Page 26409
1 Le mardi 20 mars 2012
2 [Audience publique]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 04.
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour à tout le monde.
7 Avant que nous ne commencions à entendre la déposition du témoin
8 suivant, je souhaiterais traiter d'un sujet car l'attention de la Chambre a
9 été attirée sur le fait suivant : Au cours des deux dernières semaines, le
10 nombre de prorogations de toute dernière minute ajouté à des audiences qui
11 avaient déjà été prolongées a augmenté. La Chambre reconnaît que cela
12 exerce une pression indue sur tous les participants à cette audience, à ces
13 audiences, et notamment pour ce qui est des interprètes. La Chambre
14 souhaite exprimer sa reconnaissance aux interprètes, et ce, pour la qualité
15 de leur travail et leur professionnalisme. La Chambre aimerait demander aux
16 parties de s'en tenir aux estimations de temps qui avaient été présentées
17 ou au temps imparti par la Chambre.
18 En dernier lieu, elle souhaiterait demander à l'Accusation
19 d'organiser le programme des témoins de telle façon que des demandes de
20 prorogation de toute dernière minute ne soient présentées qu'à titre
21 absolument exceptionnel, et demande à l'Accusation d'en informer la Chambre
22 aussi rapidement que possible dès qu'ils sont au courant de la situation ou
23 dès qu'ils pressentent ce type de situation.
24 Ceci étant dit, je souhaiterais que le témoin prononcer sa
25 déclaration solennelle.
26 Monsieur.
27 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai
28 la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
Page 26410
1 LE TÉMOIN : KDZ357 [Assermenté]
2 [Le témoin répond par l'interprète]
3 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur. Veuillez
4 prendre place.
5 Bonjour à vous, Madame Edgerton.
6 Mme EDGERTON : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour,
7 Madame, Messieurs les Juges.
8 Interrogatoire principal par Mme Edgerton :
9 Q. [interprétation] Monsieur, est-ce que vous m'entendez dans une langue
10 que vous comprenez ?
11 R. Oui, oui, je vous entends parfaitement.
12 Q. Merci.
13 Mme EDGERTON : [interprétation] Alors, j'aimerais demander l'affichage pour
14 commencer du document 65 ter qui correspond au numéro 90322. Il s'agit de
15 la fiche d'attribution de pseudonyme pour ce témoin et, bien entendu, je
16 demande à ce que cela ne soit pas diffusé à l'extérieur.
17 Q. Monsieur, est-ce que vous voyez lieutenant nom affiché sur votre écran
18 ? Est-ce que ce nom est bien écrit ?
19 R. Oui.
20 Mme EDGERTON : [interprétation] Est-ce que cela pourrait être le premier
21 document versé au dossier pour ce témoin.
22 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. Versé sous pli scellé.
23 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P4626, sous pli scellé,
24 Madame, Messieurs les Juges.
25 Mme EDGERTON : [interprétation] Merci.
26 Q. Monsieur, vous avez déjà fourni une déclaration et vous avez également
27 témoigné dans quatre affaires, notamment le plus récemment dans l'affaire
28 Tolimir en 2010.
Page 26411
1 Alors, avant de venir ici pour cette déposition, est-ce que vous avez eu la
2 possibilité d'écouter un enregistrement de votre déposition dans l'affaire
3 Tolimir ?
4 R. Oui. Oui, oui, j'ai écouté ma déposition.
5 Q. Peut-être qu'il faudrait que vous vous rapprochiez du microphone
6 lorsque vous répondez, Monsieur.
7 Est-ce que vous avez confirmé l'exactitude de vos propos enregistrés ?
8 R. Oui, oui, oui.
9 Q. Si les mêmes questions venaient à vous être posées aujourd'hui pendant
10 cette déposition dans cette affaire, est-ce que vous répondriez de la même
11 façon que vous avez répondu dans l'autre affaire ?
12 R. Oui, oui, tout à fait.
13 Mme EDGERTON : [interprétation] Donc, Monsieur le Président, le compte
14 rendu d'audience, de la déposition de ce témoin dans l'affaire Tolimir,
15 porte le numéro 65 ter 23650. Je souhaiterais que cela soit le prochain ou
16 le document suivant versé au dossier pour l'Accusation, et j'aimerais en
17 fait indiquer qu'il existe une version expurgée de cette déposition. Il
18 s'agit du document 23650A.
19 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je pense que nous allons leur attribuer
20 deux cotes différentes.
21 C'est ce que nous allons faire.
22 M. LE GREFFIER : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, le document
23 23650 de la liste 65 ter deviendra le document P4627, sous pli scellé, le
24 document 65 ter 23650A deviendra le document P4628.
25 Je vous remercie.
26 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
27 Mme EDGERTON : [interprétation] Merci.
28 Alors, pour résumer cette déposition écrite, je vous dirais qu'en 1994 et
Page 26412
1 en 1995, ce témoin en fait a participé à la supervision, à
2 l'enregistrement, et à la transcription de communications interceptées
3 communications par signal radio communications entre les forces serbes et
4 les dirigeants civils serbes.
5 Il décrit le lieu où cet exercice a été effectué. Il parle du personnel qui
6 a participé à cela, du matériel utilisé, et de toutes les phases de ces
7 procédés ainsi que de la procédure utilisée pour intercepter les transcrire
8 ces communications. Le témoin a personnellement été parti prenante dans
9 tous les aspects de cette procédure. Il explique comment les
10 enregistrements étaient effectués pour les communications interceptées et
11 comment les interlocuteurs étaient identifiés.
12 En outre, ce témoin a également analysé, identifié et authentifié des
13 transcriptions de communications interceptées préparées au sein de l'unité
14 où il travaillait, notamment des conversations qu'il a lui-même
15 personnellement enregistrées et transcrites.
16 Voici donc le résumé de la déposition écrite du témoin.
17 Q. Monsieur, j'ai quelques autres questions à vous poser, et avant que je
18 ne commence à vous poser mes questions, j'aimerais vous mettre en garde
19 car, si vous estimez qu'en répondant, il se peut que vous divulguez votre
20 identité, n'oubliez pas de nous demander ou n'hésitez pas plutôt à nous
21 demander de passer à huis clos partiel.
22 Monsieur, dans votre déposition écrite, aux pages 2 067 à 2 069, une
23 question vous avait été posée. Il vous a été demandé si vous partagiez avec
24 l'armée ou si vous informiez l'armée des conversations interceptées, et si
25 l'armée le faisait, vous avez expliqué comment un accord avait été conclu
26 avec les représentants du PEB du 2e Corps pour ce faire.
27 Est-ce que vous pourriez nous indiquer, brièvement, comment donc vous
28 partagiez ces informations ?
Page 26413
1 R. Je ne m'en -- je ne me souviens pas quand est-ce que cela s'est passé
2 exactement mais, à un moment donné, l'idée a été évoquée, l'idée, en fait,
3 qui correspondait à un besoin et qui correspondait -- en fait, il
4 s'agissait de faire en sorte que les dirigeants ou les supérieurs civils et
5 militaires de mon service soient informés et ils pensaient, en fait, qu'il
6 serait peut-être utile non pas de décider sur le lieu même de ce qui avait
7 l'importance ou non, mais de transmettre tout intégralement au 2e Corps, au
8 2e Corps qui, à son tour, nous fournissait ces -- leurs conversations.
9 C'est ainsi que nous avons commencé, donc, à échanger ces informations,
10 mais je ne me souviens plus exactement quand est-ce que cela a commencé.
11 Donc nous échangions ces conversations de la façon suivante. D'abord, dans
12 un premier temps, les conversations étaient analysées, à savoir saisies
13 dans l'ordinateur, et ensuite elles étaient encodées. Pendant ce que l'on
14 appelle la phase ouverte, ces conversations ont été sauvegardées sur des
15 disques mous [comme interprété] et échangés ainsi. On échangeait les
16 disques mous dans les deux sens. Lorsqu'ils nous fournissaient des
17 conversations qui étaient, donc sauvegardées sur des disques mous, nous
18 introduisions seulement quelques mesures qui avaient fait l'objet d'un
19 accord afin d'identifier le fait qu'il s'agissait de conversations fournies
20 par le 2e Corps et par le PEB. Nous attribuions des nombres -- des numéros,
21 plutôt, à ces conversations et c'est ainsi qu'elles étaient transmises au
22 siège de notre service.
23 Q. Donc, hormis ces petites -- ces petites procédures, en fait, que vous
24 venez de mentionner qui permettaient, en fait, d'identifier les
25 conversations comme étant des conversations relayées par le 2e Corps, est-
26 ce que vous modifiiez quoi que ce soit à part ceci ?
27 R. Pour ce qui est du texte à proprement parler, non, il n'était
28 absolument pas modifié. Ce n'était pas nécessaire, d'ailleurs, et pour ce
Page 26414
1 qui est de l'intitulé ou du titre, on ajoutait quelque chose. Donc, en
2 d'autres termes, on insérait une remarque pour indiquer que la conversation
3 émanait du 2e Corps, et puis, nous incluions également la date et le numéro
4 que nous avions retenu et ensuite, nous envoyions la conversation en
5 question.
6 Q. Merci.
7 Mme EDGERTON : [interprétation] J'aimerais que nous nous intéressions au
8 document P4483. Il s'agit de la transcription d'une conversation qui a eu
9 lieu le 16 juillet 1995 à 15 heures 29, conversations entre quelqu'un de
10 l'état-major principal et Palma, et vous voyez, en fait, que le numéro est
11 le numéro 668.
12 Est-ce que vous pourriez, je vous prie, agrandir la version B/C/S ?
13 Q. Monsieur, alors nous ne voyons pas le titre en haut de la traduction
14 anglaise, mais vous pourriez peut-être nous dire ce qui est indiqué dans le
15 titre de la version en B/C/S, qui est la version originale.
16 R. Oui. Je le vois, ce titre. Donc il s'agit des remarques dont je
17 parlais, à savoir cela est -- il est indiqué, plutôt, que la conversation a
18 été envoyée par le PEB du 2e Corps, et ce, pour nos besoins, et vous voyez,
19 dans le coin gauche supérieur, le numéro d'enregistrement ainsi que la
20 date.
21 Q. Donc, d'après vos réponses, je suppose qu'il s'agit d'un exemple de
22 conversations interceptées dont nous venons de parler.
23 R. Oui. Tout à fait.
24 Q. Donc ce document est envoyé -- a été envoyé par votre unité ?
25 R. Oui. Nous l'avons envoyé au siège de notre service.
26 Q. Merci.
27 Mme EDGERTON : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, c'est une
28 conversation qui avait déjà reçu une cote provisoire sous réserve de
Page 26415
1 l'authentification du document. C'est avec un témoin précédent que cela est
2 évoqué, pages 25 312 à 25 317 du compte rendu d'audience de cette affaire,
3 et je souhaiterais maintenant que ce document soit maintenant versé au
4 dossier de façon définitive.
5 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.
6 Maître Robinson.
7 M. ROBINSON : [interprétation] Je n'ai pas d'objection à ce qui vient
8 d'être dit. Nous avons eu des contacts avec l'Accusation et il semblerait
9 qu'ils souhaiteraient donner une cote définitive à tous les documents qui
10 avaient reçu des cote provisoires à partir du moment où ils ont été
11 identifiés -- authentifiés, plutôt, par un témoin. Alors je ne sais pas si
12 vous souhaitez vous intéresser à la pertinence de ces documents, mais nous,
13 nous estimons que cela n'est pas nécessaire, en fait.
14 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Lorsque l'on donne une cote provisoire
15 sous réserve de l'authentification, lorsque la Chambre fait ceci, la
16 Chambre examine la pertinence a priori et la valeur probante de cette
17 conversation interceptée. Je pense que cela a toujours été notre pratique.
18 Donc nous allons soit nous intéresser à cela de façon exhaustive où nous
19 les examinons et nous les verserons au dossier l'un après l'autre, mais
20 bon, ça -- cela relève de l'Accusation, en fait.
21 Donc, nous n'avons absolument aucun problème à verser au dossier ce
22 document de façon définitive.
23 C'est ce que nous allons faire, Madame Edgerton, puisqu'il avait été -- il
24 avait reçu une cote provisoire lorsque M. Obradovic était présent dans le
25 prétoire, si ma mémoire ne me trompe.
26 Mme EDGERTON : [interprétation] Oui, tout à fait, Monsieur le Président.
27 Alors nous allons maintenant nous intéresser à une conversation différente.
28 Document D2002, conversation qui porte la date du 16 juillet 1995, à 4
Page 26416
1 heures 15. Le numéro de ce document est le numéro 664. Il s'agit d'une
2 conversation entre l'officier de permanence de l'état-major principal et le
3 général Mladic.
4 Est-ce que vous pourriez élargir -- ou agrandir, plutôt, le document ?
5 Merci.
6 Q. Monsieur, est-ce qu'il s'agit d'une conversation qui a été transcrite
7 par votre unité ?
8 R. Oui.
9 Q. La différence entre ce document et la conversation interceptée, que
10 nous venons d'analyser, semble se situer au niveau du titre ainsi qu'au
11 niveau des lettres qui se trouvent dans le coin inférieur gauche du -- au
12 bas de la page, donc.
13 A quoi correspondent ces chiffres et numéros ?
14 R. Au bas de la page, nous voyons le numéro de code des deux personnes qui
15 ont travaillé sur ce document.
16 Donc vous avez le premier, qui se termine par les chiffres 073, qui
17 correspondent à la personne qui a enregistré la conversation.
18 L'autre combinaison de chiffres et de lettres permet d'identifier la
19 personne qui a transcrit la conversation.
20 Q. Merci.
21 Mme EDGERTON : [interprétation] Je souhaiterais demander la même chose pour
22 ce qui est du document 2002.
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais pourquoi est-ce qu'il n'a pas été
24 obtenu une cote provisoire, parce que, d'après le dossier, il semblerait
25 que ce document a été versé au dossier ?
26 Donc je vais consulter le représentant du greffe à ce sujet.
27 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
28 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bon, de toute façon, quelque fut son
Page 26417
1 statut, nous allons accepter qu'il soit versé au dossier.
2 Mme EDGERTON : [interprétation] Merci. Est-ce que nous pourrions, je vous
3 prie, nous intéresser à la pièce 32446 de la liste 65 ter ? C'est une
4 conversation qui porte la date du 11 juillet 1995, et qui a le numéro 535,
5 et cette conversation figure au bas de la version en B/C/S que vous avez
6 devant vous, Monsieur. Il s'agit d'une conversation entre le général Gvero
7 et M. Karadzic.
8 Monsieur le Greffier d'audience, est-ce que vous pourriez peut-être
9 présenter la deuxième page de la version en B/C/S, pour que le témoin
10 puisse voir quels sont les noms ou les codes qui figurent au bas du
11 document ?
12 Q. Monsieur, alors vous avez vu cette deuxième page; est-ce que vous
13 pouvez nous dire s'il s'agit d'une transcription qui provient de votre
14 unité ?
15 R. Oui, oui, oui, tout à fait, absolument.
16 Mme EDGERTON : [interprétation] Je souhaiterais que cette conversation soit
17 versée au dossier, comme pièce à charge, et pour ce qui est de la
18 pertinence, je pense que la pertinence, elle est absolument manifeste, au
19 vu de la conversation.
20 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je suppose que la Défense ne s'y oppose
21 pas.
22 M. ROBINSON : [interprétation] C'est tout à fait exact.
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. Nous allons donc accepter le
24 versement au dossier de ce document.
25 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P4629, Madame, Messieurs
26 les Juges.
27 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Et d'ailleurs, soit dit en passant,
28 Madame Edgerton, est-ce que nous devons verser ce document sous pli scellé
Page 26418
1 ou non ?
2 Mme EDGERTON : [interprétation] Bien que ce document ait été ou des
3 conversations interceptées semblables aient été versées au dossier sous pli
4 scellé dans l'affaire Tolimir, je pense qu'au vu du dossier en l'espèce,
5 nous pouvons, dans ce cas, verser au dossier ce document, de façon ouverte.
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. Je vous remercie de votre
7 orientation. Nous reviendrons là-dessus. Mais nous allons donc le verser au
8 dossier ainsi.
9 Mme EDGERTON : [interprétation] Alors, toujours à propos de ce document --
10 ah non, non, en fait, il me semble qu'il va falloir que je demande
11 l'affichage de ce document, du même document, en fait, qui porte une autre
12 cote 65 ter. Il s'agit du document 32447, et je dirais d'ailleurs que nous
13 voyons le numéro 32447 dans la version en B/C/S, mais il va falloir avoir
14 la traduction anglaise.
15 Q. Donc il s'agit d'une autre conversation, 20 minutes après la
16 conversation qui avait eu lieu entre le général Gvero et le Dr Karadzic, et
17 là, maintenant, nous voyons que le numéro est 536, et nous voyons que le
18 général Gvero dit :
19 "Président, l'argent serbe, l'église serbe et le drapeau serbe."
20 Est-ce que cette conversation -- puisque vous la regardez maintenant, est-
21 ce qu'il s'agit bien d'une conversation qui provient, qui d'abord a été
22 transcrite par votre unité et qui provient de votre unité ?
23 R. Oui.
24 Q. [aucune interprétation]
25 Mme EDGERTON : [interprétation] J'aurais la même demande à propos du
26 document, Monsieur le Président.
27 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Maître Robinson.
28 M. ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Président, c'est la dernière
Page 26419
1 ligne de cette conversation interceptée qui me pose un problème. Est-ce
2 qu'elle fait partie de la conversation interceptée ou est-ce qu'il s'agit
3 du point de vue suggestif de quelqu'un qui avait reçu des informations.
4 Voilà, nous aurions une objection à ce que la dernière phrase soit versée
5 au dossier, parce que nous ne savons pas sur quoi elle se fonde.
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais vous ne contestez pas le fait que
7 l'interlocuteur était le général Gvero et que l'autre interlocuteur était
8 M. Karadzic.
9 M. ROBINSON : [interprétation] Ecoutez, nous ne savons rien. Bon, de toute
10 façon, nous pensons que les bases n'ont pas été posées pour ce qui est de
11 la fiabilité de ce document. Mais quoi qu'il en soit, la conversion
12 interceptée, quant à elle, peut être versée au dossier, mais je pense que
13 la dernière ligne devrait être biffée parce que nous n'avons pas de base
14 pour cette dernière ligne.
15 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Edgerton, qu'en est-il ?
16 Mme EDGERTON : [interprétation] Je peux poser une question au témoin, à
17 propos de cette dernière ligne, Monsieur le Président.
18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous en prie.
19 Mme EDGERTON : [interprétation]
20 Q. Monsieur, il y a une ligne que nous voyons, une annotation à la fin de
21 la conversation, il est indiqué :
22 "Le général Gvero est présent aujourd'hui au QG du commandement Suprême."
23 Est-ce que vous savez comment ou où -- ou d'où vient cette information ?
24 R. Je vais essayer de vous fournir une explication.
25 Sur ce canal -- sur ce canal que nous supervisions ou surveillions, il y
26 avait plusieurs lignes qui étaient placées sur écoute, et ce jour-là,
27 l'opérateur en question suivait, donc écoutait toutes les lignes, et a
28 conclu qu'il n'y avait que Gvero qui était présent là-bas. Ce qui ne
Page 26420
1 signifie pas pour autant qu'il n'y avait pas d'officiers subalternes, ce
2 n'est pas que le bâtiment était vide, mais ce jour-là, quelqu'un a dû faire
3 une observation à ce sujet dans le cadre d'une autre conversation qui
4 n'était pas importante ou qui n'a pas été transcrite, mais qui indiquait
5 que seulement Gvero était présent, ou alors, lors de l'une des
6 conversations précédentes, cela a été dit.
7 Quoi qu'il en soit, c'est ce que j'essaie de vous expliquer. Ce type
8 d'observation n'est pas inséré de façon arbitraire, parce que notre
9 intention n'était pas d'induire en erreur les gens. Il y avait une base, un
10 fondement. Des collègues, qui travaillaient ce jour-là, ont donc inséré
11 cette remarque compte tenu de quelque chose d'élément solide.
12 Q. Puis encore, une question : vu que vous parlez du fondement, quel a été
13 le fondement pour identifier le Dr Karadzic comme une personne ayant
14 participé à cette conversation ?
15 R. Moi, je n'ai pas lu ce texte en entier, mais je vois que Gvero
16 apostrophe Karadzic par "président." Bon, c'est un élément qui aurait pu
17 nous guider en l'espèce, car il a été courant d'appeler Karadzic, de
18 l'apostropher par "président."
19 Q. Merci.
20 Mme EDGERTON : [interprétation] Je vais demander que cette deuxième
21 conversation interceptée soit versée au dossier, et qu'elle reçoive une
22 cote du Procureur.
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Robinson.
24 M. ROBINSON : [interprétation] On vient de me dire que la dernière ligne
25 n'a pas été correctement traduite vers l'anglais. Il y a un mot qui manque,
26 qui n'a pas été traduit qui indique que seulement le général Gvero était
27 présent, et présent aujourd'hui, c'est quelque chose qui manque à la
28 traduction.
Page 26421
1 Il faudrait donc demander que la traduction soit refaite mais, mis à
2 part cela, nous n'avons pas d'objection quant au versement de cette
3 conversation interceptée, mais nous demandons aux Juges d'évaluer le poids
4 à accorder, vu que les interlocuteurs ont été identifiés sur la base des
5 déductions, des conclusions, et ce n'est pas quelque chose qui figure
6 vraiment dans le texte.
7 Mis à part, je pense que cela répond aux critères établis par la
8 Chambre, c'est suffisamment fiable.
9 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur le Témoin, pourriez-vous lire
10 la phrase, la dernière à voix haute ?
11 LE TÉMOIN : [interprétation] "Aujourd'hui, dans le quartier général
12 principal, se trouve seulement le général Gvero.
13 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Seulement ne figure pas dans la
14 traduction.
15 Je pense que maintenant c'est parfaitement à la lecture du compte
16 rendu d'audience, Monsieur Robinson.
17 Nous allons verser ce document.
18 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la cote P4630
19 attribuée à la pièce 65 ter 32447.
20 Mme EDGERTON : [interprétation] Pour terminer, je vais demander que l'on
21 examine la pièce 65 ter 31269B. C'est une conversation interceptée qui a
22 été enregistrée le 18 juillet 1995. Elle porte le numéro 696, et elle a été
23 interceptée sur la route relais de Pale. Il s'agit des personnes
24 identifiées comme un X et un certain Budimir.
25 Q. Pour nous aider, Monsieur le Témoin, pourriez-vous --
26 Mme EDGERTON : [interprétation] Est-il possible donc pour aider le témoin
27 de voir le bas de la page en B/C/S ?
28 Q. Monsieur le Témoin --
Page 26422
1 Mme EDGERTON : [interprétation] Puis, revenez sur le haut du document.
2 Q. -- Monsieur le Témoin, est-ce encore un exemple d'une conversation qui
3 émanait de votre unité qui a été saisie et transcrite par votre unité ?
4 R. Oui, nous avons intercepté cette conversation, nous l'avons transcrite.
5 Mme EDGERTON : [interprétation] Monsieur le Président, vu la position
6 adoptée par M. Robinson, je souhaite sans poser d'autres questions verser
7 ce document au nom du Procureur.
8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Robinson.
9 M. ROBINSON : [interprétation] Pas d'objection, Monsieur le Président.
10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Nous allons verser cela.
11 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce P4631.
12 Mme EDGERTON : [interprétation] Avec ceci, se termine l'interrogatoire
13 principal. Ceci ayant été dit, je souhaite verser au dossier toutes les
14 pièces afférentes et qui ont été identifiées dans notre note d'information.
15 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Qu'en est-il des conversations
16 interceptées qui n'ont pas de traductions anglaises, par exemple, le
17 document 65 ter 3383 ainsi que la pièce 65 ter 32458 ?
18 Mme EDGERTON : [interprétation] Je pourrais revenir vers vous à la fin du
19 contre-interrogatoire puisque nous possédons les traductions anglaises de
20 toutes ces conversations, et elles n'ont pas été téléchargées. Je vous
21 présente mes excuses d'ailleurs à ce sujet.
22 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Puis la deuxième question que je
23 souhaite vous poser : Est-ce que vous souhaitez que l'on verse ces pièces
24 sous pli scellé ?
25 Mme EDGERTON : [interprétation] Dans pas mal de ces conversations
26 interceptées, il s'agira de faire de petite expurgation surtout quand il
27 s'agit de noms que l'on trouve en bas de chacune des conversations, mais
28 après avoir fait cela, je pense qu'on a vraiment pas besoin de les verser
Page 26423
1 sous pli scellé.
2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quand la déposition de ce témoin sera
3 terminée, je vais vous demander de revenir vers nous avec des informations
4 plus détaillées.
5 Mme EDGERTON : [aucune interprétation]
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur, comme vous l'avez remarqué,
7 votre interrogatoire principal a été donc versé au dossier à la place de
8 votre déposition orale sous forme écrite, autrement dit, votre déposition
9 dans l'affaire Tolimir a été entièrement versée au dossier.
10 Monsieur Karadzic, c'est à vous.
11 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Merci, Monsieur le Président. Je vous
12 souhaite bonjour à vous et Madame, Messieurs les Juges.
13 Contre-interrogatoire par M. Karadzic :
14 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin.
15 R. Bonjour.
16 Q. Tout d'abord, je voudrais vous poser une question relative à une, des
17 dernières conversations, que nous avons examinée ensemble. Vous avez dit
18 que c'était moi qui avais participé à cette conversation et vous avez dit
19 que le facteur-clé, qui vous a poussé vers cette conclusion, était le fait
20 que l'on m'a adressé par : "Président," ou "M. le Président" ?
21 R. Oui. Nous étions en mesure d'identifier les interlocuteurs en suivant
22 différents indices. Vous avez pu voir qu'il y a eu pas mal de conversations
23 interceptées et souvent les interlocuteurs ont été identifiés comme étant
24 des X ou Y. Le cas de cette conversation récente que nous avons examiné le
25 prouve.
26 Mais en ce qui vous concerne vous, on vous apostrophait toujours par "M. le
27 Président," et c'est un des arguments qui va dans ce sens. Puis nous avons
28 aussi suivi la tenue de la conversation et nous avons tiré la conclusion
Page 26424
1 qu'il s'agissait de vous, à chaque fois que l'on parlait de "M. le
2 Président," que l'on apostrophait quelqu'un par "M. le Président," à chaque
3 fois, c'était à vous que l'on s'adressait. On n'a jamais entendu quelqu'un
4 s'adresser à quelqu'un d'autre par "M. le Président."
5 Q. Chez nous, comment on apostrophe le premier ministre ? Est-il plus
6 habituel de dire "M. le Président," ou bien "M. le Ministre" ?
7 R. En général, on parle du président du gouvernement, ou bien du premier
8 ministre. Mais, moi, je n'ai jamais intercepté de conversation avec le
9 premier ministre.
10 Q. Merci. Le président d'assemblée, comment l'apostrophez-vous ?
11 R. Ecoutez, il ne m'est jamais arrivé de l'apostropher, mais vous êtes le
12 mieux à même de le savoir. S'il s'agit d'une conversation de tête-à-tête,
13 sans doute que vous vous appelez l'un à l'autre "président," n'est-ce pas ?
14 Q. Comment apostrophez-vous un président de municipalité ?
15 R. Par M. le Président de la municipalité.
16 Q. Est-ce qu'à chaque fois, on dit, M. le Président de la municipalité, ou
17 bien est-ce que l'on peut dire aussi M. le Président ?
18 R. Monsieur Karadzic, s'il s'agissait d'une information extrêmement
19 importante. Le moment était important aussi. Dans ce moment extrêmement
20 important, M. Gvero, je doute qu'il appellerait le président de la
21 municipalité, en lui disant : "M. le Président, le drapeau serbe, l'argent
22 serbe," et cetera, et cetera.
23 Donc, à en juger du contexte de la conversation, de la teneur de la
24 conversation, nous sommes arrivés à la conclusion que vous avez participé à
25 cette conversation.
26 Q. Merci. Comment apostrophez-vous le président d'une commission, par
27 exemple ?
28 R. Cela dépend. Vous pouvez l'appeler par son nom de famille. Là, il
Page 26425
1 s'agissait d'une conversation extrêmement importante, d'une information
2 importante. Vous avez un officier très haut gradé qui informe quelqu'un qui
3 doit recevoir une nouvelle importante, une information importante. Je pense
4 que cela ne sert rien d'informer de cela un président de commission, en
5 tout cas.
6 C'est la conclusion à laquelle nous nous sommes arrivés après avoir écouté
7 cette conversation. Nous avons utilisé cette conversation interceptée pour
8 nos besoins en interne, et je pense que notre jugement, à l'époque, était
9 le bon.
10 Q. Bien. Mais pendant que, moi, j'étais encore en liberté, savez-vous que
11 l'on a essayé de attribuer cette conversation interceptée au président de
12 l'assemblée, M. Krajisnik ?
13 R. Non, je ne suis pas au courant de cela.
14 Q. Est-ce que vous saviez quel était le rapport qui prévalait entre le
15 général Gvero et moi-même ce jour-là ?
16 R. Non, je ne le sais pas.
17 Q. Merci. Vous avez fait des études au niveau secondaire, des études
18 techniques, n'est-ce pas ?
19 R. Si vous souhaitez m'identifier, moi, je préférais passer à huis clos
20 partiel ou même à huis clos.
21 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur le Témoin, mais avant de
22 faire cela, Monsieur le Témoin, à la page 16, ligne 8, vous venez de dire"
23 : "Dans ce moment important." Je vais lire ce que vous avez dit.
24 "Monsieur Karadzic, il s'agissait là d'une information extrêmement
25 importante. Il s'agissait là d'un moment important et dans ce moment
26 important, je ne pense pas que M. Gvero aurait appelé le président de la
27 municipalité pour lui dire le drapeau serbe, l'argent serbe …"
28 Vous souvenez-vous avoir dit cela ?
Page 26426
1 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, tout à l'heure.
2 LE JUGE KWON : [interprétation] Vouliez-vous dire que c'est Gvero qui a
3 appelé le président, quelque soit ce président ? Est-ce que vous souhaitez
4 à nouveau voir cette conversation interceptée ? P4630.
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, bien sûr.
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous savez qui était le
7 premier à avoir appelé ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne le sais pas. Je ne sais pas qui a été
9 celui qui a appelé en premier.
10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
11 Monsieur Karadzic, si vous avez l'intention de poser -- de poser des
12 questions de l'ordre personnel au témoin, eh bien, nous allons passer à
13 huis clos partiel.
14 L'ACCUSÉ : [interprétation] Non, Monsieur le Président. Je ne veux pas
15 poser ces questions.
16 En revanche, je voudrais poser une autre question au témoin.
17 M. KARADZIC : [interprétation]
18 Q. Est-il exact qu'ici, c'est écrit "président" et pas "M. le Président,"
19 que vous avez écrit à la lettre ce qui est écrit ici ?
20 R. Je vais essayer de vous expliquer ce phénomène, car, parfois, on ne met
21 pas le nom de l'interlocuteur, parfois, il manque la première partie de la
22 phrase, parce que l'opérateur, qui fait l'écoute au moment où -- où la
23 conversation commence, il peut y avoir un retard dans l'enregistrement et
24 que donc il manque une petite portion qui n'a pas été enregistrée. Là, nous
25 avons une transcription mot pour mot de cette conversation. Personne
26 n'avait le droit de changer quoi que ce soit là-dedans. Il pouvait parfois
27 dire que l'on a entendu les personnes se présenter et sur la base de cela,
28 s'il a entendu -- s'il avait entendu dire -- enfin, Gvero dire je voudrais
Page 26427
1 parler avec un tel, un tel, l'opérateur aurait pu l'écrire. Mais, là, Gvero
2 ne s'est pas présenté, par exemple. Il ne s'est pas présenté, lui, non
3 plus, mais nous avons aussi le contexte : les conversations qui ont précédé
4 cette conversation-là et puis des conversations qui ont suivi cette
5 conversation-là, et il faut placer cela dans le contexte. Vous pouvez
6 examiner cette conversation à la lumière d'une conversation précédente, et
7 là, vous allez voir les choses plus clairement.
8 Q. Mais, Monsieur le Témoin, ici, on voit "au bout de 20 minutes;" au bout
9 de 20 minutes, ce n'est rien d'autre qu'une remarque de l'opérateur.
10 Qu'est-ce qu'il a fait ? Il nous fait -- il fait état de ses remarques au
11 lieu de écrire mot pour mot littéralement ce qu'il a entendu. Parce que,
12 là, il s'agit d'un commentaire de sa -- de sa part, il s'agit d'une
13 conclusion de la part de l'opérateur, ce préambule, cette première partie ?
14 R. Veuillez -- je vous propose -- je vous propose de examiner avec moi la
15 conversation précédente, parce que, dans la conversation précédente, nous
16 avons l'heure exacte de la conversation qui a été notée et l'opérateur qui
17 a écouté cette même conversation 20 minutes plus tôt a donc tiré ses
18 conclusions sur la base de ce qu'il a entendu 20 minutes plus tôt. On
19 n'avait aucune envie de manipuler des informations. On n'avait aucun
20 intérêt de le faire. Il s'agissait des informations que l'on devait
21 utiliser. D'une certaine façon, personne n'avait le droit de le modifier.
22 Q. Vous voulez les utiliser pour faire quoi ?
23 R. Je ne saurais répondre à cette question. Nous, nous étions censés
24 saisir ces informations. Qu'est-ce que l'on a fait après avec ces
25 informations, je ne saurais vous le dire. Peut-être que l'on n'a jamais
26 utilisé ces informations. Peut-être qu'on les a tout simplement déposées
27 quelque part. Moi, je ne saurais m'élancer dans ces conjectures.
28 Q. Si cette conversation a -- avait été enregistrée pour les besoins d'un
Page 26428
1 tribunal, est-ce que vous auriez changé quoi que ce soit dans la façon dont
2 vous avez enregistré cela ?
3 R. Si nous étions censés de placer quelqu'un sur écoute pour les besoins
4 d'un tribunal ou d'un procès, sans doute que quelqu'un serait venu nous
5 dire qu'il s'agissait donc de placer quelqu'un sur écoute pour
6 l'utilisation éventuelle devant un tribunal, il nous aurait expliqué
7 l'importance de ces conversations, de ces enregistrements, ce qu'il fallait
8 monter, le détail qu'il fallait noter, dans ce cas, peut-être que cette
9 conversation-là, le document définitif aurait une autre forme. Peut-être
10 qu'on aurait saisi cela d'une autre façon, qu'on aurait intercepté --
11 enfin, écrit le document d'une façon différente. Peut-être que le -- mais
12 je pense que c'est le tribunal qui l'aurait dit -- qui me l'aurait -- qui -
13 - qui nous aurait donné la forme exacte de ce futur document. On aurait
14 peut-être trouvé ce document dans notre siège mais, en tout cas, je ne
15 saurais vous répondre à la question posée avec précision.
16 Q. Mais pouvez-vous me dire comment vous avez réussi à identifier Gvero
17 s'il ne s'est jamais présenté ?
18 R. Je viens de vous le dire. Il faudrait vraiment écouter la conversation
19 précédente, parce qu'ici, l'explication, ou l'on peut lire : "On a entendu
20 à nouveau uniquement Gvero." Il s'agit de la conversation entre les mêmes
21 interlocuteurs, mais, vous savez, à l'époque, on connaissait très bien la
22 voix de Gvero. On l'entendait souvent, très souvent, et on était capable de
23 le reconnaître, de reconnaître sa voix.
24 Q. Merci. Dites-nous : quelle est la durée de la conversation interceptée
25 que l'on n'arrive pas à saisir dès le départ, donc quelle est la durée que
26 l'on n'arrive pas à enregistrer ?
27 R. Imaginez, vous avez donc ce magnétophone sur la table, le téléphone
28 sonne, quelqu'un répond immédiatement, en répondant, capitaine untel,
Page 26429
1 untel, je vous écoute. Il nous faut un temps pour appuyer sur le bouton,
2 enregistrement, et peut-être qu'entre le moment où le téléphone a sonné, et
3 le moment où nous, nous avons appuyé sur le bouton, il y au eu quelques
4 mots de dits, entre autres, la personne aurait pu se présenter.
5 Q. Donc au maximum quelques secondes.
6 R. Je ne sais pas. Il faudrait mesurer cela. Vous savez, parfois, vous
7 avez la personne qui répond au téléphone, en disant, bonjour, on se
8 présente, et vous avez entendu cette conversation débutée, alors que vous
9 étiez peut-être un petit peu plus loin, mais dans la même pièce, il vous
10 faut un temps pour arriver jusqu'au bouton, appuyer sur le bouton.
11 Q. Est-ce que vous saviez de quelle façon on pourrait me joindre par
12 téléphone, pendant la guerre ? Normalement, c'est la secrétaire qui
13 répondait au téléphone. La personne se présentait, demandait à parler au
14 président, ensuite la secrétaire me demandait éventuellement si je
15 souhaitais parler avec la personne en question, moi, je répondais. Ensuite,
16 elle me passait la conversation. Est-ce que vous savez que c'était bien
17 cela la procédure à respecter, à l'époque ?
18 R. Oui, je vous crois sur parole. Mais vous savez aussi que parfois vous
19 étiez sur le terrain, vous et d'autres personnes haut placées, et votre
20 secrétaire n'était pas avec vous. Je ne voudrais même pas discuter de cela.
21 Moi, je vous dis ce que nous avons entendu, et ce que nous avons écrit, ce
22 que nous avons monté. C'est cela qu'il s'agit. Personne n'a inventé quoi
23 que ce soit, ce n'était pas le but de la manipulation, cela ne sert à rien.
24 Q. Donc cette conversation a lieu le 11 juillet, n'est-ce pas ?
25 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-il possible de voir la conversation
26 précédente, parce qu'apparemment, le témoin va être aidé par cela. Donc il
27 s'agit de la pièce 4629.
28 Mme EDGERTON : [interprétation] La conversation que l'on voie en haut de la
Page 26430
1 page en B/C/S, et pour que tout le monde sache de quoi il s'agit, est le
2 document 65 ter, 30927, donc c'est la conversation qui porte le numéro 534.
3 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc il faudrait montrer au témoin le
4 bas de la page.
5 Oui, Monsieur Karadzic.
6 M. KARADZIC : [interprétation]
7 Q. Donc, en haut, vous avez ce qui est écrit : "Une conversation entre le
8 général Gvero et général Nikolaï, et puis qui est là pour interpréter." Les
9 choses sont claires, là, puisque les personnes se sont présentées. Mais
10 comment en ce qui concerne la conversation 535, comment vous avez pu
11 établir qui étaient les participants à la conversation ?
12 R. Mais je vous l'ai déjà expliqué, mais regardez, regarde l'heure de la
13 conversation, à 16 heures 23, la conversation débute. Dans cette
14 conversation, nous n'avons entendu que Gvero, nous ne vous avons pas
15 entendu, il y a une raison pour cela. Nous avons entendu que ce que Gvero
16 disait. On va revenir sur ce que vous avez dit tout à l'heure. Vous m'avez
17 demandé comment on apostrophe un président. Est-ce que vous pensez que le
18 général Gvero aurait informé quelqu'un d'un niveau bien inférieur au vôtre,
19 du fait qu'il s'était entretenu avec le général Nikolaï, et cetera, et
20 cetera ? C'est pour cela que l'on est arrivé à la conclusion, avec un
21 certain degré de certitude qu'il s'agissait là de vous. Il vous informe des
22 choses très importantes. Il s'agit d'une conversation importante.
23 Q. Donc c'est à cause des conclusions que vous avez tirées au sujet de
24 l'importance de cette conversation que vous avez pensé qu'il s'agissait de
25 moi ?
26 R. C'est parce qu'on parle -- parce qu'on vous apostrophe par "président,"
27 "M. le président."
28 Q. Mais on ne parle à aucun moment de M. le président, on parle du
Page 26431
1 président; est-ce que vous voyez M. le président, ou que ce soit ?
2 R. S'il n'y a pas, il n'y a pas.
3 Q. Pourriez-vous nous dire à quelle heure les Serbes sont rentrés dans
4 Srebrenica ?
5 R. Croyez-moi, je n'étais absolument pas tenu de mémoriser ce type
6 d'information, ces détails, d'ailleurs je ne voulais pas les mémoriser.
7 Donc croyez-moi, lorsque je vous dis que je constate ces choses alors que
8 je suis ici maintenant. Je me souviens seulement de quelques conversations
9 authentiques. Je me souviens, par exemple, comment Mladic avait organisé,
10 avait pris des mesures en fait avec une station télévisée pour que tout
11 soit enregistré et ensuite vendu. Bon, je ne pense pas que nous l'avons
12 ici. Je me souviens également d'une autre de ces conversations, lorsqu'il
13 est arrivé, lui-même, dans Srebrenica, mais je ne me souviens plus en fait
14 à quelle heure cela s'est fait. Je vous dirais également en fin de compte,
15 je n'ai pas analysé cette information.
16 Q. Merci. Mais pourquoi est-ce que nous n'avons pas cette conversation
17 interceptée, au cours de laquelle Mladic a pris des dispositions avec une
18 station télévisée pour que l'équipe télévisée enregistre quelque chose, et
19 ensuite le vendre ?
20 Mme EDGERTON : [interprétation] Ecoutez, je ne pense pas que ce sont des
21 questions que l'on doit poser à ce témoin.
22 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Effectivement.
23 M. ROBINSON : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président. Moi, je
24 pense que, si le témoin sait quelque chose à ce sujet, il devrait pouvoir
25 autoriser.
26 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, mais alors la question devrait être
27 formulée de telle façon qu'il puisse nous dire ce qu'il savait ou ne savait
28 pas.
Page 26432
1 M. ROBINSON : [interprétation] Mais il vient juste de nous le dire,
2 justement. Tout simplement, ils n'ont pas cette conversation interceptée,
3 mais je pense qu'il y a peut-être des informations à ce sujet.
4 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ecoutez, vous pouvez peut-être demander
5 au témoin si cette conversation interceptée existe, lui, il considère que
6 la conversation existe.
7 Poursuivez, Monsieur Karadzic.
8 L'ACCUSÉ : [interprétation] Excusez-moi, voilà ce que je voulais demander
9 au témoin. J'aimerais savoir qui décidait, quelle conversation interceptée
10 n'allait pas être remise à l'Accusation. Voilà, en fait, quelle était
11 l'essence de ma question, la quintessence de ma question même si je ne l'ai
12 pas posée, de façon adroite.
13 M. KARADZIC : [interprétation]
14 Q. Alors vous semblez être absolument catégorique lorsque vous dites que
15 vous avez entendu la conversation en question, et lorsque vous dites
16 qu'elle a été enregistrée également ?
17 R. J'en suis absolument sûr et certain. Je suis absolument sûr et certain
18 de l'avoir entendue. C'est une séquence télévisée qui a été vendue pour une
19 somme de 50 000 marks allemands, et de cela, j'en suis absolument sûr et
20 certain. Pour ce qui est de l'enregistrement à proprement parler, je ne
21 sais pas ce qu'il est advenu d'ailleurs. Je ne sais pas d'ailleurs ce qu'il
22 est advenu d'autres conversations. Je ne sais pas. Deux conversations
23 interceptées ont été remises au Tribunal. Moi, je n'ai pas utilisé cette
24 information. J'étais tout simplement une personne qui s'occupait de la
25 partie technique.
26 Q. Merci. Donc vous avez entendu qu'une séquence télévisée avait été faite
27 et vendue, mais ce qui m'intéresse, c'est que vous nous dites que vous avez
28 entendu que Mladic avait dit qu'il voulait que cela soit enregistré; est-ce
Page 26433
1 que vous avez consigné ou enregistré cette conversation, justement ?
2 R. Vous conviendrez que cela s'est passé il y a fort longtemps. Je ne peux
3 pas vous dire de façon absolument catégorique que la conversation existe,
4 mais on peut, de toute façon, vérifier pour voir si elle existe ou non, la
5 conversation interceptée.
6 Q. Combien de conversations interceptées avez-vous enregistrées au cours
7 de ces deux années-là ?
8 R. Non, ce n'est pas une période de deux ans. Si vous vous souvenez de
9 certains de ces documents, nous sommes arrivés à cet endroit en décembre
10 1992 et nous avons d'ailleurs passé beaucoup de temps à mettre à l'épreuve,
11 à examiner les routes relais. Nous avons procédé à des évaluations pour ce
12 qui était de la possibilité ou du potentiel d'interception. Et cetera, et
13 cetera. Moi, je ne sais pas combien de conversations il y a eu. Ce que je
14 sais est que, par contre, certains jours, nous arrivions à peine à tout
15 saisir dans l'ordinateur, et pour ce faire, nous avions besoin de
16 l'assistance de notre secrétaire du -- qui se trouve au QG pour qu'elle
17 puisse tout saisir, justement, dans l'ordinateur.
18 Q. Mais est-ce que cela est expliqué par le fait qu'elles étaient
19 nombreuses, ces conversations, pour un jour donné ?
20 R. Oui, oui. Oui, parce qu'il y en avait beaucoup. Il y avait des jours,
21 effectivement, ou physiquement, en fait, nous ne pouvions pas tout entre
22 dans l'ordinateur. Nous ne pouvions pas tout taper sur le clavier.
23 Q. Merci. Est-ce que vous pourriez nous donner une moyenne journalière
24 pour le nombre de conversations interceptées ?
25 R. Je n'en sais rien. Je ne m'occupais pas de ce genre de choses.
26 Q. Merci. Combien de fois est-ce que vous m'avez entendu ? Combien de
27 conversations interceptées avez-vous pour moi ?
28 R. Ecoutez, croyez-moi, mais je n'ai pas la réponse, je ne connais pas la
Page 26434
1 réponse à cette question.
2 Q. Merci. Fort bien. Est-ce que vous pouvez me dire ce que vous faisiez
3 des conversations interceptées où la partie serbe et moi-même étions
4 présentés sous un jour favorable ?
5 R. Ecoutez, je ne sais pas si je comprends ce que vous entendez par un
6 jour favorable.
7 Q. Mais que faisiez-vous lorsque vous aviez des conversations interceptées
8 qui auraient pu être qui auraient pu aller dans l'intérêt de la Défense,
9 qui aurait pu lui être favorable ?
10 R. Ecoutez, excusez-moi. Premièrement, voilà ce que je souhaiterais vous
11 dire. Si nous vous entendiez [inaudible] -- si nous vous entendiez, donc je
12 vais, là, être -- je vais vous dire exactement comment cela se passait.
13 Nous consignions même les blagues que vous racontiez, et si nous entendions
14 quelqu'un d'autre de la -- parmi les dirigeants, là, nous enregistrions
15 l'intégralité de la conversation.
16 Q. Merci. Donc, dites-nous, je vous prie : si vous pouvez nous dire que
17 tout ce que vous avez consigné et qui correspondait à des conversations
18 auxquelles je participais a été mis à la disposition des parties dans cette
19 affaire ?
20 R. Ecoutez, je n'en sais rien. Moi, j'ai donné ceci -- bon, je ne sais pas
21 ce qu'il en est du reste.
22 Q. Merci. Mais lorsque vous avez examiné ou analysé le compte rendu -- ou
23 les transcriptions, plutôt --
24 L'INTERPRÈTE : -- se reprend l'interprète --
25 M. KARADZIC : [interprétation]
26 Q. -- est-ce que vous avez remarqué qu'il y avait qui avaient disparu ? Je
27 ne sais pas, peut-être des conversations dont vous vous souvenez, par
28 exemple ?
Page 26435
1 R. Vous savez, il y a beaucoup, beaucoup d'années qui se sont écoulées
2 depuis. Ce que je vous ai dit à propos de Mladic, il y a un petit moment de
3 cela, c'est quelque chose dont je me souviens parfaitement et clairement.
4 Je voulais le présenter, à titre d'illustration pour que vous compreniez
5 mieux la situation, mais je vous dirais que je n'en sais rien pour répondre
6 à votre question. Il faudrait que je reprenne le cahier, -- le cahier où
7 tout était -- où tout était consigné pour voir les différentes pages, pour
8 voir si tout y figure.
9 Q. Mais ce cas -- ce registre, est-ce qu'il existe, et s'il existe, est-ce
10 qu'il peut être mis à votre disposition pour que vous puissiez nous dire
11 quelles sont les conversations interceptées qui n'ont pas été remises au
12 Tribunal ?
13 R. Non. Je ne suis pas en mesure de vous le dire. Je ne peux pas vous dire
14 quelles sont les conversations qui n'ont pas été remises au Tribunal, parce
15 qu'il faudrait que je vérifie tout et pour autant que je m'en souvienne,
16 des extraits de ce registre ont été présentés lors d'une affaire, donc il
17 existe, le registre.
18 Ah oui, et quelle était l'autre partie de votre question ? Ah oui,
19 voilà ce que je voulais vous dire. Je me souviens, par exemple, de certains
20 ordres. Moi, par exemple, quand il y a des conversations que je n'ai jamais
21 entendues, je ne sais pas ce qu'il est advenu de ces conversations, mais je
22 crains fort qu'il y a eu certaines transcriptions, notamment lorsqu'il
23 s'agissait de conversations qui n'ont pas été évoquées ici. Je pense à des
24 conversations pour lesquelles on avait utilisé des téléscripteurs ou des
25 télécopieurs. Peut-être, en fait, que les transcriptions qui correspondent
26 à ces conversations ont été détruites par le service qui avait estimé
27 qu'elles n'étaient pas importantes. Mais je pense que les transcriptions
28 devraient toutes être disponibles.
Page 26436
1 Q. Je vous remercie. Est-ce que vous vous souvenez des ordres que j'ai
2 donnés oralement et qui ont été interceptés et que vous ne voyez pas ici,
3 parce que vous venez de mentionner des ordres, il y a une minute de cela ?
4 De quels ordres s'agit-il ? De mes ordres ?
5 R. Non, non. Non, non. Je ne me souviens pas des conversations transcrites
6 et reproduites, mais par contre, je me souviens d'une de vos conversations
7 -- en fait, il s'agissait d'un message qui avait été télécopié, donc envoyé
8 par fax, qui avait été intercepté et qui traitait des pourparlers pour la
9 paix en 1995. Il y avait une trêve qui avait été conclue ou qui avait été
10 prévue et dans le fax, justement, il y avait un ordre à propos du
11 déploiement d'unités. De cela, je m'en souviens pertinemment et je ne le
12 vois pas ici, je ne la vois pas ici, cette conversation, mais il y a
13 d'autres conversations semblables qui avaient une teneur plutôt militaire
14 et qui n'ont pas été utilisées, qui ne présentent pas vraiment un intérêt
15 ici en l'espèce.
16 Q. Merci. Donc, vous travaillez pour le ministère de l'Intérieur, n'est-ce
17 pas ?
18 R. Si vous voulez que nous parlions de ce sujet, étant donné que je risque
19 d'être identifié par ces propos, je demanderais à ce que nous passions à
20 huis clos partiel ou à huis clos.
21 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pourrions brièvement passer à
22 huis clos partiel ?
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.
24 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes maintenant à huis clos
25 partiel.
26 [Audience à huis clos partiel]
27 (expurgé)
28 (expurgé)
Page 26437
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13 Page 26437 expurgée. Audience à huis clos partiel.
14
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
Page 26438
1 (expurgé)
2 (expurgé)
3 (expurgé)
4 (expurgé)
5 (expurgé)
6 (expurgé)
7 (expurgé)
8 (expurgé)
9 (expurgé)
10 (expurgé)
11 (expurgé)
12 (expurgé)
13 (expurgé)
14 (expurgé)
15 (expurgé)
16 (expurgé)
17 (expurgé)
18 (expurgé)
19 (expurgé)
20 (expurgé)
21 (expurgé)
22 [Audience publique]
23 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. Je voulais indiquer aux parties
24 que nous allons avoir des horaires habituelles, que nous allons avoir une
25 audience qui siégera en fonction des horaires habituelles aujourd'hui, donc
26 puisqu'il y a évidemment un autre procès -- il y a un autre procès auquel
27 participe l'un des Juges, donc je pense que nous pourrions peut-être
28 prendre la pause maintenant.
Page 26439
1 Monsieur Harvey.
2 M. HARVEY : [interprétation] J'aimerais, sans pour autant que cela prête à
3 confusion, vous présenter Mme Alicia Kuin, qui est licenciée de
4 l'Université d'Utrecht et qui travaille avec mon équipe depuis quelques
5 mois maintenant.
6 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie, Maître Harvey.
7 Bien, nous allons faire une pause. Pause de 20 minutes.
8 --- L'audience est suspendue à 10 heures 21.
9 --- L'audience est reprise à 10 heures 44.
10 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Karadzic, poursuivez, je
11 vous prie.
12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, merci, Monsieur le Président.
13 M. KARADZIC : [interprétation]
14 Q. Monsieur, est-ce que vous êtes en mesure de nous dire, et je fais appel
15 à votre mémoire si Mladic avait seulement demandé que tout soit enregistré,
16 ou est-ce qu'il a demandé que tout cela soit enregistré afin d'être vendu ?
17 Est-ce qu'il a mentionné cette vente, ou est-ce que vous avez entendu
18 par la suite que cet enregistrement avait été vendu ?
19 R. Dois-je répéter ce que j'ai dit, oui, bien.
20 Mladic voulait en fait, en quelque sorte se faire de l'argent avec
21 les séquences télévisées exclusives sur l'entrée de l'armée de la Republika
22 Srpska, dans Srebrenica, voilà. C'est comme cela que les choses se sont
23 passées.
24 Q. Merci. Mais vous ne vous souvenez pas quelle était la station de
25 télévision ou vous ne vous souvenez pas de quelle équipe télévisée il
26 s'agissait; est-ce qu'il s'agissait d'une organisation militaire ou d'une
27 compagnie, d'une société de télévision ou d'une chaîne de télévision ?
28 R. Ecoutez, pour autant que je m'en souvienne, il y avait plusieurs
Page 26440
1 chaînes de télévision, et il y avait peut-être d'ailleurs certaines chaînes
2 étrangères, mais je ne me souviens du nom.
3 Q. Mais est-ce que vous vous souvenez s'il avait été précisé ce qui devait
4 être enregistré et filmé, et est-ce que tout a été enregistré ?
5 R. Non, il n'avait pas l'autorisation de tout filmer. C'était tout
6 simplement l'entrée des forces serbes dans Srebrenica. C'est cela qui a été
7 enregistré et filmé. Donc c'est cette arrivée, cette entrée de l'armée dans
8 Srebrenica.
9 Q. Merci. Si nous devions ou nous venions à chercher cette transcription,
10 on la trouverait quelque part, n'est-ce pas ?
11 R. Ecoutez, moi, je ne peux pas véritablement vous dire si elle existe ou
12 non. Je me contente de vous dire ce que j'ai entendu et les gens, qui
13 travaillaient à cet endroit-là, à ce jour-là on tous entendu la même chose,
14 et puis, pour autant que je m'en souvienne, nous avons tout consigné.
15 Q. Merci. Etes-vous en mesure de nous dire qui a pris la décision, et
16 pourquoi ? Pourquoi est-ce que ce groupe a été formé, mis sur pied à cet
17 endroit ? Je ne veux pas faire référence au nom du lieu.
18 R. Je pense que, pendant l'année 1994, nous avons réussi à préparer un
19 certain nombre de dispositifs, d'instruments qui pouvaient intercepter des
20 lignes de relais radio, et qui pouvaient également ou grâce auxquelles nous
21 pouvions surveiller et suivre ces conversations téléphoniques. C'est
22 d'ailleurs en fonction de cette décision que nous nous trouvions à cet
23 endroit et, en fait, il y avait donc l'analyse qui était établie, l'analyse
24 pour surveiller une route donnée, et là, on s'est rendu compte en fait
25 qu'il y avait un grand nombre de renseignements secrets ou de
26 renseignements intéressants qui émanaient des civils ou de ces personnes
27 qui parlaient entre eux, et qui, en parlant, pendant, lors de leur
28 conversation, donnaient des noms de positions, faisaient référence au
Page 26441
1 nombre d'hommes, à certaines actions, et cetera, et cetera.
2 A la suite de quoi, on nous a dit qu'il faudrait que nous parlions à des
3 membres du 2e Corps de l'ABiH, de la République de Bosnie-Herzégovine, et
4 c'est ainsi en fait que nous nous sommes retrouvés à cet endroit.
5 Q. Merci. Vous faites référence à des fuites de renseignements, fuites
6 entendues dans des conversations de civils serbes, n'est-ce pas, et vous
7 nous dites que cela avait une certaine utilité. Pour vous, est-ce que vous
8 parliez également de conversations des civils musulmans ?
9 R. Ce qui était extrêmement important pour nous, c'était, bien entendu,
10 d'obtenir des renseignements émanant de votre camp, bien sûr.
11 Q. Merci. Etes-vous en mesure de nous dire si vous vous souvenez, si à la
12 fin de l'année 1994, le Président Carter avait obtenu une trêve de quatre
13 mois, donc avait réussi à obtenir cette trêve de quatre mois, trêve que
14 nous appelions la trêve de Carter ?
15 R. Oui, je me souviens de plusieurs cessez-le-feu qui avaient été conclus
16 afin de négocier justement. Mais je ne me souviens pas de cessez-le-feu
17 individuel, je ne me souviens pas non plus des périodes auxquelles ils ont
18 été conclus.
19 Q. Merci. Mais est-ce que vous vous souvenez que le 5 janvier 1995,
20 l'état-major général de l'armée de Bosnie-Herzégovine avait émis une
21 directive, une directive de combat qui avait ou qui aurait eu une incidence
22 sur les enclaves, et ce, cinq jours après la signature de ce cessez-le-feu
23 ?
24 R. Bien, écoutez, si vous m'avez bien entendu, si vous avez entendu ce que
25 je viens de vous dire, je ne me souviens pas de tout cela. Moi, je n'étais
26 informé des informations relatives aux lignes de front où se passaient, où
27 se déroulaient les actions.
28 Q. Mais vous ne pouvez pas établir le lien entre la formation de cette
Page 26442
1 équipe et ce lieu mentionné dans cette directive ? Là, nous parlons de la
2 fin du mois de décembre. Nous avions, à l'époque, un cessez-le-feu qui
3 était en vigueur, et par ailleurs, au même moment, nous avons cette
4 directive qui est émise. Alors, est-ce que, par la suite, vous avez appris
5 que vous aviez été là-bas à cause de la teneur de cette directive ?
6 Pourquoi est-ce que vous avez été envoyé là-bas en 1994, si ce n'est pour
7 cette raison ?
8 R. Excusez-moi.
9 Q. J'avais dit à la fin de l'année 1994, car cela n'a pas été consigné.
10 R. J'ai essayé de vous expliquer que nous n'avions ni le personnel ni les
11 ressources matérielles d'ailleurs et nous ne faisions pas ce genre de
12 travail auparavant. Tout simplement, nous sommes devenus conscients de ce
13 besoin qui existait. Des ressources militaires faisaient partie du PEB,
14 n'étaient pas suffisantes pour que nous puissions prendre en considération
15 la pléthore de conversations et tout d'ailleurs -- et tous les branchements
16 techniques que vous aviez hérités de l'armée populaire de Yougoslavie que
17 vous avez -- que vous utilisée. Donc, l'évaluation qui était faite portait
18 sur des renseignements que nous pouvions obtenir et qui étaient importants,
19 qui nous permettaient en fait de suivre et de superviser ces routes de
20 communication. Mais, par ailleurs, parallèlement, nous pouvions, en fait,
21 participer à cet exercice de surveillance et augmenter les ressources qui
22 étaient formes suffisantes. Donc, en fait, que nous sommes allés à cet
23 endroit n'a rien à voir avec des événements politiques, des négociations,
24 des cessez-le-feu ou quoi que ce soit de la sorte. Il n'y avait aucun lien
25 entre les deux choses.
26 Q. Vous avez dit avant la pause -- vous avez dit, donc, qu'il était
27 absolument interdit qu'un membre du service devienne un membre de la Ligue
28 patriotique et que cela ne se passait pas. Pourquoi est-ce que vous avez
Page 26443
1 dit cela ?
2 R. Ecoutez, je vais essayer de vous l'expliquer. Vous savez d'où je suis
3 originaire. Dans ma ville natale, en 1992 et pendant toute la guerre, les
4 collègues croates, serbes et bosniaques travaillaient conjointement, ce qui
5 était différent, d'ailleurs, dans la zone où vous vous trouviez et où se
6 trouvaient les dirigeants. Cela, vous le savez. Alors peut-être que vous
7 pouvez mentionner un ou deux Bosniaques, mais, bon, je ne pense pas qu'il y
8 en avaient qui travaillaient là-bas. Donc, moi, l'environnement, dans
9 lequel je travaillais, n'était pas encore touché par ce genre de question
10 et en tant que membre du service, ce que je préconisais, c'était qu'il
11 fallait qu'il y ait une organisation absolument apolitique. Il fallait
12 absolument cultiver une relation professionnelle et strictement
13 professionnelle et voilà, c'est ce que je voulais vous dire. Alors, hormis
14 le fait que nous avions des techniciens, des agents, des opérateurs, qui
15 étaient serbes et croates pendant toute la guerre, peu de temps avant la
16 guerre, il y a certains collègues qui sont allés dans d'autres entreprise
17 ou qui ont pris la retraite, à qui on a offert d'autres postes ou qui ont
18 été intéressés par un autre emploi. Il y en a d'autres qui sont -- qui ont
19 été intégrés au service et qui y ont passé tout le temps pendant la guerre.
20 Donc, je ne doute pas que le CDS ou le SDA -- le SDS --
21 L'INTERPRÈTE : -- se reprend l'interprète --
22 LE TÉMOIN : [interprétation] -- le SDA et le HDZ avaient utilisé
23 différentes options qui étaient à leur disposition et qu'ils avaient placé
24 leurs propres cadres dans le service, mais ce que je pense, c'est que 90 %
25 des personnes qui travaillaient étaient des professionnels. Ils faisaient
26 de façon professionnelle, ils s'acquittaient de leur travail. Mais ça,
27 c'est assez difficile d'expliquer la chose à des gens qui ne sont pas
28 originaires de Bosnie-Herzégovine, qu'en temps de conflit tel que le
Page 26444
1 conflit que nous avons connu dans un service tel que le nôtre, il est
2 difficile d'expliquer que nous avions encore dans le service pendant toute
3 cette période des membres des trois appartenances ethniques. Donc je vous
4 le dis afin de renforcer ce que j'ai déjà avancé, à savoir qu'il était
5 absolument impensable, absolument invraisemblable qu'à l'époque, l'on
6 puisse appartenir à la Ligue patriotique où à n'importe quel autre parti,
7 d'ailleurs.
8 (expurgé)
9 (expurgé)
10 (expurgé)
11 (expurgé) J'ai des problèmes à expliquer cette situation aux gens, parce
12 que les gens ne me comprennent pas et ils ne me croient pas; cependant, je
13 pense bien que vous -- que vous le savez.
14 Q. Merci. Mais moi, je voudrais que les Juges comprennent ce que vous
15 dites. Pourquoi il est impensable que les membres de la Ligue -- Ligue
16 patriotique se trouvent dans votre service ? Quel est ce différent énorme
17 qui les divise ?
18 R. Moi, je ne faisais pas partie de l'équipe opérationnelle qui s'occupait
19 de ces choses-là. Moi, je peux vous dire quelle a été la situation. En
20 revanche, lorsque les raisons des conflits -- d'un conflit éventuel, de
21 toute façon, vous-même, vous le savez que la Ligue patriotique, qui se
22 trouve dans la ville jusqu'en 1992, nous n'avons pas le droit de rester
23 dans la ville. Ils ont été transférés en dehors de la ville, parce que les
24 citoyens pensaient tous que leur présence était -- n'était pas nécessaire
25 et que leur présence rendait la situation encore plus complexe, parce que
26 les citoyens étaient dans un autre état d'esprit. Ils ne pensaient pas
27 qu'il y allait avoir la guerre et je pense que la composition multiethnique
28 de mon service et même de la police reflétait bien cet état d'esprit qui
Page 26445
1 régnait dans la ville.
2 Q. Je vous crois. Je crois ce que vous dites et je ne peux que vous en
3 féliciter, mais je voudrais savoir contre qui la Bosnie-Herzégovine était
4 en guerre en 1991.
5 Mme EDGERTON : [interprétation] Avant que le témoin ne réponde, je pense
6 que la page 33, lignes 22 à 23 -- à 24, devrait être expurgé, puisqu'on
7 peut voir quelle est la ville dont est originaire le témoin.
8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] La ligne 24 -- enfin, la page -- ligne
9 24, 3 …
10 Mme EDGERTON : [interprétation] 25 à 3.
11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] A-t-il mentionné sa ville ?
12 Mme EDGERTON : [interprétation] Il a décrit la situation qui prévalait et
13 elle était vraiment caractéristique pour cette localité.
14 M. LE JUGE KWON : [interprétation] On va faire ce que vous demandez de
15 faire.
16 Mme EDGERTON : [interprétation] Merci.
17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, vous pouvez
18 poursuivre.
19 M. KARADZIC : [interprétation]
20 Q. Pourriez-vous dire la Bosnie-Herzégovine était en guerre contre qui en
21 1991 ?
22 R. Vous me posez cette question sans doute à cause de ce certificat. Moi
23 aussi, je me suis posé la question à l'époque, parce que, moi, j'étais en
24 guerre contre personne. Cette décision a été prise au nouveau de l'Etat, à
25 savoir on a reconnu cette période comme la période de la participation à
26 l'effort de guerre et, de toute façon, je ne suis vraiment pas sûr pourquoi
27 ils ont fait cela et qui a bénéficié de tel certificat. Nous, en tant que
28 membre du MUP, on nous a reconnu ces années en tant que les années de
Page 26446
1 service. Mais, en même temps, je peux vous dire que la Bosnie-Herzégovine
2 n'était en guerre contre personne à l'époque.
3 Q. Est-ce que vous savez que l'on a reconnu la période de participation, à
4 l'effort de guerre pour certains depuis le 30 avril 1991, que c'est quelque
5 chose qui figure dans les lois de Bosnie-Herzégovine ?
6 R. Je pense que vous n'avez pas raison. C'est la première fois que
7 j'entends parler de cela.
8 Q. Merci. Nous avons ce document, et si on ne l'a pas encore versé au
9 dossier, on va le verser. Mais, bon, est-ce que l'on a reconnu donc les
10 années de service de combattants ou de vétérans aussi aux Serbes, et ceci
11 depuis l'année 1991 ?
12 R. En ce qui concerne mes collègues, les gens, qui ont travaillé avec moi,
13 on leur a reconnu ces années de service, tout comme on me les a reconnues à
14 moi.
15 Q. Merci. Est-ce qu'il vous est arrivé de passer sur écoute les membres de
16 l'ABiH ? Est-ce que vous étiez censé le faire, ou bien si -- par hasard, si
17 vous tombiez sur de telles conversations, est-ce qu'il vous est arrivé de
18 les enregistrer ? Que faisiez-vous avec ces conversations par la suite ?
19 R. Je vous ai déjà expliqué tout à l'heure que nous n'étions pas un nombre
20 suffisant pour vous écouter vous. Il y avait que très peu d'opérateurs,
21 très peu de technologie, et si au moment où nous étions en train de balayer
22 les fréquences, si nous tombions sur une fréquence utilisée par les nôtres,
23 parce qu'à vrai dire, moi, je ne sais même pas si notre armée utilisait ces
24 fréquences. Je n'en ai aucune idée à vrai dire. Mais si jamais si l'on
25 tombait sur des fréquences civils, on ne les plaçait sur écoute, on ne les
26 écoutait pas parce qu'il n'était pas besoin de les écouter parce que nous
27 avions suffisamment à faire avec vous.
28 Q. Merci. Est-ce que vous avez des problèmes --
Page 26447
1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais je vais demander que l'on passe à huis
2 clos partiel pour un instant.
3 M. KARADZIC : [interprétation]
4 Q. Donc est-ce que vous avez éprouvé des problèmes à cause de la présence
5 de l'autre structure, la structure des Nations Unies ?
6 Mais si je veux vous parler je voudrais demander au préalable de
7 passer à huis clos partiel.
8 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Peut-on passer à huis clos partiel, s'il
9 vous plaît ?
10 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel, Monsieur
11 Karadzic.
12 [Audience à huis clos partiel]
13 (expurgé)
14 (expurgé)
15 (expurgé)
16 (expurgé)
17 (expurgé)
18 (expurgé)
19 (expurgé)
20 (expurgé)
21 (expurgé)
22 (expurgé)
23 (expurgé)
24 (expurgé)
25 (expurgé)
26 (expurgé)
27 (expurgé)
28 (expurgé)
Page 26448
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13 Pages 26448-26449 expurgées. Audience à huis clos partiel.
14
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
Page 26450
1 (expurgé)
2 (expurgé)
3 [Audience publique]
4 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, vous pourrez
5 poursuivre.
6 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.
7 M. KARADZIC : [interprétation]
8 Q. Est-il exact que vous aviez un technicien qui enregistrait les
9 conversations, puis vous en aviez un autre qui transcrivait les écoutes
10 dans un cahier ?
11 R. Vous savez, là où j'étais, dans cette localité-là, tout le monde
12 faisait tout. Vous allez voir que, dans un cas précis, vous aviez un
13 employé qui avait enregistré la conversation, un autre qui l'a transcrite.
14 Mais, dans la pratique, comment les choses se présentent, vous avez deux
15 personnes assises ensemble avec l'équipement. Dans ce cas, il n'y a rien à
16 reproduire, ils sont en train d'écouter, donc de balayer les fréquences. A
17 un moment donné, ils sont tous les deux en train d'enregistrer les
18 conversations. Après cela, il sait mettre d'accord que l'un d'entre eux
19 allait transcrire les conversations entendues, alors que l'autre allait
20 continuer à écouter les conversations. Ou bien si rien ne se passe, les
21 deux vont profiter du moment, et se mettre à transcrire les conversations
22 tout en écoutant, en suivant ce qui se passe pour éventuellement
23 enregistrer la conversation au moment venu, en mettant à côté la
24 transcription en cours.
25 Q. Merci. Donc était-il possible ou même habituel que celui qui transcrit
26 la conversation n'est pas forcément la personne ayant écouté, enregistré la
27 conversation.
28 R. Oui, c'est tout à fait possible.
Page 26451
1 Q. Merci. Donc nous sommes d'accord, n'est-ce pas, pour dire que ces
2 commentaires, les explications, et cetera, provenaient de la personne ayant
3 transcrit la conversation, et pas de la personne ayant enregistré la
4 conversation ?
5 R. Je vous ai décrit un cas de figure tout à l'heure, quand on -- tout à
6 l'heure quand on a examiné la conversation de Gvero. Ces commentaires
7 étaient écrits à la fin d'une journée de travail, qu'un employé a écrit,
8 que ce jour-là, dans cette localité-là il n'y avait que Gvero que l'on
9 entendait. Quand un opérateur entend une conversation, qu'est-ce qu'il
10 note, l'heure, la fréquence et les participants. Donc celui qui va par la
11 suite transcrite cette conversation, il va utiliser ces notes pour écrire
12 le préambule de la conversation interceptée, où il va noter l'heure, la
13 fréquence et les participants. Qu'est-ce que cela veut dire ? Celui qui va
14 prendre la bande pour la transcrire, il va prendre, en même temps, ce bout
15 de papier avec les notes, il va voir que l'on a entendu, par exemple, la
16 présentation. On a parlé de cela tout à l'heure, mais que cela n'a pas été
17 enregistré sous la bande. Il va utiliser ces informations pour écrire ce
18 chapitre d'introduction, et là, il est absolument nécessaire qu'il y ait
19 une certaine coopération entre la personne ayant enregistré et la personne
20 qui va transcrire la conversation.
21 Q. Merci. Je vais vous demander d'examiner la pièce 65 ter, 23644. C'est
22 peut-être déjà une pièce à conviction, je n'en suis pas sûr. On peut donc
23 examiner cette pièce. Il ne faut pas la montrer au public.
24 Donc on ne va pas mentionner le nom de lieu. Ce que vous avez encadré ici,
25 dans le carré, est-ce bien la localité où vous vous trouviez, et ce que
26 l'on voie encerclé ? Est-ce bien la région que vous étiez en mesure de
27 suivre, d'écouter ?
28 R. Oui, c'est bien la localité où l'on se trouvait. En revanche, là cette
Page 26452
1 région n'était pas la seule région, la seule portée de nos écoutes.
2 Q. Vous pouviez écouter encore plus loin que cela, mais ça, c'est
3 certainement la région que vous pouviez suivre, n'est-ce pas, qui était à
4 votre portée ?
5 R. Oui, on va le dire comme cela. Il faudrait que je sois plus précis
6 peut-être. Mais j'essaie qu'à partir de cet endroit, on était en mesure à
7 peu près de couvrir toute cette région, et bien davantage.
8 Q. Cette partie que l'on voie ici, étiez-vous en mesure de l'écouter haut
9 la main, avec une écoute de qualité excellente ? Est-ce que vous avez eu
10 l'impression que vous pouviez très facilement donc écouter cette zone ?
11 R. Non, non, je ne suis pas d'accord avec vous. La Bosnie -- la
12 configuration du terrain en Bosnie est telle que rien n'est facile. Vous ne
13 pouvez jamais dire qu'on peut tout entendre, parce qu'à cause de montagne,
14 de vallées, de ravins, et cetera, vous étiez toujours en mesure d'obtenir
15 une fréquence protégée.
16 Q. Mais pour quelle raison il vous est arrivé parfois d'entendre un
17 participant et pas l'autre ?
18 R. Je vais essayer de vous expliquer cela. J'espère que vous allez pouvoir
19 me comprendre, d'ailleurs.
20 Donc, d'un côté, vous avez un participant qui parle en utilisant deux
21 fréquences, celle qui émane du premier participant et puis celle qui vient
22 en retour du deuxième participant. Il est nous arrivé parfois de très bien
23 entendre le participant de départ, l'énoncé, mais pas le retour, parce
24 qu'on n'arrivait pas à saisir la fréquence duplex. Bon, parfois, il nous
25 est arrivé d'y arriver et de trouver les deux fréquences, de saisir les
26 deux fréquences sur deux appareils différents, et là, on arrivait à
27 enregistrer la conversation en entier.
28 Puis, qu'est-ce qu'il pouvait arriver encore ? Vous aviez aussi la
Page 26453
1 qualité des appareils qui avaient ce rôle à jouer et qui influaient sur la
2 qualité du signal, de ce que l'on entendait. Donc, avec les écoutes
3 téléphoniques, en peaufinent les fréquences et la technologie. On arrivait
4 à entendre aussi l'autre participant à la conversation. Mais, évidemment,
5 le signal n'était jamais de la même qualité, il était toujours d'une
6 qualité moindre.
7 Q. Est-ce qu'il vous a été possible d'écouter des communications protégées
8 de la VRS ?
9 R. Alors, vous savez, quand j'étais là-bas, je ne savais même pas quelles
10 étaient vos communications protégées. Je vais vous donner un exemple. Il
11 nous est arrivé d'entendre les participants dire : "On est sur une ligne
12 protégée," l'autre disait : "Oui, oui, oui, tu peux y aller, tu peux parler
13 librement" et nous, on entendait tout. Mais ce qui a été protégé, c'était
14 la communication par téléscripteur, parce que, là, il s'agit effectivement
15 d'un chiffrage, et puis aussi, les signaux de téléfax, mais pas pour nous,
16 parce que nous, à l'époque, déjà, on était en mesure de déchiffrer ces
17 signaux.
18 Puis, encore, une chose. Il me semble qu'en 1995, je ne sais pas quel
19 mois de juillet, août, on a déjà commencé à utiliser -- vous avez déjà
20 commencé à utiliser des téléphones chiffrés brouillés, et donc, nous, on
21 entendait le parlé brouillé -- enfin, on comprenait bien, après avoir
22 entendu cela qu'il s'agissait là d'une -- d'un signal brouillé pour
23 protéger la conversation.
24 Q. Vous pouvez voir tout en bas sur la droite deux localités définies par
25 les lignes de front.
26 R. Oui, je les vois.
27 Q. Etiez-vous en mesure de placer sur écoute tout ce qui se trouvait dans
28 ces localités ?
Page 26454
1 R. Je ne sais pas dans quelle mesure vous comprenez comment cela
2 fonctionne. Je parle de communication par téléphone. Je vais essayer de
3 vous expliquer. Donc, si vous avez quelqu'un qui se trouve dans une grotte,
4 donc qui est parfaitement -- parfaitement protégée, s'il décroche le
5 combiné pour appeler son ami à Bijeljina, il doit faire partie d'un système
6 où la transmission va se faire par l'air. Dans cette partie-là de la
7 transmission, il va pouvoir être intercepté. Voilà ce que je veux essayer -
8 - ce que j'essaie de vous dire. Quelqu'un qui se trouvait dans la région
9 que vous avez marquée ici pouvait appeler et se trouver sur une fréquence
10 placée sur écoute. Mais si la conversation se déroulait à l'intérieur de
11 votre zone, celle que vous avez encerclée, peut-être qu'on n'était pas en
12 mesure de l'intercepter.
13 Q. Donc, vous parlez des lignes téléphoniques avez des fils, ou bien des
14 radio relais ?
15 R. Quand on parle de lignes téléphoniques, il y a la ligne entre ici et le
16 prochain immeuble, mais ensuite, elle passe par une antenne parabolique et
17 par l'air, donc, est susceptible d'être interceptée. C'est pour cela que je
18 pense que de nombreux officiers de la VRS pensaient qu'ils étaient sûrs
19 parce qu'ils étaient sur un téléphone -- sur une ligne téléphonique alors
20 que finalement, non, ce n'était pas toujours le cas.
21 Q. Au mois de juillet 1995, étiez-vous à votre place, à votre poste ?
22 R. Mais quelle place, quel poste ?
23 Q. Au sommet, là où vous travailliez ? Est-ce que vous étiez à votre -- à
24 votre poste de travail ?
25 R. Oui.
26 Q. Pourriez -- pouviez-vous suivre les communications entre l'endroit où
27 vous étiez et ces localités encerclées sur la carte ?
28 R. Peut-être le demandez-vous si nous avions des relations avec le
Page 26455
1 territoire que nous avions encerclé. Est-ce que nous pouvions avoir des
2 contacts directs avec cette région; c'est cela ?
3 Q. Je ne pense pas que vous aillez eu ces contacts, mais je pense que le
4 corps d'armée dont vous dépendiez avait ces contacts. Est-ce que vous aviez
5 enregistré tout cela ? Est-ce que vous étiez au courant de ce qui se
6 passait ?
7 R. Mon groupe n'avait pas de relation avec ce territoire et, voyez-vous,
8 moi, je ne suis pas au courant du fait que quelqu'un au sein du corps
9 d'armée ait eu des contacts avec ce territoire, car pour autant que je le
10 sache, ce territoire n'était équipé que de matériel destiné à des
11 interceptions. Enfin, je ne sais pas.
12 Q. Merci. Est-ce que vous aviez, d'une façon ou d'une autre, la
13 possibilité de suivre par moyens électroniques, éventuellement, ce qui se
14 passait sur ce territoire ?
15 R. A l'époque de la chute de Srebrenica, nous n'avions aucune possibilité
16 de suivre autre chose que ce que vous racontiez dans ces communications
17 dont nous avons parlé. Mais dans une certaine phase, nous avons réussi à
18 écouter des radios manuelles que de très nombreux hommes qui étaient sortis
19 de l'enclave utilisaient, des hommes qui faisaient partie de tous ces
20 groupes. Ces conversations-là, nous les écoutions. Nous avons même écouté
21 vos postes de radio manuels lorsque cela est devenu possible. Je ne peux
22 pas vous dire quelles sont les localités dont nous suivions les
23 conversations, mais nous sommes sûrs à 100 % que nous interceptions des --
24 nous interceptions des conversations de ces hommes-là et qu'il y avait de
25 l'autre côté d'autres postes de radio que nous écoutions aussi.
26 Q. Quand vous dites "vos postes de radio," vous voulez dire que vous
27 écoutiez aussi le poste de radio manuel que j'utilisais, moi ?
28 R. Non, je ne pensais pas à votre radio personnel, non.
Page 26456
1 Q. Merci. Maintenant, je vous demande si vous enregistriez les
2 conversations qui étaient échangées entre ces groupes d'hommes très
3 importants qui réussissaient à sortir; est-ce que vous suiviez aussi ces
4 conversations et les enregistriez ?
5 R. Malheureusement, non. Nous ne les avons pas enregistrées.
6 Q. Comment cela fait-il ? Pourquoi ne vous les avez-vous pas enregistrées
7 ?
8 R. Je vais vous dire comment cela s'est passé. Nous écoutions toutes
9 sortes de conversations et à partir de ces conversations nous nous sommes
10 rendus compte que c'est plusieurs milliers de personnes donc des groupes
11 énormes allaient quelque part, circulaient, se déplaçaient. Par ailleurs,
12 nous avons aussi écouté les forces serbes qui utilisaient des
13 communications radio pour semer la confusion dans les esprits de ces
14 groupes en les dirigeant vers d'autres destinations. Dans ce temps de
15 guerre, nous nous sommes efforcés d'écouter ces postes de radio manuel des
16 forces serbes pour brouiller leur signal mais, croyez-moi, nous ne sommes
17 pas parvenus, ils étaient trop loin. Quoi qu'il en soit, nous avons suivi
18 la situation et à un certain moment je sais que nous nous sommes rendus
19 compte que tout le monde était mobilisé à Zvornik, y compris la police, et
20 il a été dit qu'un groupe énorme composé de 3 000 personnes au moins se
21 déplaçait vers Zvornik pour une attaque. Mais ils ne savaient pas
22 exactement où se trouvaient ces groupes. Ils ne savaient pas où ils étaient
23 et de votre côté apparemment vous pensiez qu'il y avait une attaque alors
24 que ces personnes essayaient simplement de s'enfuir et étaient totalement
25 désorientés. Notre objectif était de brouiller leur signal. C'est ça que
26 nous avons essayé de faire.
27 Q. Merci. Est-ce que vous voulez dire que dans ces interceptions de
28 communication les différentes parties essayaient de brouiller les signaux,
Page 26457
1 de diffuser de la contre information électronique et se servaient de toutes
2 sortes de tactique de désinformation en envoyant des messages qui étaient
3 censés semer la confusion dans l'esprit de l'adversaire ?
4 R. Ça c'est autre chose. En ce moment, nous parlons d'un événement bien
5 particulier, bien concret. Nous parlons de membres de l'armée de la
6 Republika Srpska qui essayaient de pousser ces groupes énormes, enfin c'est
7 ce que nous avons appris plus tard, qui essayaient donc de les faire tomber
8 dans des embuscades. C'était cela l'objectif. C'était cela l'objectif.
9 Quant à la guerre spéciale, menée par voie de désinformation, c'est une
10 autre histoire et je ne crois pas que ce soit le sujet de nos débats en ce
11 moment.
12 Q. Mais, par exemple, si deux officiers serbes étaient en communication,
13 est-ce que vous pouviez déterminer s'ils vous trompaient sur les effectifs
14 en les augmentant ou en les diminuant, et s'ils essayaient de vous tromper
15 sur les intentions des forces serbes ? Est-ce que vous pouviez déterminer
16 dans certaines conversations que les éléments d'information communiqués
17 vous ne deviez pas leur faire confiance, peut-être ?
18 R. Les éléments d'information que nous avons obtenus en suivant les
19 communications radio, j'affirme qu'aucune désinformation n'a été diffusée
20 dans ces conversations car nous avons entendu pas mal de ces conversations
21 sur des fréquences protégées, c'est-à-dire qu'eux ne nous entendaient pas,
22 et cetera. Donc il n'y a pas eu diffusion de désinformation par cette voie.
23 Mais tous ces gens de l'enclave qui essayaient de sortir ce sont ces gens-
24 là qui utilisaient des radions manuels et qui ont été soumis à des
25 désinformations parce qu'on leur faisait savoir que ceci et cela se passait
26 et donc très pratiquement on essayait de les détourner de leur destination
27 initiale. Peut-être vous disposez-vous d'autres éléments mais, nous, à
28 partir de ces conversations, nous ne pouvions pas déterminer à quel moment
Page 26458
1 éventuellement des désinformations ont été diffusées par radio.
2 Q. Merci. Laissons de côté le mois de juillet 1995. Je vous pose une
3 question de principe : Est-ce qu'en principe, vous aviez la possibilité de
4 douter de certaines informations communiquées par radio en leur accordant
5 une importance plus ou moins grande, mais en pensant que, sur le principe,
6 c'étaient des communications destinées à tromper l'adversaire pour dire les
7 choses simplement ?
8 R. Je préférerais me limiter à ce qu'il m'est demandé de confirmer ici,
9 donc je préférerais parler des signaux que nous surveillions et écoutions,
10 Pour le reste, je préférerais ne pas en parler.
11 Q. Merci.
12 L'ACCUSÉ : [interprétation] Excellence, peut-on verser au dossier la carte
13 qui est à l'écran actuellement ?
14 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je crois que cela fait partie des pièces
15 associées liées à ce témoin.
16 Mme EDGERTON : [interprétation] Exact.
17 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.
18 L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. C'est ce que je pensais, mais je n'avais
19 pas encore reçu confirmation de cela.
20 M. KARADZIC : [interprétation]
21 Q. Qui décidait des priorités ? Qui décidait de ce qu'il fallait écouter
22 et donc des conversations qui étaient considérées comme des priorités ?
23 R. Nous avions une priorité qui était les communications concernant cette
24 route, en particulier des conversations émanant des plus hauts dirigeants
25 du côté serbe. Quelquefois sur cette fréquence, il y avait qu'une activité
26 donc l'opérateur avait la possibilité de prendre ses propres décisions pour
27 ce qui concernait les autres canaux en déterminant ce qui avait plus
28 d'importance et il agissait en conséquence.
Page 26459
1 Q. Merci. Mais comment est-ce que vous preniez vos décisions ? Comment
2 est-ce que les Serbes s'efforçaient de tromper les personnes qui tentaient
3 de sortir de l'enclave ? Est-ce qu'ils faisaient semblant d'être des postes
4 de radio musulmans ? Comment est-ce que vous avez découvert la
5 désinformation ?
6 R. Nous les avons écoutées pendant longtemps. Je crois me rappeler qu'à un
7 certain moment, un membre du 2e Corps -- parce qu'au sein du 2e Corps, ils
8 avaient des moyens de brouillage très importants nous ont laissé entendre
9 qu'il y avait des obstacles. Enfin, voilà comment les choses se passaient
10 et c'est là-dessus que nous nous concentrions. Nous nous concentrions
11 davantage sur certaines localités.
12 Q. Mais cela veut dire qu'ils étaient sur les mêmes fréquences que les
13 fréquences des postes de radio manuel musulman, parce que, si ce n'était
14 pas le cas, ils n'auraient pas pu les entendre, n'est-ce pas ?
15 R. Evidemment, ils ont trouvé ces fréquences. Ils les ont entendues, ils
16 se sont fixés sur leur fréquence et ils ont commencé à diffuser de la
17 désinformation. C'est exact.
18 Q. Merci. Donc, lorsque vous avez brouillé les postes de radio manuels des
19 Serbes, en même temps, vous avez brouillé les postes de radio manuels des
20 Musulmans, ou est-ce que vous pouviez utiliser des moyens de filtrage pour
21 distinguer entre les deux si vous étiez à la même fréquence ? Vous brûliez
22 les deux côtés, n'est-ce pas ?
23 R. Disons que j'entends ce que vous êtes en train de dire, mais dès que
24 moi, je commence à parler, il y a quelqu'un qui appui sur un bouton et qui
25 commence à brouiller ma conversation. Donc ce qu'on peut dire, c'est que
26 nous écoutions les gens de l'enclave et lorsqu'ils commençaient à émettre
27 de leur côté, nous appuyions sur un bouton pour brouiller la communication.
28 Voilà comment cela se passait.
Page 26460
1 Puisque nous sommes en train de parler de cela, voilà ce que je peux
2 dire. Un opérateur se trouve, par exemple, à un endroit déterminé et il a
3 un parent proche qui vient du secteur qu'il est en train, d'écouter. Plus
4 tard, lorsqu'ils en parlaient ensemble de ces interceptions de conversation
5 et de ce brouillage et de tout ce genre de choses, la personne, qui venait
6 de l'enclave, a dit à son interlocuteur qu'à un certain endroit, il avait
7 vu 3 000 cadavres au -- d'un bois, et que lui avait réussi à survivre. Il a
8 confirmé cet élément d'information à notre intention. Moi, je n'ai pas
9 encore parlé de cela ici et personne ne m'a posé de questions à ce sujet,
10 mais je vous dis qu'il y a des gens qui ont participé à ces événements et
11 je ne sais pas où se trouvait cette localité. Je ne suis pas allé, mais ce
12 parent proche de la personne, dont je vous parle, a confirmé qu'ils étaient
13 en train d'écouter ce groupe très nombreux qui était dirigé sur certaines
14 localités où des exécutions devaient avoir lieu.
15 Q. Vous parlez de gens qui ont été orientés vers des lieux où ils sont
16 tombés dans des embuscades; est-ce que cela signifie que ces personnes y
17 ont été conduites en fait et comment pouvez-vous direction que c'est un
18 Serbe qui a -- qui les a poussés à aller dans cette direction et pas un
19 Musulman ?
20 R. Je préférerais ne pas parler de cela. La seule chose que je vous dis,
21 c'est que dans la période dont nous parlons, nous avons entendu la partie
22 adverse, la partie serbe qui s'est servie des moyens de communication pour
23 désinformer les gens qui se trouvaient dans les bois, et ce dont je suis en
24 train de parler -- enfin, je ne sais pas si ces personnes ont été dirigées
25 vers des champs de mine ou quoi que ce soit de genre. Ce que je dis, c'est
26 que, dans une conversation qui a eu lieu après les événements, une
27 conversation qu'un des habitants de l'enclave a eu avec un de ses cousins,
28 il a été confirmé que les personnes, qui sortaient de l'enclave, ont été
Page 26461
1 conduites jusqu'à des lieux où ils sont tombés dans des embuscades et où de
2 nombreuses personnes ont été tuées.
3 Q. C'est exactement la question que je vous pose : Est-ce que vous avez pu
4 suivre par des moyens électroniques ce qui se passait des les bois ? Est-ce
5 que vous avez eu la possibilité de constater le nombre de personnes tuées
6 et la façon dont ces personnes avaient été tuées, la façon dont elles sont
7 mortes ? Est-ce qu'elles ont été tuées par des tirs d'artillerie ou bien en
8 sautant sur des mines ou bien par des tirs d'armes d'infanterie ? Est-ce
9 que vous avez pu déterminer le nombre de victimes et le lieu où ces
10 victimes ont été tuées ?
11 R. Nous n'avons rien pu apprendre au sujet du nombre de victimes ou des
12 endroits où elles ont été tuées. Pour être plus précis, nous ne savions pas
13 -- enfin, nous n'avons pas réussi à brouiller les communications, car ces
14 personnes étaient trop loin, si je me souviens bien, donc, nous n'avons pas
15 pu déterminer le nombre de victimes ou les itinéraires suivis par ces
16 victimes. Nous ne savions rien. Nous savions que des massacres avaient eu
17 lieu. Nous l'avons entendu dire dans des conversations que nous avons
18 interceptées. A Zvornik, lorsque nous avons entendu des gens qui disaient :
19 "Il y a 3 000 personnes qui se dirigent vers nous," nous savions ce genre
20 de choses, nous savions ce qu'il en était plus ou moins à partir des
21 conversations. Je ne peux rien vous dire d'autre.
22 Q. Est-ce que vous avez enregistré ces communications importantes ?
23 R. Je vous ai déjà dit que, malheureusement, nous ne les avons pas
24 interceptées -- enregistrées.
25 Q. Mais il y a encore quelque chose que je comprends mal. J'aimerais que
26 nous précisions une chose. Si une radio manuelle serbe est utilisée dans le
27 but de semer la confusion dans les esprits des Musulmans, est-ce que la
28 personne qui utilise cette radio se présente comme étant serbe ou comme
Page 26462
1 étant musulmane ?
2 R. Evidemment, celui qui utilise cette radio se présente comme Musulman;
3 sinon, il ne pourrait pas semer la confusion.
4 Q. Comment est-ce que vous avez pu déterminer que cet homme se présentait
5 sous une fausse appartenance ethnique et qu'en fait, il ne s'agissait pas
6 d'un Musulman ?
7 R. Nous sommes parvenus à le déterminer. Nous y sommes parvenus.
8 D'ailleurs, quand on écoute, c'est tout à fait clair. On le sent. Nous
9 avons même essayé et peut-être avons-nous parfois réussi. Je n'ai pas eu
10 d'informations en retour. Nous avons même essayé de leur faire savoir
11 qu'ils recevaient des informations fausses.
12 Q. Monsieur, vous et moi appartenons à la même espèce, nous parlons la
13 même langue, nous avons les mêmes intonations dans notre façon de parler.
14 Comment est-ce que vous aviez -- vous avez pu faire la différence entre
15 telle ou telle personne appartenant à tel ou tel groupe ethnique et une
16 autre personne appartenant, et vous-même --
17 L'INTERPRÈTE : -- correction de l'interprète.
18 M. KARADZIC : [interprétation]
19 Q. Comment est-ce que vous pouviez le déterminer simplement à partir d'une
20 conversation ?
21 R. A un certain moment, j'ai dit que nous avions reçu des indices par des
22 membres du 2e Corps. Je ne sais pas s'il y avait quelqu'un qui était chargé
23 d'établir ce genre de chose, mais quand on écoute des personnes qui parlent
24 ensemble, on se rend compte qu'il y a un groupe qui s'efforce sans relâche
25 de tromper l'autre groupe. On peut déterminer cela quand on se rend compte
26 que le membre d'un groupe est très fatigué, est épuisé. On l'entend dans la
27 façon de parler de cette personne. Je ne sais pas pourquoi vous insistez
28 sur ce genre de détails.
Page 26463
1 J'ai mentionné cet événement. Il y a des indices qui ont montré que
2 des gens ont été tués dans cette localité. C'est tout ce que je peux vous
3 dire et c'est ce qui s'est passé et je le maintiens.
4 Q. Je vous remercie.
5 L'ACCUSÉ : [interprétation] Excellence, je n'ai plus de questions à poser à
6 ce témoin.
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur Karadzic.
8 Madame Edgerton, vous avez des questions supplémentaires ?
9 Mme EDGERTON : [interprétation] Cinq à sept minutes, si vous me le
10 permettez, Monsieur le Président.
11 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, veuillez procéder.
12 Mme EDGERTON : [interprétation] Après, nous pourrons traiter des pièces à
13 conviction et j'ai une réponse à fournir aux Juges de la Chambre.
14 Nouvel interrogatoire par Mme Edgerton :
15 Q. [interprétation] Docteur -- le docteur Karadzic a consacré pas mal de
16 temps aujourd'hui à parler d'un certain nombre de conversations
17 interceptées, à savoir des pièces P4629 et P4630. Il a parlé de la façon
18 dont on s'adressait au président et dont il a été possible d'intercepter un
19 des participants à une conversation comme étant l'interlocuteur du général
20 Gvero et de déterminer qu'il s'agissait du président.
21 J'aimerais que nous revenions sur ces conversations du 11 juillet.
22 Mme EDGERTON : [interprétation] Premier document 65 ter, c'est le numéro
23 30927. J'aimerais qu'on l'affiche à l'écran.
24 Q. Il s'agit de la conversation pour laquelle je me suis levée pendant le
25 contre-interrogatoire alors qu'on discutait des pièces P4629 et P4630,
26 conversation du 11 juillet à 16 heures 10 entre le général Gvero et Nicolai
27 à la fréquence 83600.
28 A peu près au milieu de cette conversation, au milieu de la page, en bas de
Page 26464
1 la version anglaise de cette page, est-ce que vous voyez cet endroit où le
2 général Gvero déclare, je cite :
3 "Dites au général qu'au cas où il ne leur donne pas un arrêt de
4 bombardement, et ne retire pas les avions de l'OTAN, il va devoir supporter
5 toutes les conséquences et toute la responsabilité."
6 Est-ce que vous voyez ce passage ?
7 R. Oui, je le vois.
8 Q. Très bien. donc laissons de côté pendant un instant la première partie
9 de la conversation au sujet des aéroplanes, à 16 heures 10, laissons donc
10 ce document de côté et passons à la pièce 4629. Conversation interceptée
11 sur la même fréquence, à 16 heures 23, le général Gvero rend compte au Dr
12 Karadzic de sa conversation avec le général Nicolaï.
13 L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pourrions avoir plus de détail
14 quant aux éléments qui ont permis de déterminer qu'il s'agissait du Dr
15 Karadzic ou bien le seul élément est-il le fait que cela soit écrit dans ce
16 document ?
17 Mme EDGERTON : [interprétation] Monsieur le Président, puis-je poursuivre ?
18 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, ce sujet a été abordé pendant
19 l'interrogatoire principal et pendant le contre-interrogatoire.
20 Donc, sur cette base, Mme Edgerton est autorisée à poser la question
21 qu'elle souhaite poser.
22 Mme EDGERTON : [interprétation] Merci.
23 Q. Dans cette conversation que l'on voie, au bas de la page affichée à
24 l'écran, dans votre langue, Monsieur le Témoin, vous trouvez une nouvelle
25 référence aux avions de l'OTAN et le général Gvero dit, je cite :
26 "Je lui demande d'arrêter immédiatement l'opération et de faire
27 sortir ces avions de notre espace aérien."
28 Donc il y a deux conversations à une quinzaine de minutes d'intervalle
Page 26465
1 l'une de l'autre, qui évoque ces avions, toutes les deux, n'est-ce pas ?
2 Vous hochez de la tête; qu'est-ce que cela signifie ?
3 R. Je ne vois pas à quel moment a commencé la première conversation, oui,
4 16 heures 10 pour une conversation; 13 heures 23 pour l'autre; oui, c'est
5 bien ça, oui.
6 Q. J'aimerais que nous passions à la pièce 4360, à présent. C'est une
7 troisième conversation en date du 11 juillet, deuxième conversation avec le
8 Dr Karadzic, et nous en avons déjà parlé. Elle a eu lieu 20 minutes après
9 la conversation qui avait eu lieu à 16 heures 23; est-ce que vous voyez
10 dans cette conversation-ci --
11 Mme EDGERTON : [interprétation] J'attends un instant pour que la version
12 anglaise s'affiche aussi à l'écran, pour l'instant nous avons deux versions
13 en B/C/S à l'écran.
14 Merci.
15 Q. Est-ce que vous voyez dans cette conversation le moment où le général
16 Gvero dit au Dr Karadzic, ils sont de nouveau dans l'espace aérien -- dans
17 le ciel.
18 R. Oui, oui.
19 Q. Maintenant, j'aimerais vous montrer des interceptions de communication
20 radio, conversations interceptées par les autorités croates le même jour,
21 c'est-à-dire le 11 juillet, exactement au même moment, ou une minute plus
22 tard c'est-à-dire à 16 heures 41, et c'est le document de la liste 65 ter,
23 je vous demande une seconde, 32445.
24 Dans cette conversation, les autorités croates ont identifié le Dr Karadzic
25 comme étant un des interlocuteurs.
26 Je vous laisse quelques instants pour consulter le document. Vous
27 voyez que le Dr Karadzic, à la fin de cette conversation, dit :
28 "Oui, oui, je crois; cependant s'ils descendent, descendez-les."
Page 26466
1 Je vois que vous hochez de la tête, qu'est-ce que cela signifie ?
2 R. Je vois des itinéraires que l'on ne pouvait pas entendre ou que l'on
3 n'a pas entendu.
4 Q. Alors, au vu de ces conversations qui ont lieu à un intervalle de trois
5 minutes l'une de l'autre, le même jour, deux conversations de deux sources
6 différentes ont lieu approximativement à la même période, sur le même
7 sujet, c'est-à-dire on parle d'aéronef. Est-ce que vous auriez des
8 commentaires supplémentaires concernant le fait qu'on a identifié le Dr
9 Karadzic comme étant l'un des interlocuteurs dans les deux conversations
10 que nous avons abordées dans votre interrogatoire principal, conversations
11 qui ont été enregistrées par votre unité ?
12 R. Je suis plus que certain qu'il s'agissait de M. Karadzic dans ces
13 conversations, parce qu'il s'agit de sujets très importants. Il s'agit de
14 questions cruciales et personne n'opterait pour un interlocuteur de rang
15 inférieur afin d'aborder ce genre de question.
16 De plus, ces conversations ont été enregistrées par des groupes de
17 personnes totalement indépendantes les uns des autres. Je ne peux
18 maintenant pas vous dire s'il s'agit exactement de la même conversation, et
19 si on les comparait, je ne sais pas si on aurait exactement la même chose.
20 Q. Une dernière question de façon à ce que le compte rendu d'audience soit
21 très clair. Je voudrais que l'on revienne à la conversation qui a la
22 référence 30927. La première conversation que j'ai abordée lorsque je
23 commençais à vous poser mes questions supplémentaires. Est-ce que c'est une
24 conversation qui a été enregistrée et retranscrite par vos unités ?
25 M. LE JUGE KWON : [interprétation] La conversation avec le général Nicolaï.
26 Mme EDGERTON : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait l'afficher à
27 nouveau de façon à ce que le témoin sache exactement de quoi il s'agit ?
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est un de nos rapports effectivement.
Page 26467
1 Mme EDGERTON : [interprétation]
2 Q. Merci.
3 Mme EDGERTON : [interprétation] J'aimerais que le document, qui a la
4 référence 30927 [phon], soit versé comme pièce au dossier, et que le
5 document qui a la référence 32445 reçoive une cote provisoire aux fins
6 d'identification.
7 M. LE JUGE KWON : [interprétation] D'accord.
8 M. LE GREFFIER : [interprétation] Le document de la liste 65 ter 30927
9 recevra la cote à charge P4632, et le document de la liste 65 ter, 32445,
10 recevra une cote à titre provisoire aux fins d'identification, P4633.
11 Mme EDGERTON : [interprétation] Pas d'autres questions supplémentaires.
12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur le Témoin, ceci met un terme à
13 votre déposition.
14 Au nom des Juges de cette Chambre, et du Tribunal dans son ensemble, nous
15 souhaiterions vous remercier d'être venu à La Haye pour cette déposition.
16 Vous pouvez maintenant vaquer à vos occupations.
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
18 M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]
19 L'INTERPRÈTE : Le Président hors micro.
20 M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]
21 L'INTERPRÈTE : Toujours hors micro.
22 Mme EDGERTON : [interprétation] Avant que le témoin ne quitte le prétoire,
23 peut-être qu'on pourrait parler des pièces associées ?
24 M. LE JUGE KWON : [interprétation] D'accord, Madame Edgerton.
25 Mme EDGERTON : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Messieurs
26 les Juges, le document 65 ter 03383, est maintenant complètement traduit
27 vous vous souvenez qu'une phrase devait encore être traduite c'est fait et
28 quant à la traduction de l'autre document de la liste 65 ter elle figure
Page 26468
1 maintenant dans le système de prétoire électronique.
2 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Pour ce qui est des pièces qui
3 devraient restées sous pli scellé …
4 Mme EDGERTON : [interprétation] Ce que je vous propose, Monsieur le
5 Président, c'est que bien sûr, le document de la liste 65 ter 23655 devrait
6 être sous pli scellé, et la carte 23644, cette carte que nous avons
7 abordée, devrait également être sous pli scellé. Quant au document qui a la
8 référence 3383 et que le document noté par le témoin, et le document 23651
9 devraient tous les deux être sous pli scellé. Mais avec également quelques
10 légères expurgations au niveau -- je pense que ces documents pourraient
11 être des documents publics, ils n'auraient plus besoin d'être sous pli scellé --
12 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il n'y a pas d'opposition de la part de
13 la Défense.
14 M. ROBINSON : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président.
15 M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.
16 Nous allons faire une pause d'une demi-heure et nous reprendrons à 12
17 heures 35.
18 [Le témoin se retire]
19 --- L'audience est suspendue à 12 heures 06.
20 [Audience à huis clos]
21 (expurgé)
22 (expurgé)
23 (expurgé)
24 (expurgé)
25 (expurgé)
26 (expurgé)
27 (expurgé)
28 (expurgé)
Page 26469
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13 Pages 26469-26494 expurgées. Audience à huis clos.
14
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28
Page 26495
1 (expurgé)
2 (expurgé)
3 (expurgé)
4 (expurgé)
5 (expurgé)
6 (expurgé)
7 (expurgé)
8 (expurgé)
9 (expurgé)
10 (expurgé)
11 (expurgé)
12 (expurgé)
13 --- L'audience est levée à 13 heures 47 et reprendra le mercredi 21 mars
14 2012, à 9 heures 00.
15
16
17
18
19
20
21
22
23
24
25
26
27
28