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1 Le jeudi 24 juin 2004
2 [Audience publique]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 06.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à tous. Madame la Greffière,
6 veuillez citer l'affaire, s'il vous plaît.
7 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agit de l'affaire IT-00-39-T,
8 l'Accusation contre Momcilo Krajisnik.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Madame la Greffière.
10 Monsieur Tieger, hier après-midi, nous avons terminé avec une situation
11 quelque peu confuse. Pourriez-vous nous dire, s'il vous plaît, quelles ont
12 été les conclusions de vos recherches ?
13 M. TIEGER : [interprétation] Oui, oui absolument. Il m'a semblé que la
14 manière la plus rapide de régler le problème qui était soulevé hier,
15 consistait à prendre le passage qui serait présenté devant la Chambre
16 correspond aux entrées du journal en donnant les pages dans un ordre
17 séquentiel, tel qu'elles apparaissent dans les pièces qui ont été fournies
18 et parmi l'ensemble des pièces qui ont été fournies à la Chambre. Pour
19 autant que je puisse comprendre, certains passages présentés à la Chambre
20 n'ont pas été photocopiés correctement.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.
22 M. TIEGER : [interprétation] Tel que j'entends les choses maintenant, ceci
23 sera présenté dans l'ordre approprié.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous pouvons maintenant poursuivre sans
25 qu'il y ait de confusion. Monsieur l'Huissier, veuillez chercher le témoin,
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1 s'il vous plaît, pour le faire rentrer dans le prétoire.
2 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Okun.
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Comme je vous l'ai dit hier, cela va
6 s'en dire que vous êtes toujours tenu par la déclaration solennelle que
7 vous avez faite, la même chose s'applique au témoignage d'aujourd'hui.
8 Monsieur Tieger, vous avez la parole.
9 LE TÉMOIN : HERBERT OKUN [Reprise]
10 [Le témoin répond par l'interprète]
11 M. TIEGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
12 Interrogatoire principal par M. Tieger : [Suite]
13 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur l'Ambassadeur.
14 R. Bonjour, Monsieur.
15 Q. Monsieur l'Ambassadeur, quand nous avons terminé hier, nous regardions
16 une entrée de votre journal datée du 24 avril 1993, qui se terminait avec
17 le numéro ERN 0164531. Je viens d'attirer votre attention sur deux entrées
18 ici. Je me souviens bien sur la page ERN 4532, lorsque nous avons constaté
19 qu'il y avait quelques problèmes quant à la numérotation des exemplaires
20 qui avaient été fournis à la Chambre. Etant donné que nous avons souligné
21 ce problème, je souhaite attirer votre attention sur cette réunion en
22 question et à quelques entrées qui figurent dans votre journal à cet égard.
23 Vous devez avoir la page 4532 sous les yeux. Je souhaite évoquer deux
24 entrées, une qui apparaît à gauche en face en regard d'un astérisque. C'est
25 le Dr Karadzic qui s'exprime et l'entrée précise : "Nous savons que Kupres
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1 est vital pour les Croates, comme la Posavina l'est pour nous. Avant la
2 guerre, nous avons conclu un accord avec Boban : Kupres/Posavina."
3 Sur la page suivante, à la page suivante de votre journal, même numéro ERN,
4 c'est le Dr Karadzic qui s'exprime : "Que se passera t-il si les Serbes de
5 Krajina donnent une partie du territoire à la Croatie en échange d'un
6 territoire qui figure au numéro 3 ?"
7 Pourriez-vous nous aider, s'il vous plaît ? Lorsque le Dr Karadzic
8 s'exprime là-dessus, qu'entend-il, et qu'évoque t-il lorsqu'il parle de cet
9 accord avec Boban ou la proposition, en vertu de quoi les Serbes de Krajina
10 échangent une partie de territoire pour une partie de territoire qui serait
11 donnée aux Serbes de Croatie, dans le cadre du plan Vance-Owen ?
12 R. Le Dr Karadzic n'était, comme nous le savons, pas satisfait de la carte
13 Vance-Owen. Les dirigeants serbes de Bosnie étaient peu satisfaits de cela.
14 Ceci a pu être établi. Il y avait et on suggérait, à ce moment-là, de
15 modifications, ce que nous appelons ici une négociation. Cette négociation,
16 ceci ne s'appliquait pas à la Bosnie proprement parler. Peut-être qu'il
17 s'agissait de la Krajina de Bosnie, mais peut-être qu'il s'agissait de la
18 Krajina de Croatie, de la Vojvodine. Je suppose que c'est difficile à dire.
19 On ne sait pas exactement s'il s'agissait d'un marchandage à l'intérieur ou
20 à l'extérieur car il dit : "-- donnait un territoire à la Croatie --" On
21 suppose qu'il est en train de dire que nous allons remettre une partie de
22 la région occidentale de la Bosnie à la Croatie, pour un échange de
23 territoire qui nous sera donné. Qu'en est-il si les Serbes de la Krajina
24 donnent un territoire à la Croatie pour que nous puissions utiliser le
25 numéro 3 ? Pardonnez-moi, le numéro 3 -- il s'agit de la province, numéro 3.
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1 Ici, à l'ouest, il s'agit de la Posavina qui est la province numéro 3.
2 De toute façon, c'était une idée qui ne pouvait aboutir. Il est en train de
3 proposer ou dire que les Serbes de Bosnie seraient disposés à donner un
4 territoire à la Croatie en échange d'autres territoires. Ce n'est pas
5 quelque chose que l'on pouvait accepter. Lord Owen répond, en disant qu'il
6 s'agit-là d'un problème distinct et poursuit, en disant : si vous pouvez le
7 faire d'une façon officieuse, cela vous regarde. Les zones protégées des
8 Nations Unies, UNPAS, sont tous distinctes au plan géographique et en
9 vertu du statut actuel. Lorsqu'il a parlé des zones protégées des Nations
10 Unies, cela indiquait clairement que Lord Owen a supposé -- ou déduit,
11 d'après ce que disait Karadzic, qu'il parlait de la Croatie car les zones
12 protégées des Nations Unies ne se situaient qu'en Croatie.
13 On voit ici Karadzic qui suggère marchandage, autrement dit, un échange du
14 territoire en Bosnie pour un échange de territoire en Croatie, sur quoi
15 Lord Owen répond que c'est impossible.
16 Q. Monsieur l'Ambassadeur, je souhaite attirer votre attention très
17 rapidement, puisque nous devons agir avec célérité, sur deux entrées qui
18 font état de questions que vous avez déjà abordées de façon assez
19 approfondie. Je souhaite que nous tournions vers la page comportant le
20 numéro ERN 0462533 [comme interprété]. Il y a en haut à gauche de la page,
21 une entrée qui sont les commentaires de "MK", M. Krajisnik, qui indique :
22 "Aborde la question de Sarajevo et propose de solutions pour les parties et
23 les quartiers à 'l'intérieur' des murs et à 'l'extérieur'."
24 Plus bas, une indication sur la carte qui se poursuit, en
25 disant : "RM" - Ratko Mladic - "souhaite que l'ensemble de la rive gauche
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1 de la Drina (d'aucune façon" -- s'est souligné - "deux points, DLO/HSO)"
2 Lord Owen et vous-même.
3 Ces deux entrées illustraient-elles encore une fois les propos de M.
4 Krajisnik qui abordent la question de la division de Sarajevo, et le
5 général Mladic met en avant la demande des Serbes de Bosnie portant sur
6 l'ensemble de la région de la Drina ?
7 R. Oui, c'est exact. M. Krajisnik, comme nous l'avons évoqué à maintes
8 reprises déjà, est vivement intéressé par la question de la division de
9 Sarajevo. Ceci en est encore un exemple. Après cela, je vois que nous nous
10 avons abordé la question de Popovo Polje, qui se trouve dans la partie sud-
11 est, et la région de Nevesinje et de Sarajevo, encore une fois. Le général
12 Mladic a dit que les Serbes de Bosnie souhaitaient s'approprier l'ensemble
13 de la rive gauche de la Drina. Nous le savions déjà, puisque ceux-ci
14 l'avaient déjà répété à maintes reprises, et leurs activités et le
15 nettoyage ethnique dans cette région semblaient corroborer cela. J'ai dit
16 non, qu'il n'en était pas question.
17 Les régions qui ont été abordées les plus souvent sans doute, sur
18 lesquelles insistaient les dirigeants serbes de Bosnie de façon requérante
19 et soutenue, étaient la rive gauche de la Drina, la rive ouest de la Drina,
20 le corridor, et, en particulier, le Brcko, qui est le goulet d'étranglement
21 dans ce corridor, et Sarajevo. Parmi ces régions, les revendications
22 territoriales, qui revenaient sans cesse, les trois régions qui étaient
23 toujours mis en avant pour ce qui est du nombre de fois, où nous avons
24 entendu leur demande à cet égard et leur niveau d'insistance, portait sur
25 la division de Sarajevo, la prise de contrôle de la rive ouest de la Drina
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1 et Brcko, qui était le goulet d'étranglement dans le corridor que nous
2 avions évoqué.
3 Q. Monsieur l'Ambassadeur, si je puis attirer votre attention rapidement
4 sur deux réunions supplémentaires. La première réunion est une réunion qui
5 s'est tenue le 24, encore une fois le 24 avril 1993. Cette réunion commence
6 à la page ERN R0164535. Il y a une entrée plus particulièrement sur
7 laquelle je souhaite attirer votre attention qui se trouve à la page
8 suivante, 4536. Il s'agit là d'une réunion entre vous-même, Lord Owen, et
9 le président Cosic et le président Milosevic.
10 Encore une fois, je crois qu'il s'agit de quelque chose que vous avez
11 abordé, de façon approfondie, déjà, mais je souhaite attirer votre
12 attention sur une entrée qui se trouve en bas à droite de ce document,
13 portant le numéro 4536, M. Milosevic dit : "C et moi-même" -- je suppose
14 qu'il s'agit de Cosic et moi-même - "nous allons parler avec Karadzic et
15 Krajisnik de la présidence," et il y a un manque. Je n'arrive pas à lire --
16 R. Le mot est "consensus" et "int." représente la présidence intérimaire.
17 Q. Le passage poursuit, en disant: "Nous allons parler avec K et K" -
18 Karadzic et Krajisnik - "à la fin de la journée, nous y verrons plus
19 clair. Nous vous tiendrons informer. Nous allons parler demain."
20 Encore une fois, Monsieur l'Ambassadeur, il s'agit là, encore une fois, de
21 la présentation de ces deux personnes, le président Milosevic et Cosic
22 comme étant les deux hauts dirigeants des Serbes de Bosnie, K et K ?
23 R. Oui. Cela ne faisait aucun doute dans leurs esprits et dans les nôtres.
24 Q. Monsieur l'Ambassadeur, si je peux attirer votre attention maintenant
25 sur l'entrée semblable lors d'une réunion qui s'est tenue le 25 avril 1993,
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1 numéro ERN RO164553. Il s'agit d'une réunion qui commence par prise de
2 parole du président Cosic, le président Bulatovic et Milosevic également.
3 Le Dr Karadzic et Krajisnik sont arrivés à cette réunion à 16 heures
4 d'après-midi. "SM" - Slobodan Milosevic - "explique en notre présence à
5 Radovan Karadzic et Momcilo Krajisnik," -- indiquées par les initiales --
6 "où nous sommes par rapport au protocole d'accord et aux accords
7 provisoires ainsi que la carte."
8 J'attire votre attention ici. Il s'agit d'une illustration encore une fois
9 de ce que vous avez dite précédemment. A moins que vous ne souhaitiez faire
10 un commentaire, nous allons passer au point suivant.
11 R. Ici, je ne parlerais, Monsieur Tieger, qu'une référence est faite
12 encore au corridor en bas de la page R0164536. En bas, à droite de ce
13 document, le président Milosevic dit, encore une fois : "Pour ce qui est de
14 la carte, l'élément clé est le corridor, le corridor de Posavina." Il
15 poursuit, en disant : "S'il vous plaît, parlez en à Tudjman et Izetbegovic
16 à propos de la province numéro 3, que la province numéro 3 était la
17 province à ethnicité mixte, croate et musulmane. C'était la province qui
18 jouxtait la Sava et qui coupait le corridor qui allait de Belgrade à Banja
19 Luka. Il s'agissait, encore une fois, d'une référence à ce goulot
20 d'étranglement à Brcko.
21 A cet égard, je dois préciser qu'avant la guerre, l'opstina de Brcko
22 n'avait aucune majorité ethnique. Parmi les trois groupes ethniques, qui
23 vivaient à Brcko, les Serbes étaient en minorité et
24 80 % de cette province était non-Serbe. Dans l'opstina de Brcko, lors du
25 recensement qui a eu lieu avant la guerre, Brcko était habité à
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1 40 % par des Musulmans, 30 % par des Croates et 20 % par des Serbes de
2 Bosnie. Les chiffres exacts sont de 39 %, 29 % et 20 %. Un cinquième de
3 cette province était Serbe, 80 % environ des habitants de cet opstina,
4 d'après le recensement de 1981, n'était pas des Serbes de Bosnie. C'était
5 soit des Croates de Bosnie, soit des Musulmans de Bosnie. Néanmoins, les
6 Serbes insistaient farouchement, ils voulaient, à tout prix, que cette
7 province devienne une province serbe, non pas un opstina, mais une province
8 au sein de la Republika Srpska.
9 Que devait-il advenir de ces autres personnes ? Car la population de cet
10 opstina, avant la guerre, était de 80 000, j'entends, à Brcko, 60 000
11 habitants environ n'étaient pas des Serbes de Bosnie. Ils allaient être
12 nettoyé ethniquement, ce qui a, effectivement, été le cas.
13 Il s'agit d'un exemple concret ici de cette insistance de la part des
14 Serbes de Bosnie, de cette exigence de leur part. On entend Milosevic dire
15 ici que c'était clé. C'était un opstina qui n'était pas serbe. Ceci a été
16 fait, évidemment, pour des raisons stratégiques. Cela, nous le savions.
17 Tout un chacun le savait. Ce que cela impliquait, c'était le nettoyage
18 ethnique de la région, par la force et par la violence, des peuples qui
19 composaient 80 % de la population de cet opstina.
20 M. TIEGER : [interprétation] Pour les besoins du compte rendu d'audience,
21 Monsieur le Président, la référence fait par M. l'Ambassadeur est 4536 et
22 fait allusion à la réunion qui s'est tenue, le 24 avril.
23 Q. Monsieur l'Ambassadeur, j'aimerais, maintenant, vous montrer, s'il vous
24 plaît, un document qui est un document sur une session élargie du conseil
25 pour la coordination des positions et de la politique étatique, tenue le 21
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1 janvier 1993. Il s'agit de notes sténographiques. Je sais que vous avez
2 déjà eu l'occasion de regarder ce document. Il s'agit d'un exemplaire d'un
3 document auquel vous avez eu accès précédemment, avec l'autorisation de la
4 Chambre ainsi que de la Défense, auxquels ceci a déjà été précisé, je
5 souhaite présenter ce document au témoin pour qu'il puisse répondre aux
6 questions.
7 Q. D'abord, Ambassadeur. Dites-nous : est-il exact que cette réunion a eu
8 lieu pendant les négociations qui ont eu lieu pendant le plan de paix
9 Vance-Owen ?
10 R. Oui. Comme j'ai mentionné plutôt, le plan a été présenté aux trois
11 parties dans la première semaine du mois de janvier, c'était présenté à la
12 suite d'une discussion initiale concernant le plan, qui a pris environ deux
13 semaines. C'est ce que j'ai consigné dans mon journal.
14 Q. Est-ce que vous avez déjà eu la possibilité de passer en revue ce
15 document et d'établir qui étaient les participants et quels étaient les
16 sujets discutés ?
17 R. Oui, j'ai eu cette occasion, effectivement.
18 Q. Pourriez-vous, je vous prie, donner à la Chambre, qui étaient présents
19 et de quoi discutait-on, principalement ?
20 R. Oui. Ce comité de coordination a tenu une réunion qui avait convoqué 20
21 dirigeants les plus importants, au sein du monde politique et militaire en
22 Yougoslavie, compris la Serbie et le Monténégro. C'était une réunion
23 convoquée avec eux, de concert avec les dirigeants serbes. C'était les
24 décideurs les plus importants qui étaient convoqués, qui faisaient partie
25 de ces groupes, je parle de l'Yougoslavie, y compris la Serbie et le
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1 Monténégro et les Serbes de Bosnie, les dirigeants les plus proéminents.
2 Q. Pendant cette réunion, quelles étaient les questions sur lesquelles, on
3 s'est concentré particulièrement ?
4 R. Ils ont parlé du plan Vance-Owen. Ils ont passé en revue l'ensemble du
5 plan, je dirais que l'emphase a été mise sur deux questions principales, la
6 question territoriale et la question ethnique. En fait, toutes les
7 questions ont été abordées lors de cette réunion, c'est-à-dire, les trois
8 aspects du plan de paix Vance-Owen : les principes constitutionnels, la
9 carte, ainsi que les accords militaires. Ces trois questions ont été
10 discutées, de façon très approfondie, par le groupe de coordination. Je me
11 souviens que la réunion a duré plusieurs heures, presque trois heures. Je
12 crois que la réunion a commencé vers cinq heures de l'après-midi et s'est
13 terminée vers huit heures du soir. Il s'agissait d'une réunion qui a duré
14 trois heures. Toutes ces questions ont été couvertes, de façon bien
15 approfondie.
16 Q. Je souhaiterais attirer votre attention sur quelques passages.
17 M. STEWART : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, y a-t-il
18 une version en B/C/S de ce document ?
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Tieger, je vous écoute.
20 M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, ce document est déjà
21 versé au dossier. Il a été versé au dossier dans le cadre du témoignage de
22 M. Treanor, effectivement, il y a une version en B/C/S qui est disponible.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mme la Greffière vient de m'informer
24 qu'il s'agit d'un document qui se trouve dans le classeur P65 à
25 l'intercalaire 220.
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1 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai discuté avec M.
2 Harmon de ceci, il y a quelques jours. Je voulais simplement dire que ce
3 n'est pas la pratique de la Défense d'apporter chaque pièce avec soi chaque
4 jour, car nous avons reçu un grand nombre de documents, et les transporter,
5 tous les jours, au Tribunal et les ramener à la maison les soirs est très
6 compliqué. Il s'agit d'une tâche assez lourde pour ce qui nous concerne. Il
7 serait utile si nous pouvions savoir à l'avance quel sera le document
8 abordé, de façon à ce que nous puissions l'apporter. Il y a très grand
9 nombre de classeurs et de documents, il nous est bien difficile de les
10 transporter tous, tous les jours. Je sais que le nombre de documents ne va
11 qu'augmenter au cours du procès.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je comprends, Maître, mais je crois que
13 la liste des pièces à aborder du 22 juin a été distribuée. Je ne sais pas
14 si vous l'avez reçu. Concernant les pièces Treanor, que l'on allait
15 présenter lors de l'interrogatoire du témoin, vous ont-t-elles été
16 communiquées ? Je ne sais pas si vous l'avez reçu. Il y a une indication
17 assez claire des documents que vous pouviez vous attendre à avoir dans ce
18 prétoire.
19 M. STEWART : [interprétation] Ce sera absolument génial, Monsieur le
20 Président, si nous pouvions avoir cette liste, effectivement, c'est une
21 solution parfaite si nous pouvions consulter une liste préalablement. A ce
22 moment-là, nous saurions quel document apporté, mais nous n'avons pas reçu
23 cette liste, Monsieur le Président.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Je crois qu'il est peut-être
25 une mission quant à la communication entre les deux parties, mais nous
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1 pourrions, certainement, vous fournir l'original. L'original, en fait, se
2 trouve ici.
3 [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous pouvons, certainement, permettre à
5 M. Krajisnik de suivre. Je sais que Mme la Greffière est bien préoccupée
6 par ce fait. Elle n'aime pas tellement remettre des documents, mais nous
7 lui faisons confiance.
8 M. STEWART : [interprétation] Très bien. Nous comprenons les raisons
9 pratiques de ce que vous venez de nous dire, et nous vous en remercions par
10 avance.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Tieger, la liste du 22 juin
12 dont nous avons parlé hier, la liste qui ne se trouvait pas entre les mains
13 de la Défense, je ne sais pas pour quelle raison, mais est-il possible que
14 cette liste soit communiquée ou une copie de cette liste soit communiquée à
15 la Défense ?
16 M. STEWART : [interprétation] En réalité, Monsieur le Président, je ne
17 savais même pas qu'une telle liste existait. La raison pour laquelle je
18 n'ai jamais demandé que l'on me communique ce document, c'est que je ne
19 savais même pas qu'il existait. C'est la raison pour laquelle je n'ai
20 jamais fait une demande auprès de mes collègues.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il faut nous assurer que les documents
22 contenant les heures d'audition et les heures de l'interrogatoire ainsi que
23 les listes que l'on désire aborder soient communiquées aux parties à temps,
24 c'est-à-dire, avant le début de l'interrogatoire d'un témoin.
25 M. TIEGER : [interprétation] C'était certainement mon intention, mais je
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1 crois qu'il y a eu certains malentendus. Je ne sais pas ce qui s'est passé
2 exactement, mais, pour l'avenir, nous allons nous assurer à ce que la
3 Défense le reçoive.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, c'est, effectivement, une bonne
5 nouvelle. J'espère que la Défense pourra toujours recevoir, à l'avenir, les
6 documents et j'espère que cette omission ne surviendra pas de nouveau.
7 M. STEWART : [interprétation] Bien, Monsieur le Président. Nous venons de
8 résoudre ce problème à l'instant grâce à l'aide de Mme la Greffière, et
9 nous pouvons poursuivre.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Poursuivez, je vous prie, Monsieur
11 Tieger.
12 M. TIEGER : [interprétation]
13 Q. J'aimerais que l'on parle de quelques commentaires émis par les
14 participants, les personnes qui étaient présentes à la réunion. D'abord, il
15 y a un commentaire de Vladislav Jovanovic, qui peut être retrouvé à la page
16 19 dudit document. M. Jovanovic dit : "Le lien territorial avec la Serbie
17 et le Monténégro, en d'autres mots, avec l'Yougoslavie, doit être assuré,
18 de façon indiscutable, non pas d'une façon transitoire. Ce qui est très
19 important, c'est de nous assurer que le territoire que nous avons obtenu
20 soit un territoire national et homogène, et que cela soit fait le plus tôt
21 possible, non pas par moyen de nettoyage ethnique. Nous repoussons l'idée
22 du nettoyage ethnique tel qu'écrit. Ce qui est important, c'est que la vie
23 soit possible en Bosnie-Herzégovine et tout le monde soit transféré vers
24 leur province originale, le plus vite possible. C'est un but stratégique
25 auquel nous aspirons et qui doit être exécuté le plus vite possible."
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1 M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, les interprètes me
2 demandent de ralentir. J'espère qu'ils ont une copie de ce document.
3 J'essaierai de lire plus lentement lorsque je ferai référence à certains
4 passages de ce document.
5 Q. Ambassadeur, dites-nous, d'abord, si vous pouvez nous expliquer ce dont
6 parle M. Jovanovic pour ce qui est des positions prises lors de la
7 discussion du plan de Paix Vance-Owen.
8 R. Jovanovic était le ministre des Affaires extérieures pendant cette
9 période. Il dit qu'il n'a pas été impliqué très profondément dans les
10 négociations. C'est la raison pour laquelle il dit : "Je suis un amateur en
11 coulisse." Mais ce qu'il dit, en réalité, ici, c'est que le nettoyage
12 ethnique mené par la force et la violence n'aide pas la cause bosniaque
13 serbe au point de vue international. C'était le cas, il le savait. C'était
14 clair. C'est la raison pour laquelle il évoque le fait que le nettoyage
15 ethnique doit être fait, de façon un peu plus délicate. C'est ce que le
16 conseil vient tout juste de lire. Le Procureur vient de donner lecture de
17 ce passage.
18 Q. Après le commentaire de M. Jovanovic à la page 20, le Dr Karadzic
19 répond. Il y a une partie à laquelle je souhaiterais attirer votre
20 attention, c'est un passage qui se trouve au bas de la page lorsque le Dr
21 Karadzic dit : "Je crois que ce dont parle Jovanovic est déjà arrivé à
22 grande envergure. Notre opinion était partagée à Zvornik, la population à
23 Zvornik était 50/50 %. Le nombre des habitants à Zvornik était le même, il
24 y avait environ 50 000 habitants; ils étaient tous serbes."
25 J'aimerais, également, attirer votre attention sur les commentaire faits
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1 par M. Krajisnik à la page 21 et à la page 22. Au bas de la page 21,
2 Monsieur Krajisnik dit : "Permettez-moi de commencer par ce que M.
3 Jovanovic a dit. Radovan semble appuyer ce point de vue. Le problème n'est
4 pas le fait que 45 % du territoire et si le territoire s'étendra sur 55 %.
5 Donner une partie aux territoires, qui sont purement serbes, est la plus
6 grande ressource que nous avons sur nos territoires."
7 Il y a d'autres commentaires faits par M. Krajisnik sur la page 22 : "Il
8 serait catastrophique de penser d'un territoire de 45 % puisque ce n'est
9 pas important à savoir quel est le pourcentage du territoire, mais bien de
10 savoir quelle est la qualité du territoire." Il parle du besoin d'établir
11 des cartes. Il dit -- vers le milieu de la page, à la page 22, il dit :
12 "Nous devons rendre une partie à la fois, soit par la politique, d'autres
13 par l'immigration et d'autres parties en faisant des accords."
14 Ambassadeur, de nouveau, si vous pouvez nous fournir quelques commentaires
15 concernant les questions qui ont été discutées entre Karadzic, Krajisnik et
16 Jovanovic.
17 R. C'est exactement ce qu'ils nous avaient dit autour de la table de
18 négociation. Ils parlent d'une façon dont ils pourraient démanteler
19 l'Yougoslavie. Le besoin du nettoyage ethnique également est abordé ici. M.
20 Jovanovic dit : "Ne le faites pas de façon si brutale. Prenez votre temps,
21 que cela se passe mais plus lentement. Rendez la vie de ces personnes
22 invivable pour que la population décide par elle-même de partir de façon
23 'volontaire'." Ensuite, Karadzic revient en parlant de Zvornik, et il a dit
24 : "Nous avons déjà nettoyé ethniquement Zvornik." C'est ce qu'il dit au bas
25 de la page 20. Il a dit c'était un territoire 50/50. La majorité était
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1 néanmoins musulmane, mais le Dr Karadzic disait c'était une ville qui
2 comptait 50 % de Serbes et 50 % de Musulmans, alors que, maintenant, il n'y
3 a que des Serbes, voulant dire que l'autre moitié, les Musulmans, avait été
4 nettoyée. C'était ce que Karadzic répond à Jovanovic, qui dit : "Allez-y
5 tranquillement avec le nettoyage ethnique puisque cela nous fait du tort au
6 niveau international."
7 M. Krajisnik prend un autre point de vue. Il dit la question n'est pas
8 seulement l'idée du 45 %, car nous avons vu sur la carte hier que le
9 territoire serbe couvrait 43 % du territoire. Il dit : "Ce n'est pas
10 vraiment grave. Ce n'est pas cela qui représente les problèmes." Ce n'est
11 pas à savoir si le territoire s'étendra sur
12 55 % du territoire sur le territoire serbe, alors qu'on a également parlé
13 d'une possibilité de 65 %.
14 Au bas de la page 21, Krajisnik prétendait que la qualité de la terre, les
15 ressources des territoires, qui se trouvaient à l'intérieur de ces 43 %,
16 étaient insuffisantes, c'est-à-dire que cela ne leur rendait pas très
17 heureux. Il a également noté que ce territoire était ethniquement nettoyé.
18 C'est là qu'on voit le mot "pure". Je crois que le mot serbo-croate est le
19 mot "cistiti", qui veut dire "nettoyé", "épuré", ou une variante de
20 "cistiti".
21 Ensuite, à la page 22, M. Krajisnik poursuit dans la même veine, en donnant
22 des exemples, en parlant des ressources qui, selon lui, avaient été prises
23 des Serbes de Bosnie, qui avaient été données à d'autres communautés. Il
24 dit de façon bien franche, il dit, "nous devons penser à la qualité de la
25 terre dont nous disposons, non pas seulement de l'étendu."
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1 Pour M. Krajisnik, la question ici c'était la quantité des terres que les
2 Serbes de Bosnie allaient s'approprier, et quel était le pourcentage qui
3 leur appartiendrait à eux, mais également la qualité de cette terre. Il
4 avait l'impression qu'ils n'avaient pas été traités de façon juste dans le
5 plan Vance-Owen.
6 Q. En dernier lieu, Ambassadeur, je souhaite attirer votre attention sur
7 les commentaires prononcés par Nikola Koljevic, qui se trouvent en bas de
8 la page 24 et en haut de la page 25. Le Dr Koljevic dit : "Nous allons
9 devoir organiser une activité politique assez large -"
10 M. STEWART : [interprétation] Excusez-moi d'interrompre, Monsieur le
11 Président, mais dans le dernière réponse, le témoin a eu des spéculations
12 quant à savoir ce que le mot original en serbo-croate veut dire. Je crois
13 qu'il faudrait peut-être plutôt attendre et qualifier ce point un peu plus
14 tard. Je crois qu'il ne faudrait pas se pencher là-dessus. Nous pouvons
15 certainement élucider ce point immédiatement, puisqu'il ne faudrait pas
16 s'attarder sur ce mot.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Quel était le mot que vous avez dit en
18 serbo-croate, Monsieur le Témoin ? Vous avez parlé d'un terme utilisé en
19 serbo-croate, et nous pouvons demander aux interprètes de nous traduire le
20 mot, si je comprends bien, ces plusieurs variantes du mot "nettoyé".
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Quand j'ai écrit "pure" ici, je présume
22 que c'était sans doute le mot "cistiti" dans une quelconque des formes.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que les interprètes pourraient
24 nous dire ce que le mot "cistiti" veut dire.
25 L'INTERPRÈTE : Cela veut dire "nettoyé", littéralement.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas entendu ce que dit les
3 interprètes.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Quel est le canal que vous écoutez en ce
5 moment, Monsieur ?
6 LE TÉMOIN : [interprétation] J'écoute en langue anglaise. Je n'écoute pas
7 de traduction.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourriez-vous, Monsieur l'Huissier,
9 trouvez le canal 4 ou le canal 0 pour le témoin ?
10 Vous êtes sur le canal 4. Cela veut dire que si quelqu'un parle une autre
11 langue, on vous l'interprétera en anglais. Jusqu'à présent, bien sûr, vous
12 n'aviez pas le besoin d'écouter une interprétation. Puisque l'anglais était
13 la langue principale, les interprètes nous ont dit que cela veut dire
14 "nettoyé" ou "propre".
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
16 M. STEWART : [interprétation] Je crois que cela ne répond pas à
17 l'objection. Le témoin spéculait sur le mot original serbo-croate. Il a
18 émis quelques conjectures concernant le mot original. Je veux savoir quel
19 était ce mot original, car si nous allons mener les débats en anglais, nous
20 n'allons que répéter ce que le témoin dit. Il faudrait trouver d'abord quel
21 est le mot en serbo-croate.
22 M. TIEGER : [interprétation] Nous pourrions peut-être montrer les passages
23 sur le rétroprojecteur.
24 M. STEWART : [interprétation] Oui, plutôt que d'avoir des passages qui ne
25 correspondent pas.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je n'ai pas très bien compris votre
2 commentaire tout à l'heure. Désolé.
3 M. STEWART : [interprétation] C'est moi qui m'excuse, Monsieur le
4 Président. Je n'étais pas très clair.
5 M. TIEGER : [interprétation] Avec votre permission, Monsieur le Président.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
7 M. TIEGER : [interprétation] En anglais, nous pouvons voir que le président
8 Cosic dit, "Momcilo Krajisnik, vous êtes le prochain." En B/C/S, nous
9 voyons, "Momcilo Krajisnik is volute" et, ensuite,
10 M. Krajisnik poursuit son récit. Vous pouvez voir qu'on voit 45 %,
11 55 %, comme en anglais. La phrase qui suit, on pourra demander aux
12 interprètes de nous élucider sur ce point, mais nous pouvons voir qu'il est
13 écrit, "etnicko ciscenja, Srpska teritorija".
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est les mots utilisés. Voulez-vous
15 qu'on demande aux interprètes de traduire les quatre mots que l'on vient de
16 lire en B/C/S ?
17 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, je veux peut-être
18 qu'on soit un peu plus clair.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Poursuivez.
20 M. STEWART : [interprétation] Ce que Mme Cmeric m'informe c'est que
21 "cistiti" est un mot qui veut dire soit "propre" ou "pure", mais
22 grammatiquement parlant, cela ne veut pas dire "nettoyé" ou "purifié". Ce
23 n'est pas le verbe qui est utilisé ici, mais l'adjectif.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous voulez dire que quelque chose peut
25 être nettoyé sans que l'on l'ait préalablement nettoyé, sans qu'on ait fait
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1 l'action de nettoyer.
2 M. STEWART : [interprétation] Je crois que le témoin a dit, Monsieur le
3 Président, que le mot original en serbo-croate était "nettoyé" en forme du
4 verbe. En fait, vous comprenez ce que je veux dire. Il n'est pas nécessaire
5 d'insister là-dessus.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je crois qu'on a compris ce que
7 vous voulez dire. C'est une question d'interprétation et de langue. Vous
8 avez attiré notre attention sur ce point. Nous avons compris. Selon le
9 point de vue de la Défense, vous nous dites que plusieurs interprétations
10 sont possibles. D'accord. Merci d'attirer notre attention là-dessus.
11 Veuillez poursuive, Monsieur Tieger.
12 M. TIEGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
13 Q. J'aimerais que vous nous parlez des commentaires du
14 Dr Koljevic, je vous prie, Monsieur l'Ambassadeur. J'attirais votre
15 attention sur le commentaire fait par le Dr Koljevic, qui commence au bas
16 de la page 24 : "Nous allons devoir organiser une énorme activité politique
17 pour qu'un accord homogène soit émis pendant qu'il est encore temps."
18 M. STEWART : [interprétation] Excusez-moi d'interrompre à nouveau, mais sur
19 le compte rendu d'audience, selon ma dernière observation, afin d'éviter
20 toute confusion dans l'avenir, j'avais dit autre chose à la ligne 9:54:50.
21 Le compte rendu d'audience fait état du fait que j'aurais dit "nettoyer" ou
22 "purifier," alors que ce que j'ai dit, j'ai employé le mot "clean," et non
23 pas "cleaned". J'ai employé le mot "clean", "nettoyer", dans sa forme en
24 tant qu'adjectif, et je n'ai pas l'utilisé dans sa forme verbale. C'est
25 simplement cela que je voulais que l'on note au compte rendu d'audience,
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1 car je vois qu'une erreur s'est glissée et on voyait au compte rendu
2 d'audience, "cleaned" avec un "d", alors que j'ai dit "clean". En fait, ce
3 n'est pas du tout ce que je voulais dire, car cela contredit, en fait, ma
4 thèse.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, j'ai tout à fait bien saisi ce que
6 vous essayez de nous dire. Oui, je vois que cela se trouve à l'écran.
7 M. STEWART : [interprétation] Je suis tout à fait persuadé que toute
8 personne écoutant B/C/S ont très bien saisi c'est clair comme de l'eau de
9 roche.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous avons bien saisi vos commentaires.
11 C'est très clair. Merci.
12 M. TIEGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
13 Q. Je ne vais pas vous relire les commentaires du Dr Koljevic de nouveau,
14 Monsieur l'Ambassadeur. Le Dr Koljevic avait dit qu'il fallait développer
15 les activités concernant un accord homogénéisé pendant qu'il est encore
16 temps. Parlez-nous des commentaires du
17 Dr Koljevic dans le contexte de cette réunion, et que veut dire sa position,
18 et quelle était la position qui avait été prise par les dirigeants serbes
19 de Bosnie ? Pouvez-vous nous élucider ce point.
20 R. Oui, c'est tout à fait. Cela correspond tout à fait avec la politique
21 des Serbes de Bosnie concernant le nettoyage ethnique, c'est-à-dire, le
22 désir d'en arriver à des provinces qui sont ethniquement purifiées. Le Dr
23 Koljevic nous a donné un exemple spécifique. Lorsque le Dr Karadzic parle
24 de Zvornik il dit : "La population était mixte; 50 % était composée de 50 %
25 de Musulmans, alors que, maintenant, nous en sommes arrivés à un accord
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1 d'homogénéisation."
2 Q. Je vous remercie, Monsieur l'Ambassadeur. Je souhaiterais vous montrer
3 à présent, une partie du compte rendu d'audience de la 34e session de
4 l'assemblée nationale de la Republika Srpska, qui s'est tenue entre le 27
5 et 29 août, le 9 et le 10 septembre, et le 29 septembre et le 1er octobre.
6 Monsieur l'Ambassadeur, je souhaite, notamment, attirer votre attention sur
7 un échange entre un délégué répondant au nom de Rajko Kasagic et M.
8 Krajisnik. Ceci figure à la page 47 et se poursuit à la page 48. Pour vous
9 placer rapidement dans le contexte, ou au moins pour faire une paraphrase
10 de ce qu'a dit M. Kasagic -
11 R. Est-ce que je peux prendre un peu de temps pour lire cela, puisque
12 c'est la première fois que je vois cela ?
13 Q. Oui.
14 R. Merci.
15 Oui, merci.
16 Q. Je souhaite attirer votre attention sur un commentaire fait par M.
17 Krajisnik, mais d'abord je souhaite vous placer dans un contexte. Est-ce
18 qu'il est vrai de dire que M. Kasagic exprime ses préoccupations à l'égard
19 d'un problème quant à la question de savoir si les Serbes de Bosnie
20 allaient obtenir le corridor et, ensuite, il suggère qu'il serait
21 éventuellement possible d'abandonner Sarajevo ? Il dit, je cite : "Donnons-
22 leur Sarajevo, et voyant quelle est la valeur de ce que l'on peut obtenir
23 en échange."
24 R. Oui, c'est exact. Rajko Kasagic a souligné avec beaucoup d'insistance
25 l'importance de Brcko, le goulet d'étranglement du corridor, et, en fait,
Page 4294
1 il parle directement de la suggestion d'échanger Sarajevo, les positions
2 serbes à Sarajevo, contre l'obtention des positions serbes fermes à Brcko.
3 M. Krajisnik réagit de manière négative à ces propositions.
4 Q. M. Krajisnik répond. Ceci se trouve vers le milieu du paragraphe, à la
5 page 48 : "Permettez-moi de vous dire messieurs, les Musulmans et les
6 Croates ont demandé d'avoir leur municipalité à Banja Luka, et nous n'avons
7 pas accepter cela car nous devons avoir ce territoire pur."
8 Est-ce que cette réponse de M. Krajisnik, aux commentaires de M. Kasagic,
9 est-ce que ceci est conforme au point de vue qu'il exprimait lors du
10 processus de paix Vance-Owen ?
11 R. Oui, tout à fait.
12 Q. Afin de clarifier quelque chose, dites-moi : est-ce que ces pourparlers
13 de paix ou ces efforts, visant à trouver une solution au conflit, ont
14 continué après le rejet du plan de paix Vance-Owen par l'assemblée des
15 Serbes de Bosnie ?
16 R. Oui, il y a eu d'autres pourparlers, ils ont proposé d'autres plans et
17 d'autres cartes aux parties. Au cours de cette période, en août et
18 septembre 1993, la Conférence internationale sur l'ex-Yougoslavie se
19 poursuivait, elle était présidée par Lord Owen au nom de la Communauté
20 européenne et Thorvald de Stoltenberg, qui a pris le poste de M. Cyrus
21 Vance. On a élaboré d'autres cartes que l'on a présentées aux parties, on a
22 élaboré et proposé d'autres arrangements. Ceci s'est fait au mois d'août et
23 septembre, c'était la période pendant laquelle l'on traitait du plan dit
24 "invincible", ce plan s'appelait ainsi car les parties avaient remarqué un
25 navire de guerre britannique dans l'Adriatique qui s'appelait "Invincible".
Page 4295
1 Les discussions, les cartes et les documents, qui sont issus de cette
2 réunion, étaient appelés, officieusement : "Le plan invincible." En automne
3 1993, et approximativement pendant la même période, un peu plus tard, le
4 président Milosevic et Tudjman ensemble ont proposé un plan appelé : "Le
5 plan Tudjman/Milosevic." Un peu plus tard, mais c'était toujours au début
6 de l'année 1993, le groupe de contact, constitué de six pays, a élaboré une
7 carte qu'ils ont présentée, en juillet 1994. Au cours de cette période,
8 août et septembre 1993, on focalisait surtout sur les discussions et les
9 cartes dites "invincibles".
10 Q. Monsieur l'Ambassadeur, je souhaite, maintenant, attirer votre attention
11 sur une partie de la 37e session de l'assemblée nationale, qui a eu lieu le
12 10 janvier 1994.
13 [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Afin de permettre, plus tard, à ceux qui
15 liront le compte rendu d'audience de retrouver les bons documents, je
16 propose à la Greffière de nous dire quelle était la cote du document dont
17 nous venons de parler et qui a été versé au dossier.
18 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agissait de la pièce à conviction
19 P65, intercalaire 221.
20 M. TIEGER : [interprétation] Ce document fait partie de la catégorie des
21 documents qui font partie de la pièce P65; cependant, dans ma liste, même
22 si l'intercalaire était marqué pour le document précédent, s'agissant de ce
23 document-là, nous n'avions pas encore marqué l'intercalaire mais, encore
24 une fois, il s'agit du document P65.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, d'accord. C'est le document P65.
Page 4296
1 Mais si vous demandez aux parties de se pencher sur 18 classeurs afin de
2 trouver le bon intercalaire, cela paraît très difficile, et il serait
3 vraiment utile si en pouvait avoir le numéro de l'intercalaire.
4 M. TIEGER : [interprétation]
5 Q. Monsieur l'Ambassadeur, je souhaite attirer votre attention sur les
6 commentaires de M. Krajisnik contenus à la page 4 de la traduction, dans le
7 deuxième paragraphe, M. Krajisnik dit : "Croyez-moi que la tragédie la plus
8 grande serait si les Musulmans acceptaient de vivre ensemble avec nous.
9 Vous avez vu comment ils s'entassaient avec les Croates, mais les Croates
10 ne le souhaitaient pas. Nous perdrions notre État. C'est la seule chose que
11 je ne suis pas prêt à accepter. J'accepte, cependant, que l'on obtienne un
12 pourcentage plus petit du territoire que nous avons à présent si nous
13 resterons séparés, si nous avons notre propre État sans les Musulmans."
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Tieger, je vais vous
15 interrompre. Encore une fois, il s'agit de la numérotation. Je vois que le
16 document commence par la page 1 sur 153, ensuite, 2 sur 153 et, ensuite, la
17 page suivante est 1 sur 5. C'est surprenant au bas mot. J'ai l'impression
18 que l'on peut trouver des numéro ERN -- ou plutôt ET. Les deux premières
19 pages ont les mêmes numéros ET, ce qui laisse croire qu'il s'agit du même
20 document, alors que la troisième et la quatrième page et toutes les autres
21 pages ont des numéros différents en haut, ce qui nous surprend également
22 parce qu'apparemment, le numéro en haut porte sur le document et, en bas,
23 on a les numéros de pages. Cela prête vraiment à la confusion. Je ne dis
24 pas forcément qu'il ne s'agit pas du même document, mais ceci nous pousse à
25 nous poser certaines questions.
Page 4297
1 M. TIEGER : [interprétation] Si mes souvenirs sont bons, nous avons traité
2 de cela au moment de l'admission de ces documents suite à la déposition de
3 M. Treanor. Je pense que, visiblement, il s'agit de la même pièce à
4 conviction. Je souhaite d'abord dire pour le compte rendu d'audience qu'il
5 s'agit là du document P65, intercalaire 222.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
7 M. TIEGER : [interprétation] Comme nous l'avons dit, à l'époque, ce
8 décalage apparent vient du fait que certaines parties de cette séance, en
9 particulier, ont été traduites, et à l'époque, ce n'était pas encore
10 entièrement traduit.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si nous avons discuté de cela déjà à
12 l'époque, je m'excuse, mais vous savez que je ne peux pas retenir tous les
13 détails concernant les 18 classeurs. La seule chose qui nous donne de
14 l'espoir est que les mêmes incohérences portant sur la numérotation sont
15 soulevées de manière assez consistante, assez cohérente de temps en temps.
16 M. STEWART : [interprétation] J'allais être quelque peu ironique car,
17 effectivement, nous ne sommes pas, humainement, capables de nous souvenir,
18 absolument, de tous les détails liés à toutes les discussions.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais peut-être qu'il revient plus
20 aux parties qu'à la chambre de s'exprimer avec une certaine ironie.
21 Poursuivez, Monsieur Tieger.
22 M. TIEGER : [interprétation] Merci.
23 Q. Monsieur l'Ambassadeur, compte tenu de ce commentaire de M. Krajisnik
24 que je vous ai lu tout à l'heure, est-ce que vous pourrez nous dire si
25 c'est conforme au point de vue de Krajisnik et des autres dirigeants serbes
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1 de Bosnie au cours du processus de paix Vance-Owen et des pourparlers dans
2 le cadre de ce processus de paix ?
3 R. Oui. Ce commentaire en date du 10 janvier 1994 concerne les points de
4 vue des dirigeants serbes de Bosnie et de M. Krajisnik exprimés lors des
5 discussions Vance-Owen. C'est conforme, également, au document que nous
6 avons examiné en date du 21 janvier 1993. En particulier, cette remarque
7 est complètement conforme aux autres commentaires de M. Krajisnik, je cite
8 : "J'accepterais, cependant, que nous, les Serbes de Bosnie dans la
9 Republika Srpska, obtenions un pourcentage moins élevé du territoire par
10 rapport à ce que l'on a actuellement si l'on reste séparé et si l'on a
11 notre propre État sans les Musulmans."
12 Ceci est, tout à fait, conforme à tout ce que l'on a entendu, ce besoin
13 d'avoir un État, d'avoir un territoire ethniquement pur, et cetera.
14 Q. Pour finir, Monsieur l'Ambassadeur, je souhaite attirer votre attention
15 sur une séquence vidéo qui a déjà été visionnée devant la Chambre.
16 M. TIEGER : [interprétation] Il s'agit de la pièce P70 et la transcription
17 est P70.1 ou P70.1A.
18 [Diffusion de cassette vidéo]
19 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
20 "Nous avons, devant nous, la carte ethnique de l'ex-Bosnie-Herzégovine avec
21 les frontières des territoires tenus aujourd'hui par l'armée de la
22 Republika Srpska. Tout ce que je peux dire, c'est que ce qu'on dit, à
23 savoir que nous contrôlons les territoires peuplés par d'autres communautés
24 nationales, que ceci n'est pas vrai car on peut voir ici la carte ethnique
25 de la Bosnie-Herzégovine. Si l'on met au-dessus un transparent, indiquant
Page 4299
1 exactement nos territoires, territoires tenus par nos forces, nous pouvons
2 voir qu'il s'agit là des territoires de notre peuple. Une telle carte a été
3 présentée, d'après ce que l'on m'a dit, à Genève aussi. L'on a fait
4 comprendre que les Serbes souhaitent que les frontières de notre future
5 république soient la vallée de la Neretva. Ici, ceci correspond surtout au
6 territoire de la Republika Srpska. Il faut nous permettre, sur notre
7 territoire, d'avoir certaines enclaves peuplées par d'autres communautés
8 nationales. Cela va vous poser un problème, en particulier. Pour le moment,
9 c'est indiqué ici comme région dans la ville elle-même. Cela, c'est une
10 région musulmane. Nous, à l'avenir, nous allons uvrer pour une
11 démilitarisation et une délimitation entre les deux communautés nationales,
12 surtout serbes et musulmanes et, éventuellement, avoir une municipalité à
13 part, je veux dire pour la communauté nationale croate. Le territoire de la
14 Republika Srpska représente, en fait, la frontière dans la rivière de la
15 Drina, ensuite, la rivière de la Sava, avec une petite partie qui n'est pas
16 contrôlée, aujourd'hui, par nos forces. En fait, cette partie n'a pas
17 encore été libérée. C'est Orasje. Cela, c'est la frontière. C'est la région
18 de Simberija, d'Ozren et de la Bosnie-Herzégovine de l'est. Cette région-
19 là, d'après nos objectifs stratégiques, nous avons présenté cela à la
20 communauté nationale croate à Graz. Il nous a dit que cette frontière
21 devait délimitée nos deux communautés nationales, et cela, c'est la rivière
22 de Neretva. De toute façon, c'est une continuité de notre territoire. C'est
23 très important, et nous souhaitons qu'il y ait une Republika Srpska en tant
24 qu'unité constitutive, nous permettant la possibilité d'avoir plusieurs
25 autres unités constitutives du peuple croate et musulman. Mais de toute
Page 4300
1 façon, ce n'est pas une condition que l'on pèse, la condition que l'on
2 pèse, c'est que notre république soit unitaire, et non pas constituée de
3 plusieurs parties différentes."
4 [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous avons un problème de transcription,
6 Monsieur Tieger, car nous avons un texte traduit, en anglais, mais la
7 traduction ne fait pas partie du compte rendu d'audience. Nous allons
8 parler de cela plus tard. Poursuivez pour le moment. Nous avons déjà eu un
9 problème de ce genre. Je vais essayer de voir comment on l'a résolu, à
10 l'époque. De toute façon, ceci fait partie du compte rendu d'audience.
11 C'est consigné au compte rendu d'audience que l'on a eu un problème.
12 M. TIEGER : [interprétation]
13 Q. Monsieur l'Ambassadeur, est-ce que vous avez des commentaires par
14 rapport à la présentation faite par M. Krajisnik dans cette séquence vidéo
15 ?
16 M. STEWART : [interprétation] Excusez-moi, peut-être nous en avons déjà
17 parlé, il y a deux semaines, mais est-ce que l'on peut savoir quelle est la
18 date de cette cassette vidéo car, sur la transcription, on voit simplement
19 l'année de 1992. Est-ce que l'on a une date plus précise ?
20 M. TIEGER : [interprétation] Cette question a été soulevée. La réponse est
21 que nous n'avons pas de date plus concrète, mais peut-être que M.
22 l'Ambassadeur peut nous aider afin d'identifier la date approximative à
23 laquelle ces commentaires ont été faits.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, poursuivez.
25 M. TIEGER : [interprétation]
Page 4301
1 Q. Monsieur l'Ambassadeur, est-ce que vous pouvez intégrer cela dans votre
2 réponse ?
3 R. Oui. Je peux répondre à cela. Il est évident, sur la base des éléments
4 internes et des commentaires sur la carte que M. Krajisnik utilise dans
5 cette séquence vidéo, il dit qu'on lui avait montré cela à Genève. Il est
6 évident que la période est entre septembre et décembre. Pourquoi est-ce que
7 je dis cela ? C'est parce que, d'après ce qu'il montre sur le territoire,
8 le territoire occupé par les forces serbes, la ligne de front, et cetera,
9 ceci est un bon indice. Cela, c'est le premier point.
10 Le deuxième point, il dit : "L'on a offert cela à notre peuple à Genève."
11 C'était certainement pendant la Conférence internationale sur
12 l'ex-Yougoslavie à Genève. Le fait qu'il ne mentionne pas du tout le plan
13 Vance-Owen qui a été élaboré en janvier, ceci m'amène à conclure que cette
14 discussion et cette présentation qu'il fait concernant les objectifs des
15 Serbes de Bosnie, que ceci a eu lieu vers le mois de décembre 1992.
16 Quant à sa description de la situation et les deux cartes, la carte en
17 toile de fond et le transparent placé au-dessus, ceci est conforme à la
18 position des Serbes de Bosnie et fait référence au besoin de contrôler la
19 Drina, le corridor, d'avoir un territoire ethniquement pur ou propre ou
20 nettoyé, peut importe la sémantique. On
21 souligne de nouveau la question de Sarajevo. Le problème lié à sa
22 présentation réside dans le fait que lorsqu'il enlève le transparent, qui
23 montre les lignes de front et le fait que l'armée de la Republika Srpska
24 contrôlait 70 % du territoire, nous avons la carte qui se trouve en toile
25 de fond. M. Krajisnik dit que ceci est conforme aux lignes de front, mais
Page 4302
1 ceci n'est pas du tout conforme à cela. Bien au contraire, car le
2 territoire, qu'il revendique sur le transparent, montre que les Serbes
3 occupaient l'ensemble de la rive ouest de la Drina, jusqu'à la rivière de
4 Neretva, il s'agit là d'un territoire énorme. Le long de la rivière Drina,
5 comme nous le savons tous, cette région était peuplée par un grand nombre
6 de Musulmans. Il y avait beaucoup de municipalités musulmanes là dedans,
7 comme Zvornik, Visegrad, et cetera.
8 Les cartes ethniques sont, tout à fait, claires à ce sujet. En ce qui
9 concerne la partie à l'ouest, la Cazinska Krajina et ce qu'on appelait la
10 poche de Bihac, il dit que la rivière Una constitue la frontière et il
11 affirme que ceci est conforme à la situation ethnique qui prévalait avant
12 la guerre, c'est-à-dire, avant le nettoyage ethnique. Ceci n'est,
13 simplement, pas vrai. Il y avait plusieurs opstina, municipalités
14 musulmanes à l'est de la rivière Una. Toute carte démographique se fondant
15 sur le recensement de 1981 ou de 1991 le montre. Cette affirmation, que les
16 lignes de front correspondent à la situation en matière ethnique avant la
17 guerre, est complètement contraire à la vérité. Il suffit de jeter un coup
18 d'il sur la carte pour le constater.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Tieger, je vois l'heure, peut-
20 être, nous pourrions prendre une décision concernant les transcriptions
21 immédiatement. Peut-être que nous ne devrions pas importuner Monsieur Okun
22 avec cela.
23 Monsieur Okun, nous allons reprendre nos travaux dans 25 minutes, nous vous
24 prions de bien vouloir revenir.
25 M. STEWART : [interprétation] Probablement que le témoin a fait un lapsus.
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1 Tout à l'heure, il a dit de "décembre à décembre 1992", mais, clairement,
2 d'après ce qu'il disait préalablement dans sa réponse, il pensait de
3 septembre à décembre de cette année. Je pense qu'il vaut mieux corriger
4 cela immédiatement.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, tout le monde a compris. Merci
6 beaucoup.
7 Monsieur l'Huissier, est-ce vous pourriez faire sortir M. Okun du prétoire.
8 [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]
9 [Le témoin se retire]
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Tieger, je propose
11 qu'immédiatement après la pause, l'on visionne de nouveau la même vidéo,
12 qui dure trois minutes. Le problème c'est que le compte rendu en français
13 ne soit pas pareil que le compte rendu en anglais. Est-ce que les
14 interprètes ont une traduction en anglais ?
15 M. TIEGER : [interprétation] Oui.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'accord, dans ce cas-là, nous pourrions
17 visionner cela immédiatement après la pause. Ce sera ainsi interprété dans
18 les deux langues officielles du Tribunal. Nous allons avoir une pause
19 jusqu'à 10 heures 55.
20 --- L'audience est suspendue à 10 heures 30.
21 --- L'audience est reprise à 10 heures 58.
22 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur l'Ambassadeur, pour des raisons
24 techniques, la Chambre a décidé de réentendre cette vidéo. Vous n'avez,
25 évidemment, pas besoin de répondre à nouveau aux questions. C'est
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1 simplement pour que cette vidéo soit consignée dans le compte rendu
2 d'audience.
3 Monsieur Tieger, poursuivons, s'il vous plaît. Nous allons réentendre cette
4 cassette vidéo de deux minutes 52.
5 [Diffusion de cassette vidéo]
6 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
7 "Nous avons, devant nous, la carte ethnique de l'ex-Bosnie-Herzégovine avec
8 les frontières des territoires qui sont contrôlés aujourd'hui par l'armée
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez arrêter la cassette, s'il vous
10 plaît. Nous n'entendons pas la traduction anglaise sur le canal anglais. Je
11 demande à la cabine anglaise de bien vouloir lire la retranscription de la
12 vidéo en anglais, s'il vous plaît.
13 [Diffusion de cassette vidéo]
14 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
15 "Nous avons, devant nous, la carte ethnique de l'ex-Bosnie-Herzégovine avec
16 les frontières des territoires qui sont contrôlés aujourd'hui par l'armée
17 de la Republika Srpska. Tout ce que je peux dire, c'est que ce que l'on dit
18 aujourd'hui, à savoir que nous contrôlons les territoires qui sont peuplés
19 ethniquement par d'autres communautés nationales, que ceci n'est pas vrai.
20 Ceci est évident car en dessous, nous avons la carte ethnique de la
21 Bosnie-Herzégovine, et si l'on place au dessus un transparent indiquant,
22 exactement, les territoires tenus par nos forces, nous pouvons voir, qu'en
23 fait, il s'agit des territoires appartenant à notre peuple. Une carte
24 semblable à celle-ci a été présentée, d'après ce qu'on m'a dit, à Genève
25 aussi. On a fait comprendre le fait que les Serbes souhaitent que la
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1 frontière de notre future république soit la vallée de la Neretva. Ici,
2 nous avons surtout le territoire de la Republika Srpska. Cela dit, il est
3 permis, sur notre territoire, d'avoir des enclaves qui sont peuplées par
4 une autre communauté nationale. Sarajevo est un problème, en particulier.
5 Pour le moment, c'est marqué ici, nous avons la région, dans la ville elle-
6 même, qui est marquée comme la zone musulmane, mais nous allons uvrer pour
7 la démilitarisation et la délimitation des deux communautés nationales,
8 surtout serbes et musulmanes, et, éventuellement, avoir une autre
9 municipalité peuplée de la communauté nationale croate. Le territoire de la
10 Republika Srpska représente, en fait, la frontière, ici, qui est dans la
11 rivière de la Una, ensuite, la rivière de la Sava, ensuite, une petite
12 partie qui n'est pas tenue par nos forces, qui n'a pas encore été libérée.
13 Cela c'est Orasje. Cela, c'est la frontière. C'est la région de Semberija,
14 d'Ozren et de la Bosnie-Herzégovine de l'est. Cela dit, nous, notre région,
15 d'après nos objectifs stratégiques, nous avons présenté cela à la
16 communauté nationale croate à Graz. C'est la frontière qui doit exister
17 entre nos deux communautés nationales. Cela est la rivière de Neretva, de
18 toute façon, c'est une continuité de notre territoire. Le fait que nous
19 ayons un territoire uni, pour ainsi dire, nous oeuvrons pour cela et pour
20 avoir une unité constitutive de la Republika Srpska, nous permettons qu'il
21 y ait plusieurs autres unités constitutives du peuple croate et musulman.
22 Tout simplement, ce n'est pas une condition que nous proposons comme
23 condition, le fait que notre république doit être unie, et non pas
24 constituée de plusieurs morceaux."
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pour ce qui est de cette traduction, il
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1 me semble que c'est un petit peu différent de ce que nous voyons, ici, sur
2 notre document. L'introduction, ce que le présentateur dit au début de la
3 vidéo n'est pas enregistré ici, autrement dit : "En présence de l'assemblée
4 serbe de Bosnie a montré à notre reporteur,". Est-ce que nous sommes
5 obligés de réécouter la bande ? Non, bien. J'ai remarqué, également, qu'il
6 y avait une variante au niveau de la traduction. Ce que nous avons entendu
7 était un tout petit peu différent de ce nous avons sur notre document.
8 Nous pourrions y revenir à une date ultérieure, un peu plus tard, et
9 comparer et voir s'il y a des différences notables.
10 Nous allons maintenant poursuivre. Monsieur Tieger, vous avez la parole.
11 M. TIEGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
12 Q. Monsieur l'Ambassadeur, le transparent utilisé par M. Krajisnik montre
13 une grande étendue de territoire à l'ouest de la Drina qui est revendiqué
14 par les Serbes de Bosnie. M. Krajisnik dit que ces régions appartiennent à
15 "notre peuple". Est-ce que cette région qui est indiquée sur le transparent
16 correspond à la composition démographique de cette région de Bosnie-
17 Herzégovine avant la guerre ?
18 R. En partie, oui; en partie, non.
19 Q. Si on regarde P273, la carte qui se situe sur votre gauche, est-ce que
20 cette carte indique, clairement, la composition de la Drina au début du
21 conflit ?
22 R. Tout à fait.
23 Q. Ce qui est en vert représente les opstina où les Musulmans sont en
24 majorité ?
25 R. Oui, tout à fait. En vert pluralisme ou majorité des Musulmans dans ces
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1 opstina.
2 Q. C'étaient des opstina qui étaient habitées dans la majorité par des
3 Musulmans avant le début de la guerre ?
4 R. C'est exact.
5 Q. Monsieur l'Ambassadeur, à moins que vous n'ayez d'autres commentaires à
6 faire à propos de la vidéo, je vais terminer mon interrogatoire principal ?
7 R. J'aimerais faire une ou deux observations à propos de la
8 retranscription télévisée de M. Krajisnik. On constate au début de sa
9 présentation qu'il déclare : "Nous sommes ici devant une carte représentant
10 la composition ethnique de l'ex-Bosnie Herzégovine que nous avons pu
11 établir." Cette carte avait été montrée entre le mois de septembre et
12 décembre 1992. A ce moment-là, la Bosnie-Herzégovine était un État reconnu
13 et un membre des Nations Unies. Pourtant M. Krajisnik en parle comme étant
14 l'ex-Bosnie-Herzégovine, à savoir, il nie l'existence, il nie l'existence
15 de cet État.
16 Dans cette affirmation : "Nous possédons des territoires qui ont été
17 occupés par d'autres communautés nationales," n'est pas
18 exact ? Comme nous pouvons le voir, il s'agit là d'une affirmation erronée,
19 eu égard à cette carte représentant la composition ethnique.
20 Egalement, son autre affirmation à propos d'Orasje, l'opstina qui se trouve
21 dans la Posavina, où il dit : "Ils n'ont pas encore pris." Je recherche le
22 nom précis dans les remarques qu'il a faites au trois quart de cette
23 retranscription en anglais où il dit : "Le territoire de la République
24 Serbe de Bosnie représente, en fait, la frontière le long de fleuve Una, le
25 long de la Sava avec quelques petites régions qui ne sont pas encore sous
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1 le contrôle de nos forces, autrement dit, qui ne sont pas encore libérées."
2 Il indiquait par là qu'il y avait quelques régions qui devaient encore être
3 contrôlées par les forces serbes de Bosnie au plan militaire, et régions
4 qui devaient être conquises encore. Il a été très clair à cet égard. Encore
5 une fois, il souligne l'importance pour les Serbes de Bosnie, l'importance
6 du corridor de la Posavina établissant ce lien entre Belgrade et Brcko et
7 Banja Luka.
8 Il insiste sur la continuité du territoire serbe de Bosnie qui était détenu
9 par les forces armées serbes de Bosnie. Ici, il compare les six objectifs
10 stratégiques du 12 mai 1992 à la situation existante au moment où il
11 regarde la carte, à un moment donné, entre le mois de septembre et le mois
12 de décembre 1992. On remarque qu'il se concentre sur les points principaux,
13 les points géographiques principaux. Ce qu'il dit, en substance, quoiqu'il
14 ne le dit pas de façon explicite : nous avons réalisé nos objectifs à
15 l'exception de Sarajevo car, si vous comparez les objectifs de guerre du
16 mois de mai 1992 avec cette présentation-ci, on constate qu'il en parle de
17 façon très précise et avec beaucoup de soin. Il parle des objectifs de
18 guerre, il parle des objectifs stratégiques, et il compare ceci à la
19 représentation sur la carte; l'Una, la Neretva, le corridor, et cetera.
20 Q. Merci, Monsieur l'Ambassadeur.
21 M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai terminé mon
22 interrogatoire principal.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur Tieger.
24 Maître Stewart, la Défense est-elle prête et peut-elle commencer le contre-
25 interrogatoire ?
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1 L'INTERPRÈTE : S'il vous plaît, veuillez allumer votre micro. M. STEWART :
2 [interprétation] Je demande simplement à pouvoir utiliser le pupitre.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il ne s'agit pas d'un bien commun mais
4 de quelque chose qui peut être utilisé par tous.
5 Monsieur Okun, vous allez être contre-interrogé par M. Stewart du conseil
6 de la Défense.
7 Poursuivez, Maître Stewart.
8 Contre-interrogatoire par M. Stewart :
9 Q. [interprétation] Monsieur Okun, vous avez parlé du plan de Paix
10 Carrington qui s'appliquait à l'ensemble de l'Yougoslavie. Vous dites que
11 ceci a été accepté par tout à chacun à l'exception de la Serbie. Cela était
12 une autre façon de le formuler lorsque vous dites à l'exception de la
13 Serbie, vous entendez à l'exception de M. Milosevic.
14 R. Est-ce une question ?
15 Q. Oui, c'est une question. C'est façon appropriée d'exprimer cela ?
16 R. Oui, je pense que j'entendais par là les dirigeants serbes. Je ne sais
17 pas si on peut attribuer ce refus au président Milosevic uniquement.
18 C'était un refus qui émanait des autres dirigeants. Kontic était là
19 également. Ceci a été rejeté par la République de Serbie.
20 Q. Quelle était la raison principale de ce refus ?
21 R. Ils estimaient que cela n'était pas une solution équitable, que cela ne
22 correspondait pas à une solution aux problèmes ou à la position de la
23 République socialiste fédérale d'Yougoslavie à l'automne 1991, au mois
24 d'octobre 1991. C'est cela qui a été débattu. La position était claire,
25 l'Yougoslavie constituait un seul et même pays. La déclaration
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1 d'indépendance de la Croatie et de la Slovénie était considérée comme des
2 mouvements sécessionnistes illégaux. Ils n'acceptaient pas cette position-
3 là, et ils avaient d'autres arguments à proposés.
4 Q. Bien sûr, ils n'acceptaient pas ce qui s'était produit, par exemple, le
5 plan de Paix Carrington, si on regarde un petit peu vers l'avenir, à votre
6 avis, quelles ont été les objections principales faites par la Serbie à
7 propos du plan de Paix Carrington ?
8 R. Il y en avait plusieurs. Je crois que des dispositions concernant les
9 minorités, ce que nous avons intitulé le chapitre 2, la deuxième partie du
10 plan Carrington dans le projet d'accord. Il s'agissait d'éléments qui ont
11 été définis dans le détail, des dispositions détaillées sur la question du
12 traitement des minorités dans les différentes républiques et, plus
13 particulièrement, la question des Serbes vivant en Croatie était abordée.
14 La délégation serbe présente à la Conférence à l'Yougoslavie a estimé
15 qu'ils n'étaient pas traités de façon appropriée par ce plan Carrington. Il
16 faut noter également que la Croatie n'avait pas avalisé, encore, à 100 %,
17 le deuxième chapitre. Leurs objections, entre autres, étaient qu'ils
18 étaient inquiets au sujet de l'avenir du peuple serbe en Croatie.
19 Je dois préciser que la minorité serbe en Croatie représentait environ 12 %
20 de la population totale, 12 % de la population croate qui était des Serbes
21 orthodoxes. C'est sans doute leur principale objection.
22 Q. Il en ressort deux choses. En premier lieu, vous avez indiqué que, bien
23 que dans votre témoignage, vous ayez dit qu'il y avait ce plan de paix qui
24 a été accepté par cinq des six républiques, exception fait de ce que vous
25 venez de dire, autrement dit, la Croatie n'avait pas accepté tous les
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1 éléments de ce plan.
2 R. Hormis le fait, il y avait encore quelques éléments résiduels qui
3 étaient débattus concernant le deuxième chapitre.
4 Q. En résumé, autrement dit, lorsque la Serbie a clairement indiquée
5 qu'elle n'était pas d'accord, il y aurait eu encore un certain nombre
6 d'éléments à couvrir avant de résoudre l'ensemble du problème ?
7 R. Oui, cela est vrai. Quoique les éléments ne fussent pas insupportables,
8 il ne s'agissait pas des éléments très importants au cours de cette
9 conférence. Lord Carrington ne considérait pas qu'il s'agissait de quelque
10 chose qui était insurmontable. De toute façon, ceci a été surmonté, puisque
11 la Croatie a accepté le deuxième chapitre. C'était une question de
12 synchronisation dans le temps plutôt que d'une acceptation globale. Mais la
13 Serbie n'a jamais accepté aucun des éléments de ce plan Carrington.
14 Q. Le souci à propos de la minorité serbe de Croatie n'était pas quelque
15 chose qui était irrationnel, infondé ?
16 R. Non, du tout.
17 Q. Ensuite, vous avez parlé de la commission Badinter, - je ne sais pas si
18 vous en souvenez, au début de l'année 1992, a préparé un rapport ?
19 R. Oui. La commission Badinter a pris un certain nombre de décisions au
20 cours de toute cette période, pas seulement au mois de janvier 1992.
21 Au mois de décembre, par exemple, si je puis relater cela, au mois de
22 décembre, par exemple, pour revenir à votre question initiale, celle des
23 objections avancées par l'Yougoslavie sur les propositions du plan
24 Carrington, un des points de vue de l'Yougoslavie, quelque chose qui doit
25 être réitéré, car il s'agissait là de fondement même de leurs positions. Un
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1 des principaux points qui sont avancées, c'est que l'Yougoslavie existait;
2 c'était un pays. C'était un pays qui était en rébellion illégale contre une
3 sécession illégale. Lord Carrington a demandé à la commission Badinter de
4 répondre à cette question-là. Au mois de décembre 1991, la commission
5 Badinter a rédigé un avis -- une décision portant ce point-là en
6 particulier. Ce que la commission avait décidé, c'était que l'Yougoslavie,
7 à ce moment-là, se trouvait dans un processus de démantèlement, mais cela
8 n'était plus un État cohérent, et c'était dans un processus de dissolution.
9 Cette décision, inutile de vous le dire, n'a pas plu aux autorités
10 yougoslaves. Ils ont rendus un certain nombre de décisions au cours de
11 cette période, lorsque toutes les conférences ont été tenues, pas seulement
12 aux mois de janvier, et celle concernant la reconnaissance, évidemment,
13 était très importante, c'était un avis très important.
14 Q. Est-ce que les recommandations de la commission Badinter ne
15 concernaient que la Macédoine et la Slovénie puisqu'elles définissaient les
16 conditions de l'indépendance et la reconnaissance de l'indépendance ?
17 R. Oui, il s'agissait de la reconnaissance par la Communauté européenne.
18 Q. Oui.
19 R. Mais pas pour le reste du monde, bien sûr, parce que la commission
20 Badinter parlait au nom de la Communauté européenne.
21 Q. C'est un organe de la Communauté européenne, n'est ce pas ?
22 R. Oui, tout à fait. C'est tout à fait exact.
23 Q. Je crois que pour ce qui est de la Macédoine, la Grèce posait problème.
24 La Grèce a objecté --
25 R. Oui.
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1 Q. Quelle était la position de la Macédoine ?
2 R. Ils avaient un droit de veto là-dessus.
3 Q. Ils ont imposé leur veto. Il s'en est suivi ou en son corollaire
4 évident que la Macédoine et les autres républiques n'en était pas
5 satisfaites ?
6 R. C'est exact.
7 Q. Est-ce que les dispositions relatives aux minorités dans ces pays
8 étaient satisfaisantes ?
9 R. Ce que la décision disait, c'est qu'il n'y avait pas eu l'expression de
10 leur volonté. Il fallait qu'une expression de leur volonté se fasse
11 davantage sentir en Bosnie-Herzégovine.
12 Q. Ce qui était exact, n'est-ce pas ? Puisque ce n'était pas une décision,
13 et je crois que les commentateurs fiables ne pouvaient pas remettre ceci en
14 question, n'est-ce pas ?
15 R. Il y avait un certain niveau d'attente ici, et il y avait des
16 commentateurs qui faisaient des observations. On disait qu'un référendum
17 serait tenu suite aux décisions prises par la commission Badinter, c'est,
18 effectivement, ce qui s'est produit le mois suivant. Il y a eu un
19 référendum, le 29 février et le 1er mars 1992. L'année 1992 est une année
20 bissextile, Monsieur le Président, Messieurs les Juges. Ceci s'est tenu le
21 samedi, 29 février, et le dimanche 1er mars, 1992. Ceci a été tenu dans le
22 but de satisfaire à ces conditions, conditions exprimées car la commission
23 Badinter, la commission d'arbitrage, une expression de leur volonté.
24 Q. Les pressions politiques exercées, à ce moment-là, n'étaient-elles pas
25 exercées par la Communauté européenne, une pression forte exercée par
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1 l'Allemagne au vu de la reconnaissance de l'indépendance de la Croatie,
2 nonobstant le fait des propos de Badiner à propos de cette proposition ?
3 R. Oui, tout à fait. Les Allemands avaient été très explicites à cet
4 égard. En fait, au mois de décembre, ils allaient reconnaître la Croatie
5 d'ici Noël 1991, quelque soit la position des autres parties prenantes et
6 d'autres personnes. Par conséquent, le secrétaire général des Nations Unies
7 et le secrétaire Vance ont écrit à M. van den Broek, qui était le ministre
8 néerlandais des Affaires étrangères. C'est eux qui assuraient la
9 présidence, à ce moment-là, de la communauté européenne. Au mois de
10 décembre 1991, le secrétaire général des Nations Unies, M. Perez de
11 Cuellar, lui a écrit une lettre en lui recommandant de ne pas accorder
12 l'indépendance par petits bouts, qu'il fallait faire ceci de façon
13 cohérente. C'est précisément à cause de cette question-là -- le souhait de
14 l'Allemagne de reconnaître la Croatie immédiatement. La lettre que le
15 secrétaire général des Nations Unies a écrite à M. van den Broek a trouvé
16 une réponse, et c'est M. Genscher, qui est le ministre des Affaires
17 étrangères allemandes, qui a répondu à cette lettre. Je suis tout à fait
18 d'accord, Monsieur Stewart, pour dire que la question, la vraie question
19 qui se posait au mois de décembre 1991, une reconnaissance prématurée de la
20 sécession de ces républiques, étaient tout à fait à l'esprit de Lord
21 Carrington, et était certainement à l'ordre du jour lors de cette
22 Conférence sur l'ex-Yougoslavie.
23 Q. Monsieur Genscher, qui était le ministre des Affaires étrangères,
24 pourrait véritablement exercer beaucoup d'influence et a, finalement,
25 réussi à faire accepter, par la Communauté européenne, l'indépendance de la
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1 Croatie ?
2 R. Oui, il est vrai qu'il a beaucoup insisté. A savoir s'il a réussi
3 entièrement, je crois que ce succès n'était pas aussi important que cela
4 car la Communauté européenne n'a pas reconnu l'indépendance avant d'avoir
5 reçu les décisions prises par
6 M. Badinter et les différents Juges qui siégeaient au sein de cette
7 commission. En rapport avec ce chapitre 2 que nous avons évoqué un peu plus
8 tôt, le chapitre concernant la position des minorités, Lord Carrington a
9 fait ces propositions en octobre 1991. C'est, à ce moment-là, que la
10 Croatie a accepté de mettre en place ces dispositions concernant les
11 minorités, ce qui signifie que cela permettait de faire tomber le dernier
12 obstacle concernant la reconnaissance et de l'indépendance de la Croatie
13 par la Communauté européenne. Il est certain que l'Allemagne a exercé son
14 influence et a souhaité que cette reconnaissance se fasse plus tôt plutôt
15 que plus tard.
16 Q. Est-il vrai également de dire que Lord Carrington n'était pas satisfait
17 par cette approche ?
18 R. C'est exact. Il a aussi envoyé une lettre à M. van den Broek concernant
19 ce point. Je crois que cela devait être le 2 décembre 1991, la lettre qu'il
20 a envoyée à M. van den Broek. C'est dans le domaine public vous pouvez
21 vérifier cela, comme les lettres envoyées par le secrétaire général. Il a
22 écrit -- même avant que le secrétaire général ait envoyé cette lettre à M.
23 van den Broek, en s'opposant à une reconnaissance prématurée d'une des
24 républiques. La raison était, bien évidemment, très claire : il travaillait
25 à un accord global qui porterait sur l'ensemble de l'Yougoslavie. Si on
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1 reconnaissait la Croatie à ce moment-là avant que cet accord global n'ait
2 été trouvé, pourquoi la République de Croatie aurait-elle encore envie
3 d'être présente à la table des négociations ? Puisque la pression pour
4 faire accepter cela ne serait plus utile. C'est ce que Lord Carrington a
5 dit dans la lettre qu'il a envoyée à M. van den Broek, début du mois de
6 décembre 1991. Oui, il s'y est opposé.
7 Q. Certaines des réalités politiques étaient comme
8 suit : il semblait que de plus en plus clair, en tout cas, si la Croatie
9 allait obtenir la reconnaissance de son indépendance, la Slovénie était
10 dans le même cas ?
11 R. Oui, tout à fait. La Slovénie a été le premier pays a proclamé son
12 indépendance, et la Slovénie était de facto à l'indépendance. Car, comme
13 nous le savons, la JNA, l'armée populaire yougoslave, est entrée en force
14 en Slovénie au mois de juin 1991, ostensiblement pour protéger la frontière
15 avec l'Autriche. En fait, il s'agissait de supprimer ses velléités
16 d'indépendance et, en l'espace d'une semaine de combat, les troupes se sont
17 retirées -- je devrais dire après une semaine de combat, elles ne sont
18 jamais retournées. Telle était la situation en Slovénie à partir de la fin
19 du mois de juin 1991. Au mois de décembre, la Slovénie était de facto
20 indépendante depuis six mois déjà.
21 Ce qui n'était pas le cas de la Croatie, bien sûr, où la JNA était présente
22 et où il y avait des combats intenses.
23 Q. Est-ce que l'on peut dire en résumé que la Slovénie n'était pas une
24 question insoluble. La Slovénie, en tant que pays, avait des problèmes ou
25 un complexe que la Croatie, que la Bosnie-Herzégovine en termes de
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1 population, en termes de nationalité, en termes de composition, dans ces
2 républiques ?
3 R. Oui, je crois que c'est tout à fait exact. En Slovénie, je crois que 90
4 % de la population est slovène, ou 95 %. Le deuxième groupe, je crois qu'il
5 y avait des poches de Croates et d'Italiens, bien sûr. Il y a une
6 population italienne importante en Slovénie, étant donné que certaines
7 régions en Slovénie avaient appartenu à l'Italie. Vous avez raison. Il est
8 vrai que la Slovénie c'est la Slovénie.
9 Q. Le problème de la Slovénie et de l'indépendance de celle-ci, c'était le
10 début de ce processus de dissolution que l'on voyait se produire en
11 Slovénie, n'est-ce pas ? C'est, effectivement, ce qu'avait évoqué la
12 commission Badinter.
13 R. Oui, cela fait partie du problème. L'autre problème à propos de la
14 Slovénie qui se posait, c'était la richesse de cette république. La
15 Slovénie, avec une population de 8 %, représentait au total de la
16 population de l'ex-Yougoslavie, représentait 8 % de cette république
17 fédérale socialiste, et produisait un quart du PNB du pays. Au plan
18 économique, il est certain que la Slovénie avait représenté quelque chose
19 de très important. Sur un plan de composition ethnique, non, cela n'était
20 pas le cas.
21 Q. Lorsqu'on se penche sur les éléments qui se sont déroulés vers la fin
22 du mois de l'année 1991 et au tout début de l'année 1992, du point de vue
23 des Serbes, que ce soit des Serbes en Croatie ou en Bosnie-Herzégovine ou
24 en Serbie, la Slovénie et la Croatie semblaient prendre la route passer
25 rapidement vers la reconnaissance et l'indépendance, n'est-ce pas ?
Page 4318
1 R. Oui, c'est exact.
2 Q. C'était à la fin de 1991, que c'était déjà devenu très clair que M.
3 Izetbegovic en Bosnie-Herzégovine et que ses collègues à lui désiraient
4 également l'indépendance de la Bosnie-Herzégovine.
5 R. Oui. La Macédoine, ainsi que la Bosnie-Herzégovine, avaient également
6 déclaré leur indépendance avant la fin de l'année 1991.
7 Q. Du point de vue serbe de Bosnie, le texte était déjà écrit, si vous
8 voulez. On savait un peu où on se dirigeait, ou, pour être un peu plus
9 précis, il trouvait assez difficile de ne pas demander également
10 l'indépendance de la Bosnie-Herzégovine. C'était bien difficile de résister
11 à cette tentation ?
12 R. Je crois que c'est une présomption raisonnable de croire que les quatre
13 républiques allaient toutes devenir indépendantes toujours, et qu'elles
14 allaient recevoir leur reconnaissance,
15 c'est-à-dire que la Slovénie et la Croatie étaient les premières, et que
16 les autres allaient suivre. C'était une présomption raisonnable. Oui.
17 Q. C'était également exact de dire, n'est-ce pas, que cela allait s'en
18 suivre de la façon dont vous nous l'avez expliqué, c'était très
19 spécifiquement quelque chose que les Serbes de Bosnie ne voulaient pas que
20 cela se produise ?
21 R. Ils étaient opposés de façon violente.
22 Q. La position était la suivante, n'est-ce pas ? Vous avez dit que les
23 Néerlandais avaient la présidence de la Communauté européenne pendant la
24 deuxième partie de l'année 1991, n'est-ce pas ?
25 R. Oui.
Page 4319
1 Q. Ensuite, le Portugal a pris la relève le 1er janvier ?
2 R. Oui.
3 Q. C'est à ce moment que M. Cutilheiro a été invité à prendre place pour
4 ces négociations. Vous nous l'avez déjà décrit.
5 R. Oui.
6 Q. Les Serbes -
7 R. Excusez-moi, Monsieur Stewart. Je vous interromps. Je vois ici le nom
8 de M. Cutileiro est mal épelé sur le moniteur. Il n'y a pas de "H" dans son
9 nom.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le transcript est toujours revu pendant
11 la soirée et il est toujours corrigé. Ne vous en faites pas.
12 M. STEWART : [interprétation] M. Cutileiro est probablement la personne qui
13 souffre le plus pour ce qui est de la façon dont on épelle son nom.
14 LE TÉMOIN : [interprétation] J'imagine que cela arrive assez couramment.
15 M. STEWART : [interprétation]
16 Q. Pour revenir au monsieur qui provient du Portugal,
17 M. Cutileiro plus particulièrement, pour ce que l'on a dit sur la Bosnie-
18 Herzégovine et pour parler du processus Cutileiro. Si je puis dire, c'est-
19 à-dire qu'il était engagé dans les négociations au sein du gouvernement. On
20 a accepté la Bosnie-Herzégovine comme un État séparé, simplement pour les
21 fins de négociations.
22 R. Je crois que c'est parfaitement exact. Je ne crois pas qu'ils étaient
23 obligés d'accepter la Bosnie-Herzégovine par le processus des négociations.
24 La Bosnie-Herzégovine allait devenir, comme nous avons dit un peu plus tôt,
25 un Etat indépendant et reconnu, un membre de la communauté internationale.
Page 4320
1 Ce n'était pas les négociations qui aidaient à ce que cela se passe, mais
2 c'étaient bien les décisions de la communauté internationale. Il a fallu
3 faire vote au sein de l'assemblée générale des Nations Unies. Vous savez ce
4 n'est pas quelque chose qui vient automatiquement.
5 Q. Oui.
6 R. C'était la situation qui se prévalait à l'époque, et la reconnaissance
7 allait se produire. Ce qu'ils voulaient c'est d'avoir leur propre État,
8 leur propre entité sous les gîtes comme ils avaient dit un peu plus tôt,
9 même avant que la Bosnie ne soit reconnue, tel que nous l'avons dit il y a
10 quelques jours, c'est que déjà au mois de novembre, décembre et janvier
11 je parle, bien sûr, du mois de novembre et de décembre 1991 et du mois de
12 janvier 1992 - c'est-à-dire, ils avaient pris à l'époque les mesures
13 nécessaires pour établir ce que l'on avait appelé la Republika Srpska,
14 c'est-à-dire qu'ils avaient proclamé l'existence en janvier de cet État.
15 Ils ont même mené une constitution en février, mais ils avaient compris que
16 ce qu'ils espéraient serait un Etat bosnien fictif, nominal, de sorte à ce
17 que c'était assez faible, et cela n'allait pas affecter leurs intérêts.
18 Q. Très bien. Monsieur Okun, si je vous comprends bien, d'après votre
19 réponse, lorsque j'ai dit "par les négociations," le contexte était tel que
20 le vrai monde, les forces politiques, c'est les forces politiques qui
21 allaient décider, n'est-ce pas ?
22 R. Oui, c'est cela.
23 Q. Les réunions avec Cutileiro, les discussions qui ont lieu lors de ces
24 réunions ont mené vers deux accords. Il y a eu deux étapes. D'abord il y a
25 eu Lisbonne, ensuite, Sarajevo ?
Page 4321
1 R. Oui. Je dois ajouter quelque chose. Il y avait également où on se
2 référait à l'époque "aux accords de Londres," car ils se sont également
3 rencontrés à Londres de temps en temps, simplement pour pouvoir voir Lord
4 Carrington, car cela lui était plus facile. C'était la raison pour laquelle
5 cela se passait à Londres.
6 Q. Mais il s'agissait d'un processus continu, n'est-ce pas ?
7 R. Oui, c'est exact.
8 Q. Les deux documents clés qui s'en on suivi, se sont, en fait, les deux
9 documents qui portent le titre de, l'accord de Lisbonne et l'accord de
10 Sarajevo.
11 R. Il faut, en fait, si vous demandez au Lord Carrington et à Cutileiro,
12 ils vous répondront que c'est l'accord de Londres et l'accord de Lisbonne.
13 Q. Bien utile de savoir ce qu'ils répondraient.
14 R. Oui. Simplement, c'est que le processus continue. C'est la raison pour
15 laquelle je le mentionne.
16 Q. Il s'agit de deux pièces qui sont déjà versées au dossier et nous avons
17 déjà les cotes. C'est la cote D5 et D6. Cela serait, sans doute, très utile
18 si on pourrait remettre un exemplaire à M. Okun.
19 R. Je crois que c'est l'exemplaire que l'on m'a remis déjà précédemment.
20 Q. Très bien, Monsieur Okun. Vous l'avez vérifié ?
21 R. Le document dont je dispose porte la cote provisoire de 02093996, et on
22 peut également lire la date du 15-XII-00. Le 12 est en chiffre romain. Nous
23 pouvons lire que c'est un document qui concerne Jose Cutileiro. C'est un
24 document qui a été remis à quelqu'un par l'ambassadeur Cutileiro.
25 Q. Je vous remercie, Monsieur Okun. En fait, comme il arrive assez
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1 souvent, D6 et D5, enfin D6 est venu avant le document D5
2 chronologiquement. C'est l'accord de Lisbonne. Je crois que c'était le 27
3 février 1992, n'est-ce pas ?
4 R. Je ne suis pas tout à fait certain. Je n'y ai pas pris part, mais je
5 crois que c'était en février ou mars.
6 Q. En réalité, l'accord de Sarajevo, qui est le document D5, porte une
7 date. C'est la date du 18 mars 1992.
8 R. Oui. Comme je l'ai déjà dit, il s'agit d'un processus continu.
9 Q. Si maintenant on se penche sur le document D6, l'autre document dont
10 vous nous avez parlé il y a quelques instants, les principes généraux
11 concernant l'indépendance. Il commence avec le point A. Je ne vais tout
12 relire, mais la Bosnie-Herzégovine parle de l'indépendance. L'indépendance
13 se trouve à la première partie disant qu'il serait un État indépendant
14 composé de trois unités constituantes.
15 Au numéro 3, nous pouvons voir que les Musulmans, les Serbes et les
16 Croates, les peuples des trois nations se verraient leurs droits reconnus à
17 travers la République de Bosnie-Herzégovine. Ensuite, on parle des
18 principes constitutionnels. On les énumère dont la plupart d'entre eux, en
19 fait, ne comporte aucune objection, c'est-à-dire, ce sont des éléments de
20 la constitution. Il n'est pas nécessaire d'entrer en détail.
21 Ensuite, les unités constitutives. Au point 1, on a parlé de trois unités
22 constitutives à l'intérieur de la Bosnie-Herzégovine et les territoires
23 sont décrits à la partie E, qui se trouve à la fin du document. Ce sont des
24 unités constitutives. Le territoire des unités constitutives serait défini
25 sur la base, et ensuite, c'est laissé ouvert, car on parle du recensement
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1 de 1971 et 1981, et 1991, et les communes existantes et que quelques petits
2 ajustements doivent être faits. Car s'il y a un groupe majoritaire dans une
3 des communes, elle doit être incorporée dans une unité constitutive
4 appropriée. Il y a plusieurs parties à cette définition. On parle également
5 de l'assistance d'une commission d'arbitrage. Est-ce que c'est la
6 commission de M. Badinter ?
7 R. Oui.
8 Q. Ensuite, on parle de Sarajevo. C'est la capitale, bien sûr. Maintenant,
9 vous confirmez, bien sûr, qu'il s'agit d'un processus continu. Si nous
10 examinons l'accord de Sarajevo qui a été fait quelques semaines plus tard,
11 bien sûr, il s'est raffiné. A ce moment-là, plusieurs choix qui avaient été
12 laissés ouverts dans un premier jet ont été faits. Plus particulièrement,
13 si nous examinons les unités constitutives, je ne vais pas entrer en détail
14 pour ce qui est de A, B et C, mais, si l'on parle de l'unité constitutive
15 D1, au sein de la Bosnie-Herzégovine, nous pouvons voir un groupe de
16 travail :
17 "--aura établi afin de définir le territoire d'une unité constitutive et
18 sur la base des principes nationaux en tenant compte des autres critères
19 tels l'aspect géographique et une carte de chaque majorité relative de la
20 municipalité sera la base de cette carte, ce sont les groupes de travail
21 qui rédigeront cette carte en se basant sur ce même critère."
22 Ce que l'on voit ici, vous allez, certainement, être d'accord avec moi,
23 Monsieur Okun, c'est qu'ici on prépare le terrain pour faire en sorte que
24 la nationalité soit un caractère prédominant. On y introduit des critères
25 économiques et géographiques, mais ces critères sont des critères
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1 secondaires. On peut faire certains ajustements selon ces critères
2 secondaires, que l'on peut modifier les critères principaux, ou amender le
3 critère principal qui est la nationalité ?
4 R. Oui, c'est exactement comme cela que je vois la chose aussi.
5 Q. Lorsque je parle de la nationalité, nous parlons des trois nationalités
6 que nous connaissons, les Musulmans, les Serbes et les Croates. Que l'on
7 parle de "nationalités" ou de groupes ethniques ou "d'ethnicité", c'était,
8 néanmoins, le critère prédominant et principal ?
9 R. Oui, c'est exact.
10 Q. S'agissant maintenant du développement de ce processus, le processus
11 Cutileiro si je peux l'appeler ainsi. Cela, finalement, n'a pas, tout à
12 fait, bien marché ?
13 R. Oui, c'est cela.
14 Q. La raison étant, c'est que M. Izetbegovic avait donné son aval à
15 l'accord de Sarajevo le 18 mars. Nous pouvons voir, à la toute fin de ce
16 document : "tel qu'avalisé par les dirigeants des parties du SDA, SDS et
17 HDZ et, plus particulièrement, lors du cinquième tour des pourparlers sur
18 les accords constitutionnels." Par la suite, peu de temps après, il a
19 retiré son soutien et son aval ?
20 R. Oui, c'est ce que j'ai compris. Ce qui était normal pour les dirigeants
21 des trois parties lors des négociations, je parle maintenant les trois
22 parties, les Musulmans, les Croates et les Serbes. Ce qui était important,
23 c'est que les dirigeants devaient donner leur aval mais conformément aux
24 accords prononcés lors de l'assemblée. Nous avons vu cela lorsqu'il y a eu
25 des réunions avec le Dr Karadzic à plusieurs reprises, la même chose est
Page 4325
1 arrivée avec les Croates, Boban, probablement, avait plus de contrôle sur
2 les deux autres. Lorsqu'il est revenu à Sarajevo depuis l'endroit où on est
3 parvenu à l'accord de façon physique, mais Izetbegovic n'était plus
4 d'accord. Il a montré son désaccord.
5 Q. Il reconnaissait qu'un tel accord avait été sujet à l'approbation de
6 l'assemblée. Non, ce qui est arrivé, c'est que ce n'était que M.
7 Izetbegovic soit revenu et que, par la suite, c'est l'assemblée a rejeté
8 l'accord, mais c'est que M. Izetbegovic, lui-même, a retiré son aval, est-
9 ce exact ?
10 R. Oui, je lui ai, justement, posé la question là-dessus. Comme j'ai dit,
11 je n'ai pas pris part à cette réunion qui a eu lieu le 18 octobre. Par la
12 suite, lorsque je me suis trouvé en présence du président Izetbegovic, je
13 lui ai posé la question, et si je me souviens bien, il m'a dit que
14 lorsqu'il est revenu à Sarajevo et lorsqu'il s'est entretenu avec d'autres
15 dirigeants du gouvernement bosnien, ils l'ont convaincu que cet accord
16 n'était pas très prudent. C'est ce qu'il avait dit.
17 Pour ce qui me concerne, je ne sais pas et nous ne savons pas avec
18 certitude quelle est la raison pour laquelle ce que vous venez de décrire
19 est arrivé. J'ai lu plusieurs incidents dans les journaux, dans les médias,
20 j'ai lu des rapports, j'ai entendu des opinions disant que l'ambassadeur
21 Zimmerman qui se trouvait à Belgrade, l'ambassadeur des Etats-Unis, c'était
22 lui qui avait convaincu le président Izetbegovic de retirer sa signature.
23 J'ai demandé à Zimmerman directement si cela s'est déroulé ainsi, il a dit
24 que ce n'était pas du tout vrai, que c'était, tout à fait, faux. Mais c'est
25 ce que l'on pouvait lire dans les journaux, dans les médias et même dans
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1 les livres. Les journalistes ont souvent tendance à écrire des livres, et
2 c'est quelque chose que nous retrouvons même entre les reliures d'un livre.
3 Ce n'est pas quelque chose que nous pouvons savoir à l'instant. Zimmerman
4 est mort et Izetbegovic est mort, nous ne pouvons plus leur poser la
5 question. Je présume que si l'on voulait insister là-dessus, il faudrait
6 demander à M. Ganic, Haris Silajdzic, les hommes qui sont des dirigeants
7 musulmans bosniens reconnus, mais le fait était qu'il a changé d'avis et,
8 qu'effectivement, il a enlevé sa signature de l'accord.
9 Q. Quelle que soit la raison, Monsieur Okun, vous nous avez bien décrit
10 toutes les possibilités, toutes les théories qui puissent planer, qui
11 existent dans le monde. Le fait est que M. Izetbegovic et ses collègues au
12 sein du SDA ont, effectivement, changé leur opinion, n'est-ce pas ?
13 R. Oui.
14 Q. Cela était vu, inévitablement, par les Serbes de Bosnie comme étant une
15 sorte de trahison ?
16 R. Ils n'aimaient pas cela. C'est un fait.
17 Q. Il y a quelques instants, nous avons vu qu'ils pris part aux
18 négociations dans un contexte qui ne leur convenait pas. D'abord, ils
19 n'aimaient pas, cela ne leur convenait pas et ensuite, ils voulaient un
20 document, n'est-ce pas ?
21 R. Oui.
22 Q. Depuis le tout début, ils avaient pris part aux négociations qu'ils
23 n'aimaient pas du tout. Ils voulaient savoir dans le contexte qu'est-ce
24 qu'il pouvait bien leur arriver ?
25 R. Oui, ils avaient l'impression qu'ils avaient donné quelque chose et que
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1 la partie adverse n'avait pas réciproqué.
2 Q. Ils considéraient M. Izetbegovic depuis le début qu'il avait, en fait,
3 obtenu ce qu'il souhaitait, ce qu'il désirait ?
4 R. Je ne dirais que l'on pourrait aller jusqu'à dire cela. Vous pouvez,
5 certainement, demander la question à M. Krajisnik. Il pourra vous donner un
6 meilleur point de vue que moi. Mais ils avaient fait certains compromis,
7 cela c'est sûr et il n'avait pas réciproqué en faisant des compromis au
8 point où il semblait qu'il aurait dû.
9 Q. Certainement, même s'il avait trouvé une façon de trouver certains
10 compromis, une fois que l'accord s'est trouvé à Sarajevo, et une fois qu'il
11 ait retiré son aval, vous avez dit que c'était son point de vue, n'est-ce
12 pas ?
13 R. Oui, d'abord il a signé; ensuite, il a retiré sa signature.
14 Q. Est-il exact que vous aviez entendu dire que le ICFY, donc ou le ICFY ?
15 R. La Conférence internationale sur l'ex-Yougoslavie. Je trouve que c'est
16 bien long à dire si vous pouvez nous donner un acronyme, je serais bien
17 heureux de l'entendre, mais, sinon, je dirais toujours la Conférence
18 internationale sur l'ex-Yougoslavie ou l'ICFY, c'est ainsi que je l'ai
19 appelée, c'est une abréviation que j'ai trouvée.
20 Q. Très bien, nous allons utiliser cette abréviation si vous le souhaitez.
21 Je ne me souvenais plus si j'avais entendu cette abréviation de la bouche
22 de quelqu'un d'autre devant moi ?
23 R. Oui, c'était la conférence qui avait débuté en septembre 1992.
24 Q. J'avais l'impression que vous avez dit le mois d'août ou le mois de
25 septembre ?
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1 R. Je dis que c'était au mois de septembre puisque c'est à ce moment-là
2 que cela a commencé. La Conférence de Londres a eu lieu en août. La
3 Conférence de Londres a mené jusqu'à la Conférence internationale. Mais la
4 Conférence de Londres s'est terminée au mois d'août. La Conférence
5 internationale sur l'ex-Yougoslavie, qui avait été établie, avait été
6 établie, en fait, par la Conférence de Londres. C'est elle qui a frayé le
7 chemin pour la Conférence internationale. Comme vous pouvez voir dans mon
8 journal, immédiatement après la Conférence de Londres, à la fin du mois
9 d'août 1992 s'est suivie la Conférence internationale sur l'ex-Yougoslavie
10 en septembre 1992.
11 Q. Maintenant, nous savons que M. Izetbegovic a retiré son accord, ou
12 retiré sa signature de l'accord de Sarajevo. Cela, c'est arrivé assez
13 rapidement, peu de temps après son retour à la fin du mois de mars, un peu
14 de temps après le 18 mars. C'était à Sarajevo.
15 R. Oui, effectivement, cela s'est déroulé plus tard, deux semaines après.
16 Q. Au début d'avril, car nous savons que le mois d'avril était un mois
17 actif pour l'appeler ainsi, pour utiliser un terme neutre.
18 R. Oui, effectivement, c'est cela.
19 Q. Il ne faut pas oublier qu'effectivement, oui le mois d'avril était un
20 mois actif, mais c'était le 6 avril que la Communauté européenne a reconnu
21 la Bosnie-Herzégovine et que les Etats-Unis l'ont reconnu quelques jours
22 plus tard. C'est important car, après le 6 avril, la Bosnie-Herzégovine
23 était un Etat reconnu par le Communauté européenne et par le plupart des
24 pays. Non pas tous les pays dans le monde, mais la plupart des pays ont
25 reconnu le Bosnie-Herzégovine après le 6 et le 7 avril.
Page 4329
1 Q. Sans offusquer quelque pays que ce soit, mais la plupart des pays qui
2 étaient importants dans ce processus l'ont reconnu ?
3 R. Oui. La Chine ne l'a pas reconnu, mais dans ce contexte, la Chine
4 n'était pas un joueur pertinent. Les autres pays qui l'ont reconnu
5 l'étaient.
6 Q. Je j'utilise, encore une fois, le terme de se trouver les roues prises
7 dans le sable, mais tous ces accords se sont terminés un peu en queue de
8 poisson. Entre le mois de mars 1992 et la Conférence de Londres au mois
9 d'août 1992, il n'y avait pas de négociations actives et ouvertes
10 diplomatiques.
11 R. Oui, vous avez, tout à fait, le droit de dire qu'il y avait certains
12 problèmes. Les conférences du moins importantes, si vous voulez, aucun
13 accord n'avait pas été conclu, mais au mois de mai, à Bruxelles, j'ai
14 participé en tant qu'observateur des Nations Unies. Vous pouvez le voir
15 dans mon journal. J'ai participé à cette conférence. Cutileiro est resté
16 actif, il a travaillé sur les principes, sur la carte, tout ce que nous
17 avons sous les yeux. Il est resté actif jusqu'au mois de juin. En fait, il
18 a écrit un livre là-dessus. Si je ne m'abuse, ce livre n'est disponible
19 qu'en portugais. Je l'ai lu. Le titre est : "La Vie et la Mort des Autres."
20 Vous devriez, peut-être, vous procurer ce livre. C'est son récit, c'est le
21 récit de cette période.
22 La Conférence sur l'Yougoslavie, même si elle perdait de l'importance et
23 que le succès de cette conférence n'était pas très prononcé, ils sont
24 arrivé à un moment assez difficile au mois de juillet, car au mois de
25 juillet, l'ambassadeur britannique envoyé aux Nations Unies a pris une
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1 décision assez unilatéralement, en fait, il a demandé à ce que le conseil
2 de Sécurité des Nations Unies s'engage à prendre certaines actions. Cela a
3 rendu le secrétaire général furieux, M. Boutros Boutros-Ghali était
4 furieux, il a, ouvertement, dit qu'il était, particulièrement, fâché, qu'il
5 n'a pas apprécié les actions de l'ambassadeur britannique. Il y a eu une
6 frustration, aucun accord n'avait été conclu mais, en juillet, Sarajevo
7 faisait déjà l'objet de bombardement depuis trois mois. La ville subissait
8 des dommages et était détruite devant leurs yeux. C'était assez émotif. Je
9 crois que ce contretemps qui existait en juillet entre l'ambassadeur
10 britannique aux Nations Unies et le secrétaire général des Nations Unies,
11 c'est cela qui a fait en sorte que le gouvernement britannique a pensé à
12 organiser une conférence pour que les négociations reprennent. Cela a mené
13 à la Conférence de Londres, qui allait s'ensuivre un mois plus tard, au
14 mois d'août.
15 Q. Vous étiez à Bruxelles en tant qu'observateur, comme vous l'avez dit,
16 au mois de mai 1992. Qui étaient les joueurs principaux lors de cette
17 réunion à Bruxelles ?
18 R. C'était les personnages habituels.
19 Q. Vous voulez dire ?
20 R. Vous avez qu'à lire mes notes et vous verrez. Vous savez, ils sont tous
21 énumérés, mais je ne me souviens pas comme cela de mémoire, Maître Stewart.
22 Je peux me pencher sur mes notes, si vous voulez.
23 Q. Non, ce n'est pas nécessaire.
24 R. Je souhaite, vraiment, coopérer, mais vous savez, il y avait 50, 60
25 personnes autour d'une table. Je ne me souviens pas, au bout de 12 ans, qui
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1 était, absolument, chaque individu présent à cette réunion.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Témoin, personne, dans ce
3 prétoire, n'a l'impression que vous faites preuve du manque d'esprit de
4 coopération, rassurez-vous.
5 Q. De toute façon, vous avez corrigé ce que je vous ai dit en se qui
6 concerne le manque de négociations politiques ouvertes. Visiblement, il ne
7 s'agissait pas de réunion secrète à Bruxelles.
8 R. Non, effectivement, cela ne se passait pas en secret. Vous avez raison,
9 Maître Stewart. Ce processus stagnait et, visiblement, n'allait pas aboutir
10 à une solution. C'est ce qui passait tout au long des mois de mai, juin et
11 juillet.
12 Q. Les choses ont repris de l'élan et ont pris un autre cours, comme vous
13 l'avez décrit à la fin du mois d'août 1992. Ensuite, en septembre 1992,
14 pour ne pas entrer dans tous les détails, nous pouvons dire que ceci a
15 abouti au plan Vance-Owen en janvier 1993. Vous avez dit, lors de votre
16 déposition, dans cette affaire, préalablement, que le résultat de ce
17 processus était qu'au printemps 1993, les Croates de Bosnie avaient,
18 entièrement, accepté le plan Vance-Owen et, en fait, ils avaient déjà, dès
19 le début, à Genève accepté cela, mais ils étaient les premiers à
20 l'accepter.
21 Ensuite, les Musulmans, le gouvernement bosniaque l'a accepté en mars 1993.
22 Vous avez dit que, lorsque vous avez parlé des Musulmans, du gouvernement
23 bosniaque, qu'ils avaient quelques réserves, mais les réserves n'étaient
24 pas tellement importantes. Est-ce que vous vous en souvenez ?
25 R. Je ne m'en souviens pas immédiatement, mais ils ont énuméré cela après
Page 4332
1 leur signature. Il est possible de les retrouver.
2 Q. Il s'agissait de réserves formelles ?
3 R. Oui, vous pouvez les appeler réserves. Le Président Izetbegovic, je
4 pense, les a appelé "conditions." Mais cela revient plus ou moins à la même
5 chose. Il ne s'agissait pas d'amendements, de modifications aux sujets
6 desquelles ils insistaient comme, par exemple, c'est parfois le cas aux
7 Etats-Unis.
8 Q. Oui.
9 R. Ceci ne les a pas empêchés d'accepter le plan, il s'agissait des
10 conditions, sous réserve, et sous réserve. Tout ceci est énuméré après la
11 signature, vous pouvez les retrouver.
12 Q. Très bien. Merci, Monsieur. Vous avez clarifié ce que vous voulez dire
13 par réserve, par rapport à l'opposition.
14 En ce qui concerne les Serbes de Bosnie, vous avez dit qu'en avril 1993, le
15 seul con qui n'avait pas accepté le plan, c'était les Serbes de Bosnie, et
16 il y avait des efforts intenses déployés par le gouvernement grec qui, en
17 fait, a tenu une conférence, et vous avez dit que le Dr Karadzic a signé au
18 nom des Serbes de Bosnie, sous réserve de l'approbation de l'assemblée des
19 Serbes de Bosnie, conformément à quelque chose que vous avez décrit tout à
20 l'heure, lorsque vous avez dit que souvent ces hommes politiques
21 exprimaient ces genres de réserve, et signaient quelque chose sous réserve
22 de ceci ou cela.
23 R. Oui, il a signé, le 2 mai 1993, à Athènes, et clairement il l'a fait
24 avec réticence. Ceci n'était pas un secret. J'ai décrit dans mon journal
25 comme M. Krajisnik et M. Koljevic avaient l'air d'être au bord des larmes,
Page 4333
1 vraiment après sa signature. Le Dr Karadzic était vraiment déprimé. Il n'y
2 avait pas de doute qu'il a signé cela avec beaucoup de réticence.
3 Q. Le Dr Karadzic n'assistait pas à chacune des réunions, mais pour des
4 raisons pratiques, nous pouvons dire que le Dr Karadzic assistait à autant
5 de réunions que possible, vous pourriez dire qu'il était présent finalement
6 en permanence.
7 R. Je pense que nous pouvons dire qu'effectivement c'était l'interlocuteur
8 principal du côté des Serbes de Bosnie.
9 Q. Il a été actif sur ce plan tout au long de l'été 1992, depuis que le
10 plan Cutileiro a commencé à pratiquement couler, jusqu'en août, c'est-à-
11 dire, le moment où l'on a repris une nouvelle forme de négociation. Tout au
12 long de cette période, le Dr Karadzic était impliqué, n'est-ce pas ?
13 R. Oui, je suppose que oui. Je n'étais pas impliqué moi-même
14 personnellement. Comme vous le dites, les négociations se sont un petit peu
15 arrêtées et, après, elles touchaient plutôt à leur fin. Je pense que nous
16 pouvons vraiment dire qu'effectivement, que
17 M. Karadzic était impliqué dans tout cela.
18 Q. Est-ce que vous vous souvenez, et je comprends que vous ne vous
19 souvenez pas de tout le monde qui assistait à ces réunions. Ceci ne serait
20 pas du tout réaliste. Est-ce que vous vous souvenez si
21 M. Krajisnik a participé dans ce que j'appelle le processus ravivé des
22 négociations, à partir août 1992 et jusqu'à leur point culminant avec le
23 plan Vance-Owen ?
24 R. Oui. En ce qui concerne le nombre de fois total où nous avons rencontré
25 les hauts fonctionnaires d'État des Serbes de Bosnie, je pense que nous
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1 avons vu le Dr Karadzic le plus. Ensuite, je dirais que nous avons vu
2 autant M. Koljevic que M. Krajisnik, peut-être que M. Koljevic un petit peu
3 plus souvent. Encore une fois, je redis ce que j'ai dit dès le début, à
4 savoir que Karadzic et Koljevic parlaient un anglais excellent, et onc ceci
5 constituait un élément important. Egalement, ce qui était remarquable
6 c'était que, s'agissant des réunions les plus importantes après janvier
7 1993, lorsque le plan a été élaboré et après tous les efforts
8 préliminaires, M. Krajisnik assistait toujours à ces réunions-là, et non
9 pas Koljevic. Nous avions déjà pris note du fait que lorsque le président
10 Milosevic a appelé M. Vance en avril de Belgrade à New York pour lui dire
11 qu'il faudrait avoir encore un round de discussion, que les Grecs
12 s'activaient, et cetera, et que peut-être l'ambassadeur pouvait venir avec
13 Lord Owen, puisque M. Vance ne pouvait pas. Tout ceci est dans mes notes.
14 Là, il a dit : J'ai parlé avec Krajisnik et Karadzic, et ils sont prêts à
15 faire comme suit, et cetera.
16 Il ne fait aucun doute quelle était l'importance de ces trois messieurs et,
17 notamment, en ce qui concerne le duo Karadzic, Krajisnik.
18 Q. Nous allons revenir un peu en arrière momentanément, pour parler de la
19 réunion, en décembre 1991, et de cette période là. Est-ce que la situation
20 était un peu différente à ce moment-là par rapport aux négociations, et
21 pendant cette période M. Krajisnik n'était jamais présent à ces réunions-là
22 ?
23 R. C'est exact. M. Koljevic non plus, d'ailleurs. C'était en décembre
24 1991, et il n'y avait pas de combat en Bosnie-Herzégovine à l'époque. La
25 paix régnait en Bosnie en décembre 1991. Les seuls combats en Yougoslavie,
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1 sauf parfois quelques combats officieux, étaient les combats en Croatie.
2 C'était décembre 1991, le 2 décembre, comme nous l'avons déjà constaté, le
3 président Milosevic a dit au secrétaire Vance et à moi-même, en répondant à
4 notre question concernant la Bosnie : vous devriez parler aux dirigeants
5 serbes de Bosnie, et commencez par le Dr Karadzic. Nous sommes allés voir
6 le
7 Dr Karadzic ce jour-là et, d'ailleurs, cette réunion a été enregistrée dans
8 le journal.
9 Q. Apparemment, d'après vos notes, nous pouvons conclure que M. Krajisnik
10 a assisté à la réunion qui a eu lieu le 18 septembre 1992. C'est ce que
11 vous dites dans votre journal. Après cette date, il y a eu la réunion qui
12 s'est tenue le lendemain, le 19 septembre. Nous pouvons conclure que les
13 réunions du 18 et du 19 septembre sont, en fait, une même réunion qui s'est
14 étalée sur deux jours ?
15 R. Non, je ne pense pas qu'il s'agisse là d'une bonne conclusion. Il vaut
16 mieux se pencher sur le sujet de la réunion, Maître Stewart. Peut-être,
17 effectivement, c'était une même réunion. Peut-être il est possible de
18 considérer qu'il s'agissait d'une même réunion, mais cela dépend du sujet
19 débattu. Si, par exemple, lors d'une réunion on parlait de la situation à
20 Sarajevo pendant plusieurs heures, et si le lendemain on a discuté, par
21 exemple, du nettoyage ethnique à Zvornik, je considérais, dans ce cas-là,
22 qu'il s'agissait de deux réunions différentes. Je pense que c'est le sujet
23 qui nous permet de déterminer s'il s'agissait de la même réunion ou pas,
24 plutôt que la chronologie.
25 Q. D'accord, nous pouvons, effectivement, nous pencher sur le contenu de
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1 la réunion pour conclure s'il s'agissait d'une réunion ou de deux réunions.
2 R. Peu importe. En fait, ce qui était important c'était le sujet, ce qu'on
3 l'on débattait lors de ces réunions là.
4 Q. De toute façon, M. Krajisnik a assisté à ces réunions du 18 et du 19
5 septembre. En fait, c'était à Genève que cette réunion ou ces réunions ont
6 eu lieu.
7 Est-ce que c'est conforme à vos souvenirs si je dis que c'était la première
8 fois que vous avez rencontré M. Krajisnik vous-même, n'est-ce pas ?
9 R. Je n'en suis pas sûr. J'étais a Sarajevo en octobre 1991, lorsque les
10 Serbes de Bosnie ont quitté physiquement l'assemblée de la Bosnie-
11 Herzégovine. J'ai vu une foule de personnes et peut-être je l'ai rencontré
12 à ce moment-là. Je pense que ceci n'est pas vraiment pertinent, parce que
13 nous n'avons certainement pas eu un échange important.
14 Q. Si vous étiez à Sarajevo à ce moment-là -
15 R. Mes notes se montrent quelles sont les réunions auxquelles M. Krajisnik
16 a assisté et s'il est mentionné pour la première fois lors de cette réunion
17 là. Cela veut dire que c'est la première réunion à laquelle il a assisté.
18 Q. Oui, c'est certain. Ceci figure dans vos notes sur ces réunions. La
19 première fois c'était les 18 et 19 septembre et, ensuite, c'était le 25
20 novembre, tous.
21 M. TIEGER : [interprétation] Peut-être il vaut mieux intervenir maintenant
22 plutôt que plus tard. Mais si l'on se penche sur les notes en date du 5
23 mars 1992, nous pouvons voir une référence à une réunion avec le Dr
24 Karadzic, M. Krajisnik et Mme Plavsic.
25 M. STEWART : [interprétation] Merci. Je pense que ce fait parle de lui-
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1 même.
2 Q. Nous pouvons ajuster cela, n'est-ce pas, Monsieur Okun, s'il y avait
3 cette réunion à laquelle vous avez assisté tous les deux le 5 mars, et sous
4 réserve de ce que vous avez dit concernant Sarajevo en octobre 1991,
5 c'était la première fois que vous avez rencontré M. Krajisnik lors d'une
6 réunion ?
7 R. Oui, c'est ce qu'il est écrit dans le journal à la date du 5 mars. Je
8 vais vérifier puisque j'ai le journal devant moi. Oui, à Sarajevo. Oui, je
9 vois cela maintenant, la page 104 du journal. Le numéro ERN est R0163755, à
10 gauche. Il s'agit d'une réunion avec le Dr Karadzic et M. Krajisnik.
11 Koljevic n'y a pas insisté, mais Mme Plavsic, Biljana Plavsic y était.
12 Cette réunion a eu lieu avec ces trois personnes.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Okun, je vais vous interrompre.
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, la réunion de mars était la première.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous ne savez peut-être pas mais la
16 Chambre le sait, Me Stewart aussi, vous savez il est soumis à certaines
17 restrictions au niveau du temps. Veuillez vous concentrez pour répondre
18 directement à ses questions. Je suis sûr qu'il souhaite entendre plus au
19 sujet de cette réunion.
20 M. STEWART : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, et merci,
21 Monsieur Tieger.
22 Q. A la fois d'après où nous voyons le nom de M. Krajisnik qui apparaît
23 dans vos notes, après la réunion de septembre, c'était le 3 janvier --
24 excusez-moi, le 4 janvier 1993. C'était en janvier 1993 que vous avez pu
25 présenter ce plan pour la première fois, le plan qui a fait l'objet de
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1 discussions pendant deux ou trois mois ?
2 R. Oui. En janvier, on a commencé à avoir une série de réunions au niveau
3 le plus élevé, de manière la plus intense. On a eu des séances plénières
4 avec Milosevic, Cosic, Tudjman, et cetera. Après janvier, effectivement,
5 l'ensemble de la situation a été élevé au plus haut niveau, et c'est à ce
6 moment-là que M. Krajisnik a été présent plus au moins, toujours, au plus
7 haut niveau du pouvoir.
8 Q. Vous avez dit lors de votre déposition préalablement que lorsque vous
9 avez rencontré M. Krajisnik pour la première fois, vous avez dit "nous" et
10 je suppose que vous parlez de vous et M. Vance, et d'autres personnes de
11 votre équipe que "vous le connaissiez de nom et de réputation même avant de
12 le rencontrer, car il s'agissait là d'un dirigeant serbe de Bosnie
13 important." Qu'est-ce que vous saviez à son sujet ? Car, vous l'avez
14 rencontré pour la première fois en mars 1992, et immédiatement avant cela,
15 qu'est-ce que vous saviez au sujet de M. Krajisnik et de sa réputation ?
16 R. Je savais que c'était un dirigeant serbe de Bosnie, qu'il était le
17 président de l'assemblée de Bosnie, que Sarajevo était sa ville natale,
18 qu'il s'intéressait particulièrement à Sarajevo, que c'était un homme
19 important ayant un certain poids réel. C'est ce qu'on savait.
20 Q. Vous avez reçu une sorte de briefing sur la personne concernée ?
21 R. Le Dr Karadzic nous parlait de ses collègues, les autres nous parlaient
22 de lui. Il s'agissait d'un processus ouvert.
23 Q. Oui. Mais simplement, est-ce que vous et M. Vance, est-ce qu'avant de
24 rencontrer des gens, est-ce que vous receviez une sorte de briefing ?
25 R. Non, je ne m'en souviens pas. Nous avions des discussions avec Lord
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1 Carrington portant sur les personnes que l'on rencontrait. Bien sûr, on
2 entendait ses points de vue sur les personnes auxquelles ont étaient
3 confrontées, mais il s'agissait là des informations qui étaient
4 importantes. Il nous était important d'entendre l'avis de Carrington et de
5 Cutileiro, mais nous n'avions jamais de briefing formel.
6 Q. Est-ce que vous aviez des briefings officieux de la part de M.
7 Cutileiro concernant Krajisnik ?
8 R. Je ne me souviens pas.
9 Q. De M. Carrington ?
10 R. Je ne vois pas ce que vous voulez dire par "briefings officieux ?"
11 Q. Mais ce dont vous avez parlé tout à l'heure ?
12 R. Vous avez utilisé le mot "briefing" et je souhaite savoir ce que vous
13 voulez dire par là ?
14 Q. Monsieur Okun, nous parlons du mot "briefing" qui implique quelque
15 chose d'officiel. Vous avez dit que vous avez parlé avec Lord Carrington
16 des personnes qu'il rencontrait et qu'il vous donnait certaines
17 informations concernant cela. Je souhaite savoir s'il vous a parlé d'eux,
18 ses relations avec M. Krajisnik. Est-ce que Lord Carrington ou quelqu'un
19 d'autre vous a dit des choses concernant Krajisnik ?
20 R. Je ne m'en souviens pas.
21 Q. Mis à part ce que vous avez dit, tout à l'heure, à la chambre au sujet
22 de ce que vous saviez concernant M. Krajisnik avant la première rencontre
23 avec lui, vous ne saviez pas plus de choses concernant sa position, son
24 style, et cetera ?
25 R. On connaissait ses points de vue. Bien sûr qu'on connaissait ses
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1 positions. C'était connu de la part de tout le monde. Tout comme on va
2 savoir que vous, vous êtes un conseil de la Défense, alors que je ne vous
3 ai jamais rencontré avant, il y a trois jours. Mais vous savez qui je suis,
4 je sais qui vous êtes. On savait qu'il était le président de l'assemblée
5 des Serbes de Bosnie. J'ai déjà dit que je connaissais ses points de vue
6 officiels. Il n'y avait pas de secret au sujet de cela.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vais vous poser la question. J'essaye
8 de comprendre, parce que peut-être il y a un malentendu. D'après ce que
9 j'ai compris dans la question de Me Stewart, à ce moment-là, il voulait
10 savoir si vous aviez des informations concernant M. Krajisnik, en tant que
11 négociateur, ou est-ce que vous pensiez que c'était quelqu'un de fiable ou
12 pas fiable dans ce sens, ce genre d'information ?
13 M. STEWART : [interprétation] Oui, je veux dire quoique ce soit au sujet de
14 son "style" plutôt que simplement qui il était.
15 Q. Mais je veux dire son approche politique, sa personnalité, son style,
16 est-ce que vous saviez quelque chose au-delà de ce que vous avez dit tout à
17 l'heure ?
18 R. Nous savions que c'était quelqu'un qui oeuvrait fermement pour les
19 positions des Serbes de Bosnie. Je ne souhaite pas exagérer dans ce que je
20 dis. Nous savions que, lui, il avait signé le document demandant à la JNA
21 de venir en "aide" afin de défendre le peuple serbe. Mais, en fait, cela
22 s'est passé par l'expulsion de beaucoup d'autres personnes. Cela nous le
23 savions, car il s'agissait de quelque chose qui a été fait publiquement et
24 qui s'était déjà déroulé en décembre. On était au courant de certaines
25 actions. Mais je ne souhaite pas exagérer ou représenter mal ce que nous
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1 savions au sujet de M. Krajisnik en mars 1992. Bien sûr, après, nous avons
2 appris beaucoup plus lorsque nous étions assis autour de la même table.
3 Cela s'est complètement logique. On apprend beaucoup plus par la suite.
4 Q. Merci.
5 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, peut-être le moment
6 est opportun pour procéder à une pause ?
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, vous avez raison. Si le moment est
8 opportun pour vous, Maître Stewart, nous allons procéder à une pause
9 jusqu'à 1 heure moins 10.
10 --- L'audience est suspendue à 12 heures 25.
11 --- L'audience est reprise à 12 heures 53.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stewart, vous pouvez poursuivre.
13 M. STEWART : [interprétation] Merci.
14 Q. Monsieur Okun, vous avez parlé des rôles du Dr Karadzic, de M.
15 Krajisnik, et de M. Koljevic dans votre déposition, et du fait que M.
16 Koljevic avait un rôle de mois en mois important, au fur et à la mesure que
17 la situation évoluait. Est-ce que l'on peut dire, dans une analyse un peu
18 primaire, qu'au fur et à mesure que le rôle de M. Koljevic diminuait, celui
19 de M. Krajisnik gagnait en importance ?
20 R. Je ne dirais pas de manière aussi schématique. Les trois, par exemple,
21 ont assisté à la Conférence à Athènes en mai 1993, au moment où Karadzic a
22 définitivement signé l'acte. Les trois étaient présents. Cependant, il y a
23 eu plusieurs réunions très importantes, vraiment essentielles, cruciales,
24 auxquelles le Dr Karadzic et M. Krajisnik ont assistés, mais pas M.
25 Koljevic. Je parle, par exemple, de la réunion qui a eu lieu en avril, à la
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1 fin du moi d'avril 1993 avec M. Milosevic.
2 Q. Vous avez déjà dit que M. Krajisnik et M. Karadzic avaient des
3 personnalités plutôt différentes. Nous pouvons dire cela, n'est-ce pas ?
4 R. Oui.
5 Q. Est-il exact de dire, s'agissant de M. Krajisnik, qu'il ne fulminait
6 jamais, c'est ce que vous avez dit au -- du Dr Karadzic, mais M. Krajisnik
7 ne se comportait jamais comme cela, n'est-ce pas ?
8 R. Non, jamais.
9 Q. Vous diriez plutôt que c'était une personne mieux organisée mentalement
10 par rapport au Dr Karadzic ?
11 R. Le Dr Karadzic était un homme très intelligent. Lorsqu'il faisait part
12 de ses positions, il le faisait avec beaucoup d'attention et d'une manière
13 approfondie. Mais souvent, ses émotions prenaient le dessus lors de la
14 présentation, or ceci n'était, jamais, le cas s'agissant de M. Krajisnik.
15 M. Krajisnik gardait toujours une posture sérieuse. Je ne souhaite pas dire
16 par là que nous ne prenions pas le Dr Karadzic au sérieux. On était obligé
17 de le prendre au sérieux. Mais tout simplement, la manière dont il
18 présentait les choses était beaucoup plus émotionnelle par rapport à M.
19 Krajisnik ou au Dr Koljevic, si vous voulez. Tout le monde a son propre
20 style.
21 Q. Est-ce que M. Krajisnik a fait preuve de préoccupations en cours de vos
22 discussions concernant les subtilités constitutionnelles, procédurales ou
23 juridiques ?
24 R. Je ne dirais pas cela en ce qui concerne les subtilités, dans le sens
25 dans lequel il est possible de les interpréter. Maître Stewart, je ne dis
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1 pas que vous vous trompez, mais il ne coupait pas les cheveux en quatre. Il
2 faisait attention aux principes constitutionnels, par exemple, du plan
3 Vance-Owen, ce qui était très important pour les Serbes de Bosnie, on a
4 discuté beaucoup et longuement, il y avait des points qu'il n'appréciait
5 pas. Je ne dirais pas qu'il s'agissait là, d'une subtilité. Plutôt, il
6 considérait qu'il s'agissait là, d'une composante essentielle du plan, il
7 était en désaccord avec ses principes constitutionnels, par exemple, en ce
8 qui concerne les votes par consensus et la question de savoir si les Serbes
9 de Bosnie allaient avoir le pouvoir de veto sur tout ce qui était fait par
10 l'assemblée bosniaque. Il a pris une position très ferme en s'opposant à
11 cela, mais il s'agissait d'une position de principe, et non pas d'une
12 petite tactique de négociation.
13 Q. Est-ce qu'il était devenu évident, au fur et à mesure que vous vous
14 approchiez de la fin du processus Vance-Owen, qu'il fallait s'adresser à
15 l'assemblée des Serbes de Bosnie s'agissant de cette question-là ?
16 R. C'est ce que j'ai dit. Mais les choses n'étaient pas aussi évidentes de
17 notre point de vue. Lorsqu'ils ont dit cela, c'était leur position.
18 Ensuite, nous avons considéré que lorsqu'ils ont dit qu'ils allaient
19 s'adresser à l'assemblée avec cela que, probablement, ceci voulait dire
20 que, finalement, le plan allait être rejeté, puisque nous savions quelles
21 étaient les positions de l'assemblée des Serbes de Bosnie, sur la base des
22 réunions tenues préalablement, c'est-à-dire, avant mai 1993. Nous savions
23 quelle était la position de l'assemblée des Serbes de Bosnie. Lorsque le Dr
24 Karadzic a dit que sa signature a été posée sous réserve de l'approbation,
25 de la ratification de l'assemblée des Serbes de Bosnie, nous pouvions,
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1 vraiment, nous attendre à ce que ceci soit rejeté. C'est ce que j'ai écrit
2 dans mon journal. Vous allez trouver un endroit, si vous voulez je peux
3 vous montrer, je peux vous montrer cette entrée qu'à l'époque, je
4 m'attendais à ce que ce soit rejeté. Est-ce que vous souhaitez que je vous
5 la montre ?
6 Q. Non, ce n'est pas nécessaire. Merci, Monsieur Okun.
7 R. La seule raison pour laquelle je mentionne cela est qu'il n'y ait pas
8 écrit, "Je m'attends à ce que le plan soit rejeté." Mais plutôt, j'ai cité
9 un vers poétique qui indiquerait cela. Si vous lisez cette entrée, vous
10 n'allez pas, immédiatement, comprendre cela à moins de connaître le contenu
11 du poème.
12 Q. Vous voulez dire "L'hiver approche" ? Non, cela, c'est un autre vers
13 que vous avez ajouté.
14 R. Non, ce n'est pas cela. J'ai écrit : "Il existe des choses plus
15 difficile que le triomphe." Vous connaissez, peut-être, ce poème. C'est le
16 poème de William Butler Yeats. Le titre du poème
17 est : "A un ami dont le travail a échoué." Après la signature des Serbes de
18 Bosnie, après que les Serbes ont dit : "Qu'ils allaient s'adresser à
19 l'assemblée des Serbes de Bosnie pour ratifier cela," pour moi, il
20 devenait, tout à fait, clair que le plan Vance-Owen avait échoué. C'est ce
21 que j'ai écrit. Je mentionne cela parce que nous avons compris, clairement,
22 ce qu'il voulait dire, en disant que cette signature était posée sous
23 réserve de ce que disait l'assemblée. Effectivement, elle a subi une
24 défaite.
25 Q. Je crois que la référence au poème devrait nous permettre de
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1 reconnaître le passage en question, Monsieur Okun. Je ne veux pas vous
2 demander de nous citer l'auteur, mais la ratification par l'assemblée, je
3 crois comme vous l'avez dit plus tôt dans votre témoignage, c'était une
4 procédure à laquelle on s'attendait.
5 R. Non, cela n'a surpris personne.
6 Q. Le Dr Karadzic ou M. Krajisnik ont-ils, eux-mêmes, exprimé leur point
7 de vue, s'ils savaient si, oui ou non, ceci serait ratifié par l'assemblée
8 Serbe de Bosnie ?
9 R. Ils n'étaient pas obligés de le dire. Ils n'étaient pas obligés de le
10 dire expressément. Ils savaient et nous savions qu'ils n'allaient pas
11 réussir.
12 Q. Si quelqu'un devait essayer de le faire passer, ou essayer de vendre
13 cela, s'il y avait quelqu'un qui était à même de le faire, c'était bien M.
14 Krajisnik, n'est-ce pas ?
15 R. Je dirais que c'était une des personnes les plus importantes. Mais le
16 président Milosevic s'est rendu à l'assemblée, on constate par là,
17 l'importance qu'il jouait. Le Premier Ministre grec, Premier Ministre
18 Mitsotakis s'est rendu à l'assemblée. Mais, M. Krajisnik assurait la
19 présidence.
20 Q. Il semble que, pour finir, vous ayez eu raison. Lorsque vous étiez dans
21 la phase finale des négociations sur le plan Vance-Owen, et la question est
22 de savoir s'il serait accepté par l'assemblée serbe de Bosnie, pour ce qui
23 est de cette question là, il était, sans doute, très utile pour vous que M.
24 Krajisnik participe à vos pourparlers, à ce moment-là.
25 R. Oui.
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1 Q. C'était, en tout cas, quelque chose qui était précieux pour vous, et
2 qui l'était, peut-être, moins au début des négociations, et plus importants
3 au cours des derniers mois de ces pourparlers en 1992. Je crois qu'à ce
4 moment-là, il n'assistait pas aux réunions.
5 R. Ceci est exact, jusqu'à un certain point. Il n'était pas toujours
6 présent aux premières réunions, mais il a participé, de façon
7 significative, aux réunions qui se sont tenues entre le mois de septembre
8 et le mois de décembre, comme l'atteste ses différentes interventions à
9 propos de Sarajevo et le débat qui a porté sur les régions ethniques. Ceci
10 était très clair. Après cela, après 1993, c'était quelqu'un qui a vraiment
11 beaucoup participé. Nous connaissions son point de vue, et au mois de mai,
12 nous avions beaucoup vu M. Krajisnik, nous l'avons s'exprimer de l'autre
13 côté de la table.
14 Q. Lorsque vous dites qu'il a pris part de façon importante entre le mois
15 de septembre et le mois de décembre. Pour ce qui est de ces périodes entre
16 le mois de septembre et le mois de décembre, il était présent, d'après
17 votre journal, que le 18 et le 19 septembre ?
18 R. Oui, mais, Monsieur Stewart, il s'agissait d'interventions,
19 extrêmement, importantes. Ce qu'il a dit était très important.
20 Q. Pardonnez-moi, Monsieur Okun. Qu'est-ce que vous dites ? Vous dites que
21 ce qu'il a dit le 18 et le 19 septembre était très important ?
22 R. Oui, tout à fait.
23 Q. Mais hormis cela, entre la fin de mois septembre et le mois décembre,
24 il n'a pas pris part à ces réunions du tout ?
25 R. Nous savions qu'il était tenu informé de toute la situation. Nous
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1 l'avons revu à nouveau au mois de janvier lorsque les principaux dirigeants
2 concernés se sont retrouvés. Nous savions que son point de vue était pris
3 en compte.
4 Q. Sur un point purement pratique, M. Krajisnik semblait-il gêné lorsqu'il
5 prenait part à la discussion parce qu'il ne parlait pas anglais ?
6 R. Non, je crois que cela ne le gênait pas de façon importante. Il y avait
7 un interprète qui avait été mis à sa disposition et quelquefois il y avait
8 d'autres personnes qui parlaient un excellent anglais et qui lui
9 chuchotaient à l'oreille ce qui était dit. Buha, par exemple, chuchotait
10 dans son oreille ce qui était dit. Je crois qu'il avait une interprétation
11 simultanée qui était, tout à fait, appropriée, sans doute aussi appropriée
12 que la traduction simultanée de ce Tribunal.
13 Q. Vous voulez dire que M. Buha était assis à ses côtés et lui chuchotait
14 à l'oreille les propos de M. Vance ? Autrement dit, il n'y avait pas
15 d'interprète attitré ?
16 R. Après le mois de janvier, si, il y avait des interprètes attitrés
17 lorsque nous nous sommes réunis en séance plénière ou dans des groupes de
18 travail plus petits au palais des Nations. C'est là où nous nous sommes
19 rencontrés. Nous nous sommes rencontrés au siège des Nations Unies à
20 Genève.
21 Q. Je crois que vos notes, par la suite, évoquent la présence
22 d'interprètes, mais pour ce qui est de la réunion ou des réunions du 18 et
23 du 19 septembre, ceci a été fait par M. Buha ?
24 R. Ceci était assuré par toute personne présente autour de la table des
25 négociations, ce n'était pas toujours Buha. Pour répondre à votre question,
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1 Monsieur Stewart, la question si je vous ai bien compris, corrigez-moi si
2 je me trompe. La question qui est posée, est-ce qu'il comprenait ce qui
3 était dit autour de la table de négociations ? La réponse à la question
4 est-ce qu'il comprenait ce qui était dit autour de la table des
5 négociations ? La réponse est oui.
6 Q. Savez-vous si M. Buha parle anglais ? S'il parle bien l'anglais ?
7 R. Oui, tout à fait car j'ai eu un certain nombre d'échanges avec lui,
8 avec Buha et ces entretiens ont eu lieu en anglais.
9 Q. Monsieur Okun, la vrai question que je vous posais était de savoir si
10 la participation de M. Krajisnik, la participation active semblait se
11 trouver gênée car il semble que, le 18 et le 19 septembre 1992, sont des
12 dates où, vous-même, vous n'avez pris aucune note le concernant. Il me
13 semble ne s'être pas exprimé au cours de ces réunions. Comme vous n'avez
14 rien précisé dans votre journal à cet égard, cela pourrait porter à croire
15 qu'il n'ait pas contribué de façon pertinente ou majeure, à ce moment-là ?
16 R. M. Krajisnik s'exprime peu. C'est un homme qui fait l'économie de ses
17 mots, il parlait beaucoup moins que M. Karadzic qui était très loquace et
18 il parlait, beaucoup moins, que Nikola Kiljovic qui était, également, très
19 loquace. Ils s'exprimaient davantage. Je crois que si vous comptez les
20 mots, vous le constaterez. C'était un homme grave, c'est un homme qui, de
21 par son comportement différent, il est très digne, il parlait moins, il
22 faisait l'économie de ses mots. Il est clair qu'il faisait attention aux
23 mots qu'il choisissait, il soupesait les termes qu'il utilisait et on
24 comprenait que ce qu'il disait correspondait à ce qu'il pensait.
25 Q. Dans votre témoignage précédent, vous avez parlé des six objectifs de
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1 guerre présentés par les Serbes de Bosnie ?
2 R. Oui.
3 Q. Ainsi, un par un en sténo. Il s'agissait d'avoir un seul Etat, un État
4 au plan juridique qui porterait le nom de la Republika Srpska, et étant
5 donné que nous pouvons admettre qu'il y a certains concepts difficiles ici
6 à être appréhendés, la Republika Srpska comme État distinct ?
7 R. Quelle est la question ?
8 Q. Est-ce que vous êtes d'accord pour dire que ceci a donné lieu à un
9 certain nombre de questions sur ce que cela voulait dire au plan
10 international, au plan national ?
11 R. L'organisation, à ce stade, était assez complexe et ceci a été répété à
12 maintes reprises par tous les dirigeants serbes de Bosnie, comme ils le
13 disaient : "Nous n'allons pas vivre sous la férule musulmane. Nous voulons
14 être dirigés par les gens de chez nous." C'est ce qui est rédigé en notes
15 sténographiques, je ne peux pas m'étendre là-dessus. Autrement dit, vous
16 pouvez lire leur constitution. C'était, en substance, leur position. Ils
17 voulaient avoir leur propre État, ils voulaient pouvoir légiférer au nom de
18 leur peuple. En substance, c'est cela que cela signifie.
19 Q. Dans le contexte dans lequel ils se trouvaient, était-ce un objectif
20 raisonnable ?
21 R. Tout un chacun pensait, toutes les autres personnes estimaient qu'il
22 s'agissait là d'un objectif déraisonnable.
23 Q. Qu'entendez-vous ?
24 R. Les autres négociateurs et certains membres du gouvernement bosniaque,
25 les négociateurs, le secrétaire Vance et Lord Owen considéraient qu'il ne
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1 s'agissait pas là d'un objectif raisonnable.
2 Q. Le deuxième objectif de guerre concernait l'État qui découle du premier
3 car l'État devait avoir un territoire en continu et jouxter la Serbie. Ceci
4 ne devait pas être morcelé. Une fois que vous avez le premier objectif, le
5 deuxième objectif en découle de façon naturelle, n'est-ce pas ? C'est la
6 suite naturelle, et il serait naturel que les Serbes de Bosnie recherchent
7 cela ?
8 R. Oui, c'est assez probable, mais cela n'est pas une suite logique si on
9 se souvient, par exemple, que le Pakistan a été créé, et qu'il y avait un
10 Pakistan occidental et un Pakistan oriental. Si vous regardez le cas de
11 l'Azerbaïdjan, l'Azerbaïdjan a une frontière avec l'Arménie et la Turquie.
12 Il y a des exemples avant la Deuxième guerre mondiale, la Prusse était
13 séparée de la République Allemande, c'était le célèbre couloir polonais.
14 Les Etats-Unis, au jour d'aujourd'hui, par exemple, prenez le cas d'Hawaï
15 qui est à des milliers de kilomètres du continent américain, néanmoins, il
16 fait partie du continent américain. La même chose s'applique à l'Alaska,
17 c'est à des milliers de kilomètres.
18 Tout ce que je veux dire, j'ai compris que vous disiez qu'il s'agissait là
19 d'une exigence ou une revendication naturelle, ce qu'ils souhaitaient avoir
20 mais, à mon sens, ceci n'est ni automatique, ni nécessaire forcément.
21 Q. Bien sûr, Monsieur Okun. Nous acceptons qu'il y ait certains
22 territoires qui ont des territoires éloignés de la métropole, qui se
23 trouvent sur un autre continent. Je ne dois qu'à me retourner, simplement,
24 vers les Juges de la Chambre pour comprendre que c'est, effectivement, le
25 cas pour ajouter un certain nombre de pays à la liste. Ceci n'est pas le
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1 point que je fais valoir, néanmoins, c'est une suite logique.
2 R. Oui, j'entends bien. Il s'agit de la continuité territoriale. Bien sûr,
3 c'est quelque chose que l'on considère comme étant une suite logique.
4 Q. Pour ce qui est du troisième objectif de guerre, vous en parlez dans
5 votre journal. Il s'agissait d'une région qui devait être ethniquement pure
6 serbe ou à demi, Serbes de Bosnie ou quelle que soit la façon dont on en
7 parle. Ensuite, vous avez ajouté le terme de nettoyage ethnique. C'est un
8 sujet, évidemment, de très grande importance, Monsieur Okun. Après tout,
9 lorsque vous dites, et cela explique le "nettoyage ethnique." D'un côté
10 vous ajoutez qu'il s'agit de conséquences logiques d'avoir un État serbe ou
11 une région ethniquement pure serbe, où les Serbes de Bosnie auront une
12 majorité. Encore une fois, il s'agit, ici, de placer ceci dans le contexte
13 de l'indépendance de la Bosnie-Herzégovine. C'est qu'ils ne souhaitaient
14 pas avoir un État dans lequel ils se trouveraient en minorité. Ce qui
15 poserait problème pour eux. Ceci est apparu très clairement. Encore une
16 fois que d'asseoir la présence serbe en Bosnie était quelque chose de
17 compréhensible, n'est-ce pas ?
18 R. Je crains ne pas être d'accord avec vous encore une fois, Monsieur
19 Stewart. Quand bien même l'objectif eut été compréhensible, de façon
20 abstraite, la manière dont cet objectif était réalisée, et les régions
21 auxquelles ceci s'appliquait, étaient des régions où on a vu le transfert
22 forcé, le déplacement forcé et le massacre d'autres peuples, de Musulmans
23 et de Croates. Nous avons pu constater cela dans la présentation de
24 Krajisnik que nous avons vue sur la vidéo. Ceci pouvait être vu, on voyait
25 les lignes de front, les lignes qui étaient tenues par les Serbes, et en
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1 dessous il y avait la carte représentant la composition ethnique. Nous
2 avons une carte ici représentant la composition ethnique. Ces cartes sont
3 faciles à se procurer, et on constate que les régions détenues par l'armée
4 serbe de Bosnie, ou sous le contrôle de l'armée serbe de Bosnie, en 1992,
5 1993, 1994, ne concordaient pas avec la composition ethnique du pays sur
6 une carte d'avant-guerre. On peut dire s'il s'agit d'une hypothèse, de
7 quelque chose de, tout à fait, théorique, c'est agréable de vivre dans un
8 pays où vous êtes entouré de personnes qui font partie du même peuple que
9 vous, mais telle n'était pas la situation à laquelle faisaient face les
10 Serbes de Bosnie au début de l'année 1992. Ils ont fait en sorte que cela
11 soit le cas, et je dois préciser M. Krajisnik, le Dr Krajisnik dit ceci
12 dans sa présentation quand on regarde la vidéo. Il déclare que ceci sera un
13 territoire serbe et qu'il pourrait y avoir des enclaves d'autres peuples
14 vivant sur ce même territoire. Une enclave est une toute petite région,
15 composée d'un peuple et entourée d'un territoire beaucoup plus grand où vit
16 un autre peuple, comme Goa était une enclave sur le continent indien. Voilà
17 les mots mêmes, les propos du Dr Krajisnik que nous venons d'entendre dans
18 le prétoire.
19 Tout cela pour dire que je comprends très bien qu'il s'agit là d'une
20 hypothèse au plan théorique. C'est très agréable de vivre entouré de son
21 peuple, mais cela est tout autre chose lorsqu'on a une très grande région,
22 où des milliers et des centaines de personnes vivent de façon mélangée, et
23 que l'on ait envie de mettre en place cette région, de créer cette région
24 ethniquement pure, par le biais de la violence, d'expulsions forcées et
25 d'autres actes.
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1 Q. Je suppose que le principal axe de votre témoignage est de dire que les
2 deux ne sont pas distincts, dans la manière dont vous venez de le décrire.
3 Si on enlève l'idée des moyens illégaux pour y parvenir, le but ou
4 l'objectif qui consiste à avoir un État dans l'État, est, pour autant que
5 ce soit possible, un État serbe de Bosnie, est, en principe, un objectif
6 auquel on ne peut pas
7 s'opposer ?
8 R. Oui, en théorie on ne peut pas s'y opposer, mais, si on adopte la
9 position suivante, et si on dit que les mots traduisent la réalité ou si
10 les mots correspondent à la réalité, et si on tient compte de
11 l'aboutissement ici, cela n'est pas raisonnable, Maître Stewart, parce
12 qu'on ne pouvait y arriver que par l'utilisation de la force. C'est une
13 chose de dire que c'est une hypothèse purement théorique, c'est autre chose
14 de dire que cela va se produire. Ceci s'est produit à maintes reprises.
15 J'ai un certain nombre d'exemples en tête, je ne veux pas perdre le temps
16 de cette Chambre. Nous avons entendu d'autres exemples. Par exemple le Dr
17 Karadzic disait, il y aura la guerre en Macédoine pour les mêmes raisons
18 qu'il y a déjà la guerre ou qu'il y aura la guerre en Bosnie, et les choses
19 ne sont pas passées comme cela en Macédoine, car les dirigeants macédoniens
20 ont fait en sorte que cela ne se passe pas. Cela s'est passé en Bosnie, car
21 les dirigeants serbes de Bosnie ont fait en sorte que les choses se passent
22 ainsi.
23 Q. Le quatrième objectif de guerre avait trait au lien privilégié entre
24 l'Yougoslavie et la Serbie. Quel que soit la façon dont on le présente,
25 est-ce que vous n'estimez pas qu'il s'agit là d'un objectif tout à fait
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1 naturel, étant donné les circonstances ?
2 R. Oui, c'est vrai qu'on ne peut pas, ici, s'y opposer. J'estime que cela,
3 effectivement, est naturel. Cela dépend bien sûr de ce que l'on entend par
4 ce degré de rapport privilégié. Est-ce que, par exemple, avoir une double
5 citoyenneté, le traité d'extradition ou des relations commerciales
6 privilégiées. On peut définir ceci de plusieurs façons.
7 Q. Pour finir le cinquième objectif qui était de diviser Sarajevo entre une
8 entité musulmane et une entité serbe en Bosnie. Encore une fois à Sarajevo,
9 Monsieur Okun, ce qui s'est passé, il s'agit là de la seule façon dont on
10 pouvait résoudre ce problème insoluble, la division de Sarajevo entre deux
11 parties en Bosnie, serbe et musulmane, n'est pas véritablement un objectif
12 auquel on pouvait s'opposer ?
13 R. Je ne peux pas être d'accord avec vous ici, Maître Stewart, car la
14 population de Sarajevo était très mélangée. Il était très difficile de
15 séparer les peuples en présence, à moins de le faire par la force. Les
16 habitants de Sarajevo ne souhaitaient pas vivre de façon distincte. Pendant
17 toute la durée de la guerre, par exemple, pendant tous les mois et toutes
18 les années de bombardement par les Serbes de Bosnie de la ville, il y avait
19 un bon nombre de quartiers où il y avait des appartements qui appartenaient
20 à des particuliers où il y avait une famille serbe à un étage et une
21 famille musulmane sur le même étage. J'ai pu remarquer cela au cours de nos
22 visites. Il me semblait que les habitants eux-mêmes, les citoyens de
23 Sarajevo semblaient assez peu enclin à cela, qu'ils soient Musulmans ou
24 qu'ils soient Serbes de Bosnie, ils ne souhaitaient pas être divisés comme
25 Berlin, Berlin Est et Berlin Ouest. C'était un refrain qui revenait sans
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1 cesse. Les dirigeants Serbes de Bosnie l'évoquaient sans cesse. Ceci a été
2 souligné de façon répétée et à maintes reprises.
3 Q. Lorsque ces négociations ont commencé au mois d'août, au mois de
4 septembre 1992, est-ce que M. Vance et vous-même, vous aviez un point de
5 vue ? Saviez vous ce qui allait advenir de Sarajevo, ou ce qui devait
6 advenir de Sarajevo ? Aviez-vous une solution en tête concernant Sarajevo ?
7 R. La situation dans la ville de Sarajevo même et aux alentours était
8 connue de tous. La population serbe était importante au centre-ville. Elle
9 était plus petite que la population musulmane, néanmoins, importante. Mais
10 dans les municipalités voisines et dans les régions rurales, Ilidza, par
11 exemple, ces villages étaient majoritairement serbes. Je me souviens, par
12 exemple, que le Dr Karadzic et les autres dirigeants ont fait de Pale leur
13 capitale, capitale provisoire de la République Serbe de Bosnie. Autrement
14 dit, leur capitale était placée à côté de Sarajevo. Ceci était important
15 pour eux. Mais ni M. Vance ni moi-même, nous n'avions une idée préconçue et
16 irréversible sur la question du statut de Sarajevo au début des
17 négociations pour répondre à votre question précisément. Il était exact de
18 dire, également, que nous n'envisagions pas, et nous aurions trouvé
19 difficile d'envisager une division de Sarajevo comme l'avait été Berlin ou
20 Nicosie.
21 Q. Autrement dit, c'était une solution qui n'était pas viable, mais
22 qu'est-ce que vous envisagiez comme solution ? Ce que je ne vois pas très
23 clairement, Monsieur Okun, c'est qu'est-ce que vous envisagiez comme
24 solution ?
25 R. Laisser la ville à l'État où elle se trouvait. Cette ville avait vécu
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1 en paix pendant certaines décennies, voir même d'un certain nombre de
2 siècles. C'était une capitale, tout à fait, pacifique. Les jeux olympiques
3 avaient été organisés à Sarajevo une décennie plus tôt. C'était une ville,
4 tout à fait, pacifique, un petit peu comme La Haye. Nous ne voyions pas
5 pourquoi il était important de déranger tout cela. Je ne vois pas pourquoi,
6 non plus, on procéderait à une répartition démographique à La Haye. Cela ne
7 m'est même pas venu à l'esprit, pourquoi diviser une ville pacifique ? A
8 Sarajevo, les habitants vivaient ensemble de façon pacifique.
9 Je dois vous rappeler, Monsieur Stewart, lorsque le moment est arrivé de
10 signer la mise en place des accords du mois de janvier 1992 portant sur la
11 cessation des hostilités qui a terminé la guerre en Corée, des réunions ont
12 été tenues à un très haut niveau on avait posé la question : où cet accord
13 serait-il signé ? Il est important de garder en esprit le fait qu'il
14 s'agissait-là d'un accord entre le Serbie et la Croatie. La décision a été
15 prise, et cela se comprend fort bien, de ne signer à Belgrade, car les
16 Croates n'accepteraient pas cela. Ceci ne serait pas une bonne nouvelle
17 pour les Croates. Les Serbes ne souhaitaient pas signer ces accords à
18 Zagreb, non plus, ce qui signifiait que cela laissait Podgorica, Skopje,
19 Ljubljana, et Sarajevo. La décision a porté sur Sarajevo, car c'est une
20 ville très centrale, où il est facile d'y accéder. Cela se trouve dans un
21 endroit très tranquille. Nous pourrons, par conséquent, signer dans une
22 atmosphère tranquille. C'est la raison pour laquelle les accords du 2
23 janvier 1993, portant sur la cessation des hostilités qui ont mis fin à la
24 guerre en Croatie, ont été signés à Sarajevo, et je répète, encore une
25 fois, parce que Sarajevo était une ville pacifique.
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1 Q. Vous n'avez pas vu de problèmes surgissant du fait que le premier
2 objectif avait été atteint, c'est-à-dire, la Republika Srpska, allait
3 devenir un État au sein d'un État. C''était quelque chose qui existait
4 depuis un certain temps, mais, en pratique, cela deviendrait ainsi et, à ce
5 moment-là, Sarajevo deviendrait l'autre partie de Bosnie-Herzégovine, est-
6 ce exact ?
7 R. Je crois que j'ai déjà dit, nous n'avons pas accepté, nous n'avions
8 jamais accepté l'idée d'un Republika Srpska. Le plan Vance-Owen n'a pas
9 accepté la Republika Srpska, la proposition de son existence en tant que
10 telle. En fait, Lord Owen et le secrétaire Vance n'acceptaient pas les
11 lettres qui portaient l'entête de la Republika Srpska. Ils n'acceptaient,
12 simplement, pas ces lettres-là.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous écoute, Monsieur Tieger.
14 M. TIEGER : [interprétation] En fait, il s'agit d'un mot qui a été rédigé
15 de façon erroné.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais certainement, je vois ce que vous
17 voulez dire. Monsieur Okun, vous avez dit que le 2 janvier 1993, il y a eu
18 un accord, et que cet accord-là, l'accord du 2 janvier 1993 concernant la
19 cessation des hostilités a été ratifié, c'est l'accord qui fait en sorte
20 que les hostilités n'existent plus dans cette ville pacifique, je
21 comprends, en fait, que vous voulez dire 1992 ?
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, effectivement. Je parlais du 2 janvier
23 1992.
24 M. TIEGER : [interprétation] En fait, on voit au compte rendu d'audience le
25 mot "Corée" au lieu de "Croatie", juste à côté de "cessation des
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1 hostilités."
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que j'ai dit la Corée ? Est-ce que j'ai
3 parlé de Corée ?
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est ce qui figure au compte rendu
5 d'audience.
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis terriblement embarrassé.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais les deux pays commencent par un
8 "C". C'est, tout à fait, compréhensible. Veuillez poursuivre, Maître
9 Stewart.
10 M. STEWART : [interprétation] En fait, je croyais que cela faisait partie
11 de cette question, de cette discussion globale de la chose.
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis navré, mais il ne faut pas oublier que
13 la Corée est un pays divisé. C'est peut-être pour cela qu'inconsciemment,
14 j'ai prononcé ce mot.
15 M. STEWART : [interprétation]
16 Q. Le pouvoir résiduel qui était tenu par le pouvoir central de la Bosnie-
17 Herzégovine, c'était le sixième objectif de guerre. Dans ce contexte, les
18 autres objectifs étaient discutés, mais l'objectif principal était d'avoir
19 une Republika Srpska séparée.
20 R. Je peux dire, Maître Stewart, que si le but original n'est pas justifié
21 ou n'est pas valide, et si le but initial ne peut pas arriver sauf à
22 l'exception de l'usage de violence, de dire que quelque chose ne découle
23 pas, naturellement, de ceci jette une mauvaise lumière sur ceci.
24 Pour vous donner un exemple, vous me posez des questions, et le long de
25 votre ligne de questionnement, on pourrait croire que vous me demandiez si
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1 vous êtes d'accord avec les Nazis que l'Allemagne avait dû être libéré des
2 juifs. A ce moment-là, c'est, tout à fait, naturel de les amener en Pologne
3 et de les mettre dans une chambre à gaz. Je crois que personne ne serait
4 d'accord avec cette prémisse ici dans cette salle d'audience. Je suis
5 certain que vous ne voulez pas m'induire en erreur, mais votre question
6 laisse l'impression que ces actions étaient toutes des choses logiques,
7 simples, normales et que c'était un comportement tout à fait normal qui
8 découle d'une position prise raisonnablement. En réalité, c'étaient des
9 activités prises de façon consciente afin de créer une nouvelle réalité sur
10 la base de la force et de la violence.
11 Je ne peux pas être d'accord avec la façon dont vous présentez les faits.
12 Je ne peux pas dire qu'il s'agit de quelque chose qui découle naturellement
13 de ceci puisque le résultat final est tellement non-naturel. Dans ce cas-
14 ci, puisqu'il s'agissait du sixième but, c'est-à-dire, du droit de veto,
15 cela voudrait dire que la République bosnienne ne fonctionnerait pas. Cela
16 impliquerait de facto une désintégration de la République si l'une des
17 parties qui n'accepte pas la République a un droit de veto sur toutes les
18 activités dans la législature, à ce moment-là, il n'y a pas de République.
19 Nous avons entendu M. Krajisnik dire dans l'extrait vidéo que nous avons vu
20 dans ce prétoire il y a une heure ou plus dans sa première ou deuxième
21 phrase, nous l'avons entendu se référant à "l'ex-Bosnie-Herzégovine". Vous
22 voyez qu'au tout début de son discours, il n'acceptait pas l'État de
23 Bosnie. De décrire cette activité comme un résultat naturel n'est pas
24 juste, puisque l'on parle de la destruction d'un État, on parle de la
25 destruction physique d'un État, et les autres objectifs en parlaient
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1 également. Il faut dire que cet objectif-ci a mis le point final sur les
2 autres objectifs de guerre.
3 Q. Vous avez dit que les autres parties avaient également des objectifs de
4 guerre. Je ne veux pas donner beaucoup d'importance aux objectifs de guerre
5 des autres parties, mais pour résumer, dites-nous de quelle façon
6 décririez-vous les objectifs musulmans du parti musulman en 1992 ? Quels
7 étaient leurs objectifs de guerre ?
8 R. Leur objectif était d'avoir un État de Bosnie-Herzégovine à l'intérieur
9 des frontières présentes, reconnu internationalement. En fait, à l'époque,
10 ils voulaient que l'État soit unitaire, c'est-à-dire qu'il devrait y avoir
11 un gouvernement central et toute une série d'autres institutions, mais
12 n'appartenant pas toutefois à d'autres entités. Ils voulaient qu'il
13 s'agisse d'un État séculaire, démocratique basé sur le vote d'un homme. Les
14 Croates de Bosnie avaient également des objectifs de guerre qui
15 consistaient d'abord à enlever par un référendum ou par le vote, le 29
16 février et le 1er mars 1982, de voter pour l'indépendance, c'est-à-dire,
17 d'enlever la Bosnie de ce qui restait de l'Yougoslave au mois de mars 1992.
18 Deuxièmement, de venir en aide aux Musulmans de Bosnie afin de pouvoir
19 repousser l'armée des Serbes de Bosnie, et de défendre les territoires où
20 vivaient les Croates de Bosnie.
21 Troisièmement, ainsi ici l'objectif ressemblait à celui des Serbes de
22 Bosnie, c'est-à-dire, de garder un lien particulier ou spécial avez la
23 Croatie et peut-être même de rejoindre la Croatie à une date ultérieure.
24 Q. Vous vous souviendrez, Monsieur Okun, que M. Izetbegovic a dit dans une
25 déclaration bien connue à la fin du mois de février 1992, il a dit : "Je
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1 sacrifierais la paix pour une Bosnie Herzégovine souveraine, mais je ne
2 sacrifierais pas la souveraineté sans la paix en Bosnie Herzégovine." Est-
3 ce c'est quelque chose dont vous vous souvenez ?
4 R. Je ne me souviens pas de ces propos-là littéralement dit comme cela,
5 mais il était intéressé à avoir un État souverain, effectivement.
6 Q. Je vous cite ses propos, en anglais bien sûr, mais cette pensée
7 exprimée dans ces mots-là, est-ce que si à l'époque vous aviez entendu ses
8 propos, est-ce que vous auriez considéré qu'il s'agissait d'une déclaration
9 qui ressemblait à une déclaration de la guerre ?
10 R. Je ne crois pas que j'aurais interprété ces propos-là de cette façon-
11 là. Je crois que personne ne peut caractériser ces propos objectivement
12 comme une déclaration de la guerre, car il n'avait pas d'armée.
13 Q. J'ai parlé plus tôt d'une déclaration qui ressemblait une déclaration
14 de la guerre ?
15 R. Oui, vous voulez dire cela. Je ne crois pas. Je crois qu'il exprimait
16 l'opinion de ce que n'importe quel dirigeant dirait qui est sur le point de
17 diriger un pays, c'est-à-dire, de diriger un pays vers l'indépendance. Cela
18 fait partie de l'histoire, bien sûr, la Bosnie-Herzégovine.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est une façon particulière de
20 remémorer le Président qu'il est presque 13 heures 45. Je ne pourrais pas
21 associer de la musique, mais je dirais qu'il s'agissait d'un bruit plutôt.
22 Juste un moment à cet effectif.
23 M. STEWART : [interprétation] Je pensais que c'était des publicités.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'espère que cela ne sera pas répété de
25 cette façon-ci de nouveau. Nous nous rapprochons, effectivement, 13 heures
Page 4362
1 45.
2 J'accorde une minute aux parties pour discuter de quelques problèmes
3 pratiques. Monsieur Okun, nous n'allons pas vous importuner avec nos
4 discussions. Nous aimerions vous revoir ici devant cette Chambre de
5 première instance et devant cette salle d'audience à 9 heures du matin. Je
6 vous demanderais de ne pas discuter avec personne de votre témoignage, ni
7 du témoignage que vous allez donner.
8 Je vous remercie.
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie également.
10 [Le témoin se retire]
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Stewart, de combien de temps
12 aurez-vous encore besoin pour terminer le contre-interrogatoire de ce
13 témoin demain ?
14 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, je crois que j'aurais
15 pouvoir terminer avant la première pause de demain.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] A ce moment-là, il y aura peut-être
17 certaines questions que les Juges de la Chambre souhaiteront poser au
18 témoin, et peut-être des questions supplémentaires de la part de
19 l'Accusation. Il faut garder aussi un certain temps pour les questions
20 pratiques. Il est toujours bien de pouvoir exposer de façon publique la
21 façon dont les parties devraient procéder.
22 Le deuxième point, s'agissant des déclarations et des transcripts pour ce
23 qui est de versement au dossier de ces derniers, ils ne figurent pas sur la
24 liste de pièce à verser au dossier. Nous nous retrouvons maintenant devant
25 un problème. Le prochain problème, c'est que les pièces qui sont jointes
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1 également ne font pas partie et ne se trouvent pas sur la liste des pièces.
2 Il faudrait peut-être aborder cette question demain, à savoir, de quelle
3 façon nous allons s'occuper de ces choses dans l'avenir.
4 Je ne sais pas si les parties souhaitent ajouter quelque chose. C'est tout
5 ce que j'avais à dire pour ma part. En fait, vous pouvez peut-être rédiger
6 cette après-midi, m'envoyer peut-être un mémo en une ou deux lignes, ou si
7 vous voulez peut-être aborder cette question oralement, vous aurez peut-
8 être une ou deux minutes. Je crois que nous avons déjà débordé légèrement.
9 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, nous n'avons rien à
10 ajouter.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Je présume que l'Accusation
12 n'a rien à ajouter oralement non plus.
13 M. TIEGER : [interprétation] Non, Monsieur le Président.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons lever la séance. Nous
15 reprendrons nos travaux demain matin.
16 --- L'audience est levée à 13 heures 47 et reprendra le vendredi 25 juin
17 2004, à 9 heures 00.
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