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1 Le jeudi 27 janvier 2000
2 [Audience publique]
3 [Les accusés entrent dans la Cour]
4 --- L’audience débute à 9 h 41
5 LA GREFFIÈRE (interprétation) : Affaire IT-95-
6 14/2-T, Le Procureur contre Dario Kordic et Mario Cerkez.
7 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Me Nice, je
8 crois comprendre que vous voulez soulever quelques questions.
9 Me NICE (interprétation) : Oui, des questions
10 d’ordre administratives. Autant les aborder maintenant
11 plutôt qu’à la fin de la journée. Je suppose que de toute
12 façon nous n’aurons pas toute une journée d’audience. Il
13 est donc préférable de régler ces questions-ci dès
14 maintenant. Elles ne prendront que quelques minutes.
15 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Fort bien !
16 Me NICE (interprétation) : Merci. Est-ce que
17 nous sommes à huis clos partiel ?
18 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Voulez-vous
19 passer à huis clos partiel ?
20 Me NICE (interprétation) : C’est préférable.
21 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Mais avant que
22 nous passions au huis clos partiel, demain, nous
23 commencerons à 9 h 00 et nous terminerons
24 à midi et demi.
25 Me NICE (interprétation) : Je vous remercie.
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1 [Huis clos partiel]
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1 [expurgée]
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3 [expurgée]
4 [expurgée]
5 [Audience publique]
6 Me NICE (interprétation) : Il y a un autre témoin qui parlera d’un
7 point de contrôle. Sa déclaration a été communiquée, il y a un certain
8 temps de cela, à la Défense. J’ai dit à la Défense que ce témoin, nous
9 avions l’intention de le citer. Dernier point qui est plus étoffé à
10 certains égards : Il y a plusieurs témoins qui, dans notre dernier
11 survol de témoins à comparaître, nous avions indiqué qu’on pourrait
12 effectivement simplement verser au dossier les transcriptions et qu’il
13 ne serait peut-être pas nécessaire d’appeler en chair et en os. Il y
14 a, par exemple, le Rémi Landry dont nous avons la transcription. Il
15 n’y a pas eu de réponse s’agissant de beaucoup de ces témoins de la
16 proposition que nous avions faite. Nous ne savons pas si ces
17 transcriptions ou comptes rendus d’audience peuvent être versés au
18 dossier tel quel. Il est urgent d’avoir une réponse.
19 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Est-ce que vous pourriez,
20 aujourd’hui encore, déterminer quels sont ces témoignages que vous
21 voulez simplement verser au dossier ?
22 Me NICE (interprétation) : Mais rappelez-vous ce
23 document où il y avait des intercalaires, une chronologie.
24 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Effectivement,
25 en date du 10 novembre.
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1 Me NICE (interprétation) : C’est exact. Y
2 figurent les noms de tous les témoins concernés.
3 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Je ne vois pas
4 très bien de qui vous parlez dans cette liste. Est-ce
5 qu’il n’est pas plus simple de nommer ceux des témoins qui
6 sont concernés par cette mesure ?
7 Me NICE (interprétation) : On ne parlera pas de compte rendu
8 d’audience. Il y aura une autre dénomination qu’il sera attaché.
9 Il y a un autre témoin qui a déjà déposé dans deux autres affaires et
10 dans deux contextes différents et je suis ravi de pouvoir vous dire, et
11 c’est tout à son honneur : Ce témoin ne demande pas des mesures de
12 protection.
13 Me STEIN (interprétation) : Excusez-moi, Monsieur
14 le Président, est-ce que je peux intervenir ?
15 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Oui.
16 Me STEIN (interprétation) : Pour ce qui est des
17 témoins faisant l’objet d’un compte rendu, il suffit
18 d’avoir la liste. Nous allons réagir parce que je ne vois
19 pas très bien quels sont ces témoins dans cette liste du 10
20 novembre. Pour ces deux nouveaux témoins, ce sera la même
21 situation que Monsieur Beese. Le 9 décembre, nous avions
22 reçu ces documents. Nous pourrions peut-être en discuter demain.
23 Me NICE (interprétation) : Voire cet après-midi
24 si nous n’avons plus de témoins.
25 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Fort bien !
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1 Me NICE (interprétation) : En effet, celui qui a produit la carte ne
2 pourra pas déposer ni aujourd’hui ni demain et le témoin qui pourrait
3 nous aider s’agissant de cette liste générale pourrait ne pas être
4 disponible aujourd’hui.
5 Me STEIN (interprétation) : Il y a aussi une vidéo qui est une prise
6 de vue aérienne de la vallée que l’Accusation veut verser au dossier.
7 Je crois qu’il faudrait la voir avec Monsieur Kordic et prendre
8 disposition avec le Centre de Détention. Le plutôt sera le mieux et je
9 pense que Monsieur Kordic est en mesure de déterminer davantage que
10 nous si cet enregistrement vidéo est utile.
11 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Y a-t-il une copie disponible ?
12 Me NICE (interprétation) : Oui, je vais la remettre à la Défense le
13 plus tôt possible, peut-être dès la première pause de la journée. Je
14 vais voir s’il est possible de régler ceci.
15 Me STEIN (interprétation) : Mais lorsque nous l’aurons, je pense que
16 nous aurons besoin de l’intervention de la Chambre s’agissant du
17 quartier pénitentiaire mais j’en discuterai avec le juriste de la
18 chambre.
19 Enfin et non des moindres, n’oubliez pas, Monsieur le Président, que
20 nous avons maintenant une pile de 1 mètre de haut pratiquement qui
21 représente les documents, avec d’autres qui sont attendus, et à la
22 suite des requêtes ex parte, vous savez que nous avons demandé des
23 documents de tiers ou d’autres personnes qui ont participé à la
24 production de documents relatifs à l’ex-Yougoslavie et nous travaillons
25 d’arrache-pied à une requête aux fins de non-lieu ou d’abandon des
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1 poursuites, mais vous savez que plus nous aurons de temps entre la
2 présentation des témoins à charge et le début de la présentation des
3 témoins à décharge, le plus nous vous en saurons gré, Monsieur le
4 Président.
5 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Nous allons voir demain.
6 Me KOVACIC (interprétation) : Puis-je intervenir
7 simplement aux fins du compte rendu d’audience ?
8 Me Nice a soulevé la question de la cassette, de l’enregistrement
9 vidéo. Ceci n’a présentement aucun intérêt pour notre client. Nous
10 n’avons pas d’avis particulier.
11 Quant à la deuxième question qui avait été soulevée, toujours à
12 l’encontre de cet enregistrement vidéo, ou plutôt il s’agit là de la
13 cassette d’une prise de vue aérienne de la vallée de la Lasva, je
14 rejoins ce que disait Me Stein. Nous aurions des difficultés à fournir
15 des commentaires sur l’enregistrement si le client n’a pas l’occasion
16 de visionner cette cassette. Ça me semble nécessaire.
17 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Je suis sûr que vous pourrez
18 prendre des dispositions avec le Procureur et s’il y a un exemplaire,
19 vous pourrez peut-être le partager avec les défenseurs de Monsieur
20 Kordic.
21 [La Chambre discute]
22 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Me Naumovski.
23 Me NAUMOVSKI (interprétation) : Merci, Monsieur le Président. En ce
24 qui concerne le nouveau témoin, bien évidemment, je ne fais pas
25 d’objection. On peut lui poser toute une série de questions en dehors
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1 des questions 8, 14, 16 et 17. Merci.
2 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Je vous remercie.
3 Me NICE (interprétation) : Je reviens à la question de ces témoins
4 dont le compte rendu d’audience d’une autre affaire suffirait pour ce
5 qui est du versement au dossier. Rappelez-vous, je vais être un peu
6 mieux préparé pour ceci que la fois dernière. Nous avons les pages 21
7 et 22 de cette liste générale et qui montrait une liste séparée où
8 figurait ces témoins. Je vais peut-être veiller à ce que ceci soit
9 photocopié pour la Défense, si elle ne dispose pas encore de ce
10 document.
11 [Le témoin entre dans la Cour]
12 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Le témoin
13 peut-il donner lecture de la déclaration solennelle ?
14 LE TÉMOIN (interprétation) : Je déclare solennellement que je dirai la
15 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
16 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Monsieur, veillez vous asseoir.
17 TÉMOIN : IBRAHIM NUHAGIC
18 (ASSERMENTÉ)
19 INTERROGÉ PAR Me NICE (interprétation) :
20 Q. Monsieur, pourriez-vous décliner votre identité ?
21 R. Je m’appelle Ibrahim Nuhagic.
22 Q. Monsieur Nuhagic, avant que n’éclate le
23 conflit, est-ce que vous habitiez à Ocenici, un village
24 dont la population était uniquement musulmane ? C’était un
25 village qui se trouvait dans la municipalité de Busovaca.
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1 R. Oui.
2 Q. Je pense qu’il y avait à peu près neuf
3 familles musulmanes qui vivaient dans huit maisons ?
4 R. Oui. Il y avait huit familles. Je ne
5 pourrais pas maintenant vous citer tous les noms de ces familles.
6 Me NICE (interprétation) : Peut-on placer sur le rétroprojecteur à
7 l’intention du témoin la seule pièce que nous allons utiliser, qui est
8 la pièce Z1694 ?
9 Q. C’est une partie d’une carte que nous connaissions déjà bien et si
10 vous voyez le bas de la carte, est-ce qu’on peut placer ce bas de carte
11 dans le cadre du rétroprojecteur. Est-ce qu’on voit « Ocenici »
12 inscrit à proximité de « Donje Polje » ?
13 R. Oui.
14 Q. Est-ce que Ocenici était proche de la caserne de Draga ?
15 R. Oui.
16 Q. Sous le contrôle de qui se trouvait-il avant le conflit ?
17 R. Du HVO.
18 Q. Le 27 janvier 1993, est-ce que des soldats du HVO sont venus dans
19 votre village ? Est-ce qu’ils ont fouillé les maisons du village ?
20 Est-ce qu’ils ont confisqué toutes les armes, dont des fusils de chasse
21 ainsi que des mitraillettes ?
22 R. Oui.
23 Q. Comment étaient-ils vêtus ?
24 R. Ils étaient en tenue de camouflage et ils
25 arboraient des insignes du HVO.
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1 Q. Est-ce qu’ils avaient quelque chose sur le visage ?
2 R. La plupart avait des cagoules.
3 Q. Est-ce que tous les hommes du village ont été placés en détention
4 et ont été emmenés finalement au camp de Kaonik en passant par le poste
5 de police de Busovaca, Kaonik que nous voyons au sommet de la carte ?
6 R. Oui.
7 Q. Au cours de cette période, nous parlons ici du temps qu’il a fallu
8 pour passer du village à Kaonik, est-ce que vous deviez pendant tout ce
9 temps garder les mains en l’air, derrière la tête ?
10 R. Oui, pendant ce temps-là et tout le temps jusqu’au camp.
11 Q. Est-ce que vous avez subi des mauvais
12 traitements ou fait l’objet de menaces ?
13 R. Oui.
14 Q. Quelle était la nature du mauvais traitement
15 et la nature des menaces ?
16 R. On nous a frappés, on nous a menacés qu’ils allaient nous couper
17 des oreilles et qu’ils allaient nous égorger. Ils nous ont notamment
18 passer à tabac en allant vers le bus. On ne pouvait pas monter dans le
19 bus sans qu’on nous frappe et quand on descendait de bus, une fois de
20 plus, on nous passait à tabac. Il y avait, des deux côtés, des soldats
21 et puis, en passant, on nous a frappés.
22 Q. Je crois qu’il y avait un groupe de soldats qui est sorti d’un
23 véhicule où il y avait une arme qui était montée, faite en canon, et
24 ils ont été particulièrement durs, n’est-ce pas ?
25 R. Oui, c’est ça. C’était à la gare de bus à Busovaca.
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1 Q. À propos, au moment où se produisaient ces choses à Busovaca, est-
2 ce qu’il y avait des piétons dans la rue qui ont pu assister à ce qui
3 se passait ?
4 R. C’était la nuit. Il n’y avait que l’armée du HVO.
5 Q. Je vous remercie. Est-ce qu’apparemment, à Kaonik, vous n’avez pas
6 été battu mais que vous avez entendu d’autres prisonniers qui s’y
7 trouvaient qui, eux, criaient ?
8 R. Oui, parce qu’on m’a frappé et puis j’ai eu
9 une lésion au niveau de la colonne vertébrale.
10 Q. Est-ce que vous avez appris que des
11 prisonniers étaient emmenés pour creuser des tranchées ?
12 R. La plupart allait creuser des tranchées, pratiquement tous ceux qui
13 étaient aptes pour le faire, à part moi-même et quelques mineurs.
14 Q. Est-ce que le CICR est intervenu et les prisonniers, vous y
15 compris, ont été libérés début février ?
16 R. Oui. Ils sont venus mais on n’a pas été
17 toujours remis en liberté, pas tout de suite.
18 Q. Est-ce que finalement, vous l’avez été ?
19 R. Oui.
20 Q. Au mois d’avril et plus précisément le 16 avril, est-ce que vous
21 avez pu aussi bien voir qu’entendre le bruit et les coups de feu qui se
22 donnaient à proximité ?
23 R. Oui. On a vu Kula, Polom, Solakovici. C’est
24 en provenance de ces villages qu’on avait tiré.
25 Q. Est-ce que vous connaissiez ou est-ce que vous aviez connaissance
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1 du fait qu’un certain Mirko Cosic vivait dans la région ?
2 R. Oui.
3 Q. Quel poste occupait-il ou quel métier exerçait-il à l’époque ?
4 R. Il avait une unité. C’était une unité
5 d’intervention dénommée Jokeris.
6 Q. Est-ce que vous avez eu l’occasion de voir
7 cet homme à la télévision en avril 1993 ?
8 R. Oui. Je l’ai vu à la gare d’autobus.
9 Q. Que disait-il à l’occasion de cette émission ?
10 R. Il y avait des animateurs, un cameraman. On lui a demandé si les
11 soldats lui obéissaient et lui, il a dit que tout le monde lui
12 obéissait et qu’il faisait ce qu’il fallait, travailler. Donc, il
13 avait parlé de Kula, de Polom, de Loncari où ils ont fait un bon
14 travail et le cameraman lui a demandé ce qu’ils ont fait et quel était
15 ce travail-là. Donc, il avait tout simplement dit que c’est
16 le temps qui le montrera.
17 Q. Le 19 avril 1993, vous trouviez-vous dans votre village au moment
18 où des soldats sont revenus dans ce village ?
19 R. Oui.
20 Q. Comment étaient-ils vêtus et à quelles unités appartenaient-ils ?
21 R. Je sais que Nikica Grubesic était commandant, commandant principal,
22 commandant en chef mais je sais que c’était des soldats du HVO.
23 Q. Comment étaient-ils vêtus ?
24 R. Ils portaient des uniformes de camouflage,
25 des uniformes militaires et ils arboraient les insignes du HVO.
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1 Q. Est-ce que vous avez parlé de cagoules ?
2 R.Oui, ils avaient des cagoules.
3 Q. Comment s’est déroulée l’attaque ?
4 R. Bien, ils sont arrivés tout simplement. Ils sont rentrés dans le
5 village. Ils tuaient tous ceux qu’ils ont trouvés. Ils incendiaient
6 des maisons. Ils tuaient le bétail dans des étables. Ceux qui ont
7 réussi à s’enfuir, ils se sont sauvés. Ceux qu’ils ont trouvés, ils
8 les ont tués. Mes voisins, qui ont réussi à se sauver, ils se
9 trouvaient dans un abri. Par conséquent, ils n’ont pas pu les trouver.
10 Q. Comment ont-ils incendié les maisons ?
11 R. La plupart du temps, ils avaient des
12 munitions, enfin, des balles incendiaires.
13 Q. Où vous trouviez-vous au moment de l’attaque ?
14 R. J’étais tout à fait par hasard dans les toilettes qui étaient à
15 l’extérieur et au moment où je voulais sortir des toilettes, il y avait
16 ma nièce qui était devant la porte de ma maison qui m’a dit : « Oncle,
17 il faut que tu te sauves, il ne faut pas que tu restes parmi nous »
18 et moi, je l’ai fait. J’ai commencé à fuir. Il y avait plusieurs
19 balles qui ont été tirées dans ma direction mais moi, j’ai fait du
20 zigzag et puis je suis tombé. Le soldat qui tirait après moi, il a
21 pensé qu’il m’avait touché.
22 Q. Je pense que finalement, vous êtes rentré
23 chez vous. Est-ce exact ?
24 R. C’est exact. Je suis revenu chez moi. La nuit est tombée. On
25 n’entendait plus rien et c’est là où je suis rentré chez moi pour voir
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1 ma mère, ma sœur, les deux filles de mon frère qui sont restées à la
2 maison et qui ont été tuées. Je me suis rendu à la maison et il n’y
3 avait plus de feu. Elles ont essayé de se sauver mais c’est par
4 rafales qu’on les a tuées juste devant la maison et elles ont été
5 incendiées.
6 J’avais beaucoup de peine, bien évidemment, et puis j’ai essayé de
7 faire quelque chose pour que le feu ne se déclenche plus et j’ai vu
8 également mon oncle qui m’a dit qu’il ne fallait absolument pas que je
9 fasse quoi que ce soit. De toute façon, ce qui a été fait, ça a été
10 fait.
11 Quand j’ai vu ceux qui m’étaient proches et qui étaient mes victimes,
12 moi, je ne pouvais que regretter de ne pas avoir été parmi elles.
13 Q. Votre femme était là ?
14 R. Oui, ma mère, mon épouse, ma sœur et deux filles de mon frère.
15 Q. Vous avez parlé de cet oncle qui vous avait parlé. Est-ce qu’il
16 vous avait dit qu’il avait essayé de sortir son bétail de l’étable en
17 flammes et qu’on lui avait tiré dessus ?
18 R. Oui. Ils ont tiré en provenance de ma cour au moment où il
19 s’acheminait vers son étable pour essayer de sauver son bétail. Ils
20 ont tiré sur lui et il a été blessé.
21 Q. Vous a-t-il dit que sa famille avait été tuée par une rafale de
22 mitraillettes alors qu’elle essayait de quitter la maison ?
23 R. Oui.
24 Q. [Question non traduite]
25 R. C’est moi. Je n’étais pas loin par rapport à
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1 ma maison et non plus pas loin par rapport à sa maison.
2 Q. Dans le cadre de cette attaque, est-ce que
3 vous avez entendu des soldats qui s’adressaient la parole ?
4 Est-ce que vous les avez entendu utiliser certains noms ?
5 R. La plupart c’était des surnoms : Zara, Kole, Mago ; c’était des
6 surnoms : Cigo. Voilà ! C’était des surnoms que je connaissais, que
7 je connaissais bien. Je connais les noms de ces gens-là.
8 Q. Est-ce que vous connaissiez l’une quelconque de ces personnes ?
9 Est-ce que vous saviez qui ces personnes étaient ?
10 R. Je les connaissais avant mais comme ils portaient des cagoules,
11 enfin, ils avaient des peintures sur le visage…
12 Q. Ce Zarko, est-ce qu’on le connaissait aussi sous le nom de Cigo ?
13 R. Oui.
14 Q. Zeljo, qui était-ce ?
15 R. Zeljo Vujica.
16 Q. Est-ce qu’il y avait aussi un certain Zarko
17 Cosic ou est-ce que c’était une seule et même personne ?
18 R. Kologranic, pas Cosic.
19 Q. Et puis il y avait un certain Mladjo ?
20 R. Kologranic.
21 Q. Est-ce qu’on le connaissait sous un autre
22 surnom ou sous un autre nom aussi ?
23 R. Son surnom était Kole. En général, on l’appelait Kole.
24 Q. Est-ce qu’il y avait aussi un Zarko Kologranic ?
25 R. Oui, mais ce sont les trois frères : Kole, Ranko, Zeljo.
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1 Q. Avant cette attaque, est-ce que vous auriez entendu rapporter des
2 propos qu’aurait tenus ce Zarko Cosic ?
3 R. Quelques jours auparavant, il s’était rendu
4 dans le village et il a dit que si jamais quelque chose
5 arrivait à sa famille, que notre village allait être incendié.
6 Q. À qui a-t-il cela ?
7 R. Il l’a dit à ma sœur qui a été tuée.
8 Q. Je crois qu’à la suite de cette attaque, vous
9 avez passé environ trois mois dans la maison d’un parent à Busovaca ?
10 R. À Busovaca et à Skradno.
11 Q. Mais je pense que vous avez été chassé des lieux où vous viviez au
12 moins trois fois ? C’est le HVO qui vous en a chassé ?
13 R. Oui, c’est le HVO qui l’a fait.
14 Q. Monsieur, pourriez-vous nous dire de quelle façon vous avez appris
15 qui étaient les auteurs de cette attaque ? Je vais vous demander de ne
16 pas donner aussitôt le nom, le nom de l’homme qui, d’après vous, était
17 à la tête de cette attaque, mais dites-nous d’abord de quelle façon
18 vous avez appris cela. Qui vous a dit qui était l’auteur ou le
19 responsable de cette attaque ?
20 R. En ce qui concerne les attaques, ça ne pourrait pas être quelqu’un
21 d’autre que Dusko Grubesic qui avait commandé l’unité. On sait très
22 bien qui lui donnait des ordres.
23 Q. Avant de parler de ces noms, j’aimerais que vous disiez aux Juges
24 comment vous aviez appris cela ou comment vous saviez que c’était le
25 cas. Pourriez-vous simplement expliquer aux Juges comment il se fait
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1 que vous saviez tout cela ? Était-ce quelque chose que quelqu’un
2 vous avait dit ou quelque chose que vous avez vu vous-même ? Expliquez
3 simplement aux Juges ce qu’il en était.
4 R. Je ne sais pas. Enfin, je n’ai pas tout à
5 fait bien compris votre question.
6 Q. Je m’en excuse. Je pense que les Juges aimeraient savoir comment
7 Il se fait que vous connaissiez les responsables de cette attaque.
8 Est-ce que vous pourriez nous aider ? Est-ce que c’est quelque chose
9 que quelqu’un vous a raconté ou est-ce que c’est quelque chose que vous
10 avez pu deviner ? Par exemple, est-ce que vous auriez vu les soldats
11 qui avaient mené cette attaque ?
12 Est-ce que vous pourriez nous donner des explications ?
13 R. C’est que j’ai vu tout simplement à la télévision Zoran Maric et je
14 l’ai entendu dire qu’une seule plante devait pousser dans cet espace.
15 Au début, on n’a pas tout à fait bien compris ce qu’il voulait dire par
16 là et ce n’est que par la suite, quand les événements ont commencé à se
17 dérouler, que nous l’avons compris.
18 Me NICE (interprétation) : Il s’agit du
19 paragraphe numéro 18, Messieurs les Juges.
20 Q. Quand avez-vous vu Zoran Maric, qui était, je pense, président de
21 la municipalité de Busovaca ? Quand l’avez-vous vu dire cela ?
22 R. C’est au moment où les soldats prêtaient serment au stade de
23 Busovaca. Il a lu, à ce moment-là, ce qu’il devait faire, comment il
24 devait faire et moi, je n’avais pas le temps pour regarder la
25 télévision. Moi, je suis paysan et puis j’étais à la campagne et je
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1 n’avais pas beaucoup de temps pour regarder la télévision. Par
2 conséquent, on aurait pu en entendre bien plus. Ceux qui avaient le
3 temps pour regarder la télévision, ils en ont entendu un peu davantage.
4 Q. Vous nous dites que Dusko Grubesic était
5 l’homme responsable. Comment le savez-vous ?
6 R. Il était commandant de l’unité en question.
7 Q. Très bien ! Comment savez-vous que c’est cette unité-là ?
8 Pourriez-vous la nommer, la citer et comment savez-vous que c’est cette
9 unité qui s’est rendue coupable de ces meurtres ?
10 R. Il n’y avait pas d’autres unités.
11 Q. Est-ce que cette unité était proche de votre
12 village de Ocenici à l’époque ?
13 R. Le commandement se trouvait à Busovaca. C’était à deux kilomètres
14 et demi, jusqu’à trois kilomètres par rapport à mon village.
15 Q. Est-ce que vous comprenez pourquoi Dusko Grubesic a donné un tel
16 ordre pour que l’attaque soit déclenchée ? Connaissez-vous ses raisons?
17 R. Ça, je ne le sais pas.
18 Q. Est-ce que vous connaissez le nom d’autres personnes qui ont
19 participé à cette attaque à titre de dirigeants, de chefs ou
20 d’exécutants ?
21 R. Je connais Pasko Ljubicic qui était chef du
22 groupe dans le village.
23 Q. Comment se fait-il que vous le sachiez ?
24 R.Je l’ai appris plus tard.
25 Q. Vous l’avez appris de qui ?
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1 R. Je l’ai appris par un certain nombre de ceux que je connaissais,
2 par mes connaissances, par les soldats également. Je les ai rencontrés
3 dans la rue puis je posais des questions et puis on en parlait.
4 Q. Vous parlez de certains de leurs soldats.
5 Est-ce que ce sont des soldats qui vous ont dit avoir participé à
6 l’attaque ou est-ce que ces soldats vous ont dit qu’ils avaient appris
7 que l’attaque avait eu lieu ?
8 R. Des soldats qui n’ont pas pris part à l’attaque.
9 Q. Je vous remercie. Ces soldats qui vous ont
10 raconté tout cela, à quelle unité appartenaient-ils ?
11 R. Ils appartenaient à l’unité de Nikica Grubesic.
12 Q. Est-ce que c’est la brigade Zrinjski ?
13 R. Oui, oui.
14 Q. A-t-on dit quoi que ce soit à propos d’un rapport éventuellement
15 entre cette attaque et un incident qui s’était produit à la caserne
16 Draga ?
17 R. Je n’ai pas compris la question.
18 Q. Je m’en excuse une fois de plus. Vous avez
19 entendu parler de cette attaque…
20 Me NAUMOVSKI (interprétation) : Excusez-moi. Nous avons une
21 objection. Il s’agit de double ouï-dire. Le témoin a dit qu’il ne
22 connaissait pas les raisons pour lesquelles le commandant avait délivré
23 l’ordre pour attaquer le village, alors que j’ai le sentiment qu’on
24 veut absolument lui faire dire quelque chose qu’il a déjà dit, qu’il a
25 déjà répondu.
Page 13142
1 Me NICE (interprétation) : Nous avons affaire à un témoin, Messieurs
2 les Juges, qui, manifestement, a du mal à comprendre la technique que
3 nous utilisons ici au prétoire où des questions sont posées et il doit
4 répondre et j’espère que la question que j’ai posée n’est pas du tout
5 ni vexatoire, ni trop dirigiste. Je pense qu’elle devrait permettre à
6 cet homme de mieux se souvenir et je pense qu’il est en mesure de nous
7 répondre.
8 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Répétez la question précédente.
9 Êtes-vous au courant de motifs ou de raisons qui auraient présidé à
10 cette attaque ?
11 Me NICE (interprétation) :
12 Q. Vous avez entendu la question que vous a posée le Président de la
13 Chambre, Monsieur le Témoin. Êtes-vous au courant d’éventuelles
14 raisons qui auraient expliqué cette attaque ?
15 R. La raison est très claire. Ce n’est pas mon village uniquement qui
16 était en question mais un peu plus loin également. Il fallait nettoyer
17 des musulmans nos villages.
18 Me NICE (interprétation) : Je vais passer à autre chose, Monsieur le
19 Président. Nous sommes au paragraphe 14 du résumé.
20 Me NAUMOVSKI (interprétation) : Monsieur le Président, excusez-moi.
21 Avant de commencer, pour ce qui concerne ce point, ce paragraphe, nous
22 avons cette objection une fois de plus concernant le double ouï-dire.
23 Il faudrait se référer ici à l’Article 89(D) car ce n’est pas les
24 éléments de preuve qui sont présentés de la manière comme nous
25 l’entendons.
Page 13143
1 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Établissez la base de votre
2 question.
3 Me NICE (interprétation) : Effectivement, le libellé du paragraphe
4 induit peut-être en erreur. Il se peut que le sujet soit plus direct
5 que ce qu’il n’apparaît ici dans la lecture.
6 Q. Monsieur Nuhagic, connaissez-vous une femme
7 répondant au nom de Hasija Beslic ?
8 R. Oui.
9 Q. Répondez par un simple oui ou non à cette
10 question. Vous souvenez-vous d’un moment où vous parliez
11 avec cette femme de ce qu’on appelait des papiers de
12 sécurité, des papiers qui étaient délivrés à l’intention
13 des musulmans ? Répondez par oui ou par non. Est-ce qu’à
14 une reprise, vous avez eu une discussion avec elle à propos
15 de ces papiers ?
16 R. Oui. Moi, j’ai eu également ce document.
17 Tous les autres, d’ailleurs, l’avaient.
18 Q. Très bien ! Est-ce que cette dame et vous, vous avez vu quelqu’un
19 d’autre qui vous avait parlé lors de cette conversation que vous avez
20 eue avec cette femme à propos des documents, des papiers ?
21 R. Oui.
22 Q. Qui était cette autre personne ?
23 R. C’était Dario Kordic.
24 Q. Parlons maintenant avec un peu plus de détails de ceci. Ces
25 documents, ces papiers étaient délivrés par qui et pourquoi ?
Page 13144
1 R. Dario Kordic.
2 Q. Ces documents, quelle fonction étaient-ils censés remplir ?
3 R. Oui. Quand les soldats venaient le soir ou, éventuellement, quand
4 ils venaient nous voir le jour, il fallait montrer ce papier pour
5 qu’ils ne nous dérangent pas.
6 Q. D’après vous, ces papiers, ces documents ont-ils été efficaces,
7 ont-ils bien servi l’objectif qu’ils étaient censés servir ?
8 R. Non.
9 Q. Vous avez donc eu cette conversation avec Madame Beslic. Cette
10 conversation, sur quoi a-t-elle porté ?
11 R. Nous avons parlé. Moi aussi, j’étais présent au
12 moment où ils ont travaillé ensemble. Il ne faut pas oublier
13 qu’ils ont travaillé à Vatrostalna ensemble avec Dario Kordic.
14 Q. Vous parlez là de Hasija Beslic et de Dario Kordic ?
15 R. Oui.
16 Q. Et qu’est-ce que Madame Beslic a dit à Kordic
17 à propos de ces papiers et qu’a-t-il répondu ?
18 R. Elle a dit que ces documents n’avaient aucune valeur
19 et qu’ils ne peuvent pas véritablement nous êtres utiles même s’ils
20 nous ont été délivrés mais lui, il a riposté que les documents avaient
21 de la valeur et que, par conséquent, rien de ce qui se passait
22 auparavant ne se reproduirait plus.
23 Q. Est-ce qu’elle lui a donné des exemples de ce
24 qui s’était passé et de ce qui avait été contraire, en
25 fait, à la protection que devaient fournir ces documents ?
Page 13145
1 R. Oui. Elle lui a dit que, de toute façon, ces documents n’avaient
2 aucune valeur, que les soldats venaient, qu’ils nous chassaient des
3 maisons et puis ensuite, on nous installait dans une seule maison,
4 plusieurs familles dans une seule maison. Lui, il nous a dit que ça ne
5 se reproduirait plus mais la nuit qui suivait, la troisième nuit
6 également, ceci s’est reproduit. Par conséquent, ils ne se sont pas
7 arrêtés, ils ont poursuivi.
8 Q. Mais la maison de qui ? Était-ce votre
9 maison ou une maison appartenant à d’autres personnes ?
10 R. C’était la maison de mes cousins parce que j’ai été chassé de la
11 maison d’un de mes cousins, de l’autre, du troisième également et puis
12 ensuite, nous nous sommes tous rendus de cette troisième maison à
13 Skradno. On nous a conduits, pour dire.
14 Q. Lorsqu’on vous a chassés, est-ce qu’à ce moment-là, on a dit quoi
15 que ce soit des griefs que vous aviez formulés à Dario Kordic ?
16 R. Eh bien, ces soldats qui venaient nous chasser de la maison, ils
17 nous ont dit : « Vous êtes allés vous plaindre à Dario Kordic. Il vous
18 a donné des papiers », alors que c’est lui qui nous a autorisés et qui
19 nous a permis de faire ce que nous faisons.
20 Q. Est-ce que vous savez à quelles unités ou à
21 quelle unité appartenaient ces soldats ?
22 R. À l’unité de Dusko Grubesic dénommée Zrinjski.
23 Q. Cet incident qui concerne Hasija Beslic et
24 les quelques nuits qui ont suivi cet entretien, pourriez-
25 vous les situer dans le temps ? Au cours de quel mois cela
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1 s’est-il produit ? Êtes-vous en mesure de le faire ?
2 Évidemment, si vous ne pouvez pas, ne faites pas de conjectures.
3 R. C’était le mois de juin ou, éventuellement, début juillet.
4 Q. En août 1993, est-ce qu’on vous a emmené de l’endroit où, à ce
5 moment-là, vous étiez jusqu’au village de Skradno ?
6 R. On m’a emmené, moi-même et puis mes cousins,
7 les trois de mes cousins avec leurs familles.
8 Q. Alors que vous étiez à Skradno, est-ce que la
9 région était contrôlée par le HVO ?
10 R. Oui.
11 Q. Toujours à Skradno, est-ce que des hommes ont été emmenés creuser
12 des tranchées à plusieurs endroits comme Strane, Bare, Kula ?
13 R. Oui, oui, oui, c’est connu.
14 Q. Vous, est-ce qu’on vous a emmené creuser des
15 tranchées ou est-ce qu’on vous a laissé à Skradno ?
16 R. Moi, j’ai été blessé et puis j’avais l’âge également. C’est la
17 raison pour laquelle ils ne m’ont pas demandé d’aller creuser des
18 tranchées mais tous les autres qui étaient plus jeunes, ils l’ont fait.
19 Q. Pendant toute cette période, est-ce qu’il
20 vous est arrivé de regarder la télévision ?
21 R. Non. On n’avait pas cette possibilité. On ne pouvait pas regarder
22 la télévision. Il n’y avait pas de courant électrique. On ne pouvait
23 pas suivre la télévision.
24 Q. Je me suis sans doute, une fois de plus, mal
25 exprimé. Nous parlons de toute cette période qui commence
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1 avant votre première détention. Est-ce qu’à ce moment-là,
2 il vous est arrivé de regarder la télévision de Busovaca ?
3 R. Oui. C’était 1993 et puis en 1992 également, il y avait uniquement
4 des émissions qui passaient à la télévision de Busovaca entre 16 h 00
5 et 18 h 00. C’était la télévision croate HTV.
6 Q. Est-ce qu’il vous est arrivé de voir Kordic à la télévision ?
7 R. Oui.
8 Q. Y avait-il d’autres personnalités politiques
9 ou militaires que vous auriez vues à la télévision ?
10 R. J’ai pu voir Dario Kordic, Blaskic, Tihomir
11 Blaskic, Ignac Kostroman, Anto Valenta.
12 Q. Quel était le poste ou le grade de Monsieur
13 Kordic dans le HVO, pour autant que vous puissiez en juger ?
14 R. Voyez-vous, il avait grimpé un petit peu des échelles. Moi, je
15 n’ai pas vu le grade moi-même mais on m’a dit qu’il avait obtenu le
16 grade du Colonel.
17 Q. Vous dites qu’il a grimé des échelons un à la fois. Où est-ce
18 qu’il a commencé finalement cette ascension, dans quelle organisation ?
19 R. Il était au début un employé au niveau de la mairie.
20 Q. Est-ce qu’à un moment donné, vous avez appris qu’il était impliqué
21 dans un parti politique et si c’était le cas, dans quel parti était-il?
22 R. Je sais qu’à l’époque, quand il travaillait
23 encore dans sa société, il était membre du Parti communiste.
24 Q. À la télévision de Busovaca, on l’associait à
25 un parti politique, à un groupe politique particulier ?
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1 R. Non. En 1992, mi-1992 et 1993, mi-1992, quand il y avait des
2 bombardements par l’armée des agresseurs serbes, c’est là où il a
3 commencé à porter la tenue militaire.
4 Q. Dans le cadre d’une émission de la télévision
5 de Busovaca, a-t-on parlé de façon générale de l’État de
6 Croatie ? Est-ce que vous vous en souvenez ou pas ?
7 R. Non, je ne m’en souviens pas. En revanche, je me souviens qu’au
8 moment où on nous a chassés vers le camp, il y avait un certain nombre
9 de soldats qui criaient en disant que c’était la Croatie.
10 Q. Est-ce que vous vous souvenez d’actualités télévisées au cours
11 desquelles on aurait parlé de pommes de terre ?
12 R. Oui.
13 Q. Vous souvenez-vous du moment où ça s’est passé et qui intervenait ?
14 R. C’était début du mois de juin. Dario a dit qu’il fallait permettre
15 que des pommes de terre soient semées et au moment où la récolte
16 viendra, on allait décider qui allait organiser la récolte.
17 Q. On parlait de pommes de terre qu’on plantait.
18 Qui les avait fournies ces pommes de terre ?
19 R. C’était l’aide humanitaire.
20 Me NICE (interprétation) : Je vous remercie. Monsieur, veuillez
21 attendre un instant.
22 Je pense qu’on va vous poser d’autres questions.
23 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Je vous en prie, Me Naumovski.
24 Me NAUMOVSKI (interprétation) : Merci, Monsieur
25 le Président.
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1 J’attendais que vous me donniez la parole.
2 CONTRE-INTERROGÉ PAR Me NAUMOVSKI
3 (interprétation) :
4 Q. Monsieur Nuhagic, j’aimerais me présenter, si vous voulez bien. Je
5 m’appelle Mitko Naumovski, je suis avocat de Zagreb et je défends
6 Monsieur Kordic. Je vais donc vous poser quelques questions.
7 Puisque nous nous comprenons vous et moi en raison du fait que nous
8 parlons la même langue, je vous demanderais de ménager une pause après
9 que je vous pose mes questions, de façon à permettre l’interprétation
10 vers l’anglais et les autres langues et j’attendrai également un petit
11 peu après votre réponse à mes questions.
12 Alors, commençons par quelques questions au sujet de l’endroit d’où
13 vous venez. Vous habitiez dans le village de Ocenici, n’est-ce pas ?
14 R. Oui.
15 Q. Est-ce que le nom de Nuhagici était le nom que portait le quartier
16 dans lequel vous habitiez ?
17 R. Oui.
18 Q. Dans ce quartier, il y avait à peu près huit maisons musulmanes,
19 n’est-ce pas ?
20 R. Oui.
21 Q. Mais dans l’autre partie du village, à l’autre bout du village de
22 Ocenici, qui habitait là ?
23 R. Les Vujica.
24 Q. Donc, des familles croates ?
25 R. Oui.
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1 Q. Combien de maisons y avait-il à cet endroit ?
2 R. Quatre maisons. C’était celles qui étaient les plus proches de
3 l’endroit où j’habitais, moi.
4 Q. Il y a une forêt, n’est-ce pas, une grande
5 forêt qui s’appelle Polom à l’ouest de votre village ?
6 R. Oui.
7 Q. Conviendriez-vous avec moi que la ligne de
8 défense du HVO allait vers l’ouest du village précisément,
9 c’est-à-dire vers cette forêt de Polom, au mois de janvier 1993 ?
10 R. Oui.
11 Q. Compte tenu de la situation géographique du
12 village, et cætera, il n’y avait pas une ligne de front
13 classique. Il y avait, en fait, uniquement des patrouilles ?
14 R. Il y avait une ligne classique.
15 Q. Voulez-vous dire qu’il y avait en permanence
16 des soldats qui se trouvaient stationner à cet emplacement ?
17 R. Oui.
18 Q. Au mois de janvier 1993, combien de jeunes gens de Nuhagici
19 sont-ils partis du village avant ce que vous venez de raconter, c’est-
20 à-dire les événements du mois de mars ?
21 R. Cinq.
22 Q. Et nous sommes d’accord sur le fait que ces
23 cinq jeunes gens étaient membres de la Défense territoriale ?
24 R. Ils patrouillaient, ils faisaient partie de la garde villageoise
25 dans le village, effectivement.
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1 Q. Et au mois de janvier, ils sont partis et ils sont allés à Kacuni ?
2 R. Oui. Ceux qui avaient de la famille à Kacuni, ils y sont allés, à
3 Fojnica aussi. Cela dépendait de l’endroit où se trouvaient leurs
4 parents.
5 Q. Conviendrez-vous avec moi qu’au mois de
6 janvier, donc avant les événements du 27, de l’autre côté
7 de la ligne de front tenue par le HVO se trouvaient des
8 soldats appartenant à la Défense territoriale qui donc
9 tenaient des positions face au HVO ?
10 R. Ça, je ne le sais pas parce que j’étais dans
11 la région contrôlée par le HVO.
12 Q. Je sais que vous n’étiez pas un soldat, vous
13 l’avez déjà dit dans votre déposition, mais peut-être
14 pourrez-vous répondre aux quelques questions que j’ai à
15 vous poser au sujet de vos connaissances en matière militaire.
16 Ces jeunes gens, venaient-ils de nuit dans votre
17 village, en secret ?
18 R. Non, non.
19 Q. Très brièvement à présent, quelques questions
20 au sujet du séjour que vous avez fait dans la prison de
21 Kaonik. Vous étiez blessé, donc, vous avez vu un médecin,
22 n’est-ce pas ?
23 R. Oui.
24 Q. On vous a emmené au centre médical de Busovaca, n’est-ce pas ?
25 R. Oui.
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1 Q. Pendant le séjour que vous avez fait à
2 Kaonik, selon vous, personne ne vous a fait subir la
3 moindre violence et en fait, on vous a traité relativement
4 bien, n’est-ce pas ?
5 R. Oui.
6 Q. Je crois vous avoir déjà entendu dire que
7 l’on ne vous a pas emmené creuser des tranchées ?
8 R. Non parce que j’étais blessé et que j’avais
9 vu un médecin, après quoi on m’a ramené à la caserne, mais
10 je n’avais pas le droit de dire ce qui se passait, ce qui
11 m’était arrivé. J’ai menti, en fait. J’ai dit que j’étais
12 tombé dans l’étable quand j’étais allé m’occuper du bétail
13 parce que si j’avais dit la vérité, il me serait arrivé la
14 même chose qu’aux autres prisonniers, c’est-à-dire qu’on
15 aurait recommencer à me battre.
16 Q. Monsieur Nuhagic, mais si je vous comprends
17 bien, personne ne vous a dit que vous n’aviez pas le droit
18 de dire la vérité. C’est le résultat de votre réflexion ?
19 R. Je n’ai pas pu rentrer seul dans le cabinet
20 du médecin quand on m’a emmené le voir. Je n’ai donc pas
21 pu lui dire la vérité.
22 Q. Bien. Nous pouvons passer à un autre sujet,
23 à savoir l’attaque qui s’est déroulée au mois d’avril et
24 que vous avez déja décrite. Vous avez parlé d’un certain
25 Zarko Josic ?
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1 R. Oui.
2 Q. Pouvons-nous dire à son sujet qu’il était
3 d’une certaine façon votre voisin ? Où habitait-il ?
4 R. Près de Draga, non loin de la route.
5 Q. Vous avez dit aujourd’hui ce qu’il avait dit
6 à votre sœur quelques jours avant ces événements ?
7 R. Oui.
8 Q. Sommes-nous d’accord sur le fait qu’il lui a
9 dit qu’il allait en personne mettre en application cette
10 menace si certains événements survenaient ?
11 R. Oui.
12 Q. Et vous l’avez reconnu comme étant l’une des
13 personnes, l’un des hommes qui est arrivé dans le village ?
14 R. Je l’ai reconnu parce qu’il était déjà
15 surnommé Cigo avant ces événements.
16 Q. Vous avez mentionné le nom de Grubesic
17 aujourd’hui mais accompagné de deux prénoms différents.
18 Vous avez parlé de Nikica et de Dusko. Vous parlez de deux
19 personnes différentes ?
20 R. C’est possible, Dusko Grubesic. Il est
21 possible que j’ai parlé aussi de Nikica mais c’est Dusko
22 Grubesic.
23 Q. Qui était Dusko Grubesic ?
24 R. Le commandant de l’unité.
25 Q. Vous voulez parler de la brigade de
Page 13154
1 Busovaca ?
2 R. Oui.
3 Q. Bien. Mais alors, qui est Nikica Grubesic ?
4 R. Il est possible que j’ai…
5 Q. Que vous ayez confondu, que vous ayez fait
6 une erreur ou quoi ?
7 R. Il est possible que j’ai fait une erreur.
8 Q. Très bien. Alors, si je vous comprends bien,
9 vous dites que puisque Dusko Grubesic était le commandant
10 de la brigade Nikola Subic-Zrinjski de Busovaca, c’est lui
11 qui a donné les ordres ?
12 R. Oui.
13 Q. Mais soyons clairs : Personne ne vous a dit
14 explicitement que c’est lui qui donnait les ordres ?
15 R. Mais les soldats n’auraient pas imaginé eux-
16 mêmes ce qu’ils ont fait s’ils n’avaient pas reçu un ordre
17 pour faire ce qui a été fait.
18 Q. Donc, vous dites aujourd’hui que la
19 conclusion que vous avez tirée à son sujet tire de
20 discussions que vous avez eues après les événements du mois
21 d’avril 1993 ?
22 R. [Aucune réponse audible]
23 Q. Vous m’avez compris ?
24 R. Je vous en prie.
25 Q. Je vais répéter ma question et excusez-moi si
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1 je ne me suis pas bien fait comprendre. Donc, vous estimez
2 – c’est une conclusion que vous tirez – que Dusko Grubesic
3 était l’auteur de ces ordres et cette conclusion est issue
4 de discussions que vous avez eues avec un certain nombre de
5 personnes après les événements ?
6 R. Oui, parce qu’il y a un obus qui est tombé
7 non loin de Draga et deux personnes ont été tuées, et Ivo
8 Kristo a dit que l’obus venait de l’autre côté, c’est-à-
9 dire du secteur situé au-dessus de Nuhagici et ils ont
10 commencé à s’enfuir, mais au niveau du commandement à
11 Tisovac, ils ont été arrêtés et on leur a demandé où ils
12 allaient. Ils ont parlé de cet obus qui venait du secteur
13 situé au-dessus de nous et à ce moment-là, Ivo Kristo leur
14 a dit de retourner d’où ils venaient parce qu’il n’y aurait
15 plus d’obus qui arriverait de Nuhagici.
16 Q. Comment savez-vous cela ?
17 R. Je le sais parce que mon frère a écouté une
18 conversation quand ils ont arrêté un tracteur et qu’ils les
19 ont renvoyés à Busovaca. Il a entendu Kristo dire ça.
20 Q. Et qui l’a dit à votre frère ?
21 R. C’est lui qui a entendu.
22 Q. Il a entendu Ivo en train de parler ?
23 R. Ils étaient là sur la route et la maison
24 était juste à côté de la route.
25 Q. Dites-moi, je vous prie : À quel moment a eu
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1 lieu ce pilonnage sur la caserne de Draga, à quelle date,
2 quel jour ?
3 R. Eh bien, c’était le même jour, le 19 avril.
4 Q. Monsieur Nuhagic, j’ai compris ce que vous
5 avez dit aujourd’hui à ce sujet mais je dois dire que
6 lorsque vous avez fourni votre déclaration aux enquêteurs
7 du Tribunal le 10 septembre 1995, c’était votre première
8 déclaration au Tribunal, je suppose que vous vous rappeliez
9 bien ce premier entretien.
10 Vous avez dit clairement – je cite : « J’ai lu
11 dans un livre que Dusko Grubesic était le commandant de
12 l’unité du HVO et que c’est lui qui a ordonné l’attaque sur
13 Ocenici. » Fin de citation.
14 « Dans un livre, je l’ai lu » – je peux vous
15 montrer le passage – c’est ce que vous avez dit ?
16 R. C’est possible.
17 Q. Étant donné les différences entre ce que vous
18 dites aujourd’hui et ce que vous avez dit avant, nous
19 pouvons affirmer qu’en fait, vous ne savez pas qui a
20 ordonné l’attaque ou pour être plus précis, vous ne savez
21 pas d’où vient cette information ?
22 R. [Aucune réponse audible]
23 Q. Je vous demanderais de bien vouloir répondre,
24 Monsieur. Si vous n’avez pas compris ma question, je peux
25 la répéter.
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1 R. Répétez.
2 Q. Puisque vous admettez l’éventualité que vous
3 avez pu lire cela quelque part, j’ai simplement tirer une
4 conclusion et je vous demande si vous êtes d’accord avec
5 cette conclusion, à savoir que vous ne savez pas
6 précisément qui a émis l’ordre d’attaque contre votre
7 village et que vous ne savez pas exactement de la bouche de
8 qui vous avez entendu tout cela.
9 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Je ne sais
10 pas, Maître, si cela va nous aider beaucoup. Nous avons
11 entendu le témoin affirmé que cela lui a été dit un jour et
12 un autre jour, il a dit qu’il l’avait lu. Il a ajouté
13 aujourd’hui que c’était possible qu’il l’ait lu. Je ne
14 vois pas en quoi l’interroger davantage sur ce sujet
15 pourrait nous faire avancer beaucoup.
16 Donc, passez à un autre thème.
17 Me NAUMOVSKI (interprétation) : Merci, Monsieur
18 le Président. Je suis d’accord avec vous. Je passerai à
19 un autre sujet.
20 Q. Monsieur Nuhagic, quelques questions au sujet
21 du séjour que vous avez effectué dans le village de
22 Skradno. Vous êtes resté à Skradno du mois de mai au mois
23 de septembre 1993, n’est-ce pas ?
24 R. Non, pas à partir du mois de mai. C’est une
25 erreur. J’y suis arrivé dans la deuxième quinzaine du mois
Page 13158
1 de juin. C’est à ce moment-là que nous sommes allés à
2 Skradno.
3 Q. Aujourd’hui, vous avez dit à partir du mois
4 d’août. Maintenant, vous dites à partir de la deuxième
5 quinzaine du mois de juin. Je dois vous dire que lorsque
6 vous avez été interrogé dans l’affaire Blaskic, à la page
7 5237 du compte rendu d’audience, lignes 2 à 4, répondant au
8 Procureur, vous avez confirmé ce qu’il disait, à savoir que
9 vous vous êtes trouvé à Skradno à peu près entre le mois de
10 mai et le mois de septembre. C’est ce que vous avez dit
11 dans votre déposition dans l’affaire Blaskic.
12 R. J’ai dit à partir de la fin de juin.
13 Maintenant, ce n’est pas moi qui l’ai écrit, donc, je ne
14 peux pas avoir toujours la même date exacte. Je ne savais
15 pas qu’on en arriverait à cela. Donc, je n’ai pas pris de
16 notes écrites. Mais l’important c’est que je m’y suis
17 trouvé. Je suis parti de Busovaca pour aller à Skradno.
18 Q. Si je vous comprends bien, vous admettez
19 l’éventualité que vous ayez pu vous trouver à Skradno entre
20 le mois de mai et le mois de septembre, comme vous l’avez
21 déjà dit dans l’affaire Blaskic où vous avez déposé ?
22 R. Je n’admets pas cette éventualité parce que
23 je sais que j’ai planté les pommes de terre à Busovaca au
24 mois de juin.
25 Q. Très bien, continuons. Vous êtes parti pour
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1 Zenica en septembre 1993. Donc, vous avez quitté Skradno
2 dans le cadre de ce qu’on appelait un échange privé, un
3 échange au noir, comme on disait à l’époque ?
4 R. Oui.
5 Q. Donc, c’était le résultat de votre décision
6 personnelle et de la décision de vos fils qui vous ont
7 aidé ?
8 R. Non, mais un échange illégal a été autorisé.
9 Je crois que c’est ce qui figure dans le compte rendu de
10 l’affaire Blaskic.
11 Q. Mais si elle a été autorisée, pourquoi
12 serait-elle illégale ?
13 R. Hé ! ni les autorités ni la police ne
14 s’opposaient aux soldats qui venaient des environs de
15 Zenica et de Travnik. Je ne sais pas très bien d’où ils
16 étaient censés venir et nous, nous étions censés partir.
17 Q. Bien, je vous ai compris mais il s’agissait
18 de dispositions organisées en privé, sur le plan privé ?
19 R. Oui, oui, en un mot, on peut dire privé.
20 Q. Alors que vous étiez à Busovaca, avant votre
21 arrivée à Skradno, conviendrez-vous avec moi qu’un grand
22 nombre de réfugiés croates sont arrivés à Busovaca à ce
23 moment-là ?
24 R. Oui.
25 Q. Et ces réfugiés ont exercé une pression très
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1 importante, y compris sur les Croates mais surtout sur les
2 musulmans qui habitaient à Busovaca ?
3 R. Moi, ce que je sais c’est que ce sont les
4 soldats qui exerçaient une pression.
5 Q. Oui, oui, mais puisque vous êtes de cette
6 région, vous connaissiez bien la situation et les gens qui
7 habitaient dans cette région. Il y avait beaucoup de
8 soldats qui ont été chassés, pas seulement les membres de
9 leurs familles ?
10 R. Vous savez, quand quelqu’un se met tout d’un
11 coup à porter l’uniforme, même si je le connaissais depuis
12 un an, et je le vois tout d’un coup en uniforme, je ne le
13 reconnais pas.
14 Q. Mais puisque vous avez subi ce que j’ai
15 appelé cette pression relative à Busovaca, conviendriez-
16 vous avec moi pour dire qu’à Skradno, vous étiez tout de
17 même relativement plus à l’abri qu’à Busovaca ?
18 R. On ne peut pas parler comme cela. On ne peut
19 pas dire cela.
20 Q. Mais tout de même, vous serez d’accord qu’il
21 n’y avait pas cette pression ? Bien sûr, il y avait
22 certains actes répréhensibles commis individuellement par
23 certaines personnes, nous sommes d’accord avec cela, mais
24 de façon générale, que diriez-vous ?
25 R. Moi, je n’ai rien subi mais…
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1 Q. Dites-moi, je vous prie, quand nous avons
2 parlé de Skradno, vous avez déclaré que des hommes étaient
3 emmenés creuser des tranchées ?
4 R. Oui.
5 Q. Et vous savez, puisque vous avez parlé avec
6 ces hommes, où on les a emmenés et ce qu’ils ont fait,
7 n’est-ce pas ?
8 R. Oui, parce que lorsque le courrier arrivait
9 pour les emmener avec lui, ils disaient où ils allaient les
10 emmener, à Kula, à Bare, à Strane.
11 Q. Mais il y a encore une chose que je voulais
12 vous demander : Vous avez dit qu’y compris des Croates qui
13 étaient inaptes à porter les armes et des Serbes qui
14 étaient restés dans cette région ont également été emmenés
15 pour accomplir cette obligation de travail, n’est-ce pas ?
16 R. Non.
17 Q. Merci. Vous l’avez redit aujourd’hui et je
18 crois que nous sommes d’accord là-dessus, vous ne regardiez
19 pas beaucoup la télévision, elle ne vous intéressait pas
20 beaucoup ?
21 R. En effet.
22 Q. Mais vous avez tout de même dit que vous vous
23 rappeliez certaines situation. Il y a une chose dont vous
24 avez parlé également lors de votre déposition dans
25 l’affaire Blaskic. Vous avez dit qui vous aviez vu à la
Page 13162
1 télévision et vous avez relaté un certain nombre de
2 souvenirs que vous aviez au sujet de ces émissions de
3 télévision particulières. Vous rappelez-vous cela ?
4 R. Je n’ai pas beaucoup de souvenirs. Je me
5 rappelle simplement ce qui est lié au président de la
6 municipalité, à Monsieur Dario, et je l’ai déjà dit.
7 Q. Oui, mais c’est là que se situe une
8 différence et c’est de cela que j’aimerais que nous
9 parlions. Quand vous avez déposé dans l’affaire Blaskic,
10 vous vous êtes rappelé ce qu’avait dit Zoran Maric et ce
11 qu’avait dit Anto Valenta un jour ?
12 R. Ah oui, ça me revient.
13 Q. Mais vous ne vous rappeliez aucun autre
14 événement ?
15 R. Non.
16 Q. Peut-être pourrions-nous dire quelques mots
17 de ce que vous affirmez avoir entendu dire à Zoran Maric à
18 la télévision. Vous dites que cela se passait le jour où
19 la prestation de serment du HVO s’est déroulé ?
20 R. Oui.
21 Q. Êtes-vous d’accord que cela s’est passé dans
22 la deuxième quinzaine du mois d’août 1993, c’est-à-dire en
23 plein été ?
24 R. Je ne me rappelle pas exactement le mois ou
25 la date mais je sais qu’on a distribué des paquets de
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1 cigarettes aux soldats.
2 Q. Monsieur Maric a prononcé une très longue
3 allocution ce jour-là. Elle n’était pas courte. Vous êtes
4 d’accord ?
5 R. Peut-être mais en fait, cela ne m’intéressait
6 pas vraiment. Je ne suis pas rentré dans la maison. C’est
7 quelqu’un d’autre qui me l’a dit, qui était, lui, à la
8 maison à ce moment-là.
9 Q. Comprenons-nous bien : Vous n’avez donc pas
10 suivi la totalité du discours de Monsieur Maric ?
11 R. Non.
12 Q. Eh bien, j’ai quelques phrases tirées de son
13 discours à vous citer pour voir si vous vous les rappelez.
14 Je vais vous les lire rapidement.
15 Je cite : Vous rappelez-vous…
16 R. Je me rappelle.
17 Q. Non, non, mais je cite, Monsieur, et je dois
18 lire lentement pour les interprètes.
19 Vous rappelez-vous que Monsieur Maric a dit ce qui
20 suit – je cite : « Nous allons nous battre pour l’amour,
21 la paix et l’égalité des droits. C’est la raison pour
22 laquelle nous affirmons aujourd’hui que la Communauté
23 croate d’Herceg-Bosna n’est pas une communauté dans
24 laquelle il y aura des citoyens de deuxième zone. Ce sera
25 la communauté de la paix et de l’égalité. » Fin de
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1 citation.
2 Vous rappelez-vous l’avoir entendu prononcer ces
3 mots ?
4 R. Non, non.
5 Q. Merci. Poursuivons. Vous avez parlé
6 aujourd’hui de Monsieur Dario Kordic. Vous avez dit qu’il
7 était monté en grade progressivement et qu’il avait atteint
8 le grade de Colonel mais que c’est quelque chose qu’on vous
9 avait dit, que vous ne le saviez pas par vous-même ?
10 R. Oui.
11 Q. Donc, c’est quelque chose qui se racontait
12 dans le village. Vous ne l’avez pas entendu de sources
13 directes, de première main ?
14 R. Oui parce que je n’ai pas vu son grade mais
15 j’en ai entendu parlé.
16 Q. Vous avez dit qu’il avait progressé lentement
17 pour atteindre ce grade mais savez-vous quel grade il avait
18 avant ?
19 R. Non. J’ai simplement entendu dire qu’il
20 était monté en grade.
21 Q. Conviendrez-vous avec moi, Monsieur Nuhagic,
22 pour dire qu’en fait, vous ne savez pas précisément quelles
23 étaient les fonctions de Monsieur Kordic entre 1990 et par
24 la suite ?
25 R. En 1990, il est arrivé à la municipalité et
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1 il était un des responsables de la municipalité. Avant, il
2 était journaliste. Il était au parti communiste et c’est à
3 ce moment-là qu’il est arrivé dans la municipalité en tant
4 que responsable.
5 Q. Mais après son arrivée à la municipalité,
6 vous ne savez pas exactement quel poste il occupait,
7 quelles étaient ses fonctions exactes ?
8 R. Non.
9 Q. Bien. Alors, nous n’allons pas en parler
10 davantage. Mais pour Zoran Maric, nous en avons déjà parlé
11 tout à l’heure, vous savez qu’il était l’ancien président
12 de la municipalité et l’ancien Président du HVO ?
13 R. Je le sais pour ce qui concerne son poste en
14 tant que président de la municipalité.
15 Q. Grâce à la télévision, est-ce que vous avez
16 suivi de temps en temps les comptes rendus diffusés après
17 les conférences de presse ?
18 R. Non.
19 Q. Donc, vous n’avez aucune connaissance à ce
20 sujet ? Vous ne savez pas qui a dit quoi lors de ces
21 conférences de presse ?
22 R. Non.
23 Q. Vous avez dit aujourd’hui que vous vous
24 rappeliez tout de même avoir vu Monsieur Kordic à la
25 télévision quand il a parlé de ses pommes de terre ?
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1 R. Oui.
2 Q. Où vous trouviez-vous lorsque vous avez
3 regardé ces images télévisées ?
4 R. À Busovaca.
5 Q. De quelle émission de télévision s’agissait-
6 il ?
7 R. Ils se sont réunis sans la télévision et
8 après, à la fin de la réunion, Miro Dzakula apportait des
9 rafraîchissements à la mairie et je l’ai entendu parler de
10 cela tout à fait clairement.
11 Q. Qui était Miro Dzakula ?
12 R. Il était une sorte de traiteur. Il apportait
13 des rafraîchissements quand il y avait des réunions.
14 Q. Mais quelles réunions, des réunions à la
15 municipalité ?
16 R. Oui, à la municipalité.
17 Q. Mais ce que vous avez vu à la télévision,
18 cette réception, elle était organisée à l’occasion de
19 quoi ?
20 R. Ça, je ne saurais pas vous le dire. Je ne
21 saurais pas vous dire à quelle occasion elle a été
22 organisée.
23 Q. Mais puisque Monsieur Kordic n’avait aucun
24 rapport avec l’aide humanitaire, je suis contraint de vous
25 faire observer que Monsieur Kordic n’a jamais parlé de ce
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1 genre de chose. Donc, je vous pose la question suivante :
2 Êtes-vous sûr que c’est lui qui a parlé de cela et non une
3 autre des personnes que vous avez vues à la télévision ?
4 R. Mais c’est tout à fait cela, à la fin de la
5 réunion quand il y a eu quelques interviews pour la
6 télévision rapidement.
7 Q. Je vous prie de m’excuser mais ma question
8 était un petit peu différente : Êtes-vous sûr que c’est
9 Monsieur Kordic qui a parlé de l’aide humanitaire et non
10 quelqu’un d’autre ? Savez-vous, par exemple, qui dirigeait
11 la Croix-Rouge à Busovaca ?
12 R. Ah, ça, je ne le sais pas mais je sais que
13 les pommes de terre arrivaient par l’aide humanitaire.
14 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Un instant, je
15 vous prie. Il y avait deux questions dans ce que vous avez
16 demandé au témoin. Je vous demanderais de poser une seule
17 question au témoin à la fois.
18 Il est 11 h 00. Avez-vous d’autres questions pour
19 le témoin, Me Naumovski ?
20 Me NAUMOVSKI (interprétation) : Monsieur le
21 Président, j’en aurai encore pour 15 à 20 minutes, peut-
22 être moins.
23 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Très bien.
24 Nous suspendons l’audience pour une demi-heure.
25 Me NICE (interprétation) : [Commentaire non
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1 traduit]
2 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : [Réponse non
3 traduite]
4 --- Suspension de l’audience à 11 h 00
5 --- Reprise de l’audience à 11 h 37
6 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Je vous en
7 prie.
8 Me NAUMOVSKI (interprétation) : Merci, Monsieur
9 le Président.
10 Q. Monsieur Nuhagic, nous pouvons poursuivre.
11 Nous allons terminer là où nous nous sommes arrêtés. Est-
12 ce que, pendant que vous étiez à Busovaca, vous avez connu
13 Stipe Santic ?
14 R. Non.
15 Q. Vous ne m’avez pas répondu encore à la
16 question que je vous ai posée avant la pause. C’est la
17 raison pour laquelle il va falloir que je vous la répète.
18 Est-ce que vous êtes sûr que personne d’autre n’ait parlé
19 de ce sujet concernant l’aide humanitaire ?
20 R. Mais je ne sais pas ce qui vous intéresse.
21 Pourquoi vous êtes tellement intéressé à l’aide humanitaire
22 et aux pommes de terre ? La municipalité, bien évidemment,
23 est au courant de ce qui s’est passé.
24 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Vous avez
25 peut-être raison. Vous avez peut-être raison.
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1 Je crois que vous avez étudié la question à fond,
2 Monsieur Naumovski.
3 Me NAUMOVSKI (interprétation) : Merci.
4 Q. Nous allons poursuivre. Nous sommes
5 maintenant arrivés jusqu’à Dario Kordic. Monsieur Nuhagic,
6 est-ce que vous avez rencontré personnellement Monsieur
7 Dario Kordic ?
8 R. Quand j’étais avec Hasija Beslic, au moment
9 où elle lui avait parlé de ces documents, de ces papiers
10 que lui-même délivrait, oui.
11 Q. Hasija Beslic, qui c’est, s’il vous plaît ?
12 R. Mais c’est Hasija Beslic. C’est une femme,
13 une femme tout court. Elle a travaillé avec lui à
14 Vatrostalna à Busovaca.
15 Q. Où elle avait habité ? Dans la ville ?
16 R. Oui, en ville.
17 Q. Elle était à Busovaca jusqu’à quelle époque ?
18 Elle y est restée ?
19 R. Non. Au mois de septembre, elle est partie
20 comme tous les autres.
21 Q. Où est-ce que vous avez rencontré Monsieur
22 Kordic ?
23 R. Juste en face du grand magasin, il y a une
24 église ; enfin, c’est un square, ce n’est vraiment pas
25 grand-chose.
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1 Q. Qu’est-ce que vous avez fait en ville à ce
2 moment-là ?
3 R. Moi, j’ai accompagné Hasija. Moi, je la
4 connaissais déjà depuis longtemps. Elle était ma voisine
5 de mon village. Une de mes voisines habitait à la maison
6 qui était juste à côté de la sienne.
7 Q. Est-ce que vous avez vu les papiers, le
8 document qu’elle avait détenu ?
9 R. Monsieur, tous les citoyens de nationalité
10 musulmane avaient ce papier. Il ne faut pas y insister.
11 Q. Je ne m’y oppose pas, bien évidemment. Je
12 voulais tout simplement vous dire que les Juges ont vu un
13 certain nombre de signataires sur ces papiers. Il y avait
14 des papiers qui ont été signés par Monsieur Maric, d’autres
15 encore par Dusko Grubesic. C’est la raison pour laquelle
16 je voulais savoir qui avait signé le papier, l’autorisation
17 de cette dame.
18 R. Je ne sais pas. Elle a dit tout simplement :
19 « Les autorisations que nous avons eues selon lesquelles
20 les soldats ne devaient pas nous déranger n’ont aucune
21 valeur. » C’est ce qu’elle avait dit, que ces certificats
22 n’avaient aucune valeur.
23 Q. Donc, Hasija Beslic avait eu cet entretien
24 avec Dario Kordic, n’est-ce pas ? Vous étiez présent
25 seulement ?
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1 R. Oui, tout à fait.
2 Q. C’est elle, par conséquent, qui se plaignait
3 en disant que les soldats l’ennuyaient et que Monsieur
4 Kordic a dit que ça ne se répéterait pas, n’est-ce pas ?
5 R. Oui.
6 Q. Est-ce qu’après cet entretien, vous savez ce
7 qui s’est passé avec Hasija Beslic ?
8 R. Nous nous sommes séparés. Elle est rentrée
9 chez elle. Moi, je suis rentré également chez moi, là où
10 j’habitais à Busovaca, donc, sur notre rue.
11 Q. Est-ce que vous savez si les soldats
12 l’avaient dérangée depuis ?
13 R. Oui.
14 Q. Est-ce que ceci veut dire que vous l’avez
15 rencontrée après également ?
16 R. Oui.
17 Q. Vous nous avez dit que c’était une seule fois
18 que vous l’avez vue et que vous vous êtes entretenu avec
19 elle. C’est la raison pour laquelle je vous ai posé cette
20 question. Au moment où vous étiez à côté de cette dame qui
21 s’est entretenue avec Dario Kordic, y avait-il quelqu’un
22 d’autre ou bien il était tout seul ?
23 R. Il était tout seul.
24 Q. Il était tout seul ?
25 R. Oui.
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1 Q. Mais vous ne savez pas d’où il venait ? Vous
2 ne connaissez pas les détails ?
3 R. Non.
4 Q. Je pense que je vous ai bien compris. Vous
5 n’avez pas parlé de ce que vous faites, d’où vous venez, où
6 vous vivez, n’est-ce pas ?
7 R. C’est vrai.
8 Q. Et après cet entretien, vous dites que là où
9 vous vous êtes trouvé, il y avait encore des soldats qui se
10 sont présentés et qui ont fait une objection, qui vous ont
11 dit qu’il ne fallait pas que vous vous plaigniez à Kordic ?
12 R. Hasija l’a dit, moi également, qui montrais
13 le certificat. Il n’avait aucune valeur. Je l’ai dit.
14 Q. Monsieur Nuhagic, j’aimerais être précis. À
15 la question du Procureur, vous avez dit que les soldats se
16 sont présentés chez vous dans votre maison et qu’ils vous
17 ont dit que vous vous êtes plaint à Kordic ?
18 R. Ils l’ont dit à moi-même et ils l’ont dit à
19 Hasija et ils ont dit : « Vous vous plaignez et, de toute
20 façon, il sait qu’on vous dérange mais, de toute façon, ces
21 certificats n’ont aucune valeur. »
22 Q. Je voulais tout simplement que vous dissociez
23 de ce que vous-même, vous savez et de ce que Hasija vous a
24 dit et vos entretiens que vous avez eus avec elle. Par
25 conséquent, quand les soldats sont arrivés chez vous,
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1 qu’est-ce qu’ils vous ont dit à vous ?
2 R. En ce qui me concerne, à moi, à un de mes
3 cousins, un deuxième, un troisième auxquels, par exemple,
4 on présentait des documents, ils ont dit qu’ils n’avaient
5 aucune valeur. Ils ont dit : « Vous-mêmes, vous vous êtes
6 plaints à Kordic », puis Hasija également, et cætera. De
7 toute façon, ça n’a aucun sens parce que ces certificats
8 n’ont aucune valeur.
9 Q. Une fois de plus, il faut que je reformule ma
10 question. Vous avez dit de manière expresse que les
11 soldats vous ont dit que vous-même, vous vous êtes plaint à
12 Kordic.
13 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Ceci a été dit
14 à plusieurs reprises. Je crois que nous avons compris.
15 Me NAUMOVSKI (interprétation) : J’aimerais tout
16 simplement demander qu’on ne revienne pas à des questions,
17 qu’on ne me pose pas d’autres questions, et cætera, parce
18 qu’il y avait 14, 15 paragraphes ou points sur lesquels
19 nous avons discuté. Par conséquent, il faut peut-être
20 suivre l’ordre.
21 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : C’est nous qui
22 décidons de la façon dont les questions sont posées mais
23 nous veillerons à ce que vous ne soyez pas harcelé par le
24 fait qu’on revienne sur telle ou telle question.
25 Me Naumovski, avez-vous encore beaucoup de
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1 questions à poser ?
2 Me NAUMOVSKI (interprétation) : Une question,
3 s’il vous plaît.
4 Q. Monsieur Nuhagic, seriez-vous d’accord avec
5 moi pour dire que vous avez donné les deux déclarations aux
6 enquêteurs du Tribunal de La Haye ? Vous vous souvenez ?
7 Je peux, bien évidemment, vous les présenter.
8 R. Où ?
9 Q. En 1995 et en 1999.
10 R. Oui.
11 Q. Vous avez donné également une déclaration à
12 la police en 1994, n’est-ce pas ?
13 R. Oui.
14 Q. Par conséquent, ce sont les trois
15 déclarations et puis vous étiez également deux fois témoins
16 dans l’affaire Blaskic et Aleksovski. Par conséquent,
17 c’était au total cinq fois ?
18 R. Oui.
19 Q. Est-ce que vous êtes d’accord avec moi pour
20 dire que nulle part dans les déclarations que vous avez
21 données, ni devant le Tribunal, vous n’avez parlé de cet
22 entretien de Hasija Beslic, ni à cette partie qui portait
23 sur l’aide humanitaire ?
24 R. Quand, en 1994 ou 1995, je ne me souviens
25 pas, j’ai donné ces déclarations, je n’ai vraiment pas eu
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1 l’idée d’en parler. Ça ne m’est pas passé par l’esprit.
2 Tout simplement, ce que je vous ai dit c’est que moi, je
3 n’ai pas pris des notes et puis, par conséquent, je n’ai
4 pas pu garder tout ça en souvenir.
5 Q. Mais très brièvement, nous sommes bien
6 d’accord que vous n’avez jamais parlé de ça, que c’est bien
7 la première fois que vous en parlez en l’an 2000 ?
8 R. Oui, je suis d’accord avec vous.
9 Me NAUMOVSKI (interprétation) : Merci.
10 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je
11 vous en prie, j’ai terminé.
12 CONTRE-INTERROGÉ PAR Me MIKULICIC
13 (interprétation) :
14 Q. Bonjour, Monsieur Nuhagic. Je m’appelle
15 Goran Mikulicic et ensemble, avec mon confrère Kovacic, je
16 défends le deuxième accusé, Mario Cerkez. Tout
17 premièrement, je voudrais vous dire que je suis très
18 sincèrement désolé et triste de savoir que vous avez subi
19 autant de victimes au cours de ces événements fâcheux
20 pendant la guerre.
21 Monsieur Nuhagic, revenons en 1992 un instant, au
22 moment où l’agression a été faite sur la Bosnie-
23 Herzégovine. À la mi-1992, il y avait également une
24 attaque contre Busovaca ?
25 R. Excusez-moi mais en ce qui concerne Mario
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1 Cerkez, c’est bien la première fois que j’entends parler de
2 lui et j’entends pour la première fois qu’on parle de lui.
3 Lors des préparatifs, on m’a dit également que lui, il y
4 est mais je n’ai absolument rien à voir avec lui. Il n’est
5 même pas de ma municipalité. Ce Monsieur Mario Cerkez, je
6 ne le connais pas.
7 Q. Oui, nous comprenons parfaitement bien. Vous
8 êtes de la municipalité de Busovaca. Par conséquent, tout
9 ce que vous avez dit concerne la municipalité de Busovaca ?
10 R. Oui.
11 Q. Je vais être très bref. Je vais vous
12 demander de répondre quand même. Est-il vrai qu’à la mi-
13 1992, Busovaca a été pilonnée par la JNA ?
14 R. Oui.
15 Q. Est-ce que, comme citoyen de votre village
16 ainsi que vos voisins, vous sentiez ce risque d’être
17 attaqué par la JNA ?
18 R. Oui. On avait pilonné même Draga qui était à
19 côté de moi. Elle a été pilonnée.
20 Q. Est-ce que dans ce sens-là, Monsieur Nuhagic,
21 vous avez entrepris un certain nombre de mesures de
22 protection ?
23 R. À partir du moment où il y avait l’alerte, à
24 ce moment-là, on allait s’abriter.
25 Q. Est-ce que vous autres, villageois, vous vous
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1 êtes organisés dans le sens à mettre en place des
2 patrouilles villageoises justement dans le cas où il y
3 avait des attaques ?
4 R. En 1992, ce n’était pas le cas. Ce n’était
5 même pas indispensable au moment de pilonnages, de
6 bombardements.
7 Q. En 1993 ?
8 R. En fin 1992, nous avons déjà eu des
9 patrouilles.
10 Q. Vous avez, par conséquent, organisé vous-même
11 des patrouilles villageoises, n’est-ce pas ?
12 R. Oui.
13 Q. Dites-nous, s’il vous plaît, Monsieur
14 Nuhagic, est-ce que ces patrouilles villageoises étaient
15 armées ? Est-ce qu’elles disposaient d’armes ?
16 R. Il y en avait qui avaient des carabines, des
17 fusils de chasse. Il y avait également quelques fusils qui
18 nous ont été remis par la Défense territoriale, des
19 Kalashnikov ou je ne sais plus tellement comment on appelle
20 ces fusils.
21 Q. Est-ce que vous pouvez vous souvenir
22 approximativement combien d’armes à peu près étaient à
23 votre disposition et à la disposition des patrouilles
24 villageoises dans votre village ?
25 R. Cinq.
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1 Q. Est-ce que ces patrouilles villageoises,
2 Monsieur Nuhagic, obtenaient des ordres de quelqu’un ?
3 R. Ceci a été organisé dans le village et puis
4 même les voisins, nos voisins croates avec lesquels on
5 était en contact en 1992, fin 1992 et début 1993 également.
6 Q. Mais est-ce qu’il y avait quelqu’un qui avait
7 donné des ordres aux patrouilles villageoises ?
8 R. Non, mais nous qui étions dans le village, on
9 s’est organisé. Je ne sais pas si, éventuellement, il y
10 avait quelqu’un de l’extérieur et d’où. Ça, je ne sais
11 pas.
12 Q. Est-ce que vous-même, vous étiez membre de
13 patrouilles villageoises ?
14 R. Oui.
15 Q. Merci. Monsieur Nuhagic, je n’ai plus de
16 questions à vous poser.
17 Me MIKULICIC (interprétation) : Monsieur le
18 Président, j’ai terminé mon contre-interrogatoire.
19 R. Merci.
20 Me NICE (interprétation) : J’aimerais poser
21 quelques questions en interrogatoire supplémentaire.
22 RÉINTERROGÉ PAR Me NICE
23 (interprétation) :
24 Q. Monsieur Nuhagic, des questions vous ont été
25 posées à ce propos. Apparemment, dans l’une de vos
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1 déclarations préalables fournies aux enquêteurs du
2 Tribunal, vous auriez lu dans un livre que Monsieur Dusko
3 Grubesic était le commandant du HVO de Busovaca et c’est
4 lui qui aurait ordonné l’attaque et puis vous avez aussi
5 relaté la façon dont vous aviez appris cela de votre frère
6 après l’attaque.
7 Quand avez-vous revu votre frère ? Combien
8 d’heures ou de journées s’étaient écoulées entre l’attaque
9 et le moment où vous avez revu votre frère ?
10 R. Le deuxième ou troisième jour, nous étions à
11 Busovaca. Lui-même, il y était. C’est ce qu’il nous a
12 relaté.
13 Q. Vous avez subi et vécu une terrible
14 expérience de cette attaque. Nous ne voulons pas non plus
15 vous rappeler ces moments terribles mais vous avez
16 rencontré votre frère deux ou trois heures ou deux ou trois
17 jours après cette attaque ?
18 R. Deuxième jour, le lendemain, donc.
19 Q. Votre frère vous a dit ce que vous nous avez
20 relaté aujourd’hui ?
21 R. Oui, oui, oui.
22 Q. Est-il exact de dire qu’avant de fournir
23 cette déclaration préalable aux enquêteurs du Bureau du
24 Procureur, vous aviez donné une déclaration aux autorités
25 de Bosnie ?
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1 R. J’ai donné quelques déclarations mais comme
2 ceci s’est passé il y a longtemps, je ne peux pas m’en
3 souvenir et puis il y avait encore la peur qui sommeillait.
4 Enfin, je la sentais.
5 Me NICE (interprétation) : Messieurs les Juges,
6 plutôt que de soumettre un document au témoin, est-ce que
7 vous me permettez de donner lecture d’un texte ? La
8 Défense en dispose.
9 Q. Dans cette déclaration préalable…
10 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Pourriez-vous
11 donner la date de cette déclaration ?
12 Me NICE (interprétation) : Bien sûr. C’est un
13 procès-verbal rédigé le 26 mars 1994, d’après ladite
14 déclaration ou le procès-verbal qui a été dressé à la suite
15 d’un entretien mené avec ce témoin et l’extrait se trouve à
16 la page 2 de la traduction en anglais.
17 Voici ce que dit le témoin aux enquêteurs – je
18 cite : « La population croate de la région… » Les
19 interprètes, malheureusement, ne disposent pas de ce texte.
20 Je lirai lentement.
21 « La population croate de la région… », disais-je,
22 « …est partie en direction de Tisovac. En route, ces
23 Croates ont rencontré Dusko Grubesic, commandant de la
24 brigade Zrinjski, à qui Ivo Kristo avait dit que les bombes
25 ou obus venaient d’un autre village, ce qui n’était pas
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1 exact, et puis Grubesic a donné l’ordre à Pasko Ljubicic
2 d’emmener son groupe en direction de notre village de
3 Ocenici. »
4 R. Oui.
5 Q. Est-ce bien ce que vous avez dit aux
6 enquêteurs et est-ce bien ce que votre frère vous
7 avait dit ?
8 R. Oui, c’est ce qu’il a dit aux enquêteurs.
9 Q. Tisovac, c’est-à-dire la direction vers
10 laquelle partaient ces réfugiés ou ces villageois, est-ce
11 que vous connaissiez cette ville ?
12 R. Oui.
13 Q. On peut regarder la carte. Puisque la
14 Chambre connaît bien la géographie de la région, on voit
15 que ces deux endroits sont très rapprochés l’un de l’autre
16 mais la carte ne montre pas s’il y a une route, un chemin
17 quelconque qui relie ces deux endroits, si ce n’est la
18 route principale qui va vers Busovaca et en ressort. Est-
19 ce que votre village avait un lien direct avec Tisovac ou
20 est-ce qu’il fallait, pour aller à Tisovac, passer par
21 Busovaca ?
22 R. Oui. Il fallait passer par le village Ravno.
23 Q. À l’époque ou au moment où les villageois se
24 dirigeaient vers Tisovac, est-ce qu’il y avait quelque
25 chose de particulier, un bâtiment particulier qui se
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1 trouvait à Tisovac, un bâtiment ou encore autre chose ?
2 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Je crois que
3 là, vous dépassez la portée de l’interrogatoire principal.
4 Me NICE (interprétation) : Comme vous voulez,
5 Monsieur le Président. C’est tout ce que je demande.
6 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Monsieur le
7 Témoin, vous en avez ainsi terminé de votre déposition.
8 Vous pouvez disposer mais avant cela, Monsieur, je tiens à
9 vous remercier au nom du Tribunal Pénal International parce
10 que vous avez eu le courage de venir ici pour nous parler.
11 LE TÉMOIN (interprétation) : Merci.
12 [Le témoin se retire]
13 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Quelle sera la
14 durée probable de l’interrogatoire principal pour ce témoin?
15 Me NICE (interprétation) : Eh bien, nous en
16 terminerons en une heure, en l’espace d’une heure.
17 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Et ce sera
18 votre dernier témoin pour la semaine ?
19 Me NICE (interprétation) : Oui. Dans la mesure
20 où cette personne, si elle est considérée comme témoin,
21 pourra nous aider pour ce qui est de l’enregistrement de la
22 région, cet enregistrement qui concerne la région.
23 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Pour autant
24 que la Défense ait l’occasion de visionner cette cassette.
25 Me NICE (interprétation) : Nous prenons des
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1 dispositions pour assurer la copie de cette cassette.
2 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Et puis nous
3 avons un échange d’exposés ou d’argumentations ?
4 Me NICE (interprétation) : Oui, cet après-midi ou
5 ce matin s’agissant de trois témoins. Je crois que des
6 résumés ont été communiqués en ce qui concerne l’un de ces
7 témoins.
8 Me NAUMOVSKI (interprétation) : Excusez-moi.
9 Quelque chose qui concerne le témoin et d’autres qui ne le
10 concernent pas. Moi, je pense qu’il est impossible qu’on
11 réalise le plan du Procureur car je pense qu’il n’est
12 pratiquement pas possible d’organiser la diffusion de cette
13 cassette avec Monsieur Dario Kordic ce soir. Ça, c’est une
14 première question et puis il y a les points 6, 7, 8, 9, 13
15 et 17 que nous mettons en question.
16 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Je vous
17 remercie.
18 [Le témoin entre dans la Cour]
19 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Le témoin est
20 debout. Commençons par la procédure habituelle. Que le
21 témoin donne lecture de la déclaration solennelle.
22 LE TÉMOIN (interprétation) : Je déclare
23 solennellement que je dirai la vérité, toute la vérité et
24 rien que la vérité.
25 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Je vous
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1 remercie, Monsieur. Veuillez vous asseoir.
2 TÉMOIN : SALIH HAMZIC (ASSERMENTÉ)
3 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Me Kovacic
4 voulait intervenir.
5 Me KOVACIC (interprétation) : Oui. Désolé
6 d’intervenir maintenant mais l’expérience nous a montré
7 que, techniquement, il ne sera peut-être pas impossible
8 mais pratiquement impossible de diffuser cette cassette au
9 quartier pénitentiaire ce soir. Alors, voici ce que je
10 suggère. Nous pouvons essayer d’y parvenir en faisant un
11 gros effort ensemble mais il y a peut-être un plan
12 d’urgence qu’on peut prévoir. Nous pourrions avoir une
13 brève pause après avoir vu la cassette.
14 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Nous en
15 discuterons à la fin de la journée. Nous verrons jusqu’où
16 nous sommes allés.
17 Me KOVACIC (interprétation) : Tout à fait,
18 Monsieur le Président.
19 Puis-je demander au Procureur de ne pas poser des
20 questions trop dirigistes sur le paragraphe 17 puisque le
21 paragraphe 15 a déjà été mentionné par Me Naumovski ?
22 Merci, Monsieur le Président.
23 INTERROGÉ PAR Me NICE (interprétation) :
24 Q. Monsieur, pourriez-vous décliner votre
25 identité ?
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1 R. Je m’appelle Salih Hamzic.
2 Q. Monsieur Hamzic, est-ce que vous travailliez
3 pour Radio Zenica en 1992 ?
4 R. Oui.
5 Q. En avril 1992, est-ce que le personnel de
6 Radio Zenica a tenu une réunion destinée à mettre au point
7 une stratégie concernant la radio et quelle était cette
8 stratégie ?
9 R. Oui. Au début de l’agression sur la Bosnie-
10 Herzégovine, début avril 1992, on avait eu une réunion et
11 lors de cette réunion, nous avons pris la décision, étant
12 donné que nous avons bien compris que l’agression commence
13 sur la Bosnie-Herzégovine, que nous allons nous défendre,
14 nous allons nous organiser pour la défense de Bosnie-
15 Herzégovine et compte tenu également nos contacts avec la
16 Radio Sarajevo, nous avons opté pour cette manière d’agir.
17 Q. En mai ou en juin, est-ce qu’il y a eu des
18 programmes télévisés, des émissions où a participé Dario
19 Kordic mais où participaient aussi Praljak, Blaskic ainsi
20 que d’autres représentants officiels de la Défense
21 territoriale, chacune de ces personnalités fournissant des
22 explications ou des commentaires à propos de la guerre ?
23 R. Vous avez parlé des programmes de télévision
24 mais en effet, il s’agissait uniquement des conférences de
25 presse. Pour ce qui concerne les programmes de télévision,
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1 à ce moment-là, il y avait une station locale, Zeta, et
2 c’est de Busovaca, de Zenica qui avait diffusé les
3 programmes de télévision.
4 Q. Excusez-moi, c’est moi qui me suis trompé.
5 Qui dirigeait ce programme où il y avait notamment Dario
6 Kordic ? Qui était responsable de ces programmes ?
7 R. À cette époque-là, tous les journalistes
8 avaient un certain nombre de programmes dont ils étaient
9 chargés en fonctions de permanence mais la plupart des
10 programmes étaient tenus par Ivica Tomic et Anton Mrkonjic.
11 Q. Est-ce que ces deux hommes étaient tous les
12 deux membres du HVO ?
13 R. Oui.
14 Q. Je pense que vous connaissiez déjà Kordic
15 avant la guerre. À l’époque, n’était-il pas journaliste
16 pour l’implantation Busovaca de la firme Vatrostalna ?
17 R. Oui. Au début des années 70, Monsieur Kordic
18 a été chargé d’une émission d’une durée d’une vingtaine de
19 minutes, si je ne m’abuse, au niveau de la société
20 Vatrostalna, section Busovaca, et c’est de cette époque-là
21 que je le connais.
22 Q. On parle des années 70 ici sur le compte
23 rendu d’audience mais de quelle période parliez-vous
24 exactement ?
25 R. Excusez-moi, c’est moi qui ai fait l’erreur.
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1 C’est fin 70.
2 Q. Vous le connaissiez à ce titre et, à cette
3 époque-là, c’était une personnalité sérieuse, polie et
4 courtoise ?
5 R. À cette époque-là où j’ai coopéré avec
6 Kordic, il était tout à fait normal, il était paisible, il
7 était bien.
8 Q. Au moment où il y a diffusion de ces
9 programmes télévisés en mai et juin 1992, est-ce que vous
10 avez noté quelque chose à propos du comportement, de
11 l’attitude de Kordic ?
12 R. Vous avez une fois de plus parlé de la
13 télévision et des programmes de la télévision. Il s’agit
14 de la radio et des programmes de la radio.
15 Q. Excusez-moi, je me trompe. Il s’agit de
16 programmes radio mais la question a cette application.
17 R. Aux mois de mai et juin 1992, Kordic s’est
18 rendu à quelques reprises à la radio et il a participé à
19 cette époque-là dans ces émissions de la Radio Zenica de
20 l’époque. Je l’ai vu à quelques reprises en tenue de
21 camouflage. Je pense qu’il avait également un béret sur la
22 tête, un képi, et puis il avait également des garde-corps
23 qui portaient également des tenues noires.
24 Q. Qu’en était-il de son comportement ou de la
25 sécurité qui l’entourait, le protégeait et même plus loin,
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1 il y avait aussi d’autres gardes du corps ?
2 R. Une fois, quand il avait participé à ces
3 émissions, je me souviens que la rue où se trouvait le
4 bâtiment de la Radio Zenica était bloquée et, à cette
5 époque-là, on ne pouvait pas normalement contacter de
6 manière habituelle, disons, Kordic. Il était quelque peu
7 plus arrogant.
8 Q. À l’occasion de ces programmes, est-ce que
9 vous avez remarqué quelque chose de particulier s’agissant
10 des termes qu’il utilisait, du discours qu’il tenait ?
11 R. Oui. À cette époque-là, on a déjà commencé à
12 utiliser les termes tels « Chetnik », « Oustashi » et dans
13 le comportement de Monsieur Kordic, j’ai pu sentir une
14 arrogance par rapport au TO de l’époque. Il y avait déjà
15 une réticence qu’on sentait de sa part.
16 Q. Vous dites que certains termes étaient alors
17 utilisés. Voulez-vous dire par là qu’ils étaient utilisés
18 par Kordic ?
19 R. Je pense qu’il les a utilisés.
20 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Permettez-moi
21 de revenir au fait que vous avez relaté où la rue était
22 bloquée, était coupée. Je suppose que ceci s’est passé à
23 Zenica ?
24 R. Oui. Je parle de Zenica.
25 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Je vous
Page 13189
1 remercie.
2 Me NICE (interprétation) :
3 Q. À l’occasion de la diffusion de ces
4 programmes, avez-vous remarqué la façon dont il parlait,
5 dont il abordait les questions d’actualité et dont il
6 parlait de l’intervention bonne ou mauvaise des différentes
7 parties au conflit ?
8 R. Au début du mois de mai, c’était, disons,
9 normal. Il a parlé de cette communauté entre le HVO et le
10 TO. Ensuite, quand il est revenu, je ne sais plus si
11 c’était la deuxième fois ou quand, quand ses relations se
12 gelaient au fur et à mesure et j’avais l’impression que
13 c’est le HVO auquel il donnait un peu plus d’importance.
14 C’était le sentiment que j’avais.
15 Q. Est-ce qu’il vous est arrivé de parler à
16 Kordic à l’occasion d’une de ces émissions ?
17 R. Oui. Si mes souvenirs sont bons, c’était
18 bien la dernière fois quand j’ai contacté Monsieur Kordic.
19 Avant même le début de l’émission, nous avons eu en cadeau
20 des cigarettes, du vin ou je ne sais plus, c’était peut-
21 être une autre boisson. Après l’émission, Kordic était sur
22 le point de sortir du studio et à la sortie, je l’ai
23 rencontré et je lui ai dit : « Mais ce n’est pas bien ce
24 qu’on fait. » C’est à peu près ce que j’ai dit.
25 Q. Qu’est-ce qui vous avait amené, à ce moment-
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1 là, à lui dire cela ? Quel événement particulier l’avait
2 fait ?
3 R. J’étais irrité par la manière dont il avait
4 parlé et la manière dont il s’est prononcé au sein de
5 l’émission et moi, j’avais réagi normalement parce que je
6 connaissais Kordic et puis j’ai réagi mais c’était une
7 bonne intention.
8 Q. Pourriez-vous nous donner des détails sur son
9 apparence, sur son comportement ou sur le contenu de ce
10 qu’il a dit ce soir-là qui vous a poussé à prendre une
11 telle initiative ?
12 R. Je l’ai dit tout à l’heure. Au cours de cet
13 entretien, il y avait toujours un petit peu une partie qui
14 prévalait, soi-disant quelqu’un qui va nous défendre de
15 quelque chose. Il y avait une certaine différence qu’on
16 faisait entre les deux parties et c’est dans ce sens-là que
17 je lui en ai parlé et c’est ce que j’ai dit. Quand je me
18 suis adressé à lui, il ne m’a pas répondu. Il a passé tout
19 simplement. Il n’a pas répondu à mes paroles.
20 Q. D’après ce que vous saviez de lui, quel était
21 le rôle qu’il jouait en Bosnie centrale, d’après ce que
22 vous pouviez percevoir de ces émissions ?
23 R. Une fois de plus, je répète ce que j’ai dit.
24 D’après mon sentiment et mon point de vue, c’était
25 quelqu’un qui était le principal.
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1 Q. Revenons à la radio où vous travailliez.
2 Est-ce qu’à un moment, on a suggéré qu’il fallait un
3 surcroît de protection à votre lieu de travail ?
4 R. Oui.
5 Q. Qui a fait une telle suggestion et en quoi
6 consistait-elle ?
7 R. La proposition a été avancée par Messieurs
8 Tomic et Mrkonjic. C’était les responsables du HDZ à
9 Zenica. À cette époque-là, c’était Monsieur Dominik Sakic.
10 La proposition avait pour but de rendre le bâtiment plus
11 sûr, d’assurer la sécurité et de placer les représentants
12 du HVO, les membres du HVO devant le bâtiment.
13 Q. Est-ce qu’en fait, votre station de radio
14 avait son propre personnel chargé de la sécurité sur les
15 lieux ?
16 R. Oui. Chaque station de radio a ses propres
17 services de sécurité. Ça, c’est connu.
18 Q. Comment a réagi l’établissement à l’offre
19 faite par Monsieur Tomic ?
20 R. Je peux vous donner ma propre réponse. Au
21 cours de ces entretiens avec Monsieur Tomic et Monsieur
22 Mrkonjic, moi, j’ai tout simplement posé des questions et
23 je voulais tout simplement leur demander de qui fallait-il
24 qu’il nous protège.
25 Q. Quelle fut la réponse qui vous fut donnée à
Page 13192
1 ce moment-là ?
2 R. Bien sûr que non.
3 Q. Est-ce que vous teniez, à ce moment-là, à
4 maintenir et à sauvegarder l’indépendance de la station de
5 radio ?
6 R. Je ne sais pas dans quel sens parlez-vous
7 quand vous dites « indépendance ».
8 Q. À l’époque dont nous parlons, est-ce que cet
9 établissement était contrôlé par l’une ou l’autre faction
10 politique ou est-ce qu’il disposait de toute liberté en
11 matière de politique de diffusion ?
12 R. Radio Zenica, à cette époque-là, aujourd’hui
13 également, est une station ouverte mais quand nous parlons
14 de cette période, à cette époque-là, elle était totalement
15 ouverte pour tout citoyen et la radio station n’a jamais
16 subi d’influence de formations militaires quelconques ou
17 d’un parti politique.
18 Q. Est-ce que vous avez finalement autorisé le
19 HVO à monter la garde de l’établissement ?
20 R. Non. Bien sûr que non.
21 Q. Avez-vous remarqué qu’il y avait des membres
22 locaux du HDZ et du HVO qui sont venus en moins grand
23 nombre à la radio vers la fin de l’année 1992 et que,
24 finalement, ils ont envoyé par télécopie les rapports
25 qu’ils voulaient faire diffuser ?
Page 13193
1 R. Oui.
2 Q. Avez-vous pu établir la raison de cette
3 attitude différente, de ce revirement dans leur attitude ?
4 R. Non, mais j’ai quelques suppositions.
5 Q. Sur quoi se fondent-elles ?
6 R. Ces suppositions se fondaient sur les
7 relations qui se sont gelées entre le HDZ, le HVO d’un côté
8 et le TO de l’autre côté. La manière dont ils concevaient
9 la défense, ce n’était pas telle qui était la nôtre.
10 Q. Est-ce qu’il est arrivé à la station radio de
11 recevoir des menaces ?
12 R. Oui.
13 Q. Est-ce qu’au départ, vous ne les avez pas
14 prises trop au sérieux ?
15 R. Oui. Comme le programme de radio était un
16 programme ouvert, il y avait des menaces qui ont été
17 proférées et moi personnellement, je ne les prenais pas au
18 sérieux.
19 Q. Est-ce que les menaces sont devenues plus
20 graves, plus sérieuses vers la fin 1992, d’une nature peut-
21 être plus violente ?
22 R. Je ne saurais pas vous répondre à cette
23 question mais je peux dire qu’en automne 1992, il y avait
24 un certain nombre d’événements quelque peu bizarres qui se
25 sont produits. Je ne sais pas si c’était un concours de
Page 13194
1 circonstances ou non mais ceci s’est produit.
2 Q. Est-ce que vous pourriez nous en dire
3 davantage ?
4 R. Il y avait un de mes collègues, Bogoljub
5 Ilic, qui a été arrêté et on l’avait rasé, alors qu’on ne
6 sait pas qui l’a fait. Pour ce qui concerne la femme qui
7 était au poste de directeur de la station de Radio Zenica,
8 nommée Medina Delibasic, elle s’est fait piller dans son
9 appartement. On lui a pris des meubles, enfin, des
10 affaires personnelles. Pour ce qui me concerne, on a
11 enfoncé la porte de mon appartement, on a cambriolé mon
12 appartement mais heureusement, on n’a rien pris des effets
13 personnels.
14 Q. Est-ce que dans la région à proximité de la
15 station de radio, vers l’automne 1992, on a creusé des
16 tranchées et si ce fut le cas, ce fut le fait de qui ?
17 R. Oui. En automne 1992, à un moment donné, si
18 mes souvenirs sont bons, le HVO a fait une démonstration
19 militaire. Nous avons demandé qu’on soit protégé. À ce
20 moment-là, les membres de la Défense territoriale de
21 l’époque ont creusé quelques tranchées pour protéger
22 l’établissement de la station de radio.
23 Q. Est-ce que dans ces mesures de protection, il
24 y avait aussi le fait de cantonner des soldats à
25 l’intérieur même du bâtiment ?
Page 13195
1 R. Non, non. Bien sûr que non.
2 Q. Ces tranchées de protection, où les avait-on
3 creusées, tout près du bâtiment ou plus loin ?
4 R. Je vais vous le dire approximativement. Il y
5 avait une tranchée qui était à 15, 20 mètres à droite. À
6 gauche également, à 20 mètres de distance et puis une autre
7 tranchée de l’autre côté de la rivière de Bosna.
8 Q. En décembre 1992, est-ce qu’une bombe a
9 explosé à proximité de la station de radio ?
10 R. Oui.
11 Q. Pourriez-vous nous dire exactement où elle a
12 explosé et quelles en furent les conséquences ?
13 R. Dès la fin de 1992, nous venions de finir le
14 travail et puis je dois dire plus précisément que c'était
15 le jour du réveillon du 1er de l’an. En face de l’entrée
16 de l’établissement où était installée la station de radio,
17 il y avait une fenêtre du café sur laquelle on avait posé
18 la bombe. Elle avait explosé. C’était une grenade
19 (l’interprète se corrige) et au moment où nous, on se
20 séparait dans la nuit, elle avait explosé, cette grenade.
21 Heureusement, personne n’a été blessé car nous sortions par
22 groupes, entre deux et quatre personnes mais les vitres et
23 la porte de l’immeuble ont été démolies.
24 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Me Nice, est-
25 ce que vous allez bientôt arriver à avril 1993 ?
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1 Toutefois, avant cela, j’aimerais poser une question au
2 témoin.
3 Monsieur le Témoin, que faisiez-vous exactement à
4 la station de radio ? Quel était votre emploi précis ?
5 R. À cette époque-là, j’étais technicien chef et
6 c’est moi qui mettais en œuvre le programme.
7 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Vous
8 travaillez toujours à cet endroit ou vous travaillez
9 ailleurs aujourd’hui ?
10 R. Je suis toujours à cet endroit.
11 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Je voudrais
12 revenir au mois de mai et au mois de juin 1992. C’est à
13 cette période-là que Monsieur Kordic venait à la station de
14 radio pour y faire des programmes. Est-ce exact ?
15 R. Oui, c’est exact.
16 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Avez-vous une
17 idée du nombre d’émissions auxquelles il a participé ou,
18 plutôt, à quelle fréquence il venait participer à ces
19 émissions ? C’est peut-être une façon plus simple de poser
20 la question.
21 R. Si mes souvenirs sont bons, je pense qu’il
22 est venu deux ou trois fois. Disons trois fois. Je n’ai
23 pas travaillé chaque fois dans les équipes.
24 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Par la suite,
25 il n’a plus participé à d’autres émissions. Est-ce exact ?
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1 R. Je pense que début juin, si mes souvenirs
2 sont bons, il était venu pour la dernière fois. Je ne sais
3 plus si c’était fin mai ou début juin. Les conférences de
4 presse ou, disons, des comptes rendus qui ont été diffusés
5 ont été organisés à Busovaca et je pense que c’était au
6 Motel Tisa. Nos journalistes suivaient ce qui se passait,
7 disposaient de ces rapports, de ces comptes rendus.
8 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Je vous
9 remercie.
10 Me NICE (interprétation) : J’aimerais que le
11 témoin examine une pièce. C’est une carte qui porte la
12 cote 2282.4 et il y a déjà des annotations mais j’espère
13 que ceci ne suscitera pas d’objection de la part de la
14 Défense.
15 Q. Désolé, Monsieur, de ne pas vous avoir donné
16 l’occasion auparavant d’examiner cette carte. Ne tenez pas
17 compte des annotations apportées à la carte. J’espère que
18 cette carte vous sera utile et si c’est le cas, veuillez
19 nous indiquer où se trouvait la station de radio, tout
20 d’abord.
21 R. Mais c’est quelque peu flou.
22 Q. Il suffira de nous donner l’emplacement
23 approximatif. Il se peut que vous n’ayez pas là le détail
24 et qu’il faille obtenir une carte plus détaillée. Nous le
25 ferions. Est-ce que cette carte convient à cette
Page 13198
1 description ou pas ? Dites-le-nous. Prenez le temps qu’il
2 faut pour vous retrouver sur cette carte et voir si vous
3 pouvez nous dire où se trouvait la station de radio.
4 Vous voyez le méandre que fait la rivière Bosna ?
5 R. Oui.
6 Q. Vous voyez les ponts et leurs noms ? Donc,
7 ça devrait vous aider à vous repérer.
8 L’huissier va vous donner peut-être un pointeur et
9 je vais vous demander d’utiliser le rétroprojecteur et de
10 ne pas indiquer sur l’écran qui est devant vous mais plutôt
11 de montrer cet endroit sur le rétroprojecteur à votre
12 droite. Veuillez regarder la carte plutôt.
13 R. Je ne suis pas sûr. J’avoue que je ne peux
14 pas véritablement me débrouiller sur cette carte. Je ne
15 vois pas.
16 Q. Nous allons y revenir dans un instant.
17 Pourriez-vous nous dire comment s’appelle la rue dans
18 laquelle se trouve la station de radio ?
19 R. La station de radio, je peux vous donner
20 l’adresse, se trouve le long de la rivière Bosna. C’est la
21 première rue qui longe la rivière de Bosna et Bulevar (ph.)
22 et le bâtiment se trouve tout de suite et donne sur cette
23 rue qui s’appelle Bulevar. À l’époque, elle s’appelait
24 Fadil Spanac et actuellement, elle s’appelle Seid
25 Serdarevic (ph.).
Page 13199
1 Q. Quel est le pont le plus proche de la station
2 de radio, pour autant que vous connaissiez le nom de ce
3 pont ?
4 R. Le pont le plus proche est juste en face de
5 la mosquée du centre. C’est le pont suspendu de piétons,
6 et puis, il y a un autre point à côté de l’hôtel Metalurg.
7 Q. Fort bien !
8 Me NICE (interprétation) : Un instant s’il vous
9 plaît, Messieurs les Juges.
10 Q. Même si cette carte ne montre pas
11 l’emplacement exact, est-ce que la station de radio se
12 trouve là dans la courbe que fait la rivière ou est-ce que
13 c’est plutôt de part et d’autre de cette courbe ou de ce
14 méandre que pourrait se trouver cet endroit ?
15 R. Mais je pense qu’il est encerclé. Je pense
16 que c’est à cet endroit-là que je pointe qu’il se trouve
17 [indication du témoin].
18 Q. Vous avez parlé de tranchées qui avaient été
19 creusées de part et d’autre. C’est ce qui m’a poussé à
20 vous poser la question à propos de la carte.
21 Dans l’emplacement de cette station de radio, est-
22 ce qu’il y a entre la rivière et cet établissement autre
23 chose que le boulevard ? Est-ce que depuis le bâtiment, on
24 voit la rivière ?
25 R. Oui, on peut.
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1 Q. Et les tranchées, elles étaient à quelque
2 distance ou juste de l’autre côté ?
3 R. Oui, un peu plus éloigné, à une vingtaine de
4 mètres, 15-20 mètres, je ne sais pas exactement.
5 Q. Parlons maintenant du 19 avril : Est-ce que
6 vous étiez de service ce jour-là à la station de radio
7 lorsque vous avez reçu un appel téléphonique ?
8 R. Oui.
9 Q. Est-ce que votre interlocuteur était une
10 femme ou un homme ?
11 R. Je ne sais pas. Vous parlez de l’appel
12 téléphonique ? Je ne comprends pas ce que vous voulez
13 dire.
14 Q. C’était un homme qui vous parlait ou une
15 femme ?
16 R. C’est un homme qui a parlé avec moi au
17 téléphone.
18 Q. Et qu’est-ce que vous avez remarqué pour ce
19 qui est de sa voix, de son accent ?
20 R. Je pense que c’était une voix quelque peu
21 artificielle ou de toute façon, l’accent était croate mais
22 ce n’était pas vraiment un accent croate d’origine. Je
23 pense que la personne faisait exprès pour se faire passer
24 pour un Croate et je pense que même cette liaison
25 téléphonique, cet appel, d’après moi, selon mon estimation,
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1 ne provenait pas de Zenica.
2 Q. Qu’a dit l’homme qui parlait ?
3 R. Au moment où il m’a appelé, d’abord, il ne
4 s’est pas présenté. Il a demandé l’information. Au fond,
5 il voulait savoir où se trouvait la station de Radio
6 Zenica. Je lui ai posé la question : quelles étaient ses
7 raisons pour lesquelles il me le demandait. Ensuite, il a
8 répété sa question. Il avait insisté. Il m’a demandé – je
9 cite : « Je vous prie, où se trouve l’établissement de la
10 station de Radio Zenica. » Il avait insisté deux fois,
11 trois fois, et moi, je lui avais demandé, de mon côté :
12 « Monsieur, mais quelles sont vos raisons ? Quelles sont
13 les raisons pour lesquelles vous voulez savoir où se trouve
14 la station de Radio Zenica ? »
15 Alors lui, il avait encore une fois insisté et il
16 a encore réclamé que je lui donne la réponse à la question
17 qu’il m’avait posée. À ce moment-là, je lui ai tout
18 simplement répondu : « Monsieur, au moment où vous vous
19 rendrez à Zenica, vous pouvez demander à n’importe quel
20 passager et chacun pourrait vous dire où se trouve la
21 station de Radio Zenica. »
22 Q. Comment s’est poursuivie la conversation ?
23 R. Il avait encore insisté une ou deux fois, je
24 ne peux pas vous le dire exactement en ce moment même.
25 Moi, je lui ai répété ma question pour savoir quelles
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1 étaient les raisons pour lesquelles il demandait où se
2 trouvait l’établissement de la station de radio de Zenica
3 et puis, très paisiblement, sans m’offenser, sans me vexer,
4 sans proférer des injures, il m’a répondu : « Monsieur,
5 nous allons vous pilonner d’ici 10 minutes. » C’est à peu
6 près ça ce qu’il m’a dit.
7 Alors, moi, j’ai riposté… d’abord, j’ai ri quelque
8 peu. Je lui ai dit : « Mais vous êtes sérieux ? » Je
9 riais. Enfin, ce n’était pas clair. Il a répété :
10 « D’ici 10 minutes, nous allons vous pilonner. Essayez de
11 vous abriter. Vous êtes un homme bon. » C’est ce qu’il
12 m’a dit.
13 Q. Est-ce qu’il a ajouté autre chose ?
14 R. Quand il me l’a dit, moi, j’ai ri une fois de
15 plus et puis, je lui ai dit, parce que je n’ai pas pris ça
16 au sérieux, puis ça me paraissait impossible… je lui ai dit
17 à peu près ça : « Si vous voulez vous battre » – c’est à
18 peu près ça ce que je lui ai dit – « vous n’avez qu’à venir
19 et nous allons tirer l’un sur l’autre en utilisant des
20 fusils et pas de cette manière-là. » C’est à ce moment-là
21 que la conversation a été interrompue.
22 Q. Avez-vous pris au sérieux cette menace au
23 départ ?
24 R. Bien sûr que non parce que des menaces, il y
25 en avait déjà eu et si l’on devait prendre au sérieux
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1 toutes les menaces…
2 Q. Mais un peu plus tard, avez-vous remarqué
3 quelque chose de particulier ?
4 R. Après ce coup de téléphone, il y a eu une
5 pause dans les émissions parce qu’à midi, nous étions
6 censés nous brancher sur les émissions de la radio de
7 Bosnie-Herzégovine, nous connecter à la radio de Bosnie-
8 Herzégovine. Donc, au moment de la pause qui a eu lieu, je
9 suis allé dans un couloir qui se trouvait à côté du studio
10 pour y prendre une tasse de café et c’est là que j’ai
11 remarqué, à 15 ou 20 mètres de moi, de la fumée qui
12 provenait sans doute du grand magasin qui s’appelait
13 Bosanka à l’époque… qui s’appelait Berogradska (ph.) à
14 l’époque (se reprend l’interprète) et Bosanka aujourd’hui.
15 Q. Qu’avez-vous vu ? Avez-vous vu des blessés,
16 et cætera ?
17 R. De la fenêtre, parce qu’il y avait une
18 fenêtre dans le couloir où je me trouvais, je pouvais voir
19 la rue dans laquelle se trouve le siège de la radio et
20 partant de l’endroit où se dégageait la fumée, il y avait
21 un passage. J’ai aussi remarqué un groupe de gens qui
22 transportaient des blessés.
23 J’ai donc vu des blessés qui fuyaient dans tous
24 les sens sans savoir où ils allaient, à l’aveuglette, et à
25 ce moment-là, je ne me rendais pas encore compte de ce qui
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1 était en train de se passer. Je me suis penché par la
2 fenêtre et j’ai demandé : « Que se passe-t-il ? » et
3 quelqu’un depuis la rue m’a répondu : « Il y a des gens
4 qui sont en train de se faire tuer ici. »
5 Q. Un peu plus tard, avez-vous entendu quelque
6 chose de particulier dans le quartier de la radio ?
7 R. Écoutez, ce premier obus, moi, je ne l’ai pas
8 entendu tomber mais au moment où les gens couraient dans
9 tous les sens pour s’enfuir, j’ai entendu trois ou quatre
10 obus tomber tout près, à quelle distance exactement, je ne
11 le sais pas mais tout près, et au moment où l’un de ces
12 obus a explosé, tout le bâtiment a sauté. Je ne sais pas
13 très bien comment dire les choses autrement. Nous étions
14 au milieu de la journée, il y avait du soleil, il y avait
15 de la lumière dans le studio, et tout d’un coup, la nuit
16 s’est faite dans le studio, sans doute à cause de la
17 poussière dégagée.
18 Q. Vous avez entendu tomber ces obus mais de là
19 où vous vous trouviez, vous n’aviez aucune possibilité de
20 les voir tomber ?
21 R. Non, je ne les ai pas vus tomber mais je les
22 ai parfaitement bien entendus.
23 Q. Avez-vous vu éventuellement un cratère dû à
24 l’un de ces obus ? L’avez-vous vu par la suite pour
25 déterminer à quelle distance de la station de radio tout
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1 cela s’était passé ?
2 R. Sur le moment effectivement, je n’ai pas pu
3 le faire mais plus tard, je veux dire un jour ou deux plus
4 tard, je suis allé voir pour vérifier à quel endroit ces
5 obus étaient tombés.
6 Q. À quelle distance de la station de radio
7 étaient-ils tombés ?
8 R. Je pense que celui qui était tombé le plus
9 loin était tombé à 30 ou 50 mètres. Ça c’était le plus
10 loin. Pour les autres, ils étaient tous dans un rayon
11 d’une quinzaine de mètres de la station, et le dernier ou
12 l’avant-dernier de ces obus a touché directement le
13 bâtiment, mais comme il y avait un arbre de très grande
14 taille devant le bâtiment, dans la rue, l’obus a d’abord
15 touché l’arbre avant d’atteindre le coin du bâtiment et il
16 a fini par tomber au coin du bâtiment qui se trouve face à
17 la rivière Bosna. L’arrêt d’autobus qui se trouvait à cet
18 endroit a été démoli et une voiture également, je crois.
19 Q. Le bâtiment dans lequel vous travailliez à ce
20 moment-là, existe-t-il toujours aujourd’hui ?
21 R. Oui, il existe.
22 Q. Nous n’avons pas de photographie de ce
23 bâtiment ici à l’instant même. Nous en aurons une un peu
24 plus tard pour aider les Juges dans leur travail. Elle
25 sera versée au dossier par l’intermédiaire d’un autre
Page 13206
1 témoin. Mais peut-être pourriez-vous reconnaître l’arrêt
2 d’autobus dont vous venez de parler. Si nous pouvions
3 mieux identifier le bâtiment, reconnaîtriez-vous l’arrêt
4 d’autobus ?
5 R. Oui, oui, je le reconnaîtrais.
6 Q. J’aimerais que la pièce 2281 soit présentée
7 au témoin.
8 R. Oui, c’est cela. Il existe encore
9 aujourd’hui d’ailleurs. C’est bien celui-là. Il y a le
10 pont de Viseci qui se trouve à cet endroit-là. Il a été
11 reconstruit, l’arrêt d’autobus, et ça c’est la rivière
12 Bosna. La radio est de l’autre côté, en face. C’est bien
13 cela.
14 Q. Regardons maintenant la pièce 2282.2, je vous
15 prie… ou plutôt 2282.1 (se reprend l’interprète). Cette
16 photographie vous aide-t-elle à localiser plus précisément
17 la station de radio ?
18 R. Je n’ai pas bien compris votre question.
19 Pouvez-vous la répéter ?
20 Q. Cette photographie vous aide-t-elle à
21 identifier l’emplacement où se trouvait la station de
22 radio ? Ce que vous voyez sur cette photographie est-il
23 situé relativement près de la station de radio ?
24 R. Ce que l’on voit sur cette photographie c’est
25 l’extérieur du cinéma. Je crois que l’obus est tombé là.
Page 13207
1 Ici se trouve le grand magasin et entre ce point que je
2 montre ici [indication du témoin] et la station de radio,
3 il doit y avoir 30 à 50 mètres, ne me prenez pas au mot,
4 mais 30 à 50 mètres à peu près.
5 Q. Nous nous appuierons donc sur ces
6 photographies mais en trouverons d’autres pour aider
7 davantage les Juges de cette Chambre plus tard.
8 Les employés ont-ils été évacués du bâtiment pour
9 aller se rendre dans un abri situé non loin et êtes-vous
10 ensuite revenu dans le bâtiment de la radio avec l’un de
11 vos collègues ?
12 R. Oui.
13 Q. La radio a-t-elle cessé de fonctionner parce
14 qu’il y a eu une panne d’électricité, une coupure
15 d’électricité ?
16 R. Oui. Au moment où les obus sont tombés, j’ai
17 proposé que nous sortions du bâtiment trois par trois.
18 Parce que nous étions au rez-de-chaussée, les murs étaient
19 épais, j’ai proposé que nous allions nous abriter dans
20 l’abri antiatomique.
21 Q. Bien. Je ne crois pas que nous ayons besoin
22 d’aller davantage dans le détail sur ce point. Une fois
23 que vous êtes retourné dans le bâtiment et vous avez vu que
24 l’électricité était coupée, avez-vous réussi à réparer un
25 certain nombre d’équipement pour diffuser une cassette de
Page 13208
1 musique ?
2 R. Oui.
3 Q. Le téléphone a-t-il sonné ?
4 R. Oui.
5 Q. L’une des personnes qui appelaient au
6 téléphone était-elle un homme dont la voix ressemblait à
7 celle de l’homme qui vous avait appelé avant ?
8 R. Écoutez, j’étais en état de choc et j’ai
9 décroché. J’ai entendu la même voix qu’avant qui disait :
10 « Vous les balijas, vous n’avez pas encore été anéantis.
11 Nous allons maintenant vous frapper à nouveau. » J’étais
12 véritablement en état de choc. J’avais du mal à
13 enregistrer ce qui se passait autour de moi. Donc, était-
14 ce vraiment la même voix ou pas, je ne saurais le dire avec
15 certitude.
16 Q. Le pilonnage s’est-il poursuivi au cours de
17 l’après-midi ?
18 R. Pour autant que je m’en souvienne, non.
19 Q. L’armée de Bosnie-Herzégovine est-elle
20 arrivée et ses hommes ont-ils ordonné aux employés de la
21 radio de déménager quelques heures plus tard ?
22 R. Oui, l’après-midi de ce même jour.
23 Q. Le centre de Zenica a-t-il continué à être
24 pilonné de façon intermittente à partir de cette date
25 jusqu’en février 1994 ?
Page 13209
1 R. Pour autant que je le sache, oui.
2 Q. Je ne vous demande pas quel est votre point
3 de vue à ce sujet mais vous avez un point de vue, n’est-ce
4 pas, quant à l’endroit d’où provenaient ces obus ?
5 R. Vous parlez de…
6 Q. Je souhaite une réponse par oui ou par non.
7 R. Je suppose qu’oui.
8 Q. Ce point de vue est-il dû à ce que des tiers
9 vous ont dit ou l’avez-vous formé vous-même ? Vous l’êtes-
10 vous formé vous-même sur la base de ce que vous avez vu ?
11 R. Je me le suis formé sur la base de ce que
12 j’ai vu.
13 Q. Qu’avez-vous vu donc qui vous a permis de
14 tirer les conclusions que vous avez tirées ?
15 R. À ce moment-là, les obus arrivaient toujours
16 du même côté. Donc, nous savions où nous abriter. Au
17 départ, nous ne le savions pas mais dès le deuxième obus,
18 nous savions dans quelle direction nous pouvions nous
19 abriter.
20 Q. De quelle partie de Zenica provenaient ces
21 obus ?
22 R. Du côté de Vitez et de Busovaca. À ce
23 moment-là, je crois d’ailleurs qu’ils provenaient plus
24 souvent de la direction de Vitez.
25 Me NICE (interprétation) : Ce sont toutes les
Page 13210
1 questions que j’avais à poser à ce témoin mais je répète
2 que j’améliorerai la situation en ce qui concerne les
3 photographies. Pour l’instant, les choses ne sont pas au
4 mieux et cela n’a rien à voir avec le témoin, Monsieur le
5 Président. Mais nous améliorerons les choses dans un
6 avenir proche.
7 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Nous allons
8 suspendre l’audience jusqu’à 14 h 30.
9 Monsieur le Témoin, je vous demanderais de bien
10 vouloir revenir dans cette salle à 14 h 30 pour la fin de
11 votre déposition qui s’achèvera cet après-midi et au cours
12 de la pause-déjeuner et des autres pauses qui peuvent
13 survenir durant votre audition, je vous demande de bien
14 penser à ne parler à personne du contenu de cette
15 déposition et donc à ne pas parler non plus aux membres du
16 Bureau du Procureur. Je vous demanderais d’être de retour
17 ici à 14 h 30.
18 --- Suspension de l’audience à 13 h 00
19 --- Reprise de l’audience à 14 h 35
20 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Me Nice.
21 Me NICE (interprétation) : Nous n’avons pas une
22 autre photographie qui montre la station de radio. Je
23 pense que ce n’est pas le problème. Si ceci est
24 indispensable, je vais pouvoir la fournir. Par conséquent,
25 entre Bulevar et la deuxième rue, le « M » est encerclé.
Page 13211
1 Si jamais il y a une contestation, on peut en reparler.
2 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Me Naumovski,
3 je vous en prie.
4 Me NAUMOVSKI (interprétation) : Je vous en prie.
5 CONTRE-INTERROGÉ PAR Me NAUMOVSKI
6 (interprétation) :
7 Q. Je vais me présenter. Je m’appelle Mitko
8 Naumovski. Je suis de Zagreb et je suis un des conseils de
9 Monsieur Kordic, premier accusé. Je vais vous poser
10 quelques questions et ce que je dis normalement aux autres
11 témoins, je vais vous le redire également. Nous nous
12 comprenons. Par conséquent, vous voulez bien ménager les
13 pauses pour que les interprètes puissent correctement faire
14 leur travail.
15 Monsieur Hamzic, si je vous ai bien compris, vous
16 travaillez depuis longtemps, d’abord comme technicien et
17 ensuite, comme technicien en chef de la station radio de
18 Zenica ?
19 R. Oui.
20 Q. Est-ce que vous avez travaillé à ce poste
21 tout le temps en 1992, 1993 et 1994 ?
22 R. Oui.
23 Q. Je pense que vous avez juste fait un signe de
24 tête en réponse à la première question. Si vous voulez
25 bien répondre par la parole.
Page 13212
1 R. Je comprends.
2 Q. Est-ce que vous avez fait votre service
3 militaire à l’ex-JNA ?
4 R. Non.
5 Q. Est-ce que vous avez exercé un certain nombre
6 de fonctions militaires ? Est-ce que vous avez été
7 mobilisé ? Est-ce que vous avez eu une obligation de
8 travail ?
9 R. Oui.
10 Q. Par conséquent, vous avez été mobilisé et
11 vous avez travaillé à la radio, si je comprends bien ?
12 R. C’était l’obligation de travail,
13 effectivement.
14 Q. Entendu ! Dites-nous, s’il vous plaît, en
15 1992, vous avez dit que vous avez travaillé sur les
16 programmes. Vous avez dit également quelle était votre
17 stratégie. Vous avez dit qu’à l’époque, c’était la radio
18 de Bosnie et la télévision également qui se contactaient,
19 vous étiez en contact avec la radio et la télévision de
20 Sarajevo, n’est-ce pas ?
21 R. Oui.
22 Q. Mais de toute façon, vous n’avez pas pris
23 cette décision de manière unanime ? Il y avait un certain
24 nombre d’autres points de vue au sujet de cette stratégie
25 que vous avez épousée par la suite ?
Page 13213
1 R. Lors de cette réunion dont j’ai parlé tout à
2 l’heure lors de ma déposition, selon moi, il n’y avait pas
3 d’autres attitudes, d’autres approches.
4 Q. Ivica Tomic et Anton Mrkonjic étaient des
5 journalistes également qui travaillaient avec vous ensemble
6 à la Radio Zenica, n’est-ce pas ?
7 R. Oui, mais il ne faut pas oublier que Monsieur
8 Tomic, à cette époque-là, était rédacteur en chef.
9 Q. Quand est-ce qu’ils ne pouvaient plus
10 continuer leurs activités étant donné qu’ils étaient
11 membres du HVO ? Vous l’avez dit, d’ailleurs.
12 R. Ce n’est pas vrai de dire qu’on leur a rendu
13 impossible de continuer leurs activités. Ce sont eux-mêmes
14 qui se sont arrêtés d’exercer leurs activités, à ma
15 connaissance.
16 Q. Mais à quel moment, s’il vous plaît ?
17 R. En ce qui concerne Mrkonjic, je me souviens
18 que c’était le mois d’août 1992 où il est devenu membre de
19 cette formation militaire. Pour ce qui est de Tomic, un
20 mois, un mois et demi plus tard ou peut-être même plus
21 tard. Je ne peux pas vous le dire exactement.
22 Q. Si je vous comprends bien, à ce moment-là,
23 nous sommes d’accord pour dire que dans la deuxième moitié
24 de 1992, les gens qui travaillaient à la radio de Zenica et
25 qui étaient membres du HVO ne se rendaient plus au travail,
Page 13214
1 généralement parlant ?
2 R. Non, ce n’est pas ça.
3 Q. Vous voulez dire qu’il y en a d’autres qui
4 sont venus au travail ?
5 R. Tomic. Je viens de vous le dire.
6 Q. Mais généralement parlant, après lui, fin
7 1992, il n’y avait plus de personnes qui venaient au
8 travail ?
9 R. Si nous parlons des deux personnes en
10 question, à partir de la fin de l’année 1992, ils ne se
11 rendaient plus, les deux, au travail.
12 Q. La station de radio c’était une station
13 civile ? Ce n’était pas une station qui appartenait à un
14 parti ?
15 R. Je pense que je vous ai déjà donné des
16 précisions. Bien évidemment que ce n’était pas une station
17 qui appartenait à un parti. Elle appartenait à tout le
18 monde.
19 Q. Si je vous pose cette question, c’est tout
20 simplement parce que vous avez accepté l’aide de la Défense
21 territoriale. À un moment donné, vous avez dit qu’ils ont
22 également creusé quelques tranchées dans les environs du
23 bâtiment où vous étiez ?
24 R. Oui, mais nous n’avons pas accepté l’aide.
25 Q. Compte tenu du fait qu’à ce moment-là, dans
Page 13215
1 le secteur de Zenica, il y avait le HVO et le TO qui
2 opéraient, comment ça se fait que les deux partis ne vous
3 ont pas aidé dans ce sens-là ? Comment ça se fait que vous
4 ne vous êtes pas adressé à deux de ces formations ?
5 R. Je vous ai déjà donné la réponse. Le HVO, en
6 automne 1992, a déjà commencé à manifester la force
7 militaire.
8 Q. Où, en ville ?
9 R. Oui, tout à fait.
10 Q. Mais dites aux Juges, s’il vous plaît, vous
11 ne devez pas être tout à fait précis, ce n’est pas facile
12 mais pour que les Juges puissent se rendre compte également
13 de ce que c’est Zenica, il y avait combien de Croates et
14 combien de musulmans ? Je suis sûr que les Juges vont vous
15 comprendre. Combien il y avait de Serbes, combien de
16 musulmans, combien de Croates ? Juste pour avoir une idée
17 de la grandeur de la ville et de la population qui y
18 habitait.
19 R. Disons que sur une trentaine de personnes qui
20 travaillaient à la station de radio, 10 ou 12 étaient des
21 musulmans, il y avait autant de Serbes et le reste c’était
22 des catholiques.
23 Q. Quand vous dites catholiques, vous pensez aux
24 Croates ?
25 R. Oui, normalement.
Page 13216
1 Q. En ce qui concerne la ville, vous parlez de
2 la radio mais pour ce qui est de la ville, est-ce que vous
3 pouvez nous donner un petit peu votre estimation au sujet
4 de la population, du nombre de personnes qui appartenaient
5 à un groupe ethnique et d’autres aux autres groupes
6 ethniques ?
7 R. Je pense qu’il y avait 50 pour cent de
8 musulmans, 24 pour cent ou 25 pour cent de Serbes et 23, 24
9 pour cent de Croates, des catholiques.
10 Q. Mon confrère Mikulicic m’a fait passer une
11 feuille avec le recensement. Il paraît que les Croates et
12 les Serbes étaient à peu près au même nombre, au même
13 pourcentage, alors que les musulmans étaient dans les 55
14 pour cent.
15 R. Mais je viens de vous donner les informations
16 qui sont exactes, selon moi.
17 Q. Pour ce qui concerne les journalistes qui
18 sont partis de la radio, la Radio Zenica a poursuivi ses
19 activités tout le long de 1993, 1994, tout au moins, je le
20 suppose ?
21 R. Oui, tout à fait. Le programme a été conçu
22 comme ceci était le programme de l’époque de Bosnie-
23 Herzégovine et de la radio et télévision de Bosnie-
24 Herzégovine.
25 Q. Mais nous serons d’accord pour dire que vous
Page 13217
1 avez suivi les événements qui ont eu lieu en 1992 et,
2 notamment, depuis le mois d’avril et depuis que le conflit
3 et l’agression ont eu lieu et c’est dans ce contexte-là que
4 je vais vous poser la question. Est-ce que vous avez eu
5 une émission, par exemple, que vous avez consacrée à ce
6 sujet qui était fort discuté au moment où il y avait la
7 caserne qui a été prise par la Défense territoriale ? Vous
8 vous souvenez, il y a des canons dont ils se sont emparés ?
9 R. Oui, je me souviens de cet événement.
10 Q. Est-ce qu’il y avait une attention
11 particulière qui a été attachée à cet événement ?
12 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Dans quelle
13 mesure ceci découle-t-il de l’interrogatoire principal ?
14 Me NAUMOVSKI (interprétation) : Je voulais tout
15 simplement parler de cette conception du point de vue
16 programmes de la Radio Zenica.
17 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Le témoin
18 s’est contenté de préciser qu’il y avait des conférences de
19 presse en mai et en juin 1992, conférences auxquelles,
20 apparemment, les deux parties étaient invitées. Donc, vous
21 pouvez poser des questions là-dessus mais pour ce qui est
22 des autres orientations, ceci me semble manquer de
23 pertinence.
24 Me NAUMOVSKI (interprétation) : Oui, merci,
25 Monsieur le Président. Je vais poser les questions dans ce
Page 13218
1 sens-là. Je vais me conformer à ce que vous me demandez.
2 Nous allons passer à d’autres sujets et j’ai quelques
3 questions également qui concernent plus particulièrement
4 Monsieur Kordic.
5 Q. Très brièvement, vous avez parlé d’une
6 explosion qui a eu lieu fin décembre dans un café qui se
7 trouvait dans la proximité de l’immeuble où vous étiez.
8 R. Oui.
9 Q. Est-ce qu’on a pu découvrir les auteurs de
10 cette explosion ? Est-ce qu’on a pu découvrir ceux qui ont
11 déposé les explosifs, la bombe ?
12 R. Non.
13 Q. Est-ce que vous savez s’il y avait des
14 enquêtes, des investigations ? Cette grenade a-t-elle été
15 destinée à quelqu’un tout spécialement ?
16 R. Je ne connais pas les résultats des
17 investigations. Il est vrai que la grenade a été placée le
18 soir au moment où le café ne fonctionnait plus, enfin,
19 était fermé, alors que notre établissement est juste en
20 face du café. Par conséquent, c’est à vous de conclure à
21 qui la grenade a-t-elle été destinée.
22 Q. Mais ça, c’est votre conclusion ? Vous ne
23 savez pas vraiment les faits ?
24 R. C’est exact.
25 Q. Vous avez parlé également d’un certain nombre
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1 d’incidents qui ont eu lieu en automne 1992. Vous avez
2 parlé également d’un certain nombre d’incidents qui
3 concernaient les personnes qui travaillaient avec vous dans
4 la rédaction. Vous avez parlé du cambriolage de votre
5 appartement. Est-ce que vous savez si, éventuellement, les
6 auteurs de ces actes ont été découverts ?
7 R. Non, je ne sais pas.
8 Q. Quand nous avons parlé de cette aide, nous
9 avons dit que c’est la Défense territoriale qui, pour vous
10 protéger, a creusé des tranchées. Pourquoi vous n’avez pas
11 demandé l’aide à la police civile étant donné que la police
12 civile, normalement, doit protéger tous les citoyens et
13 maintenir l’ordre public ?
14 R. Je suppose que la police civile, à cette
15 époque-là, effectivement, avait à assurer l’ordre public.
16 Comme nous sentions qu’il y avait quelque chose dans l’air,
17 enfin, on avait le pressentiment que quelque chose allait
18 se produire, nous avons demandé la protection de la Défense
19 territoriale et puis, à mon avis, c’était tout à fait
20 logique.
21 Q. Entendu ! Nous allons encore toucher un
22 autre sujet. Vous avez dit qu’on vous avait menacé en
23 automne 1992. Est-ce que c’était quelque chose de
24 personnel ou bien, éventuellement, quelque chose qui était
25 lié à vos activités à la station de radio ?
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1 R. C’était lié à mes activités à la station de
2 radio. Quand moi, j’assurais la permanence, on savait très
3 bien à quel moment je l’assurais et c’est à ce moment-là
4 qu’il y avait des appels téléphoniques.
5 Q. Vous ne saviez pas qui vous a appelé ?
6 Personne ne s’est présenté, n’a rien dit à ce sujet-là ?
7 R. Non, je ne sais pas qui avait appelé.
8 Q. Merci. Quelques questions qui concernent
9 Monsieur Kordic. Nous sommes d’accord pour dire que vous
10 le connaissiez depuis qu’il a travaillé comme journaliste à
11 Vatrostalna à Busovaca ?
12 R. [Signe affirmatif du témoin]
13 Q. Quand le Président vous a posé la question
14 aujourd’hui, vous avez dit qu’il s’était rendu à la radio
15 deux fois, trois fois. Excusez-moi, j’ai vu que dans le
16 compte rendu, c’est marqué « général », alors que c’est le
17 « journaliste ». Il était tout simplement journaliste.
18 Kordic était journaliste à Vatrostalna. Par conséquent, je
19 pense que vous avez dit que Monsieur Kordic était, à trois
20 reprises, invité à la station de radio ?
21 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Oui, mais ça
22 concernait le mois de mai et le mois de juin 1992, alors
23 qu’apparemment, maintenant, vous posez une question qui
24 concerne une période antérieure et pendant laquelle il
25 venait en tant que journaliste.
Page 13221
1 Me NAUMOVSKI (interprétation) : C’est de ma
2 faute, Monsieur le Président, mais j’ai pensé à la même
3 période. Il y avait juste une question qui concernait
4 Vatrostalna.
5 Q. Pour être précis, aux mois de mai et juin,
6 vous avez dit que Monsieur Kordic s’était rendu à la
7 station de radio deux ou trois fois ?
8 R. J’ai dit trois fois à peu près. Je ne sais
9 pas vraiment. Je sais que moi, j’étais permanent. Trois
10 fois pendant que moi, j’y étais. Mon collègue peut-être
11 l’avait vu également à une autre période.
12 Q. Mais si je vous dis que Monsieur Kordic
13 s’était rendu deux fois à la station de radio au mois de
14 mars 1992, au moment où le Général Kukanjac de l’ex-JNA y
15 était, avant que la guerre s’était déclenchée, et la
16 deuxième fois, c’était fin mai, début juin, est-ce que nous
17 pourrions nous mettre d’accord là-dessus ?
18 R. C’est fort possible mais quand moi, j’ai
19 travaillé, moi, je sais ce que j’ai dit. Quand mon
20 collègue a travaillé à ma place, je ne sais pas ce qui
21 s’était passé.
22 Q. Lors de l’interrogatoire principal, vous avez
23 dit que les émissions avec Monsieur Kordic ont été
24 organisées par Monsieur Ivica Tomic et Anton Mrkonjic, les
25 deux journalistes dont il a été question.
Page 13222
1 R. J’ai dit en général.
2 Q. Pour rafraîchir votre mémoire, les deux
3 émissions qui étaient invitées à la radio ont été
4 organisées par une de vos collègues, une musulmane, qui
5 était en bons termes avec un certain Filip. Vous devez la
6 connaître parce que c’est une de vos collègues. Elle est
7 quelque part à l’étranger en ce moment.
8 R. Cette collègue s’appelait Aida Hadzimeljic à
9 cette époque-là. Oui, je me souviens. Je me souviens,
10 effectivement, quand Kukanjac y était, je pense que c’était
11 elle mais pour les deux autres fois, je reste sur ma
12 position comme je l’avais dit tout à l’heure.
13 Q. Entendu ! Mais comme chaque radio, Radio
14 Zenica également enregistre ses propres émissions. Par
15 conséquent, vous les avez enregistrées ? Je le suppose,
16 tout au moins.
17 R. Bien sûr mais quand, en 1993, on commençait à
18 manquer de cassettes, de bandes, nous les avons
19 réutilisées.
20 Q. Est-ce que vous disposez des bandes avec les
21 enregistrements de ces deux émissions dans lesquelles
22 Monsieur Kordic a pris part ?
23 R. À ma connaissance, non, mais il y a des
24 articles, il y a des photos, il y a un journal également
25 dénommé Nasa Rijec, Notre Parole. Vous avez parlé de
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1 Kukanjac et je pense qu’il y avait Kukanjac, Kordic et je
2 ne sais pas qui était la troisième personne, Suvalic ou
3 quelqu’un d’autre mais je suis sûr que dans les archives,
4 vous allez pouvoir trouver la photographie et l’article sur
5 l’émission.
6 Q. Les bandes ont disparu, n’existent pas ?
7 R. Moi, je vous parle de la radio. À ma
8 connaissance, à la radio, nous n’en disposons pas.
9 Q. Merci. À deux reprises, quand Monsieur
10 Kordic s’était rendu à la radio, il n’a jamais rien dit qui
11 serait pour être interprété mal au sujet des musulmans ?
12 R. Excusez-moi, je tousse, j’ai pris froid. Il
13 n’a pas dit de mal mais il n’a dit rien de bien non plus.
14 Q. Il a parlé du HVO sous un aspect positif et
15 c’est ça que vous lui avez reproché ? C’est pour ça que
16 vous lui avez dit : « Ce n’est pas bien ce que vous
17 faites » ?
18 R. Oui. Vous avez bien remarqué ce que j’ai dit
19 mais ce n’est pas pour cette raison que je l’ai dit. Moi,
20 j’ai dit tout simplement… j’ai prononcé cette phrase parce
21 que je considérais que les représentants de la Défense
22 territoriale auraient dû être mentionnés. Pourquoi on n’a
23 pas parlé de la Défense territoriale ? C’est dans ce sens-
24 là que j’ai parlé.
25 Q. En ce qui concerne ce premier sujet, cette
Page 13224
1 première émission, vous savez qu’il y avait cet entretien
2 avec le Général Kukanjac. En effet, il s’agissait d’un
3 certain nombre de problèmes qui étaient liés à l’ex-JNA,
4 cette attitude qu’il fallait adopter vis-à-vis de la JNA,
5 sinon, on n’aurait pas invité le Général Kukanjac pour
6 assister dans l’émission ?
7 R. Moi, je n’étais pas présent. Si mes
8 souvenirs sont bons, j’étais dans l’établissement mais je
9 n’étais pas chargé de cette émission. Donc, je ne me
10 souviens pas du détail.
11 Q. La deuxième fois, quel était le thème de
12 cette deuxième émission fin mai, début juin ? Nous parlons
13 de 1992 si vous étiez présent, sinon, bien évidemment, on
14 va passer.
15 R. Oui, j’y étais présent et le thème c’était la
16 défense contre l’agression et puis tout au long de
17 l’émission, on a parlé au nom de nous. Ce n’était pas
18 conjoint. Ce n’était pas vraiment au nom des deux. Nous
19 sommes partis à nous organiser ensemble et tout d’un coup,
20 il y a une partie qui est quelque peu hiérarchiquement au-
21 dessus de nous, ce qui nous a gênés, bien évidemment.
22 Q. Mais nous sommes bien d’accord pour dire que
23 Monsieur Kordic, ni par la parole ni par les gestes n’a dit
24 rien de mauvais au sujet des musulmans ?
25 R. Non, mais il n’était pas pour la coopération.
Page 13225
1 En d’autres termes, il a démontré qu’il n’était pas pour la
2 coopération.
3 Q. Entendu ! Pour ce qui vous concerne vous
4 personnellement, Monsieur Kordic avait toujours un
5 comportement correct ?
6 R. Très correct vis-à-vis de moi jusqu’à la
7 dernière rencontre. C’est là où on était… je ne sais pas
8 comment m’exprimer.
9 Q. Avant de terminer, très brièvement, vous avez
10 mentionné aujourd’hui que Monsieur Kordic avait utilisé les
11 termes tels « Chetnik », « Oustashi », et cætera. Si ceci
12 était le cas, c’était dans le contexte d’une lutte commune
13 contre l’agresseur ? C’est la raison pour laquelle il
14 avait utilisé ces termes car il y avait ce thème qui était
15 le thème principal de l’émission ?
16 R. Je ne voudrais pas parler du contexte et
17 surtout pas sortir du contexte ce qu’il avait dit. Moi, je
18 ne pourrais pas le faire maintenant et aujourd’hui.
19 Q. Nous sommes d’accord pour dire, et ça, c’est
20 votre conclusion, que Monsieur Kordic était le numéro 1 en
21 Bosnie centrale. C’est ce que vous avez dit en quelque
22 sorte. C’est bien votre conclusion, n’est-ce pas ?
23 R. Ce n’est pas ma conclusion.
24 Q. Mais c’est vous qui l’avez présentée cette
25 conclusion ?
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1 R. Oui, c’est moi qui l’ai présentée.
2 Q. D’un autre côté, vous ne savez pas
3 précisément quelles étaient les fonctions et pendant quelle
4 période Monsieur Kordic avait exercé telle ou telle
5 fonction depuis 1990 jusqu’à, enfin, pendant la guerre ?
6 R. En 1991, je sais qu’à la mairie de Busovaca,
7 il a été chargé des questions militaires. Après, quelles
8 étaient les fonctions qu’il avait exercées, je ne sais pas
9 mais je sais qu’il était le grand boss, enfin, le numéro 1
10 et c’est lui qu’on demandait pour tout.
11 Q. Est-ce que vous pouvez être plus précis ?
12 Vous ne connaissez aucun exemple très concret ? Est-ce que
13 vous savez qu’il était vice-président du HDZ, par exemple,
14 de Herceg-Bosna ? Est-ce que vous savez que, par exemple,
15 on lui avait demandé un certain nombre de choses ?
16 R. Non, mais je ne sais pas. Je ne sais pas
17 comment vous me posez les questions. Je ne les comprends
18 pas.
19 Q. Vous dites que c’est à lui qu’on s’adressait
20 pour tout mais je maintiens que vous ne connaissez pas des
21 faits. Ce sont vos conclusions ? Ce sont les ouï-dire, ce
22 sont les rumeurs que vous avez entendu dire ?
23 R. La situation était telle…
24 M. LE JUGE BENNOUNA : Me Naumovski, je crois
25 qu’on est déjà intervenu pour dire que vous ne devez pas
Page 13227
1 rentrer dans un quelconque débat avec le témoin. Posez-lui
2 des questions si vous voulez mais le lieu n’est pas de
3 débattre avec le témoin ou d’argumenter avec lui. Il vous
4 a dit quelle était son impression. C’est tout. C’était
5 son impression. Maintenant, si vous avez des questions
6 précises à lui poser, posez-lui mais n’argumentez pas avec
7 lui. Merci. Il appartient, évidemment, à la Chambre de
8 tirer les conclusions de tout cela.
9 Me NAUMOVSKI (interprétation) : Merci, Monsieur
10 le Juge. Je vais m’y conformer. Si le témoin est d’accord
11 pour dire que c’est uniquement sa conclusion, à ce moment-
12 là, je n’aurai plus de questions à poser.
13 R. Mais ce n’est pas mon point de vue. La
14 situation était telle comme je l’ai décrite. Moi, je
15 n’étais pas dans la situation de le vérifier mais je le
16 sens et tout le monde le savait.
17 Me NAUMOVSKI (interprétation) : Je n’ai plus de
18 questions. Merci. Merci au témoin.
19 CONTRE-INTERROGÉ PAR Me KOVACIC
20 (interprétation) :
21 Q. Bonjour, Monsieur Hamzic. Je m’appelle
22 Bozidar Kovacic et je suis conseil du deuxième accusé,
23 Mario Cerkez. J’ai quelques petites questions juste pour
24 préciser et juste pour mettre dans le contexte réel.
25 Monsieur Hamzic, vous avez dit que vous n’étiez
Page 13228
1 pas ou plutôt que vous étiez technicien en chef mais vous
2 n’étiez pas rédacteur en chef, vous n’étiez pas
3 journaliste, n’est-ce pas ?
4 R. Les journalistes c’est une chose et les
5 techniciens c’en est une autre.
6 Q. Mais vous, vous étiez dans le personnel
7 technique, n’est-ce pas, à la radio de Zenica ?
8 R. Oui.
9 Q. Vous avez travaillé quand même longtemps à
10 cet endroit-là. Très brièvement, vous avez parlé de
11 manière indirecte quelle était la composition également
12 ethnique à la radio. Ça correspondait en quelque sorte
13 également à la composition de la population dans la ville
14 de Zenica. Vous avez parlé de la directrice Medina
15 Delibasic. J’ai bien compris son nom. Elle était
16 musulmane, n’est-ce pas ? Est-ce que c’est exact ?
17 R. Oui.
18 Q. Vous avez parlé également de votre collègue
19 Bilic. Il est croate ? Tout au moins, c’est ce que je
20 pense. C’est le nom qui en parle.
21 R. Moi, j’ai parlé de Monsieur Bogoljub Ilic.
22 Il était serbe. Il est serbe de nationalité.
23 Q. Entendu ! Vous avez parlé également de
24 Monsieur Ivica Tomic, n’est-ce pas ? Il était croate, il
25 était au HVO ?
Page 13229
1 R. Je sais qu’il était catholique. C’est tout
2 ce que je sais.
3 Q. Et d’autres rédacteurs, ils étaient de quelle
4 nationalité ? Ils étaient mixtes ?
5 R. Oui, tout à fait.
6 Q. Par conséquent, vous avez vécu dans une
7 société multi-ethnique à Zenica ? Je pense que nous
8 pouvons conclure ça.
9 R. Oui. Comme aujourd’hui, d’ailleurs.
10 Q. Vous aussi, vous avez fait votre formation à
11 Zenica ?
12 R. Oui, mais j’ai été à Sarajevo et à Belgrade
13 également pour faire des écoles supérieures.
14 Q. Mais votre toute première jeunesse est liée à
15 Zenica ?
16 R. Oui.
17 Q. Encore quelques questions, petites questions.
18 Me KOVACIC (interprétation) : Messieurs les
19 Juges, ceci ne découle pas directement de l’interrogatoire
20 principal mais je pense que ceci pourrait nous permettre
21 d’administrer une preuve parce que nous avons ici
22 l’occasion de recevoir des informations de base sur un
23 expert qui pourrait nous dire le type de programmes qu’on
24 diffusait à l’intention de la population locale et là, on
25 pourra peut-être parler des programmes télé.
Page 13230
1 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Mais vous
2 parlez de quelle période ?
3 Me KOVACIC (interprétation) : 1992, peut-être
4 1993.
5 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : La zone de
6 réception de ce programme, quelle devait-elle être ?
7 Me KOVACIC (interprétation) : C’est ce type de
8 questions que je voulais poser au témoin parce qu’il était
9 technicien chef.
10 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Voulez-vous
11 demander au témoin jusqu’où on pouvait recevoir les
12 programmes de Radio Zenica ?
13 Me KOVACIC (interprétation) : Tout à fait.
14 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Le témoin peut
15 peut-être répondre.
16 En 1992 et en 1993, jusqu’où pouvait-on recevoir
17 les programmes de la Radio Zenica ?
18 R. Vous voulez que je donne des kilomètres ou
19 des villes ?
20 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Donc, je
21 suppose que ce qui vous intéresse c’est la vallée de la
22 Lasva, donc, disons dans la région de la vallée de la
23 Lasva, Monsieur le Témoin.
24 R. À cette époque-là, les programmes étaient
25 reçus à Busovaca et les villages dans les alentours, Vitez,
Page 13231
1 les villages autour de Vitez, Zenica et puis un peu plus
2 loin mais ça ne vous intéresse pas.
3 Me KOVACIC (interprétation) :
4 Q. Et Novi Travnik ?
5 R. Non.
6 Q. Par conséquent, les municipalités de la
7 vallée de la Lasva ?
8 R. Oui.
9 Q. Vu la profession que vous avez exercée, à ce
10 moment-là, on peut dire également qu’il y avait une station
11 de la Radio télévision Zeta qui fonctionnait, n’est-ce pas,
12 et qui couvrait ce secteur, cette région ?
13 R. Non. C’était une télévision qui couvrait
14 tout simplement Zenica.
15 Q. Par conséquent, Zenica tout simplement ?
16 R. Oui.
17 Q. Pourriez-vous nous dire s’il y avait d’autres
18 télévisions locales à Novi Travnik, Busovaca, Vitez ? Est-
19 ce que vous le savez ou non, vu la profession que vous avez
20 exercée ? Je parle de l’année 1992.
21 R. Ce que je peux dire… excusez-moi, vraiment,
22 je suis désolé, je tousse tout le temps et je n’arrive pas
23 à parler correctement mais tout ce que je peux vous dire
24 c’est de parler de Zenica. Je ne suis pas sorti de Zenica.
25 Q. Merci. Encore une question. Il y avait une
Page 13232
1 déclaration préalable que vous avez donnée. Est-ce que
2 vous vous souvenez de l’événement où un certain nombre de
3 combattants arabes ont été échangés à Zenica ? Est-ce que
4 vous l’avez transmis ? Est-ce que vous étiez un
5 technicien? C’était au mois de juin 1993.
6 R. Non, je ne sais pas. Je ne suis pas au
7 courant et en principe, Radio Zenica ne se chargeait pas de
8 tels événements.
9 Q. Merci.
10 Me KOVACIC (interprétation) : Je n’ai plus de
11 questions à poser à ce témoin. Je vous remercie.
12 Q. Merci, Monsieur le Témoin.
13 Me NICE (interprétation) : Je n’ai que deux
14 questions à poser en interrogatoire supplémentaire,
15 Monsieur le Président, mais je constate qu’au niveau du
16 contre-interrogatoire, on ne dit pas que Radio Zenica soit
17 une cible légitime.
18 RÉINTERROGÉ PAR Me NICE
19 (interprétation) :
20 Q. Au moment où vous vous êtes adressé à la
21 Défense territoriale pour qu’elle vous aide, est-ce qu’à
22 votre avis, la Défense territoriale avait fait quoi que ce
23 soit de façon unilatérale qui soit destiné à accroître les
24 tensions qui prévalaient dans la région ?
25 R. Je pense que non et pour une raison tout à
Page 13233
1 fait simple. Nous avons demandé que l’établissement soit
2 assuré. Par conséquent, un homme qui serait devant
3 l’immeuble, devant l’établissement.
4 Q. Vous vous êtes adressé à la Défense
5 territoriale plutôt qu’à la police civile, la police
6 ordinaire. Vous avez sans doute déjà répondu à cette
7 question mais ce faisant, est-ce que vous preniez position
8 en faveur d’une partie plutôt que pour une autre ? Est-ce
9 que là, vous vous manifestiez ou bien est-ce que vous
10 essayiez de vous défendre du mieux que vous le pouviez ?
11 R. Je vous en prie, à cette époque-là, il n’y
12 avait encore pas de conflit qui était déclenché. Ça, c’est
13 une première chose. Deuxièmement, on sentait qu’il y avait
14 une tension et je ne sais pas pourquoi fallait-il qu’on
15 opte pour un côté ou l’autre.
16 Q. Dernière question : On vous a demandé si
17 Kordic avait manifesté des opinions positives ou négatives
18 à l’égard des musulmans. Dans le contexte de ces émissions
19 télévisées, le fait qu’il n’ait rien dit de bon à propos
20 des musulmans, est-ce que ça a eu un effet particulier, une
21 incidence quelconque ?
22 R. Est-ce que vous voulez répéter la question ?
23 Excusez-moi. Une fois de plus, vous parlez de la
24 télévision et si vous voulez être très précis parce que
25 moi, je travaille à la radio.
Page 13234
1 Me NAUMOVSKI (interprétation) : Objection. On
2 demande le point de vue d’un témoin, alors que lui, il dit
3 qu’il n’est pas journaliste. Par conséquent, il ne peut
4 pas faire des commentaires au sujet de ce que Monsieur
5 Kordic a dit ou n’a pas dit.
6 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Il peut
7 fournir un avis. Bien sûr, la valeur probante de cet avis
8 sera établie suivant sa fonction mais quant à savoir si le
9 fait d’être journaliste aurait aidé, je ne sais pas.
10 Me NICE (interprétation) :
11 Q. Parlons de ces programmes radio. Dans le
12 contexte de ces programmes, de ces émissions de radio, le
13 fait que Kordic n’ait rien de bon à dire à propos des
14 musulmans a-t-il eu un effet quelconque ?
15 R. Quel effet ? Mais il y avait la tension, la
16 tension que les gens sentaient dans l’air.
17 Q. Je vous remercie.
18 Me NICE (interprétation) : Je n’ai plus de
19 questions à poser à ce témoin.
20 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Je pense que
21 ce n’était pas une affaire d’avis. C’était là simplement
22 des faits qu’a observés le témoin à la suite des programmes
23 qui avaient été diffusés.
24 Monsieur Hamzic, vous en avez ainsi terminé de
25 votre déposition. Je vous remercie d’être venu en tant que
Page 13235
1 témoin au Tribunal Pénal International. Maintenant, vous
2 pouvez disposer. Je vous remercie.
3 LE TÉMOIN (interprétation) : Merci.
4 [Le témoin se retire]
5 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Avant de
6 commencer les exposés, est-ce qu’on ne pourrait pas parler
7 de la cassette pour demain matin ?
8 Me NICE (interprétation) : Je suis ravi de
9 pouvoir dire que ces cassettes ont été copiées ce matin.
10 Je ne sais pas les dispositions que peut prendre la Défense
11 ce matin.
12 Me STEIN (interprétation) : Eh bien, nous sommes
13 entre les mains compétentes de notre greffière qui pourra
14 prendre toutes les dispositions nécessaires et qui nous dit
15 que demain après-midi, nous pourrons visionner avec les
16 accusés les cassettes au quartier pénitentiaire.
17 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Mais dommage.
18 Pour demain matin, alors. Il faudra combien de temps pour
19 diffuser la cassette si nous devions la diffuser demain
20 matin ? Nous pourrions peut-être reporter le contre-
21 interrogatoire la semaine prochaine si nous voyons la
22 cassette demain.
23 Me NICE (interprétation) : Ça fait à peu près 45
24 minutes en tout. Il faudrait peut-être arrêter la cassette
25 ou la diffusion, à un moment donné, pour voir tel ou tel
Page 13236
1 détail et je pense que le témoin va peut-être vouloir
2 arrêter lui aussi parce qu’il connaît bien la région et
3 vous montrer les dégâts qui ont été causés ou, alors, vous
4 allez peut-être dire : « Bien, nous avons déjà vu ce genre
5 de film, on peut passer en avancé rapide. »
6 Je ne sais pas exactement et je ne vois pas
7 nécessairement quelle sera l’utilité mais, tout du moins,
8 pourrez-vous avoir une idée précise, visuelle de la région.
9 Je crois qu’effectivement, bien sûr, il faudrait peut-être
10 prévoir 45 minutes à une heure.
11 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Apparemment,
12 on peut prendre des dispositions aujourd’hui, dès
13 aujourd’hui pour que les accusés voient la cassette au
14 quartier pénitentiaire. Je vais m’enquérir de cette
15 question auprès de Madame la Greffière.
16 Eh bien, nous allons voir si c’est possible pour
17 ce soir.
18 Me NICE (interprétation) : Avant que la Chambre
19 ne soit saisie des arguments que nous avons à lui offrir,
20 permettez-moi de rappeler une fois de plus la question de
21 la cassette ou des cassettes. Vous savez qu’il y a deux
22 témoins par le truchement desquels nous allons pouvoir
23 produire ces cassettes. Nous avons essayé de voir ce matin
24 quels étaient les problèmes à la lumière des objections
25 formulées.
Page 13237
1 Nous pourrions citer dès la semaine prochaine ces
2 deux témoins mais je prévois que l’un de ces deux témoins
3 va être muté ou, du moins, va devoir passer outre
4 Atlantique pour des raisons professionnelles la semaine
5 prochaine et il sera peut-être plus difficile, du moins
6 pour un certain temps, de le retrouver ici à La Haye
7 puisqu’il sera parti dès la semaine prochaine.
8 Je suis en train d’essayer de retrouver mes
9 documents mais si ce témoin-là n’est pas nécessaire, nous
10 pourrons passer à l’autre la semaine prochaine mais si ce
11 second est nécessaire, j’aimerais le savoir dès aujourd’hui
12 pour pouvoir enclencher toute la procédure afin que ce
13 témoin soit présent la semaine prochaine, ce que je
14 subodore, à moins, bien sûr, que la Défense ne veuille pas
15 que cette lettre soit fournie à la Chambre.
16 Je pense que ces paragraphes étaient tout à fait
17 utiles et la Chambre pourrait s’en informer parce que comme
18 ça, elle pourra se forger sa propre opinion sur mes
19 prévisions car moi, je pense que le témoin devrait être
20 présent pour tout exposé sur la recevabilité. Dans cette
21 mesure, je suis tout à fait prêt à fournir la lettre à la
22 Chambre et je peux dire à la Défense, car je ne pense pas
23 que l’un de ces deux témoins va demander des mesures de
24 protection mais enfin, autant être prudent.
25 Le témoin qui nous vient des Amériques, il a un
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1 grade militaire et je suppose que la Défense voudra sa
2 présence.
3 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Qu’en pensez-
4 vous, Me Stein ?
5 Me STEIN (interprétation) : Pour autant que nos
6 références plus ou moins dérobées et indirectes ne me
7 troublent pas encore davantage que d’habitude, j’espère
8 qu’au cours de la pause de ce soir, je pourrai vérifier
9 avec Me Nice pour voir si nous pouvons parvenir à un accord
10 car je pense que mes objections sont peut-être plus
11 limitées qu’il ne le croit.
12 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Vous pourrez
13 peut-être nous faire savoir demain matin ce qu’il en est de
14 vos conciliabules.
15 Me STEIN (interprétation) : Fort bien !
16 Me NICE (interprétation) : S’agissant de ces
17 trois témoins sur lesquels il faut trancher, la Chambre
18 dispose de certains documents concernant le Témoin Beese.
19 Je vous ai dit quelle était ma position il y a quelque
20 temps de cela s’agissant du compte rendu d’audience.
21 J’aimerais vous fournir copie de ce qu’on peut trouver dans
22 ce compte rendu d’audience.
23 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Avant de vous
24 embarquer dans ce sujet, je pense que vous avez voulu
25 évoquer plusieurs points. Il y a, notamment, la question
Page 13239
1 de l’expert. Il est 15 h 20. Il nous reste 45 minutes
2 d’audience. Alors, dans quel ordre allons-nous prendre ces
3 questions ?
4 Me NICE (interprétation) : J’allais simplement
5 dresser le décor de la question de l’expert et,
6 effectivement, nous pourrons peut-être régler ceci.
7 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Parlons de
8 l’expert.
9 Me NICE (interprétation) : Eh bien, pour ce qui
10 est de l’expert, des documents très circonstanciés ont été
11 préparés par la Défense et de notre côté, ça a été le fait
12 de Me Somers et de Monsieur Guariglia qui nous rejoint
13 puisque nous avons perdu Me Dixon qui a rejoint le Barreau
14 anglais. Vous vous souviendrez de lui pour certaines de
15 ses réquisitions qu’il a présentées avant Noël. Me Somers
16 pourra peut-être se saisir de tout grief ou de toute
17 question qu’aurait la Chambre de première instance
18 s’agissant de ces documents.
19 Il ne reste plus à la Défense qu’à formuler ses
20 objections.
21 Me STEIN (interprétation) : Mais je croyais que
22 ceci était prévu demain. Je n’ai aucun de mes documents
23 sur moi.
24 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Je crois qu’il
25 avait été dit clairement cette matinée que nous allions
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1 peut-être évoquer ces questions cet après-midi. Nous avons
2 tous les documents écrits. Y a-t-il beaucoup de choses à
3 ajouter à cela ?
4 Me STEIN (interprétation) : Oui, parce qu’hier,
5 j’ai reçu le résumé de l’argumentaire de l’Accusation. Je
6 l’ai lu rapidement hier et je crois qu’il nous défend mieux
7 que mes propres écritures parce que les concessions ou les
8 admissions qu’on y fait, je n’ai pas le texte sous les yeux
9 mais je crois que ce sont des éléments importants. Donc,
10 je crois qu’il y a beaucoup de choses à ajouter aux
11 documents écrits.
12 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Je suppose que
13 ceci s’appliquera à l’autre témoin. Est-ce que vous pouvez
14 en parler aujourd’hui ?
15 Me STEIN (interprétation) : Non, non, parce que
16 pour l’autre témoin, il y a Me Sayers.
17 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Commençons par
18 celui-là et puis nous allons mettre sur la touche l’expert.
19 Me NICE (interprétation) : Il y a deux autres
20 témoins. S’agissant de l’un d’entre eux, nous avons
21 échangé certains documents, ce qui n’a pas été le cas pour
22 l’autre mais en ce qui concerne les deux témoins, je pense
23 qu’il faut les entendre, il faut leurs dépositions pour
24 tous les deux parce qu’à chaque fois, nous avons une
25 relation de première main de quelque chose qui, jusqu’à
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1 présent, n’a été que des éléments de preuve de seconde
2 main.
3 On s’est plaint de l’absence de documents de
4 première main, de documents directs. Il y a eu des
5 affirmations formulées selon lesquelles certaines de nos
6 assertions étaient tout à fait dépourvues de fondement mais
7 ceci dit, je pense qu’on peut faire une division entre deux
8 catégories.
9 Je pense que le premier témoin qui se présente
10 dans le temps va parler du point de contrôle et je dis de
11 façon indirecte qu’il va peut-être demander des mesures de
12 protection.
13 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Est-ce que
14 nous avons reçu un résumé, une déclaration préalable le
15 concernant ? Me Nice, ça n’a pas été communiqué à la
16 Défense ?
17 Me NICE (interprétation) : Oui, cette déclaration
18 n’a pas été encore communiquée. Autre problème. Il faudra
19 simplement assurer des copies. Je peux vous présenter la
20 base de tout ceci. Vous souviendrez de façon générale,
21 Messieurs les Juges, de l’incident en tant que tel. C’est
22 le moment où Mirsad Delija est tué le 20 janvier 1993 et,
23 apparemment, ce meurtre aurait été précédé d’un incident
24 s’étant produit à un point de contrôle et impliquant,
25 notamment, l’accusé.
Page 13242
1 Plusieurs références ont été faites au cours de
2 cet incident mais aucune ne venait d’un témoin oculaire et
3 c’est le 4 novembre que le Témoin T en a parlé mais on a
4 fait objection quant à la nature du ouï-dire et Me
5 Naumovski a nié catégoriquement… vous avez fait des
6 remarques à ce propos, Messieurs les Juges, à propos de
7 l’intervention de Me Naumovski mais vous avez dit que
8 l’élément de preuve en tant que tel avait peu de valeur
9 probante parce que ce n’était pas une preuve directe et
10 puis vous avez été quand même convaincus par moi parce que
11 je vous ai promis qu’il y aurait des témoignages plus
12 directs à l’avenir.
13 Nous avons donc eu la comparution de ce témoin et
14 ça doit être sitôt après mais sans doute à la suite de ce
15 qu’a pu nous dire ce témoin, ce qu’il a pu nous relater,
16 que dès le lendemain, nous avons entamé une enquête. Il y
17 a eu une réaction rapide à cette recherche d’informations
18 qui a débouché sur l’identification du témoin que nous
19 avons vu le plus rapidement possible.
20 Sa déclaration préalable a été communiquée dès
21 qu’elle a été à notre disposition et lorsque vous aurez
22 cette déclaration sous les yeux, vous verrez que c’est là
23 la déclaration d’un témoin direct, oculaire de cet incident
24 important. Par conséquent, il est tout à fait adéquat de
25 vous soumettre ce témoignage qui est vraiment de la
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1 meilleure qualité possible et qui pourra répondre aux
2 objections récurrentes qui avaient été formulées sur la
3 nature indirecte des preuves que nous fournissions et là,
4 nous devrons, bien sûr, demander la décision de la Chambre.
5 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Quand la
6 déclaration préalable a-t-elle été communiquée à la
7 Défense?
8 Me NICE (interprétation) : En décembre 1999.
9 Notre substitut d’audience est sorti pour faire photocopier
10 ce document. L’autre déclaration est d’une toute autre
11 espèce mais elle aussi, elle vous donne un récit de
12 première main pour la première fois. Nous n’avions rien en
13 matière directe, de façon directe. Ici, par contre, on va
14 parler des contacts directs avec le témoin, qu’avait le
15 témoin et les Juges, bien sûr, pourront voir ce qu’il en
16 est.
17 Apparemment, ce témoin avait des contacts directs
18 avec Petkovic. Ce témoin s’appelle Beese. C’était un
19 témoin, un observateur de l’ECMM et vous comprendrez,
20 Messieurs les Juges, pourquoi nous n’avons pas cherché à
21 citer chacun des membres de l’ECMM, pas plus que nous
22 n’avons essayé de citer chacun des soldats qui ont servi
23 sur le terrain.
24 Il faut procéder à une sélection et,
25 inévitablement, la première sélection ne s’avère pas
Page 13244
1 toujours la bonne au fil des informations qu’on reçoit et
2 une source commune d’informations, de renseignements peut
3 être les témoins eux-mêmes parce que vous les voyez, vous
4 parlez avec eux et puis on se dit : « Voilà, ça, c’est un
5 bon témoin. Peut-être faudrait-il penser à telle ou telle
6 personne. » Apparemment, c’est ce qui s’est passé
7 s’agissant du tout premier témoin dont j’ai parlé.
8 S’agissant du Témoin Beese, on vous a parlé de lui
9 en dehors du prétoire mais aussi, et vous le verrez grâce
10 aux documents que je vais vous soumettre, au prétoire même.
11 C’est le Témoin AB qui en a parlé. Non, pas AB mais AA, me
12 dit-on. Ce témoin, même s’il avait le même grade qu’un des
13 témoins que nous avons eus hier et le même grade que le
14 Témoin Stutt qui nous pose des problèmes logistiques mais
15 s’agissant du fameux témoin AA, vous savez qu’il a été
16 soumis de façon absolument incroyable mais de façon
17 extrême, certes, à des Croates mais il a été soumis à un
18 contrôle national bureaucratique de paperasserie énorme.
19 En d’autres termes, il ne nous a pas été autorisé
20 d’avoir des contacts officiels et directs avec lui jusqu’à
21 la veille de sa déposition. Jusqu’alors, jusqu’à la veille
22 de sa déposition, tout devait se faire par le biais d’une
23 procédure très complexe, par le fait de comparaître dans
24 d’autres juridictions. Vous connaîtrez peut-être le détail
25 de ceci. Vous vous souviendrez sans doute, Messieurs les
Page 13245
1 Juges.
2 En tout cas, ce témoin n’était pas à notre
3 disposition. Nous ne pouvions pas nous adresser à lui de
4 façon ordinaire, de la façon coutumière que nous avons de
5 recevoir ces informations. Il nous a dit de but en blanc
6 qu’à son avis, c’était un témoin particulièrement utile, ne
7 serait-ce qu’à cause de l’expérience qu’il a acquise mais
8 aussi à cause de sa personnalité, de ses compétences.
9 Je crois que tout ceci est repris dans le
10 témoignage qu’il vous a fourni. Par conséquent, nous nous
11 sommes aussitôt mis à la recherche de ce témoin dont le
12 Témoin AA nous avait dit qu’il était particulièrement
13 utile. Vous le verrez à l’examen des documents signifiés,
14 vous verrez qu’il va se pencher sur deux sujets
15 intéressants. L’un, c’est le témoignage direct qu’il peut
16 fournir s’agissant de l’incident du point de contrôle, il
17 en a parlé et je pense que jusqu’à présent, il sera le seul
18 témoin qui peut en parler de façon directe.
19 Ce témoin est aussi intéressant parce qu’il va
20 vous donner une idée d’ensemble très intéressante grâce à
21 l’expérience qu’il a acquise, des événements en général et
22 aussi du rôle qu’a joué Dario Kordic. Vous verrez, ne fut-
23 ce qu’à l’examen de la présentation de son résumé signé,
24 vous verrez que sans qu’on lui pose des questions, il nous
25 a, de son propre chef, de sa propre initiative, fourni un
Page 13246
1 document au moment où on prépare ce témoin au cours d’un
2 entretien préalable et je pense que ce document se présente
3 de façon… c’est l’original, en fait. Il y a quelques
4 copies mais je sais que quelquefois, on avait dit que les
5 documents que nous fournissions n’étaient pas fiables parce
6 que des enquêteurs avaient un parti pris mais je pense
7 qu’ici, ça ne s’applique pas du tout puisque le témoin,
8 afin de nous aider et de faire une économie de temps, nous
9 a fourni son propre rapport, lequel renferme des avis qui
10 sont en droit fil de certains des avis que vous avez reçus
11 ici déjà mais ce sont des avis tout à fait utiles sur les
12 événements et sur ce qu’il voit comme étant le rôle joué
13 par Kordic.
14 Vous verrez à l’examen des pièces communiquées que
15 non seulement la relation des faits et de la rencontre
16 qu’il a eue avec Kordic a été corroborée par des notes
17 manuscrites de l’époque et de façon détaillée, donc, c’est
18 tout à fait fiable mais l’avis qu’il a sur Kordic a été
19 corroboré par un document dactylographié. Je crois que
20 nous avons fourni un extrait d’une page ou deux mais cela
21 ne vient pas de l’époque. Le document avait été rédigé
22 l’année suivante.
23 De toute façon, ça n’avait aucun rapport avec ce
24 procès-ci. C’était simplement une façon de consigner pour
25 l’histoire ce qu’avait fait cet homme et ce qu’il pensait.
Page 13247
1 Lorsque je lui ai posé la question, il m’a dit peut-être
2 modestement que c’était un document destiné à ses petits-
3 enfants, qu’il ne voulait pas en faire un succès de
4 librairie. Il voulait simplement consigner les événements
5 et les personnes qu’il avait rencontrées.
6 De toute façon, il nous a permis d’avoir un
7 document que nous vous avons remis, long de quelques pages,
8 document qui montre que c’est son avis tout à fait spontané
9 à l’époque, avis étayé par des documents de l’époque, eux
10 aussi, et je dirais que son avis correspond à certains mais
11 pas à la totalité des avis que vous avez entendus jusqu’à
12 présent.
13 Vous penserez peut-être que là, on se rapproche
14 beaucoup de ce que nous a dit le témoin entendu à huis clos
15 partiel hier et avant-hier mais vous savez que notre
16 politique de poursuite, dès le départ, n’a pas été de vous
17 communiquer un avis uniformisé, uniforme, au contraire. Je
18 crois que ce serait aussi inutile qu’irréaliste d’avoir
19 voulu faire cela.
20 Nous avons eu pour politique de mettre à votre
21 disposition les meilleurs éléments de preuve possibles
22 venant de personnes instruites, informées, car nous étions
23 convaincus que la Chambre, de toute façon, allait se forger
24 sa propre opinion au vu des éléments de preuve et que s’il
25 y a, éventuellement et effectivement, une gamme d’opinions,
Page 13248
1 ceci vous sera finalement utile et vous permettra de bien
2 laisser se décanter les faits, les opinions et les avis
3 pour arriver à la bonne décision.
4 Donc, pour ce qui est de ce témoin, je pense qu’il
5 faut vraiment qu’il soit entendu puisque c’était un témoin
6 direct et il vous sera aussi d’une utilité tout à fait
7 précieuse. Ce document a été communiqué à la Défense, me
8 dit mon substitut d’audience. Pour ce qui est du premier
9 témoin, ça a été communiqué le 9 décembre et pour ce qui
10 est du second témoin, le Témoin Beese, ça a été communiqué
11 le 5 janvier. Donc, je pense que c’était le lendemain du
12 premier entretien que nous avions eu avec lui. C’était le
13 premier jour où il était possible de voir ce témoin.
14 Rappelez-vous, Messieurs les Juges, dès que nous
15 avons repris nos travaux cette année, j’ai parlé de lui.
16 Il s’est mis à notre disposition. Il a des engagements la
17 semaine prochaine, je pense, mais je pense qu’il pourra
18 quand même venir comparaître. Voilà donc nos requêtes.
19 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : L’article du
20 Règlement qui régit cette question si vous pouvez nous
21 aider là-dessus, Me Nice, c’est le 73 bis, n’est-ce pas ?
22 C’est le nouveau 73 bis (D) qui stipule que : « Une fois le
23 procès commencé, le Procureur, s’il estime que c’est dans
24 l’intérêt de la justice, peut déposer une requête afin que
25 soit reformulée la liste des témoins ou afin de modifier la
Page 13249
1 décision qu’il avait prise sur les témoins à citer. »
2 Donc, je suppose que nous allons faire valoir cet
3 article pour votre requête et pour ce qui est de
4 l’administration de la preuve, l’article pertinent, c’est
5 l’Article 89, alinéa (B) : « La Chambre applique les règles
6 d’administration de la preuve propres à parvenir dans
7 l’esprit du Statut et des principes généraux du droit à un
8 règlement équitable de la cause. »
9 Le (C) : « La Chambre peut recevoir tout élément
10 de preuve pertinent qu’elle estime avoir valeur probante.
11 Elle peut exclure tout élément de preuve dont la valeur
12 probante est largement inférieure à l’existence d’un procès
13 équitable. » Alinéa (D). Voilà donc les dispositions
14 pertinentes.
15 Me NICE (interprétation) : J’aurais dû ajouter
16 ceci, Monsieur le Président, deux points, en fait. Tout
17 d’abord, nous avons dit très clairement à la Chambre dès le
18 début du procès qu’il était inévitable que notre liste des
19 témoins allait changer, d’abord parce qu’il fallait élaguer
20 beaucoup de choses.
21 Au départ, il fallait donner un maximum de témoins
22 parce que finalement, nous avons cité moins de deux tiers
23 des témoins prévus au départ et nous avons dit tout aussi
24 clairement que face à ce type d’instruction ou d’enquête,
25 inévitablement, des noms refont surface par la suite, en
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1 cours de procès, parce que des témoins ont plus ou moins
2 confiance au fil du temps. C’est là quelque chose de
3 fluctuant et c’est un caractère commun à tous les témoins.
4 Je pense que c’est un point commun pour chacun d’entre eux.
5 Une fois qu’ils arrivent à La Haye, ces témoins,
6 et puis qu’ils se rendent compte qu’ils vont devoir
7 déposer, souvent, ils sont plus ouverts parce qu’ils se
8 sentent moins anxieux. Ils sont sans doute plus anxieux
9 dans les circonstances inévitablement plus tendues qui
10 règnent en Bosnie.
11 Je ne vais pas insister trop sur le deuxième point
12 mais il est indéniable qu’avec le temps qui passe, des
13 témoins qui se trouvaient sur notre liste ont été éliminés.
14 Rappelez-vous, il y avait un certain Thomas. Il n’est pas
15 de l’ECMM, il parle de la même région. Lui, nous allons
16 l’éliminer de la liste, alors qu’il y a d’autres témoins
17 comme, par exemple, Rémi Landry où j’espère qu’un compte
18 rendu d’audience pourra simplement être versé au dossier de
19 cette procédure. Donc, là aussi, un nom pourra tomber.
20 Ce n’est pas une question de marchandage mais
21 pendant toute la préparation de ces témoins ou de la liste
22 des témoins, comme je l’ai déjà expliqué, j’ai fait
23 l’impossible pour réduire au minimum le nombre de témoins
24 indispensables afin de faire l’administration de la preuve
25 par d’autres moyens que par des dépositions de témoins ici
Page 13251
1 et aussi d’éliminer tout témoin qui vous serait inutile et
2 c’est dans ce contexte que je dis que, vraiment, les deux
3 témoins que nous voulons ajouter sont vraiment
4 indispensables.
5 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Mais vous
6 savez que la Chambre a un pouvoir express d’entendre des
7 éléments qui ont une valeur probante, quelle que soit la
8 procédure.
9 Me NICE (interprétation) : Je l’ai déjà dit au
10 moins à deux reprises, la Chambre peut appeler ses propres
11 témoins mais nous avons le sentiment que si nous apprenons
12 l’existence de témoins dont la déposition peut être utile,
13 nous devrons prendre l’initiative de les appeler.
14 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Est-ce que
15 vous avez un résumé du témoin qui va parler du point de
16 contrôle ?
17 Me NICE (interprétation) : Nous n’avons pas de
18 résumé. La déclaration préalable n’est pas très longue.
19 Désolé qu’il n’y ait pas encore de résumé. Est-ce que je
20 peux vous la remettre ? Pour le Juge Bennouna, il y a le
21 français et l’anglais et il y a aussi la version en anglais
22 pour le Juge Robinson et pour le Président.
23 Vous constaterez que ce document est surtout
24 présenté comme résumé sous une forme, d’ailleurs, très
25 utile que nous allons peut-être utiliser davantage à
Page 13252
1 l’avenir. Nous allons avoir une audience publique et il y
2 aura peut-être des objections. Je ne pense pas que je
3 puisse ici attirer votre attention sur tel ou tel
4 paragraphe mais vous verrez que le paragraphe 6 est un bon
5 exemple, de même que le paragraphe 8 et, à la page
6 suivante, le paragraphe 12 sera très utile aussi. Pour
7 vous rappeler le contexte général de cette déposition, vous
8 lirez utilement le paragraphe 18.
9 Il y a d’autres éléments de preuve qui vous ont
10 été soumis de façon indirecte et qui viendront du Témoin T
11 et du Témoin J. [Hors microphone]
12 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Non merci.
13 Me SAYERS (interprétation) : Si je peux me
14 permettre de m’exprimer, je dois dire que la Défense se
15 sent un peu comme en physique, quelqu’un qui serait soumis
16 au principe de Heisenberg qui est un principe
17 d’incertitude. Nous sommes prêts à entendre le Lieutenant
18 Colonel Thomas, bien sûr, mais c’est la première fois
19 qu’apparemment, on nous dit qu’il ne va pas venir
20 témoigner. Enfin, qu’il en soit comme il doit en être.
21 Je pense que vous avez, Monsieur le Président,
22 résumé de façon très compétente les deux requêtes présentes
23 que l’on peut examiner de deux points de vue différents, à
24 vrai dire, et j’aimerais d’abord parler du premier témoin,
25 celui dont la déclaration a déjà été soumise à la Chambre
Page 13253
1 de première instance.
2 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Appelons-le le
3 témoin du barrage routier, si vous préférez.
4 Me SAYERS (interprétation) : Oui. Je pense que
5 nous avons déjà dit à la Chambre notre position générale
6 qui consiste à penser que les ordres déjà rendus par cette
7 Chambre doivent être étendus à tous les témoins qui ont
8 déjà été identifiés il y a un certain temps, plusieurs
9 mois, en fait. Nous pensons pouvoir dire que nous avons vu
10 évoluer sous nos yeux pratiquement ce qui a été qualifié
11 d’impressionnisme juridique par une autre Chambre et qui
12 semble se poursuivre au fil du temps.
13 Permettez-moi la remarque suivante, Monsieur le
14 Président, Messieurs les Juges. S’agissant du témoin du
15 barrage routier, je pense que celui-ci est dans une
16 catégorie différente de l’autre.
17 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Un rappel
18 simplement, je vous prie. Cette question a été évoquée
19 dans la déposition de deux témoins que nous avons entendus
20 aujourd’hui et il y a certains éléments de preuve qui ont
21 été apportés et que je qualifierais de troisième main, à
22 savoir des témoins qui disent : « J’ai entendu quelqu’un
23 qui a dit que quelqu’un avait dit quelque chose au barrage
24 routier », mais là, nous avons un témoin qui vient
25 directement du barrage.
Page 13254
1 Me SAYERS (interprétation) : Monsieur le
2 Président, précisément, je pense que nous avons assisté à
3 l’évolution d’un certain nombre de dispositions relatives à
4 l’interrogatoire principal et le témoin du barrage, à mon
5 avis, ne rentre pas dans les catégories définies jusqu’à
6 présent. Nous ne souhaitons pas remettre en cause les
7 objections que nous avons déjà élevées par rapport à des
8 témoins qui nous sont présentés à la dernière seconde.
9 Nous pensons qu’ici, il y a un devoir par rapport aux Juges
10 de la Chambre qui doivent être mis au courant de la
11 situation telle qu’elle était et qui doivent pouvoir
12 bénéficier de l’évolution des dispositions relatives aux
13 éléments de preuve.
14 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : C’est une
15 situation qui dure déjà depuis plusieurs mois.
16 Effectivement, nous allons la considérer, y réfléchir puis
17 nous passerons à l’audition du témoin suivant.
18 [La Chambre discute]
19 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : S’agissant du
20 témoin du barrage routier, compte tenu de la concession
21 très équitable faite par Me Sayers, équitable, oui, mais
22 assez indispensable et inévitable, nous allons donc
23 recevoir cet élément de preuve.
24 Nous pouvons maintenant passer à l’autre témoin.
25 Me SAYERS (interprétation) : L’autre témoin,
Page 13255
1 Monsieur le Président, entre dans une catégorie tout à fait
2 différente de celui dont vous venez de parler.
3 L’Accusation a eu, je crois, cinq ans pour préparer la
4 présentation de ses éléments de preuve. Elle nous avait
5 annoncé 375 témoins et nous en sommes à 100. Nous avons vu
6 une procession de témoins de l’ECMM, 12 à la date
7 d’aujourd’hui si mes comptes sont bons et un certain nombre
8 qui doit venir encore à l’avenir.
9 Ici, nous parlons d’un témoin dont le nom ne
10 figure pas sur la liste des témoins préalablement fournie à
11 la Défense. C’est quelqu’un dont nous n’avions absolument
12 pas entendu parler. Le Témoin AA a déjà témoigné sur le
13 même sujet que celui sur lequel ce témoin doit être
14 interrogé et je suis sûr que les Juges se rappelleront très
15 bien la déposition du Témoin AA et les raisons pour
16 lesquelles il est nécessaire aujourd’hui de remplacer un
17 témoin.
18 Ce témoin a été identifié il y a sept mois après
19 la date limite du 17 mai imposée par la Chambre.
20 Apparemment, ce témoin est un témoin important mais je
21 demande aux Juges, je les implore, en fait, de réfléchir à
22 la question suivante. Pourquoi l’entendre ? Il a
23 rencontré Monsieur Kordic, d’après ce qu’il dit lui-même,
24 au total impressionnant d’une fois, et ce pendant toute la
25 durée de sa présence dans le cadre de la mission des
Page 13256
1 observateurs européens sur place.
2 S’agissant des faits qu’il va aborder devant cette
3 Chambre de première instance, il est tout à fait évident
4 qu’il se propose simplement de fournir un témoignage basé
5 sur des opinions. La seule rencontre qu’il a eue avec
6 Monsieur Kordic s’est déroulée le 5 mai 1993 et,
7 apparemment, le Témoin AA a assisté à cette rencontre
8 également et l’autre sujet dont il va parler, c’est une
9 conversation téléphonique avec le Général de brigade
10 Petkovic le 28 avril mais les Juges de cette Chambre ont
11 déjà entendu amplement parler de cette conversation
12 téléphonique.
13 Notre position est la suivante. Ces deux faits de
14 portée très limitée ne sont pas véritablement la raison
15 pour laquelle ce témoin est cité devant la Chambre, pas du
16 tout, et je ne vais pas passer en revue la pléthore
17 d’opinions que ce témoin s’apprête apparemment à proposer
18 aux Juges mais je pense que l’une des raisons pour laquelle
19 le Procureur a agi de la sorte c’est qu’il ne connaissait
20 pas l’importance très grande de ce témoin jusqu’à la fin de
21 l’audition du Témoin AA.
22 Les Juges se rappelleront sans doute que le Témoin
23 AA n’a rencontré ce témoin qu’une seule fois et en rapport
24 avec la pièce à conviction Z1012 qui était une analyse
25 préliminaire relative à la présence de l’armée de Croatie
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1 en Bosnie-Herzégovine et qui se conclut sur l’opinion selon
2 laquelle il est très difficile de prouver les allégations
3 selon lesquelles l’armée de Croatie était impliquée, qu’il
4 n’y a que des preuves très rares à ce sujet et que ces
5 preuves se limitent à un rapport du 23 juin 1993.
6 Apparemment, ce témoin ne se satisfait pas de se
7 limiter à deux faits d’importance très restreinte en faveur
8 du Procureur. Il fournit trois pages d’opinions et
9 d’évaluations personnelles qu’il a, apparemment, préparées
10 le 25 janvier de cette année et je pense qu’il est
11 regrettable que cela soit le cas car ces opinions ont déjà
12 été fournies à la Chambre de première instance.
13 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Me Sayers, le
14 fait que la Chambre ait déjà reçu certains documents n’a
15 aucune pertinence. Nous sommes des Juges professionnels.
16 Donc, nous sommes capables de nous faire notre avis sur tel
17 ou tel document. Ne vous préoccupez pas de cela.
18 Me SAYERS (interprétation) : Très bien, Monsieur
19 le Président. Je vais simplement parler encore quelques
20 instants des avis que ce témoin s’apprête à offrir à la
21 Chambre. Selon lui, tous les dirigeants de quelque
22 municipalité que ce soit tombent dans la catégorie des
23 maffiosi. C’est un avis qu’il exprime deux fois, ce
24 monsieur, dans sa déposition.
25 Apparemment, ces maffiosi cherchent, avec l’aide
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1 de Mate Boban, à imposer leur volonté aux habitants du
2 territoire de Herceg-Bosna en utilisant le terrorisme et
3 ils bénéficient de l’aide déterminée du Président Tudjman.
4 Cela provoque une campagne de terrorisme due à ces
5 maffiosi. Monsieur Valenta, par exemple, compte,
6 apparemment, au nombre de ces maffiosi.
7 Tous les membres des milices irrégulières sont
8 qualifiés par un terme injurieux et Monsieur Kordic, très
9 précisément, est une nouvelle fois mentionné comme étant
10 censé être le cousin de Monsieur Boban, ce que nous
11 considérons comme une erreur factuelle. Il est décrit
12 comme un bandit rempli de sa propre importance, plein
13 d’arrogance, intellectuellement faible et une déclaration
14 est faite dans ce texte quant à son lien avec Ivica Rajic,
15 bien connu.
16 Dans la conclusion de la déposition de ce témoin,
17 il est dit que Monsieur Kordic est responsable d’un certain
18 nombre de crimes de guerre. Franchement, Monsieur le
19 Président, Messieurs les Juges, il me semble que toutes ces
20 opinions, toutes ces déductions, toutes ces conclusions
21 correspondent tout à fait à ce que la Chambre est dans
22 l’obligation de déterminer elle-même.
23 [La Chambre discute]
24 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Me Sayers,
25 nous n’avons plus besoin de nous préoccuper de ce problème.
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1 Me NICE (interprétation) : Monsieur le Président,
2 si une objection peut être présentée, j’aimerais la
3 présenter en rapport avec ce point particulier.
4 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Bien sûr mais
5 nous allons plutôt entendre Me Sayers jusqu’au bout, si
6 vous le voulez bien.
7 Me SAYERS (interprétation) : Deux points encore,
8 Monsieur le Président, Messieurs les Juges, et je serai
9 très bref car je pense que nous avons déjà consacré
10 suffisamment de temps à cette question. Premier point.
11 Apparemment, ce témoin pense pouvoir déterminer ce qui est
12 pertinent dans le journal personnel. Deux pages de ce
13 journal ont été produites mais il n’y a rien de personnel
14 dans ces pages.
15 Si ce témoin est autorisé à témoigner, et nous
16 pensons que cela ne devrait pas être le cas, il est tout à
17 fait clair que nous devrions avoir la possibilité
18 d’examiner les pages de ce journal à l’avance.
19 En conclusion, Monsieur le Président, Messieurs
20 les Juges, ce témoin n’a pas été identifié dans les délais,
21 son audition n’est pas nécessaire et il est absolument
22 inutile, contrairement aux autres témoins et c’est un
23 témoin qui va parler de sujets qui ont déjà été abordés par
24 d’autres. Donc, effet cumulatif. Merci.
25 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Monsieur Nice,
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1 vous avez déjà parlé longuement sur ce point.
2 Me NICE (interprétation) : Oui, mais c’est une
3 objection que j’aimerais élever, Monsieur le Président,
4 Messieurs les Juges. Peut-être n’ai-je pas été informé
5 d’une façon tout à fait précise par la Défense mais voyons
6 d’abord ce qui vient d’être dit. S’agissant des raisons
7 pour lesquelles il importe de citer le Témoin AA, les
8 raisons invoquées ne sont absolument pas celles qui m’ont
9 guidé. Je ne vois pas pourquoi ce qui a été dit l’a été.
10 En ce qui me concerne, le Témoin AA est un témoin
11 intègre et ce qui a été dit me paraît tout à fait
12 regrettable. J’ai dit exactement aux Juges de cette
13 Chambre dans quelles conditions j’ai appris son existence
14 et pourquoi il a acquis l’importance qu’il a.
15 Maintenant, s’agissant de la déposition du Témoin
16 AA, mon collègue, Me Sayers, déclare, en rapport avec le
17 barrage routier du 28 janvier, l’incident du mois d’avril –
18 je cite : « Il est vrai que vous n’avez aucune idée, si
19 vous en avez une, de ce que Monsieur Kordic a effectivement
20 fait pour organiser la libération du convoi, la remise en
21 circulation du convoi. » Fin de citation.
22 C’est en rapport avec ce point, uniquement avec
23 celui-ci, que vous trouvez le paragraphe 5(B) du résumé de
24 la déposition du témoin qui porte sur l’incident du 28
25 avril et si vous vous rendez dans les annexes, première
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1 note manuscrite consignée à l’époque des faits, c’est en
2 lisant cela que vous comprendrez pourquoi ce témoin entre
3 précisément dans la même catégorique que le témoin
4 précédent sur ce point particulier.
5 En effet, cet homme, et il est le seul à faire,
6 nous ne le savions pas jusqu’à présent, cet homme est le
7 seul à pouvoir dire ce qui est résumé au paragraphe 5(B)
8 mais présenté de façon plus complète dans ses notes
9 d’investigation. Ce n’était pas un enquêteur mais on peut
10 qualifier ses notes de notes d’investigation. Il dit
11 précisément ce qui s’est passé dans ses notes et lors de
12 cette réunion, il affirme que Petkovic a été incapable
13 d’ordonner à Kordic la remise en circulation du convoi et
14 que Petkovic a été obligé d’expliquer à Kordic que cette
15 mesure était favorable à Kordic. Ceci est un élément de
16 preuve extrêmement important.
17 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Mais pourquoi
18 n’en disposiez-vous pas au départ ? Vous aviez accès aux
19 documents de l’ECMM. Les membres de l’ECMM ont été très
20 coopératifs avec vous et ils vous ont fourni de très
21 nombreuses informations.
22 Me NICE (interprétation) : Effectivement.
23 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : La Défense
24 affirme que vous avez eu cinq ans pour produire cet élément
25 de preuve.
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1 Me NICE (interprétation) : Monsieur le Président,
2 nous n’avons pas pu nous rendre auprès de chacun, auprès de
3 tous. Nous avons dû choisir. Des choix ont été faits.
4 J’ai dit exactement comment les choses ont évolué mais cet
5 élément de preuve fait partie de la même catégorie que le
6 témoin précédent.
7 J’ai dit très clairement que j’allais, si j’y suis
8 autorisé, citer ce témoin pour parler de cet élément de
9 preuve uniquement car en l’absence de ce témoin, vous en
10 serez réduits à vous pencher sur la déposition du Témoin AA
11 et à essayer de comparer avec d’autres éléments de preuve
12 qui ne sont pas identiques, qui ne sont pas dans la même
13 catégorie et ce serait une erreur d’agir de la sorte.
14 C’est, en tout cas, avec tout le respect que je dois à la
15 Chambre, ce que j’affirme. Ce serait une erreur dans le
16 cadre de votre mission qui consiste à rechercher la vérité.
17 Si les accusés étaient cités à la barre et niaient
18 ce fait, nous devrions citer ce témoin en réfutation mais,
19 de toute évidence, ce que la Défense vient de dire n’est
20 pas exact car il n’y a rien d’erroné dans l’élément de
21 preuve dont nous parlons.
22 M. LE JUGE BENNOUNA : L’argument qui a été avancé
23 par Me Sayers, c’est de dire que la Chambre a déjà eu
24 suffisamment de témoignages sur cette question de
25 conversations téléphoniques. Vous êtes en train de nous
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1 dire que ce qui est apporté ici n’a jamais été fourni au
2 préalable. Est-ce que c’est cela que vous nous dites, que
3 c’est un élément nouveau sur ce point-là que le témoin
4 apportera à la Chambre ? Est-ce que c’est cela ?
5 Me NICE (interprétation) : Oui, certainement.
6 C’est un nouvel élément dans le puzzle. D’ailleurs, ces
7 termes qui sont très utilisés par la Défense qui,
8 apparemment, les trouve utiles, je cherche… ah oui,
9 impressionnisme juridique. Nous ne parlons pas
10 d’impressionnisme ici. Nous parlons de plusieurs éléments
11 de preuve qui trouvent chacun leur place dans un puzzle.
12 Donc, il ne s’agit pas d’impressions ou
13 d’impressionniste mais de compléter un puzzle et lorsqu’on
14 a une pièce qui manque au puzzle, il est tout à fait
15 important de la glisser à sa place. Si ce n’est pas le
16 cas, il peut y avoir apparition d’impressions fluctuantes
17 ou vagues et peut-être même impressions qu’un élément du
18 puzzle se trouve à un emplacement qui n’est pas le sien.
19 Si l’élément du puzzle est apporté, eh bien, il
20 peut être contredit. S’il est erroné, il peut être
21 confirmé s’il est justifié mais, en tout cas, les Juges ne
22 sont pas laissés dans le vague et je dis bien que cet
23 élément de preuve est le seul que je tâcherai d’obtenir de
24 ce témoin.
25 Bien sûr, nous savons tout ce qui a été dit au
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1 sujet de la mafia, des impressions du témoin, et cætera.
2 Les Juges se rappelleront peut-être… peut-être que c’est
3 quelque chose qui a été dit à huis clos partiel dans
4 l’audition du Témoin AA. Je devrais peut-être faire
5 attention mais ce témoin a un point de vue plus vaste que
6 l’autre car il était en Herzégovine.
7 M. LE JUGE BENNOUNA : Me Nice, je crois que nous
8 en avons assez entendu sur ce témoignage pour l’instant.
9 Tous les arguments, nous les avons. Vous nous dites qu’en
10 fait, il y a une partie qui serait « originale », qui ne
11 corrobore pas un témoignage précédent. Il nous faut
12 maintenant délibérer, je crois.
13 [La Chambre discute]
14 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Les Juges de
15 la Chambre viennent d’être convaincus par les derniers
16 propos tenus par Monsieur Nice, c’est-à-dire à l’instant,
17 ils viennent d’être convaincus de la nécessité d’autoriser
18 ce témoin à être entendu sur ce point très limité, très
19 circonscrit qui est mentionné au paragraphe 5(B) du résumé
20 de sa déposition.
21 Quant à ses avis et opinions, nous les excluons.
22 Nous insistons sur le fait que nous venons d’être
23 convaincus d’agir dans ce sens car l’argument qui a emporté
24 notre conviction est celui de l’existence d’un élément de
25 preuve important et unique qu’il serait sans doute une
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1 erreur d’exclure de la présentation des éléments de preuve
2 car ce serait injuste pour l’Accusation.
3 Nous tenons à souligner que l’Accusation a,
4 effectivement, eu cinq ans pour présenter ses éléments de
5 preuve et les rassembler et il est regrettable que de tels
6 éléments arrivent à la dernière minute. Nous espérons ne
7 plus avoir à délibérer sur une question de ce genre.
8 Me NICE (interprétation) : Merci beaucoup. Si de
9 tels événements se reproduisent, ils se reproduiront pour
10 les mêmes raisons historiques. Monsieur le Juge Bennouna a
11 parlé la semaine dernière des documents de l’ECMM de façon
12 générale. Or, la situation c’est que nous ne sommes pas
13 autorisés par les fournisseurs de ces documents à les
14 communiquer de façon complète et générale. Je crois que
15 ceci a déjà été évoqué précédemment.
16 Ce n’est pas l’expression d’un point de vue
17 favorable ou défavorable à la communication de pièces. Je
18 suis toujours personnellement favorable à communiquer le
19 maximum mais je dois dire que nous ne sommes pas autorisés
20 à communiquer plus que ce que nous versons au dossier.
21 Donc, peut-être devrions-nous en discuter avec
22 l’autre partie pour voir quelle solution nous pourrons
23 trouver mais je n’aimerais pas que les Juges de cette
24 Chambre pensent que je n’ai pas répondu à ce que le Juge
25 Bennouna a demandé la semaine dernière. C’est simplement
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1 que nous ne sommes pas autorisés à agir d’une certaine
2 façon.
3 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Je vais voir
4 quelle est la décision au sujet de la cassette.
5 [La Chambre discute avec le greffe]
6 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : La cassette
7 est disponible et nous rendons la décision que cette
8 cassette doit être diffusable dans l’enceinte de l’unité de
9 détention. Elle doit donc être diffusée ce soir et nous en
10 parlerons demain.
11 Me NICE (interprétation) : Pouvons-nous parler du
12 rapport de l’expert ?
13 M. LE PRÉSIDENT (interprétation) : Oui. Après
14 quoi, nous parlerons de la vidéo.
15 Nous suspendons jusqu’à 9 h 00 demain matin.
16 --- L’audience est levée à 16 h 13
17 pour reprendre le vendredi
18 28 janvier 2000 à 9 h 00
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