Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

Page 18984

  1                    (Jeudi 18 mai 2000.)

  2                     (Audience publique.)

  3                     (L'audience est ouverte à 9 heures 33.)

  4                     (Le témoin est introduit dans le prétoire.)

  5   M. le Président (interprétation): Vous avez la parole. Nous sommes arrivés

  6   au paragraphe 30 ou 31 du résumé de la déposition de ce témoin.

  7   M. Naumovski (interprétation): C'est à peu près autour du trentième

  8   paragraphe, mais j'ai encore en tête la dernière question posée hier: elle

  9   portait sur l'organisation de la police civile à tous les niveaux

 10   territoriaux de la Bosnie-Herzégovine. J'aurais une question de plus à

 11   vous poser ce matin. Comme la police, toutes les municipalités présentes

 12   sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine, ce qui s'appelait par le passé

 13   secrétariat de la défense nationale, il existe des bureaux de la défense

 14   dans toutes les municipalités. Je vous demande si tous ces bureaux de la

 15   défense qui existaient au niveau municipal étaient des organes militaires

 16   ou civils?

 17   R.    Les bureaux de la défense étaient bien entendu des bureaux

 18   civils. Dans chaque municipalité existait un bureau de la défense qui

 19   dépendait du département de la défense dont le siège était à Mostar. Les

 20   représentants des bureaux de la défense dans les municipalités étaient

 21   responsables devant les représentants du département de la défense qui

 22   siégeaient à Mostar.

 23   Q.    Lorsque vous dites "les représentants du département", vous

 24   parlez en fait des personnes qui travaillent dans ce qu'on appellerait

 25   aujourd'hui un ministère? Les Juges de cette Chambre connaissent mieux la


Page 18985

  1   notion de ministère et c'est tout à fait la même que celle de département

  2   dont vous parlez, n'est-ce pas?

  3   R.    Oui, d'ailleurs hier, j'ai expliqué quelle était la structure de

  4   la police et cette structure vaut également pour la défense. Sur le

  5   territoire de la communauté croate d'Herceg-Bosna, il existait des bureaux

  6   de la défense, un département de la défense, un département de la police,

  7   un département pour telle ou telle activité et les représentants de ces

  8   départements avaient rang de ministre puisque qu'ils étaient tous membres

  9   du gouvernement.

 10   Q.    Sur le territoire de la Bosnie centrale, en dehors des bureaux

 11   de la défense qui existaient au niveau municipal, il existait également

 12   une direction qui siégeait à Travnik et qui était un bureau régional. Je

 13   crois qu'ensuite, cette direction a déménagé à Vitez. Mais c'était à peu

 14   près sur le plan de l'administration pour la défense l'équivalent de

 15   l'administration de la police, n'est-ce pas?

 16   R.    Oui, tout à fait.

 17   Q.    Monsieur le Président, Messieurs les Juges, M. Civcija a déjà

 18   parlé du paragraphe 30 du résumé de sa déposition qui porte sur

 19   l'aggravation de la criminalité. Je n'ai donc pas besoin de revenir là-

 20   dessus avec lui aujourd'hui. Mais nous pouvons passer aux événements

 21   d'octobre 1992.

 22   M. le Président (interprétation): Monsieur Naumovski, il y a un point que

 23   j'aimerais faire remarquer d'emblée. Monsieur le Juge Robinson est revenu

 24   parmi nous. Je dis cela pour le compte-rendu d'audience. Vous pouvez

 25   poursuivre, Maître Naumovski.


Page 18986

  1   M. Naumovski (interprétation): Vous avez déjà parlé de Refik Lendo qui

  2   était commandant de la Défense territoriale à Novi Travnik au cours du

  3   second semestre de 1992. Qui a-t-il remplacé à ce poste?

  4   R.    Il a remplacé à ce poste M. Saban Mandjuka qui a occupé les

  5   fonctions de commandant du quartier général de la Défense territoriale

  6   pendant un certain temps avant lui.

  7   Q.    Hier, vous avez déjà fait connaître ce que vous pensiez de Refik

  8   Lendo, mais à son arrivée dans son poste, les possibilités de

  9   communication mutuelles entre les Musulmans et les Croates se sont-elles

 10   améliorées ou au contraire aggravées?

 11   R.    Tant que le commandant de la Défense territoriale était

 12   M. Mandjuka, nous avions des contacts avec la partie musulmane et nous

 13   mettions en œuvre des tentatives pour créer un commandement conjoint et

 14   faire participer sur les fronts de Novi Travnik les représentants des deux

 15   communautés. Ces efforts ont donné des fruits dans une certaine mesure.

 16   Mais avec l'arrivée de M. Refik Lendo, cette situation s'est modifiée de

 17   façon draconienne, c'est-à-dire qu'en fait, M. Refik Lendo a rejeté toute

 18   possibilité de coopération avec l'autre partie.

 19   Q.    Merci. Dites-moi, je vous prie, le plus brièvement possible ce

 20   qui s'est passé au mois d'octobre : qui a attaqué qui et pourquoi ? Je

 21   vous en prie.

 22   R.    Eh bien, pour être tout à fait franc, le conflit du mois

 23   d'octobre est survenu et moi, je n'étais pas présent en ville le premier

 24   jour, c'est-à-dire le jour du déclenchement de ce conflit. Tard dans la

 25   soirée de ce jour-là, je rentrais d'un déplacement et je n'ai pas pu


Page 18987

  1   rentrer dans la ville car la ville était bloquée de tous les côtés. Donc

  2   j'ai pris un chemin détourné, en passant par la municipalité de Fojnica,

  3   de Kiseljak, de Busovaca, de Vitez pour arriver enfin à Novi Travnik, du

  4   côté nord qui n'avait pas subi l'attaque.

  5   Selon les informations que j'ai reçues, ce conflit a commencé à cause de

  6   quelque chose qui s'est passé dans une station d'essence tout près du

  7   quartier général du HVO de Novi Travnik. Si je ne m'abuse, au cours de ces

  8   affrontements, deux personnes ont trouvé la mort. Ce conflit a duré

  9   plusieurs jours.

 10   Mais nous voyons, avec les analyses ultérieures, que le but de l'armée

 11   musulmane de la Défense territoriale consistait à s'emparer de l'usine

 12   Bratstvo. D'ailleurs, les forces musulmanes ont réussi à s'en emparer.

 13   Q.    Donc si je vous comprends bien aujourd'hui, le motif réel de ce

 14   conflit était la volonté de s'emparer de l'usine Bratstvo?

 15   R.    Oui. Nous en avions déjà parlé hier : c'était une usine d'armes,

 16   d'ailleurs la plus productive pour les calibres de 60 à 200 millimètres.

 17   C'était donc un lieu particulièrement important.

 18   Q.    Après octobre 1992, le HVO a-t-il eu plus de possibilités

 19   d'utiliser ce que l'on trouvait dans l'usine Bratstvo ou bien l'accès en

 20   a-t-il été impossible jusqu'au bout de la guerre?

 21   R.    Encore aujourd'hui, en temps de paix, c'est un seul peuple qui

 22   contrôle l'usine Bratstvo ; il nous est toujours impossible d'y accéder.

 23   Le HVO n'a pas accès à cette usine.

 24   Q.    Merci. Encore un détail: vous avez dit que cette station

 25   d'essence était tout près du quartier général militaire du HVO; le


Page 18988

  1

  2

  3

  4

  5

  6

  7

  8

  9

 10

 11

 12

 13   Page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la

 14   pagination anglaise et la pagination française.

 15

 16

 17

 18

 19

 20

 21

 22

 23

 24

 25

 


Page 18989

  1   quartier militaire général militaire était à l'époque installé dans

  2   l'ancien hôtel comme vous l'appeliez, n'est-ce pas?

  3   R.    Oui. Le quartier général militaire était installé dans les

  4   locaux de l'ancien hôtel et j'en ai montré l'emplacement hier sur le plan.

  5   Cette station d'essence était donc en ville. Les forces musulmanes avaient

  6   la volonté de s'en emparer. Bien entendu, le quartier général ou plutôt le

  7   Conseil croate de défense s'est opposé à cette volonté.

  8   Q.    Merci. Dites-moi, dans le courant de l'année 1993, ce secteur de

  9   la ville de Novi Travnik, majoritairement habité par des Croates, a-t-il

 10   eu des problèmes du point de vue de l'alimentation en électricité, en eau?

 11   R.    En 1993, l'année a été très difficile pour tous les habitants de

 12   Novi Travnik, notamment pour nous, les Croates qui habitions dans la

 13   partie inférieure de la ville. Lorsque je parle de partie inférieure, je

 14   veux dire qu'il y avait une partie supérieure contrôlée par les forces

 15   musulmanes qui se trouvaient à une altitude supérieure à celle où

 16   habitaient les Croates, sur des reliefs plus importants. La majeure partie

 17   de l'année 1993, les Croates n'ont pas eu d'électricité ; d'ailleurs, ils

 18   n'ont pas eu d'eau non plus, car l'alimentation en eau était coupée. Il y

 19   a eu aussi des incidents tout à fait fâcheux avec destruction de

 20   canalisations d'adduction d'eau, car il est arrivé à plusieurs reprises

 21   que l'on voit ces canalisations à l'air libre coupées, physiquement

 22   coupées.

 23   Q.    Au mois de juin, la guerre a repris. Pouvez-vous nous dire, je

 24   vous prie, à quel moment s'est produit exactement cette reprise des

 25   conflits? Qui était l'agresseur?


Page 18990

  1   R.    Au début de l'année 1993, le rapport des forces -quand je dis

  2   rapport de forces, je parle surtout de rapport de forces militaires- s'est

  3   modifié considérablement au profit des forces musulmanes. Sur le

  4   territoire de la municipalité de Travnik, deux brigades musulmanes sont

  5   arrivées qui étaient équipées et recevaient leurs uniformes de la

  6   République de Croatie.

  7   Elles devaient se battre en principe contre l'armée de la Republika

  8   Srpska. C'étaient la 1e et la 7e brigades musulmanes. Mais les forces

  9   musulmanes, qui sont donc arrivées au niveau local, sont intervenues

 10   principalement en fait dans l'offensive contre les Croates.

 11   En effet, le 9 juin, tôt le matin, en 1993, une offensive de grande

 12   ampleur a été lancée contre les municipalités de Travnik et de Novi

 13   Travnik à partir du sud-ouest et aussi à partir de Novi Travnik. Et nous

 14   ne pensions pas que nous pourrions être attaqués à partir de cette

 15   direction. Donc les femmes, les enfants et les personnes âgées, tôt le

 16   matin, ont pris la fuite en passant par la montagne et ils sont arrivés au

 17   nombre de 6000 à 8000 dans la ville voisine. Donc ces femmes, ces enfants

 18   et ces personnes âgées ont traversé le massif Vilenica, suivis par les

 19   forces musulmanes.

 20   J'ai reçu l'ordre de mettre toute la police civile de la ville au service

 21   du règlement des problèmes qui se posaient à ces réfugiés, pour les

 22   protéger de nouvelles attaques à partir du Nord. Et c'est ce que j'ai

 23   fait.

 24   Q.    Un commentaire, s'il vous plaît. Vous parlez de ce conflit qui a

 25   redémarré au début du mois de juin, vous parlez du HVO qui a perdu des


Page 18991

  1   territoires ; en dépit de cela, le HVO a tout de même réussi à créer des

  2   lignes de front qui, d'une façon ou d'une autre, ont tout de même tenu

  3   jusqu'à la fin de la guerre entre les Croates et les Musulmans dans votre

  4   ville, n'est-ce pas?

  5   R.    Oui, tout à fait. Nous avons réalisé ce qu'on appelle le

  6   regroupement en jargon militaire, c'est-à-dire que nous nous sommes

  7   organisés de façon à défendre un espace peut-être plus réduit mais de le

  8   défendre de la façon la plus efficace qui soit. Novi Travnik était en fait

  9   encerclée de tous les côtés. Les unités qui venaient de Travnik sont

 10   arrivées pratiquement jusqu'au village de Buduciza, c'est-à-dire jusqu'aux

 11   limites de la ville.

 12   Et l'offensive qui avait été lancée contre le sud-ouest de la ville par

 13   les forces musulmanes a totalement réussi, c'est-à-dire que les Musulmans

 14   se sont emparés de ce territoire, et il n'y avait plus au sud-ouest de la

 15   municipalité le moindre espace libre. Donc les forces musulmanes à ce

 16   moment-là avaient le contrôle de 90 % du territoire municipal à partir du

 17   mois de juin, au cours de ce conflit.

 18   Il est vrai que la municipalité de Travnik couvrait une superficie de 240

 19   000 kilomètres carrés. La moitié de ce territoire avait déjà été contrôlée

 20   par les forces musulmanes à partir du conflit du mois de juin. Cette

 21   situation d'ailleurs a continué jusqu'à la fin de la guerre, c'est-à-dire

 22   jusqu'à la signature des accords de Washington.

 23   Q.    Merci, monsieur. Vous travailliez pour la police civile et,

 24   pendant un certain temps, vous avez été commandant de peloton sur la ligne

 25   de front. Pendant cette période, étiez-vous membre de la police civile ou


Page 18992

  1   étiez-vous un militaire, c'est-à-dire de qui receviez-vous vos ordres?

  2   Avez-vous jamais reçu l'ordre de persécuter qui que ce soit appartenant à

  3   un autre groupe ethnique?

  4   R.    Non, bien entendu. Les ordres que je recevais venaient

  5   exclusivement du quartier général militaire ou du commandant de

  6   l'administration de la police qui s'est trouvé pendant un certain temps à

  7   Travnik, dont le siège s'est trouvé pendant un certain temps à Travnik. Je

  8   n'ai jamais reçu un ordre quelconque qui me demanderait de persécuter

  9   quelque particulier que ce soit ou quelque groupe que ce soit de quelque

 10   groupe ethnique que ce soit. Bien au contraire.

 11   D'ailleurs, personnellement, j'ai moi-même émis des ordres destinés à

 12   tenter d'influer sur la situation pour éviter de telles persécutions ou

 13   expulsions. Je me rappelle avoir reçu un jour un ordre et, n'oublions pas

 14   que j'étais un commandant de bas niveau: donc, pour m'atteindre, cet ordre

 15   a traversé pas mal de niveaux hiérarchiques et, en tout cas, il était

 16   signé du colonel Blaskic. Il indiquait également qu'il était interdit

 17   d'agir de quelque façon que ce soit si une telle action pouvait ne serait-

 18   ce que ressembler à une persécution.

 19   Q.    Une correction au compte rendu d'audience, page 8, ligne 18.

 20   Vous parliez de vos missions au sein de la police civile et vous avez dit

 21   avoir agi uniquement sur ordre de votre chef qui était le chef de

 22   l'administration de la police qui siégeait à Travnik, n'est-ce pas?

 23   R.    Oui.

 24   Q.    J'interviens parce que, dans le compte rendu en anglais,

 25   figurent les mots "police militaire". Je tiens donc à corriger, vous avez


Page 18993

  1

  2

  3

  4

  5

  6

  7

  8

  9

 10

 11

 12

 13   Page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la

 14   pagination anglaise et la pagination française.

 15

 16

 17

 18

 19

 20

 21

 22

 23

 24

 25

 


Page 18994

  1   parlé de l'administration de la police n'était pas un organe militaire.

  2   Q.    Oui. Merci, monsieur Civcija. Avant le conflit, pendant le

  3   conflit et après le conflit, pour avancer un petit peu, avez-vous jamais

  4   entendu dire que le HDZ de Bosnie-Herzégovine ou le HVO ait mis en œuvre

  5   une quelconque politique planifiée de persécutions préparées à l'avance à

  6   l'encontre des Musulmans de Bosnie-Herzégovine?

  7   R.    Non. Absolument pas.

  8   Q.    Merci. Le dernier sujet sur lequel je vais vous poser quelques

  9   questions, il s'agit de M. Dario Kordic. Monsieur Civcija, quand avez-vous

 10   fait la connaissance de M. Dario Kordic et que représentait-il à vos yeux:

 11   un homme politique ou un soldat?

 12   R.    Eh bien, après les premières élections démocratiques en

 13   République de Bosnie-Herzégovine, vous savez que les voix se sont

 14   réparties entre les trois principaux partis politiques, à savoir le Parti

 15   de l'action démocratique, le Parti démocratique Serbe et, bien entendu,

 16   l'Union démocratique croate qui était principalement le parti des Croates.

 17   Pour autant que je le sache, M. Kordic faisait partie du conseil exécutif

 18   de ce parti, l'Union démocratique croate, HDZ. Il en était donc plus

 19   précisément le vice-président. Je ne le connaissais pas personnellement;

 20   je n'avais jamais entendu parler de lui jusqu'au moment où le problème

 21   s'est posé de se partager ou plutôt de se procurer des armes dans l'usine

 22   Bratstvo. A ce moment-là, Dario Kordic s'est montré un homme courageux,

 23   décidé. Il a participé au règlement de ce problème, à savoir qu'il a

 24   participé personnellement à diverses réunions tenues pour empêcher que les

 25   armes ne sortent de cette usine. Cela lui a valu une très grande


Page 18995

  1   popularité auprès d'une majorité du peuple croate. M.Kordic a également

  2   participé à tous les pourparlers qui se sont tenus avec les plus hauts

  3   représentants de l'Etat de Bosnie-Herzégovine. Lorsque je dis cela, je

  4   pense aux membres de la présidence, Mme Biljana Plavsic, notamment, ainsi

  5   qu'à des représentants de divers ministères comme M. Dusina, par exemple,

  6   adjoint du ministre de l'intérieur de Bosnie-Herzégovine et d'autres

  7   personnalités qui sont venues à Novi Travnik, une fois ou à plusieurs

  8   reprises, pour tenter de régler ce problème de la sortie des armes de

  9   l'usine. Il y avait aussi des représentants de l'armée serbe, le général

 10   Kukanjac, si je ne m'abuse. En tout cas, un officier de haut rang.

 11   Q.    Mais si je vous comprends bien, vous parlez de la fin de 1991,

 12   début 1992, n'est-ce pas, c'est-à-dire l'époque où la JNA était encore

 13   présente sur tout le territoire de Bosnie-Herzégovine?

 14   R.    Oui, absolument. J'en ai parlé hier. Cela s'est passé au moment

 15   de l'agression terrible qu'a vécue la République de Croatie, au moment où

 16   nous voyions tous les jours ces armes sortir de ces usines de production,

 17   tirer sur nos concitoyens en République de Croatie et tuer des civils.

 18   Q.    Pendant l'année 1993 ou 1994, c'est-à-dire pendant toute la

 19   durée de la guerre, M. Kordic était-il un commandant militaire?

 20   R.    Comme je viens de le dire, M. Kordic était un membre de l'Union

 21   démocratique croate. Il faisait partie de sa direction au plus haut niveau

 22   et il était très certainement un homme politique. Il était un homme

 23   politique en temps de paix et il l'a été également en temps de guerre,

 24   même s'il a porté un uniforme militaire.

 25   Q.    Monsieur Civcija, en tant que chef de la police civile de Novi


Page 18996

  1   Travnik, fonction que vous avez remplie pendant un temps assez long, avez-

  2   vous jamais reçu une instruction ou un ordre émanant de M. Kordic et liée

  3   aux tâches que vous accomplissiez?

  4   R.    Non, je crois déjà avoir répondu à votre question, il y a

  5   quelques instants, en disant de qui je recevais mes ordres: exclusivement

  6   du chef de la police civile, du quartier général militaire et une fois du

  7   colonel Blaskic qui était chef de la zone opérationnelle.

  8   Q.    Avez-vous jamais reçu par la voie hiérarchique du côté

  9   militaire, ou avez-vous entendu dire que M. Kordic aurait donné des ordres

 10   à des membres de la brigade Stjepan Tomasevic de Novi Travnik, en tant que

 11   commandant militaire?

 12   R.    Quand je suis devenu soldat, j'ai reçu mes ordres du commandant

 13   du 3e bataillon et du commandant de la brigade Stjepan Tomasevic qui

 14   étaient mes seuls supérieurs au sein de la brigade Stjepan Tomasevic. Je

 15   n'ai jamais entendu dire que Dario Kordic aurait émis des ordres destinés

 16   à la brigade.

 17   Q.    Merci, monsieur Civcija. Monsieur le Président, j'en ai terminé

 18   de mon interrogatoire principal.

 19               (M. Mikulicic interroge le témoin.)

 20   M. Mikulicic (interprétation): Monsieur Civcija, au nom de la défense de

 21   M. Cerkez, je vais être bref en me contentant de vous poser quelques rares

 22   questions. Les Juges de cette Chambre ont déjà entendu de la bouche

 23   d'autres témoins, comme de la vôtre d'ailleurs, qu'à Novi Travnik, on peut

 24   parler de trois conflits survenus entre les forces croates et les forces

 25   musulmanes: un conflit en juin 1992, un conflit en octobre 1992, suivi par


Page 18997

  1   cette offensive majeure de juin 1993.

  2   Vous nous avez dit hier qu'après le premier conflit déjà, une scission

  3   officieuse de la ville de Novi Travnik s'est produite, à savoir que les

  4   habitants croates se sont regroupés dans une partie de la ville alors que

  5   les Musulmans se regroupaient dans l'autre partie de la ville et que cette

  6   situation a perduré jusqu'au jour d'aujourd'hui pratiquement. Est-ce

  7   exact?

  8   R.    Oui, c'est exact.

  9   Q.    Eh bien, je vous pose la question suivante: vous rappelez-vous

 10   qu'entre le deuxième conflit, donc après la fin de ce deuxième conflit, en

 11   octobre 1992, et avant le début du troisième conflit, c'est-à-dire celui

 12   de juin 1993, vous rappelleriez-vous qu'il y ait eu des conflits armés

 13   significatifs entre les deux parties sur le territoire de Novi Travnik?

 14   R.    Non, il n'y a pas eu de conflit armés significatifs entre les

 15   deux parties, même si en ville certains incidents se sont produits.

 16   Q.    C'était donc le fruit du statu quo établi après le deuxième

 17   conflit, n'est-ce pas?

 18   R.    Oui, c'est exact.

 19   Q.    Dans votre déposition, vous avez dit hier qu'avec le début de

 20   l'agression contre la République de Croatie, un nombre significatif

 21   d'habitants de Bosnie-Herzégovine est entré dans les rangs du Conseil

 22   croate de défense pour participer à la défense contre l'agression de la

 23   JNA et de l'armée de la Republika Srpska. Je crois vous avoir entendu

 24   prononcer le nombre de 15000 hommes, n'est-ce pas?

 25   R.    (En BCS)


Page 18998

  1

  2

  3

  4

  5

  6

  7

  8

  9

 10

 11

 12

 13   Page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la

 14   pagination anglaise et la pagination française.

 15

 16

 17

 18

 19

 20

 21

 22

 23

 24

 25


Page 18999

  1   M. le Président (interprétation): Peut-on faire quelque chose pour ne pas

  2   entendre la cabine française ?

  3   Je crois que nous sommes de nouveau sur le bon canal.

  4   M. Mikulicic (interprétation): Je vais répéter la question, monsieur

  5   Civcija. En ce qui concerne les 15000 hommes qui sont allés en République

  6   de Croatie pour aider les forces armées de la République de Croatie, il y

  7   avait parmi eux un grand nombre de Musulmans également. Pourriez-vous me

  8   le confirmer?

  9   R.    Oui, il y avait également des Musulmans mais je ne sais pas

 10   combien ils étaient au total. Je ne peux pas vous répondre.

 11   Q.    Est-il également vrai qu'une fois que la guerre s'est déclenchée

 12   en République de Bosnie-Herzégovine, ces hommes qui sont allés en

 13   République de Croatie pour défendre la Croatie sont retournés en Bosnie-

 14   Herzégovine, dans leurs foyers, pour aider à la défense du territoire de

 15   la Bosnie-Herzégovine?

 16   R.    Oui. Une grande partie est retournée en Bosnie-Herzégovine pour

 17   défendre sa patrie.

 18   Q.    Par conséquent, il y avait des Croates et des Musulmans parmi

 19   eux?

 20   R.    Oui. Il y avait des Croates et des Musulmans qui sont rentrés

 21   défendre la Bosnie-Herzégovine, mais certains sont restés en Croatie.

 22   Q.    Merci, monsieur Civcija. Je n'ai plus de question, Monsieur le

 23   Président, Messieurs les Juges.

 24         (Madame Somers commence son contre-interrogatoire.)

 25   Mme Somers (interprétation): Je tiens à vous informer du fait que M. Nice


Page 19000

  1   ne participera pas, car il ne sera pas présent, au contre-interrogatoire.

  2   M. le Président (interprétation): Il n'y a pas d'objection.

  3   Mme Somers (interprétation): Monsieur le Témoin, j'aimerais obtenir

  4   quelques informations supplémentaires de votre part à propos de votre vie.

  5   Vous êtes citoyen de Bosnie-Herzégovine, avez-vous dit. Etes-vous aussi

  6   citoyen de Croatie?

  7   R.    Oui.

  8   Q.    Quel est passeport que vous avez utilisé pour venir à La Haye,

  9   si je peux vous le demander?

 10   R.    J'ai le passeport de la République de Croatie et c'est le seul

 11   que j'ai.

 12   Q.    Si je comprends, vous n'avez pas de passeport du tout de la

 13   Bosnie-Herzégovine?

 14   R.    Non, je n'ai pas le passeport de Bosnie-Herzégovine parce que,

 15   si vous avez le passeport de Bosnie-Herzégovine, vous avez besoin d'un

 16   visa pour vous rendre dans des différents pays, ce qui représente des

 17   frais. C'est la raison pour laquelle je ne l'ai pas ; j'ai le passeport de

 18   la République de Croatie.

 19   Q.    Vous vous êtes installé à Grahovo: où se trouve Grahovo, dans

 20   quelle municipalité?

 21   R.    Grahovo est une municipalité?

 22   Q.    Où se trouve physiquement cette municipalité?

 23   R.    C'est dans le canton numéro 10, en Herzégovine, au sud-ouest de

 24   l'Etat de Bosnie-Herzégovine.

 25   Q.    Combien y a-t-il de Musulmans à Grahovo?


Page 19001

  1   R.    Très peu.

  2   Q.    Pourriez-vous nous donner un pourcentage? Vous avez été en

  3   mesure de nous fournir divers pourcentages, donnez-nous une idée du

  4   pourcentage de Musulmans par rapport au chiffre total de la population.

  5   R.    Il y a entre 500 et 600 habitants à Grahovo; en ce qui concerne

  6   les Musulmans, ils sont 1%.

  7   Q.    1 %. Merci. Quand avez-vous d'abord décidé de devenir membre du

  8   HDZ?

  9   R.    En 1990.

 10   Q.    A l'époque, est-ce que vos activités se limitaient à un domaine

 11   particulier?

 12   R.    Pouvez-vous répéter la question?

 13   Q.    Vous aviez des activités dans le parti du HDZ ; ces activités se

 14   limitaient-elles à un domaine particulier ou à une région particulière de

 15   la Bosnie ou dans un autre endroit où le HDZ avait des activités?

 16   R.    En 1990, moi, j'habitais Novi Travnik.

 17   Q.    Et c'est là que vous étiez membre actif du HDZ. Est-ce exact?

 18   R.    Oui, je suis devenu membre du HDZ, de l'Union croate

 19   démocratique.

 20   Q.    Vous étiez conseiller juridique à l'usine de Bratstvo ; est-ce

 21   que vous prépariez des contrats, faisiez-vous un travail véritablement

 22   juridique?

 23   R.    Non. Moi, ce n'était pas ma tâche que de faire des contrats.

 24   Moi, je représentais mon usine devant le Tribunal.

 25   Q.    Est-ce que vous surveilliez l'élaboration des contrats? Est-ce


Page 19002

  1   que vous étiez responsable de l'approbation donnée à tel ou tel projet de

  2   contrats, contrats préparés par les personnes compétentes à Bratstvo?

  3   R.    Vous pensez aux contrats commerciaux probablement, mais c'est un

  4   service commercial qui existait au sein l'usine et moi, je n'étais pas en

  5   charge de ce service.

  6   Q.    Vous savez qu'il y avait des contrats qui étaient préparés, qui

  7   étaient conclus, par exemple des contrats avec la JNA?

  8   R.    Non, j'ai travaillé à l'usine Bratstvo. Mais il faudrait

  9   également que je vous donne des explications au sujet de l'usine Bratstvo.

 10   Il s'agit d'un complexe, il y avait plusieurs usines qui faisaient partie

 11   de ce complexe, c'est un konzern, si je peux dire ainsi.

 12   Et j'ai commencé ma carrière dans une des usines qui fabriquait les

 13   tracteurs et ne fabriquait pas des armes. Je n'ai pas travaillé dans

 14   l'usine qui fabriquait des armes. C'est la raison pour laquelle, je ne

 15   pouvais pas non plus autoriser des contrats portant sur les livraisons.

 16   Q.    On parle de l'unité administrative conjointe, c'est là que vous

 17   travailliez. Est-ce que ceci regroupait les différents éléments

 18   constitutifs de ce complexe industriel qu'était Bratstvo? Est-ce que vous

 19   vous trouviez dans ce service conjoint de surveillance générale?

 20   R.    Les quatre dernières années, j'ai été le directeur. Par

 21   conséquent, j'étais à la tête de l'ensemble du konzern, quand il s'agit du

 22   personnel évidemment.

 23   Q.    Pendant que vous travailliez là, il y avait donc ces contrats

 24   qui étaient conclus pour la production, la fabrication et la vente d'armes

 25   à la JNA. Est-ce que cela se poursuivait comme situation?


Page 19003

  1

  2

  3

  4

  5

  6

  7

  8

  9

 10

 11

 12

 13   Page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la

 14   pagination anglaise et la pagination française.

 15

 16

 17

 18

 19

 20

 21

 22

 23

 24

 25

 


Page 19004

  1   R.    La question que vous posez concerne la direction restreinte du

  2   konzern, et c'était un conseil d'administration. C'est la raison pour

  3   laquelle il faudrait vous adresser à quelqu'un qui était membre de ce

  4   conseil alors que moi, j'étais à la tête d'un service chargé du personnel.

  5   Q.    Vous répondez à ma question en disant que vous ne savez pas s'il

  6   y avait pendant tout ce temps des contrats qui continuaient d'être conclus

  7   avec la JNA?

  8   R.    Non, je ne connais pas cette activité.

  9   Q.    Vous êtes devenu juriste; ceci s'est passé au moment où il y

 10   avait encore la RSFY, n'est-ce pas?

 11   R.    Oui.

 12   Q.    Je ne sais pas quelles sont les filières à suivre pour devenir

 13   avocat, homme ou femme de loi. Est-ce qu'il y a une espèce de

 14   constitution? Est-ce qu'il y a toute une procédure à suivre pour devenir

 15   membre de tel ou tel corps? Pourriez-vous nous dire ce qu'il en est?

 16   R.    Après le bac, il faut s'inscrire à la faculté de droit. Ensuite,

 17   vous avez la possibilité d'obtenir le diplôme et après vous poursuivez

 18   évidemment vos études si vous voulez aller plus loin.

 19   Q.    Mais, pour être autorisé à plaider -et vous venez de nous dire

 20   que vous l'avez fait-, est-ce que, pour ce faire, il fallait se présenter

 21   à un examen d'admission au barreau ou est-ce qu'il faut prêter un serment

 22   d'allégeance au gouvernement ou au pouvoir en place pour pouvoir faire

 23   fonction d'avocat?

 24   R.    Certes, pour être avocat, pour être représentant ou pour être

 25   juge, il est indispensable de vous présenter à un examen. C'est un


Page 19005

  1   concours, en effet.

  2   Q.    Est-ce qu'il vous est arrivé de plaider au Tribunal

  3   constitutionnel de Bosnie-Herzégovine?

  4   R.    Non, absolument pas.

  5   Q.    Mais connaissez-vous le fonctionnement de cette instance?

  6   R.    A peu près.

  7   Q.    Et lorsque vous représentiez l'usine Bratstvo, est-ce que vous

  8   l'avez fait dans des tribunaux de Bosnie-Herzégovine?

  9   R.    Oui, j'étais dans les tribunaux de la Yougoslavie, de l'ex-

 10   Yougoslavie, et pas de Bosnie-Herzégovine.

 11   Q.    A l'époque, au sein ou dans le cadre de la république de Bosnie-

 12   Herzégovine?

 13   R.    Dans le cadre de la république fédérale de la Yougoslavie, il y

 14   avait cinq autres républiques. Outre la Bosnie-Herzégovine, il y avait

 15   deux provinces autonomes également.

 16   Q.    Où avez-vous plaidé?

 17   R.    J'ai plaidé devant les tribunaux au Kosovo, en Macédoine, en

 18   Bosnie-Herzégovine, en Croatie, en Serbie; je n'étais pas en Slovénie.

 19   Mais c'étaient les contentieux économiques commerciaux.

 20   Q.    Hier, un document a été produit par le conseil de la défense.

 21   Apparemment, vous lui aviez fourni ce document qui montrait qu'il

 22   s'agissait d'un aval donné au poste du ministère des Affaires internes ou

 23   de l'Intérieur plus exactement. Qui vous a nommé à ce poste? L'approbation

 24   était accordée par Mate Boban, mais le Tribunal aura eu l'occasion de voir

 25   plusieurs documents qui parlaient de la nomination, de la désignation à un


Page 19006

  1   poste donné. Mais nous avons vu qu'il y avait plusieurs procédures pour ce

  2   faire. Qui vous a nommé à votre poste?

  3   R.    Je ne sais pas exactement mais je suppose que c'était le

  4   président du conseil exécutif, du conseil du HVO à Novi Travnik.

  5   Q.    Mais vous n'êtes pas sûr de la personne qui vous avait nommé?

  6   R.    Je pense que c'était le président du HVO municipal à Novi

  7   Travnik.

  8   Q.    Pourriez-vous nous donner un nom, monsieur?

  9   R.    Le président du HVO municipal à Novi Travnik, à cette époque-là,

 10   était M. Jozo Sekic.

 11   Q.    Vous avez présenté un document en date du 3 juillet 1992, mais

 12   vous avez dit qu'il prenait effet le 30 ou le 13 juin.

 13   R.    Le 13 juin, c'est exact.

 14   Q.    C'était une désignation au poste de chef du service de

 15   l'intérieur à Novi Travnik; ceci est de nouveau signé par Mate Boban.

 16   Cependant, j'aimerais savoir qui vous avait proposé à ce poste en 1992?

 17   R.    Le président du HVO, M. Jozo Sekic. J'en suis sûr.

 18   Q.    Et quand l'a-t-il fait? Quand vous a-t-il proposé comme

 19   candidat?

 20   R.    Je pense que c'était fin mai 1992.

 21   Q.    Je crois qu'il y a une certaine confusion, une contradiction

 22   parce que nous avons entendu des témoins qui sont venus dire que votre nom

 23   figurait parmi six noms qui avaient été soumis pour une candidature, le 20

 24   mai 1992. Il y avait uniquement des Croates parmi ces candidats et ces

 25   noms avaient été présentés ou proposés par Dario Kordic.


Page 19007

  1   Pourriez-vous nous aider à évacuer cette confusion?

  2   R.    Monsieur Kordic a dû donner son avis ou éventuellement son

  3   accord, mais la proposition a été faite par le président du HVO municipal

  4   de Novi Travnik. En ce qui concerne ma nomination au département des

  5   affaires étrangères, ce n'était pas M. Boban, mais Brana Ceric qui avait

  6   signé. Il était représentant du département des affaires intérieures du

  7   HDZ. C'était un petit peu le poste de ministre. C'est lui qui a pris cette

  8   décision.

  9   Q.    Hier, vous nous avez présenté une décision, la pièce D219/A. Là,

 10   on parle de la nomination de membres du HVO à Novi Travnik. Il est signé

 11   de Mate Boban. Quand on voit les documents qui ont été archivés, on

 12   pourrait éventuellement trouver celui-là. Pourriez-vous nous dire où nous

 13   risquons de trouver ces archives?

 14   R.    Monsieur le Président, Messieurs les Juges, pour pouvoir

 15   répondre à ces questions quand le Procureur parle d'un certain nombre de

 16   documents, pourrait-on me passer ces documents pour les voir, car je ne

 17   peux pas en parler. On parle d'un document; ensuite, on passe à un autre.

 18   Je ne sais pas de quoi on parle. Il faudrait quand même que je voie ces

 19   documents.

 20   Q.    Si c'est nécessaire!

 21   M. le Président (interprétation) : Est-ce vraiment nécessaire?

 22   Mme Somers (interprétation) : Je voudrais savoir s'il existe des archives

 23   locales.

 24   M. le Président (interprétation) : Veuillez montrer le document au témoin.

 25   Mme Somers (interprétation) : Merci. Veuillez examiner ce document. On


Page 19008

  1

  2

  3

  4

  5

  6

  7

  8

  9

 10

 11

 12

 13   Page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la

 14   pagination anglaise et la pagination française.

 15

 16

 17

 18

 19

 20

 21

 22

 23

 24

 25

 


Page 19009

  1   voit dans le coin inférieur gauche: "Mostar, 3 juillet 1992". Puis, on

  2   voit une liste de personnes destinataires. Au point 4, on voit "Archives".

  3   Pourriez-vous nous dire où ces archives pourraient se trouver?

  4   R.    Je ne peux pas répondre à votre question. Je ne sais pas. En ce

  5   qui concerne le document que j'ai apporté, il se trouvait chez mon épouse.

  6   Q.    Dans les archives de votre épouse? Vous ai-je bien compris

  7   monsieur? Est-ce que vous voulez dire que Mate Boban a fourni ce document

  8   afin qu'il soit archivé dans les archives de votre épouse? Quand on pense

  9   aux archives, en général, on pense à un établissement où pourraient se

 10   trouver les archives d'une instance telle que la HZ HB.

 11   R.    Je vous ai compris et j'ai répondu à votre question. Je ne sais

 12   pas où se trouvent ces archives. Mais, en ce qui me concerne, le document,

 13   je l'ai eu personnellement. C'est mon épouse qui l'avait gardé pendant

 14   tout ce temps-là. Je n'ai pas parlé des archives de mon épouse mais de mon

 15   épouse qui a gardé ce document-ci.

 16   Q.    On vous a posé des questions à propos des coutumes qui

 17   prévalaient dans les différents groupes ethniques en Bosnie-Herzégovine et

 18   ce respect des coutumes, ceci par rapport au point 6 de votre résumé.

 19   Quand avez-vous perçu que ces habitudes se modifiaient et quand ces

 20   changements sont-ils intervenus?

 21   R.    Il y avait des changements significatifs qui sont survenus au

 22   moment où les attaques violentes ont été lancées contre la République de

 23   Croatie. A l'époque où les Croates, non seulement de la municipalité de

 24   Novi Travnik mais de l'ensemble de la Bosnie centrale, protestaient et

 25   demandaient que quelque chose soit fait pour que les armes ne sortent pas


Page 19010

  1   de l'usine Bratstvo et qu'on ne livre pas ces armes à l'armée qui

  2   attaquait ces gens en Bosnie-Herzégovine.

  3   Q.    Est-ce que ces changements ont été exacerbés selon vous par le

  4   fait que la communauté croate d'Herceg-Bosna ait imposé certaines choses à

  5   la population non croate? Comment avez-vous perçu cette évolution dans le

  6   secteur public?

  7   R.    Au cours de ma déposition, hier, j'ai déjà dit que nous avons

  8   traversé une période extrêmement pénible. Un Etat venait d'éclater;.

  9   d'autres étaient en train de se former. A un moment donné, nous sommes

 10   restés sans gouvernement fédéral, sans un Etat fédéral. On n'avait pas

 11   notre propre Etat. Nous avions peur. On avait peur de ce qui allait se

 12   passer. D'un autre côté, on était conscients également du danger et de

 13   cette menace de la force très puissante, la plus puissante de l'époque, la

 14   Serbie, qui ne voulait pas que la Yougoslavie soit dissoute et qui

 15   préconisait que chaque territoire habité par les Serbes devait être

 16   rattaché à la Yougoslavie. Ceci concernait également la Bosnie-

 17   Herzégovine. A ce moment-là, il y a eu des approches quelque peu

 18   différentes au sujet des solutions qu'il fallait chercher. Nous avons

 19   senti que cette agression allait être répandue sur le territoire la

 20   Bosnie-Herzégovine et nous avons souhaité nous préparer pour la défense de

 21   notre pays de Bosnie-Herzégovine.

 22   Q.    Mais, monsieur, vous parlez du début de l'agression contre la

 23   Croatie. Quelle est la date que vous envisagez? Comment situez-vous cette

 24   agression dans le temps?

 25   R.    A plusieurs reprises, cela a commencé à Plitvice, Pakrac,


Page 19011

  1   l'attaque contre Vukovar, Dubrovnik, Sibenik.

  2   Q.    Quelle date, s'il vous plaît?

  3   R.    C'était l'automne 91 pour parler plus précisément.

  4   Q.    Vous sembliez dire dans votre déposition que vous n'étiez pas

  5   inquiété. Apparemment, vous avez dit que la République de Bosnie-

  6   Herzégovine n'était pas inquiétée ou n'était pas intéressée alors que la

  7   direction l'était. C'est quand même une déclaration assez forte que vous

  8   faisiez là. Comme l'indiquait M. Mikulicic, certaines personnes de Bosnie-

  9   Herzégovine dont les Musulmans, par exemple, sont allées contribuer aux

 10   combats en Croatie. Mais qu'en est-il de cette possibilité d'avoir des

 11   troupes croates qui soient stationnées - bien sûr, avec un accord au

 12   départ- afin de défendre un territoire? Est-ce que cela manifeste une

 13   désaffection, un manque d'intérêt?

 14   R.    Monsieur le Président, Messieurs les Juges, le Procureur vient

 15   de donner une interprétation erronée des réponses que j'avais données lors

 16   ma déposition d'hier. Je n'étais pas aussi peu précis: je n'ai pas parlé

 17   des dirigeants de la République de Bosnie-Herzégovine, mais j'ai parlé des

 18   représentants politiques du peuple musulman. C'est de cela que je parlais.

 19   Q.    Vous nous donniez des exemples -c'est nécessaire de le faire- de

 20   personnes qui n'ont pas montré un intérêt véritable pour la cause?

 21   R.    Il aurait été logique que les dirigeants les plus haut placés de

 22   mon pays, de la Bosnie-Herzégovine délivrent des ordres et interdisent

 23   l'exportation des armes au moment où cette même armée lance une agression

 24   contre la République de Croatie. Il n'y a pas eu un tel ordre.

 25   Q.    Est-ce que vous voulez dire que tous les échanges commerciaux


Page 19012

  1   auraient cessé de ce fait? Corrigez-nous si nous nous trompons, mais nous

  2   avons entendu dire par beaucoup de témoins qu'il y avait des échanges

  3   commerciaux, même si c'était aussi du marché noir, mais des échanges entre

  4   toutes les parties concernées pendant ce conflit?

  5   R.    Vous avez raison: il y avait des échanges de marchandises. Je ne

  6   pensais pas qu'il fallait interdire l'échange de marchandises, ni le

  7   déroulement des courants économiques, mais il y a une différence

  8   extrêmement importante à faire entre la farine et les armes, les canons

  9   qui tuent vos propres enfants.

 10   Q.    Y a-t-il une différence entre l'essence, le carburant nécessaire

 11   pour véhiculer les armes et les munitions?

 12   M. le Président (interprétation): Je crois que nous en savons suffisamment

 13   sur ce sujet. Passons à autre chose.

 14   Mme Somers (interprétation): J'aimerais vous poser une question. Vous avez

 15   dit qu'à un moment donné, les Croates ont cessé le transport de ces

 16   cargaisons destinées à la JNA. Avez-vous vous-même participé à ces

 17   événements? Etiez-vous partie prenante?

 18   R.    Oui, j'y ai participé, mais j'étais chef du poste de sécurité

 19   publique à cette époque-là; j'occupais ce poste et c'est pour cela que

 20   j'ai participé.

 21   Q.    J'aimerais que vous étoffiez quelque peu votre propos. Vous avez

 22   parlé de discrimination généralisée contre les Musulmans et les Croates

 23   sous l'égide de l'ancien régime de la Yougoslavie. Mais qui faisait cette

 24   discrimination?

 25   R.    Le terme discrimination veut dire également qu'un peuple a plus


Page 19013

  1

  2

  3

  4

  5

  6

  7

  8

  9

 10

 11

 12

 13   Page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la

 14   pagination anglaise et la pagination française.

 15

 16

 17

 18

 19

 20

 21

 22

 23

 24

 25

 


Page 19014

  1   de droits par rapport à un autre. Quand il s'agit de l'ex-Yougoslavie,

  2   lors de ma déposition d'hier, j'ai été tout à fait clair et j'ai dit que,

  3   pratiquement à tous les postes dirigeants tels police, armée, secteur

  4   public, sociétés publiques, la grande majorité était les représentants

  5   d'un seul peuple. Dans l'armée, c'était draconien: 99% d'officiers

  6   provenaient des rangs d'un seul peuple.

  7   Q.    Permettez-moi de vous poser cette question, car vous utilisez un

  8   terme en rapport avec cette question: je suppose que nous parlons ici des

  9   Serbes? Est-ce bien cela, monsieur? Vous avez parlé de personnes

 10   privilégiées ; alors où est-ce qu'il y a discrimination? Pourriez-vous en

 11   l'espace de quelques mots nous faire un exposé de cette situation? Est-ce

 12   que vous parlez des privilèges? Il faut quand même opposer cela au fait de

 13   priver des personnes de leurs droits?

 14   R.    Si quelqu'un est privilégié, d'après moi, l'autre est lésé dans

 15   ses droits.

 16   Q.    Je crois que je devrai passer à autre chose : je ne me sens pas

 17   en mesure de poursuivre ce point avec vous. Avez-vous fait partie de la

 18   JNA?

 19   R.    Oui, j'étais membre de la JNA.

 20   Q.    Où avez-vous servi dans la JNA?

 21   R.    J'ai été à Split.

 22   Q.    Vous aviez discuté de la question du référendum. Je voudrais

 23   voir dans quelle mesure vous avez été partie prenante aux événements qui

 24   ont mené au référendum en Bosnie-Herzégovine. Est-ce que, dès 1991, vous

 25   avez participé à des réunions à Busovaca, là où Dario Kordic commençait à


Page 19015

  1   obtenir une certaine popularité, une certaine importance dans le parti du

  2   HDZ?

  3   R.    Pourriez-vous être plus précis, s'il vous plaît ? De quelle

  4   période parlez-vous ?

  5   Q.    De juillet, août 1991 ?

  6   R.    Non, je n'y étais pas.

  7   Q.    Cependant il y avait un rapport, un lien. Je crois que le HDZ ou

  8   les différentes sections du HDZ évoluaient à la même rapidité, se

  9   formaient de façon assez homogène dans les différentes municipalités,

 10   n'est-ce pas?

 11   R.    Oui. On pourrait dire qu'il y avait un lien entre le HDZ des

 12   municipalités diverses ; je pense que c'était tout à fait normal et c'est

 13   vrai aussi pour tous les partis du monde entier.

 14   Q.    Est-ce que vous, vous avez suivi les polémiques qu'il peut y

 15   avoir entre Dragomir Cicak, homme du HDZ, et Dario Kordic? Etes-vous au

 16   courant d'éventuels échanges ou de cette interaction entre ces deux

 17   hommes?

 18   R.    Non.

 19   Q.    Lisiez-vous la presse locale dans laquelle étaient répercutés

 20   certains de ces échanges par le biais d'articles divers?

 21   R.    Non. Je ne l'ai pas lue et c'est la première fois que je

 22   l'entends dire.

 23   Q.    Suiviez-vous de près l'évolution des réunions de la communauté

 24   régionale de Travnik du HDZ, le 12 novembre 1991. Est-ce que cette réunion

 25   du 12 novembre a attiré votre attention? Ceci se passait juste avant que


Page 19016

  1   soit prise la décision portant création de l'Herceg-Bosna.

  2   R.    Non, je n'étais pas à cette réunion. Donc je ne pouvais pas

  3   suivre le déroulement de la réunion en question.

  4   Q.    Etiez-vous au courant de la tenue de cette réunion?

  5   R.    Non, c'est la première fois que je l'apprends de vous.

  6   Q.    Mais quel poste… Ou que pensiez-vous de la création de l'Herceg-

  7   Bosna? Avez-vous essayé de défendre cette idée devant votre électorat ou

  8   en avez-vous parlé de façon favorable dans le HDZ ou devant des

  9   représentants d'autres partis?

 10   R.    En suivant les événements en Croatie et, un peu avant, en

 11   Slovénie, j'étais parfaitement conscient du fait que quelque chose de

 12   similaire se produirait dans le territoire de Bosnie-Herzégovine. Si cela

 13   vous intéresse, je peux vous dire que moi, je souhaitais faire quelque

 14   chose pour nous organiser, pour empêcher une telle situation.

 15   Q.    Mais pour empêcher que n'éclatent des violences ou une guerre

 16   peut-être?

 17   R.    Certainement. La guerre était pratiquement imminente et la

 18   Bosnie-Herzégovine risquait d'entrer en guerre, car les plus hauts

 19   représentants ne s'étaient pas mis d'accord sur ce qu'ils voulaient et

 20   s'ils voulaient ou pas ce nouvel Etat. Il y a deux peuples qui étaient

 21   d'accord pour que ce nouvel Etat soit créé, mais le concept n'était pas

 22   clair; il y avait des malentendus. Et un troisième peuple, le peuple

 23   serbe, ne voulait pas cet Etat.

 24   Q.    En 1991, le HDZ, qui avait à sa tête Klujic, semblait avoir les

 25   même vues que les Musulmans pour ce qui est de l'avenir de la Bosnie-


Page 19017

  1   Herzégovine. Où se trouvait la ligne qui les divisait? Où était la

  2   division entre ceux-ci?

  3   R.    Est-ce que vous pouvez me répéter la question, s'il vous plaît?

  4   Q.    Bien sûr. Vous avez parlé de deux groupes ethniques qui

  5   n'étaient pas nécessairement d'accord sur les dispositifs à prendre; vous

  6   aviez exclu les Serbes dès le début. Donc, il ne reste plus que les

  7   Croates et les Musulmans. Si nous repassons en revue tous les témoignages

  8   déjà entendus, le HDZ était bien représenté par Stjepan Klujic qui en

  9   était le président. Et manifestement, ils étaient sur la même longueur que

 10   l'autre groupe, les Musulmans, qui voulait que demeure la Bosnie-

 11   Herzégovine. Est-ce qu'il y a eu des divisions, des différences qui

 12   étaient porteurs de ces désaccords, de ces divergences?

 13   R.    En ce qui concerne le fondement de ces divergences, c'est que

 14   les hommes politiques croates voulaient introduire un mécanisme de

 15   protection pour permettre aux Croates, un des peuples qui devait agir sur

 16   un pied d'égalité et être constitutif comme les deux autres, de ne pas

 17   disparaître de la scène politique.

 18   Par conséquent, si on accepte le concept d'un Etat de citoyens, donc "un

 19   homme égale une voix", à ce moment-là, le peuple minoritaire qui avait 17%

 20   à l'époque, et actuellement 10%, aurait été menacé et aurait disparu. Les

 21   représentants politiques voulaient par conséquent que ce mécanisme

 22   fonctionne pour qu'un certain nombre de décisions importantes du point de

 23   vue stratégique ne puissent pas être prises sans consensus de tous les

 24   peuples.

 25   Je comprends parfaitement une telle approche. Après tout, ceci figure


Page 19018

  1

  2

  3

  4

  5

  6

  7

  8

  9

 10

 11

 12

 13   Page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la

 14   pagination anglaise et la pagination française.

 15

 16

 17

 18

 19

 20

 21

 22

 23

 24

 25

 


Page 19019

  1   également dans les documents qui, par la suite, ont été rédigés et qui

  2   sont incorporés dans les accords de Dayton.

  3   Q.    Mais en 1991, quels étaient les représentants politiques qui

  4   souhaitaient une telle chose? Je ne me souviens pas que c'eût été la

  5   position préconisée par M. Klujic.

  6   R.    Monsieur Klujic n'était pas le seul représentant du peuple

  7   croate, même s'il avait occupé un poste très haut placé. Je me souviens,

  8   j'ai suivi des débats au sein du parlement la Bosnie-Herzégovine. Je parle

  9   donc de tous les représentants du peuple croate qui, à plusieurs reprises,

 10   ont participé aux débats à l'assemblé de la république de Bosnie-

 11   Herzégovine et qui ont souligné ce problème. Je répète une fois de plus

 12   qu'il s'agit des mécanismes de protection et que ces mécanismes donc sont

 13   intégrés dans des accord de Dayton.

 14   Q.    Manifestement, cette idée fixe que vous aviez, le fait de

 15   représenter les 17% alors que vous vous trouviez toujours dans le RSFY,

 16   est-ce que vous aviez cette même inquiétude pour ce qui était du

 17   pourcentage de Croates se trouvant sur le territoire?

 18   R.    En ce qui concerne l'ex-Etat, la Yougoslavie, c'était un pays

 19   socialiste. Dans le cadre d'un régime socialiste, il y a d'autres règles.

 20   Il y avait un leader, un parti et, même si la Yougoslavie était un des

 21   pays les plus libéraux parmi les pays socialistes, nous n'étions pas

 22   satisfaits avec le degré de démocratie et des droits de l'homme dans cet

 23   Etat. Ceci comprenait...

 24   Q.    Pour être tout à fait précise, je parlais du fait que vous

 25   représentiez une minorité de 17%. Est-ce qu'à l'époque, cette réalité vous


Page 19020

  1   inquiétait? Répondez simplement par oui ou par non.

  2   R.    Oui.

  3   Q.    Ignjac Kostroman a formulé un commentaire en janvier 1992, au

  4   centre culturel de Busovaca. Participait à cet événement Dario Kordic. On

  5   y fêtait le fait que la République de Croatie avait été reconnue comme

  6   Etat.

  7   Alors, j'aimerais savoir ce que vous pensez de ce commentaire. Il avait

  8   dit que cette Croatie était une terre croate et que les lois croates s'y

  9   appliquaient et que ceux qui n'obéissaient pas à ces lois devraient

 10   partir. Voilà ce qu'il disait. Acceptez-vous ce genre d'avis? Partagez-

 11   vous cet avis pour ce qui est de Novi Travnik?

 12   R.    Je n'étais pas à cette réunion. Et puis je ne vous ai pas suivi:

 13   je ne sais pas quand cette réunion a eu lieu. De toute façon, je ne peux

 14   pas suivre cette attitude.

 15   Q.    Le 16 janvier 1992, après la reconnaissance de l'Etat de

 16   Croatie, et je comprends que vous n'étiez peut-être pas là, mais que

 17   pensez-vous des avis exprimés?

 18   Nous parlons là d'une communauté voisine importante pour la création de la

 19   communauté croate d'Herceg-Bosna; ici, des vues et des avis ont été

 20   exprimés. Est-ce que vous les partagez?

 21   R.    Monsieur le Président, Messieurs les Juges, pour moi, c'est

 22   difficile également de faire des commentaires d'un certain nombre

 23   d'attitudes qui sont sorties du contexte. Cela doit faire partie d'un

 24   discours. Je ne peux pas.

 25   M. le Président (interprétation): Je ne vois pas où se trouve la


Page 19021

  1   difficulté. On vous demande simplement, monsieur, de dire si vous êtes

  2   d'accord ou si vous n'êtes pas d'accord avec l'avis exprimé par ce

  3   monsieur? Vous est-il possible de répondre à cette question ou est-ce que

  4   vous préférez ne pas y répondre?

  5   M. Civcija (interprétation): Je peux vous donner la réponse, Monsieur le

  6   Président, Messieurs les Juges, à toutes les questions. Mais je vous

  7   voudrais que la question soit précise.

  8   M. le Président (interprétation): Etes-vous d'accord avec ce sentiment

  9   exprimé à ce moment-là?

 10   M. Civcija (interprétation): Je vais demander au Procureur de bien vouloir

 11   répéter la question.

 12   Mme Somers (interprétation): Ceci se passait au centre culturel de

 13   Busovaca et faisait partie de la question donnée par Ignjac Kostroman à

 14   l’occasion de la reconnaissance de la République de Croatie par la

 15   communauté internationale. Il a dit ceci s'agissant de Busovaca : "Ceci

 16   est une terre croate, les lois croates seront appliquées ici et ceux qui

 17   désobéissent aux lois croates devront partir".

 18   R.    Je ne peux pas approuver ce texte. Je dis qu'il a été sorti de

 19   son contexte intégral.

 20   Q.    Etiez-vous un de ceux qui préconisaient activement qu'il y ait

 21   un référendum pour l'indépendance ?

 22   Vous aviez dit que, sans le vote des Croates, il n’y aurait pas eu de

 23   Bosnie-Herzégovine indépendante. Qu'avez-vous fait pour préconiser, pour

 24   faire valoir vos idées?

 25   R.    Je vais le dire très simplement. Moi, avec les membres de ma


Page 19022

  1   famille, nous sommes allés voter. Nous nous sommes présentés à un

  2   référendum, ma petite fille également à l’époque avait salué M. Sekic qui

  3   était un très haut homme politique du gouvernement musulman de l'époque.

  4   Q.    Dites-moi si vous avez peut-être été motivé, car nous avons

  5   beaucoup entendu parler ici, dans ce prétoire, de réticences présentées

  6   par le HDZ à l'idée du référendum; cette décision a été prise à la toute

  7   dernière minute, comme cela semblait s'être avéré par des communications

  8   avec Mate Boban. Apparemment, on a poussé la municipalité croate à voter.

  9   Est-ce que vous hésitiez à pencher plutôt pour un côté que de l'autre?

 10   R.    J'étais absolument indisposé à ce que l'Etat de Bosnie-

 11   Herzégovine devienne un Etat indépendant.

 12   Q.    J'aimerais revenir à une référence que vous avez faite. Vous

 13   avez parlé de l’afflux massif de réfugiés dans une région. Pourriez-vous

 14   nous fournir des documents pour étayer tout cela pour ce qui est du nombre

 15   de réfugiés et de l’incidence de leur arrivée, car comment en êtes-vous

 16   arrivé à dire qu’il s’agissait là d’un afflux massif? Quel chiffre avez-

 17   vous en-tête?

 18   R.    Une fois que Sarajevo a été assiégée, le pilonnage a commencé.

 19   On a fait des efforts pour que les enfants et les vieillards, les femmes,

 20   sortent de la ville. Il y avait un convoi -je ne sais pas qui avait

 21   organisé ce convoi- qui s'est rendu à Ilija; c’est là où les soldats armés

 22   de la Republika Srpska l'ont arrêté. Ils l’ont gardé je pense entre deux

 23   et trois jours. On a été informés régulièrement de cet événement par les

 24   médias, par la télévision, par la radio. Les quotidiens rapportaient des

 25   informations, on a fait une pression sur la partie serbe pour laisser


Page 19023

  1

  2

  3

  4

  5

  6

  7

  8

  9

 10

 11

 12

 13   Page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la

 14   pagination anglaise et la pagination française.

 15

 16

 17

 18

 19

 20

 21

 22

 23

 24

 25

 


Page 19024

  1   partir ces civils, ces femmes, ces enfants. La question qui se posait

  2   était tout simplement de savoir à quel moment ils allaient vraiment

  3   accepter. Pendant ce temps-là, à Novi Travnik, nous nous sommes préparés

  4   aux représentants des trois peuples, des Croates, des Musulmans et des

  5   Serbes, pour accueillir ces malheureux, pour les héberger, pour leur

  6   donner à manger, à dormir, pour pouvoir prendre la douche, s’habiller

  7   correctement. Je me souviens que ce convoi n'est arrivé qu'au cours de la

  8   nuit et nous nous sommes occupés de ces personnes pour les héberger, après

  9   toutes les humiliations qu'ils avaient traversées, et qu’ils soient enfin

 10   installés.

 11   Le lendemain matin, ou plus tard en fonction également de nos possibilités

 12   sur le transport, ces gens-là ont été acheminés en direction de la

 13   République de Croatie. Ensuite, il y a en qui sont restés en Croatie,

 14   d'autres sont partis dans les pays tiers, mais cela dépendait également

 15   des pays prêts ou non à accueillir ces réfugiés.

 16   Q.    Vous pourriez là nous être d’une grande assistance, car j'ai lu

 17   votre résumé, j’ai écouté votre témoignage. Vous nous avez dit que ces

 18   personnes traînant dans les rues sont une cause de problème permanent. Il

 19   y a un document, le document portant la cote Z 223 qui date du mois de

 20   septembre 1992, plus exactement du 22 septembre 1992; ceci recoupe bien la

 21   période dont nous parlons. J'aimerais vous en citer un extrait. Ce

 22   document est signé de la main de Kostroman et de Valenta et de Kordic. Je

 23   vais vous présenter ce point-ci dans le cadre de ce document. Il serait

 24   utile que le document en question soit placé sur le rétroprojecteur.

 25   M. le Président (interprétation): Ce n’est pas le témoin qui en décidé,


Page 19025

  1   c’est la Chambre qui en décide. Il faut avancer plus rapidement. Si vous

  2   présentez un document ou voulez poser une question au témoin, il faut que

  3   le témoin ait ce document devant lui.

  4   Mme Somers (interprétation): Puis-je demander l'aide de l'huissier?

  5   M. le Président (interprétation): Oui.

  6   Mme Somers (interprétation): Nous parlons de la situation qui prévaut dans

  7   diverses municipalités. Je n'ai pas malheureusement pas de copie en

  8   croate. Il s'agit d'un rapport sur Novi Travnik. On parle de réfugiés,

  9   mais il est également indiqué "qu'on a remarqué qu'il y avait des éléments

 10   criminels ou des membres de la police militaire qui se livraient à des

 11   exactions".

 12   J’essaie d’accélérer mais je m’excuse auprès des interprètes.

 13   "Il y a un bon approvisionnement de la route, des réfugiés qui sont

 14   passés. Plus récemment, certains réfugiés sont revenus ou ont commencé à

 15   revenir".

 16   Je me trompe peut-être, monsieur, mais je n'entrevois pas d'inquiétude à

 17   propos de pénuries éventuelles dont vous avez parlé hier, ni d'éléments

 18   criminels, ou d'actions criminelles qui seraient le fait de réfugiés.

 19   Est-ce qu'il se peut que ce rapport ait été dressé à partir d'informations

 20   incorrectes?

 21   M. Civcija (interprétation): Si je peux répondre à votre question, je

 22   pense que vous ne m’avez pas bien compris, tout au moins pas ce que j'ai

 23   dit hier. J'ai parlé des réfugiés et j'ai parlé des réfugiés qui sont

 24   venus en deux vagues. Je vous ai dit quelle était la situation à Novi

 25   Travnik quand le premier convoi des réfugiés est arrivé. J’ai mis l’accent


Page 19026

  1   sur le fait qu’il s'agissait des réfugiés de Sarajevo.

  2   Après cela, il y avait une offensive de grande ampleur qui a été lancée

  3   par l'armée serbe, notamment sur la Krajina, au nord de la Bosnie et nord-

  4   ouest de la Bosnie. A partir de ces territoires, des fleuves de réfugiés

  5   se sont acheminés vers les municipalités de Travnik et de Novi Travnik. A

  6   cette époque-là, nous avions également un phénomène: nous étions en

  7   présence d'un phénomène à Travnik. Les Serbes étaient bien informés et ils

  8   savaient que cette offensive allait être lancée.

  9   Par conséquent, un très grand nombre de Serbes de Novi Travnik ont

 10   commencé à quitter Travnik et ils se dirigeaient vers les territoires

 11   contrôlés par l'armée de la Republika Srpska. Un grand nombre

 12   d'appartements ont été laissés comme cela. C'est tout de suite après cette

 13   deuxième vague de réfugiés. Il s'agissait de dizaines de milliers de

 14   réfugiés, qui avaient doublé, triplé la population dans la ville de

 15   Travnik et Novi Travnik. Quand je dis Travnik, je sais parce que je m'y

 16   suis rendu et j'ai vu des gens dormir dans les parcs. C'étaient des

 17   colonnes qui se suivaient des journées entières.

 18   Nous avons véritablement fait des efforts, aussi bien du côté des

 19   Musulmans que du côté des Croates, pour essayer d'héberger ces gens-là. Au

 20   début, ils rentraient dans des appartements serbes qui avaient été

 21   abandonnés. Ensuite, on a essayé de les faire stationner dans des grands

 22   espace, car il n'y avait pas véritablement d'autres conditions pour

 23   pouvoir assurer leur hébergement. C'est la raison pour laquelle on a fait

 24   tout pour offrir à ces gens-là le minimum, enfin, des repas une fois par

 25   jour, au moins des couvertures. Ils venaient avec des sacs à dos tout


Page 19027

  1   petits. Il y en avait qui n'avaient pratiquement rien avec eux. C'est

  2   pourquoi nous avons tout fait pour les aider et les secourir. Ensuite, un

  3   très grand nombre de ces réfugiés…

  4   Q.    Je vais vous interrompre, monsieur. Vous venez de fournir une

  5   réponse très circonstanciée, mais ce qui m'intéresse, c'est ceci: nous

  6   sommes en septembre 1992. A ce moment-là, rien ne montre que cette venue

  7   de réfugiés ait provoquer des problèmes du genre de ceux dont vous avez

  8   parlé. Vous avez aussi parlé de la situation en matière de sécurité ou de

  9   crimes commis par les réfugiés. Il y a un document que vous ou votre

 10   bureau avez délivré. J'aimerais votre avis là-dessus. C'est la pièce

 11   Z518.3 et de la pièce Z565.1.

 12   Examinons d'abord la pièce Z565.1 qui va arriver dans un instant. Pendant

 13   que la pièce est distribuée, pourriez-vous nous dire ceci: vous étiez

 14   officier de police, vous aviez un poste d'exécutif au sein la police;

 15   aviez-vous un mécanisme en place destiné à relever, à établir des

 16   statistiques en matière d'activités criminelles?

 17   R.    Oui.

 18   Q.    Dites-nous en deux mots quel était ce mécanisme qui vous

 19   permettait de relever ces statistiques?

 20   R.    Chaque acte criminel qui était commis était enregistré. Il y

 21   avait des registres dont nous disposions à la police.

 22   Q.    S'il existait un tel mécanisme permettant l'enregistrement de

 23   ces voies de fait, examinez le document Z565.1. On y voit le tampon de

 24   votre bureau. On ne sait pas si votre signature y figure. Je vois

 25   Zapovjednik quelque part, mais je ne sais pas si ceci vous concerne. En


Page 19028

  1

  2

  3

  4

  5

  6

  7

  8

  9

 10

 11

 12

 13   Page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la

 14   pagination anglaise et la pagination française.

 15

 16

 17

 18

 19

 20

 21

 22

 23

 24

 25

 


Page 19029

  1   tout cas, c'est un résumé que soumet votre bureau et que vous soumettez

  2   peut-être, vous en personne, s'agissant d'activités criminelles en 1992.

  3   Permettez-moi de mettre en exergue la deuxième page. On voit qu'il y a

  4   quelques cas de suicide, quelques accidents de circulation. Vous aviez dit

  5   que les tribunaux ne fonctionnaient pas. Vous n'avez pas présenté de

  6   dossiers en vue de poursuites judiciaires. Mais vous pourriez peut-être

  7   expliquer la situation.

  8   Et puis vous dites, de façon assez optimiste, que beaucoup d'actes

  9   répréhensibles ont trouvé solution, que les auteurs de ces crimes ont été

 10   arrêtés et qu'ils ont fourni des déclarations qui pouvaient être

 11   constitutives de plaintes judiciaires; et vous dites que les véhicules

 12   volés ont été rendus à leurs propriétaires. Il y a 129 actes criminels,

 13   surtout des actes de banditisme, de vols de voitures, entre autres. Est-ce

 14   que ceci est terriblement différent de ce qu'on peut trouver dans un

 15   rapport d'une telle communauté?

 16   M. Sayers (interprétation): Objection sur la forme de la question. Il y a

 17   deux jeux de questions et puis, toute une série d'hypothèses avec

 18   utilisation du pronom personnel "vous".

 19   M. le Président (interprétation): Je demande le commentaire du témoin

 20   puisqu'il a le document sous les yeux.

 21   M. Civcija (interprétation): Si vous voulez bien me répéter la question?

 22   Q.    Je vous demandais un commentaire de votre part surtout sur la

 23   question de savoir s'il s'agit ici d'un nombre inhabituel de faits

 24   criminels. Je suppose que vous avez cette formation en police judiciaire?

 25   M. le Président (interprétation): N'interrompez pas, madame Somers! Je


Page 19030

  1   voudrais terminer avant que vous n'interveniez. Attendez, s'il vous plaît.

  2   Témoin, vous avez vu ce document, n'est-ce pas?

  3   Est-ce que ce document donne un reflet fidèle de la situation en matière

  4   de faits criminels en 1992?

  5   M. Civcija (interprétation): Oui. Mais uniquement dans les quartiers qui

  6   ont été contrôlés par ce poste de police car, Monsieur le Président,

  7   Messieurs les Juges, à la fin de 1992 et au début de 1993, la ville a été

  8   divisée en deux parties et chaque police, d'un côté des Musulmans et de

  9   l'autre des Croates, avait la zone de responsabilité contrôlée par une

 10   armée ou l'autre.

 11   Mme Somers (interprétation): Puis-je poursuivre, Monsieur le Président?

 12   M. le Président (interprétation): Oui.

 13   Mme Somers (interprétation): Merci. Ce document ne nous donne aucune idée

 14   de ce qu'il advenait à cette autre moitié de la population ou à cette

 15   autre moitié de votre municipalité.

 16   R.    J'ai déjà précisé que ce document concerne les territoires qui

 17   ont été contrôlés par le poste de police de Novi Travnik, par conséquent

 18   des forces armées du HVO.

 19   Q.    Ici, on ne voit que les activités concernant les Croates.

 20   Examinez l'autre document qui porte la cote 518.3.

 21   M. le Président (interprétation): Le moment se prête peut-être bien à la

 22   pause.

 23   Mme Somers (interprétation): Ce sera assez rapide. Je m'en charge ou pas?

 24   M. le Président (interprétation): Non, nous allons avoir une pause. Madame

 25   Somers, j'aimerais que vous en terminiez bientôt, en tout cas, dans les


Page 19031

  1   meilleurs délais.

  2   Mme Somers (interprétation): Je vais m'efforcer de le faire.

  3   M. le Président (interprétation): Pause d'une demi-heure.

  4         (L'audience, suspendue à 11 heures, reprend à 11 heures 35.)

  5   Mme Somers (interprétation): Monsieur le Président, une minute, je vous

  6   prie. J'ai en effet regardé le compte rendu d'audience et je vous prie de

  7   m'excuser, je ne me rendais pas compte que vous vous apprêtiez à poser une

  8   question au témoin, d'où mon interruption qui n'était pas intentionnelle

  9   et dont je vous prie encore de m'excuser.

 10   M. le Président (interprétation): Bien entendu.

 11   Mme Somers (interprétation): Je vous remercie, Monsieur le Président.

 12   Le document 518.3 ne nous prendra que quelques minutes. Il date de mars

 13   1993 et, là encore, il reprend les statistiques du mois de février. Je

 14   vous demanderai, monsieur le Témoin, de nous dire que vous avez rendu

 15   compte de 25 cambriolages: 6 cambriolages dont les auteurs étaient connus,

 16   19 dont les auteurs étaient inconnus, 2 vols à main armée et un certain

 17   nombre de dispositions par rapport à ces crimes.

 18   Est-ce que le compte rendu concernant les statistiques du crime et de la

 19   criminalité pendant ce mois-là sont exactes dans ce texte?

 20   M. Civcija (interprétation): Je pense que oui.

 21   Q.    Merci. J'ai une question à vous poser au sujet de ce que vous

 22   avez dit au sujet de l'autre partie de la ville. Vous avez dit que des

 23   institutions distinctes ont été créées, des institutions parallèles, je

 24   crois que c'est le mot que vous avez utilisé, et le département de police

 25   musulman distinct. Si la situation dans la municipalité est devenue aussi


Page 19032

  1   grave que vous l'avez dit, auriez-vous aidé la partie musulmane pour

  2   essayer de maîtriser cette situation?

  3   R.    Pendant une certaine période, la coopération a existé. D'une

  4   certaine façon, je pense pouvoir dire que les policiers étaient solidaires

  5   les uns avec les autres.

  6   Q.    Quand cela a-t-il cessé?

  7   R?    Eh bien, puisque deux instances, deux postes de police distincts

  8   à partir du mois de juin 1992, cette situation a cessé au moment de

  9   l'escalade des conflits, c'est-à-dire au printemps 1993.

 10   Q.    Ayant parlé de l'existence de ces deux systèmes distincts, il

 11   apparaît que vous étiez la seule personne -en tout cas, c'est ce qui

 12   ressort des éléments de preuve à ma disposition- qui s'est rendu compte

 13   que les Musulmans étaient en train de créer un système parallèle.

 14   Sur quoi fondiez-vous votre avis? Quels sont les documents qui indiquaient

 15   que les Musulmans étaient en train de créer un système parallèle?

 16   R.    Je ne peux pas parler des documents, mais je peux parler de

 17   l'époque et des événements survenus pendant cette époque. Il a existé un

 18   poste de police distinct, une armée distincte également, la Défense

 19   territoriale, qui représentait les Musulmans de la population. Et il

 20   existait également une cellule de guerre, une présidence de guerre à Novi

 21   Travnik qui ne comprenait que des représentants musulmans. Pour le reste

 22   des éléments caractéristiques de la situation, nous les avons déjà

 23   décrits.

 24   Q.    Vous avez indiqué vous-même qu'après les élections

 25   multipartites, une certaine coopération a existé. Pouvez-vous nous dire


Page 19033

  1

  2

  3

  4

  5

  6

  7

  8

  9

 10

 11

 12

 13   Page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la

 14   pagination anglaise et la pagination française.

 15

 16

 17

 18

 19

 20

 21

 22

 23

 24

 25

 


Page 19034

  1   quels sont vos commentaires par rapport à la version présentée à ce

  2   Tribunal selon laquelle, apparemment, ce sont en fait les Croates qui ont

  3   créé leurs institutions distinctes excluant les Musulmans? Quel est votre

  4   point de vue sur cette thèse?

  5   R.    Hier, j'ai dit dans ma déposition, parlant d'un document qui

  6   porte sur la création du gouvernement du Conseil croate de défense dans la

  7   municipalité de Novi Travnik, qui a été montré une nouvelle fois par vous

  8   aujourd'hui, j'ai dit qu'au sein de ce gouvernement se trouvaient

  9   également trois représentants de la nation musulmane. Ce qui signifie

 10   qu'au sein du gouvernement, les représentants des deux peuples étaient

 11   présents.

 12   Q.    Et qu'est-il arrivé? Est-il possible que les nombreux témoins et

 13   nombreux documents qui attestent de cette initiative croate pour créer des

 14   institutions distinctes aient tort?

 15   R.    Je ne peux pas parler de quelque chose que je n'ai ni vu ni

 16   entendu. Mais je peux répéter ce que j'ai déjà dit. Il existe des

 17   documents, des personnes qui, pendant toute la guerre, ont été membres du

 18   Conseil croate de la défense et qui avaient un poste au sein du conseil du

 19   HVO: monsieur Ceric, M. Safet Koco et M. Rizvic, ingénieur en bâtiment.

 20   Q.    Pourquoi, je vous prie, les Musulmans ont-il été expulsés et

 21   chassés du poste de police qui, par le passé, avait été mixte?

 22   R.    Si vous aviez bien suivi ma déposition hier, j'ai dit très

 23   exactement qu'en juin 1992, une attaque a eu lieu avec un but précis. Et

 24   cette attaque était due à la Défense territoriale composée des membres

 25   musulmans de la population. Le but de cette attaque était de s'emparer de


Page 19035

  1   tous les bâtiments importants de la ville. Et d'ailleurs, ils n'ont pas

  2   été expulsés de leur travail, ils ont continué à venir à leur travail au

  3   poste de police quelques jours encore avant de quitter ce travail de leur

  4   plein gré, sur ordre de quelqu'un.

  5   Q.    Le 19 juin, une réunion s'est tenue à la maison de la culture ou

  6   maison du travail. Je crois que cette information, dont je dispose, est

  7   exacte. Suite à cette réunion, vous-même et au moins deux autres soldats

  8   ont ramené Ragib Zukic et Salih Krnjic. Et M. Krnjic a été incarcéré dans

  9   le café Grand alors que vous avez passé à tabac M. Jukic au point qu'il a

 10   perdu conscience. Que dites-vous de cela? Quelle était la motivation de la

 11   police pour agir de la sorte?

 12   M. le Président (interprétation): La première question consiste à vous

 13   demander si cela a eu lieu.

 14   M. Civcija (interprétation): J'ai dit cela hier dans ma déposition que

 15   j'ai trouvé M. Salib Krnjic qui était attaqué par deux hommes qui

 16   tentaient de l'arrêter et je l'ai défendu, j'ai pris sa défense. Quant à

 17   l'autre homme que vous venez de citer, je n'en n'ai jamais entendu parler.

 18   Mme Somers (interprétation): Vous avez entendu finalement ce qui leur est

 19   arrivé, mais avez-vous eu des information au sujet de ces agressions?

 20   R.    J'ai dit haut et clair que j'ai pris la défense de M. Salih, et

 21   que personnellement, dans ma voiture, je l'ai emmené dans un autre

 22   quartier de la ville pour lui apporter de l'aide. Le matin, j'ai trouvé

 23   dans les locaux le colonel Filipovic, représentant du HVO, que j'ai

 24   informé;il l'a emmené dans le village de Kasapovici où se trouvait le

 25   siège de la Défense territoriale, c'est-à-dire de l'armée musulmane.


Page 19036

  1   Il l'a emmené là-bas. M. Sekic est revenu avec lui; c'était le président

  2   du HVO de Novi Travnik, qui, ce matin-là, le 20 juin, avait été arrêté au

  3   barrage routier situé près de la caserne des pompiers par les membres de

  4   la Défense territoriale, c'est-à-dire des Musulmans.

  5   Q.    Krnjic a-t-il été frappé alors que vous l'emmeniez en un autre

  6   lieu pour sa propre sécurité?

  7   R.    Tant que je n'ai pas pu le défendre, il a reçu quelques coups.

  8   Q.    Qui est le propriétaire du café Grand?

  9   R.    Le propriétaire est M. Marinko Marelja.

 10   Q.    C'était également un représentant de haut rang du HVO dans votre

 11   municipalité, n'est-ce pas?

 12   R.    Oui, c'est exact.

 13   Q.    Savez-vous qu'il a recueilli de l'argent pour financer la

 14   publication du livre d'Anto Valenta?

 15   R.    Oui, il a participé au financement destiné à permettre la sortie

 16   de cet ouvrage au côté d'un certain nombre d'autres personnes qui étaient

 17   financièrement à l'aise, dirais-je.

 18   Q.    Connaissez-vous ce livre, je parle du livre traitant de la

 19   séparation de la population et des déplacements de population? Connaissez-

 20   vous cet ouvrage?

 21   R.    Oui, je connais cet ouvrage. Il a souvent fait l'objet de

 22   discussions lors de diverses réunions tenues à l'étranger entre les

 23   représentants des trois peuples et en présence de la communauté

 24   internationale.

 25   Q.    Quels genres de discussions se sont déroulées autour de cet


Page 19037

  1   ouvrage?

  2   R.    Vous savez qu'en temps de conflit armé sur notre territoire, la

  3   communauté internationale a envoyé ses représentants. Lord Owen, M.

  4   Stoltenberg, M. Vance ont été au nombre de ces représentants. De

  5   nombreuses réunions se sont organisées pour discuter de l'avenir de la

  6   Bosnie-Herzégovine et de la façon dont celle-ci devait êtres organisée. Il

  7   est donc vraisemblable que cet ouvrage ainsi que d'autres documents aient

  8   été utilisés pour l'élaboration des divers plans que vous connaissez sans

  9   doute et qui ont porté des noms différents au fil du temps.

 10   Q.    Avez-vous lu cet ouvrage?

 11   R.    Je ne l'ai pas lu mais je l'ai passé en revue rapidement. J'ai

 12   vu que ce livre comportait de nombreuses statistiques, de nombreuses

 13   cartes relatives à l'aspect de la Bosnie-Herzégovine à ce moment-là, à

 14   l'aspect de la Bosnie-Herzégovine avant, et que ce livre présentait un

 15   certain nombre de modèles expliquant l'aspect différent de la Bosnie-

 16   Herzégovine sur ces cartes.

 17   Q.    Les thèmes traités dans cet ouvrage… Le thème de cette

 18   séparation de la population a été discuté lors des réunions tenues avec la

 19   communauté internationale, n'est-ce pas? Vous pouvez répondre par oui ou

 20   par non.

 21   R.    Il existait un certain nombre de documents qui auraient dû

 22   servir de base à l'organisation de la Bosnie-Herzégovine et il est

 23   vraisemblable que cet ouvrage ait également été utilisé pour élaborer ces

 24   plans.

 25   Q.    Pouvez-vous nous dire quel est votre point de vue sur cet


Page 19038

  1

  2

  3

  4

  5

  6

  7

  8

  9

 10

 11

 12

 13   Page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la

 14   pagination anglaise et la pagination française.

 15

 16

 17

 18

 19

 20

 21

 22

 23

 24

 25

 


Page 19039

  1   ouvrage, si vous l'avez compulsé rapidement, ou bien n'êtes-vous pas en

  2   situation de le commenter?

  3   R.    Je ne pourrais rien dire d'intéressant au sujet de cet ouvrage.

  4   Q.    Je reprends. Vous êtes la première personne, si je comprends

  5   bien toute l'importance des pièces à conviction à ma disposition, qui nous

  6   a dit que le conflit du mois d'octobre 1992 a été déclenché par les

  7   Musulmans. Avez-vous des documents à l'appui de vos dires?

  8   R.    Excusez-moi, quel est le mois que vous avez cité?

  9   Q.    Octobre 1992.

 10   R.    J'ai dit très clairement que je n'étais dans la ville le premier

 11   jour du conflit. Or le conflit est censé avoir démarré après une attaque

 12   contre le poste de la station-service qui se trouvait tout près du

 13   quartier général du HVO. J'ai donc décrit déjà dans mon témoignage par

 14   quel itinéraire je suis rentré en ville, à Novi Travnik.

 15   Q.    Mais saviez-vous que des barrages routiers avaient été élaborés

 16   à l'avance, avant cet incident, même si vous affirmez ne pas vous être

 17   trouvé en ville à ce moment-là?

 18   R.    Je n'ai pas compris la question. Pourriez-vous la répéter?

 19   Q.    Vous affirmez ne pas vous être trouvé à Novi Travnik à ce

 20   moment-là mais, en dépit de cela, êtes-vous au courant du fait que des

 21   barrages routiers ont été érigés avant cet incident? Je peux vous poser la

 22   question de façon plus précise si vous le souhaitez: savez-vous qu'un

 23   barrage routier a été visité par Dario Kordic à Novi Travnik, le 17

 24   octobre?

 25   R.    Je ne sais pas quel est le barrage qui a été visité par Dario


Page 19040

  1   Kordic. Quant au dernier barrage, voyez-vous, il arrivait très souvent que

  2   ces barrages soient érigés et que leur emplacement change. Des barrages

  3   avaient été érigés, y compris avant le début de la guerre.

  4   Q.    Mais qui a érigé ces barrages?

  5   R.    D'abord, par les représentants de la police, y compris par des

  6   réservistes sur ordre du ministère de l'Intérieur reçus par nous, ou même

  7   de la présidence de la République de Bosnie-Herzégovine. Je crois que

  8   celle-ci avait rendu une décision pour insister sur la nécessité d'ériger

  9   ces barrages.

 10   Q.    Vous avez indiqué que, pour autant que vous le sachiez, Dario

 11   Kordic ne vous avait jamais donné le moindre ordre. Je vous renvoie à la

 12   date du 21 octobre 1992: un document daté de ce jour qui est la pièce

 13   Z243, pièce déjà versée au dossier.

 14   Avant de vous poser une question précise sur ce sujet, je vous demande au

 15   préalable où vous vous trouviez le 21 octobre 1992?

 16   R.    J'étais à Novi Travnik.

 17   Q.    Mais vous n'étiez pas au cœur des événements dont vous venez de

 18   prétendre qu'ils ont existé et qui, d'après vous, ont joué un très grand

 19   rôle dans l'attaque de l'armée de Bosnie-Herzégovine. Que faisiez-vous à

 20   ce moment-là?

 21   R.    Vous pensez au jour de mon arrivée à Novi Travnik ou au 21?

 22   Q.    Je pense au 21.

 23   R.    Le 21, les affrontements étaient en cours dans la ville et je me

 24   trouvais avec des représentants de la police, dans la partie basse de la

 25   ville.


Page 19041

  1   Q.    Pour vous, le conflit a commencé quel jour exactement: le 19, le

  2   20, le 21? Pouvez-vous être précis sur la date?

  3   R.    Je crois qu'il a commencé le 19. Je crois que c'est le 19 que

  4   les combats ont commencé.

  5   Q.    Avez-vous jamais rencontré à Novi Travnik le colonel Bob Stewart

  6   du Bataillon britannique? Ou bien l'avez-vous rencontré à un autre

  7   endroit?

  8   R.    Oui, je connaissais le colonel Bob Stewart et j'ai assisté à

  9   quelques réunions où il était présent lui-même. Mais je ne me rappelle pas

 10   que nous nous soyons jamais rencontrés entre  quat'z'yeux.

 11   Q.    Etiez-vous présent à Novi Travnik le 20 octobre, lorsque le

 12   colonel Bob Stewart est allé voir Dario Kordic, réunion d'où il a tiré la

 13   conclusion qu'en l'absence d'une intervention de Dario Kordic, aucun

 14   accord de cessez-le-feu ne pourrait être conclu?

 15   R.    Je ne me rappelle pas m'être trouvé à ce moment-là avec M. Bob

 16   Stewart et je ne sais ce qu'a dit M. Bob Stewart.

 17   Q.    Examinons le document dont j'ai demandé qu'il vous soit remis et

 18   je vous prierai de vous pencher sur le point 10. Ce document traite de la

 19   situation à Novi Travnik. Les auteurs en sont Blaskic et Dario Kordic.

 20   Donc des opérations de défense. "Pendant la durée des opérations de

 21   défense, le vice-président de la communauté croate d'Herceg-Bosna, Dario

 22   Kordic, et moi-même, nous trouvons à Novi Travnik conduisant en permanence

 23   les opérations militaires et connaissant dans le détail la situation dans

 24   le but de maintenir toutes les forces sous contrôle. Le commandant du

 25   groupe d'opération, le colonel Filip Filipovic, est également ici, ainsi


Page 19042

  1   que le quartier général du HVO de Novi Travnik". Fin de citation.

  2   Cet ordre était-il exécutoire pour vous?

  3   R.    …

  4   Q.    Si Kordic avait fait quoi que ce soit pour mettre en œuvre ce

  5   qui est écrit dans ce texte, est-ce que cela aurait eu un effet exécutoire

  6   pour vous?

  7   R.    A cette époque-là, je rencontrais en même temps Kordic et

  8   Blaskic. J'aurais été lié, mais uniquement par des ordres venant de

  9   M. Blaskic.

 10   M. Robinson (interprétation): Quelle est la cote de ce document?

 11   Mme Somers (interprétation):  Il s'agit du document Z143.

 12   Monsieur le Témoin, vous êtes-vous jamais efforcé d'obtenir un accord de

 13   quelque nature que ce soit avec vos interlocuteurs musulmans?

 14   M. Civcija (interprétation): Oui. Nous l'avons fait. Après le conflit, une

 15   réunion a été organisée dans le nouvel hôtel de Novi Travnik, à laquelle

 16   ont participé des représentants des deux parties. Certains sont venus de

 17   Mostar et d'autres de Sarajevo. Lors de cette réunion, nous avons discuté

 18   de l'arrêt des combats, de la levée d'un certain nombre de barrages

 19   routiers et d'autres sujets également.

 20   Q.    Ces discussions ont-elles été couronnées de succès?

 21   R.    Oui. Le conflit a cessé après cette réunion qui s'est tenue dans

 22   l'hôtel de Novi Travnik. Je ne me rappelle pas la date exacte, mais je

 23   crois qu'elle a eu lieu 7 ou 8 jours après le début du conflit du mois

 24   d'octobre 1992, donc autour du 25 ou du 26.

 25   Q.    Selon ce que vous avez dit dans votre déposition, vous


Page 19043

  1

  2

  3

  4

  5

  6

  7

  8

  9

 10

 11

 12

 13   Page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la

 14   pagination anglaise et la pagination française.

 15

 16

 17

 18

 19

 20

 21

 22

 23

 24

 25

 


Page 19044

  1   travailliez à Mostar pour un ministère. Combien de temps avez-vous occupé

  2   ce poste? L'avez-vous occupé jusqu'en 1995?

  3   R.    Oui. C'était d'abord les affaires extérieures, puis les affaires

  4   intérieures. Depuis le mois de mai 1995 jusqu'au mois d'avril 1996, j'ai

  5   travaillé au ministère de l'Intérieur.

  6   Q.    Et avant cela, vous travailliez pour le ministère..? Je n'ai pas

  7   bien compris pour quel ministère vous travailliez avant cela. Ah, des

  8   Affaires extérieures. Qui était ministre?

  9   R.    Je vous prie de m'excuser. Vous venez de me dire que j'avais

 10   travaillé au ministère des Affaires extérieures. Je n'ai jamais été

 11   diplomate, je ne le serai jamais. Donc, je ne travaillais pas au ministère

 12   des Affaires extérieures, mais au ministère de l'Intérieur.

 13   Q.    Je vous prie de m'excuser. Le mot "étranger", "extérieur" était

 14   inscrit au compte-rendu d'audience. Je ne vous ai peut-être pas bien

 15   compris. Donc, vous travailliez à Mostar. Mais en novembre 1995, étiez-

 16   vous à Mostar?

 17   R.    Oui, j'étais à Mostar.

 18   Q.    Dario Kordic travaillait-il également à Mostar en novembre 1995?

 19   Il s'y trouvait, n'est-ce pas?

 20   R.    Je crois qu'il était à Mostar mais en tant que représentant

 21   politique. Il était président de la communauté croate d'Herceg-Bosna, mais

 22   je ne me rappelle pas si c'était à cette époque-là.

 23   Q.    Puis-je vous poser la question suivante: le ministère de

 24   l'Intérieur, est-ce un ministère de la police pour l'essentiel? Les

 25   fonctions de ce ministère consistent-elles à faire respecter le droit et


Page 19045

  1   l'ordre?

  2   R.    Oui, c'est exact.

  3   Q.    Que faisiez-vous dans ce ministère? Etiez-vous juriste?

  4   R.    J'étais chargé de former les cadres de la police, d'organiser

  5   leur entraînement et leur équipement.

  6   Q.    Vous rappelez-vous la réaction qu'a suscité en novembre 1995, au

  7   sein de ce ministère, la mise en accusation de Dario Kordic par le Bureau

  8   du procureur de ce Tribunal. Y a-t-il eu des discussions, des rumeurs, des

  9   commentaires?

 10   R.    Au ministère, je ne me rappelle pas avoir discuté de cette

 11   question très concrètement avec qui que ce soit, mais cela a fait couler

 12   beaucoup d'encre dans le public.

 13   Q.    Etes-vous au courant d'efforts entrepris par les instances

 14   supérieures d'application de la loi pour ce qui est des tentatives

 15   déployées afin de traduire M. Kordic en justice devant ce Tribunal?

 16   R.    Non, je ne suis pas au courant. Et puis, j'avoue que mes

 17   activités d'ailleurs ne l'exigeaient pas. Je faisais tout à fait autre

 18   chose.

 19   Q.    Pourriez-vous tirer ceci au clair s'agissant de ce ministère?

 20   Est-ce qu'à l'époque, ce ministère était considéré comme faisant partie de

 21   la Fédération du fait des accords de Washington ou bien c'était toujours

 22   un ministère qui se donnait une désignation d'appartenance à l'Herceg-

 23   Bosna?

 24   R.    Il s'agissait du ministère de la République croate d'Herceg-

 25   Bosna et c'est un ministère qui a fonctionné comme cela jusqu'à la


Page 19046

  1   signature des accords de paix de Dayton, quand toutes les trois parties

  2   étaient dans l'obligation de mettre en œuvre ce qui était la teneur des

  3   accords. Une fois que les accords ont été signés, toutes les trois parties

  4   avaient pour obligation de mettre en place des structures telles qu'elles

  5   ont été définies par les accords de Dayton.

  6   Q.    Entre 1995 et le jour d'aujourd'hui, à combien de reprises avez-

  7   vous vu M. Dario Kordic? Je ne parle pas ici de votre venue dans ce

  8   prétoire pour y déposer. Nous parlons de la période qui s'est écoulée

  9   entre novembre 1995 et aujourd'hui. A combien de reprises avez-vous vu M.

 10   Dario Kordic?

 11   R.    Je pense que je ne l'ai pas rencontré une seule fois.

 12   Q.    Excusez-moi un instant. Vous a-t-on jamais demandé de déposer

 13   pour la défense de Tihomir Blaskic?

 14   R.    Non, malheureusement, non. Sinon, j'aurais répondu très

 15   volontiers, oui.

 16   Q.    Est-ce que vous avez offert de comparaître en qualité de témoin,

 17   si vous sembliez trouver cela si important?

 18   R.    Non. Je ne l'ai pas demandé.

 19   Mme Somers (interprétation): Je vous remercie. Je n'ai plus de question à

 20   poser à ce témoin, Monsieur le Président.

 21               (Questions supplémentaires de Me Naumovski.)

 22   M. Naumovski (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

 23   Monsieur, il y a un certain nombre de thèmes qui ont été entamés. Il y en

 24   a d'ailleurs beaucoup mais je vais juste poser quelques questions.

 25   Il a été question de Grahovo, de ce village ou petite ville que vous


Page 19047

  1   habitez; on a parlé également du pourcentage des Musulmans, juste une

  2   donnée pour que la Chambre puisse véritablement être au clair en ce qui

  3   concerne la situation à Grahovo: quel est le peuple qui a la majorité dans

  4   la municipalité et la ville?

  5   R.    Ce sont des Serbes. Même avant la guerre et après la guerre, le

  6   peuple majoritaire de cette municipalité, ce sont les Serbes.

  7   Q.    Merci. En ce qui concerne le document D221, concernant votre

  8   nomination pour le chef de police, vous avez dit que vous supposiez que

  9   vous aviez été proposé par le président du HVO municipal à Novi Travnik.

 10   Je vous ai posé la question hier et c'est marqué également dans le

 11   document: il est marqué que c'était le ministre qui avait signé votre

 12   nomination et que la proposition est arrivée du chef de la direction de

 13   police de Travnik, donc l'organe qui a été compétent pour tous les postes

 14   de sécurité publique en Bosnie centrale. Est-ce que vous vous souvenez de

 15   cela?

 16   R.    Je pense que j'ai été clair hier et aujourd'hui également lors

 17   de mon témoignage. J'ai bien précisé qu'en ce qui concerne la nomination,

 18   elle a été signée par le président du département la défense, M. Branak

 19   Resic. Cela concerne donc ma nomination comme chef de police.

 20   Il y a un autre document également qui concerne la nomination des membres

 21   du gouvernement, qui a été signé par Mate Boban; c'est M. Sekic qui aurait

 22   dû l'autoriser ou plutôt c'est lui qui a donné la proposition pour cette

 23   nomination, pas pour moi, pour tous les autres.

 24   En ce qui concerne cette première proposition pour le chef de la police,

 25   la proposition a été donnée par le commandant de la direction de la


Page 19048

  1

  2

  3

  4

  5

  6

  7

  8

  9

 10

 11

 12

 13   Page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la

 14   pagination anglaise et la pagination française.

 15

 16

 17

 18

 19

 20

 21

 22

 23

 24

 25

 


Page 19049

  1   police. Le siège était à Travnik et le chef de cette direction était M.

  2   Ivo Reza.

  3   Q.    Merci. En ce qui concerne le document D219/1, au sujet de votre

  4   nomination pour être membre du gouvernement municipal du HVO de Novi

  5   Travnik, juste une question. Est-ce que les membres du gouvernement qui

  6   avaient été nommés par la décision du président de la communauté croate

  7   d'Herceg-Bosna, Mate Boban, les Musulmans et les Croates avaient été

  8   obligés de prêter serment ou éventuellement de dire qu'ils étaient loyaux

  9   à ce gouvernement?

 10   R.    Je ne me souviens pas qu'il y avait une prestation de serment

 11   mais, en revanche, je me souviens que nous avons essayé en toute

 12   responsabilité d'organiser la vie dans la municipalité de Novi Travnik et

 13   de rendre cette vie la meilleure possible et la mieux organisée.

 14   Q.    Il a été question aujourd'hui de M. Marinko Marelja,

 15   propriétaire d'un local dénommé Grand à Novi Travnik. A cette époque-là,

 16   Marinko Marelja était vice-président du HVO; par conséquent, il était

 17   suppléant de Jozo Sekic, n'est-ce pas?

 18   R.    Oui. M. Marelja était vice-président du HVO à Novi Travnik.

 19   Q.    On vous a demandé également quelque chose au sujet de votre

 20   participation à la JNA. Vous avez fait votre service militaire à la JNA,

 21   vous êtes sorti de la faculté, vous y êtes resté 12 mois, n'est-ce pas.

 22   C'était obligatoire?

 23   R.    Oui, c'était un service militaire qui était un devoir de tout

 24   citoyen selon la législation en vigueur de l'ex-Etat. Et j'ai passé 11

 25   mois dans la ville de Split sous les drapeaux.


Page 19050

  1   Q.    Mes collègues me font dire qu'il y a une erreur dans la

  2   transcription à la page 61, sixième ligne, au moment où nous avons parlé

  3   de M. Marelja. Auriez-vous l'amabilité, s'il vous plaît, pour que je ne

  4   vous suggère pas la réponse: il était vice-président de quoi, de quel

  5   organe?

  6   R.    M. Marelja était vice-président du HVO municipal à Novi Travnik.

  7   Par conséquent, il était suppléant du président, le président était Jozo

  8   Sekic et son suppléant ou vice-président était Marinko Marelja. Ensemble

  9   avec les représentants du département, ils constituaient le gouvernement.

 10   Q.    Entendu. Vous parlez donc de l'élément civil du HVO alors que,

 11   dans la transcription page 61, sixième ligne -et c'est la raison pour

 12   laquelle j'ai réagi-, il s'agissait du commandant du HVO. C'est la raison

 13   pour laquelle j'ai réagi.

 14   Mais au moment où vous avez parlé du nombre de Croates en Bosnie-

 15   Herzégovine en 1991, selon le recensement de la population, vous avez

 16   parlé de 17%. Et vous avez dit également combien il y a de Croates

 17   actuellement.

 18   R.    Mais je suis sûr qu'ils ne sont pas plus de 10%, même moins.

 19   Q.    Il y avait une autre question également qui vous a été posée au

 20   sujet de la préoccupation concernant ce pourcentage des Croates en ex-

 21   Yougoslavie. Monsieur, vous savez que, conformément à la Constitution de

 22   la République socialiste de Bosnie-Herzégovine, tous les trois peuples,

 23   indépendamment du nombre du peuple, agissaient sur un pied d'égalité. Et

 24   les trois peuples étaient des éléments constitutifs de cette république.

 25   Est-ce que c'est exact?


Page 19051

  1   R.    Oui.

  2   Q.    Le dernier document Z243, je ne sais pas si vous l'avez sous les

  3   yeux? Vous avez la version en croate, je suppose.

  4   On parle tout le temps d'un ordre. Mais si vous regardez la première page,

  5   tout à fait à gauche en haut, c'est marqué "Communication": le communiqué

  6   sur la situation à Novi Travnik et à Jajce. A droite, à peu près à la même

  7   hauteur : "Il est indispensable de remettre à tous les quartiers généraux

  8   de la Bosnie centrale ce communiqué".

  9   M. le Président (interprétation): C'est une question?

 10   M. Naumovski (interprétation): Mais la question que je voulais savoir si

 11   monsieur le Témoin était d'accord ou non? Est-ce qu'il voit ce que je vois

 12   sur le document?

 13   M. Civcija (interprétation): Oui, c'est exact. C'est ce que vous avez

 14   précisé. C'est un rapport de la part du commandant de la zone

 15   opérationnelle, M. Blaskic. Tous les quartiers municipaux lui ont été

 16   subordonnés; je pense à l'élément militaire. Eux, normalement, ils

 17   devaient soumettre des rapports à M. Blaskic qui était commandant de la

 18   zone opérationnelle en Bosnie centrale.

 19   Q.    Pourriez-vous maintenant voir la dernière page? Quel est le

 20   titre à côté du nom de M. Kordic? On en parle également au paragraphe 10.

 21   Comment s'adresse-t-on à M. Kordic? On l'appelle M. Kordic? Ensuite, on

 22   dit quelle est la fonction qu'il exerce. Qu'est-ce que ceci veut dire pour

 23   vous? Comment l'interprétez-vous? En quelle qualité M. Kordic figure-t-il

 24   sur ce document?

 25   R.    Dans tous les cas, je l'ai déjà dit lors de mon témoignage,


Page 19052

  1   M. Kordic était un homme politique, il était un des vice-présidents de la

  2   communauté croate d'Herceg-Bosna. Par conséquent, il appartenait aux

  3   structures civiles,; alors que le colonel Tihomir Blaskic, il ne faut pas

  4   dire même qu'il était militaire, c'était un officier. C'était trop que de

  5   le dire.

  6   Q.    En ce qui concerne la période à laquelle se rapporte ce

  7   document, vous avez parlé du 25 ou du 26 octobre et vous avez dit qu'il y

  8   avait une réunion qui a rassemblé les Musulmans et les Croates, ceci en

  9   vue de surmonter le conflit. Ceci a par la suite également donné lieu à un

 10   cessez-le-feu.

 11   La question que j'aimerais vous poser est la suivante: est-ce que

 12   M. Kordic, dans une qualité ou l'autre, a participé à ces négociations

 13   entre la partie croate et la partie musulmane? Je parle du 25 et 26

 14   octobre, car vous en avez témoigné.

 15   R.    Lors de cette réunion, ce sont nos invités qui sont arrivés de

 16   Mostar et de Sarajevo qui avaient pris la parole, en gros. En ce qui

 17   concerne les gens du pays, il y avait M. Marelja, qui était vice-président

 18   du HVO de la municipalité à Novi Travnik, présent également. Je ne me

 19   souviens pas qui était présent à cette réunion. Il y avait également les

 20   représentants de QG militaires. Lors de cette réunion, on avait convenu

 21   qu'on allait aboutir à un cessez-le-feu, que nous allions également

 22   surmonter quelques points chauds, normaliser la situation et qu'à

 23   l'avenir, on allait également organiser d'autres réunions pour parler d'un

 24   certain nombre d'autres détails.

 25   Q.    Vous avez dit qui était présent à la réunion mais, si je vous ai


Page 19053

  1

  2

  3

  4

  5

  6

  7

  8

  9

 10

 11

 12

 13   Page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la

 14   pagination anglaise et la pagination française.

 15

 16

 17

 18

 19

 20

 21

 22

 23

 24

 25

 


Page 19054

  1   bien compris, vous n'avez pas parlé de M. Kordic. Par conséquent, il

  2   n'était pas présent à la réunion? Est-ce que je vous ai bien compris?

  3   R.    Je ne me souviens pas que M. Kordic avait participé à cette

  4   réunion.

  5   Q.    Merci. Ensuite, je voudrais vous demander quelque chose au sujet

  6   du document Z518.3.

  7   En ce qui concerne votre rapport, monsieur Civcija, pour le mois de

  8   février 1993 que vous remettez à la direction de la police de Travnik,

  9   c'est le point 4 qui m'intéresse. Vous parlez de deux meurtres et vous

 10   parlez de l'auteur qui est connu. Il s'agit de l'assassinat d'une personne

 11   répondant de Halilovic. Vous précisez que la personne qui a commis le

 12   crime a été identifiée; il s'agissait d'un membre du HVO. Est-ce que j'ai

 13   bien constaté ce que vous vouliez dire à travers ce document?

 14   R.    Oui. C'est tout à fait précis d'ailleurs et clair dans le

 15   document. Il s'agit de M. Ismet Halilovic, fils de Ramiz, qui

 16   malheureusement a été tué par un membre du HVO.

 17   Q.    Est-ce que vous-même, en votre qualité de chef de la police

 18   civile, vous aviez des compétences à l'égard des personnes qui étaient des

 19   militaires si jamais ces personnes commettaient un crime?

 20   R.    Absolument pas. Je l'ai déjà dit hier lors de mon témoignage.

 21   Mais, même si nous étions la police civile, moi, j'ai demandé tant que

 22   c'était possible d'enregistrer chaque acte commis. Par moment, on sortait

 23   sur les lieux également pour dresser un constat mais, en général, c'était

 24   la police militaire qui en était responsable ainsi que des organes

 25   militaires.


Page 19055

  1   Q.    Une autre question concernant l'autre meurtre dont vous parlez

  2   dans le même document, quand un membre du HVO avait été tué. C'était un

  3   Croate. Est-ce que vous-même, vous avez quelque connaissance plus précise

  4   de cet événement qui a eu lieu dans un café "Bambou" le 10 février 1993?

  5   R.    Oui. M. Zoran Jukic, surnommé Juka, a été tué. C'est une

  6   personne qui a été arrêtée plusieurs fois et mise en détention pour des

  7   actes criminels qu'elle avait commis avant la guerre. C'était la personne

  8   qui a été relâchée de sa prison car, au début de la guerre, on avait

  9   relâché beaucoup de prisonniers. Cette personne a souvent commis des

 10   incidents et a perturbé l'ordre public. On l'a empêché une fois dans une

 11   de ses activités; c'est la police militaire qui avait réagi et ils ont été

 12   obligés de le tuer.

 13   Q.    Moi, je voulais vous poser une question plus précise:

 14   éventuellement, avez-vous des détails au sujet de cet événement? Savez-

 15   vous que la police militaire du HVO était intervenue, car il s'attaquait à

 16   un Musulman dans ce même café? Savez-vous pour quelles raisons la police

 17   militaire était intervenue?

 18   R.    Non, je ne pourrais pas véritablement l'affirmer, mais je vous

 19   dis que c'était une personne connue.

 20   Q.    Merci. Cela ne fait rien. Nous n'allons pas insister. J'ai

 21   encore un autre document: le document Z223. C'est un document assez

 22   copieux. Je ne sais pas si vous l'avez. C'est un document assez

 23   volumineux. On ne va pas rentrer dans le détail.

 24   Il s'agit de l'extrait des minutes d'une réunion entre les représentants

 25   de la Bosnie centrale en septembre 1992. C'est le HDZ de la Bosnie


Page 19056

  1   centrale qui avait organisé cette réunion. Jozo Sekic était le président

  2   du HVO et Marinko Marija, vice-président, étaient présents à cette

  3   réunion. Vous-même, y étiez-vous?

  4   R.    Non, je n'y étais pas. Sûrement! Non, non. Je n'y étais pas.

  5   Q.    Sous la rubrique "Observations", observations qui concernent

  6   toutes les municipalités. En version anglaise, c'est 003279. On dit qu'il

  7   faut faire la distinction entre les structures civiles et les structures

  8   militaires du HVO. Les références en version anglaise sont 0032009. Par

  9   conséquent, on y précise également un certain nombre de vos fonctions à

 10   Novi Travnik. Il est vrai que c'était un problème en 1992, car les deux

 11   pouvoirs ne fonctionnaient pas encore, n'est-ce pas?

 12   R.    Oui, tout à fait. D'ailleurs, c'est pourquoi j'ai été nommé par

 13   le représentant du département de la Défense qui m'avait nommé comme chef

 14   de la police.

 15   Q.    Est-ce que vous pouvez voir, s'il vous plaît, la version croate,

 16   page 6, avant-dernier paragraphe? On demande aux autorités militaires du

 17   HVO de respecter la procédure réglementée pour arrêter les personnes au

 18   sujet desquelles il existe des fondements pour avoir commis des actes qui

 19   vont à l'encontre des citoyens. Je pense que ce document-là justement

 20   précise ce dont il a été question tout à l'heure?

 21   M. le Président (interprétation): Quelle est la question?

 22   M. Naumovski (interprétation): Je voulais que M. Civcija nous confirme que

 23   c'étaient les problèmes dont il s'occupait et que c'étaient en même temps

 24   les problèmes auxquels il avait à faire face. Il fallait qu'il identifie

 25   les auteurs des actes criminels et, ensuite, qu'il forme les dossiers et


Page 19057

  1   qu'il règle les poursuites judiciaires.

  2   R.    Certes, c'était un problème auquel nous avons fait face. C'est

  3   la raison pour laquelle on avait demandé aux pouvoirs militaires, aux QG

  4   militaires de travailler avec un peu plus de succès, d'organiser la police

  5   militaire, les organes militaires pour que l'on puisse dans les meilleures

  6   conditions exercer nos activités.

  7   Q.    Il y a beaucoup de choses qui figurent dans ce document mais, de

  8   toute façon, je ne vais pas prendre du temps à la Chambre et je ne vais

  9   pas insister. Mais on va peut-être encore voir la page 7. Monsieur

 10   Civcija, pouvez-vous juste regarder la page 7?

 11   Sur cette page, on demande au ministère de la Défense de la communauté

 12   croate d'Herceg-Bosna, à cette époque-là on appelait toujours cela le

 13   département, de rédiger un certain nombre de documents pour qu'il n'y ait

 14   pas de malentendu entre les pouvoirs militaires d'un côté et les pouvoirs

 15   civils de l'autre et donc, d'opérer ensemble.

 16   Par conséquent, je pense que c'est de cela que vous avez parlé en ce qui

 17   concerne vos activités à la police, n'est-ce pas ?

 18   R.    Oui. Je l'ai déjà dit et je pense qu'il ressort clairement de ce

 19   document la nature des problèmes auxquels nous avons eu à faire face. On

 20   voulait vraiment faire une distinction entre les activités, les tâches

 21   militaires et les tâches civiles pour que dans la pratique, sur le

 22   terrain, il n'y ait pas de malentendu.

 23   M. Naumovski (interprétation): Merci, monsieur Civcija. Monsieur le

 24   Président, Messieurs les Juges, je n'ai plus de question.

 25   M. le Président (interprétation): Monsieur Civcija, vous en avez ainsi


Page 19058

  1

  2

  3

  4

  5

  6

  7

  8

  9

 10

 11

 12

 13   Page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la

 14   pagination anglaise et la pagination française.

 15

 16

 17

 18

 19

 20

 21

 22

 23

 24

 25


Page 19059

  1   terminé de votre déposition. Merci d'être venu déposer devant nous au

  2   Tribunal pénal international. Vous pouvez désormais disposer.

  3               (Le témoin est reconduit hors du prétoire.)

  4   Maître Sayers, avant d'entendre le témoin suivant, je voulais vous

  5   demander ceci: est-ce que vous avez fourni une liste des témoins que vous

  6   prévoyez pour la semaine prochaine?

  7   M. Sayers (interprétation): Oui. Monsieur le Président, nous avons remis

  8   une lettre hier où il y avait l'ordre dans lequel nous allons proposer les

  9   témoins pour cette semaine-là et la semaine d'après.

 10   M. le Président (interprétation): Ce n'est sans doute pas ce qui nous a

 11   été proposé dans la liste le 10 mai?

 12   M. Sayers (interprétation): C'est exact. La lettre a été fournie hier.

 13   J'en ai un exemplaire ici. Nous l'avons envoyée à Mme Featherstone.

 14   M. le Président (interprétation): Oui. Nous l'avons, nous venons de la

 15   recevoir. Avez-vous une requête à formuler s'agissant du témoin suivant?

 16   M. Sayers (interprétation): Oui, Monsieur le Président. Il ne nous a parlé

 17   de cela qu'au moment où l'on préparait sa déposition hier. Est-ce que nous

 18   pourrions passer à huis clos partiel afin que je vous en expose les

 19   raisons?

 20   M. le Président (interprétation): Oui.

 21               (Audience à huis clos partiel.)

 22   (expurgée)

 23   (expurgée)

 24   (expurgée)

 25   (expurgée)


Page 19060

   1  (expurgée)

  2   (expurgée)

  3   (expurgée)

  4   (expurgée)

  5   (expurgée)

  6   (expurgée)

  7   (expurgée)

  8   (expurgée)

  9   (expurgée)

 10   (expurgée)

 11               (Audience publique avec mesures de protection.)

 12               (Le témoin est introduit dans le prétoire.)

 13               (Maître Sayers interroge le nouveau témoin.)

 14   J'aimerais vous informer qu'il y a ces témoins que nous avons prévus, les

 15   deux premiers parleront de la municipalité de Fojnica, une des

 16   municipalités mentionnées dans l'Acte d'accusation modifié; tous les

 17   autres témoins parleront de Busovaca.

 18   M. le Président (interprétation): Le témoin peut-il donner lecture de la

 19   déclaration solennelle?

 20   Témoin DB (interprétation): Je déclare solennellement que je dirai la

 21   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 22   M. le Président (interprétation): Monsieur, veuillez-vous asseoir.

 23   M. Sayers (interprétation): Bonjour monsieur. Merci Monsieur le Président

 24   de m'avoir donné la parole.

 25   Témoin DB (interprétation): Bonjour.


Page 19061

  1   Q.    J'aimerais vous dire que la requête que vous avez déposée afin

  2   d'obtenir des mesures de protection hier a été accordée par la Cour. Ce

  3   qui veut dire qu'aujourd'hui dans le cadre de votre déposition, vous aurez

  4   un pseudonyme et vous serez le témoin DB. C'est de cette façon-là que nous

  5   nous adresserons à vous pour votre déposition.

  6   R.    J'ai compris, merci.

  7   Q.    Merci bien, monsieur. Nous allons rapidement parcourir quelques

  8   éléments qui concernent votre vie personnelle. Mais auparavant, j'aimerais

  9   que soit distribuée cette page, et je vous demanderais, monsieur, de

 10   confirmer que c'est bien votre identité qui est écrite là, mais je vous

 11   demanderais de ne pas donner lecture de votre nom.

 12   R.    Oui.

 13                     (L'huissier s'exécute.)

 14   Q.    Témoin DB, vous êtes né dans le village de Senkovici, (expurgée)

 15    (expurgée), est-ce exact?

 16   R.    C’est exact.

 17   Q.    Avant le mois de septembre 1993, vous habitiez toujours dans ce

 18   village?

 19   R.    C'est exact.

 20   Q.    Senkovici se trouve à 7 kilomètres au sud-ouest de la ville de

 21   Novi Travnik et se situe sur le territoire de la municipalité de Novi

 22   Travnik, n’est-ce pas?

 23   Q.    Oui.

 24   Q.    Vous êtes ressortissant de quel pays, Témoin DB?

 25   R.    Bosnie-Herzégovine.


Page 19062

  1   Q.    Vous êtes d'origine ethnique croate et vous êtes de religion

  2   catholique?

  3   R.    C'est exact.

  4   M. Nice (interprétation): Je m’excuse de vous interrompre, mais le témoin

  5   a sorti son résumé de sa poche. Qu’en pensent les Juges?

  6   M. Sayers (interprétation): Je ne pense pas qu'il soit nécessaire que le

  7   témoin lise le résumé qu'il a sous les yeux.

  8   M. le Président (interprétation): Témoin DB, veuillez ne pas lire votre

  9   résumé. Nous demandons votre déposition; s’il y a tel ou tel point sur

 10   lequel vous avez besoin de vous rafraîchir la mémoire, à ce moment-là,

 11   vous pourrez examiner ce résumé.

 12   M. Sayers (interprétation): Où avez-vous été à l'école?

 13   R.    A Vodovod, le village de Vodovod.

 14   Q.    Où se trouve ce village de Vodovod? Dans quelle municipalité?

 15   R.    A proximité de Travnik.

 16   Q.    Avez-vous été à l'école secondaire?

 17   R.    Non.

 18   Q.    Pourriez-vous nous dire quel est le pays qui vous a délivré ce

 19   passeport?

 20   R.    La Bosnie-Herzégovine.

 21   Q.    Quand avez-vous obtenu ce passeport?

 22   R.    Je n'ai pas compris la question.

 23   Q.    Quand avez-vous obtenu ce passeport?

 24   R.    Il y a quelques jours.

 25   Q.    Vous êtes marié; vous avez quatre enfants.


Page 19063

  1

  2

  3

  4

  5

  6

  7

  8

  9

 10

 11

 12

 13   Page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la

 14   pagination anglaise et la pagination française.

 15

 16

 17

 18

 19

 20

 21

 22

 23

 24

 25

 


Page 19064

  1   R.    Oui.

  2   Q.    Où habitez-vous aujourd’hui?

  3   R.    Novi Travnik.

  4   Q.    Pourriez-vous dire aux Juges quelle est la profession que vous

  5   exercez aujourd'hui?

  6   R.    (expurgée).

  7   Q.    Vous travaillez pour qui?

  8   R.    Je travaille à Vilenica. C'est une société publique des services

  9   communaux.

 10   Q.    Avez-vous été membre d'un parti politique dans votre vie?

 11   R.    Non.

 12   Q.    Est-ce que vous pourriez donner aux Juges une idée de la

 13   composition ethnique de Senkovici avant la guerre, avant que ne se

 14   produisent les évènements dont vous allez parler aujourd’hui?

 15   Combien de Croates y avait-il, combien de Musulmans? Où habitaient-ils les

 16   uns et les autres?

 17   R.    Il y avait au total 450 Musulmans et Croates à Senkovici, nous

 18   avons vécu ensemble: 150 Croates et 300 Musulmans plus précisément.

 19   Q.    Est-ce que votre village était divisé en quartiers ou

 20   constituait-il un tout?

 21   R.    Divisé en deux.

 22   Q.    Seriez-vous en mesure d’expliquer à la Chambre comment se

 23   répartissaient les habitants?

 24   R.    La partie haute était habitée par les Musulmans et en bas,

 25   c’étaient des Croates. Il y a une mosquée qui nous séparait. En haut,


Page 19065

  1   c’étaient les Musulmans et en bas les Croates.

  2   Q.    Vous avez dit qu'il y avait 150 Croates qui habitaient dans

  3   votre village. Combien y en avait-il qui étaient en âge de porter des

  4   armes?

  5   R.    Trente.

  6   Q.    Et pour ce qui était des autres résidants, des autres habitants

  7   croates, que faisaient-ils?

  8   R.    Des vieillards, des femmes et des enfants.

  9   Q.    Avant que n'éclate la guerre civile entre les Croates et les

 10   Musulmans dans votre région, comment les deux communautés s’entendaient-

 11   elles? Quels étaient les rapports entre les Croates et les Musulmans?

 12   R.    Très bien.

 13   Q.    Est-ce qu'il y avait beaucoup de mariages mixtes entre Musulmans

 14   et Croates?

 15   R.    Non.

 16   Q.    Je crois comprendre qu'au moment où l'armée des Serbes de

 17   Bosnie-Herzégovine a commencé à pilonner Novi Travnik et les villages

 18   environnants en avril 1992, début avril 1992, vous savez que les Juges ont

 19   déjà entendu beaucoup de témoins à ce propos, mais qu’avez-vous fait vous?

 20   Avez-vous rejoint les rangs de l’unité militaire? Si vous l’avez fait,

 21   dans quelle unité serviez-vous?

 22   R.    J'étais membre de la communauté de Domobrani, là où j’ai monté

 23   la garde autour de mon village.

 24   Q.    De combien d'armes disposiez-vous?

 25   R.    En ce qui concerne les Croates qui habitaient en bas, nous


Page 19066

  1   disposions de 10 fusils. C'est tout.

  2   Q.    Avant que votre village soit attaqué, vous étiez bien

  3   agriculteur de métier?

  4   R.    Oui.

  5   Q.    Pourriez-vous dire aux Juges ce qu'il s'est passé, très tôt le

  6   matin du 9 juin 1993?

  7   R.    Le 9 juin, le matin, à 5 heures et quart, il y a eu une attaque

  8   qui a été lancée contre les Croates. Elle venait de toutes les directions.

  9   Le village croate était encerclé pratiquement par les Bosniens. Nous

 10   étions pratiquement encerclés. Comme je l'ai dit, les Croates étaient

 11   encerclés par les Musulmans, par les Bosniens.

 12   Q.    Où se trouvent les villages de Vodovod, Pecine et Sebecici?

 13   R.    Ce sont des villages qui encerclent Senkovici. Senkovici est au

 14   milieu. A droite, ce sont Pecine, Vodovod, Ruda et Kovacici.

 15   Q.    Est-ce que ces villages-là ont été attaqués comme le vôtre le

 16   fut? R.     Oui.

 17   Q.    Après l'attaque, que s'est-il passé? Plus exactement, après le

 18   début des activités militaires et des tirs?

 19   R.    Il y a d'abord eu des tirs et à 5 heures et demie, le 9 juin,

 20   quatre personnes ont été tuées. D'autres ont été faits prisonniers. Les

 21   membres de l'armée de Bosnie-Herzégovine ont pratiquement capturé tout le

 22   monde: des femmes et des enfants et des vieillards. Alors que les hommes

 23   en âge de combattre étaient dans une autre maison. C'est là où nous sommes

 24   restés jusqu'au moment où nous avons été échangés. Les membres de l'armée

 25   de Bosnie-Herzégovine avaient monté des gardes et on ne pouvait pas


Page 19067

  1   sortir.

  2   Q.    Lorsque l'attaque a commencé, est-ce que l'approvisionnement en

  3   eau a subi des dégâts?

  4   R.    Mais tout ceci s'est passé en une seule journée comme je l'ai

  5   dit. Cebecici, Vodovod, Pecine, Ruda, tous ces villages ont été attaqués

  6   en une seule journée.

  7   Q.    Je comprends bien. Ne soyez pas nerveux, monsieur. Je voudrais

  8   savoir s'il est arrivé quoi que ce soit au système permettant

  9   l'approvisionnement du village en eau, au moment de l'attaque ou après?

 10   R.    Quand l'attaque a été lancée, la partie haute du village qui

 11   contient le réservoir de l'eau. C'est la raison pour laquelle à 5 heures

 12   et demie, on a fermé l'eau et on ne pouvait pas l'utiliser avant qu'on se

 13   remette.

 14   Q.    Est-ce que vous vous êtes rendus ou livrés? Ou bien avez-vous

 15   été capturés?

 16   R.    On a bien été obligés de se rendre. On nous a capturés, on ne

 17   pouvait rien faire.

 18   Q.    Vous avez dit avoir été détenus, Témoin DB. Cette détention,

 19   combien de temps a-t-elle duré à Senkovici?

 20   R.    Moi, je suis resté en prison 101 jours.

 21   Q.    Est-ce que vous vous souvenez du moment où vous avez fait

 22   l'objet d'un échange contre des détenus musulmans?

 23   R.    Moi, j'ai été arrêté le 17 septembre 1993.

 24   Q.    Vous avez été capturé ce jour-là ou libéré ce jour-là?

 25   R.    J'ai été relâché, mais c'est le 9 juin 1993 que j'ai été arrêté.


Page 19068

  1

  2

  3

  4

  5

  6

  7

  8

  9

 10

 11

 12

 13   Page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la

 14   pagination anglaise et la pagination française.

 15

 16

 17

 18

 19

 20

 21

 22

 23

 24

 25

 


Page 19069

  1   Excusez-moi. J'ai été échangé le 17 septembre 1993.

  2   Q.    Vous avez donc été placé en détention pendant 101 jours.

  3   Pourriez-vous dire aux Juges si vous avez été forcé à faire des travaux

  4   manuels, à des tâches de travaux forcés, obligatoires?

  5   R.    Tous ceux qui étaient capables et en bonne condition physique,

  6   nous avons été obligés de travailler. Il y avait les terres à labourer, il

  7   y avait du blé, du maïs, de l'orge. Il fallait labourer la terre.

  8   Ils nous ont forcés ensuite, également, à creuser les tranchées sur les

  9   lignes de front face aux Serbes, là où se trouvait Kamenjar. On a creusé

 10   des tranchées également face aux Serbes, comme je l'ai dit, pour le HVO,

 11   et puis, travaillé la terre, labouré la terre parce que le peuple croate

 12   était parti, il n'y avait personne pour travailler.

 13   Q.    Procédons de façon plus méthodique. Est-ce que vous avez été

 14   forcés de faire la récolte de vos propres terres et que le fruit de la

 15   récolte a dû être donné à ceux qui vous tenaient en captivité?

 16   R.    Oui, c'est cela.

 17   Q.    Et vous avez dit avoir dû creuser des tranchées sur la ligne de

 18   front vous opposant à l'armée des Serbes de Bosnie. Est-ce que ceci s'est

 19   passé à Ruda et Pecine?

 20   R.    C'était au-dessus de Ruda et de Pecine, et c'est un endroit

 21   dénommé Kamenjar.

 22   Q.    Bien. Quelle était votre situation personnelle? Avez-vous dû

 23   aussi creuser des tranchées ailleurs?

 24   R.    Oui, j'ai été forcé ainsi que deux autres jeunes hommes à

 25   creuser des tranchées. C'était la ligne de front qui séparait les Bosniens


Page 19070

  1   et le HVO. C'était à Novi Travnik et du côté de la tour, d'un bâtiment

  2   qu'on appelait la tour.

  3   Q.    Lui avait-on donné un nom, à cette tour d'habitation?

  4   R.    Je ne me souviens pas exactement si cette tour portait un nom.

  5   Mais je me souviens qu'elle se trouvait sur la route principale qui

  6   traversait Novi Travnik. Je ne sais pas comment dire, mais il y a une

  7   banque ou, plutôt, la comptabilité publique s'y trouvait: SDK.

  8   Q.    Lui avait-on donné le nom de Solitaire, Solitari? Cela vous

  9   rappelle-t-il quelque chose?

 10   R.    Oui, effectivement, Solitaire. Et au moment où on a creusé des

 11   tranchées, c'était pour que les Bosniens puissent s'emparer de ce bâtiment

 12   dénommé Solitaire. Ils nous ont demandé de creuser les tranchées pour

 13   permettre aux Musulmans de prendre le bâtiment dénommé Solitaire.

 14   Q.    J'aimerais que nous revenions à la période de détention que vous

 15   avez subie, Témoin DB. Pourriez-vous dire aux Juges si vous avez fait

 16   l'objet de mauvais traitements au cours de cette détention? Et si cela a

 17   été le cas, à combien de reprises cela s'est-il produit ?

 18   R.    Il y avait des gens qui ont été tués tous les jours. Monsieur

 19   Ismet Zec s'y rendait. Le membre de l'armée de Bosnie-Herzégovine, de la

 20   police militaire se rendait en permanence sur ces lieux. Il nous forçait à

 21   travailler. Il nous frappait, il nous passait à tabac. Et pas moi, mais

 22   d'autres également de mes collègues qui ont été arrêtés.

 23   Q.    Je crois que les femmes détenues dans le village étaient

 24   autorisées à préparer la nourriture pour vous. Mais est-ce que vous

 25   receviez suffisamment de nourriture ou pas?


Page 19071

  1   R.    Mais les quantités étaient limitées de toute façon. Les femmes

  2   pouvaient cuisiner, préparer la nourriture pour nous mais les gardes

  3   étaient devant, et tout dépendait de ce que les gardes permettaient. C'est

  4   donc la quantité que les gardes permettaient qu'elles nous donnaient.

  5   Q.    Au cours de votre détention, avez-vous perdu du poids?

  6   R.    Oui, j'avais 90 kilos et j'ai perdu 20 kilos. Je pèse 70 kilos.

  7   Q.    Un des témoins qui est venu déposer ici -nous sommes ici à la

  8   page 8120 du transcript- a dit qu'il était venu à Senkovici et que les

  9   femmes avaient toute liberté de déplacement et que le commandant local de

 10   l'armée de Bosnie-Herzégovine lui avait expliqué que le HVO avait

 11   abandonné ce village.

 12   Pourriez-vous dire aux Juges si ses dires sont exacts ou pas?

 13   R.    Ce n'est pas exact.

 14   Q.    Et pourquoi n'est-ce pas exact?

 15   R.    Les femmes et les enfants n'étaient pas libres, ne pouvaient pas

 16   circuler librement. Les femmes, les enfants étaient enfermés. Il y avait

 17   des gardes autour, on ne peut pas parler de libre circulation.

 18   Q.    Les autres témoins qui sont venus déposer ici dans ce procès

 19   venaient de Novi Travnik. Il s'agissait de la page 943 notamment et puis

 20   vous avez un numéro de page 7720 jusqu'à la page 7723, il s'agissait du

 21   témoin Q. Et ces personnes ont dit la chose suivante.

 22   Je voudrais Témoin DB que vous nous disiez si ce qu'ils ont raconté était

 23   exact puisque vous avez une connaissance personnelle de la question.

 24   Le témoin C a dit à la page 943: "Les villageois de Senkovici, les

 25   habitants croates ne voulaient pas quitter le village alors que les forces


Page 19072

  1   de la Défense territoriale s'y trouvaient."

  2   R.    Ce n'est pas exact.

  3   Q.    Le témoin Q, lui, s'est vu poser la question suivante: "Est-ce

  4   que le HCR des Nations Unies avait dressé une liste des civils croates du

  5   village de Senkovici?".

  6   La réponse donnée était la suivante: "Non, je ne suis pas d'accord avec ce

  7   que vous dites. C'étaient des gens qui vivaient dans leur propre foyer,

  8   cultivaient leur propre terre, vivaient avec leur famille dans leur propre

  9   demeure; et comme je l'ai dit hier la plupart de ces habitants ne

 10   souhaitaient pas faire l'objet d'un échange. C'était là le problème." Fin

 11   de citation.

 12   Est-ce que ces propos recèlent une quelconque vérité, puisque vous étiez

 13   sur place, vous deviez le savoir? Pourriez-vous dire ce qu'il en était aux

 14   Juges?

 15   R.    La Croix Rouge internationale et les représentants de la Croix

 16   Rouge se sont rendus sur place. Ils ont enregistré les femmes et les

 17   enfants. Et il n'est pas du tout exact que nous, on ne voulait pas partir.

 18   Ce n'est pas exact. Je ne sais pas comment dire mais, de toute façon, on a

 19   dressé les listes. C'est vrai, ce sont les représentants de la Croix-Rouge

 20   qui ont dressé ces listes.

 21   Q.    Et ce même témoin décrit la visite effectuée par un médecin, le

 22   docteur Stanko Kranjic, visite effectuée à votre village. Étiez-vous sur

 23   place au moment de cette visite?

 24   R.    Non. Moi, j'étais forcé de travailler à ce moment-là, quand le

 25   médecin s'est rendu sur place. Mais quand je suis rentré, quelqu'un m'a


Page 19073

  1

  2

  3

  4

  5

  6

  7

  8

  9

 10

 11

 12

 13   Page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la

 14   pagination anglaise et la pagination française.

 15

 16

 17

 18

 19

 20

 21

 22

 23

 24

 25

 


Page 19074

  1   dit que je ne sais qui avait mis un papier dans la poche de ce monsieur-là

  2   pour qu'il ne dise pas devant les autorités bosniennes que l'on

  3   souhaitait, nous, être échangés le plus tôt possible pour pouvoir nous

  4   sauver.

  5   Q.    Dernier point que j'aimerais aborder avec vous, du moins pour ce

  6   qui est de la déposition du témoin Q à la page 7723.

  7   Voici la question qui lui a été posée: "Nous parlions des habitants de

  8   Senkovici. Ces personnes étaient forcées de tenir les lignes de front les

  9   opposant à la fois aux Serbes et au HVO. Est-ce exact?"

 10   Voici ce que dit le témoin Q: "Ce n'est pas exact! Non, ce n'est pas

 11   vrai ; ce n'est pas vrai. Si je peux dire quelque chose, je peux dire que

 12   ces personnes étaient en bien meilleure position que beaucoup de Musulmans

 13   qui sont allés lutter sur le front puisque ces habitants se trouvaient

 14   dans leur propre village avec leur propre famille." Fin de citation.

 15   Qu'avez-vous à dire à ce propos, Témoin DB.

 16   R.    Premièrement, le village de Senkovici se trouvait dans une

 17   situation nettement moins bonne que des positions des Musulmans. Comment

 18   pouvions-nous être dans une bonne situation si nous sommes encerclés par

 19   des Bosniens? En plus, on a été forcés de creuser des tranchées sur les

 20   lignes de front.

 21   Que ce monsieur-là dise que ce n'était pas exact, c'est moi qui peux dire

 22   que lui ne dit pas vrai parce que nous, nous avons creusé des tranchées

 23   sur les lignes de front face aux Serbes et aux Croates.

 24   Q.    Par conséquent, monsieur, comment dire.. Vous n'êtes pas

 25   d'accord avec la version des faits que livre le témoin Q, alors que vous,


Page 19075

  1   vous étiez une des personnes qui avait été forcée d'aller creuser ces

  2   tranchées sur le front? Vous personnellement, n'est-ce pas ?

  3   R.    Moi, j'ai été forcé de creuser des tranchées face aux Serbes et

  4   face aux Croates. C'est la raison pour laquelle que je ne peux pas abonder

  5   dans le sens de ce monsieur-là.

  6   Q.    Qu'est-il advenu de votre maison, votre maison familiale à

  7   Senkovici?

  8   R.    Ma maison a été détruite ainsi que beaucoup d'autres ont été

  9   détruites, et personne ne peut y habiter. Il n'y a que des murs qui sont

 10   restés.

 11   Q.    Est-ce qu'il y a encore des Croates qui vivent aujourd'hui à

 12   Senkovici, à votre connaissance?

 13   R.    Non.

 14   Q.    Connaissez-vous un certain Dario Kordic?

 15   R.    Non. Je l'ai vu uniquement à la télévision. Une fois. Je ne le

 16   connais pas personnellement. C'est tout.

 17   Q.    Je vous remercie, Monsieur le Président. Je n'ai plus de

 18   question à poser à ce témoin.

 19               (Questions supplémentaires de M. Nice.)

 20   M. Nice (interprétation): J'aimerais poser quelques questions de

 21   vérification. Pourrions-nous le faire l'après-midi?

 22   M. le Président (interprétation): Oui, nous allons lever l'audience.

 23   Monsieur le témoin, ne parlez avec personne. Attendez pour cela de

 24   terminer votre déposition et ne laissez personne vous adresser la parole.

 25   Ceci inclut les membres de l'équipe de la défense. Je vous demande d'être


Page 19076

  1   de retour à l'audience à 14 heures 30.

  2         (L'audience, suspendue à 12 heures 59, est reprise à 14 heures 32.)

  3   M. Nice (interprétation): Témoin DB, vous avez dit n'avoir jamais eu de

  4   contact avec des représentants du Bureau du procureur de ce Tribunal. Est-

  5   ce bien exact?

  6   Témoin DB (interprétation): Je n'ai pas compris la question.

  7   Q.    Vous n'avez jamais parlé avec un quelconque des enquêteurs

  8   travaillant au Bureau du procureur de ce Tribunal ?

  9   Témoin DB (interprétation): Oui, j'ai parlé avec des gens qui sont du

 10   Bureau du Procureur.

 11   Q.    Quand ceci s'est-il passé" ?

 12   R.    C'était au mois de décembre, en Bosnie. Il y avait de la neige.

 13   C'était en Bosnie centrale.

 14   Q.    Est-ce que cette entrevue a mené à la préparation d'une

 15   déclaration préalable de témoin, par exemple?

 16   R.    Je n'ai encore pas compris la question. Voulez-vous me le dire

 17   distinctement pour que je puisse vous comprendre?

 18   Q.    Vous avez fourni une déclaration écrite?

 19   R.    Oui.

 20   Q.    Il se peut que le témoin fasse une confusion entre le Bureau du

 21   procureur et une autre instance, car j'allais vous dire ceci, Témoin DB.

 22   Je ne suis pas en mesure d'accepter les détails que vous avez fournis

 23   s'agissant des mauvais traitements allégués, mais ce que je peux accepter,

 24   c'est le fait qu'on vous ait cité en tant que victime dans une plainte

 25   déposée devant le tribunal de Travnik, ceci concernant un monsieur


Page 19077

  1   répondant au nom de Atif Haskic; ceci se serait passé en 1996. M'avez-vous

  2   compris, monsieur?

  3   R.    Non, je ne comprends rien. Je ne sais pas ce que vous voulez

  4   dire au sujet de Latif Haskic. J'ai compris le nom, mais je ne sais pas ce

  5   que vous voulez de moi.

  6   Q.    Je vais peut-être prendre le problème d'un autre côté, après

  7   cette dernière tentative. Avez-vous parlé avec des enquêteurs,

  8   éventuellement des enquêteurs situés en Bosnie ? Avez-vous parlé d'un

  9   certain Atif Haskic, en 1996?

 10   R.    Atif Haskic est de mon village.

 11   Q.    Bien. Il y a des choses que je ne veux contester, mais sur

 12   lesquelles je ne suis pas d'accord. Pour ce faire, je dois consulter des

 13   documents dont nous disposons. Je n'ai pas de document venant du Bureau du

 14   procureur mais, apparemment, on a dépassé des plaintes à son encontre à

 15   propos du fait que des tranchées aient été creusées, qu'il y avait eu des

 16   interrogatoires, tout ceci aussi à propos du fait d'avoir incendié des

 17   maisons en 1996.

 18   Il serait peut-être utile pour chacun d'entre nous que nous examinions une

 19   carte. Il s'agira la pièce 1960.2.

 20   Je crois que vous pouvez regarder la carte sur l'écran, Témoin DB ?

 21   R.    Oui.

 22   Q.    Ceci nous sera utile, car nous ne connaissions pas bien la

 23   région. Nous verrons que Senkovici se trouve dans le coin inférieur gauche

 24   de la carte, alors que Novi Travnik ou Pucarevo se trouvent à droite. Et

 25   il est malaisé de le voir, mais si vous prenez la route allant de


Page 19078

  1

  2

  3

  4

  5

  6

  7

  8

  9

 10

 11

 12

 13   Page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la

 14   pagination anglaise et la pagination française.

 15

 16

 17

 18

 19

 20

 21

 22

 23

 24

 25


Page 19079

  1   Senkovici vers Pucarevo, on trouve un autre petit village qui porte le nom

  2   de Tore. Est-ce exact ?

  3   R.    Senkovici se trouve dans la partie basse, là où c'est marqué

  4   Pucarevo ; il y a d'abord Bratstvo, Patornje et ensuite Senkovici.

  5   Q.    Je vois que ce n'est pas très bien délimité, bien indiqué. Je

  6   n'ai pas pu retrouver les villages de Vodovod et Pecine. On va vous

  7   remettre un pointeur; le voici. Vous devez rester là, car il ne faut pas

  8   que les traits de votre visage apparaissent sur l'écran; il ne faut pas

  9   que ce soit filmé. Je vais vous demander de rester à votre place et de

 10   nous indiquer où se trouveraient ces villages. Vous pouvez plutôt vous

 11   reposer sur votre dossier pour ne pas être vu par les caméras.

 12               (Le témoin montre à l'aide du pointeur.)

 13   Q.    Ce n'est pas sur la carte, c'est cela? Ce n'est pas vraiment un

 14   village voisin, adjacent?

 15   R.    Ici, il y a Donje Pecine, Gornje Pecine, et puis Ruda. Oui,

 16   quelque chose comme ça, mais je ne vois pas très clair.

 17   Q.    Ce n'est pas tellement important, je voulais simplement être

 18   complet. Voici comment se présente la situation. Vous faisiez partie des

 19   Domobrani; avez-vous été autre chose dans l'armée? R.      Non.

 20   Q.    Même après l'échange, vous n'avez pas participé aux combats?

 21   R.    Oui.

 22   Q.    Et à quel titre?

 23   R.    Je n'ai pas compris.

 24   Q.    Après les combats,… Je m'excuse. Après que vous ayez fait

 25   l'objet d'un échange, vous avez dit avoir participé aux combats mais à


Page 19080

  1   quel titre?

  2   R.    Il fallait que je défende ma famille, mes enfants, mon épouse.

  3   Je vous ai dit que j'ai été dans les rangs de cette unité de Domobrani.

  4   Q.    Très bien. Vous connaissez cette tour d'habitation de Novi

  5   Travnik?

  6   R.    Excusez-moi, mais je ne vous ai toujours pas entendu.

  7   Q.    Il s'agit de cette tour.

  8   R.    Solitaire, c'est une tour. Mais excusez-moi, je ne comprends

  9   plus, je ne sais pas ce que monsieur veut dire. Enfin on ne se comprend

 10   pas.

 11   Q.    Je vérifiais simplement pour voir si vous connaissiez bien ce

 12   bâtiment. Voici ma prochaine question: lorsque vous avez été détenu à

 13   Senkovici, est-ce que vous obteniez des informations de l'extérieur? Est-

 14   ce que vous receviez des rapports sur ce qui se passait ailleurs et en

 15   particulier à Novi Travnik?

 16   R.    Non.

 17   Q.    Vous avez reçu la visite de la Croix-Rouge de temps à autres

 18   ainsi que d'autres personnes. Est-ce que ceux qui vous rendaient visite ne

 19   vous ont pas parlé de ce qui se passait à Novi Travnik?

 20   Témoin DB (interprétation): Nous avons travaillé, ceux qui étaient

 21   capables de travailler. Monsieur le Président, Messieurs les Juges, tout à

 22   l'heure, j'ai dit un certain nombre de choses, mais je vais les répéter.

 23   Il y avait les représentants de la Croix-Rouge et, soi-disant, nous ne

 24   voulions pas partir. Ce n'est pas vrai parce que moi, j'ai mon papier sur

 25   lequel j'ai bien marqué que je voulais partir.


Page 19081

  1   Q.    Oui, il se peut que vous ayez travaillé mais, lorsque vous

  2   receviez des visites d'organisations internationales, comme celles de la

  3   Croix-Rouge ou des observateurs européens, si ces personnes s'adressaient

  4   aux femmes ou aux enfants, je suppose qu'au cours de la journée et plus

  5   tard, on vous aurait informés de ce que ces personnes avaient dit à

  6   d'autres. Vous receviez des informations des observateurs ou de la Croix-

  7   Rouge? C'est du moins la question que je vous pose: vous ont-ils parlé de

  8   ce qui se passait à Novi Travnik?

  9   R.    Ecoutez. Nous n'avons pas eu de contact avec nos femmes et

 10   enfants. Nous étions enfermés dans une maison et nous avons été forcés de

 11   travailler. On n'avait absolument pas de contact sauf au moment des repas.

 12   C'étaient les deux maisons séparées. Il y avait des gardes.

 13   Q.    Je vais vous demander, monsieur, d'examiner cette photographie.

 14   Ceci va peut-être vous rafraîchir la mémoire. Il s'agit d'un homme qui

 15   porte le nom de Morsink. Je vais vous poser une question à son propos,

 16   mais d'abord examinez la photographie: c'est un visage qu'on n'oublie pas

 17   facilement. Vous souvenez-vous de ce visage?

 18   R.    Je ne me souviens pas de ce visage. Je ne le connais pas.

 19   Q.    Peut-on maintenant examiner la pièce 1085?

 20   Ce document est rédigé en anglais, Témoin DB. Je ne vais pas vous demander

 21   de le lire parce que je ne pense pas que vous parliez l'anglais.

 22   Seulement, il va être posé sur le rétroprojecteur afin que le reste de

 23   l'assemblée puisse en prendre connaissance.

 24                     (L'huissier s'exécute.)

 25   Ceci uniquement pour vous informer du fait que c'est un rapport rédigé par


Page 19082

  1   l'homme dont nous venons de voir la photographie. C'est le 20 juin qu'il a

  2   fait ce rapport dans lequel il a parlé de ce qui se passait dans votre

  3   village. Nous sommes vers le milieu de la page et il dit: "Dans le village

  4   de Senkovici, 187 Croates continuent de vivre avec les Musulmans." Est-il

  5   exact de dire qu'il y avait environ 187 Croates?

  6   R.    Je ne connais pas le chiffre mais ce n'est pas vrai, ce n'est

  7   pas qu'ils vivaient comme cela.

  8   Q.    Le rapport se poursuit, afin que vous puissiez lire tous les

  9   détails et les comprendre. "Tous les hommes croates de 20 à 50 ans étaient

 10   gardés dans cinq maisons; les femmes et les enfants pouvaient circuler

 11   librement". C'est du moins ce que cet homme a constaté le 20 juin.

 12   R.    Ce n'est pas exact. Absolument pas.

 13   Q.    Vous nous avez d'abord dit que tous les hommes étaient détenus

 14   dans une maison, c'est bien cela?

 15   R.    Oui, nous étions tous détenus dans une seule et même maison.

 16   Q.    Les femmes et les enfants pouvaient-ils circuler librement dans

 17   le village?

 18   R.    Les femmes et les enfants étaient détenus dans les trois maisons

 19   et il y avait des gardes autour de ces trois maisons. Par conséquent, ils

 20   ne pouvaient pas sortir des maisons.

 21   Q.    Monsieur Morsink continue son rapport. Il dit: "Il n'y a pas eu

 22   plainte". Ceci dès le 20 juin 1993: il n'y a pas eu de plainte.

 23   Etes-vous au courant du fait qu'un membre de la communauté internationale

 24   soit venu dans votre village et que les Croates n'aient pas formulé de

 25   plaintes auprès de lui?


Page 19083

  1

  2

  3

  4

  5

  6

  7

  8

  9

 10

 11

 12

 13   Page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la

 14   pagination anglaise et la pagination française.

 15

 16

 17

 18

 19

 20

 21

 22

 23

 24

 25

 


Page 19084

  1   R.    Non, ce n'est pas vrai.

  2   Q.    On pourrait arguer du fait, on pourrait suggérer que ceux qui

  3   vous gardaient capturés, que les Musulmans qui vous tenaient en captivité

  4   vous forçaient à ne pas manifester de plainte. Mais vous rappelez-vous de

  5   telles circonstances?

  6   R.    Non, non absolument pas.

  7   Q.    Et puis, il poursuit. Il dit: "Tous les civils se sentent mal à

  8   l'aise, dans une situation d'insécurité à cause des tirs indirects

  9   d'artillerie des Serbes". Ce serait exact là, n'est-ce pas?

 10   R.    Je ne sais pas. Pourriez-vous m'expliquer ce que vous voulez que

 11   je vous réponde et quelle est la réponse que vous souhaitez de moi?

 12   Q.    D'accord, cet homme dit que les civils sont dans un état

 13   d'anxiété du fait des tirs d'artillerie des Serbes. Est-ce que cela serait

 14   exact à votre avis?

 15   R.    Mais comment voulez-vous que cela se passe comme cela alors que

 16   les Bosniens pouvaient circuler librement d'un côté et qu'ils sont tout

 17   autour de Senkovici, alors que les Croates sont tout d'un coup en danger

 18   et pas les Bosniens? Je ne comprends pas.

 19   Q.    Ceci est rédigé le 20 juin, et je vous demande si vous aviez

 20   tous peur à cause des tirs d'artillerie décochés par les Serbes?

 21   R.    A ce moment-là, on vous force de creuser, de travailler. Vous ne

 22   pensez pas à autre chose. Vous êtes bien obligés de travailler.

 23   Q.    Puis il parle des habitants du village. Il dit: "Au moment où il

 24   a rendu visite à ce village, il y a eu cinq obus qui sont tombés."

 25   Est-il juste de dire qu'il y avait de temps à autre des obus qui tombaient


Page 19085

  1   dans le périmètre du village?

  2   R.    Je ne me souviens pas de cela.

  3   Q.    Apparemment ces tirs étaient dirigés sur la mosquée du village.

  4   Vous vous en souvenez, vous avez dit que cette mosquée servait un peu de

  5   ligne de délimitation entre la partie croate et la partie musulmane du

  6   village. Vous souvenez-vous de ces pilonnages?

  7   R.    Non.

  8   Q.    "La partie du village où vivent aujourd'hui les civils, y

  9   compris les Croates, n'a pas été ciblée depuis que le HVO s'est rendu sur

 10   la ligne avec les Serbes". Donc, ce qu'il dit ici, c'est que dans ce

 11   village où vous habitiez, tout le monde et surtout les civils n'avaient

 12   pas été ciblés depuis que le HVO s'était dirigé vers la ligne de front

 13   avec les Serbes. Est-il exact de dire que vos maisons n'ont pas été la

 14   cible de pilonnages pendant votre détention?

 15   R.    Je ne peux pas me souvenir exactement de cela. Et puis, une fois

 16   de plus, je ne comprends pas tout à fait bien votre question.

 17   Q.    J'en suis désolé. J'en suis tout à fait responsable si c'est le

 18   cas.

 19   Les maisons où vous et vos familles étaient gardées en détention n'ont pas

 20   été pilonnées, c'est-à-dire n'ont pas été la cible des obus et ceci au

 21   cours du mois de juin 93. Est-ce exact?

 22   R.    J'avoue que je ne sais pas de quel pilonnage vous parlez. Nous

 23   avons été détenus. Je ne peux pas comprendre que vous me posiez une

 24   question pareille. On a été détenus. De quel pilonnage parlez-vous?

 25   Q.    Je ne vais pas importuner la Chambre si vous n'êtes pas en


Page 19086

  1   mesure de comprendre. Je suppose que vous ne vous souvenez d'aucun

  2   pilonnage.

  3   R.    A partir du moment où le peuple bosnien nous a capturés,

  4   arrêtés, il y avait des Bosniens qui étaient à côté, 500 mètres de

  5   distance par rapport à nous.

  6   Q.    Je peux vous rassurer. Je ne veux plus vous poser beaucoup de

  7   questions. Parlons de la visite du médecin, un certain Kranjic. Vous vous

  8   souvenez de cette personne?

  9   R.    Je ne me souviens pas de ce médecin. J'ai été forcé d'aller

 10   travailler.

 11   Q.    De toute façon, je vais demander de votre part un commentaire

 12   sur cette idée-ci que je vous soumets: c'était un Croate, cet homme,

 13   n'est-ce pas? Connaissez-vous le nom du médecin?

 14   R.    Non. Je ne me souviens pas.

 15   Q.    Est-ce que les femmes de vos familles vous ont dit, avant que

 16   n'ait lieu l'échange le 29 septembre, vous ont-elles dit qu'un médecin

 17   croate avait passé un coup de fil ou qu'il était venu et qu'à la suite de

 18   sa visite, vous étiez censés faire l'objet d'un échange?

 19   R.    Moi, je n'étais pas sur place au moment où le médecin s'était

 20   rendu sur place. Paraît-il qu'il y avait une personne âgée qui avait mis

 21   un bout de papier dans la poche de ce médecin sur lequel il avait marqué

 22   qu'éventuellement, on aurait pu être échangés.

 23   Q.    Manifestement, vous vous souvenez de quelque chose à propos de

 24   ce médecin. Je vous fais valoir ceci: il y a eu deux réunions.

 25   R.    Non, ce n'est pas moi. En mon absence, il y était. Nous avons


Page 19087

  1   travaillé tous les jours et par conséquent, il a fallu creuser -comme je

  2   l'ai dit- des tranchées. Il y avait des Bosniens qui étaient autour de

  3   nous.

  4   Q.    Il est venu rendre visite en compagnie d'un Musulman et, lors de

  5   la première réunion, les Croates habitant votre village ont dit vouloir

  6   rester. Il y a eu une seconde réunion avec le médecin, mais cette fois-ci,

  7   il était seul. Il n'y avait que des Croates à cette réunion. A la suite de

  8   cette réunion, les gens ont dit qu'ils voulaient partir. Est-ce que votre

  9   famille vous a parlé de cela?

 10   R.    Ce n'est pas exact. Il n'est pas exact que l'on a pas voulu être

 11   échangés. Au contraire, on avait demandé à être échangés le plus tôt

 12   possible, car les conditions de vie étaient nulles. Il n'y avait pas de

 13   conditions de vie ni pour les femmes ni pour les enfants. Celui qui est

 14   arrivé avec les Bosniens n'avait peut-être pas osé le dire, car il ne faut

 15   pas oublier qu'on a été obligés de faire la récolte. Il fallait également

 16   ensuite donner tout au peuple bosnien alors qu'il ne nous restait

 17   absolument rien. On n'avait même pas de quoi manger.

 18   Q.    Je n'ai plus que trois ou quatre questions tout au plus à vous

 19   poser. Votre village et celui Tore étaient parmi les rares villages où il

 20   y avait une majorité de Musulmans dans la population et où les Croates

 21   auraient insisté pour rester au début du conflit en juin 93. Est-ce que

 22   cela est exact, monsieur?

 23   R.    Avant le conflit, on habitait ce territoire. Mais quand

 24   l'attaque a été lancée le 9 juin, il n'y avait plus de conditions de vie

 25   indispensables. Senkovici a été encerclée par des Musulmans. On ne pouvait


Page 19088

  1

  2

  3

  4

  5

  6

  7

  8

  9

 10

 11

 12

 13   Page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la

 14   pagination anglaise et la pagination française.

 15

 16

 17

 18

 19

 20

 21

 22

 23

 24

 25

 


Page 19089

  1   même pas sortir. Tore, c'est pareil.

  2   Q.    Vous, les Croates, vous étiez prêts à rester, à continuer à

  3   vivre dans ce village, et ceci jusqu'en septembre, même si les conditions

  4   étaient très dures ou très pénibles. Il y avait quand même un avantage à

  5   rester dans ce village: vous n'étiez pas obligés de participer aux grands

  6   combats, aux combats d'envergure qui se déroulaient?

  7   R.    On ne voulait absolument pas rester sur place. Vous ne pouviez

  8   pas rester avec les Bosniens: on vous force de travailler. Vous ne pouvez

  9   pas circuler librement. Comment voulez-vous rester?

 10   Q.    A un moment donné, on doit vous avoir dit que les Croates

 11   essayaient de s'emparer de la tour appelée "solitaire" à Novi Travnik et

 12   qu'il y a eu des tractations qui se sont soldées par ceci: ils étaient

 13   prêts à libérer les personnes qui se trouvaient enfermées dans cette tour,

 14   des Musulmans, pour autant que les Croates de votre village et du village

 15   voisin de Tore soient autorisés à s'installer dans une zone croate. Etait-

 16   ce bien là l'objet des discussions et des tractations?

 17   R.    Excusez-moi. Voulez-vous répéter cette question?

 18   Q.    L'idée, c'était que les Croates de Novi Travnik voulaient

 19   prendre possession de la tour appelée "solitaire". Je pense qu'il y avait

 20   quelque chose comme 50 personnes qui habitaient dans cette tour. Ils

 21   voulaient s'emparer de cette tour et, pour ce faire, ils étaient prêts à

 22   échanger les Musulmans qui s'y trouvaient contre le fait que les Croates

 23   qui habitaient dans cette région tenue par les Musulmans soient forcés à

 24   sortir pour s'installer dans une zone croate.

 25   R.    Je ne suis pas au courant de cela. Comme je l'ai dit, j'étais


Page 19090

  1   détenu et je ne pouvais pas apprendre des informations de tel type.

  2   Q.    Merci, je n'ai plus de question à poser à ce témoin.

  3   M. Sayers (interprétation). - Je n'ai pas de question supplémentaire,

  4   Monsieur le Président.

  5   M. le Président (interprétation): Témoin DB, merci d'être venu déposer

  6   devant le Tribunal pénal international. Vous avez terminé votre déposition

  7   et vous pouvez disposer.

  8   Témoin DB: Merci Monsieur le Président.

  9               (Le témoin DB est reconduit hors du prétoire.)

 10                     (Questions administratives.)

 11   M. le Président (interprétation): Maître Nice, pouvons-nous d'abord parler

 12   des affidavits et des pièces à conviction? Espérons que nous allons

 13   pouvoir résoudre ceci cet après-midi.

 14   M. Nice (interprétation): Je suis un peu dans l'embarras, Monsieur le

 15   Président, car j'avais préparé la situation en matière d'affidavits pour

 16   demain. Plus exactement, je n'avais pas encore étudié cette question. Il y

 17   a une question générale toutefois que je voulais soulever. Permettez-moi

 18   de l'aborder dès maintenant.

 19   Il faudra d'abord étudier de façon préliminaire la situation qui est la

 20   nôtre. Vous le savez, Messieurs les Juges, la défense, s'agissant des

 21   affidavits et ceci de façon générale, a fait valoir qu'il y a un article

 22   qui régit ces déclarations faites sous serment et que cet article du

 23   Règlement est à interpréter comme signifiant que, si la partie adverse

 24   fait une objection au dépôt au dossier d'un affidavit, soit on appellera

 25   le témoin à la barre, soit on ne pourra utiliser comme pièce à conviction


Page 19091

  1   un tel affidavit. C'est du moins ce que nous a dit la défense à

  2   l'audience.

  3   C'est une position assez catégorique qu'ils ont affichée, que ce soit ici

  4   ou sous forme de documents qui vous ont été remis. Donc, je suppose qu'ils

  5   ne vont pas changer d'avis.

  6   M. le Président (interprétation): Je ne sais pas si c'est de cette façon-

  7   là que ceci a été interprété. C'est en tout cas là une interprétation

  8   assez nouvelle.

  9   Examinons le Règlement. L'article dit "qu'une telle déclaration sous

 10   serment est recevable"; puis il y a certaines conditions qui sont

 11   supposées : "il faut qu'elle soit déposée avant la déposition du témoin

 12   cité à comparaître et si la partie adverse ne s'y oppose pas dans les sept

 13   jours de la déposition du témoin à travers lequel des déclarations sous

 14   serment sont soumises.

 15   Si la partie adverse s'y oppose, dit l'article, et si la Chambre accueille

 16   cette objection ou si la Chambre l'ordonne, les témoins seront cités pour

 17   contre-interrogatoire."

 18   Ce n'est peut-être très très clair.

 19   M. Nice (interprétation): Je ne veux pas ici lancer un débat de polémique

 20   sur l'interprétation possible à donner. Nous connaissons l'interprétation

 21   que vous avez retenue à la suite de la décision que vous avez prise devant

 22   les demande d'affidavits du procureur. C'est cette même position que nous

 23   faisons nôtre.

 24   Le problème est plutôt d'ordre pratique. C'est comme ceci qu'il se

 25   présente: étant donné la position assez catégorique et péremptoire adoptée


Page 19092

  1   par la défense à chaque fois que je reçois de sa part une déclaration sous

  2   serment, je pourrais dire, s'agissant de chacune de ces déclarations sous

  3   serment: "Nous nous y opposons". Car, selon leur interprétation, il

  4   devrait citer le témoin à la barre, sinon cela voudrait dire que la

  5   déclaration sous serment serait retirée. Loin de moi l'intention de

  6   formuler de telles objections, du moins sur cette base; ce ne serait pas

  7   une mesure d'économie judiciaire.

  8   M. Bennouna : Maître Nice, je crois que le texte est clair. J'ai bien

  9   suivi l'élaboration de ce texte et son libellé est clair.

 10   "Le dernier mot en matière d'opposition d'admission des affidavits, des

 11   déclarations sous serment revient à la Chambre." C'est clair et net.

 12   Vous avez tout à fait le droit d'objecter à une déclaration sous serment,

 13   mais il faudrait encore -c'est ce qui est dit ici- que la Chambre

 14   accueille votre objection, si elle l'accepte, à ce moment-là, il faut que

 15   le témoin vienne ici et comparaisse pour le contre-interrogatoire. Mais

 16   c'est la Chambre qui décide. Mais c'est à vous de soulever l'objection, si

 17   vous voulez.

 18   Maintenant la Chambre peut l'ordonner "proprio motu", c'est-à-dire d'elle-

 19   même.

 20   Ce sont les deux cas de figure. Il ne faut pas dire qu'il vous appartient

 21   d'objecter et tout simplement que la Chambre aurait une sorte de

 22   compétence liée, c'est-à-dire qu'elle doit suivre votre objection dans

 23   tous les cas. Ce n'est pas exact, ce n'est pas le texte.

 24   Maintenant, c'est votre droit, c'est même votre responsabilité de faire

 25   les objections qui vous semblent nécessaires pour des raisons que vous


Page 19093

  1

  2

  3

  4

  5

  6

  7

  8

  9

 10

 11

 12

 13   Page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la

 14   pagination anglaise et la pagination française.

 15

 16

 17

 18

 19

 20

 21

 22

 23

 24

 25

 


Page 19094

  1   devez expliquer à la Chambre. C'est ce qu'on a attend de vous aujourd'hui.

  2   Il nous appartient de décider à partir des raisons que vous aurez

  3   soumises, des raisons à l'appui de vos objections. Nous vous écouterons,

  4   nous écouterons également la défense, bien sûr, et il appartient toujours

  5   à la Chambre de décider.

  6   C'est clair. Cela n'a pas besoin d'interprétation; un texte clair n'a pas

  7   besoin d'être interprété.

  8   M. Nice (interprétation): Je suis de d'accord avec vous, Monsieur le Juge.

  9   Je n'aurais pas soulevé une telle question si la défense n'adoptait pas

 10   une position difficile. Je vous pose cette question parce qu'il faut

 11   surmonter un petit problème d'ordre pratique.

 12   Je suis tout à fait d'accord avec vous, Monsieur le Juge Bennouna. Ce qui

 13   devrait se passer, ce qui se passerait, c'est que s'il y a signification

 14   d'une déclaration sous serment, nous disons qu'il n'y a pas objection ou

 15   qu'il a objection pour telle ou telle raison; alors, la partie adverse -en

 16   l'occurrence, la défense- participerait au débat et nous ferait valoir

 17   pourquoi il faudrait accueillir cette déclaration sous serment et la

 18   Chambre statuerait.

 19   Ce qui me préoccupe, c'est la position adoptée par la défense: parce que

 20   la défense ne voudrait pas qu'il y ait problème ou déni de justice,

 21   qu'elle appellerait une mauvaise interprétation du Règlement, la défense

 22   ne va peut-être pas vouloir participer à débats ou à des plaidoiries à

 23   partir de cette interprétation parce qu'elle croit peut-être que cette

 24   interprétation présente des failles.

 25   J'essaie de voir ces arguments des deux côtés. A moins, bien sûr, que la


Page 19095

  1   Chambre ne participe davantage qu'elle ne souhaiterait le faire, je ne

  2   pense pas que nous allons vider la question.

  3   M. Nice (interprétation): Je pense qu'on pourrait être tout à fait

  4   équitables et la justice tout à fait respectée: on nous présente ces

  5   déclarations sous serment et à nous de décider s'il faut appeler le témoin

  6   en question pour contre-interrogatoire ou pas.

  7   C'est du moins comme cela que j'interprète la situation.

  8   M. le Président (interprétation): Je sais bien que ce n'est pas un

  9   argument que vous faites valoir vous, mais je pense qu'il ne présente

 10   aucune difficulté. La façon la plus simple pour gérer la question, c'est

 11   de le faire par lot plutôt que d'aborder chacune des déclarations sous

 12   serment: je pense que nous allons le faire par lot de douze.

 13   Mais vous n'êtes prêt à le faire aujourd'hui, monsieur Nice?

 14   M. Nice (interprétation): J'avais prévu cela pour demain matin,

 15   malheureusement.

 16   M. le Président (interprétation): Il faudrait réfléchir.

 17   Maître Sayers, éprouvez-vous des difficultés à suivre la suggestion qui a

 18   été faite?

 19   M. Sayers (interprétation): Oui. Nous avons le sentiment, comme vous

 20   l'aurez constaté, Messieurs les Juges, que l'article semble apparemment

 21   clair en imposant des délais, en disant à quel moment les conseils doivent

 22   soumettre leurs déclarations sous serment, en expliquant que ce dépôt doit

 23   se faire avant la comparution d'un témoin; c'est précisément ce que nous

 24   avons fait. C'est témoin par témoin qu'il faut procéder à l'analyse.

 25   Je crois que si l'on étudie tout ceci par lot, par jeu de documents,


Page 19096

  1   l'accusation bénéficiera d'un avantage qui ne nous a jamais été accordé

  2   lorsque l'accusation a déposé des affidavits, selon nous, en violation de

  3   ce Règlement.

  4   J'ai le sentiment que la meilleure marche à suivre, qui sera assez rapide

  5   aussi parce que nous n'avons soumis que des déclarations sous serment très

  6   courtes, portant sur des faits précis, à l'appui de certains éléments de

  7   témoins venus ici comparaître -je ne vois pas que ceci prenne beaucoup de

  8   temps-, il suffit de consacrer à peine 5 minutes à un tel examen, étant

  9   donné qu'il faudra de toute façon appeler la personne en question pour

 10   contre-interrogatoire. Tout cela semble assez simple.

 11   M. le Président (interprétation): Mais quel serait le préjudice subi si

 12   l'on abordait cette question par lot de documents? Ce serait quand même

 13   beaucoup plus facile que si l'on ventilait les éléments de preuve ou les

 14   dépositions des témoins pour étudier à chaque fois une déclaration sous

 15   serment. Notre position est ce qui est consigné dans le Règlement et je

 16   crois que c'est une application assez aisée.

 17   Décision majoritaire: nous avons décidé de parcourir les étapes de la

 18   procédure. Nous allons donner des décisions, déclaration sous serment par

 19   déclaration sous serment.

 20   Vous n'êtes pas prêt aujourd'hui, Monsieur Nice?

 21   M. Nice (interprétation): J'ai bien peur que non, Monsieur le Président,

 22   et je ne le suis pas parce que je voudrais pouvoir faire opposition à un

 23   nombre limité de telles déclarations.

 24   Je ne sais pas si je vais présenter des objections, mais je pense qu'il

 25   faut que je discute de la question avec tous ceux qui peuvent m'aider


Page 19097

  1   avant de pouvoir décider définitivement.

  2   M. Robinson (interprétation): J'aimerais vous rappeler, Monsieur Nice, que

  3   vous devez respecter le Règlement tel qu'il est libellé. Vous avez un

  4   délai dans lequel vous pouvez présenter vos objections.

  5   J'ai le texte en français mais j'espère que c'est le même texte en

  6   anglais; il s'agit du 94 ter. Il y est dit qu'il faut que vous vous

  7   opposiez dans les 7 jours, dans un délai de 7 jours de la déposition du

  8   témoin. En d'autres termes, vous avez une clarté dans le texte et nous

  9   serons tout à fait rigoureux dans l'application et le respect de cet

 10   article. Aussi pour ce qui est du délai permis, si vous voulez soulever

 11   une objection, vous le faites certes mais au plus tard dans les 7 jours

 12   qui suivent la déposition du témoin. Un point c'est tout.

 13   Si vous vous opposez, cela signifie que votre intervention sera brève. Il

 14   faudra que vous expliquiez aux Juges pourquoi vous voulez procéder au

 15   contre-interrogatoire de tel ou tel témoin, et ceci n'a rien à voir avec

 16   la recevabilité de la déclaration sous serment en tant que telle. Ceci

 17   porte uniquement sur le fait de la présence du témoin aux fins de contre-

 18   interrogatoire. C'est un droit que vous avez, mais il vous incombe à vous

 19   de présenter une objection. Mais dans les délais.

 20   M. Nice (interprétation): J'avais demandé un délai.

 21   M. le Président (interprétation): Qui vous a été accordé.

 22   M. Nice (interprétation): C'est vrai mais vous savez que du côté pratique,

 23   il n'est pas toujours facile de glaner toutes les informations nécessaires

 24   avant d'arrêter une position définitive. Ceci peut avoir pour conséquence

 25   que je vais plus souvent objecter que je ne le voudrais. Mais il faudra


Page 19098

  1

  2

  3

  4

  5

  6

  7

  8

  9

 10

 11

 12

 13   Page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la

 14   pagination anglaise et la pagination française.

 15

 16

 17

 18

 19

 20

 21

 22

 23

 24

 25

 


Page 19099

  1   peut-être aussi que je présente des objections par prudence, ne serait-ce

  2   que pour retirer cette objection par la suite.

  3   Voilà quelle est ma position, et je vous remercie de nous avoir accordé ce

  4   délai jusqu'à la fin de cette semaine.

  5   M. le Président (interprétation): J'aimerais savoir aussi si la décision

  6   que vous demandez d'être entendus demain est acceptée ou pas?

  7               (Les Juges se consultent sur le siège.)

  8   M. le Président (interprétation): Monsieur Nice, nous vous écouterons

  9   demain, je pense, à partir de 9 heures 30. Nous n'aurons pas besoin d'un

 10   temps très long pour traiter de cette question. Qu'en est-il des pièces à

 11   conviction, monsieur Nice?

 12   M. Nice (interprétation): Les pièces à conviction est un sujet dont je

 13   peux traiter dans l'immédiat, cela ne fait aucun doute, sous réserve de

 14   l'importance institutionnelle de cette question et des informations que

 15   j'ai reçues de l'institution.

 16   J'ai sous les yeux un rapport qui est un projet de rapport. Je n'ai pas

 17   encore eu le temps de le lire en détail, mais je pense que, quand je

 18   l'aurai lu, je verrai qu'il ne fait que reprendre des éléments déjà

 19   examinés, mais détaillés davantage que par le passé.

 20   Tout cela pour vous dire que j'aimerais voir ce document et tenir compte

 21   de toutes les personnes qui souhaitent participer physiquement à la

 22   discussion. Pour être bref, en quelques mots, et ce sera peut-être utile

 23   que je vous dise ce qui suit: le centre principal d'intérêt de cette

 24   institution a changé avec le temps. Rappelons-nous le premier procès,

 25   celui de Tadic, au cours duquel un grand nombre de documents originaux ont


Page 19100

  1   été produits.

  2   La situation est différente aujourd'hui, car il n'arrive pratiquement

  3   jamais que des documents originaux soient produits à l'intention des Juges

  4   quelle que soit l'affaire à laquelle l'on pense.

  5   Revenons par exemple sur deux affaires que vous connaissez sans doute très

  6   bien, Monsieur le Président, Messieurs les Juges. Monsieur le Président,

  7   vous siégiez dans l'affaire Dokmanovic, n'est-ce pas?

  8   M. le Président (interprétation): Oui, je siégeais dans l'affaire

  9   Dokmanovic mais je ne savais pas que les pièces à conviction étaient

 10   conservées selon les modalités que vous venez d'indiquer.

 11   M. Nice (interprétation): Eh bien, j'ai des procès-verbaux de ces

 12   audiences que je pourrais présenter le cas échéant, mais je crois que la

 13   question a été traitée et qu'une concession a été accordée à l'époque, à

 14   savoir que des copies pourraient être utilisées en lieu et place des

 15   originaux. Et c'est ce qui a été fait dans la majorité des cas.

 16   La même chose pour l'affaire Kupreskic. Je crois que toutes les pièces à

 17   conviction versées au dossier étaient des copies. Un seul document a été

 18   produit dans le prétoire, exactement selon les mêmes modalités que le

 19   document produit hier ici. Je crois qu'il s'agissait d'un registre du HVO,

 20   si ma mémoire est bonne. En effet, le témoin souhaitait examiner ce

 21   document. Après examen par le témoin, le document a été rendu à l'unité

 22   chargée des éléments de preuve où il est demeuré.

 23   M. le Président (interprétation): J'espère ne pas me tromper mais je n'ai

 24   aucun souvenir de ces éléments de preuve, je dois dire. En tout cas, je ne

 25   me rappelle pas qu'ils aient été appliqués dans la présente affaire.


Page 19101

  1   M. Nice (interprétation): Je vous prie de m'excuser, Monsieur le

  2   Président, s'il y a eu malentendu. Mais en ce qui concerne nous-mêmes, les

  3   représentants de la défense et les juristes de la Chambre, il n'y a pas eu

  4   malentendu. Vous vous rappellerez sans doute que, lorsque les documents

  5   sont produits, ils le sont en général en bloc et en liasse, et personne

  6   dans le prétoire ne reçoit la même liasse.

  7   Donc s'agissant des documents que les Juges ont entre les mains, les Juges

  8   se rappelleront que ces documents sont ponctionnés, sont troués,

  9   présentent des trous pour les classeurs. Lorsque la défense a produit des

 10   documents et, je demande que l'on me corrige si je me trompe, ceux-ci sont

 11   produits selon les mêmes modalités. En tout cas, l'une ou l'autre des

 12   parties a toute liberté bien entendu de demander à voir l'original quand

 13   elle le souhaite.

 14   Maintenant, il peut valoir la peine de rappeler que c'est une pratique

 15   moderne de l'utilisation et de présentation des documents. Ce qui se passe

 16   lorsqu'un document est enregistré par le Bureau du procureur;, ce n'est

 17   qu'ensuite qu'il est adressé à l'unité chargée des éléments de preuve où

 18   il est passé au scanner.

 19   Après passage au scanner, l'image du document est convertie en image

 20   numérique une fois pour toutes. Et c'est le numéro unique qui est associé

 21   à cette numérisation du document, que vous trouvez sur tous les documents,

 22   que vous aurez désormais sous les yeux. Par la suite, le document est

 23   envoyé à une unité particulière et, dans 99% sinon 100% des cas, ce

 24   document n'est plus jamais touché. Et si jamais il est déplacé, ces

 25   déplacements sont enregistrés également.


Page 19102

  1   M. le Président (interprétation): Mais la question est-elle posée aux

  2   Juges de la Chambre?

  3   M. Nice (interprétation): Pardon, vous me demandez si cela a été le cas

  4   jusqu'à présent?

  5   M. le Président (interprétation): Vous venez de dire que, quand lorsqu'un

  6   document est déplacé, il est enregistré et sa sortie de l'unité chargée

  7   des éléments de preuve est consignée par écrit.

  8   La question que je vous pose c'est: est-ce qu'une autorisation est

  9   demandée à la Chambre?

 10   M. Nice (interprétation): Non, parce qu'en principe, la pièce à conviction

 11   est la copie maîtresse, c'est-à-dire la copie qui sort du scanner, qui en

 12   a fait la numérisation, une version électronique donc. Et le malentendu, à

 13   mon avis, vient de là. C'est une bonne chose qu'il soit réglé.

 14   M. le Président (interprétation): Nous, ce que nous demandons simplement

 15   c'est que l'article 81C du Règlement soit respecté et qu'il le soit dans

 16   les plus brefs délais. C'est ce qu'il importe de faire, n'est-ce pas?

 17   M. Nice (interprétation): Personnellement, Monsieur le Président, je ne

 18   vois pas d'avantages ni dans une solution ni dans l'autre.

 19   Mais pour l'institution, il serait peut-être bon que je lise en détail la

 20   réponse fournie par l'institution qui semble manifester une préoccupation

 21   importante à cet égard.

 22   S'agissant de la conservation des documents, j'aimerais vous indiquer pour

 23   quelles raisons ils sont conservés de la manière que je viens d'indiquer.

 24   M. Robinson (interprétation): Où se trouve l'unité chargée de la sécurité?

 25   Au Bureau du procureur?


Page 19103

  1

  2

  3

  4

  5

  6

  7

  8

  9

 10

 11

 12

 13   Page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la

 14   pagination anglaise et la pagination française.

 15

 16

 17

 18

 19

 20

 21

 22

 23

 24

 25

 


Page 19104

  1   M. Nice (interprétation): C'est un coffre-fort du Bureau du procureur. Je

  2   crois pouvoir dire sans erreur qu'il s'agit de l'endroit le plus sûr de

  3   l'institution, où les règlements sont très stricts. Les documents y sont

  4   conservés et ne sont pas déplacés sans que ce déplacement soit consigné

  5   par écrit dans un registre.

  6               (Les Juges se concertent sur le siège.)

  7   M. le Président (interprétation): Nous entendrons Me Sayers dans quelques

  8   instants, mais nous vous écoutons au sujet des détails concrets.

  9   M. Nice (interprétation): Pendant que vous consultiez vos collègues,

 10   Monsieur le Président, je lisais la réponse que j'ai reçue de

 11   l'institution. J'en ferai faire des copies si c'est possible, car vraiment

 12   l'historique de la pratique concrète y est décrite de façon très

 13   satisfaisante. Nous aurons donc ces copies dans quelques instants.

 14   Les avantages concrets de cette pratique consistent en particulier dans le

 15   fait que, lorsqu'on a un même document qui doit être produit dans un ou

 16   plusieurs procès, chacun des procès dispose d'une copie maîtresse qui

 17   constitue la pièce à conviction dans le procès. Le problème qui se

 18   poserait s'il fallait produire un document devant une Chambre pour ensuite

 19   recevoir une demande émanant d'une autre Chambre, ce problème ne se pose

 20   pas.

 21   M. Bennouna: En pratique, il n'y a pas de grande différence entre le fait

 22   d'avoir un document, le "master", au greffe. Si le document est au greffe,

 23   si vous avez le document original, le "master" au greffe, vous pouvez,

 24   vous, procureur, si vous voulez l'utiliser dans un autre cas, vous

 25   adresser au greffe. As well, aussi bien! Donc, là, je ne vois pas la


Page 19105

  1   question pratique.

  2   Je crois que la question pratique, tout simplement, c'est qu'il y a une

  3   chose mal partie à un moment donné. Et quand les choses sont mal parties,

  4   c'est toujours difficile de les redresser. Il y a une question de principe

  5   qui fait que c'est au greffe d'avoir les originaux. C'est clair. Il semble

  6   que, sur le plan pratique, les choses sont mal parties au départ. Il va

  7   falloir étudier sérieusement la manière de redresser la barre. Mais le

  8   fait que vous ayez un original au greffe et que vous soyez obligés d'aller

  9   le chercher vous-même chaque fois pour une autre affaire ne change rien au

 10   problème.

 11   M. Nice (interprétation): Avec le respect que je vous dois, Monsieur le

 12   Juge, je ne crois pas que nous ayons mal commencé. Il y a un malentendu

 13   qui s'est installé en raison de la pratique adoptée dans d'autres procès.

 14   Mais déterminer si les difficultés liées aux originaux sont de grandes ou

 15   de petites difficultés, car finalement certains originaux sont de vrais

 16   originaux, d'autres sont des originaux dont la qualité s'est de toute

 17   façon détériorée avec le temps. Si ces originaux devaient être gardés par

 18   le greffe, les autres Chambres ne se verraient pas garantir un accès très

 19   aisé à ces documents.

 20   Rappelons-nous les difficultés que vit la défense en raison des nouvelles

 21   dispositions du Règlement. Cela fait des mois que la défense attend un

 22   ordre d'une Chambre, ordre de mise à disposition d'un certain document

 23   pour que ce document puisse être produit devant une autre Chambre. Les

 24   choses sont déjà assez difficiles lorsque les Chambres sont en

 25   fonctionnement, mais elles sont encore plus difficiles par la suite, à la


Page 19106

  1   fin du procès.

  2   Il y a un problème plus fondamental encore, c'est un problème pratique:

  3   les dispositions qui s'appliquent à l'Unité chargée des éléments de preuve

  4   au Bureau du procureur. Ces dispositions sont des dispositions liées à la

  5   plus stricte sécurité. Je vous ai rappelé tout cela il y a quelques jours.

  6   Il y a une chaîne de conservation des documents qui est consignée par

  7   écrit et qui ne doit pas être rompue.

  8   Une fois qu'un document est adressé au greffe, le greffe a son propre

  9   système de sécurité et ce document ne va pas être suivi au cas par cas. Il

 10   sera simplement placé sur un chariot à roulettes ou dans une pièce fermée

 11   à clef qui d'ailleurs est partagée par plusieurs représentants du

 12   Tribunal. Je ne sais pas si c'est le cas ou pas, mais c'est possible. Vous

 13   avez vu hier un original qui vous a été soumis pour vérification et nous

 14   avons parlé à ce moment-là de la chaîne de conservation unique et

 15   singulière de ce document. Il est arrivé, dans certains cas, que nous

 16   produisions plusieurs documents en une même matinée: 10, 15 ou 20

 17   documents dans la même matinée. Ces documents doivent être restitués une

 18   fois qu'ils ont été utilisés dans le prétoire. Une demi-douzaine peuvent

 19   être restitués, car aucune décision n'a été nécessaire à leur sujet et

 20   tous ces documents doivent être suivis de façon individuelle au cours de

 21   leur retour

 22   jusqu'à leur lieu d'origine. Certains sont adressés au Greffe et le risque

 23   de perte du Tribunal est beaucoup plus grand dans ce cas-là que dans le

 24   cadre des dispositions appliquées actuellement. Je vous le dis très

 25   franchement.


Page 19107

  1   M. le Président (interprétation): Ce que vous suggérez, Monsieur Nice, et

  2   nous écouterons la suite de votre argumentation par la suite, c’est que

  3   l'organisme responsable de la gestion de ce qui se passe dans le prétoire

  4   est incapable de conserver en toute sécurité un document ?

  5   M. Nice (interprétation): Je n'ai pas dit cela. J’ai simplement dit qu’il

  6   y avait un système qui était préférable à l’autre, qui est plus sûr et

  7   moins susceptible de produire une erreur.

  8   M. Robinson (interprétation): Monsieur Nice, il est possible que vous ayez

  9   raison en disant que la sécurité est supérieure mais, dans des questions

 10   de ce genre, je suis sûr que vous comprendrez que la justice doit être

 11   rendue. Personnellement, ce qui m’intéresse, c'est l'impression que de

 12   telles choses vont produire devant la communauté internationale si elle

 13   apprend que des pièces à conviction sont aux mains d’une partie au procès.

 14   Je vous le demande: quel sera l'effet produit auprès de la communauté

 15   internationale si elle apprend qu’une pièce à conviction sur la base de

 16   laquelle le Tribunal doit prononcer la culpabilité ou l'innocence se

 17   trouve entre les mains d’une personne liée à l’une des deux parties.

 18   M. Nice (interprétation): Avec tout le respect que je vous dois, Monsieur

 19   le Président, je comprends très bien votre sensibilité sur ce point. Je

 20   l'apprécie dans les circonstances dont nous parlons, compte tenu des

 21   principes qui guident notre action. Mais la raison pour laquelle

 22   pratiquement tous les documents demeurent, sans être déplacés dans les

 23   coffres-forts de l'unité chargée des éléments de preuve, en tout cas en

 24   étant déplacés un minimum, uniquement dans les cas nécessaires pour la

 25   poursuite d'un procès, et ce, dans le cadre de l’application d’un


Page 19108

  1   protocole déterminé, la raison qui justifie cela, c’est que, pratiquement

  2   dans tous les procès, il n'est pas indispensable de voir un document sous

  3   sa forme originale.

  4   Dans notre procès, à moins que ma mémoire ne fasse une omission, mais dans

  5   le procès auquel nous participons ici, je ne pense pas qu'un seul document

  6   ait été requis sous sa forme originale jusqu’à hier. Peut-être que je me

  7   trompe mais ce n'est pas très surprenant si l'on pense au rapport de

  8   l'ECMM, du Bataillon britannique, etc.

  9   Si à quelque moment que ce soit, il devenait indispensable de voir un

 10   document original, bien sûr, il pourra être produit. Ce qui est

 11   intéressant puisque nous parlons de cette question, c'est que Me Sayers a

 12   évoqué cette question au sujet d'un document Jelisic.

 13   Et malheureusement, la citation qu'il en a faite était totalement en

 14   dehors de son contexte puisqu'elle semblait m’être adressée. J’aimerais

 15   consacrer quelques instants à ce point très particulier pour vous

 16   expliquer ce qu’il s’est passé, plutôt que de rester dans les généralités.

 17   Ce qui s’est passé, c’est qu'un témoin est venu et a sorti de sa poche

 18   quelque chose; c'était un laissez-passer dont il a dit qu'il était signé

 19   par Jelisic. Ce document était une copie et chacun est convenu de

 20   continuer à travailler en se fondant sur cette copie. Il y a eu un court

 21   contre-interrogatoire quant à l'authenticité du document pour déterminer

 22   s'il avait été établi ou pas d’ailleurs, pour commencer. Malheureusement,

 23   compte tenu du fait que l'accusé avait admis avoir rédigé un tel document,

 24   un tel laissez-passer, le conseil de la défense a demandé que l'original

 25   du document demeure au Tribunal, mais les Juges ont rendu une ordonnance


Page 19109

  1   inverse en déclarant qu’ils allaient continuer à travailler sur la base de

  2   la copie.

  3   Les Juges appliquant une pratique en vigueur au Tribunal ont posé des

  4   questions et celles-ci étaient nombreuses. L’une de ces questions qui ne

  5   provenait pas du Juge Riad, comme le suggère la note que je suis en train

  6   de discuter, mais bien du Juge Rodrigues, est revenue sur la question de

  7   l’authenticité du document. Mais peut-être me suis-je trompé à ce moment-

  8   là, que le conseil de la défense estimait qu'il était préférable que le

  9   document demeure ici à La Haye plutôt que d’être restitué au témoin. C'est

 10   donc ce que j'ai demandé en demandant une exception à la règle.

 11   Et puis les Juges aussi pouvaient par la suite vouloir procéder à des

 12   investigations de l'écriture pour en déterminer l'identité et c'est la

 13   raison pour laquelle le document est resté dans les locaux du Tribunal.

 14   Voilà l’historique de tout ce problème, ce qui montre bien que la pratique

 15   générale consistait à travailler sur la base de copies en dehors de

 16   situations exceptionnelles et rares.

 17   Ici, les documents peuvent bien sûr être inspectés par la défense si elle

 18   souhaite les voir.

 19   M. le Président (interprétation): Il ne s'agit pas ici d’inspecter les

 20   documents ou de les vérifier, ce n’est pas cela le problème, c’est la

 21   conservation des pièces à conviction qui est en question. Je ne pense pas

 22   que nous allons avancer beaucoup plus loin aujourd'hui.

 23   Sauf peut-être à déterminer quelles sont les pièces à conviction les plus

 24   sensibles, notamment la cassette audio qui je crois, doit être garantie

 25   d'être en la possession et sous la garde du Tribunal et pas de l'une des


Page 19110

  1   parties.

  2   Parlons peut-être de cette réponse fournie par l’institution qui n’est pas

  3   encore signée mais que nous pouvons accepter sous sa forme actuelle.

  4   Je parlais effectivement du Bureau du procureur.

  5   Effectivement, l’institution, le Bureau du procureur, c’est du jargon, que

  6   voulez-vous.

  7   M. le Président (interprétation) : Voyons cette lettre.

  8   M. Nice (interprétation) : Pendant que ce document est distribué, parlons

  9   des cassettes audio ou autres. Ce qui est vrai des documents est vrai des

 10   cassettes également. Elles sont également copiées. A ce moment-là, il n’y

 11   avait pas encore de possibilité de copie par numérisation. Maintenant,

 12   c’est possible. Voulez-vous d'abord lire ce document, Messieurs les Juges?

 13   M. le Président (interprétation) : Non, non, nous vous écoutons.

 14   M. Nice (interprétation) : Fort bien. L’historique de ces cassettes audio

 15   ne manque d’intérêt. Je crois que la défense n'a jamais vraiment étudié la

 16   question jusqu’au bout. Voici ce qu'il s'est passé. Les premières

 17   cassettes sont arrivées, ou la première cassette arrivée à été copiée sur-

 18   le-champ. Elle est devenue la copie maîtresse, puis elle a été distribuée

 19   à la défense. Les conseils de la défense ont été invités à nous dire si

 20   les voix entendues étaient bien les voix de Kordic et de Blaskic.

 21   La défense a admis une telle chose. Mais la défense n'a rien dit qui

 22   puisse contester la nature de cette cassette ou, tout du moins, ils l’ont

 23   fait de façon très incohérente. Par la suite, Me Stein a parlé de la

 24   possibilité qu’on ait ajouté tel ou tel mot à cette cassette. Le témoin

 25   est venu déposer ici à propos de cette cassette. C'est alors que


Page 19111

  1   l'original qui venait du témoin a été apporté en respectant la chaîne de

  2   conservation et le témoin a sorti de son attaché-case une version qui

  3   avait toujours été en sa possession. Cela a été diffusé rapidement. La

  4   Chambre a trouvé qu’il s’agissait d’un document inutilisable en tant que

  5   véritable pièce à conviction, qu'il fallait procéder à une écoute dans

  6   d’autres circonstances. Ladite copie a été copiée non par le bureau du

  7   Procureur mais aussitôt par les services responsables, les services

  8   électroniques. A ce moment-là, des copies maîtresses ont été distribuées à

  9   toutes les parties.

 10   La défense en voulait une, le témoin voulait une copie qu'il voulait

 11   emmener, il en avait déjà une de toute façon.

 12   Et puis cette deuxième cassette a été soumise en temps utile à l'unité

 13   chargée des éléments de preuve, en suivant la même route que celle qui

 14   avait été empruntée par la première copie précédemment. A partir de ce

 15   moment-là, les copies maîtresses sont devenues les véritables pièces à

 16   conviction.

 17   Pour ce qui est de l'original, il est demeuré au sein du Bureau du

 18   procureur, ceci était bien connu. En effet, rappelez-vous, Messieurs les

 19   Juges, la fois suivante où l'on a parlé de la question des cassettes,

 20   c'était de savoir si la première cassette avait un contenu identique à

 21   celui de la seconde. C'est alors que Me Stein s'est levé au nom de

 22   l'accusé, ou du moins est venu à notre bureau, car il voulait écouter les

 23   deux cassettes et les comparer alors que la défense savait depuis toujours

 24   que nous possédions ces cassettes.

 25   A la suite de cela, les deux cassettes ont été remises à l'unité chargée


Page 19112

  1

  2

  3

  4

  5

  6

  7

  8

  9

 10

 11

 12

 13   Page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la

 14   pagination anglaise et la pagination française.

 15

 16

 17

 18

 19

 20

 21

 22

 23

 24

 25

 


Page 19113

  1   des éléments de preuve, mais rien n'avait été précisé au cours du contre-

  2   interrogatoire. On ne savait toujours pas quels étaient les segments qui

  3   avaient été diffusés, ceux qui éventuellement auraient été inexacts ou

  4   pas. Finalement, il n'y a rien eu de substantiel au niveau du contre-

  5   interrogatoire.

  6   Madame Verhaag va peut-être me corriger pour ce qui est de la chronologie

  7   des événements mais, ensuite, à une troisième étape, nous avons reçu un

  8   résumé des témoins à décharge et de leur déposition en tout cas. Lorsque

  9   nous avons reçu un résumé concernant un témoin de la défense, c'était la

 10   plus grande imprécision qui régnait. Si ce n'est qu'on a précisé que tel

 11   ou tel expert allait venir nous parler de cette cassette. Sans doute,

 12   allait-il se baser sur la copie maîtresse que possédait la défense.

 13   Et nous n'avions aucune raison de croire en l'espèce que nous aurions les

 14   trois semaines habituelles réservées avant la comparution d'un témoin

 15   expert. Nous nous étions dit qu'il n'était pas nécessaire de voir à ce

 16   moment-là ce que voulait dire un expert de cette cassette.

 17   Mais nous avons essayé de nous préparer quand même à ce qu'il allait peut-

 18   être vouloir dire, cet expert appelé par la défense. Les experts retenus

 19   ici par le Tribunal, qui se trouvent aux Pays-Bas, ont demandé à voir

 20   l'original; et cette copie a été copiée de façon numérisée et a été

 21   consignée dans le registre.

 22   M. le Président (interprétation): C'est effectivement l'original qui

 23   devrait être confié au greffe et tout le monde y compris l'accusation et

 24   la défense devraient disposer de copies. Ce qui ne marche pas ici, c'est

 25   que le Bureau du procureur dispose de l'original: c'est cet objet qui


Page 19114

  1   devrait se trouver conservé par le greffe.

  2   M. Nice (interprétation): Si c'est le cas, Monsieur le Président,

  3   j'accepte le fait que si nous avions été plus clairs dès le début, c'est

  4   pratiquement ce qui se serait passé et que la pièce en question soit

  5   aurait été envoyée au Greffe, soit -et c'est une option que j'évoque de

  6   façon assez générale-, mais il faudrait qu'on dise de ces pièces qu'elles

  7   ne peuvent pas sortir de l'espace sûr où elles sont conservées, à moins

  8   que ceci ne soit fait avec un certain délai préalable, un certain préavis.

  9   Je n'ajouterai rien de plus après ma dernière observation. Peut-être

 10   encore ceci: les pièces qui sont consignées à l'unité chargée des éléments

 11   de preuve suivent et sont soumises à un système de concertation des plus

 12   rigoureux. Etant donné la sécurité imposée à cette unité, je ne peux pas

 13   vous parler des détails précis, à moins que vous ne vouliez en savoir

 14   davantage; plus tard, il serait peut-être intéressant d'en discuter. Je

 15   peux vous dire en tout cas que ce système est des plus rigoureux.

 16   Toutes les pièces ont pour objectif de servir un procès donné, mais de

 17   servir à toutes les poursuites judiciaires en cours afin de les garder

 18   dans les meilleures conditions atmosphériques possibles et afin qu'elles

 19   soient à disposition.

 20   M. le Président (interprétation): Vous ne faites pas objection à ce que la

 21   défense garde ces pièces?

 22   M. Nice (interprétation): Non. Effectivement, si nous demandons d'avoir un

 23   original, je suis sûr que c'est le meilleur original possible qui pourrait

 24   le faire.

 25   M. le Président (interprétation): Et vous nous invitez à ignorer le


Page 19115

  1   Règlement comme cela a été le cas?

  2   M. Nice (interprétation): Non, je ne vous demande pas de faire fi du

  3   Règlement. A ce titre, deux choses.

  4   Il y a l'article 41: j'ai déjà attiré votre attention sur cet article.

  5   C'est une imposition qui est faite au Bureau du procureur de garder des

  6   pièces aux fins de poursuite judiciaire en cours, mais je me permets de

  7   vous faire valoir qu'ici, s'agissant de ces procès, il faut beaucoup de

  8   documents.

  9   La meilleure démarche serait peut-être de dire que la pièce à conviction

 10   est la copie maîtresse, mais il est certain qu'à tout moment des débats

 11   -même jusqu'aux délibérations et délibérés ou au moment de l'appel-, une

 12   partie quelconque peut demander à voir l'original de cette copie maîtresse

 13   aux fins d'examen. Et tout ceci est toujours parfaitement faisable.

 14   Je crois qu'au niveau du concept, ce serait la bonne façon d'aborder le

 15   problème. Dans ce cas, il n'y a pas violation du Règlement parce que ce

 16   qui aura été produit à l'audience est une copie maîtresse. Dans le même

 17   sens, certains originaux sont des copies.

 18   M. Bennouna: Pourquoi dit-on que les pièces à conviction doivent être

 19   gardées précieusement par une autorité neutre parce qu'elles servent,

 20   comme vous l'a dit le Juge May ou le Juge Robinson, à décider de la

 21   culpabilité ou de l'innocence. Elles sont le fondement finalement du

 22   jugement.

 23   Pourquoi dit-on que ces pièces à conviction doivent, et nous ne sommes pas

 24   en train d'inventer quelque chose, rester bien gardées en dehors des

 25   parties concernées? C'est pour qu'il n'y ait aucune altération possible.


Page 19116

  1   C'est cela le problème: c'est pour qu'on soit sûrs qu'il n'y ait aucune

  2   altération possible.

  3   Vous me direz que c'est exceptionnel; pour qu'il y ait une altération, il

  4   faut vraiment que ce soit quelque chose d'exceptionnel. Sur une pièce

  5   vraiment essentielle, il faut que cette altération ne soit pas visible,

  6   etc. Mais le fait est que, s'il y a une règle comme cela et que s'il y a

  7   une pratique en ce sens, c'est pour éviter toute altération des pièces à

  8   conviction.

  9   Alors vous dites "Ici, nous sommes dans un cas documentaire"; c'est ce que

 10   vous nous dites. Est-ce que cela change quelque chose? Vous savez bien

 11   qu'il y a des textes ici dont certains sont effacés, qu'on ne voit pas

 12   trop. Ils peuvent s'altérer encore plus avec le temps. Et ces textes

 13   peuvent être aussi essentiels.

 14   Mais il n'y a pas que des textes. La preuve, c'est qu'il n'y a pas que des

 15   textes: il peut y avoir aussi d'autres pièces que les textes. Je crois que

 16   c'est cela le problème. Maintenant, vous nous dites : "Nous avons une

 17   pratique au Tribunal, dans notre Tribunal, les choses ont été organisées

 18   de telle façon". Moi, mon idée, c'est que nous allons décider pour la

 19   cassette pour laquelle tout ce problème a été soulevé, l'audiotape.

 20   Pour le problème général, mon idée est qu'il doit être posé au niveau

 21   institutionnel, comme vous dites.

 22   Nous allons le poser au niveau institutionnel -ne vous inquiétez pas-, là

 23   où se trouvait l'institution et pour en débattre en profondeur, car c'est

 24   notre responsabilité morale. Mais sur le point précis de l'audio tape,

 25   s'il y a un "master" de l'audio tape, il doit être aux mains du greffier.


Page 19117

  1   Point final! Vous devez en avoir, vous, une copie et c'est tout. C'est un

  2   principe que nous aurons à débattre avec nos collègues. Je parle à titre

  3   personnel sur ce point précis. Sur le problème institutionnel, il sera

  4   débattu au niveau institutionnel. C'est tout.

  5   M. Nice (interprétation): Permettez-moi de réagir par deux arguments. Bien

  6   sûr, vous n'avez aucune raison ne pas avoir confiance au Bureau du

  7   procureur. L'histoire ne vous a pas porté à le faire. Et puis, là, l'idée

  8   qu'un document pourrait être modifié, altéré est une idée un peu vexante

  9   et que nous rejetons. Cependant, puisque vous soulevez la question,

 10   Messieurs les Juges, je vous dirai ceci: la réponse est assez rassurante.

 11   C'est la raison pour laquelle vu que nous avons un système moderne, nous

 12   agissons de façon tout à fait appropriée. Un document qui arrive passe au

 13   scanner électronique et ceci va permettre de maintenir à tout jamais

 14   l'aspect qu'a ce document à son arrivée. S'il s'altère par la suite, vous

 15   savez que c'est le fait du papier thermique de fax; effectivement, il peut

 16   devenir moins clair au fil du temps, mais s'il y a passage au scanner dès

 17   l'arrivée du document, il reçoit un numéro unique. Ce numéro peut vous

 18   donner quelque chose comme information pour ce qui est de la date

 19   d'arrivée du document. C'est utile. Et il n'est plus possible d'altérer ce

 20   document.

 21   C'est précisément ce reflet fidèle de l'original que l'on distribua à

 22   toutes les parties concernées avant ou pendant le procès. C'est ce système

 23   de sécurité qui assure une sécurité bien plus grande que celle que nous,

 24   procureur, substitut du Procureur. C'est ce que nous pouvons attendre,

 25   plus que ce que la défense peut nous fournir, car elle va peut-être nous


Page 19118

  1   fournir un original d'un original ou une copie maîtresse, mais ce qu'elle

  2   va nous fournir, la défense, n'aura pas eu les rigueurs du traitement que

  3   nos avons, nous, dans une grande institution comme la nôtre. Cela veut

  4   dire qu'à bien des égards, je me suis efforcé de vous expliquer que vous

  5   avez ici affaire à un système bien plus sécurisé et que la sécurité de ce

  6   système risquerait d'être mise en cause si l'on déplaçait les documents de

  7   façon routinière, d'un système bien organisé, bien ordonné, par divers

  8   chariots, dans tout le bâtiment.

  9   M. le Président (interprétation): Nous avons déjà entendu ces arguments.

 10   Sauf le respect que je vous dois, nous avons déjà entendu cet argument et

 11   pourtant, vous n'avez toujours pas parlé de la façon dont va nous

 12   percevoir la communauté internationale. Nous allons laisser ceci de côté.

 13   Nous avons entendu vos arguments, vos conclusions. Nous ne pouvons pas

 14   trancher cette question. Il est 4 heures moins 10, mais j'aimerais

 15   entendre ce que maître Sayers a à nous dire sur le sujet.

 16   M. Nice (interprétation): Vous me dites que je n'ai pas parlé de la

 17   perception qu'aura la communauté internationale. Je l'ai fait en vous

 18   disant que nous avons un système sécurisé et je suis plus précis encore

 19   -et je me répète- en disant que, de part et d'autre, lorsque qu'on veut un

 20   original, il est disponible, il est à votre disposition. Ce qui est à

 21   notre avis une bonne façon de traiter les documents vu le type d'affaires

 22   dont nous sommes saisis.

 23   M. le Président (interprétation): Il faut examiner un point dans tout

 24   cela: est-ce que ceci a pu constituer pour vous un préjudice supérieur à

 25   celui que pourrait être le préjudice subi parce que l'on perçoit que la


Page 19119

  1   façon de conserver les pièces n'est pas correcte? Nous avons parlé des

  2   cassettes audio comme étant des pièces à conviction particulièrement

  3   sensibles, des moyens de preuves dont -si j'ai bien compris- vous

  4   contestez l'authenticité. Y a-t-il d'autres pièces qui, à votre avis,

  5   devraient faire l'objet d'une ordonnance immédiate si nous estimons qu'il

  6   faut étudier le problème au niveau institutionnel en englobant d'autres

  7   affaires dont est saisi ce tribunal? Je peux vous dire que,

  8   personnellement, je ne pense pas à d'autres pièces qui vous auraient

  9   préoccupé. Mais vous avez peut-être autre chose en tête. Pensez-y d'ici

 10   demain.

 11   M. Sayers (interprétation): Si vous voulez ma réaction, je peux vous la

 12   livrer dès maintenant et étoffer mon propos demain. Pour répondre à votre

 13   question précise, je crois qu'il y a plus de 2300 pièces à conviction dans

 14   ce procès. Il n'est pas équitable de nous demander au débotté, comme cela,

 15   quelles sont les pièces.

 16   M. le Président (interprétation): C'est la raison pour laquelle je vous ai

 17   suggéré d'y réfléchir.

 18   M. Sayers (interprétation) : Je vais simplement prendre un exemple. Le

 19   document produit hier: comment –grand Dieu!- quiconque peut-il avoir

 20   confiance en ce type de document? Je n'en connais plus la cote, mais vous

 21   savez de quoi je parle. Un document qui est censé commémorer

 22   l'anniversaire de la communauté du Saint-Esprit, compagnie qui, d'après le

 23   témoignage du témoin qui n'a pas été réfuté a existé pendant trois mois,

 24   avait été créée le 27 février 1992 alors que le document porte la date du

 25   mois d'août, et qu'il y avait en annexe de ce document un autre document


Page 19120

  1   dont j'ai dit qu'on ne connaissait pas l'origine parce que quelqu'un avait

  2   gribouillé quelque chose sur la première page. Qui sait d'où vient ce

  3   document? Je voudrais vraiment voir de tels originaux. C'est ce que nous

  4   avons essayé d'obtenir pendant toute la durée de ce procès pour établir la

  5   base de nos objections.

  6   Je crois qu'il n'incombe pas à la défense, lorsque vous avez de véritables

  7   inondations de documents versés au dossier, je crois que ce n'est pas à

  8   nous que revient la charge de la preuve et la recherche de la preuve de

  9   l'authenticité. C'est à l'accusation.

 10   Permettez-moi de prendre un peu de recul et de nous poser la question qui

 11   a surgi aujourd'hui en cette salle. Il y a bien sûr la question générale

 12   des pièces à conviction et il faudra que je voie les conclusions tirées

 13   par l'accusation à ce propos. Mais, ici, nous n'avons pas parlé en général

 14   de pièces à conviction. Peu importe le flou dont on entoure cette question

 15   et toutes les sophismes dont on peut l'orner. Je crois que de cette façon,

 16   on ne pourra pas malgré tout dissimuler le fait qu'un préjudice a été créé

 17   ici.

 18   Je reviens à la question de la cassette. Il s'agir de la pièce 2801.4 page

 19   1347. Monsieur Nice nous a rappelé que c'était M. Vusic qui avait produit

 20   l'original, comme un "deus ex machina", ici à l'audience. Nous parlons de

 21   cette pièce-là et de cette cassette-là et pas d'une autre. M. Nice a dit

 22   en cette circonstance: "Est-ce que l'on peut demander au témoin de

 23   produire la cassette? Est-ce que l'on peut donner la cote 2801.4?" C'est

 24   de cette façon qu'intervient l'article du Règlement dont nous parlions. Un

 25   des Juges a parlé de la justice et de la perception de la Justice. Je


Page 19121

  1

  2

  3

  4

  5

  6

  7

  8

  9

 10

 11

 12

 13   Page blanche insérée aux fins d'assurer la correspondance entre la

 14   pagination anglaise et la pagination française.

 15

 16

 17

 18

 19

 20

 21

 22

 23

 24

 25

 


Page 19122

  1   crois que c'est la base qui doit nous guider. On parle de l'administration

  2   de la Justice, du principe de l'équité, de la légalité, tout ce qui est

  3   consigné dans l'article 21; et je crois que c'est le statut.

  4   Le Règlement donne forme à ces principes. Je crois qu'on ne pourrait pas

  5   être plus clair. L'article le dit: le greffe va conserver toutes les

  6   traces physiques des moyens de preuve soumis à l'audience. Sous réserve

  7   d'une directive pratique -je ne pense pas qu'il en existe et l'accusation

  8   n'en a pas fait mention- ou sous réserve de toute ordonnance rendue par la

  9   Chambre pour ce qui est du traitement à donner à ces pièces. Nonobstant la

 10   pléthore de copies de ces originaux qui sont censés être uniques puisqu'on

 11   les trouve dans nos dossiers, dans les dossiers de l'accusation, je ne

 12   sais pas si vous en disposez vous-mêmes dans vos dossiers, Messieurs les

 13   Juges, mais de tous les documents dont on a parlé, il est certain que ce

 14   document-ci doit se trouver au greffe. Or, nous avons appris pour la

 15   première fois la semaine dernière que ceux-ci ne s'y trouvaient pas.

 16   M. le Président (interprétation): Je crois que vous enfoncez une porte

 17   ouverte.

 18   Nous sommes d'accord sur le lieu où devrait se trouver conservée cette

 19   pièce, l'original et pas n'importe quelle copie, même si on l'appelle

 20   copie-maîtresse. 

 21   M. Sayers (interprétation): Copie ou copie-maîtresse. Oui, c'est ce flou,

 22   ce brouillard dont on entourait la question. Nous parlons d'une pièce qui

 23   devrait se trouver auprès du greffe et pas ailleurs.

 24   M. le Président (interprétation): Etudions la situation. Nous demandez-

 25   vous de rendre une ordonnance pour ce qui est de l'original de ces deux


Page 19123

  1   cassettes audio?

  2   M. Sayers (interprétation): Je crois qu'il faudrait en fait les rayer du

  3   dossier puisque qu'elles ne sont pas consignées au dossier. Je ne vois pas

  4   comment on pourrait les retirer comme pièces à conviction, les exclure du

  5   dossier.

  6   M. le Président (interprétation): Elles sont déjà versées au dossier. La

  7   question est de savoir où doit se trouver l'original de cette pièce. Nous

  8   allons être saisis de cette requête en temps utile. Nous allons

  9   éventuellement demander une réponse écrite de l'accusation à votre

 10   requête.

 11   Dans l'intervalle, pour rester pratique, je vais vous demander si vous

 12   avez l'original, comme nous l'avons ordonné la semaine dernière.

 13   M. Sayers (interprétation): Non, nous avons une copie numérisée de la

 14   cassette audio.

 15   Comme le Juge Bennouna le dit, comme vous le dites, Messieurs les Juges,

 16   c'est bien ce qui avait été ordonné la semaine dernière; nous nous sommes

 17   exécutés et ceci sera mis à disposition du greffe.

 18   Je ne veux pas du tout critiquer le greffe. Soyons clairs! J'ai

 19   d'excellents rapports professionnels avec le greffe qui se conduit de

 20   façon absolument parfaite et louable, mais il est choquant dans une

 21   affaire au pénal que des pièces, surtout de cet acabit, soient parties.

 22   Jamais, jamais, je n'ai entendu parler d'un cas qui se soit produit comme

 23   ça, où que ce soit, même dans un système national. Je n'insisterai pas,

 24   mais je trouve incroyable que l'accusation essaie de défendre la position

 25   qui est la sienne.


Page 19124

  1   Je crois que je vous ai dit ce que j'avais sur le cœur.

  2   M. le Président (interprétation): Voyons où nous en sommes. Que pensez-

  3   vous que nous devrions faire? Nous allons rendre une ordonnance s'agissant

  4   de ce qu'il nous semble adéquat, eu égard à cette cassette audio, mais il

  5   faut penser au traitement à réserver à toutes les autres pièces, y compris

  6   aux pièces de la défense.

  7   Est-ce que vous avez des idées à ce propos?

  8   M. Sayers (interprétation): Pour ce qui est de la question générale des

  9   pièces, il semblerait que s'il n'y a pas contestation de l'exactitude des

 10   copies, ce qui était le cas pour la plupart des pièces, je crois qu'ici,

 11   comme partout ailleurs dans les tribunaux nationaux, des copies sont tout

 12   aussi admissibles que les originaux, si l'on ne met pas en cause, si l'on

 13   ne conteste pas l'authenticité de l'original. Mais s'il y a contestation,

 14   c'est un principe fondamental de l'équité judiciaire que de voir la

 15   production de l'original puisqu'il existe cet original et que ce n'est pas

 16   un faux en soi.

 17   Comme cela a pu y être le cas avec le document hier, à moins qu’il y ait

 18   d’autres problèmes qui grèvent cette copie, mais je crois que c'est le

 19   régime que nous avons adopté et que nous avons suivi. S'il n'y a pas

 20   contestation quant à l'exactitude de la copie, on ne peut pas s'opposer à

 21   ce que soit versée au dossier une telle copie. Mais si contestation il y

 22   a, s’agissant de ce document, il est manifeste qu’il faut produire

 23   l'original. Et le seul endroit qui est permis par le règlement pour ce qui

 24   est du dépôt de cette pièce, c’est le greffe et non pas une partie,

 25   surtout dans une affaire au pénal. Je crois que c'est là notre position,


Page 19125

  1   Monsieur le Président.

  2   M. Mikulicic (interprétation): Permettez-moi, Monsieur le Président, au

  3   nom de la défense de M. Cerkez, de faire connaître notre position. La

  4   position de la défense de M. Cerkez est identique en tous points à celle

  5   de M. Kordic. Je voudrais ajouter, après avoir entendu tout ce qui vient

  6   d’être dit, que la défense de M. Kordic et de M. Cerkez estiment que

  7   l’article 81C est tout à fait applicable, dès lors qu’un élément de preuve

  8   est versé au dossier et reçoit une cote du greffier. C’est à partir de ce

  9   moment-là exclusivement le greffier, en application de l’article 81C, qui

 10   est chargé de conserver ce document. Je pense que ce Règlement ne peut pas

 11   se modifier tant qu’il est en vigueur et, en tout cas, ne peut être

 12   modifié de façon unilatérale à l'instigation d’une des deux parties au

 13   procès.

 14   Nous ne remettons absolument pas en cause le fait que le système de

 15   sécurité des éléments de preuve dont le Procureur vient de parler est un

 16   système satisfaisant, mais ce que nous remettons en cause, c'est qui

 17   contrôle ce système de conservation. Je ne vois pas pourquoi le système de

 18   conversation ou de sécurité des éléments de preuve ne pourrait pas être

 19   contrôlé par le greffe, ce qui d'ailleurs semble être indiqué comme devant

 20   être la norme à suivre dans l'article 81C du Règlement. Voilà donc,

 21   Monsieur le Président, la position de la défense que je voulais vous

 22   indiquer.

 23   M. le Président (interprétation): Merci.

 24               (Les Juges se consultent sur le siège.)

 25   M. le Président (interprétation): S'agissant de la cassette audio dont la


Page 19126

  1   référence 28.10.4 si je ne m’abuse, vient d’être citée par Me Nice,

  2   l'original va devoir être immédiatement remis sous la garde du greffe.

  3   Quant à la requête de Me Sayers qui demande que cet élément de preuve soit

  4   exclu des éléments de preuve, nous examinerons cette requête et rendrons

  5   notre décision en temps utile dans le prétoire. Mais dans l'intervalle,

  6   nous demandons au Procureur de bien vouloir nous remettre un document

  7   écrit indiquant quels ont été les endroits où la cassette s'est trouvée

  8   depuis le moment de sa production par le témoin dans la salle d’audience.

  9   Ensuite, en temps utile, j'espère que nous pourrons obtenir ce document du

 10   Procureur dans un délai de 7 jours, mais ensuite nous envisagerons les

 11   mesures à prendre pour poursuivre cette affaire. S'agissant des autres

 12   pièces à conviction, nous allons voir quelle est la situation et décider

 13   de ce qu’il convient de faire.

 14   M. Nice (interprétation): Puis-je vous proposer de nous demander une note

 15   relative à la deuxième cassette produite par le témoin mais également en

 16   rapport avec la première cassette qui a été entendue et qui été découverte

 17   comme étant identique à la seconde.

 18   M. le Président (interprétation): Oui, les deux.

 19   M. Nice (interprétation) : Les deux. Et cela doit être fait immédiatement.

 20   M. le Président (interprétation): Très bien, demain matin, nous parlerons

 21   des affidavits. Nous nous retrouvons dans ce prétoire à 9 heures 30.

 22                     (L’audience est levée à 16 heures 10.)

 23  

 24

 25