Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1   Le mercredi 2 mai 2012

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   [Le témoin vient à la barre]

  5   --- L'audience est ouverte à 9 heures 02.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour à toutes et à tous.

  7   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avant de commencer, Monsieur Tieger,

  9   hier, l'accusé a déposé sa réponse à la requête demandant l'admission de la

 10   déposition de Milan Tupajic. Il s'oppose, dans sa réponse à la requête, qui

 11   avait été déposée par l'Accusation le 16 avril 2012. Comme plusieurs

 12   contestations sont contenues dans la réponse qui n'avait pas été abordée

 13   dans la requête, y compris des questions qui concernent plusieurs

 14   dispositions du Règlement de procédure et de preuve, la Chambre

 15   souhaiterait que vous répondiez par une réplique.

 16   M. TIEGER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] A quel moment est-ce que vous seriez en

 18   mesure de le faire ?

 19   M. TIEGER : [interprétation] Je suis en train d'essayer de voir si je

 20   pourrais le faire -- ou plutôt, à quel moment je pourrais le faire. Est-ce

 21   que je pourrais vous en parler plus en détail aujourd'hui au cours de la

 22   journée ? Bien entendu, nous comprenons qu'il faudrait réagir au plus

 23   rapidement, et c'est ce que nous avons l'intention de faire, mais il

 24   faudrait être réaliste donc voir à quel moment cela pourrait se faire très

 25   précisément.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je souhaiterais que vous répondiez au

 27   plus tard demain, jeudi.

 28   M. TIEGER : [interprétation] Oui, j'ai compris, Monsieur le Président.


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Karadzic.

  2   Ou plutôt, Maître Robinson.

  3   M. ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je souhaite

  4   parler de l'écriture qui a été déposée par la France hier. Est-ce que nous

  5   pouvons passer à huis clos partiel, s'il vous plaît ?

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que nous pouvons parler en

  7   présence de ce témoin ?

  8   M. ROBINSON : [interprétation] Oui, tout à fait, sans problème.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Passons à huis clos partiel,

 10   s'il vous plaît, un instant.

 11   [Audience à huis clos partiel] [Confidentialité levée par une ordonnance de la Chambre]

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, je vous écoute, Maître Robinson.

 13   M. ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. C'est à titre

 14   confidentiel que le gouvernement français réagir en envoyant une écriture

 15   vendredi une note verbale concernant notre requête demandant le droit de

 16   rencontrer Milomir Stakic et en application de l'invitation qui a été

 17   rendue publiquement par la Chambre de première instance, et nous avons deux

 18   requêtes à cet égard. Premièrement, nous souhaitons que l'ensemble des

 19   débats soit rendu public parce qu'il n'y a pas de raison que cette réponse

 20   soit déposée à titre confidentiel et aussi si nous pouvons bénéficier du

 21   droit de répondre pour offrir une solution à la sortie de l'impasse dans

 22   laquelle qui semble être énoncée, évoquée dans cette note verbale.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] La Chambre se penchera sur la question

 24   de la confidentialité ou non.

 25   A moins que ce soit précisé de manière spécifique, il semblerait par

 26   précaution qu'il vaudrait mieux que vous répondiez à titre confidentiel,

 27   pour l'instant.

 28   Revenons en audience publique, s'il vous plaît.


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  1   [Audience publique]

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Karadzic.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Bonjour. Merci, Excellences.

  4   LE TÉMOIN : EWA TABEAU [Reprise]

  5   [Le témoin répond par l'interprète]

  6   Contre-interrogatoire par M. Karadzic : [Suite]

  7   Q.  [interprétation] Bonjour, Professeur Tabeau.

  8   R.  Bonjour.

  9   Q.  Ce qui m'intéresse c'est une affirmation dans votre rapport. Est-ce que

 10   le recensement de 1991 reconnaît la catégorie yougoslave de citoyens qui se

 11   déclarent comme yougoslaves, est-ce qu'ils constituent une catégorie

 12   spéciale ?

 13   R.  Comme je l'ai déjà dit, l'appartenance ethnique était une question

 14   ouverte. On pouvait déclarer ceux qu'on souhaitait, y compris Yougoslaves.

 15   Mais il n'y avait pas de définition spéciale de l'expression yougoslave

 16   donc qui est Yougoslave et qui ne l'est pas.

 17   Q.  D'accord. Mais, vous dans votre analyse, vous ne séparez pas les

 18   Yougoslaves vous n'en faites pas une catégorie à part, en fait. Vous les

 19   mélangez aux autres ?

 20   R.  Ils font partie de la catégorie "autres," avec tous les autres groupes

 21   ethniques qui ne sont pas les Musulmans, les Serbes, et les Croates.

 22   Q.  Merci. Seriez-vous d'accord pour confirmer que, parmi ces "autres," les

 23   Yougoslaves sont tellement plus nombreux qui constituent les deux tiers ou

 24   les trois quarts même des autres ? Donc il aurait été naturel, n'est-ce

 25   pas, de rattacher les autres Yougoslaves que de faire l'inverse ?

 26   R.  Ecoutez, je ne sais pas exactement combien il y avait de Yougoslaves

 27   dans ce groupe des autres. Etaient-ils -- constituaient-ils les deux tiers

 28   ou les trois quarts du groupe. Mais je cherchais à dégager les nombres pour


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  1   les trois groupes ethniques principaux, et puis il y avait des statistiques

  2   aussi pour les autres groupes ethniques pour que les statistiques soient

  3   complètes. Mais je ne suis pas particulièrement intéressée à distinguer les

  4   Yougoslaves des autres, d'ailleurs ni les Yougoslaves ni tout autre groupe

  5   ethnique qui en faisait partie.

  6   Q.  Mais d'expérience, pouvez-vous nous dire de quelle origine sont ces

  7   Yougoslaves ? Qui sont-ils ?

  8   R.  A mes yeux, ce sont des Yougoslaves, comme cela est déclaré dans le

  9   recensement. Mais, bien sûr, en fonction de celui qui s'exprime les

 10   Yougoslaves peuvent être, soit, des Serbes, soit, dans Croates, soit, dans

 11   d'autres cas, des Musulmans.

 12   Donc, à mon sens, ce sont des Yougoslaves, donc à mes yeux, c'est ce qui

 13   est écrit dans le recensement.

 14   Q.  D'accord. Dites-moi : d'expérience, en 1991 au moment de la

 15   décomposition de la Yougoslavie, parmi ces Yougoslaves, il y avait combien

 16   de Croates et combien de Musulmans ?

 17   R.  Alors les Yougoslaves sont des Yougoslaves pour moi, donc la question

 18   est de savoir comment les gens se perçoivent. Ceux qui se percevaient comme

 19   Yougoslaves se sont déclarés comme tels. Vous avez des gens issus de

 20   mariages mixtes, nombre d'entre eux étaient des gens qui vivaient dans des

 21   contextes urbains. Ils ne se voyaient pas appartenir à l'un ou l'autre

 22   groupe ethnique, et se sont déclarés yougoslaves.

 23   Q.  Avec tous mes respects, si vous étiez originaire de chez nous, je vous

 24   dirai que c'est là de la propagande communiste que vous divulguez. Ce qui

 25   nous intéresse c'est la substance et non pas la forme. La forme, c'est que

 26   c'était ceux qui étaient prêts à sacrifier leur appartenance ethnique à la

 27   préservation de la Yougoslavie. Est-ce que vous avez compris que cette sous

 28   catégorie était très importante, et qu'il y a eu d'énorme fluctuations de


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  1   ce groupe d'un recensement à l'autre, et que ce groupe ne suivait pas

  2   l'évolution démographique habituelle, l'évolution démographique typique des

  3   autres groupes ?

  4   R.  Ce qu'on a tendance à oublier, ce que vous semblez oublier, Monsieur

  5   Karadzic, vous aussi, c'est que les Yougoslaves et d'autres déclarations

  6   d'appartenance ethnique dépendent de la manière dont on formule la question

  7   dans le recensement, dépendent aussi des instructions que ceux qui ont mené

  8   les entretiens ont posé, ont reçu pour poser leurs questions.

  9   Donc je pense que, jusqu'à l'année 1971, lors des recensements, cette

 10   question n'était pas une question ouverte. Ce sont ceux qui menaient les

 11   entretiens qui décidaient de la manière d'enregistrer la déclaration

 12   d'appartenance ethnique, et ça a changé depuis 1971. A partir de ce moment-

 13   là, les gens pouvaient déclarer ce qu'ils souhaitaient librement, et ça

 14   avait une incidence très grave sur les nombres en fait qui en résultaient

 15   pour chaque groupe ethnique. Récemment, j'ai vu une étude dans une

 16   publication spécialisée, il n'était pas possible d'analyser les groupes par

 17   groupe ethnique pour l'ensemble de la période, à partir de la Seconde

 18   Guerre mondiale, à commencer par le premier recensement qui a eu lieu, je

 19   pense en 1948 jusqu'au dernier recensement de 1991, donc elle a été

 20   possible uniquement d'étudier l'appartenance ethnique pour les derniers

 21   recensements où il y a été tenu compte de manière cohérente et exhaustive

 22   des déclarations pour chaque groupe ethnique et pour les Yougoslaves.

 23   Donc ce que j'essayais de dire, c'est que la définition de cette question

 24   dans le recensement a une importance décisive sur les chiffres qui vont

 25   résulter du recensement. Donc, si vous ne vous intéressez pas à la

 26   définition elle-même, si vous n'en tenez pas compte, si vous ne vous

 27   penchez que sur les nombres, alors vous arrivez à quelque chose qui ne

 28   correspond aux données réelles. Donc il vous faut prendre en compte la


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  1   cohérence de la définition de l'appartenance ethnique, donc la définition

  2   qui a été utilisée tout au long des différents recensements.

  3   Q.  Ecoutez, je vais être tout à fait franc, Madame Tabeau, 230 et quelque

  4   milles, et le chiffre qui correspond aux Yougoslaves de Bosnie-Herzégovine.

  5   Alors, sur ce chiffre-là, en 1991, 200 000 étaient des Serbes, je suppose,

  6   et lorsque vous les rattachez aux autres, donc ils constituent un tiers ou

  7   un quart de ce total, en fait l'image que vous donnez de la distribution

  8   ethnique est complètement erroné, n'est-ce pas ?

  9   R.  Mais bien entendu que cela n'est pas vrai. Pour quelle raison est-ce

 10   que vous affirmez que ceux, qui se sont déclarés Yougoslaves, étaient des

 11   Serbes. Vous ne pouvez pas procéder ainsi, cela revient à modifier les

 12   réponses dans le recensement. Il n'y a pas de justification à cela, et cela

 13   est faux, est erroné, vous ne pouvez pas faire cela.

 14   Q.  D'accord. Mais lorsque vous avez une catégorie distincte dans le

 15   recensement, vous n'avez pas le droit non plus de la fusionner avec les

 16   autres. Nous savons tous, tous qui, en 1991, étaient favorables à la

 17   Yougoslavie. Pourquoi est-ce qu'on ne les a pas représentés comme catégorie

 18   distincte ? Pourquoi est-ce qu'on les a rattachés à une minorité ?

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous rentrez dans une polémique. Je

 20   pense que vous avez épuisé la question.

 21   Passons à autre chose.

 22   M. KARADZIC : [interprétation]

 23   Q.  Prenons le chapitre 2, si vous voulez bien, le chapitre 2.1 où il est

 24   question de pourcentage de Musulmans dans les différentes municipalités de

 25   Bosnie-Herzégovine, faisant partie de l'acte d'accusation dans l'affaire

 26   Karadzic. Hier, nous nous sommes déjà intéressés à cela, nous avons dit

 27   qu'il y avait 41 % en 1991, 32.8 % en 1992, pour la même catégorie.

 28   Alors est-ce que vous avez pu savoir quels sont les facteurs qui ont


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  1   influencé la situation ?

  2   Mme WEST : [interprétation] Je souhaite indiquer qu'il serait mieux si on

  3   prenait la pièce P4994, page 9.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Pour répondre à la question qui est de savoir

  6   si j'ai étudié les facteurs qui ont eu une incidence sur cette réduction du

  7   pourcentage, ma réponse est non, je ne l'ai pas fait. Toutefois, j'indique

  8   qu'une étude a été faite des déplacements de groupes ethniques et que cela

  9   fait partie du même rapport. Donc lorsqu'on parle du changement au niveau

 10   de la composition ethnique, il faut en parler tout en tenant compte des

 11   résultats de l'étude sur les déplacements.

 12   Si je puis ajouter un commentaire, hier, en fin d'audience, la dernière

 13   question qui a été posée était de savoir pourquoi est-ce que cela

 14   constituait 19.9 % de réduction et non pas 20 %. J'ai vérifié,

 15   effectivement c'est à cause de l'erreur marginale. Donc 41 % constituent en

 16   fait -- correspondent en fait à 40.9552 donc il s'agit de petite différence

 17   d'une place décimale, c'est de là que vient cette différence dans le

 18   rapport.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie, Professeur.

 20   M. KARADZIC : [interprétation]

 21   Q.  Donc ces 19 % et quelque, est-ce que vous avez pu savoir quelle est la

 22   différence entre les Musulmans qui sont restés dans ces municipalités

 23   serbes, et ceux qui sont partis ?

 24   R.  Oui, en réalité. Prenez le point 2.2. Vous verrez les chiffres ad

 25   minima de Musulmans déplacés, ils figurent ici. Donc au deuxième paragraphe

 26   de ce chapitre, nous voyons 161 047 personnes, donc le reste de la

 27   population de 1997 reste sur le même territoire. Alors, pour savoir quelle

 28   est l'importance, quelle est la taille de ce groupe qui reste ? Il nous


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  1   faut aller dans les annexes, le tableau 2, qui donne les chiffres pour les

  2   Musulmans.

  3   Mme WEST : [interprétation] Page 42 dans le prétoire électronique.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Cela ne s'affiche pas encore à l'écran. Je

  5   vais attendre un petit peu.

  6   Est-ce que vous pouvez nous faire un gros plan du premier -- de la première

  7   ligne, donc la zone couverte par l'acte d'accusation Karadzic ? Donc nous

  8   avons 161 047. Ce sont les Musulmans déplacés. Mais dans son ensemble, la

  9   population musulmane, qui a été identifiée en 1997, correspond à 283 199.

 10   Donc ça c'est le chiffre que nous voyons inscrit à gauche par rapport à

 11   161 000.

 12   Donc ce tableau vous permet aussi de voir que la partie de la population

 13   déplacée en 1997 pour ce qui est de la population musulmane correspond à

 14   56,9 %, donc vous avez cela dans l'avant-dernière colonne du même tableau.

 15   Donc presque 57 %.

 16   Les autres sont ceux qui sont restés. Donc 43 % à peu près. Donc ces

 17   chiffres figurent dans le rapport mais, de toute évidence, le rapport se

 18   concentre sur les personnes déplacées. Par conséquent, ce sont les chiffres

 19   qui correspondent à ceux qui sont déplacés qui font l'objet d'analyse.

 20   Il faudrait peut-être aussi voir la présentation dont il a été déjà

 21   question. Prenez la page 2 de la présentation.

 22   Mme WEST : [interprétation] Il s'agit de la pièce P05010.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Voyez le tableau 4 en bas, c'est en bas de la

 24   page.

 25   Mme WEST : [interprétation] Page suivante, s'il vous plaît.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Le tableau 4. Donc la deuxième colonne vous

 27   avez le chiffre minimum des personnes déplacées et des réfugiées, pour les

 28   Musulmans c'est 161 047, donc le nombre que l'on vient de mentionner, et


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  1   puis ensuite, vous avez les statistiques qui correspondent aux personnes

  2   déplacées faisant partie d'autres groupes ethniques, et vous avez en tout

  3   286 972 personnes déplacées. Les Musulmans -- donc ceux qui font partie du

  4   groupe ethnique musulman dépassent de loin en nombre les autres dans le

  5   groupe de personnes déplacées.

  6   Mais, bien entendu, cela ne signifie pas que tous les Musulmans sont

  7   partis. Il y en a qui sont restés.

  8   Je ne sais pas si ça peut être utile aux Juges de la Chambre, je pourrais

  9   produire le même type de tableau pour ceux qui sont restés, en faisant

 10   figurer les statistiques que nous avons.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous pourriez, s'il vous

 12   plaît, nous donner de nouveau le chiffre total ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Donc le total du nombre minimum de personnes

 14   déplacées dans la zone couverte par l'acte d'accusation Karadzic est de

 15   286 972.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais on ne le voit pas dans ce tableau.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Si, si. La dernière ligne, vous voyez les

 18   totaux --

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, oui, je vois.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] -- c'est la deuxième colonne en bas.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, je le vois.

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Bien.

 23   Ce sont des nombres minimums sur la base d'un échantillon certes grand,

 24   mais tout de même un échantillon.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Karadzic.

 26   M. KARADZIC : [interprétation]

 27   Q.  Donc, dans ce secteur qui a été sélectionné spécialement, donc c'est

 28   une partie de la Bosnie-Herzégovine, là, vous parlez de ces chiffres en


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  1   pourcentages.

  2   Ce que je voudrais c'est que l'on prenne la deuxième ligne, la ligne donc

  3   qui correspond aux Musulmans. Est-il exact de dire qu'en 1991, il y avait

  4   481 108 Musulmans là-bas; c'est bien ça ?

  5   R.  Dans cette zone de 27 municipalités, oui, c'est le nombre de Musulmans

  6   qui étaient déclarés là et qui sont nés avant 1980.

  7   Q.  Oui. Voyons maintenant à quoi cela correspond dans les trois colonnes

  8   qui suivent.

  9   161 000 est le nombre minimum. Nombre estimé, 284 000.

 10   Mais n'a-t-on pas pu arriver à des chiffres exacts sans se livrer à des

 11   estimations ? Pourquoi est-ce que cela correspondrait à 59 %? Est-ce qu'on

 12   n'aurait pas dû simplement procéder à la réalisation d'une liste sur la

 13   base de la liste des personnes déplacées ?

 14   R.  Ecoutez, je ne comprends pas exactement sur quoi porte votre question.

 15   Est-ce que vous pouvez peut-être la reformuler ?

 16   Q.  Pourquoi vous êtes-vous servie d'estimations dans la deuxième et la

 17   quatrième --

 18   L'INTERPRÈTE : Non, pardon, les troisième et quatrième colonnes, se reprend

 19   l'interprète.

 20   M. KARADZIC : [interprétation]

 21   Q.  -- on y voit 284 000, la cinquième colonne porte 285 000 ? Aviez-vous à

 22   votre disposition les registres des réfugiés ? Pourquoi vous n'avez pas

 23   pris des documents spécifiques délivrés par le gouvernement musulman

 24   concernant les réfugiés ?

 25   R.  Pour les raisons dont nous avons parlé hier, qu'il est important d'être

 26   en mesure de produire une étude indépendante qui viendra corroborer les

 27   résultats donnant d'autres sources mais, bien sûr, il y a eu également les

 28   raisons tout à fait pratiques. Que le registre des personnes déplacées et


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  1   des réfugiés, donc du HCR et du gouvernement de la Bosnie-Herzégovine,

  2   possédait des informations qui étaient relativement limitées par rapport à

  3   l'ethnicité des personnes, ce qui, pour nous, a été un élément essentiel.

  4   Ensuite, le registre dont nous disposions relève la situation à

  5   partir de l'an 2000 qui est plus tard encore que ce que nous avons étudié à

  6   partir des listes électorales. Pour ces raisons, et parmi d'autres, nous

  7   avons préféré prendre les sources, par exemple, du recensement et également

  8   les listes électorales.

  9   Q.  Vous estimez qu'une estimation ou un calcul de la population, même vous

 10   n'avez pas analysé les tendances, serait plus précis que les données

 11   fournies par les organes du gouvernement ?

 12   R.  J'ai analysé les sources que j'ai analysées pour la bonne raison que

 13   j'estime qu'elles sont utiles et fiables et qu'on peut s'en servir dans

 14   l'analyse qui était la nôtre.

 15   D'ailleurs, j'ai vérifié la taille des listes électorales de 1996 dont nous

 16   avons parlé hier, donc il y a eu quelque hésitation, à savoir si ce

 17   registre était de plus grande taille, c'est-à-dire je parle du registre de

 18   1997. En 1996, pour les élections, il y avait 2 396 000 électeurs inscrits,

 19   donc 2,4 millions de personnes. En 1997, le chiffre est plus important. Le

 20   taux de participation estimatif de 1996 est de 82 %; pour 1997, il est de

 21   88 %.

 22   Q.  Pourrions-nous voir le tableau 2A dont le titre est : "Changement

 23   démographique dans les municipalités de la région relevant de Karadzic." Je

 24   suis à la page 35, mais je m'abuse sans doute pour les bonnes raisons que

 25   j'ai ajouté quelques observations qui sont miennes.

 26   Pendant que nous sommes sur cette question, saviez-vous que, dans notre

 27   loi, il y a un distinguo entre les résidences et les domiciles ? Dans notre

 28   traduction, on y voit résidence, mais je me demande c'est là ma question si


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  1   vous savez qu'il existe une différence entre ces deux catégories. Si vous

  2   l'ignorez, je vous le dirai.

  3   R.  En démographie, c'est les populations de facto et de jure.

  4   Q.  Par exemple, vous savez où se trouve Zvornik, et à côté de Zvornik, il

  5   y a un village important Rastocnica mais qui appartient également à la

  6   municipalité de Kalesija. Alors les résidents sont dans l'un, mais les

  7   domiciles sont dans l'autre à Zvornik. Combien enregistrez-vous ces

  8   personnes ?

  9   R.  Alors ce que j'ai compris de facto et de jure c'est une chose

 10   différente. J'ai bien peur de ne pas comprendre ce que signifie domicile.

 11   Q.  Domicile est un lieu de résidence permanente, alors que résidence est

 12   là où la personne vit et exerce nombre de ces droits. Mais, en fait, une

 13   personne appartient à une ville et peut exercer nombre de ces droits à

 14   Zvornik, par exemple ?

 15   R.  Mais, en statistiques, nous avons, comme je l'ai dit, la population de

 16   facto et de jure. En ex-Yougoslavie, y compris dans le recensement de 1991,

 17   ceci avait trait à la population de jure. Les ménages ont fait l'objet

 18   d'entretiens sur les lieux de leurs habitations, les chefs de famille ont

 19   dû fournir les informations sur les nombres de leurs ménages, de leurs

 20   foyers. Ceux qui n'habitaient pas en ce lieu étaient signalés et étant

 21   signalés par le chef de famille étaient inclus dans le questionnaire.

 22   Q.  Quand la guerre a éclaté, cette personne retournait à son domicile et

 23   donc enregistrée sur les listes électorales dans une autre municipalité.

 24   Comment résoudre cette situation ?

 25   R.  Il y a deux éléments ayant trait à l'inscription des électeurs.

 26   Le lieu d'inscription pour voter est une chose, c'est une autre variable.

 27   C'est la municipalité où l'on souhaite voter or laquelle l'on souhaite

 28   voter. Donc, en principe, les particuliers étaient censés voter pour les


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  1   municipalités où ils étaient habitués de résidence en 1991. Toutefois, si

  2   quelqu'un devient une personne déplacée, la personne en question peut voter

  3   également pour une autre municipalité, celle-ci où, à l'avenir, la personne

  4   souhaitait s'implanter et s'établir.

  5   Dans mon analyse, je n'ai pas étudié la municipalité par laquelle ils

  6   avaient voté car ce n'est pas nécessaire pour mon analyse. Nous avons

  7   étudié le lieu d'inscription, la municipalité d'inscription, où les

  8   particuliers s'étaient inscrits pour voter. C'est une rubrique différente,

  9   et ce qui n'a rien à voir avec les droits des électeurs, les autres droits

 10   exercés à l'époque par les personnes en Bosnie-Herzégovine.

 11   Q.  Estimez-vous qu'une personne pouvait s'inscrire dans une municipalité

 12   et aller voter dans une autre municipalité ? N'était-il pas normal que l'on

 13   s'inscrive et que l'on vote dans la même municipalité plutôt que d'envoyer

 14   leurs bulletins par voie postale pour voter ?

 15   R.  Je pense que l'inscription est un processus qui se tenait avant les

 16   élections, peu importe ce qui s'est passé au moment de l'élection, lorsque

 17   l'élection, le scrutin se tenait. En regardant donc les inscriptions pour

 18   voter - et il y avait des règles strictes et établies aux fins

 19   d'inscription et aux fins d'empêcher la fraude - comme je l'ai dit, les

 20   personnes pouvaient s'inscrire dans la municipalité où ils résidaient, où

 21   ils habitaient et le vote se faisait par la suite en personne ou in

 22   absentia. Donc, encore une fois, le scrutin peu m'intéresse, mais c'est le

 23   lieu d'inscription que j'ai étudié, parce que c'est une approximation du

 24   lieu de résidence.

 25   Q.  Mais cela était impossible, Madame Tabeau. Il n'était pas possible

 26   qu'une personne s'inscrive, par exemple, à Brcko et ensuite aille voter à

 27   Banja Luka. On ne vote qu'au lieu où l'on est inscrit.

 28   Donc si vous êtes réfugié à Brdjanin [phon] et que vous voulez à


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  1   Banja Luka, la seule façon de le faire c'est de s'inscrire à Banja Luka.

  2   Est-ce exact bien cela, selon vous ?

  3   R.  L'on pouvait s'inscrire, encore une fois, où ils le souhaitaient -- où

  4   on le souhaitait, et il fallait s'inscrire pour voter pour pouvoir voter.

  5   On pouvait s'inscrire à Brcko pour voter pour Banja Luka. Cela était

  6   possible selon les règles d'OSCE.

  7   Pour voter pour Banja Luka, une personne doit soit y vivre au moment du

  8   recensement de 1991 et être inscrite au recensement de la population de

  9   Banja Luka ou, si on était une personne déplacée qui ne souhaitait pas

 10   retourner à Banja Luka, cette personne pouvait s'inscrire pour voter pour

 11   une autre municipalité.

 12   La municipalité de résidence future, ici, la personne devait donc prouver -

 13   - il était -- il lui était possible de s'implanter dans cette municipalité

 14   future de résidence. Tout ceci est réglementé dans les procédures

 15   électorales qui ont été établies par l'OSCE et qui ont été suivies au cours

 16   des élections.

 17   En fait, les règlements étaient moins stricts dans les élections de 1996.

 18   Donc, dans les élections de 1996, la procédure a été déficiente et a permis

 19   aux personnes de s'inscrire pour voter pour plusieurs municipalités. C'est

 20   un fait connu. Et à partir de l'expérience de 1996, l'OSCE a amélioré ces

 21   règlements afin d'empêcher ce type de choses.

 22   Mais tout ceci n'a rien à voir avec le lieu d'inscription pour les

 23   élections de 1997. Il a fallu d'abord s'inscrire pour voter, et ce dont

 24   nous nous sommes servis dans notre étude c'est le lieu d'inscription pour

 25   voter.

 26   Q.  Madame Tabeau, circonstancions une chose.

 27   Si vous avez une personne qui s'inscrit à Brcko et qui veut voter à Banja

 28   Luka, dans quel registre électoral cette personne est-elle inscrite ? A


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  1   Brcko ou à Banja Luka, quelque soit -- quelque soit le type d'inscription,

  2   qu'on y soit allé sur place ou pas, ce qui veut dire que la personne en

  3   question n'existe pas dans le registre électoral de Brcko parce qu'il ne

  4   souhaite pas voter dans la municipalité de Brcko ?

  5   R.  Encore une fois, cette personne vit à Brcko, en qualité de personne

  6   déplacée, et se rend au centre d'Inscription à côté de chez lui à Brcko,

  7   cette personne est enregistrée à Brcko, et c'est tout ce qui compte pour

  8   moi.

  9   Q.  Mais cette personne ne sera pas enregistrée à Brcko mais, plutôt, à

 10   Banja Luka, et il n'y a aucune mention de cette personne à Brcko. Cette

 11   personne va voter à Banja Luka, quelque soit son inscription, son lieu

 12   d'inscription, et ceci pourrait être une source de confusion grave si cette

 13   personne est censée être enregistrée à Brcko, et peut-être que vous avez

 14   reçu des informations erronées.

 15   Mme WEST : [aucune interprétation]

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] J'aimerais commenter.

 17   Mme WEST : [aucune interprétation]

 18   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 19   Mme WEST : [interprétation] -- il n'est pas clair si l'accusé ne comprend

 20   pas ce qui est présenté par Mme Tabeau. Mme Tabeau a bien indiqué que la

 21   seule chose qui l'intéressait dans cette étude et le seul fait dont il faut

 22   tenir compte c'est où la personne était inscrite, c'est important car cela

 23   indique que cette personne se trouve dans un emplacement différent en 1997

 24   qu'en 1991. Pour qui l'on a voté ou pour quel vote l'on a -- pour quelle

 25   ville on a souhaité voter n'est absolument pas pertinente --

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je crois qu'il y a confusion quant au

 27   lieu où les électeurs sont inscrits. Je crois que cela a été souligné et

 28   nous allons continuer.


Page 28341

  1   Mme WEST : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, mon commentaire est relié aux opérations

  3   de l'OSCE. Au cours des élections de 1997, l'OSCE a été fort bien préparée

  4   cette fois-là pour être en mesure de vérifier tout électeur admis à voter

  5   pour la bonne raison que l'on avait une liste complète de tous les

  6   électeurs, et ce, dans tous les bureaux de vote. Ainsi c'était des

  7   documents imprimés où les électeurs admis à voter étaient inscrits, et l'on

  8   pouvait vérifier à Brcko où cette personne vivait en 1991.

  9   Donc si la personne vivait à Banja Luka en 1991, la personne était donc

 10   vérifiée et cochée comme étant un électeur de Banja Luka et avait droit de

 11   vote à Banja Luka ou de toute municipalité future de choix, c'était selon

 12   son choix. Mais le lieu d'inscription restait Brcko.

 13   Selon moi, donc, il n'y a absolument aucune confusion quant au lieu

 14   d'inscription, aucune confusion.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] On peut donc voter en d'autre lieu que

 16   le lieu où l'on habite actuellement, uniquement si l'on est inscrit aux

 17   élections de 1991.

 18   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Au recensement de 1991.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] La condition préalable pour voter et être

 21   inscrit à voter c'est le fait d'être inscrit au recensement de 1991, et le

 22   lieu de résidence du recensement de 1991 faisait partie également de la

 23   procédure d'inscription. Le lieu -- c'était des élections municipales. Il y

 24   avait une motivation des électeurs à participation car ils élisaient des

 25   parlements locaux, ceux qui auraient le pouvoir après les élections. Donc

 26   si vous habitiez dans une municipalité, à Banja Luka, par exemple, et que

 27   vous y aviez votre maison et que vous deveniez personne déplacée, à

 28   l'évidence ce qui vous intéressait c'est de retourner dans votre maison.


Page 28342

  1   Quelque soit l'endroit où vous aboutissez après la guerre, si vous étiez

  2   Musulman de Banja Luka, vous étiez sans doute -- vous alliez dans la

  3   Fédération auprès de famille ou de proches ou dans un centre collectif pour

  4   les réfugiés.

  5   Vous pouviez vous inscrire là où vous habitiez sans vous déplacer en

  6   autocar, ou [inaudible], et voter pour votre propre municipalité au lieu où

  7   vous étiez au moment d'élections. C'est vrai que les déplacements étaient

  8   très compliqués à l'époque, et ce n'était pas sûr pour les réfugiés de

  9   retourner chez eux et d'y voter donc cette procédure élaborée par l'OSCE se

 10   fondait sur les réalités du pays à l'époque.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Karadzic.

 12   L'ACCUSÉ : [aucune interprétation]

 13   M. KARADZIC : [interprétation]

 14   Q.  Pour élucider une personne [phon], i vous avez une personne de Banja

 15   Luka qui est inscrite à Zenica et qu'il vote à Banja Luka, comment comptez-

 16   vous cette personne comme étant résidente de Banja Luka ?

 17   R.  La personne résidait à Zenica, y était inscrite, elle est considérée

 18   comme inscrite à Zenica. Ne pensons pas aux municipalités pour lesquelles

 19   l'on votait. Ce n'est pas ce qui a été étudié, c'est une question

 20   distincte. L'on sème le trouble sur la question. N'oublions pas tout

 21   simplement que nous nous sommes penchés sur le lieu d'inscription où l'on

 22   est inscrit pour voter.

 23   Q.  Merci. Mais les centaines de milliers d'électeurs qui sont inscrits aux

 24   Etats-Unis, au Canada, dans les pays européens, et qui votent pour leurs

 25   municipalités respectives, dans quelle catégorie les avez-vous inscrits ?

 26   R.  Ceux qui étaient des électeurs à l'étranger, qui ont eu la possibilité

 27   de voter dans le pays où ils se trouvaient au moment de l'élection, il y a

 28   une catégorie distincte, et qui a été élaborée pour ces derniers pour


Page 28343

  1   l'OSCE, une procédure dont on se utilise dans une élection. Donc quelque ce

  2   soit le lieu où ils vivaient, lors du recensement de 1991 en Bosnie, ils

  3   pouvaient s'inscrire pour voter de l'étranger, et d'ailleurs, plusieurs

  4   centaines de milliers d'électeurs à l'étranger se sont inscrits pour les

  5   élections de 1997.

  6   Q.  Ils se sont inscrits à New York ou à Salt Lake City, par exemple, mais

  7   il y en a bien d'autres, ils ne sont pas venus en personne. Vous ne les

  8   avez jamais donc inclus dans les tableaux car il ne faut pas oublier que la

  9   majorité de ceux qui sont partis aux Etats-Unis et ailleurs aux Etats-Unis

 10   étaient Musulmans mais nous ne les voyons pas ici.

 11   R.  Ils sont inclus dans les tableaux, c'est une catégorie conjointe de

 12   personnes déplacées et de réfugiés.

 13   Dans ce rapport, j'ai toujours les personnes déplacées dans leur

 14   propre pays et les réfugiés ensemble, car la troisième catégorie est une

 15   catégorie bien plus importante que les électeurs à l'étranger. Dans le

 16   rapport Milosevic, Slobodan Milosevic, il y a plusieurs tableaux où ce

 17   chiffre, le nombre conjoint de personnes déplacées ou des réfugiés, est

 18   ventilé à autres catégories, donc personnes déplacées dans [inaudible]

 19   pays, réfugiés.

 20   Les réfugiés sont sous représentés toutefois, pour l'étranger dans

 21   les statistiques, en tout cas, car le taux de participation n'était pas

 22   aussi élevé que ceux qui vivent dans la région au moment de l'élection de

 23   l'ex-Yougoslavie, Région de l'ex-Yougoslavie.

 24   Q.  Mais en ce qui concerne les élections en Bosnie-Herzégovine, tout

 25   particulièrement pour les deux, trois premières élections, nous avons

 26   nombre de cas de bulletins de vote qui sont arrivés de l'étranger. Mais si

 27   vous n'avez pas compté ces Musulmans qui étaient la majorité, bien sûr, il

 28   y avait des Serbes et des Croates, nous avons un moindre nombre de


Page 28344

  1   Musulmans. Comment se fait-il qu'il y avait tant de personnes dispersées

  2   dans le monde entier, et qui étaient inscrites dans différents pays,

  3   comment les trouver ?

  4   Voyons le chapitre 6, tableau 2A, qui renvoie aux Musulmans. Prenons

  5   un exemple, une municipalité.

  6   Mme WEST : [interprétation] Prétoire électronique 24.

  7   M. KARADZIC : [interprétation]

  8   Q.  Voyons, par exemple, à Kljuc, avec astérix, selon vous, combien de

  9   Musulmans vivaient à Kljuc en 1997, selon ce tableau ?

 10   R.  Ce tableau ne signale pas 1997. Il ne porte que sur 1995, où nous avons

 11   un nombre signalé, et ce nombre est de 1 211.

 12   Q.  Mais il y a des rubriques pour 1997, également, me trompais-je ? Il y a

 13   des pourcentages.

 14   R.  Oui. Pour cela, il nous faut nous référer à mon rapport, au tableau 1

 15   pour les Musulmans.

 16   Mme WEST : [interprétation] Prétoire électronique 30.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Ou peut-être le tableau 2, pour les Musulmans.

 18   Le même chiffre est plus facile car nous avons déjà débattu de ce tableau.

 19   Mme WEST : [interprétation] 42.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] La page suivante. Rangée 12.

 21   Kljuc est une municipalité scindée, et donc les deux parties sont signalées

 22   séparément. La partie fédération est le premier volet, et Kljuc Ribnik est

 23   dans le deuxième volet.

 24   Donc, si vous passez à la population de Musulmans, en 1997, qui est la

 25   quatrième, la colonne au milieu en fait, donc en RS, il n'y a que 21

 26   personnes identifiées et 8 433 dans la partie fédérale.

 27   M. KARADZIC : [interprétation]

 28   Q.  Merci. Donc, si nous nous penchons sur le tableau, on y voit que Kljuc


Page 28345

  1   avait 0.1 de Musulmans en 1997; c'est incorrect, n'est-ce pas ?

  2   Je parlais du tableau précédent que nous avions examiné dans le chapitre 6.

  3   R.  Je pense que c'est correct parce que l'on voit dans le tableau 2.1,

  4   pour les Musulmans, pour 1997, ne tient compte que de la partie RS.

  5   Mme WEST : [interprétation] Au dos de la page 24.

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pouvons-nous voir la page suivante ? Je crois

  7   qu'il s'agit de la page 25, au chapitre 6.

  8   M. KARADZIC : [interprétation]

  9   Q.  Voyons comment les Serbes et les Croates étaient inscrits dans ces

 10   municipalités là.

 11   R.  Je ne suis pas sûre que tout le monde comprenne les pourcentages au

 12   tableau 2A, pour l'année 1997, 0.1 %. C'est le nombre de Musulmans qui sont

 13   restés à Kljuc, par rapport à l'ensemble de Musulmans de Kljuc identifiés

 14   en 1997, parce que le nombre de personnes déplacées était 19, le nombre de

 15   personnes qui sont restées est 2. Je parle du tableau qui figure à l'annexe

 16   2M.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Peut-être, rapidement, est-ce qu'on

 18   pourrait y revenir ?

 19   Est-ce que vous pouvez nous expliquer ce pourcentage de 0.1 ? Comment est-

 20   ce qu'on y arrive à partir de ce tableau ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Donc dans la partie de Kljuc qui

 22   correspond à la RS, nous avons 21 Musulmans.

 23   Dix-neuf sur ce nombre-là sont partis, ce sont des personnes déplacées.

 24   Donc il n'en reste que deux sur ce territoire. Donc à Kljuc 2 divisé par

 25   21.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Cela correspond à 2 %.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est exact.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Comment est-ce que vous arrivez à 1.1 %.


Page 28346

  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense qu'il y a peut-être une erreur dans

  2   ce tableau. Je vais vérifier.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

  4   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

  5   L'INTERPRÈTE : L'interprète demande que l'on corrige le 0.1 précédent en

  6   1.1.

  7   M. KARADZIC : [interprétation]

  8   Q.  Est-ce que vous savez que la municipalité serbe de Kljuc, de la

  9   Republika Srpska se compose de villages serbes, et de Ribnik, Kljuc Ribnik,

 10   que même en 1991, il y avait là beaucoup de Musulmans ?

 11   Est-ce que vous avez pu savoir combien il y avait de Musulmans là-bas dans

 12   cette partie-là qui est revenue à Republika Srpska après les accords de

 13   Dayton ?

 14   R.  Donc toutes mes conclusions figurent dans ce rapport. Je peux reprendre

 15   ce même tableau, 2M ou 1M, qui correspond aux Musulmans, donc 1M, qui

 16   correspond à la composition ethnique, et puis le deuxième, qui correspond

 17   aux personnes déplacées; je ne sais pas quel est le tableau que vous voulez

 18   que l'on prenne pour base pour citer les numéros.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Page 25, s'il vous plaît, voyez ce qui est la

 20   situation des Serbes dans ces neuf municipalités.

 21   Merci.

 22   M. KARADZIC : [interprétation]

 23   Q.  Alors, dites-nous, s'il vous plaît : à Bosanska Krupa, comment y a-t-il

 24   de Serbes là-bas en 1997 ?

 25   R.  Page 38, s'il vous plaît, le tableau 1S, pour les Serbes.

 26   Q.  Oui, mais écoutez. Dites-nous ce qui en est de ce tableau que nous

 27   avions à l'écran à l'instant; Quelle est la signification de ce tableau ?

 28   Je voudrais savoir si, d'après ce tableau à Bosanska Krupa, en 1995, il y a


Page 28347

  1   100 % de Serbes; et qu'en 1997, ils sont 99,5 %.

  2   R.  Je suis en train de me demander quelle est la signification exacte de

  3   ces pourcentages.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Page 39 du prétoire électronique, nous

  5   voyons le nombre.

  6   Donc nous avons 99,5 % dans la ligne qui correspond à Bosanska Krupa.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Nous avons 100 % pour 1995. Je suppose que ce

  8   sont les chiffres qui ont été donnés par les autorités qui ont fourni les

  9   chiffres. Je ne me souviens pas. Il faut que je vérifie, donc, ce serait

 10   95. 100 %.

 11   Et 99.5 % c'est le pourcentage donné dans ce rapport pour la partie de la

 12   Republika Srpska, enfin de la partie de Bosanska Krupa qui revient à la

 13   Republika Srpska. C'est le tableau 1S à l'écran, ligne 3. Bosanska Krupa se

 14   compose de trois segments. Deux font une partie de la Fédération, et enfin

 15   à la fin, nous avons la Republika Srpska.

 16   M. KARADZIC : [interprétation]

 17   Q.  Professeur Tabeau, est-ce que vous savez que seul le village de Hasani

 18   est revenu à la Republika Srpska pour ce qui est de Bosanska Krupa, parce

 19   qu'un grand écrivain Branko Copic est originaire de là-bas, et qu'en fait

 20   nulle part ailleurs ? Il est question de Serbes de Bosanska Krupa, c'est la

 21   rivière droite de la rivière Una qui est revenue aux Serbes parce que les

 22   Serbes n'acceptaient pas le terme de "Bosanska."

 23   Comment ça se fait ? Que l'on parle de 95.5 % de Serbes qui seraient

 24   présents, donc 2 690 Serbes alors qu'il y en a peut-être 25 à peine sur

 25   place.

 26   R.  Je ne veux pas réagir suite à votre commentaire sur ce qui s'est

 27   produit sur ces territoires je n'ai pas étudié ces événements. Je ne peux

 28   parler que de chiffres que vous nous avez cités et, là encore, les chiffres


Page 28348

  1   à en juger d'après ce que j'ai dans mon rapport nous parlent de la partie

  2   RS de Bosanska Krupa, donc d'une petite portion de Bosanska Krupa, en 1991.

  3   Il n'y avait là juste 4 478 personnes, on le voit dans le tableau 1S. Sur

  4   ce nombre-là, en 1997, 980 sont identifiés comme Serbes. Excusez-moi. 975

  5   identifiés comme Serbes, et toute la population dans son ensemble en 1997

  6   correspond à 980 personnes. Donc quasiment tous, donc parmi les individus

  7   identifiés qui avaient vécu ici, donc 99.5 % d'entre eux, sont Serbes.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Autrement dit, toute la population a été

  9   réduite à 20 %.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Pourquoi 20 %?

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] De 4 500 --

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, c'est un échantillon des 900, ce n'est

 13   pas l'ensemble de la population, c'est un échantillon dont nous parlons.

 14   Nous pouvons comparer les échantillons statistiques entre eux, c'est ce que

 15   j'ai fait lorsque je suis arrivée à ce pourcentage de 9.5 de Serbes sur ce

 16   territoire, enfin, en se fondant sur les listes électorales.

 17   M. KARADZIC : [interprétation]

 18   Q.  Je voudrais vous demander une chose. Est-il exact que vous parlez là de

 19   Krupa sur Una, de 4 478 personnes d'après le recensement de 1991, et qu'il

 20   y avait 2 690 Serbes sur ce nombre total; c'est bien ça ?

 21   R.  Oui, c'est ce que le tableau nous dit, pour le recensement de 1991.

 22   Q.  Merci. En 1997 maintenant, vous constatez qu'il y a en tout 980

 23   personnes dont 275 Serbes, et vous arrivez à la conclusion que le nombre de

 24   Serbes a augmenté de 2 690 pour atteindre 975. Je n'y vois moi d'une

 25   augmentation.

 26   R.  En 1991, nous avons le segment total de la population donnée en nous

 27   fondant sur le recensement. Donc c'est l'ensemble de la population née

 28   avant 1980, les chiffres correspondent au recensement.


Page 28349

  1   Pour 1997, nous avons un échantillon en nous fondant sur la liste

  2   électorale. Donc nous avons aussi des personnes qui ne sont pas inscrites

  3   sur la liste électorale, les 12 % sont des électeurs qui ne sont pas

  4   inscrits sur la liste électorale. Donc sur les 980, la population de 1997,

  5   en fait, c'est un échantillon de la population de 1991. C'est un grand

  6   échantillon; cependant, il peut être utilisé pour évaluer la proportion des

  7   Serbes de 1997 sur ce territoire, et il s'agit de 99.5 % par rapport à 62 %

  8   du recensement de 1991.

  9   Donc vous avez une augmentation considérable de ce pourcentage des

 10   Serbes, en 1997.

 11   Q.  Mais où vivaient ces Serbes en 1997 ? Est-ce que vous avez pu établir

 12   qu'ils vivaient à Krupa, ou bien est-ce qu'ils se sont fait enregistrer

 13   ailleurs pour pouvoir voter pour Krupa, alors qu'aucun d'entre eux en fait

 14   ne vit à Krupa, à ce moment-là ?

 15   R.  Mais, là encore, vous avez toujours ce même problème d'inscription sur

 16   une liste électorale à un endroit, le fait de voter pour une autre

 17   municipalité. Donc comme je vous l'ai déjà dit, là, je parle de ceux qui

 18   sont tous inscrits sur ce territoire, dans cette municipalité.

 19   Q.  Mais, Professeur Tabeau, les Serbes ne sont plus à Bosanska Krupa, il

 20   n'y en a plus là, ils sont inexistants, en 1995, et à partir de ce moment-

 21   là, il n'y a plus trois parties de cette municipalité, tout est remis à la

 22   Fédération.

 23   Prenons le tableau C maintenant dans le chapitre 6, voyons ce qui en est

 24   des Serbes, là. A Petrovac, par exemple, Bosanski Petrovac, ou peut-être

 25   maintenant que nous avons encore ce tableau à l'écran, dites-nous : quels

 26   sont les chiffres qui correspondent à Bosanski Petrovac ? La municipalité

 27   au point 5 ?

 28   Mme WEST : [interprétation] Page 25.


Page 28350

  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Je voudrais commenter la question des

  2   municipalités qui ont fait l'objet de ce rapport.

  3   Nous nous sommes basés sur la liste des municipalités telles que définies

  4   dans la classification après la signature des accords de Dayton. Et cette

  5   classification a été obtenue de l'OSCE. C'est la même qui a été utilisée

  6   pendant les élections de 1997. Mais il s'agit d'un système qui change et il

  7   y a eu redécoupage des municipalités par la suite, sans aucun doute. Donc

  8   dans mon rapport, le découpage des municipalités correspond au découpage de

  9   l'OSCE qui a été établi pour les élections ou qui suit la situation pendant

 10   les élections.

 11   Alors, maintenant, ce qui en est des Serbes de Bosanski Petrovac, en 1995,

 12   nous avons 14 550 personnes. Ce sont les chiffres qui sont donnés par les

 13   autorités de la Republika Srpska, les autorités serbes, et le pourcentage

 14   de Serbes dans la population de 1995, sur la base des sources de la RS

 15   correspond à 99.7 %. Dans la colonne suivante, pour 1997, nous avons 99 %,

 16   et c'est ce qui figure dans le tableau 1S, Bosanski Petrovac.

 17   Mme WEST : [interprétation] Page 39.

 18   M. KARADZIC : [interprétation]

 19   Q.  Oui, justement voyons -- oui, je vous prie.

 20   R.  Oui, je voulais juste que l'on examine ensemble ces 99 % dans ce

 21   tableau. Donc pour la partie RS de Bosanski Petrovac, c'est l'avant-

 22   dernière colonne. Donc nous avons 99 %.

 23   Donc les deux chiffres se correspondent.

 24   Q.  Donc à Bosanski Petrovac, en 1997, il y a 99 % de Serbes ou non ?

 25   R.  Donc c'est le tableau 1S qui nous donne ce chiffre. En 1997, il y a 99

 26   % de Serbes dans l'échantillon de 1997 qui a été utilisé pour l'étude dans

 27   la partie RS de Petrovac,

 28   Q.  C'est un village qui s'appelle Drinic, où en 1991, il y avait 264


Page 28351

  1   [comme interprété] habitants, et où en 1997, il y en 205.

  2   Donc, en Bosanski Petrovac même, il manque 99.1 % de Serbes; c'est bien

  3   cela, n'est-ce pas, dans la partie qui est revenue à la Fédération ?

  4   R.  Je ne vois pas où est-ce que vous trouvez le 99.1 % de la population

  5   serbe qui manque. Maintenant, est-ce que vous pourriez m'indiquer où vous

  6   trouvez ça ?

  7   Q.  Mais c'est le tableau qui s'affiche à l'écran. Nous avons Bosanski

  8   Petrovac, Bosanski Petrovac partie qui revient à la Fédération. Nous avons

  9   23 Serbes ici, sur les milliers, 11 000, je ne sais pas combien d'avant,

 10   vous en avez 23, cela fait moins 99.1 et non pas 99. Il n'y en a pas 99,

 11   quasiment 100 % de Serbes qui manque maintenant sur la liste.

 12   R.  M. Karadzic parle de la ligne au-dessus de celle qui correspond à la

 13   partie RS de Petrovac. Donc, ici, nous avons un échantillon de 1991, nous

 14   avons 3 415 individus, dont 23 étaient des Serbes. Donc, effectivement, un

 15   tout petit pourcentage, 0,7 %, même pas 1 %.

 16   Je vous réponds oui, oui c'était ça la situation.

 17   Donc il y a des fluctuations au niveau de la population, ce n'est pas

 18   atypique ce que nous voyons à Bosanski Petrovac. Donc c'est dans le sens

 19   opposé ou inverse entre la Republika Srpska et la Fédération. On comprendra

 20   facilement la situation si on se représente ce qui s'est produit. Les

 21   accords de Dayton séparent les territoires : D'un côté vous avez la

 22   Republika Srpska, et d'autre part, vous avez la Fédération, et alors ce

 23   qu'ont fait les gens pour se sentir en sécurité, ils ont traversé les

 24   lignes définies à Dayton.

 25   Je pense que vous verrez la même chose se passer dans toute une série de

 26   municipalités, et si nous reprenons la présentation de la page 2 dont nous

 27   avons déjà parlée --

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] Prenez plutôt le chapitre 6, le tableau B qui


Page 28352

  1   nous donne les informations pour les Croates.

  2   M. KARADZIC : [interprétation]

  3   Q.  En attendant, Docteur Tabeau, comment est-ce qu'on peut utiliser cette

  4   étude dans cette affaire au pénal ? Qui doit être tenu pour responsable

  5   pour ces événements ? La guerre civile ou l'une des parties ? Il nous faut

  6   savoir maintenant si je dois en être tenu responsable, parce que si vous

  7   pensez que le responsable est la guerre civile, je vous rejoints.

  8   Mme WEST : [interprétation] Objection de l'Accusation.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le témoin n'est pas là pour répondre à

 10   ce type de question.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais le témoin nous a dit qu'elle ne s'est pas

 12   intéressée à la question de la responsabilité. Mais, je suppose que

 13   l'Accusation avait de bonnes raisons de la faire venir, nous avons 11

 14   études et un nombre colossal de tableaux qu'elle nous a présentés ici.

 15   M. KARADZIC : [interprétation]

 16   Q.  Donc prenez l'année 1995 à Banja Luka. 10 500 Croates sur 29 000 de

 17   1991, c'est bien ça ?

 18   R.  Oui, c'est exact.

 19   Q.  Cela correspond à 6,8 %, et en 1997 le pourcentage est de 2,6 %. Donc

 20   entre Dayton et 1997, les deux tiers des Croates sont partis de Banja Luka.

 21   Moins qu'entre 1991 et 1995 si l'on tient compte des pourcentages; c'est

 22   bien ça ?

 23   R.  Je pense que vous mélangez les pourcentages.

 24   Tout d'abord, je ne sais pas qu'est-ce qui vous permet de dire que les deux

 25   tiers des Croates sont partis de Banja Luka. Les 6,8 et 2,6 % ne sont pas

 26   les mêmes pourcentages, cela n'a rien à voir avec ceux qui sont partis ici

 27   dans ce tableau. Donc je pense qu'il faudrait essayer d'être tout à fait

 28   précis, essayons de voir exactement quel est le chiffre qui vous intéresse.


Page 28353

  1   Q.  Nous avons cette première ligne dans le tableau qui nous donne les

  2   informations pour les Croates. Nous avons 14,8 % de Croates en 1991 et nous

  3   en avons 6,8 % en 1995. Donc 10 000 sur les 29 000. Donc il en reste un

  4   tiers, et puis en 1997, nous avons également un tiers uniquement qui reste

  5   par rapport à l'ensemble de ceux qui étaient là au moment de Dayton, en

  6   chiffres relatifs; c'est bien ça ?

  7   R.  En effet, vous pouvez comparer les chiffres qui nous donnent donc le

  8   nombre de Croates en 1991, 29 000 [comme interprété], au 10 500 de 1995,

  9   mais cela n'a rien à voir avec les 6,8 %, c'est un pourcentage relatif.

 10   Evidemment, le nombre de Croates est tombé de manière considérable. Ça, ça

 11   ne fait absolument aucun -- il n'y a aucun doute là-dessus. Mais les 6,8 %,

 12   c'est la composition ethnique. Cela nous donne le nombre de Croates qui

 13   étaient là sur l'ensemble des groupes ethniques de Banja Luka en 1995. Donc

 14   on ne donne pas les mêmes informations que dans mon rapport et donc cela

 15   doit être lu de manière différente.

 16   Q.  Bon, fort bien. Mais c'est tout à fait clair, n'est-ce pas, qu'il y

 17   avait 14,8 % de Croates en 1991 dans l'ensemble de la population et qu'ils

 18   sont 6,8 % dans l'ensemble de la population en 1995, pour ne rester que

 19   2,6 % en 1997 dans l'ensemble de la population; c'est bien cela ?

 20   R.  Oui, oui, à Banja Luka.

 21   Q.  Mais, en pourcentage, donc pour ce qui est des chiffres relatifs, cette

 22   diminution de 6,8 à 2,6, est-ce que cela n'est pas plus important que de

 23   14,8 à 6,8 ?

 24   R.  Je pense que vous interprétez mal ce tableau. L'objectif de ce tableau

 25   n'est pas de représenter de manière générale la tendance de 1991 [comme

 26   interprété] à 1997. C'est une toute autre question qui nous intéresse dans

 27   ce tableau, c'est de savoir ce qui s'est passé, entre 1991 et 1995, la fin

 28   de la guerre, et est-ce que les chiffres que nous obtenons de différentes


Page 28354

  1   sources correspondent à ce que nous avons obtenu dans mon rapport.

  2   Donc il est pertinent de savoir quel est le nombre de personnes qui sont

  3   parties de ces municipalités dès 1993 et combien d'entre eux sont déclarés

  4   en 1995 et donc comment la composition ethnique est modifiée dès 1995 sur

  5   la base des sources de la Republika Srpska. Donc, lorsque nous avons les

  6   chiffres 1997, ils ne figurent pas ici pour nous montrer la tendance entre

  7   1995 et 1997. C'est simplement -- ce sont des mesures complètement

  8   séparées, une analyse complètement séparée, se fondant sur une source

  9   différente, à savoir les chiffres de la Republika Srpska, et toujours est-

 10   il que les chiffres se ressemblent.

 11   Bien sûr, nous ne sommes pas tout à fait certains de ces chiffres et nous

 12   ne pouvons pas les comparer directement pour dire telle a été la tendance

 13   de 1992 -- 1995 à 1997, il y a eu tel ou tel changement. Donc -- et qui

 14   plus est, les sources de la Republika Srpska ne sont pas les sources que

 15   j'ai utilisées -- que j'ai utilisées avec mes collègues pour nos

 16   conclusions. Ici, c'est à titre illustratif que je les représente pour

 17   montrer quelle a été la situation d'après les autorités de la RS dès la

 18   guerre.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Tout à fait, Madame. En réponse à la

 20   question de M. Karadzic, ne peut-on voir sur ce tableau le ratio de Croates

 21   à Banja Luka qui a régressé en 1997 par rapport à la situation en 1995 ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je le peux.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] La réponse est donc oui.

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Je le vois, mais il reste que quelques

 25   doutes quant au 6,8 % car la mesure a été très approximative. Il ne s'agit

 26   pas d'une méthodologie qui peut être prise comme étant source de chiffres

 27   exacts.

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] Les Juges de la Chambre, je vois que l'on tient


Page 28355

  1   compte du temps.

  2   M. KARADZIC : [interprétation]

  3   Q.  Convenez-vous que 14,8 % si on le compare à 0,8 %. Signifie en termes

  4   relatifs qu'il s'agit d'une régression plus importante de la part des

  5   Croates dans la population d'ensemble de 1995 à 1997 que de 1991 à 1995.

  6   Ceci peut être calculé facilement. Disons, 1,1 ou 1,3, et ici en fait il

  7   s'agit de 1 à 3.

  8   R.  Je ne peux rien ajouter car je ne comprends pas ce que M. Karadzic

  9   calcule. De quoi s'agit-il dans les 14,8 %, par exemple ?

 10   Q.  C'est la part de Croates dans la population générale en 1991. 6,8 %

 11   c'est donc la part de Croates dans la population d'ensemble en 1995, et 2,6

 12   est la part de Croates dans la population d'ensemble de 1997.

 13   J'avance donc que cette régression est inférieure quand on compare à 14,8 %

 14   a 6,8 %, plutôt que 6,8 % à 2,6 %; est-ce bien cela ou pas ?

 15   R.  Oui, c'est cela.

 16   Q.  Merci.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous prenons une pause d'une demi-heure

 18   et nous reviendrons à 11 heures 05.

 19   --- L'audience est suspendue à 10 heures 34.

 20   --- L'audience est reprise à 11 heures 07.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Karadzic.

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 23   Pourrions-nous avoir l'addendum B3, changements démographiques de la

 24   population dans la région ayant trait à certaines des municipalités de

 25   cette affaire ? Il s'agit du tableau B3.1.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président.

 27   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] En attenant que le tableau soit affiché, puis-


Page 28356

  1   je donner un commentaire sur Kljuc dont on a parlé avant la pause ?

  2   Nous regardions un tableau erroné. Si nous pouvons passer au bon tableau

  3   dans l'annexe, il s'agit du tableau 1M, pour Kljuc, et nous pouvons y voir

  4   le bon chiffre de 0,1 %.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Le tableau d'abord ? Donnez-

  6   nous ce chiffre.

  7   Oui, Madame West.

  8   Mme WEST : [interprétation] Il s'agit de la page 31.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Donc si nous nous reportons à la partie RS de

 11   Kljuc il s'agissait d'une population en 1997 de 4 250 de toutes ethnicités

 12   avec seulement quatre Musulmans, ce qui nous donne 0,1 %.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 14   M. KARADZIC : [interprétation]

 15   Q.  Mais est-ce que nous pouvons convenir qu'il n'y avait que 365 d'entre

 16   eux en 1991, et donc nous convenons également qu'il s'agit d'une zone

 17   rurale qui a été abandonnée par les Musulmans, qui ne faisaient partie

 18   d'une zone urbaine, n'est-ce pas ?

 19   R.  Je n'ai pas étudié des caractéristiques de ces régions urbaines,

 20   rurales ou autres et en quoi elles avaient changé. Je ne saurais le dire.

 21   Q.  Mais convenons-nous que le nombre de Serbes a été réduit de moitié dans

 22   la section de Kljuc qui a été remise aux Serbes ? Le total était de 8 200

 23   moins 365, ce qui signifie qu'en 1991 il y avait environ 8 000 et quelque

 24   Serbes; alors, pourriez-vous nous aider -- oui. 4 250 en 1997. Ce qui veut

 25   dire que le nombre de Serbes a également été réduit de moitié, n'est-ce pas

 26   ?

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est un échantillon; n'a-t-elle pas dit

 28   qu'il s'agissait d'un échantillon, pour 1997, Monsieur Karadzic ?


Page 28357

  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je ne pense pas, Monsieur le Président, parce

  2   qu'il s'agit d'une estimation de la population d'ensemble. Il peut s'agir

  3   d'estimation fondée sur un échantillon, mais cette estimation a trait à la

  4   population d'ensemble.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Les chiffres de 1997 sont un échantillon. Les

  6   chiffres de 1995 viennent des sources de la République serbe, et d'après ce

  7   que j'ai compris, ce n'est pas un échantillon.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, la rangée indique bien "1997,

  9   échantillon de population."

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 11   M. KARADZIC : [interprétation]

 12   Q.  Mais si je ne m'abuse, et dites-le-moi, en se fondant sur

 13   l'échantillon, vous avez estimé que la population d'ensemble de Serbes à

 14   Ribnik, n'est-ce pas, ce n'est pas un échantillon ? Un échantillon a été

 15   utilisé pour base d'estimation de la population d'ensemble.

 16   R.  Tout chiffre de 1997 est tiré d'un échantillon. Je n'ai jamais fait

 17   d'estimation de la taille de la population d'ensemble en 1997, à partir

 18   d'un échantillon. J'ai fait l'estimation de la composition ethnique à

 19   partir d'un échantillon et le nombre de personnes déplacées et de réfugiés,

 20   en qualité de chiffre minimum. C'était des types de chiffres différents que

 21   le chiffre d'ensemble.

 22   Q.  Encore une fois ce n'est pas clair. Qu'est-ce que c'est 4 250, est-ce

 23   un échantillon ou un chiffre auquel vous êtes arrivée à partir de

 24   l'échantillon et quelle était alors la taille de l'échantillon ?

 25   R.  Si vous pouvez me dire où se trouve le chiffre 4 250, où se trouve-t-il

 26   ?

 27   Q.  Kljuc, Ribnik, 1997, de 8 142, en 1997, ce chiffre régresse à 900, à 4

 28   250.


Page 28358

  1   Comment avez-vous ajouté ce chiffre ?

  2   Deuxième ligne : .12 Ribnik, République serbe, la population au total pour

  3   toutes les ethnicités en 1997 est de 4 250, alors que ce chiffre en soi ne

  4   représente pas un échantillon mais c'est l'aboutissement à partir de

  5   recensement.

  6   R.  Je regardais bien le tableau, 2S, page 51 --

  7   Q.  Mais regardez l'écran. Je parle du tableau qui se trouve sur l'écran.

  8   Mme WEST : [interprétation] Je crois qu'il y a confusion. M. Karadzic parle

  9   de Serbes, c'est un tableau musulman. Si nous voulons parler de Serbes, il

 10   nous faut passer au tableau sur les Serbes.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il n'en reste pas moins que toutes les

 13   ethnicités, les chiffres de toutes les ethnicités, je suis désolé,

 14   ethnicités, représentent des chiffres échantillons.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, certes.

 16   M. KARADZIC : [interprétation]

 17   Q.  Comment un échantillon peut-il dépasser 50 % ? Comment cet échantillon

 18   est sélectionné et ce qu'il représente ?

 19   R.  Nous avons abordé en menu détail la façon dont l'échantillon a été

 20   produit. Il s'agit de la liste électorale de 1997, qui a été produite par

 21   l'OSCE, et une copie que nous avons reçue aux fins de notre analyse. C'est

 22   un échantillon de 12.5 millions de personnes pour 1997, c'est ainsi que

 23   l'échantillon était produit.

 24   Si vous répartissez les chiffres d'électeurs à partir de ces deux

 25   échantillons, selon les municipalités, et les ethnicités, et bien sûr, vous

 26   appariez ces écritures avec le recensement des populations, c'est ainsi que

 27   ces chiffres comme ceux sur l'écran ont été obtenus, mais c'est bien un

 28   échantillon.


Page 28359

  1   M. KARADZIC : [interprétation]

  2   Q.  Mais ce que nous voyons sur l'écran, tableau 1M, nous y voyons qu'il y

  3   avait 8 142 habitants à Ribnik sur lesquels il n'y avait que 365 Musulmans.

  4   En 1997, le nombre total a chuté, passant à 4 250 avec quatre Musulmans

  5   uniquement. Ça n'a pas d'importance que ceci a trait aux Musulmans. L'on

  6   voit clairement que la régression du nombre des Serbes est donc supérieure

  7   à 50 %, n'est-ce pas ?

  8   R.  Ce tableau est pour les Musulmans. Les chiffres de 1997 sont un

  9   échantillon. Donc vous ne pouvez pas comparer les chiffres absolus de 1991

 10   aux chiffres de 1997 pour Kljuc ou Ribnik. Pour 1991, il s'agit de 8 142,

 11   et si vous les comparer, ces chiffres à 4 250 d'ensemble de 1997, ce n'est

 12   pas la taille d'ensemble, ce n'est pas correct, c'est un échantillon pour

 13   1997.

 14   Q.  C'est un échantillon de ceux qui sont inscrits sur les listes

 15   électorales, n'est-ce pas ?

 16   R.  Oui, ceux qui sont inscrits sur les listes électorales, et appariés

 17   avec les écritures du recensement.

 18   Q.  Comment ? Combien de Serbes se trouvaient à Ribnik, en 1997 ?

 19   R.  Il me faut passer au tableau alors, page 39 1S.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] La page, Madame West.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Page 39.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Prétoire électronique 40, sans doute.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Alors, pour Kljuc, Ribnik, l'on y voit le

 24   chiffre de Serbes à hauteur de 4 807 sur 4 250 dans cet échantillon, c'est-

 25   à-dire 99 %.

 26   M. KARADZIC : [interprétation]

 27   Q.  Mais en 1991, il y avait 7 686 Serbes; combien s'y trouvaient-ils en

 28   1997 ?


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  1   R.  Je ne saurais dire.

  2   Q.  Merci. Voyons maintenant l'addendum B3, le tableau B3.1

  3   Mme WEST : [interprétation] 105.

  4   M. KARADZIC : [interprétation]

  5   Q.  Voyons le premier tableau. Pouvons-nous convenir qu'en 1991, il y avait

  6   28 558 Musulmans, et 29 026 Croates à Banja Luka, n'est-ce pas ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Et 106 000 Serbes.

  9   L'INTERPRÈTE : Alors voyons la colonne de 1995; se reprend l'interprète.

 10   M. KARADZIC : [interprétation]

 11   Q.  Nous avons 10 000 Musulmans, 10 500 Croates et 125 000 Serbes, n'est-ce

 12   pas ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Convenons-nous que le pourcentage de participation de Musulmans et

 15   Croates dans la population d'ensemble est affecté par deux facteurs :

 16   premièrement, la diminution réelle des Musulmans et des Croates de deux

 17   tiers à la suite de leur départ; et deuxièmement, une augmentation relative

 18   du nombre de Serbes de 19 000; est-ce correct ?

 19   R.  Pas entièrement, mais dans les grandes lignes, je crois que la

 20   composition ethnique est un effet --

 21   L'INTERPRÈTE : L'interprète se reprend : Je crois que la composition

 22   ethnique est un effet des changements dans chaque groupe ethnique spécifié

 23   dans ce tableau.

 24   M. KARADZIC : [interprétation]

 25   Q.  Merci. Mais 14,6 Musulmans et 18,8 % [phon] de Croates en 1995, les

 26   pourcentages sont 6,4 % et 6,8 % respectivement, et ceux-ci ont été

 27   affectés par deux facteurs : La régression du nombre de Musulmans et de

 28   Croates et l'augmentation réelle du nombre de Serbes, et tout ceci a eu une


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  1   incidence sur les chiffres relatifs, n'est-ce pas ?

  2   R.  Comme je l'ai dit, dans les grandes lignes, c'est cela.

  3   Q.  Merci. Est-ce que l'on voit, alors, dans la période de 1997/1998, le

  4   pourcentage de Musulmans et de Croates qui chute à 2,1 % et à 2,6 %

  5   respectivement ?

  6   R.  Oui. C'est ce qui est présenté ici.

  7   Q.  Merci. Si nous tirons certaines conclusions, la première chute de 14,6

  8   à 6,4 a été provoquée par la guerre. Pouvons-nous convenir de la diminution

  9   passant de 6,4 à 2,1 a été le résultat des accords de Dayton selon lesquels

 10   les populations avaient le droit de choisir où elles souhaitaient vivre ?

 11   Mme WEST : [interprétation] Objection.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Il s'agit d'un statisticien démographique qui

 13   tire des conclusions fondées sur les chiffres.

 14   M. KARADZIC : [interprétation]

 15   Q.  Comment les interpréter que, de 1995 à 1997, il y a eu chute de deux

 16   tiers ? Quelle en a été la cause ? Si la première chute était produite par

 17   la guerre civile, quelle est la cause de cette deuxième régression ? C'est

 18   ce que les statistiques sont censées présenter.

 19   Mme WEST : [interprétation] Objection. Dans cette question, il y a

 20   déclaration que madame a dit quelle était la cause de la guerre. Mme n'a

 21   jamais parlé de la cause de la guerre.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 23   M. KARADZIC : [interprétation]

 24   Q.  Je reprends donc. Convenons-nous que cette régression en temps de paix

 25   est le résultat d'une décision des populations de changer d'entité ?

 26   R.  J'aimerais apporter un commentaire sur un autre élément. Il existe une

 27   différence légère quant à la détermination des chiffres. Tout d'abord, les

 28   sources sont différentes. La méthodologie a été différente. Le laps de


Page 28362

  1   temps des rapports des sources était différent. Donc les populations

  2   couvertes [comme interprété] par 1997 et 1998 et 1995 est différente. Donc

  3   toute la population de -- c'est en 1995, et 1997 ne l'est pas.

  4   Quoi qu'il en soit, je vois les chiffres, j'ai regardé et j'ai évalué les

  5   schémas de ces chiffres, donc j'ai regardé la répartition intégrale de tous

  6   les groupes ethniques. En 1991, 1995, et 1997/1998, je vois une mouvance du

  7   schéma qui indique une augmentation quant à la part des Serbes et une

  8   régression de la part des Musulmans et des Croates. C'est ainsi que je vois

  9   ce chiffre. Cela n'a rien à voir quant aux causes et aux processus qui ont

 10   mené à ces modifications. Je répertorie les changements du schéma et c'est

 11   tout, et c'est tout ce que je viens de dire, et c'est là où mon rôle

 12   s'achève. D'étudier les causes de l'immigration, là, c'est une démarche

 13   complètement différente qui serait nécessaire. Il me faudrait donc avoir

 14   une démarche complètement différente.

 15   C'est donc les causes de l'immigration qui sont une question

 16   extrêmement complexe à étudier dans un contexte de recherche.

 17   Q.  Merci. Pouvons-nous passer aux tableaux -- aux deux tableaux en dessous

 18   et voyons Krupa ?

 19   Convenons-nous que le nombre de Yougoslaves et autres à Krupa,

 20   littéralement, ont disparu ?

 21   R.  C'est ce que l'on voit dans le tableau. Ils ne sont pas répertoriés en

 22   1995.

 23   Q.  Merci. Avez-vous remarqué qu'il y a une uniformité quant à la chute de

 24   Serbes et la chute du nombre d'autres dans les municipalités de la

 25   Fédération et, d'un autre côté, l'augmentation du nombre de Serbes et

 26   autres dans les municipalités serbes de la République serbe ?

 27   R.  C'est ce que j'ai indiqué aujourd'hui, ce mouvement de population à

 28   l'opposé de la République serbe et de la Fédération, et j'ai inclus des


Page 28363

  1   chiffres sur ces mouvements de population dans la présentation. En page 2,

  2   tableau 3, il y a des chiffres qui indiquent bien ces flux opposés de

  3   mouvements dans ces deux parties, mais nous ne le voyons pas dans le

  4   tableau pour Bosanska Krupa dans l'annexe qui est à l'écran.

  5   Q.  Merci. Voyez ce qui émane de Bosanski Novi, s'il vous plaît. Nous avons

  6   des Yougoslaves et autres, 21 121 [phon], 5,1 % -- ou plutôt 2 121. Ils ne

  7   sont plus que 1,7 % en 1995, puis le chiffre monte pour atteindre 4,5 en

  8   1997/1998, donc le nombre de Yougoslaves et autres augmente dans la

  9   municipalité de Bosanski Novi, donc le pourcentage augmente par rapport à

 10   l'année 1995; est-ce bien cela ?

 11   R.  Je ne suis absolument pas d'accord. Donc en 1999 et en 1997/1998, nous

 12   avons les mêmes informations sur les groupes ethniques, parce que nous

 13   avons la même définition qui sert de base. Mais pour 1995, je n'ai

 14   absolument pas l'idée de la définition comment est-ce qu'on a défini les

 15   Serbes, les Musulmans, les Croates et les Yougoslaves, sur quelle base.

 16   Donc vous avez dit -- vous m'avez demandé aujourd'hui si je savais que la

 17   majorité des Yougoslaves étaient en fait des Serbes, donc je suppose que

 18   les autorités de la RS sont parties de cette même hypothèse, et que, là, où

 19   il y avait des différences entre les groupes ethniques, et yougoslaves, en

 20   particulier, c'est de cette manière-là qu'il faut les reporter, et ça, on

 21   le voit clairement à Banja Luka, par exemple.

 22   Q.  Mais est-ce que j'ai raison de dire qu'en 1995, dans la colonne des

 23   pourcentages pour les Yougoslaves, on voit 1,7, tandis que nous avons 4,5

 24   pour 1995. Donc il y a une estimation qu'il y a trois fois plus de

 25   Yougoslaves qu'avant.

 26   Donc ne vous sentez pas attaquée, s'il vous plaît. J'essaie juste de savoir

 27   quelle est l'évolution de la population. Je suppose que l'Accusation

 28   essaiera de démontrer aussi qui en est le responsable.


Page 28364

  1   Donc [inaudible] de savoir si, en 1995, ils sont 1,5, et après ils

  2   deviennent 4,5 % pour 1997/1998 ?

  3   R.  Mais ce que vous faites est tout à fait erroné. Vous comparez des

  4   choses qui ne sont pas comparables, et je l'ai déjà dit aujourd'hui, donc

  5   l'intention que j'avais était de montrer le changement du système, du

  6   modèle de l'évolution des groupes ethniques, donc je ne pense pas que l'on

  7   puisse comparer des pourcentages en tant que tel. Il faut voir le modèle,

  8   comment est-ce que ce modèle change entre 1995 et 1997/1998.

  9   Donc il faudrait comparer en fait le pourcentage de 1991 et 1997/1998

 10   puisque le groupe ethnique est défini de la même façon dans ces deux-là.

 11   Même si, pour 1991, nous avons toute la population qui a été recensée, et

 12   ensuite nous ne l'avons plus mais nous avons une bonne estimation.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors, si on raisonne en termes de

 14   modèle, comment est-ce que vous expliquez cette augmentation de 1,7 à 4,5

 15   pour ce qui est de la catégorie de Yougoslaves et autres ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] De la manière dont je l'interprète, il y a

 17   moins de Yougoslaves de 5,1 à 4,5 en 1997/1998.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais ne pourrait-on pas dire qu'il y a

 19   une augmentation qui est une augmentation de 1,7 en 1995 à 4,5 en 1997/1998

 20   ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Je serais très prudente en affirmant cela,

 22   parce qu'il n'est pas certain que ce soit les mêmes Yougoslaves donc ils

 23   ont été répertoriés de la même façon en 1995 et les autres années.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors il faudrait aussi être prudent

 25   lorsqu'on compare 1991 et 1995.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais, oui, bien sûr. Absolument. Ce qui est

 27   très important ici c'est la population qui part en 1992 même si, là encore,

 28   nous avons un chiffre qui repose sur une définition du groupe ethnique


Page 28365

  1   modifié.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Puis-je prendre la parole ?

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

  4   M. KARADZIC : [interprétation]

  5   Q.  Alors je ne comprends pas pourquoi est-ce qu'on nous affiche ces

  6   chiffres, ces pourcentages de 1,7, en 1995, et de 4,5, en 1997/1998, si

  7   cela ne nous montre pas l'augmentation du pourcentage de Yougoslaves et

  8   autres dans les municipalités serbes et la chute de ce pourcentage de

  9   municipalités musulmanes.

 10   En fait, nous avons 15 [inaudible] atteints en 1997/1998, le

 11   pourcentage de 1991, n'est-ce pas, parce que ça a augmenté de 1,7 à 4,5 ?

 12   R.  Mais que voulez-vous que je vous dise ? Je vous dis que l'on ne peut

 13   pas comparer ces pourcentages, ce n'est pas la bonne méthode, parce qu'il y

 14   a des différences au niveau de la méthodologie et au niveau des sources,

 15   donc la différence qui réside à la base du calcul de ces pourcentages.

 16   Mais à titre d'illustration et pour ce qui est donc des déplacements de

 17   population en 1993 et le résultat de ce déplacement en 1995, en se basant

 18   sur des sources complètement différentes de ce que nous avons utilisé dans

 19   cette étude, il nous a semblé utile d'afficher ces tableaux, de les

 20   présenter.

 21   Q.  Merci. Mais, cela étant dit, dès le premier jour nous nous sommes mis

 22   d'accord sur le fait que les sources ne sont pas les mêmes. Moi, j'ai

 23   considéré que ces sources n'étaient pas comparables et que, d'un côté, on

 24   avait un recensement, le recensement en 1991, que d'autre part, on a eu

 25   toutes sortes d'approximations et d'inscription sur les listes électorales

 26   sur la base du volontariat. Que c'était comparé des torchons et des

 27   serpillières et que ce n'était pas la même chose, donc à l'époque, vous

 28   m'avez dit, oui, maintenant vous me dites -- vous me dites qu'on ne peut


Page 28366

  1   pas comparer ces chiffres, même si vous avez décidé de les intégrer dans

  2   vos tableaux, alors.

  3   R.  Monsieur Karadzic, que voulez-vous que je vous dise ? C'est ici à titre

  4   d'illustration de ce que d'autres ont dit sur les processus qui se sont

  5   produits pendant la guerre.

  6   J'estime que les statistiques que je donne constituent une source fiable

  7   pour apprécier les migrations qui se sont produites pendant la guerre et

  8   les changements au niveau de la composition ethnique.

  9   Donc ça c'est la position que j'adopte. Si vous voulez les chiffres,

 10   prenez, s'il vous plaît, ces chiffres dans mon travail parce que je sais

 11   comment on a calculé ces chiffres et je sais que ces chiffres sont fiables.

 12   Pour ce qui est de ces sources-ci, je ne vous conseille pas de vous appuyer

 13   là-dessus en considérant que ce sont des statistiques qui montrent la

 14   réalité des événements, mais à titre illustratif, cela nous montre qu'il y

 15   a eu un certain nombre de choses qui se sont produites là-bas. C'est tout

 16   ce que je dis.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Professeur Tabeau, vous vous êtes

 18   appuyée sur les listes électorales de 1997 et vous venez de nous dire que

 19   les chiffres auxquels vous êtes arrivée sont fiables. Mais, en même temps,

 20   vous dites que ces statistiques de 1997 ne sont pas à 100 % fiables. Donc

 21   peut-être est-ce ça la question de M. Karadzic.

 22   Me suivez-vous ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je pense que oui.

 24   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Résumons. Les lises électorales de 1997 ne

 26   sont pas une source à 100 % fiable; cependant, je me suis servie de cette

 27   source pour produire mes chiffres. C'est comme ça que se pose votre

 28   question.


Page 28367

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Bien sûr, une liste électorale ne constitue

  3   pas une sourde idéale. En fait, il serait beaucoup mieux de pouvoir se

  4   fonder sur le recensement suivant le recensement de la population de

  5   Bosnie-Herzégovine parce que -- mais ce recensement nous ne l'avons pas.

  6   Les listes électorales ne sont pas d'aussi bonne qualité qu'un recensement

  7   mais sont fiables pour la période qui nous concerne, et sont généralement

  8   acceptables pour le type d'analyse que nous avons fournie ici, bien sûr, ce

  9   qui est vrai, sans aucun doute, c'est que cela constitue une source bien

 10   meilleure que les sources de la Republika Srpska pour les années 1993 et

 11   1995. Cela ne fait aucun doute. Donc, dans les tableaux que nous avons à

 12   l'écran, nous avons des approximations. Bien sûr qu'il n'y a pas eu de

 13   questionnaires qui ont été utilisés pour collecter ces informations. Il y a

 14   eu peut-être des inspections sur ces territoires et il y a eu des

 15   appréciations, des évaluations du nombre de personnes qui y résidaient. Il

 16   est certain qu'il n'y avait pas de listes dressées de noms. Il est certain

 17   qu'on ne sait pas comment l'appartenance au groupe ethnique a été déclarée.

 18   Donc, si on compare les sources de la Republika Srpska aux listes

 19   électorales, il est clair que les listes électorales sont bien de meilleure

 20   qualité. Ce que je vous dis c'est que les sources de la Republika Srpska

 21   sont très approximatives et qu'il ne faudrait pas s'appuyer sur ces

 22   numéros-là trop, parce que ce sont des approximations très grossières, que

 23   les sources de la Republika Srpska sont bonnes dans la mesure où elles nous

 24   permettent de voir qu'il y a eu de départ des territoires pendant la

 25   guerre, parce qu'on voit, en 1993 déjà, qu'il y a de grands groupes qui

 26   sont enregistrés comme étant partis, et en particulier, nous voyons qu'il y

 27   a des non-Serbes qui sont partis, et c'est ça qui a entraîné un changement

 28   au niveau de la composition ethnique dès 1995 et répertorié même par les


Page 28368

  1   autorités de la Republika Srpska. Mais pour avoir une estimation fiable de

  2   la composition ethnique, je pense qu'il voudrait beaucoup mieux que l'on se

  3   penche sur les résultats des listes électorales, parce que la méthode

  4   d'estimation a été bien plus fiable dans ce cas-là.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Page suivante, s'il vous plaît, je voudrais que

  6   l'on voie comment ça se présente à Kotor Varos.

  7   M. KARADZIC : [interprétation]

  8   Q.  Docteur Tabeau, est-ce que nous sommes bien d'accord sur le fait qu'en

  9   chiffre absolu, en chiffre relatif, il n'y a quasiment pas de changement au

 10   niveau du nombre de Serbes ? 14 000 en 1991, 1995 également, 14 056 en

 11   1991, et 14 000 en mesure 1995.

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Merci. En 1995, par cette méthode de recensement par la police, on

 14   estime à 1 800, le nombre de Musulmans, et à 1 000, le nombre de Croates.

 15   Donc c'est 10.7 et 6 % respectivement en 1995. Mais voyons maintenant

 16   comment ça chute de nouveau, le pourcentage chute entre 1995 et 1997,

 17   tandis que le nombre de Serbes ici ne change pas réellement. Donc

 18   l'augmentation éventuelle du nombre de pourcentage de Serbe n'augmente pas,

 19   mais le pourcentage de Serbes est le résultat exclusivement des mouvements

 20   dans la population musulmane et croate, n'est-ce pas ?

 21   R.  Ce que je vois c'est que le pourcentage de Serbes augment entre 1995 et

 22   1997, et les autres ont leur pourcentage qui descend. Donc le nombre de

 23   Serbes, certes, ne change pas, mais les autres partent, et c'est ça qui

 24   donne pour résultat l'augmentation de pourcentage de Serbes dans la

 25   population. Mais vous avez une situation comparable dans d'autres

 26   municipalités. Vous avez, dans certains cas, les chiffres absolus qui

 27   augmentent pour les Serbes, mais, là encore, à chaque fois, il faudrait que

 28   l'on se penche sur le modèle : comment est-ce que le nombre de personnes


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  1   dans chaque groupe ethnique évolue ?

  2   Q.  Mais voyez le pourcentage des Yougoslaves et des autres, à Kotor Varos.

  3   Donc c'est une municipalité qui reste sur le territoire de la Republika

  4   Srpska.

  5   Là, le pourcentage des Yougoslaves et autres augmente de 2.7 pour atteindre

  6   3.4; c'est bien ça ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Donc pour conclure -- ou plutôt, voyons la page suivante. Je voudrais

  9   que l'on examine la situation de Prijedor, pour pouvoir tirer des

 10   conclusions.

 11   Est-il exact de dire que nous avons ici les deux facteurs. Nous avons d'une

 12   part la diminution du nombre de Croates et de Musulmans, et d'autre part,

 13   nous avons une augmentation du nombre de Serbes de 47 000 à 61 000. Donc en

 14   1995, vous avez 3 600 Musulmans à Prijedor, et vous avez plutôt 1 000

 15   Croates, 5.4 dans la population totale, et 1.5 respectivement dans la

 16   population totale.

 17   Donc, en 1197, nous avons une augmentation du nombre de Croates par

 18   rapport à l'année 1995, tandis que le nombre de Musulmans chute, et nous

 19   avons le nombre de Yougoslaves qui augmentent. Donc les Croates,

 20   Yougoslaves et les autres reviennent à Prijedor, une fois que la paix a été

 21   rétablie, tandis que les Musulmans eux partent; c'est bien ça ?

 22   R.  J'interprète ce tableau différemment. C'est une municipalité

 23   mixte, en 1991, Prijedor. Vous avez des pourcentages comparables de

 24   Musulmans et de Serbes, les autres, les Croates, les Yougoslaves et les

 25   autres sont bien moins représentés. Puis, en 1995, 1997, 1998, ce que je

 26   vois c'est que nous avons ici une municipalité qui a une vaste majorité

 27   serbe, donc si on prend en compte leur pourcentage dans la population

 28   totale. Les Musulmans, qui avaient constitué un groupe considérable, de


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  1   taille considérable avant la guerre, n'y sont plus, et c'est que vous voyez

  2   dans les informations pour 1995, 1997/1998, ça ne change pas.

  3   Une population musulmane qui a quitté la ville correspond à 42 000,

  4   et c'est un chiffre très important. Puis, vous verrez la même chose dans

  5   les annexes de mon rapport, dans les données qui concernent les différentes

  6   municipalités, lorsque l'on prend le nombre de personnes dites déplacées,

  7   le nombre de Musulmans déplacés pour la municipalité de Prijedor, un nombre

  8   très important.

  9   Q.  Mais il y avait combien de Yougoslaves à Prijedor; est-ce que vous vous

 10   en souvenez ?

 11   R.  Bien sûr que je ne me souviens pas. Mais les Yougoslaves et les autres

 12   groupes ethniques qui figurent à l'annexe A 5.4 pour Prijedor,

 13   correspondent à 9 295. Donc c'est le nombre qui résulte du recensement de

 14   1991.

 15   Q.  Là-dessus, les deux tiers correspondaient aux Yougoslaves et un tiers

 16   aux autres; c'est bien cela ?

 17   R.  C'est ce que vous affirmez, vous. Je ne peux pas confirmer ça, et il

 18   faudrait que je vérifie.

 19   Q.  Mais prenez le recensement de 1991. Il y a, là, 6 371 Yougoslaves et 2

 20   600 autres, et sur les 6 371, en 1991, vous avez 6 000 Serbes, donc c'est

 21   la majorité, la majorité très nette de Serbes; 6 371 par rapport à 2 600,

 22   donc c'est 2 à 1, et c'est ça qui crée cette image faussée. Sans vouloir

 23   vous insulter, c'est la propagande communiste en essayant de faire

 24   représenter les Serbes comme Yougoslaves pour obtenir une image erronée de

 25   la composition ethnique.

 26   Mme WEST : [interprétation] Objection, c'est une déclaration ce n'est pas

 27   une question.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quel est le tableau que nous sommes en


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  1   train de consulter.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est le recensement que je prends pour base,

  3   le recensement de 1991, et on y voit une ventilation. On a des Yougoslaves

  4   et les autres. Dans toutes les municipalités, nous voyons bien que les

  5   Yougoslaves sont deux fois plus nombreux que les autres. Vous avez les deux

  6   tiers de ceux que Pr Tabeau catégorise comme Yougoslaves, les deux tiers

  7   sont des Yougoslaves et sur la base de la situation politique, et nous

  8   verrons qu'elle est l'évolution de la population. Les Serbes et les autres

  9   reviennent dans les municipalités serbes tandis que leur nombre tombe dans

 10   les municipalités fédérales.

 11   M. KARADZIC : [interprétation]

 12   Q.  Prenez Sanski Most, maintenant. Est-ce que le nombre de Yougoslaves et

 13   autres tombes de 4,5 % [phon] ? Nous n'avons pas l'information pour 1995,

 14   mais nous voyons que ce pourcentage correspond à 2,4 en 1997.

 15   R.  Donc, à en juger d'après le tableau pour Sanski Most, effectivement, ce

 16   sont les pourcentages que nous y trouvons. Le pourcentage pour les

 17   Yougoslaves et autres correspond en fait à ce que j'appelle autres dans mon

 18   rapport, et le pourcentage est effectivement 2,4 [comme interprété]. Là

 19   encore, je souligne que je n'ai pas séparé les yougoslaves. Ils sont

 20   étudiés de manière conjointe, confondus à tout autre groupe ethnique, donc,

 21   qui n'est pas l'un des trois groupes ethniques principaux, et c'est de

 22   cette manière-là que je ventile les informations. Mais je ne pense pas que

 23   ce soit pertinent dans le cadre de cet échange que nous avons ici, parce

 24   que ce qui est important, ce sont les changements qui se produisent au sein

 25   des trois principaux groupes ethniques.

 26   Q.  Mais la position de la Défense est à l'opposé que cela est tout à fait

 27   pertinent, parce que, dans le groupe de Yougoslaves, nous avons un très

 28   grand nombre de Serbes. C'est ce que nous affirmons, et les changements au


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  1   sein de la communauté serbe ne sont pas représentés comme cela

  2   conviendrait, et cela est dû au fait que les Yougoslaves ont été mal

  3   estimés et ils ont même été joints aux autres qui constituent une minorité

  4   plus importante. Donc, Madame Tabeau, vous auriez dû simplement parler des

  5   Yougoslaves, et vous auriez dû rattacher les autres Yougoslaves, parce que

  6   leur pourcentage est moindre, au lieu de faire l'inverse, et ainsi

  7   d'exclure un très grand nombre de Serbes de vos calculs.

  8   R.  Je vous assure que je n'ai pas éliminé les Serbes de mes calculs. Tout

  9   simplement, j'ai traité les données en me fondant sur la définition que

 10   fournissent les interviewés. Donc les Yougoslaves sont déclarés comme tels,

 11   et je les prends en compte ainsi dans mon analyse, et vous, vous me dites,

 12   c'était en fait des Serbes, mais ce n'est pas ce que j'obtiens sur la base

 13   du recensement. Les Yougoslaves sont des Yougoslaves.

 14   Q.  Fort bien. Alors pourquoi ne les séparez-vous pas des autres, alors,

 15   parce que le recensement de 1991 les traite séparément, et ce n'est pas le

 16   cas de votre rapport ? Alors pourquoi le faites-vous, puisque nous avons

 17   des données tout à fait fiables et d'un autre ordre, donc les sources qui

 18   sont d'un autre ordre pour 1997, et on complique la situation encore

 19   davantage en fusionnant les Yougoslaves aux autres, et c'est là où on rend

 20   tout travail de conclusion encore plus difficile.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, je pense que nous

 22   avons compris ce qui en est de la notion de Yougoslave, la définition de

 23   Yougoslaves et des autres. Vous pourrez présenter vos arguments plus tard

 24   sur la base de ce tableau et du travail de Mme Tabeau.

 25   Nous pourrions peut-être maintenant passer à autre chose.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Juste une question, Monsieur Karadzic.

 28   Plusieurs fois, vous avez demandé au témoin ce qui en est des changements


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  1   ou de causes de changements dans les pourcentages de population entre 1995

  2   et 1997. En quoi est-ce que cela est pertinent en l'espèce, Monsieur

  3   Karadzic ?

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais, Excellence, nous avons une période de

  5   paix pendant cette période-là, et ils ne saisissent aucune contrainte. Or,

  6   nous avons des changements démographiques, et ces changements

  7   démographiques, en chiffres relatifs, sont plus importants que pendant la

  8   guerre.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais j'aimerais savoir en quoi est-ce

 10   que cela est pertinent en vue de l'acte d'accusation dressé contre vous,

 11   les changements entre 1995 et 1997 ?

 12   Ou plutôt, Maître Robinson.

 13   M. ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. C'est dans la

 14   mesure où le témoin s'est servi des chiffres démographiques pour 1997. Si

 15   elle n'avait pas fait cela, cela n'aurait eu aucune pertinence. On n'aurait

 16   pas abordé la question de la période 1995-1997. C'est uniquement parce

 17   qu'elle l'a fait.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie, Maître Robinson.

 19   Veuillez continuer, Monsieur Karadzic.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 21   M. KARADZIC : [interprétation]

 22   Q.  À présent, je souhaite que l'on aborde la question des comparaisons

 23   entre ces différentes municipalités, alors les municipalités qui sont

 24   couvertes par l'acte d'accusation.

 25   C'est dans ce sens que je voudrais que l'on examine le tableau 2B1. B2.1.

 26   Excusez-moi. L'illustration B2.1.

 27   Mme WEST : [interprétation] Le numéro est 102.

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je suppose qu'il s'agit de la page suivante.


Page 28374

  1   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est la page 100; la page précédente.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Dans ce cas-là, il s'agit sans doute de la page

  3   précédente.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Page 100.

  5   M. KARADZIC : [interprétation]

  6   Q.  Madame Tabeau, je vous prierais de bien vouloir nous aider à comprendre

  7   cette démonstration sous forme graphique des déplacements de population.

  8   Le premier graphique à gauche illustre la participation des Serbes au

  9   sein de la population des Musulmans et Croates, n'est-ce pas, en 1991 et

 10   1997 ? Les rayures indiquent l'année 1997, n'est-ce pas ?

 11   R.  Exact.

 12   Q.  Donc, en Bosnie-Herzégovine, dans l'ensemble de la Bosnie-Herzégovine,

 13   le nombre des Serbes était en 1997 en légère augmentation. Quant au nombre

 14   de Croates, il était en légère baisse, n'est-ce pas ?

 15   R.  Oui. Il s'agit de la composition ethnique, mais ce ne sont pas des

 16   chiffres absolus. Ce sont des actions des pourcentages qui figurent ici et

 17   qui concernent effectivement l'ensemble du territoire de la Bosnie-

 18   Herzégovine.

 19   Q.  Merci. Le graphique qui est juste à droite pour ce que l'on appelle la

 20   zone Karadzic et pour 1997 montre une certaine augmentation du nombre des

 21   Serbes et une certaine baisse du nombre des Musulmans, ainsi qu'un léger

 22   déclin du nombre des Croates, n'est-ce pas ?

 23   R.  Exact.

 24   Q.  Donc sous forme graphique, Madame Tabeau, est-ce que ces graphiques et

 25   ce qu'ils indiquent vous semblent relativement comparables à vos résultats

 26   ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Merci.


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  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Examinons maintenant la partie inférieure de

  2   cette page.

  3   M. KARADZIC : [interprétation]

  4   Q.  Dans la partie de la Bosnie-Herzégovine qui faisait partie de la

  5   Fédération, nous voyons encore une relative augmentation du nombre de

  6   Serbes et une réduction d'environ 60 % du nombre de Musulmans, n'est-ce pas

  7   -- ou plutôt, pardon, le nombre des Serbes -- ce que je viens de dire

  8   concernait 1991 par rapport à 1995, mais par rapport à 1997, on constate

  9   une augmentation du nombre des Serbes, n'est-ce pas ?

 10   R.  Exact.

 11   Q.  Merci. Voyons maintenant quelle était la situation du point de vue de

 12   la population croate. Graphique suivant.

 13   Alors, dans ce qu'on appelle la zone Karadzic, est-ce que vous serez

 14   d'accord pour admettre que l'on constate pour la Republika Srpska, par

 15   exemple, une légère augmentation du nombre des Musulmans -- ou plutôt, du

 16   pourcentage de Musulmans ? Est-ce que vous pourriez nous expliquer ce

 17   graphique ?

 18   R.  Que puis-je expliquer ? Nous avons ici deux zones différentes, l'une

 19   étant l'intégralité du pays et l'autre la zone Karadzic qui englobe 27

 20   municipalités. Dans ces deux zones, on recueille le même type de

 21   statistiques et on constate les résultats sur ces graphiques.

 22   Il y a effectivement de légères différences entre la population musulmane

 23   dans la Republika Srpska et la population musulmane dans l'ensemble de la

 24   Bosnie-Herzégovine. Autrement dit, le pourcentage des Musulmans dans la

 25   zone Karadzic est légèrement supérieur à ce qu'il est dans toute la Bosnie,

 26   ce qui est tout à fait possible, car nous parlons ici de composition

 27   ethnique en pourcentages, donc c'est tout à fait possible. Je ne dirais pas

 28   que ces différences soient particulièrement significatives, dans ce cas,


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  1   mais ce qui est frappant en ce qui concerne la Republika Srpska. C'est que

  2   le pourcentage des Serbes a augmenté de façon très significative dans les

  3   deux zones, donc aussi bien dans toute la Bosnie-Herzégovine que dans la

  4   partie liée à l'affaire Karadzic, et on voit que, dans les graphiques du

  5   bas qui concernent d'une part la partie de la Bosnie-Herzégovine, faisant

  6   partie de la Fédération et la zone Karadzic, on voit que le nombre des

  7   Serbes a décliné et que le nombre des Musulmans a augmenté.

  8   Q.  Là, vous venez parler des deux graphiques du bas, n'est-ce pas, tout en

  9   bas de la page ? Donc la région sous contrôle serbe, qui fait partie de ce

 10   qu'on appelle la zone Karadzic, lorsque après la signature des accords de

 11   Dayton, elle a fait partie de la Fédération. On voit que le pourcentage des

 12   Musulmans dans cette zone dépasse 80 %, ce qui est un pourcentage à ce

 13   qu'il était en 1991, n'est-ce pas ?

 14   R.  Dans la page suivante, nous voyons les pourcentages, Donc, pour 1997,

 15   dans la partie Fédération de la zone Karadzic, nous voyons que les

 16   Musulmans constituent 86,4 % de la population.

 17   Q.  Merci. Dans ces conditions, est-ce que nous pouvons convenir qu'en

 18   temps de paix, sur un territoire sous contrôle serbe, des changements

 19   démographiques ont lieu, à savoir que les Serbes ont pratiquement disparu

 20   d'un territoire qui était sous contrôle serbe jusqu'à la signature des

 21   accords de Dayton, alors que le nombre des Musulmans s'est accru pour

 22   atteindre 80 % et plus. Autrement dit, il y a eu des déplacements de

 23   population en temps de paix, et ce, en nombre significatif.

 24   J'aimerais que nous reprenions la page précédente. On constate qu'il n'y a

 25   pratiquement pas de Serbes sur le territoire qui était sous contrôle serbe

 26   par le passé, mais c'était un territoire qui faisait partie de la

 27   Fédération. Donc, même en temps de paix, il n'y a plus de Serbes dans ce

 28   territoire et il y a un nombre de Musulmans qui est en accroissement


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  1   signification par rapport à 1991 ?

  2   R.  Non. D'abord, vous avez parlé de changements démographiques survenus

  3   après la signature des accords de Dayton, autrement dit, en temps de paix.

  4   Je ne peux pas être d'accord avec cela car ce matin nous avons déjà très

  5   longuement discuté des changements qui sont intervenus pendant la guerre.

  6   En 1993, une proportion importante de la population avait déjà quitté des

  7   municipalités qui font partie de la zone Karadzic.

  8   En revanche, ce qui est exact c'est que, dans ces graphiques, nous trouvons

  9   un résumé de la façon dont ces changements se sont déroulés. Donc les non

 10   Serbes ont quitté la zone de la Republika Srpska, et s'agissant de la zone

 11   Fédération de la Bosnie-Herzégovine, ce sont les Serbes qui ont quitté

 12   cette zone. Voilà ce que résumé la figure B.21 [comme interprété] et nous

 13   voyons que les choses sont tout à fait clair pour les deux zones, c'est-à-

 14   dire pour la Republika Srpska, d'une part, pour la zone Fédération de la

 15   Bosnie-Herzégovine, d'autre part, ainsi que pour le reste de la Bosnie-

 16   Herzégovine, et en particulier la zone couverte dans l'affaire Karadzic.

 17   Ces graphiques nous donnent une image qui est le produit du traitement de

 18   la liste électorale mais des figures comparables ont été obtenues par

 19   d'autres organisations internationales, et en particulier par le HCR.

 20   Q.  Je vous en prie, concentrons-nous maintenant sur le deuxième et le

 21   sixième graphiques.

 22   Dans le deuxième graphique, on voit la totalité de la zone Karadzic et on

 23   constate que l'augmentation du pourcentage des Serbes n'est pas aussi

 24   important et que la baisse du pourcentage des Musulmans n'est pas aussi

 25   important selon ce graphique qui concerne la zone sous contrôle serbe.

 26   Selon le graphique 6, où on voit la zone qui avait été sous contrôle serbe

 27   et qui faisait partie de la Fédération, nous voyons -- nous constatons une

 28   chute très importante du nombre de Serbes ainsi qu'une baisse du nombre des


Page 28379

  1   Croates et autres, n'est-ce pas ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Merci.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Excellences, je dispose de combien de temps

  5   encore, je vous prie ?

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous avez besoin de combien de temps,

  7   Monsieur Karadzic, de combien de temps supplémentaire -- ou de combien de

  8   temps encore ?

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je crois que, selon le temps qui m'a été

 10   imparti par vous, je dispose de toute la journée d'aujourd'hui, n'est-ce

 11   pas ? A 15 ou 20 minutes près peut-être. Peut-être Ram pourrait-il nous

 12   aider sur ce point.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] J'avais l'impression que vous n'auriez

 14   peut-être pas besoin de tout le temps qui vous a été imparti. Quoi qu'il en

 15   soit, vous avez utilisé, jusqu'à présent, quatre heures, 40 minutes.

 16   Autrement dit, vous avez encore la prochaine partie de l'audience publique

 17   d'aujourd'hui, une heure, et vous devriez sans doute pouvoir en terminer

 18   aujourd'hui. Il serait préférable que l'audition de Mme Tabeau, y compris

 19   les questions supplémentaires, se termine aujourd'hui. Mais nous verrons.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Je vais m'efforcer de me conformer à ce

 21   que vous venez de dire. Merci.

 22   J'aimerais que nous nous penchions maintenant sur l'annexe 2A qui concerne

 23   Srebrenica.

 24   Page 80 dans mes documents. J'aimerais donc que nous examinions le document

 25   2A qui montre les résultats pour Srebrenica.

 26   Mme WEST : [interprétation] Est-ce que M. Karadzic parle du document

 27   concernant les personnes déplacées à Srebrenica ou d'un autre document car

 28   je ne comprends pas très bien de quel rapport il est en train de parler.


Page 28380

  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Les résultats relatifs à Srebrenica, eu égard à

  2   la population musulmane de Srebrenica, et ensuite, on a le tableau 2A.1.

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Page 68.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais un instant que l'on affiche la page

  5   suivante, la page 69.

  6   M. KARADZIC : [interprétation]

  7   Q.  Nous lisons ce qui est écrit en haut où nous trouvons les explications

  8   de ce que comporte le tableau A2.2. Dans ce paragraphe, vous dites que l'on

  9   peut faire une distinction entre les personnes déplacées à l'intérieur de

 10   la Bosnie-Herzégovine qui, en 1997, vivaient toujours en Bosnie-

 11   Herzégovine, mais dans d'autres zones que celles où elles habitaient avant;

 12   et la population déplacée, qui a quitté la Bosnie-Herzégovine en qualité de

 13   réfugiés, et qui désormais vient à l'étranger en 1997 ?

 14   Alors est-ce que vous avez appliqué ce même critère aux 27 municipalités,

 15   ou au neuf municipalités, ou bien, est-ce que vous pensez que seuls les

 16   habitants de Srebrenica étaient partis à l'étranger ?

 17   R.  Toutes les municipalités étaient traitées selon la même méthode mais,

 18   pour Srebrenica, dans cette annexe que nous examinons maintenant, nous

 19   avons d'autres résultats qui figurent également dans ce tableau.

 20   Q.  Merci. Mais ce qui m'intéresse c'est de savoir si, pour les 27

 21   municipalités, ou pour les neuf municipalités, ou pour l'ensemble des

 22   municipalités de Bosnie-Herzégovine, vous avez établi le nombre des

 23   personnes qui en 1997 résidaient à l'étranger.

 24   R.  La même analyse a été réalisée pour toutes les municipalités sur

 25   l'ensemble du territoire de Bosnie-Herzégovine.

 26   Q.  Mais alors peut-être ai-je manqué d'attention car je n'ai pas remarqué

 27   pour les autres municipalités que vous ayez distinguées le fait que

 28   certaines personnes vivaient à l'étranger. Si vous pouvez me montrer où


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  1   cela figure, je serai très heureux de vous entendre.

  2   R.  Nous n'avons pas fait figurer des chiffres distincts relatifs au

  3   déplacement de population à l'intérieur de la Bosnie-Herzégovine par

  4   rapport au déplacement de la population à l'extérieur, à savoir de la

  5   population de réfugiés, ceci est juste un échantillon. Srebrenica est un

  6   exemple que l'on trouve dans l'annexe A2.

  7   Q.  Mais c'était effectivement l'objet de ma question. Est-ce que, pour

  8   toutes les municipalités, la même méthode n'a pas été appliquée, n'est-ce

  9   pas ? Ou bien vous avez présenté les résultats dans tous les cas selon la

 10   même méthode ?

 11   R.  Les résultats qui figurent dans le rapport constituent une sélection

 12   des chiffres les plus importants. Si vous vous intéressez aux réfugiés, il

 13   est tout à fait possible, encore une fois, de fournir ces chiffres

 14   séparément.

 15   Q.  Mais, pour Srebrenica, nous pouvons obtenir les chiffres, le nombre des

 16   réfugiés vivant à l'étranger en 1997 alors que c'est impossible pour les

 17   autres municipalités, n'est-ce pas ?

 18   R.  Ce n'est pas possible immédiatement, mais dans le rapport Slobodan

 19   Milosevic, la sélection des municipalités est différente et elle est

 20   présentée exactement de la même façon que Srebrenica ici.

 21   Cela dit, je ne pense pas que cette distinction soit absolument capitale

 22   cette distinction entre personnes déplacées à l'intérieur de la Bosnie-

 23   Herzégovine et réfugiés, mais si besoin est, ce chiffre supplémentaire,

 24   complémentaire peut être présenté ultérieurement.

 25   Q.  Merci.

 26   J'aimerais maintenant que l'on revienne à la page une de l'annexe, s'il

 27   vous plaît.

 28   Afin d'examiner le tableau A2.1, en 1991, n'est-ce pas, 29 128 habitants


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  1   constituaient la population de Srebrenica, qui comprenait à peu près 21 et

  2   quelque Musulmans --

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, les interprètes ne

  4   vous suivent pas si vous lisez le tableau trop rapidement.

  5   Pourriez-vous répéter, je vous prie ?

  6   M. KARADZIC : [interprétation]

  7   Q.  Nous les voyons ces chiffres. La population totale de Srebrenica, en

  8   1991, était de 29 128 habitants, n'est-ce pas, dont deux tiers de

  9   Musulmans, un tiers de Serbes, et 600 habitants appartenant à la catégorie,

 10   autres, avec 35 Croates, n'est-ce pas ?

 11   Alors les données que vous avez recueillies à partir de diverses sources et

 12   à des fins diverses, n'est-ce pas ? Nous voyons ici le nombre total de la

 13   population en 1997 qui est estimée à 7 422 habitants dont 7 000 Musulmans -

 14   -

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, où est-ce que vous

 16   vous êtes fourni ce nombre total de la population en 1997, étant donné ce

 17   que Mme Tabeau a dit jusqu'à présent ?

 18   Madame Tabeau.

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agit d'un échantillon des personnes

 20   enregistrées en 1997 dans la municipalité de Srebrenica.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais, Excellence, dans la première colonne,

 22   deuxième ligne, nous lisons : Tous. Et le nombre correspondant à cette

 23   catégorie "tous" est de 7 442. Cela ne peut pas être un échantillon. Cela

 24   ne peut qu'être la population totale. Est-ce que c'est simplement un

 25   échantillon ? Quel est, dans ce cas-là, le nombre de la population totale ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Permettez-moi de dire que cette catégorie

 27   "tous" concerne l'ensemble des groupes ethniques, à savoir que cette

 28   colonne regroupe l'ensemble, "tous les groupes ethniques." Mais, bien


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  1   entendu, les nombres de 1997 ont été obtenus à partir de la liste

  2   électorale, autrement dit, c'est un échantillon. Ce n'est pas la totalité

  3   de la population en 1997.

  4   M. KARADZIC : [interprétation]

  5   Q.  Mais si 7 442 est un échantillon, quel est le nombre total des

  6   habitants en 1997 ?

  7   R.  J'ai déjà dit que je ne savais pas. Je ne dispose pas de ce chiffre. Je

  8   ne dispose pas du nombre total de la population en 1997.

  9   Q.  Mais la première ligne de la colonne 1, comment peut-on la comparer

 10   avec la deuxième ligne ? Quel est le sens qu'il y a à placer ces deux

 11   chiffres l'un à côté de l'autre ?

 12   R.  Ce qui est intéressant, c'est que l'on peut calculer exactement les

 13   pourcentages. Autrement dit, nous pouvons obtenir la composition ethnique

 14   pour 1991, et aussi pour 1997. Pour 1997, à cette fin, nous avons travaillé

 15   avec un échantillon, et les pourcentages calculés se trouvent dans la

 16   deuxième partie du même tableau. On peut comparer les pourcentages entre

 17   1991 et 1997. Ceci est justifié et exact. Mais on ne peut pas comparer les

 18   nombres absolus.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais la troisième et la quatrième

 20   lignes, comment doit-on les lire ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agit de la différence relative dont nous

 22   avons déjà parlé hier; 73,2 %, c'est en 1991 les Musulmans --

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, non. La dernière ligne.

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agit de la différence entre les deux; 01

 25   moins 73,2 divisé par 73,2, cela nous donne moins 99,9. C'est la

 26   modification du pourcentage de Musulmans entre 1991 et 1997 exprimée en

 27   termes relatifs.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais comment devons-nous lire, dans ce


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  1   cas, le chiffre suivant : plus 293 [comme interprété] ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agit de 01 moins 24,7 divisé par 24,7, ce

  3   qui nous donne ce résultat.

  4   M. KARADZIC : [interprétation]

  5   Q.  Donc, le nombre des Croates est trois fois supérieur, n'est-ce pas ?

  6   Plus 281.

  7   R.  Oui, c'est ce qu'indique ce tableau.

  8   Q.  Revenons aux deux premières lignes. Est-ce que nous avons là des

  9   nombres absolus, des chiffres absolus ?

 10   R.  Oui, ce sont des chiffres absolus pour 1991 et 1997 dans la deuxième

 11   colonne.

 12   Q.  Est-il exact qu'en 1997, les Serbes ont une population réduite d'à peu

 13   près 50 unités par rapport à 1991 ?

 14   R.  Nous venons de dire que pour 1997 il s'agit d'un échantillon, alors que

 15   pour 1991 il s'agit de la population totale.

 16   Donc, ce que ne pouvons faire, c'est penser à comparer 7 169 au nombre

 17   relatif à toutes les ethnicités, qui est de 7 442, ce qui nous donne un

 18   pourcentage de 96,3 % des Serbes en 1997 au sein de la population.

 19   Q.  Madame Tabeau, je ne sais pas ce qui vous permet de dire qu'il s'agit

 20   d'un nombre absolu.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, Maître Robinson, je

 22   pense que vous avez compris l'argument de Mme Tabeau. Tous les chiffres

 23   absolus relatifs à 1997 viennent de la liste électorale.

 24   Je ne crois pas que M. Karadzic ait compris cela.

 25   M. ROBINSON : [interprétation] Je suis sûr qu'il le comprend, mais c'est le

 26   seul chiffre que Mme Tabeau a comparé avec les chiffres de 1991. Donc même

 27   si nous avons tous compris qu'il s'agissait d'un échantillon, cet

 28   échantillonnage n'est pas aussi précis que les chiffres du recensement. Or,


Page 28385

  1   c'est la base de ce que Mme Tabeau déclare dans son rapport.

  2   Donc, je crois qu'il a très bien compris.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il peut continuer avec ce genre de

  4   question pour chaque tableau.

  5   Est-ce que nous allons faire la pause ?

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pas de problème. Je souhaitais simplement jeter

  7   un coup d'œil au tableau un instant, mais si vous voulez que nous fassions

  8   la pause maintenant, c'est possible.

  9   Le tableau A2.2.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien.

 11   M. KARADZIC : [interprétation]

 12   Q.  Il s'agit des électeurs en 1997 qui viennent de Srebrenica, n'est-ce

 13   pas ? On constate qu'à Srebrenica on trouve en 1997 3 237. C'est quoi ce

 14   chiffre, est-ce que vous pouvez nous le dire ? Il s'agit d'électeurs qui

 15   sont toujours à Srebrenica, n'est-ce pas, en 1997 ?

 16   R.  Oui, ce sont des électeurs qui sont toujours à Srebrenica en 1997.

 17   Ce tableau présente des statistiques d'un genre différent par rapport

 18   à ce dont nous avons parlé jusqu'à présent. Dans le but de déterminer les

 19   déplacements de population et de déterminer qui est parti, il est

 20   nécessaire de retrouver dans la liste électorale le nombre total de la

 21   population qui vivait à l'origine dans telle ou telle municipalité. Dans le

 22   cas qui nous intéresse, il s'agit de la municipalité de Srebrenica.

 23   Donc, sur la liste électorale, on trouvait un total de 13 891

 24   électeurs qui, en 1991, habitaient à Srebrenica. Il s'agit donc du total;

 25   13 891 personnes.

 26   Q.  Sur ce total, 10 654 personnes ont voté ailleurs qu'à Srebrenica pour

 27   Srebrenica; c'est bien cela ?

 28   R.  Je ne sais pas et je ne veux pas savoir pour quelle municipalité ces


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  1   électeurs ont voté. La seule chose que je sais, c'est que ce chiffre de 10

  2   654 concerne les personnes qui se sont enregistrées pour voter ailleurs que

  3   dans la municipalité de Srebrenica, mais qu'il s'agit d'électeurs qui

  4   habitaient auparavant dans la municipalité de Srebrenica, et que seuls 3

  5   237 électeurs sur l'ensemble de la population d'origine en 1991 dans la

  6   municipalité de Srebrenica se sont enregistrés à Srebrenica en 1997. Comme

  7   nous le constatons, pratiquement la totalité de ces 3 237 personnes sont

  8   des Serbes.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant, Madame Tabeau.

 10   Comment ce nombre peut-il se comparer au nombre que nous avons vu à

 11   la page précédente, 7 242 ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] J'attendais cette question. Les deux

 13   populations sont différentes, différentes dans le sens où les électeurs qui

 14   s'enregistraient dans tel ou tel endroit pouvaient être regroupés de façon

 15   différente. Dans le tableau de la page précédente, nous avions le nombre de

 16   l'ensemble des électeurs qui se sont enregistrés à Srebrenica. L'ensemble

 17   de ces électeurs. Il ne s'agit pas uniquement des personnes qui habitaient

 18   à Srebrenica en 1991, parce qu'il y a eu des nouveaux venus entre-temps.

 19   Une population part, et une autre population arrive.

 20   Si l'on fait le total de l'ensemble de ces électeurs en 1997, on obtient le

 21   chiffre de 7 442. Ce nombre inclut les 3 237 électeurs que l'on voit dans

 22   le tableau A2.2. Les 3 237 électeurs en font partie. Mais le nombre de 13

 23   891 [comme interprété] concerne une autre population, population

 24   différente, différente dans le sens où les électeurs dans ce tableau-ci

 25   sont regroupés en fonction de leur lieu de résidence en 1991. Or,

 26   manifestement, pour un grand nombre de ces électeurs, le lieu de résidence

 27   était différent en 1997. Pour 10 654 électeurs, en fait.

 28   Donc, les perspectives qui ont présidé à l'établissement de ces tableaux


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  1   sont différentes, donc ce n'est pas une erreur de trouver 13 000 et plus

  2   électeurs au tableau 2.2 qui sont mis en rapport avec Srebrenica, et un

  3   nombre différent de ces électeurs au tableau 2.1.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie. Une seconde, Monsieur

  5   Karadzic.

  6   Allez-y, Monsieur Karadzic.

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] On pourrait faire la pause, et nous

  8   poursuivrons ensuite. Il va tout de même falloir poursuivre sur ce sujet.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] J'aimerais que vous organisiez le reste

 10   de votre contre-interrogatoire afin qu'il puisse s'achever au cours de la

 11   partie suivante de l'audience.

 12   Nous reprendrons nos débats à 13 heures 30.

 13   --- L'audience est suspendue pour le déjeuner à 12 heures 33.

 14   --- L'audience est reprise à 13 heures 32.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Karadzic.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Je vais aborder Srebrenica brièvement,

 17   ensuite nous allons aborder la question de Sarajevo.

 18   M. KARADZIC : [interprétation]

 19   Q.  Je vais vous demander d'examiner le tableau A2.2. D'après ce tableau,

 20   l'évaluation, mais ce n'est pas vraiment une évaluation,  en fait c'est un

 21   fait, ça devrait être un fait, que donc lors des élections de 1997, il y a

 22   eu 9 726 Musulmans qui sont présents qui se trouvent sur les listes

 23   électorales; est-ce exact ?

 24   R.  Moi, je pense que le chiffre exact est 9 730 Musulmans. Ce sont eux qui

 25   ont été identifiés, et il s'agit des gens qui en 1991 habitaient la

 26   municipalité de Srebrenica.

 27   Q.  Mais ils se sont présentés aux élections en 1997, n'est-ce pas, parce

 28   que regardez le titre du tableau A2.2 ?


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  1   R.  C'est ce que je viens de dire; 9 730 Musulmans originaires de la

  2   municipalité de Srebrenica figurent sur les listes électorales de 1997.

  3   Q.  Merci. Ils se sont présentés pour voter où, dans quelle municipalité ?

  4   R.  Pour quatre d'entre eux, à Srebrenica; et 9 726 ailleurs.

  5   Q.  Merci. Autrement dit, ils ne figurent pas dans les listes électorales

  6   de leur résidence ou des lieux de résidence, mais ils pouvaient voter là où

  7   ils voulaient voter, là, ils ont envie de voter.

  8   R.  Je n'ai pas compris la question. Mais ce que je peux confirmer c'est

  9   que 9 730 personnes qui habitaient la municipalité de Srebrenica, d'après

 10   le recensement de la population de 1991, ce groupe-là de Musulmans

 11   originaires de Srebrenica se sont enregistrés pour voter à Srebrenica,

 12   quatre d'entre eux, et le reste est allé voter ailleurs.

 13   Q.  Mais on parle du vote à Srebrenica, n'est-ce pas ?

 14   R.  Moi, je n'ai pas vérifié où ils sont allés voter, ce n'est pas ce qui

 15   m'intéressait. Moi, ce que j'ai voulu savoir, c'est l'endroit où ils ont

 16   été enregistrés, sur quelle liste électorale leurs noms figuraient. Il n'y

 17   en a que quatre qui étaient sur les listes de Srebrenica, alors que 9 726

 18   étaient enregistrés sur les listes relatives à d'autres municipalités.

 19   Q.  Donc ailleurs dans d'autres municipalités ?

 20   R.  Oui. Quand je dis ailleurs, ça veut dire pas dans la municipalité de

 21   Srebrenica.

 22   Q.  Est-ce que ceci comprend aussi les pays tiers, les pays européens ou

 23   l'Amérique ?

 24   R.  Oui. Et d'ailleurs, on peut examiner le tableau A2.3 qui est sur la

 25   page 71.

 26   Donc, au niveau du premier tableau A2.3 (a), nous pouvons voir le

 27   total de la population que l'on voit donc dans la dernière colonne, 9 730.

 28   Sur ce chiffre, quatre sont localisés dans la municipalité de Srebrenica.


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  1   Donc on ne le considère pas comme des personnes déplacées; le reste, on les

  2   trouve dans deux catégories distinctes. La première, 8 002 personnes, des

  3   personnes déplacées à l'intérieur de Bosnie-Herzégovine, et 1 724

  4   personnes, la colonne suivante, des réfugiés originaires de Srebrenica se

  5   trouvant dans des pays tiers, autres pays que la Bosnie-Herzégovine.

  6   Q.  Sur ce chiffre, il y en avait aussi bien en Serbie, en Croatie, au

  7   Monténégro et même en Amérique, ou bien dans des pays européens; est-ce que

  8   vous pensez que, là, on trouve le chiffre total de réfugiés, ou bien est-ce

  9   que c'est simplement le nombre des personnes réfugiées qui figurent sur ces

 10   listes d'élection ?

 11   R.  Là, ce sont des bulletins -- enfin des listes électorales, donc c'est

 12   un échantillon. Ceci ne représente pas la totalité de la population des

 13   réfugiés se trouvant dans des pays tiers qui étaient originaires de

 14   Srebrenica. C'est un petit groupe très restreint. La plupart étaient à

 15   l'extérieur de la région et même à l'extérieur de l'ex-Yougoslavie. C'est

 16   quelque chose que l'on va voir dans le tableau A2.3(c), le dernier.

 17   Q.  Avez-vous remarqué que proportionnellement la participation des Serbes

 18   dans la population déplacée, décédée, réfugiée, correspond au pourcentage

 19   des Serbes dans la population totale ? Est-ce que vous avez remarqué aussi

 20   que le nombre de Musulmans est un petit peu plus élevé surtout comparé

 21   aussi au nombre des Croates ?

 22   R.  Là, vous allez un peu trop vite, parce que, là, vous parlez de

 23   personnes décédées, alors qu'on n'a pas du tout parlé de cela, donc je ne

 24   vois pas de quoi vous parlez exactement.

 25   Q.  Je parle de façon générale, les souffrances, les réfugiés, les

 26   personnes mortes et décédées. Est-ce que vous avez remarqué, est-ce que

 27   vous êtes d'accord avec moi pour dire ou pour établir le nombre de celles

 28   qui ont souffert ? Est-ce que vous avez comparé ce nombre au nombre ou au


Page 28390

  1   pourcentage de la population serbe dans la population totale ? Est-ce que

  2   vous avez essayé de comparer ces deux catégories ?

  3   R.  Si vous parlez du pourcentage des personnes qui ont souffert, et ceci

  4   ventilé par appartenance ethnique, tout ce que je peux vous proposer c'est

  5   ce rapport. Mais, là, vous ne trouvez pas de pourcentage. Vous trouvez des

  6   chiffres minimums exprimés ad minima, et parfois quand vous voyez des

  7   pourcentages, ce sont des pourcentages parfaitement relatifs. Moi, j'ai

  8   fait un certain nombre de rapports concernant les victimes. J'ai essayé de

  9   quantifier le nombre des victimes. Le plus souvent, il s'agissait de

 10   chiffres ad minima, et ceci concernait tous les groupes ethniques, y

 11   compris la population serbe.

 12   C'est tout ce que je peux vous proposer, tout ce que je peux vous

 13   donner, mais je ne voudrais pas entrer dans cette discussion, je ne

 14   voudrais pas que l'on compare la souffrance des différents groupes

 15   ethniques. Je ne voudrais pas me lancer dans ces comparaisons.

 16   Q.  Bien. Est-il possible d'examiner rapidement le tableau 1.BH, à savoir

 17   le pourcentage des nombres de différents groupes ethniques par rapport à la

 18   population totale. C'est quelque chose qui se trouve, je pense, à la page

 19   70.

 20   Mme WEST : [interprétation] Il s'agit de la page 66.

 21   M. KARADZIC : [interprétation]

 22   Q.  Aidez-moi pour comprendre ce tableau. Donc là nous avons la population

 23   d'après le recensement de 1991, et après nous avons un échantillon, vous

 24   appelez cela comme cela, donc c'est un pourcentage auquel vous êtes arrivée

 25   sur la base d'un échantillon, et c'est un chiffre que vous donnez pour

 26   l'année 1997.

 27   Est-ce que vous êtes d'accord que sur 3,5 millions de personnes au-

 28   dessus de 18 ans il y avait à peu près 1 150 000 Serbes ?


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  1   R.  Puis-je avoir la page ? Parce que je ne vois pas tous les chiffres sur

  2   l'écran. Et il faudrait que je trouve ça dans mon rapport.

  3   Mme WEST : [interprétation] Page 65.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Voilà. Vous disiez donc qu'il y avait

  5   3 500 065 [comme interprété] à peu près d'habitants, toute ethnicité

  6   confondue, et à peu près 1 148 000 [comme interprété] étaient des Serbes.

  7   M. KARADZIC : [interprétation]

  8   Q.  Il s'agit de gens nés avant 1980, n'est-ce pas ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Ensuite, nous avons un autre chiffre, 1 800 000, toute nationalité

 11   confondue ? C'est un échantillon, n'est-ce pas ? C'est un échantillon

 12   représentant la moitié de la population de Bosnie-Herzégovine. Ceci

 13   représente à peu près la moitié de la population de Bosnie-Herzégovine ?

 14   R.  Oui. Là, vous avez les listes électorales correspondant aux élections

 15   de 1997, et donc nous avons utilisé ces listes pour effectuer ces analyses,

 16   et là, nous avons donc la totalité des électeurs, 1 800 000.

 17   Q.  Comment en êtes-vous arrivée au chiffre de 9,7 % [phon] lu de Serbes

 18   qu'avant, parce que, dans toute la Bosnie-Herzégovine, le nombre de Serbes

 19   s'est accru de 3,1 %; c'est bien cela ?

 20   R.  Où est-ce que j'ai dit cela ? Parce que, moi, je n'arrive pas à le

 21   trouver. Je ne comprends pas. Comment arrivez-vous à ce chiffre ?

 22   Q.  Donc dans la première colonne, on dit quel est le pourcentage de Serbes

 23   par rapport à la population totale de 1981 [comme interprété], et ensuite

 24   on voit la proportion de Serbes par rapport à l'échantillon calculé pour

 25   1997. Donc vous en arrivez à la conclusion que le pourcentage de Serbes

 26   s'est accru de 3,1 %, ou bien 9,7 % ?

 27   R.  Oui, c'est exact. Je le vois là.

 28   Q.  Mais comment en êtes-vous arrivée à ce pourcentage-là ?


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  1   R.  Je pense que nous avons parlé déjà de la méthode utilisée en long et en

  2   travers, à plusieurs reprises d'ailleurs au cours de ma déposition. Dois-je

  3   vraiment répéter tout cela ? Je pense que non.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pour comprendre le contexte, où sont

  5   parties les 0,7 millions de personnes, parce que d'après nos meilleurs

  6   souvenirs, en 1997 nous avions un total de 2,5 millions d'habitants.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Mais ici on parle des correspondances,

  8   donc c'est quelque chose qui ne concerne que ce chiffre, évidemment que le

  9   chiffre de 2,5 millions est un chiffre plus bas.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Les pourcentages 32,2 et 35,3 se sont les

 12   pourcentages de la représentation serbe au sein de la population totale ou

 13   bien de l'échantillon. Que dois-je dire de plus ?

 14   M. KARADZIC : [interprétation]

 15   Q.  Mais regardez ce qui se passe avec les Musulmans. Ils représentaient

 16   42,2 %, après dans la deuxième colonne 45,5 %, et là, vous en arrivez à un

 17   pourcentage de 7,7 % de plus; c'est bien cela ? Pourquoi ? Parce que les

 18   Croates, leur population a diminué, qui représentait donc 17,7 % de la

 19   population et à la fin, enfin en 1997, ils ne représentent que 13,4, puis

 20   les autres aussi, leur nombre aussi a diminué. C'est à cause de cela,

 21   n'est-ce pas, que vous pouvez tirer ces conclusions ?

 22   R.  Je ne comprends toujours pas la question que vous me posez.

 23   Q.  J'ai voulu voir comment interpréter ce tableau, comment il peut nous

 24   être utile pour voir quels étaient les mouvements de la population.

 25   Est-ce que vous savez quelle était la partie ou la portion du territoire de

 26   Bosnie-Herzégovine contrôlée par les Serbes pendant la guerre ? Est-ce que

 27   vous savez que parfois il s'agissait d'un territoire qui couvrait même

 28   jusqu'à 70 % du territoire total ?


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  1   R.  C'est vous qui le dites. Moi je n'ai jamais fait de telles

  2   comparaisons, surtout pas dans ce rapport.

  3   Q.  Merci.

  4   Est-il possible de voir le troisième tableau, 3.BH.

  5   Aidez-nous pour mieux comprendre ce tableau. Est-ce que, là, on en arrive à

  6   une estimation indiquant que toutes les personnes déplacées, tous les

  7   réfugiés correspondaient à un chiffre total de 1 306 000 et, en ce qui

  8   concerne les Serbes, ils représentaient 410 000 à peu près ?

  9   R.  Oui, vous avez bien interprété ce tableau, vous l'avez bien lu.

 10   Q.  Merci. Mais voilà ce que je vais vous dire, ceci par rapport à la

 11   population de personnes déplacées correspond au pourcentage de 31,4 %,

 12   alors que dans la population totale les Serbes représentent 32 % de la

 13   population, et c'est pour cela que je vous ai posé la question. Est-ce que

 14   vous avez remarqué cela, le pourcentage des Serbes dans la population des

 15   personnes déplacées réfugiées correspond plus ou moins à la représentation,

 16   au pourcentage de la population serbe dans la population générale de

 17   Bosnie-Herzégovine ?

 18   R.  Peut-être. Alors, qu'est-ce qu'on fait avec ce chiffre ?

 19   Q.  Il n'y a pas besoin de vous sentir menacée. Moi, je suis accusé en

 20   l'espèce. On dit que le côté serbe a semé la terreur parmi la population,

 21   et voyons voir quelle est la situation exacte. Par exemple, les Musulmans,

 22   ils représentent à peu près 550 000 Musulmans dans la population totale, ce

 23   qui correspond à 42,4 %. Quel est leur pourcentage dans la population

 24   générale de Bosnie-Herzégovine, 44 %, n'est-ce pas ?

 25   R.  Oui, c'est peut-être vrai, mais je ne me sens pas menacée du tout. Je

 26   réponds à vos questions et je ne pense pas -- je ne le sens pas comme des

 27   menaces. J'essaie de répondre à vos questions. Je ne vois pas pourquoi les

 28   pourcentages de personnes déplacées au sein de chaque groupe ethnique doit


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  1   correspondre ou être proportionnel à la représentation de la population.

  2   C'est peut-être le cas. Je ne rentrerai pas dans cette discussion. Moi,

  3   j'ai fait mon rapport avec un objectif, à savoir de fournir le nombre de

  4   personnes déplacées, exprimé par des chiffres ad minima, et de voir quel

  5   est leur pourcentage par rapport à la population ou différents groupes de

  6   population, ce que vous voyez, par exemple, dans le tableau 3BH [comme

  7   interprété]. C'est tout ce que je dis.

  8   Q.  Mais, Docteur Tabeau, vous êtes ici dans un procès au pénal. Il s'agit

  9   de déterminer ma responsabilité, ma culpabilité. Ce que vous avez fait --

 10   si ce que vous avez fait -- si vous l'aviez fait pour les besoins de la

 11   planification démographique d'un gouvernement, vous auriez tout à fait

 12   raison, mais on est ici pour déterminer mon éventuelle culpabilité pour

 13   déterminer la responsabilité des uns ou des autres. Vous savez, votre

 14   rapport doit avoir un objectif. Vous êtes ici pour quelque chose. On ne

 15   vous a pas amenée ici pour rien. Regardez la situation concernant la

 16   population croate. Là, nous avons donc 1 000 306 [phon], c'est le chiffre

 17   total de la population. Les Croates représentent 246 000, à peu près, et le

 18   pourcentage de la population civile est à peu près 18 %. Et vous allez vous

 19   rappeler qu'au sein de la population totale de Bosnie-Herzégovine, le

 20   pourcentage de Croates était à peu près égal, à savoir 18 %.

 21   R.  Alors, même si c'était comme ça ?

 22   Q.  Voici ma thèse, Docteur Tabeau : ici, il s'agissait d'une guerre

 23   civile. Les Serbes n'étaient pas là pour pourchasser ou menacer les autres.

 24   Les Serbes aussi ont souffert. Vous voyez bien qu'il s'agit ici d'une

 25   proportionnalité en ce qui concerne les souffrances.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, je pense que Mme

 27   Tabeau vous a déjà répondu. En ce qui concerne vos arguments, il vous

 28   appartient d'en décider par la suite, ou bien il appartient aux Juges,


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  1   évidemment, d'en décider à la fin.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Mais vous

  3   pourriez aussi, à juste titre, dire par la suite : mais pourquoi n'avez-

  4   vous pas présenté votre thèse à ce témoin -- au Dr Tabeau ? C'est pour cela

  5   que je l'ai fait, au cas où.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] J'interviens puisque vous avez posé une

  7   question qui portait sur les causes de ces déplacements.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Je vais aborder les questions concernant

  9   Sarajevo à présent.

 10   M. KARADZIC : [interprétation]

 11   Q.  Dans votre déposition, vous avez dit plusieurs choses qui ont trait à

 12   une qualification juridique ou politique, et voici ma question : est-ce que

 13   vous avez vous-même pu déterminer que Sarajevo était placée sous le siège,

 14   ou bien est-ce que vous avez repris cette qualification qui avait été

 15   établie à partir des autres ?

 16   R.  Moi, je ne suis pas partie de l'hypothèse que Sarajevo était sous

 17   siège. J'ai utilisé tout simplement des chiffres, un rapport produit par

 18   d'autres qui m'a servi à déterminer le nombre de victimes.

 19   Q.  Mais vous avez bien dit que Sarajevo était sous siège. Est-ce que vous

 20   considérez que Sarajevo ait été une ville assiégée ou bien est-ce que vous

 21   seriez plutôt d'accord avec moi pour dire que Sarajevo a été une ville

 22   divisée par Leningrad mais plutôt Beyrouth ?

 23   R.  Je vous réfère à la première note de bas de page du premier rapport

 24   concernant Sarajevo dans l'affaire Karadzic, où on dit que le thème du

 25   siège a été utilisé de la façon dont on l'utilisait -- de façon générale.

 26   Q.  Mais, moi, je dois combattre les généralités. Vous savez, quand les

 27   choses commencent mal, après, on ne corrige pas. Donc, on va passer à un

 28   autre sujet. Est-ce que vous avez mentionné que les victimes de Sarajevo


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  1   étaient les victimes de la terreur ?

  2   R.  C'est l'une des conclusions les plus probables, le fait de dire

  3   qu'effectivement, une campagne de terreur a été menée, en particulier

  4   contre des victimes civiles à Sarajevo.

  5   Q.  Cette affirmation exige certaines précisions. Vous avez déclaré que

  6   vous parveniez à cette conclusion en appliquant le formulaire relatif à la

  7   proportion de victimes civiles et militaires, n'est-ce pas ?

  8   R.  Oui, ces deux catégories ont été comparées.

  9   Q.  Merci. Cette formule est-elle la même lorsqu'on parle de conflits armés

 10   internationaux et lorsqu'on parle de conflits armés qui sont des guerres

 11   civiles ?

 12   R.  Je ne vois pas en quoi cette distinction pourrait être pertinente. Je

 13   ne vois pas quelle conclusion il serait possible de tirer d'une telle

 14   distinction.

 15   Q.  Je vous prie de bien vouloir simplement me dire si cette formule est

 16   une formule également appliquée pour déterminer les proportions en cas de

 17   conflit international armé comme vous le faites pour une guerre civile.

 18   Ensuite, nous irons plus loin. Mais je vous demande de bien vouloir

 19   répondre à cette question.

 20   R.  Je pense que la nécessité de protéger les civils, quel que soit le

 21   conflit, fait partie intégrante du droit international de la guerre. Les

 22   civils sont un groupe protégé de la population, qu'il s'agisse d'un conflit

 23   international ou d'un conflit interne, c'est-à-dire d'une guerre civile,

 24   donc dans toute guerre.

 25   Q.  Je ne conteste pas cela, mais ce qui m'intéresse, c'est le fait suivant

 26   : lorsque vous concluez au fait que le nombre de civils qui a été tué est

 27   plus important que cela ne devrait être admis dans un conflit de ce genre,

 28   est-ce que vous pensiez aussi à un conflit international ? Est-ce que vous


Page 28397

  1   pensez que le même critère s'applique aux deux catégories de conflits ?

  2   R.  Je n'ai pas discuté des dommages collatéraux en tant que tels dans mon

  3   rapport. J'ai réalisé une analyse simple au cours de laquelle j'ai comparé

  4   le nombre de civils tués au nombre de soldats tués, et c'est exactement la

  5   même chose pour les dommages collatéraux. Il n'existe aucun nombre qui

  6   pourrait être utilisé en tant que normes devant quelque tribunal que ce

  7   soit, normes susceptibles de permettre de déterminer un seuil, un seuil à

  8   partir duquel on ne parlerait plus de dommages collatéraux. La même

  9   remarque s'applique au travail que j'ai effectué en rapport avec Sarajevo.

 10   Il n'y a pas de prescription. Il n'y a pas de référence qui soit une norme.

 11   Il n'y a pas de nombre qui pourrait nous permettre de déterminer où se

 12   situe le seuil. Si le nombre de civils tués est beaucoup plus important que

 13   le nombre de soldats tués pendant plusieurs jours au cours d'activités de

 14   combat, c'est un fait qui pose problème.

 15   Q.  Est-ce que j'ai fait une erreur en vous comprenant ? Est-ce que j'ai

 16   mal compris en pensant qu'il n'y avait un coefficient, un coefficient qui

 17   peut indiquer s'il s'agit de victimes civiles collatérales ou de victimes

 18   civiles que l'on a tués de façon délibérée ? Est-ce que je n'ai pas raison

 19   de penser qu'il existe un tel coefficient qui permet de différencier entre

 20   les deux, c'est-à-dire entre les civils tués et blessé et des soldats tués

 21   et blessés ?

 22   R.  J'ai dit qu'il n'existe pas de norme, de référence qui puisse être

 23   utilisée dans une analyse comparable à celle que j'ai réalisée et utilisée

 24   devant un tribunal. Le terme "dommages collatéraux" existe, et si l'on

 25   compare la proportion de civils tués au nombre de soldats tués, c'est un

 26   phénomène intéressant qui nécessite une étude approfondie pour déterminer

 27   quels sont les résultats de cette analyse.

 28   Q.  Est-ce que vous voulez dire que le coefficient que vous avez appliqué


Page 28398

  1   pour décider à quel moment le nombre de victimes était excessif ? Est-ce

  2   que c'est un coefficient que vous avez créé vous-même et où est-ce que

  3   c'est un coefficient que vous avez trouvé ailleurs et que vous avez

  4   appliqué dans cette analyse ?

  5   Mais veuillez d'abord me rafraîchir la mémoire : Avez-vous dit, oui ou non,

  6   qu'un coefficient s'appliquait et que ce pourcentage avait une valeur

  7   inférieur à une autre valeur ? J'ai raison de penser de cela ou pas ?

  8   R.  Je n'ai pas créé de coefficient. J'ai étudié deux variables. La

  9   première variable c'était le nombre de civils tués, nombre recensé jour

 10   après jour, et j'ai fait la même chose pour le nombre de soldats tués. J'ai

 11   simplement réalisé une comparaison de deux variables afin d'aboutir à

 12   certaines conclusions. C'est le genre de comparaisons qui est fréquemment

 13   réalisé lorsqu'on parle d'autres conflits également mais cela ne signifie

 14   pas que l'on dispose d'un coefficient. Il s'agit simplement d'une

 15   comparaison entre des personnes tuées dans deux catégories différentes :

 16   première catégorie, les civils; et deuxième catégorie, les militaires.

 17   Puis, le deuxième élément, c'est qu'il n'existe pas de seuil pour recenser

 18   les dommages collatéraux ou le nombre de civils tués par soldats. C'est

 19   tout ce que j'ai dit.

 20   Q.  Mais vous n'avez pas évoqué un coefficient qui était proche d'un.

 21   R.  Ce n'est pas un coefficient. Simplement, si vous divisez un par un

 22   autre chiffre, le résultat de cette division peut être égal à un, inférieur

 23   à un, ou supérieur à un, et c'est tout ce que j'ai dit. Si le résultat de

 24   cette division est égal à un cela signifie que le nombre de civils tués est

 25   exactement égal au nombre de soldats tués. C'est tout ce que j'ai fait.

 26   Q.  Qui a établi cette norme ?

 27   R.  C'est ainsi que les choses sont si vous divisiez deux par deux, le

 28   résultat est égal à un, de la même façon que si vous faites deux plus deux,


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  1   le résultat est égal à quatre. Il n'y a pas de référence. Il n'y a pas de

  2   coefficient. C'est ainsi que les choses sont. On divise un chiffre par un

  3   autre chiffre, et si les chiffres en numérateur et dominateur sont les

  4   mêmes le résultat de la division est égale à un.

  5   Q.  Bon. Donc, dans les conflits armés, dans certains conflits armés, il

  6   existe quelque chose que l'on appelle "dommages collatéraux acceptables,"

  7   au nombre de victimes acceptables. Alors, quel est le nombre de civils tués

  8   qui constituerait autre chose que la diffusion de la terreur parmi une

  9   population, si je puis me permettre autre chose donc que de dommages

 10   collatéraux acceptables ?

 11   Quand est-ce qu'on atteint ce seuil dans le dénombrement des victimes

 12   civiles et des victimes militaires qui nous fait passer dans la catégorie

 13   inacceptable ?

 14   R.  Je ne peux pas vous donner un seuil, vous simplifier mon travail à

 15   l'extrême, en particulier, celui que j'ai réalisé pour la rédaction du

 16   rapport Karadzic sur Sarajevo. J'ai fait beaucoup plus que simplement

 17   calculer tel ou tel quotient, tel ou tel rapport, et vous dire que le

 18   rapport en question est excessif pendant plus de 30 % des jours pris en

 19   considération. Ça c'était simplement le début de mon analyse, et je peux

 20   vous renvoyer à mon rapport --

 21   Q.  Nous y viendrons plus tard. Pour le moment, ce qui m'intéresse ce sont

 22   simplement les fondamentaux. Vous avez conclu que les victimes civiles

 23   parmi les habitants de Sarajevo étaient le résultat de la terreur qui avait

 24   été répandue dans la ville. Je vous demande à présent de nous expliquer ce

 25   critère. Je souhaite également vous interroger au sujet de la méthode que

 26   vous avez appliquée. D'abord, est-ce que ce rapport est le même lorsque

 27   vous étudiez un conflit international ou une guerre civile, et est-ce que

 28   ce rapport est le même lorsque vous étudiez des combats en milieu urbain ou


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  1   des combats sur des champs de bataille ? Donc, si vous proposez telle ou

  2   telle affirmation, j'aimerais que vous nous expliquiez comment vous êtes

  3   parvenue à cette affirmation. Pouvez-vous nous dire ce qui est le seuil de

  4   l'acceptable, seuil qui doit être franchi pour que l'on puisse parler de

  5   terreur ?

  6   R.  Vous avez raison, il est très utile d'étudier un

  7   tel rapport dans des conflits divers et multiples. Vous avez tout à fait

  8   raison. Mais ceci est un projet tout à fait distinct de celui auquel j'ai

  9   participé, un projet qui exigerait pas mal de moyens pour recueillir des

 10   renseignements détaillés, fiables, et recenser le nombre de civils dans un

 11   conflit armé c'est en tout état de cause une tâche très difficile, je

 12   pense. Donc ce que j'ai fait est beaucoup plus simple qu'une étude aussi

 13   vaste. J'ai replacé Sarajevo dans un contexte marqué par un conflit qui

 14   s'est poursuivi pendant plusieurs mois et j'ai expliqué la méthode que j'ai

 15   appliquée dans mon rapport de façon très précise. Donc je peux vous dire ce

 16   que j'ai fait, ma conclusion au sujet de la terreur est en rapport avec le

 17   fait que d'abord les civils tués ont été tués pour des causes déterminées.

 18   Il y a un chapitre spécifique dans mon rapport, dans le rapport Karadzic,

 19   les autres rapports sur Sarajevo qui présentent les causes de décès

 20   exprimés en fonction du nombre d'obus et du nombre de tirs de tireurs

 21   isolés et d'autres tirs qui ont eu lieu, et un pourcentage important des

 22   tués a été tué pour les causes que je viens de définir.

 23   Est-ce qu'il n'y a pas de similitude ou de correspondance entre les civils

 24   et les soldats tués dans le temps ? Nous savons que les soldats sont tués -

 25   - enfin nous savons quelle est la cause de la mort des soldats. Quant à la

 26   cause de la mort des civils, il faut déterminer s'ils ont été tués par

 27   obus, par tirs isolés ou par d'autres tirs d'armes à feu. Je pense, par

 28   conséquent, qu'il y a de très bonnes raisons pour que je parle de la


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  1   probabilité qu'il y a eu une campagne de terreur au cours de laquelle les

  2   armes ont été utilisées pour tuer des civils à Sarajevo.

  3   Q.  Autrement dit, vous essayez d'affirmer que les Serbes préféraient tirer

  4   sur des civils que sur des soldats musulmans ?

  5   R.  Monsieur, je ne suis pas en train de parler des activités de combat. Je

  6   ne suis pas en train de parler de l'armée des Serbes de Bosnie. Ce que je

  7   vous dis, c'est ce que j'ai observé suite à l'étude des données relatives

  8   aux personnes tuées à Sarajevo.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame le Témoin, hier ou peut-être la

 10   semaine dernière, vous avez dit que les civils avaient été délibérément

 11   pris à partie. Vous vous rappelez avoir dit cela ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Qu'est-ce que cela signifie ? Est-ce que

 14   cela signifie que les soldats serbes ont délibérément voulu tuer des civils

 15   ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai aucune information au sujet des

 17   intentions. Je ne peux pas parler des intentions.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Parce que le mot "délibéré" ou

 19   "délibérément" a des connotations sur le plan juridique.

 20   Comment interprétez-vous votre expression, le fait de dire que les

 21   civils ont été délibérément pris à partie ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Pour moi, le mot "délibéré" ou "délibérément"

 23   n'avait aucun rapport avec des activités de combat. Il s'agit de causes de

 24   décès qui sont liées à l'emploi d'armes à feu contre des civils.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais, dans ce cas, est-ce que vous

 26   feriez une différence entre le mot "délibéré" -- non, je reprends.

 27   Dans ces conditions, une expression comme celle que vous avez

 28   utilisée, à savoir "pilonnage délibéré" ou "prise à partie délibérée",


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  1   comment une telle expression pourrait se distinguer, par exemple, de

  2   "pilonnage indiscriminé" ou de "pilonnage non proportionné", à votre avis.

  3   Est-ce que vous pourriez répondre à cette question ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Moi, je parlerais plutôt de pilonnages

  5   non proportionnés et de tirs par tireurs embusqués. Pourquoi ? Parce qu'on

  6   a lancé des obus et on a tué des personnes grâce à des tirs de tireurs

  7   isolés. Ça, c'est un fait. Il existe des causes de décès qui ont été

  8   déterminées en ce qui concerne les civils tués, et ces causes de décès

  9   illustrent le fait -- et puis, il y a eu de très nombreux jours pendant

 10   lesquels le nombre de civils tués a été supérieur au nombre de soldats

 11   tués. Donc à mon avis, selon moi, il s'agit d'une absence de

 12   proportionnalité.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 14   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Madame Tabeau, puisque nous parlons de

 15   cela, je voudrais ramener votre esprit sur une partie du contre-

 16   interrogatoire au cours duquel M. Karadzic vous a présenté sa thèse.

 17   Alors, ce qui s'est passé, c'est qu'il a posé plusieurs questions en

 18   une seule, et vous n'avez pas toujours été en mesure de répondre pleinement

 19   à ces questions.

 20   Ce que j'aimerais faire maintenant, c'est de fragmenter ces questions

 21   composées et de vous demander votre réponse sur chaque composante de telles

 22   questions, si possible.

 23   M. Karadzic a d'abord dit : Ma thèse est la suivante : ce qui s'est passé

 24   là-bas a été une guerre civile. [comme interprété] 

 25   Seriez-vous en mesure de répondre oui ou non à cette question ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que je préférerais ne pas répondre

 27   parce que je ne connais vraiment pas suffisamment les aspects juridiques.

 28   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Pas de problème. Je vous remercie.


Page 28403

  1   Ensuite, M. Karadzic vous a dit :

  2   "Ce ne sont pas les Serbes qui ont persécuté d'autres personnes sans

  3   que rien n'arrive aux Serbes, et que tout ce qui a été négatif n'arrive

  4   qu'aux représentants des autres groupes ethniques."

  5   Seriez-vous en mesure éventuellement de commenter cette phrase ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] En tant que profane qui lit des articles

  7   concernant les guerres et les conflits, je sais que toute guerre représente

  8   une situation complexe, et qu'il y a toujours plusieurs parties en

  9   présence.

 10   Donc, cela a été le cas aussi pendant la guerre en Bosnie, il y avait

 11   une partie en présence qui représentait les Serbes, ainsi que l'armée et

 12   les paramilitaires, mais il y avait aussi d'autres parties prenantes à ce

 13   conflit. Encore une fois, je préférerais ne pas approfondir davantage.

 14   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Je vous remercie. La dernière

 15   composante, le dernier élément de cette question composite, était la

 16   suivante. M. Karadzic vous a dit : "Vous vous rendrez compte que tout doit

 17   être proportionnel dans cette affaire."

 18   Seriez-vous en mesure de commenter ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis sûre que tout n'est pas proportionnel

 20   dans cette guerre. J'ai étudié les personnes tuées au cours de cette

 21   guerre, j'ai étudié les civils comme les soldats sur l'ensemble du

 22   territoire de la Bosnie-Herzégovine, et je suis sûre que les gens qui ont

 23   perdu la vie ne représentent pas des chiffres proportionnels par rapport à

 24   leur participation au sein de la composition ethnique avant la guerre ou

 25   quoi que ce soit de ce genre. Je pense que certains groupes ethniques ont

 26   davantage de représentants qui ont perdu la vie que dans d'autres groupes

 27   ethniques. Donc, cela étant, tous les groupes, tous les peuples ont

 28   souffert.


Page 28404

  1   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Je vous remercie.

  2   Monsieur Karadzic.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous remercie, Excellence. J'attendais

  4   l'interprétation. Je vous remercie pour ces précisions. C'est parce que je

  5   suis pressé que je pose ce type de questions composite.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Veuillez poursuivre, je vous prie.

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] La langue française est baroque. Elle nécessite

  8   donc plus de temps pour être interprétée.

  9   M. KARADZIC : [interprétation]

 10   Q.  Alors, si je vous disais, pour faire suite aux questions qui viennent

 11   de vous être posées par M. le Juge Baird, si je vous disais que, parmi les

 12   réfugiés, les personnes déplacées, on a une proportion qui est à peu près

 13   égale à 32 %, est-ce que vous êtes d'accord avec ce pourcentage de 32 %

 14   pour les différents groupes ethniques, un pourcentage qui est à peu près

 15   égal dans les trois groupes ethniques, 32, 34, 32, pour les Serbes, les

 16   Musulmans et les Croates ?

 17   Est-ce que c'est également le cas pour les personnes tuées, un

 18   pourcentage de Serbes à peu près égal à 32 % pour les Serbes, en

 19   particulier, et pour les autres groupes ethniques ? Est-ce que ceci

 20   correspond à une analyse statistique destinée à démontrer ce type de

 21   pourcentage ?

 22   R.  Mais qu'est-ce que je dois répondre à cette question ? Si vous voulez

 23   calculer les proportions dans les différents groupes, vous pouvez le faire,

 24   mais je pense … enfin, écoutez, je ne sais pas quoi dire. Désolée.

 25   Q.  Très bien. Merci. Mais dites-moi, s'il vous plaît : est-ce que vous

 26   savez qu'une partie a déclaré la guerre à l'autre partie ? Est-ce que vous

 27   savez que les Musulmans nous ont déclaré la guerre ?

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, non, non. Ce n'est pas une question


Page 28405

  1   que vous devez poser à Mme Tabeau.

  2   M. KARADZIC : [interprétation]

  3   Q.  Bon. Est-ce que vous savez qu'à Sarajevo se trouvait le 1er Corps de

  4   l'ABiH dont les membres étaient mêlés à la population et qui avaient des

  5   effectifs trois fois supérieurs à notre armée dans les environs de Sarajevo

  6   ?

  7   R.  Je ne sais pas, et il est fort possible même que je ne veuille pas le

  8   savoir. J'avais cette théorie par le passé, une théorie selon laquelle

  9   l'armée musulmane de Bosnie était mêlée à la population et tuait sa propre

 10   population, mais je ne pense pas que je puisse commenter aujourd'hui.

 11   Q.  Voyons ce que vous dites du nombre de victimes en 1994 à partir du 5

 12   février dans votre rapport. Vous constatez un grand nombre de victimes

 13   civiles et votre coefficient, celui dont on parlait tout à l'heure, a

 14   certainement utilisé pour aboutir à un rapport supérieur à 1.

 15   Je cherche le passage exact dans mes papiers, mais vous l'avez

 16   sûrement dans votre rapport sur Sarajevo, ce passage, n'est-ce pas ?

 17   R.  Je suppose que vous faites référence au rapport relatif à Dragomir

 18   Milosevic ou au rapport Galic pour 1994, février 1994, le rapport Galic

 19   peut-être.

 20   Q.  Oui, tableau numéro 13. Vous dites que le 5 février 1994, 45 civils et

 21   15 militaires ont trouvé la mort, ce qui fait un total de 60. Quant au

 22   rapport, il est de 1 sur 4, n'est-ce pas ? Est-ce que cette caution est

 23   illustrative du fait de terroriser une population ?

 24   R.  Je ne pense pas que ce quotient ait été calculé de façon explicite dans

 25   ce tableau. Mais il est possible que ce quotient se trouve quelque part

 26   dans un autre rapport dont je suis l'auteur.

 27   Dans le cas dont vous parlez, tableau 13, page 36 du rapport Galic,

 28   un échantillon de plusieurs journées a été déterminé sur la base du fait


Page 28406

  1   que six civils ou plus avaient été tués ce jour-là.

  2   Q.  Je vous remercie. Est-ce que vous savez ce qui s'est passé le 5 février

  3   1944, à Sarajevo, pour générer un tel nombre de victimes; est-ce que vous

  4   avez entendu parler de Markale 1 ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Savez-vous qui a été à l'origine de cet incident ?

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce n'est pas une question à poser à ce

  8   témoin.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Excellence, si l'on affirme que le 8 juin 1992,

 10   des civils ont été tués à Sarajevo, que le nombre de ces tués était de tant

 11   ou de tant sans tenir compte du fait que les Musulmans ont lancé une

 12   offensive militaire, le 8 juin 1992, à Sarajevo, vous voyez, 8 civils, 108

 13   soldats au total, 116 personnes tuées et le quotient est de 13.5 [phon].

 14   Ou bien si l'on prend une date quelconque, concernant des journées où

 15   le nombre des victimes a été particulièrement élevé, il serait important de

 16   vérifier qui a été à l'origine de l'offensive qui a eu lieu ce jour-là, ce

 17   qui s'est passé sur le terrain; est-ce que c'était de la terreur ou est-ce

 18   qu'une offensive a été lancée contre les quartiers serbes de Sarajevo ?

 19   C'est aussi important que le fait de savoir s'il y a eu siège ou pas,

 20   chapitre 8.

 21   Mme WEST : [interprétation] Monsieur le Président --

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame West -- et je sais, Monsieur

 23   Karadzic, que le moment est arrivé pour vous de conclure votre

 24   contre-interrogatoire. Je vous indique, par ailleurs, que c'est une pure

 25   perte de temps de poser ce type de questions à Mme Tabeau.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais, Excellence, si le témoin se laisse aller

 27   à utiliser des pourcentages pour déterminer ce qui est un siège, et ce qui

 28   est de la terreur infligée à la population, je pense avoir le droit de dire


Page 28407

  1   que ces données sont incomplètes, et que le contexte n'est pas exactement

  2   défini. Il importe, au plus haut point, que j'appelle l'attention de ce

  3   témoin sur le fait qu'à certaines dates bien particulières, des offensives

  4   ont été lancées, que le 1er Corps de l'ABiH avait des effectifs bien

  5   supérieurs au nôtre, et que cette armée de Bosnie-Herzégovine était

  6   beaucoup plus dangereuse que notre armée.

  7   Mais quoi qu'il en soit, revenons aux conclusions relatives à

  8   Sarajevo.

  9   M. KARADZIC : [interprétation]

 10   Q.  Savez-vous, Madame, que pendant la guerre, une partie de la ville

 11   de Sarajevo avait été baptisée Sarajevo serbe, et qu'aujourd'hui, ces

 12   quartiers sont définis par les mots "Est de Sarajevo, Sarajevo Est" ?

 13   R.  Vous parlez de Pale, je suppose.

 14   Q.  Non, je ne parle pas de Pale. 80 % du territoire de Sarajevo

 15   étaient sous contrôle serbe, les Serbes étant majoritaires dans ces

 16   quartiers. Est-ce que vous savez qu'il y avait un quartier dont la

 17   population était majoritairement serbe, qui s'appelait Ilijas, par exemple,

 18   mais qui a été remis après la signature des accords de Dayton ?

 19   R.  Je ne sais pas ce que représentent ces 80 % du territoire de

 20   Sarajevo, sous contrôle serbe et à quel moment ces 80 % ont existé. Quant à

 21   Ilijas, c'était effectivement un quartier dont la majorité de la population

 22   était serbe. Mais quelle était votre question ?

 23   Q.  Ma question est la suivante : Avez-vous conscience du fait qu'à

 24   Sarajevo, il a existé deux villes pendant toute la guerre ? Etes-vous

 25   conscient du fait que la partie serbe de la ville se situait de façon tout

 26   à fait naturelle autour de la partie musulmane, et qu'il n'y a pas eu siège

 27   à Sarajevo, mais ville divisée en deux à Sarajevo ?

 28   Est-ce que vous savez quels étaient les quartiers qui représentaient


Page 28408

  1   le Sarajevo serbe ?

  2   R.  Je ne sais pas ce que vous entendez exactement par le "Sarajevo

  3   serbe."

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Excellence, demain nous en terminerons en deux

  5   heures. Je vous demande vraiment de m'accorder un peu plus de temps

  6   aujourd'hui, pour faire toute la clarté sur la question de Sarajevo. Je

  7   m'efforcerais d'en terminer avant la fin de l'audience d'aujourd'hui, mais

  8   je vous en supplie ne me mettez pas sous pression.

  9   M. KARADZIC : [interprétation]

 10   Q.  Est-ce que l'on pourrait se pencher sur le rapport relatif à Sarajevo,

 11   dans l'affaire Karadzic. Nous pourrions revoir ensemble les tableaux que

 12   vous avez élaborés dans ce rapport.

 13   Mme WEST : [interprétation] Toutes mes excuses pour cette interruption. A

 14   titre d'information pour les Juges de la Chambre, j'indique que j'aurais

 15   des questions supplémentaires à poser, et que j'aurais besoin d'environ

 16   cinq minutes.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 18   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

 19   M. KARADZIC : [interprétation]

 20   Q.  Annexe A3. Tableau 1M.

 21   R.  Est-ce qu'il s'agit du rapport sur les municipalités ?

 22   Q.  Oui, Sarajevo 10.

 23   Mme WEST : [interprétation] Il s'agit de la pièce P4994, page 74 dans le

 24   prétoire électronique.

 25   M. KARADZIC : [interprétation]

 26   Q.  Je vous prie de bien vouloir regarder ce tableau, il est là, il est sur

 27   l'écran, voilà.

 28   Alors je vais vous demander d'examiner cela avec moi. Les personnes


Page 28409

  1   majeures, dans toute la ville de Sarajevo, correspondent aux chiffres de

  2   468 000 [phon] habitants ?

  3   R.  Oui, 438 605 habitants, et ceci dans Sarajevo dix, en 1991, tout groupe

  4   ethnique confondu.

  5   Q.  Bien. comment en êtes-vous arrivée aux chiffres pour la partie serbe de

  6   Sarajevo, 24 000 en tout, alors que Sarajevo serbe comprenait Trnovo, la

  7   moitié d'Ilidza, la moitié de Hadzici, toute la Vogosca, tout Ilijas, une

  8   partie de la vieille ville et puis Pale ?

  9   R.  Ce tableau a été fait pour les municipalités après Dayton. Donc, ici,

 10   la partie de référence, la Republika Srpska comprend une partie des

 11   municipalités de Sarajevo 10, qui, après les accords de Dayton, sont

 12   revenues à la Republika Srpska.

 13   Q.  Bien. On va continuer l'échantillon de la population pour l'année 1997.

 14   Ici, vous dites que la population serbe s'est accrue de 24 000 à 29 000. 

 15   Mais que me répondez-vous si je vous disais que le Sarajevo serbe compte

 16   100 000 habitants ?

 17   R.  Quand vous parlez de la Sarajevo serbe d'aujourd'hui, c'est la partie

 18   qui se trouve dans la Republika Srpska [inaudible]. Après avoir rendu la

 19   partie serbe de Hadzici, la partie serbe d'Ilidza, toute la Vogosca, toute

 20   Ilijas, lors de la table verte [comme interprété] à Dayton. Ce qui reste,

 21   Pale, et cetera, la population de ce qui reste de la Sarajevo serbe

 22   correspond à 100 000 habitants.

 23   R.  C'est peut-être vrai. Je ne connais pas le chiffre exact.

 24   Q.  Mais regardez alors les projections que vous avez faites. Dans la

 25   Fédération de Bosnie-Herzégovine, en 1991, il y a eu 205 000 Musulmans,

 26   alors que dans les projections que vous faites pour 1997, 161 000. Pourquoi

 27   ? Comment la population musulmane a diminué vers la partie fédérale de

 28   Sarajevo ?


Page 28410

  1   R.  C'est un échantillon, c'est un échantillon. Ce n'est pas un chiffre

  2   absolu. Ce n'est pas un chiffre total. C'est justement un échantillon qui a

  3   été identifié sur la base de l'examen des listes électorales. Donc on a ce

  4   chiffre, 161 273.

  5   Q.  Si on va à Vogosca, page suivante, s'il vous plaît.

  6   Savez-vous que Vogosca, pendant toute la durée de la guerre, était dans les

  7   mains serbes et qu'on l'a remis aux Musulmans après Dayton suite aux

  8   négociations paisibles ?

  9   R.  Monsieur, je sais qu'il y a eu les accords de Dayton, je sais que,

 10   suite à cet accord, le pays a été divisé en deux entités : La Fédération

 11   croato-musulmane et puis la Republika Srpska. Les analyses que j'ai faites,

 12   je les ai basées sur les municipalités d'après Dayton. Moi, je ne me suis

 13   pas penchée sur les informations concernant qui avait quoi avant ou après

 14   Dayton. Cela ne faisait pas partie de mon rapport.

 15   Q.  On va essayer de voir dans le tableau suivant quelle a été les sortes

 16   de Croates à Sarajevo. Voyons voir, il y a 31 000 Croates à Sarajevo, 7,1 %

 17   en 1991. Voyons voir quelle est la situation en 1997. L'échantillon --

 18   enfin, l'estimation à laquelle on arrive c'est 10 000, à savoir 4,4 %, soit

 19   37 % de moins de Croates. C'est bien exact ?

 20   R.  10 000, c'est encore un échantillon basé sur la liste de 1997.

 21   Q.  Mais que nous montre cet échantillon ? Est-ce que l'échantillon n'est

 22   pas là pour représenter un total, un chiffre total ?

 23   R.  C'est l'échantillon de Croates qui ont été enregistrés, qui se trouvent

 24   dans les listes électorales.

 25   Je ne pense pas, Monsieur Karadzic, que dans ces chiffres, vous allez

 26   trouver la réponse à la question qui était responsable de certains

 27   territoires avant et après la guerre. Là, c'est une étude simple portant

 28   sur la composition ethnique en 1991 et 1992 [comme interprété], rien de


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  1   plus. Des choses qui se sont passées pendant la guerre ne se trouvent pas

  2   répertoriées de façon explicite dans ce tableau, ces éléments ne sont pas

  3   traduits en chiffres visibles dans ce tableau.

  4   Q.  Donc on ne peut pas tirer de conclusions dans le sens juridique, pénal,

  5   du terme, n'est-ce pas, sur la base de votre rapport ?

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il n'appartient pas au témoin de

  7   répondre à la question posée, Monsieur Karadzic.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien. Si les choses sont comme cela, je vais

  9   demander à voir la page 1S, pour voir quelle a été les sortes de Serbes, et

 10   ensuite, on va passer à autre chose.

 11   M. KARADZIC : [interprétation]

 12   Q.  Est-ce exact, en 1991, à Sarajevo vivaient 133 927 [phon] Serbes de

 13   l'âge majeur, à savoir nés après 1980 ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Si je vous disais qu'à l'époque il y avait 150 000 [phon] Serbes qui se

 16   déclaraient vivre à Sarajevo, et 23 000 Yougoslaves, dont une grande partie

 17   sont des Serbes, est-ce que cela correspond au chiffre que vous avancez

 18   ici, à savoir les gens nés avant 1980 ?

 19   R.  Non. Mais pourriez-vous me donner vos sources, s'il vous plaît ?

 20   Q.  Il s'agit du recensement officiel de la population de Sarajevo. D'après

 21   ce recensement officiel, il y avait 157 000 Serbes et 23 000 Yougoslaves à

 22   Sarajevo à cette époque-là. Mais je parle de toute la population, pas

 23   seulement les habitants majeurs d'âge.

 24   R.  Oui. C'est exact. Moi, j'ai un chiffre publié des Serbes à Sarajevo,

 25   dans les dix municipalités, tout âge confondu, il correspond à 150 000

 26   [comme interprété] habitants.

 27   Q.  Merci.

 28   Et dans la partie qui est revenue à la Republika Srpska, vous


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  1   considérez qu'il y a 18 193 [comme interprété] Serbes nés après 1980 et

  2   dans la partie fédérale on trouve 115 000 personnes majeures d'âge, est-ce

  3   exact ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Donc l'estimation est qu'en 1997, il y a 82 % de moins de Serbes. Mais,

  6   moi, je vous dis que d'après mon calcul il y en a 91 % de moins dans la

  7   partie fédérale de Sarajevo et un petit plus que 55 % de plus dans la

  8   partie serbe de Sarajevo ?

  9   R.  Moi, j'en arrive à un pourcentage de 88,2 % [comme interprété] de moins

 10   de Serbes dans la partie fédérale de Sarajevo. C'est mes calculs qui

 11   montrent ça.

 12   Q.  Mais, moi, j'en suis arrivé au chiffre de 81 % [phon] -- 91 % de moins

 13   par rapport à ce chiffre de 115 [phon]. Mais, évidement, -- 115 000. Mais,

 14   de toute façon, on ne pourra pas utiliser ces chiffres parce qu'on ne sait

 15   pas quand est-ce que vous parlez d'échantillon et quand est-ce que vous

 16   parlez de la population dans le sens absolu.

 17   Toujours est-il qu'en 1997 il n'y a que 5 % de Serbes qui vivent à

 18   Sarajevo.

 19   R.  Dans la partie fédérale de Sarajevo.

 20   Q.  Oui, dans la partie fédérale de Sarajevo.

 21   Alors qu'ils représentaient 30 % avant la guerre ?

 22   R.  28 %. Donc, oui, c'est à peu près 30 %. Oui.

 23   Q.  Merci.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais vous demander de voir avec moi le

 25   tableau 2S.

 26   Mme WEST : [interprétation] Il s'agit de la page 98 [comme interprété] --

 27   88 dans le système de prétoire électronique.

 28   M. KARADZIC : [interprétation]


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  1   Q.  Pourriez-vous nous aider ? Là, nous avons donc le chiffre minimal des

  2   personnes déplacées à l'intérieur de Bosnie -- à l'intérieur de Bosnie-

  3   Herzégovine originaires de Sarajevo, [inaudible], et on compte

  4   spécifiquement les Serbes.

  5   R.  Oui.

  6   Q.  On en arrive à l'estimation qu'en 1997, 76 000 Serbes s'y trouvent,

  7   dont 11 000 même dans la Republika Srpska, et 64 000 dans la population de

  8   Bosnie-Herzégovine, là, on parle de personnes déplacées, des réfugiés.

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Merci. Je vais demander de voir la pièce 1D0559.

 11   Reconnaissez-vous ce tableau ?

 12   R.  Oui. M. Robinson m'a demandé de fournir des statistiques, si je les

 13   avais, bien sûr, concernant les morts et la disparition des Musulmans,

 14   concernant un certain nombre de municipalités pour les années entre 1992 et

 15   1995.

 16   Q.  Merci. Donc à Bratunac, il y avait 21 535 Musulmans; est-ce exact ? En

 17   ce qui concerne les morts et les portés disparus, 3 281 personnes, à savoir

 18   15.2 %; est-ce exact ?

 19   R.  Oui, c'est ce qui est écrit dans le tableau.

 20   Q.  Merci. Voyons voir le tableau en entier, Foca, 20 790 personnes, 1 160

 21   personnes tuées et disparues, 5.6 %; Kljuc, 17 696 Musulmans, 600 tués ou

 22   disparus, 3.4 %; Prijedor, 49 351 personnes, 2 627 tués ou portés disparus,

 23   5.3 %; Sanski Most, 28 136, 618 tués ou portés disparus, 2.2 %; Vlasenica,

 24   18 727, tués ou disparus, 1 197, 6.4 %; Zvornik, 48 102, tués et disparus,

 25   3 411, à savoir 7.1 %. La totalité pour toute la Bosnie-Herzégovine, il y a

 26   eu un 1 902 956 personnes tuées, portées disparues, 49 111, ce qui

 27   représente 2.6 % de la population.

 28   Est-ce que, là, vous avez aussi compté, inclus donc dans ces calculs les


Page 28414

  1   combattants qui ont été tués, qui sont morts au combat, et qui sont portés

  2   disparus ?

  3   R.  Oui, je suppose.

  4   Q.  Est-ce que vous avez inclus aussi les personnes mortes de mort

  5   naturelle ?

  6   R.  Non, pas de mort naturelle.

  7   Q.  Merci. Dans ce chiffre concernant Bratunac, est-ce que vous avez compté

  8   aussi les personnes mortes en 1995 ?

  9   R.  C'est la période de la guerre, toute la période de la guerre, jusqu'à

 10   la fin 1995, donc oui, la réponse est oui.

 11   Q.  Est-ce qu'il serait bien de conclure que pour -- pendant toute la

 12   guerre, parmi la population musulmane, nous avons moins de 3 % de personnes

 13   tués ou portées disparues, donc à savoir plus précisément 2.6 %.

 14   R.  Oui, c'est ce qui est dit du tableau.

 15   Q.  Est-ce que vous savez quel est le pourcentage des Juifs tués ou qui ont

 16   péri pendant l'holocauste en Europe, pendant la Deuxième Guerre mondiale ?

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pas de pertinence.

 18   M. ROBINSON : [interprétation] Je voudrais être entendu à ce sujet, parce

 19   que, moi, je pense que c'est quelque chose qui est pertinent. Là, il s'agit

 20   de sept municipalités qui se trouvent dans le paragraphe 38 de l'acte

 21   d'accusation du Procureur, qui figurent en tant que crime de génocide dans

 22   l'acte d'accusation. Là, nous avons un élément du génocide qui est

 23   important, à savoir l'intention de détruire une partie importante d'un

 24   groupe. Ici, vous voyez que 2.7 % de ce groupe, que le pourcentage des gens

 25   de ce groupe qui ont été disparus et je pense que ceci est important que de

 26   comparer, de pouvoir comparer ceci avec d'autres instances où il y a eu

 27   donc des accusations de génocide ou la culpabilité par rapport au génocide

 28   à savoir l'holocauste.


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais est-ce que le témoin ici présent

  2   est bien habilité à répondre à la question.

  3   M. ROBINSON : [interprétation] On lui pose la question, si elle dispose, si

  4   elle possède cette information, je pense qu'il serait utile de l'avoir;

  5   sinon, nous allons essayer de la trouver d'une autre façon.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Eh bien, je pense que ce témoin n'a pas

  7   besoin de répondre à cette question. Ce serait plus prudent de ne lui poser

  8   la question.

  9   Monsieur Karadzic, pourriez-vous terminer votre contre-interrogatoire dans

 10   l'espace de cinq minutes.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je peux vous dire quelle est ma

 12   position, est-ce que je peux la dire à Mme Tabeau.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Si vous pensez que c'est nécessaire,

 14   allez-y.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] A Rwanda, on a détruit à peu près 70 % de la

 16   population des Tutsi, et en Europe, 58 % de la population juive a été

 17   détruite.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le Dr Tabeau ne s'est pas penchée sur

 19   les questions juridiques du génocide, de la qualification du crime de

 20   génocide, déportation ou quoi que ce soit d'autre. Ceci n'a pas fait

 21   l'objet de ces rapports.

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-on verser ces tableaux ? Ça va être un

 23   outil qui va vous être utile peut-être.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 25   M. LE GREFFIER : [interprétation] D2150, Monsieur le Président, D2250,

 26   Monsieur le Président.

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 28   Madame le Témoin, j'apprécie votre travail, votre déposition, moi


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  1   j'ai essayé tout simplement d'élucider les faits.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame West.

  4   Mme WEST : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  5   Nouvel interrogatoire par Mme West :

  6   Q.  [interprétation] Madame Tabeau, plus tôt aujourd'hui, on vous a posé

  7   plusieurs questions, des questions étaient posées par le Juge Baird, et il

  8   s'agissait des parties de votre rapport concernant la ville de Sarajevo, où

  9   vous avez parlé du temps, du moment de la mort, où vous avez comparé les

 10   moments où a intervenu la mort des civils, et le moment où intervenait la

 11   mort des soldats, et vous avez comparé ces deux-là, ces deux catégories-là;

 12   vous vous souvenez de cela ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  A un moment donné, on vous a posé une question précise, à savoir quelle

 15   est la différence entre le pillage délibéré ou bien les tirs délibérés et

 16   quelle est la différence entre cela et le pillage disproportionné, sans

 17   discrimination. Vous avez dit, si vous avez les causes de décès pour les

 18   civils tués qui interviennent au cours de nombreuses journées et que le

 19   nombre de civils tués a été plus important que le nombre de soldats tués,

 20   pour moi, il s'agit là du pilonnage disproportionné. Quand vous avez parlé

 21   de cela, est-ce que vous avez utilisé cela dans le sens juridique du terme

 22   ?

 23   R.  C'est non, il s'agit d'un terme statistique. Moi, je n'ai jamais fait

 24   d'études de droit.

 25   Q.  Est-ce que -- quand vous avez fait votre étude, est-ce que vous vous

 26   êtes penché sur les notions juridiques, quand il s'agit de la cause des

 27   décès, et cetera, et quand vous avez comparé ces chiffres ?

 28   R.  Je me suis contenté de comparer les nombres, le nombre de civils tués


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  1   par le nombre de … et les causes d'essai dans les deux catégories. C'est

  2   dans ce contexte-là que j'ai étudié ces chiffres.

  3   Q.  Je voudrais aussi parler de la fiabilité des rapports de l'OSCE que

  4   vous avez utilisés en tant que sources quand vous avez fait vos

  5   comparaisons. C'est quelque chose qui figure au compte rendu d'audience

  6   d'hier à la page 28 304 -- 28 305, et puis aussi aujourd'hui, c'est le

  7   Président de la Chambre qui vous a posé la question. Il vous a demandé si

  8   vous pensez que le recensement de la population de 1997 n'était pas fiable

  9   à 100 %. C'est pour cela que je voudrais vous poser la question qui suit :

 10   Du point de vue statistique, dans un monde parfait des statistiques ou de

 11   démographie, quelles deux sources -- ou quelle source serait le plus fiable

 12   pour faire l'appareillage ou les comparaisons ?

 13   R.  J'utiliserais les deux recensements de la population, l'un qui a eu

 14   lieu avant le conflit et l'autre après.

 15   Q.  Pourriez-vous nous donner les raisons de cela ? Pourquoi vous pensez

 16   que le recensement de la population est une source fort fiable ?

 17   R.  Il y a de nombreuses raisons. C'est la méthode même que l'on utilise

 18   pour procéder au recensement de la population qui font que ce sont des

 19   sources extrêmement fiables.

 20   Q.  Autrement dit, si vous trouvez une autre source qui a utilisé les

 21   informations figurant dans le recensement de la population, est-ce que

 22   cette source secondaire serait aussi fiable à votre avis ?

 23   R.  Oui, s'il s'agit des informations qui sont copiées du recensement de la

 24   population.

 25   Q.  On va voir sur quoi sont basées les listes électorales de l'OSCE. Tout

 26   d'abord, quelle était la première condition, ou la condition sine qua non,

 27   pour qu'une personne puisse voter ?

 28   R.  Il s'agit -- il faut qu'il -- la personne a plus de 18 ans et il faut


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  1   qu'elle figure dans le recensement de la population.

  2   Q.  Comment vérifier qu'il s'agit bien de la même personne ?

  3   R.  Une copie du recensement de la population, des informations figurant

  4   concernant cette personne, y compris le numéro JMBG, le nom, la date de

  5   naissance, et cetera, la municipalité de résidence en 1991, et tout cela se

  6   trouvait dans chaque bureau de vote. Donc ils avaient vraiment des

  7   exemplaires papier de cela, et vous aviez aussi, donc, la version papier et

  8   la version électronique de ces mêmes informations dans chaque bureau de

  9   vote.

 10   Q.  Je vais demander de voir la pièce 65 ter 17956.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que je peux intervenir un instant

 12   ? Je vais revenir sur les listes électorales de 1997, 2,5 millions. Vous

 13   allez nous dire qu'il s'agit des personnes dont le nom devait déjà figurer

 14   dans le recensement de la population.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais est-ce que vous vous souvenez de la

 17   question précédente que je vous ai posée, à savoir où sont passées les

 18   7 000 000 de personnes ? Puisqu'on a parlé de 1,8 million, et vous avez dit

 19   qu'ils -- que ces personnes devaient faire l'objet de comparaisons avec le

 20   recensement, mais les 2,5 millions de personnes se trouvent déjà dans le

 21   recensement. Donc, normalement, il devrait y avoir encore davantage de

 22   correspondances.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Il y en a encore plus, beaucoup plus qui se

 24   trouve dans le recensement de la population. Je pense que tout -- toutes

 25   les personnes qui se trouvent sur les listes électorales de 1980 -- qui se

 26   trouvent dans les listes électorales doivent se trouver déjà dans le

 27   recensement de la population de 1991.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc 2,5 millions de personnes, que l'on


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  1   trouve sur les listes électorales, ce sont les personnes qui se trouvent

  2   déjà dans le recensement de la population de 1991 ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agit d'un principe, mais on n'a pas

  4   vraiment procédé à l'appareillage puisque c'est un exercice très, très

  5   difficile. Il y a beaucoup de choses qui font qu'il n'est pas possible

  6   d'arriver à un appareillage à 100 %. Vous pouvez avoir des problèmes de

  7   format. Par exemple, le format de fichier JMBG, leur formatage peut être un

  8   petit peu différent, parfois vous avez des virgules, parfois vous avez des

  9   espaces qui font qu'on ne va pas trouver l'appareillage parfait. Donc il

 10   s'agit d'une quantité énorme d'informations qui ont fait l'objet d'un

 11   traitement effectué par différentes personnes.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 13   Mme WEST : [interprétation] Puis, pour faire suite à la question du

 14   Président, vous, en théorie, ce que vous avez fait en ce qui concerne la

 15   comparaison avec les informations de l'OSCE, vous les avez faits aussi par

 16   rapport au recensement de la population.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que d'abord c'est l'OSCE qui a fait

 18   ces comparaisons, parce qu'il devait préparer les listes électorales.

 19   Ensuite, donc, ils sont les premiers à avoir travailler sur ces documents,

 20   sur ces informations.

 21   Mme WEST : [interprétation]

 22   Q.  Là, nous avons une lettre qui date du mois de novembre 2008. Est-ce que

 23   vous connaissez cette lettre ?

 24   R.  Oui, oui. C'est une lettre qui vient de l'OSCE qui a été envoyée au

 25   Procureur du bureau du Procureur et où ils confirment qu'ils ont utilisé

 26   les informations qui venaient du recensement de la population.

 27   Q.  Ce qu'on peut lire c'est qu'après avoir examiné nos informations, nous

 28   sommes en mesure de confirmer que le recensement de population de 1991


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  1   concernant la Bosnie-Herzégovine a été utilisé comme seule base pour

  2   élaborer les listes électorales de 1997. De plus, les mêmes informations

  3   montrent qu'il a -- on a utilisé -- l'on a utilisé aussi bien la version

  4   électronique que la version papier de ce recensement qui se trouvait

  5   disponible dans chaque bureau de vote pendant toute la période de vote en

  6   1997. Est-ce que le bureau du Procureur a reçu cette lettre comme

  7   confirmation à la question posée ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Donc, d'après la façon dont vous avez compris le processus

 10   d'enregistrement des électeurs effectué par l'OSCE, est-ce qu'il s'agissait

 11   donc de recopier exactement les informations se trouvant dans le

 12   recensement de population, donc pour enregistrer les personnes souhaitant

 13   voter ?

 14   R.  Oui, je pense que c'est bien cela. Ils ont travaillé sur la base des

 15   informations se trouvant dans le recensement de la population.

 16   Q.  Est-ce que vous considérez qu'il s'agit là d'une source fiable

 17   puisqu'on y trouve les informations fiables, vérifiables, comme date de

 18   naissance, le numéro JMBG, et cetera ?

 19   R.  Oui, c'est une très bonne source, comme je l'ai dit déjà. C'est une

 20   source fiable que j'ai utilisée dans le cadre de mon analyse.

 21   Q.  Vu que vous ne pouviez pas comparer les deux recensements de la

 22   population, que pensez-vous de la fiabilité du point de vue des

 23   statistiques de cette comparaison qui a été faite entre le recensement de

 24   la population de 1991 et les listes électorales de l'OSCE ?

 25   R.  Je pense qu'ils ont fait cela de la façon des plus fiables possible.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je peux poser une petite question ?

 27   Voilà, je vais dire de quoi il s'agit. Qu'en est-il des personnes qui ne

 28   voulaient pas aller voter ? Où les trouve-t-on ? Est-ce qu'on pense que ce


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  1   sont les personnes portées disparues aujourd'hui ? Parce qu'on choisit de

  2   voter ou de ne pas voter, ou de figurer ou de ne pas figurer sur les listes

  3   électorales.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je pense que c'est quelque chose qui est

  5   clair. La réponse -- on a déjà répondu.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Moi, je confirme que tout simplement ces

  7   personnes ne se trouvent pas recensées dans ces listes électorales.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Moi, j'ai une question, à moins que mes

  9   collègues aient des questions.

 10   Je pose cette question à Mme West parce que j'ai déjà vu la -- j'ai déjà

 11   pris note de la lettre de la Défense adressée à l'OSCE. Vous avez dit,

 12   Madame Tabeau, que tous les documents que vous avez utilisés auraient dû

 13   déjà être communiqués à la Défense. Cela étant dit, en ce qui concerne les

 14   listes électorales de 1996, ces listes n'ont pas été communiquées à la

 15   Défense vu que c'est quelque chose que vous n'avez pas utilisé dans le

 16   cadre de votre rapport.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Non seulement que je n'ai pas utilisé ce

 18   document, mais je ne dispose même pas de copie de cela. Donc si M. Karadzic

 19   a besoin de cela, il faudrait qu'il s'adresse directement à l'OSCE.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais, moi, je veux savoir si vous -- si

 21   vous aviez ce document. Donc c'est clair que vous ne l'avez pas.

 22   R.  Non.

 23   Q.  Le Procureur ? Le Procureur ne l'a pas non plus ?

 24   Mme WEST : [interprétation] Je vais vérifier. Mais je suis à peu près sûre

 25   que nous n'avons pas ce document.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien.

 27   Avec ceci se termine votre déposition, Docteur Tabeau. Au nom de mes

 28   collègues, je souhaite vous remercier d'être venu déposer à La Haye.


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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie, moi aussi.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Puis, nous allons poser une petite

  3   question et ensuite nous allons lever la séance tous ensemble.

  4   Monsieur Tieger, nous avons reçu votre requête. Vous demandez, de façon

  5   temporaire, donc, de ne pas mettre en œuvre la décision de la Chambre

  6   concernant les pièces relatives à l'ICMP. Nous avons, ici, reçu la réponse

  7   de la Défense, mais je ne comprends pas très bien ce que vous avez demandé.

  8   Est-ce que vous demandez qu'on arrête le versement de toutes les pièces ou

  9   uniquement des pièces qu'on n'a pas re-classifiées, à savoir qu'ils ne

 10   feront pas objet d'expurgation ?

 11   Mme WEST : [interprétation] C'est moi qui va répondre, Monsieur le

 12   Président. Nous demandons avoir davantage de temps, et ceci, concernant les

 13   pièces qui se trouvent dans la réponse, qui sont énumérées dans la réponse,

 14   y compris les pièces qui sont des pièces très volumineuses. C'est pour cela

 15   que nous avons demandé la date du 18 parce que cela inclurait aussi la base

 16   de données de l'ICMP.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc vous demandez une prorogation de

 18   délai pour la pièce 4639, 4640, et P4641; c'est bien cela ?

 19   Mme WEST : [interprétation] Je ne les ai pas sous les yeux, mais je pense

 20   qu'il y en a eu davantage sur la liste.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Voici ce qui se trouve sur la liste :

 22   neuf, à peu près neuf, ah, 11 plutôt, 11 pièces, donc vous demandez la

 23   prorogation de délai pour tous ces documents.

 24   Mme WEST : [interprétation] Oui, en effet, Monsieur le Président.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Moi, je me demande si vous avez

 26   différentes conditions en vertu de l'article 70.

 27   Mme WEST : [interprétation] En plus, nous demandons aussi la prorogation de

 28   délai en ce qui concerne les discussions en cours avec l'ICMP, et car, là,


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  1   il va s'agir éventuellement de l'application de l'article 70. Donc nous

  2   sommes en train de discuter avec eux et peut-être que nous allons aussi

  3   faire une autre requête --

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous avez quoi que ce soit à

  5   répondre par rapport à la réponse de la Défense ?

  6   Mme WEST : [interprétation] J'ai bien vu la réponse de la Défense, et en ce

  7   qui concerne ces discussions que nous sommes en train de faire avec l'ICMP

  8   je peux vous dire qu'une deuxième réponse a été écrite et nous allons faire

  9   donc une nouvelle requête vous demandant de prendre -- de réfléchir à votre

 10   décision suite à la discussion que nous avons. Mais, en attendant, vu que

 11   la date était aujourd'hui et qu'il s'agit d'un [inaudible] d'aussi

 12   volumineux, nous avons donc fait cette requête à part demandant un sursis.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien.

 14   La séance est levée pour aujourd'hui. Nous reprenons nos travaux demain à 9

 15   heures.

 16   --- L'audience est levée à 15 heures 06 et reprendra le jeudi 3 mai 2012, à

 17   9 heures 00.

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