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1 Le vendredi 20 février 2004
2 [Audience publique]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 14 heures 19.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière, veuillez annoncer
6 l'affaire.
7 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Affaire numéro IT-00-39-T, le Procureur
8 contre Momcilo Krajisnik.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Madame la Greffière.
10 Bonjour. Nous sommes aujourd'hui à notre dernière séance de la semaine.
11 L'Accusation, est-elle prête à poursuivre l'interrogatoire de M. Treanor ?
12 M. TIEGER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] A ce moment-là, je vous prie de faire
14 entrer M. Treanor.
15 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Treanor.
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cela va sans dire, je vous rappelle
19 quand même vous êtes tenu de respecter la déclaration solennelle que vous
20 avez faite au début de votre témoignage.
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Je garde cela à l'esprit.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
23 Allez-y, Monsieur Tieger.
24 M. TIEGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
25 LE TÉMOIN : PATRICK TREANOR [Reprise]
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1 [Le témoin répond par l'interprète]
2 Interrogatoire principal par M. Tieger : [Suite]
3 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Treanor.
4 R. Bonjour.
5 Q. Nous avons terminé hier avec l'explication de la création du SDS en
6 1990. Je propose de nous concentrer à présent sur le discours de Radovan
7 Karadzic lors de l'assemblée constitutive qui apparaîtra à l'écran. Ceci
8 figure dans le classeur 1, à l'intercalaire 1.
9 Je vois, Monsieur Treanor, que certaines parties de ce discours ont été
10 surlignées. J'imagine que ce sont ces parties auxquelles vous voulez
11 attirer notre attention.
12 R. Oui. Nous avons là une copie d'un discours par lequel l'assemblée
13 constitutive du SDS a été ouverte. Dans ce discours, il annonce les
14 objectifs du parti et les raisons pour lesquelles le parti a été créé. J'ai
15 surligné certaines parties afin que la Cour puisse avoir une idée de quoi
16 il est question. Dans le premier paragraphe, il fait référence à des
17 illusions, illusions du peuple serbe, de la notion serbe en tant que
18 nation, petite, faible, insignifiante. Ceci a encouragé nos ennemis à
19 terminer la fragmentation et le démantèlement de la nation. Nous avons
20 continué ce qui s'est poursuivi en temps de paix. Le génocide qui a été
21 perpétré par nos ennemis, avait pour but de détruire notre identité
22 nationale et culturelle. C'est le sentiment qui se trouvait à l'origine de
23 la création du parti.
24 Ensuite, un autre passage sur lequel j'aimerais attirer votre attention :
25 "Plusieurs centaines de milliers de Serbes ont quitté la Bosnie-Herzégovine
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1 pendant cette période. Il n'y avait plus de nouvelles générations.
2 L'organisation territoriale a fissuré les entités qui appartenaient
3 naturellement aux Serbes en Bosnie-Herzégovine et à la nation serbe, dont
4 la position était désormais inférieure et économiquement, démographiquement
5 et politiquement parlant."
6 Ce sont deux soucis qu'il tient à souligner. La situation démographique du
7 peuple serbe de Bosnie-Herzégovine et la question de la division, du
8 partage territorial de la Bosnie-Herzégovine. Le Dr Karadzic et d'autres
9 membres du SDS, ont ressenti que l'organisation territoriale de la
10 république, qui était basée sur la division du territoire de la république
11 en unités administratives qui étaient les municipalités, que tout cela
12 était fait délibérément contre les Serbes dans la plupart des municipalités
13 où normalement ils auraient dû dominer.
14 M. TIEGER : [interprétation] Il s'agit de la deuxième page de la version
15 anglaise.
16 R. Nous avons les objectifs du parti. "L'objectif principal, est l'égalité
17 inconditionnelle au niveau civil, national, culturel, religieux et
18 économique des Serbes de Bosnie-Herzégovine." Ensuite le paragraphe plus
19 loin, j'ai également surligné un passage où il est question d'objectifs du
20 parti : "L'un des objectifs étant la Yougoslavie fédérale et l'unité
21 fédérale de la Bosnie-Herzégovine." Ceci semble être un des points les plus
22 importants du programme du parti. Ceci est figuré au centre de nombreuses
23 activités dans les mois à venir. Je souhaiterais vous rappeler que le SDA,
24 le parti des Musulmans de Bosnie, dans son programme qui avait été adopté à
25 l'époque, s'était exprimé également en faveur du maintien de la Yougoslavie
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1 dans les frontières des républiques qui avaient été établies au sein de la
2 Yougoslavie et contre le partage du territoire de la Bosnie-Herzégovine.
3 Le HDZ, le Parti démocratique croate, dans son programme du mois d'août
4 1990, évoquait le droit du peuple croate à l'autodétermination, y compris
5 la sécession de la Bosnie-Herzégovine. Dans leur programme, il n'était même
6 pas question de la Yougoslavie. Le HDZ ne s'est pas exprimé en faveur du
7 maintien de la Yougoslavie, alors que tout le SDA envisageait l'avenir de
8 la BH dans le cadre de la Yougoslavie.
9 Je pense que nous avons terminé avec ce document. A présent, nous pouvons
10 aborder le programme du parti en tant que tel, ou on pourra voir de
11 nombreux points qui ont été évoqués dans le discours, et qui font partie du
12 programme officiel.
13 M. TIEGER : [interprétation] Il s'agit de l'intercalaire 2 dans le classeur
14 numéro 1.
15 R. Numéro 5 : Egalité en tant que base de vie commune, l'égalité était un
16 point très important, un terme que les dirigeants du SDS utilisaient
17 souvent. Il était question de l'égalité du peuple serbe et des autres
18 peuples au sein de la Bosnie-Herzégovine. Ensuite au point 6, on voit une
19 référence à la Yougoslavie, encore la Yougoslavie démocratique, structurée
20 comme un état moderne fédéral. Le terme "fédéral" est très important pour
21 les dirigeants des Serbes de Bosnie, puisqu'on envisageait éventuellement
22 une Yougoslavie confédérale, alors que les Serbes étaient en faveur de
23 l'état fédéral.
24 Ensuite, on voit de nouveau qu'il est fait mention de la Bosnie-Herzégovine
25 en tant que république égale dans un état fédéral. Ce sont les points
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1 principaux que je souhaitais souligner.
2 A présent, je souhaiterais qu'on parle du statut du parti.
3 M. TIEGER : [interprétation] Intercalaire 4.
4 R. Ce statut était adopté en juillet 1990. Je souhaiterais évoquer
5 quelques points d'ordre général. A la page 3 de l'original, on voit
6 l'Article 9. Je souhaiterais attirer votre attention là-dessus. Il est
7 question des droits et des obligations des membres du parti, y compris
8 notamment : "D'obéir aux règlements du parti et soutenir la réalisation des
9 objectifs et l'orientation du programme, ainsi que la mise en application
10 et le respect des décisions des organes du parti." La discipline était
11 quelque chose qui était nécessaire et qu'il fallait appliquer.
12 A présent, je vais parler des organes centraux du parti, qui ont été
13 établis en vertu de ce statut. Nous avons là, l'assemblée du parti, le
14 président, le comité central, le conseil exécutif. Les deux derniers
15 organes ne sont pas aussi importants. Je souhaiterais attirer l'attention
16 des Juges de cette Chambre, sur le fait que le statut a été modifié en
17 juillet 1991, lors de la deuxième assemblée du parti. A présent, nous
18 allons examiner de près les devoirs et les responsabilités des organes
19 différents du parti sur la base de ce statut, puisque c'était ce statut-là
20 qui était en vigueur pendant la période qui nous intéresse.
21 Nous avons une proposition nous n'avons pas la copie finale de ce document.
22 D'après les notes de la deuxième assemblée du SDS, des comptes rendus de la
23 session que nous avons à notre disposition, il s'agissait d'une proposition
24 de statut qui a été de fait adoptée, avec des modifications mineures. C'est
25 ce document qui servira de base pour notre discussion. Je souhaiterais
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1 également dire que pendant cette année qui s'est écoulée depuis la première
2 jusqu'à la deuxième assemblée du parti, nous n'avons pas beaucoup de
3 documents émanant du SDS, qui nous indiqueraient quelles sont les
4 opérations qui ont eu lieu au niveau interne. Ce n'est qu'après la deuxième
5 assemblée que le volume des documents produits par le parti devient
6 important. La deuxième assemblée, a dans un certain sens, marqué la
7 renaissance du point de vue organisationnel du parti. Un nouveau comité
8 central, un nouveau conseilleur exécutif a été élu. C'est à ce moment-là
9 que cela commence à fonctionner.
10 Nous avons de nombreuses dispositions qui sont communes aux deux statuts. A
11 la page 5, Article 19. Il est question de la structure hiérarchique du
12 parti. Les formes de l'assemblée du SDS sont évoquées du point de vue
13 organisationnel, au niveau local, municipal de la ville et au niveau
14 républicain.
15 Ce sont des niveaux variés de gouvernement en Bosnie-Herzégovine. Le niveau
16 local veut dire qu'on évoque ici les communautés locales, les
17 municipalités, les villes, la ville de Sarajevo, la seule ville en Bosnie-
18 Herzégovine du point de vue de son statut administratif, et la république.
19 La différence entre ce statut et le statut d'origine de 1990, réside dans
20 une référence aux conseils régionaux du parti. Ce statut élimine les
21 conseils régionaux du parti, même si certains d'entre eux continuent à
22 exister, le Dr Karadzic fera référence à cela. J'en ai terminé avec la
23 structure territoriale.
24 A présent, je pense que nous pourrons nous concentrer sur l'Article 30.
25 Q. Monsieur Treanor, l'Article 30, fait-il état des règlements du SDS ?
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1 R. Oui. L'Article 30 définit l'assemblée en tant qu'organe suprême du SDS,
2 et il énumère ses responsabilités.
3 M. TIEGER : [interprétation] Ceci figure à la page 11, intercalaire 5.
4 R. A présent, nous passons à l'Article 31. On y voit une longue liste de
5 devoirs et de responsabilités de l'assemblée, l'adoption et les amendements
6 au programme, l'adoption du règlement, élection du président du SDS, des
7 membres du comité central, et cetera.
8 Ensuite, l'Article 32 pourrait être intéressant aussi. Il y est question du
9 président du parti. L'article définit le président du SDS comme étant le
10 président du comité central également, et il limite son mandat à quatre
11 ans.
12 A présent, les Articles 32 et 33. Article 33 contient une liste de devoirs
13 qui incombent au président du parti. Notamment, il doit représenter le
14 parti, assurer l'application du programme, il doit convoquer l'assemblée,
15 convoquer les sessions du comité central, coordonner les activités des
16 organes du parti, prendre des décisions politiques et autres au nom du SDS,
17 à moins que cela ne relève de la compétence d'autres organes, assurer
18 l'application des décisions du parti, et cetera.
19 A présent, le comité central. L'Article 35 définit le comité central comme
20 étant l'organe suprême du parti entre les sessions de l'assemblée du parti.
21 Comme l'assemblée du parti se réunit une fois par an, le comité central, en
22 vertu du statut, est l'organe suprême
23 du parti.
24 Article 36 précise que le comité central sera composé de 45 membres. Ceci
25 est un changement par rapport au statut de 1990, où il est question de 52
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1 membres. Le comité central sera élu par l'assemblée et sera constitué des
2 députés, en prenant en considération la présentation territoriale. Ensuite
3 l'Article 37, où figure une longue liste de devoirs du comité central, qui
4 entre autres devra élire le président et les deux tiers des membres du
5 conseil exécutif du parti, à préparer des décisions à adopter par
6 l'assemblée, de décider de l'organisation territoriale du parti, de
7 l'application des décisions de l'assemblée, doit examiner et adopter les
8 rapports du conseil exécutif, et cetera.
9 A présent, le conseil exécutif, c'est le dernier des organes du parti dont
10 nous allons parler ici. L'Article 39, c'est en page 11 du statut de conseil
11 exécutif est décrit comme un organe réunissant 15 membres, certains sont
12 élus au sein du comité central, d'autres sont nommés par le président du
13 parti, et bien sûr, le comité central a son propre président.
14 L'Article 41, que nous avons sauté, je vais quand même m'y attarder pour
15 conclure cette présentation. Il s'agit d'une liste des devoirs et
16 compétences du comité exécutif. Le comité exécutif est plutôt une instance
17 de gestion et non une instance décisionnelle politique. Cela est plutôt une
18 tâche dévolue au comité central. Le comité exécutif doit préparer les
19 documents nécessaires au bon déroulement des travaux du comité central. Il
20 adopte son propre règlement, nomme les commissions, il adopte les
21 commissions, il nomme les membres des dites commissions et des autres
22 instances, et cetera. Il contrôle également les biens du SDS, il les gère.
23 Q. Monsieur Treanor, avant d'en terminer avec ces articles, j'aimerais
24 très brièvement vous demander de prendre l'Article 49 et de nous dire en
25 quoi il peut intéresser cette Chambre.
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1 R. Oui. L'Article 49 parle de l'établissement de conseils, conseils vus
2 comme des organes consultatifs attachés au SDS. Il ne s'agit pas
3 d'instances du parti à proprement parler. Il s'agit de groupes, de
4 personnes, que les dirigeants du parti peuvent consulter. A plusieurs
5 moments, ont été créés des conseils, il y a un conseil politique, un
6 conseil économique, et parfois, à un moment on a également parlé du
7 conseil. Il s'agit d'instances qui sont composées de Serbes de Bosnie
8 éminents qui n'étaient pas nécessairement membres du SDS, mais dont les
9 compétences étaient mises à la disposition du SDS, et que les dirigeants du
10 SDS pouvaient exploiter.
11 Q. Avant d'avancer dans la chronologie, Monsieur Treanor, j'aimerais que
12 vous nous disiez de quelles instances faisait partie M. Krajisnik.
13 R. En 1991, lors de l'assemblée qui s'est tenue au mois de juillet, il a
14 été élu au comité central. Lors de ce scrutin, qui s'est tenu dans le
15 contexte de l'assemblée, c'est lui qui a obtenu le plus grand nombre de
16 voix. Il a également ensuite été nommé à la commission du personnel du SDS.
17 Il s'agit d'une instance mise en place par le comité exécutif, une instance
18 dont le rôle consistait à étudier les candidatures du SDS, un des postes
19 gouvernementaux en Bosnie-Herzégovine.
20 Q. Monsieur Treanor, vous avez parlé du programme du SDS. J'aimerais
21 évoquer, en votre compagnie, un entretien avec M. Krajisnik, un entretien
22 qui s'est tenu en juillet 1990, et au cours duquel il a détaillé certaines
23 des opinions et certains des objectifs du SDS.
24 R. Oui. C'est une interview qui a été publiée dans le magazine Knin de
25 Belgrade, le 20 juillet 1990. Cette interview a été conduite par un
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1 journaliste, employé par ce magazine, Milorad Vucelic, puis ensuite a été
2 nommé à la tête de la radio de télédiffusion serbe. Je pense que ce
3 monsieur est aujourd'hui encore très actif dans le parti socialiste.
4 M. TIEGER : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur Treanor,
5 pour que l'on comprenne bien, j'aimerais que l'on se penche sur
6 l'intercalaire 3.
7 Q. Pourriez-vous nous parler du premier passage surligné, Monsieur
8 Treanor, en page 6 de cette interview ?
9 R. Oui, dans cette interview, le Dr Karadzic a passé en revue une série de
10 choses qu'il avait évoquées dans son discours lors de la session inaugurale
11 du SDS. Il s'est fendu de quelques remarques particulièrement
12 intéressantes, en passant. Par exemple, il dit ici que : "Le parti a adopté
13 la vue ou l'opinion selon laquelle la nation serbe en Bosnie-Herzégovine
14 doit promouvoir en ce qui concerne toutes les questions qui sont ensuite
15 évoquées. Il parle bel et bien de la Bosnie-Herzégovine dans la
16 Yougoslavie. Donc, le parti s'engage en faveur d'une Yougoslavie fédérale
17 et au sein de cette Yougoslavie fédérale, il y a une Bosnie-Herzégovine qui
18 est placée sur un pied d'égalité. Le statut d'égalité, un statut égalitaire
19 est garanti à tous les citoyens, à toutes les nations," il répète l'un des
20 points saillants du programme du SDS.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stewart.
22 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, j'aimerais faire une
23 petite suggestion pratique. J'espère que cela ne causera pas de problème
24 particulier au témoin. Par exemple, nous avons ce passage surligné, alors
25 page 6, a-t-on, il serait extrêmement utile de bien préciser les choses. Il
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1 faudrait nous dire de quel passage il s'agit. On pourrait peut-être le lire
2 très rapidement, pas de problème pour le retrouver en l'espèce. C'est en
3 page 6 mais simplement nous dire cela, cela risque de nous plonger dans la
4 plus grande confusion. Ici, un paragraphe numéroté pourrait peut-être nous
5 aider.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Tieger et Monsieur Treanor,
7 pourriez-vous, s'il vous plaît, faire droit à la requête de Maître Stewart
8 parce que, je pense qu'effectivement, cela va nous faire gagner du temps à
9 la longue. Peut-être pas tout de suite, mais à long terme, oui.
10 M. TIEGER : [interprétation] Certainement, Monsieur le Président.
11 R. J'en arrive au paragraphe suivant, numéro 38 dans la traduction. Il est
12 dit que : "Les événements demandent une transformation du pays, que la
13 nation serbe doit trouver sa place en Bosnie-Herzégovine grâce au SDS. Il
14 faut préparer une réaction démocratique à la nouvelle donne, qu'en tout
15 état de cause, les Serbes n'accepterons pas de vivre dans un nouvel état
16 indépendant de Croatie, ni dans quelque nouvel état que ce fut. Un état
17 dans lequel leur patrie, la Serbie, serait exclue. On dit que cela doit
18 être clair, qu'il ne doit pas y avoir de malentendus à ce sujet. Ce n'est
19 pas parce que cela répondra à la volonté du parti mais tout simplement
20 parce que la nation serbe l'exige."
21 J'ai fait référence avant parce que j'ai parlé des propositions selon
22 lesquelles la Yougoslavie devrait se transformer en une fédération, en une
23 confédération, ne plus être une fédération mais une confédération. C'est
24 une idée à laquelle s'opposaient les dirigeants serbes en Bosnie-
25 Herzégovine et même en Serbie. Il prend position contre cette idée. Il fait
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1 référence à un état indépendant de Croatie. Là, en fait, il parle de la
2 Croatie qui avait été créée sous l'égide de l'Allemagne nazie et de
3 l'Italie fasciste au cours de la Deuxième Guerre mondiale. Un état qui
4 s'était lancé dans une campagne de génocide contre les Serbes. Cet état ne
5 comprenait pas la Bosnie-Herzégovine. Ici, le Dr Karadzic relaye les
6 craintes que nourrissaient de nombreux Serbes. Ils avaient peur de vivre
7 hors d'un état dans lequel les Serbes seraient exclus.
8 Q. Monsieur Treanor, vous avez dit, lorsque vous avez fait la distinction
9 entre les différents programmes du parti SDA et du parti HDZ, concernant
10 les perspectives relatives à la Yougoslavie, allait-elle rester un état ou
11 éclater. Est-ce que dans cette interview, le Dr Karadzic parle de cela,
12 parle de la possibilité de demeurer en Bosnie-Herzégovine aux côtés des
13 Musulmans et des Croates ?
14 R. Oui. Je pense que cette interview est assez intéressante à cet égard.
15 Le journaliste semble quelque peu surpris, par exemple, d'avoir entendu
16 que, Alija Izetbegovic, qui était à la tête du SDA, était présent et même
17 s'était exprimé lors de la session inaugurale de juillet 1990. Dans cette
18 interview, le Dr Karadzic a bien du mal à souligner l'harmonie supposée
19 entre le SDS et le SDA, entre les Serbes et les Musulmans de Bosnie-
20 Herzégovine. C'est ce qui est indiqué dans le passage précédent. On peut
21 noter la réserve de Karadzic. Il nourrit une plus grande réserve encore
22 vis-à-vis des Croates. Si nous pouvions agrandir le passage qui est
23 surligné ici, le numéro 58, nous voyons que ce qu'il dit : "C'est qu'en
24 Serbie, la presse parle souvent d'une menace fondamentaliste qui pèserait
25 sur la Bosnie et le Kosovo. Il semble qu'il ait fait cette déclaration sous
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1 l'influence de certains cercles. Il semble qu'il réponde aussi à certains
2 cercles en Europe occidentale qui se fixaient sur la Bosnie-Herzégovine
3 comme d'un bastion européen du fondamentalisme islamique."
4 Le Dr Karadzic nie cela en Bosnie et dans l'interview, souligne l'harmonie
5 qui existait entre les Musulmans et les Serbes de Bosnie.
6 Q. Est-ce que l'on retrouve cette même idée en page 9 de l'entretien ?
7 R. Oui. Je pense que si nous prenons le paragraphe 63, ici, il ajoute que
8 : "Le fondamentalisme islamique est importé en Europe sous une autre forme,
9 des peuples d'autres races parlant d'autres langues et l'Europe est prise
10 de panique. Dans notre pays, nous avons des nations slaves et musulmanes.
11 Des personnes qui partagent des liens de sang avec nous et la même langue.
12 La grande majorité d'entre eux sont favorables à la qualité de vie
13 européenne. Ils veulent, néanmoins, préserver leur foi islamique. Il n'y a
14 pas de place pour la panique ici, ni entre les Serbes, ni parmi les
15 Musulmans."
16 M. STEWART : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, avant que
17 nous n'en restions là sur cette page, et bien sûr, j'entendrai les
18 assurances que vous voudrez bien maintenir. Nous pourrons toujours demander
19 des éclaircissements, notamment, sur la valeur, le statut des notes
20 manuscrites et les autres remarques qui ont été apposées sur le document.
21 Ici, on trouve certaines choses.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. J'allais justement poser la
23 question parce que je vois qu'au paragraphe 58, nous trouvons quelques
24 notes. Je n'arrive pas à tout lire mais cela commence par "conspiration,
25 complot".
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1 M. STEWART : [interprétation] Oui, "conspiration --"
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Là se pose la question de savoir s'il y
3 a bien une conspiration. J'aimerais bien savoir pourquoi nous avons une
4 version annotée de ce document.
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Je peux simplement dire que ces notes ne sont
6 pas de mon cru et que je ne les connais pas. Enfin, je ne pense pas. Je
7 pense avoir dit hier, si je ne l'ai pas fait, j'aurais dû le faire, que
8 moi-même et mon équipe avons travaillé avec les documents originaux en
9 B/C/S. A l'occasion, nous avons pu prendre connaissance des traductions.
10 Parfois, elles ont été portées à notre attention parce que les gens
11 pensaient que certaines choses devaient faire l'objet d'éclaircissements.
12 Je pense que la traduction elle-même a été faite par le FBIS, c'est-à-dire,
13 le service d'information et diffusion fédérale. Il s'agit d'une agence
14 chargée de surveiller l'activité ou de contrôler les activités des médias.
15 Les notes en marge de pages, je ne sais pas par qui elles ont été
16 apportées.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Je pense que c'est l'original. Je
18 ne l'ai pas sous les yeux. L'original ne contient pas d'annotations
19 similaires.
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. La version originale -- et j'ai la copie
21 ERN ici -- est une simple photocopie des pages d'un magazine et ne reprend
22 pas ces notes.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, effectivement.
24 M. TIEGER : [interprétation] Je pourrais peut-être apporter une
25 clarification supplémentaire.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous en prie.
2 M. TIEGER : [interprétation] Les annotations ne visent pas, elles n'ont pas
3 été apportées par le témoin, ni par quelque personne que ce soit au bureau
4 du Procureur. Si je ne m'abuse, c'est le document qui nous a été transmis,
5 mais on pourrait toujours les enlever, bon avec cet éclaircissement à
6 l'esprit, la cour comprendra qu'il ne s'agit pas d'apporter ou d'annoter le
7 document.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'accord. Si ceci agrée la Défense, est-
9 ce que vous préférez avoir une traduction épurée ou nettoyée ?
10 M. STEWART : [interprétation] En principe c'est quand même embêtant quand
11 on n'arrive pas à lire quelque chose, cela peut être une bonne chose. J'ai
12 de la difficulté à lire les annotations. Oui, nous voyons bien ce qui est
13 écrit mais je ne vais pas en faire tout un fromage. Si cela devient un
14 problème. Si je vois beaucoup d'autres notes, nous pourrons toujours
15 essayer de trouver une solution. Merci pour les éclaircissements.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et bien, continuez, Monsieur Tieger.
17 M. TIEGER : [interprétation]
18 Q. Monsieur Treanor, en juillet, lors de cet entretien de juillet 1990, le
19 Dr Karadzic a dit que la décision des Serbes de Bosnie de ne pas vivre dans
20 un état dans lequel leur patrie, ou duquel leur patrie serait exclue, lui
21 était claire. Est-ce que des démarches concrètes ont été prises pour faire
22 passer le message auprès des autres en Bosnie-Herzégovine, peut-être plus
23 tard dans l'année ?
24 R. Oui, effectivement. Et ceci est illustré dans le document suivant. En
25 examinant ce document, j'aimerais attirer votre attention sur le fait que
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1 tout à la fin de l'entretien, on ne prend ici que la dernière phrase, le Dr
2 Karadzic parle du scrutin. Il dit que sur certaines questions il ne peut y
3 avoir de défaites lors d'un scrutin. On ne peut pas accepter cela. Je ne
4 suis pas sûr, je ne sais pas très bien comment cela se traduit. Il y a une
5 expression d'une crainte que nourrissait Karadzic et d'autres dirigeants du
6 SDS. Je pense que c'était une crainte que partageaient également beaucoup
7 de Serbes. Ils étaient le deuxième plus grand groupe de population en
8 Bosnie-Herzégovine. Ils n'étaient pas en majorité. Il était tout à fait
9 imaginable par exemple que les représentants des deux ou trois grandes
10 nations joignaient leurs forces pour les battre lors d'un scrutin, par
11 exemple à l'assemblée au nom d'une autre enceinte. C'est quelque chose
12 auquel ils étaient farouchement déterminés à s'opposer. Et c'est la raison
13 pour laquelle, ils se voyaient comme l'une des nations constitutives de
14 Bosnie-Herzégovine tel que cela est défini dans la constitution. Ils
15 estimaient qu'ils avaient le droit d'avoir voix au chapitre dans toutes les
16 décisions qui les touchaient en tant que nation. Ils avaient un droit de
17 veto.
18 Document suivant, il s'agit ici de l'une des tentatives visant à résoudre
19 cette question, question de procédures peut-être,
20 question qui touchait leur position fondamentale à savoir le fait que les
21 Serbes restent en Bosnie-Herzégovine au sein d'un même état en compagnie
22 d'autres Serbes.
23 M. TIEGER : [interprétation] Document suivant, international 9.
24 R. Il s'agit d'une lettre signée par le Dr Karadzic. A l'en tête on peut
25 voir, comité central du SDS. Cette lettre est adressée à l'assemblée de la
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1 république socialiste de Bosnie-Herzégovine. Et je souhaite rappeler aux
2 Juges que cette lettre est datée d'avant les élections. Il s'agit donc de
3 l'assemblée communiste et/ou à prédominance communiste qui était sur le
4 point d'être dissoute. Cette lettre fait référence aux amendements 60 et
5 70, amendements apportés à la constitution. J'ai parlé de l'Article 60,
6 hier. Ici l'Article 60 est mentionnée même si on -- il est mal caractérisé,
7 on parle de l'Article 70, c'est une erreur. Il est indiqué que la
8 république socialiste de Bosnie-Herzégovine est un état démocratique et
9 souverain dans lequel tous les citoyens sont égaux. Les peuples de Bosnie-
10 Herzégovine, les Musulmans, Serbes et Croates et les membres des autres
11 groupes ethniques et autres nationalités sont tous égaux au sein de cet
12 état.
13 Il est indiqué dans la traduction de cette lettre que les garanties et les
14 dispositions de cet article n'ont pas été correctement pris en compte par
15 cet amendement-là. L'amendement 70 avait modifié la composition de
16 l'assemblée de la république et avait précisé dans son paragraphe 10 qu'au
17 sein de l'assemblée, une commission serait mise en place afin de traiter de
18 l'égalité des peuples. Dans cette lettre, il est suggéré qu'un autre
19 amendement doit être apporté à la constitution.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Monsieur Stewart.
21 M. STEWART : [interprétation] Il s'agit d'une question pratique. En
22 examinant ce document dans la version en anglais, il est difficile de le
23 manipuler. On peut lire : "Amendement", et on ne peut pas lire le numéro.
24 Cela pose des problèmes, lorsque l'on examine la version en B/C/S et je ne
25 comprends pas le B/C/S, on peut lire ces numéros. En fait l'amendement 70
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1 ne correspond pas à l'amendement 60 et ainsi de suite. Ceci pose des
2 problèmes mais il serait un peu difficile de devoir se référer sans cesse à
3 la version en B/C/S pour comprendre la version en anglais. Est-ce que l'on
4 pourrait remédier à ce problème car il est tout à fait inutile que la
5 Chambre et la Défense soient confrontés à un tel problème car on fait
6 référence à des documents illisibles et il faut se référer sans cesse au
7 document en B/C/S.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stewart, dans l'affaire ou le
9 procès que j'ai présidé avant celui-ci, la Défense a adopté une position
10 différente par rapport à la lisibilité des documents. Les services de
11 traduction sont parfois critiqués pour interpréter des documents qui selon
12 d'autres personnes sont illisibles, ils sont -- ils pèchent par excès de
13 prudence maintenant. Je suis d'accord avec vous, il s'agit sans doute du
14 numéro 70, mais d'autres personnes plus imaginatives pourraient dire, non,
15 c'est en fait un 78 et non pas 70, et le numéro 60 pourrait se lire comme
16 80. Nous nous trouvons dans une position et nous pensons que ce texte est
17 suffisamment lisible si on consulte le texte original. Voilà comment nous
18 devrions résoudre le problème. Si la traduction a été réalisée à partir de
19 cette copie-ci, je dirais que ce document est lisible. Si les problèmes --
20 des problèmes de ce genre se posent fréquemment, nous demanderons à
21 l'Accusation de revoir les traductions existantes réalisées à partir de
22 documents illisibles. Je suis d'accord avec vous dans une certaine mesure.
23 M. STEWART : [interprétation] Je suis désolé que les services de traduction
24 étaient si intimidés par cette équipe de la Défense virulente que vous avez
25 mentionné plus tôt. Nous sommes beaucoup plus courtois. Mais je pense que
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1 nous pourrions surveiller la situation et si le problème se pose de
2 nouveau, nous verrons ce que nous pouvons faire.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je pense qu'il s'agit davantage d'une
4 exception que d'une règle.
5 M. Treanor a l'original de ce document sous les yeux et il a réussi à lire
6 facilement tous les numéros jusqu'à présent.
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
8 M. STEWART : [interprétation] Je pense que nous étions sur le point
9 d'évoquer le paragraphe 4 de ce document.
10 Le Dr Karadzic dans cette lettre propose un nouvel amendement à la
11 constitution, amendement au terme duquel l'assemblée de la république
12 établira trois conseils nationaux, un conseil serbe, un conseil musulman et
13 un conseil croate, composés de députés. Il est question également de
14 l'application de l'égalité nationale au sein de l'assemblée du peuple serbe
15 de Bosnie-Herzégovine qui sera décidé conformément à une procédure
16 distincte. Après, on précise les questions dont le conseil serait chargé,
17 que le conseil serait chargé d'examiner.
18 Dernier paragraphe de ce document. Sont considérées les modifications
19 constitutionnelles et les élections. Le peuple Serbe de Bosnie-Herzégovine
20 a deux possibilités qui s'offrent à lui pour garantir l'égalité de ses
21 citoyens. Première possibilité, elle est contenue dans la proposition que
22 nous vous avons présentée; deuxième possibilité, la déclaration, la
23 proclamation d'un conseil national serbe. Cette proposition demandée par --
24 cet amendement, proposé par M. Karadzic aurait fourni aux trois nations
25 constituantes de Bosnie-Herzégovine un droit de veto sur toutes mesures
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1 proposées devant l'assemblée, ce qui aurait été contraire à ses intérêts en
2 tant que nation. Parmi les questions évoquées dans cette liste, au
3 paragraphe 4.4, est évoquée la question des frontières et du statut
4 constitutionnelle de la Bosnie-Herzégovine, en d'autres termes, il aurait
5 été impossible en vertu de cette modification pour les députés serbes de ce
6 conseil, de faire opposition à la sécession de la Bosnie-Herzégovine de la
7 Yougoslavie. Le Dr Karadzic dit que si cette modification n'est pas
8 apportée, le peuple de Bosnie-Herzégovine prendra d'autres mesures.
9 M. TIEGER : [interprétation]
10 Q. Quelle est la date de cette lettre adressée à l'assemblée de Bosnie-
11 Herzégovine ?
12 R. Le 8 octobre 1990. Des élections étaient prévues le 18 novembre.
13 Q. Le SDS proposait de prendre des mesures visant à l'établissement d'un
14 conseil national peu de temps après ?
15 R. Oui, c'est exact. Cette lettre n'a pas reçu un accueil favorable.
16 L'assemblée était sur le point d'être dissoute et il existait une confusion
17 dans cette lettre entre l'amendement 60 et
18 l'amendement 70. Le 13 octobre, cinq jours plus tard à peine, une réunion
19 en plein air a eu lieu à Banja Luka. Elle avait pour but d'établir un
20 conseil national serbe et de nombreux hommes politiques serbes étaient
21 présents à cette réunion, des hommes politiques de Bosnie et de Croatie
22 également. Les discours entendus étaient très intéressants et l'assemblée a
23 voté en faveur de la création d'un conseil national serbe. Ce conseil a
24 rendu une décision sur ce jour-là d'ailleurs.
25 Avant d'évoquer les décisions rendues par ce conseil, je pense que nous
Page 1288
1 pouvons examiner un extrait du discours tenu par le Dr Karadzic devant
2 cette assemblée.
3 Q. La transcription de ce discours peut être trouvée à l'intercalaire 1 du
4 classeur consacré aux conversations interceptées. Avant de voir cette
5 vidéo, je rappelle aux interprètes qu'une traduction simultanée est
6 inutile.
7 Ces séquences vidéo n'ont pas reçu de cote provisoire pour le moment.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière.
9 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Cette vidéo portera la cote P66. La
10 transcription de cette séquence vidéo recevra la cote P66A à cet égard.
11 M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, la première portion de
12 cette vidéo se trouve à la page 4 de la transcription, intercalaire 1.
13 [Diffusion de cassette vidéo]
14 M. TIEGER : [interprétation] La séquence suivante se trouve à
15 l'intercalaire -- à la page 4 de la transcription.
16 [Diffusion de cassette vidéo]
17 M. TIEGER
18 Q. Monsieur Treanor, nous allons passer à la séquence de vidéo suivante.
19 R. Je pourrais peut-être formuler quelques commentaires au sujet de ces
20 deux séquences vidéo avant de passer à autre chose.
21 Q. Dans la première séquence vidéo, les références aux anciens généraux
22 qui ont été élus présidents, là où il est question de Franjo Tudjman. Dans
23 la deuxième séquence vidéo on arbore le spectre de la guerre civile, si la
24 Slovénie et la Croatie devaient obtenir leur indépendance. Dans la deuxième
25 séquence vidéo, nous voyons la position des dirigeants du SDS au sujet des
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1 limites des frontières de la république. Le SDA était en faveur du maintien
2 des frontières. Le SDS affirme ici que ces frontières sont des frontières
3 administratives, et ne peuvent pas devenir des frontières d'état divisant
4 les Serbes.
5 [Diffusion de cassette vidéo]
6 M. TIEGER : [interprétation]
7 Q. Avant de passer à l'autre clip vidéo, pouvez-vous nous faire des
8 commentaires, Monsieur Treanor ?
9 R. Nous venons de voir M. Karadzic, s'exprimer au sujet de la situation en
10 Croatie. J'en ai déjà parlé auparavant. Il a dit que si les Croates veulent
11 quitter la Yougoslavie, ils peuvent le faire, mais ils ne peuvent pas
12 emmener les Serbes de la Croatie avec eux. Ensuite, il analyse la situation
13 en Bosnie-Herzégovine sur une crainte que la prochaine étape serait
14 d'essayer d'entraîner la BH dans son intégralité, y compris les Serbes en
15 dehors de la Yougoslavie.
16 M. TIEGER : [interprétation] A présent, passons au clip suivant.
17 [Diffusion de cassette vidéo]
18 M. TIEGER : [interprétation]
19 Q. Monsieur Treanor, vous avez des commentaires à faire au sujet de ce
20 clip ?
21 R. Tout d'abord, j'aimerais dire que nous voyons M. Karadzic exprimer des
22 craintes au sujet de l'indépendance éventuelle de la Bosnie-Herzégovine. On
23 y voit une référence turque qui représente les Musulmans de Bosnie-
24 Herzégovine, qui sont perçus comme une menace. Egalement, il est fait
25 référence aux décisions de l'assemblée qui pourraient paraître légitimes,
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1 mais craignent d'être mis en minorité. La majorité de l'assemblée pourrait
2 voter en faveur de la sécession de la Bosnie-Herzégovine. Ceci nous
3 donnerait la légitimité vis-à-vis du monde extérieur aux décisions que
4 l'assemblée aurait prises.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pour ce qui est du mot turc qu'on a
6 entendu, il ne me semble pas qu'il s'agisse de paroles prononcées par M.
7 Karadzic. Il semble que cela a été prononcé par quelqu'un du public.
8 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est possible. Nous pourrons peut-être
9 visionner encore une fois cet extrait.
10 M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]
11 [Diffusion de cassette vidéo]
12 M. TIEGER : [interprétation]
13 Q. Est-ce que cela tire au clair la question du président ?
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, maintenant tout est clair, mais il
15 faudrait que vous fassiez attention à faire la distinction entre ce que dit
16 M. Karadzic et ce qui a été dit par quelqu'un qui figurait dans le public.
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Lorsqu'il a mentionné ce qui est arrivé aux
18 Serbes, avant lorsqu'ils étaient en minorité, ceci pourrait être une
19 référence à la période des Turcs ottomans en Bosnie.
20 M. STEWART : [interprétation] Cela ne semble pas tout à fait clair au
21 transcript, au compte rendu d'audience. Peut-être qu'aux fins du compte
22 rendu d'audience, le témoin pourrait confirmer la position, telle qu'elle
23 est à présent.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne me souviens pas des mots exacts,
25 mais on a mentionné les Turcs. D'après la transcription, de ce qui est dit
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1 lors de cette réunion, il paraît que c'est l'une des voix des personnes
2 présentes dans l'assemblée, qui a énoncé cela.
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, le Dr Karadzic n'a pas fait de référence
4 explicite. Il n'a pas utilisé le mot "Turcs."
5 M. TIEGER : [interprétation]
6 Q. A présent, passons à l'autre document, intercalaire 12. En tant que
7 président du conseil national, Dr Karadzic, a-t-il fait une déclaration sur
8 la position des Serbes, en Bosnie-Herzégovine ?
9 R. Oui. Nous avons une déclaration là, tout au moins je pense que nous
10 l'avons.
11 Q. Vous avez mentionné au moins une décision du conseil national serbe.
12 Vous avez dit que vous aimeriez attirer notre attention là-dessus après le
13 visionnement de la cassette.
14 R. Oui. C'était la décision portant sur la création du conseil national
15 serbe. C'est la première décision du conseil national serbe.
16 Q. Il s'agit du document qui figure à l'intercalaire 11 du classeur 1.
17 R. Le deuxième paragraphe figurant sous le titre du chapitre.
18 Le document porte la date du 13 octobre. On y lit, je cite :
19 "En vertu de la décision du conseil national serbe, le peuple de Bosnie-
20 Herzégovine ne reconnaît aucune décision ayant pour objectif le changement
21 de caractère de l'état de Bosnie-Herzégovine, qui serait prise par des
22 députés et non pas par le peuple, uniquement, une décision prise par voix
23 de référendum par le peuple serbe."
24 Le conseil national serbe annonce qu'il constituera une chambre des
25 peuples serbes. Ceci leur conférerait le droit de veto sur les décisions
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1 prises par l'assemblée, qui mettraient en danger les intérêts du peuple
2 serbe.
3 Q. La décision du 13 octobre prise par le conseil national serbe, fait
4 référence au refus de reconnaître les décisions de ce type.
5 Maintenant, passons à la déclaration sur la position du peuple serbe, à
6 l'intercalaire 12. Est-ce qu'on peut y voir une possibilité d'envisager des
7 actions au-delà de la reconnaissance en réponse à la déclaration à laquelle
8 ils se sont opposés ?
9 R. Au paragraphe 4 de cette décision, la décision du 6 novembre 1990, nous
10 voyons ce que le conseil national serbe suggère "Si on imposait
11 l'indépendance de la Bosnie-Herzégovine ou le système confédéral, le peuple
12 serbe se réserve le droit de prendre les actions selon les circonstances,
13 afin de préserver son unité, l'unité de la nation serbe dans son ensemble."
14 Ensuite : "Le conseil national serbe ne reconnaîtra pas une seule loi ou
15 décision de l'assemblée de Bosnie-Herzégovine ou des organes de l'état, qui
16 pourrait porter atteinte aux intérêts du peuple serbe en Bosnie-
17 Herzégovine. Le conseil national serbe organisera un référendum sur les
18 questions essentielles de l'entité national du peuple serbe en Bosnie-
19 Herzégovine."
20 Q. Dr Karadzic a donné une autre interview au magazine Knin. Pendant cette
21 interview que nous retrouvons à l'intercalaire 13, il parle de nouveau des
22 actions qui seraient prises au cas où les décisions mettant en péril
23 l'unité des Serbes au sein de la Yougoslavie seraient prises.
24 R. Oui. Il s'agit d'une interview qui a été publiée dans le magazine que
25 l'interview précédente. Cet entretien a été publié le
Page 1293
1 9 novembre. Le même journaliste s'est entretenu avec M. Karadzic. Il s'agit
2 en quelque sorte, des interviews qui se suivent.
3 Je vous prie de regarder le paragraphe 4. Il y a une partie surlignée, qui
4 commence par -- Dans cette partie, il est question du succès du SDS, dans
5 son entreprise de faire renaître la vie politique des Serbes en Bosnie-
6 Herzégovine. Le Dr Karadzic évoque le côté organisationnel du parti.
7 Ensuite, je souhaiterais là rappeler à la Cour que tout ceci se passe
8 quelques jours avant les élections. Il dit, je cite : "Chaque membre du
9 conseil local du SDS est en contact avec 10 à 20 foyers serbes, afin que
10 les informations des villages les plus éloignés puissent venir jusqu'au
11 comité central dans deux heures tout au plus."
12 Q. A la page 3 de la version anglaise, le Dr Karadzic, évoque t-il la
13 question de la mise en minorité et une réaction éventuelle à cela ?
14 R. Oui. Il en reparle dans le troisième paragraphe si l'on compte d'en
15 bas. La deuxième partie de ce paragraphe est surlignée. On y lit :
16 "L'assemblée de Bosnie-Herzégovine pourrait devenir le théâtre d'événements
17 dramatiques, parce que les Serbes vont être en mis en minorité par une
18 majorité de deux tiers, par exemple, lorsqu'il est question de changement
19 du caractère étatique de la Bosnie-Herzégovine. Si cela arrive, toutes les
20 conditions pour une guerre civile seraient réunies, parce que les Serbes en
21 Bosnie-Herzégovine sont unis et puissants. Tout le monde comprend qu'il n'y
22 a pas d'acte politique qui peut être accompli sans les Serbes."
23 A présent, nous pouvons passer à la page 4 de l'original.
24 M. TIEGER : [interprétation] Je pense que ce passage figure à la page 6 de
25 la traduction anglaise.
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1 R. Au deuxième paragraphe de la fin surlignée dans la traduction anglaise,
2 on voit la phrase suivante : "Les Serbes en Bosnie-Herzégovine n'auront pas
3 renoncé facilement. Leur volonté politique sera mobilisée dans toutes les
4 régions peuplées de Serbie. Le conseil national serbe programmera le
5 pouvoir du peuple serbe et entreprendra des activités afin d'assurer la
6 liberté du peuple. Ceux qui se préparent aux fraudes lors des élections
7 jouent avec le feu. Cette déclaration dans cette dernière partie est faite
8 dans le contexte des craintes qui ont été évoquées, les craintes vis-à-vis
9 des communistes qui détiennent le pouvoir en Bosnie et qui sont
10 responsables de la réalisation des élections. C'est à ce que l'on pense
11 lorsqu'on parle d'éventuelles falsifications des résultats qui priveraient
12 le SDS et d'autres partis nationaux de la part du pouvoir, de leur rôle
13 dans le pouvoir.
14 Q. Plus tard, le Dr Karadzic revient sur le sujet des Serbes qui
15 resteraient en Yougoslavie. Est-ce qu'il indique les territoires en Bosnie-
16 Herzégovine qui devraient en faire partie ?
17 R. Passons maintenant à l'autre passage qui est surligné, à la dernière
18 page de la traduction, le premier paragraphe en haut : "Les priorités
19 serbes sont la préservation de l'unité étatique, politique et spirituelle
20 du peuple serbe. La priorité serbe est le retour du peuple serbe parmi les
21 peuples heureux et l'état serbe doit redevenir, reprendre sa place parmi
22 les états heureux. La priorité serbe est de prévenir que ne serait-ce qu'un
23 village serbe reste en dehors de la Yougoslavie, qu'ils restent dans un
24 état indépendant nouveau de Croatie."
25 Il dit en gros que tout village serbe de Bosnie devrait rester en
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1 Yougoslavie.
2 A la fin, il dit : "Nous sommes en train de dire ouvertement que nous ne
3 pouvons pas, les Serbes en Bosnie-Herzégovine, se tourner vers leur état
4 mère, la Serbie. Nous n'accepterons jamais qu'il nous reste qu'une
5 frontière d'état nous sépare de la Serbie. Tous les peuples de la
6 Yougoslavie peuvent procéder à des arrangements qu'ils désirent concernant
7 leurs états mais le peuple serbe le fera aussi. Nous voulons rester dans le
8 même état que la Serbie, la Serbie toute seule ou un état complexe."
9 Q. A présent, à l'intercalaire 14 et les deux documents qui figurent aux
10 intercalaires 14 et 15, il est question également d'unités entre les Serbes
11 en Yougoslavie ?
12 R. Oui. Nous l'avons déjà vu à plusieurs reprises dans les documents
13 précédents. Les leaders sont déterminés à ce que tous les Serbes de
14 Yougoslavie restent dans un même état et le Dr Karadzic est intéressé par
15 la coopération avec les leaders politiques de Serbie, à l'extérieur de la
16 Bosnie. Nous voyons là une lettre adressée à Slobodan Milosevic à
17 l'occasion de son élection à la fonction du président de Serbie, le 9
18 décembre 1990. Le Dr Karadzic, on voit, c'est surligné ici, dit en
19 s'adressant à Milosevic : "Votre élection suscitent des attentes. La
20 majorité du peuple serbe en Bosnie-Herzégovine se réjouit de votre
21 élection, de l'élection d'un homme d'état aux grandes capacités et au sens
22 de responsabilité aussi important. Par votre victoire aux élections pendant
23 les premières élections libres, les dernières conditions ont été remplies,
24 qui vont assurer que les Serbes et la Serbie jouiront du respect qu'ils
25 méritent lors des négociations sur la Yougoslavie, sur l'avenir de la
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1 Yougoslavie. Cela également veut dire que les relations entre les Serbes de
2 Bosnie-Herzégovine, que leur mère Serbie ne seront que renforcées."
3 Là, lorsqu'il est question de responsabilités et de Serbes à l'extérieur de
4 la Serbie, en fait, il fait référence à la disposition de la nouvelle
5 constitution de Serbie, du mois de septembre 1990. Il y avait un ministère
6 au sein du gouvernement de la République de Serbie qui s'occupait des
7 questions relatives aux Serbes qui résident à l'extérieur de la Serbie.
8 Q. Maintenant le document qui figure à l'intercalaire 15, Monsieur
9 Treanor.
10 R. Il s'agit d'une lettre du Dr Karadzic adressée à Milan Babic, le
11 président du conseil national serbe de Knin en Croatie. Il était l'un des
12 leaders principaux des Serbes de Croatie. Cette lettre lui a été adressée à
13 l'occasion de la proclamation de la région autonome serbe de Krajina en
14 Croatie. Cet événement s'est produit le 19 décembre 1990. "On y voit mes
15 félicitations et il est question d'unités d'état et de la région autonome
16 de Krajina ainsi que d'autres régions avec leurs mères, la Serbie, dans le
17 cadre d'une Yougoslavie fédérale."
18 Il est question de sa solidarité avec les Serbes de Croatie, et cetera.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Tieger --
20 [La Chambre de première instance se concerte]
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vois que vous êtes en train de
22 regarder l'heure. Aucune des deux lettres dans leur traduction ne portent
23 de date. Est-ce que cela est vrai pour l'original aussi ?
24 LE TÉMOIN : [interprétation] Nous avons des signatures mais nous n'avons
25 pas de date.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] A présent, nous allons suspendre
2 l'audience et nous reprendrons dans 20 minutes.
3 --- L'audience est suspendue à 15 heures 44.
4 --- L'audience est reprise à 16 heures 07.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Tieger, veuillez poursuivre.
6 M. TIEGER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
7 Q. Monsieur Treanor, vous avez dit que le 9 novembre, l'interview à Knin a
8 lieu avec le Dr Karadzic juste avant les élections. Pourriez-vous nous dire
9 quels furent les résultats de ces élections en Bosnie-Herzégovine ?
10 R. Oui, bien sûr. Il faut d'abord parler de ces élections de leurs
11 conséquences avant d'examiner les documents suivants. Je vais évoquer les
12 résultats de ce scrutin et vous dire quelle était la signification de ces
13 élections pour le SDS en tant que parti politique.
14 Tout d'abord, les élections se sont tenues à l'échelon de la république et
15 à l'échelon municipal. Il s'agissait d'élire les députés, les membres de
16 l'assemblée au niveau de la république et au niveau des municipalités,
17 respectivement. Il s'agissait d'élire les assemblées à ces deux échelons.
18 En parallèle, étaient également organisées des élections présidentielles en
19 Bosnie-Herzégovine. Pour la première fois, c'était un suffrage direct qui
20 était organisé pour nommer le président.
21 Au niveau municipal, je commencerai par là, au niveau municipal, disais-je,
22 nous n'avons pas de documents permettant de résumer les résultats du
23 scrutin. Cela dit, le Dr Karadzic a affirmé au sein de l'assemblée du SDS,
24 par après, que le SDS avait gagné dans 37 municipalités, c'est-à-dire, il
25 avait remporté une majorité dans les assemblées de 37 municipalités.
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1 Au niveau de la république, les élections des deux chambres de l'assemblée
2 ont vu le SDS s'arroger une part non négligeable, loin de là, des sièges
3 disponibles. Le SDS a remporté 72 sièges en tout, 38 dans la chambre des
4 municipalités, 34 sièges dans la chambre des citoyens.
5 Pour sa part, le SDA a remporté en tout et pour tout 86 sièges et le HDZ,
6 me semble-t-il 44. Il y avait en tout 130 sièges à pourvoir dans la chambre
7 des citoyens, 110 dans la chambre des municipalités. Un député pour chaque
8 municipalité et un de plus pour la ville de Sarajevo.
9 Il est important de garder à l'esprit, le total 230. C'est important parce
10 que, conformément à l'amendement 70 apporté à la constitution, l'assemblée
11 pouvait, dans bien des cas, se réunir en sessions communes, c'est-à-dire,
12 que les députés des deux chambres se réunissaient dans une seule et unique
13 configuration et pouvaient rassembler les votes. C'était notamment prévu
14 pour la nomination du premier ministre et du cabinet gouvernemental. Pour
15 entrer un peu plus dans le détail, j'ajouterais que pour réunir le quorum
16 lors d'une telle session commune, la majorité des députés de chaque chambre
17 devaient être présents mais le vote était bel et bien commun.
18 L'élection à la présidence a également donné voie au chapitre au SDS dans
19 cette institution étant donné les dernières modifications apportées à la
20 constitution. La présidence se composait de sept membres. Deux membres
21 émanaient de chaque nation constitutive, c'est-à-dire, les Musulmans, les
22 Serbes et les Croates et le dernier provenait de la nation yougoslave.
23 C'était notamment l'une des cases que les gens pouvaient cocher lors des
24 recensements pour indiquer leur identité, leur appartenance. Toute
25 identification nationale était volontaire. C'était une déclaration que
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1 devait faire les citoyens eux-mêmes. Je me permets de l'ajouter.
2 Ainsi les Serbes avaient droit à deux sièges dans la présidence et se
3 furent les deux candidats du SDS qui furent élus, Biljana Plavsic et Nikola
4 Koljevic. Pour en terminer avec le résultat des élections, je mentionnerai
5 également que les trois partis nationaux, avant le scrutin, s'étaient
6 réunis et étaient tombés d'accord pour coopérer entre eux. Nous avons déjà
7 parlé de la crainte du Dr Karadzic de voir les élections truquées,
8 entachées de fraude à cause des communistes et cette crainte était partagée
9 par les autres partis nationaux. Ils se sont mis d'accord pour former entre
10 eux une coalition après les élections. Ils se sont mis d'accord pour former
11 un gouvernement et répartir les postes au sein de ce gouvernement entre les
12 différents vainqueurs du scrutin, tant au niveau municipal qu'au niveau de
13 la république.
14 Conformément à cette décision, Alija Izetbegovic a été élu au poste de
15 président de la présidence, et ce, pour un mandat d'un an. Momcilo
16 Krajisnik a été nommé au poste de président de l'assemblée, et ce, le 20
17 décembre. Jure Pelivan du SDS [comme interprété] a été nommé au poste de
18 premier ministre et son gouvernement réunissait des représentants des trois
19 partis que j'ai cités, et ce, conformément à l'accord que je viens
20 d'évoquer. Ils sont entrés en fonction le 30 janvier.
21 Q. Monsieur Treanor, excusez-moi. Vous avez dit, enfin, c'est ce que je
22 peux lire sur le compte rendu, que Jure Pelivan du SDS avait été désigné --
23 R. Excusez-moi. Le HDZ. Il représentait le HDZ. L'accord concernait
24 également le niveau municipal et là, aussi, les postes ont été répartis en
25 fonction des résultats électoraux respectifs des trois partis dans
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1 l'assemblée municipale concernée. Les postes disponibles étaient notamment
2 celui de président de l'assemblée et puis les différents postes de nos
3 idéaux. Je ne suis pas sûr de bien comprendre à quels idéaux il fait
4 référence. Peut-être qu'il fait allusion à la notion de Grande Serbie,
5 notion assez vague en soi. En tout cas, un état plus petit que la
6 Yougoslavie et dont ne feraient pas partie les Slovènes, ni les Croates, ni
7 les Macédoniens, peut-être. Je ne suis pas sûr de bien comprendre à quels
8 idéaux il fait référence. Il s'agit donc d'un état qui serait
9 géographiquement parlant plus petit que la Yougoslavie, dont la composition
10 serait largement Serbe, serait largement peuplé de Serbes et comprendrait
11 la vaste majorité des Serbes qui vivaient à ce moment-là en Yougoslavie.
12 Q. Merci. Document suivant, intercalaire 17. Il s'agit d'un document
13 présenté par le cercle des députés du SDS dans lequel les points de vue de
14 ce dernier sont présentés. Vous y avez fait référence plus tôt.
15 R. Oui. Ce document est daté du 14 février 1991. En février, il y a eu de
16 nombreux débats publics au sujet du projet de décisions et des débats au
17 sujet de cette décision qui aurait lieu à l'assemblée. Ce document présente
18 les points de vue, comme nous pouvons le voir à la première page de ce
19 document, les points de vue du cercle des députés du SDS et du SPO. Le SPO
20 étant le mouvement du renouveau serbe, comme je l'ai dit plus tôt. Il
21 s'agit d'un document assez long, donc je vais parler des parties
22 surlignées.
23 M. TIEGER : [interprétation] Cela figure à la page 3 de la version en
24 anglais.
25 R. Page 6 de l'original, me semble-t-il.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il s'agit du troisième paragraphe en
2 partant du bas de la page.
3 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact. Ici on voit la déclaration selon
4 laquelle ce n'est qu'à l'intérieur des frontières actuelles de la Bosnie-
5 Herzégovine, inséparables de la Yougoslavie que l'harmonie fondamentale de
6 tous les peuples peut être réalisée ainsi que la conviction qu'aucun de ces
7 peuples, des peuples vivant sur ce territoire, seront subordonnés ou
8 supprimés lorsqu'il s'agit de décider de notre sort de façon générale. Nos
9 positions sont fermes même si dans certaines républiques, par exemple en
10 Slovénie, en Croatie, en Macédoine, même si ces républiques font totalement
11 sécession de la Yougoslavie. Nous répétons que le peuple serbe de Bosnie-
12 Herzégovine souhaite vivre dans une Yougoslavie même si elle est plus
13 petite, qui pourrait ne pas comprendre certaines de ses républiques
14 actuelles."
15 Ils expriment leur opinion selon laquelle ils voudraient que l'ensemble de
16 la Bosnie-Herzégovine demeure au sein de la Yougoslavie même si cette
17 Yougoslavie doit être réduite.
18 M. TIEGER : [interprétation]
19 Q. Intercalaire 18 du classeur 1, document suivant, est-ce que nous voyons
20 d'autres occurrences à propos des frontières proposées, frontières de la
21 Bosnie-Herzégovine ?
22 R. Oui. Avant d'examiner ce document, je souhaiterais simplement remarquer
23 que les débats, qui ont eu lieu à l'assemblée le 27 février, ont eu pour
24 résultat qu'il a été décidé après beaucoup de discussions, de parvenir à
25 une décision au sujet du projet de décision. Ce projet de décision aurait
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1 donné à l'assemblée le droit d'examiner ou de considérer que ses propres
2 décisions ont priorité par rapport aux décisions rendues au niveau de la
3 fédération. Le SDS a considéré que ceci était inacceptable et nié
4 l'existence même de la Yougoslavie et de sa constitution. Le débat s'est
5 donc achevé. Il n'y a pas eu de votes. Mais toute controverse était sujette
6 à controverse au sein du public, ce qui a emmené une radicalisation des
7 points de vue. Au début du mois de mars, le SDS a tenu une réunion publique
8 à Banja Luka, au cours de laquelle ses dirigeants ont traité publiquement
9 des questions qui avaient été officiellement soulevées devant l'assemblée.
10 Q. Première partie de ce document que vous avez surligné. Cette partie
11 figure à la page 3 de la version en anglais ou plutôt à la page 2.
12 R. Au dernier paragraphe de la page de la version en anglais, nous avons
13 surligné une partie qui commence à la deuxième phrase du paragraphe. Il
14 s'agit d'une déclaration citée par un journal de Banja Luka, Glas, Milovan
15 Milanovic, qui était député du SDS, aurait déclaré, je cite : "Au nom du
16 peuple de la Krajina Bosniaque, nous déclarons que toutes nations, en
17 faveur d'une Yougoslavie fédérale comprenant la Bosnie-Herzégovine, doivent
18 vivre ensemble avec les Serbes dans cette région. Nous avons déjà une
19 patrie dont la Bosnie fait partie. Nous ne voulons pas de frontières
20 divisant les frères ou les voisins. Ceux qui veulent quitter la
21 Yougoslavie, nous leur souhaitons bon voyage mais ils doivent savoir qu'ils
22 seront autorisés à sortir de ce pays uniquement ce qu'ils y ont apporté,
23 personne ne peut prendre la Krajina et faire sortir la Krajina de la
24 Yougoslavie sans se rompre le cou."
25 La Krajina est une région assez vaste en Bosnie occidentale qui se trouve
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1 le long de la Krajina croate.
2 Q. Pourriez-vous nous parler de cette réunion publique qui a eu lieu en
3 Krajina ?
4 R. Oui, à Banja Luka, qui est la capitale, la plus grande ville de cette
5 région. Il s'agit du centre le plus important, le centre urbain le plus
6 important en Krajina Bosniaque.
7 Q. Page 3 de la version en anglais, nous allons examiner les remarques de
8 M. Cizmovic ?
9 R. Oui. Au bas de la page M. Cizmovic parle au nom du mouvement de
10 renouveau serbe, lequel participait au cercle des députés du SDS au sein de
11 l'assemblée. M. Cizmovic a dit, je cite : "Aujourd'hui, nous nous adressons
12 à tous les Serbes car nous parlons au nom de ceux qui ne parleront plus
13 jamais. Tous les morts serbes, tous les Serbes qui sont tombés au cours de
14 ce siècle faisaient partie de la Yougoslavie. L'arbre serbe a été fissuré
15 pour le bien de la survie de la Yougoslavie. Nous n'avons jamais été
16 confrontés à une menace plus grande, à partir du peuple serbe d'autres
17 peuples ont été créés à partir de la foi serbe, l'athéisme est né. La
18 réconciliation fraternelle est une condition préalable pour la suite. Les
19 petits-fils des Chetniks et des partisans ne doivent pas répéter les mêmes
20 erreurs, les frontières actuelles existent uniquement au sein de la
21 fédération. Nous demandons donc l'unification de toutes les terres serbes."
22 Ceci est empreint d'un sens particulier. La référence aux peuples qui ont
23 été créés du peuple serbe, en fait, est une référence aux Musulmans de
24 Bosnie qui, à l'origine, avaient été Serbes avant de se convertir à
25 l'Islam. De nouveaux Croates pensaient la même chose pour ce qui est des
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1 petits-fils des Chetniks et des partisans. Ceci est une référence à la
2 Seconde Guerre mondiale pendant laquelle les Serbes ont combattu pour
3 diverses parties, les partisans étant les unités contrôlées par les
4 résistants communistes et les Chetniks étant un mouvement nationaliste. Il
5 est de nouveau question de frontières, des frontières actuelles, les seules
6 qui pourraient être considérées comme étant valides si la Bosnie restait au
7 sein de la Yougoslavie.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Tieger, je souhaiterais poser
9 une question d'ordre général. Depuis une heure, nous écoutons un témoignage
10 portant sur un point litigieux entre les parties. Si j'ai bien compris, le
11 témoin nous explique que les Serbes vivant en Bosnie-Herzégovine
12 craignaient de perdre tous liens avec la Serbie. Ils avaient peur d'une
13 structure confédérale de l'indépendance de la Bosnie-Herzégovine qui,
14 disperserait les Serbes dans diverses parties et de cette manière, ils
15 seraient en position de minorité dans un état indépendant ou dans une
16 confédération. Le SDS voulait s'opposer à tout prix à de tels événements,
17 de ces éventualités.
18 Ai-je raison, Monsieur Treanor ?
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que ce point est litigieux, je me
21 demande. Je m'adresse à la Défense. Si ce n'est pas le cas, nous pourrons
22 éventuellement entendre un résumé de la part de M. Treanor. Alors Monsieur
23 Stewart, ce que nous avons entendu, depuis une heure, contient-il des
24 points litigieux pour la Défense ?
25 M. STEWART : [interprétation] Le résumé que vous venez de faire me semble
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1 tout à fait correct. Il n'y a rien de litigieux là-dedans. Je ne pourrais
2 pas tout à fait dire et affirmer que tout ce qui a été dit au courant de la
3 dernière heure n'est pas litigieux.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si certains points vous semblent
5 litigieux, peut-être, que nous pourrons y prêter une attention plus
6 particulière, lors de la présentation de ce témoin.
7 M. STEWART : [interprétation] Malgré toutes les objections concernant les
8 questions directives, il s'agit de domaine que nous sommes en train de
9 traiter, dont nous sommes en train de traiter. Je pense que j'ai une idée
10 plutôt claire de ce qui n'est point litigieux pour la Défense tout au
11 moins. A ce moment-là, bien sûr, il est possible de guider le témoin. Ceci,
12 non plus, ne pose pas problème. Ceci pourrait, bien au contraire, accélérer
13 la durée. Il s'agit d'éléments de notoriété publique, de choses que l'on
14 sait. Je sais que cela pourrait être utile. Je propose que l'on fasse de la
15 sorte.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne demande pas à qui que ce soit de
17 donner carte blanche mais au bout d'une heure d'un tel témoignage, je me
18 demande si nous ne pourrions pas accélérer quelque peu la procédure. Je
19 laisse les parties à parvenir à un accord là-dessus.
20 M. TIEGER : [interprétation] Je comprends bien ce que vous voulez dire pour
21 ce qui est des craintes des Serbes dans la région que nous avons évoquée,
22 [imperceptible] une réponse concernant les menaces auxquelles ils sont
23 exposées et aux terres qui pourraient leur être prises, peut-être, qu'il
24 s'agit d'une partie qui n'est pas aussi litigieuse puisqu'il s'agit
25 d'inquiétude qui a été générée par la possibilité de la désintégration de
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1 la Yougoslavie. Mais pour ce qui est de questions directives dans ce
2 domaine, je vais, bien sûr, avoir à l'esprit les commentaires de mon
3 éminent confrère.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, allez-y.
5 M. TIEGER : [interprétation]
6 Q. Monsieur Treanor, je souhaiterais maintenant que vous vous concentriez
7 sur le discours de M. Karadzic, à la page 6 de la traduction anglaise.
8 R. Oui, en haut de la page, il y a le titre en dessous. Dr Karadzic aurait
9 dit : "Plus les chances de la survie de la Yougoslavie baissent, plus
10 grosses sont les chances d'arriver à la création de la Grande Serbie. Tous
11 les Serbes et la majorité des Musulmans voteront pour la Serbie. Nous
12 sommes le seul peuple en Europe, en ce moment, qui combat le fascisme et
13 nos armes se battent pour la vérité et la justice."
14 Lorsqu'il est question de fascisme, le Dr Karadzic a à l'esprit le
15 gouvernement du HDZ en Croatie. Les nationalistes serbes brandissaient
16 toujours l'argument que ceci était l'héritier de l'état indépendant pour
17 les Croates pendant la Deuxième Guerre mondiale.
18 Q. Vous vouliez ajouter encore quelque chose, Monsieur Treanor.
19 R. Oui. Je pense qu'on a encore un document qui traite de cette question
20 en particulier. Après, nous pourrons passer à autre chose.
21 Q. Peut-être que nous pouvons passer à un autre sujet, Monsieur Treanor.
22 Vous avez identifié les références des villages qui ne devraient pas être,
23 aucun d'entre eux, laissés à l'extérieur du territoire de la Yougoslavie.
24 Egalement, vous avez parlé de soucis des Serbes, exprimés par les Serbes,
25 par le SDS et leurs désirs de rester au sein d'un même état de la
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1 Yougoslavie. Est-ce que le SDS a pris des mesures, des mesures concrètes
2 afin d'identifier les régions au sein de la Bosnie, qui étaient identifiées
3 comme étant serbes, qui ne devraient pas être en dehors de la Yougoslavie ?
4 R. Oui. Il y a encore deux documents. Dans l'ordre chronologique, le
5 premier du 23 février 1991. Il s'agit des débats à l'assemblée sur le
6 projet de décisions.
7 Q. Ce document du 23 février figure à l'intercalaire 19.
8 Monsieur Treanor, dans ce document est-il question de la possibilité
9 envisagée par les municipalités serbes de rester au sein de la Yougoslavie,
10 des mesures qu'il prendrait en vue de réaliser cela, si le gouvernement de
11 Bosnie prend des décisions et qui mettait en péril l'indépendance de la
12 Bosnie ?
13 R. Ceci est l'approche la plus concrète à ce que les dirigeants du SDS
14 envisageaient comme étant une possible manière d'agir si une décision,
15 concernant la souveraineté était adoptée qui mènerait bien sûr à la
16 séparation de la Bosnie de la Yougoslavie. Ils avaient déjà dit qu'ils
17 n'allaient pas reconnaître une telle décision, ils ont évoqué également la
18 possibilité d'une guerre civile. Là, nous voyons des actions d'ordre
19 administratif, qui avaient été envisagées si le gouvernement républicain ne
20 fonctionnait plus de manière acceptable et légitime au sein de la
21 Yougoslavie. Nous avons ce passage surligné en bas de la page 2.
22 Q. Oui. Il s'agit de la page 2 de la version anglaise.
23 R. On y lit : "Afin d'assurer le fonctionnement de la municipalité dans
24 une telle situation, et si le gouvernement n'agit plus de manière légale,
25 d'après eux, afin d'exercer les droits et les obligations, la municipalité
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1 doit adopter des documents juridiques qu'ils proclameraient à partir du
2 moment où ce document est adopté sur le territoire de la municipalité en
3 tant que partie intégrale et indivisible de la Yougoslavie. Sur ce
4 territoire, uniquement les lois fédérales adaptées à la situation ont un
5 effet légal. La reconnaissance de l'autorité exclusive des organes
6 fédéraux, l'assemblée, la présidence de la RSFY, le conseil exécutif
7 fédéral, la JNA, dans les zones couvertes. Cette action suspendant toute
8 application des règlements et des lois républicaines au niveau des
9 municipalités où ce document a été adopté en même temps, ensuite ceci
10 donnerait la légitimité à toutes les activités et mesures prises par les
11 organes fédéraux.
12 "Ceci serait à l'origine d'une base juridique pour toutes communications
13 directes, telles qu'assistance, coopération, et cetera entre les
14 municipalités et la fédération, les organes, l'assemblée de RSFY, la
15 présidence, le conseil exécutif fédéral, et cetera et par leur
16 intermédiaire, ceci fournira des bases pour l'engagement de la JNA, le
17 secrétariat fédéral à la Défense nationale, le secrétariat fédéral aux
18 Affaires étrangères," et cetera, et cetera.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Tieger, j'ai encore une
20 question à poser. Votre question était celle de savoir si ce document
21 envisageait la possibilité pour les municipalités serbes de prendre des
22 mesures au cas où une décision par le gouvernement bosnien était prise, une
23 décision mettant en péril l'indépendance de la Bosnie.
24 Il me semble qu'il s'agit là d'un malentendu.
25 M. TIEGER : [interprétation] Oui, effectivement. C'est une erreur de
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1 formulation, on devrait lire "si ceci mettait en péril les perspectives
2 d'une Bosnie indépendante."
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Continuez.
4 M. TIEGER : [aucune interprétation]
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous venons d'entendre l'explication de
6 ce qui figure dans le document.
7 Vous avez compris la question de M. Tieger concernant justement ces mesures
8 qui devaient être prises.
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Continuez.
11 M. TIEGER : [interprétation]
12 Q. A présent, passons au journal de M. Maksimovic que nous trouverons à
13 l'intercalaire 20, page 10 et 11.
14 R. Il s'agit d'une erreur du conseil du SDS du 18 mars. En bas de la page
15 figurent trois points et on peut y lire : "Nous parlons depuis un certain
16 temps du conseil national qui devait être activé, mais il ne fonctionne
17 toutefois pas encore. Qu'en est-il de la déclaration d'indépendance de
18 l'ABiH ? Le temps est-il arrivé pour annoncer l'unification des
19 municipalités serbes de Bosnie-Herzégovine avec la Serbie ? Nous allons
20 poursuivre nos débats parlementaires sur la Bosnie-Herzégovine. Allons-nous
21 poursuivre nos débats parlementaires sur la Bosnie-Herzégovine et la
22 Yougoslavie ? Combien de temps encore allons-nous assumer nos fonctions de
23 députés au sein de l'assemblée de l'ABiH ?"
24 Ensuite, "Un appel à l'unité serbe est nécessaire à présent."
25 On voit les craintes de Maksimovic, les spéculations sur les évolutions
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1 possibles et les mesures que les leaders serbes de Bosnie devaient prendre
2 en cas d'une évolution défavorable.
3 Q. Outre la séparation des municipalités serbes de Bosnie-Herzégovine, ces
4 réflexions là-dessus qui figurent dans le document du 23 février et dans le
5 journal de Maksimovic, le SDS a-t-il pris des mesures concrètes afin de
6 déterminer les territoires qu'il estimait serbes et qui ne devaient pas
7 rester au sein de la Bosnie-Herzégovine. Et là, j'ai à l'esprit le document
8 qui figure à l'intercalaire 21. Il s'agit d'une conférence de presse du SDS
9 du mois d'avril 1991.
10 R. Je vais juste vous décrire un peu le contexte pour mieux comprendre ce
11 document. Devant leitmotiv de la politique du SDS, à savoir le désir de
12 garder tous les Serbes de Bosnie dans le cadre de la Yougoslavie, dans le
13 même état où résideraient tous les autres Serbes. Il y avait également une
14 opinion prévalente, non seulement au sein du SDS, que la structure du
15 gouvernement de la Bosnie-Herzégovine, aux échelons inférieurs à celui de
16 l'échelon de la république, devait être changée, devait être modifiée et
17 nous avons vu qu'ils ont exprimé le désir de redessiner les frontières des
18 municipalités afin que celles-ci puissent être plus favorables aux Serbes.
19 En Krajina de Bosnie et en Herzégovine de l'est, il y avait également le
20 désir de procéder à la création de gouvernements régionaux qui
21 constitueraient un niveau intermédiaire entre les municipalités et la
22 république. Les gouvernements régionaux unifieraient les municipalités de
23 certaines régions et auraient pour but de promouvoir les intérêts de sa
24 région. Ceci prêtait à controverse. En Bosnie-Herzégovine, je l'ai dit, le
25 SDA était farouchement opposé à toute partition de la Bosnie-Herzégovine et
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1 ceci expliquait que le SDA était également opposé à toute régionalisation
2 sauf, éventuellement économique.
3 Un débat s'était tenu pour parler de cette question, un débat lors d'une
4 session conjointe de l'assemblée de Bosnie-Herzégovine, et ce, le 12 avril.
5 Au cours de ce débat, une résolution fut adoptée. Par cette résolution,
6 l'assemblée demandait aux municipalités de ne pas se rallier à ce mouvement
7 de régionalisation qui était mis en avant sans l'approbation du
8 gouvernement de la Bosnie-Herzégovine. Les efforts visant à créer une
9 région dans la Krajina de Bosnie étaient déjà en cours. Evidemment, ce sont
10 ces efforts que visait la résolution.
11 Apparemment, cette session de l'assemblée s'est plutôt mal passée, les
12 députés du SDS sont sortis de l'assemblée. Ils sont sortis de la salle de
13 crainte d'être mis en minorité ce qui, d'ailleurs, fut le cas. Ils ont
14 décidé de partir, c'est ce qui est repris dans le procès-verbal de la
15 session et le président de l'assemblée, Monsieur Krajisnik, a demandé aux
16 députés qui étaient encore là, de procéder à un vote de confiance, qui
17 signifie en d'autres termes, qu'il a présenté sa démission. Il y a
18 apparemment eu un débat mais je me base toujours pour affirmer cela sur le
19 procès-verbal. Finalement, il a retiré sa démission et la résolution est
20 passée sans la présence des membres du SDS. C'était une recommandation
21 adressée aux municipalités. Cette décision n'avait partant aucun effet
22 contraignant.
23 C'était le 12 avril. Je pense qu'effectivement, nous pouvons prendre ce
24 document, c'est un article du journal Glas de Banja Luka publié le 13
25 avril.
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1 Ceci permet de resituer dans son contexte ces aspirations à la
2 régionalisation. L'article en question fait suite à une conférence de
3 presse du SDS local. Lors de cette conférence de presse, les personnes
4 présentes ont pu entendre que l'initiative de régionalisation a débuté le
5 21 janvier lors d'une réunion des présidents de 22 municipalités de la
6 Krajina de Bosnie, neuf -- on parle ici de la communauté municipale de
7 Banja Luka, c'est-à-dire, de la communauté de municipalités de Banja Luka -
8 - la décision finale était tombée cinq jours avant, lors d'une réunion des
9 conseils régionaux du SDS. C'est ce que l'on peut lire dans la traduction
10 en substance.
11 La référence à la communauté de Banja Luka nous renvoie à une communauté de
12 municipalités autour de Banja Luka. C'est une forme de coopération entre
13 les municipalités instituées par la constitution de Bosnie-Herzégovine de
14 1974. L'objet de cette coopération est de promouvoir certains intérêts
15 communs, principalement des intérêts économiques, le tourisme, ce genre de
16 choses. Ces communautés de municipalités n'étaient pas des échelons de
17 gouvernement, des niveaux de pouvoir, pas vraiment. Il ne s'agissait pas de
18 communautés sociopolitiques pour reprendre la terminologie en vigueur à
19 l'époque en Yougoslavie. Ils ne pouvaient pas légiférer, ils ne pouvaient
20 pas faire ce genre de choses. Il s'agissait simplement d'associations
21 volontaires de municipalités. Là, il y a une eu initiative pour transformer
22 la communauté des municipalités de Banja Luka en une communauté de
23 municipalités de Krajina de Bosnie qui serait dotée de pouvoirs quelque peu
24 différents.
25 Q. Peut-on dire, parce que je veux bien comprendre dans son contexte cette
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1 régionalisation, que peu après, un grand rassemblement a été organisé
2 également à Banja Luka ? Au cours de ce rassemblement, des membres du SDA
3 ont affirmé qu'il s'agissait là d'un effort, d'une initiative visant à
4 transformer la région de Bosnie-Herzégovine.
5 R. Oui, effectivement. On peut le lire dans un autre article paru dans la
6 presse. Le SDA a pris position en ces termes, il a lui-même organisé son
7 rassemblement, sa grande réunion politique à Banja Luka, et ce, peut avant
8 le 22 avril, visiblement. Cela va de soi.
9 M. TIEGER : [interprétation] L'article concernant ce rassemblement se
10 trouve à l'intercalaire 22.
11 Q. Si nous prenons la première page, Monsieur Treanor, je pense que nous
12 pouvons lire qu'entre 30 000 et 50 000 personnes étaient présentes, bien
13 plus, évidemment, selon les organisateurs. Si nous prenons la page 3 de la
14 traduction anglaise qui devrait apparaître à l'écran. Je pense que nous
15 pouvons y apprendre certains éléments sur la façon dont les membres du SDA
16 percevaient ces efforts, ces initiatives qui étaient en train de se
17 dessiner.
18 R. Oui. Bien des membres importants du SDA étaient là, notamment, Alija
19 Izetbegovic. Ajanovic, notamment, affirme que : "La raison première de ce
20 rassemblement est qu'il faut réagir aux décisions en matière de
21 régionalisation, des décisions qui vont trop loin et qui constituent tout
22 simplement des attentes, des tentatives visant à homogénéiser les groupes
23 ethniques."
24 Dans la foulée, Rusmir Mahmutcehajic a pris la parole et il aurait dit :
25 "Aujourd'hui, hors de Bosnie-Herzégovine, des gens vivant hors de Bosnie-
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1 Herzégovine veulent déchirer la Bosnie-Herzégovine. C'est la raison pour
2 laquelle nous devons clamer haut et fort au cœur de Banja Luka, et ce à
3 tous, qu'ils n'y arriveront pas."
4 Q. Au cours du même rassemblement, est-ce qu'Alija Izetbegovic a également
5 pris la parole pour s'exprimer sur ses efforts visant à homogénéiser les
6 groupes ethniques, et ce, au sein d'une république
7 qui connaissait un certain niveau de diversités?
8 R. Oui, effectivement. Je pense ici qu'on a une situation qui illustre
9 très bien à ce propos : "M. Izetbegovic aura dit ceux qui affirment qu'il y
10 a 51 % de Serbes, qu'il s'agit d'une municipalité serbe, ne pensent pas
11 comme il le faut. Ces personnes sont peut-être animées de bonnes
12 intentions, mais qui des 49 % de Musulmans sont de Croates ? A qui, à quoi
13 appartiennent-ils ? La Bosnie est une région empreinte de diversités
14 ethniques. Nous ne connaissons pas de division, sauf, bien sûr, si certains
15 veulent semer le trouble et plonger la Bosnie dans un bain de sang, mais
16 nous n'en voulons pas."
17 Voici la position du SDA, telle qu'exprimée. Ils se sont exprimés contre
18 toute division de la Bosnie et, selon eux, ces efforts, en faveur d'une
19 plus grande régionalisation, ont commencé à Banja Luka, et visaient
20 précisément à diviser la Bosnie.
21 M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, cela --
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Laissez tomber la proposition de M.
23 Stewart, qui a demandé de faire clairement référence à l'endroit où on peut
24 trouver cela parce que je pense, comme nous en sommes arrivés à la page 2,
25 on est passé de la page 3, à la page 2, au milieu de la page 2, me semble
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1 t-il. Alors, s'il vous plaît, dites-nous immédiatement où nous en sommes.
2 Je pense que cela va aider toutes les personnes qui doivent essayer de
3 suivre le compte rendu, qui devront le faire à l'avenir.
4 Monsieur Tieger.
5 M. TIEGER : [interprétation]
6 Q. Peu après ces grands rassemblements Monsieur Treanor, est-ce qu'une
7 communauté de municipalité a été formée ? En est-il question des les
8 documents qui figurent aux intercalaires 23 et 24 ?
9 R. Oui, effectivement, et ici la date clé est celle du 29 avril 1991. Une
10 réunion ait lieu à Banja Luka, en août et on a inauguré les nouvelles
11 municipalités de Krajina de Bosnie. Je pense que le premier document que
12 nous avons à notre disposition, reprend l'accord portant sur la formation
13 de cette communauté de municipalité. Il s'agit en substance d'un accord qui
14 a été conclu par les municipalités qui souhaitaient faire partie de cette
15 communauté.
16 Q. Prenons la page 3, page 3 dans la traduction anglaise de cet accord,
17 c'est l'Article 9, me semble t-il. Est-ce que vous pouvez nous dire en quoi
18 nous intéresser les dispositions à la défense du peuple, dans son
19 entièreté, et question de cela.
20 R. Oui, alors si nous prenons l'Article 9 de cet accord, nous constatons
21 que cette nouvelle communauté de municipalités s'arroge d'importantes
22 fonctions, notamment, dans le domaine de la Défense. Elle aurait des
23 conséquences, par exemple, en temps de guerre ou, lorsque la guerre menace,
24 elle aurait pour compétence, entre autres, d'organiser la Défense populaire
25 sur le territoire de la communauté de municipalités.
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1 Ce type de compétence -- ces pouvoirs n'étaient guère prévus par la
2 constitution de Bosnie-Herzégovine. Au titre de la constitution, la
3 communauté de municipalités ne pouvait pas faire ce genre de chose. Cet
4 article, que l'on trouve dans l'accord, place les communautés de
5 municipalités à un niveau qui n'était pas le leur auparavant.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'aimerais un éclaircissement, s'il vous
7 plaît. C'est lui qui a cité ce journal-là. Est-ce que c'est une erreur ou
8 est-ce qu'il s'agit de l'Article 9 ? Ce n'est pas clair dans la traduction
9 anglaise. Est-ce que cela une signification particulière ?
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce sont des guillemets dans le document
11 original également. Je ne sais pas pourquoi.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie. Veuillez poursuivre.
13 M. TIEGER : [interprétation]
14 Q. Prenons l'intercalaire numéro 24, où nous trouvons une disposition
15 assez semblable sur la Défense, dans sa disposition reprise dans les
16 statuts de l'association de municipalités.
17 R. Excusez-moi, je me permets de vous interrompre, Monsieur Tieger.
18 Monsieur le Président, j'ai un exemplaire de cet accord, mais c'est une
19 autre version et, dans cette version dont je dispose, on peut trouver la
20 signature des responsables de presque toutes les 17 municipalités, qui ont
21 adhéré à cet accord, à cette convention. On trouve également les cachets
22 et, dans cette version, dans cette deuxième version, je ne trouve pas de
23 guillemets entourant
24 l'Article 9.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est peut-être dans mon croquis.
Page 1318
1 M. TIEGER : [interprétation]
2 Q. Étudions brièvement les statuts de l'association des municipalités,
3 intercalaire numéro 24. Ce qui m'intéresse, en particulier, c'est l'Article
4 16, en page 5, de la production anglaise. Cette disposition met, de la même
5 manière, l'accent sur les questions liées à la Défense ? Y a-t-il également
6 question des pouvoirs permettant de coordonner les activités de Défense, de
7 les contrôler ?
8 R. Oui, tout à fait. J'ajouterais que les statuts décrivent les objectifs
9 et les structures des organes qui sont constitués dans les communautés de
10 municipalités. L'Article 16 dispose : "Que l'association de municipalités
11 supervisera la situation, et coordonnera les activités, visant à organiser
12 et à mettre en œuvre les préparatifs de la Défense populaire et ce,
13 conformément aux dispositions légales, au plan de Défense municipale, et au
14 plan de Défense républicaine."
15 Q. Les deux documents suivants, Monsieur Treanor, portent sur les
16 élections : sur l'élection du président, du vice-président de la communauté
17 de municipalités. Pourriez-vous nous dire de quelle personne il
18 s'agissait ?
19 R. Oui, le 29 avril, lors de la réunion constitutive, M. Vojo Kupresanin,
20 il faudra élargir cette partie du texte, c'est l'Article 1 de la décision.
21 M. Kupresanin fut élu à la présidence de l'assemblée de cette communauté de
22 municipalités. C'était un député du SDS à la Chambre des citoyens de
23 l'assemblée de Bosnie-Herzégovine.
24 Dans le document suivant, on peut lire que le même jour, M. Radoslav
25 Brdjanin, lui aussi député du SDS au sein de l'assemblée de Bosnie-
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1 Herzégovine, mais, cette fois, dans la Chambre des municipalités, fut élu
2 au poste de premier vice-président de l'assemblée de la communauté de
3 municipalité de la Krajina de Bosnie.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans le compte rendu, on trouve la date
5 du 29. Je ne me souviens pas exactement de vos paroles parce que moi j'ai
6 aussi vu le 26 --
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Je me suis peut-être trompé, excusez-moi,
8 Monsieur le Président.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Apparemment, le scrutin a eu lieu le 25
10 et la décision est datée du 26.
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Le 26 oui.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre.
13 M. TIEGER : [interprétation]
14 Q. Monsieur Treanor, le document suivant que vous avez sélectionné est un
15 document émanant du cercle des députés du SDS, intitulé position sur la
16 résolution da la crise de l'état yougoslave, et place de la Bosnie-
17 Herzégovine en Yougoslavie. Ce document figure à l'intercalaire numéro 24.
18 Je sais que vous avez surligné une série de passages. Pourriez-vous nous
19 parler du contexte dans lequel soit inscrit ce document. Cela nous aidera à
20 mieux comprendre la signification des passages que vous avez retenus.
21 R. Oui, j'en arrive à toute la polémique qui entourait le statut de la
22 Bosnie-Herzégovine, au sein de la Yougoslavie. L'assemblée avait été re-
23 saisie de la question, on allait en re-débattre. Une réunion était prévue
24 au mois de juin, un peu plus tard, je ne me souviens plus de la date, et
25 cette session de l'assemblée devait débattre de la place et du statut de la
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1 Bosnie-Herzégovine en Yougoslavie. Un fois de plus, à cette occasion, le
2 cercle de députés du SDS s'est fendu de sa propre prise de position, il a
3 couché sur papier.
4 Q. Si nous prenons la page 2, de la traduction anglaise, vous avez
5 surligné le début de la page, le premier paragraphe.
6 R. Oui. Effectivement, c'est le début de la déclaration des difficultés du
7 SDS : "Face à une grave crise que traverse l'état de Yougoslavie, une crise
8 qui menace de changer par la violence le sort des nations serbes et des
9 autres nations yougoslaves. Les députés serbes de l'assemblée de la Bosnie-
10 Herzégovine, en tant que députés légalement élus, représentent les
11 activités du peuple serbe et adressent leur prise de position par la
12 présente à l'opinion publique yougoslave et internationale. La prise de
13 position concerne la résolution de la crise de l'état yougoslave et de la
14 place de la Bosnie-Herzégovine en Yougoslavie."
15 Q. Tout en bas de la page, on trouve un autre passage surligné.
16 R. Oui. C'est une déclaration qui reprend leur position, elle se lit comme
17 suit : "Aucune nation ne peut être forcée à demeurer dans l'état
18 d'Yougoslavie. Elle ne peut pas non plus en être expulsée de force, en tout
19 ou en partie."
20 Q. Mais un éclaircissement : On trouve le terme "violemment" le concept de
21 violence quelques part dans le texte, et un peu plus loin "de force" peut-
22 on lire, c'est dans le passage que vous avez surligné tout en bas de la
23 page. A quoi est-ce que cela se rapporte exactement ?
24 R. Je dois me livrer à quelques spéculations, je vais de tenir compte du
25 contexte dans lequel s'inscrivent tous les documents. On a souvent pu lire
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1 que les dirigeants avaient de grande crainte, leurs députés avaient peur
2 d'être mis en minorité. Ils avaient peur que l'on impose des décisions que
3 d'autres députés les obligent à accepter certaines dispositions, des
4 décisions qui, selon les députés serbes, auraient profondément transformé
5 la destinée de la nation serbe, et qu'ils jugeaient inacceptable, décision
6 qui, selon le Dr Karadzic, était susceptible de déclancher une guerre
7 civile.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Tieger --
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que cela signifie que vous avez peur
10 de se voir imposer une décision par un vote majoritaire, vraiment être mis
11 en minorité.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Tieger, si vous pouvez terminer
13 votre exposé en l'espace de deux ou trois minutes, je vous en serais
14 infiniment reconnaissant, sinon, nous allons faire la pause maintenant. Je
15 ne vois pas combien de passages surlignés il vous reste à couvrir.
16 M. TIEGER : [interprétation] Je pense que ce serait possible de terminer
17 assez rapidement. Nous allons essayer.
18 Q. Monsieur Treanor, ensuite, nous avons -- il nous reste trois passages
19 surlignés en bas, de page 6 et en page 7. Si vous pouvez les passer
20 rapidement en revue, le premier passage concerne la solution apportée aux
21 problèmes de la régionalisation. Alors, le deuxième -- dans le deuxième, on
22 peut lire qu'ils insistent qu'ils veuillent rester en Yougoslavie. Le
23 troisième passage laisse entendre que des conséquences s'en suivraient, si
24 on devait s'orienter dans la voie inverse, dans la voie contraire.
25 R. Oui. Dans le premier passage surligné, nous voyons une référence à la
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1 régionalisation, c'est assez intéressant. On dit : "On dit que, dans les
2 républiques comprenant plus d'une nation fondatrice de l'état, les citoyens
3 et les nations peuvent s'organiser en régions sur la base de leurs intérêts
4 économiques, culturels, ethniques ou autres : régions, cantons, provinces,
5 et cetera, autant d'entités qui peuvent recevoir certains pouvoirs
6 législatifs, judiciaires, administratifs, qui doivent également avoir le
7 pouvoir de réglementer les services publics, de les gérer, comme c'est déjà
8 le cas dans plusieurs pays européens modernes."
9 Ici, la question de la régionalisation est directement liée à la
10 composition ethnique de la république, dont on est en train de parler. Ces
11 régions ne sont envisagées que dans les républiques où vivent plusieurs
12 groupes ethniques, et seul un critère est reconnu pour la constitution de
13 telles régions et c'est l'appartenance ethnique.
14 Dans la deuxième partie surlignée, nous voyons l'opinion, selon laquelle
15 elle aura cet égard. Le peuple serbe de Bosnie-Herzégovine se trouve dans
16 une position plutôt satisfaisante parce qu'il partage un état avec d'autres
17 segments de la nation serbe, il faut continuer d'exercer ces droits
18 historiques et naturels. Seule la force brutale pourrait obliger les Serbes
19 de Bosnie-Herzégovine à se séparer de la Yougoslavie et les priver de leur
20 protection de leurs intérêts à laquelle ils ont accès ou droit dans un état
21 fédéral."
22 En fait, les Serbes avaient, dans un premier temps, je parle des dirigeants
23 serbes, des dirigeants du SDS, où les Serbes avaient été estimés, dans un
24 premier temps, que c'était un de leurs atouts. Ils étaient en train de
25 défendre le statut quo, c'est-à-dire, une Bosnie dans -- au sein de la
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1 Yougoslavie, il souhaite simplement rester en Yougoslavie. C'était très
2 facile d'argumenter pour eux. C'était beaucoup plus facile de rester en
3 Yougoslavie que pour les autres de sortir de la Yougoslavie. C'est la
4 raison précise pour laquelle ils avaient tellement peur de perdre
5 l'avantage au cours d'un vote parce qu'évidemment, c'était pour eux, le
6 scénario catastrophe. C'était par là qu'il fallait passer pour les mettre
7 en minorité.
8 Enfin, on dit : "Toute tentative de se séparer des principes de la
9 démocratie permettant de résoudre la crise par laquelle -- que traverse la
10 Yougoslavie, la Bosnie-Herzégovine et visant à s'engager dans la violence
11 engendra une responsabilité historique et d'autres conséquences qui seront
12 inévitables."
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. On en arrive au dernier paragraphe
14 -- excusez-moi, je me trompe. Où est-ce qu'on en est.
15 M. TIEGER : [interprétation] Bien sûr. Monsieur le Président, si vous le
16 permettez alors, la partie du document, dont vient de parler M. Treanor, se
17 trouve en page 7.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
19 M. TIEGER : [interprétation] Les deux autres sections -- les deux autres
20 passages sont en page 6.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] On les a passé en revue, Monsieur
22 Tieger, n'est-ce pas ? Enfin, je pense -- je crois aussi que les
23 techniciens et les interprètes auraient bien besoin d'une pause.
24 M. TIEGER : [interprétation] Effectivement. Le moment serait bien choisi.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que nous allons revenir sur ce
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1 classeur ? Je pense que nous avons passé en revue tout un classeur. Alors,
2 j'ai déjà le deuxième sur mon bureau. Elle est sur mon bureau en bas. Est-
3 ce que je ramène celui-ci et que j'amène l'autre ?
4 M. TIEGER : [interprétation] Tout à fait, Monsieur le Président.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie. Nous reprendrons à 18
6 heures.
7 --- L'audience est suspendue à 17 heures 37.
8 --- L'audience est reprise à 18 heures 01.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Tieger, vous pouvez poursuivre.
10 M. TIEGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
11 Q. Monsieur Treanor, est-ce que nous pourrions examiner rapidement le
12 document suivant intitulé "Les propositions des Serbes". Il s'agit du
13 premier document dans le classeur numéro 2 qui figure à l'intercalaire 28.
14 Est-ce qu'il s'agit d'une officialisation du document que vous avez
15 mentionné avant la pause, c'est-à-dire, les positions concernant les
16 résolutions ?
17 R. Non. Je ne parlerais d'officialisation ici. Il s'agit plutôt d'une
18 diffusion du contenu du document précédent. Il s'agit d'un pamphlet qui a
19 été publié en serbe et en anglais. La plus grande partie de ce pamphlet
20 contient les documents que nous avons examinés auparavant. Je souhaiterais
21 terminer mes commentaires à ce sujet en disant que le 12 juin, d'après le
22 procès-verbal de l'assemblée de Bosnie-Herzégovine, ce document et d'autres
23 documents similaires du cercle des députés, ont été présentés à
24 l'assemblée. Il a été décidé par les dirigeants du cercle que la question
25 ne serait pas débattue, ceci a terminé le chapitre sur l'examen du statut
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1 de la Bosnie-Herzégovine devant l'assemblée de Bosnie-Herzégovine.
2 Q. Pourrions-nous examiner le document suivant figurant à l'intercalaire
3 29. Il s'agit de la transcription de la séance qui a eu lieu lors du
4 premier anniversaire de l'assemblée constitutive du SDS.
5 R. Oui, c'est exact. Il s'agit des notes prises lors de la deuxième
6 assemblée du SDS un an, jour pour jour, après la première assemblée. Lors
7 de cette assemblée, des rapports ont été distribués concernant l'évolution
8 des activités du parti au cours de l'année précédente. Le Dr Karadzic s'est
9 adressé à l'assemblée. Il a parlé de la situation politique générale. Il y
10 a eu de nombreux débats au sujet de la régionalisation dans le contexte du
11 parti notamment, et enfin, l'assemblée a élu des officiers ou des
12 responsables au sein des différents comités et conseils du parti pour
13 l'année suivante.
14 Q. Est-ce que nous pourrions examiner les passages surlignés de ce
15 document ? Le premier de ces passages se trouve à la page 15 de la version
16 en anglais. Il apparaît sur l'écran.
17 Monsieur Treanor, pouvez-vous nous dire qui parle ici.
18 R. C'est le Dr Karadzic qui s'exprime ici.
19 Q. Dans ce passage sélectionné, on peut voir le quatrième paragraphe de la
20 version en anglais. Le Dr Karadzic dit : "Nous avons ralenti et nous avons
21 mis un terme aux aspirations sécessionnistes." Ceci figure à la page 16 de
22 la version en B/C/S.
23 R. Je ne vois pas de quel paragraphe il s'agit mais c'est au milieu de la
24 page. Il s'agit, en fait, du quatrième paragraphe. On voit les réussites du
25 parti au cours de l'année précédente, je cite : "Voici ce que nous avons
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1 réalisé. Nous avons ralenti et mis un terme aux aspirations sécessionnistes
2 qui existent encore aujourd'hui et qui ne seront pas abandonnées facilement
3 mais il ne sera plus facile pour eux de gagner et de séparer la Bosnie-
4 Herzégovine du reste de la Yougoslavie."
5 Q. Le passage suivant se trouve à la page 25 de la transcription en
6 anglais. Le Dr Karadzic parle de l'idée de la régionalisation et de son
7 rôle dans le contexte des aspirations du SDS. Est-ce que vous pourriez
8 formuler vos commentaires à ce sujet. Cela apparaît au premier paragraphe
9 de la version en anglais, page 25.
10 R. D'après ces notes, le Dr Karadzic dit que : "Ceux qui ont assisté à
11 notre séance de l'après-midi pourront entendre une partie du rapport de
12 l'année dernière dans laquelle nous présentons notre opposition générale à
13 la régionalisation et à la territorialisation de la Bosnie-Herzégovine
14 après la guerre, ce qui a toujours été mis en œuvre contrairement à
15 l'intérêt du peuple serbe. L'idée de la régionalisation de la Bosnie-
16 Herzégovine a toujours existé chez les dirigeants du SDS dès le départ et
17 le comité central a toujours pris cela en considération, toutes les idées
18 relatives à la régionalisation découlent du comité central, d'autres des
19 membres du comité central."
20 Nous devons préserver la force du parti, ne pas abandonner face à ceux qui
21 cherchent à prendre le pouvoir et les petits Napoléons qui essaient de
22 mettre en péril le peuple serbe."
23 Dans ce paragraphe, il est fait référence de la régionalisation du parti
24 qui, comme je l'ai dit plutôt, a été aboli par les nouveaux statuts du
25 parti et on peut voir une opposition de la part de nombreux députés de
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1 l'assemblée qui voulaient voir la création de conseils régionaux du SDS
2 plus puissants comparable aux communautés de municipalités qui étaient en
3 train d'être formées afin de couvrir ces mêmes régions. Mais le Dr Karadzic
4 y était opposé.
5 Q. Le passage suivant figure à la page 26 de la version en anglais, la
6 page 29 de la transcription en B/C/S, point 4, je pense.
7 R. Je cite : "Si quelqu'un enfreint la constitution de la Bosnie-
8 Herzégovine et de la Yougoslavie, nous n'avons plus aucune obligation par
9 rapport à la constitution et nous ferons ce que M. Vukic et M. Kupresanin
10 ont annoncé. Pas avant. Un autre parti doit enfreindre la constitution de
11 la Bosnie-Herzégovine pour parvenir à la sécession de la Bosnie-Herzégovine
12 et, le cas échéant, nous préparerons une réaction démocratique, une réponse
13 démocratique du peuple serbe à tous les égards."
14 Q. Qu'en est-il de la référence à Vukic et Kupresanin ?
15 R. Je pense qu'il s'agit des débats au sujet de la régionalisation. L'un
16 des arguments avancés par M. Karadzic, arguments contre la création de
17 conseils régionaux puissants au sein du parti, est que les autres conseils
18 du parti sont structurés de la même manière que les autres échelons du
19 gouvernement. Il y a un conseil municipal, un gouvernement municipal, un
20 conseil républicain et un gouvernement républicain. Pour le moment, il n'y
21 a pas de gouvernement régional en Bosnie. Les communautés de municipalités
22 n'étaient pas des gouvernements régionaux, peut-être qu'ils l'auraient
23 souhaité. M. Vukic et M. Kupresanin l'auraient, en tout cas, souhaité mais
24 ces communautés de municipalités ne disposaient pas encore de ce statut et
25 M. Karadzic ne souhaitait pas que ce statut soit consacré avant que le
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1 temps soit venu pour le faire. Avant cela, il pensait que les conseils
2 régionaux du parti n'avaient aucune raison d'être.
3 Q. Le passage suivant surligné, lui aussi, ou plutôt avant d'en parler, je
4 souhaiterais parler du passage qui figure à la page 27 dans la traduction
5 en anglais. Dans ce passage, le Dr Karadzic de nouveau met l'accent sur
6 l'importance des conseils locaux et sur la nécessité de maintenir le
7 contact avec les communautés par le truchement des conseils locaux. Cela se
8 trouve au premier paragraphe qui se trouve en haut de la page 27.
9 R. Le Dr Karadzic déclare que : "Le SDS doit s'intéresser, avant tout, au
10 conseil local, il s'agit de l'échelon situé en dessous de l'échelon
11 municipal. Le contact avec la population a lieu à ce niveau-là, selon lui,
12 et non pas au niveau du comité central. Chaque membre du conseil local doit
13 être en rapport avec 10 à 20 foyers serbes et agir en tant qu'officier de
14 liaison pour le meilleur et pour le pire."
15 Ceci correspond à la déclaration que nous avons vue un peu plus dans
16 l'interview qu'il a donnée à la fin de l'année 1990 s'agissant du nombre de
17 foyers avec lesquels les officiers de liaison devaient établir des
18 contacts.
19 Q. Passage suivant, pages 29 et 30 de la version en anglais, dernier
20 paragraphe de la page 29 qui se poursuit sur la page 30. S'agit-il d'une
21 nouvelle référence à la politique consistant à ne pas aller de l'avant
22 avant que des mesures n'aient été prises par les autres partis ?
23 R. Oui. Le Dr Karadzic, de nouveau, exprime son point de vue selon lequel
24 il est nécessaire d'aller doucement avec le processus de régionalisation.
25 Il dit : "Je dois dire ici que la politique du Parti démocratique serbe
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1 n'est pas de partager la Bosnie-Herzégovine avant que d'autres ne nous
2 amènent à le faire. Le SDS n'approuve pas la création de nouvelles unités
3 fédérales avant que le système juridique et constitutionnel se soit
4 effondré. Cela ne peut pas être fait sous nos auspices. Ceux qui veulent
5 entreprendre des activités qui ne figurent pas dans le programme et le
6 statut du SDS et en conformité avec les points de vue du SDS, doivent créer
7 leur propre parti. Nous avons d'autres exemples de ce type à Banja Luka.
8 Une partie du comité central a fait sécession et a créé ce qu'ils appellent
9 le front de la patrie."
10 Page suivante : "Ceci entraîne des conséquences stupides et ainsi de suite"
11 Il est fait référence aux désirs de certaines personnes de Krajina de
12 Bosnie et de Krajina de Croatie, le désir d'unir les deux Krajina afin de
13 former une nouvelle République de Yougoslavie. Cette réunion a eu lieu le
14 12 juillet 1991. Les conflits avaient éclaté en Slovénie et en Croatie
15 après la proclamation de l'indépendance. Je ne sais pas s'il s'agit du
16 terme idoine mais c'est le terme qu'ils ont utilisé, la proclamation de
17 l'indépendance le 25 juin 1991. La situation a complètement changé. Il
18 s'agit d'une période d'activité politique beaucoup plus intense, pour les
19 raisons que j'ai mentionnées.
20 Q. Un peu plus loin dans la transcription de la séance anniversaire de la
21 création du SDS on peut voir dans les passages surlignés suivants que
22 certains dirigeants du SDS sont félicités par le parti pour les efforts
23 qu'ils ont entrepris au cours de l'année précédente ?
24 R. Oui.
25 Q. Excusez-moi, Monsieur Treanor. Je devrais indiquer le numéro de la page
Page 1331
1 dans la version en anglais. Il s'agit de la page 55.
2 R. On y voit quelques remarques intéressantes au sujet des dirigeants du
3 parti, et sur la personnalité éminente du parti. Dans ce premier paragraphe
4 on peut lire : "Nous devons néanmoins donner le nom de deux délégués qui se
5 sont avérés être des personnalités politiques éminentes, représentatives de
6 leur peuple, qui constituent la crème de la nouvelle classe politique
7 dirigeante. Il s'agit de Momcilo Krajisnik, président de l'assemblée de
8 Bosnie-Herzégovine, et du professeur Vojislav Maksimovic, président du
9 cercle des députés."
10 Q. Vous avez indiqué plutôt que les élections du comité central ont eu
11 lieu en juillet 1991. Nous allons à présent passer au deux passages
12 suivants surlignés aux pages 92 et 93 de la transcription en anglais. Est-
13 ce qu'il est fait mention de cette élection ?
14 R. Oui. A la première page, si nous pouvions avoir le milieu de la page
15 agrandie, on voit que Momcilo Krajisnik a emporté 212 voix, ce qui
16 correspond à la totalité des personnes présentes à l'assemblée, et c'est le
17 plus grand nombre de voix parmi les personnes qui se sont présentées. Les
18 candidats au comité central ont été nominés par les régions, les régions
19 géographiques afin d'assurer une égalité, une équitable distribution au
20 sein de leur représentation au sein du comité central. Le comité central
21 aussi proposait un certain nombre de personnes. M. Krajisnik en faisait
22 partie.
23 Q. A la page 93 de la traduction anglaise, on voit la liste des personnes
24 élues au comité central.
25 R. Il y a 45 membres du comité central qui ont été élus ce jour-là. Nous
Page 1332
1 avons là un rapport officiel des notes qui ont été les résultats des
2 élections au comité central.
3 Q. Monsieur Treanor, nous allons à présent voir un entretien téléphonique
4 intercepté, où il est question de régionalisation.
5 M. Karadzic parle avec un journaliste.
6 M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,
7 vous trouverez la transcription de cette conversation à l'intercalaire 3.
8 Cette pièce doit recevoir une cote comme les autres conversations
9 interceptées.
10 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Le CD contenant les entretiens sous
11 certaines écoutes porteront désormais la cote P67, la transcription P67A.
12 M. TIEGER : [interprétation] Au début, j'ai dit que nous avons essayé
13 d'améliorer la visibilité de la transcription des écoutes. Nous vous en
14 serons reconnaissants, bien sûr, si vous nous faisiez part de vos
15 impressions. Nous espérons qu'il y aura amélioration dans ce domaine.
16 [Diffusion de cassette audio]
17 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
18 "Karadzic : La Croatie se séparerait réellement de la Yougoslavie, mais
19 nous ne voulons absolument pas que la BH soit divisée. Si la Bosnie-
20 Herzégovine reste dans son ensemble en Yougoslavie, ceci impliquerait une
21 certaine coopération. La SAO de la Krajina et la Bosanska Krajina au niveau
22 économique, culturel, et informatif, et dans le sens où la SAO de la
23 Krajina pourrait être annexée par la Yougoslavie, soit comme une région
24 autonome.
25 Le journaliste : Comment cela pourra être annexé par la Yougoslavie ?
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1 Karadzic : Si la Croatie qui est la Yougoslavie, elle restera au sein de la
2 Yougoslavie, bien sûr, il n'y aura pas d'annexion en laissant le lien avec
3 la Yougoslavie passer par Bosanska Krajina.
4 Le journaliste : Bon, est-ce que cela veut dire que pratiquement cela
5 revient à ce que Babic a dit ?
6 Karadzic : Non, non, non. Il n'y pas de condition. Il n'y pas de raison à
7 cela. Nous combattons pour préserver la Bosnie-Herzégovine dans son
8 ensemble en tant qu'unité fédérale dans le cadre de la Yougoslavie.
9 Le journaliste : Qu'il y ait un lien avec la Yougoslavie ?
10 Karadzic : Par la Bosanska Krajina afin qu'il y ait une liaison grâce à
11 Bosanska Krajina avec la Yougoslavie.
12 Le journaliste : Le SDS ne soutient pas Babic dans sa solution proposée au
13 radical ?
14 Karadzic : Non, non, non. Pas sous les conditions telles qu'elles sont à
15 présent. La Bosnie est au sein d'une fédération. Dans ce programme nous
16 soutenons depuis le début la Bosnie-Herzégovine dans son ensemble, mais pas
17 en tant que territoire divisé comme un état qu'en faisant partie de l'état
18 fédéral de Yougoslavie. Si quelqu'un veut se séparer la Bosnie de la
19 Yougoslavie, il ne pourrait pas le faire si la Bosnie reste en tant
20 qu'entité à cet égard."
21 M. TIEGER : [interprétation]
22 Q. Pouvez-vous nous faire des commentaires à ce sujet ?
23 R. Oui, ceci s'est passé un peu avant chronologiquement parlant. Vous avez
24 dû le remarquer. Cette interview téléphonique a eu lieu le 24 juin. C'est
25 la veille des événements qui se sont produits en Serbie et en Croatie, de
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1 qu'il a été question déjà tout à l'heure, la veille du début des
2 hostilités en ex-Yougoslavie. Dr Karadzic réitère sa position concernant
3 les Serbes de Croatie. Il n'est pas question de sécession. Ils sont en
4 Yougoslavie, ils resteront en Yougoslavie. Toutefois, le projet de M. Babic
5 de lier les deux Krajina ait mentionné, mais il souligne qu'il s'y oppose
6 pour le moment, puisque les conditions ne sont pas réunies. La BH fait
7 toujours partie de la Yougoslavie, et il souhaiterait que la BH reste dans
8 le cadre de la Yougoslavie.
9 C'est en bref sa vision de la situation à ce moment-là. La SAO de la
10 Krajina en Croatie qui restera au sein de la Yougoslavie se rallie au reste
11 du pays par la Bosanska Krajina. Alors que Bosanska Krajina reste en
12 Bosnie-Herzégovine.
13 Q. Maintenant, nous entendrons la suite de cette conversation à la page
14 trois de la traduction.
15 [Diffusion de cassette audio]
16 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
17 "Le journaliste : Il est question de l'unification de la Krajina dans le
18 sens fédéral.
19 Karadzic : Non, non, non. Au cas, où la Bosnie-Herzégovine reste en
20 Yougoslavie puisque nous tenons à ce que la Bosnie-Herzégovine reste dans
21 son intégralité, demeure sous sa forme actuelle. La Bosanska Krajina sera
22 liée à la Yougoslavie par Bosanska Krajina puisqu'il s'agit de territoire
23 yougoslave et la Bosanska Krajina était un territoire yougoslave tout comme
24 la Bosnie fait partie du territoire yougoslave. Lorsque la Croatie ne sera
25 plus un territoire faisant partie de la Yougoslavie, la Bosanska Krajina en
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1 fera partie toutefois. Tout cela peut être fait de manière pacifique, mais
2 si quelqu'un veut faire sécession."
3 Journaliste : Si la Croatie parle donc, si elle ne fait plus partie de la
4 Yougoslavie de Bosanska Krajina restera sur le territoire yougoslave et
5 c'est en quelque sorte une séparation.
6 Karadzic : Non, la Croatie se sépare de la Yougoslavie et la Bosanska
7 Krajina ne sépare pas de la Yougoslavie. C'est la Croatie qui quitte la
8 Yougoslavie et Bosanska Krajina demeure sur le territoire yougoslave.
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Nous voyons là, la position réitérée, la même
10 position, pour ce qui est de la Croatie. Il est dit encore une fois que
11 c'est la Croatie qui Yougoslavie, mais les Serbes de Croatie et SAO Krajina
12 resteront sur le territoire yougoslave puisqu'ils s'y trouvent pour le
13 moment.
14 M. TIEGER : [interprétation]
15 Q. A présentation à l'écoute du 20 juin 1991, intercalaire 2, classeur
16 contenant les écoutes téléphoniques. Pouvez-vous nous dire qui sont les
17 personnes qui s'entretiennent là ?
18 R. C'est Momcilo Krajisnik et Radovan Karadzic. Ce sont les personnes qui
19 parlent.
20 [Diffusion de cassette audio]
21 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
22 "Où est-tu ?
23 Chez moi.
24 Quand pars-tu ?
25 Cet après-midi.
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1 Nous devrions parler de quelque chose avec deux, trois personnes, avec la
2 personne qui se trouve à Sarajevo. C'est tout à fait inquiétant. Un homme
3 est venu me voir lorsque nous nous parlions, nous en avons parlé
4 auparavant. Nous devrions voir avant cela. Il s'agit de quelque chose de
5 sérieux.
6 Karadzic : Tu veux que je vienne.
7 Krajisnik : Je ne sais pas peut-être que ce serait bien. J'ai appelé
8 Simovic, Zepinic, Mandic pour voir certaines choses là, mais il faudrait
9 aussi parler aux deux autres, autres personnes. Bon, toi, tu peux te
10 reposer et si tu peux venir à quatre heures moins quart, disons trois
11 heures et demie, quatre heures moins quart. D'accord.
12 Karadzic : Oui. Quatre heures moins quart. Bien.
13 Krajisnik : Tu veux que je t'envoie une voiture.
14 Karadzic : Quatre heures moins quart. A tout à l'heure.
15 M. TIEGER : [interprétation]
16 Q. Pouvez-vous identifier les personnes qui ont été mentionnées au courant
17 de cet entretien téléphonique ?
18 R. De toute évidence, il s'agit de la première conversation téléphonique
19 de ce genre.Je souhaite juste porter à votre attention le fait que M.
20 Krajisnik et Dr Karadzic se tutoie, ils sont de toute évidence proches l'un
21 de l'autre. M. Krajisnik veut parler avec M. Karadzic de quelque chose,
22 mais il n'est pas tout à fait clair de quoi il s'agit. Ce qui est clair
23 toutefois, c'est qu'il souhaite le voir et à propos de quelque chose
24 d'important. Il est question également d'arranger la réunion avec d'autres
25 personnes concernant d'autres sujets. Cet individu est M. Simovic, qui
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1 était membre du gouvernement du BH, le plus haut placé des membres du SDS.
2 Il était vice-premier ministre. Ensuite, il est question de Vito Zepinic,
3 qui était ministre adjoint des Affaires intérieures de la BH. Il était
4 également un membre du SDS et représentant du SDS, ensuite Momcilo Mandic,
5 membre du SDS aussi fonctionnaire au sein du ministère de Bosnie-
6 Herzégovine des Affaires intérieures. Il était également assistant adjoint
7 du ministre, je le pense tout au moins.
8 Q. Dans votre rapport vous mentionnez deux autres conversations
9 téléphoniques interceptées où M. Karadzic entre en contact avec Koljevic et
10 Mandic, il est question de la même réunion.
11 R. Oui. Il y a toute une série de conversations qui ont eu lieu ce jour-là
12 et il est toujours question de la même réunion appliquant ces mêmes
13 individus.
14 Q. A présent, passons à la conversation suivante, intercalaire 4 du
15 classeur. La partie de la conversation qui apparaîtra à l'écran commence à
16 la page 2 de la transcription anglaise.
17 R. Pouvez-vous nous donner quelques précisions au sujet de cette
18 conversation --
19 Q. Il s'agit de la conversation entre M. Karadzic et M. Milosevic du 8
20 juillet.
21 R. Oui. En effet.
22 M. TIEGER : [interprétation] Je demande au technicien de nous aider là,
23 puisque nous ne recevons pas le son.
24 [La diffusion de cassette audio]
25 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
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1 "J'ai parlé au plus haut niveau.
2 Karadzic : Oui.
3 Milosevic : Il faut que tu comprennes cela. Je ne peux pas tout expliquer.
4 Karadzic : D'accord.
5 Milosevic : S'il s'agit de quelque chose d'importance stratégique pour le
6 futur RAM. Tu sais que ce c'est le RAM ?
7 Karadzic : Oui, oui, je sais tout.
8 Milosevic : Il faut que le groupe de Banja Luka soit prêt et mobile.
9 Karadzic : Oui.
10 Milosevic : Il faut que tu t'assures qu'il soit mobile et prêt. Ensuite,
11 appelle Uzelac et demande-lui de venir au plus haut niveau.
12 Karadzic : D'accord.
13 Milosevic : Il faut que tu fournisses les personnes qui restent sur le
14 territoire pour garder leurs maisons, Kupres est le centre du HDZ. Ils
15 doivent être armés. Ils doivent avoir tout à leur disposition.
16 Karadzic : Bien.
17 Milosevic : Kupres, c'est très important. La troisième chose est très
18 importante pour la communauté internationale.
19 Karadzic : Oui, bien sûr. Mais peut-on arranger la même chose, qu'il me
20 fournisse les armes de la Défense territoriale, Sipovo et Merkonic.
21 Milosevic : Ce n'est pas un problème.
22 Karadzic : 170 personnes à Merkonic et 150 à Sipovo. Il faut qu'il aille à
23 Kupres.
24 Milosevic : Uzelac est responsable de cela.
25 Karadzic : Non. Je pense que oui, oui.
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1 Milosevic : Il n'y a pas de problème."
2 M. TIEGER : [interprétation]
3 Q. Pouvez-vous nous donner des détails, des détails concernant cette
4 communication ?
5 R. Là, il est question d'une conversation où on voit que les temps ont
6 changé, la situation est une situation de guerre. M. Milosevic est très
7 inquiet à propos de la situation militaire et il demande que des hommes
8 viennent en renfort à la JNA. Il obtient, bien sûr, l'assistance de
9 Karadzic. Karadzic, à son tour, lui demande de l'aider à obtenir des armes
10 pour certaines de ces municipalités. M. Milosevic, de toute évidence,
11 semble dire que cela ne cause plus de problème. Le général Uzelac était le
12 commandant de l'état major de la JNA, du 5e Corps de la JNA à Banja Luka,
13 qui a joué un rôle très important dans les opérations militaires, dirigeait
14 outre la Croatie, plus précisément, la partie nord de la Croatie.
15 Q. Monsieur Treanor, est-ce que dans votre rapport il est question
16 d'autres conversations téléphoniques mises sur écoute et qui attesteraient
17 de contacts entre Messieurs Milosevic, Karadzic, le général Uzelac et
18 d'autres où il serait question, notamment, de la mobilisation et du
19 rassemblement des armes ?
20 R. Oui, effectivement. Il y a toute une série de conversations tout au
21 cours de la même période et qui tournent autour de la question de la
22 mobilisation. C'est-à-dire, rassembler suffisamment de soldats, pour le
23 compte de la JNA pour que celle-ci puisse réaliser les opérations prévues
24 en Croatie.
25 Q. J'aimerais, Monsieur Treanor, --
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de passer à autre chose, Monsieur
2 Tieger, dites-moi, Monsieur Treanor, dans le compte rendu, je lis que
3 quelque chose revêt une importance stratégique pour le RAM futur. Il lui
4 demande : "Est-ce que tu sais ce qu'est le RAM ? Oui, je le sais, je suis
5 au courant." Mais moi, pas. Je ne suis peut-être pas le seul dans ce cas.
6 Est-ce que vous êtes au courant ?
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je ne sais pas. Je peux
8 toujours essayer d'imaginer à partir du contexte mais cela, vous pouvez le
9 faire également.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, effectivement.
11 M. TIEGER : [interprétation]
12 Q. Monsieur Treanor, j'aimerais que vous preniez le document suivant,
13 intercalaire numéro 30, classeur 2. Il s'agit du compte rendu d'une
14 conférence qui s'est tenue au mois de juillet sur la préservation des
15 terres.
16 Avant de parler des parties que vous avez mises en évidence, pourriez-vous
17 nous informer de la nature de cette conférence ?
18 R. Oui, tout à fait. A titre de préface, je dirais que ce procès-verbal,
19 ce compte rendu témoigne de la nouvelle ère par lequel passe le parti dans
20 son organisation. J'en ai déjà parlé. Nous disposons davantage de procès-
21 verbaux, de réunions. Il s'agissait surtout de réunions réunissant un grand
22 nombre de responsables. Etait présent également le Dr Karadzic si je ne
23 m'abuse et sans tenir compte des notes in extenso de la réunion de
24 l'assemblée elle-même. Il s'agit de la première réunion pour laquelle nous
25 avons une trace, une trace complète. Le titre de la conférence est quelque
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1 peu pompeux. C'est le moins que l'on puisse dire mais il s'agit de parler
2 de la question de la propriété des biens immobiliers. Les dirigeants du SDS
3 souhaitait empêcher les non-Serbes d'acquérir des biens immobiliers et de
4 s'installer dans ce qui était considéré comme des régions, des zones serbes
5 de la Bosnie-Herzégovine.
6 Q. Nous en arrivons au passage que vous avez mis en exergue, page 3 de la
7 traduction anglaise. Pourriez-vous nous faire part de vos lumières ?
8 R. Oui, tout à fait. M. Krajisnik déclare, selon ce compte rendu que : "Le
9 principal objectif de la réunion est de mieux connaître les actions du SDS
10 en matière de protection de la propriété foncière. Les terres autour des
11 grandes villes constituent le principal problème. Ces zones sont encombrées
12 d'hommes ici de Sandzak et d'autres nations. C'est la raison pour laquelle
13 personne n'a le droit de vendre des terres et les autres villageois doivent
14 désigner les personnes qui se livreraient à ces activités. Il s'agit
15 aujourd'hui de la tâche la plus importante que nous incombe."
16 J'aimerais passer à la conversation interceptée suivante, intercalaire
17 numéro 5. C'est une conversation qui a eu lieu le 18 juillet 1991. De quoi
18 s'agit-il exactement ?
19 R. C'est une autre conversation entre le Dr Karadzic et le M. Krajisnik.
20 M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, l'extrait de cette
21 conversation que nous allons entendre se trouve en page 2 de la version
22 anglaise.
23 [Diffusion de cassette audio]
24 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
25 "Krajisnik : Aujourd'hui, Radovan, nous devrions rencontrer tous les cadres
Page 1343
1 du ministère de l'Intérieur et les cadres de la police. Tu devras venir
2 également. Très bien, je vais organiser cela pour six heures. Ensuite, je
3 devrais te dire, nous avons cette chose, cette réunion dont on a parlé,
4 Lejovac et les autres. Tu veux que j'organise cela pour toi également. Où
5 est-ce qu'on fait cela, disons, cette réunion on pourra la faire ensemble
6 ou peut-être plus tard ?
7 Plus tard. Restons-là, M. [imperceptible]. Ici, d'accord, Monsieur. Dans ce
8 cas, je vais tout organiser, mais tu devras prévoir pour 18 heures et 20
9 heures.
10 D'accord."
11 [Problème technique] [aucune interprétation au bas de la page 78, jusqu'à
12 la page 80, 2e paragraphe, du texte anglais]
13 M. TIEGER : [interprétation] -- 28 juillet 1991, entre M. Karadzic et M.
14 Brdjanin. Monsieur le Président, la première partie de cette conversation,
15 nous allons entendre se trouve en page 14.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
17 [Diffusion de cassette audio]
18 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
19 "Brdjanin : Nous devons procéder à un référendum.
20 D'accord, le référendum, cela c'est pour ceux qui veulent quitter la
21 Yougoslavie.
22 Karadzic : Mais je sais.
23 Brdjanin : Ceux qui ne veulent pas quitter la Yougoslavie n'ont pas besoin
24 d'un référendum.
25 Karadzic : Bien. Nous avons déjà discuté de la façon dont nous allions
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1 résoudre le problème.
2 Brdjanin : Étant donné que le HDZ et le SDA semblent s'être ralliés, cela
3 c'est l'opinion serbe, et le peuple serbe est bien de cet avis également.
4 Karadzic : Je sais, mais la constitution de Bosnie-Herzégovine ne dispose
5 qu'il faut au moins une majorité des 2/3 pour un référendum. Il n'y pas
6 cela en Krajina. Essaie de nous faire. La confiance n'était pas là cette
7 fois, mais j'ai parlé lors du comité central et j'ai l'impression que je
8 puis les convaincre. Je sais exactement ce que je veux dire, lorsque je dis
9 quelque chose. Mais, oui, non, cela c'est vrai. On n'obtiendra pas le 2/3
10 en Krajina. Evidemment, il ne faut pas -- cet enjeu, s'ils veulent
11 absolument faire éclater la Bosnie, s'ils veulent faire sécession, s'ils
12 veulent que la Bosnie fasse sécession de la Yougoslavie, et s'ils ne
13 choisissent pas un état unifié, s'ils le rejettent cela, ils s'exposent à
14 certaines conséquences.
15 Brdjanin : Oui, mais cela c'est l'option à laquelle nous sommes favorables.
16 Quoique l'on ait dit au quartier général, mais il faille en tenir compte.
17 On l'a dit, effectivement, que ce serait un atout avoir dans sa manche."
18 M. TIEGER : [interprétation]
19 Q. Puis avant de passer à la deuxième partie de cette conversation,
20 Monsieur Treanor, j'aimerais entendre vos commentaires, si vous en avez sur
21 cet extrait de la conversation.
22 R. Oui, ici on le voit, je pense que c'est la première fois que nous
23 entendons M. Karadzic parler avec un dirigeant local. Il s'agit de M.
24 Brdjanin qui était, à l'époque, l'un des députés de l'assemblée. A
25 l'époque, il était également vice-président de l'assemblée de la nouvelle
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1 communauté de municipalité de Banja Luka, et il essaie de tempérer
2 l'enthousiasme de M. Brdjanin, qui, en l'espèce, souhaite un référendum.
3 J'imagine, par ce référendum, qu'il souhaitait démontrer que les Serbes
4 souhaitaient demeurer en Yougoslavie. Je ne sais pas exactement de quoi il
5 s'agit. En tout cas, il s'agissait de dire que la Krajina de Bosnie devait
6 rester au sein de la Yougoslavie. Quant à M. Karadzic, il rétorque que nul
7 n'est besoin d'organiser un référendum pour rester en Yougoslavie, ils sont
8 déjà en Yougoslavie, alors à quoi bon de dire qu'il a une stratégie qui
9 était mise au point et que, si certains souhaitent retrancher la Bosnie de
10 la Yougoslavie, des préparatifs ont été faits. Il y a des plans qui
11 existent pour les contrer, il suffit d'être patient.
12 Q. Je vais être clair sur la terminologie. Vous avez utilisé le mot
13 "local", vous parliez des conseils locaux, c'est-à-dire, l'instance en deçà
14 des municipalités. On a parlé de l'échelon ou de la république, à l'échelon
15 régional, l'échelon municipal, et l'échelon local. Est-ce que vous pourriez
16 préciser les choses ? Vous avez parlé d'un dirigeant local, lorsque vous
17 avez évoqué le nom de Brdjanin.
18 R. Oui, tout à fait, j'hésitais un peu. Je pense qu'il faudrait qualifier
19 M. Brdjanin de dirigeant régional. Il semble lancer dans une discussion
20 technique. Qu'est-ce qui constitue une région, je ne vais pas parler de
21 cela, mais il était député issu de l'une des municipalités de la Krajina de
22 Bosnie. Mais, comme je l'ai déjà dit, c'était -- il faisait également
23 partie de l'assemblée de la communauté de municipalités. Je n'ai pas
24 utilisé le qualificatif de local, pour parler de l'échelon de celle de la
25 municipalité. Il faisait partie des dirigeants régionaux, en Krajina de
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1 Bosnie.
2 M. TIEGER : [interprétation] Je pense qu'il nous reste juste assez de temps
3 pour écouter encore un extrait, une conversation qui est reprise en page 16
4 de la version anglaise. Il me semble qu'il est là.
5 [Diffusion de cassette audio]
6 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
7 "Je vais le réprimander. Il va devoir m'expliquer ce qu'il entendait par
8 là. Je vais voir ce qu'il voulait dire, mais ne t'en fait pas. J'ai entendu
9 les décrets. Les documents qui sont adoptés sont importants. Quoi qu'on
10 dise, cela n'a pas d'importance. Je veux dire pas seulement cela, mais cela
11 ne concerne pas que la Krajina. Nous devons sauver tous les Serbes. Nous
12 devons les préserver de ce genre de problème.
13 "Mais exactement.
14 "Je l'ai dit au comité central, Slobo va recevoir vingt milliards de
15 dollars. On a offert à Slobo vingt milliards de dollars s'il nous laissait
16 tomber. Je sais il ne va pas le faire, car nous voulons une Bosnie
17 complète, toute la Bosnie. Cela c'est notre patrie. Je veux dire, on a un
18 droit. On a le droit d'être en Bosnie et personne n'a le droit de nous
19 voler la Yougoslavie alors, ou nous retirer de la Yougoslavie. Que l'on
20 soit en minorité ou en majorité cela n'a pas d'importance. Nous allons
21 régionaliser la Bosnie et leur permettre d'avoir leur coin. Ils peuvent
22 constituer une région, cela n'est pas un problème. Qu'ils le veulent ou
23 non, en Suisse il y a des cantons et des régions. C'est également une
24 répartition ethnique purement ethnique. Il s'agit de préserver le style de
25 vie, la manière de vivre de chacun.
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1 "Enfin, je ne sais pas. Cela dépend. Cela dépend d'eux. Si c'est une bonne
2 proposition, je pense qu'ils l'accepteront. Cela dépend de vous, Monsieur.
3 C'est cela qu'il faut leur dire. Si vous essayez de contrôler la Bosnie-
4 Herzégovine, si vous voulez détruire la Bosnie-Herzégovine, si vous voulez
5 la séparer de la Yougoslavie, et bien vous complotez pour intenter à la vie
6 de la Bosnie-Herzégovine.
7 "Maintenant le principal c'est qui fait quoi. Si vous bougez, c'est votre
8 faute. Si la Bosnie-Herzégovine éclate, c'est votre faute. Moi, j'étais
9 pour une inspection en Herzégovine. Personne ne peut séparer l'Herzégovine
10 orientale. Je veux dire séparer de la Yougoslavie. Personne. Rien ne peut
11 se faire sans que cela se remarque. De toute façon, ils feront rien.
12 Personne ne peut laisser parler de la Yougoslavie. Je pense que l'approche
13 est bonne. Il ne faut pas que tu t'en fasses. Il faudrait plutôt bien se
14 dire que cela fait partie intégrante de la Yougoslavie. Il n'y a pas
15 nullement question de libérer qui que ce soit pour l'instant."
16 M. TIEGER : [interprétation] Monsieur Treanor, je suis mal à l'aise à
17 l'idée de vous demander d'aller vite en besogne. L'horloge tourne. Je pense
18 que nous allons devoir en rester là. Je ne sais pas si nous devons nous
19 interrompre ici. Nous pourrions continuer de vous écouter lundi.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si vous pouvez le faire en une ou deux
21 minutes, très bien. Mais sinon, je pense que nous allons devoir lever
22 l'audience.
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Restons-en là pour l'instant et nous pourrons
24 toujours reprendre demain.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Treanor, je vous le dis, parce
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1 que je vous l'ai déjà dit, c'est un rappel que vous ne pouvez parler à qui
2 que ce soit de la déposition que vous avez faite et de celles que vous
3 ferez à l'avenir dans ce Tribunal.
4 Nous allons lever la séance jusqu'à lundi après-midi. Nous reprendrons
5 lundi à 14 heures 15 dans la salle numéro I, c'est-à-dire, dans cette
6 salle.
7 Si plus personne n'a quoi que ce soit à ajouter, l'audience est levée.
8 --- L'audience est levée à 19 heures 01 et reprendra le lundi 23 février
9 2004, à 14 heures 15.
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