Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mercredi 24 juillet 2013

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   [Le témoin vient à la barre]

  5   --- L'audience est ouverte à 9 heures 04.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour à toutes et à tous.

  7   Monsieur Mitchell, je vous en prie, poursuivez.

  8   M. MITCHELL : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  9   LE TÉMOIN : DUSAN DUNJIC [Reprise]

 10   [Le témoin répond par l'interprète]

 11   Contre-interrogatoire par M. Mitchell : [Suite]

 12   Q.  [interprétation] Bonjour à vous, Monsieur le Professeur.

 13   R.  Bonjour.

 14   Q.  Je souhaiterais que nous nous écartions de l'objectivité ou que nous

 15   passions à autre chose hormis l'objectivité et l'impartialité de vos

 16   rapports et j'aimerais vous poser des questions à propos de certaines des

 17   critiques de fond relatives aux éléments de preuve de l'Accusation. Et

 18   l'une des critiques principales que nous avons entendue et que l'on

 19   retrouve dans tous vos rapports correspondent aux suppositions de la part

 20   des pathologistes de l'Accusation suivant lesquelles la grande majorité des

 21   blessures par balle et autres blessures se sont produites lors de la vie

 22   des personnes et que ces blessures ont été ou ont contribué aux causes de

 23   décès. Alors, les experts de l'Accusation ont expliqué ces prémisses ou ces

 24   hypothèses de façon très claire dans leurs rapports, n'est-ce pas,

 25   Professeur ?

 26   R.  Oui, vous avez expliqué leur théorie dans l'introduction, tel que, par

 27   exemple, M. John Clark qui l'a écrit, et d'ailleurs, les autres ont écrit

 28   cela de façon assez identique, c'était plutôt un système de copier et


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  1   coller. Ils ont expliqué à quel point il était difficile et impossible de

  2   déterminer si les blessures avaient été provoqués avant la mort ou après la

  3   mort sur ce matériel qui était squelettisé [comme interprété], qui donc

  4   avait été exhumé, et cetera, et cetera, et que cela était absolument

  5   acceptable, et, bon, je dis que tout cela est acceptable d'une [inaudible]

  6   professionnel. Par ailleurs, il y est expliqué -- on a fourni des

  7   explications quant à leurs suppositions, la supposition notamment selon

  8   laquelle ces personnes avaient dû être tuées d'une façon ou d'une autre

  9   parce qu'elles étaient -- parce qu'il s'agissait de corps, de cadavres. La

 10   deuxième supposition était que, dans ce cas, les blessures avaient été

 11   infligées avant la mort et qu'ils font finalement référence aux conclusions

 12   anthropologiques en indiquant que la -- les seules constatations -- enfin,

 13   il indique en fait que cela pourrait indiquer que -- qu'il y avait des

 14   blessures qui avaient été provoquées à -- que ces blessures avaient été

 15   provoquées avant la mort. Donc, en fait, moi, ce que je critique, c'est

 16   cette supposition qui est -- cette hypothèse qui est généralement acceptée

 17   qui s'applique à tous -- à -- à -- à tous les cas de figure, non pas

 18   seulement le point de vue de l'anthropologiste, mais le point de vue des

 19   experts médico-légaux qui ont effectué les autopsies. La supposition

 20   générale suivant laquelle toutes les blessures ont été infligées avant la

 21   mort, que tous ces corps -- que toutes ces personnes sont mortes à la suite

 22   des blessures provoquées par des balles et qu'il y a un très petit nombre

 23   pour lesquels la cause du décès n'a pas été déterminée, ne pouvait pas être

 24   déterminée, puisqu'il n'y a absolument aucune indication, aucun repère.

 25   J'indique cela parce qu'il y a dans ces cas quelque chose qui aurait dû

 26   être dit, une condition qui aurait dû être indiquée. Ces paramètres

 27   auraient dû être présentés de façon objective pour pouvoir parler de ces

 28   blessures qui auraient pu, par exemple, être provoquées au niveau de la


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  1   tête comme la cause du décès, mais il aurait fallu indiquer que dans ce cas

  2   d'espèce, une telle personne aurait pu avoir des blessures post-mortem,

  3   mais que la cause du décès était, par exemple, une blessure au niveau de la

  4   poitrine --

  5   Q.  Ecoutez, je voulais juste que nous soyons bien clairs quant aux

  6   suppositions. Donc, vous comprenez les hypothèses sur lesquelles nous nous

  7   sommes appuyés, n'est-ce pas ?

  8   R.  Oui, oui. Et je l'ai indiqué tout le temps dans mes rapports.

  9   Q.  Fort bien. Et vous convenez que les Juges de la Chambre ont entendu de

 10   nombreux éléments de preuve indiquant comment ces corps se sont retrouvés

 11   dans ces fosses communes.

 12   R.  Oui, tout à fait.

 13   Q.  Donc, il appartient aux Juges de la Chambre de trancher ou de décider

 14   si les suppositions avancées par les experts de l'Accusation sont

 15   raisonnables ou non, n'est-ce pas ?

 16   R.  Oui, je suis tout à fait d'accord et d'ailleurs, je l'ai écrit, cela.

 17   J'ai indiqué qu'il appartenait aux Juges de trancher cela, mais il ne

 18   m'appartient pas à moi, en tant qu'expert médico-légal ou à M. Clark ou à

 19   M. Lawrence, par exemple, et à d'autres de -- d'indiquer que les victimes

 20   ont été tuées délibérément dans le cadre d'exécutions et que ces blessures

 21   ont été infligées de façon délibérées et intentionnelles. Cela n'est pas du

 22   ressort de l'expert. Il appartient à l'expert d'expliquer comment les

 23   blessures ont été causées sur -- au niveau de quel organe ou partie du

 24   corps et la personne qui effectue l'autopsie doit décrire cela -- doit

 25   décrire le -- les autopsies en détail et doit établir les liens entre les

 26   autopsies et des causes éventuelles de décès. Mais il appartient aux Juges

 27   de la Chambre de prendre en considération tous les éléments de preuve

 28   hormis les exhumations et les autopsies et au vu de ces éléments, de


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  1   déterminer si la victime ou la personne qui a été trouvée morte a été tuée,

  2   a été exécutée ou bien si le décès a été provoquée d'une autre façon. Donc,

  3   c'est la raison pour laquelle j'indique qu'il appartient aux Juges de la

  4   Chambre d'inclure ces éléments et d'en décider. Il n'appartient pas aux

  5   experts de fournir des conclusions tout à fait libres.

  6   Et permettez-moi de vous dire de -- en fait, de vous donner un

  7   exemple à titre d'illustration --

  8   Q.  Professeur --

  9   R.  -- parce que M. Haglund parle de blessure --

 10   Q.  -- je vais vous interrompre.

 11   R.  Très bien.

 12   Q.  Il appartient aux Juges de la Chambre de décider si les suppositions

 13   avancées par les experts à charge sont raisonnables ou non. Donc, j'en

 14   reviens à ma question, Monsieur.

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Fort bien. Donc, j'aimerais maintenant que nous nous intéressions à un

 17   exemple que nous trouvons dans l'une de vos analyses d'un rapport

 18   d'autopsie de l'Accusation.

 19   M. MITCHELL : [interprétation] Et je souhaiterais avoir le document de la

 20   liste 65 ter 1D25489, page 193 dans la version anglaise et page 180 dans la

 21   VRS B/C/S.

 22   Q.  Et Monsieur le Professeur, vous constaterez qu'il s'agit de votre

 23   analyse relative à un corps qui a été trouvé à Ravnice, donc dans la fosse

 24   de Ravnice.

 25   R.  Oui. Je vais essayer de retrouver cette page. Fort bien.

 26   Q.  Donc, il s'agit d'un de vos premiers rapports dans l'affaire Popovic.

 27   Il s'agit du rapport volumineux.

 28   R.  Ah, oui, oui.


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  1   Q.  Et nous voyons que pour ce qui est de la fluoroscopie, il est indiqué :

  2   reste de cartouches en cuir acérées, pointues et des fragments.

  3   R.  Oui, des fragments. Je le vois.

  4   Q.  [aucune interprétation]

  5   L'INTERPRÈTE : Donc, correction de l'interprète ou précision de

  6   l'interprète : reste de cartouches en cuivre acérées, pointues. Reprise des

  7   débats.

  8   M. MITCHELL : [interprétation]

  9   Q.  Alors, vous aviez indiqué qu'il n'y avait absolument aucune base sur

 10   laquelle on pouvait s'appuyer pour maintenir qu'il s'agissait de blessures

 11   provoquées par des tirs de fusils. C'est votre opinion d'expert, Monsieur

 12   le Professeur. Alors que l'analyse de la fluoroscopie montre qu'il y a,

 13   donc, une cartouche de cuivre acérée fichée dans le corps de cette

 14   personne. Donc, il n'y a aucune base sur laquelle on peut se fonder pour

 15   maintenir que cette personne a été victime d'une blessure par balle. C'est

 16   votre analyse, c'est cela ?

 17   R.  Ecoutez, moi, je suis un expert et c'est la raison pour laquelle je

 18   vous dis cela. Regardez, il s'agit d'un corps "squelettisé" [comme

 19   interprété]. Il y a des parties de ce corps qui sont "squelettisés" [comme

 20   interprété]. Nous trouvons -- donc, il s'agit d'une -- d'un revêtement de

 21   cartouches en cuivre, de la chemise, en quelque sorte qui est autour et il

 22   y a quelques fragments de métal qui ont été trouvés. Dans la question est

 23   de savoir si ces parties métalliques font partie du projectile qui sont

 24   passées à travers les tissus du corps ou s'ils se -- ils étaient là, ils se

 25   -- en fait, il viennent d'une autre partie du corps. Mon objection, elle

 26   vient du fait que lorsque les blessures sont décrites -- bon, il n'y a pas

 27   de base pour indiquer sur quoi elles se sont fondées pour déterminer les

 28   blessures principales. Parce que au niveau de la fluoroscopie, le résultat,


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  1   c'est :

  2   "Blessures principales."

  3   Regardez. Vous avez la clavicule gauche qui est fracturée avec des -- une -

  4   - des fractures multiples -- ou des défauts osseux multiples. Vous avez la

  5   quatrième et la dixième côte droite qui est fracturée avec de nombreuses

  6   parties qui ne s'y trouvent plus. Vous avez les éléments vertébraux

  7   thoraciques, le cinquième, le sixième et le deuxième qui sont fracturés.

  8   Voilà. Oui, alors, ce que je disais, c'est que vous avez ces

  9   fractures. Bien entendu, la logique, c'est qu'elles ont été provoquées par

 10   un -- par des balles. Mais lorsque vous avez -- enfin, indépendamment du

 11   fait qu'il y ait ou non des fragments métalliques dans la zone

 12   environnante, on ne peut pas conclure qu'il s'agit de fractures directes ou

 13   indirectes. On ne peut pas dire si ces fractures ont été créées par

 14   certaines parties du projectile ou si elles ont été créées d'une autre

 15   façon.

 16   Alors, pour revenir à la question que vous m'avez posée, moi, je ne

 17   dispose pas d'un élément que je pourrais utiliser pour conclure qu'il y a

 18   eu -- qu'il s'agit de fractures qui ont été provoquées par des blessures

 19   par balles infligées avant la mort. Voilà ce dont je parle. Ce qui est

 20   présenté ici est une constatation qui n'est absolument pas détaillée ou

 21   étayée par des éléments de preuve radiographiques. Alors, il est indiqué

 22   que la cause du décès, c'est une blessure à la poitrine, mais au niveau de

 23   l'abdomen, qu'il s'agissait d'une arme à feu. Alors, quelqu'un peut tout à

 24   fait tirer cette conclusion. Il pourrait dire oui, oui, il s'agit de tir de

 25   balles, des blessures par balle qui ont été trouvées, mais, moi, je sais

 26   que cet homme a été poignardé au cœur avec un couteau qui n'a pas été

 27   identifié ou je sais, par exemple, qu'il a été étranglé. Comment est-ce que

 28   je pourrais décrire quelque -- et savoir qu'il s'agit de quelque chose ?


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  1   Comment est-ce que je peux le prouver cela, que cela s'est passé avant la

  2   mort ? C'est justement ce que je vous dis. Si vous me le permettez de

  3   digresser un tant soit peu, Monsieur Mitchell, je vous dirais qu'il y a

  4   trois semaines --

  5   Q.  Non. Nous allons mais non pas seulement de venir à ces fragments

  6   métalliques. Nous allons revenir à ce revêtement, cette chemise autour de

  7   la cartouche en cuivre acérée qui se trouve à l'intérieur de cette

  8   personne. Cela n'aurait pas pu se retrouver là sans provoquer une blessure,

  9   n'est-ce pas ?

 10   R.  Oui, mais où est-ce que cela a été trouvé ? Où est-ce que  cela a été

 11   localisé ? La question que je vous pose : Où est-ce que cela se trouve ?

 12   C'est justement cela, il n'inique pas où cela s'est trouvé dans le corps.

 13   Vous comprenez ce que j'essaie de vous dire.

 14   Q.  Oui, mais, moi, je conteste tout simplement le bien fondé de votre

 15   affirmation, lorsque vous nous dites qu'il n'y a aucune base sur laquelle

 16   on peut s'appuyer pour maintenir qu'il s'agit de blessures provoquées par

 17   des balles alors qu'il y a quand même une base assez raisonnable, d'après

 18   ce je pense, pour maintenir qu'il y a eu des blessures provoquées par des

 19   balles. Parce que vous avez à l'intérieur de cette personne cette jaquette

 20   métallique, n'est-ce pas?

 21   R.  Oui, je comprends la façon dont vous formulez cela de façon juridique,

 22   et je comprends pourquoi vous contestez ce que je dis, parce que vous devez

 23   prouver votre thèse. Mais, moi, tout ce que je souhaite faire, c'est

 24   présenter des éléments de preuve au Tribunal, et ce que je vous dis, c'est

 25   que cette conclusion n'est pas la preuve absolue de votre affirmation. Ce

 26   que j'indique c'est que comme dans la majorité des cas, une conclusion peut

 27   toujours être remise en question et il n'y a pas, en fait, vous ne pouvez

 28   pas indiquer de façon catégorique que cela a été infligé, que la blessure a


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  1   été infligée par une arme à feu. Cette jaquette métallique en cuivre a été

  2   identifiée, je sais pertinemment qu'elle vient d'un projectile. Mais, moi,

  3   ce que je vous demande c'est où est-ce qu'elle a été trouvée ? Est-ce

  4   qu'elle était fichée dans l'os ou est-ce qu'elle était fichée dans un reste

  5   de tissu mou, et cetera, et cetera ? Par conséquent, je sais que la fameuse

  6   jaquette métallique, moi, ce que je peux dire c'est qu'elle a pu être, elle

  7   pu arriver par la suite, elle a pu se trouver là par la suite lorsque les

  8   corps ont été empilés les uns sur les autres, voilà ce dont je parle. Je ne

  9   critique pas les conclusions. Tout ce que je dis, c'est que c'est une

 10   conclusion incomplète pour affirmer ce que vous dites. J'ai besoin de trois

 11   secondes sans être interrompu.

 12   Lorsque la momie de Tutankamen a été radiographié en fait en 1980 ou en

 13   1976 pour la première fois, ils ont déterminé qu'il y avait eu une fracture

 14   au niveau de l'os occipital droit, et ce n'est que, c'est seulement il y a

 15   deux ans qu'ils ont placé le même corps de Tutankamen sur un scanner,

 16   qu'ils ont fait un IRM, et qu'ils ont remarqué qu'il n'y avait absolument

 17   pas de fracture au niveau du crâne, mais en même temps, en revanche ils

 18   avaient affirmé en 1976, enfin je ne sais plus quand d'ailleurs, la

 19   première fois qu'une radiographie avait été faite de cette momie, qu'il y

 20   avait bel et bien une fracture du crâne et que cela avait été provoqué par

 21   une blessure encourue lors d'un combat, ce qui n'est absolument pas vrai.

 22   Donc une radiographie est quelque chose qui peut faire l'objet d'un débat

 23   très, très sérieux, et cela doit être pris très au sérieux. Donc là, il y a

 24   une conclusion radiographique qui indique  tout simplement qu'il y a une

 25   jaquette métallique pointue qui se trouve là. Mais où ? Comment était-elle

 26   positionnée ? Voilà ce dont je parle.

 27   Q.  Fort bien. Nous allons poursuivre, Monsieur le Professeur.

 28   Vous avez été très critique, disais-je, de façon générale des rapports


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  1   d'autopsie de l'Accusation, donc je voudrais qu'en quelques minutes vous

  2   nous parliez de vos procédures et de vos normes. La façon dont vous, vous

  3   avez par exemple œuvré lorsqu'on vous a demandé d'examiner des corps en

  4   Bosnie orientale, en 1992. Car vous faisiez partie d'une équipe serbe qui

  5   s'est rendue à Zvornik, le 16 mai 1992, n'est-ce pas ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Et vous vous êtes rendu à cet endroit parce que le ministère de la

  8   Santé serbe avait reçu une demande du juge d'instruction de Zvornik qui

  9   souhaitait que 150 corps soient identifiés, et ces corps avaient été

 10   trouvés à Karakaj et Bratunac, où ils avaient été rassemblés, n'est-ce pas

 11   ?

 12   R.  Là, vous me posez une question à propos de quelque chose qui s'est

 13   passé il y a d'illustre de cela, donc, oui, je le suppose; oui, oui, oui,

 14   oui, nous étions là mais je ne connais pas les détails. Mais je vous en

 15   prie. Notre professeur dirigeait l'équipe à ce moment-là.

 16   Q.  Il s'agissait du Pr Samuilo Pejakovic ?

 17   R.  Oui, le professeur Samuilo Pejakovic.

 18   Q.  Donc vous vous êtes rendu à Karakaj, le 16 mai 1992, et vous avez

 19   examiné 16 corps qui se trouvaient dans des housses mortuaires dans

 20   l'abattoir, n'est-ce pas ?

 21   R.  Oui, oui.

 22   Q.  Et là, vous avez procédé à un examen de base pour déterminer l'âge, le

 23   sexe des personnes et toute caractéristique qui aurait permis d'identifier

 24   ces personnes, n'est-ce pas ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Et vous vous êtes rendu compte que quatre de ces personnes avaient des

 27   éléments d'identification qui permettaient de les identifier comme

 28   Musulmans.


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  1   R.  Croyez-moi lorsque je vous dis que je ne me suis absolument pas informé

  2   des détails. Certes, j'ai fourni une déclaration à ce sujet mais je ne me

  3   souviens pas des détails. Alors peut-être que vous pourriez me donner des

  4   informations, et je pourrais confirmer tout ce que j'ai signé. Mais bon, je

  5   sais que cela s'est passé ainsi mais vous savez, je ne me souviens pas des

  6   détails. N'oublions pas que cela s'est passé il y a plus de 20 ans.

  7   Q.  Fort bien. Donc vous avez effectué un examen de base, mais vous n'avez

  8   pas procédé à une autopsie sur ces corps, n'est-ce pas ?

  9   R.  Non, nous n'avons pas fait d'autopsie.

 10   Q.  Donc il n'y a pas de rapport d'autopsie officielle ?

 11   R.  Non. Je crois qu'il y a des photographies, quelques photographies. Je

 12   pense même avoir montré des photographies que nous avions faites afin

 13   justement d'essayer d'identifier ces personnes. Mais bon, il y a même plus

 14   que cela, je pense que nous les avons montrées à l'un de vos enquêteurs.

 15   Q.  Le Pr Pejakovic donc s'est rendu à Bratunac pour regarder une centaine

 16   de corps qui se trouvaient à l'école primaire là-bas, n'est-ce pas ?

 17   R.  Oui, oui, il est allé seul. Et d'après ce qu'il m'a dit, enfin d'après

 18   ce qu'il nous a dit à tous, cela s'est passé dans la salle de gymnastique

 19   de l'école élémentaire ou primaire, bon, c'était l'été, la phase de

 20   putréfaction était déjà très avancée. Donc bon il y avait quand même, les

 21   gens étaient préoccupés parce qu'ils pensaient qu'une infection pourrait se

 22   propager. Donc lui-même, il a dit qu'il fallait les inhumer, les enterrer

 23   le plus rapidement possible pour empêcher cette éventualité de l'infection

 24   qui se propagerait. Voilà ce dont je me souviens à propos de cette école

 25   élémentaire. Mais en tant qu'équipe avec le Pr Pejakovic, nous, nous ne

 26   sommes pas allés là-bas.

 27   Q.  Bien. Et donc une fois de plus, cette équipe serbe a été envoyée, elle

 28   n'a pas effectuée d'autopsie. Le Pr Pejakovic a dit, mettez ces corps dans


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  1   une fosse, n'est-ce pas ?

  2   R.  Oui, oui, c'est justement cela. Et je pense, bon, pour que tout soit

  3   bien, bien clair, je vous dirais que je ne me souviens plus de la date mais

  4   je vous dirais quand même que tout cela a commencé de façon assez

  5   chaotique. Donc nous avons obtenu des informations, une demande d'aide pour

  6   que nous aidions ces gens là-bas, sur le terrain, pour que quelque chose

  7   soit fait, c'était toujours la Yougoslavie à l'époque, les compétences

  8   étaient du domaine des ministères de la république. Donc il y a eu en

  9   quelque chose, il y avait une sorte de juridiction militaire, et c'est là

 10   que le juge d'instruction nous a donné un ordre : Est-ce que vous en tant

 11   qu'expert vous pouvez nous aider ? Que devrions-nous faire de toutes ces

 12   personnes que nous avons trouvées étaient mortes dans les rues ? Et j'ai

 13   dit : Eh bien, dans un premier temps, il faudrait voir combien de corps il

 14   y a, il faudrait les photographier, essayer de les identifier, et ensuite

 15   les inhumer. Voilà comment les choses se sont passées. Ensuite, ils nous

 16   ont dit : Bon, il y a quelques personnes mortes là-bas, est-ce que vous

 17   pouvez faire quelque chose ? Donc nous avons dit : Oui, fort bien. Voyons

 18   si nous pouvons les photographier. Et si nous pouvons avoir les paramètres

 19   de base, on verra si nous pouvons conclure s'il s'agit de femmes ou

 20   d'hommes, déterminer leur taille. Et ils ont dit : Ils se trouvent dans une

 21   école à Bratunac, et là, à Bratunac, il y a un grand nombre de corps. Est-

 22   ce que vous pouvez faire quelque chose ? Nous avons dit : Mais nous ne

 23   pouvons aller là-bas. Nous ne savons pas ce dont il s'agit. Nous devons

 24   avoir une ordonnance d'un tribunal pour procéder à une autopsie. Nous ne

 25   pouvons pas nous lancer dans des autopsies sans ordonnance des tribunaux.

 26   Donc, voilà tout cela a été terminé en une journée, et nous n'avons pas

 27   effectué d'autopsies. La seule chose que nous avons faite, c'est que nous

 28   les avons photographiées, ces personnes, à l'endroit où elles se trouvaient


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  1   et nous les avons examinées. Nous avons même trouvé certains documents

  2   d'identité sur certaines, mais je ne me souviens pas des détails.

  3   Q.  Fort bien. Mais le fait est que vous et vos collègues avez reçu la

  4   demande d'examiner ces corps, et vous n'avez pas fait de rapports

  5   d'autopsie, il n'y a pas de description des blessures, de la façon dont ces

  6   blessures auraient pu être provoquées, la cause des décès n'a pas été

  7   déterminée, rien de tout cela n'a été fait, n'est-ce pas ?

  8   R.  Non. Enfin, en tout cas, pas pour autant que je le sache.

  9   Q.  Mais vous conviendrez alors que même si nous acceptons vos critiques

 10   relatives aux rapports d'autopsie de l'Accusation - ce qui n'est pas le cas

 11   d'ailleurs, puisque nous ne les acceptons pas - vous conviendrez, disais-

 12   je, qu'un rapport d'autopsie accompagné d'une description succincte,

 13   certes, mais d'une description quand même et de quelques suppositions

 14   définies et précisées est une situation qui est infiniment supérieure à la

 15   situation où vous n'avez absolument aucun rapport d'autopsie, n'est-ce pas

 16   ?

 17   R.  Oui, naturellement, bien sûr. Dans des circonstances normales, certes.

 18   Q.  Alors, j'aimerais maintenant vous posez une question à propos de vos

 19   éléments de preuve relatifs à ce qui a été fait au niveau des fosses. Et

 20   j'aimerais dans un premier temps m'intéresser à ce que vous avez dit à

 21   propos de la déposition du Pr Wright à ce sujet. Vous avez dit lundi dans

 22   le cadre de votre déposition à la page 41 752 que le Pr Wright ne pouvait

 23   pas exclure la possibilité que l'on avait ajouté des choses dans les

 24   fosses. Vous vous en souvenez de cela ?

 25   R.  Oui, oui.

 26   Q.  Vous avez dit que le Pr Lawrence ne pouvait pas exclure la possibilité

 27   que les fosses avaient été complétées ou alimentées ?

 28   R.  D'après mes notes, c'est effectivement, si je m'en souviens bien, ce


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  1   que disent mes notes.

  2   Q.  Alors, Professeur, vous avez raison de dire que le Pr Lawrence a dit à

  3   la page du compte rendu d'audience 22 486 que le degré de variation de la

  4   décomposition était sans doute dû à l'endroit où se trouvait la fosse, mais

  5   il ne pouvait pas déterminer l'heure de la mort, donc il y avait

  6   différentes options possibles. Ensuite, il a déclaré à différentes

  7   occasions qu'il s'agissait du domaine d'expertise, en réalité, du Pr Wright

  8   et qu'il fallait lui poser les questions à lui.

  9   Vous êtes un pathologiste et médecin légiste, Professeur, admettez-vous -

 10   comme le Pr Lawrence - que la question de savoir si les fosses ont été

 11   alimentées est une vraie question archéologique ou non ?

 12   R.  Eh bien, voyez-vous, je vous ai expliqué dès le début quelle était

 13   l'école qui était la mienne en tant que médecin légiste. Je ne pense pas

 14   que le Pr Lawrence ait suivi les mêmes études et qu'il soit allé à la même

 15   école que moi. Et donc, en tant que pathologiste légiste, je peux dire si,

 16   oui ou non, la fosse a été alimentée en me fondant essentiellement sur la

 17   décomposition des corps. Alors, un archéologue aurait des connaissances

 18   particulières ayant trait à l'exploration du terrain, au fait de retrouver

 19   différents types de sol, et c'est sur cette base-là qu'il peut déterminer

 20   si, oui ou non, quelque chose a été ajouté par la suite. Mais en tant

 21   qu'expert légiste, je trouve que ce type d'information est important car il

 22   permet d'établir le niveau de décomposition au niveau des corps et si nous

 23   sommes en présence de putréfaction qui est une indication de différentes

 24   heures de décès et d'enfouissement. Donc je crois que je suis plus

 25   compétent dans ce domaine-là que l'archéologue, qui a une vision plus

 26   étroite. Alors, je dois voir son rapport ainsi que le rapport d'autopsie

 27   pour pouvoir l'établir. Je pense que l'archéologue est en mesure d'établir

 28   si, oui ou non, il s'agit d'une fosse primaire ou secondaire en analysant


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  1   les objets qui ont été retrouvés dans un autre endroit, mais j'affirme

  2   qu'il revient au pathologiste légiste de déterminer ces questions-là.

  3   Q.  Est-ce que vous êtes d'accord pour dire que, pour ce qui est de la

  4   question précise de savoir si, oui ou non, il y a un seul orifice qui est

  5   exhumé et un seul objet déposé à l'intérieur de cette orifice, est-ce que

  6   c'est une question qui relève des travaux de l'archéologue ?

  7   R.  La question doit être formulée de la manière suivante : Y a-t-il

  8   quelque chose dans l'orifice, dans le trou, ou y a-t-il rien ? Y a-t-il des

  9   matériaux biologiques, un homme, un animal, une plante, et dans ce cas il y

 10   aurait d'autres domaines de spécialités qui seraient requis outre

 11   l'archéologue. Mais si vous parlez de fosses communes où les corps ont été

 12   enfouis, il s'agit de délimiter la fosse, les paramètres de la fosse, les

 13   caractéristiques du terrain, à savoir si quelque chose a été élargi par la

 14   suite ou pas. Mais pour notre examen de pathologiste, à savoir l'examen des

 15   corps et des parties de corps, on ne peut pas faire grand-chose. Cela

 16   revient à nous. C'est ce que l'on nous a enseigné et c'est ainsi que nous

 17   procédons. Nous faisons partie du personnel auxiliaire lorsqu'il s'agit de

 18   mener une enquête sur une fosse commune.

 19   Q.  Alors, soyez un peu pus précis. Lorsqu'un archéologue analyse une

 20   fosse, s'il y a des modifications au niveau de la structure des sols et si,

 21   oui ou non, cet endroit précis a été remué à une occasion ou à plusieurs

 22   occasions, cela relève du rôle de l'archéologue, n'est-ce pas, de

 23   déterminer cela et d'analyser cela en particulier, d'analyser la fosse et

 24   de regarder si, oui ou non, le sol a été remué plus d'une fois ou une fois

 25   ?

 26   R.  D'après mon expérience sur le terrain, les meilleurs résultats sont

 27   obtenus lorsque l'archéologue commence à explorer la zone où se trouve la

 28   fosse et que, accompagné d'experts légistes et d'hommes de la police


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  1   scientifique, les corps sont levés et la surface du sol sous les corps est

  2   étudiée, et ce n'est que lorsque la fosse est complètement vide que

  3   l'archéologue est à même d'explorer cet endroit. Et c'est de la meilleure

  4   approche pour une enquête lorsqu'il faut enquêter sur une fosse et lorsque

  5   plus d'un corps a été levé.

  6   Q.  Monsieur le Professeur, vous avez dit que le Pr Wright, dans sa

  7   déposition, a dit qu'il ne pouvait pas exclure le fait que Glogova 1, que

  8   cette fosse avait été alimentée. Je vais vous lire ce qu'a dit le Pr Wright

  9   le 1er décembre 2011, page du compte rendu d'audience 22 313. M. Karadzic

 10   lui a posé la question de savoir s'il a trouvé des fosses qui avaient été

 11   alimentées. Et il a répondu en disant :

 12   "Non. Qu'est-ce que vous entendez par la question 'alimentée' ? Je n'ai vu

 13   aucune fosse qui, d'après mon interprétation, aurait été ouverte aux fins

 14   d'y déposer davantage de corps…"

 15   Ensuite, il a poursuivi en disant et a dit plus particulièrement :

 16   "Je ne l'ai pas vu à Glogova. Je ne l'ai pas vu à aucune des fosses

 17   attribuées aux événements de Srebrenica. Mais une de ces fosses dont nous

 18   parlons et que j'ai vue en Bosnie, mais c'était une fosse qui datait de

 19   1992…"

 20   Donc le Pr Wright a dit tout à fait le contraire dans sa déposition. Il y a

 21   dit tout à fait le contraire de ce que vous avez dit, vous, n'est-ce pas ?

 22   R.  Eh bien, précisons ce point.

 23   Q.  Il n'y a pas grand-chose à préciser, Monsieur le Professeur. Vous avez

 24   dit qu'il ne pouvait pas écarter l'idée ou le fait que les fosses aient pu

 25   être alimentées. Et le Pr Wright a dit de façon très catégorique :

 26   "Je n'ai rien vu de ce type dans les fosses que l'on attribuait aux

 27   événements à Srebrenica…"

 28   R.  Je ne sais pas si nous parlons ici de la même chose. Le Pr Wright a dit


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  1   qu'il ne pouvait pas écarter le fait que certaines fosses avaient été

  2   alimentées plus tard. Alors, je ne sais pas ce que dit le compte rendu

  3   d'audience. Je l'ai entendu dire cela, il a dit qu'il ne pouvait pas

  4   écarter cette idée-là. Mais ce que Dusan Janc a écrit dans son rapport

  5   confirme ce que j'ai dit aujourd'hui, à savoir que des corps ont été

  6   déposés par la suite dans certaines fosses, ce qui exclut --

  7   Q.  Nous allons y venir dans quelques instants, Monsieur le Professeur.

  8   Donc le Pr Wright a dit dans sa déposition que pour ce qui était des fosses

  9   qu'il avait exhumées, il n'a constaté aucune preuve indiquant que ces

 10   fosses auraient été ouvertes et alimentées. Et M. Fredy Peccerelli a dit la

 11   même chose à propos de la fosse Lazete 1, page du compte rendu d'audience

 12   22 741, où il a dit qu'il n'y avait aucune preuve que Lazete 1 avait été

 13   alimentée avec d'autres corps. A la page 48.

 14   R.  Oui, Peccerelli, je connais.

 15   Q.  Vous dites dans votre rapport d'août 2009 que vous avez constaté que le

 16   rapport de M. Peccerelli concernant Lazete 1 était acceptable et exact.

 17   Donc vous êtes d'accord pour dire que sa déposition, où il a indiqué que

 18   rien ne permettait de prouver que cette fosse avait été alimentée ou qu'on

 19   avait déposé d'autres corps dans cette fosse, était exacte et acceptable,

 20   n'est-ce pas ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Et le Pr Haglund, qui a dirigé les exhumations à Branjevo, Lazete 2A et

 23   2B et Cerska, eh bien, M. Karadzic lui a posé les mêmes questions à la page

 24   du compte rendu d'audience 23 913. Et il a dit :

 25   "Non, car la plupart, on n'avait rien ajouté à ces fosses. On avait fait

 26   sortir des corps. On n'avait pas ajouté d'autres corps ou on n'a pas mis

 27   d'autres corps dans d'autres fosses…

 28   "Rien ne permettait d'indiquer qu'il y avait des corps qui étaient là


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  1   qui provenaient d'autres guerres ou d'autres inhumations. Nous n'avons pas

  2   pu constater ceci au niveau de nos conclusions."

  3   Page du compte rendu d'audience 23 914, ensuite, il poursuit en disant :

  4   "Il est clair que nous n'avions pas beaucoup d'éléments sur lesquels nous

  5   reposer à l'époque. Lorsqu'il y a des dépouilles dans les fosses et qu'il y

  6   avait une personne en bas, une personne au milieu et une autre personne en

  7   haut, que ces personnes étaient toutes imbriquées les unes autour des

  8   autres et qu'il n'y avait absolument pas de couches mais que ces personnes

  9   ont simplement été jetées dans la fosse à peu près au même temps."

 10   Donc vous avez ces dirigeants de différentes équipes d'exhumation en 1996,

 11   1998, 1998 [comme interprété] et l'an 2000, et toutes ces personnes disent

 12   qu'il n'y a pas de preuve au niveau des fosses que ces personnes ont

 13   exhumées indiquant que ces fosses aient été alimentées par d'autres corps

 14   ou qu'on y ait ajouté d'autres corps. Donc vous êtes d'accord pour dire que

 15   ces experts qui ont dirigé ces inhumations sont en bonne posture pour

 16   déterminer cela, n'est-ce pas ?

 17   R.  Peut-être que ces personnes ne sont pas à même d'examiner ces

 18   questions-là; mais à la lumière des analyses que j'ai faites moi-même, ça

 19   n'est pas ce que l'on peut dire. Que ces personnes aient donné leurs

 20   conclusions définitives et leurs avis, ceci ne découle pas de l'état des

 21   choses. Si vous retrouvez des corps à différents stades de décomposition

 22   dans une seule fosse, cela indique très certainement qu'il y a eu

 23   différentes heures de décès et différents moments d'enfouissement. Dusan

 24   Janc précise exactement cela, à savoir que des corps y ont été placés à

 25   différents moments. Et mon point de départ était la déclaration de Dusan

 26   Janc. C'est une conclusion tout à fait légitime, à la manière dont on m'a

 27   dit que je ne pouvais pas arriver à ces conclusions, parce que, d'après

 28   eux, il y avait suffisamment de preuves qu'il y avait différents moments où


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  1   ces personnes avaient été inhumées. Parce que vous ne pouvez pas enterrer

  2   300 personnes en une seule journée, donc cela a dû se faire à différents

  3   moments.

  4   Ça n'est pas que leur déclaration que j'ai étudiée. J'ai étudié les

  5   analyses individuelles de ces personnes et j'ai regardé ce sur quoi ils se

  6   sont fondés sur leurs conclusions, mais j'ai constaté que leurs conclusions

  7   étaient souvent sans fondement et non justifiées. Et comme je l'ai indiqué

  8   dans le cas de Ravnice, il y a une conclusion qui a été présentée, mais je

  9   ne sais pas comment l'interpréter. Voilà ce que je veux dire. Alors, je

 10   veux parler de squelettisation. La squelettisation ou la momification

 11   lorsqu'il n'y a pas de tissus mous. La momification lorsque le tissu est

 12   desséché. La saponification et d'autres degrés de putréfaction lorsque tous

 13   ces éléments se retrouvent en un seul et même endroit -- comme l'a dit le

 14   Pr Lawrence, cela est le reflet du degré de putréfaction dans la fosse

 15   elle-même. Alors, pour répondre à la question de savoir si ceci permet

 16   d'établir l'heure de la mort et permet de dire qu'il y a différentes heures

 17   de mort et différents moments où ces corps ont été inhumés, il n'a pas

 18   exclu cette possibilité-là. Donc je parle ici en qualité d'expert légiste.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Le compte rendu.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] La ligne 13, et je crois qu'il est précisé

 22   qu'il faut répéter, le témoin a dit que ces trois degrés de putréfaction

 23   ont été retrouvés dans une seule et même fosse.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 25   M. MITCHELL : [interprétation]

 26   Q.  Monsieur le Professeur, vous revenez sans cesse au corrigendum de Dusan

 27   Janc, alors je vous propose de regarder cela maintenant. C'est la pièce

 28   D1975.


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  1   Je souhaite être très clair, Monsieur le Professeur, vous ne contestez pas

  2   le fait que la fosse de Glogova contenait des corps de l'école Vuk Karadzic

  3   à Bratunac, des corps de Potocari, de Konjevic Polje, et d'un camion rempli

  4   de corps le long de la route Bratunac-Konjevic Polje. Mais vous, vous dites

  5   que ces corps ont été déposés à des moments différents ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  [aucune interprétation]

  8   R.  C'est ce qui découle du corrigendum, la correction apportée à son

  9   rapport. C'est ce qui en découle.

 10   Q.  Alors veuillez regarder ce corrigendum, d'une part, il n'est dit que

 11   les corps ont été déposés à différents moments, n'est-ce pas ? C'est votre

 12   hypothèse à vous. Si vous regardez le deuxième alinéa, on peut lire :

 13   "Les corps d'individus d'endroits outre que le dépôt de Kravica ont

 14   également été emmenés dans les fosses de Glogova … "

 15   Rien n'indique ici que quelque chose s'est passé après, après que les corps

 16   de l'entrepôt de Kravica aient été placés à cet endroit-là ?

 17   R.  Et quand les corps ont-ils été emmenés à l'entrepôt de Kravica ? Au

 18   moment où ces autres corps ont été emmenés par camions ? Je vous pose la

 19   question. Quelle est cette conclusion "un camion entier rempli de corps" ?

 20   Qu'est-ce que cela signifie et les corps étaient déjà inhumés ? --

 21   Q.  [aucune interprétation]

 22   R.  -- et ensuite on les a fait venir. Comment est-ce que vous interprétez

 23   cela ?

 24   Q.  Je vais vous dire exactement comment j'interprète cela. Regardez les

 25   trois déclarations de témoin pour comprendre exactement à quel moment ces

 26   corps ont été inhumés ?

 27   R.  Puis-je dans ce cas savoir ce qu'ont dit ces témoins ? Je ne dispose

 28   que de ce rapport-ci. Les corps d'individus d'endroits autres que


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  1   l'entrepôt de Kravica ont également été emmenés dans la fosse commune de

  2   Glogova. On les a transportés jusque-là. Cela a duré un certain temps. Et

  3   ensuite on parle de Bratunac jusqu'à 80 corps, Potocari, Konjevic Polje,

  4   Bratunac est ici, Konjevic Polje est là, est-ce que vous pensez que tout

  5   ceci s'est fait à un jour ou plus tard ?

  6   Q.  [aucune interprétation]

  7   R.  -- alors son rapport se fonde également sur --

  8   Q.  -- alors avant que vous ne vous livriez trop à des conjectures, ces

  9   trois témoins sont très clairs --

 10   R.  Non, pas de conjecture.

 11   Q.  Les témoins sont très clairs lorsqu'il parle des corps qui ont été

 12   déposés dans la fosse de Glogova lorsque cette fosse était ouverte entre le

 13   14 et le 17 juillet environ, ce qui veut direction que la déposition du Pr

 14   Wright, à savoir que la fosse de Glogova n'a pas été alimentée d'autres

 15   corps par la suite est exacte ?

 16   R.  Je ne fonde pas mon opinion sur des déclarations de témoin. Comment le

 17   Pr Wright dans ce cas expliquerait-il les différents degrés de putréfaction

 18   ? Il affirme qu'il n'y a pas eu d'autre corps déposé par la suite. Et donc

 19   si c'était le cas voici ma question : Si tous ces corps avaient été inhumés

 20   en même temps, comment peut-on les inhumer pendant trois jours et comment

 21   expliquez-vous le fait que les degrés de putréfaction étaient différents ?

 22   Ceci signifie que l'heure de la mort était différente ou que l'on a fait

 23   venir ces corps d'autres endroits, ce qui est confirmé dans ce cas. Donc si

 24   quelqu'un était inhumé dans la fosse le 15 juillet, comment le corps

 25   aurait-il pu être squelettisé [comme interprété] à moins que la personne ne

 26   soit décédée six mois plus tôt.

 27   Donc je vous parle en tant qu'expert légiste, et non pas seulement en tant

 28   qu'archéologue. La déclaration de témoin est quelque chose que l'on peut


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  1   utiliser pour établir l'heure approximative de la mort; cependant, j'avance

  2   tout ceci sur la base des documents que j'ai reçus et je parle en qualité

  3   d'expert les victimes qui ont été levées ou les corps des victimes levés

  4   dans ces fosses n'ont pas -- ces corps n'ont pas été inhumés en l'espace de

  5   cinq jours entre le 10 et le 19 juillet 1995, mais il y avait là des gens

  6   qui sont morts bien avant à l'extérieur du secteur de Srebrenica qu sont

  7   morts en 1992 et 1993. Voilà ce que je veux vous dire. Et j'essaie de

  8   présenter aux Juges de la Chambre ou de parler aux Juges de la Chambre du

  9   fondement des conclusions que je tire en tant qu'expert légiste.

 10   Q.  Alors, moi, je vais vous dire ce que le Pr Wright avait a adire sur les

 11   différents niveaux degrés de putréfaction qui d'après vous ne peuvent

 12   qu'indiquer que les corps ont été déposés dans la fosse à différents

 13   moments. A la page compte rendu d'audience 22 307 - et vous étiez dans le

 14   prétoire à ce moment-là - et il a dit :

 15   "Qu'il y avait certainement des différences au niveau des stades de

 16   décomposition des corps et cela dépendait de l'endroit où l'individu ou le

 17   corps était déposé par rapport à la masse des corps. Si, par exemple, un

 18   corps est inhumé dans la fosse au bord, à ce moment-là, le corps se

 19   putréfie beaucoup plus facilement et le corps est squeletisé beaucoup plus

 20   rapidement que pour un corps qui se trouve au milieu de l'ensemble de la

 21   masse des corps. Donc tous ces corps ne sont pas au même niveau de

 22   décomposition, mais il y a des différences au niveau des degrés de

 23   décomposition qui peuvent être interprétés au vu d'un endroit où le corps

 24   gise [comme interprété] dans la fosse par rapport à la masse d'autres corps

 25   lorsqu'ils ont été exécutés."

 26   Donc admettez-vous qu'il y a différents niveaux de décomposition et que

 27   cela ne signifie pas forcément que les corps ont été inhumés à différents

 28   moments; cela peut être dû à l'endroit où est retrouvé le corps dans la


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  1   fosse commune, n'est-ce pas ?

  2   R.  Alors accordez-moi quelques secondes pour je puisse retrouve quelque

  3   chose. C'est précisément ce qu'a dit le Pr Lawrence cela portait sur la

  4   putréfaction dans les fosses communes et l'emplacement des corps dans la

  5   fosse et que cela avait une incidence sur les niveaux de décomposition et

  6   cela est exact. Cependant, ce que vous avez lu après, vous avez dit que

  7   cela dépendait de l'endroit où on avait tiré sur l'individu, cela n'est pas

  8   exact, car tous les corps qui étaient dans la fosse ne faisaient pas

  9   l'objet d'exécution.

 10   Q.  [aucune interprétation]

 11   R.  Alors le troisième point que j'essaie de faire valoir --

 12   Q.  Je n'ai pas parlé de l'endroit où on avait tiré sur les individus.

 13   Comme l'a dit le Pr Wright, je parle de l'emplacement des corps à

 14   l'intérieur de la fosse qui peut avoir une incidence sur le degré de

 15   décomposition des corps, n'est-ce pas ?

 16   R.  Oui, d'accord, mais vous avez lu autre chose après. Est-ce que vous

 17   pourriez me lire exactement ce que le Pr Lawrence a dit ?

 18   Q.  Je ne sais pas. Je n'ai pas parlé du tout de l'endroit où les individus

 19   ont été tués, mais je peux vous citer de qu'a dit le Pr Lawrence au point à

 20   la page du compte rendu d'audience 22 482, et encore une fois, vous étiez

 21   là. Il a dit :

 22   "Il y a très souvent de grandes variations au niveau de la décomposition

 23   des corps. Les travaux effectués sur les fosses  communes après la Deuxième

 24   Guerre mondiale attestent de cela. A l'extérieur de la fosse, les corps se

 25   décomposent plus rapidement que par rapport au milieu de la fosse, et ceci

 26   est dû tout simplement à leur proximité à l'air, à l'eau. Et lorsqu'on est

 27   au centre de la fosse, on a tendance à constater moins de décomposition

 28   parce qu'il y a moins d'oxygène. Et donc, des variations sont constatées,


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  1   et ce n'est pas inhabituel dans une fosse commune."

  2   Je vais vous reposer la question, Professeur, êtes-vous d'accord pour dire

  3   que les différents niveaux de décomposition peuvent être expliqués par

  4   différentes conditions à l'intérieur d'une seule et même fosse ?

  5   R.  Oui. Alors, les deux procès auxquels j'ai assisté, le Pr Lawrence a

  6   indiqué que la variation de la putréfaction indique différents moments du

  7   décès, heure du décès, et différents moments où les corps ont été inhumés.

  8   Et en réponse à la question posée par M. Karadzic, il a dit, Oui, et c'est

  9   ce que j'affirme devant les Juges de la Chambre. Il ne s'agit pas

 10   simplement de parler de la fosse ou de la position des corps dans la fosse,

 11   qui ont une incidence, mais il y a différentes heures de décès et

 12   différents moments où les corps ont été inhumés. Il faut tenir compte de

 13   cela. Lorsqu'on parle de différentes heures de décès, c'est quelque chose

 14   dont nous ne tenons pas compte. L'heure du décès ne doit pas coïncider avec

 15   l'heure de l'inhumation. Ça, c'est tout à fait clair. La mort a pu avoir

 16   lieu de nombreux mois avant, et ensuite le corps a été enterré avec les

 17   autres corps. Et si le décès a eu lieu bien des mois avant, à ce moment-là

 18   nous sommes en présence de décomposition, squelettisation, momification et

 19   saponification. Et si vous prenez ce corps et que vous l'inhumez en même

 20   temps que trois ou quatre autres dans une seule et même fosse, l'heure du

 21   décès ne va pas correspondre à ces autres heures de décès. C'est ce que je

 22   dis.

 23   M. Karadzic a posé cette question et la réponse a été donnée le 8

 24   décembre 2012. Et j'ai écouté cela. Donc j'admets cette partie-là de ses

 25   propos, ceci a eu une incidence sur la putréfaction. Mais permettez-moi

 26   d'ajouter cet autre élément car, après tout, cela fait partie de mon

 27   domaine d'expertise. Je ne parle pas d'autre chose.

 28   Q.  Bon. Si vous acceptez le témoignage au sujet de ceux qui étaient


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  1   chargés des exhumations et qui ont dit que chacune de ces fosses avait été

  2   créée à un moment donné et que tous les corps y ont été ensevelis en même

  3   temps, je pense que si la situation se présente comme telle, Professeur, la

  4   raison pour laquelle on voit des degrés différents de putréfaction dans la

  5   fosse, c'est uniquement dû au fait qu'à l'intérieur de cette fosse il y a

  6   des conditions différentes qui s'y présentent.

  7   R.  Certes. Et quelle est votre question ?

  8   Q.  Je vais vous la reposer. Si l'on accepte les témoignages de ceux qui

  9   ont dirigé les exhumations et qui ont dit que les corps y ont été ensevelis

 10   en une fois, si vous acceptez ceci comme étant une vérité, dans ce cas

 11   concret, les différents degrés de décomposition des corps dans une fosse

 12   peuvent être expliqués par le fait qu'il s'agit d'une fosse commune et qu'à

 13   l'intérieur de celle-ci il y a des conditions différentes qui s'y

 14   présentent ?

 15   R.  Ça, c'est une construction phénoménale de la question. Si je dis "oui",

 16   je confirme votre thèse. Je dirais "oui", mais en sus de tout ce que j'ai

 17   dit jusqu'à présent. Les degrés différents de putréfaction des corps dans

 18   une seule fosse lorsque les victimes ont été ensevelies en même temps, ça

 19   ne veut pas forcément dire que cela n'est que l'expression des conditions

 20   qui règnent dans la fosse. C'est aussi dû au moment du décès, aux modalités

 21   du décès et aux conditions dans lesquelles s'était trouvée la dépouille

 22   avant que d'être ensevelie. Et avec ce complément qui a fait l'objet de

 23   l'approbation de M. Lawrence, je tomberais d'accord avec ce que vous dites.

 24   L'une des conditions qui influent sur le degré de décomposition des corps,

 25   c'est l'état de la fosse. D'accord. La situation dans la fosse et la

 26   position du corps dans la fosse influent.

 27   D'accord. Mais j'ajoute ce que je viens d'ajouter.

 28   Q.  Passons maintenant à un sujet autre, votre théorie au sujet de la


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  1   corrélation qui existe entre les fosses primaires et secondaires pour ce

  2   qui est des ADN. Vous avez témoigné pour dire à la page 41 751 du compte

  3   rendu que si une partie du corps dans une fosse secondaire n'a pas une

  4   corrélation ADN avec la fosse primaire, cette fosse secondaire est en fait

  5   une fosse primaire pour ce qui est de cette partie-là du corps. Vous ai-je

  6   bien compris ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Bien. A plusieurs endroits, vous avez précisé --

  9   R.  Excusez-moi un instant. C'est peut-être la fosse primaire pour ceux des

 10   corps qui n'ont pas de corrélation ADN avec une autre fosse primaire.

 11   Q.  Bon. Par exemple, dans votre rapport le plus récent, daté d'août 2012,

 12   vous dites qu'on peut le voir - page 18 de la pièce 65 ter 1D25488 - et là,

 13   vous dites que :

 14   "Les autres corps de ces fosses qui ne sont pas placés en corrélation avec

 15   les autres corps du point de vue de l'ADN ont été enterrés là-bas à titre

 16   primaire. En d'autres termes, il n'y a pas d'élément de preuve démontrant

 17   que ces autres corps auraient été déplacés."

 18   C'est ce que vous avez déclaré, n'est-ce pas ?

 19   R.  Oui. C'est l'élément crucial de mon témoignage, et je serais content de

 20   le redire.

 21   Q.  Mais vous n'étiez pas conscient du fait que c'était déjà un fait jugé

 22   pour ce qui est des liens balistiques liés, par exemple, à la nature des

 23   sols dans les fosses communes à tire primaire et à titre secondaire ?

 24   R.  Est-ce que vous parlez de l'affaire Vujadin Popovic, ici ?

 25   Q.  Non. Ce que je vous ai demandé, c'est la chose suivante. Vous avez dit

 26   que s'il n'y avait pas de corrélation ADN, il n'y a pas de preuve qui

 27   dirait que les autres corps ont été déplacés. Moi je vous demande si vous

 28   saviez qu'il y a eu des corrélations de faites entre les fosses du point de


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  1   vue balistique, nature des sols, et cetera.

  2   R.  Je sais que les constats balistiques et certains objets ont permis

  3   d'établir des corrélations entre des fosses primaires et des fosses

  4   secondaires. Ça, c'est exact. Il y a des corrélations entre ces fosses

  5   primaires et secondaires. Ce que j'affirme, cependant, c'est que dans ces

  6   fosses secondaires, puisqu'il y a un lien d'établi avec la fosse primaire,

  7   la corrélation ADN nous parle du matériel biologique et ce matériel

  8   biologique ne peut être lié qu'à une seule personne où il y a corrélation

  9   ADN. Mais tous les autres corps - et il y en a eu des centaines - ne sont

 10   pas liés à la fosse primaire. C'est ce que je vous dis.

 11   Si nous avons dix corrélations, par exemple, entre une fosse secondaire et

 12   une fosse primaire et/ou une fosse primaire et une autre fosse primaire,

 13   vous pouvez me poser la question de savoir pourquoi, mais parce que le

 14   corps a été scindé en deux. Mais les autres corps qui se trouvent dans des

 15   fosses secondaires ne sont pas nécessairement venus d'une fosse primaire,

 16   indépendamment des projectiles qu'on a retrouvés. C'est ce que je vous ai

 17   dit et c'est cela qui est exact.

 18   Q.  Vous seriez d'accord avec moi pour dire que l'une des raisons pour

 19   lesquelles il n'y a pas de corrélation ADN entre une fosse primaire et

 20   secondaire pour un corps particulier, c'est parce que ce corps a été

 21   extrait entièrement d'une fosse primaire et déplacé dans son intégralité

 22   vers une fosse secondaire ? Vous seriez d'accord avec moi ?

 23   R.  Ça, c'est l'une des possibilités. Absolument.

 24   Q.  On a pu voir dans votre rapport, Professeur, que vous citez certains

 25   témoins. Par exemple, la déclaration du témoin qui était un commandant de

 26   ce peloton de la Brigade de Zvornik qui était sur la route, Damjan

 27   Lazarevic, qui non seulement a été à Orahovac, Kozluk, ferme de Branjevo

 28   pendant les premiers ensevelissements, mais il a été là-bas lorsque ces


Page 41889

  1   corps ont été extraits de là-bas pour être ré ensevelis. Est-ce que vous

  2   avez lu cette déclaration ?

  3   R.  Moi je ne me suis pas servi de cette déclaration. Je ne l'ai pas. Je ne

  4   sais pas du tout de quoi vous parlez, là.

  5   Q.  Donc vous n'avez pas eu en votre possession des déclarations de témoins

  6   qui ont, en fait, décrit la façon dont les fosses primaires ont été

  7   excavées avec transfert des corps vers des fosses secondaires ?

  8   R.  Non. Les seules déclarations que j'ai eues en ma possession dans

  9   l'affaire Vujadin Popovic, je l'ai transmis ici, dans ce cas où les témoins

 10   ont fait des déclarations, et j'ai donné les références. Ils ont parlé de

 11   la façon dont ils ont opéré une percée, en se battant ou en ne se battant

 12   pas, pour aller de Srebrenica vers ailleurs. Et j'ai émis des réserves,

 13   j'ai dit que ce n'était pas à moi d'en juger. Je peux prendre en

 14   considération leur témoignage, mais c'est aux Juges qu'il appartient de

 15   soupeser la valeur. Moi j'ai pris en considération la façon dont des gens

 16   ont péri, quelles sont les armes à feu qui ont été utilisées. Et ce qu'il

 17   importait, c'est de savoir si dans les environs de Srebrenica, il y a eu à

 18   cette période-là, entre le 11 le 19 juillet, lorsqu'ils ont commencé à

 19   opérer cette percée en direction des territoires libres à l'extérieur de

 20   Srebrenica, ils sont donc tombés sur un grand nombre de corps qui étaient

 21   en phase de décomposition. Alic Hasan, le témoin que j'ai cité, il l'a

 22   confirmé. Et pour moi, c'est très important, c'est crucial, parce que c'est

 23   un témoin qui a témoigné, et j'ai ici le numéro ERN, il a dit qu'il avait

 24   trouvé un groupe de 100 personnes originaires de Srebrenica tuées. Et un

 25   autre a dit que suite à des explosions d'obus et des tirs d'artillerie, une

 26   colonne à eux qui comptait 3- à 4 000 personnes qui se retiraient par la

 27   forêt et qui ont été attaquées. Trois ou 4 000 personnes passent par la

 28   forêt et sont attaquées --


Page 41890

  1   Q.  Je dois vous interrompre, là.

  2   R.  Mais je n'ai que ces témoignages de ces témoins-là, et je n'ai personne

  3   d'autre.

  4   Q.  Bien.

  5   R.  Et je n'ai pas les déclarations du témoin que vous avez mentionné tout

  6   à l'heure.

  7   Q.  Bon. Alors, le rapport d'août 2012 dit que vous n'aviez pas de

  8   corrélations ADN pour ce qui est des autres corps qui ont été déplacés,

  9   vous n'avez donc pas pris en compte les déclarations de témoin, les

 10   éléments de preuve balistiques, les éléments de preuve liés à la nature des

 11   sols et les preuves matérielles autres qui ont été présentées, n'est-ce pas

 12   ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Alors, vous avez dit "oui", vous n'avez pas pris en considération ces

 15   éléments-là ?

 16   R.  C'est cela.

 17   M. MITCHELL : [interprétation] Est-ce qu'on peut à présent se pencher sur

 18   le 65 ter 25488, page 21 en anglais et 18 en B/C/S.

 19   Q.  Il s'agit de votre rapport d'août 2012, Professeur. Vous allez voir

 20   conclusion (d), ou point (d), où vous dites :

 21   "Les analyses" effectuées au sujet "des mécanismes par lesquels il y a eu

 22   des blessures de portées, des façons dont les mesures ont été portées, pour

 23   ce qui est des cas analysés par moi… montrent que la plupart des blessures

 24   ont pu se produire au cours de combat, c'est-à-dire de conflit armé, c'est-

 25   à-dire par armes à feu, obus, explosifs, et qu'il n'y a pas de

 26   caractéristiques qui seraient liées à des 'exécutions'(mort par

 27   fusillade)…"

 28   Alors, c'est votre opinion, aucun de ces cadavres exhumés ne comporte des


Page 41891

  1   caractéristiques qui seraient celles d'une exécution par Peloton

  2   d'Exécution ?

  3   R.  Est-ce que vous parlez du chapitre Circonstances du décès ou façon dont

  4   les personnes sont décédées ?

  5   Q.  C'est au bas de la page, sous-paragraphe (d).

  6   R.  Je n'arrive pas à le trouver.

  7   Q.  C'est sur l'écran que vous avez sous les yeux, Monsieur, au pas de la

  8   page en B/C/S.

  9   R.  Oui, je viens de le voir.

 10   Q.  Je vais vous poser la question à nouveau. Est-ce qu'à votre avis, la

 11   totalité des corps exhumés présente des caractéristiques qui ne sont pas

 12   d'une exécution par un Peloton d'Exécution ?

 13   R.  Si l'on lit attentivement le (d), j'ai dit et je souligne que les

 14   blessures survenues pas armes à feu, et j'essaie de le dire d'une autre

 15   façon, ne présentent absolument aucun élément de preuve qui serait lié à

 16   des exécutions. Parce que les blessures en combat et la fusillade -- si par

 17   "exécution" on estime que c'est des tirs  par armes à feu d'un peloton

 18   d'exécution. Mais ici, ce que j'ai voulu mettre en exergue, c'est ceci :

 19   l'opinion formulée qui consiste à dire qu'il s'agit de blessures dues à des

 20   exécutions, telles que les a décrites Haglund, qui sont donc des blessures

 21   supplémentaires au niveau de la tête de plusieurs victimes qui montreraient

 22   que les coups de feu auraient été tirés de proximité immédiate ou à bout

 23   portant, c'est avec cette opinion-là du Dr Haglund que je ne suis pas

 24   d'accord, et je vous explique pourquoi. Si un cadavre est putréfié et

 25   squelettisé [comme interprété], comme on en a vu, et on décrit des

 26   blessures. Il y a une dizaine de blessures. En ma qualité de médecin

 27   légiste chargé d'autopsie, je ne sais pas si la blessure à la nuque est la

 28   première des blessures qui a été portée et que les autres sont venus après


Page 41892

  1   ou si c'est l'inverse. Je ne peux pas déterminer l'ordre des blessures

  2   portées. Notre profession n'est pas à même de déterminer cela. Je ne peux

  3   donc pas accepter. Je peux accepter qu'il y a une blessure à la nuque, mais

  4   --

  5   Q.  [aucune interprétation]

  6   R.  -- est-ce qu'une arme qui est due à une exécution à bout portant. Il

  7   n'y a pas d'élément de preuve qui dirait que le canon de l'arme a été près

  8   et que c'est une blessure portée à bout portant. Il n'y a pas d'élément de

  9   preuve et c'est ce que je suis en train de dire. La majeure partie des

 10   corps où l'on a constaté des blessures par armes à feu ont des

 11   caractéristiques de blessure en conflit armé. Pour un certain nombre de ces

 12   cas de figure, j'ai dit qu'il y avait des éléments où l'on pouvait accepter

 13   l'hypothèse d'une exécution, parce qu'il y avait des ligatures. Il est donc

 14   logique de conclure cela en ma qualité de médecin légiste, je peux

 15   considérer que ce sont des personnes qui sont mortes du fait d'une

 16   exécution. Et c'est ce que j'ai couché sur papier.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Compte rendu.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Le professeur a parlé de traces de poudre à la

 20   place "de l'endroit où la balle est entrée" et ça été omis à la ligne 21.

 21   L'INTERPRÈTE : La cabine française précise qu'elle n'a pas entendu, il a

 22   parlé tellement vite que nous n'avons pas relevé cet élément-là.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je ne vois pas ce passage de consigné.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Fort bien.

 25   M. MITCHELL : [interprétation]

 26   Q.  Professeur, vous avez été fort critique à l'égard du Dr John Clark en

 27   particulier pour avoir prétendument déclaré que la plupart des décès ne

 28   pouvaient pas être liés au conflit. Alors si on revient à la page 11 en


Page 41893

  1   anglais et à la page 10 en B/C/S dudit rapport, et là au premier paragraphe

  2   -- vous dites -- point 4, façon dont les blessures ont été portées, vous

  3   dites :

  4   "L'opinion de Clark (présentée au rapport ERN 0308 0711 … c'est que ceci ne

  5   serait pas lié à des combats entre guillemets"'alors, dans la plupart des

  6   décès on dit que ça ne pouvait pas être lié à des combats … '"

  7   Alors je voudrais que vous vous penchiez sur votre rapport, pour voir ce

  8   que cette phrase signifie et on se penchera ensuite sur la citation du Pr

  9   Clark pour essayer d'y retrouver la même phrase. Est-ce que vous voyez la

 10   phrase entre guillemets ? On dit que :

 11   "'Pour la plupart des cas de figure, la mort, le décès ne peut pas être lié

 12   à des activités de combat …'"

 13   Ça se trouve en page suivante de la version B/C/S.

 14   R.  Je le vois. Oui, je le vois.

 15   Q.  Bon.

 16   R.  [aucune interprétation]

 17   M. MITCHELL : [interprétation] Je souhaite maintenant que l'on nous montre

 18   au prétoire électronique la pièce P105, page 28 en anglais et page 32 en

 19   B/C/S.

 20   M. LE GREFFIER : [interprétation] Est-ce que vous parlez de la pièce à

 21   conviction P4105, Monsieur Mitchell ?

 22   M. MITCHELL : [interprétation] Oui.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur le Greffier.

 24   M. MITCHELL : [interprétation]

 25   Q.  Vous allez voir ici, Professeur, qu'il n'y a absolument rien à trouver

 26   qui dirait "grande majorité de cas, la mort ne serait être liée à des décès

 27   au combat". Alors si l'on diminue quelque peu le format de la version en

 28   B/C/S, c'est la page que vous aviez eu à l'esprit lorsque vous avez cité


Page 41894

  1   cette référence, 030811 [comme interprété] ?

  2   R.  Oui. C'est ce rapport; mais c'est ce qui dit au début, je l'ai répété à

  3   plusieurs endroits cela. Parce qu'ici c'est une citation qui provient de ce

  4   document.

  5   Donnez-moi un petit instant.

  6   Q.  Professeur, mais vous avez spécifiquement donné cette référence ERN or

  7   les propos que vous avez cités dans la traduction de votre rapport ça ne se

  8   trouve pas dans le rapport du Dr Clark et il n'y a rien de ne serait-ce

  9   qu'à peu près semblable à cela. Ce dont je suis en train de parler,

 10   Professeur, c'est que vous avez cité une formulation ou prétendument cité

 11   une partie du rapport du Dr Clark alors que ça ne s'y trouve absolument pas

 12   et vous avez ensuite développé une thèse que vous avez par la suite

 13   critiquée ?

 14   R.  [aucune interprétation]

 15   Q.  Peut-être pourrions-nous faire une pause --

 16   R.  Oui. J'ai besoin de me pencher sur la totalité de documents, parce que,

 17   moi, j'ai cité son rapport à lui. Il se peut que la page -- enfin que je me

 18   sois trompé de page, mais c'est son rapport cumulatif pour les trois sites,

 19   ce rapport cumulatif est gros comme ça.

 20   Q.  Professeur, il ne peut pas s'agir d'une erreur au niveau de la

 21   référence ERN que vous avez en réalité citée. Et vous dites que c'est la

 22   page où l'on a les conclusions générales en provenance des trois sites

 23   d'ensevelissement. Donc il ne s'agit pas d'une erreur de chiffre, parce que

 24   vous avez de façon évidente parlé de cette page-là.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant, je vous prie.

 26   Est-ce que vous avez compris la question, Monsieur le Témoin ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que nous pouvons revenir sur ce


Page 41895

  1   point-là après la pause --

  2   M. MITCHELL : [aucune interprétation]

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] -- comme ça le professeur aura le temps

  4   de se pencher sur son dossier. Est-ce que nous pouvons continuer ?

  5   M. MITCHELL : [interprétation] Je suis sur le point de passer à quelque

  6   chose de tout à fait autre, Monsieur le Président, --

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bon, alors si le moment est opportun on

  8   peut faire une pause maintenant.

  9   Nous allons faire une pause jusqu'à 11 heures.

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut donner au professeur la

 11   totalité du rapport en copie papier ou sous forme de copie papier pour ce

 12   qui est de la citation qui vient d'être faite ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais, moi, je l'ai retrouvé.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais, moi, je n'ai que 33 pages à ce sujet.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je crois que la professeur possède la

 16   totalité des documents. Mais si nécessaire, on peut demander un complément

 17   de documentation au représentant de l'Accusation, voire au représentant de

 18   la Défense.

 19   A 11 h.

 20   --- L'audience est suspendue à 10 heures 27.

 21   --- L'audience est reprise à 11 heures 03.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Professeur, est-ce que vous avez eu

 23   l'occasion de regarder les rapports auxquels nous avions fait référence

 24   avant la pause ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Et j'aimerais présenter mes excuses et

 26   dire que M. Mitchell avait raison lorsqu'il a cité cette page. Il s'agit

 27   bien de l'original du document dont je parlais dans la cote. Cela étant, le

 28   rapport fait une trentaine de pages, et M. Clark y explique ce qu'il a


Page 41896

  1   retrouvé dans ces trois emplacements. S'agissant de ce que j'ai rédigé, eh

  2   bien, j'avais tenu compte de l'intégralité du document, pas uniquement des

  3   conclusions, et l'on dit que dans une grande majorité les décès ne peuvent

  4   pas être liés à des combats. Et j'ai retrouvé dans sa déclaration du 20

  5   février 2007 dans l'affaire Vujadin Popovic la référence exacte à ces trois

  6   emplacements, et il est arrivé à la conclusion que principalement, pour la

  7   majorité des cas, le décès ne peut pas être lié à des combats. Donc la

  8   conclusion générale serait de dire que ces personnes dans ces trois

  9   emplacements, Ravnice, Glogova et Zeleni Jadar, ont été retrouvées avec des

 10   blessures par balle, des lésions provoquées par différents calibres, et

 11   aucun des hommes dans ces fosses ne portaient pas d'armes ni d'uniforme

 12   militaire. Voilà, ça c'était pour répondre à la question de savoir si ces

 13   hommes étaient des combattants ou pas. Ensuite, le 20 février, il a déclaré

 14   qu'une grande majorité des décès ne pouvaient pas être liés au combat. Et

 15   donc, dans le rapport principal pour l'affaire Karadzic, à la page 52, j'ai

 16   tiré une conclusion, et cette phrase fait partie des conclusions générales

 17   pour ces trois emplacements. Et par rapport à cette affirmation et par

 18   rapport aux informations dont je disposais en tant qu'expert lorsque je me

 19   suis rendu sur les emplacements et lorsque j'ai enquêté là-bas, et sur la

 20   base des autres documents, on ne peut accepter qu'une grande majorité des

 21   dépouilles étaient liées à des combats, et j'ai expliqué pourquoi.

 22   Mais vous avez raison, Monsieur Mitchell, dans la mesure où cette page, la

 23   page 711, c'est la dernière page, la conclusion générale, dit cela. Mais

 24   moi j'avais étudié l'intégralité du rapport, qui faisait plus de 30 pages,

 25   où, entre autres, il déclarait ce qui est repris dans le rapport. Donc j'ai

 26   commis une erreur et cette erreur n'était pas délibérée.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez continuer, Monsieur Mitchell.

 28   M. MITCHELL : [interprétation]


Page 41897

  1   Q.  Encore une question sur ce sujet, Professeur. Nous avons revu le

  2   rapport du Dr Clark de la première à la dernière page, et je pense qu'il

  3   est exact de dire qu'il ne mentionne pas, en fait, le mot "combat", il ne

  4   le mentionne pas du tout dans son rapport. Et je ne parle pas que de cette

  5   page-là, je parle de tout le rapport.

  6   R.  On ne parle pas de combat. C'est un terme que j'ai utilisé. Je parle de

  7   "oruzani sukobl efet [phon]" qui veut dire "conflit armé", et par là

  8   j'entends les personnes qui ont été blessées et qui présentent des lésions

  9   suite à l'utilisation de plusieurs instruments, en particulier lorsque l'on

 10   parle d'éclats d'obus. Les éclats d'obus ne sont pas utilisés lors

 11   d'exécutions ou lors de décès par armes à feu. En conséquence, je parle de

 12   combat ou d'absence de combat, ou de conflit armé ou d'absence de conflit

 13   armé. C'est là que j'établis une différence pour qu'il n'y ait pas de

 14   mauvaise interprétation.

 15   Et précisément, je dis que pour les cas où l'on a déterminé, sans

 16   doute possible, qu'il y a eu ligature -- donc, pour les 450 à 500 personnes

 17   pour lesquelles il a été déterminé sans aucune doute que ces ligatures

 18   existaient, eh bien, en qualité d'expert légiste, j'ai conclu qu'il

 19   s'agissait d'exécutions, quelles que soit les lésions qui ont été

 20   infligées, ou plutôt, à quoi ces lésions ressemblaient en fonction de

 21   l'emplacement, du numéro de l'emplacement qui a été attribué, et cetera.

 22   Mais en tant que légiste, j'affirme encore, et je le maintiens, que les

 23   autres lésions qui ont été reprises ont été provoquées par des éclats

 24   d'obus, par des bombardements, et qu'on ne peut pas les lier aux

 25   exécutions. Et c'est vraiment là la différence majeure.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Professeur, comme vous le savez, nous

 27   avons un temps limité, donc contentez-vous de répondre simplement aux

 28   questions qui vous sont posées, s'il vous plaît.


Page 41898

  1   M. MITCHELL : [interprétation]

  2   Q.  Professeur, revenons aux critiques de fond selon lesquelles toutes les

  3   dépouilles qui ont été exhumées ne présentent pas les caractéristiques

  4   d'une exécution faite par un peloton d'exécution. J'aimerais à présent

  5   passer en revue deux scénarios possibles, le premier étant une exécution

  6   faite par un peloton et le deuxième étant celle qui a utilisé des grenades,

  7   et j'aimerais avoir votre point de vue sur ce que vous avez constaté dans

  8   les comptes rendus d'autopsie et savoir si cela est cohérent avec les

  9   éléments de preuve.

 10   Premier scénario, donc nous avons des éléments de preuve pour

 11   l'exploitation agricole de Branjevo et les exécutions qui y ont eu lieu, et

 12   vous avez passé en revue certains comptes rendus d'autopsie du site de

 13   Pilica, n'est-ce pas ?

 14   R.  Oui.

 15   M. MITCHELL : [interprétation] J'aimerais que l'on affiche le document

 16   1D07723 dans le prétoire électronique, s'il vous plaît.

 17   Il s'agit de la déclaration du Témoin Franc Kos, qui était membre du

 18   10e Détachement de Sabotage. Il se trouvait à l'exploitation agricole de

 19   Branjevo le 16 juillet 1995, et il a été condamné par le tribunal d'Etat

 20   pour avoir participé à des assassinats là-bas. Ce témoin nous dit dans sa

 21   déclaration :

 22   "25 personnes ont été déchargées," et il parle de l'exploitation agricole

 23   de Branjevo. "Ils ont déchargé 25 personnes. Il se peut qu'il y en ait eu

 24   moins. Ils les ont emmenées dans le champ qui se trouvait derrière, où

 25   Zoran Goronja était, et je l'avais nommé chef de la sécurité. Marko Boskic

 26   était derrière lui et Zoran Goronja a commencé à tirer. Il a tiré dix à 20

 27   fois, mais comme il était de petite taille et très léger, le M84 qu'il

 28   utilisait l'a fait tomber."


Page 41899

  1   Ensuite, M. Kos continue en disant que plusieurs soldats ont utilisé

  2   leurs fusils automatiques et qu'ils ont fait la même chose pour le deuxième

  3   groupe, qu'il y a eu plusieurs blessés et qu'il a voulu abréger leurs

  4   souffrances et a tiré à bout portant sur quatre d'entre eux.

  5   Donc, ce que Franc Kos nous décrit dans sa déclaration est une

  6   exécution; ce n'est pas un conflit, n'est-ce pas, Professeur ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Et il décrit des coups de feu qui ont été tirés sur des crânes, sur des

  9   corps, l'utilisation d'une mitrailleuse M84 et l'utilisation de fusils

 10   automatiques. Tout cela correspond aux éléments de preuve que vous avez vus

 11   dans les comptes rendus d'autopsie pour le site de Pilica, n'est-ce pas ?

 12   R.  Pour la plupart, oui.

 13   Q.  Très bien. Franc Kos va venir la semaine prochaine en qualité de témoin

 14   à décharge, il a été cité à la barre par M. Karadzic, et il va nous

 15   apporter des éléments de preuve sur les exécutions qui ont eu lieu à

 16   l'exploitation agricole de Branjevo. J'aimerais savoir, Professeur, si

 17   l'équipe de la Défense, avant votre déposition, vous a dit qu'il s'agissait

 18   d'un conflit armé et qu'il allait y avoir une déposition pour montrer que

 19   l'exécution avait eu lieu une semaine après votre déposition ?

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pouvons-nous avoir la référence ? Où nous dit-

 21   il que ces personnes sont mortes à l'exploitation agricole de Branjevo au

 22   combat ?

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Maître Robinson, est-ce que la Défense a

 24   confirmé qu'il y a eu des exécutions de ces personnes à l'exploitation

 25   agricole de Branjevo ?

 26   M. ROBINSON : [interprétation] Non, nous n'avons pas pris position sur ces

 27   éléments de preuve jusqu'à présent.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien.


Page 41900

  1   Continuons, Monsieur Mitchell.

  2   M. MITCHELL : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

  3   Q.  Je répète ma question, Professeur : je vous ai demandé si on vous avait

  4   dit que la Défense allait citer à la barre Franc Kos pour décrire les

  5   exécutions qui ont eu lieu à l'exploitation agricole de Branjevo ?

  6   R.  Non.

  7   Q.  J'aimerais vous donner quelques éléments supplémentaires d'information,

  8   et je voudrais vous parler de la déposition de Drazen Erdemovic. Il s'agit

  9   de la pièce P332 en l'espèce. J'aimerais que l'on affiche la page du compte

 10   rendu 10 971. Et M. Erdemovic, dans cette pièce, nous dit : 

 11   "Les premières personnes qui se trouvaient dans ce bus avaient les yeux

 12   bandés et les mains liées derrière le dos."

 13   Cela correspond aux éléments de preuve que vous avez vus dans les rapports

 14   d'autopsie s'agissant de Pilica, n'est-ce pas ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Et Erdemovic ajoute :

 17   "On nous a ordonné de leur tirer dessus. Ils nous tournaient le dos".

 18   Alors, les éléments de preuve montrant qu'il y a eu des tirs par derrière

 19   sur les victimes concordent également avec les comptes rendus d'autopsie

 20   que vous avez analysés, n'est-ce pas ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Très bien --

 23   R.  Pour que les choses soient totalement précises. Dans ces cas-là,

 24   lorsque les orifices d'entrée et les lésions étaient remarquées sur la

 25   partie arrière du corps, allant de la tête, en passant par le tronc et en

 26   allant jusqu'au extrémités, eh bien, tout cela est cohérent avec la

 27   déposition de ce témoin auquel vous avez fait référence. Je ne sais pas ce

 28   qu'il a dit, je ne sais pas s'il a dit exactement qu'on leur avait fait


Page 41901

  1   tourner le dos. Mais dans ce sens-là, eh bien, si c'est cela le sens de sa

  2   déposition, je pense que cela est cohérent avec les comptes rendus

  3   d'autopsie qui montrent que les blessures et les lésions ont été retrouvées

  4   au dos des dépouilles.

  5   Q.  Mais il y avait 132 personnes qui ont été exhumées de l'exploitation

  6   agricole de Branjevo à Pilica, n'est-ce pas ?

  7   R.  Je ne peux pas vérifier cela maintenant. Je suppose que c'est exact.

  8   Q.  Eh bien, croyez-moi, sur parole c'est ce que le rapport du Dr Haglund

  9   nous dit, dans sa pièce P4321. Et le rapport du Dr Haglund nous dit

 10   également que 77 de ces personnes avaient les poings liés et que les

 11   ligatures étaient associées à cinq victimes supplémentaires. Dans l'affaire

 12   Popovic, vous avez déposé et vous aviez déclaré à l'époque que vous n'aviez

 13   pas regardé les comptes rendus d'autopsie pour les victimes qui

 14   présentaient des ligatures, et que vous n'aviez étudié que les corps qui ne

 15   présentaient pas de ligatures. Est-ce que vous pouvez le confirmer ?

 16   R.  Quand ai-je dit cela c'était lors d'une de mes dépositions ?

 17   Q.  Oui. Je vous demande juste de confirmer que vous n'avez étudié dans les

 18   comptes rendus d'autopsie que les dépouilles qui ne présentaient pas de

 19   ligature parce que vous aviez accepté le fait que les personnes qui

 20   présentaient des ligatures avaient été exécutées ?

 21   R.  Oui, oui, j'ai accepté cela. Un instant. Combien de personnes avez-vous

 22   cité ? 100 ? 130 pour Pilica…

 23   J'ai une liste ici, oui, elle date de 2007. Je ne retrouve pas ce chiffre,

 24   ah, voilà, Pilica, il y a un grand nombre d'autopsie mais il n'a pas de

 25   chiffre mentionné. Il s'agit d'un document --

 26   Q.  [aucune interprétation]

 27   R.  -- que vous m'avez donné ou l'on énumère les dépouilles par

 28   emplacement, mais, oui, j'ai passé en revue Pilica --


Page 41902

  1   Q.  [aucune interprétation]

  2   R.  -- et uniquement ceux qui ne présentaient pas des ligatures.

  3   Q.  Oui, c'est ce que je voulais vous demander. Vous n'avez regardé que les

  4   comptes rendus d'autopsie pour les dépouilles qui ne présentaient pas de

  5   ligature ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Et vous avez donc accepté que les dépouilles qui présentaient des

  8   ligatures avaient été exécutées ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Professeur, lorsque vous vous êtes forgé cette opinion disant que tous

 11   les corps qui avaient été exhumés ne présentaient pas les caractéristiques

 12   d'une exécution effectuée par un peloton, est-ce que cela ne vous aurait

 13   pas aidé de comparer les lésions des dépouilles présentant des ligatures

 14   que vous aviez acceptées et qui avaient été exécutées comparer ces

 15   dépouilles-là avec les dépouilles qui ne présentaient pas de ligature et

 16   voir s'il y avait une cohérence entre les lésions présentées par un groupe

 17   les lésions présentées pour un autre groupe ?

 18   R.  Non, je ne l'ai pas fait. Je suis parti du fait que les dépouilles, qui

 19   présentaient des ligatures, avaient été exécutées. Maintenant pour l'autre

 20   groupe, celui qui ne présentait pas de ligature sur les bras ou aux jambes,

 21   les lésions qui étaient observées n'étaient pas des lésions qui en tout

 22   certitude auraient pu être causées par des exécutions.

 23   L'INTERPRÈTE : Note de la cabine anglaise : Les interprètes demandent au

 24   témoin de répéter la dernier phrase.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Professeur, je suppose que vous parliez

 26   trop rapidement. Mais les interprètes n'ont pas pu entendre la dernière

 27   phrase que vous avez déclarée. Est-ce que vous pourriez la répéter ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, désolé.


Page 41903

  1   Les corps sans ligature aux bras ou toute autre partie du corps et pour

  2   lesquels j'ai dit qu'ils avaient été exécutés et j'accepte cette

  3   conclusion, eh bien, pour moi cela était un fait. Pour les autres corps où

  4   il n'y avait pas de ligature au cas où il y avait des lésions je n'ai pas

  5   procédé à une analyse comparative, ces lésions provoquées par des armes à

  6   feu ont été constatées sur des personnes dans des cas d'exécution, quelle

  7   que soit la position du corps de face ou de dos. Mais en fonction du nombre

  8   et de l'emplacement des orifices d'entrée, ce genre de lésions se présente

  9   également dans les cas de conflit armé. C'est ce que j'ai dit.

 10   M. MITCHELL : [interprétation]

 11   Q.  Mais n'êtes-vous pas d'accord qu'il aurait été utile de comparer les

 12   lésions du groupe présentant des ligatures avec le groupe qui n'en

 13   présentait pas parce que si ces deux groupes présentaient des lésions

 14   similaires, cela suggérait que ces personnes avaient été tuées de la même

 15   façon ?

 16   R.  D'une certaine façon, oui, mais il y a quand même un [phon]

 17   [inaudible].

 18   Q.  D'accord. Alors, encore une chose sur ce cas de figure-là, le premier

 19   scénario. Dans votre rapport qui est une compilation des trois rapports qui

 20   découlent de l'affaire Popovic, vous affirmez qu'il y avait des projectiles

 21   qui avaient été retrouvés sur un corps, et que cela pourrait dire que la

 22   victime a souffert d'une lésion provoquée par -- d'une lésion provoquée par

 23   une arme à longue portée parce que la balle a pu ralentir et perdre de sa

 24   vitesse lorsqu'elle a touché la victime. Est-ce que vous vous souvenez de

 25   cette partie de votre rapport ?

 26   R.  Je m'en souviens et je vais vous répondre directement. Pour plusieurs

 27   victimes, on a retrouvé des projectiles, et nous l'avons vu hier, dans les

 28   corps. Ces projectiles, comme vos experts en balistique l'ont expliqué, et


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  1   je suis d'accord avec eux, ces projectiles avaient été tirés à grande

  2   vitesse et le degré de pénétration était également élevé, l'angle de

  3   pénétration était élevé. Donc la question qui se pose c'est de savoir

  4   comment on peut retrouver dans un corps trois projectiles, par exemple, le

  5   projectile d'un obus, des parties d'un projectile ? Que nous suggère ces

  6   conclusions d'autopsie ? Eh bien, pour moi en tant qu'expert, la réponse

  7   consisterait à dire qu'au vu des caractéristiques d'une arme, soit la balle

  8   a été tirée à une grande distance ou les projectiles sont passés par

  9   certains obstacles qui les ont ralentis ou encore ces projectiles ont

 10   traversé d'autres corps avant d'atteindre leur dernière cible elles se sont

 11   arrêtées dans le corps où on a retrouvé le projectile. Ceux-là sont les cas

 12   de figure possibles. Mais d'un point de vue médico-légal ce projectile qui

 13   a un angle élevé de pénétration et une vitesse dans des circonstances

 14   normales peut passer par un corps et pourrait provoquer certaines lésions

 15   dont les tissus mous et les tissus durs. Mais je dois également réfléchir à

 16   une autre possibilité, à savoir de quelle distance le projectile a été tiré

 17   et est-ce qu'il est passé par le corps de quelqu'un avant d'arriver à sa

 18   dernière cible, est-ce qu'il est passé par un autre obstacle, ce qui veut

 19   dire qu'il aurait été ralenti.

 20   Q.  [aucune interprétation]

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Compte rendu.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ligne 2, le professeur a dit : Mais si la balle

 24   reste, et c'est le cas, et l'interprète n'a pas entendu la fin de la phrase

 25   dans ce cas-là.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 27   Continuons, Monsieur Mitchell.

 28   M. MITCHELL : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.


Page 41905

  1   Q.  J'aimerais vous décrire à présent comment ce sont déroulées les

  2   exécutions à l'exploitation agricole de Branjevo ce jour-là en fonction des

  3   éléments de preuve en l'espèce. Il y a un groupe de prisonniers qui ont été

  4   descendus d'un bus et qui ont été alignés dans le champ et ils ont été

  5   abattus, ensuite un deuxième groupe a été aligné directement derrière ces

  6   personnes qui venaient d'être tuées et on leur a tirées dessus. Et ainsi de

  7   [inaudible] pendant plusieurs heures, chaque groupe de prisonniers a été

  8   aligné derrière la ligne de prisonniers précédente qui ont été exécutés.

  9   Donc les balles passent par ces corps, mais il y a d'autres corps déjà

 10   morts qui se trouvent devant les lignes de prisonniers. Donc je pense que

 11   cela constituerait une autre explication raisonnable pour, en tout cas, les

 12   fragments de balle qui ont été retrouvés dans ces dépouilles, de dire que

 13   ceux qui étaient déjà à terre avaient été touchés par des balles, que ces

 14   balles avaient traversé les personnes déjà mortes avant de toucher les

 15   autres prisonniers.

 16   Serait-ce une explication raisonnable expliquant pourquoi ces corps

 17   contiennent ces projectiles ?

 18   R.  Oui, et je l'ai dit. C'est l'une des explications logiques. Lorsqu'un

 19   projectile passe par un obstacle, l'obstacle pouvant être un corps, un

 20   arbre, une dalle, c'est possible. J'ai étudié tous ces cas de figure, et

 21   cela s'appliquerait également aux cas présentant des ligatures. Je ne nie

 22   pas cela.

 23   Q.  Très bien. Passons au deuxième scénario, à savoir l'exécution

 24   impliquant des grenades. Dans votre rapport d'août 2012, à la page 13 - il

 25   s'agit du document 25488 de la liste 65 ter - vous décrivez, là, les

 26   lésions retrouvées sur les dépouilles de Ravnice, Glogova et Zeleni Jadar,

 27   et vous nous dites que les lésions provoquées par souffle qui sont

 28   présentes sur certaines des dépouilles correspondent à des conflits armés.


Page 41906

  1   R.  Oui.

  2   Q.  Et c'est à ce moment-là, dans votre rapport que vous faites référence à

  3   un certain nombre de déclarations de témoins qui décrivent un conflit armé

  4   dans la zone, n'est-ce pas ?

  5   R.  Oui.

  6   Q.  Mais vous ne citez pas une seule déclaration de témoin qui décrirait le

  7   fait qu'à l'entrepôt de Kravica, on aurait eu recours à des grenades,

  8   n'est-ce pas ?

  9   R.  Ecoutez, moi, je ne disposais que de ces déclarations-là et je les ai

 10   citées, ces déclarations.

 11   Q.  Eh bien, je vais vous donner lecture de ce qui a été dit par Franc Kos,

 12   un autre témoin à décharge de M. Karadzic. Page 15 de sa déclaration, où il

 13   indique que :

 14   "Les membres du 10e Détachement de Sabotage se trouvaient à l'entrepôt de

 15   Kravica," et voilà ce qu'il dit :

 16   "Marko Boskic," qui faisait également partie de l'unité, "s'est dirigé vers

 17   l'entrepôt, y a pris deux grenades à main et ensuite les a lancées sur la

 18   droite du dépôt où il y avait encore des gens qui étaient en vie à cet

 19   endroit là. Il a lancé deux grenades à main."

 20   Donc nous avons l'un des témoins à décharge de M. Karadzic qui indique que

 21   des grenades ont bel et bien été utilisées à l'entrepôt de Kravica. Alors,

 22   est-ce que cela vous permet de déterminer peut-être pourquoi les corps se

 23   trouvant dans les fosses qui ont un lien avec l'entrepôt de Kravica ont des

 24   traces de blessures par souffle ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Monsieur le Professeur, vous avez témoigné dans une des affaires de

 27   Srebrenica dont a été saisie ce Tribunal, à savoir l'affaire Popovic et

 28   consorts, et vous savez qu'il y a un vaste corpus d'éléments de preuve à


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  1   propos de ces exécutions. Est-ce que vous avez demandé à la Défense ces

  2   déclarations de témoins ou ces éléments de preuve apportés par ces témoins

  3   lorsque vous avez rédigé vos rapports pour cette affaire ?

  4   R.  J'ai reçu tous les rapports qui ont été fournis à M. Karadzic. J'ai

  5   déjà indiqué combien avaient été présentés sous format électronique. Il y

  6   avait des fichiers, des dossiers, des DVD, des images, des photographies,

  7   et cetera, et cetera. Alors, j'ai réussi à examiner une partie de ces

  8   documents. Je n'ai pas demandé, ni reçu d'ailleurs, les déclarations de

  9   témoins auxquels vous faites référence maintenant. Moi je me suis intéressé

 10   à l'aspect médico-légal.

 11   Dans l'affaire Popovic et consorts, j'avais reçu des documents de la

 12   part de la Défense. J'ai cité certaines déclarations de témoins, certes. A

 13   partir de ces déclarations, j'ai conclu que certaines personnes avaient été

 14   tuées par des explosifs. Dans certains des documents relatifs à Kravica, il

 15   y avait des éléments qui permettaient d'indiquer que l'on avait eu recours

 16   à des explosifs, effectivement.

 17   Maintenant, vous me dites qu'un témoin a relaté comment deux grenades

 18   à main avaient été jetées. Des grenades, cela occasionne des blessures qui

 19   sont soit plus petites, soit plus larges, par rapport aux blessures

 20   provoquées par des débris d'obus, et il se peut que cela ait occasionné la

 21   mort de plusieurs personnes, justement sur les corps desquels on a retrouvé

 22   des fragments de métal. L'on peut dire donc que ces personnes auraient été

 23   tuées par ce genre de chose.

 24   Mais j'aimerais également vous dire ce qui suit, car dans d'autres

 25   endroits où cela s'est passé, cela n'exclut pas pour autant le fait qu'il y

 26   ait eu des combats et que les morts aient été provoquées par ces combats.

 27   Je ne fais pas fi des éléments de preuve apportés par ces personnes qui ont

 28   témoigné ici qui ont fait référence à un grand nombre de victimes, au fait


Page 41908

  1   que des mortiers avaient été utilisés, que des PAM avaient été utilisés et

  2   d'autres armes également qui ont une puissance de feu extrêmement

  3   importante. Je pense, par exemple, à Alic Hasan, Mehmet Alic, Enver Abdic

  4   et d'autres qui ont raconté comment des personnes qui se trouvaient autour

  5   d'eux ont été tuées. Ce que je voudrais dire, c'est qu'il y a des éléments

  6   de preuve qui indiquent que des armes extrêmement destructives ont été

  7   utilisées, des obus, des mortiers, des PAM, des projectiles de grand

  8   calibre, et cetera, et cetera. Donc, sur la base de tous ces éléments, j'ai

  9   tiré une conclusion, et ma conclusion étant qu'un grand nombre de personnes

 10   ont été tuées dans le cadre d'un conflit armé, ni plus ni moins. Et

 11   d'ailleurs, je ne renie rien. Je ne fais que confirmer.

 12   Q.  Vous venez juste de dire, et je vous cite :

 13   "Je ne peux pas exclure les éléments de preuve présentés par ces

 14   personnes qui ont parlé de conflit armé."

 15   Or, vous n'avez pas tenu compte de tous les éléments de preuve

 16   relatifs aux exécutions. La Défense ne vous les a pas fournis, et vous ne

 17   les avez pas demandés d'ailleurs, non plus, les documents en question, bien

 18   que dans l'affaire Popovic, lorsque vous avez témoigné en 2008, certains de

 19   ces éléments de preuve vous aient été montrés ?

 20   R.  J'ai témoigné dans l'affaire Popovic et consorts, et j'ai

 21   expliqué -- j'ai examiné dans un premier temps tous les éléments et j'ai

 22   fourni des explications; toutefois, je ne disposais pas des déclarations

 23   des témoins dont vous venez de me parler. Je n'avais pas non plus les

 24   déclarations. Enfin, elles ne m'ont pas été fournies par la Défense non

 25   plus. Toutefois, ce que vous venez de me dire ne me fera pas

 26   fondamentalement modifier la conclusion principale qui émane de mon analyse

 27   d'expert. Donc j'accepte, certes, que quelque 500 personnes aient été

 28   exécutées, mais je continue à dire que dans cette zone de nombreuses


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  1   personnes ont été tuées lors des combats. Et je dois insister, et ce, parce

  2   que je pense au Tribunal, pour que la vérité éclate. Je dois insister sur

  3   le fait qu'il y a quand même un grand nombre de personnes qui ont été

  4   portées disparues et qui ont été liées aux événements de Srebrenica entre

  5   le 11 et le 19 juillet 1995. Ces personnes ont été enterrées dans ces

  6   fosses primaires et secondaires, mais, en fait, elles ont été emmenées par

  7   la suite. Il faut savoir que leurs décès datent d'une période qui précède

  8   les événements de Srebrenica, et qui les précède des beaucoup. Donc il y a

  9   trois groupes de victimes dont il est question, et cela, je veux le dire de

 10   façon très, très claire aux Juges de la Chambre, parce que les documents

 11   que j'ai analysés confirment ceci.

 12   Et puis, il y a un moment de cela, vous m'avez posé une question à

 13   propos de Bratunac, à propos des 80 victimes dont a parlé M. Pejakovic dans

 14   cette école. M Pejakovic les a trouvées et a indiqué qu'il pensait qu'il

 15   fallait qu'elles soient inhumées. Mais ça, c'était en 1992. Or, leurs noms

 16   figurent sur la liste des victimes de Srebrenica. Je ne vois vraiment pas

 17   le lien entre les deux. Voilà ce dont je parle.

 18   Q.  Je vous dirais que vous venez de concocter cela. Parce que M. Pejakovic

 19   s'est rendu à Bratunac, il a regardé ces centaines de corps et puis il a

 20   dit : Il faut qu'ils soient enterrés dans une fosse. Donc vous, vous ne

 21   savez absolument pas qui étaient ces personnes. Comment est-ce que vous

 22   pouvez maintenant nous dire que leurs noms figurent sur la liste des

 23   personnes portées disparues à Srebrenica ? Vous ne savez pas qui étaient

 24   ces centaines de personnes mortes en 1992, n'est-ce pas ?

 25   R.  Une petite minute, je vous prie. Je ne pense pas qu'il faille

 26   s'exprimer de la sorte. Je ne suis pas venu ici pour concocter quoi que ce

 27   soit ou inventer quoi que ce soit.

 28   Q.  Monsieur le Professeur, vous venez de nous dire que les noms de cette


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  1   centaine de personnes de Bratunac figurent sur la liste des personnes

  2   portées disparues à Srebrenica. Or, vous, vous ne savez pas qui étaient

  3   cette centaine de personnes de Bratunac. Le Dr Pejakovic, ou Pr Pejakovic,

  4   il est allé là-bas, il a constaté et il a regardé ces corps en 1992, et

  5   puis il a dit : Il faut qu'ils soient placés dans une fosse commune. Mais

  6   vous ne savez absolument pas qui sont ces personnes ?

  7   R.  Eh bien, moi, je vais vous prouver que je n'invente rien du tout. Moi

  8   je suis informé à propos de ces personnes et je sais pertinemment ce qu'a

  9   fait le Pr Pejakovic. Il se trouve que dans le corrigendum de Dusan Janc -

 10   et je ne sais pas pourquoi je fais toujours référence à ce corrigendum et à

 11   lui - mais le fait est que dans ce corrigendum, il est indiqué que les

 12   corps d'autres personnes -- d'autres personnes à part les personnes qui

 13   étaient à Kravica ont été amenés dans la fosse de Glogova, et cela a inclus

 14   quelque 80 personnes de Bratunac. Donc, voilà. Moi, je fais référence à ce

 15   document. C'est ce document que j'utilise. Ce n'était pas en 1992, mais ces

 16   personnes, elles ont été tuées en 1992 à Bratunac --

 17   Q.  Ecoutez, je ne sais pas si c'est à dessein que vous faites l'amalgame

 18   entre les deux. Mais le Pr Pejakovic a regardé des centaines de corps à

 19   l'école de Bratunac en 1992. Dusan Janc, lui, fait référence à 80 corps qui

 20   se trouvaient, en 1995, dans l'école de Vuk Karadzic. Il s'agit de deux

 21   événements complètement séparés, n'est-ce pas ?

 22   R.  Mais il ne fait pas référence à l'année 1995. Dusan Janc parle des 80

 23   corps de Bratunac, qui se trouvaient autour de l'école. Donc, là, vous avez

 24   la zone de l'école et la zone autour de l'école de Vuk Karadzic à Bratunac,

 25   et cela figure dans le corrigendum de Dusan Janc. Je n'invente absolument

 26   rien et je ne fais aucun amalgame. C'est ce qui est écrit.

 27   Q.  Mais en tant qu'expert, vous nous dites que Dusan Janc fait référence

 28   aux mêmes corps que ceux qui été vus par le Pr Pejakovic en 1992, au moment


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  1   où il a dit : Qu'on les place dans une fosse commune. Vous êtes en train de

  2   nous dire dans le cadre de votre déposition d'expert que ces deux choses

  3   correspondent au même événement ?

  4   R.  Ecoutez, c'est mon analyse d'expert. Le Pr Pejakovic a examiné entre 80

  5   et 100 corps dans cette école. Il a dit qu'à cause des risques d'épidémie,

  6   il fallait qu'ils soient enterrés. D'où venaient ces corps ? Où ont-ils été

  7   enterrés ? Où est-ce qu'on les a emmenés ? Je n'en sais rien. Et

  8   d'ailleurs, personne présent dans ce prétoire ne le sait non plus.

  9   Toutefois, nous avons le rapport. Moi, lorsque j'ai étudié le rapport de M.

 10   Janc, j'ai établi le lien entre Bratunac et l'école en ce sens qu'ils ont

 11   été probablement enterrés autour de l'école, et ce sont les corps auxquels

 12   il fait référence lorsqu'il apporte cette correction à la liste des

 13   victimes de Srebrenica, ni plus ni moins. Moi, je ne connais pas leurs

 14   noms. Je ne connais pas leur nombre exact. Je ne me livre pas à des

 15   conjectures. Je ne fais qu'examiner ce document, et à partir de ce

 16   document, j'ai tiré certaines connaissances. Et, en fait, après, j'ai

 17   établi le lien avec ce que j'avais entendu de la part de M. Pejakovic.

 18   Q.  Donc il y a une centaine de corps pour lesquels nous n'avons pas de

 19   noms qui ont été enterrés en 1992, et ces personnes, même si on ne connaît

 20   pas leurs noms, figurent sur la liste des personnes portées disparues à

 21   Srebrenica. C'est ce que vous nous dites ?

 22   R.  Oui. Tout comme dans le cas de Potocari 1 et Potocari 2. Il y a eu

 23   également des corps enterrés là-bas, des corps qui remontaient à l'année

 24   1993. Et cela, je l'ai écrit dans mon rapport. Il y a des gens dont on sait

 25   qu'ils sont morts à telle et telle et telle date. Même l'ABiH a indiqué

 26   qu'il y avait des personnes qui avaient été tuées lors des combats à

 27   Srebrenica, et cela avait un lien à Srebrenica en 1993 et 1994, jusqu'au

 28   mois de mai 1995.


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  1   Q.  La question que je vous ai posée était comme suit : vous, vous affirmez

  2   que ces centaines de corps que le Pr Pejakovic a vus à l'école de Bratunac

  3   se trouvent sur la liste des personnes portées disparues à Srebrenica, et

  4   vous ne savez absolument pas qui sont ces centaines de Musulmans que le Pr

  5   Pejakovic a vus là-bas ? Vous ne connaissez pas leur identité, n'est-ce pas

  6   ? Oui ou non ?

  7   R.  Non. Non, je ne connais pas leur identité.

  8   M. MITCHELL : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai plus de

  9   questions à poser. Et je ne vais pas aborder la question de la liste de

 10   l'ABiH, je ne vais pas poser de questions à ce sujet à M. Dunjic. Bon, il

 11   s'agit d'une question démographique. Nous avons le rapport du Dr Tabeau qui

 12   traite de cette question, pages 93 à 98 de la pièce P4995. Ce sont les

 13   éléments de preuve que nous apportons, et nous nous fondons sur ces

 14   éléments de preuve.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 16   Monsieur Karadzic, avez-vous des questions supplémentaires ?

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, Madame, Messieurs

 18   les Juges. Je vous remercie.

 19   Nouvel interrogatoire par M. Karadzic :

 20   Q.  [interprétation] Je commencerais par parler du dernier thème qui a été

 21   abordé avec vous, Monsieur le Professeur. On vous a demandé si vous aviez

 22   lu toutes les déclarations de témoin. J'aimerais savoir quelle est la

 23   majorité des documents que vous avez examinés.

 24   R.  Essentiellement, ces documents étaient des rapports de pathologistes ou

 25   des rapports d'autopsie, en sus de documents qui pouvaient être utilisés

 26   pour déterminer ou estimer la date du décès, ce qu'on appelle les

 27   mécanismes ayant provoqué les blessures et les circonstances qui ont

 28   prévalu en 1995 et après le mois de juillet 1995. Donc ce sont les


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  1   documents qui m'ont été présentés, donc des documents portant sur des

  2   exhumations, la méthodologie utilisée, les méthodes d'exhumation, la

  3   méthodologie utilisée lors des autopsies, et cetera. Donc il y a eu des

  4   rapports relatifs à certains lieux présentés par des pathologistes, des

  5   anthropologistes ou des archéologistes [comme interprété] également qui ont

  6   été, en fait, la base qui m'a permis d'examiner ces rapports d'autopsie

  7   individuels.

  8   Et en tant qu'expert, je n'avais pas seulement une obligation vis-à-

  9   vis de vous, mais également vis-à-vis des Juges de la Chambre de première

 10   instance, vis-à-vis de la Défense et vis-à-vis de l'Accusation, puisqu'il

 11   fallait que j'indique les illogismes ou certaines choses, en fait, qui

 12   n'étaient pas tout à fait conformes à ce que pensait la profession

 13   médicale. Il s'agissait d'indiquer les imperfections de lacunes et de

 14   déterminer si -- déterminer, dans un premier temps, quel était le nombre

 15   des victimes liées aux événements de Srebrenica au mois de juillet. Il

 16   s'agissait également de savoir si les morts -- que si on pouvait établir un

 17   lien entre les décès et l'exécution ou les décès et des blessures, des

 18   lésions à un certain moment ou sur un certain lieu.

 19   Q.  A la page 42 du compte rendu d'audience, M. Mitchell a décrit comment

 20   les exécutions se sont déroulées à la ferme agricole de Branjevo d'après la

 21   déclaration d'un témoin. Il a été dit que la ligne des personnes qui allait

 22   être exécutées se trouvait derrière les personnes qui venaient d'être

 23   exécutées. Donc s'ils étaient derrière ces corps, comment est-il possible

 24   que les balles qui leur étaient destinées percutent les corps de ceux qui

 25   se trouvaient devant ?

 26   R.  Ecoutez, je ne sais pas si je vous ai très bien compris, mais d'après

 27   que j'avais compris, l'Accusation avait dit qu'ils étaient devant ceux qui

 28   avaient déjà été exécutés.


Page 41914

  1   Q.  Non, c'est le contraire. A la page 42, M. Mitchell indique exactement

  2   l'inverse, le contraire, donc il y avait la première ligne d'hommes qui

  3   étaient exécutés, et puis derrière cette ligne, vous aviez la ligne

  4   suivante des hommes qui allaient être exécutés. Donc, dans ces

  5   circonstances, est-ce que les balles auraient pu toucher et tuer ce groupe

  6   de personnes et se retrouver dans les corps de ceux qui avaient déjà été

  7   exécutés --

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, où est-ce que vous

  9   trouvez la référence relative aux propos de M. Mitchell qui a dit que la

 10   deuxième ligne se trouvait derrière ou devant la première ligne ? Est-ce

 11   que vous faites référence à la page 42, --

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, ligne 19 de la page 42.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] tout ce qu'il a dit c'est : Et ensuite

 14   il y a un deuxième groupe auquel on demande de se mettre en ligne derrière

 15   les cadavres ou les corps.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Exactement, derrière les corps, les cadavres et

 17   non pas devant.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Mitchell.

 19   M. MITCHELL : [interprétation] Je n'ai peut-être pas été assez clair dans

 20   ma formulation. Je pense que tout est clair lorsque je dis, lorsque je pose

 21   la question, lorsque je dis :

 22   "Les balles passaient à travers ces corps, il y avait d'autres corps qui

 23   étaient alignés derrière eux qui se trouvaient en ligne, bien, qui se

 24   trouvaient alignés."

 25   Voilà le scénario que j'ai proposé.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Et c'est ainsi que j'ai compris ce scénario.

 27   M. KARADZIC : [interprétation]

 28   Q.  Oui, mais toutefois, M. Mitchell a utilisé comme fondement le


Page 41915

  1   témoignage d'un témoin qui avait dit qu'ils étaient alignés derrière et non

  2   pas devant --

  3   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Monsieur Karadzic, bon, je pense que

  4   la confusion vient peut-être de vous. Enfin personne ne pense que -- enfin

  5   c'est une question de logique, de bons sens, personne ne va penser ou

  6   suggérer que les balles vont passer à travers la ligne ceux qui se trouvent

  7   devant jusqu'à ceux qui se trouvent derrière pour ensuite revenir vers la

  8   ligne de ceux qui se trouvent devant. C'est une question de bon sens.

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 10   M. KARADZIC : [interprétation]

 11   Q.  A plusieurs reprises au cours de l'audience d'aujourd'hui, et je vous

 12   donne un exemple, l'exemple de la page 28 et il y en a d'autres par la

 13   suite, il y a un lien qui a été établi avec le rapport de M. Janc, et qu'il

 14   n'y avait aucune indication d'exécutions dans ce rapport. Et, en fait, cela

 15   vous a été reproché lorsque vous l'avez dit.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Alors nous allons nous intéresser à cette pièce

 17   P4055. Voyons ce que l'enquêteur, M. Manning, a à dire à ce sujet. Ah, non,

 18   non, ce n'est pas le bon numéro. Ce n'est pas la bonne cote. Moi, j'ai dit

 19   P04505. P4505. Excusez-moi. Il y a une erreur. C'est moi qui ai fait

 20   l'erreur. Ce n'est pas le rapport. En fait, la cote est différente. Il

 21   s'agit apparemment du document P4502. Excusez-moi. P4504. Page 83 pour la

 22   version serbe. Qui correspond à la page 59, page 59 du document papier,

 23   mais dans le prétoire électronique il s'agit de la page 83. Nous avons la

 24   bonne page en serbe.

 25   M. KARADZIC : [interprétation]

 26   Q.  Professeur, regardez les 47 corps relativement intacts. Regardez ce qui

 27   est dit à ce sujet. Alors, pour lequel de ces corps, est-ce que l'on peut

 28   avancer ou affirmer qu'ils ont été exécutés ou qu'il a été exécuté ?


Page 41916

  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pourrions avoir la version

  2   anglaise ? Peut-être qu'il s'agit de la page 59. Voilà, c'est la bonne

  3   page. Est-ce que nous pourrions avoir la version serbe à nouveau.

  4   M. MITCHELL : [interprétation] Monsieur le Président, je pense qu'il s'agit

  5   de Zeleni Jadar 5; est-ce que M. Karadzic pourrait nous le confirmer, je

  6   vous prie ?

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui. Regardez la page précédente nous verrons

  9   exactement de quoi il s'agit. Mais, moi, je ne me suis pas beaucoup occupé

 10   de cela. Mais je voulais juste vous donner une page à titre d'exemple. Là,

 11   nous avons 47 corps relativement intacts. Zeleni Jadar 5.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, voilà, je le vois maintenant,

 13   effectivement. Pourriez-vous me répéter la question ? J'essaie de lire tout

 14   ce qui est écrit.

 15   M. KARADZIC : [interprétation]

 16   Q.  Alors regardez 33. Alors cause du décès pour 33 blessures par balle.

 17   Pour deux, il est probable qu'il s'agissait de blessures par balle. Trois,

 18   là, c'est une possibilité, il est possible que cela ait été des blessure

 19   par balle, et alors blessure -- une blessure possible par balle et des

 20   blessures provoquées par des débris d'obus. Et puis vous avez 9 pour

 21   lesquels cela n'a pas été déterminé, pour sept de ces corps, il y a

 22   présence de petits fragments métalliques.

 23   Alors pour lesquels de ces corps, est-ce que l'on pourrait dire ici, devant

 24   les Juges de la Chambre, qu'ils ont été exécutés par le Peloton d'Exécution

 25   ?

 26   R.  Eh bien, écoutez, afin de répondre à votre question, et en tant que

 27   professionnel, je pense qu'il faudrait que je consulte le rapport

 28   d'autopsie pour Zeleni Jadar 5, et ainsi je pourrais déclarer, pour les


Page 41917

  1   personnes qui ont subi des blessures par balle et pour lesquelles il y a

  2   des liens ou des ligatures, qu'ils ont été exécutés par un peloton

  3   d'exécution, comme je l'ai fait précédemment. Toutefois, il n'y pas de

  4   ligatures pour les 33 personnes pour lesquelles il est indiqué que la cause

  5   du décès est -- que la cause du décès est une blessure par balle. Alors

  6   c'est quelque chose que l'on peut dire mais on ne peut pas l'affirmer avec

  7   certitude. Il ne s'agit pas du type de blessures qui militent en faveur de

  8   l'une ou de l'autre option, à mon avis.

  9   Toutefois, il y a des conclusions qui ont été tirées à propos de la

 10   cause du décès. C'est assez intéressant, je pense, parce que cela a été

 11   fait en bonne et due forme. Vous avez d'un côté plusieurs degrés de

 12   probabilité pour expliquer la cause du décès qui est beaucoup plus

 13   importante que la cause véritable du décès. Dans un ou deux cas, la cause

 14   du décès a été déterminée. Pour deux ou trois cas, il s'agit d'une

 15   probabilité, donc, là, on peut dire que peut-être oui, peut-être non, il y

 16   a une blessure par balle qui provoque la mort; et puis vous avez, dans

 17   trois des cas, des blessures qui peuvent éventuellement être liées à une

 18   cause possibilité de décès. Mais quoi qu'il en soit on ne peut pas conclure

 19   que la mort a été provoquée par des blessures à la suite de balle, et l'on

 20   ne peut certainement pas dire de façon catégorique que ces personnes ont

 21   été exécutées par un peloton d'exécution, et on ne peut pas le conclure.

 22   Enfin, c'est la seule conclusion que l'on peut tirer sur la base de ce

 23   document.

 24   Q.  Je vous remercie. Est-ce que vous savez en fait s'il y avait des

 25   fosses individuelles ? Est-ce qu'il s'agissait de fosses communes ? Comment

 26   est-ce que les Musulmans ? Quel était le classement ou les catégories

 27   qu'ils établissaient à partir, pour les différents sites de fosses ?

 28   R.  Moi, je ne peux pas répondre à cette question sur la façon dont


Page 41918

  1   les fosses étaient classées. Il y avait des fosses communes qui contenaient

  2   plusieurs corps. Il y a eu des fosses beaucoup plus petites avec beaucoup

  3   moins de personnes inhumées, 10, 20 une vingtaine, puis il y a également

  4   des fosses, des tombeaux individuels. Les corps ont été ramenés de la

  5   surface où ils avaient été tués, soit dans une foret ou dans un champ, et

  6   dans certains rapports que j'ai consulté précédemment, j'ai vu également

  7   qu'il y avait eu des inhumations individuelles, des gens qui ont été

  8   inhumés individuellement. Mais ça, c'est plus valable pour la Bosnie

  9   centrale et la Bosnie orientale qu'ailleurs. Je ne me souviens plus où

 10   d'ailleurs en Bosnie centrale. Moi, je connais ce type de fosses ou de

 11   tombeaux mais ils n'étaient pas très nombreux. Et ça, c'était au début de

 12   l'année 1995 et en 1996, il y avait présence du bureau du procureur du

 13   parquet en fait de la fédération, et les témoins ont indiqué différentes

 14   fosses, et leur ont dit c'est là où nous avons enterré les personnes, et

 15   cetera. C'est ainsi qu'ils ont terminé leur identification d'ailleurs. Et

 16   bon, il s'est avéré, il est avéré que certaines des personnes, qui avaient

 17   été exhumées, avaient l'objet d'une identification erronée, et je ne veux

 18   surtout pas me livrer à des conjectures à ce sujet.

 19   Q.  Merci, Monsieur le Professeur. Pages 21 et 22 aujourd'hui. Nous

 20   avons entendu les allégations de l'Accusation lorsque le Procureur a cité

 21   ces témoins, et lorsqu'il a parlé du degré de décomposition des corps dans

 22   les fosses communes et que cela dépendait d'un microclimat de la fosse, et

 23   que la squelettisation était plus probable à la périphérie de la fosse que

 24   dans le centre. Pourriez-vous nous dire si leurs conclusions confirmaient

 25   que les paries périphériques de la fosse dans ces parties-là les corps

 26   étaient davantage squelettisés qu'ailleurs ? Est-ce que leurs conclusions

 27   étaient claires et montraient qu'il y a effectivement sur le plan

 28   géographique des différences au niveau du terrain, à savoir que les angles


Page 41919

  1   des corps squelettisés par rapport à un autre angle de la fosse commune ou

  2   les corps ont été retrouvés saponifiés ?

  3   R.  Ce qui a été affirmé, ce qui a été dit, eh bien, moi, je suis

  4   d'accord avec l'idée qu'un microclimat dans une fosse importante, eh bien,

  5   que le microclimat est différent d'un angle à l'autre. Cela dépend de

  6   l'épaisseur des piles des corps, et que les corps qui se trouvaient à la

  7   périphérie, au plus proche de la surface, eh bien, que ces corps-là ont

  8   subi une putréfaction qui est différente. Voici un aspect théorique de la

  9   chose. Ce qui était très important dans ce cas, c'était de constater que,

 10   dans ces fosses importantes en taille, il était important d'analyser les

 11   rapports post-mortem pour pouvoir identifier les degrés de putréfaction sur

 12   certains corps. Il fallait pouvoir comparer ces degrés de putréfaction avec

 13   l'endroit où les corps se trouvaient dans la fosse. Ça, c'est un début de

 14   réponse. Je n'ai pas terminé. Je vais être très concis à partir de

 15   maintenant.

 16   Ce qui signifie que dans le rapport post-mortem, et j'essaie d'être

 17   très objectif, dans les rapports post-mortem, eh bien, ils étaient très

 18   superficiels pour ce qui est du descriptif de la putréfaction. Les données

 19   étaient imprécises et générales. J'ai fait confiance à Lawrence et Clark,

 20   Je sais qu'il s'agit d'experts légistes, ils savent comment les corps se

 21   modifient dans les fosses; cependant, dans les rapports post-mortem qui ont

 22   fait partie des différents, qui font partie des rapports, je n'ai pas

 23   trouvé de description précise sur la putréfaction. Les pathologistes qui

 24   ont conduit les autopsies ont décrit les corps de façon différente, même

 25   Lawrence et Clark ont dit que la putréfaction n'a pas - n'était pas décrite

 26   de manière suffisamment précise, et donc ils ont essayé de définir ou de

 27   parler de cette différence. Moi, je suis parti de là, de l'analyse de la

 28   putréfaction de la décomposition des corps, et je suis parvenu à la


Page 41920

  1   conclusion que la putréfaction n'était pas seulement due à des différences

  2   de conditions dans la fosse mais également à l'heure du décès, et à l'heure

  3   de l'inhumation, et il s'agit là d'une conclusion très importante.

  4   Q.  Alors je vais revenir à une autre question. Si nous admettons que

  5   la théorie est valable, en vertu de laquelle un microclimat est un élément

  6   décisif, a-t-on pu établir que certaines parties de la fosse ont fait en

  7   sorte que les corps étaient squelettisés sans que l'on fasse de

  8   discrimination par rapport aux autres corps. En d'autres termes, est-ce

  9   qu'il y avait des corps qui étaient mélangés et des corps qui étaient

 10   séparés, et cela correspondait-il au microclimat présent dans les

 11   différentes parties de la fosse ? Cela était-il la preuve que certains

 12   corps d'un côté étaient squelettisés ?

 13   R.  Alors écoutez, non, il n'y a pas de preuve à cet effet.

 14   Q.  Merci.

 15   R.  Il n'y a que des affirmations générales indiquant que la plupart des

 16   corps avaient été squelettisés, certains corps étaient saponifiés, et

 17   cetera.

 18   Q.  Donc est-ce que cela signifie qu'à la périphérie des fosses, il y avait

 19   des corps saponifiés alors que les corps squelettisés se trouvaient dans le

 20   centre ? Et qu'en est-il des corps qui étaient à côté les uns des autres et

 21   qui étaient exposés au même microclimat ? Est-ce qu'on pouvait dire que

 22   pour ce qui est de corps exposés au même microclimat, il y avait un corps

 23   qui était saponifié et un autre qui était squelettisé ?

 24   R.  Il y avait des cas de genre. Dans un cas, un certain nombre de corps

 25   squelettisés et saponifiés affichaient un degré de saponification

 26   différent, et j'ai dit que de tels corps ont été retrouvés dans un même

 27   microclimat et que nous devions tenir compte des différentes heures ou

 28   dates de la mort et des différentes heures ou dates de l'inhumation.


Page 41921

  1   Cependant, si nous parlons d'heures du décès différentes, il est peut-être

  2   préférable de parler d'une heure différente de l'inhumation, parce que les

  3   corps auraient pu être inhumés le même jour mais, cependant, présenter des

  4   degrés de putréfaction différents. M. Christopher Lawrence était d'accord

  5   avec moi lorsque je lui ai posé la même question.

  6   Q.  Alors, à la page 16, il est clairement indiqué qu'il n'y a pas eu

  7   d'inhumation par la suite, et l'Accusation s'est reposée sur son expert.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Regardez le D1975, le corrigendum de M. Janc.

  9   M. KARADZIC : [interprétation]

 10   Q.  En attendant l'affichage du document, à l'alinéa 2, vous avez entendu

 11   parler de la déclaration du témoin en vertu de laquelle, à Glogova 1, tous

 12   les corps ont été inhumés entre le 14 et le 17 juillet. Vous trouverez ceci

 13   à la page 16, me semble-t-il.

 14   Regardez le premier alinéa. Si toutes les inhumations étaient terminées le

 15   17 juillet, comment expliquez-vous le fait que des personnes qui étaient en

 16   Yougoslavie jusqu'au 26 juillet ont, néanmoins, été retrouvées dans cette

 17   fosse ?

 18   R.  Je dirais dan ce cas que ces la preuve qu'il y a eu des inhumations par

 19   la suite dans cette fosse, et il s'agit d'un élément de preuve qui atteste

 20   de cela.

 21   Q.  [aucune interprétation]

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Mitchell.

 23   M. MITCHELL : [interprétation] Monsieur le Président, peut-être que je peux

 24   préciser ce point-là. La fosse L à Glogova. L Glogova tout simplement, pas

 25   Glogova 1. Le Pr Wright a parlé dans sa déposition à propos de cette fosse.

 26   Il a clairement exclu cela. Il est clair qu'il s'agit d'un dépôt distinct

 27   qui se trouve sur le côté de la fosse et que cela ne fait pas partie des

 28   éléments présentés ici.


Page 41922

  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que nous allons donner une

  2   référence ?

  3   M. MITCHELL : [interprétation] Je vais regarder.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

  5   M. MITCHELL : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons poursuivre, Monsieur

  7   Karadzic.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pouvons également avoir la

  9   citation qui permet d'indiquer que c'était purement ponctuel. Douze, et ils

 10   ont tous été inhumés, dix de Serbie, et ensuite ils ont tous été inhumés à

 11   des dates différentes.

 12   M. KARADZIC : [interprétation]

 13   Q.  A la page 4 aujourd'hui, il a été précisé que c'est aux Juges de la

 14   Chambre d'en décider, à savoir quels sont les éléments que l'on peut faire

 15   valoir. D'après vous, la Chambre de première instance est en droit

 16   d'entendre un deuxième avis qui contredit le premier ?

 17   R.  Alors, ça n'est pas à moi -- c'est à moi, en qualité d'expert,

 18   que de donner mon avis. Je dois partager avec vous ce que j'ai remarqué car

 19   ceci vous permettra peut-être de faire plus la clarté sur les événements

 20   qui se sont déroulés. Je dois parler de ce qui peut être admis au non sur

 21   un plan purement professionnel et je peux vous parler de la manière dans

 22   ces éléments doivent être interprétés.

 23   Q.  Merci. Nous attendons l'affichage d'un document. Et je souhaite

 24   maintenant que nous parlions de ce qui a été abordé hier à la page 100, à

 25   savoir la destruction des objets.

 26   R.  Les objets, oui, je suis d'accord.

 27   Q.  Est-ce que vous l'avez fait de façon intentionnelle ? Vous a-t-on

 28   contraint à le faire à cause de quelque chose ?


Page 41923

  1   R.  Je ne comprends pas. Est-ce que c'est moi qui aie fait cela

  2   intentionnellement ?

  3   Q.  Nous parlons de Racak et des échantillons qui se sont dégradés.

  4   R.  Non, non, non, non.

  5   Attendez, attendez. Je n'ai pas répondu. Que se passe-t-il lorsque

  6   l'on parle de ces échantillons pris à Racak pour l'analyse de l'ADN, qui a

  7   fait l'objet d'une question de la part de M. Mitchell ? Ces échantillons

  8   ont été envoyés à l'institut médico-légal -- nous parlons en fait du lac de

  9   Radonjic, non pas de Racak. Il s'agit d'échantillons des tissus et des

 10   ossements. Moi je me suis occupé de l'ensemble de la procédure. Ceux-ci ont

 11   été envoyés à l'institut médico-légal et placés dans un congélateur. Ceci

 12   remonte à 1998. Dans l'intervalle, il y a eu le bombardement en 1999, le

 13   tristement célèbre, lorsqu'il y a eu des coupes d'électricité, et ce

 14   congélateur n'était pas alimenté. Et en 2000 ou 2001, à savoir trois ans et

 15   demi après, on devait sortir ces échantillons. Il y avait des sacs en nylon

 16   avec des marquages dessus, et il y avait des marquages à l'intérieur des

 17   sacs. Et certains de ces marquages ont été perdus, ils s'étaient dégradés

 18   dans l'intervalle.

 19   Q.  Merci.

 20   R.  Telle était la raison.

 21   Q.  Merci. Je souhaite terminer avant la pause. Ceci n'a donc pas été fait

 22   de façon intentionnelle ?

 23   R.  Bien sûr que non.

 24   Q.  A la page 89, on vous a posé la question sur la manière dont ont traité

 25   de façon différente les vêtements retrouvés sur les victimes du Kosovo et

 26   ensuite en Bosnie. Veuillez dire aux Juges de la Chambre quelles étaient

 27   les formations serbes engagées au Kosovo, de qui s'agissait-il ?

 28   S'agissait-il de civils ? Quelles auraient pu être les victimes ? Et suite


Page 41924

  1   au combat ou suite à des exécutions ?

  2   R.  Maintenant, vous m'obligez à me souvenir de choses qui se sont

  3   produites en 1998. Au Kosovo, il y avait l'UCK, ou la "KLA", une

  4   organisation terroriste qui terrorisait à la fois les Albanais et les

  5   Serbes, les Albanais qui ne souhaitaient pas les rejoindre. Et de l'autre

  6   côté, nous avions ce qui s'appelait la subjectivité juridique, et le

  7   territoire était défendu par l'armée et la police. De l'autre côté, il y

  8   avait des gens en uniforme, et il y avait les membres de l'ALK qui ne

  9   portaient pas d'uniformes particuliers. Avant quelle année, je ne sais pas.

 10   Ils portaient des vêtements civils. Ils avaient des uniformes militaires,

 11   mais ces uniformes n'étaient pas complets. Il y avait également des unités

 12   spéciales et il y avait cette police, et nous avons appris à l'époque que

 13   c'était de la police. Ils portaient des jeans noirs et des vestes en cuir

 14   noir. Voici les informations que j'ai reçues et que je vous ai

 15   communiquées. Et par la suite, on leur a remis des uniformes avec des

 16   insignes, et cetera.

 17   Q.  Merci. En d'autres termes, si vous aviez trouvé des victimes serbes au

 18   Kosovo sans uniforme, cela vous aurait-il permis de conclure qu'il

 19   s'agissait de civils, par opposition à la Bosnie, où la guerre en Bosnie

 20   était menée par des civils ?

 21   R.  Cela va au-delà de mon champ d'expertise; cependant, parmi les victimes

 22   au Kosovo, il y avait surtout des civils serbes, des agriculteurs, des

 23   femmes âgées et, bien évidemment, des hommes mûrs. Mais il s'agissait tous

 24   de civils qui portaient des habits civils. Il est notoirement connu qu'ils

 25   ont été tués en raison de leur appartenance ethnique. Il y avait également

 26   beaucoup d'Albanais qui ont été tués parce qu'ils ne souhaitaient pas

 27   soutenir l'ALK et il y avait des Albanais de confession différente. Ils ont

 28   été tués également.


Page 41925

  1   Pour ce qui est de la deuxième partie de mon rapport, j'ai déclaré que

  2   d'après les journaux et documents disponibles en Bosnie, le conflit

  3   engageait d'un côté l'armée de la Republika Srpska et de l'autre l'ABiH. Au

  4   début, la BiH faisait intervenir des personnes qui ne portaient l'uniforme.

  5   Il s'agissait de gardes villageoises, d'hommes de la Défense territoriale,

  6   je ne sais pas comment on les appelait. Je suis sûr que vous savez cela

  7   mieux que moi.

  8   Q.  Dans votre déclaration - c'est au 25380 - à propos du Kosovo, vous avez

  9   retrouvé des victimes qui étaient des femmes. Ceci vous permettrait-il de

 10   conclure qu'il s'agissait de civils ?

 11   R.  Dans ces cas-là précis, je peux dire absolument. Il s'agissait tout

 12   d'abord de trois ou quatre femmes, deux femmes avaient plus de 70 ans et

 13   c'étaient des sœurs. Il y avait une femme qui était plus jeune - qui a été

 14   tuée en même temps que son mari - et cette femme venait de donner naissance

 15   à son enfant. Ils ont réussi à cacher l'enfant. Ils ont été tués, incendiés

 16   à bord d'un véhicule, et jetés dans le canal du lac Radonjic. Et la

 17   quatrième femme a été retrouvée plus tard avec son mari. Ils ont été tués

 18   parce qu'ils venaient prétendument de l'étranger et qu'ils ne souhaitaient

 19   pas aider l'ALK, car il fallait financer l'ALK à l'époque. Voilà pour ce

 20   qui est de ces quatre femmes dont je me souviens. Et ces femmes portaient

 21   des habits civils. Et je peux affirmer avec certitude qu'il s'agissait de

 22   victimes innocentes et civiles.

 23   Q.  Alors, pour ce qui est de votre déclaration, 25381, vous avez établi

 24   que les victimes de Racak portaient sous leurs vêtements civils des sous-

 25   vêtements militaires tous identiques, ainsi que des bottes qui leur avaient

 26   été données par l'armée. Donc cela provient de l'arsenal militaire, fait

 27   partie de l'équipement militaire ?

 28   R.  Oui, je l'ai dit et je l'ai dit dans ma déposition ici. Ces sous-


Page 41926

  1   vêtements, ces caleçons qui sont portés, c'est gris, c'est porté par

  2   l'armée; et les bottes également étaient bien particulières, elles avaient

  3   un marquage dessus, on indiquait qu'il s'agissait d'un lot de bottes de

  4   l'armée. Et d'après ce dont je me souviens, le nom de la compagnie était

  5   indiqué dessus et on indiquait de quelle usine provenaient ces bottes, avec

  6   la lettre O inscrite dessus, un O avec un tréma au-dessus.

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande le versement au dossier de ces deux

  8   déclarations du Pr Dunjic, qui ont également été utilisées par le

  9   Procureur.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Je crois que ce qui est encore plus important

 11   que les vêtements, c'est le fait que les traces de poudre ont été

 12   retrouvées sur les paumes des mains des victimes de Racak, et on a pu

 13   constater des blessures qui étaient caractéristiques de blessures par armes

 14   à feu lorsqu'une personne est à demi recroquevillée dans un abri ou

 15   derrière un bouclier. Et c'est quelque chose que j'ai dit à l'Accusation

 16   lorsque l'équipe finlandaise dirigée par un professeur, Helena Ranta.

 17   L'INTERPRÈTE : L'interprétation de cabine anglaise n'a pas entendu le nom

 18   du chef de la première équipe finlandaise.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, veuillez répéter

 20   votre question, s'il vous plaît.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'ai dit qu'hier vous m'avez dit que c'était à

 22   moi de décider si, oui ou non, j'allais demander le versement de ces

 23   documents au dossier, et maintenant j'en demande le versement.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avons-nous déjà vu ces déclarations ?

 25   Monsieur Mitchell.

 26   M. MITCHELL : [interprétation] Monsieur le Président, je crois que les

 27   déclarations citées --

 28   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]


Page 41927

  1   M. MITCHELL : [interprétation] -- eh bien, leur teneur n'est pas pertinente

  2   à l'égard de l'affaire qui nous intéresse aujourd'hui. J'ai dit à M. Dunjic

  3   qu'il avait changé l'importance qu'il accordait aux vêtements civils et aux

  4   vêtements d'hiver, et je crois qu'il a expliqué à moi et à M. Karadzic les

  5   raisons de ces différences. Je ne pense pas que ces déclarations sous-

  6   jacentes aient besoin d'explications supplémentaires.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Etant donné que ces questions ont déjà

  8   été abordées, je ne sais pas si c'est nécessaire de verser au dossier ces

  9   documents.

 10   M. ROBINSON : [interprétation] Ces documents peuvent corroborer ce qu'il a

 11   dit, donc s'il y a un élément de doute, cela permet de les corroborer. Mais

 12   cela n'est pas contesté.

 13   M. MITCHELL : [interprétation] Je ne pense pas qu'il soit contesté le fait

 14   que le Pr Dunjic ait dit quelque chose à propos de vêtements civils dans

 15   une déclaration, quelque chose à propos de vêtements d'hiver, et que c'est

 16   différent maintenant.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Restons-en à cela. De façon générale,

 18   les Juges de la Chambre émettent des réserves quant au fait de cumuler un

 19   nombre important de documents.

 20   Poursuivons, simplement.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 22   M. KARADZIC : [interprétation]

 23   Q.  Monsieur le Professeur Dunjic, est-ce que vous êtes tombé sur des

 24   données qui indiqueraient qu'il y avait des roulements à billes dans les

 25   corps qui proviennent de grenades à main ?

 26   R.  Oui, dans un certain nombre d'endroits, je crois que c'était à Zeleni

 27   Jadar 5, je ne me souviens pas l'endroit en question, mais il y avait des

 28   roulements à billes qui ont été retrouvés dans certains corps. Il y avait


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  1   des blessures par balle et d'autres armes ou instruments.

  2   Q.  Merci. Et d'après la commission de San Antonio, on sait que des guerres

  3   ont été menées à cet endroit-là avant Srebrenica. Avant même ce qu'a dit

  4   Dean Manning par rapport à ma question, autrement dit, qu'il y avait des

  5   combats qui se sont poursuivis après Srebrenica. Donc, même M. Manning ne

  6   le sait pas. Connaissez-vous le nombre de victimes de la 28e Division avant

  7   1995 ?

  8   Ligne 3, on devrait lire "nisu imali sjest," ne savait pas --

  9   R.  Je ne dispose pas d'information qui me permettrait de savoir combien de

 10   victimes il y avait avant juillet 1995, parmi les soldats et les civils de

 11   l'ABiH, mais je sais qu'il y a eu des combats à cet endroit-là avant le

 12   mois de juillet, entre 1992 et 1995, et qu'un nombre important de personnes

 13   ont été tuées dans ce laps de temps de part et d'autre.

 14   Q.  Merci.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que nous pourrions regarder le 1D9323

 16   dans le prétoire électronique, s'il vous plaît.

 17   Malheureusement, nous n'avons pas de traduction pour ce document. Je ne

 18   pense pas que nous ayons une traduction.

 19   M. KARADZIC : [interprétation]

 20   Q.  Monsieur le Professeur, veuillez nous parler de ce tableau?

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Mitchell.

 22   M. MITCHELL : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaite que l'on

 23   m'indique d'où vient ce document. Il n'y a pas de numéro ERN, semble-t-il.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Il s'agit de quelque chose qui a été saisi dans

 26   les ordinateurs de Zepa, l'ensemble des transmissions avec l'état-major

 27   général de la 28e Division. La 28e Division disposait d'ordinateur qui

 28   contenait un nombre important de documents comme celui-ci, et c'est un de


Page 41929

  1   ces documents.

  2   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation] 

  3   M. MITCHELL : [interprétation] Je m'oppose à l'utilisation d'un quelconque

  4   document de ce genre.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors enlevons-le de l'écran, pour

  6   l'instant.

  7   Veuillez pour suivre.

  8   M. MITCHELL : [interprétation] Je m'oppose à l'utilisation d'un tel

  9   document sans numéro ERN, et sans traduction. Nous n'avons aucune

 10   indication, nous ne savons pas absolument de quoi il s'agit.

 11   M. ROBINSON : [interprétation] Ce qui signifie qu'il n'y a que les

 12   documents présentés par l'Accusation qui peuvent être montrés au témoin. Et

 13   donc c'est le fait que le document ne comporte pas de numéro ERN.

 14   M. MITCHELL : [interprétation] Ecoutez, ce n'est pas ce que j'ai dit.

 15   C'est le fait de savoir que nous ne savons pas d'où vient le document,

 16   premièrement, et ensuite, deuxièmement, le fait que nous n'avons pas une

 17   traduction pour ce document.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] La Chambre, et si les parties ne sont

 19   pas satisfaites de l'origine, vous faites objection à son utilisation, si

 20   j'ai bien compris ?

 21   M. MITCHELL : [interprétation] Je fais objection à son utilisation en

 22   attendant d'avoir une traduction pour voir de quoi il s'agit, pour moi-

 23   même.

 24   M. ROBINSON : [interprétation] Eh bien, je crois que c'est un document que

 25   nous, ce n'est pas ainsi qu'on a procédé. Je crois que le document peut

 26   être utilisé. La question de l'origine va aller vers des questions

 27   d'admissibilité. Mais le fait de savoir si on peut continuer à s'en servir,

 28   parce que si l'on ne laisse pas le témoin répondre à des questions au sujet


Page 41930

  1   de ce document, c'est une chose, mais si on n'apporte pas de source

  2   adéquate pour ce qui est de l'origine, eh bien, le document ne sera pas

  3   admis au dossier.

  4   [La Chambre de première instance se concerte]

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] La Chambre est portée à tomber, a plutôt

  6   tendance à tomber d'accord avec l'observation formulée par M. Robinson.

  7   Voyons un peu comment les choses vont évoluer, on va voir si le témoin est

  8   à même de commenter.

  9   M. KARADZIC : [interprétation]

 10   Q.  Est-ce qu'on dit aperçu sur les pertes en effectif du 28e Groupe

 11   opérationnel --

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, pourquoi ne demandez-

 13   vous pas au témoin d'en donner lecture.

 14   M. KARADZIC : [interprétation]

 15   Q.  J'aimerais que vous donniez lecture de l'en-tête, et ensuite vous

 16   pouvez sauter le reste jusqu'à --

 17   R.  Permettez-moi, je crois avoir compris ce que le Juge a demandé. C'est

 18   un rapport envoyé par l'ABiH à l'intention du commandement de la 28e

 19   Division. Et on dit la référence, Srebrenica, 3 avril 1995. Et en sous

 20   titre, on dit : "Rapport relatif aux pertes dans la zone de responsabilité

 21   de la 28e Division", puis ensuite il y a un texte. Et ensuite, on dit en

 22   dessous : "Aperçu relatif aux pertes en effectif au sein des unités, OGA, à

 23   la date du -- enfin jusqu'à la date du 31 décembre 1994."

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant.

 25   Monsieur Mitchell.

 26   M. MITCHELL : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, je pense que

 27   nous ne devrions pas sauter les choses ici. Il faut donner lecture de

 28   chaque mot.


Page 41931

  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais ça ne pose aucune difficulté que de

  2   donner lecture du tout. Donc je voulais vous faire gagner du temps.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Professeur, est-ce que vous pouvez

  4   donner lecture, je vous prie, de la première phrase de la première ligne de

  5   ce document.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] On dit en haut : Copie -- non, ce n'est pas

  7   ça. "Armija, armée de la République de Bosnie-Herzégovine --

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, ils ont dit "copy of"; c'est en

  9   anglais ça.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Mais en dessous il y a défense de la

 11   république, secret militaire, strictement confidentiel.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Concentrez-vous, je vous prie sur la

 13   réponse. Je vous ai demandé la dernière ligne.

 14   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] La dernière ligne de ce document.

 16   J'aimerais qu'on descende vers le bas du document. On voit "page" en

 17   anglais aussi.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation]  Oui, on voit "page 1".

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous pouvez nous expliquer de

 20   quoi dans ce document ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Relevez, je vous prie, la page.

 22   Il s'agit d'un rapport relatif aux pertes militaires en effectif de l'Unité

 23   A8, Armée 8, j'imagine, à la date du 31 décembre 1994. Ce sont donc des

 24   récapitulatifs de pertes.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bon, ceci étant dit, pourquoi ce

 26   document comporte-il des mots en anglais ? Est-ce que vous avez une idée de

 27   la raison ? C'est ça ma question.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne le sais vraiment pas.


Page 41932

  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Excellences, je pense ne pas pouvoir terminer

  2   avant la pause. On s'efforcera de retrouver la référence ERN du même

  3   document, et ces documents se trouvent être prédéfinis par l'ordinateur,

  4   ces programmé de la sorte.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. Est-ce qu'on peut faire une pause

  6   de 45 minutes, et on va reprendre à 13 h 20.

  7   --- L'audience est levée pour le déjeuner à 12 heures 36.

  8   --- L'audience est reprise à 13 heures 28.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous avez des informations

 10   complémentaires à nous fournir, Monsieur Mitchell ?

 11   M. MITCHELL : [interprétation] Deux éléments très courts, Monsieur le

 12   Président. Je retire mon objection pour ce qui est du dernier document

 13   montré par M. Karadzic, à savoir le 1D9323. Nous avons une version

 14   différente du même document dans notre collection à nous et nous l'avons

 15   téléchargée au prétoire électronique en tant que pièce 22548 de la liste 65

 16   ter. Et pendant le déjeuner, il y a déjà une version de la traduction, un

 17   premier jet de traduction de fait. Alors, on aura au moins la première

 18   partie en anglais bientôt.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci beaucoup.

 20   M. MITCHELL : [interprétation] Deuxième chose, le professeur Wright a

 21   témoigné au compte rendu 22268 au sujet de Glogova L en tant que fosse

 22   commune et ce pendant la période du 17 et au 27 juillet. Et comme les Juges

 23   de la Chambre vont s'en souvenir, dans une notification relative au

 24   professeur Wright qui a été présentée le 28 novembre 2011, il y a un

 25   rapport distinct que le professeur Wright a rédigé au sujet de cette fosse

 26   secondaire L et nous avons retiré le rapport parce que ces victimes

 27   n'avaient rien à voir avec l'incident E-3.1 qui est celui des exécutions de

 28   l'entrepôt de Kravica. Donc, le professeur Wright a -- enfin, nous n'avons


Page 41933

  1   délibérément pas présenté des éléments de preuve au sujet de ce que le Pr

  2   Wright a dit, au sujet de cette fosse L, parce que ça n'avait rien à voir

  3   avec les éléments de l'organigramme E.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

  5   Monsieur Karadzic, est-ce que vous avez utilisé le 22548 ?

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je crois que --

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant. Est-ce que vous pouvez nous

  8   donner la référence une fois de plus, Monsieur Mitchell ?

  9   M. MITCHELL : [interprétation] 25458.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 11   M. ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Président, je -- pendant que

 12   nous attendons, je remarque que nous n'avons pas ici le Juge Lattanzi.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, merci de me l'avoir rappelé. Elle

 14   ne peut pas être avec nous en raison d'obligations officielles qui la --

 15   vont la retenir d'ici à la fin de cette journée.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, est-ce qu'on peut --

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] On m'a dit qu'il y avait une traduction,

 18   un premier jet de traduction de ce document. Oui.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 20   M. KARADZIC : [interprétation]

 21   Q.  Professeur, est-ce que vous confirmez que le 31 décembre 1994 et le --

 22   c'est la même date, la même en-tête ?

 23   R.  Oui, c'est le même document. Le 3 avril 1995.

 24   Q.  Merci.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut nous montrer la page suivante

 26   en version anglaise, s'il vous plaît ?

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais c'est tout ce que nous avons,

 28   Monsieur Karadzic.


Page 41934

  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, mais le tableau n'a pas été traduit, donc

  2   rien que le texte. Alors, moi, je voudrais qu'on nous affiche la dernière

  3   page en version serbe. Non, ce qui manque, c'est les -- il y a cinq pages

  4   qui manquent. 1375 de l'ERN plus cinq ou six pages encore. Il faut le 1380

  5   ou le 81 et c'est des pages manquantes. Dans la version précédente, nous

  6   avons le document entier.

  7   M. MITCHELL : [interprétation] Je n'avais pas d'objection pour le cas où M.

  8   Karadzic souhaiterait utiliser sa version B/C/S en -- accompagné d'une

  9   traduction anglaise.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, mais c'est -- ce -- ça me semble

 11   assez équitable.

 12   Revenons maintenant vers cette pièce 1D9323.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci. Est-ce qu'on peut nous montrer l'avant-

 14   dernière page ? Parce que la dernière ne nous intéresse pas. L'avant-

 15   dernière, s'il vous plaît.

 16   M. KARADZIC : [interprétation]

 17   Q.  Professeur, est-ce que je peux vous demander de vous pencher sur ce qui

 18   figure au total en bas. On a d'abord : mort, légèrement blessé, grièvement

 19   blessé, hors d'état de combattre. Alors, au 1e janvier 1995, combien de

 20   morts y a-t-il ?

 21   R.  D'après ce tableau que vous venez de me montrer, les morts sont au

 22   nombre de 1607. Bon, revenez -- ramenez le tableau. Oui, 1607, je disais.

 23   Dans le groupe des grièvement blessés, 654. Légèrement blessés, 2501. Au

 24   total, pour ce qui est des pertes : 4762. Et disparus, 225. Donc, nous

 25   avons 1607 morts; 225 disparus; et grièvement blessés, 654; légèrement

 26   blessés, 25 -- 2501. C'est un total qui -- ce sont les totaux qui sont

 27   données en page 11.

 28   Q.  Merci. Professeur, est-ce que les documents que vous avez eu l'occasion


Page 41935

  1   d'étudier ont fait la distinction entre les victimes qu'a connu la 28e

  2   Division et celle de juillet 1995. Est-ce qu'on a séparé les choses pour

  3   dire que ceci fait partie de telle période ?

  4   R.  Non. Je n'ai pas trouvé de documents de ce type.

  5   Q.  Merci.

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande le versement au dossier de ce

  7   document et je demanderais à ce qu'il soit complété avec une version

  8   anglaise et celle-ci.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons lui accorder une cote à des

 10   fins d'identification.

 11   M. MITCHELL : [interprétation] Pas d'objection.

 12   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce MFI D3897, Messieurs les

 13   Juges.

 14   M. KARADZIC : [interprétation]

 15   Q.  Merci, Professeur. Grand merci de l'effort que vous avez bien voulu

 16   consentir. Et merci du travail que vous avez fourni ainsi que du témoignage

 17   que vous nous avez apporté.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Professeur. Ceci met un terme à

 19   votre témoignage.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie également de votre patience,

 21   parce que certaines de mes réponses ont été quelque peu plus longues. Mais

 22   j'ai estimé qu'il était indispensable d'apporter des éclaircissements pour

 23   que tout un chacun comprenne bien ce que j'ai mis sur papier, ce que j'ai

 24   couché sur papier et ce que j'ai raconté. Merci. Je peux m'en aller ?

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, en effet.

 26   [Le témoin se retire]

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Nicholls, j'ai cru comprendre

 28   que vous aviez un certain nombre de points à évoquer.


Page 41936

  1   M. NICHOLLS : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. En fait, étant

  2   donné que je me suis penché une fois de plus sur la question, je dirais

  3   qu'il n'y aura aucun sujet à aborder -- préliminaire. On peut continuer

  4   avec nos travaux.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons passer maintenant au contre-

  6   interrogatoire de M. Keserovic dont l'interrogatoire principal a déjà pris

  7   fin auparavant.

  8   M. ROBINSON : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président.

  9   M. NICHOLLS : [aucune interprétation]

 10   L'INTERPRÈTE : Ce -- c'est s'excuse d'avoir parlé hors micro.

 11   M. NICHOLLS : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, j'ai

 12   besoin d'une minute pour mettre mon ordinateur en marche.

 13   [Le témoin vient à la barre]

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Comment allez-vous, Général?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais très bien. Merci.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je tiens seulement à vous dire que la

 17   déclaration solennelle que vous avez déjà faite est encore en vigueur. Nous

 18   allons continuer aujourd'hui avec le contre-interrogatoire qui sera confié

 19   au représentant du bureau du Procureur. Vous le comprenez, n'est-ce pas ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je le comprends.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Nicholls, à vous.

 22   M. NICHOLLS : [interprétation] Je vous remercie, Messieurs les Juges.

 23   LE TÉMOIN : DRAGOMIR KESEROVIC [Reprise]

 24   [Le témoin répond par l'interprète]

 25   Contre-interrogatoire par M. Nicholls :

 26   Q.  [interprétation] Bonjour, Professeur.

 27   R.  Bonjour.

 28   Q.  La première des choses que je voudrais vous demander se rapporte à une


Page 41937

  1   partie de votre témoignage que nous avons eu l'occasion d'entendre il y a

  2   quelques semaines de cela, et cela porte aussi sur vos éléments de votre

  3   rapport afférent. Il n'est point nécessaire de faire référence au rapport,

  4   mais je dirais pour les parties en présence qu'il s'agit de la page 22,

  5   paragraphe 14, et il s'agit du rapport de M. Brown, paragraphes 2.81, 2.92

  6   à 2.98, plus concrètement liés à la situation à Vecici, Kotor Varos.

  7   Vous vous souviendrez d'en avoir parlé dans votre rapport et dans votre

  8   témoignage ici, n'est-ce pas ?

  9   R.  Je m'en souviens, en effet.

 10   Q.  Pour ce qui est de la page du compte rendu d'audience T-40939, M.

 11   Karadzic vous a posé des questions au sujet de l'analyse effectuée par M.

 12   Brown pour ce qui est du cas de Vecici, et vous en avez parlé à la page 40

 13   940, et vous avez dit :

 14   "Tout simplement, le désarmement avait été un préalable pour la conduite de

 15   telles opérations, et il y a eu beaucoup de conflits qui se sont produits

 16   entre les résidents où les résidents de Vecici ont été tués.

 17   "Question : M. Brown a fait remarquer que parmi ces villages musulmans et

 18   croates, il n'y avait que le village de Vecici où il y a eu des conflits

 19   avec tant de victimes ?"

 20   Et vous avez dit que :

 21   "M. Brown avait analysé cette localité concrète mais qu'il n'y avait pas

 22   qu'elle, et l'incident de Vecici avait sous-entendu bon nombre de pertes

 23   sans présentation de l'analyse des raisons pour lesquelles il y a eu

 24   conflit ayant donné lieu à autant de victimes."

 25   Alors, je voudrais que nous parlions justement de ces victimes à Vecici.

 26   M. NICHOLLS : [interprétation] A cette fin, j'aimerais qu'on nous affiche

 27   le 00719 de la liste 65 ter, s'il vous plaît. Voilà, c'est bon.

 28   Q.  Il s'agit d'un rapport de combat du 1er Corps de la Krajina. C'est daté


Page 41938

  1   du 4 novembre 1992. C'est ce que M. Brown nous cite dans son rapport aux

  2   notes de bas des pages 443 et 740. Et il y est dit :

  3   "Les Bérets verts qui essayaient de sortir du village de Vecici sont tombés

  4   dans notre embuscade. Il y en a eu 40 de tués et 20 de capturés pour ce qui

  5   est de ce qu'il est convenu d'appeler l'ABiH. Et quelque autres 150 membres

  6   des Bérets verts se sont rendus, pour l'essentiel avec des femmes et des

  7   enfants, dans la soirée…"

  8   Est-ce que vous avez eu l'occasion de voir ce rapport déjà auparavant,

  9   Monsieur ? Est-ce qu'on vous l'a donné ? C'est ce qui est cité dans le

 10   rapport de M. Brown.

 11   R.  Je ne suis pas sûr d'avoir vu l'intégralité de ce rapport ou d'avoir vu

 12   la totalité de ces paragraphes-ci.

 13   Q.  Bien. Eh bien, nous avons fourni à la Défense un CD, un disque dur,

 14   avec tous ces documents et les notes de bas de page qui s'y rapportent. Je

 15   voudrais savoir si on vous l'a donné lorsque vous avez préparé votre

 16   critique ?

 17   R.  J'ai reçu de la part de la Défense un certain nombre de documents qui

 18   sont cités en référence par M. Brown dans ses conclusions, voire dans ses

 19   commentaires.

 20   Q.  Bien. Mais est-ce que vous avez obtenu la totalité des documents qui

 21   sont mentionnés aux notes de bas de page dans le rapport de M. Brown ? Et

 22   la réponse peut être oui, non, ou je ne sais pas, ou je ne m'en souviens

 23   pas.

 24   R.  S'agissant des documents mentionnés aux notes de bas de page, je pense

 25   qu'il n'en a manqué aucun et que je les ai tous reçus.

 26   Q.  Bien. Donc vous aviez en votre possession ce document-ci, et celui-ci

 27   mentionne 40 personnes tuées au sujet de Vecici et au sujet du mois de

 28   novembre, n'est-ce pas ?


Page 41939

  1   R.  Oui.

  2   M. NICHOLLS : [interprétation] Puis-je demande un versement au dossier de

  3   ce document ?

  4   M. ROBINSON : [interprétation] Pas d'objection.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bon.

  6   M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce 6462, Messieurs

  7   les Juges.

  8   M. NICHOLLS : [interprétation]

  9   Q.  Je voudrais que ce soit clairement indiqué qu'il s'agit là d'un

 10   document envoyé à l'état-major principal.

 11   R.  Oui.

 12   M. NICHOLLS : [interprétation] Je souhaite maintenant que l'on nous affiche

 13   la pièce 00293 de la liste 65 ter.

 14   Q.  Ce document est également daté du 4 novembre, du 1er Corps de la

 15   Krajina, et est adressé à l'état-major principal. C'est la note de bas de

 16   page de M. Brown numéro 445. Regardez le paragraphe 2. Vous vous souvenez

 17   de ce document, Monsieur, n'est-ce pas ?

 18   R.  Je pense que le document contient les mêmes informations que dans le

 19   document précédent. Le contenu est pratiquement le même. Seul l'ordre des

 20   paragraphes diffère. Et ce qui est mentionné --

 21   Q.  [aucune interprétation]

 22   R.  -- au paragraphe 2 parle de Kotor Varos encore une fois.

 23   Q.  Je pense que ma question n'était pas claire. Je vous demande si vous

 24   vous souvenez avoir vu ce document ? Est-ce que vous vous souvenez avoir vu

 25   ce document lorsque vous avez préparé votre rapport, Monsieur ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Et vous avez raison, le contenu est le même. Voyons ce que nous dit le

 28   paragraphe 2 -- deuxième partie :


Page 41940

  1   "Dans la région de Kotor Varos, il y a eu des heurts entre les membres des

  2   forces musulmanes et nos unités, parce qu'il y a eu un refus de négocier le

  3   départ de la région du village de Vecici. Environ 40 Bérets verts ont été

  4   tués et environ 200 ont été capturés. Un massacre brutal des membres

  5   capturés des Bérets verts a commencé parce que quatre hommes avaient été

  6   blessés et quatre [comme interprété] avaient été tués par un soldat de la

  7   Brigade d'infanterie légère de Kotor Varos, et parce que les soldats

  8   blessés ont été incendiés sur Gola Planina (Jajce).

  9   "Des mesures pour empêcher des massacres à l'avenir ont été prises via la

 10   22e Brigade d'Infanterie légère."

 11   On nous dit, là aussi, que 40 membres des forces ennemies ont été tués au

 12   combat, quatre soldats ont été blessés, un soldat a été tué, et on dit que

 13   c'est là que le massacre brutal des prisonniers a commencé. Cela a

 14   également été envoyé à l'état-major principal, n'est-ce pas ?

 15   R.  Oui.

 16   M. NICHOLLS : [interprétation] Je demande le versement de ce

 17   document.

 18   M. ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai pas

 19   d'objection, tant que l'on a pu établir que ces documents disent ce qu'ils

 20   disent. Je pense que si l'on veut apporter un certain fondement au contre-

 21   interrogatoire et aux questions qui sont posées lors de ce contre-

 22   interrogatoire, il faudrait permettre au témoin d'apporter des commentaires

 23   ou, du moins, poser une question là-dessus.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je m'attends à ce qu'il y en ait,

 25   oui.

 26   M. NICHOLLS : [interprétation] Oui, je vais lui montrer encore un document,

 27   et ensuite je poserai des questions sur les trois documents que j'aurai

 28   présentés et je lui demanderai de les commenter.


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous admettons le document.

  2   M. LE GREFFIER : [interprétation] Cela devient la pièce P6463, Messieurs

  3   les Juges.

  4   M. NICHOLLS : [interprétation] J'aimerais que l'on affiche le document

  5   00722 de la liste 65 ter.

  6   Q.  Ce document est daté du lendemain, 1er Corps de la Krajina, adressé à

  7   l'état-major principal. Situation du territoire au paragraphe 4 :

  8   "La situation dans la municipalité de Kotor Varos reste très complexe.

  9   Après le refus de rendre les armes et de se rendre à l'armée de la

 10   Republika Srpska, les extrémistes musulmans du village de Vecici ont tenté

 11   de combattre pour sortir du village et aller vers Travnik.

 12   "Dans les heurts qui ont eu lieu entre l'armée de Republika Srpska, suite à

 13   la mort d'un soldat et à plusieurs autres soldats qui ont été blessés, plus

 14   de 150 extrémistes sont morts au combat."

 15   Ce document nous dit également qu'un soldat a été tué et plusieurs ont été

 16   blessés, mais on nous parle de 150 morts au combat, et cela n'est pas exact

 17   ? Il n'y a pas eu 150 morts au combat ? Il s'agit d'un rapport arrangé du

 18   massacre, Monsieur ?

 19   R.  Je pense que le document dit sans ambiguïté que plus de 150 personnes

 20   sont mortes lors de combats intenses, et sur la base de ce que je lis, je

 21   crois qu'ils ont véritablement été tués lors des combats.

 22   Q.  Oui, mais combien de fois avez-vous vu 150 combattants tués en une

 23   journée de combat et combien de fois avez-vous vu des rapports disant

 24   qu'après la mort d'un soldat et les blessures de quatre soldats, un

 25   massacre brutal a été déclenché, et puis un autre rapport disant qu'après

 26   la mort d'un soldat et des blessures de plusieurs soldats, 150 ont été tués

 27   au combat ?

 28   R.  Ce n'est pas courant. Je ne me souviens pas avoir vu autant de


Page 41942

  1   personnes ayant été tuées au combat de cette façon.

  2   Q.  Très bien. Alors, lorsque vous répondiez aux questions du Dr Karadzic,

  3   vous avez parlé de pertes, et il a parlé des événements de Vecici. Si des

  4   personnes meurent lors d'un massacre brutal, ce ne sont pas des pertes; ce

  5   sont des victimes, n'est-ce pas ?

  6   R.  Pour autant que je me souvienne, je n'ai pas analysé la façon dont ces

  7   personnes sont mortes. Je n'ai pas déterminé le nombre de décès et je n'ai

  8   pas non plus analysé les modalités de ces décès. Je me suis contenté de

  9   donner mon avis à ce que M. Karadzic m'avait avancé et à ce qu'avaient

 10   avancé les commandants du 1er Corps. Lorsque Vecici a été mise sous blocus

 11   et lorsque les pourparlers ont commencé, ils pensaient que la population

 12   civile devait être protégée --

 13   Q.  Oui, je comprends cela. Vous en avez parlé dans votre rapport. Ce dont

 14   moi je vous parle, c'est de votre déposition dans ce prétoire lorsque vous

 15   avez parlé des pertes, et ce document était à votre disposition. Vous aviez

 16   déclaré que vous n'aviez pas analysé les circonstances de tout cela. Dans

 17   votre déposition d'expert devant les Juges de la Chambre, lorsque vous avez

 18   parlé de ces pertes, vous n'avez pas mentionné le fait qu'il y avait

 19   également un document qui faisait référence à ces décès comme étant les

 20   victimes d'un massacre brutal ?

 21   R.  Oui, c'est possible. Il se peut que je n'aie pas parlé des

 22   circonstances de ces décès ni du nombre de personnes qui sont mortes. Je me

 23   suis davantage concentré sur le comportement du côté serbe sur la question

 24   de Vecici.

 25   Q.  Nous y reviendrons dans un instant. Nous parlerons plus avant de la

 26   question des mesures prises contre les soldats du 1er Corps de la Krajina

 27   qui avaient commis des crimes. Mais avant cela, avant de passer à ce sujet-

 28   là, j'aimerais savoir si vous êtes au courant de poursuites contre


Page 41943

  1   quelqu'un pour ce massacre de Vecici ? Vous n'étiez pas au 1er Corps de la

  2   Krajina à ce moment-là, mais dans le cadre de vos recherches, est-ce que

  3   vous avez trouvé ce genre d'information ou est-ce quelqu'un vous en a parlé

  4   ?

  5   R.  Le 1er Corps de la Krajina, le tribunal militaire et le procureur du

  6   tribunal militaire ont entamé des procédures et ont mené des enquêtes

  7   contre certaines personnes qui avaient participé à ces événements. Je sais

  8   rien de ces activités, je ne les ai pas analysées. Je ne sais pas comment

  9   les choses se sont terminées.

 10   Q.  Donc nous parlons du mois de novembre 1992, lorsque les tribunaux

 11   militaires existaient déjà depuis un certain temps, les tribunaux

 12   militaires de Banja Luka. Vous ne pouvez pas me donner comme référence

 13   quelque poursuite que ce soit pendant la guerre contre des soldats du 1er

 14   Corps de la Krajina pour ce crime-là ? C'est ce que vous venez de nous dire

 15   ?

 16   R.  Non, pas pour Vecici.

 17   Q.  Très bien. Alors, regardons ce que vous venez de nous dire au compte

 18   rendu.

 19   M. NICHOLLS : [interprétation] J'aimerais verser ce document, Messieurs les

 20   Juges.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 22   M. LE GREFFIER : [interprétation] Cela devient la pièce P6464, Messieurs

 23   les Juges.

 24   M. NICHOLLS : [interprétation]

 25   Q.  Page 80, ligne 1, vous nous dites :

 26   "Au 1er Corps de la Krajina, le tribunal militaire et le procureur du

 27   tribunal militaire ont entamé des procédures et ont mené des enquêtes

 28   contre certaines personnes qui avaient participé à ces événements. Je ne


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  1   sais pas rien de ces activités, je ne les ai pas analysées. Je ne sais pas

  2   comment les choses se sont terminées."

  3   C'est ce que vous venez de nous dire, Monsieur. J'aimerais à présent lire

  4   ce que votre rapport nous dit, page 20 de la version anglaise :

  5   "Plusieurs actions qui ont été mentionnées ont été entamées pour que le

  6   personnel subordonné ne commette pas de crimes ni d'autres délits contre

  7   des non-Serbes, et lorsqu'ils avaient lieu, les auteurs étaient arrêtés et

  8   poursuivis au pénal."

  9   C'est ce que vous avez dit à la page du compte rendu 40 955, lorsque vous

 10   avez déposé lors d'un interrogatoire principal :

 11   "Je répète qu'il," - et là, vous parlez du commandement du 1er Corps de la

 12   Krajina - "a donné la priorité à des événements et à des crimes qui avaient

 13   eu lieu sans aucun doute, mais ce n'était pas le comportement qui

 14   prévalait, et cela n'avait été ordonné ni encouragé par qui que ce soit. Si

 15   cela avait eu lieu, on finissait toujours par découvrir les auteurs et par

 16   les poursuivre ou encore par prendre des mesures appropriées contre ces

 17   auteurs."

 18   Ma question est la suivante : comment pouviez-vous dire la semaine dernier

 19   que ce genre d'événements avaient toujours été découverts, que les auteurs

 20   étaient poursuivis; et aujourd'hui, vous nous dites que vous n'avez pas

 21   analysé ce genre d'événements et que vous ne connaissez pas l'issue de

 22   toute cette histoire ?

 23   R.  J'ai dit que je ne sais pas précisément comment les événements liés à

 24   Vecici s'étaient terminés. Je ne connais pas les personnes, je ne connais

 25   pas l'épilogue, je ne sais pas combien de personnes ont été poursuivies ni

 26   quelles mesures ont été prises précisément. Mais j'ai dit que je savais que

 27   les organes judiciaires avaient entamé des procédures par rapport à cette

 28   affaire-là.


Page 41945

  1   Q.  Vous avez dit :

  2   "Si cela avait lieu, on découvrait toujours les auteurs et on les

  3   poursuivait." C'est ce que vous avez dit lorsque vous avez parlé de ces

  4   événements d'un point de vue général. Est-ce que vous maintenez cela, que

  5   ces crimes ont toujours été poursuivis ?

  6   R.  Des procès avaient toujours lieu. Ces personnes ont été poursuivies, et

  7   les procès se terminaient pas une condamnation ou pas. Je ne sais pas si,

  8   pour des crimes plus importants qui ont été commis, il n'y a pas eu de

  9   poursuites par les organes du 1er Corps de la Krajina. Il y a toujours eu

 10   des enquêtes, et des mesures ont été prises afin de traiter ce genre

 11   d'affaires.

 12   Q.  Il est impossible de prouver cela à ce moment-là, en tout cas, ce que

 13   vous êtes en train de nier, le fait que personne n'ait été arrêté ni

 14   poursuivi pour les meurtres de Vecici. Est-ce que vous pourriez nous dire

 15   si vous connaissez quelqu'un qui ait été poursuivi ou une affaire traitant

 16   de cette question-là ?

 17   R.  Je vous ai dit que je ne pouvais pas vous donner de noms.

 18   Q.  Très bien. Est-ce que vous savez que les victimes de ces meurtres

 19   doivent encore être retrouvées ? Est-ce que vous le saviez ? Est-ce que

 20   vous savez si ces victimes sont toujours portées disparues?

 21   R.  Dans les documents que j'ai analysés et pendant la procédure de

 22   rassemblement des documents, je suis tombé sur des données montrant que

 23   plusieurs de ces personnes, ou plutôt, les victimes, n'ont pas été

 24   retrouvées. Donc, oui, je connaissais cette partie-là.

 25   Q.  Merci. Parlons maintenant d'un autre crime bien connu. Ce crime a eu

 26   lieu environ 16 jours avant votre arrivée au 1er Corps de la Krajina. Vous

 27   êtes arrivé là-bas le 17 juin 1992, n'est-ce pas ?

 28   R.  Oui. Le 17 juin 1992, j'ai rejoint l'armée de Republika Srpska, et j'ai


Page 41946

  1   rejoint le 1er Corps de la Krajina le 21 juin de la même année.

  2   Q.  Regardons cet événement qui a eu lieu deux semaines avant votre

  3   arrivée. Est-ce que vous avez entendu parler des meurtres en masse qui ont

  4   eu lieu à l'école de Velagici à Kljuc le 1er juin 1992, où 80 civils ont été

  5   assassinés dans l'école ?

  6   R.  J'ai entendu parler de ces événements à l'école de Velagici.

  7   Q.  Vous êtes d'accord avec moi pour dire qu'il y a eu 80 civils qui ont

  8   été assassinés ? Environ 80 civils.

  9   R.  Il faudrait que je regarde le document. Des rapports reprennent les

 10   chiffres exacts. Il y a plusieurs documents qui existent. Je ne connais pas

 11   par cœur tous les chiffres. Mais je sais qu'effectivement, oui, il y a eu

 12   un événement.

 13   Q.  Et donc, pouvons-nous nous mettre d'accord pour dire que cet événement

 14   est un meurtre en masse de Musulmans par des soldats de la VRS ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Est-ce que cet événement nous donne un autre exemple de vos propos lors

 17   de votre déposition lorsque vous avez dit que les auteurs étaient toujours

 18   découverts et poursuivis ?

 19   R.  Cet événement ou ce crime n'a pas été caché. Les canaux réguliers en

 20   ont fait état. Des mesures ont été prises pour retrouver et poursuivre les

 21   auteurs. J'aimerais attirer votre attention sur le fait que je n'ai pas

 22   analysé le nombre de victimes et que je n'ai pas nié non plus l'existence

 23   de ces agissements criminels. Mais lorsque je me suis exprimé, j'ai mis

 24   l'accent sur le fait que cela ne constituait pas la politique officielle,

 25   soit des autorités ou de l'armée de Republika Srpska, et qu'à chaque fois,

 26   ces autorités et l'armée de Republika Srpska insistaient sur la nécessité

 27   de protéger et de respecter la population civile, les prisonniers de

 28   guerre, et d'adhérer aux lois et coutumes de la guerre.


Page 41947

  1   Q.  Très bien. Mais ce n'est pas tout ce que vous avez dit. Vous avez

  2   également dit, et je vous l'ai déjà cité trois fois, que les auteurs

  3   étaient toujours découverts et poursuivis. Seriez-vous d'accord pour dire

  4   que dans ce cas-là, les auteurs ont été découverts parce que tout le monde

  5   savait qui ils étaient, mais ils n'ont jamais été poursuivis ? Que les

  6   tribunaux militaires du 1er Corps de Krajina les ont laissé partir ?

  7   R.  Dans cette affaire-là et dans des affaires qui portent plus largement

  8   sur des événements dans la région de la municipalité de Kljuc, vu qu'on

  9   parle de cette municipalité, des poursuites ont été entamées, des auteurs

 10   ont été poursuivis, ont été retrouvés et arrêtés. Enfin, à savoir s'ils ont

 11   été libérés plus tard ou pas, c'était au tribunal d'en décider.

 12   Aujourd'hui, il existe encore des personnes qui ont participé à ces

 13   événements et qui purgent des peines de prison de plusieurs années en

 14   Bosnie-Herzégovine. Des procès ont eu lieu et des procès ont toujours lieu

 15   aujourd'hui devant des tribunaux.

 16   Q.  Avançons. La raison pour laquelle ils purgent leurs peines aujourd'hui,

 17   leurs peines de huit ans de prison environ, c'est parce qu'ils n'ont pas

 18   été poursuivis avant l'an 2000, n'est-ce pas, et c'est le cas d'une affaire

 19   qui portait sur le meurtre d'Omer Filipovic ?

 20   R.  Pendant la guerre, ils n'ont pas tous été condamnés et n'ont pas dû

 21   purger leurs peines, donc. Mais des procès ont eu lieu. L'issue du procès

 22   devrait relever d'un autre genre d'analyse que je n'ai pas menée.

 23   Q.  Très bien. Alors je ne veux pas m'appesantir là-dessus mais vous avez

 24   quand même analysé cela parce que vous avez déclaré devant ce Tribunal que

 25   des gens étaient toujours capturés et poursuivis et vous l'avez prononcé

 26   lorsque vous vouliez prouver comment le 1er Corps de la Krajina et les

 27   autorités avaient effectué leur travail. Est-ce que vous pensez que le 1er

 28   Corps de la Krajina a fait son travail et tout son possible pour empêcher


Page 41948

  1   des crimes et que les autorités de Republika Srpska font tout leur possible

  2   pour empêcher des crimes commis en 1992 lorsqu'un auteur ait puni par un

  3   tribunal civil en 2006 ? Est-ce que vous mettriez cela sur le tableau

  4   d'honneur du 1er Corps de la Krajina ?

  5   R.  Le 1er Corps de la Krajina et les autorités sans au doute ont fait tout

  6   leur possible pour empêcher que des crimes soient commis, que des meurtres

  7   non nécessaires aient lieu ou toute autre chose. Et ils ont ordonné de

  8   prendre des mesures contre les auteurs. Ce sont les documents que j'aie

  9   cités dans mes conclusions. Le 1er Corps n'a pas rédigé un document quel

 10   qu'il soit sans mettre l'accent en particulier sur la nécessité de protéger

 11   tout le monde. Et sans insister sur le fait que cela devrait se faire

 12   quelle que soit l'appartenance ethnique religieuse ou autre.

 13   Q.  Je vais vous arrêter, Monsieur. Nous ne parlons pas d'ordre théorique.

 14   Je vous parle de ce qui s'est passé après la commission de meurtres en

 15   masse de la part de soldats du 1er Corps de la Krajina. Vous nous parlez du

 16   cas d'un soldat serbe que vous connaissez, qui a été condamné pendant la

 17   guerre. A part Stankovic, pour des crimes commis contre des Musulmans ou

 18   des Croates ou des assassinats, est-ce que vous pouvez nous donner un nom ?

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je pense que cela va au-delà du domaine

 20   d'expertise de ce témoin. Je pense que Novak Todorovic, le président du

 21   tribunal, devrait répondre à ce genre de question. Il est disponible et il

 22   a donné ces informations.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce qu'il n'a pas traité de ce sujet-

 24   là lors de sa déposition ?

 25   M. NICHOLLS : [interprétation] Il l'a fait, Monsieur le Juge. C'est la

 26   partie que j'ai citée environ quatre fois. La partie disant que tout le

 27   monde a été puni.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je pense que cette question peut être


Page 41949

  1   posée.

  2   Pouvez-vous répondre à la question, Monsieur ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Il y a des exemples. Lorsque j'ai discuté avec

  4   deux juges de l'époque, Nikola Tomasevic et Srdjan Forca, qui étaient juges

  5   au tribunal militaire à Banja Luka, j'ai appris qu'ils avaient condamné

  6   plusieurs fois des Serbes pour des atrocités commises contre des Musulmans

  7   ou des Croates. Et parmi les condamnations une peine de mort avait été

  8   prononcée qui a été commutée par la suite.

  9   M. NICHOLLS : [interprétation]

 10   Q.  Vous avez entendu parler du massacre de Velagici. Est-ce que vous savez

 11   si quiconque a été poursuivi pour ce crime pendant la guerre, même si on

 12   connaissait les 12 suspects ? Non, je vais reformuler. Biffez cette phrase,

 13   s'il vous plaît.

 14   Pouvez-vous me dire qui quelque personne que ce soit a été condamnée pour

 15   ce crime qui a eu lieu en juin 1992, avant la fin de la guerre, lorsque ces

 16   hommes continuaient à servir au sein de leurs unités ?

 17   R.  Je ne peux pas répondre à cette question, je ne sais pas si quelqu'un a

 18   été condamné.

 19   Q.  Bien, allons de l'avant, mais je pense que vous conviendrez avec moi

 20   que dans votre déclaration de la dernière fois lorsque vous avez déposé

 21   pour la dernière fois - et je ne vous accuse de rien du tout, Monsieur -

 22   lorsque vous avez déclaré que les auteurs ont toujours été identifiés et

 23   que tout le monde a été poursuivi et puni, en fait, vous aviez tort ?

 24   R.  Je ne suis pas sûr d'avoir déclaré que tout le monde ait été condamné,

 25   ce que j'ai dit par contre c'est que des poursuites avaient eu lieu et je

 26   maintiens cela, oui, je maintiens que pour chaque cas qui a été découvert,

 27   des ordres ont été donnés selon lesquels les auteurs devaient être

 28   retrouvés et que des poursuites devaient être entamées contre ces


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  1   personnes-là et que ces personnes devaient être tenues responsables de

  2   cela. J'ai dit tout cela, maintenant quant au résultat final, savoir si

  3   tout le monde a été condamné et si tout le monde a purgé sa peine, je ne

  4   pense pas avoir dit ce genre de chose en tout cas pas dans ces mots-là.

  5   J'ai dit que des poursuites étaient entamées et que des ordres avaient été

  6   donnés.

  7   Q.  Ce que vous avez dit à la page du compte rendu d'audience 4095 et je

  8   cite :

  9   "Je répète, il a accordé la priorité à tous ces délits et incidents qui

 10   s'étaient déroulés sans aucun doute, mais il ne s'agissait pas d'un

 11   comportement qui prévalait toujours et ils n'ont pas été encouragés pour

 12   quiconque et personne n'a donné d'ordre. Et si cela s'est passé, ils ont

 13   toujours fini par découvrir les auteurs des événements, ils ont toujours

 14   fini par les poursuivre et à prendre contre eux des mesures appropriées."

 15   Lorsque vous dites "poursuivre" bon, il s'agit tout simplement de remettre

 16   un rapport enquête judiciaire, un rapport au pénal et ensuite de renvoyer

 17   des soldats en question sur le front, c'est cela que vous entendez par

 18   "poursuivre," "poursuite" puisque vous le mentionnez dans votre déclaration

 19   ?

 20   R.  Oui, il s'agit de poursuites pénales, il s'agit de diligenter une

 21   enquête pour que les auteurs soient découverts et il s'agit ensuite de

 22   continuer ces poursuites.

 23   Q.  Bien. Nous allons passer à autre chose, autre chose qui figure dans

 24   votre déposition. Vous avez témoigné que chaque fois que l'armée

 25   participait, elle empêchait les conflits entre les différentes

 26   appartenances ethniques et que tout le monde se sentait beaucoup plus en

 27   sécurité en présence de la JNA. Page 40 956, c'est là que vous dites que

 28   tout le monde se sentait plus en sécurité lorsque la JNA était présente. Et


Page 41951

  1   à la page 4957[comme interprété] une question vous est posée :

  2   "Général, est-ce que l'armée a empêché les conflits entre les appartenances

  3   ethniques et est-ce que cela a une incidence négative sur la préparation de

  4   combat du corps et de ces unités ? Est-ce que c'est quelque chose que M.

  5   Brown a remarqué, à savoir que certains éléments étaient affectés pour

  6   prévenir ce type de conflits ?"

  7   Vous avez répondu :

  8   "Pendant toute la période et notamment en 1992, les éléments des unités et

  9   même des unités entières ont participé aux activités dans/et ainsi que dans

 10   les zones intérieures entourées par les lignes de front.Ils ont constitué

 11   des organes et des situations afin d'assurer la protection des populations

 12   qui vivaient dans la zone … "

 13   Et un peu plus loin vous dites et je cite toujours :

 14   "Le seul objectif était de faire en sorte que la zone soit pacifique,

 15   paisible et offre davantage de sécurité. Après tout, les gens partout y

 16   compris en Bosnie-Herzégovine se sentaient plus en sécurité s'il y avait

 17   des unités de l'armée déployées dans certaines zones."

 18   Vous vous souvenez avoir tenu ces propos, Monsieur ?

 19   R.  Oui, oui, j'ai sans aucun doute écrit ceci. Alors je ne sais pas si

 20   cela correspond exactement aux mots que vous venez de prononcer -- et pour

 21   ce qui est de l'essentiel, c'est ce que vous venez de dire, bien sûr.

 22   Q.  Bien.

 23   M. NICHOLLS : [interprétation] Pièce P03660.

 24   Q.  Et en attendant que cette pièce ne soit affichée, j'aimerais vous

 25   demander si vous connaissez Branko Basara, est-ce que vous le connaissez

 26   personnellement ? Il s'agissait du commandant de la 6e Brigade de Krajina.

 27   R.  Pendant la guerre, ou plutôt, à ce moment-là, non, je ne le connaissais

 28   pas. Je l'ai rencontré plusieurs années après la guerre, et là, je l'ai


Page 41952

  1   rencontré personnellement lors d'une réunion très rapide. Mais à l'époque,

  2   non, nous ne nous connaissions pas personnellement.

  3   Q.  Fort bien. Alors, là, il s'agit de son registre de guerre, qu'il a

  4   écrit à la main, donc registre de guerre pour la 6e Brigade d'infanterie,

  5   sa brigade qui se trouvait à Sanski Most. Alors, pour que vous le sachiez,

  6   lors d'une audition avec le bureau du Procureur, il a bien confirmé que

  7   c'était son écriture et que c'est lui qui a rédigé ce document.

  8   M. NICHOLLS : [interprétation] Et je suis intéressé par le paragraphe 4,

  9   qui se trouve à la deuxième page de la version anglaise. Page 3 de la

 10   version  serbe, qui est la version originale.

 11   Q.  Alors, il se peut que cela soit difficile à lire, mais ce qui

 12   m'intéresse, c'est le paragraphe numéro 4, c'est sur ce paragraphe que

 13   j'attire votre attention. Donc, M. Basara écrit l'histoire -- ou

 14   l'historique de sa brigade, et voilà ce qu'il écrit :

 15   "Le 30 [phon] avril 1991," en fait, ce devrait être 1992, "la 6e Brigade a

 16   été transférée entièrement et dans le secret le plus absolu de Jasenovac

 17   vers la zone de Sanski Most, ce qui fait que tout le monde a été surpris.

 18   Avec l'arrivée de brigade sur ce territoire, les Musulmans et les Croates

 19   ont commencé à avoir peur et les Serbes ont poussé un soupir de

 20   soulagement."

 21   Alors, bon, ce n'est pas absolument primordial, mais Basara était présent,

 22   il arrive à Sanski Most. Et vous, vous nous dites que tout le monde se

 23   sentait beaucoup plus en sécurité parce qu'ils étaient présents là-bas et

 24   ils empêchaient les conflits entre les appartenances ethniques, alors que

 25   lui, il écrit que les Serbes ont été soulagés lorsqu'ils les ont vus

 26   arriver alors que les Croates et les Musulmans ont commencé à avoir un

 27   sentiment de crainte. C'est bien cela, n'est-ce pas ?

 28   R.  Il est dit là qu'avec l'arrivée de la brigade, les Musulmans et les


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  1   Croates ont commencé à avoir peur et que les Serbes ont poussé un soupir de

  2   soulagement. Alors, pourquoi et pourquoi Basara a ressenti ceci, je dois

  3   vous dire que moi je n'ai pas eu la possibilité de consulter ce document

  4   précédemment. Mais --

  5   Q.  Je vais vous interrompre, Monsieur. Non, poursuivez, excusez-moi. Je

  6   n'aurais pas dû vous interrompre.

  7   R.  Donc, moi je ne me souviens pas avoir vu ce document manuscrit tel

  8   qu'il est présenté ici, mais -- alors, il est indubitable que dès l'année

  9   1991, dans la région de Sanski Most, entre autres régions, il y avait une

 10   organisation paramilitaire des Croates et des Musulmans, cela s'est passé.

 11   Et j'insiste sur le fait qu'il s'agissait de paramilitaires parce qu'à

 12   cette époque, en 1991 et jusqu'au mois de mai 1992, la seule force armée

 13   légale dans cette région était la JNA, l'armée populaire de Yougoslavie.

 14   Alors, il y avait certes un armement illégal, les Musulmans et les Croates

 15   auraient pu avoir peur parce qu'ils étaient organisés de façon

 16   paramilitaire, de cette façon, ils avaient obtenu des armes de façon

 17   illicite et ils s'étaient préparés, sans aucun doute, à ce conflit, et ils

 18   ne pouvaient pas véritablement -- ils ne pouvaient pas avoir un conflit

 19   avec d'autres personnes qu'avec les Serbes dans cette zone.

 20   Alors, pourquoi est-ce que les Serbes ont poussé un soupir de soulagement ?

 21   Parce que les Serbes avaient répondu à l'appel de l'état fédéral et l'appel

 22   lancé par ce qui était à l'époque la JNA, ils s'étaient mobilisés, ils

 23   avaient participé pour essayer de trouver des solutions aux problèmes qui

 24   existaient en République de Croatie. Leurs familles étaient restées à

 25   Sanski Most littéralement sans aucune protection. Lorsque la brigade est

 26   revenue, c'était normal qu'ils poussent un soupir de soulagement et qu'ils

 27   se sentent mieux.

 28   Q.  Alors, dans un premier temps, vous nous avez dit que ce document


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  1   n'avait été pas mis à votre disposition. Or, il a été mis à votre

  2   disposition, et cela est expliqué dans la note 132 d'Ewan Brown, juste pour

  3   que vous le sachiez.

  4   Et puis, nous allons regarder autre chose qu'écrit M. Basara : "Etant donné

  5   que notre tâche en tant qu'unité de la JNA était d'empêcher les conflits

  6   entre les nationalités, à savoir d'empêcher le massacre du peuple serbe,

  7   nous ne pouvions pas publiquement armer les Serbes. Alors nous avons fait

  8   deux choses : dans un premier temps, nous avons organisé et armé le peuple

  9   serbe, et puis deuxièmement … nous avons essayé de persuader -- de

 10   convaincre les Musulmans et les Croates qu'ils devaient rester loyaux et

 11   que nous pouvions tous vivre ensemble …"

 12   Donc, cela était, en fait, la double théorie de M. Brown que vous

 13   critiquiez dans votre rapport et que vous avez critiquée, d'ailleurs, lors

 14   de votre déposition également, n'est-ce pas ?

 15   Bon, je ne vais pas entrer dans tous les détails, mais vous voyez que M.

 16   Basara écrit comment ils ont utilisé des astuces, en quelque sorte, pour

 17   armer de licite -- légale les Serbes et seulement les Serbes.

 18   R.  Ecoutez, moi je ne peux que vous dire que c'est le point de vue

 19   personnel de M. Basara, il l'a écrit - nous l'avons vu sur la première page

 20   - il a écrit cela alors qu'il avait déjà pris sa retraite. Moi, je n'ai pas

 21   trouvé cela intégré à une position officielle ou à un ordre ou à des

 22   consignes, et la brigade ne s'est pas comportée de la sorte. Alors,

 23   pourquoi est-ce que M. Basara a écrit cela alors qu'il était à la retraite,

 24   c'est une question peut-être que vous devrez lui poser.

 25   Q.  Il figure sur la liste des témoins, donc nous lui poserons la question.

 26   Et vous vous souviendrez, mais je le dis quand même, qu'il a pris sa

 27   retraite en 1992, à la fin de l'année 1992, et non pas à une date

 28   ultérieure. Alors, bon, c'est une question de point de vue personnel,


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  1   certes, mais il était le commandant et il a rédigé cela comme registre tenu

  2   pendant la guerre. Donc, il ne s'agit pas de son point de vue personnel; il

  3   s'agit de son histoire ?

  4   R.  Alors, c'est peut-être son journal de bord qu'il tenait, mais ce

  5   n'était pas un journal de guerre officiel car un journal de guerre officiel

  6   correspond à un travail formaté, et c'est un journal qui doit être tenu par

  7   le commandement de l'unité, et non pas par un commandant.

  8   Q.  Oui, je comprends fort bien cela. Ce n'est pas ce que je vous dis,

  9   d'ailleurs, puisqu'il est indiqué "registre de guerre" en haut.

 10   Mais je vais vous poser une toute dernière question.

 11   M. NICHOLLS : [interprétation] Et je souhaiterais que la page 5 de la

 12   version serbe et 3 de la version anglaise soient affichées.

 13   Q.  Regardez le pourriez-vous numéro 6, il est indiqué :

 14   "L'Europe a reconnu la Bosnie-Herzégovine et la guerre a éclaté entre les

 15   Serbes, les Croates et les Musulmans, et la JNA s'est retirée du territoire

 16   de Bosnie-Herzégovine. La 6e Brigade a quitté les forces de la JNA et est

 17   devenue l'armée de la Republika Srpska. Sa mission a changé et les

 18   Musulmans et les Croates sont devenus des adversaires, et la brigade s'est

 19   vu confier la tâche de les désarmer, d'empêcher le massacre du peuple

 20   serbe. La 6e Brigade a ensuite préparé -- s'est ensuite préparé pour saisir

 21   le -- pour que le pouvoir soit saisi et a sécurisé la prise du territoire

 22   des municipalités de Sanski Most et de Kljuc. Les villages de Hrustovo et

 23   Vrhpolje ont opposé une résistance et nos unités ont pu dégager ces zones

 24   de façon -- avec succès."

 25   Donc, M. Basara nous dit que le seul objectif n'était pas de -- de --

 26   d'apporter l'avantage de sécurité à la zone en question. L'objectif était

 27   également de désarmer les Musulmans et les Croates, de défendre le peuple

 28   serbe contre les massacres, d'armer les Serbes et seulement les Serbes.


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  1   Voilà quelle était la tâche de la 6e Brigade de la Krajina, n'est-ce pas ?

  2   R.  Non. Non, non, ce n'est pas exact. La 6e Brigade est arrivée à Sanski

  3   Most parce qu'elle avait été, dans un premier temps, mobilisée dans ce

  4   secteur. Et c'était le territoire où elle se trouvait basée. Et cette

  5   brigade était censée se trouver là. Je n'ai trouvé aucun document, aucun

  6   ordre dans lesquels la -- on aurait demandé à la 6e Brigade de Sana de

  7   désarmer seulement les Musulmans et les Croates. Plutôt, cette brigade

  8   avait reçu l'ordre de rassembler les armes dont disposait la population de

  9   façon illégale, indépendamment de l'appartenance ethnique.

 10   Deuxièmement, Basara dit ici qu'il -- avoir créé les conditions

 11   nécessaires pour l'arrivée des autorités serbes, ce qui n'est pas exact.

 12   Les autorités avaient été mises en place après les élections pluripartites

 13   et existaient toujours. Ce gouvernement local comprenait des membres des

 14   groupes ethniques musulmans et croates à Sanski Most. A ce moment-là, il

 15   n'y avait personne qui souhaitait mettre en place de nouvelles autorités.

 16   Donc, il n'est pas exact de dire que des conditions avaient créées pour une

 17   prise de contrôle. Il est vrai que la 6e Brigade avait pour tâche de

 18   protéger la population, compte tenu du fait -- la population serbe, compte

 19   tenu du fait que pendant le deux guerres mondiales précédentes, ils avaient

 20   souffert aux mains de leurs voisins, les Croates et les Musulmans, et que

 21   cela s'était passé -- mal passé pour eux dans les guerres précédentes. Et

 22   donc, cette brigade avait pour tâche d'empêcher le -- un conflit ethnique

 23   en désarmant ceux qui disposaient d'autres illégales.

 24   Chacun avait le droit de posséder des armes légalement, parce que

 25   personne ne faisait la différence entre les groupes ethniques de dire par

 26   exemple que certains groupes ethniques pouvaient faire partie de la

 27   brigade. Avant que le conflit n'éclate en ex-Yougoslavie, la 6e Brigade

 28   comprenait des membres croates et musulmans. Et c'était proportionnel à


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  1   leur représentation au niveau de la population -- la représentation était

  2   proportionnelle par rapport à la population. Personne ne les a empêchés de

  3   participer aux tâches menées par la brigade ou que ce ceux que la brigade

  4   était censée mener conformément aux plans de l'ex-JNA.

  5   Q.  Très bien. Alors, nous allons poursuivre. Dites-vous dans votre

  6   déposition qu'à Sanski Most, la 6e Brigade de la Krajina a désarmé, de la

  7   même façon, les Musulmans, les Croates et les Serbes. Et ils n'ont pas

  8   simplement désarmé les Musulmans et les Croates. Est-ce bien ce que vous

  9   dites dans votre déposition ?

 10   R.  Ce que je dis, que -- c'est que les tâches ou missions de la brigade

 11   consistaient à se saisir ou rassembler toutes les armes illégales qui

 12   existaient à l'époque. Je ne dis pas qu'un même nombre de chaque groupe

 13   ethnique a été désarmé, parce que les Serbes ont répondu à la mobilisation

 14   et en contrepartie ont reçu des armes. Alors que les Musulmans et les

 15   Croates n'ont pas répondu à l'appel à la mobilisation et la plupart de ces

 16   personnes n'étaient pas légalement en possession de leurs armes.

 17   Q.  Alors, maintenant, nous allons parler du déplacement de la population

 18   dont vous parlez à la page 24 de votre rapport. Vous dites dans la

 19   situation nouvellement créée, la cohabitation était impossible. Et la

 20   réinstallation et -- de la population était l'une des options envisagées.

 21   Vous maintenez cela, n'est-ce pas, de dire que la cohabitation était

 22   impossible ? C'est bien votre opinion sur la situation en Bosnie-

 23   Herzégovine en 1992, disons avril-mai 1992 ?

 24   R.  Voici mon point de vue. Voici comment les choses se sont passées.

 25   Lorsque -- Quand -- On ne pouvait pas continuer à vivre dans l'Etat de

 26   l'ex-Yougoslavie. C'était beaucoup plus confortable pour tout le monde,

 27   mais comme il était impossible de parvenir à une solution pacifique, eh

 28   bien la Bosnie-Herzégovine était dans la même situation et certaines


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  1   personnes ont dû être privées de leurs droits pour que ce soient créées les

  2   conditions d'une cohabitation. Il n'y avait pas de bonne solution pour la

  3   Bosnie-Herzégovine. Tous les documents le montrent. Il s'agit de documents

  4   à caractère politique et ces documents indiquent que les Serbes ne

  5   cessaient de rechercher une solution pacifique. Mais ils n'ont pas obtenu

  6   une quelconque compréhension de l'autre partie.

  7   Q.  Très bien.

  8   R.  Et la Bosnie-Herzégovine souffre encore de --

  9   Q.  Ecoutez, je vais vous interrompre. Nous allons maintenant expliquer

 10   ceci davantage lorsque je vais parler du sujet que je vais aborder

 11   maintenant. Alors, dans cette affaire, page du compte rendu d'audience

 12   40945 à 14 -- 40946. Vous avez critiqué M. Brown en disant :

 13   "Les Musulmans et les Croates sont partis et M. Brown constate ou conclut

 14   qu'il s'ait d'un départ forcé. Dans certains paragraphes, il parle

 15   également de nettoyage ethnique qui a été fait sous la pression exercée par

 16   les autorités serbes et que c'est la raison essentielle du départ de la

 17   population."

 18   Et ensuite, vous poursuivez en disant :

 19   "Ce qui est véritablement important et ce que j'estime être important est

 20   le fait que la population s'est -- est surtout partie parce que sur le

 21   territoire de la Bosnie-Herzégovine, un conflit avait commencé. La guerre

 22   avait éclaté. Il y avait un Etat d'insécurité qui régnait et chacun tentait

 23   de quitter la région si c'était possible."

 24   D'après votre thèse, il n'y a pas eu de départ forcé des Musulmans et

 25   des Croates. Ils sont simplement partis comme tous les autres parce qu'ils

 26   avaient peur de la guerre et qu'ils ont quitté les zones de combat.

 27   R.  Oui. En 1992, la Bosnie-Herzégovine était divisée. Son territoire était

 28   divisé entre les trois peuples de -- en vertu du principe de la majorité


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  1   d'un groupe ethnique. Et dans ces conditions-là, ces peuples ont -- se sont

  2   évertués -- ou, en tout cas, ont essayé de se rendre dans un endroit où ils

  3   étaient davantage en sécurité ou ils pensaient être davantage en sécurité.

  4   Et ils pensaient être davantage en sécurité sur des territoires où ils

  5   étaient majoritaires et où ils pouvaient exercer leurs droits. C'est la

  6   raison essentielle de leur départ. Tout le monde est parti. Il n'y avait

  7   pas que les Musulmans et les Croates. Il n'y avait pas que ces deux groupes

  8   ethniques qui ont quitté le territoire de la Republika Srpska. Les Serbes

  9   sont partis aussi, les Serbes ont quitté le territoire de la Fédération

 10   musulmane ou la République de Bosnie-Herzégovine, comme cela s'appelait à

 11   ce moment-là. Les Musulmans et les Serbes ont quitté l'Herceg-Bosna, donc -

 12   -

 13   Q.  Et votre analyse comprend également Sanski Most, parce que vous dites

 14   que les gens n'ont pas été contraints à quitter Sanski Most, les Musulmans

 15   et les Croates ?

 16   R.  Dans mon rapport, j'ai évoqué de nombreux documents délivrés par M.

 17   Karadzic, l'état-major principal de l'armée, les autorités civiles, 1 KK.

 18   Et ces documents montrent qu'ils ont insisté pour qu'aucune pression ne

 19   soit exercée sur la population la contraignant à partir. On a encouragé la

 20   population à choisir librement l'endroit où ils souhaitaient vivre. Ce

 21   qu'ils devaient faire, en revanche, c'est se conformer aux autorités qui

 22   avaient été élues légalement dans le secteur.

 23   Q.  Très bien. Alors, est-ce que nous pouvons regarder la pièce P03645. Il

 24   s'agit en fait des conclusions de la cellule de Crise de Sanski Most. Le 7

 25   mai 1992, au point 1 :

 26   "La cellule de Crise de la municipalité serbe de Sanski Most fonctionnera

 27   en tant que cabinet de guerre à partir d'aujourd'hui.

 28   La cellule de Crise est… exclusivement à l'intention -- ou destinée au


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  1   public.

  2   L'INTERPRÈTE : L'interprète n'est pas sûre.

  3   M. NICHOLLS : [interprétation]

  4   Q.  "2. Mladen Lukic et Mirko Vrucinic tiendront des pourparlers avec le

  5   commandant de la 6e Brigade du Corps de Krajina, le colonel Basara, pour

  6   qu'il participe en tant que membre du cabinet de guerre de la municipalité

  7   serbe de Sanski Most et pour qu'il soit d'accord sur la transformation de

  8   la JNA en Défense territoriale serbe."

  9   Ceci se passe avant même la 16e séance de l'assemblée. Vous conviendrez que

 10   la cellule de Crise est en train de se rapprocher, ou en tout cas de

 11   fonctionner secrètement comme un état-major de guerre pour que Basara

 12   s'implique dans cela, n'est-ce pas ?

 13   R.  Il y avait eu des tentatives individuelles, comme à Sanski Most, des

 14   unités de l'armée avaient été placées sous le contrôle du gouvernement

 15   local. Et vous constaterez d'après les conclusions que la situation était

 16   analogue à Kljuc. Les forces armées dans la structure de commandement

 17   étaient régies de façon très stricte sur le principe de l'unicité du

 18   commandement, et toutes les unités sont placées sous un seul et même

 19   commandement. Il n'était donc pas possible ou, en tout cas, je n'ai trouvé

 20   aucun document à cet effet, qui montre que cette conclusion avait été mise

 21   en œuvre, que l'état-major, quelle que soit l'appellation, le cabinet de la

 22   guerre ou la cellule de Crise, ait jamais placé cette unité sous son

 23   commandement. Je ne le pense pas.

 24   Q.  Alors, je n'ai pas dit que cette unité était placée sous son

 25   commandement. C'était placé sous le commandement du général Talic, qui a

 26   commencé à être impliqué ou à participer au cabinet de guerre, n'est-ce pas

 27   ?

 28   R.  Les cellules de Crise, ou plutôt, le cabinet de guerre en tant


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  1   qu'organe n'existe pas. Vous ne le trouvez pas dans les textes de loi,

  2   règlements, décrets, et cetera. Il y avait des états-majors dans des

  3   circonstances exceptionnelles, mais il n'y avait pas cabinets de guerre.

  4   Une cellule de Crise est en quelque sorte un organe ou quelque chose -- une

  5   entité institutionnalisée dans un secteur, en général une municipalité, qui

  6   permet de rassembler tous les participants et toutes les personnes qui

  7   souhaitent trouver une solution à la guerre de la façon la plus simple. Un

  8   de ses membres était le commandant d'une unité militaire ou le commandant

  9   de la Défense territoriale. Il est possible que l'on ait demandé au

 10   commandant de la brigade de devenir membre de la cellule de Crise.

 11   M. NICHOLLS : [interprétation] Nous allons nous arrêter à moins le quart,

 12   Monsieur le Président ? Encore un document rapidement --

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 14   M. NICHOLLS : [interprétation] Alors, P02613.

 15   Q.  Décision de la cellule de Crise datée du 22 mai, réunion du 21, et :

 16   "Sur la base d'une proclamation du président de la présidence de la

 17   République serbe de Bosnie-Herzégovine, Dr Radovan Karadzic, la cellule de

 18   Crise de Sanski Most va mettre en œuvre -- ou adopter la décision sur la

 19   mobilisation générale des forces et du matériel militaire dans la

 20   république et par la présente ordonne les différentes structures à cet

 21   effet …"

 22   "(d) le commandant de la 6e Brigade de Krajina, le colonel Basara, et le

 23   commandant de la Défense territoriale serbe, le colonel Anicic, par la

 24   présente, donnent instruction pour que soient protégées les installations

 25   vitales dans la ville et par-dessus tout, le système d'induction d'eau, le

 26   transformateur, le silo, et cetera."

 27   M. NICHOLLS : [interprétation] Alors, page suivante en anglais, s'il vous

 28   plaît.


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  1   "Pour ce qui est du désarmement des formations paramilitaires à Sanski

  2   Most, le colonel Basara et le colonel Anicic sont responsables de la mise

  3   en œuvre de ou de l'application : (a) du délai définitif de la remise des

  4   armes."

  5   Et à l'alinéa (b), on parle du fait de garantir la paix à Sanski Most, et

  6   cetera.

  7   Q.  Donc, ce document montre qu'en réalité, les autorités civiles, Rasula

  8   et Vrkes, travaillent ou collaborent avec le commandant de la 6e Brigade de

  9   Krajina, Basara, et avec la TO, Anicic, pour préparer les opérations de

 10   combat, n'est-ce pas ?

 11   R.  Eh bien, il ne s'agit pas d'actions de combat ici. Il s'agit du

 12   contrôle du territoire et de la protection des infrastructures sur le

 13   territoire. Les unités de l'armée peuvent être engagées dans ces missions-

 14   là avec les unités de la police et les unités de la Défense territoriale.

 15   Q.  Il s'agit en fait de les désarmer ensemble, n'est-ce pas ?

 16   R.  Une des tâches serait le désarmement, ou une des tâches consisterait à

 17   insister sur la reddition des armes dans un délai prescrit. Nous avons fait

 18   cela également.

 19   M. NICHOLLS : [interprétation] Merci, Madame, Messieurs les Juges. C'est un

 20   bon moment pour s'arrêter.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons lever l'audience pour

 22   aujourd'hui et reprendre demain matin à 9 heures.

 23   --- L'audience est levée à 14 heures 47 et reprendra le jeudi, 25 juillet

 24   2013, à 9 heures 00.

 25  

 26  

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 28