Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le jeudi 28 février 2013

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  5   --- L'audience est ouverte à 9 heures 03.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour à tous.

  7   Peut-on demander au témoin de prononcer la déclaration solennelle,

  8   s'il vous plaît.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 10   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 11   LE TÉMOIN : NOVICA ANDRIC [Assermenté]

 12   [Le témoin répond par l'interprète]

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur Andric. Veuillez vous

 14   asseoir et vous mettre à l'aise.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avant de commencer votre déposition,

 17   Monsieur Andric, je voudrais attirer votre attention sur une Règle qui est

 18   en vigueur dans ce Tribunal, il s'agit de l'article 90(E). Vous pouvez donc

 19   soulever une objection et refuser de répondre à une question posée par M.

 20   Karadzic, l'Accusation ou même les Juges si vous pensez que votre réponse

 21   pourrait vous incriminer dans le domaine pénal. Dans ce contexte,

 22   "incriminer" signifie que vous pourriez dire quelque chose qui signifierait

 23   que vous admettez être responsable d'un délit ou d'un crime au pénal, ou

 24   que vous diriez quelque chose qui pourrait fournir des éléments de preuve

 25   laissant penser que vous avez commis un crime ou un délit au pénal.

 26   Cependant, si vous pensez qu'une réponse pourrait vous incriminer et que,

 27   par conséquent, vous refusez de répondre à la question, je dois vous faire

 28   savoir que le Tribunal est habilité à vous forcer à répondre à cette


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  1   question. Mais dans ce cas de figure, le Tribunal s'assurera que votre

  2   témoignage obtenu de la sorte ne pourra pas être utilisé par la suite comme

  3   élément de preuve contre vous-même, hormis le cas de poursuite pour faux

  4   témoignage. Est-ce que vous comprenez ce que je viens de vous dire ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur Andric.

  7   Monsieur Karadzic, c'est à vous.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Bonjour, Excellences. Bienvenue à Mme le Juge

  9   Lattanzi, qui est de retour, et bonjour à tous.

 10   Interrogatoire principal par M. Karadzic :

 11   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Andric.

 12   R.  Bonjour.

 13   Q.  Monsieur Andric, est-ce que vous avez fourni une déclaration à mon

 14   équipe de la Défense ?

 15   R.  Oui.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pourrait-on afficher sur le système de prétoire

 17   électronique le document 1D7813.

 18   M. KARADZIC : [interprétation]

 19   Q.  Est-ce que vous voyez cette déclaration dont je viens de vous parler

 20   qui s'affiche à l'écran ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Je vous demande de ménager des pauses entre mes questions et vos

 23   réponses. Moi, je ferai de même. Nous devons également parler lentement de

 24   façon à ce que tout puisse être consigné au compte rendu d'audience, et que

 25   les interprètes puissent interpréter tout ce que nous disons. Est-ce que

 26   vous avez lu et signé cette déclaration ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Merci. Pourrait-on maintenant consulter la dernière page. J'aimerais


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  1   que le témoin identifie la signature. Est-ce que c'est votre signature ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Merci. Est-ce que cette déclaration reflète fidèlement ce que vous avez

  4   dit à l'équipe de la Défense en réponse à leurs questions ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Si je vous posais les mêmes questions aujourd'hui, est-ce que vous y

  7   apporteriez les mêmes réponses ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Merci.

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Excellences, j'aimerais verser cette série de

 11   documents au titre d'article 92 ter.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Maître Robinson.

 13   M. ROBINSON : [interprétation] Oui. Merci, Monsieur le Président. Il y a

 14   huit documents que nous souhaiterions rajouter à la liste 65 ter étant

 15   donné que nous n'avions pas auditionné le témoin au moment où nous avons

 16   déposé notre liste de documents au titre de l'article 65 ter.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous avez dit "huit" documents ?

 18   M. ROBINSON : [interprétation] Effectivement. En fait, il y en a sept.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 20   Des objections, Monsieur Zec ?

 21   M. ZEC : [interprétation] Pas d'objections, Monsieur le Président.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons accepter le versement de ces

 23   documents, mais pour ce qui est des photos qui sont mentionnées au

 24   paragraphe 13, je souhaiterais demander à l'accusé de préciser par le

 25   truchement du témoin quand ces photos ont été prises et quelle partie a été

 26   modifiée.

 27   Nous allons donc donner des cotes pour la déclaration ainsi que pour

 28   les pièces associées.


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  1   M. LE GREFFIER : [interprétation] La déclaration au titre de l'article 65

  2   ter 1D7813 recevra la cote D3038. Quant aux sept documents, les cotes

  3   seront D3039 à D3045.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

  5   Veuillez continuer, Monsieur Karadzic.

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vais continuer maintenant en lisant le

  7   résumé de la déclaration en anglais.

  8   Novica Andric est né le 28 mai 1962 dans le village de Kosovo, dans

  9   la municipalité de Rogatica. Il est allé à l'école primaire de Rogatica et

 10   ensuite il est allé à l'école secondaire pour être mécanicien auto, et

 11   ensuite il est allé dans une école technique pour la circulation et le

 12   transport à Gorazde. En 1983, il s'est rendu à Kraljevo pour faire son

 13   service militaire au sein de la JNA au sein de la police militaire de la

 14   route ou d'une unité de celle-ci.

 15   Novica Andric a remarqué qu'après la constitution des partis

 16   nationaux, la situation tant au niveau politique, économique, social et

 17   national a changé soudainement et a commencé à se détériorer rapidement. Le

 18   SDA a été constitué durant le premier semestre de l'année 1990 et M. Andric

 19   se rappelle que le SDS n'a pas été constitué jusqu'à bien plus tard, c'est-

 20   à-dire au début du mois de septembre en ce qui concerne la municipalité de

 21   Rogatica. La première unité armée illégale dans la partie de l'est de la

 22   Bosnie a été constituée à Pokrivenik, un village peuplé de Musulmans, et

 23   cette unité a été constituée à la fin de l'année 1990 et au début de

 24   l'année 1991.

 25   De nombreux Serbes s'attendaient à ce que cette situation soit

 26   réglée; cependant, ces espoirs n'ont été présents que jusqu'au référendum

 27   sur la sécession de la Bosnie-Herzégovine de la Yougoslavie. Après ce

 28   référendum, le nationalisme a augmenté et il est devenu manifeste aux yeux


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  1   de Novica Andric que les Serbes, les Croates et les Musulmans ne pouvaient

  2   plus vivre ensemble en harmonie. De nombreux Musulmans disaient que la

  3   Bosnie leur appartenait et qu'ils allaient s'en emparer.

  4   A Rogatica, il y a eu une méfiance complète au sein des populations

  5   et, en guise de précaution, les Serbes ont commencé à organiser des gardes

  6   villageoises la nuit avec des armes de chasse dont ils avaient la

  7   possession légale. Ceci a été fait à partir du début du deuxième semestre

  8   1991. Des rafales d'armes automatiques pouvaient retentir provenant de

  9   villages musulmans.

 10   Novica Andric a rejoint la Défense territoriale serbe aux environs du

 11   20 avril 1992 et a été chargé de protéger les villages qui faisaient face

 12   aux villages musulmans étant donné que ces villages s'étaient armés très

 13   tôt et possédaient toute une série d'armes d'infanterie. Aux environs de la

 14   même époque, les armes de l'ex-Défense territoriale de Rogatica ont été

 15   distribuées à la TO. Toutes les armes étaient conservées dans les dépôts et

 16   les armureries de la JNA pour des raisons de sécurité. La Défense

 17   territoriale n'était pas armée par la JNA qui n'avait que stocké leurs

 18   armes dans des dépôts d'armes.

 19   Depuis le début du mois de mai 1992, il y a eu des provocations

 20   continues au niveau des villages musulmans. Ils ont souvent ouvert le feu

 21   contre des maisons serbes avec des armes d'infanterie, des mitraillettes

 22   antiaériennes, et des pièces de mortier. Une demande a été faite par la TO

 23   serbe de façon à ce que les armes soient remises et que les combattants

 24   puissent avoir comme garantie la paix et la sécurité; cependant, M.

 25   Alibegovic, le dirigeant de ces unités, a refusé et a continué les actes de

 26   provocation. Le commandement de la TO a pris décision de mener une attaque

 27   sur les villages musulmans; cependant, les Serbes d'un hameau avoisinant a

 28   alerté les Musulmans et ils se sont retirés.


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  1   La TO serbe est entrée dans le village de Madjer, et Fejzo Hurko a

  2   été capturé avec sa femme et son fils et emmenés dans le village de Novica

  3   Andric et on lui a dit qu'il serait cantonné dans le garage à côté de sa

  4   maison. On leur a donné un abri. Ils ne sont restés que 15 à 20 minutes là-

  5   bas, et ensuite ils ont été envoyés au groupe scolaire de façon à y être

  6   logés. Durant la période qu'ils ont passé dans le garage, personne ne les a

  7   maltraités ni ne les a torturés.

  8   Novica Andric savait que son père, Miodrag, avait été capturé par des

  9   Musulmans alors qu'il rentrait chez lui et qu'il avait été incarcéré. Il a

 10   été condamné à 20 ans d'emprisonnement pour avoir soi-disant tué trois

 11   Musulmans et avoir également été à l'origine d'incident qui s'était

 12   prétendument produit dans le garage. Il a été acquitté après avoir obtenu

 13   gain de cause en appel.

 14   En ce qui concerne le groupe scolaire, Novica Andric était tout à

 15   fait conscient qu'il s'agissait d'un centre d'attente pour les familles qui

 16   quittaient le centre-ville, tant des familles musulmanes que serbes. Novica

 17   Andric, alors qu'il a traversé le centre-ville, a vu entre 25 et 30 hommes

 18   qui jouaient à dix au football.

 19   Novica Andric a été rappelé sur la ligne de défense en tant que

 20   chauffeur et, durant sa mission il s'est rendu au centre de détention de

 21   Rasadnik. Il n'a pas été informé que les détenus faisaient l'objet de

 22   torture physique pendant qu'il était sur place dans ce centre. Tant les

 23   détenus serbes que musulmans étaient détenus à Rasadnik. Durant ses

 24   premières visites à ce centre, il a vu personnellement que les détenus

 25   recevaient de la nourriture et que cette nourriture était la même que celle

 26   que recevait le personnel du centre de détention et les soldats de la

 27   brigade. Il était conscient que les détenus étaient détenus sur place à des

 28   fins alimentaires.


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avant d'accepter le versement et

  2   d'appeler les photos que l'accusé a demandé qu'on appelle sur les écrans,

  3   je donne la parole à M. Zec.

  4   M. ZEC : [interprétation] Monsieur le Président, je sais que le résumé que

  5   vient de lire M. Karadzic n'est pas un élément de preuve, mais il a dit que

  6   l'affaire contre le père du témoin comprenait également les incidents qui

  7   se seraient produits dans le garage, mais le jugement qui sera déposé comme

  8   pièce à conviction ne comprend pas cet incident, seuls les crimes liés à

  9   des meurtres de civils dans le village de Bjelogorci en juin 1992

 10   comprennent et sont inclus dans ce jugement.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, est-ce que vous êtes

 12   d'accord avec les commentaires de M. Zec ?

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je sais que Mico Andric, le père de Novica

 14   Andric, était accusé et avait été condamné pour des incidents qui s'étaient

 15   soi-disant produits dans le garage, et ensuite il a été acquitté.

 16   Cependant, je n'ai pas étudié de près le jugement.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Après avoir vu la photo, pourquoi ne pas

 18   également consulter le jugement.

 19   Continuez.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Je voudrais demander l'affichage…

 21   [Le conseil de la Défense se concerte]

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je souhaiterais afficher le document 1D12014.

 23   Merci.

 24   M. KARADZIC : [interprétation]

 25   Q.  Pourriez-vous nous dire ce que représente cette photo et quand cette

 26   photo a été prise ?

 27   R.  La photo a été prise durant la reconstruction des incidents du village

 28   de Bjelogorci. Il s'agit du garage où des témoins ont prétendu à tort


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  1   qu'ils avaient été maltraités.

  2   Q.  Merci. Est-ce qu'il y a eu des modifications importantes qui ont été

  3   apportées à ce garage et est-ce qu'il est différent de l'aspect qu'il avait

  4   au moment où ces témoins ont déposé ?

  5   R.  Non, il n'y a pas eu de changement. Il s'agit d'un garage avec une

  6   porte de garage tout à fait classique. Et à ce jour, ce garage est

  7   également toujours utilisé comme cuisine d'été.

  8   Q.  Merci. Quand ceci s'est-il passé, ces événements qui ont été mentionnés

  9   par les témoins ?

 10   R.  Fin du mois de mai.

 11   Q.  Fin du mois de mai ?

 12   R.  Oui, fin du mois de mai.

 13   Q.  Et à l'époque, est-ce que cette cuisine d'été était déjà utilisée ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Est-ce qu'on leur a servi quelque chose ? Et si oui, où est-ce que ceci

 16   était préparé ?

 17   R.  On leur a servi du café dans cette cuisine d'été qui est toujours

 18   utilisée comme cuisine d'été. Ils sont restés pendant environ une quinzaine

 19   d'heures jusqu'à ce que des véhicules viennent de Rogatica, qui se trouve à

 20   5 kilomètres du village.

 21   L'INTERPRÈTE : Les interprètes demandent à ce que le témoin parle plus près

 22   du micro.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] 12015, est-ce que l'on pourrait afficher ce

 24   document.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pourriez-vous me rappeler quand cette

 26   reconstitution des événements a eu lieu, Monsieur Andric ?

 27   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 28   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]


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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Je crois que c'était en 1999, avant

  2   l'acquittement. C'était en 1999. En 1998 ou en 1999, avant le jugement

  3   d'acquittement. Toutes les institutions internationales étaient présentes;

  4   celles qui étaient présentes en Bosnie-Herzégovine.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Comme le témoin l'a confirmé, s'il n'y a

  6   pas eu de changement important, nous pouvons éviter de consulter toutes ces

  7   photos et passer au sujet suivant.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

  9   M. KARADZIC : [interprétation]

 10   Q.  Quelles sont les faux témoignages qui ont été rejetés lorsque votre

 11   père a été acquitté ?

 12   R.  Hamdija Omanovic, c'est sa déposition qui a été rejetée, ainsi que le

 13   frère de Hamdija, ainsi que Sefik Hurko, dont le nom du père est Fejzo.

 14   L'INTERPRÈTE : Les interprètes demandent encore une fois au témoin de

 15   parler dans le micro.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Une seconde, s'il vous plaît.

 17   Je vous demande de parler dans le micro, s'il vous plaît, de façon à ce que

 18   les interprètes vous entendent bien.

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Ah, d'accord, d'accord.

 20   M. KARADZIC : [interprétation]

 21   Q.  Pourrait-on obtenir une précision, s'il vous plaît : quelle est la

 22   personne qui a déposé et qui avait pour nom de famille Hurko, et quelles

 23   sont les dépositions qui ont été rejetées ?

 24   R.  Sefik Hurko, il a fait un faux témoignage, et la cour cantonale de

 25   Sarajevo a évalué qu'il s'agissait de fausses déclarations et le jugement

 26   donc a été un jugement d'acquittement, celui qui est présenté ici.

 27   Q.  Et qu'en est-il de son père, est-ce qu'il a déposé ?

 28   R.  Son père a déposé à Sarajevo, là-bas. Il n'a pas déposé dans le procès


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  1   de Miodrag Andric, mais leurs déclarations étaient différentes.

  2   Q.  Et c'est lequel des deux qui se trouvait dans le garage pendant 20

  3   minutes ?

  4   R.  Hurko Sefik; Hurko Fejzo; et la femme de Fejzo. Leur séjour a été très

  5   bref, jusqu'à ce qu'un véhicule arrive pour venir les chercher, conduit par

  6   Ljubomir Cerovic, qui était à l'époque l'assistant responsable de la

  7   sécurité.

  8   Q.  Pourriez-vous nous aider à obtenir des précisions : est-ce que votre

  9   père a été accusé pour le garage ? Est-ce que le garage était inclus dans

 10   ce jugement d'acquittement ?

 11   R.  Oui, il avait été condamné parce qu'on l'avait accusé d'incidents qui

 12   s'étaient soi-disant produits dans le garage et également des civils qui

 13   auraient été tués. Et après la reconstitution des événements, et après que

 14   les témoins aient été entendus une nouvelle fois, il s'est avéré que la

 15   déposition fournie était un faux témoignage.

 16   Q.  Et le jugement mentionne quoi précisément ?

 17   R.  Le garage et le meurtre de trois civils, enfin le soi-disant meurtre de

 18   trois civils.

 19   Q.  Merci.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Si les Juges de la Chambre sont satisfaits, je

 21   n'ai pas d'autres questions à poser à l'heure actuelle.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous demanderais de vérifier si le

 23   jugement mentionne également les incidents dans le garage. Est-ce qu'il est

 24   possible de vérifier ceci maintenant ?

 25   M. ROBINSON : [interprétation] Je lis le jugement, et pour l'instant il

 26   parle de trois civils qui auraient été tués. Je ne vois pas de référence au

 27   garage dans les conclusions, mais je n'ai pas terminé de lire la

 28   déclaration.


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc, vous êtes d'accord avec M. Zec ?

  2   M. ROBINSON : [interprétation] Jusqu'à présent et d'après ce que j'ai pu

  3   voir pour l'instant, oui. Mais je pense que ceci pourra faire l'objet d'un

  4   contre-interrogatoire étant donné que le témoin a déjà confirmé certains

  5   éléments dans ce qu'il vient de dire.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais M. Karadzic a avancé ceci, donc je

  7   voudrais m'assurer qu'il est d'accord avec M. Zec. Sinon il va devoir

  8   passer en revue la totalité du jugement et nous dire quelle partie du

  9   jugement fait référence au garage.

 10   M. ROBINSON : [interprétation] Il s'agit d'un jugement de 18 pages. Dans ce

 11   cas-là, peut-être qu'on pourrait faire une pause de cinq à dix minutes de

 12   façon à ce qu'il puisse le lire et de façon à ce qu'il soit pleinement

 13   conscient de la situation ?

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Les Juges de la Chambre n'ont aucun

 15   problème, mais ceci va être décompté du temps de la Défense. Nous allons

 16   donc faire une pause de cinq minutes.

 17   --- La pause est prise à 9 heures 27.

 18   --- La pause est terminée à 9 heures 42.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, est-ce que vous avez

 20   terminé votre lecture ?

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, et nous avons déterminé de quoi il en

 22   retourne. Je voudrais qu'on nous affiche le 1D3043. Il s'agit d'un jugement

 23   en première instance du tribunal cantonal de Sarajevo. Je voudrais qu'on

 24   nous montre la page 2, la page suivante. Dans l'exposé des motifs -- je

 25   précise qu'il s'agit de la page 3 en version anglaise. Alors, dans cet

 26   exposé des motifs, disais-je, il est indiqué à la ligne 5 ou 6 que :

 27   "…l'adjoint du procureur cantonal, à l'occasion de l'audience

 28   principale, a modifié en partie l'acte d'accusation en faisant en sorte


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  1   d'accuser Miodrag Andric pour les mêmes chefs d'accusation mais avec un

  2   présenté factuel des choses quelque peu modifié…".

  3   Et à ce titre, je voudrais qu'on nous affiche la page suivante,

  4   c'est-à-dire page 8, et 5 en version anglaise.

  5   On dit au paragraphe 2 :

  6   "Sefik Hurko a déclaré qu'il a été fait prisonnier dans le garage de

  7   l'accusé…"

  8   M. KARADZIC : [interprétation]

  9   Q.  Monsieur Andric, est-ce que vous pouvez nous dire si votre père, à

 10   l'occasion du prononcé de cette sentence en première instance, a été mis en

 11   accusation pour le garage ?

 12   R.  Le garage a tout le temps été mentionné à l'occasion du procès.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Andric, étant donné que vous,

 14   vous avez parlé en même temps que l'accusé, les interprètes ne vous ont pas

 15   bien entendu. Je vous prie de répéter votre réponse, et à l'avenir veuillez

 16   faire une petite pause avant que de commencer à répondre à la question qui

 17   vous est posée.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Pendant toute la durée du procès, on a fait

 19   état du garage. Cela a été partie intégrante du procès, avec le reste.

 20   M. KARADZIC : [interprétation]

 21   Q.  Merci. Est-ce que vous savez nous dire à quel effet le procureur a

 22   modifié l'acte d'accusation pendant le procès lui-même ?

 23   M. ZEC : [interprétation] Ça, c'est une conjecture.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Zec.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Moi, je ne lui ai pas demandé d'émettre des

 26   conjectures. Je lui ai demandé s'il le savait, et il est dit ici que ça a

 27   été modifié. Il n'y a pas d'élément de preuve disant qu'il y a eu un

 28   jugement de rendu.


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, un instant.

  2   Monsieur Zec.

  3   M. ZEC : [interprétation] M. Karadzic a convié le témoin à faire un

  4   commentaire au sujet de ce que le procureur dans cette affaire-là a modifié

  5   à l'acte d'accusation. Je trouve que cela n'est pas approprié comme façon

  6   de procéder.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Moi, j'ai cru comprendre que la question

  8   était celle de demander au témoin s'il savait si l'acte d'accusation avait

  9   été modifié. Je crois que le témoin est à même de répondre.

 10   Vous pouvez répondre, Monsieur Andric.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Je crois que par la suite ils ont renoncé à ce

 12   volet relatif au garage.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 14   Excellences, dans le jugement rendu en première instance, ce n'est pas

 15   mentionné comme étant un élément de la condamnation, et c'est la raison

 16   pour laquelle ce n'est pas mentionné du tout en deuxième instance.

 17   M. KARADZIC : [interprétation]

 18   Q.  Est-ce qu'on a déclaré votre père coupable de quoi que ce soit ?

 19   R.  Non.

 20   Q.  Merci.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ça, c'est pour ce qui est de

 22   l'interrogatoire principal ?

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui. Mais pour ce qui est du jugement rendu, le

 24   fait est que dans la première instance il n'y a eu condamnation, et c'est

 25   la raison pour laquelle au niveau de l'appel, personne ne fait mention du

 26   garage, ni l'accusation, ni la défense.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Fort bien. Merci.

 28   Comme vous l'avez remarqué, Monsieur Andric, votre témoignage au principal


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  1   a été versé au dossier en majeure partie sous forme écrite plutôt que de

  2   vous entendre oralement au prétoire. Vous allez maintenant être contre-

  3   interrogé par M. Zec, qui est le représentant du bureau du Procureur.

  4   M. ZEC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  5   Contre-interrogatoire par M. Zec :

  6   Q.  [interprétation] Bonjour à vous, Monsieur Andric.

  7   R.  Bonjour.

  8   Q.  Je crois que les choses sont claires, mais permettez-moi tout de même

  9   de vous poser plusieurs questions au sujet de votre biographie. Votre père

 10   s'appelle Miodrag Andric, et il est connu comme Mico; c'est bien cela ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Votre maison de famille se trouve au village de Kosovo, municipalité de

 13   Rogatica; est-ce bien exact ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  A côté de votre maison de famille, il y a un garage où Sefik Hurko,

 16   Fejzo Hurko et Izeta Hurko, ainsi que Abdulah Hurko, ont été détenus le 14

 17   août ou vers le 14 août 1992. Est-ce bien exact ? Est-ce que ces gens-là

 18   ont été gardés dans le garage ?

 19   R.  Non. Ils n'ont pas été détenus. Ils ont été accueillis là. Le garage

 20   n'a jamais été fermé. Il y avait Hurko Sefik, Fejzo et l'épouse de Fejzo,

 21   non pas la quatrième personne que vous avez mentionnée.

 22   Q.  Et Abdulah ?

 23   R.  Non.

 24   Q.  Mais Abdulah Hurko est considéré comme étant disparu depuis. Je suppose

 25   que vous ne savez rien au sujet de l'endroit où il pourrait se trouver ?

 26   R.  Il n'y a pas eu de quatrième personne d'amenée là, et cette quatrième

 27   personne n'a pas été là du tout. Est-ce qu'il y a eu mort de cet homme

 28   pendant l'attaque, je ne veux pas en parler. Je ne le sais pas. Mais je


Page 34454

  1   vous dis qu'ils étaient trois dans ce garage. Ils n'ont pas été enfermés.

  2   Le garage était ouvert tout le temps, et ils sont restés là pendant très

  3   peu de temps.

  4   Q.  Parmi les soldats qui ont gardé ces membres de la famille Hurko, il y

  5   avait Stojan Perkovic; Brane Krsmanovic; Dragomir Abazovic, surnommé Pidje;

  6   Danko Neric et Rajko Kusic. Est-ce bien exact ?

  7   R.  Il y avait eu plusieurs personnes. Rajko Kusic, Stojan Perkovic, un

  8   dénommé Krsmanovic, un dénommé Abazovic. Oui, je crois que c'est tout. Mais

  9   ils ne les ont pas gardés détenus. Ils se sont entretenus avec eux.

 10   Q.  Les membres de cette famille Hurko ont été gardés dans votre garage

 11   contre leur volonté, et on ne les a pas autorisés à s'en aller; est-ce bien

 12   exact ?

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je remarque qu'il y a une question

 14   d'interprétation. Vous dites qu'ils ont "été gardés", et le témoin répond

 15   qu'"ils n'ont pas été détenus".

 16   M. ZEC : [interprétation] Oui, j'ai remarqué le même aspect, Monsieur le

 17   Président.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Eh bien, gardez cela à l'esprit, et

 19   continuez.

 20   M. ZEC : [interprétation]

 21   Q.  Monsieur Andric, est-ce que vous pouvez répondre à ma toute dernière

 22   question ou vous voulez que je la répète ?

 23   R.  Répétez, s'il vous plaît.

 24   Q.  La famille Hurko a été gardée dans votre garage contre sa volonté, et

 25   elle n'a pas eu l'autorisation de s'en aller, n'est-ce pas ?

 26   R.  Ils n'ont pas été mis en détention. Une fois qu'ils ont été capturés

 27   suite à une contre-attaque des forces serbes, on a trouvé chez eux un

 28   pistolet et deux boîtes de 70 cartouches. Ils ont donc été capturés eux


Page 34455

  1   aussi, et ils ont été emmenés à Rogatica. On les a mis de côté, là, parce

  2   que parmi les membres de l'armée il y avait des gens dont les frères et les

  3   membres de la famille avaient péri. On ne voulait pas que quelque chose

  4   leur arrive à ceux-là. On ne voulait pas qu'il y ait de vengeance

  5   irréfléchie de la part d'individus de ce genre. On les a donc mis à l'abri,

  6   là, en attendant un véhicule qui les transporterait vers Rogatica.

  7   Q.  Monsieur Andric, je remarque que vous êtes en train de répéter toute

  8   une série de faits.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Laissez-moi intervenir.

 10   La question était celle-ci, Monsieur Andric. Avaient-ils la possibilité de

 11   s'en aller pendant qu'ils sont restés dans votre garage ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Ils avaient l'autorisation de s'en aller, mais

 13   ils n'avaient pas où aller. Il y avait déjà une attaque en cours. Ils

 14   étaient plus en sécurité là qu'à quelque endroit que ce soit ailleurs dans

 15   la zone de combat.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous revenons vers vous, Monsieur Zec.

 17   M. ZEC : [interprétation] Merci.

 18   Q.  Sefik, Fejzo et Abdulah ont été battus et torturés par des soldats qui

 19   les ont gardé dans votre garage; est-ce bien exact ?

 20   R.  J'ai d'abord indiqué que le quatrième, ce Abdulah, on ne l'a jamais

 21   amené au garage. Pendant tout leur séjour là-bas, j'étais présent, et

 22   j'affirme en toute responsabilité qu'il n'y a eu aucun mauvais traitement

 23   et aucun abus.

 24   Q.  En 2009, Stojan Perkovic a plaidé coupable devant la cour de Bosnie-

 25   Herzégovine pour des crimes commis à Rogatica, y compris ce qui a été

 26   commis dans votre garage; le saviez-vous cela ?

 27   R.  Je sais qu'il est en train de purger une peine. Pour ce qui est du

 28   reste, je ne le sais pas. Je ne sais pas pour quel délit il est en train de


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  1   la purger, sa peine.

  2   Q.  Le jugement figure dans les éléments de preuve de cette affaire. Il

  3   s'agit de la pièce D01665. Mais toujours est-il, Monsieur Andric, que la

  4   réalité est celle-ci : Stojan Perkovic a plaidé coupable de ce délit, et il

  5   s'agit d'un délit que vous dites ne s'être jamais produit; c'est bien cela

  6   ?

  7   R.  Il n'y a eu aucun mauvais traitement, là. Je ne sais pas ce qu'il a

  8   reconnu pour ce qui est de son acte d'accusation. Il n'y a pas eu de

  9   mauvais traitement dans le garage. Il n'y a qu'une vérité. Il n'y en a pas

 10   deux, et la vérité est celle que je vous ai dite. Je suis prêt à aller sur

 11   un détecteur de mensonges pour déterminer si je dis la vérité, et on peut

 12   soumettre au détecteur de mensonges ceux qui disent le contraire. On verra

 13   qui sortira de là comme étant celui à dire la vérité.

 14   Q.  Soyons clairs. J'imagine que vous êtes conscient du fait que Sefik

 15   Hurko a été une fois de plus gardé dans votre garage le jour d'après,

 16   c'est-à-dire le 15 août 1992. Est-ce que vous le saviez cela ?

 17   R.  Non. Après avoir été emmené, il n'est plus ramené au garage. Il n'est

 18   plus revenu. Ce sont de fausses déclarations, ceux-là.

 19   Q.  Vous nous avez dit que vous avez été chauffeur et policier dans la

 20   police militaire de la Brigade de Rogatica. Le commandant de brigade,

 21   c'était Rajko Kusic, n'est-ce pas ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Et Ljubomir Cerovic, cet individu auquel vous faites référence dans

 24   votre déclaration, se trouve être à la tête de ce secteur chargé de la

 25   sécurité du renseignement jusqu'au 30 novembre 1992, date à laquelle il a

 26   perdu la vie. Après Cerovic, le nouveau chef du département de la sécurité

 27   du renseignement est devenu Zoran Carkic; est-ce bien exact ?

 28   R.  Oui.


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  1   Q.  Votre supérieur hiérarchique immédiat au niveau de la police militaire,

  2   c'était un dénommé Radenko Ilic, n'est-ce pas ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Vous nous avez dit dans votre déclaration que vous avez été à Rasadnik

  5   à plusieurs reprises pendant l'exercice de vos fonctions. Il est exact de

  6   dire que les civils musulmans ont été détenus à Rasadnik et, parmi eux il y

  7   avait des vieillards et des femmes ?

  8   R.  A côté de Rasadnik, à côté de cette unité de détention militaire, il y

  9   avait un centre d'accueil qui a été déménagé là après la cessation de

 10   l'utilisation de l'école secondaire. Ils n'ont pas été mêlés aux militaires

 11   qui étaient détenus. Ils se trouvaient dans un bâtiment qui se trouvait

 12   juste à côté de cette unité de détention militaire.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] On a dit, il faut dire "relocated" au lieu de

 14   "located". On les a déplacés de l'école secondaire.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vos propos n'ont pas été traduits, parce

 16   que vous avez parlé en même temps que l'interprétation se produisait.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je m'excuse. A la ligne 2, le témoin a dit qu'à

 18   côté de cette unité de détention militaire il y avait un centre d'accueil

 19   qui se trouvait être déménagé depuis l'école lorsque l'école a rouvert ses

 20   portes. Et on n'a pas dit "located in", mais "relocated from" en anglais.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 22   Veuillez continuer, Monsieur Zec.

 23   M. ZEC : [interprétation] Je voudrais qu'on nous affiche à présent le 65

 24   ter 24479.

 25   Q.  Monsieur Andric, vous allez voir devant vous une liste de prisonniers

 26   de guerre envoyés par le commandement du Corps de la Drina vers le

 27   commandement de la Brigade d'infanterie légère de Prodrinje, la 4e de ces

 28   brigades, à l'intention du lieutenant-colonel Cerovic, 1er février 1993. Si


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  1   vous vous penchez sur l'intitulé sur le document, vous allez voir qu'il est

  2   fait référence à Vili. La Chambre a reçu des éléments de témoignage disant

  3   que ce "Vili" était un surnom, le surnom de Vinko Bojic, qui était un

  4   gardien à Rasadnik. En d'autres termes, Vili, c'est Vili camp, c'est le

  5   camp de Rasadnik; c'est bien cela ?

  6   R.  Ce n'est pas un camp. C'était un centre d'accueil. Pour ce qui est de

  7   la prison militaire ou de la détention militaire, c'était une installation

  8   de détention. Et Rasadnik, personne ne l'appelait Vili.

  9   Q.  Quand on fait référence à ce camp de Vili, c'est une référence faite à

 10   Rasadnik, n'est-ce pas ?

 11   R.  Mais ce n'était pas un camp, le centre s'appelait Rasadnik. Ça ne

 12   s'appelait pas Vili.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que "lugoru" en B/C/S ça veut

 14   dire "camp" ?

 15   Je voudrais entendre les interprètes nous le confirmer.

 16   L'INTERPRÈTE : Les interprètes confirment.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 18   Veuillez continuer, Monsieur Zec.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais rectifier. A la deuxième ligne, il

 20   a dit que "personne n'a appelé Rasadnik par le terme de Vili". Page 20,

 21   ligne 2.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous confirmez ceci, Monsieur

 23   Andric ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que vous pouvez répéter votre question

 25   ?

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non. Ce que l'accusé vient de nous dire,

 27   c'est que vous avez déclaré que Rasadnik, ça n'a jamais été appelé Vili.

 28   Est-ce que vous confirmez avoir dit cela, Monsieur Andric ?


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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bon, Monsieur Zec.

  3   M. ZEC : [interprétation]

  4   Q.  Est-ce que vous confirmez que Vinko Bojic était connu sous le surnom de

  5   Vili et il était gardien à Rasadnik ?

  6   R.  Oui. Oui.

  7   Q.  Penchons-nous un peu sur cette liste de noms --

  8   M. ZEC : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai fait référence à la

  9   pièce P03267, page 7, quand j'ai dit que vous avez obtenu des éléments de

 10   preuve au sujet de Vinko Bojic et de son surnom Vili.

 11   Q.  Alors, Monsieur Andric, si vous vous penchez sur cette liste de noms,

 12   il y a un nom qui est celui d'Edina Musovic au numéro 1. Et Edina, c'est un

 13   nom de femme musulmane, n'est-ce pas ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Edina est née en 1972. Et au numéro 2, il y a Biba Kustura. Biba, c'est

 16   aussi un nom de femme musulmane, n'est-ce pas ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Biba est née en 1928. Au numéro 3, on voit Nura Kustura. Nura, c'est

 19   encore un nom de femme musulmane, n'est-ce pas ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Nura est née en 1930. Au numéro 4, on dit Hanuma Kustura. Ce nom

 22   apparaît dans un autre document que je vous montrerai tout à l'heure.

 23   Alors, il est dit que Hanuma Kustura, c'est également un nom de femme

 24   musulmane, n'est-ce pas ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Et Hanuma est née en 1892, ce qui fait qu'à l'époque de sa détention,

 27   elle avait 101 ans, Monsieur Andric, n'est-ce pas ?

 28   R.  Eh bien, d'après ceci, oui, mais je n'ai pas eu l'occasion de voir qui


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  1   se trouvait là-bas, mon travail ne consistait pas à aller dans ces

  2   bâtiments-là. Mon travail consistait à amener là des soldats qui avaient

  3   enfreint la discipline militaire. Je ne peux pas vous confirmer qui il y

  4   avait là-bas.

  5   Q.  Je viens de vous donner lecture des quatre premiers noms qui étaient

  6   des noms de femmes. Mais, en fait, il y a eu des noms qui vont jusqu'au

  7   numéro 17 et, au numéro 41, en page suivante de la liste. Il s'agit en

  8   réalité d'une chose, Monsieur Andric, c'est qu'à Rasadnik on avait détenu

  9   également des civils, n'est-ce pas ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Aux numéros 32 à 35, on voit les noms de Sefik Hurko, de Mahir

 12   Jasarevic, Fejzo Hurko, et Alija Isakovic. Vous avez lu leurs déclarations

 13   et ils ont tous affirmé avoir été détenus à Rasadnik; c'était bien exact,

 14   n'est-ce pas ?

 15   R.  Oui.

 16   M. ZEC : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais demander le

 17   versement au dossier de ce document.

 18   M. ROBINSON : [interprétation] Pas d'objection.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce sera versé au dossier.

 20   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P6155, Madame, Messieurs

 21   les Juges.

 22   M. ZEC : [interprétation] Maintenant, le 06153.

 23   Q.  Monsieur Andric, vous avez devant vous une liste de personnes détenues

 24   datée du 10 avril 1993. Cette liste a été envoyée par le commandement du

 25   Corps de la Drina, à savoir le lieutenant-colonel Cerovic, et comme on a pu

 26   le voir il y a quelques instants de cela, c'est lui qui a été le

 27   destinataire de la liste. M. Cerovic est en train d'envoyer la liste au

 28   commandement du Corps de la Bosnie de l'est, au ministère de la Justice et


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  1   de l'Administration, à un certain Slobodan Aviljas. Sur cette liste, on

  2   voit des noms de civils musulmans dont je vous ai donné lecture tout à

  3   l'heure. Le voyez-vous cela ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Mahir Jasarevic est au numéro 32 de la page suivante de la liste, et on

  6   a déjà vu ceci dans la déclaration relative à Mahir Jasarevic. Il s'agit de

  7   la pièce 1D07602, page 4. Mahir a dit en été 1993 que Vinko Bojic, Zoran

  8   Carkic et vous-même, Novica Andric, vous les avez fait monter à bord d'un

  9   autocar avec d'autres prisonniers, y compris une femme enceinte, et vous

 10   les avez emmenés à Zvornik. Alors, Monsieur Andric, ces civils ont été

 11   détenus à Rasadnik, et ça, vous le savez parce que vous avez emmené un

 12   groupe d'entre eux vers Zvornik; c'est bien exact ce que j'ai dit, non ?

 13   R.  C'est exact. Ce groupe était destiné à se rendre sur le territoire

 14   musulman, car ils avaient exprimé le désir de passer de l'autre côté des

 15   lignes pour parvenir au territoire contrôlé par l'armée représentant leur

 16   peuple. Les autorités musulmanes ont empêché l'accord destiné à leur

 17   permettre de se rendre sur le territoire sous leur contrôle, et je crois

 18   qu'un jour ou deux plus tard ils ont dû revenir.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un commentaire supplémentaire. Est-ce

 20   que vous êtes d'accord sur le fait qu'ils ont été détenus à Rasadnik avant

 21   leur transfert vers Zvornik ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Là-bas, c'était un centre d'accueil, ce centre

 23   qui a été créé et qui abritait des gens qui étaient venus de l'école. Je ne

 24   sais pas exactement quelles sont toutes les personnes qui séjournaient là-

 25   bas. Je ne suis pas entré dans ce centre, donc je n'ai pas vu toutes ces

 26   personnes, je ne les connaissais pas personnellement.

 27   M. ZEC : [interprétation]

 28   Q.  Monsieur Andric, nous parlons des gens que vous avez conduits à


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  1   Zvornik. C'étaient bien des gens qui avaient été détenus à Rasadnik, n'est-

  2   ce pas ? 

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Mahir a aussi déclaré dans sa déclaration, page 4, que des femmes, des

  5   enfants et des personnes âgées de Satorovici, Berkovici et d'autres

  6   villages de la région de Rogatica avaient été détenus à Rasadnik.

  7   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce vous souhaitez le chargement

  9   informatique de cette déclaration ?

 10   M. ZEC : [interprétation] Oui, c'est tout à fait possible, Monsieur le

 11   Président. Il s'agit du document 1D07602, page 4.

 12   Q.  Et Mahir a déclaré que des femmes, des enfants et des personnes âgées

 13   venant de Satorovici, de Berkovici, et d'autres villages de la région de

 14   Rogatica avaient été détenus à Rasadnik. Il a dit que deux femmes âgées de

 15   Berkovici - Nura, qui avait 102 ans, et Aisa, âgée de 101 [comme

 16   interprété] ans - sont décédées après un an de détention. C'est bien ce qui

 17   s'est passé à Rasadnik, n'est-ce pas ?

 18   R.  Je ne suis pas au courant. C'est possible, mais je ne suis pas au

 19   courant.

 20   Q.  Dans ce cas, je demande que l'on affiche la pièce P06152. C'est un

 21   rapport d'exhumation daté du 4 novembre 1998, et le passage qui m'intéresse

 22   se trouve en page 9 de la version anglaise, page 7 de la version B/C/S.

 23   Dans cette partie du rapport d'exhumation, il est question de Rasadnik,

 24   Monsieur Andric. Selon ce rapport, 14 corps d'êtres humains ont été exhumés

 25   dans ce lieu, des personnes qui provenaient de Rasadnik. Au point 11, on

 26   voit le nom de Hanka Kustura, né en 1895. Et au point 12, on voit le nom de

 27   Sejfo Mirvic, né en 1948. En page suivante, on trouve le nom d'Aisa

 28   Osmanovic, née en 1898, ce qui signifie qu'elle avait 95 ans en 1993. Halil


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  1   Vatres figure également sur la liste, né en 1928.

  2   Monsieur Andric, la réalité, c'est bien qu'un certain nombre de civils sont

  3   morts à Rasadnik en raison des mauvaises conditions auxquelles ces

  4   personnes ont été soumises là-bas, n'est-ce pas ?

  5   R.  Je ne suis pas au courant, car comme je l'ai déjà dit, j'allais très

  6   rarement à Rasadnik. Donc tout ce qui se passait là-bas, je ne le sais pas.

  7   Q.  A la fin de votre déclaration, vous faites référence aux événements

  8   survenus après la chute de Zepa en 1995. Vous parlez d'Ahmet Brgulja. Mais

  9   j'aimerais d'abord vous interroger au sujet d'Avdo Palic. Vous savez qui

 10   était Avdo Palic ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  La VRS a capturé Avdo Palic après la chute de Zepa et il a été détenu

 13   dans un appartement de Rogatica, n'est-ce pas; c'est exact ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Cet appartement était utilisé par Zoran Carkic, alors qu'il appartenait

 16   en fait à un Musulman de Rogatica; c'est exact, ça aussi, n'est-ce pas ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  C'est vous qui avez fourni les gardes pour cet appartement, et les

 19   gardes étaient Goran Ristanovic, Slobodan Obrenovic et Danko Frganja,

 20   n'est-ce pas ? Ces trois hommes devaient garder Avdo Palic dans cet

 21   appartement, n'est-ce pas ?

 22   R.  Ils ont été emmenés sur place pour être à ses côtés pendant son séjour

 23   à cet endroit.

 24   Q.  Selon les ordes émis par l'Etat-major principal de la VRS le 10 août

 25   1995, vous-même, Monsieur Andric, et Zoran Carkic avez conduit en voiture

 26   Avdo Palic jusqu'à une prison à un autre endroit, n'est-ce pas ?

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Le nom de la prison ne figure pas au compte

 28   rendu.


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  1   M. ZEC : [interprétation] Il s'agit de la prison de Mlin, non loin de

  2   Bijeljina.

  3   Q.  C'est bien vous qui avez conduit Avdo Palic jusqu'à Mlin à partir de

  4   Rogatica, n'est-ce pas ?

  5   R.  Oui.

  6   M. ZEC : [interprétation] Je demande l'affichage du document 65 ter 24641.

  7   Q.  Monsieur, vous allez voir maintenant un ordre émanant de Ljubisa Beara

  8   qui date du 10 août 1995. Au paragraphe 1, nous trouvons une référence au

  9   fait qu'Atlantide doit être transféré à Mlin, dans la municipalité de

 10   Bijeljina. Au paragraphe 2, nous lisons que le capitaine Carkic a organisé

 11   ce voyage avec le commandant Kusic et qu'il s'est chargé personnellement de

 12   cette mission en annonçant son arrivée au colonel Todorovic à l'IBK, et

 13   cetera. Monsieur Andric, il s'agit bien de l'ordre selon lequel vous-même

 14   et Carkic avez conduit en voiture Avdo Palic jusqu'à Mlin, n'est-ce pas ?

 15   R.  Je ne sais pas quel était le nom de l'endroit, mais enfin, en gros, il

 16   est vrai que nous sommes allés là-bas.

 17   Q.  Sur ordre de l'état-major principal de la VRS, ce qui est exact

 18   également, n'est-ce pas ?

 19   R.  Oui.

 20   M. ZEC : [interprétation] Monsieur le Président, je demande le versement au

 21   dossier de ce document.

 22   M. ROBINSON : [interprétation] Pas d'objection.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il est admis.

 24   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce P6156.

 25   M. ZEC : [interprétation]

 26   Q.  La raison pour laquelle Palic a été emmené à Mlin, et la raison pour

 27   laquelle il a été retenu avant cela dans l'appartement dont nous avons

 28   parlé, c'est qu'il fallait le dissimuler au public et au CICR, n'est-ce pas


Page 34465

  1   ?

  2   R.  Sa rétention dans cet appartement lui a permis de jouir de meilleures

  3   conditions que les conditions dans lesquelles se trouvaient les autres

  4   prisonniers, car il s'agissait d'un haut officier, d'un officier de haut

  5   rang. Voilà la raison. Il a été déplacé de là parce qu'il y avait des

  6   soldats dont les membres de la famille avaient été tués au cours de

  7   l'attaque de Bubanj Potok, tués donc par des forces qui étaient conduites

  8   par Avdo Palic. Donc il existait une crainte que ces familles souhaitent

  9   lui faire du mal.

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Au compte rendu d'audience à la ligne 23, il

 11   serait préférable d'utiliser en anglais le mot "sheltered" plutôt que

 12   "removed". Et je ne vois aucune mention de Bubanj Potok.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je crois que nous pouvons poursuivre.

 14   M. ZEC : [interprétation]

 15   Q.  Le corps d'Avdo Palic a été exhumé à partir d'une fausse commune qui se

 16   trouvait à Vragolovi, qui est à 10 kilomètres de la ville de Rogatica. Vous

 17   le savez cela, n'est-ce pas ?

 18   R.  Je ne suis pas au courant.

 19   Q.  Monsieur Andric, qui a ramené Avdo Palic de Mlin ? C'est bien cette

 20   même personne qui l'a tué et qui l'a enterré à Vragolovi, n'est-ce pas ?

 21   R.  Je ne suis pas au courant de cela. Pour ma part j'ai remis Avdo Palic à

 22   Mlin. Quant à ce qui s'est passé par la suite, il existe sans doute des

 23   documents qui le montrent. S'agissant de ce que je sais, cela ne concerne

 24   que le voyage de Rogatica à Bijeljina, et je l'ai laissé à Bijeljina.

 25   Q.  Parlons maintenant d'Ahmet Brgulja. Ahmet n'est pas arrivé --

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Une seconde. Pourrions-nous jeter un

 27   coup d'œil à la carte pour situer Rogatica, Mlin et le lieu où se trouve la

 28   fosse commune.


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  1   M. ZEC : [interprétation] Absolument. Je demande l'affichage du document 65

  2   ter numéro 19145. Monsieur le Président, c'est une carte qui se trouve dans

  3   notre dossier pour la Chambre. J'aimerais que l'on agrandisse la partie

  4   centrale de cette carte.

  5   Q.  Monsieur Andric, est-ce que vous voyez le premier triangle à partir du

  6   bas, à côté duquel figure la mention "garage de Novica Andric" ? C'est donc

  7   à peu près l'endroit où se trouve la maison de votre famille. Et puis un

  8   peu plus haut, vous voyez la mention de la ville de Rogatica sur la carte,

  9   n'est-ce pas ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Et à gauche de la "ville de Rogatica", on voit une étoile accompagnée

 12   de la mention "mosquée de Vragolovi", et au-dessus on voit la mention

 13   "Vragolovi", n'est-ce pas ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Et un peu à droite on voit la mention "ferme de Rasadnik". Est-ce que

 16   vous pouvez confirmer en gros l'exactitude de ces localisations sur la

 17   carte ?

 18   R.  Oui.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Et Mlin, la prison de Mlin ?

 20   M. ZEC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, mais j'aimerais

 21   d'abord que nous en terminions avec cette carte, et ensuite j'en afficherai

 22   une autre.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Cette carte n'est pas encore versée au

 24   dossier ?

 25   M. ZEC : [interprétation] A ma connaissance, non.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Des objections, Maître Robinson ?

 27   M. ROBINSON : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Cette carte est admise au dossier.


Page 34467

  1   M. LE GREFFIER : [interprétation] En tant que pièce P6157.

  2   M. ZEC : [interprétation] Je demande l'affichage de la pièce P04675.

  3   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ceci ne sera pas diffusé vers

  5   l'extérieur du prétoire. Mais pourquoi est-ce que ce document est sous pli

  6   scellé ?

  7   M. ZEC : [interprétation] Je n'ai pas encore pu vérifier cela. Je vous

  8   remercie de me le rappeler, Monsieur le Président.

  9   M. ROBINSON : [interprétation] Je crois savoir pourquoi, c'est un document

 10   qui a un rapport avec des communications interceptées, je crois.

 11   M. ZEC : [interprétation] Je demanderais que l'on agrandisse --

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je crois qu'on aurait pu trouver une

 13   carte de meilleure qualité. Mais enfin, continuons.

 14   M. ZEC : [interprétation] Monsieur le Président, ce qui m'intéresse c'est

 15   que vous puissiez situer Mlin et Vragolovi.

 16   Q.  Monsieur Andric, Mlin se trouve bien non loin de Bijeljina, n'est-ce

 17   pas ? Cette prison de Mlin où vous avez amené Palic, elle se trouve bien au

 18   voisinage de Bijeljina ?

 19   R.  C'est très précisément dans la ville de Bijeljina.

 20   Q.  Et sur cette carte vous voyez Bijeljina sur la droite de la carte,

 21   n'est-ce pas ?

 22   R.  Oui.

 23   M. ZEC : [interprétation] Est-ce qu'on peut maintenant dérouler la carte

 24   vers le bas sur l'écran. Encore un peu.

 25   Q.  Est-ce que vous voyez le nom de Rogatica tout en bas de la carte ?

 26   R.  Oui.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quelle est la distance qui sépare Mlin

 28   et Rogatica approximativement ? Est-ce que c'est plus de 100 kilomètres ?


Page 34468

  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Deux cent kilomètres.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci. Cela suffira.

  3   M. ZEC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  4   Q.  Concentrons-nous maintenant sur Ahmet Brgulja. Ahmet n'est pas arrivé à

  5   Kladanj, comme vous l'avez laissé entendre. Il a été maintenu en détention

  6   à Rasadnik, n'est-ce pas ?

  7   R.  Moi, je l'ai vu à Boksanica, quand il était en train de se diriger vers

  8   Kladanj. Je crois qu'il est parti, et quand est-ce qu'il est rentré, ça je

  9   ne sais pas. Moi, je l'ai vu à Boksanica, comme je l'ai déclaré. Il est

 10   parti dans le convoi qui se dirigeait vers Kladanj.

 11   M. ZEC : [interprétation] Je demande l'affichage du document D02133.

 12   Q.  Vous avez, Monsieur Andric, sous les yeux une liste de prisonniers

 13   musulmans qui a été établie par Zoran Carkic, en compagnie de qui vous avez

 14   conduit Avdo Palic jusqu'à Mlin. Cette liste a reçu autorisation de

 15   diffusion par Zdravko Tolimir. Il est écrit ici que :

 16   "A partir du 28 juillet 1995, les citoyens dont les noms suivent

 17   d'appartenance ethnique musulmane ont été logés au centre d'accueil de

 18   Rogatica."

 19   Ce centre d'accueil, c'est bien Rasadnik, n'est-ce pas ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Aux points 1, 2 et 3, nous trouvons les noms des dirigeants de Zepa,

 22   c'est-à-dire Mehmed Hajric, Hamdija Torlak, et Amir Imanovic [comme

 23   interprété]. Au point 14 [comme interprété], nous voyons le nom de Hamdija

 24   Muratovic [comme interprété], n'est-ce pas ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Au point 45, nous lisons qu'Atlantida, né en 1958, se trouve dans un

 27   autre lieu, un lieu sûr. Il s'agit bien d'Avdo Palic que vous-même et

 28   Carkic déteniez dans l'appartement dont nous avons parlé, n'est-ce pas ?


Page 34469

  1   R.  Oui.

  2   M. ZEC : [interprétation] Je n'ai pas d'autre question à poser au témoin,

  3   Monsieur le Président. Je vous remercie.

  4   Q.  Merci, Monsieur Andric.

  5   R.  Je vous en prie.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il vous faut combien de temps pour vos

  7   questions supplémentaires, Monsieur Karadzic ?

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je pense que 15 à 20 minutes suffiront. Peut-

  9   être même moins.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. Dans ces conditions nous allons

 11   faire la pause maintenant. Une demi-heure de pause, et nous reprenons nos

 12   débats à 11 heures.

 13   --- L'audience est suspendue à 10 heures 30.

 14   --- L'audience est reprise à 11 heures 02.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Zec.

 16   M. ZEC : [interprétation] Monsieur le Président, si vous m'autorisez encore

 17   à poursuivre deux minutes, car une question se pose au sujet du père de ce

 18   témoin, Miodrag Andric. Vous vous rappellerez peut-être qu'il y avait une

 19   question qui faisait partie de l'affaire dont nous parlons. M. Karadzic a

 20   affirmé que l'incident relatif au garage était pris en compte dans le

 21   procès, et il a dit en page 12 du compte rendu d'audience d'aujourd'hui que

 22   le procureur avait modifié l'acte d'accusation et que les faits relatifs au

 23   garage ont été abandonnés. Le témoin a admis cela. J'ai ici l'acte

 24   d'accusation, qui constitue le document 65 ter numéro 24688. C'est tout ce

 25   que j'aimerais revoir --

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous pouvez soumettre la question au

 27   témoin ?

 28   M. ZEC : [interprétation] Oui.


Page 34470

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous n'avons pas le texte dans prétoire

  2   électronique ?

  3   M. ZEC : [interprétation] Il est dans le prétoire électronique, mais

  4   malheureusement nous n'avons pas de traduction.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Hm.

  6   M. ZEC : [interprétation]

  7   Q.  [interprétation] Monsieur Andric, est-ce que vous voyez en première

  8   page de ce document le nom de votre père, Miodrag Andric, également connu

  9   sous le surnom de Mico ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Ceci est l'acte d'accusation retenu contre votre père, et il date du 6

 12   septembre 1996. Est-ce que vous confirmez que c'est bien l'acte

 13   d'accusation selon lequel votre père a été jugé à Sarajevo ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Je vous demanderais de bien vouloir lire lentement un passage. Vous

 16   voyez la mention "Date 3 juin 1996…" Or, je crois que c'est "1992" qui

 17   devrait être écrit, mais enfin je voudrais que vous lisiez lentement le

 18   passage qui suit -- ou plutôt, excusez-moi, prenez-en connaissance sans le

 19   lire à haute voix, et ensuite dites-nous, je vous prie, quelles sont les

 20   charges qui sont retenues dans ce document contre votre père, les incidents

 21   évoqués.

 22   R.  Il s'agit d'un acte d'accusation relatif au meurtre de trois civils,

 23   mais je crois qu'il y a eu un acte d'accusation modifié dans lequel le

 24   garage est évoqué.

 25   Q.  Il s'agit de l'acte d'accusation sur la base duquel votre père a été

 26   jugé et le jugement a été prononcé sur la base de cet acte d'accusation.

 27   Donc il n'y a pas mention du garage. Est-ce que vous êtes d'accord avec

 28   cela ?


Page 34471

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc la question posée consiste à

  2   demander au témoin si l'acte d'accusation a été modifié, ou bien, est-ce

  3   que Monsieur Zec, vous infirmez dans la présentation de vos moyens que ce

  4   document est l'acte d'accusation initial ?

  5   M. ZEC : [interprétation] C'est exact, et c'est le seul acte d'accusation

  6   existant.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous pouvez poser la question au témoin.

  8   M. ZEC : [interprétation] Le témoin affirme que l'acte d'accusation a été

  9   modifié. Je dis pour ma part qu'il ne l'a pas été. Je peux lui reposer la

 10   question, mais il répondra de la même manière.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous pourriez par la suite prouver à

 12   quelle date l'acte d'accusation initial a été déposé, cet acte d'accusation

 13   contre Miodrag Andric.

 14   M. ZEC : [interprétation] Certainement, Monsieur le Président, mais cela

 15   doit être écrit dans le jugement. Un jugement doit faire état de l'acte

 16   d'accusation sur la base duquel son père a été jugé et est-ce que cet acte

 17   d'accusation a été modifié ou pas.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc, Monsieur Andric, est-ce que vous

 19   confirmez que le 6 septembre 1996 est bien la date à laquelle les premières

 20   poursuites ont été engagées contre votre père ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, ce n'est pas septembre, c'est juin. La

 22   date du meurtre, en fait, c'est le mois de juin. Mais je ne comprends pas

 23   pourquoi le témoin Hurko Sefik n'a pas été entendu pendant le procès si mon

 24   père a effectivement été mis en accusation pour les incidents liés au

 25   garage.

 26   M. ZEC : [interprétation]

 27   Q.  Encore une fois, tout dépend de l'acte d'accusation et l'acte

 28   d'accusation est évoqué dans le jugement.


Page 34472

  1   M. ZEC : [interprétation] Monsieur le Président, je renvoie les Juges de la

  2   Chambre -- parce que j'ai ici le document ID12018, qui est le jugement en

  3   première instance. Et en page 2, dans l'exposé des motifs, il est fait état

  4   de l'acte d'accusation --

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Jetons un coup d'œil.

  6   Quelle page ?

  7   M. ZEC : [interprétation] Cela devrait être la page 2 en B/C/S. Et page 2

  8   également en anglais. Voyons d'un peu plus près. Non, page 3 en anglais.

  9   J'en demande l'affichage.

 10   Q.  Monsieur Andric, vous voyez ce document ? C'est le jugement en première

 11   instance en 1997, et dans l'exposé des motifs nous lisons : Le procureur

 12   public principal de Sarajevo a mis en accusation sur la base de l'acte

 13   d'accusation numéro KT, et cetera, et cetera, Miodrag Andric. Donc, je

 14   reprends la question que je vous ai posée il y a quelques instants. Ceci

 15   est bien l'acte d'accusation initial sur la base duquel votre père Miodrag

 16   Andric a été mis en accusation, n'est-ce pas ?

 17   R.  Oui.

 18   M. ZEC : [interprétation] Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs les

 19   Juges, je demande le versement au dossier de cet acte d'accusation qui est

 20   le document 65 ter numéro 24688.

 21   M. ROBINSON : [interprétation] Pas d'objection.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie. Le document est admis.

 23   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il devient la pièce P6158, enregistré aux

 24   fins d'identification.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Karadzic.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 27   Nouvel interrogatoire par M. Karadzic :

 28   Q.  [interprétation] Monsieur Andric, étant donné que nous sommes en train


Page 34473

  1   de parler de ce document, je voudrais que l'on revienne sur l'exposé des

  2   motifs. On peut voir aux lignes 5 ou 6 que le procureur adjoint cantonal a

  3   partiellement modifié l'acte d'accusation durant l'audience.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

  5   Monsieur Zec.

  6   M. ZEC : [interprétation] Nous revenons à la même position qui était

  7   avancée au départ. M. Karadzic a demandé au témoin de faire un commentaire

  8   concernant les débats qui ont eu lieu durant le procès en Bosnie.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais nous n'avons pas entendu la

 10   question.

 11   M. ZEC : [interprétation] Mais je vois où cela va aller. Cela porte sur une

 12   modification très limitée de l'acte d'accusation qui n'est pas liée, qui

 13   n'a rien à voir avec l'abandon de certains chefs d'accusation qui sont au

 14   cœur de mon objection.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais nous n'avons pas entendu la

 16   question.

 17   Alors, allez-y, Monsieur Karadzic.

 18   M. KARADZIC : [interprétation]

 19   Q.  Donc, Monsieur le Témoin, cet acte d'accusation que l'on vous a montré,

 20   qui porte la date du 9 septembre 1996 et qui a été utilisé comme document

 21   de base, est-ce que ce document a été modifié durant ce procès ? Et dans

 22   quelle mesure le garage a-t-il été abordé durant le procès ?

 23   R.  Durant tout le procès on a parlé du garage et des témoins ont été

 24   entendus à ce sujet. Cela signifie que les personnes accusées ont été

 25   accusées d'avoir commis certains actes associés aux incidents du garage.

 26   Q.  Merci. Mais dans la reconstitution des faits concernant le garage ?

 27   R.  La reconstitution des faits a permis de déterminer que des témoins

 28   avaient fourni des faux témoignages. Et dans la première déclaration qui


Page 34474

  1   avait été faite à Sarajevo, le témoin avait dit qu'il y avait une petite

  2   porte attenante au garage, mais lorsqu'en fait ils sont arrivés sur les

  3   lieux, lorsqu'ils ont pris des photos du garage, le témoin a changé sa

  4   version des faits. En fait, il a modifié sa déclaration en fonction de ce

  5   qui lui convenait, et en fait ces déclarations étaient des faux

  6   témoignages.

  7   Q.  Merci. Qui a mené la reconstitution des faits concernant cet incident

  8   du garage ?

  9   R.  En fait, le bureau du Procureur cantonal, le MUP du canton de Sarajevo,

 10   le MUP de la Republika Srpska, l'ombudsman du Bureau des droits de l'homme

 11   ainsi qu'une institution représentant les droits de l'homme, ils étaient

 12   tous présents.

 13   Q.  Merci, Monsieur Andric. Je voudrais en fait vous demander quelque chose

 14   : cette liste qui vous a été présentée constitue la liste des personnes qui

 15   ont été appelées des personnes qui avaient été capturées. Est-ce que ces

 16   listes sont exactes ? Est-ce que vous savez si ces listes étaient fiables ?

 17   R.  Je ne sais pas. Je n'ai pas vraiment tous les éléments. Je ne sais pas

 18   qui était toutes ces personnes. En fait, je n'ai pas vraiment beaucoup

 19   d'informations à ce sujet.

 20   Q.  A la page 8 du compte rendu d'audience d'aujourd'hui, lignes 14 et 15,

 21   mon éminent collègue de la partie adverse, M. Zec, vous a fait part d'une

 22   information suivante, à savoir que M. Cerovic avait perdu la vie le 30

 23   novembre 1992. Est-ce que vous le connaissiez personnellement, et est-ce

 24   que c'est vrai que c'est ce jour-là qu'il a perdu la vie ?

 25   R.  C'est exact. Il a perdu la vie ce jour-là. Une mine antiblindée l'a

 26   tué.

 27   Q.  Merci. Est-ce qu'il s'agissait d'un événement important ? Est-ce que la

 28   brigade et le corps étaient au courant de cela ? Est-ce qu'il savait que ce


Page 34475

  1   dénommé Cerovic avait été tué ?

  2   R.  Je crois.

  3   Q.  Est-ce que M. Cerovic était une personne importante dans les structures

  4   militaires ?

  5   R.  Il était commandant en second pour la sécurité au sein de la brigade.

  6   Q.  Merci. J'aimerais maintenant que nous consultions la pièce P6155

  7   rapidement. Quel était le grade de M. Cerovic ?

  8   R.  Il était capitaine ou commandant. Je n'en suis pas sûr.

  9   Q.  Je vous demande de regarder la date sur ce document. Comment est-il

 10   possible que le 1er février 1993, le Corps de la Drina envoie des

 11   informations à son attention, c'est-à-dire trois ou quatre mois après qu'il

 12   ait été tué ?

 13   R.  Je ne sais pas.

 14   Q.  Merci.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Zec.

 16   M. ZEC : [interprétation] Peut-être qu'il faudrait consulter la dernière

 17   page de ce document, parce que je parlais de Ljubomir Cerovic, et le témoin

 18   l'a confirmé. Il était officier de sécurité. Désolé, c'est la première

 19   page.

 20   Et là on parle d'un Slobodan Cerovic. Moi, je ne parle pas d'un Slobodan

 21   Cerovic.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Qui était lieutenant-colonel.

 23   M. ZEC : [interprétation] Exactement. Donc, un grade différent.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne suis pas sûr qu'on voie

 25   "Slobodan".

 26   M. ZEC : [interprétation] C'est sur l'autre liste, pas sur celle-ci.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, mais on peut demander. Merci,

 28   Monsieur Zec.


Page 34476

  1   M. ZEC : [interprétation] Oui.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait maintenant --

  3   M. KARADZIC : [interprétation]

  4   Q.  En fait, est-ce qu'il y avait deux Cerovic dans la brigade ?

  5   R.  Non, il y en avait un qui était dans la brigade et l'autre qui était au

  6   niveau du Corps de la Drina.

  7   Q.  Merci. Et où il est mentionné quatrième, cela porte sur Rogatica,

  8   n'est-ce pas ?

  9   R.  [aucune interprétation]

 10   L'INTERPRÈTE : Les interprètes n'ont pas saisi la réponse du témoin.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, en raison des voix

 12   qui se chevauchaient, les interprètes n'ont pas saisi votre réponse.

 13   Quelle a été votre réponse, Monsieur le Témoin ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Brigade de Rogatica, 1ère Podrinje.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais quel poste occupait M. Cerovic au

 16   sein du Corps de la Drina ? Qui était le Cerovic qui était au sein du Corps

 17   de la Drina ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Slobodan Cerovic.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Et quel était son grade ? Que faisait-il

 20   dans cette brigade, dans ce corps ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas. Mais il est vrai que cette

 22   personne existait et qu'elle était au sein du corps.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce qu'il est impossible que ce

 24   dénommé Slobodan Cerovic, qui se trouvait au sein du Corps de la Drina, est

 25   en fait officier au sein de la Brigade d'infanterie légère de Podrinje ?

 26   C'est la raison pour laquelle le message lui était envoyé ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne sais pas.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien.


Page 34477

  1   Continuez, Monsieur Karadzic.

  2   M. KARADZIC : [interprétation] Merci. Est-ce que l'on pourrait consulter

  3   maintenant rapidement la pièce P6553.

  4   Q.  Slobodan Aviljas, est-ce que ce nom vous rappelle quelque chose ?

  5   R.  Non.

  6   Q.  Pourriez-vous consulter cette liste et voir si elle a été envoyée à

  7   Slobodan Aviljas ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Merci. J'aimerais maintenant --

 10   M. ZEC : [interprétation] Je vous prie de m'excuser. Il s'agit de la liste

 11   que je mentionnais précédemment et cette liste a été envoyée par Slobodan

 12   Cerovic.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je crois qu'on va y arriver. Pourquoi ne

 14   pas consulter la dernière page. Nous voyons donc commandant en second,

 15   lieutenant-colonel Slobodan Cerovic.

 16   M. ZEC : [interprétation] Et nous parlions de Ljubomir Cerovic qui était

 17   officier de sécurité. Donc, il s'agit de deux personnes différentes.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc, Monsieur Andric, est-ce que vous

 19   confirmez que ce document a été envoyé par Slobodan Cerovic, qui était

 20   commandant second au sein du Corps de la Drina et dont le grade était celui

 21   de lieutenant-colonel ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est possible, oui.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Allez-y, Monsieur Karadzic.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 25   M. KARADZIC : [interprétation]

 26   Q.  Quel était votre rôle dans le transfert du lieutenant-colonel Palic à

 27   Mlin ?

 28   R.  J'étais chauffeur au sein de la police militaire, donc c'est moi qui ai


Page 34478

  1   conduit ce véhicule le long de cette route.

  2   Q.  Merci. Est-ce que vous avez fait une déclaration quelconque quelque

  3   part à ce sujet ?

  4   R.  Oui, j'ai fait une déclaration au service de police criminelle de Banja

  5   Luka.

  6   Q.  Est-ce qu'ils vous ont fait confiance et comment avez-vous pu prouver

  7   que vous disiez la vérité ?

  8   R.  Eh bien, on m'a fait subir un test de détecteur de mensonges et on a

  9   ensuite conclu que ces déclarations étaient conformes à la vérité, comme

 10   c'était le cas.

 11   Q.  Aujourd'hui, à la page 22 et à la page 23, lorsqu'une question assez

 12   complexe vous a été posée, vous avez répondu par l'affirmative. J'aimerais

 13   que vous nous expliquiez comment on peut comprendre cette réponse

 14   affirmative. Lecture en anglais :

 15   "Question : Je vais donc vous lire les quatre premiers noms qui sont tous

 16   des noms de femmes. En fait, ils apparaissent jusqu'au numéro 17 ainsi

 17   qu'au numéro 41, la page suivante de la liste. La réalité, Monsieur Andric,

 18   c'est que des civils musulmans ont été détenus à Rasadnik, n'est-ce pas ?"

 19   Et vous répondez :

 20   "Oui."

 21   Pourriez-vous nous dire si vous confirmez que ces personnes se

 22   trouvaient à l'unité de détention de Rasadnik ?

 23   R.  Ils étaient au centre de réception. Ils étaient à côté les uns

 24   des autres. En fait, ils étaient au niveau du centre de réception.

 25   Q.  Merci. Ensuite, on peut voir, des lignes 32 à 35, je vais en

 26   donner lecture :

 27   "…les noms de Sefik Hurko, Alija Isakovic et Fejzo Hurko, dont vous

 28   avez examiné les déclarations, et ils disent tous qu'ils ont été détenus à


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  1   Rasadnik; c'est exact, n'est-ce pas ?"

  2   Et vous avez répondu par l'affirmative. Qu'est-ce qui est exact, que

  3   vous avez lu cette partie des déclarations ou est-ce que vous saviez que

  4   ces personnes étaient détenues à Rasadnik dans cette partie-là ?

  5   R.  Sefik Hurko, Izeta Hurko, Alija Isakovic et Fejzo Hurko n'étaient

  6   pas --

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Etant donné que les voix se

  8   chevauchaient, les interprètes n'ont pas saisi la fin de votre réponse.

  9   Pouvez-vous répéter. Sefik Hurko, Izeta Hurko, Fejzo Hurko et Alija

 10   Isakovic étaient quoi ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Ils étaient en détention militaire.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 13   M. KARADZIC : [interprétation]

 14   Q.  Merci. Et à la page 23 -- en fait, avant cela, pourriez-vous nous dire

 15   sur quelle base ils étaient en détention militaire alors que les autres se

 16   trouvaient au centre de réception ?

 17   R.  Les deux Hurko avaient des pistolets ainsi que des cartouches, 70 au

 18   total, c'est la raison pour laquelle ils étaient en détention militaire,

 19   parce qu'ils étaient considérés comme des personnes étant armées.

 20   Q.  Merci. Et ils ont été faits prisonniers où ?

 21   R.  Ceci s'est passé après la contre-attaque parce que les unités

 22   musulmanes du village de Madjer ont incendié les villages de Dobromirovici

 23   et Lelek. Et, durant la contre-attaque, la femme de Fejzo et Hurko Fejzo,

 24   ainsi que Sefko Hurko, ont été faits prisonniers.

 25   Q.  Merci. Et ils se trouvaient dans votre garage. Est-ce qu'ils étaient

 26   vos prisonniers ou les prisonniers de votre famille ou les prisonniers de

 27   qui ?

 28   R.  C'étaient les prisonniers de l'armée.


Page 34480

  1   Q.  Merci. Ici, à la page 23, je vais en donner lecture en anglais :

  2   "Les civils étaient détenus à Rasadnik et vous le savez parce que

  3   vous avez conduit un groupe de personnes faisant partie de leur groupe vers

  4   Zvornik."

  5   Et votre réponse :

  6   "Oui, c'est exact." Ensuite, vous avez dit -- on vous a posé la

  7   question. "Ce groupe était censé se rendre sur territoire militaire…" et

  8   vous avez dit :

  9   "C'est exact". Et, quand vous dites "c'est exact", est-ce que cela

 10   parle du fait que vous les avez conduits en voiture ou est-ce que vous

 11   parlez du fait qu'ils étaient prisonniers à Rasadnik ?

 12   Q.  Non, ils étaient dans ce centre et c'est la raison pour laquelle

 13   ils ont en fait exprimé le souhait de changer de lieu de résidence de façon

 14   à se rendre sur le territoire qui était contrôlé par leur peuple.

 15   Cependant, les autorités musulmanes n'ont pas permis cela. Ils leur ont

 16   permis de rentrer dans la zone de Tuzla, mais ensuite ils ont empêché cette

 17   entrée et ils sont revenus sur Rasadnik.

 18   Q.  Merci.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais maintenant que l'on affiche une

 20   carte sur les écrans qui porte la cote P6157.

 21   M. KARADZIC : [interprétation]

 22   Q.  J'aimerais que vous nous expliquiez à tous présents ici qui détenait

 23   quel territoire de façon à ce que tous les participants, mais

 24   principalement les Juges de cette Chambre de première instance, puissent

 25   bien comprendre qui contrôlait quoi.

 26   M. ZEC : [interprétation] Monsieur le Président, je ne pense pas que ceci

 27   ait été abordé dans le contre-interrogatoire ou dans l'interrogatoire

 28   principal.


Page 34481

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais je pense que ceci est pertinent

  2   pour bien comprendre qui détenait quoi et quels endroits sur cette carte

  3   étaient détenus par qui.

  4   M. ZEC : [interprétation] Peut-être que vous souhaitez l'entendre, mais

  5   c'est quelque chose qu'il aurait dû aborder dans le cadre de son

  6   interrogatoire principal.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quoi qu'il en soit, veuillez continuer,

  8   Monsieur Karadzic, nous aimerions entendre cela.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pourrait-on agrandir un peu la carte de façon à

 10   voir la partie centrale de la municipalité. Et je voudrais que l'on donne

 11   un stylet électronique au témoin, s'il vous plaît.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais commençons d'abord par agrandir

 13   cette carte. Est-ce que cela vous suffit, Monsieur Karadzic ?

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, je pense que ce sera bon.

 15   M. KARADZIC : [interprétation]

 16   Q.  Monsieur Andric, s'il vous plaît, pourriez-vous nous dire, par exemple,

 17   qui, à la fin de l'été 1992, durant cette période critique durant laquelle

 18   Rogatica a été libéré par les Serbes, donc durant cette période, où se

 19   trouvait la ligne de démarcation ou de séparation ? Qui avait le contrôle

 20   de quel territoire ? En utilisant la lettre S pour les Serbes et la lettre

 21   M pour les Musulmans.

 22   R.  Je vais essayer.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais votre question est tellement

 24   générale que j'aimerais savoir comment ceci découle du contre-

 25   interrogatoire, Monsieur Karadzic ? A moins que ceci ait une importance

 26   bien précise quant à l'endroit où se trouvait l'établissement scolaire ou

 27   le garage ou la maison de M. Andric à Vragolovi.

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président. Vragolovi a


Page 34482

  1   été mentionné. Donc, il serait bon de savoir qui contrôlait Vragolovi, qui

  2   aurait pu détruire la mosquée là-bas, qui se trouvait à quel endroit dans

  3   cette zone, de façon à mieux comprendre quels étaient les territoires

  4   détenus par les Serbes.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc, la mosquée -- oui, allez-y,

  6   Monsieur Zec.

  7   M. ZEC : [interprétation] La question de Vragolovi a été abordée suite à

  8   l'exhumation d'Avdo Palic, parce que c'est l'endroit où il a été exhumé. Il

  9   n'y a pas eu de question concernant Vragolovi concernant l'année 1992, soit

 10   dans l'interrogatoire principal soit dans le contre-interrogatoire.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais qui contrôlait Vragolovi en 1995,

 12   parce que ça, ça pourrait être pertinent.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais, Messieurs les Juges, toutes ces

 14   annotations pourraient avoir leur importance, parce que sinon l'Accusation

 15   ne fournirait pas une carte avec toutes ces annotations ?

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Peut-être qu'ils n'en ont pas trouvé une

 17   meilleure concernant la période en question. Alors, passez à autre chose,

 18   Monsieur Karadzic.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais est-ce que vous me permettriez de demander

 20   au témoin de tracer une ligne qui est la ligne de démarcation entre les

 21   territoires détenus par les Serbes et ceux détenus par les Musulmans en

 22   1992 ?

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Et comment cela découle-t-il du contre-

 24   interrogatoire ?

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Le garage, les combats et l'arrestation de ces

 26   personnes qui figurent sur cette liste, tout ceci s'est produit en 1992.

 27   Donc, j'aimerais que le témoin nous décrive la situation qui était celle de

 28   ces villages dans lesquels ces personnes ont été détenues. Pourquoi y


Page 34483

  1   avait-il des personnes âgées dans ces centres et pourquoi ces personnes

  2   n'étaient pas restées dans leurs villages ? Ceci découle effectivement du

  3   contre-interrogatoire.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Fort bien. Alors, continuez.

  5   Pouvez-vous tracer un trait, Monsieur Andric ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Cette ligne part du village de Kosovo en

  7   direction de Leleci. Je crois que les maisons qui se trouvent à Leleci ne

  8   sont pas représentées sur cette carte. Madjeri était sous le contrôle des

  9   forces musulmanes, ainsi que Kozici et Kopljevici. Il y avait une ligne de

 10   Défense qui traversait un village --

 11   L'INTERPRÈTE : Dont les interprètes n'ont pas saisi le nom.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] -- et qui délimitait les forces musulmanes et

 13   les forces serbes.

 14   M. KARADZIC : [interprétation]

 15   Q.  Pourriez-vous nous tracer les lignes qui parcouraient la totalité de la

 16   municipalité ?

 17   R.  Eh bien, je ne sais pas si je pourrais vraiment aller dans les détails.

 18   Quoi qu'il en soit, les forces musulmanes détenaient déjà les zones qui

 19   entouraient cette localité.

 20   Q.  Très bien. Est-ce que vous pourriez donc encercler les villages qui

 21   étaient détenus par les Musulmans. Qui détenait, par exemple, Vrazalice ?

 22   R.  Les Musulmans.

 23   Q.  Alors dans ce cas-là, placez un cercle avec la lettre M.

 24   R.  [Le témoin s'exécute]

 25   Q.  Et qu'en est-il de Bulozi ?

 26   R.  Une seconde.

 27   Q.  C'est au sud de Vrazalice, Bulozi.

 28   R.  C'était également sous leur contrôle.


Page 34484

  1   Q.  Otricevo ?

  2   R.  M.

  3   Q.  Brcigovo ?

  4   R.  M.

  5   Q.  Lubardici ?

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, cela dépasse le champ

  7   ou le périmètre de vos questions que vous aviez mentionné. Donc, la zone

  8   qui était en dessous de la ligne appartenait aux Musulmans, n'est-ce pas,

  9   était détenue par les Musulmans ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pourriez-vous apposer la date

 12   d'aujourd'hui, qui est le 28 février, et votre signature en haut de cette

 13   carte, s'il vous plaît.

 14   LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Et cette carte sera la prochaine pièce à

 16   décharge.

 17   M. LE GREFFIER : [interprétation] D3046.

 18   M. KARADZIC : [interprétation]

 19   Q.  Monsieur Andric, je vais donner lecture de ces villages, et je vais

 20   vous demander où il y avait des combats et autour de quels villages il y

 21   avait des combats donc, et autour de quels villages il n'y avait pas de

 22   combats. Dans le document qui parle de cela, c'est en fait les pièces P6153

 23   et P6155. On parle des personnes qui se trouvaient au centre de Rasadnik,

 24   au centre d'accueil. Est-ce qu'il y avait par exemple des combats aux

 25   environs du village de Zakomo ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Et à Zelice [phon] ?

 28   R.  Oui.


Page 34485

  1   Q.  Donc, je répète. Jesenica ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Dumonjici [phon] ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Berkovici ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Ukavice ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Radava ?

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Dans quelle mesure ceci est-il important

 11   ou lié au contre-interrogatoire ?

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, il a été dit ici, et

 13   d'ailleurs dans le titre ceci peut nous aider à tirer la conclusion, à

 14   savoir que nous parlons de prisonniers, mais le témoin a confirmé qu'il

 15   s'agissait de civils qui ont été réceptionnés au centre d'accueil. Donc ce

 16   qui m'intéresse, c'est de savoir pourquoi des civils se trouvaient dans ce

 17   centre d'accueil. Est-ce qu'il s'agissait d'une zone de combat ou est-ce

 18   qu'il s'agissait d'un nettoyage ethnique ? C'est une question importante,

 19   tant pour la Défense qu'au niveau de l'acte d'accusation.

 20   [La Chambre de première instance se concerte]

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Zec.

 22   M. ZEC : [interprétation] Je voulais simplement consigner au compte rendu

 23   d'audience que le document mentionne que ces personnes étaient des

 24   prisonniers de guerre.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous avez une objection quant

 26   aux questions supplémentaires ?

 27   M. ZEC : [interprétation] J'avais soulevé une objection précédemment mais

 28   je pensais que vous, Monsieur le Président, vous souhaitiez entendre ces


Page 34486

  1   questions. Donc je n'ai plus d'objection.

  2   [La Chambre de première instance se concerte]

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, nous pensons que vous

  4   avez épuisé le sujet. Je vous prie de passer à un sujet autre.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Je voudrais qu'on nous montre le 65 ter

  6   24439, s'il vous plaît.

  7   M. KARADZIC : [interprétation]

  8   Q.  On vous a interrogé, Monsieur, au sujet du rôle que vous avez joué dans

  9   le transfert d'Avdo Palic de Rogatica vers Mlin. J'ai dit 24439 pour ce qui

 10   est du 65 ter. En quelle qualité avez-vous été interrogé au MUP de la

 11   Republika Srpska en 2006 ? Est-ce que c'est bien ce document ?

 12   R.  J'ai été entendu en ma qualité de témoin.

 13   Q.  Merci. Est-ce qu'on peut nous afficher la page 3, s'il vous plaît. En

 14   version anglaise, ce sera la page 4. Je vais donner lecture de cette phrase

 15   :

 16   "D'après mes souvenirs, ce dénommé Palic était en compagnie desdits

 17   gardiens pendant une dizaine de jours et durant la période de temps en

 18   question, à deux ou trois reprises, je leur ai apporté à manger…"

 19   Et avant votre signature, vous dites que vous ne savez rien au sujet du

 20   sort d'Avdo Palic.

 21   Est-ce que cette déclaration a été vérifiée sur un détecteur de mensonges ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Merci. Puis-je demander le versement au dossier de cette pièce.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Y a-t-il des objections ?

 25   M. ZEC : [interprétation] Pas d'objection.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce sera donc versé au dossier. Mais

 27   quelle est sa longueur ? Nous ne pouvons pas la verser au dossier dans son

 28   intégralité, ou alors seulement cette page ?


Page 34487

  1   M. ZEC : [interprétation] C'est une déclaration du témoin qu'il a fournie

  2   en 2009, je crois, pour le compte du MUP de la RS.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quatre pages.

  4   M. ZEC : [interprétation] Exactement. Sa déclaration est assez courte.

  5   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

  6   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D3047, Madame, Messieurs

  7   les Juges.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Monsieur Andric. Merci, Madame,

  9   Messieurs les Juges. Je n'ai plus de question à poser.

 10   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je vous en prie.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Andric, ceci met un terme à

 12   votre témoignage. Je tiens à vous remercier au nom de cette Chambre de

 13   première instance du fait d'être venu à La Haye pour fournir ce témoignage.

 14   Vous êtes maintenant libre de vous en aller.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 16   [Le témoin se retire]

 17   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 18   M. FILE : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, juste une petite

 19   question administrative, si vous le permettez.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Bonjour, Monsieur File.

 21   M. FILE : [interprétation] Bonjour. Il y a eu deux pièces qui portent des

 22   cotes MFI pendant l'expectative d'une traduction en anglais. Je fais

 23   référence ici aux pièces P5975 et P6549. Je voulais juste informer les

 24   Juges de la Chambre que les traductions anglaises sont disponibles, que ça

 25   a été téléchargé au prétoire électronique, et je demanderais à ce que ces

 26   documents soient admis au dossier en tant que pièces à part entière.

 27   M. ROBINSON : [interprétation] Nous n'avons pas d'objection.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] La Chambre a procédé à des vérifications


Page 34488

  1   pour ce qui est du fait de savoir s'il y a eu des pièces MFI du fait d'une

  2   absence de traduction anglaise, ou si c'était une raison autre pour ce qui

  3   est de savoir, par exemple, d'une position de la Défense qui aurait été

  4   différente, mais ce n'est pas le cas. Suite à vérification, ces deux

  5   documents seront donc versés dans leur intégralité. Merci, Monsieur File.

  6   M. FILE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je demanderais au témoin de donner

  8   lecture de la déclaration solennelle.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 10   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 11   LE TÉMOIN : BOZIDAR TRISIC [Assermenté]

 12   [Le témoin répond par l'interprète]

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur Trisic. Veuillez vous

 14   asseoir et vous mettre à l'aise. Avant que vous ne commenciez à témoigner,

 15   Monsieur Trisic, je me dois d'attirer votre attention sur une Règle tout à

 16   fait concrète émanant de notre Règlement de procédure et de preuve qui est

 17   celui de ce Tribunal international, il s'agit de l'article 90(E). En

 18   application de cet article, vous pouvez faire objection pour ce qui est

 19   d'apport de réponse à des questions posées par M. Karadzic, par

 20   l'Accusation, voire par les Juges si vous estimez que cette réponse serait

 21   susceptible de vous incriminer. Dans ce contexte-ci, "incriminer" peut

 22   signifier que vous risqueriez de dire quelque chose qui serait considéré

 23   comme une reconnaissance de culpabilité pour un délit au pénal ou dire

 24   quelque chose qui pourrait fournir des éléments de preuve montrant que vous

 25   avez commis un crime ou un délit au pénal. Alors, si vous estimez que cette

 26   réponse est susceptible de vous incriminer et que vous refusez de répondre,

 27   la Chambre peut toutefois vous obliger à répondre, mais aucun témoignage

 28   obtenu de la sorte ne pourra être utilisé par la suite comme élément de


Page 34489

  1   preuve contre vous, hormis le cas de poursuite pour faux témoignage. Est-ce

  2   que vous avez bien compris ce que je viens de vous expliquer ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

  5   Monsieur Karadzic, à vous.

  6   Interrogatoire principal par M. Karadzic :

  7   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Trisic.

  8   R.  Bonjour, Monsieur le Président.

  9   Q.  On vous demande de parler un peu plus fort ou de vous rapprocher des

 10   micros. Et moi, je vous demande de parler assez lentement et de faire des

 11   pauses entre mes questions et vos réponses.

 12   R.  Je vous comprends.

 13   Q.  Je vous remercie. Est-ce que vous avez fait une déclaration aux membres

 14   de mon équipe de la Défense ?

 15   R.  Oui.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais que l'on nous montre au prétoire

 17   électronique la pièce 1D7814.

 18   M. KARADZIC : [interprétation]

 19   Q.  Monsieur Trisic, est-ce que vous voyez cette déclaration sur l'écran en

 20   face de vous ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Merci. Cette déclaration, est-ce que vous l'avez bien relue et signée ?

 23   R.  Je l'ai relue, oui, mais je ne vois pas ma signature encore.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Bien, nous allons demander à ce que la dernière

 25   page soit affichée pour le témoin sur nos écrans.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est cela. C'est moi qui ai signé cette

 27   déclaration.

 28   M. KARADZIC : [interprétation]


Page 34490

  1   Q.  Merci. Est-ce que cette déclaration reprend fidèlement ce que vous avez

  2   dit au membre de l'équipe de la Défense ?

  3   R.  Oui, Monsieur.

  4   Q.  Si aujourd'hui je vous posais les mêmes questions que celles qui vous

  5   ont été posées, est-ce que vos réponses, en substance, se trouveraient être

  6   les mêmes ?

  7   R.  Je ne changerais rien du tout et, pour l'essentiel, ce serait la même

  8   chose que je dirais.

  9   Q.  Merci.

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Puis-je demander le versement au dossier de

 11   cette déclaration et les documents en application du 92 ter.

 12   M. ROBINSON : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, mais il

 13   y a deux pièces connexes qui ne sont pas -- enfin, qui ont été annoncées,

 14   mais que je n'ai pas retrouvé à l'occasion de mes propres vérifications sur

 15   la liste 65 ter. Et je demanderais à ce que ce soit rajouté. Je ne pense

 16   pas que ce soit sur la liste, parce que le récolement avec le témoin a eu

 17   lieu après la présentation de cette liste.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Y a-t-il des objections, Monsieur File ?

 19   M. FILE : [interprétation] Pas d'objection.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bon, ce sera versé au dossier ainsi que

 21   les deux pièces connexes.

 22   M. LE GREFFIER : [interprétation] Le 92 ter deviendra pièce à conviction

 23   D3048, et les deux pièces connexes seront désormais les pièces D3049 et

 24   D3050 respectivement.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 26   Monsieur Karadzic, allez-y.

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Je me propose de donner lecture du

 28   résumé de la déclaration de Bozidar Trisic.


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  1   Bozidar Tricic a résidé à Zaklopaca, et avant la guerre il a travaillé

  2   comme enseignant dans une école primaire locale.

  3   Il a résidé dans un village ethniquement mixte où les relations entre

  4   la totalité des résidants étaient bonnes. Cependant, après les élections

  5   multipartites, les gens ont commencé à faire preuve de défiance vis-à-vis

  6   des autres en raison de la propagande, mais il n'y a toujours pas eu

  7   d'incidents dans ce village, incidents qui seraient causés par leur

  8   appartenance ethnique.

  9   En début du mois de mai 1992, deux autocars transportant quelque 200

 10   personnes sont arrivés à Zaklopaca. C'étaient des gens qui étaient des

 11   Musulmans qui résidaient dans des villages avoisinants et qui avaient fui

 12   parce que les forces musulmanes avaient souhaité les mobiliser. On leur a

 13   trouvé un hébergement temporaire dans le village. Ces nouveaux arrivés ont

 14   informé les villageois de Zaklopaca du fait que les Musulmans avaient placé

 15   des barrages routiers à l'entrée de la rue de la mine de bauxite à Rupovo

 16   Brdo, et qu'ils n'autorisaient pas les mineurs à aller au travail. Des

 17   patrouilles mixtes ont commencé à se créer dans Zaklopaca par les

 18   villageois étant donné que tant les Musulmans que les Serbes avaient pris

 19   peur; toujours est-il que ces voisins musulmans et serbes ont continué à se

 20   fréquenter mutuellement.

 21   Le 16 mai 1992, Bozidar Trisic a remarqué trois soldats dans le

 22   village, qu'il n'a pas reconnus. Il s'est entretenu avec eux et ils ont dit

 23   qu'ils sont à la recherche de Turcs dans le village. Il les a informés du

 24   fait qu'il n'y avait pas de Turcs dans le village et qu'ils pouvaient

 25   rebrousser leur chemin. Et, lorsque ces soldats sont partis, on a pu

 26   entendre des coups de feu en provenance de Gornja Zaklopaca. Une fois

 27   rentré chez lui, Bozidar Trisic a remarqué qu'il pleuvait des balles sur le

 28   village, et tout un chacun au village était bouleversé parce qu'on ne


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  1   savait pas si le village était attaqué par des Musulmans ou des Serbes.

  2   Bozidar Trisic a remarqué qu'il y a eu des tirs en provenance de

  3   maisons serbes vers la direction de laquelle était venue l'attaque, c'est-

  4   à-dire vers la forêt. Il a également remarqué la présence de soldats

  5   inconnus qui étaient en train de tirer sur le village. Les tirs ont duré

  6   quelque 10 à 15 minutes et, une fois que ça a cessé, les habitants de

  7   Zaklopaca ont remarqué un convoi de véhicules de tourisme qui passait à

  8   côté. Bozidar Trisic n'a vu aucune voiture de police ou de l'armée dans ce

  9   convoi.

 10   Un certain nombre de villageois ont été tués lors de cette attaque

 11   et, par la suite, les habitants musulmans ont quitté Zaklopaca pour aller

 12   vers le village musulman de Gerovi. Suite à ceci, les résidants serbes ont

 13   patrouillé dans le village pour garder tant les maisons musulmanes que les

 14   maisons serbes. Les résidants serbes ont aidé leurs voisins musulmans en

 15   leur fournissant des vivres, des cigarettes et autres produits. L'incident

 16   qui s'est produit ce jour-là n'avait pas été planifié, et tant les Serbes

 17   et les Musulmans s'étaient trouvés dans cette situation périlleuse. Il n'y

 18   a eu aucune maison de détruite ou de mise à feu lors de cet incident.

 19   Personne n'a fait venir des Musulmans d'ailleurs pour les tuer à Zaklopaca.

 20   Il n'y a que des résidants à avoir été tués. Bozidar Trisic considère que

 21   cet incident a sans doute été une vengeance pour le meurtre de trois

 22   membres locaux de la Défense territoriale qui se trouvaient à l'extérieur

 23   de la mine.

 24   Ceci a été le résumé de ce témoignage, et je n'ai pas d'autre

 25   question à lui poser.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bon, Monsieur Trisic, comme vous l'avez

 27   certainement remarqué, votre témoignage au principal dans cette affaire est

 28   versé au dossier sous forme écrite plutôt que sous forme d'un témoignage


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  1   oral. Vous allez à présent être contre-interrogé par un représentant du

  2   bureau du Procureur, à savoir M. File.

  3   M. FILE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Bonjour à tout un

  4   chacun.

  5   Contre-interrogatoire par M. File :

  6   Q.  [interprétation] Monsieur Trisic --

  7   R.  Bonjour.

  8   Q.  -- je voudrais commencer par vous poser des questions relatives au

  9   début du mois de mai 1992 là où vous avez parlé de l'arrivée de deux

 10   autocars transportant quelque 200 Musulmans en provenance des villages

 11   avoisinants. Vous savez de quel événement je suis en train de parler et,

 12   parmi ces villages, il y avait celui de Pomol.

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Y a-t-il eu des familles ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Et dans ce groupe, il y avait des hommes et des femmes de tous âges

 17   confondus avec des enfants ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Dans votre déclaration au paragraphe 7, vous avez dit :

 20   "Lorsqu'on leur a demandé pourquoi ils étaient venus chez nous, ils

 21   nous ont dit qu'ils avaient fui parce que les forces musulmanes voulaient

 22   les mobiliser pour les faire partie d'un détachement à Djile. Or, comme ils

 23   ne voulaient pas être mobilisés, ils ont fui vers nous pour demander

 24   protection."

 25   Alors, vous serez d'accord avec moi pour entendre dire -- enfin, pour

 26   bien que ça semble étrange voir des familles musulmanes, y compris femmes

 27   et enfants avec personnes âgées, qui ont fui leurs villages avoisinants par

 28   peur d'être mobilisés dans une unité militaire; c'est bien cela ?


Page 34494

  1   R.  Oui.

  2   Q.  Vous savez qui était Omer Selimovic, n'est-ce pas ? Il résidait à

  3   Zaklopaca, n'est-ce pas ?

  4   R.  Oui. 

  5   M. FILE : [interprétation] J'aimerais qu'on nous affiche la pièce 65 ter

  6   24671.

  7   Q.  Vous allez voir sur votre écran la déclaration d'un témoin, M.

  8   Selimovic, déclaration recueillie par ce Tribunal en l'an 2000. En page 4 -

  9   je voudrais qu'on nous affiche au prétoire électronique - et notamment au

 10   paragraphe 2, je vais vous donner lecture de ce qu'il a dit. Cette arrivée

 11   des mêmes personnes que vous décrivez, il les décrit autrement. Il dit :

 12   "Un grand nombre de personnes déplacées du village de Pomol est arrivé à

 13   Zaklopaca. Chacune de nos familles a pris quelques individus, et ils nous

 14   ont raconté ce qui s'est passé. Pomol, ça se trouvait à une dizaine de

 15   kilomètres, ils ont dit qu'un char serbe leur a tiré dessus, que leurs

 16   maisons ont été détruites et incendiées, et qu'ils ont dû fuir vers les

 17   forêts."

 18   Est-ce que ceci rafraîchit votre mémoire pour ce qui est du fait de

 19   savoir pourquoi ces gens-là étaient venus à Zaklopaca ?

 20   R.  Lorsque nous nous sommes entretenus avec les personnes qui sont

 21   arrivées, ils ont parlé de gardes mixtes, entre Musulmans et Serbes, et il

 22   est vrai de dire que ces gens ont été accueillis à l'école primaire, et

 23   d'autres ont été accueillis dans des maisons privées appartenant à des

 24   Musulmans. C'est moi en personne qui leur ait posé la question. Enfin,

 25   d'abord nous étions contents de les voir arriver parce que c'étaient des

 26   gens qui ont dû fuir. Ils nous ont raconté qu'à côté de la mine de bauxite,

 27   il y a eu des barrages routiers d'érigés, qu'on avait nettoyé le terrain,

 28   et qu'eux, ils avaient voulu se mettre à l'abri. Ils m'ont dit à moi-même


Page 34495

  1   en personne qu'ils l'ont fait, qu'ils ont fait ainsi, mais le fait qu'ils

  2   aient fui ou pas, ça je l'ignore.

  3   Q.  Donc vous dites dans votre témoignage qu'on ne vous a jamais précisé le

  4   fait que le village, leur village, avait été incendié et qu'ils avaient fui

  5   une attaque d'un char serbe ?

  6   R.  Il est vrai que je ne leur ai pas demandé si leur village était

  7   incendié. Ils nous ont dit qu'ils sont venus parce qu'on voulait les

  8   mobiliser. C'était un assez grand nombre d'habitants là, et on voulait leur

  9   faire partie de ce détachement de Djile. Ils ont dit qu'ils venaient

 10   temporairement demander abri. C'étaient des gens qui étaient fort

 11   agréables, des braves gens.

 12   Q.  Bien. Nous sommes en train de parler d'événements du 16 mai 1992, et je

 13   vais commencer par vous demander de nous confirmer un certain nombre de

 14   points de faits basiques au sujet des événements qui se sont produits ce

 15   jour-là. Ce jour-là, quelque 60 voisins du village se sont faits tués au

 16   village, n'est-ce pas ?

 17   R.  Oui.

 18   Q.  Et toutes ces victimes, c'étaient des Musulmans, qui ont été tués par

 19   des tirs de fusil ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Et vous avez vu des soldats qui ont tiré en direction du village ce

 22   jour-là ?

 23   R.  Non.

 24   Q.  Bon. On va arriver à ce point-là plus tard. Il est vrai que vous avez

 25   ce jour-là fait des grillades, un barbecue, dans la maison d'un voisin,

 26   Saban Selimovic ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Et pendant cet après-midi, pendant que vous étiez en train de parler


Page 34496

  1   avec ce voisin qui s'appelait Branko Julevic, vous avez échangé quelques

  2   propos avec ce Branko Julevic ?

  3   R.  Non. Ce n'est pas un autre jour que ça s'est passé. Ça s'est passé le

  4   même jour.

  5   Q.  Bon. Alors, ce même jour vous vous êtes entretenu avec un voisin qui

  6   s'appelle Branko Julevic, et pendant cette conversation il y a eu trois

  7   soldats qui sont arrivés que vous n'avez pas reconnus.

  8   R.  Branko Jolovic.

  9   Q.  Merci d'avoir rectifier le compte rendu d'audience. Alors, à l'occasion

 10   de cette conversation, est-il vrai de dire que vous avez été abordé par

 11   trois soldats que vous n'avez pas reconnus ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Ils portaient des uniformes de camouflage et ils étaient armés de

 14   fusils automatiques, n'est-ce pas ?

 15   R.  Non, ils ne portaient pas des uniformes de camouflage. Ils avaient des

 16   uniformes de couleur vert olive, et ils avaient en effet des armes

 17   automatiques en main, pour autant que je m'en souvienne.

 18   Q.  Donc au paragraphe 12 de votre déclaration, là où il est dit qu'ils

 19   étaient en uniforme de camouflage et qu'ils portaient des fusils

 20   automatiques sur l'épaule, il convient de rectifier la teneur du texte;

 21   c'est bien ce que vous êtes en train de nous dire ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Alors d'après vous, ils ont dit qu'ils cherchaient des Turcs, qu'ils

 24   étaient après des Turcs, n'est-ce pas ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Alors, vous avez compris que ces soldats, c'étaient des Serbes, n'est-

 27   ce pas ?

 28   R.  Oui.


Page 34497

  1   Q.  Alors, c'est ce jour-là un premier signe pour vous qui indiquait que

  2   quelque chose n'allait pas bien, n'est-ce pas ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Et avant l'apparition de ces soldats, lorsque vous étiez en train de

  5   vous entretenir avec votre voisin, ce M. Jolovic, était-il armé ?

  6   R.  Je ne l'ai pas remarqué.

  7   Q.  Mais si, par exemple, il portait une mitraillette semi-automatique,

  8   vous l'auriez remarqué; non ?

  9   R.  Bien sûr que j'aurais remarqué. On ne pouvait pas le dissimuler sous sa

 10   veste.

 11   Q.  Et vous êtes certain que ce voisin, M. Jolovic, ne vous a pas abordé en

 12   compagnie d'autres soldats en tant que groupe ?

 13   R.  Non, Monsieur. Il était assis devant la maison de Vujadin Vasiljevic,

 14   sur une espèce de bout de tronc d'arbre, là où on coupe le bois, et ils

 15   étaient assis et ils discutaient, et moi je suis arrivé en allant vers le

 16   magasin, la boutique du village, et je me suis un peu arrêté pour

 17   m'entretenir avec eux, et je leur ai demandé, j'ai demandé : "Comment ça va

 18   ?" Enfin, une échange formelle.

 19   Q.  Bien.

 20   M. FILE : [interprétation] Alors, est-ce qu'on peut nous afficher la pièce

 21   65 ter 24682, s'il vous plaît.

 22   Q.  Et en attendant l'affichage, vous avez connu un certain Semsudin Muskic

 23   ?

 24   R.  Muskic, Semsudin Muskic.

 25   Q.  J'imagine que vous savez de qui je parle ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Il se trouvait à ce même barbecue que vous ?

 28   R.  Oui, il y avait toute la famille. Enfin, lui et son frère et la famille


Page 34498

  1   entière était dans la cour. Mais lui était arrivé avant, parce qu'il était

  2   parti pour Vlasenica, puis il est revenu.

  3   Q.  Bien. Il a fait une déclaration à la date du 26 juin 1998, auprès d'un

  4   juge d'instruction du tribunal cantonal de Tuzla au sujet d'une enquête

  5   relative à Milenko Djuric et autres personnes pour ce qui est du génocide

  6   commis à Zaklopaca. Et j'imagine que vous avez sous les yeux une copie de

  7   sa déclaration.

  8   J'attirerais votre attention sur le bas de la page 1 en B/C/S et la

  9   partie supérieure de la page 2 en version anglaise. Et vous allez voir

 10   qu'il décrit qu'il a passé la journée entière en compagnie de son frère et

 11   d'un voisin, Saban Selimovic, où il y avait dans sa cour un barbecue, et

 12   dans la partie basse de la page 2 en version anglaise, en partie haute de

 13   la page 2 en version B/C/S, il dit :

 14   "Dans la maison de Saban il y avait toute la journée un voisin,

 15   Trisic Bozidar, qui était un greffier, et vers 16 heures 55 j'ai décidé

 16   d'aller à la maison qui se trouvait à 20 mètres de là. Je me souviens que

 17   j'ai mis la télé, et j'ai vu que l'écran montrait 17 heures, et mon frère

 18   Mevlo et ses enfants ont dit : Tiens, il y a des soldats. J'ai sorti pour

 19   voir de quels soldats il s'agissait. Il y avait quatre personnes que je ne

 20   connaissais pas qui débarquaient d'une voiture Honda, qui portaient des

 21   fusils automatiques, qui portaient des uniformes vert olive de la JNA, et

 22   j'ai reconnu Jolovic Brano, fils de Radomir, un voisin. Brano, lui, portait

 23   un fusil mitrailleur M72. Ils sont allés en direction de Selimovic. Devant

 24   la cour, ils ont été accueillis par Trisic Bozo, et il s'est entretenu avec

 25   eux. J'ai vu que Bozidar voulait les empêcher d'entrer dans la cour et je

 26   les ai entendus l'engueuler. Et, Trisic Bozidar qui, à nous autres qui

 27   regardions tout cela, nous a fait un signe de la main pour indiquer qu'il

 28   fallait que nous partions, que nous fuyons. Et on a vu que la situation


Page 34499

  1   était critique. On a tous fui la maison…"

  2   Puis, il décrit les tirs à l'arme automatique qui ont suivi quelques

  3   instants plus tard. Alors, dans cette déclaration, il semblerait que vous

  4   avez essayé d'empêcher ces hommes armés d'entrer dans la cour de ce voisin

  5   et vous avez fait signe aux autres que c'était dangereux et qu'il fallait

  6   que vous fuyiez. Vous avez peut-être sauvé la vie de cet homme. Vous en

  7   souvenez-vous ?

  8   R.  Oui, je m'en souviens. Je précise seulement pour ce qui est de cette

  9   version où il dit qu'ils ont essayé d'entrer dans la maison de Selimovic

 10   Saban. Or, ça, ma maison et la maison de Saban, c'était une maison à côté

 11   de l'autre. Mais, moi, ces soldats, je les ai empêchés d'accéder à quelque

 12   50 mètres de ma maison et celle de Saban. C'était la maison juste devant la

 13   maison de Vujadin Vasiljevic. Nous étions debout devant cette maison

 14   lorsque ces soldats ont traversé la rivière en descendant de la route

 15   principale. Et, il est vrai que j'ai sauvé non pas seulement sa vie, mais

 16   la vie de bon nombre de Serbes aussi et de la totalité des Musulmans qui se

 17   trouvaient là. Enfin, j'ai mis ma vie en danger. Enfin, je regrette que ça

 18   se soit passé ainsi, et je suis content d'avoir agi comme j'ai agi.

 19   Q.  D'accord. Donc, dans cette déclaration, il est également indiqué que

 20   Brano Jolovic faisait partie d'un groupe de soldats qui s'approchaient de

 21   vos maisons. Est-ce que ceci vous rafraîchit la mémoire quant à ce que

 22   faisait votre voisin, M. Jolovic, à ce moment-là ?

 23   R.  Mon voisin, M. Jolovic, travaillait à la mine, et il était aussi

 24   gardien au terrain de football de Milici --

 25   Q.  Excusez-moi, ce qui m'intéresse, ce n'est pas le contexte d'existence

 26   de M. Jolovic. Je me demandais simplement si cela vous rafraîchissait la

 27   mémoire quant à ce que faisait M. Jolovic à ce moment précis.

 28   R.  Je suis tombé sur mes voisins, Jolovic et Vasiljevic, qui étaient assis


Page 34500

  1   sur ce billot de bois devant la maison de Vujadin Vasiljevic. Et, quelque

  2   cinq minutes plus tard, les trois soldats dont je parle sont apparus. Voilà

  3   ce que je sais. Ça, j'en suis sûr.

  4   Q.  D'accord.

  5   R.  Maintenant, avec qui il est venu, je ne sais pas.

  6   Q.  D'accord. Vous êtes allé à la maison pour vous habiller et prendre

  7   votre fusil M48, et vous dites que lorsque vous êtes sorti dans votre cour,

  8   vous y avez vu un soldat qui avait placé une mitrailleuse sur les

  9   canalisations d'eau et tirait sur le village, n'est-ce pas ?

 10   R.  Oui. Sauf que lorsque les trois soldats sont revenus, parce qu'ils se

 11   sont immédiatement retournés, et l'un d'entre eux a essayé de saisir son

 12   fusil, l'autre l'a bousculé, et ils sont retournés sur la route. Quelques

 13   minutes plus tard dans le haut du village, il y avait, donc c'était le

 14   quartier du village qui s'appelle Gornji Selo, des tirs ont commencé. A ce

 15   moment-là, je suis retourné dans la maison de Vujadin, enfin j'ai pris le

 16   chemin de la maison de Vujadin, et lorsque je m'approchais de la maison,

 17   pas à partir des canalisations, mais sur les tuyaux, c'est là que se

 18   trouvait la mitrailleuse, parce qu'il y avait un système d'adduction d'eau

 19   qui reliait Zaklopaca et Milici ainsi que notre bourg et, entre la maison,

 20   la mienne et la maison de Saban, des balles étaient en train de voler et il

 21   y avait un nuage de fumée.

 22   Q.  Excusez-moi de vous interrompre, mais votre déclaration est déjà versée

 23   au dossier, donc vous n'avez pas à répéter ce qu'elle contient. J'aimerais

 24   que vous répondiez aux questions.

 25   R.  Très bien. Merci.

 26   Q.  Donc, vous avez dit "oui" lorsque je vous ai interrogé sur le point de

 27   savoir si vous aviez vu un soldat qui tirait sur le village. Et, il y a

 28   quelques minutes, vous avez dit, lorsque je vous ai demandé si vous avez vu


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  1   des soldats tirer sur le village ce jour-là, vous avez dit "non". Donc, je

  2   suppose que vous souhaitez corriger cette réponse ?

  3   R.  J'ai vu un soldat qui tirait à partir des canalisations d'eau, du

  4   système d'adduction d'eau.

  5   Q.  D'accord.

  6   R.  Mais je n'ai pas vu d'autres soldats qui tiraient sur Gornje Selo.

  7   Q.  Mais l'homme qui tirait se trouvait bien sur votre propriété à ce

  8   moment-là ?

  9   R.  Vous parlez du soldat ? C'est à son sujet que vous me demandez s'il

 10   était sur ma propriété ?

 11   Q.  Oui.

 12   R.  Il n'était pas sur ma propriété, mais devant. Il était à 50 ou 100

 13   mètres de ma propriété, juste en dessous de la grand-route.

 14   Q.  Bien. Vous avez crié dans sa direction lui disant d'arrêter de tirer;

 15   il a arrêté de tirer; il est parti et il ne s'est pas retourné pour tirer

 16   sur vous, n'est-ce pas ?

 17   R.  En effet.

 18   Q.  Vous n'étiez pas en train de patrouiller dans le village, vous ne

 19   participiez pas à une opération de tirs de quelque nature que ce soit,

 20   n'est-ce pas ? 

 21   R.  En effet.

 22   Q.  Vous êtes resté chez vous à la maison pendent tout ce temps ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Vous n'habitiez pas dans le centre du village, n'est-ce pas ?

 25   R.  J'habitais tout près de l'entrée du village.

 26   Q.  Et vous n'avez pas vu ce qui se passait au centre du village à ce

 27   moment-là, n'est-ce pas ?

 28   R.  Non, je n'ai pas vu ce qui se passait dans la partie haute du village.


Page 34502

  1   Q.  Vous aviez un voisin musulman dont le nom était Adem Selimovic qui est

  2   allé dans le village pour voir ce qui se passait et qui est revenu une

  3   demi-heure plus tard pour vous dire qu'il y avait pas mal de morts, n'est-

  4   ce pas ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  A ce moment-là, vous êtes allé chez votre voisin musulman pour dire à

  7   lui et à ceux avec qui ils se trouvaient qu'il serait préférable qu'ils

  8   quittent le village pour se rendre dans un quartier où ne vivaient que des

  9   Musulmans, n'est-ce pas ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Et vous avez dit cela -- excusez-moi. Vous avez dit cela parce que vous

 12   saviez que l'endroit où ils se trouvaient n'était pas sûr pour les

 13   Musulmans, n'est-ce pas ?

 14   R.  En effet.

 15   Q.  Et, ensuite, vous êtes allé participer à une patrouille dans le village

 16   avec d'autres Serbes, n'est-ce pas ?

 17   R.  Non. Je suis allé tout seul pour voir ce qui se passait avec les

 18   voisins proches. J'ai vu qu'il n'était pas là et, à ce moment-là j'ai

 19   poursuivi mon chemin jusqu'au village où se trouvait les maisons des Serbes

 20   et la maison d'Adem Selimovic, et c'est là que je les ai trouvés, si vous

 21   voyez ce que je veux dire.

 22   Q.  Donc, il est exact que par la suite, vous avez sûrement vu des dizaines

 23   de Musulmans qui étaient vos voisins et qui, à ce moment-là, étaient morts,

 24   abattus par arme à feu, n'est-ce pas ?

 25   R.  Non. Je n'ai pas pu voir cela, parce que cela se passait dans le haut

 26   du village et nous habitions dans le bas du village. Dans mon quartier du

 27   village, personne n'est mort.

 28   Q.  Essayons de préciser les choses. Est-ce que vous êtes en train de dire


Page 34503

  1   que vous n'êtes jamais allé dans le haut du village après l'incident pour

  2   voir ce qui s'était passé ?

  3   R.  En effet, je n'y suis jamais allé.

  4   Q.  Donc, finalement, vous-même et voisins musulmans qui étaient restés en

  5   vie, vous avez quitté ensemble Zaklopaca, n'est-ce pas ?

  6   R.  Oui. Sur le moment, ils étaient très bouleversés, mais par la suite les

  7   choses se sont arrangées. Nous nous sommes rencontrés tous les jours. Nous

  8   nous voyons tous les jours. Ils sont revenus.

  9   Q.  Non, ils ne sont pas revenus. Ils sont venus momentanément pour

 10   ramasser leurs effets personnels; c'est bien cela ?

 11   R.  Oui, oui, oui.

 12   Q.  J'ai remarqué dans votre déclaration que vous avez dit que pas une

 13   seule maison n'a été incendiée ou détruite pendant cet incident, mais il

 14   est vrai, n'est-ce pas, que finalement les Serbes se sont installés dans

 15   les maisons qui étaient en réalité la propriété des Musulmans ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Est-ce que vous savez que des femmes musulmanes qui ont survécu à ce

 18   massacre sont allées à pied à Vlasenica pour se rendre entre les mains de

 19   soldats serbes et qu'elles ont été amenées dans un immeuble de la

 20   municipalité où il a été exigé d'elles qu'elles signent un document par

 21   lequel elles abandonnaient leurs maisons et tous leurs biens aux Serbes, et

 22   que c'est seulement à ce moment-là qu'elles ont été transportées par

 23   autobus hors de la ville dans la direction de Kladanj. Est-ce que vous êtes

 24   au courant de cela ?

 25   R.  Je ne sais rien de cela.

 26   M. FILE : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Messieurs les

 27   Juges, je cite la pièce à conviction P418.

 28   Q.  D'accord. Donc, vous avez dit au paragraphe 26 de votre déclaration :


Page 34504

  1   "On m'a dit que certains déclarent que l'attaque de Zaklopaca a été menée à

  2   bien par le poste de police de Milici, ou plus précisément par les

  3   policiers de Milici, et que Rade Bjelanovic était le chef de ce poste de

  4   police. Je déclare que ceci est inexact car j'aurais reconnu les policiers

  5   du poste de police de Milici qui portaient un uniforme de couleur bleue à

  6   cette époque-là."

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Alors, est-ce que vous savez qui est Mesudina Zaimhadzic habitant

  9   Zaklopaca, qui est l'auteur de cette déposition ?

 10   R.  Je ne sais pas qui c'est.

 11   Q.  Elle a reconnu très précisément un policier qu'elle connaissait à

 12   Milici, et elle a cité le nom de Milomir Milosevic comme étant un des

 13   participants à l'attaque dont nous parlons. Est-ce que vous avez vu Milomir

 14   Milosevic à Zaklopaca pendant le massacre ?

 15   R.  Moi, je ne l'ai pas vu.

 16   Q.  Cette femme déclare également qu'à 17 heures elle a regardé par la

 17   fenêtre de sa maison, et elle a vu quatre ou cinq véhicules de l'armée et

 18   une voiture de police qui était en train d'arriver. Est-ce que vous ne vous

 19   rappelez pas cette voiture de police ?

 20   R.  Je ne me souviens pas. Je n'ai vu ni voiture de police ni véhicule de

 21   l'armée ce jour-là.

 22   Q.  Est-ce que vous connaissez les quatre survivants dont je vais

 23   maintenant vous donner les noms, survivants de l'attaque de Zaklopaca :

 24   Ibro Hamidovic ?

 25   R.  Oui. 

 26   Q.  Hakija et Havo Berbic ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Mersida Salihovic ?


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  1   R.  Oui.

  2   Q.  Toutes ces personnes ont fourni des déclarations sous serment en 1995

  3   devant un juge de Tuzla, déclaration qui est de la même nature que la

  4   déclaration de 1998 que nous avons déjà examinée, dont l'auteur était

  5   Semsudin Muskic. Je voudrais vous montrer quelques passages de ces

  6   déclarations, et je vous interrogerais à leur sujet par la suite. Je

  7   demande l'affichage du document 65 ter numéro 24678. Il s'agit de la

  8   déclaration sous serment d'Ibro Hamidovic. Lorsque le texte apparaîtra à

  9   l'écran, je demanderais que l'on affiche la page 2 de la version en B/C/S,

 10   ainsi que de la page 2 de la version en anglais. Et en haut des deux pages

 11   vous verrez ce que dit M. Hamidovic. Il déclare que :

 12   "Ce jour-là, le 16 mai 1992 vers 16 heures, j'étais dans ma maison dans le

 13   village de Zaklopaca, et j'ai vu soudainement apparaître trois à quatre, ou

 14   plutôt non, sept à huit véhicules qui ont traversé le village non loin de

 15   ma maison, et le premier de ces véhicules était une voiture de police. J'ai

 16   reconnu Milomir Milosevic, un policier dans la voiture de police. Il a

 17   conduit les autres véhicules jusqu'au bout du village, et ensuite il est

 18   retourné à l'entrée du village, a saisi un fusil et a commencé à tirer."

 19   Il décrit donc l'ouverture du feu un peu plus tard. Pour gagner du temps je

 20   ne vais pas citer les trois autres déclarations, celles de Havo Berbic et

 21   de Hakija Berbic, ainsi que de Mersida Salihovic, mais je vous dis que dans

 22   ces trois déclarations on trouve à peu près la même description d'une

 23   voiture de police. Donc, je me demandais s'il était possible que vous

 24   n'ayez tout simplement pas vu cette voiture de police ou ces voitures de

 25   police, qui se sont effectivement trouvées à Zaklopaca ce jour-là ?

 26   R.  Je n'ai pas vu cette voiture. Je n'ai vu aucune voiture de police. Dans

 27   le haut du village, dans les 100 à 200 mètres qui menaient au haut du

 28   village, la police était en train de s'occuper de la réparation des


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  1   systèmes d'adduction d'eau, et il y avait des patrouilles de police qui

  2   surveillaient ces canalisations d'eau. Milosevic était un policier, mais je

  3   ne l'ai pas vu. Je n'ai vu aucune voiture de police ce jour-là, pas une

  4   seule.

  5   Q.  Mais d'après ce que vous savez -- excusez-moi.

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demanderais à M. le Procureur de nous dire à

  7   quel endroit dans le texte il est indiqué que la voiture de police se

  8   trouvait dans le village, car dans le texte, ce que nous venons de voir,

  9   c'est qu'il est écrit que les voitures ont traversé le village.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] On peut revenir sur ce point.

 11   Mais, Monsieur Trisic, vous étiez en train d'essayer de dire quelque chose.

 12   Vous disiez qu'il était possible, et vous avez été interrompu. Qu'est-ce

 13   que vous essayez de dire ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Il est possible que les voitures de police

 15   soient passées pour se rendre jusqu'au système d'adduction d'eau tous les

 16   jours. Les membres des patrouilles de police qui gardaient les adductions

 17   d'eau changeaient. Ils se relayaient. C'est la police qui assurait la

 18   sécurité de ces systèmes d'adduction d'eau.

 19   M. FILE : [interprétation]

 20   Q.  Ce que vous dites, c'est que cela aurait pu se passer sans que vous

 21   l'ayez vu vous-même en personne, n'est-ce pas ?

 22   R.  Oui. Je n'ai vu aucune voiture de police, aucun véhicule de l'armée ce

 23   jour-là.

 24   Q.  D'accord. Dans mes dernières questions, je voudrais vous interroger au

 25   sujet de certaines déclarations que vous avez faites dans votre déclaration

 26   de témoin. Au paragraphe 23 vous déclarez que l'attaque de Zaklopaca s'est

 27   déroulée spontanément, qu'elle n'avait pas été planifiée, puis au

 28   paragraphe 27 de cette même déclaration vous donnez votre avis quant aux


Page 34507

  1   raisons qui ont pu motiver les assaillants. Vous dites :

  2   "Un convoi de véhicules militaires de la JNA se déplaçait à travers Milici

  3   ce jour-là en direction de la Serbie, et il a rencontré de nombreux

  4   problèmes en chemin. C'est sans doute quelqu'un qui se trouvait dans ces

  5   véhicules qui est responsable de la mort de ces trois membres de la garde

  6   territoriale. Il est possible qu'ils aient trouvé un groupe de Musulmans

  7   dans le voisinage, des volontaires qui étaient à Milici à ce moment-là, et

  8   qu'ils sont allés à Zaklopaca et ont provoqué l'incident."

  9   Cette déclaration, en fait ce sont des conjectures de votre part, puisque

 10   vous avez dit que vous ne saviez pas qui étaient les assaillants ?

 11   R.  Oui.

 12   M. FILE : [interprétation] Je n'ai plus de question à poser au témoin,

 13   Monsieur le Président, Madame, Messieurs les Juges.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, pensez-vous pouvoir

 15   terminer votre contre-interrogatoire en dix minutes ?

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je pense que oui.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Excusez-moi, je voulais dire question

 18   supplémentaire. Bien, dans ce cas, vous avez la parole, Monsieur Karadzic.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 20   Nouvel interrogatoire par M. Karadzic :

 21   Q.  [interprétation]

 22   Q.  Monsieur Trisic, en page 55 du compte rendu d'audience d'aujourd'hui,

 23   on vous interroge en vous demandant et je vais citer exactement la

 24   question, je vais la dire en anglais :

 25   "Eh bien, vous êtes d'accord qu'il peut paraître étonnant d'entendre

 26   dire qu'un groupe de familles musulmanes, y compris des femmes, des enfants

 27   et des personnes âgées, fui leur village voisin en raison de la crainte

 28   d'être mobilisé au sein d'une unité militaire, n'est-ce pas ?"


Page 34508

  1   Et vous avec répondu "oui". Est-ce que vous étiez d'accord pour dire

  2   que ceci était étonnant ?

  3   R.  Non, je n'étais pas d'accord pour dire cela. Ce n'est pas du tout

  4   étonnant, nous essayions tous d'éviter la mobilisation, que nous soyons

  5   Serbes ou Musulmans, bien entendu. Donc, il est tout à fait normal

  6   d'essayer de fuir l'enfer qui se trouvait là-haut. Je ne sais pas

  7   exactement où, mais, enfin, dans le voisinage de la mine.

  8   Q.  Merci. En page 59 du compte rendu d'audience d'aujourd'hui, il

  9   était implicite dans une question qui vous a été posée que l'arrivée des

 10   trois soldats était un signe indiquant que quelque chose n'allait pas bien.

 11   Quand est-ce que vous avez appris la mort de ces trois soldats tombés dans

 12   une embuscade, mort dû aux Musulmans, mort qui avait eu lieu antérieurement

 13   ?

 14   R.  Je ne l'ai découvert que le lendemain.

 15   Q.  En pages 61 et 62 du compte rendu d'aujourd'hui, vous avez

 16   entendu dire que le feu avait été ouvert dans le haut du village. Est-ce

 17   que tous ceux qui sont entrés dans le village ou qui voulaient accéder au

 18   village à ce moment-là devaient passer devant chez vous pour passer par le

 19   pont ?

 20   R.  Non, ils n'étaient pas obligés de passer par là. Ils pouvaient

 21   entrer dans le village par un autre itinéraire, par Gornji Zalukovi [phon]

 22   à partir de la grand-route.

 23   Q.  Page 65 du compte rendu d'audience, vous avez répondu "oui" à la

 24   question du Procureur qui vous demandait s'il était exact que les Serbes

 25   avaient emménagé dans les maisons des Musulmans. Pouvez-vous nous dire qui

 26   étaient ces Serbes ?

 27   R.  Les Serbes qui ont emménagé dans les maisons des Musulmans à Zaklopaca

 28   venaient du secteur de Rupovo Brdo, parce qu'ils avaient été expulsés de là


Page 34509

  1   après des attaques qui avaient eu lieu à Brdo et à Slivovo, et ils

  2   s'étaient enfuis vers Zaklopaca, et c'est là qu'ils ont emménagé dans les

  3   maisons des Musulmans. Ils venaient de Gornje Vrsinje.

  4   Q.  Est-ce que ces maisons, ils les ont reçues officiellement en cadeau ?

  5   R.  Non, ils n'ont pas reçu ces maisons en cadeau. Ils y ont simplement

  6   vécu un certain temps et se sont très bien occupés de ces maisons, de leur

  7   entretien. Plus tard, les maisons ont été rendues aux Musulmans, et

  8   maintenant elles sont totalement rénovées après que leurs anciens

  9   propriétaires les aient récupérées.

 10   Q.  Merci. Ma question n'a pas été complètement insérée au compte rendu

 11   d'audience. Quand est-ce qu'ils en sont devenus les propriétaires ?

 12   R.  Non, ils n'en sont pas devenus les propriétaires, parce que ce n'était

 13   pas possible.

 14   Q.  Il a également été dit que des certificats ont été demandés à certaines

 15   personnes, certificats ou attestations par lesquelles ces personnes

 16   faisaient don de leurs maisons. Combien y a-t-il eu de cas de changement de

 17   propriétaires à Vlasenica, c'est-à-dire que le bien immobilier de quelqu'un

 18   lui aurait été pris ?

 19   R.  Je ne connais pas un seul cas de bien immobilier qui aurait été

 20   confisqué à quelqu'un.

 21   Q.  Est-ce que vous connaissez Tomo Savkic, Milenko Stanic, et d'autres

 22   membres de la population serbe de Vlasenica ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Est-ce que ces autorités ont participé ou ont été impliquées d'une

 25   quelconque façon dans cet incident de Zaklopaca ?

 26   M. FILE : [interprétation] Monsieur le Président, je fais objection à cette

 27   question comme dépassant le champ du contre-interrogatoire.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.


Page 34510

  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Il a été dit ou impliqué qu'il y avait eu sur

  2   place une voiture de police. Or, une voiture de police, c'est un véhicule

  3   qui appartient aux autorités locales.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne suis pas sûr que cette question

  5   découle du contre-interrogatoire. Vous auriez pu la poser au cours de

  6   l'interrogatoire principal. J'ai tendance à être d'accord avec le

  7   Procureur.

  8   Maître Robinson, vous pouvez nous aider ?

  9   M. ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je pense que le

 10   contre-interrogatoire du Procureur a mis en cause la personne ou les

 11   personnes responsables des meurtres, ce qui est tout à fait conforme à la

 12   question débattue.

 13   [La Chambre de première instance se concerte]

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Nous autorisons la question.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 16   M. KARADZIC : [interprétation]

 17   Q.  Monsieur Trisic, vous avez dit aujourd'hui que vous n'avez pas reconnu

 18   ces personnes, et il a été lu un passage d'une déclaration dans laquelle il

 19   était également écrit que les personnes responsables des tirs n'ont pas été

 20   reconnues. Alors, ce qui m'intéresse maintenant, c'est la chose suivante :

 21   d'après ce que vous savez personnellement, est-ce que la police de

 22   Vlasenica ou de Milici a participé à cet incident et quelle a été la

 23   position de la police ou des autorités de Vlasenica et de Milici par

 24   rapport à cet incident ?

 25   R.  Je pense que les autorités n'ont pas été au courant de l'incident, car

 26   les efforts étaient déployés vers la possibilité pour nous tous de

 27   continuer à vivre les uns avec les autres, à côté des uns des autres, comme

 28   nous le faisions depuis toujours. Et je pense personnellement que les


Page 34511

  1   autorités n'ont même pas été informées de cet incident.

  2   Q.  Merci. Vous avez évoqué la possibilité de la présence de la police pour

  3   assurer la sécurité des conduites d'eau. Est-ce que vous saviez qu'une

  4   voiture de police aurait pu accompagner la colonne de l'armée pendant que

  5   cette colonne traversait les municipalités ? Je voudrais vous lire une

  6   partie de la déclaration de Zoran Durmic qui a témoigné ici récemment.

  7   Paragraphe 8 :

  8   "Nous avons été arrêtés au niveau du barrage routier. On nous a

  9   demandé où nous allions et nous avons répondu que nous escortions la

 10   colonne militaire jusqu'à Zvornik. Toutes les personnes présentes à ce

 11   barrage routier ont été assez fermes et désagréables dans ce qu'ils ont

 12   dit."

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] La lecture a été trop rapide. Regardez

 14   le compte rendu d'audience et reprenez peut-être à partir du point où la

 15   phrase s'est arrêtée au compte rendu d'audience.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vois --

 17   M. FILE : [interprétation] Monsieur le Président.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Monsieur File.

 19   M. FILE : [interprétation] Je fais objection à cette question comme étant

 20   particulièrement directrice. En effet, utiliser les mots d'un témoin pour

 21   laisser entendre quelque chose qui a trait à ce barrage routier et à la

 22   colonne militaire n'est pas adapté.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] J'aurais tendance à être d'accord avec

 24   vous, Monsieur File.

 25   Quelle est votre question, Monsieur Karadzic ? Veuillez la poser d'une

 26   manière moins directrice.

 27   M. KARADZIC : [interprétation]

 28   Q.  Je pensais à tous les moyens qui auraient permis de voir une voiture de


Page 34512

  1   police sans que celle-ci ait participé à --

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Enfin, je retire. Je retire.

  3   M. KARADZIC : [interprétation]

  4   Q.  Monsieur Trisic, est-ce que vous avez entendu parler d'un tiers ?

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, est-ce que c'est

  6   votre dernière question ? Car nous devons suspendre l'audience. Poursuivez.

  7   M. KARADZIC : [interprétation]

  8   Q.  Monsieur Trisic, vous avez dit n'avoir reconnu aucun de ces soldats.

  9   Est-ce que peut-être un tiers, un autre habitant, vous aurait dit avoir

 10   reconnu l'un ou l'autre des soldats qui sont arrivés et qui ont tirés ?

 11   R.  Non, je n'ai pas entendu ce genre de chose.

 12   Q.  Dernière question. Où est-ce que les personnes qui ont été tuées ont

 13   été tuées ? Est-ce que ces personnes se trouvaient dans leurs maisons ou

 14   ailleurs ? Enfin, dans quelles conditions est-ce qu'un nombre aussi

 15   important de personnes a été tué en dix ou 15 minutes seulement ?

 16   R.  C'est ce que m'ont dit les habitants, que des gens ont été tués alors

 17   qu'ils étaient en train de fuir leurs maisons pour essayer de se sauver par

 18   les forêts, par le cours d'eau, et cetera. Tous ceux qui sont restés dans

 19   leurs domiciles sont restés vivants. Rien ne leur est arrivé. Ibro

 20   Hamidovic et Semsudin, en tout cas, ont déclaré cela. Quand il est venu me

 21   voir à Vlasenica trois jours plus tard, lui et sa femme ainsi que leurs

 22   belles-sœurs allaient bien.

 23   Q.  Je vous remercie, Monsieur Trisic.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je n'ai plus de question à poser au témoin,

 25   Monsieur le Président.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Trisic. Je

 28   vous remercie d'être venu à La Haye pour témoigner. Vous pouvez maintenant


Page 34513

  1   vous retirer.

  2   Ce que je vais dire ne concerne que la journée d'aujourd'hui. La Chambre va

  3   prendre une heure de pause pour le déjeuner. Donc, l'audience sera

  4   définitivement suspendue jusqu'à 15 heures, à moins que cela ne pause un

  5   problème à l'une ou l'autre des parties.

  6   M. ROBINSON : [interprétation] Pas de problème.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous reprenons à 13 heures 45.

  8   --- L'audience est levée pour le déjeuner à 12 heures 42.

  9   [Le témoin se retire]

 10   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 11   --- L'audience est reprise à 13 heures 49.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Peut-on demander au témoin de prononcer

 13   la déclaration solennelle, s'il vous plaît.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 15   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 16   LE TÉMOIN : MOMIR BULATOVIC [Assermenté]

 17   [Le témoin répond par l'interprète] 

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur Bulatovic. Veuillez vous

 19   asseoir et vous mettre à l'aise.

 20   Peut-on demander au greffier de passer à huis clos partiel, s'il vous

 21   plaît, très rapidement.

 22   [Audience à huis clos partiel]

 23  (expurgé)

 24  (expurgé)

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 26  (expurgé)

 27  (expurgé)

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 11  (expurgé)

 12   [Audience publique]

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez continuer, Monsieur Karadzic.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 15   Interrogatoire principal par M. Karadzic :

 16   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Une seconde. J'ai oublié de mentionner

 18   que nous allons tenir ce volet d'audience conformément à l'article 15 bis

 19   en l'absence du Juge Morrison.

 20   Voilà, allez-y.

 21   M. KARADZIC : [interprétation]

 22   Q.  Monsieur le Président, est-ce que vous avez fait une déclaration à

 23   l'équipe de ma Défense ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Je vois que vous savez déjà qu'il faut ménager des pauses entre les

 26   questions et les réponses, et je vous en remercie.

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pourrait-on demander qu'on affiche le document

 28   1D07815, s'il vous plaît.


Page 34515

  1   M. KARADZIC : [interprétation]

  2   Q.  Est-ce que vous voyez le document sur l'écran, qui est votre

  3   déclaration ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Merci. Est-ce que vous avez lu et signé cette déclaration ?

  6   R.  Au vu de la première page, il s'agit de la déclaration que j'ai lue et

  7   que j'ai signée, effectivement.

  8   Q.  Merci.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-on maintenant montrer au président

 10   Bulatovic la dernière page, de façon à ce qu'il puisse identifier sa

 11   signature.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est ma signature.

 13   M. KARADZIC : [interprétation]

 14   Q.  Merci. Est-ce que cette déclaration reflète fidèlement ce que vous avez

 15   dit à l'équipe de la Défense ?

 16   R.  Oui.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous pouvez répéter, Monsieur

 18   Karadzic. Je ne suis pas sûr de vous avoir entendu ou pas.

 19   L'ACCUSÉ : [aucune interprétation]

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous pouvez essayer votre

 21   micro ?

 22   L'ACCUSÉ : [aucune interprétation]

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je suis désolé, c'est mon notebook qui a

 24   appuyé sur le bouton priorité. Veuillez continuer.

 25   M. KARADZIC : [interprétation]

 26   Q.  Si je vous posais les mêmes questions aujourd'hui, est-ce que vous

 27   apporteriez les mêmes réponses à ces questions, réponses qui figurent dans

 28   cette déclaration ?


Page 34516

  1   R.  Oui, ce serait les mêmes, mais je dois vous faire remarquer que je peux

  2   également présenter d'autres éléments à cette honorable Chambre de première

  3   instance, y compris certains faits qui ne pouvaient pas être incorporés

  4   dans la première déclaration.

  5   Q.  Merci.

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Monsieur les

  7   Juges, puis-je verser cette série de document au titre de l'article 92 ter.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Maître Robinson.

  9   M. ROBINSON : [interprétation] Pour le président Bulatovic, nous avons en

 10   fait huit pièces associées; deux ne figuraient pas sur notre liste 65 ter,

 11   ce sont les deux dernières qui figurent sur notre tableau, et nous

 12   demandons qu'elles soient rajoutées puisque ces deux documents ont été

 13   abordés durant la séance de récolement.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Et pour ce qui est des domaines que le

 15   témoin souhaitait aborder, est-ce que ceci va être obtenu en déposition

 16   viva voce par M. Karadzic ?

 17   M. ROBINSON : [interprétation] Non, Monsieur le Président. Je pense qu'il y

 18   aura des explications supplémentaires nécessaires dans le cadre des

 19   questions supplémentaires.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Des objections, Madame Uertz-Retzlaff ?

 21   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Non, pour ce qui est des éléments

 22   actuels qui ont été abordés par le témoin dans sa déclaration, si j'ai bien

 23   compris, tout ceci est versé dans sa totalité. Ai-je bien compris cela ?

 24    M. LE JUGE KWON : [interprétation] J'allais également soulever ce point.

 25   En ce qui concerne les quatre - je crois, un, deux, trois, oui, quatre au

 26   total - notes sténographiques, je suppose que vous allez demander le

 27   versement des pages qui ont été présentées au témoin, n'est-ce pas ?

 28   M. ROBINSON : [interprétation] S'il n'y a pas d'objection de la part de


Page 34517

  1   l'Accusation, nous souhaiterions que ces pages soient versées au dossier,

  2   mais si l'Accusation souhaite que nous ne versions que les pages

  3   concernées, nous le ferons.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je m'adresse à vous, Madame Uertz-

  5   Retzlaff.

  6   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Oui.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pourquoi devraient-elles être toutes

  8   versées ?

  9   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] En fait, je pense qu'elles devraient

 10   être versées dans leur totalité et je [inaudible] de la Défense, notamment

 11   le document de la liste 65 ter 06141, parce qu'en fait, il s'agit de la

 12   totalité d'un document qui fait référence à un recensement réalisé par les

 13   négociateurs de paix. Je pense que ce document devrait être versé dans sa

 14   totalité et l'Accusation va utiliser ce document pour mettre en exergue

 15   certains passages et il est difficile de procéder par petites touches,

 16   parce que cela porte sur les négociations.

 17         Pour ce qui est des comptes rendus du Conseil suprême de la Défense,

 18   tout du moins pour ce qui est des documents 06243 et 06256, il y a quelques

 19   passages qui ne sont pas vraiment pertinents pour la situation en Bosnie,

 20   mais qui portent en fait sur le financement de la VJ, mais il n'y en a pas

 21   beaucoup. Les discussions sont principalement associées à des problèmes sur

 22   le territoire de la Republika Srpska, la coopération des dirigeants avec

 23   les armées, et je pense que ceci devrait également être présenté dans sa

 24   totalité aux Juges de cette Chambre. Pour ce qui est du document 06253, il

 25   s'agit également d'un document qui porte totalement sur les négociations,

 26   les résultats de ces négociations, les positions adoptées par les Bosno-

 27   Serbes et les autres participants et, par conséquent, je pense qu'il serait

 28   très utile pour les Juges de la Chambre qu'ils disposent de la totalité de


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  1   ce document également.

  2   [La Chambre de première instance se concerte]

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Fort bien. Compte tenu des

  4   circonstances, nous allons accepter le versement de tous ces documents dans

  5   leur totalité.

  6   Peut-on recevoir les cotes.

  7   M. LE GREFFIER : [interprétation] La déclaration au titre de l'article 92

  8   ter, document 65 ter 1D7815, recevra la cote D3051. Les huit pièces

  9   associées recevront les cotes D3052 à D3059 respectivement.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 11   Veuillez continuer, Monsieur Karadzic.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Je vais maintenant donner lecture du

 13   résumé de la déclaration du président Bulatovic qui vient d'être versé au

 14   dossier. Je vais en donner lecture en langue anglaise.

 15   Momir Bulatovic a officié en tant que président du Monténégro du 23

 16   décembre 1990 au 15 janvier 1998. Il a occupé le poste de premier ministre

 17   de la République fédérale de Yougoslavie du 19 mai 1998 au 4 novembre 2000.

 18   Le président Bulatovic pense que les Serbes de Bosnie, dirigés par Radovan

 19   Karadzic, n'avaient pas besoin de la guerre ni ne la voulaient. Ils étaient

 20   en faveur d'un statu quo, c'est-à-dire en faveur d'un maintien dans la

 21   Yougoslavie telle qu'elle existait. Tout ce qu'ils ont fait était en fait

 22   une réponse ou une riposte à des actions et à des menaces des Musulmans de

 23   Bosnie qui avaient pour objectif de régner sur la totalité de la Bosnie. Le

 24   président Bulatovic est convaincu que la guerre aurait pu être évitée en

 25   mars 1992 si les Musulmans de Bosnie avaient accepté le plan Cutileiro.

 26   Cependant, ils ont été persuadés par les Américains qu'ils pourraient

 27   obtenir bien plus s'ils rejetaient ce plan. Plus de trois ans plus tard et

 28   après que des milliers de vies aient été sacrifiées, cette période s'est


Page 34519

  1   soldée par un accord, l'accord de Dayton, qui était quasiment identique au

  2   plan Cutileiro.

  3   Le 16 septembre 1991, le président Bulatovic a participé à une réunion de

  4   hauts représentants de la Serbie, du Monténégro et de la Bosnie-Herzégovine

  5   à Belgrade. La réunion était organisée afin de trouver des solutions afin

  6   de conserver la Yougoslavie telle quelle. Le Dr Karadzic et Adil

  7   Zulfikarpasic, un dirigeant musulman, ont été invités en tant qu'invités

  8   spéciaux après avoir conclu cet accord historique serbo-musulman pour

  9   demander un partage du pouvoir pacifique en Bosnie. Le président Alija

 10   Izetbegovic a choisi de ne pas participer à cette réunion.

 11   Lorsqu'il est devenu inévitable que la Bosnie ne resterait pas au sein de

 12   la Yougoslavie, le Dr Karadzic a été en faveur d'une entité bosno-serbe

 13   distincte au sein de laquelle les Serbes pourraient se diriger

 14   politiquement plutôt que d'être sous le contrôle politique des Bosno-

 15   Musulmans. Le Dr Karadzic a toujours exprimé le souhait que les Musulmans

 16   et les Croates pourraient vivre dans l'entité serbe avec un plein respect

 17   de leurs droits, alors que les Serbes qui préféraient vivre dans l'entité

 18   bosno-musulmane ou bosno-croate seraient libres de le faire et que leurs

 19   droits seraient également respectés. Il s'agissait du principe qui sous-

 20   tendait le plan Cutileiro auquel s'était souscrit le Dr Karadzic en mars

 21   1992 et qu'il a soutenu tant en privé qu'en public.

 22   Le président Izetbegovic [sic] n'a jamais entendu le Dr Karadzic dire que

 23   tout ce qui l'amenait à penser qu'il était en faveur de l'expulsion des

 24   Musulmans et des Croates des zones serbes en Bosnie -- il n'était pas au

 25   courant d'une entreprise criminelle conjointe entre les dirigeants bosno-

 26   serbes de la République fédérale de Yougoslavie visant à expulser les

 27   Musulmans et les Croates des zones serbes de la Bosnie.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Juste une seconde, Monsieur Karadzic. Je


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  1   crois qu'à la ligne 3, vous auriez dû parler du président Bulatovic, et non

  2   du président Izetbegovic. Veuillez continuer.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'espère que ce n'est pas ce que j'ai dit. J'ai

  4   dit président Bulatovic. Je ne sais pas comment ceci a été traduit.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] C'est ce que vous avez dit. Veuillez

  6   continuer.

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Le président Bulatovic était au courant des

  8   objectifs stratégiques adoptés par l'assemblée bosno-serbe en mai 1992. Il

  9   n'avait jamais conçu que l'objectif de séparation signifiait une séparation

 10   physique des groupes ethniques ou religieux par le biais d'expulsions. Il a

 11   toujours conçu que c'était dans le sens politique, de façon à ce que les

 12   Serbes puissent être en mesure de se gouverner eux-mêmes plutôt que d'être

 13   mis en minorité par les Musulmans.

 14   Le président Bulatovic est conscient que durant la guerre en Bosnie, des

 15   membres de la population de tous les groupes ethniques ont fait l'objet

 16   d'expulsions. Il ne pense pas que ceci était le résultat de politiques de

 17   Radovan Karadzic. Plutôt, il s'agissait d'une mentalité collective de la

 18   population, qui a réagi de manière instinctive lorsque la guerre a éclaté,

 19   en raison de ce qu'ils avaient vécu durant la Deuxième Guerre mondiale,

 20   lorsque les Oustacha ont aidé les Musulmans à tuer de nombreux civils

 21   serbes dans des villages dans toute la Bosnie. Lorsque la guerre a éclaté

 22   en Bosnie, le Dr Karadzic n'avait aucune possibilité - ni tout autre

 23   dirigeant politique - de contrôler la population afin d'éviter que ces

 24   crimes ne soient commis.

 25   Le président Bulatovic a eu de nombreuses conversations avec le Dr Karadzic

 26   concernant le bombardement de Sarajevo. Le Dr Karadzic a reconnu la

 27   responsabilité politique et les dégâts causés par les bombardements à la

 28   cause bosno-serbe aux yeux du monde. Il a dit au président Bulatovic que


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  1   lorsqu'il s'était enquis auprès du général Mladic et de l'armée bosno-serbe

  2   pour savoir si l'on pouvait mettre fin au bombardement, on lui avait

  3   répondu que le bombardement était nécessaire pour éviter que les positions

  4   serbes soient prises par l'armée bosno-musulmane qui, dans ce cas-là,

  5   ensuite, pourrait attaquer les civils serbes dans les banlieues de

  6   Sarajevo.

  7   Le Dr Karadzic ainsi que le président Bulatovic ont également abordé les

  8   allégations fréquentes formulées par les négociateurs internationaux, à

  9   savoir que les bombardements n'étaient pas limités à repousser des attaques

 10   militaires mais qu'elles étaient ciblées contre des zones civiles. Le Dr

 11   Karadzic lui a dit qu'il avait interdit le bombardement de zones civiles à

 12   plusieurs reprises et qu'il a fait tout ce qu'il pouvait pour éviter un

 13   bombardement inutile ou disproportionné de Sarajevo.

 14   Le bombardement du marché de Markale à Sarajevo le 5 février 1994 a été

 15   abordé lors des discussions du Conseil suprême de la Défense le 7 février

 16   1994. Le général Perisic, le chef d'état-major de l'armée nationale

 17   yougoslave, la JNA, a dit :

 18   "Là-bas, en Republika Srpska, ils disent que ce ne sont certainement pas

 19   eux qui sont responsables, et la probabilité est limitée."

 20   Le général Perisic a ensuite signalé que :

 21   "Nos experts militaires avancent que ceci est impossible. Nous pensons

 22   qu'il en est allé de même pour la rue Vase Miskina, à savoir que l'explosif

 23   a été préparé a l'avance et a été placé dans différents endroits et qu'à un

 24   moment donné, on a donné le signal pour déclencher ces explosifs au moment

 25   où il y avait le plus grand nombre de personnes sur place."

 26   En août 1992, la question des camps de détention en Bosnie-Herzégovine est

 27   arrivée de manière très proéminente aux négociations après des reportages

 28   dans les médias concernant ces camps. Lorsque les rapports de maltraitance


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  1   de personnes dans ces camps ont vu le jour, il a parlé de ceci avec Radovan

  2   Karadzic. Le Dr Karadzic semblait être surpris de ces actes de

  3   maltraitance. Il a dit au président Bulatovic qu'il avait garanti que les

  4   réfugiés dans les camps seraient pris en charge correctement. Ils seraient

  5   traités conformément aux conventions de Genève.

  6   Le président Bulatovic a abordé avec Radovan Karadzic la question des

  7   paramilitaires. Le Dr Karadzic ne souhaitait pas que les groupes

  8   paramilitaires soient présents en Bosnie, et ils causaient également de

  9   grands problèmes pour les autorités bosno-serbes locales et pour les

 10   citoyens civils, et de la même manière le Dr Karadzic voulait se

 11   débarrasser de ces personnes mais n'avait tout simplement pas la

 12   possibilité de le faire.

 13   En 1994, le président Bulatovic est devenu conscient qu'un différend avait

 14   vu le jour entre le président Karadzic et le général Mladic. Durant des

 15   séances du Conseil suprême de la Défense en 1994, c'est une instance du

 16   système yougoslave de défense, ils ont approuvé certaines actions

 17   personnelles visant à mettre en retraite des généraux qui, on pensait,

 18   soutenaient le président Karadzic, tel que le général Stanislav Galic. Lors

 19   d'une discussion le 11 juillet 1994, on leur a dit que le général Mladic

 20   avait proposé de mettre en retraite les généraux qui avaient maintenant

 21   "adopté l'option Karadzic".

 22   Au fur et à mesure que la guerre s'est déroulée, le président Karadzic a

 23   perdu beaucoup de son pouvoir politique. Le général Mladic était devenu une

 24   icône, et l'assemblée bosno-serbe était dominée par des représentants du

 25   peuple qui se trouvaient dans les tranchées et qui étaient contre toutes

 26   formes de compromis. A un moment il semblait que le président Karadzic

 27   avait perdu le contrôle du général Mladic et de la VRS.

 28   Le président Bulatovic a appris à connaître très bien Radovan Karadzic au


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  1   cours des années allant de 1991 à 1997. Il ne l'a jamais entendu faire

  2   montre de haine contre les Musulmans ou les Croates, ni n'avoir prononcé

  3   des propos qui le laisseraient penser que le Dr Karadzic était en faveur

  4   des crimes commis contre des peuples issus de ces groupes ethniques. Il

  5   peut dire avec une certitude absolue que Radovan Karadzic n'aurait jamais

  6   été en faveur de l'exécution de prisonniers, que ce soit à Srebrenica ou

  7   ailleurs.

  8   Le président Bulatovic était présent lors des négociations à Belgrade en

  9   juillet 1996 lorsque le diplomate américain, Richard Holbrooke, s'est rendu

 10   à Belgrade pour négocier en vue de faire démissionner Radovan Karadzic dans

 11   le cadre de la mise en œuvre des accords de Dayton. Il a entendu

 12   personnellement Richard Holbrooke dire qu'il avait la garantie du président

 13   des Etats-Unis que Karadzic ne ferait pas l'objet de poursuites par le

 14   Tribunal de La Haye s'il démissionnait et s'il se retirait de la vie

 15   politique.

 16   C'est le un résumé que je voulais vous communiquer, et je n'ai pas de

 17   question à poser au président Bulatovic pour ce qui est de mon

 18   interrogatoire au principal.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il me semble que les interprètes ont

 20   omis d'interpréter la dernière partie de ce que vous avez dit parce qu'ils

 21   étaient encore au résumé. Est-ce que vous pouvez répéter.

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Le président Bulatovic était présent à

 23   l'occasion des négociations à Belgrade en juillet 1996 lorsque le diplomate

 24   des Etats-Unis d'Amérique, Richard Holbrooke, est venu à Belgrade pour

 25   négocier la démission de Radovan Karadzic en tant que partie intégrante de

 26   la mise en œuvre des accords de Dayton.

 27   Le président Bulatovic a entendu personnellement Richard Holbrooke

 28   dire qu'il avait la garantie du président des Etats-Unis que M. Karadzic ne


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  1   ferait pas l'objet de poursuites au Tribunal de La Haye s'il démissionnait

  2   et s'il se retirait de la vie politique.

  3   Ce qui n'a probablement pas été interprété, c'est que j'ai dit qu'il

  4   s'agissait du résumé, et que pour l'instant je n'avais pas de question à

  5   poser.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Effectivement, c'est ce qui manquait.

  7   Monsieur Bulatovic, comme vous l'avez remarqué, votre déposition en

  8   l'espèce a été versée par écrit plutôt qu'une déposition orale. Maintenant,

  9   c'est un représentant du bureau du Procureur qui va procéder au contre-

 10   interrogatoire, en l'occurrence, il s'agit de Mme Uertz-Retzlaff.

 11   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je

 12   m'attendais en fait à ce qu'un ou deux documents soient abordés viva voce;

 13   or, ce n'est d'évidence pas le cas. C'est bien. Merci.

 14   Contre-interrogatoire par Mme Uertz-Retzlaff :

 15   Q.  [interprétation] Alors bonjour, Monsieur Bulatovic.

 16   R.  Merci.

 17   Q.  Monsieur Bulatovic, dans votre déclaration aux paragraphes 24 à 26,

 18   vous avez mentionné le pilonnage de Sarajevo, et dans ce contexte vous

 19   faites référence à des notes sténographiques d'une session du conseil de

 20   coordination de la politique d'Etat qui s'est tenue le 18 août 1992. Et M.

 21   Karadzic vous aurait dit à vous, à Milan Panic et autres personnes

 22   présentes, qu'il n'avait pas de contrôle, qu'il n'exerçait pas de contrôle

 23   à l'égard des armes et à l'égard de certaines parties de la VRS, et que ces

 24   parties agissaient comme bon leur semblaient; est-ce bien exact ?

 25   R.  Cette question est assez vaste. Je ne sais pas exactement quel est le

 26   point auquel vous vouliez en arriver.

 27   Q.  Je vous demandais si M. Karadzic, lorsqu'il a parlé de certains

 28   événements à l'occasion de ces réunions, avaient coutume de dire qu'ils


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  1   n'exerçaient pas de contrôle à l'égard des armes lourdes - par exemple à

  2   Sarajevo - et certaines autres parties où la VRS agissait comme bon lui

  3   semblait. Est-ce que c'est une chose qu'il avait coutume de vous dire, ça

  4   et là, à vous ou à d'autres personnes ?

  5   R.  Si vous me demandez si ces notes sténographiques reprennent fidèlement

  6   le débat qui s'est déroulé, je dirais que oui. C'est tout à fait fidèle

  7   pour ce qui est de ce qui s'est dit. Mais si vous voulez savoir si à cette

  8   occasion et à bien d'autres occasions on a dû faire face au fait qu'il y

  9   avait une guerre civile qui faisait rage et qu'il n'était pas possible

 10   d'exercer le contrôle et le commandement à l'égard de toute unité, je ne

 11   pense pas que le général Mladic ait pu le faire lui-même, et encore moins

 12   pouvait faire ce genre de choses à un leader politique qui se trouvait être

 13   là-bas.

 14   Q.  Monsieur Bulatovic, lorsque vous dites ce type de choses, vous vous

 15   référez aux affirmations où M. Karadzic et d'autres membres de la direction

 16   des Serbes de Bosnie avaient présenté ce type d'affirmation à l'occasion de

 17   vos entretiens, n'est-ce pas ? Et vous, personnellement, vous n'auriez pas

 18   l'opportunité de présenter vos observations ?

 19   R.  Ecoutez, si vous le permettez, il n'y avait pas que M. Karadzic. Il y

 20   avait une conférence sur l'ex-Yougoslavie qui avait cours, et qui se

 21   rapportait à la Bosnie-Herzégovine, entre autres, et il y avait des

 22   intermédiaires internationaux, Lord Owen avec M. Cyrus Vance, et après

 23   cela, Thorvald Stoltenberg. Nous avons à bien des reprises essayé de

 24   trouver une solution pacifique et se confronter au fait que les pilonnages

 25   duraient. Nous avions demandé des confirmations de la part d'instances

 26   indépendantes. Nous voulions que les pilonnages cessent, nous ne voulions

 27   faire confiance seulement à une partie uniquement. Mais d'après les sources

 28   des Nations Unies de la mission d'observation, on a pu constater que le


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  1   pilonnage de Sarajevo se déroulait au-delà de toute logique ou de tout

  2   planning. Et cela n'exprimait pas notre préoccupation à nous seulement, à

  3   nous autres, mais aussi une préoccupation de la part des intermédiaires

  4   internationaux.

  5   Je sais que Lord Owen avait été horrifié --

  6   Q.  Je vais vous interrompre.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant. Je vais vous interrompre

  8   moi-même.

  9   Madame Uertz-Retzlaff, nous allons faire une petite pause de cinq minutes à

 10   présent.

 11   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Très bien.

 12   --- La pause est prise à 14 heures 19.

 13   --- La pause est terminée à 14 heures 24.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pour les besoins du compte rendu

 15   d'audience, je dirais que nous sommes en train de siéger avec tous les

 16   Juges de la Chambre à présent.

 17   Vous pouvez continuer, Madame Uertz-Retzlaff.

 18   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 19   Q.  Monsieur Bulatovic, je vous ai interrompu parce que nous avons que très

 20   peu de temps, je ne vous ai pas posé de question au sujet de négociations

 21   avec la communauté internationale ou les internationaux et ce qu'ils vous

 22   ont dit. Ce que je préférerais c'est vous entendre répondre de façon

 23   précise aux questions qui sont posées.

 24   Permettez-moi de vous dire que vous avez personnellement remarqué à

 25   l'occasion des réunions et des négociations avec M. Karadzic et les

 26   dirigeants des Serbes de Bosnie, que lorsqu'ils étaient exposés à des

 27   pressions ils avaient parfois coutume de faire des manœuvres politiques et

 28   même de dire la vérité. Ou de dire des contrevérités. Est-ce que vous


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  1   l'avez remarqué, et est-ce que vous vous en souvenez ?

  2   R.  C'est dans la meilleure des intentions possibles que j'ai voulu

  3   répondre à votre question. Je n'ai pas voulu m'étendre en largeur. Et je

  4   dirais qu'à ces négociations internationales c'était précisément les sujets

  5   abordés : les pilonnages de Sarajevo. On a compte les obus, nous n'avons

  6   pas été les seuls à le faire; ça a été fait par toute la conférence sur la

  7   Bosnie-Herzégovine, ça a été l'œuvre du système de monitoring des Nations

  8   Unies.

  9   Q.  Je vais vous interrompre à nouveau. Ma question était celle de savoir

 10   si à l'occasion de votre coopération avec M. Karadzic et les autres leaders

 11   des Serbes de Bosnie vous avez pu remarquer qu'ils disaient parfois des

 12   contrevérités ou s'ils avaient recours à des manœuvres politiques. C'était

 13   la question, alors si vous pouvez répondre par oui ou pour un non.

 14   R.  Non, moi, je perçois ceci comme une question directrice. Je me trompe

 15   peut-être. Je vous serais reconnaissant de m'aider et me dire ce qui est la

 16   signification, est-ce que quelqu'un dit la vérité ou des contrevérités, il

 17   est toujours vrai qu'il y a de graves pilonnages qui sont en cours au

 18   niveau d'une ville et qu'il y a beaucoup de pertes de vie humaine qui

 19   surviennent.

 20   Moi, je n'arrive pas à établir le lien.

 21   Q.  Je vais vous interrompre à nouveau. L'Accusation a le droit de poser

 22   des questions directrices et c'est ce que je suis en train de faire,

 23   j'avais espéré que vous répondriez à la question que j'ai posée mais vous

 24   ne l'avez pas fait.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je crois que le témoin a été jeté dans

 26   une confusion du fait de votre question précédente.

 27   Cette question était celle de savoir si M. Karadzic et d'autres dirigeants

 28   des Serbes de Bosnie avaient parfois, avec vous ou avec d'autres


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  1   représentants, proféré des contrevérités ? C'est une question générale.

  2   Vous pouvez y répondre, Monsieur Bulatovic.

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] D'après moi, ce n'est pas le cas. J'ai été

  4   présent lorsqu'ils ont raconté ce qui se passait à d'autres personnes et

  5   d'autres sources d'information ont confirmé, ont corroboré une telle

  6   présentation des événements et cet état des choses.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bon. Vous pouvez continuer, Madame

  8   Uertz-Retzlaff.

  9   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 10   Je voudrais qu'on montre maintenant au témoin la pièce 65 ter 24596B.

 11   Q.  Et en attendant son affichage, je dirais qu'il s'agit là d'une partie

 12   de votre livre intitulé : "Les règles de silence", où vous décrivez le

 13   conflit en ex-Yougoslavie et vos observations à vous. Cet extrait concret

 14   du livre se rapporte à la description que vous avez faite d'un événement

 15   qui s'est produit à Genève dans la nuit du 19 janvier 1994. Oui, c'est bien

 16   cela. Vous y décrivez, à cette page-là, vos négociations entre la partie

 17   serbe et la partie croate. Vous indiquez que l'on avait abouti à un accord

 18   du point de vue d'une proposition émanant de la partie serbe pour ce qui

 19   est d'une délimitation interethnique et d'une carte qui reprendrait ceci.

 20   Et vous parlez des démarches suivantes à entreprendre, à savoir que des

 21   experts en cartes de part et d'autre préciseraient les cartes qui

 22   prendraient en compte les expectatives territoriales du côté croate.

 23   R.  Je suis l'auteur de ce livre, je m'en souviens très bien. Je l'ai relu,

 24   et je crois que ceci reflète fidèlement les événements de l'époque tels que

 25   je les ai vécus. Mais vous me permettrez de dire ceci : je suis en train de

 26   parler d'autre chose par rapport à ce qui a été posé comme question. Ce

 27   n'est pas les cartographes qui étaient chargés de définir les frontières.

 28   Il est clairement dit ici que le président Karadzic et les autres membres


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  1   de la délégation serbe ont essayé d'arriver à un territoire de 17,5 % qui

  2   répondrait aux attentes du président croate, M. Tudjman, du point de vue de

  3   la possibilité d'arriver à un accord historique pour ce qui est de la

  4   coopération entre Serbes et Croates. Et à mes yeux, ce paragraphe-ci est un

  5   autre événement, est une autre illustration du sort tragique qu'a connu la

  6   Bosnie-Herzégovine. Et je parle de l'énorme responsabilité qui était

  7   assumée par le représentant politique respectif --

  8   Q.  Je vais vous interrompre.

  9   Ce à quoi je faisais en réalité référence, c'était le fait d'indiquer

 10   que le pas qui restait à faire, c'était l'élaboration de cartes qui

 11   feraient l'objet de l'accord de tout un chacun, et c'est ce que cette page

 12   nous décrit. A cette même page, vous indiquez que Radovan Karadzic aurait

 13   dit qu'il n'était point nécessaire d'avoir des cartographes et que les

 14   expertes de la Republika Srpska achèveraient tout le boulot. Ensuite vous

 15   dites :

 16   "Je crois que Tudjman n'avait pas véritablement claqué la porte après

 17   lui lorsque Radovan Karadzic a demandé : 'Est-ce que quelqu'un a une gomme

 18   pour effacer ?' Nous ne pouvions pas croire qu'il allait effacer la ligne

 19   sur laquelle ils venaient de tomber d'accord…"

 20   C'était bien ainsi que la situation se présentait ?

 21   R.  Non, pas du tout. Nous sommes en train de lire le même texte,

 22   mais nous le lisons de façon différente. Moi, je décris un drame qui est

 23   censé nous faire aboutir à des dessins de cartes, et on parle qu'une ligne

 24   au crayon sur une carte à l'échelle de 1 par rapport à 50 000, mais ça,

 25   c'est un kilomètre. Mais le kilomètre, c'est marqué par des souffrances des

 26   victimes et des pertes de vies. C'était une tentative d'aboutir à une

 27   solution, mais il est évident qu'une guerre qui a si impitoyablement

 28   détruit la Bosnie-Herzégovine a fait que les victimes de tous les côtés a


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  1   rendu le compromis impossible. Il ne s'agit pas ici de dire que quelqu'un

  2   dit la vérité ou un mensonge. Mais il s'agit de savoir dans quelle mesure

  3   on peut supporter et assumer des pertes de vies humaines qui --

  4   Q.  Je vais vous interrompre.

  5   Je viens de vous donner lecture de vos propos à vous, qui sont

  6   consignés dans ce livre, et nous pouvons le voir ici dans les deux langues.

  7   Est-ce que vous êtes en train de nier que ça s'est passé tel que vous

  8   l'avez décrit dans votre livre, à savoir que Radovan Karadzic a effacé une

  9   ligne que l'on venait de convenir ?

 10   R.  Maintenant, je crois comprendre ce que vous vouliez dire.

 11   Q.  Monsieur Bulatovic, j'ai donné lecture de ce que vous avez écrit dans

 12   votre livre. J'ai supposé que vous avez couché sur papier ce que vous aviez

 13   pu observer à l'époque, et je voulais savoir si ça s'est bien passé tel que

 14   rédigé ici.

 15   R.  Je ne nie rien de ce qui est écrit ici, mais je ne peux pas être

 16   d'accord sur l'interprétation d'une phrase que vous êtes en droit d'évoquer

 17   comme question en votre qualité de Procureur - et vous le faites maintenant

 18   - mais moi, dans cette phrase, je ne vois pas du tout ce que vous voulez

 19   laisser entendre. Ce n'est pas ici un récit au sujet d'un menteur qui est

 20   en train de gommer quelque chose de convenu. Il y a beaucoup de pages avant

 21   celle-ci et beaucoup de pages après celle-ci qui montrent à quel point il

 22   était difficile d'aboutir à une paix en Bosnie. Et je ne pourrais pas être

 23   d'accord avec votre interprétation ici pour dire que c'est moi qui ai

 24   qualifié Radovan Karadzic de menteur. Ça, c'est une interprétation que vous

 25   faites, mais moi, je ne vous la confirme pas.

 26   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais

 27   demander le versement au dossier de cet extrait.

 28   M. ROBINSON : [interprétation] Pas d'objection.


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Cette page sera versée au dossier.

  2   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P6159, Madame, Messieurs

  3   les Juges.

  4   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Je voudrais à présent que l'on nous

  5   affiche la pièce 65 ter 24596A.

  6   Q.  Il s'agit d'un autre extrait de votre livre, et il est question ici

  7   d'un extrait qui parle des négociations relatives au plan Vance-Owen datant

  8   de 1993, et il s'agit d'un certain nombre de pages non négligeable, mais la

  9   première page et le deuxième paragraphe vous font dire que :

 10   La partie yougoslave voulait véritablement aboutir à la paix, et était

 11   disposée à faire tout compromis raisonnable pour y aboutir. Alors, Monsieur

 12   Bulatovic, les compromis raisonnables que vous avez vus dans le plan Vance-

 13   Owen en 1993, les Serbes de Bosnie et la direction des Serbes de Bosnie

 14   ainsi que M. Karadzic n'avaient pas partagé votre opinion pour ce qui est

 15   de ce qu'il fallait entendre par compromis raisonnable, n'est-ce pas ?

 16   R.  Ça, c'est exact.

 17   Q.  Et vous avez également dit que c'était là votre évaluation pour ce qui

 18   est de dire que le plan Vance-Owen aurait protégé les intérêts des Serbes

 19   de Bosnie, permis de mettre un terme à la guerre, et fourni une procédure

 20   juridique qui permettrait d'apporter des solutions aux autres questions

 21   contestées, n'est-ce pas ?

 22   R.  C'est exact. Et je dirais que j'ai personnellement soutenu tous les

 23   plans, à commencer par celui de Lord Carrington et pour finir avec le plan

 24   de Dayton, parce que j'ai toujours estimé qu'il valait mieux avoir un

 25   mauvais plan de paix que d'avoir une continuation de la guerre.

 26   Q.  D'après ce que j'ai pu lire dans votre livre - il serait possible à

 27   présent de passer à la page 2 des deux versions - vous indiquez que M.

 28   Milosevic et vous-même avez fait tout ce que vous pouviez faire pour


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  1   convaincre les leaders des Serbes de Bosnie d'accepter le plan. Et

  2   lorsqu'ils sont partis au soir, vous avez en fait compris qu'ils l'avaient

  3   accepté et qu'ils étaient enfin tombés d'accord; est-ce bien exact ?

  4   R.  Oui, c'est exact.

  5   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] J'aimerais que nous passions à la

  6   page suivante à présent pour examiner le dernier paragraphe de la page en

  7   anglais et en B/C/S.

  8   Q.  Immédiatement après, M. Karadzic et M. Krajisnik ont rompu leur

  9   promesse et ont déclaré être opposés à l'accord. C'est de cette façon vous

 10   décrivez les choses dans votre livre. Est-ce bien le souvenir que vous en

 11   avez aujourd'hui également ?

 12   R.  Oui. Dans le livre, il est indiqué que les députés qui étaient

 13   responsables de la prise de cette décision étaient à la guerre. J'ai

 14   beaucoup regretté que ce plan ne soit pas admis. Mitsotakis le Grec, Cosic,

 15   le président yougoslave de l'époque, Milosevic et moi-même avons déployé

 16   tous les efforts possibles pour les convaincre mais malheureusement, nous

 17   n'avons pas réussi. Je ne pense pas que ce petit jeu était dû au président

 18   Karadzic, président de la Republika Srpska. Je pense que c'était une espèce

 19   de folie qui régnait à l'époque au sein de leur parlement, et c'est tout

 20   cela qui est écrit dans les pages que vous venez d'évoquer de mon ouvrage.

 21   Q.  Oui, mais moi je vais un peu plus loin dans le texte. Vous décrivez

 22   également dans ce passage que vous avez poursuivi tout cela lors de la

 23   réunion d'Athènes, des négociations qui se sont poursuivies avec le premier

 24   ministre grec Mitsotakis, et qu'à ce moment-là, ce qui s'en est suivi,

 25   c'est que M. Karadzic a signé et finalement accepté le plan provisoire. Il

 26   est question également dans ce passage du livre que vous-même, M. Milosevic

 27   et le premier ministre Mitsotakis avez assisté à la réunion qui s'en est

 28   suivi, au cours de laquelle l'accord n'a finalement pas été ratifié, n'est-


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  1   ce pas ?

  2   R.  Oui, c'est exact.

  3   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] J'aimerais que nous passions

  4   maintenant à la page 4 dans les deux langues, troisième paragraphe de la

  5   version anglaise, dernier paragraphe de la version B/C/S.

  6   Q.  Dans ce passage, vous dites que durant cette séance de l'assemblée -

  7   c'est ce que vous dites dans votre livre - M. Karadzic n'a pas apporté son

  8   soutien au plan, contrairement à ce que vous-même et manifestement les

  9   autres membres de la délégation de Belgrade avaient espéré, mais qu'il

 10   s'est exprimé dans un sens contraire à l'adoption du plan, n'est-ce pas ?

 11   C'est bien ce qui s'est passé ?

 12   R.  Dans mon ouvrage figurent mes impressions, que je conserve encore

 13   aujourd'hui, à savoir que le président Karadzic a montré clairement qu'il

 14   subissait des pressions importantes sur le plan humain, qu'il s'est

 15   comporté peut-être d'une façon un peu rusée, mais qu'il s'est donc exprimé

 16   encore une fois contre la signature du plan. Je sais que cette réaction

 17   était contraire à ses convictions profondes, mais des pressions tellement

 18   importantes ont été exercées sur lui à Athènes qu'il a accepté d'informer

 19   finalement son assemblée d'une façon très habile.

 20   Q.  Et dans la suite de ce passage dans votre livre, vous décrivez le fait

 21   qu'après les discours, que vous-même, les membres de la délégation de

 22   Belgrade, et en particulier M. Milosevic, avez faits, le climat a changé et

 23   que finalement vous avez commencé à espérer que le plan soit accepté. Il y

 24   a eu une interruption de la séance pour des réunions particulières. Et je

 25   voudrais vous citer - en page 5 de la version anglaise, même page de la

 26   version B/C/S - le passage suivant. C'est ce que vous dites :

 27   "La bonne occasion de conclure la paix a disparu parce que la séance a été

 28   interrompue en vue de réunions particulières auxquelles vous n'avez pas pu


Page 34534

  1   être présent et vous appelez cela des manœuvres politiques qui ont abouti

  2   au rejet du plan."

  3   Est-ce que c'est une bonne description des sentiments qui étaient les

  4   vôtres à l'époque, à savoir que ce sont des manœuvres qui vous ont empêché

  5   d'aboutir ?

  6   R.  Oui, on peut dire que c'est exact, oui. Oui.

  7   Q.  Vous dites également un peu plus loin dans votre livre que la même

  8   chose s'est produite au moment de la réunion du Groupe de contact en 1994.

  9   Vous dites, en rapport avec le mois de juillet 1994, que :

 10   "Même à ce moment-là, nous étions," dites-vous, "sûrs que la conclusion par

 11   rapport au plan de paix serait positive. La différence, cette fois-ci,

 12   c'était que nous avions davantage de réserves par rapport à la sincérité

 13   des intentions nourries par les dirigeants de la Republika Srpska."

 14   Est-ce que ceci reprend également les sentiments qui étaient les vôtres ?

 15   R.  Oui, c'est exact.

 16   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Je demande le versement au dossier de

 17   ce document.

 18   M. ROBINSON : [interprétation] Pas d'objection.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le document est admis.

 20   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce P6160.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Une seconde, je vous prie. Si c'est un

 22   document qui s'ajoute au précédent, pourquoi ne pourrait-il pas être joint

 23   au précédent dans une seule et même pièce à conviction ?

 24   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Je n'ai pas d'objection. C'est nous

 25   qui avons donné un numéro différent à ce document, car nous pensions que

 26   cela faciliterait les choses.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons ajouter l'extrait dont il

 28   vient d'être question à la pièce à conviction précédente, c'est-à-dire la


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  1   pièce P6159.

  2   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Je demande à présent l'affichage du

  3   document 65 ter numéro 24585.

  4   Q.  Et en attente de l'apparition du document à l'écran, je vous indique la

  5   chose suivante : il s'agit d'une retranscription d'un certain nombre de

  6   documents bruts recueillis par la BBC pour la vidéo que préparait la BBC et

  7   qui s'intitule "La mort de la Yougoslavie." Vous vous rappelez avoir

  8   participé à cette série d'interviews qui ont été conduites au sujet de la

  9   mort de la Yougoslavie et auxquelles ont participé un grand nombre de

 10   protagonistes ?

 11   R.  Oui, je m'en souviens. Je me souviens aussi d'avoir regretté ma

 12   participation, car c'est une vidéo faite par des journalistes qui est faite

 13   de telle façon que vous parlez pendant deux heures, et cinq minutes de ce

 14   que vous avez dit sont introduites dans la vidéo, à savoir uniquement les

 15   éléments qui plaisent aux journalistes. Je vais regarder ce texte plus en

 16   détail. Il est devant moi en anglais, ce qui n'est pas un problème, mais

 17   j'aimerais voir à quel moment ce document a été rédigé.

 18   Q.  Moi non plus, je ne suis pas capable de déterminer exactement à quel

 19   moment vous avez eu ces interviews avec un journaliste, mais en tout cas,

 20   ce sont des documents bruts de la BBC. Il ne s'agit pas de retranscriptions

 21   littérales qui auraient été reprises littéralement dans l'émission qui a eu

 22   lieu plus tard.

 23   M. ROBINSON : [interprétation] Il y a une date au bas du document.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 25   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Ah oui, 7 octobre 1994.

 26   Q.  Est-ce que ceci vous rafraîchit la mémoire par rapport au moment où ces

 27   interviews ont eu lieu ?

 28   R.  Oui, mais l'émission intitulée "Mort de la Yougoslavie" et faite par la


Page 34536

  1   BBC n'a été diffusée qu'après l'an 2000. C'est pourquoi la date qui figure

  2   ici, 1994, crée une certaine confusion dans mon esprit, car lorsque j'ai

  3   participé à ces interviews de la BBC, j'ai ensuite mis un terme à ma vie

  4   politique.

  5   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Monsieur le Président, moi non plus

  6   je ne vois pas très clairement comment cela peut se faire.

  7   Q.  Monsieur le Témoin, vous vous rappelez que vous avez cessé votre vie

  8   politique après l'an 2000 ?

  9   R.  Je regarde le texte. Il s'agit du récit fait par la BBC au sujet de la

 10   fin de la Ligue des Communistes yougoslave et logiquement, cela veut dire

 11   qu'il est question du parti communiste yougoslave, parce qu'en 1994 il y

 12   avait des sujets beaucoup plus importants que le comité central et le 14e

 13   Congrès du parti à discuter. Ce 14e Congrès a eu lieu en 1989.

 14   Q.  Je voudrais préciser un point. Ceci est un document très volumineux et

 15   selon ce document vous avez traité d'un certain nombre de sujets. Ce qui

 16   nous intéresse, ce ne sont pas les premiers sujets dont vous avez parlé,

 17   qui ont été abordés par ce journaliste - en tout cas selon le texte que

 18   nous avons ici. Passons à la page 28 de ce document. A cet endroit vous

 19   évoquez un événement qui est le bombardement de Gorazde en avril 1994. Et

 20   la date citée dans le texte est celle du 8 octobre 1994. Il est donc

 21   question dans ce passage d'un événement dont vous avez entendu parler par

 22   la police, à savoir que Gorazde avait été bombardée. Est-ce que vous vous

 23   rappelez cet événement ?

 24   R.  Eh bien, je lis le texte que j'ai sous les yeux ici, et je réponds,

 25   oui, je crois que ce qui est dit ici est exact.

 26   Q.  Et vous dites dans ce document que vous-même et M. Milosevic avez été

 27   ébahis de voir qu'une action de ce genre avait été mise en œuvre

 28   puisqu'elle détruisait tous les efforts diplomatiques qui avaient été


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  1   investis par le passé et à ce moment-là vous vous êtes confronté à M.

  2   Karadzic et à M. Krajisnik. C'est bien ce que vous dites, n'est-ce pas ?

  3   R.  Si nous lisons le document, je pourrais confirmer ou infirmer. Mais

  4   pour le moment je ne sais pas comment vous répondre.

  5   Q.  Eh bien, voyons la page suivante du document. En haut de cette page

  6   suivante, nous voyons que M. Milosevic et vous-même avez été très dérangés

  7   par la nouvelle de ce qui s'était passé et que vous les avez appelés, les

  8   responsables de cette action, qui au départ ont nié avoir attaqué Gorazde,

  9   ensuite vous les avez confrontés à la réalité de la chose et à ce moment-là

 10   ils ont dit que, oui, ils l'avaient fait et qu'ils allaient mettre un terme

 11   à ce bombardement. Est-ce que vous vous rappelez cette situation ?

 12   R.  Eh bien, disons que c'est bien comme ça que les choses se sont passées.

 13   Malheureusement il y a eu pas mal de situations de ce genre. Vous voyez que

 14   ceci mène directement aux différents bombardements de l'OTAN sur les

 15   positions de la VRS qui s'en ont suivis. Oui, voilà, c'est ma réponse.

 16   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais

 17   demander le versement au dossier des pages que je viens d'évoquer, à savoir

 18   les pages 28 et 29 de ce document uniquement. Et je vais me servir encore

 19   d'un autre extrait de ce même document.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Des objections, Maître Robinson ?

 21   M. ROBINSON : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous versons au dossier ces deux pages

 23   auxquelles s'ajoutera une autre page par la suite.

 24   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Oui. Merci, Monsieur le Président. Il

 25   faut maintenant revenir à la page 22.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Attendez -- un numéro de pièce à

 27   conviction.

 28   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce P6160. 


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  1   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Page 22 du document à l'écran, je

  2   vous prie.

  3   Q.  Dans cette page, vous parlez au journaliste d'une situation que nous

  4   avons déjà évoquée, à savoir les pourparlers que vous avez eus avec M.

  5   Karadzic à Belgrade la veille de la séance du parlement de Bijeljina. Vous

  6   dites dans ce passage de ce document que vous avez écrit une lettre à

  7   Bijeljina dans laquelle l'argument principal, comme vous le dites ici, et

  8   vous rappelez que cette lettre a été "signée par Cosic, Milosevic, et vous-

  9   même, l'argument principal consistait à dire qu'ils n'avaient pas le droit

 10   de décider au nom de tous, en particulier en raison du fait qu'ils

 11   n'étaient pas confrontés au même danger que celui qu'ils étaient en train

 12   de créer pour leur propre population."

 13   Donc, est-ce que ce que vous dites dans ce passage s'est réellement passé ?

 14   R.  Oui, dans cette période il y avait des divergences importantes sur le

 15   plan politique entre les dirigeants de la Republika Srpska et les

 16   dirigeants de la République fédérale yougoslave. Je tiens simplement à dire

 17   à la Chambre que dans cette période la Serbie et le Monténégro subissaient

 18   des sanctions particulièrement lourdes. Nous ne pouvions pas nous

 19   approvisionner en lait et en médicaments pour nos bébés, et nous avions le

 20   sentiment que nos vies étaient en danger. C'était un sentiment qui était

 21   très différent de celui qui était ressenti par la population en Bosnie-

 22   Herzégovine. Et je parle donc de divergences politiques, sans être en

 23   mesure de dire qui avait raison ou qui avait tort. Nous avions une

 24   nervosité particulière au Monténégro à ce moment-là parce que nous étions

 25   confrontés à une situation impossible sur le plan de l'existence. Mais la

 26   différence, c'est que tout de même chez nous la paix régnait, alors que là-

 27   bas la guerre faisait rage.

 28   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Monsieur le Président, je demande le


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  1   versement au dossier des pages 21 et 22 de ce document --

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

  3   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] -- et ce sont les seules pages que je

  4   vais demander de verser au dossier pour ce document.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ces deux pages seront donc ajoutées à la

  6   pièce P6160.

  7   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation]

  8   Q.  Monsieur Bulatovic, j'aimerais maintenant vous renvoyer au paragraphe

  9   20 de votre déclaration de témoin dans lequel vous dites que tous les

 10   groupes ethniques ont subi des mesures d'expulsion.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avant de parler de cela.

 12   Monsieur Bulatovic, est-ce que vous avez une version papier de votre

 13   déclaration de témoin devant vous ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 16   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation]

 17   Q.  Vous dites également que ces mesures d'expulsion n'ont pas été le

 18   résultat de la politique de M. Karadzic mais bien le résultat de la

 19   mentalité collective de la population à l'époque dont vous parlez, et vous

 20   donnez quelques détails à ce sujet. Monsieur Bulatovic, est-ce que vous

 21   attestez du fait que les expulsions et les crimes subis par les Serbes, les

 22   Croates, et les Musulmans dans la période allant de 1991 à 1995 en Croatie

 23   et en Bosnie n'ont pas été le résultat des politiques mises en œuvre et des

 24   actions réalisées par leurs responsables, leurs dirigeants respectifs ?

 25   Est-ce que c'est ce que vous dites dans votre déposition ?

 26   R.  Ma conviction profonde est celle que je nourris encore aujourd'hui,

 27   c'est que tout cela était la conséquence d'une terrible guerre civile qui

 28   faisait rage dans ces régions, et que cette guerre civile était due à


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  1   l'éclatement sans contrôle et illégal de l'Etat qui existait précédemment,

  2   à savoir donc que ces expulsions et ces crimes ont été la conséquence de la

  3   guerre civile qui a fait rage et n'a pas été uniquement le résultat d'un

  4   plan. J'ai la fierté - et je tiens à le souligner - j'ai la fierté de dire

  5   que mon pays, le Monténégro, a gardé les portes ouvertes pour de nombreuses

  6   personnes qui ont trouvé refuge à ce moment-là; 700 000 habitants du pays,

  7   j'ai la fierté d'en avoir reçu 72 000 des réfugiés de Bosnie-Herzégovine,

  8   dont 30 % était des Musulmans. Ils ont trouvé abri au Monténégro et, bien

  9   sûr, ont pu le faire grâce aux Nations Unies.

 10   Q.  Je vous interromps en raison du temps. Je comprends tout à fait que

 11   vous souhaitiez préciser ce point très fermement, mais malheureusement je

 12   n'ai pas suffisamment de temps à ma disposition. Car ce n'est pas tout à

 13   fait une réponse exacte à ma question, que j'aimerais vous reposer --

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que nous ne pourrions pas

 15   poursuivre demain, Madame Uertz-Retzlaff ?

 16   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Monsieur le Président, j'aurais

 17   encore deux questions à poser, si c'est possible, et j'en aurais terminé.

 18   Mais nous pouvons faire demain aussi, si vous préférez.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] S'il ne s'agit que deux questions, nous

 20   pourrons poursuivre sans doute avec l'accord du personnel, des interprètes

 21   et de la sténotypiste pour en terminer aujourd'hui.

 22   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Je vous remercie.

 23   Q.  Est-ce que vous dites, Monsieur Bulatovic, que la population, quel que

 24   soit le groupe ethnique à laquelle elle appartenait, a subi des expulsions,

 25   des meurtres et d'autres crimes de masse sur un territoire de très grande

 26   taille uniquement à cause de la présence d'une mentalité particulière et

 27   parce qu'il y avait une guerre et pas en raison des décisions des

 28   dirigeants ou, en tout cas, des personnes qui étaient aux manettes au sein


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  1   des armées en présence ?

  2   R.  J'espère avoir bien compris votre question, je réponds que je ne crois

  3   pas qu'il existait un plan, je ne crois pas non plus qu'il ait existé une

  4   possibilité, pour quelle que partie en présence que ce soit, qu'il s'agisse

  5   des Musulmans, des Croates ou des Serbes, d'ordonner des crimes et des

  6   expulsions. Je dis avec la plus grande certitude, sur la base de toute

  7   l'histoire de la Bosnie-Herzégovine et sur la base des nombreuses décennies

  8   de coexistence pacifique qui ont eu lieu dans le pays, que lorsqu'une

  9   guerre commence, lorsque la terre se met à trembler sous les pieds des

 10   gens, eh bien, les gens sont capables de toutes sortes de crimes et qu'ils

 11   ne souhaitent qu'une chose, fuir le territoire pour se rendre dans un

 12   endroit où ils se sentent en sécurité. Je ne crois pas qu'il y ait eu un

 13   plan parce que je connais très bien la Bosnie, son histoire et sa

 14   population. J'ai parlé à de très nombreuses personnes, y compris au

 15   président Izetbegovic, à Mate Boban également, le dirigeant croate de

 16   Bosnie. Nous avons passé de nombreuses années les uns aux côtés des autres.

 17   Je connais très bien le président Karadzic aussi. Et je miserais tout ce

 18   que j'ai gagné pendant toute ma vie en disant qu'à mes yeux ces personnes

 19   ne sont pas des criminels. Ce sont des personnes qui se sont trouvées dans

 20   des positions particulièrement difficiles à une période particulièrement

 21   difficile, à une période horrible. Et croyez-moi, tous les 50 ans dans

 22   l'histoire de la Bosnie-Herzégovine, des expulsions et des crimes de ce

 23   genre se répètent.

 24   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Monsieur le Président, c'est la fin

 25   de mon interrogatoire sur ce chapitre.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie, Madame Uertz-Retzlaff.

 27   Monsieur Bulatovic, nous poursuivrons demain. Je crois que vous comprenez

 28   l'anglais, n'est-ce pas ? J'ai l'obligation de vous prévenir qu'il vous est


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  1   interdit de discuter avec qui que ce soit de ce que vous dites dans votre

  2   déposition. Je vous remercie.

  3   L'audience est levée.

  4   --- L'audience est levée à 15 heures 01, et reprendra le vendredi, 1er mars

  5   2013, à 9 heures 00.

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