Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le jeudi 8 mars 2012

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   [Le témoin vient à la barre]

  5   --- L'audience est ouverte à 9 heures 02.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le Juge Morrison n'est pas présent en

  7   raison de fonction officielle qu'il doit occuper et, par conséquent, nous

  8   allons siéger conformément à l'article 15 bis aujourd'hui.

  9   Monsieur Tieger, c'est à vous. Continuez.

 10   M. TIEGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Encore une fois,

 11   merci, Monsieur le Président.

 12   LE TÉMOIN : PETAR SKRBIC [Reprise]

 13   [Le témoin répond par l'interprète]

 14     Interrogatoire principal par M. Tieger : [Suite]

 15   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Skrbic.

 16   R.  Bonjour.

 17   Q. Hier, nous parlions de l'ordre que vous avez reçu du général Mladic, par

 18   le truchement de quelqu'un de l'état-major principal, en ce qui concerne

 19   les bus, et je voulais vous poser une question pour obtenir une précision.

 20   Vous avez parlé, dans votre déposition, sans doute, l'affaire Popovic, dans

 21   le document qui était lié à la mise en œuvre de cette question, et au

 22   départ, vous pensiez que cela provenait du Secrétariat du ministère de la

 23   Défense de Zvornik. Mais vous l'avez ensuite précisé qu'il s'agissait d'un

 24   document du ministère de la Défense envoyé à Zvornik, et toujours dans le

 25   même ordre d'idée, je voudrais vous demander de consulter un autre document

 26   qui porte la référence 65 ter, 23640.

 27   M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, j'avais demandé que

 28   l'on rajoute ce document sur la liste 65 ter, et la Défense n'a pas


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  1   d'objection.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Nous allons donc rajouter ce

  3   document.

  4   M. TIEGER : [interprétation] Merci.

  5   Q.  Il n'y a encore que l'anglais à l'écran, mais on devrait bientôt avoir

  6   la version originale, dans votre langue. Il s'agit d'un document du 13

  7   juillet 1994, c'est un rapport sur la mobilisation de véhicule conformément

  8   à vos ordres confidentiels et vous avez une liste de ces ordres :

  9   "Une mobilisation supplémentaire n'est pas possible étant donné que

 10   toutes les possibilités ont été épuisées et que le transport des passagers

 11   est paralysé."

 12   C'est signé de Stevan Ivanovic, et vous pouvez voir, au niveau de

 13   l'en-tête : "Republika Srpska, ministère de la Défense, Secrétariat de

 14   Zvornik du ministère de la Défense," et ensuite vous avez un en-tête en

 15   dessous qui mentionne le ministère de la Défense à Pale. Je voulais vous

 16   demander, Général, si ceci va, dans le sens, dans la précision que vous

 17   aviez apportée, à savoir qu'il s'agit d'un document émanant de Zvornik, à

 18   l'attention du ministère plutôt que dans l'autre sens.

 19   R.  Oui, c'est exact.

 20   Q.  Est-ce que cela fait partie de ces efforts visant à obtenir des

 21   bus suit à cet appel téléphonique que vous avez reçu dans la soirée du 11

 22   juillet ?

 23   R.  Du moment où j'ai reçu cet appel et au cours des jours à venir, nous

 24   avons commencé à mettre ceci en œuvre, mais le Secrétariat du ministère de

 25   la Défense à Zvornik informe le ministère de la Défense de Pale, comme vous

 26   l'avez fait remarquer, mais ils font référence à leur ordre, l'ordre du

 27   ministère de la Défense de la Republika Srpska. Ils ne mentionnent pas

 28   l'ordre de l'état-major principal, et vous avez donc fait remarquer ceci


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  1   très justement.

  2   Q.  Mais j'ai bien compris que vous aviez contacté le ministère de la

  3   Défense conformément à l'ordre du général Mladic, leur demandant de donner

  4   un ordre à leur secrétariat, n'est-ce pas ?

  5   R.  C'est exact.

  6   Q.  Merci.

  7   M. TIEGER : [interprétation] Est-ce que je pourrais verser ce document,

  8   Monsieur le Président ?

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, ce sera donc la nouvelle pièce à

 10   charge.

 11   M. LE GREFFIER : [interprétation] P4552.

 12   M. TIEGER : [interprétation]

 13   Q.  Général, je voudrais parler maintenant d'une réunion, vous nous avez

 14   indiqué que vous aviez eu une réunion avec M. Karadzic, le 14 juillet 1994

 15   [comme interprété]. Je sais que vous avez parlé à certains de ces aspects

 16   dans votre déposition, dans l'affaire Tolimir.

 17   Aux pages du compte rendu d'audience 15 484 à 15 488, dans l'affaire

 18   Popovic, vous parlez de votre réunion avec le président et le commandant

 19   suprême, et vous mentionnez entre autres que vous avez emporté certains

 20   documents pour qu'il puisse les signer; est-ce exact ?

 21   R.  C'est exact.

 22   Q.  Parmi ces documents, j'aimerais savoir si vous avez également emporté

 23   des décrets concernant la mise en retraite de la promotion de certaines

 24   personnes ?

 25   R.  Autant que je m'en souvienne, Monsieur Tieger, j'avais avec moi deux

 26   décrets : l'un concernant des départs à la retraite, et un autre concernant

 27   la nomination des deux officiers.

 28   Q.  Qui a été l'objet de ce décret concernant un départ à la retraite, et


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  1   qui était mentionné dans ces décrets concernant des nominations ? Est-ce

  2   que vous pouvez nous dire à quel poste ces personnes étaient nommées ?

  3   R.  Les décrets concernant le départ à la retraite concernait le général

  4   Milenko Zivanovic, et le décret concernant une nomination était le général

  5   Radislav Krstic. Il devait être promu en tant que commandant du Corps de la

  6   Drina, et vous aviez le commandant Svetozar Andric, qui devait être nommé

  7   chef de l'état-major du Corps de la Drina. Etant donné que d'après ces

  8   règles en matière d'effectif, il s'agit de la position d'un général. Si

  9   vous nommez un colonel, le commandant suprême ou le président de la

 10   république est la personne qui sera responsable de la signature de cet

 11   ordre de nomination.

 12   Q.  Vous avez dit que, si vous nommez un colonel mais, en fait, ce que vous

 13   voulez dire si vous assurez la promotion de quelqu'un qui a déjà le grade

 14   de colonel, n'est-ce pas ?

 15   R.  Oui. Si vous avez quelqu'un qui occupe déjà le grade de colonel et que

 16   vous le nommez au grade de général, dans ce cas-là, la personne qui doit

 17   signer l'ordre est le commandant suprême ou le président de la république.

 18   Q.  Très bien. Donc une de vos responsabilités était de présenter ces

 19   décrets et d'obtenir la signature de M. Karadzic durant la réunion que vous

 20   aviez eue avec lui, le 14 juillet, n'est-ce pas ?

 21   R.  Oui, c'est exact.

 22   Q.  Général, je voudrais que vous consultiez un autre document qui porte la

 23   cote P04485. Il s'agit d'un document du 13 juillet 1995. Je sais que vous

 24   avez déjà vu ce document, Général, notamment durant votre déposition dans

 25   l'affaire Tolimir. C'est un document qui a été signé par Radenko Jovicic.

 26   Qui est Radenko Jovicic ?

 27   R.  Radenko Jovicic était lieutenant-colonel et il était commandant en

 28   second du commandant du Corps de la Drina -- du commandement du Corps de la


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  1   Drina pour les affaires liées au personnel.

  2   Q.  Ce document porte sur porte sur la remise de responsabilités et des

  3   obligations du commandant du corps, et il est mentionné :

  4   "Conformément au décret du président de la Republika Srpska, et en présence

  5   du commandant de l'état-major général de la VRS, le colonel général Ratko

  6   Mladic le transfert des responsabilités du commandant du Corps de la Drina,

  7   qui a été réalisé le 13 juillet 1995."

  8   On part du principe, dont que le poste du général Krstic et la nomination

  9   du colonel Andric au poste de chef d'état-major du corps, est mentionné ici

 10   et qu'il s'agit d'une information pour que la décision soit connue.

 11   Pourriez-vous expliquer comment ceci est lié à la signature du décret ou à

 12   la présentation du décret à M. Karadzic, le président et le commandant

 13   suprême, ce qui s'est passé le lendemain ?

 14   R.  Monsieur le Président, Madame, Messieurs les Juges, je voudrais vous

 15   expliquer pourquoi il y a un écart entre la date de la signature, c'est-à-

 16   dire le 14 juillet, alors que le transfert des responsabilités a eu lieu le

 17   13 juillet, c'est-à-dire avant la signature du décret, et avant que ces

 18   changements s'opèrent.

 19   Je vais ralentir un peu, Monsieur Tieger, de façon à ce que les interprètes

 20   puissent me suivre.

 21   Je peux vous expliquer ceci de la manière suivante : Radenko Jovicic, le

 22   lieutenant-colonel avait dit conformément au décret, mais on ne voit pas en

 23   fait le numéro. C'est tout simplement parce qu'il ne connaissait pas le

 24   numéro du décret, mais il savait pertinemment que ce décret allait être

 25   promulgué. Je suppose que le général Mladic savait que le président

 26   signerait ce décret, et c'est la raison pour laquelle ce transfert de

 27   responsabilités a eu lieu la veille de la signature, et je voudrais attirer

 28   votre attention sur le fait qu'il est mentionné "à transmettre à …" en


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  1   dessous de la signature, en dessous de la signature de Radenko Jovicic. Le

  2   document avait, pour objectif, les objectifs suivants : Les brigades du

  3   Corps de la Drina et les autres unités, qui étaient parties intégrantes du

  4   Corps de la Drina, devaient être informées du fait qu'il y avait un

  5   changement au niveau du commandement du corps. Ils devaient être au courant

  6   du fait que cela s'est passé et ils devaient savoir à qui ils devaient

  7   obéir à l'avenir s'ils recevaient des ordres.

  8   Q.  Merci, Général. Vous avez mentionné que : "Le général Mladic devait

  9   savoir que le président allait signer ce décret;" est-ce que cela signifie

 10   que vous disposiez d'information concernant une conversation qu'ils

 11   auraient eue ? Ou est-ce que c'est tout simplement parce que vous savez

 12   comment, en pratique, cela fonctionnait et que, par conséquent, une

 13   conversation avait dû avoir lieu ? Ou est-ce qu'il y a un autre raison qui

 14   vous permet de penser que le général Mladic était au courant du fait --

 15   était certain que le président allait signer ce décret ?

 16   R.  Lorsque des nominations sont envisagées ou des promotions au grade de

 17   général, la procédure à suivre est la suivante, vous avez des séances qui

 18   ont lieu en présence de commandants de l'état-major principal. Dans le cas

 19   de Milenko Zivanovic, cela ne rentrait pas dans les procédures habituelles,

 20   et je ne peux que supposer que le général Mladic, et peut-être que le

 21   commandant suprême était également impliqué, que donc ils ont décidé de

 22   nommer le général Krstic en tant que commandant. Je ne sais pas s'ils ont

 23   vraiment parlé de cette question. Je suppose qu'ils l'ont fait ça semble

 24   assez évident et je suppose qu élément commandant suprême a accepté la

 25   proposition émanant du commandant de l'état-major principal selon laquelle

 26   le général Krstic devrait être nommé commandant du corps et que Milenko

 27   Zivanovic devrait partir en retraite.

 28   Q.  Merci, Général. Vous avez parlé précédemment du colonel Jovicic, qui


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  1   était commandant en seconde du Corps de la Drina, et vous avez dit qu'il

  2   était responsable des questions liées au personnel. Pourriez-vous expliquer

  3   quel était le lien professionnel qui vous unissait, au colonel Jovicic ?

  4   Est-ce qu'il était votre subordonné et dans une hiérarchique direct, ou au

  5   niveau des lignes plutôt spécialisées en matière de hiérarchie, c'est-à-

  6   dire est-ce qu'il vous faisait rapport pour certains aspects et pas pour

  7   d'autres ?

  8   R.  Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, Radenko Jovicic

  9   était directement sous la coupe du commandant du Corps de la Drina. Cela

 10   signifie qu'il ne pouvait prendre aucune décision sans l'aval du commandant

 11   du Corps de la Drina, mais d'un point de vue plus spécialisé, il devait

 12   être en contact avec moi pour les questions techniques, en ce qui concerne,

 13   par exemple, les propositions de promotion, et s'il n'envoyait pas de

 14   rapport dans le délai, je pouvais en fait lui donner un avertissement en

 15   lui disant qu'il devait envoyer ces rapports dans des délais plus courts.

 16   Q.  Est-ce que vous vous souvenez que M. Jovicic vous ait contacté ou est-

 17   ce que vous vous souvenez avoir parlé avec lui de ce transfert de

 18   responsabilités le 13 juillet, à savoir est-ce qu'il s'est conformé à ses

 19   obligations et est-ce qu'il vous a fait rapport de ce transfert de

 20   responsabilité et des questions liées à la promotion de Krstic et d'Andric

 21   ?

 22   R.  Il n'était pas obligé de le faire, ce n'était pas en fait son

 23   obligation, il devait en fait faire suivre. C'est ce que j'ai mentionné en

 24   bas de cette lettre, il y avait la mention "à faire suivre à." Vous pouvez

 25   voir que le secteur, au sein duquel je travaillais, n'est pas mentionné. Ça

 26   a été transmis à l'état-major principal et c'est ce que ça signifie donc ce

 27   terme "à faire suivre."

 28   Q.  Général, je voudrais maintenant passer à autre chose, et je voudrais


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  1   consulter un autre document, à savoir le document de la liste 65 ter 22824.

  2   Il s'agit d'un document du bureau de presse de la Republika Srpska, qui

  3   porte la date du 20 juillet 1995, et qui émane du cabinet du président de

  4   la république, vous pouvez le voir. On mentionne le président de la

  5   république et le commandant suprême des forces armées de la Republika

  6   Srpska qui autorisent une promotion exceptionnelle du général Zivanovic -

  7   non, je vous prie de m'excuser - du général Krstic au poste de commandant

  8   du Corps de la Drina.

  9   R.  C'est exact.

 10   Q.  Il fait des louanges de Krstic et de Zivanovic, qui sont à l'origine

 11   des victoires serbes à Srebrenica et à Zepa, et le président félicite

 12   l'état-major principal, le commandement du Corps de la Drina, ainsi que le

 13   personnel de police et des forces armées suite à une victoire brillante à

 14   Srebrenica et à Zepa, et au fait qu'ils sont arrivés à contrer cette

 15   offensive musulmane en Serbie et à Sarajevo. Est-ce que ce communiqué

 16   mentionne exactement la même chose, à savoir la promotion qui était

 17   mentionnée dans le décret que vous avez présenté au président le 14 pour

 18   qu'il le signe, et que nous avons abordé précédemment dans le cadre de

 19   transfert de responsabilité ?

 20   R.  Monsieur le Président, autant que je me souvienne - et en général, ma

 21   mémoire me sert bien et est fiable - je n'ai pas présenté le décret

 22   concernant la promotion du général Zivanovic; cependant, le commandement

 23   Suprême a le droit de promouvoir quelqu'un même sans proposition, et il

 24   s'agit donc là d'une promotion au rang de général, et lorsqu'un officier

 25   hautement gradé partait en retraite, on pouvait en fait lui donner un grade

 26   supérieur juste avant sa retraite.

 27   Q.  Merci pour cette précision.

 28   M. TIEGER : [interprétation] Je souhaiterais verser ce document au dossier,


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  1   Monsieur le Président.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais ce document ne porte que sur la

  3   promotion extraordinaire juste avant le départ à la retraite du général

  4   Zivanovic, n'est-ce pas ?

  5   M. TIEGER : [interprétation] Je vais lui poser la question.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, c'est moi qui vais lui poser.

  7   M. TIEGER : [interprétation] Désolé.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Général Skrbic, ma question est la

  9   suivante : Lorsque vous avez reçu le décret des mains du président, est-ce

 10   que la promotion du général Zivanovic avait déjà fait l'objet d'une

 11   décision, à ce moment-là ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc il s'agissait d'une décision liée

 14   au départ à la retraite du général Zivanovic, à la nomination du général

 15   Krstic au poste du commandant du Corps de la Drina, n'est-ce pas ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est exact.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc c'est seulement à ce moment-là que

 18   la promotion du général Zivanovic a fait l'objet d'une décision, n'est-ce

 19   pas ? Est-ce que j'ai bien compris le déroulement des différents événements

 20   ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je crois que c'est exact.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Cependant, ce document porte sur la

 23   nomination du général Krstic en tant que commandant du Corps de la Drina,

 24   alors que cette promotion avait déjà eu lieu.

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact, mais cette formulation était

 26   utilisée à l'attention du public. Ce n'est pas une formulation qui est

 27   propre à l'armée.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur Tieger.


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  1   M. TIEGER : [interprétation]

  2   Q.  Je veux obtenir une dernière précision; est-ce que, d'après vous,

  3   Monsieur le Témoin, ce fait était de tout ce qui s'est passé jusqu'au jour

  4   de la signature, et qu'il ne reflète pas nécessairement la date précise à

  5   laquelle le général Zivanovic a fait l'objet d'une promotion extraordinaire

  6   juste avant ce départ à la retraite ?

  7   R.  C'est exact.

  8   Q.  Merci. Général, je souhaiterais passer à un autre sujet, et je voudrais

  9   que l'on consulte le document de la liste 65 ter, 02275. Il s'agit encore

 10   une fois d'un document que nous avons déjà vu. Il s'agit d'une décision

 11   concernant la déclaration d'un état de guerre dans les municipalités de

 12   Srebrenica et de Skelani par le président de la république le Dr Radovan

 13   Karadzic, qui porte la date du 14 juillet 1995.

 14   Lorsque vous avez eu connaissance d'une déclaration imminente d'un état de

 15   guerre ou du fait que l'état de guerre avait été déclaré dans la région le

 16   14 juillet 1995; est-ce que vous avez compris pourquoi l'état de guerre

 17   avait été déclaré ce jour-là, dans cette région ?

 18   R.  Je ne l'ai pas compris, Monsieur Tieger, à ce moment-là, je ne l'ai pas

 19   compris. Je n'ai pas compris pour quelle raison l'état de guerre avait été

 20   décrété uniquement dans cette zone.

 21   Q.  Avez-vous compris pour quelle raison vous dites ne pas avoir compris

 22   pour quelle raison l'état de guerre avait été décrété uniquement dans cette

 23   zone, mais avez-vous compris pour quelle raison l'état de guerre avait été

 24   décrété à ce moment-là, c'est-à-dire à un moment qui venait après

 25   l'investissement de Srebrenica par les forces bosno-serbes et après la

 26   prise de contrôle par les Bosno-serbes dans ce secteur ?

 27   R.  Monsieur le Président, j'appelle votre attention sur le paragraphe 2 de

 28   ce texte, où nous lisons, je cite :


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  1   "L'objectif poursuivi en proclamant l'état de guerre consiste à rendre

  2   possible la mobilisation totale de toutes les ressources humaines et

  3   matérielles, dans la défense de la république pour une victoire finale sur

  4   l'ennemi."

  5   Alors c'est cela qui me rend un peu perplexe, car déclarer un état de

  6   guerre sur une partie d'un territoire uniquement et s'attendre à ce que

  7   toutes les ressources humaines et matérielles soient mises à disposition

  8   pour la défense de ce territoire de la république, cela ne me paraît pas

  9   tout à fait clair. Par ailleurs, l'état-major principal a insisté sur le

 10   fait que, pendant toute la guerre en république de la Republika Srpska, il

 11   y avait un état de guerre qui régnait puisque une guerre se déroulait dans

 12   la région, guerre qui n'a pas été déclarée, décrétée jusqu'à 1975.

 13   Dans ce document, les raisons sont expliquées, raisons qui poussaient

 14   à décréter l'état de guerre dans les municipalités de Srebrenica et de

 15   Skelani, paragraphes 4, 5 et 6.

 16   Q.  Au paragraphe 3, il est fait mention de la nécessité de prendre toutes

 17   les mesures nécessaires pour réaliser les objectifs fixés en utilisant les

 18   ressources disponibles de façon organisée et efficace, et que ceci doit

 19   être fait par les forces armées dans la zone de responsabilité du Corps de

 20   la Drina. Général, quels étaient les objectifs assignés aux forces armées

 21   dans la zone de responsabilité du Corps de la Drina, à cette époque-là,

 22   c'est-à-dire le 14 juillet 1995 ?

 23   R.  Je ne me rappelle pas Monsieur Tieger, je ne me rappelle pas exactement

 24   quelles étaient les missions assignées aux forces armées. Peut-être

 25   pourriez-vous me montrer un document, ou un ordre qui me permettrait de

 26   confirmer la nature exacte de ces missions, parce que nous ne pensions pas

 27   uniquement au Corps de la Drina. Nous avions six corps d'armée en tête

 28   ainsi que les forces aériennes, la défense d'artillerie, et à l'état-major


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  1   principal, nous devions nous occuper de tout cela en même temps. Donc je ne

  2   me rappelle pas les missions affectées à chaque élément en particulier, à

  3   chaque corps en particulier.

  4   Q.  Général, quelle a été la conséquence de cette déclaration de l'état de

  5   guerre sur la capacité de l'armée à mobiliser ses effectifs humains et ses

  6   moyens matériels ? Je vais vous poser une question plus précise par rapport

  7   aux moyens : Qu'est-ce qui a permis à l'armée de faire, à ce moment-là, ce

  8   qu'elle ne pouvait pas faire avant que l'état de guerre n'ait été décrété ?

  9   Je veux parler de son action par rapport aux moyens matériels, équipement,

 10   et cetera, dépendant des civils ?

 11   R.  Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, dans un état de

 12   guerre - enfin il y a une différence importante entre l'état de guerre et

 13   l'absence d'état de guerre - tous les moyens matériels et humains sont mis

 14   à disposition des forces armées lorsque l'état de guerre a été décrété afin

 15   que la guerre puisse se mener. La police aussi est à la disposition de

 16   l'armée. Il n'y a plus nécessité de soumettre des demandes une fois que la

 17   mobilisation a eu lieu et les moyens économiques sont également mobilisés à

 18   des fins de guerre, donc tous les organes de l'état - je veux parler de

 19   toutes les autorités gouvernementales et toutes les autorités militaires -

 20   ont à leur disposition l'ensemble des moyens matériels et humains qui

 21   doivent être utilisés de façon rationnelle.

 22   Décréter l'état de guerre, cela ne suffit pas qu'on va se mettre à

 23   utiliser à tout va tous les moyens mis à la disposition de l'armée sans

 24   veiller à une utilisation rationnelle. L'utilisation doit être rationnelle

 25   mais il y a moins de procédures et de paperasse pour obtenir les moyens

 26   nécessaires.

 27   Q.   Donc si, par exemple, l'armée voulait utiliser un bulldozer d'une

 28   entreprise civile ou une excavatrice appartenant à une entreprise civile,


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  1   est-ce qu'elles pourraient l'obtenir sans recourir à des protocoles très

  2   complexes; c'est bien ce que vous venez de dire, n'est-ce pas ?

  3   R.  C'est exact. Mais il fallait tout de même qu'un document soit rédigé.

  4   Quand même, on ne pouvait pas s'emparer de quoi que ce soit par la force.

  5   Q.  Merci. Général, je volais -- non, non.

  6   M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, je demande le versement

  7   au dossier de ce document.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le document est admis, ce sera donc la

  9   pièce à conviction à charge suivante.

 10   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce P4553, Monsieur le

 11   Président, Madame, Monsieur les Juges.

 12   M. TIEGER : [interprétation]

 13   Q.  En fin, Général, je voulais appeler votre attention sur une des choses

 14   que vous avez dite dans votre déposition dans l'affaire Popovic au sujet

 15   des renseignements que vous receviez au sujet de Srebrenica. Page 15 601 du

 16   compte rendu d'audience dans l'affaire Popovic, vous avez dit penser que

 17   vous avez entendu parler de l'attaque sur Srebrenica pour la première fois

 18   après la guerre. Or, je crois que vous avez dit quelque chose un peu

 19   différent lorsque vous avez témoigné dans l'affaire Tolimir donc je

 20   souhaitais que vous précisiez ce point. Pourriez-vous vous expliquer sur ce

 21   point devant les Juges de la présente Chambre, je vous prie ? Il s'agit du

 22   moment où vous auriez entendu parler de l'attaque contre Srebrenica et de

 23   ce qui s'en est suivi.

 24   R.  Monsieur Tieger, je ne me rappelle pas exactement à quelle date. J'en

 25   ai entendu parler mais j'ai entendu parler de cette activité au moment où

 26   les médias ont commencé à en parler.

 27   Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, je voudrais mettre

 28   l'accent sur un problème de méthodologie. A Srebrenica pendant les journées


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  1   en question et la période qui a suivi la guerre, j'ai eu beaucoup plus

  2   d'informations que j'en avais au moment des faits, parce que, par la suite,

  3   j'ai pu passer en revue toutes sortes de documents et obtenir des

  4   renseignements de sources diverses. A l'époque, j'avais des engagements

  5   importants, j'étais très pris, il y avait cette offensive des forces

  6   croates et musulmanes contre la partie occidentale de la Krajina. Donc

  7   vraiment nous n'avions pas le temps ni la présence d'esprit pour nous

  8   occuper du problème de Srebrenica en 1995. Je veux parler du 20 juillet

  9   1995, mais par la suite, j'ai eu beaucoup plus d'informations.

 10   Q.  Donc, Général, vous avez indiqué que vous vous rappelez avoir entendu

 11   parler pour la première fois de Srebrenica au moment où les médias en ont

 12   parlé. Est-ce que cela signifie que vous n'avez rien su de ce qui se

 13   passait à Srebrenica, je veux dire, du fait qu'une attaque avait commencé

 14   contre Srebrenica, et que les forces serbes de Bosnie avaient réussi leur

 15   investissement de la ville de Srebrenica, et cetera, de la bouche des

 16   autres membres de l'état-major principal à vos côtés ou de la bouche

 17   d'autres membres de la VRS au moment où les faits se déroulaient, c'est-à-

 18   dire en juillet 1995 ? Vous n'en avez pas entendu parler à ce moment-là ?

 19   R.  Non, Monsieur Tieger. Je n'en ai pas entendu parler à ce moment-là.

 20   Nous - et quand je dis "nous," je pense au général Djukic qui était malade

 21   et moi-même - nous étions au poste de commandement chargé de la logistique

 22   à Han Pijesak, et donc à cet endroit, nous n'avions pas de contact avec nos

 23   autres collègues qui se trouvaient à Crna Rijeka au poste de commandement

 24   principal. Quant à cette activité précise, nous avons donc eu une mission

 25   bien précise à remplir le 18 juillet 1995, et je pense que c'est pour cela

 26   que je n'ai rien entendu de Srebrenica, à ce moment-là, parce que le 18

 27   juillet 1995, nous avions pour tâche d'organiser tout l'aspect logistique

 28   de la défense à partir du poste de commandement de Han Pijesak, et c'était


Page 25989

  1   une mission importante.

  2   Q.  Que ce soit dans cette période de façon générale ou à quelque moment

  3   que ce soit par la suite, est-ce que vos collègues de la VRS, ou qui que ce

  4   soit qui vous est permis d'entendre parler de façon générale de l'attaque

  5   de Srebrenica, est-ce que ces sources d'information vous ont dit que cette

  6   attaque de Srebrenica était, pour l'essentiel, une attaque défensive

  7   destinée à empêcher les Musulmans de s'emparer de l'enclave, ou est-ce

  8   qu'ils vous ont dit que c'était un effort offensif destiné à libérer

  9   Srebrenica pour y mettre en place un pouvoir exercé par les Serbes de

 10   Bosnie qui devait être un pouvoir durable ?

 11   R.  Monsieur Tieger, vous avez posé plusieurs questions en une seule là;

 12   est-ce que vous pourriez avoir l'amabilité de segmenter votre question ?

 13   Car, dans le cas contraire, je devrais répondre en m'appuyant sur ce que je

 14   sais de façon générale et vous exposer tout ce que je sais des zones

 15   protégées et de la situation qui régnait à partir de 1994, et cetera dans

 16   ce secteur 1994 et début 1995 --

 17   Q.  Je ne pensais pas que ma question n'avait pas été claire, mais essayons

 18   de préciser les choses si ce que j'ai dit ne suffisait pas.

 19   Je ne vous demande pas de nous dire ce que vous savez, en général, ou de

 20   nous exposer vos conclusions générales. Ce que je voudrais savoir c'est ce

 21   que les personnes qui vous ont parlé vous ont dit, vos collègues autrement

 22   dit, en quel terme vous ont-il expliqué -- s'ils vous ont expliqué, donc

 23   s'ils l'ont fait, en quel terme vous ont-ils expliqué ou ont-ils fait

 24   allusion à l'attaque de Srebrenica ? Est-ce que l'attaque de Srebrenica

 25   avait pour but d'empêcher tout impact à partir de l'enclave, ou est-ce

 26   qu'elle avait pour but de libérer Srebrenica et d'y introduire une fois

 27   pour toute les pouvoirs des Serbes de Bosnie ?

 28   R.  Excusez-moi, Monsieur Tieger, je n'ai pas dit que votre question


Page 25990

  1   n'avait pas été précise à mes yeux. J'ai dit qu'elle était trop vaste et

  2   que, par conséquent, il m'était difficile de me concentrer sur un aspect

  3   particulier. Mais, Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, nous

  4   n'avons pas discuté de Srebrenica et Zepa, entre nous. Entre nous, notre

  5   sentiment partagé c'était qu'il s'agissait d'une libération.

  6   Q.  De ce point de vue-là, je vais passer --

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Une seconde, Monsieur Tieger. Il y a un

  8   point qui n'est pas tout à fait clair à mes yeux. Excusez-moi de vous

  9   interrompre.

 10   Monsieur, vous avez dit que vous avez appris ce qui s'était passé à

 11   Srebrenica longtemps après, après les événements. Alors, est-ce que vous

 12   voulez parler de l'attaque de Srebrenica et de la chute de Srebrenica en

 13   tant que telle, est-ce que c'est cela que vous avez appris plus tard ? Est-

 14   ce que vous ne saviez pas qu'une opération était en cours contre Srebrenica

 15   à ce moment-là ? Vous ne saviez pas que Srebrenica était tombée le 11

 16   juillet, vous ne l'avez pas su au moment où Srebrenica tombait ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président, je ne l'ai

 18   pas su à ce moment-là.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 20   Monsieur Tieger, veuillez poursuivre.

 21   M. TIEGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 22   Q.  Général, est-il exact que, le 20 juillet, vous avez assisté à une fête

 23   qui était donnée ou une réception qui était organisée en l'honneur du

 24   général Zivanovic, au restaurant Jela ?

 25   R.  Oui, j'y ai assisté.

 26   Q.  J'aimerais que nous regardions rapidement trois séquences vidéo qui

 27   concernent cette fête de départ, et la première démarre au point horaire 20

 28   -- 002922, c'est le général Mladic qui s'exprime, et on trouve ce passage


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  1   en page 8 de la version papier du compte rendu en anglais et en page 7 du

  2   compte rendu en B/C/S. Le numéro 65 ter de ce document est 40206A.

  3   [Diffusion de la cassette vidéo]

  4   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

  5   "Merci. Vous avez remporté le triomphe avec vos commandants et vous

  6   transmettez vos pouvoirs en ce moment avec toute la fierté que peut vous

  7   donner ce qui s'est passé à Srebrenica et Zepa. Fierté pour le peuple serbe

  8   que cette bataille parmi les batailles ait été gagnée."

  9   M. TIEGER : [interprétation] D'accord. Nous avons une traduction en anglais

 10   sur papier dont je vais demander le versement au dossier de ce passage.

 11   "Donc vous remettez vos responsabilités de commandement de corps au

 12   général Krstic avec lequel vous avez donné Srebrenica et Zepa libérés au

 13   peuple serbe."

 14   Alors j'aimerais que nous passions au commentaire du général Zivanovic, à

 15   présent, deuxième séquence vidéo.

 16   [Diffusion de la cassette vidéo]

 17   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 18   "Je suis extrêmement heureux parce que la Romanija est une région où brille

 19   le soleil de la beauté serbe et que ce soleil brille sur la beauté serbe."

 20   M. TIEGER : [interprétation]

 21   Q.  D'accord. Alors ce commentaire, selon lequel il dit qu'il est

 22   extrêmement heureux parce que le soleil de la Romanija brille sur toute la

 23   merveille, toute la beauté serbe se trouve en page 12 de la transcription

 24   anglaise, et en page 12 de la transcription en B/C/S. Enfin, nous allons

 25   entendre les propos --

 26   [Le conseil de l'Accusation se concerte]

 27   M. TIEGER : [interprétation]

 28   Q.  Excusez-moi, Monsieur le Témoin, est-ce que vous pourriez identifier


Page 25992

  1   les personnes que l'on voie au point horaire 00:40 :48.2 sur l'écran, dans

  2   le cliché qui a été -- le cliché arrêté de la vidéo qu'on voie à l'écran

  3   actuellement.

  4   R.  Oui, je peux identifier les personnes. Monsieur Tieger, vous voulez que

  5   je commence ?

  6   Q.  Oui, je vous en prie.

  7   R.  Sur ma gauche, à l'écran, se trouve le général Mladic; au milieu c'est

  8   le général Milenko Zivanovic, qui tient un verre à la main; et complètement

  9   à droite, celui qui a les bras croisés et sur un des poignets de cet homme,

 10   on voit une montre, c'est le général Krstic, Radislav Krstic.

 11   Q.  Merci. Page 13 de la transcription anglaise, et page 13 de la

 12   transcription en B/C/S, nous allons maintenant voir ce qu'a dit le général

 13   Krstic, et nous verrons les images en même temps.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous auriez, par hasard, le

 15   numéro de la version papier de la transcription qui accompagne cette vidéo,

 16   les quatre derniers chiffres.

 17   M. TIEGER : [interprétation] Ce document ne fait pas partie des vidéos dont

 18   la diffusion était prévue pendant le procès, Monsieur le Président, si

 19   c'est ce que vous demandez; est-ce que vous voulez le numéro ERN ?

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais on a ici l'ensemble des

 21   transcriptions des vidéos par écrit, ce n'est pas de cela que vous parlez ?

 22   M. TIEGER : [interprétation] Je ne crois pas. Je crois que je comprends de

 23   quelle transcription papier vous parlez vous-même, mais je ne crois pas que

 24   je parle de la même.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] A la table des matières, on lit : Numéro

 26   3 V000-9016, fête organisée à l'occasion du départ à la retraite du général

 27   Milenko Zivanovic, dans le restaurant Jela, numéro ERN V000-4258;" ce n'est

 28   pas cela ?


Page 25993

  1   M. TIEGER : [interprétation] Je vérifie pour voir si l'intégralité des

  2   séquences vidéo se trouve à l'endroit dont vous parlez.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce qui est expliqué par écrit, c'est que

  4   c'est Nenad Petrusic, conseil de la Défense du général Krstic qui a remis

  5   cette cassette.

  6   M. TIEGER : [interprétation] Vous avez raison, Monsieur le Président, mais

  7   je ne pense pas que les séquences que je suis en train de diffuser se

  8   trouvent dans le document dont vous parlez.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien.

 10   M. TIEGER : [interprétation] Alors passons à la dernière séquence, c'est le

 11   général Krstic qui parle.

 12   L'INTERPRÈTE : Les interprètes indiquent qu'ils n'ont pas le texte et

 13   qu'ils doivent interpréter du serbe en français, en même temps qu'ils font

 14   de l'anglais français à partir des sous-titres de la vidéo. Donc pour la

 15   troisième vidéo, l'interprète français s'abstient de cet exercice.

 16   [Diffusion de la cassette vidéo]

 17   M. TIEGER : [interprétation]

 18   Q.  Donc ce sont les mêmes personnes que vous venez d'identifier, il y a un

 19   instant, que l'on voie à l'image, n'est-ce pas, Général ?

 20   R.  Exact.

 21   Q.  Merci. Général, les séquences que nous venons de voir et les événements

 22   qui se sont déroulés dans ce restaurant Jela font-ils partie de toute cette

 23   expression de satisfaction par rapport à la libération de Srebrenica, que

 24   vous avez évoqué il y a un instant dans vos quelques réponses précédentes ?

 25   R.  Cette expression est en fait formulée par le biais de métaphore qui

 26   semble avoir un caractère politique plutôt qu'autre chose. Donc autorisez-

 27   moi à avoir ce sentiment, notamment le général Zivanovic qui s'exprime

 28   vraiment en métaphore lorsqu'il dit que la Romanija est un soleil qui


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  1   brille, et cetera, et cetera.

  2   M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, je demande le versement

  3   au dossier de ces séquences, et ceci met un point final à mon

  4   interrogatoire principal.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ces séquences vidéo sont versées au

  6   dossier.

  7   M. LE GREFFIER : [interprétation] Elles deviennent la pièce P4554.

  8   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Général, avant que le contre-

  9   interrogatoire ne commence, j'aurais un point à discuter avec vous. Vous

 10   avez dit, je cite :

 11   "Nous n'avons pas discuté de Srebrenica et Zepa entre nous, mais le

 12   sentiment partagé que nous avions c'est que Srebrenica avait été -- c'est

 13   que Srebrenica et Zepa avaient été libérés."

 14   Alors comment est-ce que vous pouviez savoir quel était le sentiment

 15   partagé entre vous, si vous n'en avez pas discuté entre vous ? Est-ce que

 16   vous pourriez me dire cela ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, si je me souviens bien de la

 18   question que m'a posée M. Tieger, elle était formulée ainsi : Quel était

 19   votre sentiment par rapport à ce qui s'était passé à Srebrenica et à Zepa ?

 20   Moi, le mot "libération," je le mets entre guillemets, voyez-vous. Nous

 21   n'avons pas discuté au moment des faits mais plus tard, et ce n'était pas

 22   une discussion officielle, c'était des discussions personnelles,

 23   officieuses.

 24   Voyez-vous, Monsieur le Juge, nous subissions constamment des

 25   attaques à partir des zones protégées. Je ne vais pas m'étendre très

 26   longtemps sur ce sujet, et c'est la raison d'ailleurs pour laquelle je mets

 27   le mot "libération," entre guillemets. Donc, dans nos conversations

 28   informelles, et personnelles, et pas dans des conversations officielles,


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  1   nous parlions les uns avec les autres en tant qu'être humain, et voilà le

  2   sentiment que nous avions.

  3   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Je vous remercie.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Bonjour, Excellences. Bonjour à tous.

  6   Contre-interrogatoire par M. Karadzic :

  7   Q.  [interprétation] Bonjour à vous, Général.

  8   R.  Bonjour.

  9   Q.  Puisque nous l'avons encore à la mémoire, je propose que nous

 10   commencions par la fin et puis nous remontrons vers le début de ce qui vous

 11   a été demandé pendant l'interrogatoire principal, est-ce que vous êtes

 12   d'accord que dans la situation dans laquelle se trouvait le général

 13   Zivanovic il ne semble pas surpris ou attristé du fait qu'il est en train

 14   de remettre ses pouvoirs de commandant du corps et du fait qu'il est en

 15   train de prendre sa retraite ?

 16   R.  Au contraire, Monsieur Karadzic. En fait, il m'apparaît à moi comme

 17   tout à fait content, tout à fait heureux.

 18   Q.  Merci. Quand vous lui avez demandé dans quel condition il a appris ce

 19   que le président s'apprêtait à signer, quand vous lui avez demandé s'il

 20   avait parlé avec Mladic, et cetera, est-ce que vous trouvez ce qu'il vous a

 21   dit convaincant puisqu'il n'a pas l'air surpris et ce n'est pas un

 22   événement désagréable pour lui ? Est-ce que vous croyez que ce sujet avait

 23   déjà été discuté pas mal de temps, et est-ce que vous pensez que les

 24   préparatifs avaient lieu depuis pas mal de temps pour ce transfert de

 25   responsabilité cela ne s'est pas fait brutalement, n'est-ce pas ?

 26   R.  En effet, c'est ce que je crois, Monsieur le Président, Madame,

 27   Monsieur les Juges. Le général Zivanovic avait été blessé, et cette prise

 28   de retraite avait déjà été prise en considération et discutée.


Page 25996

  1   Q.  Est-ce que vous convenez avec moi que, depuis déjà plusieurs mois, le

  2   général Zivanovic était souvent absent pour maladie, et que cela semblait

  3   tout à fait naturel de le remplacer à son poste ? Je veux dire plutôt de

  4   changer et de modifier sa situation, parce que je voudrais pas parler de

  5   remplacement, remplacement peut avoir des implications péjoratives.

  6   R.  Oui, je suis d'accord avec ce que vous venez de dire.

  7   Q.  Je vous remercie, et merci de ménager une pause, car vous et moi,

  8   effectivement, devons ménager de petite pause pour faciliter le travail des

  9   interprètes.

 10   Nous avons vu des séquences vidéo. Nous avons entendu des métaphores, nous

 11   avons entendu Zivanovic parler d'une façon assez exaltée et métaphorique,

 12   en parlant de la Romanija et du soleil qui éclairait les terres serbes.

 13   Est-ce que vous êtes d'accord, et est-ce que les Juges de la Chambre de

 14   première instance devraient savoir que la Romanija n'est pas seulement une

 15   montagne légendaire pour les Serbes, c'est-à-dire une montagne qui suscite

 16   des sentiments d'attachement intense de la part des Serbes, et tout ceci

 17   dans le cadre de la très longue période d'occupation turque, mais qu'à un

 18   certain moment, avant la guerre la Romanija était habitée à peu près à 90 %

 19   par des Serbes aussi ?

 20   R.  Oui. C'était un territoire qui était totalement serbe. Il y avait

 21   quelques Musulmans, ici ou là, dans certains secteurs, mais ils étaient

 22   très peu nombreux. La Romanija a une histoire particulièrement glorieuse

 23   durant la Seconde Guerre mondiale, et c'est une montagne qui joue un rôle

 24   tout à fait légendaire dans l'esprit des Serbes en rapport avec ce qui

 25   s'est passé pendant cette bataille, mais je ne vais pas rentrer dans les

 26   détails.

 27   Q.  Je vous remercie. Alors, maintenant, vous avez parlé de la Romanija;

 28   est-ce que vous êtes d'accord que Slavisa Vajner était le commandant


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  1   pendant cette bataille de la Seconde Guerre mondiale qui s'est déroulée

  2   dans la Romanija, et qu'il n'était pas serbe, mais qu'il a été accepté avec

  3   enthousiasme ?

  4   R.  Oui. Slavisa Vajner, surnommé Cica.

  5   Q.  Je vous remercie. Est-ce que vous êtes d'accord qu'en Romanija, il y

  6   avait dix villages musulmans qui sont restés intacts, parce que les

  7   Musulmans, qui les habitaient, avaient rendu leurs armes, et nous, nous

  8   avons assuré leur protection, n'est-ce pas ?

  9   R.  Monsieur Karadzic, je suis désolé, de ne pas pouvoir confirmer ce

 10   point, parce que je n'en suis pas sûr totalement. Excusez-moi.

 11   Q.  Merci. Donc vous ne savez pas ce qui est arrivé à Satorovici, mais pour

 12   ce qui est du reste, ça c'est peut-être produit par la suite. Est-ce que

 13   vous avez entendu parler du fait qu'on avait envoyé de la farine dans ces

 14   villages et également de la nourriture dans les villages croates ?

 15   R.  Ce n'est pas uniquement en Romanija et dans la zone de Vares, mais dans

 16   d'autres localités de Republika Srpska où vivaient des Musulmans, par

 17   exemple, à Mrkonjic Grad, à Sanski Most, et cetera. On peut vraiment en

 18   conclure que la même chose s'est produite en Romanija. Pour ce qui est de

 19   l'autre endroit que vous avez mentionné, je sais pertinemment que des

 20   Musulmans et des Croates vivaient là-bas, même si ces localités étaient

 21   contrôlées par la VRS.

 22   Q.  Merci. Est-ce que vous seriez d'accord avec moi pour dire que des

 23   Musulmans et des Croates qui sont restés sur place pouvaient vivre

 24   librement car il n'y avait personne dans leurs villages qui appartenait aux

 25   armées de l'ennemi, et ceux qui sont partis étaient des parents d'enfants

 26   qui avaient rejoint les forces armées ennemies, et c'était la raison pour

 27   laquelle ils ne se sentaient pas vraiment à l'aise dans ces localités.

 28   R.  Monsieur Karadzic, je sais qu'ils étaient en sécurité et qu'ils étaient


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  1   traités comme tout autre citoyen de Republika Srpska. Cependant, je ne peux

  2   pas vous dire pour quelles raisons certaines personnes ont quitté ces

  3   localités.

  4   Q.  Vous voulez dire pour quelles raisons ces personnes ont quitté les

  5   localités ?

  6   R.  Non, je voulais dire pour quelles raisons ils étaient en sécurité ou

  7   pas en sécurité.

  8   Q.  Merci. Etes-vous d'accord pour dire qu'il y a eu des discours de

  9   célébration, est-ce que vous êtes d'accord pour dire que les opérations

 10   dans les environs de Srebrenica et de Zepa ont été menées par un seul corps

 11   et non pas plusieurs ? Et qu'à ce titre, l'état-major principal n'a pas

 12   assuré la coordination, et c'est peut-être la raison pour laquelle vous

 13   n'étiez pas au courant des préparatifs de cette opération.

 14   R.  Oui. Il s'agissait d'une opération organisée au niveau du corps, et

 15   même si je n'étais pas censé connaître tout ce qui se passait au niveau de

 16   chaque opération, j'étais impliqué dans la gestion du personnel et dans

 17   l'organisation de manière générale mais, bien sûr, je ne participais à

 18   toutes les opérations.

 19   Q.  Merci. Si je vous disais que la mission essentielle du Corps de la

 20   Drina était en fait d'assurer une séparation entre les enclaves de Zepa et

 21   de Srebrenica et de libérer l'axe allant de Milici à Skelani, qui n'aurait

 22   jamais d'ailleurs à être coupée en premier lieu, est-ce qu'il est possible

 23   que cela ait été réalisé sans que vous ayez été au courant des préparatifs

 24   de la mission à proprement parler ?

 25   R.  Il est possible que les choses se soient déroulées ainsi, mais il est

 26   également possible que personne n'ait jugé bon de m'en informer, et

 27   d'ailleurs, après la guerre, j'ai pris connaissance de nombreux documents y

 28   compris les documents du Tribunal où j'ai pu en conclure que la mission


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  1   était de séparer les deux enclaves plutôt que de les occuper. J'ai

  2   également vu des documents qui montraient que vous avez approuvé la

  3   poursuite de l'opération même si au départ ce n'était pas une mission qui

  4   relevait du Corps de la Drina.

  5   Q.  Mais soyons plus précis, qu'entend-on par libération ? Etes-vous

  6   d'accord avec moi pour dire que, par la suite, on a considéré tout ceci

  7   comme un processus de libération même si au départ cela ne faisait pas

  8   partie des objectifs de la mission ?

  9   R.  Oui, exactement.

 10   Q.  Très bien. Merci. Nous avons  vu que j'ai félicité le général Krstic,

 11   ce qui ne l'a pas beaucoup aidé devant ce Tribunal; êtes-vous d'accord

 12   qu'il s'agissait d'un acte politique de ma part, de façon à ce que tout le

 13   monde soit félicité, pas uniquement Mladic ?

 14   R.  Oui, Monsieur Karadzic, j'ai également appris cela dans un livre écrit

 15   par le Dr Kosta Cavoski. J'ai également vu un document où vous mentionniez

 16   que le général Mladic était une légende vivante parce qu'on l'avait

 17   transformé en légende vivante. Mais il y avait d'autres généraux pour

 18   lesquels vous avez chanté les louanges y compris le général Krstic. Mais

 19   peut-être que je ne vous ai pas cité verbatim, j'ai paraphrasé ce que vous

 20   avez dit.

 21   Q.  Merci. Je voudrais maintenant vous présenter le document D2058. En

 22   attendant que ce document s'affiche, Général, est-ce que vous confirmez

 23   que, le 18, vous avez dû organiser la défense de la zone de l'état-major

 24   principal ainsi que la zone de la base logistique, mais vous deviez vous

 25   défendre contre qui, étant donné que Srebrenica avait été libéré les 11 et

 26   12 juillet ?

 27   R.  Nous défendions le poste de commandement arrière de Han Pijesak. Il a

 28   fait l'objet d'une attaque de groupe musulman armé qui était en fait au


Page 26000

  1   départ membres de la 28e Division de l'armée de Bosnie-Herzégovine,

  2   division qui avait son poste de commandement à Srebrenica.

  3   Q.  Lorsque vous a demandé quelles étaient les raisons qui avaient motivé

  4   la déclaration d'un état de guerre -- il semble que ce ne soit pas le bon

  5   document. J'ai demandé le document D2058. Je reprends.

  6   On vous a demandé quelles étaient selon vous les raisons qui avaient

  7   justifié la déclaration d'un état de guerre dans cette région, compte tenu

  8   du poste que vous occupiez à l'état-major, vous n'étiez pas nécessairement

  9   au courant des raisons, n'est-ce pas ?

 10   R.  Monsieur Karadzic, tout l'état-major principal et plus particulièrement

 11   mon secteur devait absolument savoir si mon l'état de guerre avait été

 12   proclamé ou pas. Maintenant, quant à savoir pourquoi, cela ne nous

 13   intéressait pas vraiment. On se trouvait dans une situation, il s'agissait

 14   d'un processus que j'appellerais social qui nous permettait de mener à bien

 15   certaines activités et tâches militaires, et nous pouvions le faire plus

 16   facilement tant que la guerre n'avait pas été déclarée, comme je l'ai

 17   expliqué à M. Tieger.

 18   Q.  Mais vous n'avez pas fait d'objection parce que l'armée souhaitait que

 19   la guerre soit déclarée dès que les Musulmans nous avaient déclaré la

 20   guerre en 1992. De cette manière, on était mieux à même de se défendre et

 21   on pouvait utiliser le fait que la guerre avait été déclarée tant que les

 22   Musulmans ne faisaient pas, ne nous attaquaient.

 23   R.  Exactement.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Juste une seconde. Nous n'avons pas

 25   entendu la réponse du témoin.

 26   Est-ce que votre réponse, Monsieur Skrbic était, "exactement" ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est ce que j'ai dit. J'ai dit,

 28   exactement.


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Tieger.

  2   M. TIEGER : [interprétation] J'avais demandé que l'on nous donne la

  3   citation ou que l'on nous parle du document précis en question. Je suppose

  4   qu'il s'agit d'un document qui déclare l'état de guerre mais je ne pense

  5   pas que ce qui a été mentionné par le Dr Karadzic reflète fidèlement ce qui

  6   figurait dans le document.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais dans la question, M. Karadzic

  8   disait :

  9   "Parce que l'armée voulait que la guerre soit déclarée dès que les

 10   Musulmans nous ont déclaré la guerre en 1992."

 11   Est-ce que vous voulez dire que, malgré les souhaits de l'armée, M.

 12   Karadzic n'a pas déclaré la guerre jusqu'à ce moment-là ? C'est ce que vous

 13   vouliez dire, Monsieur Skrbic ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, l'armée voulait que la

 15   guerre soit déclarée. Mais le président de la république, qui pouvait

 16   déclarer la guerre ne l'a pas fait jusqu'à ce moment-là, c'est-à-dire le 14

 17   juillet 1995, et la guerre n'a été déclarée que dans une seule partie du

 18   territoire de la Republika Srpska, c'est-à-dire les municipalités de

 19   Skelani et de Srebrenica.

 20   Pour ce qui est de la totalité des territoires de la Republika Srpska,

 21   l'état de guerre n'a été déclaré qu'à la fin de juillet 1995.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce qu'il y a une partie du

 23   territoire où la guerre avait déjà été déclarée ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, sur le territoire du Corps de Sarajevo-

 25   Romanija, c'est-à-dire la zone dans les environs de Sarajevo. Je crois que

 26   c'était le 23 juillet 1995 que l'état de guerre a été déclaré. Je suis

 27   désolé, peut-être que je me trompe de date, mais la guerre a été également

 28   déclarée dans la zone du 2e Corps de la Krajina, dans la zone de Drvar et


Page 26002

  1   dans la partie occidentale de la Republika Srpska. Je crois que c'était

  2   durant l'année 1994, le deuxième semestre 1994, peut-être.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Général.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

  5   M. KARADZIC : [interprétation]

  6   Q.  Je peux peut-être vous être d'une aide quelconque -- ou en fait, je

  7   vais vous demander votre aide. Est-ce que vous seriez d'accord pour dire

  8   que nous avons déclaré que nous étions en état de guerre seulement quand

  9   nous nous sommes trouvés dans des circonstances extraordinaires, c'est-à-

 10   dire lorsque tous les éléments de la société devaient être impliqués pour

 11   se défendre, c'est-à-dire que nous étions en fait au bord de la défaite à

 12   ce moment-là ?

 13   R.  Oui, Monsieur Karadzic. Vous avez évalué la situation et vous avez

 14   déclaré la guerre par le biais d'un décret.

 15   Q.  Nous n'avons pas encore vu le procès-verbal des séances de la

 16   présidence de Bosnie-Herzégovine; est-ce que vous êtes d'accord cependant

 17   pour dire que les Musulmans nous ont déclaré la guerre, le 29 juin -- le 20

 18   juin 1992, et qu'en fait, la guerre avait été vraiment déclarée le 22 juin;

 19   en d'autres termes, la Bosnie est devenue une zone de guerre à ce moment-là

 20   ?

 21   R.  Monsieur Karadzic, j'aimerais attirer votre attention sur le fait que

 22   la Bosnie s'est trouvée en guerre avant cette date. En tant que membre de

 23   la JNA, j'étais responsable de l'analyse de la situation sur tous les

 24   territoires de la RSFY. Nous avons pu déterminer que le président Alija

 25   Izetbegovic, même s'il était président de la présidence de la Bosnie-

 26   Herzégovine en avril 1992, qui a ensuite été rebaptisé l'état-major de la

 27   Défense territoriale républicaine et ensuite l'état-major de la TO de la

 28   Bosnie-Herzégovine. Le 8 avril 1992, il a déclaré un état imminent de


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  1   guerre, ce qui signifie que la guerre allait bientôt éclater.

  2   Q.  Merci. Est-ce que vous vous souvenez que, le 8 avril, il a démis de ses

  3   fonctions le général Vukosavljevic et l'a nommé Hasanefendic, suite à cela

  4   des directives ont été promulguées contre la JNA contre les Serbes dans les

  5   régions autonomes serbes, n'est-ce pas ?

  6   R.  Oui, c'est exact. Je voulais simplement rajouter que dans ces documents

  7   la JNA et les Serbes étaient considérés comme les agresseurs. Enfin, ils

  8   n'utilisaient le terme "Serbes," ils utilisaient le terme de "Chetniks."

  9   Q.  Pourriez-vous maintenant consulter le document, qui est sur les écrans,

 10   qui émane du département de la Sûreté de l'Etat, et il est mentionné que le

 11   14, dans la zone de Pobudje, municipalité de Bratunac, un groupe composé de

 12   5 000 hommes a été identifié, sur les 5 000, 500 étaient armés ?

 13   Est-ce que vous êtes d'accord pour dire que, le 11, l'armée serbe est

 14   entrée dans la zone de Srebrenica, alors que la 28e Division était dans les

 15   forêts, et c'est seulement le 16 que 10 000 combattants, tel que cela est

 16   relaté par les Musulmans, ont réalisé une percée dans Tuzla, en direction

 17   de Tuzla. Ils étaient répartis de manière sporadique dans les différentes

 18   zones boisées, et ils présentaient un danger très important pour les Serbes

 19   tant dans les villages que dans les villes ?

 20   R.  Monsieur Karadzic, je n'ai pas vraiment suivi de près ces activités.

 21   Donc je ne peux ni confirmer ni infirmer ce que vous avancez.

 22   Q.  Merci. Mais vous ne saviez pas que vous deviez défendre le poste de

 23   commandement arrière qui était menacé par ces groupes.

 24   R.  C'est exact. Bien sûr, il y avait un conflit armé. Il y avait des

 25   affrontements, et le village de Mokro, qui se trouve entre Han Pijesak et

 26   Sokolac, a fait l'objet d'affrontement. Nous affrontions ces groupes. Il y

 27   en avait plusieurs, t ils avançaient et reculaient entre Srebrenica et Zepa

 28   et en direction de Kladanj et d'Olovo.


Page 26004

  1   Q.  Merci. Si je vous disais que les représentants des autorités civiles de

  2   Bratunac et de Srebrenica m'ont demandé de déclarer l'état de guerre, le

  3   14, parce qu'ils n'étaient pas en mesure de garantir leur survie si ces

  4   unités se retournaient contre eux, est-ce que vous seriez d'accord pour

  5   dire que c'est la raison pour laquelle l'état de guerre a été déclaré ?

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, le témoin vous a dit

  7   qu'il ne le pouvait pas confirmer ni infirmer ce que vous disiez. Je ne

  8   vois donc pas pourquoi vous continuez dans ce sens.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je vais

 10   reformuler ma question.

 11   M. KARADZIC : [interprétation]

 12   Q.  Général, M. Tieger essaie de dire que nous avions besoin de militariser

 13   la zone du Corps de la Drina de façon à ce que l'armée puisse obtenir des

 14   engins de terrassement plus facilement. Est-ce que cela semble justifié,

 15   raisonnable, ou un peu tiré par les cheveux ?

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je crois qu'il a répondu déjà à cette

 17   question.

 18   Oui, Monsieur Tieger.

 19   M. TIEGER : [interprétation] Je crois que vous avez raison, Monsieur le

 20   Président, et de plus M. Karadzic ne cite pas exactement ce qui s'est passé

 21   durant l'interrogatoire principal.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il a dit que la raison de cette -- qui

 23   avait justifié la déclaration de la guerre n'était pas quelque chose qui

 24   l'intéressait et qui ne la connaissait pas. Donc je vous demande de passer

 25   à autre chose, Monsieur Karadzic.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation]

 27   M. KARADZIC : [interprétation]

 28   Q.  Je crois que vous avez déjà répondu à cette question, c'est-à-dire la


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  1   manière dont les décrets étaient signés. Est-ce que vous êtes d'accord pour

  2   dire que je n'ai promu que très rarement, ou pratiquement jamais qui que ce

  3   soit, sauf si, au départ, il y avait une proposition qui émanait des

  4   structures de commandement de l'état-major principal ?

  5   R.  Oui, c'est exact, Monsieur Karadzic. En tant que président de la

  6   république, vous suiviez les propositions qui émanaient du commandant de

  7   l'état-major principal de l'armée de la Republika Srpska, à savoir le

  8   général Mladic, qui prenait des décisions suite à des consultations avec

  9   nous de manière tout à fait collégiale.

 10   Q.  Merci. Hier, on a mentionné le moment où vous avez reçu l'ordre du

 11   général Mladic d'apprêter les bus. Est-ce que vous avez remarqué que le

 12   moment exact de cet événement était considéré comme très important pour M.

 13   Tieger, c'est-à-dire le fait que ceci s'est passé dans la soirée du 11 ?

 14   Donc je vais vous poser la question suivante : Est-ce exact que, dans notre

 15   région, l'heure d'été est une heure plus tard que l'heure du soleil, comme

 16   d'ailleurs en Europe de l'ouest ?

 17   R.  C'est exact.

 18   Q.  Merci. Est-ce que vous êtes d'accord pour dire que, par conséquent,

 19   durant cette période de l'année, il faut jour très tard, et que, par

 20   conséquent, les journées sont très longues ?

 21   R.  Oui. C'est contenu de notre position sur le globe. Ce n'est pas parce

 22   que le soleil se lève très tôt.

 23   Q.  Merci. Lorsque le général Mladic vous avait donné l'ordre de vous

 24   charger de l'affrètement de ces bus, est-ce qu'il vous a dit qu'il avait

 25   une réunion avec Karremans, par exemple, et que c'est celui-ci qui par le

 26   truchement du général Nikolai avait demandé à ce que l'armée de la

 27   Republika Srpska participe à l'évacuation ? Est-ce que vous étiez au

 28   courant de cela ?


Page 26006

  1   R.  Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, je vous ai déjà dit

  2   que le général Mladic n'était pas entré directement en contact avec moi.

  3   Cet ordre m'avait été transmis sans aucune explication supplémentaire, mais

  4   je savais exactement comment je devais agir. Je crois que j'ai déjà dit

  5   ceci aujourd'hui ou peut-être hier. Je ne m'en souviens plus exactement.

  6   Q.  Merci. Mais, pour couper les cheveux en quatre en se demandant si

  7   c'était relativement tard ou très tard dans la soirée, est-ce qu'il est

  8   possible que vous ayez reçu cet ordre bien après 20 heures ? Dans cette

  9   région, durant cette période de l'année, il fait encore jour, donc est-ce

 10   que vous vous souvenez si vous avez reçu cet ordre avant la tombée de la

 11   nuit ?

 12   R.  Monsieur Karadzic, je ne m'en souviens pas exactement. Je sais que

 13   c'était en début de soirée. Mais je ne veux pas aller à l'encontre des

 14   réponses que j'ai données.

 15   Je suis désolé, Monsieur le Président, Madame, Messieurs les Juges.

 16   Mais, à l'époque, l'heure de la réception de cet ordre ne nous paraissait

 17   pas importante. C'était la tâche qui semblait importante, pas vraiment

 18   l'heure à laquelle j'ai reçu cet ordre.

 19   Q.  Merci, Général. Mais, hier au début, vous avez dit tard dans la soirée

 20   -- ou plutôt, tard dans la nuit, et M. Tieger a essayé de vous faire dire

 21   que c'était plus tôt. Est-ce que vous pensez qu'il aurait été possible que

 22   vous ayez reçu cet ordre avant 20 heures ?

 23   M. TIEGER : [interprétation] J'aimerais avoir une citation du compte rendu

 24   d'audience, parce que ce n'est pas ainsi que je me remémore

 25   l'interrogatoire principal.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors, dans ce cas-là, consultons le

 27   compte rendu d'audience.

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pages 74 et 75, du compte rendu d'audience


Page 26007

  1   d'hier.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous citez le résumé qu'a lu

  3   M. Tieger ?

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Non, je crois que c'était déjà dans le cadre

  5   des questions de l'interrogatoire principal. Il a demandé au  général, à

  6   quelle heure il avait reçu cet ordre, et le général a commencé par

  7   répondre, "tard dans la nuit."

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est à la page 79, ligne 21, je cite :

  9   "Question : … pouvons-nous nous dire quand vous avez reçu cet ordre, le 11

 10   juillet ?

 11   Réponse : Autant que je me souvienne, c'était tard dans la soirée que j'ai

 12   reçu cet appel téléphonique."

 13   Ensuite, Monsieur Tieger a dit :

 14   Question : … je voudrais obtenir une précision, j'en veux pour preuve la

 15   page 18 731 dans l'affaire Tolimir, et vous avez mentionné que c'était dans

 16   l'après-midi ou en début de soirée. Donc est-ce exact de dire que ce

 17   n'était pas vraiment dans l'après-midi mais plutôt dans la soirée ?

 18   Réponse que vous avez faite : Oui. C'était peut-être une meilleure manière

 19   de décrire le moment où j'ai reçu cet appel téléphonique."

 20   M. TIEGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Encore une fois,

 21   ceci montre bien qu'on a cité de manière indue des passages du compte rendu

 22   d'audience qui n'ont jamais existé, et qu'on n'a jamais en fait mentionné

 23   que ces éléments s'étaient produits durant la nuit. Il n'y a aucune

 24   référence à cet effet.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Effectivement c'était mentionné tard

 26   dans la soirée. J'ai donné lecture de la totalité du passage. Passons à

 27   autre chose. Quelle est votre question, Monsieur Karadzic ?

 28   M. KARADZIC : [interprétation]


Page 26008

  1   Q.  En fait, je voulais obtenir une précision lorsque l'on dit tard dans la

  2   soirée, ceci ne signifie pas la soirée. Lorsqu'on dit "tard" dans la

  3   soirée, on peut en fait mentionner la nuit. La soirée dans notre langue, ça

  4   peut vouloir dire jusqu'à minuit.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, ce n'est pas vous qui

  6   déposez ici, mais si vous voulez, vous pouvez poser des questions au

  7   témoin, mais je crois que le témoin a déjà répondu aux questions que vous

  8   lui avez posées.

  9   Je regarde l'horloge, donc si vous voulez poser une dernière question

 10   concernant la période à la soirée qui vous intéresse et ensuite nous ferons

 11   la pause.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 13   M. KARADZIC : [interprétation]

 14   Q.  Général, lorsqu'on dit : "Tard dans la soirée," dans notre langue, cela

 15   signifie quoi exactement; est-ce que la fin de la soirée cela signifie que

 16   la nuit est déjà tombée, et que donc il fait déjà noir dehors ?

 17   R.  Monsieur Karadzic, tard dans la soirée, cela signifie au moment du

 18   crépuscule, et je ne veux pas modifier ma réponse précédente.

 19   Q.  Merci. Mais le crépuscule dans l'autre région du monde, c'est après 20

 20   heures, la tombée de la nuit donc.

 21   R.  Oui, étant donné que c'était durant l'été effectivement, la tombée de

 22   la nuit c'était après 20 heures.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Nous pourrons peut-être faire la pause

 24   maintenant.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Nous reprendrons dans une

 26   demi-heure, c'est-à-dire à 11 heures.

 27   --- L'audience est suspendue à 10 heures 30.

 28   --- L'audience est reprise à 11 heures 01.


Page 26009

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, veuillez poursuivre.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

  3   M. KARADZIC : [interprétation]

  4   Q.  Général, pouvez-vous me dire s'il est exact que les autobus ont été

  5   mobilisés uniquement en Republika Srpska, et si ce n'est pas le cas, en

  6   quels autres endroits auraient-ils été mobilisés -- réquisitionnés ?

  7   R.  Pour autant que je le sache, ils n'ont été réquisitionnés qu'en

  8   Republika Srpska.

  9   Q.  Merci. En page 73 du compte rendu de l'audience d'hier, vous avez

 10   apporté une correction à ce qui vous était dit dans une question, je crois,

 11   en affirmant que Ratko Mladic n'était pas le chef de l'état-major, mais le

 12   commandant de l'état-major principal. Pourquoi avez-vous apporté cette

 13   correction, quelle est l'importance de cette correction ?

 14   R.  Monsieur Karadzic, on n'utilise pas le mot "necenic" pour désigner le

 15   commandant de l'état-major principal de façon officielle dans le langage

 16   militaire, donc étant donné les fonctions qui étaient les miennes,

 17   s'agissant du chef d'état-major principal de la VRS, c'était mon devoir

 18   d'appeler l'attention sur ce point.

 19   Q.  je vous remercie. Donc il y a une différence, n'est-ce pas, et peut-

 20   être une différence importante entre le poste de chef et le poste de

 21   commandant ?

 22   R.  Le chef de l'état-major principal c'est celui qui donne des ordres à

 23   l'armée, quant au commandant il commande l'armée. Les fonctions de ces deux

 24   hommes sont similaires, il n'y a pas de différences fondamentales entre les

 25   deux, mais la différence existe uniquement au niveau du mot qui est

 26   utilisé.

 27   Q.  Donc l'un des deux donne des ordres sous la responsabilité d'un autre,

 28   et l'autre c'est le commandant. Il commande l'ensemble de l'armée, n'est-ce


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  1   pas ?

  2   R.  C'est exact.

  3   Q.  Merci. Maintenant, je vais vous demander s'il est exact, avant la

  4   guerre, que vous travailliez au ministère fédéral de la Défense nationale,

  5   que nous appelions à l'époque Secrétariat fédéral à la Défense nationale et

  6   que votre responsabilité fût le moral des troupes, n'est-ce pas ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Merci. Est-ce que, dans ces fonctions, vous pouviez obtenir des

  9   renseignements et suivre les événements de ce qui se passait sur la scène

 10   politique ainsi que de ce qui avait un rapport avec les questions de

 11   sécurité, et en particulier, les questions liées à la sécurité au sein de

 12   l'armée ?

 13   R.  Oui. Nous suivions les renseignements, en particulier les

 14   renseignements qui étaient fournis par les médias. En ce qui concerne la

 15   façon dont les médias traitaient la JNA en particulier et la Défense

 16   populaire généralisée, au sein de notre direction, il y avait des personnes

 17   qui faisaient partie d'équipes d'expert de l'état-major général de la JNA,

 18   et ces équipes étaient chargées d'analyser la situation sur le plan de la

 19   sécurité sur l'ensemble du territoire de la République socialiste

 20   fédérative de Yougoslavie, donc de la RSFY, pour utiliser le sigle.

 21   Q.  Je vous remercie. Est-ce que cela signifie que vous deviez également

 22   tenir compte des évolutions politiques, de l'importance relative des

 23   différents partis politiques, et de tout ce qui se passait du point de vue

 24   politique ? Est-ce que vous analysiez tout cela pour évaluer l'influence

 25   sur la sécurité du pays et sur le rôle que devait éventuellement jouer

 26   l'armée de cette situation sur le plan de la sécurité ?

 27   R.  Nous analysions tout ce qui avait trait à la société. Quant aux

 28   processus politiques et actions politiques des partis qui existaient à


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  1   l'époque après la mise en place du système multipartite en RSFY, nous les

  2   intégrions dans nos analyses des processus sociaux que nous suivions de

  3   près.

  4   Q.  Je vous remercie, Général. Donc pouvons-nous convenir que depuis le

  5   début de la crise et jusqu'au retrait de la JNA de Bosnie-Herzégovine et de

  6   Macédoine, la JNA avait principalement à l'esprit dans le respect de la

  7   constitution, la nécessité de préserver l'intégrité territoriale, et

  8   l'unité du pays de la Yougoslavie ?

  9   R.  Oui. L'objectif principal de la JNA, qui était défini dans la Loi sur

 10   le rôle des forces armées, était de s'opposer éventuellement à un agresseur

 11   venu de l'extérieur. Tout le système de préparation de la défense était

 12   centré sur cette mission qui était la mission centrale. Cette mission

 13   n'avait jamais été envisagée comme devant consister en une opposition à une

 14   force armée de l'intérieur du pays de la RSFY. Vous avez très bien défini

 15   la mission de l'armée selon la constitution.

 16   Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, nous devions nous les

 17   officiers prêter serment au moment où nous prenions nos fonctions - je vais

 18   paraphraser, je ne veux pas vous donner les termes exacts - mais nous

 19   disions en gros, je cite :

 20   "Je m'engage solennellement à préserver l'intégrité et la

 21   souveraineté territoriale de la République de Yougoslavie," et cetera, et

 22   cetera.

 23   Puis, je cite :

 24   "Je m'engage à obéir aux ordres de mes officiers supérieurs," et

 25   cetera.

 26   Je ne vais pas vous donner l'intégralité de ce serment et je le

 27   rappelle ici simplement de mémoire.

 28   Q.  Général, est-il exact que le système en vigueur par le passé dans le


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  1   pays, c'est-à-dire le système de la Défense populaire généralisée et de

  2   l'autodéfense - et là, je parle de toutes les unités organisées qui

  3   existaient dans le pays et qui étaient censées participer à ces actions

  4   d'autodéfense, le cas échéant - cette organisation existait à tous les

  5   niveaux jusqu'au niveau municipal,  et au niveau des communautés locales,

  6   et au niveau des entreprises commerciales, donc est-il vrai que tout ce

  7   système a été à un certain moment un système très favorable pour le

  8   développement de formations paramilitaires, d'armées distinctes au niveau

  9   des républiques, et est-ce que, finalement, ce système très favorable a

 10   fini par constituer une menace pour l'unité du pays ?

 11   R.  J'ai déjà évoqué la loi sur les forces armées, et en vertu de cette

 12   loi, les forces armées se composaient de la JNA, de la Défense

 13   territoriale, et de la police en temps de guerre. Ces forces recevaient des

 14   armes dans le cadre de l'application de cette idée de la Défense populaire

 15   généralisée, que l'on peut résumer comme suit : Chaque citoyen peut devenir

 16   un soldat, et chaque soldat est, avant tout, un citoyen, et la JNA et la

 17   Défense territoriale recevaient des armes, donc avaient des armes à leur

 18   disposition ainsi qu'un certain nombre de munition. Donc l'hypothèse que

 19   ces groupes organisés, dans les conditions que je viens d'évoquer, et

 20   armés, dans les conditions que je viens d'évoquer, auraient pu décider de

 21   s'armer pour d'autres objectifs n'est pas une hypothèse infondée.

 22   Q.  Je vous remercie. J'aimerais aider les interprètes. Quand vous dites

 23   "BK," est-ce que cela signifie équipements de combat, et quelles sont les

 24   munitions qui sont distribuées dans le cadre de cette distribution des

 25   équipements de combat ?

 26   R.  Monsieur Karadzic, vous avez tout à fait raison. Le sigle BK signifie

 27   équipements de combat. Chaque soldat recevait un équipement de combat et

 28   demi pour son usage personnel ainsi qu'un certain nombre de pièces


Page 26013

  1   d'artillerie, et cetera, et en temps de guerre, les réservistes se voyaient

  2   distribuer deux équipements de combat par combattant.

  3   Q.  Merci. Est-ce que vous vous rappelez que la présidence de la RFSY,

  4   avant les élections multipartites, a essayé de remédier au dégât qui avait

  5   déjà eu lieu, en déclarant que la JNA devait vérifier la distribution de

  6   ces armes dans le cadre de la distribution des équipements de combat ?

  7   R.  C'est exact, je crois qu'un document officiel existe qui l'indique.

  8   Q.  Merci. Est-il vrai que c'est sur les bases, que nous venons de décrire,

  9   qu'on commençait à se développer des formations paramilitaires et des

 10   armées autonomes dans les différentes républiques, d'abord en Slovénie puis

 11   en Croatie, et que ces armées autonomes se composaient d'Unités de la

 12   Défense territoriale, d'Unités de la police, qui parfois bénéficiaient de

 13   renfort apporté par des réservistes de la police, et que des Unités de la

 14   Garde ou des Unités de la Ligue patriotique en Bosnie ? Qu'ils ne faisaient

 15   partie des structures officielles des forces armées ont rejoint ces

 16   nouvelles structures autonomes ? Est-il vrai que le Secrétariat fédéral à

 17   la Défense nationale n'avait pas prévu de devoir se battre contre un ennemi

 18   intérieur, ce qui a accru les capacités militaires de l'ennemi ?

 19   R.  Monsieur le Président, Madame, Messieurs les Juges, j'aimerais

 20   souligner un point à l'avantage des Juges de la Chambre. La présidence de

 21   la RSFY et la JNA, ainsi que son état-major général n'ont pas -- ne

 22   considéraient pas que la Défense territoriale de Slovénie était une

 23   formation paramilitaire, parce que la Défense territoriale de Slovénie

 24   était une entité légale, qui existait dans le respect de la loi, elle

 25   faisait partie intégrante des forces armées officiellement. Mais la Défense

 26   territoriale de Slovénie a attaqué la JNA, et vous avez parlé, Monsieur

 27   Karadzic, de trois éléments en dehors de cette Défense territoriale de la

 28   Slavonie, qui, eux, effectivement ont bien été considérés comme des


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  1   formations paramilitaires par l'état-major général.

  2   Q.  Je vous remercie. Pouvons-nous convenir que vous saviez bien ce qui se

  3   passait au sein de la JNA dans les deux républiques de Slovénie et de

  4   Croatie, et pouvons-nous convenir les soldats, les officiers, leurs

  5   familles, les équipements qu'ils possédaient étaient menacés, étaient

  6   soumis à un blocus, et que donc pour parler, brièvement, la JNA se trouvait

  7   dans une position impossible.

  8   R.  Au sein de la direction dans laquelle je travaillais, nous avions une

  9   idée très précise de la situation et de son évolution, et nous avons

 10   analysé cette situation à chaque instant pour préciser de quelle façon elle

 11   pouvait influer sur le moral des troupes. Il fallait que nous tirions des

 12   conclusions. Les conséquences de ces événements ont été très traumatiques

 13   pour les officiers et les soldats. Les soldats étaient de jeunes recrues

 14   qui avaient à peine 19 ou 20 ans, et qui se voyaient attaqués. Les moyens

 15   en électricité et en eau, ont été coupés, ces hommes n'avaient plus d'eau

 16   dans les casernes où ils se trouvaient, les officiers de Zagreb se sont

 17   plaints auprès de moi en disant que leurs voisins les menaçaient et qu'ils

 18   étaient obligés de partir. J'ai parlé aussi à médecin à Zagreb, c'était en

 19   1991, et il m'a dit : Colonel, les officiers ont très peur, ils ont peur

 20   pour leurs familles, et certains d'entre eux commencent à partir. Ils

 21   partaient en laissant -- en partant dans la volonté de déplacer leurs

 22   familles, de les faire sortir de là, et ils allaient vers d'autres régions.

 23   Voilà, la situation en Slovénie quand tout a commencé, et cela s'est

 24   poursuivi ensuite en Croatie, en Bosnie-Herzégovine.

 25   Q.  Je vous remercie.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je me demandais si cette série de

 27   questions pouvait vous apporter une aide quelconque dans votre Défense.

 28   Est-ce que vous pourriez être plus succinct dans votre contre-


Page 26015

  1   interrogatoire, et mieux centrer les sujets que vous abordez ? A des fins

  2   de planification, Monsieur Karadzic, vous avez besoin de combien de temps

  3   pour votre contre-interrogatoire, à votre avis ?

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je pense qu'on m'a accordé deux heures et

  5   demies. J'ai utilisé déjà une demi-heure, je pense qu'il me reste deux

  6   heures, et j'en aurais terminé dans le temps qui m'a été alloué, je crois.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le temps alloué est un temps maximum,

  8   vous n'êtes pas obligé d'utiliser l'intégralité de ce temps. Si vous pouvez

  9   en terminer avant, cela ne peut être que bon.

 10   Veuillez procéder, Monsieur Karadzic mais, je vous en prie, concentrez-

 11   vous, bien, sur les questions les plus importantes pour votre Défense.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Excellence, mais ayant écouté le

 13   Procureur dans l'affaire Seselj, j'ai été absolument ébahi de voir

 14   qu'apparemment, personne ne tient compte du fait qu'il y avait une guerre.

 15   On s'exprime comme si les Serbes s'étaient jetés sur les autres, et

 16   j'aimerais, pour ma part, que cela soit bien précisé. Est-ce que nous les

 17   Serbes, nous sommes des sauvages qui nous jetons sur tout ce qui bouge, ou

 18   est-ce que nous avions des raisons tout à fait valables d'agir comme nous

 19   l'avons fait, et le général était à un poste qui lui permettait de voir

 20   tout ce qui se passait dans le détail ? Mais, enfin, je vais continuer.

 21   M. KARADZIC : [interprétation]

 22   Q.  Général, vous avez dit que vous suiviez de près l'évolution des

 23   événements politiques; est-ce que vous conviendrez avec moi que les

 24   nouveaux partis en Croatie, en particulier, ont vu le jour et qu'ils ont

 25   commencé à utiliser un langage très effrayant pour les Serbes en ressortant

 26   les symboles, les insignes, et la rhétorique de la Seconde Guerre mondiale

 27   qui était traumatisante et effrayante pour les Serbes ?

 28   R.  Les symboles, la rhétorique utilisés dans les discours politiques - ça


Page 26016

  1   c'est tout à fait clair - avaient pour but de montrer à toute personne qui

  2   écoutait ces discours que la survie des Serbes dans ces régions était en

  3   danger, et ce commentaire concerne en particulier l'Union démocratique

  4   croate, le HDZ, qui, si je ne me trompe, a été créé en 1991.

  5   Q.  Merci. Général, est-ce qu'au Secrétariat national à la Défense

  6   nationale, vous vous êtes rendu compte que de nouveaux partis politiques

  7   avaient été créés en Bosnie-Herzégovine; est-ce que vous avez suivi de près

  8   la rhétorique de ces partis, le comportement de ces partis, le programme

  9   politique de ces partis ainsi que la façon générale dont ils s'exprimaient

 10   ?

 11   R.  Oui, nous avons également suivi cela de près.

 12   Q.  Merci. Est-il exact que le Parti démocratique serbe a été le dernier

 13   parti à être créé, et que pour ma part, j'ai fait mon apparition sur la

 14   scène politique en dernier au moment où tous ces nouveaux partis ont été

 15   créés ?

 16   R.  Monsieur Karadzic, d'après les éléments d'information dont nous

 17   disposions à l'époque, ce que vous dites est exact, et je vous prie de

 18   m'excuser, mais au début, nous n'avons pas prêté particulièrement attention

 19   à votre parti, à votre personne. Vous n'avez pas attiré particulièrement

 20   l'attention du Secrétariat national à la Défense -- du Secrétariat fédéral

 21   à la Défense nationale dans vos discours.

 22   Q.  Merci. Est-ce que vous convenez qu'en Croatie, la création des

 23   formations paramilitaires a été entreprise au niveau même de l'état, et que

 24   le seul parti politique, qui possédait sa propre organisation

 25   paramilitaire, était le SDA, en Bosnie-Herzégovine. C'était une formation

 26   militaire baptisée : Ligue patriotique.

 27   R.  Oui, et nous avons transmis ces éléments d'information au Secrétariat

 28   fédéral à la Défense nationale, c'est-à-dire à celui qui dirigeait ce


Page 26017

  1   secrétariat, le général Veljko Kadijevic.

  2   Q.  Merci. Est-ce que vous conviendrez qu'après Hitler, ce parti politique

  3   dont nous parlons a été le seul -- probablement le premier, après Hitler

  4   qui a possédé sa propre armée ?

  5   R.  Je ne sais pas si on peut s'exprimer ainsi pour le monde entier mais,

  6   en tout état de cause, dans notre partie du monde, c'est le premier parti

  7   politique qui a possédé des forces armées, qui lui étaient propres, et je

  8   parle, bien sûr, de la Bosnie-Herzégovine.

  9   Q.  Merci. Est-ce que vous conviendrez qu'en Bosnie-Herzégovine, les médias

 10   ont mené une campagne qu'il est permis de qualifier de campagne anti-

 11   yougoslave et anti-serbe, et une campagne dirigée contre l'armée, en dépit

 12   des contacts qui ont eu lieu avec l'armée de Bosnie-Herzégovine et de

 13   nombreux accords conclus au sujet du rôle joué par la JNA, les médias ont

 14   mené une campagne qui déformait la réalité considérablement.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Tieger.

 16   M. TIEGER : [interprétation] Excusez-moi, j'hésitais à me lever, mais si

 17   l'accusé continue à poser le genre de question qu'il est en train de poser,

 18   je me sens dans l'obligation de demander à ce que des précisions soient

 19   apportées au contexte dans lequel se situent les questions. En effet, on

 20   parle de couverture médiatique, on parle de média qui s'exprimait contre

 21   l'armée, contre les Serbes et contre la Yougoslavie, je pense qu'il

 22   faudrait que toutes ces questions soient séparées les unes des autres et

 23   qu'il y ait un fondement pour les question posées au témoin, ce qui a accru

 24   les capacités militaires de l'ennemi.

 25   R.  Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, j'aimerais souligner

 26   un point à l'avantage des Juges de la Chambre. La présidence de la RSFY, et

 27   la JNA, ainsi que son état-major général n'ont pas -- ne considéraient pas

 28   que la Défense territoriale de Slovénie était une formation paramilitaire,


Page 26018

  1   parce que la Défense territoriale de Slovénie était une entité légale qui

  2   existait dans le respect de la loi, elle faisait partie intégrante des

  3   forces armées officiellement. Mais la Défense territoriale de Slovénie a

  4   attaqué la JNA, et vous avez parlé, Monsieur Karadzic, de trois éléments en

  5   dehors de cette Défense territoriale de la Slavonie, qui eux, effectivement

  6   ont bien été considérés comme des formations paramilitaires par l'état-

  7   major général.

  8   Q.  Je vous remercie. Pouvons-nous convenir que vous saviez bien ce qui se

  9   passait au sein de la JNA dans les deux républiques de Slovénie et de

 10   Croatie, et pouvons-nous convenir les soldats, les officiers, leurs

 11   familles, les équipements qu'ils possédaient étaient menacés, étaient

 12   soumis à un blocus, et que donc pour parler brièvement la JNA se trouvait

 13   dans une position impossible.

 14   R.  Au sein de la direction dans laquelle je travaillais, nous avions une

 15   idée très précise de la situation et de son évolution, et nous avons

 16   analysé cette situation à chaque instant pour préciser de quelle façon elle

 17   pouvait influer sur le moral des troupes. Il fallait que nous tirions des

 18   conclusions. Les conséquences de ces événements ont été très traumatiques

 19   pour les officiers et les soldats. Les soldats étaient de jeunes recrues

 20   qui avaient à peine 19 ou 20 ans, et qui se voyaient attaqués. Les moyens

 21   en électricité et en eau, ont été coupés, ces hommes n'avaient plus d'eau

 22   dans les casernes où ils se trouvaient, les officiers de Zagreb se sont

 23   plaints auprès de moi en disant que leurs voisins les menaçaient et qu'ils

 24   étaient obligés de partir. J'ai parlé aussi à médecin à Zagreb, c'était en

 25   1991, et il m'a dit, Colonel, les officiers ont très peur, ils ont peur

 26   pour leurs familles, et certains d'entre eux commencent à partir. Ils

 27   partaient en laissant -- en partant dans la volonté de déplacer leurs

 28   familles, de les faire sortir de là, et ils allaient vers d'autres régions.


Page 26019

  1   Voilà la situation en Slovénie quand tout a commencé, et cela s'est

  2   poursuivi ensuite en Croatie, en Bosnie-Herzégovine.

  3   Q.  Je vous remercie. --

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je me demandais si cette série de

  5   questions pouvait vous apporter une aide quelconque dans votre Défense.

  6   Est-ce que vous pourriez être plus succinct dans votre contre-

  7   interrogatoire, et mieux centrer les sujets que vous abordez. A des fins de

  8   planification, Monsieur Karadzic, vous avez besoin de combien de temps pour

  9   votre contre-interrogatoire, à votre avis ?

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je pense qu'on m'a accordé deux heures et

 11   demies. J'ai utilisé déjà une demi-heure, je pense qu'il me reste deux

 12   heures, et j'en aurais terminé dans le temps qui m'a été alloué, je crois.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le temps alloué est un temps maximum,

 14   vous n'êtes pas obligé d'utiliser l'intégralité de ce temps. Si vous pouvez

 15   en terminer avant, cela ne peut être que bon.

 16   Veuillez procéder, Monsieur Karadzic, mais je vous en prie concentrez-vous

 17   bien sûr les questions les plus importantes pour votre Défense.

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Excellence, mais ayant écouté le

 19   Procureur dans l'affaire Seselj, j'ai été absolument ébahi de voir

 20   qu'apparemment personne ne tient compte du fait qu'il y avait une guerre.

 21   On s'exprime comme si les Serbes s'étaient jetés sur les autres, et

 22   j'aimerais pour ma part que cela soit bien précisé. Est-ce que nous les

 23   Serbes, nous sommes des sauvages qui nous jetons sur tout ce qui bouge ou

 24   est-ce que nous avions des raisons tout à fait valables d'agir comme nous

 25   l'avons fait, et le général était à un poste qui lui permettait de voir

 26   tout ce qui se passait dans le détail. Mais enfin, je vais continuer.

 27   M. KARADZIC : [interprétation]

 28   Q.  Général, vous avez dit que vous suiviez de près l'évolution des


Page 26020

  1   événements politiques. Est-ce que vous conviendrez avec moi que les

  2   nouveaux partis en Croatie, en particulier ont vu le jour et qu'ils ont

  3   commencé à utiliser un langage très effrayant pour les Serbes en ressortant

  4   les symboles, les insignes, et la rhétorique de la Seconde Guerre mondiale

  5   qui était traumatisante et effrayante pour les Serbes ?

  6   R.  Les symboles, la rhétorique utilisés dans les discours politiques - ça

  7   c'est tout à fait clair - avaient pour but de montrer à toute personne qui

  8   écoutait ces discours que la survie des Serbes dans ces régions était en

  9   danger, et ce commentaire concerne en particulier l'Union démocratique

 10   croate, le HDZ, qui si je ne me trompe, a été créé en 1991.

 11   Q.  Merci. Général, est-ce qu'au Secrétariat national à la Défense

 12   nationale, vous vous êtes rendu compte que de nouveaux partis politiques

 13   avaient été créés en Bosnie-Herzégovine; est-ce que vous avez suivi de près

 14   la rhétorique de ces partis, le comportement de ces partis, le programme

 15   politique de ces partis ainsi que la façon générale dont ils s'exprimaient

 16   ?

 17   R.  Oui, nous avons également suivi cela de près.

 18   Q.  Merci. Est-il exact que le Parti démocratique serbe a été le dernier

 19   parti à être créé, et que pour ma part, j'ai fait mon apparition sur la

 20   scène politique en dernier au moment où tous ces nouveaux partis ont été

 21   créés ?

 22   R.  Monsieur Karadzic, d'après les éléments d'information dont nous

 23   disposions à l'époque, ce que vous dites est exact, et je vous prie de

 24   m'excuser, mais au début, nous n'avons pas prêté particulièrement attention

 25   à votre parti, à votre personne. Vous n'avez pas attiré particulièrement

 26   l'attention du Secrétariat national à la Défense -- du Secrétariat fédéral

 27   à la Défense nationale dans vos discours.

 28   Q.  Merci. Est-ce que vous convenez qu'en Croatie, la création des


Page 26021

  1   formations paramilitaires a été entreprise au niveau même de l'état, et que

  2   le seul parti politique qui possédait sa propre organisation paramilitaire

  3   était le SDA, en Bosnie-Herzégovine. C'était une formation militaire

  4   baptisée, Ligue patriotique.

  5   R.  Oui, et nous avons transmis ces éléments d'information au Secrétariat

  6   fédéral à la Défense nationale, c'est-à-dire à celui qui dirigeait ce

  7   secrétariat, le général Veljko Kadijevic.

  8   Q.  Merci. Est-ce que vous conviendrez qu'après Hitler, ce parti politique

  9   dont nous parlons a été le seul, probablement le premier après Hitler qui a

 10   possédé sa propre armée ?

 11   R.  Je ne sais pas si on peut s'exprimer ainsi pour le monde entier, mais

 12   en tout état de cause, dans notre partie du monde, c'est le premier parti

 13   politique qui a possédé des forces armées, qui lui étaient propres, et je

 14   parle, bien sûr, de la Bosnie-Herzégovine.

 15   Q.  Merci. Est-ce que vous conviendrez qu'en Bosnie-Herzégovine, les médias

 16   ont mené une campagne qu'il est permis de qualifier de campagne anti-

 17   yougoslave et anti-serbe, et une campagne dirigée contre l'armée, en dépit

 18   des contacts qui ont eu lieu avec l'armée de Bosnie-Herzégovine et de

 19   nombreux accords conclus au sujet du rôle joué par la JNA, les médias ont

 20   mené une campagne qui déformait la réalité considérablement.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Tieger.

 22   M. TIEGER : [interprétation] Excusez-moi, j'hésitais à me lever, mais si

 23   l'accusé continue à poser le genre de question qu'il est en train de poser,

 24   je me sens dans l'obligation de demander à ce que des précisions soient

 25   apportées au contexte dans lequel se situent les questions. En effet, on

 26   parle de couverture médiatique, on parle de média qui s'exprimait contre

 27   l'armée, contre les Serbes et contre la Yougoslavie, je pense qu'il

 28   faudrait que toutes ces questions soient séparées les unes des autres et


Page 26022

  1   qu'il y ait un fondement pour les question posées au témoin, disant que le

  2   témoin ait à répondre à l'ensemble regroupé de cette façon.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, même si les questions

  4   reçoivent des réponses affirmatives des déclarations générales de ce genre

  5   n'apportent guère d'assistance aux Juges de la Chambre. Soyez précis. Et je

  6   vous demanderais encore une fois de vous concentrer sur les questions les

  7   plus importantes. Economisez votre énergie. Nous avons beaucoup de faits

  8   déjà jugés. Je ne les ai pas sous les yeux en ce moment, mais il y a

  9   différentes manières de verser au dossier le contexte historique. Vous

 10   n'avez pas besoin de reprendre chaque aspect du contexte pour en faire une

 11   question à poser au témoin.

 12   Veuillez poursuivre.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Excellence. Mais sauf le respect que je

 14   vous dois, je dois dire que si j'ai bien compris l'acte d'accusation dressé

 15   à mon encontre j'ai été accusé d'avoir été à l'origine d'une politique qui

 16   a été la cause des événements que nous connaissons, et étant donné cette

 17   réalité il me faut montrer que nous nous sommes contentés de réagir aux

 18   actions qui ont été entreprises par d'autres pour commencer. A cette

 19   époque-là, la question qui est intéressante c'est la Défense yougoslave et

 20   la façon dont les médias rendaient compte de l'évolution des affrontements

 21   militaires et personne ne peut répondre à des questions relatives aux

 22   médias en Bosnie-Herzégovine mieux que le témoin que vous avez devant vous

 23   et il est le mieux placé pour dire à quel point les médias ont sapé les

 24   bases du pays.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez procéder, Monsieur Karadzic.

 26   M. KARADZIC : [interprétation]

 27   Q.  Je serai court, Général. Est-ce qu'au sein Secrétariat fédéral à la

 28   Défense nationale vous étiez inquiet en raison du comportement des médias


Page 26023

  1   et de la façon dont ils rendaient compte de la situation en Bosnie-

  2   Herzégovine ainsi que de l'incidence que cette façon de relater les faits

  3   pouvait avoir sur les relations interethniques et la stabilité du pays ?

  4   R.  Oui, Monsieur Karadzic. Nous étions très inquiets en raison des

  5   événements qui se déroulaient en Bosnie-Herzégovine, et nous avons fini par

  6   conclure que l'évolution ne pouvait aboutir qu'à quelque chose qui serait

  7   le pire que l'on pouvait imaginer, à savoir une guerre absolument

  8   sanguinaire. Nous l'avons fait savoir au général, chef de l'état-major

  9   principal, nous lui avons rappelé la guerre au Liban, par exemple, qui

 10   était aussi une guerre similaire, une guerre civile.

 11   Q.  Je vous remercie. Est-ce que vous avez fait connaître votre inquiétude

 12   parce que vous considériez que la Bosnie-Herzégovine étaient une véritable

 13   poudrière à ce moment-là ?

 14   R.  Oui, c'est tout à fait cela, Monsieur Karadzic. Je crois d'ailleurs que

 15   nous avons consigné par écrit ce mot dans certains de nos documents.

 16   Q.  Merci. Général, puisqu'à l'époque je n'étais pas particulièrement

 17   intéressant pour vous, est-ce que vous conviendrez qu'aucun Radovan

 18   Karadzic n'aurait pu manipuler ou enflammer le peuple serbe étant donné que

 19   la mémoire de ce peuple quant au génocide commis en 19941 avait déjà été

 20   ravivée ? Conviendrez-vous avec moi que vous qui observiez mon comportement

 21   ne l'auriez jamais qualifié de comportement destiné à manipuler ou à

 22   enflammer les esprits ?

 23   R.  Monsieur Karadzic, je ne peux que répondre à ce que vous venez de dire

 24   au sujet du génocide. Pour le reste de votre question, je préfèrerais ne

 25   pas le commenter. Personne, ni Karadzic ni Raskovic ni personne d'autre,

 26   n'avait besoin de rappeler au peuple le danger que représentait le

 27   génocide. Le peuple serbe avait cela très présent à l'esprit.

 28   Q.  Je vous remercie. Est-ce que vous avez remarqué qu'au nom de mon parti


Page 26024

  1   et de mon groupe ethnique, je n'ai cessé de proposer des solutions

  2   pacifiques, des solutions politiques et que j'ai déployé toute mon énergie

  3   pour tenter d'éviter le conflit armé ? Est-ce que ce que vous saviez de mes

  4   activités au Secrétariat fédéral à la Défense nationale vous permettaient

  5   de conclure ce que je viens de dire ?

  6   R.  Tout ce qui paraissait dans les médias, que ce soit dans la presse

  7   écrite ou dans les médias télévisés nous permettait de suivre la situation

  8   générale, et donc nous suivions tout ce qui concernait la situation, y

  9   compris ce que vous faisiez, vous.

 10   Q.  D'un point de vue de la Sûreté de l'Etat et de la garantie de son

 11   unité, j'aimerais savoir s'il y avait des éléments associés à mon poste

 12   politique qui aurait pu vous intéresser au niveau du ministère de la

 13   Défense ?

 14   R.  Pour vous dire la vérité, Monsieur Karadzic, je ne me souviens pas être

 15   arrivé à une conclusion de ce genre.

 16   Q.  Merci. D'après vous, le danger rencontré par les Serbes en Bosnie-

 17   Herzégovine était-il réaliste et pensez-vous que s'ils ne s'étaient pas

 18   défendus en Bosnie ils en auraient souffert ?

 19   R.  Oui. C'est exactement cela. Il s'agissait précisément de cette peur du

 20   peuple serbe qui remontait à l'expérience vécue durant la Deuxième Guerre

 21   mondiale et également suite à des déclarations politiques plus récentes,

 22   notamment celle de Franjo Tudjman, le président croate, qui divisait les

 23   Serbes en trois catégories, il disait : Un tiers des Serbes devait être

 24   tué, un tiers devait être renvoyé hors des faire [inaudible] et le

 25   troisième tiers devait rester sur le territoire croate, à condition qu'ils

 26   soient convertis au Catholicisme.

 27   Il y a un mois, le président Mesic, l'ancien président de la Croatie, a

 28   demandé au président de la Republika Srpska : Ce que Dodik allait faire ?


Page 26025

  1   Dodik est le président de la Republika Srpska actuelle. Il a dit, s'il y

  2   aune autre guerre, la Republika Srpska va disparaître, comme les Serbes

  3   d'ailleurs.

  4   Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, je n'ai pas parlé des

  5   raisons historiques qui laissent clairement penser qu'un danger de génocide

  6   est présent, et vous êtes peut-être au courant de certains des éléments qui

  7   sont associés à cela.

  8   Q.  Merci, Général. Est-ce que vous vous souvenez que ce même M. Mesic, en

  9   1991, à plusieurs reprises a mis en garde les populations d'un risque que

 10   la guerre dépasse les frontières de la Croatie et touchent également la

 11   Bosnie, et c'est en fait ce qui s'est passé, ce qui a facilité la position

 12   de la Croatie ?

 13   R.  Précisément. Je vous rappelle d'une déclaration très tranchée faite par

 14   ce monsieur. Il a pris la parole devant le parlement croate, il a dit :

 15   J'ai terminé ma mission. La Yougoslavie n'existe plus et, cependant, il

 16   avait été membre de la présidence yougoslave.

 17   Q.  Pour une période donnée, il a même été président de cette présidence,

 18   n'est-ce pas, et il avait prêté serment en s'engageant de garantir

 19   l'intégrité ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Vous êtes né en Yougoslavie, n'est-ce pas ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Merci. Est-ce que vous avez ensuite suivi les tentatives de la Bosnie-

 24   Herzégovine d'éviter la guerre et d'utiliser la JNA pour mettre un terme au

 25   conflit et pour séparer les parties belligérantes à la demande

 26   d'Izetbegovic mais également à la demande des membres de la présidence de

 27   la Bosnie-Herzégovine ?

 28   R.  Oui, il y a eu des tentatives de ce genre, l'état-major général de la


Page 26026

  1   JNA pensait que la JNA devait jouer le rôle de tampon afin d'éviter tout

  2   conflit ethnique. Cependant ils ne sont pas arrivés en Croatie, et nous

  3   étions peu enclins à utiliser la même idée en Bosnie-Herzégovine, étant

  4   donné que nous ne pensions pas que cela fonctionnerait.

  5   Monsieur le Président, Madame, Messieurs les Juges, je ne me souviens plus

  6   si c'était en 1991 ou à un autre moment, mais je me suis rendu en Bosnie-

  7   Herzégovine dans le cadre d'un voyage de l'équipe de l'état-major général.

  8   L'intention était de prendre le pouls de la situation et je devais plus

  9   particulièrement m'intéresser aux questions du moral des troupes. J'ai été

 10   ravi de voir qu'il y avait des patrouilles de police mixtes avec des

 11   membres de la JNA, mais ça n'a duré qu'un certain temps, parce que les

 12   mêmes formations qui patrouillaient ensemble se sont ensuite affrontées.

 13   Q.  Merci. Je vais vous poser la question suivante : Je voudrais savoir si

 14   vous savez ce qui a découlé de la conférence internationale sur la

 15   Yougoslavie ou si vous avez même participé ou si vous avez suivi ces

 16   débats, notamment la conférence qui eu lieu en marge concernant la Bosnie-

 17   Herzégovine présidée par Lord Carrington et par l'ambassadeur Cutileiro ?

 18   R.  Oui, nous avons suivi cela lorsque des réunions se sont tenues à

 19   Lisbonne ensuite à Paris, puis à Vienne, et cetera. Puis, il y a eu les

 20   différents sicles de négociations et de pourparlers avec Vance-Owen, avec

 21   Stoltenberg, et avec d'autres représentants des Nations Unies. Nous avons

 22   suivi tout cela, et je peux vous dire, Monsieur le Président, Madame,

 23   Monsieur les Juges, que nous étions reconnaissants de tous les efforts

 24   consentis pour arriver à une solution pacifique et pour éviter cet

 25   épanchement de sang en Bosnie-Herzégovine. C'était l'opinion partagée par

 26   tous les membres de l'état-major général.

 27   Q.  Merci. Je voudrais maintenant que l'on passe à la période du début de

 28   la guerre. Est-ce que vous n'avez pas tout de suite rejoint les rangs de la


Page 26027

  1   VRS, et au départ, est-ce que vous étiez conscient du fait que cette VRS

  2   avait été mis sur pied ?

  3   R.  Monsieur Karadzic, j'ai rédigé certains articles pour une encyclopédie

  4   et certains de ces articles portent sur la Republika Srpska, par conséquent

  5   je connais très bien ce sujet.

  6   Q.  Merci. Est-ce que vous seriez d'accord pour dire que d'autres

  7   communautés ethniques peut-être pas en Macédoine, mais d'autres républiques

  8   qui avaient fait sécession ont retiré leurs officiers de commandement ainsi

  9   que leurs forces de réserve ainsi que leurs conscrits de la JNA afin de

 10   constituer leurs propres armées républicaines ? Tout le monde avait fait

 11   ceci avant que les Serbes en Bosnie ne fassent la même et n'emboîte le pas.

 12   R.  Oui. Il s'agit de fait historique.

 13   Q.  Merci. Etes-vous d'accord pour dire que les armes et les moyens ainsi

 14   que le matériel à la disposition de ces communautés ethniques avaient été

 15   confisqués immédiatement, et je parle ici également d'entrepôt, de dépôt

 16   d'armes, d'usine de fabrication d'armes, des TO, et cetera. Est-ce que tout

 17   ceci a fait l'objet d'une saisie unilatérale, et ensuite d'une

 18   redistribution ?

 19   R.  Oui, Monsieur Karadzic, mais pas uniquement cela. Ils ont même reçu des

 20   armes y compris les armes lourdes et des missiles venant de l'étranger.

 21   Je voudrais d'ailleurs attirer votre attention, Monsieur le

 22   Président, Madame, Messieurs les Juges, sur l'affaire Kikas. Kikas en fait,

 23   il s'agit d'un avion gros porteur transport de troupes, qui a dû atterri à

 24   Zagreb. Cet avion appartenait à la JNA et avait décollé de Uganda avec une

 25   cargaison importante d'armes. Puis il y a eu l'affaire Cazmatrans, le

 26   général Martin Spegelj a fait l'objet d'un procès et a été condamné pour

 27   importation illicite d'armes venant de Hongrie. Il y avait également des

 28   moyens de la TO qui étaient à leur disposition ainsi que le matériel de la


Page 26028

  1   JNA qui était stocké dans des entrepôts. En plus, ils ont obtenu des armes

  2   de l'étranger.

  3   Q.  Merci, Général. Etant donné que tout ceci a été connu du grand

  4   public, est-ce que vous êtes d'accord pour dire que les Serbes étaient

  5   particulièrement déçus et mécontents du fait que la JNA avait adopté une

  6   position de neutralité alors que les Serbes s'attendaient à ce que l'état

  7   yougoslave et ses institution protège notre droit de rester au sein de la

  8   Yougoslavie ?

  9   R.  Monsieur Karadzic, ce n'était pas uniquement la classe politique

 10   qui a été déçu, je crois que le peuple serbe dans son ensemble a été déçu

 11   en Bosnie-Herzégovine.

 12   Q.  Merci. Alors est-ce que nous sommes d'accord pour dire que le

 13   peuple serbe a tenu rigueur pendant une très longue période à la JNA, et

 14   lorsque la JNA s'est retirée, le peuple serbe disposait immédiatement d'une

 15   armée alors que les autres communautés ont peu à peu constitué leur propre

 16   armée en utilisant certains moyens, certains effectifs de cette même JNA ?

 17   R.  Il y a plusieurs questions dans ce que vous venez de dire,

 18   Monsieur Karadzic. Alors, tout d'abord, oui, effectivement les gens étaient

 19   très en colère, et en tant qu'officier, c'était très difficile d'être en

 20   contact avec la population de manière générale, on disait mais qu'est-ce

 21   que vous faites ? Nous allons être tués si vous retirez vos troupes et vos

 22   moyens ?

 23   Deuxièmement, des armes n'ont pas uniquement été obtenues dans les

 24   stocks de la JNA, parce que la JNA a retiré ses armes dans une grande

 25   mesure. Ils se sont retirés du territoire de la Bosnie-Herzégovine, quand

 26   je parle de ils au pluriel je parle donc des différentes structures de la

 27   JNA, qui se sont retirées de Bosnie-Herzégovine avec leurs armes. Mais de

 28   nombreuses armes sont arrivées de Slovénie et de Croatie, ça c'est un fait.


Page 26029

  1   La plupart des armes ont été obtenues dans les stocks de la Défense

  2   territoriale.

  3   Q.  Merci. Maintenant je voudrais vous poser la question suivante :

  4   Lorsque la JNA a transféré ces réserves d'armes et d'artillerie, dans les

  5   zones serbes, est-ce qu'ils souhaitaient armer les Serbes ou est-ce qu'ils

  6   voulaient simplement s'assurer qu'ils pouvaient se défendre en cas

  7   d'attaque ? Est-ce qu'ils voulaient empêcher que le matériel soit pris

  8   puisqu'il était stocké sur des territoires où les personnes n'étaient plus

  9   maintenant des sympathisants de la JNA ? Est-ce qu'ils ont agi de cette

 10   manière pour leur propre survie ou pour la survie des populations serbes

 11   locales ?

 12   R.  Je pense que c'était à leur propre survie, Monsieur Karadzic. Sur

 13   le territoire qui était sous le contrôle des Serbes, ce territoire était en

 14   fait le territoire le plus sûr pour ce qui est de ces armes et ces moyens.

 15   Q.  Merci. Au moment où la VRS a été constituée, notre loi fait

 16   référence à une organisation assez inhabituelle puisque en fait l'état-

 17   major général a été appelé état-major principal; est-ce que  vous êtes

 18   d'accord pour dire qu'il s'agissait d'une appellation assez inhabituelle,

 19   et pourquoi ?

 20   R.  Toutes les armées du monde ont l'habitude de parler de chef de

 21   l'état-major général. Je crois que cette remarque vaut aussi bien pour

 22   l'ouest que pour l'est.

 23   Donc cette appellation, c'est-à-dire commandant de l'état-major principal,

 24   est un petit peu inhabituel, mais elle se justifie pour des raisons

 25   historiques et pour des raisons structurelles. Alors les raisons

 26   structurelles sont les suivantes. Il existait un autre région militaire à

 27   Sarajevo, et cette autre région militaire était dirigée par M. Ratko Mladic

 28   avec l'accord en tout cas probable du président de la RSFY. Donc c'est le


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  1   commandant qui dirigeait cette région militaire, et dans tout le territoire

  2   de la RSFY il y avait des commandants pour les différents territoires

  3   concernés t pas des chefs d'états-majors généraux.

  4   Q.  Merci. Est-ce que selon vous les forces armées étaient une organisation

  5   complexe, et le commandant suprême des forces armées était le président de

  6   la république ex officio, les forces armées n'étant réellement unifiées

  7   qu'en conditions de guerre ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Merci. Donc est-ce que nous sommes d'accord vous et moi sur le fait que

 10   c'est soit le commandant soit le chef de l'état-major qui commande l'armée

 11   en tant que l'une des composantes des forces armées, et que la police qui

 12   est sous les ordres du ministère de l'Intérieur et qui est intégré aux

 13   forces armées dans certaines circonstances est commandée par son

 14   commandant, le commandant de la police ? Qu'en temps de guerre au niveau

 15   stratégique, donc si la guerre est déclarée, c'est le président qui joue le

 16   rôle de commandant suprême des forces armées réunies.

 17   R.  Excusez-moi, Monsieur Karadzic. Est-ce que votre question porte sur une

 18   situation de guerre ou sur un état de guerre ?

 19   Q.  Parler d'état de guerre serait sans doute plus adapté, plus exact.

 20   R.  Ah, ah. Donc, lorsque l'état de guerre a été décrété, les commandants

 21   de toutes les composantes des forces armées dans le pays, c'est-à-dire les

 22   commandants de l'armée ainsi que de la police, sont concernés, et qu'il y

 23   ait état de guerre décrété ou pas, le commandant suprême garde le rôle qui

 24   est le sien, et ce rôle consiste à exercer un commandement sur l'armée, ce

 25   rôle de commandement de l'armée, le président le joue aussi bien en temps

 26   de guerre qu'en temps de paix.

 27   Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, vous pouvez lire

 28   l'ensemble de responsabilité qui incombe au président dans le texte des


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  1   décrets.

  2   Q.  Merci. Donc nous sommes d'accord que lorsque vous avez parlé des

  3   responsabilités du président de la république, le président de la

  4   république peut exercer un commandement stratégique. Le président de la

  5   république ne peut pas avoir un rôle direct sur l'armée sans passer par

  6   l'état-major principal et par ces commandants toutefois.

  7   M. TIEGER : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président. Est-ce

  8   que, dans cette question, on demande au témoin d'interpréter le texte de

  9   loi ou les principes qui sous-tendent la loi, ou est-ce qu'on demande au

 10   témoin quelles sont les possibilités et les réalités de facto quant à ce

 11   que le président peut ou doit faire ?

 12   [La Chambre de première instance se concerte]

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] La Chambre estime que la question peut

 14   être posée, et que le cas échéant, vous pouvez la reprendre dans vos

 15   questions supplémentaires, Monsieur Tieger.

 16   M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, je comprends, mais je

 17   tiens tout de même à faire remarquer que l'accusé vient de consacrer 45

 18   minutes, si non davantage, à obtenir des éléments de preuve susceptibles de

 19   l'aider dans l'objectif qui est le sien. Mais qui ne sont pas liés à

 20   l'interrogatoire principal. Or l'Accusation sera donc dans ces conditions

 21   contraintes de procéder à ce qui finalement reviendra à un contre-

 22   interrogatoire et je ne pense pas que nous ayons pu prévoir ce fait avant

 23   l'audience d'aujourd'hui. C'est la raison pour laquelle je me lève pour

 24   demander des précisions pendant le contre-interrogatoire de façon à

 25   minimiser au maximum l'incidence que ce problème pourra avoir sur

 26   l'Accusation.

 27   [La Chambre de première instance se concerte]

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez procéder, Monsieur Karadzic.


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  1   Mais, tout de même, Général, pouvez-vous répondre à la question qui

  2   consistait à vous demander si le président de la république ne pouvait pas

  3   exercer un contrôle direct sur l'armée sans passer au préalable par l'état-

  4   major principal et ces commandants ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est comme cela que les choses se

  6   faisaient. Bien sûr, Monsieur le Président.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc, de façon générale, il pouvait

  8   donner des ordres ou, en tout cas, superviser et contrôler l'armée par le

  9   biais de l'état-major principal, mais est-ce qu'il pouvait donner des

 10   ordres au commandant d'un corps, par exemple, il pouvait le faire ou pas ?

 11   Le commandant du Corps de la Drina ou le commandant du corps lié à une

 12   autre zone de responsabilité en Bosnie orientale, par exemple, est-ce que

 13   c'était une possibilité qu'il lui donne des ordres ou pas ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, vous avez parlé du

 15   président comme étant un général - mais ce n'était pas le cas - excusez-

 16   moi, d'avoir appelé votre attention sur ce point. Mais, si le président

 17   contactait les commandants d'un corps d'armée, il n'outrepassait pas les

 18   dispositions de la loi. Car telles étaient bien ses prérogatives. Mais le

 19   commandant d'un corps d'armée avait la responsabilité d'informer le

 20   commandant de l'état-major principal du fait que le président avait pris

 21   contact avec lui et des raisons pour lesquelles ce contact avait lieu. Par

 22   exemple, si le président m'avait contacté en tant que commandant suprême,

 23   il ne l'a pas fait, mais s'il l'avait fait il m'aurait dit quelque chose

 24   dont j'aurais rendu compte, que j'aurais rapporté au commandant de l'état-

 25   major principal de la VRS, le général Mladic, j'aurais donc informé le

 26   général Mladic de ce qui s'était passé.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Veuillez poursuivre, Monsieur

 28   Karadzic.


Page 26033

  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous remercie.

  2   M. KARADZIC : [interprétation]

  3   Q.  Donc M. Tieger est également satisfait, je vais vous poser une question

  4   concrète.

  5   Est-ce que vous avez remarqué que j'aurais été mécontent du niveau de

  6   contrôle ou d'influence que j'exerçais sur l'armée dans le respect de la

  7   légalité ?

  8    R.  Mais, Monsieur Karadzic, je ne suis pas sûr de bien comprendre votre

  9   question, parce que le contrôle peut s'exercer de diverses façons, le

 10   ministère de la Défense, par exemple, effectue des inspections qui sont une

 11   forme de contrôle, à l'intérieur de l'armée, il existe des contrôles de

 12   l'aptitude au combat.

 13   Donc ne m'en veuillez pas, je vous prie, mais je n'ai pas très bien compris

 14   votre question.

 15   Q.  Je vais être encore plus concret. Est-ce que nous pouvons convenir vous

 16   et moi, qu'il existait des suspicions de part et d'autre qui étaient des

 17   suspicions idéologiques, aussi bien au sein de la société civile avec la

 18   création des nouveaux partis politiques qu'au niveau des officiers membres

 19   des divers commandements ? Est-ce que vous êtes d'accord qu'il y avait de

 20   part et d'autres certaines personnes qui nourrissaient des soupçons, des

 21   suspicions ?

 22   R.  Oui, c'est exact. D'ailleurs je ne parlerais pas uniquement de soupçon

 23   ou de suspicion, je dirais même des divergences.

 24   Q.  Merci. Est-il exact qu'il y avait aussi des tensions entre le pouvoir

 25   civil et en particulier entre moi et l'état-major général, pour diverses

 26   raisons ? L'une des raisons étant si l'on prend mon exemple personnel, que

 27   je reprochais à l'armée de retirer trop de personnes de l'économie réelle,

 28   et que dans ces conditions l'économie réelle, les entreprises ne pouvaient


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  1   plus fonctionner correctement ?

  2   R.  Oui, ça, c'était un reproche que vous faisiez très souvent à l'armée.

  3   Vous disiez à l'armée qu'elle avait des exigences mégalomanes et que vous

  4   me demandiez à moi en particulier de suivre cela de près.

  5   Q.  Merci. Est-il exact que j'ai essayé d'exercer une influence plus grande

  6   sur l'armée que ce soit par le biais du ministère ou directement, mais que

  7   je ne croyais pas tout savoir et que je ne pensais pas que je pouvais tout

  8   contrôler ou plus précisément je vous demande si j'aurais fait un effort

  9   pour exercer un contrôle plus important et que je n'aurais pas réussi dans

 10   cette tentative ?

 11   R.  Je pense qu'on peut citer plusieurs exemples de tentatives de ce genre

 12   de votre part, Monsieur le Président, mais il vous arrivait de ne pas

 13   réussir ce que vous essayiez.

 14   Q.  Merci. Est-il vrai que j'ai essayé de transformer l'état-major

 15   principal en état-major général, et que j'ai essayé de remplacer le numéro

 16   1 pour qu'il soit nommé par l'assemblée -- mais que je n'ai pas réussi

 17   parce que le numéro 1 était nommé par l'assemblée et ne pouvait être

 18   remplacé à son poste que par l'assemblée ?

 19   R.  Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, indirectement j'ai

 20   découvert que le président souhaitait remplacer M. Mladic à son poste, en

 21   1993. Mais j'ai été personnellement le témoin du fait que le président a

 22   mis en place une espèce de Conseil de la défense et qu'il a nommé le

 23   général Mladic au poste de numéro 1 de ce conseil, et à l'état-major

 24   principal de la VRS, nous avons considéré que cette nomination en tant que

 25   numéro 1 du conseil était en fait un licenciement, un limogeage. Donc le

 26   président a limogé Mladic le 4 août 1995, et pour notre part, nous nous

 27   sommes réunis en état-major principal complet de la VRS pratiquement tous

 28   les membres de l'état-major principal assistaient à cette réunion, c'était


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  1   le 6 ou le 8 août, excusez-moi, j'avais dit juillet pour commencer mais

  2   c'était au mois d'août, donc le 6 ou le 8 août, plusieurs jours après ce

  3   limogeage.

  4   Q.  Est-ce que vous pouvez dire aux Juges de la Chambre dans quelle

  5   condition fonctionne cet état-major principal complet par rapport à une

  6   décision venant de moi ?

  7   R.  Etant donné que nous connaissions très bien les dispositions légales

  8   relatives à cette problématique, nous avons écrit une lettre dans laquelle

  9   nous proposions à l'assemblée nationale de la Republika Srpska de ne pas

 10   accepter le limogeage du général Mladic, car nous, nous proposions qu'il

 11   reste le commandant de l'état-major principal de l'armée de la Republika

 12   Srpska. mais nous étions conscients du fait qu'à cette époque-là, le

 13   président n'avait même pas compétence pour limoger le général Mladic,

 14   c'est-à-dire pour lui donner d'autres responsabilités dans un autre organe,

 15   ce que nous, nous considérions comme un limogeage. Nous étions tout à fait

 16   conscients du fait que c'est le 12 mai 1992 que l'assemblée nationale de la

 17   Republika Srpska avait nommé Ratko Mladic au poste de commandant de l'état-

 18   major principal.

 19   Q.  [aucune interprétation]

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] A la page précédente du compte rendu

 21   d'audience, lignes 16 à 18, il s'agit d'une de vos questions, je me demande

 22   s'il s'agit d'un problème de traduction ou si ce qui est consigné est bien

 23   exact. Voilà la question que vous avez posée, d'après le compte rendu

 24   d'audience :

 25   "Est-il vrai que je ne pouvais pas transformer l'état-major général en

 26   état-major principal …"

 27   Est-ce bien ce que vous avez demandé ? Je pense que c'est le contraire,

 28   n'est-ce pas ?


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  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, oui, tout à fait, c'est le contraire.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Une petite seconde.

  3   [La Chambre de première instance se concerte]

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Karadzic, poursuivez, je

  5   vous prie.

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors, entre-temps, je m'interrogeais,

  8   me demander si vous pourriez essayer de mettre un terme à votre contre-

  9   interrogatoire, à la fin de ce volet d'audience.

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Donc je n'ai plus qu'une demi-heure?

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, une demi-heure à compter de

 12   maintenant. 

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que c'est le temps total qui m'a été

 14   imparti ?

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, non, vous auriez encore 25 minutes

 16   pendant le prochain volet d'audience. Mais je m'interrogeais juste sur

 17   cette éventualité. Je me demandais si cela avait été possible.

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ecoutez, Madame, Messieurs les Juges, je

 19   souhaiterais plutôt utiliser tout le temps qui m'a été imparti, parce qu'il

 20   est très, très rare que nous ayons une personne telle que ce témoin qui

 21   connaît si bien de l'intérieur la structure de la VRS, la structure du

 22   personnel de la VRS. Mais, bon, je vais donc aller très, très vite en

 23   besogne.

 24   M. KARADZIC : [interprétation]

 25   Q.  Général, est-ce que nous pourrions, je vous prie, examiner le document

 26   1D5168 ? Je pense qu'il a déjà été versé au dossier.

 27   Est-ce que il s'agit d'un document que vous avez rédigé, et signé qui a été

 28   envoyé à l'assemblée nationale, ainsi qu'au président de la république. Il


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  1   s'agit de ma tentative pour renommer en quelque sorte l'état-major général

  2   et le convertir en état-major principal, et pour faire en sorte que Mladic

  3   participe à la vie politique. Il s'agissait de le nommer chef du conseil,

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pages 2 et 3, je vous prie pour que nous

  5   puissions voir les signatures.

  6   M. KARADZIC : [interprétation 

  7   Q.  Général, dites-nous, quand vous serez prêt pour que nous puissions

  8   afficher la page numéro 3.

  9   R.  J'ai déjà la page 3 devant moi.

 10   Q.  Alors est-ce qu'il s'agissait d'une pétition, d'une lettre envoyée à

 11   l'assemblée, lettre par laquelle vous exprimiez votre soutien mutuel et que

 12   vous aviez indiqué à quel point vous étiez loyal les uns aux autres et que

 13   ma décision en fait ne devait pas être mise en œuvre ?

 14   R.  Ecoutez, Monsieur Karadzic, nous -- vous pouvez l'appeler une pétition,

 15   une lettre, une décision. L'essentiel c'était que nous recommandions en

 16   fait à l'assemblée aux députés plutôt de l'assemblée de la Republika Srpska

 17   de faire fi de votre décision, de ne pas en tenir compte.

 18   Q.  Merci. Est-ce que vous convenez pour dire que vous étiez tous prêts à

 19   monter sur les barricades en quelque sorte car Mladic venait à être

 20   remplacé ? Vous avez tous déclaré que vous quitteriez l'état-major

 21   principal mais que vous resteriez pour défendre la république, et qu'en

 22   fait de ce fait je me serais retrouvé sans état-major principal.

 23   R.  Tout à fait.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Si ce document n'a jamais été versé j'aimerais

 25   qu'il soit versé au dossier.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il me semble que ce document a été versé

 27   au dossier lorsque le général Milovanovic est venu déposer. Il me semble

 28   avoir déjà vu ce document, je m'en souviens.


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  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, j'étais convaincu qu'il avait déjà été

  2   versé au dossier ce document --

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bon, poursuivons, et de toute façon,

  4   nous réglerons ce problème, et s'il n'a pas été versé, nous le verserons au

  5   dossier.

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  7   M. KARADZIC : [interprétation]

  8   Q.  Convenez-vous que la VRS n'avait que -- ne disposait que de 2 000

  9   officiers de métier pour quelque 109 000 ou 210 000 soldats ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Merci. Est-il exact que les 209 000 soldats en question n'étaient pas

 12   des soldats de métier, il s'agissait d'une armée populaire composée de

 13   réservistes, de recrues, bon, certains d'ailleurs n'avaient jamais effectué

 14   leur service militaire ?

 15   R.  Oui. Oui. Il s'agissait essentiellement de réservistes. Il avait 14 000

 16   sous officiers de réserve et il y avait 7 000 officiers de réserve. Les

 17   autres étaient des conscrits. Monsieur Karadzic, nous avions très, très peu

 18   de recrues, car le contingent ou la somme totale -- du nombre total plutôt

 19   de recrues s'élevait à quelque 6 000. Pour ce qui est de la structure

 20   sociale de l'armée, à proprement parler, je vous dirais que la plupart de

 21   ces hommes étaient des agriculteurs ou des travailleurs. Cela était ou

 22   représentait une lourde charge, un lourd fardeau pour l'armée, parce que

 23   ces gens, en fait, ils avaient leurs métiers ils travaillaient la terre,

 24   ils voulaient justement travailler pour faire survivre leurs familles.

 25   C'est la raison pour laquelle ils essayaient très fréquemment d'éviter de

 26   faire partie de l'armée et d'exécuter des tâches militaires. Il faut savoir

 27   quand même que le professionnalisme et l'enseignement au sein de nos rangs

 28   militaires était un problème.


Page 26039

  1   Q.  Merci. Nous allons voir un autre document que vous avez rédigé.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, je viens d'être

  3   informé que cette lettre, la lettre du général destinée à l'assemblée,

  4   avait été versée au dossier sous la cote D2159.

  5   M. TIEGER : [interprétation] C'est justement pour cela que je voulais

  6   intervenir, Monsieur le Président.

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

  8   M. KARADZIC : [interprétation]

  9   Q.  Convenez-vous que, lorsque l'on pense à ce type de structure, à savoir

 10   cette structure composée de personnes qui travaillaient ou qui étaient des

 11   fermiers créait des problèmes pour ce qui était du commandement et du

 12   contrôle, parce que ces personnes n'étaient absolument pas préparés à

 13   défendre quoi que ce soit hormis leur terre et leurs villages ? En d'autres

 14   termes, il était, par exemple, impossible d'effecteur une manœuvre.

 15   R.  Oui, c'est exact.

 16   Q.  Est-ce que nous pourrions avoir le document 1D5155 ? Malheureusement,

 17   nous n'avons qu'une traduction de votre texte, il s'agit de la VRS du mois

 18   de mai 1992, et justement vous vous intéressez à cette question de couches

 19   sociales ou de la structure de la VRS. Est-ce que c'est vous qui avez

 20   rédigé cet article ?

 21   R.  Ça c'est différent, non, non.

 22   Q.  Moi, je souhaitais demander l'affichage du document 1D5166.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Voilà, il s'agit bien du document, dans

 24   votre liste de document je vois un document intitulé : "Notes de M.

 25   Skrbic."

 26   1D5170. Est-ce c'est ce que vous aviez dit, Monsieur Karadzic ?

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] 1D5165.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.


Page 26040

  1   M. KARADZIC : [interprétation]

  2   Q.  Avez-vous rédigé ce texte ? Pouvons-nous afficher la deuxième page, et

  3   je vais vous donner lecture du passage en anglais qui s'intéresse à cette

  4   question. Est-ce que c'est vous qui avez rédigé cet article à l'occasion du

  5   deuxième anniversaire de l'existence du Corps de la Krajina ?

  6   R.  Ecoutez, excusez-moi, mais je n'ai pas le texte en B/C/S.

  7   Q.  Mais est-ce que c'est vous qui l'avez rédigé ? Je vais vous donner

  8   lecture et peut-être que vous reconnaîtrez si c'est vous qui l'avez écrit,

  9   c'est ce qui est encadré :

 10   "La structure sociale des combattants a été différente en fonction des

 11   différentes étapes de la création du corps, mais il s'agit essentiellement

 12   de travailleurs et d'agriculteurs. Ces derniers, en fait, peuvent poser un

 13   problème moral lorsque l'on pense à la partie de la population qui se voie

 14   attribuer les tâches les plus difficiles, et qui sont, en fait, les devoirs

 15   militaires qui doivent être effectués sur la ligne de front, et cela pose

 16   un problème quant à l'équité de la situation, un problème moral."

 17   R.  Ecoutez, si nous avions la version serbe, je serais extrêmement

 18   reconnaissant si quelqu'un pouvait nous fournir la version serbe.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Monsieur Tieger. Il a été indiqué

 20   que cela avait été publié le 9 mai 1994, dans "Srpska Vojska," mais je ne

 21   sais pas si M. Karadzic a besoin de ceci pour poser sa question au témoin.

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ecoutez, Monsieur le Président, je souhaitais

 23   entendre l'observation du témoin, parce que c'est un texte qui est truffé

 24   d'analyses, d'excellentes analyses quant à la véritable nature de cette

 25   armée. Cela aidera la Chambre à faire la différence entre ce type d'armée

 26   et une armée professionnelle où il est très facile d'établir le

 27   commandement et le contrôle.

 28   M. KARADZIC : [interprétation]


Page 26041

  1   Q.  Est-ce que c'est vous qui avez rédigé ce texte, et est-ce que cela

  2   correspond à ce que vous avez écrit ?

  3   R.  Oui, Monsieur Karadzic. J'étais sur le point de commencer à répondre.

  4   Il s'agit effectivement de mon tex publié le 9 mai 1994 dans "Srpska

  5   Vojska." J'ai retrouvé le paragraphe à propos de la structure sociale des

  6   combattants dans le cadre de l'établissement ou de la création du 2e Corps

  7   de la Krajina. Toutefois, bon, c'est quelque chose qui caractérisait toute

  8   la VRS la structure sociale.

  9   Q.  [aucune interprétation]

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que ce texte pourrait être versé au

 11   dossier ?

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 13   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D2191.

 14   L'ACCUSÉ : [aucune interprétation]

 15   M. KARADZIC : [interprétation]

 16   Q.  Alors, nous allons nous intéresser à ceci. Est-il exact, Général -- ou

 17   plutôt, est-ce que nos tribunaux militaires ont travaillé pendant toute la

 18   guerre, et est-ce qu'ils bénéficiaient, ou est-ce qu'il y avait

 19   indépendance dans le cadre de leur travail, je pense, toute influence

 20   qu'aurait pu être exercée par des commandements ou des autorités ? C'est-à-

 21   dire que savez-vous à ce sujet ?

 22   R.  Cela est tout à fait exact.

 23   Q.  Merci. Convenez-vous que nos documents tel que le document relatif à la

 24   Loi sur les forces armées, à la Loi relative à la Défense, et d'autres

 25   d'ailleurs tiennent absolument et de façon intégrale de réglementations

 26   relevant des conventions de Genève, des lois et coutumes de la guerre, et

 27   d'autres documents juridiques de ce type ?

 28   R.  Oui, et d'aucuns peuvent voir très, très, très clairement cela, lorsque


Page 26042

  1   les documents que vous venez d'énumérer sont analysée.

  2   Q.  Voilà ce que j'aimerais savoir maintenant : Est-ce que vous avez été

  3   informé ? Ne serait-ce qu'une seule fois d'une affaire ou d'un cas plutôt

  4   ou une unité avait reçu un ordre qui équivalait à la commission d'un crime,

  5   savez-vous si cet ordre n'a jamais été exécuté et si ensuite l'état-major

  6   principal ou d'autres militaires auraient en fait dissimulé ce qui s'est

  7   passé ?

  8   R.  Non, je n'ai absolument aucune connaissance personnelle de ce type de

  9   document.

 10   Q.  Mais je pense à notre armée, je pense à nos structures de commandement,

 11   est-ce que la commission de crimes était encouragée -- ou plutôt, est-ce

 12   qu'il était indiqué, ou est-ce que les documents étaient absolument contre

 13   s'érigeait contre la commission de tout crime ?

 14   R.  Les documents montrent que la VRS ainsi que l'Etat d'ailleurs

 15   insistaient fréquemment sur l'importance du respect des conventions de

 16   Genève et de ces annexes, d'ailleurs, ainsi l'importance du respect des

 17   lois de la guerre.

 18   Q.  Merci, Général. Mais est-ce que vous n'avez jamais été -- ou est-ce que

 19   vous pourriez imaginer nos commandements se taire ou dissimuler un ordre,

 20   par exemple, où il aurait été donné l'ordre de violer ?

 21   R.  Ecoutez, Madame, Messieurs les Juges, tout cela est absolument

 22   hypothétique. Toutefois, je présume que, sur les 2 000 officiers de métier

 23   dont nous disposions, personne n'aurait donné ce type d'ordre. Il n'est pas

 24   facile de l'affirmer de façon absolument catégorique, parce que vous ne

 25   savez jamais quel est le type de personnes surtout lorsqu'il s'agit de viol

 26   parce que c'était votre question.

 27   Q.  Merci, Général. Mais je ne vous posais pas une question à propos de

 28   personnes individuelles mais je voulais parler de certaines unités. Ce que


Page 26043

  1   je voulais savoir si certaines unités auraient approuvé ce type de

  2   comportement ou aurait dissimulé ce type de comportement ? Je pense, par

  3   exemple, à des viols organisés.

  4   R.  Non, non, Monsieur Karadzic. Cela n'était pas possible.

  5   Q.  Donc il a été fait référence à votre visite du 14 juillet 1995, et vous

  6   avez avec vous des documents où l'on trouve ce type de référence. Mais est-

  7   ce que vous vous souvenez qu'à l'occasion de cette visite, j'ai signé ces

  8   documents sans les lire ? Je faisais véritablement confiance aux services

  9   professionnels qui relevaient de l'état-major principal.

 10   R.  Oui. Je pense que vous les avez signés immédiatement.

 11   Q.  Merci. Ecoutez, je ne suis pas soldat de métier, mais d'après les

 12   informations dont vous disposiez, est-ce que, moi, je faisais confiance à

 13   ces services professionnels justement, et est-il exact que je n'ai jamais

 14   vérifié ce qui me présentait, et d'ailleurs je n'avais pas non plus --

 15   enfin, je n'avais absolument aucun doute à propos de leur comportement

 16   professionnel ?

 17   R.  Pour ce qui est de mon domaine, je vais vous dire qu'effectivement vous

 18   n'avez jamais exprimé le moindre sentiment de méfiance pour ce qui est du

 19   domaine dans lequel je travaillais.

 20   Q.  Merci. Convenez-vous donc qu'il s'agissait bien de votre opinion

 21   lorsqu'il est indiqué que je ne souhaitais pas entièrement aider l'armée,

 22   que je souhaitais imposer des restrictions, que je souhaitais limiter la

 23   portée des activités de l'armée, et qu'en ce sens, j'ai quand même été un

 24   obstacle pour l'armée lorsque l'on pense, par exemple, à son attitude au

 25   combat, à sa préparation au combat ? Est-ce que vous pensez que les

 26   autorités civiles, et moi-même, en particulier, vous ont imposé des

 27   restrictions essentiellement du fait des négociations auxquelles je

 28   participais mais pour d'autre raison également ?


Page 26044

  1   R.  Alors, vous mentionnez certaines catégories dans votre question,

  2   Monsieur Karadzic, mais j'aimerais attirer votre attention sur le fait que

  3   vous aviez exprimé vos objections quant à la discipline au sein de l'armée.

  4   Q.  Merci.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pourriez-vous être un peu plus précis ?

  6   Je ne pense pas vous saisir absolument. Vous êtes d'accord -- vous avez

  7   marqué votre accord avec M. Karadzic, et puis vous avez ajouté que M.

  8   Karadzic avait des objections quant à la discipline au sein de l'armée.

  9   C'est bien cela, et qu'entendez-vous alors, Général ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, écoutez, je vais

 11   paraphraser ce qu'avait dit le président de l'époque, M. Karadzic. Voilà ce

 12   qu'il a dit en présence du général Mladic alors que, moi, j'étais également

 13   présent, voilà ce qu'il a dit, Général, comment est-ce que vous pouvez

 14   avoir une armée indisciplinée ? C'est quelque chose que je vous reproche.

 15   Alors j'ai posé la question au général Mladic qui m'a dit, Est-ce que je

 16   peux répondre à la question du président ? Le général Mladic a dit :

 17   Ecoutez, allez-y. Moi, j'ai dit : M. le Président, l'armée ne dispose que

 18   de 2 000 soldats de métier, mais il y a quelque 209 000 hommes, si vous

 19   comparez cela à la police qui dispose de 9 000 hommes, vous pouvez établir

 20   -- vous pouvez mettre les choses en parallèle, et à la [inaudible] de la

 21   police, au sien de la police, il s'agit tous de professionnels. Moi, je ne

 22   me souviens pas ce qu'avait répondu le président mais voilà ce qu'il avait

 23   dit en fait --

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Moi, ce que je voulais savoir c'était de

 25   que vous entendiez lorsque vous avez dit que Karadzic avait des objections

 26   quant à la discipline au sein de l'armée, qu'entendez-vous par cela ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui. Mais cela signifie qu'à un certain

 28   niveau, les ordres n'étaient pas respectés. Alors je ne sais pas à quel


Page 26045

  1   ordre ou à quels ordres pensait le président, mais nous avions l'impression

  2   qu'il y avait une certaine hiérarchie, une certaine discipline. Excusez-

  3   moi, puis-je poursuivre ?

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, je vous en prie.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] J'avais l'impression qu'il y avait une

  6   hiérarchie, qu'il y avait une discipline au sein du corps, mais que pour ce

  7   qui est était des 20 subalternes, ils n'avaient pas cette discipline. Puis

  8   il y avait d'autres défaillances, il y avait d'autres lacunes auxquelles je

  9   fais référence dans mon article. Dans une certaine mesure, nous étions

 10   d'accord avec l'évaluation du président, nous étions d'accord avec ce qui

 11   avait dit, nous voulions nous, tout simplement dire au président ou

 12   expliquer au président quelles étaient les raisons de cette situation.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie. C'est maintenant

 14   beaucoup plus clair pour moi.

 15   Monsieur Karadzic.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 17   M. KARADZIC : [interprétation]

 18   Q.  Général, est-ce qu'il y avait, est-ce qu'il y a eu d'autres occasions

 19   où vous avez exprimé votre avis qui était contraire au mien, en des termes

 20   clairs et catégoriques, et est-ce que vous pensiez que cela pouvait être

 21   fait sans qu'il y ait des conséquences, parce que vous avez dit, il y a une

 22   minute, que vous ne vous souvenez pas de ce que j'avais répondu ? Donc, si

 23   j'avais répondu d'une façon désagréable, par exemple, je suppose que vous

 24   en serez souvenu, n'est-ce pas ?

 25   R.  Oui, probablement.

 26   Q.  Alors est-ce que vous pouvez nous dire s'il était possible de me parler

 27   de façon ouverte, sans pour autant en subir les conséquences ?

 28   R.  Oui, oui c'est exact. Je vous ai parlé de façon très ouverte, très


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  1   franche, et je n'ai jamais souffert des conséquences.

  2   Q.  A la ligne 14, lorsque vous êtes venu me trouver, est-ce que vous vous

  3   souveniez l'heure à laquelle sont venues les autorités civiles de

  4   Srebrenica et de Bratunac ? Ils étaient venus dans mon bureau; est-ce que

  5   vous vous souvenez si elles sont venues après vous, avant vous ? Est-ce que

  6   vous vous souvenez à quelle heure elles sont venues ?

  7   R.  Monsieur Karadzic, le document de votre secrétaire aurait pu me

  8   rappeler le temps, sans le document je ne m'en serais pas souvenu en fait.

  9   Mais le document en question, il est indiqué que je vous ai vu de 12 heures

 10   15 à 12 heures 36, le 14 juillet.

 11   Q.  Merci. Après cela, les autorités ou les représentants des autorités

 12   civiles sont arrivés; est-ce que vous êtes pour dire que c'est la raison

 13   pour laquelle je n'ai pas pu vous informer du fait que j'allais déclarer

 14   l'état de guerre dans cette zone, parce que je n'avais pas d'information, à

 15   ce moment-là, suivant lesquelles il y avait une telle concentration de

 16   forces dans les bois. Il s'agissait de la 28 Division en fait, ou des

 17   forces de la 28e Division.

 18   R.  Bien sûr que vous ne m'avez rien dit à propos de votre intention de

 19   déclaration de l'état de guerre.

 20   Q.  Mais, à ce moment-là, au moment de la réunion, est-ce que quoi que ce

 21   soit a été dit à propos des prisonniers de guerre ou des crimes de guerre ?

 22   Est-ce que ce type de thème a été débattu par exemple ?

 23   R.  Non, Monsieur Karadzic.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, je vois l'heure, je me

 25   demandais quand est-ce que vous envisagez de faire la pause ? 

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est le moment de faire la pause.

 27   Mais est-il vrai que vous avez rencontré M. Deronjic ou quelqu'un d'autre

 28   de Srebrenica, à la fin ou après votre réunion avec M. Karadzic ?


Page 26047

  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, Monsieur le Président. Je ne connaissais

  2   pas cette personne.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ou alors est-ce que vous avez vu une

  4   délégation de Srebrenica ou une délégation de cette zone ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, moi, j'ai tiré une

  6   conclusion ou des conclusions après avoir consulté le document de la

  7   secrétaire de M. Karadzic. Je suppose que vous avez lu le document.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, oui, j'ai le document, je vois.

  9   Mais il est indiqué que vous avez eu une réunion, enfin votre réunion s'est

 10   terminée à 12 heures 35. Il y avait une réunion à 12 heures 45, donc je

 11   m'interrogeais, je me demandais si vous auriez peut-être vu l'un ou l'autre

 12   membre de ces délégations.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, c'est une possibilité,

 14   il y avait des personnes qui étaient assises, à la réception, là où se

 15   trouvait la secrétaire. Mais je ne leur avais pas véritablement accordé une

 16   grande attention, je n'ai pas parlé avec ces personnes. Moi, je fais ce que

 17   j'avais à faire, et je suis parti.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien.

 19   Nous allons faire une pause d'une demi-heure, et nous reprendrons à 13

 20   heures. Une petite seconde, non, non, nous reprendrons à 13 heures 30. Nous

 21   allons faire une pause d'une heure. Entre-temps, j'aimerais lire une

 22   décision orale.

 23   Eu égard à la demande de l'accusé qui souhaite bénéficier de l'aide de

 24   l'expert de la Défense dans la -- relativement à la déposition du témoin

 25   expert Butler, déposée le 5 mars 2012, demande à laquelle l'Accusation ne

 26   s'oppose pas, la Chambre fait droit à ladite demande au vu de la nature

 27   technique des moyens de preuve qui vont être fournis par M. Butler, et ce,

 28   pour être conforme aux pratiques précédentes de la Chambre. Nous


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  1   reprendrons à 13 heures 30.

  2   --- L'audience est suspendue pour le déjeuner à 12 heures 32.

  3   --- L'audience est reprise à 13 heures 31.

  4    M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, vous pouvez

  5   poursuivre.

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

  7   M. KARADZIC : [interprétation]

  8   Q.  Mon Général, je vais essayer d'être clair et concis pour essayer

  9   d'obtenir des réponses brèves, oui ou non, de votre part, et puis j'espère

 10   que, si on a besoin, on pourra aborder quelqu'un plus tard.

 11   Est-il exact que vous pensiez ou saviez que les autocars envoyés à

 12   Srebrenica étaient nécessaires pour évacuer ceux qui voulaient partir de

 13   leur plein gré, qui voulaient être transférés eux-mêmes quelque part ?

 14   R.  Monsieur Karadzic, ce n'est pas comme cela que je l'ai dit dans ma

 15   déclaration dans l'affaire Popovic. J'ai dit que ces autocars étaient

 16   nécessaires pour évacuer la population.

 17   Q.  Est-ce que vous aviez des informations quant à la possibilité qu'il

 18   s'agissait d'une évacuation forcée, ou bien d'après vous, s'agissait-il

 19   plutôt d'une évacuation qui était prévue dans le texte de loi car il

 20   s'agissait d'évacuer les civils des zones couvertes par les opérations de

 21   guerre ?

 22   M. TIEGER : [interprétation] On a posé trois questions en une question, en

 23   une seule question, et ce n'est pas facile au témoin de répondre.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pouvez-vous répartir votre question en

 25   trois questions séparées ?

 26   M. KARADZIC : [interprétation]

 27   Q.  Mon Général, est-ce que vous aviez une connaissance quelconque qui vous

 28   ferait croire qu'il s'agissait d'une évacuation forcée ?


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  1   R.  Non.

  2   Q.  Est-ce que cela se sous entendait qu'il s'agissait d'une évacuation de

  3   la population qui souhaitait partir, qui souhaitait être évacuée ?

  4   R.  Moi, je ne le savais pas, Monsieur Karadzic.

  5   Q.  Merci. Est-il exact, mon Général, que la directive numéro 7 a été créée

  6   différemment que ce n'était le cas avant, dans le sens où ces directives

  7   étaient créée avec un effort conjoint de tous les officiers, alors que,

  8   cette fois-ci, pour cette directive-ci, vous n'aviez pas pris part à son

  9   élaboration ?

 10   R.  Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, quand j'ai répondu à

 11   des questions semblables avant, à chaque fois, j'ai dit que je répondais

 12   sur la base de connaissances générales que j'aie. En ce qui concerne la

 13   directive numéro 7, je n'ai rien à ajouter par rapport à ce que j'ai dit

 14   dans l'affaire Popovic et consorts, ou bien dans l'entretien que j'ai donné

 15   à M. McCloskey le 12 juillet 2005.

 16   Q.  Merci. Mais j'ai voulu vous entendre à ce sujet, vous, en tant que

 17   témoin, mais nous pouvons poursuivre, et puis vous allez ajouter cela si le

 18   besoin se présente.

 19   Est-il exact qu'une directive c'est une instruction d'ordre général et

 20   stratégique, il ne s'agit pas d'un ordre strict, qu'il s'agit d'exécuter

 21   immédiatement les ordres font suite aux directives, n'est-ce pas ?

 22   R.  Oui. Les directives sont les documents qui donnent des instructions

 23   générales quant à la façon de mener la guerre.

 24   Q.  Si, dans une directive, une instance très haute placée donne l'ordre de

 25   commettre un crime de façon volontaire ou involontaire, est-ce que les

 26   subordonnés ont le droit de refuser ou de mettre en garde cette instance

 27   contre une telle directive ?

 28   R.  Chaque activité qui mène vers un crime suit cette même procédure, à


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  1   savoir on n'est pas obligé de suivre un ordre qui demanderait de vous de

  2   commettre un crime, et je pense que c'est quelque chose qui est aussi écrit

  3   dans cette directive.

  4   Q.  Est-ce que certaines phrases que l'on a vues dans la directive numéro

  5   7, des phrases qui n'étaient pas très claires, est-il exact que ces phrases

  6   n'ont pas été réitérées dans la directive 7/1 que Mladic a envoyé comme

  7   base des ordres à donner ?

  8   R.  Oui. Il y avait des différences entre ces deux directives, et je n'ai

  9   pu les voir que plus tard.

 10   Q.  Est-ce que cela veut dire qu'au moment où ces directives ont été mises

 11   en œuvre vous n'aviez aucune connaissance au sujet de ces directives qu'il

 12   s'agisse de bons ou de mauvais côtés ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Maintenant, je voudrais présenter la pièce 1D5170. Avez-vous pris des

 15   notes suite aux informations de renseignement qui arrivaient à l'état-major

 16   principal ?

 17   R.  Oui. Oui.

 18   Q.  Je vais demander que l'on examine ces notes et je vais demander de me

 19   donner quelques éléments d'information au sujet de cela. Tout d'abord, est-

 20   ce que le document, que l'on voit, correspond à ces notes dont on a parlé

 21   cette fois-ci dactylographiées ?

 22   R.  Oui, Monsieur Karadzic. Ici, on voit mes notes personnelles que j'ai

 23   écrites entre le 18 mars 1995, et à peu près le mois de mai de la même

 24   année. C'est moi qui ai introduit ces notes, et quand on voit 0, ça veut

 25   dire opérationnel, donc il s'agit là d'une compilation des informations de

 26   renseignement que j'ai examinées dont j'ai tenu compte au moment où je me

 27   suis rendu à Crna Rijeka au poste de commandement.

 28   Q.  Donc, ici, il s'agit des notes personnelles que vous auriez pu utiliser


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  1   pour écrire vos mémoires, votre biographie, par exemple, ou bien une étude

  2   ?

  3   R.  Moi, à chaque fois que j'avais une note personnelle, j'écrivais note

  4   personnelle, autrement dit, prim.ps, et ensuite j'ajoutais mes initiales;

  5   le restant des informations est les informations qui ne sont venues par le

  6   service de Renseignements.

  7   Q.  Vu que vous avez l'habitude d'écrire, vous êtes bien au courant de la

  8   façon dont on note les informations pertinentes, parce que vous aimez

  9   participer à l'écriture de certaines encyclopédies ?

 10   R.  Oui, Monsieur Karadzic.

 11   Q.  Le 21 mars 1995, on peut lire que les Musulmans ont acheté 15 roquettes

 12   qui sont arrivées dans les convois de l'aide humanitaire; est-ce exact ?

 13   C'est ce qui est encadré. C'est vraiment en bas.

 14   R.  Mais c'est le 21 janvier 1995.

 15   Q.  Mais après, on parle d'une autre -- la date du 20 mars.

 16   R.  C'est autre chose le 20 mars.

 17   Q.  [aucune interprétation]

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Normalement, il s'agit du 21 mars,

 19   n'est-ce pas ? Voulez-vous voir l'entrée suivante ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est exact, Monsieur le Président.

 21   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] La page suivante en B/C/S, s'il vous plaît. On

 23   voit bien qu'il s'agit de la date du 24 mars.

 24   M. KARADZIC : [interprétation]

 25   Q.  Est-il exact ce qui est exact sous le 24 mars, à savoir au niveau du

 26   poste de contrôle de la police, à Zepa les Musulmans et les Croates se sont

 27   livrés à des combats puisque les Croates ne voulaient laisser passer les

 28   combattants moudjahiddines à Teslic. Car Teslic est-ce vrai a été placé


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  1   sous le contrôle serbe à l'époque ?

  2   R.  Oui, en effet. Teslic était placé sous le contrôle serbe à l'époque.

  3   Q.  Puis, ici, on peut voir que même s'ils étaient en coalition avec les

  4   Musulmans, les Croates ne voulaient pas laisser les Moudjahidines. Quand on

  5   parle des Moudjahidines, est-ce que, d'après vous, il s'agit des

  6   combattants venus de pays arabes ?

  7   R.  Oui, c'est exact, et d'ailleurs, c'était le nom même l'Unité les El

  8   Moudjahidine.

  9   Q.  Maintenant je voudrais voir OP 13 -- la note OP 13.

 10   Q.  [aucune interprétation]

 11   R.  [aucune interprétation]

 12   Q.  Donc le numéro ERN à la fin c'est 340.

 13   Alors c'est vraiment sous le paragraphe numéroté, on peut voir que :

 14   "L'ouest considère que les querelles entre les Serbes vont se

 15   poursuivent jusqu'à ce que certains dirigeants ne soient limogés."

 16   Est-ce que vous êtes d'accord avec moi pour dire qu'aussi bien l'ouest

 17   qu'en Croatie on se réjouissait de ces querelles entre les Serbes ?

 18   R.  Oui, je suis d'accord avec vous.

 19   Q.  Est-il possible de voir maintenant la note 0.17 ? En anglais, le 10

 20   avril, vous avez trouvé des informations, vous dites que :

 21   "L'OTAN fait de la reconnaissance de façon intense dans la zone --

 22   dans les zones protégées, recueille des informations concernant les cibles

 23   serbes pour procéder au bombardement éventuellement."

 24   Est-ce que vous êtes d'accord avec moi pour dire que, quand l'OTAN

 25   recueillait des informations, ils ne recueillaient pas seulement pour lui-

 26   même, pas seulement pour l'OTAN, pour les besoins de l'OTAN mais aussi pour

 27   la partie adverse. Et d'ailleurs, les officiers qui étaient sur le terrain

 28   faisaient la même chose.


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  1   R.  Oui, c'est un fait.

  2   Q.  Ici, on peut voir que la "Turquie est en train d'armer les Musulmans et

  3   d'envoyer les Moudjahidines en Bosnie;" est-ce exact ?

  4   R.  Oui, c'est exact. C'est ce qui était écrit dans les informations, dans

  5   les renseignements que j'ai reçus.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Tieger.

  7   M. TIEGER : [interprétation] Je suis désolé, parce que je ne me suis pas

  8   levé plus tôt, parce que ça fait plusieurs fois que cela se répète. Donc

  9   l'accusé a obtenu des informations, une réponse plutôt du témoin concernant

 10   des informations alléguées qui ne se trouvent pas dans ce document. Le

 11   témoin a indiqué quelle a été la base qui lui a -- donc il s'est servi pour

 12   préparer ce document. Il en a un petit peu parlé, maintenant on parle des

 13   informations dont on ne connaît pas la provenance. Je vous demande que l'on

 14   fournisse la provenance de tels éléments d'information.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous avez compris la question

 16   de M. Tieger ? Quand vous étiez d'accord avec M. Karadzic pour dire que

 17   l'OTAN a fait passer ces informations aux Bosniens, vous vous êtes basé sur

 18   quoi exactement pour l'affirmer, ou bien pour vous mettre d'accord ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai très bien compris

 20   la question de M. Tieger. Voici quelle est la base de cela, c'est un

 21   renseignement que j'ai traduit dans ces documents, que j'ai écrit dans ces

 22   documents. Puis, moi-même, de ma propre expérience, je sais comment on

 23   procédait à de tels renseignements, parce que, moi-même, j'ai pu voir dans

 24   la Bosnie occidentale, j'ai pu apercevoir moi-même des vols de

 25   reconnaissance de l'OTAN et cette information donc a été corroborée par ce

 26   que j'ai vu sur le terrain moi-même.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] M. Tieger voulait savoir si l'OTAN avait

 28   transmis de telles informations aux autorités bosniennes. Vous avez dit que


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  1   oui, comment le savez-vous ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Nous le savions à cause de toutes les

  3   activités qu'entreprenait l'armée croate et l'ABiH, les opérations nous

  4   concernant. Ils savaient exactement, Monsieur le Président, où étaient

  5   déployées nos pièces d'artillerie. Ils savaient où se trouvaient les

  6   réfugiés, ils savaient comment étaient déployées nos forces. Ils ne

  7   pouvaient pas le savoir, ils ne pouvaient pas le faire sur la base de la

  8   technologie dont ils disposaient, à l'époque. Ces informations ne pouvaient

  9   venir que des renseignements qu'ils recevaient électroniquement, ou bien

 10   parce qu'on leur a fourni des vues aériennes, des photos aériennes.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Voilà, c'est la réponse que j'ai voulu

 12   obtenir.

 13   Vous pouvez poursuivre, Monsieur Karadzic.

 14   L'ACCUSÉ : [aucune interprétation]

 15   M. KARADZIC : [interprétation]

 16   Q.  Dans le dernier encadré, on peut lire qu'à partir de zones protégées,

 17   on parle de la date du 10 avril :

 18   "On procède aux opérations de combat similaires à celles qui se sont

 19   déroulées à Majevica et Vlasic, en ayant pour objectif de provoquer les

 20   Serbes et d'obtenir le soutien de l'aviation de l'OTAN."

 21   Est-il exact, Monsieur, que certaines provocations auxquelles ils se

 22   sont livrés avaient pour l'unique but de provoquer une réaction du côté de

 23   l'OTAN ?

 24   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

 25   M. KARADZIC : [interprétation]

 26   Q.  Dans le paragraphe précédent, on parle des mouvements dans toutes les

 27   directions à Majevica et Vlasic, et ici, on voit que l'on procède aux

 28   opérations similaires à partir des zones protégées pour provoquer les


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  1   Serbes et pour ensuite provoquer une réaction de l'OTAN; est-ce que c'est

  2   quelque chose qui vous paraît clair ? 

  3   R.  Oui, pour moi, cela a été toujours clair, pour moi-même et pour l'armée

  4   serbe.

  5   Q.  Ici, on voit qu'il y a eu aussi des provocations au niveau de Sarajevo,

  6   et que l'objectif était le même, il s'agissait d'obtenir une réaction ou de

  7   sympathie de la communauté internationale, et une réaction militaire de

  8   l'OTAN; est-ce exact ?

  9   R.  Oui, c'est exact.

 10   Q.  Merci. Maintenant la note O.22, donc le 15 avril 1994.

 11   R.  Non, non, 1995.

 12   Q.  Excusez-moi, oui, enfin le mois d'avril, autrement dit le quatrième moi

 13   de l'année 1995.

 14   En haut, on peut voir que les Musulmans ont fait venir les Cygnes noirs.

 15   S'agissait-il d'unité de paramilitaires notoire qui par la suite a été

 16   intégrée à l'armée de Bosnie-Herzégovine ?

 17   R.  Oui. C'était une unité paramilitaire. Ils avaient des hirondelles et

 18   ils avaient des pigeons de la mosquée et puis d'autres unités.

 19   Q.  A Sarajevo, à nouveau des provocations, des provocations qui partent

 20   des enclaves avec pour objectif de provoquer les Serbes, et puis on va

 21   tourner la page en serbe, et ici, on peut lire qu'ils sont en train de

 22   transférer la population des différentes parties de Sarajevo. Ils ont tué

 23   un soldat français, ils tirent sur des soldats russes. Est-ce que ceci

 24   avait été interprété comme nous, comme des préparatifs pour préparer une

 25   offensive ?

 26   R.  A chaque fois que vous avez le transfert de la population, ou bien

 27   quand on fait partir la population, c'est un indice à peu près sûr pour

 28   chaque militaire qui signifie qu'on est en train de préparer des activités


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  1   de combat.

  2   Q.  Très bien. Ici, on parle de Gorazde mais cela ne nous intéresse pas,

  3   parce que Gorazde ne fait pas partie de l'acte d'accusation.

  4   Donc je vais vous demander de voir la note O.25 Donc on peut lire.

  5   Au cours d'une opération qui a eu lieu entre le 30 avril et le 1er

  6   mai, plus de 2 000 Serbes ont été tués dans la Slavonie occidentale. Est-ce

  7   que par la suite nous avons appris qu'il y en a eu bien davantage de tués ?

  8   R.  Monsieur Karadzic, cette information ne vient pas de moi. C'est

  9   une information que je tiens des renseignements. Mais vous avez posé une

 10   autre question ici, non seulement que l'on a tué des Serbes mais on a fait

 11   partir entre 500 et 600 000 de Serbes de la République de Croatie, ils sont

 12   tous passés par la Republika Srpska. Ceci nous a posé des problèmes

 13   énormes. Il s'agissait de les nourrir et puis notre armée, il fallait

 14   qu'elle circule. Nous avions des colonnes de réfugiés qui s'ébranlaient

 15   entre Bijeljina et Petrovac à Drvar. Vous aviez une colonne qui couvrait

 16   une distance de 600 kilomètres, vous aviez une colonne très dense avec des

 17   hommes, des vieillards, des chariots. Des réfugiés de Croatie, ils étaient

 18   tous réfugiés et ils étaient en train de passer par les territoires de la

 19   Republika Srpska.

 20   Q.  Merci. La page 35, s'il vous plaît. Ici, nous avons une information du

 21   15, et Izetbegovic aurait pris une décision le 12 mai et qui visait à

 22   bloquer, à casser le blocus de Sarajevo. Il avait pour l'intention de

 23   s'emparer d'Ilidza, Hadzici, et Ilijas il voulait lancer une attaque de

 24   l'extérieur et ayant pour but donc de percer ce cercle.

 25   R.  Oui, c'est exactement ce qui est dit dans ce texte.

 26   Q.  Bien. Maintenant la page 0.36. Donc le 16, le 1er Corps d'armée a

 27   commencé à Lukavica, Vojkovici, Pavlovac, Linjaca [phon], c'était des

 28   villages habités par des civils qui étaient à 100 % serbes. Etes-vous


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  1   d'accord avec cela, avec cette constatation ?

  2   R.  Oui, Monsieur Karadzic, je suis d'accord. Pour dire qu'il s'agissait là

  3   des villages habités par une population civile, cela étant dit je ne sais

  4   pas quelle a été leur appartenance ethnique.

  5   Q.  Etes-vous d'accord que s'ils avaient percé nos lignes, est-ce que vous

  6   êtes d'accord pour dire que cette population aurait péri d'après

  7   l'expérience que vous avez de leurs opérations militaires ?

  8   R.  ce sont des suppositions, des conjectures, cela étant dit ça me semble

  9   asse réel comme possibilité.

 10   Q.  Est-ce que vous pouvez confirmer aux Juges que, là, nous avons des

 11   hameaux de la Sarajevo serbe, et qui étaient des quartiers avant de ce qui

 12   était Sarajevo avant la guerre ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  [aucune interprétation]

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-il possible de demander le versement de ce

 16   document ?

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Tieger.

 18   M. TIEGER : [interprétation] S'il s'agit des extraits dont on a parlé, je

 19   n'ai pas d'objection.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons le verser.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Moi, j'aurais tout lu si j'avais eu le temps,

 22   mais je pense que c'est quelque chose qui aurait été fort utile pour les

 23   Juges de la Chambre. De toute façon ce n'est pas un document qui est très

 24   long.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Dans quelle mesure et de quelle façon

 26   ceci sera utile aux Juges ?

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, ceci vous permettrait

 28   d'avoir accès aux informations de renseignement qui arrivaient à l'état-


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  1   major principal, qu'il s'agissait de prendre en compte avant d'entreprendre

  2   des activités et opérations.

  3   [La Chambre de première instance se concerte]

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Tieger.

  5   M. TIEGER : [interprétation] Peut-être qu'il n'est pas nécessaire que je le

  6   dise, mais je vais peut-être dire les choses --enfoncer des portes

  7   ouvertes. D'abord, je vous dirais qu'il va à l'encontre de la pratique

  8   suivie et instaurée d'ailleurs par cette Chambre, ce qui vient d'être fait,

  9   deuxièmement, ce n'est pas le renseignement qui est arrivé à l'état-major

 10   principal. Dans le meilleur des cas, il s'agit d'un extrait choisi que le

 11   témoin a choisi d'insérer dans ce document. Donc même si cette pratique

 12   était autorisée, ce qui a été le cas par le passé, il y a encore un certain

 13   nombre de documents d'ailleurs que l'Accusation pourrait présenter dans

 14   leur intégralité et donc -- enfin, franchement, cela ne sert pas à grand-

 15   chose.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Sans les voir ces documents, nous

 17   ne pouvons pas juger et trancher et dire s'ils sont pertinents ou non. Donc

 18   nous allons suivre la pratique déjà retenue. Et si nécessaire, certains

 19   extraits ou certains passages plutôt pourront être ajoutés, si cela est

 20   véritablement nécessaire.

 21   Donc nous n'allons admettre que ces extraits --

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voulais tout simplement confirmer, demander

 23   au témoin de confirmer s'il est vrai que cela émanait des services de

 24   Renseignement et qu'il s'agissait donc de renseignements secrets que vous

 25   avez obtenus à l'état-major principal, renseignement qui était à la

 26   disposition de l'état-major principal.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. Donc nous allons verser cela au

 28   dossier. La Chambre a déjà donné sa décision, rendue sa décision.


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  1   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D2192.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pourrions maintenant demander

  3   l'affichage de la pièce 1D5164.

  4   M. KARADZIC : [interprétation]

  5   Q.  Général, vous vous souvenez, je suppose, de ce rapport quotidien, c'est

  6   vous d'ailleurs qui l'établissiez et vous l'avez envoyé celui-ci au

  7   commandement du 2e Corps de la Krajina ?

  8   R.  Oui, je m'en souviens.

  9   Q.  Merci. Est-ce qu'il est indiqué dans le premier paragraphe --ou plutôt,

 10   dans le premier paragraphe, il est question des négociations qui avaient

 11   été interrompues à Genève, et dans le deuxième paragraphe, il est indiqué

 12   que, d'après les informations initiales, notre participation à la

 13   commission chargée de mener à bien l'enquête relative au massacre à

 14   Sarajevo avait été acceptée. Est-ce que vous vous souvenez donc que le

 15   massacre a été utilisé comme excuses, de raisons plutôt, pour mettre un

 16   terme aux négociations à Genève ? Est-ce que vous vous souvenez qu'au

 17   départ, ils ont accepté nos enquêteurs, ils ont accepté qu'ils participent

 18   à l'enquête, et puis qu'ensuite ils aient rejeté cette éventualité ?

 19   R.  Oui, oui, c'est sur la base de cette information, de ce renseignement

 20   que j'ai compilé le rapport, d'ailleurs que j'ai envoyé et transmis aux

 21   unités subordonnées des brigades.

 22   Q.  Merci.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je souhaiterais que cela soit versé au dossier.

 24   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

 25   M. LE GREFFIER : [interprétation] Je sera la pièce 2193.

 26   M. KARADZIC : [interprétation]

 27   Q.  J'aimerais dans un premier temps, Général, vous posez une question,

 28   est-il exact que les parents musulmans et croates empêchaient leurs enfants


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  1   de rallier les rangs de la JNA en 1991 et 1992 ?

  2   R.  Oui, c'est exact. En 1991, ce n'était pas un phénomène si répandu que

  3   cela, mais en 1992, en revanche, ils ont essayé de les empêcher de se

  4   rallier à l'armée.

  5   Q.  Mais est-ce qu'il s'agissait du point de vue des dirigeants politiques

  6   de ces communautés également ? Est-ce que cela correspondait à leurs

  7   positions ?

  8   R.  Au départ, les dirigeants, auxquels vous faites référence, avaient

  9   lancé un appel pour leur demander de ne pas rallier les rangs de l'armée,

 10   puis ensuite un ordre avait été donné en fonction de cet ordre il était

 11   indiqué qu'il ne fallait pas qu'ils rallient la JNA.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je souhaiterais que le document 1D5167 soit

 13   affiché.

 14   M. KARADZIC : [interprétation]

 15   Q.  Général, est-ce que vous convenez que ces mêmes parents, en mars 1995,

 16   ont envoyé leurs enfants pour qu'ils accomplissent leur service militaire,

 17   et vous, vous avez donné un ordre pour indiquer que la formation devrait

 18   être assuré à Manjaca. Est-ce que vous pouvez le confirmer cela ? Est-ce

 19   que vous pouvez nous dire pourquoi il était plus opportun pour eux que cela

 20   ait lieu à Manjaca ?

 21   R.  Parce que, Monsieur Karadzic, le centre d'Entraînement de l'état-major

 22   principal de la VRS se trouvait à Manjaca. A Manjaca, cela se trouve juste

 23   à côté de Banja Luka.

 24   Q.  Merci. Est-ce que vous pourriez, je vous prie, montrer le bas de la

 25   version anglaise, et est-ce que vous convenez qu'il aurait été beaucoup

 26   mieux pour eux d'être ensemble ? Il aurait été mieux de leur fournir leurs

 27   vivres et leurs rations alimentaires en fonction de leur religion mais

 28   c'était mieux qu'ils soient ensemble, n'est-ce pas ?


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  1   R.  Oui, c'est exact.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que cela peut être versé au dossier, je

  3   vous prie ?

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

  5   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D2194.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] On vient de me dire que vous avez

  7   exactement trois minutes à votre disposition, Monsieur Karadzic.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Nous avons un document très important que je

  9   voulais montrer.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, non, écoutez, ce n'est absolument

 11   pas acceptable, Monsieur Karadzic. Vous venez de passer quasiment une heure

 12   à aborder des questions qui sont vaguement pertinentes, et à la fin, vous

 13   nous dites que vous avez un document très important à présenter. Alors,

 14   pour que vous puissiez peut-être essayer d'apprendre vous n'allez pas, nous

 15   n'allons pas plutôt vous autoriser à bénéficier d'une prorogation de temps.

 16   Donc poursuivez il vous reste trois minutes.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 18   M. KARADZIC : [interprétation]

 19   Q.  Général, alors peut-être que vous pourriez répondre en disant oui ou

 20   non. Mais est-ce que vous vous souvenez que, lors de la réunion du

 21   commandement Suprême du 31 mars 1995, la liberté de mouvement a été

 22   abordée, et convenez-vous qu'à ce moment-là, nous avons répété notre point

 23   de vue ? Point de qui était que personne ne devrait être contraint à partir

 24   ou à rester, et lorsque je dis personne, je fais référence à des civils.

 25   R.  Oui, je me souviens de ceci.

 26   Q.  Merci. Général, est-ce que vous savez si nous avons jamais eu

 27   l'intention de nous séparer des Musulmans qui vivaient en Republika Srpska

 28   ? Est-ce que nous avons voulu chasser les Musulmans et les Croates de


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  1   territoires qui faisaient ou qui devaient faire partie de l'entité

  2   constituante serbe ?

  3   R.  Ecoutez, Madame, Messieurs les Juges, j'ai déjà dit que les Musulmans y

  4   résidaient tout comme les autres résidents de la Republika Srpska. Mais bon

  5   c'était quand même des conditions, partout à Prijedor, à Banja Luka, à

  6   Sanski Most, à Mrkonjic Grad, enfin et cetera, et cetera, et cetera. Alors

  7   ils vivaient à ces endroits de façon tout à fait normale. Lorsque l'armée

  8   croate a attaqué Mrkonjic Grad avec leur artillerie, les Musulmans et les

  9   Serbes ont été tous bombardés, et moi, j'étais d'ailleurs personnellement

 10   présent à ce moment-là.

 11   Q.  Général, est-ce qu'à un moment donné, les responsables - je fais

 12   référence aux dirigeants, et aux responsables - est-ce qu'ils n'ont jamais

 13   indiqué que les Croates et les Musulmans devraient être anéantis ? Est-ce

 14   qu'ils avaient dit qu'ils devraient être tués et anéantis ?

 15   R.  Je n'ai jamais, jamais entendu quiconque parler de cela.

 16   Q.  Merci. Mais est-ce que vous saviez que notre armée, il inhumait les

 17   soldats ennemis ? Par exemple, dans une zone donnée, Oric a perdu 2 000

 18   soldats, par exemple, dans une autre zone. Est-ce que vous savez comment

 19   notre armée inhumait ces soldats lorsque la bataille était terminée ?

 20   R.  Je ne le sais pas, Monsieur Karadzic, c'était en fait le secteur de

 21   l'arrière garde qui était responsable de ce type de question.

 22   Q.  Merci, Général. Je m'excuse de vous faire aller vite, mais je voulais

 23   tout simplement savoir ce que vous pensiez. Je pense donc à vous, je pense

 24   au niveau de votre ministère fédéral, alors il se peut que bon je vous ai

 25   rendu la tache un peu difficile puisque tout cela est allé très vite, mais

 26   je vous remercie, de toute façon.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, je vous prie.

 28   Monsieur Tieger, avez-vous des questions supplémentaires ?


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  1   M. TIEGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  2   Nouvel interrogatoire par M. Tieger :

  3   Q.  [interprétation] Général, aujourd'hui, à la page 23, M. Karadzic vous a

  4   posé une question, il vous a demandé des louanges à propos du général

  5   Krstic ou des compliments, et vous avez rappelé les observations émanant de

  6   M. Karadzic, à propos du général Mladic qui était en train de venir une

  7   véritable légende, parce que nous l'avions en fait transformé en légende et

  8   qu'il y avait d'autres généraux qui devaient être loués et félicités,

  9   notamment le général Krstic. Je me demande si vous avez cité les propos de

 10   M. Karadzic précisément ou s'il s'agissait d'une paraphrase. Mais le fait

 11   est qu'à ce sujet, je souhaiterais que le document de la liste 65 ter,

 12   4509A [comme interprété] soit affiché.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce qu'il s'agit une vidéo ?

 14   M. TIEGER : [interprétation] Oui, tout à fait.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Alors je dirais pour le compte rendu

 16   d'audience, non, il est écrit "fédération," mais non, ce n'était pas

 17   fédération, ça a été corrigé. Merci.

 18   [Diffusion de la cassette vidéo]

 19   M. TIEGER : [interprétation]

 20   Q.  Général, ce sont les observations auxquelles vous pensiez, lorsque vous

 21   avez fait cette référence, n'est-ce pas ?

 22   R.  Oui, oui, tout à fait, Monsieur Tieger.

 23   Q.  Merci.

 24   M. TIEGER : [interprétation] J'aimerais demander le versement au dossier de

 25   ce document, Monsieur le Président.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Quelle en est la date, c'était le

 27   mois d'août me semble-t-il ?

 28   M. TIEGER : [interprétation] Je pense que c'est le 4, le 4 août.


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quelle sera la cote ?

  2   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la cote P4555.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-être qu'il serait juste de poser la

  4   question au général, à propos du contexte, la date est la date du 4, il

  5   faudrait savoir quelle décision avait été prise, si cela avait à voir avec

  6   le limogeage de M. Mladic.

  7   M. TIEGER : [interprétation] Ecoutez, je pense que le contre-interrogatoire

  8   est terminé, je serai reconnaissant à M. Karadzic de me laisser poser mes

  9   questions.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, continuez, Monsieur Tieger.

 11   M. TIEGER : [interprétation]

 12   Q.  Alors vous avez entendu donc les observations dans la vidéo, est-ce que

 13   vous, vous saviez que le général Krstic avait planifié l'opération de

 14   Srebrenica devant M. Karadzic ?

 15   R.  Non, Monsieur le Président. Je l'ai appris après la guerre.

 16   Q.  Général, je voudrais maintenant --

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Après la guerre, mais comment Général ?

 18   Est-ce que vous pouvez nous dire ce que vous avez entendu à propos de la

 19   planification de cette opération ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, non, non, ce n'était

 21   pas la planification de l'opération dont je parlais. J'ai appris donc à

 22   propos de cette séquence télévisée, je l'ai appris en fait dans l'ouvrage

 23   de M. Kosta, il en parle dans cet ouvrage.

 24   C'est comme ça que j'ai appris ce qu'avait dit M. Karadzic, et là, je vais

 25   paraphraser, en fait.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. Bien. Bon. Nous n'allons pas nous

 27   attarder là-dessus.

 28   Monsieur Tieger.


Page 26065

  1   M. TIEGER : [interprétation]

  2   Q.  Général, à la page 42, un peu plus tôt, M. Karadzic vous pose une

  3   question et vous demande -- vous parle du génocide de la Deuxième Guerre

  4   mondiale et de sa participation lorsqu'il a quelque sorte manipulé la

  5   population serbe en faisant référence aux souvenirs de ces événements, et

  6   vous, vous avez dit en réponse -- vous vouliez répondre par rapport à thèse

  7   du génocide et vous avez indiqué que : 

  8   "Personne, ni Karadzic ou Raskovic ou ni personne d'autre, n'avait besoin

  9   de mettre en garde ou de rappeler à la population le danger du génocide."

 10   Vous avez dit que :

 11   "La population serbe en était parfaitement consciente."

 12   Mais, en fait, Général, est-il exact, oui ou non, que le SDS a pris des

 13   mesures pour s'assurer que l'on rappelle le bon souvenir des Serbes ce qui

 14   était le génocide et pour rappeler les Serbes qu'il y avait eu ce génocide

 15   afin justement de les mettre en garde contre l'illusion de cette

 16   cohabitation ou illusions alléguées de cette cohabitation et du fait qu'ils

 17   vivaient ensemble ?

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je pourrais avoir une référence ?

 19   M. TIEGER : [interprétation] Oui, je pose ma question, donc voilà c'est la

 20   base dans un premier temps, et ensuite je fournirai les références.

 21   Q.  Général, est-ce que vous pouvez répondre à cette question dans un

 22   premier temps.

 23   R.  Monsieur Tieger, j'ai entendu "SPS," dans l'interprétation, alors "SPS"

 24   c'est le Parti socialiste serbe, mais je vois sur le compte rendu

 25   d'audience --

 26   Q.  Oui, il s'agissait du Parti démocratique serbe du SDS.

 27   R.  Oui, tout à fait, Monsieur Tieger. Moi, je le vois. Je le vois dans le

 28   compte rendu anglais.


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  1   Bon, je vous dirais que tous ces partis politiques avaient agi de façon

  2   politique. Ils essayaient de rappeler aux gens différentes idées, et je

  3   n'exclus pas la possibilité que le SDS ait rappelé à la population le

  4   génocide, mais ce que je voulais dire c'est que la population n'avait pas

  5   véritablement besoin de grandes explications pour se rendre compte des

  6   dangers réels.

  7   Q.  Alors document de la liste 65 ter 11934, je vous prie. Deuxième page

  8   pour la version B/C/S, je vous prie. Général, regardez la première colonne

  9   à la gauche, troisième paragraphe complet avant la fin. Vous y trouvez la

 10   référence suivante il s'agit de M. Velibor Ostojic, qui est entre autres

 11   ministre de l'intérieur pour la Republika Srpska et voilà ce qu'il dit :

 12   "La tâche suivante, qui avait été commencée, à ce moment-là, également,

 13   consistait à rappeler à la population les événements tragiques historiques

 14   récents et d'essayer de récupérer de ces écueils, les ossements des Serbes

 15   qui avaient été tués de façon si atroce durant la Deuxième Guerre mondiale.

 16   C'était une mise en garde à propos des illusions de la cohabitation avec

 17   l'ennemi qui avait été acceptée par la population serbe. Le peuple serbe

 18   s'est rendu compte tout à coup qu'ils avaient été leurrés et trompés et que

 19   son histoire récente truffée de tragédie, de génocide, d'exode lui avait

 20   été dissimulée."

 21   Puis ensuite, vous regardez la deuxième colonne, là, vous voyez encore M.

 22   Ostojic qui fait référence au SDS, qui prépare la population à la défense -

 23   - pour qu'elle se défende.

 24   Puis, si vous poursuivez encore et que vous passer à la page suivante, vous

 25   voyez --

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais demander à M. Tieger de ne pas

 27   paraphraser mais de citer exactement les propos de M. Ostojic pour que nous

 28   puissions nous en faire une idée.


Page 26067

  1   M. TIEGER : [interprétation]

  2   Q.  "Le SDS préparait la défense de la population serbe, et il est préparé

  3   de façon nationale. Ce qui signifie que la population serbe était beaucoup

  4   plus préparée que leurs ennemis pour la première fois dans l'histoire

  5   moderne."

  6   Puis, si vous passez en haut de la dernière colonne, vous voyez qu'il est

  7   écrit :

  8   "Voilà les deux exploits en quelque sorte du SDS et il ne s'agit que de la

  9   première étape qui aboutira au but ultime, l'unification de la nation

 10   serbe."

 11   Donc, Général, est-ce que cela correspond au fait qu'en dépit du fait que

 12   la population serbe n'avait pas besoin qu'on lui rappelle ce qui s'était

 13   passé, le SDS a quand même pris sur lui de rappeler le génocide de la

 14   Deuxième Guerre mondiale afin de s'assurer que la population abandonne

 15   cette idée de cohabitation entre les communautés ?

 16   M. ROBINSON : [interprétation] Objection. Voilà une question très

 17   directrice.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Hm-hm. Est-ce que vous pouvez

 19   reformulez, je vous prie.

 20   M. TIEGER : [interprétation]

 21   Q.  Général, vous voyez est-ce que vous considérez que cet article

 22   correspond ou nous donne -- nous rappelle les efforts déployés par le SDS

 23   pour rappeler à la population les raisons avancées, ou est-ce que vous

 24   considérez que cet article reprend certains aspects des efforts menés par

 25   le SDS tels l'avait indiqué M. Ostojic ?

 26   R.  Monsieur Tieger, vous avez fort bien remarqué que nous -- qu'il s'agit

 27   d'un entretien avec M. Velibor Ostojic, d'une interview, cela faisait

 28   partie de l'article. Je ne sais pas d'ailleurs s'il était ministre à ce


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  1   moment-là, mais il indique son point de vue, et il indique ce que vous

  2   venez de mentionner. Je ne peux pas réfuter ses propos.

  3   Q.  Merci, Général.

  4   M. TIEGER : [interprétation] Je vais demander le versement au dossier de ce

  5   document.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ecoutez, moi, je ne pense pas avoir

  7   compris où se trouvait la partie anglaise que vous avez lue. Vous pourriez

  8   peut-être m'aider à trouver le passage ? Ce qui se termine par la

  9   réunification …

 10   M. TIEGER : [interprétation] Oui, vous avez raison. Cela se trouve en haut

 11   de la dernière colonne. Cela n'a pas été traduit. Vous avez raison. Donc

 12   nous pouvons -- alors soit le -- je peux faire en sorte d'avoir la

 13   traduction de ce passage qui est quand même assez concis et nous

 14   l'ajouterons à la traduction -- au reste de la traduction.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais est-ce que nous n'avons pas retenu

 16   la pratique de ne pas verser au dossier les interviews de parties tierces ?

 17   Parce que c'est ce dont il s'agit quand même ?

 18   M. TIEGER : [interprétation] Oui, c'est la déclaration de la personne qui

 19   interroge, qui mène à bien l'interview. Mais cela en fait explique

 20   directement la position de l'accusé. C'est un officiel, un représentant du

 21   SDS qui parle du point de vue officiel du parti à un moment. Bon, je pense

 22   que là c'est différent cela devrait être versé au dossier.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Maître Robinson.

 24   M. ROBINSON : [interprétation] Non, ce n'est pas la peine de se préoccuper

 25   de ceci, parce que le témoin ne s'est contenté tout simplement de dire que

 26   cela faisait partie de l'artillerie. Il n'a rien confirmé du tout, donc je

 27   ne pense pas que cela puisse être versé au dossier par le truchement de ce

 28   témoin.


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  1   M. TIEGER : [interprétation] Excusez-moi, de vous interrompre. Mais

  2   deuxièmement -- premièrement, cela avait déjà été accepté. C'est une

  3   déclaration qui a été faite par le témoin au moment des faits. Et

  4   deuxièmement, bon, il y a une question de contexte, le contexte a été

  5   présenté par l'accusé. L'Accusation réagit à propos de quelque chose dont

  6   le contexte est déjà été donné. Donc je pense qu'il serait -- que ce serait

  7   une erreur que de ne pas verser au dossier, parce qu'en fait, il s'agit

  8   d'informations qui au départ ont été demandées par l'accusé, il y a des

  9   questions qui ont été posées, et là, nous nous contentons en fait de

 10   fournir de plus amples renseignements pendant les questions supplémentaires

 11   de l'Accusation. Donc nous faisons -- nous creusons la situation.

 12   [La Chambre de première instance se concerte]

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Tieger, la Chambre souhaiterait

 14   s'en tenir à sa pratique déjà retenue, étant donné qu'il s'agit d'une

 15   interview d'une partie tierce accordée à un représentant des médias, ou à

 16   un média qui s'appelle "Javnost", et le témoin, en fait, a confirmé que

 17   cette interview a bel et bien eu lieu. Dans la mesure où le témoin l'a

 18   confirmé, cela fait déjà partie des éléments de preuve. Donc, nous n'allons

 19   pas accepter le versement au dossier de ce document.

 20   M. TIEGER : [interprétation] J'aimerais pouvoir expliquer mon raisonnement,

 21   mais je ne veux surtout pas m'ériger contre la décision de la Cour, mais je

 22   pense -- enfin, je pourrais peut-être développer, en fait, mon propos.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Je pense que vous nous avez

 24   déjà donné votre argument, donc poursuivons.

 25   M. TIEGER : [interprétation] Fort bien.

 26   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

 27   M. TIEGER : [interprétation]

 28   Q.  Je n'ai plus qu'une question à vous poser, et j'espère avoir bien


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  1   compris, en fait. Parce que nous avons vu l'accusé discuter en long, en

  2   large et en travers le fait que vous aviez accès à et que vous reteniez des

  3   renseignements extrêmement secrets, ou en tout cas des renseignements qui

  4   provenaient de cette source pendant la période du mois d'avril et du mois

  5   de mai 1995, qui portaient sur plusieurs activités. Est-ce que vous avez eu

  6   le même accès à ces renseignements secrets en juin et en juillet 1995 ?

  7   R. Non, Monsieur Tieger. Le 25 mai, j'ai arrêté et je n'ai plus conservé ce

  8   genre d'information parce que je m'occupais d'autres choses.

  9   Q.  Donc, est-ce que vous savez, compte tenu de ces renseignements, combien

 10   de Serbes ont apparemment été tués en Slavonie -- donc ça, vous le saviez,

 11   mais d'après ce que j'ai compris, vous n'étiez absolument pas au courant de

 12   ce qui s'était passé à Srebrenica, et vous l'avez entendu -- vous en avez

 13   pris connaissance dans les médias. C'est cela, la situation que vous

 14   décrivez ?

 15   R.  Monsieur Tieger, les renseignements que je recevais en tant que

 16   renseignements secrets, je les ai reçus pendant la période comprise entre

 17   mars et mai 1995, il n'y avait pas d'autres périodes, et notamment pas la

 18   période à laquelle vous venez de faire référence. Les renseignements à

 19   propos des personnes tuées en Slavonie occidentale, je ne les ai pas

 20   inventés. Je les ai copiés dans des registres du renseignement. Je ne peux

 21   ni confirmer ni infirmer d'ailleurs leur exactitude. C'est tout simplement

 22   ce qu'indiquaient les rapports.

 23   M. TIEGER : [interprétation] Je n'ai plus de questions à poser. Si la

 24   Chambre le souhaite, je ne veux pas revenir sur la décision que vous avez

 25   prise, mais je me permets de demander à la Chambre d'examiner à nouveau la

 26   pratique retenue lorsqu'il s'agit de déclarations qui ont été faites au

 27   moment des faits. Je pense que c'est une pratique qui a été suivie et

 28   retenue, et que Me Robinson avait oublié. Sinon, je n'ai rien d'autre à


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  1   dire.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

  3   [La Chambre de première instance se concerte]

  4   Questions de la Cour : 

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Général, aujourd'hui, sur la page du

  6   compte rendu d'audience 13, lignes 12 à 15, aujourd'hui donc, vous nous

  7   avez expliqué les raisons pour lesquelles vous aviez du mal à vous rappeler

  8   les événements de Srebrenica, vous avez dit ce qui suit :

  9   "Monsieur le Président, je voudrais attirer votre attention sur un problème

 10   de méthode. Au cours de quelques derniers jours, j'ai appris bien davantage

 11   au sujet de Srebrenica que je ne le savais à l'époque, davantage que je ne

 12   l'ai appris depuis la fin de la guerre. J'ai aussi étudié certains

 13   documents en attendant".

 14   Eh bien, ce qui m'intéresse c'est de savoir quels sont ces documents que

 15   vous avez étudiés ? Qu'est-ce qui vous a amené à savoir davantage de choses

 16   aujourd'hui, puis dites-nous, d'après vous, comment se sont déroulés tous

 17   ces meurtres, qui en a donné l'ordre ? Pourriez-vous nous aider à ce sujet

 18   ?

 19   R.  Monsieur le Président, je ne pense pas que l'on ait donné l'ordre de

 20   tuer. Cela étant dit, je ne nie pas qu'il y ait eu de meurtres de commis.

 21   Moi, j'ai vu et je puis voir des vidéos que vous, vous avez pu voir aussi,

 22   à plusieurs reprises, sans doute. Et dans ces enregistrements vidéo, j'ai

 23   pu voir ce qui se trouvait dans ces autocars dans les vidéos que l'on a pu

 24   regarder à la télé chez nous, mais que l'on peut voir au jour d'aujourd'hui

 25   sur l'internet. Vous savez, moi, je ne me suis pas documenté pour écrire un

 26   article scientifique à ce sujet. Il s'agit des observations que j'ai faites

 27   pour arriver à des conclusions personnelles.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors quelles sont vos observations


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  1   personnelles, quelles sont vos conclusions, Mon Général ?

  2   R.  J'en suis arrivé à la conclusion que cette population a été évacuée,

  3   mais on leur a donné la possibilité de rester. Une délégation musulmane

  4   avait signé un accord devant M. Karremans en acceptant de partir sous les

  5   auspices de l'ONU. Ce sont les informations auxquelles j'ai pu avoir accès.

  6   Ensuite j'ai regardé des enregistrements vidéo sur l'internet et ailleurs,

  7   où l'on voyait des colonnes de gens, des bus quitter Potocari en direction

  8   de Kladovo et autres endroits.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Eh bien, avec ceci se termine votre

 10   déposition, Mon Général. Au nom du Tribunal, je souhaite vous remercier

 11   d'être venu déposer à La Haye. A présent, vous pouvez disposer.

 12   [Le témoin se retire]

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Tieger, c'est à vous de décider

 14   si vous souhaitez citer le prochain témoin à présent ou non.

 15   M. TIEGER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président. Oui,

 16   c'est M. Nicholls qui va l'interroge. Donc je vais voir ce qu'il en pense.

 17   Donnez-moi un instant, s'il vous plaît.

 18   Il serait peut-être mieux, vu les circonstances, de commencer demain [comme

 19   interprété]. Vous aviez raison, en quelque sorte.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Parfois les journées sont plus

 21   longues que prévues, alors il vaudrait mieux lever la séance pour la

 22   semaine, à moins qu'il y ait d'autres points à soulever, mais apparemment

 23   non.

 24   Donc, dans ce cas, nous allons lever la séance et reprendre nos travaux

 25   lundi à 9 heures du matin.

 26   --- L'audience est levée à 14 heures 35 et reprendra le lundi 12 mars 2012,

 27   à 9 heures 00.

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