Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

Page 29035

  1   Le jeudi 18 octobre 2012

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   [Le témoin vient à la barre]

  5   --- L'audience est ouverte à 9 heures 01.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour à tous et à toutes.

  7   Avant d'entrer dans ce prétoire, le greffier m'a dit qu'aujourd'hui

  8   nous en sommes au 300e jour du procès.

  9   Avant que de commencer, les Juges de la Chambre souhaiteraient se pencher

 10   sur une question en souffrance. Le 11 octobre 2012, le greffier a rendu une

 11   décision au sujet de l'indigence de l'accusé et il a été décidé que

 12   l'accusé devrait contribuer financièrement à sa propre défense. Le 15

 13   octobre 2012, l'accusé a présenté une requête pour une prorogation des

 14   délais jusqu'au 26 novembre 2012, date à laquelle il devrait présenter une

 15   demande de réexamen de la décision du greffier.

 16   En appui de sa requête, l'accusé affirme que cette rallonge dans le temps

 17   est nécessaire parce qu'il s'agit d'éléments complexes à étudier et que,

 18   comme la présentation des éléments à décharge a commencé, il doit aborder

 19   un certain nombre de questions devant la Chambre d'appel. Alors, il demande

 20   d'avoir accès à une décision ex parte confidentielle dans une autre affaire

 21   parce qu'il est fait référence à des notes de bas de pages 40 et 58 pour ce

 22   qui est d'un avenant ex parte à une décision du greffier, avenant numéro 2.

 23   La Chambre exprime, en note de page numéro 40 de cet avenant, que le

 24   greffier a dit qu'il était disposé à communiquer la teneur de cette

 25   décision si la Chambre le lui ordonnait. La Chambre aussi fait savoir qu'à

 26   la date du 15 octobre 2012, l'Accusation a fait savoir à la Chambre qu'elle

 27   n'avait pas l'intention de répondre à la requête de l'accusé.

 28   Alors, ayant examiné la requête de l'accusé, la Chambre a décidé de faire


Page 29036

  1   droit à cette prorogation du délai; par conséquent, l'accusé devrait

  2   présenter sa requête en réexamen de la décision du greffier avant le 26

  3   novembre 2012. La Chambre également ordonne au Greffe de fournir à l'accusé

  4   la décision confidentielle en ex parte à laquelle il est fait référence aux

  5   notes de bas de pages 40 et 58 de la décision du greffier ex parte, avenant

  6   numéro 2.

  7   A part cela, il y a un autre point que je voudrais tirer au clair avec

  8   l'accusé lorsqu'il s'agit des pièces connexes pour ce qui est du témoignage

  9   de M. Kovacevic. L'un des éléments qui se trouve être mentionné, c'est le

 10   1D2337 dans sa notification, et si on se penche sur le paragraphe 49 du

 11   Statut du Tribunal, il est fait référence à 1D8452. Le problème, c'est que

 12   le 1D8452 n'existe pas au prétoire électronique, et je ne suis pas du tout

 13   sûr que ce document ne se trouverait pas être en réalité le 1D2337. En

 14   attendant, la Défense devrait vérifier.

 15   Mme Edgerton.

 16   Oui, excusez-moi, je voulais encore dire au témoin qu'il y a une mise en

 17   garde à aborder.

 18   Général Kovacevic, avant que de commencer à témoigner, je tiens à attirer

 19   votre attention sur une règle qui est en vigueur au Tribunal pénal

 20   international pour l'ex-Yougoslavie. En application de ce 90(E), vous

 21   pouvez faire objection quant à répondre à des questions de l'Accusation ou

 22   de l'accusé ou encore à des questions posées par les Juges si vous estimez

 23   que votre réponse serait susceptible de vous incriminer. Quand je dis

 24   "incriminer", ça veut dire que ce que vous pourriez dire serait

 25   préjudiciable pour ce qui est d'indiquer que vous avez une culpabilité ou

 26   une responsabilité pénale au sujet de ce que vous avez commis. Mais quand

 27   bien même vous estimeriez que cette réponse serait susceptible de vous

 28   incriminer et que vous ne voudriez pas répondre à la question, le Tribunal


Page 29037

  1   a le droit discrétionnaire de vous obliger à répondre. Mais dans ce cas-là,

  2   le Tribunal s'assurera de faire en sorte que le témoignage ainsi fourni ne

  3   puisse pas être utilisé comme pièce à conviction dans l'une quelconque des

  4   autres affaires qui seraient diligentées contre vous pour quelque

  5   témoignage que ce soit, si ce n'est le cas d'un faux témoignage.

  6   Général, est-ce que vous avez compris ce qui vous a été dit ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous avez entendu la

  9   traduction ? Parce que je ne sais pas si le micro est en marche. Répondez,

 10   s'il vous plaît, à nouveau.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je vous ai bien entendu.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 13   Madame Edgerton, veuillez commencer.

 14   Mme EDGERTON : [interprétation] Merci.

 15   LE TÉMOIN : BLAGOJE KOVACEVIC [Reprise]

 16   [Le témoin répond par l'interprète]

 17   Contre-interrogatoire par Mme Edgerton :

 18   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Kovacevic.

 19   R.  Bonjour.

 20   Q.  Après avoir écouté le Dr Karadzic à la lecture du résumé de votre

 21   témoignage, j'ai été frappée par quelques éléments, et avant que de

 22   commencer avec mon contre-interrogatoire, je voudrais tirer ces choses-là

 23   au clair, dès le début. Tout d'abord, lorsque vous m'avez rencontrée il y a

 24   quelques jours - et je vous remercie de l'avoir fait - vous avez indiqué

 25   quel était votre travail actuellement et vous avez indiqué que vous

 26   travailliez pour le ministère fédéral de la Défense en tant que conseiller

 27   chargé de l'éducation et de la formation; est-ce bien exact ?

 28   R.  Oui.


Page 29038

  1   Q.  De quelle façon se fait-il que vous soyez un officier d'active dans les

  2   forces armées de la Bosnie-Herzégovine ?

  3   R.  Une partie des effectifs des forces armées se trouvent être employés au

  4   ministère de la Défense.

  5   Q.  Et de par votre grade, vous êtes brigadier, non pas général de brigade

  6   ?

  7   R.  J'ai bien dit que j'étais brigadier. Et c'est notre grade militaire le

  8   plus élevé.

  9   Q.  Pendant que le Dr Karadzic avait donné lecture du résumé de votre

 10   témoignage, il a dit la chose suivante :

 11   "Le passage des convois humanitaires était tout à fait libre, il n'a pas

 12   été entravé par les forces serbes."

 13   Et lorsque je me penche sur le paragraphe 39 de votre déclaration, je vois

 14   que ce n'est pas exactement ce que vous avez dit. Ce que vous avez dit

 15   s'agissant de l'aide humanitaire était assez concret. Aussi, afin d'éviter

 16   toute impression erronée, je voudrais vous donner lecture de ce que vous

 17   avez dit au paragraphe 39. Vous avez dit :

 18   "A Grbavica, il y avait un passage au travers duquel les convois

 19   humanitaires passaient, et je sais qu'Adra, c'est une organisation

 20   humanitaire musulmane, tout comme Caritas, qui est une organisation

 21   caritative croate, passaient de l'autre côté de la ville sans entrave, en

 22   empruntant un pont à proximité de la faculté d'économie."

 23   Alors, vous êtes en train de parler ici d'un passage à un endroit concret

 24   lorsqu'il s'agit de deux organisations humanitaires très concrètes, et rien

 25   de plus, n'est-ce pas ?

 26   R.  C'est exact.

 27   Q.  Merci. Juste une petite question préliminaire. Dans le résumé de votre

 28  témoignage, il est fait référence à une 110e Brigade du 1er Corps de l'ABiH.


Page 29039

  1   Ce que vous avez dit dans votre déclaration au paragraphe 18, c'est que le

  2   commandant c'était un dénommé Musan Topalovic. Etant donné vos fonctions à

  3   l'époque du conflit et ce que vous avez dit avoir su au sujet des unités

  4   musulmanes dans Sarajevo, vous devez forcément avoir eu connaissance du

  5   fait qu'il n'a jamais existé une 110e Brigade de Sarajevo et que

  6   l'appellation de la brigade de Topalovic c'était la 10e Brigade de

  7   Montagne, n'est-ce pas ?

  8  R.  Il y a peut-être eu une erreur; 10e Brigade de Montagne, 1er Corps. Oui,

  9   je suis au courant de ceci. Et Musan Topalovic, appelé Caco, était son

 10   commandant.

 11   Q.  Je suis navrée, mais il me semble que les interprètes n'ont pas entendu

 12   la première partie de ce que vous avez dit au sujet de cette unité, ou

 13   plutôt au sujet de son nom. Pouvez-vous répéter, je vous prie.

 14   R.  Il y a peut-être eu une erreur dans la prise de note. Il s'agit du 1er

 15  Corps, et la 1ère Brigade portait la désignation 10, c'est-à-dire c'était la

 16   10e Brigade de Montagne, et je sais que Dusan Topalovic, surnommé Caco,

 17   avait été son commandant.

 18   Q.  Merci. C'est tout ce que je voulais vous demander pour tirer au clair

 19   l'appellation de la brigade, d'après ce qui figure dans votre déclaration.

 20   Alors, ce Topalovic est mort et son unité a été supprimée en octobre 1993,

 21   n'est-ce pas ?

 22   R.  L'unité n'a pas été supprimée. Elle a été réorganisée. Mais en somme,

 23   c'est resté la même unité.

 24   Q.  Et ce Topalovic, a-t-il été tué en octobre 1993 ?

 25   R.  Je l'ai appris par les médias. Je ne peux pas affirmer qu'il a été tué

 26   ou pas.

 27   Q.  Merci. Essayons de nous concentrer sur la période de temps que vous

 28   avez passée au sein de la 1ère Brigade mécanisée de Sarajevo. Vous avez dit


Page 29040

  1   que vous étiez chef des opérations et de la formation et l'entraînement de

  2   cette brigade. Alors, qu'est-ce que cela signifie au juste ?

  3   R.  A l'époque, mon travail consistait à organiser l'entraînement des

  4   unités de la 1ère Brigade motorisée de Sarajevo.

  5   Q.  Et que fait, donc, le chef chargé des tâches opérationnelles ?

  6   R.  Une brigade ne comporte pas de chef des tâches opérationnelles. Ces

  7   tâches opérationnelles et les tâches éducatives se trouvent être regroupées

  8   en une seule et même fonction.

  9   Q.  Mais qui, alors, a donc planifié les opérations au sein de la brigade ?

 10   R.  C'est l'état-major de la brigade qui planifie les opérations.

 11   Q.  Je me souviens que vous avez bien dit il y a quelques jours que vous

 12   étiez le numéro 3 au sein de cette brigade. Est-ce que ça signifie que vous

 13   étiez membre de cet état-major de la brigade ?

 14   R.  Oui, j'ai été membre de l'état-major.

 15   Q.  Donc, vous avez été impliqué dans la planification des opérations de la

 16   brigade ?

 17   R.  Oui, c'est le cas.

 18   Q.  Merci. Je voudrais que nous passions à présent à certains secteurs liés

 19   à la responsabilité tactique de votre brigade, et je voudrais vous

 20   mentionner quelques sites caractéristiques pour vous demander si vous

 21   pouvez nous confirmer que cela tombait sous la zone de responsabilité de

 22   votre brigade. Tout d'abord, je voudrais parler de cette église orthodoxe

 23   de Veljine. Est-ce que ça se trouve dans la zone de responsabilité de la

 24   1ère Brigade mécanisée ?

 25   R.  Je n'ai pas connaissance de ce terme de Veljine. Vous parlez de Veljine

 26   ? Il y avait une église orthodoxe qui tombait dans la zone de

 27   responsabilité de la 1ère Brigade mécanisée de Sarajevo.

 28   Q.  Oui, c'est l'église à laquelle je faisais référence. Merci. Et la


Page 29041

  1   caserne de Slavisa Vajner-Cica à Lukavica ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Et la rue d'Ozrenska ?

  4   R.  En grande partie, mais la rue Ozrenska, c'est très long comme rue.

  5   Donc, une partie ne faisait pas partie de la zone de responsabilité de la

  6   1ère Brigade motorisée de Sarajevo.

  7   Q.  S'agissant des tours dans la rue actuelle appelée rue de Grbavica

  8   [comme interprété], c'est les tours 6 et 6A et la tour numéro 8.

  9   R.  Je ne connais pas les numéros. Je connais les noms de rue. Je sais que

 10   la limite à gauche, c'était la rue de Milutina Djuraskovica. Je sais ils

 11   appelaient cela la tour ou le gratte-ciel. Enfin, je ne sais pas trop ce

 12   qu'on entend par là. Ça se trouvait dans la zone de responsabilité de la

 13   1ère Brigade.

 14   Q.  Peut-être vais-je vous montrer une image, une photo, parce que des fois

 15   il est plus facile de s'y retrouver quand on voit les images plutôt que de

 16   parler d'adresses.

 17   Mme EDGERTON : [interprétation] J'aimerais qu'on nous montre la pièce 65

 18   ter 23858, s'il vous plaît.

 19   Q.  Alors, il s'agit de ces tours-ci, Brigadier. Est-ce que ça, ça se

 20   trouvait dans votre zone de responsabilité ?

 21   R.  Est-ce qu'on est sur la rive gauche de la Miljacka ici ?

 22   Q.  Ça se trouve au sud de la rive de la Miljacka.

 23   R.  Etant donné que ma zone de responsabilité ne se trouvait pas là, je ne

 24   sais pas si ces endroits ont été pris ou pas. Ça pouvait être une espèce de

 25   zone intercalaire entre les emplacements des différentes unités.

 26   Q.  Ça, ça se trouvait dans le cadre de votre brigade, Brigadier. Ça se

 27   trouve être les tours de la rue de Grbavicka 6, 6A et 8. Est-ce que ça

 28   faisait partie de la zone de responsabilité qui était la vôtre, enfin celle


Page 29042

  1   de votre brigade ?

  2   R.  Si ça se trouve en rive gauche de la Miljacka, oui.

  3   Q.  Merci.

  4   Mme EDGERTON : [interprétation] Nous n'avons plus besoin de cette photo.

  5   Q.  Le monument de Vrace, ça se trouvait dans votre zone de responsabilité

  6   ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Et Osmice ?

  9   R.  Si on ne parle que de cette pension Osmice, oui, mais pas la zone

 10   entière d'Osmice.

 11   Q.  Oui, la petite pension. Et Zlatiste ?

 12    R.  Zlatiste aussi. Kula, c'était tenu par nous. Zlatiste, non.

 13   Q.  Et jusqu'où à l'est s'étirait la zone de responsabilité de votre

 14   brigade ?

 15   R.  Il est difficile de parler de zones. C'est un terme militaire, en

 16   effet, mais étant donné les faibles effectifs, les unités ne pouvaient pas

 17   aller très en profondeur. Donc, on peut plutôt parler de lignes plutôt que

 18   de parler de zones.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je peux demander à ce que soit tiré

 20   au clair une chose au compte rendu. Le transcript dit : "Ils n'allaient pas

 21   en profondeur." Le brigadier, lui, a dit que ces effectifs n'avaient pas la

 22   profondeur nécessaire en matière du territoire. Je crois que ça fait quand

 23   même une différence, et qu'il convient de faire la distinction.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Fort bien. Nous allons demander un

 25   éclaircissement par le soin du service CLSS de traduction.

 26   Continuons.

 27   Mme EDGERTON : [interprétation]

 28   Q.  Etant donné ce que vous venez de faire commentaire, est-ce que vous


Page 29043

  1   pouvez nous dire jusqu'à où, à l'est, s'étendait la zone ou la ligne tenue

  2   par les effectifs de votre brigade ?

  3   R.  La profondeur moyenne d'une défense d'une brigade, c'était conditionné

  4   par le déploiement des unités dans cette zone. Le commandement, en tant que

  5   tel, et l'unité d'artillerie, ça se trouvait en profondeur. C'est en

  6   moyenne à 2 ou 3 kilomètres, pas plus.

  7   Q.  Je vous pose sans cesse des questions au sujet de l'est et vous, vous

  8   me parlez de profondeur. Alors, je ne sais pas si nous avons un problème de

  9   compréhension.

 10   R.  Si vous regardez par rapport à Sarajevo, la 1ère Brigade de Sarajevo

 11   était organisée, déployée, en direction de l'est, c'est-à-dire vers

 12   Sarajevo.

 13   Q.  Est-ce que ça allait --

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant.

 15   Oui, Monsieur Karadzic.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je crois que le général Kovacevic a dit que ça

 17   n'avait pas englobé la partie est de Sarajevo, et la traduction dit oui. Il

 18   manque une négation, ici. Ça peut influer sur l'interrogatoire de Mme

 19   Edgerton dans la suite de ce qu'elle va poser comme question.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant.

 21   Je vais demander au témoin de répéter sa réponse.

 22   Monsieur Kovacevic, s'il vous plaît.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] La 1ère Brigade de Sarajevo n'avait pas un

 24   front face à Sarajevo à partir de l'est. C'était plus du côté sud. Ça

 25   faisait partie du front. Mais le front a été une ligne entrecoupée. On ne

 26   peut pas parler d'est et ouest. Il est tout à fait impossible de parler en

 27   catégories de ce genre.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Fort bien.


Page 29044

  1   Mme EDGERTON : [interprétation]

  2   Q.  Je vais laisser ceci de côté, on y reviendra plus tard. Merci.

  3   Brigadier, cette brigade à vous, parce qu'on va parler de celle-ci et de

  4   ses unités, des bataillons, votre brigade disposait de bataillons, dont un

  5   bataillon mixte d'artillerie et un bataillon antiaérien; est-ce que bien

  6   exact ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Où se trouvait le poste de commandement de ce bataillon d'artillerie

  9   mixte ?

 10   R.  Ça se trouvait à Tilava. Et la notion la plus restreinte pour le

 11   désigner, c'est le site d'Uzdojnice.

 12   Q.  Etaient-ce des positions de tir de ce bataillon ou de ces batteries, ou

 13   étaient-ce des positions accessoires ?

 14   R.  C'étaient les positions principales de réserve et tout ce que vous

 15   voulez. L'unité a passé tout le temps de la guerre à cet endroit.

 16   Q.  Et quelles armes lourdes avait donc cette unité à sa disposition sur ce

 17   site ?

 18   R.  Je ne sais pas ce que vous entendez par "armes lourdes". L'unité avait

 19   eu une composition standardisée.

 20   Q.  Si je devais être plus précise, je pourrais dire : quelles sont les

 21   armes lourdes au-delà du 120 millimètres qu'elle avait à sa disposition à

 22   cet endroit-là ?

 23   R.  Il y avait une batterie d'obusiers de 122 millimètres, de 155

 24   millimètres et une batterie VBR appelée Plamen de 128 millimètres.

 25   Q.  Combien d'armes compose une batterie ?

 26   R.  Quelque part, c'est quatre à huit pièces, mais ce n'est pas forcément

 27   toujours le cas. On n'est pas obligé d'avoir quatre ou huit. Cela dépend de

 28   la situation.


Page 29045

  1   Q.  Et qu'est-ce que c'est que ce Plamen ?

  2   R.  Ce sont des lance-roquettes à canons multiples, mais c'est les plus

  3   petits, ceux qu'on utilise pour des petites distances.

  4   Q.  Et y avait-il eu des mortiers de 120 millimètres qui, aussi, se

  5   trouvaient être disposés ou affectés à ce bataillon d'artillerie mixte sur

  6   ces sites ?

  7   R.  Dans cette unité mixte d'artillerie, il n'y avait pas de mortiers de

  8   120 millimètres. Ce que je sais, toutefois, c'est qu'en application de

  9   l'accord relatif au rassemblement et au contrôle des armements, pour ce qui

 10   est des bataillons d'infanterie, on a rassemblé précisément ce type d'armes

 11   au sein de l'unité d'artillerie mixte. Pendant toute la période de temps en

 12   question au poste de commandement de cette unité, il y avait une mission

 13   d'observation des Nations Unies. Et je me souviens que l'interprète,

 14   c'était Sanja Zverovic [phon]. Les autres changeaient. Je dois également

 15   ajouter à ceci, qu'à cause des incidents fréquents à Sarajevo, on insistait

 16   très souvent auprès de la FORPRONU pour qu'elle confirme des tirs ou non.

 17   Les carnets qui étaient gardés à ce poste de commandement étaient très

 18   précieux pour se prêter à ce genre d'exercice.

 19   Q.  Nous y reviendrons davantage en détail tout à l'heure, mais vous venez

 20   de parler d'un carnet. Voulez-vous dire par là un carnet d'artillerie ?

 21   R.  Chaque unité enregistre ses propres informations. Ici, je faisais

 22   référence au carnet des observateurs de la FORPRONU, où ils enregistraient

 23   tout tir de n'importe quel point et de n'importe quelle zone.

 24   Q.  Mais moi, je vous ai parlé d'un carnet d'artillerie. Vous semblez dire

 25   que ces carnets étaient gardés. Est-ce que votre brigade gardait ce genre

 26   de carnet d'artillerie qui enregistrait tout tir de tout point et le

 27   résultat de ces tirs ?

 28   R.  Une brigade a un journal de terrain où sont enregistrées les opérations


Page 29046

  1   de toutes les unités, pas seulement celles d'artillerie. Et les résultats

  2   obtenus ne peuvent être que devinés. On ne peut pas enregistrer dans un

  3   carnet l'impact d'un projectile en particulier. On ne le sait pas, tout

  4   simplement.

  5   Q.  Très bien. Merci. Nous allons laisser ceci de côté pour l'instant et

  6   nous allons continuer avec les bataillons dans votre brigade. Vous avez

  7   confirmé que vous aviez un bataillon aéroporté. Où se trouvait-il ? Où

  8   était-il posté ?

  9   R.  Le bataillon d'armes de défense antiaérienne ne servait presque à rien,

 10   car en 1992, ou en juillet 1992, vu que l'aéroport a été sous la protection

 11   des Nations Unies, dans la zone de Sarajevo toutes les armes de défense

 12   antiaérienne ont été retirées de la zone, nous l'avons fait, la zone autour

 13   de l'aéroport. Donc, il n'y avait pas d'armes de défense antiaérienne à

 14   Sarajevo. Seuls les canons de 20 millimètres et de 30 millimètres étaient

 15   utilisés comme armes anti-infanterie, parce qu'il était possible de les

 16   utiliser à cet objectif.

 17   Q.  Merci pour cette réponse, mais je vous ai demandé quelque chose de

 18   complètement différent. Je vous ai demandé où se trouvait le QG, votre QG.

 19   R.  Dans la pratique, il n'y en avait pas du tout. Il était attaché à

 20   l'unité d'artillerie. Il existait d'un point de vue formel, mais il n'y

 21   avait rien dans la pratique.

 22   Q.  Et les canons de 20 et 30 millimètres qui étaient utilisés comme armes

 23   anti-infanterie, où étaient-ils déployés ?

 24   R.  Ils étaient déployés dans le cercle extérieur, comme nous l'appelions,

 25   de Sarajevo, aux alentours de Trnovo. Certains se trouvaient à Praca, vers

 26   Gorazde; d'autres à Nisici, face à Olovo. Donc, ces pièces d'artillerie

 27   auraient pu être plus efficaces dans des zones sans bâtiments plutôt que

 28   dans des zones urbaines. On ne pouvait pas les utiliser dans des zones


Page 29047

  1   urbaines.

  2   Q.  Donc, elles se trouvaient dans les bataillons ?

  3   R.  Oui, on les donnait aux bataillons d'infanterie, c'est exact.

  4   Q.  Et vous aviez aussi un bataillon de char dans cette brigade, n'est-ce

  5   pas ?

  6   R.  Oui, il y avait un bataillon blindé dans la brigade. Il était déployé,

  7   ou plutôt, une compagnie était déployée à l'ancien aéroport qui s'appelait

  8   Butmir, où se trouve à présent la base des forces européennes à Sarajevo.

  9   Une autre compagnie se trouvait à Jahorinski Potok à Pale, un petit peu

 10   après Pale en allant vers Praca. Et il y avait une autre compagnie à

 11   Trnovo.

 12   Q.  Combien de chars se trouvaient dans ce bataillon ?

 13   R.  Trois ou quatre, en général, et 27 chars. Mais dans ce cas-ci, ce

 14   n'était pas le cas, il y en avait moins.

 15   Q.  Et de quel type de char s'agissait-il ? Des T55 ? Des T34 ?

 16   R.  Tous les chars étaient des T55.

 17   Q.  Bien. Je voudrais passer à un autre sujet, celui des tireurs d'élite,

 18   car dans votre déclaration vous avez dit qu'il n'y avait pas de tireurs

 19   d'élite entraînés et professionnels dans votre unité. Je ne sais pas très

 20   bien quoi comprendre par cela. Vous avez utilisé le mot "unité" très

 21   souvent dans votre déclaration, donc quelquefois il faut deviner ce à quoi

 22   vous faites référence. Donc, Monsieur, lorsque vous nous avez dit cela,

 23   est-ce que vous vouliez parler de votre brigade ou de votre bataillon ou de

 24   quelque chose d'autre ?

 25   R.  En fait, dans ma déclaration, je pense que l'on peut faire une

 26   distinction claire entre ce qu'une unité était lorsque j'étais le chef des

 27   opérations et de la formation dans la brigade, car je décrivais ce que je

 28   faisais à l'époque, les tâches que j'assumais à l'époque. Lorsque j'étais


Page 29048

  1   commandant de bataillon, j'ai décrit la situation qui se rapportait à cette

  2   fonction-là, donc je ne vois pas ce que vous ne comprenez pas. Est-ce que

  3   vous pourriez être plus claire, s'il vous plaît.

  4   Q.  Lorsque vous avez déclaré qu'il n'y avait pas de professionnels

  5   entraînés dans votre unité, à quoi faisiez-vous référence, au bataillon ou

  6   à la brigade ?

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pouvons-nous montrer le passage au

  8   témoin, s'il vous plaît.

  9   Mme EDGERTON : [interprétation] Absolument. Je parle du paragraphe 36 de la

 10   pièce P2331. Et nous pouvons afficher la version dans la langue du témoin.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pouvez-vous nous lire le passage à ce

 12   paragraphe 36, s'il vous plaît. Pour faciliter les choses au témoin,

 13   pouvez-vous donner lecture de ce paragraphe, s'il vous plaît.

 14   Mme EDGERTON : [interprétation]

 15   Q.  Monsieur, au paragraphe 36, vous nous dites :

 16   "Il n'y avait pas de tireurs d'élite professionnels entraînés dans

 17   mon unité. Les histoires sur les tireurs d'élite à Sarajevo ne sont pas

 18   nécessaires, si l'on sait et que l'on tient compte du fait que les tirs de

 19   tireurs embusqués sur des cibles bien visibles se faisaient à des grandes

 20   distances. A toutes les positions à Sarajevo, et en particulier dans mon

 21   unité, des tirs pouvaient avoir lieu et provenaient d'armes de tous types,

 22   y compris des fusils à main, parce que les distances sont très petites.

 23   J'avais des informations selon lesquelles il existait des tireurs d'élite

 24   dans l'unité du 1er Corps de l'ABiH et qui étaient dirigés contre nous."

 25   Donc, lorsque vous parlez d'"unité" ici, Monsieur, est-ce que vous parlez

 26   d'une brigade ou du bataillon ?

 27   R.  Je parlais du bataillon, mais je peux aussi vous parler de la brigade

 28   car je connais aussi ce genre de cas. C'était moi qui étais chargé de


Page 29049

  1   l'entraînement des unités. Je n'avais jamais organisé ni mené de formation

  2   de tireurs d'élite. Les tireurs d'élite dans les unités sont sélectionnés

  3   en fonction de leurs caractéristiques physiques et psychologiques et

  4   suivent des entraînements de tir spécifiques. On leur donne un VES spécial,

  5   en fait, c'est une spécialité militaire qui est enregistrée dans leur

  6   dossier militaire. Et je peux vous dire avec toute certitude que dans la

  7   1ère Brigade motorisée de Sarajevo, il n'y avait pas de personnel de la

  8   sorte.

  9   Lorsque je vous ai dit que cela n'était pas nécessaire, je voudrais vous

 10   renvoyer à la carte que vous m'avez montrée et je voudrais que vous voyiez

 11   que les lignes de séparation étaient de 20 à 50 mètres en moyenne. Toute

 12   personne qui connaît les armes comprendra que des appareils optiques ne

 13   peuvent pas être utilisés dans ce genre de portée. Que toutes les petites

 14   armes d'infanterie peuvent être utilisées dans ce genre de cas et que, d'un

 15   point de vue militaire, les tirs embusqués ne serviraient à rien.

 16   Q.  Donc, par exemple, lorsque nous parlons du groupe de tireurs d'élite

 17   qui était sous le commandement de Nebojsa Ivkovic et qui opérait dans la

 18   zone du 2e Bataillon, de qui parlons-nous ? Parlons-nous de tireurs d'élite

 19   spécialement formés ou de très bons tireurs qui peuvent atteindre leurs

 20   cibles avec de petites armes d'infanterie ?

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-être que je peux aider les interprètes.

 22   Les très bons tireurs sont ceux qui tirent; en tout cas, c'est ce que l'on

 23   dirait dans notre langue. Et ce n'est pas le terme que le témoin a entendu

 24   dans l'interprétation qui lui a été donnée. Ce terme est très rarement

 25   utilisé.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Merci.

 27   Pouvez-vous répondre à la question, s'il vous plaît ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Pouvez-vous répéter votre 


Page 29050

  1   question ?

  2   Mme EDGERTON : [interprétation]

  3   Q.  Oui, bien sûr. Sur les photos que l'on vous a montrées, photos des

  4   bâtiments de Grbavicka, une unité de tireurs d'élite était sous le

  5   commandement de Nebojsa Ivkovic et d'autres. Et donc, quand on parle de

  6   cette unité, quel type de tireurs l'a composée, des tireurs d'élite ou des

  7   tireurs aguerris qui utilisaient des petites armes d'infanterie ?

  8   R.  Nebojsa Ivkovic n'a jamais été dans le 3e Bataillon d'infanterie,

  9   jamais. J'ai entendu parler de cet homme vers la fin de la guerre. Je l'ai

 10   vu à Grbavica. Je ne pense pas qu'il ait joué de rôle non plus dans le 2e

 11   Bataillon, mais je n'en suis pas sûr. Je dois vous dire que la 1ère Brigade

 12   de Sarajevo n'a jamais émis ce genre d'ordre, sinon, en ma qualité de

 13   commandant du bataillon, j'aurais reçu cet ordre. Cependant, certaines

 14   personnes qui pensaient être des spécialistes et qui s'autoproclamaient

 15   être des spécialistes le faisaient pour faire bonne figure. Je suppose

 16   qu'il se considérait comme étant quelqu'un de ce genre-là. Mais je ne sais

 17   pas si dans la 1ère Brigade de Sarajevo il y avait un groupe de tireurs

 18   d'élite organisé, et, franchement, je ne sais pas à quoi cela aurait servi.

 19   Q.  Est-ce que vous remettez en question le fait que la brigade avait des

 20   positions de tir dans les bâtiments dans la rue Grbavicka ?

 21   R.  Non, non, je ne remets pas cela en question. Ce que je remets en

 22   question, c'est qu'il y avait là des groupes de tireurs d'élite. Ce n'était

 23   pas le cas. La brigade n'a pas organisé ce genre de choses. J'en suis sûr,

 24   je vous le dis, sinon j'aurais reçu un ordre à cet effet.

 25   Q.  Les personnes qui se trouvaient à ces positions de tir étaient-elles

 26   équipées d'armes spéciales qui les auraient aidées à mener à bien leur

 27   mission ?

 28   R.  Je sais exactement quel genre d'armes ont été données à la 1ère Brigade


Page 29051

  1   de Sarajevo. Aucune arme qui ne se retrouvait pas dans l'organigramme ne

  2   leur a été délivrée.

  3   Q.  Est-ce que vous pouvez expliquer ce que vous voulez dire par

  4   "organigramme", ou armes qui se trouvaient dans l'organigramme ?

  5   R.  Peut-être que vous avez eu l'occasion de voir la configuration des

  6   unités. En fait, tout est expliqué en détail, le nombre d'hommes, les

  7   armes, comment les unités sont formées. Les brigades ne sont pas

  8   improvisées.

  9   Q.  Peut-être que nous pouvons essayer à nouveau de répondre à cette

 10   question, et j'aimerais vous aider en vous montrant un document.

 11   Mme EDGERTON : [interprétation] Pouvons-nous afficher le document 23823 de

 12   la liste 65 ter, s'il vous plaît. Il devrait être disponible dans la langue

 13   originelle et en version anglaise. Il émane de Veljko Stojanovic,

 14   commandant de la 1ère Brigade motorisée de Sarajevo, et daté du mois

 15   d'octobre 1993, le 29 octobre pour être précis, et est adressé au général

 16   Galic. Voilà, la partie droite de l'écran ne montrait pas l'entièreté du

 17   document. Merci. C'est fait.

 18   Q.  Monsieur, ce document a été émis par le commandant de votre brigade,

 19   Stojanovic, et répondait à l'ordre du général Galic et informait également

 20   le général Galic que la brigade possédait quatre M49 [comme interprété],

 21   des fusils de 7,9 millimètres avec des lunettes; deux fusils de 7,62

 22   millimètres semi-automatiques à visée optique; trois M49 [comme

 23   interprété], des mitrailleuses de 7,62 millimètres à lunette; 12 fusils de

 24   7,62 [comme interprété] millimètres à vue infrarouge; quatre silencieux; et

 25   quatre fusils de 7,62 millimètres silencieux. Et le colonel Stojanovic dit

 26   que dans votre brigade il n'y avait pas d'unité de tireurs d'élite mais des

 27   fusils à lunette pour les soldats qui se trouvaient sur la ligne de front.

 28   S'agit-il d'armes qui faisaient partie de l'organigramme ou pas ?


Page 29052

  1   R.  Puis-je apporter un commentaire à cette question ?

  2   Q.  Bien sûr.

  3   Q.  Le 1er Corps de Sarajevo et la 1ère Brigade motorisée de Sarajevo

  4   n'avaient pas des unités qui faisaient face à la ville uniquement. Seules

  5   quelques unités étaient déployées là-bas. La majorité des unités étaient

  6   affectées dans les zones de manœuvre, c'est-à-dire dans ce cercle extérieur

  7   dont j'ai parlé. Et c'est là que ce genre d'armes est majoritaire, et il

  8   est normal que le commandant soit au courant de la destination de ces

  9   armes. Il n'y avait rien d'inhabituel là-dedans. Les forces croates et les

 10   forces musulmanes disposaient d'armes identiques.

 11   Q.  Est-ce que vous êtes en train de dire que les unités de brigade sur la

 12   ligne de confrontation à Sarajevo ne possédaient pas ces armes ?

 13   R.  S'il vous plaît. Une lunette peut être montée sur n'importe quel type

 14   de fusil, même un fusil de chasse. Mais si quelqu'un utilise ce genre

 15   d'arme, ça ne veut pas nécessairement dire que cette personne est un tireur

 16   d'élite. Si on applique cette logique, alors on peut en déduire que tous

 17   les chasseurs sont des tireurs d'élite.

 18   Q.  Parlons un instant des unités qui se trouvaient dans le cercle

 19   intérieur. Quelle était la mission de ces unités ?

 20  R.  Il y a quelques instants, je vous ai dit que la 1ère Brigade de Sarajevo

 21   se trouvait à l'avant des zones peuplées, et que comme les distances

 22   étaient très proches il était impossible d'utiliser des appareils optiques.

 23   Je ne vais quand même pas vous expliquer dans les détails ce que veulent

 24   dire des opérations urbaines.

 25   Q.  Les unités dans le cercle intérieur qui utilisaient ces armes, qui

 26   ciblaient-elles et qui planifiait leur tir ?

 27   R.  Il n'y a pas de planification de tir. Un soldat se trouve soit dans une

 28   tranchée ou dans son bâtiment. Il observe la zone devant lui, et tout ce


Page 29053

  1   qui pose danger est soumis à un tir; s'il n'y a pas de danger, il n'y a pas

  2   besoin de tirer.

  3   Q.  Quel genre de rapport devaient établir ces unités ? Est-ce qu'elles

  4   devaient faire rapport de toute victime ?

  5   R.  Un tireur ne sait pas s'il a fait une victime ou pas. Donc, comment

  6   peut-il faire un rapport là-dessus ? C'est une question de bon sens.

  7   Q.  Voulez-vous dire par là que quelqu'un qui tire avec un fusil ne voit

  8   pas l'impact de la cible ? Je ne comprends pas.

  9   R.  Je comprends que vous ne compreniez pas, car vous n'assumiez pas ce

 10   genre de fonction. Un soldat sur la ligne prend lui-même la décision de

 11   tirer ou pas en fonction de son évaluation des risques, de sa propre

 12   évaluation des risques. S'il était vraiment en danger, et s'il devait

 13   attendre d'envoyer un rapport et de recevoir l'ordre de tirer, il sera mort

 14   100 fois dans l'intervalle. Donc, c'est absolument inutile. D'un point de

 15   vue général, lorsque la chaîne de commandement est créée, un ordre est émis

 16   quant au type de régime de tir qui aura lieu et qui sera appliqué. Et très

 17   souvent dans nos rangs, nous devons attendre, car nous étions forcés à

 18   prouver que ce n'était pas nous qui avions ouvert le tir, mais que nous

 19   nous étions défendus. Malheureusement, nous avons subi des pertes à cause

 20   de cela.

 21   Q.  Merci. Passons à une autre unité au sein de votre bataillon. Dans votre

 22   déclaration au paragraphe 43, vous nous parlez de volontaires dans les

 23   rangs de votre unité. Vu que nous parlons de votre bataillon, j'aimerais

 24   savoir si vous faites référence à Slavko Aleksic ?

 25   R.  Je ne faisais pas référence à lui uniquement. C'était l'un des

 26   volontaires. C'est celui qui vivait au cimetière juif, quartier du

 27   cimetière juif, et il se décrivait comme un Chetnik, ce qui est

 28   complètement contraire à ce qu'il faisait, car comme toute autre personne,


Page 29054

  1   il avait été mobilisé suivant la procédure traditionnelle. Je ne pense pas

  2   que ses allégeances politiques aient quelque chose à voir avec ce qu'il

  3   faisait. Slavko Aleksic n'était pas membre des paramilitaires. Vous pouvez

  4   le voir dans le livre VOB8. Il n'était pas de ceux qui se décrivaient comme

  5   étant des Chetniks, mais plutôt comme des membres de la population locale.

  6   Mais il y avait des gens d'autres pays parmi eux aussi.

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je pense qu'il y a eu une erreur dans le compte

  8   rendu. Il a dit des Chetniks et des radicaux, et non pas des Chetniks et

  9   des volontaires. Et plus tôt il a également dit il n'était pas un

 10   volontaire.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien.

 13   Madame Edgerton.

 14   Mme EDGERTON : [interprétation] Merci.

 15   Q.  Aleksic ---

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Un instant. Le témoin a confirmé ce que je

 17   viens de dire et cela n'a pas été consigné.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] De toute façon, la Section des services

 19   linguistiques et de conférence éclaircira ceci à l'avenir.

 20   Veuillez poursuivre.

 21   Mme EDGERTON : [interprétation]

 22   Q.  Est-ce que l'unité d'Aleksic avait des mortiers ?

 23   R.  Non.

 24   Q.  Quel type d'armes avait cette unité ?

 25   R.  Des armes d'infanterie sans aucune arme de calibre dépassant celui

 26   d'une mitrailleuse, ou, plutôt, d'un fusil mitrailleur.

 27   Q.  Avaient-ils des fusils à lunette ?

 28   R.  Comme toutes les autres unités. C'était une compagnie antiblindée,


Page 29055

  1   antichar. Ils avaient des armes d'infanterie à cet effet. Il n'y avait que

  2   des fusils.

  3   Q.  Quelle était leur mission ?

  4   R.  Leur seule et unique mission était d'empêcher le passage par le

  5   cimetière juif, et leur ligne de défense passait à l'entrée de la caserne

  6   Bosut, d'un côté du cimetière juif, pour s'étendre jusqu'à la route

  7   périphérique à Sarajevo, et il n'y avait aucune autre mission. C'est là

  8   qu'elle a commencé la guerre, cette unité, et c'est là qu'elle l'a terminée

  9   également, au niveau du mur du cimetière juif.

 10   Q.  Qui a fourni à l'unité d'Aleksic son équipement, son matériel ? Comment

 11   était-elle approvisionnée ?

 12   R.  Eh bien, Aleksic faisait comme toutes les autres unités. C'était une

 13   unité à l'organigramme. Donc, il passait par l'approvisionnement tout à

 14   fait ordinaire et la procédure courante. Ce n'était pas des paramilitaires.

 15   Ceci concernait la communauté locale de Kovacici. Les membres de son unité

 16   en étaient majoritairement originaires, c'étaient des gens du cru. Il y

 17   avait également des volontaires étrangers, un petit nombre d'entre eux,

 18   mais toutes les unités, quant à l'approvisionnement, procèdent de la même

 19   manière.

 20   Q.  Est-ce que cet "approvisionnement identique" signifie qu'ils passaient

 21   par le commandant de bataillon et ensuite par le commandant de brigade ?

 22   R.  Oui.

 23   Mme EDGERTON : [interprétation] Je voudrais passer à un autre document,

 24   mais avant de faire cela, Madame et Messieurs les Juges, je voudrais

 25   demander que le document 23823 de la liste 65 ter soit versé au dossier.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Soit.

 27   M. LE GREFFIER : [interprétation] Reçoit la cote P5930.

 28   Mme EDGERTON : [interprétation] Je voudrais maintenant que nous examinions


Page 29056

  1   le document 23874 de la liste 65 ter. Il s'agit d'une demande envoyée par

  2   Slavko Aleksic.

  3   Q.  Donc, Général, à l'écran devant vous apparaît ce document émanant de la

  4   compagnie antichar d'Aleksic, daté du 16 décembre [comme interprété] 1993.

  5   Ils demandent, entre autres, des fusils automatiques de calibre 7,62; des

  6   Brownings de calibre 7,62; des balles incendiaires, ou plutôt des balles

  7   traçantes; ainsi que des fusils à lunette de calibre 7,9; des mortiers de

  8   calibre 82 millimètres; de l'explosif, donc du TNT; des mèches à combustion

  9   lente, et cetera. Est-ce que vous voyez tout cela ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Alors pourquoi avez-vous déclaré que l'unité d'Aleksic ne disposait pas

 12   de mortiers ?

 13   R.  Eh bien, il n'en avait pas, il en demande ici. Le fait qu'il les

 14   demande ne signifie pas que sa demande a été approuvée.

 15   Q.  Oui, mais ceci s'adresse à vous. Est-ce que vous avez approuvé cette

 16   demande ou non ?

 17   R.  Voici comment je vais vous répondre : j'ai rencontré un problème

 18   constant puisqu'il ne s'agissait pas ici d'un effectif permanent. Il

 19   s'agissait d'effectifs mobilisés qui avaient des compétences militaires

 20   moindres. Il est assez incroyable de constater à quel point ces gens

 21   étaient mégalomanes et effrayés. Ils avaient peur. Ils voulaient avoir des

 22   réserves de toutes sortes de choses, et je savais cela. Donc, je n'ai

 23   jamais approuvé ce genre de demande. Ils ne l'ont pas demandé qu'une seule

 24   fois. Ils ont demandé des appareils, des avions, également. Mais c'était

 25   tout à fait ordinaire comme type de demande. Cela n'a pas été approuvé,

 26   parce que je ne pouvais pas approuver la délivrance d'un matériel dont je

 27   ne disposais pas moi-même. J'ai dit que l'approvisionnement de nos unités

 28   se faisait de façon éminemment professionnelle, ce qu'on peut voir dans


Page 29057

  1   tous nos rapports. C'était une pratique tout à fait normale et habituelle.

  2   Si bien que personne ne pouvait contourner la procédure habituelle.

  3   Q.  Général, est-ce que vous voulez vraiment que nous prenions au sérieux

  4   cette affirmation selon laquelle ils ont demandé des avions ?

  5   R.  Je vous dis qu'ils ont demandé un soutien aérien. Je vous le dis tout à

  6   fait sérieusement. Ils pensaient qu'ils allaient être massacrés. Ils

  7   étaient pris de panique. Et il est vrai que parfois ils étaient en danger,

  8   mais ce n'était pas à ce point. Alors, vous n'en avez pas une idée précise,

  9   mais moi j'ai vécu toutes sortes de choses. Il ne s'agissait pas d'une

 10   armée professionnellement entraînée au combat, mais de gens du cru, de la

 11   population locale, de la population locale qui avaient peur. La question

 12   essentielle qui se posait à eux, c'était : Qui va m'aider lorsque je serai

 13   sur la ligne de front et que je serai en danger ?

 14   L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas entendu la fin de la réponse du témoin.

 15   Mme EDGERTON : [interprétation]

 16   Q.  Dans ce même paragraphe, vous dites également --

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Il y a une erreur à nouveau dans le

 18   compte rendu. Le témoin n'a pas dit "et je leur fournissais tout." Mais il

 19   a dit que leur demande consistait à dire "donne-moi tout, donne-moi tout,"

 20   alors que dans le compte rendu, nous lisons "je leur ai tout fourni, je

 21   leur ai tout donné."

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il y a dans le compte rendu la marque

 23   habituelle d'une lacune qui sera comblée par les sténotypistes

 24   ultérieurement.

 25   Veuillez poursuivre.

 26   Mme EDGERTON : [interprétation] Je voudrais maintenant demander l'affichage

 27   du document 23 -- ou, plutôt, demander le versement du document 23874.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Soit.


Page 29058

  1   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il reçoit la cote P5931.

  2   Mme EDGERTON : [interprétation]

  3   Q.  Je voudrais maintenant passer à un autre sujet. Ceci concerne une

  4   partie de ce que vous avez dit au paragraphe numéro 24 de votre

  5   déclaration. Vous avez dit que :

  6   "Ce n'était que dans les médias des Musulmans que vous aviez vu les

  7   éventuelles victimes d'affrontements qui avaient eu lieu entre nos unités

  8   et les unités ennemies du 1er Corps de l'ABiH, et qu'il se serait agi de

  9   victimes civiles, également. De notre côté, il y a eu de tels cas,

 10   notamment le 6 janvier 1994 lorsque les Musulmans ont lancé une attaque sur

 11   le cimetière juif et le pont de Vrbanja."

 12   Alors juste pour obtenir une précision, ces victimes civiles que vous

 13   évoquez dans ce paragraphe, vous parlez de victimes dans le territoire

 14   contrôlé par les Musulmans, n'est-ce pas ?

 15   R.  Non. Dans la première partie, lorsque j'ai dit que c'est par les médias

 16   que j'apprenais l'existence de victimes du côté musulman - et je l'affirme

 17   aujourd'hui encore - je ne savais pas ce qui se passait à Sarajevo et je ne

 18   savais pas s'il en allait réellement ainsi. C'est quelque chose que

 19   j'apprenais à la télévision. Par ailleurs, je sais comment les médias

 20   participent à la propagande et que celle-ci fait partie intégrante de la

 21   guerre. Je sais, par ailleurs, que la partie adverse n'en faisait pas

 22   secret, qu'elle le faisait ouvertement. Je savais qu'il y avait beaucoup

 23   d'incidents qui étaient montés de toutes pièces, mais c'est tout ce que je

 24   savais. La seule autre possibilité était d'obtenir des informations de la

 25   part des personnes qui traversaient la ligne de séparation pour passer de

 26   notre côté et qui nous racontaient ce qui passait là-bas. Si quelqu'un

 27   savait bien de façon fiable ce qui s'y passait, c'étaient eux, parce que

 28   moi, je ne m'y suis pas trouvé. Quant à cet événement du 6 juin 1994, que


Page 29059

  1   j'ai déjà évoqué et qui s'est produit de notre côté, c'était simplement à

  2   titre d'illustration. A chaque fois qu'il y a des combats dans une localité

  3   habitée, et compte tenu du fait que les civils vivaient pratiquement sur

  4   les lignes et non pas à l'arrière des lignes, il est inévitable que les

  5   victimes civiles soient beaucoup plus nombreuses que les victimes

  6   militaires, parce que les soldats sont à l'abri alors que les civils n'ont

  7   pas d'autre choix que de se débrouiller pour se mettre à l'abri, et

  8   deviennent donc souvent des victimes collatérales, comme on dit

  9   aujourd'hui. C'était uniquement à titre d'illustration que j'en ai parlé,

 10   alors qu'il y a eu de nombreux cas de ce type.

 11   Q.  En fait, je voudrais juste apporter une correction ou une précision au

 12   compte rendu. Vous avez parlé d'un événement du 6 juin 1994. Est-ce que

 13   vous parliez, en fait, de l'événement du 6 janvier 1994, auquel vous vous

 14   référiez dans votre déclaration ?

 15   R.  Oui, janvier.

 16   Q.  Merci. Alors, vous venez de dire que vous ne saviez pas ce qui se

 17   passait dans Sarajevo et si c'était bien ce qui s'y passait. Alors, est-ce

 18   que tout ce que vous nous dites, c'est que vous n'aviez aucun poste avancé

 19   qui vous aurait permis d'observer ce qui s'est passé dans la ville ?

 20   R.  C'était impossible. Parce qu'il n'y avait pas d'espace pour organiser

 21   quoi que ce soit à l'avant des lignes.

 22   Q.  Donc, vous ne disposiez d'aucune possibilité de procéder à des

 23   observations portant, par exemple, sur les cibles que vous vous apprêtiez à

 24   frapper ?

 25   R.  Rien d'autre de ce qui était visible de la ligne de front elle-même sur

 26   une distance d'environ 20 mètres.

 27   Q.  Oui. Mais, Général, dans votre déclaration, vous dites avoir pris des

 28   mesures visant à éviter les victimes collatérales au moment où la décision


Page 29060

  1   devait être prise de tirer ou non sur une cible. Alors, comment pouviez-

  2   vous prendre ce type de décision si vous n'aviez pas la possibilité de

  3   procéder à des observations de vos cibles ?

  4   R.  C'était simple. Mon unité se trouvait au contact et ne pouvait rien

  5   projeter à l'avant de ses propres lignes, parce qu'à 20 mètres de distance,

  6   c'était déjà le territoire des Musulmans. Et en milieu urbain, où nous nous

  7   trouvions, il était impossible de tirer en ligne droite. C'est impossible

  8   pour un fusil à cause de l'obstacle que représentaient les bâtiments.

  9   Alors, évidemment, lorsqu'il y a un dégagement ou une ouverture, ça devient

 10   possible. Il est possible également d'utiliser des grenades qui peuvent

 11   être lancées. Il est possible de disposer des explosifs ou une mine devant

 12   une tranchée, mais c'est tout.

 13   Q.  Donc, si vous tiriez au moyen de vos armes sans avoir procédé à des

 14   observations préalables à partir d'un poste avancé, je serais extrêmement

 15   curieuse de savoir quelles étaient ces mesures que vous preniez pour éviter

 16   les victimes collatérales.

 17   R.  Ce que vous me demandez est impossible. Je vous répète que la distance

 18   qui séparait les lignes était en moyenne de 20 à 50 mètres. Et cette zone

 19   intermédiaire en milieu urbain était occupée par des habitations, des

 20   maisons, qui ne laissaient aucune visibilité. On avait une visibilité

 21   uniquement lorsqu'une rue passait à un endroit. Il était possible de voir

 22   également si l'on était dans une maison qui surplombait son voisinage, mais

 23   on ne pouvait pas voir loin. Ce que je vous affirme, c'est que si quelqu'un

 24   vous dit voir ce qui se passait à Bascarsija en étant posté à Grbavica, il

 25   s'agit d'un fou, parce que même 100 mètres plus loin à partir de la rivière

 26   Miljacka, c'est impossible. On ne voit pas. Ce n'est pas le genre de

 27   visibilité qu'on a dans une ville. Si vous sortez d'un bâtiment dans la

 28   rue, vous ne pouvez voir que ce qu'il y a dans cette rue. Vous ne pouvez


Page 29061

  1   pas voir ce qu'il y a derrière le bâtiment voisin. D'ailleurs, pourquoi

  2   aurait-on besoin de guider les tirs de fantassins ? Ils sont tout à fait

  3   capables de guider leurs propres tirs. Mais la cible ne sera pas touchée

  4   par chacune des balles tirées. Il y aura également des ricochets, des coups

  5   qui manquent la cible, et cetera.

  6   Q.  Mais vous nous dites au paragraphe 32, et je vais vous le lire, je cite

  7   :

  8   "Lorsque nous menions des activités de combat et ouvrions le feu sur des

  9   cibles militaires situées dans des zones civiles, nous prenions des mesures

 10   visant à réduire le nombre de victimes civiles collatérales."

 11   Et vous donnez un exemple. En fait, moi, ce que je vous demande, c'est

 12   simplement de nous donner d'autres exemples.

 13   R.  C'est très simple - et c'est exact - le fait de donner l'ordre de ne

 14   pas ouvrir le feu si ce n'est pas nécessaire pour éviter des victimes

 15   inutiles; l'ordre de tirer en visant des cibles représentant un danger, et

 16   non pas au petit bonheur la chance; et d'éviter ces types de tir dans tous

 17   les sens qui représentent un danger. Alors, je ne peux pas maintenant

 18   inventer quelque chose de spectaculaire. Il s'agit de choses qui se

 19   produisaient dans les combats et que nous avons essayé d'éviter. Nous ne

 20   sommes pas des penseurs, des philosophes, pour maintenant imaginer quelque

 21   chose de complètement extravagant. C'était pensé pour que cela s'adresse à

 22   chaque individu se trouvant dans une tranchée pour qu'il agisse de façon

 23   avisée, réfléchie, tout en se protégeant du danger qui le menaçait et sans

 24   menacer la vie d'autres si cela n'était pas nécessaire.

 25   Q.  Dois-je alors comprendre que c'était chaque soldat qui lui-même devait

 26   estimer le danger ou la menace auquel il était confronté au moment où il

 27   devait décider de la nature de sa riposte et de la façon dont il allait

 28   riposter ? Est-ce que c'est cela que vous êtes en train de nous dire ?


Page 29062

  1   R.  Mais je vous en prie. Un soldat qui se trouve dans une tranchée, s'il

  2   devait attendre que quelqu'un lui apporte une décision qui lui dira s'il

  3   doit se défendre ou non, il ne se défendrait jamais. Il est normal que la

  4   partie adverse soit à l'affût de toute imprudence pour nous infliger des

  5   pertes. Toute autre affirmation n'est qu'un mensonge ou une illusion.

  6   Personne d'autre ne peut prendre la décision de se défendre ou non que le

  7   soldat qui se trouve dans la tranchée, parce que c'est lui-même qui se

  8   trouve menacé et en danger. Ce n'est pas lui qui décide si des combats vont

  9   avoir lieu ou non. C'est la finalité même du commandement. Lui, il prend

 10   une décision qui le concerne lui-même. Le commandant de section prend la

 11   décision qui concerne la section, et au-delà. C'est la raison même de

 12   l'existence d'une hiérarchie. Il faut bien reconnaître que là où les unités

 13   ont été entraînées, elles sont professionnelles, et tout cela fonctionne

 14   mieux. Là où les soldats ne sont pas assez entraînés, cela fonctionne moins

 15   bien, il y a plus d'erreurs, et on peut dans ces cas-là parler de la

 16   qualité des unités. Elles se distinguent en cela, par rapport à leur niveau

 17   d'entraînement, par rapport à la capacité des soldats qui se trouvent dans

 18   la tranchée d'accomplir une mission de façon professionnelle au sein de

 19   l'unité à laquelle ils appartiennent. C'est en cela qu'il y a des

 20   différences.

 21   Q.  Vous nous parlez d'un soldat dans une tranchée. Mais qu'en était-il des

 22   soldats tirant, par exemple, des obus de mortier de 60 ou 82 millimètres ?

 23   Est-ce qu'un tel soldat était lui aussi censé prendre la décision de tirer

 24   ou de ne pas tirer et devait-il lui-même décider s'il était approprié de

 25   répondre ou non à une menace ?

 26   R.  Non. Un mortier, c'est une arme qui n'est pas une arme individuelle

 27   mais collecte. Dans l'armée, il y a des armes qui sont servies par des

 28   individus. D'autres armes sont servies par des équipes mais sous la


Page 29063

  1   responsabilité et l'autorité d'un officier, et on ne peut pas utiliser de

  2   telles armes sans ordre de l'officier. Dans cette catégorie d'armes, on

  3   trouve les armes d'artillerie, qui se distinguent des armes personnelles

  4   servies par un soldat décidant de l'emploi ou non de cette arme. Alors que

  5   les armes collectives sont utilisées sur décision du commandant du groupe

  6   correspondant. Il est impossible qu'un individu seul décide sans

  7   l'intervention de son commandant de tirer un obus de mortier.

  8   Q.  Mais au paragraphe numéro 23, vous avez dit qu'il s'agissait de

  9   mortiers sous le commandement du SRK et que ces mortiers ne devaient tirer

 10   que si la ligne était directement menacée.

 11   Donc, ceci s'appliquait-il uniquement aux soldats dans les tranchées

 12   ou aux soldats qui disposaient d'armes d'infanterie, ou bien votre ordre

 13   s'appliquait-il également à ceux qui servaient les mortiers ?

 14   R.  Vous avez parlé du commandant de corps, si lui émet un ordre, il est

 15   évident qu'il intervient parce que la zone de responsabilité du corps

 16   d'armée est menacée, et dans ces cas-là tout le monde doit intervenir.

 17   Toutes les ressources du corps sont engagées. Tout commandant qui prend une

 18   décision dispose probablement d'information concernant ce qui se passe en

 19   dessous du niveau auquel il se trouve, donc tous les effectifs sont

 20   mobilisés dans ces cas-là. Mais le simple fait d'être mobilisé ne signifie

 21   pas nécessairement que l'on agit. L'action n'intervient qu'au moment où

 22   l'ordre arrive du commandement.

 23   Q.  Je vais lire ce qui figure au paragraphe numéro 23. Je 

 24   cite :

 25   "Il avait été ordonné de nombreuses fois à partir des différents niveaux du

 26   commandement du SRK qu'il ne fallait ouvrir le feu que lorsque des vies

 27   étaient directement menacées et uniquement en visant des cibles

 28   représentant un danger du point de vue de la sécurité de l'unité."


Page 29064

  1   Donc, ce que je comprends, c'est qu'indépendamment de la question de savoir

  2   qui servait une arme donnée, c'était à ces personnes-là qu'il appartenait

  3   de décider à quel moment il convenait de tirer et qu'est-ce qui constituait

  4   une réponse appropriée, n'est-ce pas ?

  5   R.  Il s'agit là d'une façon de mettre en état d'alerte une unité en

  6   attente d'une action. J'ai dit tout à l'heure qu'un soldat n'observe que ce

  7   qui se trouve devant lui. Un secteur d'environ 20 ou 50 mètres, c'est assez

  8   étroit, mais un soldat individuel ne peut pas couvrir une zone plus

  9   importante et il n'en a pas besoin. Alors, s'il constate un danger ou une

 10   menace et qu'il a le temps d'en faire état, il le fera; mais s'il n'a pas

 11   le temps le de faire, il agira à titre individuel. Cependant, les armes

 12   collectives n'interviennent que suite à l'observation d'une cible et sur

 13   ordre. Si ce soldat qui se trouve dans une tranchée note la présence d'un

 14   groupe devant lui, il va en faire état de façon à ce que le commandement

 15   puisse décider d'agir ou non, d'ouvrir le feu ou non, et de quelle façon.

 16   Q.  Oui, mais --

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Edgerton, veuillez avancer, s'il

 18   vous plaît.

 19   Mme EDGERTON : [interprétation] Très bien.

 20   Q.  Dans votre déclaration, vous avez dit au paragraphe numéro 44 :

 21   "Il était assez fréquent de constater que les mortiers mobiles

 22   ouvraient le feu, les mortiers mobiles qui se trouvaient près

 23   d'infrastructures civiles telles que le bâtiment de la présidence, le

 24   bâtiment de la radiotélévision ou le complexe hospitalier, afin de

 25   provoquer une réaction de la part des Serbes."

 26   Alors, concernant ces mortiers, ces unités de mortiers mobiles, quelle

 27   était la taille de ces mortiers généralement ?

 28   R.  J'étais employé au centre d'entraînement maréchal Tito avant la guerre.


Page 29065

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21   

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  


Page 29066

  1   Dans ce centre maréchal Tito se trouvaient des armes collectives utilisées

  2   pour l'entraînement des recrues, et parmi ces armes il y avait de nombreux

  3   mortiers de 60 millimètres, de 82 millimètres et de 120 millimètres de

  4   calibre. Il y avait également d'autres armes, d'autres moyens, comme des

  5   chars T55, des véhicules blindés de transport de troupes, des armes

  6   antiaériennes --

  7   Q.  Général, je vous ai demandé quel était le calibre des mortiers mobiles

  8   que vous avez évoqués au paragraphe 44. Je ne vous ai rien demandé

  9   concernant l'équipement qui se trouvait à la caserne maréchal Tito.

 10   R.  Une partie des armes et des équipements de la caserne maréchal Tito a

 11   été prise pour être montée à bord de camions. Sur tout camion, il est

 12   possible de monter la base ou le support d'un mortier afin que ce dernier

 13   puisse être utilisé, de façon à ce qu'on puisse tirer un ou deux obus avant

 14   que le camion ne change d'emplacement. C'est là une tactique visant à

 15   donner l'impression de la présence d'un grand nombre d'armes d'artillerie

 16   pour causer la panique et la confusion. Mais le plus souvent ce qui est

 17   fait dans ce genre de circonstances, c'est qu'on ouvre le feu de façon

 18   totalement inopinée et ce sont les premiers projectiles qui causent le plus

 19   de victimes, qui tuent le plus grand nombre de victimes, et les autres

 20   s'enfuient. Puisqu'à Sarajevo, notamment dans le voisinage de Grbavica, il

 21   y avait un tunnel --

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Kovacevic, votre réponse est

 23   amplement suffisante. Mme Edgerton vous a posé une question concernant le

 24   calibre des mortiers mobiles.

 25   Alors, est-ce que nous allons peut-être faire une pause maintenant, Madame

 26   Edgerton ?

 27   Mme EDGERTON : [interprétation] Oui, merci.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] De combien de temps pensez-vous avoir


Page 29067

  1   encore besoin pour le contre-interrogatoire ?

  2   Mme EDGERTON : [interprétation] Pas plus d'un volet d'audience, et

  3   probablement moins.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien.

  5   Nous allons donc faire une pause d'une demi-heure.

  6   --- L'audience est suspendue à 10 heures 30.

  7   --- L'audience est reprise à 11 heures 02.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Madame Edgerton. Veuillez

  9   continuer, je vous prie.

 10   Mme EDGERTON : [interprétation] Merci.

 11   Q.  Brigadier, on s'était arrêtés sur le sujet des mortiers mobiles, et je

 12   voudrais qu'on reste là-dessus pendant un moment encore. Dans ce que vous

 13   nous avez dit au cours de votre témoignage, vous avez indiqué que ces armes

 14   avaient tiré sur des cibles qui avaient été relevées ou suite à ordres

 15   reçus. Est-ce que partant de là il serait possible de dire que toute

 16   riposte ou réaction à des tirs de mortier qui se déplaçaient était une

 17   chose qui était censée faire l'objet d'un ordre au niveau d'un commandement

 18   ?

 19   R.  Lorsqu'il s'agit de tirer vers des cibles de ce type, ce qu'il faut

 20   qu'il y ait en premier c'est que l'on sache d'abord à partir de quel

 21   endroit ce type d'activité est venu à être déployé. Deuxièmement, dans

 22   toute unité vous avez des équipages qui desservent des armes lourdes qui

 23   sont de permanences, donc on peut observer les choses. Et s'il n'y a pas eu

 24   riposte immédiate, la riposte devient dénuée de sens, car l'objectif des

 25   tirs, avec des plateformes mobiles, c'était justement de causer des dégâts,

 26   aboutir à un effet donné vis-à-vis des cibles souhaitées, quitter les lieux

 27   très vite, et générer une riposte de la part de l'adversaire. On avait agi

 28   de façon ciblée pour que les activités se fassent à partir de bâtiments


Page 29068

  1   qui, d'une certaine façon, étaient censés être des bâtiments protégés.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je me dois d'intervenir. A partir de la ligne

  3   17 et au-delà, on n'a pas bien transmis ce que le témoin a dit. A la ligne

  4   17, on a dit que la cible, ce n'était pas de cibler un mortier mobile.

  5   C'était la finalité de faire en sorte qu'avec ces mortiers sur plateforme

  6   mobile, l'on porte du tort à l'adversaire, et il fallait riposter aussi tôt

  7   que possible. Et à la ligne 17 à 21, on n'a pas bien saisi ce que le témoin

  8   a voulu dire.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il est difficile de suivre ce que vous

 10   venez de dire à l'instant, et vous êtes en train de nous distraire. S'il y

 11   a un problème d'interprétation, vous pouvez intervenir même plus tard.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais oui, mais le sens de ce que le témoin a

 13   dit est complètement raté. On a complètement raté ce que le témoin a dit.

 14   On lui donne une signification tout à fait autre.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bon, plutôt que de me faire intervenir,

 16   est-ce que vous pouvez répéter votre question, et ceci notamment à la

 17   lumière de l'intervention de M. Karadzic ?

 18   Mme EDGERTON : [interprétation] Peut-être pourrais-je essayer de procéder

 19   autrement.

 20   Q.  Est-ce que vous ou vos supérieurs hiérarchiques aviez, par des

 21   signatures, approuvé l'utilisation de chaque arme pour riposter à ces tirs

 22   en provenance de mortier sur des plateformes mobiles ?

 23   R.  On ne riposte pas en faisant, en apposant une signature. Je vous l'ai

 24   dit, toutes les unités, y compris les unités d'artillerie, disposent de

 25   façon permanente d'armes qui sont prêtes à tirer, qui peuvent riposter

 26   immédiatement, instantanément. Ça s'appelle en matière professionnelle une

 27   aptitude de haut combat permanente. Dans toutes les unités ça existe. Quand

 28   on remarque qu'on nous tire dessus avec un mortier sur une plateforme


Page 29069

  1   mobile, dès qu'on a rapporté qu'il y a eu des tirs, qu'on a observé des

  2   tirs, l'officier de permanence - ce n'est pas forcément toujours le

  3   commandant - l'officier de permanence a le droit et peut donner l'ordre

  4   d'utiliser l'arme qui est susceptible d'apporter une riposte.

  5   Et ce que je me dois de vous dire c'est qu'à partir de ma zone à moi,

  6   depuis Zlatiste et depuis Osmice, on avait une vue exceptionnelle sur la

  7   ville de Sarajevo, et c'est à l'œil nu, sans jumelles, qu'on pouvait le

  8   voir. Alors pourquoi j'ai parlé de l'hôpital militaire ? Parce que ça se

  9   trouve juste derrière les lignes de front, à Marin Dvor, et derrière

 10   l'hôpital militaire, par un tunnel, de Gorice, il y avait tout un trafic

 11   qui s'opérait. Et pendant la guerre, ça servait de paravent pour les

 12   mortiers et chars qui tiraient depuis là vers nos positions à Grbavica et

 13   Trebevic.

 14   Q.  Brigadier --

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Puis-je dire quelque chose. On n'a pas consigné

 16   "Grbavica". Le témoin a dit que l'on tirait en direction de Trebevic et

 17   Grbavica. Or, Grbavica n'est pas consigné au compte rendu.

 18   Mme EDGERTON : [interprétation]

 19   Q.  Brigadier, ces informations complémentaires sont intéressantes, mais je

 20   voudrais revenir à la question que je vous ai posée et qui se rapportait à

 21   ce qui suit. Le processus que vous avez décrit pour ce qui est de

 22   l'approbation de tir en direction de cible devait être quelque chose de

 23   suivi à toute riposte au mortier mobile, et partant de votre réponse, ce

 24   que je crois comprendre, que c'est parfois mais pas toujours ?

 25   R.  Non, toujours. Ce que vous n'avez pas relevé c'est que je disais que

 26   suivant la filière de commandement il y a des armes de permanence et des

 27   officiers de permanence. Ce n'est pas forcément le commandant qui approuve

 28   la chose. Ça peut être l'officier de permanence. Il est constamment présent


Page 29070

  1   là-bas.

  2   Q.  Quel type de mesures prendriez-vous, puisque ces mortiers mobiles que

  3   vous avez décrits venaient à être repérés à proximité de bâtiments civils ?

  4   Quelles sont les mesures que vous preniez pour prévenir des dégâts

  5   collatéraux ?

  6   R.  Je me dois de vous dire que toute arme qui tire est une cible légitime

  7   en application du droit de guerre international. Où que cette arme-là se

  8   trouverait-elle, indépendamment de ce qui se trouverait autour, civils ou

  9   autre chose, c'est une cible légitime. Et ils ne sont pas censés faire ce

 10   genre de chose; or, c'est ce qui a été fait, justement, pour qu'il y ait

 11   riposte et pour qu'il y ait morts de civils pour indiquer que c'était pour

 12   terroriser les citoyens de Sarajevo et qu'on le faisait délibérément. C'est

 13   ainsi que l'on attirait des tirs vers des endroits qui, en réalité, ne

 14   seraient pas ciblés.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Kovacevic, pouvez-vous, je vous

 16   prie, répéter la dernière partie de votre réponse.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Je répète. On attirait des moyens, des

 18   armements, à proximité de bâtiments tels que les hôpitaux ou des bâtiments

 19   d'habitation de civils, et depuis là on tirait aux fins de provoquer une

 20   riposte de la part de l'armée de la Republika Srpska. Et quand on

 21   provoquait ce type de riposte, il y avait très souvent des dégâts

 22   collatéraux. Il y avait des morts, des blessés parmi les civils. Et

 23   ensuite, dans les rapports, c'était présenté comme si ça avait été une

 24   terrorisation délibérée, un pilonnage délibéré des citoyens de Sarajevo et

 25   tir de tireurs embusqués fait de façon délibérée. Mais moi, je vous répète

 26   que d'après les règles de guerre, toute arme qui tire vers vous, c'est une

 27   cible légitime. Indépendamment de l'endroit où elle se trouve, ça devient

 28   une cible militaire légitime.


Page 29071

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Kovacevic, pourriez-vous prêter

  2   attention à la question et essayer de répondre à celle-ci. La question

  3   n'était pas celle de savoir si ces mortiers sur plateforme mobile avaient

  4   constitué des cibles légitimes ou pas. Dans votre déclaration, au

  5   paragraphe 32, vous avez dit que lors de la conduite d'activités de combat

  6   et de tir en direction de cibles militaires placées dans des zones civiles,

  7   vous avez dit que vous aviez pris des mesures pour réduire les dégâts

  8   collatéraux parmi les civils.

  9   Or, la question de Mme Edgerton était celle de savoir quelles étaient

 10   les mesures que vous aviez prises lorsque vous ripostiez à ce type de tir à

 11   partir de mortiers sur des plateformes mobiles ? Parce que là, on a

 12   l'impression que vous n'avez pas pris de mesures du tout. Quelle est votre

 13   réponse ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous l'ai dit tout à l'heure. La mesure

 15   était celle-ci : personne n'était censé tirer sans ordre de la part du

 16   commandant ou de la part de l'officier de permanence. Ça, c'est une mesure,

 17   parce que le chef en place, l'officier en place ne va pas tirer au petit

 18   bonheur la chance. Il va prendre des mesures et il va essayer de cibler

 19   l'arme qui a tiré et non pas les environs. C'est la mesure la plus

 20   importante de protection. Deuxièmement, il appartenait au commandant

 21   d'évaluer si, oui ou non, il fallait tirer, parce que si ce tir de mortier

 22   n'a pas causé de dégâts, eh bien, là on ne ripostait pas, on ne ripostait

 23   pas du tout, mais on ripostait quand les vies des hommes étaient mises en

 24   péril, soit aux positions occupées par les effectifs ou alors lorsqu'il

 25   s'agissait de la population civile qui se trouvait à Grbavica. Ce qui

 26   pouvait arriver, c'est qu'après les tirs de ce mortier, on tire de façon

 27   prolongée en direction de ce secteur. Parce que s'il n'y a pas eu une

 28   riposte immédiate, on n'a pas tiré. C'est les seules mesures qu'on pouvait


Page 29072

  1   prendre. Il n'existe pas de mesures autres que l'on puisse prendre.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Madame Edgerton, veuillez

  3   continuer.

  4   Mme EDGERTON : [interprétation] Merci.

  5   Q.  Vous avez fait référence dans vos réponses à des cibles en disant qu'il

  6   fallait faire en sorte qu'il soit tiré sur des cibles concrètes et non pas

  7   sur le secteur tout entier. Alors, est-ce que vous pouvez expliquer s'il y

  8   a une liste de cibles ou si l'identification des cibles était faite ad hoc

  9   ?

 10   R.  Non. Chaque unité devant soi détermine quelle est la liste des cibles

 11   pour indiquer quelles sont les choses qui constituent un péril pour ladite

 12   unité. C'est indiqué de façon précise sur les cartes. Et sans pour autant

 13   tirer, on calcule les éléments de tir pour pouvoir efficacement ouvrir le

 14   feu en direction de ces cibles-là.

 15   Q.  Alors, vous venez de nous dire que "tous ces éléments ont été

 16   identifiés". Est-ce que vous pouvez nous dire comment se présentait cette

 17   liste de cibles ? Quelle est l'information que vous aviez à votre

 18   disposition ?

 19   R.  Ecoutez, je vais vous répondre en termes simples. Les cibles, c'étaient

 20   les unités en face de nous. L'artillerie tire sur l'artillerie, les blindés

 21   tirent sur les blindés, l'infanterie tire sur l'infanterie. C'est la

 22   répartition des cibles par leur importance.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Aux lignes 6 à 9, on a dit que l'on préparait

 24   les éléments de tir sans pour autant tirer, on le faisait à l'avance. Peut-

 25   être Mme Edgerton pourrait-elle demander au témoin si c'était bien la

 26   signification qu'il fallait entendre. Les éléments sont-ils recensés à

 27   l'avance sans qu'il y ait de tir d'effectué ?

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Kovacevic, pouvez-vous


Page 29073

  1   confirmer ce que M. Karadzic vient de nous dire ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, on appelle cela la préparation du théâtre

  3   de combat. On calcule tous les éléments à l'avance.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Fort bien. Ça a peut-être été interprété

  5   "de façon rapide et efficace."

  6   Veuillez continuer, Madame Edgerton.

  7   Mme EDGERTON : [interprétation] Merci.

  8   Q.  Lorsqu'il est question des cibles et des informations que vous aviez au

  9   sujet de ces cibles, vous avez parlé de la présence de civils sur le

 10   territoire tenu par l'ABiH. Etait-ce là un facteur qui influait sur votre

 11   liste de cibles ou pas ?

 12   R.  Oui, absolument.

 13   Q.  Comment ? Est-ce que vous aviez coutume d'inclure cette information

 14   dans votre liste de cibles ?

 15   R.  C'est simple. Si on était sur un champ de manœuvre, et non pas en

 16   ville, un peloton ou une section d'infanterie, ça aurait été une cible

 17   légitime pour les tirs d'une batterie d'artillerie. Etant donné que ce

 18   peloton ou cette section se trouvait en ville, dans une agglomération, ce

 19   n'était pas une cible légitime pour l'artillerie parce que ça aurait été un

 20   massacre de civils.

 21   Q.  Mais je ne vois pas que vous ayez répondu du tout à ma question. Est-ce

 22   que les informations au sujet des civils avaient été utilisées ou intégrées

 23   pour ce qui est de cette liste de cibles ? Comment les gens pouvaient-ils

 24   savoir s'il y avait des civils et où ils se trouvaient, où est-ce qu'ils se

 25   trouvaient dans le secteur où il y avait des cibles militaires ?

 26   R.  En bonne partie, on pouvait le voir depuis nos positions. On voit la

 27   population qui habite dans différents bâtiments. Ça se voit. Deuxièmement,

 28   de notre côté, nous avions beaucoup de gens, de Serbes, qui avaient fui ces


Page 29074

  1   lieux et qui avaient été utilisés comme main-d'œuvre au sein des unités de

  2   l'ABiH. Ils avaient donc servi à creuser des tranchées, et il leur arrivait

  3   de réussir à fuir et rejoindre nos rangs. Une fois arrivés chez nous, ils

  4   nous donnaient exactement les renseignements pour ce qui est des tranchées

  5   et des autres fortifications construites par eux, s'agissant de leur

  6   emplacement. Partant de ce type d'information, nous procédions à des

  7   rectificatifs.

  8   Q.  Mais vous n'avez rien de plus mis à jour ? Parce que les informations

  9   en provenance de gens qui étaient passés de votre côté, ça devenait assez

 10   rapidement caduque à partir du moment où ils sont passés chez vous.

 11   R.  C'est exact. Mais le nombre de ces personnes qui fuyaient et qui

 12   réussissaient à s'évader, ça nous parvenait en continuité.

 13   Q.  Est-ce que vous avez placé ce type d'information obtenue de la bouche

 14   de ces gens-là au sujet des civils, est-ce que vous avez inclus cela dans

 15   vos listes de cibles ?

 16   R.  Je dois vous dire que nous avons agi prudemment vis-à-vis de ces

 17   informations. On n'a pas tout considéré comme étant bon et juste. Nous

 18   avons été sélectifs. Nous ne pouvions pas prêter foi à ce type de dires

 19   parce qu'on a pu aussi vouloir nous tromper.

 20   Q.  A quelle fréquence avez-vous remis à jour vos listes de cibles ?

 21   R.  C'était un processus permanent.

 22   Q.  Eh bien, ça a dû être très difficile pour vous, étant donné que vous

 23   n'aviez pas d'observateurs placés en avant, comme vous nous l'avez dit.

 24   R.  Nous n'avions pas eu d'observateurs placés en avant. Mais depuis

 25   Trebevic, lorsque vous connaissiez la ville, sans instrument optique aucun,

 26   on pouvait assez bien définir et déterminer la situation telle qu'elle se

 27   présentait à Sarajevo. Non seulement depuis Trebevic, d'ailleurs, mais à

 28   partir de tous les monticules ou toutes les surélévations dans et autour de


Page 29075

  1   Sarajevo. Parce que Sarajevo, c'est une ville relativement petite, à vrai

  2   dire densément peuplée. Sur certaines parties de la ville de Sarajevo, le

  3   front était tenu rien qu'avec des armes d'infanterie.

  4   Q.  Si Sarajevo était habitée ou peuplée de façon aussi dense, comme vous

  5   venez de nous l'indiquer -- enfin, non, je vais poser la question comme

  6   ceci : y a-t-il eu des zones dans la ville qui n'ont pas été ciblées ?

  7   R.  Oui, il y en a eu.

  8   Q.  Quelles étaient ces zones ?

  9   R.  Par exemple, Cengic Vila, ça n'a pas été exposé à des tirs du tout.

 10   Parce que de toutes parts c'était à l'abri.

 11   Q.  Donc c'était, d'après vous, une zone où il n'y a pas eu de tirs. Est-ce

 12   qu'il y en a eu d'autres ou est-ce que c'était la 

 13   seule ?

 14   R.  Ce n'était pas la seule, mais - comment dirais-je ? - il n'y a qu'à

 15   Cengic Vila où il n'y a pas eu de ligne de front du tout face à nous.

 16   Q.  Donc, ceci n'était pas une zone d'exclusion de tir, mais c'était une

 17   zone où vous n'aviez pas relevé la présence de cibles militaires ?

 18   R.  Cengic Vila, c'était habité de civils. Il n'y avait pas d'institutions,

 19   il n'y avait pas de militaires. Personne ne s'y attardait, il n'y avait

 20   donc aucune utilité à tirer en direction de Cengic Vila. Il n'y avait

 21   aucune nécessité de tirer sur ce type de secteur, et personne n'a ressenti

 22   le besoin de tirer sur Cengic Vila.

 23   Q.  Merci. Je vais passer à un autre sujet abordé par votre déclaration. Au

 24   paragraphe 34, vous indiquez que :

 25   "Il y a eu des situations où des individus ouvraient le feu sans pour

 26   autant que l'on sache si ces tirs avaient prêté à conséquence. Mais vous

 27   aviez coutume de punir ce type d'infractions à la discipline."

 28   C'est ce que dit ce paragraphe 34 de votre déclaration. Alors, quelles


Page 29076

  1   infractions à la discipline ou cas de figure où des individus viendraient à

  2   ouvrir le feu sans que vous sachiez s'il y a eu conséquence à cela ? De

  3   quoi parlez-vous au juste ?

  4   R.  Je peux vous donner des exemples concrets. Par exemple, un soldat vient

  5   à se saouler, il est donc sous l'emprise de l'alcool, et indépendamment de

  6   la place où il se trouve, il a une arme et il se met à s'en servir. Ça peut

  7   provoquer une riposte de la part de l'adversaire et cette riposte peut

  8   générer des séquelles. Et c'est le cas le plus fréquent d'indiscipline que

  9   nous ayons eu. Il y a des cas où le soldat sur la ligne de front, pour des

 10   raisons qui ne sont connues que de lui, vienne à tirer au hasard pour

 11   causer des dégâts chez l'adversaire, mais aussi générer des dégâts de notre

 12   côté tant pour ce qui est des militaires que pour des civils.

 13   La forme suivante d'indiscipline fréquente pendant la guerre, c'est

 14   le fait de quitter son poste de son propre gré pour ce qui est d'un soldat.

 15   Les vols aussi. Je ne voudrais pas énumérer tout type de cas de figure,

 16   mais véritablement, selon nos règlements en temps de paix ainsi qu'en temps

 17   de guerre, ce genre de personne subisse des sanctions disciplinaires ou

 18   voire pénales. Cela dépendait de la gravité du crime. En tout cas, l'on

 19   calibrait la punition en fonction de la gravité.

 20   Q.  Est-ce que l'un de ces incidents, l'une de ces infractions

 21   disciplinaires, impliquait des victimes suite à des tirs de fusil ou des

 22   blessures suite à des tirs de fusil ou de tireurs isolés ? Est-ce que des

 23   civils ont été blessés ou tués par vos forces en territoire tenu par les

 24   Bosniens ?

 25   R.  Je ne peux pas vous le dire précisément - et c'est ce que j'ai dit dans

 26   ma déclaration - je ne peux pas vous dire précisément ce qui leur est

 27   arrivé parce que je n'ai pas pu m'y rendre. Ceci dit, je sais une chose, et

 28   c'est parce que je l'ai très souvent vu à la télévision, je pouvais accéder


Page 29077

  1   à la chaîne de télévision de Bosnie-Herzégovine, je ne dois pas

  2   nécessairement croire ce que j'ai vu car je sais que plusieurs choses

  3   avaient été montées de toutes pièces. Mais dans certains cas, je ne sais

  4   pas dans quelle mesure ce qui était relaté était vrai et ce n'est pas à moi

  5   de le juger.

  6   Q.  Qu'en est-il des bombardements ? Est-ce que vous avez mené des enquêtes

  7   sur des cas, des incidents de bombardement de civils en territoire tenu par

  8   les Bosniens du chef de vos forces ?

  9   R.  Je n'ai mené aucune enquête sur des bombardements.

 10   L'INTERPRÈTE : Note des interprètes : Est-ce que le témoin pourrait

 11   s'exprimer plus lentement, s'il vous plaît.

 12   Mme EDGERTON : [interprétation]

 13   Q.  Pouvez-vous répéter votre réponse un petit peu plus lentement, s'il

 14   vous plaît.

 15   R.  Je n'ai pas mené de telles enquêtes car je n'avais pas de pièces

 16   d'artillerie dans mon unité, et je suis un officier d'infanterie et je ne

 17   serais pas compétent dès lors pour mener une enquête d'expert portant sur

 18   des pièces d'artillerie.

 19   Q.  Lorsque vous dites "unité", maintenant vous nous parlez de bataillon.

 20   Est-ce que la même chose est valable pour la période où vous étiez au

 21   service du commandement de la brigade ?

 22   R.  Oui. Lorsque je servais au commandement de la brigade, je ne pouvais

 23   pas participer à des questions d'artillerie parce que c'était le chef

 24   d'artillerie qui était chargé de cela. C'était un professionnel qui

 25   proposait d'engager des actions d'artillerie. Donc, c'était le chef

 26   d'artillerie qui s'occupait de cela. Il faisait partie du personnel.

 27   Q.  Donc, ni dans votre bataillon, ni dans votre brigade, vous n'étiez au

 28   courant d'une enquête menée pour des cas de bombardements et de tirs isolés


Page 29078

  1   sur des civils par les forces de la VRS sur le territoire tenu par les

  2   Bosniens ?

  3   R.  Lorsque j'étais dans la brigade, et je sais, je le sais, que le chef

  4   d'artillerie était en contact constant avec l'équipe d'observation de la

  5   FORPRONU.

  6   Q.  Ce n'est pas ma question.

  7   R.  Laissez-moi terminer, s'il vous plaît -- qui était affectée au poste de

  8   commandement de l'unité d'artillerie, et tout ce que cette équipe faisait

  9   était su de l'unité de commandement d'artillerie. Le chef d'artillerie le

 10   savait et le commandant de brigade le savait. En tant qu'officier

 11   d'infanterie, je ne participais pas à cette procédure parce que je n'avais

 12   pas les compétences nécessaires s'agissant de l'utilisation de

 13   l'artillerie. S'agissant du bataillon, je n'avais pas de pièces

 14   d'artillerie, et donc je n'aurais rien pu faire.

 15   Q.  Merci. Je suppose d'après ce que vous venez de nous dire que la réponse

 16   est non, donc continuons. Dans votre déclaration, vous nous avez dit qu'une

 17   attaque bosnienne, celle du 6 janvier 1994 - et je cite là le paragraphe 24

 18   de votre déclaration - je vais d'abord vous rafraîchir la mémoire et je

 19   vais vous donner lecture de la phrase :

 20   "De notre côté, il est arrivé, notamment le 6 janvier 1994, lorsque des

 21   Musulmans ont exécuté une attaque sur le cimetière juif et le pont de

 22   Vrbanja."

 23   J'aimerais vous donner lecture de quelque chose de cette attaque le 6

 24   janvier 1995. Il s'agit du document 23902 de la liste 65 ter.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je dois vraiment intervenir. Mme Edgerton, avec

 26   tout le respect que je vous dois, a donné une réponse plutôt qu'une

 27   question. Le témoin n'a pas dit qu'il n'y avait pas d'enquête au niveau de

 28   la brigade mais que cela se faisait par des professionnels en coopération


Page 29079

  1   avec la FORPRONU. Votre conclusion est de dire que seul le bataillon, et

  2   pas la brigade, le faisait. Je parle ici de la ligne 18 du compte rendu.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il a répondu que :

  4   "…tout ce qui a été fait était connu du commandement de l'unité

  5   d'artillerie, du chef d'artillerie et du commandant de brigade."

  6   Il n'a pas donné d'exemple particulier, c'est la raison pour laquelle Mme

  7   Edgerton a répondu "non", et le témoin n'a pas répondu à ce commentaire,

  8   mais c'est un commentaire.

  9   Continuons.

 10   Mme EDGERTON : [interprétation] Merci.

 11   Donc le document 23902 de la liste 65 ter, s'il vous plaît. La version

 12   anglaise devrait apparaître aussi.

 13   Q.  Brigadier, vous venez de nous parler d'observateurs militaires des

 14   Nations Unies, et ici vous avez un rapport de situation de ces observateurs

 15   daté du 6 janvier 1994 pour le secteur de Sarajevo. Au paragraphe 7, page 2

 16   de la version anglaise -- je ne sais pas à quel paragraphe cela correspond

 17   dans la version B/C/S, je pense que c'est au bas de la page 2 en B/C/S et

 18   cela continue à la page 3.

 19   Mme EDGERTON : [interprétation] Pouvons-nous passer à la page 2 en anglais,

 20   s'il vous plaît. Merci.

 21   Q.  Je vais vous lire le point 7(a) de ce document. Il nous parle de la

 22   situation à Sarajevo pour le jour de l'attaque. On nous dit que : 

 23   "Les forces de la FORPRONU ont rapporté que l'ABiH a lancé une

 24   offensive dans les zones tenues par les Serbes de Grbavica aujourd'hui. Il

 25   n'est pas encore clair" --

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous devons passer à la page

 27   suivante pour le B/C/S.

 28   Mme EDGERTON : [interprétation] Excusez-moi.


Page 29080

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Probablement maintenant.

  2   Mme EDGERTON : [interprétation] Je vais attendre que la page suivante

  3   apparaisse avant de continuer.

  4   Q.  "…nous ne savons pas encore si des territoires ont été gagnés par

  5   l'ABiH. Cette action a mené les forces serbes à donner un ultimatum sur la

  6   station de radio locale, déclarant que si les forces bosniennes ne

  7   cessaient pas leur attaque, alors ils allaient répliquer sous la forme

  8   d'une attaque d'artillerie. L'entièreté de la ville de Sarajevo était en

  9   état d'alerte…"

 10   Donc, la réponse de vos forces à cette attaque le 6 janvier dont vous

 11   parlez dans votre déclaration était de menacer d'une réplique massive à

 12   l'encontre de la ville dans son ensemble, n'est-ce pas ?

 13   R.  Non, ce n'était pas ma réponse. Je ne sais pas d'où cela vient. Je

 14   n'étais pas chargé des émissions radio, donc je ne peux pas dicter ce que

 15   la radio allait émettre. Je ne peux pas faire de commentaire sur tout ce

 16   qui se passait à Sarajevo et autour de Sarajevo. Je ne peux parler que de

 17   Grbavica et de ce qui se passait là-bas.

 18   Q.  Donc, si c'est le cas, lorsque vous nous dites au paragraphe 27 de

 19   votre déclaration "nous n'avons pas ouvert le feu sur des civils…," vous ne

 20   faites référence qu'à la situation de votre bataillon à Grbavica, n'est-ce

 21   pas ?

 22   R.  Je vous ai dit il y a quelques instants que si vous me posez une

 23   question sur la brigade, je vous réponds sur la brigade, et lorsque vous me

 24   posez une question sur le bataillon, je vous réponds sur le bataillon. Rien

 25   de plus. Sarajevo est une zone relativement vaste, et je ne veux pas

 26   apporter de commentaire sur ce que d'autres ont fait.

 27   Mme EDGERTON : [interprétation] Nous pouvons enlever ce document. Merci.

 28   Q.  Au paragraphe 27 de votre déclaration, vous nous dites :


Page 29081

  1   "Les membres de mon unité étaient parfaitement au courant des conséquences

  2   qu'encourait l'armée serbe si des tirs indiscriminés avaient lieu sur des

  3   cibles civiles."

  4   J'aimerais vous montrer des documents à cet égard, mais avant cela,

  5   j'aimerais vous demander ce que vous entendez par "tirs indiscriminés" ?

  6   R.  Des tirs indiscriminés sur Sarajevo voulaient dire des tirs incontrôlés

  7   de projectiles d'artillerie au hasard, sans cibler qui que ce soit ou quoi

  8   que ce soit et sans devoir cibler qui que ce soit ou quoi que ce soit. Les

  9   tirs indiscriminés englobent aussi des tirs sur des personnes dans le but

 10   uniquement de les terroriser. A certains moments, tout ce qui pouvait

 11   perturber la vie quotidienne et le travail pouvait être inutile à moins de

 12   menacer l'unité en question.

 13   Q.  Très bien. Passons maintenant à la pièce P01587, s'il vous plaît, un

 14   rapport de situation quotidien d'un observateur militaire des Nations Unies

 15   pour le secteur Sarajevo daté des 7 et 8 janvier 1994. Je vais vous donner

 16   lecture de ce document à la page 2, paragraphe 2 -- pardon.

 17   Mme EDGERTON : [interprétation] Pouvez-vous revenir à la première page,

 18   s'il vous plaît. Merci.

 19   Q.  Descendons au paragraphe 2 : 175 tirs mixtes pour le territoire tenu

 20   par les Serbes ont provoqué 35 blessés, y compris sept femmes et un enfant,

 21   et dix tués, y compris deux femmes et un enfant. Et on nous dit dans ce

 22   rapport que :

 23   "Environ 50 % des impacts enregistrés se trouvaient sur la ligne de front.

 24   Le reste ciblait des zones résidentielles ou des zones utilisées

 25   quotidiennement par des civils."

 26   Pouvons-nous ensuite passer à la deuxième page, au paragraphe 9, s'il vous

 27   plaît. Merci.

 28   Le paragraphe 9 nous dit :


Page 29082

  1   "Il semble que le grand nombre de pertes au sein de Sarajevo est dû au

  2   bombardement de la part de canons VRS d'une zone utilisée très fréquemment

  3   par des civils pour éviter les zones de tireurs isolés. Cette zone est

  4   toujours très achalandée et les civils y circulent à pied."

  5   Donc, je viens de vous donner lecture de ce document. Est-ce que cela

  6   correspond à votre définition de tirs indiscriminés, Monsieur ?

  7   R.  Je ne vois pas dans le document le lieu de ces incidents.

  8   Q.  Est-ce que cela aurait une incidence sur la réponse que vous nous

  9   fourniriez ?

 10   R.  Alors, quand je regarde ce document, j'en conclus que cela a eu lieu

 11   sur la ligne de front du 1er Corps de l'ABiH et le Corps de Sarajevo-

 12   Romanija de la VRS. C'est une très grande zone. On ne nous dit pas où ont

 13   eu lieu les pertes ni comment, et vu que je n'étais pas présent, je ne peux

 14   pas vous apporter de commentaire à ce sujet. Je ne peux que vous donner mon

 15   avis. Ce rapport ne me dit pas grand-chose en tant qu'officier. Pourquoi ?

 16   Eh bien, parce qu'il y a quelques instants, nous avons dit que les lignes

 17   de séparation dans des zones urbaines avaient à proximité ou même à

 18   l'intérieur de ces lignes de séparation des civils qui y habitaient. On ne

 19   dit pas qu'on a ciblé des civils ici; on dit juste dans ce rapport que

 20   certains civils ont été tués. Et il y a quelques minutes, je vous ai dit

 21   que toute action peut provoquer des pertes civiles en zone urbaine, toute

 22   action quelle qu'elle soit.

 23   Deuxièmement, j'ai remarqué que le terme "tir isolé" est utilisé hors

 24   contexte, sans définition militaire digne de ce nom de "tir isolé". Il

 25   semble que tout tir court soit décrit comme étant un tir isolé, et ce n'est

 26   pas le cas. Les tireurs d'élite sont les membres les moins nombreux d'une

 27   unité. Cela étant, toute action est décrite ici comme étant une action de

 28   tireur d'élite. Je n'ai aucun doute quant au nombre de pertes, mais je


Page 29083

  1   pense que nous avons besoin d'une description plus détaillée montrant si

  2   les civils étaient véritablement les cibles ou si cela a été une erreur

  3   pour conclure ce qui s'est passé exactement. Donc, ce document nous parle

  4   de pertes d'un côté seulement. Je pense qu'il y avait des tirs provenant

  5   des deux côtés. S'il n'y a pas de pertes de l'autre côté, ce rapport, pour

  6   moi, est un rapport d'une seule des parties belligérantes.

  7   Q.  Que feriez-vous s'il y avait une erreur et si des civils en territoire

  8   tenu par les Bosniens étaient tués ou blessés - comme vous l'avez dit tout

  9   à l'heure - alors que vous n'aviez pas de rapports ni d'entrées dans des

 10   carnets sur ce qui s'était passé lorsque l'on visait cette cible ?

 11   R.  Tout ce que je puis vous dire est que si nous parlons de quelque chose

 12   que je n'ai pas fait, vu la situation actuelle, je vous répondrais que

 13   j'aurais agi en fonction des règles, donc des règles disciplinaires, du

 14   code pénal, et rien d'autre. C'était obligatoire.

 15   Q.  Merci. Nous allons passer à un autre domaine. C'est lié au paragraphe

 16   16 de votre déclaration. Vous nous avez dit :

 17   "Plus tard pendant la guerre, des armes de 80 millimètres et de calibre

 18   plus élevé ont été enlevées à une distance de 20 kilomètres de Sarajevo et

 19   étaient contrôlées par la FORPRONU."

 20   Est-ce que vous confirmez encore aujourd'hui cette affirmation ?

 21   R.  Oui.

 22   Mme EDGERTON : [interprétation] Pouvons-nous regarder la carte P1593, s'il

 23   vous plaît. Donc c'est une carte obtenue des archives de la VRS à Banja

 24   Luka en 2006 montrant la zone d'exclusion de 20 kilomètres autour de

 25   Sarajevo. Est-ce que ma collègue pourrait zoomer sur le centre-ville où il

 26   y a un T annoté et zoomer sur les deux encadrés rouges en dessous de ce T,

 27   qui se trouvent à sa droite et immédiatement en dessous.

 28   Q.  Brigadier, cette carte vous montre, légendes à l'appui,  les armes et


Page 29084

  1   les points de collecte d'armes à l'intérieur de la zone de 20 kilomètres et

  2   en dehors de cette zone. Pouvez-vous zoomer davantage pour que l'on voie

  3   les deux encadrés rouges et que le brigadier les voit ?

  4   Vous voyez que dans la zone de Lukavica Tilava, des mortiers de 120

  5   millimètres se trouvaient, dix, ou étaient en cours de maintenance, deux

  6   obusiers de 105 millimètres, deux lance-roquettes multiples de 128

  7   millimètres de type Plamen, et 15 chars T55. Est-ce que vous le voyez ?

  8   R.  Oui.

  9   Mme EDGERTON : [interprétation] Pouvez-vous remonter sur l'encadré rouge

 10   qui se trouve au-dessus.

 11   Q.  Alors là, nous avons le point de collecte d'armes de Grbavica, et l'on

 12   voit ici qu'il y a quatre mortiers de 82 millimètres; cinq -- désolée, les

 13   BaT de 82 millimètres, c'est l'acronyme utilisé; cinq mortiers de 60

 14   millimètres; quatre mortiers de 82 millimètres; un fusil Top de 76

 15   millimètres de type B1; et un char T55, entre autres, qui sont en cours de

 16   maintenance au point de collecte d'armes à Grbavica, et ces deux localités,

 17   ces deux points, se trouvent bien à l'intérieur de la zone d'exclusion de

 18   20 kilomètres. Maintenant que vous avez vu cette carte, Monsieur, est-ce

 19   que vous confirmez ce que vous avez dit dans votre déclaration ?

 20   R.  Tout est correct. Les pièces d'artillerie qui ont été évacuées de la

 21   zone de 20 kilomètres de Sarajevo sont restées entre les mains de l'armée

 22   de la Republika Srpska. Ce que vous venez de nous citer, eh bien, ce sont

 23   les armes qui ont été collectées à des points particuliers. Ils n'étaient

 24   plus entre nos mains. Nous n'y avions plus accès sans la permission de la

 25   FORPRONU, car ces armes avaient été ramassées sous l'égide de la FORPRONU

 26   et il y a une grande différence entre ces armes et d'autres armes que l'on

 27   avait entre les mains.

 28   Q.  Mais Brigadier, la création de la zone d'exclusion totale n'a pas


Page 29085

  1   diminué la capacité de combat de votre artillerie du tout, n'est-ce pas ?

  2   R.  Oui, considérablement.

  3   Mme EDGERTON : [interprétation] Pouvons-nous voir le document 23926 de la

  4   liste 65 ter, s'il vous plaît.

  5   Q.  Brigadier, ce document est daté de mai 1995 et reprend les avoirs

  6   d'artillerie qui sont prêts à soutenir les tirs des actions planifiées de

  7   la RSK, et il montre clairement les avoirs de votre brigade et leur

  8   localisation.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il est étrange de ne pas avoir une

 10   version anglaise pour ce document.

 11   Mme EDGERTON : [interprétation] Il y a une version anglaise. Un instant,

 12   s'il vous plaît.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pouvons-nous voir la date et tous les autres

 14   éléments nécessaires du document, tels que l'auteur, la signature.

 15   Mme EDGERTON : [aucune interprétation]

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, cela va venir. Je pense que sur la

 17   page suivante il y a une signature, mais je ne suis pas sûr de la date.

 18   Mme EDGERTON : [interprétation] Et la traduction, la version anglaise,

 19   vient d'être mise à disposition. Toutes mes excuses, Messieurs les Juges,

 20   Madame le Juge.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 22   Donc, page 2. Veuillez continuer.

 23   Mme EDGERTON : [interprétation] Merci.

 24   Pouvons-nous revenir à la première page, et je vais attendre que mes

 25   collègues puissent afficher la version anglaise.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, elle a été téléchargée.

 27   Mme EDGERTON : [interprétation] Formidable.

 28   Q.  Donc, on y voit la zone de responsabilité de votre brigade, où se


Page 29086

  1   trouve l'artillerie et d'autres avoirs. L'aide pour la 1ère Brigade

  2   motorisée de Sarajevo est de 120 millimètres -- ou il inclut quatre

  3   mortiers de 120 millimètres venant de la région de Palez; un canon B1 de 76

  4   millimètres de la zone de la caserne à Zlatiste; et deux chars T55 de la

  5   zone de Zlatiste et Vrace. Brigadier, je crois que l'on voit clairement ici

  6   que la capacité de combat de votre brigade n'était pas du tout remise en

  7   question, n'est-ce pas ?

  8   R.  Je vous en prie, il s'agit ici de prévision et non pas de la réalité.

  9   Pour que ces moyens parviennent jusqu'au terrain qui est ici évoqué,

 10   jusqu'à la zone évoquée, il faut d'abord pouvoir les prendre. Or, ce n'est

 11   pas possible. Vous imaginez bien que si l'on avait pris par la force ces

 12   armes, cela ne serait pas passé inaperçu. Cela n'a pas été fait. C'est une

 13   prévision. Alors tout ceci est peut-être parfaitement exact, mais ce n'est

 14   qu'une prévision. Ce n'est pas la description de ce qui a été réellement

 15   fait. C'est une prévision pour que ces différentes armes et équipements se

 16   retrouvent dans ces différentes positions. Mais elles ne s'y trouvaient pas

 17   avant et ce n'est qu'une prévision.

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pouvons-nous voir la deuxième page en serbe

 19   pour vérifier ce qui est écrit ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] A partir de la date, 14 mai 1995, je vois

 21   qu'il s'agit de préparatifs de la défense face à l'offensive annoncée des

 22   Musulmans de Sarajevo. J'estime que ceci est une prévision. On prépare ici

 23   la défense, et ceci aux fins d'empêcher que la route vers Trebevic ne soit

 24   coupée. Je vois la date du 14 mai 1995, et c'est à la moitié de ce mois

 25   qu'a commencé l'offensive des Musulmans sur tous les fronts et qui a duré

 26   jusqu'à la fin du mois d'août, lorsqu'un cessez-le-feu est intervenu.

 27   Mme EDGERTON : [interprétation]

 28   Q.  Passons maintenant au document numéro 23921 de la liste 65 ter. Il


Page 29087

  1   s'agit d'un document de l'état-major principal de la VRS, signé par le

  2   général Mladic. Il porte sur le regroupement des tirs d'appui à l'intérieur

  3   et à l'extérieur de la zone des 20 kilomètres. Au paragraphe se trouvant à

  4   la page 2 de l'anglais et au bas de la page 1 en B/C/S, le paragraphe donc

  5   intitulé "solutions positives", nous voyons qu'à l'intérieur des périmètres

  6   des 20 kilomètres, l'artillerie destinée à procéder à des tirs d'appui de

  7   structures a été regroupée avec l'artillerie qui devait servir de soutien

  8   aux compagnies assurant le maintien de la première ligne de défense et que

  9   l'on a choisi également des zones à l'extérieur du secteur des 20

 10   kilomètres pour procéder à ce regroupement et à un transfert rapide pour

 11   concentrer les tirs le long d'un autre axe. Les unités motorisées de votre

 12  brigade, la 1ère Brigade motorisée de Sarajevo, étaient entraînées pour agir

 13   en utilisant l'équipement disponible pour mettre en route cet équipement,

 14   l'utiliser le long de certains axes, dans un délai d'une demi-heure. Donc,

 15   il apparaît clairement que le général Mladic lui-même constate que la zone

 16   d'exclusion ne diminue pas votre préparation au combat à l'intérieur de

 17   votre brigade.

 18   R.  Eh bien, je ne peux que supposer qu'au niveau le plus haut on a décidé

 19   de faire revenir les armes au sein des unités en raison du danger évident

 20   que représentait l'offensive annoncée des forces musulmanes. Alors, je ne

 21   sais pas quelle a été l'issue de ces conversations, mais cet ordre, je le

 22   vois pour la première fois, et je vois que toutes ces armes sont toujours

 23   là où elles étaient -placées sous contrôle - et que l'on planifie leur

 24   retour, ce qui est tout à fait logique et normal. Parce qu'à un moment

 25   donné, lorsqu'un danger se présente, les délais se raccourcissent et il

 26   s'agit d'agir le plus rapidement possible pour reprendre des armes et les

 27   redéployer dans certaines zones, certains secteurs. Alors, c'est la

 28   première fois que je vois ce document, mais c'est ainsi que je le


Page 29088

  1   comprends.

  2   Mme EDGERTON : [interprétation] Je souhaiterais demander le versement de ce

  3   document, Madame et Messieurs les Juges.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Soit.

  5   M. LE GREFFIER : [interprétation] Le document reçoit la cote P5932.

  6   Mme EDGERTON : [interprétation] Merci. Encore un document --

  7   Je vous demande juste quelques instants, s'il vous plaît.

  8   Q.  Passons à un autre secteur. Au paragraphe numéro 15 de votre

  9   déclaration, vous avez indiqué que vous n'aviez aucune connaissance du fait

 10   que l'objectif final des autorités serbes concernant Sarajevo consistait en

 11   un partage de la ville. Je voudrais vous présenter un autre document

 12   émanant du général Mladic, la pièce P3052, datée du 14 décembre 1993. C'est

 13   intitulé complément à la directive numéro 6.

 14   Ce document a été émis en se fondant sur une décision de décembre 1993, par

 15   les représentants les plus haut placés du peuple serbe. Il s'agit pour la

 16   RSK et d'autres forces d'entreprendre un certain nombre d'actions. Et la

 17   toute dernière ligne du premier paragraphe dit quels sont les objectifs

 18   attachés à cette opération, à savoir créer les conditions permettant le

 19   partage de Sarajevo en deux parties.

 20   Alors, compte tenu de ceci, Général, est-ce que vous maintenez ce que vous

 21   avez déclaré au paragraphe 15 de votre déclaration ?

 22   R.  J'affirme cela, oui. Il s'agit des positions dominantes sur le mont Hum

 23   qui, jusqu'au 17 mai 1992, était entre les mains des Serbes, et il s'agit

 24   de voies d'accès à ces positions dominantes. Alors ici, comme on le sait

 25   bien, il y a, dans les parties centrales de Sarajevo, la possibilité

 26   d'exercer une influence décisive sur le front autour de Sarajevo. Une cible

 27   militaire tout à fait crédible a été déterminée. Il s'agit d'une élévation

 28   non habitée où se situe un relais de radiotélévision, un répéteur, et, en


Page 29089

  1   réussissant cela, on soulagerait de façon très significative les unités

  2   serbes qui sont au contact des forces musulmanes. Butmir et Hrasnica se

  3   trouvent au sud-ouest de Sarajevo, dont ces localités sont séparées par

  4   l'aéroport. Elles n'exercent pratiquement aucune influence sur la situation

  5   à Sarajevo, mais elles permettraient d'assurer la communication avec

  6   Ilidza, qui était coupée de la partie est de la ville de Sarajevo sur le

  7   plan des communications, parce qu'en 1992, au mois de juin, Ilidza avait

  8   cédé le contrôle de l'aéroport et était coupée géographiquement de la

  9   partie est de Sarajevo. Donc, cet ordre, je ne l'interprète pas comme un

 10   partage politique de la ville de Sarajevo entre les Serbes et les Bosniens,

 11   mais bien plutôt dans la première partie de l'opération comme une prise des

 12   positions importantes et, dans la deuxième partie, la jonction de deux

 13   parties du territoire dans une zone assez étroite, à savoir Butmir et

 14   Hrasnica, qui sont un petit territoire, la jonction de deux zones à l'est

 15   et à l'ouest. Donc, je ne comprends absolument pas ici qu'il s'agisse de

 16   partager la ville en une moitié serbe et une moitié musulmane et que ce

 17   serait là l'objectif.

 18   Q.  C'est une interprétation intéressante, mais --

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais juste demander une chose. Il n'a

 20   pas été consigné que concernant Hum, le témoin a dit qu'il s'agissait d'une

 21   zone non habitée.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur le Témoin, avez-vous bien dit

 23   cela ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Aussi bien Hum que Zuc et Orlic, aussi

 25   bien à l'époque qu'aujourd'hui, sont des zones non habitées.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Kovacevic, je note que vous

 27   parlez un peu trop vite pour que les interprètes puissent vous suivre. Est-

 28   ce que vous pourriez ralentir, s'il vous plaît.


Page 29090

  1   Madame Edgerton, à vous.

  2   Mme EDGERTON : [interprétation] Merci.

  3   Q.  Nous allons passer à un dernier sujet que vous évoquez au début de

  4   votre déclaration, paragraphe numéro 8, où vous avez indiqué, je cite :

  5   "A toutes les positions où je me suis trouvé, il n'y a pas eu une seule

  6   action offensive de menée; il n'y avait que des actions défensives. Ces

  7   positions avaient été établies au début de la guerre et sont restées en

  8   l'état jusqu'à la fin de celle-ci."

  9   Alors, je voudrais à ce sujet attirer votre attention sur un autre document

 10   qui porte le numéro 09139 dans la liste 65 ter. Il s'agit d'une lettre de

 11   Dragomir Milosevic à Ratko Mladic à la date du 19 mai 1996.

 12   Mme EDGERTON : [interprétation] Passons à la page numéro 4 en B/C/S, et je

 13   crois que c'est le cinquième paragraphe intégral à la page 4 correspondant

 14   à la seconde page en anglais et au dernier paragraphe intégral que l'on y

 15   trouve. Alors, j'ai apparemment un décalage dans la pagination, Mesdames,

 16   Messieurs les Juges. Je souhaiterais prendre quelques instants pour

 17   corriger cela.

 18   La page que je vois afficher devant moi en anglais est la page numéro 4.

 19   Or, il me faudra la page numéro 2 de la version anglaise. Quant à la

 20   version en B/C/S, il s'agit de la page numéro 3 qui est à l'écran, alors

 21   qu'il me faudrait la page numéro 2 dans la version en B/C/S. Formidable.

 22   Merci.

 23   Q.  Donc, le cinquième paragraphe intégral dans l'affichage de la moitié

 24   gauche de l'écran et le dernier paragraphe intégral de la version anglaise,

 25   Dragomir Milosevic écrit au général Mladic, je cite : "Lorsque je

 26   participais aux combats, je ne reculais devant rien. J'ai combattu avec la

 27   plus grande détermination. J'ai participé personnellement à la

 28   stabilisation de la défense à Grbavica. J'ai libéré le complexe Soping à


Page 29091

  1   Grbavica II. J'ai donné l'assaut personnellement et, ensemble avec la

  2   police et une section de soldats, j'ai libéré l'installation à Zlatiste,

  3   j'ai libéré la tour de Bistrik, la tour Mala à Mrkovici. J'ai tout fait

  4   pour empêcher toute incursion à partir de Sarajevo le long de tout axe, et

  5   c'est grâce à moi que la rue Ozrenska a été protégée."

  6   Alors, nous avons ici des accents particulièrement libérateurs. Est-ce que

  7   cela vous semble être une action offensive ou défensive, Général ?

  8   R.  Eh bien, si vous lisez ceci attentivement, vous verrez que ces

  9   événements concernent l'année 1992. A cette époque-là, je me trouvais à

 10   Pazaric, après quoi je me suis trouvé à Blazuj. Donc, je n'étais pas à ces

 11   positions. Mais quand on aborde ceci en ayant à l'esprit la distinction

 12   entre ce qui est défensif et offensif, il s'agit ici de positions qui

 13   peuvent être prises par dix hommes. Parce que, de toute façon, les

 14   installations qui sont ici citées sont petites. On ne pouvait pas y faire

 15   entrer plus de personnes. Donc, je peux tout à fait comprendre et je sais

 16   que l'objectif était de préserver la route de Lukavica vers Pale via

 17   Trebevic, et c'est pour ça que ces petits bâtiments de type restaurants et

 18   autres ont été pris. Alors, si on considère ça comme une offensive, soit.

 19   Mais moi, je considère qu'une offensive, c'est quelque chose qui se déroule

 20   à une plus grande échelle. Alors Mrkovici, c'est sur la route qui va vers

 21   Pale via Poljina. Donc, je n'ai jamais vu qu'aucune des positions qui sont

 22   ici citées aient correspondu à un effectif plus important que celui d'une

 23   section. Et je ne pense pas qu'à cette échelle on puisse parler d'actions

 24   offensives.

 25   Et pour finir, cette ligne, on la retrouvait quasiment en l'état, inchangée

 26   à la fin de la guerre.

 27   Q.  Eh bien, si vous considérez que ceci ne peut pas être considéré comme

 28   une offensive, nous allons examiner un autre document de Dragomir


Page 29092

  1   Milosevic. Numéro D568, c'est le discours qu'il a fait lors de la cérémonie

  2   de présentation des couleurs de guerre, des drapeaux en 1996. La page qui

  3   m'intéresse, c'est le numéro 3 dans les deux versions. Ici, le général

  4   Milosevic dit, je cite :

  5   "Nous avons mené des opérations visant à améliorer notre position tactique

  6   et à étendre les territoires serbes libres dans les secteurs d'Otes, de

  7   Mojmilo, de Zlatiste, de Kijev, et ensuite vers Praca et Gosinje."

  8   Alors, est-ce que ceci est caractéristique d'une action offensive ou

  9   défensive, le fait d'étendre le territoire serbe ?

 10   R.  Je ne souhaite pas avoir l'air de donner des leçons, mais ici on

 11   utilise le terme d'"opération", alors que les opérations reviennent

 12   normalement aux effectifs les plus importants, aux unités les plus

 13   nombreuses. Or, on ne parle nulle part de combats, d'affrontements. Ici,

 14   aucune des installations ou des positions qui sont citées n'a une taille

 15   qui pourrait correspondre à l'effectif d'une compagnie d'infanterie. Aucun.

 16   Alors, celui qui a écrit ceci ne comprend tout simplement pas les termes,

 17   les notions de combats, d'affrontements. Parce que toutes les positions qui

 18   sont ici citées ont pour objectif de donner un léger avantage tactique.

 19   Mais l'auteur de ce texte, manifestement, ne comprend pas les termes de

 20   "combats, de batailles", et certainement pas celui d'"opération." Ce sont

 21   les armées qui se lancent dans des opérations. Alors, quelles sont les

 22   forces, les effectifs qui se sont chargées de ceci ?

 23   Q.  Très bien. Alors, passons maintenant au document numéro 23939 de la

 24   liste 65 ter. Il s'agit d'un ordre d'attaque daté du 30 novembre 1992 et

 25   qui s'adresse à la 1ère Brigade de Rajlovac. Ceci devrait être connu de

 26   vous, Général, puisque vous avez commandé la 1ère Brigade de Rajlovac en

 27   1992, pendant une partie de l'année.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] On nous informe que ce document n'a pas


Page 29093

  1   encore été mis à disposition.

  2   Mme EDGERTON : [interprétation] Je vais solliciter votre patience encore

  3   une fois, Madame et Messieurs les Juges.

  4   [Le conseil de l'Accusation se concerte]

  5   Mme EDGERTON : [interprétation] Excusez-moi, Madame et Messieurs les Juges.

  6   L'erreur vient de moi. Il s'agit du document numéro 23839. Toutes mes

  7   excuses.

  8   Q.  Général, reconnaissez-vous ce document ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Au paragraphe numéro 1 de ce document, il est question d'information

 11   concernant l'ennemi. Il est dit, je cite :

 12   "Il n'y a pas de civils dans la zone de la mosquée de Sokolje, mais il y en

 13   a dans le secteur s'étendant entre la mosquée et Brijesce."

 14   Ensuite, au paragraphe numéro 3 en anglais et en bas de la page numéro 1 en

 15   B/C/S, nous voyons -- alors, est-ce qu'on peut revenir à la page 1 en

 16   B/C/S. Merci. Vous voyez les tâches de la brigade. Il y est dit, je cite :

 17   "Notre brigade a reçu pour instruction de lancer une attaque à partir de

 18   ses positions de départ en direction de la zone située à droite de Lemezovo

 19   Brdo - Zabrdje - Smiljevici, en direction de Svabino Brdo et Brijesko Brdo,

 20   de couper le village et d'encercler les forces de l'ennemi dans le villages

 21   de Sokolje, ensuite de nettoyer les villages de Sokolje, Brijesce et

 22   Brijesko Brdo, puis d'atteindre la ligne Zuc-Skravnik, décharge Brijesko

 23   Brdo, et opérer la jonction avec nos forces dans le village de Vecici où

 24   l'on passera la défense," et cetera.

 25   Alors, s'agit-il d'offensive ou de défense ?

 26   R.  Il s'agit ici d'une offensive, mais une offensive limitée. Je voudrais

 27   vous montrer sur une carte à quoi ressemble le terrain concerné.

 28   Q.  Mais je crois que vous avez très bien et très clairement répondu à ma


Page 29094

  1   question. Je vous remercie, Général.

  2   Mme EDGERTON : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions.

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi. Mais ce que j'ai dit, c'est qu'il

  4   s'agissait d'une action offensive, mais offensive de façon limitée. Il

  5   s'agit de la prise d'une installation, or cette installation, et c'est

  6   d'ailleurs la raison pour laquelle j'ai demandé à avoir une carte --

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Kovacevic, je crois que la

  8   Chambre a compris votre réponse.

  9   Si nécessaire, M. Karadzic peut revenir sur ce sujet à l'occasion des

 10   questions supplémentaires. Alors, Madame Edgerton, je suppose que vous ne

 11   demandez pas le versement de ce document ?

 12   Mme EDGERTON : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, est-ce que vous avez

 14   des questions supplémentaires ?

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Excellence. Je souhaiterais simplement

 16   donner l'occasion au général Kovacevic de terminer sa réponse.

 17   Nouvel interrogatoire par M. Karadzic :

 18   Q.  [interprétation] En nous disant de quel type d'endroit il s'agit, la

 19   décharge, Zuc-Skravnik, et cetera.

 20   R.  En une phrase : il s'agit d'une pointe qui se prolongeait jusqu'à la

 21   localité habitée de Rajlovac, une avancée du terrain. Là-bas, il y avait

 22   une usine Orlovo, et il y avait là le poste de transformation centrale pour

 23   l'alimentation de l'électricité de la ville de Sarajevo. Nous souhaitions

 24   empêcher ces actes de terrorisation [phon] en intervenant sur place. Parce

 25   que cette pointe de territoire qui s'appelle Sokolje et qui a une largeur

 26   d'environ 300 mètres en moyenne, nous souhaitions couper cette pointe de

 27   territoire et rectifier la ligne. On le voit très clairement et on peut le

 28   déterminer très clairement sur les cartes. On peut notamment déterminer


Page 29095

  1   quelles étaient les conséquences d'une telle action. C'est un objectif très

  2   limité. A savoir, une fois l'opération terminée, l'envergure de cette

  3   opération, la seule façon de la décrire, c'est qu'elle n'aurait pu engager

  4   qu'une section, pas un effectif plus important que cela. Donc, je ne pense

  5   pas que l'on puisse qualifier cela d'opération. Et c'est la raison pour

  6   laquelle j'aurais aimé qu'on apporte un peu de précision dans le langage

  7   utilisé lorsqu'on emploie des termes comme "bataille, combat, opération,

  8   action". Il y a beaucoup de confusion.

  9   Q.  Merci pour votre réponse. Et merci d'être venu déposé.

 10   R.  Merci.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Kovacevic, je vous pose la

 12   question par curiosité. Au paragraphe 43 de votre déclaration, vous avez

 13   indiqué que les volontaires présents dans votre unité comprenaient

 14   également des Coréens. Alors, est-ce que vous vous rappelez si c'étaient

 15   des Sud ou des Nord-Coréens ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] C'étaient des personnes qui venaient de Kobe.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors, c'étaient des Japonais ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Alors, c'est qu'on a mal consigné cela. Parce

 19   que moi, j'ai très certainement dit qu'ils venaient de Kobe.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais peut-être qu'on a mal transcrit Kobe comme

 21   Corée.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vos propos se sont chevauchés et votre

 23   commentaire n'a pas été consigné.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Dans notre prononciation, si on dit "venant de

 25   Kobe" ou "venant de Corée", il y a une seule lettre de différence.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 27   Ceci met un terme à votre déposition, Monsieur Kovacevic. La Défense a

 28   peut-être un commentaire, Maître Robinson ?


Page 29096

 1  

 2  

 3  

 4  

 5  

 6  

 7  

 8  

 9  

10  

11  

12  

13  

14   Page intercalée pour assurer l’équivalence de pagination des

15   versions anglaise et française

16  

17  

18  

19  

20  

21  

22  

23  

24  

25  

26  

27  

28  


Page 29097

  1   M. ROBINSON : [interprétation] Oui, excusez-moi, Monsieur le Président.

  2   Je souhaite revenir aux pièces associées sur lesquelles vous avez

  3   attiré notre attention et qui peuvent appeler une explication de la part de

  4   ce témoin. Alors, la pièce 1D2337, ou plutôt, qui a reçu la cote 2332. Il y

  5   a une confusion quant aux nombres, parce que ce à quoi on se réfère au

  6   paragraphe 49 de la déclaration porte maintenant un numéro différent, mais

  7   c'est le même document. Donc, je souhaitais simplement demander une

  8   confirmation de cela. Ce que je viens de dire décrit la situation dans

  9   laquelle nous sommes.

 10   [Le conseil de la Défense se concerte]

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Les deux documents sont en fait un

 12   seul et même document, n'est-ce pas ?

 13   M. ROBINSON : [interprétation] Oui. On m'a affirmé que nous avons chargé

 14   dans le système le document 1D840 -- 1D8452 une seconde fois en tant que

 15   1D2337. Donc, si le témoin doit le confirmer, nous pouvons le lui demander.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, non. Je vous crois sur parole,

 17   Maître.

 18   Donc, au nom de la présente Chambre, je souhaite vous remercier, Monsieur

 19   Kovacevic, d'être venu déposé à La Haye. Vous êtes libre de repartir, mais

 20   nous allons également suspendre l'audience.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pour reprendre à 13 heures 15.

 23   --- L'audience est levée pour le déjeuner à 12 heures 31.

 24   [Le témoin se retire]

 25   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 26   --- L'audience est reprise à 13 heures 17.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que le témoin peut faire sa

 28   déclaration solennelle, s'il vous plaît.


Page 29098

  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

  2   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

  3   LE TÉMOIN : DUSAN SKRBA [Assermenté]

  4   [Le témoin répond par l'interprète]

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur. Veuillez vous asseoir

  6   et mettez-vous à l'aise, s'il vous plaît.

  7   Oui, Monsieur Karadzic, à vous.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

  9   Interrogatoire principal par M. Karadzic :

 10   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Skrba. Est-ce que vous voulez que je

 11   m'adresse à vous en disant "colonel" ou "général" ?

 12   R.  "Skrba" suffit.

 13   Q.  Fort bien. Merci.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pouvons voir au prétoire

 15   électronique le 1D6030, s'il vous plaît.

 16   M. KARADZIC : [interprétation]

 17   Q.  Est-ce que vous avez relu la déclaration que vous avez faite auprès de

 18   l'équipe de la Défense et est-ce que vous l'avez sous les yeux là, à

 19   présent ?

 20   R.  Ce n'est pas en serbe.

 21   Q.  Est-ce qu'on vous a donné lecture de cette déclaration en anglais et

 22   est-ce que ça reflète exactement ce que vous aviez dit ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Si aujourd'hui --

 25   Mme WEST : [interprétation] Excusez-moi d'interrompre M. Karadzic. Monsieur

 26   le Président, Madame le Juge et Messieurs les Juges, je crois que nous

 27   avons besoin d'une mise en garde en application du 90(E) et peut-être

 28   pourrait-on le faire avant le début du témoignage.


Page 29099

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avez-vous des objections à formuler ?

  2   M. ROBINSON : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Monsieur Skrba, avant que d'aller

  4   de l'avant, je voudrais attirer votre attention sur une règle particulière

  5   qui est en vigueur ici au Tribunal. En application de cette règle, qui est

  6   l'article 90(E) du Règlement, vous pouvez faire objection pour ce qui est

  7   de répondre à une question posée par l'Accusation ou par l'accusé, ou voire

  8   encore par la Chambre, si vous estimez que votre réponse est susceptible de

  9   vous incriminer. Et par "incriminer", on veut dire que ce que vous diriez

 10   pourrait être reconnu comme étant une reconnaissance de culpabilité et/ou

 11   alors un témoignage qui montrerait que vous avez commis une infraction.

 12   Alors, si vous pensez que votre réponse est susceptible de vous incriminer

 13   et que vous ne voulez pas répondre à la question, le Tribunal a le droit

 14   discrétionnaire de vous obliger à répondre. Mais dans ce cas de figure-là

 15   le Tribunal s'assurera de faire en sorte que ce témoignage soit fait de

 16   façon à ce que ce ne soit pas utilisé contre vous en tant que témoignage

 17   pour ce qui est de quelque infraction que ce soit, exception faite du faux

 18   témoignage. Est-ce que vous me comprenez, Monsieur ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Je l'entends dire pour la première fois, mais

 20   je veux bien vous croire, et je vais m'y conformer.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 22   Veuillez continuer, Monsieur Karadzic.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 24   M. KARADZIC : [interprétation]

 25   Q.  A la place de cette déclaration, si je vous posais les mêmes questions

 26   que celles qui vous ont été posées, est-ce que vous apporteriez les mêmes

 27   réponses que celles que vous avez fournies dans votre déclaration ?

 28   R.  Oui.


Page 29100

  1   Q.  Merci.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Excellences, puis-je vous demander de faire en

  3   sorte que le 1D6030 soit versé au dossier, ou que, donc, ce paquet de

  4   documents en application du 92 ter soit versé au dossier dans son

  5   intégralité.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, alors cette déclaration du 92 ter

  7   sera versée au dossier.

  8   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ça deviendra la pièce P2341, Messieurs

  9   les Juges.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je crois que vous êtes en train de

 11   verser deux documents en tant que pièces connexes ?

 12   Y a-t-il des objections, Madame West ?

 13   Mme WEST : [interprétation] Non.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce sera donc versé au dossier aussi.

 15   Est-ce qu'on peut avoir les cotes.

 16   M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Le 65 ter

 17   1D8567 deviendra le D2342, et le 65 ter 1D8568 deviendra à présent la pièce

 18   D2343.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 20   Veuillez continuer, Monsieur Karadzic.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 22   Je me propose de donner lecture du résumé de la déclaration de M. Skrba en

 23   anglais.

 24   Dusan Skrba est né le 24 février 1949 à Kasindol, municipalité d'Ilidza, à

 25   Sarajevo. Avant la guerre, il a travaillé à Sarajevo dans une entreprise

 26   qui s'appelait Univerzalpromet à Prokuplje. Il a fait son service dans

 27   l'armée en 1970-1971 à Zadar, à l'école des officiers de réserve, dans les

 28   armes de l'artillerie.


Page 29101

  1   Dusan Skrba a vu un alignement de Bérets verts avant le début de la guerre,

  2   en octobre ou novembre 1991, à l'extérieur du grand magasin Sarajka au

  3   centre de la ville de Sarajevo. Il avait eu vent du fait que la Ligue

  4   patriotique avait eu un alignement d'organisé à Hrasnica en octobre 1991.

  5   A la date du 15 mars 1992, il a été rappelé par la JNA et on lui a

  6   dit de se présenter auprès des autorités de la caserne de Slavisa Vajner-

  7   Cica à Lukavica, et il a eu pour organisation de mettre en place des

  8   unités.

  9   A commencer par le 4 avril 1992, il y a eu des attaques d'infanterie

 10   de la part d'unités musulmanes contre la caserne, et ce, de façon

 11   quotidienne. Toutes sortes d'armes d'infanterie, y compris des tromblons

 12   propulsés à partir de fusils et des lance-roquettes, avaient été utilisées

 13   en sus des grenades à main.

 14   Pendant cette crise de mai 1992 qui est liée au retrait des membres

 15   de la JNA de cette caserne de la ville de Sarajevo et des cadets de la

 16   caserne de maréchal Tito, Dusan Skrba a reçu l'ordre de préparer des tirs

 17   dans le cas d'une attaque, à préparer, donc à une -- de se préparer à une

 18   riposte dans le cas d'une attaque des unités pour ce qui est du retrait.

 19   Lorsque les forces musulmanes ont attaqué la caserne du maréchal Tito, il a

 20   reçu l'ordre de tirer vers ces unités à Marin Dvor.

 21   Le 27 mai 1992, la 1ère Brigade mécanisée de Sarajevo a été créée.

 22   Cette brigade avait pour l'essentiel des moyens mais n'était pas

 23   suffisamment fournie en effectifs. Dusan Skrba est devenu le commandant de

 24   ce bataillon d'artillerie mixte. La zone de responsabilité de la 1ère

 25   Brigade mécanisée de Sarajevo s'étendait du pont Bembasa jusqu'au vieil

 26   aéroport et la rivière Zeljeznica, telle qu'indiquée sur la pièce 65 ter

 27   1D08567.

 28   A la date du 1er juillet 1992, des observateurs des Nations Unies ont


Page 29102

  1   été déployés à son poste de commandement et sont restés là-bas jusqu'à la

  2   fin de la guerre. A chaque fois qu'il fallait ouvrir le feu, Dusan Skrba

  3   informait les observateurs des Nations Unies et leur montrait le point à

  4   partir duquel les forces musulmanes avaient lancé leur attaque. Il

  5   présentait un rapport sur les lieux auprès des membres des Nations Unies à

  6   chaque fois qu'il y a eu ouverture de tir. Les observateurs des Nations

  7   Unies ne se sont jamais plaints auprès de lui pour ce qui est de ses

  8   rapports, de son travail, ou de l'exercice des activités de ses unités à

  9   lui.

 10   Le Corps de Sarajevo-Romanija avait pour objectif de protéger les

 11   lignes de front là où il y a eu partage en secteurs ethniques serbes pour

 12   empêcher des percées du 1er Corps de l'ABiH qui viendraient des parties de

 13   la ville de Sarajevo qui étaient placées sous contrôle musulman, parce que

 14   ceci aurait fait en sorte qu'un grand nombre d'effectifs de l'ennemi

 15   auraient pu passer vers d'autres lignes de front. Pendant la guerre,

 16   d'après sa connaissance, le Corps de Sarajevo-Romanija a uniquement conduit

 17   des actions défensives, exception faite de l'opération Lukavac 93, dont

 18   l'objectif a été de rejoindre les effectifs de l'Herzégovine et du Corps de

 19   Sarajevo-Romanija.

 20   Dusan Skrba a eu des informations disant que ces unités du 1er Corps

 21   de l'ABiH étaient déployées en profondeur du territoire, et cela a englobé

 22   les zones civiles de celles des parties de la ville qui étaient sous le

 23   contrôle des autorités musulmanes, telles que Velesici, Ciglane, Bjelave,

 24   la mairie de la ville, Dobrinja III [comme interprété] et Bistrik.

 25   Son unité et lui en personne ont toujours pris soin de faire en sorte

 26   que les mesures soient prises aux fins de ne pas cibler des installations

 27   civiles dans la ville. On a tiré uniquement lorsqu'il y a eu des cibles qui

 28   ont été constatées comme étant des points de tir ou des cibles militaires,


Page 29103

  1   en cas de légitime défense ou sur ordre du commandement supérieur en

  2   direction de cibles militaires concrètes. Ni lui ni les membres de son

  3   unité, ses subordonnés ou supérieurs, n'ont jamais eu l'intention de

  4   provoquer des pertes civiles ou de terroriser les civils sur le territoire

  5   sous contrôle musulman, ou alors de s'attaquer à des moyens de transport

  6   publics. Ils n'ont jamais donné ou obtenu d'ordres oraux ou écrits à cet

  7   effet.

  8   Bien que cette brigade ait disposé d'un certain nombre de bombes

  9   aériennes en stock, elles n'ont jamais été utilisées dans la zone de

 10   responsabilité de ladite unité.

 11   Pour ce qui est des incidents où il y a eu tir de trois obus de

 12   mortier qui sont tombés sur le secteur d'Alipasino Polje le 22 janvier

 13   1994, Dusan Skrba a désigné Butmir comme étant la place à partir de

 14   laquelle, très probablement, les tirs étaient venus. Il déclare également

 15   que les tirs pouvaient venir en provenance de Nedzarici, Knezevo Polje et

 16   Alipasino Polje.

 17   Pour ce qui est de l'incident où un obus de mortier de 120

 18   millimètres est tombé sur le secteur résidentiel de la ville à Dobrinja le

 19   4 février 1994, Dusan Skrba affirme qu'il n'y a pas eu de tir d'ouvert

 20   depuis leurs positions ce jour-là, et que ça ne pouvait pas être fait sans

 21   son ordre - or, il n'en a pas donné - et sans qu'il y ait eu une annonce au

 22   préalable auprès des observateurs de la FORPRONU.

 23   Pour ce qui est de l'incident de la rue Safeta Susica [comme

 24   interprété] et Majdanska, Dusan Skrba affirme qu'aucune bombe aérienne n'a

 25   jamais été tirée depuis Lukavica ou de Prljevo.

 26   Pour ce qui est de l'incident de Markale II, Dusan Skrba affirme que

 27   les tirs ne pouvaient pas avoir été ouverts depuis cet endroit-là avec des

 28   mortiers de 120 millimètres, parce que tous ces mortiers de 120 millimètres


Page 29104

  1   ou armes à plus gros calibre ont été redéployés dans un cercle de 20

  2   kilomètres autour de Sarajevo, ou avaient été placés sous contrôle de la

  3   FORPRONU.

  4   Alors, je n'ai pas de questions supplémentaires à poser à ce témoin.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

  6   Madame West.

  7   Mme WEST : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. A l'occasion de

  8   mon contre-interrogatoire, je me propose de me servir d'un certain nombre

  9   de cartes, et, bien entendu, toutes ces cartes sont déjà téléchargées au

 10   prétoire électronique. Mais pour faciliter la tâche des participants, j'ai

 11   préparé des copies papier, et je vais demander à l'huissière de nous aider

 12   à les faire distribuer.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pour des fins de planification, puis-je

 14   savoir de combien de temps vous pensez avoir besoin, Madame West ?

 15   Mme WEST : [interprétation] Monsieur le Président, je pense que j'aurai

 16   besoin d'au moins deux audiences.

 17   M. ROBINSON : [interprétation] Nous nous excusons pour ce qui est des

 18   copies qui nous sont distribuées avant que d'avoir été distribuées aux

 19   Juges de la Chambre. On a l'impression d'avoir commencé à manger avant les

 20   invités, mais je m'excuse.

 21   Mme WEST : [interprétation] J'aimerais qu'on nous affiche à présent la

 22   pièce D2342, s'il vous plaît.

 23   Monsieur le Président, est-ce que je peux continuer ?

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, allez-y.

 25   Contre-interrogatoire par Mme West :

 26   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Skrba.

 27   R.  Bonjour.

 28   Q.  Je m'appelle Kim West et je suis l'un des membres du bureau du


Page 29105

  1   Procureur. Je me propose de vous poser toute une série de questions

  2   aujourd'hui, et il est très probable que nous ayons à continuer lundi

  3   aussi.

  4   R.  Je vous comprends.

  5   Q.  Merci. Devant vous, sur l'écran, vous pourrez voir une carte, et je

  6   sais bien que vous l'avez déjà vue.

  7   Mme WEST : [interprétation] Alors, j'aimerais que l'on zoome sur la partie

  8   qui se trouve en plein milieu.

  9   Q.  C'est une carte qui nous a été fournie et où l'on a indiqué votre zone

 10   de responsabilité. La reconnaissez-vous ?

 11   R.  C'est en rouge ?

 12   Q.  C'est exact, en effet.

 13   Mme WEST : [interprétation] Alors, est-ce que nous pouvons maintenant

 14   agrandir ce secteur seulement, le secteur en rouge.

 15   Q.  Est-ce que c'est un secteur que vous avez annoté vous-même lorsque vous

 16   avez voulu indiquer votre zone de responsabilité ?

 17   R.  C'est à peu près cela, oui. C'est cette zone-là de responsabilité.

 18   Q.  Fort bien. C'est plutôt petit, donc je vais demander à ce que l'on nous

 19   montre le 65 ter 09390E, et je me suis donc procurée une carte un peu plus

 20   détaillée afin que nous puissions nous y retrouver plus facilement.

 21   M. ROBINSON : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, je sais

 22   que M. Reid est très occupé et fait plusieurs choses à la fois, mais nous

 23   aimerions aussi recevoir une liste des pièces à conviction qui seront

 24   utilisées pendant le contre-interrogatoire.

 25   Mme WEST : [interprétation] Et, Monsieur le Président, pour les besoins du

 26   compte rendu, hier j'ai demandé un versement au dossier d'une carte plus

 27   grande. Il s'agit d'une carte qui a été établie à partir de celle-ci, de la

 28   même.


Page 29106

  1   Q.  Alors, Monsieur, ceci n'est qu'un agrandissement de ce qu'on a vu tout

  2   à l'heure sur nos écrans, et vous allez avoir la possibilité de tracer des

  3   cercles, avec l'aide du huissier. Et j'aimerais qu'on aide le témoin à ce

  4   faire. Alors, je vous dirai ce qu'il convient de marquer. Mettez d'abord un

  5   cercle pour ce qui est de l'emplacement de votre poste de commandement.

  6   R.  [Le témoin s'exécute]

  7   Q.  Monsieur, est-ce que vous voyez l'emplacement qui se trouve juste au

  8   milieu, à côté d'Uzdojnice ? Je sais que ma prononciation n'est pas des

  9   meilleures, mais est-ce que vous pouvez nous dire ce qui s'y trouve ?

 10   R.  C'est le poste de commandement de l'unité d'artillerie mixte avec les

 11   unités -- le commandement des unités qui étaient déployées dans ce secteur.

 12   Est-ce que vous voulez que je vous l'annote ?

 13   Q.  Oui, s'il vous plaît.

 14   R.  Ceci est le poste de commandement. Est-ce que vous voulez que je vous

 15   indique l'emplacement des autres unités aussi ?

 16   Q.  Monsieur, pouvez-vous nous indiquer l'emplacement de Lukavica et

 17   veuillez nous indiquer ce qui s'y trouvait.

 18   R.  Lukavica, ça se trouvait devant notre première ligne, et ici, en noir,

 19   c'est la caserne de Slavisa Vajner-Cica et Slobodan Princip Seljo. Ici, il

 20   y avait l'usine Energoinvest. Et là-bas, la caserne, plus loin, Cica, mais

 21   on ne la voit pas sur cette carte.

 22   Q.  Alors, bon. Mettez d'abord un cercle autour de Lukavica.

 23   R.  Je ne peux que cercler Energoinvest, les installations industrielles,

 24   et la faculté d'électrotechnique. L'électrotechnique, c'est ici, et l'usine

 25   Energoinvest se trouve ici.

 26   Q.  Bon, s'agissant de cette carte, on peut voir en bas à droite un endroit

 27   qui est marqué comme étant le lieu-dit Tilava. Le voyez-vous ?

 28   R.  Oui.


Page 29107

  1   Q.  Que s'y trouvait-il ?

  2   R.  Il y avait une infirmerie et le foyer de la communauté locale, le siège

  3   de la communauté locale. Vous voulez que je vous l'indique aussi ?

  4   Q.  S'il vous plaît, oui.

  5   R.  [Le témoin s'exécute]

  6   Q.  Monsieur, pouvez-vous parapher cette carte et mettre la date

  7   d'aujourd'hui, s'il vous plaît.

  8   R.  C'est cela. On est bien le 18.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce sera la pièce à conviction suivante

 10   de l'Accusation.

 11   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce P5933, Madame,

 12   Messieurs les Juges.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pendant que cette carte est encore sur nos

 14   écrans, le témoin a dit qu'on ne voit que la faculté et l'entreprise

 15   d'Energoinvest. Est-ce qu'on pourrait demander qu'il mette un E et un F

 16   pour que l'on sache bien que ce n'est pas des casernes. Ce n'est pas des

 17   installations militaires. Il y a la faculté d'électronique et l'usine

 18   Energoinvest. Il y a un cercle et un rectangle qui sont dessinés par le

 19   témoin.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, c'est tout à fait juste.

 21   Pourriez-vous mettre un F et un E, Monsieur.

 22   LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 24   Ce sera sauvegardé comme annotation.

 25   Mme WEST : [interprétation] Merci.

 26   Q.  Monsieur Skrba, y a-t-il eu un QG quelconque à se trouver à Lukavica ?

 27   R.  Je ne comprends pas. Que voulez-vous dire par Lukavica ?

 28   Q.  Eh bien, par rapport à l'endroit où vous avez passé le plus de temps


Page 29108

  1   possible, est-ce que c'est quelque chose où il y a déjà un cercle sur notre

  2   écran ?

  3   R.  Oui, Uzdojnice et Palovac, c'est là que se trouvait le commandement

  4   subordonné et il y avait un poste de commandement du corps que l'on ne peut

  5   pas voir sur cette carte.

  6   Q.  C'est bon. Merci. Monsieur Skrba, nous savons que vous avez vaqué à des

  7   questions liées à l'artillerie au sein de la 1ère Brigade motorisée de

  8   Sarajevo et de son commandement. Pouvez-vous nous dire de la part de qui

  9   receviez-vous vos ordres ?

 10   R.  Nous recevions nos ordres de la part du chef chargé de l'artillerie au

 11   niveau du commandement de la brigade.

 12   Q.  Est-ce que vous receviez également des ordres de la part du

 13   commandement du corps de l'artillerie ?

 14   R.  Non, jamais directement. On n'est jamais passés par là; on est passés

 15   toujours par le chef de l'artillerie au niveau de la brigade.

 16   Q.  Et à commencer par l'année 1992, pouvez-vous nous indiquer le nom de

 17   cet individu, de cette personne qui était habilitée à vous donner des

 18   ordres ?

 19   R.  Lorsque je suis devenu commandant le 27 mai, mon supérieur était Simic

 20   Savo.

 21   Q.  Est-ce qu'à un moment donné il y a eu changement de commandement ? Est-

 22   ce que quelqu'un d'autre est devenu -- quelqu'un d'autre ?

 23   R.  Le commandant de la brigade, c'était toujours la même personne, et

 24   Simic Savo, en 1994, est allé occuper de nouvelles fonctions, et c'est

 25   alors que j'ai occupé les deux fonctions.

 26   Q.  Bon. S'agissant des ordres que vous receviez, c'étaient des ordres par

 27   écrit et des ordres donnés oralement, n'est-ce pas ?

 28   R.  Uniquement par écrit.


Page 29109

  1   Q.  Donc, uniquement par écrit. Merci pour cet éclaircissement. Au

  2   paragraphe 14 de votre rapport, vous parlez d'un ordre du commandement

  3   supérieur au sujet de cibles militaires spécifiques. Pouvez-vous nous dire

  4   à ce sujet ou décrire à ce sujet à quel point cela était-il spécifique,

  5   détaillé, ces cibles militaires ?

  6   R.  Ecoutez, chaque objectif doit être décrit et désigné de façon concrète,

  7   sa taille, son emplacement et indication des moyens de l'ennemi qui étaient

  8   là-bas, soit des effectifs, soit du matériel technique ou le reste.

  9   Q.  Et quand vous receviez des ordres pour ce qui était d'intervenir en

 10   direction de certaines cibles, vous vous attendiez à ce type d'information

 11   ?

 12   R.  Oui, on s'attendait à chaque fois à des informations concrètes,

 13   l'emplacement, le lieu et la taille de la cible.

 14   Q.  Pourquoi est-ce que ces détails étaient-ils importants pour vous ?

 15   R.  Ces détails étaient importants pour pouvoir planifier les tirs

 16   d'artillerie que nous allions ouvrir, des tirs individuels avec une seule

 17   arme ou des tirs groupés avec toute l'unité utilisant des armes d'un

 18   calibre particulier.

 19   Mme WEST : [interprétation] Pouvons-nous afficher le document P1511, s'il

 20   vous plaît.

 21   Q.  J'aimerais regarder un exemple d'un ordre -- en fait, ce n'est pas

 22   vraiment un ordre mais du langage utilisé, et vous n'avez jamais vu ce

 23   document auparavant, mais j'aimerais savoir si cela correspond à votre

 24   expérience. Il s'agit d'une conversation interceptée datée du 29 mai 1992,

 25   et la Chambre a entendu des éléments de preuve à cet égard. Il s'agit d'une

 26   conversation entre le général Mladic et quelqu'un du nom de Potpara. Ce

 27   nom, Potpara - désolée pour la prononciation - est-ce que vous le

 28   connaissez ?


Page 29110

  1   R.  Non.

  2   Q.  Très bien. Et pendant cette conversation, Mladic demande à l'autre

  3   personne :

  4   "Est-ce qu'il vous tire dessus ?"

  5   Et Potpara répond :

  6   "Pas pour le moment."

  7   Mladic demande :

  8   "Et est-ce que vous, vous tirez ?"

  9   Potpara dit :

 10   "Nous avons répliqué."

 11   Ensuite, Potpara ajoute :

 12   "Vers le musée et vers l'hôpital, nous avons tiré à Crni.

 13   "Mladic : Oui. Quelles armes avez-vous utilisées ?

 14   "Potpara : 82.

 15   "Mladic : 82. Est-ce que vous avez tiré sur la cible ?

 16   "Potpara : Ceux qui ont observé…

 17   "Mladic : Pardon ?

 18   "Potpara : Ces observateurs nous ont dit que c'était bien.

 19   "Mladic : Tirez sur une bonne cible.

 20   "Potpara : D'accord, d'accord.

 21   "Mladic : Ne les laissez pas vous perturber.

 22   "Potpara : Bien.

 23   "Mladic : Donc, dès que ces fils de pute vous attaqueront, tirez sur eux.

 24   Est-ce que vous pouvez tirer sur la gare ?

 25   "Potpara : Oui, oui.

 26   "Mladic : Eh bien, touchez-les avec quelque chose. Et éparpillez-les.

 27   "Potpara : O.K. O.K.

 28   "Mladic : Au revoir."


Page 29111

  1   Pensez-vous que ce type de langage, de vocabulaire, est suffisamment

  2   détaillé pour décrire une cible ?

  3   R.  Je suis désolé, mais ça n'a rien à voir avec moi. Je n'étais pas à la

  4   tête de ce 82. Cette arme n'était pas à la disposition de mon unité.

  5   Q.  Oui, mais je vous ai dit tout à l'heure, Monsieur, que cette

  6   conversation, vous ne la connaissiez pas. Je l'utilise comme exemple pour

  7   parler de ce que vous avez défini comme étant un langage expliquant en

  8   détail les cibles. Donc, par exemple, "éparpillez-les", cette expression-

  9   là, si vous aviez reçu un ordre tel que celui-ci, est-ce que cet ordre

 10   aurait été suffisamment détaillé pour choisir une cible ?

 11   R.  Je n'ai jamais reçu d'ordre de la sorte, je ne pense pas que ce soit

 12   précis.

 13   Q.  Par quelle procédure pouvez-vous remettre en question un ordre ?

 14   R.  Je demandais une approbation écrite.

 15   Q.  Quel --

 16   R.  A condition -- bon, si je demandais une explication ou une approbation

 17   par écrit pour une cible en particulier, je m'assurais toujours via mes

 18   observateurs et les observateurs d'artillerie et ceux qui se trouvaient sur

 19   les lignes avant sur le terrain et qui s'occupaient de la reconnaissance du

 20   terrain, de me faire un rapport et de m'assurer du type de cible que nous

 21   devions viser, et ensuite un ordre serait émis pour préparer les tirs et

 22   ouvrir le tir.

 23   Q.  Est-ce que vous le faisiez systématiquement ?

 24   R.  Je dirais dans 99 % des cas.

 25   Q.  Pouvez-vous nous parler de la procédure grâce à laquelle vous déployiez

 26   les hommes qui étaient sous vos ordres. Par exemple, est-ce que vous aviez

 27   des positions de tir fixes et est-ce que vous affectiez ces hommes à ces

 28   positions ?


Page 29112

  1   R.  L'artillerie est une unité idiosyncrasique qui a bénéficié d'un

  2   entraînement spécial et, bien sûr, à chaque poste, nous devions avoir du

  3   personnel entraîné, formé, capable de faire fonctionner une arme, et

  4   d'autres personnes qui étaient capables d'observer les cibles, de préparer

  5   le relevé des coordonnées, pour préparer les tirs et ensuite procéder au

  6   tir et viser une cible en particulier, parce qu'il y a plusieurs façons

  7   d'ouvrir le tir : il y a une préparation simple, une préparation courte, et

  8   une préparation complète.

  9   Q.  Oui, nous allons y arriver. Mais dites-moi, combien de postes de tir y

 10   avait-il dans votre zone de responsabilité ?

 11   R.  A cet endroit-là, il y avait quatre unités et quatre positions de tir,

 12   et je ne les ai pas modifiées pendant la guerre, ou en tout cas, jusqu'à ce

 13   que nous soyons repostés 20 kilomètres plus loin.

 14   Mme WEST : [interprétation] Pouvons-nous réafficher le document 09390E de

 15   la liste 65 ter, s'il vous plaît.

 16   Q.  Je vais vous demander de localiser votre position de tir, mais avant,

 17   est-ce que vous pouvez me dire si cette carte est trop petite pour que vous

 18   puissiez vous exécuter ou pas ?

 19   R.  Non, non, je peux vous le montrer. En dessinant des lignes plus

 20   petites, je pense que je peux y arriver.

 21   Q.  Donc, je vois quatre lignes. Est-ce qu'elles représentent les quatre

 22   positions de tir jusqu'à votre réaffectation ?

 23   R.  Oui. Oui, oui, ces quatre lignes.

 24   Q.  Très bien. Et combien de temps sont-ils restés à ces quatre endroits ?

 25   R.  Jusqu'à ce que nous bougions 20 kilomètres plus bas, donc en dehors du

 26   cercle entourant Sarajevo.

 27   Q.  Dites-moi quand vous l'avez fait.

 28   R.  Au mois d'août 1995.


Page 29113

  1   Q.  Donc jusqu'en août 1995, ces lignes-là représentent vos quatre lieux de

  2   tir permanents ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  De 1992 à août 1995, y avait-il d'autres postes de tir dans votre zone

  5   de responsabilité qui dépendaient de vous ?

  6   R.  Dans ma zone de responsabilité de tir, il n'y avait pas d'autres unités

  7   d'artillerie, à part ces quatre-là.

  8   Q.  Pouvez-vous signer cette carte et y mettre la date également.

  9   R.  Oui. Juste une petite correction.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous pouvons l'effacer avec l'aide de

 11   l'huissière.

 12   Mme WEST : [interprétation] Merci.

 13   Pouvons-nous lui donner une cote, s'il vous plaît.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons sauvegarder ce document et

 15   lui attribuer une cote.

 16   M. LE GREFFIER : [interprétation] Pièce P5934.

 17   Mme WEST : [interprétation]

 18   Q.  Monsieur Skrba, au paragraphe 10 de votre rapport vous parlez du 1er

 19   Corps de l'ABiH et du type d'armes dont ils disposaient. J'aimerais d'abord

 20   parler du type d'armes dont vous disposiez. Est-ce que vous pouvez me dire

 21   si vous aviez des mortiers ?

 22   R.  Oui. Oui, de 120 millimètres.

 23   Q.  Combien ?

 24   R.  Douze.

 25   Q.  Quoi d'autre ?

 26   R.  MD30. Des obusiers MD30 de 120 millimètres.

 27   Q.  Combien ?

 28   L'INTERPRÈTE : Correction de l'interprète. 122 millimètres.


Page 29114

  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Six.

  2   Mme WEST : [interprétation]

  3   Q.  Quoi d'autre ?

  4   R.  Weber 128 millimètres. Quatre pièces, quatre.

  5   Q.  Quoi d'autre ?

  6   R.  C'est tout.

  7    Q.  Est-ce que vous aviez des lance-roquettes multiples ?

  8   R.  C'est tout. VBR 128 millimètres, quatre pièces. Et VBR veut dire

  9   "lance-roquettes multiples".

 10   Q.  Désolée. Merci.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame West, pouvons-nous faire une

 12   pause de cinq minutes, s'il vous plaît.

 13   --- L'audience est suspendue à 13 heures 58.

 14   [Le témoin quitte la barre]

 15   --- L'audience est reprise à 14 heures 05.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pour le reste du volet d'audience,

 17   d'aujourd'hui, la Chambre siègera conformément à l'article 15 bis du

 18   Règlement, le Juge Morrison s'étant absenté pour des questions urgentes.

 19   Dites-moi, est-ce que vous pourriez passer brièvement en huis clos partiel,

 20   s'il vous plaît.

 21   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes en huis clos partiel.

 22   [Audience à huis clos partiel]

 23  (expurgé)

 24  (expurgé)

 25  (expurgé)

 26  (expurgé)

 27  (expurgé)

 28  (expurgé)


Page 29115

  1  (expurgé)

  2  (expurgé)

  3  (expurgé)

  4  (expurgé)

  5  (expurgé)

  6  (expurgé)

  7  (expurgé)

  8  (expurgé)

  9  (expurgé)

 10  (expurgé)

 11  (expurgé)

 12  (expurgé)

 13  (expurgé)

 14  (expurgé)

 15  (expurgé)

 16  (expurgé)

 17  (expurgé)

 18  (expurgé)

 19  (expurgé)

 20  (expurgé)

 21   [Audience publique]

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Maître Robinson.

 23   M. ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur le Juge. Nous avons reçu

 24   quelques réponses à nos requêtes de mesures de protection pour les témoins

 25   qui vont venir au mois de novembre, et nous aimerions dire à la Chambre que

 26   nous allons contacter le témoin après avoir reçu la réponse de la part de

 27   l'Accusation pour voir s'ils veulent que nous fournissions d'autres

 28   informations à la Chambre. Alors, j'aimerais vous demander de nous donner


Page 29116

  1   quelques jours pour nous exécuter. Nous pensons pouvoir déposer cela lundi.

  2   Et nous aimerions que vous mettiez entre parenthèses vos décisions jusqu'à

  3   ce que nous ayons eu l'occasion de répliquer, et ce sera la pratique

  4   pendant tout le reste de l'affaire.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Nous en prenons note.

  6   Rappelons le témoin, s'il vous plaît.

  7   [Le témoin vient à la barre]

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez continuer, Madame West.

  9   Mme WEST : [interprétation] Merci.

 10   Q.  Monsieur Skrba, nous nous sommes arrêtés, et juste avant d'arrêter nous

 11   parlions de lance-roquettes, et vous avez indiqué que dans votre unité il y

 12   en avait quatre. Pouvez-vous nous dire dans quel objectif les aviez-vous ?

 13   Et dans quel type de situation vous y aviez recours ?

 14   R.  On les utilise rarement. On a besoin de beaucoup de munitions pour ce

 15   genre d'armes. Je dirais que pendant la guerre nous les avons peut-être

 16   utilisées une à deux fois. On les utilisait uniquement pour neutraliser du

 17   personnel ennemi qui attaquait, une attaque d'infanterie, bien sûr.

 18   Q.  Mais vous en aviez tout de même quatre, n'est-ce pas ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Et vous avez dit que vous les aviez utilisés une ou deux fois. Est-ce

 21   que vous pourriez nous décrire ces occasions ?

 22   R.  Nous l'avons utilisé une fois. C'est la JNA qui l'a utilisé, en fait,

 23   lorsque nous étions à Lukavica. Je pense que c'était avant son départ pour

 24   la Serbie, le 3 ou le 4 mai. Je n'étais pas au commandement et je ne

 25   décidais pas à ce moment-là. Et puis, une fois ou deux en 1993, nous les

 26   avons utilisés en direction du mont Igman lorsque nous avons procédé à

 27   l'opération Lukavac 93.

 28   Q.  Vous venez de nous parler de trois occasions auxquelles vous avez


Page 29117

  1   utilisé ces lance-roquettes. Est-ce que vous vous souvenez d'autres

  2   occasions ?

  3   R.  Eh bien, il y a eu ces trois fois-là. Pendant toute la guerre, on ne

  4   les a utilisés que trois fois pour ce qui est de ma position et mes armes.

  5   Q.  Vous venez de nous parler de vos positions. Vous aviez dit qu'il y

  6   avait quatre positions de tir, vous nous en avez parlé tout à l'heure. Est-

  7   ce que vous parlez de cela ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Est-ce que vous en aviez un à chacune des positions de tir ou est-ce

 10   qu'ils étaient répartis différemment ?

 11   R.  Les quatre se trouvaient au même endroit que j'ai annoté sur la

 12   dernière carte. Donc, ils étaient regroupés en un seul endroit.

 13   Q.  Dans votre déclaration, au paragraphe 24, vous dites que :

 14   "Le 28 août, il n'y avait pas de mortiers de 120 millimètres, et ces

 15   mortiers et ceux de plus grand calibre qui étaient dans ma zone de

 16   responsabilité avaient déjà été déployés ailleurs en dehors de la ville de

 17   Sarajevo."

 18   En août 1995, d'après votre déclaration, ce 120 millimètres se

 19   trouvait en dehors, mais qu'en est-il des mortiers de plus petit calibre ?

 20   Est-ce qu'ils se trouvaient toujours dans votre zone de responsabilité ?

 21   R.  Non, ils n'étaient plus dans ma zone de responsabilité. Ils

 22   appartenaient au bataillon.

 23   Q.  Mais est-ce qu'il y avait des mortiers de calibre plus petit dans

 24   la zone qui était au sud de Sarajevo ?

 25   R.  Les commandants de bataillon les déployaient et les

 26   positionnaient dans leur zone de responsabilité. Je n'avais pas

 27   d'information sur les lieux de déploiement ni la quantité.

 28   Q.  Pouvez-vous nous dire à quoi servaient ces mortiers de 120 millimètres


Page 29118

  1   ? Comment pouvait-on les utiliser au mieux ?

  2   R.  Les mortiers de 120 millimètres sont en général utilisés pour détruire

  3   du personnel sur des pentes, que ce soit des pentes avant ou arrière car

  4   ces mortiers peuvent tirer des obus de très haut.

  5   Q.  Et lorsque vous tiriez des mortiers de 120 millimètres, combien de tirs

  6   y avait-il ?

  7   R.  Ça dépendait de la cible et du type de l'attaque. C'était aussi en

  8   fonction de la trajectoire de l'obus, de l'endroit d'où on le tirait à de

  9   la cible. Ça pouvait être à une distance d'une minute, de deux minutes, de

 10   cinq minutes. On pouvait ajuster les choses.

 11   Q.  Mais ce tir de mortier était unique, n'est-ce pas ?

 12   R.  Que voulez-vous dire par "unique" ? Vous voulez dire un seul obus ?

 13   Q.  Oui.

 14   R.  Il y avait un seul obus très rarement. En général, il y en avait un ou

 15   deux ou plus. On ne tirait un seul obus que lorsque l'on avait déjà

 16   précédemment tiré sur la même cible, mais en général il fallait vérifier

 17   tous les éléments de tir.

 18   Q.  Vous nous avez dit que ces mortiers étaient utilisés principalement

 19   pour détruire du personnel. Quel type d'arme utilisiez-vous pour détruire

 20   des bâtiments ?

 21   R.  Des chars ou des Maljutkas ou d'autres types de matériel, des canons.

 22   Q.  Au paragraphe 12 de votre déclaration, vous nous dites :

 23   "D'après mes informations, le SRK ne menait que des actions

 24   défensives."

 25   En d'autres mots, est-ce que cela veut dire que vous ne tiriez que des tirs

 26   de riposte pour répliquer aux tirs de l'ABiH ?

 27   R.  Exclusivement en réponse aux tirs de l'ABiH.

 28   Q.  Parlons du temps de réponse. Est-ce que vous pouvez nous expliquer la


Page 29119

  1   procédure de réponse ? Lorsque l'on vous tire dessus une première fois, que

  2   faites-vous juste après ? Quelle est la première chose que vous faites ?

  3   R.  Je recevais un rapport du poste d'observation disant que des tirs

  4   avaient eu lieu sur la ligne de front, la ligne avant. Mes observateurs,

  5   donc, m'informaient de cela. Et ensuite, directement, je recevais un autre

  6   rapport du commandement de la brigade disant que dans un certain secteur

  7   une attaque était en cours ou allait avoir lieu. Ça pouvait être une

  8   attaque d'artillerie ou d'infanterie. Lorsque ces rapports correspondaient,

  9   nous déterminions le lieu de la cible, le positionnement de la cible, nous

 10   faisions le relevé des coordonnées de la cible, nous calculions les

 11   éléments, et le temps qui s'écoulait pouvait être de cinq ou dix minutes.

 12   Et ensuite, si le bombardement continuait, alors nous riposterions afin de

 13   rétablir le calme. Ce ne serait qu'un seul obus d'abord, et ensuite les

 14   observateurs continueraient leurs observations et verraient si le premier

 15   obus avait atterri là où nous le voulions. Sinon, nous corrigions nos

 16   éléments de tir et continuions. Dans 90 % des cas, nous n'utilisions qu'une

 17   seule pièce pour tirer notre obus.

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Le témoin a dit : Nous tirions un obus afin de

 19   rétablir le calme, pas seulement pour corriger les éléments de tir mais

 20   aussi pour rétablir le calme. Cela n'a pas été enregistré.

 21   Mme WEST : [interprétation] Je pense que cela a été enregistré, mais nous

 22   pouvons continuer.

 23   Q.  Donc, revenons en arrière. Vous avez dit que vous tiriez votre premier

 24   tir de riposte environ cinq à dix minutes après la première attaque. Donc,

 25   c'était très court comme période de temps.

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Et les premières informations que vous receviez étaient celles venant

 28   de vos observateurs, n'est-ce pas ?


Page 29120

  1   R.  Oui.

  2   Q.  Ensuite, votre commandant de brigade vous informait qu'il y avait une

  3   attaque en cours ou que l'on attendait une attaque ?

  4   R.  Ou alors c'est moi qui les informais, qui informais l'officier de

  5   permanence au sein du commandement, puisque j'avais mes propres

  6   observateurs qui, eux, avaient constaté ce qui se passait. Donc, je leur

  7   faisais part de cela et j'attendais les instructions quant à ce qui

  8   convenait de faire.

  9   Q.  En d'autres termes, vous confirmiez qu'il y avait eu des tirs, ensuite

 10   vous déterminiez l'emplacement de la cible, puis vous ripostiez, n'est-ce

 11   pas ?

 12   R.  Je demandais et j'attendais leur approbation également. J'attendais

 13   d'eux qu'ils me disent ce que je devais faire, s'il fallait riposter par

 14   des tirs ou non, s'il fallait simplement attendre.

 15   Q.  Alors, si nous avançons au paragraphe 14 de votre déclaration, vous en

 16   dites un peu plus à ce sujet. Vous dites que vous avez pris des mesures

 17   pour que l'on ne tire pas sur les civils. Et plus bas, au paragraphe 16,

 18   vous dites la chose suivante. Peut-être que nous pourrions afficher aussi

 19   bien la version anglaise que la version en B/C/S du paragraphe numéro 16.

 20   Vous poursuivez sur ce même sujet à cet endroit.

 21   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] On m'informe qu'il n'y a pas de version

 23   en B/C/S, Madame West.

 24   Mme WEST : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît.

 25   M. ROBINSON : [interprétation] Il y a une déclaration provisoire qui

 26   dispose d'une version en B/C/S, mais elle est enregistrée sous un numéro

 27   différent dans la liste 65 ter.

 28   Mme WEST : [interprétation] Et peut-être que c'est la pièce qui porte le


Page 29121

  1   numéro 1D05641, en B/C/S, dans la liste en application de la liste 65 ter.

  2   Je crois qu'il serait utile d'afficher également la version en B/C/S de ce

  3   même paragraphe. Merci.

  4   Q.  Alors, Monsieur le Témoin, vous voyez sur l'écran de gauche la même

  5   chose, le même texte en B/C/S. Cela commence comme suit, je cite :

  6   "Nous avions des ordres permanents nous enjoignant de ne pas ouvrir le feu

  7   sur des cibles civiles dans la ville. Moi-même, à titre personnel et de

  8   l'unité, au cours d'actions de combat et lorsque nous ouvrions le feu sur

  9   des cibles militaires situées dans des secteurs civils, nous prenions des

 10   mesures visant à réduire le nombre de victimes civiles collatérales.

 11   "Par exemple, si un ou des chars ouvraient le feu depuis le secteur

 12   de Velesici ou de Ciglane et que ces tirs nous visaient, nous ripostions

 13   par des tirs proportionnés visant l'emplacement à partir duquel on avait

 14   tiré sur nos unités."

 15   Monsieur Skrba, cette notion de tir proportionné qui figure dans cette

 16   phrase correspond-elle à ce que vous avez voulu dire par prendre des

 17   mesures, lorsque vous avez parlé des mesures que vous preniez ?

 18   R.  Oui. S'ils avaient tiré deux ou trois obus, nous ripostions par un ou

 19   deux obus pour les arrêter dans ce qui aurait pu être la suite de leurs

 20   actions.

 21   Q.  Et s'ils tiraient au moyen d'un char, est-ce que vous ripostiez par des

 22   tirs de char également ?

 23   R.  Nous ne pouvions pas atteindre les positions depuis lesquelles ils

 24   tiraient au moyen de char. Si bien que les ripostes, eh bien, je faisais en

 25   sorte qu'elles soient tirées au moyen d'un obusier de 122 millimètres.

 26   C'était la tendance.

 27   Q.  Je parle de "char" parce que c'est l'exemple même que vous avancez dans

 28   cette phrase. Mais, par exemple, s'ils utilisaient un obusier de 122


Page 29122

  1   millimètres -- allez-y, continuez.

  2   R.  Dans ce paragraphe, ce qui est dit correspond à ce qu'ils faisaient.

  3   Principalement, c'est depuis Velesici et Ciglane qu'ils tiraient en

  4   utilisant des chars et des obusiers, et c'est sur nos postes avancés qu'ils

  5   tiraient. Alors, si nous ne ripostions pas immédiatement, ils continuaient

  6   de tirer. Ils auraient continué si nous n'avions pas riposté.

  7   Q.  Merci. Revenons maintenant à ce que nous étions en train d'aborder au

  8   sujet de la notion de tir proportionné. Par exemple, s'ils tiraient en

  9   utilisant un canon de 130 millimètres, est-ce qu'en guise de riposte

 10   proportionnée vous tiriez en utilisant le même type d'arme et le même

 11   nombre d'obus ?

 12   R.  Madame, ils n'avaient pas de canon de 130 millimètres en contrebas dans

 13   la ville.

 14   Q.  Merci. Ce n'était qu'un exemple. Voici où je souhaite en venir - et je

 15   souhaite simplement m'assurer que je comprends bien ce que vous dites dans

 16   votre déclaration - vous parlez de tir proportionné, vous m'avez donné

 17   l'exemple de leurs tirs, de deux ou trois obus qu'ils tiraient et de votre

 18   riposte. Vous avez dit qu'il y avait d'abord un premier obus, puis ensuite

 19   vous parlez de "proportionnalité". Alors, est-ce que vous utilisiez le même

 20   type d'arme et le même nombre de munitions, ou alors seulement l'un ou

 21   l'autre de ces éléments ?

 22   R.  Eh bien, un tir ou peut-être deux, un ou deux obus, pour les arrêter.

 23   C'est ce que j'entendais par "proportionnel". C'était notre façon de les

 24   arrêter, de les empêcher de continuer. Nous tirions un ou deux obus sur

 25   cette position, soit pour les en chasser, soit simplement pour arrêter

 26   leurs tirs.

 27   Q.  Et au paragraphe 16 -- vous avez indiqué au préalable que vous preniez

 28   des mesures pour réduire le nombre de victimes civiles collatérales, mais


Page 29123

  1   au paragraphe 16, lorsque vous vous référez à ces mesures, ce que vous avez

  2   à l'esprit ce sont ces tirs proportionnés, n'est-ce pas, et cette approche

  3   fondée sur la proportionnalité ?

  4   R.  En règle générale, nous ripostions par un ou deux obus; mais il y avait

  5   également des cas dans lesquels c'était à partir de Kosevo, de l'hôpital

  6   militaire ou d'une caserne qu'ils nous tiraient dessus avec des obus de 120

  7   millimètres, alors que nous, nous ne visions pas du tout ces cibles-là

  8   parce que nous savions de quelle nature étaient ces installations, et elles

  9   étaient marquées comme telles, qu'il s'agisse de l'hôpital militaire ou de

 10   Kosevo. Nous ne tirions pas du tout dans ces directions parce que nous ne

 11   voulions pas qu'il y ait encore davantage de victimes à ces endroits-là, et

 12   surtout pas des victimes civiles.

 13   Q.  Monsieur le Témoin, est-ce que vous êtes en train de nous dire que vous

 14   n'avez jamais tiré sur un hôpital à Sarajevo -- que la 1ère Brigade

 15   motorisée de Sarajevo n'a jamais tiré sur un hôpital ?

 16   R.  En effet.

 17   Q.  Y a-t-il eu d'autres cibles -- ou plutôt, d'autres positions, d'autres

 18   sites dans cette ville que vous considériez comme étant complètement exclus

 19   en tant que cibles ?

 20   R.  Je ne sais pas si vous connaissez la situation, mais il y avait près de

 21   99 % de Serbes dans la ville de Sarajevo et il y avait cinq équipes de la

 22   FORPRONU qui observaient en permanence la situation, qui supervisaient

 23   chaque position de tir. Donc, les armes étaient regroupées dans ces cinq

 24   positions et les observateurs surveillaient à chaque fois qu'on ouvrait le

 25   feu à partir d'une de ces positions. Et je ne peux vous parler que de ce

 26   qui se passait dans ma zone de responsabilité.

 27   Q.  Alors, au paragraphe numéro 18 de votre déclaration, vous dites que :

 28   "Parmi les cibles militaires contrôlées par les Musulmans et situées


Page 29124

  1   dans la ville, je listerai les cible suivantes…" Velesici, Ciglane,

  2   Bjelave, le bâtiment de la municipalité, la mairie donc, Dobrinja et

  3   Bistrik. Alors, je voudrais maintenant que nous parlions plus en détail de

  4   ces différentes cibles.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame West, pouvez-vous prévoir une

  6   marge de cinq minutes à la fin de l'audience d'aujourd'hui.

  7   Mme WEST : [interprétation] Pouvons-nous afficher la pièce P5926, s'il vous

  8   plaît.

  9   Q.  Ceci est une carte de Sarajevo figurant l'ensemble de ces six

 10   localités, de ces six sites. Alors, devant vous, vous avez une liasse de

 11   documents, comme tout le monde dans cette salle d'audience, et pour le

 12   compte rendu d'audience, il s'agit du document 23918 dans la liste 65 ter.

 13   Vous en avez donc une copie papier juste devant vous, Monsieur le Témoin.

 14   Je souhaiterais que nous examinions la page numéro 1. Monsieur le Témoin,

 15   sur votre table, il y a un classeur sous la carte -- voilà. Je vous prie de

 16   bien vouloir examiner ce document. Nous y voyons cinq des zones que vous

 17   citez au paragraphe numéro 18, Velesici, Ciglane, Bistrik, et cetera. Et

 18   ensuite, si nous passons à la page 2, vous verrez que Dobrinja y est

 19   visible. Alors, si vous examinez cette carte, est-ce que vous pouvez

 20   convenir avec moi qu'il s'agit là d'une représentation précise des

 21   différents emplacements auxquels se trouvaient ces cibles ?

 22   R.  Mais je ne vois absolument pas que l'on ait fait figurer ici les

 23   positions de tir.

 24   Q.  Non, et vous ne le verrez pas. Car il ne s'agit que d'une carte et de

 25   rien d'autre. Alors, passons à la page numéro 3 de cette carte, Monsieur le

 26   Témoin, il s'agit d'un agrandissement de Velesici. Il s'agit du document

 27   23918 dans la liste 65 ter, page 3. Je crois que tout le monde a une copie

 28   papier.


Page 29125

  1   En page 3, nous trouvons Velesici sous forme de photographie

  2   satellite.

  3   Monsieur Skrba, est-ce que vous pourriez nous décrire quel était le type de

  4   configuration que l'on trouvait à Velesici ? Etait-ce une zone

  5   résidentielle, industrielle, ou autre ?

  6   R.  Velesici était un quartier résidentiel avec des appartements et des

  7   maisons individuelles, à ceci près que dans la partie nord, vers la voie de

  8   chemin de fer, il y avait une partie qui était une zone industrielle, une

  9   petite partie en direction de la gare.

 10   Q.  Et il y a aussi des écoles dans cette zone, n'est-ce pas, qui étaient

 11   là pour scolariser les enfants de la population locale ?

 12   R.  Probablement que c'était le cas, mais je ne m'en souviens pas, ça n'a

 13   pas marqué ma mémoire. Probablement qu'il y avait des écoles primaires,

 14   mais je ne m'en souviens guère.

 15   Q.  Alors, dans votre déclaration, vous parlez d'un char à Velesici. Alors,

 16   je crois que maintenant vous avez à l'écran devant vous l'affichage de ce

 17   plan de Velesici. Est-ce que vous pourriez nous indiquer à l'écran

 18   l'emplacement de ce char.

 19   R.  J'ai du mal à m'y retrouver, bien que je sois assez bon en topographie.

 20   Il se trouvait à peu près au-dessus de l'usine de tabac, mais je ne vois

 21   pas où est cette usine.

 22   Q.  Monsieur Skrba, nous allons poursuivre et je vais vous demander de

 23   préciser l'emplacement de tous les différents éléments que vous mentionnez

 24   au paragraphe numéro 18.

 25   Mme WEST : [interprétation] Mais, Monsieur le Président, je souhaite

 26   suggérer que nous fassions peut-être une interruption maintenant, ce qui

 27   permettrait à M. Skrba peut-être de mettre à profit la soirée pour examiner

 28   ces documents qu'il pourrait emporter, et nous poursuivrions dans ce cas


Page 29126

  1   demain.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne vois pas de difficulté à cela.

  3   Merci, Madame West.

  4   Très bien. Monsieur Skrba, nous poursuivrons demain. Je vous rappelle que

  5   vous n'avez l'autorisation de discuter avec personne de votre déposition.

  6   Est-ce que vous le comprenez ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Veuillez raccompagner le

  9   témoin hors du prétoire. Je vous souhaite bonne soirée.

 10   M. ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Président, c'est bien lundi que

 11   nous reprenons nos débats, n'est-ce pas ?

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, en effet, lundi.

 13   M. ROBINSON : [interprétation] Oui. Enfin, je ne veux pas que le témoin

 14   pense qu'on attend de lui qu'il revienne demain.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oh, en effet.

 16   Est-ce que c'est moi qui ai dit "demain" ?

 17   Mme WEST : [interprétation] Oui, excusez-moi, j'ai dit "demain" par erreur.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc, nous ne siégeons pas demain et

 19   nous poursuivrons lundi matin. Je vous souhaite donc bon week-end, Monsieur

 20   le Témoin.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 22   [Le témoin quitte la barre]

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Maître Robinson, je reviens à ce que

 24   vous avez dit des éventuelles répliques suite aux réponses de l'Accusation

 25   quant aux demandes de mesures de protection, j'ai dit que je prenais acte

 26   de ce que vous disiez, mais il y a quand même un certain nombre d'éléments

 27   qui me posent problème. Veuillez ne pas partir du principe que la Chambre

 28   vous autorisera à répliquer à chaque fois, mais au moment où je vous ai


Page 29127

  1   entendu présenter cette position qui est donc la vôtre, j'ai cru qu'il y

  2   avait des éléments nouveaux dans les réponses de l'Accusation, je ne suis

  3   cependant pas sûr que ce soit le cas. Alors, premièrement, vous devriez

  4   avoir obtenu tous les éléments d'information au moment où vous déposez

  5   votre demande de mesures de protection. Ensuite, à moins qu'il n'y ait des

  6   éléments d'information nouveaux qui surviennent et qui nécessitent une

  7   réplique de votre part, auquel cas vous pouvez contacter le témoin et

  8   déposer ces informations supplémentaires, il n'est pas usuel de procéder

  9   ainsi à chaque fois en présentant des éléments d'information nouveaux.

 10   M. ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Mais de façon

 11   générale, la position de l'Accusation a consisté à dire que des

 12   informations supplémentaires étaient nécessaires et qu'il ne fallait pas

 13   faire droit à la requête de la Défense parce qu'il n'y avait pas là toutes

 14   les informations nécessaires. Donc, nous voulons donner tout simplement au

 15   témoin l'opportunité de nous dire tout ce qui serait utile à fournir à

 16   l'appui d'une demande de mesures de protection. Nous souhaitons que les

 17   témoins aient la possibilité de dire tout ce qu'ils peuvent souhaiter dire

 18   avant qu'une telle décision ne soit prise. Et notamment dans les cas où

 19   nous, en tant que Défense, nous n'appuyons pas l'adoption de mesures de

 20   protection, je pense qu'il est particulièrement important que la situation

 21   du témoin en question soit expliquée très en détail à la Chambre. Donc,

 22   nous nous efforçons évidemment de recueillir toutes les informations

 23   pertinentes à l'avance, mais nous estimons néanmoins qu'il est très

 24   important de donner au témoin la possibilité de présenter tout ce qu'il

 25   considère comme important pour la Chambre de connaître.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est exactement la situation qui me

 27   préoccupait. Vous vous attendez à des réponses de l'Accusation indiquant

 28   que votre requête n'est pas suffisamment motivée. Eh bien, vous devriez en


Page 29128

  1   fait préparer tout ce qui est nécessaire pour qu'il puisse être fait droit

  2   à une telle requête à l'avance, dès le début. Veuillez garder cela à

  3   l'esprit.

  4   Alors, très bien. Nous allons donc lever l'audience jusqu'à lundi prochain.

  5   Je vous remercie.

  6   --- L'audience est levée à 13 heures 42 et reprendra le lundi 22 octobre

  7   2012, à 9 heures 00.

  8  

  9  

 10  

 11  

 12  

 13  

 14  

 15  

 16  

 17  

 18  

 19  

 20  

 21  

 22  

 23  

 24  

 25  

 26  

 27  

 28