Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le jeudi 21 mars 2013

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 05.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour à tous.

  6   Avant que d'entendre la déposition du témoin suivant, nous avons une

  7   ordonnance orale. La Chambre évoque la demande de Krstic pour le réexamen

  8   de l'ordonnance en date du 13 mars 2013 déposée à titre confidentielle le

  9   19 mars 2013 par laquelle le conseil de M. Krstic demande le réexamen de la

 10   décision orale de la Chambre du 13 mars 2013 à laquelle M. Krstic a reçu

 11   l'ordre de témoigner dans cette affaire le 25 mars 2013, à partir d'un

 12   rapport médical pertinent qui n'identifiait pas les motifs médicaux qui

 13   représenteraient une cause fondée pour que M. Krstic n'obtempère pas quant

 14   aux modalités de l'assignation à comparaître en date du 23 octobre 2012. M.

 15   Krstic demande que cette ordonnance soit écartée sur la base que,

 16   premièrement, il n'a pas reçu la possibilité de présenter les écritures

 17   quant à la signification et l'impact du rapport médical; et deuxièmement,

 18   que les Juges de la Chambre et leur décision orale semblent n'être pas dans

 19   le droit-fil du rapport médical.

 20   Les Juges de la Chambre ont reçu avis des préoccupations de santé

 21   citées par M. Krstic lorsqu'il a refusé de témoigner dans cette affaire le

 22   7 février 2013, ce qui a amené la Chambre à ordonner les préparatifs d'un

 23   rapport médical plus détaillé analysant si M. Krstic était en mesure de

 24   témoigner et d'évaluer l'impact éventuel de ce témoignage dans cette

 25   affaire sur sa santé. Pour décider d'ordonner que M. Krstic témoigne dans

 26   cette affaire, les Juges de la Chambre sont avertis que ce faisant, cela

 27   pourrait produire une détresse considérable quant à M. Krstic, mais ont

 28   conclu que tout impact potentiel sur sa santé tel qu'identifié dans le


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  1   rapport médical n'était pas suffisamment grave pour représenter un

  2   fondement pour ne pas obtempérer aux modalités de l'assignation à

  3   comparaître. Selon la Chambre, la demande de réexamen n'est pas fondée et

  4   il n'y a pas eu d'erreur claire de raisonnement, ni que le réexamen serait

  5   nécessaire pour prévenir toute injustice.

  6   Le Greffier reçoit donc les instructions de communiquer cette

  7   décision à M. Krstic et à ses représentants juridiques.

  8   Cela étant, nous allons faire entrer le témoin suivant.

  9   Oui, Monsieur Tieger.

 10   M. TIEGER : [interprétation] J'aimerais soulever une question d'intendance

 11   rapidement, Monsieur le Président, et il s'agit de quelque chose que M.

 12   Robinson a évoqué dans des écritures, et c'est peut-être manifeste pour

 13   tout un chacun, mais j'aimerais qu'on me donne confirmation, c'est-à-dire

 14   qu'en ce qui concerne M. Martic, au-delà de tout ce qui se pourrait se

 15   passer dans les quelques jours à venir, nous avons confirmation officielle,

 16   comme je l'ai dit, cela semble manifeste, que le Procureur ne va pas

 17   procéder à un contre-interrogatoire la semaine prochaine, tout du moins

 18   pour notre calendrier et l'affectation de nos ressources. Donc, peut-être

 19   que ceci est confirmé par la réponse des Juges de la Chambre à la demande

 20   de M. Robinson quant aux dates de comparution à l'heure actuelle. Quoi

 21   qu'il en soit, il est clair que le contre-interrogatoire ne pourra se tenir

 22   la semaine prochaine. Nous aimerions tout simplement qu'on nous le

 23   confirme, de ce qui nous semble manifeste, et que ce soit les Juges de la

 24   Chambre qui nous le confirment pour que nous n'engagions pas des efforts

 25   qui seraient [inaudible].

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Les Juges de la Chambre sont avertis de

 27   la situation et étudient la question, et je crois que les Juges de la

 28   Chambre reviendront sur la question pendant la journée.


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  1   M. TIEGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  2   M. ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Président, nous avons déposé nos

  3   demandes sur la question concernant l'affectation d'un conseil avant que M.

  4   Tieger n'ait présenté sa thèse qui inclut une recommandation que la Chambre

  5   pourrait ne pas avoir compétence sur la question, et je présume que les

  6   Juges de la Chambre sont tout à fait avertis de deux décisions qui donnent

  7   à la Chambre de première instance compétence sur la question, une étant

  8   l'affaire Popovic, à laquelle vous avez pris part, et l'autre étant

  9   l'affaire Mico Stanisic. Je pourrais remettre ces deux éléments aux Juges

 10   de la Chambre si cela vous intéresse; par ailleurs, j'aimerais également

 11   vous signaler que ce n'est pas une perte de temps pour revenir à cette

 12   question qui serait renvoyée au Président.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quelle a été la décision dans l'affaire

 14   Popovic ?

 15   M. ROBINSON : [interprétation] Décision sur la troisième demande d'examiner

 16   la décision du Greffier sur l'affectation d'un co-conseil pour Radovo

 17   Miletic au 20 février 2007, où les Juges de la Chambre ont inversé la

 18   décision du Greffier que l'avocat Nenad Petrisic ne pourrait être le co-

 19   conseil pour M. Miletic parce qu'il ne parlait pas anglais. Dans l'affaire

 20   Mico Stanic, une autre décision sur l'examen de la décision du Greffier

 21   concernant le co-conseil de Mico Stanisic le 24 avril 2007, où les Juges de

 22   la Chambre ont estimé qu'ils avaient compétence pour examiner le rejet du

 23   Greffier d'affectation du co-conseil pour Mico Stanisic sur la base qu'il

 24   ne parlait anglais et qu'on maintiendrait la décision du Greffier dans

 25   cette affaire.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je note que ces deux décisions ont trait

 27   à l'accusé ou à l'un des accusés.

 28   M. ROBINSON : [interprétation] C'est exact.


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

  2   Eh bien, maintenant, faisons entrer le témoin suivant. Le témoin suivant

  3   est Sosic, n'est-ce pas, pour confirmer ?

  4   M. ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

  5   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Si le témoin veut bien prononcer la

  7   déclaration solennelle.

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

  9   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 10   LE TÉMOIN : MIRKO SOSIC [Assermenté]

 11   [Le témoin répond par l'interprète]

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur Sosic. Si vous voulez

 13   bien vous asseoir.

 14   Oui, Monsieur Karadzic, si vous voulez bien continuer.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour

 16   à tous.

 17   Interrogatoire principal par M. Karadzic :

 18   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Sosic.

 19   R.  Merci. Bonjour à vous.

 20   Q.  Avez-vous déposé une déclaration auprès de mon équipe de la Défense ?

 21   R.  J'ai donné plusieurs déclarations. Je ne sais pas de laquelle vous

 22   parlez.

 23   Q.  Est-ce que vous avez récemment lu et signé l'une d'entre elles ?

 24   R.  Oui. Très récemment, vos collaborateurs sont venus à mon hôtel. J'ai lu

 25   la déclaration dans son intégralité et l'ai signée.

 26   Q.  Si vous voulez bien ménager des pauses entre les questions et les

 27   réponses. Si vous voulez bien regarder le compte rendu et suivre le

 28   curseur. Il convient de s'exprimer lentement et de ménager des pauses entre


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  1   mes propos et les vôtres.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais que l'on affiche le document 1D7941,

  3   je vous prie.

  4   M. KARADZIC : [interprétation]

  5   Q.  Professeur, est-ce que vous voyez devant vous la déclaration que vous

  6   avez déposée ?

  7   R.  Si l'on pouvait agrandir le texte, parce qu'il est minuscule à l'heure

  8   actuelle. Oui, oui, c'est cela.

  9   Q.  Merci. Est-ce que vous avez lu et signé cette déclaration ?

 10   R.  Oui, c'est exactement la déclaration que j'ai lue et vue.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pourrions-nous voir la version serbe sur l'une

 12   des moitiés de l'écran, et ensuite la dernière page pour identifier le

 13   paraphe.

 14   M. KARADZIC : [interprétation]

 15   Q.  Est-ce bien votre paraphe ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Merci. Est-ce que cette déclaration reprend fidèlement vos propos ?

 18   Est-ce que tout est exact ? Est-il nécessaire de rectifier quoi que ce soit

 19   ?

 20   R.  Pour autant que je le voie, tout est bien interprété. Comme tous les

 21   témoins, l'on pourrait toujours ajouter quelque chose, mais ceci est bien

 22   le fond de l'affaire.

 23   Q.  Si je devais vous poser les mêmes questions aujourd'hui que celles que

 24   l'on vous a posées au cours de l'entretien, est-ce que vos réponses

 25   seraient dans la teneur les mêmes ?

 26   R.  Oui.

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaite verser cette

 28   liasse 92 ter.


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  1   M. ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Président, la liasse contient

  2   trois documents connexes. Aucun d'entre eux n'est énuméré sur notre liste

  3   65 ter, et je demande leur ajout parce que nous ne les avions pas au moment

  4   où cette liste a été versée.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Après avoir regardé brièvement la

  6   déclaration du témoin où il s'agit donc de ces trois éléments, les Juges de

  7   la Chambre n'estiment pas qu'ils forment une partie inséparable et

  8   indispensable de la déclaration ni qu'ils soient pertinents. Donc les Juges

  9   de la Chambre ne souhaitent pas admettre ces documents à l'heure actuelle.

 10   Bonjour, Madame Iodice. Avez-vous une objection quant au versement de cette

 11   déclaration ?

 12   Mme IODICE : [interprétation] Le versement de la déclaration, non, Monsieur

 13   le Président.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc nous allons recevoir la déclaration

 15   relevant de l'article 92 ter pour ce témoin.

 16   M. LE GREFFIER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, et 1D7941

 17   devient la pièce D3138.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 19   Oui, Monsieur Karadzic, si vous voulez bien continuer.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Puis-je présumer que je peux poser des

 21   questions viva voce sur ces documents ?

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Cela, il vous en revient de décider,

 23   Monsieur Karadzic, mais il s'agit d'une question distincte à savoir si les

 24   Juges de la Chambre vont les recevoir en versement après avoir été

 25   convaincus de leur pertinence et de leur valeur probante.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 27   Je vais maintenant lire le résumé de la déclaration du Pr Sosic, et ce, en

 28   anglais.


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  1   Le professeur Dr Mirko Sosic a travaillé en tant que professeur au centre

  2   universitaire, centre médical plus précisément, au sein de la clinique pour

  3   la chirurgie thoracique. Il est membre de l'Académie des sciences et des

  4   arts, ainsi que professeur éminent, ainsi que chirurgien connu. Au mois

  5   d'août 1992, lorsqu'il a quitté Sarajevo, il a travaillé à l'hôpital à

  6   Koran.

  7   Mirko Sosic estime que les communistes serbes et musulmans ont commencé à

  8   exercer des pressions sur le personnel serbe dans les années 1960, ce qui a

  9   eu pour conséquence le départ de beaucoup de cadres de Sarajevo. Pourtant,

 10   lorsque les partis politiques ont été créés, les médecins ont été divisés

 11   sur la base de leur appartenance ethnique. Mirko Sosic a vu les membres des

 12   paramilitaires musulmans la première fois en mars 1992 lorsque ces forces

 13   ont pratiquement occupé l'hôpital universitaire de Kosevo. Après quoi, il y

 14   avait des hostilités à l'encontre des Serbes, ainsi qu'on les suspectait

 15   pour certaines choses, et cela s'est passé également pour ce qui est des

 16   employés et des patients. Après les premiers affrontements à Sarajevo, la

 17   cellule de Crise a été formée au sein de ce centre universitaire et

 18   médical, et à partir de ce moment-là les médecins serbes ont été démis de

 19   leurs fonctions.

 20   Le 4 avril 1992, Mirko Sosic a essayé de voyager de Pale à Sarajevo. Il a

 21   rencontré un grand groupe de personnes qui ont été arrêtées par les

 22   Musulmans armés, et cela s'est passé sur la ligne routière entre Pale à

 23   Sarajevo. On leur a ordonné de retourner d'où ils étaient venus. Mirko

 24   Sosic n'était en mesure de retourner à Sarajevo que quelques jours plus

 25   tard par le dernier vol civil.

 26   A ce moment-là, il y avait des barrages à l'intérieur de la ville. Des

 27   gardes ont été organisées par les locataires des bâtiments d'habitation

 28   pour contrôler les entrées et les sorties de ces bâtiments. C'était


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  1   strictement contrôlé. Et les personnes qui vérifiaient ces entrées et ces

  2   sorties étaient les membres des groupes paramilitaires armés qui

  3   procédaient à des fouilles des appartements qui leur paraissaient suspects

  4   et les saccageaient. A partir du premier jour de ces affrontements à

  5   Sarajevo, il y avait des barrages qui ont été érigés à Sarajevo. Les gardes

  6   ont été organisées par les habitants des bâtiments dans la ville, et les

  7   entrées ainsi que les sorties de ces bâtiments étaient strictement

  8   contrôlées.

  9   En juin 1992, il a vu des camions qui passaient par la route et il a

 10   entendu des coups de tir. Et lorsque les camions ont passé, il a pu voir

 11   qu'il y avait des armes qui ont été mises sur ces carrosseries et des

 12   projectiles ont été tirés de ces armes. Pourtant, ses voisins musulmans ont

 13   nié cela. D'autres armes ont été placées autour de la ville. Par exemple,

 14   un canon a été placé à l'entrée au sous-sol dans les salles aux urgences de

 15   l'hôpital. Ce canon a été tiré dehors pour lancer deux ou trois projectiles

 16   et pour être rentré à nouveau.

 17   Mirko Sosic a joint l'hôpital de guerre à Koran à Pale, et pour autant

 18   qu'il se souvienne, les médecins serbes ont respecté la déontologie

 19   médicale et ne faisaient aucune différence entre les patients. Tout le

 20   personnel de l'hôpital a apporté beaucoup d'attention à des victimes

 21   blessées appartenant à tous les groupes ethniques. Les soldats de la

 22   FORPRONU capturés se sont trouvés dans une situation où on faisait

 23   attention à leur état psychologique et physique.

 24   Pendant qu'il était à Sarajevo, Mirko Sosic a été informé que

 25   beaucoup de Serbes étaient morts à l'hôpital puisqu'ils n'ont pas reçu

 26   d'aide médicale. A plusieurs reprises, d'après les informations de Mirko

 27   Sosic concernant ces événements, les médecins musulmans ont ouvert le tir

 28   d'artillerie de l'hôpital Kosevo.


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  1   M. KARADZIC : [interprétation]

  2   Q.  Maintenant, j'aimerais vous poser quelques questions concernant

  3   certains documents.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut d'abord afficher 1D10031.

  5   M. KARADZIC : [interprétation]

  6   Q.  Est-ce que vous connaissiez les circonstances dans lesquelles les

  7   soldats des Nations Unies ont été arrêtés ?

  8   R.  Oui. Un jour - et je ne me souviens pas de la date exacte, je vois que

  9   la date figure dans cette annexe - j'ai obtenu les informations du ministre

 10   de la Santé, Dragan Kalinic, qui était ministre de la Santé à l'époque. Il

 11   m'a dit que je devais voir les soldats de la FORPRONU capturés qui se

 12   trouvaient dans un camp à proximité pour voir ce qu'il leur fallait pour ce

 13   qui est des médicaments, de l'assistance médicale, et cetera, pour

 14   l'informer par la suite là-dessus, pour savoir de quels médicaments ils

 15   avaient besoin et pour savoir quelle était l'ambiance en général là-bas.

 16   J'ai accepté cette mission, et puisque j'ai voulu aider ces gens, puisque

 17   j'ai supposé que ces gens avaient peur, j'ai emmené un collègue avec moi

 18   qui était un excellent médecin qui parlait anglais, ainsi qu'une femme qui

 19   était volontaire, qui travaillait dans un autre hôpital, et elle était

 20   néerlandaise et elle était pharmacienne à la retraite.

 21   Q.  Merci, Professeur. Pouvez-vous nous dire ce que représente cette lettre

 22   pour ce qui est de ces événements, cette lettre qui figure sur la première

 23   page ? Est-ce qu'il s'agit d'une demande ?

 24   R.  Oui, c'est le commandant qui l'a écrite à l'attention du commandant

 25   Batinic, dans laquelle il souhaitait qu'on les aide, puisqu'il était

 26   préoccupé par la santé des personnes qui avaient été capturées.

 27   Q.  Merci. Est-ce que vous avez fait publier cela quelque part ? Est-ce que

 28   cela est un document public ?


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  1   R.  Non. Pour autant que je m'en souvienne, je prenais des notes, des notes

  2   donc manuscrites, mais cela n'a pas été publié, non, nulle part. Cela n'a

  3   pas été publié, nulle part.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-on maintenant afficher la troisième page,

  5   s'il vous plaît.

  6   M. KARADZIC : [interprétation]

  7   Q.  Pouvez-vous nous aider, puisqu'on ne dispose toujours pas de la

  8   traduction de cette partie, de cette deuxième partie du document ?

  9   R.  Excusez-moi, est-ce qu'on peut agrandir encore un peu cette partie

 10   dudit document. Cette deuxième partie. Il s'agit d'une partie de mon

 11   rapport. Dans cette partie de mon rapport, je dis que le capitaine nous a

 12   invités à faire l'inspection dans ces lieux pour ce qui est des personnes

 13   capturées pour voir quelles étaient les conditions de leur hébergement, de

 14   l'hébergement des officiers capturés, quel est le traitement qui leur est

 15   réservé, quel est leur état physique et psychique, de les examiner en

 16   quelque sorte, et de voir tout ce dont ils avaient besoin et dans quel état

 17   ils se trouvaient pour ce qui est de leurs blessures, s'il y en avait. J'ai

 18   proposé d'abord de leur parler, puisque j'étais médecin civil et j'ai voulu

 19   voir d'abord comment on va procéder à cela. Il y a eu deux propositions

 20   pour le faire : on pouvait leur parler en tant que groupe ou

 21   individuellement, et tout le monde voulait qu'on leur parle

 22   individuellement, avec toutes les personnes capturées, et toutes ces

 23   personnes nous ont dit qu'elles avaient des problèmes. Au début, ces

 24   personnes étaient effrayées, mais lorsqu'ils ont vu que nous étions venus

 25   avec de bonnes intentions, et lorsqu'ils se sont rendu compte que cette

 26   femme qui était néerlandaise pouvait parler à un officier néerlandais dans

 27   sa langue maternelle, l'ambiance est devenue presque amicale.

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-on maintenant afficher le bas de la page


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  1   pour voir qui a signé ce rapport. Pouvez-vous nous dire ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. C'est ma signature, ainsi que la

  3   signature de mon collègue qui était avec moi dans ces lieux. Il était

  4   spécialiste en urologie.

  5   M. KARADZIC : [interprétation]

  6   Q.  Pouvez-vous, s'il vous plaît --

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Juste un instant. Monsieur le Témoin,

  8   voyez-vous votre signature dans ce document ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne vois pas la signature, mais je vois que

 10   c'est dactylographié, signé par Pr Mirko Sosic.

 11   M. KARADZIC : [interprétation]

 12   Q.  Est-ce que ce texte est authentique ?

 13   R.  Oui, c'est absolument authentique.

 14   Q.  Et à la page suivante, pouvez-vous nous dire de quoi il s'agit ?

 15   R.  Il s'agit de la liste des personnes capturées, ou, pour ainsi dire, les

 16   personnes qui étaient membres de la FORPRONU et qui s'y trouvaient.

 17   Q.  Merci.

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Monsieur le Président, je demande que ce

 19   document soit versé au dossier avec une cote aux fins d'identification.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce qu'il y a des objections de la

 21   part de l'Accusation ?

 22   Mme IODICE : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] On va verser ce document au dossier,

 24   avec une cote aux fins d'identification en attendant la traduction en

 25   anglais de ce même document.

 26   M. LE GREFFIER : [interprétation] Cela sera D3139, et il faut que j'apporte

 27   une correction pour ce qui est de la pièce précédente qui a reçu la cote

 28   D3138.


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

  2   M. KARADZIC : [interprétation]

  3   Q.  Professeur Sosic, vous avez dit que les médecins qui étaient

  4   d'appartenance ethnique serbe ont été démis de leurs fonctions, on les a

  5   fait partir de leurs postes. Pouvez-vous nous dire ce qui s'est passé par

  6   la suite pour ce qui est de ces médecins serbes ?

  7   R.  Pour ce qui est de ce rapport avec les médecins serbes, je pourrais

  8   vous donner quelques exemples à titre d'illustration. Au début de la

  9   guerre, par exemple, j'étais chef de la clinique. Et lors de l'une des

 10   réunions auxquelles les chefs des cliniques de ce centre médical avaient

 11   été convoqués, et la réunion a été organisée par la cellule de Crise dont

 12   le président a été Pr Faruk Konjhodzic, mon collègue, lorsque je suis venu

 13   à cette réunion, il m'a demandé pourquoi est-ce que je suis revenu, puisque

 14   ma place n'était pas à cette réunion, et moi j'étais toujours chef de la

 15   clinique. Moi, j'ai perçu cela comme une sorte de renvoi de mon poste.

 16   Après la réunion, j'ai appris d'un collègue plus jeune, qui était mon

 17   assistant, qu'il avait été informé du fait que c'était lui qui allait

 18   devenir chef de la clinique, et il m'a dit dans un entretien officieux

 19   qu'il ne voulait pas m'en parler, qu'il se comporterait de la même façon

 20   comme jusqu'alors. Il m'a dit : "C'est vous qui procéderez à des examens

 21   des patients. Il ne faut pas que cela présente des problèmes pour nous".

 22   Mais moi, je me suis senti un peu mal à l'aise, puisque après 25 ou 30 ans

 23   de travail dans la clinique, et fréquentation de collègues que je

 24   connaissais depuis le lycée, soudainement vous vous rendez compte que la

 25   situation a changé. Et lors de mes conversations avec d'autres collègues,

 26   j'ai appris que d'autres collègues ont eu le même destin.

 27   Par exemple, l'un de mes collègues qui travaillait à la clinique de

 28   traumatologie, qui avait beaucoup de patients à l'époque, le Pr Vranic, il


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  1   m'a dit : "Sois content, puisque tu as eu de la chance". J'ai dit :

  2   "Pourquoi ?" Il m'a dit que lors de la réunion -- l'autre, il m'a dit :

  3   "Vous ne devriez jamais m'adresser à moi à l'avenir", même s'il était chef

  4   de cette clinique.

  5   Donc ce n'était que des exemples de ce type de situation.

  6   Puisque quotidiennement on était témoin de tout cela, parce que tous

  7   les jours on apprenait qu'un autre est parti ou un médecin a été tué ou a

  8   été blessé ou a disparu, et cetera. Et le 4 avril --

  9   Q.  S'il vous plaît, ralentissez votre débit puisque tout ce que vous dites

 10   est consigné au compte rendu.

 11   R.  A partir du début du conflit, à savoir du 4 avril, le recteur de la

 12   faculté de médecine, M. Borisa Starovic, a fait l'objet de tentative de

 13   meurtre. En montant dans sa voiture, il s'est penché, et grâce à ce

 14   mouvement, la balle l'a éraflé au niveau de l'omoplate et la balle ne l'a

 15   pas touché dans la tête. Les membres de la famille de mon collègue, qui

 16   habitaient dans leur appartement, dans la cuisine de leur appartement, lui,

 17   son épouse a été blessée ainsi que sa fille. Donc, certains médecins, je

 18   peux le dire aujourd'hui, ont fait l'objet de certaines tentatives

 19   d'attentats ou d'attentats. Vojko Sorbat a été assassiné dans l'un de ces

 20   attentats. Pr Janko [phon] Mijatovic, en rentrant chez lui du travail,

 21   lorsqu'il a essayé de franchir le pont à Vrbanja, a été grièvement blessé.

 22   Il a été blessé par une balle de tireur isolé. Il a dû subir 11

 23   interventions chirurgicales puisque les blessures qu'il a subies se

 24   trouvaient toutes au niveau de l'abdomen, donc toutes ces opérations

 25   chirurgicales étaient très difficiles. Et il y avait d'autres exemples

 26   également de --

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Docteur Sosic, je suis désolé, mais il

 28   faut que je vous interrompe, étant donné que notre temps est limité.


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  1   Monsieur Karadzic, continuez, s'il vous plaît.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

  3   M. KARADZIC : [interprétation]

  4   Q.  Vous avez mentionné une cellule de Crise qui prenait des décisions.

  5   Pouvez-vous nous dire brièvement de quelle cellule de Crise il s'agissait ?

  6   R.  Si j'ai bien compris, il s'agissait d'une cellule de Crise ou d'un

  7   organe qui a été créé ad hoc, et qui a remplacé tous les autres organes

  8   exécutifs de l'hôpital et du centre universitaire et médical, et dont les

  9   compétences étaient d'organiser, de contrôler toutes les activités et de

 10   superviser toutes les activités dans l'hôpital et, bien sûr, toutes les

 11   activités concernant le personnel.

 12   Q.  Merci. Pouvez-vous nous dire pourquoi un tel rapport vous a été réservé

 13   ainsi qu'envers d'autres collègues serbes ? Est-ce que vous étiez membre

 14   d'un parti politique ?

 15   R.  Puis-je faire un commentaire. Je n'ai jamais été membre d'un parti

 16   politique. J'aimais la chirurgie et j'occupais les postes éminents. J'étais

 17   président de l'association des chirurgiens de toute la Yougoslavie. Je

 18   m'occupais de cela. Excusez-moi, il faut que je dise également qu'en tant

 19   qu'étudiant, j'étais un bon sportif et j'ai été admis au sein de la Ligue

 20   des Communistes, après quoi, en fait, je n'avais pas suffisamment de temps

 21   pour m'occuper de ces activités, après quoi j'ai été exclu de cette Ligue

 22   des Communistes.

 23   Q.  Merci. Vous êtes retourné après le début de la guerre à Sarajevo.

 24   Pourquoi êtes-vous rentré à Sarajevo ? Est-ce que vous avez voulu y rester

 25   ?

 26   R.  Bien sûr. Je suis né à Sarajevo. Et tout ce que j'avais se trouvait à

 27   Sarajevo. J'avais mes amis, j'ai bâti ma carrière professionnelle à

 28   Sarajevo. Et j'ai obtenu un prix à Sarajevo pour ce que j'ai fait dans le


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  1   domaine de la médecine. C'est le prix le plus respecté de la ville de

  2   Sarajevo. Bien sûr, en tant que membre d'une équipe de médecin, je me suis

  3   vu décerner ce prix. Et j'étais persuadé que les conflits pouvaient être

  4   résolus des moyens pacifiques, que la guerre ne devait pas avoir lieu. Et

  5   d'ailleurs, j'étais chef de la clinique et j'ai dû assumer mes

  6   responsabilités pour ce qui est de mes collègues, de mes patients, et pour

  7   ce qui est de moi-même et de mes fonctions en tant que médecin.

  8   Q.  Merci. Je crois qu'à la ligne 15 il fallait consigner en 1986.

  9   Professeur, dites-nous si ultérieurement, à un moment donné, vous avez

 10   établi un aperçu ou une liste des médecins qui, comme vous, ont dû quitter

 11   Sarajevo au final ?

 12   R.  Eh bien, si vous me permettez, d'abord je dirais que cette attitude

 13   d'inégalité en droit, parce que ça c'est une chose que j'ai perçue au

 14   quotidien à l'égard des Serbes. Ensuite, je me suis rappelé une pensée

 15   intelligente d'autrui, ce n'est pas moi qui ai formulé cette pensée. Moi,

 16   je ne me sentais pas Serbe, je ne considérais pas que j'étais un

 17   nationaliste. Je faisais partie d'une famille de chirurgiens au plan

 18   international. Et une phrase disait, me semble-t-il, quelque chose de ce

 19   genre : Si on vous insulte et on vous attaque parce que vous êtes Juif, il

 20   faut que vous vous défendiez en tant que Juif. Donc, si on vous offense en

 21   votre qualité de Serbe, vous devez vous défendre en tant que Serbe. C'est

 22   un grand philosophe qui a dit ceci. C'est Mme Hannah Arendt. Et j'étais

 23   contraint à faire comme on m'a poussé à faire, parce que vous n'apparteniez

 24   nulle part au final.

 25   Et je ne pouvais pas cesser de m'étonner de voir des gens

 26   disparaître, comment les gens s'en allaient. Et en ma qualité de profane,

 27   j'ai commencé à établir des listes de gens que j'avais contactés, des

 28   médecins en vue, qui quittaient Sarajevo. C'était une liste d'amateurs que


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  1   j'ai faite. Mais il y avait 440 médecins dessus, et 95 % de ces médecins,

  2   je vous le garantis, ne faisaient partie d'aucun parti politique; 70 ou 80

  3   % de ces gens c'étaient des professeurs bien en vue, des professeurs

  4   d'université, des médecins éminents. Ce qui m'étonnait, moi, et je n'ai pas

  5   réussi à découvrir les raisons, pas même aujourd'hui, pour mettre en place

  6   des circonstances qui ont fait que ces gens ont été contraints de quitter

  7   Sarajevo. N'est-ce pas un dégât terrible pour une ville, pour la médecine,

  8   que de voir, par exemple, une ville perdre 450 médecins notoirement connus.

  9   Q.  Merci.

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais qu'on nous affiche au prétoire

 11   électronique une pièce qui est le 1D10029.

 12   M. KARADZIC : [interprétation]

 13   Q.  Et en attendant, Professeur, lorsque vous avez parlé des attentats,

 14   est-ce que vous pouvez nous dire combien les lignes serbes, où les

 15   possibilités de tir de la part des Serbes se trouvaient éloignées des

 16   endroits où il y a eu des gens qui ont péri.

 17   R.  D'après ce que j'ai pu évaluer - et vous savez je suis né à Sarajevo,

 18   j'aimais beaucoup aller dans la montagne à côté, à Trebevic - et d'après

 19   moi c'était 3, voire même 4 kilomètres à vol d'oiseau.

 20   Q.  Merci. Alors, qu'est-ce que nous avons sous les yeux, Professeur ? Est-

 21   ce que c'est bien votre liste à vous ?

 22   R.  Oui. J'en ai été l'initiateur, mais vous savez, j'ai montré cette liste

 23   à des collègues et on m'a critiqué, et tu as oublié un tel, m'a-t-on dit.

 24   Alors, j'ai complété -- non, je ne peux pas dire que j'ai été directement

 25   au courant de tout ceci. On m'a critiqué : "Pourquoi tu n'as pas mis celui-

 26   ci, parce qu'un tel est parti à tel endroit."

 27   Q.  Donc ceci, ce recensement, c'est un ouvrage collectif, n'est-ce pas ?

 28   R.  Oui, établi par des amis.


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  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Est-ce que je peux demander le versement

  2   au dossier de ce document ?

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pouvez-vous nous aider et nous indiquer

  4   en quoi ceci est-il pertinent pour l'affaire que vous défendez ici, ou la

  5   cause que vous défendez.

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est par sentiment de justice que je vais

  7   répondre. Pour ce qui est de la question liée au droit, je laisse la parole

  8   à M. Robinson. On a parlé de tout ce qui s'est passé avec les Musulmans. On

  9   a dit que les Serbes sauvages ont attaqués à Sarajevo, qui était une ville

 10   paisible. Or, Sarajevo était militarisée et elle a été cruelle vis-à-vis

 11   des Serbes, parce que quand vous avez une liste de 500 médecins qui ont

 12   fuit et qui n'étaient pas membres du SDS, qui n'étaient pas des hommes du

 13   parti politique en question, ça peut vous compléter une image. C'est pour

 14   l'image que je voudrais demander un versement, c'est le fondement que

 15   j'avance.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Est-ce que vous avez une

 17   observation à formuler ?

 18   Mme IODICE : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Tout d'abord, je

 19   voudrais faire remarquer que l'Accusation a présenté une requête pour

 20   exclure le témoignage de ce témoin, y compris le document qui se trouve

 21   être mentionné au paragraphe 16 de cette ancienne déclaration, et dans la

 22   réponse l'accusé a été d'accord pour ce qui était de mettre de côté cette

 23   pièce à conviction une fois que l'on a eu la version finale de la

 24   déclaration du Dr Sosic. Ça, c'est d'un.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais attendez. Cette requête, ça été une

 26   décision qui a été prise par la Chambre ?

 27   Mme IODICE : [interprétation] Non, Monsieur le Président, parce qu'une fois

 28   que l'accusé est tombé d'accord avec les objections de l'Accusation, les


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  1   Juges de la Chambre nous ont demandé si l'affaire était close.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

  3   Mme IODICE : [interprétation] Et deuxième élément que je voudrais mettre en

  4   exergue, c'est que le témoignage relatif aux médecins qui ont quitté

  5   Sarajevo se trouve déjà dans une déclaration écrite qui devrait se trouver

  6   être suffisante. Je ne vois en quoi ceci gagne en valeur si l'on ajoute

  7   cette pièce à conviction.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] D'abord, je vais répondre que ceci ne fait que

 10   corroborer sa déclaration, et mis à part ce fait, le 1D130 à 133 sont des

 11   parties de clips vidéo qui ont été versées au dossier et qui se rapportent

 12   à ce sujet précis, et le professeur ici présent fait son apparition dans le

 13   film en question.

 14   Mme IODICE : [interprétation] Si vous me le permettez, Madame, Messieurs

 15   les Juges.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, allez y.

 17   Mme IODICE : [interprétation] Quand il s'agit de corroborer les propos du

 18   témoin, je dirais que la source dans de cas concret est le même, ce qui

 19   fait que la pertinence de la corroboration se trouve être limitée. C'est un

 20   document qui ne fait que confirmer ce qu'il a dit. Il n'y a pas d'autres

 21   déclarations.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien que j'aie quelques doutes au sujet

 23   du fait de savoir si ceci est pertinent, je vous ai autorisé à poser la

 24   question au Dr Sosic, et sa déclaration se trouve faire partie intégrante

 25   de son témoignage. Je ne vois pas en quoi ce document apporterait de

 26   pertinent. Donc, nous n'allons pas le verser au dossier.

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 28   M. KARADZIC : [interprétation]


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  1   Q.  Vous avez mentionné le Pr Jovo Vranic, qui est décédé entre-temps, et

  2   vous avez dit que vous avez procédé avec lui à des échanges d'information.

  3   Est-ce que vous pouvez nous dire ce qu'il y a de plus marquant au sujet de

  4   ce que le Pr Vranic vous a dit ?

  5   R.  Nous sommes collègues. Nous avons été collègues et nous sommes nés à

  6   peu près à la même année, on a effectué les mêmes fonctions, on était dans

  7   la même situation et dans les mêmes difficultés. Il a donc été logique que

  8   pendant et après la guerre, nous ayons des contacts et une coopération. Le

  9   Pr Vranic a rédigé des mémoires au sujet de cette période de guerre, et il

 10   m'a demandé de revoir le document, de le réviser, parce que ça n'avait pas

 11   encore été imprimé, il n'y a pas eu d'impression parce qu'il est décédé

 12   entre-temps.

 13   Mais toujours est-il qu'à l'époque où j'ai voulu rédiger un avant-

 14   propos, je l'ai contacté. Il m'a apporté des explications au sujet de sa

 15   situation, de ses impressions, de ses souvenirs datant de la période de la

 16   guerre, parce qu'il était à la tête de la clinique de traumatologie, et

 17   c'est là que la majeure partie des patients arrivait, de par la nature des

 18   blessures subies. Et il m'a confirmé ce que je savais déjà, pas seulement

 19   moi, mais tout le monde le savait, à savoir qu'avant le début de la guerre

 20   au mois de mars déjà, l'hôpital a déjà été occupé par des organisations

 21   paramilitaires, et tous les médecins, tous ceux qui étaient employés à

 22   titre officiel, devaient passer des contrôles rigoureux à l'entrée, qui se

 23   sont faits de façon informelle. On était fouillé, on a dû ouvrir nos sacs,

 24   nos bagages.

 25   Q.  Merci, Professeur. J'ai une partie de ce livre ici, je doute toutefois

 26   que les Juges de la Chambre vont ressentir la nécessité de se pencher

 27   dessus. Mais je vais vous poser une question au sujet d'un autre document à

 28   présent. Est-ce que vous pouvez nous dire ce qui a, du point de vue de


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  1   l'infrastructure médicale, été resté aux Serbes à Sarajevo une fois qu'ils

  2   ont été chassés de la ville ? Qu'est-ce que vous avez constaté ? Qu'avez-

  3   vous eu à faire du point de vue de la protection de la santé de la

  4   population et des blessés ?

  5   R.  Eh bien, voyez-vous, à première vue c'était un problème insoluble parce

  6   que dans ces parties de la ville qui étaient placées sous le contrôle des

  7   Serbes, il restait quelques établissements de santé qui n'étaient pas

  8   équipés, qui n'avaient pas le matériel nécessaire pour fournir une

  9   protection médicale complète. Le seul hôpital complet qui se trouvait à

 10   Kasindol était un hôpital de type pavillonnaire, spécialisé en matière de

 11   soins de tuberculose et des maladies pulmonaires. Donc, il n'y avait pas de

 12   salles d'opération. Cet hôpital avait été fondé en 1921 et ne pouvait en

 13   aucune façon satisfaire à l'objectif fondamental.

 14   Q.  Merci, Professeur.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je crois qu'il convient d'avoir à l'esprit ici

 16   le document 1D10025. Je voudrais savoir si les Juges de la Chambre sont

 17   disposés à accepter ce document, qui montre les difficultés auxquelles les

 18   médecins serbes ont eu à faire face.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] J'ai déjà rendu une décision pour ce qui

 20   est de dire que ceci n'est pas une partie indispensable et inséparable de

 21   la déclaration de ce témoin. Aussi n'allons-nous pas autoriser son

 22   versement, mais pour nous assurer de la pertinence et de sa valeur

 23   probante, nous aimerions voir ces documents. Je doute toutefois qu'il y ait

 24   là une valeur probante majeure. A vous de décider de la façon de procéder,

 25   Monsieur Karadzic.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Moi, je propose son versement au dossier, mais

 27   si vous décidez, vous, de ne pas le verser au dossier, moi, je voudrais

 28   qu'on nous montre le 1D10027, parce que là, il y a des connaissances que le


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  1   Pr Sosic a transmises pour ce qui est de ce que le Pr Vranic lui a dit. Et

  2   au prétoire électronique, je précise qu'il s'agit des pages 4 à 10. C'est

  3   ce qu'on a traduit, et je crois que ces six pages suffiront.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, pour gagner du temps,

  5   je vous dirais que la Chambre n'est pas portée à faire verser l'un

  6   quelconque de ces documents au dossier. A l'avenir, veuillez demander à M.

  7   Robinson de vous indiquer comment procéder pour demander un versement au

  8   dossier de document. Allez de l'avant.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Excellences. Mais je me dois de dire que

 10   j'ai une très grande estime pour M. Robinson, et moi, j'ai plus un

 11   sentiment de justice qu'un sentiment de façon de procéder en matière de

 12   droit, et c'est la raison pour laquelle j'ai posé ces questions, et ce que

 13   j'ai dit, est ce que j'ai dit. Merci. Mais en ce moment, je n'ai plus

 14   d'autres questions à poser au Pr Sosic.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Docteur Sosic, comme vous l'avez déjà

 16   remarqué, votre témoignage au principal dans cette affaire se trouve être

 17   en majeure partie versée au dossier sous forme écrite, donc sous forme de

 18   déposition écrite plutôt que le témoignage verbal. Et vous allez à présent

 19   être contre-interrogé par le représentant du bureau du Procureur.

 20   Oui, Madame Iodice, vous avez la parole.

 21   Mme IODICE : [interprétation] Merci, Madame, Messieurs les Juges.

 22   Contre-interrogatoire par Mme Iodice :

 23   Q.  [interprétation] Bonjour, Docteur Sosic. Docteur, vous nous avez dit

 24   aujourd'hui que vous n'avez jamais été membre d'aucun parti politique; est-

 25   ce bien exact ?

 26   R.  C'est absolument exact. Et comme je vous l'ai dit, à titre de

 27   rectification, j'ai précisé que lorsque j'étais étudiant pour des raisons

 28   d'appartenance à un club sportif, j'ai été admis au parti communiste. Mais


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  1   je n'ai pour ma part jamais été membre d'un parti.

  2   Q.  Vous avez également dit dans votre déclaration que vous avez été nommé

  3   ministre de la Santé, du temps du gouvernement de Klickovic.

  4   Mme IODICE : [interprétation] Et à ce titre, j'aimerais qu'on nous montre

  5   la pièce 65 ter 24737. Et en attendant que ce document ne s'affiche sur nos

  6   écrans, je précise qu'il s'agit d'un article de journaux de "Knina", et

  7   c'est daté du 2 septembre 1996. Dans cet article, il est question de gens

  8   qui ont été nommés pour faire partie du gouvernement de Klickovic.

  9   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

 10   Mme IODICE : [interprétation] J'ai des copies papier pour ce document pour

 11   le témoin, si cela peut l'aider.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, je vois que le document s'est

 13   affiché sur l'écran, mais il y a des difficultés, me semble-t-il. Donc

 14   point de problème pour ce qui est de se servir du rétroprojecteur. Alors

 15   nous allons peut-être avoir recours à l'affichage Sanction ?

 16   Mme IODICE : [interprétation] Oui, en effet. Est-ce qu'on peut nous

 17   montrer la page 3 en version B/C/S. Il s'agit de la page 5 de la version

 18   B/C/S. Merci.

 19   Q.  Docteur Sosic, vous pouvez voir ici au haut de la page votre nom.

 20   On dit : professeur, Docteur Mirko Sosic. Et à la dernière phrase du texte,

 21   dans la dernière phrase, on dit :

 22   "…les membres du Parti démocratique serbe."

 23   Le voyez-vous ?

 24   R.  Oui.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Juste une seconde. Oui, continuez.

 26   Mme IODICE : [interprétation]

 27   Q.  Donc vous étiez membre du SDS, n'est-ce pas ?

 28   R.  Je ne sais pas, quelle est la coutume ici. Je n'ai jamais été membre du


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  1   SDS, et c'est parce que je n'étais pas membre du SDS que j'ai rencontré des

  2   problèmes pour être nommé au sein du gouvernement.

  3   Le ministre à l'époque qui m'a proposé comme candidat, parce qu'avant

  4   cela je travaillais au sein d'un groupe d'experts pour une stratégie de

  5   développement du système de santé, il m'a dit que ce n'était pas important,

  6   et qu'il avait mené des consultations à ce sujet, mais je n'ai jamais été

  7   membre du SDS. Ici, peut-être que les gens pensaient qu'il fallait être

  8   membre du SDS pour être à ce poste, peut-être que ceci est mal intentionné,

  9   cet article, je ne sais pas. J'étais le seul qui ne voulait pas être

 10   membre. Comment expliquer ? J'avais mes propres valeurs en tant que

 11   chirurgien, et en tant qu'expert, en tant que scientifique, je ne jugeais

 12   pas bon d'être membre d'un parti politique.

 13   Q.  Merci.

 14   Mme IODICE : [interprétation] Pourrait-on verser ce document au dossier.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 16   M. LE GREFFIER : [interprétation] P6213.

 17   Mme IODICE : [interprétation]

 18   Q.  Et vous avez mentionné une médaille, une décoration que vous avez reçue

 19   en 1996. Est-ce que vous avez reçu cette distinction en 1995 ? Est-ce que

 20   vous l'avez reçue directement des mains de M. Karadzic ?

 21   R.  Croyez-moi, je ne connais pas la date, je ne me souviens de la date.

 22   L'INTERPRÈTE : Les interprètes de cabine anglaise n'ont pas saisi la phrase

 23   précédente.

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais ce n'était pas vraiment important pour

 25   moi.

 26   Mme IODICE : [interprétation]

 27   Q.  Mais vous vous souvenez que la personne qui vous a remis cette

 28   distinction était M. Radovan Karadzic, n'est-ce pas ?


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  1   R.  Oui.

  2   Q.  Merci. Au paragraphe 7 de votre déclaration --

  3   Mme IODICE : [interprétation] Pourrait-on donner un exemplaire de la

  4   déclaration au témoin.

  5   Q.  Donc je vous demande de consulter le paragraphe 7 de votre déclaration,

  6   vous parlez de perquisitions. Lorsque nous nous sommes rencontrés il y a

  7   quelques jours, vous avez confirmé que rien n'avait été volé de votre

  8   appartement, n'est-ce pas ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Merci. Et dans votre déclaration, vous parlez des armes que vous avez

 11   vues, et vous avez été témoin de bombardement, vous mentionnez que vous

 12   vous trouviez à Sarajevo jusqu'à la mi-août 1992, n'est-ce pas ?

 13   R.  C'est exact, c'est exact. Je me souviens que c'était l'été, c'était au

 14   petit matin.

 15   Q.  Merci. Au paragraphe 8 de votre déclaration, vous parlez d'un incident.

 16   Vous avez vu un camion avec une arme embarquée. Est-ce que j'ai bien

 17   compris, c'est-à-dire que vous avez entendu deux tirs et vous avez vu un

 18   camion avec une arme embarquée à son bord; est-ce exact ?

 19   R.  En partie. Vous savez, j'étais devant la porte. C'était peut-être 6

 20   heures du matin, c'était l'été, et je remplaçais ma femme parce que je ne

 21   pouvais pas être de garde en raison des gardes que je faisais à l'hôpital.

 22   Et ensuite, j'ai entendu des tirs venant des résidences universitaires à

 23   Bjelave. Il y a eu deux ou trois tirs, on a entendu ces tirs se rapprocher

 24   peu à peu et c'est passé devant ma maison. Ce n'était pas un camion très

 25   gros. C'était un petit camion TAM et il y avait une arme qui était

 26   embarquée à son bord. Et lorsqu'il est passé, les tirs sont devenus plus

 27   distants. Alors, je ne sais pas si c'étaient deux ou trois tirs, mais j'ai

 28   pu voir l'évolution de ces tirs compte tenu du son.


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  1   Q.  Mais je voulais savoir si vous avez d'abord entendu des tirs et ensuite

  2   vous avez vu passer le camion ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Mais vous n'avez pas vu que les tirs provenaient de ce camion alors

  5   qu'il passait devant vous ?

  6   R.  Vous voulez dire à ce moment où le tir a été tiré ? Non.

  7   Q.  Merci. Et au paragraphe 9, vous parlez d'un canon que vous avez vu à

  8   proximité de la salle des urgences à l'hôpital. Est-ce exact que vous avez

  9   vu ce canon mais que vous n'avez pas vu un tir provenant de ce canon ?

 10   R.  Tout d'abord, je me dois de vous corriger. Il s'agissait en fait de la

 11   clinique de traumatologie. Ce n'était pas en fait la salle des urgences.

 12   Deuxièmement, il y avait toujours une sirène qui retentissait, et

 13   nous savions que c'était un avertissement qu'il ne fallait pas qu'on sorte.

 14   Q.  Je vais vous arrêter là. Nous allons en venir à cela. Je voulais tout

 15   d'abord savoir si vous avez vu ce canon mais que vous n'avez pas vu que

 16   l'on tirait à partir de ce canon ? Nous viendrons à ce que vous venez de

 17   dire un peu plus tard. Vous n'avez pas vu un tir provenant de ce canon,

 18   n'est-ce pas ?

 19   R.  J'étais caché derrière la fenêtre et j'observais - bien sûr, j'étais

 20   prudent, vous savez - et j'ai vu cette arme. C'était tellement fort,

 21   c'était une explosion très importante, et on ne peut pas se tromper. Et

 22   lorsque vous voyez ensuite de la fumée -- alors, est-ce que c'était le

 23   moment où j'ai vu que le tir était exécuté, je ne peux pas le dire. Mais

 24   j'ai vu la fumée qui se dispersait, et avant cela j'ai vu que la totalité

 25   du bâtiment s'est ébranlé.

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] A la ligne 16, il faudrait que ce soit

 27   mentionné "fumée".

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, de la fumée, de la poussière, enfin, je


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  1   ne sais pas exactement.

  2   Mme IODICE : [interprétation]

  3   Q.  Merci. J'aimerais que vous consultiez maintenant la deuxième partie du

  4   paragraphe 9, où vous parlez de cet incident précis. Je souhaiterais

  5   résumer votre déposition et voir si vous êtes d'accord avec moi. Donc, tout

  6   d'abord, vous avez entendu une sirène retentir. Ensuite, vous avez entendu

  7   une explosion très importante qui a ébranlé la totalité du bâtiment. Et

  8   ensuite, vous avez entendu ce qui selon vous était en fait le bruit de la

  9   chute d'un obus et ensuite une explosion plus lointaine; est-ce exact ?

 10   R.  Je vais vous corriger sur un point. J'ai donc entendu le son de la

 11   trajectoire, vous savez, quand un projectile traverse l'air. Et après, j'ai

 12   entendu une explosion dans le lointain. Peut-être que c'est important de

 13   faire la distinction.

 14   Q.  Merci. Et vous avez dit dans votre déclaration que vous étiez à

 15   l'intérieur lorsque tout ceci s'est passé, n'est-ce pas ?

 16   R.  Oui. Oui, oui, au niveau du département où l'on fait des diagnostics.

 17   Nous sommes allés chercher les médicaments que nous pouvions obtenir, et

 18   j'étais accompagné de l'infirmière chef.

 19   Q.  Et vous êtes d'accord que les autres sirènes étaient également

 20   déclenchées en cas de danger, n'est-ce pas ?

 21   R.  Oui, en général, c'est ainsi que ça se produisait. S'il y avait une

 22   attaque, effectivement, il y avait des sirènes qui retentissaient.

 23   Q.  Et on pourrait considérer que le bombardement, ça a été considéré comme

 24   un danger, n'est-ce pas ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Est-ce que vous êtes également d'accord avec moi pour dire que

 27   lorsqu'un obus tombe sur un bâtiment, ce bâtiment est ébranlé, tremble ?

 28   R.  Bien, je suppose que oui.


Page 35775

  1   Q.  Je vais passer à autre chose, ce que vous abordez dans le paragraphe

  2   11. Vous avez mentionné que vous vous étiez rendu à la base des

  3   observateurs militaires des Nations Unies et que vous avez jugé qu'ils

  4   étaient en bon état de santé physique et mentale, et vous en avez parlé

  5   dans votre rapport qui est déjà versé au dossier.

  6   Mme IODICE : [interprétation] Pourrait-on afficher la pièce D989, s'il vous

  7   plaît.

  8   Q.  Docteur Sosic, nous avons également reçu comme pièce à conviction en

  9   l'espèce un rapport officiel que vous aviez demandé et que vous avez

 10   également signé, et il va s'afficher devant vous dans quelques instants.

 11   Il s'agit de votre rapport. Est-ce que vous le reconnaissez ?

 12   R.  Il ne s'agit pas de mon écriture manuscrite et il ne s'agit pas non

 13   plus de ma signature.

 14   Q.  Très bien. Alors, nous allons passer à la page 5 en B/C/S. Là, il

 15   s'agit de votre signature, n'est-ce pas ?

 16   R.  Effectivement.

 17   Q.  Et pour ce qui est de la page 3 en B/C/S, il s'agit bien de votre

 18   signature également, n'est-ce pas ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Peut-on passer aux pages 2 tant en anglais qu'en B/C/S, s'il vous

 21   plaît. Vous voyez, au niveau du numéro 2, vers la fin de la page, vous

 22   recensez certains des otages et vous soulignez que certains faisaient

 23   montre de signes de stress extrême.

 24   R.  Vous voulez dire ce document ?

 25   Q.  Où il est mentionné :

 26   "Jose Antonio Muelin (Espagne) qui présente des signes de stress extrême…"

 27   R.  Bien sûr que je m'en souviens. C'est un homme qui, lorsqu'il a été fait

 28   prisonnier, avait un problème personnel, sa femme était enceinte. Donc ce


Page 35776

  1   stress était lié au fait qu'il ne pouvait pas être en contact avec sa

  2   femme, et il était, bien sûr, préoccupé.

  3   Mais pourrais-je dire quelque chose dès le départ. Mon ami a noté son

  4   adresse, et dès qu'il est revenu, le Dr Babic a appelé son ami en Espagne,

  5   il a appelé sa femme et on lui a dit qu'il ne devait pas s'inquiéter. Ceci

  6   n'était pas vraiment conforme aux règles militaires, parce que vous savez

  7   ce qui se passe dans l'armée. Cependant, d'un point de vue humain, nous

  8   avons jugé bon de faire cela, et nous avons informé qui de droit de façon à

  9   ce qu'ils ne soient pas inquiets pour leurs êtres chers.

 10   Q.  Merci.

 11   Mme IODICE : [interprétation] Est-ce que l'on peut passer à la page

 12   suivante en B/C/S, tout en haut de la page. C'est la même page pour la

 13   version anglaise.

 14   Q.  Vous vous souvenez du cas -- c'est la page 2 en anglais, en bas de la

 15   page.

 16   Vous vous souvenez d'un autre officier hollandais [comme interprété]

 17   qui présentait également des symptômes de dépression provoqués par son

 18   statut incertain ? Vous vous souvenez de cela ?

 19   R.  Vous voulez dire M. Clerieh de la République tchèque ?

 20   Q.  Non. Il s'agit d'un Janusz Kalbarczyk de Pologne. C'est en haut de la

 21   page.

 22   R.  Oui, oui, effectivement, je vois. C'était un officier polonais. Et j'ai

 23   écrit ces notes. Parce que nous avions déterminé des priorités pour savoir

 24   qui devait être libéré en premier, mais cela ne me semblait pas être cette

 25   situation, d'après moi.

 26   Mme IODICE : [interprétation] Peut-on passer à la page 4 dans les deux

 27   versions.

 28   Q.  Et au point 1.1, est-ce que vous vous souvenez, entre autres, parmi les


Page 35777

  1   choses que vous avez consignées, qu'ils se plaignaient tous du traitement

  2   qu'ils avaient subi durant leurs premiers jours là-bas ?

  3   R.  1.1, oui ?

  4   Q.  Oui.

  5   R.  Ceci est lié à des éléments que je souhaitais consigner sur papier.

  6   Lorsque vous êtes privé de liberté, ce n'est pas plaisant. Là, c'était donc

  7   le premier jour, et les gens étaient vraiment surpris. Ils ne pensaient pas

  8   que ceci pouvait se produire. C'est ce que je voulais dire.

  9   Q.  Merci.

 10   R.  Je vous en prie.

 11   Q.  J'ai une dernière question. A la fin du paragraphe 5 dans votre

 12   déclaration -- vous avez votre déclaration devant vous, n'est-ce pas,

 13   Monsieur Sosic ?

 14   R.  Oui, mais quel paragraphe ?

 15   Q.  Fin du paragraphe 5. Et vous dites :

 16   "Les souffrances des docteurs serbes durant la guerre ont été décrites par

 17   un film intitulé 'Sarajevo, la vérité couverte par le silence.' Je remarque

 18   que certains des événements mentionnés dans ce film ont déjà été décrits et

 19   versés au dossier dans l'affaire contre le Dr Radovan Karadzic sous les

 20   numéros de cote D130, D131, D132 et D133."

 21   Lorsque je vous ai demandé l'autre jour si vous aviez visionné ces

 22   vidéos lorsque vous avez passé en revue votre déclaration avec la Défense,

 23   vous nous avez dit que vous n'aviez pas visionné ces vidéos, qu'on ne vous

 24   les avait pas montrées; est-ce exact ?

 25   R.  Ah, vous avez fait référence à cela ? J'ai dit que je n'ai pas revu le

 26   film. J'ai dit cela à ce moment-là. Ce sont les déclarations que j'ai

 27   faites, mais je dois dire qu'il s'agissait de 1998. Et pour ce qui est de

 28   tous ces détails, je ne peux pas m'en souvenir. J'ai dit que je n'avais pas


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  1   revu le film pendant ce procès à La Haye.

  2   Q.  Oui. En fait, vous ne savez pas exactement ce que représentent ces

  3   chiffres ou quelle est la teneur de ces documents ?

  4   R.  Les chiffres concernent ce film. Mais ces chiffres ne me disent rien.

  5   Q.  Bien. Le film ne vous a pas été montré au moment où vous avez examiné

  6   votre déclaration ?

  7   R.  Non, pas à La Haye.

  8   Mme IODICE : [interprétation] Ce sont toutes les questions que j'ai voulu

  9   poser au témoin.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Madame Iodice.

 11   Monsieur Karadzic, avez-vous des questions supplémentaires à poser à ce

 12   témoin ?

 13   L'ACCUSÉ : [aucune interprétation]

 14   Nouvel interrogatoire par M. Karadzic :

 15   Q.  [interprétation] Professeur, saviez-vous de quoi la Défense parlait, de

 16   quelle de vos déclarations ?

 17   R.  Oui, j'étais au courant de tout pour ce qui est des documents qui

 18   étaient à la disposition de la Défense. Et lorsque le juge d'instruction

 19   est venu à Pale, je lui ai montré ces déclarations, et aujourd'hui

 20   également, je les ai vues.

 21   Q.  Merci. A la page 29, peut-être, du compte rendu d'aujourd'hui, vous

 22   avez dit que vous avez procédé à un tri en désignant des priorités pour ce

 23   qui est des personnes qui devaient être libérées avant les autres. De

 24   quelle façon avez-vous fait cela, est-ce que vous avez proposé une liste ?

 25   R.  Oui, et en particulier pour ce qui est de ce monsieur d'Espagne, j'ai

 26   dit qu'il fallait le libérer sans délai, et je pense qu'il a été libéré

 27   deux ou trois jours par la suite. Et j'étais très content puisque quelqu'un

 28   m'a écouté et a accepté ma proposition en tant que médecin.


Page 35779

  1   Q.  Merci. Est-ce que c'est dans le document 1D10031, à la dernière page du

  2   document ?

  3   R.  Je pense que j'ai vu cela. Mais à présent, je ne vois pas ce document à

  4   l'écran.

  5   Q.  Pouvez-vous nous dire le nom de cet Espagnol ? Jenny Sesita [phon] a

  6   pleuré et a beaucoup parlé avec Luis [phon], c'est ce qui est mentionné

  7   dans cette déclaration. Merci. Dans ce cas-là, on n'a pas besoin de

  8   l'afficher.

  9   R.  C'était une dame qui était pharmacienne diplômée qui est venue nous

 10   aider. Elle est restée avec nous pendant un certain temps. Elle était très

 11   émotive.

 12   Q.  Elle était Néerlandaise ?

 13   R.  Oui, elle vit à Heerhugowaard, près d'Amsterdam. Nous sommes amis. Et

 14   l'autre soir, elle est venue me rendre visite, avec l'autorisation du

 15   Tribunal, bien sûr.

 16   Q.  A la page 27, on vous a posé la question de savoir si le bâtiment

 17   touché par un projectile est ébranlé ou tremble à ce moment-là. Lorsque

 18   vous avez vu la traînée de fumée concernant le projectile lancé de ce

 19   canon, est-ce que le bâtiment a été touché par ce projectile ?

 20   R.  Pas du tout. Il s'agissait de deux choses différentes, deux expériences

 21   différentes. Je ne me trouvais pas dans un bâtiment qui a été touché par un

 22   projectile, mais je peux imaginer comment c'est. Mais ce que j'ai pu

 23   sentir, c'était la détonation qui a provoqué le tremblement de la terre.

 24   Q.  Est-ce que le département de traumatologie a été touché ?

 25   R.  Pour autant que je m'en souvienne, non.

 26   Q.  A la page 24, on vous a posé des questions pour ce qui est de la

 27   médaille de l'ordre de miséricorde.

 28   R.  Oui, il s'agit d'une décoration.


Page 35780

  1   Q.  Connaissez-vous quelqu'un d'autre qui a reçu la même décoration ?

  2   R.  Il s'agit d'une décoration pour ce qui est de contribution concernant

  3   les traitements des blessés ou des malades. Ma collègue des Pays-Bas a

  4   également reçu la croix de la miséricorde, "Cross of Mercy" ou quelque

  5   chose comme cela. Je pense qu'une petite cérémonie a été organisée et que

  6   c'était vous qui aviez remis cette médaille, mais il y avait d'autres

  7   médecins également qui méritaient la même médaille.

  8   Q.  Mme le Procureur Iodice a souligné que cette médaille vous a été

  9   décernée par moi-même et que cela représenterait un côté erroné de ce fait.

 10   Nous nous sommes rencontrés dans l'enceinte de l'hôpital, n'est-ce pas,

 11   pendant la guerre ? Pouvez-vous dire quelque chose là-dessus à cette

 12   Chambre ?

 13   R.  Oui. Si vous me le permettez, je dois dire que je suis plus âgé que Dr

 14   Karadzic, beaucoup plus âgé. A l'époque, le Dr Karadzic était étudiant,

 15   j'étais assistant à la faculté de médecine. Nous ne nous fréquentions pas à

 16   l'époque, mais pendant la guerre et au début de la guerre, je le

 17   connaissais. Voilà ce qui m'a impressionné le premier jour, à savoir le 20

 18   août, lorsque je suis arrivé à Pale, lorsque j'ai fui Sarajevo, lui, il

 19   était parmi les premières personnes qui se sont présentées pour me saluer,

 20   pour me décrire la situation, pour me dire qu'ils avaient besoin de

 21   médecins. Il m'a dit : "Il y avait d'autres collègues qui étaient vos

 22   collègues qui sont là. Peut-être que vous devriez rester parmi nous."

 23   Mais la plupart du temps, j'avais des contacts avec le Dr Karadzic

 24   lorsque j'avais besoin de quelque chose. Pendant notre coopération, je

 25   n'étais pas content de mon statut de médecin militaire, puisque moi j'étais

 26   médecin civil, et ce rapport n'était pas vraiment un rapport idéal, et

 27   c'est pour cela que je me suis adressé au Dr Karadzic en tant que

 28   président, s'il pouvait faire quelque chose pour que mon statut change.


Page 35781

  1   Nous ne savions pas ce qui allait se passer pour ce qui est de nos

  2   familles, de nos enfants. Nous ne voyions pas l'issue de cette situation.

  3   C'est comme ça qu'on est arrivé à l'idée de former un centre médical en

  4   tant qu'hôpital pour les civils. Lorsque j'ai mentionné cela, le Dr

  5   Karadzic a accepté cette idée en me disant qu'il allait m'aider pour que

  6   cette idée se réalise. C'est peut-être à ce moment-là qu'on a commencé à

  7   coopérer d'une façon plus intense, peut-être parce qu'il s'agissait d'une

  8   situation euphorique.

  9   Et en sachant que nous ne pouvions aucunement rentrer à Sarajevo,

 10   nous souhaitions créer des conditions pour nos hommes, pour notre

 11   population, pour nos soldats, pour nos malades; des conditions dignes d'un

 12   être humain. Ne pas continuer à travailler dans un hôtel, dans une chambre

 13   d'hôtel où on a fait remplacer des tables de billards avec deux tables pour

 14   les opérations.

 15   Le Dr Karadzic a contribué à ce que cette idée se réalise. Des

 16   architectes de Belgrade étaient venus. Je me souviens qu'il y avait un

 17   homme, Pr Antic, un homme de renom dans son domaine qui nous a proposé de

 18   préparer un projet pour ce qui est de la construction de l'hôpital. Et

 19   lorsque j'ai commencé à lui parler, j'ai vu que le Dr Karadzic passait de

 20   temps en temps pour parler de l'emplacement futur de l'hôpital, et je me

 21   souviens qu'à l'époque une demande a été faite qui, à mes yeux, était un

 22   peu irréaliste. Dr Karadzic a dit : "Vous savez, il faut qu'on construise

 23   un théâtre ici aussi. Il faut que les gens vivent ici." Donc, il a pris

 24   part active à ces activités. Je pense que d'une certaine façon, c'était sa

 25   manière de se relaxer.

 26   Le ministre de la Santé m'a invité à ce que j'examine le Dr Karadzic,

 27   parce qu'il avait un problème au genou, le genou qui était enflé et très

 28   chaud. Moi, je lui ai demandé comment il supportait cela. Il m'a dit : "Je


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  1   dois faire des exercices physiques." Moi, j'ai examiné le genou. J'ai pris

  2   son pouls, sa tension artérielle, qui était de 150, le pouls était de 110,

  3   et je lui ai dit qu'il était en état de stress. Lui m'a répondu : "C'est

  4   mon état normal. C'est comme cela que je vis." Et pour moi, je ne pouvais

  5   pas me permettre de dire : "Il faut que vous diminuiez vos activités

  6   physiques."

  7   Q.  Est-ce que vous connaissez ma position pour ce qui est du

  8   traitement accordé à d'autres personnes pour ce qui est, par exemple, de

  9   l'aide humanitaire, pour ce qui est des patients d'autres appartenances

 10   ethniques, et cetera ?

 11   Mme IODICE : [interprétation] Monsieur le Président.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je pense que nous avons suffisamment

 13   entendu là-dessus. C'est quelque chose qui ne découle pas du contre-

 14   interrogatoire. C'est ce que vous avez voulu dire, Madame Iodice ?

 15   Mme IODICE : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je ne pense pas

 16   que la question concernant la médaille puisse entraîner des questions

 17   concernant d'autres sujets très divers.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Si vous avez d'autres questions à poser,

 19   nous allons plutôt maintenant suspendre l'audience.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vais en finir dans une minute, mais je crois

 21   que cela découle du contre-interrogatoire, parce que Mme le Procureur a

 22   essayé d'invalider la réponse du témoin lorsqu'il a dit qu'il avait reçu la

 23   croix de la miséricorde.

 24   Mme IODICE : [aucune interprétation]

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il a dit qu'il a retiré cette question.

 26   Continuez.

 27   M. KARADZIC : [interprétation]

 28   Q.  Monsieur Sosic, lorsque vous avez dit que quelqu'un a écrit que vous


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  1   étiez membre du SDS au sein du gouvernement, vous souvenez-vous quel était

  2   le parti politique auquel appartenait le ministre Kalinic jusqu'à la fin de

  3   la guerre ? A quel parti politique il appartenait lorsqu'il est devenu

  4   ministre ?

  5   R.  Si je me souviens bien - bien que j'aie évité de m'occuper de cela - il

  6   était l'un des fondateurs du Parti des réformistes, et je pense que M.

  7   Markovic était président de ce parti politique des réformistes, ou des

  8   forces réformistes.

  9   Q.  Merci, Professeur. Je vous remercie d'être venu pour témoigner devant

 10   ce Tribunal.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. On est arrivé à la fin de

 12   votre déposition, Professeur Sosic. Au nom des Juges de la Chambre,

 13   j'aimerais vous remercier d'être venu à La Haye pour témoigner. Maintenant,

 14   vous pouvez quitter le prétoire, et nous allons faire la pause maintenant.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] La pause est jusqu'à 11 heures 05.

 17   --- L'audience est suspendue à 10 heures 35.

 18   [Le témoin quitte la barre]

 19   --- L'audience est reprise à 11 heures 12.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Maître Robinson, vous avez la

 21   parole.

 22   M. ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Président, puis-je vous

 23   présenter Beatris Spasova, de Bulgarie, notre stagiaire qui nous rejoint à

 24   ce moment-là, pendant ce volet de l'audience. Merci.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 26   Avant de commencer la déposition du témoin suivant, la Chambre de

 27   première instance aimerait maintenant aborder une question de procédure

 28   concernant la pièce D3127, aux fins d'identification.


Page 35784

  1   Le 14 mars 2013, la Chambre a versé au dossier les pages 18 à 22 du

  2   document 65 ter 1D7910, et lui a accordé une cote aux fins

  3   d'identification, qui est D3127, sous réserve de régler d'autres questions.

  4   La Chambre remarque que les pages 20 à 22 de la pièce D3127, qui a reçu la

  5   cote aux fins d'identification, sont identiques aux pages du document qui a

  6   été versé au dossier en tant que P2597. Par conséquent, la Chambre estime

  7   qu'il est nécessaire de verser au dossier seulement les pages 18 et 19 sous

  8   la cote D3127 pour éviter d'avoir des duplications, et, pour des

  9   instructions à la Défense de retirer les pages 20 à 22 du document qui a

 10   été téléchargé dans le système du prétoire électronique en tant que D3127.

 11   De plus, la Chambre remarque que l'original en B/C/S du document D3127 n'a

 12   pas été téléchargé dans le système du prétoire électronique, seule la

 13   traduction en anglais a été téléchargée dans le système du prétoire

 14   électronique. La Chambre donne des instructions à la Défense pour situer et

 15   télécharger dans le système du prétoire électronique la version originale

 16   en B/C/S, et, s'il est nécessaire, que la Défense agisse de concert avec

 17   l'Accusation. Par conséquent, puisqu'on a abordé toutes les raisons pour

 18   lesquelles la pièce D3127 a obtenu le statut du document aux fins

 19   d'identification, la Chambre la verse au dossier.

 20   Maintenant, on peut faire entrer le témoin suivant dans le prétoire.

 21   Oui.

 22   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Monsieur le Président.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour, Madame.

 24   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. En ce

 25   qui concerne le conseil relevant de l'article 90(E) par rapport à ce

 26   témoin, c'est une mesure de précaution en raison de son poste à l'époque.

 27   Je voulais simplement le mentionner. Il n'y a pas de soupçon à l'encontre

 28   de ce témoin découlant de ses déclarations.


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que nous pouvons donc faire sans

  2   et lui apporter ce conseil si nécessaire ?

  3   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Je pense que cela suffira.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci de cette information, Madame.

  5   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le témoin peut-il prononcer la

  7   déclaration solennelle.

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

  9   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 10   LE TÉMOIN : ZIVAN FILIPOVIC [Assermenté]

 11   [Le témoin répond par l'interprète]

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour, Monsieur Filipovic. Si vous

 13   voulez bien vous asseoir.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] M'entendez-vous dans une langue que vous

 16   comprenez, Monsieur Filipovic ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous entends, mais le son n'est pas

 18   suffisamment fort.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant, je vous prie.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous m'entendez mieux

 22   maintenant, Monsieur Filipovic ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 25   Si vous voulez bien reprendre, Monsieur Karadzic.

 26   Interrogatoire principal par M. Karadzic :

 27   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Filipovic.

 28   R.  Bonjour, Monsieur Karadzic.


Page 35786

  1   Q.  Je vois que vous savez d'ores et déjà qu'il nous faut ménager des

  2   pauses entre nos propos, les vôtres et les miens, et nous ne devrions pas

  3   non plus accélérer notre rythme pour que les interprètes puissent faire

  4   leur travail.

  5   Est-ce que vous avez remis une déclaration à mon équipe de la Défense ?

  6   R.  Oui.

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pourrions avoir à l'écran le

  8   document 1D7947.

  9   M. KARADZIC : [interprétation]

 10   Q.  Pendant que nous attendons que ce document s'affiche, Monsieur

 11   Filipovic, quel était votre grade quand vous avez pris votre retraite ?

 12   R.  J'ai pris ma retraite avec le grade de lieutenant-colonel réserviste,

 13   mais je ne suis pas retraité militaire, mais je suis un civil à la

 14   retraite.

 15   Q.  Merci.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] 1D7947, je vous prie.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Si la déclaration relevant de l'article

 18   92 ter du témoin -- ah, je le vois maintenant à l'écran.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, effectivement, nous l'avons à l'écran,

 20   donc le rétroprojecteur n'est pas nécessaire.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Si vous en avez une copie imprimée,

 22   remettez-la au témoin -- il en dispose déjà. Très bien.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Poursuivez, Monsieur Karadzic.

 25   M. KARADZIC : [interprétation]

 26   Q.  Voyez-vous la déclaration à l'écran devant vous, c'est-à-dire est-elle

 27   identique à ce que vous avez par-devers vous en version imprimée ?

 28   R.  Je pense. Oui.


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  1   Q.  Merci. Avez-vous lu et signé cette déclaration ?

  2   R.  Oui.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pourrions-nous afficher la dernière page au

  4   bénéfice du témoin, pour qu'il puisse identifier son paraphe. M. KARADZIC :

  5   [interprétation]

  6   Q.  Est-ce là votre signature ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Merci. Est-ce que cette déclaration reprend fidèlement ce que vous avez

  9   déclaré à l'équipe de la Défense et y a-t-il quoi que ce soit que vous

 10   souhaiteriez rectifier ?

 11   R.  Je crois que tous les éléments de cette déclaration sont identiques à

 12   ce que j'ai déclaré. Et, si possible, peut-être une correction. Je crois

 13   qu'il s'agit d'un élément technique. Au paragraphe 20.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] L'avant-dernière page, je vous prie, et le

 15   paragraphe 20.

 16   M. KARADZIC : [interprétation]

 17   Q.  Pourriez-vous nous aider et nous dire ce qu'il convient de rectifier.

 18   R.  On y voit ici :

 19   "Après que la VRS ait été établie en mai 1992, certains Musulmans ont

 20   également répondu à la mobilisation".

 21   C'était un chiffre minuscule de Musulmans, et le texte devrait continuer

 22   comme suit :

 23   "En septembre 1992, lorsque la mobilisation générale a été lancée, un grand

 24   nombre de Musulmans ont répondu à cet appel, et un bataillon et unité de

 25   génie ont été créés", comme on le voit dans le texte à la phrase suivante.

 26   Q.  Merci. Et ils sont restés dans l'armée de la Republika Srpska jusqu'à

 27   la fin de la guerre; c'est exact ?

 28   R.  Oui.


Page 35788

  1   Q.  Est-ce que tous les autres éléments sont exacts ?

  2   R.  Oui, tout le reste est comme il faut.

  3   Q.  Si je devais vous poser les mêmes questions aujourd'hui ici, que celles

  4   que l'on vous a posées lors de votre entretien, est-ce que vos réponses

  5   seraient dans la teneur les mêmes ?

  6   R.  Dans la teneur, oui.

  7   Q.  Merci.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je souhaite verser cette déclaration sous le

  9   régime de 92 ter.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Des objections, Madame ?

 11   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous recevons ce document.

 13   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il reçoit la cote D3140.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, si vous voulez bien continuer,

 15   Monsieur Karadzic.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. J'aimerais maintenant lire un résumé de

 17   la déclaration de M. Zivan Filipovic, lieutenant-colonel de la réserve de

 18   l'armée de la Republika Srpska, et je le lirai en anglais.

 19   M. Zivan Filipovic a été commandant de la Défense territoriale de Bijeljina

 20   et par la suite commandant adjoint de la 2e Brigade de Semberija. Il estime

 21   que les relations interethniques entre les Musulmans et les Serbes étaient

 22   normales jusqu'à la moitié des années 1990. Toutefois, lorsque les partis

 23   nationalistes sont entrés en activité et le SDA a souhaité mettre sur pied

 24   ses politiques séparatistes, il a ainsi perturbé ces bonnes relations. De

 25   plus, des manifestations organisées de travailleurs par les employés

 26   musulmans à la scierie de Bijeljina en 1990-1991 ont mené à une

 27   détérioration plus grave encore de ces bonnes relations interethniques. Les

 28   ouvriers de l'usine d'acier ont eu recours à des violences physiques pour


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  1   saisir l'usine et pour s'assurer que les conflits avec la police se

  2   diffusent dans toute la ville.

  3   Il était connu que le SDA était responsable de ces troubles. Lorsque

  4   ce dernier a commencé à proposer des sélections dans ses demandes de

  5   nominations pour les postes importants, dans tout le monde politique il

  6   était clair qu'il avait l'intention depuis toujours de mettre la main sur

  7   les états-majors de la Défense territoriale municipale, régionale et

  8   républicaine. Et ceci est devenu la base de la création de la Ligue

  9   patriotique et des Bérets verts.

 10   Zivan Filipovic considère que les articles dans les médias concernant

 11   la guerre à Bijeljina et les affirmations des Musulmans concernant les

 12   activités des Serbes sont des mensonges de la part de ceux qui ont provoqué

 13   les combats en ville.

 14   Le 30 mars 1991, Zivan Filipovic a reçu un appel téléphonique chez

 15   lui lui signalant des tirs au centre de la ville. Il s'est rendu dans la

 16   direction de la ville mais a été arrêté à un barrage qui était gardé par

 17   plus de 15 hommes bien armés. On lui a dit qu'ils avaient le contrôle de la

 18   ville et que s'il ne se tournait pas les talons, il serait abattu. Il en a

 19   reconnu quelques-uns comme étant des habitants musulmans, et un certain

 20   nombre d'entre eux portaient des bérets verts.

 21   Lorsque Zivan Filipovic est retourné au bureau en avril 1992, il a vu

 22   que le bureau avait été cambriolé, les dossiers étaient éparpillés au sol

 23   et dans les escaliers, et toutes les armes qui avaient été affectées

 24   avaient été emportées par des inconnus. Il a été informé par ses collègues

 25   que pendant les combats, les habitants musulmans avaient tenté de fermer la

 26   ville par des barricades. Des tireurs embusqués musulmans étaient également

 27   postés aux points en hauteur de Bijeljina et entouraient l'hôpital et le

 28   commissariat de police.


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  1   Par la suite, dans ce conflit, les forces musulmanes ont fait courir

  2   la rumeur que les soldats serbes avaient tué 500 habitants musulmans qui

  3   s'étaient réfugiés dans les installations militaires. Cette rumeur a eu

  4   pour effet d'inciter les Musulmans au point où ils ont été en mesure de

  5   reprendre les armes. Toutefois, ce mensonge a été dévoilé, les Musulmans de

  6   Janja ont rendu leurs armes. Et ce faisant, ils ont démontré qu'ils étaient

  7   bien mieux équipés que les soldats serbes.

  8   En qualité de membre de la VRS à Brcko, Zivan Filipovic a été témoin

  9   de tirs d'artillerie au hasard quasi quotidiens contre le centre de la

 10   ville par des unités d'artillerie et de blindé de l'armée de la République

 11   de BH et du HVO, en se servant de nombreux systèmes de lance-roquettes. Ces

 12   tirs au hasard ont produit de nombreuses destructions d'installations

 13   civiles et de nombreux blessés. L'armée de la République de Croatie a

 14   également tiré sur Brcko.

 15   Zivan Filipovic était averti des conventions de Genève, du droit

 16   international de guerre et du droit humanitaire, et ses soldats en étaient

 17   également avertis. Personne dans son unité ne les avait enfreintes. Il est

 18   averti que les membres de l'armée de la BH et du HVO n'ont pas respecté ces

 19   lois, ce qui a été confirmé lorsqu'un échange a été organisé où les forces

 20   musulmanes et les soldats serbes se sont vus remettre les dépouilles des

 21   collègues qui avaient été capturés vivants mais tués par les forces

 22   musulmanes.

 23   M. KARADZIC : [interprétation]

 24   Q.  Je voudrais vous poser une seule question. Avant la guerre --

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant.

 26   Madame, oui.

 27   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Une correction. Je sais que ce n'est

 28   qu'un récapitulatif, mais ce nonobstant, la date du 30 mars 1991 ne reflète


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  1   pas ce que le témoin a déclaré. Dans sa déclaration, il a déclaré le 31

  2   mars 1992.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vois que vous hochez du chef.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est exact.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Désolé.

  6   M. KARADZIC : [interprétation]

  7   Q.  Avant la guerre, vous déclarez au deuxième paragraphe que vous étiez

  8   commandant adjoint de la Défense territoriale municipale de Bijeljina ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Qui était le commandant et que pouvez-vous dire de cette personne et

 11   ses activités ?

 12   R.  Jusqu'en 1990, le commandant était Ljubomir Mitrovic, qui a pris sa

 13   retraite, et par harmonisation concernant la distribution et la division du

 14   pouvoir entre le SDA et le SDS de Bijeljina, M. Saud Abdic a été nommé

 15   comme étant le nouveau commandant. Il venait de recevoir son diplôme et il

 16   avait le grade de deuxième lieutenant, qui était le grade inférieur de qui

 17   que ce soit dans cet état-major.

 18   Q.  Connaissez-vous cette optique d'armement et de mise en œuvre des forces

 19   paramilitaires et de leur participation éventuelle ?

 20   R.  Les armes des collaborateurs de la Défense territoriale étaient

 21   retenues dans des armureries de la caserne de la JNA à Bijeljina qui

 22   étaient gardées par la JNA elle-même. Nous avions également d'autres armes

 23   aux fins de défense éventuelle qui étaient tenues dans des institutions ou

 24   dans des entreprises, et les conditions avaient été mises en place, c'est-

 25   à-dire que la sécurité devait être garantie avec des coffres-forts, des

 26   portes en métal, et cetera. En ce qui concerne les plans de défense,

 27   c'était donc là les armes dont on allait se servir en cas de défense de

 28   toute urgence de ces institutions et de ces entreprises. C'était le plan de


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  1   la Défense territoriale. Saud Abdic, à titre de commandant, n'aurait pu le

  2   changer de son propre chef même s'il le souhaitait. Il était très souvent

  3   absent, ne venait pas au travail. Et dans mes débats avec d'autres

  4   collègues qui étaient également Musulmans, on m'a dit qu'il s'était rendu à

  5   un entraînement à Kula, à Zvornik. L'entraînement était celui qui était

  6   offert aux Bosniaques, membres futurs de la Ligue patriotique.

  7   Q.  Merci, Monsieur.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions à poser à M.

  9   Filipovic.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Merci.

 11   Monsieur Filipovic, comme vous l'avez remarqué, votre témoignage au

 12   principal dans cette affaire a été versé en majeure partie sous sa forme

 13   écrite, et ceci s'est fait donc par écrit au lieu de témoignage fourni

 14   verbalement. Alors, maintenant vous serez contre-interrogé par le

 15   représentant du bureau du Procureur, Mme Uertz-Retzlaff.

 16   Veuillez prendre la parole, Madame.

 17   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 18   Contre-interrogatoire par Mme Uertz-Retzlaff :

 19   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Filipovic.

 20   R.  Bonjour, Madame le Procureur.

 21   Q.  Je voudrais vous remercier d'avoir accordé une séance de récolement à

 22   l'Accusation, et je voudrais évoquer certains des faits que vous avez

 23   avancés pendant ce récolement.

 24   Aux paragraphes 7 et 8 de votre déclaration, vous avez décrit comment vous

 25   avez perçu le début des combats à la date du 31 mars 1992. Vous n'avez pas

 26   besoin de vous pencher sur votre déclaration, à moins que vous n'ayez

 27   besoin de rafraîchir votre mémoire sur certains points. Et nous n'avons pas

 28   besoin d'entrer dans les détails que vous nous avez déjà décrits dans votre


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  1   déposition fournie par écrit.

  2   Alors, pendant ce récolement lundi, vous avez dit que tout ceci a commencé

  3   lorsque des jeunes Musulmans avaient fréquenté un café qui s'appelait

  4   Istanbul et il y avait des jeunes Serbes qui allaient au café Ravna Gora et

  5   qui ont commencé à se battre entre eux. Et dans ce contexte, vous nous avez

  6   précisé que le café Ravna Gora était un endroit fréquenté par ceux qui se

  7   qualifiaient de Chetniks et qui étaient liés à Mirko Blagojevic. C'est bien

  8   ce que vous nous avez 

  9   dit ?

 10   R.  Il y a une petite rectification. Je me suis trompé sur un plan

 11   technique. Il s'agissait du café Istanbul et l'autre café s'appelait

 12   Srbija. Les jeunesses radicales se rassemblaient, du côté des Serbes, dans

 13   ce café Srbija, et les jeunesses du groupe ethnique bosnien musulman se

 14   rassemblaient dans ce café qui s'appelait Istanbul. Ces deux cafés, ils

 15   peuvent se regarder les uns les autres parce qu'ils se trouvent à quelque

 16   100 mètres d'écart l'un de l'autre, et le fait est qu'il y a eu d'abord des

 17   règlements de comptes entre ces deux cafés lorsqu'un Bosnien, un Musulman,

 18   avait essayé d'entrer à cheval.

 19   Q.  Je vais vous interrompre. Nous n'avons pas beaucoup de temps à notre

 20   disposition. Ça, vous nous l'avez déjà dit lorsque nous nous sommes

 21   entretenus lundi. Si j'ai besoin de plus de détails, je vais vous demander

 22   de nous les fournir; mais, à l'opposé, je vous demanderais d'être le plus

 23   bref possible dans vos réponses.

 24   Monsieur Filipovic, il y a des témoignages qui ont été fournis devant les

 25   Juges de la Chambre --

 26   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Et là, je fais référence à une

 27   interview qui porte la référence P02901 au sujet de Mirko Blagojevic.

 28   Q.  Je n'ai pas l'intention de vous le montrer à présent, Monsieur


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  1   Filipovic, mais M. Blagojevic nous dit dans cet entretien que son groupe

  2   avait jeté une grenade à main dans le café Istanbul. Est-ce que cela a

  3   peut-être été le tout début de cette histoire ?

  4   R.  Oui, une grenade à main a été jetée vers le café Istanbul, et ensuite

  5   un homme à cheval est venu du café Istanbul pour jeter une autre grenade à

  6   main, mais cette fois-ci dans le café qui s'appelait Srbija.

  7   Q.  Monsieur Filipovic, au paragraphe 22 de votre déclaration, vous évoquez

  8   le nombre de victimes dont vous avez eu à connaître. Point n'est nécessaire

  9   de revenir à cela maintenant. Je fais référence à cette déclaration afin

 10   que les Juges de la Chambre sachent partant de quoi je présente les

 11   renseignements que j'avance.

 12   Lorsqu'à l'occasion du récolement je vous ai posé cette question en raison

 13   de qui y a-t-il eu des victimes, vous avez dit que c'étaient des jeunes

 14   gens belliqueux qui étaient responsables; et Arkan, tout comme ses hommes;

 15   puis Ljubisa Savic, surnommé Mauzer; puis la Ligue patriotique à la tête de

 16   qui il y avait un certain homme Tiric; et un groupe de reconnaissance de la

 17   JNA. Et c'est au sujet de ce groupe de reconnaissance de la JNA qui était

 18   une unité de réservistes avec des Serbes du cru commandés par Gavrilovic,

 19   qui par la suite est devenu commandant de la 2e Brigade d'infanterie légère

 20   de Semberija au sein de la VRS. Vous souvenez-vous de nous avoir dit ceci ?

 21   R.  Oui, mais vous avez quelque peu modifié l'ordre des choses. C'est les

 22   membres de la Ligue patriotique qui ont posé des barrages routiers et des

 23   tireurs d'élite à certains endroits, et ensuite il y a eu des gens qui

 24   avaient participé à la guerre pour ce qui est de la levée des barrages

 25   routiers et de l'élimination des tireurs isolés de différents endroits qui

 26   se trouvaient aux carrefours de la ville de Bijeljina.

 27   Q.  Monsieur Filipovic, vous nous avez également indiqué lundi -- ou

 28   plutôt, pour être plus précis, on vous a montré à ce moment-là un article


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  1   de presse de "Slobodna Bosna" --

  2   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Et, Madame, Messieurs les Juges, je

  3   fais référence ici à la pièce P0685 [comme interprété].

  4   Q.  -- où vous vous êtes penché sur certains noms et vous vous êtes souvenu

  5   d'une famille albanaise dont le nom a été repris sur la liste de "Slobodna

  6   Bosna", n'est-ce pas ? Vous en souvenez-vous ?

  7   R.  Oui.

  8   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Alors, dans ce contexte-là, je

  9   voudrais que l'on nous affiche sur nos écrans la pièce P02919, page 29.

 10   J'espère que le système marche. Ce qui est en train de s'afficher, c'est

 11   plusieurs photos. Je voudrais qu'on nous montre la page 29, et il est

 12   question d'une photo prise à l'époque. Page 29, s'il vous plaît. Alors, si

 13   le système ne fonctionne pas - je précise que c'est le 29 qu'il nous faut -

 14   mais j'ai des copies papier.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous pouvez nous montrer.

 16   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Monsieur le Président, c'est la photo

 17   de la page 29.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Si mes souvenirs sont bons, ça devrait

 19   être la page 30.

 20   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Moi, on m'a dit que c'était la bonne.

 21   Mais essayons 30, oui. Alors, agrandissons un peu pour que M. Filipovic y

 22   voit mieux.

 23   Q.  Monsieur Filipovic, lorsque vous vous penchez sur cette photo, est-ce

 24   que vous savez nous dire si vous reconnaissez ces gens -- il y a une

 25   personne qui est couchée et une autre femme qui se trouve être penchée et

 26   essaie de façon évidente de se porter en aide de ce jeune homme. Est-ce que

 27   vous savez nous dire de qui il s'agit ?

 28   R.  Je vois la photo. Je suppose que cette femme est en train d'aider cet


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  1   homme, mais je ne sais pas du tout de qui il s'agit.

  2   Q.  Est-ce que cela pourrait être l'un des membres de cette famille

  3   albanaise que vous avez mentionnée et qui résidait à proximité du barrage

  4   routier non loin de l'hôpital ?

  5   R.  Je ne sais pas. D'après le visage, je dirais que je ne me souviens pas

  6   du tout de ce visage-là.

  7   Q.  Bon. Peut-être pourrait-on passer à la photo suivante -- mais avant que

  8   de le faire, indiquez-nous un peu le genre de vêtement que cette femme est

  9   en train de porter.

 10   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Et ensuite, passons à la photo

 11   suivante.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je crois que c'était la dernière photo

 13   de la série. Montrez-nous la photo que vous voulez montrer. Oui, cette

 14   photo se trouve deux pages avant.

 15   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Enfin, c'est tout à fait à l'opposé

 16   de ce que j'ai comme indication ici, mais…

 17   Q.  Bon, Monsieur Filipovic, au vu de cette photo, pouvez-vous nous dire si

 18   vous reconnaissez quiconque de ces soldats ?

 19   R.  Non.

 20   Q.  Au vu de la façon dont ces gens sont vêtus et au vu des armes portées

 21   par eux, est-ce que l'on pourrait dire que ce sont des membres de votre

 22   Défense territoriale ? Ou, partant de ce qu'ils sont en train de porter,

 23   pourrait-il être conclu de l'appartenance de ces hommes à un groupe donné ?

 24   R.  D'après le matériel et la façon dont ils sont équipés, c'est-à-dire des

 25   armes en leur possession, je suppose que ce sont des membres de l'unité à

 26   Arkan.

 27   Q.  Et lorsque vous vous penchez sur les corps que l'on voit sur cette

 28   photo, et si vous prenez en considération les alentours de là où ils sont


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  1   allongés, vous pourrez voir une femme près du mur, c'est la même femme que

  2   celle de la photo précédente, n'est-ce pas ?

  3   R.  A en juger par la jupe et le pull-over, oui.

  4   Q.  Si maintenant vous vous penchez sur le site, vous voyez une porte à

  5   deux battants, en métal, est-ce que l'on peut dire que vous êtes à même de

  6   la reconnaître ? Est-ce que vous pouvez nous dire où est-ce que ceci se

  7   trouve ?

  8   R.  Non.

  9   Q.  Ces photos-là, les avez-vous vues publier quelque part dans les années

 10   1990 pendant les événements ? Est-ce que vous avez eu l'occasion de les

 11   voir ? Ou est-ce que c'est ici que vous les avez vues pour la première fois

 12   ?

 13   R.  C'est ici que je les ai vues pour la première fois.

 14   Q.  Bien. Merci. Nous allons aller de l'avant, et peut-être pourrait-on

 15   enlever ces photos de l'écran. Alors, pendant votre récolement de lundi,

 16   vous nous avez indiqué que vous saviez qu'Arkan avait ouvert un centre

 17   d'entraînement de l'autre côté de la Drina à Badovinci. C'est bien ce que

 18   vous nous avez dit ?

 19   R.  Oui.

 20   Q.  Vous avez aussi indiqué que vous ne saviez pas qu'à Badovinci on avait

 21   entraîné des jeunes gens de Bijeljina, mais vous aviez aussi su que trois

 22   hommes de Bijeljina avaient été entraînés dans ce centre d'entraînement

 23   d'Arkan à Erdut. Et vous avez dit qu'il y avait un dénommé Vojkan

 24   Djurkovic, Pero Sarov, Sarov étant son surnom. Est-ce que vous vous

 25   souvenez de la troisième de ces personnes ?

 26   R.  Dans ce centre d'Erdut, bien avant les événements survenus à Bijeljina,

 27   il y a eu trois hommes relativement jeunes qui sont allés dans ce centre

 28   d'entraînement. Partant de quoi ? Je ne sais pas. Il s'agissait d'un Vojkan


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  1   Djurkovic, surnommé Puskar. L'autre était un dénommé Pero, que l'on

  2   connaissait par son surnom de Sarov. Et le troisième était un dénommé

  3   Maletic, dont le surnom était Promaja.

  4   Q.  Monsieur Filipovic, vous avez mentionné lundi le fait qu'Arkan avait

  5   une réputation plutôt mauvaise. On l'avait considéré que c'était un

  6   criminel, et on a dit, au sujet de ses hommes et lui, que bon nombre de

  7   Serbes avaient peur d'eux, et que la totalité des Musulmans avaient peur

  8   d'eux aussi. C'est bien ce que vous nous avez dit, n'est-ce pas ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Monsieur Filipovic, au paragraphe 13 de votre déclaration, vous faites

 11   référence à Arkan, et vous indiquiez que vous ne savez pas comment il est

 12   arrivé à Bijeljina. Toutefois, nous avons pu voir ici, dans le prétoire,

 13   une interview avec ce M. Arkan --

 14   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Et je précise, à l'intention des

 15   Juges, qu'il s'agit de la pièce P02857.

 16   Q.  -- et c'est lui en personne qui a affirmé, je cite, ceci :

 17   "Nous sommes venus ici pour aider la population serbe…"

 18   Puis dans une phrase un peu plus loin, il dit :

 19   "Nous sommes venus suite à une invitation de la part de la TO de la

 20   Semberija et de Bijeljina, à savoir de leur cellule de Crise pour aider le

 21   peuple serbe qui se trouvait être en péril là".

 22   Alors, Monsieur Filipovic, vous avez été commandant de la TO, et Arkan fait

 23   référence ici à une invitation émanant de la Défense territoriale de

 24   Semberija et de Bijeljina. Alors, qui cela pouvait-il être si ce n'est pas

 25   vous ?

 26   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je crois bien que les choses n'ont pas été bien

 27   citées. Il n'a pas dit Semberija et Bijeljina. Il a dit Semberija et

 28   Majevica.


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Fort bien.

  2   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] On pourra placer le texte sur

  3   l'écran. Il s'agit de la pièce P02857. Dans la version anglaise, du moins,

  4   que j'aimerais qu'on nous montre, c'est ce que j'ai vu.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, c'est en B/C/S qu'on dit "Semberija

  6   et Bijeljina". Vous pourrez peut-être tirer la chose au clair avec le

  7   témoin.

  8   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation]

  9   Q.  C'est Arkan qui a parlé de Semberija et Bijeljina. Et ma question pour

 10   vous était celle de savoir si c'était vous qui l'aviez convoqué ou invité ?

 11   Si ce n'est pas vous, qui d'autre cela a-t-il bien pu être du côté de la TO

 12   de Semberija et Bijeljina ?

 13   R.  Mon commandant était un Musulman. Il était le commandant de la TO de la

 14   municipalité de Bijeljina. Moi, j'étais chef du QG; j'étais donc l'homme

 15   numéro deux. Je vous ai déjà dit à l'occasion du récolement qu'il a pu être

 16   invité par les trois soldats à lui que j'ai déjà cités ou alors les

 17   radicaux qui étaient en train d'entrer dans un règlement de comptes pour

 18   venir en aide. Mais je vous répète que ni la TO ni les autorités de la

 19   ville de Bijeljina n'ont invité Arkan pour que celui-ci leur vienne en

 20   aide.

 21   Q.  L'apparition d'Arkan à Badovinci avant qu'il y ait début de conflit,

 22   cela a contribué à la montée des tensions en ville, n'est-ce pas ? Cela a

 23   fait peur aux gens, comme vous nous l'avez dit, en particulier, les

 24   Musulmans avaient peur de lui, n'est-ce pas ?

 25   R.  J'ai dit - et ça, c'est une chose exacte - Arkan, c'était une

 26   personnalité très particulière. Il aimait à se présenter en tant qu'héros

 27   et libérateur. S'agissant de ses déclarations, il y en a eu de toutes

 28   sortes. Il s'est beaucoup vanté. Il a beaucoup vanté ses aptitudes pour ce


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  1   qui était du potentiel qui était le sien à libérer les Serbes. C'était

  2   arbitraire. Ce n'était ni formulé par des instances officielles au niveau

  3   de la TO, pas plus qu'au niveau de la municipalité. Il ne faisait que se

  4   vanter. C'était de la vantardise.

  5   Q.  Je vais vous interrompre. Ma question était celle de vous demander si

  6   son apparition à Badovinci a renforcé les tensions qui étaient déjà

  7   présentes en ville, c'était la question que je vous ai posée. Ai-je eu

  8   raison de le dire ?

  9   R.  Je pense que le séjour à Badovinci n'a pas augmenté les tensions et ça

 10   n'a rien provoqué en ville du tout jusqu'au moment où il est arrivé en

 11   ville.

 12   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] J'aimerais que l'on affiche le

 13   document de la liste 65 ter 40607A, s'il vous plaît.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Filipovic, en attendant que le

 15   document s'affiche, est-ce que vous savez ou est-ce que vous vous souvenez

 16   qui a envoyé ces trois jeunes hommes, y compris Djurkovic et Maletic au

 17   camp d'entraînement d'Erdut d'Arkan, ce camp d'entraînement, donc ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, si vous voulez entendre

 19   mon opinion, c'était la Garde des Volontaires d'Arkan et des jeunes hommes

 20   qui étaient des durs qui voulaient faire partie de son unité, qui étaient

 21   allés là-bas parce qu'ils voulaient faire partie de la défense du peuple

 22   serbe. Mais personne ne les a envoyés là-bas.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Madame Uertz-Retzlaff.

 24   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Oui.

 25   Q.  Donc, il s'agit d'un entretien que vous avez tenu en 1995, et vous vous

 26   souviendrez peut-être que vous avez donné un entretien à un groupe qui

 27   compilait des informations sur des événements historiques. Et ce que vous

 28   mentionnez ici dans ce document, vous mentionnez :


Page 35802

  1   "La tension et l'information concernant Arkan, qui réalise des

  2   formations à Badovinci et ensuite au niveau de la rivière de la Drina à

  3   Popovi [comme interprété], il avait pour objectif d'éviter ou de garder le

  4   contrôle d'importation d'armes, et cette information avait, en fait, fait

  5   empirer à la situation encore plus, ce qui a créé l'incident de la nuit du

  6   31 mars au 1er avril, ce qui a constitué le début de la guerre en ex-Bosnie-

  7   Herzégovine".

  8   Donc, en fait, vous avez dit que ceci avait contribué à ces

  9   événements, n'est-ce pas ?

 10   R.  Eh bien, vous savez, on a dit beaucoup de choses sur Arkan, Arkan étant

 11   un homme dangereux. On disait est-ce que vous avez entendu parler de ceci

 12   et ceci au sujet d'Arkan ? Arkan ceci, Arkan cela. Mais son séjour n'a pas

 13   créé d'incident majeur. Maintenant, est-ce qu'il a eu un impact vraiment

 14   réel sur Semberija et sur la ville de Bijeljina jusqu'aux tirs qui ont

 15   commencé durant la nuit du 31 mars au 1er avril ? Et puis ensuite, il y a

 16   ces histoires disant qu'il était dangereux, qu'il était omnipotent, et

 17   cetera, et cetera, que ses unités étaient des unités d'élite, je suppose,

 18   enfin je suppose que ces témoignages étaient corroborés par le fait qu'il a

 19   été entré dans le territoire. C'était un Fata Morgana pour nous --

 20   Q.  Je vous interromps, Monsieur le Témoin, parce que nous n'avons pas

 21   beaucoup de temps, et je vous ai dit lors de notre entretien que je devrais

 22   vous interrompre si vous rentriez trop dans les détails.

 23   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] J'aimerais maintenant que l'on

 24   affiche la pièce P05475.

 25   Q.  C'est un rapport du général de la JNA, Jankovic, du 4 avril 1992.

 26   Monsieur Filipovic, vous connaissiez le général Jankovic, n'est-ce pas ? En

 27   tant que commandant, vous deviez donc coopérer avec lui, puisqu'il était

 28   commandant, n'est-ce pas ?


Page 35803

  1   R.  Je connaissais le général Jankovic personnellement, et je savais qu'il

  2   y avait un général dont le QG était à Tuzla. C'était le commandant de la

  3   division, et c'est lui qui rédigeait les ordres pendant un certain temps

  4   pour toutes les unités subordonnées.

  5   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Je me suis peut-être mal

  6   exprimée. Je souhaitais que l'on affiche le document qui porte la cote

  7   P05475, qui devait porter la date du 4 avril 1992. Apparemment, c'est

  8   toujours le mauvais document. Je me suis trompée, Monsieur le Président. En

  9   fait, c'est la pièce P05474 et non 75 qu'il nous faut. Voilà, c'est le bon

 10   document.

 11   Q.  Et si vous consultez le point 2 dans le document, le général

 12   Jankovic parle de :

 13   "…l'influence importante du SDS et de la propagande d'Arkan qui se

 14   fait ressentir au sein de la 28e [comme interprété] Division partisane et

 15   au sein du 17e Régiment d'artillerie, ce qui signifie que certains

 16   conscrits ont quitté ses rangs avec leurs armes".

 17   Monsieur Filipovic, en tant que commandant de la TO, vous étiez au

 18   courant de ces problèmes, n'est-ce pas ?

 19   R.  Il y avait des problèmes. La guerre qui a éclaté a été un choc pour

 20   tous, et tout le monde a commencé à soupçonner son voisin. Et cela semble

 21   assez normal, selon moi, d'une certaine manière, parce que ce qui ne serait

 22   pas normal, c'était plutôt les conditions de vie.

 23   Q.  Au point 4, donc un peu plus bas dans ce document, le général Jankovic

 24   mentionne dans la deuxième phrase que :

 25   "La ville de Bijeljina est contrôlée par des hommes du SDS et

 26   d'Arkan…"

 27   Et il mentionne également un peu plus loin que les structures de la

 28   JNA abritent à présent 3 000 réfugiés. Donc ce qu'il dit ici décrit la


Page 35804

  1   situation de l'époque, n'est-ce pas ?

  2   R.  Je ne peux pas faire de commentaire concernant ce chiffre. Je ne sais

  3   pas si quelqu'un a recensé tous ces réfugiés, mais il y avait deux groupes

  4   de réfugiés. Ils se sont réfugiés dans des casernes. Vous en aviez un qui

  5   était à la caserne de Bijeljina et vous avez un groupe plus petit de 500

  6   Musulmans qui ont pris refuge à la caserne de Golo Brdo, qui est environ à

  7   3 kilomètres de Bijeljina. Maintenant, qu'on les appelle des réfugiés ou

  8   pas, c'étaient des personnes qui ont essayé de trouver un refuge pour se

  9   protéger contre des tirs. Mais il y avait également un certain nombre de

 10   Serbes parmi eux. Ils ont essayé, donc, de se mettre en sécurité dans ces

 11   casernes.

 12   Q.  Monsieur Filipovic, lorsque nous avons eu notre audition lundi, vous

 13   avez dit que vous avez rencontré Arkan à trois reprises, et vous nous avez

 14   dit que votre première rencontre s'est tenue dans la soirée du 3 avril 1992

 15   durant une réunion d'information au sein de la caserne de la JNA, réunion à

 16   laquelle ont également participé Dragan Andjelic, président du Comité

 17   exécutif; Milan Novakovic; Novica Simic; et Dragisa Makum [phon]. Et vous

 18   avez dit que durant cette rencontre --

 19   R.  Dragisa Masal. C'était le commandant Dragisa Masal.

 20   Q.  Merci. Et vous avez également dit qu'à ce moment-là, Arkan a demandé

 21   sans ambages la prise de contrôle de la caserne pour que cette caserne soit

 22   sous le contrôle de lui et de ses hommes. C'est ce qu'il vous a dit, n'est-

 23   ce pas ?

 24   R.  Oui. Arkan voulait que le centre d'entraînement passe d'Erdut à

 25   Bijeljina, et étant donné que la caserne à Bijeljina faisait tout à fait

 26   l'affaire, il a dit qu'il voulait en fait que les commis, c'est-à-dire les

 27   communards, les officiers communistes, quittent ces locaux et qu'on prenne

 28   le contrôle de cette caserne et qu'on libère le peuple serbe de cette


Page 35805

  1   menace de guerre.

  2   Q.  La deuxième rencontre avec Arkan, vous nous avez dit, a eu lieu le

  3   lendemain dans le bâtiment municipal durant une réunion avec les autorités

  4   locales durant laquelle Arkan a encore une fois exigé qu'ils prennent le

  5   contrôle de la caserne et il a fait énormément pression sur Zlavko Jokovic.

  6   Pourriez-vous nous dire quel poste occupait M. Jokovic à l'époque ?

  7   R.  M. Jokovic, à l'époque, était président de la municipalité de

  8   Bijeljina. Lorsque Arkan n'est pas arrivé à ses fins, c'est-à-dire à

  9   reprendre le contrôle de la caserne des militaires, il a essayé de demander

 10   cela auprès des autorités civiles et il a fait énormément pression sur le

 11   président de la municipalité, et quelqu'un a informé le président Karadzic

 12   de ce qui se passait à Bijeljina. Donc la réunion a été interrompue et

 13   Zlavko Jokovic est ensuite revenu en transpirant, en disant : "Je ne sais

 14   pas vraiment quoi faire. Le président ne va pas permettre que ceci se

 15   passe. Et si je ne prends pas ces mesures, Arkan va m'éxécuter."

 16   Après quelques instants, suite à cette exigence de prendre le contrôle de

 17   la caserne, je crois que le président Karadzic a limogé le président de la

 18   municipalité de Bijeljina parce qu'il essayait d'être en coopération avec

 19   des structures non militaires ou paramilitaires.

 20   Q.  D'accord. Merci. Une autre remarque. Le même jour, Mme Plavsic est

 21   également arrivée à Bijeljina et faisait partie donc de la délégation. Est-

 22   ce que vous étiez présent lors de son arrivée ou pas ?

 23   R.  La délégation a été envoyée par la présidence de Bosnie Herzégovine et

 24   était composée de Biljana Plavsic, Fikret Abdic, ainsi que le ministre de

 25   la Défense. Je n'étais pas présent.

 26   Q.  C'est la seule chose que je vous demandais, si vous étiez présent ou

 27   pas. Merci. Durant cette audition que nous avons eue avec vous lundi, vous

 28   avez dit qu'Arkan est reparti le 6 avril, mais son colonel qui s'appelait


Page 35806

  1   Pejo est resté sur place après le départ d'Arkan, n'est-ce pas ?

  2   R.  De temps en temps, effectivement, Pejo restait à Bijeljina, et un

  3   groupe d'autres hommes également restait sur place à Bijeljina.

  4   Q.  Monsieur Filipovic, vous avez également parlé de la troisième fois que

  5   vous avez rencontré Arkan et vous avez dit que c'était en septembre 1992,

  6   lorsque vous étiez déjà membre de la 2e Brigade légère de Semberija de la

  7   VRS et que vous étiez déployé le long de la ligne de front entre le village

  8   musulman de Celik et le village serbe de Bobeta Brdo dans la région de

  9   Brcko. Et vous nous avez dit qu'Arkan et ses hommes étaient arrivés de la

 10   municipalité de Lopare et voulaient en fait riposter suite à une attaque

 11   qui avait eu lieu contre le village serbe de Miroslavci, et il a exigé que

 12   vous et votre unité fassent partie de cette attaque contre Celik. Et vous

 13   avez également dit qu'il avait mentionné : Essayez de prendre tous les

 14   butins que vous pourrez prendre durant l'attaque.

 15   Est-ce que ceci résume bien ce que vous nous avez dit ?

 16   R.  Oui. Il a lancé une attaque contre Celik. Lorsqu'il est venu parler à

 17   mon unité, l'attaque avait déjà commencé. Il a demandé notre soutien, mais

 18   nous n'avions pas d'accord de notre commandant de corps, c'est-à-dire de

 19   nos instances supérieures. Mais il nous a simplement forcés à nous rendre à

 20   Celik, et à cette occasion nous avons exfiltré trois de ses soldats qui

 21   étaient morts et 16 de ses soldats qui avaient été blessés. C'est là que le

 22   contact s'est terminé.

 23   Q.  Merci.

 24   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait maintenant

 25   afficher le document de la liste 65 ter 0844 [sic].

 26   Q.  Ceci nous ramène à la période du début du mois d'avril 1992 à Bijeljina

 27   lorsque vous étiez encore au sein de la TO. En attendant que ce document

 28   s'affiche, il s'agit d'un autre rapport du 17e Corps de la JNA, un rapport


Page 35807

  1   du général Jankovic, qui porte la date du 7 avril --

  2   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Non, encore une fois, ça semble être

  3   le mauvais document. Encore une fois, ce n'est pas le bon document. Est-ce

  4   que j'ai donné le mauvais numéro ? C'était le document de la liste 65 ter

  5   08441.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Filipovic, est-ce que vous êtes

  7   devenu le commandant de la TO à un moment donné ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

  9   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] C'était en fait le commandant en

 10   second.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] C'était Gavrilovic qui a été nommé commandant.

 12   Moi, j'étais commandant en second.

 13   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Oui, je suis désolée, il n'était que

 14   commandant en second. Il n'était pas commandant. Je me suis mal exprimée,

 15   Monsieur le Président.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 17   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Nous avons maintenant le bon

 18   document.

 19   Q.  Au point 2, si vous regardez donc le point 2, le général Jankovic parle

 20   encore une fois des problèmes de mobilisation et mentionne que la cellule

 21   de Crise de Bijeljina ne permettrait pas cette mobilisation. Ils exigeaient

 22   que la 17e Brigade d'anti-artillerie soit rebaptisée la Brigade de

 23   Semberska et qu'elle devrait avoir une influence directe sur la nomination

 24   des officiers supérieurs.

 25   Est-ce que vous vous souvenez de cette situation, Monsieur Filipovic

 26   ?

 27   R.  Je pense que le général essaie de se justifier ici, mais il est vrai

 28   que la présidence de la municipalité de Bijeljina a nommé trois hommes au


Page 35808

  1   début du mois d'avril 1992 parce que rien d'autre ne fonctionnait.

  2   Q.  Et vous parlez ici de la cellule de Crise de Bijeljina ? Parce que M.

  3   Jankovic, ici, parle de la cellule de Crise de Bijeljina. Que veut-il dire

  4   ?

  5   R.  Non. Je crois que le général s'est mal exprimé. La présidence de la

  6   municipalité de Bijeljina a nommé Gavrilovic, Filipovic et Andric comme

  7   l'équipe de commandement de la Défense territoriale pendant la guerre, mais

  8   pas comme membres de la cellule de Crise. Parce que moi, je n'aurais jamais

  9   été membre de cette équipe si ça avait été le cas. Ils ne m'auraient jamais

 10   nommé.

 11   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Peut-on verser ce document au

 12   dossier.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 14   M. LE GREFFIER : [interprétation] Document 6214.

 15   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Monsieur le Président --

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je crois que le témoin a dit qu'il ne faisait

 17   pas partie du SDS.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne faisais pas partie du SDS,

 19   effectivement.

 20   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Je n'ai pas dit cela. Est-ce que j'ai

 21   dit qu'il était membre du SDS ?

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, non --

 23   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Jamais.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] -- c'est probablement le témoin qui a

 25   dit cela.

 26   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] D'accord.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous confirmez que vous avez

 28   dit cela ?


Page 35809

  1   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai dit que je n'étais pas membre, que je ne

  2   faisais pas partie du SDS.

  3   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Monsieur le Président, je suis

  4   consciente du temps qui passe, mais j'ai encore besoin d'un peu plus de

  5   temps et j'ai besoin de parler d'un point précis concernant Arkan parce que

  6   je sais qu'il y a d'autres déclarations concernant des faits jugés qui sont

  7   liés à ses soldats et qui sont remises en question. Et, par conséquent,

  8   j'aurais peut-être besoin d'environ encore 20 minutes.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pouvez-vous essayer de terminer avant la

 10   pause, c'est-à-dire dans 15 minutes ?

 11   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Oui, je vais essayer de le faire.

 12   Q.  Monsieur Filipovic, au paragraphe 20 de votre déclaration, vous avez

 13   fait référence à un bataillon de la VRS commandé par Pasaga Halilovic, un

 14   Musulman. Vous avez parlé de cela déjà aujourd'hui.

 15   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Et il faut maintenant qu'on passe à

 16   huis clos partiel, Monsieur le Président, puisque j'aimerais parler de

 17   moyens de preuve confidentiels.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 19   [Audience à huis clos partiel]

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 17   [Audience publique]

 18   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation]

 19   Q.  Monsieur Filipovic, au paragraphe 14 de votre déclaration, vous

 20   décrivez la situation qui prévalait à Janja en avril 1992, vous avez parlé

 21   de cela ce matin, et vous avez également dit qu'à l'époque il était

 22   possible d'éviter la tragédie. Pourtant, les Musulmans ont été expulsés de

 23   Janja en 1994, n'est-ce pas, précisément en août et en septembre 1994 ?

 24   Vous étiez au courant de cela, n'est-ce pas ?

 25   R.  Je sais qu'un grand nombre de Musulmans de Janja ont demandé de partir,

 26   et je suppose qu'un certain nombre d'entre eux ont été expulsés de ce

 27   territoire de Janja. Janja avait beaucoup de réfugiés qui étaient arrivés

 28   de la Bosnie centrale, des réfugiés serbes. Et les tensions à Janja étaient


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  1   palpables. Donc il y avait plusieurs raisons pour ce qui est du départ des

  2   Musulmans, il y avait des Musulmans qui voulaient partir et il y avait

  3   également des Musulmans qui ont été forcés à partir, mais non pas de la

  4   part du MUP de la Republika Srpska ou de la part de l'armée de la Republika

  5   Srpska, non.

  6   Q.  Est-ce que c'est encore une fois Vojkan, que vous avez mentionné, qui

  7   était responsable de cela ?

  8   R.  Vojkan a été jugé pour ce qu'il a fait. Il y a eu des Musulmans qui

  9   étaient témoins lors de ce procès au pénal. Mais ce procès au pénal a été

 10   interrompu, à savoir Vojkan Djurkovic a été libéré par rapport aux chefs

 11   d'accusation disant qu'il avait expulsé des Musulmans. Et ce jugement a été

 12   rendu en Bosnie-Herzégovine.

 13   Q.  J'aimerais maintenant vous poser des questions par rapport à un dernier

 14   sujet, Monsieur Filipovic, par rapport à ce que vous nous avez dit lundi, à

 15   savoir le 3 mai 1992, Mauzer, sur une place publique à Bijeljina, en

 16   utilisant des porte-voix, a invité la population à libérer Brcko, et vous

 17   nous avez dit qu'il y avait 12 autocars à bord desquels il y avait des gens

 18   qui sont partis de Brcko. Il y avait des hommes de Mauzer parmi ces

 19   personnes, il y avait des hommes de Gavrilo, des membres de la TO et du

 20   MUP. Et j'aimerais vous poser la question suivante : vous n'êtes pas parti

 21   vous-même à ce moment-là, ou bien vous avez rejoint ces gens qui sont

 22   partis ?

 23   R.  Non. Cette colonne est partie le 3 mai à l'appel des habitants de Brcko

 24   pour aider à libérer l'hôpital, le dispensaire qui était en flammes, ainsi

 25   que la voie de communication. Et quant à moi, je suis parti à Brcko le 6

 26   mai pour m'acquitter d'une tâche qui m'avait été confiée, donc c'était

 27   trois jours plus tard par rapport au départ de la colonne.

 28   Mme UERTZ-RETZLAFF : [interprétation] Peut-on maintenant afficher la pièce


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  1   P02889 à nos écrans, et j'espère que le bon document sera affiché cette

  2   fois. Il s'agit du rapport extraordinaire du 29 septembre 1992 qui a été

  3   envoyé par le capitaine Cutoric. Oui, c'est le bon document. Le document a

  4   été envoyé du commandement du Corps de la Bosnie orientale. Dans ce

  5   document sont décrites les activités à Brcko. Et le document est envoyé à

  6   l'état-major principal de la VRS.

  7   Q.  Si vous regardez le premier plus grand paragraphe, où il est dit :

  8   "Il y avait des individus de différents types de 'patriotes' qui affluaient

  9   dans la ville qui voulaient combattre pour 'la cause serbe' et qui ont

 10   commis des pillages, des viols et il y avait également des meurtres

 11   arbitraires."

 12   Ensuite, il est dit :

 13   "Il y avait des groupes qui étaient venus et qui étaient soutenus par les

 14   autorités militaires et civiles à l'époque. Et là, nous faisons référence

 15   aux responsables de Bijeljina qui, au début de la guerre, ont rassemblé 550

 16   'combattants'. Il y avait des hommes de Mauzer et du commandant Gavrilovic,

 17   des hommes d'Arkan commandés par Peja et les autorités civiles de

 18   Bijeljina."

 19   Monsieur Filipovic, pour ce qui est du commandement de votre corps,

 20   puisque vous étiez membre de ce corps, il a décrit les activités des unités

 21   de Bijeljina, n'est-ce pas ?

 22   R.  Le fait est que le front à Brcko était un front difficile, et

 23   hormis les unités régulières du MUP et de l'armée à Brcko venaient des

 24   petits groups d'individus qui, de façon arbitraire, créaient des problèmes

 25   et ternissaient la réputation du MUP et de l'armée. Nous ne disposions pas

 26   de suffisamment de forces pour protéger la ville de Brcko par rapport à ces

 27   groupes violents qui arrivaient de je ne sais pas quelle région, et je ne

 28   sais pas vers quelles autres régions ils partaient. Un tel groupe


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  1   s'appelait "les hommes d'Obilic" et ces hommes sont arrivés du Kosovo. Un

  2   autre groupe était le groupe d'hommes de Zika Crnogorac. Il s'agissait des

  3   groupes auto-organisés qui étaient venus en tant que volontaires pour aider

  4   les Serbes, et en fait il s'agissait d'hommes qui étaient venus uniquement

  5   pour piller.

  6   Q.  Un dernier document, Monsieur Filipovic, que je voudrais vous montrer,

  7   porte la cote P02855. Cela devrait être le document qui est affiché à

  8   l'écran. Il s'agit du rapport du commandement du 1er Corps de la Krajina qui

  9   a été envoyé à l'état-major principal de la VRS, et la date devrait être le

 10   13 août 1992. Il ne s'agit pas du bon document…

 11   R.  Non.

 12   Q.  En fait, oui. C'est le bon document. Il s'agit du 28 -- oui. Oui, c'est

 13   le bon document. La date est le 28 juillet 1992. Ce document émane du

 14   colonel Zdravko Tolimir, et si vous regardez le premier paragraphe, dans ce

 15   paragraphe, il parle de différents groupes, tels que les hommes d'Arkan, de

 16   Seselj, les commandos du capitaine Dragan, et cetera. Ensuite, dans le

 17   paragraphe suivant, il parle de leurs caractéristiques principales en

 18   disant qu'il s'agit des hommes qui n'ont pas des qualités morales. Ensuite,

 19   il dit que beaucoup de membres de ces formations montrent la haine envers

 20   les non-Serbes, et ensuite, je cite, il dit :

 21   "On peut conclure sans aucune réserve qu'il s'agit des éléments

 22   génocidaires du peuple serbe."

 23   Ensuite, dans la ligne suivante, il fait référence à des pillages.

 24   Monsieur Filipovic, il s'agit d'une description juste de la conduite

 25   des unités mentionnées par M. Tolimir dans ce document ?

 26   R.  Il y a eu de telles situations, de telles conduites. Ces groupes

 27   de faux patriotes étaient enclins à faire des pillages, et des hommes

 28   honnêtes se sont présentés aux unités militaires, et mis à part la police


Page 35814

  1   militaire, la police du MUP et d'autres unités, il y avait également de

  2   tels individus par rapport auxquels on ne pouvait pas protéger la

  3   population. La 2e Brigade de Semberija, pendant quatre mois, avait une

  4   compagnie de la police militaire à Janja pour protéger la population de

  5   Janja des pillages de tels groupes au début de la guerre.

  6   Je ne sais pas comment vous expliquer tout cela, mais je pense qu'il

  7   s'agit des chiens de la guerre qui participent à la guerre pour piller, et

  8   ils n'aidaient aucun peuple, et moins la peuple serbe. Ils n'étaient que

  9   les membres des groupes paramilitaires, des groupes qui se livraient aux

 10   pillages.

 11   Q.  Monsieur Filipovic, maintenant j'aimerais qu'on affiche la page 5 dans

 12   les deux versions de ce document. Comme on peut voir ici - et c'est à peu

 13   près au milieu de la page dans les deux versions - que le colonel Tolimir

 14   fait référence à Bijeljina. Encore une fois, je vais citer ce qu'il dit :

 15   "La Garde nationale serbe à Bijeljina a rejoint la soi-disant Brigade

 16   spéciale de façon formelle. La Garde nationale serbe a été formée par le

 17   SDS de Bijeljina, et la présidence de l'assemblée municipale de Bijeljina a

 18   décidé que c'est l'armée de Bijeljina qui allait défendre Bijeljina, au cas

 19   où une attaque serait lancée, et le commandant Ljubisa Savic, surnommé

 20   Mauzer, sera nommé commandant de cette unité."

 21   Ensuite il a dit :

 22   "Derrière la garde se trouve la plupart des autorités municipales de

 23   Bijeljina, qui la soutiennent toujours."

 24   Monsieur Filipovic, encore une fois, M. Tolimir a donné une évaluation pour

 25   ce qui est du rôle de Mauzer, et il avait raison pour ce qui est de cette

 26   évaluation ?

 27   R.  Le colonel Tolimir travaillait pour l'organe de la sécurité, et Mauzer

 28   et la garde faisaient partie du 3e Corps. Entre eux, il y a eu des


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  1   incompréhensions et de l'animosité, mais le corps était supérieur par

  2   rapport à la Garde de Bijeljina. Il y a eu des malentendus, c'est probable,

  3   mais mineurs, et ils étaient subordonnés au commandement du corps.

  4   Q.  Lorsqu'on a parlé lundi, lors de cette séance de récolement, vous avez

  5   dit que Mauzer, au début, pouvait être vu dans les bureaux du SDS lorsque

  6   le colonel Tolimir a dit que la Garde nationale serbe a été formée par le

  7   SDS de Bijeljina, cela devrait être exact, n'est-ce pas ?

  8   R.  La Garde nationale serbe a été créée par Ljubisa Savic, surnommé

  9   Mauzer, comme une sorte de contrepoids à Zeljko Raznatovic, Arkan, pour

 10   qu'il puisse disposer de sa propre garde pour que la garde d'Arkan parte de

 11   Bijeljina et pour que sa garde à lui reste pour défendre Bijeljina. Ljubisa

 12   Savic, Mauzer, a essayé en appliquant une discipline sévère, et puisqu'il

 13   était têtu, il a essayé de jouer le rôle de la garde d'Arkan, et de se

 14   faire présenter en tant que quelqu'un qui défendait le peuple serbe seul.

 15   Q.  Ma dernière question pour vous, Monsieur Filipovic : cette brigade

 16   spéciale, la Garde nationale serbe également assurait l'escorte de M.

 17   Karadzic et de M. Krajisnik lorsqu'ils se rendaient à Bijeljina ou

 18   lorsqu'ils passaient par Bijeljina pour aller à Belgrade; est-ce vrai ?

 19   R.  Je ne dispose pas de cette information. Je ne le sais pas.

 20   Q.  Monsieur le Président, je n'ai pas d'autres questions à poser à M.

 21   Filipovic.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] De moi-même, j'ai l'impression que les

 23   parties pourraient éventuellement dégager des faits convenus, par exemple

 24   sur les paramilitaires, et donc quelques questions, on aurait pu s'en

 25   dispenser.

 26   Nous allons faire une pause de 45 minutes, et nous reviendrons à 13 heures

 27   20.

 28   --- L'audience est levée pour le déjeuner à 12 heures 35.


Page 35816

  1   --- L'audience est reprise à 13 heures 23.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Jusqu'à la fin de notre audience

  3   d'aujourd'hui, nous allons siéger en vertu de l'article 15 bis, le Juge

  4   Morrison étant absent.

  5   Oui, Monsieur Robinson.

  6   M. ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Si je puis vous

  7   présenter Zygimantas Juska, l'un de nos stagiaires de Lituanie qui sera

  8   avec nous pendant cette audience.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Karadzic, avez-vous des

 10   questions à poser à ce témoin ?

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Quelques-unes simplement, pour élucider deux ou

 12   trois choses.

 13   Nouvel interrogatoire par M. Karadzic :

 14   Q.  [interprétation] Lorsque vous parlez de mésentente entre les civils et

 15   les structures militaires, pourriez-vous nous dire quelle en était la

 16   raison ?

 17   R.  Monsieur Karadzic, je crois que parallèlement à la guerre qui se

 18   déroulait en Bosnie-Herzégovine il y avait également une guerre civile, et

 19   que les autorités nouvellement élues étaient anticommunistes et les

 20   officiers de l'ex-JNA, de l'ex-Yougoslavie, étaient principalement des

 21   communistes, et donc il y avait une certaine dissension entre l'idéologie

 22   de l'ex-système communiste et du nouveau système fondé sur les ethnies et

 23   la nouvelle préemption des questions en Bosnie-Herzégovine. Je crois que

 24   c'était là absence de confiance. Que les communistes appuient un groupe

 25   ethnique ou d'autres, l'on estimait que les communistes avaient tendance à

 26   agir différemment dans des situations pourtant analogues. Et c'était, à mon

 27   sens, là l'objet même de cette mésentente.

 28   Q.  Merci.


Page 35817

  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pourrions-nous afficher maintenant le document

  2   P02855, c'est-à-dire l'afficher à nouveau. Merci.

  3   M. KARADZIC : [interprétation]

  4   Q.  Je vais essayer de vous lire un extrait du document, mais la police

  5   d'imprimerie est assez petite : 

  6   "Personne dans les formations paramilitaires n'a exprimé son affiliation

  7   par rapport au parti politique au pouvoir, le SDS. Au contraire, la plupart

  8   d'entre eux ont les insignes politiques de partis d'opposition de la

  9   Serbie, le SPO, le SNS…," et cetera.

 10   En quoi ces informations correspondent-elles, ainsi que l'évaluation donnée

 11   par le colonel Tolimir, par rapport à ce que vous savez de l'appartenance

 12   au parti de ces paramilitaires ?

 13   R.  Je crois que la sécurité militaire avait différentes façons de

 14   surveiller et de soupeser la conduite des groupes et des unités militaires

 15   ainsi que des organes, et dans ces rapports, ce sont ces évaluations qui

 16   sont souvent exprimées. Les formations paramilitaires, principalement de

 17   Serbie - je l'ai mentionné, l'une d'entre elles du Kosovo - ne sont pas

 18   arrivées, influencées par une idéologie, ni communiste, ni l'autre. Je

 19   crois qu'elles sont venues pour "aider" les Serbes, et, en fait, ils sont

 20   venus pour en tirer un gain pécuniaire et pour les pillages. C'est pourquoi

 21   la direction militaire - principalement, je veux dire, le commandement du

 22   3e Corps ainsi que les autorités municipales, et en particulier je

 23   soulignerais la direction de l'Etat, c'est-à-dire votre rôle et le rôle du

 24   général Mladic également, pour se débarrasser de ces formations

 25   paramilitaires qui ont été une nuisance non seulement pour l'armée mais

 26   également pour les habitants ainsi que la sphère politique.

 27   Q.  Merci. Nous n'avons pas besoin de ce document.

 28   Page 62 au compte rendu aujourd'hui, on vous a posé des questions sur


Page 35818

  1   les expulsions de Janja et de Vojkan. Vous avez dit que ce dernier avait

  2   été libéré et que les Musulmans avaient témoigné lors de son procès, les

  3   Musulmans de Bijeljina. Je n'ai pas compris s'il s'agissait également de

  4   Musulmans de Janja. Pourriez-vous nous dire : ces témoins, ces Musulmans

  5   qu'il emmenait dans l'autre partie du pays, ont témoigné lors du procès ?

  6   R.  Ils ont témoigné au nom de Vojkan Djurkovic, surnommé Puskar, parce

  7   qu'ils estimaient qu'il les avait aidés dans des conditions difficiles pour

  8   sortir du territoire de Bosnie et que la situation serait beaucoup plus

  9   facile pour eux à cet endroit. Alors, pour quitter Janja, il n'y a pas eu

 10   de pressions politiques à l'exception d'un grand nombre de Serbes qui

 11   étaient arrivés dans un lieu déjà habité appelé Janja. J'ai des

 12   informations selon lesquelles de 28 municipalités de l'ex-Bosnie-

 13   Herzégovine, des Serbes sont arrivés à Janja. Donc il y avait différentes

 14   coutumes, différentes habitudes, différentes mœurs qui se trouvaient, et

 15   tout autre, en un même lieu. Quelque 10 000 réfugiés à Janja et 10 000

 16   habitants du cru dans un espace relativement limité dans des conditions de

 17   vie très difficile, sans avoir suffisamment d'eau, de nourriture, sans

 18   avoir suffisamment d'espace, et cetera, ce qui a rendu les conditions de

 19   vie absolument insupportables.

 20   Et c'est pour la même raison que j'ai des informations, et je pense

 21   que c'est vrai, que le juriste de Tuzla avait présenté à Vojkan - il était

 22   Bosniaque, un Musulman, Pasic - il voulait présenter à Vojkan la liste de

 23   personnes qui devaient être emmenées aux lieux ordinaires pour les échanges

 24   réalisés par les armées. Donc ils devaient y être amenés parce qu'ils

 25   seraient échangés sur place, c'est-à-dire qu'ils seraient amenés à Tuzla et

 26   remis entre les mains de leurs compatriotes.

 27   Et je pense que le gros des témoins qui ont témoigné pour

 28   Vojkan venaient de ce lieu, c'est-à-dire de ce lieu Janja, et après avoir


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  1   été relâché, il s'est vanté dans Janja qu'il n'avait rien fait et que les

  2   témoins avaient témoigné et qu'il avait déclaré qu'il les avait aidés.

  3   Q.  Merci. Qu'en est-il de Pasaga Halilovic et les quelques personnes parmi

  4   les 50 personnes ou autres qui étaient incluses mais qui ne souhaitaient

  5   pas partir ?

  6   R.  Je ne connais pas les détails. Je sais certainement que Pasaga

  7   Halilovic était à la tête du bataillon de l'armée musulmane qui luttait

  8   dans le cadre du Corps de la Bosnie orientale de la 3e Brigade de Semberija

  9   dans la région de Posavina, et qu'ils étaient loyaux. C'est-à-dire qu'ils

 10   avaient répondu à l'appel sans uniforme, qu'ils avaient mis en place un

 11   uniforme et que l'officier de réserve, un colonel, se trouvait à la tête de

 12   cette unité. Et la direction municipale et les officiers du commandement du

 13   corps ont été horrifiés, et l'on ne savait pas -- enfin, bref, je vous

 14   dirais qu'ils regrettaient que ce se soit passé ainsi. Et la méthode qui a

 15   été utilisée pour les emmener sur place, c'est quelque chose que j'ignore.

 16   Q.  Merci. Savez-vous s'ils ont été rendus ou si M. Halilovic est encore en

 17   vie aujourd'hui ?

 18   R.  Je ne sais pas où il se trouve à l'heure actuelle, mais je sais que

 19   l'un de ses frères était professeur à l'école d'agriculture et qu'il est

 20   encore membre de cette unité et qu'il habite à Bijeljina. En ce qui

 21   concerne Pasaga, je ne sais pas s'il se trouve dans la Fédération. Il était

 22   responsable de la municipalité de Bijeljina. Il était également directeur

 23   de certaines d'entreprises, et cetera.

 24   Q.  Merci. Qui a remplacé Pasaga Halilovic au poste de commandant de

 25   bataillon ?

 26   R.  Lorsqu'il y a eu des Serbes et des Musulmans -- je ne suis pas sûr en

 27   ce qui concerne les Musulmans, mais pour les Serbes un événement

 28   malheureux. C'était quelque chose, si je puis me permettre, qui n'était pas


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  1   inhabituel ou pas anormal pour les Serbes. Mujica Jahic a été mené à ce

  2   poste. A cette période, il était le directeur des eaux et des égouts à

  3   Bijeljina et il était également officier de réserve, il remplaçait Mujica

  4   Jahic à ce poste, et il a dirigé cette unité jusqu'à la fin de la guerre.

  5   Q.  Je peux présumer de son groupe ethnique, mais d'autres participants au

  6   procès ne peuvent être jugés par leurs noms. Pourriez-vous nous dire quelle

  7   était son appartenance ethnique ?

  8   R.  Mujica était Musulman. Il est sans doute Bosniaque aujourd'hui.

  9   Q.  Merci. Vous avez vu également plusieurs documents qui étaient signés de

 10   la main du général Jankovic. Où se trouvait le siège ou son quartier

 11   général, ou plutôt, à l'époque où il a présenté ses appréciations sur les

 12   événements de Bijeljina ?

 13   R.  Le général Jankovic était le commandant et il avait son quartier

 14   général à Tuzla, et tous les événements à Bijeljina et dans les régions

 15   avoisinantes ainsi que la tentative de déplacer la garnison de Tuzla sous

 16   la direction du général Jankovic et les événements à Brcanska Malta étaient

 17   des tentatives à cet effet pour pouvoir délivrer certains ordres. Mais ne

 18   parlons pas de cela. Par exemple, pour mobiliser l'unité et se saisir de la

 19   rive gauche de la Drina, ce qui était absurde. Ou, par exemple, je ne

 20   saurais juger des filières par lesquelles le général Jankovic avait obtenu

 21   cette information, sans doute par l'intermédiaire des organes de sûreté et

 22   du renseignement. Toutefois, il me semble également qu'ils se sont assurés

 23   de la situation de façon peut-être unilatérale et qu'ils en ont ensuite

 24   fait rapport à leur supérieur pour que le général Jankovic - et je

 25   l'affirme et je prends la responsabilité de mes affirmations - il ne

 26   disposait pas d'information 100 % exacte venant du territoire.

 27   Q.  Merci. Pour autant que vous sachiez, est-ce que le SDS a pris part aux

 28   combats qui se sont tenus en avril 1992 ?


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  1   R.  Le SDS est un parti politique et n'a certainement pas pris part à la

  2   chose du point de vue militaire. Toutefois, le siège du conseil municipal

  3   de Bijeljina a servi de site de rassemblement pour l'armée, et cetera.

  4   Donc, des membres du SDS sont allés au front, mais pas en qualité d'unité

  5   ou d'unité politique ni d'instance politique, mais à titre de membres d'une

  6   unité militaire. Donc, Monsieur le Président, leur affiliation politique

  7   était une chose, et leur engagement militaire était un élément tout à fait

  8   différent. Il n'y a pas eu d'unité de créée sur le territoire de Bijeljina

  9   à titre politique.

 10   Q.  Merci. Monsieur le Témoin, je n'ai plus de questions pour vous. Merci

 11   d'être venu témoigner, et merci d'avoir été un représentant officiel de la

 12   Republika Srpska tout à fait correct, bien que vous n'avez pas été membre

 13   du SDS.

 14   R.  Je vous remercie aussi.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. Ceci met un terme à votre

 16   témoignage, Monsieur Filipovic. Au nom des Juges de la Chambre, je tiens à

 17   vous remercier d'être venu à La Haye pour le fournir. Maintenant, vous êtes

 18   libre de vous en aller.

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie également en votre qualité de

 20   Chambre, et je remercie le Tribunal de La Haye pour rechercher à déterminer

 21   la vérité et la justice.

 22   [Le témoin se retire]

 23   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je voudrais que le témoin prononce le

 25   texte de la déclaration solennelle.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 27   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 28   LE TÉMOIN : DUSAN SPASOJEVIC [Assermenté]


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  1   [Le témoin répond par l'interprète]

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur Spasojevic. Veuillez

  3   vous asseoir et vous mettre à l'aise.

  4   Je suppose que vous m'entendez dans une langue que vous comprenez, Monsieur

  5   Spasojevic ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avant que vous ne commenciez à

  8   témoigner, Monsieur Spasojevic, je dois attirer votre attention sur une

  9   règle de ce Règlement de procédure et de preuve qui est le nôtre, il s'agit

 10   de l'article 90(E). Et en application de cet article, vous pouvez faire

 11   objection pour ce qui est de répondre à une question posée par M. Karadzic,

 12   par l'Accusation, et même par les Juges si vous estimez que vos réponses

 13   seraient susceptibles de vous incriminer au titre d'un délit au pénal. Dans

 14   ce contexte, "incriminer" ça veut dire que vous pourriez dire une chose et

 15   qui vaudrait à une reconnaissance de culpabilité pour ce qui est d'un délit

 16   au pénal ou dire quelque chose qui serait un élément de preuve qui

 17   indiquerait que vous avez commis un délit au pénal. Toutefois, dans le cas

 18   où vous estimerez que cette réponse serait susceptible de vous incriminer,

 19   et en guise de conséquence vous veniez à répondre que vous ne vouliez pas

 20   apporter de réponse, je tiens à vous dire que le Tribunal a l'autorité de

 21   vous contraindre à répondre à la question quand même. Mais dans ce cas de

 22   figure, le Tribunal s'assurera à ce que ce témoignage fourni en de telles

 23   circonstances ne vienne pas à être utilisé dans une procédure qui pourrait

 24   être entreprise à votre égard, exception faite du délit qui serait celui

 25   d'un faux témoignage de votre part.

 26   Est-ce que vous comprenez ce que je viens de vous dire, Monsieur Spasojevic

 27   ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

  2   Oui, Monsieur Karadzic, je vous prie de commencer.

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

  4   Interrogatoire principal par M. Karadzic :

  5   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Spasojevic.

  6   R.  Bonjour, Monsieur le Président.

  7   Q.  Je vous demande de faire des pauses entre mes questions et vos

  8   réponses, ou mes phrases et les vôtres, et les phrases, nous devrons les

  9   prononcer sans hâte, afin que tout soit consigné au compte rendu.

 10   Est-ce que vous avez fourni une déclaration aux membres de mon équipe de la

 11   Défense ?

 12   R.  Oui.

 13   Q.  Merci.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais qu'on nous affiche au prétoire

 15   électronique la pièce 1D7946.

 16   M. KARADZIC : [interprétation]

 17   Q.  Voyez-vous sur l'écran le texte de la déclaration que vous avez faite ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Merci. Est-ce que vous l'avez relue, cette déclaration, et signée ?

 20   R.  Oui.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Puis-je demander à ce que l'on affiche pour le

 22   témoin la dernière page du texte de cette déclaration afin qu'il

 23   reconnaisse la signature qui s'y trouve.

 24   M. KARADZIC : [interprétation]

 25   Q.  Est-ce bien votre signature, Monsieur ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Merci. Est-ce que ladite déclaration reproduit fidèlement les propos et

 28   les renseignements que vous avez fournis, ou conviendrait-il de rectifier


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  1   quelque chose ?

  2   R.  On y a bien repris ce que j'ai dit.

  3   Q.  Merci. Si aujourd'hui je venais à vous poser les mêmes questions que

  4   celles qui vous ont été déjà posées auparavant, est-ce que les réponses

  5   apportées par vous seraient en substance les mêmes ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Merci.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Excellences, je demande le versement au dossier

  9   de cette pièce. Et il y a un paragraphe que j'aimerais aborder viva voce

 10   parce que ça n'a pas été traduit.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Y a-t-il des objections, Madame

 12   Gustafson, pour ce qui est du texte de la déclaration ?

 13   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Non, Madame, Messieurs les Juges.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ce sera versé au dossier.

 15   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce à conviction

 16   D3141, Madame, Messieurs les Juges.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez continuer, Monsieur Karadzic.

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci, Excellence. Je me propose à présent de

 19   donner lecture du résumé de la déclaration de M. Dusan Spasojevic en langue

 20   anglaise.

 21   Dusan Spasojevic est né --

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, allez-y.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Excusez-moi, pour ce qui est des interprètes.

 24   Je m'excuse auprès d'eux.

 25   Dusan Spasojevic est né le 23 octobre 1958, à Bijeljina, et réside

 26   présentement au village de Dazdarevo. Il était inspecteur de la police

 27   criminelle au poste de sécurité publique de Bijeljina. Dusan Spasojevic et

 28   ses collègues ont obtenu des informations du domaine du renseignement


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  1   indiquant de façon claire que ces dissensions ethniques grandissantes entre

  2   les Serbes et les Musulmans de Bijeljina ne faisaient que croître. Et

  3   pendant que les Serbes voulaient préserver le statu quo politique, qui

  4   était donc le fait de confier le maintien de l'ordre aux forces régulières,

  5   les Musulmans ont rejoint les rangs des unités paramilitaires en Croatie et

  6   ont pris part à des opérations terroristes contre la JNA.

  7   Entre 1990 et 1992, le parti du SDA, qui a exercé un contrôle plein

  8   et entier à l'égard du ministère de l'Intérieur en Bosnie-Herzégovine, a

  9   utilisé ses ressources pour procéder à une sélection des membres musulmans

 10   des effectifs de réserve de la police pour les envoyer en Croatie à des

 11   fins d'entraînement. Hasan Tiric, par exemple, était un membre du comité

 12   principal du SDA à Bijeljina, et il a armé secrètement les musulmans pour

 13   les préparer à réaliser des activités terroristes. Les cartes établies par

 14   les extrémistes musulmans ont indiqué la présence de maisons serbes avec

 15   des croix dessus pour illustrer de façon claire la nature du conflit qui

 16   allait survenir à Bijeljina.

 17   En fin 1990, il y a eu pratiquement des rapports quotidiens au sujet

 18   de persécutions et d'abus commis à l'égard de femmes serbes par des jeunes

 19   musulmans dans les marchés de la ville. A la même période, un autre groupe

 20   de jeunes musulmans a pris d'assaut certaines installations

 21   d'approvisionnement pour des raisons de combat ethniquement motivé. Dusan

 22   Spasojevic et ses collègues ont conclu du fait que ces groupes étaient

 23   organisés et s'étaient voués à la création de dissensions ethniques pour

 24   faire régner le désordre.

 25   Vers la mi-1991, la situation était si grave que les Musulmans de

 26   Bijeljina n'ont été que dans des restaurants ou bars en propriété de

 27   Musulmans, et les Serbes n'allaient que dans ceux qui étaient en propriété

 28   de Serbes. Pendant ce temps-là, les autorités locales de la municipalité,


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  1   la garnison de la JNA et la police ont exercé leurs activités et se sont

  2   efforcés de toutes leurs forces pour ce qui était de calmer les tensions et

  3   améliorer les relations interethniques.

  4   Le 30 mars 1992, un Serbe a fait exploser un engin explosif dans un

  5   restaurant. L'auteur a été arrêté par l'équipe d'enquête qui était conduite

  6   par les Serbes. L'incident a montré que la police et les autorités locales

  7   étaient déterminées à calmer la situation et conduire devant la justice

  8   ceux qui enfreignaient la loi, y compris lorsque ces auteurs de crimes

  9   étaient des Serbes.

 10   Vers le 27 mars, Dusan Spasojevic a été informé d'une explosion qui

 11   s'était produite dans des locaux du SDA. Une fois arrivé sur le lieu de

 12   l'événement, il a trouvé 20 à 30 Musulmans qui s'étaient rassemblés, qui

 13   menaçaient et qui ont empêché Spasojevic et ses collègues d'accéder au site

 14   de l'événement. Les renseignements, par la suite, ont révélé que des armes

 15   ont été très rapidement après transférées de ces locaux du SDA vers une

 16   mosquée à proximité de ce site. Dusan Spasojevic pense qu'on les a empêchés

 17   d'accéder aux locaux du SDA après l'explosion pour dissimuler le stockage

 18   des armes qui se produisait là-bas. 

 19   Le 1er avril 1992, Dusan Spasojevic a trouvé un barrage routier non

 20   loin de ses locaux où il y avait 15 hommes en armes. Ces hommes ont par la

 21   suite tiré sans semonce en direction d'un véhicule de la police qui portait

 22   l'inscription "police", et ils ont tiré également en direction des badauds

 23   qui se trouvaient à proximité, et parmi ceux-là, il y avait aussi des

 24   enfants. L'endroit où Dusan Spasojevic habitait était connu comme étant un

 25   bâtiment où habitaient des policiers et leurs familles. Il a constaté qu'il

 26   y avait plus encore de barrages routiers dans les rues avoisinantes, et il

 27   croit que ça a été mis en place pour empêcher la police d'intervenir afin

 28   de calmer les désordres survenus dans la ville. Quelque peu plus tard dans


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  1   la journée, des hommes qui ont armé ces barrages routiers ont commencé à

  2   tirer en direction de soldats qui leur avaient demandé de lever ces

  3   barrages. Dusan Spasojevic a été informé par l'officier de service du fait

  4   que le poste de police et les routes principales, ainsi que les carrefours

  5   étaient bloqués par des Musulmans en armes et que l'hôpital local était

  6   tout à fait encerclé. Sur les bâtiments plus élevés que les autres, on a pu

  7   constater la présence de tireurs embusqués qui ont ouvert le feu sans

  8   discernement, et bon nombre de Serbes avaient fui vers des villages à

  9   proximité. Dusan Spasojevic croit bien que ces événements ont été planifiés

 10   à l'avance et que ça a été le fait de Musulmans armés à Bijeljina.

 11   Dusan Spasojevic n'a jamais reçu l'ordre de quiconque s'agissant de

 12   faire quoi que ce soit au détriment des citoyens non-serbes et il n'a

 13   jamais donné d'ordre à ses propres subordonnés en ce sens. Les activités de

 14   Dusan Spasojevic et de ses subordonnés étaient conformes à la loi et

 15   visaient au bien-être de la totalité des citoyens indépendamment de leur

 16   appartenance ethnique. La totalité des crimes commis contre des citoyens

 17   non-serbes ont fait l'objet d'enquêtes et, à chaque fois que cela a été

 18   possible, les auteurs ont été remis entre les mains des autorités

 19   concernées.

 20   Dusan Spasojevic a été impliqué dans les activités d'une commission qui a

 21   enquêté au sujet des événements de Srebrenica. La commission a conclu du

 22   fait que la partie musulmane avait faussement déclaré qu'il y eu 8 000

 23   Musulmans de tués en déclarant que les soldats musulmans qui ont été tués à

 24   l'occasion de cette tentative de percée ont été déclarés comme étant des

 25   victimes innocentes de Srebrenica. Un rapport à ce sujet a été présenté par

 26   le MUP de la RS, mais a été rejeté.

 27   Ceci constitue un bref résumé du témoignage de ce témoin.

 28   M. KARADZIC : [interprétation]


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  1   Q.  Alors Monsieur, je voudrais vous demander, pour ce qui est du

  2   paragraphe 2, où il est indiqué qu'à partir de 1997 jusqu'en 2006,  pendant

  3   dix ans, vous exerciez des fonctions de chef de poste de police à

  4   Bijeljina; est-ce bien exact ?

  5   R.  Non. J'ai été chef de poste pendant trois ans, et après j'ai effectué

  6   d'autres tâches au niveau de la police criminelle, mais j'ai tout le temps

  7   été employé par ce service, oui.

  8   Q.  Merci. Est-ce qu'il a fallu que ces effectifs de la police, au niveau

  9   international, vous attestent comme étant quelqu'un de tout à fait propice

 10   pour ce qui est de cette mission de policier ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  Merci. Vous avez mentionné la déclaration de ce M. Tiric.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais à cet effet qu'on nous affiche le

 14   1D15018.

 15   M. KARADZIC : [interprétation]

 16   Q.  En attendant, j'aimerais que vous nous indiquiez ce que vous savez dire

 17   au sujet des formations qui ont par la suite été sous les ordres de M.

 18   Tiric.

 19   R.  Tiric était un criminel d'avant-guerre contre qui j'avais déposé une

 20   plainte pour ce qui est de vol par effraction grave.

 21   Ce dépôt de plainte au pénal, ça a été l'œuvre de mes collègues. Ils ont

 22   recueilli des déclarations de la part de ce Tiric Hasica, d'abord au niveau

 23   des personnes qui se sont trouvées au barrage routier et qui, par la suite,

 24   à la fin des conflits, ont restitué une partie de leurs armes au poste de

 25   sécurité publique à Bijeljina.

 26   Q.  Merci.

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais qu'on nous montre la page suivante,

 28   s'il vous plaît.


Page 35830

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Madame Gustafson.

  2   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Désolée d'interrompre. Je voudrais faire

  3   remarque que nous avons reçu une traduction de ce document ce matin. Ça n'a

  4   pas été chargé sur le système de prétoire électronique, mais nous l'avons

  5   dans le système Sanction dans les deux langues.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

  8   M. KARADZIC : [interprétation]

  9   Q.  Pourriez-vous nous dire de quel article il s'agit, l'article 151 ?

 10   R.  Il s'agit du Code de procédure pénale, et en vertu de ce code un

 11   rapport au pénal doit être déposé auprès du bureau du procureur.

 12   Q.  Merci. Est-ce que vous pouvez dire quelque chose sur le reste de cet

 13   article ? Est-ce que vous connaissiez d'autres personnes, certaines de ces

 14   personnes ?

 15   R.  Je connaissais la plupart de ces autres personnes, certaines de vue,

 16   d'autres mieux que cela. Pas mal d'entre eux sont des criminels comme, par

 17   exemple, Hasica Tiric. C'était un des plus connus, si vous voulez.

 18   Q.  Merci.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pourrait-on avoir la page suivante en

 20   anglais. Il est mentionné que "Tiric, Hasan" était présent, et puis il y a

 21   le reste également.

 22   M. KARADZIC : [interprétation]

 23   Q.  Pourquoi est-ce que des rapports au pénal ont été déposés contre

 24   eux ?

 25   R.  Je pense que c'était lié à une rébellion armée.

 26   Q.  Merci. Est-ce que Hasan Tiric a participé à ces événements du 31 mars

 27   1992 ?

 28   R.  Oui, étant donné que le bâtiment de la police était entouré de cinq ou


Page 35831

  1   six barrages, je l'ai remarqué. Il était à bord d'un véhicule, une Ford,

  2   avec un numéro d'immatriculation de Zvornik, et je l'ai vu venant d'un

  3   barrage et allant vers un autre barrage. Il a utilisé également un camion

  4   de pompiers ainsi qu'un petit camion TAM. Je l'ai vu à plusieurs reprises

  5   durant la matinée alors que je me trouvais dans le bâtiment.

  6   Q.  Merci. Vous avez mentionné que c'était un bâtiment où vivaient des

  7   policiers. Est-ce qu'on faisait une distinction par rapport à l'endroit où

  8   l'on établissait ces barrages en fonction des bâtiments et du quartier où

  9   ils se trouvaient ?

 10   R.  Eh bien, le bâtiment complet était bloqué. C'était un bâtiment

 11   résidentiel, et toutes les sorties et toutes les entrées étaient bloquées.

 12   Q.  Merci.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Puis-je verser cela au dossier.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Gustafson.

 15   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Nous remarquons qu'il s'agit d'un rapport

 16   au pénal qui est un résumé d'information et qui est basé sur une liste de

 17   pièces jointes qui figure à la fin du rapport. Aucune de ces pièces jointes

 18   sont incluses. Il semble que ce document est donc basé dans une grande

 19   partie sur des contenus de déclarations de personnes tierces. Donc ceci est

 20   associé à certaines préoccupations de la Chambre qui avaient été

 21   mentionnées précédemment concernant ce type de déclarations, des

 22   préoccupations qui sont en plus décuplées par le fait qu'étant donné que

 23   nous n'avons pas ces déclarations, nous ne pouvons pas évaluer l'exactitude

 24   de ce rapport et de ce que celui-ci synthétise. Et de plus, les

 25   déclarations semblent être des déclarations durant une période de guerre

 26   qui ont été consignées par des policiers bosno-serbes et qui portent sur

 27   des Musulmans, et au vu du traitement que faisaient subir les forces de

 28   police bosno-serbe aux Musulmans en l'espèce, et je fais référence aux


Page 35832

  1   faits jugés 863, 937, 1327, 2228, 2437, 2536 et 2652, ceci donc soulève

  2   d'autres questions en matière de fiabilité.

  3   Cependant, je pense que certains de ces éléments qui sont avancés

  4   dans ce document sont associés à ce qu'avance le témoin dans sa

  5   déclaration, et je vais utiliser ce document pour essayer de vérifier ce

  6   qui est avancé. Donc, dans ces circonstances, je n'ai pas d'objection au

  7   versement de ce document. Je voudrais simplement faire remarquer qu'il y a

  8   des problèmes de fiabilité en ce qui concerne le poids que l'on peut

  9   accorder à terme à ce document. Merci.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Nous allons accepter le

 11   versement.

 12   M. LE GREFFIER : [interprétation] P3142 [comme interprété].

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Je n'ai pas d'autres questions à poser à

 14   M. Spasojevic pour l'instant.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Les faits jugés que vous avez mentionnés

 16   portaient principalement sur des circonstances d'ordre général où des

 17   Musulmans étaient détenus, pas précisément dans le cadre d'une enquête au

 18   pénal.

 19   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Non. En fait, certains d'entre eux

 20   impliquaient également des interrogatoires, mais ce n'était pas

 21   nécessairement lié complètement à des questions de détention.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 23   Monsieur Spasojevic, comme vous l'avez remarqué, votre déposition à

 24   décharge a été versée dans sa plus grande partie par écrit par le biais de

 25   votre déclaration écrite plutôt que par le biais d'une déposition viva

 26   voce. Vous allez maintenant faire l'objet d'un contre-interrogatoire par

 27   une représentante du bureau du Procureur, en l'occurrence Mme Gustafson.

 28   C'est à vous, Madame Gustafson.


Page 35833

  1   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Merci.

  2   Contre-interrogatoire par Mme Gustafson :

  3   Q.  [interprétation] Bonjour.

  4   R.  Bonjour.

  5   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je voudrais revenir à ce rapport au pénal

  6   pour un instant. Je voudrais qu'on revienne sur le système Sanction.

  7   Q.  L'objet de ce rapport, Monsieur le Témoin, un rapport concernant Hasan

  8   Tiric ainsi que d'autres criminels, en fait, ce sont tous des Musulmans, y

  9   compris 28 Musulmans qui d'après le rapport à l'époque étaient décédés,

 10   n'est-ce pas ?

 11   R.  Je ne peux pas vous confirmer cela.

 12   Q.  Vous ne savez pas ? Parce que le rapport est clair à ce sujet --

 13   R.  Je ne sais pas.

 14   Q.  Vous ne savez pas s'ils étaient tous d'appartenance ethnique musulmane

 15   ou si les 28 étaient déjà morts à l'époque ?

 16   R.  Je pense qu'ils étaient tous Musulmans, mais je ne sais pas s'il y en

 17   avait tant que ça qui étaient déjà morts.

 18   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Pourrait-on passer à la page 39 en anglais

 19   et à la page 14 en B/C/S.

 20   Q.  Ici, le rapport fait état de personnes recensées aux numéros 130 [comme

 21   interprété] à 160, et il s'agit du nom d'un certain nombre de personnes

 22   qui, après l'éclatement des conflits armés, et cetera, ont été engagées

 23   activement en tant qu'extrémistes musulmans au niveau de barrages établis

 24   dans une rue à proximité de l'hôpital, et c'est à ce moment-là que ces

 25   personnes ont perdu la vie.

 26   Ces personnes recensées ici aux numéros 133 à 160 dans ce rapport

 27   étaient donc décédées à cette époque-là déjà, n'est-ce pas ?

 28   R.  Etant donné que je n'étais pas responsable de ce dossier et que je n'ai


Page 35834

  1   pas examiné ces corps, je ne peux pas me prononcer.

  2   Q.  Très bien.

  3   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Peut-on passer maintenant à la page 51 en

  4   anglais et à la page 21 en B/C/S. Et au début du premier paragraphe complet

  5   dans la version anglaise, en haut de la page en B/C/S, on parle du fait que

  6   le troisième jour des conflits armés à Bijeljina, des événements se sont

  7   produits, donc ce serait le 3 avril, et les extrémistes musulmans se

  8   félicitaient d'avoir facilement pris le contrôle de la ville et d'avoir

  9   essayé d'intimider les Serbes autant que possible.

 10   Et dans le paragraphe suivant, il est mentionné que durant les

 11   troisième et quatrième jour du conflit, c'est donc les 3 et 4 avril, des

 12   personnes de Semberija qui s'étaient organisées de manière interne étaient

 13   arrivées à faire tomber certains des barrages dans la ville et à mettre en

 14   déroute les extrémistes musulmans.

 15   Q.  Cette description donc est celle des événements des 3 et 4 avril,

 16   Monsieur Spasojevic, et elle est presque totalement fausse. Les Musulmans

 17   n'ont jamais pris le contrôle de la ville, et encore moins facilement. Ce

 18   n'était pas non plus des personnes qui s'étaient auto-organisées à

 19   Semberija et qui avaient permis de faire tomber certains barrages, mais

 20   c'étaient principalement la Garde de Volontaires serbe d'Arkan et sa force

 21   paramilitaire, qui d'ailleurs, je remarque, n'est mentionnée nulle part

 22   dans le rapport. Et de plus, les hommes d'Arkan avaient commencé à

 23   démanteler ces barrages immédiatement, et dès le 3 avril, c'était Arkan, et

 24   pas les Musulmans, qui contrôlait la ville, n'est-ce pas ?

 25   R.  Je ne suis pas d'accord avec vous.

 26   Q.  Très bien.

 27   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Alors, passons à la pièce P2629. Nous

 28   pouvons passer au bas de la page 1 en B/C/S et le haut de la page -- non,


Page 35835

  1   désolée, en fait, le bas de la page 1 en anglais et le haut de la page 3 en

  2   B/C/S.

  3   Q.  Et on peut voir ici que :

  4   "La situation en matière de sécurité à Bijeljina était perturbée le

  5   31 mars 1992 à 20 heures 30 dans la soirée lorsque des barrages ont été

  6   établis dans le centre de la ville par des extrémistes musulmans. Et durant

  7   la nuit" - c'est la page suivante en anglais - "le lendemain, la Défense

  8   territoriale, la Garde nationale serbe ainsi que la Garde des Volontaires

  9   ont commencé à démanteler ces barrages sous la supervision de la cellule de

 10   Crise de Bijeljina."

 11   Donc il est clair d'après ce rapport de police que la Garde nationale serbe

 12   ainsi que la Garde des Volontaires serbe, en d'autres termes, les hommes

 13   d'Arkan, ont commencé à démanteler les barrages immédiatement, c'est-à-dire

 14   durant la nuit du 31 mars et durant la matinée du 1er avril, n'est-ce pas ?

 15   R.  Les barrages n'ont été démantelés que vers 10 heures ou 11 heures le

 16   lendemain, parce que j'ai observé le démantèlement d'un des barrages.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Compte rendu d'audience. A la ligne 12, le

 18   témoin a dit que le démantèlement a commencé à 10, mais pas que ça avait

 19   fini.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Fort bien.

 21   Mme GUSTAFSON : [interprétation]

 22   Q.  Lorsque vous dites "le lendemain", vous voulez dire le 1er avril ou le 2

 23   avril ?

 24   R.  Je ne peux pas vraiment être sûr de la date, mais les barrages étaient

 25   là toute la nuit. Donc le lendemain du premier jour où ces barrages ont

 26   érigés. Ils ont donc été démantelés le lendemain entre 10 heures et 11

 27   heures.

 28   Q.  Mais vous n'avez vu la présence que d'un seul barrage, n'est-ce pas ?


Page 35836

  1   R.  J'ai vu le démantèlement d'un barrage. De mon bâtiment, c'est-à-dire de

  2   l'immeuble où j'habitais, du toit de cet immeuble, j'ai pu observer qu'au

  3   total il y avait quatre, voire cinq barrages.

  4   Q.  Très bien.

  5   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Pourrait-on passer maintenant au document

  6   D1612, s'il vous plaît. Et j'aimerais que l'on passe à la page 11 dans les

  7   deux langues. J'aimerais attirer votre attention sur le haut de la page en

  8   B/C/S et le milieu de la page anglaise. Il s'agit d'un entretien qu'a donné

  9   Arkan après ces événements relatant ce qui s'était passé à Bijeljina. Et il

 10   explique :

 11   "Nous sommes arrivés durant la nuit…"

 12   Et puis, un peu plus bas, on peut lire :

 13   "C'était la nuit; cependant, nous sommes entrés dans Bijeljina en

 14   tant qu'unité et nous avons pris le contrôle du centre de la ville.

 15   "Les combats ont été très rudes…"

 16   Et ensuite, huit ou neuf lignes plus bas, on dit :

 17   "Bien sûr, nous avions une expérience militaire. Nous avions beaucoup

 18   de faits d'armes à notre compte et nous sommes entrés en tant que … unité

 19   militaire et nous avons donc pris le contrôle de Bijeljina rapidement."

 20   On peut passer maintenant à la page suivante, s'il vous plaît. Vers le

 21   milieu de la version anglaise et vers le haut de la page pour la version en

 22   B/C/S, on demande :

 23   "Qui était responsable, le vrai patron à l'époque ?"

 24   Et il répond :

 25   "Moi, j'étais le patron à Bijeljina." Et il dit : "Et puis, au niveau

 26   du poste de contrôle, par exemple, il y avait Dogo," et puis il commence à

 27   parler en fait d'un incident. Il y avait Bojan -- Doko, Abdic et Simovic

 28   qui sont arrivés, on les a obligés à s'allonger par terre. Et puis, il dit


Page 35837

  1   : "On les a renvoyés ce même soir," mais il explique qu'ils revenaient le

  2   lendemain. Et il explique qu'ils sont revenus le lendemain avec Mme

  3   Plavsic.

  4   Donc il est clair que cet incident au poste de contrôle s'est passé

  5   le 3 avril puisque la délégation est arrivée le 4. Donc ceci montre

  6   qu'Arkan avait constitué un barrage routier qui permettrait de contrôler

  7   les entrées et les sorties de la ville dès le 3 avril.

  8   Q.  Donc ces documents, Monsieur le Témoin, montrent que la description du

  9   conflit dans le rapport au pénal contre Hasan Tiric représente de manière

 10   erronée les Musulmans comme la force dominante et fait un état erroné du

 11   fait que c'étaient les Musulmans qui contrôlaient les barrages alors qu'en

 12   fait c'était Arkan qui le faisait, n'est-ce pas ?

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Une explication. Comment se fait-il que cette

 14   audition est un document officiel et qu'un rapport au pénal n'est pas

 15   officiel ? Ceci devrait être appelé audition plutôt que de document --

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, ceci n'est pas du

 17   tout approprié, c'est une intervention inacceptable. Vous pouvez aborder

 18   tout ceci durant vos questions supplémentaires.

 19   Veuillez continuer -- est-ce que vous vous souvenez de la question qu'on

 20   vous a posée, Monsieur Spasojevic ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est inexact. Arkan aimait faire sa propre

 22   promotion et se vanter dans les médias. Et il y en avait 15 ou 16 qui

 23   étaient là-bas, j'ai des informations à ce sujet. Il a eu des affrontements

 24   avec des invités, mais ce n'est pas lui qui a établi ces barrages routiers.

 25   Il n'y avait d'ailleurs pas de contrôle ou de barrages routiers qu'il

 26   contrôlait nulle part, autant que je sache.

 27   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Très bien. Alors, je voudrais maintenant

 28   qu'on passe au document 5474, c'est un document officiel. Affichez le point


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  1   4 en bas de la page. Il s'agit du rapport du 17e Corps de la JNA daté du 4

  2   avril. Au point 4, il est dit :

  3   "La situation sur le territoire est extrêmement complexe. La ville de

  4   Bijeljina est contrôlée par le SDS et par les hommes d'Arkan qui ne

  5   permettent même pas à l'unité de blindé de sortir de certaines positions

  6   dans la ville."

  7   Q.  Monsieur Spasojevic, indépendamment du fait si Arkan a contrôlé des

  8   points de contrôle ou pas, il était en mesure de contrôler les entrées de

  9   la JNA dans la ville, n'est-ce pas ?

 10   R.  Je suis policier et je ne voudrais pas en parler, mais je sais qu'Arkan

 11   ne pouvait pas contrôler les entrées et les sorties de la ville aux points

 12   de contrôle. Je vous dis ça puisque je vivais dans la ville et je

 13   connaissais toute la ville, je suis allé partout dans la ville.

 14   Q.  Bien. J'ai une dernière question à vous poser concernant Arkan. Puisque

 15   vous avez parlé en détail de ces événements dans votre déclaration, les

 16   événements qui se sont produits en début avril, et vous n'avez pas

 17   mentionné Arkan du tout. Est-ce que cela veut dire que pour ce qui est de

 18   l'implication d'Arkan à ces conflits à Bijeljina, elle n'était pas

 19   suffisamment importante pour que vous mentionniez cela dans votre

 20   déposition après avoir prononcé la déclaration solennelle ?

 21   R.  Moi, j'avais des problèmes pour ce qui est de la criminalité à

 22   l'époque, et moi je ne pensais pas que c'était quelque chose d'important ou

 23   de nécessaire de parler de lui.

 24   Q.  Maintenant, j'aimerais vous poser des questions concernant les

 25   personnes qui se sont fait tuer pendant le conflit. Vous n'avez pas vu de

 26   vos propres yeux qui que ce soit qui ait été tué pendant le conflit au

 27   milieu du mois d'avril, n'est-ce pas ?

 28   R.  Oui.


Page 35839

  1   Q.  Au paragraphe 20 de votre déclaration, vous avez dit qu'après le début

  2   du conflit, des cadavres ont été ramassés par des employés de la voirie,

  3   accompagnés par la police, et les cadavres ont été emmenés dans la morgue

  4   par la suite. Est-ce que vous avez participé, vous, en personne, à cette

  5   activité pour ce qui est de ramasser des cadavres ou est-ce que vous avez

  6   entendu parler de cela ?

  7   R.  J'ai seulement entendu parler de cela.

  8   Q.  Avez-vous vu ces cadavres avant qu'ils n'aient été ramassés, qui

  9   gisaient dans les rues ?

 10   R.  Lorsque je suis parti vers le village en empruntant la rue Majevicka,

 11   je pense que j'ai vu un cadavre. C'était un certain Stevanovic [phon]. Je

 12   l'ai vu lorsque je suis parti avec les membres de ma famille, avec mes

 13   enfants, pour aller dans ce village.

 14   Q.  Mis à part ce cadavre, est-ce que vous avez vu d'autres cadavres ?

 15   R.  Je n'arrive pas à me souvenir, mais je ne crois pas que j'aie vu

 16   d'autres cadavres.

 17   Q.  Bien. Pour ce qui est de ces cadavres, ces cadavres ont été ramassés

 18   dans les rues où ils gisaient. Il n'y avait pas d'enquête menée sur les

 19   lieux par rapport à ces cadavres, n'est-ce pas ?

 20   R.  Oui, c'est vrai.

 21   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Peut-on passer à huis clos partiel pour

 22   quelques instants, s'il vous plaît.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 24   [Audience à huis clos partiel]

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 13  Page 35840 expurgée. Audience à huis clos partiel.

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  1  (expurgé)

  2   [Audience publique]

  3   Mme GUSTAFSON : [interprétation]

  4   Q.  Je remarque également que dans le rapport au pénal contre Hasan Tiric

  5   figure également qu'un certain nombre de personnes, y compris Redzep

  6   Sabanovic, ont perdu leur vie près des barrages à la proximité de

  7   l'hôpital. Cela se trouve en pages 51 à 52 de la version en anglais.

  8   Reconnaissez-vous ce lieu ? Est-ce que ce lieu sur la photo se trouve près

  9   de l'hôpital de Bijeljina, près du barrage ?

 10   R.  La photographie montre peut-être ce lieu. Mais je ne suis pas tout à

 11   fait certain. Excusez-moi, je ne peux pas répondre à votre question avec

 12   précision.

 13   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Est-ce qu'on peut maintenant revenir au

 14   rapport au pénal dans le système Sanction, pages 51 et 52 dans la version

 15   en anglais et la page 21 dans la versions en B/C/S.

 16   Il s'agit de la partie qui se trouve vers la fin de la version en anglais.

 17   Q.  Le paragraphe où il est question des Musulmans qui ont été tués près du

 18   barrage à proximité de l'hôpital, et il est dit dans ce paragraphe :

 19   "Pendant la destruction du barrage près de l'hôpital, les personnes

 20   suivantes ont perdu leur vie sur ou autour du barrage pendant qu'elles

 21   présentaient une résistance armée…"

 22   Ensuite, il y a la liste avec les noms de ces personnes.

 23   Mais il n'y a pas de source d'information pour ce qui est de

 24   l'identification de ces personnes. Monsieur Spasojevic, quelle était la

 25   source de ces informations concernant les Musulmans qui ont présenté une

 26   résistance armée au moment où ils ont été tués ?

 27   R.  Je ne le sais pas.

 28   Q.  Connaissiez-vous Redzep Sabanovic ?


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  1   R.  Je le connaissais de vue.

  2   Q.  Bien. Et est-ce que vous connaissiez son épouse, Aisa, Aisa Sabanovic ?

  3   R.  Non.

  4   Q.  Bien. Vous avez pourtant confirmé qu'Aisa Sabanovic -- qu'Aisa est un

  5   prénom musulman féminin, n'est-ce pas ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Il y a une liste d'annexes jointes à ce rapport, entre autres, un

  8   certain nombre de certificats de décès, et également on voit le certificat

  9   de décès pour Aisa Sabanovic. Mais dans le rapport au pénal, on ne voit

 10   rien pour ce qui est de comment elle a été tuée. Savez-vous pourquoi cela

 11   ne figure pas dans le rapport au pénal pour ce qui est de la cause du décès

 12   de cette femme ?

 13   R.  Je ne le sais pas.

 14   Q.  Dans cet extrait du rapport au pénal, on voit mention de Bego Sindric

 15   également, qui a été tué sur ou autour de ce barrage et dont le cadavre a

 16   été ramassé le 5 ou le 6 avril. Mais un autre témoin dans cette affaire, Dr

 17   Kicanovic, a déposé que Bego Sindric a été blessé et qu'il a été emmené à

 18   l'hôpital.

 19   Pouvez-vous confirmer cela ?

 20   R.  Je ne le sais pas.

 21   Q.  Monsieur Spasojevic, au paragraphe 20 de votre déclaration, vous avez

 22   dit qu'à peu près une moitié des victimes au conflit qui a eu lieu au début

 23   du mois d'avril ont été tuées pendant les combats dans les rues. Mais pour

 24   ce qui est de votre déposition, on peut clairement conclure que vous n'avez

 25   pas vu de cadavres hormis un cadavre, que vous n'avez vu personne qui a été

 26   tué, vous n'avez pas vu des blessures de ces gens, que vous ne saviez rien

 27   pour ce qui est des enquêtes menées sur les lieux, et quand je vous ai posé

 28   la question pour ce qui est de la source de ces informations pour ce qui


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  1   est de ce rapport au pénal concernant les gens qui ont été tués et qui ont

  2   présenté une résistance armée, vous n'en saviez rien. Donc vous vous êtes

  3   lancé dans des conjectures pour ce qui est de ces personnes tuées pendant

  4   les combats dans les rues ?

  5   R.  Les policiers en ont parlé, et c'est comme cela que j'ai tiré cette

  6   conclusion. Ma conclusion n'est pas précise lorsque je dis qu'à peu près

  7   une moitié des personnes se sont fait tuer lors des combats dans les rues.

  8   Ce n'est pas quelque chose qui est très précis. C'est une conclusion à

  9   laquelle j'ai pu arriver selon ce que j'ai entendu dire là-dessus.

 10   Q.  Maintenant, j'aimerais vous poser une dernière question concernant ce

 11   rapport au pénal.

 12   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Et c'est par rapport à la page 59 en

 13   anglais et à la page 24 dans la version en B/C/S, ce qui représente la

 14   liste d'annexes. Pouvez-vous regarder cette liste d'annexes pour qu'on

 15   puisse passer à la page suivante dans les deux versions.

 16   Q.  Il y a au total 65 annexes. Il s'agit de certificats de décès et de

 17   déclarations pour la plupart de ces annexes. Dans votre déclaration, vous

 18   avez dit pour ce qui est de l'annexe à ce rapport au pénal, il y a la

 19   télécopie envoyée par le SDA de Tuzla au SDA de Brcko concernant la dépêche

 20   concernant la distribution des armes qui devaient être utilisées aux

 21   combats avec les Serbes à Bijeljina. Mais ce document n'est pas énuméré ici

 22   dans cette liste d'annexes.

 23   R.  Cette télécopie a été envoyée en 1992; les locaux du SDA ont été

 24   démolis dans la rue Njegoseva. Et je pense que la télécopie a été retrouvée

 25   finalement dans les locaux du SDA.

 26   Q.  Avez-vous une explication concernant le fait que cette télécopie ne

 27   figure pas sur la liste d'annexes ou de pièces jointes à ce rapport au

 28   pénal, bien que vous ayez affirmé que cela était joint à ce rapport au


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  1   pénal ?

  2   R.  Cela aurait dû être joint à ce rapport.

  3   Q.  Au paragraphe 18, vous avez dit que tous les crimes commis contre les

  4   citoyens non-serbes de la municipalité de Bijeljina étaient les crimes sur

  5   lesquels se sont penchés les membres du poste de sécurité publique de

  6   Bijeljina, et tous les auteurs éventuels de ces crimes ont été retrouvés et

  7   remis aux organes compétents pour ce qui est des poursuites au pénal.

  8   Ensuite, au paragraphe 25, vous avez parlé du meurtre qui a eu lieu en

  9   septembre 1992 où les membres de deux familles, Saraljic et Mujagic, ont

 10   été tués. C'était le crime, et c'est ce que vous avez dit, le crime qui a

 11   été condamné par toute la communauté.

 12   Maintenant, est-ce vrai que les membres de ces deux familles, on les a fait

 13   sortir de leurs maisons pour les exécuter sur les rives de la Drina près du

 14   village et que l'unité de Dusko Malovic a été suspectée d'avoir commis ce

 15   crime ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Au paragraphe 25 de votre déclaration, vous avez dit que pour ce qui

 18   est de cet incident vous avez fait une déclaration il y a trois ans et que

 19   ce crime est toujours en instance. La raison pour cela, Monsieur

 20   Spasojevic, est qu'il n'y a pas eu d'enquête pour ce qui est de ce crime

 21   jusqu'en 2002, lorsque le parquet de Bijeljina a demandé à la police de

 22   Bijeljina de mener une enquête pour ce qui est de cet incident ?

 23   R.  Oui, c'est vrai.

 24   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Regardons maintenant le document 24768 de

 25   la liste 65 ter.

 26   M. ROBINSON : [interprétation] Est-ce que M. Reid peut nous envoyer ce

 27   document aussi.

 28   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Excusez-moi.


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  1   Q.  Il s'agit du rapport émanant du centre de sécurité publique de

  2   Bijeljina envoyé au bureau régional du parquet de Bijeljina concernant

  3   cette affaire. Le titre est votre demande du 26 février 2002 concernant la

  4   collecte des renseignements. Et ensuite, il est dit :

  5   "D'après votre demande … nous avons fait une vérification des fichiers

  6   opérationnels du CJB Bijeljina, du poste de police de Bijeljina, pour

  7   constater qu'il n'y avait pas de documents concernant le crime énuméré dans

  8   votre demande, il n'y a pas eu non plus de rapport au pénal déposé auprès

  9   du parquet compétent."

 10   C'est la confirmation du fait que ce crime, au moment où il a été perpétré,

 11   n'a pas été -- il n'y a pas eu d'enquête pour ce qui est de ce crime ?

 12   R.  Oui.

 13   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je demande que ce document soit versé au

 14   dossier.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 16   M. LE GREFFIER : [interprétation] Cela sera P6215, la pièce à conviction de

 17   l'Accusation.

 18   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Regardons maintenant le document 65 ter

 19   qui porte le numéro 24773.

 20   Q.  Il s'agit de la note officielle du poste de police de Bijeljina du 3

 21   juin 2002. Encore une fois, il s'agit de l'enquête eu égard à ce crime, et

 22   c'est la note officielle concernant l'entretien avec Momcilo Djilas. Comme

 23   vous pouvez le voir, M. Djilas a dit à la police de Bijeljina qu'en 1992,

 24   il travaillait au sein de la police de réserve de Brodac. Ensuite, cinq

 25   lignes plus bas au premier paragraphe, il est dit que le commandant du

 26   poste de police, Radoljub Ivanovic, a ordonné à Milo Skoric et à Miodrag

 27   Tomic de se rendre à Balatun pour jeter les cadavres dans la rivière, les

 28   cadavres des personnes qui avaient été tuées la veille.


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  1   Ensuite, il décrit ce lieu : "Lorsque je me suis approché du lit de

  2   la rivière Drina, j'ai pu voir des cadavres se trouvant près des rives mais

  3   flottant dans l'eau." Osman Sarajlic, Izo Sarajlic, sa fille ainsi que son

  4   épouse étaient les cadavres de ces personnes, ensuite il y avait le cadavre

  5   de leur fille qui avait entre dix et 12 ans et d'autres personnes.

  6   A la page suivante dans la version en anglais, il a dit :

  7   "Puisque les cadavres se trouvaient dans l'eau et puisque sur les rives il

  8   n'y avait pas de cadavres, il n'était pas nécessaire qu'on les jette dans

  9   l'eau. Nous sommes rentrés pour informer le commandant Ivanovic que

 10   quelqu'un d'autre avait déjà jeté les cadavres dans l'eau avant nous, nous

 11   avons recouvert de terre ces cadavres pour que des mouches et d'autres

 12   insectes n'affluent pas. Après avoir entendu ça, le commandant a dit :

 13   'Vous avez bien fait'".

 14   Cet avis a été emporté par Borislav Ivanic et Milenko Djokic. Est-ce que ce

 15   sont des agents de police avec lesquels vous avez travaillé ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Pouvez-vous nous dire que ce sont des agents de police professionnels

 18   et que vous pouvez vous appuyer sur la véracité et l'exactitude de leur

 19   note ?

 20   R.  Oui, vous pouvez vous appuyer sur son exactitude.

 21   Q.  Est-ce que vous connaissiez cet agent de police du commissariat de

 22   police qui a été interrogé, Momcilo Djilas ?

 23   R.  Oui, je le connaissais.

 24   Q.  Et en 1992, faisait-il partie du commissariat de police de Brodac ?

 25   R.  Oui, conformément à sa déclaration.

 26   Q.  Le savez-vous, en dehors de cela ?

 27   R.  Je ne le savais pas, mais j'ai lu à ce sujet, et ce, maintenant.

 28   Q.  Saviez-vous que le commandant du poste de police de réserve était


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  1   Radoljub Ivanovic, est-ce que vous le saviez à l'époque ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Et pourriez-vous confirmer, à partir de vos propres informations, que

  4   ce site où les corps ont été trouvés, que M. Djilas décrit, c'est-à-dire

  5   les rives de la Drina et dans la Drina à proximité de Balatun, ceci est-il

  6   conforme à vos informations ?

  7   R.  En 1992, je n'avais pas ces informations, en 1992. Et par la suite,

  8   j'ai pris part au recueil de documents et de notes qui ont été envoyés

  9   ensuite au bureau du procureur.

 10   Q.  Et est-ce que ces informations sont dans le droit-fil des informations

 11   que vous avez recueillies ?

 12   R.  Oui, pour la plupart.

 13   Q.  Et est-ce que vous avez recueilli d'autres informations sur les membres

 14   de la police, c'est-à-dire le commissariat de police de réserve de Brodac

 15   ayant participé à la dissimulation des dépouilles de ces victimes ?

 16   R.  Tous les documents qui ont été recueillis ont été transmis au bureau du

 17   procureur à Bijeljina. Je ne me souviens plus de tout ce que nous avons

 18   recueilli.

 19   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je souhaite verser ce document.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, il est versé.

 21   M. LE GREFFIER : [interprétation] Reçoit la cote P6216, Monsieur le

 22   Président.

 23   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Pouvons-nous passer au document de la

 24   liste 65 ter 24816.

 25   Q.  C'est un autre document provenant de cette enquête qui a été lancée en

 26   2002. C'est un certificat délivré par la Croix-Rouge de la RS à la demande

 27   du MUP de Bijeljina et des organes judiciaires, énumérant un nombre de

 28   personnes portées disparues venant de ces familles. Si vous voulez bien


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  1   dérouler la liste et indiquer si cette liste de personnes disparues est

  2   conforme à vos informations concernant les victimes, ou, tout du moins,

  3   l'identité des victimes de ce crime.

  4   R.  Oui.

  5   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je souhaite verser ce document.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

  7   M. LE GREFFIER : [interprétation] Et reçoit la cote P6217.

  8   Mme GUSTAFSON : [interprétation]

  9   Q.  Une dernière question sur cet incident, Monsieur le Témoin. Alors que

 10   vous avez pris part à cette enquête qui a été lancée en 2002, est-ce que

 11   les informations qui ont été recueillies au cours de ladite enquête, au vu

 12   de ces informations, est-ce que l'unité de police spéciale de Dusko Malovic

 13   est restée le principal suspect dans cette affaire ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Merci.

 16   Mme GUSTAFSON : [interprétation] Je vais passer à un autre sujet et je vais

 17   commencer par un document relativement long, donc si cela vous convient,

 18   Monsieur le Président, nous pourrions conclure pour aujourd'hui.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, certainement.

 20   Monsieur Robinson, est-ce que nous allons entendre M. Vucurevic demain ?

 21   M. ROBINSON : [interprétation] Non, Monsieur le Président, nous ne sommes

 22   pas en mesure. Nous avons essayé mais, malheureusement, les services de

 23   Sécurité ne sont pas en mesure de recevoir un récolement --

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] En regardant sa déclaration brièvement,

 25   les Juges de la Chambre ont relevé que s'il y a des segments qui sont

 26   pertinents et importants, certes, d'autres, en revanche, ont trait à la

 27   région de Nevesinje, qui est en Herzégovine et qui ne relève pas de l'acte

 28   d'accusation. Donc, en préparant la déclaration révisée, vous pourriez


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  1   peut-être vous pencher sur la question, et la plus grande partie des pièces

  2   connexes semblent être liées à cette région.

  3   Monsieur Spasojevic, nous allons lever l'audience et nous allons continuer

  4   demain à 9 heures. Entre-temps, je vous recommande de ne parler à personne

  5   de votre déposition.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Très bien.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] L'audience est levée.

  8   --- L'audience est levée à 14 heures 43 et reprendra le vendredi, 22 mars

  9   2013, à 9 heures 00.

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