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1 (Vendredi 22 juin 2001.)
2 (Conférence de mise en état.)
3 (L'audience est ouverte à 10 heures.)
4 (Les accusés sont dans le prétoire.)
5 (Audience publique.)
6 (L'audience est présidée par un Juge unique, le Juge Hunt.)
7 M. le Président (interprétation): Veuillez citer l'affaire?
8 Mme Taylor (interprétation): Affaire IT-95-14/2-A, le Procureur contre
9 Dario Kordic et Mario Cerkez.
10 M. le Président (interprétation): Veuillez-vous identifier?
11 M. Yapa (interprétation): Je m'appelle Upawansa Yapa, je suis membre de
12 l'accusation et j'ai, à mes côtés, M. Norman Farrell, et Mlle Edel Guzman
13 est notre assistante.
14 M. le Président (interprétation): Oui, Maître Naumovski?
15 M. Naumovski (interprétation): Monsieur le Président, je m'appelle Mitko
16 Naumovski. Je suis avocat-conseil de la défense de M. Dario Kordic, je
17 viens de Zagreb.
18 M. le Président (interprétation): Merci. Monsieur Cerkez?
19 M. Kovacic (interprétation): Je m'appelle Bozidar Kovacic, je viens de la
20 Croatie et je représente M. Cerkez.
21 M. le Président (interprétation): Merci.
22 Monsieur Kordic, est-ce que vous comprenez, est-ce que vous entendez
23 l'interprétation?
24 M. Kordic (interprétation): Oui, certainement, Monsieur le Président. Je
25 comprends.
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1 M. le Président (interprétation): Oui, très bien. Vous pouvez vous
2 rasseoir.
3 Monsieur Cerkez, est-ce que vous pouvez entendre les procédures dans la
4 langue que vous comprenez?
5 M. Cerkez (interprétation): Oui, certainement, Monsieur le Président.
6 M. le Président (interprétation): Il s'agit d'une conférence de mise en
7 état, conformément à l'Article 65 bis.
8 Avant de procéder à notre programme, est-ce qu'il y a quelque chose que
9 l'accusation désire soulever?
10 M. Yapa (interprétation): Non, Monsieur le Président.
11 M. le Président (interprétation): Voulez-vous soulever quelque chose de
12 nature générale de la part de M. Kordic?
13 M. Naumovski (interprétation): (Hors micro.)
14 Excusez-moi. En fait, de nature générale, je n'ai rien de particulier à
15 soulever. Je désire simplement peut-être aviser la Chambre que nous avons
16 fait deux requêtes hier. Etant donné que vous n'avez peut-être pas eu
17 assez de temps hier pour examiner le tout, je voulais simplement vous
18 aviser que nous les avons soulevées.
19 M. le Président (interprétation): Oui, certainement, c'est un peu tard.
20 J'ai consulté les documents mais il faudrait néanmoins essayer de nous les
21 présenter un peu plus à l'avance la prochaine fois.
22 De la part de M. Cerkez, est-ce que son avocat-conseil aurait quelque
23 chose à dire?
24 M. Kovacic (interprétation): (Hors micro.)
25 Je suis désolé. Monsieur le Président, nous n'avons rien de particulier à
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1 soulever. Nous avons également examiné les documents provenant de M.
2 Kordic, mais étant donné que j'étais en voyage lorsqu'ils sont arrivés,
3 les impressions que j'ai eues, d'après ce que j'ai lu, sont en effet que
4 je vais certainement être d'accord.
5 Je vais me joindre à ce qui a été présenté dans les arguments et donc cela
6 est lié aux documents qui existent en Bosnie-Herzégovine et aux documents
7 qui se trouvent dans les archives de la Bosnie-Herzégovine et de la
8 Fédération de Bosnie-Herzégovine. Donc je ne suis pas tout à fait prêt
9 aujourd'hui à entamer cette argumentation, si vous désirez. Mais je suis
10 néanmoins prêt à accepter et je me joins à ce qui a déjà été dit.
11 M. le Président (interprétation): Avant d'en arriver là, Monsieur Yapa,
12 pourriez-vous m'entretenir, s'il vous plaît, et me dire que représentent
13 les archives de la Bosnie-Herzégovine? Vous en avez fait état dans votre
14 lettre. A quoi vous référez-vous exactement?
15 M. Yapa (interprétation): Monsieur le Président, juste un instant, s'il
16 vous plaît.
17 Monsieur le Président, selon les informations reçues, je pourrais vous
18 dire que les documents qui ont été communiqués, en fait, c'est un document
19 qui a été communiqué, il a été obtenu de la part des archives de la
20 Bosnie-Herzégovine. Je ne peux pas vous donner une évaluation précise pour
21 ce qui est du moment même, où le document a été communiqué.
22 M. le Président (interprétation): Non, je crois que vous m'avez mal
23 compris. Selon votre lettre que nous avons reçue sur une base ex parte, et
24 en fait je vais vous la remettre dans un instant, elle est datée donc du
25 30 juin, dans votre lettre, nous lisons que:
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1 "Les documents qui sont joints représentent les résultats de nos
2 recherches faites auprès des archives de la Bosnie-Herzégovine."
3 En fait, j'ai également reçu un grand nombre de documents. J'aimerais
4 savoir que représentent pour vous ces archives de la Bosnie-Herzégovine?
5 Comment les interprétez-vous? Qu'est-ce que c'est?
6 Nous avons en fait beaucoup à faire avec les archives de Zagreb mais il
7 s'agit d'une autre archive ici, n'est-ce pas, dans ce cas-ci?
8 M. Yapa (interprétation): Eh bien, si je puis revenir et vous parler de la
9 façon dont le document a été communiqué…
10 M. le Président (interprétation): Non, Monsieur Yapa, c'est une question
11 très simple et c'est la suivante: que représentent les archives de la
12 Bosnie-Herzégovine? Est-ce qu'il s'agit d'un ensemble de documents que
13 l'accusation a obtenus? Et si oui, à quel moment est-ce que vous les avez
14 obtenus?
15 M. Yapa (interprétation): Oui, merci, Monsieur le Président.
16 Il s'agit d'un ensemble de documents. Ce sont des documents qui ont été
17 obtenus des archives de la Bosnie-Herzégovine au cours d'une opération au
18 mois d'octobre 2000, et cela a été situé sur l'étagère 5E7 dans la
19 troisième chambre d'archives de la Bosnie-Herzégovine.
20 M. le Président (interprétation): Non, non, nous n'avions pas besoin
21 d'autant de détails. Mais vous dites que vous avez saisi ces documents,
22 vous avez pris ces documents au mois d'octobre 2000? Est-ce exact?
23 M. Yapa (interprétation): Oui, c'est exact.
24 M. le Président (interprétation): Est-ce que vous avez communiqué ces
25 documents à la défense?
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1 M. Yapa (interprétation): Non, nous n'avons pas encore communiqué ces
2 documents à la défense.
3 M. le Président (interprétation): Pour quelle raison?
4 M. Yapa (interprétation): Oui? Vous m'avez posé la question: pourquoi nous
5 n'avons pas communiqué ces documents?
6 M. le Président (interprétation): Oui.
7 M. Yapa (interprétation): Eh bien, nous n'avons pas communiqué ces
8 documents.
9 M. le Président (interprétation): Oui mais pourquoi n'avez-vous pas
10 communiqué ces documents?
11 Voyez-vous, vous avez une obligation qui… vous êtes lié à une obligation,
12 selon l'Article 68, c'est que tous les documents que vous avez en votre
13 possession, vous avez l'obligation, selon l'Article 68, de communiquer ces
14 documents.
15 Cet ensemble de documents sur lesquels vous avez mis la main dessus, il y
16 a donc 8 mois que vous avez déjà en votre possession ces documents! Et la
17 question est la suivante: quelle est la raison pour laquelle vous n'avez
18 pas communiqué ces documents auparavant, vous les avez communiqués en date
19 du 13 juin?
20 M. Yapa (interprétation): Eh bien, c'est en fait quelque chose que nous
21 n'avions pas vraiment considéré comme étant des documents qui feraient
22 l'objet de divulgation, de communication. Nous ne croyions pas qu'il
23 s'agissait de ce genre de documents-là. Et lorsque nous avons mis la main
24 sur ce genre de documents, nous nous sommes dit: "Oui, c'est le genre de
25 documents qu'il faudrait communiquer".
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1 M. le Président (interprétation): Vous n'aviez donc pas fait de
2 recherches, vous n'aviez pas revu ou relu ces documents jusqu'en juin et
3 vous ne vous étiez pas conformés à l'Article 68?
4 M. Yapa (interprétation): Oui particulièrement, selon l'Article 68.
5 M. le Président (interpretation): Oui, c'est une obligation qui est
6 continue, il faut communiquer les moyens de preuve à décharge.
7 M. Yapa (interprétation): Oui mais nous avons fait les recherches.
8 M. le Président (interpretation): Oui, à quel moment avez-vous fait les
9 recherches? Dites-nous à quel moment vous avez examiné ces documents que
10 vous avez reçus au mois d'octobre de l'année dernière, selon l'Article 68?
11 A quel moment est-ce que vous avez fait les recherches pour vous conformer
12 à l'Article 68?
13 M. Yapa (interprétation): Eh bien, nous avons… Bien sûr, l'attention que
14 nous portons à ces documents est une attention qui se fait sur une base
15 continue.
16 M. le Président (interpretation): Non, je ne veux pas avoir de réponse
17 évasive. Vous ne voulez peut-être pas être évasif de façon délibérée mais
18 vous ne répondez pas à mes questions.
19 Lorsque quelqu'un a dit: "Nous devons examiner ces archives provenant de
20 la Bosnie-Herzégovine pour nous conformer à l'Article 68"?
21 M. Yapa (interprétation): Mais cela a été fait, cela a été fait depuis le
22 tout début, Monsieur le Président, avec tout mon respect.
23 M. le Président (interpretation): Depuis le mois d'octobre, il y a donc
24 quelqu'un qui examine ces documents, c'est cela que vous êtes en train de
25 nous dire? Depuis le mois d'octobre de l'année dernière?
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1 M. Yapa (interprétation): Je crois que cela devrait être comme cela.
2 M. le Président (interpretation): Mais ce n'est pas une réponse.
3 Est-ce que quelqu'un s'est penché sur ces documents, oui ou non?
4 M. Yapa (interprétation): Monsieur le Président, pour vous donner une
5 réponse très précise à cela, je ne peux pas, je ne suis pas en position de
6 vous répondre pour l'instant, mais je suis absolument certain que la
7 recherche avait été faite. Lorsque nous avons mis la main sur ces
8 documents, nous les avons communiqués.
9 M. le Président (interpretation): Et quelle est la taille, quelle est
10 l'ampleur, ou que représentent ces documents exactement?
11 Ce sont des choses qui sont très pertinentes, vous savez. Et dans la
12 dernière décision que j'ai rendue dans cette affaire, j'ai attiré
13 l'attention sur le fait que c'est très important de communiquer, c'est
14 aussi important que l'obligation de faire un procès.
15 L'accusation ayant donc soulevé la description et ayant parlé du fait
16 qu'ils représentent la justice -cela est tout à fait vrai- mais l'une des
17 obligations que l'accusation a en tant que représentants de la justice,
18 est de communiquer tous les moyens de preuve, non seulement sur l'Article
19 68 mais l'accusation est liée à une obligation générale de communiquer
20 tous les moyens de preuve.
21 L'année dernière, cette affaire était donc encore en cours, et pour la
22 première fois vous avez découvert ces documents au mois de juin, il me
23 semble que vous n'avez peut-être pas l'explication tout à fait à la portée
24 de votre main en ce moment, mais vous allez devoir nous expliquer cela.
25 M. Yapa (interprétation): Oui, merci.
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1 M. le Président (interpretation): S'agissant maintenant de l'implication
2 de M. Kordic concernant une prolongation, un délai, que désirez-vous dire
3 là-dessus?
4 M. Naumovski (interprétation): Monsieur le Président, excusez-moi, je ne
5 peux pas ne pas dire quelque chose sur ce que l'accusation vient de dire
6 pour parler de l'origine, c'est-à-dire de la date depuis laquelle
7 l'accusation tient entre ses mains le document en question.
8 En effet, dans notre requête déposée le 18 juillet 2000, cette Chambre a
9 établi une ordonnance à l'adresse de la Bosnie-Herzégovine en vue de
10 communication des éléments demandés par le conseil de la défense.
11 L'accusation sait très bien que le conseil de la défense est à la
12 recherche de ces documents depuis l'an dernier.
13 Nos débats ici ont déjà pris fin vers le mois de décembre. Si certains de
14 ces documents avaient été communiqués au Tribunal, je crois pouvoir dire
15 que probablement la décision du Tribunal aurait été différente.
16 Il s'agit en effet, Monsieur le Président, de documents d'intérêt crucial.
17 Voilà pourquoi je ne peux pas accepter ce que vient de dire l'accusation.
18 Depuis le mois de décembre de l'an dernier, ils avaient en leur possession
19 ces documents alors qu'ils ne m'ont été communiqués qu'en date du 14 de ce
20 mois-ci.
21 M. le Président (interpretation): Oui mais, si je comprends bien, c'est
22 que vous vous êtes occupé vous-même, vous vous êtes chargé vous-même de
23 ces documents, les documents ayant été déposés ex parte, l'accusation ne
24 pouvait pas savoir que vous étiez à la recherche de ces documents.
25 Je ne comprends pas pourquoi vous avez fait vos requêtes ex parte, encore
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1 que je ne comprenne pas tout à fait pour quelles raisons aucun de ces
2 documents n'a été déposé de concert avec la requête ex parte.
3 M. Naumovski (interprétation): Essayons de commencer par la fin.
4 Lorsque j'ai déposé ce mémoire, je voulais que ces documents soient
5 communiqués mais j'ai eu bien peur de ne pas évidemment faire infraction
6 quant à la nécessité de garder le secret de tout le document.
7 Voilà pourquoi j'ai voulu demander d'abord au Tribunal de rendre publics
8 tous ces documents. Ce que j'ai craint, c'est de faire une infraction à la
9 règle.
10 M. le Président (interpretation): Il s'agit d'une grande différence entre
11 documents qui ont été rendus publics et documents qui ont été communiqués
12 par une partie à l'autre partie.
13 Lorsque vous parlez d'ex parte, c'est que vous prenez certaines mesures,
14 vous faites certains actes sans dire pour autant à l'accusation ce que
15 vous voulez dire par là. Vous ne demandez aucune ordonnance!
16 Voilà pourquoi je ne comprends pas pourquoi vous l'avez fait ainsi.
17 Les mesures de protection sont là pour ne pas que le document traité soit
18 considéré comme rendu public.
19 M. Naumovski (interprétation): Mais c'est ce que l'accusation a fait
20 également de son côté, elle a demandé certains documents en ex parte, elle
21 l'a fait auprès de certains Etats. C'est ce que nous avons fait. C'était
22 la praxis d'ailleurs empruntée.
23 Pour ce qui est de la Bosnie-Herzégovine, ne serait-ce que pour parler
24 d'un premier temps, nous avons voulu prendre possession de quelques
25 documents pour pouvoir les manipuler, les traiter, avant de présenter nos
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1 éléments de preuve.
2 Mais il faut dire également que nous avons développé une ample
3 correspondance avec les officiers de la confédération de Bosnie-
4 Herzégovine, malheureusement cette coopération n'a donné aucun résultat.
5 Mais l'accusation, quant à elle, savait très bien que nous avions demandé
6 tous ces documents à la Bosnie-Herzégovine. Je le sais parce que même en
7 audience publique on l'avait dit.
8 Peut-être que pour parler de certaine annexes considérées comme
9 confidentielles, on pourrait le dire ainsi. Mais on savait très bien que
10 nous étions à la recherche de documents et nous les avons demandés à
11 l'ONU, à l'Union européenne et à d'autres Etats également.
12 M. le Président (interprétation): Le principe fondamental concernant
13 chaque affaire, c'est qu'une procédure ex-parte ne doit être appliquée que
14 lorsque ceci se situe dans l'intérêt de la justice, de la justice qui nous
15 concerne tous.
16 Lorsque la communication à l'autre partie ou lorsque le fait d'une requête
17 quelconque est de nature à être onéreux et à aller à l'encontre des
18 intérêts de la partie adverse ou à l'encontre de certaines parties qui ont
19 trait à ces requêtes, l'ensemble -il s'agit d'ailleurs de l'ensemble des
20 décisions établies par ce Tribunal international- et si ceci devait être
21 une pratique générale, voilà le bon moment où il faut l'arrêter cette
22 pratique. En tout cas, nous pouvons nous en occuper un peu plus tard.
23 Ce qui me préoccupe maintenant concernant votre mémoire, votre requête,
24 c'est que si vous ne le faites pas et si l'accusation continue de
25 travailler à ce rythme lent, vous ne les aurez jamais ces documents parce
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1 que d'autres documents surviendront.
2 Voilà la raison pour laquelle vous ne pouvez pas déposer votre requête
3 comme vous avez voulu le faire. Le moment venu où les documents seront en
4 votre possession, vous serez emmenés dans une affaire où cette
5 documentation ne correspond plus à votre requête.
6 Nous devons faire avancer les affaires. Votre client était en détention et
7 depuis longtemps. Et la Chambre d'appel doit évidemment faire poursuivre
8 la procédure en appel.
9 M. Naumovski (interprétation): J'accepte volontiers, Monsieur le
10 Président, ce que vous venez de dire. J'aimerais bien que tous ces
11 documents qui ont été présentés en ex-parte soient rendus publics. Je ne
12 sais plus quelles ont été les "discovery" documents de la part de
13 l'accusation. C'est dans ce sens-là que j'avais demandé à la Chambre
14 certaines dispositions.
15 Mais revenons au principe, Monsieur le Président. Le document qui nous a
16 été communiqué, et sur la base duquel nous voulons déposer notre requête,
17 nous semble être d'intérêt crucial.
18 Tout au long de l'affaire qui a duré pendant huit mois entiers, nous avons
19 discuté notamment de persécutions: qui a attaqué qui dans la vallée de la
20 Lasva, si les deux parties ont été prêtes ou pas etc., etc.
21 Voilà pourquoi vient la consternation qui est la mienne lorsque j'entends
22 dire par l'accusation qu'au mois d'octobre, l'an dernier, l'accusation
23 avait entre ses mains ce document avant que l'affaire soit close. Et il
24 s'agit évidemment d'un document clé.
25 D'autre part, si on a rendu possible l'accès aux archives de Zagreb à
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1 l'accusation, alors je crois que pour parler équitabilité, on devrait
2 parler évidemment des mêmes chances d'accès. Nous aussi par rapport à
3 l'accusation, nous entendons pour la première fois que ces archives
4 existent, pour parler des archives de Bosnie-Herzégovine. Et pour parler
5 de notre requête à nous, évidemment nous pouvons dire que nous ne savions
6 pas que ces archives existaient. Alors que maintenant nous voyons que ces
7 archives existent.
8 Monsieur le Président, ce n'est pas que je veuille me justifier mais
9 regardez le calendrier. Le 14 de ce mois-ci, j'ai reçu la lettre de
10 l'accusation. Le 18 de ce mois-ci, M. Kordic reçoit la sentence en croate,
11 alors que ce n'est seulement qu'en date du 20, mercredi, que j'ai pu
12 déposer ma requête lorsque j'étais venu à La Haye avant-hier.
13 Je ne veux pas me justifier par cela pour dire que ce n'est qu'hier que
14 vous avez pu avoir cette requête, Monsieur le Président. Mais voilà
15 comment les choses ont évolué depuis quelque temps.
16 M. le Président (interprétation): Mais j'aimerais encore entendre la
17 réponse à ma question. Peut-être devrais-je formuler la question
18 autrement? Avez-vous d'autres fondements sur quoi vous baser en appel?
19 M. Naumovski (interprétation): Nous avons plusieurs raisons pour
20 interjeter appel, pour parler de la sentence de la Chambre de première
21 instance, et qui ne concernent pas ce que nous venons de dire pour parler
22 d'un autre organe. Je m'excuse auprès de nos interprètes, je parle
23 beaucoup trop vite.
24 M. le Président (interprétation): Pourquoi donc ne pouvez-vous pas déposer
25 votre requête en appel où vous pourriez exposer les autres raisons de
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1 votre plainte?
2 M. Naumovski (interprétation): Je crois, Monsieur le Président, que nous
3 pouvons lire l'Article 11, l'alinéa 11 de notre mémoire à savoir, où nous
4 parlons de ces raisons pour lesquelles nous n'avons pas pu le faire.
5 Lorsqu'en date du 18 ou du 20, ou 19 ou 20, M. Kordic a pu lire la
6 sentence, il a pu repérer certaines nuances de cette sentence qui lui ont
7 été inconnues il y a quelques jours seulement.
8 Et pourquoi inconnues? Inconnues parce que tout simplement je n'étais pas
9 en mesure de lui assurer la traduction de l'ensemble de la sentence telle
10 qu'elle m'a été rendue, non plus que je n'ai pu repérer moi-même certaines
11 nuances. Je dois le reconnaître moi-même.
12 Voilà la raison pour laquelle, notamment dans l'intérêt de la justice,
13 dans l'intérêt de la protection des droits de l'appelant et de mon client,
14 je peux dire maintenant qu'on devrait proroger le délai, permettre à M.
15 Kordic, une fois qu'il a lu la sentence, pour préciser certains points sur
16 lesquels nous devons nous baser dans notre appel.
17 Nous ne devons pas demander un nouveau délai de 90 jours mais nous prenons
18 la liberté de vous demander un délai de 30 jours supplémentaires sous
19 forme alternative. Et si vous me permettez de le rappeler, Monsieur le
20 Président, je crois qu'il est d'intérêt crucial d'avoir une vue d'ensemble
21 des archives.
22 M. le Président (interprétation): Je vous en prie, je ne veux pas vous
23 entendre répéter ce que vous avez dit. Dites-moi pourquoi est-ce que vous
24 ne pouvez pas faire acte d'appel jusqu'à un certain temps? Ajoutez ensuite
25 les documents en supplément plus tard. Vous dites vous-même que vous ne
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1 parlez ni le français ni l'anglais, n'est-ce pas?
2 M. Naumovski (interprétation): Je ne parle pas français, je parle un peu
3 anglais juste de quoi me débrouiller. Mais évidemment, le Greffe n'a pas
4 toujours pu se rendre compte de la connaissance de l'anglais qui est la
5 mienne pour que je puisse m'occuper de la sentence pour la traduire. Tout
6 le temps de la durée de l'affaire, je ne me suis servi que de la langue
7 croate, Monsieur le Président.
8 M. le Président (interprétation): Alors, vous pourriez peut-être expliquer
9 de quelle façon vous êtes qualifié pour être un des conseils de la
10 défense. Parce qu'après le Règlement, vous devez connaître l'une des deux
11 langues de travail, à moins qu'il n'y ait certaines qualités dont vous
12 faites preuve et signalées par vous au Greffe?
13 M. Naumovski (interprétation): Si je comprends bien, tout ceci a été
14 valable dans les cas où il s'agissait d'avocats commis par le Tribunal.
15 Moi-même, j'ai été choisi par M. Kordic.
16 Tout au long de la durée du procès, j'ai eu des co-conseils des Etats-Unis
17 d'Amérique qui, bien sûr, parlaient très bien l'anglais étant donné que
18 c'est leur langue maternelle.
19 M. le Président (interprétation): Mais la règle est tout à fait concrète.
20 Il s'agit d'une application d'ordre général de cet Article. Il ne s'agit
21 pas évidemment de conseil de la défense désigné par le Tribunal
22 international lorsqu'il s'agit de représenter les intérêts d'un accusé.
23 L'avocat pourra représenter les intérêts d'un client, d'un accusé, s'il
24 est en mesure de parler l'une des deux langues de travail du Tribunal
25 international; il s'agit d'une règle d'application générale.
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1 Et demain, dans le 44B, nous pouvons lire que: "Le Greffe peut, à la
2 demande du suspect, etc., admettre un conseil ne parlant aucune des deux
3 langues de travail du Tribunal mais lorsque ceci se situe dans l'intérêt
4 de la justice". Encore que je ne comprenne pas tout à fait comment vous
5 pouvez dire que vous êtes là en tant que conseil de la défense si vous
6 n'êtes pas qualifié en cette matière?
7 M. Naumovski (interprétation): Avec tout le respect que j'ai pour vous,
8 Monsieur le Président, je ne suis pas tout à fait sûr de pouvoir dire
9 qu'en décembre 1997, lorsque M. Kordic m'avait désigné comme étant un des
10 conseils de la défense, cette condition ait été de rigueur. Cette
11 condition ne m'a pas été posée par le Greffe pour dire si je suis qualifié
12 pour le reste du travail qui est le mien. Je ne voudrais pas m'y
13 prononcer.
14 Pour parler évidemment de la langue anglaise, je vous dis, Monsieur le
15 Président, que j'avais à mes côtés toujours mes collègues avocats qui
16 parlaient bien l'anglais et qui étaient là pour m'aider. Nous sommes dans
17 une situation tout à fait spécifique maintenant.
18 M. le Président (interprétation): Maître Naumovski, ce que je voulais vous
19 dire, c'est tout simplement que pour déposer un mémoire, il faut avoir
20 l'avocat qualifié suffisamment, c'est-à-dire être en mesure de parler
21 l'une des langues de travail. Quand il s'agit du co-conseil, il est dans
22 l'intérêt de la justice de permettre à cet avocat d'être un des
23 défenseurs, mais avoir pour autant quelqu'un qui serait capable de lire,
24 ne serait-ce que de lire les sentences.
25 Or, je voudrais savoir si maintenant vous pouvez saisir, si vous voulez
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1 saisir ce fait-là pour avoir une prorogation de délai?
2 M. Naumovski (interprétation): Monsieur le Président, je n'ai rien voulu
3 faire de la sorte. C'est tout simplement M. Kordic qui, en lisant la
4 sentence, vous l'a demandé ainsi, et c'est en son nom que je vous le
5 demande maintenant.
6 Notre conseil de la défense était bien sûr composé de gens qui parlaient
7 le croate et l'anglais, mais par la force des choses, me voilà seul
8 maintenant à être le défenseur de M. Kordic. Je ne voulais certainement
9 pas exploiter ceci comme étant un fait mais je crois que M. Kordic doit
10 évidemment avoir droit à une prorogation de ce délai, ne serait-ce que
11 d'un mois supplémentaire. Pour toutes ces raisons que je viens d'évoquer.
12 Evidemment tout dépendra de vous, Monsieur le Président.
13 M. le Président (interprétation): Je crois qu'évidemment il faudra faire
14 preuve de patience mais le fait est que l'accusé n'est pas en mesure de
15 lire dans sa langue originale la sentence rendue, mais évidemment tout
16 ceci ne devrait pas empêcher que des requêtes soient déposées, encore que
17 ce fait puisse être pris en considération en vue d'une prorogation du
18 délai.
19 Il a été dit que la décision sera faite, la sentence sera faite et rendue
20 publique au cours de ce mois-ci, et en langue croate, et ceci a été fait.
21 Pour parler de l'alinéa 11 de votre requête, à vrai dire, il n'apporte pas
22 grand-chose de nouveau.
23 Avez-vous quelque chose d'autre à ajouter?
24 M. Naumovski (interprétation): Pour ce qui est de notre mémoire, si vous
25 croyez que je n'ai guère besoin de revenir sur le sujet des archives de
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1 Bosnie-Herzégovine, alors je n'ai plus rien à dire.
2 Mais si vous me permettez, je pourrais dire quelque chose volontiers
3 également sur les archives de Bosnie-Herzégovine.
4 M. le Président (interprétation): Maître Naumovski, c'est une question à
5 part. En ce qui me concerne, il s'agit d'une affaire dont vous pouvez vous
6 occuper dans le cadre de la requête qui sera la vôtre. Mais ce mémoire
7 devra être fait d'ici la date butoir, dans le cadre du délai qui vous a
8 été accordé, et il vous sera rendu possible également d'ajouter d'autres
9 suppléments lorsque vous serez en mesure de faire vos recherches en
10 matière d'archives, si l'accusation a fait une omission pour vous
11 communiquer tout cela, évidemment ne concernant que cette affaire
12 concrète. Mais au stade où nous sommes, je ne parle que de votre requête
13 portant prorogation du délai.
14 Avez-vous quelque chose à dire là-dessus?
15 M. Naumovski (interprétation): Non, Monsieur le Président, je n'ai plus
16 rien à dire là-dessus.
17 M. le Président (interprétation): D'accord.
18 Monsieur Yapa, avez-vous quelque chose à dire au sujet de ces documents
19 déposés en ex parte?
20 M. Yapa (interprétation): (Hors micro.)
21 Monsieur Farrell vient de me dire que nous avons en fait assez de
22 documents qui nous indiquent que les documents ont été soumis de façon ex
23 parte, et ces documents sont présentés sous scellés.
24 M. Farrell (interprétation): Concernant ces documents, concernant les
25 documents ex parte, le Procureur est tout à fait d'accord avec ses
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1 collègues et nous ne voyons pas la raison pour laquelle ces documents ont
2 été soumis de façon ex parte.
3 M. le Président (interprétation): Oui, je crois que je devrais les laisser
4 ou j'ai le désir de les laisser en tant que documents confidentiels, car
5 ils seront sujets à discussion plus tard. Mais je suggère que ces
6 documents soient disponibles également à vos collègues?
7 Est-ce qu'il y a une raison pour laquelle ces documents ont été présentés
8 ex parte?
9 M. Farrell (interprétation): Non, il n'y a en fait aucune raison à ce
10 moment-ci.
11 M. le Président (interprétation): Oui mais le Procureur a demandé la
12 déposition de ces documents ex parte, mais je ne comprends pas la raison?
13 M. Farrell (interprétation): Non, pour être franc, moi non plus je ne
14 comprends pas.
15 M. le Président (interprétation): Si je vous dis que ces documents
16 pourraient être faits de façon ex parte, si vous voulez avoir des
17 documents de l'Etat, vous pouvez peut-être ordonner que ces documents
18 soient présentés de la sorte. Mais si l'Etat revient pour dire: "Nous
19 avions des préoccupations en ce qui a trait à la sécurité", alors nous
20 devrions soumettre ces documents de façon ex parte.
21 Mais je crois que les deux parties désirent toujours avoir les documents
22 ex parte, les ordonnances ex parte, mais cela doit s'arrêter. Il faudrait
23 arrêter ce genre de pratique.
24 M. Farrell (interprétation): Oui, vous avez tout à fait raison. Mais un
25 seul commentaire, si vous voulez que nous répondions à cette requête
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1 concernant la réordonnance de cet ordre qui vient de la Bosnie-
2 Herzégovine.
3 M. le Président (interprétation): Non, pas tout à fait.
4 M. Farrell (interprétation): Nous ne pouvons pas répondre à la requête car
5 nous venons de la recevoir. Mais si vous voulez rendre une ordonnance pour
6 rendre que cette ordonnance ex parte soit levée, en fait je ne sais pas si
7 en ce moment-ci la Chambre d'appel a en fait rendu l'ordre concernant ces
8 documents en Bosnie-Herzégovine, et je ne sais pas si on a demandé que ces
9 documents soient versés ex parte.
10 M. le Président (interprétation): Oui, certainement.
11 M. Farrell (interprétation): Eh bien, de cette façon-là, tous ces
12 documents devraient être rendus disponibles sur une base confidentielle.
13 Nous allons donc évaluer le tout et répondre en considération.
14 M. le Président (interprétation): Oui, très bien. Je vais donc donner
15 l'ordonnance que le matériel qui accompagne le tout soit disponible à
16 l'accusation sur une base confidentielle.
17 Est-ce que le Procureur désire soulever quelque requête que ce soit, ou
18 voulez-vous dire quelque chose concernant le délai? Est-ce que vous vous
19 êtes préoccupé par cela?
20 M. Farrell (interprétation): Le Procureur sera en mesure, ou conformément
21 à notre requête faite le 9 août, nous nous conformons au délai car la
22 version en langue BCS n'a pas été disponible pour nous.
23 Nous comprenons très bien dans les circonstances que cela devrait être
24 allouée. Nous ne croyons donc pas qu'il devrait y avoir une raison pour ce
25 délai supplémentaire.
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1 M. le Président (interprétation): Oui.
2 M. Kovacic (interprétation): Si on peut ajouter encore quelque chose au
3 sujet de la question, ou on la traite tout à l'heure?
4 M. le Président (interprétation): Si vous voulez faire une jonction de ces
5 requêtes, vous devez tout de même déposer le document, mais j'aimerais
6 bien entendre ce que vous avez à dire pour corroborer ce que vous venez de
7 dire. Vous devez avoir évidemment en vue ce que j'ai dit tout à l'heure,
8 vous devez avoir également d'autres raisons de votre appel. Le tout devra
9 être fait d'ici le mois d'août.
10 Si vous avez quelque chose à dire, allez-y.
11 M. Kovacic (interprétation): Monsieur le Président, bien sûr, je le ferai
12 par écrit de façon formelle pour parler de cette requête, mais étant donné
13 que nous sommes en train de discuter du fond même j'aimerais pouvoir
14 ajouter quelque chose que je considère comme étant spécifique pour la
15 défense de Cerkez.
16 Un premier point: c'est ce que vous avez déjà dit dans une première
17 ordonnance qui était la vôtre, lorsque vous avez prorogé le délai qui nous
18 était imparti, j'ai étudié la matière avec toute l'attention nécessaire.
19 Or, l'une des questions clés qui se pose maintenant, c'est au fait
20 d'établir un équilibre entre le droit de l'accusé à avoir un procès rapide
21 et le droit qui est le sien de pouvoir avoir recours à tous les moyens et
22 de disposer de suffisamment de temps en vue d'une défense de bonne
23 qualité.
24 Ce procès dure autant qu'il dure, pratiquement depuis 1997. Nous
25 considérons que, dans une étape préalable au procès, il y a eu beaucoup de
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1 temps perdu, mais peu importe, le procès tout court a été extrêmement
2 rapide, je crois pouvoir dire beaucoup trop rapide à notre encontre, mais
3 peu importe, ce n'est pas une remarque pertinente. Mais ce qui est
4 pertinent c'est que l'accusé se trouve au moment et dans une situation où
5 nous, de notre côté, nous semblons préoccupés lorsqu'il faut savoir si
6 tous ses droits ont été respectés, pour parler de la rapidité et de la
7 vitesse à laquelle le procès a été fait.
8 Or, il y a certains faits nouveaux, le fait est que de nouveaux documents
9 existent.
10 Est-ce que nous allons maintenant proroger les délais? Est-ce que nous
11 pouvons peut-être encore une fois empiéter sur le droit qui est le sien de
12 se faire défendre de façon réaliste rapide et équitable?
13 Un second point que je voudrais toujours soulever, toujours dans le cadre
14 de la demande de prorogation de délai, est une question d'ordre
15 parfaitement pratique, Monsieur le Président. Laquelle question se pose
16 lorsqu'il s'agit évidemment de préparer, d'élaborer l'appel.
17 Malheureusement, je dois travailler dans cet esprit-là ou je serai obligé
18 de déposer notre appel jusqu'en août prochain. Et lorsque nous parlons des
19 parties de notre appel où nous devons traiter de quelques questions, de
20 quelques points de droit et de quelques points de fait, tout me semble
21 être sans encombre.
22 Mais un troisième point, dont nous nous occupons dans notre appel,
23 concerne les faits, et en majeure partie, il s'agit de la valeur probante
24 de certains éléments de preuve que cette Chambre a évidemment trouvés
25 comme elle les a trouvés. Et dans ce sens-là, je ne peux plus me souvenir
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1 s'il s'agissait de deux ou de trois points du "draft" même où l'accusation
2 nous a notifié plusieurs paquets, lesquels paquets, lesquels colis que
3 nous n'avons toujours pas pu voir.
4 Lorsque nous les avons reçus, certains de ces documents, nous avons dû
5 faire marche arrière. Et en fait, nous avons été obligés de nous en tenir
6 autrement, c'est-à-dire d'échanger un petit peu l'essence même de la
7 défense qui était la nôtre.
8 Par conséquent, la question pratique est la suivante: serait-il pertinent
9 d'élaborer, de dresser l'appel tel quel pour avoir la possibilité plus
10 tard de recevoir de nouveaux documents, où entre-temps nous pouvons peut-
11 être faire quelques enquêtes en attendant de nouveaux documents -en
12 l'occurrence, documents concernant les archives de Bosnie-Herzégovine-
13 pour ensuite essayer de mordre dans telle ou telle partie des archives
14 pour l'ensemble de notre appel? Voilà comment je vois l'affaire.
15 Et si je peux conclure, Monsieur le Président, si nous parlons de
16 l'équilibre des trois, alors et pour parler de notre client, je crois que
17 ce qui devrait prévaloir ici, c'est le droit de mon client de prendre part
18 au procès; c'est-à-dire d'avoir suffisamment de temps pour se préparer à
19 ce qu'il doit élaborer, et notamment étant donné le droit qui lui est
20 imparti également, à savoir avoir droit à un procès rapide.
21 Or, où en sommes-nous maintenant, Monsieur le Président?
22 Voilà quatre ans que ce procès dure. Pardon! Pas quatre ans, un peu plus
23 de trois ans. Et une seconde proposition que j'ai à formuler, toujours
24 dans le même sens, de voir proroger ce délai. Car je suis persuadé, pour
25 ma part, que la force probante de nos arguments ou que, disons, la méthode
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1 d'approche qui sera la nôtre, ce serait beaucoup plus utile pour notre
2 appelant, plus utile aussi pour les autres parties et en définitive plus
3 utile pour le Tribunal qui devra s'en charger.
4 C'est dans ce sens-là que je voulais me faire entendre, Monsieur le
5 Président, pour parler notamment de cet équilibre qui doit être fait.
6 Essayons de parler peut-être d'un délai tout à fait modéré et qui nous
7 semble raisonnable d'un ou deux mois pendant lequel nous devons jouir
8 d'une prorogation. Ne serait-ce que pour avoir le temps de nous servir de
9 quelques-uns des éléments de preuves supplémentaires pour faire, nous, les
10 constructions de notre appel, peut-être pour ajouter quelque chose selon
11 ce que vous venez de suggérer vous-même.
12 Et si vous me permettez de revenir à quelques-unes des idées évoquées par
13 vous à l'adresse de mon collègue Naumovski et à l'accusation, peut-être
14 que le conseil de la défense se trouve dans une situation défavorable
15 lorsqu'elle ne voulait pas accepter le dépôt des documents d'archives de
16 Bosnie-Herzégovine en ex-parte.
17 Le fait est qu'en octobre de l'an dernier, au cours du procès, il devait
18 être clair et de façon tout à fait notoire à l'accusation, comme ceci
19 devait être clair à tous ceux présents dans cette Chambre, dans ce
20 prétoire, qu'il y avait pas mal de documents qui manquaient et qui
21 seraient de provenance des archives de Bosnie-Herzégovine.
22 Pour quelle raison? Parce que nous n'avons pas pu faire des révélations et
23 des communications en temps utile et sur un pied d'égalité. Je crois que
24 vous avez pu vous en rendre compte, Monsieur le Président. Pour avoir
25 accès à certains documents, nous ne l'avons fait que vers la phase finale
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1 du procès, lorsque j'ai déjà dû faire ma plaidoirie.
2 Et pendant ce temps-là, on pouvait voir qu'il y avait des documents
3 communiqués d'un côté alors qu'ils ne l'ont pas été de l'autre. Encore que
4 même pour parler de l'étape préalable au procès, le conseil de la défense
5 a tout fait pour pouvoir avoir accès aux archives de Bosnie-Herzégovine.
6 Le fait est que pendant le procès même nous n'avons pas pu avoir l'accès
7 aux documents des archives de Bosnie-Herzégovine. Ces documents
8 n'existaient pas. Le fait est qu'on sentait toute la nécessité de ces
9 documents-là. Mais pendant tout ce temps-là, les archives devaient être
10 accessibles à l'accusation et au conseil de la défense. Nous étions
11 souvent ensemble là-bas.
12 Tout un tas de document a été communiqué à ce Tribunal, sans avoir pour
13 autant les documents de Bosnie-Herzégovine. Le problème c'est que tous les
14 documents qui étaient d'origine bosniaque, c'est-à-dire en possession des
15 autorités de Bosnie-Herzégovine, tous ces documents étaient venus
16 parallèlement à l'Acte d'accusation, c'étaient les tout premiers documents
17 venus. Mais une fois que ces documents étaient devenus, d'une certaine
18 manière, contestables, alors là et au cours du procès on n'avait plus
19 droit à des documents de ce genre et de Bosnie-Herzégovine. Et voilà ce
20 qui nous préoccupe fort, Monsieur le Président.
21 Lorsque nous avons reçu cette lettre de l'accusation en date du 18 de ce
22 mois-ci, nous nous sommes rendu compte qu'une archive de Bosnie-
23 Herzégovine existe. Dans le cadre desquelles archives existent des
24 documents, et notamment la 7e Brigade de Bosnie-Herzégovine, brigade
25 musulmane.
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1 Alors, si nous pouvons faire une recherche maintenant de ce qui s'était
2 passé, nous nous rendrons compte que cette 7e Brigade musulmane était un
3 facteur important, ne serait-ce que pour dire au moins 200 fois pour ne
4 pas dire 1.000 fois.
5 Or, je m'en tiens, Monsieur le Président, aux propositions que je viens de
6 formuler et je vais m'associer par écrit aux propositions faites par mon
7 collègue Naumovski.
8 M. le Président (interprétation): Et qu'arrivera-t-il lorsque l'accusation
9 produit un autre document, lequel document on retrouvera lors des
10 recherches des archives? Est-ce que vous allez demander une nouvelle
11 prorogation d'un délai d'un mois à nouveau?
12 Et de plus, vous devez comprendre comment se présentent les réalités. La
13 Chambre d'appel connaît bien toute cette matière. Si le conseil de la
14 défense veut déposer tout de façon concrète et parfaite, et si en
15 attendant, il faut s'attendre à toutes les recherches, ceci n'est pas
16 possible.
17 Le Tribunal international est tenu d'aller de l'avant. Je vous ai dit que
18 vous devez avoir d'autres bases sur lesquelles vous pouvez vous fonder,
19 peut-être sur des points qui seraient d'ordre procédurale, etc.
20 Nous voulons que vous soyez convaincus, tout à fait convaincus que vous
21 serez en mesure d'ajouter d'autres éléments si d'autres éléments de preuve
22 apparaissent. Il n'y a pas de raison pour laquelle vous ne pouvez pas
23 faire avancer votre travail, ne serait-ce que dans une partie de vos
24 travaux, alors que certains de ces documents ont été déjà implicitement
25 mentionnés dans votre requête.
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1 Voilà, c'est là-dessus que je devrais procéder à des consultations. Avez-
2 vous quelque chose d'autre à ajouter?
3 M. Kovacic (interprétation): Non, Monsieur le Président. Je n'ai rien plus
4 à ajouter. Je suis tout à fait d'accord avec vous au sujet de ce vous
5 venez de dire. Nous ne pourrions plus voir la fin de notre procès si nous
6 devions raisonner de la sorte. Autrement dit, d'une manière ou d'une
7 autre, nous devons trouver un milieu raisonnable et réaliste.
8 Maintenant, que nous nous sommes rendu compte de l'existence de documents,
9 au sujet desquels documents moi-même je devais abdiquer, croyant qu'on ne
10 pourrait jamais les voir, essayons de voir s'il y a quelque chose
11 d'intérêt crucial dans ces documents.
12 Nous pouvons supposer tout de même qu'il y a quelque chose dans tout cela
13 et qui serait d'intérêt crucial. Alors, donnez-nous quelque temps,
14 Monsieur le Président, ne serait-ce que pour nous permettre d'élaborer en
15 première ligne notre défense et notre acte d'appel.
16 Plus tard, bien sûr, nous ne devons pas demander toujours de nouvelles
17 prorogations, je sais que de nouveaux documents surgiraient. Mais,
18 Monsieur le Président, tel ne sera pas le cas, à savoir que vous devez
19 nous voir toujours, une fois les nouveaux documents apparus, revenir pour
20 demander de nouvelles prorogations de délai. Non! Ceci n'aura pas lieu.
21 Mais essayons de dire ainsi, étant donné que certains documents ont fait
22 apparition. Je ne veux pas descendre dans le détail ni pour parler des
23 documents que l'accusation nous a communiqués, encore que moi aussi j'ai
24 quelques documents de grande valeur et qui sont au nombre de 4 ou 5.
25 Ecoutez, nous avons 260 documents nouveaux à recevoir, 262 plus
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1 précisément. Est-ce que je vais les traiter, Monsieur le Président? Est-ce
2 que je peux m'en servir? Y a-t-il des documents utiles dans ce lot de 262
3 documents qui ont été annoncés?
4 Je crois que nous avons tout de même mérité, Monsieur le Président, je ne
5 veux pas être difficile pour le demander, mais nous avons mérité une
6 certaine prorogation de délai. Nous pouvons préparer notre appel. Et en
7 attendant de voir au sujet de ce que je viens de dire, nous pouvons peut-
8 être préparer quelques suppléments également au sujet de telle ou telle
9 question.
10 Ensuite, je le répète, nous avons la seconde partie de notre appel qui ne
11 concerne pas les faits. Eh bien, cette partie de l'appel va bon train et
12 au rythme déjà connu, et pour laquelle, laquelle partie de notre appel,
13 nous ne demandons pas de prorogation de délai. Je vous remercie, Monsieur
14 le Président.
15 M. le Président (interprétation): Pourriez-vous me parler de ces 262
16 documents dont vous avez fait état? Ce sont de nouveaux documents? Vous
17 dites que ne vous ne les avez pas encore reçus ou est-ce que vous dites
18 que vous n'avez pas encore pu examiner ces documents?
19 M. Kovacic (interprétation): Non, Monsieur le Président, je n'ai
20 physiquement pas reçu ces documents. L'accusation a été très
21 bienveillante. Ils m'ont appelé au téléphone, je crois que c'était mardi
22 de cette semaine. Ils m'ont appelé pour m'informer que ces documents se
23 trouvent sur un disque compact. Ces documents m'ont été communiqués dans
24 ma boîte aux lettres. Nous avons essayé de demander à ce que… En fait, si
25 l'on passe par les bureaux, tels que le DHL et d'autres services postaux,
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1 je sais que cela prend toujours une semaine.
2 Donc j'ai demandé à l'accusation de me soumettre en fait ce document, de
3 le mettre dans ma boîte aux lettres. Ils ont été aimables, ils m'ont donné
4 tous les noms, tous les titres, ils m'ont également dit d'où provenaient
5 ces documents, non seulement qu'ils proviennent des archives de Zagreb,
6 mais ils m'ont également informé de quelle boîte provenaient ces
7 documents. Je pouvais donc avoir une idée thématique, et brièvement ils
8 m'ont informé du titre de chaque document pour la plupart.
9 Je dois vous dire qu'hier soir, j'ai examiné tous ces documents hier à
10 l'hôtel, il s'agit d'une liste comprenant 262 documents, et je vois qu'il
11 y a un bon nombre de documents très intéressants qui s'y trouvent.
12 Je dois également vous dire qu'il y a certains thèmes qui m'intéressent
13 particulièrement, tels que la détention du détenu.
14 Nous avons des centaines de documents concernant cela. Mais il y a peut-
15 être des documents qui n'ont absolument aucune pertinence. Je vois le
16 thème principal et général, mais il y a quelques thèmes et quelques titres
17 qui m'intéressent beaucoup.
18 Et d'après ces titres-là, je vois que cela pourrait être des documents
19 intéressants, spécialement si on voit la date de leur émission.
20 Parce que, Monsieur le Président, dans cette affaire, nous sommes saisis
21 depuis très longtemps, mais tout ce qui est arrivé dans la vallée de la
22 Lasva est arrivé au mois d'avril 1983 et je m'y suis concentré sur ce mois
23 d'avril, et je vois qu'il y a un bon nombre de documents qui parlent de ce
24 mois d'avril.
25 Je ne sais donc pas ce que contiennent ces documents. Je m'attends à
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1 découvrir quand même des documents assez intéressants. Et je me joins à la
2 pensée de mes collègues de l'accusation. Je ne vais certainement pas
3 examiner des documents qui ne seront pas pertinents.
4 Je ne sais pas si vous êtes au courant de tous les détails, mais avant
5 cela nous avions reçu en date du 24 mai, 8 documents, en date du 31 mai,
6 18 documents, et en date du 18 juin, j'ai également reçu des documents, ce
7 document de la Bosnie dont j'ai fait état. Je parle des dates lors
8 desquelles j'ai reçu ces documents dans mon bureau. Ils ont été envoyés
9 quelques jours auparavant.
10 M. le Président (interpretation): Merci. Bien. Au moins nous avons le tout
11 consigné au compte rendu d'audience. Lorsque vous allez donc revenir, et
12 si jamais vous nous revenez et que vous désirez parler de ces documents,
13 nous en saurons un peu plus long. Merci bien.
14 Y a-t-il autre chose que le Procureur désire soulever? Monsieur Yapa, y a-
15 t-il quelque chose?
16 M. Yapa (interprétation): Non.
17 M. le Président (interpretation): Pour M. Kordic, Maître Naumovski?
18 M. Naumovski (interprétation): Non, Monsieur le Président.
19 M. le Président (interpretation): Maître Kovacic?
20 M. Kovacic (interprétation): Non.
21 M. le Président (interpretation): Très bien. Une décision sera donc rendue
22 dans les plus brefs délais, et concernant M. Cerkez il faudrait que la
23 requête soit jointe à l'application le plus vite possible. Nous allons
24 maintenant lever la séance.
25 (L'audience est levée à 10 heures 55.)