Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le jeudi 4 mai 2006

2 [Audience publique]

3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 08.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, à tous et à toutes dans le

6 prétoire, ainsi que ceux qui sont à l'extérieur mais qui sont là pour nous

7 aider.

8 Monsieur le Greffier, veuillez citer l'affaire.

9 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, il s'agit

10 ici de l'affaire IT-00-39-T, le Procureur contre Momcilo Krajisnik.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci beaucoup. Monsieur Josse, je vois

12 que vous êtes debout.

13 M. JOSSE : [interprétation] Monsieur le Président, je vais tout de suite me

14 référer à une conversation interceptée si vous me le permettez.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais je vais d'abord rappeler à M.

16 Krajisnik que ce matin une fois de plus, il est tenu par la déclaration

17 solennelle qu'il a faite au début de son témoignage.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] M. Josse voudrait parler d'une écoute,

19 alors je voudrais qu'on nous la fasse entendre.

20 M. JOSSE : [interprétation] Merci. Je vais demander à ce que ceci nous soit

21 passé.

22 Est-ce que les copies ont été confiées aux Juges de la Chambre ?

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je crois que cela nous a été

24 distribué.

25 M. JOSSE : [interprétation] M. Krajisnik a besoin d'une copie en B/C/S.

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais nous avons plusieurs copies, alors

27 il y en a deux -- non il y en a une. D'accord, alors uns avons une

28 conversation interceptée datée du 3 décembre 1991 entre Karadzic et

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1 Krajisnik.

2 M. JOSSE : [interprétation] Je tiens également à dire que je suis

3 reconnaissant à nos confrères de l'Accusation, étant donné qu'ils vont nous

4 faire passer cet enregistrement vu que nous n'avons pas été en mesure nous-

5 même de le faire avec nos équipements ce matin.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, allez-y.

7 LE TÉMOIN : MOMCILO KRAJISNIK [Reprise]

8 [Le témoin répond par l'interprète]

9 Interrogatoire principal par M. Josse: [Suite]

10 [Diffusion de cassette audio]

11 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]

12 "C'est un maître de maison, un vrai maître de maison.

13 Karadzic : Oui. Il n'y a pas de bon à rien.

14 Krajisnik : Ce sont des Serbes. A partir du moment où ce sont des

15 braves gens.

16 Karadzic : C'est des vrais Serbes, il n'y a pas de ville plus serbe

17 que Niksic, voilà.

18 Krajisnik : Non, il n'y en a pas de la sorte.

19 Karadzic : Il n'y en a pas des comme cela dans le monde entier.

20 Krajisnik : Je sais à partir du fait que Niksic --

21 Karadzic : Tu vas bien ?

22 Krajisnik : Oui, comment ça va ? Ça va bien et ça a été comment là-

23 haut ?

24 Karadzic : Cela a été parfait. J'étais avec Vance pendant 1 heure 25

25 minutes. Nous n'avons pas publié la chose.

26 Krajisnik : Oui.

27 Karadzic : Et cela a été formidable.

28 Krajisnik : Ne me dit pas.

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1 Karadzic : Ce sont d'autres gens, ces Américains. Ces merdes

2 européennes sont insupportables par rapport à eux.

3 Krajisnik : Qu'est-ce que tu penses, qu'est-ce que cela va donner ?

4 Karadzic : Bien, je vais te raconter. Ils ont demandé quelque chose

5 au sujet de la Bosnie et j'ai refusé. Je lui ai dit, écoutez, s'il vous

6 plaît, vous n'avez qu'à dire aux autres, à la Communauté européenne, que

7 vous venez en Bosnie, et si vous ne voyez pas les trois peuples en

8 présence, les trois parties en présence, vous n'avez rien vu.

9 Krajisnik : Hm-hm.

10 Karadzic : Alors, si vous ne voyez que moi et Izetbegovic, vous

11 n'avez vu personne. Il faut que vous voyiez aussi les Croates. Vous devez

12 voir les trois parties.

13 Krajisnik : C'est bien.

14 Karadzic : Autrement vous n'avez vu personne, vous allez être

15 désinformé. Et deuxièmement, nous ne voulons pas autoriser les Casques

16 bleus. Ils disent que la situation en Bosnie est grave. Oui, elle est

17 grave, mais nous maintenons l'équilibre, on ne tire pas.

18 Krajisnik : Hm-hm.

19 Karadzic : Si vous venez, cela va bouleverser l'équilibre et vous en

20 serez la cause. La cause de ces troubles et des conflits et c'est ce qu'ils

21 ont mal pris. Quand tu leur dis que c'est eux qui vont en être la cause. Et

22 comment voulez-vous que nous soyons la cause ? Je leur ai dit : Bien, voilà

23 comment. Les Serbes, compte tenu de la grande défiance, les Serbes vont

24 penser que les Musulmans vont vous manipuler. Les Musulmans vont penser que

25 les Serbes vous ont manipulés. Tout le monde sera tendu et cela va donner

26 des histoires. Alors, si vous n'arrivez pas à calmer ces troubles, la

27 Bosnie est grande et il y aura des tirs, et cetera. Alors, laissez tomber

28 tout cela et les observateurs non armés, est-ce qu'ils porteront des

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1 uniformes ? Oui, ce sera le cas. Bien, je ne peux pas vous le promettre

2 mais il faudrait que vous les placiez dans la vallée de la Neretva. Alors,

3 je leur ai dit, je ne peux pas décider tout seul, il faut que je consulte

4 des gens. Nous sommes un parti démocratique et ainsi de suite. Je leur ai

5 dit que je pensais que cela était exclu. Alors, il voulait un QG à

6 Sarajevo. Je lui ai dit, il n'est pas question de le faire à Sarajevo.

7 Krajisnik : Alors, il a accepté ?

8 Karadzic : Non, il a accepté. J'ai dit Sarajevo, non pas question.

9 Vous pouvez aller à Livno. Alors, il a demandé pour Banja Luka. Je lui ai

10 dit que j'allais lui faire savoir pour Banja Luka, parce que j'étais en

11 train d'y réfléchir. Mais, il faut que ce soit en Bosnie. Je lui avais

12 proposé Ljubljana.

13 Krajisnik : Hm-hm.

14 Karadzic : Alors, il a dit que cela ne donnerait rien, parce qu'il

15 semblerait que cela donnerait l'air ou cela fera croire que nous soutenions

16 la cessation de la Slovénie.

17 Krajisnik : Hm-hm.

18 Karadzic : Et il est terriblement contre la reconnaissance.

19 Krajisnik : Bon.

20 Karadzic : Contre la reconnaissance, te dis-je. Je leur ai dit, nous

21 ne sommes pas contre la reconnaissance, mais nous sommes contre la

22 reconnaissance en tant que fait unilatéral. Il faut que nous le fassions au

23 niveau du Parlement fédéral et que la Slovénie entame là sur le processus

24 de sa reconnaissance afin que la Yougoslavie soit le premier pays à la

25 reconnaître.

26 Krajisnik : Hm-hm.

27 Karadzic : Ensuite, après la Yougoslavie tout le monde peut la

28 reconnaître. Et pour ce qui est de la Croatie, il s'agit de se référer à

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1 cette expérience-là. Il nous dit mais nous redoutons que les tensions ne

2 feraient que croître parce que la Croatie veut être reconnue et la Bosnie,

3 non, la Bosnie ne le veut pas. Alors, je lui ai dit, alors je lui expliqué

4 qu'avec notre constitution il en allait ainsi. Alors il me dit qu'il a lu

5 quelque chose à ce sujet. Est-ce qu'on lui a envoyé cela ? Oui ?

6 Krajisnik : Quoi ?

7 Karadzic : Nos papiers ?

8 Krajisnik : Oui.

9 Karadzic : J'ai lui quelque chose à ce sujet, m'a-t-il dit.

10 Krajisnik : Oui, on lui a envoyé. On lui a envoyé une lettre.

11 Karadzic : Une lettre ?

12 Krajisnik : Oui, il a renvoyé une réponse.

13 Karadzic : Il a renvoyé une réponse, oui ?

14 Krajisnik : Oui, il a renvoyé une --

15 Karadzic : Je voudrais bien voir sa réponse.

16 Krajisnik : Elle est chez Nikola. Je l'ai donné à Nikola puisqu'il

17 l'a envoyé à mon nom, mais elle se réfère à Nikola.

18 Karadzic : Bon. Cela a été très bien, cela a été très bien. Avec

19 Slobo, j'ai achevé bon nombre de choses, pour ce qui de son gouvernement et

20 --

21 Krajisnik : Ecoute, s'il vous plaît.

22 Karadzic : Je t'écoute.

23 Krajisnik : A midi, nous avons une commission constitutionnelle ici,

24 enfin une constitution sans Serbes pour la première fois.

25 Karadzic : Hm-hm.

26 Krajisnik : Il serait bon, si tu pouvais venir.

27 Karadzic : Hm-hm.

28 Krajisnik : Et à 4 heures, nous avons, tu sais notre -- Karadzic :

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1 Notre quoi ?

2 Krajisnik : Bien j'ai pensé que nous pourrions être là-bas pendant

3 une demi-heure, et nous demanderions à Petko de travailler. Tu sais la

4 commission constitutionnelle, la nôtre.

5 Karadzic : Mais il faut que je -- est-ce qu'il faut j'y sois, parce

6 qu'à 1 heure j'ai une télévision étrangère.

7 Krajisnik : Bon, alors si ce n'est pas possible, ne vient pas. Mais

8 laisse-moi te dire, j'ai pensé qu'il serait utile -- que cela serait utile,

9 mais peu importe. On leur expliquera le pourquoi du comment. Les nôtres

10 sont au courant. Je crois que les gens de la Krajina vont venir.

11 Krajisnik : Bon.

12 Karadzic : Une autre chose.

13 Krajisnik : Oui.

14 Karadzic : Il faudra me demander le système politique belge et

15 hollandais. Il faut demander cela à l'un des nôtres.

16 Krajisnik : Je ne sais pas, je pense que l'autre avait cela.

17 Karadzic : Lukic ?

18 Krajisnik : Je ne sais plus quoi. Tu as dit Belge ? On va voir cela.

19 Karadzic : Belge, le système politique belge. Tu sais là, il y a deux

20 communautés qui vivent l'une à côté de l'autre depuis le début jusqu'au

21 bout. Et le système scolaire et les autorités sont doubles et cela ne se

22 rejoint qu'en haut au sommet de l'Etat.

23 Krajisnik : Hm-hm.

24 Karadzic : Et il y a des choses constituées sur les bases paritaires.

25 Je crois que la situation est assez intéressante.

26 Krajisnik : Bon si cela est vrai, je veux bien. J'ai ouï dire de leur

27 bouche et j'avais reçu aussi l'ambassadeur belge ici. Il m'avait expliqué,

28 il a parlé d'enclaves et de tout cela. Ce qui fait que --

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1 Karadzic : Mais non.

2 Krajisnik : Bien.

3 Karadzic : En Hollande, il y a des enfants protestants et catholiques

4 qui suivent des cours dans la même école.

5 Krajisnik : Bon, nous n'avons rien contre le fait de vivre ensemble,

6 seulement le problème c'est qu'il ne faudrait pas que quelqu'un impose à

7 autrui.

8 Karadzic : Le problème c'est la manipulation et le fait d'imposer sa

9 volonté. Il faut que nous assurions la nécessité pour tout à chacun de

10 souffler et de voir qu'il n'y a pas d'imposition de la volonté d'autrui.

11 Krajisnik : Ecoute, Radovan, s'il vous plaît, nous avons convenu ici

12 que ce serait utile. Nous avons aujourd'hui le comité principal et le Club

13 des députés. Cela dura assez longtemps, et il faudrait que nous options

14 pour cet aspect économique. Tu sais que les ministres doivent présenter, et

15 cetera. Nous ne voulons pas qu'il y ait abus au niveau du Parlement, ce

16 serait une mauvaise chose, et il faudrait préparer les décisions avec des

17 invitations et que cela se fasse de façon officielle parce que le 12, on a

18 également --

19 Karadzic : Bien.

20 Krajisnik : On a le Club des députés concernant le Parlement et il

21 faudrait que ce soit officiel. Il ne faut pas que le Parlement soit mis

22 dans une situation où il serait en deçà du niveau qui est requis.

23 Karadzic : Bien, je suis d'accord, je suis d'accord.

24 Krajisnik : Et, il n'y a pas de décision à prendre d'urgence. Tout

25 doit se faire jusqu'au 12 et jusqu'au 12 il faut que la décision soit

26 prise.

27 L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas terminé. Le Président répond à

28 l'interprète de la cabine anglaise, pour ce qui est d'une correction à

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1 apporter au compte rendu d'audience.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie de la correction

3 apportée. L'interprète ayant apporté la correction qui se lit comme suit,

4 après le mot "Begovic" : "Il y a une date de reconnaissance," et "ce n'est

5 pas une faveur qu'on lui doit."

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je voudrais qu'une cote soit attribuée à

7 ce document.

8 M. JOSSE : [interprétation] Je vous en prie.

9 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D186.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D186. Monsieur le Greffier, veuillez me

11 donner une copie.

12 L'INTERPRÈTE : L'interprète de la cabine française s'efforce de terminer le

13 texte que lui n'a pas en traduction anglaise, comme cela est le cas de la

14 cabine anglaise.

15 [voix sur voix]

16 "Alors, il faut que la décision soit adoptée jusqu'au 12. Il faut que

17 nous préparions les documents. Je crois, tu sais, que le 12, ce sont les

18 conseils. Il faudrait que nous nous mettions d'accord pour demain. D'après

19 moi, ce sera plutôt tordu concernant le fait qu'il veuille révoquer le

20 dénommé Begovic, et on lui doit vraiment une grande connaissance.

21 Karadzic : Oui, oui.

22 Krajisnik : C'est fonction de son comportement. Il faut que nous nous

23 attaquions au dénommé Doka.

24 Karadzic : Oui, oui.

25 Krajisnik : Et demain, je ne sais pas comment les gens vont -- enfin, il

26 faudrait que la délégation que nous avons entamé, tu sais --"

27 [Fin de la diffusion de la cassette audio]

28 L'INTERPRÈTE : L'interprète interrompt pour reprendre les interventions du

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1 prétoire.

2 M. JOSSE : [interprétation] Je suis reconnaissant à M. le Président. Je

3 voudrais les enregistrements audio sur CD et les transcriptions que nous

4 avons entendues à la fin du témoignage de M. Krajisnik.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je crois que cela ne devrait pas être un

6 problème. Il faudrait toutefois accorder des noms à tous ces documents,

7 ainsi qu'aux enregistrements audio.

8 M. JOSSE : [interprétation] Certainement.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il faudrait non seulement que cela se

10 reflète au niveau des numéros des pièces de versement au dossier, mais il

11 faudrait que nous sachions le retrouver au niveau du 186.

12 M. JOSSE : [interprétation] Oui, je comprends.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors s'il y a des difficultés -- je ne

14 pense pas qu'il y ait des difficultés techniques majeures. Nous pouvons

15 donner les noms que nous voulons, n'est-ce pas ?

16 M. JOSSE : [aucune interprétation]

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cela nous reviendra.

18 Q. Monsieur Krajisnik --

19 L'INTERPRÈTE : L'interprète de la cabine anglaise fait savoir que la cabine

20 française n'a pas terminé l'interprétation du texte.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous en avons terminé, et la cabine

22 française a fait savoir qu'elle n'avait pas terminé la traduction à vue.

23 M. JOSSE : [interprétation]

24 Q. Au début du compte rendu --

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, non.

26 M. JOSSE : [interprétation]

27 Q. Alors, au début de cette écoute interceptée, Monsieur Krajisnik, M.

28 Karadzic parle de façon tout à fait claire des négociations qu'il a eues

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1 avec M. Vance.

2 R. Oui.

3 Q. Les négociations auxquelles on se réfère ont eu lieu où ?

4 R. Les médias ont également publié le fait que cette réunion s'était tenue

5 à Belgrade, où M. Vance a rendu visite à M. Milosevic, et c'est à ce

6 moment-là qu'il a rencontré également M. Karadzic. C'est à cela que se

7 rapporte ce que M. Karadzic est en train de dire ici.

8 Q. Alors, partant du rapport détaillé fourni par M. Karadzic, il nous

9 semble évident que vous n'avez pas été présent à cette réunion vous-même.

10 R. Non, je n'y ai pas été.

11 Q. M. Karadzic est en train de décrire les négociations qu'il avait eues

12 avec quelqu'un à part. Alors, savez-vous de qui il s'agissait ?

13 R. Je crois bien qu'il s'agissait ici de feu le président Milosevic. Il

14 était président à l'époque, et je crois que les médias ont publié le fait

15 qu'il avait eu une rencontre avec M. Vance ainsi qu'avec ses

16 collaborateurs.

17 Q. Pourquoi n'avez-vous pas été présent à cette réunion-là ?

18 R. Je vous l'ai dit hier. J'étais représentant de l'Etat. Je ne pouvais

19 pas aller à une réunion de ce type, et ici, M. Vance avait souhaité

20 rencontrer les partis, et les partis en Bosnie-Herzégovine ont été

21 représentés par les chefs des partis. Ici, au devant de la Bosnie-

22 Herzégovine, M. Karadzic a assisté à cette réunion en sa qualité de

23 représentant de la partie serbe et du Parti démocratique serbe. Donc dans

24 cette combinaison-là, il n'y avait pas moyen pour moi d'être présent.

25 Q. En première page de la version anglaise, M. Karadzic est en train de

26 dire, et je cite : "Il n'y a pas de tirs." Alors, à quoi se réfère-t-on

27 ici, selon vous ?

28 R. Je sais que feu M. Vance était venu pour tomber d'accord avec la

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1 Serbie, à savoir, avec M. Milosevic, la nécessité d'exercer de sa part une

2 pression sur les Serbes de Krajina pour l'arrivée des forces des Nations

3 Unies. M. Karadzic dit : "On ne tire pas en Bosnie. Il n'y a pas de guerre

4 comme cela est le cas en Croatie." Il ne l'a pas dit explicitement, mais

5 là-bas, il pensait -- il trouvait nécessaire le déplacement des forces des

6 Nations Unies. C'est ce qu'il voulait dire. Parce que s'il y a eu des

7 échanges de tirs sporadiques, il n'y a pas de tirs véritables, il n'y a pas

8 de guerre, et il a dit : "Pas comme ailleurs," donc en Croatie, et

9 "pourquoi," se référant à M. Vance, "pourquoi enverraient-ils des Casques

10 bleus, Casques bleus des Nations Unies ?"

11 Q. Ce document auquel on se réfère un peu plus tard, c'est quoi ? Vous

12 dites vous-même que vous l'avez donné à Nikola parce qu'il avait mis mon

13 nom dessus.

14 R. Il s'agit probablement d'une des lettres que nous avions envoyées à la

15 Communauté européenne à l'époque, ainsi qu'à M. Vance. Comme cela avait été

16 envoyé à mon nom, mais cela était destiné à M. Koljevic, je le lui ai

17 transmis. Je suppose qu'il s'agissait de la réponse de M. Vance, feu M.

18 Vance, au courrier que nous lui avions adressé nous-même. Je suppose que

19 c'est bel et bien ce courrier-là. Je n'arrive pas à me remémorer la

20 possibilité que ce soit autre chose.

21 Q. Ensuite, il y a une référence au comité constitutionnel serbe pour la

22 première fois. Pouvez-vous, s'il vous plaît, nous informer là-dessus ?

23 R. Lorsque nous avons créé l'assemblée du peuple serbe en Bosnie-

24 Herzégovine, comme toutes assemblées ou parlements, elle était censée

25 fonctionner avec des commissions. Donc, en Bosnie-Herzégovine, le président

26 de la commission constitutionnelle était toujours le président du Parlement.

27 Quant à savoir si c'était suite à un document qui donnait des consignes ou

28 alors si c'était à cause de l'inertie, je ne sais pas, mais en tout cas,

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1 c'était comme cela. Donc, nous avons décidé de commencer à préparer la

2 rédaction, de préparer l'adoption d'une déclaration sur la République serbe

3 de Bosnie-Herzégovine. Cette commission devrait très certainement se

4 rencontrer pour justement effectuer ce travail de préparation. Il y avait

5 des députés ainsi que des personnalités de l'extérieur, des experts

6 juridiques qui étaient là pour interpréter les sujets afin d'être sûrs que

7 la rédaction du cadre constitutionnel soit correcte. Cela, c'est la

8 commission constitutionnelle.

9 M. Trbojevic, si vous vous souvenez bien, est venu ici, il était

10 membre de cette commission en Bosnie-Herzégovine quand j'étais président --

11 enfin, président de la République serbe, aussi. Souvent, il me remplaçait.

12 Souvent, il devait me remplacer parce que je n'étais pas disponible. Le

13 président de la commission des affaires constitutionnelles était censé

14 participer à des différentes réunions, donc souvent, il me remplaçait aussi.

15 Pour vous expliquer ce qu'est cette commission constitutionnelle du

16 Parlement serbe, on doit trouver son nom, d'ailleurs, les noms des membres

17 de la commission dans le bulletin officiel. Dans le bulletin officiel, on

18 pouvait trouver le nom des membres de la commission, donc les députés

19 étaient membres d'au moins une commission et parfois de deux commissions.

20 Je sais qu'il y avait différents députés qui étaient sur deux commissions à

21 la fois. M. Poplasen, par exemple, était membre d'une commission.

22 Q. Ensuite, il y a une référence aux systèmes politiques néerlandais et

23 belge. C'est M. Karadzic qui fait cette allusion. Pourquoi était-il

24 intéressé par ces systèmes, par le fonctionnement de ces deux pays ?

25 R. Pendant tous les pourparlers, ces deux Etats étaient un exemple pour

26 nous. Il y avait deux Etats qui nous servaient d'exemple, c'était la

27 Belgique et la Suisse, puisque ce sont deux Etats multiethniques, deux

28 entités multiethniques, et on essayait de copier leur système pour

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1 l'appliquer à la Bosnie-Herzégovine. La Bosnie-Herzégovine a une espèce

2 d'autorité chapeau, enfin, ensuite, il y a différentes entités tout comme

3 il y a les Flamands en Belgique et les Wallons en Belgique. Quand on s'est

4 rendus en Belgique, on nous a dit qu'il pouvait très bien y avoir des

5 quartiers flamands et des quartiers wallons. Nous pensions que nous

6 pourrions avoir cela au sein d'une même ville, donc on se disait qu'on

7 pouvait peut-être appliquer cela à Sarajevo. Je ne sais pas si c'était

8 vraiment convaincant, mais en tout cas, le but c'était un petit peu de

9 transformer la Bosnie-Herzégovine selon l'exemple belge.

10 Q. Un peu plus tard, vous nous dites que : "Le Club des députés ici, en

11 liaison avec le Parlement, il faudrait que ce soit officiel parce qu'on ne

12 s'est jamais trouvé dans une situation où le Parlement perd sa dignité."

13 Ceci dit quoi, tout cela ?

14 R. Bien, ici on est le 3 décembre. La séance du Parlement s'est tenue

15 après le 11 décembre. Différentes branches de l'administration du

16 gouvernement, surtout le SDS aux niveaux municipal et républicain, toutes

17 ces administrations voulaient participer à la session de l'assemblée du

18 peuple serbe. Donc c'était vraiment un regroupement assez important, donc

19 cela priverait l'assemblée de son autonomie. Donc j'ai suggéré à M.

20 Karadzic qu'il y ait une réunion préparatoire qui soit séparée, que les

21 Clubs de députés se réunissent de façon séparée, et qu'ensuite il y ait

22 séance du Parlement sans eux pour que cela ne devienne pas une foire

23 d'empoigne. J'essayais de m'assurer que le Parlement soit un endroit plus

24 officiel, plus cérémonial, parce qu'il me semblait que s'il y avait trop de

25 gens qui venaient de l'extérieur, ce serait la foire. Je ne voulais pas que

26 les députés soient dominés par les gens venant de l'extérieur.

27 Q. Là, c'est la correction qui a été apportée à la traduction anglaise. Il

28 est dit maintenant que vous devez quelque chose à Begovic, que vous lui

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1 êtes reconnaissant, donc vous avez une dette envers lui ?

2 R. M. Begovic, si je me souviens bien, était vice-ministre de la Défense

3 nationale, c'était l'adjoint de M. Doko et il était Musulman. Mais du point

4 de vue de l'état-major qui existait auparavant, il voulait toujours que la

5 Défense nationale reste une matière qui suive la constitution. Il est entré

6 en conflit avec le SDA parce que le SDA, lui, voulait en fait plutôt Doko

7 qui était Croate plutôt que Begovic qui était un Musulman et qui était un

8 officier d'active au sein de la JNA. Donc, le SDA voulait qu'il soit

9 remplacé par quelqu'un qui vienne de leur propre camp, qui aurait l'échine

10 plus souple en ce qui concerne les consignes du parti. C'est pour cela que

11 j'ai dit qu'on avait une dette envers lui. Nous, du côté serbe, on lui

12 devait quelque chose puisque M. Begovic, qui était Musulman, travaillait

13 pour la constitutionnalité, pour être sûr que la JNA occupe le rôle qui lui

14 était dû.

15 Si vous vous souvenez bien, M. Kapetina a témoigné ici, et il nous a

16 expliqué toutes les violations qui ont été perpétrées par le ministère

17 envers la JNA. M. Begovic, lui, était quelqu'un qui était extrêmement

18 objectif, qui n'avait aucun préjugé. C'est mon appréciation de cette

19 personne. De toute façon, ultérieurement, il a été remplacé, mais enfin,

20 voilà ce qui se passait à ce moment-là.

21 Q. M. Begovic appartenait-il à un parti politique ?

22 R. Je ne pense pas. Comme M. Kapetina, qui lui aussi, finalement, est

23 resté en poste d'un régime à l'autre, de l'ancien régime au nouveau régime,

24 M. Begovic lui aussi est resté en poste au ministère. Le SDA l'a soutenu,

25 bien qu'il n'était pas membre du SDA. Mais il était Musulman, donc

26 automatiquement il était considéré comme étant, je cite, comme "faisant

27 partie des Musulmans, de l'équipe des Musulmans."

28 Q. Donc vous dites ensuite, il faut attaquer Doko, et cela, c'est pour les

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1 raisons que vous venez de nous expliciter; c'est cela ?

2 R. Oui. Pour les raisons que je vous ai données et pour d'autres raisons

3 d'ailleurs que je ne vous ai pas encore expliquées. M. Doko, tout comme M.

4 le Témoin Kapetina a expliqué lors de sa déposition, M. Doko ne

5 reconnaissait pas les lois, il agissait un peu comme s'il se trouvait au-

6 dessus des lois. Il agissait en négligeant la loi.

7 Q. Vers de la fin de la conversation, vous dites à M.

8 Karadzic : "Il ne sert à rien de quitter l'assemblée, de quitter le

9 Parlement. Nous devons rester là jusqu'au bout et combattre, tu sais."

10 Pourriez-vous exactement nous dire ce que vous entendiez par cela ?

11 R. Je me disais que les membres du Parti démocratique serbe et du Parti du

12 Renouveau serbe, donc tous les députés serbes qui avaient déjà quitté

13 l'assemblée plusieurs fois, enfin le Parlement plusieurs fois. Chaque fois

14 que leur constitution avait été violée, chaque fois que leurs intérêts

15 nationaux étaient blessés, ils quittaient la pièce, ils quittaient la

16 salle, ils me laissaient seul. J'étais en train de dire, ce n'est pas une

17 bonne façon de procéder. Il faut se battre. On avait, bien sûr, opposé un

18 veto, cela c'est bien, mais on ne doit pas quitter la salle parce qu'on est

19 en colère. Il y a eu d'autres, le HDZ et le SDB aussi ont, de temps en

20 temps, essayé de quitter la pièce, et j'allais toujours les voir pour

21 essayer de les convaincre de revenir en salle pour continuer à discuter.

22 Tout comme on avait décidé de participer aux travaux de l'assemblée

23 commune, du Parlement commun et de ne parler que de nos propres intérêts au

24 sein de l'assemblée serbe, du Parlement serbe, je me disais qu'on devait

25 rester et se battre pour nos droits au sein de ce Parlement conjoint de

26 Bosnie-Herzégovine. On devait se battre pour essayer d'obtenir ce qui

27 paraissait être notre dû.

28 M. JOSSE : [interprétation] Je n'ai plus rien à demander à propos de cette

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1 conversation téléphonique.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur Josse. Je regarde

3 quelques détails au passage. Quand vous nous avez dit que vous ne vouliez

4 pas que le Parlement devienne une foire d'empoigne où il y aurait trop de

5 personnes de l'extérieur qui domineraient la scène, aviez-vous -- là vous

6 nous parliez de l'assemblée conjointe ou du Parlement conjoint ou est-ce

7 que vous parliez uniquement du Parlement serbe ?

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Je parlais du Parlement serbe, et j'ai

9 utilisé cette expression de foire d'empoigne parce que de toute manière, ce

10 n'arrivait pas à l'assemblée conjointe, enfin au Parlement conjoint.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si je vous comprends bien, un moment

12 vous parlez de l'assemblée du Parlement serbe ne comprenant pas et ensuite

13 plus tard, en revanche, vous parlez de la conduite à tenir au sein du

14 Parlement conjoint pour défendre vos propres intérêts, en disant qu'il faut

15 vous défendre et qu'il ne faut pas uniquement utiliser la politique de la

16 chaise vide ?

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est cela. On ne doit pas utiliser cette

18 politique de la chaise vide, en tout cas en ce qui concerne l'assemblée

19 conjointe.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le Juge Hanoteau aurait une question. A

21 partir du transcript, il n'est pas toujours clair de voir de quelle

22 assemblée il s'agit. Mais le Juge Hanoteau a une question.

23 M. LE JUGE HANOTEAU : Dans cette assemblée serbe, comment des personnes

24 extérieures qui auraient assisté à l'assemblée pouvait dominer les

25 députés ? Je ne vois pas qu'est-ce que vous entendez par là ?

26 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, il y avait 63 députés. Si

27 on faisait rentrer 50 membres du conseil principal, sept ou huit membres du

28 conseil exécutif, des personnes aussi venant des conseils régionaux et

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1 d'autres invités, dans ce cas-là les députés sont en minorité. Il y a plus

2 de non-membres, de non-députés, que de députés. On parle de chiffre. Après

3 tout, chaque personne présente a le droit de débattre, de participer à la

4 discussion. C'est les députés qui ont la priorité, mais les autres ont

5 aussi la parole. Ce que j'essayais de dire, c'est que ce rassemblement --

6 bon, il y aurait 63 députés contre 80 et quelque non-membres. Ce n'est pas

7 arrivé, mais je voulais éviter que cela arrive. Je voulais éviter

8 absolument que cela arrive. Je ne voulais pas que les députés soient

9 complètement noyés par des personnes extérieures et l'extérieur avait

10 extrêmement envie d'être à la session.

11 M. LE JUGE HANOTEAU : Est-il constitutionnel ou légal que de personnes

12 invitées à assister à l'assemblée puissent participer à la discussion ?

13 C'était prévu par les textes ? Des personnes extérieures à l'assemblée qui

14 n'étaient pas députés pouvaient participer aux discussions. Je suppose

15 qu'elles ne pouvaient pas voter des décisions, mais elles pouvaient

16 participer aux discussions. C'est cela que vous nous dites ?

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Tout à fait, tout à fait. Ils avaient droit de

18 participer aux discussions, mais ils ne pouvaient pas voter.

19 M. LE JUGE HANOTEAU : Merci.

20 M. JOSSE : [interprétation] Je n'ai plus de questions.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il me semble que maintenant c'est à M.

22 Stewart de poser des questions et de reprendre l'interrogatoire principal.

23 M. STEWART : [interprétation] Oui, tout à fait, quelques questions.

24 Interrogatoire principal par M. Stewart : [Suite]:

25 Q. [interprétation] Monsieur Krajisnik, nous en arrivons maintenant en

26 janvier 1992, juste en suivant la chronologie des événements. Je tiens à

27 dire la chose suivante juste pour votre information et pour l'information

28 aussi des personnes présentes dans le prétoire. Il y avait deux séances du

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1 Parlement serbe qui se sont tenus en janvier 1992, l'une le 9 janvier où

2 une mesure a été prise, proclamation de la déclaration de la République

3 serbe de Bosnie-Herzégovine. Ensuite, une autre session le 26 janvier 1992.

4 M. STEWART : [interprétation] Tout ceci est disponible.

5 Q. Mais je ne vais pas vous poser de questions, Monsieur Krajisnik, à

6 propos de ces deux séances. Ce n'est pas parce que je suis fou; il faut

7 comprendre que ce n'est pas parce que j'aurais oublié qu'elles ont existé,

8 ne vous en faites pas, c'est uniquement parce que je pense qu'on y

9 reviendra plus tard, en plus sur ce qui a été débattu lors de ces sessions,

10 est repris lors d'autres sessions, et on en parlera plutôt lors des autres

11 sessions. Ce n'est pas juste pour dire qu'en janvier 1992, il ne s'est

12 absolument rien passé, Monsieur Krajisnik, mais nous allons passer plutôt à

13 autre chose. Quelque chose qui s'est passé et cela est incontestable à la

14 fin janvier 1992, vous vous êtes rendu à Belgrade à la fin du mois de

15 janvier 1992. C'est bien vrai, n'est-ce pas ?

16 R. Tout à fait. Oui, j'étais à Belgrade. Je ne suis jamais vraiment sûr si

17 c'était à la fin janvier ou à la fin décembre, mais je pense que vous avez

18 raison. Cela devait être fin janvier 1992, si vous parlez de cette grande

19 réunion qui s'est tenue à Belgrade.

20 Q. Il y a beaucoup de -- enfin je ne conteste pas que cette réunion se

21 soit tenue à la fin janvier 1992. Je pense que c'est incontestable, on a

22 énormément de preuves à ce sujet. Donc il y avait cette grande réunion qui

23 se tenait à Belgrade. Est-ce que le Dr Karadzic était présent lui aussi ?

24 R. Oui.

25 Q. Quel était le but de votre visite à Belgrade ?

26 R. Il y a quelques minutes, j'ai mentionné la visite de feu M. Vance. Le

27 sujet de notre accord était de faire venir des Casques bleus à la

28 République de Krajina serbe dans des zones qui, plus tard, sont devenues

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1 des zones sous protection des Nations Unies. Les dirigeants serbes de la

2 République de Krajina, de ce côté croate de la Krajina, étaient opposés au

3 plan qui plus tard était connu sous le nom du plan Vance. La présidence de

4 la Yougoslavie dirigée par M. Kostic à l'époque a organisé cette grande

5 réunion à laquelle participaient aussi des représentants de la Krajina

6 serbe, de la Krajina bosniaque, quatre d'entre nous venant de Sarajevo. Il

7 y avait M. Koljevic, M. Karadzic, Mme Plavsic, moi-même et M. Mladic aussi,

8 à l'époque il était commandant de la JNA à Knin. Le but de cette grande

9 réunion était de faire pression sur les dirigeants de la République serbe

10 de Krajina, celle qu'on appelait à l'époque la SAO Krajina. Il fallait

11 faire pression sur eux pour qu'ils acceptent le plan Vance. Si je me

12 souviens bien, on a passé deux à trois jours à discuter du matin au soir

13 pour essayer vraiment de les pousser à accepter, de les forcer à accepter

14 plutôt, avec toute sorte de présentations, et cetera.

15 Q. Il y a aussi M. Babic qui était absolument au centre de cette réunion.

16 R. Tout à fait, oui. Feu M. Babic était très opposé et comme vous l'avez

17 bien dit il était vraiment essentiel, enfin c'était vraiment un pivot de

18 l'opposition à cette réunion. Son gouvernement à lui était un élément

19 opposé au plan, donc vraiment il était sous les feux des discussions.

20 Q. Maintenant quel rôle deviez-vous jouer en tant que groupe de Serbes de

21 Bosnie ? Quel était votre rôle dans cette réunion ?

22 R. Il y avait le président de la municipalité de Banja Luka, des gens qui

23 venaient de la région de Banja Luka. C'était un groupe assez hétérogène. Il

24 n'y avait pas que des représentants de l'assemblée du peuple serbe. Notre

25 rôle était d'être utilisés, employés pour appliquer une certaine pression

26 pour les obliger à accepter le plan Vance. Quand j'ai dit qu'on devait

27 utiliser, employer c'est entre les guillemets, bien sûr, on était là pour

28 participer et contribuer, on était là pour contribuer à convaincre les gens

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1 venant de la SAO Krajina qui étaient plus proches de nous, qui finalement

2 nous faisaient plus confiance, donc on était là pour les convaincre pour

3 qu'ils puissent accepter le plan Vance.

4 Q. Vous nous dites que vous étiez employés entre guillemets. Vous aviez

5 l'impression d'être utilisé correctement ou avez-vous l'impression d'être

6 manipulé, instrumentalisé ?

7 R. Quand quelqu'un vous fait venir pour que vous soyez là pour faire

8 pression sur un tiers, sur un point qui ne vous concerne pas vraiment

9 directement, je n'arrive pas à trouver le mot exact qui qualifie cela. Je

10 ne pense pas que c'était mauvais à la base. On était là, on a été amené un

11 petit peu pour contribuer à faire pression. C'est pour cela que j'ai

12 utilisé ce mot selon lequel on avait été utilisé. J'aurais peut-être mieux

13 fait de dire nous avions été invités pour présenter notre argumentaire de

14 façon à aider, à persuader ou à convaincre les gens de la SAO Krajina.

15 Avant, de toute manière, on n'avait rien à dire et personne ne nous

16 demandait quoi que ce soit. Tout se passait entre la Serbie et la SAO

17 Krajina. J'ai utilisé ce terme vraiment entre guillemets.

18 Q. Y avait-il des différences d'opinion importantes à propos de ce point-

19 là, ce point concernant la Krajina et M. Babic ? Y avait-il des différences

20 d'opinion importantes entre vous, M. Karadzic, M. Koljevic, Mme Plavsic ?

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est étrange, on dirait qu'on a un chat

22 qui miaule dans les écouteurs ou un orage dans les écouteurs.

23 M. STEWART : [interprétation] Cela va devenir un gros chat surtout.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] A-t-on la moindre idée d'où vient ce

25 tonnerre dans les écouteurs ? Est-ce que tous les micros sont fermés ?

26 M. STEWART : [interprétation] Je viens de fermer mon micro.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cela va beaucoup mieux du coup.

28 M. STEWART : [interprétation] Oui, je viens de déplacer le micro et il

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1 semble que le chat soit parti, parfait. Tout va bien, merci. Où en étions-

2 nous ?

3 Q. Monsieur Krajisnik, avant cette interruption je me demandais s'il y

4 avait des points de vue différents, des opinions à propos de la SAO Krajina

5 et la position de M. Babic, entre vous et M. Karadzic, M. Koljevic et Mme

6 Plavsic ?

7 R. Oui, il y avait des différences de vues.

8 Q. Pouvez-vous nous les décrire en peu de mots ?

9 R. M. Karadzic, tout comme M. Koljevic et moi-même, considérions qu'on

10 venait d'accepter le plan Vance et nous faisions confiance aux

11 négociateurs, quand ils disaient qu'on ne pouvait plus vraiment améliorer

12 ce plan. Alors que pour Mme Plavsic, qui affectivement avait tendance à

13 soutenir la direction de la SAO Krajina, elle voulait que nous exigions

14 plus d'égalité entre le côté serbe et le côté croate. Elle avait un peu une

15 opinion différente, différente de la nôtre, différente de l'autre camp y

16 compris l'opinion des Serbes de Bosnie-Herzégovine.

17 Q. Dans les réunions publiques, est-ce qu'elle restait silencieuse à

18 propos de ces divergences de vues ou est-ce qu'elle avait tendance à

19 l'exprimer très ouvertement ?

20 R. Si je me souviens bien, elle avait tendance à s'exprimer publiquement.

21 D'ailleurs, elle l'a dit ouvertement lors de cette réunion. D'ailleurs,

22 elle a même été applaudie, applaudie par ces Serbes-là, par les dirigeants

23 de la SAO Krajina. Si je me souviens bien, mais je m'en souviens très, très

24 bien. Je m'en souviens très bien qu'elle l'a dit publiquement lors de cette

25 réunion et qu'elle a été applaudie.

26 Q. Combien de temps êtes-vous resté à Belgrade cette fois-là ?

27 R. Je crois que nous avons travaillé toute la nuit, c'est-à-dire toute une

28 journée et toute la soirée et pendant la nuit, une partie de la nuit, et

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1 nous avions terminé le lendemain. En fait, nous n'avions presque pas dormi

2 pendant la nuit. Donc deux jours et nuits, si vous voulez. Je ne sais pas

3 si le lendemain, nous étions rentrés à la maison ou non. Je ne me souviens

4 plus. Mais je sais que cette session a été très longue, donc elle a durée

5 toute une journée, toute une soirée et une nuit, et on a continué le

6 lendemain. C'est à ce moment-là que les représentants de la SAO serbe ne

7 sont pas venus, c'est-à-dire le feu Babic n'est pas venu, donc le

8 lendemain, il n'est pas venu à la réunion. Il y a eu une courte pause, mais

9 nous ne sommes pas allés dormir. Nous ne sommes pas rentrés à la maison

10 pour dormir, donc nous n'avions pas du tout dormi cette nuit-là.

11 Q. Pendant toute la durée de votre visite à Belgrade, est-ce que vous

12 avez, vous, et dans ce contexte, je pense aux Serbes de Bosnie de Sarajevo,

13 je n'inclus pas M. Babic, donc vous, les Serbes de Bosnie de Sarajevo, est-

14 ce que vous aviez eu des discussions avec qui que ce soit concernant des

15 questions qui affectent la Bosnie, outre cette question précise sur la

16 Krajina et M. Babic et ses collègues ?

17 R. Je crois que nous n'avons pas parlé de cela. Ils étaient tellement

18 préoccupés par plus gros problème qu'il aurait été presque impoli de parler

19 de la Bosnie alors que nous n'avions pas résolu cette question principale

20 qui a fait l'objet, en réalité, de cette assemblée. Je crois que tous les

21 représentants de Belgrade ont quitté cette réunion assez rapidement, et

22 nous étions restés seuls, nous, derrière, et en fait, nous nous sommes tous

23 séparés vers la fin de la journée. S'il y a eu des réunions, c'étaient des

24 réunions non officielles. Mais nous n'avons pas parlé de Bosnie de façon

25 officielle.

26 Q. A ce moment-là ou à l'époque, vous étiez encore en train de mener des

27 négociations sous l'égide de la Communauté européenne, n'est-ce pas ?

28 R. Oui. Je crois que oui. Oui, effectivement, oui.

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1 Q. Et le Portugal avait pris la présidence à partir du 1er janvier 1992

2 pour une durée de six mois, n'est-ce pas ?

3 R. Je crois que oui, vous avez tout à fait raison. Oui, puisque la Grande-

4 Bretagne les a remplacés après cette période.

5 Q. Est-ce que vous saviez à l'époque que vous allez avoir une réunion avec

6 M. Cutileiro, que cette réunion se préparait et que vous alliez en avoir

7 une ?

8 R. Je crois que oui, mais pas lors de cette réunion-là. Nous n'avons pas

9 parlé. Je crois qu'une initiative a été lancée puisque la décision avait

10 été prise relative au référendum de la part de la coalition musulmano-

11 croate, et la Communauté européenne a commencé à s'intéresser de façon un

12 peu plus active à ces problèmes. Je ne peux pas maintenant me rappeler de

13 la chronologie, mais il est tout à fait certain qu'à l'époque, nous avons

14 entamé des discussions, et M. l'ambassadeur Cutileiro était présent avec sa

15 délégation. Il était le médiateur entre les trois partis.

16 Q. Nous allons y revenir dans quelques instants. Nous allons aborder cette

17 question dans quelques instants, mais avant d'en arriver à vous poser des

18 questions sur cela, je souhaiterais que l'on examine la pièce P64A,

19 classeur 11, intercalaire 264. J'ai un exemplaire pour M. Krajisnik.

20 M. TIEGER : [interprétation] J'anticipe peut-être -- je me suis levé de

21 façon peut-être trop rapide, mais je voulais demander si je pouvais

22 également avoir un exemplaire. Mais je vois que Mme l'Huissière n'a pas

23 encore pu nous les remettre. Enfin, voilà, nous les avons maintenant.

24 Merci.

25 M. STEWART : [interprétation]

26 Q. Il semblerait que deux points figurent sur cette page.

27 M. TIEGER : [interprétation] Excusez-moi. Excusez-moi, Monsieur Stewart.

28 Nous avons simplement l'exemplaire en B/C/S, donc nous ne sommes pas en

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1 mesure de suivre. Nous n'avons pas tous les classeurs avec nous, bien sûr,

2 et nous ne savions pas quels étaient les classeurs que vous vouliez.

3 M. STEWART : [interprétation] Oui, bien sûr. Je vous comprends tout à fait.

4 Je vais essayer de remédier à ce problème immédiatement.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Outre de nous donner la cote, pourriez-

6 vous nous dire de quoi il s'agit ?

7 M. STEWART : [interprétation] Oui, certainement, Monsieur le Président.

8 Justement, j'allais vous le dire. Il s'agit d'un PV de la réunion du 13

9 février 1992 du comité municipal, et on voit les chiffres 00. Mais en fait,

10 ce n'est pas cela qui m'intéresse, mais c'est ce qui suit. En anglais,

11 c'est deux pages qui suivent, deux pages après la date que je viens de

12 donner.

13 Q. Monsieur Krajisnik, vous verrez que l'on fait référence à la date du 17

14 février 1992. L'intitulé est : "Réunion du conseil municipal 00 du SDS de

15 Prijedor." Est-ce que vous voyez cela ?

16 R. Je ne sais pas si j'ai trouvé le bon endroit. Vous parlez de Prijedor ?

17 Q. Oui. Vous verrez qu'en dessous de la date du 17 février, on peut voir

18 "SDS Prijedor." Est-ce que vous avez trouvé ce passage ?

19 R. Oui, oui. C'est un peu plus loin, effectivement. J'ai retrouvé le

20 passage.

21 Q. [aucune interprétation]

22 R. Il s'agit du 17 février 1992.

23 Q. Deux ou trois lignes plus bas, on voit les mots : "Agenda. Rapport sur

24 la mise en œuvre des conclusions adoptées lors de la réunion du conseil

25 principal de l'assemblée serbe de la BiH après avoir adopté l'ordre du

26 jour. Ving-huit membres. Simo Miskovic, le président de 00 SDS," encore une

27 fois, nous ne savons pas ce que cela veut dire exactement, "ont fait un

28 rapport sur la réunion qui a eu lieu à Sarajevo." Le conférencier principal

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1 invité était M. Karadzic, président du SDS de la BiH. La question discutée

2 était l'acte de sécession de la BiH, qui a été mis en œuvre par le Parti de

3 l'Action démocratique, le SDA. Eu égard à ceci, nous sommes forcés de créer

4 des communautés nationales dans des zones définies ethniquement. "La

5 position de la Communauté européenne est celle qu'elle n'interviendrait pas

6 dans les affaires internes de la BiH. Un débat suivra sous peu sur la

7 constitution de la République serbe en BiH, et ensuite sur son adoption. Le

8 but de la république est de renforcer les autorités locales dans la région

9 et leur pouvoir politique et économique au maximum. La région de la Krajina

10 de Bosnie œuvre également dans cette direction. Après que la situation dans

11 ce pays se soit calmée et que les conditions appropriées soient créées,

12 tous les territoires serbes et les communautés seront unifiés par la

13 volonté du peuple. La communauté internationale a pris la position qu'elle

14 ne reconnaîtra pas la souveraineté de la BiH en tant qu'Etat indépendant.

15 Le SDA s'est engagé de façon importante à résoudre et à compter les votes

16 électoraux. Toute participation par les Serbes dans tout référendum

17 organisé par le SDA est hors de question. Dans ce contexte, il est

18 nécessaire d'activer le deuxième niveau du conseil principal du SDS et de

19 la BiH. Les partis, commissaires, doivent être envoyés sur l'ensemble du

20 territoire où la population serbe habite. Tous devraient avoir une

21 protection dans leurs zones respectives."

22 Maintenant, Monsieur Krajisnik, pourriez-vous nous dire --

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Stewart, avant de continuer,

24 j'ai sur mon écran une pièce qui a été versée au dossier, une autre

25 version, ce qui veut dire que c'est une autre traduction. Pourrions-nous

26 travailler sur la base du document qui a déjà été versé au dossier ?

27 J'examine ou je regarde à l'instant le document qui porte la cote P64

28 intercalaire 264. Ce n'est pas exactement la même chose, et je comprends

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1 tout à fait que plusieurs traductions ont été faites, mais essayons de nous

2 concentrer sur le document qui est versé au dossier et d'en faire la

3 lecture. Si, pour une raison ou une autre, il ne s'agit pas de la meilleure

4 traduction possible, à ce moment-là, elle pourrait être remplacée par une

5 meilleure traduction, mais essayons de ne pas travailler avec plusieurs

6 copies d'un même document.

7 M. STEWART : [interprétation] Puis-je ajouter, Monsieur le Président, que

8 je suis tout à fait d'accord avec vous. Nous nous efforçons du mieux que

9 nous le pouvons pour ce faire.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

11 M. STEWART : [interprétation] Il nous arrivera de temps en temps de ne pas

12 pouvoir justement réussir à nous plier à votre demande, eu égard à la

13 pléthore de documents que nous avons à notre disposition, le document dont

14 nous devons travailler, mais nous allons essayer d'éviter ce problème.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je viens de vérifier P64 [comme

16 interprété] intercalaire 89, et il semblerait que ce document comporte

17 également une traduction différente, donc il ne s'agit pas de celle vous

18 avez lue. Il faudrait trouver s'il y a deux sources.

19 M. STEWART : [interprétation] Je ne sais pas si cette traduction est

20 meilleure ou moins bonne, je ne sais pas.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, tout à fait, mais tout ce que

22 j'essayais de faire, c'est simplement de m'assurer qu'au compte rendu

23 d'audience, il soit clairement indiqué que deux versions du même document

24 existent et que nous avons remarqué que vous ne vous êtes pas servis du

25 document qui est déjà versé au dossier. Donc, je vais vérifier le tout et

26 voir si les différences sont particulièrement flagrantes, s'il y a des mots

27 qui ressortent ou est-ce qu'il s'agit simplement de petites nuances

28 linguistiques. Alors veuillez poursuivre.

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1 M. STEWART : [interprétation] Je suis tout à fait d'accord avec vous,

2 Monsieur le Président, et on peut lire également au compte rendu d'audience

3 qu'il est bien difficile de recueillir tous les documents et de trouver le

4 bon document.

5 Maintenant, pour ce qui est de la partie que je viens de lire, Monsieur le

6 Président, est-ce que vous estimez qu'elle est bien différente de celle que

7 vous avez au dossier ?

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, Monsieur Stewart.

9 M. STEWART : [interprétation]

10 Q. Monsieur Krajisnik, la phrase principale est de dire : "qu'il est

11 absolument impératif d'activer le deuxième niveau du conseil principal du

12 SDS de la BiH." Est-ce que vous pouvez nous dire de quoi il s'agit

13 exactement ? A quoi fait-on référence, ici ?

14 R. Nous l'avons déjà vu à maintes reprises ici, tout au long de ma

15 déposition. J'ignore vraiment de quoi il s'agit. Je sais que c'est lié aux

16 Variantes A et B, mais je ne peux pas établir de lien entre ces

17 dispositions et quoi que soit d'autre, pour la simple raison qu'il

18 semblerait qu'il s'agisse ici de résultats d'une réunion qui a fait l'objet

19 de factures de l'Holiday Inn. Il s'agissait d'une réunion commune. On

20 parlait des négociations, et ici, on a déjà dit que de façon très claire,

21 on allait former la Serbie-et-Monténégro en tant que Yougoslavie, donc on

22 avait déjà parlé d'une telle création, et que cela serait beaucoup plus

23 facile que de reconnaître la Bosnie et de parler d'unité nationale. C'était

24 le but de cette réunion.

25 Mais la traduction devrait être faite -- lorsqu'on parle de députés, il ne

26 s'agit de députés, mais de commissaires. Si vous vous souviendrez, une

27 personne a déjà témoigné pour dire que c'était lui qui transmettait les

28 positions du président du parti. Donc, j'essaie d'illustrer par ces propos

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1 la situation telle qu'elle était. Pour ce qui est de cette question du

2 deuxième niveau, je ne peux vraiment pas vous dire de quoi il s'agit

3 précisément. On fait peut-être référence à la deuxième variante, je ne sais

4 pas à quoi ils font référence. Ils pensaient peut-être à quelque chose de

5 semblable. Mais je dois vous assurer, croyez-moi que je ne sais pas

6 exactement de quoi il s'agit. S'agit-il des Variantes A et B ? Je ne le

7 sais pas et je ne pourrais vraiment pas établir de lien direct. Prijedor

8 n'avait rien entrepris après cette réunion, et vous pouvez le voir,

9 d'ailleurs, dans les documents, donc Prijedor n'a rien fait. Les documents

10 du comité exécutif de Prijedor n'avaient rien entrepris concernant les

11 Variantes A et B. On n'a pas entamé quoi que ce soit, donc je ne sais pas

12 de quoi il s'agirait, ici, vraiment.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Stewart, pour votre

14 information, il y a une légère différence quant aux deux traductions. Dans

15 un exemplaire, on voit -- dans le vôtre, d'ailleurs, je crois que vous avez

16 dit -- donc dans votre exemplaire à vous, vous parlez de -- vous dites

17 qu'il est nécessaire de mettre en œuvre le deuxième niveau du conseil

18 exécutif du SDS de la BiH, les activités du parti et les commissaires,

19 alors que l'autre document parle de -- alors que l'autre traduction dit

20 qu'il est absolument nécessaire de couvrir le territoire ainsi que sa

21 population (serbe) par les représentants, les militants et les

22 représentants; donc commissaires et représentants n'est peut-être pas la

23 même chose qu'activistes, militants et représentants.

24 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, est-ce que je pourrais

25 peut-être vous donner mon opinion sur ce qui s'est passé ? J'ai obtenu ma

26 version -- je n'essaie certainement pas de jeter le blâme sur l'Accusation,

27 mais j'ai reçu ce document du mémoire préalable au procès du bureau du

28 Procureur. Ce n'est pas tout à fait déraisonnable de procéder de la sorte

Page 23484

1 lorsqu'on travaille, je comprends. Mais il est certain que si le document

2 qui se trouve en note de bas de page dans le mémoire préalable au procès de

3 l'Accusation et si la version est différente de celle qui fait partie des

4 éléments de preuve et des documents des éléments de preuve, donc vous

5 comprendrez, Monsieur le Président, qu'il arrive de temps en temps que l'on

6 travaille à partir de ce document et que si l'on travaille à partir de ces

7 documents, il y aura certainement un écart entre la pièce et le document

8 qui se trouve comme en note de bas de page.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je comprends tout à fait. Il y a des

10 différences, et il faut tout à fait essayer d'éviter les différences même

11 s'il y a une légère confusion et qu'il y a peut-être des différences.

12 M. STEWART : [interprétation] Tout à fait.

13 Q. Un peu plus bas dans la même document, on peut lire : "Liens avec la

14 Serbie." C'est l'intitulé. Je ne sais pas si vous voyez ce passage,

15 Monsieur Krajisnik ? "Liens avec la Serbie."

16 R. Oui, oui. Je vois.

17 Q. Plusieurs paragraphes plus tard, nous pouvons voir : "Il est important

18 d'établir le contrôle sur nos territoires.". "We need…" C'est le paragraphe

19 qui commence par : "We need…"

20 "Cet accord a été fait lors de la session plénière qui a eu lieu

21 avant la session conjointe de l'assemblée serbe de la BiH pour laquelle M.

22 Srdic était le député du serbe - illisible - du peuple serbe de la

23 municipalité de Prijedor."

24 On fait référence ici à la plénière. De quoi s'agit-il, la plénière

25 avant l'assemblée ? Que représente cette session ? C'est la session de qui,

26 de quoi, pourquoi ?

27 R. C'est où ? Excusez-moi, je n'arrive pas à trouver ce passage. J'ai

28 trouvé les liens avec la Serbie, mais je n'arrive pas à retrouver le

Page 23485

1 passage dont vous m'avez donné lecture.

2 Q. Monsieur, est-ce que vous voyez 150 000 Serbes --

3 R. Oui.

4 Q. -- 1,5 million de Serbes ? C'est tout juste en dessous, après les mots

5 "10 % de Musulmans", on dit : "Il était nécessaire d'établir le contrôle

6 sur nos territoires. Ceci a été convenu lors de la plénière qui a eu lieu

7 avant la session."

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans ma traduction, je vois réunion

9 préliminaire, donc il y a quand même une différence.

10 Monsieur Krajisnik, lorsqu'on parle de réunion, est-ce qu'on parle d'une

11 réunion préliminaire dans votre langue à vous ou parle-t-on d'une session

12 plénière ? Est-ce une plénière ?

13 LE TÉMOIN : [interprétation] On voit ici "pleminarni", donc on fait une

14 erreur. Ce n'est pas "pleminarni", donc c'est quelque chose qui précède une

15 réunion, donc c'est ce qui précède. On voit ici "pleminarni", qui est une

16 combinaison entre plénière et --

17 M. STEWART : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, mais est-

18 ce qu'on peut dire "pleminarni" en serbe ?

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est peut-être un mot serbe, n'est-ce

20 pas ?

21 L'INTERPRÈTE : Les interprètes notent que c'est exactement ce qui figure

22 dans l'original. Note de la cabine française : il s'agit d'une erreur. Le

23 mot pleminarni n'existe pas. Les interprètes de la cabine anglaise disent

24 que ce n'est pas un mot serbe exactement et que ce mot n'existe pas, mais

25 c'est bel et bien écrit dans l'original.

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. De toute façon, cela ne représente

27 pas un -- il ne semblerait pas qu'il s'agisse d'une plénière, d'une session

28 plénière mais plutôt d'une session préliminaire.

Page 23486

1 M. STEWART : [interprétation] Je crois que c'est un hybride de deux mots

2 anglais, donc c'est cela qui me tracassait un peu, mais bon, très bien, je

3 crois que nous avons tout à fait bien saisi de quoi il s'agissait. C'est

4 une légère erreur.

5 Q. Bien. Maintenant, Monsieur Krajisnik, est-ce que vous pourriez nous

6 dire de quel type de réunion il s'agissait ? Qui avait organisé cette

7 réunion qui a eu lieu avant la session de l'assemblée serbe ?

8 R. La session élargie. Outre le Club des députés, il est très peu probable

9 que d'autres représentants, d'autres membres y étaient présents. C'était

10 peut-être une session plénière, même si ce n'est pas ce qu'on lit, donc une

11 plus large réunion, plus grande réunion avant la session de l'assemblée

12 serbe de la BiH, comme on peut lire ici. Srdic a participé à cette session

13 et Srdic était le député du peuple serbe de la municipalité de Prijedor.

14 Q. Cette réunion a eu lieu le 15 février, samedi le 15 février; est-ce que

15 vous vous souvenez si, effectivement, une telle réunion a eu lieu avant la

16 session de l'assemblée ? Vous souvenez-vous de cela ?

17 R. Le 15 février. Je ne me souviens pas. J'ai vu ici une facture de

18 l'Holiday Inn du 15 février, donc je crois que oui, on a dû faire une

19 réunion élargie avant la session de l'assemblée, avant la réunion de

20 l'assemblée en tant que telle, mais je ne pourrais pas vous dire si

21 effectivement, c'était la date. Mais je peux vous dire que j'ai vu une

22 facture faisant état du 15 février de l'hôtel Holiday Inn, et j'imagine que

23 c'est là que cette réunion a eu lieu.

24 Q. Bien, donc un peu plus bas en anglais, M. Srdic prend la parole et il

25 parle de Dragan Sidjak, donc Srdic prend la parole et il parle de Sidjak

26 Dragan.

27 R. Sidjak Dragan, oui, c'est un peu plus bas. J'ai trouvé, mais je ne sais

28 pas si voulez que je regarde ceci ?

Page 23487

1 Q. M. Sidjak dit : "Il croit que la BiH serbe ne mènera qu'à une guerre et

2 il ne croit pas que cette idée fonctionnera. Il est convaincu qu'une idée

3 plus réaliste devrait être mise en œuvre en Krajina, plus particulièrement

4 lorsqu'il s'agit de Sarajevo en tant que son centre." Est-ce que vous

5 connaissez M. Sidjak ?

6 R. Je l'avais déjà vu lors d'une réunion, je ne m'étais pas entretenu avec

7 lui; toutefois, je sais de qui il s'agit. Je ne peux pas dire que je ne le

8 connais bien, mais je sais qui sait.

9 Q. Lorsqu'ici M. Sidjak fait référence à la Krajina, est-ce que dans votre

10 esprit à vous c'est tout à fait clair de quoi cette Krajina est censée être

11 composée, de quelles parties ?

12 R. J'ai déjà expliqué aux honorables Juges de la Chambre en leur parlant

13 de contexte historique, que la volonté de réunir les deux Krajina était

14 toujours présente. Ici, il ne s'agit pas de la réunification de la Krajina

15 de Bosnie et de la Krajina serbe, mais la Région autonome de la Krajina.

16 C'est de cela qu'on parle, donc avec son siège à Sarajevo. Il dit ici que

17 cette proposition-là est meilleure que celle de réunir ou de créer une

18 Republika Srpska à l'intérieur d'une Bosnie-Herzégovine, donc c'est à cela

19 qu'il fait référence. Il dit que cette région autonome qui existe déjà

20 devrait représenter une entité en tant qu'entité seule, indépendante, mais

21 il n'avait pas pensé à la réunification des deux Krajina, même si à

22 plusieurs reprises, eu égard à la crainte, on a assez souvent parlé de la

23 réunification des deux Krajina. Mais après le plan Vance, il est tout à

24 fait certain que cela aurait représenté une violation du plan Vance, mais

25 nous avons toujours tenté d'essayer de l'empêcher.

26 Q. Ensuite, M. Srdic --

27 R. L'interprétation n'est peut-être pas adéquate lorsqu'il dit qu'il croit

28 que dans la Serbie de la BiH, il ne voit que la guerre. Il ne veut pas dire

Page 23488

1 qu'il garantit qu'il s'agira d'une guerre, mais c'est une évaluation

2 personnelle. Il pense qu'une guerre éclatera, qu'une guerre était imminente.

3 Donc, c'est la personne qui est en train de rédiger le PV qui emploi la

4 troisième personne du singulier. C'est lui qui transmet son opinion. Ce

5 n'est pas la même chose. Si M. Sidjak avait parlé à la première personne du

6 singulier, il aurait dit : "Je crois que la guerre est imminente." Il n'a

7 pas fait un appel à la guerre, mais il a simplement cru que la situation

8 était telle qu'une guerre était éminente, qu'une guerre allait éclater.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il y a également une légère différence

10 dans la traduction dans notre document. Votre version à vous se lit comme

11 suit : "Il croit que la BiH serbe ne mènera qu'à une guerre et ne croit pas

12 que cette idée fonctionnera," alors que sur l'autre, dans l'autre

13 traduction, on peut lire : "Il ne voit que la guerre en Serbie de la BiH et

14 croit que cela ne marchera pas." Donc, c'est pour attirer votre attention

15 sur les deux écarts, les deux différences incohérentes.

16 M. STEWART : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. J'ai une

17 dernière question.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

19 M. STEWART : [interprétation]

20 Q. M. Srdic dit, d'après la réponse de Miskovic : "On a déjà vu que M.

21 Srdic était un député de l'assemblée serbe." Il dit : "L'argument important

22 dans notre transformation est le plébiscite qui aura lieu. La création des

23 Etats entrave une émigration massive, la relocation et l'échange de

24 territoires. Ceci est quelque chose qui ne peut pas être évité."

25 Est-ce que c'était le point de vue exprimé par M. Srdic ? Plutôt, ce

26 point de vue exprimé par M. Srdic, est-ce que c'était un point de vue qui

27 était partagé par la majorité des membres de l'assemblée serbe, des députés

28 de l'assemblée serbe ?

Page 23489

1 R. J'ai bien peur que vous ayez mal compris cette intervention, parce que

2 les personnes qui parlaient avant disaient que la Krajina, qui était

3 autonome, qu'elle devrait devenir un Etat, alors que M. Srdic répond à ce

4 que Miskovic dit, et il s'oppose à l'opinion de Miskovic et dit : "Notre

5 décision plébiscitaire est différente." La création d'entités en Bosnie-

6 Herzégovine voudrait dire que cela entraînerait de l'émigration, et cetera.

7 Nous avons déjà vu auparavant que M. Karadzic avait dit la même chose. Il

8 était contre cette solution que M. Sidjak avait cru comme étant meilleure.

9 Donc, M. Srdic s'oppose à l'idée qu'il fallait établir des comtés dans un

10 Etat, mais que ce qu'ils avaient entendu dans Sarajevo, c'était -- à

11 Sarajevo que la Bosnie devait être transformée ou scindée en trois unités

12 constitutives nationales. Ce n'est peut-être pas très clair. Vous n'avez

13 peut-être pas très bien compris.

14 Un peu plus haut, l'autre parle de Sarajevo et dit, M. Sidjak dit :

15 "Cette unité constitutive dont le siège est à Sarajevo." Ce sont des

16 phrases -- je comprends ma langue et je comprends les interventions, ici.

17 Je crois qu'il est bien difficile de traduire -- donc, M. Srdic était

18 contre le fait de créer des entités à l'intérieur de l'Etat de Bosnie-

19 Herzégovine, parce que cela mènerait à une immigration, à une

20 relocalisation, et cetera.

21 Je pourrais vous donner lecture, si vous voulez, mot à mot. Je peux

22 analyser chaque pensée.

23 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, est-ce que le moment

24 est opportun pour prendre la pause ?

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Alors, nous allons prendre une

26 pause jusqu'à 11 heures.

27 --- L'audience est suspendue à 10 heures 34.

28 --- L'audience est reprise à 11 heures 07.

Page 23490

1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Stewart, je vous prie de

2 continuer.

3 M. STEWART : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Puis-je

4 demander à Mme l'Huissière de remettre à M. Krajisnik, par le biais

5 habituel, un PV de la 7e Session du Parlement serbe datée du 15 février

6 2002. Je crois qu'il s'agit de la pièce P65, classeur numéro 8,

7 intercalaire 88.

8 Q. Monsieur Krajisnik, j'aimerais vous demander de retrouver la page 15.

9 R. Oui, je l'ai retrouvée.

10 Q. Ici, il y a un numéro 1 en marge, en votre qualité de président, vous

11 avez ouvert les travaux pendant toute la session. Vous êtes intervenu dans

12 les débats pour ce qui est de ce projet de constitution de Bosnie-

13 Herzégovine. Ensuite, c'est le Pr Milanovic qui prend la parole. Au

14 troisième paragraphe de son intervention, il est dit, pour ce qui est de

15 l'article 3, définissant le territoire de la Bosnie-Herzégovine --

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce qu'on peut m'indiquer la page en

17 version anglaise ?

18 M. STEWART : [interprétation] C'est la page 15, Monsieur le Président. Je

19 m'excuse d'avoir omis de le préciser.

20 Q. Il y est dit s'agissant de l'article 3 qui définit le territoire de la

21 Bosnie-Herzégovine : "A notre commission constitutionnelle, dont je suis

22 membre, je me suis employé en faveur."

23 "Monsieur Krajisnik, nous avons eu du mal à retrouver le projet de texte

24 présenté aux personnes présentes. Ce que nous avons, c'est la constitution

25 qui, elle, a été adoptée."

26 M. STEWART : [interprétation] Il s'agit de la pièce P64A, intercalaire 551,

27 classeur numéro 20.

28 Q. Monsieur Krajisnik, pourriez-vous nous dire si, d'après vos souvenirs,

Page 23491

1 il a été question de cet article 3, où il est fait état de la république

2 faisant partie intégrante de l'Etat fédéral de Yougoslavie ? Vous souvenez-

3 vous du fait que c'est ce bref passage de l'article 3, tel qu'adopté, ainsi

4 que l'article 2 de la constitution dans la version qui a été adoptée, que

5 nous avons sautée tout à l'heure, qui précise que ce territoire est

6 constitué des Régions autonomes, des municipalités autres régions

7 nationales y compris celles où un génocide a été accompli à l'égard du

8 peuple serbe pendant la Deuxième Guerre mondiale. Nous avons rencontré déjà

9 ce type de formulation dans une forme plus ou moins élargie, et j'aimerais

10 savoir si cela a déjà été adopté comme définition du territoire de cette

11 république aux termes de la constitution ?

12 R. Pour l'une et l'autre des questions que vous avez posées, je dirais,

13 oui.

14 Q. Si nous passons maintenant à la page 23, l'intervenant est M. Zekic,

15 Goran Zekic. Il y a un numéro 2 en marge. Il dit : "J'ai sauté ici au

16 niveau des territoires de la République. Cet article 3 est donné de la

17 façon suivante en laissant la possibilité à un grand nombre de territoires

18 serbes et de régions serbes la possibilité de faire partie de la Bosnie-

19 Herzégovine serbe, cela donnerait un dénouement pacifique. Il faudrait

20 prévoir, en cas de conflit, que la constitution prévoie que les territoires

21 qui ont, de par le passé, été à nous mais qui ont été perdus, non seulement

22 en raison du génocide mais aussi en raison des migrations, si nécessaire.

23 Par exemple, le secteur qui se trouve le long de la Drina, adjoindre à la

24 Romanija la Serbie et autres, il ne convient pas de nous priver à l'avance

25 de cette possibilité en tenant compte de ce critère dans d'autres variantes

26 de dénouement de la situation telle qu'elle se présente."

27 Il me semble, vous allez rectifier le tir si cela est faux, que mis à part

28 la définition qui incorpore la région où, à l'égard du peuple serbe, il y a

Page 23492

1 eu un génocide perpétré pendant la Deuxième Guerre mondiale, ce que M.

2 Zekic avait voulu suggérer c'était quelque chose en sus, lorsqu'il a fait

3 référence aux territoires historiques qui avaient été les nôtres d'après ce

4 qu'il dit, ai-je raison ?

5 R. Oui. Il y a eu bon nombre de propositions. L'une des propositions a été

6 celle que vous venez de mentionner. Au fil de l'histoire, certains

7 territoires ont été habités par une population, puis après par une autre

8 population, donc il y a eu des migrations. Ce qui fait que ceci se trouve

9 être assez vague, assez peu précis. Mais, il avait probablement parlé de

10 Srebrenica et de la région de Podrinje d'où il est originaire. C'est peut-

11 être la raison pour laquelle il a tenu ce propos.

12 Q. Mais son opinion n'a pas été acceptée et n'a pas fait, n'a pas été

13 incorporée dans la constitution, n'est-ce pas ?

14 R. Pour autant que je m'en souvienne, cela n'a pas été incorporé à celle-

15 ci. Il y a des raisons à cela. Ici aussi, nous avons indiqué qu'un document

16 est adopté et qu'il sera promulgué ultérieurement. Cela a, une fois de

17 plus, été une main tendue vis-à-vis de la partie adverse afin que cette

18 constitution du peuple serbe en Bosnie-Herzégovine ménage la possibilité de

19 faire autrement, quoique la décision ait été prise déjà d'organiser un

20 référendum. Cette décision, elle, a déjà, enfin la constitution a déjà été

21 promulguée le 22 mars 1992. Pour ce qui est du projet, je crois avoir une

22 copie sur moi. Je pourrais vous la remettre si vous êtes intéressé. Vous

23 allez pouvoir voir le projet dans sa première version, tel qu'envisagé.

24 Q. Monsieur Krajisnik, si vous êtes en train de nous dire que vous l'avez

25 ici, sur vous, dans ce cas-là, nous aimerions en effet beaucoup le voir

26 avec l'autorisation des Juges de la Chambre.

27 R. Non, pas ici, mais dans ma chambre, dans ma cellule à la prison.

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je pense, Monsieur Stewart, que vous

Page 23493

1 serez toujours aussi intéressé demain.

2 M. STEWART : [interprétation] Oui, je resterai intéressé demain aussi.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] On va peut-être demandé à M. Krajisnik

4 de l'apporter puisque ce serait apprécié par Me Stewart.

5 M. STEWART : [interprétation] Grand merci, Monsieur le Président.

6 Q. Bien, essayons maintenant de passer à la page 26 en version serbe, ceci

7 se retrouve en haut de la page 27 en version anglaise. Nous avons un numéro

8 4 en marge du texte, c'est toujours M. Milosevic qui parle dans cet article

9 3. On verra qu'après, que dans la constitution cet article 3 devient

10 article 2. Une fois que vous apporterez le projet, on pourra le vérifier.

11 Ici à l'article 3, il est dit : "J'ai étudié ce matin les frontières sur la

12 carte. Je demanderais à ce que cet article soit étudié une fois de plus

13 avec tout le sérieux qui lui est dû. Je ne vais tirer avec certitude les

14 frontières sur la carte partant de l'article 3. Ici, il convient d'abord de

15 voir la notion des entités ethniques serbes".

16 Monsieur Krajisnik, en se référant à l'article numéro 2 voire 3, où il est

17 fait état de régions dans lesquelles un génocide a été perpétré à l'égard

18 du peuple serbe pendant la Deuxième Guerre mondiale, j'aimerais que vous

19 veniez à nous présenter, avec une certitude plus ou moins grande, les

20 frontières définitives de ce territoire de la République serbe à l'époque ?

21 R. Cette carte, pour ce qui est des régions où un génocide a été perpétré,

22 est mise à la disposition du bureau du Procureur. L'une de ces cartes

23 existe dans la documentation. Mais la signification ici n'était pas, et je

24 ne pouvais pas à l'époque tirer des frontières, parce ceci se passe après

25 ou pendant les entretiens avec M. Cutileiro. Lorsque vous faites l'objet de

26 pressions pour ce qui est de la création d'une Krajina, vous entreprenez

27 des mesures visant à faire mettre un terme à un processus qui ne nous

28 convient pas et qui pourrait être qualifié de démantèlement de la Bosnie-

Page 23494

1 Herzégovine. Nous procédons à des démarches aux pas à pas dans l'espoir,

2 dans l'attente de trouver une solution à l'occasion des négociations avec

3 M. Cutileiro. Nous nous trouvions maintenant à une période où les

4 négociations se trouvent assez avancées et où on a une idée assez précise

5 des critères. C'est la raison pour laquelle, ces gens-là parlent de parties

6 ethniques, d'entités ethniques, et ainsi de suite. Nous nous situions

7 maintenant dans une période où il est question de la transformation de la

8 Bosnie-Herzégovine sous l'égide de la Communauté européenne.

9 Q. Monsieur Krajisnik, est-ce que la situation se présentait de la façon

10 suivante : l'adoption de la constitution comportant une définition des

11 territoires de la République serbe qui s'est faite dans des circonstances

12 où il y avait quand même des doutes assez importants pour est de l'endroit

13 par où devrait passer ces frontières ?

14 R. Vous avez raison. Parce que toute personne qui venait prendre la parole

15 avait à l'esprit l'idée de cette carte telle qu'il la voyait. Mais les

16 frontières ne pouvaient pas faire l'objet d'une détermination sans la

17 participation des trois parties. Il a été impossible de dire "ce sont nos

18 territoires," un point c'est tout. Cela n'était pas faisable du point de

19 vue de la partie serbe, du point de vue officiel, j'entends, parce que

20 chaque individu avait voulu que sa région fasse partie aussi de cette unité

21 constitutive du groupe ethnique serbe. C'est la raison pour laquelle ceci

22 se trouve être dit de façon aussi vague, puisque cela devait faire l'objet

23 de négociations, et non pas d'une décision de notre part à nous seulement.

24 Q. En anglais, cela se trouverait à une dizaine de lignes plus bas, mais

25 je ne pense pas qu'il y ait une grande différence en serbe. J'aimerais que

26 vous retrouviez le chiffre de 51 %, et une phrase où il est dit : "Si c'est

27 le critère de majorité ethnique absolue, il y a dans la constitution une

28 phrase où il est question de cette 'majorité ethnique absolue'." L'avez-

Page 23495

1 vous retrouvé ?

2 R. Il y a, en serbe, à la même page, un endroit où il y a 31 %, et un

3 autre endroit où il y a 51 %. C'est bien de cela que vous parlez ?

4 Q. Quelques lignes plus haut : "-- que nous reconnaissons à autrui cette

5 majorité ethnique absolue, mais nous nous réservons également le droit de

6 cette majorité ethnique absolue pour ce qui est d'établir un critère de

7 délimitation de la souveraineté d'un peuple. Je crois qu'il n'y a que cela

8 à pouvoir constituer un critère, puisque c'est la majorité ethnique absolue

9 qui crée la possibilité à un peuple de mettre en place une souveraineté et

10 de prendre souverainement des décisions sans pour autant demander l'avis

11 des autres. Je crois que c'est là un point important, si nous prenons le

12 critère de la majorité ethnique absolue pour ce qui est du critère de la

13 délimitation physique vis-à-vis des autres. Il convient d'accepter une

14 chose, à savoir que nous ne pouvons pas transformer notre 31 % de la

15 population en 51 %. Ils seront en minorité chez nous, et nous serons

16 minoritaires dans certaines des régions à eux."

17 Alors il y a eu des interjections depuis les sièges de certaines personnes.

18 Est-ce que cela signifie que les gens étaient contre ce que M. Milojevic

19 était en train de dire ?

20 R. Pour autant que je m'en souvienne, ils s'étaient opposés au 31 %, parce

21 que l'opinion prépondérante était celle de dire qu'un grand nombre de

22 Serbes s'étaient prononcés comme étant des Yougoslaves, ce qui fait

23 qu'officiellement, il y avait 31 ou 31,5 % de Serbes, 43 % de Musulmans et

24 17,5 % de Croates. Mais il y avait un nombre important de personnes s'étant

25 prononcées comme étant des Yougoslaves, et l'atout de M. Milojevic était

26 celui de dire que les Serbes n'étaient pas 31 % -- ou ne pouvait pas avoir

27 51 %. Alors, ce qu'il voulait dire, c'est que sur le plan territorial, nous

28 sommes propriétaires d'un certain nombre de pourcentage en territoire, à

Page 23496

1 savoir, 64 % des terres. Ce sont là des chiffres qu'il cite, mais la

2 réaction a été due au 31 % qu'il a mentionné, parce qu'il a estimé que les

3 Serbes ont été les plus nombreux à se prononcer comme étant des

4 Yougoslaves. Les Croates disaient la même chose et les Musulmans aussi,

5 mais la vérité est que les Serbes se sont surtout prononcés comme étant des

6 Yougoslaves. Donc, c'est ces gens-là qui contestaient ces dires depuis les

7 sièges qu'ils occupaient. Ils ont contesté également ce qu'il avait dit

8 avant au sujet de la majorité absolue. Le critère était censé être majorité

9 relative, parce que vous aviez 40, 40 et quelques, et 20 % ou 43 %. Donc

10 ceux qui avaient 43 % étaient majoritaires, parce que la majorité absolue,

11 c'était plus de 51 -- de 50, 51 %. Mais quand il y avait majorité relative,

12 c'était peut-être préférable, parce que cela impliquait que nous allions

13 avoir des minorités à eux chez nous et des minorités à nous chez eux. Cela

14 nous donnerait le droit, si nous étions donc cette majorité-là, à prendre

15 des décisions sans demander l'opinion d'autrui, et cela n'avait certes pas

16 été la politique que nous avions défendue. Il est peut-être allé un peu de

17 l'avant. C'était un homme assez bon, un enseignant, un professeur. Nous

18 avons eu coutume de dire qu'il était en train plutôt de philosopher.

19 Q. Je vais vous demander d'éclairer notre lanterne à un endroit. Je me

20 réfère notamment à la ligne 19 du compte rendu. Vous y dites que M.

21 Milojevic était en train de dire que nous avions 51 % et que nous étions

22 propriétaires de la majeure partie des terres, à savoir des 64 %. Or, si on

23 se penche sur le texte : "Il convient d'accepter une chose, à savoir qu'il

24 n'est pas question de transformer 31 % en 51 %. Ils seront en minorité chez

25 nous et nous serons en minorité chez eux."

26 Alors, Monsieur Krajisnik, cela n'est peut-être pas tout à fait clair à 100

27 %, ce que vous dites que M. Milojevic était en train de le dire en

28 affirmant qu'il y avait 51 % et qu'il s'opposait au fait de prendre 31 %

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1 comme étant le bon chiffre. A la lecture du texte anglais, c'est tout à

2 fait le contraire que l'on déduirait. J'aimerais si possible que vous

3 tiriez au clair cet élément-là.

4 R. Quand j'ai écouté la traduction de ce que vous avez dit, c'est tout à

5 fait le contraire. Ecoutez. Le 31 ou le 31,5 %, peu importe, c'est le

6 pourcentage qui découle du recensement de 1991 pour ce qui est des Serbes

7 ou du nombre de Serbes en Bosnie-Herzégovine. Quand j'ai parlé des 31 %,

8 pourquoi ont-ils réagi ? Ils ont réagi en raison des Yougoslaves. Je ne

9 vais pas me répéter. Alors, M. Milojevic, lui, est venu dire ou parler des

10 territoires qui ont probablement été mentionnés par ses prédécesseurs, et

11 il a dit que nous, 31 % de Serbes, nous ne pouvons pas faire des 31 % à 51

12 %. C'est la signification de son intervention à lui. Plus tard, il est

13 question des terres, des territoires. Nous n'avons pas fait la part des

14 populations. Il n'était pas question de délimiter des populations, mais de

15 délimiter des territoires, et c'est de là que découle la différence au

16 niveau des cartes que j'ai mentionnées, si vous vous en souvenez bien.

17 Alors vous avez, pour ce qui est de vos observations, tout à fait raison.

18 Ici, il y a une mauvaise compréhension des choses, parce qu'il est question

19 de 31 % de la population. Nous ne pouvons pas donc dire que nous sommes 51

20 % pour réclamer plus qu'il ne nous est dû, plus que notre dû. C'est là

21 qu'il y ait eu des réactions depuis l'auditoire.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'aimerais obtenir un autre

23 éclaircissement. Lorsque vous avez parlé des 64 %, cela a été une

24 observation que vous aviez faite vous-même, parce que je ne vois pas les 64

25 % dans le texte. Cela a été un commentaire que vous avez fait au sujet de

26 la question ?

27 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, merci, Monsieur le Président. Je ne sais

28 pas si cela se retrouve dans le texte, mais j'ai fait ce commentaire parce

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1 que nous avons utilisé ce chiffre très souvent de par le passé. C'est peut-

2 être la raison pour laquelle je l'ai mentionné. C'était un commentaire de

3 ma part.

4 M. STEWART : [interprétation]

5 Q. Ensuite, il dit : "C'est une réalité de la vie, et c'est sur la base de

6 la réciprocité que nous allons mettre en place des relations au niveau de

7 la république, avec réciprocité des droits. Nous devons accepter le fait

8 qu'il y aura des territoires où les Serbes seront minoritaires, mais les

9 Croates et les Musulmans, eux aussi, seront minoritaires dans d'autres

10 secteurs. Pour ce qui est par exemple des régions ethniquement les plus

11 pures sur le plan ethnique, nous n'avons que 60 % de Serbes. Les autres,

12 les 40 % sont constitués par les autres groupes ethniques. C'est la réalité

13 de la vie. Donc, il faut que cela se reflète dans la constitution. Il

14 faudra donc bien prévoir que nous serons minoritaires et majoritaires, et

15 qu'ils le seront également eux aussi, et que sur la base d'une délitation

16 physique de notre souveraineté, d'autre part, et compte tenu de la

17 réciprocité des droits, il faudra que nous aménagions les relations au

18 niveau de cette interaction des droits."

19 Monsieur Krajisnik, s'agissant de ce passage dont je viens de vous

20 donner lecture, est-ce que ceci coïncide bien avec les intentions et

21 l'approche de l'équipe chargée des négociations qui était censée continuer

22 à débattre de ces questions avec M. Cutileiro et les autres ?

23 R. C'était la politique officielle et c'était le sujet de nos discussions

24 avec M. Cutileiro, c'est-à-dire qu'une certaine communauté ethnique se

25 retrouverait en minorité dans certains endroits, mais qu'il fallait qu'il y

26 ait réciprocité, et cetera, et cetera. Donc, ce que dit M. Milojevic est

27 tout à fait correct et il en faisait la promotion. De plus, nous avons

28 décidé que ceci serait aussi des conditions préalables et nécessaires lors

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1 de nos pourparlers avec M. Cutileiro. Nous savions que certains Serbes

2 seraient en minorité dans les zones musulmanes, par exemple, mais on

3 n'avait rien contre cela du moment où les droits ethniques, leurs droits en

4 tant qu'êtres humains, étaient bien protégés.

5 Q. Ensuite, il poursuit, là nous sommes en bas de la page 27 de la version

6 anglaise, un petit peu -- une autre page en serbe, enfin. Il poursuit

7 avec : "On ne peut pas savoir ce qui se passera dans 50 ans." Voyez-vous

8 cette référence, Monsieur Krajisnik ?

9 R. Oui.

10 Q. "On ne peut pas savoir ce qui va nous attendre dans 50 ans. On va

11 laisser le temps au temps. On ne sait pas s'il y aura des nouvelles

12 installations, des déplacements de population, des nettoyages des

13 territoires ethniques ou si on va arriver à un moment d'une civilisation

14 telle où il ne sera plus pertinent de se demander si on est en minorité ou

15 en majorité. Mais à cette étape, à l'étape que nous vivons, nous devons

16 opter pour un critère de majorité ethnique et pour l'acceptation d'une

17 minorité ethnique."

18 D'après vous, de quoi parle M. Milojevic quand il utilise cette

19 formulation : "Nettoyage de territoires ethniques ?"

20 R. Je sais exactement quel débat avait lieu à cette époque. Les députés de

21 la Krajina de Bosnie disaient qu'il y avait énormément d'endroits qui

22 étaient à prédominance serbe, par exemple Cazin, Bihac, Prijedor, et cetera.

23 Il disait donc que les gens avaient été nettoyés ethniquement au cours de

24 la Deuxième Guerre mondiale, ce qui veut dire tués. Après la guerre, aussi,

25 il y avait des migrations en Vojvodina, en Slavonie, et cetera. Il y avait

26 des épithètes assez extrémistes qui avaient été exprimés à ce moment-là.

27 D'ailleurs, M. Milojevic a bien expliqué ce qu'il voulait dire dans sa

28 première phrase. Il a dit : "On ne peut savoir ce qui nous arrivera dans 50

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1 ans. Il faut laisser le temps au temps, mais il faut traiter les problèmes

2 actuels, les problèmes qui se présentent à nous maintenant, et nous allons

3 nous concentrer sur la concentration de la Bosnie-Herzégovine."

4 Ce n'est pas comme s'il était en train de promouvoir le nettoyage

5 ethnique. Il parlait du génocide qui avait eu lieu lors de la Deuxième

6 Guerre mondiale, dans sa réplique aux députés de la Krajina de Bosnie.

7 J'essaie de vous expliquer un petit peu le type de discussions qui étaient

8 en cours. Il disait que cela fait très longtemps que les premiers soldats

9 de ce territoire avaient été nettoyés au cours de la Deuxième Guerre

10 mondiale -- enfin, ce qu'il dit ici, en fait, que ces hommes avaient été

11 tués. Donc là, on fait référence au génocide de la Deuxième Guerre mondiale.

12 Q. A la page 30, maintenant, c'est à la page 30 en anglais et aussi à la

13 page 30 en serbe, ici, c'est le Dr Karadzic qui prend la parole. On a un

14 numéro 6 en marge comme annotation. Vous le voyez bien ?

15 R. Oui.

16 Q. Troisième paragraphe du Dr Karadzic, et voici ce qu'il dit, je cite :

17 "Pour ce qui est des majorités, de nombreux territoires de Bosnie-

18 Herzégovine vont rester sans définition sur cet égard, car aucun groupe ne

19 peut déclarer posséder la majorité absolue. Je pense que là où nous avons

20 une majorité, nous ne devrions pas dire s'il s'agit d'une majorité absolue

21 ou relative, mais nous ne devrions faire référence qu'aux zones où les

22 Serbes sont en majorité. Il y a des endroits, nous nous sommes arrangés

23 avec l'un de nos partenaires dans cet endroit où ils sont en majorité

24 relative, donc nous allons voter pour que ce territoire soit défini comme

25 le leur et nous ferons exactement la même chose dans les territoires, avec

26 leur propre vote, où eux -- où nous, en revanche, sommes en majorité

27 relative. Après tout, je suis sûr que les cartes vont être le sujet

28 d'autres négociations et parfois même de conflits. Il serait tellement plus

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1 facile si l'on pouvait trouver une solution politique plutôt qu'une autre,

2 et je pense vraiment que ceci est tout à fait possible."

3 Monsieur Krajisnik, ici, le Dr Karadzic dit : "Nous nous sommes arrangés

4 avec nos partenaires dans un des territoires où ils sont en majorité

5 relative pour que nous votions pour que ce territoire leur appartienne et

6 soit défini comme étant le leur." Donc, il parle soit des Croates, soit des

7 Musulmans ? De qui parle-t-il exactement ?

8 R. Je peux vous dire oui, sans doute, c'est soit l'un, soit l'autre,

9 mais je crois que M. Karadzic faisait sans doute allusion aux Croates

10 puisqu'il y avait beaucoup plus de pourparlers avec le camp croate qu'avec

11 le camp musulman. Pour ce qui est de la teneur du discours de M. Karadzic,

12 c'était la version préalable, pas la version définitive. S'il y a 33 % de

13 Serbes, 33 % de Croates et 33 % de Musulmans, donc une situation où

14 personne n'est en majorité ni absolue ni relative, dans ce cas-là les trois

15 communautés ethniques doivent se mettre d'abord pour savoir à qui attribuer

16 ce territoire. Les Musulmans et les Croates peuvent dire par exemple :

17 ensemble, on est à 66 %, donc il faut que ce territoire fasse partie de

18 telle unité territoriale. Karadzic faisait référence à cela, l'un des deux

19 autres camps. Il disait qu'il y avait des domaines, enfin, des endroits qui

20 devraient être attribués aux Croates, d'autres, à nous, pour définir les

21 territoires. Enfin, c'était le principe territorial qu'il essayait de

22 promouvoir.

23 Q. Passons maintenant à la page 38 en anglais, 37 en serbe. Là, il y a une

24 petite annotation en marge qui porte le numéro 8, par repère.

25 R. Oui, j'ai trouvé.

26 Q. Il s'agit donc de l'intervention du professeur Kosutic. Je pense que

27 c'est quelqu'un que nous n'avons jamais vu par le passé. Pouvez-vous nous

28 dire un petit peu qui cette personne était ?

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1 R. C'était un professeur de l'Université de Belgrade. Il était professeur

2 de droit, donc c'est un juriste. Il avait été invité pour aider nos propres

3 juristes. Il a donc participé à cette séance et a fait cette intervention

4 portant sur la constitution. En fait, on lui avait demandé de venir par le

5 biais de canaux assez privés. Il était assez proche de M. Karadzic, et

6 c'est M. Karadzic qui l'a invité personnellement pour plus ou moins nous

7 conseiller, pour que l'on évite d'incorporer des erreurs dans la

8 constitution.

9 Q. Passons à cette référence numéro 8 à la page 38 de l'anglais, page 37

10 du serbe, voici ce qu'il dit, le premier point a à voir avec le référendum,

11 voyez-vous la page ?

12 R. Oui.

13 Q. Notre première question porte sur le référendum. "Les gens ont décidé

14 qu'ils voulaient vivre dans un Etat conjoint avec les autres peuples qui

15 désirent la même chose. Ceci doit être déclaré. Le pays auquel ils se

16 réfèrent s'appelle la Yougoslavie. Bien sûr, à l'heure actuelle, il se peut

17 que ce nom-là soit changé par le passé, si les autorités compétences le

18 désirent, de toute façon c'est tout à fait non pertinent. A l'heure

19 actuelle, ce pays pour l'instant s'appelle la Yougoslavie, on en a parlé

20 d'ailleurs et on y a référé lors du référendum sous ce nom-là. De même,

21 votre parole était bien que vous n'étiez pas contre de vivre dans une

22 Bosnie-Herzégovine conjointe du moment que ce soit un Etat où les trois

23 peuples sont égaux".

24 Monsieur Krajisnik, la constitution telle qu'elle a été adoptée lors de

25 cette réunion a dit dans l'article 3, et elle l'a dit de façon très

26 franche, que la République fait partie de l'Etat fédéral de Yougoslavie.

27 Aviez-vous reçu la moindre indication de la part de Belgrade, là je ne veux

28 pas parler des universitaires de Belgrade, comme ce professeur, mais des

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1 consignes venant des dirigeants politiques de Belgrade pour ce qui est de

2 leur opinion quant à l'inclusion de cette disposition dans votre

3 constitution des Serbes de Bosnie ?

4 R. C'est une décision finale, comme je l'ai bien dit. Je l'ai déjà dit il

5 y a quelques jours d'ailleurs. Nous voulions créer une nouvelle Yougoslavie

6 et nous ne pourrions pas être inclus dans ce pays suite à la position prise

7 par la Conférence sur la Yougoslavie. Cette Yougoslavie n'avait pas encore

8 été créée, je crois qu'elle n'a été créée qu'en avril. Elle a été

9 promulguée en avril, si je me souviens bien.

10 Mais je m'en souviens très bien quand même. Dans le projet, c'est

11 encore une discussion qu'on a eue avec les autres camps, enfin on

12 comprenait bien qu'on ne pourrait pas faire partie de la Yougoslavie parce

13 que la Yougoslavie serait établie selon des lignes bien différentes. Comme

14 M. Kosutic l'a probablement mentionné lors de ces discussions avec M.

15 Karadzic, je ne voulais pas vous dire qu'il n'était pas informé mais il

16 disait on peut rester en Bosnie. Il a expliqué le modèle. Il ne voulait pas

17 décourager les gens qui disaient mais on a fait le plébiscite. Pourquoi

18 est-ce que, dans la constitution, vous être en train de nous rejeter de la

19 Yougoslavie ? Ce n'est pas un problème. On peut promulguer la constitution

20 plus tard. Il faut trouver une solution pour la Bosnie-Herzégovine. Il nous

21 sera facile d'affiner notre constitution pour que cela devienne quelque

22 chose qui soit encore prêt dans les papiers et les documents administratifs

23 d'un Etat internationalement reconnu de Bosnie-Herzégovine. Je me souviens

24 très bien de tout cela, j'ai peut-être fait une erreur, mais le but en tout

25 cas c'était que ces négociations aboutissent à une solution. Ensuite du

26 coup, on a réussi à prendre des mesures qui ont fait avancer les choses.

27 Q. Ensuite, il y a une contribution qui nous vient du Dr Kalinic, sans

28 doute en haut de la page 57 ou 56 de la version en B/C/S, en anglais c'est

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1 en haut de la page 54. Le Dr Kalinic prend la parole. Avez-vous trouvé le

2 passage, Monsieur Krajisnik ?

3 R. Oui, je le vois. Je vois qu'il y a une annotation 9, le numéro 9 juste

4 après le début de l'intervention de M. Kalinic.

5 Q. Oui, je vais commencer à lire presque le début de l'intervention de M.

6 Kalinic. Je cite : "Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, je vais

7 vous faire quelques propositions". Ensuite, le premier paragraphe, en

8 résumé par quelque chose qui vient au milieu du paragraphe où il dit : "Je

9 crois vraiment qu'il faut que nous nous dépêchions pour rédiger la

10 constitution, bien que cette constitution ne sera pas la première ou la

11 dernière".

12 Au prochain paragraphe, il dit : "Je voulais suggérer, la deuxième me

13 semble encore plus importante, nous devons avoir une constitution mais il

14 reste à savoir si notre Etat va pouvoir fonctionner. Plus tôt aujourd'hui,

15 dans un groupe plus restreint, j'ai suggéré que l'on utilise une procédure

16 médicale. Vous savez que nos ministres, notre conseil des ministres avec M.

17 Cizmovic et M. Simovic doivent aller rendre visite à toutes municipalités

18 pour tirer le bilan exact de la situation au cours des sept jours à venir.

19 Cela nous aidera à déterminer si nous avons bel et bien une infrastructure

20 qui pourrait devenir opérationnelle une fois que notre république serbe est

21 proclamée ou savoir si nous n'avons pas cette infrastructure, nous ne

22 pourrons pas être souverain si nous ne pouvons pas exercer notre pouvoir

23 sur notre territoire qui nous revient."

24 Ici, Monsieur Krajisnik, quand il parle de ce groupe restreint, le Dr

25 Kalinic, ici, faisait-il référence à un groupe dont vous auriez fait

26 partie ?

27 R. Non. Je ne sais absolument pas de qui il parlait ou à qui il avait

28 parlé. Il aurait pu parler de ses députés qui venaient des forces

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1 réformistes, il aurait pu parler à d'autres personnes. Je ne me souviens

2 pas du tout d'une idée de ce type qui ait été suggérée lors d'une réunion à

3 laquelle j'ai participé. Je pense qu'il a parlé à d'autres personnes, à un

4 autre cercle.

5 Q. A ce moment, avant que M. Kalinic ne prenne la parole lors de cette

6 réunion de l'assemblée, avez-vous eu connaissance de ce plan ou de cette

7 proposition selon lequel M. Cizmovic et M. Simovic allaient rendre visite

8 aux municipalités pour tirer le bilan un peu de la situation et savoir

9 quelle était exactement la situation ?

10 R. Non, je sais très bien que j'en avais aucune connaissance. Je sais

11 aussi qu'il n'y a pas aussi de visite ultérieure. Je pense que ce n'est

12 qu'une proposition, il apportait un peu sa contribution à la discussion, il

13 voulait proposer quelque chose. De toute façon, cela n'a pas été adopté et

14 cela n'a pas été exécuté et je n'ai aucune connaissance de visites rendues

15 aux municipalités par M. Cizmovic et M. Simovic.

16 Q. Ensuite, il passe au troisième paragraphe. Vous l'avez trouvé, Monsieur

17 Krajisnik ?

18 R. Oui.

19 Q. "La troisième chose qui vraiment m'inquiète beaucoup me gène depuis

20 longtemps et je vois qu'aucun progrès n'a été fait. Mais peut-être ces

21 messieurs venant du cercle intime des dirigeants du parti serbe pourront en

22 parler plus que moi. Je vois bien que dans la constitution, la JNA doit

23 s'occuper de la Défense. Je prie Dieu que ce serait aussi facile à faire

24 qu'à dire. Je pense que les sept prochains jours devraient être employés à

25 autre chose outre quelque chose que nous avons déclaré lors de notre

26 conclusion précédente selon laquelle notre relation avec la JNA, donc avec

27 l'armée populaire de Yougoslavie devrait être redéfinie en vue de

28 déterminer ce que nous partageons en matière d'intérêt politique et

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1 essentiel et qu'il convient que nous entamions des négociations urgentes

2 avec l'état-major pour leur demander si la JNA sera prête le 23, voire au

3 pire le 29 ou le 30 quand la Bosnie-Herzégovine sera déclarée Etat

4 indépendant, car c'est quelque chose qui va arriver j'en suis certain,

5 étant donné que tout a déjà été arrangé, tout est déjà stocké dans les

6 ordinateurs. Nous devons leur demander s'ils défendraient les territoires

7 du peuple serbe, c'est-à-dire les territoires qui appartiennent à l'Etat

8 conjoint de Yougoslavie."

9 Donc, M. Kalinic, qu'est-ce qu'il propose ? Visiblement, il est en train de

10 faire une prédiction assez sinistre de l'avenir des Serbes de Bosnie, en

11 train de dire que l'indépendance de Bosnie-Herzégovine sera déclarée d'ici

12 la fin du mois, ce qui est une prédiction tout à fait sinistre pour les

13 Serbes de Bosnie, n'est-ce pas ?

14 R. Oui, mais M. Kalinic est en train de lancer la panique et

15 malheureusement c'est ce qui est arrivé. Il était complètement paniqué, il

16 était en train de dire, nous sommes paniqués parce que la Bosnie-

17 Herzégovine va être reconnue, il va y avoir une guerre. C'était le 30, il

18 me semble. On devait être en février. Donc cela ne peut pas être le 30

19 février, cela n'existe pas. Cela doit être le 30 mars plutôt. Il est en

20 train de dire il faut voir si la JNA va nous protéger, oui ou non, comme

21 prévu, parce que c'était notre position, ou s'ils nous défendront pas.

22 Cela, c'est vraiment quelqu'un qui parle sous l'emprise de la panique,

23 malheureusement il a eu raison en fin de compte. On n'était vraiment pas

24 persuadé que la Bosnie-Herzégovine serait reconnue avant que la

25 transformation soit adoptée, puisque c'est ce que M. Cutileiro nous avait

26 dit. On va faire d'abord la transformation, il va y avoir le référendum,

27 ensuite après on aura la transformation, puis ce sera fini. J'ai un article

28 d'ailleurs qui vient de ce moment-là. Il faut d'abord référendum, ensuite

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1 indépendance de la Bosnie-Herzégovine mais référendum sur la position

2 conjointe des trois camps. Là, il proposait qu'il fallait établir une

3 nouvelle variante avec, je ne sais pas, peut-être une Défense territoriale

4 ou quelque chose de ce style. Tout cela mélange tout, mais c'est parce

5 qu'il est très inquiet, malheureusement l'avenir l'histoire a montré qu'il

6 avait eu raison d'être inquiet.

7 Q. Monsieur Krajisnik, en fait, je ne suis pas rendu compte que le mois de

8 février n'a pas de 30, en effet, mais cette année c'était une année

9 bissextile, il y avait un 29 quand même. Cela dit, il parle d'un mois,

10 enfin je ne sais pas, mais d'après vous M. Kalinic est juste en train de

11 dire : de toute façon c'est évident, cela va nous arriver, cela nous pend

12 au nez. L'indépendance va être déclarée ?

13 R. Oui. Oui. On sentait bien que la Bosnie-Herzégovine allait être

14 reconnue. Il y avait quelques affirmations assez tangibles et assez

15 réalistes selon lesquelles la Bosnie-Herzégovine allait être reconnue. M.

16 Kalinic avait raison sur ce point. Il y a cet avertissement supplémentaire

17 qui s'adressait à la communauté internationale. C'est pour cela qu'on

18 voulait que les gens connaissent notre constitution. On s'était dit on va

19 d'abord se mettre d'accord sur la transformation ainsi on aura résolu le

20 problème de façon négociée et pacifique et cela empêchera la situation de

21 continuer en s'envenimer. Donc vous avez raison, il y avait quand même

22 quelques indications très nettes selon lesquelles la Bosnie-Herzégovine

23 allait être proclamée en tant qu'Etat indépendant.

24 Q. Monsieur Krajisnik, à votre connaissance, lors de cette séance de

25 l'assemblée y avait-il qui que ce soit au sein de la direction des Serbes

26 de Bosnie qui ait déjà parlé avec l'état-major de la JNA et qui se serait

27 entretenu avec l'état-major de la JNA eu égard de ce qui pourrait arriver

28 si et quand la Bosnie-Herzégovine devenait un pays indépendant ?

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1 R. Non, on ne parlait pas de cette variante, mais la présidence de

2 Bosnie-Herzégovine, je ne sais pas exactement à quel moment, mais l'a

3 abordée à Sarajevo et à Skopje avec l'état-major, le sort réservé à la JNA

4 sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine. Pour ce qui est du côté serbe,

5 de nous autres, quant à savoir si nous avons parlé avec la JNA et avec

6 l'état-major de cette variante, pour leur demander si une fois la Bosnie-

7 Herzégovine reconnue ils allaient nous défendre ou non ? Je n'ai jamais eu

8 connaissance de ce type de variante. Je crois que personne n'en avait

9 jamais parlé parce que c'était de toute façon évident.

10 Ils allaient exécuter leur devoir au titre de ce qui était prévu par la

11 constitution. C'est ce qu'on voulait et c'est ce qu'ils voulaient. Il n'y

12 aurait pas de guerre dans ce cas-là, il y aurait transformation de la

13 Bosnie-Herzégovine, jusqu'à ce moment-là ce serait la JNA qui serait

14 chargée de la paix et s'il y avait des attaques, ils nous défendraient. Si

15 vous vous souvenez, Karadzic a dit à un moment, on n'a pas besoin d'armée,

16 nous avons la JNA et ils nous ont promis de nous défendre si nous sommes

17 attaqués, et le fait est que nous n'allons attaquer personne, ils

18 défendront les Serbes. Je crois qu'il a fait cette déclaration et que cette

19 déclaration a été présentée ici devant cette Chambre. La JNA devait juste

20 exécuter son rôle au titre de ce qui était prévu par la constitution.

21 Q. Monsieur Krajisnik, nous comprenons bien que vous n'êtes pas juriste,

22 mais votre réponse c'est que la JNA devait exécuter son rôle prévu au titre

23 de la constitution.

24 Vous, en tant qu'homme politique et en tant qu'économiste, vous n'êtes pas

25 juriste, mais en tant qu'homme politique et en tant qu'économiste, si nous

26 arrivons à une circonstance où la Bosnie-Herzégovine déclare son

27 indépendance, prenons comme hypothèse que suffisamment de membres de la

28 communauté internationale aient reconnu ce pays pour que la Bosnie-

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1 Herzégovine soit en effet reconnu comme un Etat indépendant, d'après vous

2 quel était le rôle prévu par la constitution de la JNA, à partir du moment

3 où la BiH devenait un Etat indépendant ?

4 R. Nous d'abord, on n'acceptait la reconnaissance. Elle était illégale à

5 notre avis, puisqu'elle avait été effectuée de façon illégale. C'est sûr,

6 c'est connu et dans la constitution il est bien écrit quel est le rôle de

7 la JNA. Quel était notre état d'esprit ? Nous voulions que ceux qui avaient

8 à voir avec la Bosnie-Herzégovine -- enfin, nous, on comprenait que la JNA

9 resterait les seules forces armées en présence et que la JNA devait

10 protéger ceux qui sont attaqués. C'était à cela qu'on pensait. Ce n'est pas

11 à moi de dire, ni à aucun de nous de dire que la Yougoslavie devait être

12 protégée ou ceci ou cela, mais pour ce qui est de la Bosnie-Herzégovine, en

13 tout cas, on s'attendait à ce qu'ils protègent la paix et, s'il y avait

14 attaque, qu'ils protègent les personnes attaquées, donc ils devaient un peu

15 être un tampon. Ils devaient servir de tampon. C'est cela que je veux dire

16 par le rôle qui leur est dévolu par la constitution, ce n'est pas

17 exhaustif, bien sûr.

18 Q. Oui, je vois que votre opinion est très claire, Monsieur Krajisnik.

19 Selon vous, une déclaration d'indépendance, même si elle était reconnue par

20 la communauté internationale, était illégale de votre point de vue. Je le

21 note, c'est tout, puisque vous l'avez dit noir sur blanc.

22 Ensuite, je n'ai pas encore posé de questions, mais Monsieur Krajisnik,

23 vous voulez reprendre ce que j'ai dit, car vous trouvez que j'ai mal

24 interprété votre opinion ?

25 R. Vous avez tout à fait clairement expliqué ou compris, de toute façon.

26 Je considère que la Bosnie-Herzégovine, à ce jour, a été acceptée de façon

27 illégale. Cela aurait dû être fait au sein de l'assemblée. Il y a eu

28 également un livre publié par M. Filipovic qui nous explique ses

Page 23511

1 commentaires et ses opinions et qui nous explique de quelle façon cela a

2 été fait, de façon inconstitutionnelle. Mais bien, d'accord, c'est dans le

3 passé.

4 Q. Monsieur Krajisnik, je n'essaie simplement pas de mener un séminaire

5 juridique ici, mais je voulais simplement savoir quel était votre point de

6 vue en tant qu'homme politique pour être tout à fait clair.

7 Est-ce que vous avez, par exemple, demandé aux juristes de vous

8 donner leur avis pour ce qui est de cette session du 15 février ? Est-ce

9 que vous avez consulté des avocats, à savoir quelle était la position

10 constitutionnelle de la JNA dans les circonstances ?

11 R. S'agissant de la JNA, noua n'avons pas discuté de cette dernière, elle

12 était présente. Il existait une disposition dans la loi, et lors des

13 conversations avec M. Cutileiro, nous avions toujours dit que la question

14 de la Défense serait réglée de façon à part, de façon séparée, qu'on allait

15 se pencher particulièrement sur cette question. Je voudrais simplement

16 ajouter que tout à l'heure, lorsque j'ai dit que nous ne reconnaissions pas

17 la Bosnie-Herzégovine en tant que telle, nous ne reconnaissions pas la

18 façon dont elle a été reconnue, en fait. Je comprends qu'elle a été

19 reconnue, mais on a parlé des transformations. On nous a promis que ce

20 processus était un processus de transformation, que ce processus se serait

21 terminé. Donc, selon le plan Cutileiro, il aurait fallu l'exécuter jusqu'à

22 la fin, mais nous ne l'avons pas fait. Je crois que les Nations Unies ont

23 reconnu, d'ailleurs, la Bosnie-Herzégovine, mais nous avions demandé à ce

24 qu'elle fasse l'objet d'une transformation. Nous n'étions pas contre une

25 Bosnie-Herzégovine unitaire telle qu'elle a été reconnue. Nous n'étions pas

26 contre une Bosnie-Herzégovine transformée de la façon dont la Communauté

27 européenne le demandait, le proposait.

28 Maintenant à savoir si nous avions demandé conseil auprès d'avocats,

Page 23512

1 puisqu'il s'agit de constitution, il est certain que les juristes les plus

2 éminents s'étaient penchés sur la question de la constitution et il était

3 certain que la JNA allait rester là. Il s'agissait d'une période

4 transitoire, donc nous ne nous étions pas penchés sur la question de la

5 JNA. Je crois que nous n'avons même pas discuté de la JNA. Nous n'estimions

6 pas que c'était important et nécessaire.

7 Q. Monsieur Krajisnik, pour éviter toute confusion, lorsque vous parlez du

8 rôle de la JNA, selon la constitution, vous dites qu'il était très clair

9 dans la constitution. On pourrait lire très clairement dans la constitution

10 quel était le rôle de la JNA. Est-ce que vous faisiez référence à la

11 nouvellement adoptée constitution de la Republika Srpska ou la constitution

12 de la Yougoslavie fédérale telle qu'elle existait depuis des années ?

13 R. A ce moment-là, il existait encore l'ex-Yougoslavie. On n'avait pas

14 encore procédé à la formation d'une nouvelle Yougoslavie. Selon cette

15 constitution, la JNA avait des compétences selon la constitution, et nous

16 n'étions pas habilités à voir ou à changer le rôle de la JNA. Nous ne

17 pouvions pas changer son rôle. C'était un fait. C'était un fait qu'elle

18 était là et qu'il y avait des dispositions dans la loi qui prévoyaient son

19 existence.

20 Q. Est-ce que vous êtes en train de me dire que vous appuyiez ou que

21 plutôt vous laissiez à la JNA de mettre en œuvre ou d'exécuter leur droit

22 constitutionnel ou leur rôle constitutionnel, d'agir selon la constitution

23 de sorte d'être guidés par vous, sans recevoir d'ordres venant de vous ?

24 R. D'abord, nous n'avions la possibilité d'avoir aucune influence sur eux.

25 Maintenant, pour les personnes au sein de la JNA, je pourrais vous dire

26 qu'il y avait d'excellents guerriers. Il y avait d'excellents

27 professionnels. Nous devions nous informer, à savoir, de quelle façon la

28 JNA allait se comporter, et nous ne pouvions pas donner d'ordres à la JNA.

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1 Nous ne pouvions rien changer pour ce qui est de la JNA. Cela n'avait pas

2 été fait non plus. Nous étions un allié. Nous étions un allié naturel de la

3 JNA, puisque les deux autres camps s'étaient retournés contre la JNA. Ils

4 procédaient à un blocus de casernes, ils menaient la guerre contre la JNA,

5 et cetera. Donc, nous étions beaucoup plus proches de la JNA et c'est ainsi

6 que nous obtenions d'elle des informations, d'ailleurs. Pour ce qui est de

7 la diriger, de lui donner des conseils ou de changer sa façon de

8 fonctionner ou de donner des ordres, nous ne pouvions pas le faire et nous

9 ne l'avions pas fait.

10 Q. Est-il exact de dire, Monsieur Krajisnik, qu'à l'époque, je parle du 15

11 février, lorsque cette session de l'assemblée a eu lieu, nous savons que

12 vous deviez avoir d'autres pourparlers avec M. Cutileiro et d'autres

13 personnes ? Vous avez dit à ces Juges de la Chambre que vous aviez

14 souhaité, pour ce qui vous concerne, vous avez expliqué aux Juges de la

15 Chambre que vous espériez qu'une solution de paix résulterait de ces

16 pourparlers, n'est-ce pas ? C'est ce que vous nous avez dit jusqu'à

17 présent ? Est-ce que j'ai bien compris vos propos ?

18 R. Vous avez tout à fait raison, et il y avait des propositions

19 pacifiques. En mars, par exemple, si vous vous rappelez, il y a une

20 première version, un premier jet de l'accord de Lisbonne et ensuite, de

21 Sarajevo.

22 Q. Nous allons y arriver sous peu, mais si l'on parle encore du mois de

23 février, puisque j'ai déjà résumé votre point de vue, il y a eu néanmoins

24 une possibilité tout à fait claire qui menaçait, d'une certaine façon,

25 qu'avant que ce processus soit mené à bien, soit exécuté, qu'il faudra

26 d'abord que la Bosnie-Herzégovine se déclare indépendante et que la

27 Communauté européenne la reconnaisse. Le Dr Kalinic avait cette crainte,

28 mais il y en avait, certes, d'autres aussi. Mais il y avait cette

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1 possibilité très distincte qui guettait, qui était prête à se faire voir,

2 n'est-ce pas ?

3 R. Oui, oui. Vous avez raison. Je dis tellement souvent que M. Stewart a

4 raison que j'ai bien peur que je n'arriverai jamais à le contredire.

5 Q. J'essaie de me remettre du choc, Monsieur Krajisnik. Merci.

6 Bon, écoutez Monsieur Krajisnik, si effectivement les choses se sont

7 déroulées de la façon dont elles se sont déroulées en février, est-ce que

8 dans votre esprit, est-ce qu'il y avait un besoin d'entreprendre une

9 quelconque action militaire ?

10 R. Voyez-vous les choses se sont déroulées comme elles se sont déroulées

11 et c'est arrivé, effectivement. Je ne vais pas vous dire ce qui s'est passé

12 en début d'avril; vous allez sans doute me poser la question. Si on avait

13 proclamé la Bosnie-Herzégovine sans préalablement procéder à la

14 transformation de la Bosnie-Herzégovine et la scinder en trois unités

15 constitutives, et qu'avec cette transformation, nous allions sortir sur un

16 référendum, à ce moment-là, cela aurait représenté l'imposition d'une

17 solution, donc on ne sait pas ce qui aurait pu se passer, c'était

18 imprévisible. Je ne crois pas que quiconque aurait fait un geste actif pour

19 enclencher une guerre, pour mener une guerre. Mais la guerre a commencé en

20 avril, d'une façon spontanée ou incontrôlée. Nous avions peur qu'alors que

21 l'on menait des discussions lors de cette assemblée, qu'une guerre pouvait

22 éclater, une guerre incontrôlée. Vous savez, ce genre de gestes

23 incontrôlés, ce sont les gestes les plus difficiles à contrôler. Il y avait

24 énormément de gens qui étaient armés et l'arme ne se tait jamais, c'est-à-

25 dire que l'ensemble de la JNA s'était retiré en Bosnie, il y avait la

26 création de formations paramilitaires, et cetera. Il s'en fallait de peu

27 pour que la Bosnie s'enflamme.

28 Q. Je sais qu'il y a eu les événements qui ont suivi le mois de février,

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1 et il vous est sans doute bien difficile de revenir aux événements qui ont

2 précédé le mois d'avril, mais je vous demande de vous concentrer sur

3 février, donc mi-février, parmi les Serbes de Bosnie et les dirigeants.

4 Vous craigniez quoi exactement, si cette déclaration et la reconnaissance

5 de l'indépendance résultaient de ces discussions ?

6 R. Lorsque nous parlions de façon ouverte, publique, tout le monde disait

7 que ce genre de chose ne pourrait jamais arriver, et même si cela se

8 produisait, nous ne l'accepterions jamais. Il arrivait difficile d'admettre

9 la crainte. Je peux vous parler de moi, je peux vous dire comment je me

10 sentais. Lorsque je vous parle de moi, personnellement, je l'ai déjà dit

11 auparavant, je croyais, j'étais persuadé qu'une solution serait trouvée.

12 J'avais peur de la guerre, je craignais la guerre. J'avais peur des

13 histoires que j'avais entendu dire de la guerre et je craignais que cela ne

14 se reproduise de nouveau. Chez tous les dirigeants serbes, j'ai vu qu'ils

15 étaient craintifs, ils avaient peur de ces gestes incontrôlés menés par des

16 gens à plusieurs niveaux locaux et qu'il était impossible de rien faire.

17 Vous menez une politique, vous essayez de donner la conscience aux gens

18 qu'il y aura un accord, qu'on arrivera ou parviendra à un accord, vous

19 essayez de convaincre les gens qu'il n'y aura pas de guerre, et lorsqu'une

20 guerre éclate, vous perdez la confiance de ces gens. Les gens disent :

21 voilà, vous m'avez dit quelque chose, et maintenant, le contraire est

22 arrivé, nous avions raison et pas vous. Les temps étaient difficiles, il y

23 avait beaucoup de fausses informations, de vraies informations qui

24 rajoutaient de l'huile sur le feu. On disait : "Nous allons suivre la

25 constitution, mais nous allons la proclamer plus tard." Nous voulions

26 gagner du temps pour trouver une solution politique.

27 Q. Le Dr Kalinic, qui avait proposé certaines choses, est-ce que c'était

28 dans le but de mener des pourparlers de façon urgente avec le QG ? Est-ce

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1 que cette proposition avait été adoptée ?

2 R. Je ne le sais pas, si sa proposition a été adoptée ou acceptée. J'ai

3 assisté à une autre réunion où la présidence de Bosnie-Herzégovine s'est

4 entretenue avec les représentants du QG à Sarajevo. J'étais présent lors de

5 cette réunion-là, mais je n'ai pas été présent lors d'autres réunions. Même

6 si quelque chose de ce genre avait été adopté, cela n'avait pas été

7 exécuté. Je suis tout à fait certain que cela n'avait pas été exécuté à

8 l'extérieur de Sarajevo. Il y avait eu des contacts avec M. Kukanjac, qui

9 était là, à Sarajevo. Toutes les parties avaient des contacts avec ce

10 dernier, mais ce n'est pas l'état-major principal.

11 Q. Excusez-moi, Monsieur Krajisnik, pour être tout à fait clair, lorsqu'il

12 y a quelques instants, vous avez fait référence à une réunion à laquelle

13 vous avez été présent, lors de laquelle les représentants de l'état-major

14 étaient présents de Sarajevo, à quel moment cette réunion a-t-elle eu

15 lieu ?

16 R. Je dois vous dire bien franchement que je ne me souviens vraiment pas

17 de la date, mais je sais que c'était autour de cette époque. Il y avait M.

18 Brovet, M. Adzic et M. Kadijevic. Ces trois personnes étaient présentes. Je

19 crois que c'était l'ensemble de la composition de la délégation de l'état-

20 major et de l'autre partie, il y avait des représentants de la BiH, il y

21 avait le président de l'assemblée, le premier ministre y était également,

22 le président de la présidence, mais je ne peux pas vous énumérer d'autres

23 personnes, malheureusement. Je pourrais peut-être me tromper si je tentais

24 de le faire. Mais il est certain que les médias en ont parlé et il y a

25 sûrement des documents que vous pourriez retrouver avec les personnes qui

26 étaient présentes.

27 Q. Est-ce que c'était avant ou après cette session de l'assemblée ?

28 R. Encore une fois, je dois être tout à fait honnête. Je ne me souviens

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1 pas. Logiquement, il aurait fallu que ce soit après, mais je ne me souviens

2 pas exactement quand elle a eu lieu. De plus, lors de cette réunion, on n'a

3 pas discuté des sujets qui ont été soulevés par M. Kalinic. Ce n'était pas

4 comme si on disait : est-ce que vous allez défendre le peuple serbe ?

5 C'était simplement une réunion avec les représentants de l'état-major, mais

6 je ne me souviens pas qu'on ait parlé avec les membres de l'état-major

7 concernant cette proposition qui a été présentée par M. Kalinic. Je ne me

8 souviens pas qu'on leur ait demandé : est-ce que vous pouvez nous

9 protéger ? Est-ce que vous allez nous défendre ? Sinon, nous allons

10 certainement créer notre propre armée. Je suis tout à fait certain que cela

11 n'avait pas été posé comme question et je suis tout à fait certain aussi

12 que je me serais certainement souvenu si le côté serbe en avait parlé avec

13 les membres de l'état-major. Cela va sans dire, comme je l'ai déjà dit, ils

14 allaient nous défendre ou ils allaient défendre les parties -- Ils allaient

15 nous défendre contre la partie adverse, quelle que soit la partie adverse,

16 et entre-temps, nous essayions de trouver une solution politique.

17 Q. Encore une fois, nous sommes vers la mi-février 1992; M. Ratko Mladic,

18 est-ce qu'il avait déjà joué un rôle actif dans la vie politique de Bosnie-

19 Herzégovine ?

20 R. Non, non. Je ne crois pas. Tout du moins, pas avant la création de

21 l'armée de la Republika Srpska. Mais avant qu'il ne devienne commandant de

22 l'état-major de l'armée de la Republika Srpska, il avait à un certain

23 moment donné remplacé le général Kukanjac en tant que commandant du 2e

24 District militaire, et avant cela, il était le co-commandant à Knin. Il

25 couvrait une très grande zone ou région, y compris en Bosnie-Herzégovine.

26 Je l'avais rencontré pour la première fois lors de négociations concernant

27 le plan Vance-Owen, et après cette date, je ne l'ai plus revu pendant très

28 longtemps. Mais politiquement parlant, je n'avais jamais entendu son nom

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1 avant. Je ne le connaissais pas. Je n'étais pas du tout au courant de son

2 existence, même si j'avais en fait entendu parler de lui, je n'étais pas au

3 courant qu'il avait joué un rôle important ou quelque rôle que ce soit.

4 Q. Vous avez mentionné que vous n'étiez pas à Belgrade lors de cette

5 réunion impliquant M. Babic. Vous nous avez dit, Monsieur Krajisnik, que la

6 première fois que vous l'avez rencontré, vous nous avez dit que vous ne

7 l'aviez pas ni vu ni rencontré dans les semaines qui ont suivi la réunion

8 de Belgrade et cela nous emmène à l'assemblée du 15 février, n'est-ce pas,

9 c'est quelques semaines après la réunion ?

10 R. Non. Je ne le rencontrais pas. Je ne l'avais pas rencontré avant, non

11 je ne l'ai rencontré qu'à ce moment-là, il occupait un poste à Knin. Je ne

12 lui avais pas parlé, je ne le connaissais pas avant de le rencontrer.

13 Ensuite, il a remplacé Kukanjac, je ne sais pas quand exactement, mais

14 après cela je l'ai vu deux fois je crois.

15 Q. Quand est-ce que vous avez vu M. Mladic après que vous soyez parti pour

16 Pale en avril 1992 ?

17 R. Je crois que c'est pendant cette période-là, oui. Je crois qu'après

18 qu'il ait remplacé M. Kukanjac, après l'incident de Sarajevo le

19 commandement a été retiré, il a remplacé Kukanjac et il travaillait

20 probablement sur le retrait d'autres casernes, j'ai dû le voir à ce moment-

21 là. Vous avez raison. C'est à cette époque-là. Mais je ne l'avais pas vu

22 auparavant car je sais que j'avais rencontré M. Kukanjac avant cela. Il

23 m'avait escorté, il est passé avec moi par les barricades pour m'emmener

24 jusqu'à ma maison de Zabrdje, mais je n'avais pas vu M. Mladic avant la

25 guerre. Maintenant, les événements me reviennent quelque peu.

26 Q. Après cette session de l'assemblée du 15 février 1992, et je parle de

27 vous, Monsieur Krajisnik, personnellement, est-ce que vous avez pris part à

28 quelque planification de la guerre, à des projets visant à planifier la

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1 guerre ?

2 R. Non, absolument pas. Je suis tout à fait persuadé qu'aucun Serbe de

3 Bosnie-Herzégovine n'a travaillé à établir de plan, il n'y avait absolument

4 aucun plan militaire à l'exception de la JNA. Je peux vous le dire avec

5 certitude. J'en suis certain à 100 %. Je l'aurais su si quelqu'un avait

6 planifié quoi que ce soit militairement parlant. Je parle du côté civil.

7 Quand je parle de la JNA, c'est autre chose. Mais le peuple n'avait rien à

8 voir, et nous n'avions rien à voir avec eux officiellement. Il y avait un

9 certain soutien du SDS envers l'armée pour ce qui est de la mobilisation

10 mais nous n'avions absolument pas procédé à quelque que planification que

11 ce soit.

12 Q. Je vais élargir ma question quelque peu en guise de précision.

13 Lorsque je vous ai demandé de nous dire si vous aviez pris part à une

14 planification de guerre, je parle également de toutes formes de

15 planification de défense civile ou de préparatifs en vue de guerre plutôt

16 que de procéder à la planification de forces armées. Je ne sais pas si

17 c'est plus clair lorsque je vous pose cette question de cette façon-ci.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Stewart, permettez-moi de vous

19 dire la façon dont j'ai compris la question. Est-ce que vous faites

20 référence à la distribution d'armes parmi les Serbes, est-ce que vous

21 aimeriez parler de tels événements par exemple ?

22 M. STEWART : [interprétation] Oui, tout à fait. J'ai essayé d'être neutre,

23 le plus neutre que possible.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est l'essence de votre question ?

25 M. STEWART : [interprétation] Oui, cela fait partie de ma question, c'est

26 une partie importante de ma question.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Krajisnik, lorsque vous avez

28 dit que vous auriez dû savoir si quelqu'un avait planifié quoi que ce soit

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1 au niveau militaire, est-ce qu'à ce moment-là -- et vous avez dit aucun des

2 Serbes de Bosnie-Herzégovine n'a travaillé à créer un plan, est-ce que cela

3 incluait également la distribution d'armes parmi les civils ou à

4 l'extérieur de la JNA ou la Défense territoriale ?

5 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai très peur d'être vague. J'essaie d'être

6 précis. Malheureusement, je crois que j'ai permis une imprécision. Je me

7 suis exprimé de façon imprécise ou vague. Ce que je voulais dire c'est

8 qu'il aurait été logique que j'en sois informé si les armes avaient été

9 distribuées ou non. Je sais de quelle façon les gens recevaient les armes.

10 Krsman l'avait mentionné. Mais je parle de voix officielles, lorsque nous

11 nous sommes entretenus au conseil ou au club ou lors des sessions de

12 l'assemblée, je n'ai jamais assisté à une réunion lors de laquelle on

13 aurait parlé d'organisation militaire. Mais deux choses étaient arrivées

14 lors de la session de l'assemblée de Bosnie-Herzégovine. Une question avait

15 été soulevée concernant un incident, à deux reprises deux camions ou plutôt

16 à plusieurs reprises des camions qui portaient des armes avaient été

17 interceptés. Une fois le côté serbe avait été pointé du doigt, en

18 Herzégovine, à Sarajevo. Mais je n'ai pas voulu m'impliquer à cela. C'était

19 au MUP et au bureau du procureur de s'occuper de ce genre de choses. Je

20 parle de moi personnellement. Nous avions certes un plan en Bosnie-

21 Herzégovine, un plan en cas de guerre si jamais la guerre avait éclaté. En

22 tant que conférencier et en tant que président du Parlement de Bosnie-

23 Herzégovine, j'avais ce plan qui se trouvait dans mon tiroir, le tiroir de

24 mon bureau pour la Bosnie-Herzégovine. Pour ce qui est du côté serbe, pour

25 ce qui est d'organiser quelque chose militairement parlant, si j'avais fait

26 des plans ou si on avait procédé à la planification de quoi que ce soit,

27 non, j'avais tout à fait laissé de côté tout ce qui touchait ce genre de

28 sujets à l'époque. Peut-être que quelqu'un d'autre procédait à d'autres

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1 planifications, ou planifiait autre chose. J'ai reçu toutes sortes

2 d'informations, mais je n'avais absolument aucune connaissance de

3 l'existence de tels plans.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Lorsque vous dites que vous receviez

5 toutes sortes d'informations, mais que vous ne saviez pas, vous n'aviez

6 aucune connaissance précise de ce qui se passait, est-ce que vous êtes en

7 train de nous dire que plus tard vous avez reçu un grand nombre

8 d'informations ou est-ce que vous nous parlez de ce qui s'est passé à

9 l'époque ?

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, --

11 M. STEWART : [interprétation] Dans mon transcript on voit de façon très

12 précise le mot "now", "maintenant."

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Voyons voir.

14 M. STEWART : [interprétation] Je crois que M. Krajisnik disait : "Je

15 recevais toutes sortes d'informations maintenant, mais à l'époque je

16 n'avais absolument aucune connaissance de tout ceci."

17 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je n'ai peut-être pas bien lu la

19 réponse, permettez-moi de revenir en arrière et de relire le transcript.

20 Oui, effectivement, ma question a été superflue. Je n'aurais pas dû vous la

21 poser puisque tout à l'heure vous avez répondu de façon très claire.

22 LE TÉMOIN : [interprétation] M. Stewart a raison une nouvelle fois.

23 M. STEWART : [interprétation] Voilà, sur ce, Monsieur le Président,

24 je consulte la pendule et je me demande s'il faut prendre la pause.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, nous allons reprendre nos

26 travaux à midi 50.

27 --- L'audience est suspendue à 12 heures 32.

28 --- L'audience est reprise à 12 heures 58.

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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Stewart, il y a un point qui

2 demande une clarification, et j'aimerais m'en entretenir à ce propos avec

3 le témoin.

4 M. STEWART : [interprétation] Bien sûr, Monsieur le Président.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Krajisnik, ce matin, vous avez

6 passé du temps à nous expliquer qu'il pourrait y avoir une situation où

7 vous seriez en majorité absolue ou une situation où vous seriez en majorité

8 relative, et que dans ce cas-là, il y aurait un des groupes ethniques qui

9 serait en majorité, mais qu'il n'y aurait pas de majorité absolue, donc ils

10 seraient à moins de 50 %. Or, hier, nous étions en train de parler des

11 documents Variantes A et B, vous avez évoqué le fait qu'il serait tout à

12 fait inutile de prendre les mesures stipulées à la Variante A dans les

13 municipalités à majorité serbe, puisque finalement, c'était le statu quo

14 qui existait à l'heure actuelle. Ils avaient une majorité et pouvaient donc

15 exercer tous les pouvoirs qu'ils avaient ou autorité éventuelle sur la base

16 de ce statu quo.

17 Si j'ai bien compris votre explication, vous avez interprété les documents

18 de Variantes A et de B où l'on parle de la majorité serbe comme étant

19 finalement des situations où les Serbes sont en majorité absolue; c'est

20 bien cela ? On ne parle pas de majorité relative, mais de majorité

21 absolue ?

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Vous avez tout à fait raison. La Variante A

23 était destinée aux municipalités où les Serbes avaient 51 % des députées à

24 l'assemblée municipale ou plus de 51 %. Il est question de municipalités

25 dans cette Variante A.

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, A, et non pas B. Donc, une

27 municipalité en majorité signifie une majorité absolue, n'est-ce pas ?

28 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, ici, il est question de

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1 l'assemblée parlementaire où vous exercez le pouvoir à plus de 51 %, c'est

2 donc le nombre de députés qui permet d'avoir le pouvoir. Alors, la

3 conséquence en est le fait que les Serbes aient voté pour les Serbes, les

4 Musulmans pour les Musulmans et les Croates pour les Croates. Là où nous

5 avons au-delà de 51 % des députés, bien entendu, vous avez la majorité pour

6 exercer le pouvoir. Il n'était pas question de la composition ethnique,

7 mais plus au moins, cela revenait au même.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Tout est clair.

9 Maintenant, Monsieur Stewart, vous pouvez poursuivre votre interrogatoire

10 principal.

11 M. STEWART : [interprétation] Merci.

12 Q. Monsieur Krajisnik, nous allons passer au point suivant qui est

13 toujours au même document, donc nous allons regarder la page 61 de la

14 version en B/C/S et la page 58 de la version en anglais. J'ai l'annotation

15 en marge, qui est un 10, en fait.

16 R. Oui.

17 Q. Il s'agit d'une intervention du Dr Karadzic. Il dit la chose suivante :

18 "Quelque chose me dit que M. Krajisnik va conclure bientôt cette session,

19 et de ce fait, j'ai deux demandes à faire." Vous voyez cela, Monsieur

20 Krajisnik ?

21 R. Oui.

22 Q. "La première demande s'adresse aux députés de la Krajina. Je leur

23 demande de travailler avec nos gens là-bas, avec nos membres du parti, de

24 travailler énormément pour expliquer nos buts stratégiques, pour expliquer

25 nos tactiques, et ce, de façon quotidienne, même si nos tactiques n'ont pas

26 tant changé que cela. Nous avons traversé la montagne, et maintenant, les

27 gens peuvent vraiment voir --"

28 A ce moment-là, Monsieur Krajisnik, y avait-il des buts stratégiques

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1 bien identifiés et bien formulés de la part des dirigeants des Serbes de

2 Bosnie ?

3 R. Ici, on voit que M. Karadzic prie les députés de la Krajina, à savoir,

4 la Krajina de Banja Luka, c'est la Krajina dans sa partie bosniaque, aux

5 fins d'expliquer ce dont il a été question ce jour-là, à savoir que nous

6 souhaitions une république unifiée du peuple serbe en Bosnie-Herzégovine,

7 ce qui signifiait que la variante de la Krajina qu'ils voulaient souvent

8 avancer ou mettre en exergue comme variante à eux ne constituait pas notre

9 objectif stratégique, parce que quand il parle ici d'objectifs

10 stratégiques, il veut dire que sur un plan tactique, il convient de

11 raconter des choses que les gens devraient interpréter. Mais nous, nous

12 disions ouvertement que nous voulions une Yougoslavie. Nous voulions en

13 Bosnie une unité constitutive, et cela constituait l'objectif stratégique.

14 Celui-ci était ou visait à avoir une unité constitutive unifiée au sein de

15 la Bosnie-Herzégovine, et ici, il était question d'une république de

16 proclamée pour le peuple serbe au sein de la Bosnie-Herzégovine. C'est donc

17 ce que M. Karadzic avait demandé à ses députés, d'expliquer à la population

18 serbe dans la Krajina, ce qui constituait notre objectif, parce que vous

19 vous souviendrez qu'il y a eu des conclusions de la Région autonome de la

20 Krajina au sein de la Yougoslavie. Alors on a essayé d'expliquer de quoi il

21 en retournait, à cette session-là. C'était pratiquement la même chose que

22 ce qu'on a adopté en date du 12 mai, mais on y viendra après. Tout ce qui a

23 été débattu à l'occasion de ces sessions devait être expliqué à la

24 population sur le terrain.

25 Q. Soyez sûr, Monsieur Krajisnik, qu'on y viendra à un moment ou un autre

26 au cours de votre déposition. Mais je ne vais pas quand même sauter tous

27 ces mois pour que l'on explore quels étaient ces fameux buts qui ont été

28 évoqués le 12 mai. Vous nous avez dit donc dans votre réponse : "C'est

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1 presque identique à ce qui avait été adopté le 12 mai." Donc, pouvez-vous

2 nous dire exactement ce qui est donc si proche de ce qui avait été adopté

3 le 12 mai ?

4 R. Si nous suivons la séquence des événements, je dirais qu'ici, la

5 constitution, pour des raisons politiques, fait état de la Yougoslavie.

6 Pendant très longtemps, il a été question de la Yougoslavie. Mais il était

7 question de la constitution de la République serbe de Bosnie-Herzégovine.

8 Dans le plan Cutileiro, cela était censé s'appeler l'unité constitutive

9 serbe de la Bosnie-Herzégovine, puis une unité constitutive croate et une

10 unité constitutive musulmane au sein de la Bosnie-Herzégovine. Ici, M.

11 Karadzic leur dit : "Expliquez à tout un chacun que nous, les Serbes de

12 Bosnie, allons avoir une unité constitutive. On ne va pas faire d'unité

13 constitutive avec des régions." Il fallait expliquer la chose parce que les

14 gens commençaient déjà à s'identifier par régions variées, et cela se

15 trouvait être étroitement lié aux négociations qui se déroulaient avec M.

16 Cutileiro. Sur un plan politique, on préparait petit à petit le terrain,

17 pour ne pas dire tout de suite : "Pas question du Yougoslavie," mais on

18 essayait d'établir une espèce de jonction. C'est la raison pour laquelle

19 j'ai dit que cela était très similaire.

20 Q. Oui, très bien. Nous allons maintenant laisser tomber ce document pour

21 le moment. Vous pouvez mettre de côté ce classeur reprenant toutes les

22 séances de l'assemblée.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Stewart, j'ai beaucoup de

24 difficulté à suivre votre numérotation dans la version B/C/S. J'ai n'ai

25 jamais trouvé les passages aux pages qui étaient mentionnées par vous.

26 Alors, peut-être qu'il y a un problème de numérotation aussi en ce qui

27 concerne l'original ? Enfin, j'en n'avais pas non plus ces petites

28 annotations en marge qui, quand même, vous ont permis de vous y retrouver,

Page 23527

1 Monsieur Krajisnik. Enfin, la plupart du temps, j'ai réussi à trouver les

2 bonnes pages, mais je pense qu'il y a quand même un petit problème avec la

3 numérotation des pages en B/C/S. Bien sûr, j'utilise la version

4 électronique où la numérotation de la page se trouve en haut de l'écran, et

5 la dernière page de ce document -- vous pouvez peut-être comparer par

6 numéro de ERN pour voir si cela correspond ? A la page 61, sur l'écran

7 donc, le numéro ERN est le 00898123.

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, permettez-moi d'expliquer.

9 Très souvent, il y a un enregistrement double. Chez moi, par exemple, la

10 numérotation commence par SA 00, et chez vous, c'est autre chose, parce que

11 j'ai un aperçu où pour la même session, il y a deux notes en bas de page,

12 et il se peut que vous ayez ce modèle-là. Mais j'ai retrouvé toutes les

13 pages auxquelles s'est référé M. Stewart.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, peut-être, mais avec le numéro ERN,

15 est-ce que cela coïncide ?

16 M. STEWART : [interprétation] Non, cela ne coïncide pas.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'étais en train de travailler sur

18 l'intercalaire 88. Je crois que c'est le 64A, intercalaire 88. Cela pourra

19 aussi être le P65 d'ailleurs.

20 M. STEWART : [interprétation] Oui. Pour ce qui est de la référence, je lis

21 juste une note. C'est bien le P65, dossier numéro 8, intercalaire 88. Oui.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Je pense que l'original est

23 différent de ce qui est stocké sur l'écran, parce que parfois je vois des

24 différences dans la numérotation et aussi dans les titres de la version

25 B/C/S, et entre la version B/C/S et la traduction. Je suis un peu

26 préoccupé. Bon, tout semble à peu près identique, mais il faut bien que

27 l'on essaye d'éviter quand même, dans la mesure du possible, de travailler

28 tous sur des versions différentes d'un même document, versions différentes

Page 23528

1 en B/C/S, versions différentes dans leurs traductions anglaises. Je voulais

2 juste attirer votre attention là-dessus.

3 M. STEWART : [interprétation] Je suis tout à fait d'accord avec vous. Bien

4 sûr, il y a une explication à tout cela, en tout cas, en ce qui concerne ce

5 point. Ce ne sont pas deux traductions différentes. Si j'ai bien compris,

6 il y a d'abord un compte rendu sténotypé, et l'autre est un compte rendu

7 qui a été enregistré, c'est un enregistrement audio. Donc, il s'agit dès le

8 départ de deux comptes rendus qui sont différents en serbe.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai bien compris.

10 M. STEWART : [interprétation] Je crois que l'Accusation est d'accord avec

11 moi.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais je vous ai dit de faire

13 attention, par exemple, aux numéros ERN quand ils diffèrent, et nous avons

14 bien compris, en tout cas, qu'il y a deux versions en B/C/S qui servent

15 d'originaux. Mais enfin, ce n'est pas très grave. Alors à ce moment-là, il

16 faut quand même qu'on fasse attention pour bien suivre.

17 M. STEWART : [interprétation] Oui. Si tant est qu'on puisse faire une

18 estimation basée sur un jugement, je pense quand même que la version audio

19 semble plus fidèle que la version sténo, mais bon, cela, c'est très

20 personnel.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, c'est vrai, c'est vrai, on peut se

22 dire qu'une version audio est plus fidèle qu'une version sténographique.

23 M. STEWART : [interprétation] Bon, je ne peux pas vraiment vérifier ce qui

24 s'est passé, je ne peux pas vérifier tout ce qui se passe en serbe dans

25 l'original, mais la version audio semble plus fidèle et plus exhaustive

26 surtout que la version sténotypée.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais il faudrait peut-être juste

28 que les parties comprennent bien, qu'elles fassent bien attention aux

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1 documents, et surtout qu'elles fassent référence aux documents qui sont

2 stockés par le Greffe et que l'on peut trouver dans la base de données

3 judiciaire. On les trouve tous. Je suis certain que M. le Greffier pourra

4 vous aider. Il le fait, d'ailleurs. Quand un document n'est pas trouvé

5 immédiatement, il me l'envoie. Quand je ne le trouve pas, en tout cas, il

6 me l'envoie par e-mail en pièce jointe et je peux l'ouvrir tout de suite.

7 C'est la façon dont nous préférons que les documents soient versés. C'est à

8 notre avis plus efficace.

9 M. STEWART : [interprétation] Oui, je suis tout à fait d'accord, mais que

10 puis-je dire ? J'apprécie tout d'abord votre contribution, merci. Mais de

11 toute façon, on essaie toujours de vous faire savoir quand il y a deux

12 versions différentes. Mais je tiens à rajouter une chose. Parfois,

13 l'Accusation a choisi de verser un document, enfin, une version spéciale,

14 et nous, nous préférons parfois présenter une autre version de la même

15 chose. Donc dans ce cas-là, nous aimerions quand même nous réserver le

16 droit de procéder de la sorte, donc d'utiliser une version un peu

17 différente. Du moment qu'on vous en avertit, je pense que c'est possible.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, bien sûr, mais on ne veut pas qu'il

19 y ait de confusion, de mélange. On n'est pas en train de vous dire qu'une

20 des parties va déclarer que sa traduction est meilleure que l'autre, ce

21 n'est pas du tout ce que je tiens à dire. Mais j'ai remarqué qu'à la fois

22 pour les traductions et pour les originaux -- pour les traductions, cela

23 est évident, en tout cas, il faut que je voie un petit peu du côté de

24 l'Accusation où vous avez eu des redondances de traduction, mais je tiens

25 vraiment à ce que l'on évite de travailler tous sur des versions

26 différentes d'un même document.

27 M. STEWART : [interprétation] Oui, nous sommes tout à fait d'accord avec ce

28 que vous avez dit.

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1 M. TIEGER : [interprétation] Sincèrement, ceci est un peu ce qui va se

2 passer lors des prochaines sessions, et nous essayons donc d'anticiper un

3 peu les choses et de toujours amener les documents qui à notre avis, vont

4 être présentés. Si M. Stewart nous donne juste le ERN de la version B/C/S

5 ainsi que l'interprétation qu'il en a, on peut immédiatement vérifier si

6 les copies que l'on a apportées en anticipant ce qui allait être présenté

7 le jour même, si on a bien les bonnes copies. Enfin, cela ne va pas marcher

8 à 100 %, c'est sûr, mais avons quand même essayé jusqu'à présent de

9 fonctionner de la sorte.

10 M. STEWART : [interprétation] Tout à fait.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je pense que cela devrait surtout

12 être fait par anticipation, parce qu'en fin de compte, on pourrait très

13 bien mélanger un peu les choses. Parce que parfois, le témoin répond en se

14 basant sur une version en B/C/S d'un certain original, enfin, d'un original

15 en B/C/S, et nous, nous pouvons en avoir un autre et ne pas vraiment

16 comprendre sa réponse parce qu'il se base sur un original qui n'est pas le

17 même que celui que nous possédons. J'insiste juste là-dessus pour que cela

18 ne crée pas plus de confusion que nécessaire. Enfin, nous n'allons pas

19 passer tout le reste de la séance là-dessus, mais je tiens juste à faire

20 remarquer qu'il est bon d'anticiper ces problèmes et de faire en sorte

21 qu'ils soient les moins compliqués possibles.

22 M. STEWART : [interprétation] Encore dix secondes sur un point logistique.

23 M. Sladojevic pourra répondre à toutes ces demandes pour ce qui des numéros

24 ERN et des documents, donc il me suffit de lui envoyer un e-mail. Je suis

25 sûr, en revanche, je suis sûr, d'ailleurs, qu'il sera très heureux de vous

26 envoyer un e-mail pour vous dire exactement quels sont les documents qui

27 vont être utilisés à l'avenir.

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, allez-y.

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1 M. STEWART : [interprétation] S'il n'est pas content de le faire, il

2 s'exécutera.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est une nouvelle façon de manager, je

4 pense que cela marche très bien. Vous pouvez maintenant continuer.

5 M. STEWART : [interprétation]

6 Q. Monsieur Krajisnik, voici un document, pièce -- je ne pense pas que

7 cela va soulever d'autres questions, mais il faudrait quand même que vous

8 jetiez un œil dessus. Il s'agit donc du P211. Nous avons déjà averti la

9 Chambre que nous allions sans doute utiliser cette pièce. Cela fait

10 longtemps que l'on n'avait pas vu cette carte. Elle a été montrée lors la

11 déposition de M. Okun, il y a très longtemps, et entre autres choses,

12 c'était même avant que M. le Juge Hanoteau ne rejoigne le collège des

13 Juges, donc il ne l'a peut-être sans doute jamais vu, ou peut-être jamais

14 vu. Enfin, je pense qu'il l'a sans doute vu lorsqu'il s'est familiarisé

15 avec l'affaire, bien sûr, mais nous pouvons la regarder à nouveau. Donc,

16 elle est basée sur le recensement de 1991; d'ailleurs, il y a une date.

17 Sans doute que c'est une carte qui a été élaborée en août 1991. Tout est en

18 serbe, mais dans la légende à gauche, on voit qu'il y a des couleurs. Ce

19 n'est pas toutes les couleurs auxquelles faisait référence M. Krajisnik

20 hier, puisque les Croates sont en bleu, les Musulmans en vert et les Serbes

21 en orange -- carmin-orange, et les Yougoslaves en jaune. Cela montre un peu

22 les majorités.

23 M. STEWART : [interprétation] Cela fait référence à l'observation que vous

24 aviez faite, d'ailleurs, Monsieur le Président, il y a quelques minutes,

25 pour ce qui est des questions portant sur les Variantes A et B, par

26 exemple. Prenez les municipalités croates en bleu, là où ils sont plus de

27 66 % de la population, c'est en bleu foncé; quand ils sont entre 50 % et 60

28 %, c'est en bleu plus clair; et quand c'est bleu et blanc, c'est quand

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1 c'est la majorité relative, donc cela répond exactement à la question que

2 vous avez posée, il y a quelques minutes, Monsieur le Président. De plus,

3 il y figure aussi les pourcentages de la population des autres groupes

4 ethniques. On le trouve avec ces petits histogrammes. Donc, il s'agit du

5 recensement de 1991.

6 Je pense que c'est une carte assez pratique. Bon, je ne l'ai pas

7 trouvée moi-même, mais cela montre bien le bilan de la situation en 1971,

8 ensuite, l'évolution par rapport en ce qui s'est passé en 1981 à 1991, et

9 tout à fait en bas à droite, puisque Sarajevo, bien sûr, ne peut pas

10 vraiment rentrer sur une carte de cette taille, on voit un bloc dans lequel

11 figure la ville de Sarajevo. Ainsi, on voit les municipalités de Sarajevo.

12 Je vous la montre parce que je pense quand même qu'il est bon d'avoir cette

13 carte à l'esprit, en tout cas, pour ce qui est de la Défense, quant aux

14 débats de ce qui a à voir avec M. Cutileiro, par exemple, et d'autres

15 éléments en l'espèce. C'est une carte qui est facile à lire, mais c'est

16 vrai qu'il peut être très difficile de se souvenir de tous ces éléments.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, ce sera extrêmement utile.

18 M. STEWART : [interprétation]

19 Q. Bon, Monsieur Krajisnik, je ne sais si vous l'avez devant vous, mais --

20 R. Oui.

21 Q. Vous avez vu cette carte au cours de la procédure, n'est-ce pas,

22 Monsieur Krajisnik ? Mais il s'agit quand même d'une carte qui était à

23 votre disposition et que vous aviez pu étudier au cours de l'année 1991,

24 fin de l'année 1991, début de l'année 1992, n'est-ce pas ?

25 R. Oui, cette carte ou une carte similaire a été prise en considération

26 par nos soins. Mais, j'attire votre attention sur le fait que cela n'a pas

27 fait l'objet, disons, d'un débat avec M. Cutileiro, parce que cela, c'est

28 la carte des municipalités, ce n'est pas la carte du cadastre. J'ai ici la

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1 carte de Bosnie-Herzégovine qui est celle du cadastre et qui a déjà été

2 présentée ici. Je peux vous expliquer pourquoi elle ne se prête pas à la

3 création des unités constitutives. Mais toujours est-il que j'ai vu cette

4 carte, j'en ai pris connaissance, en effet.

5 Q. Bien. Avant de passer à des questions plus précises à propos de cette

6 carte, l'une des caractéristiques de cette carte, celle que nous avons à

7 l'écran, là, la P211, elle a son utilité, mais il est vrai que tout est

8 traité au niveau de la municipalité. L'élément le plus petit que l'on

9 trouve sur cette carte, c'est une municipalité. Donc, je pense que vous

10 nous en avez parlé il y a une minute. C'est bien ce que vous vouliez nous

11 dire ?

12 R. Oui. Oui, vous avez tout à fait raison. Ici, on peut voir quelle est la

13 municipalité qui a la majorité requise pour rejoindre les rangs de ceux qui

14 font partie de la région. Si elle n'a pas la majorité requise, cela ne peut

15 pas être le cas, elle n'a pas la majorité de population. Alors, c'est

16 utilisable pour expliquer la Variante B, pour ce qui est des majorités et

17 minorités. Mais pour ce qui est du plan Cutileiro, il faut se référer à une

18 autre carte où l'on verra dans les différentes municipalités qui a la

19 majorité ou la minorité dans les différentes communautés locales, parce

20 qu'il se peut que la municipalité soit plus grande. Alors, on peut prendre

21 la Bosnie-Herzégovine et par les 43 %, cela nous donnerait la moitié en

22 vert ou presque la moitié en jaune, et cetera. Vous avez tout à fait raison

23 de dire qu'il s'agissait de voir dans quelle partie la municipalité, dans

24 son ensemble, avait réuni tel ou tel autre pourcentage des populations.

25 Q. Oui, à nouveau, pour jeter les bases un petit peu de la situation, vous

26 avez fait référence à une carte que vous avez ici avec vous, mais pas ici

27 avec vous dans ce prétoire. Je pense que vous voulez dire qu'elle est avec

28 vous au quartier pénitentiaire.

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1 R. Non, non. Quand je l'ai dit, je pensais ici, dans ma mallette.

2 Q. Oui.

3 M. STEWART : [interprétation] Alors peut-être pourrait-on permettre à M.

4 Krajisnik de nous montrer cette carte ? Cela pourrait éviter peut-être tout

5 malentendu éventuel, et ainsi, on pourra vérifier au cours de la soirée si

6 elle est bien en adéquation avec ce que l'on a.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. C'est à vous, Monsieur Stewart, de

8 savoir s'il faut -- nous avons entendu des dépositions selon lesquelles si

9 on considère la détention de la terre, il y a des municipalités qui

10 seraient à majorité serbe, alors qu'en matière de la population, elles ne

11 seraient pas. Bien sûr, la question est de savoir si les décisions sont à

12 prendre par les propriétaires terriens ou par des citoyens. Cela dit,

13 personne ne conteste le fait que dans certaines municipalités, plus de 50 %

14 des terres étaient détenues par des Serbes. Quant à savoir si c'était la

15 référence à utiliser pour voir s'il y avait majorité ou pas ou s'il

16 convenait plutôt de regarder les pourcentages de population, bien sûr -- en

17 tout cas, il semblerait qu'il n'y a pas eu vraiment de différence entre la

18 détention des terres et la population. Je n'ai jamais entendu au cours

19 d'aucun contre-interrogatoire que l'on considère que si l'on se base sur la

20 détention de la terre et la possession, les résultats seraient différents

21 et plus favorables aux Serbes que si l'on parle de la proportion de la

22 population.

23 M. TIEGER : [interprétation] Je ne suis pas tout à fait d'accord avec cela.

24 Si je me souviens des dépositions que nous avons eues, il semblerait --

25 principalement pour ce qui est donc de ce 64 % dont nous a parlé M.

26 Krajisnik, je crois que là, c'était pas tout à fait exact, ce 64 % de

27 terres détenu par les Serbes.

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Je me souviens qu'il y a eu un peu

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1 de dispute là-dessus quant à savoir si c'était justifié, en fait, parce

2 qu'il y avait aussi des terres qui n'étaient pas détenues par qui que ce

3 soit, par un propriétaire privé.

4 M. STEWART : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je laisse cela à vous, Monsieur --

6 M. STEWART : [interprétation] Oui, je pense qu'on en a parlé lors de la

7 déposition de M. Okun. En tout cas, on en a parlé certainement lors de sa

8 déposition. J'en suis sûr.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, tout à fait. Je n'étais pas

10 préparé. Je suis désolé. J'ai soulevé un lièvre, là.

11 M. STEWART : [interprétation] Oui. De toute façon, tout comme les cartes,

12 il y a aussi des dépositions qui datent déjà, et on commence à ne plus

13 vraiment s'en souvenir.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, c'est à vous de vérifier si cela

15 est important ou pas, de toute façon.

16 M. STEWART : [interprétation] Je voudrais la carte, si je puis, Monsieur le

17 Président.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Monsieur Krajisnik.

19 M. STEWART : [interprétation] Donc, je vais vérifier de toute manière pour

20 la carte, si elle nous apporte quoi que ce soit.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Krajisnik, pouvez-vous, s'il

22 vous plaît, nous fournir la carte que vous avez avec vous dans votre

23 mallette ?

24 M. STEWART : [aucune interprétation]

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Ici, il y a la carte de Sarajevo et celle de

26 Bosnie-Herzégovine. Mais ce n'est pas une carte serbe, c'est une carte

27 émanant d'une instance officielle de la Bosnie-Herzégovine, ce qui fait que

28 les pourcentages ici disent autre chose. C'est une carte qui déjà été

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1 versée au dossier en guise d'élément de preuve. Cela, c'est Bosnie-

2 Herzégovine et Sarajevo.

3 M. STEWART : [interprétation] Oui. Je crois que je le vois d'ici que ce

4 sont des cartes qui en effet ont bel et bien été déjà versées au dossier.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans ce cas-là, il faut juste que l'on

6 retrouve la cote, c'est tout.

7 Je me souviens, je crois, de ces cartes-ci. Il y en a deux qui sont

8 identiques. Je me souviens très bien de celle qui était en bleu et rose.

9 M. STEWART : [interprétation] Peut-être que la chose la plus efficace à

10 faire serait peut-être que M. Krajisnik, nous les confie pendant la nuit,

11 comme cela, nous allons vérifier si elles ont bel et bien été versées au

12 dossier, trouver la cote, et cetera.

13 M. TIEGER : [interprétation] Nous, on a regardé en vitesse, et on a

14 l'impression que --

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais je crois qu'il s'agit du P68. Dans

16 le P68, nous avons cette fameuse carte bleue et rose.

17 M. STEWART : [interprétation] Il s'agit d'une pièce qui a été versée sous

18 un grand nombre d'intercalaires, n'est-ce pas, et cela nous vient de M.

19 Treanor.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Je vous parle de l'intercalaire 2,

21 et je vais juste vérifier maintenant très rapidement.

22 M. TIEGER : [interprétation] A notre avis, il s'agit aussi du P293.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Je note le P293.

24 Effectivement, il s'agit bien de cette pièce.

25 Voilà, pour l'égalité des armes, vous avez le droit de déposer des

26 documents à deux reprises, en double. Je me demande si la troisième carte,

27 celle qui a les couleurs bleues et vertes, si elle figure déjà dans cette

28 liasse de documents. Sinon, je vais voir. Un instant, s'il vous plaît.

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1 Donc, elle n'y figure pas. Bien. Je vous prierais de porter une attention

2 toute particulière sur la carte bleue et verte, Monsieur Krajisnik, et pour

3 les parties, à ce moment-là, vous allez pouvoir peut-être le trouver.

4 M. STEWART : [interprétation] Effectivement. Nous allons les remettre à

5 notre assistant en passant par M. Josse. Donc, nous allons remettre par le

6 biais de M. Josse ces cartes à notre assistant chargé des cartes. Voilà.

7 Q. Monsieur Krajisnik, nous aimerions vous demander de prendre les pièces

8 D5 et D6. Ils ne sont pas en ordre chronologique, D6 vient avant le D5,

9 dites-nous, est-ce que D6 semble être ce que l'on appelle, ce que l'on

10 connaît sous le nom de l'accord de Lisbonne ?

11 R. Oui. L'accord de Lisbonne porte également le nom de l'accord de

12 Sarajevo. Il s'agit de deux accords en réalité, c'est deux déclarations qui

13 sont présentées ici. Voici d'abord la variante initiale que j'ai reçue,

14 c'est-à-dire l'accord de Lisbonne.

15 Q. Oui. C'est une déclaration sous les principes et, selon ce document, la

16 Bosnie-Herzégovine deviendrait un Etat indépendant composé de trois unités

17 constituantes, entre parenthèses appelées… il y a un astérisque qui indique

18 que les noms de ces unités constituantes demandent réflexion plus profonde.

19 M. STEWART : [interprétation] Donc les unités constituantes entre crochets,

20 il y a un astérisque à côté et en bas de la page le mot pour ces unités

21 constituantes exige une réflexion plus profonde.

22 Q. Ce document, l'original de ce document n'était pas dans votre langue,

23 n'est-ce pas, Monsieur Krajisnik, n'a pas été rédigé en B/C/S ?

24 R. Non, pas à l'époque, pas pendant que les pourparlers avaient lieu, mais

25 le document avait été traduit très rapidement puisqu'il s'agit d'un accord

26 assez court. Donc le lendemain ou peut-être même le même jour, j'avais pris

27 connaissance de la teneur de ce document.

28 Q. Est-il exact de dire que les réunions, c'est-à-dire que ce document a

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1 été rédigé à la suite de réunions qui avaient lieu à Lisbonne quelques

2 jours après la session de l'assemblée dont nous avions discuté il y a

3 quelques instants, celle du 15 février 1992 ?

4 R. Oui. Mais je me souviens bien, ce document a été rédigé le 13 mars, il

5 portait la date du 13 mars, vous pouvez le voir certainement dans

6 l'original. Après le 25 février, cette réunion à Lisbonne a eu lieu. Je

7 crois que c'était en date du 13 mars. Alors que l'autre document a été

8 rédigé le 18 mars. Vous pouvez certainement le vérifier.

9 Q. Toujours est-il qu'il y avait certains écarts entre les deux, c'est-à-

10 dire que les pourparlers ont été ajournés, les gens sont rentrés chez eux,

11 ensuite les pourparlers ont repris, n'est-ce pas ? Est-ce que c'est exact ?

12 Donc il y a un laps de temps entre les deux ?

13 R. Oui, vous avez tout à fait raison.

14 Q. Je souhaiterais que l'on vous remette D5 si vous ne l'avez pas encore.

15 Monsieur Krajisnik, je vous demanderais de vous placer dans un certain

16 désavantage par rapport à ce document puisqu'il est en anglais. Ce document

17 a été rédigé à Sarajevo le 18 mars 1992. Est-ce que cela correspond avec

18 votre souvenir de la deuxième version. Vous nous avez dit qu'une deuxième

19 version a été rédigée en mars ?

20 R. Oui. Ce document est la variante qui a eu lieu après la réunion de

21 Sarajevo, après l'accord de Sarajevo. Vous avez raison. Il s'agit de la

22 deuxième variante modifiée et finale. En fait, à l'époque, c'était une

23 variante finalisée dans laquelle les trois parties s'étaient déclarées,

24 s'étaient prononcées.

25 Q. Est-il exact de dire, Monsieur Krajisnik, qu'on n'a jamais essayé de

26 dire qu'il s'agissait d'un accord final, d'un accord finalisé qui a été

27 rédigé à la suite de ces discussions, s'agissant des trois parties ?

28 R. Je n'ai pas très bien saisi. Qu'est-ce que vous voulez dire par final ?

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1 Oui, c'était le document final sur lequel nous nous étions mis d'accord,

2 mais il n'a pas été élaboré, c'est-à-dire que selon ce document, il aurait

3 fallu créer un plan complet et rédiger un document beaucoup plus complet

4 que celui-ci si j'ai bien compris votre question.

5 Q. Oui, je vais reformuler ma question. Je vais vous la poser de façon un

6 peu plus neutre. Peut-on dire que ces documents étaient un accord

7 contraignant, que la teneur de ces deux documents représentait un accord

8 contraignant entre les parties ?

9 R. Tous ces points avaient été acceptés comme étant des points

10 contraignants si j'ai compris votre question. Selon les principes énoncés,

11 les principes de l'accord de Lisbonne, nous n'avions pas fait un plan

12 élaboré, un plan complet tel que nous l'avons fait après le plan de Dayton

13 ou du Groupe de contact, on n'a pas élaboré un plan signé qui était devenu

14 à ce moment-là contraignant. Les quatre côtés, il y avait la Communauté

15 européenne et les trois parties. Tout le monde avait accepté ces principes

16 et même les cartes avaient été faites. La seule question, la seule vraie

17 question sur laquelle nous nous n'arrivions pas à nous mettre d'accord,

18 c'était la question de la carte. Toutes les autres questions étaient

19 beaucoup plus faciles à débattre et il était beaucoup plus facile de se

20 mettre d'accord sur les autres points.

21 Q. D7A et D7B, Monsieur Krajisnik, je ne sais pas si vous avez déjà ce

22 document sous les yeux ?

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vois D7 et D7A. Je ne sais pas si

24 vous faites référence à ce document-là. D7 étant un document manuscrit, il

25 y a des passages manuscrits.

26 M. STEWART : [interprétation] Non, en fait, je voulais D7A. Techniquement

27 parlant il s'agit de 7 et 7A, quelle est la référence officielle ?

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D7, c'est le document qui comporte des -

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1 - enfin, il est plus au moins manuscrit et l'autre document porte la cote

2 D7B. En fait, ce n'est pas très logique.

3 M. STEWART : [interprétation] Oui, vous avez tout à fait raison.

4 Q. Monsieur Krajisnik, est-ce que vous voyez deux documents bien distincts,

5 deux différentes cartes ? Est-ce que vous voyez, Monsieur Krajisnik, ces

6 deux cartes ?

7 R. Je les vois, je connais, je les reconnais les deux.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Tieger, je vous écoute.

9 M. TIEGER : [interprétation] Il nous serait bien utile d'avoir la copie

10 soit de D7A ou de l'autre document.

11 M. STEWART : [interprétation] On pourrait peut-être la placer sur le

12 rétroprojecteur cette carte ?

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourrait-on copier la liste des pièces ?

14 C'est une question de copie en fait. Toutes les pièces que nous avons sont

15 dans notre ordinateur afin que vous puissiez immédiatement les retrouver.

16 Je ne dis pas que vous n'avez pas le droit d'avoir un document entre vos

17 mains, un document sur papier, mais c'est peut-être plus facile.

18 M. STEWART : [interprétation] Nous croyons que, Monsieur le Président,

19 techniquement ou pratiquement, ceci n'est pas faisable.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cela m'étonne. Il semblerait qu'il soit

21 très facile de scanner les pièces que nous avons déjà --

22 M. STEWART : [interprétation] Mais tout n'a pas été scanné.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Presque tout a été scanné.

24 M. STEWART : [interprétation] Oui, un très grand nombre de pièces ont été

25 scannées, mais il y a des milliers de pages, par exemple, qui n'ont pas été

26 scannées. Vous avez tout à fait raison. Un très grand nombre de pièces ont

27 été scannées, mais il y a également des pièces qui n'ont pas encore été

28 scannées.

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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je dirais que la majorité a été scannée.

2 Ce n'est pas le dossier complet, mais même le classeur Treanor, 64 et 65,

3 ont presque complètement été scannés. Il nous faudra certainement trouver

4 une façon de vous venir en aide. Je suis très préoccupé par le fait de

5 devoir tout imprimer constamment et cela sauve beaucoup de temps.

6 M. STEWART : [interprétation] Nous avons déjà fait du progrès, n'est-ce pas

7 ?

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

9 M. STEWART : [interprétation] Cela pourrait nous aider énormément si --

10 enfin je crois que les documents dont nous disposons, tout le monde devrait

11 en disposer également, c'est-à-dire que je crois en cela.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien.

13 M. STEWART : [interprétation]

14 Q. Monsieur Krajisnik, qu'est-ce que vous avez sous les yeux sur l'écran ?

15 R. Je vois à l'écran la carte de Cutileiro. C'est ainsi qu'à Sarajevo, on

16 nous a proposé la division à Sarajevo.

17 Q. Et l'autre carte ?

18 R. Ces deux cartes ont été publiées dans les journaux, je les ai avec moi.

19 Mais cette deuxième carte, c'était la proposition du côté musulman et c'est

20 cela qui a causé tant de confusion. Avant la carte de Cutileiro, les trois

21 parties avaient donné leurs propositions, elles avaient fait des

22 propositions qu'elles avaient remises à M. Cutileiro. C'était la

23 proposition du côté musulman. Justement, cette carte a été publiée dans un

24 journal que j'ai avec moi ici. J'ai cela, et la carte de Cutileiro. Je

25 crois que cela fait partie également des éléments de preuve au dossier.

26 Q. Oui, probablement, Monsieur Krajisnik. Mais en fait, la position est

27 très claire, n'est-ce pas, de dire que la première carte que nous avons

28 examinée était la carte 7B, celle avec des lignes horizontales, c'est la

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1 carte qui faisait partie de l'accord. Elle était rattachée à l'accord,

2 alors que la carte musulmane n'était pas rattachée à l'accord. C'était

3 l'une des propositions. C'était une carte qui faisait partie d'un très

4 grand nombre de cartes qui avaient été présentées lors des discussions;

5 est-ce que c'est exact ?

6 R. Oui. Mais petite précision. Vous avez tout à fait raison, mais je

7 souhaiterais apporter une toute petite précision. La carte de Cutileiro

8 était une carte de travail, et ils ont dit : Voilà, nous vous proposons

9 cette carte à la suite de cet accord et, sur cette carte, nous allons créer

10 des équipes qui vont pouvoir faire des corrections mineures au niveau du

11 territoire, et vous allez peut-être pouvoir vous entendre. Mais vous verrez

12 que, dans le document du 13 mars, on peut voir que selon le recensement de

13 1971, 1981 et 1991, donc on dit dans cette carte de quelle façon est-ce

14 qu'on peut procéder à la création et à la formation d'une carte la plus

15 précise. Le côté croate voulait que la carte soit faite selon le

16 recensement de 1971. Nous demandions que la carte soit faite selon le

17 recensement de 1981 et les Musulmans voulaient que la carte soit faite

18 selon le recensement de 1991. Donc, c'était une carte de travail. Nous

19 devions établir les frontières. C'était un jet préliminaire.

20 M. STEWART : [interprétation] Je crois que le moment est opportun pour

21 terminer la journée, notre session d'aujourd'hui.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, tout à fait, Monsieur Stewart.

23 Monsieur Krajisnik, même si je ne vous demande pas à tous les jours de ne

24 pas parler avec personne du témoignage que vous rendez, vous le faites

25 quand même, n'est-ce pas même si j'oublie de vous demander ceci ?

26 LE TÉMOIN : [interprétation] Vous m'avez tellement fait peur, Monsieur le

27 Président, que je n'ose plus parler à personne de rien.

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'accord. Puisque vous avez compris, il

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1 n'est plus nécessaire de vous rappeler cette consigne.

2 Nous allons lever la séance et bon après-midi.

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci beaucoup.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous reprendrons nos travaux

5 demain matin à 9 heures.

6 --- L'audience est levée à 13 heures 48 et reprendra le vendredi 5

7 mai 2006, à 9 heures 00.

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