Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1              Mardi 4 juillet 2000.

  2               Audience Publique

  3               L'audience est ouverte à 9 heures 30

  4   M. le Président (interprétation): Je vous en prie si vous le voulez bien,

  5   donner votre déclaration solennelle.

  6   M. Neimarevic (interprétation): Je déclare solennellement que je dirai la

  7   vérité, toute la vérité, rien que la vérité.

  8   M. le Président (interprétation): Je vous en prie, asseyez vous.

  9   Je vous en prie, Maître Naumovski.

 10   M. Naumovski (interprétation): Merci, Monsieur le Président, Messieurs les

 11   Juges.

 12               (M. Neimarevic est interrogé par Me Naumovski.)

 13   M. Neimarevic, voudriez-vous décliner votre identité?

 14   M. Neimarevic (interprétation): Je m'appelle Stjepan Neimarevic.

 15   Question:   Vous êtes né le 4 Octobre 1951 à Travnik, vous êtes Croate et

 16   vous êtes ressortissant de Bosnie-Herzégovine, n'est-ce pas?

 17   Réponse:    Oui.

 18   Question:   Vous êtes franciscain et comme fonctionnaire ecclésiastique,

 19   vous n'avez jamais été membre d'un parti politique quelconque.

 20   Réponse:    Oui, vous avez raison.

 21   Question:   Vous avez vécu dans quelques villes en Bosnie-Herzégovine,

 22   tout d'abord vous avez vécu à Guca Gora où vous avez suivi six classes de

 23   l'enseignement primaire, ensuite deux autres. Vous les avez faites à Han

 24   Bila qui est à 4 kilomètres au sud-est de Guca Gora.

 25   Réponse:    Oui.


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  1   Question:   Vous avez eu votre bac au lycée franciscain à Visoko et vous

  2   avez fait votre noviciat à Kraljeva Sutjeska. Par la suite, après avoir

  3   terminé le noviciat, vous avez fait la théologie pendant six ans à

  4   Sarajevo.

  5   Réponse:    Oui.

  6   Question:   D'après la législation en vigueur de l'époque, vous avez été

  7   obligé de faire votre service militaire et depuis 1975 jusqu'à 1977, vous

  8   avez fait votre service militaire à la marine de la JNA?.

  9   Réponse:    Oui.

 10   Question:   Depuis 1979 jusqu'à 1981, vous avez été curé à Nova Bila, à

 11   Livno, à Vitez, à Brajkovici. Ce sont des villes en Bosnie-Herzégovine,

 12   n'est-ce pas?

 13   Réponse:    Oui.

 14   Question:   En 1993, vous êtes rentré à Guca Gora où vous avez vécu au

 15   couvent jusqu'au 8 Juin 1993, le jour où l'armée de Bosnie-Herzégovine a

 16   attaqué Guca Gora et ensemble avec d'autres Croates, vous avez été

 17   expulsés, n'est-ce pas?

 18   Réponse:    Oui.

 19   Question:   Monsieur Neimarevic, la Chambre a déjà entendu parler beaucoup

 20   des relations qui ont régné entre les peuples de Bosnie-Herzégovine avant

 21   la guerre mais très brièvement, vous pourriez peut-être nous dire si ces

 22   relations interethniques avant la guerre en Bosnie-Herzégovine étaient

 23   harmonieuses, idylliques ou non.

 24   Réponse:    Etant donné que dans l'ex-Yougoslavie, il y avait un parti

 25   unique, le parti communiste de Yougoslavie, les gens qui occupaient des


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  1   postes importants dans les structures du pouvoir, étaient obligés de se

  2   marier avec des personnes qui appartenaient à un autre groupe ethnique ou

  3   une autre confession et c'est de cette manière-là qu'ils étaient

  4   considérés comme répondant aux critères. Et d'un autre côté, on peut dire

  5   qu'après la deuxième guerre mondiale, il y avait une certaine paix qui

  6   s'est installée entre les groupes ethniques, car personne n'osait rien

  7   dire contre qui que ce soit, mais d'un autre côté, il y avait également

  8   des relations amicales qui se sont créées entre les personnes appartenant

  9   aux groupes ethniques différents, de nationalités différentes. Il y avait

 10   des bons côtés, il y avait de mauvais côtés, il y avait également des

 11   relations qui étaient mauvaises entre les peuples appartenant à des

 12   groupes ethniques différents. Moi-même, j'avais des amis également parmi

 13   des Musulmans, bien évidemment parmi les Serbes également avec lesquels

 14   j'ai coopéré souvent et j'ai travaillé également avec eux.

 15   Question:   La Chambre a eu déjà l'occasion d'entendre parler de la

 16   situation des Croates en ex-Yougoslavie. C'est la raison pour laquelle je

 17   pense que nous pouvons ne pas s'y référer tout de suite mais si jamais on

 18   en a besoin, nous pouvons éventuellement y revenir. Mais au moment où vous

 19   parlez de vos relations avec d'autres peuples, vous-mêmes, vous avez

 20   envoyé des messages de félicitations à vos confrères musulmans, à

 21   l'occasion de la fête.

 22   Réponse:    Oui, pratiquement, j'ai envoyé des félicitations à mes

 23   confrères musulmans, que ce soit Bayram ou autres fêtes musulmanes, à

 24   plusieurs reprises, je me souviens moi-même, je me rendais avec un de mes

 25   confrères pour me rendre chez eux dans leur maison ou bien dans les


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  1   mosquées pour les féliciter de leur fête. Mes paroissiens également se

  2   rendaient pour Bayram chez des amis, pour les féliciter. Mais

  3   malheureusement, je me dois de vous dire que moi-même personnellement, je

  4   n'ai jamais reçu des voeux à l'occasion de Noël, de Pâques, et cette

  5   dernière Pâques que j'ai passée au couvent, moi je n'ai pas reçu, pas une

  6   seule carte de voeu et à cette époque-là, Hazim qui était très connu, un

  7   ami, est venu après un certain nombre d'événements qui se sont passés,

  8   notamment le Jeudi Saint.

  9   Question:   Excusez-moi, je vous interromps. Nous sommes en train

 10   d'exposer par ordre chronologique et par moment on y arrivera.

 11   Réponse:    Oui.

 12   Question:   Quand vous parlez des félicitations que vous n'avez jamais

 13   eues, vous parlez probablement de vos confrères des associations

 14   musulmanes et autres?

 15   Réponse:    Oui, effectivement. Mais une fois, nous avons invité quelqu'un

 16   pour prendre le café avec nous, comme ceci se fait régulièrement entre les

 17   voisins, mais lui, il a dit: "Je viendrai uniquement si je dois venir, si

 18   c'est une obligation".

 19   Question:   Monsieur Neimarevic, nous pouvons poursuivre. Nous allons

 20   passer au paragraphe 6, Monsieur le Président et Messieurs les Juges, au

 21   paragraphe 6. Monsieur Neimarevic, vous pourriez nous dire quelques mots,

 22   comment les relations se sont détériorées entre les Croates et les

 23   Musulmans? La Chambre a déjà entendu dire ce qui s'était passé avec le

 24   pouvoir central, c'est la raison pour laquelle je ne vous invite pas à

 25   nous en parler, mais ce qui serait intéressant éventuellement, c'est de


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  1   dire des détails, des précisions dont vous avez voulu nous entretenir. Il

  2   y avait également un exemple dont vous avez parlé à l'époque, où l'ex-JNA

  3   se retirait du territoire de la République de Slovénie et de la république

  4   de Croatie, et tout l'armement se rendait en Bosnie-Herzégovine. Les

  5   Croates et les Musulmans, d'un ordre général, n'ont pas véritablement

  6   compris de la même manière ce retrait de l'armée en Bosnie-Herzégovine.

  7   Est-ce que j'ai raison, ou non?

  8   Réponse:    Oui. C'est pratiquement le début d'un très grand malentendu

  9   entre les Croates et les Musulmans. Tout simplement parce qu'il y a eu

 10   déjà des combats qui ont commencé, qui se sont déclenchés en Slovénie, et

 11   ces opérations auraient pu être arrêtées mais malheureusement, ce n'était

 12   pas le cas, pratiquement tout l'équipement, tout le matériel militaire,

 13   tout ceci se retirait vers la Bosnie-Herzégovine, et l'histoire nous

 14   apprend que si les armes s'accumulent à un endroit, elles ne peuvent pas

 15   rester, ne pas être utilisées, ceci s'est passé en Bosnie-Herzégovine, à

 16   notre grand regret. Il y avait eu de grands transports d'armements qui se

 17   sont rendus en Bosnie-Herzégovine. Les Croates ne le voyaient pas bien,

 18   ils s'attendaient également à ce que ceci n'allait pas mener à une

 19   situation de paix, mais à l'effusion du sang, et cela a également

 20   terrorisé les Croates. Nous avons essayé d'expliquer aux Musulmans, nous

 21   avons essayé de leur dire que ce n'était pas bien pour la Bosnie-

 22   Herzégovine qu'une accumulation d'armements soit effectuée, et que ceci

 23   aurait pour résultat des conséquences assez graves pour nous autres, qui

 24   habitions en Bosnie-Herzégovine. Malheureusement, ni les dirigeants

 25   musulmans de l'époque à Sarajevo, encore moins des gens qui étaient sur le


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  1   terrain, n'étaient parfaitement conscients de ce qui allait se passer,

  2   n'étaient pas conscients du danger.

  3   M. le Président (interprétation): Monsieur Neimarevic, je vais vous

  4   interrompre, excusez-moi. Je pense que vous êtes au clair que c'est un

  5   procès qui dure, qui dure depuis un certain temps, et nous avons entendu

  6   beaucoup de témoins qui ont déjà exposé. Nous avons également eu un nombre

  7   de pièces à conviction, c'est la raison pour laquelle nous avons déjà

  8   entendu parler de tout ce que vous venez de nous relater. L'avocat sait ce

  9   qui est pertinent, c'est la raison pour laquelle il va vous poser les

 10   questions concernant ces questions permanentes. Soyez aimable, concentrez-

 11   vous sur ces questions.

 12   M. Naumovski (interprétation): Merci. Il est vrai, le Président vient de

 13   vous le dire, que la Chambre a beaucoup entendu parler de tout cela.

 14   Pourriez-vous nous dire comment les Musulmans de Travnik ont accueilli les

 15   transports de ces armes, et les contingents qui sont arrivés de Slovénie

 16   et de Croatie?

 17   Réponse:    Ils ont accueilli ces transports avec des fleurs, avec des

 18   chants, avec des apéritifs et le reste.

 19   Question:   Et bien, au moment où les soldats de la JNA se sont rendus

 20   chez vous, cela a provoqué en quelque sorte une séparation entre les

 21   Musulmans d'un côté, et les Croates de l'autre côté, à Travnik et dans la

 22   municipalité?

 23   Réponse:    Oui, vous avez raison.

 24   Question:   Vous avez dit à la Chambre que vous avez dit aux Musulmans,

 25   vous avez parlé de l'imminence de la guerre, et qu'il était indispensable


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  1   de s'armer et de se défendre de cette agression qui allait suivre. Mais si

  2   je vous ai bien compris, vous ne vous êtes pas compris entre vous, Croates

  3   et Musulmans?

  4   Réponse:    Il est vrai, il y avait à titre d'illustration que je vais

  5   vous citer, ma rencontre avec l'un de mes collègues musulmans. Quand je

  6   l'ai contacté, il m'a dit : "Quand j'ai entendu parler Dedakovic Jastreb,

  7   qui a parlé à la télévision de Sarajevo, j'ai commencé à le haïr alors que

  8   lui m'a dit: "Il faut regarder pour s'acheter un petit fusil, et regarder

  9   sa vache". A mon avis, à ce moment-là, il a compris que le danger allait

 10   se répandre en Bosnie-Herzégovine et que tout ce que nous autres, les

 11   Croates, nous disions, c'était effectivement vrai, car nous avions eu

 12   l'intention de sauvegarder, préserver les vies, aussi bien des Musulmans

 13   que des Croates.

 14   Question:   Tout simplement pour éclaircir, Dedakovic était Croate, et il

 15   était commandant à la tête de la défense à Vukovar, n'est-ce pas?

 16   Réponse:    Oui.

 17   Question:   A l'automne 1992, vous vous êtes rendu à Krpeljici, c'est un

 18   village à côté de Guca Gora, vous avez demandé l'aide de la Défense

 19   territoriale pour combattre les Serbes à Vlacici?

 20   Réponse:    Oui.

 21   Question:   Est-ce qu'on a satisfait votre demande?

 22   Réponse:    Non, on n'a pas répondu à notre demande. C'est à cette époque-

 23   là qu'ils ont commencé à organiser l'armée, qui n'était pas avec nous, et

 24   c'était déjà évident, un jour ou l'autre, ceci s'est démontré par la

 25   suite, c'est une armée qui s'est retournée contre nous.


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  1   Question:   Monsieur Neimarevic, vous étiez en contact avec vos

  2   paroissiens, et vous avez pu obtenir beaucoup d'informations. Pourriez-

  3   vous nous dire si les Croates aidaient les Musulmans à Zenica, dans ce

  4   premier temps, dans votre municipalité en envoyant des armes, de

  5   l'équipement, ou bien d'une autre façon?

  6   Réponse:    Nous avons essayé d'aider les Musulmans, et ceci aussi bien du

  7   point de vue humanitaire qu'en leur envoyant des armes que nous avons

  8   obtenues de temps à autres. Moi, personnellement, j'ai aidé les Musulmans

  9   en envoyant de la nourriture. Nous avons disposé de notre pharmacie

 10   également, à Travnik, et les médicaments ont été mis à la disposition des

 11   Musulmans, en grande partie. Nous avons aidé également les Serbes qui

 12   étaient en conflit avec nous, mais ils sont restés avec nous. Nous leur

 13   avons fourni la nourriture et tout ce dont ils avaient besoin, parce que

 14   ce n'était pas leur faute. Eux-mêmes, ils ont été menacés, à cette époque-

 15   là.

 16   Question:   Au paragraphe 8, vous avez tenu à nous parler d'une

 17   conversation que vous avez surprise en automne 1992, quand vous vous êtes

 18   rendu au poste de police à Novi Travnik pour proroger votre permis de

 19   conduire.

 20   Réponse:    Oui. Ceci m'a choqué, je dois dire, car à ce moment-là, j'ai

 21   surpris un entretien entre les deux policiers qui étaient sur place. Il y

 22   avait des informations qui parvenaient et qui n'étaient pas bonnes. A ce

 23   moment-là, on a commencé à dire que nous autres, les Croates, nous

 24   voulions vendre la Bosnie-Herzégovine, que nous souhaitions partager la

 25   Bosnie-Herzégovine avec d'autres. Tout ceci était en fonction de la montée


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  1   de tension, ce qui a par la suite provoqué la guerre entre nous. Bosnanski

  2   Brod est tombée, et à cette époque-là ils ont dit: "Ce sont les Croates

  3   qui ont vendu Bosnanski Brod, mais si jamais il vendent Jajce qui était

  4   encerclée pendant une grande époque, nous allons les entendre à Karaula

  5   c'est un village Musulman qui mène vers Travnik, nous allons les tuer et

  6   nous allons leur prendre des armes". Ceci m'a vraiment frappé, m'a

  7   perturbé. Moi, je suis un curé et je ne pouvais pas croire que de telles

  8   choses pouvaient arriver entre nous.

  9   Question:   Merci. Quand vous parlez maintenant Jajce, c'était la fin de

 10   1992, pourriez-vous nous dire si cet afflux assez grand de réfugiés, en

 11   majorité de Musulmans, s'étaient rendus dans le territoire de Travnik et

 12   dans d'autres villes de la Bosnie Centrale, et comment ceci s'est reflété

 13   sur cet équilibre qui existait auparavant, équilibre ethnique, si je peux

 14   m'exprimer ainsi.

 15   Réponse:    Oui. C'était une des raisons pour lesquelles le conflit s'est

 16   déclenché entre nous. Nous avons senti qu'il y avait quelque chose qui se

 17   passait qui était assez étrange. Ce qui était intéressant, c'était de

 18   constater que tous les réfugiés de Bozenska Krajina, de Banja Luka de

 19   Kluc, de Prijedor etc, tous affluaient en Bosnie centrale et à Travnik

 20   plus particulièrement. Les hommes en âge de combattre restaient à Travnik

 21   alors que les autres, les femmes et les enfants s'acheminaient vers la

 22   Croatie où ils étaient installés, hébergés dans des hôtels. Et puis tout

 23   d'un coup, un très grand nombre de Musulmans s'est manifesté dans toutes

 24   les municipalités en Bosnie Centrale. Ceci a provoqué la peur parmi les

 25   Croates, parce que nous nous sommes posés la question de ce qui allait se


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  1   passer si jamais un conflit se déclenchait. Un très grand nombre de

  2   Mujahedin également se sont rendus et sont venus des pays arabes et ce qui

  3   a véritablement provoqué la terreur parmi la population croate. Cette peur

  4   était encore plus grande au moment où ils ont commencé à provoquer des

  5   catholiques. Ma propre maison à Guca Gora a fait l'objet également de ces

  6   provocations. Ils se rendaient sur les camionnettes, dans les combis, en

  7   traversant les villages purement croates, en criant "Allahu-Ekber" et

  8   c'est de cette manière là que l'on sentait que nous avons été menacés. Une

  9   tension montait de plus en plus.

 10   Question:   Pourriez-vous nous dire quel était le village où se trouvait

 11   le centre, la base des Mudjahedin?

 12   Réponse:    C'était Mehuric, 5 ou 6 kilomètres à vol d'oiseau par rapport

 13   à Guca Gora, au nord-est. C'est la vallée de la rivière Bjela.

 14   M. Bennouna: Pardon Monsieur Naumovski, j'aimerais demander à M.

 15   Neimarevic, il dit que ce qu'il appelle des Moudjahidin ont utilisé, vous

 16   dites qu'il y a eu beaucoup de provocations et que vous-même, vous avez

 17   fait l'objet de provocations dans votre maison. Est-ce que vous pouvez

 18   nous dire ce que l'on entend par provocations, ce que vous entendez, vous,

 19   par provocations, précisément? Vous avez parlé des provocations générales.

 20   Vous avez dit qu'ils ont fait des provocations à l'égard des Croates.

 21   Qu'est-ce que concrètement sont les provocations?

 22   M. Neimarevic (interprétation): Ils ne se sont pas véritablement attaqués

 23   à ma maison, mais c'est à Guca Gora dans mon village, ils venaient dans

 24   des camionnettes, des camions, et parmi une population de mon village qui

 25   était très pacifique, Guca Gora, ils criaient "Allahu-Ekber". C'est un


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  1   salut et ceux qui savent ce que c'est et qui ont vécu en Bosnie-

  2   Herzégovine savent très bien que c'était une provocation. C'est de cette

  3   manière-là qu'on provoquait les gens, ou bien on provoquait un désordre

  4   parce qu'ils voulaient probablement demander la réponse de l'autre côté

  5   dans tous les cas. Crier à haute voix "Allahu-Ekber" dans un village

  6   purement catholique, cela ne pouvait que provoquer la terreur. Et les gens

  7   étaient véritablement troublés et perturbés et ils savaient que quelque

  8   chose allait se passer. C'était un signe précurseur de ce qui s'est passé

  9   par la suite, le 8 Juin 93.

 10   M. Bennouna: Merci Monsieur Neimarevic. Donc c'est ce que vous avez dit.

 11   Ils criaient: Dieu est grand… dans les villages. Cette formule, comme une

 12   formule de foi, c'est tout. Il n'y a pas d'autres actes de provocation?

 13   Réponse:    A ce moment, ce n'était que cela.

 14   M. Bennouna: Merci.

 15   M. Naumovski (interprétation): Merci; Monsieur le Président, Messieurs les

 16   Juges. Nous pouvons poser la question. Nous nous rattachons à ce que le

 17   Juge avait posé comme question. Est-ce que les Moudjahidin qui venaient

 18   dans votre village étaient armés ou non?

 19   Réponse:    Oui, ils étaient armés.

 20   Question:   Merci. Au paragraphe 10, vous parlez d'un entretien que vous

 21   avez eu avec le représentant de la FORPRONU de Britbat. Vous avez parlé de

 22   la compétence et de l'aide que la FORPRONU aurait dû fournir pour vous

 23   défendre contre les Serbes.

 24   Réponse:    Oui, c'est le chapelain qui est arrivé chez moi. Il m'a dit

 25   que nous pouvions organiser une réunion. A l'office de ma paroisse, nous


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  1   avons organisé notre entretien et lors de ces entretiens, je lui ai

  2   demandé si jamais les Serbes nous attaquent, si la JNA se rendait dans

  3   notre région, s'ils allaient nous défendre pour préserver nos propres

  4   vies. Il m'a dit qu'ils n'étaient pas venus pour nous défendre mais qu'ils

  5   sont là, la FORPRONU, pour protéger les convois, pour nous fournir l'aide

  6   humanitaire et lors de cette réunion, il nous a demandé, il nous a prié

  7   d'organiser éventuellement une réunion où on convoquerait aussi bien les

  8   chefs religieux musulmans, que catholiques pour discuter de la situation

  9   des problèmes, pour voir ce qu'il est possible de faire dans cette région

 10   pour éviter le conflit et la guerre. Les curés ont accepté avec

 11   satisfaction cette proposition, car nous avons vu que c'était une

 12   possibilité effectivement d'engager un dialogue et puis d'aboutir à une

 13   solution positive qui aurait pu être bénéfique pour nous tous. Ce

 14   chapelain représentant de la FORPRONU, m'a informé quelques jours plus

 15   tard que malheureusement les chefs religieux musulmans ne voulaient pas

 16   cette réunion conjointe et qu'ils n'étaient pas prêts à participer à cette

 17   réunion.

 18   Question:   Merci.

 19   Passons au paragraphe 11. Vous avez commencé à évoquer les événements qui

 20   se sont produits le jeudi 5 Avril 1993, le Jeudi Saint.

 21   Très brièvement s'il vous plaît, pourriez-vous nous dire qui a lancé

 22   l'attaque, quelles sont les installations qui ont été endommagées, etc.?

 23   Réponse:    Oui tout à fait. Cela s'est produit le Jeudi Saint. Mes deux

 24   voisins qui organisaient la chorale et qui connaissaient quelqu'un à

 25   Travnik qui savait jouer de la musique, ont organisé la messe à l'occasion


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  1   du Jeudi Saint et voilà. Puis, pendant les célébrations, ils se sont

  2   rendus à Guca Gora, puis ils sont revenus à Travnik. A Travnik, l'un d'eux

  3   a été battu à tel point qu'il est devenu méconnaissable. L'autre n'a pas

  4   été touché, enfin cet autre voisin, mais celui de Travnik a également

  5   essuyé beaucoup de coups, Antos Miljamic, qui est mon voisin et le fils de

  6   mon parrain, a pratiquement perdu connaissance. Il était vraiment très

  7   amoché.

  8   Question:   Dites-nous, que s'est il passé à la pharmacie, la pharmacie de

  9   Caritas? Il y a eu d'autres événements, à Travnik.

 10   Réponse:    Oui, ils ont complètement vidé la pharmacie en question. Ils

 11   ont cassé et saccagé nombre de boutiques qui étaient la propriété des

 12   Croates de Travnik, puis ils ont commis une erreur considérable, qui

 13   consistait à brûler les drapeaux du peuple croate à Travnik. C'était un

 14   signe de dénigrement et, à ce moment-là, l'homme qui était à la tête des

 15   observateurs européens qui se trouvaient à ce moment à Travnik et qui a

 16   tout vu, lui a répondu que cela n'était pas bien, et que cela allait

 17   coûter cher au peuple musulman de Bosnie Centrale s'ils continuaient à se

 18   comporter de cette façon-là.

 19   Question:   A l'instant, Monsieur Neimarevic, vous avez dit qu'à Pâques,

 20   un de vos amis musulmans est venu vous voir, et qu'il vous a fait part de

 21   son avis au sujet des événements qui étaient en cours.

 22   Réponse:    Comme je viens de le dire, c'était un photographe; il

 23   s'appelle Hazim. C'est un ami que je voyais souvent. Il est venu voir à

 24   Guca Gora, qui est à dix kilomètres de Travnik. Il était extrêmement

 25   agité, nerveux, triste, et il m'a souhaité "Bonnes Pâques", puis il m'a


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  1   dit justement cela, il m'a dit qu'il regrettait ces événements et que son

  2   peuple n'avait aucun droit de faire cela à Travnik, puisque Travnik avait

  3   été, pendant des siècles, au croisement des cultures, des confessions, et

  4   finalement du pouvoir également.

  5   Question:   Vous a-t-il dit, s'il vous plaît, qui attisait le feu à

  6   Travnik, qui incitait les extrémistes à agir? A-t-il mentionné qui que ce

  7   soit, dans ce contexte?

  8   Réponse:    Il ne l'a pas dit. Mais un autre de mes amis m'a dit, à un

  9   moment, lorsque nous nous sommes croisés devant cette boutique de photo,

 10   le principal Imam de la mosquée de Travnik, M. Nusret, passait, et là il a

 11   dit: "C'est lui, le plus grand extrémiste de Travnik".

 12   Question:   Très bien, merci.

 13   Au fond, vous avez déjà couvert le paragraphe 12. Peut-être une seule

 14   phrase à ce sujet. Puisque quelques-uns de vos voisins ont été passés à

 15   tabac, peut-on dire qu'à Pâques, en 1993, il n'était plus sûr de circuler

 16   à Guca Gora et aux alentours?

 17   Réponse:    Oui, bien sûr, la situation est devenue dangereuse. Les routes

 18   ont été fermées petit à petit, et tout simplement, on ne pouvait plus

 19   circuler. Les gens avaient peur, notamment ceux qui avaient une famille,

 20   femmes et enfants, parce que personne ne savait ce qui allait se produire

 21   le lendemain.

 22   Question:   Très bien. Et à l'époque, a-t-on renforcé la guerre de

 23   propagande? Avez-vous eu l'occasion de voir des émissions diffusées à la

 24   télévision?

 25   Réponse:    Cela a commencé à la télévision de Bosnie-Herzégovine avant


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  1   cette date. Il y a eu des choses qui ont été dites, qui allaient creuser

  2   le fossé entre les Croates et les Musulmans. On pouvait quasiment détecter

  3   une hostilité ouverte d'après la physionomie des présentateurs à la

  4   télévision, et on peut dire que le programme d'information de certaines

  5   radios diffusait précisément des informations qui allaient créer une haine

  6   à l'encontre du peuple croate. Un fait, si vous me le permettez, un fait

  7   que j'ai expérimenté tant de fois: les Serbes ont pilonné Zenica et nous

  8   avons entendu la provenance du tir, nous avons entendu le moment où on a

  9   chargé l'artillerie et le moment de l'explosion à Zenica. Et parfois, nous

 10   étions en mesure d'entendre les sirènes d'alerte à Zenica. Puis après, on

 11   écoutait la radio de Zenica, et le présentateur disait que les Croates

 12   étaient en train de pilonner Zenica. Sur ce, nous avons réagi, nous avons

 13   dit que cela n'était pas vrai. Il n'empêche qu'ils nous répondaient en

 14   disant: "Mais nous savons qui envoie des obus sur Zenica, et nous faisons

 15   notre travail, nous savons pourquoi nous le faisons".

 16   Question:   On peut dire que c'était de manière intentionnelle qu'on

 17   diffusait des fausses informations, d'après ce que vous venez de nous

 18   dire, d'après votre exemple?

 19   Réponse:    Oui, tout à fait, parce qu'il leur arrivait de pilonner des

 20   villages croates autour de Zenica, puis après, ils déclaraient l'état de

 21   danger général et disaient que c'étaient les Croates qui étaient à

 22   l'origine des tirs.

 23   Question:   A l'époque, au moment de Pâques, en 1993, à partir de Pâques

 24   jusqu'à l'été, vous est-il arrivé, à un moment, de voir des cars qui

 25   transportaient beaucoup de camions, qui passaient par Guca Gora en allant


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  1   de Zenica à Travnik? Et qu'a-t-on dit, à ce moment-là? Quelle était la

  2   raison de ce déplacement?

  3   Réponse:    En fait, ce que j'ai remarqué, c'est que les Musulmans étaient

  4   en train de concentrer de plus en plus de soldats à Travnik. Leur

  5   explication était de dire qu'ils se rendaient au mont Vlasic pour faire

  6   face aux Serbes. Et une fois, nous les avons arrêtés à Guca Gora; il y

  7   avait cinq ou six bus avec 250, voire plus, combattants armés qui

  8   partaient en direction de Travnik. Nous ne savions pas qu'ils allaient

  9   passer par chez nous, nous ne savions pas du tout quelle était leur

 10   destination, et ils nous ont montré une attestation, ils ont dit qu'ils se

 11   rendaient sur les lignes de front. A ce moment-là, il y a eu un accord, on

 12   a dit qu'à chaque fois, il fallait qu'ils se manifestent, qu'ils nous

 13   disent où ils se rendaient, et que le chemin de retour devait être le même

 14   que l'itinéraire à l'aller. Et avec le même nombre de combattants que le

 15   nombre de ceux qui devaient être remplacés sur les lignes.

 16   Donc, ce qui s'est passé, c'est qu'ils ne sont pas revenus par le même

 17   chemin, ils sont allés, ils ont envoyé les cars vides par Nova Bila, et

 18   cela a provoqué la peur dans la population.

 19   Question:   Après Pâques, en 1993, quels étaient les moyens de

 20   communication entre Guca Gora et le reste de la Bosnie centrale? Vous

 21   étiez dans une espèce de blocus, n'est-ce pas? Brajkovici et d'autres

 22   villages également étaient dans la même situation, vous étiez complètement

 23   encerclés par l'armée de Bosnie-Herzégovine?

 24   Réponse:    Il n'était pas impossible de se rendre à l'extérieur, parfois,

 25   mais c'était extrêmement risqué. Pour la plupart, les routes étaient


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  1   fermées, il y avait plein de postes de contrôle, on pouvait partir, mais

  2   on n'était jamais sûr de revenir.

  3   Question:   Malgré cette situation dans laquelle vous vous êtes trouvés,

  4   malgré cet encerclement, vous et vos paroissiens, à l'époque, pensiez-vous

  5   que vos voisins allaient vous attaquer? Est-ce que c'était quelque chose à

  6   quoi vous songiez?

  7   Réponse:    Il est très difficile de répondre aujourd'hui à cette

  8   question. Le problème est le suivant: à l'époque, nous n'étions ni

  9   physiquement ni psychologiquement prêts pour ces conflits avec les

 10   Musulmans. Nous souhaitions vivre en paix avec eux. Pendant la dernière

 11   semaine de mon séjour à Guca Gora, j'ai eu des conversations avec des

 12   gens, et ils m'ont dit que les Musulmans n'allaient jamais les attaquer.

 13   Malheureusement, cela s'est produit.

 14   Question:   Nous allons y revenir.

 15   Vous avez passé plusieurs mois coupés du reste de la Bosnie Centrale.

 16   Aviez-vous l'électricité, et pouviez-vous regarder la télévision

 17   normalement? Receviez-vous la presse?

 18   Réponse:    Non. Ni la télévision, ni la radio, ni la presse écrite; rien

 19   ne pouvait nous atteindre, plus rien. Nous étions coupés, et nous vivions

 20   comme nous avons vécu il y a très longtemps dans le passé, quand tout cela

 21   n'existait pas. Seuls ceux qui avaient des piles à la maison pouvaient

 22   écouter la radio, c'est à peu près tout ce qui était encore possible.

 23   Donc, entendre des informations à la radio pour se renseigner un petit peu

 24   sur ce qui se passait à l'extérieur de Guca Gora, à l'extérieur de

 25   l'endroit où nous nous trouvions.


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  1   Question:   Nous passons au paragraphe numéro 15, Monsieur le Président.

  2   Monsieur Neimarevic, au début du mois de Juin, c'est le village de Dolac

  3   qui a été attaqué. Nous pouvons dire qu'il s'agit de la banlieue de

  4   Travnik, est-ce exact?

  5   Réponse:    Oui.

  6   Question:   Connaissez-vous la date? Avez-vous la date en tête? C'était

  7   vers le 5? Il me semble que c'était le 5, c'est ce que vous avez dit dans

  8   votre résumé. Mais cela n'a pas été le seul village qui a été attaqué,

  9   puisqu'après, c'est Ovcarevo, un autre village dans la municipalité de

 10   Travnik, qui a été attaqué. Est-ce exact?

 11   Réponse:    Oui.

 12   Question:   Qui a attaqué ces villages?

 13   Réponse:    Ce sont les forces musulmanes qui les ont attaqués: Dolac a

 14   été attaquée, une localité croate très ancienne qui a une très belle

 15   église. Ce village sera complètement ravagé par la suite, détruit, et

 16   l'église a été endommagée au point qu'elle a commencé à s'effondrer. Quant

 17   à Ovcarevo, c'était une paroisse très importante, il n'y avait pas que

 18   Ovcarevo, il y avait plusieurs localités qui ont été attaquées. Turbe, par

 19   exemple, et dans les environs de Travnik aussi. Alors, un exode massif de

 20   la population croate s'est produit, ces gens ont été accueillis par la

 21   population serbe du mont Vlasic, et ils ont permis de continuer leur

 22   chemin vers la Croatie.

 23   Question:   Très bien.

 24   Ces jours-là, ou plutôt le jour de l'attaque, c'est la paroisse de

 25   Brajkovici qui a été attaquée, elle aussi. Pourriez-vous préciser un petit


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  1   peu, pour la Chambre? La paroisse de Brajkovici, en fait, ces douze

  2   villages de cette paroisse n'appartenaient pas uniquement à la

  3   municipalité de Travnik. Environ 80 % de cette paroisse appartenaient à la

  4   municipalité de Travnik, et 20 % à la municipalité de Zenica, est-ce

  5   exact?

  6   Réponse:    Oui.

  7   Question:   Tous ces villages étaient en majorité croates, mis à part le

  8   village de Cukle qui était un village mixte, croato-musulman. Est-ce

  9   exact?

 10   Réponse:    Oui. En fait, la paroisse de Brajkovici, où j'ai passé six

 11   ans, est séparée de Guca Gora par la rivière Bila. La plupart des villages

 12   étaient à 100 % croates, mis à part le village de Cukle, qui était un

 13   village mixte. Kojnevici aussi était un peu mélangé, mais c'était dans la

 14   municipalité de Zenica.

 15   Question:   Ces données que vous avez apprises ultérieurement, à savoir au

 16   moment où la paroisse de Brajkovici a été prise dans son intégralité, il y

 17   a eu combien de Croates qui ont été forcés à partir?

 18   Réponse:    Environ 5 500 Croates ont été obligés de partir de la paroisse

 19   de Brajkovici à cause des combats qui se sont déroulés le 8 Juin 1993. Un

 20   grand nombre de civils ont été tués, il y en a eu qui ont été brûlés vifs

 21   dans leurs maisons. Je connais un cas, à Grahovcici et à Brajkovici. Ils

 22   étaient nombreux à s'enfuir en direction de Nova Bila, en empruntant

 23   toutes sortes de chemins, par les bois. Puis dans les premières heures de

 24   la matinée, le 9 Juin 1993, le dernier d'entre eux est arrivé à Nova Bila.

 25   On évalue à une seule famille les Croates qui sont restés, une seule


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  1   famille de deux personnes. Puis il y a eu des Croates qui se sont cachés

  2   chez Cimici, ils étaient une vingtaine à peu près et plus tard, ils ont

  3   été échangés et ils sont arrivés à Nova Bila, à Vitez et dans cette zone-

  4   là.

  5   Question:   Très bien. Pendant qu'on parle de la paroisse de Brajkovici,

  6   vous venez de dire que l'église de Dolac a été détruite. Qu'en est-il de

  7   la chapelle de Bukovac ?

  8   Réponse:    Elle a été brûlée et détruite, rasée. On a des photos aussi.

  9   Question:   Un fait à citer, c'est aussi le cas de l'église d'Ovcarevo?

 10   Réponse:    Oui, elle a été pillée. En fait, ce qui est intéressant, c'est

 11   que les forces musulmanes, dans la plupart des cas, ne provoquaient pas de

 12   dommages sur les bâtiments à l'extérieur, mais plutôt à l'intérieur de

 13   ceux-ci. Donc à Guca Gora notamment, l'église du couvent et le couvent ont

 14   été vidés, saccagés à l'intérieur.

 15   M. Naumovski (interprétation) : Excusez-moi, on en parlera lorsqu'on en

 16   viendra à Guca Gora. Mais actuellement, ce sont les villages qui se

 17   trouvent autour de Guca Gora qui m'intéressent. Le cas de l'église

 18   catholique de Travnik m'intéresse.

 19   Réponse:    L'église de Saint-Jean Baptiste a été dévastée. Ils ont même

 20   pris le Crucifix, ils l'ont attaché à un véhicule et l'on conduit dans la

 21   ville.

 22   Question:   Vous connaissez le sort des 36 Croates dans un hameau de

 23   Bukovzi qui se trouve à côté du village de Maljine?

 24   Réponse:    Oui, c'est un événement tragique qui s'est produit. Il y avait

 25   donc ces 36 Croates qui ont été fusillés, c'était un groupe de civils et


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  1   de militaires, un groupe mixte. Une jeune femme, qui était une femme

  2   médecin, s'occupait des blessés, elle portait l'insigne de la Croix-Rouge,

  3   elle a été sortie du village et a été fusillée. Ceux qui ont survécu et

  4   qui l'ont vu de leurs propres yeux sont des témoins directs. Il y a eu des

  5   blessés, etc..

  6   Question:   Il n'est pas utile d'entrer dans les détails. Nous avons

  7   présenté la déclaration de Pavle Barac, Monsieur le Président, une

  8   déclaration sous serment, à l'appui de ce récit.

  9   Monsieur Neimarevic, au moment du début des conflits dans votre région,

 10   ces réfugiés, ils sont venus se mettre à l'abri dans votre couvent, n'est-

 11   ce pas, ces civils? Dites-nous ce qui s'est produit le 8 Juin 1993, tôt le

 12   matin, à Guca Gora? Qui a conduit l'attaque, et comment a évolué la

 13   situation?

 14   Réponse:    Le 8 Juin 1993, c'est le pilonnage de Guca Gora qui a

 15   commencé. En fait, c'était plutôt le 6, et le 8 Juin, vers trois heures et

 16   demie du matin, c'est l'attaque elle-même contre le village qui a

 17   commencé. Moi, je me trouvais au couvent avec mon collègue, sa famille,

 18   son père, sa mère, sa belle-mère et ses enfants. Les sœurs se trouvaient

 19   sur place également. Et à un moment, ce que j'ai pu voir, c'était dans la

 20   cour du couvent, des femmes qui étaient en pleurs, qui étaient extrêmement

 21   perturbées, un peu hystériques. Je leur ai demandé ce qui s'était produit.

 22   Elles m'ont dit que les Moudjahidin étaient à proximité, qu'ils se sont

 23   mis à égorger et que cinq ou six personnes avaient déjà été tuées, et que

 24   parmi ceux qui étaient arrivés, il y avait deux femmes qui avaient perdu

 25   leur mari le matin en question, et l'une d'elles m'a demandé de l'aider


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  1   pour sauver son beau-père. Je lui ai dit qu'on allait quitter le couvent.

  2   J'ai dit cela aux sœurs et à mon collègue, à Mirko Bobac, puis nous avons

  3   quitté le couvent et Guca Gora également.

  4   Question:   Qui a essayé de défendre Guca Gora? Combien de personnes ont

  5   essayé de résister à cette attaque?

  6   Réponse:    Il faut savoir que la plupart des Croates de Guca Gora

  7   travaillaient à l'étranger. Il y avait très peu d'habitants aptes à se

  8   défendre. Il y avait extrêmement peu de personnes, on était peut-être une

  9   centaine, tous compris, femmes, personnes âgées, etc.. Donc ce village,

 10   comme la plupart des villages de la paroisse, n'était pas défendu.

 11   Question:   Combien de personnes ont été tuées pendant cette première

 12   attaque menée par les forces de l'armée de Bosnie-Herzégovine?

 13   Réponse:    Six personnes, puisqu'il y en avait beaucoup qui ne savaient

 14   pas que l'armée musulmane s'était emparée du village, donc ils ne

 15   l'avaient appris que plus tard. Ils sont venus au couvent où ils sont

 16   restés jusqu'au lendemain, grâce à la Forpronu qui se trouvait par hasard

 17   en mouvement vers Guca Gora, et un dentiste de Vitez les a informés de ce

 18   qui était en train de se produire. Ils sont entrés à Guca Gora, dans ce

 19   couvent, et ils ont protégé ces réfugiés. Voilà.

 20   Question:   Monsieur le Président, si vous me le permettez, nous

 21   souhaitons faire voir un bref extrait vidéo. Il s'agit de la pièce D204/1.

 22   C'est la cote de la vidéo, mais deux séquences figurent donc dans cette

 23   vidéo. Nous avons déjà montré l'extrait qui concerne le convoi de la joie,

 24   mais nous avons un autre extrait qui concerne les événements de Guca Gora.

 25   Ce sont des extraits d'un reportage de la BBC, au sujet précisément de ce


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  1   qu'est en train de relater M. Neimarevic. Je demanderai à la cabine

  2   technique de nous montrer la vidéo.

  3         (Les interprètes indiquent que, les cabines n'ayant pas reçu de

  4         transcription, il n'y aura pas de traduction.)

  5   jonction ok

  6   M. Naumovski (interprétation): Je remercie la cabine technique. Monsieur

  7   Neimarevic, nous avons vu les images qui ont été tournées dans la cour de

  8   votre couvent, n'est-ce pas? Ce sont vos paroissiens qui montaient dans

  9   ces transporteurs. Vos voisins, vos proches, vous les avez reconnus pour

 10   la plupart?

 11   Réponse:    Oui, bien sûr que je les ai reconnus. Ce sont mes voisins, les

 12   gens les plus proches, ma tante, les membres de ma famille. Ils se

 13   trouvaient dans ce couvent, et puisque les forces musulmanes tiraient sur

 14   le couvent à l'aide de différentes armes, c'est la première fois que les

 15   forces de la FORPRONU ripostent. Ils ont tiré sur les positions musulmanes

 16   afin de protéger la population civile qui n'était absolument pas armée.

 17   C'est la première fois que la FORPRONU tire.

 18   M. le Président (interprétation): Avons-nous la date pour la vidéo, Maître

 19   Naumovski?

 20   M. Naumovski (interprétation): Il me semble que c'était le 8 Juin, en fait

 21   mon collègue me corrige, le 9 Juin 1993.

 22   M. le Président (interprétation): Si c'est bien le 9 Juin, très bien mais

 23   pourriez-vous s'il vous plaît le vérifier et en informer la Chambre après

 24   la pause?

 25   M. Naumovski (interprétation): Oui tout à fait.


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  1   M. Neimarevic (interprétation): C'était dans l'après-midi du 8 Juin et

  2   l'évacuation s'est produite le 9 ,puisqu'ils ont passé la nuit dans

  3   l'église et dans le couvent de Guca Gora. Donc l'événement s'est produit

  4   le 8 Juin dans l'après-midi, lorsque les soldats anglais ont tiré, et

  5   l'évacuation de la population s'est produite le lendemain, autrement dit

  6   le 9.

  7   Question:   Cette même vidéo nous présente les événements du 8 et du 9

  8   Juin. Est-ce exact? Ai-je bien compris?

  9               (Le témoin acquiesce.)

 10   Question:   Monsieur Neimarevic, vous avez été forcé vous-même de quitter

 11   le couvent, mais qui est entré dans ce couvent par la suite?

 12   Réponse:    Lorsque les civils l'ont quitté, ainsi que les soldats anglais

 13   qui se sont retirés vers Vitez et vers Nova Bila, ce sont les forces

 14   musulmanes qui se sont installées dans le couvent et c'est là qu'elles ont

 15   installé leur commandement. Leurs soldats étaient basés sur place.

 16   Question:   Excusez-moi, pendant un mois ou plutôt un mois plus tard,

 17   grâce à la médiation de la FORPRONU, vous avez pu retourner dans votre

 18   couvent. Dites-nous quelle était la situation là-bas? Dans quel état était

 19   le couvent?

 20   Réponse:    Il était vraiment dans un état déplorable. Il était couvert de

 21   graffitis, de citations du Coran je suppose, puisque c'était en langue

 22   arabe, sur les portes des chambres, il y avait des inscriptions de tous

 23   genres, également dans le bureau, sur une couverture, ils avaient écrit

 24   une citation du Coran. L'église était complètement ravagée, les orgues

 25   étaient détruites, en fait brûlées, d'après ce que j'ai pu voir, puis,


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  1   nous avions une fresque d'un peintre connu, Zlatko Freser. Cette fresque a

  2   été recouverte de peinture. Ils ont également mis de la peinture sur les

  3   bancs, puis nous avions des fresques et une mosaïque connue du peintre

  4   Dulcic, cela également était endommagé.

  5   Question:   L'orgue, vous dites qu'on a mis de la peinture sur les bancs,

  6   qu'est-ce qu'on a mis sur les bancs?

  7   Réponse:    Il n'y avait non seulement de la peinture mais aussi des

  8   matières fécales.

  9   Question:   Peut-on en ce moment, Monsieur le Président, présenter notre

 10   pièce, un résumé d'information militaire du 16 Juin 1993, et j'attire

 11   l'attention de la Chambre sur le paragraphe numéro 8. Huissier, s'il vous

 12   plaît, pourriez-vous nous aider. Le paragraphe 8 en effet parle de ce que

 13   dit M. Neimarevic, c'est la raison pour laquelle il ne faut pas en donner

 14   lecture.

 15   Mme Ameerali (interprétation): Le document sera marqué de 290/1.

 16   M. Naumovski (interprétation): Je voudrais ne pas vous prendre beaucoup de

 17   temps Monsieur Neimarevic. Nous avons préparé des photographies sur ce que

 18   vous avez relaté, sur l'intérieur de l'église et nous pourrions également

 19   verser ces photographies au dossier.

 20   Si vous voulez bien les placer sur le rétroprojecteur, la photographie est

 21   en couleur. Les photographies originales sont en couleur, les autres en

 22   noir et blanc mais de toute façon, je pense que M. Neimarovic serait en

 23   état et en mesure de nous dire et de nous préciser de quoi il s'agissait.

 24   Il s'agissait d'un des fragments, Monsieur Neimarovic, , de ce qui s'est

 25   passé à l'intérieur du couvent.


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  1   Réponse:    Oui effectivement. Nous voyons ici les photographies de

  2   l'intérieur de l'église et de ce qui s'est trouvé et de ce qui s'est passé

  3   en dehors de la cour du couvent. On n'en parle pas.

  4   Question:   Mais je vais demander tout simplement à l'huissier de bien

  5   placer sur le rétroprojecteur, la photographie.

  6   Réponse:    Nous voyons la photographie principale, l'hôtel de l'église de

  7   Guca Gora; vous voyez qu'il y a une peinture par laquelle on a couvert un

  8   certain nombre de murs.

  9   Question:   Est-ce que vous pouvez s'il vous plaît placer quelque peu à

 10   droite la photographie? Je m'adresse à l'huissier.

 11   Réponse:    A droite, vous voyez donc la cour, c'est de là qu'on avait

 12   tiré par des armes à feu, par la suite, ils ont mis du feu. Il a été

 13   possible de voir ceci très clairement.

 14   Question:   Et tout à fait à droite?

 15   Réponse:    Il y avait ces six voisins de Guca Gora qui ont été tués le 8

 16   Juin 1993.

 17   Question:   Et ce sont les tombes qui ont été profanées?

 18   Réponse:    Oui.

 19   Question:   Nous n'allons pas poursuivre. Si vous voulez bien, je

 20   m'adresse au greffe pour attribuer la côte pour cette pièce à conviction.

 21   Mme Ameerali (interprétation): La pièce sera cotée D291/1.

 22   Question:   Même si M. Neimarevic n'a pas pu très bien constater dans quel

 23   état étaient les maisons dans les environs, nous avons quelques

 24   photographies et je vais demander à l'huissier de prendre ce jeu de

 25   photographies.


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  1   Je ne vais pas prendre du temps, à la Chambre, mais on va tout simplement

  2   placer sur le rétroprojecteur, quelques photographies des maisons et puis,

  3   si le témoin veut bien nous dire à qui appartenaient ces maisons.

  4   Réponse:    Ces maisons que vous voyez, c'est d'abord la maison de mon

  5   cousin,.

  6   Question:   Mais pas dans le détail.

  7   Réponse:    Oui il s'agit des maisons à Guca Gora. C'est tout à fait

  8   clair.

  9   Question:   Oui, oui, d'accord, on s'arrête là.

 10   M. Naumovski (interprétation): Je voudrais attirer votre attention sur

 11   cette photographie qui est à droite. C'est marqué: le corps.

 12   Réponse:    Oui 7ème Corps. C'étaient les forces musulmanes.

 13   Question:   Merci. Je pense que cela suffit. Je vais tout simplement

 14   demander la côte.

 15   Mme Ameraali (interprétation): D292/1.

 16   M. Naumovski (interprétation): Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

 17   nous avons encore une photographie. Il s'agit de la maison de M.

 18   Neimarevic. Je m'excuse, mais nous ne disposons pas de l'original. Il y a

 19   une erreur mais c'est demain que nous allons remettre la photographie

 20   originale au greffe. Monsieur Neimarevic, pour ce qui concerne ces

 21   photographies qui ont été prises sur place, vous avez reconnu votre

 22   maison. Est-ce que vous voulez nous confirmer tout simplement s'il s'agit

 23   bien de votre maison, une fois qu'elle sera placée sur le rétroprojecteur?

 24   Réponse:    Oui. C'est ma maison natale. Derrière ces murailles que vous

 25   voyez, quelque peu à droite, il y a une autre maison également qui


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  1   m'appartenait également, elle aussi a été brûlée, incendiée.

  2   Question:   Merci, Monsieur l'Huissier. On n'aura plus besoin de votre

  3   aide.

  4   Monsieur Neimarevic, nous avons parcouru très brièvement votre résumé.

  5   C'est pour économiser du temps, mais juste une explication à la Chambre.

  6   La Chambre a déjà vu que les maisons à Guca Gora ont été endommagées très

  7   gravement et elles ont été pillées également. Pourriez-vous nous dire

  8   combien de maisons à Guca Gora et dans les environs ont été pillées, ont

  9   été dévastées, à peu près?

 10   Réponse:    Je ne pourrais pas vous dire exactement combien au total, mais

 11   quelques milliers de maisons.

 12   Question:   Mais je pense à Guca Gora.

 13   Réponse:    250 maisons étaient au total. Il y avait très peu de maisons,

 14   peut-être 10 ou 15 qui sont restées, qui n'ont pas été incendiées, pas été

 15   détruites, mais qui ont été pillées à 100 %.

 16   Question:   Encore une donnée, s'il vous plaît, est-ce que des maisons en

 17   question ont été réparées, est-ce que les paroissiens sont retournés à

 18   Guca Gora?

 19   Réponse:    Non. Malheureusement, un nombre très restreint de maisons ont

 20   été rénovées, d'après les informations dont nous disposons, on ne sait pas

 21   si on va faire.

 22   Question:   Excusez-moi, est-ce que vous nous avez donné le dernier numéro

 23   pour la pièce à conviction, la toute dernière s'il vous plaît? Je

 24   m'adresse au greffe.

 25   Mme Ameraali (interprétation): D293/1.


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  1   M. Naumovski (interprétation): Merci. Votre paroisse, Guca Gora, avant le

  2   8 juin 1993, avait combien d'habitants au total, je parle de paroissiens

  3   peut-être?

  4   Réponse:    Il y avait 3 500 paroissiens, sur ce chiffre, pratiquement

  5   tout le monde a quitté leur foyer, exception faite de Brankovac et de ...

  6   Ce sont les deux petits villages.

  7   Question:   Excusez-moi, mais ces 3 500 paroissiens, approximativement,

  8   c'est un nombre qui s'ajoute au total de ceux qui ont été obligés de

  9   partir de la municipalité de Travnik ou de la municipalité de Zenica.

 10   C'était un nombre extrêmement important, n'est-ce pas?

 11   Réponse:    Oui, absolument. De Brajkovici, plus de 5 000 personnes sont

 12   parties pour la paroisse centrale, il y avait à peu près le même nombre.

 13   Les environs de Zenica ont été également abandonnés. Il y a d'autres

 14   paroisses d'où les gens ont été expulsés.

 15   Question:   Est-ce que 20 000 personnes à peu près ont été expulsées de

 16   cette région? Je parle des Croates.

 17   Réponse:    Oui, au minimum 20 000.

 18   Question:   Merci.

 19   Dernier paragraphe de votre résumé.

 20   Vous avez exprimé non seulement votre point de vue concernant les raisons

 21   du déclenchement de conflit entre les Musulmans et les Croates en Bosnie

 22   Centrale mais vous avez répété également quelque chose que votre ami

 23   musulman que vous respectiez beaucoup, vous a dit. Quelle était la raison

 24   principale de ce conflit d'après vous?

 25   Réponse:    Les dirigeants musulmans voulaient maintenir, d'abord


Page 22011

  1   préserver la Yougoslavie. C'est un premier point.

  2   Question:   Mais je ne voulais pas tellement rentrer en débat politique.

  3   Je voulais tout simplement vous poser la question de ce qui s'est passé

  4   chez vous.

  5   Réponse:    Un de mes amis, il y a sept ou huit mois, avant le conflit, a

  6   dit que ceci allait se passer. Il nous a dit qu'ils ne se sont pas

  7   préparés pour la guerre avec des Serbes, mais nous nous sommes préparés

  8   pour vous-mêmes. Nous avons suffisamment de munitions pour vous-mêmes et

  9   nous avons suffisamment de nourriture et de médicaments pour pouvoir

 10   survivre. Et en gros, je pense que la guerre a eu lieu parce que les

 11   Musulmans ont perdu les territoires en Bosnie-Herzégovine. Pour pouvoir

 12   survivre, ils ont été parfaitement conscients qu'ils ne pouvaient rien

 13   faire contre les Serbes, qu'ils allaient périr tout simplement et c'est la

 14   raison pour laquelle ils ont commencé le conflit avec les Croates parce

 15   qu'ils voulaient compenser les territoires qu'ils avaient perdus. Et ceci

 16   a été notamment visible à travers l'interview du défunt général Pacovic

 17   qui avait parlé pour le journal de Zagreb en 1994. C'était l'avant dernier

 18   numéro ou dernier numéro de ce journal et il a dit, je cite:.

 19   M. le Président (interprétation): Je crois que ceci dépasse la capacité

 20   qu'a le témoin de déposer à ce propos.

 21   M. Naumovski (interprétation): Merci, Monsieur Neimarevic. On va terminer

 22   sur le point de ce que vous avez soulevé, que les Musulmans soi-disant

 23   voulaient compenser le territoire parce qu'ils avaient perdu les

 24   territoires des Serbes. C'est un Musulman qui vous l'a raconté?

 25   Réponse:    Oui.


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  1   Question:   Je vous remercie, c'est de cette manière-là que je termine

  2   l'interrogatoire et je remercie la Chambre.

  3   M. Kovacic (interprétation): Nous n'avons pas de questions à poser, merci,

  4   Monsieur le Président.

  5   Mme Somers (interprétation): Désolée de devoir soulever cette question en

  6   présence du témoin mais je dois informer la Chambre de ce que M. Nice a

  7   reçu ce matin, la déclaration sous serment de M. Franjo, il n'avait pas

  8   été informé, il n'avait pas eu la possibilité d'examiner, ce qui veut dire

  9   que l'accusation ne peut pas intégrer ceci dans notre contre-

 10   interrogatoire. Je voudrais que la Chambre sache que nous avons eu une

 11   conversation avec Hunter Williams dimanche soir entre 9 heures et 9 heures

 12   et demi du soir au moment où une copie des résumés était préparée et

 13   apparemment ceci a été envoyé, mais cette déclaration sous serment

 14   apparemment était déjà prête le 30 Juin. Pourrons-nous peut-être

 15   l'exclure?

 16   M. le Président (interprétation): Je ne suis pas prêt à avoir des échanges

 17   d'arguments sur les circonstances entourant cette déclaration sous

 18   serment. Je pense que nous pouvons nous concentrer pour le moment sur la

 19   déclaration du témoin.

 20               (Le témoin est contre interrogé par Mme Somers.)

 21   Mme Somers (interprétation): J'aimerais vous demander une précision

 22   Monsieur? Etes-vous toujours curé?

 23   Réponse:    Oui.

 24   Question:   Est-il convenable que je m'adresse à vous en vous parlant

 25   comme si vous étiez le père Neimarevic?


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  1   Réponse:    Oui, vous pouvez vous adresser comme vous voulez.

  2   Question:   Père Neimarevic, veuillez-nous indiquer où vous travailliez et

  3   où vous travaillez depuis 1993? Où est votre base?

  4   Réponse:    En 1993, c'était à la fin du mois d'Octobre, que j'ai quitté

  5   le territoire de Bosnie Centrale. Et ensuite, j'ai rendu visite à ma

  6   famille, à mes soeurs tout premièrement, à quelques uns de mes amis, et

  7   après, on m'avait chargé d'être chapelain à côté de Zagreb parce que je ne

  8   pouvais pas retourner sur le territoire dans le territoire de Bosnie

  9   Centrale.

 10   Question:   Et depuis 1993, vous habitez à Zagreb en Croatie, est-ce

 11   exact?

 12   Réponse:    Moi, j'étais très peu de temps à Zagreb, j'étais beaucoup plus

 13   à l'étranger. Et j'ai été à Blaskovac à côté de Zagreb à un moment donné

 14   et par la suite, six mois en Australie.

 15   Question:   Pourriez-vous nous situer la période au cours de laquelle vous

 16   vous trouviez en Australie, et est-ce que cela a été l'endroit où vous

 17   vous êtes trouvé à l'étranger?

 18   Réponse:    J'ai passé 6 mois et je suis rentré au début du mois de Mars,

 19   je ne peux pas me souvenir exactement de la date, mais c'était une semaine

 20   avant que le Pape se rende à Zagreb car je suis allé relayer mes confrères

 21   en Australie qui ont organisé le séjour du Pape à Zagreb.

 22   Mme Somers (interprétation): C'était la visite du Pape en 1997? C'est à

 23   cela que vous pensez, ou bien c'était en 1995?

 24   Réponse:    C'était la première visite du Pape en Croatie. C'était à la

 25   fin de 1994, si je ne m'abuse.


Page 22014

  1   Mme Somers (interprétation): Le retour début Mars, c'était en 1994. Je

  2   peux m'assurer que nous sommes tout à fait exacts pour ce qui est des

  3   dates et des années?

  4   Réponse:    1995.

  5   Mme Somers (interprétation): Et vous vous êtes trouvé à l'étranger pendant

  6   une année à peu près, est-ce exact?

  7   Réponse:    C'est mon supérieur qui m'avait envoyé en Suisse pendant un an

  8   et j'ai eu pour mission, la mission croate en Suisse.

  9   Mme Somers (interprétation): Et cette mission croate, est-ce que vous

 10   parlez d'une mission du gouvernement ou est-ce qu'il s'agit d'une mission

 11   religieuse?

 12   Réponse:    Je pense à la mission catholique, religieuse en Suisse.

 13   Question:   Pourriez-vous nous donner le nom de ce supérieur qui vous a

 14   envoyé en Suisse?

 15   Réponse:    C'était père Tomislav, il était à la tête des franciscains à

 16   Mostar. Tomislav Pervan. Moi j'étais dans leur province et j'ai travaillé,

 17   j'étais chargé des réfugiés.

 18   Question:   Et votre supérieur, où se trouvait-il? Je parle de l'endroit

 19   physique où il se trouvait en Bosnie-Herzégovine?

 20   Réponse:    Le supérieur de mon ex paroisse se trouvait à Zagreb et c'est

 21   lui qui m'a envoyé à Ljubuski pour m'occuper des réfugiés croates, des

 22   Croates de Bosnie Centrale.

 23   Mme Somers (interprétation): Votre province au départ, est-ce qu'elle se

 24   trouvait en Bosnie?

 25   Réponse:    Oui, ma première province était en Bosnie.


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  1   Question:   Et qui était votre supérieur à cette époque au moment où vous

  2   vous trouviez dans cette province de Bosnie?

  3   Réponse:    C'était le père Petar Andelovic.

  4   Question:   Nous avons reçu un résumé à la fois en anglais et en croate,

  5   ce résumé, est ce vous qui l'avez rédigé?

  6   Réponse:    Ce résumé que vous avez obtenu, c'est moi-même qui l'ai

  7   rédigé.

  8   Question:   Le bureau du Procureur a eu des contacts avec un supérieur

  9   très élevé dans la hiérarchie religieuse en Bosnie et a reçu pour

 10   information ceci, apparemment, la politique était qu'aucun franciscain ne

 11   pouvait être interrogé par le bureau du Procureur, n'était autorisé à

 12   déposer. Pourriez-vous nous dire si vous, vous avez dû obtenir

 13   l'autorisation d'un quelconque supérieur de votre hiérarchie qui vous

 14   permettrait ou qui vous a permis de déposer ici aujourd'hui?

 15   Réponse:    Pour ce qui est de mon témoignage, ma déposition, on m'a

 16   demandé de témoigner et aucun dans ma province n'était contre cette idée.

 17   Question:   Avez-vous informé vos supérieurs de votre venue à ce Tribunal

 18   et du fait que vous aviez eu des entretiens avec la défense?

 19   Réponse:    Mon supérieur actuel est au courant. Il est informé par mon

 20   supérieur du cloître du couvent que j'allais déposer, que j'allais me

 21   rendre ici.

 22   Question:   Qui est votre supérieur aujourd'hui?

 23   Réponse:    Mon supérieur est le Père Tomislav.

 24   Question:   C'est un prénom, je suppose. Quel est son nom de famille, s'il

 25   vous plaît?


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  1   Réponse:    Père Tomislav Pervan.

  2   Question:   Père Neimarevic, les fonctions que vous indiquez aujourd'hui

  3   ici dans ce prétoire, est-ce que ce sont des fonctions officielles de

  4   l'église catholique en Bosnie-Herzégovine ainsi qu'en Croatie?

  5   M. le Président (interprétation): Qu'est-ce que vous voulez dire par là,

  6   Madame Somers? A quelle partie du témoignage du témoin faites-vous

  7   référence?

  8   Mme Somers (interprétation): Eh bien, il y a certains commentaires qui ont

  9   été formulés à propos des rapports qui existaient, et pour ce qui est de

 10   la montée des tensions, des causes du conflit, je dispose de pièces qui

 11   vont porter là-dessus. Et je voulais vous demander si je pouvais obtenir

 12   une réponse du témoin sur ce point.

 13   M. le Président (interprétation): Monsieur Neimarovic, vous avez entendu

 14   ce que vient de dire Mme Somers. Est-ce que vous donnez ici un témoignage

 15   qui est le reflet de la position officielle de l'église ou est-ce que vous

 16   donnez ici votre propre avis dans le cadre de votre déposition?

 17   Réponse:    Moi je parle en mon nom personnel. Et je raconte ce que j'ai

 18   vécu, ce que j'ai vu, ce que j'ai entendu. Tout ce dont j'ai réfléchi.

 19   C'est cela que je vous ai relaté aujourd'hui.

 20   Mme Somers (interprétation): Excusez-moi.

 21   Les Juges se consultent sur le siège.

 22   M. le Président (interprétation): Poursuivez.

 23   Mme Somers (interprétation): Monsieur l'Huissier, est-ce que on peut

 24   remettre au témoin la pièce Z 14-65.7? Peut on également placer une copie

 25   sur le rétroprojecteur. Pourriez-vous placer la version en Croate sur le


Page 22017

  1   rétroprojecteur, parce que je ne suis pas sûr que les interprètes

  2   disposent de cette pièce. Reconnaissez-vous ce questionnaire, Monsieur

  3   Neimarevic?

  4   Réponse:    Vous parlez du questionnaire numéro 8?

  5   Question:   Oui, le reconnaissez-vous ce formulaire? Est-ce un

  6   questionnaire que vous avez vous-même rempli? Est-ce bien vous, ce

  7   monsieur qui porte le nom de Stjepan Neimarevic?

  8   M. Bennouna: Pardon, Madame Somers, est-ce que la partie en anglais est la

  9   traduction exacte de ce qui suit en Serbo Croate? Je ne crois pas.

 10   Mme Somers (interprétation): Cela devrait être le cas. Cela devrait

 11   indiquer les noms, les dates.

 12   M. Bennouna: Je n'ai pas l'impression car nous avons certaines réponses de

 13   M. Neimarevic qui ne se trouvent pas dans la partie questionnaire et qui

 14   se limitent au questionnaire, j'ai l'impression. Je ne sais pas si c'est

 15   une traduction exacte de ce qu'il y a de l'autre côté.

 16   Mme Somers (interprétation): Vous voulez que je le parcoure pour m'assurer

 17   qu'il y a correspondance? Cela ne sera pas long. Mais apparemment…

 18   M. Naumovski (interprétation): Excusez-moi, Monsieur le Président,

 19   Messieurs les Juges, je ne veux pas perturber le contre-interrogatoire

 20   mais je vois que dans le questionnaire on dit que ces données vont être

 21   traitées de manière strictement confidentielle et c'est un document de la

 22   Communauté Européenne. Par conséquent, si c'est comme cela, nous sommes en

 23   audience publique. A ce moment-là, au moins on peut passer à huis clos

 24   partiel. Merci.

 25   Mme Somers (interprétation): Permettez-moi de réagir. Parce que la


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  1   quintessence de ce document porte sur des crimes de guerre or nous sommes

  2   dans un Tribunal qui est saisi de crimes de guerre. Je pense que là nous

  3   sommes tout à fait dans le cadre des compétences.

  4   M. le Président (interprétation): Nous sommes d'accord. Monsieur

  5   Neimarevic, pourriez-vous nous dire ce qu'il en est de ce document?

  6   Ceci a l'air d'être un questionnaire que vous avez rempli.

  7   Réponse:    Oui c'est moi qui l'ai rempli.

  8   M. le Président (interprétation): Oui, puisque votre nom y figure. C'est

  9   bien votre date de naissance.

 10   Réponse:    Oui effectivement.

 11   M. le Président (interprétation): Poursuivez, Madame Somers.

 12   Mme Somers (interprétation): Il n'y a pas la date à laquelle vous avez

 13   rempli ce questionnaire. Pourriez-vous nous la préciser?

 14   Réponse:    Je l'ai oublié, excusez-moi.

 15   Question:   Où avez-vous rempli ce questionnaire? A Travnik? En Croatie,

 16   en Australie?

 17   Réponse:    C'était à Ljubuski.

 18   Mme Somers (interprétation): Comment ce questionnaire vous est-il parvenu?

 19   Qui vous a demandé de le remplir?

 20   Réponse:    On m'a dit qu'il s'agissait des personnes qui communiquaient,

 21   qui était en contact avec le Tribunal à La Haye et si je voulais être

 22   témoin, qu'il fallait remplir ce questionnaire et l'envoyer dûment rempli.

 23   Je ne connais pas personnellement les gens qui me l'ont envoyé.

 24   Mme Somers (interprétation): Aujourd'hui, vous êtes au couvent de

 25   Ljubuski, n'est-ce pas?


Page 22019

  1   Réponse:    Oui, je suis actuellement à Humac, c'est le couvent à

  2   Ljubuski.

  3   Question:   Quand avez-vous rejoint ce couvent? Je ne sais plus la date

  4   que vous avez indiquée. Voudriez vous me la répéter?

  5   Réponse:    Je suis arrivé début Mai à Ljubuski.

  6   Question:   Quelle année ?

  7   Réponse:    95.

  8   Question:   Ce qui fait qu'à un moment donné, entre 1995 et la date

  9   d'aujourd'hui, vous avez rempli ce questionnaire, n'est-ce pas ?

 10               (Le témoin acquiesce.)

 11   Question:   On fait référence à certains événements dans ce questionnaire.

 12   Veuillez examiner le numéro 9. Est-ce qu'on vous a demandé d'être témoin

 13   pour des infractions ou des crimes particuliers, pour un procès

 14   particulier ? Aujourd'hui, au cours de l'interrogatoire principal, vous

 15   avez énuméré plusieurs choses qui pourraient relever de ce paragraphe.

 16   Mais je note ici que le seul élément indiqué, c'est que vous avez été

 17   présent dans le cadre d'une conversation du commandant Ilja Nakic et d'une

 18   personne qui s'appelait Puskic. Est-ce que c'est le seul crime dont vous

 19   vouliez avertir les observateurs de la Commission Européenne ?

 20   Réponse:    Ma toute première tâche était de dire ce que j'ai vu, ce que

 21   j'ai vécu. Alors qu'ici, il s'agissait des actes criminels qui ont eu lieu

 22   à à Miletici, dans la paroisse de Brajkovici où on a massacré 5 civils qui

 23   étaient de nationalité croate. Il y en a quelques uns qui appartenaient

 24   aux Témoins de Jehovah et qui n'avaient pas le droit d'avoir des armes.

 25   Ils étaient civils à 100 % alors que Suskic était général de l'armée de


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  1   Bosnie-Herzégovine.

  2   Question:   Lorsqu'on vous a demandé la nationalité spécifique ou

  3   l'identité des auteurs, vous avez cité le nom d'Alagic, commandant du

  4   troisième corps d'armée de Zenica. Est-ce que c'est le seul auteur que

  5   vous avez été en mesure de citer, le commandant lui-même ?

  6   Réponse:    Moi j'ai dit qu'il était commandant du 3ème Corps et les

  7   soldats qui ont perpétré ces crimes étaient sous sa compétence, tout au

  8   moins c'est l'information dont je disposais.

  9   Question:   Pour ne pas perdre de temps puisque sous peu nous allons avoir

 10   une pause, mais vous parlez d'un crime et du lieu où ce crime était

 11   commis, c'était Guca Gora et précédemment, vous avez cité le nom de

 12   Brajkovic, me semble-t-il. Est-ce qu'il s'agit du même crime, est-ce que

 13   vous faites un lien entre Alagic et les crimes de Guca Gora ? Pourriez-

 14   vous nous expliquer ceci avant la pause ?

 15   Réponse:    Je ne peux pas associer Alagic où qui que ce soit. Pour ce qui

 16   concerne Guca Gora, le crime s'est produit le 8 Juin 93, quand très tôt le

 17   matin, 6 catholiques avaient été tués, des paroissiens de Guca Gora.. Ici,

 18   on parle d'un autre événement. Un événement qui a eu lieu effectivement et

 19   j'en ai entendu parler dans le village de Miletici.. Ce commandant a

 20   informé Nakic que le massacre a été perpétré sur les civils à Miletici,

 21   paroisse de Brajkovici qui est à côté de Guca Gora. Il n'y a que la

 22   rivière Bila qui les sépare.

 23   M. le Président (interprétation): Il est 11 heures 5, madame Somers. Si

 24   ceci vous convient, nous allons faire une pause. M. Neimerovic, nous

 25   allons faire une pause. N'oubliez pas qu'il vous est interdit de vous


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  1   entretenir avec qui que ce soit pendant la pause. Il faut attendre pour

  2   cela la fin de votre déposition. Ceci concerne également les membres de la

  3   défense. Nous reprendrons à 11 heures 35.

  4         (La séance, suspendue à 11 heures 05, est reprise à 11 heures 38.)

  5   Mme Somers (interprétation): Monsieur Neimarevic, je reviens au

  6   questionnaire. Au point 11, vous donnez une réponse au sujet de l'identité

  7   de l'auteur, vous l'avez identifié par le nom Alagic. Est-ce que cela se

  8   réfère au numéro 9? Vous indiquez que vous avez été témoin ou victime

  9   d'actes criminels commis à l'encontre de la propriété, des biens, ou bien

 10   ou point 10… Excusez-moi, j'ai fait l'inversion des points.

 11   M. Neimarevic (interprétation): Alagic était le commandant du troisième

 12   corps, et Juskic était un commandant dans la zone. Alors, quant à votre

 13   question, au moment où j'ai rempli le questionnaire, je pensais qu'il

 14   fallait répondre en donnant les noms des personnes ou de la personne qui

 15   commandait sur ce territoire. Je ne pensais pas que c'était lui-même qui

 16   était personnellement auteur du crime, mais qu'il était à la tête des

 17   hommes qui l'ont commis. C'était donc sous sa responsabilité que les actes

 18   ont été commis.

 19   Question:   Vous n'avez pas connaissance vous-même, directement, d'actes

 20   qu'Alagic aurait commis ou n'aurait pas commis?

 21   Réponse:    Non, je n'ai pas pu me procurer ce genre d'information.

 22   J'étais à Guca Gora, et tout ce que j'ai entendu, vous l'avez

 23   vraisemblablement auprès du père Franjo Krizanac qui a inhumé ces victimes

 24   dans la paroisse de Brajkovici, à l'époque.

 25   Question:   Qui vous a dit d'inscrire le nom d'Alagic à cet endroit


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  1   précis?

  2   Réponse:    Personne ne me la dit. Tout simplement, j'ai indiqué

  3   qu'Alagic était le commandant du troisième corps d'armée.

  4   Question:   Pour que la hiérarchie de l'église soit parfaitement claire,

  5   je souhaite vous poser une question au sujet de la hiérarchie. Au sommet,

  6   il y a le Pape, qui est à la tête des franciscains, et à la tête des

  7   prêtres des diocèses. Est-ce exact? Nous avons deux lignes parallèles, les

  8   franciscains d'un côté, et les diocésains d'autre part?

  9   Réponse:    Je ne vois pas quel est l'objectif de votre question. Je

 10   ne comprends pas pourquoi vous me posez cette question.

 11   M. Naumovski (interprétation): Il me semble que cela sort complètement du

 12   champ de la déposition du témoin. Cela étant, le champ de la déposition…

 13   Je ne comprends pas pourquoi.

 14   M. le Président (interprétation): Maître Naumovski, c'est à nous d'en

 15   juger, de savoir si cela sort du champ ou non. Vous ne devez pas

 16   intervenir.

 17   Mme Somers (interprétation): Vous êtes franciscain??

 18   Réponse:    Oui.

 19   Question:   C'est un groupe de prêtres, mais il y a un autre groupe, ce

 20   sont des prêtres diocésains. Est-ce exact?

 21   Réponse:    Oui..

 22   Question:   Au-dessus des deux groupes des franciscains et des diocésains

 23   à la fois, il y a le  Vatican, le Pape. Le Pape est à la tête des deux

 24   branches de prêtres. Est-ce exact? Les deux lui sont subordonnés?

 25   Réponse:    Oui.


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  1   Question:   S'agissant de la hiérarchie franciscaine, il y a le général, à

  2   un niveau, dans la chaîne de commandement?

  3   Réponse:    Oui, c'est exact.

  4   Question:   S'agissant des franciscains, dont vous faites partie, à un

  5   niveau subordonné il y a celui qui est à la tête d'une province, en Bosnie

  6   par exemple?

  7   Réponse:    Oui, c'est exact.

  8   Question:   Et au-dessous de celui qui est à la tête d'une province, il y

  9   a le père. Et vous, vous en êtes un?

 10   Réponse:    Oui, c'est exact.

 11   Question:   Et vous vivez dans les différents monastères, et vous

 12   appartenez aux différents ordres. Est-ce une manière fidèle de présenter

 13   les choses?

 14   Réponse:    Oui.

 15   Question:   S'agissant de l'autre branche, nous avons les diocésains ; ils

 16   sont également sous l'autorité du Pape, et sous le Pape se situent les

 17   archevêques ou les évêques?

 18   Réponse:    Oui, c'est exact.

 19   Question:   Au-dessous de l'archevêque ou de l'évêque, se trouvent les

 20   prêtres diocésains ; ce sont les prêtres qui travaillent de la manière la

 21   plus directe avec les fidèles?

 22   Réponse:    Oui, c'est exact.

 23   Question:   Etes-vous en mesure de nous expliquer les divisions entre les

 24   franciscains et les prêtres diocésains en Bosnie-Herzégovine? Au sujet de

 25   l'indépendance de la Bosnie, et au sujet de l'existence de l'Herceg-


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  1   Bosnie, connaissez-vous les positions respectives de ces deux branches?

  2   Avant de répondre, pourriez-vous, s'il vous plaît, au sujet de ces deux

  3   points, l'indépendance de la Bosnie et la HZHB, nous présenter la position

  4   des responsables des provinces?

  5   Réponse:    Les positions de l'église catholique consistaient à

  6   considérer que la Bosnie est un état, que la Bosnie Herzégovine ne doit

  7   pas être partagée. C'est également la position du responsable de la

  8   province et de l'évêque. Quant à savoir quelles sont les opinions des

  9   prêtres, je n'en ai aucune idée, cela n'a pas fait l'objet de mes

 10   conversations, je n'ai eu ni l'occasion ni le temps de le faire. Les

 11   opinions personnelles ne regardent qu'eux-mêmes.

 12   Question:   Etes-vous impliqué dans les différences de position entre

 13   l'évêque de Mostar, l'évêque Peric, et les franciscains d'Herzégovine?

 14   M. le Président (interprétation) :La première question serait la suivante:

 15   avez-vous connaissance de l'existence d'une telle division?

 16   M. Neimarevic (interprétation): Pour autant que je le sache, les divisions

 17   sont de nature ecclésiastique. Il ne s'agit pas ici de l'attitude à

 18   l'égard de la Bosnie-Herzégovine. Il s'agit de problèmes purement relatifs

 19   à l'église, de problèmes qui datent d'il y a très longtemps, d'il y a un

 20   siècle, et je ne vois vraiment pas pourquoi vous me posez ce genre de

 21   question.

 22   Mme Somers (interprétation): Savez-vous ce qui est arrivé à l'évêque Peric

 23   en 1996, quand il a essayé de ramener les frères dans les monastères,

 24   parce qu'il causait des problèmes politiques?

 25   Réponse:    Oui, je suis au courant de cet incident. Mais comme je l'ai


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  1   déjà dit, cela n'a rien à voir avec la politique. Il s'agit d'un problème

  2   interne à l'église. Donc le problème des franciscains d'une part, et de

  3   l'évêque basé à Mostar. Cela n'a rien à voir avec la Bosnie-Herzégovine,

  4   cela est purement interne à l'église.

  5   Question:   Qu'est-ce qui était derrière cet incident qui a pratiquement

  6   impliqué le lynchage du prêtre, enfin de l'évêque, excusez-moi?

  7   Réponse:    Comme je l'ai déjà dit, certaines paroisses de

  8   l'Herzégovine devraient revenir sous l'autorité de l'évêque d'après

  9   l'opinion de l'église, mais il s'agit d'un peuple qui a toujours vécu avec

 10   les franciscains et qui souhaite que les franciscains se maintiennent.

 11   L'évêque ne donne pas de réponse positive et pour autant que je le sache,

 12   parce que je ne m'y suis pas rendu moi-même, le problème est que le peuple

 13   a été révoltée par la décision de l'évêque. Il fallait s'entretenir avec

 14   les fidèles à ce sujet, et voir comment résoudre le problème de l'évêché

 15   et de l'ordre franciscain en particulier. Donc c'est un problème interne à

 16   l'église, encore une fois.

 17   Question:   La pièce 1016, s'il vous plaît. Je demanderai à l'huissier de

 18   la distribuer.

 19   1016.1. Il s'agit d'un article. Nous avons l'article original et la

 20   traduction. Cela a été fourni sous forme de résumé, la date de l'article

 21   est le 4 juin 1993. Cet article a été publié dans un journal de Zagreb,

 22   Globus, et l'auteur de l'article est Davor Butkovic. Je souhaite attirer

 23   votre attention sur un certain nombre de points que relève M. Butkovic. En

 24   particulier, cet article traite de l'attitude très agressive, et manquant

 25   de respect, de la part de Mate Boban à l'égard de l'archevêque, à l'époque


Page 22026

  1   le cardinal de Zagreb, Mgr Kuharic. Connaissez-vous cette lettre qui a été

  2   écrite au nom de Mate Boban, et envoyée au cardinal Franjo Kuharic vers le

  3   27 Mai 1993? Cette lettre fait l'objet de cet article.

  4   Réponse:    Comme vous le savez, à cette date-là, j'étais à Guca Gora, le

  5   7 mai, et je n'avais aucun moyen de me procurer ce journal. J'avais appris

  6   que cette lettre avait été envoyée. Quant à savoir qui l'a rédigée, qui

  7   l'a envoyée, pourquoi ils l'ont rédigée… Comment pourrais-je le savoir?

  8   Donc, vraiment, il s'agit de faire une petite enquête, de savoir qui a

  9   rédigé cette lettre. L'a-t-il réellement rédigée ou non? Il s'agit de

 10   choses dont je ne sais rien, vraiment, je ne sais rien au sujet de cela.

 11   Question:   Veuillez m'en excuser. J'espérais que le résumé allait lui

 12   aussi être distribué, mais je vais essayer d'indiquer dans l'article les

 13   points sur lesquels je souhaite vous poser des questions.

 14   Butkovic a écrit que la lettre de Boban est probablement le plus grand

 15   scandale politique qui se soit produit depuis l'effondrement du

 16   communisme. Il y a à peu près quinze jours, le cardinal Kuharic a lancé un

 17   appel pour la paix en Bosnie-Herzégovine, dans lequel il a critiqué les

 18   Croates eux aussi, ainsi que leur rôle dans les affrontements entre les

 19   Croates et les Musulmans. Dans son appel, il dit que les Croates de

 20   Bosnie-Herzégovine sont tout autant responsables d'éventuelles sanctions

 21   qui pourraient être imposées à la Croatie, qu'ils sont responsables des

 22   affrontements entre les Croates et les Musulmans. Cet appel n'exclut pas

 23   la possibilité que les Croates de Bosnie soient responsables de crimes de

 24   guerre. Fin de citation.

 25   Plus loin, dans l'article, il y a une description de la lettre qui a été


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  1   rédigée par Boban, et cela fera l'objet d'une pièce à conviction séparée,

  2   mais il est dit que cette lettre révèle un conflit entre les hommes

  3   politiques de la partie la plus politisée du peuple Croate, à savoir les

  4   Croates d'Herzégovine, et le sommet de la hiérarchie ecclésiastique, à

  5   savoir le cardinal Kuharic. D'après le révérend de Split, Cvitanovic, ce

  6   genre d'attitude du clergé n'a été pratiquée que par les dictatures au

  7   Chili, par l'Allemagne d'Hitler et par les leaders des révolutions

  8   française et mexicaine. Fin de citation.

  9   M. le Président (interprétation): Pourriez-vous nous éclairer un petit peu

 10   à ce sujet? Est-ce que vous cherchez à contester la crédibilité du témoin,

 11   Madame Somers?

 12   Mme Somers (interprétation): Simplement, je veux savoir si la position du

 13   témoin correspond à la position de l'église, une église organisée, ou bien

 14   s'il a une position différente?

 15   M. Bennouna: Madame Somers, vous vous rendez bien compte, tout de même,

 16   que nous devons, dans cette affaire où nous sommes, aller maintenant au

 17   centre des problèmes, des questions, et ne pas tourner autour. Nous avons

 18   quand même beaucoup avancé depuis un an et demi. Est-ce que vous ne pouvez

 19   pas poser cette question directement au témoin, pour savoir quelle est sa

 20   position par rapport à ce différend au sein de l'église, tout simplement,

 21   comment il se situe lui-même, sans être obligée de nous faire tout le tour

 22   d'horizon de ses relations? Allons directement au fait, et je crois que

 23   l'on peut le faire pour beaucoup d'autres questions, et tout de même, nous

 24   concentrer sur l'affaire qui nous concerne et perdre moins de temps, et

 25   aussi maintenir directement l'intérêt des Juges sur l'affaire concernée.


Page 22028

  1   Mme Somers (interprétation): Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

  2   j'essaierai d'aller au vif du sujet, mais je dois orienter la Chambre au

  3   sujet des différentes positions qui sont exprimées dans l'article. Je dois

  4   simplement attirer votre attention sur des passages qui sont les plus

  5   importants. Bien entendu, j'essaierai de poser les questions de manière

  6   plus directe, mais je souhaitais attirer votre attention sur les passages

  7   les plus importants.

  8   Non seulement cet article reflète une scission très importante, mais il

  9   est question de la position de l'évêque de Sarajevo, de Vinko Puljic,

 10   ainsi que d'autres figures importantes au sein de l'église catholique. Et

 11   le dernier point, au sujet de cet article, c'est le commentaire de

 12   Butkovic disant que le cardinal Kuharic a montré qu'il était la première

 13   personnalité publique croate qui assume sa responsabilité historique.

 14   Kuharic a été la première personne en Croatie à s'adresser directement aux

 15   Croates, en disant que les Croates n'étaient pas innocents dans le conflit

 16   qui les opposait aux Musulmans.

 17   Pourriez-vous, à présent, consulter la lettre elle-même, la lettre de Mate

 18   Boban? Il s'agit de la pièce Z985.2. Nous l'avons à la fois dans

 19   l'original et dans sa traduction anglaise, mais veuillez m'excuser, nous

 20   n'avons pas de traduction française. L'article que vous venez de voir,

 21   l'article de Butkovic, parle de cette lettre, précisément. Butkovic

 22   présentait cette lettre comme un acte suicidaire de la part de Boban, acte

 23   politiquement suicidaire. Les seuls points que je souhaite relever

 24   particulièrement concernent les observations que fait Boban, les

 25   commentaires de Boban où il dit: "Quel est l'argument que vous avez à


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  1   votre disposition quand vous parlez de la Bosnie-Herzégovine en temps

  2   qu'Etat où nous devrions vivre, quand vous parlez d'un Etat qui a été

  3   internationalement connu, qui est membre des Nations Unies. Très bien.

  4   Qu'est-ce que vous avez finalement obtenu de cet état ? Demandez aux

  5   prêtres de Bosnie si cette Bosnie existe ? Oui elle existe. Il y a eu un

  6   bain de sang pour les Croates, les Croates ont versé leur sang pour cette

  7   Bosnie et leurs restes y sont enterrés. Mais, il y a quelque chose que

  8   tout le monde peut voir, même ceux qui ne sont pas particulièrement

  9   perspicaces. Il y a une Bosnie que le HVO a défendu parce que c'est aussi

 10   le peuple des Croates. Très brièvement et actuellement, vous nous

 11   regroupez devant la même bannière, en appelant à la réconciliation. Vous

 12   pouvez dire à tous les journalistes que la Croatie n'a rien à voir avec

 13   cela. Une partie de la Croatie est restée en Bosnie et cela ne concerne

 14   pas la Croatie, même si ces deux autres nations souhaitent effacer ce qui

 15   reste des Croates en Bosnie". Et par la suite, il est dit : "Ils

 16   s'adonnent à la vengeance et au Coran, à l'encontre de ce qui reste des

 17   Croates en Bosnie".

 18   Mme Somers (interprétation): Est-ce une manière de s'adresser à une

 19   archevêque ou à un cardinal ?

 20   M. le Président (interprétation) : Il s'agit de poser des questions de

 21   manière pertinente au témoin. Si le Procureur cherche à affirmer que

 22   l'église était partiale, cela peut être posé de manière tout à fait

 23   directe au témoin. Et si vous souhaitez présenter les éléments de preuve

 24   en réplique, vous pouvez le faire.

 25   Monsieur Neimarevic, avez-vous déjà vu cette lettre ?


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  1   Réponse:    Jamais je n'ai vu cette lettre. Jamais.

  2   M. le Président (interprétation) : Très bien. Pouvez-vous faire une

  3   observation, quelle qu'elle soit à ce sujet ? Est-ce que cela représente

  4   vos points de vue ?

  5   Réponse:    Cette lettre a été rédigée à un moment… vous savez c'était la

  6   guerre. Que se passait-il entre Zagreb et Grude ? C'est quelque chose que

  7   j'ignore totalement. A l'époque, moi j'essayais de préserver ma vie et la

  8   vie des gens avec qui je vivais à l'époque. Je n'avais pas le temps de me

  9   poser la question quant à savoir si on allait combattre pour le territoire

 10   ou pour autre chose. A mon supérieur, le responsable de la province, en

 11   Février 93, j'ai dit littéralement la chose suivante : je ne veux

 12   absolument pas savoir quel sera le territoire sur lequel vivront les

 13   Croates. La seule chose qui m'intéresse, c'est de savoir comment préserver

 14   les vies des gens, c'était ma seule préoccupation pendant mon séjour à

 15   Guca Gora et d'ailleurs pendant toute la durée de mon séjour en Bosnie-

 16   Herzégovine jusqu'à aujourd'hui.

 17   M. le Président(interprétation): Y avait-il une partialité de la part des

 18   franciscains ? Etaient-ils mal disposés à l'encontre des Musulmans ?

 19   Réponse:    Cela dépend de l'endroit où les gens se sont trouvés, dans

 20   quelle situation. Par exemple, si on vous a égorgés les proches, si on

 21   vous a pris tout ce à quoi vous teniez, tout ce qui était le plus

 22   précieux, on est en droit de se demander ce que l'on éprouverait à ce

 23   moment-là. Je ne sais pas si c'est de la haine ou autre chose.

 24   M. Bennouna: La question qui vous a été posée par le Président n'est pas

 25   celle-là. Cela nous permettrait d'avancer beaucoup plus vite, M.


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  1   Neimarevic. La question est la suivante : est-ce que de la part de votre

  2   hiérarchie, en tant que franciscain, vous aviez reçu des recommandations

  3   pour prendre une position quelconque sur le conflit qui se déroulait sous

  4   vos yeux ? C'est cela la question. Est-ce que de la part de votre

  5   hiérarchie, en tant que franciscain, on vous a demandé de vous engager

  6   dans un sens ou dans un autre ? Dites nous s'il y a une position en tant

  7   que franciscain qui vous a été dictée par votre hiérarchie ?

  8   Réponse:    Je peux vous répondre de la manière suivante : nous n'avions

  9   aucun contact avec les responsables de notre province, ni avec le

 10   cardinal. Tout ce que nous faisions, nous le faisions sur notre propre

 11   initiative, sur le terrain. Et je peux vous citer un exemple de Vitez en

 12   93, lorsque j'ai vu le cardinal, il a dit : "Puisqu'il n'y a aucune

 13   communication avec Travnik, puisque nous avons un représentant à Travnik,

 14   tout ce que vous avez à résoudre, faites-le vous-mêmes. Vous êtes le

 15   responsable du couvent, faites ce que vous pouvez, s'agissant des

 16   confessions, s'agissant des sacrements, s'agissant des mariages. Il n'y

 17   avait pas de programme général qui nous aurait été communiqué et c'est

 18   peut-être cela l'une des causes du problème, le fait qu'il n'y en ait pas

 19   eu avant les conflits, parce que s'il y avait eu une rencontre entre les

 20   responsabilités des différentes confessions, si on s'était mis d'accord

 21   sur l'attitude à adopter, peut-être que le cours des événements aurait été

 22   différent en Bosnie-Herzégovine. Et encore une fois, chacun devait réagir

 23   par rapport à la situation où ils se trouvait. Moi et d'autres personnes

 24   qui ont été forcées à fuir sous une pluie de balles, mais comment aurait-

 25   on pu se poser la question qui portait sur l'avenir de la Bosnie-


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  1   Herzégovine ? C'était notre vie qui était menacée. Nous étions menacés de

  2   perdre la chose la plus précieuse, à savoir la vie.

  3   M. le Président (interprétation) : Passons à autre chose à présent.

  4   Mme Somers (interprétation): Je vous remercie d'avoir anticipé sur mes

  5   questions. L'accusation n'a jamais estimé que l'ensemble des franciscains

  6   étaient mal disposés à l'égard des Musulmans. A présent, je souhaite

  7   attirer la tension de la Chambre et du témoin sur les pièces Z-14–76.5,

  8   Z-17-73.6, Z-14-73.7, Z-14-71.7. Il s'agit de 4 article et nous allons

  9   aborder très brièvement chacun d'entre eux même si ceci porte sur

 10   plusieurs jours.

 11   M. le Président (interprétation) : Est-ce que je peux voir les documents ?

 12   Voyons. Apparemment, il s'agit d'un article qui date de 97.

 13   Mme Somers (interprétation): Quel document examinez-vous monsieur le

 14   Président ?

 15   M. le Président (interprétation) : J'ai la pièce 14-76.5, mais je voudrais

 16   les avoir tous.

 17   J'ai donc le 14-71.7, 14-73.6, 14-73.7, et le 14-76.5. Est-ce que nous

 18   devrions avoir d'autres pièces ?

 19   Mme Somers (interprétation) : Non.

 20   M. le Président (interprétation): Nous n'allons pas les examiner. Je

 21   voulais seulement savoir ceci : tout d'abord, quelle est votre intention ?

 22   Pourquoi soumettez-vous ces documents, quel est leur intérêt ?

 23   Mme Somers (interprétation) : Eh bien pour ce qui est du 14-76.5, c'est un

 24   article de 1997, de Slodjena. Ceci a pour objet de mettre en lumière la

 25   position du Pape. On voit vers le milieu de la page ceci : ceci fait en


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  1   premier lieu référence à la visite du Saint-Père à Sarajevo au cours de

  2   laquelle, il a une fois de plus confirmé, sans aucune équivoque, que

  3   l'église catholique était fortement opposée à la division ou au partage de

  4   la Bosnie-Herzégovine, pour des raisons nationales et religieuses, et

  5   qu'il recherchait à maintenir l'intégrité de la Bosnie-Herzégovine. Voilà

  6   ce qui m'intéresse dans cet article.

  7   M. le Président (interprétation): Eh bien, je me tourne vers le témoin.

  8   Etiez-vous au courant de ceci, Monsieur Neimarevic?

  9   M. Neimarevic (interprétation): Moi, je ne dispose pas d'un texte en

 10   croate. Par conséquent, je ne sais pas de quoi il s'agit. Je suppose qu'il

 11   s'agissait du discours du Pape.

 12   M. le Président (interprétation : Nous n'avons pas le temps de l'examiner.

 13   Le point suivant.

 14   Mme Somers (interprétation): Article suivant. Excusez-moi s'il y a un saut

 15   pour ce qui est des dates. Là, nous parlons du 1473 point 6, article qui a

 16   paru assez tard, plus tard en tout cas, et qui exprime une inquiétude.

 17   M. Robinson (interprétation): Le 73 point 6?

 18   Mme Somers (interprétation): Excusez-moi, vous ne l'avez pas reçu? Ou le

 19   76 point 6. Excusez-moi, je me suis trompée. Examinons le 1471 point 7. Ce

 20   qui est fourni ici, si vous voulez lire l'article par la suite, Messieurs

 21   les Juges, c'est une explication du différend ou des différences qui

 22   existent entre le diocèse, entre les franciscains d'Herzégovine et le

 23   diocèse.

 24   M. Bennouna: La question, c'est-à-dire qu'une demi-heure après, ou peut-

 25   être même trois quarts d'heure après, nous en sommes toujours à la


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  1   structure de l'église. On vous a demandé, à travers ces documents, de bien

  2   vouloir poser au témoin les questions pertinentes qui concernent le

  3   témoignage principal, et dans la mesure où vous êtes dans le contre-

  4   interrogatoire. En quoi cela concerne le témoin? Posez-lui la question

  5   directement. On ne peut tout de même pas passer en revue la structure de

  6   l'église à travers ce témoin, sans qu'il soit concerné directement,

  7   quelque part.

  8   Mme Somers (interprétation): Effectivement, je vais établir un lien entre

  9   ceci et des questions précises. Lorsque nous parlons du 1473 point 7, nous

 10   avons un premier commentaire. Ceci fait référence à un commentaire fait

 11   par le témoin, à savoir que l'église catholique, et c'est ici l'archevêque

 12   Pulic de Sarajevo qui dit que l'église catholique ne soutient aucun parti,

 13   il veut que la paix règne en Bosnie. Et puis il poursuit, en expliquant

 14   ceci. Il dit, je cite la dernière phrase: "Je sais que certains

 15   représentants de l'église catholique vont faire appel au citoyen pour

 16   qu'il vote en faveur de l'union démocratique croate HDZ, mais ce n'est pas

 17   là la position de l'église en Bosnie Ceci est mis en lumière par le

 18   cardinal Pulic". Fin de citation.

 19   Père, vous aviez dit que vous n'aviez pas d'affiliation politique quelle

 20   qu'elle soit. Est-ce que, à un moment donné, vous avez participé à des

 21   activités du HDZ, même si vous n'en étiez pas membre?

 22   Réponse:    Au début des changements démocratiques en Bosnie-Herzégovine,

 23   nous étions tous, l'église y compris, pour un état de Bosnie-Herzégovine

 24   démocratique, l'état de droit. Moi-même, j'ai appuyé cette idée, je le

 25   souhaitais, je souhaitais véritablement des changements et je souhaitais


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  1   qu'en définitive, la démocratie s'installe, et la liberté, dans ces

  2   territoires. Moi-même, personnellement, je n'ai jamais été membre d'aucun

  3   parti, et bien évidemment j'ai appuyé les représentants du peuple croate

  4   en Bosnie-Herzégovine, qui avançaient que la Bosnie-Herzégovine devait

  5   être un état de droit, un état indépendant, indivisible dans l'intégrité,

  6   l'intégralité de son territoire.

  7   Question:   Etiez-vous favorable aux idées du HDZ, en 1990?

  8   Réponse:    En 1990, il n'y avait pas de HDZ, mais il y avait des

  9   patriotes en Bosnie-Herzégovine. Par conséquent, j'ai appuyé tout autre

 10   parti, SDA, HDZ, tous ceux qui combattaient pour l'Etat de Bosnie-

 11   Herzégovine dans ses frontières intégrales.

 12   Question:   Est-ce que vous souteniez la création de la communauté croate

 13   d'Herceg-Bosna en 1991?

 14   Réponse:    Ce n'est pas moi qui ai créé l'entité de Herceg-Bosna.

 15   D'ailleurs, moi, je ne pouvais pas le faire, car qui suis-je? Je ne vois

 16   pas pourquoi vous me posez une question de ce type là.

 17   Question:   Est-ce que vous avez soutenu l'idée de la création d'une

 18   entité croate séparée, d'une entité ou d'un état croate séparé sur le

 19   territoire de la Bosnie-Herzégovine, ce qui était l'Herceg-Bosna?

 20   Réponse:    A ma connaissance, concernant l'entité d'Herceg-Bosna, c'était

 21   une entité qui rassemblait le peuple croate. L'objectif n'était pas de

 22   partager, de diviser le territoire de Bosnie-Herzégovine. J'ai pu voir les

 23   documents qui ont été publiés, et chaque fois c'était marqué: l'Etat de

 24   Bosnie-Herzégovine...

 25   M. Bennouna: Répondez à la question qui vous a été posée. Est-ce que vous


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  1   avez soutenu l'Herceg-Bosna, ou non? On ne vous demande pas de nous

  2   expliquer ce que c'est, nous savons ce que c'est que l'Herceg-Bosna. Est-

  3   ce que vous avez soutenu le projet d'Herceg-Bosna, ou non?

  4   M. Neimarevic (interprétation): Eh bien, la question n'est pas précise.

  5   Tout premièrement, moi j'étais pour que le peuple croate en Bosnie-

  6   Herzégovine...

  7   M. le Président (interprétation) : Un instant. Vous êtes un homme cultivé.

  8   Vous savez ce qu'était l'Herceg-Bosna. Est-ce que vous souteniez sa

  9   création, ou pas? Répondez par oui ou par non. La question est simple.

 10   M. Neimarevic (interprétation): Même si la question est simple, elle ne

 11   l'est pas! Moi, j'étais pour la création…

 12   M. le Président (interprétation): Oui ou non?

 13   M. Neimarevic (interprétation): Oui.

 14   Mme Somers (interprétation): Au paragraphe 7 de votre résumé, vous

 15   fournissez un commentaire, et vous parlez du fait que vous êtes intervenu

 16   pour que la Défense territoriale rejoigne le HVO. Vous êtes allé dans un

 17   village voisin de Guca Gora pour intercéder auprès de la Défense

 18   territoriale, pour qu'elle rejoigne le HVO sur les lignes de front près du

 19   mont Vlacic, face à l'armée des Serbes de Bosnie. Est-ce que vous aviez

 20   pour rôle de présenter des requêtes de nature militaire, d'avoir un rôle

 21   politico-militaire?

 22   M. Neimarevic (interprétation): Ceci n'a rien à voir avec la politique et

 23   les questions militaires. Nous avons eu peur, et nous avons dit que les

 24   lignes allaient être percées, que par conséquent le peuple allait périr.

 25   Parce que nous avions peur, et avec un certain nombre de personnes qui


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  1   étaient avec moi dans le village, d'autres villages également, nous nous

  2   sommes rendus sur place et nous avons demandé qu'ils nous aident, non

  3   seulement pour qu'ils combattent là-bas, mais aussi pour évacuer les

  4   blessés, etc.. Par conséquent, l'objectif principal était l'objectif

  5   humanitaire, d'aider les gens. Et si jamais quelque chose arrive, surtout

  6   d'éviter le pire.

  7   Question:   Et qui vous a demandé d'agir de la sorte?

  8   Réponse:    Quelques personnes de Stradinic, d'un village voisin, quelques

  9   personnes de Guca Gora, où j'étais prêtre, m'ont demandé de le faire.

 10   Question:   Dans ce même paragraphe 7, vous indiquez que le HVO a aidé les

 11   Musulmans de Zenica en leur fournissant des armes. Comment le savez-vous?

 12   Réponse:    Je le sais parce que les gens le racontaient, tous ceux

 13   qui transportaient des armes, qui armaient les uns et les autres… On le

 14   racontait.

 15   Question:   Vous, personnellement, vous avez eu l'occasion de voir le HVO

 16   fournir des armes aux Musulmans? Est-ce que vous en avez été le témoin

 17   oculaire?

 18   Réponse:    Non, je n'étais pas le témoin oculaire.

 19   Question:   Père, vous avez dit que ce qui vous préoccupait le plus,

 20   c'était la vie, la vie humaine. Je vais vous poser des questions sur deux

 21   documents, le Z-306.4 et le Z-306.5. Ces documents nous les avons tous

 22   deux en Croate et en Anglais. Nous allons d'abord examiner le document

 23   306.4. L'avez-vous ? C'est une lettre, une demande signée par vous, datée

 24   du 8 Décembre 92, lettre adressée au HVO, au gouvernement municipal du HVO

 25   plus exactement à Travnik. Est-ce que vous reconnaissez ce document ?


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  1   Réponse:    Oui c'est moi qui l'ai rédigé.

  2   Question:   Vous avez parlé d'allégations, d'atrocités en interrogatoire

  3   principal. Ceci se serait passé en Juin 93. Cette lettre est écrite fin

  4   92. C'est-à-dire, six mois après la passation d'un accord entre les Serbes

  5   et les Croates, mettant fin à leur hostilité. Pourriez-vous nous expliquer

  6   ceci : est-ce que vous étiez au courant de quoique ce soit en Décembre 92,

  7   de quelque chose qui soit de nature à vous inciter à vouloir déplacer des

  8   objets précieux de votre monastère à Zagreb ? Est-ce que à ce moment-là,

  9   vous aviez des informations, s'agissant des événements qui allaient peut-

 10   être se dérouler par la suite ?

 11   Réponse:    Eh bien, monsieur le Président, messieurs les Juges, je

 12   voudrais savoir quelque chose. Le couvent de Guca Gora a été brûlé dans

 13   son histoire à plusieurs reprises. La dernière fois, c'était à la fin de

 14   la deuxième guerre mondiale et tout ce que nous avions à l'église, et dans

 15   le monastère, tout a été brûlé. C'est la raison pour laquelle le

 16   supérieur, Père Petar Andelovic a demandé, en passant par le Père Buza

 17   Blazevic qui a travaillé à Caritas à Split, m'a demandé justement si

 18   c'était possible que des objets d'art qui se trouvaient au couvent, au

 19   monastère, que ces objets soient déplacés pour ne pas subir des

 20   endommagements. On n'a pas pensé du tout au conflit entre les Croates et

 21   les Musulmans. On a plutôt pensé, car nous étions dans la zone

 22   d'opérations d'artillerie serbe, et à n'importe quel moment, un obus

 23   aurait pu tomber sur le couvent, sur l'église, que tout ceci soit brûlé de

 24   nouveau, et que cela disparaisse à tout jamais. C'est la raison pour

 25   laquelle il ne s'agissait pas de mes propres réflexions et je n'ai pas


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  1   pensé que quelque chose aurait pu se passer. On a tout simplement

  2   considéré qu'il était indispensable que la tragédie de 45 ne se répète pas

  3   et que des objets d'art soient préservés.

  4   Question:   Pourquoi, à cette date précise, alors qu'il n'y avait pas de

  5   conflits opposant les Serbes et les Croates, pourquoi le faire à ce

  6   moment-là et pas plutôt en 91 ou début de l'année 92 ? A quel moment avez-

  7   vous reçu la demande de Split ?

  8   Réponse:    Tout de suite avant d'assurer le camion, c'est tout simplement

  9   mon supérieur qui me l'a ordonné. Moi, c'était ma tâche. J'ai fait ce

 10   qu'il m'avait demandé, pas plus. Je ne sais pas de quoi vous parlez

 11   d'autre.

 12   M. le Président (interprétation): Monsieur Neimarevic, vous êtes mentionné

 13   ou vous vous mentionnez comme étant le garde, est-ce que vous étiez celui

 14   qui gardait le monastère ?

 15   Réponse:    Oui.

 16   M. le Président (interprétation): Et qu'est-ce cela représentait comme

 17   responsabilité, cette position que vous occupiez ?

 18   Réponse:    Cette tâche que j'avais à remplir, j'étais frère ou chef des

 19   frères. Et j'étais chef des 7 paroisses qui étaient dans la propriété des

 20   franciscains : Zenica, Guca Gora, Ovcarevo, Vodolac et quelques autres.

 21   Par conséquent, moi j'avais à organiser les activités dans ces paroisses

 22   et c'est moi qui coordonnais les chefs des paroisses. Et j'étais par

 23   conséquent chef d'un certain nombre de frères en Bosnie-Herzégovine qui

 24   couvraient les 7 paroisses dont il a été question.

 25   M. le Président (interprétation) : Je vous remercie.


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  1   Mme Somers (interprétation) : Et au Z-306.5, nous avons la réponse de

  2   Zelko Pervan, réponse à votre requête par laquelle il fournit un

  3   chauffeur, le camion. Est-ce que en fait, il y a eu évacuation de ces

  4   objets d'art ?

  5   Réponse:    Ces objets ont été déplacées en quelques jours, tous les

  6   objets.

  7   Question:   Pourriez-vous nous donner une description générale du type

  8   d'objets qui ont été déménagés ?

  9   Réponse:    En général, c'étaient des tableaux, des tableaux d'art, des

 10   livres, des anciens livres, quelques documents, quelques anciens documents

 11   probablement. Actuellement, Père Kijanak dispose d'un inventaire de tous

 12   ces objets que nous avons déplacées et qui ont été rentrés par la suite au

 13   couvent de Guca Gora.. On a été obligés également de faire un inventaire,

 14   de marquer sur la liste tout ce que nous transportons pour ne pas avoir

 15   des problèmes à la frontière, à l'entrée par la suite également pour re-

 16   rentrer ces objets, parce que nous avons de toute façon pensé que nous

 17   allons les ramener au couvent et c'est la raison pour laquelle, grâce au

 18   chef supérieur, grâce à moi également, à ces gens-là qui se sont occupés

 19   du transport de ces objets, nous avons réussi à les préserver et puis à

 20   les ramener au monastère.

 21   Question:   Simple conversation, à ce moment-là votre supérieur, c'était

 22   Petar Andelevic. Est-ce exact ?

 23   Réponse:    Oui. C'est exact.

 24   Question:   Quand avez-vous rencontré Dario Kordic pour la première fois ?

 25   Réponse:    Je ne me souviens pas exactement de la date, mais je pense que


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  1   je l'ai rencontré au moment où des changements démocratiques ont vu le

  2   jour, peut-être même après les premières élections. Je pense que c'est là

  3   où j'ai rencontré M. Dario Kordic, la première fois où nous nous sommes

  4   rencontrés, comme deux êtres humains, ce qui arrive.

  5   Question:   A quelle fréquence avez-vous eu des contacts avec Dario Kordic

  6   depuis la date de votre première rencontre jusqu'à en fait aujourd'hui ?

  7   Réponse:    Une dizaine de fois au total. Je pense.

  8   Question:   Et pourriez-vous nous dire quelle était la nature des contacts

  9   que vous aviez avec lui, est-ce que vous étiez son prêtre, comment dire,

 10   la personne religieuse avec la quelle il avait des contacts ?

 11   Réponse:    Dario habitait Busovaca et moi j'étais à Guca Gora.. Nous nous

 12   sommes rencontrés, disons, avec d'autres personnes, c'était officieux, ce

 13   n'était pas véritablement une rencontre officielle. Une fois, Dario était

 14   venu une ou deux fois au couvent, il est passé, il était de passage, il

 15   est venu avec quelques copains. Nous nous sommes rencontrés également à

 16   Nova Bila, éventuellement, nous nous sommes rencontrés une autre fois à

 17   Zagreb.

 18   Question:   Est-ce que Dario Kordic vous a consulté sur la façon dont le

 19   territoire de Herceg-Bosna pouvait devenir plus catholique ?

 20   Réponse:    Le sujet de nos conversations n'était pas celui-là. Nous nous

 21   sommes tout simplement rencontrés, on a parlé des problèmes différents,

 22   tout ce qui vous préoccupe, vous-mêmes. On peut dire vraiment en toute

 23   conscience, que c'était un contact tout à fait personnel et pour ce qui

 24   concerne des plans, vous devez savoir que si jamais il y avait des plans,

 25   si on les a élaborés, quelque part, ce n'étaient pas les nôtres.


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  1   D'ailleurs personne ne s'est adressé à nous pour nous poser des questions.

  2   Ce n'est pas à nous qu'on demandait ce que l'on allait faire.

  3   Question:   Quand vous dites "nous" ou "nôtre", de qui parlez-vous,

  4   pourriez-vous nous le dire ?

  5   Réponse:    Je pense à moi-même, à mes frères avec lesquels j'étais dans

  6   la même confrérie.

  7   Question:   Est-ce que nous pourrions voir la pièce Z-321 ? La Chambre a

  8   déjà pris connaissance de ce document. Mais pourriez-vous nous fournir un

  9   commentaire sur certains aspects de cet ordre émis par Dario Kordic est

 10   Ignac Kostroman, le 16 Décembre 92, peu de temps après le déménagement de

 11   certains de ces objets de votre monastère ? Ce qui m'intéresse en

 12   particulier, c'est la notion d'une politique croate globale. Est-ce que

 13   vous avez été informé de l'existence d'une telle politique croate

 14   globale ? Est-ce que ce thème a été évoqué dans le cadre de vos contacts

 15   avec M. Dario Kordic ?

 16   Réponse:    C'est bien pour la première fois que je vois ce document.

 17   Question:   Au paragraphe premier, on dit: "désigner quelqu'un qui sera

 18   responsable de la coopération avec les communautés régionales qui soient

 19   vraiment catholiques, pour l'exécution de cette politique croate globale.

 20   A Travnik, qui aurait été cette personne ?

 21   Réponse:    Je n'en ai pas la moindre idée. Je ne le sais pas.

 22   Question:   Paragraphe 3, on parle : "De la nécessité de lancer d'urgence

 23   une opération de grande envergure pour que soit dirigés et placés des

 24   "symboles et monuments religieux", des croix des statuts dans des zones

 25   habitées, au carrefour, le long des routes, dans les magasins afin de


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  1   raviver la tradition catholique profondément ancrée dans chacun des

  2   Croates". Fin de citation. Est-ce que on vous a consulté sur ce point et

  3   si ceci n'était pas le cas, si c'est la première fois que vous prenez

  4   connaissance de ceci, pourriez-vous nous parler de l'impact que ceci a

  5   peut-être eu sur les non catholiques qui habitaient dans des municipalités

  6   tout à fait mixtes comme celle de Travnik ?

  7   Réponse:    C'est bien pour la première fois que je le vois, que je vois

  8   ce document. Je n'ai jamais remarqué que quoique ce soit ait été réalisé

  9   de tout cela. Comment on aurait réagi? Je ne sais pas.

 10   Eventuellement, on aurait pu s'attendre à des réactions négatives.

 11   Quelqu'un aurait posé la question: "pourquoi?" Je ne peux pas

 12   véritablement vous faire des commentaires, je ne peux qu'avancer des

 13   hypothèses sur ce qui serait advenu. C'est bien la première fois,

 14   véritablement, que je vois ce document.

 15   Question:   Nous n'aimons pas lancer d'hypothèse, mais vous, vous êtes un

 16   homme de foi, vous vivez ou vous viviez dans une municipalité mixte. A

 17   votre avis, quelles auraient été les réactions suscitées par cet ordre,

 18   s'il avait été mis en oeuvre? Comment les Musulmans, ou peut-être

 19   éventuellement les orthodoxes, auraient-ils réagi?

 20   Réponse:    C'est une question tout à fait hypothétique. Moi, je pense

 21   qu'on aurait pu s'attendre à des réactions négatives, ce qui est normal,

 22   naturel. De quel type de réaction pourrait-on parler? Je ne sais pas, je

 23   n'ai aucune expérience là-dessus.

 24   Question:   Vous trouviez-vous à Travnik le 8 Avril 1993?

 25   Réponse:    Le 8 Avril 1993, c'était à la veille de Pâques, oui, j'étais à


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  1   Travnik. Je ne sais pas si c'était le jour de Pâques, pour ce qui concerne

  2   les dates véritablement, je ne les ai pas retenues.

  3   Question:   Etes-vous au courant d'un incident qui s'est produit à

  4   Travnik, incident où il y a eu des moments assez violents à la suite du

  5   moment où on a enlevé des drapeaux croates à Travnik?

  6   Réponse:    Je n'étais pas ce jour-là à Travnik, j'étais à la veille. Ce

  7   qui s'est passé, je l'ai appris, je l'ai appris de la bouche des personnes

  8   qui ont appris cet événement. J'ai appris également qu'il y en avait, mais

  9   il y en a qui ont dit qu'il y avait un conflit qui s'était déclenché entre

 10   l'armée et le HVO. Je ne sais pas si c'est vrai, mais j'ai appris que les

 11   deux membres de l'armée de Bosnie-Herzégovine à cette époque-là ont été

 12   tués. J'ai déjà dit, au cours de ma déposition de ce matin, que le

 13   représentant de l'Union européenne à l'époque avait dit que le fait que de

 14   brûler des drapeaux allait cher, le peuple Musulman, ceci n'aurait pas dû

 15   se passer, c'était en quelque sorte l'ouverture du conflit.

 16   Question:   Deux questions: qui était l'observateur de la communauté

 17   européenne? Peut-être vous en souviendrez-vous?

 18   Réponse:    Moi, je ne garde pas en mémoire les dates et les noms, et je

 19   ne me rappelle pas quel était son nom, mais je pense qu'il n'est pas

 20   difficile de vous renseigner. Il y a certainement des documents qui en

 21   parlent, et vous pouvez vous renseigner auprès de la communauté européenne

 22   quant à ceux qui étaient sur place, et qui peuvent certainement vous le

 23   relater. Car moi, je l'ai appris, effectivement, des personnes qui ont été

 24   en quelque sorte victimes, qui ont été maltraitées physiquement, qui

 25   avaient subi des traumatismes assez graves. Je suis sûr que vous pouvez


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  1   vous adresser à M. Antes Milanic ou Franjo Lujanovic qui étaient des

  2   personnes qui ont été accueillies à Travnik et qui avaient été attaquées.

  3   Question:   Vous, personnellement, vous n'avez pas entendu un observateur

  4   de l'Union européenne tenir ces propos; c'est ce qui vous a été relaté par

  5   quelqu'un, n'est-ce pas?

  6   Réponse:    Oui, vous avez raison.

  7   Question:   Seconde question: pourquoi y avait-il un drapeau croate qui a

  8   été hissé à Travnik? Peut-être le savez-vous, puisque ceci faisait partie

  9   de la Bosnie-Herzégovine, et puisqu'il y avait un nombre d'ailleurs

 10   significatif de Musulmans qui habitaient Travnik?

 11   Quelle était l'objectif poursuivi par le fait de hisser un drapeau croate?

 12   Pour vous, est-ce que c'était synonyme d'une certaine provocation?

 13   Réponse:    Ici, il faut faire la distinction entre les drapeaux croates.

 14   Si vous pensez à l'Etat croate, moi je parlais du peuple croate en Bosnie-

 15   Herzégovine. Le peuple croate de la Croatie n'a pas le même drapeau que

 16   celui qui a été hissé en Bosnie-Herzégovine. Par conséquent, ce n'est pas

 17   le drapeau de la République de Croatie qui a été hissé, mais le drapeau du

 18   peuple croate de Bosnie-Herzégovine. Tout comme des Musulmans qui avaient

 19   leur propre signe et symbole qui avait été hissé, les Croates également

 20   avaient leur propre symbole. Je ne crois pas que ceci était négatif. Les

 21   gens n'étaient pas tellement dérangés. Il y en a beaucoup qui n'ont pas

 22   été véritablement dérangés. Pourquoi voulez-vous qu'un symbole de

 23   quelqu'un d'autre m'importune?

 24   Question:   Pourriez-vous, très brièvement, nous indiquer les

 25   distinctions, les différences qu'il y a entre les deux drapeaux, celui des


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  1   Croates de Bosnie et le drapeau de Croatie?

  2   Réponse:    Eh bien, les drapeau se ressemblent, mais le peuple croate en

  3   Bosnie-Herzégovine a un symbole qui date du Moyen âge, alors que la

  4   République de Croatie a, au-dessus des armoiries… Le drapeau de la

  5   République de Croatie, au-dessus des armoiries, a également des symboles

  6   des provinces et des paroisses.

  7   Question:   Que ce soit pour l'un ou l'autre des Croates, je suppose que

  8   ceci ne concernait pas ou n'impliquait pas les Croates, c'était pour les

  9   Croates, de Bosnie ou de Croatie, mais ceci n'intégrait pas les Musulmans,

 10   n'est-ce pas?

 11   Réponse:    Il faut ajouter quelque chose d'autre là-dessus. Il y avait

 12   des Musulmans, également, qui se sentaient comme des Croates et qui

 13   considéraient ce drapeau comme le leur, mais il y en avait d'autres qui se

 14   sentaient tout comme des Serbes, auxquels ce drapeau ne convenait pas.

 15   Mais la question que vous pouvez poser, à l'inverse également, c'est: quel

 16   était le rapport des Croates vis-à-vis des symboles, comme je l'ai dit,

 17   musulmans? Par conséquent, c'est une question qui est également à poser.

 18   Question:   Dans le résumé, vous citez une phrase que je n'ai pas

 19   retrouvée dans votre interrogatoire; c'est la dernière ligne du paragraphe

 20   15, lorsque vous parlez de Dolac, du fait que des gens ont pris la fuite

 21   en direction du monastère de Guca Gora. Vous dites ceci: "Certains soldats

 22   du HVO ont également cherché refuge dans le monastère". Vous n'avez pas

 23   repris ceci dans votre interrogatoire principal. Est-il exact de dire que

 24   certains soldats du HVO se sont aussi réfugiés dans ce monastère de Guca

 25   Gora? Il s'agit de la dernière ligne de votre paragraphe 15 de ce résumé


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  1   que vous avez vous-même rédigé.

  2   Réponse:    Non, ce n'était pas à Dolac, c'était à Guca Gora, au moment où

  3   elle est tombée. Et ils ont trouvé refuge au couvent, car nous, nous

  4   l'avions déjà quitté. La Forpronu, qui a pénétré dans le couvent, leur

  5   avait ordonné d'enlever les vêtements militaires, ils ont pris les

  6   vêtements civils que nous avions au couvent et c'est comme cela qu'ils ont

  7   été transportés. Sinon, ils n'auraient pas pu être évacués. Il s'agit donc

  8   du couvent de Guca Gora, sinon je ne sais pas ce qui s'est passé à Dolac,

  9   et je ne peux pas savoir si véritablement il y avait des militaires qui,

 10   éventuellement, se sont rendus dans une église ou dans un couvent. Je ne

 11   le sais pas.

 12   Question:   A Guca Gora, avant que la Forpronu ne soit prête à évacuer ces

 13   soldats, est-ce que la Forpronu les a également désarmés?

 14   Réponse:    Oui, à partir du moment où ils ont demandé également qu'on

 15   leur fournisse des vêtements civils, ils ont pris leurs armes.

 16   Question:   J'en arrive à mon dernier point. En Avril 1993, le 16 Avril

 17   1993, il y a un incident bien connu, ce qui s'est passé à Ahmici. Est-ce

 18   que vous savez ce qui s'est passé à Ahmici?

 19   Réponse:    En ce qui concerne cet incident, moi, je ne connaissais pas

 20   vraiment ce qui s'était passé à Ahmici, avant d'arriver à Nova Bila. Par

 21   conséquent, je ne sais strictement rien sur Ahmici.

 22   Question:   Quand êtes-vous arrivé à Nova Bila en tant que personne

 23   déplacée?

 24   Réponse:    Le 8 Juin 1993 à midi, autour de midi.

 25   Question:   Et dans la municipalité de Travnik, on n'a vraiment rien dit à


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  1   propos de ce qui s'était passé dans une municipalité voisine, finalement,

  2   celle de Vitez. Personne ne vous en a parlé?

  3   Réponse:    Moi, j'étais dans un encerclement total, et nous n'avons eu

  4   aucune information sur ce qui s'était passé à Ahmici. Cela, c'est vrai,

  5   aucun de mes confrères, ni moi-même, personne n'était au courant, personne

  6   ne nous a parlé.

  7   Question:   Dernier paragraphe de votre résumé: vous y présentez votre

  8   avis, selon lequel le conflit qui a opposé les Croates et les Musulmans

  9   portait, ou était causé par des pertes territoriales infligées aux

 10   Musulmans par les Serbes. Nous avons ici, dans ce prétoire, entendu

 11   beaucoup de témoins qui sont venus nous dire qu'il y avait des accords

 12   entre les dirigeants serbes et croates, que ce soit Milosevic ou Tudjman,

 13   ou Boban et Karadzic. Ils nous ont parlé également de la création

 14   d'Herceg-Bosna. Ils l'ont présentée comme étant l'une des sources du

 15   conflit. Est-ce que vous êtes d'accord avec ces points de vue qui ont été

 16   soumis ici? Indépendamment de pertes subies par les Musulmans, mais pour

 17   ce qui est des causes éventuellement différentes?

 18   Réponse:    A ma connaissance, la création d'Herceg-Bosna n'a pas tout de

 19   suite provoqué le conflit entre les Croates et les Musulmans. L'entité

 20   Herceg-Bosna existait, et il y avait des convois chargés de nourriture qui

 21   traversaient Herceg-Bosna, pour approvisionner aussi bien la population

 22   musulmane que croate. Les gens qui analysaient tout ce qui se passait ont

 23   conclu, tout comme moi, que ce n'étaient pas uniquement les Croates, si

 24   eux parlaient du partage de la Bosnie-Herzégovine, c'était quelque chose

 25   qui était préconisé aussi bien par les Serbes que par les Musulmans. Par


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  1   conséquent, on ne peut pas accuser un peuple, un seul peuple, et dire

  2   qu'il était le seul à vouloir partager le territoire de Bosnie-

  3   Herzégovine. Personnellement, je considère, comme je l'ai déjà précisé

  4   dans mon résumé, que le fait même qu'un très grand nombre de réfugiés ait

  5   afflué en Bosnie centrale, et que cet équilibre national était mis en

  6   cause, constituait une véritable source pour le conflit qui s'est

  7   déclenché entre les Croates et les Bosniens en Bosnie-Herzégovine. Il ne

  8   faut pas oublier non plus que nous avons observé, avec beaucoup de

  9   sympathie au début, l'arrivée des soldats de Bosnie-Herzégovine qui,

 10   ensemble, combattaient à Kotovares et ailleurs, et qu'ils allaient

 11   combattre ensemble, les Croates et les Musulmans. Mais malheureusement,

 12   ceci ne s'est pas passé par la suite. Par ailleurs, moi-même, on m'a dit,

 13   mes amis parmi les Musulmans me disaient que les Moudjahidin étaient

 14   arrivés pour se rendre sur les lignes de front face à l'ex-JNA, face aux

 15   Serbes, pour défendre la Bosnie centrale. Malheureusement, par la suite,

 16   nous avons compris que ce n'était pas s'était pas la vérité. Et moi, je

 17   suis désolé de constater que ceci s'est passé.

 18   Question:   Si je vous ai bien compris, vous estimez que ce sont surtout

 19   les Musulmans, ou l'armée de Bosnie-Herzégovine, qui n'ont pas rejoint les

 20   Croates pour défendre le territoire de cette République de Bosnie-

 21   Herzégovine. Est-ce exact? Est-ce bien votre avis?

 22   Réponse:    Eh bien, ceux qui étaient les premiers à vouloir défendre la

 23   Bosnie-Herzégovine, c'étaient les Croates, et ils ont formé le HVO. Par la

 24   suite, c'est l'armée de Bosnie-Herzégovine, ou plutôt la Défense

 25   territoriale, tout au début, il y avait également une autre formation


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  1   militaire, je ne sais pas comment elle s'appelait, par conséquent la

  2   Défense territoriale par la suite, l'armée de Bosnie-Herzégovine en

  3   troisième lieu, et tout ce que nous avons pu voir à la radio, à la

  4   télévision, les deux armées étaient légales et elles avaient pour tâche de

  5   défendre le territoire de Bosnie-Herzégovine. Mais comme les négociations

  6   politiques qui avaient été menées plus tard ont probablement signalé et

  7   avancé quelques autres propositions, et il y avait le pouvoir qui a été

  8   perdu également en Bosnie-Herzégovine, et c'est la raison pour laquelle il

  9   y a eu ce manque de confiance qui s'est manifesté entre les deux armées,

 10   ce qui a conduit à la situation extrêmement grave. Cela, c'est mon point

 11   de vue.

 12   Question:   Je vous remercie. Je n'ai plus de questions à vous poser,

 13   Monsieur.

 14               (Questions complémentaires de M. Naumovski.)

 15   M. Naumovski (interprétation): Merci, Monsieur le Président et Messieurs

 16   les Juges.

 17   Très brièvement, Monsieur Neimarevic, on vous a posé toutes une série de

 18   questions en ce qui concerne les relations au sein de l'église catholique,

 19   enfin des questions purement internes. Mais la question que je voudrais

 20   vous poser est: est-ce que vous-même, vous êtes venu déposer ici sur ce

 21   que vous avez vu personnellement dans la municipalité de Travnik, ou

 22   éventuellement pour d'autres raisons?

 23   M. Neimarevic (interprétation):    Si je suis venu ici, c'est pour

 24   témoigner comme témoin oculaire, pour vous relater ce que j'ai vu, ce que

 25   j'ai vécu, ce que j'ai pu entendre raconter par les autres, par conséquent


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  1   pour essayer de vous brosser le tableau de la situation dans laquelle nous

  2   nous sommes trouvés au moment des événements, aussi bien des événements

  3   qui ont précédé ce conflit tragique entre les deux peuples.

  4   Question:   J'ai la pièce à conviction Z146.4, c'est le questionnaire, le

  5   questionnaire que vous avez rempli pour une organisation internationale

  6   chargée des Droits de l'Homme. En remplissant ce questionnaire, vous avez

  7   exprimé votre disposition d'être cité comme témoin si jamais on vous

  8   convoquait. Il s'agit donc de la pièce à conviction Z1416.7, et ceci est

  9   bien formulé au point 13. Vous avez dit que vous étiez prêt à déposer

 10   devant le Tribunal?

 11   Réponse:    Oui.

 12   Question:   Est-ce que quelqu'un vous a contacté de la part du Tribunal,

 13   et au sujet de ce questionnaire que vous avez rempli?

 14   Réponse:    Non.

 15   Question:   Merci. Deux autres documents: Z306.4 et Z306.5, liés au

 16   transport de ces objets d'art de votre couvent. Mon confrère du bureau du

 17   Procureur vous a induit, en quelque sorte, en erreur et je vais essayer de

 18   la corriger. Est-ce que vous êtes d'accord avec moi pour dire qu'au début

 19   du mois de Novembre, c'est Jajce qui est tombée? Je parle du mois de

 20   Novembre 1992.

 21   Réponse:    Oui, vous avez raison.

 22   Question:   Est-ce que, une fois que Jajce est tombée, l'armée serbe des

 23   Serbes de Bosnie a continué des opérations violentes militaires à

 24   l'encontre de Travnik?

 25   Réponse:    Oui, à Vlacic, à Vares, les obus tombaient un petit peu


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  1   partout dans la Vallée de la Lasva, à Travnik, Turbe, partout dans la

  2   paroisse, à Ovcarevo, à Vitez, à Zenica, Busovaca, etc.. Tout était déjà

  3   pris dans le tourment de guerre.

  4   Question:   Au moment où vous demandez que ces objets d'art soient

  5   déplacés, c'est au mois de Décembre 1992. Est-ce que, à ce moment-là, les

  6   opérations de guerre sont violentes, ou bien la paix s'est instaurée

  7   pendant six mois déjà entre les Croates, les Musulmans et les Serbes? Dans

  8   quel état vous étiez?

  9   Réponse:    Non, il n'y avait pas de cessez-le-feu. Il y avait quelques

 10   pauses qui ont été marquées, je ne sais pas pour quelle raison,

 11   éventuellement il y avait des transferts des forces d'une région à

 12   l'autre, je ne sais pas. Mais ce qui s'est passé, il est vrai, c'est que

 13   nous autres, comme je l'ai dit, mon chef ainsi que moi-même, nous avons

 14   pris la décision, nous avons considéré qu'il serait utile de déplacer ces

 15   objets parce que de toute façon, s'il y a un on m'avait posé la question,

 16   j'aurais fait exactement la même chose.

 17   Question:   Excusez-moi, c'est le contexte qui m'intéresse. Nous allons

 18   conclure. Est-ce qu'il s'agissait d'opérations militaires violentes qui

 19   étaient en cours dans la municipalité de Travnik au moment où vous avez

 20   déplacé les objets d'art?

 21   Réponse:    Oui.

 22   Question:   Il a été question également du drapeau du peuple croate. Vous

 23   avez fait la distinction entre les deux drapeaux, vous avez parlé

 24   également de ces armoiries qui sont les armoiries qui datent du moyen âge.

 25   Réponse:    Oui.


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  1   Question:   La question qui s'était posée également, c'était de savoir si

  2   le drapeau croate également intégrait les Musulmans, et vous, vous avez

  3   donné une réponse. La question que je voulais vous poser était de savoir

  4   si le drapeau des Musulmans portait des symboles croates?

  5   Réponse:    Vous parlez du drapeau musulman?

  6   Question:   Oui.

  7   Réponse:    Non. Il ne portait que des symboles de son propre peuple.

  8   Question:   La Chambre a déjà entendu dire que chacun hissait son propre

  9   drapeau, chaque peuple avait son drapeau, son drapeau historique.

 10   Réponse:    Oui, c'est exactement cela.

 11   Question:   C'est tout, Monsieur le Président. C'est tout, Monsieur

 12   Neimarevic. Je n'ai plus de questions.

 13   M. le Président (interprétation) : C'est le moment propice. Monsieur

 14   Neimarevic, merci d'être venu devant le Tribunal international pour

 15   déposer. Maintenant, vous êtes arrivé au terme, vous pouvez disposer.

 16   M. Neimarevic (interprétation): Merci.

 17   M. le Président (interprétation): Nous allons reprendre à 14 heures 30.

 18         (La séance, suspendue à 13 heures, est reprise à 14 heures 30.)

 19         (Questions relatives à la procédure)

 20   M. le Président (interprétation): Allez-y, Monsieur Nice.

 21   M. Nice (interprétation): Avant que les témoins ne viennent, ici dans le

 22   prétoire, un premier témoin sera une jeune femme et quelques éléments à

 23   son sujet. Elle est handicapée à 70 % d'après ce qu'il paraît, elle a été

 24   prévue pour la fin de la semaine, mais il nous a été dit hier qu'elle

 25   allait comparaître plus tôt. Sa déposition est assez limitée quant aux


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  1   points pertinents qu'elle aborde. La défense souhaite présenter des

  2   éléments de preuve au sujet de ce qui a été fait par les Musulmans aux

  3   Croates. Je ne souhaite pas m'opposer à cela. Je pense que c'est plutôt à

  4   la Chambre de décider si cela a un poids ou non. Mais un autre élément qui

  5   me préoccupe le plus, c'est la déclaration qui ne me poserait pas problème

  6   si elle avait été fournie plus tôt. L'incident qu'évoque ce témoin, n'est

  7   pas fourni en anglais pour que nous puissions vérifier. En fait les

  8   documents à l'appui ne sont pas fournis en anglais, donc je ne peux pas

  9   juger mais elle a été prévue comme témoin potentiel et non pas comme un

 10   témoin sûr. Là, je fais référence au dernier paragraphe de ce résumé,

 11   quelque chose qui a été déjà abordé. Je ne comprends pas d'où vient ce

 12   paragraphe. Le bureau du Procureur n'a pas pu prendre contact avec cette

 13   jeune femme. Cela peut être corrigé, mais il s'agit d'une jeune femme très

 14   handicapée et si on laisse entendre que nous avons intentionnellement omis

 15   de prendre contact avec elle, cela ne serait pas du tout conforme à la

 16   vérité. Donc, très vraisemblablement, je ne contesterais pas sa

 17   déposition, je ne lui poserais probablement pas de questions, et je

 18   regrette qu'elle ait été citée en dépit de son handicap très important.

 19   Vous vous rappellerez une autre déposition dans le cas des témoins de

 20   l'accusation, nous avons procédé d'une autre façon, nous avons essayé de

 21   résumer au plus lorsqu'il s'agissait des dépositions des témoins qui

 22   avaient traversé des épreuves très importantes.

 23   S'agissant à présent de l'autre témoin, c'est un homme, il y a une

 24   modification dans l'ordre de comparution des témoins et très

 25   vraisemblablement, je ne serais pas en mesure de contre interroger ce


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  1   témoin, ou peut-être pas du tout cette semaine à cause de ces

  2   modifications.

  3   Je vous demanderais donc de m'accorder le droit de le contre interroger

  4   demain.

  5   M. le Président (interprétation): Allez-y, Monsieur Sayers. Donc, au sujet

  6   du premier témoin, la jeune femme, vous auriez pu vous mettre d'accord

  7   avec l'accusation.

  8   M. Sayers (interprétation): Oui, nous parlons de Marijana Vidovic. Cette

  9   jeune femme est arrivée uniquement vendredi. Nous avons vérifié cette

 10   déclaration signée et nous l'avons fournie à l'accusation dès que cela a

 11   été mis à notre disposition. Par conséquent, je ne vois pas ce que nous

 12   aurions pu faire de plus.

 13   M. le Président (interprétation): Mais c'est votre propre témoin de

 14   Bosnie! Vous auriez pu la voir là-bas! Et ne pas attendre à ce que cela

 15   arrive à La Haye.

 16   M. Sayers (interprétation): Oui, il y a beaucoup de possibilités, Monsieur

 17   le Président.

 18   M. le Président (interprétation): Non, mais c'est vous qui citez ce

 19   témoin. Ce qui m'étonne ici, c'est cette pratique où les déclarations ne

 20   sont pas fournies dans la localité où réside, je suppose, les témoins. A

 21   l'avenir, si vous avez un témoin du même genre, peut-être que vous devriez

 22   procéder autrement. Mais si vous avez une déclaration bosniaque, vous

 23   pouvez la fournir à l'accusation, l'accusation aurait pu accepter cette

 24   déclaration avant, si elle l'avait reçue.

 25   M. Sayers (interprétation): Mais nous n'avions aucune déclaration orale.


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  1   Elle a eu un entretien par Me Naumovski et non pas par les autres membres

  2   de l'équipe. Et je dois dire que c'est en Mars que nous avons anticipé le

  3   résumé de cette déclaration. Donc, ce n'est pas une surprise que

  4   l'accusation savait que ce témoin allait dire. Je me rappelle à présent le

  5   témoin Z et le colonel Williams qui ont déposé au sujet des événements

  6   qu'elle va couvrir aussi.

  7   M. le Président (interprétation): Il est clair que lorsqu'il y a des

  8   points contestés, les déclarations sont fournies à l'autre partie et je ne

  9   vois pas pourquoi il n'est pas possible d'appliquer cela dans ce Tribunal.

 10   En particulier, pour éviter la comparution du témoin lorsque cela n'est

 11   pas nécessaire et également pour réduire les coûts du procès. Je tiens à

 12   informer les deux parties qu'il s'agit là d'une pratique qu'il convient de

 13   suivre. Mais puisque le témoin est ici, nous allons l'entendre. Toutefois,

 14   à l'avenir, si vous avez un témoin du même genre, nous souhaitons que sa

 15   déclaration soit fournie avant.

 16         (Mlle Marijana Vidovic est introduite dans la salle d'audience et

 17         interrogée par Me Sayers.)

 18   M. le Président (interprétation): Que le témoin prononce la déclaration

 19   solennelle.

 20   Mlle Vidocic (interprétation): Je déclare solennellement que je dirai la

 21   vérité, toute la vérité, rien que la vérité.

 22   M. le Président (interprétation): Veuillez prendre place.

 23   Allez-y, Maître Sayers.

 24   M. Sayers (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

 25   Bonjour, Mademoiselle Vidovic. Pourriez-vous vous présenter ?


Page 22057

  1   Témoin:     Je m'appelle Vidovic Marijana.

  2   M. Sayers (interprétation): Madame Vidovic, nous allons parcourir

  3   rapidement ce qui est contenu dans la déclaration que vous avez signée le

  4   2 Juillet. Vous êtes née le 2 Février 1981 à Zenica. Est-ce exact ?

  5   Réponse:    Oui.

  6   M. Sayers (interprétation) : Vous êtes Croate de Bosnie de par votre

  7   appartenance ethnique et vous êtes citoyenne de Bosnie-Herzégovine ?

  8   Réponse :   Oui.

  9   Question:   Vous avez fréquenté l'école primaire de Vitez. En Juin l'année

 10   dernière, vous avez terminé vos études secondaires à Vitez vous vous êtes

 11   spécialisée dans les matières que sont l'économie et le commerce.

 12   Réponse:    Oui.

 13   Question:   En partie, vous avez suivi les études secondaires à Split en

 14   République de Croatie parce que vous aviez besoin de soins médicaux qui

 15   vous ont été donnés là-bas également.

 16   Réponse:    Oui.

 17   Question:   Depuis le mois de Décembre l'année dernière, vous travaillez

 18   au sein de la brigade des gardes à la caserne Draga du HVO de Busovaca et

 19   vous êtes membre du personnel de soutien de la troisième division de

 20   l'armée de la fédération de Bosnie-Herzégovine à Vitez.

 21   Réponse:    Oui.

 22   Question:   En septembre 1993, mademoiselle Vidovic, je pense qu'il est

 23   exact de dire que vous viviez à Buhine Kuce avec vos parents, Dragan et

 24   Ana. Vidovic, votre frère aîné Nedjelko et votre frère cadet Branislav,

 25   ainsi qu'avec vos grands-parents.


Page 22058

  1   Réponse:    Oui.

  2   Question:   Il y avait combien de maisons à Buhine Kuce à peu près ?

  3   Réponse:    Environ 40 maisons.

  4   Question:   Il y avait combien de maisons croates et combien de

  5   musulmanes ?

  6   Réponse:    Il y avait 30 maisons qui étaient la propriété des Croates et

  7   10 qui étaient Musulmanes.

  8   Question:   Très bien. Dans les paragraphes 4 et 5 de votre résumé, Mlle

  9   Vidovic, vous décrivez un incident qui s'est produit le 9 Septembre 1993 ;

 10   votre frère Nedeljko qui avait 14 ans à l'époque a été blessé par un

 11   tireur isolé musulman, juste devant votre maison. Pouvez-vous nous décrire

 12   cet événement s'il vous plaît ?

 13   Réponse:    Nedeljko est sorti devant notre maison familiale et un tireur

 14   isolé qui tirait de Sivrino Selo l'a touché au ventre.

 15   Question:   Y a t-il eu beaucoup d'incidents provoqués par les tireurs

 16   isolés dans votre village ?

 17   Réponse:    Oui.

 18   Question:   Est il exact de dire que les tireurs isolés musulmans de

 19   Sivrino Selo ont tiré quotidiennement sur les Croates entre le mois

 20   d'Avril 93 jusqu'en Avril 94 ?

 21   Réponse:    Oui.

 22   Question:   Combien de personnes de votre village ont été blessées ou

 23   tuées par ces coups de feu tirés par des tireurs isolés ?

 24   Réponse:    En 1994, il y a eu des morts, et il y a eu environ 10 ou 15

 25   civils qui ont été blessés.


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  1   Question:   Trois personnes ont été tuées par les tireurs isolés. Ce sont

  2   Mirko Samija, Magdalena Pranjkovic et Marko Buhic ?

  3   Réponse:    Oui.

  4   Question:   Dans votre résumé, vous découvrez le traitement qui était

  5   réservé à votre frère. Je ne pense pas qu'il soit utile de le présenter, à

  6   moins que l'accusation souhaite poser des questions-là dessus. Mlle

  7   Vidovic, je parlerai à présent de l'attaque sur Buhine Kuce en Janvier 94.

  8   Vous aviez 12 ans à l'époque est-ce exact ?

  9   Réponse:    Oui.

 10   Question:   Pour autant que vous le sachiez, y avait-il des armes dans

 11   votre maison avant cette attaque ?

 12   Réponse:    Il n'y en avait pas, non.

 13   Question:   Très bien. Je pense que vous avez déjà identifié les personnes

 14   qui habitaient dans votre maison, mais pouvez-vous dire à la Chambre ce

 15   qui s'est produit le matin du 9 Janvier 1994 ?

 16   Réponse:    Le 9 janvier 1994, à 4 heures 20 du matin, les Musulmans sont

 17   rentrés dans cette localité, Buhine Kuce, ils ont tué mon père ma mère, le

 18   frère de mon père ainsi que son fils qui s'appelait Drazen et qui avait 17

 19   ans à l'époque et ce matin, ils ont blessé mon frère cadet.

 20   Question:   Les attaquants qui ont lancé cette attaque, sur votre village,

 21   ont-ils prononcé des mots que vous étiez en mesure d'entendre ?

 22   Réponse:    Oui, le matin quand on a entendu les tirs, c'est mon père qui

 23   est sorti le premier de la maison, il a été tué, ma mère moi et mon frère

 24   cadet sommes sortis. Ils ont d'abord tiré sur ma mère à une distance de 2

 25   mètres, je m'y trouvais moi aussi. J'étais blessé au bras et mon frère


Page 22060

  1   cadet a été touché. C'étaient des Moudjahidin, ils avaient des bas sur la

  2   tête, ils avaient des insignes et des bérets, et ils m'ont tiré par mon

  3   bras blessé. Puis j'ai traversé la route, puis il y a eu des Musulmans qui

  4   m'ont placé le fusil à la gorge et quand ils ont vu que j'étais blessée,

  5   ils m'ont laissé partir. Alors j'ai commencé à m'acheminer vers la base de

  6   la FORPRONU en direction d'Impregnacija et un membre de la FORPRONU à qui

  7   j'ai demandé de nous aider à pointé le fusil sur nous, nous avons continué

  8   à marcher sur la route. Un homme nous a aidés et il nous a transportés à

  9   l'hôpital de Nova Bila. C'est la que je suis restée pendant 10  jours dans

 10   cet hôpital et après on nous a transférés à Split.

 11   Question:   Très bien. Est-il exact qu'en Mars 94, les corps de vos

 12   parents, de votre oncle et de votre cousin et de Ankica Grbavac et Mirko

 13   Safradin ont été trouvés ensevelis sous la neige près de la maison

 14   musulmane ?

 15   Réponse:    Oui, ils ont été tués le 9 janvier. 15 jours plus tard, nous

 16   avons été transférés à Split, donc ce qui a fait que personne n'a vu

 17   l'enterrement de mes parents et puis le 2 Mars, ils avaient passé deux

 18   mois dans la neige, ces corps ont été retrouvés et ont été inhumés.

 19   Question:   Très bien.

 20   Monsieur le Président, nous avons un extrait vidéo de 30 secondes. Si

 21   Mlle. Vidovic pourrait identifier quelques personnages qui apparaissent,

 22   dans cette cassette, nous avons une transcription, nous avons une

 23   traduction en français. Le texte est en français.

 24   Je demanderai à la cabine technique d'arrêter la diffusion à des moments

 25   ou Mlle Vidovic peut identifier des personnages.


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  1         (Diffusion de la cassette.)

  2   Réponse:    Ici en rouge, c'est ma mère, c'est près de ma maison.

  3   Question:   Vous montriez la figure en blanc ? En rouge ?

  4   Réponse:    Oui en rouge.

  5   Question:   Peut-on continuer à montrer la cassette.

  6   La cassette montre un hôpital, une salle d'attente de l'hôpital. Avez-vous

  7   reconnu qui que ce soit ?

  8   Réponse:    A l'hôpital, c'était moi-même et mon frère cadet. C'était

  9   l'hôpital de Nova Bila.

 10   Question:   Très bien. La dernière page de votre résumé, Mlle. Vidovic.

 11   Pendant l'attaque de l'armée de Bosnie-Herzégovine en Janvier 94, vous

 12   avez perdu votre père et votre mère, votre oncle Mirko, votre cousin

 13   Drazen, est-ce exact ?

 14   Réponse:    Oui.

 15   Question:   Est-il également exact de dire que tous ceux qui vivaient à

 16   Buhice Kuce ont été tués ce jour-là, hormis Anto Grbavac, vous-même et

 17   votre frère et hormis donc deux personnes… enfin l'épouse et l'enfant âgé

 18   de deux ans de cet homme avaient été tués par les membres de l'armée de

 19   Bosnie-Herzégovine.

 20   Réponse:    Oui c'est exact. J'ai été blessée et également mon frère a été

 21   blessé, mon frère cadet Branislav et nous sommes les seuls à avoir

 22   survécu. Tous les autres ont été tués.

 23   Question:   Vous avez dit, il me semble que 15 civils ont été tués dans

 24   votre village ce jour-là?

 25   Réponse:    Oui.


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  1   Question:   Très bien. Au paragraphe 12 de votre résumé, il est décrit

  2   quels sont les soins qui vous ont été donnés à l'hôpital. Je ne pense pas

  3   qu'il convienne de rentrer dans les détails, je pense qu'il est exact que

  4   vous avez subi six opérations du bras et de l'épaule, en Bosnie-

  5   Herzégovine, en Croatie et enfin en Allemagne, dans trois pays donc.

  6   Réponse:    Oui.

  7   Question:   On vous a accordé le taux d'invalidité de 70 % suite donc à

  8   ces blessures que vous avez subies le 9 Juin 1994.

  9   Réponse:    Oui.

 10   Question:   Je n'ai pas d'autres questions. Peut-on avoir une côte pour la

 11   cassette, s'il vous plaît?

 12   Mme Ameerali (interprétation): La côte sera D 294 A/1 et la côte de la

 13   transcription sera D 294 A/1.

 14   Question:   Ligne 16, page 72, il y a une erreur dans la transcription, il

 15   est écrit Juin 1994 et le mois qui doit figurer est le mois de Janvier.

 16   M. le Président (interprétation): Maître Kovacic?

 17   M. Kovacic (interprétation): Je vous remercie, nous n'avons pas de

 18   questions.

 19               (Melle Vidovic est contre interrogée par M. Nice.)

 20   M. Nice (interprétation): Je n'aurais que quelques questions à vous poser

 21   Mademoiselle Vidovic, rien de très important.

 22   Tout d'abord, la courte séquence que nous avons vue, il y avait la

 23   transcription que nous avons reçue, même si ces sous-titres n'étaient pas

 24   très clairs mais d'après ce que nous avons reçu, la séquence se terminait

 25   par la phrase: "les troupes britanniques de la FORPRONU de la région ont


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  1   fait tout ce qu'elles pouvaient pour sauver les Croates qui étaient les

  2   victimes des Musulmans." Ceci s'est passé il y a longtemps, mais est-il

  3   exact que les forces britanniques de la FORPRONU ont fait ce qu'elles

  4   pouvaient?

  5   Réponse:    Le matin en question, lorsque mes parents ont été tués, je

  6   sais qu'ils se trouvaient à proximité, ils auraient pu venir et mettre fin

  7   à cela, et empêcher qu'ils ne soient tués. Cette cassette a été

  8   enregistrée plus tard quand ma mère gisait morte et nous étions à

  9   l'hôpital. Plus tard, ils sont passés par là et ils ont fait

 10   l'enregistrement. Cela a été enregistré quand ils avaient déjà été tués.

 11   Question:   Puis-je vous expliquer ceci, afin que vous compreniez mieux.

 12   Mais auparavant, ceci: quand avez-vous vu l'avocat, Me Naumovski, il y a

 13   combien de temps de cela?

 14   Réponse:    Au mois de Décembre 1999.

 15   Question:   Je vous remercie.

 16   Est-ce qu'il vous a présenté un projet de texte de ce résumé qui nous a

 17   été transmis et qui a été signé le 2 Juillet?

 18   Réponse:    Oui, cela a été signé le 2 Juillet, j'en ai un exemplaire sur

 19   moi. Je l'ai signé moi aussi.

 20   Question:   Effectivement, mais est-ce qu'avant le 2 Juillet, il vous

 21   avait envoyé un projet de résumé?

 22   Réponse:    Non, je l'ai signé ici. C'est ici que cela a été rédigé quand

 23   je suis venue à La Haye.

 24   Question:   Mais je crois qu'il avait déjà été rédigé avant votre arrivée

 25   à La Haye et ce document attendait votre signature une fois votre présence


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  1   à La Haye.

  2   Réponse:    Non, j'ai dit à l'avocat tout ce qui s'était passé. Nous

  3   l'avons rédigé ensemble puis quand je l'ai lu, je l'ai signé.

  4   Question:   C'est un point tout à fait mineur, mais nous avons reçu un

  5   document qui montrerait que votre projet de texte était déjà prêt avant

  6   votre arrivée. Est-ce que c'est quelque chose d'impossible ou est-ce que

  7   c'est à exclure?

  8   Réponse:    Je suis arrivée et nous l'avons vu ensemble, j'ai tout

  9   raconté, puis ils ont traduit en Croate et en Anglais, et je l'ai lu

 10   plusieurs fois et je l'ai signé. Mais j'ai dit tout cela, tout ce qui est

 11   dedans. C'est la vérité. Ils ne l'ont pas écrit sans moi.

 12   Question:   Et qui a eu l'idée de mettre le dernier paragraphe, le

 13   paragraphe 13?

 14   Réponse:    En dépit des choses horribles qui sont arrivées à ma famille

 15   et à moi-même, personne du bureau du Procureur ne m'a jamais contactée,

 16   n'a jamais parlé avec moi.

 17   Question:   Qui a eu cette idée?

 18   Réponse:    Avant, je suis déjà venue à La Haye et j'avais raconté cette

 19   situation, tout ce qui est arrivé à mes parents et après, personne n'a été

 20   tenu responsable pour cela.

 21   Question:   Quand êtes-vous déjà venue à La Haye?

 22   Réponse:    Je ne connais pas la date exacte mais il y a, à peine 2 ans.

 23   J'ai été témoin.

 24   Question:   Est-ce que c'était comme témoin d'un accusé dans un procès

 25   précis?


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  1   Réponse:    Oui, je suis venue déposer pour le général Blaskic.

  2   Question:   Est-ce que vous vous souvenez si vous avez déposé à huis clos,

  3   ce que l'on appelle à huis clos alors que les stores étaient baissés?

  4   Réponse:    Je ne sais pas cela. Je ne peux pas vous dire ce que je ne

  5   sais pas. C'était pareil comme cela dans un prétoire.

  6   Question:   Je peux vous aider de cette façon-ci, pour autant que ceci

  7   vous aide. Les incidents qui se sont produits dans votre village, font

  8   effectivement l'objet d'une enquête et vous figurez parmi les témoins

  9   potentiels. Ce qui veut dire que si vous voulez des numéros de téléphone

 10   de personnes que vous voulez contacter afin que vous puissiez en temps

 11   utile comparaître à titre de témoin, je peux vous les fournir, si ceci

 12   peut vous être utile. Je vous remercie. Je n'ai plus d'autres questions.

 13   M. le Président (interprétation): Monsieur Nice, ce sera peut-être utile

 14   que quelqu'un du bureau du Procureur explique la situation au témoin.

 15   M. Nice (interprétation): Effectivement, vous comprendrez, Messieurs les

 16   Juges, comment je suis surpris par ce que dit ce témoin, effectivement,

 17   cela ne s'explique que si effectivement le témoin a déposé comme je l'ai

 18   suggéré.

 19   M. Sayers (interprétation): Pas d'interrogatoire supplémentaire et nous ne

 20   nous opposons pas du tout à ce que le bureau du Procureur s'entretienne

 21   avec le témoin.

 22   M. le Président (interprétation): Mademoiselle Vidovic, vous en avez

 23   terminé de votre déposition. Je vous en remercie d'être venue déposer.

 24   Quelqu'un du bureau du Procureur pourra peut-être vous aider pour ce qui

 25   est des enquêtes menées à propos de ces tristes événements. Peut-être


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   1   allez-vous vouloir parler avec ces personnes par la suite? Vous pouvez

  2   disposer.

  3               (Le témoin est reconduit hors de la salle d'audience.)

  4   M. le Président (interprétation): Maître Naumovski.

  5   M. Naumovski (interprétation): Merci, Monsieur le Président. Avant que le

  6   témoin rentre dans le prétoire, on avait quelques difficultés au cours de

  7   cette semaine et nous pouvons informer la Chambre de la chose suivante.

  8   Le témoin suivant, c'est M. Pavao Vidovic. Il est ici même, il va pouvoir

  9   témoigner tout de suite. Ensuite, c'est M. Ivo Vidovic qui est arrivé très

 10   tard hier soir mais je pense qu'il va être prêt pour demain. Par la suite,

 11   c'est M. Kresimir Bozic et ensuite Turtko Jelic qui est notre dernier

 12   témoin pour cette semaine. Malheureusement, un témoin qui figure sur la

 13   liste depuis deux semaines a eu encore de nouveaux problèmes et ce n'est

 14   qu'aujourd'hui que la demande pour son visa a été introduite. Par

 15   conséquent, il ne sera pas ici au cours de cette semaine, mais il sera

 16   probablement prêt pour le lundi prochain, c'est tout au moins ce que l'on

 17   nous a promis. C'est dans ce sens-là que nous modifions quelque peu la

 18   liste pour la semaine prochaine. Je ne suis pas sûr que je peux dire tous

 19   les noms et je vais vous demander tout de suite, Monsieur le Président, de

 20   passer en huis clos partiel pour vous dire les noms.

 21   (La séance se poursuit à huis clos partiel.)

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 25               (La séance se poursuit en audience publique.)


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  1               (Le témoin est introduit dans la salle d'audience.)

  2               (M. Pavao Vidovic est interrogé par Me Naumovski.)

  3   M. le Président (interprétation): Je vous en prie, faites votre

  4   déclaration solennelle.

  5   M. Vidovic (interprétation):Je déclare solennellement que je dirai la

  6   vérité, toute la vérité, rien que la vérité.

  7   M. le Président (interprétation): Je vous en prie, vous pouvez vous

  8   asseoir.

  9   Je vous en prie, Maître Naumovski.

 10   M. Naumovski (interprétation): Merci, veuillez décliner votre identité?

 11   M. Vidovoc (interprétation): Je m'appelle Pavao Vidovic.

 12   Question:   Merci très brièvement, nous allons parcourir vôtre CV. Vous

 13   êtes né le 22 octobre 1941 dans le village de Radosevic dans la

 14   municipalité de Vares.

 15   Réponse:    Oui.

 16   Question:   Monsieur Vidovic, pouvez-vous attendre un peu de ménager des

 17   pauses, c'est important pour les interprètes. Vous êtes croate de

 18   nationalité et vous êtes ressortissant de Bosnie-Herzégovine?

 19   Réponse:    Oui.

 20   Question:   Vous êtes marié et avez trois enfants.

 21   Réponse:    Oui.

 22   Question:   Monsieur Vidovic, vous êtes sorti de l'Université

 23   d'Architecture de Sarajevo, vous êtes donc diplôme,s vous avez travaillé

 24   comme architecte pendant toute votre vie ?

 25   Réponse:    Oui.


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  1   M. Naumovski (interprétation) : En 1990, après les élections

  2   multipartites, vous êtes devenu membre du HDZ branche locale à Vares,

  3   n'est-ce pas ?

  4   Réponse:    Oui.

  5   Question:   Au cours de ces premières élections démocratiques qui ont eu

  6   lieu en novembre 90, vous avez été élue député membre du parlement à

  7   l'assemblée municipale de Vares ?

  8   Réponse:    Oui.

  9   Question:   Depuis le printemps 92, jusqu'en Octobre 93, vous étiez

 10   membre, vous étiez plutôt vice président du HDZ à Vares ?

 11   Réponse:    Oui.

 12   Question:   Vous avez été chargé pour approvisionner la population en

 13   nourriture mais en 93, vous avez été chargé des communications dans cette

 14   enclave de Vares si on peut l'appeler comme cela ?

 15   Réponse:    Oui.

 16   Question:   M. Vidovic, vous avez quitté Vares avec la plupart des

 17   Croates, entre le 2 et le 3 Novembre 93, n'est-ce pas ?

 18   Réponse:    Oui.

 19   Question:   En effet, vous avez été obligé de quitter votre ville et votre

 20   municipalité. Pourriez-vous nous dire pourquoi ?

 21   Réponse:    Ce sont les formations de l'armée de Bosnie-Herzégovine qui

 22   ont attaqué la municipalité de Vares, c'était la raison pour laquelle il

 23   fallait quitter la ville.

 24   Question:   Tout premièrement, avec quelques uns de vos voisins habitants

 25   de Vares, vous êtes allé dans le village d'Aktanco, mais le 14 Décembre


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  1   93, vous êtes allé à Kiseljak, vous étiez pratiquement réfugié, expulsé à

  2   Kiseljak.

  3   Réponse:    Oui.

  4   Question:   Comme réfugié à Kiseljak vous y êtes resté jusqu'au 7 Juillet

  5   98, au moment où vous êtes retourné dans votre ville à Vares ?

  6   Réponse:    Oui. C'est la date à laquelle je suis retourné à Vares car

  7   j'ai obtenu l'appartement où j'habitais avant la guerre.

  8   Question:   Pendant que vous étiez réfugié à Kiseljak le 29 Décembre 1993,

  9   vous avez été nommé vice-Président de la mairie de Vares, en exil n'est-ce

 10   pas ?

 11   Réponse:    Oui.

 12   Question:   En 1996, encore en exil, vous avez été élu Président de la

 13   section de Vares du HDZ de Bosnie-Herzégovine.

 14   Réponse:    Oui.

 15   Question:   Et enfin M. Vidovic, jusqu'à il y a quelques jours, vous étiez

 16   maire de la municipalité de Vares, vous-même ainsi que l'un de vos

 17   collègues Musulmans vous vous êtes relayés à ce poste tous les 5 mois.

 18   Réponse:    Oui, au cours de des deux dernières années et demi.

 19   Question:   Je vous remercie. Quelques questions au sujet de la situation

 20   à Vares avant le mois de juillet 92. Je voudrais tout simplement vous

 21   rappeler que la Chambre à eu l'occasion d'entendre quelques détails qui

 22   concernent Vares. D'après le recensement de la population de 91, pourriez-

 23   vous dire à la Chambre combien il y avait en pourcentage de Croates,

 24   combien de Musulmans et combien de Serbes, en gros ?

 25   Réponse:    Dans la municipalité de Vares, il y avait au total 22203


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  1   habitants, dont 40, 1 % ou 41 % de Croates, 30 % de Musulmans bosniens,

  2   17 % de Serbes et le reste, c'étaient les représentants d'autres groupes

  3   ethniques.

  4   Question:   Je pense qu'il y a eu une erreur dans la transcription vous

  5   avez de 17 % de Serbes alors que dans la transcription c'est 16 %.

  6   Réponse:    Effectivement 17 %.

  7   Question:   Bien évidemment, on ne compte pas les autres.

  8   Réponse:    Je n'ai pas donné exactement le même pourcentage mais

  9   approximativement.

 10   Question:   Pourriez-vous nous dire quelque chose qui est intéressant :

 11   dans la ville même de Vares, ville industrielle, il y avait des

 12   représentants de tous les peuples qui habitaient ensemble, c'était une

 13   ville multi ethnique si l'on peut dire ainsi.

 14   Réponse:    Oui.

 15   Question:   Cependant, les villages ont été pratiquement séparés dans le

 16   sens ethnique, enfin, il y avait des villages Serbes, Musulmans et

 17   Croates.

 18   Réponse:    Oui au nord c'étaient les Croates, à l'est c'étaient les

 19   Serbes et au sud des villages étaient occupés par des Musulmans.

 20   Question:   Quand on parle de Vares, après les premières élections en

 21   1990, il y a eu une situation qui était assez intéressante qui a eu lieu.

 22   C'est la seule municipalité à Vares où le parti socio-démocrate, enfin

 23   SDP, a obtenu la majorité.

 24   Réponse:    Oui tout à fait.

 25   Question:   Pourriez-vous nous dire maintenant quelque chose au sujet de


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  1   ce qui s'est passé en Ex-Yougoslavie à l'époque. Vares était un centre

  2   important en 91 et 92. Vares a connu une crise économique assez grande.

  3   Est-ce que c'est exact ?

  4   Réponse:    Oui.

  5   Question:   Et ceci s'associe à l'industrie lourde qui était l'industrie

  6   principale à Vares ?

  7   Réponse:    Oui pour ce qui concerne l'économie, dans la municipalité de

  8   Vares, elle était de telle nature que nous étions pratiquement une source

  9   de matière première pour toutes les industries :les mines s'y trouvaient,

 10   la forêt qu'on coupait, avant la guerre, on avait les trois mines dans les

 11   trois localités, il y avait également une mine de zinc, de baryte et de

 12   plomb, mais tout ceci était dans le cadre de très grands complexes de l'ex

 13   Yougoslavie. Au moment où la désintégration de la Yougoslavie s'est

 14   produite, ces grands complexes cessaient d'exister. C'est la raison pour

 15   laquelle l'économie de Vares est restée privée pratiquement de tous

 16   soutiens et de tous appuis.

 17   Question:   Mais c'était tout simplement pour brosser un tableau. Nous

 18   n'allons pas abuser du temps de la Chambre.

 19   Pour ce qui concerne l'hiver 91 92, est-ce que c'était un hiver qui était

 20   dur pour vous autres habitants de Vares parce qu'il y avait ce collapse de

 21   l'industrie ?

 22   Réponse:    Oui effectivement, dès les années 90, ou plutôt à la fin des

 23   années 90, la vie est devenue de plus en plus dure dans la municipalité de

 24   Vares et la fin de 91 était une année sans vivres, nous n'avions

 25   pratiquement rien. Il n'y avait pas de quoi vendre et à l'époque, nous


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  1   avons été obligés de nous adresser au HDZ, au gouvernement de Bosnie-

  2   Herzégovine pour obtenir l'aide humanitaire en vivres, pour que la

  3   population puisse véritablement traverser cet hiver 91-92.

  4   Nous avons reçu l'aide de la République de Croatie à cette époque-là, en

  5   gros, l'aide venait de Slavanski Brod, car on avait déjà des connaissances

  6   et des relations là-bas, de Medkovic, de Split et des municipalités de

  7   Bosnie-Herzégovine également, dont la majorité étaient des Croates.

  8   Question:   Mais ces vivres qui venaient dans la ville de Vares, vous les

  9   avez distribuées parmi toute la population ou bien elles étaient réservées

 10   uniquement aux Croates ?

 11   Réponse:    Nous avons distribué cette nourriture et nous avons eu des

 12   listes de toutes les familles. Il y avait sur les listes aussi bien des

 13   Serbes que des Croates ou des Musulmans et personne à cette époque-là, n'a

 14   été véritablement isolé du point de vue national, quand il s'agit de la

 15   distribution des vivres. Nous avons distribué des articles alimentaires

 16   selon les listes dont nous disposions. Tous ceux qui en avaient besoin,

 17   s'il ne pouvait pas véritablement se nourrir à ce moment-là, nous les

 18   avons nourris par cette aide humanitaire.

 19   Question:   Quand en avril 92, la guerre s'est déclenchée, quand les

 20   Serbes de Bosnie et l'armée ont attaqué, aussi bien les Croates que les

 21   Musulmans, vous avez créé un commandement conjoint, je pense aux Croate et

 22   aux Musulmans?

 23   Réponse:    Oui. Nous avons mis en place une cellule de crise, et nous

 24   avons commencé à organiser la défense. Nous avons créé l'état-major

 25   conjoint, ce sont les membres de l'ex défense territoriale croates et


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  1   musulmans qui ont été nommés pour être membres de ce commandement

  2   conjoint.

  3   Question:   Et le commandant était croate?

  4   Réponse:    Oui, c'était Malbasic.

  5   Question:   A cette époque-là, comme vous l'avez précisé au paragraphe 10,

  6   l'armée des Serbes obtenait des armes même par hélicoptère, et vous vous

  7   étiez en quelque sorte encerclés. Je pense à la municipalité de Vares.

  8   Réponse:    Oui, parce que la situation de la ville et de la municipalité,

  9   qui se trouve quelque part à l'écart sur le plan du trafic et de la

 10   circulation… Breza/Pedrugovic, cet axe a été coupé, nous sommes restés

 11   isolés par rapport au reste du monde. C'est la raison pour laquelle, en

 12   1992, nous avons fait une nouvelle route qui allait de Breza à Visoko, un

 13   chemin, une route qui nous a permis de rester en contact avec d'autres

 14   régions de l'Etat.

 15   Question:   Merci. Nous pouvons passer maintenant au paragraphe 11.

 16   Monsieur Vidovic, pourriez-vous nous dire maintenant quelle était la

 17   situation en ville et dans la municipalité, à la fin du mois de Juillet

 18   1993, et ceci sur le plan de l'approvisionnement, de la nourriture, de

 19   l'économie et tout autre plan?

 20   Réponse:    Je ne sais pas si vous pensez à 1992 ou 1993.

 21   Question:   1992. Excusez-moi, c'est moi qui me suis trompé.

 22   Réponse:    Pour ce qui concerne l'approvisionnement en nourriture en

 23   1992, c'était très difficile, ceci ne s'est pas amélioré par rapport à la

 24   fin de 1991, et nous avons été obligés d'organiser les convois

 25   humanitaires, d'aller chercher la nourriture en Croatie, en Herzégovine.


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  1   Question:   Mais est-ce que les boutiques, les magasins ont été ouverts?

  2   Est-ce que les écoles fonctionnaient?

  3   Réponse:    L'année scolaire 1990/1991 s'est terminée quelque peu plutôt,

  4   mais cette année scolaire a eu lieu. Pour ce qui concerne les commerces,

  5   cela n'a pas fonctionné, la population était vraiment menacée.

  6   Question:   Pourriez-vous maintenant dire à la Chambre si, à cette époque-

  7   là, les organes municipaux du pouvoir ont entrepris un certain nombre de

  8   démarches pour essayer de surmonter la situation, ou bien si vous êtes

  9   restés passifs?

 10   Réponse:    A cette époque-là, au niveau de l'assemblée municipale, comme

 11   nous l'avons appelée à l'époque, nous avons essayé de faire quelque chose

 12   pour faire démarrer les choses, mais vu la structure du pouvoir… SDP avait

 13   la majorité, par conséquent nous n'avons pas véritablement réussi à faire

 14   grand-chose.

 15   Question:   Est-ce ce que vous avez eu un certain nombre d'entretiens avec

 16   les représentants du SDP, pour essayer d'améliorer la situation? Avez-vous

 17   abouti à quelques accords?

 18   Réponse:    Non. Nous n'avons pas eu véritablement des contacts au

 19   parlement, mais il ne faut pas oublier non plus que nous étions mixtes sur

 20   le plan de la composition, et le comité exécutif a essayé de résoudre

 21   cette question. Cependant, il n'y avait pas véritablement de

 22   compréhension. Et il y avait une certaine attitude passive du côté du

 23   parti SDS, et SDA de l'autre côté; c'est la raison pour laquelle la

 24   situation ne s'est pas véritablement améliorée en 1992 et 1993.

 25   Question:   Est-ce que le SDA, la section à Vares, appuyait vos propres


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  1   demandes, les demandes des députés croates, parce que vous avez négocié

  2   avec les représentants du SDP?

  3   Réponse:    Mais tous les partis appuyaient les revendications. Le parti

  4   SDA était à la troisième place, du point de vue du nombre de députés.

  5   Ensemble, avec nous, ils ont essayé de résoudre cette question. Les

  6   réformistes également nous ont appuyés. Il y en avait à l'assemblée

  7   municipale avec quelques députés, c'est la raison pour laquelle on avait

  8   véritablement, à cette époque-là, un bloc qui était assez puissant, et

  9   nous avons essayé d'améliorer la situation, de changer la situation.

 10   Question:   Et puis une dernière question à ce sujet-là. Il y avait dans

 11   ces malentendus entre vous-même et le SDP. Ceci s'est terminé de telle

 12   façon que le 26 Mars 1992, une toute dernière réunion de l'assemblée

 13   municipale a eu lieu avant la guerre.

 14   Réponse:    Oui, c'est le 26 Mars que, pour la dernière fois, nous avons

 15   tenu la séance de l'assemblée municipale. Après cela, il n'y avait plus de

 16   convocation de séance, le président ne l'a jamais convoquée. A cette

 17   époque-là, si je peux dire ainsi, un député du SDP s'est attaqué à nous,

 18   sur une base uninationale.

 19   Question:   Mais on ne va pas entrer dans le détail, on ne va pas abuser

 20   de la patience de la Chambre. Le 26 Mars, dans la transcription c'est

 21   marqué 26 Avril, par conséquent le 26 Mars, c'était la dernière séance de

 22   l'assemblée municipale. Est-ce que j'ai raison ou tort?

 23   Réponse:    Vous avez raison.

 24   Question:   Vous avez poursuivi, par la suite, vos négociations et les

 25   entretiens avec le SDA pour surmonter la situation, n'est-ce pas?


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  1   Réponse:    Oui, nous avons essayé de nous mettre d'accord avec les

  2   représentants du SDA. Nous avons essayé d'organiser ensemble le pouvoir,

  3   et ceci dans le but de résoudre quelques questions clé au niveau de la

  4   ville et de la municipalité.

  5   Question:   Mais j'espère que vous êtes arrivés à quelques accords. Vous

  6   vous êtes mis d'accord quand même sur le fait que la situation n'était pas

  7   tenable et que par conséquent, il fallait faire quelque chose?

  8   Réponse:    Oui, effectivement. Pendant tout ce temps-là, en discutant,

  9   nous nous sommes mis d'accord et nous avons conclu qu'il était

 10   indispensable d'entreprendre quelque chose pour améliorer la situation.

 11   C'était une attitude commune. Nous avons conclu que cette situation ne

 12   pouvait pas être tolérée, que la population de la municipalité de Vares

 13   était pratiquement au bord de la famine. Au cours des entretiens avec les

 14   représentants du SDA, c'était véritablement une attitude commune que nous

 15   avons épousée.

 16   Question:   Est-ce que vous avez pu vous mettre d'accord sur la manière

 17   d'organiser le nouveau pouvoir? Est-ce que vous-même, avec les

 18   représentants du SDA, vous êtes parvenus à un accord sur la façon

 19   d'organiser le pouvoir?

 20   Réponse:    Au moment où nous avons commencé nos entretiens, nous nous

 21   sommes même mis d'accord au sujet de la répartition des portefeuilles et

 22   des ministères différents, mais on ne pouvait pas se mettre d'accord sur

 23   la manière dont il fallait s'organiser, notamment en attendant les

 24   événements qui allaient se passer car les représentants du SDA, les

 25   représentants des Musulmans demandaient qu'on enlève du bâtiment de la


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  1   mairie le drapeau croate qui était hissé ensemble avec le drapeau musulman

  2   avec des lys et une fois quand ils avaient refusé de participer au

  3   pouvoir, nous autres, nous avons posé la question pour savoir si

  4   éventuellement cela les dérangerait si le HDZ ensemble, avec d'autres

  5   membres qui l'auraient accepté, avec des citoyens, si eux seraient

  6   d'accord avec nous, on organise le pouvoir à Vares et sur d'autres

  7   principes, sur d'autres bases. Eux, ils étaient parfaitement d'accord. Ils

  8   ont dit que c'était bien, et qu'ils n'allaient pas poser de problèmes et

  9   c'est le 1er Juillet 1992 que ceci s'est passé. Il n'y avait aucun

 10   incident et aucun problème.

 11   Question:   Si je vous ai bien compris M. Vidovic, c'est le 1er Juillet

 12   1992 que le HVO a organisé, si l'on peut dire, le pouvoir au niveau de la

 13   municipalité de Vares et ce, avec l'accord de la branche de Vares du HDZ.

 14   Réponse:    Oui.

 15   Question:   Il ne souhaitait pas néanmoins indiquer à leurs membres, à

 16   leurs représentants qu'il était nécessaire qu'ils participent à ce

 17   pouvoir.

 18   Réponse:    Oui.

 19   Question:   M. Vidovic, lorsque le HVO a pris entre ses mains

 20   l'organisation du pouvoir, y a-t-il eu des fonctionnaires qui ont été

 21   renvoyés de leur poste au sein de ces organes du pouvoir?

 22   Réponse:    Tous les fonctionnaires municipaux sont restés à leur poste,

 23   mis à part ceux qui ne souhaitaient plus se rendre au travail. Nous

 24   n'avons demandé à personne de signer une déclaration de loyauté quelle

 25   qu'elle soit, nous avons laissé le libre choix à tout un chacun. Tout un


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  1   chacun pouvait choisir librement s'il souhaitait continuer à travailler ou

  2   non.

  3   Question:   Indépendamment du fait que les membres du SDA n'étaient pas

  4   prêts à participer aux organes du pouvoir, les Musulmans qui n'étaient pas

  5   membres du SDA, s'acquittaient-ils d'un certain nombre de fonctions de

  6   responsabilité au sein de ces nouveaux organes du pouvoir du HVO?

  7   Réponse:    Oui. Les Musulmans étaient chargés au sein de ces organes du

  8   pouvoir du HVO, de 3 domaines qui étaient, à notre avis, très importants:

  9   l'éducation, la protection civile et la sécurité sociale. Ils ont accepté

 10   de prendre leur place au sein du gouvernement du HVO.

 11   Question:   Pouvez-vous nous citer les noms de ces Musulmans qui ont

 12   occupé ces postes?

 13   Réponse:    Quant à l'éducation, c'était Mme Mufida Dzihdo, la protection

 14   civile était entre les mains de M. Rusmir Berberovic et la sécurité

 15   sociale c'était M. Edhem Ascerija.

 16   Question:   Peut-être aurais-je pu vous poser cette question auparavant,

 17   mais dites-nous s'il y a eu des réactions négatives de la part de vos

 18   voisins, de vos concitoyens musulmans au moment où Vares a rejoint la

 19   communauté croate de Herceg-Bosna?

 20   Réponse:    Et bien, nous n'avons eu aucune réaction négative suite à

 21   cette décision que nous avons prise. Il faut savoir qu'à l'époque on

 22   considérait et c'était la position adoptée, que c'était uniquement depuis

 23   l'Herceg-Bosnie qu'on pouvait recevoir de l'aide sous forme de nourriture,

 24   de l'équipement, des manuels scolaires ou d'autres objets de nécessité, de

 25   première nécessité, par exemple des médicaments, tout ce qui est


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  1   nécessaire à assurer un déroulement normal de la vie quotidienne.

  2   Question:   Dites, s'il vous plaît, à la Chambre si cette relation

  3   relativement satisfaisante de la part de la population de Vares, j'entends

  4   par là les Croates et les Musulmans, a été modifiée à partir du moment où

  5   le 1er Septembre 1992, le HVO a organisé le pouvoir dans ce secteur? Est-

  6   ce que cela s'est détérioré?

  7   Réponse:    Quoiqu'il en soit, la vie s'est améliorée, parce que nous

  8   avons tout de suite commencé à organiser des convois, et ces convois

  9   apportaient à Vares les objets de première nécessité. Les boutiques ont

 10   été ouvertes, les commerces, et je pense que c'était de cette façon qu'on

 11   a pu faire profiter de cela tous les citoyens de la municipalité de Vares.

 12   Question:   En Bosnie Centrale, les conflits importants ont éclaté dès le

 13   mois de Janvier, mais c'est devenu une véritable guerre en Avril 1993.

 14   Alors, est-ce que cela a eu un impact sur la vie commune des Croates et

 15   des Musulmans à Vares ou bien non?

 16   Réponse:    Au début du conflit qui a opposé les Croates et les Musulmans

 17   en Bosnie centrale, et au nord de l'Herzégovine , à ce moment-là, il n'y a

 18   pas eu un grand impact de cela au niveau de la municipalité de Vares.

 19   Chacun contrôlait son territoire et il n'y a pas eu d'incidence le long

 20   des lignes de délimitation. En fait, celles-ci n'étaient même pas tracées

 21   à l'époque.

 22   Question:   Si je vous ai bien compris, à l'époque, vous aviez toujours un

 23   même ennemi commun et c'était l'armée des Serbes de Bosnie?

 24   Réponse:    Oui, oui au fond, c'est cela.

 25   Question:   Monsieur Vidovic, vous êtes le 163ème témoin qui dépose devant


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  1   cette Chambre. On a déjà beaucoup entendu dire au sujet du fait que le

  2   HDZ, le HVO, la HZ-HB, etc, ont mis en oeuvre une politique de harcèlement

  3   des membres des autres groupes ethniques et notamment des Musulmans et que

  4   cette situation était présente à Vares également donc. Est-ce que c'est

  5   exact?

  6   Réponse:    Cela n'est pas exact, la ville de Vares était dans un

  7   encerclement pratiquement total, que ce soit par les Musulmans ou par les

  8   Serbes. Et il n'y avait aucun moyen de mettre en place une purification

  9   ethnique, quelle qu'elle soit. Il n'y avait pas non plus l'intention de le

 10   faire.

 11   Question:   Je vous en prie.

 12   Réponse:    Au fond, cela montre que chez nous, que ce soit dans les

 13   dispensaires ou dans les écoles ou dans les entreprises, tout le monde est

 14   resté en place, aucun directeur n'a été renvoyé, si cela n'avait pas été

 15   fait de son propre gré, s'il n'était pas parti tout seul, nous avons même

 16   permis aux Serbes qui voulaient quitter la ville, d'emmener tous leurs

 17   biens, sans aucun problème.

 18   Question:   S'il vous plaît, je pense que la Chambre a déjà entendu des

 19   réponses à cette question. Vous avez été membres du HDZ pendant de longues

 20   années ou plutôt vous l'êtes toujours. Vous avez été membre de la HZ-HB,

 21   vous savez quel est le type de politique, que cela soit à titre officiel

 22   ou officieux qui a été mené, vous avez également eu l'occasion de vous

 23   entretenir avec des hommes qui ont fait partie de ces instances de

 24   pouvoir. Vous est-il arrivé à un moment quel qu'il soit que quelqu'un

 25   défende cette politique de persécution, donc des non Croates, que cela


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  1   soit à Vares ou dans d'autres localités de la HZ-HB?

  2   Réponse:    Au cours de mes contacts, je ne l'ai jamais entendu et cela ne

  3   figure pas non plus dans les documents officiels de la HZ-HB.

  4   Question:   Dans vos contacts à titre personnel, avez-vous eu l'occasion

  5   d'entendre de la part des fonctionnaires de ces instances quelque chose

  6   allant dans ce sens?

  7   Réponse:    Lors des réunions officielles, même dans les contacts privés,

  8   je n'ai jamais entendu qui que ce soit prôner ce genre de chose.

  9   Question:   Pour en terminer avec cette question au sujet de Vares, après

 10   avoir pris le contrôle, pris sur son organisation du pouvoir le 1er

 11   Juillet 1993, le HVO a-t-il mis en place une politique quelconque de

 12   persécution des non Croates dans la municipalité de Vares?

 13   Réponse: Il me semble avoir déjà dit à l'instant que nous n'avons pas

 14   cherché à priver qui que ce soit de ses droits, nous avons respecté les

 15   Droits de l'Homme et pendant notre exercice du pouvoir, nous n'avons pas

 16   renvoyé de son poste qui que ce soit, nous n'avons pas arrêté qui que ce

 17   soit pour la simple raison qu'il était Serbe ou Musulman.

 18   Question:   Vous venez de dire, Monsieur Vidovic, que la situation s'est

 19   améliorée, que les commerces ont rouvert, que suite au 1er Juillet 1992,

 20   la vie a commencé à se normaliser. Mais vous n'avez pas cité un détail:

 21   votre coopération avec vos voisins, j'entends par là, le deuxième corps

 22   d'armée de l'armée de Bosnie-Herzégovine à Tuzla. Vous, en tant que

 23   municipalité, vous aviez une bonne collaboration avec eux, n'est-ce pas?

 24   Réponse:    Oui, s'agissant du deuxième corps d'armée, s'agissant des

 25   organes de pouvoir civil, nous avions de bons contacts avec eux. Le 23


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  1   Septembre 1993, c'est un détail, je suis parti avec un groupe de sportifs

  2   de Vares et nous avons été invités à Tuzla. Nous avons joué des matchs de

  3   basket-ball avec Sloboda de Tuzla, et nos basketteurs ont montré ce qu'ils

  4   avaient appris en ces temps de guerre. Si l'on tient compte du fait que

  5   cela s'est produit un mois avant l'attaque menée contre la municipalité de

  6   Vares, on voit que ces contacts étaient vraiment bons, et les unités du

  7   HVO tenaient les lignes face aux Serbes, au niveau de Ribnica et de Vosuca

  8   où nous aidions, au cours de ces combats, le deuxième corps d'armée

  9   bosniaque.

 10   Egalement, nous avons fourni des équipements à une brigade, nous leur

 11   avons fourni des munitions, et ce, jusqu'à la fin de l'année 1992. C'était

 12   la brigade Dolovo qui recevait notre aide, et cela lui a permis de

 13   résister à l'armée serbe.

 14   Question:   Un détail au sujet de la brigade de la ville Dolovo:c'était

 15   une brigade de l'armée de Bosnie-Herzégovine?

 16   Réponse:    Oui, il y avait aussi une petite unité du HVO au sein de cette

 17   brigade. Elle comptait 16 membres, me semble-t-il.

 18   Question:   Merci. Il n'en reste pas moins que les Musulmans ont fondé

 19   tout d'abord leur forces armées, puis par la suite, en fait plutôt un seul

 20   détail que je souhaite avancer, les Musulmans ont mis sur pied leurs

 21   propres forces armées, et "c'est cela qui a mis fin à l'état-major

 22   conjoint chargé de la défense de la ville".

 23   Réponse:    Cet état-major conjoint s'est définitivement effondré en 1992,

 24   à l'automne 1992, lorsque c'est dans le village de Strijezevo que sont

 25   partis ces membres Musulmans, et c'est à ce moment-là que l'armée de


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  1   Bosnie-Herzégovine a commencé à organiser ses propres unités dans la

  2   municipalité de Vares. Concrètement, la défense conjointe a cessé de

  3   fonctionner à partir de ce moment-là.

  4   Question:   Un autre point, s'il vous plaît: du côté musulman, est-ce

  5   qu'il y a eu création de leur propres organes de pouvoir au moment où la

  6   présidence de guerre a été constituée à Dabravine?

  7   Réponse:    A Strijezevo, c'était à la fin de l'été 1992 qu'il y a eu

  8   effectivement création de cette instance parallèle, parallèle au

  9   gouvernement du HVO, dans la ville même.

 10   Question:   Puisque nous avons deux instances de pouvoir organisées de

 11   manière simultanée, est-ce que cela veut dire que le territoire lui-même

 12   est partagé dans le sens des pouvoirs?

 13   Réponse:    Oui, pour ce qui est des pouvoirs, on peut dire qu'il y a eu

 14   une espèce de partage tacite. Comme je vous l'ai déjà dit, dans le sud de

 15   la municipalité de Vares résidait essentiellement une population musulmane

 16   et dans ce secteur, nous avons perdu, si je puis m'exprimer ainsi, nous

 17   avons cessé d'exercer le pouvoir, puisque c'est la présidence de guerre

 18   qui a commencé à exercer le pouvoir.

 19   Question:   Lorsque je parle de convois du HVO, je pense donc à vos

 20   convois du HVO de Dabravine. Les moments où il y a eu, donc, les arrêts

 21   des deux convois, ces incidents n'ont pas dégénéré, n'est-ce pas?

 22   Réponse:    Non, dans ce cas-là, il n'y a pas eu d'escalade. On nous a

 23   rendu les véhicules, seulement ce que ces véhicules transportaient, tout

 24   cela était déchargé dans un centre logistique de l'armée de Bosnie-

 25   Herzégovine.


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  1   Question:   Nous pouvons passer au paragraphe 18, à présent. Quelques

  2   questions au sujet du Convoi de la Joie, ou plutôt du convoi de Tuzla en

  3   1993. Le 12 Avril 1993, vous avez été obligé de vous déplacer à Zagreb?

  4   Réponse: Oui, j'ai dû aller à Zagreb parce que mon entreprise avait un

  5   chantier à Zagreb, et je suis allé surveiller un petit peu l'évolution des

  6   travaux pour voir comment cela se déroulait.

  7   Question:   Vous êtes allé à Zagreb quelques jours avant le conflit, avant

  8   que le conflit n'éclate en Bosnie centrale. Donc, puisque quelques jours

  9   plus tard le conflit a éclaté, avez-vous été en mesure de retourner à

 10   Vares quand vous avez terminé votre travail à Zagreb?

 11   Réponse:    Je pense que je suis l'une des dernières personnes à avoir

 12   emprunté cette route à travers Novi Travnik, Bugojno, Jablanica, Dresnica

 13   et Siroki Briyeg.

 14   Question:   Donc, vous l'avez empruntée.

 15   Réponse:    Je me suis donc rendu à Zagreb, je suis revenu et quelques

 16   jours plus tard, le conflit a éclaté en Bosnie centrale. Ces axes

 17   routiers, en direction de Vares où je devais retourner, se sont trouvés

 18   bloqués. Donc je suis resté en Herzégovine deux mois exactement.

 19   Question:   Pendant que vous étiez en Herzégovine, on peut dire que d'une

 20   certaine sorte, vous avez été témoin de l'arrivée de ce Convoi de la Joie

 21   qui est parti de Tuzla par Vares pour atteindre Grude?

 22   Réponse:    Oui. Pendant que j'étais en Herzégovine, je ne sais pas

 23   exactement, mais je pense effectivement que c'était le 20 Mai, un convoi

 24   est arrivé de Tuzla à Vares. Il a été rejoint par quelques véhicules du

 25   HVO de Vares.. Ce que j'espérais, c'était de pouvoir revenir avec ce


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  1   convoi, c'est à cela que je m'attendais, parce que ce convoi avait reçu

  2   des attestations à la fois de l'armée de Bosnie-Herzégovine et du HVO, des

  3   laissez-passer.

  4   Question:   C'était donc un convoi un peu inhabituel, c'était le HVO et

  5   l'armée de Bosnie-Herzégovine de Tuzla qui l'ont mis sur pied afin de se

  6   procurer toute sorte d'équipements, n'est-ce pas, des armes, des munitions

  7   également?

  8   Réponse:    Ils ont reçu l'autorisation de transporter du matériel de

  9   guerre également, oui, en plus de tout ce qui était vivres et autres

 10   produits nécessaires à la population.

 11   Question:   Donc, c'était un petit convoi, relativement petit, il est

 12   arrivé en Herzégovine et vous l'avez rejoint. Pendant votre retour en

 13   direction de Vares, ou plutôt de Tuzla, ce convoi comptait combien de

 14   véhicules? Dites-le nous de manière approximative.

 15   Réponse:    Il y a eu environ 700 véhicules, y compris les camions, les

 16   remorques, les citernes, les autocars ainsi que les véhicules de tourisme.

 17   Question : Ce convoi bénéficiait d'une escorte des "Warriors" du bataillon

 18   britannique, ou ils l'ont rejoint plus tard, pour autant que vous le

 19   sachiez?

 20   Réponse:    Je ne sais pas s'il a eu une escorte à son arrivée en

 21   Herzégovine, c'est un élément que j'ignore puisque j'ai été mis au courant

 22   de son arrivée une fois que je me suis retrouvé sur place. Mais à notre

 23   retour d'Herzégovine, il a été été effectivement escorté par le BRITBAT de

 24   la Forpronu.

 25   Question:   Monsieur Vidovic, la raison qui vous a donc poussé à rejoindre


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  1   ce convoi, c'était de revenir chez vous?

  2   Réponse:    Oui, le seul moyen que j'avais de rentrer chez moi, c'était de

  3   rejoindre ce convoi. Il y avait aussi trois véhicules particuliers,

  4   voitures particulières, qui ont rejoint ce convoi, et plusieurs autocars.

  5   Question:   Mais en Herzégovine, il y avait bien d'autres véhicules qui

  6   attendaient, parce que finalement, ce convoi a atteint ce chiffre

  7   surnaturel de 700 véhicules?

  8   Réponse:    Oui, il y avait même des personnes qui sont venues

  9   d'Allemagne, des véhicules tout à fait neufs avec des plaques

 10   d'immatriculation tout à fait récentes, et ces véhicules ont rejoint le

 11   convoi.

 12   Question:   Monsieur Vidovic, à quel moment ce convoi a-t-il quitté Grude

 13   pour se diriger vers Tuzla?

 14   Réponse:    Le convoi est parti de Grude dans l'après-midi du 7 Juin 1993.

 15   Nous avons voyagé pendant plusieurs jours. Nous avons passé une nuit près

 16   de Tomislavgrad, la deuxième nuit, quand nous sommes partis, c'était donc

 17   un lundi, la nuit du lundi au mardi, nous l'avons passé près de

 18   Tomislavgrad, la nuit suivante, du mardi au mercredi, nous avons atteint

 19   Prozor.

 20   Question:   Excusez-moi. Donc, la nuit du 9, la deuxième journée de votre

 21   voyage?

 22   Réponse:    Du 8 au 9, c'était près de Maklijen, de Gornji Vakuf, à

 23   l'entrée de Gornji Vakuf, que nous avons passé la nuit. Et le 10, tard

 24   dans la soirée, nous sommes arrivés, puisqu'à côté du village d'Opara et

 25   jusqu'à l'entrée de Novi Travnik, nous avons circulé sans lumière puisque


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  1   tel a été l'ordre qui nous avait été donné. Donc tard dans la soirée, nous

  2   sommes arrivés à l'entrée de Novi Travnik, le 10 Juin. Et là, on nous a

  3   arrêtés à l'entrée de la ville, c'est là que nous avons passé la nuit.

  4   Question:   S'il vous plaît, qui vous a arrêté à l'entrée de la ville?

  5   Pour quelle raison avez-vous été arrêtés?

  6   Réponse:    Nous avons été arrêtés par le bataillon britannique de la

  7   Forpronu, et ce parce que, dans ce secteur, il y avait des combats. Durant

  8   toute cette nuit, nous avons été témoins.

  9   Question:   Donc, c'était pour des raisons de sécurité?

 10   Réponse:    Oui, pour des raisons de sécurité, parce qu'on ne pouvait pas

 11   voyager de nuit.

 12   Question:   Pour résumer, le 10 au soir, vous vous êtes arrêtés sur la

 13   route, vous avez passé la nuit aux abords de Novi Travnik?

 14   Réponse:    Oui.

 15               (Les Juges se consultent sur le siège.)

 16   Question:   Monsieur Vidovic, vous avez commencé à parler de cela. Vous

 17   avez passé la nuit du 10 au 11 sur la route. Avez-vous entendu des combats

 18   dans les environs?

 19   Réponse:    Durant toute la nuit, on a entendu des coups de feu, en fait

 20   des tirs d'artillerie et de différentes armes de l'infanterie. C'est ce

 21   qui nous a permis d'apprendre que tout ce secteur était le théâtre des

 22   opérations.

 23   Question:   Dites-moi, s'il vous plaît… Le lendemain, quand vous êtes

 24   arrivés à Vitez, je suppose que vous avez entendu de la bouche des

 25   habitants de Vitez, ou de la bouche des gens que vous connaissiez sur


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  1   place, ce qui s'était passé cette nuit-là, la nuit du 10 Juin 1993, ce qui

  2   s'était passé à Vitez?

  3   Réponse:    A Vitez, au point de contrôle de la police où nous avons été

  4   arrêtés, j'ai entendu dire que la veille au soir, il y a eu des morts à

  5   Vitez, que huit enfants ont été tués. Et d'une certaine façon, cela m'a

  6   permis de comprendre un peu mieux ce qui s'était passé avec le convoi.

  7   Question:   Très bien. Dites-moi, s'il vous plaît, pendant que vous étiez

  8   à l'entrée de Travnik, dans la nuit du 10 au 11 Juin 1993, les gens qui se

  9   trouvaient à proximité vous ont-ils dit depuis quand ces combats faisaient

 10   rage, ces combats dont vous entendiez les bruits durant cette nuit?

 11   Réponse:    Mais la nuit en question, nous n'avons pas eu de contacts avec

 12   la population parce que tout simplement, nous ne pouvions pas le faire,

 13   c'était la nuit noire. Il n'y avait pas d'électricité. Nous n'avions pas

 14   le droit de nous écarter des véhicules, nous n'osions pas le faire. Nous

 15   n'avons donc pas eu de contacts, du moins cela est vrai pour la partie du

 16   convoi dont je faisais partie. Nous n'avons pas eu de contacts avec la

 17   population locale.

 18   Question:   Très bien. Mais vous l'avez entendu le lendemain, n'est-ce

 19   pas, ou le jour d'après?

 20   Réponse: Le lendemain, à Vitez, j'ai entendu les gens parler de la

 21   situation qui prévalait à Vitez et dans les environs.

 22   Question:   Et vous a-t-on dit qui a attaqué qui, ces jours-là, justement

 23   les jours où vous êtes arrivés en Bosnie centrale?

 24   Réponse:    J'ai entendu dire qu'il y avait eu des attaques sur Travnik,

 25   sur la vallée de la Lasva et sur Vitez en particulier, où… comment dire…


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  1   ces attaques ont été les plus fortes. Et puis, j'ai entendu parler de la

  2   situation dans la ville. Et puis j'ai pu le voir de mes propres yeux.

  3   Question:   Oui, je vois. Mais ce que je n'ai pas compris, c'est si vous

  4   avez dit qui a attaqué Travnik?

  5   Réponse:    C'est l'armée de Bosnie-Herzégovine qui a conduit cette

  6   attaque.

  7   Question:   Très bien. Dites-moi, à présent, s'il vous plaît, vous avez

  8   passé cette nuit sur la route, c'était un convoi qui s'étendait sur

  9   plusieurs kilomètres, n'est-ce pas, puisqu'il comptait environ 700

 10   véhicules?

 11   Réponse:    Oui, c'était une colonne très longue et nous avons passé toute

 12   la nuit à cet endroit, jusqu'au lendemain matin.

 13   Question:   Et dites-nous ce qui s'est produit dans la matinée du 11 Juin

 14   1993, quand vous vous êtes remis en route. Vous avez quitté Travnik et

 15   vous êtes partis vers Nova Bila?

 16   Réponse:    Tôt le matin, nous avons poursuivi notre chemin, lorsque les

 17   soldats qui assuraient la sécurité nous l'ont permis. Mais quand nous

 18   sommes arrivés à l'endroit qui s'appelle "Kod Brale" de Stare Bila, il y a

 19   eu séparation des véhicules. Le convoi s'est divisé en deux parties. Moi,

 20   j'étais au début de la deuxième partie. Donc, la première est partie vers

 21   la carrière qui fonctionnait, là-bas.

 22   Question:   Très bien. Mais qui a partagé ce convoi? Quels étaient les

 23   critères selon lesquels cela s'est fait? Pouvez-vous décrire un petit peu

 24   la situation à la Chambre?

 25   Réponse:    Ce convoi était partagé par la population de Stare Bila, par


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  1   les habitants de Stare Bila. Nous ne pouvions pas poursuivre, puisque le

  2   convoi lui-même s'est divisé. Il n'était plus aussi compact qu'avant et en

  3   fait, cette population a eu le temps d'installer des barrages, des

  4   obstacles sur la route. Et cette partie du convoi, qui se trouvait

  5   derrière nous, s'est dirigée vers la carrière.

  6   Question:   Vous parlez des habitants. Ces habitants, c'étaient des

  7   soldats, c'étaient des hommes, des femmes, des enfants? Qui était-ce?

  8   Réponse:    Il y avait des civils, il y avait des femmes, des enfants, des

  9   hommes.

 10   Question:   Excusez-moi, mais dans quel état d'esprit étaient-ils? Ils

 11   étaient plutôt amicaux, plutôt hostiles à votre égard? C'étaient des gens

 12   qui éprouvaient de l'amertume? Décrivez, un petit peu.

 13   Réponse:    Eh bien, en aucun cas on ne peut dire qu'ils avaient une

 14   attitude amicale, c'était plutôt le contraire, ils étaient hostiles. Nous

 15   qui portions les insignes du HVO de Vares, ils nous disaient que nous

 16   étions un convoi musulman, que nous avions trahi le HVO de Vares. C'est

 17   pratiquement cela qu'ils nous reprochaient. Il y a eu des mots assez durs

 18   qui ont été prononcés. Ce peuple était vraiment amer et hostile.

 19   M. le Président (interprétation): Monsieur Naumovski, je vois que nous

 20   sommes à mi-chemin de cette déposition, mais il est 4 heures, et vous

 21   devriez peut-être poursuivre demain.

 22   M. Naumovski (interprétation): Oui.

 23               (Questions relatives à la procédure.)

 24   M. le Président (interprétation): Entre-temps, un point qui a été soulevé

 25   par le greffier d'audience, vous avez dit: il devrait être possible de


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  1   recueillir les dépositions des témoins qui déposeront par vidéo conférence

  2   en une journée. Si tel est le cas, ce serait effectivement mieux puisqu'il

  3   ne faudrait pas que le greffe et les techniciens passent la nuit là-bas.

  4   M. Naumovski (interprétation): Nous ne savons pas combien de temps, il

  5   faudra pour le contre-interrogatoire. Ce que nous pensons, c'est qu'une

  6   journée devrait être suffisante mais nous ne pouvons pas être affirmatif à

  7   100 %. J'aimerais aider le greffe, mais je ne peux pas vous en dire plus.

  8   M. Bennouna: Je crois que Me Sayers avait déjà précisé que les trois

  9   témoins qui sont appelés à témoigner, témoignent sur des points assez

 10   limités. Et que pour l'interrogatoire principal, cela ne prendrait pas

 11   beaucoup de temps si mes souvenirs sont bons. A combien estimez-vous

 12   l'interrogatoire principal pour les trois témoins? Je crois que cela

 13   pourrait aider.

 14   M. Naumovski (interprétation): Eh bien, je ne pense pas que

 15   l'interrogatoire principal de tous les trois témoins puissent durer trois

 16   heures, très certainement, puisque nous avons par exemple le témoin qui

 17   parlera de Kacuni, cela peut prendre 15 minutes pas plus et si on ne

 18   rentre pas dans les détails, 20 minutes tout au plus. Certainement deux

 19   heures, peut-être moins de deux heures.

 20   M. Bennouna: Si c'est effectivement moins de deux heures et si on estime

 21   que le contre-interrogatoire prendra autant de temps, c'est-à-dire

 22   l'équivalent, cela devrait pouvoir se faire dans la journée.

 23   M. le Président (interprétation): Pourriez-vous nous assister sur ce

 24   point?

 25   M. Nice (interprétation): Effectivement, s'il y a un interrogatoire


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  1   principal en une heure, nous pourrions entendre ces trois témoins en une

  2   journée.

  3   M. le Président (interprétation): Le greffe peut-il s'entretenir avec moi?

  4               (Le greffe s'entretient avec le Président.)

  5   M. Nice (interprétation): Permettez moi d'objecter ceci, Messieurs les

  6   Juges, nous comprenons qu'il est bien entendu que tous ces résumés sont

  7   préparés, et que les documents qui nous ont été notifiés la semaine

  8   dernière le prouvent suffisamment. Mais s'il y a déposition par liaison

  9   vidéo, il serait fort utile d'avoir les résumés qui soit rédigés ou signés

 10   là où s'effectuera la liaison à l'avance.

 11   Et donc, tant que j'ai le micro, je vais peut-être corriger quelque chose

 12   qui n'a pas trait à ce témoin, mais puisque j'ai constaté une erreur, je

 13   dois la corriger.

 14   Le dernier témoin a déposé en audience publique. Et quelque part, c'est

 15   passé par les mailles du filet dans le bureau du Procureur. Cela aurait pu

 16   être un témoin dont on déposerait le compte rendu d'audience, mais

 17   apparemment, elle a déposé pour un accusé, mais nous n'en avons pas

 18   constaté la réalité. Mais Mme Verhaag a discuté avec elle.

 19   M. le Président (interprétation): En ce qui concerne ce témoin, Maître

 20   Naumovski, si je calcule bien, il s'agit de 164 témoins et pas 163, vous

 21   avez peut-être oublié le témoin de l'accusation d'hier. C'est peut-être

 22   possible.

 23   M. Naumovski (interprétation): Je n'avais pas compté le témoin

 24   d'aujourd'hui, semble-t-il.

 25   M. le Président (interprétation): Monsieur Vidovic, nous allons suspendre


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  1   l'audience. Nous la reprendrons demain matin. N'oubliez pas qu'au cours de

  2   cette pause, vous n'avez pas la permission de parler à qui que ce soit de

  3   votre déposition et que personne ne vous en parle. Ceci concerne aussi la

  4   défense. Veuillez être de retour au prétoire demain à 9 heures 30.

  5   M. Vidovic (interprétation): Je comprends.

  6               (L'audience est levée à 16 heures 10.).

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