Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1                     Le lundi 17 janvier 2000

  2                     [Audience publique]

  3                     [Les accusés entrent dans la Cour]

  4                     --- L’audience débute à 9 h 34

  5         LA GREFFIÈRE (interprétation) :  Bonjour, Monsieur

  6   le Président.  L’affaire IT-95-14/2-T, Le Procureur du

  7   Tribunal contre Dario Kordic et Mario Cerkez.

  8         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Oui, Monsieur Nice ?

  9         Me NICE (interprétation) :  Monsieur le Président,

 10   le Colonel Stewart est ici.  Il est prêt à être entendu et

 11   il aimerait, bien entendu, que son audition s’achève

 12   aujourd’hui, si possible.

 13         Nous n’avons encore aucune nouvelle s’agissant d’une

 14   éventuelle ordonnance émise par la Chambre I, au sujet d’un

 15   certain document dont j’ai déjà parlé.  Par conséquent, je n’ai

 16   pas pu communiquer ce document au témoin en question pour obtenir

 17   ses commentaires.  Nous espérons que dans le courant de la

 18   présente matinée, une notification pourrait nous parvenir de la

 19   Chambre numéro I quant à la possibilité de divulguer ce document.

 20   Si tel était le cas, je demanderais une pause de courte durée qui

 21   permettrait au témoin d’examiner ce document et je demanderais à

 22   pouvoir parler au témoin s’il a quelque chose à dire au sujet de

 23   ce document, mais bien entendu, dans ce cas, nous ne parlerions

 24   que du document et de rien d’autre puisque sa déposition aurait

 25   déjà commencé.


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  1         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Nous verrons

  2   cela en temps utile.

  3         Me NICE (interprétation) :  Le témoin peut donc

  4   entrer dans le prétoire.

  5         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Avant de

  6   demander que le témoin n’entre dans le prétoire, il y a

  7   encore quelques points à régler.

  8         Nous sommes deux Juges à siéger ce matin puisque, comme

  9   vous le savez, Monsieur le Juge Robinson est absent pour des

 10   raisons personnelles de la plus grande importance.  Par

 11   conséquent, nous proposons de rendre une nouvelle ordonnance dans

 12   le cadre de l’application de l’Article 15 bis car nous estimons

 13   qu’il est de l’intérêt de la justice que ce procès se poursuive

 14   et que le témoin présent ici aujourd’hui et les autres témoins

 15   prévus pour cette semaine soient entendus.  Donc, nous estimons

 16   que nous pouvons rendre cette ordonnance, à moins qu’il y ait

 17   objection de la part de quiconque dans ce prétoire.

 18         Me STEIN (interprétation) :  Non, Monsieur le Président,

 19   nous l’avons déjà dit, nous n’avons pas d’objection.

 20         Me KOVACIC (interprétation) :  Pas d’objection,

 21   Monsieur le Président.

 22         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Très bien.  Eh bien,

 23   Monsieur le Juge Robinson aura pas mal de comptes rendus

 24   d’audience à lire mais nous en avons déjà parlé ensemble, comme

 25   je vous l’ai dit la semaine dernière, et il ne s’y est pas


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  1   opposé.  Donc, nous rendons l’ordonnance dont je viens de parler,

  2   en vertu de l’Article 15 bis du Règlement.

  3         Autre point que je voulais évoquer.  Nous avons reçu la

  4   déposition écrite, le compte rendu d’audience de la déposition du

  5   Colonel Stewart dans l’affaire Blaskic.  Il s’agit d’une

  6   déposition qui s’est faite sous serment et qui a donné lieu à

  7   contre-interrogatoire.  Nous proposons donc que ce document

  8   devienne pièce à conviction de notre procès.  Y a-t-il objection

  9   à cela ?

 10         Me NICE (interprétation) :  Non, Monsieur le Président.

 11         Me SAYERS (interprétation) :  Pas d’objection,

 12   Monsieur le Président.

 13         Me KOVACIC (interprétation) :  Pas d’objection non plus.

 14         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Ah, excusez-

 15   moi, Me Kovacic, je ne vous ai pas donné la parole et je ne

 16   vous avais pas posé la question au sujet de l’ordonnance

 17   relative à l’Article 15 bis.  Je vous prie de m’excuser.

 18         Le compte rendu dont je viens de parler étant versé au

 19   dossier et puisque nous avons eu la possibilité d’en prendre

 20   connaissance, il suffira sans doute aux conseils de la Défense

 21   de se référer, dans ce compte rendu d’audience, aux passages qui

 22   les intéressent.

 23         J’ai remarqué qu’il y avait de plus nombreuses

 24   références à Monsieur Kordic que vous n’en faites état dans

 25   votre résumé d’interrogatoire, Monsieur Nice.


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  1         Me NICE (interprétation) :  Oui, en effet.

  2         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Mais si les conseils

  3   doivent utiliser ce compte rendu d’audience, je propose qu’une

  4   référence au compte rendu suffise, plutôt que de reposer des

  5   questions au témoin.  Il suffira, par conséquent, de demander au

  6   témoin :  « Êtes-vous d’accord sur tel et tel point ? » et le

  7   témoin peut éventuellement, dans ce cas, répondre :  « Oui, je

  8   suis d’accord avec ce que j’ai dit il y a deux ou trois mois. »

  9   Donc, cela pourrait nous permettre d’accélérer les choses.

 10         Vous avez prévu une heure, Monsieur Nice ?

 11         Me NICE (interprétation) :  Sans doute moins,

 12   Monsieur le Président.

 13         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Eh bien, ce sera très

 14   utile.  Cela permettra au témoin de quitter La Haye ce soir si

 15   son contre-interrogatoire est terminé, ce que j’espère.

 16         Si des références sont faites au journal personnel

 17   du témoin et au livre qu’il a écrit, les conseils peuvent

 18   sans doute nous renvoyer aux passages pertinents et nous

 19   pourrons les lire sans rentrer dans les détails.

 20         Très bien. Peut-on faire entrer le témoin dans le prétoire?

 21         Me KOVACIC (interprétation) :  Monsieur le Président, un

 22   point technique, si vous me permettez.  Puisque le compte rendu

 23   d’audience reprenant la déposition de ce témoin dans une autre

 24   affaire sera – quel terme utilisé – versé au dossier, je ne sais

 25   pas très bien techniquement quel terme utilisé…


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  1         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Il fera partie

  2   des pièces à conviction de notre procès.

  3         Me KOVACIC (interprétation) :  Mais dans ce cas,

  4   ne devrait-il pas recevoir une cote ?

  5         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Oui, sans doute.

  6         Me KOVACIC (interprétation) :  Cela nous permettra

  7   de savoir comment y faire référence sur le plan technique.

  8         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Eh bien, je

  9   propose que ce soit une pièce à conviction de l’Accusation.

 10         Me NICE (interprétation) :  Je vous demanderais de

 11   nous donner quelque temps pour réfléchir à la cote qui est

 12   la plus opportune car nous avons un ordre déterminé pour

 13   les cotes de pièces à conviction.

 14         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Je vous demanderais de

 15   nous proposer une solution dans la journée d’aujourd’hui.

 16         Me NICE (interprétation) :  Oui, tout à fait.

 17               [Le témoin entre dans la Cour]

 18         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Monsieur le Témoin, je

 19   vous demanderais de prononcer la déclaration solennelle.

 20         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je déclare solennellement que

 21   je dirai la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 22         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Vous pouvez

 23   vous asseoir.

 24         LE TÉMOIN (interprétation) :  Merci.

 25         TÉMOIN :  ROBERT  ALEXANDER STEWART


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  1         (ASSERMENTÉ)

  2         QUESTIONS PAR :

  3         Me NICE (interprétation) :  Pouvez-vous décliner

  4   votre identité ?

  5         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je m’appelle Robert

  6   Alexander Stewart.

  7         Me NICE (interprétation) :  Il nous faut ménager

  8   une pause entre les questions et les réponses, si vous le

  9   voulez bien, ce qui permettra l’interprétation simultanée

 10   de se dérouler dans les meilleures conditions.

 11         Colonel Stewart, étiez-vous le commandant du 1er bataillon

 12   du régiment du Cheshire en Bosnie d’octobre 1992 à mai 1993 ?

 13         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 14         Me NICE (interprétation) :  Avez-vous relu la déclaration

 15   que vous avez faite et la déposition que vous avez donnée dans

 16   l’affaire Blaskic ?  Avez-vous des commentaires à faire en vue de

 17   corriger l’un ou l’autre de ces deux documents ?

 18         LE TÉMOIN (interprétation) :  J’ai relu ces documents et je

 19   n’ai pas de correction ou de commentaire à faire à leur sujet.

 20         Me NICE (interprétation) :  À combien de reprises

 21   environ avez-vous rencontré Dario Kordic pendant la durée

 22   de votre mission ?

 23         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je crois l’avoir

 24   rencontré quatre ou cinq fois à peu près.

 25         Me NICE (interprétation) :  Nous venons de


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  1   confirmer que vous avez eu entre les mains un résumé de

  2   votre déposition ici aujourd’hui.  Je vous demande si vous

  3   êtes également d’accord avec le contenu de ce résumé écrit.

  4         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

  5         Me NICE (interprétation) :  Peut-être l’avez-vous entre les

  6   mains mais je vous demanderais toutefois de vous efforcer de

  7   répondre aux Juges en utilisant les termes qui vous viennent

  8   spontanément à l’esprit plutôt que de vous référer à ce résumé.

  9         S’agissant des conclusions que vous tirez au sujet de

 10   Kordic, et je verrai à ce que toutes les sources d’information

 11   nécessaires soient entre vos mains pour vous aider, je vous

 12   demande si au nombre de ces sources d’information, vous incluez

 13   les rencontres personnelles que vous avez eues avec Kordic ?

 14         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 15         Me NICE (interprétation) :  Comment ces

 16   renseignements provenant de vos patrouilles vous

 17   atteignaient-elles :  directement ou indirectement ?

 18         LE TÉMOIN (interprétation) :  Les renseignements émanant de

 19   mes patrouilles m’atteignaient directement et il m’arrivait

 20   souvent de me former ma propre opinion car j’étais très souvent

 21   sur les lieux moi-même.  Donc, en tant que commandant, j’avais

 22   accès à des sources d’information diverses, multiples.

 23         Me NICE (interprétation) :  Avant de recevoir des

 24   renseignements, ces renseignements allaient-ils à un service de

 25   renseignements ou à des responsables chargés de renseignements ?


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  1         LE TÉMOIN (interprétation) :  La réponse à cette question

  2   consiste à dire que cela dépendait.  Si ces informations étaient

  3   considérées comme d’une importance vitale, elles m’arrivaient

  4   directement sans intermédiaire, mais le système normal consistait

  5   à informer les patrouilles et à leur demander de rendre compte au

  6   retour de leur mission.  Elles étaient informées avant leur 

  7   départ et c’était des sections chargées du renseignement qui

  8   s’occupaient d’informer les patrouilles avant leur départ,

  9   de même que de recueillir leurs informations au retour de

 10   leur mission.

 11         Me NICE (interprétation) :  Receviez-vous

 12   également des renseignements émanant des observateurs ou

 13   des moniteurs de l’ECMM ?

 14         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.  Ces reseignements

 15   m’étaient très utiles car ces observateurs opéraient dans des

 16   secteurs où je ne patrouillais pas toujours et ce pour la raison

 17   suivante :  En général, ces observateurs travaillaient dans une

 18   zone plus pacifique que celle où je souhaitais concentrer mon

 19   travail car je me concentrais sur les secteurs qui posaient

 20   davantage de problèmes.  En effet, les observateurs de l’ECMM ne

 21   disposaient pas de blindés pour les protéger, contrairement

 22   à moi.  Il m’arrivait d’ailleurs de leur prêter ces blindés.

 23         Me NICE (interprétation) :  Receviez-vous des

 24   informations ou des renseignements émanant des personnes

 25   employées sur les lieux, y compris d’interprètes ?


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  1         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui, mais les

  2   renseignements que j’obtenais des interprètes étaient dus

  3   au fait que ces interprètes étaient avec moi ou avec les

  4   patrouilles qui opéraient sur le terrain le plus souvent.

  5         Me NICE (interprétation) :  Receviez-vous des

  6   renseignements directement du HVO et de l’armée de Bosnie-

  7   Herzégovine ?

  8         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui, mais nous avions pour

  9   principe de ne pas transmettre les reseignements reçus du HVO ou

 10   de l’armée de Bosnie-Herzégovine à la partie adverse.  Cela

 11   faisait partie des règles tacites que je demandais de respecter,

 12   c’est-à-dire que nous ne nous faisions pas les transmetteurs

 13   d’information d’une partie à destination de l’autre partie

 14   car je pensais que c’était là une façon inopportune de

 15   travailler.  Cela aurait accru la méfiance à notre égard.

 16         Me NICE (interprétation) :  Enfin, receviez-vous

 17   des renseignements émanant directement des habitants

 18   résidant sur les lieux ou de personnes à qui vous parliez ?

 19         LE TÉMOIN (interprétation) :  C’était notre source

 20   d’information la plus importante, puisque j’étais très

 21   souvent sur le terrain, lorsque je rendais visite à quelqu’un qui

 22   avait vécu à cet endroit toute sa vie, et je pense que les

 23   informations que pourrait me fournir cette personne étaient

 24   dignes de la plus grande crédibilité.  Donc, qu’il s’agisse de

 25   musulmans ou de Croates de Bosnie, les renseignements fournis par


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  1   ces personnes étaient les renseignements les plus utiles que j’ai

  2   jamais reçus et c’est donc pour cette raison principalement que

  3   j’ai consacré un temps aussi important à l’écoute de personnes

  4   sur le terrain.

  5         Me NICE (interprétation) :  Je demanderais que l’on remette

  6   au témoin la carte qui constitue la pièce 2781.2.  Cette carte

  7   pourrait être placée sur le rétroprojecteur.  Je pense, Colonel

  8   Stewart, que vous savez utiliser le rétroprojecteur puisque vous

  9   l’avez sans doute déjà fait lors de votre déposition dans l’autre

 10   affaire où vous avez été témoin.

 11         Colonel Stewart, nous avons fait la liste des rencontres

 12   personnelles que vous avez eues avec Monsieur Kordic et

 13   auxquelles vous accordez une grande importance. S’agissant de

 14   chacune de ces rencontres, je vous demanderais, en quelques

 15   phrases, de résumer ce qui a été discuté et d’en tirer des

 16   conclusions.  D’abord, je vous demande si un incident s’est

 17   produit à Novi Travnik le 20 octobre 1992 et si vous pouvez nous

 18   en parler.

 19         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui, en effet.  Cela s’est

 20   passé à un moment où mon bataillon n’était pas sur le théâtre des

 21   opérations.  Cet incident a eu lieu lorsque nous étions en

 22   reconnaissance en vue de décider comment et à quel endroit nous

 23   allions stationner nos troupes en Bosnie centrale. J’étais seul à

 24   savoir que je n’avais avec moi qu’une vingtaine de personnes. 

 25   Notre base était située dans une école de Vitez qui était vide à


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  1   à ce moment-là et nous nous servions du gymnase pour y dormir.

  2         Ce qui s’est passé le 20 octobre c’est que des combats

  3   intenses avaient éclaté à Vitez et dans le secteur environnant et

  4   ces combats étaient d’une telle importance que j’ai pensé qu’ils

  5   pourraient peut-être mettre un terme au déploiement des troupes

  6   des Nations Unies en Bosnie centrale, ce qui, bien entendu,

  7   aurait réduit à néant la mission qui m’avait été confiée.  C’est

  8   donc pour cette raison que j’ai décidé d’agir immédiatement en

  9   vue de tenter de résoudre le problème.

 10         Je me rappelle que le 20, je suis allé à l’hôtel Vitez où

 11   j’avais séjourné quelque temps auparavant pour essayer de

 12   déterminer qui était responsable et le commandant que j’ai trouvé

 13   à l’hôtel Vitez m’a dit que les raisons qui expliquaient ces

 14   combats et l’érection des barrages routiers résidaient dans les

 15   troubles provoqués par les musulmans.  En fait, des coups de feu

 16   étaient tirés aux environs de l’hôtel Vitez, qui était également

 17   le quartier général du HVO, et après ma visite, on m’a dit qu’il

 18   faudrait que j’aille rencontrer le commandant des musulmans de

 19   Bosnie, ce que j’ai fait.

 20         Lui se trouvait dans une école et je me rappelle que

 21   lorsque je suis allé le voir, il était assis dans ce que je pense

 22   être le bureau du directeur, dans lequel les vitres d’une fenêtre

 23   avaient éclaté en raison de coups tirés par un lance-roquette

 24   multiple ou en raison de l’éclatement d’un missile antichar.  On

 25   m’avait dit que cette explosion s’était produite au cours de la


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  1   nuit.

  2         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Colonel Stewart, il y a

  3   un point que j’aimerais éclaircir.  Je vous prie de m’excuser de

  4   vous interrompre.

  5         On vous a dit d’aller rencontrer le commandant des

  6   musulmans de Bosnie, vous l’avez fait, vous l’avez trouvé

  7   dans une école.  Je suppose que celle-ci se trouvait à

  8   Vitez.  Mais qui vous a demandé d’agir de la sorte ?  Je

  9   vous pose la question au cas où vous vous en souvenez. 

 10   Sinon, vous pouvez dire que vous ne vous rappelez pas.

 11         LE TÉMOIN (interprétation) : Je me rappelle qui m’a demandé

 12   cela.  C’était un certain Nakic.  C’est ce que j’ai écrit dans

 13   mes notes.

 14         J’ai été envoyé dans ce secteur par Cerkez, commandant du

 15   HVO, d’après ce qu’il m’a dit.  En tout cas, je suis donc allé

 16   dans cette école et ensuite, je suis retourné à l’hôtel, ce qui

 17   n’était pas chose facile en raison des coups de feu très nombreux

 18   qui étaient tirés, mais nous y sommes tout de même parvenus,

 19   après quoi je me suis rendu à Novi Travnik dans l’après-midi.

 20   C’était extrêmement difficile.

 21         J’ai organisé un convoi.  J’ai pris le chemin de

 22   Novi Travnik et sur le chemin, j’ai été arrêté à un barrage

 23   routier par des membres du HVO, après quoi j’ai pénétré

 24   dans Novi Travnik.  Tout cela était extrêmement dangereux. 

 25   C’est le moins que l’on puisse dire.  Nous étions au volant


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  1   d’un Land Rover et il me semblait que nous risquions de

  2   tomber dans une embuscade.  Je ne sais pas pour quelle

  3   raison toutefois aucun de mes véhicules n’a été touché.

  4         Nous avons traversé rapidement Novi Travnik, notre

  5   premier objectif consistant à nous rendre au quartier

  6   général de l’armée de Bosnie-Herzégovine, qui apparemment

  7   était commandée par un homme répondant au nom de Lendo. 

  8   Lorsque nous y sommes arrivés, j’ai parlé à ce Lendo qui

  9   était un homme très désagréable.  Je lui ai dit que les

 10   combats devaient cesser et apparemment, il détenait des

 11   prisonniers ou des otages.  J’ai exigé que ces prisonniers

 12   ou ces otages me soient remis immédiatement, ce qu’il a refusé.

 13         Je lui ai dit que je n’étais pas prêt à accepter un refus

 14   de sa part mais il a continué à refuser et au moment où j’étais

 15   prêt à partir, il m’a présenté un homme qui était terrifié.  En

 16   fait, cet homme portait une chemise et des chaussures sans lacet,

 17   ce genre de chose, et à l’évidence, il était terriblement apeuré.

 18   Mais j’ai tout de même pensé qu’un homme c’était mieux que rien.

 19   Donc, j’ai redit à Lendo que les combats devaient cesser, que

 20   c’était une honte, et j’ai pris le chemin du quartier général du

 21   HVO à ce moment-là.  Lorsque cet homme dont je crois qu’il

 22   s’agissait d’un otage du HVO, lorsqu’il s’est un peu calmé, il

 23   m’a indiqué où se trouvait le quartier général du HVO.

 24         Les combats se poursuivaient dans la ville à ce moment-là

 25   et nous nous sommes rendus dans ce que je crois être le Café


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  1   Grand où j’ai rencontré Kordic pour la première fois.  Cette

  2   rencontre s’est déroulée au bar, qui était au premier étage du

  3   Café, et là encore, je concevais ma mission comme consistant à

  4   obtenir un cessez-le-feu entre le HVO et l’armée de Bosnie-

  5   Herzégovine.

  6         Je vous prie de m’excuser pour avoir parlé aussi

  7   longuement mais ce que je voulais vous dire c’est que c’est

  8   dans ces conditions que s’est déroulée ma première

  9   rencontre avec Dario Kordic.

 10         Me NICE (interprétation) :  Comment était-il

 11   habillé ?  Pouvez-vous le décrire ?

 12         LE TÉMOIN (interprétation) :  Il portait un

 13   treillis militaire dépourvu d’emblème ou d’insigne. 

 14   Apparemment, le HVO n’avait ni insigne ni emblème à ce

 15   moment-là. Il était entouré de plusieurs hommes habillés

 16   comme lui et semblait être leur commandant.

 17         Me NICE (interprétation) :  Vous a-t-il parlé ? 

 18   Avez-vous négocié avec lui en tant que commandant ?

 19         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 20         Me NICE (interprétation) :  Lui ou une autre

 21   personne vous a-t-elle donné le nom du commandant suprême

 22   du HVO à Novi Travnik, auquel vous auriez pu vous adresser

 23   à ce moment-là ou bien l’entretien s’est-il déroulé dans

 24   l’hypothèse que Kordic était le commandant ?

 25         LE TÉMOIN (interprétation) :  Eh bien, pour être


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  1   franc, je pensais rencontrer Blaskic et j’ai donc été un

  2   peu surpris de voir Kordic et pas Blaskic car je m’étais

  3   rendu à Novi Travnik dans le but de rencontrer Blaskic, en

  4   fait, et Blaskic était absent mais Kordic était présent.

  5         Me NICE (interprétation) :  Vous a-t-il été dit

  6   d’une façon ou d’une autre que Kordic rendait compte à

  7   Blaskic ou que vous devriez rencontrer Blaskic ?

  8         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non.  En fait, je n’ai pas

  9   vraiment réfléchi à la question car pour ce qui me concernait,

 10   j’avais une priorité urgente, qui était de mettre un terme aux

 11   combats, et j’étais prêt à recourir à toute personne susceptible

 12   de m’aider dans cette tâche et, à ce moment-là, c’est Kordic qui

 13   semblait pouvoir être le plus utile pour moi.

 14         Me NICE (interprétation) :  Passons au deuxième

 15   incident mais dans le résumé, il s’agit du petit (c) pour

 16   respecter la chronologie.  Y a-t-il eu un incident au cours

 17   duquel un soldat danois a été kidnappé par le HVO et pour

 18   lequel les Nations unies vous avaient demandé de l’aide ?

 19         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.  Il est arrivé un moment

 20   où le contingent danois basé à Kiseljak avait apparemment perdu

 21   un soldat qui s’était trouvé sur la route seul, je crois, et qui

 22   avait été enlevé. Je connaissais Dario Kordic.  J’ai reçu un coup

 23   de téléphone du commandement des Nations unies à Kiseljak qui me

 24   demandait si je pouvais aider à la libération de ce soldat. 

 25         En fait, j’avais dîné avec Dario Kordic la veille au soir,


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  1   je crois, à mon quartier général, avec le commandant de l’armée

  2   de l’armée de Bosnie-Herzégovine également au cours de ce que

  3   nous appelions nos dîners.  J’ai demandé au Capitaine Foregrave

  4   d’aller rencontrer Dario Kordic pour voir s’il pouvait intervenir

  5   dans la libération de ce soldat et apparemment, il a eu une

  6   certaine influence car ce soldat a été libéré quatre heures plus

  7   tard.

  8         Me NICE (interprétation) :  Passons au paragraphe…

  9         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Peut-on

 10   établir la date de cet incident, Monsieur Nice ?

 11         Me NICE (interprétation) :  Colonel Stewart,

 12   pouvez-vous donner une date pour cet incident ?

 13         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non.

 14         Me NICE (interprétation) :  Mais pouvez-vous situer cet

 15   incident en rapport avec le suivant, celui du 4 février 1993 ?

 16         LE TÉMOIN (interprétation) :  Il a eu lieu avant.

 17         Me NICE (interprétation) :  Donc, parlons maintenant, si

 18   vous le voulez bien, du 4 février à Busovaca, le bâtiment de la

 19   poste et la carte vous aidera peut-être pour nous dire ce qui

 20   s’est passé et quelle a été, à votre avis, l’importance toute

 21   particulière de cet incident.

 22         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je me suis rendu le

 23   4 février dans l’immeuble des PTT de Busovaca.  À ce

 24   moment-là, Kordic était le commandant militaire de Busovaca

 25   et, autant que je m’en souvienne, il ne portait toujours


Page 12295

  1   pas de galon, mais en tout cas, il était habillé en treillis. Ça,

  2   j’en suis sûr.  Il était assez nerveux, assez agité, et j’ai

  3   trouvé ça un petit peu bizarre, inhabituel.  J’ai eu l’impression

  4   qu’il était nerveux du fait de l’avancée de l’armée de Bosnie-

  5   Herzégovine qui avait passé les collines et qui s’avançait donc

  6   vers Busovaca.

  7   Il m’a demandé de faire tout ce qui était en mon pouvoir pour

  8   mettre fin aux combats et moi, j’ai interprété cela comme

  9   signifiant que le HVO était peut-être en train de perdre cette

 10   confrontation, et je crois que ce jour-là, je suis allé dans la

 11   zone de Katici et aussi à un endroit qui n’apparaît pas sur votre

 12   carte, qui n’apparaît pas sur la partie de la carte que vous êtes

 13   en train de me montrer.  Je vais essayer de le trouver.

 14         Donc, pour vous donner une idée de la situation des lieux,

 15   Vitez se trouve ici [indication du témoin]. Donc, Vitez est ici.

 16   Ensuite là, vous avez Busovaca [indication du témoin].  Cette

 17   route, c’est la route qui suit la vallée de la Lasva et qui

 18   ensuite part vers Zenica. Ce carrefour ici [indication du

 19   témoin], un carrefour en forme de T, c’est un carrefour

 20   stratégique parce que la forme… l’endroit où d’un côté, vous

 21   pouvez partir vers Kiseljak et de l’autre vers Zenica.  Busovaca

 22   se trouvait ici [indication du témoin] et l’immeuble des PTT,

 23   bien entendu, se trouvait au centre de Busovaca.

 24         Je m’y suis rendu [indication du témoin] et l’on m’a dit

 25   que les combats étaient très intenses à peu près à


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  1   cet endroit [indication du témoin].  Je suis allé à Katici

  2   et à Merdani dans mon blindé parce qu’on m’avait demandé

  3   d’essayer de faire quelque chose et la nuit tombait.  Je le

  4   répète, les combats étaient intenses et nous avons essuyé

  5   des tirs lorsque nous sommes arrivés sur la zone.

  6         Me NICE (interprétation) :  Qu’avez-vous appris de cette

  7   rencontre avec Dario Kordic, agité comme vous nous l’avez décrit,

  8   au sujet du niveau du commandement militaire dont il bénéficiait?

  9         LE TÉMOIN (interprétation) :  J’en ai conclu que

 10   Kordic avait été mis au commandement de Busovaca du fait du

 11   poste de dirigeant politique qu’il occupait et on lui avait

 12   demandé d’essayer de contrôler la situation.  J’en ai conclu

 13   qu’à cette époque, il était le commandant du HVO de Busovaca.

 14         Me NICE (interprétation) :  Nous allons maintenant

 15   passer au 22 février.  Y a-t-il eu ce jour-là un incident

 16   au niveau d’un barrage sur la route de Zenica ?

 17         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.  J’avais

 18   négocié à ce sujet, au sujet de ce barrage.  Si on regarde

 19   la carte, on voit que ce barrage constituait un problème

 20   important parce que c’est l’endroit où la route principale

 21   s’approchait de la rivière.  Il y avait là une falaise et

 22   en fait, au moyen d’explosifs, on avait fait sauter une

 23   partie des rochers de la falaise pour bloquer la route.

 24         Il faut bien comprendre qu’il y avait seulement des routes

 25   qui menaient à Zenica.  L’une c’était la route principale et

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  1   l’autre c’était l’itinéraire de la vallée, une route où il y

  2   avait souvent des combats, où il y avait souvent des barrages, et

  3   perdre l’accès à Zenica, c’est-à- dire la route la plus pratique

  4   où l’ensemble des agences internationales disposaient de points

  5   de contrôle, aurait été extrêmement grave.

  6         Me NICE (interprétation) :  Vous nous parlez d’une

  7   route qui passe par la vallée.  Est-ce que vous parlez de

  8   la route de montagne ?

  9         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.  La route qui

 10   passait par la montagne.

 11         Me NICE (interprétation) : Nous allons en parler plus tard.

 12         LE TÉMOIN (interprétation) :  Donc, cette question du

 13   barrage m’a beaucoup préoccupé et j’ai demandé au Commandant

 14   Jennings de s’occuper de cela et de régler le problème.  Il n’y

 15   est pas parvenu. Donc, moi-même, j’ai essayé de faire en sorte de

 16   démanteler ce barrage et je me suis entretenu avec Blaskic.  Il a

 17   convenu qu’en effet, la route pourrait de nouveau être réouverte

 18   et lorsque je suis allé voir Kordic, il n’était pas d’accord.  Il

 19   ne voulait pas que la route soit réouverte et il a dit que ce

 20   qu’avait dit Blaskic à ce sujet n’avait aucune importance et

 21   qu’il ne fallait y attacher aucune importance.

 22         Me NICE (interprétation) :  Est-ce que,

 23   finalement, la route a été ouverte ?

 24         LE TÉMOIN (interprétation) :  Pas à ce moment-là. 

 25   Il a encore fallu deux ou trois jours et j’ai dû garantir


Page 12298

  1   que moi-même, j’assurerais la sécurité de cette route en y

  2   installant un point de contrôle permanent avec certains de

  3   mes hommes et c’est quelque chose que j’ai fait avec

  4   énormément de réticence puisque établir ainsi des points de

  5   contrôle, ce n’était pas quelque chose qui me plaisait

  6   parce que ça immobilisait beaucoup de mes hommes, ça

  7   demandait beaucoup d’hommes et très franchement, je n’avais

  8   pas l’impression que c’était extrêmement utile et efficace.

  9         Me NICE (interprétation) :  Nous avons entendu des témoins

 10   et nous avons d’ailleurs vu un film où l’on vous voit découvrir

 11   le massacre de Ahmici.  Vous en avez parlé dans votre déposition

 12   dans l’affaire Blaskic.  Je ne vais pas vous demander, donc, de

 13   revenir en détail sur cet événement.  Mais je voudrais savoir si

 14   le 26 avril, après la découverte du massacre, vous avez rencontré

 15   Kordic, réunion au cours de laquelle il vous a donné une

 16   explication au sujet des événements de Ahmici.

 17         LE TÉMOIN (interprétation) :  En effet, et Kordic

 18   m’a dit que les incidents de Ahmici avaient été causés par

 19   des Serbes de Bosnie qui voulaient tuer des musulmans et

 20   faire porter la responsabilité de ces tueries sur le HVO.

 21         Me NICE (interprétation) :  Quelle a été votre

 22   réaction à ce moment-là à ce qu’il vous a dit ?

 23         LE TÉMOIN (interprétation) :  J’ai estimé que

 24   cette explication était minable et ridicule et qu’elle

 25   n’avait rien à voir avec la vérité.


Page 12299

  1         Me NICE (interprétation) :  Le lui avez-vous dit ?

  2         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui, tout à fait.

  3         Me NICE (interprétation) :  J’en viens maintenant aux

  4   conclusions que vous avez tirées au sujet de Kordic et toutes les

  5   informations que vous avez obtenues.  Je voudrais savoir quels

  6   étaient ses liens avec les instances les plus élevées du HVO.

  7         LE TÉMOIN (interprétation): Il est sûr qu’il avait un poste

  8   avait un poste très important au sein du HVO.  Il me l’a dit lui-

  9   même. Il était Vice-président. Il était Vice-président politique.

 10   Il me l’a dit lui-même. Il en était très fier.  Et moi, pour moi,

 11   j’ai eu l’impression que c’était un dirigeant politique en Bosnie

 12   centrale.  « Politique », j’emploie ce mot mais en sachant que

 13   j’emploie ce mot en voulant dire qu’il pouvait donner des

 14   instructions aux militaires, des orientations.

 15         Me NICE (interprétation) :  Je reviendrai à ces

 16   conclusions ultérieurement mais tout d’abord, quelques

 17   points de détail.  Quels étaient ses liens avec Valenta ?

 18         LE TÉMOIN (interprétation) :  J’ai eu l’impression que

 19   Valenta était son mentor, quelqu’un dont il s’inspirait.  Il faut

 20   savoir que Valenta avait écrit un ouvrage, que je n’ai jamais lu

 21   d’ailleurs parce que moi, je ne lis pas le croate, mais lorsqu’il

 22   m’en a fait une exégèse oralement, moi, j’ai eu l’impression que

 23   c’était un livre qui s’apparentait beaucoup à Mein Kampf parce

 24   que Mein Kampf c’était un livre qui préconisait le nettoyage

 25   ethnique.  Apparemment, c’était la même chose pour Valenta


Page 12300

  1   dans son ouvrage.

  2         Me NICE (interprétation) :  Paragraphe (d) puisque

  3   nous avons traité du point (c) déjà.  Avec le temps, avez

  4   pu tirer la conclusion que la participation de Kordic dans

  5   les affaires militaires est restée identique ou qu’elle a

  6   diminué ou bien qu’elle est devenue plus importante ?

  7         LE TÉMOIN (interprétation):  Ma réponse est la suivante: Il

  8   a commencé dans la région comme dirigeant politique, bien que

  9   l’incident du 20 octobre 1992 ait montré qu’il avait aussi son

 10   mot à dire dans les décisions prises par l’armée à Novi Travnik,

 11   mais il est indéniable qu’il est devenu de plus en plus impliqué

 12   dans les affaires militaires, à tel point qu’à la fin de ma

 13   mission, il était commandant militaire à Busovaca.

 14         Il est indéniable qu’il n’était pas militaire de carrière,

 15   au contraire de Blaskic qui lui était un ancien officier de la

 16   JNA, qui connaissait personnellement et qui aimait, d’ailleurs,

 17   qui avait de la sympathie pour Merdan dans l’armée de Bosnie-

 18   Herzégovine, alors que Kordic, lui, était un ancien journaliste.

 19   C’était quelqu’un qui avait des activités… un engagement

 20   politique.

 21         Me NICE (interprétation) :  Est-ce que vous avez pu vous

 22   faire une idée sur la façon dont les membres du HVO estimaient

 23   les capacités ou les aptitudes militaires de Kordic ?

 24         LE TÉMOIN (interprétation) :  J’ai eu l’impression

 25   que les soldats du HVO n’avaient pas beaucoup de respect


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  1   pour Kordic.  Ils estimaient que ce n’était pas un homme

  2   qui était fait pour être un commandant militaire.  J’ai

  3   l’impression qu’ils n’en pensaient pas moins à son sujet.

  4         Me NICE (interprétation):  Est-ce que cela s’est traduit de

  5   la façon suivante: Est-ce qu’il est arrivé qu’il refuse d’obéir à

  6   des ordres qu’ils recevaient de lui directement ou indirectement?

  7         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non, je ne pense pas.  Non.

  8   C’est une impression que j’ai eue. La situation était extrêmement

  9   confuse.  C’était tout le temps la cas.  J’ai l’impression, donc,

 10   que Blaskic était le commandant militaire et que Kordic était le

 11   commandant politique, et ayant étudié les forces armées

 12   soviétiques pendant toute ma carrière pratiquement au sein de

 13   l’armée britannique, je n’ai pas été très surpris de voir que les

 14   différentes parties belligérantes dans les Balkans soient

 15   organisées sur un modèle soviétique, à savoir que vous aviez, au

 16   niveau du commandement, un commandant militaire et un commandant

 17   politique. 

 18         C’est la façon dont était organisée la JNA, en suivant

 19   donc le modèle soviétique avant que Tito ne s’éloigne du bloc

 20   soviétique.  Mais en fait, ils ont continué à adopter le même

 21   modèle d’organisation.  Vous aviez toujours un commandant

 22   militaire et un commandant politique et normalement,

 23   commandant militaire devait obtenir l’accord du commandant

 24   politique pour prendre des mesures, quelles qu’elles soient.

 25         Donc, moi, j’avais l’impression, et je suis toujours

 


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  1   convaincu que c’est le cas, que Blaskic a été nommé commandant

  2   militaire de Bosnie centrale et que Kordic, lui, a été nommé

  3   commandant politique de Bosnie centrale.  Mais quand je dis

  4   « nommé », il faut bien savoir qu’à ce moment-là, on parlait du

  5   HVO qui était un HVO qui se créait, qui en était à ses

  6   balbutiements et tout ceci se passait dans la précipitation. 

  7   Donc, il ne disposait pas de manuels, d’ouvrages, de procédures

  8   que l’on suivait à la lettre.  En fait, il faisait les choses de

  9   façon un peu précipitée suivant les besoins qui se présentaient.

 10         Me NICE (interprétation) :  Merci.  Je crois que nous avons

 11   traité des alinéas (e) qui sont les négociations d’octobre 1992,

 12   (f), le commandement militaire à Busovaca en 1993, (g), sa

 13   position vis-à-vis de Blaskic, la relation dans la hiérarchie et

 14   le fait qu’il est passé outre aux ordres de Blaskic le 23 février.

 15         Je vais maintenant passer au point (h) et je

 16   voudrais vous demander si vous avez vu Kordic participer

 17   personnellement à la perpétration de crimes de guerre.

 18         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non.  Je dois dire que je ne

 19   l’ai jamais vu et je n’ai, d’ailleurs, pas eu l’impression qu’il

 20   ait participé personnellement à des crimes de guerre.

 21         Me NICE (interprétation):  En ce qui concerne l’attaque sur

 22   Ahmici, en partant de ce que vous avez dit dans votre résumé, au

 23   moment de l’offensive sur Ahmici, disposiez-vous d’informations

 24   au sujet de l’évolution de la situation ?

 25         LE TÉMOIN (interprétation) :  Ahmici, ça a eu lieu le 16


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  1   avril 1993 et pour moi, il était très clair que la situation en

  2   Bosnie centrale se détériorait depuis un certain temps.  Je parle

  3   des relations entre l’armée de Bosnie-Herzégovine et le HVO qui

  4   se détérioraient.  L’offensive sur Ahmici a dû être planifiée,

  5   préparée à l’avance.

  6         En tant qu’officier de carrière expérimenté, je peux vous

  7   dire que l’on ne peut pas réunir autant de soldats, les soldats

  8   nécessaires pour mener une telle opération, sans avoir planifié

  9   cette opération d’une façon ou d’une autre.  De ce fait,

 10   l’offensive sur Ahmici a dû être portée à la connaissance, a dû

 11   être souscrite par Monsieur Kordic.  Il a dû y donner son accord

 12   parce qu’à ce moment-là, il était encore ce que j’appellerais le

 13   « commissaire politique » pour la Bosnie centrale.

 14         Pour moi, il est inconcevable de penser… (l’interprète se

 15   reprend) je ne pense pas que Kordic… (l’interprète se reprend) je

 16   ne pense pas que Blaskic ait participé à cette opération ou ait

 17   mené cette opération atroce et répugnante sans un accord

 18   politique, et cet accord politique, il est venu de Kordic.

 19   C’était ce qui se passait en Bosnie centrale.

 20         Me NICE (interprétation) :  Une question plus générale et

 21   dernière question à ce sujet :  Est-ce qu’il y avait des

 22   stratégies, des politiques qui peuvent intéresser la Chambre de

 23   première instance au sujet du nettoyage ethnique et je voudrais

 24   savoir dans quelle mesure ce genre de stratégies et ce genre

 25   d’opérations nécessitaient une approbation ou une contribution de


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  1   la part des dirigeants politiques ?

  2         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je pense que les décisions

  3   relatives aux opérations de nettoyage ethnique venaient de deux

  4   sources.  Tout d’abord, il y avait la stratégie politique du HVO

  5   qui était déterminée, entre autres, par des gens comme Ante

  6   Valenta, et comme je l’ai déjà dit précédemment, Kordic me

  7   paraissait faire partie de ses disciples, des gens qui suivaient

  8   son idéologie, et l’autre raison c’était la suggestion qui était

  9   faite que la zone de Bosnie centrale devait être divisée aux

 10   termes du Plan Vance-Owen en zones qui étaient un petit peu

 11   absurdes si on regardait la situation.

 12         Par exemple, Gornji Vakuf, qui était musulmane en majorité,

 13   devait revenir aux Croates et Novi Travnik où l’on trouvait aussi

 14   beaucoup de musulmans devait revenir également aux Croates et les

 15   Croates étaient censés se centrer sur Zenica.  C’est l’une des

 16   raisons pour lesquelles la situation a explosé.  C’est quelque

 17   chose qui se préparait déjà depuis longtemps.  C’est le désir de

 18   changer la situation avant que la communauté internationale

 19   réalise qu’elle s’était trompée.  Les opérations de nettoyage

 20   ethnique en Bosnie centrale ont été menées avec l’accord – ont dû

 21   être menées, j’en suis convaincu – avec l’accord des dirigeants

 22   politiques du HVO.

 23         Me NICE (interprétation) :  Donc, pour vous, la situation

 24   était la suivante :  Est-ce que les dirigeants politiques

 25   pouvaient passer outre les ordres des dirigeants militaires ou


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  1   est-ce que le contraire était vrai ?

  2         Me SAYERS (interprétation) :  Je pense qu’il

  3   s’agit d’une question tendancieuse.

  4         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Je ne pense

  5   pas que ce soit le cas.  Il s’agit d’une question à

  6   laquelle on peut donner une réponse ouverte.

  7         LE TÉMOIN (interprétation) :  Ma réponse est la

  8   suivante :  Je pense que c’est les politiques qui décidaient.

  9         Me NICE (interprétation) :  Est-il arrivé que les ordres de

 10   Kordic soient annulés par des instances militaires ou par des

 11   politiques situés à un niveau supérieur au sien ?

 12         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non.

 13         Me NICE (interprétation) :  Nous savons déjà que vous avez

 14   demandé à Blaskic d’enquêter sur ce qui s’était passé à Ahmici.

 15   Au moment où vous avez formulé cette demande et sur la base de

 16   votre expérience d’officier, est-ce qu’à votre avis, il existait

 17   des documents écrits relatifs à ce qui s’était passé ?

 18         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je pense qu’il devait y avoir

 19   des ordres écrits qui avaient été délivrés dans le cadre de la

 20   préparation de l’offensif sur Ahmici et j’imagine qu’il y a pu y

 21   avoir un document de conclusion, un document rédigé suite à ce

 22   qui s’était passé à Ahmici, mais étant donné le caractère

 23   répugnant de ce qui s’est passé à Ahmici et ailleurs, il est

 24   probable que ces documents ont été cachés ou bien même on été

 25   détruits parce que c’était des documents qui étaient explosifs.


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  1         Je voudrais ajouter une chose à ce stade.  J’ai pu me

  2   convaincre qu’il y a eu également des crimes contre l’humanité

  3   perpétrés par l’armée de Bosnie-Herzégovine, mais cela ne… du

  4   moins dans ma zone, cela n’a jamais été fait à l’échelle où de

  5   tels crimes ont été perpétrés dans la vallée de la Lasva.

  6         Me NICE (interprétation) :  Est-ce que Blaskic

  7   vous a jamais fourni des rapports ou des documents

  8   quelconques ou est-ce que de tels documents vous ont été

  9   fournis par quelqu’un d’autre pour vous expliquer que le

 10   HVO n’avait pas participé à l’attaque sur Ahmici ?

 11         LE TÉMOIN (interprétation) : Eh bien, j’ai reçu une réponse

 12   à la lettre que j’avais envoyée immédiatement après la découverte

 13   de ce qui s’était passé à Ahmici.  J’avais envoyé cette lettre à

 14   Blaskic.  Je l’ai vue, d’ailleurs, lorsque j’ai déposé dans

 15   l’affaire Blaskic.  Je suis tout à fait prêt à reconnaître, donc,

 16   qu’on a répondu à ma lettre, mais je suis sûr que rien n’a été

 17   fait entre ce moment-là et le moment où j’ai quitté la Bosnie

 18   centrale le 10 mai 1993.  Absolument rien n’a été fait pour

 19   enquêter de façon déterminée pour savoir ce qui s’était vraiment

 20   passé dans le village de Ahmici le 16 avril 1993.

 21         Me NICE (interprétation) :  Afin de rafraîchir la

 22   mémoire de la Chambre, je souhaiterais que soit présenté au

 23   témoin le document portant la cote D64/1.  Je pense que

 24   c’est le document auquel il vient de faire référence.  Je

 25   vous prie de placer ce document sur le rétroprojecteur.


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  1         S’agit-il du document auquel vous avez fait

  2   référence lorsque vous nous avez dit que vous avez vu une

  3   réponse à votre lettre, une réponse que l’on vous a montré

  4   lors de votre déposition dans l’affaire Blaskic ?

  5         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui, c’est

  6   effectivement ce document.

  7         Me NICE (interprétation) :  Je pense que Messieurs

  8   les Juges ont lu ce document précédemment.  Donc, inutile

  9   d’en redonner lecture.

 10         Je souhaiterais maintenant que nous passions rapidement et

 11   pour quelques instants à huis clos partiel puisque nous allons

 12   maintenant parler d’un autre témoin potentiel.

 13         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Oui.

 14                           [Huis clos partiel]

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 21                     [Audience publique]

 22         LE TÉMOIN (interprétation) :  Quelle est la différence

 23   entre session publique et session à huis clos partiel ?

 24         Me NICE (interprétation) :  Une session à huis

 25   clos partiel est une session qui exclut la galerie, c’est-


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  1   à-dire qui exclut le public de ce qui est dit à l’intérieur

  2   de la salle du prétoire.  Donc, le Tribunal a le droit de

  3   limiter l’information pour ce qui est du public.

  4         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je voudrais savoir

  5   cela parce que je parle de choses très importantes.

  6         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Si quelque chose vous

  7   dérange à ce sujet, nous pouvons vous fournir l’occasion, pendant

  8   la pause, de vous entretenir avec Me Nice pendant la pause et

  9   donc, cela peut être expliqué, et s’il y a quelque chose sur

 10   laquelle vous désirez attirer l’attention du Tribunal, nous

 11   pouvons en discuter.

 12         LE TÉMOIN (interprétation) :  Mais c’est une

 13   pratique de l’armée britannique que de ne pas identifier

 14   les gens qui participent aux opérations spéciales.

 15         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Si vous voulez en

 16   discuter avec Me Nice, vous pouvez le faire, mais si vous avez

 17   besoin d’une ordonnance, nous allons vous en communiquer une.

 18         LE TÉMOIN (interprétation) : Une pratique normale chez nous

 19   est de ne pas identifier les gens à tout venant, c’est tout.

 20         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Très bien.

 21         Me NICE (interprétation) :  Avec la carte géographique que

 22   vous avez sous les yeux et compte tenu du fait que les Juges

 23   n’ont pas eu l’opportunité de visiter la région, est-ce que vous

 24   pouvez nous expliquer ou nous dire quelque chose sur cette route

 25   de montagne, que vous pouvez aussi nous indiquer sur le plan, et


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  1   nous expliquer dans quelle mesure cette route était importante

  2   pour vous, à la différence de celle qui passait par la vallée ?

  3         LE TÉMOIN (interprétation) :  Alors, pour vous donner une

  4   idée et vous orienter un peu, voici l’emplacement de la ville de

  5   Vitez ici [indication du témoin].  Ici se trouve Zenica

  6   [indication du témoin] où se trouvait les agences

  7   internationales.  C’est ici [indication du témoin] que se

  8   trouvait mon commandement militaire où j’étais installé moi-même

  9   et les deux directions pour Zenica étaient les suivantes :  L’une

 10   au travers de cette vallée qui passait, donc, par la vallée de

 11   la Lasva jusqu’à ce carrefour ici [indication du témoin], puis,

 12   la route continuait vers Sarajevo et si l’on prenait à gauche, on

 13   pouvait se rendre à Zenica.  C’était une route bien entretenue,

 14   fort bonne pour tout accès logistique et toute assistance

 15   humanitaire.  La route passant par la vallée était la meilleure

 16   des voies de communication, sauf pour emmener des poids lourds

 17   jusqu’à Zenica.

 18         Il y avait une route par la montagne qui allait jusqu’au

 19   sommet et puis qui redescendait jusqu’à Zenica. Alors, ceci était

 20   la voie la plus rapide pour ce qui est de l’éloignement à vol

 21   d’oiseaux, mais l’autre route était nettement plus rapide en

 22   raison de la facilité de transport puisque vous n’aviez pas de

 23   monts et de côtes à escalader.  Je prenais personnellement la

 24   route de montagne si j’étais en Land Rover et je prenais, par

 25   exemple, la route de la vallée si j’étais dans un blindé.


Page 12313

  1         Me NICE (interprétation) :  À combien de reprises

  2   avez-vous utilisé cette route passant par la montagne, à

  3   l’époque des événements de Ahmici ?

  4         LE TÉMOIN (interprétation) :  Pour ce qui est des

  5   événements de Ahmici, de cette période-là, donc, vers le 16

  6   avril, je crois m’y être rendu à trois reprises, à Zenica

  7   notamment ce jour-là, au moins deux fois, mais probablement

  8   trois.  Il faut que vous sachiez que j’écrivais mon journal

  9   le lendemain parce que le soir, j’étais fatigué et je crois

 10   que je n’ai fait que mentionner des données.  Cela, donc,

 11   n’a pas été un récit tout à fait précis des événements.

 12         Me NICE (interprétation) :  Pour que tout ceci ait

 13   un sens et pour aider la présente Chambre, je voudrais vous

 14   demander si vous vous rappelez quelque incident que ce soit

 15   lorsque vous aviez reçu de l’assistance pour faire enlever

 16   des mines posées sur la route ?

 17         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.  Parfois, les

 18   gens m’aidaient à enlever les mines qui avaient été posées

 19   sur la route, quelle que soit cette route d’ailleurs, et

 20   parfois, je le faisais moi-même.  Il est évident que nous

 21   avions appris de façon relativement rapide que toutes ces

 22   mines antichars ne comportaient pas ce qu’on appelle les

 23   mines surprises, n’étaient pas encore piégées, et cela

 24   était assez fréquent au niveau d’une armée professionnelle.

 25         Me NICE (interprétation) :  Nous essaierons de


Page 12314

  1   nous souvenir de vos réponses aux questions posées il y a

  2   quelque temps et je crois que lorsque vous parliez de la

  3   route vers Zenica, pouvez-vous nous dire :  En ce qui

  4   concerne la date du 16 avril, y a-t-il quelque note que ce

  5   soit pour ce qui est de votre déplacement vers Zenica ?

  6         LE TÉMOIN (interprétation) :  Le 15 avril, je suis

  7   allé à Zenica mais je ne suis pas revenu.

  8         Me NICE (interprétation) :  C’est tout ce qu’il nous faut

  9   savoir.  Si vous n’êtes pas revenu ce jour-même, est-ce que vous

 10   pouvez nous dire quelque chose à propos du 14 ?

 11         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non, j’étais à Tuzla.

 12         Me NICE (interprétation) :  Et le 15 ?

 13         LE TÉMOIN (interprétation) :  Le 15, j’ai passé la

 14   matinée dans le quartier général.  J’avais de la paperasserie à

 15   faire, puis dans le début d’après-midi, je suis allé à Novi

 16   Travnik jusqu’à ce qu’on m’appelle pour que j’aille à Zenica.

 17         Me NICE (interprétation) :  Est-ce que vous avez

 18   régulièrement ramassé des gens que vous rencontriez sur la

 19   route pour les transporter dans votre véhicule ou cela ne

 20   faisait-il pas partie de votre politique ?

 21         LE TÉMOIN (interprétation) :  La pratique officielle

 22   consistait à ne pas embarquer des gens dans nos véhicules, mais

 23   cette pratique officielle était complètement dénuée de sens.  Ici,

 24   l’on savait que les gens étaient en péril.  Donc, je n’ai pas

 25   obéi aux ordres qui émanaient de l’ONU et j’ai donné instruction


Page 12315

  1   à mes gens que lorsqu’ils voyaient une population menacée,

  2   en péril, ou si quelqu’un devait aller se rendre à l’hôpital,

  3   par exemple, ou devoir tomber sur un soldat qui était en péril ou

  4   blessé, et si nous pouvions lui sauver la vie, eh bien, nous le

  5   faisions parce que nous considérions que les soldats étaient

  6   aussi des êtres humains, donc, qu’ils méritaient d’être aidés. Je

  7   répondrais que je prenais, que j’embarquais volontiers les gens

  8   lorsque ceux-ci avaient besoin d’être transportés d’urgence,

  9   indépendamment du fait qu’il s’agissait de musulmans, Croates, ou

 10   de qui que ce soit d’autre.

 11         Me NICE (interprétation) :  Deux détails encore et je me

 12   propose de terminer.  D’abord, cela ne figure pas d’ailleurs dans

 13   le résumé, mais nous pourrions le mentionner également. Vous avez

 14   vu un ou plusieurs sites qui avaient servi de lieu

 15   d’emprisonnement dans la région de Busovaca et de Vitez ?

 16         LE TÉMOIN (interprétation) :  En fait, dans la région de

 17   Vitez, j’en ai vu deux, l’une qui s’appelait Kaonik et l’autre

 18   qui ne portait pas de nom mais qui se trouvait au sud de

 19   Busovaca.

 20         Me NICE (interprétation) :  Mais est-ce que cela a une

 21   importance quelconque de voir que deux emplacements étaient

 22   utilisés en tant que lieux d’emprisonnement ?

 23         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je pense que cela

 24   devait être la chose qui leur convenait le plus.

 25         Me NICE (interprétation) :  Je crois que nous


Page 12316

  1   pourrions voir une pièce à conviction Z306 et je voudrais

  2   que celle-ci soit remise à Messieurs les Juges.  Il s’agit

  3   d’un bulletin d’information militaire datant de 1992, de

  4   décembre 1992, et au bas de la page, il y a une partie où

  5   l’on mentionne une personne dénommée Marinko.  Est-ce que

  6   vous avez connu une personne nommée Marinko ?

  7         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui, peut-être mais

  8   je ne me souviens plus des noms.

  9         Me NICE (interprétation) :  D’après ce qui a fait

 10   l’objet du rapport, Marinko avait dit qu’il connaissait

 11   bien Kordic et vers la fin… non, plutôt vers le début

 12   décembre, il avait décrit Kordic et Blaskic comme deux

 13   corps et une même âme et que Novi Travnik serait une ville

 14   croate qui serait une ville centrale de la nouvelle Herceg-

 15   Bosna et que les musulmans devraient quitter Zenica.

 16         Comment comprenez-vous cette réponse pour ce qui

 17   est de la situation générale de l’époque ?

 18         LE TÉMOIN (interprétation) :  Eh bien, j’avais compris que

 19   cela venait du livre de Monsieur Valenta et je crois que ces

 20   données ont été recueillies par l’un de mes officiers de

 21   renseignements et je n’avais pas été au courant de ce qui se

 22   faisait au niveau de ces bulletins d’information militaire et

 23   habituellement, je ne dirigeais pas ces bulletins, à moins que je

 24   n’aie donné instructions à mon personnel de porter tel ou tel

 25   autre renseignement dans les bulletins de renseignements


Page 12317

  1   militaires.

  2         Me NICE (interprétation) :  Monsieur le Président,

  3   il serait peut-être utile de demander au témoin…

  4         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Je vous remercie. 

  5         Me SAYERS (interprétation) :  Je vous remercie,

  6   Monsieur le Président.

  7         QUESTIONS PAR :

  8         Me SAYERS (interprétation) :  Bonjour, Monsieur le

  9   Colonel Stewart.  Je m’appelle Steve Sayers et je suis l’un

 10   des avocats représentant Monsieur Dario Kordic dans ce cas

 11   et derrière moi, Messieurs Kovacic et Mikulicic représentent et

 12   défendent Monsieur Mario Cerkez.  Je voudrais…

 13         LE TÉMOIN (interprétation) :  Mais je crois que

 14   Monsieur Cerkez est ici.

 15         Me SAYERS (interprétation) :  Non.  Il y a juste

 16   Monsieur Kordic ici. 

 17         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Il y a deux

 18   accusés ici dans la même affaire.

 19         Me NICE (interprétation) :  Justement, j’ai omis le

 20   paragraphe 9 et nous pourrions en traiter maintenant ou alors par

 21   la suite, lors du contre-interrogatoire, si vous le voulez bien.

 22         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Nous pourrions entamer

 23   le paragraphe 9 et par la suite, Monsieur Kovacic sera libre de

 24   poser quelques questions dans le cas où il le souhaiterait.

 25   Alors, je vous en prie.


Page 12318

  1         Me SAYERS (interprétation) :  Je vous remercie,

  2   Monsieur le Président.

  3         Monsieur le Colonel, pour ce qui est de vous-même et de la

  4   Chambre, je me propose de vous poser des questions sur trois

  5   grands domaines et j’espère que j’aurai la possibilité de

  6   terminer aujourd’hui mais cela dépendra de notre rapidité

  7   d’avancement.  Quelques questions d’abord pour ce qui est du

  8   journal que vous teniez à jour, du livre que vous avez rédigé.

  9   Ensuite, quelques questions sur les lignes de commandement, les

 10   chaînes de commandement du HVO et je me propose de vous poser

 11   quelques questions d’ordre général par la suite.

 12         Ensuite, je voudrais que nous passions par ordre

 13   chronologique au travers des événements dont vous êtes au courant

 14   et dont vous avez témoigné dans la matinée d’aujourd’hui et ce

 15   sera, si vous voulez, la majeure partie de mon contre-

 16   interrogatoire et je me propose de vous poser également quelques

 17   questions au sujet de votre opinion au sujet de Ahmici.  Je ferai

 18   un maximum pour vous indiquer les temps de pause afin que vous

 19   puissiez vous préparer.

 20         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je vous remercie. 

 21   C’est fort prévenant de votre part.

 22         Me SAYERS (interprétation) :  Si j’ai bien compris, vous

 23   avez effectué deux visites de reconnaissance en Bosnie-

 24   Herzégovine avant d’avoir amené le premier bataillon de votre

 25   régiment pour l’accomplissement de ses tâches en Bosnie.  La

 


Page 12319

  1   première visite de reconnaissance se trouvait vers la fin du mois

  2   de septembre ?

  3         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

  4         Me SAYERS (interprétation) :  Et vous aviez visité

  5   brièvement la ville de Vitez ?

  6         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui, oui, oui.  Donc, j’ai

  7   passé deux semaines.  J’ai passé aussi quelques jours en Serbie

  8   et puis par la suite, une semaine en Bosnie centrale.

  9         Me SAYERS (interprétation) :  Et vous étiez passé

 10   par Tuzla, n’est-ce pas ?

 11         LE TÉMOIN (interprétation) : Lors de mon passage en Serbie,

 12   j’ai essayé d’arriver jusqu’à Tuzla mais je n’ai pas réussi parce

 13   que j’avais été coincé vers Zvornik et lorsque j’étais en Bosnie

 14   centrale, j’ai réussi à arriver jusqu’à Vitez.

 15         Me SAYERS (interprétation) :  Donc, cette deuxième visite a

 16   duré du 18 au 22 octobre, lorsque vous étiez revenu vers Split ?

 17         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui, c’est cela.  Je ne suis

 18   pas sûr des dates mais c’est exactement ce qui s’est passé.

 19         Me SAYERS (interprétation) :  Dans l’affaire Blaskic, vous

 20   aviez témoigné d’instructions de la part du Général McKenzie pour

 21   ce qui était de la tenue de votre journal et je voudrais vous

 22   montrer une copie du journal que vous aviez tenu à jour et qui

 23   figure ici parmi les pièces à conviction avec l’accord, bien sûr,

 24   de la Chambre.

 25         LA GREFFIÈRE (interprétation) :  Le document porte


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  1   la cote D151/1.

  2         Me SAYERS (interprétation) :  Je vous remercie.

  3         Par conséquent, ce document D151/1, est-ce bien la

  4   copie de votre journal ?

  5         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.  Cela semble l’être.

  6         Me SAYERS (interprétation) :  Alors, je crois que vous

  7   devriez garder le document parce que nous allons nous référer à

  8   ce journal pendant le contre-interrogatoire.  Le deuxième

  9   document que je voudrais vous montrer c’est un journal qui…enfin,

 10   un document qui porte le titre : « Journal du commandant » et je

 11   crois que c’est le journal officiel de votre régiment.  Je

 12   voudrais que vous jetiez également un œil sur ce dernier.

 13         LA GREFFIÈRE (interprétation) :  Il s’agit du

 14   document D152/1.

 15         Me SAYERS (interprétation) : Le document que vous voyez est

 16   le journal officiel des événements importants qui avaient été

 17   tenu à jour par le premier bataillon du régiment de Cheshire ?

 18         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.  C’était mon

 19   commandant qui avait tenu ce journal.

 20         Me SAYERS (interprétation) :  Et il s’agit des

 21   notes officielles, si je puis dire, pendant que vous étiez

 22   de service en Bosnie ?

 23         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.  C’est comme

 24   mon commandant a vu les choses.

 25         Me SAYERS (interprétation) :  Et il s’agit du


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  1   commandant ou du Major Tim Park, n’est-ce pas ?

  2         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui, c’est cela.

  3         Me SAYERS (interprétation) :  Et il avait été remplacé par

  4   le Major Brian Watters.  Je crois que nous pourrions conclure,

  5   Monsieur le Colonel, que vous avez été sollicité par l’armée

  6   britannique pour ce qui est de rédiger un livre sur votre séjour

  7   en Bosnie et ce livre a été rédigé, enfin, publié par Harper

  8   Collins en 1993, qui porte le nom de « Vies brisées » ?

  9         LE TÉMOIN (interprétation): Oui. Le directeur des relations

 10   publiques de l’armée m’avait demandé de rédiger ce livre et il

 11   avait dit que cela aurait beaucoup d’importance que de le faire

 12   et que les gens cesseraient donc de m’inciter à le faire.

 13         Me SAYERS (interprétation) :  Et ce livre a été rédigé dans

 14   la même année, enfin, que celle où vous avez séjourné en Bosnie ?

 15         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 16         Me SAYERS (interprétation) :  Je voudrais que

 17   certaines parties du livre soient marquées par Madame la

 18   Greffière, enfin, le greffe afin que nous puissions nous

 19   référer à ces parties pendant notre contre-interrogatoire. 

 20         LA GREFFIÈRE (interprétation) :  Le document porte

 21   la cote D153/1.

 22         Me SAYERS (interprétation) :  Monsieur le Colonel,

 23   nous pourrions commencer avec le livre « Vies brisées ». 

 24   J’imagine que c’est votre photo en couverture. 

 25         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Oui.  Nous


Page 12322

  1   n’allons pas avancer plus vite si nous posons ce type de

  2   question.  Bien sûr qu’il s’agit de sa photo.

  3         Me SAYERS (interprétation) :  En page 319 de ce livre, vous

  4   avez dit qu’il y avait eu en Bosnie une guerre civile classique,

  5   où des civils avaient combattu contre des civils, et je crois que

  6   vous serez d’accord avec les vues générales que vous aviez

  7   énoncées concernant la situation en Bosnie et auxquelles vous

  8   deviez faire face en Bosnie centrale dans la première moitié de

  9   1993 et dans les deux ou trois mois qui ont suivi ?

 10         LE TÉMOIN (interprétation) :  C’est cela.

 11         Me SAYERS (interprétation) :  En outre, en page 19

 12   de ce livre, concernant les informations initiales que vous

 13   aviez obtenues pour aller vous rendre avec vos soldats en

 14   Bosnie centrale, on vous avait dit que la haine qui

 15   existait entre les parties au conflit était telle qu’il

 16   était, enfin, presque incroyable d’en croire ses yeux.

 17         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je pense que cela a eu lieu à

 18   propos de Sarajevo et je me souviens qu’on me l’avait dit.

 19         Me SAYERS (interprétation) :  Oui, et vous aviez dit que

 20   les relations entre les Croates et les musulmans, en page 6,

 21   enfin, qu’elles dataient de siècles, qu’il y avait des rivalités,

 22   des guerres, des massacres et que toute cette région était

 23   considérée comme un baril de poudre.  Je pense que c’est le

 24   résultat des informations que vous aviez reçues en vue de vous

 25   préparer pour votre service ?


Page 12323

  1         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui, c’est cela.

  2         Me SAYERS (interprétation) :  Donc, il s’agit seulement non

  3   pas de toutes les informations mais de certains renseignements ?

  4         LE TÉMOIN (interprétation) :  Mais presque tous

  5   les renseignements étaient de ce genre.

  6         Me SAYERS (interprétation) :  Mais vous ne saviez

  7   pratiquement rien sur les Balkans avant d’avoir été nommé

  8   et envoyé là-bas ?

  9         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.  Si ce n’est

 10   les conditions d’hébergement et quelques données historiques.

 11         Me SAYERS (interprétation) :  Monsieur le Colonel,

 12   vous avez décrit une cellule pour la rédaction des

 13   bulletins d’information militaire ?

 14         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui, en effet.  Les

 15   Nations unies m’avaient dit qu’il n’y avait pas de service

 16   de renseignements pour les opérations des Nations unies et

 17   moi, j’avais dit que je n’étais pas d’accord du tout et je

 18   crois que l’on m’avait dit que cela s’appelait un centre

 19   d’informations et j’ai dit que les activités de

 20   renseignements étaient indispensables afin que les

 21   activités militaires soient à même de fonctionner.

 22         Me SAYERS (interprétation) :  Votre segment chargé du

 23   renseignement était commandé par le Capitaine Christian Leyshon ?

 24         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 25         Me SAYERS (interprétation) :  Vous le considériez


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  1   comme étant un officier jeune et tout à fait responsable ?

  2         LE TÉMOIN (interprétation) : Il était tout à fait efficace.

  3         Me SAYERS (interprétation) :  Le conseil a déjà eu

  4   l’occasion d’entendre pas mal d’informations pour ce qui est de

  5   la rédaction des bulletins d’information militaire.  Pouvez-vous

  6   nous dire que la tâche du département d’information et de

  7   renseignement était aussi de rédiger des résumés concernant les

  8   événements importants dans votre zone de responsabilité ?

  9         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non.  La tâche de cette

 10   cellule de renseignements était de préparer les soldats qui

 11   devaient aller sur le terrain afin qu’ils puissent accomplir

 12   leurs tâches et recueillir les informations ramenées par les

 13   patrouilles de reconnaissance, donc, se pencher et étudier les

 14   informations pour être plus efficaces par la suite en nous

 15   rendant sur le terrain. 

 16         Bien sûr, il y avait aussi une tâche d’information mais

 17   l’organisation du renseignement avait pour première tâche d’aider

 18   les gens qui se rendaient sur le terrain, et parlant de ce sujet,

 19   c’est précisément parce que les cellules de renseignement

 20   fournissaient des appréciations.  Cela ne signifiait pas que

 21   des gens comme moi les lisaient toutes.

 22         Me SAYERS (interprétation) :  Je comprends, Monsieur le

 23   Colonel, mais j’essaie seulement d’avoir une idée comment cette

 24   information arrive à être rédigée.  Je m’excuse de m’être éloigné

 25   du sujet.  Donc, il est exact que le commandant recevait des

 


Page 12325

  1   renseignements qui étaient recueillis par des gens qui étaient

  2   dans les renseignements militaires ?

  3         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non, ce n’était pas

  4   général mais cela avait lieu à 5 h 00.

  5         Me SAYERS (interprétation) :  Et vos officiers

  6   vous renseignaient des résultats, enfin, des renseignements

  7   recueillis quotidiennement ?

  8         LE TÉMOIN (interprétation) :  Mais c’est le

  9   personnel qui s’en chargeait, pas moi-même.

 10         Me SAYERS (interprétation) :  Donc, vos officiers

 11   de liaison, Monsieur le Capitaine Foregrave ou Dundas-

 12   Whatley, étaient efficaces et vous aviez une opinion très

 13   haute de leurs aptitudes ?

 14         LE TÉMOIN (interprétation) :  En réponse, je

 15   dirais qu’ils étaient des personnes parfaitement biens mais

 16   si maintenant, il fallait individuellement les annoter,

 17   bien, ma réponse aurait peut-être été autre.

 18         Me SAYERS (interprétation) : Avant que vous ne vous rendiez

 19   en Bosnie-Herzégovine, vous avez reçu des informations générales

 20   sur ce que vous pouviez trouver là-bas et c’est le Lieutenant

 21   Colonel Doyle qui vous avait donné ces informations ?

 22         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 23         Me SAYERS (interprétation) :  En pages 29 et 30 de

 24   votre livre et en page 280 de ce même livre, tout comme

 25   dans votre journal en date du 25 septembre 1992, on dit que


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  1   le Lieutenant Colonel Doyle vous avait donné instructions

  2   d’être très attentif pour ce qui est de l’établissement de

  3   la vérité parce que toutes les personnes en Bosnie-

  4   Herzégovine avaient un penchant à déformer la vérité ?

  5         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.  C’est ce qu’on

  6   m’a dit.

  7         Me SAYERS (interprétation) :  On vous avait donné

  8   aussi instructions de vous préparer à l’attaque, enfin,

  9   parce qu’on allait toujours blâmer les autres ?

 10         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui. 

 11         Me SAYERS (interprétation) :  Il s’agissait d’une

 12   routine afin de pointer du doigt vers l’autre partie pour

 13   l’accuser pour toutes choses ?

 14         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui, c’est cela.

 15         Me SAYERS (interprétation) :  Je vais vous poser quelques

 16   questions, mon Colonel, au sujet de la chaîne de commandement.

 17         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Je crois que

 18   ce serait un bon moment que de procéder à une pause si vous

 19   proposez de changer de sujet.

 20         Monsieur Nice, est-ce que vous voulez vous

 21   entretenir avec le témoin maintenant ou par la suite ?

 22         Me NICE (interprétation) :  Je ne sais pas s’il y

 23   a eu une ordonnance de la part de la Chambre I.  Je vais le

 24   vérifier.  Mais je crois que sa réponse avait été qu’il

 25   n’était pas tenu d’en parler.


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  1         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Oui, vous pouvez le

  2   faire comme ça.  Ainsi, nous allons voir s’il y a quelque chose

  3   à ajouter.  Mais il va falloir que vous fassiez une requête pour

  4   ce qui est des documents provenant de la Chambre I et je crois

  5   que nous pourrions le faire avant cette pause et cette pause va

  6   durer maintenant une demi-heure.

  7         --- Suspension de l’audience à 11 h 03

  8         --- Reprise de l’audience à 11 h 36

  9         Me SAYERS (interprétation) :  Merci, Monsieur le Président.

 10         Colonel, avant la pause, je vous ai dit que nous allions

 11   parler de la chaîne de commandement au sein du HVO.  J’aimerais

 12   que nous en parlions, donc, maintenant assez rapidement.

 13   Je crois que mes questions sont assez simples et si vous avez

 14   besoin de donner davantage de détails, faites-le moi savoir.

 15         Première question :  Vous saviez que le quartier

 16   général du HVO, il se trouvait à Mostar, n’est-ce pas ?

 17         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 18         Me SAYERS (interprétation) :  Le Général de brigade Milivoj

 19   Petkovic était commandant en chef du HVO, n’est-ce pas ?

 20         LE TÉMOIN (interprétation) :  Exact.

 21         Me SAYERS (interprétation) :  Le commandement militaire du

 22   HVO se répartissait en plusieurs zones opérationnelles, n’est-ce

 23   pas, par exemple, la zone opérationnelle de Bosnie centrale qui

 24   était sous le commandement du Colonel Tihomir Blaskic et la zone

 25   opérationnelle du nord-ouest d’Herzégovine qui, pendant la


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  1   durée de votre mission, était sous le commandement du

  2   commandant Zeljko Siljeg, n’est-ce pas ?

  3         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

  4         Me SAYERS (interprétation) :  Chacune de ces zones

  5   opérationnelles était commandée par un commandant distinct

  6   qui rendait compte au commandant en chef du quartier

  7   général de Mostar, n’est-ce pas ?

  8         LE TÉMOIN (interprétation) :  C’est effectivement

  9   ce que j’avais compris.

 10         Me SAYERS (interprétation) :  S’agissant des zones

 11   opérationnelles, Colonel, elles étaient divisées en

 12   brigades au niveau des municipalités, n’est-ce pas ?

 13         LE TÉMOIN (interprétation) :  S’il est permis de

 14   les appeler des brigades, effectivement.

 15         Me SAYERS (interprétation) :  Dans la mesure où il

 16   s’agissait de brigades, il y avait, en tout cas, une brigade

 17   stationnée à Vitez, une autre à Novi Travnik, une autre à

 18   Busovaca, et je ne les cite qu’à titre d’exemple, n’est-ce pas ?

 19         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui, à titre

 20   d’exemple, effectivement.

 21         Me SAYERS (interprétation) :  Chacune des brigades

 22   était commandée par un commandant de brigade qui rendait

 23   compte au commandant de la zone opérationnelle, n’est-ce pas ?

 24         LE TÉMOIN (interprétation) :  Pour autant que nous

 25   ayons pu le constater, effectivement.  J’ajouterais, si


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  1   vous me le permettez, que nous n’avons jamais vu un ordre de

  2   bataille.  Il s’agit ici de supposition déterminée par nous. Nous

  3   n’avions pas non plus la possibilité de poser des questions

  4   exactes pour apprendre ce qu’il en était.  Nous ne pouvions pas

  5   poser des questions indiscrètes et lorsque je dis indiscrète, je

  6   veux dire que je considérais de telles questions comme

  7   inopportunes.  Nous en étions donc réduits à des suppositions.

  8         Me SAYERS (interprétation):  Très bien.  Donc, vous n’avez,

  9   bien entendu, jamais interrogé le Colonel Blaskic quant au

 10   rapport qu’il pouvait avoir avec Monsieur Kordic, s’agissant de

 11   la chaîne de commandement militaire, n’est-ce pas ?

 12         LE TÉMOIN (interprétation) :  Eh bien, il est fort possible

 13   que je lui aie posé la question, en fait, car je n’avais pas bien

 14   compris cette structure qui n’était pas bien définie, à mes yeux.

 15   Donc, il est possible que j’ai posé la question mais cela n’est

 16   pas inscrit dans mon journal.

 17         Me SAYERS (interprétation) :  Vous saviez que, par

 18   exemple, le Colonel Blaskic avait sous son commandement la

 19   brigade Nikola Subic-Zrinjski de Busovaca, n’est-ce pas ?

 20         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 21         Me SAYERS (interprétation) :  Vous saviez qu’il

 22   avait la possibilité de délivrer des ordres au 4e bataillon

 23   de la police militaire stationnée à Vitez, n’est-ce pas ?

 24         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 25         Me SAYERS (interprétation) :  De même, il avait


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  1   sous son commandement ce que l’on appelle des unités

  2   spéciales du type Vitezovi qui était commandé par Darko

  3   Kraljevic.  Vous rappelez-vous cela ?

  4         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non.

  5         Me SAYERS (interprétation) :  Vous ne vous

  6   rappelez pas.  Très bien.  Merci.

  7         Vous avez dit dans votre déposition dans l’affaire Blaskic

  8   qu’il était possible qu’il y ait eu une chaîne de commandement

  9   militaire et une chaîne de commandement politique, que donc, vous

 10   suspectiez que ces chaînes de commandement existaient mais

 11   qu’elles n’ont jamais été confirmées.  Je renvoie les Juges aux

 12   pages 23764 et 23749 du compte rendu d’audience.  Donc, c’est

 13   bien votre impression, n’est-ce pas, Colonel ?

 14         LE TÉMOIN (interprétation) :  C’est exact.

 15         Me SAYERS (interprétation) :  Le Colonel Blaskic

 16   n’a jamais dit devant vous qu’il y avait deux chaînes de

 17   commandement, n’est-ce pas ?

 18         LE TÉMOIN (interprétation) :  Le Colonel Blaskic,

 19   effectivement, ne m’a jamais dit qu’il y avait une double

 20   chaîne de commandement.  Mais je reprends la question pour

 21   que les choses soient tout à fait claires et je réponds que

 22   non, il ne l’a pas fait.

 23         Me SAYERS (interprétation) :  Vous n’avez jamais

 24   évoqué le sujet avec Monsieur Kordic, n’est-ce pas ?  Vous

 25   ne lui avez jamais demandé s’il avait une autorité, un


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  1   pouvoir militaire quelconque ?

  2         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je n’y ai pas pensé. 

  3   Je ne crois pas l’avoir fait.

  4         Me SAYERS (interprétation) :  Très bien.  La même

  5   chose est vraie de tous les dirigeants croates de Bosnie

  6   auxquels vous avez parlé, y compris le Général de brigade

  7   Petkovic et le Colonel Blaskic, n’est-ce pas ?

  8         LE TÉMOIN (interprétation) :  Eh bien, je pense

  9   qu’il est possible que j’en ai parlé au Colonel Blaskic,

 10   voyez-vous.  Il est possible que je l’ai fait mais je ne

 11   peux pas le dire avec certitude.  C’est une impression.

 12         Me SAYERS (interprétation) : Mais il n’y a aucun doute dans

 13   votre esprit, je pense, en tout cas, vous l’avez dit au cours de

 14   l’interrogatoire principal et dans l’affaire Blaskic, mais

 15   j’aimerais tout de même vous resoumettre cette question. Il n’y a

 16   aucun doute dans votre esprit que le Colonel Blaskic était le

 17   commandant militaire des forces armées du HVO en Bosnie centrale,

 18   dans la zone opérationnelle de Bosnie centrale, n’est-ce pas ?

 19  LE TÉMOIN (interprétation) :  Il a dit qu’il l’était, je

 20   l’ai admis et il m’est apparu comme étant le commandant.

 21         Me SAYERS (interprétation) :  Vous l’avez toujours

 22   considéré comme étant le commandant, n’est-ce pas ?

 23         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui, en effet.

 24         Me SAYERS (interprétation) :  Vous avez dit à Monsieur le

 25   Juge Shahabuddeen qu’à votre avis, le Colonel Blaskic était le

 


Page 12332

  1   commandant suprême de toutes les forces armées du HVO en Bosnie

  2   centrale et que vous n’avez jamais pensé que Monsieur Kordic

  3   était commandant de ces forces armées.  Vous ne vous êtes jamais

  4   adressé à lui comme étant le commandant, n’est-ce pas ?

  5         LE TÉMOIN (interprétation) :  En effet, c’est exact.

  6         Me SAYERS (interprétation) :  Avez-vous jamais dit

  7   à quelqu’un que vous considériez Monsieur Kordic comme le

  8   commandant militaire à Busovaca ?

  9         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je crois que je l’ai dit.

 10         Me SAYERS (interprétation) :  À qui ?

 11         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je ne sais pas.  En tout cas,

 12   c’est apparemment consigné dans mon journal et donc, je le

 13   considérais comme exact à l’époque.  Pour compléter ma déposition

 14   de ce matin, j’ajouterai que Monsieur Kordic apparaissait comme

 15   détenteur du pouvoir de décision militaire à Novi Travnik le 20…

 16   au mois d’octobre.  Ce n’était peut-être pas permanent mais à

 17   l’époque, je pensais qu’il était commandant à Busovaca

 18   effectivement.  Mais je ne sais plus à qui je l’ai dit,

 19   probablement à plusieurs personnes.

 20         Me SAYERS (interprétation) :  Avez-vous informé

 21   vos services de renseignements militaires de cela ?

 22         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je pense qu’il le savait. 

 23   Parfois, il y avait des réunions d’information et de compte

 24   rendu, mais je vous l’ai déjà dit, je n’avais pas beaucoup de

 25   temps à ma disposition.  Donc, elle n’était pas régulière.


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  1         M. LE JUGE BENNOUNA :  Si Monsieur Kordic avait le

  2   commandement de Busovaca, est-ce que cela apparaît à travers des

  3   actes de caractère militaire ou des relations de caractère

  4   militaire que vous avez eues avec Busovaca et où vous êtes obligé

  5   de passer par lui en ce qui concerne toute opération militaire

  6   relative à Busovaca ? Est-ce que vous pouvez déduire de certaines

  7   opérations qu’il avait vraiment le commandement de Busovaca ?

  8         LE TÉMOIN (interprétation):  Eh bien, je n’ai jamais appelé

  9   Monsieur Kordic. Je ne me suis jamais adressé à lui en l’appelant

 10   Colonel, ce qui l’aurait mis au même niveau, bien sûr.

 11         Mais pour répondre à votre question, Monsieur le Juge, je

 12   le considérais comme le commandant militaire de facto à Busovaca

 13   à l’époque où je lui ai rendu visite.  C’est ce que j’ai dit dans

 14   dans ma déposition car voyez-vous, il y a un certain signe qui

 15   indique que quelqu’un est un commandant militaire.  Une de ces

 16   indications c’est que cet homme est assis dans la pièce des

 17   opérations et qu’il est entouré d’un certain nombre d’hommes. Une

 18   autre indication c’est que personne ne le contredit.  Une autre

 19   indication c’est que lorsqu’il donne des instructions, celles-ci

 20   sont, en général, respectées.  Une autre indication, en fait,

 21   c’est qu’il lui est permis de ne pas être d’accord avec un autre

 22   commandant militaire de facto en Bosnie centrale tel que Blaskic,

 23   et ce matin, j’ai parlé dans ma déposition de ce qui s’est passé

 24   sur la route de la vallée de la Lasva.

 25         Je ne suis pas sûr que je réponde bien à votre question,


Page 12334

  1   Monsieur, mais je ne peux pas y répondre mieux.

  2         Me SAYERS (interprétation) : Colonel, nous allons passer en

  3   revue dans quelques instants tous les ordres de bataille que

  4   votre régiment élaborait à destination de la zone opérationnelle

  5   Bosnie centrale. Mais je vous demande à nouveau de confirmer qu’à

  6   votre avis, Monsieur Kordic était commandant militaire à Busovaca.

  7         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je ne suis pas sûr de l’avoir

  8   dit à mes services de renseignement.  Mais avez-vous de Kordic ou

  9   de Blaskic, excusez-moi? Avez-vous parlé de Monsieur Kordic comme

 10   étant le commandant en Bosnie centrale ?

 11         Me SAYERS (interprétation) :  Je vous ai demandé si vous

 12   aviez informé vos services de renseignements militaires du

 13   régiment du Cheshire en passant par la cellule chargée de la

 14   rédaction des bulletins de renseignements militaires.  Je vous ai

 15   donc demandé si vous aviez dit à ce service de renseignement qu’à

 16   votre avis, Monsieur Kordic était commandant à Busovaca.

 17         LE TÉMOIN (interprétation) :  Il est possible que je l’ai

 18   fait ou que je ne l’ai pas fait, je ne sais pas exactement.

 19         Me SAYERS (interprétation): Eh bien, s’agissant de Monsieur

 20   Kordic, j’ai quelques questions générales à vous poser avant que

 21   nous n’entrions dans les documents chronologiques.  Saviez-vous

 22   qu’il existait une entité pendant la durée de votre mission qui

 23   s’appelait « communauté croate d’Herceg-Bosna » en Bosnie

 24   centrale ?

 25         LE TÉMOIN (interprétation) :  Une espèce


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  1   d’organisme politique, n’est-ce pas ?  Eh bien, écoutez, il y a

  2   plusieurs expressions pour désigner ce dont vous parlez, mais je

  3   dis oui, en effet, je me rendais bien compte qu’il s’agissait

  4   d’un organisme politique.  Maintenant, quel était son nom exact,

  5   je ne le savais pas.

  6         Me SAYERS (interprétation) :  Je vous pose une autre

  7   question.  Si vous ne savez pas, vous me le dites et tout ira

  8   bien.  Saviez-vous que le HVO, le conseil croate de Défense,

  9   était distinct de la communauté croate d’Herceg-Bosna, que le HVO

 10   avait une structure de direction et des responsables différents

 11   de ceux qui étaient responsables de la communauté croate

 12   d’Herceg-Bosna ?

 13         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Écoutez, avant que vous

 14   n’entriez dans ce sujet, je vous indique que certaines questions

 15   risquent d’être contestées et ne doivent pas être considérées

 16   comme des faits.

 17         Me SAYERS (interprétation) :  Oui, Monsieur le Président. 

 18   Je vais vous donner le fondement juridique de mes questions.

 19         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Posez vos

 20   questions d’une manière plus générale.

 21         Me SAYERS (interprétation) :  Oui, Monsieur le Président.

 22         Colonel, trois entités sur lesquelles j’aimerais que vous

 23   concentriez, premièrement, ce qu’on a appelé la HZ-HB, communauté

 24   croate d’Herceg-Bosna dont je viens de parler.  Saviez-vous qui

 25   était le Président de cette entité ?


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  1         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je ne m’en souviens pas de

  2   mémoire mais je crois que cela avait quelque chose à voir avec

  3   Valenta et les autres qui étaient tous liés les uns aux autres.

  4   C’était une espèce de ligne liée à Kordic, en effet.

  5         Me SAYERS (interprétation) :  S’agissant maintenant du HVO,

  6   conseil croate de la Défense, saviez-vous qui était le Président

  7   du conseil de la Défense croate quand vous êtes arrivé en Bosnie-

  8   Herzégovine en septembre 1992, Monsieur ?

  9         LE TÉMOIN (interprétation): Je n’en ai pas la moindre idée.

 10         Me SAYERS (interprétation) :  Avez-vous jamais

 11   entendu le nom de Jadranko Prlic ?

 12         LE TÉMOIN (interprétation) :  J’ai entendu ce nom mais plus

 13   tard.  Voyez-vous, tout ça n’avait pas de pertinence pour moi.

 14   J’étais sur le terrain et je m’efforçais de résoudre une situation

 15   très chaotique.  Qui, diable, était le Président de tel ou tel

 16   organisme et don’t je ne pensais qu’il était particulièrement

 17   honnête, c’était un sujet auquel je ne consacrais pas une minute

 18   d’attention à l’époque.  Excusez-moi si je vous semble impoli

 19   mais j’avais de grandes difficultés à me concentrer sur le chef

 20   de tel ou tel état-major alors que je faisais face à d’extrêmes

 21   difficultés moi-même.

 22         Me SAYERS (interprétation) :  Saviez-vous que

 23   Monsieur Valenta était en fait Vice-président du HVO, sur

 24   nomination du 17 octobre 1992 ?

 25         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non, mais cela ne me


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  1   surprend pas.  Je pensais qu’il était Vice-président de

  2   l’organisation que vous venez de décrire ou son Président,

  3   mais en tout cas, un responsable de haut rang.

  4         Me SAYERS (interprétation): Saviez-vous que Monsieur Kordic

  5   n’a jamais été Vice-président ou Président du HVO et qu’il n’a

  6   jamais eu de rôle officiel au sein de cet organisme, en dehors du

  7   fait qu’il était membre d’un comité chargé du personnel ?

  8         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  C’est une question très

  9   directive encore une fois, Me Sayers.  Vous présentez les choses

 10   comme étant des faits et je ne crois pas que nous pourrons avancer

 11   beaucoup plus.  Le témoin a déjà dit ce qu’il savait de Kordic à

 12   l’époque.  Je vous propose de passer à un autre sujet.

 13         Me SAYERS (interprétation): Eh bien, passons à la troisième

 14   entité au sujet de laquelle je souhaitais vous poser quelques

 15   questions car un certain nombre de références y sont faites dans

 16   les bulletins d’information militaire.  Saviez-vous que Monsieur

 17   Kordic était l’un des cinq Vice-présidents du parti politique HDZ

 18   de Bosnie-Herzégovine ?

 19         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui, je le savais. 

 20   C’est ce qu’il m’avait dit.

 21         Me SAYERS (interprétation) :  Très bien.

 22         LE TÉMOIN (interprétation) :  Mais c’est lui qui m’avait

 23   dit qu’il l’était, pour que les choses soient très claires.

 24         Me SAYERS (interprétation) :  Encore une question générale,

 25   Monsieur.  Est-il permis de dire que vous ne connaissiez pas la


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  1   différence qui existait entre le HVO, la communauté croate

  2   d’Herceg-Bosna et le HDZ de Bosnie-Herzégovine ?

  3         LE TÉMOIN (interprétation) :  Ma réponse est la

  4   suivante :  Je savais qu’il existait des organisations et

  5   des organismes différents, dont je pensais qu’ils étaient

  6   très étroitement liés les uns aux autres.

  7         Me SAYERS (interprétation) :  Très bien.  Une allocution a

  8   été prononcée par Monsieur Kordic le 5 novembre, pièce à

  9   conviction 129/1A.  Au cours de cette allocution, Monsieur Kordic

 10   s’identifie comme le Vice- Président de l’Herceg-Bosna.  Vous

 11   rappelez-vous avoir lu des textes au sujet de cette allocution ?

 12         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non.

 13         Me SAYERS (interprétation) :  Très bien.  Je demanderais à

 14   présent à Monsieur l’Huissier de vous remettre le bulletin de

 15   renseignements militaires 87, daté du 26 janvier 1993, pièce à

 16   conviction de la Défense, 106/1.  J’en ai un exemplaire pour le

 17   témoin et un exemplaire à placer sur le rétroprojecteur.  Merci,

 18   Monsieur l’Huissier.

 19         Colonel, je vous demanderais de lire ce qui figure en page

 20   2 et j’appelle votre attention sur les observations formulées par

 21   la section de renseignements militaires de votre régiment qui

 22   figurent au milieu de la page et qui portent sur un incident où

 23   des mines ont été enlevées.  Les responsables… l’officier de

 24   renseignement dit que Dario Kordic est le représentant local du

 25   HDZ et qu’il prétend être adjoint de Mate Boban et il a une très


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  1   grande influence localement dans la région.  Est-ce bien ce que

  2   vous aviez compris de sa situation à partir du 26 janvier 1993,

  3   représentant local du HDZ ?

  4         LE TÉMOIN (interprétation) :  Cela me paraît tout

  5   à fait correct.

  6         Me SAYERS (interprétation) :  Très bien, merci.

  7         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  En avez-vous

  8   terminé avec cette pièce à conviction ?

  9         Me SAYERS (interprétation) :  Oui.

 10         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Eh bien, dans

 11   ce cas, il convient de la restituer au greffe.

 12         Me SAYERS (interprétation) :  Colonel, et

 13   j’appelle l’attention des Juges sur la page 23872 du compte

 14   rendu d’audience, vous avez dit à Monsieur le Juge

 15   Rodrigues, dans l’affaire Blaskic, que s’agissant du statut

 16   de Monsieur Kordic en tant que représentant militaire à

 17   Busovaca, vous avez dit – je cite :  « C’est une

 18   impression.  Ce n’est pas un fait. »  Fin de citation.

 19         Est-ce toujours ce que vous dites aujourd’hui dans

 20   votre déposition, à savoir que c’est une impression au

 21   sujet du statut de Monsieur Kordic dans la région, rien

 22   d’autre qu’une impression ?

 23         LE TÉMOIN (interprétation) :  J’avais l’impression

 24   qu’il était commandant.  Je n’ai jamais vu effectivement un

 25   ordre de bataille qui l’affecte à ce poste mais mon


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  1   impression était que lorsque j’allais le voir, il était

  2   responsable.  Lorsque j’allais le voir, il était dans la

  3   salle des opérations.  Donc, un certain nombre d’indices

  4   m’ont amené à cette impression, à cette supposition.

  5         Me SAYERS (interprétation) :  Très bien. Parlons maintenant

  6   des bulletins de renseignements militaires qui décrivent le poste

  7   de Monsieur Kordic et ce qu’il faisait au moment des faits.

  8   Prenons par exemple le 14 décembre 1992, le bulletin de

  9   renseignements militaires qui comporte cette date, et je demande

 10   le versement au dossier.  Donc, j’aimerais qu’une cote soit

11   affectée à ce document dont je voudrais discuter un passage avec

12   vous.

 13         LA GREFFIÈRE (interprétation) :  Ce document est

 14   enregistré sous la cote D154/1.

 15         Me SAYERS (interprétation) :  Merci beaucoup.

 16         Le passage que j’aimerais discuter avec vous,

 17   Colonel, se trouve en pages 3 et 4.  Paragraphe 10, nous

 18   lisons en titre « Brigade de Busovaca ».

 19         LE TÉMOIN (interprétation) :  Excusez-moi, je suis perdu.

 20         Me SAYERS (interprétation) :  C’est la page que

 21   vous êtes en train de regarder.

 22         LE TÉMOIN (interprétation) :  Ah, je vois.  Page 3 ?

 23         Me SAYERS (interprétation) :  C’est la page 3/4. 

 24   Il est vrai, n’est-ce pas, que les commandants du HVO et

 25   les adjoints ont leurs noms inscrits sur cette page ainsi


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  1   que le commandant de la brigade de Busovaca et que le

  2   régiment du Cheshire, le 14 décembre 1992, estimait que

  3   Zoran Maric était commandant de la brigade de Busovaca ?

  4         LE TÉMOIN (interprétation) :  C’est ce qui est écrit ici.

  5         Me SAYERS (interprétation) :  Bien, merci.

  6         LE TÉMOIN (interprétation) :  Ce n’est pas

  7   nécessairement ce que je pensais à l’époque.  Ce n’était

  8   pas mon opinion mais c’est ce qui est écrit ici.

  9         Me SAYERS (interprétation) :  Très bien.

 10         LE TÉMOIN (interprétation) :  À mon avis, la

 11   réponse que j’apporterais si l’on me posait la question

 12   serait :  « Je ne sais pas. »

 13         Me SAYERS (interprétation) :  Merci.  J’en ai terminé avec

 14   ce bulletin de renseignements militaires.  Le prochain que

 15   j’aimerais discuter avec vous est un document déjà enregistré

 16   sous la cote D102/1, bulletin de renseignements militaires numéro

 17   75.  Je demanderais à Monsieur l’Huissier de placer la page 1 sur

 18   le rétroprojecteur.

 19         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Quelle est la

 20   date de ce bulletin ?

 21         Me SAYERS (interprétation) :  Le 15 janvier 1993,

 22   Monsieur le Président.

 23         Colonel, la seule partie de ce texte que j’aimerais

 24   discuter avec vous se trouve au sous-paragraphe (b), où l’on lit

 25   les mots suivants :  « La brigade Nikola Subic-Zrinjski est


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  1   commandé par Niko Jozinovic. »  Voyez-vous ce passage ?

  2         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui, je le vois.

  3         Me SAYERS (interprétation) :  Avez-vous jamais…

  4         LE TÉMOIN (interprétation) :  Excusez-moi, je suis

  5   perdu.  Où se trouve ce passage ?

  6         Me SAYERS (interprétation) :  En haut de l’écran

  7   où nous lisons :  « La brigade Nikola Subic-Zrinjski est

  8   commandée par Niko Jozinovic. »  Voyez-vous ce passage ?

  9         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 10         Me SAYERS (interprétation):  Avez-vous jamais eu le moindre

 11   contact avec le commandant Jozinovic au cours de votre mission,

 12   pour autant que vous puissiez vous en souvenir ?

 13         LE TÉMOIN (interprétation) :  Pour autant que je

 14   puisse m’en souvenir, je ne sais pas.

 15         Me SAYERS (interprétation) :  Très bien.  J’en ai terminé

 16   avec ce document, Monsieur l’Huissier. Le document suivant est le

 17   document Z428, déjà enregistré… (l’interprète se reprend) Z429.

 18         Monsieur, veuillez prendre la page 4, paragraphe 7. On voit

 19   une analyse de la structure de commandement du HVO.

 20         C’est la page précédente, Monsieur l’Huissier.

 21         « Une structure de commandement du HVO en Bosnie

 22   centrale… »

 23         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Encore une

 24   fois, je vous demande la date, Me Sayers.

 25         Me SAYERS (interprétation) :  Monsieur le


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  1   Président, la date est celle du 1er février 1993.  Il

  2   s’agit du bulletin de renseignements militaires 93.

  3         Colonel, il est stipulé ici que le Colonel Tihomir Blaskic,

  4   au paragraphe (a), donc : « Le Colonel Tihomir Blaskic commande

  5   toutes les opérations militaires du HVO dans la région de la

  6   Bosnie centrale.  La Bosnie centrale se compose de trois zones

  7   opérationnelles subdivisées en neuf brigades. »  C’est bien ce

  8   que vous aviez compris, n’est-ce pas ?

  9         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 10         Me SAYERS (interprétation) :  Il est dit ensuite

 11   que : « Chacune des brigades se divise en un certain nombre

 12   de groupes de manœuvre qui, à leur tour, se subdivisent en

 13   secteurs opérationnels. »  Est-ce bien ce que vous aviez

 14   compris de la structure opérationnelle militaire ?

 15         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 16         Me SAYERS (interprétation) :  Monsieur l’Huissier, je vous

 17   demande maintenant de présenter la page suivante sur le

 18   rétroprojecteur, le haut de la page suivante, où nous lison :

 19   « Deuxième zone opérationnelle. »  Le commandant de la brigade

 20   Nikola Subic-Zrinjski, à partir du 1er février 1993, est nommé

 21   dans ce texte comme étant Niko Jozinovic, n’est-ce pas ?

 22         LE TÉMOIN (interprétation) :  C’est ce qui est écrit sur

 23   ce papier mais je me demande si c’était le cas de facto.

 24         Me SAYERS (interprétation) :  L’adjoint du

 25   commandant est Anto Sliskovic, n’est-ce pas ?


Page 12344

  1         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

  2         Me SAYERS (interprétation) :  Avez-vous jamais

  3   rencontré ou avez-vous jamais discuté avec Anto Sliskovic

  4   pour autant que vous vous en souveniez ?

  5         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je ne me rappelle pas.

  6         Me SAYERS (interprétation) :  Très bien !  Merci,

  7   Monsieur l’Huissier, je n’ai plus besoin de ce document.

  8         Colonel, avez-vous été au courant d’un changement

  9   de commandement au sein de la brigade Nikola Subic-Zrinjski

 10   qui s’est produit au début de février 1993, c’est-à-dire à

 11   peu près au même moment où vous avez eu avec Monsieur

 12   Kordic votre rencontre du 4 février 1993 ?

 13         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je n’étais pas au

 14   courant mais cela ne me surprend pas.

 15         Me SAYERS (interprétation) :  Je demanderais à Monsieur

 16   l’Huissier de vous remettre la pièce à conviction 109/1.

 17         Je souhaiterais que vous examiniez la troisième

 18   page.  Il s’agit d’un bulletin de renseignements militaires

 19   numéro 103 du 11 février 1993.  Au point 5, on peut lire :

 20   « Busovaca.  La brigade du HVO à Busovaca est maintenant

 21   commandée par Dusko Grubesic. » 

 22         Saviez-vous qu’il y avait eu un changement au niveau du

 23   commandement de la brigade de Busovaca au début février 1993 ?

 24         LE TÉMOIN (interprétation) :  Mes hommes le

 25   savaient peut-être.  Moi, non.


Page 12345

  1         Me SAYERS (interprétation) :  Pendant votre

  2   mission, est-ce que vous avez eu l’occasion de parler avec

  3   le Commandant Grubesic ?

  4         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je ne sais pas.

  5         Me SAYERS (interprétation) :  Merci, Monsieur l’Huissier.

  6         Je souhaiterais que vous examiniez le document

  7   suivant, document portant la cote 108/1.  Il s’agit du

  8   bulletin de renseignements militaires numéro 96 en date du

  9   4 février 1993, Monsieur le Président, Monsieur le Juge.

 10         Une question au sujet de la page 1 de ce document.  Sur ce

 11   document, on peut lire que : « Le Commandant du HVO à Busovaca,

 12   Jozinovic, a déclaré que des Mujahedins avaient attaqué le

 13   village croate de Kula depuis des positions de l’armée de Bosnie-

 14   Herzégovine à Kula.  Ils avaient bénéficié d’un soutien de

 15   l’artillerie. »  On peut également lire que : « Le Commandant

 16   Jozinovic a déclaré qu’on lui avait donné l’ordre de retourner à

 17   Zepce pour y commander un QG conjoint. »

 18         Étiez-vous au courant du changement de

 19   commandement ?  En fait, vous nous l’avez déjà dit.  Avez-

 20   vous des détails au sujet du déplacement du Commandant

 21   Jozinovic et de son remplacement par Grubesic ?

 22         LE TÉMOIN (interprétation) :  Eh bien, moi, je

 23   m’intéressais aux gens avec qui je parlais, que je

 24   rencontrais, effectivement.  C’est la façon dont j’opérais. 

 25   Mais c’est tout à fait concevable ce que vous me dites.


Page 12346

  1         Me SAYERS (interprétation):  Donc, en d’autres termes, vous

  2   êtes allé à Busovaca, vous avez rencontré Monsieur Kordic en

  3   février, par exemple, vous l’avez vu dans ce que vous avez estimé

  4   être le quartier général et vu les circonstances, vous en aves

  5   conclu que c’était lui le commandant ?

  6         LE TÉMOIN (interprétation) :  Absolument.

  7         Me SAYERS (interprétation) :  Mais vous ne lui

  8   avez jamais demandé si c’était lui le commandant ?

  9         LE TÉMOIN (interprétation):  Non, je ne lui ai pas demandé.

 10         Me SAYERS (interprétation) :  Merci, Monsieur l’Huissier.

 11         Dernier document dans cette série que je souhaiterais vous

 12   montrer, c’est le document portant la cote D128/1.  Il s’agit là

 13   d’un ordre de bataille qui semble être en date du 26 février 1993

 14   mais il faut bien admettre que la date est presque illisible.  Je

 15   ne sais pas s’il s’agit du 25 ou du 26 février à vrai dire.  Il

 16   s’agit d’un document qui a été rédigé par votre cellule de

 17   renseignements, n’est-ce pas ?

 18         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 19         Me SAYERS (interprétation) :  On peut voir que le

 20   commandant du HVO dans la zone opérationnelle de Bosnie

 21   centrale était Tihomir Blaskic, n’est-ce pas ?

 22         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 23         Me SAYERS (interprétation) :  On peut voir que le

 24   commandant de la police militaire est Dusko Grubesic, je

 25   crois.  Avez-vous rencontré Monsieur Grubesic ?


Page 12347

  1         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je suis pratiquement

  2   sûr que oui mais je ne sais pas quand.

  3         Me SAYERS (interprétation):  On voit que c’est Dario Kordic

  4   qui est inscrit ici comme représentant du HDZ ?

  5         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

  6         Me SAYERS (interprétation) :  Une fois de plus, en

  7   ce qui concerne la structure de commandement de la brigade

  8   Nikola Subic-Zrinjski dans la deuxième zone opérationnelle,

  9   c’est le Commandant Grubesic qui commande cette brigade et

 10   Sliskovic est son commandant en second ?

 11         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 12         Me SAYERS (interprétation) :  Pour vous, il n’y a aucun

 13   doute au sujet du fait que le Colonel Blaskic disposait de

 14   l’autorité militaire nécessaire pour donner des ordres à la

 15   brigade Nikola Subic-Zrinjski, n’est-ce pas ?

 16         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je n’ai aucun doute

 17   au sujet du fait qu’il avait l’autorité pour donner des

 18   ordres à toutes les brigades qui se trouvaient dans la zone

 19   opérationnelle.  Mais quant à savoir si ces ordres avaient

 20   été exécutés, ça, je ne peux pas vous le dire.

 21         Me SAYERS (interprétation):  J’en ai terminé de la première

 22   partie de mon contre-interrogatoire et maintenant, je voudrais

 23   passer en revue ce qui s’est passé dans l’ordre chronologique

 24   lors de votre séjour en Bosnie centrale. Vous n’avez rencontré ni

 25   le Colonel Blaskic, ni Monsieur Kordic pendant votre première


Page 12348

  1   opération de reconnaissance à la fin septembre 1992 ?

  2         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je ne pense pas que

  3   ce soit tout à fait exact.  Je crois peut-être avoir

  4   rencontré Monsieur Blaskic.

  5         Me SAYERS (interprétation) :  Mais vous avez dit à

  6   la page 23730 du compte rendu d’audience que vous ne l’avez

  7   pas rencontré pourtant.

  8         LE TÉMOIN (interprétation) :  Moi, ce que je dis

  9   c’est que je ne m’en souviens pas.  Si je l’ai écrit, c’est

 10   exact.  Mais il me semble que j’ai rencontré Blaskic très tôt.

 11         Me SAYERS (interprétation) :  Si on examine la

 12   situation militaire générale que vous avez rencontrée

 13   pendant votre mission, il est exact, n’est-ce pas, que les

 14   forces serbes de Bosnie contrôlaient environ 70 pour cent

 15   du territoire de Bosnie-Herzégovine, n’est-ce pas ?

 16         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 17         Me SAYERS (interprétation) :  Ils avaient lancé

 18   des offensives importantes au nord, à l’ouest, à l’est qui

 19   ont eu pour conséquence des flux importants de réfugiés en

 20   Bosnie centrale et au nord de l’Herzégovine, n’est-ce pas ?

 21         LE TÉMOIN (interprétation) :  Il ne s’agissait pas

 22   de réfugiés mais il s’agissait de personnes déplacées.

 23         Me SAYERS (interprétation) :  La capitale du pays,

 24   Sarajevo, était encerclée, en fait, assiégée et coupée du

 25   reste du territoire depuis avril 1992, n’est-ce pas ?


Page 12349

  1         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

  2         Me SAYERS (interprétation) :  Et il en est resté

  3   de même pendant toute votre mission ?

  4         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.  Il y avait une

  5   voie d’accès et je suis allé une fois à Sarajevo.

  6         Me SAYERS (interprétation) :  De manière générale, la ligne

  7   de front en Bosnie-Herzégovine se présentait de la façon suivante

  8   suivante :  La principale ligne de front entre les Serbes et

  9   l’Alliance musulmo-croate se situait dans la zone de la ville de

 10   Jajce et de Turbe au nord-ouest de votre QG à Vitez, n’est-ce pas?

 11         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui, et ça allait

 12   jusqu’à Maglaj également.

 13         Me SAYERS (interprétation) :  Et à l’est et les

 14   lignes de front…

 15         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non, on ne peut pas vraiment

 16   dire ça.  Les lignes de front, ce n’était pas les lignes de front

 17   qu’on rencontre dans les guerres classiques parce que les lignes

 18   de front, c’était là où on trouvait la majorité des Serbes, des

 19   Croates ou et cætera.  Mais la ligne de front allait de l’ouest,

 20   de Tomislavgrad jusqu’à Gornji Vakuf.  Mais en fait, les combats

 21   se concentraient autour des villes où il se trouve que la

 22   majorité de la population était constituée de personnes

 23   appartenant à une autre origine ethnique.

 24         Donc, en fait, il y avait des combats à Tomislavgrad, à

 25   Gornji Vakuf, autour de Novi Travnik et jusqu’au nord, à Maglaj


Page 12350

  1   et à Zepce, particulièrement à Maglaj d’ailleurs.  Donc, on ne

  2   peut pas dire que les combats étaient concentrés dans une zone

  3   particulière.  Voilà ma réponse.

  4         Me SAYERS (interprétation) :  J’ai bien compris.

  5   Est-il exact de dire qu’à votre avis, les combats pendant

  6   la durée de votre mission, ces combats se résumaient à des

  7   luttes pour contrôler des parties du principal axe

  8   d’approvisionnement et de ravitaillement ?

  9         LE TÉMOIN (interprétation) :  Il y a deux choses à

 10   dire à ce sujet.  D’abord, il y avait les principales zones

 11   de combat où les Croates de Bosnie et les musulmans de

 12   Bosnie étaient censés lutter ensemble contre les Serbes de

 13   Bosnie et puis il y avait des endroits où il y avait des

 14   combats internes entre les Croates de Bosnie et les

 15   musulmans de Bosnie qui essayaient de prendre le contrôle

 16   de lignes de communication qui leur étaient importantes.

 17         Me SAYERS (interprétation) :  Passons maintenant

 18   au détail.  Vous êtes arrivé le 18 octobre 1992 en Bosnie

 19   centrale, au moment où des combats faisaient rage dans la

 20   zone de Vitez et Novi Travnik, n’est-ce pas ?

 21         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 22         Me SAYERS (interprétation) :  Vous avez rencontré

 23   le commandant de l’armée de Bosnie-Herzégovine, Sefkija

 24   Dzidic – je crois que c’était son nom – et cet homme vous a

 25   dit que les forces musulmanes avaient érigé des barrages


Page 12351

  1   sur les routes à l’est de Vitez, ceci afin d’empêcher les

  2   forces croates de Bosnie d’apporter des renforts à Novi

  3   Travnik, n’est-ce pas ?

  4         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

  5         Me SAYERS (interprétation) :  Il s’agissait de troupes qui

  6   venaient de l’est, de Kiseljak et de Busovaca, n’est-ce pas ?

  7         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

  8         Me SAYERS (interprétation) :  Dans le même temps,

  9   la ville de Jajce faisait l’objet d’une attaque très dure

 10   de la part des forces serbes de Bosnie, n’est-ce pas ?

 11         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 12         Me SAYERS (interprétation) :  Vous nous dites que

 13   vous êtes allé à Novi Travnik, que vous êtes entré à Novi

 14   Travnik vers 2 h 00 de l’après-midi le 19 ou le 20 octobre,

 15   alors que les combats faisaient rage, n’est-ce pas ?

 16         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 17         Me SAYERS (interprétation) :  Vous avez rencontré le

 18   commandant des forces musulmanes, Refik Lendo, et vous avez exigé

 19   qu’il libère immédiatement des prisonniers qu’il détenait et en

 20   fait, tout simplement, il vous a ri au nez, n’est-ce pas ?

 21         LE TÉMOIN (interprétation) :  C’est exact.

 22         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Me Sayers, il est

 23   inutile de revenir sur la déposition du témoin dans l’affaire

 24   Blaskic.  S’il y a des questions que vous souhaitez évoquer

 25   faites-le directement et s’il y en a d’autres sur lesquelles


Page 12352

  1   vous souhaitez attirer notre attention, vous pourrez le faire

  2   ultérieurement, après la déposition du témoin.  Mais essayons de

  3   nous concentrer sur les questions, sur les thèmes qui n’ont pas

  4   été évoqués précédemment.

  5         Me SAYERS (interprétation) :  Je vais m’efforcer

  6   de le faire.

  7         Vous êtes allé à Vitez et vous cherchiez le

  8   commandant du HVO, le Colonel Blaskic, n’est-ce pas ?

  9         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 10         Me SAYERS (interprétation) :  Mais vous ne

 11   cherchiez pas Monsieur Kordic ?

 12         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non.

 13         Me SAYERS (interprétation) :  En fait, vous ne

 14   saviez même pas que Monsieur Kordic existait lorsque vous

 15   êtes allé à Vitez en cherchant le Colonel Blaskic ?

 16         LE TÉMOIN (interprétation) :  C’est exact.

 17         Me SAYERS (interprétation) :  Monsieur Cerkez vous

 18   a dit que le Colonel Blaskic était à Novi Travnik et c’est

 19   là que vous êtes allé ?

 20         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 21         Me SAYERS (interprétation) :  Vous n’avez jamais

 22   rencontré le Colonel Blaskic à Novi Travnik, n’est-ce pas ?

 23         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non.

 24         Me SAYERS (interprétation) :  Vous êtes arrivé

 25   sans que votre arrivée ait été annoncée et vous êtes arrivé


Page 12353

  1   au Café Grand et vous n’avez pas trouvé le Colonel Blaskic,

  2   il n’y avait que Monsieur Kordic ?

  3         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

  4         Me SAYERS (interprétation) :  Est-ce que le

  5   Colonel Filipovic était là ?

  6         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non.

  7         Me SAYERS (interprétation) :  Ensuite, vous avez

  8   appris que le Colonel Filipovic avait une position de

  9   commandement dans la zone Travnik-Novi Travnik et qu’il

 10   relevait directement du Colonel Blaskic, n’est-ce pas ?

 11         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.  Ensuite, on

 12   l’a déplacé.  C’était un homme très bien.

 13         Me SAYERS (interprétation) :  Oui, je crois que

 14   vous l’avez dit dans votre livre.  Vous avez parlé d’une

 15   conversation téléphonique entre Monsieur Kordic et le

 16   Colonel Dzemal Merdan à Zenica.  Vous avez insisté sur la

 17   nécessité de faire appel aux autorités de Sarajevo dans le

 18   cadre des négociations sur les cessez-le-feu, n’est-ce pas ?

 19         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui, je m’en

 20   souviens très bien.

 21         Me SAYERS (interprétation) :  Ensuite, on vous a demandé

 22   d’aller chercher le Colonel Merdan à Zenica le 20 octobre 1992 ?

 23         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 24         Me SAYERS (interprétation) :  Vous l’avez fait ?

 25         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui, et je n’y étais


Page 12354

  1   jamais allé et ça n’a pas été une tâche facile.

  2         Me SAYERS (interprétation) :  Vous avez amené le

  3   Colonel Merdan à l’hôtel Vitez, le QG du HVO, et à ce

  4   moment-là, le Colonel Blaskic et le Colonel Merdan ont

  5   négocié un cessez-le-feu, n’est-ce pas ?

  6         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non.

  7         Me SAYERS (interprétation) :  Qu’ont-ils fait ?

  8         LE TÉMOIN (interprétation) :  Ils ont parlé de 14

  9   h 00 jusqu’à… de 2 h 00 à 4 h 00.  Ils ne sont pas parvenus

 10   à mettre un terme aux combats ce jour-là.  Il a fallu

 11   plusieurs jours, même une semaine pour qu’on y parvienne et

 12   j’ai laissé sur place le Capitaine Simon Ellis.

 13         Me SAYERS (interprétation) :  Mais le fait est

 14   qu’il y a eu des négociations entre le Colonel Merdan et le

 15   Colonel Blaskic et Merdan n’a pas insisté pour que Kordic

 16   soit présent ?  Il n’a d’ailleurs même pas mentionné son nom ?

 17         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui, c’est exact.

 18         Me SAYERS (interprétation):  Un point de détail au sujet de

 19   Refik Lendo, du Commandant Refik Lendo.  Il s’agit d’un document

 20   qui est un bulletin de renseignements militaires, un des premiers

 21   bulletins préparé par votre bataillon.  Je vais demander que ce

 22   document soit versé au dossier et qu’il lui soit attribué une

 23   cote et ensuite, je vous le montrerai.

 24         Je vous demande de regarder la dernière page.  Le Capitaine

 25   Leyshon déclare dans ce document que le Commandant Lendo…

 


Page 12355

  1         LA GREFFIÈRE (interprétation) :  Le document

  2   portera la cote 155/1.

  3         Me SAYERS (interprétation) :  « On pense que c’est

  4   le Commandant Lendo qui est responsable du début du conflit

  5   entre le HVO et l’armée de Bosnie-Herzégovine à Novi

  6   Travnik qui a entraîné un grand nombre de morts. »

  7         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

  8         Me SAYERS (interprétation) :  Est-ce que c’est la

  9   façon dont vous voyiez les choses à l’époque ?

 10         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je ne sais pas.

 11         Me SAYERS (interprétation) :  Vous ne vous

 12   souvenez pas que le Capitaine Leyshon vous l’ait dit ?

 13         LE TÉMOIN (interprétation) :  C’est Leyshon qui a

 14   écrit cela, c’est son écriture, n’est-ce pas ?

 15         Me SAYERS (interprétation) :  Oui.

 16         LE TÉMOIN (interprétation) :  C’est un officier de

 17   renseignements et il était tout à fait à même de se former

 18   sa propre opinion et je ne souhaite pas le mettre en doute. 

 19   C’est peut-être ce qui s’est passé.

 20         Me SAYERS (interprétation) :  Il était clair pour vous que

 21   le Colonel Blaskic était le commandant du HVO au moment où il a

 22   négocié avec Merdan à l’hôtel Vitez le 20 octobre, n’est-ce pas ?

 23         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.  C’était le

 24   commandant du HVO à Vitez.  Je partais de ce principe et je

 25   n’aurais pas permis qu’il participe aux négociations si je


Page 12356

  1   n’avais pas pensé que c’était le cas et qu’il avait l’autorité

  2   de participer à de telles négociations.

  3         Me SAYERS (interprétation) :  Peu après les négociations

  4   entre les colonels Blaskic et Merdan, vous êtes parti, comme vous

  5   nous l’avez dit, et je crois que vous êtes revenu le 30 octobre

  6   1992 en Bosnie centrale, n’est-ce pas ?

  7         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

  8         Me SAYERS (interprétation) :  Un jour plus tard,

  9   la ville de Jajce est tombée suite à une attaque soutenue

 10   de la part des Serbes de Bosnie.  Cela se situait au nord-

 11   ouest de la base britannique de Nova Bila ?

 12         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui. C’était assez loin. Mais

 13   ce que vous dites est exact.  Enfin, les faits sont exacts.

 14         Me SAYERS (interprétation) :  Ceci a entraîné une

 15   arrivée de personnes, de réfugiés croates et musulmans dans

 16   votre zone de responsabilité ?

 17         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.  Nous avons vu passer au

 18   moins 10,000 personnes devant l’école où nous étions stationnés.

 19   C’était une vision assez difficile à supporter.

 20         Me SAYERS (interprétation) :  À ce moment-là, il y

 21   avait une sorte de coopération entre les musulmans et les

 22   Croates, une espèce d’alliance, n’est-ce pas ?

 23         LE TÉMOIN (interprétation) :  En fait, j’aurais

 24   espéré que cette alliance soit plus solide puisqu’ils

 25   semblaient lutter contre un ennemi commun et ils semblaient


Page 12357

  1   travailler d’ailleurs ensemble à Travnik jusqu’à Turbe,

  2   d’ailleurs. Il y avait un QG militaire.  J’y suis allé aussi bien

  3   avec des Croates que des soldats musulmans de l’armée de Bosnie-

  4   Herzégovine. Je suis allé à Turbe moi-même, donc. Ultérieurement,

  5   le fait que les Croates se retirent de Turbe, j’ai interprété

  6   cela comme un acte de trahison de leur part puisqu’ils ont laissé

  7   les musulmans tous seuls.

  8         Me SAYERS (interprétation) :  C’est ce qu’on vous

  9   a dit, n’est-ce pas ?

 10         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.  Enfin, c’est

 11   ce que j’ai pu comprendre.  Je n’ai vu aucun soldat du HVO

 12   dans la zone et puis je ne me suis pas contenté de circuler

 13   dans la zone.  J’y ai marché, et cætera.  J’ai bien vu ce

 14   qui s’y passait.  Je n’étais pas aussi corpulent à l’époque

 15   qu’aujourd’hui.  Donc, j’ai bien arpenté la zone.

 16         Me SAYERS (interprétation) :  Je crois que la fois suivante

 17   où vous avez rencontré Monsieur Kordic, c’était le 22 novembre

 18   1992 au QG conjoint, mixte dont vous nous avez parlé à Turbe.  Je

 19   voudrais vous montrer le bulletin de renseignements militaires

 20   numéro 22 en date du 22 novembre 1992 et je voudrais savoir si ça

 21   vous rafraîchit la mémoire au sujet de cet incident.  Donc,

 22   j’aimerais que vous examiniez ce document.

 23         Il s’agit d’un document, Monsieur le Président,

 24   Monsieur le Juge, qui est daté du 22 novembre 1992.

 25         LA GREFFIÈRE (interprétation) :  Le document


Page 12358

  1   portera la cote 156/1.

  2         Me SAYERS (interprétation) :  Je vais vous demander

  3   d’examiner la page 3 de ce document, mon Colonel, et à la page 2,

  4   on fait référence à la visite du commandant à Turbe, au QG de

  5   Turbe, et à la page suivante, on voit les personnes qui s’y

  6   trouvaient.  Vous avez rencontré Ante Prkacin…

  7         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Laissez un peu de temps

  8   au témoin pour s’y retrouver, s’il vous plaît. Que souhaitez-vous

  9   demander au témoin à ce sujet ?  Voulez- vous lui poser des

 10   questions au sujet de la visite à Turbe ou autre chose ?  Bien,

 11   cela se trouve au bas de la page 2 : « Visite de l’officier

 12   commandant à Turbe. » C’est cela, n’est-ce pas ?

 13         Me SAYERS (interprétation) :  Si on passe à la

 14   page suivante, on voit une description de cette réunion. 

 15   Donc, il s’agit de la page 3.

 16         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Laissez un peu de temps

 17   au témoin pour qu’il prenne connaissance de ce document.

 18         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je suis désolé, excusez-moi.

 19   En fait, j’examinais le document en suivant la pagination

 20   militaire qui est différente de l’autre.  C’est pour ça que je ne

 21   m’y retrouvais pas.  J’y suis maintenant.

 22         Me SAYERS (interprétation) :  Vous avez rencontré Monsieur

 23   Kordic qui s’affirmait lui-même comme étant le Président de

 24   Herceg-Bosna ainsi que Monsieur Ante Prkacin de Mostar et il vous

 25   a sans doute dit qu’il était vice-Président de Herceg-Bosna ?


Page 12359

  1         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.  Mais je souhaiterais

  2   mentionner que le Général était à Turbe lorsque nous nous y

  3   sommes rendus.  Il m’a dit qu’il assurait la coordination entre

  4   l’armée de Bosnie-Herzégovine et le HVO.

  5         Me SAYERS (interprétation) :  Merci.  J’en ai fini

  6   avec cette pièce à conviction.  Je souhaiterais maintenant

  7   traiter d’un incident auquel vous faites référence dans

  8   votre journal le 19 décembre 1992.  Il s’agit du Sergent

  9   Gilbert, un de vos hommes, qui avait été arrêté à Vares par

 10   la brigade Bobovac, par le commandant de la brigade Bobovac

 11   à Bobovac, Emil Hara.  Vous en souvenez-vous ?

 12         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 13         Me SAYERS (interprétation) :  Vous êtes intervenu

 14   personnellement parce qu’on avait essayé précédemment de

 15   construire un pont pour faciliter notamment le passage de

 16   l’aide humanitaire et ces opérations de construction du

 17   pont ont été interrompues du fait de cet incident dans

 18   lequel a été impliqué un de vos subordonnés, n’est-ce pas ?

 19         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.  C’est un incident

 20   extrêmement étrange.  Ce sergent, apparemment, il a été arrêté et

 21   puis il a été accusé d’avoir transporté des Serbes dans son

 22   véhicule.  Je n’ai jamais vraiment réussi à aller au fond de

 23   l’affaire mais en fait, finalement, peu importait.  Ce qui

 24   importait véritablement c’était que moi, je voulais ouvrir la

 25   route vers Tuzla afin de pouvoir faire passer l’aide humanitaire


Page 12360

  1   et nous étions en train de reconstruire à peu près cinq ou six

  2   ponts pour faire passer des poids lourds.

  3         Je sais où vous voulez en venir.  Donc, je peux aller droit

  4   au but, oui. Le commandant de Vares m’a dit que la seule personne

  5   qui était en mesure de permettre la reconstruction de ces ponts

  6   c’était Tihomir Blaskic.  Je suis allé voir Blaskic.  Il a donné

  7   les ordres qu’il a donnés et la reconstruction des ponts a

  8   recommencé.

  9         Me SAYERS (interprétation) :  Oui.  Vous avez

 10   répondu à la question que j’allais vous poser.  Une

 11   dernière question à ce sujet.  Il est indéniable, n’est-ce

 12   pas, que Monsieur Kordic n’avait aucune responsabilité et

 13   aucune influence militaire dans la zone de Vares, n’est-ce pas ?

 14         LE TÉMOIN (interprétation): Pas à ma connaissance. De toute

 15   façon, ce n’est pas quelque chose à quoi j’ai vraiment pensé.

 16         Me SAYERS (interprétation) :  Maintenant, passons au point

 17   suivant dans la chronologie. Le 10 janvier 1993, je crois qu’il y

 18   a eu un incident, des violences, des combats à Novi Travnik. Vous

 19   êtes allé voir le Commandant Malbasic à Novi Travnik, le

 20   commandant du HVO, et je crois que vous avez dit de lui

 21   précédemment que c’était quelqu’un de bien, ce Commandant

 22   Malbasic.

 23         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 24         Me SAYERS (interprétation) :  Vous n’avez eu aucun

 25   contact avec Monsieur Kordic au sujet de cette reprise des


Page 12361

  1   combats à Novi Travnik, n’est-ce pas ?

  2         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non, en effet.

  3         Me SAYERS (interprétation) :  Le point suivant que

  4   je souhaiterais évoquer avec vous, c’est des combats très

  5   durs qui ont éclaté au milieu ou à la fin janvier 1993 dans

  6   la zone de Gornji Vakuf.  Vous avez dit dans votre livre à

  7   la page 205 que – je cite : « Les combats se sont déclenchés

  8   à Gornji Vakuf et nous ne sommes jamais parvenus à découvrir

  9   quelle en avait été la cause. »       Fin de citation.

 10         Est-ce toujours votre opinion aujourd’hui ?

 11         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 12         Me SAYERS (interprétation) :  Dans votre

 13   déposition dans l’affaire Blaskic, mon Colonel…

 14         LE TÉMOIN (interprétation) :  Excusez-moi.  Je voudrais

 15   ajouter quelque chose maintenant que j’y réfléchis.  C’est peut-

 16   être le Plan Vance-Owen qui a joué le rôle de catalyseur en ce

 17   qui concerne ces combats.  Je crois l’avoir dit ailleurs.  Mais

 18   pour répondre à votre question précédente, je dirais non, je ne

 19   sais pas quelle était la raison de l’irruption de ces combats

 20   mais peut-être était-ce le fait de ce ridicule plan.

 21         Me SAYERS (interprétation) :  Merci.  Maintenant,

 22   j’ai quelques questions de détail à vous poser au sujet des

 23   combats.  Dans votre déposition dans l’affaire Blaskic…

 24                     [La Chambre discute]

 25         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Me Sayers,


Page 12362

  1   vous pouvez continuer.

  2         Me SAYERS (interprétation) :  Mon Colonel, dans l’affaire

  3   Blaskic, vous nous avez dit qu’à votre avis, Gornji Vakuf se

  4   trouvait en dehors de la zone de responsabilité du Colonel

  5   Blaskic, n’est-ce pas ?

  6         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

  7         Me SAYERS (interprétation) :  La zone

  8   opérationnelle nord-ouest de l’Herzégovine était sous le

  9   commandement de Zeljko Siljeg, quelqu’un dont on peut dire

 10   que vous ne vous entendiez pas très bien avec lui ?

 11         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non, ce n’est pas quelqu’un

 12    que j’aurais aimé rencontrer au coin d’une rue sombre.

 13         Me SAYERS (interprétation) :  Mais cet homme,

 14   Siljeg, commandait, n’est-ce pas, la zone de Gornji Vakuf ?

 15         LE TÉMOIN (interprétation) :  S’il n’avait pas commandé

 16   cette zone, cela m’aurait énormément surpris parce que je suis

 17   allé moi-même le chercher pour participer à des réunions à Gornji

 18   Vakuf et j’ai eu l’impression qu’il commandait véritablement

 19   cette zone.  Il n’y avait aucun doute à ce sujet.

 20         Me SAYERS (interprétation) :  Pendant toute la

 21   durée de votre séjour, vous n’avez eu aucun élément à votre

 22   disposition vous permettant de dire que Monsieur Kordic

 23   avait une influence militaire quelconque dans la zone de

 24   Gornji Vakuf en Herzégovine, n’est-ce pas ?

 25         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non.


Page 12363

  1         Me SAYERS (interprétation) :  Le conflit de Gornji

  2   Vakuf a entraîné des négociations pour obtenir un cessez-

  3   le-feu, des négociations qui ont pris beaucoup de temps ?

  4         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

  5         Me SAYERS (interprétation) :  Dans votre livre

  6   « Vies brisées », à la page 224, vous avez dit que Mate

  7   Boban avait personnellement ordonné la mise en place de ce

  8   cessez-le-feu.  Saviez-vous que Mate Boban était Président

  9   de l’entité qui a été décrite il y a quelque temps ici même

 10   comme la Communauté croate de Herceg-Bosna ?

 11         LE TÉMOIN (interprétation) :  La raison pour laquelle je

 12   l’ai dit c’est parce que je n’arrivais pas à obtenir aucun

 13   progrès.  J’avais perdu mon chauffeur, il avait été tué sans

 14   doute par un soldat musulman, et je n’arrivais à rien faire pour

 15   protéger la population de Gornji Vakuf et j’étais tellement

 16   ulcéré, je me sentais tellement impuissant qu’un dimanche, ce qui

 17   est inhabituel pour les Britanniques, un dimanche, j’ai demandé à

 18   être mis en contact avec Lord Owen pour exiger qu’il donne des

 19   ordres afin de mettre un terme à l’avancée de Siljeg et de ses

 20   hommes dans Gornji Vakuf où ils détruisaient les maisons une par

 21   une et où ils avançaient avec leurs chars et j’ai appris à ce

 22   moment-là, enfin apparemment, que Mate Boban se trouvait à

 23   Genève.  Enfin, tout cela, je l’ai entendu dire.

 24         Apparemment, Owen a fait quelque chose, a dit

 25   quelque chose dans une réunion et ensuite, j’ai vu Siljeg


Page 12364

  1   changer d’attitude parce que… c’est au moment où je

  2   m’apprêtais à lui dire que j’avais pris des contacts au

  3   plus haut niveau que lui-même a changé d’attitude.  Donc,

  4   il semble qu’il a eu des ordres de quelque part, de

  5   quelqu’un pour calmer la situation et j’en suis très content.

  6         Me SAYERS (interprétation) :  Un cessez-le-feu

  7   avait été signé à Gornji Vakuf en date du 20 janvier 1993,

  8   signé par le Général Petkovic pour le HVO et Monsieur

  9   Pasalic pour le 4e corps de l’armée de la Bosnie-

 10   Herzégovine.  Est-ce que vous vous en souvenez ?

 11         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.  Je me souviens de la

 12   signature de cet accord et je sais que cela était important

 13   puisque Petkovic était venu signer l’accord en question.

 14         Me SAYERS (interprétation) :  Bien !  Je me propose de

 15   passer à un autre sujet qui concerne la croissance des tensions

 16   entre les deux parties et les conflits de Busovaca en 1993.

 17   Chronologiquement parlant, je pense que le premier incident

 18   sérieux dans la région de Busovaca avait été la levée du point de

 19   contrôle musulman en date du 20 janvier 1993 dans la localité de

 20   Kacuni, à quelques kilomètres au sud de Busovaca.  Il s’agissait

 21   de la mise en place de ce point de contrôle ?

 22         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 23         Me SAYERS (interprétation) :  Fort bien !

 24         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je suis désolé.  Des fois, je

 25   fais de mon mieux, mon cerveau peut ressembler à un ordinateur.


Page 12365

  1         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Mais personne ne vous

  2   critiquera si vous ne vous souvenez pas exactement des événements

  3   qui ont eu lieu il y a sept ans.  Si vous ne vous souvenez pas,

  4   bien, dites tout simplement que vous ne vous souvenez pas.

  5         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je vous remercie.

  6         Me SAYERS (interprétation) :  Je vous remercie, Colonel. 

  7   Nous allons essayer de rafraîchir votre mémoire si des fois cela

  8   vous semble difficile et je crois que vous faites une très fort

  9   bonne tâche.  Je me propose de demander au greffe de vous

 10   présenter le bulletin d’information 103/1 qui est la pièce à

 11   conviction 81… (l’interprète se reprend) c’est la pièce à

 12   conviction 103/1 qui représente, enfin, le texte du bulletin

 13   d’information 81.

 14         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Monsieur

 15   Sayers, je crois que vous devriez passer plus rapidement.

 16         Me SAYERS (interprétation) :  Je crois que vous

 17   avez raison.  Je vais essayer d’accélérer la chose.

 18         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Et nous allons

 19   parler de la rencontre du 4 février ?

 20         Me SAYERS (interprétation) :  Oui, Monsieur le Président.

 21         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Nous pouvons

 22   donc nous pencher là-dessus.

 23         Me SAYERS (interprétation) :  Si vous vous

 24   souvenez, mon Colonel, on parle du point de contrôle à

 25   Kacuni mis en place en date du 20 janvier par les


Page 12366

  1   musulmans. À la page 3, on parle de Busovaca.  Est-ce que

  2   cela vous rafraîchit la mémoire concernant les dates ?

  3         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui, tout à fait.

  4         Me SAYERS (interprétation) :  Nous avons donc déterminé que

  5   ce point de contrôle avait été mis en place en date du 20 janvier

  6   par les musulmans.  Je vous remercie, Monsieur l’Huissier.

  7         Mon Colonel, est-ce que vous vous souvenez que la

  8   7e brigade avait déplacé ses unités au nord de Kacuni

  9   quelque peu avant l’éclatement du conflit ?

 10         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je ne me souviens

 11   pas tout à fait.  Je me souviens de Kacuni parce qu’un

 12   tireur d’élite avait fait sauter mon couvre-chef de ma tête.

 13         Me SAYERS (interprétation) :  Nous allons demander à

 14   Monsieur l’Huissier de vous présenter un autre document histoire

 15   de vous aider à vous souvenir des événements.  Si vous vous

 16   référez à la page 2 de ce compte rendu, au point 4, vous verrez

 17   que votre cellule de renseignements informe de plusieurs sources

 18   qu’il y avait mise en place au nord de Kacuni de la 7e brigade

 19   des musulmans.  C’était une brigade mobile dirigée par Zenica en

 20   direct et, partant de sources sûres, il s’agirait d’au moins 80

 21   soldats déplacés au cours des journées précédentes.

 22         Est-ce que vous vous souvenez d’avoir rencontré

 23   ces renseignements, enfin, d’en avoir eu connaissance ?

 24         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je crois avoir

 25   rencontré certaines de ces personnes sur le terrain.


Page 12367

  1         Me SAYERS (interprétation) :  Des membres de la

  2   brigade musulmane ?

  3         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui, sur le terrain.  Je n’ai

  4   pas lu cela mais j’ai vu ce que les gens faisaient sur le

  5   terrain.  Il y avait certainement des soldats musulmans.  Quand

  6   vous parlez de brigade, c’est une mauvaise piste que vous suivez.

  7   Je voudrais dire que dans une armée normale, une brigade est une

  8   unité de 5 ou 6 000 hommes et vous parlez d’une brigade de 50 à

  9   60 soldats.  Donc, c’est ce qui prête à confusion et il faut que

 10   je le dise à l’intention de personnes qui sont au courant comme

 11   moi, enfin, qui sont au courant des us et coutumes militaires.

 12         Me SAYERS (interprétation) :  Je vous remercie. Pour ce qui

 13   est des combats qui ont eu lieu, on ne se pose pas de question

 14   quant à savoir que les combats avaient été initiés par le meurtre

 15   de deux soldats croates à ce point de contrôle. Et vous vous êtes

 16   entretenu avec le Général Hadzihasanovic et le Colonel Merdan ?

 17         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 18         Me SAYERS (interprétation) :  Vous aviez dit au Général

 19   Hadzihasanovic et au Colonel Merdan qu’il y avait une partie de

 20   leurs responsabilités pour ce qui est des événements du 25

 21   janvier, n’est-ce pas ?

 22         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.  Je crois l’avoir dit.

 23   Je ne sais pas s’ils ont été d’accord.  Je ne m’en souviens plus.

 24         Me SAYERS (interprétation) :  À la page 322 de

 25   votre livre, vous avez parlé de vos entretiens avec


Page 12368

  1   Monsieur Merdan et nous pourrions, si vous le voulez bien,

  2   nous pencher sur le texte qui y figure.  Vous avez dit, en

  3   effet : « Je sentais que les musulmans étaient responsables

  4   de la plupart des problèmes puisqu’ils avaient tué deux

  5   soldats croates et s’il y avait dans la vallée de Busovaca

  6   une guerre véritable, eh bien, c’est la bonne voie d’y

  7   arriver.  C’est une bonne chose et Merdan est tombé

  8   d’accord et il s’est excusé et il s’était déclaré disposé à

  9   venir avec moi personnellement pour résoudre le problème. »

 10         Est-ce que vous vous en souvenez ?

 11         LE TÉMOIN (interprétation):  Pas autant dans le détail mais

 12   si je l’ai écrit dans le livre c’est que cela s’est effectivement

 13   déroulé de cette façon.  Mais je n’ai pas eu ce type de problème.

 14         Me SAYERS (interprétation) :  Vous avez vu donc des

 15   éléments de preuve ?  Vous avez vu des maisons brûlées dans la

 16   région de Kacuni et des preuves de destruction récente comme vous

 17   l’avez décrit à cette page-là de votre livre ?

 18         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.  Toute cette

 19   zone avait été brûlée.

 20         Me SAYERS (interprétation) :  Vous vous souvenez

 21   que c’était des maisons croates dans le sud de Kacuni ?

 22         LE TÉMOIN (interprétation) :  Pour être tout à

 23   fait sincère, je ne m’en souviens pas.

 24         Me SAYERS (interprétation) :  Fort bien !

 25         LE TÉMOIN (interprétation) :  On pouvait


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  1   éventuellement déterminer s’il s’agissait de maisons

  2   croates ou musulmanes si on entrait mais les communautés en

  3   présence étaient assez proches l’une de l’autre.

  4         Me SAYERS (interprétation): Je voudrais attirer l’attention

  5   du Tribunal sur la pièce à conviction D105/1 et on y parle de

  6   maisons brûlées, maisons de Croates brûlées par les membres de

  7   l’armée bosniaque.  Je n’affirme pas que cela est exact mais ce

  8   que j’affirme c’est que cela est arrivé tout le temps dans votre

  9   zone de responsabilité pendant que vous étiez là-bas, n’est-ce

 10   pas ?

 11         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui, c’est cela.

 12         Me SAYERS (interprétation) :  Est-ce que vous avez

 13   reçu des informations de la part de vos soldats ou d’autres

 14   sources pour ce qui est des massacres de Croates dans les

 15   villages de Dusina et de Lasva ?

 16         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je pense que oui.  Je pense

 17   que j’ai mentionné cela dans certains de mes témoignages.  Je me

 18   suis notamment efforcé d’étudier tous les comptes rendus qui

 19   m’étaient soumis pour ce qui est des Croates massacrés par les

 20   musulmans.

 21         Me SAYERS (interprétation) :  Une question seulement à ce

 22   propos. Est-ce que vous avez entendu parler de poursuites pénales

 23   quelconques ou de sanctions administratives concernant ces

 24   massacres de Dusina et Lasva survenus en date du 26 juin 1993 ?

 25         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je crois que Merdan m’avait


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  1   dit que les personnes qui avaient commis cela passeraient en Cour

  2   martiale.

  3         Me SAYERS (interprétation) :  Est-ce que vous vous

  4   souvenez ?  Est-ce que vous êtes allé ?

  5         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non.

  6         Me SAYERS (interprétation) :  Est-ce qu’avant de

  7   quitter cette région, vous avez fait quelque chose pour

  8   examiner la véracité des dires ?

  9         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non.  Je regrette

 10   beaucoup de ne pas l’avoir fait.

 11         Me SAYERS (interprétation) :  Permettez-moi de passer à un

 12   autre sujet maintenant avant d’arriver à la rencontre qui a été

 13   mentionnée par Monsieur le Président de la Chambre.  Les combats

 14   qui ont eu lieu dans la région de Busovaca ont été résolus par

 15   l’obtention de cet accord de cessez-le-feu du 30 janvier 1993…

 16   (l’interprète se reprend) le 30 juin.  Est-ce que vous vous en

 17   souvenez ?

 18         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non.  Est-ce que

 19   vous pouvez m’aider à me rappeler ?

 20         Me SAYERS (interprétation):  Est-ce que l’huissier pourrait

 21   vous montrer les pièces à conviction suivante:  D54/1 et Z421/1A?

 22         Je voudrais attirer votre attention sur la pièce à

 23   conviction D54/1.  Il s’agit de la version anglaise de

 24   l’accord de cessez-le-feu qui a été signé par six personnes.

 25         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.  Je m’en


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  1   souviens maintenant.

  2         Me SAYERS (interprétation) :  Vous êtes l’un des

  3   signataires, mon Colonel ?

  4         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je pense avoir

  5   rédigé moi-même ce document.

  6         Me SAYERS (interprétation) :  Le Colonel Merdan,

  7   au nom des forces musulmanes, et le Colonel Nakic, au nom

  8   des forces du HVO, des forces croates ?

  9         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui, c’est cela.

 10         Me SAYERS (interprétation) :  En page 21… j’ai peut-être

 11   dit 30 juin.  Non, il faut me rectifier.  C’est le 30 janvier.

 12         LE TÉMOIN (interprétation) :  J’ai bien compris

 13   parce que dans mon journal, c’est le 30 janvier.

 14         Me SAYERS (interprétation):  Est-ce que vous vous souvenez,

 15   mon Colonel, du fait que le Colonel Blaskic avait été convié à

 16   Kiseljak mais qu’il ne pouvait pas se rendre de Kiseljak à Vitez

 17   puisque cette route principale d’approvisionnement entre Kacuni

 18   et Bilalovac avait été bloquée ?

 19         LE TÉMOIN (interprétation):  Je sais qu’il y était et comme

 20   la route était bloquée, il était très difficile de se déplacer

 21   entre Kiseljak et Vitez et je l’avais emmené moi-même une fois,

 22   ce qui fait qu’il aurait pu faire la route dans l’un de mes

 23   blindés.

 24         Me SAYERS (interprétation) :  Personne n’a jamais

 25   suggéré que Monsieur Kordic devrait être présent à ces


Page 12372

  1   négociations, quoique ces négociations auraient été censées

  2   résoudre le problème des combats à Busovaca ?

  3         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non.

  4         Me SAYERS (interprétation) :  Et personne n’a

  5   insisté sur l’utilité de sa présence ?

  6         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non.

  7         Me SAYERS (interprétation) :  Et personne n’a

  8   jamais souligné l’importance clé de sa présence ?

  9         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non.

 10         Me SAYERS (interprétation) :  Vous n’avez jamais essayé

 11   d’assurer la présence de Monsieur Kordic à ces négociations ?

 12         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non, mais j’aurais

 13   accepté la présence de Monsieur Kordic car je souhaitais

 14   avoir quelqu’un capable de prendre des décisions et s’il

 15   s’agissait d’avoir quelqu’un avec les autorités

 16   nécessaires, j’aurais accepté la présence de Monsieur Kordic.

 17         Me SAYERS (interprétation) :  Vous n’avez pas

 18   demandé sa présence ?

 19         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non, mais j’avais

 20   demandé à chaque fois que Monsieur Blaskic y soit.

 21         Me SAYERS (interprétation) :  De la même façon, Jeremy

 22   Fleming qui avait été représentant de la mission d’observation

 23   de la Communauté européenne n’a jamais suggéré qu’il serait utile

 24   que Monsieur Kordic assiste à ces négociations ?

 25         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je ne m’en souviens pas.


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  1         Me SAYERS (interprétation) :  Donc, il n’avait

  2   jamais insisté sur l’importance clé de la présence de

  3   Monsieur Kordic à ces négociations, n’est-ce pas ?

  4         LE TÉMOIN (interprétation) :  Pour autant que je m’en

  5   souvienne, non, mais je ne peux pas parler en son nom. La réponse

  6   à votre question est non mais cela ne met pas en cause la

  7   nécessité d’avoir Monsieur Kordic présent à ces négociations.

  8         Me SAYERS (interprétation):  Je voudrais attirer maintenant

  9   votre attention sur le paragraphe 6 de cet accord.  Il s’agit de

 10   la libération simultanée de détenus dans l’organisation du Comité

 11   international de la Croix- Rouge.  Il est bien vrai, n’est-ce

 12   pas, qu’il n’y a pas eu d’accord concret pour ce qui est de la

 13   libération momentanée des prisonniers à l’époque qui aurait été

 14   surveillée par le Comité international de la Croix-Rouge ?

 15         LE TÉMOIN (interprétation) :  Si vous pouvez le remarquer,

 16   le représentant de la CICR était présent et on peut le voir… le

 17   CICR était présent étant donné que Monsieur Whitworth était

 18   présent et il y a sa signature sur l’accord.  J’avais essayé de

 19   prévoir cette clause et c’est la raison pour laquelle la clause

 20   figure parce que nous avons convenu à l’avance de la chose entre

 21   nous.

 22         Me SAYERS (interprétation) :  J’en ai conclu avec ce sujet. 

 23   Nous poursuivons chronologiquement.  Il s’agit des camps que l’on

 24   appelle les silos à Kacuni que vous aviez visités avec les

 25   représentants du CICR en date du 1er février 1993.  Est-ce que


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  1   vous vous souvenez d’avoir discuté des conditions de détention ?

  2         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui. J’ai parlé des

  3   conditions et cela était très important.

  4         Me SAYERS (interprétation) :  Il y avait une

  5   trentaine de personnes détenues là-bas, n’est-ce pas ?

  6         LE TÉMOIN (interprétation) :  Pour autant que je

  7   m’en souvienne, oui, et elles se trouvaient dans une sorte

  8   d’étable.  Je crois que nous leur avions donné des couvertures.

  9         Me SAYERS (interprétation) :  Suite à cette

 10   visite, vous avez été l’hôte d’une réunion qui avait été

 11   présidée par le Général Morillon en date du 1er février

 12   dans votre base.  Cela est noté dans votre journal.

 13         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 14         Me SAYERS (interprétation) :  Est-ce que vous vous souvenez

 15   que le Lieutenant Colonel Duncan était présent également ?

 16         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 17         Me SAYERS (interprétation) :  Et les représentants

 18   des commandements régionaux des deux parties, Monsieur

 19   Blaskic et le Général Hadzihasanovic, étaient là-bas ?

 20         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 21         Me SAYERS (interprétation) :  Avec les représentants de

 22   la FORPRONU, les accompagnateurs du Général Morillon ?

 23         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 24         Me SAYERS (interprétation) :  Et les représentants

 25   de la mission d’observation de la Communauté européenne et


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  1   de la Croix-Rouge ?

  2         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

  3         Me SAYERS (interprétation) :  Monsieur Kordic

  4   n’était pas là-bas ?

  5         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non.  Monsieur

  6   Kordic n’avait même pas été convié à cette réunion.  Donc,

  7   pour autant que je sache, non.

  8         Me SAYERS (interprétation) :  Permettez-moi maintenant de

  9   traiter des résultats des négociations de paix, c’est-à-dire de

 10   la mise en place d’une Commission conjointe de Busovaca qui avait

 11   été aussi dénommée, enfin, qui avait été appelée Commission de

 12   coordination de Busovaca.  En page 238 de votre livre, vous avez

 13   dit qu’il s’agissait de l’une des meilleures idées auxquelles

 14   vous aviez assisté en Bosnie centrale.

 15         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui, pour deux raisons :

 16   D’abord parce qu’il me semblait que cela fonctionnait et

 17   deuxièmement, c’était une commission qui m’avait privé d’une

 18   tâche pénible et c’était peut-être égoïste mais il est exact que

 19   cela fonctionnait d’une certaine façon parce qu’il y a des

 20   personnes convenables qui se sont mises à table et qui ont essayé

 21   donc de faire cesser les combats.

 22         Me SAYERS (interprétation) :  Le comité exécutif

 23   se constituait de Monsieur Fleming, de vous, du Général

 24   Hadzihasanovic en tant que commandant des forces musulmanes

 25   et le Général Blaskic, représentant du HVO, n’est-ce pas ?


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  1         LE TÉMOIN (interprétation) :  Les réunions avaient lieu en

  2   général entre moi-même, Monsieur Fleming, Monsieur Merdan et en

  3   général, Blaskic ne pouvait pas être présent et il envoyait son

  4   représentant.

  5         Me SAYERS (interprétation) :  Il s’agissait de

  6   Monsieur Franjo Nakic, n’est-ce pas ?

  7         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui, je pense.

  8         Me SAYERS (interprétation) :  Vous aviez beaucoup

  9   de considération pour lui ?

 10         LE TÉMOIN (interprétation) :  J’avais beaucoup de

 11   considération pour bien des gens là-bas, des deux parties.

 12         Me SAYERS (interprétation) :  Est-il exact,

 13   Colonel, que cette commission siégeait tous les jours

 14   pendant plusieurs mois, du moins jusqu’à juin 1993 ?

 15         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je ne sais pas s’ils se

 16   réunissaient tous les jours mais ce que nous avons fait c’est que

 17   nous avions créé un bureau juste à côté de ma base, dans une

 18   maison à côté de la base et je leur fournissais des denrées

 19   alimentaires, des véhicules et j’avais attribué un détachement de

 20   soldats pour qu’ils puissent se déplacer. Je ne sais pas s’ils se

 21   réunissaient tous les jours mais ils se réunissaient souvent.

 22         Me SAYERS (interprétation) :  Mais pour être précis, mon

 23   Colonel, n’est-il pas vrai que la commission avait au début été

 24   sise dans la base du bataillon hollandais de Busovaca puis a été

 25   transférée en mars 1993 vers votre base à Vitez, c’est-à-dire


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  1   vers le bâtiment de la mission d’observation de la CEE ?  N’est-

  2   ce pas vrai ?

  3         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.  Elle a été

  4   transférée parce que nous avions pensé qu’elle serait plus

  5   efficace si elle se trouvait plus près de nous.

  6         Me SAYERS (interprétation) :  Mon collègue me montre qu’il

  7   y a une erreur dans le transcript et je voudrais qu’il y soit

  8   remédié et en ligne 24, j’avais demandé si Monsieur Kordic avait

  9   été invité et le transcript dit que oui, alors qu’en fait, il

 10   n’avait pas été invité.

 11         Maintenant, nous pouvons poursuivre sur le thème

 12   que nous avons entamé.  Monsieur Kordic n’a donc assisté à

 13   aucune réunion de cette commission de coordination de Busovaca ?

 14         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non, pas pour autant

 15   que je le sache.

 16         Me SAYERS (interprétation) :  Donc, pour autant

 17   que vous le sachiez, il n’y a pas été convié ?

 18         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non.  Nous n’avions

 19   pas besoin.  Nous avions les commandants militaires et

 20   leurs représentants là-bas.

 21   Me SAYERS (interprétation) :  Et personne n’a suggéré que

 22   sa présence pourrait être utile, voire importante ?

 23         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non.  Personne n’a suggéré sa

 24   présence et je n’ai jamais pensé que sa présence aurait été utile.

 25         Me SAYERS (interprétation) :  Maintenant, je vais


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  1   me tourner vers la réunion que vous avez eue avec Monsieur

  2   Kordic en date du 4 février 1993 et je vais vous prier,

  3   Monsieur, de vous pencher sur votre journal portant cette date.

  4         En page 1441, on dit que Kordic voulait vous rencontrer,

  5   qu’il se trouvait à Busovaca, que vous êtes allé le voir là-bas

  6   avec les représentants du HVO local.  Kordic était d’accord pour

  7   se rendre à Katici et Merdani où il y avait de sérieux combats.

  8   C’est à peu près le résumé de ce qui est inscrit concernant cette

  9   réunion du 4 février 1993 ?

 10         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 11         Me SAYERS (interprétation) :  Vous avez dit que

 12   Kordic avait une mine plutôt troublée et que cela n’était

 13   pas typique pour Monsieur Kordic.

 14         LE TÉMOIN (interprétation) :  À mon avis, Monsieur

 15   Kordic était une personne qui pouvait devenir agitée,

 16   c’est-à-dire excitée mais il avait plutôt l’air préoccupé

 17   par une chose qui semblait représenter un péril.

 18         Me SAYERS (interprétation) :  Donc, il était

 19   préoccupé par de sérieux combats au nord-est de Busovaca ?

 20         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 21         Me SAYERS (interprétation) :  Il vous demandait

 22   d’essayer de faire quelque chose à ce sujet et vous avez

 23   dit que vous alliez entreprendre votre possible ?

 24         LE TÉMOIN (interprétation) :  J’ai dit que j’allais y aller

 25   pour essayer de faire cesser les combats puisque j’y étais et que


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  1   j’essaierais de négocier avec les deux parties en présence.

  2         Me SAYERS (interprétation):  Vous ne vous souvenez donc pas

  3   que vous vous êtes entretenu avec le commandant de la brigade,

  4   Monsieur Jozinovic, ou avec son remplaçant, Monsieur Grubesic,

  5   qui avait été commandant de la brigade à cette époque ?

  6         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non.

  7         Me SAYERS (interprétation) :  Quand vous êtes venu dans ces

  8   villages de Katici et Merdani – je pense que c’était des petits

  9   villages – c’était véritablement un chaos, n’est-ce pas ?

 10         LE TÉMOIN (interprétation) :  Quand je suis arrivé là-bas,

 11   il faisait assez sombre.  Il était très difficile d’y accéder.

 12   Je m’y suis rendu avec mon Warrior, mon blindé, et j’avais le

 13   véhicule du Sergent Kudzovinski (ph.) avec moi.  La route était

 14   glissante.  Il était difficile donc d’y accéder et lorsque nous

 15   sommes arrivés là-bas, nous avons traversé la voie ferrée et nous

 16   sommes arrivés tard.  Nous sommes allés directement vers la zone

 17   de combat.  On a tiré sur nous.

 18         J’ai essayé de me rendre à Merdani et j’ai conclu que cela

 19   était par trop dangereux et qu’il n’était pas possible d’y aller

 20   en véhicule car j’avais perdu un deuxième Warrior au retour,

 21   suite à une attaque, et après avoir vérifié que les gens allaient

 22   bien, je les ai laissés là-bas.

 23         Me SAYERS (interprétation) :  Donc, vous êtes allé

 24   au commandement britannique de Nova Bila ?

 25         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.


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  1         Me SAYERS (interprétation) :  La journée suivante, le jour

  2   suivant, vous et Monsieur Fleming – vous le dites dans votre

  3   journal, vous pouvez vous pencher dessus si vous le voulez – il

  4   est exact que Monsieur Fleming avait présidé à cette réunion pour

  5   examiner cette situation et faire cesser le feu ?

  6         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

  7         Me SAYERS (interprétation) :  Il y avait donc le

  8   Colonel Blaskic et Monsieur Merdan ?

  9         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 10         Me SAYERS (interprétation) :  Et vous aviez aussi les

 11   représentants de certaines organisations internationales ?

 12         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 13         Me SAYERS (interprétation) :  Monsieur Kordic

 14   n’avait pas été invité à cette réunion non plus ?

 15         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non.

 16         Me SAYERS (interprétation) :  Donc, si nous

 17   suivons chronologiquement les faits, est-ce que vous vous

 18   souvenez de l’ordre conjoint qui avait été signé dans la

 19   ville de Kakanj en date du 13 février 1993 – cela a été

 20   signé par le Colonel Blaskic et le Général Hadzihasanovic –

 21   pour ce qui est de l’application de ce qu’ils avaient

 22   convenu de faire dans l’accord daté du 30 janvier 1993 ?

 23         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non.

 24         Me SAYERS (interprétation) :  Vous ne vous souvenez pas ?

 25         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non, parce que


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  1   j’étais en congé.

  2         Me SAYERS (interprétation) :  Est-ce que vous avez

  3   vu cet ordre ?

  4         LE TÉMOIN (interprétation) :  Peut-être que oui mais mon

  5   remplaçant avait été commandant du bataillon à cette époque.

  6         Me SAYERS (interprétation) :  Est-ce que nous

  7   pouvons continuer ?

  8         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Je crois que nous nous

  9   éloignons de ce dont parlait le témoin et si le moment vous

 10   semble propice, nous pourrions procéder à une pause. 

 11         Est-ce que Monsieur Nice a reçu des informations

 12   supplémentaires ?

 13         Me NICE (interprétation) :  Je crois qu’il ne sera pas

 14   possible de prévoir l’arrivée de qui que ce soit d’entre eux.  Il

 15   faudrait une signature pour cela et cela ne sera pas disponible

 16   jusqu’à après le déjeuner et ce sont des problèmes de juridiction

 17   locale.

 18         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Mais vous

 19   pourriez vous pencher sur la voie à suivre.

 20         Me NICE (interprétation) :  Oui.  Je pourrais vous

 21   dire quelque chose au sujet d’un autre thème.  Le compte

 22   rendu pourrait porter la cote de 2791.

 23         Je voudrais revenir sur ce que la Chambre avait souligné

 24   auparavant, à savoir que je voudrais bénéficier de la coopération

 25   du témoin concernant ces documents et je crois que ce serait


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  1   d’une grande valeur pour cette Chambre d’instance et je pense

  2   qu’il serait utile si nous pouvions retenir le témoin jusqu’à

  3   demain.

  4         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Oui, si cela

  5   n’est pas dérangeant ou inconvenant pour le témoin.

  6         Me NICE (interprétation) :  Si la Chambre pouvait

  7   siéger un peu plus longtemps aujourd’hui, nous pourrions

  8   traiter pleinement du problème en question.

  9         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Si nous

 10   pouvions terminer aujourd’hui avec ce témoin, nous

 11   pourrions siéger un peu plus longtemps.

 12         Me Sayers, je crois que vous avancez assez bien et

 13   selon votre état d’avancement au travers du fascicule que

 14   vous avez devant vous…

 15         Me SAYERS (interprétation) :  Je crois que

 16   j’avance plus vite que je ne le pensais.  Je ne vois pas

 17   pourquoi cela ne se poursuivrait pas ainsi et j’espère que

 18   je finirai d’ici la fin de cette journée.

 19         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Je vous prie

 20   d’essayer de le faire.

 21         Monsieur Kovacic.

 22         Me KOVACIC (interprétation) :  Si je devais

 23   évaluer le temps qui me sera nécessaire, je crois qu’il me

 24   suffirait d’une petite demi-heure, pas plus.

 25         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Monsieur Nice,


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  1   si vous désirez vous entretenir avec le témoin concernant

  2   ses plans ou plannings, vous pourriez le faire.

  3         LE TÉMOIN (interprétation) :  Si cela peut aider

  4   ce Tribunal, je vais rester aussi longtemps que cela sera

  5   nécessaire.  Je tiens donc que nous achevions avec ce

  6   témoignage.

  7         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Je voudrais

  8   vous dire que le témoin n’a le droit de s’entretenir avec

  9   qui que ce soit pendant le témoignage et cela inclut le

 10   Procureur et vous pouvez nous parler de vos plannings et

 11   s’il y a des documents de présentés, vous pouvez vous

 12   entretenir concernant ces documents avec le Procureur.

 13         Je vous remercie et je crois que nous allons lever

 14   la séance jusqu’à 14 h 30 maintenant.

 15         --- Suspension de l’audience à 13 h 03

 16         --- Reprise de l’audience à 14 h 36

 17         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Monsieur Nice.

 18         Me NICE (interprétation) :  Je crois que nous

 19   sommes toujours en public.  Donc, il me faudra parler avec

 20   quelques précautions.  Mais je voulais parler d’une

 21   ordonnance émise par cette Chambre de première instance qui

 22   porte sur l’exercice du pouvoir discrétionnaire de la

 23   Chambre relativement à l’emploi d’un document particulier.

 24         Je demanderais que ce pouvoir discrétionnaire

 25   intervienne de façon à ce que ce témoin soit autorisé à


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  1   examiner ce document.  C’est un document que le témoin espérait

  2   pouvoir examiner et de tous les témoins que vous avez entendus,

  3   celui-ci est sans doute le plus apte à en évaluer…

  4         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Oui.  La

  5   Défense en a-t-elle reçu un exemplaire ?

  6         Me NICE (interprétation) :  La Défense n’a pas encore reçu

  7   un exemplaire de ce document parce que nous venons à peine de

  8   recevoir l’ordonnance qui porte sur ce document mais elle a vu

  9   l’ordonnance en question.  J’ai demandé à ce que le témoin puisse

 10   examiner ce document sans subir la moindre pression liée au temps,

 11   c’est-à-dire qu’il puisse l’examiner en dehors du prétoire et

 12   qu’il puisse en parler ensuite brièvement. 

 13         Ce que je demanderais, avec le respect que je dois

 14   à la Chambre, c’est si celle-ci pourrait autoriser donc le

 15   témoin à voir ce document et qu’une pause soit ménagée à

 16   cette fin car cela aiderait également les interprètes et

 17   les Juges que le Colonel Stewart puisse passer ce document

 18   en revue avec le temps nécessaire.

 19         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Eh bien, si

 20   c’est plus opportun, nous pouvons continuer le contre-

 21   interrogatoire pour le moment et nous verrons par la suite.

 22         Me NICE (interprétation) :  Merci, Monsieur le Président.

 23         Me SAYERS (interprétation) :  Colonel, nous allons

 24   poursuivre l’examen chronologique des incidents survenus

 25   pendant la durée de votre mission et nous en sommes arrivés


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  1   en février 1993.  Vous avez déjà parlé d’un incident survenu le

  2   le 22 février mais en fait, vous n’avez pas rencontré Monsieur

  3   Kordic le 22 février.  Ce que vous avez dit aux Juges de cette

  4   Chambre c’est qu’en fait, un officier commandant de la Compagnie

  5   C, le Commandant Jennings, vous avez demandé de le voir,

  6   n’est-ce pas ?  Si vous voulez vous rafraîchir la mémoire, vous

  7   pouvez jeter un coup d’œil à votre journal personnel avant de

  8   répondre à la question.

  9         LE TÉMOIN (interprétation) :  C’est exact.

 10         Me SAYERS (interprétation) :  Ce que vous avez dit, ce que

 11   vous avez raconté, c’était un incident au cours duquel un barrage

 12   routier a été érigé dans le cadre d’une opération humanitaire et

 13   vous avez dit qu’il y avait déjà eu quelques incidents de ce

 14   genre à Busovaca par le passé, dans le passé récent.

 15         LE TÉMOIN (interprétation) :  C’est une

 16   possibilité mais je n’ai pas dit que c’était certain.

 17         Me SAYERS (interprétation) :  Je me demandais si l’on

 18   pouvait vous montrer deux bulletins de renseignements militaires

 19   qui vont peut-être jeter quelque lumière sur ces faits et vous

 20   rafraîchir la mémoire.  Il s’agit du bulletin de renseignements

 21   militaires 115 daté du 22 février 1993 et du bulletin de

 22   renseignements militaires 118 daté de trois jours plus tard.

 23         LA GREFFIÈRE (interprétation) :  Le bulletin de

 24   renseignements militaires 115 sera enregistré sous la cote

 25   D157/1 et le bulletin de renseignements militaires 118 sous


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  1   la cote D158/1.

  2         Me SAYERS (interprétation) :  Colonel, nous allons parler

  3   maintenant du bulletin du 22 février 1993, pièce D157/1, le

  4   bulletin de renseignements militaires 115.  Je vous demanderais

  5   de prendre la page 2.  Vous y voyez un rapport qui vient sans

  6   doute du Commandant Jennings selon lequel deux barrages routiers

  7   ont été érigés sur la base apparemment d’ordres directs de

  8   Monsieur Kordic du HDZ et le rapport se poursuit en stipulant

  9   que Kordic avait déclaré que Busovaca n’avait reçu qu’une

 10   livraison d’aide humanitaire au cours des derniers huit jours…

 11   au cours des derniers 39 jours (se reprend l’interprète) et

 12   qu’il avait reçu l’ordre de bloquer la route avec un camion afin

 13   d’appeler l’attention de toutes les organisations concernées sur

 14   ce fait.

 15         Cela vous rafraîchit-il la mémoire ?  Savez-vous

 16   si cet incident a eu lieu ?

 17         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je ne sais pas si

 18   c’est le cas ou pas mais ce document me rappelle

 19   effectivement qu’un barrage routier a existé et que Kordic

 20   a ordonné la levée de ce barrage.  Selon vous, il n’était

 21   pas commandant à ce moment-là, n’est-ce pas ?  Donc, il

 22   n’aurait pas pu donner l’ordre de bloquer la route.

 23         Me SAYERS (interprétation) :  Eh bien, examinons

 24   le bulletin de renseignements militaires suivant, Monsieur,

 25   le document D158/1.  Page 2, au point 6, nous lisons


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  1   « Busovaca ».  Au milieu du paragraphe à peu près, nous

  2   lisons : « La raison pour laquelle ces barrages ont été

  3   établis n’est pas très claire mais il est dit que

  4   l’érection de ces barrages est liée à une inégalité dans la

  5   répartition de l’aide humanitaire. »  Vous voyez cela ?

  6         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

  7         Me SAYERS (interprétation) :  Cela correspond-t-il

  8   à votre souvenir ?

  9         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non.  Je ne me

 10   rappelle pas cela exactement mais c’est sans doute dû à un

 11   défaut de mémoire de ma part.  Je n’étais pas, cela étant,

 12   nécessairement informé de ce qui se passait à ce moment-là.

 13         Me SAYERS (interprétation) :  Cela n’est pas un

 14   problème.  Parlons d’un autre incident survenu peu de temps

 15   après.  Vous rappelez-vous, Monsieur, qu’un véhicule blindé

 16   de marque Mercedes, je crois, appartenant au contingent

 17   néerlandais a été détourné par des hommes sur la route

 18   entre Vitez et Travnik et empêché de pénétrer dans Vitez ?

 19         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.  Je me rappelle

 20   cela très bien.

 21         Me SAYERS (interprétation) :  Très bien !  Vous

 22   rappelez-vous, Monsieur, qu’un officier de police militaire

 23   s’en est plaint à l’hôtel Vitez et a demandé l’assistance

 24   de l’hôtel Vitez pour organiser la restitution du

 25   véhicule ?


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  1         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je suis sûr que je

  2   me rappelle.

  3         Me SAYERS (interprétation) :  Eh bien, je

  4   demanderais à Monsieur l’Huissier de vous montrer la pièce

  5   D114/1, un bulletin de renseignements militaires.  Merci,

  6   Monsieur l’Huissier.  J’en ai terminé avec les deux

  7   documents précédents et je vous prierais de bien vouloir

  8   placer celui-ci sur le rétroprojecteur.

  9         Je vous parlerai, Colonel, de la page 2 de ce

 10   document.  Ce document est un bulletin de renseignements

 11   militaires en date du 23 février 1993 et il est stipulé ici

 12   que : « Le premier régiment du Cheshire et d’autres ont

 13   rendu visite au quartier général du HVO à Vitez pour

 14   demander la restitution du véhicule et de son contenu. » 

 15   Vous voyez cela ?

 16         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 17         Me SAYERS (interprétation) :  Apparemment, il

 18   s’agit ici de vous et de l’un de vos officiers de liaison.

 19         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je ne me suis pas

 20   contenté de m’y rendre.  J’ai également rendu visite au

 21   commandant.

 22         Me SAYERS (interprétation) :  À savoir à Ivica

 23   Santic ?

 24         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 25         Me SAYERS (interprétation) :  Très bien, Monsieur. 


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  1   Merci, Monsieur l’Huissier, j’en ai terminé avec ce

  2   document.

  3         Colonel, vous vous êtes rendu à Novi Travnik. 

  4   Vous avez parlé au chef de la police et selon votre journal

  5   personnel, apparemment, celui-ci avait de bonnes relations,

  6   un certain pouvoir ?

  7         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

  8         Me SAYERS (interprétation) :  Le lendemain, vous

  9   êtes allé voir le Colonel Filipovic à Travnik pour savoir

 10   s’il pouvait éclairer un peu la question, jeter quelque

 11   lumière sur ce problème et il a réussi à le faire, n’est-ce

 12   pas ?

 13         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non.

 14         Me SAYERS (interprétation) :  Très bien !  Vous

 15   nous avez dit, n’est-ce pas, il y a quelque temps que selon

 16   vous, le Colonel Filipovic était un homme bien, que vous

 17   l’appréciez, que vous le considériez comme quelqu’un

 18   d’assez impressionnant, n’est-ce pas ?

 19         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui, en effet.

 20         Me SAYERS (interprétation) :  Très bien, Monsieur. 

 21   Vous rappelez-vous si le véhicule de marque Mercedes a été

 22   restitué au bataillon néerlandais mais que c’est un groupe

 23   de la mafia locale qui, apparemment, n’était pas d’accord

 24   pour accepter la restitution du véhicule par Monsieur

 25   Kordic à Busovaca ?


Page 12390

  1         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.  En fait, cela

  2   n’est pas consigné dans mon journal mais j’ai rencontré la

  3   mafia.  Je suis allé voir ce criminel.

  4         Me SAYERS (interprétation) :  Très bien !  Ce

  5   criminel était un homme répondant au nom de Zarko Andric,

  6   n’est-ce pas, connu également sous un surnom, si je ne

  7   m’abuse ?

  8         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui, je pense que

  9   c’était le cas.  C’était un personnage tout à fait

 10   désagréable.  Excusez-moi, j’aurais quelque chose à

 11   ajouter.  Je pense que Monsieur Kordic a aidé à la

 12   restitution du véhicule et je pense que la mafia a eu un

 13   rôle à jouer effectivement dans cette affaire.  Je crois

 14   qu’une certaine pression a également été exercée sur nous

 15   par les responsables municipaux et sur moi en particulier

 16   par ce représentant de la mafia.

 17         Me SAYERS (interprétation) :  Personnellement,

 18   vous n’avez rien eu à voir avec Monsieur Kordic sur ce

 19   sujet ?  Ces tractations se sont déroulées entre le

 20   Commandant Jennings et Monsieur Kordic, n’est-ce pas ?

 21         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.  Je pense que

 22   Monsieur Kordic a eu quelques rapports avec des membres de

 23   mon bureau.

 24         Me SAYERS (interprétation) :  Nous poursuivons

 25   l’examen chronologique des faits.  Le point suivant


Page 12391

  1   concerne la mort de l’un de vos soldats, Monsieur Rock, je

  2   crois, le Caporal Rock qui s’est tué en manipulant un fusil

  3   chargé, n’est-ce pas ?

  4         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

  5         Me SAYERS (interprétation) :  C’était un accident,

  6   n’est-ce pas ?

  7         LE TÉMOIN (interprétation) :  J’espère.

  8         Me SAYERS (interprétation) :  Ce n’était pas un

  9   suicide, à votre avis, n’est-ce pas ?

 10         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je pense que ce

 11   soldat était assez instable.  Il était ivre et je crois

 12   qu’il a joué avec ce fusil et qu’il est mort de façon

 13   accidentelle.

 14         Me SAYERS (interprétation) :  Le point suivant

 15   dont je voulais parler dans l’ordre chronologique est une

 16   rencontre de haut niveau à laquelle vous faites référence

 17   dans votre journal personnel entre plusieurs représentants

 18   politiques à Zenica sous la direction de Monsieur

 19   l’Ambassadeur Thebault qui a présidé la réunion.  Vous

 20   rappelez-vous cette rencontre ?

 21         LE TÉMOIN (interprétation) :  Pouvez-vous me

 22   donner la date, je vous prie ?

 23         Me SAYERS (interprétation) :  Oui.  Le 25 mars

 24   1993, Monsieur, et je vous prie de m’excuser de n’avoir pas

 25   mentionné cette date au moment où j’ai formulé ma question.


Page 12392

  1         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.  Cela semble

  2   possible mais je n’en vois pas de trace ici.

  3         Me SAYERS (interprétation) :  Merci.  Passons

  4   maintenant aux événements qui concernent directement un

  5   point au sujet duquel vous avez témoigné, à savoir le

  6   massacre des civils à Ahmici.  Il est vrai, n’est-ce pas,

  7   qu’avant le 16 avril, la tension s’était considérablement

  8   et régulièrement accrue entre les forces bosniennes,

  9   musulmanes et les forces croates dans la vallée de la

 10   Lasva, n’est-ce pas ?

 11         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 12         Me SAYERS (interprétation) :  Par exemple, à

 13   Travnik, le 10 avril, une bombe avait été jetée contre le

 14   quartier général du HVO.  Vous vous rappelez cela ?

 15         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je ne suis pas sûr

 16   que cela soit consigné dans mon journal personnel et je ne

 17   me rappelle pas vraiment.  Mais peut-être la source émane-

 18   t-elle des services de renseignements militaires.

 19         Me SAYERS (interprétation) :  En tout cas, il

 20   suffira de dire, Monsieur, que les autorités musulmanes de

 21   Travnik vous ont dit qu’elles ne pouvaient pas accepter la

 22   direction croate dans la province 10 comme le prévoyait le

 23   Plan Vance-Owen.  Vous vous rappelez cela ?

 24         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.  Ça, je suis

 25   sûr que c’était le cas.


Page 12393

  1         Me SAYERS (interprétation) :  Je crois, Monsieur,

  2   qu’une réception a eu lieu à l’occasion de Pâques, le 12

  3   avril 1993, au quartier général du HVO à laquelle ont

  4   participé le Colonel Blaskic, Monsieur Kordic et vous y

  5   étiez également ?

  6         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

  7         Me SAYERS (interprétation) :  Dans votre journal

  8   personnel, vous parlez de la présence du Président du HVO

  9   dont vous dites que vous ne vous rappelez pas son nom. 

 10   Mais au fil des années écoulées depuis, ce nom vous est-il

 11   revenu à l’esprit ?

 12         LE TÉMOIN (interprétation) :  Il pourrait s’agir

 13   de Valenta.  Je n’en suis pas sûr.  Je ne me rappelle pas.

 14         Me SAYERS (interprétation) :  Très bien !

 15         LE TÉMOIN (interprétation) :  J’utilise

 16   l’expression « Président du HVO » probablement parce que je

 17   n’ai aucune certitude à ce sujet.

 18         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Les

 19   interprètes, Me Sayers, vous demandent de bien vouloir

 20   ralentir votre débit.

 21         Me SAYERS (interprétation) :  Oui, Monsieur le

 22   Président, je n’y manquerai pas.

 23         Vous n’y êtes pour rien, Colonel.  C’est moi le

 24   responsable.  On me le reproche souvent.  Vous rappelez-

 25   vous un attentat contre Darko Kraljevic non loin de


Page 12394

  1   Kruscica le 13 avril 1993 ?

  2         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je ne crois pas me

  3   rappeler ce fait.

  4         Me SAYERS (interprétation) :  Eh bien, parlons

  5   maintenant de l’événement suivant, à savoir l’enlèvement

  6   des quatre responsables du HVO non loin de Novi Travnik par

  7   des Mujahedins membres de la 7e brigade musulmane.  Vous

  8   avez été informé de cet incident, n’est-ce pas ?

  9         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 10         Me SAYERS (interprétation) :  Vous avez protesté

 11   auprès de Monsieur l’Ambassadeur Thebault quant à ce que

 12   vous conceviez comme une tentative avortée de la part de

 13   l’ECMM d’enquêter à ce sujet et de résoudre le problème,

 14   n’est-ce pas ?

 15         LE TÉMOIN (interprétation) :  Si c’est bien

 16   l’incident auquel je pense, j’ai proposé des véhicules à

 17   l’ECMM qui a refusé d s’en servir et j’ai dû récupérer ces

 18   véhicules moi-même.  Je crois que c’est probablement de

 19   cela qu’il s’agit.  J’étais très en colère.

 20         Me SAYERS (interprétation) :  En fait, dans votre

 21   journal personnel, à la date du 15 avril, vous relatez,

 22   Monsieur, que vous avez exigé une explication pour

 23   justifier cette conduite extraordinaire de la part de

 24   l’ECMM et que vous avez pris des mesures importantes auprès

 25   des responsables de Novi Travnik, n’est-ce pas ?


Page 12395

  1         LE TÉMOIN (interprétation) :  C’est exact et le

  2   comportement extraordinaire était un comportement non

  3   professionnel face aux problèmes.

  4         Me SAYERS (interprétation) :  Vous les avez mis

  5   dans la situation où ils ont dû demander l’intervention des

  6   forces britanniques pour s’extraire de Novi Travnik, n’est-

  7   ce pas ?

  8         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui, Monsieur.

  9         Me SAYERS (interprétation) :  Vous rappelez-vous

 10   que les musulmans ont prétendu que l’ensemble de cet

 11   incident avait pour but de nuire à la réputation des forces

 12   musulmanes et notamment à celle de la 7e brigade

 13   musulmane ?

 14         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je ne me rappelle

 15   pas avec certitude.

 16         Me SAYERS (interprétation) :  Je demanderais que

 17   l’on vous montre le bulletin de renseignements militaires

 18   en date du 14 avril 1993, pièce à conviction D70/1.  Je

 19   demanderais à Monsieur l’Huissier de placer la page 2 sur

 20   le rétroprojecteur, le bas de la page.  « La section du

 21   renseignement fait observer que l’armée de Bosnie-

 22   Herzégovine prétend que cet incident lié à l’enlèvement est

 23   monté de toutes pièces par le HVO pour remettre en cause la

 24   réputation des forces musulmanes et notamment de la 7e

 25   brigade musulmane. »


Page 12396

  1         Cela vous rafraîchit la mémoire, Colonel, quant

  2   aux allégations proférées par les forces musulmanes ?

  3         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non.  Mais le seul

  4   commentaire que j’aurais à faire à ce sujet consiste à dire

  5   qu’à mon avis, ces hommes ont été enlevés par des

  6   Mujahedins.  Il n’y avait aucun montage.  Voilà le

  7   commentaire que je souhaite faire mais je n’ai aucune

  8   certitude, aucune connaissance certaine.

  9         Me SAYERS (interprétation) :  Très bien, Colonel. 

 10   C’est tout à fait exact.  Saviez-vous que ces hommes ont

 11   ensuite été libérés suite à l’intervention d’une force HVO

 12   et armée de Bosnie-Herzégovine agissant conjointement ? 

 13   Cela s’est passé après la fin de votre mission, le 19 mai

 14   1993, mais avez-vous été informé de cela ?

 15         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je me rappelle cela,

 16   oui.

 17         Me SAYERS (interprétation) :  Merci. 

 18         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Vous en avez

 19   fini sur ce point ?

 20         Me SAYERS (interprétation) :  L’incident suivant,

 21   Colonel, si je ne m’abuse, s’est produit le matin du 15

 22   avril 1993, date de l’enlèvement du Commandant Zivko Totic

 23   et de l’exécution de ses gardes du corps ainsi que du

 24   meurtre d’un passant.  Vous vous rappelez cet incident, je

 25   pense ?


Page 12397

  1         LE TÉMOIN (interprétation) :  Ce n’était pas une

  2   exécution.  C’était un meurtre en bonne et due forme. 

  3   C’était une attaque destinée à mettre la main sur Totic au

  4   cours de laquelle ils étaient prêts à tuer tous ceux qui se

  5   trouvaient sur le chemin et ils ont tué les gardes du corps

  6   et un passant.  Je me rappelle cet incident, effectivement

  7   mais je n’étais pas présent.

  8         Me SAYERS (interprétation) :  Avez-vous reçu des

  9   rapports de vos soldats qui ont été témoins des

 10   conséquences de cet incident ?

 11         LE TÉMOIN (interprétation) :  J’ai été impliqué

 12   personnellement dans les conséquences de cet incident car

 13   j’ai été convoqué par l’ambassadeur dirigeant l’ECMM suite

 14   à cet incident qui m’a demandé d’aller immédiatement à

 15   Zenica, ce que je ne souhaitais pas faire à l’époque, et

 16   l’ambassadeur dirigeant de l’ECMM a eu recours à son

 17   pouvoir politique pour m’informer qu’il souhaitait que je

 18   m’y rende, ce que j’ai fait malgré mes réticences.

 19         Je savais qu’un tel geste pouvait être un

 20   catalyseur à ce moment-là qui risquait de provoquer de

 21   graves problèmes.

 22         Me SAYERS (interprétation) :  Merci, Colonel. 

 23   Vous avez témoigné en disant quel était votre point de vue

 24   quant à l’importance de l’enlèvement de Totic.  Je cite les

 25   pages 23798, 23826, 23827 et 23878 de votre déposition. 


Page 12398

  1   Nous n’avons pas besoin d’y revenir dans le détail,

  2   Monsieur.  Mais en tout cas, vous vous êtes rendu

  3   directement à Zenica en provenance de Travnik, si je ne

  4   m’abuse, en utilisant une route de montagne dès lors que

  5   l’ambassadeur responsable de l’ECMM vous a demandé de vous

  6   y rendre ?

  7         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je ne sais pas si

  8   c’était une route de montagne ou une route de vallée mais

  9   je m’y suis rendu très rapidement.

 10         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Un point,

 11   Colonel.  Pouvez-vous nous aider sur ce point ?  Combien de

 12   temps fallait-il pour se rendre de Vitez à Zenica par les

 13   différentes routes disponibles ?

 14         LE TÉMOIN (interprétation) :  Monsieur le

 15   Président, je pense qu’il fallait à peu près une demi-

 16   heure.  Cela pouvait dépendre un petit peu du véhicule

 17   utilisé.  Mais si l’on utilisait la route qui traversait la

 18   vallée, le voyage pouvait même être un peu plus rapide. 

 19   Tout dépendait de la situation et du véhicule utilisé.

 20         Me SAYERS (interprétation) :  En tout cas, vous ne

 21   vous rappelez pas si le 15, vous êtes allé à Zenica en

 22   utilisant la route de montagne ou la route de la vallée,

 23   n’est-ce pas ?

 24         LE TÉMOIN (interprétation) :  J’essaie de

 25   réfléchir et j’aurais une petite préférence pour la route


Page 12399

  1   qui traverse la vallée.

  2         Me SAYERS (interprétation) :  Bien, en tout cas,

  3   lorsque vous êtes arrivé à Zenica, la conférence avait

  4   commencé, le Colonel Merdan y participait pour les

  5   musulmans, si je ne m’abuse, et vous lui avez dit estimer

  6   que cet enlèvement était absolument inacceptable, n’est-ce

  7   pas ?

  8         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

  9         Me SAYERS (interprétation) :  Lui vous a dit que

 10   la partie musulmane ne pouvait pas être blâmée pour cet

 11   incident ?

 12         LE TÉMOIN (interprétation) :  Ce n’est pas tout à

 13   fait ça. 

 14         Me SAYERS (interprétation) :  Mais en tout cas, il

 15   a nié être responsable de cet incident ?

 16         LE TÉMOIN (interprétation) :  Il a nié le fait que

 17   des soldats sous son commandement en aient été

 18   responsables.

 19         Me SAYERS (interprétation) :  Il a déclaré que

 20   cette question relevait des autorités civiles et pas de

 21   l’armée, n’est-ce pas ?

 22         LE TÉMOIN (interprétation) :  En effet.

 23         Me SAYERS (interprétation) :  Et disons, pour être

 24   très simple et très bref, que vous n’avez pas été

 25   convaincu, n’est-ce pas ?


Page 12400

  1         LE TÉMOIN (interprétation) :  C’est le moins qu’on

  2   puisse dire.

  3         Me SAYERS (interprétation) :  Avez-vous su que le

  4   Commandant Totic a ensuite été libéré par la partie

  5   musulmane le 19 mai de la même année dans le cadre de la

  6   libération des quatre officiers du HVO ?

  7         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui, j’en ai été

  8   informé.

  9         Me SAYERS (interprétation) :  Dans votre journal

 10   personnel, à la date du 15 avril, vous dites estimer que

 11   les combats du lendemain matin étaient directement liés à

 12   Totic et en fait, c’est ce que le représentant du HVO avait

 13   déclaré dans la soirée du 15, n’est-ce pas ?

 14         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 15         Me SAYERS (interprétation) :  Il y avait eu

 16   éruption de la violence ce soir-là qui s’était répandue

 17   dans l’est de la vallée de la Lasva si je ne m’abuse ?

 18         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je ne me rappelais

 19   pas exactement mais je suis d’accord que c’est le

 20   représentant du HVO qui en a parlé à ce moment-là.

 21         Me SAYERS (interprétation) :  Et vous étiez

 22   d’accord avec le point de vue exprimé par lui,

 23   n’est-ce pas ?

 24         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je ne me rappelle

 25   pas exactement quel était ce point de vue mais si ce point


Page 12401

  1   de vue consistait à dire que l’incident allait provoquer

  2   des difficultés, créer des problèmes et que les combats

  3   allaient s’élargir, je suis prêt à admettre ce fait.

  4         Me SAYERS (interprétation) :  Très bien.  Je crois

  5   que vous avez passé toute la soirée à Zenica après la fin

  6   de la conférence présidée par l’ambassadeur à la tête de

  7   l’ECMM ?

  8         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.  J’y suis resté

  9   jusqu’à une heure tardive.

 10         Me SAYERS (interprétation) :  Le lendemain matin,

 11   vous avez reçu, je crois, un renseignement de votre

 12   commandant adjoint, qui était le Commandant Watters à

 13   l’époque, à 5 h 30 du matin environ.  Il vous a parlé de

 14   l’explosion de la violence dans les environs de la vallée

 15   de la Lasva, n’est-ce pas ?

 16         LE TÉMOIN (interprétation) :  Absolument.

 17         Me SAYERS (interprétation) :  Vous avez pris la

 18   décision de retourner rapidement à Vitez pour y arriver le

 19   plus rapidement possible le matin du 16 ?

 20         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 21         Me SAYERS (interprétation) :  Vous rappelez-vous

 22   que vous avez pris le chemin de Vitez à partir de Zenica

 23   aux environs de 7 h 15, 7 h 30 du matin ?

 24         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 25         Me SAYERS (interprétation) :  C’est-à-dire au


Page 12402

  1   moment où le jour se levait ?

  2         LE TÉMOIN (interprétation) :  Eh bien, j’étais

  3   seul, je voulais partir à 5 h 30 mais il y avait des

  4   risques importants pour moi à une heure si tôt le matin.

  5         Me SAYERS (interprétation) :  Très bien !

  6         LE TÉMOIN (interprétation) :  D’ailleurs, le

  7   numéro 2 de mon commandement m’a donné l’ordre de ne pas

  8   partir avant le lever du jour.

  9         Me SAYERS (interprétation) :  Je crois que vous

 10   avez utilisé la route de montagne pour retourner à Vitez

 11   suite à la réception du rapport relatif à des combats

 12   importants qui avaient éclaté dans la région.  Vous avez

 13   dit à Monsieur le Juge Shahabuddeen en page 23857 du compte

 14   rendu d’audience que vous avez effectué ce voyage très

 15   rapidement.  En fait, vous avez essayé de regagner Vitez le

 16   plus rapidement possible, n’est-ce pas ?

 17         LE TÉMOIN (interprétation) :  C’est exact.

 18         Me SAYERS (interprétation) :  Il n’y a pas mention

 19   dans votre journal personnel du fait que quelqu’un se soit

 20   joint à vous pour ce voyage le 16 avril ?  Je vous

 21   demanderais de consulter votre journal.

 22         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non, je n’ai pas

 23   besoin de le consulter.  Sur le chemin du retour, sur la

 24   route de montagne, il est certain que personne n’est monté

 25   à bord de mon véhicule avec moi ce matin-là.  Il y avait


Page 12403

  1   trois champs de mines à traverser, plusieurs barrages

  2   routiers à franchir et je n’ai certainement demandé à

  3   personne de m’accompagner.  En fait, je craignais pour ma

  4   vie pendant tout le voyage.

  5         Me SAYERS (interprétation) :  Lorsque vous avez

  6   atteint Vitez, Monsieur, il était à peu près 9 h 00 du

  7   matin, n’est-ce pas ?

  8         LE TÉMOIN (interprétation) :  Peut-être même un

  9   peu plus tôt.

 10         Me SAYERS (interprétation) :  Vous êtes allé au

 11   quartier général du HVO pour voir le Colonel Blaskic,

 12   n’est-ce pas ?

 13         LE TÉMOIN (interprétation) :  J’ai cherché à voir

 14   presque immédiatement le Colonel Blaskic.

 15         Me SAYERS (interprétation) :  Vous n’avez pas

 16   réussi à le trouver, n’est-ce pas ?

 17         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non, parce qu’il

 18   n’était pas là.

 19         Me SAYERS (interprétation) :  Serait-il permis de

 20   dire, Colonel, que vous n’avez fait aucun effort à quelque

 21   moment que ce soit pour rencontrer Monsieur Kordic ou

 22   l’appeler au téléphone le 16 avril dans la matinée ?

 23         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je pense qu’il est

 24   tout à fait permis de le dire.  Effectivement, je n’ai pas

 25   effectué de telles tentatives.


Page 12404

  1         Me SAYERS (interprétation) :  Monsieur, vous

  2   n’avez pas réussi à trouver le Colonel Blaskic.  Je crois

  3   qu’à ce moment-là, vous avez repris la route de montagne,

  4   vous avez passé à Ahmici et c’est à ce moment-là que vous

  5   avez vu des maisons en feu et des corps éparpillés le long

  6   de la route, n’est-ce pas ?

  7         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non.  Je pense que

  8   j’ai utilisé la route de la vallée.  Voyez-vous, ce jour-

  9   là, j’ai été à Zenica deux ou trois fois.  Lorsque je suis

 10   arrivé à Vitez, j’étais à bord de mon véhicule Discovery et

 11   j’ai dû faire le voyage Vitez-Zenica le plus rapidement

 12   possible.  En fait, je crois avoir emprunté la route de la

 13   vallée et j’ai vu de nombreux corps éparpillés sur la route

 14   au cours de mon voyage.  Je pense qu’une patrouille du HVO

 15   a d’ailleurs utilisé un lance-roquette multiple pour tirer

 16   sur moi.

 17         Me SAYERS (interprétation) :  Voyons s’il est

 18   possible de vous rafraîchir la mémoire puisque apparemment,

 19   vous semblez ne pas vous rappeler très bien.

 20         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui, cela peut

 21   m’aider.

 22         Me SAYERS (interprétation) :  Eh bien, vous avez

 23   relaté dans le compte rendu d’audience de l’affaire Blaskic

 24   que le 16 avril, vous étiez passé aux abords du chalet

 25   suisse.  C’est le bâtiment que l’on appelle le bungalow qui


Page 12405

  1   se trouve à Nadioci.  Vous rappelez-vous cela ?

  2         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

  3         Me SAYERS (interprétation) :  Cela vous

  4   rafraîchit-il la mémoire si je vous dis que vous

  5   conduisiez…

  6         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Une seconde. 

  7   Est-ce qu’il s’agit de la route de montagne ou de la route

  8   de la vallée ?

  9         LE TÉMOIN (interprétation) :  De la route de la

 10   vallée, Monsieur.  Donc, c’est bien ce que j’ai dit, j’ai

 11   emprunté la route de la vallée.

 12         Me SAYERS (interprétation) :  Très bien !  Il est

 13   donc permis de dire que vous êtes passé devant Ahmici aux

 14   environs de 10 h 30 du matin le 16 avril 1993 ?

 15         LE TÉMOIN (interprétation) :  C’est tout à fait

 16   exact mais je ne me rappelle pas exactement l’heure.

 17         Me SAYERS (interprétation) :  Je suppose que vous

 18   saviez que le Lieutenant Dooley et un autre lieutenant

 19   étaient présents aux côtés de vos soldats à Ahmici le matin

 20   et l’après-midi du 16 avril ?

 21         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui, je l’ai su mais

 22   ils n’étaient pas à l’intérieur du village.  Ils étaient en

 23   périphérie du village.

 24         Me SAYERS (interprétation) :  Vous ont-ils dit

 25   qu’ils y ont trouvé un certain nombre de corps aux abords


Page 12406

  1   du cimetière, à l’est de Ahmici, entassés et qu’ils ont

  2   constaté que des allers et retours s’effectuaient de Ahmici

  3   jusqu’à l’hôpital de Travnik le 16 avril ?

  4         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je me rappelle

  5   qu’ils ont travaillé dans le secteur.  Je ne me rappelle

  6   pas s’ils m’ont parler de corps ou d’aller-retour de

  7   véhicules.

  8         Me SAYERS (interprétation) :  Très bien !  Mais

  9   avez-vous appris qu’ils avaient vu à peu près 50 corps sans

 10   vie dans le voisinage de Ahmici le 16 avril ?

 11         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non, je ne suis pas

 12   au courant.  Ce que je veux dire c’est que moi-même,

 13   j’avais vu 15 à 20 corps sans vie et que je n’étais pas en

 14   patrouille officiellement.  Donc, ils n’ont pas forcément

 15   fait mention du nombre, qui n’avait pas une très grande

 16   importance vu les événements. 

 17         C’est peut-être une façon un peu cruelle de

 18   s’exprimer mais ce fait n’avait pas une grande pertinence

 19   par rapport à ce que nous faisions.  Nous étions absolument

 20   abasourdis.  Donc, ils ne m’ont pas dit le nombre, non.

 21         Me SAYERS (interprétation) :  Très bien, Monsieur. 

 22   Passons maintenant au jour suivant.  Avez-vous appris que

 23   votre commandant adjoint avait, en fait, mené des

 24   négociations de cessez-le-feu à Vitez et qu’au cours de ces

 25   négociations, le Colonel Blaskic ainsi que le commandant


Page 12407

  1   local de l’armée de Bosnie-Herzégovine, de la 325e brigade

  2   de montage, Monsieur Sefkija Dzidic, avait participé à ces

  3   négociations ?

  4         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je ne me rappelle

  5   pas mais le fait aurait été tout à fait normal.  J’avais

  6   l’habitude de lui confier ce genre de tâches.

  7         Me SAYERS (interprétation) :  Très bien !  Vous

  8   rappelez-vous que deux négociateurs du HVO, membres de

  9   l’équipe de négociateurs, Monsieur Pilicic et Monsieur

 10   Prskalo, ont été la cible de balles tirées par des tireurs

 11   embusqués des forces de l’armée de Bosnie-Herzégovine à

 12   Stari Vitez ?

 13         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non.  J’aimerais me

 14   rappeler cela.  Mais ont-ils été tués ?

 15         Me SAYERS (interprétation) :  Je ne crois pas

 16   qu’ils aient été tués.

 17         LE TÉMOIN (interprétation) :  Bien !

 18         Me SAYERS (interprétation) :  Le point suivant sur

 19   le plan chronologique dont nous allons parler est la

 20   conversation que vous avez eue, je crois, avec le Colonel

 21   Blaskic le 18 avril 1993.  Vous rappelez-vous cette

 22   conversation, Monsieur ?

 23         LE TÉMOIN (interprétation) :  Est-ce qu’il s’agit

 24   de l’incident de Cajdras ?

 25         Me SAYERS (interprétation) :  Oui.


Page 12408

  1         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je me rappelle.

  2         Me SAYERS (interprétation) :  Il dit que cela

  3   s’est passé à Cajdras, n’est-ce pas ?

  4         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

  5         Me SAYERS (interprétation) :  Vous étiez sur les

  6   lieux, vous avez vu près de 1 000 réfugiés, vous leur avez

  7   parlé avec l’aide de votre interprète et du représentant du

  8   HCR, n’est-ce pas ?

  9         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.  J’étais

 10   perturbé de voir un si grand nombre de personnes réunies

 11   qui visiblement avaient été expulsées de leurs domiciles et

 12   je leur ai fait la promesse de les aider si je le pouvais.

 13         Me SAYERS (interprétation) :  Mais il suffira de

 14   dire, Monsieur, qu’il s’agissait de personnes déplacées, à

 15   votre avis, qui n’avaient pas quitté volontairement leurs

 16   domiciles, n’est-ce pas ?

 17         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non.  Visiblement,

 18   certaines de ces personnes avaient quitté leurs domiciles

 19   sous l’effet de la peur mais je pense qu’un grand nombre

 20   avaient été expulsées parce que je suis allé voir où ces

 21   personnes habitaient et leurs maisons étaient en feu. 

 22   Donc, la réponse est :  Je ne pense pas qu’elles aient

 23   quitté leurs maisons volontairement.

 24         Me SAYERS (interprétation) :  À votre avis, ces

 25   personnes ont été expulsées volontairement ou


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  1   involontairement par les forces musulmanes qui attaquaient

  2   les villages croates à partir de Zenica, n’est-ce pas ?

  3         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

  4         Me SAYERS (interprétation) :  Très bien !  En

  5   fait, Monsieur, y avait-il des forces musulmanes qui ont

  6   réagi après le 16 avril et l’un des aspects de ces

  7   représailles a visé des bâtiments du HVO, en fait, tous les

  8   bâtiments du HVO à Zenica ont été pris pour cibles par les

  9   forces musulmanes, n’est-ce pas ?

 10         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui, c’est exact.

 11         Me SAYERS (interprétation) :  Les deux sièges des

 12   brigades ont été encerclés, cernés et ont dû se rendre

 13   finalement aux représentants des brigades du HVO à Zenica,

 14   n’est-ce pas ?

 15         LE TÉMOIN (interprétation) :  Eh bien, Totic était

 16   parti, il avait disparu et nous nous inquiétions pour sa

 17   sécurité.  Les autres membres des brigades, vous avez

 18   raison, certains des membres de ces brigades étaient à

 19   Cajdras et je m’inquiétais pour eux également.

 20         Me SAYERS (interprétation) :  J’aimerais à présent

 21   que nous consacrions quelques minutes, Colonel, à l’examen

 22   des négociations qui se sont déroulées entre les

 23   commandants militaires au niveau national et les

 24   commandants au niveau local le 18 avril et par la suite. 

 25   Vous avez appris qu’un accord de cessez-le-feu avait été


Page 12410

  1   conclu entre les représentants politiques croates et les

  2   représentants politiques musulmans au plus haut niveau le

  3   18 avril, accord signé par le Président Boban pour la

  4   Communauté croate de Herceg-Bosna et le Président

  5   Izetbegovic pour la partie musulmane, n’est-ce pas ?

  6         LE TÉMOIN (interprétation) :  Eh bien, à

  7   l’instant, je ne me rappelle pas mais cela semble possible.

  8         Me SAYERS (interprétation) :  Pour les Juges, je

  9   signale que nous avons la pièce à conviction D83/1 à

 10   l’appui de ces dires.

 11         Colonel, vous rappelez-vous que suite à cet accord

 12   unilatéral de cessez-le-feu, un ordre a été émis par le

 13   commandant en chef des forces militaires du HVO, le Général

 14   de brigade Milivoj Petkovic, le 18 avril 1993 ?

 15         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je ne sais pas.  Le

 16   problème est toujours le même, à savoir que ce qui se passe

 17   au sommet de l’échelle n’atteint pas toujours le bas de

 18   l’échelle et, en fait, j’ai vu des cas où les Croates

 19   bosniaques, c’est-à-dire les membres du HVO et les forces

 20   musulmanes bosniaques, affirmaient ne pas accepter des

 21   ordres venant d’en haut lorsque ces ordres concernaient

 22   leur localité, comme chacun ici peut le comprendre.

 23         Me SAYERS (interprétation) :  Je me rends bien

 24   compte, Colonel, mais en fait, une tentative a été faite,

 25   je crois, et vous avez participé à cette tentative pour


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  1   faire en sorte que les ordres venant d’en haut, si nous

  2   pouvons nous exprimer ainsi, descendent jusqu’au niveau le

  3   plus bas de la hiérarchie.  Des visites sur le terrain ont

  4   été organisées par les deux commandants, le Général

  5   Hadzihasanovic et le Général Petkovic, à la fin du mois

  6   d’avril, n’est-ce pas ?

  7         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui, et je les ai

  8   accompagnés moi-même.

  9         Me SAYERS (interprétation) :  En fait, ces visites

 10   ont été assez efficaces, n’est-ce pas ?  Les ordres ont

 11   finalement atteint le bas de l’échelle hiérarchique, le bas

 12   de la hiérarchie ?

 13         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 14         Me SAYERS (interprétation) :  Reprenons l’ordre

 15   chronologique.  Vous rappelez-vous que des négociations de

 16   haut niveau se sont tenues à Zenica le 20 avril 1993 entre

 17   le Général de brigade Petkovic et le Colonel Blaskic qui

 18   représentaient la partie croate et le Général Halilovic et

 19   le Général Hadzihasanovic qui représentaient la partie

 20   musulmane ?

 21         LE TÉMOIN (interprétation) :  Était-ce les

 22   négociations auxquelles a participé le Général Morillon qui

 23   était présent également ?

 24         Me SAYERS (interprétation) :  Je crois qu’il

 25   s’agissait de Monsieur l’Ambassadeur Thebault.


Page 12412

  1         LE TÉMOIN (interprétation) :  Ah oui, je me

  2   rappelle.

  3         Me SAYERS (interprétation) :  En fait, le Général

  4   de brigade Petkovic vous avait demandé, selon ce qui est

  5   stipulé dans votre journal personnel, de trouver de Colonel

  6   Blaskic et vous avez donné votre accord, n’est-ce pas ?

  7         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui, je pense que

  8   c’est exact.

  9         Me SAYERS (interprétation) :  Est-il permis de

 10   dire que Monsieur Kordic n’a à aucun moment été impliqué

 11   dans ces négociations ?

 12         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui, en effet, c’est

 13   exact.

 14         Me SAYERS (interprétation) :  Une nouvelle fois,

 15   je vous demande si personne ne vous avait demandé de

 16   participer ou n’avait pensé que votre participation à ces

 17   négociations était importante, n’est-ce pas ?

 18         LE TÉMOIN (interprétation) :  En effet.

 19         Me SAYERS (interprétation) :  Personne du côté

 20   musulman ou du côté croate ou du côté des organisations

 21   internationales présentes ou des organismes militaires

 22   présents n’a prétendu que la présence de Monsieur Kordic

 23   était nécessaire d’une quelconque façon, n’est-ce pas ?

 24         LE TÉMOIN (interprétation) :  C’est exact.

 25         Me SAYERS (interprétation) :  En fait, Monsieur,


Page 12413

  1   vous rappelez-vous que l’accord officiel signé par le

  2   Général de brigade Petkovic et par le Général Halilovic l’a

  3   été le 20 avril ?

  4         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je ne me rappelle

  5   pas.  Je me rappelle que Morillon était présent.  Je me

  6   rappelle cette journée.  J’étais furieux parce que j’avais

  7   passé la plus grande partie de la journée à essayer de

  8   retrouver le Général Morillon qui ne cessait de

  9   disparaître.  C’était toute une histoire.

 10         Me SAYERS (interprétation) :  J’aimerais que l’on

 11   vous présente la pièce D24/1.  Nous pouvons la placer sur

 12   le rétroprojecteur.  Je ne sais pas d’ailleurs si elle est

 13   indispensable mais je pensais vous poser une question à ce

 14   sujet pour vous rafraîchir la mémoire éventuellement au

 15   sujet du fait que l’accord a été signé le 20 avril par les

 16   deux hommes dont je viens de parler et contresigné par le

 17   Général Morillon et l’Ambassadeur Thebault.  Pouvez-vous

 18   regarder la page 2, celle où figurent les signatures ?

 19         LE TÉMOIN (interprétation) :  Ah oui, pas de

 20   problème.

 21         Me SAYERS (interprétation) :  Très bien.  Dans

 22   votre livre, en page 293, vous affirmez que ces deux

 23   commandants militaires étaient les deux hommes qui étaient

 24   les commandants de plus haut rang, n’est-ce pas ?

 25         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.


Page 12414

  1         Me SAYERS (interprétation) :  Très bien !  Merci,

  2   Monsieur l’Huissier. 

  3         Passons maintenant à la journée du 21 avril.  Je

  4   crois que de nouvelles négociations se sont déroulées au

  5   niveau local entre le Colonel Blaskic et le Colonel Merdan

  6   le lendemain à votre quartier général de Vitez.  Vous

  7   rappelez-vous cela ?

  8         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

  9         Me SAYERS (interprétation) :  Très bien !  Il

 10   n’est pas contestable que…

 11         LE TÉMOIN (interprétation) :  Elles ne se sont pas

 12   déroulées à mon quartier général.  C’était dans le bâtiment

 13   de l’ECMM non loin de ma base et Petkovic était présent

 14   ainsi que Halilovic.

 15         Me SAYERS (interprétation) :  Ces négociations se

 16   sont déroulées entre les deux commandants locaux, le

 17   Colonel Blaskic et le Colonel Merdan, mais le Général de

 18   brigade Petkovic pour le HVO et le Général Halilovic pour

 19   l’armée de Bosnie-Herzégovine supervisaient leurs efforts,

 20   n’est-ce pas ?

 21         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui, c’est exact.

 22         Me SAYERS (interprétation) :  Très bien !  N’est-

 23   il pas exact que le 21 avril 1993, selon l’évaluation faite

 24   par l’armée britannique, le HVO a été engagé dans des

 25   opérations militaires dues aux brigades de l’armée de


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  1   Bosnie-Herzégovine et que le 3e corps d’armée s’est trouvé

  2   en position dominante sur le plan militaire dans la vallée

  3   de la Lasva, au nord de la vallée ?

  4         LE TÉMOIN (interprétation) :  C’est ce que j’ai

  5   estimé à ce moment-là effectivement.

  6         Me SAYERS (interprétation) :  Très bien !  Nous

  7   appelons l’attention des Juges de cette Chambre sur la

  8   pièce Z776 qui est un bulletin de renseignements militaires

  9   daté du 21 avril 1993 qui précise l’observation qui vient

 10   d’être faite en page 2.

 11         Maintenant, Colonel, passons à la journée du 22

 12   avril et au jour suivant.  Est-il permis de dire qu’un

 13   grand nombre de représentants de la presse et

 14   d’organisations internationales se sont rendus dans la

 15   région à cette date-là au cours de nombreuses visites ?

 16         LE TÉMOIN (interprétation) :  Pas avant la

 17   découverte du massacre de Ahmici.  De toute façon, la

 18   période était atroce et je pense qu’un grand nombre de

 19   représentants de la presse ont visité la région à ce

 20   moment-là.

 21         Me SAYERS (interprétation) :  Très bien !  Vous

 22   avez conduit les ambassadeurs de trois pays membres du

 23   Conseil de Sécurité dans une visite de Ahmici à la fin du

 24   mois d’avril, n’est-ce pas ?

 25         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.


Page 12416

  1         Me SAYERS (interprétation) :  Vous avez aussi

  2   rencontré deux enquêteurs du Centre des Nations unies pour

  3   les Droits de l’Homme ?

  4         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.  Osario

  5   notamment.

  6         Me SAYERS (interprétation) :  Ils avaient été

  7   envoyés sur les lieux suite à votre demande d’enquête au

  8   sujet des événements atroces de Ahmici, n’est-ce pas ?

  9         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 10         Me SAYERS (interprétation) :  Est-il permis de

 11   dire, Monsieur, que dans votre évaluation, dans

 12   l’évaluation de l’armée britannique, celle-ci n’avait pas

 13   les moyens ou l’expérience nécessaires pour procéder à une

 14   enquête de médecine légale du type que vous considériez

 15   nécessaire ?

 16         LE TÉMOIN (interprétation) :  Absolument. 

 17   S’agissant de mon bataillon, nous étions un bataillon de

 18   combat, nous n’avions pas d’unité de police mais l’armée

 19   britannique aurait pu avoir le savoir-faire nécessaire mais

 20   n’était pas représentée sur le terrain.

 21         Me SAYERS (interprétation) :  Vous avez adressé

 22   une demande au Centre des Nations unies pour les Droits de

 23   l’Homme en lui demandant son aide et deux enquêteurs vous

 24   ont été envoyés, n’est-ce pas ?

 25         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je ne suis pas sûr


Page 12417

  1   que la demande émanait de moi mais je pense qu’ils sont

  2   venus de leur propre gré.

  3         Me SAYERS (interprétation) :  Au cours de votre

  4   première visite à Ahmici le 22 avril, avez-vous

  5   effectivement dit à la Chambre d’instance chargée du procès

  6   Blaskic que vous vous rappeliez des concentrations

  7   importantes de soldats de l’armée de Bosnie-Herzégovine

  8   dans les collines surmontant Ahmici, que l’environnement

  9   était dangereux ?  Vous rappelez-vous cela ?

 10         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.  Ce n’était pas

 11   des concentrations importantes car les groupes se

 12   composaient au maximum de 20 hommes mais voyez-vous, une

 13   concentration importante vous fait penser à une centaine

 14   d’hommes ou plus.  Mais enfin, il y avait un certain nombre

 15   de soldats sur les collines entourant le village de Ahmici,

 16   suffisamment pour que je me rappelle l’existence d’une

 17   ligne de défense.

 18         Me SAYERS (interprétation) :  Très bien ! 

 19   J’appelle l’attention des Juges de cette Chambre sur la

 20   page 23757 du compte rendu d’audience dans l’affaire

 21   Blaskic où vous dites – je cite : « À ce moment-là, il y

 22   avait des concentrations importantes de soldats de l’armée

 23   de Bosnie-Herzégovine sur les collines. »  Fin de citation. 

 24   Mais vous vous êtes expliqué, je crois, quant à la

 25   signification de cette expression.


Page 12418

  1         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.  Vous m’avez eu

  2   là.  Ce que je voulais dire c’est qu’il y avait des groupes

  3   d’une vingtaine d’hommes environ.

  4         Me SAYERS (interprétation) :  Très bien !  Et

  5   c’est à votre retour de cette visite à Ahmici… étiez-vous

  6   avec les ambassadeurs des pays membres du Conseil de

  7   Sécurité lorsque vous avez écrit votre lettre au Colonel

  8   Blaskic ?

  9         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.  J’aimerais

 10   m’expliquer sur ce point car les choses sont un peu

 11   complexes.  Monsieur le Président, Monsieur le Juge, Jean-

 12   Pierre Thebault m’avait demandé de faire cesser les combats

 13   et il a plaidé auprès de moi pour que je le fasse moi-même,

 14   que je n’envoie pas un représentant à ma place.  Cela s’est

 15   passé le matin du 22 avril.

 16         Je n’avais aucune réticence, d’ailleurs, car

 17   j’avais tout un bataillon sous mon commandement et je

 18   n’étais pas simplement à Vitez.  Je pouvais étendre mes

 19   activités jusqu’à Tuzla.  Mais j’ai fait ce que l’on m’a

 20   demandé.  J’ai emmené un groupe d’hommes ainsi qu’un

 21   certain nombre de blindés suffisant pour assurer notre

 22   protection, des chars légers, un véhicule de journaliste et

 23   j’étais tenu de respecter les instructions du bataillon

 24   britannique.  Mais j’ai fait pour la presse tout ce que je

 25   pouvais faire. 


Page 12419

  1         J’ai emmené ce convoi le long de la route de

  2   montagne jusqu’au sommet de la montagne et en chemin, j’ai

  3   déjà procédé à des négociations au niveau de deux barrages

  4   routiers.  L’un était un barrage du HVO en bas et l’autre,

  5   un barrage de l’armée de Bosnie-Herzégovine pratiquement au

  6   sommet de la colline.

  7         Ensuite, nous avons suivi la crête sur la colline

  8   entre Zenica et la vallée de la Lasva ou Vitez et je

  9   m’arrêtais chaque fois que nous rencontrions un nombre

 10   important de soldats, de 20 soldats ou plus.  Je descendais

 11   de mon véhicule, je parlais à ces soldats, je leur disais

 12   qu’il fallait arrêter les combats.  En toute équité – je

 13   m’en souviens à présent que j’y repense – il y avait un

 14   commandant musulman qui était très agressif, l’un de ceux

 15   que nous avons rencontrés.  Je lui ai dit qu’il devait se

 16   taire et faire ce que nous disions, c’est-à-dire cesser les

 17   combats.

 18         Pardonnez-moi d’être aussi explicite.  Mais la

 19   majorité des gens que nous rencontrions avaient très peur. 

 20   Mais ce qui m’a motivé surtout c’est que des soldats, de

 21   simples soldats criaient lorsqu’ils nous rencontraient et

 22   ils nous disaient qu’ils ne pouvaient pas cesser les

 23   combats dans le village de Ahmici où il y avait des femmes

 24   et des enfants qui avaient été tués par le HVO.

 25         Je leur ai dit : « Le HVO ne peut pas avoir fait


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  1   cela.  Ce n’est pas le HVO.  C’est impossible.  Les membres

  2   du HVO sont des êtres humains, ils n’auraient pas pu agir

  3   de la sorte. »  Eux insistaient pour dire qu’ils ne

  4   pouvaient pas cesser les combats tant qu’ils ne

  5   connaîtraient pas la vérité et je leur ai dit que je

  6   découvrirais la vérité.

  7         Donc, je suis redescendu de la colline en

  8   traversant les lignes encore une fois.  J’ai traversé en

  9   voiture le village de Ahmici, un endroit où je n’étais

 10   jamais allé jusque là parce qu’il n’était pas près de la

 11   route.  J’ai donc traversé le village de Ahmici qui

 12   ressemblait pratiquement à un cimetière.  L’endroit était

 13   totalement désert.  Il n’y avait plus personne. 

 14   Pratiquement toutes les maisons avaient été détruites.  Le

 15   minaret de la mosquée, comme vous le savez, avait été

 16   démoli et l’endroit ressemblait… le minaret ressemblait à

 17   une fusée pointée vers l’espace.  Il y avait des chiens

 18   morts, des animaux morts un peu partout.

 19         Aujourd’hui, on sait ce qui s’est passé.  Mes

 20   soldats ont trouvé de très nombreux corps sans vie.  Mais

 21   je n’ai pas immédiatement vu des preuves de l’existence de

 22   ces corps sans vie sur le moment et, d’ailleurs, j’en

 23   remercie le ciel.  J’ai donc traversé le village en voiture

 24   et j’ai commencé à monter vers la vallée.  C’est un village

 25   dont les maisons sont alignées et une route unique traverse


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  1   le village.

  2         Pratiquement au sommet de la colline, je suis

  3   descendu de mon véhicule et j’ai dit à mes soldats qu’il

  4   fallait qu’ils fouillent tout le village jusqu’à la vallée

  5   pour voir s’il n’y avait pas des femmes et des enfants tués

  6   et d’ailleurs, j’ai redescendu la route moi-même. 

  7         À un tiers du chemin, à un tiers de notre

  8   traversée du village, des soldats m’ont appelé.  Ils

  9   étaient malades et d’ailleurs, je le comprends très bien. 

 10   Nous avions découvert les premières maisons en feu et nous

 11   avions vu dans la première maison des corps massacrés.  En

 12   fait, je connaissais la maison des Ahmic et j’y ai vu le

 13   corps d’un homme et d’un petit garçon dont les vêtements

 14   étaient calcinés devant l’entrée mais il y avait encore

 15   pire à découvrir par la suite parce que derrière la maison,

 16   dans la cave, nous avons vu ce qui manifestement était le

 17   corps de quatre bébés, les restes de deux femmes également

 18   et les soldats qui étaient présents n’ont pas pu supporter

 19   le spectacle.

 20         C’est à ce moment-là que je me suis rendu compte

 21   que ce que les soldats des collines m’avaient dit était

 22   exact.  J’avais des représentants de la BBC avec moi et de

 23   ITV également, Martin Bell, qui est un correspondant de la

 24   BBC très connu et aujourd’hui député.  Ils ont filmé tout

 25   ce qu’ils ont vu.  Je ne pouvais pas en croire mes yeux. 


Page 12422

  1   Ensuite, nous avons trouvé d’autres preuves montrant que

  2   des gens avaient été assassinés.

  3         Voilà ce qui s’est passé ce jour-là.  Je n’étais

  4   pas certain de l’identité de ceux qui avaient commis ces

  5   actes à ce moment-là mais je savais que c’était un crime

  6   contre l’humanité et j’ai décidé de faire tout ce qui était

  7   en mon pouvoir pour faire en sorte que l’opinion soit

  8   informée.  Voilà !  Je regrette que la réponse ait été

  9   aussi longue.

 10         Me SAYERS (interprétation) :  Merci, mon Colonel. 

 11   Donc, une des premières choses que vous ayez faites lorsque

 12   vous êtes retourné à votre base, c’est d’écrire une lettre

 13   au Colonel Blaskic le 22 avril 1993, n’est-ce pas ?

 14         LE TÉMOIN (interprétation) :  J’ai également

 15   essayé de le contacter par téléphone.

 16         Me SAYERS (interprétation) :  La lettre a reçu la

 17   cote D63/1.  Inutile de vous la faire authentifier.  Donc,

 18   vous avez dit que le Colonel Blaskic vous a immédiatement

 19   répondu en disant qu’il était prêt à envoyer une commission

 20   d’enquête conjointe à Ahmici ?

 21         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je ne me souviens

 22   pas avoir reçu cette lettre mais je suis tout à fait prêt à

 23   admettre le fait qu’effectivement, nous ayons reçu cette

 24   lettre le lendemain, le 23 avril.  Je ne souhaite pas

 25   contester ce fait.


Page 12423

  1         Me SAYERS (interprétation) :  Bien !  Nous

  2   traiterons de cet échange de lettres au sujet de l’enquête

  3   dans la dernière partie de mon contre-interrogatoire mais

  4   si vous le permettez, je vais continuer en suivant la

  5   chronologie.

  6         Vous avez précédemment identifié Monsieur Akhavan

  7   et Monsieur Osario.  Vous nous avez dit qu’il s’agissait là

  8   des deux enquêteurs qui sont arrivés sur place et qui

  9   étaient envoyés par le Centre des Nations unies pour les

 10   Droits de l’Homme.  En fait, ils sont devenus vos

 11   principales sources sur ce qui s’était produit à Ahmici ? 

 12   C’est eux qui vous ont fourni des faits, n’est-ce pas ?

 13         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 14         Me SAYERS (interprétation) :  À votre avis, ils

 15   ont mené une enquête criminelle en bonne et due forme ?

 16         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non, non.  À mon

 17   avis, ce n’était pas des personnes qualifiées pour le

 18   faire.  Ils ne disposaient pas des moyens pour le faire. 

 19   Ils ont recueilli les témoignages, les déclarations des

 20   gens.  Nous, nous étions sur place.  Nous nous efforcions

 21   de découvrir ce qui s’était produit.  Ainsi, par exemple,

 22   sur la base de ce qu’ils nous avaient dit, ces deux hommes,

 23   nous sommes allés dans la maison numéro 7 à Ahmici et nous

 24   avons trouvé des corps, de nouveaux corps, des corps

 25   d’enfants.  Nous avons trouvé une famille.


Page 12424

  1         Donc, si je me souviens bien, ils n’étaient pas là

  2   pour lancer une enquête qui mènerait à un procès.  Ils

  3   étaient là pour rédiger un rapport.  Mais je me trompe

  4   peut-être.

  5         Me SAYERS (interprétation) :  Vous savez que

  6   Monsieur Osario et Monsieur Akhavan ont interrogé un grand

  7   nombre de victimes sur ce qui s’est passé à Ahmici.  Ils

  8   l’ont fait à Zenica, n’est-ce pas ?

  9         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui, oui, ainsi,

 10   d’ailleurs, que les représentants du CICR.

 11         Me SAYERS (interprétation) :  On vous a informé

 12   que les noms de suspects ont été réunis dès le 4 mai 1993

 13   et vous avez obtenu de ces personnes, de ces deux hommes,

 14   les noms de ces suspects ?

 15         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 16         Me SAYERS (interprétation) :  Vous avez décidé de

 17   ne pas donner ces noms au Colonel Blaskic, ni au HVO,

 18   n’est-ce pas ?

 19         LE TÉMOIN (interprétation) :  C’est exact.

 20         Me SAYERS (interprétation) :  Cette décision

 21   figure dans votre journal à la date du 4 mai 1993, n’est-ce

 22   pas ?

 23         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 24         Me SAYERS (interprétation) :  Bien ! 

 25         LE TÉMOIN (interprétation) :  Et la raison est


Page 12425

  1   tout à fait évidente.

  2         Me SAYERS (interprétation) :  Vous en avez conclu

  3   que vous ne pouviez pas faire confiance au Colonel Blaskic

  4   et lui confier ces informations ?

  5         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non.  J’ai conclu

  6   qu’il se pouvait que ces hommes disparaissent.

  7         Me SAYERS (interprétation) :  Je vais attirer

  8   l’attention de la Chambre sur les pages 23820 et 23821 du

  9   compte rendu d’audience dans l’affaire Blaskic.  Cette

 10   liste, cependant, a été remise à Monsieur Damon, a été

 11   remise à la presse, n’est-ce pas ?

 12         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je ne pense pas que

 13   ce soit moi qui la lui ai donnée.  Vous parlez de Dan Damon

 14   de Sky News ?

 15         Me SAYERS (interprétation) :  Oui, c’est cela.

 16         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je l’ai peut-être vu

 17   mais je ne pense pas que je lui ai donné les noms.  J’ai

 18   donné les noms à l’ambassadeur de l’ECMM et peut-être que

 19   Damon se les a procurés là les noms ou bien peut-être les

 20   lui ai-je donnés.  Je ne m’en souviens pas.

 21         Me SAYERS (interprétation) :  Passons aux réunions

 22   que vous avez eues suite à l’échange de lettres entre vous-

 23   même et le Colonel Blaskic.  Le 24 avril, vous avez

 24   rencontré les représentants de l’autorité, de ce que vous

 25   appelez le gouvernement de Vitez, à savoir Monsieur Santic


Page 12426

  1   et Monsieur Skopljak.  Vous en souvenez-vous ?  Je crois

  2   que cela figure dans votre journal.

  3         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.  Je crois que

  4   c’est dans mon journal et si vous le permettez, j’aimerais

  5   revoir ce passage.  Ça me permettrait de mieux vous

  6   répondre.  Oui, en effet, c’est cela.

  7         Me SAYERS (interprétation) :  Visite suivante

  8   immédiatement après, c’est une réunion avec le Colonel

  9   Blaskic.  Après avoir rencontré les dirigeants politiques

 10   civils, vous avez rencontré les dirigeants militaires ?

 11         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 12         Me SAYERS (interprétation) :  Il est exact, n’est-

 13   ce pas, que le Colonel Blaskic a reconnu sans problème que

 14   Ahmici se trouvait dans sa zone de responsabilité ?

 15         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 16         Me SAYERS (interprétation) :  Il a reconnu

 17   également que les soldats qui avaient participé à

 18   l’opération de Ahmici étaient sous son commandement ?

 19         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 20         Me SAYERS (interprétation) :  Il n’a jamais

 21   affirmé, le 24 avril ou ultérieurement, que les meurtres de

 22   ces civils étaient menés par des éléments incontrôlés par

 23   lui-même, n’est-ce pas ?

 24         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je ne me souviens

 25   pas qu’il ait dit ça.  Je ne me souviens pas le 24 avril


Page 12427

  1   avoir dit que s’il était responsable, je le verrais un jour

  2   dans un prétoire.  Mais je ne sais pas si c’est à ce

  3   moment-là que je l’ai dit mais je l’ai dit à un moment ou à

  4   un autre.

  5         Me SAYERS (interprétation) :  Nous y reviendrons

  6   ultérieurement mais vous avez dit au Colonel Blaskic qu’à

  7   votre avis, s’il reconnaissait que les soldats de Ahmici

  8   étaient les siens, dans sa zone de responsabilité, à ce

  9   moment-là, qu’il était un criminel de guerre.  C’est ce que

 10   vous lui avez dit, n’est-ce pas ?

 11         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 12         Me SAYERS (interprétation) :  Immédiatement après

 13   cela, vous êtes allé au service d’information publique de

 14   l’armée britannique et vous leur avez dit que le Colonel

 15   Blaskic avait convenu, avait reconnu que Ahmici se trouvait

 16   dans sa zone de responsabilité, n’est-ce pas ?

 17         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 18         Me SAYERS (interprétation) :  Vous avez déclaré

 19   qu’il avait endossé la responsabilité opérationnelle pour

 20   les actions de ses soldats dans la zone de Ahmici ?

 21         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 22         Me SAYERS (interprétation) :  C’est lui qui vous

 23   l’a dit, n’est-ce pas ?

 24         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 25         Me SAYERS (interprétation) :  Et ceci, pour vous,


Page 12428

  1   a confirmé le fait que le Colonel Blaskic était commandant

  2   des opérations, commandant opérationnel pour ce qui s’était

  3   produit à Ahmici, n’est-ce pas ?

  4         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

  5         Me SAYERS (interprétation) :  Prenons un peu de

  6   recul maintenant.  Est-il exact, n’est-ce pas, que le

  7   Colonel Blaskic était très choqué par ce qui s’était passé

  8   dans sa zone de responsabilité ?

  9         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui, oui.  Il était

 10   choqué – ça, c’est le moins qu’on puisse dire – et j’ai

 11   ressenti une certaine compassion pour lui à ce moment-là.

 12         Me SAYERS (interprétation) :  Vous n’avez jamais

 13   eu l’opinion que le Colonel Blaskic ait délibérément

 14   ordonné à des hommes sous son commandement d’aller à Ahmici

 15   et de massacrer des civils dans ce village, n’est-ce pas ?

 16         LE TÉMOIN (interprétation) :  Il faudrait que j’y

 17   réfléchisse.  Le fait est que moi, je pensais que c’était

 18   le commandant et que ses soldats l’avaient fait.  C’est

 19   tout.  Je n’ai pas poussé la réflexion plus loin.  Il

 20   faudrait que je réfléchisse vraiment à ce que signifie

 21   votre question pour pouvoir y répondre.

 22         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Je pense que

 23   nous avons traité du sujet autant qu’il convient.

 24         Me SAYERS (interprétation) :  Je suis d’accord

 25   avec vous, Monsieur le Président.


Page 12429

  1         Mais, Monsieur le Colonel, mon Colonel, parlons de

  2   la réunion du 23 avril chronologiquement.  Savez-vous que

  3   dans le village de Miletici, il y a eu un massacre de

  4   Croates ?  C’est-à-dire que cela se situe au nord de votre

  5   base.

  6         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

  7         Me SAYERS (interprétation) :  L’incident suivant,

  8   l’événement suivant, c’est une réunion qui a eu lieu avec

  9   Monsieur Kordic le 26 avril 1993 et ceci est consigné dans

 10   votre journal, n’est-ce pas ?

 11         LE TÉMOIN (interprétation) :  [Réponse inaudible]

 12         Me SAYERS (interprétation) :  Votre réponse est-

 13   elle positive ?

 14         LE TÉMOIN (interprétation) :  Excusez-moi, je suis

 15   en train de consulter mon journal.

 16         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  De quelle page

 17   du journal du témoin s’agit-il ?

 18         LE TÉMOIN (interprétation) :  C’est la page 44. 

 19   Il s’agit du lundi 26 avril.

 20         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Merci.

 21         Me SAYERS (interprétation) :  Monsieur le Témoin,

 22   ici, on ne voit aucune référence à la déclaration dont vous

 23   nous dites que Monsieur Kordic a prononcée au sujet des

 24   Serbes qui seraient responsables du massacre de Ahmici ?

 25         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non.


Page 12430

  1         Me SAYERS (interprétation) :  Donc, quand vous

  2   nous avez dit cela, vous vous basez sur vos souvenirs

  3   uniquement ?

  4         LE TÉMOIN (interprétation) :  Bien, je m’en

  5   souviens tout simplement.

  6         Me SAYERS (interprétation) :  À la page 23812 de

  7   votre déposition dans l’affaire Blaskic, vous dites vous

  8   souvenir d’avoir ri à chaudes larmes à cette explication

  9   qui vous a paru complètement ridicule et qui vous a prouvé

 10   que Kordic n’était pas un soldat, n’est-ce pas ?

 11         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 12         Me SAYERS (interprétation) :  Avez-vous jamais

 13   entendu le Colonel Blaskic dire ou faire des déclarations

 14   allant dans ce sens, affirmant donc que les Serbes étaient

 15   responsables de l’assassinat des civils à Ahmici ou que

 16   c’était des musulmans déguisés en soldats du HVO qui

 17   avaient tué d’autres musulmans ?

 18         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non, non.  Il

 19   n’aurait jamais dit quelque chose d’aussi stupide parce

 20   qu’il savait très bien que je me serais moqué de lui.

 21         Me SAYERS (interprétation) :  Après six mois dans

 22   la zone d’opération, n’est-ce pas, et beaucoup de réunions

 23   avec le Colonel Blaskic, vous avez eu le sentiment de bien

 24   le connaître, n’est-ce pas ?

 25         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non, ce n’est pas


Page 12431

  1   exact.  Je ne peux pas dire que j’ai connu ou acquis une

  2   connaissance approfondie de qui que ce soit dans la zone

  3   puisque je ne parlais pas la même langue.  Je me basais

  4   uniquement sur mes impressions.

  5         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Est-ce que, Me

  6   Sayers, vous contestez le fait que Monsieur Kordic ait

  7   déclaré, comme nous l’a dit le témoin ou comme l’a

  8   mentionné le témoin dans sa déposition, que Monsieur Kordic

  9   ait donc déclaré que c’était les Serbes qui étaient

 10   responsables ?

 11         Me SAYERS (interprétation) :  Je ne crois pas,

 12   Monsieur le Président, que ceci fasse l’objet d’une

 13   contestation.

 14         Monsieur le Témoin, immédiatement après votre

 15   rencontre avec Monsieur Kordic, vous êtes allé voir… je

 16   crois que vous avez dit que vous êtes allé voir les

 17   offensives musulmanes qui étaient organisées à Putis et

 18   Jelinak au nord du carrefour de Kaonik ?

 19         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 20         Me SAYERS (interprétation) :  Et là, vous avez vu

 21   des gens qui étaient chassés de chez eux et vous avez vu

 22   des gens qui étaient tués, n’est-ce pas ?

 23         LE TÉMOIN (interprétation) :  Putis et Jelinak, ce

 24   sont des endroits qui sont situés au nord de Kaonik, au

 25   nord-est de Busovaca, dans les montagnes.  Ce jour-là donc,


Page 12432

  1   j’ai traversé les lignes du HVO et je suis allé jusque sur

  2   les positions de l’armée de Bosnie-Herzégovine et lorsque

  3   je suis arrivé là, je suis descendu de mon véhicule et j’ai

  4   essayé de persuader l’armée de Bosnie-Herzégovine ou les

  5   soldats qui s’y trouvaient de me donner le corps d’un

  6   soldat du HVO pour que je le ramène à Dario Kordic.  J’ai

  7   pensé que c’était la chose à faire.  Ils ont refusé.  Donc,

  8   je l’ai enterré après avoir récupéré ses effets personnels.

  9         Me SAYERS (interprétation) :  Vous souvenez-vous

 10   avoir dit dans votre journal que vous avez vu des éléments

 11   vous permettant de dire que certains musulmans avaient

 12   procédé à du nettoyage ethnique contre les Croates et

 13   avaient incendié leurs maisons ?

 14         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 15         Me SAYERS (interprétation) :  Vous vous en

 16   souvenez, n’est-ce pas ?

 17         LE TÉMOIN (interprétation) :  [Réponse inaudible]

 18         Me SAYERS (interprétation) :  Bien ! 

 19         LE TÉMOIN (interprétation) :  Permettez-moi de

 20   consulter mon journal.  Oui, ça se trouve ici, au bas de la

 21   page 44.  Oui.  Mais ça ne se trouvait pas au bas de

 22   Busovaca.  C’était près de la route de montagne.

 23         Me SAYERS (interprétation) :  Il n’y a aucune

 24   contestation à ce sujet.  Putis et Jelinak sont deux

 25   villages qui sont à quelques kilomètres seulement au nord


Page 12433

  1   du carrefour de Kaonik, c’est cela ?

  2         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

  3         Me SAYERS (interprétation) :  Le 28 avril, vous

  4   avez décidé de traverser Busovaca pour voir l’état des

  5   combats dans la zone et je crois que vous avez écrit

  6   quelque chose à ce sujet dans votre journal.  Vous êtes

  7   vous-même entré dans Busovaca dans votre véhicule, n’est-ce

  8   pas ?

  9         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 10         Me SAYERS (interprétation) :  Vous ne vous

 11   souvenez pas avoir constaté aucun problème avec des convois

 12   du HCR, des soldats qui, ce jour-là, la veille ou le

 13   lendemain, auraient été arrêtés ?

 14         LE TÉMOIN (interprétation) :  En fait, à cette

 15   époque, il y avait effectivement des problèmes sur la

 16   route.

 17         Me SAYERS (interprétation) :  Mais dans le journal

 18   du commandant, on ne fait référence à aucune de ces

 19   difficultés.  Disposez-vous de ce journal devant vous ? 

 20         LE TÉMOIN (interprétation) :  Si vous me le dites,

 21   je l’accepte, mais le fait est que cette route entre

 22   Kiseljak et Busovaca était souvent bloquée à cette période

 23   et il était impossible pour certains convois de passer.

 24         Me SAYERS (interprétation) :  Mais dans votre

 25   journal, vous ne faites nulle part mention de difficultés


Page 12434

  1   avec ces convois, n’est-ce pas ?

  2         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non.

  3         Me SAYERS (interprétation) :  Afin que toutes les

  4   choses soient bien claires, j’affirme que dans le bulletin

  5   de renseignements militaires du 28 avril ou du 29 avril

  6   1993, on ne fait nullement mention de ces difficultés.

  7         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Je doute que

  8   le témoin puisse répondre à cette question.  Vous pourrez

  9   en temps utile nous faire les observations que vous jugerez

 10   utiles à ce sujet.

 11         Me Sayers, est-ce que vous approchez de la fin de

 12   votre contre-interrogatoire ?  Il faut tenir compte de

 13   l’heure.

 14         Me SAYERS (interprétation) :  J’ai dit que

 15   j’espérais pouvoir terminer à 16 h 15 et je pense que ce

 16   sera toujours le cas.

 17         Monsieur le Témoin, vous nous dites que vous

 18   n’avez… ou est-il exact de dire que vous ne vous souvenez

 19   d’aucune difficulté en ce qui concerne le passage des

 20   convois pour la date du 28 avril 1993 ?

 21         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 22         Me SAYERS (interprétation) :  Est-il exact que

 23   vous êtes allé à Busovaca le même jour, le 19 avril [sic],

 24   avec le Général Halilovic, le Général de brigade Petkovic

 25   et l’Ambassadeur Thebault, n’est-ce pas ?


Page 12435

  1         LE TÉMOIN (interprétation) :  C’était le 29.

  2         Me SAYERS (interprétation) :  Le lendemain du 28,

  3   bien évidemment.  Vous n’avez jamais entendu parler de la

  4   possibilité d’une attaque de Busovaca par les troupes

  5   britanniques pendant cette période, le 28, 29 avril ?

  6         LE TÉMOIN (interprétation) :  Je ne pense pas. 

  7   Les soldats, je les voyais constamment et s’il y avait

  8   effectivement une offensive prévue, il aurait fallu faire

  9   en sorte de se procurer les armes nécessaires.

 10         Me SAYERS (interprétation) :  Et personne n’a

 11   jamais envisagé une telle attaque à la fin avril, n’est-ce

 12   pas ?

 13         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non.

 14         Me SAYERS (interprétation) :  Poursuivons.  Très

 15   brièvement, j’ai quelques questions au sujet du thème

 16   suivant.

 17         Le Général de brigade Petkovic et le Général

 18   Halilovic ont été persuadés de rester dans la zone pendant

 19   une période d’environ 10 jours afin d’être sûrs que la

 20   nouvelle de la mise en place d’un cessez-le-feu descende

 21   jusqu’au niveau des hommes sur le terrain, n’est-ce pas ?

 22         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 23         Me SAYERS (interprétation) :  Vous souvenez-vous

 24   vous être rendu dans le village de Gomionica le 29 avril

 25   1993 ?  Il y avait là des forces de l’armée de Bosnie-


Page 12436

  1   Herzégovine à peu près à 1,5 kilomètre au nord de la route

  2   et le Général Halilovic leur a parlé.

  3         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

  4         Me SAYERS (interprétation) :  Est-ce que vous vous

  5   souvenez que le Général de brigade Petkovic, lui, est resté

  6   à l’abri du véhicule blindé et il vous a semblé que c’était

  7   là une bonne idée ?

  8         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.  Il faut bien

  9   être conscient du fait qu’à ce moment-là, un officier qui

 10   appartenait à l’armée de Bosnie-Herzégovine avait été tué à

 11   Sarajevo alors qu’il était sous la garde des Français.  Il

 12   avait été tué par les Serbes.  Donc, moi, j’étais très

 13   conscient de la responsabilité que j’avais quand

 14   j’emportais des gens dans mes véhicules, quelle que soit

 15   leur appartenance.

 16         Me SAYERS (interprétation) :  En fait, vous faites

 17   référence à la mort de Monsieur Hakija qui était vice-

 18   président de…

 19         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 20         Me SAYERS (interprétation) :  Donc, vous vous êtes

 21   rendu avec le Général de brigade Petkovic et le Général

 22   Halilovic et chaque fois où vous avez donné des ordres ou

 23   ils ont donné les ordres aux troupes d’arrêter de se

 24   battre, cela était suivi d’effets, n’est-ce pas ?

 25         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui, je crois.


Page 12437

  1         Me SAYERS (interprétation) :  Poursuivons la

  2   chronologie et parlons d’une réunion que vous avez eue avec

  3   Monsieur Anto Valenta le 4 mai 1993.  Est-il exact de dire

  4   qu’à votre connaissance, c’est la première réunion que vous

  5   ayez eue avec Monsieur Valenta ?

  6         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

  7         Me SAYERS (interprétation) :  En fait, vous

  8   n’étiez même pas conscient de son existence jusqu’à cette

  9   réunion du 4 mai, n’est-ce pas ?

 10         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.  Je me souviens

 11   qu’il m’a dit qu’il était arrivé sur la zone très

 12   récemment.

 13         Me SAYERS (interprétation) :  Vous nous dites

 14   qu’avant le 4 mai 1993, vous ne saviez rien de lui.  C’est

 15   ce que vous avez dit dans l’affaire Blaskic.  Est-ce

 16   toujours ce que vous pouvez nous dire aujourd’hui ?

 17         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 18         Me SAYERS (interprétation) :  Vous souvenez-vous

 19   avoir parlé de Monsieur Valenta avec Monsieur Kordic avant

 20   ce jour ?

 21         LE TÉMOIN (interprétation) :  Peut-être Monsieur

 22   Kordic m’en a-t-il parlé mais je ne m’en souviens pas.

 23         Me SAYERS (interprétation) :  Vous ne vous en

 24   souvenez pas.  Bien !  Monsieur Valenta vous a dit qu’il

 25   était Vice-président du HVO, qu’il était l’un des Vice-


Page 12438

  1   présidents du HVO, n’est-ce pas ?

  2         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui, je crois que

  3   c’est exact.  Le HVO… je ne sais pas, en tout cas, Vice-

  4   président de l’organisation.  Je ne dirais pas vraiment le

  5   HVO.

  6         Me SAYERS (interprétation) :  Au cours de votre

  7   première rencontre, vous lui avez dit que vous considériez

  8   qu’il était au moins complice de génocide ainsi que tous

  9   les membres du gouvernement de Vitez ?

 10         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 11         Me SAYERS (interprétation) :  Vous lui avez

 12   également dit que vous disposiez d’une liste de noms que

 13   vous alliez donner à l’ECMM, n’est-ce pas ?

 14         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 15         Me SAYERS (interprétation) :  Monsieur Valenta

 16   vous a dit qu’il ne savait rien, qu’il n’avait rien su de

 17   ce qui s’était passé à Ahmici, des tueries de Ahmici

 18   jusqu’à deux jours après cet événement ?

 19         LE TÉMOIN (interprétation) :  C’est possible, en

 20   effet. 

 21         Me SAYERS (interprétation) :  C’est ce que vous

 22   avez dit à la page 23715 de votre déposition dans l’affaire

 23   Blaskic.

 24         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Inutile de

 25   revenir sans cesse sur la déposition du témoin dans


Page 12439

  1   l’affaire Blaskic.  Si vous en avez vraiment besoin

  2   ultérieurement, vous pourrez le faire à ce moment-là.

  3         Me SAYERS (interprétation) :  Bien !

  4         Une dernière question au sujet de cette rencontre. 

  5   Lorsque vous avez dit à Monsieur Valenta que le

  6   gouvernement de Vitez était complice de génocide, vous avez

  7   dit que Valenta avait affirmé ne rien savoir de Ahmici

  8   jusqu’à deux jours après les événements, n’est-ce pas ?

  9         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 10         Me SAYERS (interprétation) :  Un jour plus tard,

 11   le 5 mai 1993, vous êtes allé dans un centre de détention

 12   de l’armée Herzégovine, près du QG de la brigade de l’armée

 13   de Bosnie-Herzégovine à Poculica, n’est-ce pas ?

 14         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 15         Me SAYERS (interprétation) :  Vous y avez vu

 16   environ une vingtaine de Croates qui étaient détenus là ?

 17         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 18         Me SAYERS (interprétation) :  Parlons maintenant

 19   de la réunion que vous avez eue le 7 mai 1993 avec Monsieur

 20   Valenta, deuxième réunion en trois jours, et vous y avez

 21   également amené le Lieutenant Colonel Duncan.  Vous en

 22   souvenez-vous ?

 23         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 24         Me SAYERS (interprétation) :  Dans votre journal,

 25   à la date du 8 mai, vous affirmez qu’à votre avis, le


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  1   commandement suprême du HVO se comportait comme Hitler et

  2   que Valenta et Boban avaient donné des instructions aux

  3   fins de mettre en place des opérations de nettoyage

  4   ethnique.  C’est ce que vous avez dit le 8 mai dans votre

  5   journal.  Mais il s’agit, n’est-ce pas, de pures

  6   spéculations de votre part, Monsieur ?

  7         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non, non.  Moi, je

  8   me suis basé sur les théories que m’avait exposées Valenta

  9   à partir de son ouvrage, qu’il m’avait expliquées lui-même,

 10   et si je regarde mon journal, je peux lire que Valenta nous

 11   a donné une leçon, nous a exposé les théories selon

 12   lesquelles les Serbes, les Croates et les musulmans

 13   devaient être rassemblés chacun dans leurs propres cantons. 

 14   Il m’a remis son livre qui ressemble beaucoup à Mein Kampf,

 15   qui est un guide pour l’action, et on peut dire qu’ils ont

 16   mis en place les théories qu’il a exposées dans son livre.

 17         Me SAYERS (interprétation) :  Mais il ne vous a

 18   jamais dit qu’il avait donné des ordres dans ce sens ?

 19         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non.  Il m’a parlé

 20   de ses théories.

 21         Me SAYERS (interprétation) :  Vous n’avez jamais

 22   lu le livre ?

 23         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non.

 24         Me SAYERS (interprétation) :  Et vous n’avez

 25   jamais rien vu qui puisse vous permettre de dire que le


Page 12441

  1   Président Boban ait donné de tels ordres ?

  2         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non.

  3         Me SAYERS (interprétation) :  De toute façon, il

  4   s’agit d’un journal privé, n’est-ce pas ?

  5         Passons maintenant à la réunion que vous avez eue

  6   avec les Colonels Blaskic et Duncan.  Vous avez dit que

  7   vous avez organisé une réunion entre Duncan, vous-même et

  8   les voyous locaux.  C’est la façon dont vous considériez le

  9   Colonel Blaskic à l’époque ?

 10         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui, c’est

 11   l’impression que j’avais de ces gens au fur et à mesure que

 12   les événements se développaient.

 13         Me SAYERS (interprétation) :  Vous avez rencontré

 14   le Colonel Blaskic et c’était votre dernière réunion,

 15   n’est-ce pas ?

 16         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 17         Me SAYERS (interprétation) :  Vous aviez déjà

 18   décidé que c’était la dernière fois que vous le

 19   rencontriez, n’est-ce pas ?

 20         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.  Duncan et moi-

 21   même, nous avions décidé que j’allais le mettre au pied du

 22   mur au sujet de Ahmici, que j’allais être extrêmement

 23   énergique dans ma façon de le mettre au pied du mur et nous

 24   envisagions tout à fait que nous allions nous brouiller

 25   avec Blaskic.  Mais pour moi, cela n’avait aucune


Page 12442

  1   importance parce que je m’apprêtais à quitter la zone et il

  2   valait mieux que les choses soient bien claires pour

  3   l’officier qui allait prendre la relève.

  4         Me SAYERS (interprétation) :  Il y avait avec vous

  5   des représentants du CICR, n’est-ce pas, et vous vouliez

  6   également les présenter au Colonel Blaskic ?

  7         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non.  Ils étaient là

  8   quand je suis arrivé mais j’ai attendu qu’ils partent avant

  9   de lui dire tout cela parce que je ne voulais pas les

 10   impliquer là-dedans.

 11         Me SAYERS (interprétation) :  Donc, les gens du

 12   CICR sont partis et vous avez confronté le Colonel

 13   Blaskic ?

 14         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 15         Me SAYERS (interprétation) :  Vous lui avez dit

 16   que c’était lui le commandant des troupes du HVO ?

 17         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 18         Me SAYERS (interprétation) :  Et il a dit que

 19   c’était le cas ?

 20         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 21         Me SAYERS (interprétation) :  Il a confirmé qu’il

 22   était le commandant et qu’il était responsable des actions

 23   des soldats qui étaient sous son commandement ?

 24         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 25         Me SAYERS (interprétation) :  C’est à ce moment-là


Page 12443

  1   que vous lui avez dit qu’un jour, vous le verriez dans un

  2   prétoire ?

  3         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

  4         Me SAYERS (interprétation) :  Alors que tout le

  5   monde s’apprêtait à partir, Monsieur Kordic est arrivé le 9

  6   mai, n’est-ce pas ?

  7         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.  Est-ce

  8   vraiment là ?  Oui, apparemment.

  9         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Où est-ce que

 10   cela se trouve dans le journal ?

 11         Me SAYERS (interprétation) :  C’est à la date du 9

 12   mai, premier paragraphe.

 13         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  C’est à peine

 14   lisible.

 15         Me SAYERS (interprétation) :  On peut y lire la

 16   chose suivante :  « Dario Kordic est arrivé au moment où

 17   tout le monde s’apprêtait à partir et nous avons tous bu un

 18   verre. »  C’est bien exact ?

 19         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 20         Me SAYERS (interprétation) :  Vous êtes sûr que

 21   lors de cette réunion, le Colonel Blaskic n’a jamais dit

 22   que les meurtres de civils de Ahmici avaient été commis par

 23   des Serbes, des musulmans ou des musulmans déguisés en

 24   soldats du HVO ?

 25         LE TÉMOIN (interprétation) :  Autant que je m’en


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  1   souvienne.

  2         Me SAYERS (interprétation) :  Merci, mon Colonel. 

  3   J’en ai terminé de mon examen de la chronologie.

  4         Maintenant, je voudrais parler de Ahmici et de

  5   l’enquête sur ces événements et de la correspondance qui a

  6   eu lieu à ce sujet.  Ce sera la dernière partie de mon

  7   contre-interrogatoire.

  8         Vous avez décidé de ne pas donner au Colonel

  9   Blaskic la liste de noms des suspects, ceci du fait

 10   d’instructions que vous avez reçues du gouvernement

 11   britannique, n’est-ce pas ?

 12         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non.  Je ne m’en

 13   souviens pas exactement.  Je me suis entretenu avec le QG

 14   de la brigade.  Il est possible que j’aie demandé des

 15   conseils juridiques mais autant que je m’en souvienne, je

 16   pense que j’ai simplement… non.  En fait, j’ai beaucoup

 17   réfléchi parce que spontanément, j’avais envie de lui

 18   donner ces noms mais finalement, quelqu’un m’a persuadé de

 19   ne pas le faire pour toutes les raisons que j’ai

 20   précédemment mentionnées.

 21         Me SAYERS (interprétation) :  Bien !  Et j’imagine

 22   que vous avez parlé de cette décision avec Monsieur Osario,

 23   n’est-ce pas ?

 24         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Mais est-ce

 25   que, finalement, cela a une grande importance de savoir


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  1   avec qui cette décision a été prise ?

  2         Me SAYERS (interprétation) :  En effet, peut-être

  3   que cela n’a pas autant d’importance que cela, Monsieur le

  4   Président.

  5         Poursuivons.  À votre avis, Monsieur le Témoin,

  6   l’opération de Ahmici, est-ce que c’était une opération de

  7   ratissage, de nettoyage ?

  8         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

  9         Me SAYERS (interprétation) :  Au vu de votre

 10   expérience, il vous est apparu qu’il aurait fallu à peu

 11   près un jour et demi pour préparer et monter cette

 12   opération ?

 13         LE TÉMOIN (interprétation) :  Si vous voulez, mais

 14   comment peut-on répondre à une question de cette sorte ? 

 15   C’est très difficile.  Mais bon, mettons une demi-journée.

 16         Me SAYERS (interprétation) :  Mais vous ne savez

 17   pas si le Colonel Blaskic a donné des ordres à aucun de ses

 18   soldats afin de faire tuer des civils à Ahmici ?

 19         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Nous en avons

 20   déjà parlé et le témoin nous a déjà dit qu’il ne disposait

 21   pas d’information à ce sujet.

 22         Me SAYERS (interprétation) :  Il est indéniable,

 23   n’est-ce pas, Monsieur le Témoin, que le Colonel Blaskic

 24   n’était pas en mesure d’aller à Zenica parce que Zenica

 25   était contrôlé par les forces musulmanes à ce moment-là,


Page 12446

  1   c’est-à-dire à la fin avril 1993, au moment où les combats

  2   se poursuivaient, le cessez-le-feu était en cours de

  3   négociations et il ne pouvait pas aller à Zenica, n’est-ce

  4   pas, pour s’entretenir avec qui que ce soit là-bas ?

  5         LE TÉMOIN (interprétation) :  Non, non.  À moins

  6   que je ne l’y emmène moi-même.

  7         Me SAYERS (interprétation) :  C’est là-bas, à

  8   votre connaissance, n’est-ce pas, que se trouvaient tous

  9   les témoins oculaires des événements atroces de Ahmici,

 10   n’est-ce pas ?  C’est là qu’on les avait emmenés ?

 11         LE TÉMOIN (interprétation) :  La majorité d’entre

 12   eux se sont échappés, ont fui vers Zenica quand ils ont été

 13   libérés.  Environ 800 personnes étaient emprisonnées par le

 14   HVO à Zenica.  Ils étaient hébergés dans des prisons qui,

 15   en fait, étaient souvent des écoles.  Mais il faut bien

 16   dire que les musulmans faisaient la même chose à Zenica.

 17         Me SAYERS (interprétation) :  Mais ce qui

 18   m’intéresse ici c’est de savoir si, à votre connaissance,

 19   les témoins oculaires des événements de Ahmici se

 20   trouvaient à Zenica, près du Centre des Nations unies pour

 21   les Droits de l’Homme, n’est-ce pas ?

 22         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.

 23         Me SAYERS (interprétation) :  Mon Colonel, merci

 24   beaucoup.  Je n’ai pas d’autres questions à vous poser, à

 25   moins que Messieurs les Juges n’en aient eux-mêmes.


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  1         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Non, nous

  2   n’avons pas de question.  Merci.

  3                     [La Chambre discute]

  4         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Colonel

  5   Stewart, il paraît tout à fait réaliste de dire que vous

  6   allez être contraint de revenir demain.

  7         LE TÉMOIN (interprétation) :  Oui.  C’est

  8   également comme ça que je vois la chose, du point de vue

  9   militaire.

 10         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Oui.  Il

 11   s’agit d’une évaluation plutôt juridique de la chose. 

 12         Me Kovacic, vous aurez, je crois, à peu près une

 13   demi-heure demain matin.  C’est ce que vous pensez, n’est-

 14   ce pas ?

 15         Me KOVACIC (interprétation) :  Oui.

 16         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Merci.

 17         Monsieur Nice, vous pouvez vous entretenir avec le

 18   témoin au sujet du document dont nous avons parlé mais vous

 19   ne pouvez lui parler de rien d’autre.

 20         Me NICE (interprétation) :  Oui.

 21         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Je vous

 22   propose de procéder de la façon suivante.  Nous allons en

 23   terminer avec la déposition du témoin sur tous les sujets

 24   qui nous intéressent et ensuite, nous retournerons au

 25   document.  Ensuite, suivra un rapide contre-interrogatoire


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  1   au sujet de ce document uniquement.

  2         Me SAYERS (interprétation) :  Je me demande si

  3   nous pourrions avoir à notre disposition un exemplaire de

  4   ce document.  D’autre part, j’ai une question qui est très

  5   rapide à poser à la Chambre, suite au départ du Colonel

  6   Stewart du prétoire.

  7         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Je ne vois pas

  8   pourquoi ce document ne pourrait pas vous être communiqué.

  9         Me NICE (interprétation) :  Non, en effet.  Je

 10   pense que la Chambre est en mesure d’ordonner la production

 11   de ce document tout autant que la Défense.

 12         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Nous le ferons

 13   si cela est nécessaire.

 14         Me NICE (interprétation) :  Est-ce que vous

 15   envisagez de lever l’audience maintenant ou dans 15

 16   minutes ?

 17         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Oui.

 18         Me NICE (interprétation) :  Je voudrais dire que

 19   nous avons deux témoins pour demain et un témoin qui

 20   prendra beaucoup plus longtemps, qui nous prendra

 21   certainement une journée entière mercredi.

 22         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Donc, il y a

 23   un témoin pour lequel nous n’aurons pas besoin de beaucoup

 24   de temps ?

 25         Me NICE (interprétation) :  Je pense que c’est le


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  1   cas des deux témoins pour demain.  Nous n’aurons pas besoin

  2   de beaucoup de temps.  Il y a deux témoins déjà présents

  3   aujourd’hui.  Nous les entendrons demain.  Il y aura

  4   ensuite un témoin que nous entendrons mercredi et qui va

  5   arriver à La Haye demain soir.

  6         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Eh bien, nous

  7   finirons le contre-interrogatoire demain. 

  8                     [La Chambre discute]

  9         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Monsieur le

 10   Juge Bennouna me rappelle que nous n’avons pas rendu

 11   d’ordonnance aux fins de protection au sujet du document et

 12   nous allons donc le faire immédiatement.  Ce document ne

 13   doit être communiqué à quiconque en dehors des membres de

 14   l’équipe de la Défense.  Une ordonnance écrite sera rendue

 15   demain et l’ordonnance prend la forme habituelle.

 16         Monsieur le Colonel, nous vous prions d’être

 17   présent demain matin à 9 h 30 dans ce prétoire.

 18         Me NICE (interprétation) :  [Hors microphone]

 19         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Vous pouvez

 20   vous retirer, Colonel.  Je vous remercie.

 21                     [Le témoin se retire]

 22               Me SAYERS (interprétation) :  C’est un petit

 23   point mais j’ai été prié de soulever la question.  À la

 24   page 11760, ligne 9, on a mentionné par hasard le nom d’un

 25   témoin sous protection et nous allons prier le greffe pour


Page 12450

  1   que ce nom soit expurgé du compte rendu.

  2         Me NICE (interprétation) :  Pendant que nous

  3   sommes encore dans le prétoire sans le témoin, je voudrais

  4   dire que les deux témoins prévus pour demain avaient

  5   demandé des mesures de protection mais la demande a déjà

  6   été formulée.  J’espère que nous serons en mesure, d’une

  7   façon ou d’une autre, de nous consacrer à la question de

  8   leur protection dans le cas où cette protection serait

  9   accordée afin que ces personnes-là puissent témoigner

 10   demain.

 11         Pour ce qui est du premier témoin, je crois qu’il

 12   avait demandé une pleine protection pour la raison que nous

 13   avons avancée et je crois que nous pourrions en discuter

 14   avec la Chambre, même si cette Chambre ne compte que deux

 15   Juges.  Mais je crois que la chose doit être résolue.

 16         Le premier témoin est un témoin qui est venu pour

 17   contre-interrogatoire de la part de la Défense et il s’agit

 18   là d’un témoin dont la Défense a demandé l’assistance.

 19                     [La Chambre discute]

 20         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Monsieur

 21   Sayers, nous avons une demande concernant ce premier témoin

 22   de demain où des raisons sont avancées qui diffèrent des

 23   raisons habituelles mais nous pensons que cela devrait

 24   suffire.  Avez-vous des objections ?

 25         Me SAYERS (interprétation) :  Je n’ai reçu qu’une


Page 12451

  1   seule demande de mesures de protection et je crois que cela

  2   concernait le deuxième témoin qui avait demandé à témoigner

  3   dans une séance à huis clos.

  4         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Je crois que

  5   vous pourriez étudier la chose ce soir et nous pourrons

  6   nous pencher sur la question ultérieurement et je crois que

  7   cela nous prendra assez peu de temps demain matin au

  8   départ.

  9         Me SAYERS (interprétation) :  Oui, Monsieur le

 10   Président.

 11         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Oui.  Cela a

 12   été communiqué ?

 13         Me NICE (interprétation) :  Oui.  Cela a été fait

 14   ex parte, communiqué ex parte, mais je crois que si vous me

 15   le permettez, je pourrai ultérieurement découvrir les

 16   détails à la Défense et nous pourrions nous pencher, par la

 17   suite, là-dessus.

 18         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Bien, Monsieur

 19   Sayers, je ne voudrais pas vous laisser patauger dans le

 20   noir mais vous serez informé en temps utile.

 21         Me NICE (interprétation) :  Autre chose.  (expurgée)

 22  (expurgée)

 23  (expurgée)

 24  (expurgée)

 25  (expurgée)


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  1  (expurgée)

  2  (expurgée)

  3  (expurgée) Je crois

  4   qu’il faudra le faire ex parte.  Je sais que cela est assez

  5   gênant pour ce qui est des sessions ex parte mais nous

  6   pourrions peut-être le faire jeudi.

  7         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Oui.  Ça

  8   serait peut-être la meilleure des choses à faire.

  9         Me NICE (interprétation) :  Je vous remercie.

 10         M. LE PRÉSIDENT (interprétation) :  Pour ce qui

 11   est des témoins de demain, tout dépendra de la façon dont

 12   procédera le Procureur, le Bureau du Procureur avec ses

 13   témoins.

 14         Me NICE (interprétation) :  Certainement.

 15         --- L’audience est levée à 16 h 09

 16         pour reprendre le mardi 18 janvier

 17         2000 à 9 h 30

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12   Page blanche insérée aux fins d’assurer la correspondance entre la

13   pagination anglaise et la pagination française.

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