Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   TRIBUNAL PENAL INTERNATIONAL             

  2   POUR L'EX-YOUGOSLAVIE  

  3                           Jeudi 17 juin 1999

  4                 L'audience est ouverte à 10 heures 55.

  5   Mme Ameerali (interprétation). - Bonjour, Monsieur le Président,

  6   Messieurs les Juges. Affaire IT-95-14 /2-T, le Procureur contre Dario

  7   Kordic et Mario Cerkez.

  8   M. le Président (interprétation). - Maître Nice, je me tourne

  9   vers vous. Nous sommes en retard : il y a eu un problème technique eu

 10   égard au compte rendu. D'après ce que j'ai compris, nous pouvons

 11   poursuivre, même si nous n’aurons pas le compte rendu.

 12   M. Nice (interprétation). - Si, nous l'aurons.

 13   M. le Président (interprétation). - Ah oui, je vois que tout est

 14   arrangé. Eh bien, tout est bien qui finit bien.

 15   Nous allons traiter de questions de procédure. Je vois que

 16   Maître Smith est présent. Un message nous a été transmis étant donné qu'il

 17   y avait certaines difficultés.

 18   M. Nice (interprétation). - Oui. Avant que je vous explique

 19   cela, je demanderai que nous puissions siéger plus tard dans l'après-midi,

 20   si toutefois cela est nécessaire. Je voudrais dire la chose suivante vis-

 21   à-vis du témoin : la section d’aide aux victimes et aux témoins, se basant

 22   sur la proposition d'hier -à savoir que nous commencions par la question

 23   de procédure et le témoin ensuite-, a fixé un rendez-vous avec un médecin

 24   le plus tard possible dans la journée, c'est-à-dire à 15 heures 30. En

 25   effet, ce témoin souffre d’une douleur chronique qui n'a fait qu'empirer


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  1   depuis son arrivée ici. Il souhaite témoigner, mais également pouvoir

  2   consulter le médecin cet après-midi.

  3   J'ai pensé qu’en de telles circonstances, il serait préférable

  4   d'écouter ce témoin dès maintenant, en espérant pouvoir terminer son

  5   témoignage avant son rendez-vous chez le médecin et de faire suivre son

  6   témoignage du débat sur les questions de procédure.

  7   Nous avons tous reçu ce matin un document de 22 pages de la part

  8   de la défense. J'ai eu la possibilité de le lire ; je pense que vous avez

  9   eu la même possibilité. Nous avons également fourni une réponse d'une page

 10   à la question du Juge Robinson, hier, avec une annexe d’un extrait d'un

 11   texte qui, je pense, sera utile.

 12   Par conséquent, je pense que cette discussion sera quelque peu

 13   restreinte si vous avez la possibilité de consulter tous les documents qui

 14   vous ont été transmis. Nous sommes, bien entendu, entre vos mains, mais si

 15   le témoin est entendu dès maintenant et si l'on termine son témoignage,

 16   dans ce cas-là, la discussion juridique pourrait suivre ce témoignage et

 17   nous amener jusqu'à la fin de l'après-midi, surtout si vous êtes prêts à

 18   pousser quelque peu la fin de l'audience, cet après-midi.

 19   Et le dernier témoin pourrait être entendu demain. Je n'aimerais

 20   pas qu'un témoin doive rester encore ce week-end, étant donné qu'il est là

 21   depuis dix jours.

 22   M. le Président (interprétation). - Oui. Maître Stein ?

 23   M. Stein (interprétation). – Maître Smith ne vous le demandera

 24   pas, mais je vais le faire à sa place : il subit actuellement le décalage

 25   horaire et il est extrêmement fatigué, étant donné le travail qu'il a dû


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  1   faire hier : ce document qui a été distribué. C'est la raison pour

  2   laquelle nous aimerions que nous abordions cette question de procédure

  3         (Les Juges se consultent sur le Siège.)

  4   M. le Président (interprétation). - Nous allons entendre le

  5   témoin d'abord. Nous voyons bien dans quelles circonstances se trouve

  6   Maître Smith, peut-être qu'il voudra prendre un peu de repos. Nous

  7   entendrons vos arguments à 15 heures cet après-midi, et nous sommes prêts

  8   à travailler un peu plus tard cet après-midi et un peu plus tôt demain

  9   matin afin de conclure la discussion sur ces questions, si c'est

 10   nécessaire.

 11   Cependant nous aimerions que les deux parties coopèrent afin

 12   d’en avoir terminé avec ce témoin d'ici à 15 heures cet après-midi.

 13   M. Stein (interprétation). – Monsieur le Président ?

 14   M. le Président (interprétation). – Oui.

 15   M. Stein (interprétation). – Maître Smith accepte volontiers

 16   votre proposition si toutefois il a l'autorisation de quitter le prétoire.

 17   M. Nice (interprétation). – Maitre Somers, Maître Dixon et

 18   Maître Lopez-Terres reviendront cet après-midi puisse qu'ils étaient là

 19   pour traiter de la question de procédure.

 20         (Ces trois membres du Bureau du Procureur sortent du prétoire.)

 21   M. Scott (interprétation). – ...(Hors micro)

 22   Il y a une demande de mesures de protection pour le témoin suivant. Je

 23   suggère que nous passions en audience à huis clos partiel afin que je

 24   puisse présenter cette demande. Si les mesures de protection sont

 25   accordées, nous pourrons traiter des éléments de preuve sensibles, si je


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  1   puis dire, dès le début de l'audience, et notamment en audience à huis

  2   clos partiel, et non pas en audience à huis clos total ; ensuite nous

  3   pourrons poursuivre en audience publique pendant le reste du témoignage.

  4   M. le Président (interprétation). - Très bien. 

  5                      (Audience à huis clos partiel.)

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 11                         (Audience publique)

 12   M. le Président (interprétation). - Très bien.

 13   M. Scott (interprétation). - Témoin H, au cours des six premiers

 14   mois de 1993, et plus particulièrement au cours du mois de janvier 1993,

 15   viviez-vous en Bosnie Centrale ?

 16   Témoin H (interprétation). - Oui.

 17   M. Scott (interprétation). - Peut-on dire également qu'en janvier 1993,

 18   il semblait de plus en plus probable que les Croates de Bosnie allaient

 19   entamer un conflit armé avec les Musulmans, en Bosnie Centrale ?

 20   Témoin H (interprétation). - Oui.

 21   M. Scott (interprétation). - Est-il exact de dire qu'en janvier

 22   de cette année1993, le HVO de Busovaca a pilonné les villages musulmans de

 23   Loncari et Merdani en utilisant des mortiers ?

 24   Témoin H (interprétation). - oui.

 25   M. Scott (interprétation). – Dites-vous également qu'après ce


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  1   pilonnage un nombre important de Musulmans a quitté la région de Loncari

  2   et de Merdani et s'est rendu vers Zenica ?

  3   Témoin H (interprétation). - Oui.

  4   M. Scott (interprétation). - Et après être resté là-bas quelques

  5   semaines ou quelques mois est-il exact que nombre de ces Musulmans sont

  6   revenus s'installer dans la région de Loncari et Merdani ?

  7   Témoin H (interprétation). – Oui, c'est cela.

  8   M. Scott (interprétation). – Et après le retour de ces Musulmans

  9   ou de ces Bosniens, si vous préférez, y a-t-il eu une deuxième ou

 10   troisième attaque du HVO en avril 1993 ?

 11   Témoin H (interprétation). – C'est cela.

 12   M. Scott (interprétation). - Vous êtes-vous retrouvé, le

 13   16 avril 1993, dans une maison du village de Loncari ?

 14   Témoin H (interprétation). - Oui.

 15   M. Scott (interprétation). - Je vais demander à l'huissier de

 16   montrer au témoin et de placer sur le rétroprojecteur ce qui a été coté

 17   précédemment, comme étant la pièce de l'accusation 2612.3.

 18   (L'huissier s'exécute.)

 19   Témoin H, veuillez consulter la carte qui vient d'être placée,

 20   sur votre droite, sur le rétroprojecteur. Je vais vous dire, à vous et à

 21   toutes les personnes qui se trouvent dans ce prétoire, que Loncari n'est

 22   pas particulièrement indiqué sur cette pièce, la pièce P 2612.3.

 23   Mais pouvez-vous consulter cette carte et, grâce à votre doigt

 24   ou au pointeur qui se trouve juste en face de vous, pourriez-vous indiquer

 25   où se trouvait à peu près le village de Loncari ? Si vous pouvez trouver


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  1   Vitez, Busovaca, pouvez-vous nous montrer l'endroit approximatif où se

  2   trouvait Loncari par rapport à ces deux endroits ?

  3   Témoin H, indiquez cela sur la carte et non sur le moniteur en

  4   face de vous, sur cette carte en couleur qui se trouve sur cette machine à

  5   côté de vous.

  6   (Le témoin s'exécute.)

  7   Monsieur l'huissier, veuillez aider le témoin, s'il vous plaît.

  8   (L'huissier s'exécute.)

  9   Très bien. Pour le compte rendu, vous indiquez une zone qui se

 10   trouve un peu au nord de Busovaca et un peu à l'est de Vitez, c'est cela ?

 11   Témoin H (interprétation). – Oui.

 12   M. Scott (interprétation). - Et étant donné l'état des routes,

 13   etc., combien de temps fallait-il pour arriver en voiture de Loncari quand

 14   on venait de Vitez ?

 15   Témoin H (interprétation). - La distance est de sept kilomètres.

 16   M. Scott (interprétation). – De Busovaca.

 17   Témoin H (interprétation). – Six kilomètres.

 18   M. Scott (interprétation). – Très bien merci.

 19   Témoin H, au cours de la matinée du 16 avril 19993, vous êtes

 20   vous réveillé et levé vers 5 heures 3, 5 heures du matin ?

 21   Témoin H (interprétation). – Je pense que c'était 4 heures 30,

 22   entre 4 heures 30 et 5 heures du matin ?

 23   M. Scott (interprétation). - Vous êtes Musulman, n'est-ce pas,

 24   ou Bosnien et vous pratiquez la foi musulmane ?

 25   Témoin H (interprétation). - Oui.


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  1   M. Scott (interprétation). - Quand vous vous êtes levé, ce

  2   matin-là, avez-vous fait la prière matinale du matin ?

  3   Témoin H (interprétation). – Oui, je l'ai faite.

  4   M. Scott (interprétation). - Diriez vous que, par la suite, vous

  5   avez demandé à votre femme d'allumer la radio pour écouter les nouvelles

  6   de 5 heures ?

  7   Témoin H (interprétation). – Oui.

  8   M. Scott (interprétation). - Pouvez-vous dire à la Chambre si

  9   vous avez entendu quoi que ce soit ou une personne à la radio qui aurait

 10   parlé d'une attaque qui a eu lieu contre le village par la suite, je parle

 11   du matin du 16 avril ?

 12   Témoin H (interprétation). - J'ai entendu M. Kordic. Il

 13   ordonnait d'attaquer toutes les positions de l'armée de Bosnie-

 14   Herzégovine.

 15   M. Naumovski (interprétation). - Monsieur le Président ?

 16   M. le Président (interprétation). – Maître Naumovski ?

 17   M. Naumovski (interprétation). - Je voulais tout simplement

 18   demander au Procureur de ne pas poser des questions tendancieuses.

 19   M. Scott (interprétation). - Pourriez-vous répéter, à la lumière

 20   de cette objection, si vous avez identifié M. Kordic ?

 21   M. le Président (interprétation). – Ce n'est pas la peine de le

 22   répéter, Maître Scott.

 23   M. Scott (interprétation). - Mais je n'ai pas entendu la réponse

 24   du témoin, c'est pour cela que je demandais qu'il répète.

 25   Connaissiez vous M. Kordic ? Saviez-vous qui il était avant le


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  1   16 avril 1993 ?

  2   Témoin H (interprétation). - Oui, je le connaissais.

  3   M. Scott (interprétation). – Que saviez-vous de son rôle et de

  4   son poste en Bosnie centrale ?

  5   Témoin H (interprétation). - Au moment où je l'ai vu et connu,

  6   il était chef de la Défense territoriale à Busovaca ; c'est lui qui

  7   s'occupait des conscrits et de leur service militaire au sein de l'ex-JNA.

  8   M. Scott (interprétation). - Quel lien existait-il, à votre

  9   avis, entre M. Kordic et le conseil croate de défense ou HVO ?

 10   Témoin H (interprétation). - Je ne saurais pas vous le dire.

 11   M. Scott (interprétation). - D'après vous, quel rôle M. Kordic

 12   avait-il joué au cours du conflit entre les Musulmans et les Croates au

 13   cours de 1993, à peu près ?

 14   Témoin H (interprétation). - Je ne pourrais pas vous le dire non

 15   plus.

 16   M. Scott (interprétation). - Avez-vous jamais vu M. Kordic jouer

 17   un rôle quelconque au sein d'une formation militaire que vous auriez vue

 18   en Bosnie centrale ?

 19   Témoin H (interprétation). – Non, je ne l'ai pas vu et je n'ai

 20   jamais observé quoi que ce soit, mais en revanche mon fils Salih a été à

 21   l'armée à Bare pour faire son service militaire. Il a donc convoqué tous

 22   les parents qui avaient des soldats dans l'armée, car il y avait le

 23   conflit entre les Croates et les Serbes à Pakrac. Donc, il nous a demandé

 24   de nous rendre à Busovaca où nous étions entre 20 et 30. Et il nous a tout

 25   simplement dit qu'il fallait préparer tous les dossiers, les dossiers de


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  1   nos enfants pour qu'on puisse les faire sortir de l'ex-JNA et pour que

  2   leur service militaire ne soit pas prolongé, qu'ils retournent à la maison

  3   et qu'ils puissent s'inscrire à la faculté métallurgique de Zenica.

  4   Je dois dire qu'à M. Ibrahim Hodzic, en coopération avec

  5   M. Kordic, j'ai remis les papiers et ils ont agi ainsi, c'est de cette

  6   manière-là qu'ils ont fait sortir nos enfants de l'ex-JNA.

  7   M. Scott (interprétation). – Etait-ce à cause de tout cela, de

  8   tout ce que vous venez de nous parler, que vous avez pu reconnaître la

  9   voix de M. Kordic à la radio au cours de la matinée du 16 avril ?

 10   Témoin H (interprétation). – C'est tout à fait normal parce

 11   qu'il était un personnage médiatique.

 12   M. Scott (interprétation). – Qu'est-ce que cela veut dire, dans

 13   quel sens était-il un personnage médiatique ?

 14   Témoin H (interprétation). – C'est lui qui donnait tous les

 15   ordres qu'il fallait délivrer.

 16   M. Scott (interprétation). - Quels types d'ordres ?

 17   Témoin H (interprétation). - C'est Monsieur qui le sait, moi je

 18   ne le sais pas.

 19   M. Scott (interprétation). - Bien. Poursuivons.

 20   Témoin H, peut-on dire que vous n'aviez aucune connaissance

 21   personnelle eu égard à Mario Cerkez ?

 22   Témoin H (interprétation). – Non, je ne connais même pas Cerkez.

 23   M. Scott (interprétation). - Très bien.

 24   Dites-vous aujourd'hui, Témoin H, qu'après avoir entendu

 25   M. Kordic à la radio, vous et votre épouse, êtes restés dans cette


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  1   maison... enfin que votre femme est restée dans cette maison, et que vous-

  2   même et votre frère, et d'autres hommes musulmans êtes allés dans une

  3   petite maison ou dans un petit bois plus précisément pour vous y cacher

  4   qui se trouvait à peu près à 200 mètres de la maison ?

  5   Témoin H (interprétation). - Nous sommes allés dans un bois

  6   derrière la maison, moi-même, mon Salih. Et puis la pluie a commencé un

  7   petit peu à tomber. Vers 6 heures de l'après-midi, nous sommes rentrés à

  8   la maison. J'ai observé par la fenêtre de ma chambre pour voir si

  9   Fuad Kermo et son frère Alaga allaient venir en provenance de Kaonik,

 10   parce qu'ils se trouvaient sur une position au niveau de Jelinak. Puis,

 11   j'ai demandé à mon épouse de me donner un peu d'eau pour que je puisse

 12   boire de l'eau. Ensuite, elle est rentrée dans la salle de bain, elle a

 13   regardé par la fenêtre, elle a aperçu les trois soldats du HVO, ils

 14   portaient des casques et ils avaient également des fusils, ils sont

 15   rentrés chez moi et ils m'ont posé la question : "Où se trouve ton fils ?

 16   Où se trouve ton fils ?.

 17   M. Scott (interprétation). – Excusez-moi, témoin H, je

 18   demanderai que vous fassiez attention à ne pas identifier certaines

 19   personnes, à moins que je vous demande de le faire, pour respecter la

 20   demande et l'attribution de mesures de protection.

 21   Témoin H (interprétation). – Oui, je vous comprends parfaitement

 22   bien, oui merci.

 23   M. Scott (interprétation). - Je ne voudrais pas retarder nos

 24   travaux, mais peut-être devrions-nous expurger le compte rendu de

 25   certaines informations divulguées par le témoin.


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  1   Vous avez dit qu'il y avait trois soldats qui venaient vers

  2   vous, en tout cas que c'est votre épouse qui vous en a informé, que trois

  3   soldats arrivaient chez vous. Sont-ils rentrés dans la maison ?

  4   Témoin H (interprétation). – C'était à 8 heures du matin.

  5   M. Scott (interprétation). - A ce moment-là, outre ce que vous

  6   venez de nous dire, y avait-il des tirs de mortier ou des tirs

  7   d'artillerie qui avaient lieu aux environs de Loncari et dans les autres

  8   villages musulmans environnants au cours du 16 avril ?

  9   Témoin H (interprétation). - Oui.

 10   M. Scott (interprétation). - Pouvez-vous dire à la Chambre, à

 11   votre connaissance, si le village de Loncari était défendu au cours de la

 12   matinée ou de la journée du 16 avril 1993 contre le HVO et son attaque ?

 13   Témoin H (interprétation). - Non.

 14   M. Scott (interprétation). – Y avait-il des éléments, certaines

 15   composantes de l'armée de Bosnie-Herzégovine au village de Loncari ou dans

 16   ses environs au cours de la matinée du 16 ?

 17   Témoin H (interprétation). – Non.

 18   M. Scott (interprétation). - Lorsque les soldats du HVO sont

 19   entrés chez vous, avez-vous tenté de leur dire que votre fils n'était pas

 20   chez vous ?

 21   Témoin H (interprétation). - Oui.

 22   M. Scott (interprétation). - Et en fait, malgré cela, les

 23   soldats du HVO ont-ils retrouvé votre fils dans la maison et lui ont-ils

 24   de mandé de sortir de sa cachette ?

 25   Témoin H (interprétation). – Tout premièrement, il y a un soldat


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  1   qui est rentré. Moi j'ai dit qu'il n'était pas à la maison. Ensuite, il a

  2   traversé la cuisine, il y avait également un garde-manger, mon fils s'est

  3   caché là-dedans et il a pu repérer ses pieds et le soldat est rentré, un

  4   deuxième est rentré, ils ont parlé de je ne sais pas quoi, je n'ai pas

  5   entendu. Ensuite, ils l'ont fait sortir et mon fils avait tellement peur

  6   qu'il avait pâli et moi je me suis dit qu'il allait s'évanouir et que son

  7   coeur allait lâcher.

  8   M. Scott (interprétation). - Très bien.

  9   Et suite à cela, suite à cet instant, le HVO vous a emmenés,

 10   vous et votre fils, ainsi que le voisin qui était dans la maison, vous a

 11   emmenés dans la maison de ce voisin. C'est également à ce moment-là que le

 12   HVO a réuni, avec vous, le fils de ce voisin ?

 13   Témoin H (interprétation). - Oui, c'est vrai à 1000 %.

 14   M. Scott (interprétation). - Et, vous quatre, vous avez été

 15   emmenés où ? Je parle de vous, de votre fils, de votre voisin et de son

 16   fils ?

 17   Témoin H (interprétation). - Nous avons été emmenés en-dessous

 18   du village. Il y avait un minibus qui nous attendait. J'ai pu voir

 19   beaucoup d'autres personnes de notre village ; nous étions assez

 20   nombreux : une vingtaine. Et ce M. Mirko Plavcic, fils de Jure, qui était

 21   le chauffeur du bus.

 22   M. Scott (interprétation). - Et, à l'exception de ce chauffeur

 23   du minibus, combien d'autres soldats du HVO avez-vous dans le bus ou

 24   autour ?

 25   Témoin H (interprétation). - Trois ou quatre nous ont escortés


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  1   jusqu'au camp et il y avait également un autre groupe assez important qui

  2   s'y trouvait ; ils étaient déployés dans les champs.

  3   M. Scott (interprétation). - Est-il exact qu'après avoir été

  4   placés dans ce bus -je parle de ce groupe de 21 personnes, vous avez été

  5   transférés au camp de Kaonik ?

  6   Témoin H (interprétation). - Oui.

  7   M. Scott (interprétation). - Parmi ces soldats du HVO, dites-

  8   vous, Témoin H, que l'un d'entre eux était Ivica Andrijasevic, de

  9   Jelinak ? Et, d'après ce que vous avez pu observer, il vous semblait que

 10   ce soldat était le commandant de ce groupe de soldats ?

 11   Témoin H (interprétation). - Oui, c'est cela.

 12   M. Scott (interprétation). - Dans ce groupe, avez-vous également

 13   reconnu Ante Andrijasevic ?

 14   Témoin H (interprétation). - Oui, c'est le frère d'Ivica.

 15   M. Scott (interprétation). - En fait, avez-vous vu également le

 16   père de ces deux hommes, Stipo Andrijasevic, également, à Loncari, le

 17   16 avril 1993 ?

 18   Témoin H (interprétation). - Non, je n'ai pas vu Stipo, mais je

 19   l'ai vu dans le camp : c'est lui qui tenait les clés des cellules.

 20   M. Scott (interprétation). - Etait il un garde au camp ?

 21   Témoin H (interprétation). - Oui.

 22   M. Scott (interprétation). - Dites-vous, ce matin, que le groupe

 23   de 21 personnes a été emmené à Kaonik, qu'on vous a ordonné de sortir du

 24   bus, de vous aligner et que vous donniez certaines informations : quant à

 25   vous, vos noms, etc. ?


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  1   Témoin H (interprétation). - Oui.

  2   M. Scott (interprétation). - Et la personne qui a recueilli ces

  3   informations -noms, prénoms, dates de naissance, etc.- était

  4   Ljubo Vukadinovic, n'est-ce pas ?

  5   Témoin H (interprétation). - Oui, Ljubo Vukadinovic.

  6   Témoin H (interprétation). - Comment était-il vêtu, à l'époque,

  7   si toutefois vous vous en souvenez ?

  8   Témoin H (interprétation). - Il portait un uniforme.

  9   M. Scott (interprétation). - Etait-ce un uniforme de camouflage

 10   avec un insigne du HVO ?

 11   Témoin H (interprétation). - Oui.

 12   M. Scott (interprétation). - Après avoir donné ces informations

 13   et après avoir été alignés les uns à côté des autres, vous est-il arrivé

 14   quoi que ce soit d'autre ?

 15   Témoin H (interprétation). - On nous a alignés et tous ceux qui

 16   avaient de l'argent dans les poches, des cigarettes, de l'or ou n'importe

 17   quoi devaient donc remettre tout cela, tout ce qui était de qualité comme,

 18   par exemple, une paire de chaussures.

 19   M. Scott (interprétation). - Une fois que votre nom a été relevé

 20   et que les soldats du HVO ont saisi certains biens personnels, vous avez

 21   été placés ensuite dans un hangar ; c'est ce que vous dites ?

 22   Témoin H (interprétation). - Oui.

 23   M. Scott (interprétation). - Pouvez-vous dire aux Juges la chose

 24   suivante : lorsque vous êtes arrivés à Kaonik, ce jour-là, combien

 25   d'autres détenus y avez-vous trouvés ?


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  1   Témoin H (interprétation). - 150 ou 160. Je ne sais pas le

  2   nombre exact, mais c'est environ 150 ou 160 détenus : il y avait des

  3   personnes de Vitez, de Novi Travnik, de Prus, de Donji Vakuf ; des

  4   personnes étaient arrêtées partout. Partout où il y avait des Bosniens. De

  5   Teckel également.

  6   M. Scott (interprétation). - Afin d'accélérer les choses, j'ai

  7   passé un détail mais je voudrais y revenir néanmoins. Sans identifier plus

  8   avant votre fils, pourriez-vous confirmer qu'il ne le participait

  9   absolument pas à une quelconque opération de défense ou à un quelconque

 10   groupe armé militaire à Loncari le 16 avril 1993 ?

 11   Témoin H (interprétation). - Non.

 12   M. Scott (interprétation). - Concernant les personnes que vous

 13   avez trouvées au camp, quand vous êtes arrivé, vous avez dit qu'il

 14   s'agissait de Bosniens de toute la Bosnie Centrale, n'est-ce pas ?

 15   Témoin H (interprétation). - Oui.

 16   M. Scott (interprétation). - D'après ce que vous avez compris,

 17   qu'était Kaonik jusqu'au 16 avril 1993 ?

 18   Je vais peut-être aider le témoin, si vous n'y voyez pas

 19   d'inconvénient, Messieurs les Juges.

 20   Etait-ce une ancienne caserne de la JNA ?

 21   Témoin H (interprétation). - Oui.

 22   M. Scott (interprétation). - Pourriez-vous nous donner toute

 23   information dont vous pourriez disposer sur certains événements ou sur

 24   certaines choses qui se sont produites à la caserne de Kaonik et qui

 25   aurait trait à Dario Kordic ? Avez-vous jamais vu ou entendu ou appris


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  1   quoi que ce soit qui aurait eu trait à M. Kordic et à un éventuel lien

  2   entre lui et la JNA et le camp de Kaonik ?

  3   Témoin H (interprétation). - Non.

  4   M. Scott (interprétation). - Le lendemain matin, le 17 avril

  5   1993 donc, avez-vous vu Zlatko Aleksovski qui entrait dans le hangar où

  6   vous étiez avec Ljubo Vukadinovic ?

  7   Témoin H (interprétation). - Oui.

  8   M. Scott (interprétation). - Monsieur Aleksovski portait un

  9   uniforme de camouflage, n'est-ce pas ?

 10   Témoin H (interprétation). - C'est exact.

 11   M. Scott (interprétation). - A ce moment-là, M. Aleksovski a-t-

 12   il dit qu'il avait besoin de 30 hommes pour exécuter une tâche

 13   particulière ?

 14   Témoin H (interprétation). - Oui, 30 hommes.

 15   M. Scott (interprétation). - En fait, il s'est avéré que

 16   30 Bosniens ont été sélectionnés et que l'un d'entre eux était votre fils,

 17   n'est-ce pas ?

 18   Témoin H (interprétation). - Nous étions d'abord alignés ; il a

 19   choisi 29 personnes. Mon Salih, mon fils, est resté aligné, mais ce n'est

 20   que par la suite qu'ils lui ont dit : "Viens toi aussi !" C'est comme ça

 21   qu'ils étaient au nombre de 30.

 22   M. Scott (interprétation). - Quand vous avez vu votre fils

 23   partir du hangar, avez-vous eu la possibilité de lui parler ou de lui dire

 24   au revoir, de lui dire quoi que ce soit ?

 25   Témoin H (interprétation). - Non.


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  1   M. Scott (interprétation). - Monsieur Aleksovski, est-ce qu'il

  2   était présent au moment où ces Bosniens ont été emmenés à l'extérieur et

  3   qu'on leur a demandé de monter dans un camion ?

  4   Témoin H (interprétation). - Oui.

  5   M. Scott (interprétation). - Dites vous ce matin que ces

  6   30 prisonniers ont été emmenés pour creuser des tranchées à Rovna ou peut-

  7   être à Kovacevac, dans cette région en tout cas ?

  8   Témoin H (interprétation). - Oui, oui.

  9   M. Scott (interprétation). - Parmi ces 30 Musulmans, qui ont été

 10   emmenés pour creuser des tranchées, l'un d'entre eux était-il le fils de

 11   votre voisin dont vous avez parlé précédemment ?

 12   Témoin H (interprétation). - Il n'était pas dans le même groupe

 13   que mon fils Salih ; il faisait partie d'un autre groupe. D'après ce que

 14   m'ont dit les détenus, Ramo a été blessé à 10 heures du matin, alors que

 15   mon fils a été blessé vers 4 heures de l'après-midi.

 16   M. Scott (interprétation). - Est il exact, Témoin H, que ni

 17   votre fils ni le fils de votre voisin ne sont revenus du camp de Kaonik,

 18   ce matin du 16 avril et par la suite ?

 19   Témoin H (interprétation). - Oui, oui. Ils ne sont pas revenus.

 20   M. le Président (interprétation). - Maître Scott, pourriez-vous

 21   passer la suite très très rapidement, s'il vous plaît.

 22   Ne vous troublez pas, s'il vous plaît.

 23   Y a-t-il contestation sur ces points-ci ? Maître Scott, nous

 24   lisons ce qui a été inscrit dans le résumé ; je ne crois pas qu'il soit

 25   nécessaire de revenir là-dessus.


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  1   Vous sentez-vous mieux, Témoin H ?

  2   Témoin H (interprétation). - Cela va, ça va.

  3   M. le Président (interprétation). - Si vous souhaitez

  4   poursuivre, Maître Scott ?

  5   M. Scott (interprétation). - Oui, je voudrais regarder où nous

  6   en sommes dans le résumé. Permettez-moi de résumer sans parler de tous ces

  7   paragraphes.

  8   Vraisemblablement, votre fils, n'est-ce pas, au cours de cette

  9   journée, a été blessé et il a reçu une balle dans le corps, derrière la

 10   tête. Mais vous avez reçu des informations, différents rapports selon

 11   lesquels, en fait, il a été apparemment emmené à l'hôpital, soit à

 12   Busovaca soit à Nova Bila. Mais les informations qu'on vous a

 13   communiquées, à ce moment-là, vous disaient que la blessure, quoique assez

 14   grave, ne menaçait pas la vie de votre fils ?

 15   Témoin H (interprétation). - On m'a dit qu'une balle l'avait

 16   juste écorché derrière la tête et qu'il allait bien, que tout allait bien.

 17   Il y a six mois, je me suis rendu à la Croix-Rouge internationale : ils

 18   m'ont confirmé qu'il a été emmené à Busovaca où on l'a soigné, mais qu'ils

 19   n'avaient aucune information sur lui, suite à ce qui lui est arrivé à

 20   Busovaca.

 21   M. Scott (interprétation). - Pour en terminer sur ce point, vous

 22   n'avez pas revu votre fils, vous n'en n'avez pas entendu parler depuis le

 23   17 avril 1993 ; c'est bien exact ?

 24   Témoin H (interprétation). - C'est exact.

 25   M. Scott (interprétation). - Au cours de la matinée, tôt le


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  1   matin, ce matin-là, le 18 avril -excusez-moi, je suis passé au

  2   paragraphe 64-, est-il exact que trois jeunes Musulmans ont été amenés au

  3   hangar de Kaonik : Saban Osmancevic, Abdulah Osmancevic et

  4   Samir Osmancevic ?

  5   Témoin H (interprétation). - Oui, c'est exact.

  6   M. Scott (interprétation). - Est-il exact qu'ils vous ont

  7   expliqué qu'ils s'étaient cachés dans la maison d'Alija Osmancevic et que

  8   des soldats du HVO les avaient trouvés également et les avaient arrêtés ?

  9   Témoin H (interprétation). - Oui.

 10   M. Scott (interprétation). - Donc au cours de cette matinée-là

 11   ou bien du lendemain, M. Aleksovski est-il venu jusque dans le hangar avec

 12   des officiers de police et a demandé quelque chose dans ce sens : "Où sont

 13   ces trois oiseaux qui sont arrivés hier ?".

 14   Témoin H (interprétation). - C'est cela, c'est ce qu'il a dit.

 15   M. Scott (interprétation). – Et que s'est-il passé ? Qu'est-il

 16   arrivé à ces trois jeunes hommes après, si vous avez vu quoi que ce soit ?

 17   Témoin H (interprétation). – Amid été blessé à la jambe droite,

 18   en fait au pied droit, Avdo et Saban ont essayé de le porter jusqu'au

 19   véhicule de police. Mais Zlatko a dit : "Laissez le, il peut se

 20   débrouiller tout seul". Il a réussi à ramper jusqu'à la voiture, ils l'ont

 21   attaché et ils l'ont emmené dans le véhicule de police. Suite à quoi on ne

 22   sait pas ce qui leur est arrivé, on n'a plus aucune trace d'eux.

 23   M. Scott (interprétation). - Vous ne les avez jamais vus ou

 24   entendu parler d'eux par la suite ?

 25   Témoin H (interprétation). – Non, plus jamais. Ils étaient cinq,


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  1   les trois personnes, mon fils et le fils de mon voisin. J'insiste, je

  2   demande que les Messieurs me disent où ils se trouvent pour qu'on puisse

  3   les enterrer de manière décente. Tout le temps que je suis ici, depuis que

  4   je suis ici, je pense à mon Salih, à mon fils et c'est ce que je demande,

  5   je le demanderai jusqu'à la fin de mes jours.

  6   M. Scott (interprétation). – Témoin H, on vous a détenu au camp

  7   de Kaonik du 16 avril au 16 mai 1993 à peu près, n'est-ce pas ?

  8   Témoin H (interprétation). - Exact.

  9   M. Scott (interprétation). – Diriez-vous que les conditions qui

 10   régnaient au camp de Kaonik et dans lesquelles vous vous trouviez, vous et

 11   les autres prisonniers, étaient mauvaises et difficiles ?

 12   Témoin H (interprétation). – Les conditions étaient mauvaises.

 13   On se couchait sur le sol et c'est pour cela que nous sommes tous malades

 14   maintenant. Après une dizaine de jours, au bout d'une dizaine de jours, la

 15   Croix-Rouge est arrivée et nous a apporté des couvertures. Je n'ai pas

 16   était maltraité, torturé, je n'ai pas subi de sévices corporels, mais

 17   psychologiquement j'ai subi des tortures, ils me traitaient de "balija".

 18   Nous avions des seaux pour uriner, on était au nombre de 160 et nous

 19   avions tous l'habitude, nous Bosniens, de nous laver après avoir été aux

 20   toilettes, nous n'avions pas pu prendre le bain, la douche. Lorsque je

 21   suis sorti du camp, j'étais sale, la barbe avait poussé, donc

 22   psychologiquement effectivement, j'ai beaucoup souffert.

 23   M. Scott (interprétation). - Avez-vous pu changer de vêtements,

 24   ou avez-vous pu prendre une douche ou un bain au cours de vos trente jours

 25   de détention ?


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  1   Témoin H (interprétation). - Non, surtout pas, absolument pas.

  2   M. Scott (interprétation). – Témoin H, est-il exact qu'il y

  3   avait environ 160 détenus dans ce hangar en béton qui mesurait à peu près

  4   60 mètres de long sur 12 ou 13 mètres de large?

  5   Témoin H (interprétation). - Oui, c'est exact.

  6   M. Scott (interprétation). – Est-il exact également qu'on vous

  7   donnait généralement deux repas, ou plutôt qu'on vous donnait de la

  8   nourriture deux fois par jour ?

  9   Témoin H (interprétation). – Oui, c'est exact. On nous apportait

 10   10 ou 15 portions, des portions de l'ex-JNA. On avait du riz, deux ou

 11   trois cuillers de riz, un peu de pain. J'avais mal à la mâchoire quand je

 12   suis sorti, je ne pouvais plus mâcher. Mais heureusement à l'époque, je

 13   n'avais même pas faim ; grâce à Dieu !

 14   M. Scott (interprétation). – Est-il exact qu'en moyenne au cours

 15   de la période de détention que vous avez passée dans le camp, chaque

 16   prisonnier recevait en moyenne une à deux cuillers de riz par repas et du

 17   pain rassis comme vous l'avez dit ?

 18   Témoin H (interprétation). - Oui.

 19   M. Scott (interprétation). - Y avait-il un médecin ou des soins

 20   quelconques qui étaient fournis à qui en avait besoin au camp de Kaonik ?

 21   Témoin H (interprétation). – Non, pas à Kaonik même, mais on

 22   emmenait les détenus à Busovaca. J'avais besoin de l'aide d'un médecin,

 23   mais Aleksovski m'a dit qu'on ne pouvait pas nous rendre à Busovaca parce

 24   qu'il y avait un conflit sur la route. C'est pour cela que je n'ai pas pu

 25   consulter le médecin.


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  1   M. Scott (interprétation). – Puis-je demander à l'huissier de

  2   soumettre au témoin la pièce 1867 qui a été distribuée précédemment. Je

  3   voudrais que la pièce soit placée sur le rétroprojecteur également.

  4   (L'huissier s'exécute.)

  5   Auparavant, vous avez déjà indiqué un bâtiment sur cette carte

  6   et vous avez dit qu'il s'agissait du hangar dans lequel vous aviez été

  7   détenu. Est-ce bien ce bâtiment-là dont nous parlons également

  8   aujourd'hui ?

  9   Témoin H (interprétation). – Oui, le voilà.

 10   M. Scott (interprétation). - Est-ce le bâtiment E, indiqué de la

 11   lettre E sur cette photographie aérienne ?

 12   Témoin H (interprétation). - Oui.

 13   M. Scott (interprétation). - Très bien.

 14   Et il s'agissait bien avant le 16 avril 1993, à une certaine

 15   époque, d'une caserne de la JNA, n'est-ce pas?

 16   Témoin H (interprétation). – La caserne se trouvait devant, mais

 17   ce n'était pas une grande caserne, il n'y avait que des gardes dans ces

 18   bâtiments.

 19   M. Scott (interprétation). - Avant le 16 avril 1993, combien de

 20   temps auparavant les soldats de la JNA avaient-ils quitté cette caserne, à

 21   peu près ?

 22   Témoin H (interprétation). - Je ne peux pas vous le dire, je ne

 23   peux pas dire la date exacte où la JNA a quitté la caserne.

 24   M. Scott (interprétation). - Pouvez-vous nous dire, s'il vous

 25   plaît, si c'était quelques jours avant le 16 avril, quelques mois ?


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  1   Pouvez-vous nous donner ce type de renseignement ?

  2   Témoin H (interprétation). - Je pense que cela s'est produit

  3   plusieurs mois avant le 16 avril, même peut-être vers la fin de 1991, ou

  4   la fin de 1992, excusez-moi, ou en 1993, je ne sais pas, non, j'ai oublié

  5   beaucoup de choses entre temps.

  6   M. Scott (interprétation). - Etiez-vous présent ou avez-vous

  7   entendu parler, par d'autres personnes, par des amis ou à la télévision,

  8   des informations sur l'époque où la JNA…

  9   M. le Président (interprétation). - Nous avons déjà entendu

 10   parler de tout cela. Je ne sais pas à quel paragraphe vous faites

 11   référence, mais je voudrais que nous cessions cela et que nous passions à

 12   autre chose. Passons aux tranchées, s'il vous plaît.

 13   M. Scott (interprétation). – C'est effectivement ce qu'allais

 14   faire. Un instant, s'il vous plaît, je vais me retrouver. J'ai besoin d'un

 15   petit moment.

 16   Le troisième jour, au moment où vous vous êtes rendu à Kaonik,

 17   est-ce que vous-même et d'autres Bosniens vous avez été amenés pour

 18   creuser des tranchées ?

 19   Témoin H (interprétation). – Oui. .

 20   M. Scott (interprétation). - Où vous a-t-on amené ?

 21   Témoin H (interprétation). - On m'a emmené pour la première fois

 22   à Gradine.

 23   Nous étions une dizaine, entre 10 et 13. Moi-même, Sadi Kribo,

 24   Ckilje, Pero, Pezer, Osmancevic Dulaga, Naim Osmancevic, et puis il y

 25   avait quelques autres mais je ne me souviens pas de leur nom.


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  1   M. Scott (interprétation). - Pourriez-vous nous confirmer si la

  2   personne qui était le commandant du groupe du HVO qui vous a escorté

  3   jusqu'aux tranchées était Ivica Andrijasevic, de Jelinak ?

  4   Témoin H (interprétation). – Non, ce n'est pas Ivica qui nous a

  5   conduit, c'est quelqu'un d'autre avec un fusil 84, je ne l'ai jamais vu.

  6   c'est bien la première fois que j'ai vu cette arme. Il nous a demandé de

  7   chanter : "Je ne t'aime pas Alija parce que tu es balija, et c'est Drina

  8   qui va t'emporter les cent Moudjahidin".

  9   Un a commencé à chanter. Salik Ribo. Moi, je lui ai dit : "Je

 10   t'en prie, ne chante pas". Lui, il est retourné et il a dit : "Toi, vieux

 11   tu peux commencer à chanter". Moi, j'ai riposté : "Si je savais chanter, à

 12   ce moment-là je ne serais pas ici"

 13   M. Scott (interprétation). – Avant de passer à un autre sujet,

 14   Monsieur H, je vais encore vous reposer la même question.

 15   Quand vous avez commencé à creuser des tranchées ou on vous a

 16   conduit jusqu'à l'endroit où il fallait creuser les tranchées. Est-ce que

 17   vous pouviez identifier la personne qui a été commandant de ces unités HVO

 18   qui vous ont escorté pour vous rendre sur les lieux ?

 19   Témoin H (interprétation). - Non, je ne savais pas. Ils étaient

 20   très prudents, vous savez. C'est le HVO de Busovaca qui se rendait à Vitez

 21   et c'est de Vitez qu'ils emmenaient les unités à Busovaca. C'est la raison

 22   pour laquelle vous ne pouviez pas savoir véritablement de qui il

 23   s'agissait. Moi je ne les connaissais pas, j'avoue.

 24   M. Scott (interprétation). - Concernant le creusement des

 25   tranchées, est-il vrai qu'on ne vous a pas donné d'eau et de nourriture ?


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  1   Témoin H (interprétation). - C'est vrai. Au moment où nous avons

  2   commencé à creuser des tranchées à Gradina, puis nous les avons terminées,

  3   on nous a demandé de retourner au hangar et avant on nous a même demandé

  4   de creuser des tranchées à Komar.

  5   Je fais une erreur ! Pezer avait dit, il avait un peu plus de

  6   64 ans, 65 ans, et il a dit : "Je ne suis pas capable de creuser des

  7   tranchées. Vous pouvez me tuer ici-même". C'est la raison pour laquelle on

  8   nous a dit : "Vous allez tous rentrer et vous ne restez plus à Komar".

  9   M. Scott (interprétation). - Ce jour-là, est-ce qu'un des

 10   soldats du HVO avait montré la maison et ceci à partir de l'endroit où

 11   vous vous êtes trouvé, où vous avez creusé les tranchées ? Il avait pointé

 12   la maison, le 16 avril, où vous vous trouviez le 16 quand vous avez été

 13   arrêté ?

 14   Témoin H (interprétation). - Oui. Quand nous avons été

 15   conduits...

 16   M. Scott (interprétation). - Vous pouvez poursuivre.

 17   Témoin H (interprétation). - A un moment donné, nous sommes

 18   partis vers l'endroit pour creuser des tranchées. Nous nous sommes reposés

 19   à un certain endroit. Lui, il m'avait dit : "Regarde, c'est ta maison". Il

 20   y avait un soldat qui avait enfoncé la porte. Il n'a rien trouvé, il a

 21   fait des perquisitions et il a dit : "Mais ta maison n'a pas été mise à

 22   feu !" Moi j'ai dit : "Non" et lui il a dit : "Elle va être brûlée". Et

 23   j'ai dit : "Si toutes les maisons ont été incendiées, que la mienne soit

 24   incendiée également", et au au bout de 20 jours, effectivement, toutes les

 25   maisons ont été incendiées.


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  1   M. Scott (interprétation). - Vers le 26 avril 1993, est-ce que

  2   qu'il y avait un gardien qui s'est rendu à côté de vous et vous a emmené

  3   jusqu'au bureau de M. Aleksovski, dans le camp de Kaonik ?

  4   Témoin H (interprétation). – Oui.

  5   M. Scott (interprétation). - Est-ce que vous vous êtes rencontré

  6   à cet endroit-là ?

  7   Monsieur le Président, je vais abréger mon interrogatoire. Je

  8   voudrais passer brièvement passer à un certain nombre de questions.

  9   Est-ce que vous avez rencontré la personne appelée Jakob

 10   Petrovic dans le bureau de Aleksovski ?

 11   Témoin H (interprétation). – Oui. Au moment où je suis venu dans

 12   son bureau, il y avait un soldat. Il m'avait dit qu'il y avait quelqu'un

 13   qui m'a demandé, puis d'autres se sont posés la question : pourquoi on me

 14   demandait, et puis d'autres ont répondu qu'on avait trouvé les trois

 15   grenades chez moi, ce qui n'était pas vrai du tout. Quand je me suis rendu

 16   dans le bureau d'Aleksovski, j'y ai rencontré Jako Petrovic.

 17   Je le connaissais bien et lui connaissait très bien Salih, mon

 18   fils, car il se rendait aux actions volontaires et moi également qui était

 19   beaucoup plus âgé, j'y allais. J'ai posé la question à Jako : "Qu'est-ce

 20   que qui se passe avec mon Salih ?", il m'a riposté : "Ne t'inquiète pas,

 21   il est blessé quelque peu mais pas trop. Il se trouve à l'hôpital à Bila".

 22   C'est ce qu'il m'avait dit à ce moment-là, dans le bureau d'Aleksovski. Il

 23   m'a dit : "Je ne peux pas te dire autre chose, c'est tout ce que je peux

 24   te dire". Et il m'a donné une bouteille de Coca-Cola et des cigarettes

 25   Rhunhill. J'ai dit que je ne fumais pas. Il a dit : "Mais si tu ne fumes


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  1   pas, ce n'est pas important, tu n'as qu'à amener les cigarettes et

  2   quelqu'un qui fume se réjouira".

  3   M. Scott (interprétation). - Est-ce que, Monsieur le Témoin H,

  4   vous avez compris que M. Petrovic était membre du service de

  5   renseignements, du SIS ?

  6   Témoin H (interprétation). - D'après ce que je pense,

  7   effectivement : il exerce encore maintenant ces fonctions.

  8   M. Scott (interprétation). - Nous pouvons poursuivre.

  9   Est-ce qu'on vous a emmené à un autre lieu pour creuser des

 10   tranchées, le lendemain matin, par exemple vers la fin du mois d'avril

 11   1993 ?

 12   Témoin H (interprétation). - Oui.

 13   M. Scott (interprétation). - C'est Zarko qui m'a dit :

 14   "Malheureusement, je ne peux pas t'aider. Mais je peux éventuellement

 15   t'aider pour qu'on ne t'envoie pas creuser des tranchées." Le lendemain

 16   matin, un certain Zare est arrivé ; on m'a dit qu'il était de

 17   Koter Varoc ; c'est ce qu'on m'avait dit. Et il a dit : "Tu peux te rendre

 18   sur les lieux pour creuser des tranchées." J'ait dit : "Ecoute, c'est

 19   Zarko qui m'a dit que je n'allais pas aller creuser des tranchées". Alors,

 20   il m'a injurié et il a dit qu'il fallait que j'aille avec les autres.

 21   M. Scott (interprétation). - Où vous a-t-on amené pour creuser

 22   des tranchées, ce jour-là ? C'était à Podjele ?

 23   Témoin H (interprétation). - Oui.

 24   M. Scott (interprétation). - Pourriez-vous dire si, ce jour où

 25   vous avez creusé des tranchées, vous avez eu de la nourriture et de


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  1   l'eau ?

  2   Témoin H (interprétation). - On a creusé des tranchées, des

  3   fortifications jusque tard dans la nuit, vers minuit. A 10 heures, on nous

  4   a servi du thé et deux biscuits ; c'était pour la journée. Nous sommes

  5   restés jusqu'à midi sur place en espérant qu'on allait nous ramener au

  6   hangar, mais on nous a ramenés dans une étable ; il y avait du foin et

  7   c'est là que nous avons dormi. Nous avons entendu, nous tous, moi-même et

  8   les autres, que M. Zare, ce Zare dont j'ai parlé tout à l'heure, avait

  9   tiré un obus sur le village Grablje. Et nous étions tous stupéfaits ; nous

 10   avons eu très peur, car nous nous sommes dit qu'en restant dans cette

 11   étable nous allions tous être calcinés.

 12   M. Scott (interprétation). - Après cela, on vous a emmenés à

 13   creuser des tranchées à Polom, n'est-ce pas ?

 14   Témoin H (interprétation). - Oui. A 100 % et même à 1000 %,

 15   c'est vrai.

 16   M. Scott (interprétation). - Pourriez-vous nous dire s'il est

 17   exact qu'on s'est comporté quelque peu mieux vis-à-vis de vous à cet

 18   endroit par rapport à Podjele ?

 19   Témoin H (interprétation). - Oui, on nous a donné de la

 20   nourriture, des cigarettes ; on a pu prendre des repas. Cela, c'est vrai.

 21   M. Scott (interprétation). - La quatrième fois qu'on vous a

 22   emmenés creuser des tranchées, c'est à Bakije, n'est-ce pas?

 23   Témoin H (interprétation). - Oui.

 24   M. Scott (interprétation). - Je vais demander à l'huissier de

 25   m'aider à soumettre au témoin la pièce à conviction 1794 et de la placer


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  1   sur le rétroprojecteur.

  2   (L'huissier s'exécute.)

  3   Témoin H (interprétation). - Je ne vois pas tout à fait

  4   clairement : est-ce que je peux me lever ? Comment je peux faire ?

  5   M. le Président (interprétation). - Oui, je vous en prie.

  6   Faites.

  7   M. Scott (interprétation). - Je vous en prie, regardez bien

  8   attentivement cette carte, mais faites attention, car vous avez la

  9   déformation des traits du visage. Il vaut mieux peut-être que vous ne

 10   bougiez pas de votre place et que vous restiez là où vous êtes. Est-ce que

 11   vous pouvez simplement regarder de là où vous vous trouvez ?

 12   Témoin H (interprétation). - Oui.

 13   M. Scott (interprétation). - Monsieur, voulez- vous bien montrer

 14   ce que vous voyez sur le rétroprojecteur et pas sur l'écran ? Je vais

 15   demander à l'huissier de l'aider.

 16   (L'huissier s'exécute.)

 17   Est-ce que vous pouvez identifier les quatre localités sur la

 18   pièce à conviction 1794 ? Car vous avez déjà procédé à cette

 19   identification. La lettre A représente quoi, s'il vous plaît ?

 20   Témoin H (interprétation). - A, c'est Gradina. B, c'est Bakije.

 21   C, c'est Podjele. La lettre D, c'est Rovna Sela où mon enfant a été

 22   blessé. Ensuite, F, c'est Kovacevac.

 23   M. Scott (interprétation). - Qu'est-ce que c'est la lettre F,

 24   s'il vous plaît ? Pouvez-vous répéter ? Que voyez-vous sous la lettre F ?

 25   Témoin H (interprétation). - Kovacevac.


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  1   M. Scott (interprétation). - Et la lettre E ?

  2   Témoin H (interprétation). - Bare.

  3   M. Scott (interprétation). - Par conséquent, vous avez identifié

  4   les lieux dont vous avez fait mention au cours de votre déposition

  5   aujourd'hui, n'est-ce pas ?

  6   Témoin H (interprétation). - Oui.

  7   M. Scott (interprétation). - Vous avez été emmené sur ces quatre

  8   localités pour creuser les tranchées. Est-ce vrai ?

  9   Témoin H (interprétation). - Oui.

 10   M. Scott (interprétation). - Monsieur le Témoin H, est-il vrai

 11   que le fait de creuser des tranchées voulait dire que les Bosniens qui ont

 12   été emmenés pour ce faire étaient également utilisés comme bouclier

 13   humain ?

 14   Témoin H (interprétation). - Oui.

 15   M. Scott (interprétation). - Selon votre expérience et à votre

 16   connaissance, est-ce que la distance entre la ligne du HVO et la ligne de

 17   l'armée de Bosnie-Herzégovine était à une distance de 150 à 250 mètres ?

 18   Témoin H (interprétation). - Oui.

 19   M. le Président (interprétation). - Juge Robinson ?

 20   M. Robinson (interprétation). - Monsieur Scott, il serait peut-

 21   être utile de pouvoir se voir, car il y a un pilier entre nous. Tout à

 22   l'heure, vous parliez des boucliers humains : il serait utile que la

 23   Chambre puisse savoir ce qui a été fait dans ce sens-là et, notamment, en

 24   nous référant aux boucliers humains.

 25   M. Scott (interprétation). - J'ai essayé d'en parler, mais je


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  1   n'ai pas bien fait.

  2   Monsieur le témoin H, j'ai parlé des lignes entre les deux

  3   parties. Pouvez-vous dire, s'il vous plaît, aux Juges et notamment

  4   répondre au Juge Robinson si les prisonniers bosniens étaient mis face à

  5   la ligne du HVO pour qu'ils puissent servir en même temps en tant que

  6   bouclier humain ? Est-ce qu'ils se trouvaient entre les deux lignes ?

  7   Témoin H (interprétation). – Oui, car effectivement ils se

  8   trouvaient entre les deux lignes et entre les tirs qui étaient échangés,

  9   et les soldats se cachaient derrière les rochers et derrière l'arbre.

 10   Alors nous, on servait de bouclier humain.

 11   M. Scott (interprétation). – Mais, j'aimerais attirer votre

 12   attention sur un autre point, sur un incident, pour parler très

 13   concrètement, le 17 avril 1993, cinq prisonniers Musulmans de Loncari ont

 14   été tués à Kuber.

 15   Témoin H (interprétation). - Oui.

 16   M. Scott (interprétation). – Est-ce que vous étiez au courant,

 17   est-ce que c'est le HVO qui les a forcés pour porter les munitions pour le

 18   HVO et comme cela ils ont été exposés aux tirs ?

 19   Témoin H (interprétation). - Oui.

 20   M. Scott (interprétation). - Je vais m'excuser si je prononce

 21   mal les noms, est-ce qu'il s'agissait de Seid Kermo, Ibrahim Kermo,

 22   Naim Zlatagic, Midhat Ribo et Hamdo ?

 23   Témoin H (interprétation). - Le nom de cette dernière personne

 24   m'est inconnu, pour le reste, oui.

 25   M. Scott (interprétation). - Pourriez-vous nous dire maintenant,


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  1   bien évidemment si vous le savez, s'il y avait encore les douze jeunes

  2   Bosniens qui ont été emmenés de Loncari au cours de cette même période et

  3   ils ont été emmenés par le HVO -je parle de la période qui s'est écoulée

  4   entre le 17 et le 20 avril 1993- ? Ces jeunes gens ont disparu. Depuis, on

  5   n'en a jamais plus entendu parler ?

  6   Témoin H (interprétation). - Oui c'est vrai, vous avez raison.

  7   M. Scott (interprétation). - Est-ce qu'il s'agit des douze

  8   personnes dont je vais vous donner les noms.

  9   Fuad Kermo ?

 10   Témoin H (interprétation). – Oui.

 11   M. Scott (interprétation). – Alaga Kermo ?

 12   Témoin H (interprétation). – Oui.

 13   M. Scott (interprétation). – Nevzudin Kermo ?

 14   Témoin H (interprétation). – Oui.

 15   M. Scott (interprétation). – Sabahudin Pezer ?

 16   Témoin H (interprétation). – Oui.

 17   M. Scott (interprétation). – Ibrahim Pezer ?

 18   Témoin H (interprétation). - Oui

 19   M. Scott (interprétation). – Smajo Pezer

 20   Témoin H (interprétation). – Oui.

 21   M. Scott (interprétation). –Amel Zlagic ?

 22   Témoin H (interprétation). – Amel Zlatagic, oui. 15 ans, il

 23   avait à cette époque-là, excusez-moi.

 24   M. Scott (interprétation). – Avdulah Pezer ?

 25   Témoin H (interprétation). – Oui, il était né en 1938.


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  1   M. Scott (interprétation). – Avdo Ovcar ?

  2   Témoin H (interprétation). – Réfugié, il était chez nous, on l'a

  3   emmené, c'est lui qui était hébergé et c'est la raison pour laquelle on

  4   l'appelait "ovcar" parce que le terme "ovcar" veut dire mouton.

  5   M. Scott (interprétation). – Musa Kulosman ?

  6   Témoin H (interprétation). - Musa Kulosman, 17 ans réfugié de

  7   Kljuc.

  8   M. Scott (interprétation). – Osman Osmancevic ?

  9   Témoin H (interprétation). – Oui, Osman Osmancevic et

 10   Ramo Osmancevic sont de Jelinak. C'étaient des personnes âgées de plus de

 11   70 ans.

 12   M. Scott (interprétation). - Est-ce que vous avez appris qu'on

 13   n'a plus jamais entendu parler d'un certain nombre d'individus du village

 14   de Nadioci qui ont été arrêtés par le HVO, entre le 17 et le

 15   20 avril 1993 ?

 16   M. Stein (interprétation). - Je fais référence aux paragraphes

 17   91, 92 et 93. Puis-je avoir des informations sur la date justement de ces

 18   informations, sur le niveau d'information puisque tout ceci nous a été

 19   donné au temps passé ?

 20   M. le Président (interprétation). – Effectivement.

 21   M. Scott (interprétation). - En ce qui concerne le témoignage

 22   que vous venez de nous donner dans ces quelques dernières minutes,

 23   témoin H, comment avez-vous appris que ces gens manquaient, qu'ils

 24   n'avaient pas réapparu et comment connaissez-vous tous les noms que nous

 25   avons cités ?


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  1   Témoin H (interprétation). – Je l'ai appris par Mehmed Cermic ou

  2   plutôt par sa fille parce qu'elle était restée la seule en vie, son père,

  3   Mehmed Cermic a disparu, Aica Chermic également, deux frères, tous étaient

  4   mineurs, sa soeur qui était en première classe, à l'école élémentaire,

  5   ensuite Salkic, son épouse Saliha, ensuite leur fils Osman Salkic, je

  6   parle également de la mère Sebiha, je parle de leur enfant, Mirnesa, de

  7   leur enfant Alena Salkic, je parle également de Emsad Salkic, je parle de

  8   la mère Nihada Salkic, de l'enfant Senad Salkic, de l'enfant

  9   Nermin Salkic, de l'enfant Melisa Salkic, du père Esad Salkic, de la mère

 10   Fatima Salkic, de l'enfant Adis Salkic, de l'enfant Adisa Salkic,

 11   18 personnes au total, toutes ont disparu.

 12   L'interprète. - L'objection de Me Stein portait sur la forme

 13   "passive" de la formulation des paragraphes et non pas la forme passée.

 14   M. Scott (interprétation). - Pour conclure, témoin H, êtes-vous

 15   en train de nous dire que vers le 13 mai 1993 Aleksovski est venu dans le

 16   hangar avec M. Petrovic, qu'ils ont rassemblé les prisonniers et qu'il a

 17   été indiqué que ceux qui avaient de la famille à Busovaca pouvaient y

 18   aller. Busovaca, à ce moment-là, était contrôlée par le HVO et ceux qui

 19   n'avaient pas de famille à Busovaca pouvaient aller à Skradno.

 20   Témoin H (interprétation). – Oui c'est exact à 1000 % exact.

 21   M. Scott (interprétation). - Donc le compte rendu est clair.

 22   Avez-vous été libéré à ce moment-là ou bien avez-vous été simplement

 23   transféré et emprisonné quelque part ailleurs ?

 24   Témoin H (interprétation). – On a été sous contrôle du HVO et

 25   les Bosniaques n'étaient pas sortis à l'époque, on nous a emmenés, nous


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  1   étions une soixantaine de Bosniaques, on nous a emmenés afin qu'on puisse

  2   faire notre toilette. Un homme m'a dit : "Il faut que tu fuies, sinon tu

  3   passeras par le couteau". Et deux ou trois jours plus tard, avec mon beau-

  4   frère et (expurgé), à 1 heure 30 du matin nous étions prêts pour fuir.

  5   Vers 1 heure, on s'est réveillé, j'avais peur, j'avais peur de fuir.

  6   Lorsqu'ils se sont levés, ils m'ont dit : "(expurgé), il faut que tu te

  7   prépares". J'ai dit : "Non, j'ai peur". J'avais trois enfants, une épouse.

  8   Mon beau-frère avait deux enfants. "Si on nous tue, nous, alors nos

  9   familles vont rester sans père". Une femme m'a donné deux chemises et des

 10   chaussures puisque je n'avais pas de quoi mettre sur moi. Donc je portais

 11   tout cela afin de ne pas le perdre. Un homme nous a accompagnés jusqu'au

 12   pont. Et lorsque nous y sommes arrivés, près de la maison de Stramenica,

 13   (expurgé) est parti le premier, ensuite Ekrem est passé derrière lui, puis

 14   moi. Je voulais rentrer. Le monsieur chez qui on a passé les trois nuits

 15   en question m'a dit : "vas-y, avance". J'ai prononcé ma prière en arabe,

 16   j'ai pris mon sac. Nous sommes passés à côté d'une usine de Kaonik et puis

 17   je ne me souviens plus du nom de la personne, on a traversé la rivière

 18   kozica.

 19   Lorsque nous avons rejoint la rivière...

 20   M. Scott (interprétation). – Témoin H, excusez-moi, permettez-

 21   moi d'intervenir, je ne suis pas sûr que les Juges souhaitent que nous

 22   entrions dans tous les détails de cet événement, mais il suffit de dire

 23   que vous-même et certains autres des Musulmans bosniens, vous vous êtes

 24   échappés de la garde du HVO à cette époque et que, quelque temps après,

 25   vous avez retrouvé votre épouse, n'est-ce pas ?


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  1   Témoin H (interprétation). - C'est exact. Au moment où je suis

  2   arrivé à l'endroit où se trouvait mon épouse, j'ai trouvé mon père

  3   également. Mon épouse m'a embrassé et m'a demandé où se trouvait Salih. Et

  4   moi, je lui ai dit qu'il a été blessé et qu'on va l'échanger contre

  5   quelqu'un d'autre.

  6   M. Scott (interprétation). - Je ne vais pas poursuivre plus loin

  7   sur ce point. Prenez un instant, simplement.

  8   M. le Président (interprétation). – Témoin H, vous sentez-vous

  9   bien ?

 10   Témoin H (interprétation). - Oui.

 11   M. le Président (interprétation). –Y a-t-il quoi que ce soit

 12   d'autre ?

 13   M. Scott (interprétation). - Nous en avons terminé, merci.

 14   M. le Président (interprétation). - Très bien. Combien de temps

 15   va durer le contre-interrogatoire ?

 16   M. Stein (interprétation). – Dix minutes et ceci le rendra plus

 17   court.

 18   M. le Président (interprétation). - Peut-être devrions-nous

 19   faire une pause de dix minutes dès maintenant. Et nous essaierons d'en

 20   terminer peu de temps après 13 heures. Je pense que ceci vous permettra de

 21   mener votre contre-interrogatoire.

 22   Témoin H, nous allons faire une pause de dix minutes à présent.

 23   Et si vous vous sentez bien, à la fin de cette pause, nous en terminerons

 24   en un demi-heure à peu près.

 25         L'audience, suspendue à 12 heures 25, est reprise à 12 heures 40.


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  1   M. Scott (interprétation). - Je demanderai la coopération du

  2   conseil de la défense afin de déterminer ce qui a été dit

  3   en audience à huis clos partiel et ce qui a été dit

  4   en audience publique afin qu'il n'y

  5   ait pas de bavures ou de gaffes.

  6   M. Naumovski (interprétation). – Mes questions seront très

  7   brèves ; c'est pour cela que l'on peut passer en audience publique. Donc

  8   je n'aborderai absolument pas les questions de l'identité du témoin.

  9   M. le Président (interprétation). - Oui, Monsieur Naumovski.

 10   Très bien, allez-y.

 11   M. Naumovski (interprétation). – Merci, Monsieur le Président.

 12   Je suis Mitko Naumovski, conseil de défense de M. Dario Kordic. Excusez-

 13   moi de vous poser quelques questions, mais elles seront très brèves. Je

 14   vous prie donc d'y répondre.

 15   Puisqu'on se comprend bien, je vous prie juste d'attendre

 16   quelques secondes afin que les interprètes puissent faire leur travail.

 17   M'avez-vous compris ?

 18   Témoin H (interprétation). - Oui.

 19   M. Naumovski (interprétation). – Vous avez dit que, le 16 au

 20   matin, vous avez entendu à la radio M. Dario Kordic qui émettait à

 21   l'époque un ordre à l'attention des unités du HVO, ordonnant donc une

 22   attaque contre les unités de l'armée ?

 23   Témoin H (interprétation). - C'est exact.

 24   M. Naumovski (interprétation). – Vous l'avez entendu aux

 25   nouvelles ?


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  1   Témoin H (interprétation). - Oui, sur Radio Busovaca.

  2   M. Naumovski (interprétation). – Donc c'est Radio Busovaca qui

  3   l'a diffusé ? C'est donc aux nouvelles publiques que vous avez entendu

  4   M. Kordic émettre des ordres ?

  5   Témoin H (interprétation). - C'est exact.

  6   M. Naumovski (interprétation). – Monsieur le Président, compte

  7   tenu de la situation, je n'ai plus de question à l'attention de ce témoin.

  8   M. le Président (interprétation). - S'il est contesté que

  9   M. Kordic a dit quoi que ce soit à la radio, ce matin-là, eh bien, ceci

 10   devrait faire l'objet de questions destinées au témoin.

 11   M. Naumovski (interprétation). – C'est absolument contestable,

 12   Monsieur le Président.

 13   M. le Président (interprétation). - Témoin H, êtes-vous certain

 14   que c'était M. Kordic que vous avez entendu à la radio, ce matin là ?

 15   Témoin H (interprétation). - J'en suis sûr, à 1000 %.

 16   M. Naumovski (interprétation). – J'ai bien compris la réponse,

 17   mais, lors des préparatifs de ce contre-interrogatoire, j'avais plusieurs

 18   questions en vue, compte tenu de toutes les déclarations de tous les

 19   témoins qu'on a entendus jusqu'à présent. Mais je pense qu'il n'est pas

 20   nécessaire de confronter ce témoin au témoignage d'autres personnes qui

 21   n'ont pas mentionné ce fait allégué.

 22   M. le Président (interprétation). - Mais, d'après ce dont je me

 23   souviens, c'était le seul point pertinent sur lequel il était nécessaire

 24   de poser des questions au témoin. Si vous n'avez plus de question à poser,

 25   eh bien, vous n'en serez pas critiqué pour autant.


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  1   M. Naumovski (interprétation). – Je n'ai plus de question et il

  2   nous a répondu. Il nous a dit ce que nous voulions entendre : il a entendu

  3   un ordre public adressé par M. Dario Kordic, à 5 heures du matin. C'est

  4   tout.

  5   M. le Président (interprétation). - Très bien.

  6   Monsieur Kovacic ?

  7   M. Kovacic (interprétation). - Compte tenu du fait que

  8   l'accusation, dans sa requête du 3 mai, qui concerne les témoins, a

  9   mentionné dans le point 99, sur la page 22, a mentionné donc les sujets

 10   sur lesquels ce témoin a l'intention de témoigner et puisqu'il n'est

 11   absolument pas question de mon client, nous n'avons pas de question à

 12   poser à ce témoin.

 13   M. le Président (interprétation). - Très bien. Je suppose qu'il

 14   n'y a pas de nouvelle question de la part de l'accusation ?

 15   M. Scott (interprétation). - On suggère du côté de la défense

 16   qu'il ne serait pas raisonnable que M. Kordic ait effectivement donné un

 17   ordre à la radio, ce matin-là. Par conséquent, je vais reposer une

 18   question au témoin.

 19   Témoin H, pouvez-vous nous fournir une quelconque aide, à nous

 20   et aux Juges également, quant à ce qu'a fait M. Kordic, le 16 avril 1993,

 21   ce matin-là ? Et pourquoi il aurait fait une annonce publique, à la radio,

 22   sur une éventuelle attaque du HVO ?

 23   M. Naumovski (interprétation). – Objection. Cela n'a aucun

 24   rapport avec ma question ; ma question était tout autre justement,

 25   concernant cet ordre.


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  1   M. le Président (interprétation). - Posez la question,

  2   Maître Scott. Vous pouvez le faire.

  3   M. Scott (interprétation). - Témoin H, vous souvenez-vous de la

  4   question que je vous ai posée ? Je vais vous la répéter.

  5   Pouvez-vous nous dire ou nous aider à comprendre, parce que vous

  6   avez vécu en Bosnie Centrale, que vous avez traversé ces événements et que

  7   vous les avez subis, pourquoi Dario Kordic aurait fait cette déclaration

  8   publique, à cette époque-là ?

  9   Témoin H (interprétation). - Écoutez, c'était un personnage

 10   éminent ; il apparaissait souvent sur les médias, c'est un personnage

 11   médiatique. Donc c'est lui qui peut répondre.

 12   M. le Président (interprétation). - Merci. Ceci nous permet

 13   d'arriver au terme de votre déposition. Vous êtes maintenant libéré. Merci

 14   beaucoup d'être venu devant le Tribunal international pour y témoigner.

 15   Vous pouvez maintenant vous rendre à votre rendez-vous.

 16   Témoin H (interprétation). - Je vous remercie. Le monde et

 17   l'Europe doivent être au courant de ce qui s'est passé, de ce qui est

 18   arrivé au peuple bosnien. Je vous en prie et j'insiste là-dessus : il faut

 19   qu'on trouve les charniers, les tombes de nos enfants ; les membres de

 20   leur famille l'exigent. Nous vivons, nous sommes déprimés ; je pense à mon

 21   Salih tout le temps, je le vois sortir du camp. J'ai demandé à

 22   M. Vukadinovic de m'emmener moi et pas mon fils : ils ne me l'ont pas

 23   permis, ils ne me l'ont pas autorisé.

 24   M. le Président (interprétation). - Oui, merci.

 25         (Le témoin est reconduit hors du prétoire.)


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  1   M. Nice (interprétation). - Je crois que la pression exercée par

  2   le temps s'est un peu apaisée.

  3   M. Nice (interprétation). - Je n'ai pas ici l'autre témoin qui

  4   devait témoigner puisque je ne pensais pas qu'il pourrait le faire

  5   aujourd'hui. Cependant je me suis organisé pour qu'il vienne cet après-

  6   midi. Néanmoins, vous voulez peut-être accélérer la discussion relative à

  7   la procédure et nous pourrons peut-être entendre le témoin à la fin de

  8   l'après-midi, si toutefois il nous reste du temps. Je ne pense pas qu'il y

  9   aura de problème de temps, quoiqu'il en soit, ni aujourd'hui ni demain

 10   matin.

 11   M. le Président (interprétation). - Quelle est votre estimation

 12   de la durée de la déposition du témoin suivant, pour ce qui est de

 13   l'interrogatoire principal, en tout cas.

 14   M. Nice (interprétation). - Je pense moins d'une heure pour

 15   l'interrogatoire principal, je ne peux pas me prononcer pour le contre-

 16   interrogatoire.

 17   M. Sayers (interprétation). - Je dirai que nous allons passer un

 18   temps assez considérable avec le témoin suivant, mais je ne peux pas vous

 19   dire combien de temps exactement, sans avoir entendu l'interrogatoire

 20   principal.

 21   M. le Président (interprétation). - Si nous commençons demain

 22   matin à 9 heures et demie, ceci va-t-il suffire ? Peut-on s'assurer que

 23   nous terminions avant 1 heure, si l'interrogatoire principal se termine à

 24   10 heures 30 ?

 25   M. Sayers (interprétation). - Oui, je pense que cela suffira.


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  1   M. le Président (interprétation). - Très bien.

  2   Nous allons entendre les arguments juridiques cet après-midi et,

  3   s'il nous reste du temps, nous entendrons le début du témoignage du témoin

  4   suivant.

  5   L'un des assistants juridiques pourrait-il s'approcher du bureau

  6   des Juges, s'il vous plaît ?

  7         (Les Juges se consultent sur le Siège.)

  8   Monsieur Nice, nous allons entendre les arguments de M. Smith à

  9   14 heures 30 ; ensuite, nous entendrons votre réponse.

 10   Je vais faire distribuer la proposition de calendrier de

 11   l'automne. Il est prévu que nous siégions pendant tout l'automne, à part

 12   quelques ajournements. Cette copie porte mon nom en haut, mais n'en tenez

 13   pas compte.

 14   Si vous souhaitez formuler des remarques sur ce calendrier,

 15   n'hésitez pas à le faire. Ceci nous donnerait 50 jours supplémentaires à

 16   peu près, si l'on compte en demi-journées. En ce qui nous concerne, nous

 17   espérons que l'accusation en aura terminé d'ici à la fin de l'automne, ce

 18   qui serait le 10 décembre. Si vous n'êtes pas d'accord avec cette

 19   possibilité, faites-nous le savoir.

 20   M. Nice (interprétation). – ... (Hors micro.)

 21   J'ai étudié cette question dès hier et je vous donnerai une

 22   estimation précise dans les meilleurs délais.

 23   M. le Président (interprétation). - Autre question sur laquelle

 24   la défense pourrait nous aider.

 25   Monsieur Stein, ne vous sentez pas obligé de répondre dès


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  1   maintenant. A la fin de la présentation des arguments de l'accusation,

  2   nous envisagerons un ajournement afin de vous permettre de vous préparer.

  3   Mais j'espère qu'il ne s'agira pas d'une longue période de temps. Peut-

  4   être que là encore, vous pourrez y réfléchir et vous exprimer sur la

  5   question.

  6   M. Stein (interprétation). – Je ne pense pas que nous

  7   travaillerons pendant les vacances de Noël, n'est-ce pas ?

  8   M. le Président (interprétation). - Non. Nous ne travaillerons

  9   pas pendant les vacances de Noël ni au Nouvel An pour ce nouveau

 10   millénaire.

 11   M. Stein (interprétation). – Oui, étant donné l'occupation des

 12   vols en avion, s'entend pour le Nouvel An, je voudrais connaître le plus

 13   rapidement possible quel va être notre calendrier pour cette période.

 14   M. le Président (interprétation). - Nous pensons à une période

 15   d'un mois, mais bien sûr, peut-être souhaitez-vous y réfléchir ?

 16   M. Stein (interprétation). – Merci.

 17   M. le Président (interprétation). - Nous levons l'audience.

 18   L'audience, suspendue à 12 heures 53, reprendra à 14 heures 30.

 19   M. le Président (interprétation). - Maître Smith ?

 20   M. Smith (interprétation). - Monsieur le Président, je souhaite

 21   présenter l'argument au nom de M. Kordic, argument qui exprime notre

 22   opposition très ferme à deux des aspects principaux de la proposition de

 23   l'accusation.

 24   Tout d'abord, la demande de versement de déclarations écrites de

 25   témoins en tant qu'éléments de preuve et l'utilisation de résumés, ainsi


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  1   que l'utilisation de témoignages de substitution émanant d'enquêteurs du

  2   Bureau du Procureur, au lieu d'entendre les témoignages de témoins directs

  3   au cours de l'audience.

  4   C'est Me Stein qui abordera les questions pratiques qui se

  5   posent suite à la proposition de l'accusation et Me Naumovski est tout à

  6   fait prêt à répondre à certaines questions, si cela est nécessaire,

  7   concernant les principes de droit civil.

  8   Nous vous avons fourni les grandes lignes de notre intervention.

  9   Je suis désolé que ce document soit un peu abrupt, mais nous avons voulu

 10   répondre aussi directement et aussi exhaustivement que possible, notamment

 11   aux questions que vous avez posées hier.

 12   Nous souhaitons également produire par écrit la teneur de notre

 13   opinion sur ces questions. Ce document sera disponible si une décision

 14   contraire à l'accusé est prise. Et, à mon humble avis, je pense que ceci

 15   entraînerait une demande directe d'appel interlocutoire. Cela dit, je ne

 16   peux pas m'exprimer au nom de l'accusation.

 17   Laissez-moi donc vous donner une vue d'ensemble de notre

 18   position.

 19   Tout d'abord, la validité de la proposition du Procureur : en ce

 20   qui concerne ses arguments, qu'elle a reconnus comme étant circonstanciels

 21   et qu'elle a choisi de présenter, cette validité donc doit être reconnue,

 22   tout d'abord et principalement au regard du langage utilisé, langage très

 23   spécifique utilisé dans le Statut et dans le Règlement de ce Tribunal.

 24   Nous affirmons que les deux aspects principaux de cette

 25   proposition, que je viens donc de reprendre, sont illégaux à la lumière de


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  1   ces deux textes et entraîneraient ou nécessiteraient des changements

  2   radicaux et sans précédent dans ces deux textes.

  3   M. le Président (interprétation). - Excusez-moi, Maître Smith.

  4   Oui, je comprends, mais il y a l'arrêt dans l'affaire Aleksovski qui nous

  5   permet d'aborder, dans une certaine mesure, la question que vous venez de

  6   soulever et qui permet d'admettre des comptes rendus lorsqu'il y a eu

  7   contre-interrogatoire.

  8   M. Smith (interprétation). - Effectivement, vous avez raison,

  9   cette observation est exacte.

 10   Dans l'affaire Aleksovski, à notre avis, une chose tout à fait

 11   différente s'est produite, si je la compare avec l'affaire qui nous

 12   intéresse. Comme vous l'avez dit, dans cette affaire, il était question

 13   d'utiliser un témoignage préalable prononcé sous serment qui avait été

 14   donné devant ce Tribunal, dans un cadre formel, dans une instance

 15   judiciaire et qui avait fait l'objet d'une certaine forme de contre-

 16   interrogatoire dans l'affaire et par l'accusé qui était présent dans cette

 17   affaire.

 18   Or, nous faisons un pas de plus dans l'affaire qui nous

 19   intéresse, parce qu'ici, il est question de déclarations qui n'ont pas été

 20   prononcées sous serment, déclarations qui ont été recueillies par des

 21   enquêteurs employés par le Bureau du Procureur, donc non soumises à une

 22   supervision judiciaire ; et des déclarations qui ne sont donc pas soumises

 23   aux normes régissant les faux témoignages. J'en parlerai plus longuement

 24   par la suite, car vous trois, je crois, faisiez partie du collège de Juges

 25   de la Chambre d'appel dans l'affaire Aleksovski.


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  1   Nous citons, à notre avis, les décisions, les dispositions plus

  2   précisément, les plus pertinentes du Statut et du Règlement ; nous y

  3   reviendrons un peu plus longuement.

  4   Je vais passer assez rapidement sur cette partie de l'argument.

  5   Cet après-midi, je m'attacherai plus particulièrement sur ce qui

  6   est, à mon avis, un jugement erroné des résultats obtenus si l'on applique

  7   des principes de droit civiliste et le pacte international sur les droits

  8   civils et politiques, sur lesquels vous avez posé des questions, ainsi que

  9   les décisions prises dans le cadre du Tribunal de Nuremberg. Je crois

 10   qu'il est important de mentionner qu'ici il n'est pas question d'esprit de

 11   clocher juridique -si je suis dire- même si les deux aspects dont je viens

 12   de parler ne sont pas acceptables ni dans les systèmes de Common Law ni

 13   dans des systèmes de droit romain, en matière pénale.

 14   Cependant, ici, comme vous l'avez indiqué fréquemment, nous ne

 15   traitons pas de droit national. Nous sommes dans la sphère du droit

 16   international humanitaire, droit pénal également du droit humain, si je

 17   puis dire, du droit des Nations Unies plus précisément, si je puis dire.

 18   Quelles sont les nécessités émanant de ce droit ? Quel droit

 19   prévoit ces normes de droit des Nations Unies ? Comment a-t-il évolué en

 20   se fondant sur des centaines d'années de droit de tradition civiliste et

 21   de tradition de Common Law ? Quels sont les droits de l'accusé qui sont

 22   garantis par un tel droit ?

 23   D'autre part, il n'est pas question de douter de la volonté de

 24   la défense à se lancer dans certaines expériences lorsque les droits de

 25   l'accusé ne risquent pas d'être lésés de façon significative.


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  1   Je l'ai dit dans notre mémoire, nous sommes prêts à tenter de

  2   nouvelles expériences.

  3   D'autre part, nous ne contestons pas la recevabilité de la

  4   plupart -pas tous, bien sûr- mais de la plupart des éléments de preuve

  5   documentaires qui figurent dans le dossier : cartes, photographies, ce

  6   type de documents. Cependant, les questions posées sont les deux questions

  7   dont j'ai parlé précédemment : l'utilisation de déclarations préalables de

  8   témoins et l'utilisation de résumés de témoignage et de témoins de

  9   substitution.

 10   M. le Président (interprétation). - Permettez-moi de vous

 11   interrompre. Je ne veux pas vous interrompre trop souvent, mais nous avons

 12   lu votre mémoire. C'était très utile. Par conséquent, dans une certaine

 13   mesure, nous avons à l'esprit vos arguments. Mais je vous interromps pour

 14   être bien certain de ce qui pose problème ici.

 15   Vous dites, tout d'abord, que c'est l'utilisation des

 16   déclarations préalables qui ont été recueillies sans que les témoins

 17   prêtent serment et vous contestez la possibilité que ces documents

 18   puissent être versés en tant qu'éléments de preuve. Ensuite, vous parlez

 19   des résumés des enquêteurs, n'est-ce pas ?

 20   M. Smith (interprétation). - Et également le fait que les

 21   enquêteurs viennent témoigner ici à la place de témoins directs et qu'ils

 22   viennent étayer la totalité du dossier qu'ils souhaiteraient voir verser

 23   en tant que pièces à conviction dans cette affaire. Je pense que c'est ce

 24   à quoi l'accusation pense d'ailleurs.

 25   M. le Président (interprétation). - Bien. Je l'ai noté.


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  1   Par conséquent, ce qui n'est pas contesté, c'est la recevabilité

  2   de certains documents ou des éléments de preuve documentaires, plus

  3   précisément, émanant du dossier.

  4   M. Smith (interprétation). - Ce qui n'est pas contestable, c'est

  5   qu'il est peut-être vrai que la plupart des documents inclus dans son

  6   dossier sont recevables et que, peut-être, nous pourrions régler ce

  7   problème par accord entre les parties.

  8   Mais je ne suis pas d'accord pour dire que tous les éléments de

  9   preuve présentés dans ce dossier, parce qu'ils sont dans ce dossier,

 10   doivent être nécessairement recevables. Je dis simplement que sur des

 11   documents, tels que des cartes ou des photographies, nous proposons

 12   éventuellement de nous mettre d'accord sur ce type de document. Nous

 13   parlons également des tirs de mortier à Zenica, ce genre de choses. Peut-

 14   être que, sur ces points-là, nous pouvons nous mettre d'accord avec

 15   l'accusation. Mais ce sont les déclarations écrites de témoin, les résumés

 16   des déclarations et les témoignages des enquêteurs qui nous intéressent et

 17   qui nous posent problème.

 18   M. Bennouna. - Merci, moi aussi j'ai lu le papier qui est très

 19   intéressant et très complet, comme la plupart des choses d'ailleurs que

 20   vous présentez. Il comporte une argumentation juridique très fournie et

 21   complète.

 22   Vous comprenez, je crois que le Tribunal international dont nous

 23   faisons partie est un Tribunal qui est confronté à des problèmes

 24   spécifiques, en particulier qui ne sont pas les problèmes d'un tribunal

 25   national. Vous l'avez dit vous-même, nous sommes dans un Tribunal


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  1   international avec des problèmes particuliers.

  2   Il est bien entendu que nous ne pouvons pas, et tout le monde

  3   l'a admis, et le Statut et le Règlement aussi vont dans ce sens, adopter

  4   entièrement tel ou tel système national.

  5   Il est bien entendu que c'est le Procureur, et non pas un juge

  6   d'instruction, comme vous l'avez dit dans votre papier, qui présente un

  7   certain nombre de preuves à charge, qui présente l'ensemble du dossier, et

  8   là vous avez montré la distinction entre le système de Common Law et le

  9   système de Civil Law. Dans un cas le Procureur est partie prenante, et

 10   dans l'autre cas nous avons un juge d'instruction qui est neutre.

 11   Donc nous avons bien suivi votre raisonnement. Et nous ne

 12   pouvons pas appliquer des règles de Civil Law concernant l'administration

 13   de la preuve dans un système où il n'y a pas de juge d'instruction.

 14   Mais nous devons quand même avoir un dossier cohérent et faire

 15   un choix entre l'ensemble des éléments de preuve qui sont administrés, et

 16   la preuve de manière qui convient. Vous nous avez proposé, vous-même, que

 17   pour chaque village il n'y ait que deux témoins. Je vous rappelle votre

 18   proposition vous avez dit : "Deux témoins par village" et vous avez dit

 19   que ce système ne limite pas le nombre de témoignages à deux par village,

 20   mais que, pour tout témoin supplémentaire, le Procureur devait faire une

 21   demande argumentée pour expliquer en quoi le témoin "x-2" ou plus quelque

 22   chose, le témoin supplémentaire, quelque chose de nouveau et en quoi cela

 23   ne ferait que répéter ce qui a déjà été dit. C'est cela que vous nous avez

 24   proposé.

 25   Vous avez bien vu que vous nous avez mis dans la gêne parce que


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  1   cela veut dire qu'il faut choisir des témoins. Il n'appartient pas aux

  2   Juges d'imposer un choix de témoins au Procureur d'une part. Et d'autre

  3   part le Procureur lui-même s'est trouvé dans une situation où il a un

  4   certain nombre de faits, dont il voudrait faire état sans être absolument

  5   limité par la proposition de la défense. C'est là où nous en sommes.

  6   Alors, vous nous dites maintenant : "Nous pouvons coopérer".

  7   La proposition de M. Nice est venue après en disant : "Je vous

  8   propose un dossier, en vous demandant d'essayer d'utiliser les avantages

  9   de la Common Law et de la Civil Law en vue de permettre à la situation

 10   d'avancer".

 11   Vous nous dites : "Mais nous pouvons coopérer". Seulement, nous

 12   avons constaté, nous, jusqu'à présent, que cette coopération ne donnait

 13   rien parce que la défense n'a rien accepté et qu'elle a été incapable

 14   d'accepter quoi que ce soit. Vous nous dites : "On peut accepter des

 15   photos ou bien que l'indépendance de tel pays s'est bien bien passée à

 16   telle date, etc.". Vous comprenez que ceci ne nous avance pas.

 17   Ce qui est proposé dans le dossier, en réalité…

 18   C'est pour cela que je crois que toute votre argumentation ne

 19   répond pas, tout à fait, à la proposition qui a été faite par le

 20   Procureur.

 21   Il n'est pas proposé ici que ces déclarations deviennent, en

 22   quelque sorte, des témoignages, au sens strict du mot. Elle conserve le

 23   statut de déclarations, qui ont été recueillies par le Procureur dans les

 24   conditions qui ont été celles du Procureur. Donc il n'est pas question

 25   pour nous ni de violer nos règles ni de changer la pratique. Nous les


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  1   prenons en tant qu’éléments documentaires, documentations disponibles qui

  2   comportent toutes sorte de choses : des déclarations, des documents, des

  3   photos. Cela peut être des objets, cela peut être, comme cela a été dit,

  4   n'importe quel élément qui peut nous permettre de voir la vérité.

  5   Sur ce dossier alors, Me Nice nous a proposé que l'enquêteur

  6   lui-même le présente, mais l'enquêteur ne vient pas ici comme témoin au

  7   lieu et place des déclarants. Il vient pour nous dire comment le dossier a

  8   été constitué, ce qui est quelque chose de différent, dans quelles

  9   conditions les déclarations ont été recueillies et quel est le contenu du

 10   dossier ; mais il ne vient pas témoigner sur le contenu des faits qui sont

 11   apportés, c'est différent.

 12   Il vient présenter le dossier. Et vous pouvez lui dire : "telle

 13   photo ne vient pas de tel endroit, vous vous êtes trompé" ou "pour telle

 14   personne, ce n'est pas sa date", je dis les choses qui me viennent à

 15   l'esprit, ou encore "la date de naissance n'est pas la bonne" ou "tel

 16   village ne se situe pas à tel endroit", etc. Mais il vient présenter le

 17   dossier.

 18   Une fois que le dossier est en main, nous sommes en train de

 19   faire ensemble le travail du juge d'instruction dans la Civil law, mais il

 20   faut bien que quelqu'un le fasse, à un moment donné, ce travail

 21   intermédiaire parce que nous ne pouvons pas nous permettre une procédure,

 22   vous le comprenez, avec l'éloignement, etc., ce qui fait que finalement on

 23   est en train d'être critiqué pour la longueur de nos procédures.

 24   Lorsque ce dossier sera présenté, il va être présenté par un

 25   enquêteur, vous allez vous-même donner votre avis sur ce dossier, le


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  1   commenter. A partir de là, le Procureur va nous proposer au sein du

  2   dossier les témoins qui paraissent les plus pertinents à appeler à la

  3   barre, avec votre coopération. Quand on dit appeler à la barre, ce sont

  4   les témoins que nous allons écouter ici et qui vont faire l'objet d'un

  5   contre-interrogatoire.

  6   Le dossier n'a qu'une valeur d'éléments. De toute façon ces

  7   déclarations, nous les avons, nous n'avons pas attendu les dossiers pour

  8   avoir les déclarations, et vous les avez aussi d'ailleurs. Les

  9   déclarations, tout le monde les a. Seulement, c'est la présentation en

 10   dossier qui change.

 11   C'est-à-dire que, comme nous sommes en train de travailler dans

 12   ce cas, à travers une série de villages répartis dans toute une région qui

 13   s'appelle la Bosnie centrale, et que ceci est d'une grande complexité

 14   -vous le reconnaissez vous-mêmes, puisque nous sommes en train de couvrir

 15   toute une région géographique-, le dossier est une façon de mieux saisir

 16   peut-être de quoi il s'agit. En effet, nous passons d'un village à

 17   l'autre ; parfois nous passons d'un témoin qui est dans un village à un

 18   témoin dans un autre village.

 19   Et on nous propose de présenter l'ensemble des éléments

 20   factuels, rassemblés par le Procureur en un seul dossier. Etant entendu,

 21   bien sûr, que ce que l'on appelle le témoignage, c'est le témoignage qui

 22   est donné ici. C'est cela le témoignage. Et c'est là où le pacte sur les

 23   droits civils intervient. Le pacte sur les droits civils dit "qu'un

 24   accusé, lorsqu'un témoin est cité, a le droit au contre-interrogatoire et

 25   qu'il a droit à apporter lui-même ses témoins".


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  1   Mais il n'interdit pas ce qui se passe derrière ; il n'interdit

  2   pas autrement tout le Civil Law, comme cela a été dit hier par

  3   Maître Nice : tout le Civil Law serait contraire au pacte des droits

  4   civils, ce qui est très absurde. Donc, il ne faut pas dire que le pacte

  5   sur les droits civils ne permet que les témoignages dans la Cour et qui

  6   font l'objet d'un contre-interrogatoire ; c'est absurde et ce n'est pas

  7   vrai. Quelle que soit l'argumentation qu'on peut faire, ce n'est pas vrai

  8   parce que ceci n'a pas besoin d'une argumentation juridique.

  9   C'est pour cela qu'à mon sens, il faut relativiser la question

 10   du dossier. C'est une façon de présenter une situation de la manière la

 11   plus pratique, la plus simple, peut-être la plus opérationnelle, mais dans

 12   le cadre du respect des droits de la défense et de manière à ce que nous

 13   puissions revenir à votre système, c'est-à-dire qu'il y aura des témoins

 14   pris dans les dossiers et entendus ici ; ils seront les témoins les plus

 15   pertinents, qui donnent la situation la plus complète sur le village en

 16   question.

 17   Il est bien entendu qu'à l'occasion de l'examen du dossier, vous

 18   nous direz quelle est la limite de votre coopération ; vous nous direz,

 19   comme cela a été dit ce matin dans un témoignage, si des éléments de fait

 20   -tel prisonnier tel camp, tel creusement de tranchée, tel déplacement de

 21   population- si ces éléments de fait existent. Sont-ils contestés ou pas

 22   contestés ?

 23   Voilà. C'est dans ce cadre-là que je voudrais, Maître Smith, que

 24   vous nous aidiez. Ce n'est pas de contester le système du dossier parce

 25   qu'il introduirait une preuve indirecte sans le respect des droits de la


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  1   défense. Je pense que ce n'est pas du tout l'intention de cette Cour ; je

  2   l'ai dit hier et je le répète encore aujourd'hui : notre intention est

  3   bien de respecter entièrement les droits de la défense ; mais aussi en

  4   administrant la justice de la manière la plus loyale, la plus rapide et la

  5   plus efficace possible.

  6   Alors, vous nous dites de vous laisser coopérer : on peut vous

  7   croire sur parole. Prenez le dossier, coopérez. Puis, on peut lever la

  8   séance tout de suite. Mais si vous n'arrivez pas jusqu'à présent à

  9   coopérer, on propose que le dossier soit présenté ici, que la coopération

 10   se passe en quelque sorte devant la Chambre, avec toutes les garanties

 11   nécessaires, qu'on fasse le point avec vous ; et puis, qu'on puisse

 12   avancer parce qu'autrement le système serait bloqué.

 13   Voilà ce que je voulais dire, Monsieur le Président. J'espère

 14   que j'ai été assez clair vis-à-vis de Maître Smith.

 15   M. Smith (interprétation). - Permettez-moi de revenir sur

 16   certains des arguments que vous venez de présenter, Monsieur le Juge

 17   Bennouna.

 18   Tout d'abord, je voudrais être clair, je crois que vous l'avez

 19   été également. Notre proposition a été de prendre un nombre assez

 20   arbitraire : 2 ; ceci nous semblait un chiffre approprié qui aurait pu

 21   décrire la situation qui prévalait dans tel ou tel village. Bien sûr nous

 22   aurions pu choisir un autre chiffre, 5 par exemple, 3 peut-être, mais nous

 23   avons tenté de mettre en place un mécanisme souple, permettant à d'autres

 24   témoins de venir s'exprimer si cela était nécessaire afin d'aider la

 25   Chambre de première instance, afin d'éviter les effets que pourrait avoir


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  1   une limitation directe, que nous parlions de village après village, ou

  2   bien si l'on tentait de limiter le nombre général des témoins.

  3   Je vous rappelle, qu'à l'époque, la proposition était de 350 à

  4   370 témoins.

  5   En ce qui concerne notre coopération, nous avons dû, comme vous

  6   l'avez vu dans le document déposé, nous soumettre au processus de

  7   communication et nous préparer au contre-interrogatoire, au moment même où

  8   nous avons été invités à nous mettre d'accord sur certains points qui

  9   nécessitaient, selon nous, une certaine argumentation ; et donc nous

 10   demandions du temps pour pouvoir nous en sortir.

 11   Nous sommes maintenant en train de préparer une proposition,

 12   justement, portant sur ces points sur lesquels nous espérons pouvoir nous

 13   mettre d'accord avec l'accusation, points qui sont, selon nous, moins

 14   argumentatifs et qui vous aideront, vous aussi, à procéder dans ce sens.

 15   D'autre part, il est très difficile de prendre 2700 pièces

 16   potentielles que vous n'avez pas vues, pour la plupart d'entre elles, et

 17   de décider, si oui ou non, vous êtes prêts à arriver à un accord avec

 18   l'accusation.

 19   Ceci est également très difficile à faire avec le grand nombre

 20   de documents importants que nous avons eus, que nous avons eus avec le

 21   mémoire préalable au procès déposé par l'accusation, que nous étions en

 22   train d'assimiler, au moment même où nous essayons de rédiger notre

 23   mémoire en réponse, mémoire également préalable au procès.

 24   Nous y parvenons maintenant et nous avons essayé de rédiger ce

 25   qui me semble être une liste importante des documents de base sur lesquels


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  1   nous sommes près à parvenir à un accord avec l'accusation.

  2   Par conséquent, nous faisons tout ce qui est en notre pouvoir

  3   pour coopérer et si nous avions eu les documents que nous avons eus juste

  4   avant le procès, trois ou quatre mois avant le procès, nous aurions pu

  5   alors être à même de consacrer suffisamment de temps à la lecture et de

  6   trier entre les points sur lesquels nous pourrions nous mettre d'accord

  7   avec l'accusation et ceux qui posaient problème. Cela n'a pas été le cas

  8   et ceci nous a placé dans une position extrêmement complexe.

  9   De plus, nous nous y sommes mis et maintenant nous étudions

 10   chacun des documents avec notre client en croate, afin d'obtenir son

 11   opinion parce que, bien entendu, nous ne faisons rien sans consulter notre

 12   client, afin de prendre des décisions, de faire certaines concessions qui

 13   pourraient le léser, et ceci prend énormément de temps ; mais comme je

 14   l'ai dit, nous pensons nous en sortir prochainement et parvenir au terme

 15   de cette procédure.

 16   J'avais supposé, mais peut-être que nous entendrons

 17   l'accusation, d'ailleurs je pense que cela va être le cas pour savoir

 18   quelle est son intention, quant à moi, que les déclarations écrites de

 19   témoins qui figurent dans le dossier, au moins dans certains cas, peut-

 20   être dans de nombreux cas, devaient être versées au dossier des pièces à

 21   conviction, alors que le témoin ne serait pas venu témoigner, sans faire

 22   cas des objections de l'accusé. Or ceci nous poserait énormément de

 23   problèmes.

 24   Autre choses encore. En ce qui concerne le juge d'instruction,

 25   si ce Tribunal assume le rôle de juge d'instruction lorsqu'il reçoit un


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  1   dossier, d'une quelconque forme, pas en tant qu'élément de preuve, en tout

  2   cas d'après ce que j'ai compris, dans un système de Civil Law lorsqu'un

  3   juge d'instruction recueille un témoignage auprès d'un témoin il en

  4   informe l'accusé. En tout cas, je sais que c'est le cas en Bosnie et en

  5   ex-Yougoslavie. Et le conseil de la défense a le droit d'être présent, la

  6   défense a le droit de se confronter à ce témoin, de lui poser des

  7   questions.

  8   Par conséquent, peut-être que nous voulons en venir à la même

  9   chose vous et moi, à savoir que les éléments qui figurent dans le dossier,

 10   qui nous préoccupent particulièrement, les déclarations de témoins et les

 11   résumés de ces déclarations, ou plutôt résumés de ce que dirait le témoin,

 12   identiques au document qui nous a été proposé, je vous ai entendu dire

 13   quelles ne seraient pas considérées comme éléments de preuve à moins que

 14   le témoin vienne ici témoigner, si la défense souhaite contre-interroger

 15   ce témoin. Et en un certain sens, tout le dossier devient alors un

 16   ensemble de preuves que l'on propose.

 17   Je vous rappelle, je suis sûr que les événements de ce matin

 18   vous rafraîchiront la mémoire, même lorsqu'un témoin a été interrogé par

 19   un membre du Bureau du Procureur et, qu'en toute bonne foi, les enquêteurs

 20   pensent savoir ce que le témoin va dire, eh bien ce qui est proposé à ce

 21   moment-là, le témoignage qui est fait à ce moment-là, diffère souvent de

 22   ce que le témoin dit lorsqu'il témoigne lui-même, sous réserve du droit de

 23   confrontation et du droit du contre-interrogatoire.

 24   Ce qui m'étonne beaucoup dans votre suggestion, c'est la valeur

 25   que l'on attribue à ce dossier. Pourquoi présenter ce dossier devant les


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  1   Juges, si ce n'est pas un élément de preuve ? Il ne peut pas faire partie

  2   du dossier d'audience, il ne peut pas être examiné au moment de déterminer

  3   un jugement sans que le témoin vienne témoigner. Alors quelle autre valeur

  4   peut-on lui accorder et comment peut-on gagner plus de temps que prévu

  5   simplement si l'accusation présente ce dossier à la défense et si la

  6   défense le considère.

  7   M. le Président (interprétation). - Mais l'accusation présentant

  8   le dossier à la défense, c'est cela ! Et ensuite ?

  9   M. Smith (interprétation). - Non. Dans la mesure où l'on gagne

 10   du temps, grâce au fait que l'accusation concentre ses arguments en

 11   élaborant ce dossier, étant donné que les résumés des déclarations de

 12   témoins -et les déclarations de témoins ne peuvent pas être présentés en

 13   tant qu'éléments de preuve sans que le témoin ne vienne s'exprimer, quels

 14   sont les avantages que présente le fait de présenter ce type de documents

 15   aux Juges.

 16   Je reconnais que les Juges sont des Juges professionnels, qu'ils

 17   sont à même de séparer les éléments de preuve des documents qui ne sont

 18   pas des éléments de preuve, et de ne pas être influencés par ce qui n'est

 19   pas un élément de preuve.

 20   Mais, tous les efforts de l'accusation visant à véritablement

 21   comprendre l'essence de ce que va dire le témoin, même si tout ceci est

 22   fait en très bonne foi, eh bien ce que l'accusation pense être la teneur

 23   du témoignage, parfois, souvent même, ne correspond pas avec ce que le

 24   témoin dit. Alors comment juger ensuite de la fiabilité de déclarations de

 25   témoins, quel est le poids, quels sont les avantages au regard d'éventuels


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  1   préjudices que subirait l'accusé ? Quel est l'avantage de placer ce

  2   dossier devant un Tribunal ? Quelle est la valeur supplémentaire de cette

  3   démarche ?

  4   Lorsque l'on ne peut pas considérer les déclarations de témoins

  5   et d'autres documents à moins que le témoin ne se présente devant ce

  6   Tribunal ? Quelle est la valeur intrinsèque de ces dossiers ?

  7         (Les Juges se consultent sur le Siège.)

  8   M. le Président (interprétation). - Maître Smith ?

  9   M. Smith (interprétation). - Merci, Monsieur le Président. Je

 10   crois que j'ai fait de mon mieux pour répondre à la question de Monsieur

 11   le Juge Bennouna. Ici, nous traitons des conséquences pratiques qu'aurait

 12   la proposition de l'accusation et des normes prévues par la loi.

 13   Je me mets à votre disposition pour répondre à des questions sur

 14   l'argument juridique. Mais je vais maintenant passer la parole à M. Stein,

 15   afin qu'il entre plus en détail dans ces questions d'ordre pratique :

 16   comment progresser, si cela est possible.

 17   M. le Président (interprétation). - Oui, bien sûr, mais il y a

 18   un problème qui vient de me traverser l'esprit : nous avons tendance à

 19   débattre de ce point dans un espèce de vide ; or, il serait peut-être

 20   utile, à un moment donné, de savoir ce qui se passe, par exemple, avec le

 21   dossier Tulica et d'en parler. Ne serait-ce que pour un exercice et afin

 22   de voir si nous pouvons admettre ce dossier au dossier des éléments de

 23   preuve ; avec l'enquêteur qui pourrait éventuellement témoigner sur ce

 24   dossier ou quelque chose comme cela.

 25   Mais si nous traitons les choses de façon plus concrète, peut-


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  1   être pourrons-nous découvrir si, effectivement, il y a un terrain commun

  2   entre les parties ou déterminer quelles sont les questions sur lesquelles

  3   nous devons statuer.

  4   M. Smith (interprétation). - C'est précisément ce que M. Stein

  5   est sur le point de faire. Je pense que vous suggérez que l'hypothèse soit

  6   donc que les déclarations de témoins et les résumés des enquêteurs soient

  7   versés au dossier des pièces à conviction par le biais de ce dossier et

  8   par l'enquêteur, n'est-ce pas, qui viendrait témoigner ?

  9   M. le Président (interprétation). - Oui, en tout cas, c'est une

 10   hypothèse sur laquelle nous pouvons travailler. Maître Stein, je vous en

 11   prie.

 12   M. Stein (interprétation). – D'emblée, j'entre dans le domaine

 13   qui nous intéresse. Le document que j'ai sous les yeux est le dossier

 14   Tulica et le rapport Tulica, comme vous l'avez fait remarquer

 15   immédiatement. D'ailleurs, avez-vous ces documents sous les yeux ?

 16   M. le Président (interprétation). - Nous avons le rapport

 17   Tulica, nous avons le rapport Tulica du responsable de l'équipe

 18   d'enquête ; on nous l'a donné hier. Le dossier est sous les yeux de la

 19   juriste, je crois.

 20   M. Stein (interprétation). – Si cela ne vous dérange pas, la

 21   chose la plus importante, en fait, c'est l'index de ce dossier, comme vous

 22   l'avez indiqué hier, à juste titre. Je vais mettre mes écouteurs parce que

 23   je crois qu'on va me dire de ralentir très rapidement.

 24   Comme vous l'avez fait remarquer hier, les cartes, les images

 25   qui ont trait à la présentation, tout cela ne nous pose pas de problème.


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  1   Les déclarations de témoins, j'y reviendrai. Le compte rendu d'audience :

  2   de 15 à 18. Eh bien, tout d'abord, le témoin 15,NN, a refusé de venir.

  3   L'accusation n'a pas dit que c'est parce que nous avions fait

  4   quelque chose d'inapproprié : son refus de venir ne devrait pas permettre

  5   que l'on introduise son témoignage de façon détournée. A moins qu'une

  6   demande soit déposée au titre de l'arrêt Aleksovski.

  7   En ce concerne le témoin 18, le témoin était le témoin D. Ils

  8   ont proposé là aussi de déposer son témoignage et je ne vois pas pourquoi.

  9   En ce qui concerne les documents relatifs aux exhumations et le

 10   rapport portant sur l'exhumation : à cette époque-là, l'accusé était mis

 11   en accusation ; je crois que c'était en février 1998. On ne nous a pas

 12   demandé de participer à cela. Cela n'a rien à voir avec la recevabilité,

 13   mais c'est une question intéressante, car il est question de rapports de

 14   médecins légaux. Et ceci a trait à la question du témoignage d'expert. Il

 15   est également question de preuves documentaires ayant trait à la

 16   destruction de biens, les photographies. Les autres points ne nous posent

 17   pas de problème.

 18   Par conséquent, ce qui pose problème, ce qui est au coeur de

 19   notre débat, ce sont les déclarations écrites de témoins et le rapport

 20   Tulica.

 21   Tout d'abord, en ce qui concerne les déclarations écrites, elles

 22   ne sont pas complètes. Les déclarations qui figurent dans le dossier sont

 23   intitulées "Déclarations officielles", je crois. Il y a un titre qui y

 24   figure : "Déclarations écrites de témoins officiels - Tribunal pénal

 25   international...", etc.


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  1   Il y a d'autres déclarations de ces mêmes témoins qui ont été

  2   recueillies avant ou après, avant cette déclaration à cet enquêteur

  3   particulier, qui n'ont pas été incluses. Par conséquent, la présentation

  4   de leurs déclarations n'est pas complète.

  5   Ceci nous ramène, bien sûr, à l'utilisation qui doit être faite

  6   de ces déclarations. Si elles ne font que remplir un vide, eh bien, nous

  7   pensons qu'elles ne sont pas nécessaires. Cependant, si elles doivent être

  8   lues par les Juges afin qu'ils obtiennent une vue globale, une vue

  9   d'ensemble de ce qui s'est passé, mais qu'elles ne doivent pas devenir

 10   éléments de preuve, dans ce cas-là, elles ne sont pas nécessaires non

 11   plus.

 12   Pourquoi ? Parce que si nous prenons toutes les déclarations de

 13   témoins indirects, qui vous expliqueront la situation générale, d'une

 14   façon dont je ne dis pas qu'elle ne serait pas inappropriée, vous n'avez

 15   pas besoin de ces déclarations.

 16   Et si vous lisez chacune de ces déclarations, dans ce cas-là,

 17   les préoccupations du Juge Bennouna deviennent tout à fait évidentes.

 18   Chacun a une perspective différente sur le même village. Or nous, ce que

 19   nous cherchons c'est une vue d'ensemble générale sur ce qui s'est passé

 20   dans ce village en particulier.

 21   Je vois très bien l'accusation qui pourrait souhaiter demander à

 22   un enquêteur de venir s'exprimer sur la topographie d'un village, la

 23   composition ethnique d'un village, la position du village par rapport aux

 24   lignes de front et d'autres types d'informations, sans entrer dans les

 25   détails du témoignage qu'a donné un témoin sur les événements qui se sont


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  1   passés sur le terrain.

  2   Nous pouvons aller encore plus loin : on peut dire -si l'on

  3   était un enquêteur- par exemple : il est dit de reprendre les arguments de

  4   l'accusation. L'enquêteur pourrait dire : un certain nombre de témoins

  5   (sans les nommer, bien sûr) ont dit que ceci et on dit que cela. Ceci

  6   irait à l'encontre des droits de la défense à une certaine confrontation

  7   avec ces témoins.

  8   J'ai compris ce que vous avez dit, j'ai compris ce que dit la

  9   partie adverse, et moi, je crois que l'accusation souhaite que ces

 10   déclarations doivent être lues, selon l'accusation, comme des éléments de

 11   preuve substantiels, vous laissant ou nous laissant la liberté, la

 12   possibilité de demander que ces témoins soient cités ou non.

 13   Je crois qu'ils veulent que la Cour prenne une décision, à

 14   savoir de faire citer ces témoins ou pas, ou bien qu'elle demande à la

 15   défense de prouver que certains de ces témoins doivent être cités ou non.

 16   M. Bennouna. - Je crois que nous perdons du temps inutilement.

 17   Je pense qu'il y a un malentendu, parce que ce que nous avons dit... A

 18   l'accusation, vous lui faites dire aussi des choses... Mais ce n'est pas

 19   comme cela que je les ai comprises.

 20   Il n'a jamais été question de prendre les déclarations

 21   directement d'un enquêteur du Procureur pour en faire des preuves sans

 22   aucun filtre, si je puis dire ; ce n'est pas possible. Je crois qu'aucun

 23   juriste digne de ce nom n'aurait pu soutenir cela, sauf à passer par un

 24   autre système qui est le juge d'instruction, etc., ce qui n'est pas le cas

 25   ici.


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  1   Maintenant, ce qui a été proposé, vous le savez très bien : vous

  2   venez de dire que les photos ne vous posent pas de problème. Un certain

  3   nombre de documents ne nous posent pas de problème.

  4   Vous savez très bien que, depuis que nous avons commencé dans ce

  5   procès, nous avons un certain nombre de faits, qui ne sont finalement

  6   contestés ni par la défense ni par l'accusation, de ce qui s'est passé ;

  7   et que là où le problème commence à devenir un objet de contestation ou de

  8   conflit, c'est lorsque l'accusé est cité quelque part, ou les accusés sont

  9   concernés par tel ou tel événement.

 10   Et que les trois quarts ou les quatre cinquièmes des témoignages

 11   portent sur des faits qui se sont passés ici, et là qui sont le back-

 12   ground, l'arrière-plan, de l'accusation qui vient par le fait de lier ces

 13   faits à l'accusé. Quel est le lien entre les faits et l'accusé ? C'est là

 14   que vous pouvez avoir des contestations.

 15   Ce qui apparaîtra du dossier, c'est qu'un certain nombre

 16   d'éléments -et vous venez de le dire vous-même- n'ont pas besoin de

 17   témoignage devant la Cour. C'est vers cela que nous voulons arriver. Si on

 18   avait le recul historique, des historiens, on aurait pu les établir, mais

 19   il faudra attendre cinquante ans. Nous ne pouvons pas faire cela !

 20   C'est-à-dire qu'en fin de compte, on se dit : voilà ce qui s'est

 21   passé dans tel endroit. Or, si nous pouvons arriver à ne pas répéter

 22   d'abord, nous savons que si vous avez une contestation sur tel point, il

 23   suffira d'amener un ou deux témoins, ou pour confirmer tel point et que

 24   les autres le répètent. Ce n'est pas la peine de le faire plusieurs fois.

 25   Ce qui a été fait d'ailleurs ici, encore ce matin, où nous avons entendu


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  1   sur certains faits plusieurs fois les mêmes choses.

  2   Donc, nous voulons, à partir de tel village, faire sortir...

  3   -l'accusation vous a proposé l'enquêteur ; si vous avez une autre

  4   proposition, elle est la bienvenue- faire sortir le dénominateur commun et

  5   ce qui est contesté. Et, à partir de là, amener les témoignages sur les

  6   points véritablement qui font l'objet d'une contestation dans tel ou tel

  7   village. Voilà dans quel esprit nous travaillons.

  8   Evidemment, si la déclaration ne fait pas l'objet de

  9   contestation, nous la prendrons comme preuve, mais avec votre accord. Si

 10   telle déclaration de témoin ou tel aspect de la déclaration ou telle page

 11   ne fait pas l'objet de déclaration de M.Stein, nous la prenons en tant

 12   qu'élément de preuve.

 13   S'il y a une contestation, nous vous demandons pourquoi il y a

 14   une contestation ; nous essayons de comprendre cette contestation et nous

 15   renvoyons cela à l'accusation pour qu'elle fasse le nécessaire afin de

 16   faire la preuve sur place. Voilà dans quel esprit nous travaillons.

 17   Nous ne sommes pas en train de révolutionner ce qui est

 18   évidemment la règle du Tribunal. Ce n'est pas le rôle d'une Chambre de

 19   changer les règles du Tribunal. Les règles du Tribunal changent à travers

 20   des procédures prévues par les textes.

 21   M. Stein (interprétation). – Monsieur le Juge Bennouna, vous

 22   avez couvert beaucoup de terrain. Je vais essayer de répondre à tout, si

 23   j'y arrive. Mais tout d'abord, revenons au début.

 24   Nous avons coopéré dans la mesure du possible. Je le souligne

 25   pour les raisons que M. Smith a données. Que s'est-il passé au départ ?


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  1   Vous avez dit à l'accusation : "Présentez vos meilleurs témoins tout

  2   d'abord". Nous avons supposé que cela voulait dire : "Présentez vos

  3   meilleurs témoins qui vont pouvoir lier M. Kordic avec les allégations de

  4   l'acte d'accusation". Nous ne pensions pas que ceci allait avoir trait à

  5   tout ce qui s'est passé dans la vallée de la Lasva. "Établissez le lien

  6   entre Kordic et l'autre accusé, avec les allégations".

  7   Donc ils ont présenté leurs meilleurs témoins et ils ont pris

  8   beaucoup de temps. Et ce que nous avons découvert, c'est que les témoins

  9   qui étaient préparés à témoigner n'ont pas véritablement établi le lien.

 10   Nous avons cité plusieurs documents. Le Procureur a fait appel de votre

 11   décision excluant certains témoins ; eh bien, nous pensons qu'il s'agit là

 12   d'une présentation d'argument relativement subtile. En tout cas, c'est ce

 13   qu'a dit le Procureur lorsqu'il a fait sa déclaration liminaire. Il a dit

 14   que les éléments de preuve allaient dans plusieurs directions.

 15   Cependant, ce n'est pas le cas. Ce n'est absolument pas le cas.

 16   Nous souhaitons, nous, voir des témoins qui vont entrer dans une certaine

 17   polémique. Nous avons demandé un résumé et, après plusieurs expériences,

 18   ceci a aidé. L'accusation guide maintenant sur des questions

 19   préliminaires ; vous-mêmes, vous le faites en demandant ce qui est

 20   contesté, ce qui ne l'est pas. Ceci nous a permis de procéder beaucoup

 21   plus rapidement. Par conséquent, nous ne pouvons pas cependant considérer

 22   que l'un des recours soit d'inclure et de reconnaître directement ces

 23   déclarations de témoin comme éléments de preuve.

 24   Nous pouvons également affiner encore plus la procédure. Nous

 25   pourrions savoir enfin s'il s'agit d'ouï-dire, de première main, de


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  1   seconde main, de troisième main ; nous pourrions évaluer ainsi la

  2   fiabilité des témoignages. Je n'ai aucun problème à coopérer avec

  3   l'accusation sur les questions que nous allons leur présenter sur les

  4   faits. Nous pourrions vous présenter d'ailleurs un tableau de différentes

  5   dates d'actes, d'événements, de questions qui ne font pas l'objet de

  6   contestation.

  7   Parce que ce qui nous intéresse ici, ce sont les éléments de

  8   preuve qui ont trait à M. Kordic et qui le lient aux allégations.

  9   J'affirme également que la lecture de ce rapport Tulica m'a

 10   amené à la conclusion qu'il a été utilisé au lieu de témoignages directs.

 11   Si ce n'est pas le cas, nous perdons du temps.

 12   D'autre part, ce rapport Tulica a été préparé par un enquêteur

 13   qui n'a pas parlé à ces témoins, les témoins qui font l'objet des

 14   numéros 7 à 14. Or, sur ces témoins, un seul a été interrogé par

 15   l'enquêteur. Au lieu de cela, les autres témoins ont été interrogés par

 16   M. Bajwa… Non, M. Radikinen n'a fait qu'interroger le témoin 14 ; les

 17   autres ont été interrogés soit par M. Bajwa soit par M. Judy Gillison.

 18   Par conséquent, je me pose certaines questions sur la question

 19   de savoir si oui ou non ce témoin est le bon témoin à utiliser et de cette

 20   façon. Il me semble franchement que le rapport que nous avons obtenu ou

 21   que nous obtenons lors d'audiences préliminaires, dans notre système

 22   juridique, devant un grand jury, comme nous l'appelons, lorsqu'il faut

 23   tout d'abord établir qu'il existe une présomption de preuve, eh bien, cela

 24   correspond un peu à ce que nous avons.

 25   Il est question ici de ce qu'a vu chacun des témoins, de ce qu'a


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  1   entendu chacun des témoins. Ce n'est pas une vision d'ensemble. On donne

  2   le nom de chaque témoin, nom après nom. Par conséquent, ceci vient

  3   remplacer le témoignage direct. Ceci vous invite donc à revenir à l'index

  4   de ce rapport et de déterminer si, oui ou non, l'enquêteur qui a élaboré

  5   ce dossier l'a fait en toute exactitude. Moi, je peux vous dire que non.

  6   Notamment, lorsqu'on utilise toute la panoplie de déclarations de témoin

  7   qui nous sont disponibles, par exemple.

  8   Le témoin qui a rédigé ce rapport dit que le HVO a attaqué le

  9   village à tel ou tel endroit. Ensuite, il fait référence à ce que dit l'un

 10   des témoins dans le dossier. Le problème est que le témoin a dit que le

 11   village avait été attaqué par des Serbes également, des membres de l'armée

 12   serbe. Ceci n'est pas mentionné. Là, ce n'est qu'un petit exemple.

 13   Donc ce qui nous reste, je suppose, c'est la question suivante :

 14   que veut faire l'accusation ?

 15   Ceci ne modifie pas la charge de la preuve et la charge de

 16   production de documents sur nos épaules. D'après ce que j'ai compris, il

 17   veut que vous digériez ce rapport, que vous donniez un certain nombre de

 18   conseils sur ce qui serait nécessaire, ce qui mettrait l'accusé dans une

 19   position difficile ; ou bien l'accusation voudrait que nous disions quel

 20   témoin nous souhaitons voir citer.

 21   M. le Président (interprétation). - Mais, d'après ce que j'ai

 22   compris, on vous demanderait, ou bien, disons, l'enquêteur pourrait être

 23   contre-interrogé, je crois que c'est la suggestion, on vous demande

 24   quelles sont les questions faisant l'objet de litige. Et l'enquêteur

 25   pourrait être interrogé sur ces questions-là. Qu'elles apparaissent dans


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  1   le dossier ou dans le rapport. Et après que vous l'avez indiqué, une

  2   décision -si cela était nécessaire- pourrait être prise par la Chambre à

  3   fin de l'identité des témoins cités.

  4   M. Stein (interprétation). – Et par qui également.

  5   M. le Président (interprétation). - Serait-il possible que l'on

  6   vous donne le dossier et que la Chambre dispose également de ce dossier,

  7   que l'on reçoive les documents sous réserve d'arguments éventuels, bien

  8   entendu, mais que, de façon générale, ces documents soient admis au

  9   dossier et que vous, vous répondiez, soit au rapport de l'enquêteur soit

 10   au dossier de l'enquêteur, en disant ce qui est contesté et ce qui peut

 11   faire l'objet d'un accord ? L'un des arguments importants, c'est

 12   qu'évidemment ceci constitue une lourde tâche. Cela dit, c'est bien le

 13   travail d'un conseil de la défense dans une affaire compliquée.

 14   M. Stein (interprétation). – Nous avons suffisamment à faire

 15   déjà, mais effectivement, merci !

 16   M. le Président (interprétation). - Et oui, il faut bien

 17   s'attendre à ce que des avocats soient en mesure d'exécuter ce type de

 18   tâche.

 19   Peut-on envisager cette possibilité ?

 20   M. Stein (interprétation). – Oui, bien entendu. Vous expliquez

 21   quelle est ma préoccupation : ceci modifie la charge de la preuve et la

 22   rejette sur quelqu'un, mais nous ne savons pas qui : nous ne l'avons pas

 23   déterminé.

 24   Nous pouvons dire : très bien, nous sommes d'accord pour les

 25   cartes, pour les photographies, etc. Mais nous pourrons dire : pas sur


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  1   cette déclaration de témoin. Alors, je pense que, d'après la procédure, la

  2   charge de la preuve nous revient. Et nous devons dire à ce moment-là

  3   pourquoi, ce qui pose problème. Et nous devons convaincre le Tribunal

  4   d'ordonner à l'accusation de faire venir ce témoin. Donc ceci modifie la

  5   charge de la preuve : nous devons expliquer pourquoi tout ceci est

  6   nécessaire.

  7   M. le Président (interprétation). – Non, non, effectivement,

  8   vous pouvez avoir pour responsabilité de clarifier la question, afin de

  9   bien comprendre quels éléments de preuve, quels témoignages doivent être

 10   entendus.

 11   M. Stein (interprétation). – Oui mais, bien entendu, il y a deux

 12   possibilités de répondre à la question ; la deuxième étant celle que vous

 13   avez adoptée pour chaque témoin, et nous avons répondu chaque fois que

 14   nous l'avons pu, mais parfois, nous ne pourrons pas le faire pour

 15   différentes raisons. Le dossier qui a fonctionné pour certains d'entre eux

 16   mais qui ne fonctionnera peut-être pas pour d'autres, sera peut-être un

 17   bon exercice et peut-être que parfois nous parviendrons à un accord.

 18   Cependant, il y a de nombreuses questions qui se posent à ce

 19   moment-là, outre la responsabilité de M. Kordic vis-à-vis des allégations

 20   qui figurent dans l'acte d'accusation. N'oubliez pas que cette affaire

 21   couvre deux, trois ans, ce n'est pas notre faute. C'est une affaire

 22   extrêmement large, de grande envergure et c'est la faute de l'accusation.

 23   Et nous devons gérer ce problème du mieux que nous pouvons.

 24   Notre position comme nous l'avons dit au Juge Robinson, c'est

 25   que parfois nous n'avons rien à voir avec tel ou tel village. Je dois dire


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  1   que la défense doit être extrêmement forte pour tel ou tel village ou la

  2   défense, plus particulièrement, a été très forte dans tel ou tel village

  3   alors qu'elle ne l'a pas été dans d'autres villages. Par conséquent, c'est

  4   ce qui crée le problème.

  5   Cependant, j'essaie d'être pragmatique dans mon approche. Si

  6   nous avions un livre avec différentes questions, effectivement, nous

  7   devrions dire les points sur lesquels nous sommes d'accord et les points

  8   sur lesquels nous ne sommes pas d'accord.

  9   Nous allons préparer ce même livre, nous pouvons le présenter à

 10   l'accusation, nous allons proposer certains accords et certaines

 11   stipulations. Cependant, je voudrais que vous y repensiez. Lorsque nous

 12   allons arriver à notre défense, également, en théorie, nous pourions

 13   présenter un document de même type et dire à l'accusation "accepté" ou

 14   "rejeté".

 15   Je crois qu'en fait ce qui pose problème se sont les conclusions

 16   des enquêteurs.

 17   Ce rapport, lorsqu'on le lit, est-ce simplement une chronique

 18   des événements ? Oui bien sûr, et c'est une chronique non pas des

 19   documents mais des déclarations de témoins : une citation, tout comme un

 20   mémoire juridique, une citation des termes des témoins directs, des

 21   victimes, et lorsqu'on essaie d'aller au-delà, lorsqu'on rentre dans les

 22   déclarations elles-mêmes, et d'ailleurs c'est un problème qui se

 23   présentera pendant tout le procès. Où en sommes-nous ? S'agit-il de

 24   rumeurs ? D'ouï-dire ? Etc. Mais lorsqu'on cite un témoin tel que celui-

 25   ci, on en arrive à la question de savoir quelle est la capacité de ce


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  1   témoin de nous dire ce qui est dans ce document, dans ce livre.

  2   Si on lit ce qui est dans le document, nous n'avons besoin de

  3   personne, mais si vous voulez découvrir quelle est la teneur de ce

  4   document, eh bien il suffit de le lire. Ce n'est pas une personne qui a

  5   été vraisemblablement sur place, mais si nous en arrivons au contre-

  6   interrogatoire de cet individu nous faisons entrer sur scène un autre

  7   filtre. Quelle que soit la façon dont nous traitons cette question, nous

  8   revenons aux déclarations de témoins. Comment doit-on les utiliser ? Va-t-

  9   on les filtrer dans ce type de documents ? Ou bien, ces témoins vont-ils

 10   venir finalement ? S'ils vont venir finalement, alors pourquoi gaspillons-

 11   nous notre temps précieux à lire ce type de document ?

 12   M. Bennouna. - Je ferai une très courte intervention. Vous venez

 13   de dire vous-même les choses. Vous donnez votre propre réponse. Vous avez

 14   dit : en majorité, le rapport, c'est une chronique des événements.

 15   Vous savez bien que les témoignages, beaucoup de témoignages que

 16   nous avons entendus, ont une grande partie de chronique des événements et

 17   il y a le rapport de cet événement avec l'accusé qui est une deuxième

 18   ligne de chose.

 19   Sur la chronique des événements, même dans votre contre-

 20   interrogatoire, le plus souvent, vous admettez l'événement. Donc c'est sur

 21   la chronique de l'événement qu'on vous dit, parce que vous dites : vous

 22   prenez ce rapport, il y a toute une partie effectivement qui rapporte des

 23   événements qui se sont passés à Tulica. Nous en avons à Kiseljak, nous en

 24   avons à Zenica, à Travnik, un certain nombre de villages qui passent,

 25   comme cela, où il s'est passé des choses. Il y a eu des incidents qui ont


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  1   amené des confrontations qui se sont passées, déclenchées de telle ou

  2   telle façon. Il y a certaines choses sur lesquelles vous pouvez être

  3   d'accord, vous le savez très bien. Bien sûr, ces choses là, il n'y a pas

  4   de problème.

  5   On n'est pas en train de mettre la charge de la preuve sur la

  6   défense, comme vous le dites, pas du tout dans ce système. Vous dites : là

  7   c'est une chronique d'événements, là cela nous pose un problème. Cela nous

  8   pose un problème. Vous nous dites quel est le problème, on ne vous demande

  9   pas de faire la preuve du problème. Vous nous dites : cela nous pose un

 10   problème. Voilà où on en est pour l'instant.

 11   Comme vous le savez, c'est une affaire, comme mon collègue le

 12   Juge May vient de le dire, d'une très grande complexité. Il est certain

 13   que ces rapports donnent beaucoup de travail, c'est vrai. Mais

 14   effectivement c'est peut-être un travail à faire au lieu d'entendre le

 15   témoin sur place, en présence de toute la défense, de l'équipe du

 16   Procureur, des Juges, pour nous raconter des choses qu'on trouve dans le

 17   document et où on n'a pas besoin de lui. C'est à ce niveau là, qu'on n'a

 18   pas besoin qu'il nous le répète ou même que plusieurs témoins nous le

 19   répètent.

 20   Lorsqu'il y a un problème, une chose problématique par rapport

 21   aux accusés que vous défendez, qui les mettent en cause et vous estimez

 22   qu'ils les mettent injustement en cause, eh bien c'est là où vous dites :

 23   cela ne peut pas passer. Et l'accusation pour aller au-delà doit produire

 24   un témoin et doit faire la preuve avec le contre-interrogatoire.

 25   Je ne sais pas si j'ai été clair.


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  1   M. Stein (interprétation). – Oui, je crois qu'il y a deux

  2   questions qui sont liées.

  3   D'abord il y a effectivement une série chronologique de faits.

  4   Si ce document présente une série chronologique de faits, comme étant la

  5   chose suivante : "il est allégué que le HVO a attaqué le 16, etc., dans

  6   telle et telle région, dans tel ou tel village", nous disons également, en

  7   présentant l'opposition, sans en donner de sources, que nous pourrions

  8   tous le lire d'une façon qui ne porterait pas préjudice en disant :

  9   "d'accord", "pas d'accord", "d'accord", "pas d'accord", mais ce n'est pas

 10   ce que fait ce document. Ce document dit : "le témoin dit la chose

 11   suivante" et le témoin dit la chose suivante.

 12   Alors si nous devons suivre cette voie, c'est peut-être de

 13   présenter une chose neutre en résolvant la question de la chronologie

 14   comme vous venez de le suggérer.

 15   Ceci nous amène à la deuxième question proposée par le Juge May.

 16   Si l'on passe en revue la chronologie de façon neutre, la défense peut

 17   dire : "oui", "non", "oui", "non", "oui", "non" et passer à autre chose.

 18   C'est peut-être une solution pratique.

 19   La troisième question que vous devez comprendre cependant, et je

 20   suis sûr que vous la comprenez d'ailleurs, est qu'il y a toujours les

 21   délits qui doivent être établis ; il y a toujours des actes dont on doit

 22   faire la preuve et ceci doit être fait, et dans certains cas cela n'a pas

 23   été le cas, sans que nous soyons d'accord ou pas d'accord. Ceci nous

 24   demande ici d'être d'accord sur un élément de délit ou de crime, ce que

 25   nous ne pouvons pas faire.


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  1   Bien entendu, mes collègues veulent que je vous le rappelle, une

  2   fois de plus, puisque vous parlez toujours de la découverte de la vérité,

  3   et c'est le point le plus important.

  4   Même des gens de toute bonne foi, des témoins, des enquêteurs,

  5   tout être humain filtre les événements de différentes manières. Certains

  6   sont plus précis que d'autres, certains utilisent une connaissance

  7   générale, certains pensent qu'ils ont entendu certaines choses. Et, dans

  8   ce cas, dans trois ou quatre exemples, nous avons eu les meilleurs

  9   exemples de cela, des membres de l'accusation ont parlé, interrogé... je

 10   ne sais pas... des témoins qui sont ici, afin que ces témoins viennent

 11   témoigner. Ils ont passé en revue la déclaration, ils sont venus avec des

 12   résumés montrant très exactement ce qu'ils pensaient que le témoin allait

 13   dire et lorsque le témoin arrive ici, sans aucun contre-interrogatoire,

 14   mais simplement du fait de l'atmosphère de cette Chambre et sous serment,

 15   eh bien le véritable témoignage diffère du résumé entendu.

 16   Nous l'avons entendu aujourd'hui. Nous l'avons déjà entendu et

 17   mon collègue de la partie adverse est assez surpris, ce qui d'ailleurs a

 18   amené un certain débat de cinq ou dix minutes entre différents témoins.

 19   Ceci, bien sûr, fait partie des règles de la confrontation et du

 20   contre-interrogatoire. Le témoin peut très rapidement changer son

 21   histoire. Bien entendu, tous les témoins ne recevront pas des questions

 22   sur le régime communiste, l'enseignement, l'éducation, etc. Nous l'avons

 23   déjà fait.

 24   Par conséquent, nous jugeons, à partir de ce que nous entendons

 25   de notre perspective et de la façon dont évoluent les choses, ce sur quoi


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  1   nous devons revenir et ce sur quoi nous ne devons pas revenir.

  2   Nous n'avons pas peur d'être en désaccord, lorsque nous ne

  3   pouvons pas. Parfois nous le pouvons, parfois nous ne le pouvons pas.

  4   Parfois nous pouvons nous ouvrir à des idées tout à fait novatrices et

  5   nous présenterons certaines idées à l'accusation, mais ce n'est pas notre

  6   faute.

  7   Nous sommes ici parce que l'accusation a choisi de faire venir

  8   ici M. Kordic et elle a choisi un acte d'accusation qui recouvre une

  9   grande période et de nombreux actes, de nombreux événements. Vous avez été

 10   très clair.

 11   La présentation des arguments de l'accusation doit être terminée

 12   d'ici au mois de décembre et avec soixante témoins, ceci devrait être

 13   possible, étant donné les méthodes que nous avons utilisées. Nous avons

 14   lutté contre ces méthodes. Malheureusement ou heureusement, nous en voyons

 15   pas le bien-fondé.

 16   Par conséquent, avec tout le respect que je dois à cette

 17   Chambre, si je comprends les arguments présentés dans le mémoire de

 18   l'accusation, eh bien ceci en fait, est contraire à tous les principes de

 19   respect du droit de l'accusé en ce qui concerne les déclarations écrites

 20   de témoins. Si j'ai mal compris et si les déclarations de témoins sont

 21   juste présentées pour une raison qui n'est pas celle de les faire verser

 22   au dossier, très bien : dans ce cas-là, nous voulons simplement lire une

 23   chronologie tout à fait neutre des événements, mais c'est une chose tout à

 24   fait différente. Si cela était véritablement une chronologie neutre de ce

 25   que le Procureur veut prouver et si ce dossier ne contenait pas des


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  1   déclarations de témoins qui se répètent parfois, je crois qu'il n'y aurait

  2   pas de problème.

  3   M. le Président (interprétation). - J'aimerais aussi entendre la

  4   défense sur la recevabilité des comptes rendus, non pas des déclarations

  5   écrites de témoins, mais des comptes rendus.

  6   Monsieur Kovacic, peut-être voudriez-vous intervenir ?

  7   M. Kovacic (interprétation). - Monsieur le Président, Messieurs

  8   les Juges, il est difficile, bien évidemment, de coordonner toutes nos

  9   activités. Nous abondons parfaitement dans le sens de la défense du

 10   premier accusé, dans beaucoup d'éléments qui ont été avancés. Par

 11   conséquent, je vais être très bref.

 12   Tout le débat que nous venons de mener et qui, d'ailleurs, dure

 13   depuis des semaines entières, est le résultat en grande partie du fait que

 14   nous nous rendons compte tous, aussi bien la Chambre que l'accusation et

 15   la défense, du fait que nous avons beaucoup de documents, je dirai même

 16   des dizaines et des centaines de pages, alors que, sur le plan humain, il

 17   est pratiquement impossible véritablement de maîtriser tous ces documents

 18   et surtout de rester rationnel et efficace.

 19   Pendant les préparatifs de ce débat, et ce n'est pas dans mes

 20   intentions de dire qu'il y en a qui ont fait des choses, d'autres pas du

 21   tout, ou bien critiquer. Mais, de toute façon, lors des préparatifs -je me

 22   dois de répéter-, nous avons espéré, nous autres également, des conseils,

 23   des avocats qui viennent d'un système juridique différent, nous avons

 24   espéré qu'à travers donc ce système de déclarations, de témoignages, de

 25   substituts, nous allons pouvoir effectivement accélérer les choses et


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  1   surtout, nous mettre d'accord sur les choses qui sont incontestables et ne

  2   pas perdre de temps là où il n'est pas indispensable, notamment lors des

  3   séances que nous avons et les débats comme c'est le cas aujourd'hui.

  4   Malheureusement, nous nous sommes rendus compte, dès le début,

  5   que ce n'était pas possible. Et ceci, à mon avis, pour les deux raisons :

  6   premièrement, parce que l'accusation était trop en retard avec les

  7   documents qu'ils ont remis à la défense. Ce processus est encore en cours,

  8   en quelque sorte. Mais il y avait une pile de documents que nous avons

  9   reçus au cours du mois de mars. Ensuite, ce fleuve, si je peux dire, de

 10   documents que nous avons reçus s'est quelque peu arrêté au mois de mai.

 11   Mais là, maintenant, nous sommes encore à recevoir les documents. Ce n'est

 12   plus un fleuve, c'est un ruisseau !

 13   Bref, je veux dire que la défense a été, par conséquent, limitée

 14   au point de vue temps. Par conséquent, nous n'avons pas pu véritablement

 15   discuter, notamment sur les sujets qui nous ont été les moins clairs. Je

 16   viens d'un système juridique où, comme je l'ai dit, toutes les parties

 17   savent très bien quel est le domaine dans lequel elles ne s'exposent pas

 18   aux risques, plutôt que de toucher à des domaines qui ne sont pas

 19   réglementés et, de cette manière-là, provoquer des problèmes qui poseront

 20   d'autres problèmes, mais après avoir perdu beaucoup de temps et en

 21   recourant à de nouvelles méthodes.

 22   Je vais, à titre d'illustration, vous donner quelques exemples.

 23   Nous allons commencer à travailler avec des résumés. Je me dois de vous

 24   reconnaître que je pensais qu'avec des résumés, on aurait effectivement pu

 25   économiser du temps. Mais je vois qu'aujourd'hui, ce n'est pas le cas. De


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  1   toute façon, chacun peut apprécier les choses.

  2   De l'autre côté, l'accusation a proposé à la défense -je pense,

  3   de toute façon, que c'est leur obligation ou, de toute façon cela aurait

  4   dû être leur obligation, car la défense était en retard en ce qui concerne

  5   les préparatifs et la Chambre ne pouvait pas en décider différemment- les

  6   deux propositions en ce qui concerne des substituts, au moment où nous ne

  7   disposions pas de tous les documents.

  8   Il y avait 37 points -c'est le premier document- et nous avons

  9   accepté tout de suite 7 points ; en ce qui concerne les autres, nous avons

 10   dit que si jamais, éventuellement, on pouvait éviter un certain nombre de

 11   caractéristiques au sujet des faits, etc., que nous pourrions probablement

 12   accepter d'autres points contenus dans ces documents.

 13   Après quoi, l'accusation n'a même pas essayé d'améliorer les

 14   choses et ceci est resté en suspens. On a perdu des heures et des heures ;

 15   les résultats étaient minimes et personne n'est revenu en arrière. Par

 16   conséquent, nous n'avons pas pu véritablement procéder à la recevabilité

 17   de tels documents.

 18   Ensuite, nous avons reçu un autre document, document qui, une

 19   fois de plus, contenait de nombreux points. Cette fois-ci, l'accusation

 20   appelle cela la deuxième invitation du Bureau du Procureur. A ce moment-

 21   là, nous avons reçu encore d'autres documents.

 22   Personnellement, nous pouvons dire que la défense du deuxième

 23   accusé a répondu à ces propositions. Sur les 75 points de la proposition

 24   que l'accusation avait avancés, rien n'avait à faire avec l'acte

 25   d'accusation concernant le deuxième accusé Cerkez. C'est la raison pour


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  1   laquelle je ne vois pas de raisons pour lesquelles je répondrais à cette

  2   question.

  3   En ce qui concerne les allégations concernant Cerkez, en nous

  4   référant à ces documents, elles portent sur 48 points. Sur 48 points, nous

  5   avons accepté 11 points, ce qui veut dire un quart. En d'autres termes,

  6   nous avons accepté ces points avec quelques propositions tout simplement

  7   d'omettre quelques allégations véritablement minimes.

  8   A titre d'illustration, je vais vous donner quelques exemples et

  9   je m'excuse auprès de vous d'abuser de votre temps. Dans un point, par

 10   exemple : stipulation. Là, c'est un point-clef pour mon accusé. Nous avons

 11   dit que nous ne nous opposions pas à la proposition d'adopter les

 12   observations différentes : éviter les coordonnées géographiques, car nous

 13   ne connaissons pas ce système de mesure ; par conséquent, nous ne pouvons

 14   pas véritablement l'accepter du point de vue juridique.

 15   Ce n'est absolument pas important. Ensuite, nous avons ajouté

 16   également, en ce qui concerne la localité dont il est fait mention dans le

 17   texte, on a parlé de Vitez et Stari Vitez. Nous avons tout simplement

 18   ajouté le terme dont la partie intégrante est Mahala. Le Procureur n'a

 19   jamais répondu à cette proposition. Ceci, donc, concerne les onze points

 20   que nous avons acceptés avec ces petites propositions et, comme j'ai dit,

 21   des toutes petites modifications. On aurait pu se mettre d'accord sur les

 22   onze points.

 23   En ce qui concerne les trois points, nous avons demandé les

 24   modifications un peu plus importantes, mais en acceptant quand même les

 25   stipulations données.


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  1   Je pense qu'il aurait été beaucoup plus efficace, et mieux

  2   également, pour les deux parties qu'on recoure à une méthodologie qui est

  3   définie : ne pas expérimenter à partir du moment où nous expérimentons un

  4   peu trop. Personnellement, je pense que nous pouvons également induire en

  5   erreur la Chambre. Personnellement, je ne suis pas pour car je pense que

  6   nous allons faire un pas en arrière et, qu'en effet, nous allons perdre du

  7   temps plus que nous n'allons en gagner.

  8   De l'autre côté, si la communication est déjà terminée, à ce

  9   moment-là, on pourrait peut-être parler un peu plus de stipulations. C'est

 10   la raison pour laquelle l'utilisation également de résumés, auxquels on

 11   avait recours, n'a pas véritablement été bénéfique parce que si nous avons

 12   reçu le résumé, par exemple une demi-heure avant que le témoin vienne dans

 13   ce prétoire ou même un jour avant, nous ne pouvons pas véritablement

 14   l'étudier. Si on reçoit cette communication deux ou trois jours avant, à

 15   ce moment-là, bien évidemment, nous pouvons l'étudier davantage. C'est la

 16   raison pour laquelle, il ne faut pas perdre le temps, en ce qui concerne

 17   bien évidemment les faits, qui sont les faits incontestables, au moment où

 18   il décline son identité, où il dit qu'il a travaillé, où il a travaillé

 19   etc. Cinq ou sept minutes, par exemple, nous suffisent.

 20   Par conséquent, le reste du temps… nous pouvons utiliser pour le

 21   reste. C'est la raison pour laquelle, je rejoins la défense de Kordic,

 22   dans le sens de m'opposer à définir une telle classification, et je

 23   propose à la Chambre de demander à l'accusation d'appliquer les méthodes,

 24   les méthodes qui sont connues et qui ne sont pas contraires au Règlement

 25   de preuve et au Statut, ni au droit international, aux Conventions


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  1   internationales, et sont conformes au droit civiliste et au Common Law.

  2   Si on parle du droit civiliste -le mémoire de l'accusation parle

  3   du droit civiliste que je n'approuve pas- et nous savons tous, également,

  4   que, dans le cadre du droit civiliste, il y a des différences très grandes

  5   et des variations entre les pays. Par conséquent, la situation n'est pas

  6   tout à fait claire et si on débat de cette question-là, à ce moment-là, il

  7   faudrait également parler du droit tempo criminis en Bosnie, parce que

  8   c'est beaucoup plus pertinent que le droit français qui, à ce moment-là,

  9   n'aurait rien à faire avec les événements sur le territoire en question.

 10   C'est la raison pour laquelle il faudrait peut-être également se référer à

 11   d'autres droits.

 12   Voilà, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je ne

 13   voudrais pas abuser de votre temps plus longtemps.

 14   M. Le Président (interprétation). - Voulez-vous dire quoi que ce

 15   soit à propos de la recevabilité des comptes rendus d'audience de témoins

 16   ayant déposé dans d'autres affaires ?

 17   M. Kovacic (interprétation). - Comme je l'ai dit Monsieur le

 18   Président, Messieurs les Juges, je rejoins la défense de Kordic.

 19   En ce qui concerne les témoignages donnés devant cette Chambre

 20   et les déclarations dans d'autres affaires devant d'autres Chambres, nous

 21   sommes prêts à les examiner, mais nous sommes d'avis qu'il faudrait les

 22   examiner, les verser au dossier, conformément à l'article 89 © du

 23   Règlement en qualité documentaire -donc une preuve documentaire. Ceci me

 24   paraît le plus raisonnable.

 25   Mais dans le cas où, par exemple, on procède à l'examen d'un cas


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  1   à l'autre, le fondement de reprendre de tels éléments de preuves, ce qui

  2   m'intéresse, c'est de savoir si le témoin, au cours du contre-

  3   interrogatoire, avait été interrogé de la manière qui correspond à ma

  4   propre défense.

  5   C'est la raison pour laquelle Monsieur le Président, Messieurs

  6   les Juges, je voudrais vous dire, tout à fait ouvertement que s'il s'agit

  7   d'une pièce à conviction dans l'affaire Blaskic, c'est à titre d'exemple

  8   que je vous donne ceci, dans la majorité des cas, le contre-interrogatoire

  9   auquel la défense a procédé dans cette affaire est, sinon identique, au

 10   moins assez proche de notre défense.

 11   Il y aurait peut-être deux cas où nous avons quelques besoins

 12   également qui sont quelque peu plus proches. Mais de toute façon, je ne

 13   pense pas qu'ils seraient indispensables, ils ne seraient pas

 14   véritablement à notre détriment. C'est la raison pour laquelle, je dis

 15   que, dans ce cas-là, cela ne serait pas, par exemple, quelque chose qui

 16   serait contesté, mais dans d'autres cas, cela serait peut-être vrai.

 17   Mais vous voyez, c'est comme cela qu'il faut réfléchir. Enfin il

 18   y a certaines affaires où c'est le cas, dans d'autres, ce n'est pas le

 19   cas.

 20   M. Stein (interprétation). – Nous avons discuté de cette

 21   question l'autre jour. Vous connaissez notre position, vous connaissez

 22   bien l'affaire, Monsieur le Président. S'il y a un besoin particulier et

 23   s'il y a égalité d'armes, et s'il y a possibilité de procéder au contre-

 24   interrogatoire comme c'était prévu dans l'affaire Aleksovski, nous pensons

 25   que la question mérite examen.


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  1   M. le Président (interprétation). – Oui. Maître Nice ?

  2   M. Nice (interprétation). – Monsieur le Président, pourriez-vous

  3   apporter quelques éclaircissements sur votre proposition à la lumière des

  4   arguments entendus ?

  5   M. le Président (interprétation). – Je serais tout à fait

  6   concis, Maître Nice. J'aimerais proposer à Maître Dixon qu'il parle de

  7   l'accord et s'il y a d'autres questions qui restent en suspens, par

  8   rapport à ce document que j'ai reçu ce matin -il y a ce pacte- je crois

  9   que Maître Dixon connaît mieux ces questions-là. Il a rédigé le dossier et

 10   Maître Lopez-Terres pourra se saisir de toutes les questions qui découlent

 11   de la jurisprudence ou de la compétence en France et après avoir suivi les

 12   arguments de ce matin, je peux dire que c'est une discussion intéressante.

 13   Ce sont des tâches qui concernent notre affaire, il est intéressant de

 14   voir quelles sont les disciplines différentes qui trouvent leur

 15   répercussion dans les arguments que nous avons entendus.

 16   Permettez-moi de dire ceci : le résultat pour ce qui est de

 17   Kordic est clair, à moins qu'il ne soit forcé d'autres façons, ils ne

 18   seront prêts à admettre quelque chose que si c'est approuvé, si la preuve

 19   est administrée par des moyens de preuve.

 20   Je vais peut-être utiliser le rétroprojecteur. Je pense que

 21   l'huissier pourra m'aider à parvenir à ce rétroprojecteur.

 22   Maître Stein disait il y a peu que si une déclaration neutre

 23   avait été signifiée qui porterait sur l'historique des événements de

 24   Tulica, les choses auraient pu prendre un cours différent, mais la

 25   déclaration que vous avez sous les yeux, qu'on peut lire en l'espace d'à


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  1   peine une minute et qui fait le résumé chronologique et neutre des

  2   positions prises à l'égard de Tulica, ce document a été signifié sous

  3   cette forme-ci à la défense dès l'automne, pas l'automne 1998, ceci, avec

  4   toutes les pièces jointes qui étaient alors disponibles a été signifié à

  5   la défense, c'est-à-dire que des avocats qui se sont succédés à la défense

  6   de ces deux hommes ont reçu ceci à l'automne 1997. Et si les avocats de la

  7   défense font bien leur travail, ils doivent avoir étudié ces déclarations,

  8   les avoir préparées.

  9   Ce qui veut dire que s'il y a une invitation à se mettre

 10   d'accord, laquelle a été signifiée en février 1999, si ce que Me Stein

 11   nous dit à propos de la recevabilité générale d'un document neutre est le

 12   reflet des intentions à long terme de ces avocats de la défense, pourquoi

 13   alors ce document qui fait à peine une minute de lecture, n'aurait-il pas

 14   pu être accepté, ne serait-ce que pour l'exclure par identification, ce

 15   qui aurait permis à l'accusation sur-le-champ de déterminer quels étaient

 16   les témoins qu'il fallait vraiment appeler à la barre ?

 17   Et c'est bien ce qui se serait passé. Mais en fait, et je crois

 18   que Me Stein a eu la candeur de révéler la vérité de la démarche qu'ils

 19   sont obligés ou qu'ils ont choisi de sélectionner, il l'a fait lorsqu'il

 20   nous a dit… (attendez que je le trouve) que s'agissant des faits

 21   importants, ils ne sont pas en mesure de se mettre d'accord.

 22   Qu'entend-il par là ? Mais bien évidemment que les crimes commis

 23   sur le terrain, les exactions qu'on oublie, le rapport direct avec Kordic,

 24   que s'agissant de ceci, la défense n'est pas en mesure d'admettre quelque

 25   exaction que ce soit.


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  1   Et c'est la qu'intervient de façon essentielle le rôle qu'a joué

  2   la Chambre de première instance. Nous avons déposé différentes requêtes

  3   aux fins d'assistance et de coopération, nous avons au moins épuisé notre

  4   arsenal d'idées. Nous sommes à bout d'idées. C'est la raison pour laquelle

  5   nous nous tournons vers vous pour avoir votre assistance plus générale,

  6   Messieurs les Juges.

  7   Il se peut que la défense ne soit pas en mesure de le faire,

  8   étant donné les instructions reçues de leurs clients pour d'autres raisons

  9   que j'ignore ou ne serait-ce que parce que c'est la façon américaine de

 10   tout présenter et espérer que les témoins ne seront pas disponibles ou ne

 11   viendront pas déposer.

 12   Mais en tout cas, s'ils ne font aucune admission, cette Chambre

 13   de première instance en vertu de ce règlement du 73F et du 90G, on a là un

 14   exemple des compétences dont vous disposez pour déclarer admissibles des

 15   accords et de les exiger sur le nombre de questions.

 16   Et il vous incombe, Messieurs les Juges, en vertu du 73 bis F

 17   qui renvoie à la conférence de mise en état, mais par implication, c'est

 18   une compétence qui est accordée à la Chambre de façon générale lui

 19   permettant d'exiger de la défense une déclaration de fait établi ou

 20   convenu, elle peut le faire en disant quels sont les faits qui sont

 21   établis, qui sont convenus ou pas.

 22   Le 90G qui est une disposition que nous connaissons bien, exerce

 23   un contrôle sur les modalités de l'interrogatoire des témoins et de la

 24   présentation des éléments de preuve, de manière à :

 25   i) rendre l'interrogatoire et la présentation des éléments de


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  1   preuve efficaces pour l'établissement de la vérité,

  2   ii) éviter toute perte de temps inutile (fin de citation)

  3   Et la Chambre doit avoir le loisir de le faire, car nous ne

  4   l'avons pas, à savoir dire à la défense : "Bien, vous avez désormais un

  5   récit, un narratif de ce qui s'est produit à Zenica d'après la

  6   déclaration, paragraphe 1, y a-t-il quoi que ce soit qui est contesté dans

  7   ce premier paragraphe ?"

  8   Si ce n'est pas le cas, nous considérerons que les pièces

  9   jointes y afférent sont lues, s'il y a de bonnes raisons pour contester,

 10   il est bien certain qu'à ce moment-là, il faudra appeler le témoin à la

 11   barre et il va de soi également que si cela veut dire qu'il faut appeler

 12   beaucoup de témoins, eh bien, c'est ce qui se passera.

 13   Nous nous aventurons à supposer de leur suggérer, comme c'est

 14   peut-être ce que disait le Juge Bennouna ou ce qu'il avait à l'esprit

 15   lorsqu'il a bien résumé quelles étaient nos intentions, il semblera bien

 16   qu'il y aura peu de choses contestées et que ce à quoi vous aurez à faire,

 17   c'est une démarche empruntée par la défense qu'elle considère comme tout à

 18   fait légitime et qui est effectivement légitime dans certains systèmes.

 19   C'est une politique qui consiste à dire : "Tout est remis en question,

 20   vous devez administrer la preuve si vous en êtes capable", que cela soit

 21   pour un vol à l'étalage ou pour des infractions graves, où il y a une base

 22   de témoins locaux et la possibilité d'obtenir tous les témoins à la barre

 23   en un temps raisonnable.

 24   Si c'est bien ce que fait le système local, lorsqu'il le

 25   considère raisonnable, cela ne l'est pas ici en instance. Et j'espère que


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  1   nous avons résumé de façon exacte le système français. Ce serait

  2   inapproprié dans le système français également car même, bien sûr s'il y a

  3   l'attente générale, selon laquelle il y aura des témoins qui parleront de

  4   sujets importants, témoins qui pourraient être interrogés par

  5   l'accusation, par les juges et par la défense, il y a un pouvoir de

  6   surveillance, si vous voulez, d'abord du juge d'instruction, puis des

  7   juges de première instance qui vont dire "non, non, cette question-là

  8   n'est pas une question pour laquelle il faut aller plus loin que la

  9   déclaration écrite."

 10   M. le Président (interprétation). – Maître Nice, nous allons

 11   dépasser le temps imparti. Je le crains fort. En général, nous avons une

 12   pause à cette heure ci.

 13   Apparemment, vous n'allez pas encore nous dire beaucoup de

 14   choses.

 15   M. Nice (interprétation). - Je ne pense pas, j'ai encore

 16   quelques notes, mais j'espère que vous me donnerez l'occasion de les lire

 17   pour être bien sûr que je n'ai rien oublié, mais je n'aurai sans doute pas

 18   grand-chose à ajouter.

 19   Mais vous allez peut-être vouloir entendre les arguments de

 20   MM. Dixon ou Lopez-Terres parce que je crois que, sur ces questions, en

 21   tout cas moi j'ai été grandement aidé par la connaissance de différents

 22   systèmes, peut-être que cela pourra vous être utile également.

 23   (Les Juges se consultent sur le Siège.)

 24   M. le Président (interprétation). - Pour autant que les

 25   interprètes en soient d'accord, nous allons siéger encore 20 minutes afin


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  1   de terminer cet échange d'arguments.

  2   M. Nice (interprétation). - Merci. Permettez-moi de vous

  3   rappeler, Messieurs les Juges, que, dans les argumentaires que nous avions

  4   par écrit, il y a quelques semaines, il n'y avait que deux passages mis en

  5   exergue par la ligne verticale et en caractères gras.

  6   Il y avait ce passage : "La Chambre a loisir de décider quels

  7   sont les fournisseurs d'informations à appeler à la barre". Deuxième

  8   passage : "Il n'incombait pas à la défense mais bien à la Chambre de

  9   décider des déclarations à lire."

 10   M. le Président (interprétation). - Cela va de soi. Toutefois,

 11   je veux, je tiens à bien comprendre ce que vous nous demandez en matière

 12   de procédure, dès maintenant.

 13   M. Nice (interprétation). - Est-ce que vous m'avez interrompu,

 14   Monsieur le Président ?

 15   M. le Président (interprétation). - Oui, je voudrais apporter

 16   tous les éclaircissements nécessaires pour voir si j'ai bien compris. Vous

 17   nous demandez, pour ainsi dire, si nous voulions rendre une ordonnance et

 18   que le dossier soit signifié à la défense ?

 19   M. Nice (interprétation). - Oui.

 20   M. le Président (interprétation). - On demanderait pendant un

 21   certain laps de temps, que la défense nous fasse part des éléments

 22   contestés, quels sont les documents contestés, plus précisément. Et quels

 23   sont les éléments contestés s'agissant du rapport Tulica, disons. On

 24   demanderait des échanges d'arguments sur le document.

 25   M. Nice (interprétation). - C'est exact. La défense aurait


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  1   l'occasion de poser des questions à un officier ou fonctionnaire. Le

  2   juge Bennouna nous a donné des exemples du type de questions qu'on

  3   pourrait poser. Je crois que, précédemment, j'avais donné d'autres

  4   exemples moi-même. Mais ces questions pourraient les aider afin de

  5   déterminer les témoins à citer ou les points de litige. Des arguments

  6   peuvent être présentés sur les éléments en litige et les témoins à

  7   appeler.

  8   De cette façon, je crois qu'on pourrait mieux délimiter et

  9   circonscrire les sujets. Et, en fonction des disponibilités, nous

 10   pourrions appeler les témoins qui s'avéreraient nécessaires.

 11   M. le Président (interprétation). - Mais cela va peut-être

 12   prendre plus de temps, a-t-il été avancé, plutôt que d'appeler deux ou

 13   trois témoins pour chaque village.

 14   M. Nice (interprétation). - Effectivement, s'il n'y avait qu'un

 15   ou deux témoins par village. Mais nous avons pour obligation de présenter

 16   des éléments de preuve pour tous les crimes qui forment la base de cet

 17   acte d'accusation. Je crois que nous avions, pour le moment, prévu quelque

 18   chose comme plus de 170 témoins. Nous ne pouvons pas partir d'un nombre

 19   aléatoire de témoins par village, si nous ne savons pas ce qui est admis

 20   et ce qui est contesté.

 21   M. le Président (interprétation). - Certes, mais nous avons pour

 22   devoir de veiller à ce que ce procès reste dans un délai raisonnable et je

 23   ne sais pas si c'est raisonnable de devoir appeler 170 témoins.

 24   M. Nice (interprétation). - Mais c'est tout ce que l'on peut

 25   faire. Je vous ai montré les documents, Monsieur le Président. C'est le


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  1   document dont quelqu'un a dit qu'il aurait voulu l'avoir mais, finalement,

  2   cela ne donne rien. Maître Kovacic a fait quelques répliques, mais on ne

  3   peut rien faire unilatéralement parce qu'il faut avoir les réponses des

  4   défenseurs des deux accusés.

  5   M. le Président (interprétation). - Au départ, vous aviez

  6   demandé que soit admis le dossier, que l'enquêteur soit appelé pour que ce

  7   dossier puisse être admis : ce n'est plus cela.

  8   M. Nice (interprétation). - Ce n'est pas ce que nous disions au

  9   départ ; ce n'était d'ailleurs pas ce que l'on disait dans ce document. Il

 10   est certain que ceci aurait pour effet, par l'un ou l'autre détour, que ce

 11   qui n'est pas contesté soit versé au dossier, que cela soit un accord, une

 12   stipulation ou la lecture d'un ouï-dire, peu importe. Si cela devient un

 13   moyen de preuve en instance, cela le devient, bien sûr, sous le contrôle

 14   de la Chambre qui reflète bien là ses diverses obligations.

 15   Monsieur Lopez-Terres me corrigera, si je me trompe. Mais, par

 16   exemple, dans le système français, est comprise dans les obligations des

 17   juges dont ils doivent s'acquitter la bonne administration de la justice.

 18   Et ceci est répercuté dans notre Statut, dans notre Règlement par le fait

 19   d'éviter des pertes de temps inutiles. C'est tout ce que l'on peut faire :

 20   on ne peut pas y arriver autrement. Nous, nous disons sans doute qu'il y a

 21   des éléments qui ne sont pas contestés, mais c'est la façon que nous avons

 22   trouvée pour montrer que les questions non contestées ne doivent pas faire

 23   l'objet de témoignages inutiles de témoins qui, pour certains, viennent de

 24   centaines de kilomètres.

 25   M. le Président (interprétation). - Voudriez-vous que nous


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  1   rendions une ordonnance par rapport à Tulica, par rapport au dossier

  2   Tulica ?

  3   M. Nice (interprétation). - Oui.

  4   M. le Président (interprétation). - Dossier que nous avons dans

  5   le rapport ?

  6   M. Nice (interprétation). - Tout à fait. Nous demanderons

  7   l'autorisation d'appeler, en temps voulu, les témoins et nous pourrons

  8   répondre à des questions.

  9   M. le Président (interprétation). - Serait-il vraiment utile de

 10   citer les témoins ?

 11   M. Nice (interprétation). - Eh bien, c'est à la défense d'en

 12   juger. Il se peut que la défense ait des questions à poser ? Maître Stein

 13   vous l'a dit : il veut poser des questions, par exemple, sur ceux qui ont

 14   recueilli les déclarations préalables, pour s'enquérir des méthodes.

 15   J'ajoute une petite parenthèse : d'abord, il n'y a pas de

 16   problème pour les déclarations autres que celles qui sont utilisées par

 17   nous. En effet, si l'on demande un enquêteur à la barre et qu'il fait une

 18   déclaration tout à fait contradictoire avec ce qu'a dit le témoin, c'est

 19   bien à cela que sert le contre-interrogatoire de l'enquêteur ; ceci

 20   permettra aux Juges de résoudre les problèmes qu'ils ont. Cela ne pose pas

 21   de difficulté.

 22   Il se pourrait fort bien que ce témoin soit utile à la défense,

 23   ne serait-ce qu'à cette fin. Sinon, il pourrait s'avérer essentiel parce

 24   que son récit pourrait être le moyen par lequel les parties non contestées

 25   du dossier deviennent des moyens de preuve publics dans cette affaire et


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  1   qui répondent ainsi au principe de l'oralité des débats ; en effet, dans

  2   certains systèmes, on exige que certaines choses soient dites en public et

  3   ne soient pas simplement communiquées en privé.

  4   M. le Président (interprétation). - S'agissant des comptes

  5   rendus d'audience, qu'en est-il ? Est-ce que vous nous invitez à les

  6   admettre ?

  7   M. Nice (interprétation). - Oui, les déclarations préalables et

  8   les comptes rendus d'audience pourraient présenter un potentiel en vertu

  9   des ouï-dire. Et ceci relève des règles du Tribunal.

 10   M. le Président (interprétation). - Il y a une distinction.

 11   M. Nice (interprétation). - Quant au type précis, je pourrai

 12   vous en parler plus longuement dans un instant. Mais, à ce stade, il

 13   suffirait peut-être d'ordonner la recevabilité des comptes rendus

 14   d'audience, en réservant à une décision ultérieure la question des

 15   déclarations préalables parce que vous voudrez entendre les arguments de

 16   la défense sur certaines déclarations, lorsque la défense aura eu

 17   l'occasion de mieux examiner le dossier.

 18   M. le Président (interprétation). - Mais si un témoin refuse de

 19   venir, je suppose qu'il tirerait une certaine force de l'argument

 20   d'obtenir le moyen de preuve en l'absence du témoin ?

 21   M. Nice (interprétation). - Effectivement, si un témoin est

 22   incapable de venir, on informera la défense. D'autres efforts seront

 23   déployés à l'égard de ce témoin et voilà.

 24   Quant au témoin récalcitrant ou mort, aux témoins qui ne veulent

 25   pas venir déposer à cause de la peur, c'est une autre question qu'on


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  1   traitera plus tard, un autre jour. Mais, à ce stade, effectivement, si un

  2   témoin est un peu récalcitrant, je suppose qu'il a une certaine

  3   caractéristique qui pourrait être intéressante pour la défense. Ceci va

  4   peut-être aider mes amis américains de la partie adverse. Et ceci va peut-

  5   être intéresser le Juge Bennouna.

  6   Dans d'autres systèmes, il y a maintenant, même dans des

  7   affaires pénales, une présomption, selon laquelle des déclarations

  8   recueillies par des enquêteurs pourraient devenir des moyens de preuve du

  9   procès, sous réserve d'une requête formulée expressément par la défense à

 10   la Chambre pour qu'il y ait des témoins qui se présentent à l'audience.

 11   Et ces déclarations ont des préambules qui ne diffèrent pas

 12   tellement, finalement, de ce que l'on trouve dans les déclarations

 13   préalables du TPIY.

 14   Mais il n'y a pas de clauses pénales, chez nous, parce que notre

 15   Statut ne permet pas à une Chambre de pénaliser des témoins qui déclarent,

 16   dans leur déclaration préalable, des éléments qui s'avèrent inexacts

 17   lorsque ces déclarations sont versées au dossier.

 18   Mais c'est un domaine qui relève du Règlement. Mais sinon, la

 19   déclaration et les règles qui les régissent sont assez semblables à ce qui

 20   se passe dans d'autres pays. Je pense aussi au niveau du contenu. Excusez-

 21   moi, si je dévoile un secret du métier.

 22   Monsieur Lopez-Terres, qui se demandait pourquoi, dans notre

 23   institution, des enquêteurs ne font pas ce qui se fait dans d'autres

 24   systèmes, à savoir de recueillir une déclaration sous serment, ce qui

 25   pourrait peut-être répondre à certaines inquiétudes des civilistes, on a


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  1   répondu : ce n'est pas ce qui se fait en Amérique ! Tout ceci pour montrer

  2   que le fait de mouler ou de remouler plusieurs systèmes n'est pas facile

  3   et que chacun a sa façon de voir ; mais qu'il est utile d'apprendre ce qui

  4   se fait ailleurs.

  5   Mais nous avons un problème pratique ici : sans l'intervention

  6   de la Chambre de première instance, il faudra citer autant de témoins que

  7   ceux qui nous ont autorisés ou que nous estimons nécessaires pour prouver

  8   les éléments constitutifs au niveau des crimes, la base du crime.

  9   Mais je crois que cette méthode de substitution permet de faire

 10   l'économie de beaucoup de témoins.

 11   M. Robinson (interprétation). - Voyons si j'ai bien compris : le

 12   dossier est signifié à la défense, ceci afin que la défense détermine s'il

 13   y a des éléments litigieux. Et ceci, bien sûr, sous réserve de la décision

 14   prise par la Chambre, de façon générale, s'agissant des témoins qui

 15   devraient être cités.

 16   Si la Chambre n'a pas pris de décision à propos de certains

 17   témoins quant à leur comparution, est-ce que la déclaration de ces témoins

 18   demeure toutefois ? Est-ce qu'elle va être lue pour être versée au

 19   dossier ?

 20   M. Nice (interprétation). - C'est effectivement ce que nous

 21   disions, soit qu'on la lise pour être versée au dossier, soit qu'elle

 22   devienne moyen de preuve, d'une façon ou d'une autre.

 23   M. Robinson (interprétation). - Donc on peut se fier à ces

 24   éléments pour déterminer la culpabilité ?

 25   M. Nice (interprétation). - Tout à fait.


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  1   M. Stein (interprétation). – Et, pour moi, c'était là que le bât

  2   blessait.

  3   M. Nice (interprétation). - Eh bien, je crois que là, j'ai pu

  4   franchir les abîmes interculturels et que j'ai pu me faire comprendre.

  5   M. le Président (interprétation). - Est-ce que vous pourriez

  6   terminer ?

  7   M. Nice (interprétation). - J'en ai pratiquement terminé ; nous

  8   avions quelques questions précises du juge Robinson à propos du pacte. Je

  9   voulais simplement vérifier si c'était utile et si vous aviez besoin des

 10   explications de Me Dixon.

 11   Je crois en avoir terminé, mais je vais consulter mes notes pour

 12   m'en assurer.

 13   (Me Nice consulte ses notes.)

 14   Oui, je ne sais pas si vous avez à l'esprit les différentes

 15   formules de déclaration possibles. J'en ai préparé un certain nombre, un

 16   échantillon, si cela vous intéresse, parce que je crois que le titre de la

 17   déclaration qui a été recueillie auprès de témoins venant de camps de

 18   réfugiés, par exemple, est un exemple typique.

 19   Et puis, certains disent qu'effectivement, leur déclaration n'a

 20   pas été recueillie sous la contrainte, etc., "que cette déclaration m'a

 21   été lue et que je la reconnais, etc.." Il y a donc celles qui portent les

 22   titres "Déclaration au Tribunal pénal international pour l'ex-

 23   Yougoslavie".

 24   Et puis, il y a une troisième catégorie de déclarations de

 25   témoin qui n'est pas incluse dans ce dossier, des déclarations, par


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  1   exemple, qui ont été recueillies au Tribunal de Zenica. On y indique les

  2   différents articles aux titres desquels la déclaration a été recueillie.

  3   Le témoin dit alors, dans cette déclaration, qu'il sait qu'il peut

  4   encourir certaines peines de nature pénale si jamais on le convainc de

  5   faux témoignage, etc. etc.

  6   Par conséquent, il y a de nombreuses garanties ou de nombreux

  7   avertissements vis-à-vis de la qualité de ce témoignage. Mais il faut

  8   souligner que le langage très utilisé par la défense quant à la mauvaise

  9   foi, dans le cadre du rassemblement d'éléments de preuve, a été

 10   abandonné : il est tout à fait absurde que les déclarations de témoins

 11   seront recueillies dans un esprit de mauvaise foi ou dans un esprit

 12   trompeur ; au moins ces allégations ont disparu.

 13   Si vous le souhaitez, je peux faire des copies de ces

 14   déclarations qui doivent être considérées parallèlement aux déclarations

 15   du TPIY.

 16   (Les déclarations sont remises à l'huissier.)

 17   (La Greffière les remet aux juges.)

 18   M. Robinson (interprétation). – Maître Nice, si la Chambre se

 19   voit présenter ce genre de règles, pourquoi ne pas trouver un point-

 20   limite, à savoir que les témoins que la Chambre a identifiés, ou bien ses

 21   déclarants, pourraient être identifiés par la Chambre, n'est-ce pas ?

 22   M. Nice (interprétation). - Oui, effectivement, c'est une

 23   possibilité. Mais je pense que ceci redonnerait le pouvoir de contrôler

 24   cette procédure à la défense, parce que si la défense refuse de se mettre

 25   d'accord sur quoi que ce soit, si la défense n'est pas prête à admettre


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  1   quoi que ce soit, parce qu'elle n'est pas prête à admettre les crimes

  2   principaux, eh bien, la Chambre sera dans une position difficile : elle

  3   devra soit citer un très grand nombre de témoins parce qu'en fait, un très

  4   grand nombre de témoins sera nécessaire ou serait nécessaire afin de

  5   prouver tous les crimes importants, ou bien la Chambre devrait limiter de

  6   façon arbitraire certaines des allégations de crime.

  7   C'est un acte d'accusation qui est de grande envergure, car les

  8   activités des personnes en question étaient également de grande envergure.

  9   J'espère que vous ne me trouverez pas impertinent, mais je

 10   voudrais répondre à une observation du Juge . Il a dit, je crois : "Mais

 11   c'est un peu fort de prendre simplement deux de vos témoins ? C'est peut-

 12   être une démarche un petit peu exagérée". Et la réponse est que parfois,

 13   c'est possible, lorsque les témoins ont eu à faire avec le territoire en

 14   question.

 15   C'est pourquoi j'ai dit, dès le début, que notre préoccupation

 16   est que vous devriez avoir accès aux informations les plus complètes afin

 17   de parvenir à la juste conclusion. C'est une façon de résoudre la façon

 18   dont vous pouvez avoir accès à toutes ces informations.

 19   M. Robinson (interprétation). – Mais c'est une question

 20   extrêmement complexe et, pour moi, la difficulté est que je me place dans

 21   la position suivante : c'est au Procureur de gérer son affaire mais, dans

 22   ce domaine, bien sûr, dans cette instance, ceci doit être considéré à la

 23   lumière d'une décision de la Chambre afin d'assurer la plus efficace

 24   administration de la justice possible. Mais c'est théoriquement le

 25   Procureur qui connaît le mieux les arguments qu'il entend présenter.


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  1   M. Nice (interprétation). - Mais je suis tout à fait d'accord.

  2   Je pars de la même position. Vous vous souviendrez de la façon dont j'ai

  3   expliqué quel était notre projet, comme je l'ai fait tout avant, vis-à-vis

  4   des accusés ; j'ai dit : "Je citerai quelques témoins par localité, parce

  5   que, par le biais de votre contre-interrogatoire, vous limiterez les

  6   questions et ceci me permettra de limiter le nombre de témoins à citer.

  7   C'était la démarche de la correspondance entre les parties.

  8   Et ce n'est que, parce que la démarche des admissions, des

  9   accords n'a pas porté ses fruits, que nous nous sommes retrouvés dans

 10   cette position. Je suis tout à fait heureux de revenir à la solution

 11   visant à citer de nombreux témoins, mais je ne peux pas garantir la date

 12   de la fin de la présentation de nos arguments dans ce cas-là.

 13   M. le Président (interprétation). – Merci, Maître Nice.

 14   Maître Stein, nous vous avons déjà entendu une fois.

 15   M. Stein (interprétation). – ... (Hors micro.)

 16   M. le Président (interprétation). - Il nous faudra du temps pour

 17   étudier ces questions, mais nous allons les étudier. Et nous rendrons

 18   notre décision en temps voulu.

 19               L'audience est levée à 16 heures 30.

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