Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mercredi 11 décembre 2013

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   [Le témoin vient à la barre]

  5   --- L'audience est ouverte à 9 heures 04.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour à toutes et à tous.

  7   Oui, Monsieur Harvey.

  8   M. HARVEY : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame,

  9   Messieurs les Juges. Je voudrais présenter Julie Malingreau, qui fait

 10   partie de mon équipe depuis le mois de septembre. Elle est originaire de

 11   Belgique et elle possède un master de l'Université d'Amsterdam, tout comme

 12   un master de l'Université du Louvain-la-Neuve.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 14   Oui, Madame Edgerton.

 15   Mme EDGERTON : [interprétation] Merci.

 16   LE TÉMOIN : VLADIMIR MATOVIC [Reprise]

 17   [Le témoin répond par l'interprète]

 18   Contre-interrogatoire par Mme Edgerton :

 19   Q.  [interprétation] Monsieur Matovic, bonjour. Est-ce que vous m'entendez

 20   bien ?

 21   R.  Je vous entends bien.

 22   Q.  Parfait. Je ne vais pas vous garder ou vous retenir longtemps

 23   aujourd'hui. Je me propose de vous poser un certain nombre de questions

 24   partant de ce que vous nous avez dit hier et au sujet aussi de la

 25   déclaration que vous avez signée à l'intention du Dr Karadzic et de son

 26   équipe.

 27   R.  Fort bien.

 28   Q.  Hier, vous nous avez expliqué les positions formulées par M. Cosic au


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  1   sujet de l'arrestation de M. Izetbegovic, suite à la publication de la

  2   déclaration islamique. Et si vous vous en souvenez, on en était arrivé au

  3   point où vous avez expliqué comment l'épouse d'Izetbegovic était venue avec

  4   des familles de ceux qui étaient arrêtés pour apporter de l'argent, et là

  5   on vous a interrompu. Alors, Monsieur Matovic, sans entrer dans beaucoup de

  6   détail -- vous allez bien ?

  7   R.  Oui.

  8   Q.  Alors, sans entrer plus en avant dans le détail par rapport à ce que

  9   vous avez dit hier, je voudrais vous demander de nous dire s'il est exact

 10   que dans le contexte d'un forum qui a été mis en place à Belgrade aux fins

 11   de protéger la liberté de parole, M. Cosic a parlé pour soutenir les non-

 12   Serbes qui ont été arrêtés, n'est-ce pas ?

 13   R.  J'aimerais utiliser mes propres mots pour vous dire ce qui, de par mon

 14   souvenir, a été dit. Il se peut que j'aie fait un lapsus. Alors si vous

 15   voulez bien, je me proposerais de répéter ce que j'ai dit hier. Quel

 16   argent, il n'y a pas eu d'argent. Aucun argent. M. Cosic n'a en aucune

 17   façon ni reçu ni s'est vu proposer de l'argent. C'est l'offense la plus

 18   grande que de voir quelqu'un vous proposer de l'argent pour cela. Dans le

 19   pays, nous sommes en train de nous battre contre la corruption, mais

 20   quelqu'un à un poste si haut placé, je dirais qu'il n'a pas encore été

 21   président, mais il n'est pas question qu'il y ait eu recours à ce type de

 22   procédé.

 23   A la session de son comité, il a formulé des protestations à l'égard des

 24   autorités. Et c'est à Belgrade que ça s'est fait, mais c'est à Sarajevo

 25   qu'il y a eu toute une procédure d'arrestation, et moi j'ai été engagé en

 26   tant que journaliste pour écrire sur ce sujet, et j'ai dit à ma rédaction,

 27   et il était entendu aussi que le journal "Oslobodjenje" à Sarajevo et les

 28   journaux à Belgrade, mon journal, publient la chose en parallèle. Je me


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  1   suis entretenu avec Izetbegovic et je lui ai dit que, d'après mes

  2   connaissances journalistiques de la conception des responsabilités,

  3   culpabilités et libertés, dans tout ce qu'il a dit, il n'y avait rien de

  4   sujet au pénal. Il a affirmé que cette déclaration islamique était un

  5   document religieux et non pas politique. Et j'ai dit par la suite à Cosic

  6   ce que j'en pensais. A la session du comité, il a formulé des

  7   protestations. Je ne me souviens pas exactement de ce qu'il a dit, mais il

  8   s'est adressé aux autorités de Belgrade et sans pour autant aller à

  9   Sarajevo afin de ne pas s'immiscer dans leurs affaires, il a protesté pour

 10   ce qui est de voir quelqu'un de poursuivi pour la formulation de ses

 11   convictions religieuses. Et par la suite, une partie de la presse qui était

 12   plutôt libérale chez nous à ce moment a publié tout ceci, et les familles

 13   et les épouses d'Alija Izetbegovic et celles des autres ont apporté -- mais

 14   entendons-nous bien. Elles étaient venues de chez elles, c'étaient des

 15   petits cadeaux sympathiques qu'elles avaient apportés, des gâteaux

 16   orientaux. C'étaient des familles qui avaient apporté cela en témoignage de

 17   reconnaissance.

 18   Alors, Cosic et les autres se sont trouvés d'un peu pris de court et

 19   il a organisé un déjeuner à proximité de sa maison. Je ne me souviens plus

 20   où c'était -- enfin, si vous voulez le savoir, je pourrais peut-être me

 21   rappeler du restaurant où ça s'est fait, et je sais qu'à l'occasion de

 22   cette conversation, il y avait le Pr Ljubomir Tadic de présent. Il était

 23   venu de Sarajevo, lui. Il était originaire de Sarajevo, il connaissait les

 24   circonstances et il y a eu cet entretien où Cosic leur a dit que nous, les

 25   Serbes, on n'était pas comme ça, et à ce moment-là, dans l'opinion publique

 26   de Sarajevo, on avait affirmé que tout cela venait de Belgrade, que cela

 27   passait via l'accusé, et cetera -- non, non.

 28   Il a démenti la chose, et d'après ce que j'en sais, je pense que


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  1   c'est tout à fait inconciliable avec sa personnalité et toute sa façon

  2   d'agir. Je ne sais pas si vous m'avez bien compris.

  3   Q.  Merci, Monsieur Matovic. Je vous ai parfaitement bien compris. Vous

  4   avez répondu à ma question et vous avez apporté des éclaircissements par

  5   rapport à ce que vous avez dit hier.

  6   Je voudrais maintenant me tourner de façon concrète sur certaines

  7   choses qui figurent dans votre déclaration. Alors, si j'ai bien compris

  8   cette déclaration écrite faite par vous, vos propos au sujet de Srebrenica,

  9   c'est de dire que ces exécutions massives du mois de juillet 1995 de plus

 10   de 7 000 hommes et jeunes hommes de Bosnie par les forces armées de la

 11   Republika Srpska, est une chose qui avait été planifiée à l'avance, parce

 12   que nous avons cru comprendre, d'après vos propos, que c'était dans le

 13   cadre d'une espèce de complot international qui a impliqué des officiers

 14   allemands -- non, excusez-moi, américains et allemands, tout comme des

 15   hommes politiques avec qui les gens de la VRS étaient en contact. C'est ce

 16   que vous nous avez dit dans votre déclaration, n'est-ce pas ?

 17   R.  Alors, vraiment, j'étais sous l'effet de drogues ou de l'alcool, et je

 18   ne bois pas en principe, mais telle chose -- moi, j'aimerais bien que vous

 19   me donniez lecture de cela. Je n'ai pas vu cette déclaration depuis que je

 20   l'ai faite, mais je ne crois pas du tout à cela. Mais allons, donc.

 21   Moi, je traverse la Drina, je passe par Zvornik pour apprendre ce qui

 22   se passe et informer mon employeur, mes chefs de ce qui se passe là-bas.

 23   Mais moi, on m'a seulement dit qu'à Srebrenica, semble-t-il une grand-mère,

 24   à titre officieux on me l'a dit, donc ceux qui étaient éloignés de

 25   Srebrenica, notamment les gens de Han Pijesak et autres. Est-ce que cela

 26   suffit ?

 27   Q.  Ecoutez, je vais faire ce que vous venez de demander. Je vais donner

 28   lecture de ce qui figure dans votre déclaration.


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Téléchargeons, donc, cette déclaration.

  2   Mme EDGERTON : [interprétation] Je n'ai pas le numéro de la pièce à

  3   conviction. Je crois qu'il s'agit du 1D09095.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Il s'agit de la pièce D4184.

  5   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut donner au témoin une copie

  6   papier, s'il vous plaît.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais on va voir. C'est très court.

  8   Mme EDGERTON : [interprétation] Et --

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Peut-être que le Greffe pourrait

 10   imprimer la version en B/C/S.

 11   Mme EDGERTON : [interprétation] Et peut-être, pour la version B/C/S,

 12   faudrait-il aller vers la page 2.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur, nous allons imprimer sur

 14   papier un exemplaire de votre déclaration.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci. Un grand merci.

 16   Mme EDGERTON : [interprétation]

 17   Q.  Monsieur Matovic, je crois qu'il faut que vous vous penchiez sur la fin

 18   du tout premier paragraphe en page 2.

 19   Et je vais en donner lecture. Il s'agit d'une rencontre que vous avez eue

 20   avec Nadja.

 21   Vous avez dit que Nadja vous aurait parlé "des dangers que représentent les

 22   'faucons' de l'OTAN groupés autour des officiers américains et allemands" -

 23   -

 24   R.  Moi, je vais essayer de vous répondre, si je vous ai bien compris.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, non, attendez la question. C'est en

 26   page 2 en anglais.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Je m'excuse.

 28   Mme EDGERTON : [interprétation] Je vais essayer de trouver la page exacte


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  1   en serbe pour donner la référence aux interprètes. J'aimerais qu'on me

  2   donne un instant pour le faire.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ça se trouve au bas du premier

  4   paragraphe.

  5   Mme EDGERTON : [interprétation] Oui, cinquième ou sixième ligne.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, je le vois. Pourquoi ne donnez-vous

  7   pas lecture, parce qu'il y a des guillemets de placés.

  8   Monsieur Matovic, est-ce que vous avez retrouvé le passage ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 10   "Il est allé de Han Pijesak à Pale", c'est ainsi que commence la phrase,

 11   non ?

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Si je peux vous aider. C'est le paragraphe

 13   précédent, Nadja lui a dit ensuite --

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est en page 2, mais le passage du haut.

 15   "Nadja lui a dit ensuite qu'il y avait un danger comme s'étaient

 16   exprimés des 'faucons' de l'OTAN rassemblés autour d'une partie des

 17   officiers américains et allemands et de certains hommes politiques qui sont

 18   en contact incessant par le biais de certains services de renseignements,

 19   et ce, avec un nombre donné d'officiers de la VRS, pour préparer des

 20   exécutions massives de la population musulmane, en particulier de civils,

 21   afin que ce soit un justificatif", et cetera. Donc c'est au conditionnel,

 22   tout ceci est au conditionnel, "afin que tout ceci serve de justificatif

 23   pour une opération planifiée de l'OTAN aux fins d'attaquer la RS, la

 24   Republika Srpska."

 25   Par conséquent, la première partie de la phrase, son début je veux

 26   dire, peut être interprétée ainsi, mais il faut entendre la totalité de la

 27   phrase. Cette brève information faite par Nadja consistait en une mise en

 28   garde, et elle en appelait à ne pas s'aventurer, comme on a pu le voir à


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  1   l'occasion des conflits, je peux vous donner les dates et les endroits

  2   aussi, pour que cela serve aux "faucons" de l'OTAN pour procéder au

  3   bombardement de la Republika Srpska. Je ne sais pas si j'ai été clair, et

  4   je ne sais pas non plus si cela vous aura suffi.

  5   Mme EDGERTON : [interprétation]

  6   Q.  Eh bien, cela ne semble pas se ressembler à ce que vous aviez dit,

  7   parce que vous l'aviez dit clairement dans votre déclaration où l'on

  8   affirme que les exécutions en masse à Srebrenica par les militaires des

  9   Serbes de Bosnie qui se trouvaient être planifiées à l'avance en complot

 10   qui impliquait des Allemands et des Américains. Et la VRS avait, semble-t-

 11   il, eu connaissance de la chose ?

 12   R.  Est-ce que je peux répondre pour vous rappeler ce que j'ai évoqué hier.

 13   La mise en garde qu'elle a faite disait que les Serbes étaient très en

 14   péril vis-à-vis du revanchisme de notre ennemi traditionnel, l'Allemagne;

 15   parce que s'il y avait eu échec de cette offensive musulmane qui perdait

 16   ses forces parce qu'elle n'a pas réalisé les résultats escomptés et promis

 17   par les Musulmans à leurs financiers et à leurs donateurs en armes, il y

 18   avait un danger pour ce qui est de nouvelles provocations de la partie

 19   musulmane. Parce que s'ils réussissaient à mettre en scène une vengeance ou

 20   quoi que ce soit de ce genre qui serait réalisé ou qui aurait pu être

 21   réalisé par les Serbes, c'est une chose qui les arrangerait plus encore

 22   parce que cela pourrait servir de justificatif à l'OTAN aux fins de

 23   procéder à des bombardements dans le cas où les forces serbes

 24   bombarderaient ou mettraient en péril ce qu'on appelle "neaj" [phon] dans

 25   notre langue, c'est tout ce que qui n'est pas fort, c'est ce qui constitue

 26   femmes, enfants et personnes inoffensives. Alors, c'était une mise en garde

 27   pour ce qui, par la suite, a été l'œuvre des forces serbes. J'aimerais que

 28   vous m'expliquiez de quels détails vous étiez en train de parler.


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Matovic, je vais vous poser la

  2   question suivante. Penchez-vous sur la dernière phrase du premier

  3   paragraphe. Je vais vous en donner lecture :

  4   "Elle l'a également mis en garde pour ce qui est de préparatifs effectués

  5   en vue d'exécutions massives de la population musulmane…"

  6   Donc elle vous a dit "qu'il y a eu des préparatifs en cours pour ce qui est

  7   d'une exécution massive…". Est-ce que c'est erroné, d'après ce que vous

  8   êtes en train de nous apporter comme explication ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, excusez-moi. Je n'ai pas voulu vous

 10   interrompre. Dans la version que j'ai obtenue, je ne vois pas du tout cette

 11   phrase qui dit : "Elle a mis en garde…"

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ça doit être une question de traduction, très

 13   probablement.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vais demander aux interprètes de nous

 15   interpréter ce qu'ils entendent, non pas la version anglaise. Pouvez-vous

 16   donner lecture de la dernière phrase du premier paragraphe, après le

 17   passage où on parle de "'faucons' de l'OTAN…"

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Faucons ? Que je retrouve la phrase d'après,

 19   n'est-ce pas ? "Il est resté très peu de temps" --

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Non, pas cela.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Avant cela. Ah, vous voulez que je répète.

 22   "Nadja lui a ensuite dit que la prise de Srebrenica par la VRS a été

 23   approuvée par Alija Izetbegovic, et on aurait donné l'ordre à Naser Oric

 24   quelques mois avant cela de se retirer avec une partie de son armée. Nadja

 25   lui a ensuite dit qu'il y avait" --

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant. Penchez-vous sur l'écran. Je

 27   vais vous l'indiquer sur -- est-ce que vous voyez la phrase sur l'écran ?

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] Excellence, il avait juste commencé à lire.


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez lire à partir de cet endroit-

  2   là.

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je vois.

  4   "Nadja lui a ensuite dit qu'il y avait un danger, comme elle l'a dit, de la

  5   part" --

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Non, vous avez sauté une ligne, Monsieur.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] "Nadja lui a ensuite dit qu'il y avait un

  8   péril, comme elle l'a dit, de la part des faucons de l'OTAN à se rassembler

  9   autour de certains officiers américains et allemands et de certains hommes

 10   politiques qui sont en contact ininterrompu par le biais de services du

 11   renseignement avec un certain nombre d'officiers de la VRS, et qu'il y

 12   avait des préparatifs d'exécution massive de la population civile [comme

 13   interprété], en particulier de civils, pour que cela serve de justificatif

 14   à une opération déjà planifiée d'attaque de l'OTAN contre la Republika

 15   Srpska."

 16   Est-ce que vous voulez que je réexplique tout ceci, que je vous réexplique

 17   cette phrase. Je peux vous analyser la phrase pour vous indiquer quelle est

 18   la substantifique moelle de cette phrase, d'après ce que j'en comprends.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant, Monsieur Matovic. Veuillez

 20   attendre la question. Merci de nous avoir donné lecture de ce passage.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Bien. 

 22   [La Chambre de première instance se concerte]

 23   Mme EDGERTON : [interprétation] Peut-être pourrait-on écarter la version

 24   anglaise. Comme cela, M. Matovic pourra se pencher sur la déclaration et

 25   les choses seront plus claires pour lui.

 26   Q.  Monsieur Matovic, --

 27   R.  Oui.

 28   Q.  -- il n'y a donc pas eu de complot, d'après ce que vous nous avez dit ?


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  1   R.  Je ne comprends pas ce que vous voulez dire.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce qu'il a dit qu'il y avait eu un

  3   complot ?

  4   Mme EDGERTON : [interprétation] Non, c'était dans ma question que je lui ai

  5   posée.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bon.

  7   Mme EDGERTON : [interprétation]

  8   Q.  Monsieur Matovic, est-ce que vous acceptez le fait qu'en juillet 1995,

  9   des membres de l'armée des Serbes de Bosnie et des membres de la police des

 10   Serbes de Bosnie ont exécuté plus de 7 000 hommes et garçons musulmans ?

 11   L'acceptez-vous ? C'est bien vrai, non ?

 12   R.  Moi, s'agissant d'une question aussi directrice, je dirais que je ne

 13   suis jamais tombé sur ce genre de question. Parce que si la finalité du

 14   déplacement de Nadja et de mon entretien avec elle -- et j'ai quand même

 15   une certaine expérience en matière de journalisme, lorsque j'obtiens une

 16   information, la chose importante c'est de savoir si on est bien

 17   intentionné, si on est compétent et le reste. Si on me dit telle chose,

 18   moi, j'aurais eu des questions à poser, mais moi, avec elle, je n'ai posé

 19   aucune question. D'après l'expression de mon visage, quand elle a commencé

 20   à parler des scissions dans l'OTAN, de nouvelles attaques, et cetera, et à

 21   l'expression de mon visage, elle a peut-être élargi sa phrase. Mais elle

 22   n'a pas demandé de me prononcer au sujet du nombre de morts et au sujet de

 23   conflits éventuels. Moi, je viens --

 24   Q.  Monsieur Matovic, maintenant, presque 20 ans après les faits, est-ce

 25   que vous acceptez de dire que les militaires et la police des Serbes de

 26   Bosnie ont commis des exécutions massives de plus de 7 000 hommes et

 27   garçons à Srebrenica en juillet 1995 ? Acceptez-vous ceci comme étant vrai

 28   maintenant ?


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  1   R.  Oui, je l'accepte, mais je ne répondrai pas simplement par oui ou par

  2   non à votre question. J'ajouterais une explication, si vous me le

  3   permettez, juste quelques phrases.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Allez-y, Monsieur Matovic.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Jusqu'à aujourd'hui, il me reste encore

  6   quelques points obscurs, même si j'ai peut-être passé plus de temps là-bas

  7   que la plupart des journalistes et des représentants politiques

  8   yougoslaves, et j'ai passé énormément de temps à essayer d'expliquer à

  9   beaucoup de gens vraiment l'essence de ce conflit. Et jusqu'à aujourd'hui

 10   encore, mes collègues, les journalistes, les reporteurs, viennent me voir

 11   et me demandent de leur donner des explications, mais il reste encore

 12   quelques points obscurs à mes yeux, comme je l'ai dit.

 13   Le point le plus obscur est le suivant : comment une petite ville telle que

 14   Srebrenica qui, d'après les statistiques, d'après les recensements,

 15   comptait 8 à 10 000 habitants et 300 habitations, comment, dans une telle

 16   ville, on aurait pu avoir 7 000 hommes qui se sont rendus là-bas ? Qui sont

 17   ces 7 000 hommes qui se sont rendus là-bas et qui a été exécuté ? Je sais

 18   que le taux de natalité qui avait été utilisé avait été repris des Albanais

 19   --

 20   Q.  Monsieur Matovic --

 21   R.  -- et les taux de natalité en augmentation sont les armes les plus

 22   fortes contre les Européens --

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Laissez le témoin continuer, s'il vous

 24   plaît, Madame Edgerton.

 25   Mme EDGERTON : [interprétation] Toutes mes excuses, Monsieur le Président.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] J'aimerais voir où il en vient.

 27   Mme EDGERTON : [interprétation] Très bien.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Continuez, Monsieur Matovic.


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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Donc, pour répondre à ce genre de questions de

  2   la part de quelqu'un qui vient de Belgrade et pour que cette personne

  3   communique à Nadja, parce que même avec mes amis les plus proches qui

  4   partagent mon point de vue et mes avis sur la situation dans le monde, et

  5   en particulier sur les frontières de notre pays, on m'a même dit qu'il n'y

  6   avait même pas énormément de combat à Potocari, que le bataillon s'était

  7   retiré et que les civils avaient suivi le bataillon parce qu'on leur avait

  8   promis l'asile, du travail aux Etats-Unis, en Europe, et cetera. L'armée

  9   était là-bas au début, le premier à partir était Naser Oric - et je ne sais

 10   pas si cela se retrouve dans ma déclaration - et il a été suivi par

 11   d'autres militaires en âge de porter les armes, qui se sont rendus vers

 12   Zepa et d'autres enclaves sous leur contrôle, qui sont retournés dans leurs

 13   bases.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous vous souvenez de la

 15   question, Monsieur Matovic ? Puis-je en conclure que votre réponse est :

 16   Oui ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que j'ai dit à Nadja ou à tout autre

 18   personne que les Serbes avaient tué là-bas 7 000 Musulmans ? Bien,

 19   j'entends ce chiffre bien précis pour la première fois. Plus tard, il y a

 20   eu certaines allégations de la part des Musulmans à cet effet, mais moi, je

 21   l'ai appris de façon plus graduelle de la part des médias plutôt que

 22   directement, même si je suis encore allé en Republika Srpska --

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, la question était la suivante :

 24   Aujourd'hui, dans ce prétoire, acceptez-vous le fait qu'environ 7 000

 25   Musulmans ont été tués ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je ne peux pas accepter quelque chose,

 27   quelque chose que j'ignore. Tout ce que je sais c'est que de tous les

 28   théâtres de guerre en Yougoslavie à l'époque, en Croatie, en Bosnie-


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  1   Herzégovine, au Kosovo et à Metohija plus tard, toute partie au conflit a

  2   essayé de maximaliser ses pertes, les civils qui ont été tués,

  3   contrairement à des guerres précédentes où les commandements essayaient de

  4   minimiser les pertes. Et dans cette guerre-là, tous les camps --

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Matovic --

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] -- ont exagéré, ont gonflé les nombres de

  7   pertes et de morts.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je pense que vous avez répondu à la

  9   question, mais avant de redonner la parole à Mme Edgerton, j'aimerais me

 10   tourner vers vous, Maître Robinson.

 11   Vous avez vu qu'il y a d'énormes différences entre l'original et la

 12   traduction anglaise, et au vu de cela, je ne suis pas sûr que Mme Edgerton

 13   puisse continuer son contre-interrogatoire. Je ne sais pas si les autres

 14   parties traduites dans ce document sont exactes. Donc, j'aimerais tout

 15   d'abord savoir qui a préparé, qui a traduit ce document ?

 16   M. ROBINSON : [interprétation] La section langue du Greffe.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je veux alors demander au témoin de nous

 18   reparler du début à la fin de son contact avec Nadja. Dans quelle

 19   circonstance l'avez-vous rencontrée, de quoi avez-vous parlé lors de votre

 20   conversation avec elle et qu'avez-vous fait à Han Pijesak. Est-ce que vous

 21   pourriez nous l'expliquer, Monsieur, si vous vous en souvenez.

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] A Han Pijesak avec Nadja -- non. Je l'ai

 23   rencontrée à Zvornik --

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, je vais reposer ma question. Est-ce

 25   que vous pourriez nous expliquer dans quelles circonstances vous avez été

 26   amené à rencontrer Nadja ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Je l'avais remarquée -- bon, j'étais beaucoup

 28   plus jeune à l'époque. Je l'avais remarquée, donc, dans l'entourage du


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  1   général Gallois, qui se rendait assez souvent en Roumanie pendant cette

  2   période-là, et puis, pour diverses raisons, il s'arrêtait à Belgrade. Il

  3   nous appelait, il nous prévenait, il nous appelait de Bucarest ou de

  4   Timisoara. Je dois dire que je ne suis ni enquêteur ni procureur, je ne

  5   savais pas que j'allais devoir déposer à ce sujet plus tard. Et la plupart

  6   du temps, il nous demandait des livres, des documents, les informations que

  7   nous avions à disposition sur l'évolution dans notre pays et les évolutions

  8   de nos voisins occidentaux actuels, les anciennes républiques yougoslaves -

  9   -

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors, je vais essayer de vous aider.

 11   Est-ce que M. Bulatovic vous a demandé de rencontrer Nadja ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Non, il ne l'a pas demandé. Je pense

 13   qu'officiellement il était même en vacances, et lorsque cette réunion a eu

 14   lieu, il a dit que je devrais y aller parce que je connaissais très bien la

 15   situation, alors que lui était Monténégrin, qu'il ne participait pas

 16   beaucoup à ce genre de choses et qu'il n'avait pas beaucoup d'information.

 17   Il en a appris plus, mais plus tard. A l'époque, il n'avait pas beaucoup

 18   d'information. Je ne me souviens plus de la formulation exacte. Mais, en

 19   fait, il cherchait tout simplement quelqu'un qui n'était pas trop occupé et

 20   il m'a dit que ce serait bien que j'y aille.

 21   Vous savez, en juillet, les gens sont en vacances en général, et à l'époque

 22   je pouvais toujours partir en vacances avec ma famille. Je pense que vous

 23   voyez ce que je veux dire. Donc, je n'ai pas eu envie d'aller à Srebrenica.

 24   J'avais d'autres choses à faire avec ma famille. Mais, des trois personnes,

 25   j'étais la moins occupée, donc j'ai accepté. Il n'y a pas eu d'ordre, cela

 26   dit. Et si ma mémoire est bonne, il m'a dit : Ce serait bien, Vlada, que

 27   vous y alliez parce que vous connaissez les gens là-bas, vous connaissez la

 28   situation --


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant.

  2   [La Chambre de première instance se concerte]

  3   L'ACCUSÉ : [aucune interprétation]

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Attendez.

  5   Nous allons voir dans quelle mesure le témoin peut répondre à cette

  6   question, et ensuite nous déciderons de l'interrogatoire et du contre-

  7   interrogatoire viva voce du témoin.

  8   Monsieur Matovic, est-ce que vous avez rencontré Nadja au restaurant

  9   Vidikovac ? Est-ce que vous vous souvenez de cette 

 10   réunion ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Bien sûr, à la terrasse de motel qui

 12   s'appelait Vidikovac et qui donnait sur le lac.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors, commencez votre histoire à partir

 14   de là, s'il vous plaît. De quoi avez-vous parlé avec Nadja ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Il n'y a pas d'histoire. Je n'étais pas en

 16   mesure de --

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, c'est moi qui me suis trompé. Est-

 18   ce que vous pourriez nous dire ce que Nadja vous a dit dans ce restaurant ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que dans cette déclaration, même si

 20   je ne peux pas en donner lecture maintenant, les choses sont décrites très

 21   précisément.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, ne vous appuyez pas sur votre

 23   déclaration. Racontez-nous de mémoire ce que Nadja vous a dit dans ce

 24   restaurant ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Vous savez, les rencontres avec des personnes

 26   de ce genre - ce n'était pas un représentant politique, elle n'était pas

 27   impliquée dans la stratégie militaire, et moi non plus - c'est sur mon

 28   expérience personnelle en tant que journaliste, et puis grâce à mon


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  1   expérience également au sein du bureau du président, la chose suivante

  2   s'est passée. En fait, j'ai eu l'impression, même si les choses n'étaient

  3   pas très claires, j'ai eu l'impression que je devais lui passer un message.

  4   Et elle m'a dit exactement ce qui est écrit dans cette déclaration. Je ne

  5   sais pas s'il y a un problème de traduction --

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant.

  7   LE TÉMOIN : [aucune interprétation] 

  8   [La Chambre de première instance se concerte]

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Edgerton, vous vouliez dire

 10   quelque chose ?

 11   Mme EDGERTON : [interprétation] Oui, je voulais dire qu'il est en train de

 12   lire sa déclaration.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Excellences --

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Etant donné que cette déclaration est

 16   très, très courte, je pense que nous pouvons poursuivre en direct, sans

 17   nous appuyer sur cette déclaration.

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais juste préciser que vous n'avez pas

 19   entendu l'interprétation de la dernière phrase. Cela n'est pas consigné au

 20   compte rendu. Le témoin peut répéter ce qu'il a dit.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non. Il est en train de lire sa

 22   déclaration. Malheureusement, les Juges de la Chambre ne sont pas

 23   convaincus de l'admission au dossier de cette déclaration en conformité

 24   avec l'article 92 ter du Règlement de procédure et de preuve. Je vais

 25   consulter mes collègues.

 26   [La Chambre de première instance se concerte]

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons excuser le témoin pendant

 28   quelques instants.


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  1   Monsieur Matovic, je vous invite à quitter le prétoire quelques instants.

  2   [Le témoin quitte la barre]

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] A la lumière des différences, tout

  4   d'abord, entre la version originale et la traduction anglaise et,

  5   deuxièmement, entre sa déclaration et son témoignage oral, les Juges de la

  6   Chambre estiment qu'il serait juste d'interroger oralement le témoin, si M.

  7   Karadzic désire en faire un témoin à décharge, effectivement. Et au vu des

  8   circonstances actuelles, si l'accusé le désire, il peut reporter la

  9   déposition du témoin.

 10   M. ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Président, je pense qu'étant

 11   donné l'âge avancé du témoin, il serait très difficile de le faire revenir.

 12   Je pense que nous allons continuer, que nous allons entendre sa déposition

 13   dans le prétoire directement, et nous allons essayer de rééquilibrer les

 14   choses plus tard et voir quelles heures devraient être allouées pour cet

 15   interrogatoire.

 16   M. LE JUGE MORRISON : [interprétation] Maître Robinson, effectivement, le

 17   témoin est une personne âgée, mais il essaie de se rappeler des choses qui

 18   se sont déroulées il y a 20 ans et il semble avoir quelque difficulté à se

 19   souvenir des choses sans s'appuyer sur sa déclaration. Alors, s'il ne va

 20   pas utiliser la déclaration, je crois qu'il ne pourra pas déposer, et cette

 21   déclaration ne peut pas être utilisée à cause des problèmes de traduction.

 22   Donc, je pense que vous devriez conseiller le Dr Karadzic dans ce sens-là.

 23   Prenez cinq minutes, discutez avec lui et voyez s'il serait réaliste et

 24   s'il serait dans l'intérêt de la Défense de continuer avec ce témoin tel

 25   que les choses se présentent.

 26   M. ROBINSON : [interprétation] Eh bien, oui, il est toujours bon d'étudier

 27   toute chose, mais honnêtement, ce témoin est ici parce qu'il a rencontré le

 28   Dr Karadzic en juillet 1995 et déclare que le Dr Karadzic n'avait pas de


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  1   bonnes informations sur Srebrenica. Donc, je pense que nous pouvons

  2   continuer l'interrogatoire sur cette partie de ces éléments de preuve, et

  3   Mme Edgerton peut traiter du reste. En tout cas, nous n'avons pas de

  4   problème avec cela. Nous pouvons en discuter et voir ce que le Dr Karadzic

  5   veut faire.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous avez des objections,

  7   Madame Edgerton ?

  8   M. TIEGER : [interprétation] J'aimerais prendre la parole. J'aimerais vous

  9   faire remarquer, Monsieur le Président, que je crois que Me Robinson a

 10   essayé de faire passer quelque chose qui n'est pas partagé par les Juges de

 11   la Chambre. Il a dit "Nous allons rééquilibrer les choses plus tard", comme

 12   s'il en revenait à la Chambre de décider de cela. Je ne pense pas qu'il

 13   faudrait consigner cela au compte rendu comme un accord qui a été passé

 14   entre Me Robinson et les Juges de la Chambre. Je ne pense pas que la

 15   Chambre avait l'intention de le faire.

 16   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que les questions générales sur le

 18   premier et le deuxième paragraphes peuvent être admises au dossier et ne

 19   pas être répétées ?

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Edgerton, qu'avez-vous à dire ?

 21   Mme EDGERTON : [interprétation] Non. Le témoin a dit : Je n'ai pas lu ma

 22   déclaration après l'avoir faite. Donc, non, dans aucun cas, nous

 23   n'accepterions cela.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous voulez lever l'audience

 25   pendant quelques instants pour en discuter avec M. Karadzic ?

 26   M. ROBINSON : [interprétation] Oui, ce serait bien. Cinq minutes peut-être.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous reprendrons à 10 heures.

 28   --- La pause est prise à 9 heures 53.


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  1   --- La pause est terminée à 10 heures 02.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Karadzic ou Maître

  3   Robinson.

  4   M. ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, nous ferons au

  5   mieux pour interroger ce témoin de vive voix.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Merci. Donc, nous allons

  7   annuler le versement au dossier de sa déclaration en application de

  8   l'article 92 ter. Nous allons libérer cette cote, et ce qui reste sera le

  9   compte rendu et nous allons entendre le témoignage de vive voix.

 10   Faites entrer le témoin, s'il vous plaît.

 11   [Le témoin vient à la barre]

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Rebonjour, Monsieur Matovic.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Une question s'est posée au sujet de la

 15   traduction et aussi nous avons eu quelques autres problèmes. Les Juges de

 16   la Chambre ont décidé, par conséquent, d'entendre votre témoignage

 17   oralement, et ce n'est pas par le biais du versement au dossier de votre

 18   déclaration écrite que cela va se faire. Donc, M. Karadzic va vous poser

 19   des questions. Est-ce que vous comprenez cela ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous voulez juste, s'il vous

 22   plaît, tenir compte d'une chose. Vous parlez la même langue avec M.

 23   Karadzic, donc il faudrait faire une pause entre les questions et les

 24   réponses. Donc, s'il vous plaît, attendez un petit peu après la question de

 25   M. Karadzic avant de commencer à répondre.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 28   Monsieur Karadzic, vous avez la parole.


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  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Bonjour, Excellences. Bonjour à toutes et à

  2   tous.

  3   Interrogatoire principal par M. Karadzic : [Suite]

  4   Q.  [interprétation] Monsieur Matovic, bonjour.

  5   R.  Bonjour, Monsieur Karadzic.

  6   Q.  C'était trop rapide. Ralentissons un peu.

  7   Donc, Monsieur Matovic, oublions qu'il ait eu une déclaration, maintenant.

  8   Dites-nous, s'il vous plaît, est-ce que vous m'avez rencontré en juillet

  9   1995 ?

 10   R.  En juillet 1995, où est-ce que je vous ai rencontré, de manière

 11   générale ?

 12   Q.  Est-ce que vous êtes venu me voir en juillet 1995 ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Est-ce que vous pouvez vous rappeler de quoi nous avons parlé ?

 15   R.  Je dois juste remarquer quelque chose : je vous ai rencontré par deux

 16   fois en peu de temps. Alors, une première fois, c'était Srebrenica, c'est-

 17   à-dire l'opération de Srebrenica, et après, c'était les événements de

 18   Croatie, avec la Republika Srpska. Et nous nous sommes rencontrés deux

 19   fois. Une première fois brièvement, au sujet de Srebrenica, et là, vous

 20   m'avez dit -- en fait, ce qui m'a intéressé, et je vous ai dit à vous -- je

 21   ne me souviens plus si je vous ai dit de comment cela s'est fait, par quel

 22   contact, mais je vous ai peut-être dit que c'était un contact fiable et

 23   tout à fait confirmé. Donc, je vous ai expliqué qu'il y avait -- que ce

 24   contact avait non pas une information, mais -- en fait, ce qui me trouble

 25   c'est que tout ce que j'ai dit partout et à mes amis, je ne sais pas si mes

 26   textes prévus pour la publication du livre, qui doit être édité, ont été

 27   conservés. Mais je dois vous dire une chose. Jamais je n'ai dit à personne

 28   que cette rencontre avec cette Nadja ait été une conversation où il y a eu


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  1   des questions de sa part, et surtout sur des opérations de guerre. Elle

  2   savait très bien quand je suis venu. Je ne sais pas d'où elle est venue,

  3   elle, et je ne lui ai pas posé cette question quand il y a eu ces

  4   relations. Ce n'est pas correct de poser des questions par la suite qui

  5   mettent en doute la crédibilité de la personne avec qui on s'entretient sur

  6   ses intentions.

  7   Q.  Monsieur Matovic, laissons cela de côté. Nous ne parlons plus de la

  8   déclaration. Essayez de vous rappeler ce de quoi nous avons parlé, nous

  9   deux. Est-ce que vous avez pu savoir quelles étaient les informations que

 10   j'avais et quelles étaient les informations que vous aviez sur Srebrenica ?

 11   R.  Je ne suis pas celui qui aurait pu vous informer de quelque chose,

 12   parce que moi non plus je n'étais pas au courant de grand-chose. Je vous ai

 13   simplement dit que nous avions une source de bonne foi et bienveillante à

 14   l'égard des Serbes, et que cette source nous a fourni une information, à

 15   savoir qu'il y a eu une scission au sein de l'OTAN, et qu'une fois que,

 16   pour ne pas employer un terme trop fort, qu'à partir du moment où

 17   l'offensive musulmane s'était calmée, qu'une partie des représentants avait

 18   dit que cette guerre était inutile, que les Serbes tenaient déjà 70 % du

 19   territoire, et cetera. Mais ce n'est pas quelque chose que Nadja m'a dit.

 20   Elle m'a dit littéralement ce qui figure dans la déclaration écrite. Il y a

 21   eu une scission, un fossé qui s'est creusé au sommet de l'OTAN, il y a des

 22   faucons et des colombes, c'est ce qu'elle a dit; ceux qui veulent que la

 23   guerre se poursuive de manière intense et encore plus violente, et les

 24   autres qui veulent qu'on mette fin à tout ça, que les gens règlent leurs

 25   comptes sur place et que nous, nous ne voulons plus payer pour ces guerres

 26   insensées.

 27   Q.  Je vous remercie. Et s'agissant des événements de Srebrenica, est-ce

 28   que vous m'avez posé des questions là-dessus et est-ce que je savais


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  1   quelque chose là-dessus et qu'est-ce que j'en savais ?

  2   R.  Je m'attendais à ce que vous me disiez, vous à moi, parce que moi

  3   j'étais journaliste, donc je ne suis pas revenu avec son message à elle,

  4   puisque en tant que journaliste, si j'avais été sur place, sans en même

  5   temps avoir des informations, des documents, des notes à l'appui, parce que

  6   tout ce qu'elle m'a dit m'a permis de savoir qu'elle avait su ça, je ne

  7   sais pas, à La Haye, ou à Bruxelles, ou je ne sais pas où. Je ne sais pas

  8   d'où elle a eu tout ça. Donc, ce message comme quoi il y avait juste cet

  9   avertissement et son appel à nous, que les Serbes ne se laissent pas piéger

 10   --

 11   Q.  [aucune interprétation]

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous pouvons poursuivre.

 13   Mme EDGERTON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Poursuivez.

 15   M. KARADZIC : [interprétation]

 16   Q.  Monsieur Matovic, écoutez, nous n'allons plus parler de Nadja, s'il

 17   vous plaît. Nous deux, vous et moi, de quoi avons-nous parlé ? M'avez-vous

 18   posé des questions ? M'avez-vous informé de quoi que ce soit ? Et moi, est-

 19   ce que je vous ai posé des questions ?

 20   R.  De mémoire, d'après cette conversation --

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Madame Edgerton.

 22   Mme EDGERTON : [interprétation] Avec tous mes respects, Dr Karadzic devrait

 23   faire très attention lorsqu'il articule ses questions lorsqu'il interroge

 24   ce témoin, compte tenu de ce qui s'est passé précédemment, et il devrait

 25   éviter de poser des questions directrices en fournissant des informations

 26   au témoin, comme il n'arrête pas de le faire.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vais essayer d'aider. Monsieur

 28   Matovic, est-ce que vous vous rappelez avoir rencontré M. Karadzic en


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  1   juillet 1995 ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Je me souviens dans la mesure -- oui,

  3   attendez, est-ce que je peux y aller maintenant ?

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous ai demandé si vous vous

  5   souveniez d'avoir rencontré M. Karadzic au mois de juillet 1995. Vous

  6   pouvez répondre par oui ou par non.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous vous souvenez combien de

  9   fois vous l'avez rencontré en juillet 1995.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Je me souviens de cette rencontre-là et une

 11   autre tentative lorsque j'ai apporté des lettres. En fait, je ne l'ai pas

 12   vu, lui, mais j'ai vu ses collaborateurs dans les bureaux de la présidence

 13   de la République de Bosnie-Herzégovine. Il n'était pas là, il ne savait pas

 14   exactement quand il allait revenir, et la lettre que j'avais apportée, je

 15   l'ai confiée à la secrétaire. C'est comme ça qu'on faisait.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous l'avez rencontré une fois en

 17   juillet 1995, vous avez rencontré une fois M. Karadzic ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Juste une correction. Maintenant, je ne

 19   sais plus ce qui était dans la déclaration, ce qui a été traduit dans la

 20   déclaration, ce qui a été dit, mais je sais seulement que je l'ai vu une

 21   deuxième fois, mais je ne sais pas si c'était en juillet. C'était pas la

 22   même -- c'était la même -- c'était pas la même information, c'était une

 23   information semblable. Alors une deuxième fois, j'ai vu Nadja, elle avait

 24   apporté une information, mais je ne sais pas si c'était en juillet ou en

 25   août. En ce moment, je n'arrive pas à me souvenir de cela, était-ce à la

 26   fin du mois de juillet. Ça, je n'arrive pas à me souvenir quand je lui ai

 27   apporté l'information sur la République serbe de Krajina et sur les

 28   préparatifs sur le plan de la situation là-bas.


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc, vous avez rencontré M. Karadzic en

  2   juillet 1995. A ce moment-là, de quoi avez-vous parlé avec M. Karadzic ?

  3   Est-ce que vous pouvez nous dire ce dont vous vous souvenez ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Je me souviens surtout de lui sur la

  5   probabilité, ou, plutôt, sur la source de ses informations. Il suivait

  6   surtout la CNN. Il m'a demandé si j'en savais plus sur les commentaires

  7   dans la presse parce que j'avais travaillé dans la presse également, sur

  8   des questions de politique étrangère surtout. J'ai suivi des guerres et des

  9   choses comme ça. Donc, on a surtout parlé de ça, mais moi, je suis venu le

 10   voir pour lui demander ce qu'il savait de cela et s'il pouvait informer les

 11   gens qui m'avaient invité sur ce qui était exact, et est-ce qu'il est vrai

 12   qu'une guerre venait de commencer et de quelle intensité. Et à ça, il m'a

 13   dit, si mes souvenirs sont bons, que lui aussi il s'est fait dire cela tout

 14   comme moi. Et moi, donc, dans cette information de retour - il faut dire

 15   que ça peut sembler un peu morbide - mais qu'il y a eu une victime, une

 16   vieille dame ou une dame, mais il ne s'est pas agi de 7 000 soldats morts.

 17   Alors ça non, et des choses comme ça.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

 19   Monsieur Karadzic, je pense qu'il vaudrait mieux poser une question à la

 20   fois. Ça vaudrait mieux. Veuillez poursuivre.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 22   M. KARADZIC : [interprétation]

 23   Q.  A ce moment-là, avons-nous parlé de personnes capturées ?

 24   R.  De mémoire, c'était bien plus tard, plus tard qu'on a parlé de

 25   prisonniers. On a surtout parlé de prisonniers lorsqu'il y a eu une

 26   invitation lancée par le président Cosic. A ce moment-là, on a reçu la

 27   visite à Belgrade du Prix Nobel Elie Wiesel, c'était une mission

 28   humanitaire, il est venu chercher des informations sur l'existence des


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  1   camps, camps musulmans, ou plutôt, des camps où il y avait des Musulmans en

  2   Bosnie-Herzégovine. Et là, je suis venu vous voir une nouvelle fois, et

  3   vous avez répondu ce que j'ai transmis à M. Wiesel. Je lui ai dit :

  4   Monsieur, là où, ou si vous voulez aller, si vous avez des informations de

  5   la part de Belgrade, il n'y aura aucun obstacle, on va tout faire pour vous

  6   aider. Et je pense que son escorte pourrait confirmer cela, ou son

  7   entourage. Il y avait je ne sais pas combien d'hélicoptères, de véhicules

  8   de combat, tout ce qu'il a voulu, et la règle était de ne pas prévoir cela

  9   par avance. Uniquement le matin quand j'arrivais là, on disait telle sera

 10   la destination, et c'est là que je choisissais par quel moyen et où. Donc,

 11   la plupart des camps étaient des endroits où il y avait des combats

 12   alentour, mais ça -- je ne sais pas. Vous avez compris ? Vous êtes

 13   satisfait de ma réponse ?

 14   Q.  [aucune interprétation]

 15   R.  Et c'est là que nous avons eu une conversation, et vous avez dit que

 16   tout accès allait être rendu possible. Bien sûr, en fonction de la

 17   situation sur le champ de bataille à Banja Luka, la situation à Manjaca,

 18   puis Gorazde, Foca, que sais-je.

 19   Q.  Je vous remercie. Est-ce que vous pouvez nous dire s'il s'est avéré que

 20   j'étais bien informé sur les événements du mois de juillet à Srebrenica,

 21   donc, juillet 1995 ? Pendant cet entretien, est-ce que vous avez --

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avant de répondre, oui.

 23   Mme EDGERTON : [interprétation] C'est entièrement directeur et inapproprié,

 24   Monsieur le Président, Madame, Messieurs les Juges.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous pouvez reformuler votre

 26   question, s'il vous plaît.

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui.

 28   M. KARADZIC : [interprétation]


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  1   Q.  Monsieur Matovic, est-ce que vous vous rappelez dans quelle mesure

  2   j'étais informé des événements de Srebrenica ?

  3   R.  Mais je répète, dès que quelqu'un vous dit qu'il est informé surtout

  4   grâce à la CNN, eh bien, en tant que collègue et professionnel, moi aussi

  5   je suis ce que diffuse la CNN; mais si on a une seule source et pas

  6   d'autres sources et que c'était ça la source de vos connaissances, en une

  7   phrase, que je ne peux pas maintenant relater de manière tout à fait

  8   fidèle, si vous m'aviez dit que vous étiez au courant qu'il y avait là une

  9   opération et que je ne pouvais transmettre à Belgrade aucune information

 10   sur l'essentiel, sur la substance de ces choses, c'est la raison pour

 11   laquelle j'ai essayé par moi-même de venir là, de me rendre à Bratunac, par

 12   le général Mladic. Et puis, les autres généraux étaient à Han Pijesak.

 13   C'était le commandement des arrières. Eux, ils m'ont dit qu'ils n'étaient

 14   au courant de rien. Et quand je leur ai cité ce qui était écrit dans la

 15   presse et ce qu'on a vu à la télévision, ils m'ont dit qu'ils n'avaient

 16   absolument aucune information là-dessus. C'est juste à titre

 17   d'illustration, c'était ça le ton de notre conversation. Donc, encore une

 18   fois, j'ai apporté des lettres. Je ne me souviens pas exactement, peut-être

 19   que j'ai apporté des informations un peu plus récentes qui nous sont

 20   parvenues d'autre part. Mais ça, ce Tribunal le sait. Il y a eu déjà des

 21   procès contre des Français qui étaient d'orientation à suivre De Gaulle et

 22   qui sont passés par des représentants à qui ils ont donné des informations

 23   que l'on me demande aujourd'hui de fournir. Mais moi, je n'étais pas

 24   militaire --

 25   Q.  Est-ce que vous pouvez éclaircir un point. Vous dites : "Je n'ai pas pu

 26   transmettre à Belgrade des informations." Pourquoi ?

 27   R.  Mais parce que même à eux j'ai dit exactement cette même chose, que

 28   vous-même vous n'étiez pas suffisamment informé, et que pour autant que


Page 44925

  1   j'aie compris cette image, entre Pale et Srebrenica, c'est loin, il y a des

  2   obstacles par lesquels il fallait passer, et c'est par là que sont passés à

  3   ce moment-là et avant cela ces formations, donc on n'était pas en sécurité.

  4   Donc, je ne sais pas comment est-ce que vous auriez pu, d'ailleurs, même si

  5   votre sécurité vous aurait permis d'y aller, parce que même moi ils m'ont

  6   averti du fait. D'ailleurs, ça m'est arrivé par la suite. J'étais avec

  7   votre directeur de la banque nationale à bord d'un véhicule, on est passés

  8   à côté d'une colonne musulmane qui était au repos. Certainement qu'ils ne

  9   vous auraient pas laissé vous mettre dans une situation pareille.

 10   Q.  Je vous remercie.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions pour M. Matovic.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Madame Edgerton.

 13   Contre-interrogatoire par Mme Edgerton : [Suite]

 14   Q.  [interprétation] Monsieur Matovic, quand vous avez rencontré Dr

 15   Karadzic et quand vous lui avez parlé, il ne vous a rien dit des

 16   informations qu'il recevait sur ce qui était en train de se produire à

 17   Srebrenica, et ce, de la part de ses soldats, de leurs commandants, de sa

 18   police et de leurs commandants, des membres de la diaspora serbe et des

 19   responsables politiques du coin. Il ne vous a rien dit de ces informations

 20   qu'il recevait d'eux, n'est-ce pas ?

 21   R.  Est-ce que vous pourriez accepter cette tentative que je fais ? Je

 22   pourrais répondre en tant que journaliste. Ça m'est plus familier. Cela me

 23   correspondrait mieux.

 24   Q.  Monsieur Matovic, très précisément, j'ai formulé ma question pour que

 25   vous puissiez y répondre plus facilement, et non pas en tant que

 26   journaliste. Donc, ma question est la suivante : il ne vous a rien dit sur

 27   toutes les autres informations qu'il recevait, n'est-ce pas ? Vous pouvez

 28   répondre par oui ou par non.


Page 44926

  1   R.  Je ne peux pas. Tout simplement, je ne lui ai pas posé de questions de

  2   ce type-là. C'est ça que je veux vous dire. Et est-ce que vous avez un peu

  3   de patience pour que je vous réponde en tant que journaliste, quand j'écris

  4   pour les gens qui lisent les articles ? Est-ce que les Juges accepteront

  5   que je réponde d'une manière concrète, plus en relief ?

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, entendons ce que le témoin a à

  7   dire.

  8   Soyez bref, Monsieur Matovic.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais essayer d'être le plus concis

 10   possible.

 11   Cela faisait 40 ans que j'étais journaliste. En fait, je n'ai pas

 12   toujours été journaliste. Mais après, j'ai été aussi enseignant sur la

 13   sélection ou le tri des informations à l'institut de journalisme. J'ai

 14   enseigné aux étudiants étrangers. Donc, j'avais une information que j'ai

 15   reçue de Nadja qui était une information étonnante pour la une des

 16   journaux, pour la page de couverture. Mais là, je n'étais pas journaliste.

 17   Je devais relayer les informations à ceux qui m'avaient envoyés là-bas.

 18   Donc, il fallait que je transmette la nouvelle information et que je donne

 19   l'explication. Alors, est-ce que j'allais pouvoir faire en sorte que toute

 20   l'information serait appropriée pour la une ou est-ce qu'il faudrait un peu

 21   plus ? Je n'avais pas assez de temps. Et comment est-ce que j'aurais pu le

 22   faire ? Puisque M. Karadzic m'a dit que, sur l'envergure du conflit, il ne

 23   savait pas à ce moment-là. Il m'a dit qu'il ne le savait pas, que lui non

 24   plus n'était pas informé.

 25   Donc, il s'agit là d'un concours de circonstances qui était tel qu'il

 26   fallait réagir sur-le-champ, rapidement, et on n'avait pas le temps de se

 27   consulter -- en fait, lui, il était le président de la république -- mais

 28   bon, il faudrait que j'abrège. Donc, cette information que j'avais reçue,


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  1   je me suis demandé est-ce que je peux l'étoffer par de nouveaux détails ?

  2   Je n'avais pas le temps de me rendre sur les champs de bataille, et on m'a

  3   conseillé par le commandement de Han Pijesak, commandement des arrières,

  4   qu'il ne fallait pas que je me rende là. Mais non pas à cause de

  5   l'opération, c'était plutôt parce que le général Mladic, le commandant de

  6   l'armée, se déplaçait de Bijeljina jusqu'à Zepa sans arrêt et dans une

  7   situation de guerre. C'était un terrain où ne pouvait pas passer librement.

  8   Donc, est-ce qu'ils m'ont dit ça -- il avait un hélicoptère. Il avait tout

  9   ce qu'il fallait. Donc, lui, il s'y rendait. Et c'est cela qui m'a été

 10   conseillé --

 11   Mme EDGERTON : [interprétation]

 12   Q.  Donc, si je vous ai bien compris, vous avez répondu par la négative à

 13   la question que je vous ai posée; autrement dit, le Dr Karadzic ne vous a

 14   rien dit au sujet des informations qu'il recevait d'autres sources

 15   d'information ?

 16   R.  Oui, je ne peux pas le dire. Parce que moi-même je n'avais pas

 17   suffisamment de temps pour parler avec lui de la situation. Moi, je lui ai

 18   demandé si je pouvais ajouter d'autres informations sur les informations

 19   fournies par Nadja. Il m'a répondu que non, car lui-même il n'avait pas

 20   suffisamment d'information et ne savait pas à quel moment il allait

 21   recevoir des informations pertinentes.

 22   Q.  [aucune interprétation] 

 23   R.  Allez-y, oui.

 24   Mme EDGERTON : [interprétation] Monsieur le Président, je regarde l'heure.

 25   Peut-être que vous souhaitez prendre la pause à présent. Cela étant dit,

 26   j'ai besoin d'encore sept minutes, peut-être même moins, après la reprise.

 27   Et surtout si vous me donnez une demi-heure pour réfléchir, donc, pour la

 28   pause.


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Nous allons prendre la pause

  2   à présent.

  3   --- L'audience est suspendue à 10 heures 31.

  4   --- L'audience est reprise à 11 heures 03.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Madame Edgerton.

  6   Mme EDGERTON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. J'ai réfléchi

  7   et je n'ai pas d'autre question pour ce témoin.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Madame Edgerton.

  9   Est-ce que vous avez des questions supplémentaires ?

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Non, Monsieur le Président. Merci.

 11   [La Chambre de première instance se concerte]

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Matovic, avant la pause, vous

 13   avez dit quand vous avez rencontré M. Karadzic, et je vous cite :

 14   "Cette fois-là je n'étais pas là comme journaliste. J'étais là comme un

 15   messager des gens qui m'ont envoyé là-bas pour leur apporter des nouvelles,

 16   des informations."

 17   Pourriez-vous nous dire ce que vous vouliez dire par là ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Moi, je fais partie d'une profession j'y

 19   ai travaillé pendant 40 ans, et nous avons une certaine déontologie des

 20   règles et je me suis retrouvé dans une situation qui est complètement

 21   opposée à celle-ci dans la mesure où j'avais une certaine liberté d'agir,

 22   ou la déontologie, les règles étaient différentes. Et c'est à cela que je

 23   fais allusion. Vous pouvez le trouver dans des livres à Belgrade. Les

 24   livres ont été publiés, et on m'a rapproché cela, justement, à cette époque

 25   où j'ai été fonctionnaire. Par la suite, je leur ai expliqué ma situation.

 26   Ils m'ont présenté leurs excuses. Donc voilà, je faisais partie d'une

 27   profession et je me suis retrouvé dans une tout autre profession qui

 28   répondait à d'autres règles.


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  1   On m'a dit que si mon interlocuteur me fournissait des informations, et

  2   surtout s'ils ne les fournissaient pas, je n'avais absolument pas le droit

  3   de faire de commentaire. Voici à quoi je pensais. Il lui appartenait de

  4   m'apporter des informations; il m'appartenait de les transmettre. Et à ce

  5   moment-là, quand je suis allé voir M. Karadzic, et cetera, vu que j'avais

  6   l'âme de journaliste, j'ai réagi, parce que c'était une nouvelle

  7   sensationnelle, et c'est comme cela que je l'ai sentie, alors j'ai essayé

  8   d'intervenir auprès des deux personnes les plus compétentes, comme il

  9   fallait que je m'entretienne avec Alija Izetbegovic, mais c'était

 10   complètement contraire aux intérêts du pouvoir, et j'ai refusé de parler

 11   avec Alija Izetbegovic à cause de mes convictions de journaliste. Mais

 12   c'était une nouvelle sensationnelle, mais sans fondement. Et je n'avais pas

 13   le temps, je n'avais pas suffisamment de temps pour aller explorer cela

 14   moi-même. Donc, je me suis présenté au lieu le plus important auprès de la

 15   position la plus importante qui soit, pour lui demander, pour demander à

 16   cette personne de confirmer ou infirmer cela.

 17   Et vous savez, cela - et je présente mes excuses au Procureur - cela,

 18   c'était complètement contraire à la déontologie de ma profession

 19   précédente. Mais dans toute profession, même pour les policiers, eh bien,

 20   il faut quand même qu'il y ait une certaine déontologie qu'il s'agit de

 21   respecter. Vous pouvez traiter une personne comme -- enfin, en accord avec

 22   sa fonction. En l'espèce, il s'agissait du président de la république, et

 23   je ne pouvais pas lui poser la question de savoir combien il y avait de

 24   morts là-bas, et cetera. Vous savez, ce n'était pas mon rôle que de lui

 25   poser cette question-là, et puis, professionnellement, ce n'était pas

 26   permis, tout simplement, ni en tant que journaliste ni dans une autre

 27   fonction. Je n'essaie pas vraiment de glorifier la profession de

 28   journaliste, leur déontologie, mais vous savez, vous avez des règles de


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  1   base qui régissent la profession, la règle de jeu. Je ne pouvais pas les

  2   contourner, ces règles.

  3   Donc je ne peux pas vous dire vraiment de quoi nous avons parlé. Nous

  4   avons parlé, moi, je lui ai demandé s'il était au courant du message que

  5   j'ai reçu, s'il était au courant du danger, qu'il ne fallait pas tomber

  6   dans le piège, et cetera, et cetera. Et j'ai reçu la réponse me disant

  7   qu'il n'avait pas, malheureusement, suffisamment d'information de tous les

  8   côtés, et même pas des gens du terrain. Et voilà, c'est avec cela que s'est

  9   terminé notre entretien.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quand vous avez rencontré M. Karadzic,

 11   est-ce que vous travailliez encore au niveau de la présidence yougoslave ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Bien sûr, bien sûr. J'étais mis à la

 13   disposition à l'époque, dans les hautes fonctions de l'Etat. On va dire que

 14   j'étais une espèce de conseiller principal pour les situations

 15   extraordinaires, même si je n'avais pas les mêmes grades, les mêmes

 16   fonctions au moment où j'étais président de la république, mais à l'époque,

 17   j'ai été auprès du ministère de la Défense, et pendant les opérations de

 18   guerre, il s'agissait de répondre à la propagande hostile de l'ennemi.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Eh bien, maintenant, j'ai une question

 20   pour les parties. Est-ce que la réunion, cette réunion avec M. Karadzic, se

 21   trouve dans l'agenda ?

 22   M. ROBINSON : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

 23   Mme EDGERTON : [interprétation] Effectivement, cette réunion ne se trouve

 24   pas dans l'agenda, et nous n'avons pas de date de cette réunion.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Matovic, avec ceci se termine

 26   votre déposition. Au nom des Juges de la Chambre, je souhaite vous

 27   remercier d'être venu à La Haye pour déposer. Je vous souhaite un bon

 28   voyage de retour.


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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

  2   [Le témoin se retire]

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce qu'il y a d'autre changement dans

  4   l'ordre de comparution des témoins ?

  5   M. ROBINSON : [interprétation] Non, Monsieur le Président. Le témoin

  6   prochain, c'est M. Milincic, et il devrait être là.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Et après lui ?

  8   M. ROBINSON : [interprétation] M. Kovacevic.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Et ensuite ?

 10   M. ROBINSON : [interprétation] Ecoutez, je ne pense pas que nous allons

 11   arriver jusqu'à la déposition de M. Radinkovic, de sorte que nous allons

 12   commencer avec le colonel Blagojevic et le général Tolimir, demain.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 14   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] J'aimerais demander au témoin de faire

 16   la déclaration solennelle.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 18   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 19   LE TÉMOIN : MILOS MILINCIC [Assermenté]

 20   [Le témoin répond par l'interprète]

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur Milincic. Vous pouvez

 22   vous asseoir.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien.

 25   Avant de commencer votre déposition, Monsieur Milincic, je voudrais attirer

 26   votre attention sur un article qui existe ici, il s'agit de l'article 90(E)

 27   du Règlement de procédure et de preuve. En vertu de cet article, vous

 28   pouvez refuser de répondre aux questions posées par les parties ou même par


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  1   les Juges, si vous pensez que cette question pourrait vous incriminer, à

  2   savoir constituer une infraction au pénal. Dans ce contexte, quand je dis

  3   "incriminer", je pense à quelque chose qui peut correspondre à un aveu de

  4   culpabilité par rapport à une infraction au pénal, ou bien de donner des

  5   éléments de preuve dans ce sens. Cependant, si vous pensez que la réponse

  6   pourrait vous incriminer, et si, à cause de cela, vous refusez de répondre

  7   à la question, eh bien, je dois vous dire que les Juges du Tribunal peuvent

  8   vous forcer à répondre à ladite question. Mais dans ce cas, le Tribunal va

  9   faire en sorte que votre déposition obtenue de la sorte ne sera utilisée

 10   dans aucune affaire contre vous pour toute infraction quelle qu'elle soit,

 11   excepté l'infraction de faux témoignage.

 12   Est-ce que vous m'avez compris ? 

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je comprends très bien.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 15   Vous pouvez poursuivre, Monsieur Karadzic.

 16   Interrogatoire principal par M. Karadzic :

 17   Q.  [interprétation] Bonjour, Professeur Milincic.

 18   R.  Bonjour. Je vous souhaite bonne chance, et j'espère que le Dieu nous

 19   vienne à l'aide.

 20   Q.  Ceci va être difficile à traduire. C'est un vieux dicton, plutôt un

 21   vers de poète Njegos. Mais je vais vous demander, Professeur, de parler

 22   lentement et de respecter un temps de pause pour que tout ce que nous

 23   disons entre au compte rendu d'audience.

 24   Pourriez-vous me donner votre nom et votre date de naissance et lieu de

 25   naissance ?

 26   R.  Milos Milincic, professeur de littérature, retiré. J'habite à Bajinci,

 27   à côté de Banja Luka. Je suis né le 15 décembre 1942. Là, je suis marié et

 28   j'ai deux enfants.


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  1   Q.  Pourriez-vous nous dire quelle était votre carrière politique et

  2   professionnelle, quelle était votre carrière ?

  3   R.  J'ai été professeur à l'école, professeur de la langue serbo-croate et

  4   de la littérature. Ensuite, j'ai été proviseur de l'école élémentaire. Et

  5   au moment des élections, j'ai été élu président, en 1990, de l'assemblée

  6   municipale de Srbac. Ensuite, j'ai été le directeur de l'institut de

  7   l'éducation à Banja Luka, et c'est là que j'ai pris ma retraite. En ce qui

  8   concerne mon idéologie, j'ai été membre de la Ligue des Communistes

  9   jusqu'en 1990, depuis mon service militaire. Et en 1990, je suis devenu

 10   membre du Parti démocratique serbe.

 11   Q.  Au cours de votre carrière, est-ce que vous avez été décoré ? Est-ce

 12   que vous avez reçu des médailles ?

 13   R.  Oui, en tant que professeur, j'ai été le premier dans les compétitions

 14   linguistiques, il s'agissait de compétitions régionales de Banja Luka. Et

 15   j'ai deux médailles, Njegos de premier ordre et Njegos de deuxième ordre.

 16   Ensuite, j'ai eu aussi d'autres décorations, si vous voulez, moins

 17   importantes, mais j'y tiens tout de même. Sans oublier que la municipalité

 18   de Srbac m'a décoré pour avoir pris certaines mesures pour avoir veillé au

 19   maintien de la paix et au développement de la municipalité.

 20   Q.  Merci. Pourriez-vous nous dire quelle a été la composition ethnique de

 21   votre municipalité en 1990 et 1991 ?

 22   R.  Comme aujourd'hui. Mais depuis 1948, je dirais que la composition est

 23   la même, depuis les premières élections après la Deuxième Guerre mondiale.

 24   A 92 à 95 %, vous avez une population serbe. Nous comptons un peu plus que

 25   21 000 habitants. Le dernier recensement a montré que la population a

 26   diminué, nous avons à peu près 19 000 habitants. Et donc, toujours serbe à

 27   95 %.

 28   Q.  Vous avez dit que la population a diminué. Est-ce qu'elle a diminué


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  1   proportionnellement par rapport aux différents membres de groupes ethniques

  2   ?

  3   R.  En ce qui concerne le pourcentage, le rapport entre les Serbes, les

  4   Croates et les Musulmans, eh bien, je dirais que c'est proportionnel. Donc

  5   vous avez à peu près 1 000 personnes de moins. Nous avons aussi des

  6   Tchèques qui habitent dans notre municipalité.

  7   Q.  Pourriez-vous nous dire quelle est la signification du nom Srbac ? Est-

  8   ce que nous avons changé le nom de la municipalité pendant la guerre ?

  9   R.  Eh bien, il y a eu différentes explications de ce nom. Nous avons

 10   entendu dire des témoins que Srbac était une municipalité nouvelle. Elle a

 11   été, pourtant, fondée en novembre 1933, pendant le Royaume de Yougoslavie.

 12   Le ministre des Affaires intérieures a décidé que Bosanski Svinjar, c'était

 13   avant le nom de Srbac -- donc, il y avait Hrvacki Svinjar [phon] et

 14   Bosanski Svinjar. Hrvacki Svinjar, aujourd'hui, est appelé Davor; alors que

 15   Bosanski Svinjar est devenu Srbac, et c'était donc au mois de novembre

 16   1933.

 17   Q.  Est-ce que vous pouvez nous dire ce que signifie le nom de la ville ?

 18   R.  Vous avez trois versions qui expliquent le choix de la ville. Il y en a

 19   qui disent que c'est à cause de la faucille que l'on dit "srp" en serbe,

 20   et, donc, d'où vient le nom de Srbac. Et puis, d'autres disent que c'est à

 21   cause des Serbes, de la composition ethnique serbe.

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'espère que l'on va corriger le compte rendu

 23   d'audience correctement pour qu'il reflète les noms correctement. Très

 24   bien.

 25   M. KARADZIC : [interprétation] 

 26   Q.  Pourriez-vous nous dire pourquoi vous avez rejoint le SDS en 1990 ?

 27   R.  J'étais professeur à l'école secondaire. J'étais professeur de la

 28   langue et de la littérature. Je dois dire qu'il y avait beaucoup d'élèves


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  1   de Croatie, de Davor, qui traversaient la rivière pour venir à l'école. Ils

  2   venaient en bateau. Ensuite, vous avez eu la dissolution du bloc de l'est.

  3   Et, oui, j'ai suivi les leçons de Dedijer, qui a fait une biographie de

  4   Tito, et j'ai pensé donc que le moment était venu que l'on définisse notre

  5   existence culturelle, ethnique, qu'il fallait que l'on propage en tant que

  6   bons voisins notre identité et d'affirmer notre existence ethnique, nos

  7   communautés respectives. Même en 1941, 1945, il n'y a pas eu de conflit sur

  8   le territoire de la municipalité. Et je pensais que moi, en tant qu'un

  9   humaniste, je pourrais contribuer à l'affirmation de cette identité.

 10   C'était un mélange, je dirais, romantique, humaniste. Je pensais que

 11   j'allais pouvoir contribuer, donc, à cette nouvelle définition de l'être

 12   ethnique dans cette ère.

 13   Q.  Pourriez-vous nous dire à quel moment vous avez créé votre parti

 14   politique et est-ce que moi j'étais présent à ce moment-là ?

 15   R.  Oui, le 28 juillet, nous avons eu un comité d'initiative à Srbac. Moi,

 16   je me suis rendu à ce rassemblement en tant qu'observateur. Et notre prêtre

 17   m'a suggéré de faire partie de ce comité d'initiative. Vu que j'étais un

 18   humaniste, un homme de lettres, que je n'avais pas de connotation négative,

 19   il a pensé que j'étais l'homme qu'il fallait pour faire ce qu'il y avait à

 20   faire. Et donc, les choses ont commencé comme cela.

 21   Moi, j'ai parlé avec des gens, j'ai parlé en public, et à un moment

 22   donné il y a eu la cérémonie, donc la cérémonie qui a eu lieu le 31 août

 23   1990 sur le square public de Srbac. Il y avait environ 

 24   10 000 personnes de présentes, les journalistes ont fait cette évaluation,

 25   alors que la ville de Srbac ne compte que 6 000 habitants. Et donc, vous

 26   avez parlé, Vojo Kupresanin s'est aussi adressé à la masse, moi aussi,

 27   Zdravko Kovacevic aussi. Nous avons parlé de nos objectifs, de notre

 28   programme, de la plateforme du parti, nous voulions préserver l'écologie,


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  1   la nature. Et je dois dire que vous n'avez dit qu'une phrase, et avec cette

  2   seule phrase, vous avez réussi à conquérir l'audience. Est-ce que je peux

  3   vous dire de quoi il s'agit ?

  4   Q.  [aucune interprétation]

  5   R.  Donc vous avez parlé à peu près une demi-heure, et ensuite, de façon

  6   légère, vous avez dit que le Parti démocratique serbe est trop calme, trop

  7   docile. Et vous avez cité un poème concernant Kraljevic Marko, donc le roi

  8   Marko, et sa mère qui lui disait qu'il avait un caractère trop docile, mais

  9   il lui a répondu : Ecoutez, si le malheur intervient, je vais facilement,

 10   moi aussi, tourner l'épée là où il faut. Et puis, vous avez dit que des

 11   aventuristes demandent qu'il y ait la guerre, mais que ces mêmes

 12   aventuristes n'ont pas demandé aux mères croates, serbes et musulmanes si

 13   elles avaient des enfants pour les enterrer au moment où il y aurait la

 14   guerre, car le jardin est plus beau quand vous y avez les fleurs de toutes

 15   les couleurs. Et vous avez vraiment tout fait pour que les voisins

 16   continuent à vivre paisiblement les uns avec les autres. Et c'était

 17   vraiment quelque chose qui était bienvenu parmi la population.

 18   Je dois dire que cette campagne était plutôt une campagne idéologique

 19   que ethnique. Comment dire ? Vous aviez plutôt un conflit entre la droite

 20   et la gauche qu'un conflit entre les groupes ethniques. Parce que sur cette

 21   plateforme-là, sur une plateforme nationaliste, personne n'aurait emporté

 22   le pouvoir. S'il avait dit quoi que ce soit de mal au sujet des Croates,

 23   des Musulmans ou des Serbes, aucun parti n'aurait gagné les élections.

 24   Q.  Très bien.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vais demander que l'on montre

 26   l'enregistrement 1D15612.

 27   M. KARADZIC : [interprétation]

 28   Q.  Donc, c'est la vidéo que vous avez citée tout à l'heure.


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  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Et je vais demander de montrer cela à partir de

  2   11 heures 15.

  3   [Diffusion de la cassette vidéo]

  4   M. KARADZIC : [interprétation]

  5   Q.  Est-ce que vous pouvez d'abord nous dire ce que l'on voit ici ?

  6   R.  Oui, c'est cet enregistrement-là, oui. On était déjà à la tombée du

  7   soir.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut revenir vers le début et

  9   augmenter le volume. Les interprètes ont une transcription.

 10   [Diffusion de la cassette vidéo]

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] L'image est en train de fuir. Mais l'audio, on

 12   l'entend. On entend les applaudissements.

 13   L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

 14   "Nos ennemis ne sont pas seulement ceux qui haïssent les Serbes. Nos

 15   ennemis sont ceux qui sont les ennemis de la démocratie, et je peux vous

 16   dire qu'aujourd'hui la démocratie en Yougoslavie est menacée sous plusieurs

 17   aspects. Elle est menacée pas seulement par ceux qui ont été jusqu'à

 18   présent au pouvoir, mais elle est menacée également par des gouvernements

 19   qui sont venus au pouvoir dans certaines de nos républiques" --

 20   [Fin de la diffusion de la cassette vidéo]

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant, je vous prie. Pourquoi ne

 22   pas télécharger la transcription en anglais et en B/C/S et -- à moins que

 23   M. Tieger n'ait une objection quelconque à formuler. Je ne pense pas que ce

 24   soit utile que de suivre un enregistrement d'une qualité aussi piètre.

 25   M. TIEGER : [interprétation] Oui, certainement. Je n'ai pas d'objection,

 26   Monsieur le Président.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bon. Alors, j'aimerais que nous passions

 28   vers le prétoire électronique.


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  1   M. ROBINSON : [interprétation] Ça devrait être en page 2.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais qu'on nous monte en page 2 le moment

  3   où on est à 11 heures et quart. Bien entendu, si les participants sont

  4   d'accord, on peut demander un versement de la transcription toute entière

  5   du discours, mais je voudrais que ceci soit entendu dans le prétoire.

  6   M. KARADZIC : [interprétation]

  7   Q.  Pouvez-vous nous présenter d'abord, Professeur Milincic, cette partie

  8   du discours ?

  9   R.  Oui. J'ai dit que vous aviez terminé ce rassemblement populaire, et on

 10   s'attendait de votre part à des propos plus raides. Mais après avoir dit

 11   que la démocratie était menacée à plusieurs points de vue et que certains

 12   s'employant en faveur de la guerre et des aventuriers ne se sont pas posés

 13   la question de savoir si les mères serbes, croates ou musulmanes ont porté

 14   au monde des enfants pour qu'ils fassent la guerre. Vous vouliez édifier

 15   les relations interhumaines et interethniques, et il y a cette phrase très

 16   imagée que vous avez prononcée, au terme de quoi les jardins sont les plus

 17   jolis quand il y a plusieurs types de fleurs qui y fleurissent. Et c'est la

 18   raison pour laquelle l'image voulait dire que vous vous employiez en faveur

 19   d'une vie commune des différents groups ethniques. C'était ça la finalité

 20   poursuivie.

 21   Q.  Merci.

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Excellences, je demande le versement au dossier

 23   des deux pages de ce discours et l'enregistrement vidéo, si vous le voulez,

 24   le 1D15612.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce qu'on peut voir ce passage qui se

 26   rapporte au jardin que vous avez mentionné ?

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Il se peut que cela soit en page 1 ou alors que

 28   cela ait été une image utilisée lors de l'entretien avec des personnalités


Page 44940

  1   politiques présentes --

  2   M. TIEGER : [interprétation] Attendez, attendez.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non.

  4   M. TIEGER : [interprétation] Excusez-moi, mais il n'y a aucune finalité de

  5   mettre constamment en garde le Dr Karadzic --

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non.

  7   M. TIEGER : [interprétation] -- mais ça fait un exemple de plus.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pendant que vous vous êtes préparé en

  9   vue de ce témoignage, vous avez réécouté l'enregistrement vidéo, n'est-ce

 10   pas ? Ce discours que M. Karadzic a tenu au rassemblement ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai pris part à ce rassemblement tout comme

 12   M. Karadzic, et j'ai à la maison l'enregistrement complet.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Excellences, en première page, passage 4.59,

 14   les deux dernières phrases, on ne mentionne pas le jardin, mais on

 15   mentionne le fleurissement de fleurs différentes --

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne me souviens pas si c'était un jardin ou

 17   un pré qu'on avait mentionné, au juste.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, mais vous devez poser la question

 19   au témoin.

 20   M. TIEGER : [interprétation] Mais c'est M. Karadzic qui témoigne, il

 21   demande au témoin de confirmer son témoignage à lui. C'est une façon de se

 22   comporter qui se perpétue.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Excusez-moi. Il n'en est pas ainsi. Nous avons

 24   demandé le passage dans la transcription, et j'ai renvoyé le témoin vers

 25   l'avant-dernier passage, à partir de la phrase où on dit que :

 26   "Le peuple serbe en Bosnie-Herzégovine aurait pu s'organiser en un

 27   groupe belliqueux et dangereux…"

 28   Je voudrais que le témoin nous en donne lecture. Vous avez le curseur


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  1   qui vous l'indique.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] "Le peuple serbe aurait pu mettre en place une

  3   organisation belliqueuse, mais le peuple serbe ne l'a pas fait. Là où il y

  4   a la démocratie, le peuple serbe a fleuri. Et les autres peuples ont fleuri

  5   également. Il en sera de même si démocratie il y a et si paix civique il y

  6   a."

  7   Ce sont des propos qui m'ont incité à devenir membre du parti et l'un

  8   des dirigeants de ce parti, ce type de propos. C'est ainsi que j'ai compris

  9   la démocratie et c'est ainsi que je percevais la vie dans un Etat qui

 10   assurait ce type de possibilités.

 11   M. KARADZIC : [interprétation]

 12   Q.  Merci. Puis-je vous demander maintenant de prêter attention au 3.26,

 13   qui se trouve un peu au-dessus. De quoi est-ce que je suis en train de

 14   parler à cet endroit-là ?

 15   R.  Il y est dit :

 16   "Je me dois de dire, que les autorités ont demandé auprès des autres

 17   peuples. Ce n'est pas nous, les Serbes, qui avons détruit le monument à Ban

 18   Jelacic à Zagreb, ça a été l'œuvre d'autres autorités. Ce monument ne nous

 19   a pas dérangés du tout. Qu'ils le remettent à sa place s'ils le souhaitent.

 20   Nous, Serbes, nous n'avons pas regardé de travers nos voisins musulmans

 21   lorsqu'ils fêtaient la fête du Bajram. Nous les félicitions de la fête.

 22   Nous n'avons pas défendu leurs endroits saints, Hajvatovica et la grotte

 23   des jeunes filles. Nous allons respecter leurs lieux saints et nous allons

 24   y aller comme les Musulmans respectent notre monastère d'Ostrog et viennent

 25   au monastère d'Ostrog. C'est ainsi que l'on vit ensemble dans la

 26   communauté. Il n'y a aucune raison pour qui que ce soit de renoncer à quoi

 27   que ce soit. Nous demandons à ce que soit ramené et restitué ce qui fait de

 28   nous des peuples : l'histoire, les religions et les coutumes. Nous


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  1   demandons la même chose pour nos voisins, les Croates, les Musulmans, les

  2   Juifs, les Roms et autres. Nous n'allons pas les aimer plus s'ils renoncent

  3   à ce qui fait d'eux ce qu'ils sont. Qu'ils vivent de leur pleine vie

  4   spirituelle. Ils seront plus paisibles et cela fera d'eux des voisins

  5   meilleurs."

  6   Alors, c'est une leçon de démocratie. En ma qualité de professeur de

  7   lettres, j'ai compris que c'était là le rêve auquel il convenait d'aspirer.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons verser ceci au dossier avec

  9   le discours tenu par M. Karadzic.

 10   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la pièce D4185, Madame,

 11   Messieurs les Juges.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 13   M. KARADZIC : [interprétation]

 14   Q.  Est-ce que vous avez été un responsable du Parti démocratique serbe; et

 15   si oui, dans quelles instances et pendant quelle période, je vous prie ?

 16   R.  A partir du 28 juillet 1990 jusqu'à l'an 2002, j'ai tout le temps fait

 17   partie des instances du SDS, à commencer par le fait d'être président d'un

 18   comité municipal du parti à Srbac, et j'ai passé trois mandats à la tête de

 19   l'organisation au niveau de la république.

 20   Q.  Merci. Vous avez été trois fois membre du comité principal. Comment

 21   est-on élu au comité principal ?

 22   R.  J'ai été proposé par mon parti d'origine à Srbac, et la proposition a

 23   été véhiculée vers l'assemblée. C'est-à-dire, il y avait là les

 24   propositions émanant de toutes les municipalités. Puis il y a eu un

 25   suffrage secret, puisque plusieurs candidats il y a eus, et par un hasard,

 26   je ne sais lequel, j'ai eu le plus de votes. Peut-être pas le plus, mais un

 27   très grand nombre des votes. Je ne sais pas, peut-être parce que j'ai du

 28   charme ou que je suis prof de lettres, mais je crois que j'ai eu beaucoup


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  1   de succès à l'occasion de ce suffrage secret.

  2   Q.  Merci. Est-ce que vous avez participé à la création de la politique et

  3   des positions politiques du Parti démocratique serbe à l'occasion de

  4   l'exercice de ces trois mandats ?

  5   R.  Oui, on peut dire que j'ai pratiquement en tout temps été en situation

  6   de suivre les activités du parti, du comité principal de ce parti, et de

  7   véhiculer les conclusions vers le comité municipal, et vice-versa. Les

  8   positions du comité municipal, je les transmettais au comité principal. En

  9   particulier lorsque la guerre a commencé, lorsque nous avons eu des

 10   difficultés, où il n'y avait plus d'électricité, lorsque nous avons été

 11   abandonnés à nous-mêmes, certaines suggestions émanant de vous en personne

 12   m'ont grandement aidé à servir de bon panneau d'indication.

 13   Q.  Je vous demande de parler plus lentement parce qu'on n'a pas consigné

 14   les moyens de communication qui ont fait défaut. Mais c'est le fait d'avoir

 15   parlé vite.

 16   Est-ce que vous pouvez nous dire si, à l'occasion de la participation

 17   à cette création de la politique du SDS, y a-t-il eu des écarts vis-à-vis

 18   de la politique du SDS et ce qui vous a attiré au départ vers le parti ?

 19   R.  Je vous ai déjà dit ce qui m'avait motivé pour ce qui était de devenir

 20   membre du parti. Et maintenant, pour ce qui est de la plateforme ou du

 21   programme du parti, lorsque j'ai étudié ceci, et j'ai réétudié mes agendas,

 22   lorsque dès les années 1990, avant même qu'il y ait eu des élections, on

 23   nous avait dit que l'intention était celle de coopérer avec tous les partis

 24   en présence après les élections, mais à condition qu'il n'y ait pas les

 25   quatre "anti" : antidémocratie, antisémitisme, anticroatisme et

 26   antiserbisme. Donc, c'étaient les quatre "anti" que nous voulions éviter.

 27   L'INTERPRÈTE : Les interprètes demandent à ce que le témoin répète le

 28   quatrième "anti" qui a manqué.


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  1   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Nous avions dit que nous allions coopérer

  3   après les élections, que nous entrerions en coalition avec tous les partis

  4   - Srbac avait cinq partis qui avaient participé aux élections - et nous

  5   avions transmis cela comme position vers le comité principal. Nous voulions

  6   éviter l'antidémocratie, l'antisémitisme, l'antiserbisme et

  7   l'antiyougoslavisme. Nous considérions que la Yougoslavie continuerait à

  8   exister dans un esprit de tolérance et de vie commune et de vie unitaire.

  9   Malheureusement, ce n'est pas ainsi que les choses se sont passées.

 10   M. KARADZIC : [interprétation]

 11   Q.  Merci. Qui dans votre municipalité avait été la personnalité la plus

 12   importante au niveau des autorités à mettre en œuvre la politique du Parti

 13   démocratique serbe ?

 14   R.  Mais là, je me dois de dire que lorsqu'il y a eu coupure des

 15   transmissions, lorsque nous avons moins pu nous parler et nous rencontrer,

 16   j'ai dû me fonder sur les principes du parti pour rassembler autour de moi

 17   des individus, des personnalités, et chercher à mettre en place des modus

 18   vivendi. En ma qualité de président de cette cellule de parti, puis en tant

 19   que maire de l'assemblée municipale de Srbac pendant sept ans, j'ai été la

 20   personne qui a été louée et qui a été critiquée, et comme vous pouvez le

 21   voir, j'ai survécu.

 22   Q.  Merci. Est-ce que dans vos activités et l'exercice du pouvoir à Srbac,

 23   vous avez mis en œuvre dans la mesure la plus grande possible cette

 24   politique qui était celle du Parti démocratique serbe ?

 25   R.  Lorsque nous l'avons emporté aux élections, lorsque l'assemblée

 26   municipale de Srbac avait eu 60 députés, et comme je vous l'ai dit tout à

 27   l'heure, cinq partis ont gagné les bancs de l'assemblée municipale, le SDS

 28   avait eu 42 députés sur un total de 60; le Parti socialiste en a eu huit;


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  1   les réformistes en ont eu six; le SPO en a eu deux. Je crois avoir bien

  2   fait l'addition. Lorsque nous avons mis en place un pouvoir, il y a eu un

  3   peu de méfiance -- de défiance à l'égard des partis à préfixes

  4   idéologiques, et on a été défiants vis-à-vis du Parti socialiste. Et je

  5   vous avais précisé que la chose la plus intelligente à faire, c'était de

  6   voir le SDA, qui n'avait que deux députés sur un total de 60, parce que

  7   nous pouvions mettre en place une autorité tous seuls, nous avions une

  8   majorité absolue, et j'ai dit qu'il aurait été correct et judicieux de

  9   faire en sorte qu'un poste important soit confié au SDA. Je me suis

 10   consulté avec mes collaborateurs, j'ai eu des consultations, mais il y a eu

 11   des oui et des non. Mais lorsque nous avons constaté qu'on allait avoir des

 12   mariages de Bosniens, il serait bon d'avoir un député que serait le député

 13   maire chargé des mariages en sus de ceux qui étaient membres de cette

 14   institution. Il fallait qu'il y ait, par exemple, un adjoint à moi, M.

 15   Halid Hadziselimovic, à être l'un des députés chargé d'un remplacement en

 16   cas d'absence.

 17   Q.  Merci. Vous nous avez dit, avant la guerre et après la guerre, quelle a

 18   été la structure de la population. Alors, où résidaient les Musulmans du

 19   point de vue du noyau urbain de la ville et est-ce qu'il y avait des

 20   agglomérations plus ou moins homogénéisées à l'extérieur de ce noyau urbain

 21   ?

 22   R.  Oui, il y avait Kobas. C'est une localité à côté de la rive de la Sava.

 23   Il y a de l'autre côté Kobas croate, et il y avait notre Kobas de Srbac. Et

 24   de notre côté à nous, il y avait quelque 70 familles à résider là depuis

 25   toujours. Ensuite, Crna, une autre agglomération. Et vous étiez encore

 26   jeune, vous me l'avez raconté, vous êtes passé par Crna et vous vouliez

 27   savoir s'il y avait encore des gens. Il y avait 15 familles dans cette

 28   petite bourgade. Dans la localité de Srbac, il y a aussi un certain nombre


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  1   de familles musulmanes. La concentration des familles musulmanes était à

  2   Kobas, Crna et à Srbac même.

  3   Q.  Merci. Est-ce que, et si oui, dans quelle mesure, vous respectiez leurs

  4   besoins, leurs droits ? Est-ce que vous avez tenu compte de leurs

  5   revendications ? Je parle maintenant de la période précédant la guerre.

  6   R.  Le directeur de l'école à Kobas - et c'est une école régionale faisant

  7   partie de la municipalité de Srbac - il y avait Rasin Zukanovic qui était à

  8   la tête de cette école, qui était directeur. Il y a une bonne raison à

  9   cela. Et par la suite, à Kobas, on donnera son nom à la place du nom d'un

 10   héros national, et on a donné le nom à l'école Mehmed Mesa Selimovic. Il y

 11   a à Srbac Jovan Jovanovic Zmaj, le nom d'un auteur serbe; et là-bas c'était

 12   Mehmed Mesa Selimovic, qui était un grand écrivain musulman.

 13   Q.  Merci. Est-ce que vous connaissiez mes positions, mes opinions à ce

 14   sujet, ou est-ce que nous avions eu des contacts ?

 15   R.  Vous m'avez dit une fois quelque chose qui m'a surpris. Vous avez

 16   toujours demandé s'il y avait eu des tensions, des problèmes, quels étaient

 17   les comportements respectifs des gens, et je vous ai répondu : Mais qui n'a

 18   pas de problèmes ? Pour certaines personnes la guerre est un allié --

 19   Q.  Ralentissez. On a consigné de façon tout à fait erronée ce que vous

 20   avez dit tout à l'heure.

 21   R.  Lorsque vous m'avez demandé quelle était la situation dans la

 22   municipalité, vous m'avez demandé s'il y avait des pressions d'exercées à

 23   l'égard de ces gens, puisqu'on était en temps de guerre, et j'ai dit : Mais

 24   où est-ce qu'il n'y a pas de problèmes ? La mafia, les vautours de toutes

 25   sortes, sous le couvert de la nuit, font toutes sortes de choses. Et puis,

 26   vous m'avez dit : Laisse tomber les mafieux et les vautours. Comment cela

 27   se passe-t-il avec les Musulmans, les Croates, les Ruthènes, les Tchèques à

 28   Srbac ? Et j'ai dit : Nous nous efforcions de les protéger tous. Et puis,


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  1   vous avez été un peu irrité par mes réponses évasives et vous avez dit :

  2   Ecoutez, si à Srbac vous avez peur de quelque chose et si 1 000 non-Serbes

  3   vous dérangent, vous n'êtes ni des Serbes ni des être humains. Et vous avez

  4   utilisé un terme qui m'a surpris, et je vais peut-être pouvoir le répéter.

  5   Q.  Allez-y.

  6   R.  Vous avez dit : Sur 23 000 habitants, s'il n'y a pas 1 000 Serbes, et

  7   si cela vous dérange, ce fait-là, le peu de gens non-serbes, vous n'êtes ni

  8   des êtres humains, ni des Serbes, vous êtes des --

  9   L'INTERPRÈTE : L'interprète de la cabine française précise que la meilleure

 10   des traductions serait de dire : Vous êtes des trous du cul.

 11   M. KARADZIC : [interprétation]

 12   Q.  Je suis véritablement surpris de réaliser combien de mots vilains j'ai

 13   utilisés dans mes conversations téléphoniques, mais j'ai été pris de court

 14   un peu pour le compte rendu.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Alors, je voudrais que le document --

 16   L'INTERPRÈTE : La référence n'a pas été entendue par l'interprète.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] -- soit affiché.

 18   M. KARADZIC : [interprétation]

 19   Q.  [aucune interprétation]

 20   M. TIEGER : [interprétation] Si M. Karadzic est surpris par la

 21   transcription, ça peut également aussi être entendu comme étant les efforts

 22   des interprètes qui perdent l'haleine à force de s'efforcer de le suivre.

 23   Et apparemment il parle, lui aussi, trop vite. Et je crois pouvoir entendre

 24   à la voix de l'interprète que le rythme, la cadence de l'interprétation est

 25   en train de peiner pour le suivre.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur Tieger.

 27   Est-ce que vous vous souvenez de la question qui vous a été posée, Monsieur

 28   Milincic ?


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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Il va falloir la répéter.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] 65 ter 31802 --

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, mais avant que de demander

  4   l'affichage d'un document sur nos écrans, pouvez-vous poser votre question

  5   ?

  6   M. ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Président, je crois que c'est le

  7   document de la conversation interceptée qui vient d'être évoqué.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ah bon.

  9   M. KARADZIC : [interprétation]

 10   Q.  Est-ce que vous pouvez nous dire -- enfin, vous l'avez dit tout à

 11   l'heure, ce n'était pas tout à fait clair. Quel était le problème pour ce

 12   qui est du nom donné à l'école de Kobas ?

 13   R.  Je crois que l'école de Kobas s'appelait Esad Midzic, et puis on a

 14   voulu procéder à des changements parce qu'il y avait eu des divisions

 15   idéologiques de prédominantes déjà --

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant. Avant que de poursuivre,

 17   nous avons besoin de déterminer en premier lieu qui sont les

 18   interlocuteurs.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais je pensais que c'était déjà inscrit sur le

 20   texte.

 21   M. KARADZIC : [interprétation]

 22   Q.  Est-ce que vous pouvez identifier les interlocuteurs ?

 23   R.  C'est nous deux, Milos Milincic et le président Karadzic.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Le document, lui, dit "Milosic". Ce

 25   n'est pas Milincic.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est une erreur. Milos Milincic. C'est moi.

 27   Aucun dilemme à cela.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Comment savons-nous qu'il s'agit là


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  1   d'une erreur ? Vous devez d'abord le déterminer avec le témoin avant que

  2   d'aller au-delà, Monsieur Karadzic.

  3   M. KARADZIC : [interprétation]

  4   Q.  Monsieur Milincic, est-ce que vous pouvez nous dire on parle de la

  5   "municipalité de Srbac" et on dit "président de la municipalité, Milos

  6   Milosic." Alors, est-ce qu'il y a existé un dénommé Milos Milosic ? Ou est-

  7   ce que c'est une erreur commise par celui qui était en train de nous mettre

  8   sur écoute ?

  9   R.  J'étais le maire de la municipalité. Et ici, il est question du maire

 10   Milos Milincic, c'est une erreur de frappe.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Nous avons un enregistrement audio,

 12   Excellences. La qualité est plutôt mauvaise. Mais on peut identifier les

 13   voix.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais le contexte entier nous le dit par lui-

 15   même.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bon, cela suffira. Continuons, je vous

 17   prie.

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] On peut tous le lire. Est-ce qu'on peut nous

 19   afficher la page suivante, s'il vous plaît.

 20   Q.  Et je vous demande de nous relater un peu de quoi il s'agissait ici.

 21   R.  Il s'agit de l'école de Kobas, je pense qu'elle portait le nom d'un

 22   héros national de la guerre précédente, Esad Midzic, et nous voulions

 23   placer les choses dans d'autres cadres, plus artistiques des différentes

 24   nations. Et on a demandé quel pourrait être le nom que l'on pourrait donner

 25   à l'école de Kobas. Il y a eu des propositions plus extrémistes, de

 26   l'appeler Saint Sava, par exemple, puis il y a eu deux députés du SDA qui

 27   ont réagi. Ils ont dit : Non, quand même ne mettez pas Saint Sava. Nous

 28   sommes des Bosniens, des Musulmans, et ce n'est pas tout à fait la première


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  1   des associations d'idées que nous pourrions avoir. Puis il y a eu des

  2   péripéties, on a parlé de Ducic. On a donné le nom de Njegos à une autre

  3   école. Il y a eu nombre de situations comiques à ce sujet également.

  4   Et je pense vous avoir appelé, moi, pour demander que faut-il faire, quelle

  5   activité déployée, aller plus vite. Et puis, vous avez formulé une

  6   proposition, plusieurs noms, et vous avez dit : Mais soyez intelligent,

  7   cherchez un compromis. Vous aviez parlé de Jovan Ducic, et je pense que

  8   vous aviez même évoqué quelque chose de sympathique. Vous m'avez dit :

  9   Milos, si vous devez garder le nom d'une école en utilisant des effectifs

 10   de la police, alors là, les choses vont mal.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut nous afficher la page

 12   suivante en anglais.

 13   M. KARADZIC : [interprétation]

 14   Q.  Vous souvenez-vous de ce que j'ai dit du point de vue de Saint Sava et

 15   de son patrimoine ?

 16   R.  Oui, nous avons essayé de discuter de ces questions-là avec des

 17   députés. Nous voulions leur faire savoir que Saint Sava était quelqu'un

 18   d'éclairé, que c'était quelqu'un de populaire même avant la dernière

 19   guerre, que les écoles organisaient des fêtes pour célébrer la Saint Sava,

 20   qu'il ne fallait pas faire preuve d'étroitesse d'esprit parce que Saint

 21   Sava était un enseignant, qu'il était accepté par tout le monde comme étant

 22   quelqu'un de proéminent, d'exceptionnel, de cultivé. Mais les gens ne le

 23   savaient pas, et c'est la raison pour laquelle ils ont réagi de façon

 24   instinctive. Et je me souviens que même un de mes députés qui était Serbe a

 25   dit : Ecoutez, mettez de côté Saint Sava. Quel livre a-t-il écrit ? Je lui

 26   ai dit quels étaient les ouvrages de Saint Sava, mais nous en sommes restés

 27   là.

 28   Q.  J'aimerais savoir à présent la chose suivante : lors de notre


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25  

26  

27  

28  


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  1   conversation, on a parlé de certains éléments. Mais quelle était ma

  2   recommandation ? Quelle a été la voie suivie pour arriver à un compromis ?

  3   R.  Eh bien, vous avez proposé Vuk Karadzic, et j'ai dit non, parce qu'une

  4   autre école porte déjà ce nom. Pourquoi pas Jovan Ducic, avez-vous dit ?

  5   Les socialistes ont commencé à regarder ses défauts idéologiques. Ils ont

  6   dit que Ducic était un Chetnik qui avait émigré en Amérique, donc il

  7   fallait aussi s'occuper de cela. Et puis, vous avez dit : Eh bien, pourquoi

  8   pas Mehmed Mesa Selimovic, c'est pas mal. Et vous m'avez laissé le choix.

  9   Vous m'avez dit que vous vouliez avoir mes conseils, mais que c'était à moi

 10   de décider du nom. Mais moi, je voulais vous consulter, je ne voulais pas

 11   me précipiter. J'ai reçu une lettre d'Ostoja, je l'ai ici avec moi. Et les

 12   gens d'Ostoja m'ont écrit parce qu'ils n'étaient pas contents des

 13   changements de noms de toutes les écoles.

 14   Q.  Qu'en est-il de l'école centrale à Srbac, comment s'appelle-t-elle et

 15   sa filière à Kobas ?

 16   R.  Eh bien, dans la Grande Srbac, c'était Jovan Jovanovic Zmaj. C'était un

 17   auteur pour enfants très connu. Tout le monde l'aimait bien, quelles que

 18   soient les couleurs politiques, parce qu'il écrivait de façon chaleureuse

 19   sur les enfants, sans établir aucune différence, sans aucune idéologie.

 20   Alors, pour l'école de Kobas, on a donné le nom d'un autre auteur, Mehmed

 21   Mesa Selimovic. Voilà le compromis qui a été atteint.

 22   Q.  Merci. Pendant la guerre, est-ce que vous avez eu l'occasion de

 23   protéger vos minorités et comment l'avez-vous fait, si c'était le cas ?

 24   R.  Eh bien, je vais vous dire cela : il y avait des charognards, comme je

 25   vous l'ai dit, qui ont profité de la nuit et qui ont porté les armes à

 26   Srbac Lepenica. A Lepenica, la famille Malesevic a été tuée et les auteurs

 27   ont été arrêtés. C'étaient des Serbes. L'un s'est suicidé et deux autres

 28   ont été condamnés à mort. Mais la peine a été commuée à 20 ans de prison. A


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  1   un autre endroit, une famille avait été attaquée. Les attaquants

  2   cherchaient de l'argent et du carburant. La famille a été rouée de coups,

  3   mutilée. Dans un village qui s'appelait Kladari [phon], un magasin a été

  4   cambriolé et les Serbes ont roué de coups le propriétaire. Donc, les

  5   Musulmans avaient très peur. Et nous avons mis sur pied un poste de

  6   contrôle de la police à Kobas, pour protéger la population de Kobas de ces

  7   incursions, de ces grands héros nationaux qui, en fait, étaient des

  8   voleurs, des pilleurs, tout simplement.

  9   Q.  Merci. Pouvez-vous nous dire qui étaient les victimes, quelle était

 10   leur appartenance ethnique ? Qui étaient les auteurs de ces crimes ?

 11   R.  [aucune interprétation] 

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant. Veuillez répéter lentement

 13   vos propos, s'il vous plaît.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Alors, la famille Malesevic à Gornja Lepenica

 15   se composait d'un couple qui était marié. Ils avaient pris leur retraite

 16   après avoir travaillé en Allemagne pendant toute leur vie. C'était une

 17   famille riche. Ils ont été tués par ces trois Serbes qui ont été arrêtés,

 18   les auteurs du crime, j'entends. Ils ont été condamnés à mort. L'un d'entre

 19   eux s'est suicidé. Pour les deux autres, leur peine a été commuée à 20 ans

 20   d'emprisonnement. Maintenant, s'agissant de la famille Vejinovic à Razboj

 21   [phon], il n'a jamais eu d'arrestation des auteurs. La police n'avait pas

 22   de preuve. Certains Serbes ont été interrogés. Et dans une autre ville --

 23   L'INTERPRÈTE : -- dont le nom a échappé aux interprètes.

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] -- qui était une localité serbe, les gens

 25   n'ont pas osé témoigner, n'ont rien voulu dire. Cependant, certains

 26   charognards, donc, sont venus, se sont rendus là-bas, c'étaient également

 27   des Serbes. Alors pourquoi est-ce que je vous raconte tout cela ? Parce

 28   qu'on m'a pointé une arme sur la tempe. C'étaient des soldats qui l'ont


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  1   fait, c'étaient des Serbes, et la situation était vraiment horrible.

  2   M. KARADZIC : [interprétation]

  3   Q.  Merci. Est-ce que vous pourriez nous aider. Est-ce qu'il y a eu des cas

  4   d'émigration de membres de minorité dans votre municipalité ? Comment les

  5   hommes musulmans et croates en âge de porter les armes se comportaient-ils

  6   ?

  7   R.  Les entreprises ne fonctionnaient plus, et cela a duré très longtemps.

  8   Il n'y avait plus de communication avec le monde extérieur. Nous n'avions

  9   plus de moyen de subsistance. On peut parler de l'émigration de Serbes de

 10   Zmaj [phon], qui se trouve à la frontière. Quoi qu'il en soit, on m'a

 11   informé du fait que 60 Musulmans de Bosnie, pas de familles, des personnes,

 12   en particulier des jeunes, avaient migré dans des pays tiers parce que ces

 13   personnes n'avaient pas d'emploi. Leurs biens, leurs avoirs étaient

 14   protégés. Les Serbes ont emménagé dans certaines de ces maisons. C'étaient

 15   des réfugiés qui venaient de différents territoires de Bosnie-Herzégovine.

 16   Et à la fin de la guerre, les biens ont été rendus à leurs propriétaires.

 17   Q.  Merci. Qu'en est-il de la majorité de ces personnes ? Donc, je ne parle

 18   plus de ces 60 personnes, je parle de la population, est-ce qu'elle est

 19   restée à Srbac ?

 20   R.  Non, il n'y a pas eu d'exode du tout. Et lorsque vous m'avez posé une

 21   question sur les combattants ou sur les troupes, je dois aussi vous

 22   préciser que j'ai quelques documents dans mon porte-document. Vingt deux

 23   Musulmans ont combattu dans la Brigade de Srbac. Ils ont été blessés et ils

 24   ont été informés d'une décision selon laquelle ils avaient le statut de

 25   vétérans de guerre et qu'ils allaient recevoir des indemnités. Vingt deux

 26   combattants musulmans avaient été blessés et ils faisaient partie de la

 27   Brigade de Srbac. Beaucoup d'entre eux ne faisaient pas partie de la

 28   Brigade de Srbac. Et j'ai moi-même participé à un enterrement au cours


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  1   duquel un soldat, un soldat musulman, avait été tué. Et je me suis assuré

  2   qu'un hodja participe et procède aux rites appropriés. Alors, c'est facile

  3   d'en parler maintenant, mais il faut quand même avoir du courage pour le

  4   faire, pour demander à un hodja de participer à l'enterrement. Et moi, j'ai

  5   eu des problèmes à cause de cela, on me l'a reproché.

  6   Q.  Merci. Je voudrais éclaircir une chose. Vous n'avez pas parlé du mot

  7   "exode". Vous avez dit plutôt qu'il n'y a pas eu de déménagements, de

  8   départs; c'est bien cela ?

  9   R.  Non, non, non. Il n'y a pas eu d'exode. Les gens ne sont pas partis.

 10   Q.  Lorsque vous dites que certaines personnes n'étaient pas dans la

 11   Brigade de Srbac, qu'est-ce que vous vouliez dire par là ? Est-ce qu'il y

 12   avait d'autres unités ?

 13   R.  Oui, oui, la majorité des personnes se trouvaient dans la Brigade de

 14   Srbac, mais il y en avait qui étaient aussi dans la 16e Unité ou dans

 15   d'autres unités.

 16   Q.  Merci. Pourriez-vous nous dire maintenant si dans votre voisinage il y

 17   avait d'autres municipalités où les présidents des municipalités ont réussi

 18   à préserver la paix pour leurs minorités; et, si oui, qui étaient les

 19   présidents de ces municipalités et quel était leur lien avec le conseil

 20   principal ?

 21   R.  Alors, si je devais résumer les choses après toutes ces explications,

 22   je dirais que les plus haut placés dans le parti et dans la municipalité,

 23   là encore, j'ajoute un petit bémol à cela, cela dépendait des capacités de

 24   communication et du programme du parti lui-même. Mais ces municipalités, en

 25   général, ont résisté à la guerre dans une certaine mesure. Par exemple, à

 26   Srbac, dans la municipalité de Srbac, j'étais le président de la

 27   municipalité et du conseil principal. Et on pensait que c'était la

 28   municipalité la plus sûre, et ce, pendant toute la guerre. Nous pouvons


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  1   revenir là-dessus, si vous le voulez. Ensuite, il y avait la municipalité

  2   de Gradiska, où il y avait plus de Musulmans qu'à Srbac. Dans certaines

  3   municipalités, l'équilibre était préservé. Prnjavor, par exemple. On

  4   l'appelait Prnjavor parce que c'était un melting-pot en miniature de la

  5   Yougoslavie. Toutes les communautés ethniques y étaient représentées. Donc,

  6   s'il faut résumer les choses, il y avait peut-être un conflit d'intérêt de

  7   ce point de vue-là, mais on a essayé de concentrer le pouvoir pour

  8   simplifier les choses au maximum.

  9   Q.  Qui étaient les présidents de ces municipalités ? Vous avez parlé de

 10   Gradiska, de Prnjavor, de Laktasi, Mrkonjic Grad --

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous avez parlé de Laktasi,

 12   Monsieur ?

 13   M. TIEGER : [interprétation] Non, il n'en a pas parlé.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Non, non, j'ajoute ces noms maintenant,

 15   j'ajoute ces noms de municipalités et je voudrais demander qui étaient les

 16   présidents de ces municipalités.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Les candidats du Parti démocratique serbe, le

 18   président du SDS à Gradiska était un certain Nebojsa; Stevan Jovic, il

 19   était aussi membre du SDS, et c'était le président du SDS à Laktasi, et

 20   puis Dodik, qui est à présent le président de la Republika Srpska; à

 21   Mrkonjic, il y avait le Dr Luka Cudic, je crois qu'il s'appelait comme ça;

 22   puis, à Prnjavor, le candidat du SDS était Nemanja Vasic. Je ne veux pas

 23   vous donner toute la liste. A Trebinje --

 24   M. KARADZIC : [interprétation]

 25   Q.  Non, non, cela suffit, merci. Quel était le lien entre ces présidents

 26   et le conseil principal ?

 27   R.  Eh bien, nous nous rencontrions souvent, nous communiquions. Si

 28   quelqu'un ne participait pas à une réunion du conseil principal pour quelle


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  1   que raison que ce soit, eh bien, les participants transmettaient les

  2   informations sur la réunion aux autres.

  3   Q.  Est-ce qu'ils étaient membres du conseil principal ?

  4   R.  Nebojsa, le président de Gradiska, oui; Nemanja Vasic, oui; Stevan

  5   Jovic, je pense qu'il n'était pas membre du conseil principal; Luka Cudic,

  6   à Mrkonjic, oui; Bozidar Vucurevic, à Trebinje, aussi. Mais je ne m'en

  7   souviens plus très bien. Je pense que ces personnes avaient décidé et

  8   avaient pris leurs responsabilités pour être les plus haut placées, et

  9   c'est là où il y avait le moins de problèmes, c'est grâce à cela.

 10   Q.  Merci, Monsieur Milincic.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Excellences, je n'ai plus de questions à ce

 12   stade-ci. Ici, j'aimerais demander le versement de la conversation

 13   interceptée, y compris la bande vidéo [comme interprété].

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous avez des objections,

 15   Monsieur Tieger ?

 16   M. TIEGER : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Faut-il admettre la bande-son ?

 18   L'ACCUSÉ : [interprétation] Pas absolument, mais si cela intéresse

 19   quelqu'un.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Eh bien, nous allons admettre la

 21   conversation interceptée.

 22   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Cela devient la pièce D4186, Madame,

 23   Messieurs les Juges.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Monsieur Tieger.

 25   M. TIEGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 26   Contre-interrogatoire par M. Tieger :

 27   Q.  [interprétation] Monsieur Milincic, ce n'est pas la première fois que

 28   vous venez déposer devant ce Tribunal. Vous avez également déposé dans


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  1   l'affaire Krajisnik en qualité de témoin à décharge en 2005, au mois de

  2   novembre; c'est bien cela ?

  3   R.  Oui, c'est exact.

  4   Q.  Vous avez également donné une déclaration à l'équipe de la Défense de

  5   M. Karadzic pour cette affaire en particulier, et je suppose que cela a eu

  6   lieu cette année ?

  7   R.  Oui, c'était en juillet ou en août. Je crois que c'était plutôt en

  8   août.

  9   Q.  Merci. Le Dr Karadzic vous a demandé à la page 46 du compte rendu si le

 10   parti s'était écarté de ce qu'il avait été dit au rassemblement de

 11   septembre 1990, et nous avons consulté le document lors de votre

 12   interrogatoire principal, et nous avons revu le compte rendu. Alors, ces

 13   déclarations à l'époque du Dr Karadzic, dans lesquelles vous avez indiqué

 14   que le parti ne s'était pas écarté de ce qu'il avait été convenu --

 15   M. TIEGER : [interprétation] Et je pense qu'il faut demander l'affichage de

 16   la pièce D4185, le compte rendu de ce rassemblement et du discours du Dr

 17   Karadzic.

 18   Q.  Par exemple, dans la partie qui se trouve à côté de 4.59, la quatrième

 19   phrase environ :

 20   "Vous voulez cohabiter pacifiquement avec les autres, mais les autres

 21   doivent également désirer la même chose pour qu'il y ait cohabitation.

 22   Vous, les Serbes, vous traiterez les autres strictement de la même façon

 23   que les autres vous traitent, rien de plus, rien de moins…"

 24   Donc, c'était l'une des déclarations prononcées par le Dr Karadzic à

 25   l'époque, n'est-ce pas ?

 26   L'INTERPRÈTE : Le témoin opine du chef.

 27   M. TIEGER : [interprétation]

 28   Q.  Et à 6 minutes 55, à la fin de la partie, on nous dit également :


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  1   "Nous ne prendrons rien de ce qui appartient aux autres et nous ne

  2   laisserons rien aux autres de ce qui nous appartient…"

  3   Et ça, c'est la partie de la déclaration du Dr Karadzic en 1990, et vous

  4   avez indiqué que le parti ne s'était pas écarté de cela par la suite; c'est

  5   bien cela ?

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Page suivante, s'il vous plaît.

  7   M. TIEGER : [interprétation]

  8   Q.  Je voulais juste vous demander de confirmer cela. Est-ce que vous avez

  9   retrouvé le passage ? C'est vraiment un tout petit passage.

 10   R.  Vous faites référence à 11 minutes 15 :

 11   "Mais nos ennemis ne sont pas seulement ceux qui détestent les Serbes…"

 12   Q.  Non. J'ai parlé de la fin du passage à 6 minutes 55 :

 13   "Nous ne prendrons rien de ce qui appartient aux autres et nous ne

 14   laisserons rien aux autres de ce qui nous appartient…"

 15   Donc, pouvez-vous le confirmer ?

 16   R.  Oui, oui, oui, je le vois.

 17   Q.  Et même si dans cette partie du discours on ne dit pas que vous avez

 18   fait allusion à Marko Kraljevic et à l'image où on le voit portant une épée

 19   à l'envers jusqu'au moment où cela est nécessaire.

 20   M. TIEGER : [interprétation] Je demande pour cela l'affichage du document

 21   40635A de la liste 65 ter, s'il vous plaît.

 22   Q.  Cela se trouve -- c'est un autre téléchargement qui a été vérifié une

 23   deuxième fois, si je ne m'abuse. En fait, c'est la même traduction que vous

 24   voyez ici, mais je préfère être sûr.

 25   Quoi qu'il en soit, pour la version en B/C/S, c'est la même. Et je vais

 26   vous donner lecture de la partie en anglais de la traduction que nous avons

 27   reçue. Il s'agit d'une référence à l'image de Marko Kraljevic que vous avez

 28   citée. La référence, le code temps, est 1:17.21 jusqu'à 1:17.49 pour le


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  1   rassemblement. Je cite :

  2   Nous n'allons pas être durs aussi parce que cette vieille chanson sur

  3   Marko Kraljevic le dit, lorsqu'il portait son épée la tête à l'envers et

  4   qu'une fée l'avait averti qu'il devait changer sa position. Et Marko lui a

  5   répondu : Si j'ai des ennuis, je retournerai mon épée facilement. Nous

  6   serons gentils et démocratiques jusqu'au moment où la démocratie ne

  7   fonctionnera plus. A ce moment-là, si quelqu'un nous attaque, nous

  8   renverserons l'épée.

  9   Ensuite, le Dr Karadzic continue : Nous serons doux et démocratiques

 10   jusqu'au moment où la démocratie ne fonctionnera plus. A ce moment-là, si

 11   quelqu'un nous attaque, nous renversons nos épées.

 12   Donc, là, en fait, c'est une autre image, d'après vous, si j'ai bien

 13   compris, de ce qui a été déclaré et transmis par le Dr Karadzic au

 14   rassemblement, et le parti, là encore, ne s'est pas écarté de cela lorsque

 15   le moment est venu ?

 16   R.  Je dois vous dire que la population, en particulier la population

 17   serbe, a eu la peur dans les tripes pendant des dizaines et des dizaines --

 18   Q.  Nous avons un temps limité, Monsieur. Je pense que vous avez répondu

 19   aux questions du Dr Karadzic. Je vous demande à présent de répondre à la

 20   mienne. Et je vous rappelle ma question : est-ce que c'est bel et bien ce

 21   que le Dr Karadzic a déclaré lors du rassemblement et est-ce que vous avez

 22   bien indiqué que ces questions-là n'ont pas fait l'objet d'un écartement de

 23   la part du parti ? Est-ce que c'est exact ?

 24   R.  Nous ne nous sommes pas écartés de la démocratie. Si nous sommes

 25   attaqués, nous nous défendons. Et tout le monde a applaudi cela lors du

 26   rassemblement. Si on nous attaquait, mais on ne s'attendait pas à être

 27   attaqués.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous avez posé une question en plusieurs


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  1   parties.

  2   D'abord, confirmez-vous que M. Karadzic ait déclaré cela à l'époque

  3   lors de ce rassemblement ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est ce qui a été dit et je crois que tout le

  5   monde l'a bien compris. Je ne vois pas pourquoi cela pose problème.

  6   M. TIEGER : [interprétation] Je demande le versement de ce document,

  7   Monsieur le Président, et j'aimerais l'ajouter à la pièce précédente.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne sais pas comment nous pouvons

  9   ajouter ce passage vidéo --

 10   M. TIEGER : [interprétation] Oui, c'est vrai. Nous allons avoir, alors, une

 11   pièce supplémentaire --

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-il possible d'ajouter cette partie,

 13   d'un point de vue technique ?

 14   M. ROBINSON : [interprétation] Vous voulez l'ajouter à la séquence vidéo et

 15   au compte rendu ?

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, s'il faut l'ajouter, il faudrait

 17   l'ajouter pour les deux. Nous allons opérer une admission séparée.

 18   M. ROBINSON : [interprétation] Oui, je crois que cela serait plus facile.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pièce de l'Accusation.

 20   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Cela devient la pièce P6563, Madame,

 21   Messieurs les Juges.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] J'espère qu'il y a des liens établis

 23   entre ces deux pièces.

 24   M. TIEGER : [interprétation] Je pense que le Greffe peut s'occuper de cela.

 25   Monsieur le Président, je vais passer à un autre point. Je ne pense

 26   pas devoir entrer dans trop de détails, car je remarque qu'il est presque

 27   temps de faire la pause, mais il serait peut-être préférable de le faire

 28   maintenant ?


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Nous allons faire une pause de 45

  2   minutes, et nous reprendrons à 13 heures 15.

  3   --- L'audience est levée pour le déjeuner à 12 heures 28.

  4   --- L'audience est reprise à 13 heures 18.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous en prie, continuez, s'il vous

  6   plaît.

  7   M. TIEGER : [interprétation] Merci.

  8   Q.  Monsieur le Témoin, en page 54 du compte rendu d'audience

  9   d'aujourd'hui, vous avez mentionné quelques crimes qui auraient été commis

 10   à Srbac. La dernière fois que vous êtes venu déposer ici, dans l'affaire

 11   Krajisnik c'était, vous avez également évoqué la question de crimes et de

 12   poursuites engagées pour crimes. Et vous avez attiré l'attention de la

 13   Chambre de première instance sur le meurtre de M. Hadziselimovic. Vous

 14   vouliez montrer aux Juges de la Chambre que les autorités ont répondu à ce

 15   meurtre de Musulman en vue par des poursuites et l'emprisonnement de

 16   l'auteur. Exact ? C'est ce qui s'est passé la dernière fois que vous êtes

 17   venu déposer.

 18   R.  Hadziselimovic, c'était mon vice-président, mais au moment où il y a eu

 19   cet événement à la brasserie avec cet auteur ou plusieurs auteurs, il

 20   n'était pas déclaré dans la municipalité de Srbac. Il s'était déclaré comme

 21   résidant à Zagreb parce qu'il avait un appartement là-bas --

 22   Q.  Ecoutez, je ne vous demande pas de nous résumer l'ensemble de cette

 23   affaire de meurtre de Hadziselimovic. Mais je vous demande s'il est vrai ou

 24   pas - et je peux vous montrer le compte rendu d'audience de l'affaire

 25   Krajisnik, la partie pertinente, si vous voulez - est-ce qu'il est vrai ou

 26   non que vous êtes venu au Tribunal et vous avez affirmé que c'est M.

 27   Stankovic qui a tué M. Hadziselimovic et que c'est M. Stankovic qui a fait

 28   l'objet de poursuites pour ce meurtre ?


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  1   R.  Oui, il est exact que cela s'est produit. M. Stankovic a été condamné,

  2   il a été condamné pour d'autres délits ou crimes en plus de ce meurtre;

  3   mais ce meurtre de Hadziselimovic, ça a été une rixe. J'ai vérifié cela par

  4   la suite également. Cela s'est produit dans le cadre d'une rixe dans ce

  5   troquet. Donc, le fait est que Hadziselimovic passait devant cet endroit et

  6   il a réagi parce qu'il a entendu une chanson, et il y a une rixe qui s'est

  7   ensuivie, il a été grièvement blessé, et il est mort à l'hôpital de Banja

  8   Luka cinq ou six jours plus tard.

  9   Q.  Essayons de voir quelle est la chronologie dans cette information et

 10   comment vous avez fourni cette information à la Chambre.

 11   M. TIEGER : [interprétation] Donc, je voudrais que l'on nous affiche le

 12   document 25768 de la liste 65 ter. Nous allons tout d'abord voir le

 13   document, puis je vais vous orienter vers la page. Je demande la page 18

 14   450, s'il vous plaît.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que je peux avoir cela dans ma langue ?

 16   M. TIEGER : [interprétation]

 17   Q.  Je vais vous en donner lecture et ce sera traduit, pour voir si vous

 18   vous rappelez, si cela vous permettra de vous rafraîchir la mémoire.

 19   M. TIEGER : [interprétation] 18 450, s'il vous plaît.

 20   Q.  J'étais en train de résumer ce que vous aviez dit pendant

 21   l'interrogatoire principal devant ce Tribunal, et je voulais vous montrer

 22   que :

 23   "…vous cherchiez à démontrer aux Juges de la Chambre qu'en cette

 24   circonstance, c'est un Musulman en vue qui a été assassiné, et les

 25   autorités serbes ont réagi en engageant des poursuites et en mettant en

 26   prison l'auteur; exact ?"

 27   Et puis, vous avez répondu en disant :

 28   "Oui."


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  1   Ça, c'est une première chose, Monsieur Milincic. Donc, il est exact de dire

  2   que vous avez attiré l'attention des Juges sur cet événement afin de

  3   montrer à quel point la réaction des autorités serbes a été sévère; exact ?

  4   R.  C'est comme cela que vous l'interprétez. Mais à ce moment-là --

  5   Q.  Non, non. Monsieur Milincic, excusez-moi. Vous contestez ce que vous

  6   avez dit là ? La question était de savoir si vous vouliez démontrer aux

  7   Juges de la Chambre qu'en cette circonstance, un Musulman en vue avait été

  8   tué par les autorités serbes et elles ont répondu en engageant des

  9   poursuites et en mettant en prison l'auteur. Donc, vous avez dit "oui" en

 10   2005. Est-ce que maintenant vous niez cela ? Est-ce que vous le réfutez ?

 11   R.  Non, non, je ne nie pas que j'aie dit ça à ce moment-là, mais j'ai

 12   vérifié par la suite. Ça n'a pas été un meurtre, ça a été une rixe qui a

 13   éclaté dans ce troquet, et cet homme est mort, il est décédé cinq ou six

 14   jours plus tard à l'hôpital. Moi, j'étais président de la municipalité, je

 15   n'étais pas tenu de savoir tous les détails. Tout comme pour la famille

 16   Malesevic, je ne connais pas les détails de leur meurtre.

 17   Q.  Donc, je vois qu'aujourd'hui vous expliquer aux Juges de la Chambre que

 18   lorsque M. Hadziselimovic, qui était un Musulman en vue, qui était votre

 19   adjoint, donc lorsqu'il a été tué, on a arrêté quelqu'un pour ce meurtre,

 20   et vous dites qu'il a été emprisonné et poursuivi pour cela, mais vous

 21   dites qu'en fait il s'agit d'une simple rixe; c'est ça ? Ce que vous ne

 22   saviez pas à l'époque. Vous avez appris cela uniquement bien du temps après

 23   l'événement. C'est ça votre explication ?

 24   R.  Mon explication est qu'effectivement cela s'est passé, il y a eu une

 25   rixe, il y a un homme qui est décédé à l'hôpital, et les autorités

 26   militaires ont arrêté ce monsieur dont on a donné le nom, il a été

 27   auditionné et relâché par la suite. Et, en fait, par la suite, il va

 28   commettre d'autres crimes ou délits. Ça, c'est incontestable. Ça, c'est la


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  1   vraie vérité. En fait, il a été arrêté et relâché, il a pu rentrer chez

  2   lui. Donc, je me suis un petit peu précipité lorsque j'ai dit qu'il a été

  3   condamné immédiatement. En fait, il n'a été condamné que par la suite.

  4   Q.  Le fait est que les Juges de la Chambre de première instance dans

  5   l'affaire Krajisnik ont examiné les documents que vous aviez présentés pour

  6   étayer votre affirmation comme quoi M. Stankovic avait été jugé et

  7   emprisonné pour ce meurtre de Hadziselimovic et vous -- je vais vous lire

  8   cela :

  9   "Question : Et s'agissant des documents que vous avez apportés ici" -- il

 10   s'agit du bas de la page 18 450 et ça déborde sur la page suivante. Donc :

 11   "Question : S'agissant de ces documents que vous avez apportés et qui

 12   portent sur le meurtre de Hadziselimovic, la Chambre vous a demandé comment

 13   vous pouviez savoir quel est le meurtre sur lequel portaient ces documents,

 14   parce que cela ne semblait pas tout à fait clair d'emblée, et vous, vous

 15   avez affirmé à l'intention des Juges de la Chambre que ces documents

 16   portaient sur le meurtre de Hadziselimovic puisque vous saviez à quel point

 17   il était important d'être bien précis et de donner les informations

 18   exactes; est-ce exact ?"

 19   Et vous avez répondu :

 20   "Réponse : Oui."

 21   Ça, c'était en 2005.

 22   R.  Ecoutez, je vais réagir à cela. Vous avez attiré mon attention sur la

 23   chronologie des événements avec Hadziselimovic, et c'est à ce moment-là que

 24   j'ai compris qu'en fait, je n'avais pas été au courant de l'ensemble des

 25   éléments à l'époque. Donc, vous avez raison. Je n'ai pas tenu compte de

 26   certains événements. Dans la chronologie, il me manquait quelques éléments.

 27   Donc, le fait est que cet homme a écopé de six ans pour ce qu'il a fait,

 28   mais après cette rixe avec Hadziselimovic, les autorités militaires l'ont


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  1   relâché. C'était la guerre, on n'avait pas où mettre les gens en détention.

  2   Donc, c'est uniquement à partir du moment où il a récidivé qu'il a été,

  3   effectivement, arrêté de nouveau et condamné, et là il a été condamné à six

  4   ans. Ça, c'est toute la vérité, et on peut la vérifier. Moi, j'étais

  5   président de la municipalité, mais je voulais dire par ma réponse qu'on a

  6   été trop cléments vis-à-vis de personnes, qu'ils soient Serbes ou

  7   Musulmans. Et s'il se passe des choses et ne vont pas bien d'un côté, bien

  8   sûr qu'elles se reproduisent d'autre part également.

  9   M. TIEGER : [interprétation] Je demande que ce document soit versé au

 10   dossier.

 11   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

 12   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la pièce P6564.

 13   M. TIEGER : [interprétation]

 14   Q.  Monsieur Milincic, vous avez parlé de ce qui s'est passé par la suite

 15   et je voudrais résumer rapidement cette affaire Stankovic. Premièrement, en

 16   mai 1992 -- donc, je vous renvoie à la page 18 465, c'est ce que vous avez

 17   confirmé en 2005. Vers le dernier tiers de la page :

 18   En mai 1992, M. Stankovic a tué M. Hadziselimovic. En août 1992, il a tué

 19   Hasima Zukanovic, une femme, et Alagic, et il a tiré sur Hamza Bojadzic et

 20   Sabra Alagic, la mère de M. Alagic, et il a grièvement blessé Hamza

 21   Bojadzic et Sabra Alagic. Et puis en septembre 1994, il a tiré sur deux

 22   enfants serbes, et enfin, à ce moment-là, il a été mis en prison jusqu'à

 23   peu près en 2002.

 24   Tout cela est exact, n'est-ce pas ? Et puis vous confirmez, en haut de la

 25   page suivante :

 26   "C'est exact, ce que vous venez de dire."

 27   C'est comme ça que vous avez témoigné en 2005 ?

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donnez lecture de toute la phrase, s'il


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  1   vous plaît.

  2   M. TIEGER : [aucune interprétation]

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] De sa réponse --

  4   M. TIEGER : [interprétation]

  5   Q.  "Vous venez de me rappeler ce qu'il en est des enfants serbes. J'avais

  6   complètement oublié ce qui en était d'eux, malheureusement. Il est exact ce

  7   que vous venez de dire. Ce détail, malheureusement, il m'a échappé."

  8   Et c'était bien en 2005; exact ? Donc, c'est ça, la chronologie des

  9   événements qui concernent M. Stankovic ?

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Nous ne voyons pas ce qu'il faut --

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais je ne vois pas ce qui pose problème ici.

 12   Je n'ai fait que vous aider pour que vous ayez la bonne chronologie.

 13   J'avais omis cet élément. En fait, je n'avais pas toute la chronologie

 14   exacte. Et pourquoi est-ce qu'il a été remis en liberté, ça, je n'ai rien à

 15   voir avec cela. Moi, je n'étais pas des autorités militaires. Et pourquoi

 16   est-ce qu'il a été condamné à six ans, ça, je ne sais pas. Moi, je ne

 17   cachais rien du tout. Je regrette qu'il y ait eu des victimes, et je

 18   regrette qu'il y ait eu des victimes musulmanes et les Malesevic. Mais vous

 19   savez, en temps de guerre, il se produit des choses insensées. Vous ne

 20   pouvez pas les contrôler.

 21   M. TIEGER : [interprétation] Je demande que ces deux pages soient versées

 22   au dossier.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, nous allons les ajouter.

 24   M. TIEGER : [interprétation]

 25   Q.  Vous avez répondu aujourd'hui à certaines questions posées par M.

 26   Karadzic sur d'autres municipalités, d'autres présidents de municipalités

 27   et ainsi de suite. Je vais venir à cela dans un instant, mais maintenant je

 28   constate que je vous ai déjà interrogé au sujet de votre témoignage et


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  1   votre déclaration. Et je constate que la question du rassemblement et du

  2   discours dont vous avez parlé avec Dr Karadzic a fait l'objet de la

  3   déclaration fournie à la Défense de M. Karadzic; exact ? Vous avez abordé

  4   cette question-là dans votre déclaration; exact ?

  5   R.  Oui, ce que j'ai écrit et ce que j'ai dit. Oui, on en parle, justement.

  6   Qu'est-ce qui pose problème ?

  7   M. TIEGER : [interprétation] Je demande l'affichage du document 1D09746,

  8   s'il vous plaît.

  9   Q.  Est-ce que vous pouvez jeter un coup d'œil sur ce document, est-ce que

 10   vous pouvez parcourir les pages et confirmer qu'il s'agit bien de la

 11   déclaration que vous avez fournie à la Défense Karadzic à peu près en

 12   juillet dernier ?

 13   R.  Est-ce que vous voulez que je confirme cela; c'est ça ?

 14   Q.  Confirmez simplement s'il s'agit bien de cette déclaration que vous

 15   avez donnée à la Défense Karadzic. Est-ce bien cette déclaration-là ou non,

 16   et après je vous poserai d'autres questions.

 17   R.  Oui, cette déclaration est authentique et je maintiens ce que j'y ai

 18   dit.

 19   Q.  D'accord. Quand on a compilé cette déclaration, comment est-ce qu'on

 20   s'y est pris ? Est-ce qu'un représentant ou plusieurs représentants de la

 21   Défense de Karadzic vous ont suggéré quels sont les thèmes qu'il fallait

 22   aborder ?

 23   M. ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Président, excusez-moi, je n'ai

 24   pas d'objection, mais je voudrais simplement consigner que si jamais cette

 25   question recevait une réponse, nous allions demander de verser cette

 26   déclaration au dossier. Nous pensons qu'à ce moment-là la déclaration

 27   deviendrait pertinente.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Tieger.


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  1   M. TIEGER : [interprétation] Oui, je pense qu'il faudrait que les Juges de

  2   la Chambre attendent pour voir si le contenu de la déclaration est

  3   pertinent ou pas.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Compte tenu du fait qu'il a déposé viva

  5   voce, ne pourriez-vous pas vous poser la question directement et voir

  6   comment il y répond. Et par la suite, vous pourrez continuer.

  7   M. TIEGER : [interprétation] Oui, je souhaiterais poser quelques questions

  8   préliminaires, Monsieur le Président.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 10   M. TIEGER : [interprétation] Parce que, vous voyez, en fait, cela pourrait

 11   entraîner la question de la manière dont on a rédigé la déclaration.

 12   Q.  [aucune interprétation]

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant. Voilà, c'est la pause que

 14   vous devriez ménager. Allez-y, poursuivez.

 15   M. TIEGER : [interprétation]

 16   Q.  Donc, est-ce que, au fond, tout cela, ce sont les propos qui viennent

 17   de vous ou est-ce que la Défense Karadzic vous a suggéré ce que vous

 18   devriez dire ?

 19   M. ROBINSON : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, je

 20   n'objecte pas, mais si nous parlons de la substance de la déclaration et de

 21   la manière dont cette déclaration a été recueillie, par opposition à

 22   quelque chose qui ne cadrerait pas avec son témoignage, alors je pense

 23   qu'il faudrait admettre au dossier de l'affaire la déclaration elle-même.

 24   Puisque vous avez refusé le versement de la déclaration au titre de

 25   l'article 92 ter, alors je pense qu'il ne serait pas correct de discuter

 26   maintenant de la manière dont on s'y est pris pour rédiger cette

 27   déclaration.

 28   M. TIEGER : [interprétation] Mais on ne peut pas mélanger les serpillières


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  1   et les torchons. Je vais maintenant aborder une question particulière, un

  2   extrait de cette déclaration qui va rendre pertinentes toutes ces

  3   questions. On ne peut pas parler de ça dans l'abstrait.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant.

  5   [La Chambre de première instance se concerte]

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Allez-y. Poursuivez, s'il vous plaît.

  7   M. TIEGER : [interprétation] Merci.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Et nous verrons s'il est nécessaire de

  9   verser au dossier cette déclaration en temps voulu.

 10   M. TIEGER : [interprétation] Merci.

 11   Q.  Monsieur Milincic, vous vous rappelez la question que je vous posais

 12   avant cette intervention : est-ce que la Défense Karadzic vous a suggéré

 13   quels sont les thèmes que vous devriez aborder ? Est-ce qu'on vous a

 14   suggéré les propos que vous devriez avoir ou est-ce que cela n'a pas eu

 15   lieu ?

 16   R.  Ecoutez, je suis un homme mûr, j'ai éduqué des générations entières,

 17   des promotions entières, j'ai interprété des messages d'artistes, je n'ai

 18   pas besoin qu'on me dise ce que je dois dire -- qu'on me souffle ce que je

 19   dois dire. J'ai parlé en tant que président de la municipalité, et cetera,

 20   et cetera, j'ai donné tous les éléments qui sont décrits ici. Donc, au

 21   sujet de la création du parti, du début de la guerre, au sujet de ce que

 22   Karadzic nous a demandé de faire, vous savez, les municipalités, c'était

 23   autant de petits Etats à ce moments-là. Moi, il a fallu que j'agisse de

 24   manière autonome. Je ne pouvais pas attendre que Karadzic me dise ce qu'il

 25   fallait faire. Donc, est-ce qu'on m'a suggéré quoi que ce soit, non.

 26   Ecoutez, tout ça, j'aurais pu le rédiger chez moi, dans mon lieu de travail

 27   ou chez moi.

 28   L'INTERPRÈTE : Les interprètes ont du mal à suivre.


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Milincic, vous vous exprimez un

  2   peu trop rapidement.

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous pouvez répéter à partir

  5   du moment où vous avez dit quelque chose qui me serait suggéré, eh bien, ce

  6   serait superflu.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi. Donc, la déclaration que j'ai

  8   donnée, ou les déclarations que j'ai données sont des déclarations

  9   authentiques, qui viennent de moi. J'ai dit, vu ma maturité, la maturité de

 10   ma vision du monde, le fait que j'ai été enseignant pendant de longues

 11   années, tout cela m'a permis de répondre à des questions importantes qui

 12   portent sur Srbac, mais pas seulement sur Srbac, mais aussi sur un contexte

 13   plus large, ainsi que sur le rôle joué par Karadzic dans tout cela. Donc,

 14   des coïncidences, des concordances entre les questions et les réponses,

 15   écoutez, mes réponses, de toutes les manières, étaient parfaitement

 16   authentiques. J'ai parlé de Srbac, des rapports de pouvoir au niveau de la

 17   municipalité, j'ai parlé des questions qui se posaient au jour le jour au

 18   moment où les autorités ne fonctionnaient pas, parce que c'était une

 19   situation de guerre, ne fonctionnaient pas comme elles fonctionnent

 20   aujourd'hui, les lignes de téléphone et autres, tous les moyens de

 21   communication. Donc, lorsque chaque municipalité était quasiment un Etat

 22   autonome, et lorsqu'elle devait --

 23   M. TIEGER : [interprétation]

 24   Q.  Monsieur Milincic, vous avez répondu à ma question.

 25   M. TIEGER : [interprétation] Et je vais maintenant vouloir aborder le

 26   paragraphe 22.

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Au compte rendu d'audience, page 72, ligne 5,

 28   je comprends les interprètes, puisque cela se ressemble. Le témoin n'a pas


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  1   dit : "Je suis en bonne santé", "zdrav" [phon]. Il a dit : "Je suis un

  2   homme mûr", "zrejo" [phon].

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  4   M. TIEGER : [interprétation]

  5   Q.  Vous voyez le paragraphe 22, le dernier paragraphe de votre déclaration

  6   :

  7   "En tant que président de l'assemblée municipale de Srbac, membre du

  8   conseil principal du SDS, et sur la base des contacts directs ave le

  9   président…" et cetera "…je peux affirmer catégoriquement…"

 10   Vous voyez cela ?

 11   R.  Hm-hm.

 12   Q.  Très bien.

 13   M. TIEGER : [aucune interprétation]

 14   Q.  Alors, s'il vous plaît, jetez un coup d'œil rapidement là-dessus, parce

 15   que je vais vous demander d'examiner un autre document.

 16   M. TIEGER : [interprétation] Je demande l'affichage 25776 de la liste 65

 17   ter, s'il vous plaît.

 18   Q.  Donc, nous voyons ce même paragraphe, le paragraphe 22 de votre

 19   déclaration, et nous voyons le paragraphe 19 de la déclaration du témoin

 20   Dragomir Ljubojevic. Précédemment, son témoignage a été versé au dossier,

 21   et il avait été président de l'assemblée municipale de Bijeljina et non pas

 22   de Srbac, comme vous. Alors, voyez cet extrait, Monsieur Milincic, qui

 23   commence par :

 24   "A na osnovu …"

 25   Et je vais vous dire une chose : c'est verbatim, littéralement, mot pour

 26   mot, ce qui figure dans votre déclaration.

 27   M. ROBINSON : [interprétation] Objection, Monsieur le Président. A moins

 28   que la traduction soit différente --


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  1   M. TIEGER : [interprétation] Vérifiez la version serbe, s'il vous plaît.

  2   M. ROBINSON : [interprétation] Justement, c'est ce que je suis en train de

  3   faire. Je regarde la version serbe. Je ne vois pas que ce soit identique,

  4   verbatim. Monsieur le Président --

  5   M. TIEGER : [interprétation] Donc, j'en donnerai lecture pour que le témoin

  6   puisse suivre.

  7   M. ROBINSON : [interprétation] Est-ce que je peux terminer mon intervention

  8   ?

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 10   M. ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Président, la seule manière dont

 11   cela pourrait être pertinent, c'est si la déclaration était versée au

 12   dossier. Donc, la question n'est pas de savoir si ce qu'il a dit correspond

 13   à quelque chose qu'il a librement formulé ou pas. Et vous avez déjà dit que

 14   sa déclaration ne faisait pas partie de sa déposition, donc, cette fois-ci

 15   je demande le versement de sa déclaration écrite. Et puis, M. Tieger peut

 16   poser toutes les questions qu'il veut. 

 17   M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 19   M. TIEGER : [interprétation] Ce qui est pertinent ici, ce n'est pas la

 20   totalité de la déclaration écrite, ce n'est pas le contenu de la

 21   déclaration. Ce qui est pertinent c'est de savoir si, oui ou non, on a

 22   soufflé les réponses au témoin, si on l'a encouragé à dire telle ou telle

 23   chose. Donc, ce paragraphe est certainement pertinent, et la question de

 24   savoir si, oui ou non, on lui a fourni des éléments d'information, c'est ça

 25   qui est important pour pouvoir apprécier la valeur de sa déposition, mais

 26   cela ne signifie pas que l'on doive verser tout le reste de la déclaration

 27   au dossier. Ce paragraphe est pertinent et pas le reste.

 28   [La Chambre de première instance se concerte]


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  1   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Monsieur Tieger, est-ce que vous

  2   pourriez un petit peu détailler le dernier point que vous avez soulevé à

  3   l'intention des Juges, à savoir que la Chambre ne devrait pas accepter la

  4   totalité de la déclaration ?

  5   M. TIEGER : [interprétation] Oui, Monsieur le Juge. J'ai sélectionné cet

  6   extrait précisément pour démontrer une chose, à savoir ma thèse que ce

  7   témoin semble avoir reçu soit des éléments d'information spécifiques, soit

  8   des instructions sur la modalité -- ou plutôt, il faudrait peut-être qu'il

  9   enlève son casque pour l'instant, parce que j'aurai d'autres questions à

 10   lui poser sur ce même sujet.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 12   Monsieur Milincic, est-ce que vous pourriez quitter le prétoire un instant,

 13   s'il vous plaît.

 14   [Le témoin quitte la barre]

 15   M. TIEGER : [aucune interprétation]

 16   M. LE JUGE KWON : [aucune interprétation]

 17   M. TIEGER : [interprétation] Excusez-moi, j'étais en train de vous répondre

 18   --

 19   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Excusez-moi, je pensais que vous

 20   attendiez la traduction.

 21   M. TIEGER : [interprétation] Eh bien, je parle de cela parce que c'est une

 22   question de principe. Parce que la déclaration ne me fait peur, parce que -

 23   - j'ai attiré l'attention des Juges sur ce paragraphe en particulier parce

 24   qu'il nous mène à des conclusions inévitables, en quelque sorte; autrement

 25   dit, soit ce témoin a reçu les informations par rapport à ce qu'il doit

 26   dire ou bien on se trouve face à des circonstances parfaitement

 27   extraordinaires, des plus extraordinaires qui soient.

 28   Et pour cela, nous pensons que ce paragraphe est pertinent, comme c'est le


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  1   cas du paragraphe 19 dans la déclaration de Ljubojevic. En ce qui concerne

  2   le reste de la déclaration, peut-être que dans le reste nous avons les

  3   informations dont le témoin a eu connaissance de façon indépendante. En

  4   tout cas, je peux dire que ce paragraphe met en doute la fiabilité de la

  5   déclaration, et c'est une déclaration au sujet de laquelle les Juges ont

  6   déjà décidé qu'elle était en grande partie pas pertinente.

  7   Alors que là nous avons une portion de la déclaration qui est, à nos

  8   yeux, très suspecte et très pertinente.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quand M. Robinson a demandé que la

 10   déclaration toute entière soit versée au dossier, ce n'est pas à cause du

 11   contenu de la déclaration, c'est pour voir de quelle façon on a posé les

 12   questions.

 13   M. TIEGER : [interprétation] Ecoutez, Monsieur le Président, la question de

 14   savoir de quelle façon on a posé les questions par rapport aux paragraphes

 15   1, 2 ou 3, cela ne m'intéresse pas.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, mais vous avez choisi ce

 17   paragraphe-ci, mais ce paragraphe s'inscrit dans une déposition.

 18   M. TIEGER : [interprétation] Je ne suis pas d'accord avec cela. Parce que

 19   si vous avez une partie seulement de la déclaration qui a été influencée ou

 20   donnée avec l'influence de la Défense, je pense que si cela jette un doute

 21   sur ce qu'il dit maintenant, eh bien, c'est une question de poids. Mais

 22   cela n'influence pas l'intégralité d'une décision qui n'a pas été versée au

 23   dossier vu qu'on a considéré qu'elle n'était pas pertinente --

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Attendez, j'essaie de comprendre ce que

 25   vous dites. Donc, ce paragraphe en particulier, c'est un paragraphe isolé

 26   et qui a été soufflé par l'équipe de la Défense au témoin. Et quel est

 27   l'effet de cela ?

 28   M. TIEGER : [interprétation] Les Juges -- eh bien, c'est à vous de décider,


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  1   évidemment, de décider de l'effet que cela fait --

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Cette partie-là n'est pas versée au

  3   dossier.

  4   M. TIEGER : [interprétation] Oui. Mais cela montre comment a agi la Défense

  5   pour faire venir ce témoin devant cette Chambre. Cela montre comment on a

  6   soufflé les informations au témoin. Et nous pensons que c'est quelque chose

  7   qui est très important pour les Juges quand il s'agit d'évaluer la

  8   crédibilité de ce témoin, surtout par rapport aux autres informations

  9   données au cours du contre-interrogatoire. Bien sûr que vous ne pouvez pas

 10   ignorer ce paragraphe. Cela étant dit, ce n'est pas à moi de vous dire

 11   quelle conclusion tirer de cela, mais il faut savoir ce qui s'est passé

 12   avec ce témoin. Mais je pense que c'est un facteur qu'on ne peut pas

 13   ignorer, c'est un élément important, et c'est de notre responsabilité en

 14   tant que Procureur d'attirer votre attention là-dessus.

 15   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Monsieur Tieger, si ce paragraphe jette

 16   un doute sur la fiabilité, comme vous dites, de la déclaration, si c'était

 17   le cas, pourquoi verser au dossier la déclaration ?

 18   M. TIEGER : [interprétation] Eh bien, s'il s'est posé la question de savoir

 19   s'il fallait ou non verser la déclaration -- si vous n'avez pas déjà dit

 20   que la plupart de cette déclaration n'était pas pertinente et qu'il fallait

 21   donc poser les questions au témoin de vive voix, donc, si cette déclaration

 22   avait été versée en vertu de l'article 92 ter, dans ce cas-là je me serais

 23   posé la question de savoir si ce paragraphe, tel qu'il est, n'a pas une

 24   influence sur la déclaration dans la mesure où la déclaration ne pourra pas

 25   être versée au dossier en vertu de l'article 92 ter. Maintenant, j'attire

 26   votre attention sur ce paragraphe vu que vous avez entendu ce témoin de

 27   vive voix et vous allez pouvoir vous-mêmes évaluer la fiabilité de sa

 28   déposition de vive voix, et ceci, en ayant à l'esprit ses contacts


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  1   préliminaires avec l'équipe de la Défense Karadzic.

  2   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Monsieur Robinson, est-ce que vous

  3   souhaitez répondre ?

  4   M. ROBINSON : [interprétation] Oui, je voudrais répondre. Car le Procureur,

  5   maintenant, a vraiment créé un problème là où il n'en existe pas vu qu'il

  6   souhaite verser une déclaration qui n'a pas été versée au dossier, mais il

  7   essaie d'en verser juste un paragraphe pour prouver son argument. Pour que

  8   vous puissiez vraiment évaluer la fiabilité de ce procès, je pense qu'il

  9   faut dans ce cas verser la déclaration toute entière.

 10   M. TIEGER : [interprétation] Moi, je n'ai pas dit que l'on a soufflé tout

 11   ce qui se trouve dans la déclaration au témoin, que toutes les informations

 12   lui ont été soufflées par la Défense. Ce que je dis, c'est que ce qui se

 13   trouve dans le paragraphe 22 et dans le paragraphe 19 de la déclaration

 14   précédente, eh bien, que ce sont des mots qui lui ont été soufflés. Alors,

 15   vu ce qu'il a dit lui-même, nous pensons -- parce que lui, il a dit que

 16   c'étaient ses propres mots. Nous avons ici des informations fiables pour

 17   évaluer sa crédibilité.

 18   Et ce qui nous intéresse, c'est ce qui se trouve dans le paragraphe

 19   22 de la déclaration, parce que ceci récuse le témoin car ceci reflète ses

 20   propos. Et de façon plus large, c'est quelque chose qui va être utile aux

 21   Juges quand ils vont juger de la crédibilité et de la fiabilité de sa

 22   déposition de vive voix. C'est pour cela que nous demandons le versement de

 23   ce paragraphe-ci.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] J'ai une question pour vous, Monsieur

 25   Robinson.

 26   Mis à part la question de fiabilité ou crédibilité de ce témoin en

 27   particulier, est-ce que cette question n'a pas un effet sur la fiabilité,

 28   parlant de façon générale, des déclarations 92 ter de la Défense ?


Page 44979

  1   M. ROBINSON : [interprétation] Oui, absolument. Parce que M. Tieger,

  2   justement, met en doute les propos du témoin, c'est-à-dire qu'il se demande

  3   si ce sont ses propos ou bien des propos qui lui ont été soufflés. Donc, la

  4   fiabilité de la déclaration est ébranlée.

  5   [La Chambre de première instance se concerte]

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais attirer votre attention --

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, allez-y.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Le témoin a aussi dit qu'il aurait pu y avoir

  9   des coïncidences quand -- avant qu'on ne lui montre ces deux paragraphes.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous avons déjà entendu cela. Merci.

 11   [La Chambre de première instance se concerte]

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous allez pouvoir poursuivre, Monsieur

 13   Tieger. En ce qui concerne le versement de la déclaration dans son

 14   intégralité, on va traiter de cela plus tard. Au moment où M. Karadzic

 15   demande le versement de ce document, c'est à ce moment-là que nous allons

 16   prendre une décision sur ce sujet.

 17   Maintenant, je vais demander que l'on fasse entrer à nouveau le

 18   témoin.

 19   [Le témoin vient à la barre]

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous pouvez poursuivre, Monsieur Tieger.

 21   M. TIEGER : [interprétation]

 22   Q.  Monsieur Milincic, vous avez toujours ce document sous vos yeux. Vous

 23   ne dites pas sérieusement que ces louanges au Dr Karadzic que vous faites,

 24   vous et M. Ljubojevic, eh bien, qu'elles sont venues spontanément de façon

 25   indépendante de chacun de vous ? Vous ne dites pas cela ?

 26   R.  Il n'y a pas longtemps, j'ai lu la déclaration d'un écrivain qui a dit,

 27   un auteur contemporain, il parlait d'un auteur d'il y a dix siècles. Et il

 28   dit : Je me suis aperçu qu'il m'a plagié. Certaines choses ont été définies


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  1   de la même façon. Eh bien, moi, je pense qu'on pourrait dire la même chose

  2   en ce qui concerne ma déclaration. Je suis sûr que de nombreux témoins

  3   seraient d'accord avec cette définition.

  4   Moi, je viens de regarder ma déclaration. Bon, c'est quelque chose

  5   qui a été traduit. La mienne, je l'ai écrite en caractères cyrilliques.

  6   Mais c'est juste le style qui est différent; le fond est le même. L'auteur

  7   a sans doute, sur la base de ce que j'ai dit, moi et Ljubojevic, eh bien,

  8   il a écrit ce qui est écrit ici. Maintenant, vous pouvez dire que là il

  9   s'agit de quelque chose d'orchestré. Vous pouvez essayer de le dire, mais

 10   moi je peux vous dire que c'est la définition même de Radovan Karadzic.

 11   J'avoue que Karadzic dit la même chose mais avec une petite différence. Eh

 12   bien, là, vous avez exactement la même chose. Karadzic était un homme qui

 13   respectait la légalité, la loi. Il a été souvent critiqué justement à cause

 14   de son esprit démocratique. On disait qu'il parlait trop, qu'il négociait

 15   trop au lieu d'agir. Et avec le temps qui s'est écoulé, je suis de plus en

 16   plus convaincu que c'est la description même du fond de la personne de

 17   Radovan Karadzic. Et c'est pour cela que je suis venu ici, pour dire la

 18   vérité.

 19   Maintenant, on peut comparer les termes, les mots -- alors, c'est

 20   quoi ? C'est de la théorie littéraire. Mais juridiquement, on peut dire que

 21   l'auteur de ce texte, après m'avoir écouté, moi et Ljubojevic, il a écrit

 22   ce qu'il y a écrit. Il a juste utilisé des termes différents. Parce que ce

 23   qui est important de dire, c'est que c'était un homme qui respectait la

 24   loi, qui a toujours accepté la critique des hommes politiques serbes qui le

 25   critiquaient justement parce qu'il hésitait, attendait, il était beaucoup

 26   plus prudent à leur goût. C'était un homme qui respectait la loi, un

 27   démocrate.  

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-il possible que M. Tieger montre


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  1   l'intégralité du paragraphe 22, et là on va voir que ce n'est pas mot pour

  2   mot la même chose.

  3   M. TIEGER : [interprétation]

  4   Q.  J'ai montré la portion que j'ai voulu montrer, mais -- et, Monsieur,

  5   est-ce que vous avez vérifié la déclaration à l'extérieur pour vérifier ce

  6   que vous avez dit ?

  7   R.  Oui, oui. J'ai voulu justement vérifier si on a trahi mes propos et

  8   j'ai vu que non. Les mots utilisés sont peut-être un peu différents, mais

  9   le fond de ma déclaration, la raison pour laquelle je suis ici, c'est pour

 10   dire que Radovan Karadzic est un humaniste, un homme qui respecte la loi.

 11   Et je lui ai dit souvent : Ecoute, oublie cette démocratique parlementaire,

 12   parce qu'il y a des gens qui se meurent tous les jours. Non, non, il ne

 13   voulait pas. Il ne voulait pas faire différemment. Et justement, il a cité

 14   le vers de notre poète pour corroborer ses propos, Njegos, encore une fois,

 15   un homme très sage. Donc, évidemment, stylistiquement, ce n'est pas

 16   exactement les mêmes propos, mais au fond c'est exactement ce que je pense

 17   de lui.

 18   Q.  Bien.

 19   M. TIEGER : [interprétation] Je demande le versement de cela.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Moi, je demande que l'intégralité du paragraphe

 21   22 soit versée au dossier.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] On l'a vu, on l'a vu il y a un instant.

 23   Ça, c'est l'extrait du paragraphe 22, n'est-ce pas ?

 24   M. TIEGER : [interprétation] Oui.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] M. Tieger a montré le paragraphe 22 au

 26   témoin, et ensuite il a comparé cela à ce document. Il a montré, donc, cela

 27   à titre de comparaison. Mais si le besoin se présente, vous pouvez lui

 28   présenté l'intégralité du paragraphe 22 plus tard -- au témoin, je veux


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  1   dire.

  2   [La Chambre de première instance se concerte]

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons verser au dossier cela.

  4   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ceci va devenir la pièce à conviction

  5   P6565.

  6   M. TIEGER : [interprétation]

  7   Q.  Monsieur Milincic, plus tôt aujourd'hui, on vous a posé des questions

  8   au sujet des autres municipalités et des autres présidents de municipalités

  9   qui prétendument avaient réussi à préserver la paix. Au cours de votre

 10   déposition dans l'affaire Krajisnik, on vous a aussi posé des questions, et

 11   vous avez répondu à ces questions, au sujet des événements qui se sont

 12   déroulés dans les autres municipalités de la Krajina. Et ces portions de

 13   cette déposition se trouvent -- et là, je vais donner un exemple, donc à la

 14   page 18 439 de votre déposition dans l'affaire Krajisnik. Donc, sur la page

 15   précédente, on vous a posé des questions au sujet du sort réservé aux

 16   Musulmans et aux Croates au cours du printemps et de l'été 1992 dans les

 17   municipalités de la Krajina. A la page 18 439, le Juge qui préside la

 18   Chambre intervient et il dit :

 19   "Monsieur Milincic, personne n'a dit que vous étiez responsable de

 20   cela. On voulait savoir ce que vous avez entendu des autres en ce qui

 21   concerne le sort réservé aux Croates et aux Musulmans de la Krajina ?"

 22   Et là, vous avez répondu :

 23   "Vous devez comprendre que ces choses ne se faisaient pas ouvertement. S'il

 24   y avait quoi que ce soit qui se passaient comme c'est prétendu, eh bien, ce

 25   n'est pas quelque chose qui se faisait publiquement, ce n'est pas quelque

 26   chose qui a été médiatisé, et nous n'étions pas au courant de cela à Srbac.

 27   Je pouvais entendre parler de cela dans les médias, mais bon, les médias

 28   étaient déjà influencés à l'époque, ils ne racontaient qu'un côté de


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  1   l'histoire. J'ai pu entendre des rumeurs, mais ce n'était pas au centre de

  2   ces développements. Il y a des informations que j'ai pu recevoir avec un

  3   délai de six mois au sujet des crimes, des meurtres, violences, les gens

  4   qui ont perdu leur travail, et cetera, et ce sont des choses qui se sont

  5   produites de trois côtés. Cela dépendait des municipalités. C'est normal

  6   que moi j'ai été plus au courant de ce qui arrivait aux Serbes, mais

  7   évidemment que je ne pouvais pas faire la sourde oreille devant les

  8   histoires qui courraient au sujet des Croates et des Musulmans."

  9   Donc, est-ce que vous pouvez confirmer, Monsieur Milincic, que c'est la

 10   réponse que vous avez donnée au sujet du sort réservé aux Musulmans et aux

 11   Croates ?

 12   R.  Mais j'ai déjà dit que là il s'agissait de rumeurs. On parlait de

 13   milliers et milliers de femmes violées. J'ai déjà cité Bismarck, je pense,

 14   qui a dit que les gens mentaient pendant la guerre, la plupart des temps,

 15   pendant la chasse, et pendant les élections. Et là, vous avez eu tout cela,

 16   tous ces événements à la fois. Evidemment, moi, je m'occupais de mes

 17   propres municipalités. En ce qui concerne les rumeurs, que voulez que je

 18   vous dise à ce sujet-là, je ne saurais dire au jour d'aujourd'hui si

 19   c'étaient des rumeurs ou bien des choses que l'on dissimulait ou bien des

 20   choses qui ne se sont pas produites, mais que l'on a exagéré ou minimisé

 21   les événements, bien sûr. Il y a eu cela de tous les côtés, parce que

 22   c'était la guerre. Et je ne vois pas qu'est-ce qui vous pose problème dans

 23   cette réponse. Parce que je dois vous rappeler aussi Tolstoï, les propos de

 24   Tolstoï, qui nous a dit à nous tous "Tous les familles heureuses se

 25   ressemblent."

 26   Q.  Non, Monsieur Milincic, vraiment, vous avez déjà dit cela dans votre

 27   déposition dans l'affaire Krajisnik. Ce n'est pas la peine.

 28   Donc, voilà, vous dites que vous avez entendu -- bon, moi, je vais


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  1   verser cela au dossier et ensuite, je vais passer à un autre sujet soulevé

  2   dans votre déposition de l'affaire Krajisnik.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Ceci va être ajouté à la pièce P6964.

  4   M. TIEGER : [interprétation]

  5   Q.  Ensuite, le Juge Orie continue son intervention :

  6   "Monsieur Milincic --" c'est à la page 18 441.

  7   "Monsieur Milincic, donc, la seule chose que je vous demande, c'est de

  8   savoir si vous avez entendu dire que les Musulmans et les Croates ont été

  9   tués. Je ne vous demande pas si vous savez où, quand, combien, et cetera,

 10   donc, la question : est-ce que vous avez entendu dire cela au sujet des

 11   Musulmans et des Croates ?

 12   Et vous répondez :

 13   "Je l'ai entendu. Je l'ai entendu. Je l'ai entendu. Je l'ai entendu.

 14   J'ai entendu des histoires. Je ne peux pas vous donner des informations

 15   précise, en dépit de mes efforts."

 16   Donc, est-ce que vous pouvez confirmer que vous avez répondu comme cela à

 17   la question posée par le Juge qui présidait la Chambre dans l'affaire

 18   Krajisnik ?

 19   R.  J'ajouterais même que j'ai aussi entendu dire que de nombreuses serbes

 20   avaient été tués, aussi bien en Krajina qu'à l'extérieur. Je ne vois pas où

 21   est le problème.

 22   Q.  Monsieur Milincic --

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous n'avez pas répondu à des questions

 24   portant sur ce sujet dans votre interrogatoire principal. C'est pour cela

 25   que M. Tieger vous demande tout simplement si vous confirmez ou infirmez

 26   avoir dit cela dans la déposition dans l'affaire Krajisnik.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, j'ai entendu des rumeurs. Comment

 28   définir cela, les rumeurs ? Mais je pense qu'on ne peut pas parler vraiment


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  1   des Musulmans et des Croates comme des seules victimes, parce qu'on ne

  2   mentionne pas les Serbes. Où sont les Serbes dans tout cela ?

  3   L'ACCUSÉ : [interprétation] Le compte rendu d'audience, s'il vous plaît.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Milincic, on vous a demandé si

  5   vous pouvez confirmer que vous avez bien tenu ces propos en répondant à la

  6   question du Juge dans l'affaire Krajisnik.

  7   Vous pouvez répondre par l'affirmative, aussi simple que cela. Est-ce

  8   que vous êtes d'accord avec moi ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je l'ai dit. Dans ce contexte-là. Je l'ai

 10   entendu dire. Je ne l'ai pas vu. Je ne peux pas affirmer.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Le compte rendu d'audience.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Si vous le dites une fois, on va vous

 13   entendre. Vous n'avez pas besoin de le répéter.

 14   Allez-y, Monsieur Karadzic.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] A la page 86, lignes 11 et 12, le témoin n'a

 16   pas dit ce qui est écrit ici. Il a dit : J'ai aussi entendu dire que de

 17   nombreux Serbes avaient été aussi tués. Et ce n'est pas le principe de tu

 18   quoque que l'on évoque ici et c'est exactement ce qu'on peut en conclure à

 19   la lecture du compte rendu.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que je l'ai dit comme cela, parce que

 21   c'est une réponse logique.

 22   M. TIEGER : [interprétation] Ecoutez, là, c'est vraiment encore un exemple

 23   illustre de l'intervention inutile de M. Karadzic qui essaie d'interpréter

 24   ce qu'a dit le témoin. Donc, il a tout simplement dit qu'il était d'accord

 25   et que c'était bien cela qu'il avait dit.

 26   Q.  Donc, maintenant, on va parler de la cellule de Crise de la région

 27   autonome de la Krajina.

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] Le compte rendu d'audience.


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  1   M. TIEGER : [interprétation] Je pose une question.

  2   M. ROBINSON : [interprétation] Monsieur Tieger, je dois vous rappeler que

  3   dans ce prétoire, il est habituel de permettre les interventions de M.

  4   Karadzic quand il s'agit des interventions portant sur le compte rendu

  5   d'audience.

  6   M. LE JUGE BAIRD : [interprétation] Et je voudrais ajouter quelque chose à

  7   votre attention. Je pense que nous devrions éviter les interventions

  8   agressives des deux côtés du prétoire, parce que ce n'est pas quelque chose

  9   qui est constructif.

 10   M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Juge, je vous remercie de votre

 11   intervention. Je vous ai compris et nous allons nous conformer à votre

 12   instruction.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur Tieger.

 14   Oui, Monsieur Karadzic.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Excusez-moi, mais j'attendais l'interprétation.

 16   En page 87 dans mon intervention, on a réitéré l'erreur commise. Alors,

 17   j'aimerais que la journée entière d'aujourd'hui soit réécoutée et rectifiée

 18   quand cela est nécessaire. Le témoin a dit qu'il avait -- j'ai également

 19   entendu parler de victimes serbes. Il n'a pas dit ce qui est consigné au

 20   compte rendu. Et on a parlé des rumeurs dont il a eu vent. Donc, il a eu

 21   vent d'une chose, mais il a eu également de l'autre chose.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] La raison pour laquelle j'ai laissé

 23   faire c'est parce que je n'y voyais pas une grande différence.

 24   Si vous avez un problème au niveau du compte rendu je voudrais que vous

 25   évoquiez la question par écrit.

 26   Pouvons-nous continuer maintenant.

 27   M. TIEGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 28   Q.  Monsieur Milincic, je vais parcourir le compte rendu. Page 18 443, vers


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  1   le bas de la page. Et j'aimerais que nous passions aussitôt après à la page

  2   18 443. La question a été celle-ci :

  3   "Question : Lorsqu'on a créé un QG de crise de la Région autonome de la

  4   Krajina, les présidents des municipalités en sont devenus membres, et vous

  5   avez été présent à l'occasion de ces réunions ?"

  6   Vous avez répondu :

  7   "Oui, oui."

  8   Alors est-ce que vous pouvez confirmer que c'est bien ce que vous avez dit

  9   dans l'affaire Krajisnik ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Et vous avez également témoigné - en page 18 362 - pour dire que la RAK

 12   a donné instruction ou ordre à Srbac de créer une cellule de Crise et que

 13   vous l'aviez fait. Vous avez dit :

 14   "A un moment donné en 1992, nous avons reçu l'ordre de la Krajina, de

 15   la Région autonome de la Krajina, et c'était l'institution à laquelle vous

 16   faites référence pour ce qui est des municipalités de Krajina qui se

 17   trouvaient autour de Banja Luka. Banja Luka était un centre. Et ils ont

 18   ordonné ou suggéré de créer des cellules de Crise pour que la vie dans la

 19   municipalité puisse avoir cours le plus normalement possible…"

 20   C'est bien ce que vous avez dit, n'est-ce pas ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Donc, à la lumière de vos contacts avec les autorités de la RAK, la

 23   cellule de Crise de la RAK, et les présidents des municipalités qui ont été

 24   présents à l'occasion de ces réunions, on vous a posé des questions dans

 25   votre témoignage affaire Krajisnik, que parler des possibilités que vous

 26   aviez eu d'apprendre de la bouche de ces personnes, les dirigeants de la

 27   région et les dirigeants des autres municipalités ce qui se passait. Il

 28   s'agit de la page 18 444. Et on a attiré votre attention sur les


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  1   commentaires de M. Kupresanin qui était également originaire de Srbac,

  2   commentaires faits à la 24e Session de l'assemblée des Serbes de Bosnie. Je

  3   fais référence aux commentaires de la page 18 445. Où M. Kupresanin a dit

  4   ce qui suit :

  5   "Nous disons que la guerre n'est pas nécessaire en Bosnie-Herzégovine. Mais

  6   la guerre en Bosnie-Herzégovine était nécessaire. Et, à présent, s'il

  7   fallait compter la population maintenant même, on aurait soit plus ou à

  8   environ plus de un million de Bosnie-Herzégovine. La Bosnie-Herzégovine

  9   serait essentiellement une république serbe. Est-ce que la guerre était

 10   nécessaire en Serbie ? Ce serait une chose terrible si la Serbie n'entre

 11   pas en guerre maintenant, ce serait une chose terrible que de le dire, mais

 12   les Musulmans et les Albanais prendront le pouvoir légalement à Belgrade au

 13   côté de l'opposition belgradoise. Cette guerre a donc été nécessaire."

 14   Nous allons passer maintenant au 18 447. On vous a demandé ensuite :

 15   "Monsieur Milincic, est-ce que M. Kupresanin, devant cet organe et devant

 16   tous ces délégués, n'a pas reconnu le fait qu'il y a eu diminution de la

 17   population musulmane en Bosnie-Herzégovine, diminution qui s'est faite par

 18   le biais d'expulsion massive forcée ? N'est-ce pas de cela qu'il est

 19   question ?"

 20   Et vous avez dit :

 21   "Oui, ce sont des faits."

 22   Alors, c'est un résumé exact de ce que vous avez dit dans votre témoignage

 23   dans l'affaire Krajisnik, n'est-ce pas ?

 24   R.  Mais non. Mais je ne reconnais pas du tout ce type de propos. Ce que

 25   disait Vojo Kupresanin, pourquoi ne lui avez-vous pas posé la question, il

 26   a témoigné ici. Confirmer ses propos à lui, moi, je ne peux pas le faire.

 27   Mais, je ne peux pas maintenant vous dire quels ont été les faits. Alors,

 28   veuillez m'indiquer quels sont les faits que vous évoquez. Moi, je n'en


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  1   sais rien.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Milincic, il est -- enfin vous

  3   n'avez peut-être pas probablement compris. C'est ce que vous avez dit dans

  4   votre témoignage dans l'affaire Krajisnik, et M. Tieger vous a lu la teneur

  5   de votre témoignage dans l'affaire Krajisnik. Et on vous a donné lecture de

  6   l'intervention de M. Kupresanin. Et on vous a posé des questions au sujet

  7   de ce qu'il a dit lui-même.

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Moi, je ne peux vous confirmer que ce sont là

  9   mes propos. Et je n'ai pas répondu par l'affirmative. S'agissant de ce que

 10   Vojo a dit, je ne le sais pas, moi.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Si vous ne vous en souvenez pas, c'est

 12   bon.

 13   M. TIEGER : [interprétation] Je vais demander un versement au dossier,

 14   Monsieur le Président.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons verser ces pages au dossier.

 16   En passant, de combien de temps pensez-vous avoir besoin pour

 17   terminer votre contre-interrogatoire ?

 18   M. TIEGER : [interprétation] J'en ai fait un bon bout, j'en ai écarté un

 19   autre. Je voudrais aborder un autre sujet, et je pense que nous allons à

 20   présent passer à -- enfin lorsque j'aurais fini ce que je suis en train de

 21   faire, je vais lui poser des questions très concrètes. Ce n'est même pas un

 22   sujet mais c'est une déclaration antérieurement faite par lui.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Continuez.

 24   M. TIEGER : [interprétation] Merci.

 25   Q.  Alors, Monsieur Milincic, les questions se suivent lorsqu'on vous a

 26   interrogé sur ce que M. Karadzic a dit en juillet 1992, et sur ce que M.

 27   Nedic a dit tout comme M. Karadzic juillet 1992 à l'occasion de la 17e

 28   Session de l'assemblée. Et je fais référence à la page 18 448. M. Nedic a


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  1   été cité pour avoir dit ce qui suit :

  2   "'…nous devons reconnaître que les Musulmans nous ont été implantés et que

  3   nous sommes censés être des bourreaux. Je ne veux pas que le peuple serbe

  4   devienne un bourreau, mais je ne veux pas non plus renoncer à notre Etat,

  5   notre terre, et territoire.'"

  6   Ensuite, Dr Karadzic est cité pour avoir dit quelle était son opinion au

  7   sujet de la mentalité orientale qui tire ses origines de l'Islam, et de la

  8   préoccupation qui était la sienne de voir les Serbes ne pas pouvoir

  9   contrôler le taux de naissance chez les Musulmans. Puis il a dit :

 10   "'Il y a de la vérité dans ce que M. Kupresanin a dit,' bien que comme je

 11   l'ai indiqué, référence faite à M. Nedic 'personne en Europe ne va le dire

 12   ouvertement' pour ne pas se faire hérisser les Musulmans.'"

 13    Et on passe au 18 449, on vous a demandé dans l'affaire Krajisnik si ce

 14   n'était pas encore une reconnaissance du fait que ce qui se produisait aux

 15   Musulmans en Bosnie-Herzégovine en mai, juin, et juillet, c'était

 16   précisément cela. Et vous avez répondu :

 17   "A la relecture de tout ceci, la mémoire m'en revienne. Mais à Srbac,

 18   nous avons ignoré la chose. Nous l'avons effacée. Mais en fait, vous me

 19   demandez de me souvenir de ce qui a été dit il y a 12 ans, et c'est

 20   impossible. J'adhère à ce que j'ai dit avant, les choses qui se sont

 21   produites, les discours inflammatoires et toutes ces choses concrètes dans

 22   la vie, moi, ça m'a fait rester les deux pieds sur terre et je voulais

 23   faire en sorte que la vie se déroule de façon normale à Srbac."

 24   Et ensuite, je vous ai demandé :

 25   "Monsieur Milincic, plutôt que de rester fermement sur terre, vous

 26   étiez à Srbac, et dans la meilleure des variantes possibles, avec les yeux

 27   fermés, les oreilles bouchées, ignorant tout ce qui était en train de se

 28   produire à l'égard des Musulmans et Croates dans la Krajina ?"


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  1   Et vous avez dit :

  2   "Que vouliez-vous que je fasse d'autre ? A Srbac, je veux dire."

  3   C'est ce que vous avez dit dans votre témoignage en 2005 dans l'affaire

  4   Krajisnik devant la Chambre en question, n'est-ce pas, Monsieur Milincic ?

  5   R.  Alors moi, ça me paraît ridicule, vraiment ridicule. On me demande à

  6   présent de dire que j'aurais peut-être dû intervenir ou faire je ne sais

  7   quoi au sujet de ce que Nedic disait. Mais comment voulez-vous que je sache

  8   ce que Nedic avait dit ? Moi, je voulais résoudre mes malheurs à moi, et

  9   vous ne m'avez pas laissé terminer ma phrase. Nous avions nos malheurs à

 10   nous, nous à Srbac, nous voulions préserver ce qu'on avait. Ce que disait

 11   Nedic ou les autres, je n'en ai aucune idée.

 12   Que voulez-vous que je puisse avoir fait à Srbac pour qu'il n'y ait

 13   pas de problèmes ? Ce n'était pas fonction des autres municipalités. Là, je

 14   ne peux pas vous aider. En substance, vous voudriez que je dise maintenant

 15   que ces municipalités avaient pour charge de résoudre des problèmes qui

 16   étaient les leurs. Moi, j'avais les miens. J'allais en réunion à Banja

 17   Luka, je voulais me renseigner où est-ce qu'il y a du pétrole, du gasoil,

 18   où est-ce qu'il y a du bois. Et comment voulez-vous que je conduise la

 19   politique d'une autre municipalité ?

 20   C'est une information qu'on m'a peut-être communiquée, mais ce

 21   n'était pas mon travail. J'aurais pu pleurer. Mais je n'ai rien pu faire.

 22   Alors, on aurait ri de moi. Vous devez comprendre que je l'ai dit dans

 23   l'intention de me faire une idée juste et précise. Chaque municipalité

 24   faisait de son mieux.

 25   Nous avions la meilleure des situations possibles. Nous avions de

 26   très bonnes relations avec les Croates pendant toute la durée de la guerre.

 27   Parce qu'on recevait les journaux "Arena" de Zagreb, qui écrivaient des

 28   textes affirmatifs au sujet de la coopération de nos deux municipalités


Page 44993

  1   respectives --

  2   Q.  Monsieur, je vous remercie.

  3   M. TIEGER : [interprétation] Je demande le versement au dossier de ces deux

  4   pages.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien. Ce sera rajouté également.

  6   M. TIEGER : [interprétation]

  7   Q.  Et pour finir, Monsieur Milincic, vous vous êtes dépeint à maintes

  8   reprises --

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Puis-je prendre la parole ?

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je peux demander très aimablement à

 12   M. Tieger de nous donner la référence où j'aurais dit que nous ne pouvions

 13   pas contrôler les taux de naissance des Musulmans ? Où est-ce que j'ai dit

 14   cela ?

 15   M. TIEGER : [interprétation] Moi, j'étais en train de citer le compte rendu

 16   d'audience, page 18 448, et de façon générale --

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bon, continuons. Vous avez cité une

 18   transcription.

 19   M. TIEGER : [interprétation] Oui, c'est cela. Monsieur le Président, merci.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais qu'est-ce que --

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais ça, on pourra en discuter après.

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] C'est des allégations faites par M. Tieger.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais vous pouvez les aborder une fois

 24   qu'il aura terminé.

 25   M. TIEGER : [interprétation]

 26   Q.  Et pour finir, Monsieur Milincic, vous vous êtes décrit vous-même à

 27   plusieurs reprises comme étant un humaniste, comme quelqu'un de préoccupé

 28   par la légalité, si j'ai bien compris votre témoignage. En fait, si l'on se


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  1   réfère à la pièce P921, page 80 en version anglaise et page 55 en version

  2   B/C/S, vous avez assez tôt été favorable à la prise d'otages des effectifs

  3   internationaux pour améliorer la situation de la Republika Srpska, n'est-ce

  4   pas ? La transcription de la 24e Session de l'assemblée de la Republika

  5   Srpska datée du 8 janvier 1993, je vais citer ce que vous avez dit :

  6   "Nous avons nous aussi quelque chose pour les faire chanter. Parce que si

  7   Homeini, à son époque, avait gardé un petit nombre de personnes à

  8   l'ambassade américaine, et cela a secoué l'Amérique de fond en comble, nous

  9   avons quand même d'autres hommes ici que nous pourrions utiliser comme une

 10   arme."

 11   C'est ce que vous avez défendu comme thèse devant l'assemblée au

 12   début janvier 1993, n'est-ce pas, Monsieur Milincic ?

 13   R.  Il faut que je vous aide un peu. Ça, c'est arraché à son

 14   contexte. Vous n'avez pas tout lu. J'ai raconté un conte au sujet du loup

 15   et de l'agneau. On a toujours été jugés coupables. Il fallait que nous

 16   fassions quelque chose pour que les gens commencent à s'entretenir avec

 17   nous. Prenons des gens, gardons-les, et ils vont peut-être venir les

 18   chercher et on finira par discuter. Alors, deux ans après cela -- regardez

 19   la date de ma déclaration et regardez la date de la prise des otages

 20   français, les pilotes. Mais je l'ai dit deux ans avant. Je ne suis quand

 21   même pas un précurseur pour ce qui est de la prise des pilotes en otage. Je

 22   crois que vraiment, c'est tout à fait inapproprié comme utilisation.

 23   Je l'ai dit dans un contexte qui était celui d'affirmer que personne

 24   ne prêtait une oreille attentive à ce que nous disions. Alors, j'ai dit :

 25   Faisons venir des gens à eux, ils viendront les chercher, et on finira par

 26   leur parler et leur dire que nous ne voulions pas la guerre. Et deux ans

 27   après, vous montrez les photos des pilotes pris en otage. Mais vous n'allez

 28   quand même pas dire que j'ai été à l'origine idéologique de ce type de


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  1   prise d'otages ou d'arrestations ? C'est une coïncidence pure et simple. Je

  2   l'ai dit dans le cadre d'un conte, on a parlé du loup et de l'agneau,

  3   l'agneau est allé boire de l'eau en aval du ruisseau. C'était un conte que

  4   je racontais, et je disais cela pour que nous soyons pris au sérieux. Et

  5   alors, j'ai dit : Forçons-les à venir, on viendra les chercher, et on

  6   pourra discuter avec. Alors, vous prenez quelque chose qui s'est produit

  7   deux ans avant. Prenez la date des propos à Banja Luka et prenez la date de

  8   la prise des otages.

  9   Q.  Je n'ai pas parlé des "pilotes", Monsieur Milincic, mais merci

 10   d'avoir abordé cela.

 11   M. TIEGER : [interprétation] Je n'ai plus de questions, Madame,

 12   Messieurs les Juges.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, parce que…

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur Tieger.

 15   Est-ce que vous avez des questions supplémentaires, Monsieur Karadzic ?

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, et je serai très bref.

 17   Nouvel interrogatoire par M. Karadzic :

 18   Q.  [interprétation] Professeur, est-ce que vous avez demandé que vos

 19   remarques à l'assemblée soient traduites dans une sorte de document ?

 20   R.  De la RAK, c'est ce dont vous parlez ?

 21   Q.  Ce qu'on vient de vous montrer, notre assemblée.

 22   R.  Oui, bien sûr.

 23   Q.  S'agissait-il d'une discussion libre ou est-ce que vous aviez demandé

 24   une adoption ? Est-ce qu'il y a un vote suite à votre proposition ?

 25   R.  Non, non, non. J'ai pris part aux discussions. Certaines personnes ont

 26   même commencé à rire, mis à part la fable et le conte de fée.

 27   Q.  Merci.

 28   R.  Oui, c'est ce dont moi j'ai parlé en désespoir de cause. Si vous parlez


Page 44996

  1   bien du loup et de l'agneau, oui, oui. J'ai voulu montrer en termes

  2   littéraires que l'on ne nous respectait pas --

  3   Q.  Merci. On vous a posé des questions sur des événements dans les

  4   municipalités. Pourriez-vous nous dire combien d'événements ont eu lieu

  5   dans votre municipalité et qui était visé ? Etait-ce uniquement les non-

  6   Serbes ?

  7   R.  Alors, j'ai parlé des Malesevic il y a quelques instants, ensuite des

  8   Vejinovic, Kladari, je ne me souviens plus du nom de famille. Des gens ont

  9   été roués de coups. C'est difficile de parler de tous ces petits

 10   événements. Mais d'un point de vue statistique, bien sûr, il y avait plus

 11   de Serbes, 21 000. Et ces gens -- ces Serbes sont revenus, ils sont venus

 12   en vacances, et ils ont été maltraités. Ils ont été volés même, j'ose le

 13   dire, ils ont fait l'objet de chantage, ils ont été intimidés par ces soi-

 14   disant héros.

 15   Q.  Merci. Mais les étrangers, lorsqu'ils entendent des noms de famille, ne

 16   connaissent pas nécessairement l'appartenance ethnique. Donc, ces

 17   Malesevic, Vejinovic, et cetera, quelle était leur appartenance ethnique ?

 18   R.  Des Serbes. Les Malesevic étaient à Gornja, les Vejinovic à Razboj, et

 19   puis une autre famille serbe à Kladari. Et ces familles ont été victimes de

 20   ces gangs qui arrivaient de nuit, qui les volaient, qui leur demandaient de

 21   l'argent ou du carburant, et cetera.

 22   Q.  Merci. Quelle était la réaction des autorités contre ces crimes commis

 23   contre des Serbes, des Musulmans et des Croates ? Est-ce que les autorités

 24   ont réagi, est-ce qu'elles ont entamé des poursuites, ou est-ce qu'elles

 25   ont essayé de dissimuler tout cela ?

 26   R.  Moi personnellement, j'ai dit à la cellule de Crise : Ces Musulmans qui

 27   sont maltraités, ces personnes innocentes, quelles qu'elles soient, il faut

 28   qu'on ne leur fasse plus cela. Il faut arrêter les auteurs de tout cela. Ne


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  1   les laissez pas faire cela. Prenez leurs armes. Amenez-les ici.

  2   Q.  Merci. Et d'après ce que vous avez entendu, ces rumeurs, que se

  3   passait-il dans d'autres municipalités en Krajina, quels que soient le

  4   fondement de ces rumeurs et leur précision ? Est-ce que vous aviez des

  5   informations montrant que c'était là le fruit du comportement des

  6   autorités, et je parle de nos autorités dans ces municipalités ? Comment

  7   réagissaient-elles ?

  8   R.  Les autorités dans nos municipalités s'occupaient de personnes qui

  9   étaient des renégats - appelons-les comme cela - un, deux ou trois d'entre

 10   eux. Donc, il y avait des tirs. Les autorités condamnaient cela. Les

 11   autorités n'ont pas voulu justifier cela. Elles se sont opposées à cela.

 12   Elles ont pris leurs armes, les ont désarmés, comme je l'ai déjà dit.

 13   Disons que si un Serbe avait été roué de coups et si on lui avait volé son

 14   tracteur ou une Golf, une voiture de type Golf, c'était un autre Serbe qui

 15   le faisait. C'est dans ce genre de situation que nous nous sommes retrouvés

 16   à l'époque. Et même encore aujourd'hui, il y a des cas dans les

 17   municipalités où ce genre de choses se passent encore aujourd'hui.

 18   Q.  [aucune interprétation]

 19   L'INTERPRÈTE : Note des interprètes de la cabine anglaise : Nous n'avons

 20   pas entendu la question de M. Karadzic.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pouvez-vous répéter votre question, s'il

 22   vous plaît.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui. Je demandais le document 1D09746, s'il

 24   vous plaît. Je voudrais que l'on affiche le dernier paragraphe, le

 25   paragraphe 22.

 26   M. KARADZIC : [interprétation]

 27   Q.  Vous voyez là l'endroit où s'est arrêtée l'Accusation. J'aimerais que

 28   vous nous donniez le reste du contenu de ce paragraphe. L'Accusation


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  1   s'était arrêtée à la partie qui parle d'un représentant du peuple serbe.

  2   R.  Nous ne voulions pas une guerre, voilà pourquoi il y a eu un

  3   plébiscite. Nous pensions que le plan Cutileiro serait notre salut. Nous

  4   étions heureux que tout cela s'arrête; cependant, nous savons ce qui est

  5   arrivé. Nous savons qu'Izetbegovic a --

  6   Q.  Désolé, Professeur. Ma question est juste la suivante : le paragraphe

  7   22, est-ce que ce dernier paragraphe est affiché dans son intégralité ou

  8   manque-t-il un morceau de ce paragraphe ?

  9   R.  Je ne le vois pas.

 10   Q.  Le dernier paragraphe au-dessus de la partie qui dit "witness

 11   acknoledgement" en anglais.

 12   L'INTERPRÈTE : Note des interprètes : Les interprètes n'entendent plus le

 13   témoin.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] A chaque fois que nous avons discuté au

 15   téléphone, vous me disiez la chose suivante : Prenez en compte tout cela,

 16   essayez d'apaiser les extrémistes, protégez les biens de la population.

 17   Peut-être que les conditions chez vous sont meilleures que dans d'autres

 18   municipalités. Accueillez des réfugiés, approvisionnez la population. Voilà

 19   ce que vous m'avez toujours dit. Et, de par ces mots, je vous considérais

 20   comme une personne qui pensait que Srbac pouvait arriver à faire tout cela.

 21   S'opposer à ces aventuriers. Nous avions les meilleures conditions

 22   possibles et nous étions également en contact avec les Croates dans l'autre

 23   camp. Srbac, en tant que municipalité, n'a jamais été suspectée par

 24   d'autres municipalités. C'était même un petit peu suspect de la part des

 25   autres municipalités --

 26   M. KARADZIC : [interprétation]

 27   Q.  Oui, mais ce que je vous demande, c'est --

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant, Monsieur Karadzic.


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  1   Je voudrais savoir de combien de temps vous aurez encore besoin.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Cinq minutes.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons nous arrêter pour deux

  4   minutes. L'audience est suspendue pour deux minutes.

  5   --- La pause est prise à 14 heures 46.

  6   --- La pause est terminée à 14 heures 48.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pour le reste de cette audience, nous

  8   travaillerons en application de l'article 15 bis, en l'absence de Mme la

  9   Juge Lattanzi, qui est prise -- elle doit être présente à une autre

 10   réunion.

 11   Veuillez continuer, Monsieur Karadzic.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 13   M. KARADZIC : [interprétation]

 14   Q.  Professeur Milincic, pourriez-vous nous dire la chose suivante : dans

 15   cette déclaration, les faits qui y figurent sont-ils exacts, sont-ils

 16   véridiques ?

 17   R.  Tout ce qui est dit, à partir de la création jusqu'au fonctionnement

 18   des municipalités, les questions que j'ai évoquées ici, tout cela est

 19   correct, est exact.

 20   Q.  Vous dites --

 21   R.  Que c'est exact.

 22   Q.  Merci. Cette déclaration reflète-t-elle exactement votre avis sur ces

 23   événements --

 24   M. TIEGER : [interprétation] Non, non, ce n'est pas approprié d'essayer de

 25   faire cela avec le 92 ter. C'est exactement ce qui est en train de se

 26   passer. Nous allons maintenant inverser le processus de certification.

 27   M. ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Président, c'est exactement ce

 28   qu'on nous force à faire après les interventions qui ont eu lieu pendant le


Page 45000

  1   contre-interrogatoire. C'était de démontrer dans quelles circonstances la

  2   déclaration a été recueillie, à savoir démontrer que les éléments

  3   d'information qui y figurent sont fiables et que ce n'est pas quelque chose

  4   qui a été soufflé au témoin par la Défense. Et ensuite, nous allons

  5   demander que la déclaration soit versée au dossier.

  6   M. TIEGER : [interprétation] Alors, à ce moment-là, il faudra poser des

  7   questions sur le paragraphe en question. Donc, ça, c'est tout à fait

  8   approprié. Mais essayer d'imposer la récusation, pour faire cela, il faudra

  9   qu'ils répondent -- mais essayer d'imposer une récusation, cela veut dire

 10   qu'il faudrait qu'ils nous répondent pourquoi la totalité de la déclaration

 11   devrait être acceptée. La Chambre a pourtant estimé que cette déclaration

 12   est pour l'essentiel non pertinente.

 13   [La Chambre de première instance se concerte]

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Maître Robinson, Monsieur Karadzic, la

 15   Chambre voudrait verser au dossier le paragraphe 22 de la déclaration, mais

 16   si la Défense souhaite que la totalité de la déclaration soit versée au

 17   dossier pour démontrer comment elle a été obtenue, M. Karadzic devrait

 18   parcourir les paragraphes un à un.

 19   A ce stade, ce que nous allons admettre au dossier, c'est le

 20   paragraphe 22 du document. C'est la version intégrale de ce paragraphe que

 21   nous allons admettre au dossier.

 22   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera la cote D4187.

 23   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 24   Le paragraphe 4, est-ce qu'on pourrait l'afficher, s'il vous plaît.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je ne pense pas que ce soit la manière

 26   de procéder qu'il faille adopter. Il ne faut pas d'abord montrer le

 27   paragraphe.

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais j'ai déjà posé une question sur les


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  1   départs avant. Je l'ai posée.

  2   [La Chambre de première instance se concerte]

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je n'ai pas bien compris ce que vous

  4   vouliez dire, Monsieur Karadzic. Vous alliez poser des questions

  5   supplémentaires sur les départs, ce qui a été fait pendant le contre-

  6   interrogatoire de M. Tieger, ou bien vous allez aborder le processus de

  7   rédaction de la déclaration du témoin ?

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais les deux, Monsieur le Président. Il faut

  9   surtout établir si les choses qu'affirme le Procureur sont exactes. Je ne

 10   voudrais pas témoigner là-dessus moi-même. Je voudrais poser la question au

 11   témoin, puis après c'est à vous de trancher.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Tieger.

 13   M. TIEGER : [interprétation] Je n'ai pas contre-interrogé sur la question

 14   du nombre de Musulmans qui ont quitté Srbac.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Excusez-moi, j'avais l'intention de

 16   parler de l'écart qui aurait été opéré par le SDS par rapport à ce qui

 17   avait été dit par M. Karadzic lors du rassemblement. Donc, excusez-moi.

 18   C'est un malentendu sur le terme au paragraphe 4.

 19   M. ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Président, je ne vois pas

 20   pourquoi M. Karadzic ne pourrait pas soumettre au témoin ce paragraphe --

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Parce que c'est directeur --

 22   M. ROBINSON : [interprétation] Non. La question serait la suivante :

 23   s'agit-il bien ici de vos propos ou de propos qui vous ont été soufflés par

 24   quelqu'un d'autre ?

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, vous n'avez pas compris ma

 26   question. J'ai demandé quel est l'objectif de la question, et il a dit :

 27   Les deux, afin d'obtenir les éléments de preuve qui sont contenus dans la

 28   déclaration. Pour montrer ce qu'il y a dans la déclaration elle-même, eh


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  1   bien, c'est une question directive.

  2   M. ROBINSON : [interprétation] Mais, Monsieur le Président, je pense qu'il

  3   s'agit maintenant d'admettre au dossier certains paragraphes de la

  4   déclaration. Pour faire cela, pour essayer de montrer s'il s'agit de propos

  5   du témoin ou pas, c'est la seule chose que nous essayons de faire

  6   maintenant. Donc, je ne pense pas que ce soit directeur de demander : Est-

  7   ce que ce sont vos propos ou est-ce que quelqu'un vous a suggéré ces propos

  8   ? S'il dit que ce sont biens des propos qui viennent de lui, cela montre

  9   que la déclaration que la déclaration elle-même et les informations qu'elle

 10   contient sont des éléments qui viennent de ce témoin et que ce n'est pas

 11   quelque chose qui lui a été soufflé par la Défense.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Toutefois, après avoir entendu dire par

 13   le témoin qu'il s'agit bien de ses propos, je ne pense pas que ce soit

 14   utile aux Juges de la Chambre --

 15   M. ROBINSON : [interprétation] Mais à ce moment-là, ce que la Chambre a

 16   fait, c'est de rejeter notre déclaration, y compris les paragraphes pour

 17   lesquels vous dites qu'ils sont pertinents pour la cause de M. Karadzic.

 18   Alors, il nous a été demandé d'interroger le témoin de vive voix.

 19   L'Accusation bénéficie à 100 % du fait qu'il y a une déclaration, et nous,

 20   nous n'avons pas le droit d'obtenir ce que nous souhaitions par le biais de

 21   cette déclaration, par son versement au dossier.

 22   M. TIEGER : [interprétation] Mais ce n'est pas un jeu.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Attendez.

 24   Vous pouvez vous asseoir.

 25   [La Chambre de première instance se concerte]

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Une Conférence de mise en état est

 27   prévue à 15 heures 30, et il nous faut libérer la salle d'audience à 15

 28   heures précises.


Page 45003

  1   Donc, nous allons vous accorder la possibilité de poser cette

  2   question, mais cela n'aura pas lieu aujourd'hui. Nous allons poursuivre

  3   demain à 9 heures.

  4   Monsieur Milincic, l'audience est levée.

  5   --- L'audience est levée à 15 heures 00 et reprendra le jeudi, 12 décembre

  6   2013, à 9 heures 00.

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