Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mercredi 19 février 2014

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 03.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour à tous.

  6   Oui, Monsieur Harvey.

  7   M. HARVEY : [interprétation] Bonjour. Je voudrais vous présenter Colby

  8   Kuvara, qui a un diplôme de droit de la faculté de Hastings à San

  9   Francisco, la faculté de droit, et qui est originaire de la baie de San

 10   Francisco, et qui maintenant est étudiante à l'Université de Leidon.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour, Madame Edgerton. Vous n'avez

 12   pas d'endroit pour vous asseoir.

 13   Mme EDGERTON : [interprétation] Je suis ici que très rapidement.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Tieger.

 15   M. TIEGER : [interprétation] Oui. Nous voulions aborder des informations

 16   erronées qui sont basées sur un malentendu qui découle du dépôt de la

 17   Défense d'hier d'une requête pour accepter le versement de certaines

 18   interceptions, ce qui laissait penser qu'en partie, l'Accusation, après

 19   avoir examiné les éléments de preuve, avait accepté que ces interceptions

 20   étaient authentiques. Comme je l'ai mentionné hier, bien sûr, nous l'avons

 21   fait pour un certain groupe d'interceptions téléphoniques, mais comme j'ai

 22   essayé de l'expliquer hier, nous n'avons pas accepté l'authenticité pour

 23   celles-ci. Il y a certains facteurs ici qui permettent de faire un

 24   distinguo entre ce groupe d'interceptions et les autres, et cet accord n'a

 25   pas encore été conclu. Et je suis ravi de l'expliquer, ou Mme Edgerton

 26   pourra vous expliquer plus en détail les aspects qui sous-tendent ce

 27   distinguo, mais ceci devra être fait à huis clos partiel étant donné que

 28   nous allons parler de méthodologie. Mais ce que je peux dire en audience


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  1   publique, c'est que j'ai transmis cette information à Me Robinson. La base

  2   de sa requête n'est pas exacte, et nous considérons que ces interceptions

  3   téléphoniques, ou du moins le plus gros de celles-ci, doivent être

  4   authentifiées avec les témoins idoines. Et je pense que les 30

  5   interceptions --

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Tieger, l'Accusation va déposer

  7   une réponse ?

  8   M. TIEGER : [interprétation] Oui, effectivement --

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Dans ce cas-là, la Chambre ne prendra

 10   aucune décision sans avoir considéré la réponse de l'Accusation.

 11   M. TIEGER : [interprétation] Très bien. C'était simplement l'objectif de

 12   mon intervention.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Quand la Chambre peut-elle s'attendre à

 14   recevoir votre réponse ?

 15   M. ROBINSON : [interprétation] Je vous prie de m'excuser, Monsieur le

 16   Président. L'Accusation, si elle n'est pas d'accord à ce processus

 17   d'authentification, eh bien, cela signifie qu'on devra faire comparaître le

 18   témoin. Donc, on n'a pas besoin de décision à ce sujet. Donc, nous

 19   pensions, mais par erreur, que nous avions un accord, mais je n'avais pas

 20   bien compris M. Tieger. Et la seule question en suspens, c'est qu'en fait,

 21   il reste les interceptions croates qui devront faire l'objet de la

 22   déposition d'un témoin. Il n'y a rien qui justifie une décision de la

 23   Chambre.

 24   Et donc, j'allais en fait proposer de déposer une requête modifiée

 25   pour prévoir dans le calendrier la déposition de ce témoin à l'attention,

 26   donc, du gouvernement croate pour le 3 mars, à 4 heures de l'après-midi --

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Une seconde. La Chambre n'a pas encore

 28   eu suffisamment de temps pour lire la requête de la Défense.


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  1   Alors, vous voulez déposer une requête supplémentaire, mais je pense

  2   qu'il faudrait attendre que la Chambre puisse lire la réponse de

  3   l'Accusation par écrit.

  4   M. TIEGER : [interprétation] Et nous nous efforcerons de faire ceci aussi

  5   rapidement que possible, plutôt que d'utiliser les délais qui sont en

  6   général impartis pour ce genre de procédure.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie.

  8   [La Chambre de première instance se concerte]

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Peut-on faire comparaître le témoin

 10   suivant.

 11   C'est M. Mudrinic, n'est-ce pas ?

 12   M. ROBINSON : [interprétation] Oui, effectivement.

 13   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Peut-on demander au témoin de prononcer

 15   la déclaration solennelle.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 17   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 18   LE TÉMOIN : DUSAN MUDRINIC [Assermenté]

 19   [Le témoin répond par l'interprète]

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Monsieur Mudrinic. Veuillez

 21   prendre place et installez-vous.

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avant de déposer, je voudrais attirer

 24   votre attention sur un article du Règlement du Tribunal, à savoir l'article

 25   90(E). En vertu de cet article, vous pouvez refuser de répondre à des

 26   questions posées par M. Karadzic ou par le bureau du Procureur, voire par

 27   les Juges, si vous pensez que vos réponses pourraient vous incriminer pour

 28   un crime ou un délit au pénal.


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  1   Dans ce contexte, le concept d'"incrimination" signifie que vous

  2   pourriez prononcer des phrases qui pourraient être considérées comme une

  3   admission de culpabilité pour un délit ou un crime au pénal ou que vous

  4   pourriez dire quelque chose qui pourrait fournir des éléments de preuve qui

  5   laisseraient penser que vous avez commis un crime ou un délit au pénal.

  6   Cependant, si vous pensez qu'une réponse pourrait vous incriminer et que,

  7   par conséquent, vous refusez de répondre à cette question, je dois vous

  8   faire savoir que le Tribunal est habilité à vous forcer à répondre à cette

  9   question. Mais dans cette situation, le Tribunal s'assurera qu'un

 10   témoignage obtenu de la sorte ne pourra être utilisé par la suite comme

 11   élément de preuve contre vous hormis le cas de poursuite pour faux

 12   témoignage.

 13   Est-ce que vous avez bien compris, Monsieur Mudrinic ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 16   Monsieur Karadzic, vous pouvez commencer.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Bonjour à tous.

 18   Interrogatoire principal par M. Karadzic :

 19   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Mudrinic.

 20   R.  Bonjour, Monsieur le président.

 21   Q.  Je vous demande d'avoir l'amabilité, à l'instar d'autres orateurs

 22   serbes, de parler lentement pour les besoins du compte rendu d'audience.

 23   Monsieur Mudrinic, est-ce que vous avez fait une déclaration à mon équipe

 24   de la Défense ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Merci.

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait montrer au témoin le

 28   document 1D49500.


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  1   M. KARADZIC : [interprétation]

  2   Q.  Est-ce que vous avez vu la version serbe de votre déclaration ? La page

  3   1 est sur la gauche de l'écran.

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Est-ce que vous l'avez lue et est-ce que vous l'avez signée, cette

  6   déclaration ?

  7   R.  Oui.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait montrer au témoin la

  9   dernière page de ce document, s'il vous plaît, de façon à ce qu'il puisse

 10   identifier sa signature.

 11   M. KARADZIC : [interprétation]

 12   Q.  Est-ce qu'il s'agit bien de votre signature ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Merci. Est-ce que cette déclaration reflète fidèlement ce que vous avez

 15   dit à l'équipe de la Défense ? Est-ce que les faits sont exacts ou est-ce

 16   que vous avez besoin d'apporter des modifications ou des rectificatifs ?

 17   R.  Tout ce qui est consigné dans ce document est ce que j'ai dit.

 18   Q.  Merci. Si je devais vous poser les mêmes questions aujourd'hui, les

 19   mêmes questions que celles qui vous ont été posées lorsque cette

 20   déclaration a été établie, est-ce que sur le fond vous y répondriez de la

 21   même manière ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Merci.

 24   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je souhaiterais verser la déclaration au

 25   dossier au titre de l'article 92 ter.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame McKenna, est-ce que vous avez des

 27   objections ?

 28   Mme McKENNA : [interprétation] Pas d'objection.


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  1   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous acceptons le versement.

  2   M. LE GREFFIER : [interprétation] D4387.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez continuer, Monsieur Karadzic.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

  5   Je vais maintenant lire en langue anglaise un bref résumé de la déclaration

  6   de M. Dusan Mudrinic.

  7   Dusan Mudrinic était membre des forces de défense serbe, les SOS, qui

  8   étaient une unité de la 6e Brigade de la Sana. Il était membre du SDS et

  9   vivait à Sanski Most.

 10   Après le démantèlement de la RSFY, les Musulmans ont commencé à acheter

 11   illégalement des armes et à se préparer pour la guerre. Les SOS ont été

 12   constitués après que les extrémistes musulmans aient provoqué le premier

 13   incident à un poste de contrôle qu'ils avaient établi dans le village de

 14   Trnava. Les SOS ont été créés en raison du besoin de protéger les civils

 15   qui avaient peur pour leur sécurité, étant donné que la 6e Brigade de la

 16   Sana se trouvait sur le front en Croatie et que la JNA se retirait vers la

 17   Serbie.

 18   Bien que les autorités serbes aient offert aux Croates et aux Musulmans de

 19   diviser la ville en parties musulmanes et serbes, les extrémistes musulmans

 20   sont entrés dans Sanski Most et ont investi le bâtiment de l'assemblée

 21   municipale avec pour objectif de créer une structure de TO et de police

 22   municipale musulmane pour la municipalité. Après le refus de se conformer à

 23   l'ultimatum et de rendre leurs armes et de quitter le bâtiment, les

 24   autorités serbes ont promulgué un ordre à la TO et à certaines parties de

 25   la police serbe de désarmer ce groupe et de libérer le bâtiment municipal.

 26   Peu de temps après, la cellule de Crise de la municipalité de Sanski Most a

 27   fait appel à tous les citoyens de la région de rendre à la TO et à la

 28   police civile toutes les armes qu'ils avaient en leur possession sans


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  1   permis d'arme. Etant donné que certains extrémistes  musulmans dans le

  2   quartier de Mahala ont refusé de se conformer à cet ordre, le commandement

  3   de la 6e Brigade de la Sana a reçu la mission de pénétrer dans le quartier

  4   de Mahala, d'identifier les extrémistes, et de les remettre aux autorités

  5   de répression.

  6   Après les incidents provoqués par les extrémistes musulmans et

  7   l'établissement des points de contrôle dans chaque village, les lignes

  8   téléphoniques ont été coupées, il n'y avait plus d'électricité, et la

  9   circulation dans les villes environnantes a été perturbée. Certaines

 10   personnes et groupes ont tiré profit de cette situation en se livrant à des

 11   pillages, et en commettant des crimes. Les autorités serbes ont essayé de

 12   contrôler la situation, et ont commencé à intenter des poursuites contre

 13   les auteurs de ces crimes. Les personnes honnêtes et loyales de Sanski Most

 14   n'ont pas été interpellées, ni maltraitées, ni interrogées.

 15   Un nombre de Musulmans des villages environnants qui ne voulaient pas

 16   rentrer en conflit avec les autorités serbes ont demandé de se rassembler

 17   dans la salle des sports de Sanski Most pour leur propre sécurité. De

 18   manière simultanée, des réfugiés serbes ont commencé à arriver de toutes

 19   les parties de Bosnie-Herzégovine, après avoir été repoussés des villes qui

 20   avaient été prises par les forces musulmanes. Les autorités municipales ont

 21   reçu ces réfugiés serbes et ont essayé de les héberger dans des maisons qui

 22   avaient été abandonnées par les personnes qui avaient déjà quitté la région

 23   de manière volontaire. Les autorités serbes ont fait de leur mieux pour

 24   organiser les convois et la sécurité des personnes qui avaient décidé de

 25   quitter la municipalité. Cependant, environ 5 000 Musulmans ont continué à

 26   vivre et à travailler à Sanski Most de 1992 à 1995, ce qui montre que les

 27   autorités serbes avaient mené à bien une politique raisonnable et juste

 28   vis-à-vis de tous les peuples, quelle que soit leur appartenance ethnique.


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  1   Le Dr Karadzic n'aurait pas pu savoir ce qui se passait sur le terrain à

  2   tout moment, notamment durant une période où les lignes de communication

  3   étaient coupées. Et, lorsque les lignes ont été rétablies, il a insisté

  4   pour s'assurer qu'il y ait la paix, la sécurité pour toutes les

  5   populations. Le Dr Karadzic n'a pas participé à des crimes ni n'a été à

  6   l'origine du départ permanent de Bosno-musulmans et de Croates du

  7   territoire qui était revendiqué par les Serbes, au moins en ce qui concerne

  8   la municipalité. Les autorités serbes ont donné aux Musulmans et aux

  9   Croates la possibilité de rester et de vivre librement en Republika Srpska

 10   tant qu'ils respectaient la constitution et les lois de la Republika

 11   Srpska.

 12   Ceci représente un bref résumé. Et à ce stade, je n'ai pas de questions à

 13   poser à M. Mudrinic.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Merci.

 15   Monsieur Mudrinic, votre déposition à décharge en l'espèce a été versée par

 16   écrit par le biais de votre déclaration écrite au lieu d'une déposition

 17   orale.

 18   C'est maintenant Mme McKenna, qui représente le bureau du Procureur, qui va

 19   vous poser des questions dans le cadre du contre-interrogatoire.

 20   Allez-y, Madame McKenna.

 21   Mme McKENNA : [interprétation] Merci.

 22   Contre-interrogatoire par Mme McKenna :

 23   Q.  [interprétation] Monsieur Mudrinic, votre surnom était Medeni, n'est-ce

 24   pas ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Et Dusan Saovic, que vous mentionnez dans votre déclaration, avait pour

 27   sobriquet Njunja, n'est-ce pas ?

 28   R.  Njunja, pas Ninja.


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  1   Q.  Et Njunja était le commandant des SOS, n'est-ce pas ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Vous étiez le commandant en second, n'est-ce pas ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Maintenant, je vais vous donner les noms d'autres membres des SOS, et

  6   je voudrais que vous confirmiez si, oui ou non, ils étaient membres du SOS.

  7   Tout d'abord, Vojo Dusenovic ?

  8   R.  Vojo Dosenovic.

  9   Q.  Est-ce que il était membre des SOS, Monsieur Mudrinic ?

 10   R.  Oui, il était membre des SOS.

 11   Q.  Milan Camber, que l'on appelait également Skica, est-ce qu'il était

 12   membre des SOS ?

 13   R.  Milan Camber, Skica que l'on appelait.

 14   Q.  Est-ce que Milan Camber était membre des SOS, oui ou non ?

 15   R.  Oui, mais simplement pendant une certaine période.

 16   Q.  Goran Kerkes, est-ce qu'il était membre des SOS ?

 17   R.  Goran Kerkes n'était pas membre des SOS.

 18   Q.  Et, qu'en est-il de Zoran Bubulj ?

 19   R.  Non.

 20   Q.  Et Danilusko Kajtez ?

 21   R.  Danilusko Kajtez était membre des SOS pendant environ deux mois ou deux

 22   mois et demi.

 23   Q.  Au paragraphe 4 de votre déclaration, vous dites que :

 24   "Le SDS n'avait rien à voir avec notre structure. Nos SOS et les SOS de

 25   Banja Luka n'avaient rien à voir les unes avec les autres."

 26   Il est vrai, n'est-ce pas, Monsieur Mudrinic que lorsque les SOS de Sanski

 27   Most ont été dûment établis, vous étiez en contact avec que les autorités

 28   de la Région autonome de la Krajina, la RAK, n'est-ce pas ?


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  1   R.  Il est vrai que lorsque les SOS ont été constitués, nous avons été en

  2   contact et en liaison avec la Défense territoriale de Sanski Most parce que

  3   nous étions des ex-membres de la TO.

  4   Mme McKENNA : [interprétation] Pourrait-on maintenant consulter le document

  5   26051 de la liste 65 ter.

  6   Q.  Monsieur Mudrinic, il s'agit d'une déclaration de l'état-major des

  7   forces de défense serbe de la municipalité de Sanski Most. Et signée le

  8   SOS, et porte la date du 13 avril 1992.

  9   Et dans le premier paragraphe, on peut lire :

 10   "Nous informons par la présente le peuple serbe et le public de manière

 11   générale de la municipalité de Sanski Most qu'une unité des forces de

 12   défense serbe (les SOS) a été constituée le 12 avril 1992 à Luska Palanka."

 13   Tout d'abord, Monsieur Mudrinic, est-ce que vous êtes d'accord pour dire

 14   que la formation d'une unité des SOS laisse penser qu'il s'agit d'une unité

 15   qui fait partie d'une organisation plus importante ?

 16   R.  Je ne suis pas d'accord pour dire que cette structure faisait partie

 17   d'une organisation plus importante. Les SOS ont été établis à Sanski Most à

 18   Luska Palanka --

 19   L'INTERPRÈTE : Les interprètes de cabine anglaise demandent au témoin de

 20   répéter la dernière phrase du témoin.

 21   Mme McKENNA : [interprétation]

 22   Q.  Monsieur le Témoin, les interprètes n'ont pas saisi la dernière phrase.

 23   Vous avez dit que les SOS avaient été constitués à Luska Palanka. Est-ce

 24   que vous souhaitiez rajouter quelque chose d'autre ?

 25   R.  Ces forces ont été constituées à Sanski Most mais sa constitution a été

 26   établie ou proclamée à Luska Palanka.

 27   Q.  Très bien. Consultons le quatrième paragraphe, on peut lire que :

 28   "Les insignes et les uniformes de l'unité étaient conçus sur la base d'un


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  1   accord avec la JNA et la Région autonome de Bosanska Krajina…"

  2   Donc, vous êtes d'accord, Monsieur Mudrinic, pour dire que ceci montre bien

  3   que les SOS étaient en contact tant avec la JNA que la RAK lors de sa

  4   formation ?

  5   R.  C'est ce que dit ce document. Lorsque les forces ont été établies, les

  6   insignes de la JNA ont été adoptés également.

  7   Mme McKENNA : [interprétation] Je souhaiterais verser ce document au

  8   dossier.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous acceptons ce versement.

 10   M. LE GREFFIER : [interprétation] P6680.

 11   Mme McKENNA : [interprétation]

 12   Q.  Monsieur Mudrinic, la Chambre de première instance a entendu M. Vinko

 13   Nikolic, membre des SOS, qu'il avait été nommé en tant que représentant des

 14   SOS à la cellule de Crise à une réunion du 14 avril 1992. Il est vrai,

 15   n'est-ce pas, que les SOS travaillaient en étroite collaboration avec le

 16   SDS pour la prise de contrôle serbe de Sanski Most, n'est-ce pas ?

 17   R.  C'est exact. Mais avec le bémol que nous ne nous initions pas dans les

 18   activités des autorités. Nous n'organisions rien du tout. Nous n'aidions

 19   qu'à la mise en œuvre des dispositions juridiques. Il est vrai que Vinko

 20   Nikolic était un représentant, mais nous n'avons fait qu'aider à

 21   l'application du droit. La prise de contrôle, c'est vrai. Nous n'avons pas,

 22   en fait, eu d'entretien avec les autorités en tant que tel. Nous n'avons

 23   fait qu'aider dans le processus.

 24   Mme McKENNA : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait maintenant afficher

 25   le document 26053 de la liste 65 ter.

 26   Q.  Nous avons ici un rapport sur les activités et la participation aux

 27   opérations de combat du SOS selon le plan de la 6e Brigade de Krajina et

 28   nous avons la date qui est celle du 4 septembre 1992. Nous voyons que le


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  1   SOS a été constitué et placé sous le commandement de la 6e Brigade, et puis

  2   dans la suite nous voyons que :

  3   "Toutes les actions qui ont été menées jusqu'à présent ont été menées

  4   avec l'approbation du commandement de la brigade. Depuis la création de la

  5   6e Brigade, les membres du SOS ont mené à bien de nombreuses missions

  6   importantes en tant que membres des SOS de Sanski Most."

  7   Et puis nous avons le détail de ces activités : Le transport et

  8   distribution des armes, présence sur le théâtre des opérations. Des détails

  9   sur la prise du bâtiment municipal, toutes les actions de nettoyage sur le

 10   territoire de la municipalité.

 11   Donc, nous voyons comment le SOS a apporté son assistance, comme vous

 12   venez de nous le dire ?

 13   R.  Ce qui est exact, c'est que nous avions pour mission de contrôler et de

 14   vérifier la circulation des individus suspects et d'empêcher d'une certaine

 15   manière l'activité des groupes terroristes, empêcher des activités

 16   terroristes par des membres du HDZ et du SDA. Et il faut savoir, en fait,

 17   que ces activités n'étaient pas en cours à Sanski Most. Il n'y en avait

 18   pas. Il y a eu un certain nombre d'activités mais il n'y a pas eu d'actions

 19   terroristes en tant que telles pendant la guerre de quelque part que ce

 20   soit, les uns ou les autres. Quant aux patrouilles, eh bien, cela signifie

 21   en fait que dans les villages alentours on venait à l'aide des villageois.

 22   On les encourageait pour qu'ils ne soient pas démoralisés, et puis quand il

 23   y avait des barricades d'érigées ou des patrouilles villageoises, on les

 24   encourageait à nous informer, à informer les instances compétentes s'ils

 25   remarquaient qu'il y avait un danger qu'un incident ne se produise. C'est

 26   tout.

 27   Mais quant à la distribution d'armement, ça, ce n'est pas exact. Nous

 28   n'avons jamais apporté d'armes dans notre secteur.


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  1   Q.  Nous allons voir plus en détail les activités des SOS.

  2   Mme McKENNA : [interprétation] Pour l'instant, je tiens à verser au dossier

  3   ce document.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

  5   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P6681.

  6   Mme McKENNA : [interprétation]

  7   Q.  Pour l'instant, je voudrais que l'on se concentre sur vos liens avec la

  8   cellule de Crise. Au paragraphe 4, vous dites que vous vous êtes placé tout

  9   d'abord sous le commandement de la TO et ensuite que c'était la 6e Brigade

 10   à laquelle vous vous êtes subordonné. Paragraphe 8.

 11   C'est la cellule de Crise qui vous versait votre rémunération; exact ?

 12   R.  C'est la première fois que j'entends parler de rémunération. On n'a

 13   rien reçu. Ce n'est pas sous forme de solde ou de rémunération qu'on a reçu

 14   quelque chose. C'était peut-être juste une simple contribution pour qu'on

 15   puisse acheter des vivres. Juste les choses les plus élémentaires, mais

 16   c'était tout.

 17   Mme McKENNA : [interprétation] Je souhaite que l'on nous présente le

 18   document 26052 de la liste 65 ter.

 19   Q.  Nous avons ici les conclusions d'une réunion de la cellule de Crise du

 20   18 [comme interprété] juin 1992. Et je voudrais attirer votre attention sur

 21   le point 3, qui se lit comme suit :

 22   "Anicic a présenté un rapport sur les activités de la police militaire et

 23   les activités de la section de sabotage de Njunja appelé," et puis nous

 24   avons là un mot qui a été barré.

 25   Donc, c'est le commandant de la TO, Nedjo Anicic, qui fait un rapport au

 26   SOS ?

 27   R.  Oui, c'est exact. Anicic était le commandant de la Défense

 28   territoriale.


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  1   Q.  Et voyons le paragraphe 4, qui se lit comme suit :

  2   "La cellule de Crise a approuvé l'assistance financière (une récompense

  3   pour la section de sabotage et une section de police militaire

  4   correspondant à une contribution aux dépenses journalières de l'ordre de 1

  5   500 dinars)."

  6   Donc, Anicic fait son rapport à la cellule de Crise. Il leur fait rapport

  7   sur la nature des activités menées par le SOS, et la cellule de Crise

  8   approuve que l'on contribue financièrement aux activités du SOS; exact,

  9   n'est-ce pas ?

 10   R.  Ecoutez, moi, je n'ai jamais reçu cette contribution financière. Et si

 11   jamais il y en a eu, comme je viens de vous dire à l'instant, ça a été

 12   peut-être une aide pour qu'on puisse s'approvisionner en vivres d'un

 13   montant que l'on voit ici dans ce document. Et sinon, je ne vois pas qu'on

 14   ait reçu d'autre aide d'aucune sorte.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je ne sais pas si je vois bien, mais j'aurais

 16   besoin d'une explication. L'appellation n'est plus celle de SOS dans ce

 17   document. Je ne sais pas si c'est une omission de ma part, si je ne vois

 18   pas bien.

 19   Mme McKENNA : [interprétation] La référence à la section de sabotage de

 20   Njunja, comme vient de le confirmer le témoin, est une référence au SOS.

 21   Nous venons de l'entendre.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] La question porte sur le paragraphe 4.

 23   Paragraphes 4, 5, 6, est-ce qu'il y a là des références au SOS ? Est-ce que

 24   le document se suffit ? Le document se suffit.

 25   Mme McKENNA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je demande que

 26   ce document soit versé au dossier.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, nous allons le verser au dossier.

 28   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P6682.


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  1   Mme McKENNA : [interprétation]

  2   Q.  Monsieur Mudrinic, nous venons de voir un document où Njunja a déclaré

  3   que le SOS a transporté et distribué des armes. Or, vous venez d'affirmer

  4   dans votre déclaration que vous n'avez jamais distribué d'armes, ce qui ne

  5   concorde pas avec le témoignage de M. Nikolic qui a dit à cette Chambre de

  6   première instance que le SOS a contribué à ce que le peuple serbe soit armé

  7   à Sanski Most avant que le conflit n'éclate.

  8   Est-ce que vous voulez y répondre ?

  9   R.  Ecoutez, je ne suis pas au courant de ces affirmations ou de ces

 10   informations, qu'on ait distribué des armes. Non, moi, je ne suis pas au

 11   courant de cela.

 12   Mme McKENNA : [interprétation] Monsieur le Président, par précaution, je

 13   préfère que l'on passe à huis clos partiel.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 15   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

 16   [Audience à huis clos partiel]

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 13  Page 47372 expurgée. Audience à huis clos partiel.

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 21  (expurgé)

 22   [Audience publique]

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, nous sommes en audience publique

 24   maintenant.

 25   Mme McKENNA : [interprétation]

 26   Q.  Il est exact, n'est-ce pas, qu'à partir de 1991, vous apportiez des

 27   armes de la caserne militaire de Prijedor, vous les apportiez à Sanski Most

 28   ?


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  1   R.  Cela n'est pas exact. En 1991, je ne suis jamais allé à la caserne de

  2   Sanski Most. Que ce soit en 1991 ou en 1992. Et sur quelle base (expurgé)

  3   raconte-il cela, je ne le sais pas. Si ce n'est que lui, il aurait dû être

  4   présent pour savoir tout ça. Mais moi, je ne suis jamais allé à la caserne

  5   de Prijedor en 1991 et je n'ai jamais transporté d'armes à bord de quel que

  6   véhicule que ce soit. Et d'ailleurs, il faudrait ajouter qu'il y a eu des

  7   indices comme quoi certains l'ont fait, mais la police civile a plusieurs

  8   fois eu l'occasion d'arrêter feu Saovic et moi-même, a contrôlé le

  9   véhicule, n'a jamais rien trouvé. Ils nous faisaient descendre du véhicule

 10   et ils fouillaient le véhicule, mais ils n'ont jamais rien trouvé. Donc, je

 11   ne sais pas ce qui lui permet de dire cela. Sur quelle base il déclare ça,

 12   je ne sais pas.

 13   Q.  Alors, voyons maintenant ce qui en est d'autres activités que vous avez

 14   eues avant la guerre.

 15   Mme McKENNA : [interprétation] Monsieur le Président, je vois qu'il y a là

 16   une ligne qu'il faudrait peut-être expurger.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Le compte rendu d'audience.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] La dernière partie de la réponse, lignes 13,

 20   14, le témoin n'a pas dit : "Je ne vois pas pourquoi qui que ce soit dirait

 21   cela." Il a dit : "Je ne vois pas pourquoi lui a dit cela." Et non pas

 22   pourquoi "quiconque" dirait cela.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien.

 24   Mme McKENNA : [interprétation]

 25   Q.  Monsieur Mudrinic, vous-même ainsi que d'autres membres du SOS, vous

 26   aviez reçu une formation pour utiliser les explosifs, n'est-ce pas ?

 27   R.  Non, cela n'est pas exact.

 28   Q.  Voyez votre propre déclaration.


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  1   Mme McKENNA : [interprétation] 65 ter 25968.

  2   Q.  Monsieur Mudrinic, c'est la déclaration que vous avez donnée le 22

  3   décembre 1992 à la police de Sanski Most sur les circonstances de la mort

  4   de Njunja qui est survenue plus tôt ce même mois.

  5   Mme McKENNA : [interprétation] Alors, je voudrais que l'on nous affiche la

  6   page 5 en anglais et page 3 en B/C/S. Nous n'avons pas le bon document. Il

  7   me faudrait le document 25968 de la liste 65 ter.

  8   La page précédente en anglais, s'il vous plaît.

  9   Q.  Vers la fin de la page en anglais, vous dites :

 10   "J'ai vu l'endroit où Njunja gisait et j'ai vu ses blessures, et d'après ce

 11   que j'en pense, et j'ai été formé à utiliser des explosifs, je pense que

 12   l'explosif a été lancé au moment où Njunja passait le véhicule. En

 13   répondant à la question qui était de savoir si les membres de l'unité SOS

 14   avaient toujours des explosifs sur eux, puisque j'avais mentionné qu'ils

 15   avaient été formés à utiliser les explosifs, je déclare que je ne sais pas

 16   s'ils les avaient sur eux."

 17   Donc, je voudrais vous reposer ma question, Monsieur Mudrinic, il est vrai,

 18   n'est-ce pas, que vous et d'autres membres de l'unité  SOS aviez été formés

 19   à utiliser les explosifs ?

 20   R.  Je vais vous répondre de la même manière. Nous n'avons pas été formés à

 21   utiliser les explosifs. Cela étant dit, comme j'avais une formation

 22   militaire dans l'ex-Yougoslavie, compte tenu de l'unité dont j'étais

 23   membre, j'ai nécessairement eu à savoir comment utiliser les explosifs,

 24   mais c'était en 1975.

 25   Peut-être que c'est la raison pour laquelle j'ai dit que j'avais été formé

 26   à utiliser des explosifs. Mais dire que nous avons été spécifiquement

 27   formés, entraînés à utiliser les explosifs, là, ça, ce n'est pas vrai.

 28   Mme McKENNA : [interprétation] Je voudrais que ce document soit versé au


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  1   dossier, s'il vous plaît.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous allez citer de nouveau

  3   sa déclaration ?

  4   Mme McKENNA : [interprétation] C'est possible.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] De quelle page il s'est agi, page 4 ?

  6   Mme McKENNA : [interprétation] Pages 4 et 5 de la version anglaise.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Ces deux pages seront admises

  8   au dossier.

  9   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P6683.

 10   Mme McKENNA : [interprétation]

 11   Q.  Monsieur Mudrinic, il est vrai, n'est-ce pas, que même avant que le

 12   conflit n'éclate, le SOS était tristement connu pour le plastiquage de

 13   bâtiments qui appartenaient aux non-Serbes ?

 14   R.  Ecoutez, moi, pour ce qui est de Sanski Most, je ne suis pas au courant

 15   qu'il y ait eu des explosions qui auraient fait sauter des bâtiments. Il

 16   n'est pas vrai de dire qu'on ait fait ça. Des explosions de cette

 17   envergure-là, de cette force-là, qu'on ait pu faire sauter des bâtiments,

 18   ça, il n'y en a pas eu.

 19   Dans la plupart des cas, si on peut appeler ça une explosion, c'était

 20   une grenade qui aurait explosé, quelque chose de moindre puissance. Mais

 21   des explosions qui auraient fait sauter des immeubles, des bâtiments, il

 22   n'y en a pas eu de ce type-là à Sanski Most.

 23   Q.  Monsieur Mudrinic, cette Chambre de première instance a reçu des

 24   éléments de preuve comme quoi il y a eu des grenades qui ont été jetées sur

 25   des bâtiments qui étaient la propriété des Musulmans ou des Croates en 1991

 26   et au début de l'année 1992, et que c'était fait par le SOS, et que les

 27   bâtiments qui ont été visés étaient des cabinets d'avocats, des cafés, des

 28   brasseries et d'autres.


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  1   Mme McKENNA : [interprétation] Et je vous réfère au document KDZ474, P3395,

  2   pages 10 à 19; KDZ490, pièce 3634, pages 31 et 32.

  3   Q.  Vous et Njunja, vous avez personnellement lancé ces grenades, n'est-ce

  4   pas ?

  5   R.  Moi et feu Saovic, il n'est pas vrai de dire que nous ayons fait

  6   exploser cela. Comme je viens de vous dire, il n'y a pas eu à Sanski Most

  7   d'explosions qui auraient eu la puissance de faire sauter un bâtiment

  8   entier. Il y a eu des explosions qui ont apporté des dégâts à des

  9   bâtiments.

 10   Q.  Mais c'est vous qui êtes responsable de ces explosions, n'est-ce pas ?

 11   R.  Encore une fois, je vous dis que nous n'avons pas fait cela. Et, là,

 12   encore, je répète, qu'à plusieurs reprises nous avons été contrôlés et

 13   fouillés par la police, et c'était la police mixte, la police conjointe,

 14   donc il y avait là des Musulmans et des Croates dans cette police, et ils

 15   n'ont jamais trouvé d'armes sur nous, jamais d'explosifs à chaque fois

 16   qu'ils nous ont fouillés, qu'il s'agissait de fouiller notre véhicule ou

 17   nous-mêmes. Il y a eu des explosions, mais moi je ne sais pas qui en a été

 18   l'auteur. Et généralement, ça produisait de nuit. Et je ne sais pas qui les

 19   a provoquées.

 20   Et il faut savoir qu'il y a aussi des bâtiments serbes qui ont été

 21   plastiqués.

 22   Q.  La vérité est qu'on n'a pas véritablement déployé d'efforts pour

 23   identifier les responsables parce que ce sont les autorités serbes qui ont

 24   empêché toutes enquêtes, n'est-ce pas ?

 25   R.  Les autorités serbes ont tenté d'identifier les auteurs. Parce qu'au

 26   niveau des postes de sécurité publique il y avait des Musulmans aussi avec

 27   les Serbes. Je viens de vous dire qu'on avait des patrouilles mixtes au

 28   moment des fouilles ou des perquisitions. Ils ont tout essayé. Je ne sais


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  1   pas pourquoi ils ne s'y sont pas parvenus. Mais je sais que c'étaient des

  2   Musulmans et des Serbes qui ont travaillé ensemble dans le poste de

  3   sécurité publique. Et je vous dis encore une fois, c'est de nuit que ça se

  4   passait.

  5   L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas compris la fin de la réponse.

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Intervention sur le compte rendu d'audience.

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Ligne 19, on a traduit comme si le témoin avait

  9   dit "des immeubles serbes avaient été plastiqués eux aussi" mais le témoin

 10   a dit des bâtiments.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Continuons.

 12   Mme McKENNA : [interprétation]

 13   Q.  Monsieur Mudrinic, vous nous avez précédemment confirmé que Milan

 14   Camber, Danilusko Kajtez, étaient membres des SOS, il s'agit de personnes

 15   qui étaient connues de la police, ils avaient un passé criminel, n'est-ce

 16   pas ?

 17   R.  Il n'y avait pas de criminels ni d'activités criminelles à Sanski Most.

 18   Je peux pas dire que c'étaient des criminels. Ecoutez, il faudrait examiner

 19   leurs dossiers, leurs casiers pour le savoir. Moi, je pense que c'était pas

 20   des criminels. Il faudrait vérifier s'ils ont un casier judiciaire ou pas.

 21   Mais il n'y avait ni d'activités criminelles ni de criminels en tant que

 22   tels à Sanski Most.

 23   Je parle, là, de criminalité importante, enfin de plus grande envergure ou

 24   gravité.

 25   Mme McKENNA : [interprétation] Je renvoie les parties à la déposition du

 26   Témoin KW545, pages du compte rendu d'audience 46 964 à 46 966, ainsi que

 27   la pièce D4351.

 28   Q.  Mais, Monsieur Mudrinic, Adil Draganovic, qui était le président du


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  1   tribunal de Sanski Most est venu déposer devant une autre Chambre dans un

  2   autre procès ici devant ce Tribunal.

  3   Mme McKENNA : [interprétation] Je voudrais que l'on nous affiche le

  4   document 26047 de la liste 65 ter. Malheureusement, nous n'avons pas de

  5   version B/C/S, je vais donc en donner lecture lentement.

  6   On lui a posé la question suivante : Quand a-t-il entendu parler pour la

  7   première fois des SOS. Et il a répondu :

  8   "Il est difficile de vous préciser le moment de façon exacte, c'est la

  9   première fois que j'avais entendu parler d'une organisation secrète serbe

 10   où il y avait des civils et il y avait des gens qui étaient portés sur les

 11   comportements criminels, pour ce qui est de la pose d'explosifs,

 12   plasticage, création de trouble et désordre. Et je connaissais la plupart

 13   de ces gens."

 14   J'aimerais qu'on nous passe maintenant la page 3.

 15   Vers la moitié de la page, on lui a demandé :

 16   "Quelle avait été la réputation de ces gens ?"

 17   Et il a répondu :

 18   "C'était pour l'essentiel des gens problématiques du point de vue de leur

 19   comportement. En fait, je pourrais dire que c'étaient des criminels."

 20   Q.  Vous venez de nous dire qu'à Sanski Most il n'y avait pas eu de

 21   criminalité digne de ce nom, et ici on voit un juge du tribunal de Sanski

 22   Most qui vous décrit, vous et vos collègues, en tant que criminels.

 23   R.  Que voulez-vous que je réponde. Je ne sais même pas qui c'est ce juge.

 24   J'imagine que ça doit être Dobrevic [phon] --

 25   L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas bien entendu.

 26   Mme McKENNA : [interprétation]

 27   Q.  Monsieur Mudrinic, pouvez-vous répéter, je vous prie, la fin de votre

 28   réponse. Vous avez dit que vous ne savez pas qui ce juge était. Vous avez


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  1   ajouté quelque chose.

  2   R.  Je ne sais pas si c'est Ankica Dobrijevic ce juge, le juge qui nous a

  3   décrits comme étant des criminels. Ce que je peux vous dire à ce sujet,

  4   c'est que j'ai 57 ans et je n'ai jamais eu de dépôt de plainte au pénal à

  5   mon égard, et je n'ai jamais été condamné pour quoi que ce soit devant

  6   aucun tribunal dans cette ex-Bosnie-Herzégovine. Je n'ai aucun casier

  7   judiciaire et je n'ai répondu au pénal de rien du tout.

  8   Q.  Voyons un peu ce que ce juge dit à votre sujet à vous, Monsieur

  9   Mudrinic. Il continue, il décrit --

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Puis-je demander au Procureur de nous indiquer

 11   de qui la déclaration c'est ? Parce que le témoin n'a pas compris de quel

 12   juge vous êtes en train de parler, Madame.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je crois que ça été mentionné, Adil

 14   Draganovic.

 15   [La Chambre de première instance se concerte]

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, lui, le témoin a mentionné un autre

 17   nom, mais il s'agit d'Adil Draganovic ici.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Je peux dire au sujet de ce juge, Adil

 19   Draganovic, en sus ce que j'ai dit, à savoir que je n'ai pas de casier

 20   judiciaire et que je n'ai jamais été sanctionné à titre pénal, et c'est

 21   peut-être lui qui avait été dans la criminalité économique peut-être.

 22   Parce que quand je suis arrivé à Banja Luka, j'ai été informé par lui-même,

 23   à mon adresse là où je résidais, du fait que lui, en sa qualité de

 24   président du tribunal à Sanski Most, avait placé une interdiction de vente

 25   et d'échange de biens immobiliers à Sanski Most, et il a expliqué la chose

 26   en disant que le président Rasula --

 27   Mme McKENNA : [interprétation]

 28   Q.  Monsieur Mudrinic -- Monsieur Mudrinic, peut-être M. Karadzic va-t-il


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  1   vouloir entrer dans le détail de tout ceci. Moi, j'aimerais que nous nous

  2   concentrions sur ce que M. Draganovic a dit à votre sujet dans son

  3   témoignage à votre sujet devant une autre Chambre de ce Tribunal.

  4   On lui a demandé - et c'est en page suivante - quelque chose et il a décrit

  5   le fait que votre groupe avait terrorisé la ville, avait généré la peur

  6   parmi la population et chaque nuit il y a eu plasticage de bâtiments

  7   appartenant à des Bosniens. Et on lui a demandé :

  8   "Qu'en est-il des attaques à l'égard de personnes ? Y a-t-il eu des

  9   attaques de commises à l'égard d'individus ?"

 10   Il a dit :

 11   "Absolument, oui. Il y a eu des gens d'attaqués. J'ai été dans une

 12   situation, un enseignant m'a téléphoné, un enseignant d'un lycée de Sanski

 13   Most, qui s'appelait Blaz Grgic, qui était professeur d'allemand. Et il a

 14   dit qu'on était entrés par effraction dans son appartement, qu'on avait

 15   volé beaucoup d'argent, et il a dit que cela avait été l'œuvre de deux

 16   personnes : un dénommé Dusan Saovic, surnommé Njunja, et un certain Dusan

 17   Mudrinic, surnommé Medeni. Déjà, on avait peur de ces hommes, a-t-il dit,

 18   d'eux et des autres membres de ce groupe. Il n'a pas rapporté ou dire la

 19   chose à la police à l'époque. Donc, je l'ai convié à venir chez moi et j'ai

 20   eu un entretien avec lui.

 21   "Après cet entretien, j'avais des fondements justifiés pour ce qui est de

 22   considérer que c'était ces gens-là qui avaient commis des délits au pénal.

 23   Je l'ai déclaré à la police et j'ai demandé une enquête. Cependant, le jour

 24   d'après, ils sont allés au centre scolaire avec des armes. Ils portaient

 25   des armes et ils se sont attaqués à cet enseignant qui a dû fuir Sanski

 26   Most, ce jour-là ou les jours d'après."

 27   Alors, Monsieur Mudrinic, vous, en personne, vous avez attaqué des non-

 28   Serbes et vous les avez intimidés, y compris cet enseignant, n'est-ce pas ?


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  1   R.  Ce n'est pas exact. Pour ce qui est de la totalité des membres de

  2   l'armée, je vous l'affirme en toute responsabilité, c'est Saovic et moi qui

  3   avions bénéficié de la plus grande des confiances des gens. Et personne

  4   parmi les Musulmans étant resté vivre à Sanski Most n'a été attaqué. Et ils

  5   nous ont fréquenté, au contraire.

  6   Maintenant, pour ce qui est de ce professeur, ce Blaz, il m'a mis en

  7   accusation, moi et Saovic, pour ce qui est d'avoir accédé à son appartement

  8   par effraction pour voler de l'argent. Mais on a déterminé que la porte

  9   n'avait pas été fracturée, qu'il n'y avait rien d'endommagé à la porte.

 10   Et il a raconté par la suite qu'il avait pris cet argent pour le

 11   parti, son parti et il n'a pas osé le dire et l'avouer à sa femme.

 12   Et il n'est pas vrai de dire que Saovic et moi avions des armes. Nous

 13   n'avions aucune nécessité de porter des armes en ville. Et c'est très

 14   rarement que nous avons porté des armes en ville. Nous étions

 15   essentiellement en civil et sans armes. Tous les Musulmans qui sont restés

 16   habiter à Sanski Most peuvent vous le confirmer. Je ne suis donc pas

 17   d'accord avec la teneur de ce Adil Draganovic et de ce dénommé Blaz. Je ne

 18   peux pas comprendre que l'on puisse affirmer que l'on ait fracturé la porte

 19   de chez lui, alors que la police a fait un constat : ni la serrure, ni la

 20   porte, ni la fenêtre n'ont été fracturés. La porte était fermée à clé.

 21   Comment peut-il affirmer alors que l'on ait fracturé la porte pour entrer

 22   dans l'appartement. Et j'étais --

 23   Q.  Monsieur Mudrinic --

 24   R.  J'ai été au tribunal pour cela. Le tribunal a constaté que cet

 25   appartement n'avait pas été fracturé et j'ai été acquitté de tous chefs

 26   d'accusation.

 27   Q.  Monsieur Mudrinic, vous avez mentionné les Musulmans qui sont restés

 28   vivre là-bas. On y viendra. Mais au paragraphe 13 de votre déclaration,


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  1   vous dites que même avant le début des conflits, les Musulmans ont quitté

  2   Sanski Most.

  3   Et c'était ça, l'objectif des SOS, terroriser les Musulmans pour les

  4   faire partir ?

  5   R.  Je ne sais pas de quelle façon on les a terrorisés. Moi, je ne pense

  6   pas que ce soit le cas. Qui plus est, les gens que nous connaissions à

  7   titre personnel, nous leur disions qu'il n'y avait aucune nécessité de

  8   quitter la ville, que l'autorité serait rétablie, comme de par le passé, et

  9   qu'on allait continuer à vivre normalement. Et les gens n'ont pas été

 10   chassés de Sanski Most. Nous avons essayé de les convaincre de rester. Le

 11   fait qu'ils aient souhaité de partir, c'est autre chose.

 12   Mme McKENNA : [interprétation] J'aimerais qu'on nous affiche la pièce

 13   P3397, s'il vous plaît.

 14   Q.  Monsieur Mudrinic, vous nous avez dit qu'il n'y avait pas eu de

 15   criminalité véritable à Sanski Most et vous avez dit que vous et les SOS,

 16   vous n'étiez impliqués dans aucune espèce d'explosion. Voyons un peu ce que

 17   Njunja et les autres membres du SOS ont déclaré.

 18   Ceci est un rapport relatif aux activités du SOS entre le 1er mai 1991 et

 19   le 16 septembre 1992. M. Nikolic a confirmé devant les Juges de cette

 20   Chambre-ci le fait que ça a été signé par Njunja, Cankovic et lui-même.

 21   Mme McKENNA : [interprétation] Page 2, s'il vous plaît, en version anglaise

 22   et page 3 en B/C/S.

 23   Il s'agit du deuxième paragraphe en B/C/S et l'avant-dernier paragraphe en

 24   version anglaise. Il est dit :

 25   "Nous n'avons autorisé à aucun moment des rassemblements plus grands du SDA

 26   et du HDZ, nous avons brisé tout rassemblement d'une façon habituelle. Le

 27   SDS de Sanski Most est notre témoin pour ce qui est de leur accession au

 28   pouvoir. On ne saurait imaginer ce qui aurait pu se produire si on n'avait


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  1   pas procédé de la sorte. Le plasticage des bâtiments n'était dans l'intérêt

  2   de personne, mais les Oustachis et les Bérets verts ne pouvaient pas être

  3   brisés d'une façon autre."

  4   Q.  Et c'est ça, la vérité, n'est-ce pas, Monsieur Mudrinic ? Le SOS a

  5   plastiqué des bâtiments en possession de Musulmans et de Croates et s'est

  6   attaqué à la population non-serbe pour semer la peur parmi cette population

  7   afin de les intimider et faire partir de la municipalité.

  8   R.  Je ne peux pas être d'accord avec ceci. On parle encore de plasticage

  9   de bâtiments. Je viens d'indiquer tout à l'heure que ces explosions qui

 10   sont survenues, ce n'étaient pas de grosses explosions. C'étaient des

 11   grenades à main qui étaient peut-être jetées quelque part. Mais je tiens

 12   aussi à préciser que pour ce qui est de ces grenades, personne n'a été ni

 13   tué ni blessé. S'agissant des intimidations, je ne sais pas ce qu'ils

 14   considèrent comme étant des intimidations. Si on faisait notre apparition

 15   dans un endroit où nous avait laissé entendre qu'il y aurait un

 16   rassemblement et on y allait pour faire interrompre ceci, c'était peut-être

 17   ça l'élément qui les a fait présenter ce type de réflexion.

 18   Q.  Le SOS a utilisé un camion, où on avait posé une mitrailleuse à trois

 19   tubes; c'est bien cela ?

 20   R.  C'est exact.

 21   Q.  Et vous et Njunja étiez chargé de ce camion ?

 22   R.  Ce n'est pas vrai. Ce camion, il y avait un chauffeur. Il y avait cette

 23   mitrailleuse à trois tubes, mais on s'en est servi pour être transporté

 24   d'un lieu à l'autre. Ce camion à trois tubes était là, oui, mais le camion

 25   a été utilisé plus pour le transport de personnel et de moyens matériels.

 26   Q.  Mais, Monsieur Mudrinic, ça a également été utilisé pour tirer de façon

 27   indiscriminée ou non sélective en direction de maisons civiles de Mahala ?

 28   R.  A Mahala, il n'y a pas eu de tirs de ce tri-tubes du tout, jusqu'à la


Page 47386

  1   fin des opérations de la TO à Mahala. Après la fin des opérations, ce canon

  2   à trois tubes a dirigé ses tirs en direction de la forêt, là où les

  3   extrémistes Musulmans avaient fui. Il n'y a que dans cette direction que ça

  4   avait tiré à la fin. A Mahala et s'agissant des maisons, non, il n'y a pas

  5   eu tir dessus. Je précise aussi que ce camion existait dans une autre unité

  6   à Usti Palanka [phon]. Ce camion-ci n'a pas tiré. Je vous dis qu'il a été

  7   utilisé pour tirer dans la direction de la forêt, direction dans laquelle

  8   s'étaient enfuis les extrémistes musulmans de Mahala.

  9   Mme McKENNA : [interprétation] Je voudrais que nous passions brièvement à

 10   huis clos partiel.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 12   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel, Madame,

 13   Messieurs les Juges.

 14   [Audience à huis clos partiel]

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 21   [Audience publique]

 22   Mme McKENNA : [interprétation]

 23   Q.  Aux paragraphes 11 et 20 de votre déclaration, vous indiquez que des

 24   gens étaient venus aux centres de rassemblement de leur plein gré à des

 25   fins de protection. Et au paragraphe 19, vous dites que vous ne savez pas

 26   qu'il y ait eu des gens honnêtes et loyaux de Sanski Most à avoir été

 27   amenés, interrogés ou malmenés là.

 28   D'autres témoins comparus devant cette Chambre, des témoins musulmans, ont


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  1   décrit le fait que des hommes, femmes et enfants ont été arrêtés pour être

  2   acheminés vers des centres de détention, y compris la salle Krings et la

  3   salle des sports, pour y être détenus ou pour être transportés à

  4   l'extérieur de la municipalité. D'autres témoins ont dit qu'ils n'avaient

  5   pas choisi d'y aller. On les arrêtait et emmenait là-bas sous une escorte

  6   en armes.

  7   C'est la réalité des choses, n'est-ce pas ?

  8   R.  La réalité des choses, c'est qu'après l'opération de Mahala, les

  9   Musulmans qui vivaient à Mahala voulaient être rassemblés à un seul

 10   endroit. Ils ne voulaient pas être disséminés dans différentes rues. Et

 11   c'était un centre, une salle de sports. Ce n'était pas de type fermé.

 12   C'était ouvert. Ils pouvaient sortir chez eux, ils pouvaient aller au

 13   magasin et aller où ils voulaient. Il y avait une police civile qui se

 14   trouvait là pour assurer la sécurité de ces gens. Pour ce qui est de

 15   l'extérieur de la ville, je ne sais pas que l'on ait emmené qui que ce

 16   soit.

 17   Pour ce qui est de la salle Krings que vous évoquez, moi, je n'y suis

 18   jamais allé.

 19   Q.  Le SOS a aidé le SJB à arrêter les Musulmans et Croates, n'est-ce pas ?

 20   R.  C'est exact.

 21   Q.  Et, par exemple, vous, Monsieur Mudrinic, aviez conduit un groupe

 22   d'hommes qui ont arrêté Mirzet Karabeg, n'est-ce pas ?

 23   R.  J'ai été présent, je m'en souviens très bien. Je ne l'ai pas

 24   appréhendé, je ne l'ai pas emmené non plus pour un interrogatoire. J'étais

 25   de passage lorsque sa sœur - et ça, je m'en souviens bien - sa sœur qui

 26   avait enseigné le serbo-croate pour moi, elle m'a demandé de me porter

 27   garant. J'ai dit : Mais pourquoi veux-tu que je me porte garant ? Je pense

 28   qu'il sera relâché. Je ne l'ai pas appréhendé personnellement. Je n'ai rien


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  1   fait à son sujet.

  2   Q.  M. Karabeg a témoigné dans cette affaire pour dire que le 25 mai 1992,

  3   on l'a arrêté. Il y a eu deux véhicules pleins de personnes, huit individus

  4   en armes sont arrivés, et lui a été emmené au poste de police. Ça se trouve

  5   à la pièce P3303, page 73.

  6   Il fournit pas mal de détails au sujet de cette arrestation dans son

  7   témoignage dans l'affaire Krajisnik. Et je vais vous donner lecture de ce

  8   qu'il a dit dans cette affaire-là. Je cite :

  9   "J'ai été arrêté à la maison. C'étaient les gens que je viens de vous

 10   identifier," et il évoque Dusan Mudrinic, Dusko Savija, Tomo Delic et" --

 11   L'INTERPRÈTE : Un autre nom que l'interprète n'a pas saisi.

 12   Mme McKENNA : [interprétation]

 13   Q.  -- et il dit : "Ce sont les gens qui m'ont arrêtés. Ils ont été

 14   conduits par un certain Dusan Mudrinic, surnommé Medeni."

 15   On lui a demandé :

 16   "Où vous a-t-on emmené ?"

 17   Et il a dit :

 18   "On m'a emmené au poste de police. Medeni m'a dit que Rasula et les autres

 19   policiers voulaient m'interroger."

 20   Donc, ce n'est pas vrai de dire, Monsieur Mudrinic, que vous n'étiez que de

 21   passage ? C'est qui vous étiez à la tête de ce groupe d'hommes qui ont

 22   arrêté M. Karabeg et vous l'avez fait suite à instruction du président de

 23   la cellule de Crise, Rasula ?

 24   R.  Je vous affirme ici que Mirzet Karabeg, je ne l'ai pas appréhendé, je

 25   ne l'ai pas mis aux arrêts. Je sais que sa sœur, devant le bâtiment du SUP,

 26   m'a dit que j'étais tenu responsable pour lui. Je lui ai dit : Mais

 27   pourquoi veux-tu que je réponde pour lui, alors que je ne suis pas une

 28   autorité exécutive ? Je n'ai fait qu'aider à certaines occasions où il n'y


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  1   avait pas suffisamment de policiers. Et je n'y suis pas allé de mon plein

  2   gré. J'ai été convoqué. Il fallait faire telle chose. Ils venaient à moi

  3   pour me demander trois ou quatre hommes à des fins d'assistance aux

  4   policiers civils, et nous n'avons fait qu'escorter ces policiers pour qu'il

  5   n'y ait pas d'incidents. Je n'ai arrêté personne. Je n'étais aucune espèce

  6   d'autorité. Je n'étais pas un policier, j'étais un simple soldat qui

  7   obéissait à ces ordres. Si on me demandait d'aller quelque part, j'y

  8   allais.

  9   Pour ce qui est du reste, pour expliquer à l'un ou à l'autre qu'il y

 10   avait des interrogatoires de prévus, c'était le fait de l'autorité civile

 11   et des policiers de la police civile. J'étais là pour éviter qu'il y ait

 12   des incidents.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] Compte rendu d'audience, s'il vous plaît.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Mudrinic, est-ce que vous êtes

 15   d'accord pour dire que vous avez fourni une assistance ou que vous avez

 16   sécurisé les lieux lorsque la police a arrêté ce M. Karabeg ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Vous me demandez si j'ai aidé ?

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Mais c'est ce que vous venez de dire.

 19   Vous avez prêté assistance à certaines reprises. Et vous dites que vous

 20   avez sécurisé les effectifs.

 21   Donc, je vous demande si vous avez sécurisé les lieux lorsque la police

 22   civile a arrêté M. Karabeg.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

 24   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Karadzic.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] En page 32, ligne 5, on a consigné le contraire

 26   de ce que le témoin a dit. Le témoin a dit : Je ne l'ai pas appréhendé pour

 27   l'emmener à un interrogatoire.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Je crois que ceci devrait être


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  1   rectifié.

  2   Vous êtes d'accord, Monsieur Mudrinic, pour ce qui est d'avoir dit quelque

  3   chose de ce genre ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] S'agissant de ce cas de figure, je ne l'ai pas

  5   appréhendé et je ne l'ai pas amené à un interrogatoire.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Continuons.

  7   Mme McKENNA : [interprétation] Merci.

  8   Q.  Parlons maintenant du type d'assistance que les membres du SOS ont

  9   fournie --

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Compte rendu. Le témoin n'a pas 

 11   dit : Je n'y étais pas. Il a dit qu'à cette fois-là, il n'était pas la

 12   personne à l'avoir appréhendé. Ligne 4.

 13   Et je demande au témoin de parler un peu plus lentement pour éviter ce type

 14   de confusion et d'erreur.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous êtes d'accord avec ce

 16   qui vient d'être dit, Monsieur Mudrinic, ce qui vient d'être dit par M.

 17   Karadzic ?

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bon. Allons-y.

 20   Mme McKENNA : [interprétation]

 21   Q.  Monsieur Mudrinic, d'autres témoins ont décrit des passages à tabac

 22   survenus au poste de police de Sanski Most, avec la participation d'un

 23   collègue à vous, Danilusko Kajtez, membre du SOS.

 24   Vous avez été au courant de ces passages à tabac, n'est-ce 

 25   pas ?

 26   R.  Mon travail dans le cadre de cette assistance à la police civile,

 27   c'était d'acheminer quelqu'un, l'appréhender, pour l'amener à un

 28   interrogatoire. Là, ma tâche se terminait. Ce que les inspecteurs faisaient


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  1   là-bas, comment se passaient les interrogatoires au poste de sécurité, je

  2   n'en sais rien.

  3   Q.  Essayons de tirer au clair votre témoignage, Monsieur Mudrinic. Est-ce

  4   que vous acceptez le fait que c'est vous qui avez emmené M. Karabeg pour

  5   qu'il soit interrogé ?

  6   R.  Non, je ne l'accepte pas. Je sais qu'à trois reprises j'ai été envoyé à

  7   la police civile en tant qu'assistant. Je connais les noms et prénoms des

  8   gens que j'ai aidés. Pour ce qui est de ce M. Karabeg, non.

  9   Q.  Bien. Vous nous avez dit que vous n'aviez pas eu à connaître de

 10   passages à tabac survenus au SJB. Est-ce que vous avez été au courant des

 11   passages à tabac dans le bâtiment de Betonirka, et ça a été l'œuvre des

 12   membres du SOS, y compris cet individu Kajtez. Est-ce que vous avez au

 13   courant de ces passages à tabac-là ?

 14   R.  Je vais vous répéter une fois de plus que pour ce qui est du poste de

 15   sécurité publique et des passages à tabac, je n'en suis pas au courant, je

 16   n'étais pas présent. Pour ce qui est des passages à tabac à Betonirka, j'ai

 17   ouï dire qu'il y en a eu, mais je n'avais rien à voir avec cela. Je n'étais

 18   ni le gérant, ni directeur, ni rien du tout. J'en ai eu vent, mais je n'ai

 19   pas été présent et je n'ai rien vu.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Compte rendu d'audience, s'il vous plaît.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 22   L'ACCUSÉ : [interprétation] Après "Mirzet Karabeg" -- pour ce qui est de

 23   Mirzet Karabeg, il a dit "Je n'ai pas"; il n'a pas dit "Je ne sais pas." On

 24   peut réécouter, si vous le voulez.

 25   L'INTERPRÈTE : Note des interprètes de la cabine anglaise : Le témoin

 26   n'articule vraiment pas du tout et il parle très rapidement.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Mudrinic, est-ce que vous

 28   pouvez confirmer que vous avez bien dit cela ?


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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons faire une pause, et nous

  3   allons reprendre à 11 heures.

  4   Mais, Monsieur Mudrinic, je tiens à vous inviter à ralentir votre débit

  5   lorsque nous reprendrons, s'il vous plaît, pour que les interprètes vous

  6   comprennent bien. Merci.

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Très bien. J'ai compris.

  8   --- L'audience est suspendue à 10 heures 31.

  9   --- L'audience est reprise à 11 heures 03.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez continuer, Madame McKenna.

 11   Mme McKENNA : [interprétation] Merci.

 12   Q.  Monsieur Mudrinic, vous et vos collègues du SOS organisiez le transfert

 13   de détenus de Sanski Most au camp de Manjaca, n'est-ce pas ?

 14   R.  C'est exact. Six, sept ou huit de nos membres - je me souviens plus du

 15   nombre exact - ont coopéré avec la police, et ces membres ont aidé la

 16   police. Ils étaient à bord des autocars.

 17   Q.  Le témoin oculaire, Sakib Muhic, a vu vos collègues Milan Camber et

 18   Danilusko Kajtez rouer de coups six hommes, les rouer jusqu'à mort

 19   s'ensuive à l'extérieur du camp de Manjaca. Est-ce que vous avez entendu

 20   parler de cela ?

 21   R.  Non.

 22   Q.  Monsieur Mudrinic, en fait, il est établi que le SOS n'a pas uniquement

 23   rassemblé des non-Serbes et les a détenus, mais ses membres ont également

 24   participé aux mauvais traitements et aux meurtres qui ont eu lieu dans les

 25   camps de détention ?

 26   R.  Les membres des SOS ne se trouvaient pas dans les camps de détention.

 27   Je le répète : Ils n'étaient que dans l'escorte des autocars qui se sont

 28   rendus dans les camps. Et je suis sûr qu'ils ne se sont pas attardés dans


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  1   les camps. Ils n'ont fait que participer au trajet vers les camps.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Compte rendu.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] A la ligne 14 de la page précédente, on dit que

  5   les membres étaient à bord des autocars. Alors que le témoin a dit qu'ils

  6   étaient à bord des autocars, un par autocar. Pour aider la police. Donc un

  7   membre se trouvait à bord de chaque autocar.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous êtes d'accord, Monsieur

  9   Mudrinic ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est ce que j'ai dit.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci.

 12   Mme McKENNA : [interprétation]

 13   Q.  Au paragraphe 10 de votre déclaration, vous dites qu'après l'éclatement

 14   de la guerre, certaines personnes et certains groupes ont tiré profit de la

 15   situation commençant à piller et à commettre des crimes, mais les autorités

 16   serbes ont essayé d'arrêter cela et de contrôler les choses dès que

 17   possible.

 18   Monsieur Mudrinic, dans votre déclaration du 22 décembre 1992, vous faites

 19   référence à votre café Leli. Ce café a été pris de force de Sadic, n'est-ce

 20   pas ?

 21   R.  Ce que je peux vous dire c'est que ce café n'a pas été pris de force.

 22   Le nom du Musulman est Eko Sadic. Et moi, j'étais un invité permanent, si

 23   je puis dire, de ce café, et je connaissais très bien ce Musulman. Sa femme

 24   était Serbe, c'était un mariage mixte. Ils avaient vécu en Suisse. Elle est

 25   restée là-bas et il est revenu de son propre gré. En fait, c'est plutôt à

 26   son initiative que nous sommes allés voir un avocat, Panic, où nous avons

 27   rédigé un contrat stipulant que je reprendrais son café. Après avoir repris

 28   son affaire, cet homme n'est pas parti. Il y était comme avant, et sa


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  1   sécurité n'était pas menacée.

  2   Donc, en fait, ce café ne lui a pas été saisi. C'est à son initiative que

  3   nous avons rédigé chez un avocat les documents idoines. Et ce n'était pas

  4   juste le café qui a été repris, il y avait également une habitation à

  5   l'étage. Donc ce n'est pas vrai qu'il y a eu saisie du café.

  6   Q.  Et Njunja a, lui, pris le café Gold d'un Musulman également ?

  7   R.  Même façon, le propriétaire, Fikret Zlatar, l'a offert ou l'a donné à

  8   Saovic. Et après l'avoir fait, il est resté à Sanski Most pendant un

  9   certain temps. Il n'est pas parti directement. Et, là, encore, cela n'a pas

 10   été pris de force.

 11   Q.  Goran Cankovic, un autre membre des SOS a un café, le café Spider qui

 12   appartenait également à un Musulman auparavant ?

 13   R.  Goran Cankovic avait son propre café. Le propriétaire du café Spider

 14   était un ami proche qui, de la même façon, lui a remis le café et qui est

 15   resté aussi au café plus tard, il l'a fréquenté.

 16   Dans certains cas, ces cafés étaient aussi loués par la municipalité ou

 17   étaient transmis à des amis. Alors, pour les cas que vous venez de citer,

 18   ce que je peux vous dire c'est que ces cafés n'ont pas été pris de force.

 19   Ou de plus, le propriétaire du café que moi j'avais repris, m'a dit à un

 20   moment qu'il voulait partir pour rendre visite à sa femme. Et il a décidé

 21   qu'il devait partir, j'ai essayé de le persuader du contraire, mais

 22   finalement il a pris un autocar, je l'ai accompagné, je lui ai parlé au

 23   téléphone plus tard lorsqu'il était en Allemagne. Sa femme est revenue

 24   pendant la guerre. Je lui ai donné les clés de l'appartement qui se

 25   trouvait à l'étage. Elle voulait reprendre quelques affaires. Elle a été

 26   très heureuse de constater qu'il n'avait pas eu de dommage causé et que

 27   rien n'avait été pris. Donc, le propriétaire, lorsqu'il est revenu

 28   d'Allemagne et qu'il est revenu à Sanski Most, m'a dit que rien n'avait été


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  1   pris de force, il m'avait même téléphoné à son retour.

  2   L'ACCUSÉ : [interprétation] Compte rendu.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] A la ligne 1 de la page 39, le témoin a dit

  5   qu'elle était heureuse de constater qu'il n'y a pas eu de dommage et

  6   qu'elle en était reconnaissante. Le terme utilisé en anglais est "blad" b-

  7   l-a-d. Je ne sais pas ce que cela veut dire mais ce n'est pas ce que le

  8   témoin a dit.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je pense que c'est une coquille. Il

 10   faudrait que ce soit le terme "glad" g-l-a-d, qui veut dire heureux.

 11   Continuez.

 12   Mme McKENNA : [interprétation]

 13   Q.  Le café Cobra appartenait également à un Musulman, n'est-ce pas ?

 14   R.  Je me souviens pas de ce café. Je me souviens pas du café Cobra.

 15   Q.  Donc, tous ces cafés qui ont été offerts par les Musulmans à vous-même

 16   et à vos collègues du SOS, en tout cas pour le vôtre, il a été vendu avec

 17   un bénéfice, et c'est vous qui en avez tiré les bénéfices ?

 18   R.  Non, ce n'est pas vrai. Ce café que moi j'ai gardé, vu qu'il n'y avait

 19   pas de combat dans ce secteur, nous avons procédé à des rénovations, et

 20   c'est le frère du propriétaire qui habitait à côté qui a fait ces

 21   rénovations. Il était charpentier, c'était un homme d'affaires à Sanski

 22   Most. Il a parlé à son frère qui se trouvait en Allemagne et, à mon

 23   initiative, il a rénové le café. Et son frère allait au café avec moi. Je

 24   ne l'ai vendu à personne. Je ne l'ai donné à personne. Lorsque j'ai quitté

 25   Sanski Most, le café était encore là et personne en était propriétaire.

 26   Q.  Vos collègues du SOS et vous-même, vous vous êtes rendus en voitures,

 27   et ces voitures dans lesquelles vous circuliez avaient été prises à des

 28   Musulmans ?


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  1   R.  Oui, des véhicules avaient été pris aux Musulmans, mais il y avait

  2   aussi des véhicules qui, tout comme les cafés, avaient été donnés à des

  3   amis.

  4   Q.  Monsieur Mudrinic, dans votre déclaration vous parlez de la mosquée qui

  5   a été détruite. Et, en fait, vous-même et vos collègues des SOS aviez fait

  6   partie des personnes qui avaient détruit la mosquée ou qui avaient posé une

  7   bombe, n'est-ce pas ?

  8   R.  Ce n'est pas vrai. Nous n'avons pas posé de bombe dans des mosquées.

  9   Q.  En vérité, Monsieur Mudrinic, c'est votre groupe qui, pour vous, était

 10   contrôlé par les autorités, mais elles n'étaient pas en fait, parce

 11   qu'elles agissaient main dans la main avec les autorités. C'est bien cela

 12   la vérité ?

 13   R.  Je ne suis pas d'accord avec votre affirmation selon laquelle les

 14   autorités ne pouvaient pas nous contrôler. Nous étions à la disposition des

 15   autorités 24 heures sur 24. Nous étions tous dans une salle dans le centre-

 16   ville de Sanski Most, et à l'étage se trouvait une radio, nous étions là-

 17   bas à la disposition des autorités, et elles pouvaient toujours nous

 18   contacter.

 19   L'INTERPRÈTE : Note des interprètes de la cabine anglaise : Le témoin a

 20   parlé de téléphones, mais les interprètes n'ont pas entendu ce qu'il a dit.

 21   Mme McKENNA : [interprétation]

 22   Q.  Monsieur Mudrinic, est-ce que vous pourriez répéter ce que vous avez

 23   dit sur les téléphones.

 24   R.  Oui. On n'avait pas de lignes téléphoniques opérationnelles. Il n'y

 25   avait pas de communication possible. La majorité de nos membres, des

 26   membres de notre unité vivait à 5, 6 ou 7 kilomètres dans des villages

 27   avoisinants. Donc, si les autorités avaient eu besoin de nous à un moment

 28   où l'autre, nous n'aurions pas pu entrer en contact avec les autorités.


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  1   Voilà pourquoi, ensemble, nous avons décidé -- donc, ensemble avec les

  2   autorités, que nous passerions tous la nuit au centre-ville dans un

  3   bâtiment dans le centre sportif où l'on pourrait être contactés en

  4   permanence. Donc, il n'est pas exact de dire qu'ils ne pouvaient pas nous

  5   contrôler.

  6   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Monsieur Karadzic.

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] A la ligne 18, page 40, on parle d'"une radio"

  8   et, en fait, le témoin a parlé de la "radio de Sanski Most, de la station

  9   de radio de Sanski Most".

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Merci.

 11   Mme McKENNA : [interprétation]

 12   Q.  Monsieur Mudrinic, dans votre déclaration, vous faites référence à

 13   plusieurs reprises, et vous en avez aussi parlé aujourd'hui lors de votre

 14   déposition, vous faites référence au fait que les Musulmans ont quitté

 15   Sanski Most de façon volontaire, de leur propre gré, et qu'il est vrai

 16   qu'environ 5 000 Musulmans ont continué à vivre et à travailler à Sanski

 17   Most de 1992 à 1995, et que cela montre que les autorités serbes ont mené

 18   une politique juste et raisonnable vis-à-vis de toute la population, quelle

 19   que soit leur appartenance ethnique.

 20   Mme McKENNA : [interprétation] Je voudrais passer à huis clos partiel, s'il

 21   vous plaît.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 23   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel, Madame,

 24   Monsieur les Juges.

 25   [Audience à huis clos partiel]

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 13  Pages 47399-47401 expurgées. Audience à huis clos partiel.

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  7  (expurgé)

  8   [Audience publique]

  9   Mme McKENNA : [interprétation]

 10   Q.  Monsieur Mudrinic, Arkan et ses hommes sont arrivés à Sanski Most en

 11   septembre 1995. Pouvez-vous le confirmer ?

 12   R.  Non, ce n'est pas exact.

 13   L'ACCUSÉ : [interprétation] L'interprétation que nous avons entendue a

 14   parlé du mois de septembre 1992, voilà pourquoi il a répondu cela.

 15   Mme McKENNA : [interprétation] Je vais répéter ma question.

 16   Q.  Arkan et ses hommes sont bien arrivés à Sanski Most en septembre 1995 ?

 17   R.  C'est exact.

 18   Q.  Et vous avez personnellement aidé les hommes d'Arkan à rassembler les

 19   non-Serbes et à les emmener pour des interrogatoires ?

 20   R.  Non, c'est faux. Je n'ai rien à voir avec Arkan et ses formations, à

 21   part à un moment où nos autorités nous ont demandé de trouver du bétail

 22   pour s'alimenter. Et un collègue, M. Dosenovic, est arrivé et il a dit que

 23   des agriculteurs lui avaient laissé sept ou huit moutons et qu'ils avaient

 24   été envoyés au QG d'Arkan parce qu'il y avait un boucher là-bas parmi ses

 25   hommes qui pouvait abattre les bêtes. Donc, voilà. A part cela, je n'avais

 26   pas rien à voir avec eux.

 27   Mme McKENNA : [interprétation] Regardons le document 26032 de la liste 65

 28   ter, s'il vous plaît.


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  1   Q.  En attendant que le document s'affiche, Monsieur Mudrinic, je voudrais

  2   vous dire que quatre témoins ont fait des déclarations au TPIY dans

  3   lesquelles ils ont décrit comment, avec les hommes d'Arkan, vous les avez

  4   enlevés, vous les avez roués de coups, vous les avez placés dans le coffre

  5   d'une voiture et vous les avez emmenés pour interrogatoire.

  6   Malheureusement, nous n'avons pas de version en B/C/S de cette

  7   déclaration, mais je vais en donner lecture lentement. C'est la page 3 de

  8   cette déclaration de M. Zecir Sadic.

  9   R.  Est-ce que vous pouvez répéter la question. Est-ce que vous dites

 10   que moi j'ai roué quelqu'un de coups et que je l'avais placé dans le coffre

 11   d'une voiture ?

 12   Q.  Nous allons passer en revue cette déclaration par le menu, et ensuite

 13   je vous poserai une question.

 14   Voici ce que ce témoin a dit concernant un incident qui s'est produit à la

 15   fin du mois de septembre 1995. Et il dit :

 16   "Je cherchais où je pouvais loger lorsque j'ai vu Dusan Mudrinic, un Serbe

 17   du cru. Il a élevé la voix et il m'a dit de m'arrêter et de sortir du

 18   véhicule. A ce moment-là, quatre soldats qui étaient habillés de la même

 19   manière que des soldats qui s'étaient rendus chez moi la veille au soir

 20   sont sortis rapidement du véhicule qui me suivait.

 21   "Lorsque les soldats sont sortis de la voiture, je me suis rendu

 22   compte que c'étaient des hommes d'Arkan en raison de la manière dont ils

 23   étaient habillés et du fait qu'ils n'étaient pas originaires de la région.

 24   Ils m'ont immédiatement attaché les mains.

 25   "Et lorsqu'ils ont fini de battre Smajo, ils nous ont forcés à entrer

 26   dans le coffre d'une voiture la tête la première. Avant d'avoir été forcé

 27   dans le coffre de la voiture, je savais qu'il y avait d'autres personnes

 28   qui se trouvaient dans le coffre d'une autre voiture. Et ensuite, la


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  1   voiture a démarré."

  2   Est-ce que vous vous souvenez de cet incident, Monsieur Mudrinic ?

  3   R.  Non, je ne m'en souviens pas.

  4   Q.  Toutes les victimes de ce qui s'est passé ce jour-là corroborent ces

  5   détails par des déclarations détaillées au TPIY. Ils mentionnent que vous

  6   parcouriez cette région avec les hommes d'Arkan en convoi, vous identifiiez

  7   des Musulmans, vous les rouiez de coups, et vous les jetiez dans des

  8   coffres de voiture.

  9   Donc, c'est la vérité ? Vous avez enlevé ces Musulmans, vous les avez

 10   battus et vous les avez ensuite remis aux hommes d'Arkan.

 11   R.  C'est inexact. Et en toute connaissance de cause, j'avance que je n'ai

 12   tabassé aucun Musulman.

 13   Q.  Alors, consultons une autre déclaration portant sur des faits qui se

 14   sont produits durant la même période.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Juste une seconde.

 16   Est-ce que vous connaissez ce monsieur, Zecir Sadic ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Je connais cette personne.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien.

 19   Mme McKENNA : [interprétation] Peut-on maintenant afficher le document

 20   26034 de la liste 65 ter. Il s'agit d'une autre déclaration faite au TPIY

 21   par Fatima Omic. Pourrait-on passer à la page 2 en version anglaise, s'il

 22   vous plaît, vers le bas de la page. Elle a décrit comment elle avait

 23   entendu parler de la prise de contrôle d'Arkan sur Sanski Most. Et ensuite,

 24   elle dit :

 25   "Plus tard, deux soldats en uniforme sont venus chez nous, et ils avaient

 26   été guidés par Dusan Mudrinic."

 27   Peut-on passer à la page suivante, s'il vous plaît.

 28   "Ils sont entrés chez nous et ils ont dit à mon mari, Taib Omic, de


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  1   s'habiller et de les suivre. Taib n'a pas soulevé d'objection et il a fait

  2   ce qu'on lui demandait de faire. Je n'ai pas vu mon mari après cela. J'ai

  3   été expulsée de ma maison du village de Sehovici. Personne ne me donnait

  4   des informations.

  5   "Je n'ai pu entendu parler de mon mari jusqu'à qu'ils aient exhumé le

  6   charnier de Sasina en juillet 1996. J'ai identifié son corps dans la morgue

  7   provisoire qui avait été établie dans l'usine Krings. Je n'ai pas en mesure

  8   de reconnaître son visage en raison des blessures qu'il avait subies à la

  9   tête."

 10   Q.  Il s'agit donc d'un témoignage d'une femme de 64 ans. Est-ce que vous

 11   vous souvenez de cet incident ?

 12   R.  Je ne me souviens pas de cet incident. Et j'avance ne jamais avoir

 13   pénétré dans la maison d'un Musulman quel qu'il soit. Mais je serais

 14   curieux de savoir comment cette personne connaissait mon nom, étant donné

 15   que 90 % des personnes dans la ville ne connaissaient pas mon nom, mais

 16   connaissaient que mon surnom. Et maintenant, vous parlez d'une femme de 65

 17   ans qui prétend me connaître. Et je vous dis que je ne suis jamais rentré

 18   dans quelle que maison musulmane que ce soit, et encore moins les avoir

 19   battus ou les avoir maltraités.

 20   Q.  Monsieur Mudrinic, avant la guerre, vous et le groupe des SOS avez mené

 21   une campagne de terreur et d'intimidation. Et durant la guerre, vous avez

 22   détruit des monuments religieux, vous vous êtes appropriés des biens

 23   immobiliers qui appartenaient à des Musulmans. Et lorsqu'en septembre 1995

 24   Arkan et ses hommes sont venus à Sanski Most, vous avez aidé à rafler les

 25   Musulmans du cru et vous les avez envoyés en détention, et c'est là qu'ils

 26   sont morts pour la plupart d'entre eux.

 27   Et maintenant, c'est dans votre intérêt personnel de mentir à ce sujet.

 28   C'est la vérité, n'est-ce pas ?


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  1   R.  Je répète, nous n'avons pas commis de crimes. Nous n'avons pas aidé

  2   Arkan lorsqu'il est venu. Nous n'avons pas plastiqué de bâtiment quel qu'il

  3   soit. Toutes les déclarations sont passées par moi-même et Saovic, et si

  4   quelque chose n'était pas clair, ça aurait été soit Mudrinic, soit Saovic.

  5   Je ne suis pas d'accord avec ce qui est mentionné ici, à savoir que l'on a

  6   procédé à l'intimidation de personnes. Les 5 000 ou 6 000 personnes qui

  7   restaient à Sanski Most nous contactaient pour qu'on les aide s'il y avait

  8   des actes de provocation. Quoi qu'il en soit, nous avons aidé tout le

  9   monde. Nous n'avons pas enlevé qui que ce soit. Nous n'avons pas fait

 10   sortir des personnes de chez elles, nous ne les avons pas battues, nous ne

 11   les avons pas maltraitées.

 12   Mme McKENNA : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Messieurs les

 13   Juges, je n'ai pas d'autres questions.

 14   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Merci, Madame McKenna.

 15   Monsieur Karadzic, est-ce que vous avez des questions supplémentaires ?

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 17   Nouvel interrogatoire par M. Karadzic :

 18   Q.  [interprétation] Monsieur le Témoin, nous allons commencer par la fin.

 19   Dans la déclaration 26034, la personne dit qu'en 1995, dans la zone, il n'y

 20   avait que 30 % de Musulmans. Comment ceci cadre avec votre expérience ?

 21   Est-ce qu'elle a surestimé les chiffres ou qu'elle les a sous-estimés ?

 22   R.  Je n'ai pas compris votre question.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Madame McKenna.

 24   Mme McKENNA : [interprétation] J'ai une objection car ceci n'est pas lié

 25   aux sujets qui ont été abordés dans la déclaration.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Maître Robinson.

 27   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que je peux prendre la parole ?

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Allez-y.


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  1   L'ACCUSÉ : [interprétation] Le Procureur avance que les Musulmans ont été

  2   expulsés ou que l'on a expulsé ces Musulmans, et cette personne dans cette

  3   déclaration dit qu'ils représentaient 30 % de la population en 1995 et

  4   qu'elle-même vivait dans cette maison avec son mari en 1995.

  5   Je demande au témoin si ces personnes ont été expulsées, et si tel était le

  6   cas, comment se fait-il que les 30 % qui étaient sur place n'ont pas été

  7   expulsés ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Personne n'a été expulsé --

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Mudrinic, on ne vous a pas posé

 10   de question.

 11   [La Chambre de première instance se concerte]

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons vous permettre de continuer,

 13   Monsieur Karadzic.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

 15   M. KARADZIC : [interprétation]

 16   Q.  D'après ce que vous saviez ou d'après votre évaluation, combien de

 17   Musulmans habitaient à Sanski Most en septembre 1995 ? Ici, on voit dans la

 18   déclaration, 30 %. Est-ce que vous pensez qu'il y en avait plus que cela ?

 19   R.  Je pense qu'il y avait environ 5 000 Musulmans. Je ne sais pas à quoi

 20   cela correspond en pourcentage puisque je ne sais pas combien il y en avait

 21   avant la guerre. Mais je crois qu'il en avait environ 5 000.

 22   Q.  Quel était le facteur décisif qui a motivé certains de rester à Sanski

 23   Most et qui a motivé d'autres de partir ? Est-ce qu'il y a eu des

 24   expulsions ?

 25   R.  Non, il n'y a pas eu d'expulsion. Ceux qui souhaitaient rester sont

 26   restés. Et ceux qui voulaient partir sont partis. Il y avait beaucoup de

 27   soldats à Sanski Most, venant des différentes parties au conflit, et

 28   lorsque différentes municipalités sont tombées, des personnes sont parties


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  1   de ces municipalités et des Musulmans ont commencé à exprimer le souhait de

  2   quitter Sanski Most et de partir dans des pays tiers. Certains avaient déjà

  3   envoyé leurs enfants à l'étranger.

  4   Q.  Merci. A la page 9, on dit que votre surnom est Medeni. Etant donné que

  5   de nombreux participants au procès ne parlent pas la langue serbe,

  6   pourriez-vous me dire ce que ce surnom signifie en serbe ?

  7   R.  Cela signifie doux ou mielleux.

  8   Q.  Cela découle du terme "miel", n'est-ce pas ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Ça ne me semble pas cruel dans ce cas-là ?

 11   R.  [aucune interprétation]

 12   Q.  Merci. A la page 43, vous avez dit que (expurgé) avait été envoyé

 13   en prison à Bihac. Cette prison était dirigée par qui ?

 14   Mme McKENNA : [interprétation] Je me permets d'interrompre les débats. Je

 15   pense qu'il faudrait que nous passions à huis clos partiel.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous prie de m'excuser. Peut-être que l'on

 17   peut procéder à l'expurgation de ce nom.

 18   M. KARADZIC : [interprétation]

 19   Q.  Vous avez parlé d'une personne qui était en prison à Bihac. De quelle

 20   prison s'agissait-il ? Et pourquoi était-il là-bas ?

 21   R.  Pendant la guerre, il vivait avec nous. Nous avions grandi ensemble.

 22   Nous étions allés à l'école ensemble. Et lorsque nous avons quitté Sanski

 23   Most, il est parti avec nous. Les Musulmans l'ont recherché. Ils

 24   connaissaient son nom. Ils voulaient savoir ce qu'il était advenu de nous

 25   parce qu'il était resté chez nous tout le temps. C'était quelqu'un de très

 26   honnête. Et des Musulmans de Sanski Most ont commencé à le rechercher pour

 27   qu'il fasse l'objet d'un échange. Mais il a souhaité rester à Prijedor avec

 28   nous. Finalement, il est parti. J'ai eu vent qu'il avait été interrogé. Il


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  1   a été envoyé à la prison de Bihac. Il a été interrogé. Il a été battu et

  2   puis, ensuite, il a été relâché. J'ai eu vent de ceci par un ami musulman

  3   qui était venu à Banja Luka. Après qu'il ait été relâché de prison, libéré,

  4   pendant quatre ou cinq mois, il a bu énormément et il est mort cinq ou six

  5   mois plus tard. Quoi qu'il en soit, il était en prison à Bihac et cette

  6   prison était sous le contrôle des Musulmans.

  7   Q.  Merci. A la page 40, on vous a posé des questions concernant les

  8   véhicules qui avaient été confisqués. Qui les a confisqués et pourquoi ?

  9   L'INTERPRÈTE : Les interprètes de cabine anglaise demandent que les micros

 10   soient éteints.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Ces véhicules ont été confisqués de leurs

 12   propriétaires musulmans, mais je ne sais pas pourquoi, je ne sais pas quels

 13   étaient les motifs qui justifiaient ces confiscations. Quoi qu'il en soit,

 14   la plupart de ces voitures avaient été données à des amis serbes par les

 15   Musulmans pour éviter que ces voitures ne puissent pas être réparées. Dans

 16   la majorité des cas, si les Musulmans avaient donné ces voitures et qu'ils

 17   avaient besoin d'une aide pour, par exemple, être envoyé à l'hôpital, eh

 18   bien, ceci pouvait être organisé. C'étaient des accords entre les personnes

 19   qui fonctionnaient.

 20   M. KARADZIC : [interprétation]

 21   Q.  Merci. Et qu'en est-il des véhicules qui étaient conduits par des

 22   membres des SOS ? Qui les avaient confisqués et pour quels motifs ? Est-ce

 23   que la police confisquait des véhicules qui étaient la propriété de Serbes

 24   et de Musulmans et pour quels motifs ?

 25   R.  Des véhicules, effectivement, étaient confisqués ou saisis. La police

 26   confisquait des véhicules. Si quelqu'un changeait d'avis, la police rendait

 27   les véhicules aux Musulmans qui avaient changé d'avis et qui voulaient

 28   récupérer leurs voitures.


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  1   Q.  A la page 39, il est mentionné qu'on vous avait donné un local

  2   commercial. Comment ces contrats de don étaient formulés ?

  3   R.  Le Procureur a mentionné plusieurs magasins, et je sais que pour ces

  4   trois magasins il y avait un contrat qui avait été établi par un avocat, et

  5   la personne qui était impliquée dans la transaction était assise à côté de

  6   moi. Pour ce qui est des autres magasins ou des autres locaux commerciaux,

  7   en fait, ces locaux ont été vendus aux enchères par la municipalité. Je ne

  8   suis pas sûr de cela.

  9   Q.  Merci. Est-ce qu'il s'agissait de locaux commerciaux privés ou de

 10   locaux en propriété sociale ?

 11   R.  Il avait les deux cas.

 12   Q.  Et pour ce qui est de ce contrat, est-ce que vous avez signé ceci en

 13   tant que membre des SOS ou en tant que personne privée ?

 14   R.  En tant que personne privée, et la personne qui l'a co-signé était mon

 15   très bon ami. Et c'est lui qui était à l'initiative de tout cela. Et après

 16   ceci, il a continué à être un habitué de ce local, jusqu'à ce qu'il décide

 17   de partir.

 18   Q.  A la page 23, je ne sais pas si c'était en audience à huis clos partiel

 19   ou pas -- non, ce n'était pas le cas, parce que la personne, en fait,

 20   déposait en audience publique.

 21   On vous a montré la déclaration d'Adil Draganovic. Il était le président du

 22   tribunal à Sanski Most avant la guerre et il est mentionné qu'il aurait pu

 23   avoir participé à des crimes. Qui était-il ? Est-ce que vous pensez que sa

 24   déposition contre les Serbes à Sanski Most était objective ?

 25   R.  Adil travaillait également au tribunal à l'époque. Je ne sais pas

 26   comment dire cela; il n'était pas très populaire. Il n'était pas populaire

 27   à mes yeux, ça, c'est sûr. J'ai été informé par la cour de Sanski Most à

 28   mon adresse qu'une interdiction avait été imposée sur la vente de biens


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  1   immobiliers. Et cette interdiction mentionne que Nedeljko Rasula, la femme

  2   de feu Saovic, et moi-même, ainsi qu'un professeur, Bosko Banjac, devaient

  3   en fait rassembler 100 000 deutschemarks et que lui, en tant que président

  4   du tribunal, suspendrait cette interdiction de session de ces biens

  5   immobiliers.

  6   L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-on maintenant montrer au témoin le

  7   document D4174.

  8   M. KARADZIC : [interprétation]

  9   Q.  Il a été mentionné que vous aviez -- qu'il avait peut-être participé à

 10   des activités criminelles. Est-ce que c'était l'extorsion de 100 000

 11   deutschemarks qui était le seul chef d'accusation ou est-ce que vous avez

 12   entendu parler de quelque chose d'autre ?

 13   R.  Non.

 14   Q.  Consultez ce document. Pouvez-vous nous dire sous quel contrôle la

 15   localité de Buzim se trouvait ?

 16   R.  Je pense qu'elle relevait de Bihac.

 17   Q.  Et quelle était la composition ethnique ?

 18   R.  Musulmane.

 19   Q.  Maintenant, consultez ce document en rapport au pénal, les décisions du

 20   tribunal municipal après la guerre, ceci est recensé au point (c), par

 21   exemple, on peut dire :

 22   Conformément à la décision du tribunal municipal, a ordonné le paiement non

 23   autorisé de 1 000 [comme interprété] deutschemarks pour les besoins de la

 24   communauté religieuse islamique de Sanski Most.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que l'on peut passer à la page suivante

 26   en anglais.

 27   M. KARADZIC : [interprétation]

 28   Q.  C'est le paragraphe 2. On peut lire, il aurait détourné du budget de


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  1   Buzim une certaine somme d'argent.

  2   R.  Eh bien, étant donné qu'il voulait que l'on lui donne 100 000

  3   deutschemarks, ça semble plausible.

  4   L'INTERPRÈTE : Note des interprètes : La page idoine n'est pas à l'écran en

  5   version anglaise.

  6   M. KARADZIC : [interprétation]

  7   Q.  De quel type de personne s'agissait-il lorsqu'il s'agissait de

  8   questions politiques et pour ce qui était de résoudre une crise ?

  9   R.  Il avait des opinions bien tranchées. 

 10   Q.  Ismet Sabic [comme interprété], Karabeg, Suad, Mirzet, qui étaient ces

 11   personnes ?

 12   Mme McKENNA : [interprétation] Objection.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 14   Mme McKENNA : [interprétation] Je ne vois pas comment ceci découle du

 15   contre-interrogatoire.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vais poser la question uniquement au sujet

 17   de Mirzet Karabeg. Ceci découle du contre-interrogatoire.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Karabeg était un extrémiste, et c'est

 19   probablement pourquoi il a été interpellé, mis en détention et interrogé.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait rapidement montrer le

 21   document D5 au témoin.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Une seconde, s'il vous plaît. Est-ce que

 23   l'on peut revenir au document précédent. Le document D4174.

 24   Vous avez répondu à la question de M. Karadzic que ce bureau du procureur a

 25   été sous le contrôle d'une localité qui était musulmane de composition

 26   ethnique.

 27   Peut-on passer à la dernière page. Ce document a été rédigé par un dénommé

 28   Zlatko Pozderac. Pourriez-vous nous dire à quel groupe ethnique appartient


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  1   l'auteur de ce document ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est un Musulman.

  3   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien.

  4   Veuillez continuer, Monsieur Karadzic.

  5   M. KARADZIC : [interprétation]

  6   Q.  Qu'en est-il de cette famille, les Pozderac ? Est-ce que c'était une

  7   famille bien connue ?

  8   R.  C'est une famille connue parce qu'il y avait un ancien haut responsable

  9   qui appartenait à cette famille, Hamdija Pozderac.

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait maintenant rapidement

 11   afficher le document D5.

 12   M. KARADZIC : [interprétation]

 13   Q.  Le 27 -- pardon, 7 mars 1992, un officier opérationnel de la Sûreté de

 14   l'Etat conjointe rédige ce document concernant les extrémistes à Sanski

 15   Most qui obtiennent des armes pour les Bérets verts, et parmi eux il y a

 16   Adil Draganovic et Mirzet Karabeg.

 17   Comment ceci cadre avec ce que vous saviez ?

 18   R.  Eh bien, d'après ce que je sais, ces deux personnes se sont

 19   effectivement procuré des armes, et c'étaient les plus extrêmes au sein du

 20   parti du SDA.

 21   Q.  A la page 18 du compte rendu d'audience LiveNote d'aujourd'hui, il est

 22   mentionné qu'apparemment en 1992, vous vous rendiez à la caserne de

 23   Prijedor et vous apportiez des armes.

 24   Ma première question est la suivante : est-ce que le SOS à Sanski Most

 25   existait avant cette date, c'est-à-dire la date de la proclamation de leur

 26   création à Lusci Palanka ?

 27   R.  Non.

 28   Q.  Deuxièmement, est-ce que vous faisiez partie de la Défense territoriale


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  1   de Sanski Most ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  La distribution d'armes de la JNA en provenance de la caserne et pour

  4   les besoins des hommes de la TO, est-ce que cette distribution était légale

  5   ou pas ? Cela n'a pas d'importance si vous l'avez fait ou pas.

  6   R.  Ce n'est pas illégal.

  7   Q.  Dans l'une de ces déclarations, il est dit qu'en septembre 1995 et

  8   pendant toute la guerre, tout a été fait sur ordre de la cellule de Crise

  9   de Sanski Most.

 10   Est-ce que vous savez jusqu'à quand cette cellule de Crise a existé à

 11   Sanski Most ? A partir de quand est-ce qu'elle a été démantelée ?

 12   R.  Je ne connais pas la date exacte.

 13   Q.  Et l'année, vous en souvenez-vous ? Est-ce qu'en 1995 la cellule de

 14   Crise était toujours en place ?

 15   R.  Non. Parce qu'on avait déjà déclaré l'état de guerre. Non, je pense

 16   qu'il n'y avait pas de cellule de Crise.

 17   Q.  Très bien. On a admis au dossier le document P6682, page 15 du compte

 18   rendu d'audience. Le 18 juin 1992, d'après ce document, on voit qu'on ne

 19   vous appelle plus SOS, qu'on vous appelle peloton ou section d'intervention

 20   ou de diversion.

 21   Alors, pourquoi est-ce que vous avez été rebaptisés ?

 22   R.  Parce qu'on faisait partie de la 6e Brigade de Sana en tant que peloton

 23   d'intervention. Donc, on ne nous appelait plus SOS, on nous appelait

 24   peloton d'intervention de la 6e Brigade de la Sana. Mais les gens ont

 25   continué de nous appeler les SOS, mais en fait, c'était plus dans le nom.

 26   Le nom c'était le peloton ou la section d'intervention de le 6e Brigade de

 27   la Sana.

 28   Q.  Très bien. Et deux questions qui me restent encore. Avant de rejoindre


Page 47416

  1   les SOS, est-ce que certains de ces hommes étaient connus pour avoir été

  2   déjà condamnés au pénal ? Est-ce que c'étaient des criminels notoires ? Je

  3   ne parle pas de ce qui s'est passé avant.

  4   R.  Mais personne n'a été criminel.

  5   Q.  Et ma dernière question : étiez-vous le seul groupe qui portait ce nom,

  6   le nom de SOS ? Et j'aimerais savoir quelle est la raison de certains

  7   malentendus que vous avez eus avec les autorités, des choses qui ressortent

  8   dans ces documents que nous avons 

  9   examinés ?

 10   R.  A Banja Luka, il y avait un groupe qui s'appelait lui aussi SOS, et il

 11   n'y avait absolument aucun lien avec nous, rien à faire. On avait déjà

 12   constitué les forces armées croates et musulmanes, et c'est simplement par

 13   inertie que nous aussi, on a pris ce nom, SOS. Mais il y a eu HOS, par

 14   exemple.

 15   Q.  Etaient-ce les forces armées serbes ou forces de défense serbe ?

 16   R.  C'étaient les forces de défense serbe.

 17   Q.  Merci. Et à Sanski Most, y avait-il d'autres formations qui portaient

 18   le même nom ? Et à cet égard, est-ce que vous aviez besoin de démontrer aux

 19   autorités qui vous étiez, de bien vous identifier ?

 20   R.  A Sanski Most, personne ne s'appelait du même nom, mais il y a eu des

 21   abus du nom quand il s'agit de ce nom SOS. Il y a eu des vols, des

 22   pillages, mais on a pu régler ça. On a appelé le président de la

 23   municipalité et le commandant de la TO locale, on les a fait venir dans

 24   cette salle où nous étions stationnés et on leur a donné la liste de tous

 25   les gars qui étaient là. Ils sont restés dans cette salle. Et puis, en

 26   voiture, le président de la municipalité et le commandant de la TO sont

 27   partis dans la partie musulmane de la ville, et là ils ont trouvé des gens

 28   qui avaient des tracteurs et des chariots menés par des chevaux et qu'il y


Page 47417

  1   avait écrit "SOS" sur ces charrettes ou ces tracteurs, et qui se sont

  2   livrés à des pillages. Donc, c'était pas nous.

  3   Q.  Je vous remercie, Monsieur Mudrinic.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions.

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Madame McKenna.

  6   Mme McKENNA : [interprétation] Une seule question, si je puis, qui porte

  7   sur le sujet qui a été abordé dans les questions supplémentaires.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Sur quoi plus précisément ?

  9   Mme McKENNA : [interprétation] L'interdiction de procéder à des ventes ou

 10   des achats de biens immobiliers, l'interdiction qui a été imposée par M.

 11   Draganovic.

 12   [La Chambre de première instance se concerte]

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, je vous en prie, Madame McKenna.

 14   Mme McKENNA : [interprétation] Je vous remercie.

 15   Contre-interrogatoire supplémentaire par Mme McKenna :

 16   Q.  [interprétation] Monsieur Mudrinic, vous avez dit qu'il y a eu une

 17   interdiction dont vous avez fait l'objet, vous, avec M. Rasula et M.

 18   Saovic, interdiction de vendre des biens immobiliers. Et cette interdiction

 19   a été prononcée parce que M. Draganovic vous a portés devant les tribunaux,

 20   vous-même et d'autres personnes, sur la base de l'allégation que vous-même

 21   et Njunja aviez incendié sa maison le 27 mai 1992, que vous aviez tiré des

 22   obus de canon sur sa maison.

 23   R.  Mais ce n'est pas exact. Dans cette décision du tribunal comme quoi je

 24   fais l'objet de cette interdiction, j'ai vu que sa maison avait été

 25   incendiée, mais par Crni Djordje [phon], c'est une section qui s'appelait

 26   ainsi, George Noir. Et ensuite, il a dit que c'était moi, que j'avais tiré

 27   avec un canon sur lui. Mais, en fait, c'était cette unité qui s'appelait

 28   George le Noir. Dans cette déclaration, il m'accuse d'avoir tiré avec ce


Page 47418

  1   canon, alors que c'était en fait George le Noir. Moi, j'étais un fantassin,

  2   j'étais dans l'infanterie. Je n'aurais pas pu tirer, je n'avais pas de

  3   canon. Et lui, dans sa déclaration, il dit que c'était un canon à trois

  4   tubes, George le Noir, et puis ensuite il parle de moi et de Saovic. Mais

  5   nous, on n'avait rien à voir avec cette unité-là. Donc, c'était ce qu'il

  6   disait dans sa déclaration.

  7   Q.  Mais pour que ce soit clair, cette interdiction de vendre les biens

  8   immobiliers, il l'a prononcée sur la base de cette allégation que vous

  9   aviez tiré sur sa maison; exact ?

 10   R.  Non, non, ce n'est pas exact. Je suis en train de vous l'expliquer.

 11   Dans sa déclaration, on parle d'un canon, d'un canon qui s'appelle George

 12   le Noir, et que c'est ce canon qui a tiré sur sa maison et l'a incendiée.

 13   Et lui, il établit un lien entre ce canon et moi-même. Moi, je n'avais rien

 14   à voir avec ce canon.

 15   Je vous ai dit que dans la brigade il y avait deux camions comme ça.

 16   Et si lui dit qu'il y avait Georges le Noir --

 17   Q.  Ecoutez, je n'ai peut-être pas été tout à fait claire.

 18   Donc, laissons de côté le fait que vous ayez participé à cela. Mais

 19   le fait qu'il vous est interdit de vendre l'immobilier, cette interdiction

 20   était basée sur l'allégation que vous ayez participé à cela. Il a allégué

 21   que vous avez participé à cela. N'est-ce pas correct ?

 22   R.  Non, ce n'est pas exact. Je vous dis encore une fois, dans cette

 23   décision rendue par le tribunal par quoi on m'interdit de vendre

 24   l'immobilier, il est écrit que c'est moi qui ai incendié sa maison parce

 25   que j'ai tiré sur sa maison avec un canon qui s'appelle George le Noir.

 26   Mais je n'avais rien à voir avec ce canon et je n'ai pas incendié sa

 27   maison. A cause de cela, j'ai dû engager un avocat qui s'est rendu au

 28   tribunal à Sanski Most, et cette affaire a été transférée au tribunal de


Page 47419

  1   Bihac puis à Bosanska Krupa, et l'affaire a été classée. D'ailleurs, au

  2   tribunal, ils ont été étonnés de voir ce qui était allégué, lorsqu'ils ont

  3   vu qu'il avait demandé que 100 000 deutschemarks soient rassemblés par nous

  4   pour que cette interdiction soit levée. Et, en fait, cette affaire a été

  5   classée trois ou quatre ans plus tard.

  6   Q.  Je vous remercie, Monsieur Mudrinic.

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais vous demander une précision.

  8   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Sur quoi ?

  9   L'ACCUSÉ : [interprétation] Sur le procès, était-ce un procès qui a été

 10   mené à titre officiel ou c'était une affaire privée.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] D'après ce que l'on voit, cette

 12   interdiction a été prononcée sur la base d'une ordonnance rendue par le

 13   tribunal. Quelle qu'en soit la raison.

 14   Est-ce que vous êtes d'accord, Monsieur Mudrinic ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Mais par la suite, même s'il y a eu un

 16   procès, à partir du moment où l'avocat a réussi à ce que cette interdiction

 17   soit levée, moi, je n'étais informé de rien, si ce n'est des informations

 18   que j'ai reçues par mon avocat.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voulais demander si, pour cet acte, il y a

 20   jamais eu des poursuites engagées d'office par le parquet.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que non. Je n'ai été informé de rien.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Votre déposition est terminée, Monsieur

 23   Mudrinic. Au nom des Juges de la Chambre de première instance, je tiens à

 24   vous remercier d'être venu à La Haye pour déposer. Vous pouvez disposer à

 25   présent.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 27   [Le témoin se retire]

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Tieger, avant de continuer, je


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  1   pense que je dois reparler de la question des interceptions. Un malentendu

  2   semble avoir été causé dans mon esprit.

  3   Donc, d'après ce que j'ai compris, l'Accusation ne souhaitait pas

  4   soulever d'objection et était d'accord, en fait, pour ce qui est de

  5   l'authenticité des interceptions croates qui allaient être traitées pas le

  6   témoin à venir, mais ce n'est pas le cas.

  7   M. TIEGER : [interprétation] Oui. Je n'ai pas été suffisamment clair.

  8   Excusez-moi. Donc, ce que vous avez bien compris, ce n'était pas le cas.

  9   Nous n'étions pas d'accord avec. Et je pense que Me Robinson a proposé de

 10   retirer la requête et d'avancer.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc, nous n'avons pas besoin d'attendre

 12   votre réponse ?

 13   M. TIEGER : [interprétation] Oui, tout à fait. Mme Uertz-Retzlaff a

 14   mentionné quelque chose pendant la pause, que pour d'autres raisons, la

 15   Chambre pourrait souhaiter peut-être une réaction. Mais, effectivement,

 16   comme nous l'avons dit et comme Me Robinson l'a dit explicitement.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Donc, vous allez citer ce témoin ?

 18   M. ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Et vous prévoyez cela pour le 3 mars ?

 20   M. ROBINSON : [interprétation] Oui. Je propose que cela se passe à 16

 21   heures le 3 mars, que l'on interrompe la déposition du Dr Karadzic et qu'il

 22   n'y ait pas d'interruption ce jour-là quand on s'attend à ce qu'il y ait du

 23   monde dans la galerie du public pour écouter M. Karadzic. Donc, le mieux ce

 24   serait pour le prévoir à 16 heures.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Cela ne vous gêne pas --

 26   M. TIEGER : [interprétation] Non.

 27   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Alors, est-ce que -- ah, nous avons le

 28   témoin suivant.


Page 47421

  1   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bonjour, Monsieur Gruban.

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Prononcez la déclaration solennelle,

  5   s'il vous plaît.

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

  7   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

  8   LE TÉMOIN : MOMCILO GRUBAN [Assermenté]

  9   [Le témoin répond par l'interprète]

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Je vous remercie. Veuillez vous

 11   installer confortablement.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Avant que vous ne déposiez, Monsieur

 14   Gruban, je dois vous informer comme suit nous avons un article dans notre

 15   Règlement de procédure et de preuve devant ce Tribunal, il s'agit de

 16   l'article 90(E). Et en application de cet article, vous pouvez refuser de

 17   répondre à toute question qui vous serait posée par M. Karadzic, par

 18   l'Accusation, voire même par les Juges si vous pensiez que votre réponse

 19   risquait de vous incriminer dans le cadre d'une procédure au pénal.

 20   Et ici, "incriminé" signifie dire quelque chose qui reviendrait à un aveu

 21   de culpabilité pour un délit ou un crime ou dire quelque chose qui pourrait

 22   fournir des éléments de preuve comme quoi vous avez commis un crime ou un

 23   délit. Toutefois, si vous veniez à penser que votre réponse risquait de

 24   vous incriminer, si vous refuseriez d'y répondre, de répondre à une telle

 25   question, je dois vous dire que le Tribunal a la possibilité de vous

 26   contraindre à répondre à une telle question. Seulement, si cela devait se

 27   produire, le Tribunal vous garantit que votre déposition obtenue dans de

 28   telles circonstances ne serait en aucun cas utilisée contre vous sauf dans


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  1   le cas de poursuite pour faux témoignage.

  2   Est-ce que vous comprenez cela, Monsieur ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je comprends.

  4   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Karadzic, vous avez la parole,

  5   vous pouvez poursuivre.

  6   Interrogatoire principal par M. Karadzic :

  7   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur Gruban.

  8   R.  Bonjour.

  9   Q.  Je dois vous demander de ménager une pause. Vous articulez bien. Mais

 10   je vais vous demander à prononcer lentement vos phrases pour gagner du

 11   temps et pour éviter qu'il y ait des problèmes au niveau du transcript.

 12   Monsieur Gruban, est-ce que vous avez rencontré mon équipe de Défense, est-

 13   ce que vous leur avez donné une déclaration ?

 14   R.  Oui, j'ai donné une déclaration.

 15   Q.  Merci.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande que l'on montre au témoin le

 17   document 1D9652.

 18   M. KARADZIC : [interprétation]

 19   Q.  A gauche, est-ce que vous voyez s'afficher la première page de la

 20   version serbe de votre déclaration ?

 21   R.  Oui, c'est ce que je vois.

 22   Q.  Merci. Avez-vous lu cette déclaration et l'avez-vous signée ?

 23   R.  Oui, lue et signée.

 24   Q.  Merci.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande l'affichage de la dernière page pour

 26   que le témoin puisse identifier la signature.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est ma signature.

 28   M. KARADZIC : [interprétation]


Page 47423

  1   Q.  Merci. Est-ce que cette déclaration reflète fidèlement ce que vous avez

  2   déclaré à mon équipe de Défense ?

  3   R.  Oui, au mieux de mes connaissances.

  4   Q.  Merci. Si je vous posais aujourd'hui les mêmes questions, vos réponses

  5   est-ce qu'elles seraient les mêmes pour ce qui est du fond ?

  6   R.  Oui, elles seraient les mêmes.

  7   Q.  Je vous remercie.

  8   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande que ce document soit versé au

  9   dossier en application de l'article 92 ter.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Maître Robinson.

 11   M. ROBINSON : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Nous avons

 12   identifié 23 photographies en tant que pièces connexes, qui ne figurent pas

 13   sur notre liste, puisqu'au moment où nous avons enregistré cette liste nous

 14   n'avions pas encore recueilli la déclaration du témoin. Je vous remercie.

 15   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Est-ce que vous avez des objections,

 16   Madame Sutherland ?

 17   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien, nous allons verser tout cela

 19   au dossier.

 20   M. LE GREFFIER : [interprétation] Alors, la déclaration 1D9652, devient la

 21   pièce D4388. Et les 24 photographies deviennent les pièces allant de D4389

 22   à D4412.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons entendre votre résumé après

 24   la pause.

 25   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je vous en prie.

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons faire une pause de 45

 27   minutes, et nous reprendrons à 13 heures 05.

 28   --- L'audience est levée pour le déjeuner à 12 heures 21.


Page 47424

  1   --- L'audience est reprise à 13 heures 10.

  2   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Pour le reste de l'audience

  3   d'aujourd'hui ainsi que pour l'audience de demain, nous siégeons en

  4   application de l'article 15 bis; Mme le Juge Lattanzi ne pourra pas se

  5   joindre à nous pour des raisons d'ordre personnel. Je vous remercie.

  6   Veuillez continuer, Monsieur Karadzic.

  7   L'ACCUSÉ : [interprétation] Merci.

  8   Je me propose de donner lecture en anglais d'un bref résumé de la

  9   déclaration de M. Momcilo Gruban. Par la suite, je l'inviterai à nous

 10   expliquer la teneur de deux documents qu'il a eu la gentillesse d'apporter.

 11   Momcilo Gruban a été mobilisé en septembre 1991 pour faire partie des

 12   forces de réserve de la police, et c'est là qu'il est resté jusqu'à la fin

 13   de la guerre. Il est arrivé au centre de rassemblement et d'enquête

 14   d'Omarska au début du mois de juin 1992 et il a été nommé chef des équipes

 15   de sécurité. En 2008 jusqu'en 2009, la chambre du tribunal de Bosnie-

 16   Herzégovine l'a condamné à sept ans d'emprisonnement. Le 31 décembre 2010,

 17   il a été remis en liberté anticipée.

 18   Après que les conflits aient été sur le territoire de la municipalité de

 19   Prijedor, M. Gruban a été enrôlé dans une escouade de police d'Omarska. Il

 20   a été actif et de service sur le territoire de la communauté locale de

 21   Maricka, qui comprenait une quinzaine de maisons occupées par des résidents

 22   d'autres groupes ethniques. Aucun n'a été tué et n'a vu sa propriété

 23   détruite, et ces gens sont toujours sur place. Ils résident sur le

 24   territoire de la communauté locale de Maricka.

 25   Les détenus d'Omarska étaient des gens qui avaient été trouvés dans

 26   la zone de combat et avaient été emmenés là-bas afin de préciser leur

 27   participation au conflit armé. Leur détention était prévue comme

 28   temporaire, et à partir du moment où leur responsabilité était établie, il


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  1   fallait soit les relâcher, soit les envoyer dans une prison. Les détenus

  2   étaient détenus dans plusieurs pièces et ils étaient répartis en

  3   différentes catégories par les inspecteurs de la sécurité militaire, de

  4   l'Etat et la sécurité publique.

  5   La Défense territoriale avait pour mission de sécuriser le périmètre

  6   externe autour de l'enceinte de la mine, tandis que l'équipe de police de

  7   réserve d'Omarska avait la responsabilité de garantir la sécurité à

  8   l'intérieur du centre de rassemblement et d'enquête d'Omarska. Pendant les

  9   trois premières semaines à partir du moment où le centre a été mis sur

 10   pied, la sécurité était également garantie par des unités spéciales de la

 11   police du centre des services de Sécurité de Banja Luka, le CSB.

 12   Les missions de M. Gruban comprenaient le fait de maintenir les

 13   communications et la distribution des repas aux gardiens, ainsi que le fait

 14   de rendre compte au chef du volet police de la sécurité, M. Mejakic, sur

 15   les éléments d'information reçus pendant la durée de son équipe. Son équipe

 16   comprenait à peu près 20 policiers qui étaient armés de canons longs de

 17   calibres différents. En l'absence de tout ordre concret portant sur le

 18   traitement à réserver aux détenus, ils étaient d'accord pour aider ces

 19   hommes dans toute la mesure du possible dans la limite de leurs

 20   attributions. Pendant le service de M. Gruban, les conditions de séjour

 21   étaient aussi humaines que possible compte tenu des circonstances imposées

 22   par l'état de guerre et la pénurie généralisée. Les détenus avaient accès à

 23   l'eau, aux sanitaires, et ils ne redoutaient pas un mauvais traitement.

 24   Un total d'environ 2 500 détenus sont passés par Omarska, dont environ 30

 25   des femmes qui avaient pris part activement à la rébellion armée. Les

 26   capacités de prise en charge étaient appropriées au départ, mais vu que le

 27   nombre de détenus n'a pas arrêté d'augmenter, très rapidement ces capacités

 28   n'étaient plus suffisantes et nombre de détenus se sont trouvés placés à


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  1   l'extérieur pendant la journée. Cependant, ils pouvaient passer la nuit au

  2   restaurant. M. Gruban n'a vu aucun individu plus jeune que 15 ans et il n'a

  3   pas vu non plus d'individus aux capacités mentales réduites au centre

  4   d'Omarska.

  5   En application du règlement, à partir du moment où un individu était

  6   admis dans un centre ou une installation de détention, il fallait qu'il

  7   soit fouillé. Aucun mauvais traitement n'était autorisé dans le cadre cette

  8   procédure, et M. Gruban a fait au mieux pour empêcher cela. Un groupe

  9   spécial de policiers a été désigné pour amener les détenus à

 10   l'interrogatoire et pour les ramener dans leurs pièces. Parfois, il est

 11   arrivé que des inspecteurs haussent la voix pendant les interrogatoires, et

 12   il y a eu des cas où on a eu recours à la force physique; mais dans la

 13   plupart des cas, les détenus ont reconnu eux-mêmes que l'interrogatoire

 14   avait été mené de manière correcte.

 15   Les détenus pouvaient se nourrir librement, et la plupart d'entre eux se

 16   rendaient régulièrement à attendre la distribution de la nourriture. Il

 17   n'empêche que des extrémistes qui avaient pris part à l'attaque sur

 18   Prijedor et qui avaient été blessés dans les combats étaient détenus dans

 19   la maison blanche, et leur nourriture leur était apportée par d'autres

 20   détenus. L'eau était disponible aux prisonniers, et la plupart des pièces

 21   disposaient de plusieurs robinets. L'enceinte de la mine était

 22   approvisionnée en eau potable puisée dans deux puits profonds, que ce soit

 23   avant ou pendant la guerre. Des conditions d'hygiène modestes étaient le

 24   résultat des circonstances de guerre, et il n'y a pas eu de mauvais

 25   traitement réservé aux détenus qui aurait été le résultat d'un plan.

 26   Il y a eu des cas où des groupes d'individus armés qui échappaient au

 27   système de contrôle ont réussi à s'introduire dans le centre d'Omarska et

 28   qu'ils ont imposé de mauvais traitement aux détenus. Ces groupes


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  1   paramilitaires étaient bien armés, et les gardiens du centre n'étaient pas

  2   en mesure d'opposer une résistance à ces groupes puisque les policiers

  3   étaient déployés sur l'ensemble de cette enceinte, donc sur une zone très

  4   large.

  5   M. Gruban n'est pas au courant de cas de viol, d'attaque ou

  6   d'humiliation de prisonniers. Pour autant qu'il le sache, personne n'a été

  7   ciblé sur la base de son éducation, de son appartenance confessionnelle ou

  8   autre.

  9   Je viens de présenter un bref résumé. A présent, je souhaite poser

 10   quelques questions à M. Gruban sur quelques documents.

 11   M. KARADZIC : [interprétation]

 12   Q.  Monsieur Gruban, vous avez eu l'amabilité de nous apporter deux

 13   documents qui sont placés en corrélation avec votre déclaration et votre

 14   travail.

 15   Je vous demande donc de nous expliquer de quoi il s'agit.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je voudrais qu'on montre 1D49067 au témoin. Il

 17   nous faut juste une page, mais il faudra la zoomer.

 18   M. KARADZIC : [interprétation]

 19   Q.  Pouvez-vous nous aider, Monsieur Gruban, qu'avons-nous sous les yeux ?

 20   Qui est-ce qui l'a fait et qui est-ce qui a consigné les notes qui s'y

 21   trouvent ?

 22   R.  Nous avons ici le rez-de-chaussée du bâtiment administratif de la mine

 23   d'Omarska, c'est là qu'on a détenu des gens. C'est moi qui ai inscrit ces

 24   renseignements puisque j'ai travaillé à la mine d'Omarska et je connaissais

 25   très bien les locaux en question.

 26   Si besoin est, je peux vous indiquer où ces personnes ont été

 27   détenues, je vais même vous donner -- j'ai fait des calculs de métrage et

 28   de superficie. Et je m'étais dit que puisque j'allais témoigner, il


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  1   faudrait peut-être montrer au Procureur et aux personnes présentes comment

  2   les choses se sont présentées dans la réalité.

  3   Q.  Merci. Est-ce que vous pouvez nous aider, nous dire ce que c'est que ce

  4   1A, A2, A3, et ainsi de suite ?

  5   R.  A1, c'est un garage qui était prévu pour un véhicule de service. Ce

  6   garage compte 21,16 mètres carrés. Et ça mesure 4,60 mètres sur 4,60

  7   mètres.

  8   Q.  Vous n'avez pas à entrer dans autant de détails. Veuillez nous indiquer

  9   quelles sont les différentes pièces que nous avons, et peut-être allons-

 10   nous tirer quelques détails au clair. Est-ce que vous pouvez expliquer le

 11   reste ?

 12   R.  A3, c'était cinq cabines avec des toilettes et quatre pissoirs. A4,

 13   c'est une pièce où il y avait dix robinets. A5 -- je parle peut-être un peu

 14   vite. A5, c'est l'entrée dans le bâtiment administratif du côté est. A6,

 15   c'est cinq douches d'un côté et cinq douches de l'autre; au total, dix

 16   pommeaux de douche. A7 et A8, ce sont des pièces avec des douches. Il y en

 17   a au total - 10, 15, 25 - 25 sur cet espace-là.

 18   Ces locaux-là, avant la guerre, ont été utilisés par les employés de

 19   la mine superficielle d'Omarska. C'est là que ces ouvriers se changeaient.

 20   A9, c'étaient les armoires, les vestiaires. Et les A6, 7, 8, les gens

 21   pouvaient se laver avant que de rentrer chez eux. 

 22   Q.  Merci. Qu'est-ce que c'est que ce A22 ?

 23   R.  A22, c'est le restaurant, la cantine. Il y a quelque 234 mètres carrés.

 24   Ça fait 10 mètres par 25 mètres, de mesure exacte. Nous, nous avions notre

 25   repas chaud, là. Et lorsque les détenus ont été placés là, il y a eu là la

 26   distribution de la nourriture.

 27   Q.  Merci. Alors, A19, encore des robinets et des toilettes ?

 28   R.  Oui, c'est exact. C'est juste avant d'entrer au restaurant, où on


Page 47429

  1   pouvait se laver les mains, il y avait des toilettes aussi, et il y a là

  2   des robinets pour permettre aux gens de se laver les mains. Dans le A19,

  3   quand il y a eu des personnes de détenues, on avait mis du personnel

  4   médical qui amenait une solution pour que l'on possède à des désinfections

  5   afin qu'il n'y ait pas de maladies infectieuses à se propager. C'est là que

  6   se trouvait donc cette équipe médicale, à A19. C'était du chlore avec je ne

  7   sais quoi, une solution qui était destinée à désinfecter les mains des gens

  8   avant la distribution des repas.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Un instant. Ligne 8, le témoin a dit

 10   "AD," et il a dit qu'il y avait là des vestiaires. Mais moi, je ne trouve

 11   pas de AD sur le schéma.

 12   Oui, Monsieur Gruban.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agit du A9. C'est une grande pièce qui

 14   porte le A9. Il n'y avait pas de AD.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] En serbe, "devet" veut dire 9. C'est de là que

 16   vient la confusion.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Bien, merci. Continuons.

 18   M. KARADZIC : [interprétation]

 19   Q.  Avez-vous eu des maladies infectieuses, des épidémies, pendant que vous

 20   vous trouviez là-bas ?

 21   R.  Je sais qu'il y a eu un cas de figure où une personne -- et je ne sais

 22   pas vous dire quelle était la maladie en question. On avait un service

 23   sanitaire, un médecin militaire et un infirmier. Et comme moi je

 24   travaillais à la mine, je connaissais les engins. Je suis allé jusqu'à un

 25   engin pour prendre du carburant et j'ai donné ça au chauffeur pour

 26   permettre le transport de ce malade à Banja Luka, où il a été hospitalisé.

 27   Et on l'a ramené. Et, Dieu merci, il est encore en vie et en bonne santé.

 28   On se parle de temps à autre.


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  1   Q.  Merci. Je vous prie de parler un peu plus lentement. Le numéro 14,

  2   c'est quoi ?

  3   R.  Le numéro 14, c'est ce qu'on appelle la verrière. C'est l'entrée de

  4   l'immeuble, et c'est là que l'on a fait séjourné également des détenus.

  5   Q.  Et le numéro 15 ?

  6    R.  Le 15, c'est l'entrée du côté sud, l'entrée du bâtiment administratif,

  7   mais côté sud.

  8   Q.  Merci. Est-ce que vous pouvez nous dire où se trouve la cuisine ? Voit-

  9   on ici la cuisine ?

 10   R.  Vous parlez de la ligne de distribution d'alignement. C'est le 23. Ça

 11   venait au 28, les rations venaient au 28, puis on faisait transiter par le

 12   A24 et au A23, il y avait une ligne de distribution des plats. Ça a été en

 13   place avant la guerre et pendant le séjour des détenus dans ces locaux.

 14   Q.  Alors, pourquoi a été utilisé ce bâtiment avant les conflits et avant

 15   que l'on y place des détenus ?

 16   R.  Ce bâtiment était le bâtiment administratif de la mine. Il y avait

 17   d'abord eu des détenus, puis ensuite on a fait séjourné là des membres de

 18   l'armée serbe et des réfugiés serbes qui étaient venus des municipalités de

 19   la Krajina de l'ouest : Sanski Most, Petrovac et ainsi de suite.

 20   Q.  Merci. Est-ce que le bâtiment avait été amélioré, réparé entre le

 21   séjour des prisonniers et le séjour de l'armée serbe et des réfugiés serbes

 22   ?

 23   R.  Non. On a rien réparé. La première construction de l'immeuble a été

 24   effectuée en 2004 lorsque la mine a été reprise par la compagnie Mittal. Il

 25   a eu des réparations mineures de faites du point de vue de l'apparence

 26   extérieure des choses. Mais là, de l'intérieur, les locaux sont restés les

 27   mêmes. Il y a peut-être eu des éléments décoratifs de refaits à

 28   l'extérieur, des fenêtres.


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  1   Q.  Mittal, c'est une société qui vient d'où ?

  2   R.  Mittal, c'est une compagnie très réputée qui s'occupe de l'exploitation

  3   du minerai de fer. Ils ont des aciéries, des mines et ils tiennent

  4   l'aciérie de Cicak, de Smederevo. C'est un Hindou qui en est le

  5   propriétaire et la compagnie est une compagnie d'origine anglaise.

  6   Q.  Alors, vous avez dit que le propriétaire était hindou et que la

  7   compagnie était britannique ?

  8   R.  Oui, pour autant que je le sache. Je ne sais pas si les choses ont

  9   changé de ce côté-là.

 10   Q.  Merci.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut nous montrer maintenant la

 12   page suivante, s'il vous plaît.

 13   M. KARADZIC : [interprétation]

 14   Q.  Monsieur Gruban, est-ce que vous avez eu des locaux plus confortables

 15   et meilleurs pour ce qui est de l'ébergement des détenus ou, voire des

 16   personnes qui étaient censées être interrogées à Prijedor ?

 17   R.  D'après ce que j'en sais, sur le territoire de la municipalité de

 18   Prijedor, nous n'avions pas eu de locaux de ce type pour ce qui est de

 19   pouvoir y installer un tel nombre de détenus. Au centre du poste de

 20   sécurité publique, il y avait une petite pièce de garde à vue où on aurait

 21   pu mettre quelques personnes, mais cette pièce ne pouvait pas accueillir

 22   plus de dix personnes.

 23   Q.  Merci. Est-ce que vous pouvez maintenant nous dire ce que nous avons

 24   sous les yeux ?

 25   R.  Ce schéma est l'étage du bâtiment administratif de tout à l'heure, il y

 26   a quelques instants. Nous avons vu le rez-de-chaussée, maintenant nous

 27   voyons le premier étage.

 28   Q.  Est-ce que vous pouvez nous dire ce que ces pièces annotées sont ? Et


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  1   qu'est-ce que c'est que cette pièce qui ne porte aucune annotation ?

  2   R.  Ces pièces ont été utilisées avant la guerre, et là, je vous ai indiqué

  3   qui séjournait. On avait, par exemple, le gérant de l'exploitation, puis le

  4   service des actives au numéro 10. Les services de comptabilité au 9. Au B1,

  5   c'était la salle, une grande salle de réunion du conseil ouvrier. Le

  6   directeur était au B1; la secrétaire au B2; le directeur technique au B3;

  7   le juriste au B4; les ingénieurs au numéro B5.

  8   Q.  Ralentissez, s'il vous plaît.

  9   R.  B6 et B7, c'étaient des toilettes et une douche à chaque fois, et il y

 10   avait aussi des lavabos pour se laver la figure, et cetera. Le B8, c'est un

 11   couloir, et ainsi de suite.

 12   C'était donc ce qui se trouvait là avant les événements. Lorsque ces

 13   événements se sont produits, à l'étage du bâtiment administratif, on avait

 14   mis des inspecteurs. Il y avait des équipes d'inspecteurs qui se

 15   composaient de trois hommes chacune, et ces hommes interrogeaient les

 16   détenus, procédaient aux sélections et catégorisations. La pièce B5 était

 17   la pièce de où se trouvaient les hommes de permanence. Il y avait là deux

 18   ou trois policiers. Il y avait un poste émetteur-récepteur, et il y avait

 19   deux dactylos qui retapaient les déclarations recueillies auprès des

 20   détenus. C'est là qu'on les retapait avec des machines à écrire. A

 21   l'époque, il n'y avait pas d'ordinateurs, mais c'étaient des machines à

 22   écrire manuelles, classiques. Ensuite, on ramenait les documents pour

 23   signature à qui de droit.

 24   Q.  Merci. Je vois un ERN, un numéro ERN. Qui est-ce qui a fait ce schéma ?

 25   Sans compter les inscriptions au crayon que vous avez apposées vous-même.

 26   R.  Eh bien, c'est dans mon affaire que j'ai reçu ces schémas de la part du

 27   bureau du Procureur. Tout ce que nous avons pu obtenir dans l'affaire me

 28   concernant, ça nous a été remis par les soins du bureau du Procureur, parce


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  1   que nous ne pouvions trouver aucun document à cet effet. Je ne sais pas si

  2   vous le saviez, mais lorsque les effectifs de la SFOR sont entrés dans le

  3   poste de sécurité publique, la documentation entière a été saisie, ce qui

  4   fait que pour notre défense, nous ne pouvions rien trouver du tout,

  5   exception faite de ce qui nous a été confié par les soins du Procureur.

  6   Q.  Merci. Alors, dites-nous qu'est-ce que cette grande case où il n'y a

  7   aucune inscription ?

  8   R.  Ça, c'est une partie du toit, c'est le toit du restaurant ou de la

  9   cantine. La cantine se trouvait, donc, en dessous.

 10   Q.  Merci.

 11   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'aimerais maintenant qu'on nous montre la page

 12   suivante, s'il vous plaît.

 13   A la ligne 8, il faudrait dire que c'est le toit qui se trouve au-dessus de

 14   la cantine.

 15   M. KARADZIC : [interprétation]

 16   Q.  La cantine, on la trouvait dans le schéma affiché en premier lieu,

 17   n'est-ce pas ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Est-ce que vous pouvez nous aider et nous dire de quoi il s'agit ?

 20   R.  Bien sûr. Ceci est le rez-de-chaussée de l'atelier qui est souvent

 21   mentionné ici au tribunal, et on l'a appelé le hangar. Les choses seront

 22   ainsi plus claires pour ce qui est de l'équipe du bureau du Procureur.

 23   Mais ça, c'est un atelier. Et avant la guerre, on y entretenait les

 24   véhicules, les dumpers, les engins et les petits véhicules destinés à

 25   satisfaire aux besoins de la mine. Et quand les événements se sont

 26   produits, on a également placé là des détenus.

 27   Q.  Merci.

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut nous afficher -- non,


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  1   excusez-moi.

  2   M. KARADZIC : [interprétation]

  3   Q.  Dites-nous ce qu'il y a un peu ici. Il y a un point d'eau, n'est-ce pas

  4   ?

  5   R.  Oui. Il y a un point d'eau. Vous voyez cette pièce A11. C'est là qu'il

  6   y avait 24 robinets à eau potable, il y a six pissoirs et, vers le bout, il

  7   y a cinq cabines de toilette délaissées. Et les personnes détenues ont été

  8   placées sur le -- enfin, ils se trouvaient à l'emplacement qui se trouve à

  9   gauche, en haut. Il y a une espèce de pièce de 23 mètres sur 19 mètres et

 10   quelques, et c'est là qu'on avait placé des détenus. Au rez-de-chaussée, il

 11   y a une autre pièce où on les avait placés. C'est la tenue électrique du

 12   système B de la mine.

 13   C'est ce qui se trouve au niveau du A17. Ça, c'est pour ce qui est du rez-

 14   de-chaussée.

 15   Et à partir de ce rez-de-chaussée, il y a le A15 et le A8, ce sont

 16   deux cages d'escalier. Je ne sais pas si vous voyez ce que je suis en train

 17   de vous montrer. Ce sont des escaliers qui permettaient d'accéder à l'étage

 18   de l'atelier en question.

 19   Q.  Merci.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-on nous montrer l'image suivante, s'il

 21   vous plaît.

 22   M. KARADZIC : [interprétation]

 23   Q.  Alors, nous sommes ici à l'étage de l'atelier. Que se trouvait donc ici

 24   ?

 25   R.  C'est l'étage de l'atelier, oui. A gauche de l'escalier, comme on les a

 26   vus tout à l'heure en bas, on sort de l'escalier.

 27   Et cette grande salle -- je ne l'avais pas mais j'ai obtenu cette

 28   image de la part du bureau du Procureur, alors lorsque j'ai procédé à mes


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  1   préparatifs, j'ai dessiné les choses ainsi. Cette grande salle qui porte le

  2   A1, c'est là qu'on avait installé des détenus.

  3   Q.  Dites-nous ce que ça avait été avant ?

  4   R.  C'était une grande salle de réunion. C'est là que se réunissaient les

  5   employés de l'atelier que je viens de vous décrire tout à l'heure.

  6   Q.  Merci.

  7   R.  Au A2, il y avait l'assistant du directeur. Ça a été vidé. On a sorti

  8   des meubles comme on a sorti les meubles de toutes ces pièces. Et on a mis

  9   des détenus aux A3, A4, et cetera. Et à l'étage, il y a aussi des points

 10   d'eau. Je les ai indiqués en mettant un numéro 5 et un numéro 6.

 11   Q.  Merci.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Peut-on nous montrer l'image suivante, s'il

 13   vous plaît.

 14   M. KARADZIC : [interprétation]

 15   Q.  Que nous montre-t-on ici ? Dites-nous ce que ça avait été auparavant et

 16   à quoi ça a servi ?

 17   R.  Eh bien, pour ce qui est de cette image, c'est quand on est monté à

 18   l'étage. Tout à l'heure, on a vu le côté gauche de l'étage. Ici, c'est

 19   l'espace à droite de l'escalier. Et ces locaux portent des désignations.

 20   Par exemple, au numéro 4, il y avait des vestiaires, c'est là que les gens

 21   se changeaient. Lorsque les détenus sont arrivés --

 22   Q.  Mais de grâce, ralentissez.

 23   R.  Excusez-moi. On a sorti toutes les armoires, et cet espace a été libéré

 24   pour qu'on puisse y mettre des détenus. L'espace numéro 6, c'est là que se

 25   trouvaient des douches. C'est là que se douchaient les employés chargés de

 26   l'entretien.

 27   Q.  Ralentissez. A quoi ça a servi une fois que ça a été transformé en

 28   unité de détention ?


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  1   R.  Toutes les personnes ont été gardées là. Les gardiens n'entraient pas

  2   dans ces locaux. Les gardiens se trouvaient à l'escalier d'accès,

  3   l'escalier qui permet de monter à l'étage. Ce qui fait que les gens

  4   pouvaient librement utiliser les différentes pièces.

  5   Vous voyez, par exemple, au numéro 15, ça avait été un atelier de

  6   réparation électrique. Ça a été vidé et on l'a cédé aux personnes qui ont

  7   été hébergées là. Comme toutes ces pièces, on avait sorti l'inventaire, les

  8   meubles, et on a fait de ces pièces des pièces où ont séjourné les détenus.

  9   Q.  Merci. Est-ce que vous pouvez nous dire comment ça s'est passé du point

 10   de vue de l'approvisionnement en vivres ? Quelle a été la mission confiée

 11   aux autorités municipales ? Comment les choses se sont passées et quelle

 12   était la consommation de vivres dans ce bâtiment ?

 13   R.  Vous parlez du moment où il y a eu des détenus dedans ?

 14   Q.  Oui.

 15   R.  Les vivres ou les plats ont été préparés dans la cuisine qui se trouve

 16   à quelque un kilomètre et demi de ce bâtiment, il est question d'un

 17   bâtiment à l'entrée du complexe de la mine d'Omarska. Il y a eu de grosses

 18   difficultés pour ce qui est de la préparation des plats, surtout quand il

 19   n'y avait pas d'électricité. Les plats ont été préparés pour l'armée, pour

 20   la police, pour la Défense territoriale et pour les détenus. Donc, on

 21   préparait à manger, un grand nombre de repas. Je vous dirais que les

 22   détenus recevaient un repas par jour qui se composait d'une assiette d'un

 23   plat cuisiné et d'un quart d'une miche de pain. Et, en même temps, la

 24   région d'Omarska, et de la Krajina en général, ça avait été coupé du reste

 25   du monde. Le corridor était fermé. La Krajina était encerclée. Il y avait

 26   de grosses pénuries de vivres, de médicaments, et si vous vous en souvenez,

 27   à Banja Luka, il y a eu 12 bébés qui sont morts par manque de médicaments.

 28   Ce n'est que lorsque le corridor a été ouvert, lorsque la Krajina a pu


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  1   faire une jonction avec la République fédérale de la Yougoslavie et le

  2   reste du territoire de la République serbe de Bosnie-Herzégovine, c'est là

  3   qu'il a été possible d'acheminer des vivres, des médicaments et autres

  4   produits de première nécessité.

  5   Q.  A la ligne 3, on a consigné un morceau de pain. Vous avez dit un quart

  6   d'une miche de pain.

  7   R.  Oui, ça fait un quart de kilo. On coupe une miche de main en quatre.

  8   Q.  Merci.

  9   R.  Je dois vous dire en sus que nous étions quelques-uns à apporter de

 10   quoi manger de la maison et on partageait avec les détenus. Ça a été fait

 11   sur notre propre initiative, et je sais qu'il y a eu d'autres personnes en

 12   sus de moi-même à avoir fait la même chose.

 13   Q.  Merci.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande le versement au dossier de ce

 15   document.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous allons lui donner une cote à des

 17   fins d'identification.

 18   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce MFI D4413, Messieurs les

 19   Juges.

 20   M. KARADZIC : [interprétation]

 21   Q.  Le document suivant, c'est une liste des agglomérations. Mais je crois

 22   que maintenant on pourra le mettre de côté, ce document, parce que ça n'a

 23   pas une importance de tout premier ordre.

 24   Merci, Monsieur. Je n'ai plus de questions pour vous.

 25   R.  Si vous me le permettez, je ne sais pas si ça vous a échappé à la

 26   lecture de la déclaration, ou je ne sais pas si peut-être on a mal traduit.

 27   Mais je ne sais pas vous dire le numéro de la ligne. On a dit que j'avais

 28   été affecté au poste de chef d'équipe. Moi, j'ai dit que j'ai été affecté


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  1   au poste de responsable de permanence dans la pièce où je travaillais.

  2   Et on avait dit que le directeur était Mejakic. Mejakic n'était pas

  3   directeur. Je m'excuse si c'est une erreur d'interprétation, mais nous

  4   savons tous que Mejakic n'était pas le directeur.

  5   Autre erreur encore que j'ai consignée, on aurait dit que les détenus

  6   pouvaient manger quand ils voulaient. Non, pas quand ils voulaient. Quand

  7   c'était le tour de leur pièce, c'est là que ceux qui étaient dans telle

  8   pièce allaient ensemble manger.

  9   M. KARADZIC : [interprétation]

 10   Q.  Oui, pour Gruban [comme interprété], on a dit qu'il était chef de la

 11   sécurité de la police. Il se peut que l'interprétation ait été faite

 12   autrement.

 13   Mais je vous remercie. Et le résumé, ce n'est pas une pièce à conviction.

 14   Ce qui importe, c'est ce qui se trouve dans texte de la déclaration.

 15   R.  Merci.

 16   Q.  Vous allez maintenant être contre-interrogé par l'Accusation. Est-ce

 17   que vous avez le texte de votre déclaration sous les yeux ?

 18   R.  Non, je ne l'ai pas.

 19   L'ACCUSÉ : [interprétation] Est-ce qu'on peut lui en fournir un.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, allez-y, Madame Sutherland.

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, excusez-moi. En ligne 14, ce n'est pas

 22   "Gruban" qu'il fallait consigner. C'est "Mejakic" que l'on devait noter. Et

 23   c'est dans le résumé qu'on a indiqué qu'il avait été à la tête de la police

 24   civile. Moi, j'ai dit" Mejakic", et au compte rendu on a consigné "Gruban".

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, merci.

 26   Contre-interrogatoire par Mme Sutherland :

 27   Q.  [interprétation] Monsieur Gruban, on vous appelle Momo Gruban aussi,

 28   n'est-ce pas ?


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  1   R.  Oui.

  2   Q.  Votre surnom c'est aussi Ckalja ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Il y a eu un acte d'accusation public dressé contre vous en février

  5   1995 par ce Tribunal-ci, et vous avez été un fugitif jusqu'à votre

  6   reddition en mai 2002; c'est bien cela ?

  7   R.  L'acte d'accusation a été dressé -- je n'ai pas été un fugitif. J'ai

  8   répondu présent à la convocation du Tribunal dès qu'une loi a été adoptée

  9   concernant la coopération avec ce Tribunal entre la Republika Srpska et la

 10   République fédérale de Yougoslavie. A l'époque, j'étais en RFY, et dès que

 11   ces deux lois ont été promulguées, je me suis tout de suite porté présent

 12   pour répondre à la convocation de ce Tribunal.

 13   Q.  Vous avez été en liberté entre février 1995 et mai 2002; c'est bien

 14   cela ?

 15   R.  C'est exact.

 16   L'ACCUSÉ : [interprétation] Objection. On dit : Vous avez en liberté. Mais

 17   "at large" en anglais, c'est en fuite. Et il faudrait demander au témoin

 18   s'il confirme d'avoir été en fuite.

 19   Mme SUTHERLAND : [interprétation] M. Gruban a déjà répondu à la question.

 20   Il a dit oui.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, il a évoqué une question

 22   d'interprétation. Il a entendu la question interprétée comme s'il avait été

 23   en liberté. Ligne 17.

 24   Je vous prie de répéter la question.

 25   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 26   Q.  Monsieur Gruban, vous avez été fugitif, ou plutôt, vous étiez libre,

 27   jusqu'à votre reddition au Tribunal à compter du moment où il y a eu un

 28   acte d'accusation de dressé à votre encontre en février 1995, et vous êtes


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  1   resté libre jusqu'au 19 mai 2002, date de votre reddition.

  2   R.  Moi, je n'ai pas pu me rendre parce que les autorités de ma république

  3   n'avaient pas de loi de coopération. Il y a eu des gens qui se sont rendus

  4   suivant une filière à titre privé. Je vous rappelle qu'en arrivant à La

  5   Haye, et c'est M. Kwon qui a fait partie du panel des Juges et feu le Juge

  6   May, je suis le premier des Serbes a avoir été relâché avec des garanties

  7   de la République fédérale de Yougoslavie et de la Republika Srpska. Je me

  8   suis conformé à toutes les conditions et, par la suite, il y a eu des mises

  9   en liberté provisoire d'autres accusés. Donc, je n'ai fait aucune entorse

 10   aux conditions de ma remise en liberté provisoire dans l'attente du procès.

 11   Q.  Monsieur Gruban, vous n'avez pas répondu à ma question. Je ne vous ai

 12   pas parlé de libération provisoire.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Continuez.

 14   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 15   Q.  En 2006, votre procès a été transféré du TPIY au tribunal de Bosnie-

 16   Herzégovine, où vous avez donc été poursuivi avec d'autres co-accusés,

 17   c'est-à-dire Zeljko Mejakic, et cetera ?

 18   R.  Ce n'est pas exact. Zeljaja n'était pas un de mes co-accusés. Nous ne

 19   faisions pas partie du même procès.

 20   Q.  J'ai dit, Zeljko Mejakic.

 21   R.  Les discussions concernant notre transfert à Sarajevo se sont tenues

 22   ici. Nous avons eu une objection à savoir que nous n'aurions pas de procès

 23   équitable à Sarajevo et que nous ne pourrions pas garantir nos droits de

 24   l'homme.

 25   Q.  Monsieur Gruban, désolée de vous interrompre. Je voulais simplement que

 26   vous confirmiez qu'en 2006, votre procès a été transféré d'ici au tribunal

 27   de l'Etat de Bosnie-Herzégovine et que vous avez donc fait l'objet d'un

 28   procès là-bas avec trois co-accusés.


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  1   R.  Malheureusement, malheureusement, effectivement, ce procès a été

  2   transféré là-bas.

  3   Q.  Et vous avez été condamné en 2008 pour des crimes commis contre des

  4   non-Serbes au camp d'Omarska. Vous avez été condamné pour des crimes contre

  5   l'humanité puisque ces crimes avaient été commis alors que vous étiez de

  6   permanence, également des crimes qui ont été commis alors que vous n'étiez

  7   pas de service, mais que le système de mauvais traitement et de persécution

  8   au camp était appliqué tel que celui que vous appliquiez quand vous étiez

  9   de service, n'est-ce pas ?

 10   R.  Malheureusement, ce tribunal a violé les droits de l'homme des accusés.

 11   Mon dossier est encore à Strasbourg, et la Cour constitutionnelle de

 12   Bosnie-Herzégovine a également cassé les jugements en raison du caractère

 13   rétroactif de la loi.

 14   Q.  Monsieur Gruban, vous avez été condamné pour crimes contre l'humanité

 15   par le tribunal d'Etat, n'est-ce pas ?

 16   R.  Malheureusement, vous avez vu comment le tribunal s'est comporté. La

 17   décision a été ce qu'elle a été. Mais cette affaire n'est pas terminée.

 18   J'espère que la Cour de Strasbourg cassera cette décision et qu'un nouveau

 19   procès sera organisé.

 20   Q.  Vous avez été plus précisément condamné pour meurtre; emprisonnement,

 21   internement illégal et arbitraire des détenus du camp; torture, composée de

 22   passages à tabac; et d'autres agressions sexuelles; ainsi que d'autres

 23   agressions inhumaines, à savoir l'internement des détenus dans des

 24   conditions inhumaines, le harcèlement, l'humiliation ainsi que d'autres

 25   actes de maltraitance psychologique. N'est-ce pas ?

 26   R.  C'est ce que vous avez dit. Des enquêtes ont été menées contre moi dès

 27   que les premiers prisonniers ont été libérés en 1992 et jusqu'à la fin. Et,

 28   pour l'instant, je n'ai encore vu aucune déclaration de quel que témoin que


Page 47443

  1   ce soit qui aurait déclaré que j'ai commis quelle que exaction que ce soit

  2   contre quel que détenu que ce soit.

  3   Q.  Monsieur le Témoin, je vous demande de confirmer que ce sont les crimes

  4   pour lesquels vous avez été condamné par le tribunal d'Etat de Bosnie.

  5   C'étaient les conclusions de votre chambre au tribunal d'Etat de Bosnie-

  6   Herzégovine. Que vous soyez d'accord ou pas, ça a été la décision qui a été

  7   prise par ce tribunal-là, n'est-ce pas ?

  8   R.  Je vous ai dit que la procédure est encore en cours. Un appel a été

  9   déposé auprès de la Cour de Strasbourg. Il est possible que ce soit le cas

 10   à l'heure actuelle, mais j'espère sincèrement que ce ne sera pas la

 11   dernière décision en l'espèce.

 12   Q.  Et vous avez été condamné au départ à une peine d'emprisonnement de 11

 13   ans qui a été ensuite réduite en appel à sept ans, n'est-ce pas ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Au paragraphe 2 de votre déclaration, vous dites que les Serbes

 16   constituent la majorité dans 42 des 72 localités dans les municipalités

 17   serbes. Mais il y avait plus de Musulmans que de Serbes dans certains

 18   d'entre elles, n'est-ce pas ?

 19   R.  D'après le recensement de 1991, pour la première fois, il y avait plus

 20   de Musulmans que de Serbes à Prijedor. Et sur les 71 localités, les Serbes

 21   étaient majoritaires dans 42 localités, soit 67 % du territoire total de la

 22   municipalité de Prijedor.

 23   Q.  Les Serbes ne constituaient pas non plus la majorité de la population

 24   dans la ville de Prijedor, lorsque vous faites le calcul des différents

 25   groupes ethniques, les Musulmans et les Croates étant pris ensemble ?

 26   R.  Les Serbes représentaient la majorité à Prijedor. Si vous consultez le

 27   recensement de 1991, et je l'ai reçu de votre part, vous verrez que d'après

 28   ce recensement, les Serbes étaient majoritaires dans la ville à proprement


Page 47444

  1   parler.

  2   Q.  Dans la ville de Prijedor, il y avait 13 927 Serbes. Mais si vous

  3   combinez les Musulmans et les Croates, vous avez une population de 15 145

  4   personnes.

  5   Nous pouvons afficher ce document qui est le recensement, mais est-ce que

  6   vous acceptez les chiffres que je vous présente ? Je parle de la ville de

  7   Prijedor même.

  8   R.  Je ne comprends pas pourquoi vous combinez les Musulmans et les

  9   Croates. Pourquoi pensez-vous qu'ils représentent une seule entité ?

 10   Pourquoi ne pas parler des Yougoslaves des autres ? Selon vous, ils

 11   devraient faire partie de quelle catégorie ?

 12   Q.  Si vous les rajoutez, nous arrivons à 20 708, donc, les Serbes

 13   n'étaient pas majoritaires dans la ville de Prijedor, n'est-ce pas ?

 14   R.  Les Serbes représentaient la majorité par rapport à toutes les autres

 15   catégories individuelles. Je parle des Musulmans, des Croates et des

 16   Yougoslaves et des divers.

 17   Q.  Au paragraphe 2, vous mentionnez que la commune locale de Maricka était

 18   composée d'environ 15 personnes composées de 50 résidents d'autres

 19   appartenances ethniques, et vous l'avez mentionné dans votre déposition

 20   encore une fois aujourd'hui.

 21   En fait, il y avait cinq Croates et aucun Musulman qui habitaient

 22   dans le village de Maricka, n'est-ce pas ?

 23   R.  Où avez-vous trouvé cela ? Si vous avez le recensement, mettez-le à

 24   l'écran, et vous verrez qu'il y avait 50 non-Serbes, qui est le terme que

 25   vous avez utilisé ici; 50 non-Serbes qui vivaient dans cette localité et

 26   qui y vivent toujours d'ailleurs. Aucun d'entre eux n'a été tué. Ils ont

 27   encore leurs biens, leurs bâtiments religieux, leurs cimetières, rien n'a

 28   changé.


Page 47445

  1   Q.  Monsieur Gruban, il y avait cinq Croates et aucun Musulman, un

  2   Yougoslave et 28 divers ou 28 personnes appartenant à d'autres groupes

  3   ethniques dans le village de Maricka. Est-ce que vous confirmez, ou est-ce

  4   que vous êtes d'accord avec moi lorsque je dis qu'il n'y avait que cinq

  5   Croates et aucun Musulman ? Et ceci d'après le recensement de 1991.

  6   R.  Peut-être que l'on ne se comprend pas bien. La commune locale de

  7   Maricka est composée de trois Maricka : Maricka San [phon], Maricka Dju

  8   [phon], Maricka Duba [phon]. Et ces quatre villages représentaient la

  9   commune locale de Maricka Kriveja et trois villages qui ont dans leurs noms

 10   le nom de Maricka. C'est ce dont je parle.

 11   Q.  Est-ce que vous êtes d'accord pour dire que dans cette commune, il y

 12   avait que cinq Croates et aucun Musulman ?

 13   R.  Pourquoi est-ce un problème ? Affichons le recensement à l'écran et ne

 14   rentrons pas dans des conjectures. Je sais qu'il y en avait 50. Pourquoi

 15   rentrer dans des conjectures ?

 16   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Pourrait-on avoir sur les écrans le

 17   document de la liste 65 ter 002425S [comme interprété], s'il vous plaît. Je

 18   demande l'affichage du recensement publié à Zagreb en 1995 [comme

 19   interprété] qui porte le numéro 65 ter 00242S.

 20   L'ACCUSÉ : [interprétation] Mais en 1995, il n'y avait pas de recensement.

 21   Il y en a eu en 1991 et le suivant a été organisé l'année dernière.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous pouvez aborder ceci dans vos

 23   questions supplémentaires si nécessaire.

 24   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 25   Q.  Monsieur Gruban, vous pouvez voir en bas les différentes parties de la

 26   municipalité de Prijedor.

 27   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Est-ce que l'on peut passer à la deuxième

 28   page.


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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] On sait bien que le recensement a eu lieu en

  2   1991 et l'année dernière. Je n'ai jamais entendu parler d'un recensement de

  3   1995. Qui a organisé ce recensement en 1995 et comment mon nom n'est pas

  4   là-dessus ? Je ne suis pas au courant d'un recensement qui aurait eu lieu

  5   en 1995.

  6   Mme SUTHERLAND : [interprétation] J'ai dit que c'était le recensement de

  7   1991 qui a été publié en 1995. Il s'agit du recensement de 1991.

  8   Q.  Vous voyez que tout en bas de la page, en commençant par le bas, le

  9   troisième village est Maricka. Et si l'on passe à la page suivante --

 10   R.  Pourrait-on agrandir un peu ce document, parce que c'est un peu trop

 11   petit pour moi.

 12   Q.  Vous voyez au numéro 43, 1 598 Serbes; cinq Croates, aucun Musulman; un

 13   Yougoslave; et 28 personnes d'appartenance ethnique diverse ou autre.

 14   R.  Oui. Mais qu'en est-il des autres chiffres ? Je ne vois pas le haut des

 15   colonnes.

 16   Je peux voir qu'il y a deux Yougoslaves, d'accord ? Si je consulte la

 17   ligne 43.

 18   Q.  Un Yougoslave et 28 autres.

 19   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Madame Sutherland, je ne suis pas sûr de

 20   bien suivre tout cela. Est-ce que l'on pourrait voir le haut de cette page,

 21   s'il vous plaît ? Est-ce qu'on voit deux séries de chiffres pour 1991 ?

 22   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Oui.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Et dans la traduction en anglais, on

 24   voit 48, 53, et cetera, et cetera.

 25   Mme SUTHERLAND : [interprétation] C'était sur la page précédente. Le

 26   recensement a toujours deux pages pour chaque page. Deux pages pour chaque

 27   localité.

 28   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Si vous voulez continuer à poser des


Page 47447

  1   questions là-dessus, pourquoi ne pas faire impression de ces deux pages et

  2   les donner en version papier au témoin.

  3   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Oui, si ça peut être fait.

  4   L'ACCUSÉ : [interprétation] Si je peux être entendu, je vais donner lecture

  5   des différentes rubriques en serbe.

  6   "La population de Croatie qui est originaire de Bosnie-Herzégovine" --

  7   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous avons une traduction écrite en

  8   anglais. Je pense que vous allez avoir des copies papier.

  9   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 10   Q.  Et, Monsieur Gruban, lorsque vous recevrez ce document, ce qui

 11   m'intéresse, ce sont les chiffres qui sont en haut à gauche de la page.

 12   Je voudrais simplement que vous confirmiez qu'il n'y avait en fait que cinq

 13   Croates et aucun Musulman dans la commune de Maricka.

 14   R.  Je ne comprends vraiment pas, parce que sur la rubrique il est

 15   mentionné : "Population de Croatie qui est originaire de Bosnie-Herzégovine

 16   et divisée par les différentes localités." Mais à la page 197, je n'ai pas

 17   les localités, je n'ai que des numéros. Donc, avec les numéros, je ne peux

 18   pas vous dire à quoi correspond la population. Si vous regardez à la

 19   première page, vous avez les noms, en fait, des différentes localités. Est-

 20   ce que vous avez quelque chose de similaire à un document où il est

 21   mentionné Maricka, avec les chiffres, et de cette manière je pourrais en

 22   tirer des conclusions concernant les chiffres exacts.

 23   Vous voyez, il n'y a pas de nom de localités sur le document que vous

 24   m'avez donné.

 25   Q.  Monsieur Gruban, comme je vous l'ai montré sur l'écran, vous avez vu

 26   Maricka qui était à la troisième ligne en partant du bas. Et vous avez

 27   également vu que ça correspondait au numéro 43 dans l'angle droit de la

 28   page. Donc, si vous consultez le numéro 43, vous pourrez voir en fait les


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  1   chiffres pour 1991. Total de Croates, Musulmans, Serbes, Yougoslaves et

  2   autres.

  3   R.  Ecoutez, il faut ajouter la localité de Krivaja aussi puisque cela fait

  4   une communauté locale. Moi, j'ai parlé de la communauté locale de Maricka,

  5   donc je parlais de l'ensemble des deux. Il faudra additionner, puis ensuite

  6   vous saurez qu'il s'agit de 50, que ce sera ça, le résultat de l'addition.

  7   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais

  8   demander que ce document soit versé au dossier pour passer à autre chose.

  9   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Deux pages.

 10   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Non. Il s'agit des résultats du

 11   recensement pour la municipalité de Prijedor.

 12   M. LE JUGE KWON : [interprétation] De combien de pages ? Six pages ?

 13   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Il me semble qu'il faut se servir des résultats

 15   du recensement officiel de l'Etat de Bosnie-Herzégovine, et non pas de la

 16   Croatie.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Attendez un instant. Je ne comprends pas

 18   la pagination. Vous demandez que l'on verse au dossier combien de pages ?

 19   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Six pages, Monsieur le Président. Ce

 20   serait peut-être plus facile si l'on s'appuie sur l'impression papier qui a

 21   été faite par M. l'Huissier.

 22   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Très bien. Nous allons admettre

 24   cela au dossier.

 25   [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

 26   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Nous n'avons pas besoin d'attribuer une

 27   cote provisoire.

 28   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P6684.


Page 47449

  1   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

  2   Q.  Au paragraphe 2 de votre déclaration, Monsieur Gruban, vous dites que

  3   les Serbes occupaient 67 % du territoire et que les minorités non-serbes

  4   qui résident dans cette zone bénéficient de la protection de la part des

  5   autorités et que la plupart de ces gens sont toujours en place.

  6   Alors, vous savez que cela n'est pas vrai. Les minorités non-serbes ne

  7   bénéficiaient pas de la protection de la part des autorités et la plupart

  8   n'étaient plus en résidence là-bas.

  9   R.  Ecoutez, je vous parle de la zone où j'ai vécu et où j'ai travaillé.

 10   Donc, je me concentre surtout sur ma communauté locale. Tous les non-Serbes

 11   sont restés, comme je vous l'ai dit, ils sont restés sur place. Leurs

 12   bâtiments ou leurs édifices religieux, leurs propriétés, eh bien, on n'y a

 13   pas touchés, leur cimetière, leurs biens --

 14   Q.  Monsieur, vous limitez votre déclaration au paragraphe 2 à votre

 15   village; c'est bien cela ? Vous ne parlez pas de toute la municipalité de

 16   Prijedor.

 17   R.  Je me limite à ma communauté locale et aux alentours. A titre

 18   d'exemple, Gradina, Jelicka, Lamovita, Bistrica, Sanicani, Rakelici,

 19   Busnovi, Tomasica, Omarska, eh bien, tous ces villages se situent dans le

 20   pourtour de ma communauté locale. Et je ne me souviens pas qu'il y ait eu

 21   de victimes là parce que les gens n'étaient pas Serbes ou parce qu'on leur

 22   a détruit leurs biens ou endommagé leurs biens. Donc, je parle bien de

 23   cette zone-là.

 24   Q.  Mais vous êtes d'accord avec moi pour dire que les biens non-serbes

 25   dans la municipalité de Prijedor, à Brdo, par exemple, Kozarac, ces

 26   secteurs-là, eh bien, que là les biens ont été détruits par les forces

 27   serbes ?

 28   R.  Vous parlez de localités qui étaient à majorité musulmane. Donc, ce


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  1   secteur de Kozarac, avec cinq ou six villages alentour, et le secteur de

  2   Brdo. Là, les Musulmans étaient majoritaires, et c'est là qu'il y a eu des

  3   combats.

  4   Q.  Quand vous dites qu'il y a eu des "opérations de combat", vous voulez

  5   dire par là qu'il y a eu des bombardements menés par des forces, par la

  6   VRS, sur ces secteurs, n'est-ce pas ?

  7   R.  Il y a eu des combats intenses, le 24 mai, par exemple. Les combats ont

  8   commencé au niveau de Kozarac. On a coupé une colonne militaire là. On a

  9   dressé un barrage routier, et l'armée a eu pour mission de faire lever ce

 10   barrage. Et dans le village de Jakupovici un soldat, Zgonjanin, a été tué,

 11   et c'est là que les combats ont commencé. Les combats ont concerné les deux

 12   parties qui y ont participé.

 13   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je demande l'affichage du document 05071

 14   de la liste 65 ter.

 15   L'ACCUSÉ : [interprétation] Compte rendu d'audience.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 17   L'ACCUSÉ : [interprétation] Le témoin a dit que les combats ont été menés

 18   de part et d'autre, et ça n'a pas été consigné au compte rendu d'audience.

 19   Lignes 18 à 21 du compte rendu d'audience.

 20   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Monsieur Gruban, êtes-vous d'accord ?

 21   Avez-vous dit cela ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Veuillez poursuivre.

 24   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 25   Q.  Monsieur Gruban, nous avons ici un rapport opérationnel d'un membre du

 26   SNB, Milos. Il fait son rapport aux autorités. Il déclare que la situation

 27   dans la municipalité de Prijedor revient à la normale progressivement. La

 28   date du rapport est celle du 28 mai 1992.


Page 47451

  1   "Les combats dans le secteur de Kozarac se terminent. La plupart des

  2   localités sont entre les mains de l'armée de la République serbe de Bosnie-

  3   Herzégovine. Nos forces ont perdu cinq hommes et environ dix ont été

  4   blessés. Tandis que, d'après de nombreuses sources fiables, on estime que

  5   plusieurs centaines d'hommes ont été perdus du côté de l'ennemi."

  6   Donc, il ne s'agit pas là de combat intense entre deux parties

  7   belligérantes. Il s'agit d'une attaque, d'un bombardement de la population

  8   civile de Kozarac, n'est-ce pas ?

  9   R.  Ecoutez, c'est peut-être pour la première fois que je vois ce rapport.

 10   Je ne sais pas qui est ce Milos. Je ne sais pas où il travaille. A

 11   l'époque, j'étais dans la police; je n'étais pas dans l'armée. Donc, il

 12   m'est très difficile de commenter ces opérations militaires puisque je n'ai

 13   pas l'expertise, les connaissances nécessaires pour faire cela. Je sais

 14   qu'il y a eu des combats, je sais qu'on a rendu compte de cela à la

 15   télévision également et à la radio, et puis on a pu entendre des bruits

 16   très forts de tirs.

 17   Q.  Mais en fait, c'était ça, la situation, n'est-ce pas ? La VRS, à la

 18   date du 28 mai 1992, avait perdu à peu près cinq hommes. Et dans la

 19   population musulmane, les pertes s'élèvent à plusieurs centaines d'hommes.

 20   C'était ça, la situation. Tout le monde le savait, n'est-ce pas ?

 21   L'ACCUSÉ : [interprétation] Je demande la parole --

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Ecoutez, je pourrais me lancer dans des

 23   conjectures. Est-ce qu'il y a eu cinq tués et dix blessés, je ne pourrais

 24   qu'essayer de le deviner. Et je ne sais pas est-ce qu'il y en avait de

 25   l'autre côté. Donc, je ne voudrais pas m'aventurer dans des suppositions

 26   infondées. Je ne voudrais pas en parler. Il doit y avoir des témoins qui

 27   pourraient en parler.

 28   L'ACCUSÉ : [interprétation] Juste une chose. Est-ce que ce document dit que


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  1   les victimes se comptent dans les rangs de la population, comme cela figure

  2   en ligne 3 ?

  3   Est-ce que le document lui-même parle des pertes au niveau de la

  4   population elle-même ?

  5   M. TIEGER : [interprétation] Est-ce que je peux réagir ? Puisque ce n'est

  6   pas la première fois que cela se produit. Ce ne peut pas être une question

  7   appropriée posée par l'accusé. Bien entendu, l'accusé peut prendre

  8   connaissance du document. C'est une manière pour lui d'attirer l'attention

  9   du témoin sur quelque chose.

 10   M. LE JUGE KWON : [interprétation] J'étais en train de vérifier si Mme

 11   Sutherland s'était référée à la population.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, c'était ligne 3.

 13   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, lignes 2 et 3.

 14   L'ACCUSÉ : [interprétation] Le document lui-même ne parle pas de population

 15   en tant que telle.

 16   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Là-dessus, il est en droit de soulever

 17   l'objection.

 18   Continuons.

 19   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, je continue.

 20   Je demande que ce document soit versé au dossier.

 21   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui, Maître Robinson.

 22   M. ROBINSON : [interprétation] Nous n'avons pas d'objection.

 23   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Très bien. Nous allons admettre ce

 24   document.

 25   M. LE GREFFIER : [interprétation] Pièce P6685.

 26   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 27   Q.  Donc, Monsieur Gruban, vous avez dit il y a un instant que les zones où

 28   résidaient les Musulmans -- et vous avez mentionné Hambarine et Kozarac,


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  1   mais je voudrais plutôt parler de Prijedor. Les habitants de la vieille

  2   ville de Prijedor, qui était aussi connue sous le nom de Stari Grad,

  3   c'étaient surtout des Musulmans ?

  4   R.  Ecoutez, Stari Grad, je ne l'ai pas trouvée dans le recensement. Donc,

  5   je ne sais pas d'où vient cette appellation Stari Grad, la vieille ville. A

  6   travers l'histoire, Kozarac est plus ancien que Prijedor, tout comme mon

  7   village. C'est en 1689 qu'on parle pour la première fois de Prijedor en

  8   tant que tel. Ecoutez, Stari Grad, c'est peut-être une autre localité qui

  9   fait partie de l'agglomération de Prijedor. Et puis, je n'ai pas compris,

 10   je ne sais pas pourquoi vous me posez cette question. Je ne pense pas que

 11   ça se trouve dans ma déclaration, mais je vous prie, continuez. Je n'ai pas

 12   très bien compris ce que vous vouliez me demander. Je ne voudrais pas que

 13   vous pensiez que je suis pathétique.

 14   Q.  Monsieur Gruban, c'est au paragraphe 2 de votre déclaration que vous

 15   avez déclaré que les minorités non-serbes dans ce secteur ont bénéficié de

 16   la protection de la part des autorités, et vous avez dit qu'ils sont restés

 17   sur place. Donc, ils ne sont pas partis pour la plupart. Donc, ce que je

 18   vous soumets, c'est que de fait, la population non-serbe -- ou, plutôt, que

 19   les biens qui leur appartenaient ont été détruits par les forces serbes et

 20   par les autorités serbes.

 21   Vous connaissez bien la zone dont je suis en train de parler, et donc

 22   Stari Grad en fait partie, le quartier de Stari Grad ?

 23   R.  Ecoutez, je ne vois vraiment pas de quel quartier ou cité vous me

 24   parlez. Et peut-être que ça porte un autre nom, pour que je puisse le

 25   reconnaître.

 26   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Je demande l'affichage de la pièce

 27   P03532, s'il vous plaît.

 28   C'est une carte -- est-ce que vous pourriez agrandir, s'il vous


Page 47454

  1   plaît.

  2   Q.  Donc, au-dessus de la rivière, sur la gauche sur la carte, nous voyons

  3   ce quartier de Stari Grad. Il figure sur la carte. Est-ce que, maintenant,

  4   vous savez de quel secteur je suis en train de parler ?

  5   M. LE JUGE KWON : [interprétation] On peut zoomer davantage encore.

  6   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

  7   Q.  Alors, Monsieur Gruban ?

  8   R.  Oui, que vouliez-vous me demander ?

  9   Q.  Bon, vous connaissez cette agglomération de Stari Grad que j'ai évoquée

 10   tout à l'heure, vous savez que ça a été complètement détruit par les forces

 11   serbes.

 12   R.  Ce que vous appelez Stari Grad ici, de mon avis, c'est l'agglomération

 13   de Bereka. C'est ainsi que nous l'appelons. On appelle ça Bereka. Il y a un

 14   petit canal qui va tout autour, et ça se trouve à droite de la Sana. C'est

 15   à cela que vous faites référence en tant que Stari Grad ? Moi, je vous dis

 16   que nous à Prijedor, nous appelons ça Berek.

 17   Q.  Et vous savez que ça a été complètement détruit, n'est-ce pas ?

 18   R.  Je ne sais pas que ça a été complètement détruit. Parce qu'à l'époque

 19   de l'attaque des forces musulmanes sur Prijedor, je ne me trouvais pas dans

 20   ce secteur-là, ce qui fait que je ne pourrai pas en parler. Moi, je me

 21   trouvais à 20 ou 25 kilomètres de là, au moins. Ce que je sais, j'ai ouï

 22   dire que quand il y a eu cette attaque de Prijedor --

 23   Q.  Oui, allez-y.

 24   R.  Le 30 mai, il y a eu une grosse attaque de la ville de Prijedor par les

 25   unités musulmanes, et ce, sur plusieurs axes. On s'est attaqués au vieil

 26   hôtel. Ces effectifs sont arrivés jusqu'au bâtiment du ministère de

 27   l'Intérieur jusqu'au bâtiment de l'assemblée municipale. L'attaque a

 28   commencé très tôt le matin à 4 heures.


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  1   Q.  Monsieur Gruban, si vous voulez bien me pardonner de vous interrompre,

  2   mais ma question se rapportait à la destruction de cette partie-là et cette

  3   partie a été détruite après l'attaque de Prijedor.

  4   R.  Je voulais poursuive sur ma lancée, mais peut-être que nous ne nous

  5   sommes pas bien compris. Ce que j'ai appris, c'est que cette attaque avait

  6   duré jusqu'à 11 heures ce jour-là. Il y a eu l'armée serbe et la police

  7   serbe qui ont lancé une contre-attaque. Et ce matin --

  8   Q.  Monsieur Gruban, je ne veux pas entendre parler de détails sur

  9   l'attaque de Prijedor. Les Juges de la Chambre ont entendu des témoignages

 10   à ce sujet déjà auparavant. Je voudrais vous demander de nous dire si vous

 11   êtes d'accord avec moi pour dire que cette partie de la ville appelée Stari

 12   Grad a été détruite après l'attaque de Prijedor. Ça, vous le savez, n'est-

 13   ce pas ?

 14   R.  Je ne sais pas que ce Stari Grad ou Berek a été détruite, parce que je

 15   n'y ai pas été. Je peux vous dire ce que j'ai ouï dire. Lorsque les forces

 16   musulmanes ont été brisées, lorsqu'elles ont commencé à se retirer, et

 17   c'est ce que j'ai lu dans leurs déclarations et j'ai écouté des

 18   déclarations de leur part, ils se sont retirés en passant par Stari Grad et

 19   ces forces auraient résisté à partir de là, ce qui fait que l'armée et la

 20   polie ont tiré dessus. Il est probable qu'il y ait eu des bâtiments

 21   d'endommagés dans cette partie-là de la ville.

 22   Mais je vous répète que c'est ce que j'ai appris. Je ne l'ai pas vu

 23   directement. Je n'ai pas participé à ce qui s'est passé. C'est ce que j'ai

 24   ouï dire.

 25   Q.  Donc, si vous n'êtes jamais passé à côté de ce quartier, vous n'y êtes

 26   jamais allé après le 30 mai pour voir que ça a été complètement détruit

 27   lorsque vous êtes allé en voiture de Prijedor à Maricka; vous n'êtes jamais

 28   passé à côté ?


Page 47456

  1   R.  Cette agglomération n'est pas sur mon axe de déplacement par la route.

  2   Je viens à Prijedor depuis Maricka, Rakelici, Sanicani, Gomjenica, et

  3   j'arrive ainsi, et j'arrive de l'autre côté. Cette agglomération, ce

  4   quartier est complètement à part, et c'est tellement retiré qu'il faut

  5   absolument y aller de façon délibérée pour arriver là. Ce n'est pas quelque

  6   chose que l'on a sur son chemin. Il faudrait que je fasse exprès d'aller

  7   là-bas.

  8   Q.  Je voudrais maintenant passer au camp d'Omarska.

  9   Au paragraphe 6 et une fois de plus aujourd'hui, vous nous avez dit que

 10   vous avez été l'un des policiers de permanence de l'équipe. Le tribunal de

 11   la cour d'Etat a rejeté vos allégations, et on a conclu du fait que vous

 12   avez été l'un des trois chefs d'équipe de garde du camp d'Omarska; est-ce

 13   bien exact ?

 14   R.  Je n'ai jamais été nommé commandant de la garde ou chef de la garde. Il

 15   y avait plusieurs options.

 16   Q.  Ecoutez, Monsieur Gruban, écoutez ma question. Je vous ai dit le

 17   tribunal a rejeté vos affirmations au terme desquelles vous n'avez pas

 18   exercé de fonctions de commandement et on a conclu du fait que vous avez

 19   été l'un des chefs d'équipe de garde au camp d'Omarska ?

 20   R.  Je pense qu'au début, nous avons déjà parlé de cette cour, on a parlé

 21   de la façon dont on m'a jugé, et je ne pense pas qu'il soit très, très

 22   intelligent de s'attendre de ma part à ce que je fasse des commentaires sur

 23   les modalités du procès.

 24   Q.  Mais vous pouvez ne pas être d'accord, mais c'est ce que le tribunal a

 25   constaté, n'est-ce pas ? Je vois que vous hochez de la tête.

 26   R.  Bien sûr que je ne suis pas d'accord avec.

 27   Q.  Donc, vous avez été l'un des chefs des trois équipes de gardes en

 28   place, n'est-ce pas ?


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  1   R.  Vous savez, les tribunaux, ça peut aussi se tromper.

  2   Q.  Monsieur Gruban, est-ce que la cour a conclu du fait que vous avez été

  3   chef d'une équipe ?

  4   R.  Hélas, c'est ce qu'a conclu cette cour. Mais ce n'est pas terminé. Je

  5   ne voudrais pas commenter plus en avant. J'ai interjeté appel à Strasbourg.

  6   Le jour où ça reviendra de là-bas, on verra où est-ce qu'on en est.

  7   Q.  Vous avez dit au paragraphe 8 de votre déclaration qu'aucun des membres

  8   de la police de réserve dans votre équipe n'avait malmené les détenus.

  9   Alors, maintenant, vous dites qu'au niveau de ce Tribunal-ci, qu'il n'y a

 10   pas eu de crimes de survenus à l'occasion de votre équipe à vous ?

 11   R.  Oui, c'est ce que j'affirme. Et s'il y avait eu un cas de figure de ce

 12   genre, certains des hommes de permanence ou des gardiens auraient été

 13   nommés en tant qu'auteurs de l'un quelconque de ces délits au pénal ou de

 14   ces infractions. Et il y a eu 100 jours de procès, et il n'y a pas un seul

 15   gardien de mon équipe à voir été nommé par son nom et prénom pour qu'il y

 16   ait affirmation qu'un tel aurait commis tel crime.

 17   Q.  Votre chambre de première instance a constaté que s'agissant de votre

 18   responsabilité pénale individuelle au camp d'Omarska, que ce système de

 19   mauvais traitement et de persécution avait englobé des exécutions de

 20   détenus et que cela a été l'œuvre directe et individuelle de personnes qui

 21   faisaient partie de votre équipe que vous contrôliez, y compris la

 22   disparition en juillet 1992 d'une personne répondant au nom de famille

 23   Kapetanovic --

 24   L'INTERPRÈTE : -- et d'une autre personne dont le nom n'est -- n'a pas été

 25   compris par les interprètes.

 26   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 27   Q.  Et on a conclu également du fait qu'il a été exécuté au moins 50

 28   détenus originaires du village de Hambarine en fin juillet 1992.


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  1   C'est l'incident auquel vous faites référence au paragraphe 38 de votre

  2   déclaration s'agissant du fait jugé 1185. Et vous affirmez ne rien savoir à

  3   ce sujet et que, par conséquent, ça ne peut pas être vrai ?

  4   R.  D'où vous voulez-vous que je commence ? Vous venez de me poser

  5   plusieurs questions en série dans ce que vous venez d'exposer.

  6   Q.  Ce que je vous ai indiqué, c'est ce que la chambre de première instance

  7   a constaté à votre procès à vous pour ce qui est de votre responsabilité

  8   pénale. Et j'ai mentionné deux choses : les disparitions en juillet 1992 de

  9   Hajrudin [phon] Kapetanovic et d'une personne Badnjevic, répondant au nom

 10   de Badnjevic, et ensuite j'ai parlé d'exécution de quelques 50 détenus

 11   originaires du village de Hambarine en fin juillet 1992. Et j'affirme qu'il

 12   s'agit du même incident, ces tirs où il y a eu au moins 50 détenus que vous

 13   mentionnez dans votre paragraphe 38 où vous indiquez que vous n'avez aucune

 14   connaissance à ce sujet; donc, ça ne peut pas être vrai.

 15   Est-ce qu'il s'agit du même incident ou du même événement que vous

 16   évoquez vous-même où l'on a exécuté au moins 50 détenus fin juillet ?

 17   R.  Bon, est-ce que vous voulez que nous parlions d'abord du cas

 18   Kapetanovic et qu'ensuite nous revenions vers ce deuxième cas ? Vous venez

 19   de faire la jonction entre deux cas de figure qui sont tout à fait distinct

 20   et qui sont différents l'un de l'autre.

 21   Q.  Non, ce sont deux événements distincts, oui, Monsieur Gruban. On peut

 22   parler de ce Kapetanovic, de l'événement lié à cet individu. Mais penchons-

 23   nous plutôt sur les circonstances de l'événement.

 24   Les éléments de preuve présentés à votre procès par le témoin de

 25   l'événement - qui est Enes Kapetanovic - qui a dit que trois hommes, y

 26   compris les deux, Burhanudin Kapetanovic et l'individu Badnjevic, qui

 27   avaient été interpellés avant lui. Et lorsque Enes est sorti de la pièce,

 28   vous étiez passé, vous, et vous aviez dit : "Arrêtes-toi là. As-tu été


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  1   interpellé ?"

  2   Puis, vous lui avez posé le bras par-dessus l'épaule et vous lui avez dit :

  3   "Viens par ici. Ce serait dommage que de voir disparaître un tel gaillard."

  4   Enes a par la suite entendu dire de la bouche de ses amis que vous l'aviez

  5   sauvé d'une mort certaine.

  6   C'est ce que vous avez dit à Enes Kapetanovic ? Vous l'avez aidé à

  7   survivre. N'est-ce pas ?

  8   R.  Eh bien, voilà comment les choses se sont passées. Il y a du des

  9   personnes qui ont été sorties d'Omarska --

 10   Q.  Monsieur Gruban, est-ce que vous pouvez répondre à ma question, je vous

 11   prie.

 12   R.  Je ne peux malheureusement pas vous répondre de façon brève. Si vous me

 13   le permettez, je vais vous raconter les circonstances telles qu'elles se

 14   sont présentées, et ensuite on pourra entrer dans le reste, les aspects …

 15   vous le permettez ou pas ?

 16   Q.  Mais répondez à ma question. Vous avez dit à Enes Kapetanovic : Vous

 17   l'avez aidé à survivre. Oui ou non ?

 18   R.  J'ai aidé beaucoup de personnes à survivre à tous ces événements, il

 19   n'a pas été le seul. Permettez-moi, je vous prie, de vous expliquer les

 20   choses telles qu'elles se sont passées.

 21   Q.  Monsieur Gruban, la cour de Bosnie-Herzégovine a constaté que vos

 22   propos et votre comportement laissait entendre une incertitude au niveau de

 23   la destinée des détenus, et c'est ce qui a permis aux juges de la cour que

 24   les détenus étaient censés être liquidés.

 25   Donc, vous savez qu'il y avait des personnes interpellées, en particulier,

 26   lors des équipes de nuit, et que ces personnes ne revenaient pas.

 27   R.  Ce n'est pas exact. Je ne connais pas le sort des personnes qui ont

 28   quitté le centre. Il y a eu bon nombre d'interpellations et, Dieu merci, il


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  1   y en a qui ont été interpellés, emmenés et qui sont encore vivants. Il y a

  2   eu des cas où on a interpellé des individus et on les a emmenés, et,

  3   malheureusement, ces personnes ne sont plus vivantes. Donc, on ne peut pas

  4   généraliser et dire que toutes les personnes interpellées ne sont plus

  5   vivantes.

  6   Il y a eu des gens qui sont partis, il y a eu des gens transférés vers

  7   Trnopolje, il y a eu des gens qui ont été relâchés pour entrer chez eux.

  8   Q.  Donc, vous saviez qu'il y a eu ces interpellations ?

  9   R.  Je ne pouvais pas être au courant de toutes les interpellations. Je

 10   pouvais être au courant de certaines d'entre elles. Je peux parler des cas

 11   de figure où j'ai été au courant. Permettez-moi maintenant de vous raconter

 12   le cas de figure Kapetanovic tel que ça s'est présenté. Et Enes a témoigné

 13   lui-même pour dire que je ne savais pas qu'il y avait eu des personnes

 14   interpellées avant lui, je lui ai demandé : "Est-ce que tu as été

 15   interpellé ?" Et pendant que je séjournais dans le bureau de permanence, je

 16   ne savais pas qu'il allait y avoir des interpellations et des personnes

 17   d'emmenées. Je l'ai vu, je lui ai moment donné s'il avait faim. Je lui ai

 18   proposé du pain. Je suis allé à la cuisine, il n'y avait pas de pain.

 19   Alors, je l'ai ramené dans sa pièce.

 20   Et entre-temps, j'avais emprunté l'escalier que je vous ai montré au

 21   bâtiment administratif et j'ai rencontré le chauffeur de la fourgonnette du

 22   SUP de Prijedor. Et il y a eu deux personnes d'emmenées à ce moment-là. Je

 23   n'ai pas demandé où est-ce qu'on les emmenait. Je n'ai pas demandé ce qui

 24   se passait, j'ai rebroussé mon chemin. Et j'ai informé Mejakic du fait que

 25   j'avais ramené l'individu en question, le Enes en question, donc Enes est

 26   resté. Et les deux autres sont partis et Mejakic a dit : "Tant Pis. Laisses

 27   tomber."

 28   Alors, il n'y a pas eu de cas de figure où les gardiens allaient enquêter


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  1   sur la destination de tel individu ou tel autre ou est-ce qu'on emmenait

  2   les uns ou les autres. Il y avait quelqu'un d'autre de charger de cela. Les

  3   gardiens étaient censés se comporter de façon égale à l'égard de tout un

  4   chacun, protéger tout un chacun, et lorsque l'on transférait, catégorisait

  5   les gens pour les transférer ailleurs, là, les gardiens ne s'en mêlaient

  6   pas. Comme chez vous, le gardien ne sait pas du tout où est-ce qu'un

  7   individu mis en détention va être emmené où. Où cela nous emmènerait-il si

  8   tout un chacun posait des questions pour savoir où est-ce qu'on emmenait

  9   celui-ci ou celui-là.

 10   L'ACCUSÉ : [interprétation] Compte rendu.

 11   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui.

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] En page 101, ligne 16. Le témoin a dit que : Il

 13   y a eu des gens qu'on avait sortis de là-bas, qu'il y en a eu qui ont été

 14   envoyés à Trnopolje, il y en a qui ont été relâchés pour entrer chez eux,

 15   ça n'a pas été consigné cela. Et vous pouvez réécouter l'enregistrement

 16   pour vérifier.

 17   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Vous êtes d'accord, Monsieur Gruban ?

 18   C'est bien ce que vous avez dit ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Je peux même vous donner des exemples, oui,

 20   d'exemples de personnes qui ont été relâchées pour rentrer chez elles, en

 21   compagnie des inspecteurs --

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Non, moi, je vous ai simplement demandé

 23   si vous confirmiez les propos de M. Karadzic.

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, certainement.

 25   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Veuillez continuer, Madame Sutherland.

 26   Mme SUTHERLAND : [interprétation]

 27   Q.  S'agissant des personnes qui ont été sorties de là, interpellés pour

 28   être sorties la nuit, vous n'aviez rien contre le fait de voir cela se


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  1   passer. Vous étiez là-bas, votre travail consistait à veiller à la sécurité

  2   des détenus, n'est-ce pas ?

  3   R.  Certainement. Chaque gardien était censé veiller à la sécurité des

  4   détenus. Mais si on vous fournissait une liste de personnes que vous étiez

  5   censés céder, vous n'aviez pas le droit de poser des questions, où est-ce

  6   qu'il va, pourquoi il va, on vous dit de le confier à un tel, et vous le

  7   faisiez tout simplement.

  8   Q.  Et qui est-ce qui vous donnait ces listes ?

  9   R.  Ces listes avec les noms des personnes étaient habituellement apportées

 10   par les chauffeurs qui venaient les chercher. On recevait des listes tapées

 11   à la machine et signées, et on remettait les individus en question à qui de

 12   droit.

 13   Q.  Qui avait signé cela ?

 14   R.  Ces listes ont été signées par le chef du poste de sécurité publique.

 15   Sans son approbation, personne ne pouvait quitter à titre individuel ce

 16   centre d'accueil et de rassemblement.

 17   Au début - je vais vous dire - les toutes premières journées parce que ça

 18   avait été conçu pour durer peu de temps - il y a eu des détenus de relâchés

 19   après interrogatoire lorsque les inspecteurs déterminaient que ces

 20   personnes n'avaient pas participé au soulèvement armé, et qui n'avaient pas

 21   commis de délit au pénal, ces personnes-là ont été relâchées immédiatement.

 22   Par la suite, on a interdit la libération de ces individus.

 23   Q.  Monsieur Gruban, ce que je voudrais c'est vous demander de vous

 24   concentrer sur les personnes que l'on a interpellées et emmenées et que

 25   l'on n'a plus jamais revues. Vous saviez que des personnes ont été emmenées

 26   de là et vous avez continué à autoriser ce type de choses à se produire ?

 27   R.  Ce n'est pas exact. Je ne savais pas où est-ce qu'on emmenait ces

 28   individus. Et, qui plus est, il y a bon nombre de mes amis qui étaient


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  1   détenus qui me demandaient à les intégrer dans ces listes pour être

  2   interpellés et allés chez eux. Il y a eu donc des individus qui ont été

  3   transférés et qui sont encore en vie et en bonne santé. D'autre part, il y

  4   a d'autres personnes qui ont été interpellées, qu'on a emmenées et qui,

  5   malheureusement, ne sont plus vivantes.

  6   Q.  Bon. Vous avez entendu le témoignage d'Enes Kapetanovic lors de votre

  7   procès en Bosnie. Et il est exact de dire, n'est-ce pas, qu'il a déclaré

  8   avoir entendu des amis à lui, des dires qui affirmaient que vous l'aviez

  9   sauvé d'une mort certaine, n'est-ce pas ?

 10   R.  C'est ce qu'il a déclaré dans le prétoire. Enes, je le rencontre encore

 11   de nos jours. On se dit bonjour. On se fréquente. Et s'il avait senti que

 12   j'avais fait quelque chose de mal, il ne me contacterait plus. C'est un

 13   homme qui est complètement conscient de mon rôle, de mes pouvoirs. Je

 14   n'étais pas à même de faire quoi que ce soit. Je ne savais pas qu'il avait

 15   été interpellé, je l'ai laissé rester. Je l'ai fait retourner dans la

 16   pièce, et c'est ainsi qu'il est resté là.

 17   Mme SUTHERLAND : [interprétation] Monsieur le Président, je vois l'heure.

 18   M. LE JUGE KWON : [interprétation] Oui. Nous allons continuer demain matin.

 19   Monsieur Gruban, je tiens à vous dire qu'il ne faut vous entretenir avec

 20   personne au sujet de votre témoignage.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Fort bien.

 22   M. LE JUGE KWON : [interprétation] L'audience est levée.

 23   [Le témoin quitte la barre]

 24   --- L'audience est levée à 14 heures 47 et reprendra le jeudi, 20 février

 25   2014, à 9 heures 00.

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