Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mardi 30 mai 2006

2 [Audience publique]

3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 12.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à tous et à toutes.

6 Madame la Greffière, veuillez citer l'affaire.

7 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Ceci est

8 l'affaire IT-00-39-T, le Procureur contre Momcilo Krajisnik.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Madame la Greffière.

10 Peut-être y a-t-il eu une certaine confusion pour ce qui est de savoir que

11 nous allions éventuellement commencer à 10 heures. Si j'ai bien compris,

12 Monsieur Krajisnik, votre dentiste est tombé malade.

13 On m'a dit que vous alliez voir ce dentiste jeudi matin. C'est jeudi matin

14 que nous allons commencer avec un peu de retard. Si j'ai bien compris,

15 Monsieur Krajisnik, vous avez fourni au Greffier un document en B/C/S. Est-

16 ce que je peux jeter un coup d'œil dessus.

17 Il me semble que c'est une partie --

18 M. JOSSE : [interprétation] Est-ce que nous pourrions obtenir une copie, je

19 vous prie, Monsieur le Président ?

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Certainement. Il me semble qu'il s'agit

21 là d'une copie des pages qui vont de 216 à 218. Il s'agit de pages du livre

22 rédigé par M. Sefer Halilovic.

23 M. JOSSE : [interprétation] Je pense que le livre est intitulé, "Stratégie

24 rusée."

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Monsieur Krajisnik, pourriez-vous

26 nous expliquer, peut-être est-ce moi-même qui ai réclamé ce document, mais

27 j'aimerais que vous m'expliquiez en quelques mots pourquoi ce document nous

28 a été remis ?

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1 L'ACCUSÉ : [interprétation] Vous avez reçu deux documents, Monsieur le

2 Président. Il se peut que vous n'en ayez qu'un sous les yeux, mais en

3 réalité j'ai voulu aider les Juges de la Chambre ainsi que le bureau du

4 Procureur. Hier, il a été question de savoir si quelqu'un s'était employé

5 en faveur de la création d'un Etat islamique et il a été question du

6 déplacement des gens du Sandzak. J'ai pensé que ceci serait utile. Je peux

7 même vous indiquer l'emplacement exact du passage.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Monsieur Krajisnik, je vais confier

9 le soin aux parties en présence pour ce qui est de décider si elles

10 souhaitent présenter des éléments de preuve à l'appui de votre témoignage.

11 Par exemple, j'imagine que si une réponse est fournie à une question

12 déterminée, il se peut que qu'à l'occasion des questions complémentaires,

13 Me Josse vienne dire : Je souhaite présenter ceci parce que ceci constitue

14 le fondement sur lequel le témoin s'est appuyé pour fournir sa réponse, à

15 moins que les parties n'aient des positions divergentes sur ce point, et je

16 suis en train de regarder les deux parties en présence pour demander s'il y

17 a un document quelconque, indiquez-nous son existence et nous demanderons

18 aux parties si elles ont l'intention de vous interroger à ce sujet --

19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La Chambre est quelque peu hésitante

21 pour ce qui est de créer une énorme collection de documents rédigés par qui

22 que ce soit au sujet d'événements du début 1990. Cela ne nous surprend pas.

23 Cela ne fait qu'ajouter un éclairage nouveau sur ce qui est s'est produit à

24 l'époque. Les Juges de la Chambre veulent se concentrer essentiellement sur

25 les témoignages présentés ici. Ceci ne signifie pas que ces pièces seront

26 exclues. Notre attention est attirée dessus mais le fait de verser cela au

27 dossier de façon spontanée serait peut-être exagéré.

28 Etes-vous d'accord ?

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1 M. JOSSE : [interprétation] Tout d'abord, je suis tout à fait d'accord avec

2 ce que le Président de la Chambre vienne de dire. Je ne voudrais pas non

3 plus que M. Krajisnik se voit être dissuadé de présenter des documents de

4 cette sorte aux Juges de la Chambre. Il se peut qu'à la différence des

5 extraits de ce livre, il y a une possibilité, qu'après le contre-

6 interrogatoire, il y ait nécessité pour nous de démontrer s'il y a eu

7 présentation de position erronée ou pas. Je ne voudrais pas que cela ne

8 soit pas fait. Il y a là une double négation.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Monsieur Josse. Je suis d'accord

10 avec vous, mais nous sommes en train de nous centrer sur le type de

11 document que nous avons sous les yeux. J'ai dit auparavant que nous

12 hésitions pour ce qui est de créer une collection immense de documents

13 quels qu'en soient les auteurs, parce qu'il nous faut nous concentrer sur

14 les documents qui nous intéressent. S'il s'agit d'un document spécifique,

15 pertinent et qui sous-tend la teneur d'une réponse, je suis d'accord pour

16 que ce soit versé au dossier. Nous attirons l'attention des parties en

17 présence sur l'existence de document et les parties devront décider si

18 elles demanderont le versement de cette pièce ou pas. Si elles disent

19 qu'elles ne veulent pas demander le versement, il appartiendra encore tout

20 de même à la Chambre de décider si ce document sera versé ou pas. Je suis

21 porté à présent sur un choix qui est celui de le mettre de côté et à

22 Messieurs Josse et Tieger de décider par la suite.

23 L'ACCUSÉ : [interprétation] Excusez-moi, mais vous avez ma réponse parce

24 que vous m'avez confié une tâche.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, cela c'était le sujet qui vient.

26 D'après ce que j'ai pu voir ce n'est pas en trois lignes que vous avez

27 répondu, mais vous avez fourni une explication assez brève au sujet des

28 documents que vous avez fournis dans le classeur. La façon que j'ai de

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1 compter jusqu'à trois semble différente de la vôtre. Je vois que vous avez

2 même parfois pris moins de trois lignes pour ce faire, Monsieur Krajisnik.

3 Je crois qu'à 90 % vous vous en êtes tenu à ce que je vous ai demandé de

4 faire. Je suppose que vous avez rangé les choses par priorité, voire par

5 importance. Les documents les plus importants devraient être en première

6 position. Ce serait ce premier document.

7 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, c'est en jaune que

8 j'ai surligné les documents importants. Ceux qui sont d'une moindre

9 importance se trouvent après. Ce sont les documents qui ont moins

10 d'importance.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ils sont moins -- oui, mais ils sont

12 plus importants que les documents qui sont complètement dénués

13 d'importance. Monsieur Krajisnik, je vous ai convié à placer cela dans un

14 ordre de priorité. Vous pouvez toujours le faire. Vous pouvez toujours par

15 exemple mettre un A, B, C, D, et cetera, et le A serait le plus important

16 parmi les autres documents qui ont de l'importance. Parce qu'en

17 l'occurrence tel que cela se présente ici, vous nous avez confié le choix

18 de le faire.

19 L'ACCUSÉ : [interprétation] Je peux surligner en jaune si cet ordre de

20 priorité vous intéresse, je peux le faire pendant la pause.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. A présent, il s'agit de déterminer

22 quel serait l'ordre des priorités s'agissant de ces premiers 21 documents.

23 Avez-vous une copie de ceci sur vous, Monsieur Krajisnik ?

24 L'ACCUSÉ : [interprétation] Oui, oui.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'aimerais que vous indiquiez clairement

26 parmi ceux qui sont surlignés en jaune, quel est l'ordre de priorité que

27 vous leur accorderiez. En même temps, j'aimerais que les parties se voient

28 remettre des copies. Nous allons garder la nôtre en attendant la traduction

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1 et nous demanderons au service de traduction de le faire traduire en

2 priorité.

3 M. TIEGER : [interprétation] Juste un commentaire, Monsieur le Président.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

5 M. TIEGER : [interprétation] Compte tenu des suggestions faites par la

6 Chambre ce matin, je viens de penser à une question. Quelle que soit

7 l'issue des choses dont on vient de débattre, nous voulons nous assurer de

8 la nécessité d'avoir une claire distinction entre le temps utilisé à ce

9 faire dans le procès et le temps qui est alloué au bureau du Procureur pour

10 le contre-interrogatoire.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je comprends cela. Monsieur Tieger,

12 vous avez bien compris que dans la décision qui a été adoptée pour la

13 Défense, nous avons procédé à une estimation du temps moyen effectivement

14 utilisé pour le témoin et nous allons exactement procéder de la même façon

15 lorsqu'il s'agit de vous. Nous pensons que vous devriez avoir 15 jours.

16 Cela n'est pas encore une décision prise à titre officiel, mais nous allons

17 nous pencher sur la question très bientôt. Il en ira de même pour ce qui

18 est de la Défense car il convient de prendre en compte la façon dont le

19 contre-interrogatoire sera conduit.

20 Vous pouvez continuer.

21 Oui, Monsieur Josse.

22 M. JOSSE : [interprétation] Monsieur le Président, juste un ou deux points

23 de procédure; cela pourrait peut-être attendre à la fin de l'audience.

24 J'aimerais me référer à la toute dernière des réponses apportées par M.

25 Krajisnik pendant la journée d'hier.

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, j'ai vu un e-mail à ce sujet.

27 En fait, j'ai suggéré hier et j'ai dit que la première des choses à faire

28 serait d'entendre ce que M. Krajisnik a dit. Bien entendu, je ne peux pas

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1 le faire moi-même, je ne peux pas dire que la traduction est bonne ou pas.

2 Mais il faut que nous entendions d'abord ce qu'il a exactement dit en B/C/S

3 et il faut que nous étudiions la question partant de l'interprétation.

4 M. JOSSE : [interprétation] Je peux vous expliquer pourquoi cela n'a pas

5 été fait, parce que cela nous prendrait pas mal de temps. Je convierais les

6 Juges de la Chambre à continuer et de procéder comme si cela avait été fait

7 hier à la fin de l'audience parce qu'il s'agit de la deuxième phrase de sa

8 réponse qui constitue problème dûment pour ce qui concerne la Défense.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais --

10 [La Chambre de première instance se concerte]

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Josse, les Juges de la Chambre

12 estiment qu'il faudrait commencer par les propos qui ont été proférés. Si

13 cela risque de nous prendre trop de temps, je propose de le faire pendant

14 la toute première pause parce qu'il importe pour les Juges de la Chambre de

15 voir si nous pouvons bénéficier de l'aide d'un B/C/Sophone [phon] qui

16 réécouterait l'enregistrement de façon attentive pour nous retraduire une

17 fois de plus les propos qu'il a tenus et pour lui demander s'il y a des

18 doutes concernant l'original.

19 M. JOSSE : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, mais je viens

20 d'identifier le problème plus ou moins. Si vous voulez que nous procédions

21 de cette façon, je n'ai aucune objection.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, bien sûr. Il ne fait pas l'ombre

23 d'un doute que cela nous permettra de voir ce qui a été dit en B/C/S et

24 ensuite nous pourrons demander à M. le Témoin de procéder à la démarche

25 suivante --

26 M. JOSSE : [interprétation] Merci.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

28 M. JOSSE : [interprétation] Peut-être pourrais-je soulever d'autres

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1 questions avant la fin de cette audience.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cela me convient. Vous savez plus ou

3 moins l'heure à laquelle nous faisons nos pauses.

4 Dois-je comprendre que vous avez réécouté l'enregistrement --

5 M. JOSSE : [interprétation] Non, non, ce n'a pas été le cas.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Ce sera le premier pas à faire

7 pour lever toute ambiguïté et nous allons nous référer à l'enregistrement

8 en B/C/S, puis on suivra le cheminement que je viens d'indiquer.

9 M. JOSSE : [interprétation] Merci.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Tieger.

11 Mais, Monsieur Krajisnik, je tiens à vous rappeler que vous êtes toujours

12 tenu par la déclaration solennelle que vous avez faite au tout début de

13 votre témoignage.

14 Monsieur Tieger, veuillez continuer.

15 M. TIEGER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je ne sais pas

16 si les documents prévus pour aujourd'hui ont déjà été distribués.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, cela a été fait déjà. Merci.

18 [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]

19 M. JOSSE : [interprétation] Je suis désolé de vous interrompre, mais l'une

20 des deux questions de procédure est la suivante, et je tiens à dire qu'il

21 serait peut-être préférable de nous pencher dessus tout de suite.

22 Je me suis entretenu sur ce sujet avec M. Harmon hier. Je suis assez

23 inquiet pour ce qui est de la possibilité pour M. Krajisnik de prendre avec

24 lui dans l'Unité de Détention des documents qui ont déjà été présentés à

25 l'occasion du contre-interrogatoire. Mes éminents confrères n'ont pas

26 d'objection à ce sujet, mais ils font objection pour ce qui est de le voir

27 emporter des documents qui ne lui ont pas encore été présentés à l'occasion

28 du contre-interrogatoire.

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1 Pour être tout à fait franc, je ne suis pas en mesure de présenter une

2 argumentation à ce sujet. Ce sont des difficultés de nature logistique

3 parce que tous ces documents se trouvent plus ou moins réunis dans un ou

4 plusieurs classeurs. Ce qui fait qu'il faut que nous aboutissions à un

5 compromis pour voir de quelle façon il nous faudra procéder.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons nous pencher sur le

7 problème.

8 M. JOSSE : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons voir comment cela pourrait

10 être réparti. Il se peut que nous créons un classeur de plus et les

11 documents utilisés à l'occasion du contre-interrogatoire seront enlevés des

12 anciens classeurs pour être placés dans un nouveau classeur que M.

13 Krajisnik pourra emporter dans l'Unité de Détention. Est-ce que cela vous

14 convient, Monsieur Tieger ?

15 M. TIEGER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Cela ne m'est pas

16 venu à l'idée, mais je crois que la question logistique ne posera pas

17 difficultés.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Continuons sur cette base-là.

19 M. JOSSE : [interprétation] Merci.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ensuite les Juges de la Chambre vont se

21 pencher sur la façon dont ceci a été réalisé.

22 M. TIEGER : [interprétation] Un petit éclaircissement pour ce qui est des

23 sessions de l'assemblée de 1991, 1992.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Allez-y.

25 M. TIEGER : [interprétation] Nous savons que M. Krajisnik dispose de tout

26 ceci et nous ne voyons pas pourquoi ceci serait copié une fois de plus pour

27 être ajouté à ses archives au niveau de l'Unité de Détention, c'est ce que

28 j'avais à l'esprit.

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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La seule chose qui importe en ce moment

2 c'est de savoir si lui a sous les yeux les documents sur lesquels vous lui

3 posez des questions.

4 M. TIEGER : [interprétation] Oui. Je vous remercie.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Allez-y.

6 LE TÉMOIN : MOMCILO KRAJISNIK [Reprise]

7 [Le témoin répond par l'interprète]

8 Contre-interrogatoire par M. Tieger : [Suite]

9 Q. [interprétation] Monsieur Krajisnik, je voudrais que nous parlions

10 d'abord des remarques présentées par M. Milojevic à l'occasion de la 24e

11 Session. Je me réfère à la page 49 de la version anglaise et en B/C/S vous

12 allez le retrouver au 02149912. Les quatre derniers chiffres sont 9912.

13 Tout d'abord, Monsieur Krajisnik, je dirais que M. Milojevic a

14 également été ministre au sein du gouvernement de la Republika Srpska,

15 n'est-ce pas ?

16 R. Excusez-moi, mais je voulais dire qu'il s'agit là -- oui, oui. C'est

17 exact, à l'époque, oui.

18 Q. Il a également été membre du comité exécutif du SDS. Il a été ministre

19 au ministère du Développement et de la Planification du territoire, n'est-

20 ce pas ?

21 R. Oui, c'est quelque chose ressemblant à ce que vous venez de dire. Dans

22 la composition du premier gouvernement, il n'a pas été cela, mais dans la

23 deuxième composition du gouvernement, il a été à ces fonctions.

24 Q. Oui, mais à l'époque de cette session, il était ministre chargé du

25 Développement et de la Planification de l'espace. Alors, la session s'est

26 tenue au mois de janvier 1993 après le remaniement du gouvernement en fin

27 1992 ?

28 R. Je me dois de vous dire que l'ancien gouvernement, vers la fin de

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1 l'année, a été révoqué de ses fonctions. Le mandataire, enfin je ne sais

2 pas s'il a été là en tant que professeur ou ministre, mais pour ce qui est

3 de la composition du deuxième gouvernement qui a été mis en place en 1993,

4 il a été effectivement ministre. Je ne sais pas dans quel rôle il est

5 intervenu ici, parce qu'en sa qualité de ministre au sein du gouvernement,

6 je crois qu'il a commencé à intervenir dix jours après. Oui, là, il a été

7 ministre.

8 Q. Bien. Alors, ce que M. Milojevic a été ou devait devenir éminemment à

9 l'occasion de la tenue de cette 24e Session est la chose suivante : "Il est

10 un critère qui me semble inacceptable. Owen a suivi des critères ethniques

11 d'avant la guerre, et ceci me paraît inacceptable, parce que nous devons" -

12 -

13 R. Est-ce que vous pouvez m'indiquer où se trouve ce paragraphe ? Excusez-

14 moi de vous donner du mal.

15 Q. Le mieux, c'est de vous référer au milieu de la page. Vous allez

16 trouver les chiffres 50 à 100. Quelques lignes plus haut, vous verrez le

17 début du passage dont je parle.

18 R. Oui, je viens de le retrouver.

19 Q. Là, M. Milojevic est en train de dire que : "Ce sont les critères

20 d'avant la guerre qui sont pris en compte. Alors, s'il n'y croyait pas, il

21 n'avait qu'à trouver le moyen de faire retourner les Serbes à Tuzla tout

22 comme les Musulmans ne retourneront plus à Brcko. Ceci était favorable à

23 ces échanges."

24 Il est question de ces déplacements massifs de la population, et il

25 parle des déplacements qui se sont passés au fil des 50 dernières années.

26 Puis, il dit : "Pendant ces cinq derniers mois, il y a eu près d'un million

27 de personnes qui se sont déplacées. Le principe d'immigration n'a pas été

28 abandonné. Aussi devrions-nous insister, d'après moi, sur le fait que

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1 d'après moi, nous allons terminer cette tâche bientôt pour voir ces choses

2 se passer comme elles se sont passées. Ces changements ethniques sont

3 censés être faits. En tant de paix, ce sera un fait accompli. Nous aurons

4 un état à nous, un état sur le plan ethnique qui sera le nôtre."

5 Monsieur Krajisnik, M. Milojevic est en train de parler du fait de

6 consolider les effets de ces changements ethniques, et il parle des

7 changements de la situation ou des modifications de la situation ethnique

8 survenues avant la guerre, n'est-ce pas ?

9 R. Il est professeur. Il est en train de parler en sa qualité d'homme de

10 science et non pas en sa qualité de membre du SDS. Très souvent, il a pris

11 la parole pour prononcer ce type de choses, non pas en sa qualité de membre

12 du SDS, mais de façon à contrôler et d'une façon qui n'a pas été agréée par

13 nous-mêmes. Il était professeur à l'université. C'est par cette qualité-là

14 qu'il est intervenu.

15 Q. C'est à cela qu'il pensait quand il a dit que : "Les Serbes ne

16 reviendraient pas à Tuzla tout comme les Musulmans ne retourneraient plus à

17 Brcko." Quand il a insisté sur la nécessité : "De terminer cette tâche

18 tantôt," vous expliquez qu'il a parlé en sa qualité d'homme de science et

19 non pas que c'était là la propagation ou l'emploi en faveur d'une politique

20 qui devrait être celle de la Republika Srpska ?

21 R. Je vais être très clair pour ce qui est des déplacements de la

22 population, il est intervenu en sa qualité d'homme de science. Pour ce qui

23 est de la tâche accomplie à laquelle vous vous référez comme étant un acte

24 incriminé, je dirais, que très souvent, il a eu coutume de présenter des

25 propositions d'une certaine façon qui n'ont, en aucun cas, été approuvées

26 par le reste des personnes. Ce type d'idées n'a pas trouvé terre fertile

27 parmi les auditeurs. Je ne dis pas qu'il n'y a pas eu de personnes qui

28 n'ont pas été du même avis que lui, mais ces personnes étaient en minorité.

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1 Q. Nous allons bientôt voir qui est-ce qui a été d'accord avec lui et qui

2 ne l'a pas été. Nous allons nous référer à des remarques similaires faites

3 par M. Milojevic à la session suivante. Je me réfère à l'intercalaire

4 numéro 9, page 54 en version anglaise et au 012 [comme interprété] -- au

5 02149992 en version B/C/S, Monsieur Krajisnik.

6 R. Oui, je l'ai retrouvé. Est-ce que vous pouvez juste me dire quel est

7 l'emplacement de la ligne en question pour que je puisse vous suivre ?

8 Q. Ecoutez, c'est presque à la demie de la page. Vous allez voir qu'il est

9 question de Vance-Owen.

10 R. Oui, j'ai trouvé. Oui, le projet Vance-Owen.

11 Q. M. Milojevic se plaint ici du fait de voir : "Le projet de Vance-Owen

12 ne rejetait les déplacements des personnes à l'occasion de ces événements

13 pour en faire une solution finale. Il parle de la situation précédente

14 comme si rien n'était survenu pendant la guerre."

15 Or, il est survenu des déplacements immenses, si vous vous référez à

16 la page 55 de la version anglaise. C'est là une phrase vers la fin d'un

17 long paragraphe, où M. Milojevic dit : "Le plan de paix doit prévoir, et

18 cela n'a pas été intégré à ce texte pour faire en sorte que ces

19 déplacements constituent une solution civile et que les solutions réalisées

20 pendant la guerre soient durables."

21 Une fois de plus, Monsieur Krajisnik, il s'avère que

22 M. Milojevic se réfère ici à des changements intervenus au niveau de la

23 population, changements très grands, dans les mois précédents, et il

24 s'emploie en faveur de faire en sorte que ce soit permanent, n'est-ce pas ?

25 R. Oui, mais votre interprétation n'est pas tout à fait exacte. Il parle

26 de l'adoption du plan Vance-Owen, et il dit que c'est un projet qui ne

27 pourra pas fonctionner. Il a raison. Il s'avère qu'il y a eu des

28 déplacements indépendamment du fait de savoir si ces déplacements étaient

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1 justifiés ou pas. Et il a parlé d'un climat général qui n'était pas

2 favorable à l'adoption de ce type de solution.

3 Q. Monsieur Krajisnik --

4 R. Vous pouvez trouver ici --

5 Q. Monsieur Krajisnik, excusez-moi. Vous êtes en train de changer de

6 sujet. Le fait de le voir souhaiter voir le plan Vance-Owen adopté ou pas

7 dans certaines circonstances, mais

8 M. Milojevic est en train de dire de façon claire à la 25e Session, comme

9 cela a été le cas à l'occasion de la 24e Session pour ce qui est de

10 s'assurer que les changements démocratiques survenus au niveau de la

11 population devraient être permanents. Est-ce que j'ai raison ?

12 R. Je vous parle d'interprétation. Je n'ai pas à lire ce que vous venez de

13 lire. Prenez la deuxième phrase qu'il a prononcée pour savoir ce qu'il

14 avait à l'esprit. Si vous arrachez ceci de son contexte, évidemment, cela

15 semble être le cas. Mais il a dit que cela s'est passé et que les gens ne

16 sont pas revenus chez eux. Il a dit qu'on devait accepter le plan Vance-

17 Owen, quoique irréalisable. Nous étions contre. Alors, si vous arrachez ce

18 que vous avez arraché de son contexte, vous verrez que dans le contexte il

19 n'en est pas ainsi.

20 Q. Monsieur Krajisnik, M. Milojevic --

21 M. TIEGER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

22 Q. M. Milojevic reflétait une attitude, et en réalité, une politique qui

23 avait fait l'objet de discussion et qui était la politique de la RS à la

24 suite du déplacement massif auquel faisait référence M. Milojevic, n'est-ce

25 pas ? C'est-à-dire que dans la mesure du possible de s'assurer que le

26 déplacement de la population demeure un déplacement permanent.

27 R. J'ai dit que cette interprétation n'était pas correcte. Je peux

28 expliquer pourquoi c'est écrit de cette façon-ci.

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1 Vous tirez tout ceci du contexte. Il a parlé de la relocation d'un

2 déplacement des deux côtés. C'est pour cela qu'il fallait accepter le plan

3 Vance-Owen. C'est la raison pour laquelle il avait dit qu'il fallait

4 l'accepter. Il n'a pas dit qu'il fallait consolider la position des Serbes;

5 il a simplement parlé du plan Vance-Owen. Et lui, en tant qu'homme de

6 science, estimait que ce mouvement de population devait avoir lieu car les

7 gens n'allaient plus pouvoir revenir.

8 Q. En réalité, M. Milojevic faisait référence à l'objectif selon lequel le

9 territoire ethnique serbe devrait rester le plus serbe que possible, et que

10 dans la mesure du possible, les Musulmans ne devraient pas avoir le droit

11 de revenir. L'homogénéisation devait être maintenue dans la mesure du

12 possible, et même augmentée, n'est-ce pas ?

13 R. Je dois vous dire que si vous ne placez pas ces propos dans un

14 contexte, il est très facile de se tromper. Il a dit qu'il fallait

15 absolument accepter le plan Vance-Owen. Il n'a pas parlé de la mise en

16 œuvre de la politique. Nous parlons du mois de janvier 1993, mais nous ne

17 parlons pas de la politique. Ce qu'il a dit ce sont des faits. Il a dit,

18 qu'en tant que scientifique, ces gens-là n'allaient pas revenir. Les

19 Nations Unies parlent de cela également. C'est la raison pour laquelle il

20 propose d'adopter le plan Vance-Owen. Cela ne reflétait pas la politique du

21 peuple serbe; c'était contraire à la politique de l'assemblée serbe, du

22 peuple serbe. C'est dans ce contexte-là qu'il a dit cela. Il a expliqué que

23 les choses s'étaient déroulées de la façon dont elles s'étaient déroulées

24 et qu'il fallait accepter le plan Vance-Owen.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je dois intervenir.

26 Monsieur Krajisnik, vous avez attiré notre attention sur le contexte. Les

27 lignes qui suivent se lisent comme suit : "Lorsque nous aurons prouvé cela,

28 s'ils ne reconnaissent pas, on parle de la reconnaissance de l'acceptation

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1 en tant qu'un endroit permanent après la réinstallation, nous allons

2 probablement nous faire d'autres amis dans le monde, et ensuite, il sera

3 beaucoup plus facile, même si nous entrons en guerre encore une fois," si

4 je comprends bien, c'est qu'il fallait accepter le plan Vance-Owen. Le plan

5 Vance-Owen n'est pas un plan très satisfaisant, puisqu'il ne contient pas

6 l'acceptation du caractère permanent de la réinstallation ou

7 relocalisation. C'est donc sur quoi il faut travailler en employant des

8 moyens diplomatiques. Nous allons nous faire de nouveaux amis, et si nous

9 ne sommes pas satisfaits, nous allons mener une autre guerre.

10 Voilà une observation sur laquelle j'aimerais que vous nous apportiez un

11 peu plus de lumière.

12 Il semble y avoir un malentendu entre vous et M. Tieger. Si

13 M. Tieger vous dit : N'est-il pas exact de dire que M. Milojevic préconise

14 la permanence, le caractère permanent de la situation lorsqu'on parle de la

15 réinstallation, vous avez dit il ne faut pas examiner les choses de façon

16 unilatérale. Cela ne voulait pas dire simplement que les Musulmans

17 n'allaient plus jamais revenir sur le territoire serbe, mais cela veut

18 également dire -- enfin, il en vaut de même pour l'autre côté. Je n'ai pas

19 pensé que ce que M. Tieger a demandé préconisait également l'autre côté que

20 les Musulmans n'allaient pas revenir. Lorsqu'il vous a posé ces questions,

21 il ne dit pas que M. Milojevic dit en même temps que les Serbes ne

22 devraient pas revenir ou retourner aux endroits desquels ils proviennent.

23 Monsieur Tieger, je ne sais si je vous ai mal compris, mais l'un pourrait

24 même être le corollaire de l'autre, n'est-ce pas ? Je vous ai bien compris.

25 M. TIEGER : [interprétation] Oui, vous avez bien compris, Monsieur le

26 Président.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.

28 Donc, M. Tieger ne vous dit pas que seuls les Musulmans ne pourront pas

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1 revenir, mais il attire également votre attention sur le plan de M.

2 Milojevic selon lequel il dit : Ni les Serbes, ni les Musulmans ne

3 devraient retourner là d'où ils viennent. Dans le contexte - puisqu'il ne

4 s'agit pas encore du plan Vance-Owen - si le plan Vance-Owen n'a pas encore

5 été mis en place, plus tard d'après les négociations, il est possible de se

6 faire de nouveaux amis, de nouveaux alliés après la guerre.

7 Veuillez, je vous prie, nous faire des commentaires là-dessus, dites-nous

8 ce que vous en pensez ?

9 L'INTERPRÈTE : Est-ce que l'on peut placer le microphone plus près du

10 témoin, merci.

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Voilà. C'est qu'on me l'a placé comme cela.

12 Merci.

13 Voilà. J'ai dit que M. Milojevic a dit que c'était arrivé, que le

14 déplacement bilatéral a eu lieu. Je ne dis pas qu'il ne le constate pas

15 comme quelque chose qui peut nous aider d'accepter le plan Vance-Owen qui

16 n'est pas acceptable; mais je dis que c'est ce qu'il a dit en tant qu'homme

17 scientifique, en tant qu'homme de science parce qu'il parle des Nations

18 Unies. Il parle du concept, et il raconte ce qui se passe pendant la

19 guerre. Personne n'était pour le plan Vance-Owen. Il était le seul à

20 vouloir la mise en œuvre de ce plan. Il n'a pas parlé d'une autre

21 politique. Il parlait en tant qu'homme de science même s'il était ministre.

22 Je ne dis que cela, enfin je répète ce qu'il a dit. C'est très important

23 d'examiner le tout dans le contexte. Il n'a pas préconisé l'idée de garder

24 les choses telles qu'elles étaient; il préconisait un changement.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Tieger, la Chambre n'essaiera

26 pas d'obtenir de nouvelles interprétations de ce texte pour l'instant.

27 M. TIEGER : [interprétation]

28 Q. Monsieur Krajisnik, vous avez parlé du mois de janvier 1993 et du

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1 contexte. Les dirigeants serbes de Bosnie y compris vous, vous nous avez

2 dit que vous avez discuté de l'homogénéisation et vous avez également dit

3 qu'il fallait stimuler la migration de Musulmans dans une direction et les

4 Serbes dans une autre et qu'il fallait améliorer cette homogénéisation qui

5 existait déjà en janvier 1993 avant et après. Ma question est de savoir si

6 cette idée existait avant janvier 1993 ou après ?

7 R. Après votre thèse d'hier, à savoir que je parlais de "Turcs," mais j'ai

8 été étonné parce que je ne me souviens pas d'avoir employé le mot "Turcs."

9 Il n'est pas impossible de dire que j'ai pu préconiser cette idée.

10 En réalité, l'idée était de faire en sorte que chacun avait le droit

11 de retourner dans leur demeure. Ma politique n'était pas à déplacer la

12 population puisque vous avez trouvé hier quelque chose que j'ignorais avoir

13 dit. Je ne peux pas maintenant nier ceci.

14 Q. Nous allons parler de la position officielle dans quelques instants.

15 Permettez-moi de vous poser brièvement : qui a préconisé l'homogénéisation,

16 le maintien et l'amélioration de la situation qui a causé la relocalisation

17 dans les mois qui avaient précédé, qui étaient ces personnes ?

18 R. Je ne peux vous donner de noms, mais je sais que Tudjman avait été cité

19 assez souvent lors des sessions de l'assemblée. Il parlait d'une

20 relocalisation humanitaire mais cela n'était pas notre politique officielle

21 puisque nous avions déclaré tout le temps, que chacun avait le droit de

22 revenir dans sa propre demeure.

23 Je ne peux pas me rappeler maintenant avec les meilleures intentions du

24 monde, je ne peux pas me souvenir qui auraient dit cela. C'étaient peut-

25 être des dirigeants très hauts placés. Je ne le sais vraiment plus.

26 Q. Passons maintenant à l'intercalaire 19, je vous prie. L'intercalaire 19

27 représente des notes sténographiques d'une réunion du conseil pour

28 l'harmonisation de la politique d'Etat tenue le 21 janvier 1993. Parmi les

Page 24912

1 personnes présentes, vous y étiez présent, le Dr Karadzic, Koljevic, Mladic,

2 Milosevic, M. Jovanovic, le ministre des Affaires étrangères de Serbie, et

3 cetera, et d'autres personnes. Nous voyons que ces noms figurent sur la

4 liste des personnes présentes. Maintenant, prenons le commentaire à la page

5 17 en anglais, 19 en B/C/S de M. Jovanovic.

6 M. Jovanovic dit au début de ce deuxième paragraphe : "Les liens

7 territoriaux avec la Serbie et le Monténégro, c'est-à-dire, la Yougoslavie

8 doit être sécurisée de façon à faire les choses non transitionnelles. Le

9 plus important c'est que le territoire que nous obtenons deviendra le plus

10 rapidement que possible homogénéisé de façon nationale, mais non pas en

11 passant par le nettoyage ethnique. Le nettoyage ethnique n'est pas une

12 bonne idée, mais il est important que la vie dans une Bosnie à l'avenir est

13 impossible et que toutes les personnes devraient se déplacer vers leur

14 province d'origine. Voilà le but stratégique qu'il faut essayer d'atteindre.

15 Il faut essayer de le mettre en œuvre."

16 Et il poursuit en disant : "Si au contraire une liberté de

17 déplacement résulte en un déplacement de résidence, mélange de population,

18 alors ce que nous avons fait disparaîtra et nous perdrons tout. Ceci

19 devrait être notre objectif non pas de diriger le sujet d'une conversation

20 sur le fait qu'un très grand nombre de Serbes demeurent sur les provinces

21 d'autres nations mais de prendre des territoires où on peut établir des

22 personnes et de stimuler la migration de nos gens vers leur province

23 d'origine, et les autres également. Il faut nous en tenir à ceci, c'est

24 notre principe de base. C'est ce qui nous guidera."

25 En parlant de l'objectif de l'homogénéisation ethnique et la

26 nécessité de stimuler la migration afin de pouvoir arriver à ce but, M.

27 Jovanovic soulève essentiellement la question qu'a soulevé M. Milojevic, en

28 disant que même si un très grand nombre d'objectifs avaient déjà été mis en

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1 œuvre et que beaucoup de choses avaient été réalisées au cours des mois

2 précédents, par le biais de la relocalisation de la population, que la

3 situation doit être maintenue et améliorée. Est-ce que c'est cela qu'il dit,

4 n'est-ce pas, cette position qu'il présente ?

5 R. Oui, il y incluait également la Yougoslavie ou la Serbie. Je dois

6 expliquer de quoi il s'agit puisque ce qui est important c'est le contexte

7 de cette réunion.

8 Q. Très bien. Mais d'abord, nous sommes d'accord pour dire que c'était la

9 position qu'il préconisait, mais vous voulez nous expliquer le contexte,

10 vous aimeriez nous expliquer ce qui aurait dû se passer en Serbie et au

11 Monténégro car cela faisait partie également de sa position ?

12 R. Sa position, telle que lue ici, était celle-ci, mais le contexte était

13 différent de Milojevic, ce qui serait très utile de me permettre

14 d'expliquer.

15 Q. Que le contexte soit différent ou non, M. Jovanovic parle néanmoins du

16 besoin de maintenir et d'améliorer l'homogénéisation ethnique et nationale

17 en stimulant la migration en direction des territoires tenus par les Serbes

18 de Bosnie, n'est-ce pas, de la RS, la Republika Srpska ?

19 R. Non. L'homogénéisation des Serbes, lorsqu'il parlait de cela, il

20 pensait à l'espace ethnique serbe. Ce n'est pas seulement le territoire en

21 tant que tel, il incluait également les Serbes. C'est la raison pour

22 laquelle il est important que je vous explique ce qu'il a dit ici, ce que M.

23 Milojevic expliquait, car c'est à ce moment-là que nous pouvons seulement

24 arriver à une conclusion juste et correcte.

25 Q. L'espace ethnique serbe dans son ensemble, y compris la Republika

26 Srpska ?

27 R. Permettez-moi, je vous prie de vous expliquer. Vous tirez tout hors

28 contexte sans mon explication. Je suis sûr que vous trouverez mon

Page 24914

1 explication utile, puisque si vous ne me permettez pas de vous expliquer

2 cela n'engendrera que d'autres malentendus. Je ne peux pas répondre oui ou

3 non, ou je peux si vous voulez. Je peux dire oui, c'est vrai. Tout ceci est

4 vrai mais je dois vous expliquer pourquoi ce sujet a été invoqué de cette

5 façon-ci.

6 Q. Très bien. Veuillez, je vous prie, élaborer.

7 R. Cette réunion a été organisée à l'initiative du feu M. Slobodan

8 Milosevic. C'est là qu'on a discuté du plan Vance-Owen. M. Jovanovic parle

9 contre le plan Vance-Owen dans cette réunion alors que quatre mois plus

10 tard il avait apporté une lettre dans laquelle il nous a expliqué qu'il

11 était pour le plan Vance-Owen. Ici, il nous dit quelque chose et sept mois

12 plus tard, il dit autre chose.

13 Il explique ici que le plan Vance-Owen n'était pas bon puisqu'il ne

14 permettait pas l'homogénéisation alors que M. Milojevic dit : Le plan

15 Vance-Owen est bon puisque nous avons fait l'homogénéisation des Serbes

16 dans la Republika Srpska.

17 Ce même Jovanovic nous a remis une lettre nous disant à Bijeljina

18 qu'il fallait accepter le plan Vance-Owen car sinon, nous aurons des

19 sanctions. Effectivement, il y a eu des sanctions et vous avez vu tout ce

20 qui a été dit ici. Lui-même avait expliqué qu'il était amateur et qu'il

21 nous disait tout ceci même si c'était un ministre chargé des Affaires

22 extérieures et qu'il était une personne remarquable et merveilleuse.

23 Q. Très bien. Maintenant examinons les réactions du dirigeant serbe de

24 Bosnie, M. Jovanovic, à la page 19 en anglais, page 21 en B/C/S. Le Dr

25 Karadzic, je vais attendre que vous trouviez le passage.

26 R. Oui, j'ai trouvé, merci beaucoup.

27 Q. Le Dr Karadzic dit que : "Ce dont parle Jovanovic est déjà arrivé. Nous

28 étions 50/50 à Zvornik, maintenant Zvornik est composé du même nombre

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1 d'habitants, 50 000, et ils sont tous Serbes. Plus de 24 000 Serbes de

2 Zenica et Serbie sont arrivés de la Bosnie centrale et se sont installés à

3 Zvornik."

4 Ensuite il poursuit pour dire que : "Si la Serbie voulait nous aider à

5 recevoir des réfugiés, ce serait une excellente solution et que personnes

6 ne pourrait changer quoi que ce soit."

7 Cela veut dire que le Dr Karadzic accepte l'appui du ministre Jovanovic

8 quant à l'homogénéisation, insiste pour dire qu'à plusieurs endroits, c'est

9 déjà arrivé dans une certaine mesure ?

10 R. M. Karadzic était contre le plan Vance-Owen et il appuyait la position

11 de M. Jovanovic; c'était exact. Ce que vous avez dit ici c'était vrai, ce

12 que vous avez dit que les Serbes étaient partis à Zvornik et que les

13 Musulmans de Zvornik étaient allés s'installer ailleurs dans d'autres

14 régions, c'est tout à fait exact. Et que les Serbes n'acceptaient pas les

15 réfugiés, et tout ceci est vrai. Karadzic plus tard a signé à Athènes le

16 plan Vance-Owen.

17 Q. Plus tard, à la page 20, en anglais, on peut trouver des commentaires

18 et des remarques faites par le ministre Jovanovic et le Dr Karadzic. Page

19 20 en anglais, page 22 en B/C/S. Vous dites au mois de janvier 1993, dans

20 cette réunion : "Je vais commencer par ce que M. Jovanovic a dit, et

21 Radovan a parlé dans le même sens. Le problème n'est pas que 45 % du

22 territoire qui maintenant augmente à 55 %, mais ils ont pris des

23 territoires serbes ethniques nettoyés, ils les ont remis à eux. C'est un

24 trésor inestimable des territoires que nous avons pris. Par exemple,

25 pourquoi est-ce qu'ils ont pris une partie de la Krajina de Bosnie et l'ont

26 annexée à Cazin Krajina, à cause de la mine de Ljubija et de la mine de

27 bauxite de Bosanska Krupa. Ces deux mines maintenant appartiennent à Cazin

28 Krajina. Une autre question : pourquoi est-ce qu'ils ont pris la Posavina,

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1 il y a deux raffineries à cet endroit-là, à Bosanski Brod et à Modrica, il

2 y a beaucoup de commerces à Odzaci et il y a aussi le complexe de Doboj."

3 Maintenant, Monsieur Krajisnik, ce que vous nous expliquiez, vous expliquez

4 le contexte général, n'est-ce pas ?

5 R. Oui, mais il faut que je vous explique. Voici ma position, c'est

6 exactement vrai ce que j'ai dit ici, même aujourd'hui je pense de la même

7 façon. Je peux vous expliquer ce que je voulais dire par-là. Je pourrais

8 vous expliquer les faits.

9 Q. Avant de ce faire, j'aimerais vous poser quelques questions spécifiques

10 quant à ce que vous avez dit.

11 R. Oui, je vous écoute.

12 Q. Vous avez fait référence à une mine à Ljubija. S'agit-il d'une mine de

13 Prijedor ?

14 R. Oui, c'est une mine qui se trouve tout près de Prijedor.

15 Q. Et la mine de bauxite se trouvait à Bosanska Krupa, n'est-ce pas ?

16 R. Oui.

17 Q. C'est ce que vous appelez trésors inestimables pris du territoire

18 serbe. Et vous dites : "Nous les avions sur notre territoire" et ces

19 derniers étaient annexés selon le plan ?

20 R. Oui. Vous avez tout à fait raison sauf que je vais vous expliquer.

21 Ljubija se trouvait dans la partie croate alors que Krupa se trouvait sur

22 le territoire majoritairement peuplé par les Musulmans. Je ne sais pas si

23 Krupa se trouve sur le territoire ethnique serbe. J'aimerais expliquer ce

24 que je voulais dire.

25 Q. Oui, je vous écoute.

26 R. D'après le plan Vance-Owen, nous avions des cartes et tout le monde

27 disait, M. Karadzic et M. Jovanovic, tous ces derniers parlaient de

28 l'étendue du territoire. Alors je dis, il n'est pas important de penser 45

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1 %, 55 %. Je parlais de la richesse du territoire. Je suis économiste. Ils

2 ont donné aux Musulmans toutes les richesses d'un territoire qui était

3 censé appartenir aux Serbes qui ethniquement est musulman; ils les ont

4 annexées aux Musulmans alors que nous, on nous a donné des bois, des

5 forêts, des prés, alors que ce n'est pas un territoire de qualité que nous

6 avons obtenu. Vous avez raison pour dire que Krupa est majoritairement

7 musulmane et que Ljubija est majoritairement croate et c'est ce qui est

8 écrit également dans le plan de Cutileiro, mais Modrica ne l'est pas à

9 100 % et Brod non plus, la partie de la raffinerie ne l'est pas non plus,

10 mais ils l'ont pris également. Je parlais de la qualité du territoire qu'on

11 nous a donné. C'est pour cela que nous avons reçu

12 49 %.

13 Q. Nous pouvons voir que vous faites référence à la qualité, c'est-à-dire,

14 à la qualité de ce que vous avez reçu plutôt que ce parler de l'étendue du

15 territoire en parlant de pourcentage. Lorsque vous avez fait votre

16 présentation, votre grief fait état de ce qu'on n'a pas alloué aux Serbes

17 musulmans, c'est-à-dire que vous dites que les Musulmans ont pris quelque

18 chose qui ne leur appartenait pas, d'un territoire qui se trouvait sur le

19 territoire ethniquement nettoyé serbe, Prijedor et Bosanska Krupa puisque

20 vous faites référence à ces derniers, n'est-ce pas ?

21 R. Oui. Monsieur le Procureur, voilà. Bosanska Krajina est un territoire

22 ethnique. Ce sont deux enclaves musulmanes alors que dans d'autres

23 territoires, tel Sarajevo, qui est beaucoup plus riche que la moitié de la

24 Bosnie-Herzégovine où il y avait des Serbes, ceci également est appartenu

25 aux Musulmans.

26 Nous devons examiner le contexte économique dans lequel j'ai prononcé

27 ces mots. Krajina en tant que Krajina est majoritairement serbe. Il ne

28 s'agit pas seulement de deux petites enclaves, je n'ai pas seulement fait

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1 référence à ces deux enclaves. On peut regarder Krajina. Territorialement

2 parlant, Krajina aurait dû appartenir aux Serbes puisqu'Una était la

3 frontière. La rivière Una était la frontière qui délimitait le territoire

4 qui devait appartenir aux Serbes.

5 On ne peut pas dire que Krupa était majoritairement musulmane alors

6 que le territoire n'était pas majoritairement musulman mais la population

7 était majoritairement musulmane. Je ne sais pas si la mine se trouvait à

8 gauche ou à droite de la Una, peut-être même sur le territoire serbe, je

9 l'ignore, mais Ljubija n'est pas musulmane mais croate.

10 Q. Avant le conflit, donc avant qu'il n'éclate en avril 1991, il y avait

11 environ 50 000 Musulmans rien qu'à Prijedor. Ce n'était pas un secteur

12 ethniquement pur ?

13 R. Non. Je ne vous parle pas de Prijedor, on parle de territoire, du

14 territoire de Prijedor. Ce territoire de Prijedor est beaucoup plus serbe

15 que musulman. Il y avait plus de Musulmans en ville, alors que Ljubija est

16 une autre ville, une autre ville séparée où là il y a une majorité croate

17 et non pas une majorité musulmane.

18 Q. Passons maintenant à ce qu'a dit M. Koljevic. Cela se trouve à la page

19 22 de la version anglaise et 25 et 26 de la version en B/C/S.

20 R. Oui, j'ai trouvé le passage.

21 Q. M. Koljevic fusionne un peu les deux discussions, puisqu'il dit et je

22 cite : "Il me semble que bien qu'il y ait des

23 dissimilarités [phon], il y a une chose qui émerge et qui est commune au

24 discours de Momo et au discours de M. Jovanovic. Quand on parle de cartes,

25 il vaut mieux insister sur le principe économique que sur le principe

26 national."

27 Ensuite, il poursuit et je cite : "En bref, il me semble que ceci, c'est-à-

28 dire, utiliser un principe économique pour recouvrir l'autre principe est

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1 une bonne chose. Cela doit être combiné avec autre chose si possible."

2 Ensuite, il explique ce qu'il convient de faire et poursuit en pages 23 --

3 22 à 23. Il nous dit qu'il voyage énormément au sein de la Republika Srpska

4 et il dit, je cite : --

5 R. Pourriez-vous nous dire exactement où cela se trouve en B/C/S ? C'est

6 bien à la page 26 ?

7 Q. Je cite : "Je n'ai pas besoin de vous dire ce que cela signifie. Il

8 nous faudra développer énormément d'activités politiques" --

9 R. Oui.

10 Q. -- "afin de gagner les gens à notre cause. Il faudra développer

11 l'activité d'une installation homogène tant qu'il en est encore temps."

12 M. Koljevic, d'après vous, est en train de faire deux choses, n'est-ce pas

13 ? Tout d'abord, il utilise l'argument économique bien plus que l'argument

14 ethnique, parce qu'il sait bien que cela va être beaucoup plus convaincant

15 pour les négociateurs internationaux. Ensuite, il confirme l'objectif de

16 ces installations homogènes et de ces secteurs homogènes pendant qu'il en

17 est encore temps, n'est-ce pas ?

18 M. JOSSE : [interprétation] Il me semble qu'il faudrait quand même lire le

19 paragraphe qui se trouve juste au-dessus afin de voir un petit peu le

20 contexte.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Tieger, allez-vous accepter

22 cette suggestion qui vient de la Défense ?

23 M. TIEGER : [interprétation] Je ne pense pas que cela change grand-chose.

24 Si M. Krajisnik veut le lire qu'il le lise, mais je ne vois pas pourquoi je

25 le lirais à haute voix.

26 M. JOSSE : [interprétation] Tout cela me va, du moment que M. Krajisnik

27 peut lire le paragraphe qui précède.

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.

Page 24920

1 Monsieur Krajisnik --

2 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, le Procureur maintenant

3 qu'il a parlé, je ne sais plus du tout où j'en suis. J'aimerais bien savoir

4 de quoi il parle. Je vais faire des commentaires, et je tiens quand même à

5 parler correctement et répondre correctement à sa question. Mais je

6 n'arrive pas à trouver ce paragraphe qui me donnera, soi-disant, le

7 contexte. Je me souviens très bien de cette réunion, mais c'est une

8 question très spécifique qu'il vient de me poser quand même.

9 Au début, je savais exactement ce qu'il était en train de lire, et

10 ensuite, je me suis totalement perdu dans les lignes. Alors, si vous

11 pourriez, s'il vous plaît, me dire où se trouve ce paragraphe de contexte,

12 je pourrais le lire. Merci.

13 Je soutiens absolument tout ce qu'a dit M. Koljevic ici. Si quelque chose

14 n'est pas clair pour vous, je serais prêt à vous donner des explications.

15 M. TIEGER : [interprétation]

16 Q. Non, je n'ai pas besoin de questions à poser là-dessus, à moins que les

17 Juges n'aient besoin de clarification. Je pense que nous pouvons

18 poursuivre.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous pouvons poursuivre, en effet.

20 M. TIEGER : [interprétation]

21 Q. Monsieur Krajisnik, en fait, les dirigeants des Serbes de Bosnie

22 allaient continuer à insister sur les conséquences de l'état de fait qui

23 avaient résulté de la guerre. Ils vont insister dans la mesure du possible

24 pour que cet état de fait soit maintenu et conservé; c'est bien cela ?

25 R. Non, pas du tout, c'est faux. C'est ce que j'ai essayé de vous

26 expliquer il y a une seconde. Ce qui est correct, en revanche, c'est que

27 nous avons toujours insisté pour en revenir aux lignes de départ qui

28 étaient prévues dans le plan Cutileiro, où l'homogénéisation des secteurs

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1 ethniquement serbes était concentrée sur des unités. Il n'y avait pas de

2 nettoyage, il n'y avait pas ce qui se passait pendant la guerre. Certes, il

3 y avait des déclarations, mais ce n'était pas la politique.

4 Le plan Vance-Owen a aboli la Republika Srpska. C'est pour cela qu'on était

5 opposés à ce plan. C'est pour cela que M. Koljevic était contre les

6 provinces. Il explique un petit peu tout ceci. Il faut comprendre tout

7 cela. Peut-être que je le comprends peut-être mieux que vous parce que je

8 connaissais M. Koljevic.

9 Q. Monsieur Krajisnik, on insistait -- là, je voudrais être sûr qu'on a

10 bien la même chose en tête tous les deux - on insistait sur le fait que la

11 situation démographique qui résultait de la guerre devait être conservée.

12 Par exemple, maintenant que Zvornik était devenue une municipalité serbe,

13 comme l'a expliqué le Dr Karadzic à M. Jovanovic au conseil de

14 coordination, il convenait que cela reste ainsi, que cela en reste ainsi

15 dans la mesure, bien sûr, où les dirigeants des Serbes de Bosnie pouvaient

16 contrôler cette situation; c'est bien cela ?

17 R. Non, Monsieur le Procureur, M. Karadzic et M. Jovanovic ont dit qu'il y

18 avait une situation de fait qui avait été créée du fait de la guerre.

19 C'était la guerre, et c'est comme cela. Ensuite, ils ont proposé des

20 négociations. Donc, c'est tout à fait contraire à ce que vous venez de nous

21 dire, puisqu'il n'y aurait pas eu de gains du fait de la guerre. Or, c'est

22 ce qui s'est passé. Il n'y a pas de Serbes à Zvornik ou à Zenica à l'heure

23 actuelle. Ils n'étaient pas si ravis finalement de ce qui était arrivé. Ils

24 n'étaient pas enthousiastes à propos de la situation. Ils demandaient sans

25 cesse des négociations. Ils n'étaient pas ravis du fait qu'il n'y ait plus

26 de Musulmans à Zvornik.

27 Q. Passons maintenant à la 26e Session et à quelques remarques qui ont

28 émané du Dr Karadzic.

Page 24922

1 M. TIEGER : [interprétation] Il faudrait peut-être distribué ce document.

2 Q. Monsieur Krajisnik, le passage auquel nous allons nous référer se

3 trouve à la page 02150079, pratiquement au milieu de ce paragraphe.

4 M. TIEGER : [interprétation] Pour vous, Messieurs les Juges, il s'agit de

5 la deuxième page de la version anglaise.

6 Q. Juste après la référence au Liban, à Chypre, et cetera, --

7 R. Oui, oui.

8 Q. Je cite : "Si les dirigeants musulmans avaient eu le cran, ils auraient

9 pu avoir ce qu'ils ont eu sans que la moindre goutte de sang ne soit versée.

10 Si cela avait été avant la guerre, nous aurions sacrifié plus de

11 territoires que ce que nous sommes préparés à sacrifier maintenant. Et si

12 nous avions pu avoir un accord avant la guerre, on aurait pu avoir une

13 démarcation entre nous. Maintenant, nous en sommes là où nous en sommes, la

14 communauté internationale va devoir reconnaître la nouvelle situation. Car

15 du fait de la guerre, il y a une nouvelle situation de fait qui a été créée.

16 On ne va pas faire revenir les 50 000 Serbes de Zenica à Zvornik ou en

17 Bosnie centrale. C'est hors de question. La carte de Cutileiro nous donnait

18 plus de la moitié de Zvornik."

19 Monsieur Krajisnik, M. Karadzic, ici, ne parle pas uniquement de

20 territoire; il parle aussi de personnes, de gens. Il dit que les Serbes ne

21 vont pas quitter Zvornik. Il dit aussi à l'assemblée que les Musulmans ne

22 vont pas revenir; c'est bien cela ?

23 R. Oui, mais cela, c'est hors contexte. Cela dit, vous avez raison. Avant

24 de dire cela, il a dit autre chose. Il fait quand même référence au plan

25 Vance-Owen, ici.

26 Q. Oui, mais en quoi est-ce que cela peut changer le fait que le Dr

27 Karadzic parle quand même de gens, de personnes, où ils sont, où ils

28 pourraient aller, à savoir, s'ils vont rentrer, et cetera ? Cela n'a rien à

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1 voir avec le fait que ce soit dans le contexte du plan Vance-Owen ou pas ?

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Tieger, nous avons beaucoup de

3 difficultés à trouver votre passage.

4 M. JOSSE : [interprétation] Oui, le mien aussi est incomplet. Je n'ai pas

5 de deuxième page pour ce qui est de l'anglais.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai une page de deux, --

7 M. JOSSE : [interprétation] Tout à fait, moi non plus.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous n'avez pas indiqué sur quelle page

9 se trouvait le passage.

10 M. JOSSE : [interprétation] Mon éminent confrère nous a dit qu'il s'agit de

11 la deuxième page, mais c'est une page que nous n'avons pas. Peut-être

12 pourrait-on la mettre sur le rétroprojecteur.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Tout à fait, ce serait une bonne idée.

14 Maintenant, il faudrait aussi nous laisser une petite seconde pour qu'on

15 ait le temps de lire ce document. Si vous pouviez, s'il vous plaît, faire

16 un zoom pour que l'on puisse lire correctement à l'écran.

17 Monsieur Tieger, vous pourrez peut-être répéter votre dernière question.

18 M. TIEGER : [interprétation] Très bien.

19 Q. Je comprends que toutes ces discussions se faisaient alors qu'il y

20 avait des négociations internationales. Ma question est la suivante : en

21 quoi est-ce que cela peut avoir quoi que ce soit à faire avec le fait que M.

22 Karadzic ici, est en train de parler de personnes, de personnes qui vont

23 peut-être aller quelque part ou ne vont peut-être ne se rendre ailleurs ?

24 R. M. Karadzic est en train d'expliquer le plan Cutileiro. Il faisait --

25 non, je me reprends. Il est en train d'expliquer le plan Vance-Owen. Il

26 parlait à des personnes qui lui posaient des questions du style : Qu'est-ce

27 qui va nous arriver ? Zvornik va appartenir maintenant aux Musulmans. Nous

28 avons quitté Zenica. C'est pour cela que M. Karadzic leur dit : Personne ne

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1 va vous chasser. Il faut continuer à travailler, et cetera.

2 Il faisait de la politique. Si vous dites à des gens qu'ils doivent

3 quitter la zone sur laquelle ils viennent juste d'arriver, parce que suite

4 au plan, c'est censé être une région musulmane - parce que vous vous

5 souvenez, qu'à ce moment-là, le plan Vance-Owen a été discuté en mai, était

6 discuté, et en mai il a été signé à Athènes - donc, il dit cela pour les

7 députés qui leur dit : Mais qu'est-ce qui va nous arriver; nous, on

8 appartient ici, c'est notre région ?

9 Q. La politique essaie quand même de s'en tenir à la situation de

10 fait qui avait résulté de la guerre. Ceci a ajouté aux arguments

11 historiques, aux territoires ethniques qui existaient auparavant, tout ceci

12 qui avait été fait pour s'assurer que les Serbes resteraient sur des

13 territoires qui étaient contrôlés par la Republika Srpska et que les

14 Musulmans n'y reviendraient pas; c'est bien cela ?

15 R. Non, c'est absolument faux. Je peux vous montrer une carte qui

16 montre que les Serbes se sont retirés de 23 % du territoire. Ils se sont

17 mis d'accord pour cela. C'est d'ailleurs dans le livre d'Owen. Je peux vous

18 montrer la carte où nous nous sommes tous mis d'accord là-dessus. Ce qu'il

19 disait, c'était de la politique uniquement. Il disait : On ne peut pas

20 accepter le plan ou ils vont s'enfuir d'ici. Je peux vous montrer la carte

21 pour vous montrer ce qui était notre politique. Ici, il s'agit de la

22 politique. Il faisait de la politique. Les gens devaient quitter cette

23 région, parce que c'était maintenant la province d'un autre camp. Or, ils

24 étaient déjà partis de Zenica.

25 Ce n'était pas notre politique. Ce plan ici montre quelle est notre

26 politique. C'est un but politique. Je sais exactement ce qu'il dit. Je ne

27 dis pas qu'il n'y avait pas des soldats qui n'auraient pas envie que cela

28 se passe de la sorte puisque c'est un discours assez militaire. Mais je

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1 vous dis que notre politique, c'était de revenir à la table de négociations.

2 Nous étions prêts à nous retirer. Il s'agit d'une carte qui montre quels

3 sont les territoires dont nous étions prêts à nous retirer. Vous verrez

4 qu'il y a énormément de territoires, de territoires qui étaient détenus par

5 nous jusque-là. Je vais demander à ce que cette carte soit amenée demain

6 dans le prétoire.

7 Q. Je serais ravi de voir cette carte le temps venu. Après la pause, je

8 tiens à vous montrer d'autres commentaires qui ont trait toujours à ce même

9 effort qui est de solidifier une situation qui a résulté de la guerre, une

10 situation de fait.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais avant d'avoir une pause,

12 Monsieur Josse, je vois que vous vous levez.

13 M. JOSSE : [interprétation] Oui. J'aimerais quand même m'entretenir avec M.

14 Krajisnik pour deux raisons. D'ailleurs, mes éminents collègues sont au

15 courant de ces deux raisons.

16 M. TIEGER : [interprétation] Très bien. Nous avons, en effet, parlé; je

17 n'ai aucune objection.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Puisque vous vous êtes mis

19 d'accord, vous pouvez faire ce que vous voulez; vous entretenir avec M.

20 Krajisnik, comme vous le souhaitez.

21 Nous allons lever la séance provisoirement pour une pause jusqu'à 11

22 heures moins cinq.

23 --- L'audience est suspendue à 10 heures 30.

24 --- L'audience est reprise à 11 heures 01.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Josse, le CLSS est en train de

26 travailler sur le point que vous avez soulevé au début de l'audience et

27 nous espérons que peut-être au cours de la pause suivante nous aurons notre

28 réponse.

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1 M. JOSSE : [interprétation] Merci.

2 Monsieur Krajisnik est en train de travailler sur ce que vous lui avez

3 demandé et il en aura aussi terminé lors de la prochaine pause.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.

5 Maintenant, Monsieur Tieger, vous avez la parole.

6 M. TIEGER : [interprétation]

7 Q. J'ai encore quelques questions à vous poser sur le maintien de la

8 situation de fait comme j'en ai parlé avant la pause. Si nous pouvons en

9 revenir à l'intercalaire 40 -- la 42e Session de l'assemblée des Serbes de

10 Bosnie.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Où allons-nous trouver ce document, s'il

12 vous plaît ?

13 M. TIEGER : [interprétation] C'est en train d'être distribué, vous allez

14 l'avoir dans une seconde.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

16 M. TIEGER : [interprétation]

17 Q. Monsieur Krajisnik, il s'agit d'un passage qui se trouve à la page

18 02152880 et 02152881.

19 M. TIEGER : [interprétation] En ce qui concerne la version anglaise, il

20 s'agit de la deuxième page du document qui vous a été distribué.

21 Q. On reparle encore de quelque chose qui se dit dans le contexte de

22 négociations internationales. Et là le Dr Karadzic reconnaît la chose

23 suivante : "Nous savons bien que nous allons devoir abandonner quelque

24 chose, on le sait. Si nous voulons obtenir notre premier objectif

25 stratégique, il nous faut nous débarrasser de l'ennemi qui est dans notre

26 maison --"

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous n'avons pas de page de garde, et

28 nous n'arrivons absolument pas à retrouver ce texte. De quoi s'agit-il, de

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1 la 42e Session; c'est bien cela ? Qui s'est tenue quand ?

2 M. TIEGER : [interprétation] La 42e Session, je pensais que j'avais la

3 date, que la date était sur le document mais visiblement, non.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le premier qui a trouvé la date peut le

5 faire savoir aux autres, cela fera avancer les choses.

6 M. TIEGER : [interprétation] Un moment, s'il vous plaît.

7 [Le conseil de l'Accusation se concerte]

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cela doit être au moins en 1993, voire

9 un peu plus tard.

10 M. TIEGER : [interprétation]

11 Q. Le passage sur lequel je tiens à attirer votre attention se trouve sur

12 la version anglaise à peu près au milieu du document.

13 Il s'agit du passage suivant et je cite : "Nous tenons pour fait

14 acquis que nous allons devoir abandonner quelque chose. Il n'y a aucun

15 doute à cela et si nous voulons atteindre notre premier but stratégique,

16 qui est de se débarrasser de l'ennemi qui est dans notre maison," c'est-à-

17 dire, les Croates et les Musulmans, "et de ne plus vivre dans un même Etat

18 avec eux. Ceci sera coûteux et nous devons abandonner des secteurs, mais

19 nous ne voulons pas seulement contrôler un grand territoire et nous voulons

20 qu'il nous appartienne."

21 Le Dr Karadzic ensuite poursuit après ces références et parle des

22 villes et des lieux de culte, des collines traditionnelles qui sont très

23 importantes pour les Serbes de Bosnie. Il dit, et je cite : "Ce qu'il pense

24 et ce que je pense, c'est que la situation de fait peut être reconnue. Il y

25 a une guerre et ces territoires ne seront pas rendues, cela n'arrive que

26 très rarement, le Monténégro n'a pas rendu Skadar, mais il a rendu 30 % de

27 son territoire qui était sous son contrôle."

28 Ensuite, il poursuit et parle des choses qui doivent être rendues et

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1 conclut. Je cite : "Nous devons danser sur le fil du rasoir et sur

2 l'extrémité du gouffre. Nous savons que nous devons rendre quelque chose.

3 Nous savons qu'il faudra peut-être qu'on se coupe un doigt, et cela va

4 faire mal mais on ne peut pas se permettre quand même de se faire couper

5 les deux mains, voire encore pire de se faire couper la gorge. Même un

6 homme qui n'a plus deux mains est encore un homme mais il ne peut plus

7 s'occuper de lui-même, il ne peut plus se nourrir. Il ne peut plus se

8 défendre. Notre désir est de nous éloigner de la situation de fait, et ceci

9 demande que l'un des camps soit vaincu. Ceci signifie aussi que nous devons

10 aussi nous engager vers la situation de fait et abandonner quelque chose en

11 ce qui concerne cette situation de fait mais il faut que nous soyons les

12 personnes qui vont décider ce qui va être abandonné, et nous ne devons pas

13 leur permettre de prendre ce qu'ils veulent."

14 Monsieur Krajisnik, ici en référence au fait que l'on doit s'éloigner

15 de la situation de fait et ensuite on doit revenir à la situation de fait,

16 là il nous parle des efforts après les déplacements massifs des

17 populations, et des réinstallations massives des populations en 1990.

18 Efforts qui ont été effectués afin de concentrer les Musulmans dans des

19 petites poches en Bosnie-Herzégovine; c'est bien cela ?

20 R. Non pas du tout, Monsieur le Procureur. Je vais vous expliquer.

21 Ce qu'a dit M. Karadzic est extrêmement clair.

22 Q. Tout d'abord, la situation de fait dont il parle, c'est la

23 situation de fait sur le terrain, n'est-ce pas ? C'est la situation qui

24 existe en ce qui concerne les territoires qui sont contrôlés et où des

25 membres des groupes ethniques résident à l'époque; c'est bien cela ?

26 R. Vous avez raison. L'état de fait c'est que les armées des trois

27 parties avaient des territoires qui étaient sous leur contrôle et il

28 s'agissait d'une guerre; c'est comme cela. C'était la situation de fait qui

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1 existait à l'époque.

2 Q. Monsieur Karadzic reconnaît que les Serbes de Bosnie vont très

3 certainement devoir abandonner des portions de ce qu'ils détiennent à

4 l'heure actuelle, mais ils veulent en abandonner le moins possible. C'est

5 là la référence à se couper un doigt plutôt que se couper la main ou voire

6 de se faire égorger; c'est bien cela ?

7 R. Non, ce n'était pas ce qu'il voulait dire. Ce qu'il voulait dire c'est

8 qu'on ne peut pas dessiner notre propre carte à l'avance. On n'a pas notre

9 propre proposition. Pourquoi se couper un doigt avant de savoir exactement

10 quel va être le résultat des négociations. C'est cela sa métaphore. Il est

11 très dangereux de dessiner une carte, c'est cela que dit Karadzic. Il est

12 très dangereux de dessiner une carte. On a un grand territoire qui va être

13 réduit à 49 % uniquement du territoire parce que les personnes qui sont sur

14 ce territoire vont faire leurs bagages, et on ne sait absolument pas encore

15 si -- en résultat après les négociations ils auront ce territoire ou non.

16 Le problème, c'est de comment réduire 65 % à 49 %. On voit qu'il est prêt à

17 donner une partie d'un territoire, mais il ne sait pas de quel morceau de

18 territoire il s'agit. Voilà ce qu'il voulait dire par ces termes.

19 Q. Monsieur Krajisnik, le Dr Karadzic connaissait avant la situation sur

20 le terrain. Il savait que les Serbes de Bosnie avaient créé des réalités

21 qui n'existaient pas avant le conflit et s'appropriaient les territoires en

22 se fondant sur un droit, qui selon lui, émanait de ce nouvel état de faits.

23 N'est-ce pas la position qu'il affirme et que d'ailleurs, les autres

24 membres de la direction des Serbes de Bosnie, y compris vous-même, ont

25 affirmée pendant toutes les négociations ?

26 R. Non, ce n'est pas comme cela, mais c'étaient des tactiques. Il s'agit

27 de tactiques au cours des négociations, mais là il s'agit de savoir si on

28 est prêt ou non à dessiner une carte qui reflète la situation de fait sur

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1 le terrain; c'est ce que nous avons fait. Quand les négociations sont en

2 cours, on doit quand même avoir une tactique et on met en place différents

3 éléments tactiques et d'ailleurs on utilise aussi énormément de tactiques

4 pour convaincre les députés à soutenir votre point de vue. Il y avait un

5 plan et là il s'agissait des tactiques qui permettaient de faire avaler

6 cette pilule, qui était parfois assez amère, par les députés.

7 Q. Maintenant, nous allons voir exactement ce que le Dr Karadzic a dit en

8 ce qui concerne ce point. Il faudrait regarder le PV de la 46e Session qui

9 se trouve à l'intercalaire 12.

10 M. TIEGER : [interprétation] La séance précédente de la 42e s'est tenue le

11 18 et le 19 juillet 1994.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avons-nous cette 42e

13 Session --

14 M. TIEGER : [interprétation] La 46e Session s'est tenue du 9 au 11 novembre

15 1994 ainsi que le 23 novembre 1994.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Est-ce que nous l'avons sous

17 les yeux ? Nous l'avons. Merci.

18 M. TIEGER : [interprétation]

19 Q. Monsieur Krajisnik, la partie de la session sur laquelle je souhaite

20 attirer votre attention commence au 02153381 en B/C/S et se termine par

21 02153382. Là le Dr Karadzic dit -- et je m'excuse. Je précise que c'est la

22 page 157, non pas sur la partie où il y a l'indication de l'intercalaire.

23 C'est à peu près au niveau de la page 4 dans cet extrait en anglais.

24 R. Est-ce que c'est à la page que vous m'avez indiquée à moi ou pas, le

25 3381 ?

26 Q. Oui, cela commence tout en bas de la page, cela commence par : "Notre

27 objectif est de créer un Etat. Quelle va être sa taille, nous ne le savons

28 pas, mais il faut que ce soit en un morceau --"

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1 R. Laissez-moi le temps de le retrouver, je vous prie. Oui, je l'ai

2 retrouvé.

3 Q. La quatrième ligne à partir du bas --

4 R. Oui, je l'ai retrouvée.

5 Q. " -- et pour qu'il y en ait, il faut qu'elle soit en un morceau. Nous

6 devons maintenir cette réalité aussi longtemps qu'il le faudra pour que le

7 monde l'accepte. Nous avons créé de nouvelles réalités. Localement parlant,

8 Zvornik a été à 60/40 % en faveur des Musulmans puis sont venus les Serbes

9 de Zenica, ont pris Kozluk. Les Musulmans sont partis en Europe ou je ne

10 sais où. Et ces messieurs nous ont dit : De quel droit vous réclamez

11 Zvornik ? Nous leur avons dit que toute la Bosnie était Serbe à l'époque,

12 que cela c'est de l'histoire et cela ne nous intéresse pas. Alors quel est

13 le droit à partir duquel vous vous réclamez Zvornik ? Nous réclamons

14 Zvornik partant du droit qui découle des nouvelles réalités. Cette guerre a

15 créé de nouvelles réalités. Il n'y a pas eu dans l'histoire de guerre qui

16 n'a pas créé une certaine réalité. Cette guerre a créé une réalité et

17 maintenant il y a ici des Serbes originaires de Zenica. Vous ne voulez pas

18 donner aux Musulmans Zvornik alors il faudrait qu'on fasse une nouvelle

19 guerre pour chasser ces Serbes et les faire retourner à Zenica. C'est selon

20 ce droit-là que nous réclamons Zvornik."

21 Monsieur Krajisnik, ceci est une reconnaissance explicite faite par le Dr

22 Karadzic, reconnaissance du fait qu'on avait insisté sur les conséquences

23 des campagnes militaires qui se sont déroulées en 1992 et 1993 qui ont,

24 elles, donné lieu à une réalité nouvelle et que la direction des Serbes de

25 Bosnie insisterait sur son maintien aussi longtemps que faire se pourra.

26 R. Je vous dis, Monsieur le Procureur, qu'il n'en était pas ainsi. Je veux

27 vous l'expliquer. Je pense l'avoir expliqué dans une certaine mesure.

28 Ceci fait partie d'une rhétorique. Je sais quelle a été la teneur de

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1 l'entretien avec M. Owen et M. Stoltenberg au sujet de Zvornik sur une

2 terrasse à côté du lac de Zvornik. Il voulait calmer la population parce

3 que Zvornik devait faire partie d'une autre unité ethnique et les gens

4 risquaient de s'en aller tous. Il voulait apaiser la population parce que

5 l'armée se serait retirée, tout le monde se serait retiré. Justement à

6 l'époque, il y a les cartes qui montrent que nous avions accepté de nous

7 retirer d'une grande partie du territoire.

8 Il dit bien : Nous ne savons pas ce que nous allons restituer mais il

9 faudra bien qu'on restitue quelque chose. Pour que la pilule soit avalée

10 par ceux qui l'écoutaient, il fallait qu'il dise quelle était la situation

11 de fait. Il a dit qu'il fallait garder certaines parties parce que l'armée

12 allait se retirer des territoires qui n'allaient pas nous revenir. C'est là

13 en substance le problème.

14 Il s'en est servi. Je le sais, mais il s'en est servi à des fins politiques

15 et non pas pour s'employer en faveur de cette situation de fait. Il voulait

16 avoir des négociations et rien d'autre. Nous ne savions pas ce que nous

17 devions restituer. Nous avions de gros territoires, de grandes parties de

18 territoire et il fallait que nous restituons quelque chose, mais nous ne

19 savions pas quoi. Nous avons dû restituer des territoires serbes et il

20 fallait bien que nous restituions des territoires musulmans.

21 Dans toutes les entrevues, il a fallu que nous parlions de la

22 situation de fait parce que nous voulions prévenir le retrait de l'armée de

23 ce secteur parce que les gens nous disaient : Mais dites-nous ce qui va

24 finir par être à nous pour que nous sachions où aller, parce que nous ne le

25 savions pas. Si Karadzic avait dit : Cela ce ne sera pas à nous, ce que

26 nous avons déjà en notre possession, qu'adviendrait-il ? L'armée se serait

27 retirée et qu'adviendrait-il ? Mais aucun homme politique n'accepterait de

28 le faire. Je sais. Je sais qu'il en a été ainsi pour Zvornik comme je vous

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1 l'ai raconté la fois passée.

2 Q. Dans la mesure où les Serbes de Bosnie ont été contraints d'abandonner

3 des territoires aux Musulmans, il devait y avoir des efforts pour empêcher

4 les Musulmans de passer des territoires qu'ils avaient entre leurs mains

5 pour venir sur des territoires serbes, n'est-ce pas ?

6 R. Non. Je vais vous donner un exemple. Nous avons perdu Glamoc, Grahovo,

7 Drvar, tout cela se passe sur des territoires ethniques serbes au niveau

8 des cartes. La situation de fait montre que les Musulmans s'étaient emparés

9 de ces territoires-là. Nous avons perdu le Sarajevo serbe que nous avions

10 entre nos mains. La situation de fait était que c'était à nous mais sur la

11 carte ce n'était pas à nous. La situation de fait ne signifie rien pour ce

12 qui était des négociations. Ce n'était pas notre politique.

13 Nous voulions que les soldats restent là. Si je le disais, je le

14 disais à ces fins mais je ne pense pas que j'ai pu le dire souvent. J'ai dû

15 le dire très rarement parce qu'on voulait éviter que les soldats ne s'en

16 aillent parce qu'il y avait déjà pas mal de gens qui fuyaient les lignes de

17 front. Personne ne voulait aller faire la guerre, personne ne voulait aller

18 garder ces lignes. Il y a le volet politique, le volet rhétorique pour

19 mettre en place une politique.

20 Q. Mais --

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'essaie de comprendre ce que vous êtes

22 en train de nous dire, Monsieur Krajisnik. Est-ce que vous êtes en train de

23 nous dire que ce langage, le langage utilisé ici consiste à dire : "Cette

24 guerre a mis en place une réalité nouvelle. Nous avons ici des Serbes

25 originaires de Zenica. Si vous voulez donner Zvornik aux Musulmans, il

26 faudrait qu'on fasse une nouvelle guerre pour chasser ces Serbes et les

27 faire retourner à Zenica."

28 Est-ce que c'est de cette rhétorique-là que vous parlez ?

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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Je me souviens exactement telle phrase.

2 Lorsque M. Karadzic a dit à M. Owen à Zvornik : Les Serbes ont été chassés

3 de Zvornik. Des Musulmans sont allés d'ailleurs vers Zvornik, alors comment

4 faire revenir les uns et les autres, alors que les uns et les autres sont

5 des réfugiés. Il l'a dit ici de façon plus belliqueuse, afin que nos

6 populations comprennent qu'il fallait rester à Zvornik parce qu'ils

7 allaient se dire que ce n'était pas leur ville à eux. Ils ne savaient pas

8 que cela allait faire partie de nos cartes à nous ou pas. Ce n'est peut-

9 être pas une rhétorique appropriée pour leur, mais à l'époque, il fallait

10 que ce soit dit enfin je ne sais pas s'il fallait vraiment que ce soit dit

11 mais c'est ce qui a été dit.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, continuez, Monsieur Tieger.

13 M. TIEGER : [interprétation]

14 Q. M. Karadzic a, à plusieurs reprises, dit à l'assemblée des Serbes de

15 Bosnie qu'il fallait maintenir la situation de fait et préserver des

16 réalités nouvelles. Il l'a également dit à M. Owen d'une façon quelque peu

17 plus diplomatique ?

18 R. M. Karadzic, à l'occasion de chacune des réunions, a dit qu'il fallait

19 préserver les lignes et préserver la situation de fait. Là, sur ce point,

20 vous avez raison. A chaque réunion, il disait qu'il fallait préserver les

21 lignes et la situation de fait. A chaque réunion, on lui posait la question

22 de savoir, quels étaient nos territoires et quels étaient nos plans afin

23 que nous défendions que cela et ne pas défendre le reste. Il disait que

24 nous n'avions pas carte, qu'il fallait bien restituer quelque chose.

25 L'essentiel pour le moment, c'était de préserver la situation de fait et

26 qu'on aboutirait par des négociations à des cartes en fin de compte. C'est

27 là la vérité entière.

28 Milan Trbojevic, en sa qualité de témoin, a bien dit qu'il avait à

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1 cent reprises demander à Karadzic : Le plan, le planning pour ce qui était

2 de savoir ce qu'il fallait défendre et on n'a pas été capable de le dire,

3 parce qu'on ne savait pas quelle carte on allait finir par avoir. Cela

4 dépendait des négociations.

5 Il y avait de grands territoires et le problème se posait de savoir

6 quel territoire restituer. Il fallait bien restituer quelque chose en

7 substance pour ne pas aboutir à une érosion au niveau des lignes. Vous le

8 disiez aux gens pour qu'ils restent sur le terrain parce que les

9 négociations sont en cours, tout simplement. Bien sûr qu'il parlera de

10 faits historiques pour appuyer ce qu'il est en train de dire, mais non pas

11 pour le maintenir parce que personne n'a préservé une situation de fait.

12 Q. Je vous ai auparavant posé la question de savoir ce qui se produirait

13 si les Serbes de Bosnie en arrivaient à devoir abandonner certains

14 territoires. Est-ce qu'on viserait à décourager les Musulmans, à les

15 empêcher, à les limiter pour ce qui était d'accéder à ces territoires

16 serbes. Vous avez dit que cela ne sera pas le cas, n'est-ce pas ?

17 R. Excusez-moi, je n'ai pas bien compris. Si les Serbes venaient à

18 rétrocéder certains territoires, est-ce que nous serions contre le fait de

19 voir venir des Musulmans s'installer là; c'est bien ce que vous vouliez

20 dire ?

21 Q. Non. Non pas s'agissant des territoires qui reviendraient aux Musulmans

22 mais les empêcher de les voir quitter les territoires attribués aux

23 Musulmans vers des territoires serbes ?

24 R. Non. A l'occasion de chaque accord, nous avons accepté et signé que

25 chacun avait le droit de revenir dans sa maison, sur son foyer. Il se peut

26 que quelqu'un ait fait des déclarations autres mais dans tous les accords,

27 il y a cette clause où les trois parties avaient accepté la chose. Il n'y a

28 pas un seul accord où cela ait été rejeté et où cela n'ait pas été la chose

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1 en faveur de laquelle nous étions employés. Si quelqu'un les rejetait,

2 c'est autre chose mais il n'y a pas un seul accord où cela n'est pas figuré.

3 Q. Vous, le Dr Karadzic et M. Koljevic ainsi que le ministre Jovanovic

4 avez parlé de la stratégie du maintien et de l'amélioration, de

5 l'homogénéité. Pour ce qui est de la toute dernière remarque que vous avez

6 faite pour affirmer que des personnes avaient probablement affirmé autre

7 chose, il serait peut-être bon de voir ce que le Dr Karadzic a dit à la 39e

8 Session de l'assemblée nationale aux dates du 24 et 25 mars 1994.

9 M. TIEGER : [interprétation] Nous allons pouvoir le retrouver à

10 l'intercalaire 16, Messieurs les Juges, page 88 en version anglaise. En

11 version serbe, page 71 ou ERN 02152322.

12 Q. M. Krajisnik, je vous demande de vous référer à peu près à la moitié de

13 la page.

14 R. Oui.

15 Q. Là, le Dr Karadzic dit, une fois de plus parlant des négociations : "Il

16 se peut que l'on nous cherche à nous balancer tous les Musulmans. Nous

17 essaierons de partager la Bosnie comme le Sandzak, moitié aux Serbes,

18 moitié aux Croates. Ils vont peut-être essayer de nous coller tout cela.

19 Nous allons peut-être avoir l'obligation d'accepter mais nous allons les

20 délimiter dans une province autonome, où à partir de laquelle ils ne

21 pourront pas librement venir s'installer dans nos régions à nous."

22 Ici le Dr Karadzic assure les députés serbes de Bosnie, le peuple

23 serbe de Bosnie et il dit que dans l'étendue du possible, il sera investi

24 tous les efforts possibles pour s'assurer que les Musulmans ne viennent pas

25 s'installer dans les secteurs qui sont pris ou réclamés par les Serbes de

26 Bosnie. Est-ce bien de cela qu'il s'agit ?

27 R. Je n'ai pas très bien compris votre question. Je n'arrive pas à établir

28 le lien pour vous répondre proprement parce qu'ici les choses sont dites

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1 tout à fait autrement. Je ne peux pas confirmer. Est-ce que vous pouvez

2 être un peu plus clair au niveau de votre question ?

3 Ici, il ne cherche pas à s'approprier des régions musulmanes; il

4 parle des variantes qui, à son avis, pourraient être acceptées pour ce qui

5 est de solution de la crise en Bosnie-Herzégovine. C'est bien ce qui s'est

6 passé par la suite. L'une des propositions avait été celle-là justement, de

7 partager la Bosnie et de faire une fédération musulmano-croate et une

8 Republika Srpska. Il parle des connaissances qui sont les siennes. Il a

9 présenté les variantes de ce qui pourrait constituer une situation.

10 Veuillez me répéter votre question parce que je n'ai pas compris

11 l'endroit où vous vouliez en venir.

12 Q. Je vous ai posé la question de savoir quelle a été la position des

13 Serbes de Bosnie concernant la liberté de mouvement des Musulmans pour ce

14 qui est de leur retour vers les secteurs à présent contrôlés par les Serbes

15 de Bosnie. Nous étions en train de parler de la possibilité pour le

16 Musulman de revenir ou pas sur les territoires tenus par les Serbes de

17 Bosnie. C'est un sujet tout à fait clair dont on a déjà parlé et j'ai

18 attiré votre attention sur les remarques présentées par le Dr Karadzic, là

19 où il dit : "Nous allons les limiter dans une espèce de province autonome à

20 eux, à partir de laquelle ils ne seront pas en mesure de se déplacer

21 librement vers nos secteurs."

22 R. Oui, cela c'est un segment. Dans le même plan, M. Karadzic a signé que

23 chacun pouvait revenir chez soi. Et il dit : Je ne sais pas ce qui va se

24 passer. Il y avait différentes variantes en instance et il a même parlé de

25 Tuzla : Qu'adviendra t-il si on nous demande de retourner à Tuzla ? Tuzla

26 n'était pas à nous. Il explique des choses qui ne se sont pas produites et

27 qui ne pourraient se produire. Il avait parlé aussi d'autonomie pour Tuzla.

28 Alors le plan c'est cela. Vous retrouvez le plan, et vous avez trouvé

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1 noir sur blanc le fait où les trois parties avaient prévu que chacun

2 pouvait revenir chez soi. Ici, il n'est pas question de plan, c'est une

3 fantaisie. Ils parlent de ce que pensait l'Amérique ou l'Europe, mais cela

4 n'avait rien de réaliste.

5 Q. Ceci --

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que je peux intervenir un

7 instant.

8 Cela arrive une fois de plus, et une fois de plus encore, Monsieur

9 Krajisnik. M. Tieger est en train de vous montrer un texte, et ensuite là

10 vous expliquez que cela s'est produit autrement en fin de compte. On fait

11 la distinction très claire entre ce qui s'est dit à un moment donné. Par

12 exemple, dans ce cas concret, vous pouvez dire : C'est vraiment ce que M.

13 Karadzic a dit à l'époque, mais cela n'a pas été notre politique et on peut

14 le voir dans le texte de l'accord final qui a été signé ultérieurement, où

15 vous pourrez constater que cela n'a pas été notre politique. Il y a une

16 distinction claire.

17 J'ai à plusieurs reprises remarqué que M. Tieger vous posait une

18 question et que vous répondiez d'une façon qui n'était pas directement liée

19 à la question même. Il n'y a rien de mal à dire : Oui, c'est exact, c'est

20 ce que M. Karadzic a bel et bien dit. On a laissé entendre que les

21 Musulmans ne sauraient revenir à Tuzla, mais en fin de compte, à l'occasion

22 des négociations, une position différente a été adoptée et vous pouvez le

23 voir en vous penchant sur le résultat des négociations. Il est clair qu'une

24 chose a été dite à l'époque et qu'autre chose s'est produite

25 ultérieurement. A plusieurs reprises déjà vous avez plus ou moins dit qu'il

26 y avait une interprétation erronée, non partant de ce qui s'est dit à

27 l'époque, mais partant d'événements survenus ultérieurement. Il est évident

28 qu'il y a une différence entre les deux.

Page 24940

1 Veuillez continuer.

2 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai compris la

3 question comme étant celle-ci : Est-ce que ce que M. Karadzic a dit ici a

4 été votre politique à vous ? Je ne me souviens pas que Karadzic ait dit

5 cela. Je veux bien relire et dire que ce que j'ai lu est exact mais je vous

6 explique quelle a été notre politique. Je vous dis que cela a été une

7 rhétorique et c'est la réponse que j'ai à vous apporter. Pour appuyer mes

8 dires, je dirais qu'il n'y a pas eu de planning, mais que c'étaient des

9 plannings imaginaires. Je suis en train de répondre aux questions qu'il me

10 pose telles je les comprends.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je pense que si M. Karadzic a, à

12 l'époque, exprimé sa politique ou une partie de ses opinions, cela n'a pas

13 été la substance de la question, ce n'est pas de cette façon que je l'ai

14 comprise. Je viens de relire les questions.

15 Monsieur Tieger, vous avez peut-être entendu vous aussi que M. Krajisnik a

16 compris la question d'une façon différente de celle dont je l'ai comprise.

17 Essayez de rendre vous questions les plus claires possibles dans toute

18 circonstance. S'il y a une différence entre ce qui a été dit et ce qui a

19 constitué la politique, je vous demande de faire une distinction entre les

20 deux et de nous dire si vous comprenez que la signification des propos de

21 M. Karadzic était telle et telle et la question suivante à poser : Est-ce

22 que cela a été sa politique ? Mais évitons de voir les questions et les

23 réponses se fonder sur une mauvaise compréhension de l'un ou de l'autre.

24 Veuillez continuer, Monsieur Tieger.

25 M. TIEGER : [interprétation]

26 Q. Tout d'abord, Monsieur Krajisnik, nous sommes bien d'accord pour dire

27 qu'il y a une différence entre ce que quelqu'un avait espéré accomplir et

28 ce que quelqu'un a pu accomplir. Bien sûr, cela c'est une question qui fait

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1 partie de la compréhension que le commun des mortels a.

2 R. Oui. Vous avez tout à fait raison. Beaucoup de gens avaient des

3 souhaits et la réalité était tout autre. Parmi ces gens-là il y avait des

4 responsables, je suis d'accord, des responsables qui avaient souhaité autre

5 chose, qui avaient souhaité une chose et que la réalité ait été autre

6 chose.

7 Q. Question numéro deux, il serait exact de dire, n'est-ce pas, que le Dr

8 Karadzic a dit ici qu'il y avait, pour le moins qu'on puisse dire, le

9 souhait et il dit tout le temps "nous." Nous entendons par là que c'était

10 le souhait des Serbes de Bosnie que de décourager les déplacements libres

11 des Musulmans à partir de quelque territoire qu'ils puissent obtenir vers

12 le territoire détenu par les Serbes.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Tieger, il y a une fois de

14 plus, deux questions dans une seule et vous créez une situation similaire.

15 M. TIEGER : [interprétation] Oui, je m'excuse, vous avez raison.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Tout d'abord, est-ce que dans ce que M.

17 Karadzic dit, exprime un souhait; la deuxième question est celle de savoir

18 si c'était juste le souhait du Dr Karadzic, ou si en se servant du "nous,"

19 il a, par ce pluriel, voulu exprimer le fait qu'il était en train de parler

20 au nom de la totalité des Serbes de Bosnie. C'est exactement l'exemple que

21 j'avais mentionné tout à l'heure.

22 Veuillez continuer, Monsieur Tieger.

23 M. TIEGER : [interprétation]

24 Q. Monsieur Krajisnik, tout d'abord, est-il exact de dire que le Dr

25 Karadzic avait exprimé le souhait de décourager le déplacement libre des

26 Musulmans depuis quelque territoire qui serait le leur vers le territoire

27 des Serbes de Bosnie ?

28 R. C'est probablement ce qui est écrit ici. Ce que je vous garanti, c'est

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1 qu'en tenant ces propos, il n'a pas eu ce souhait-là parce qu'il avait

2 conduit une politique réaliste.

3 Q. Quand il a dit cela --

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Krajisnik, vous êtes en train

5 maintenant, vous, de faire la même chose. Vous êtes en train de mélanger ce

6 que le Dr Karadzic avait à l'esprit et ses propos. Si je dis que : Le

7 soleil est en train de briller, cela signifie qu'il n'y a pas de nuages

8 pour dissimuler le soleil. L'une des premières choses, c'est la façon dont

9 nous devons comprendre les choses partant du langage utilisé, de la

10 formulation. La deuxième phase, c'est de savoir si les propos prononcés

11 dans une situation concrète pouvaient avoir une signification différente à

12 l'esprit ou aux yeux de celui qui a prononcé ces propos. Il faut que nous

13 ayons une définition claire.

14 Donc, si je dis que : Le soleil est en train de briller, il n'y a pas de

15 nuages qui sont en train de dissimuler le soleil ou une partie du

16 territoire. Si vous parlez de circonstances concrètes, il conviendrait de

17 parler des choses différemment, parce que si c'est un pilote qui se

18 trouvait au-dessus des nuages qui disait cela, la signification de ses

19 propos ne serait pas les mêmes, mais dépendrait des circonstances à partir

20 dans lesquelles on se placerait. Alors, si quelqu'un se sert de ces mots

21 dans la signification normale des mots pour dire qu'il s'agissait de

22 décourager le libre déplacement - parce que c'est là la signification

23 normale des propos - et la deuxième question pourrait être celle de savoir

24 pourquoi le Dr Karadzic, en se servant de ces propos-là, avait tout de même

25 autre chose à l'esprit. Il faut que nous ayons une distinction claire entre

26 ce qui est dit comme signification normale de certains propos, et pour

27 savoir si la signification normale de certains mots ou de certains termes

28 pourrait être utilisée dans les circonstances données. Il faut que nous

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1 ayons une image des plus claires et que nous procédions pas à pas pour

2 qu'il n'y ait pas confusion de l'un et de l'autre. Cela s'est passé trop

3 souvent ce matin tant dans les questions que dans les réponses.

4 Maintenant, je voudrais demander à Monsieur Tieger --

5 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je ne me souviens pas

6 de ces propos. Je ne sais pas. Ce n'est pas ce que je veux dire. Ce que je

7 crois, --

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Krajisnik, nous sommes en train

9 d'intervenir à partir de cet enregistrement. Vous n'avez pas à vous en

10 souvenir. La question première est celle de savoir quelle est la

11 signification normale de ces propos. M. Tieger est en train de vous

12 demander une confirmation pour ce qui est du fait de savoir s'il y a un

13 malentendu au sujet des propos. Si vous dites, cela voulait dire telle

14 chose, quoi qu'il ait dit, et ensuite, vous ajoutez ce que vous savez, vous,

15 qui pourrait nous amener à ne pas considérer que la personne qui a prononcé

16 ces propos aurait eu à l'esprit la signification normale de ceci mais

17 aurait eu à l'esprit quelque chose de différent.

18 Alors, continuons. M. Tieger est en train de vous poser des questions

19 partant de ce texte dont il vous donne lecture. C'est un texte qui provient

20 d'un enregistrement qui a été transcrit.

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Ecoutez, je vous en prie. Ce que j'essaie, je

22 ne mets pas en doute le texte --

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce n'est pas la question qui est

24 contestée. Vous dites que vous ne vous souvenez pas de ces propos. Nous

25 sommes en train de travailler sur ce texte.

26 Veuillez continuer, Monsieur Tieger.

27 M. TIEGER : [interprétation]

28 Q. Est-il exact de dire que le Dr Karadzic était en train de transmettre

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1 aux députés de l'assemblée des Serbes de Bosnie à l'époque, qu'une position

2 qui était celle de la direction des Serbes de Bosnie visant dans la mesure

3 du possible à prévenir, à décourager les Musulmans de toute possibilité de

4 se déplacer du territoire qui leur serait accordé aux termes de l'accord

5 pour se déplacer vers celui des Serbes de Bosnie ?

6 R. Ce n'est pas exact. Ce n'est pas ces termes-là que Karadzic a utilisés,

7 quoique ceci soit bel et bien écrit. Il a dit : S'il arrivait une chose qui

8 n'est jamais arrivée. Il a parlé de cela. Il n'est pas arrivé des choses

9 qui se sont passées. Il n'a pas parlé d'un plan concret. Il voulait calmer

10 les gens pour que ceux-ci n'abandonnent pas certains territoires.

11 Q. Quel que soit le motif pour qu'il ait fait ce genre de commentaires,

12 quel que soit ses raisons qui l'ont poussé à faire ces commentaires, il a

13 quand même dit aux députés -- il leur a transmis ce message, n'est-ce pas ?

14 R. Il faisait semblant de dire aux députés que c'était la position prise

15 par les dirigeants serbes. Mais ce n'était pas réellement la position prise

16 par les Serbes. Il faisait semblant, il feignait de dire que c'était --

17 donc, il faisait semblant de dire que c'était sa position alors que ce

18 n'était pas le cas.

19 Q. Il y a quelques instants, nous avons consulté un texte dans lequel le

20 Dr Karadzic avait dit que si c'était nécessaire, une guerre serait lancée

21 envers Zvornik, envers les Musulmans de Zvornik. Est-ce que c'était la

22 position, Monsieur Krajisnik, à savoir qu'une nouvelle guerre serait

23 enclenchée, s'il était nécessaire pour se séparer des Musulmans, pour

24 séparer les Serbes des Musulmans ?

25 R. Pour ce qui est de Zvornik, cela a été dit pour calmer le peuple qui

26 venait d'arriver là. Il avait vraiment dit cela. Mais ce n'était pas ni ma

27 position, ni la sienne, ni la position de qui que ce soit. Il avait

28 simplement dit ces propos pour calmer les gens, pour les rassurer de rester

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1 sur place. C'est dans ce sens-là qu'il a dit cela.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Krajisnik, je crois que la

3 question visait à savoir si c'était votre position aussi.

4 LE TÉMOIN : [interprétation] Il y avait deux questions. C'est une question

5 à deux volets, mais je vais vous répondre si c'était ma position. Ce

6 n'était pas ma position. Si jamais j'ai dit cela, je l'ai dit à des fins

7 politiques, mais cela n'a jamais été ma conviction personnelle. Je n'ai

8 jamais dit que personne ne pouvait retourner sur son territoire, dans sa

9 demeure. J'ai toujours dit que les gens avaient le droit de regagner leurs

10 demeures et de retourner sur leurs territoires. Je l'ai toujours dit. Si

11 j'ai prononcé ces mots, c'était simplement pour calmer les gens, pour des

12 fins politiques. Mais j'ai toujours préconisé la position, à savoir que

13 lors de chaque conférence que tout un chacun devait et pouvait retourner

14 chez soi.

15 M. TIEGER : [interprétation]

16 Q. Alors, nous allons voir ce que vous avez dit et nous pourrons passer à

17 la prochaine session.

18 R. Allez-y. Faites.

19 M. TIEGER : [interprétation] Intercalaire 5. A l'intercalaire 5, nous

20 pouvons voir qu'il s'agit d'un transcript d'une réunion qui avait été

21 diffusée à la télévision. C'était une réunion de l'unité serbe à Banja Luka,

22 qui a été tenue le 21 août 1994.

23 Q. Vos commentaires, Monsieur Krajisnik, permettez-moi de les retrouver.

24 Un instant, je vous prie. Vos commentaires se trouvent à la page -- au

25 début de la page 7 en B/C/S. En anglais --

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Page 9.

27 M. TIEGER : [interprétation]

28 Q. Vous dites : "Chers frères et sœurs, mon cher peuple de la Krajina,

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1 après avoir entendu ces merveilleux propos prononcés par mes prédécesseurs,

2 j'ai le grand plaisir de me retrouver ici parmi vous."

3 Afin que vous sachiez les merveilleux mots auxquels on a fait référence un

4 peu plus tôt et qui comprennent des commentaires de

5 M. Kupresanin aux pages 4 et 5 en anglais, qui dit parmi d'autres choses :

6 "Il ne peut y avoir d'état musulman sur un territoire qui a appartenu

7 toujours aux Serbes. Il n'y a pas de peuple musulman. Le peuple entier le

8 sait. Il n'y a que le peuple serbe qui vit sur ce territoire."

9 M. Brdjanin, à la page 5 en B/C/S et page 6 en anglais, dit entre autres :

10 "Ces forces gauchistes qui nous proposent une coexistence encore une fois,

11 doivent savoir que c'est l'obligation des Serbes, pour les prochains 100

12 ans, de se laver les mains des méchants non-chrétiens qui ont pollué notre

13 terre."

14 Vos commentaires se poursuivent, Monsieur Krajisnik, jusqu'au point où vous

15 dites : "Nous voulons seulement nous séparer car nous ne pouvons pas vivre

16 ensemble. Je dois ajouter quelque chose à cette discussion et au discours

17 prononcé par M. Kupresanin. Si les Musulmans ne souhaitent pas être Serbes,

18 s'ils ne reconnaissent pas les Serbes, je ne pourrai pas -- "

19 R. Je n'ai pas trouvé ce passage. Vous sautez d'un passage à l'autre. Je

20 n'arrive pas à vous suivre.

21 Q. Très bien.

22 R. Vous avez commencé du début, mais je n'arrive plus à retrouver

23 Kupresanin.

24 Q. Cela peut être trouvé à la page 9.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Page 8. Kupresanin est à la page 8 --

26 LE TÉMOIN : [interprétation] Je le vois, mais je n'arrive pas à trouver

27 Kupresanin.

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Kupresanin est --

Page 24947

1 M. TIEGER : [interprétation] Au bas de la --

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En bas de page --

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, non, non, non.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est à la page 4.

5 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai trouvé Kupresanin, mais je n'arrive pas à

6 trouver --

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est à la page 8. Votre discours

8 commence à la page 7, Monsieur Krajisnik, et se poursuit sur la page 8.

9 M. TIEGER : [interprétation] C'est la page 12 en anglais, Monsieur le

10 Président.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] 12.

12 M. TIEGER : [interprétation] Page 9 en B/C/S.

13 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai trouvé. Merci beaucoup.

14 M. TIEGER : [interprétation]

15 Q. "Si les Musulmans ne souhaitent pas être Musulmans [comme interprété]

16 s'ils ne reconnaissent pas ce fait, je les comprends. Je peux seulement

17 éprouver beaucoup de regrets pour les personnes qui ne souhaitent pas être

18 Serbes, car cette personne ne sait pas à quel point c'est merveilleux et

19 glorieux d'être Serbe. C'est pour cela que nous devons nous séparer. Cela

20 prendrait une énorme guerre pour nous forcer de vivre ensemble. Il n'est

21 pas nécessaire de nous séparer; nous sommes déjà séparés. Il serait

22 nécessaire de faire une guerre pour nous forcer de vivre ensemble dans un

23 même état. Notre but que nous préconisons est le but de nous séparer,

24 d'unir notre Etat qui s'appelle la Republika Srpska, et la Krajina de

25 Serbie deviendra un jour la Serbie."

26 C'est un exemple de cette même position adoptée par le

27 Dr Karadzic lors de la 46e Session, c'est-à-dire, de refaire la réalité qui

28 avait été créée, de défaire la relocalisation massive des gens, c'est-à-

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1 dire que cela prendrait une autre guerre, car dans la mesure du possible,

2 vous et le Dr Karadzic, n'alliez pas permettre de défaire ceci.

3 Q. Mais non. C'est tellement mal compris, Monsieur le Procureur. Je ne

4 vous comprends vraiment pas. Comment vous pouvez interpréter ces propos

5 comme cela. Vous devez lire le texte au complet pour comprendre ce que j'ai

6 dit et ce qu'a dit M. Kupresanin.

7 Ce n'est pas vrai. Je vais répondre à toutes vos questions, que ce n'est

8 pas vrai pour que l'on revienne dans une Bosnie unitaire. C'est cela que je

9 voulais; je ne voulais pas autre chose. Ici aussi, nous avons accepté la

10 Bosnie.

11 Je vous prie de me permettre de faire des commentaires sur chaque

12 chose que vous avez dit concernant Kupresanin, les Musulmans et le reste.

13 Q. J'ai mentionné des choses. J'ai dit que Brdjanin a déclaré que : Nous

14 devons nous laver les mains littéralement des méchants non-chrétiens, nous

15 essuyer les pieds. Alors, qu'est-ce que vous vouliez faire comme

16 commentaire concernant le commentaire de Brdjanin ?

17 Ou d'abord, permettez-moi de préciser les non-chrétiens, ce sont les

18 Musulmans, n'est-ce pas, pour être tout à fait précis ?

19 R. On pense aux Musulmans, mais je n'ai jamais fait de commentaire

20 concernant ce qu'avait dit Brdjanin, car la discussion aurait été

21 complètement désagréable. Je n'ai fait des commentaires que sur ce qu'avait

22 dit Kupresanin. Rhétoriquement, j'ai dit merci pour ces belles paroles pour

23 simplement taire la déclaration avec laquelle je ne suis pas d'accord, pour

24 passer sous silence ce que je pense réellement.

25 M. Kupresanin niait l'existence des Musulmans. Il avait dit que les

26 Musulmans étaient des Serbes. C'étaient des anciens Serbes, des ex-Serbes.

27 L'assemblée a applaudi, car ils applaudissaient à tout, à toutes les

28 bêtises. J'ai dit maladroitement que si les Musulmans ne voulaient pas

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1 devenir Serbes, il faut les croire, c'est-à-dire, ils ont bien le droit de

2 ne pas être Serbes. Je le dis même aujourd'hui. La masse qui m'écoutait,

3 j'ai dit, c'est tellement merveilleux d'être Serbe. Je suis vraiment désolé

4 qu'ils ne soient pas Serbes. Mais je n'ai pas appuyé Kupresanin; au

5 contraire. En disant cela, j'ai nié implicitement ce qu'il avait dit, parce

6 que vous ne pouvez pas ordonner à quelqu'un d'être Serbe si une personne

7 est Musulmane. Je n'ai pas dit : Kupresanin, tu es criminel. Qu'est-ce que

8 tu racontes ? Quel homme politique aurait dit cela ? J'étais devant une

9 assemblée. Donc, j'ai dit : Oui, il faut les croire qu'ils sont Musulmans.

10 Il faut leur faire confiance. Il faut leur donner le droit d'être

11 Musulmans. Vous ne pouvez pas forcer quelqu'un d'abandonner sa nation.

12 Je n'ai jamais voulu nier aux Musulmans de faire partie de leur

13 nation.

14 Q. Permettez-moi d'attirer votre attention sur deux points. D'abord, la

15 tactique proposée par les Serbes de Bosnie, il semblerait -- ou plutôt dans

16 les efforts d'empêcher le retour des Musulmans aux endroits sur le

17 territoire sur lequel ils habitaient, en parlant de cet aspect-là, ce

18 point-là, d'abord, je vais attirer votre attention sur deux sessions. La

19 première session étant la 37e Session.

20 M. TIEGER : [interprétation] Il faudrait peut-être distribuer ce document.

21 La première personne qui -- à la page 126 en anglais et 93 et B/C/S.

22 Q. C'est M. Maksimovic qui prend parole. Les commentaires de

23 M. Maksimovic commencent sur le milieu de la page. C'est le troisième

24 paragraphe de cette page, Monsieur M. Krajisnik.

25 M. Maksimovic dit : "Ce que je voudrais vraiment voir, c'est une

26 attitude ferme selon laquelle les Musulmans et les Croates ne pourraient

27 plus revenir sur le territoire sous notre dominance, et ne devraient pas

28 revenir sur le territoire en question, sur le territoire croate, sous la

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1 dominance croate. Il faudrait être très précis, sinon j'ai bien peur que

2 les personnes de Sandzak occuperaient Srbinje qui était à Foca et les

3 régions environnantes puisqu'il y en a trop dans cette région. Nous

4 devrions adopter une position ferme et les empêcher de retourner sur les

5 territoires que nous avons gagnés, d'après ces combinaisons internationales,

6 pour empêcher que la communauté internationale nous trahisse après que nous

7 ayons signé ceci. Je crois que c'est bien difficile, je comprends. Nous

8 sommes beaucoup plus préoccupés par leur destin que par le destin de nos

9 propres gens. Je m'en fous. Je ne suis pas intéressé par où les Musulmans

10 vivront, s'ils auront leur peuple. Ce qui m'intéresse, c'est où vivra mon

11 peuple et le territoire sur lequel vivra mon peuple. Donc, d'avoir 500

12 Musulmans dans notre futur pays est vraiment une question importante à

13 résoudre."

14 Ensuite, je souhaiterais attirer votre attention - à la page 132 de

15 l'anglais et 97 en B/C/S. - Ce sont les commentaires faits par le Dr

16 Karadzic. C'est le deuxième paragraphe de ces commentaires sur cette page.

17 "Pour ce qui est du retour des réfugiés, je ne vais pas répondre à la

18 question de Vojo. D'après le droit international, nous avons le droit

19 d'empêcher le retour des réfugiés. En principe, tous les réfugiés peuvent

20 revenir. Je voudrais seulement ajouter une phrase. Ceci doit également être

21 un processus bilatéral. Les Musulmans et les Croates ont accepté un

22 processus bilatéral, et plus tard, Owen m'a demandé : Pourquoi est-ce que

23 tu insistes pour qu'il y ait ce processus à deux voies bilatérales ? Je lui

24 dit : Lorsque les Serbes de Zvornik retourneront à Zenica, ce n'est qu'à ce

25 moment-là que les Musulmans de Prijedor retourneront à Prijedor. Ce n'est

26 qu'à ce moment-là qu'il y aura un processus bilatéral. Conformément au

27 droit international, nous ne pouvons pas déclarer, nous ne pouvons pas

28 empêcher le retour des réfugiés."

Page 24951

1 Pour répondre maintenant aux commentaires de M. Maksimovic, ou plutôt en

2 répondant de cette façon-là, est-ce que le Dr Karadzic n'était pas en train

3 d'expliquer une stratégie assez fourbe pour empêcher le retour des

4 Musulmans sur le territoire tenu par les Serbes, nonobstant l'esprit des

5 accords internationaux, nonobstant l'esprit dans lequel les accords

6 internationaux ont été signés ?

7 R. M. Karadzic a dit que selon les conventions internationales, il faut

8 permettre le retour des réfugiés. Il disait aux gens ce qu'ils voulaient

9 entendre. Il insistait tout le temps là-dessus. M. Karadzic n'a pas dit

10 qu'il s'agissait d'une stratégie fourbe, mais il essayait de calmer les

11 gens qui étaient prêts à se lancer dans une guerre.

12 Q. Encore une fois, essayons de faire une différence entre les mots et

13 leur signification. N'est-il pas exact de dire que le

14 Dr Karadzic essayait de dire à Maksimovic et aux autres représentants du

15 peuple serbe qui se trouvaient sur place, qu'il avait trouvé une stratégie

16 pour prévenir, pour empêcher que les Musulmans ne reviennent sur les

17 territoires serbes ? Est-ce que ce n'est pas cela qu'il disait ?

18 R. Non. Il a pensé à une stratégie selon laquelle ils accepteraient ce

19 plan. Parce qu'avant cela, il avait signé leur retour. Il avait signé un

20 accord selon lequel ils avaient droit de revenir.

21 Q. Encore une dernière fois, et je vais après cela abandonner la question.

22 N'est-il pas exact de dire ce que le Dr Karadzic disait ici, ce qu'il

23 essayait de véhiculer dans ce passage que je viens de vous lire - le

24 message véhiculé dans le passage était que par en acceptant cette

25 disposition de processus à deux sens ou bilatéral, à ce moment-là, c'est

26 une façon de satisfaire les préoccupations du Dr Maksimovic et des autres

27 personnes qui craignaient que le retour des Musulmans sur le territoire

28 serbe représente un risque. Je ne veux pas que vous me disiez pourquoi

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1 est-ce qu'il l'a dit; je veux simplement que vous me disiez si oui ou non

2 ces mots-là communiqués aux députés étaient bien ce que nous avons lu ici.

3 Est-ce que c'est bien ce qu'il a dit aux députés ?

4 R. Il a dit cela à M. Maksimovic, c'est vrai. Il lui a dit qu'il existait

5 des conventions internationales. Il a dit ces deux phrases ensemble. M.

6 Maksimovic est intelligent. Il savait très bien que les conventions

7 internationales ont beaucoup plus de poids qu'un ajout ou un addendum de M.

8 Karadzic. Il a dit ce que vous avez dit, sauf qu'il a dit également qu'il

9 respecterait les conventions internationales qui sont beaucoup plus

10 vieilles, qui ont beaucoup plus de préséance qu'une phrase ajoutée par le

11 Dr Karadzic.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Tieger, je ne sais pas si cela

13 aiderait si je vous disais ce que moi, en tant que personne qui ne parle

14 pas nécessairement le serbo-croate comme une personne née à cet endroit,

15 mais je vais vous dire, si vous êtes d'accord avec moi pour dire, qu'il est

16 tout à fait clair que lorsque le Dr Karadzic parle des obligations du droit

17 international, ensuite, il ajoute qu'il s'agit de processus bilatéral et

18 que les Musulmans, les Croates l'ont accepté. Mais plus loin il a dit -- M.

19 Owen m'a demandé : Pourquoi est-ce que vous avez insisté sur ce processus

20 bilatéral. et il répond : "Lorsque les Serbes de Zvornik retourneront à

21 Zenica, ce n'est qu'à ce moment-là que les Musulmans de Prijedor

22 retourneront à Prijedor; il faut donc qu'il y ait un processus bilatéral."

23 A la lecture de ces phrases, même si je ne suis pas originaire d'un

24 pays anglo-saxon, lorsque je lis ceci d'abord je voudrais corriger ce que

25 vous avez dit sur le transcript. Le transcript fait référence lorsque les

26 Serbes retourneront à Zenica mais ce n'est pas ce qui a été dit. C'était

27 lorsque les Serbes retourneront, je vois une ambiguïté à la lecture de ces

28 mots. Il est possible de comprendre ces propos comme suit : seulement quand

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1 les Serbes de Zvornik retourneront à Zenica, les Musulmans de Prijedor

2 retourneront à Prijedor, on le comprends comme ceci, comme une espèce de

3 condition et non pas à moins que les Serbes ne reviennent. Ce qui implique

4 si les Serbes ne reviennent pas à Zenica, il n'y aura pas de possibilité de

5 permettre aux Musulmans de retourner à Prijedor. Mais une deuxième

6 interprétation de ce passage, je vous prie de me corriger si je m'abuse

7 linguistiquement, je vois que M. Josse est également anglo-saxon, l'autre

8 façon de comprendre ces phrases est de dire : si vous insistez sur le droit

9 des Musulmans de leur permettre de revenir à Prijedor, à ce moment-là, bien

10 sûr les Serbes auraient également le droit de retourner à Zenica. Je crois

11 que ces deux façons d'interpréter impliquent le bilatéralisme. Je vois une

12 ambiguïté au point de vue linguistique si vous me permettez, je

13 souhaiterais en discuter avec M. Josse dont l'anglais est sa langue

14 maternelle.

15 M. Josse reçoit la traduction du B/C/S. C'est un problème, je

16 voudrais savoir s'il y a un problème quant à l'interprétation et je

17 souhaiterais que l'on s'assure qu'il n'y a pas de malentendus.

18 M. TIEGER : [interprétation]

19 Q. Monsieur Krajisnik, une question avant de passer à un sujet qui est

20 très étroitement liée à cette question-ci.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Je vous écoute.

22 M. TIEGER : [interprétation]

23 Q. Monsieur Krajisnik, est-il exact de dire que le Dr Karadzic dit ici

24 qu'il explique aux députés une méthode selon laquelle l'accord relatif au

25 droit des réfugiés et personnes déplacées de retourner peut effectivement

26 être interprété de façon à dire : nous allons signer l'accord d'une façon

27 un peu fourbe pour permettre aux Serbes d'accéder à ce qu'ils désirent ?

28 R. Non, Monsieur le Procureur. Ce n'est pas ce qu'il dit. En pratique les

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1 Serbes ne sont pas retournés à Zenica alors que les Musulmans sont revenus

2 à Prijedor. Ils savaient très bien que les accords internationaux, c'était

3 cela. Non, non. Je comprends votre question, je vais vous expliquer. Un

4 instant, permettez-moi. Ici --

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Krajisnik, je vous interromps

6 de nouveau. Encore une fois, vous mélangez ce qui a été dit plus tard et ce

7 qui a été dit lors de la réunion. Je vous prierai de ne pas semer encore

8 plus de confusion.

9 Veuillez poursuivre.

10 M. TIEGER : [interprétation]

11 Q. Je souhaiterais passer à l'intercalaire 13. Il s'agit de la 53e

12 Session.

13 R. Je dois vous dire que je n'ai jamais eu ces documents de la session et

14 je ne les ai pas eus dans ma possession. C'est la raison pour laquelle je

15 dois les lire d'abord. Je n'ai pas dans le quartier pénitentiaire toutes

16 ces sessions-là. Je n'ai pas eu le temps de les lire, c'est pour cela qu'il

17 m'a fallu lire ce texte pour le comprendre.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Chaque fois que vous avez besoin de lire

19 le contexte, je vous prierais de nous informer de cela. Nous vous

20 permettons toujours de lire le document en question.

21 M. TIEGER : [interprétation]

22 Q. La portion de --

23 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

24 M. TIEGER : [interprétation]

25 Q. Monsieur Krajisnik, le document qui m'intéresse ce sont des

26 commentaires de M. Karadzic. Vous pouvez trouver ces commentaires à la page

27 02154335, dernier paragraphe.

28 M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, en anglais c'est la

Page 24956

1 page 29.

2 LE TÉMOIN : [interprétation] De quelle session il s'agit, s'il vous plaît,

3 dites-moi si ce n'est pas trop vous demander.

4 M. TIEGER : [interprétation]

5 Q. C'est la 53e Session tenue le 28 août 1995. Ici le Dr Karadzic cite, il

6 parle des droits de l'homme --

7 R. Pardon, page 35 ou quelle page ? Je n'ai pas la page 36.

8 M. TIEGER : [interprétation] J'ai une copie supplémentaire de cette page si

9 vous souhaitez la voir.

10 LE TÉMOIN : [interprétation] C'était la page 36; est-ce que c'est exact ?

11 M. TIEGER : [interprétation]

12 Q. Page 4 335, le dernier paragraphe de la phrase.

13 R. Merci beaucoup.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cette page --

15 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai trouvé.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous n'avons pas cette page non plus. Je

17 passe de 35 à 36, de 334 à 336. Nous venons de la recevoir, oui.

18 Veuillez poursuivre, je vous prie.

19 M. TIEGER : [interprétation]

20 Q. Le Dr Karadzic parle : "Des droits de l'homme, droits fondamentaux,

21 tels qu'énumérés dans les accords internationaux, seront observés y compris

22 le droit des réfugiés et des personnes déplacées leur permettant de revenir

23 dans leurs demeures."

24 Il cite les disposition et il continue pour dire : "Nous avons

25 maintenant ajouté ce qui doit être un processus général. Ils ne savent pas

26 de quoi il s'agit, donc ils changent la première partie de la phrase. Notre

27 intention est de dire : D'accord. Chacun a le droit de retourner chez soi

28 après la guerre, s'il s'agit d'un processus général. Si on veut dire un

Page 24957

1 processus général, cela veut dire que les Musulmans de Kozluk peuvent

2 revenir à Kozluk, si les Serbes de Kozluk peuvent revenir à Zenica. S'ils

3 ne souhaitent pas retourner, à ce moment-là, s'ils ne peuvent pas

4 retourner, nous auront besoin d'une nouvelle guerre pour faire ceci. C'est

5 la raison pour laquelle nous devons insister sur un processus général, un

6 processus qui soit, soit général ou pas de processus du tout. Nous pourrons

7 nous comporter de façon serbe, d'une façon cyrillique, et nous pouvons tout

8 leur dire directement. Nous pouvons être fourbe ou fourbe un peu."

9 Le Dr Karadzic explique aux députés le but et les faits escomptés de

10 l'inclusion du processus général dans sa disposition de processus général.

11 R. Non, cela ne veut pas dire cela. Ici on peut lire : "S'ils ne

12 peuvent pas retourner," c'est juste comprendre ceci. S'ils ne souhaitent

13 pas et s'ils ne peuvent pas revenir, de regagner leurs demeures, alors à ce

14 moment-là, c'est vrai il explique ce que cela veut dire.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce qu'il y a des problèmes de

16 traduction car M. Krajisnik, je vois, je lis la chose suivante : "S'ils ne

17 souhaitent pas revenir, nous aurons besoin, et s'ils ne peuvent pas

18 revenir, à ce moment-là nous aurons besoin d'une guerre pour les échanger."

19 C'est ce qu'on lit en anglais, n'est-ce pas ?

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. S'ils ne peuvent pas revenir, oui.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui ? D'accord, c'est clair.

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Si on les empêche, on les a empêchés de

23 revenir, ils ne sont pas revenus; cela vous le savez, j'imagine.

24 M. TIEGER : [interprétation]

25 Q. Monsieur Krajisnik, je pense qu'il s'agit d'une interprétation assez

26 ambiguë de ce passage. Pour quelle raison voulez-vous que Dr Karadzic ait

27 décrit cela comme étant rusé, fourbe, sournois. C'est uniquement parce que

28 cela sape les dispositions qui sont comprises dans l'accord ?

Page 24958

1 R. Je vais vous expliquer un peu ce que je pense. M. Karadzic a accepté le

2 fait que tout le monde pouvait rentrer chez soi pour une seule raison;

3 c'est uniquement parce que pendant la guerre, il était impossible à

4 quiconque de rentrer. Il essayait d'expliquer et c'était très rusé

5 d'expliquer pourquoi il a signé cette première partie. Il savait bien qu'il

6 y avait des conventions internationales qui sont une priorité, que ses

7 propres décisions n'étaient que secondaires. En pratique, cela ne marchait

8 pas et cela ne pouvait pas être mis en œuvre. Il savait d'ailleurs que ce

9 serait impossible à mettre en œuvre.

10 Il disait cela uniquement pour que les gens acceptent le plan en

11 entier. Certaines personnes avaient des objections en disant : certains

12 vont pouvoir retourner dans notre territoire, d'autres ne pourront pas

13 retourner dans leur territoire. Je vous explique un peu ce qu'il vous

14 disait, et il est vrai que ce qui est écrit est écrit mais je peux vous

15 dire en revanche ce qui est arrivé en pratique.

16 Q. Je pense que vous avez bien répondu à la question, Monsieur Krajisnik,

17 et avant la pause nous allons passer à un autre passage de cette 53e Séance.

18 M. TIEGER : [interprétation] Il me semble, Messieurs les Juges, qu'il

19 conviendrait d'abord de distribuer ce document.

20 LE TÉMOIN : [interprétation] De quelle session s'agit-il, s'il vous plaît ?

21 M. TIEGER : [interprétation]

22 Q. C'est toujours la 53e, la même séance que celle que nous étudions

23 précédemment.

24 R. Merci.

25 Q. Je vais donc attirer votre attention sur deux passages. Le premier se

26 trouve à la page 64 de la version en anglais. Page 02154381 de la version

27 en B/C/S. C'est en bas de la page et cela continue en haut de la page

28 suivante. Je vais parler de deux passages. Je vais vous demander ensuite si

Page 24959

1 le Dr Karadzic n'était pas en train de décrire comment la situation de fait

2 avait été créée.

3 A la page 64, tout d'abord : "Les grandes opérations qui ont été

4 programmées et planifiées par notre armée, l'épée, le chien rusé, et cetera,

5 ce sont quelques opérations qui ont agrandi notre territoire par rapport à

6 ce que nous avions fait en 1992, comme s'il s'agissait de véritables

7 opérations, comme si les territoriaux avaient agi avec de vraies opérations

8 bien programmées, bien effectuées dans des circonstances où nous étions

9 inférieurs en termes d'effectifs et supérieurs en termes de puissance de

10 feu. Après cela, après avoir entassé les Musulmans dans de petites poches,

11 en ayant réussi à les concentrer, on n'a pas pu faire grand-chose."

12 Maintenant, si vous pouviez tourner la page, M. Krajisnik, au deux tiers de

13 la page, en B/C/S au 02154387.

14 M. TIEGER : [interprétation] Pour ce qui est de Messieurs les Juges, il

15 s'agit de la page 68 de la version anglaise.

16 Q. Où M. Karadzic commence et dit : "Jusqu'à présent, nous avons réussi à

17 ce que nous voulions. Nous sommes une nation. Trebinja --"

18 R. Je suis désolé, je suis perdu. Quel est le paragraphe.

19 Q. D'accord.

20 R. J'ai trouvé la page 88.

21 Q. Vous descendez le premier paragraphe et c'est environ à douze lignes et

22 cela commence par : "Jusqu'à présent, nous avons réussi notre mission…"

23 Pour vous les aider, les phrases suivantes ont les mots "Drvar" et

24 "Trebinje." Vous avez trouvé le passage ?

25 R. Oui.

26 Q. Pour ce qui est de la version anglaise, en page 68, il s'agit d'un

27 passage qui commence quatre lignes avant la fin. Je cite :

28 "Jusqu'à présent nous avons réussi notre mission. Nous sommes une

Page 24960

1 nation. Trebinje doit s'occuper équitablement de Drvar et Drvar doit

2 s'occuper aussi de Trebinje, sinon nous sommes fichus. Nous ne pouvons pas

3 nous permettre de croire qu'ils vont nous dérober nos territoires

4 traditionnels. A dire vrai, ce sont des villes dont nous nous sommes

5 emparés pour nous-mêmes et nous ne sommes que 30 %. Je peux en nommer

6 autant que vous voulez, mais nous ne pouvons pas abandonner les villes. En

7 revanche, nous sommes 70 %. Il ne faut pas que cela se sache, mais

8 souvenez-vous combien d'entre nous étions à Bratunac, combien d'entres nous

9 nous étions à Srebrenica, à Visegrad, à Rogatica, à Vlasenica, à Zvornik,

10 et cetera. Etant donné leur importance stratégique, ils sont devenus nos

11 territoires. Personne ne remet cela en question."

12 Maintenant ces deux passages, M. Krajisnik, expliquent bien qu'il y

13 avait une situation de facto, une nouvelle réalité sur le terrain et c'est

14 celle à laquelle il fait référence. C'est une situation qui a été créée;

15 c'est bien cela ?

16 M. JOSSE : [interprétation] Il me semble que le reste du paragraphe devrait

17 être lu, ou M. Krajisnik au moins devrait pouvoir le lire à voix basse.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Tieger --

19 M. TIEGER : [interprétation] Pas de problème, je vais vous lire le reste.

20 "Entre Grmec et Kozara, je crois que Milosevic le sait d'ailleurs.

21 Les négociateurs étrangers d'ailleurs le savent déjà. Entre Grmec et

22 Kozara, plus rien ne peut appartenir à qui que ce soit à part à nous parce

23 qu'il y a eu génocide là-bas. Il y a eu des Serbes qui ont été tués. Le

24 nombre de Musulmans maintenant est de 50 % à cause de ces génocides et non

25 pas à cause de l'évolution naturelle des choses. Il y a aussi des génocides

26 dans la vallée de la Neretva. Voilà, c'est tout ce que j'avais à dire."

27 Monsieur Krajisnik, ce génocide dont on fait référence, c'est le

28 génocide de la Deuxième Guerre mondiale, n'est-ce pas ?

Page 24961

1 R. Oui.

2 Q. Pour revenir à ma question précédente, les deux passages qui ont été

3 lus qui proviennent de cette séance expriment bien la situation de facto

4 qui expliquait le fait qu'il y avait une réalité sur le terrain qui avait

5 été créée de facto après la guerre. Cela reflète bien un nouvel état de

6 fait ?

7 R. Karadzic a dit qu'il avait pris les parties de territoire qui

8 n'appartenaient pas aux Serbes et a énuméré ces villes, d'ailleurs. Il a

9 dit qu'il fallait quand même que nous conservions les zones où les Serbes

10 étaient 70 % en Krajina. Il a dit aussi, dans les zones où il y avait eu

11 génocide, que les Musulmans avaient obtenues à la fin, et là il voulait

12 parler du mont Kozara et de Jasenovac, il a dit quand même qu'il fallait

13 qu'on s'occupe les uns des autres. Il a aussi parlé des territoires qui

14 n'étaient pas nôtres mais que nous avions pris, Bratunac et Srebrenica,

15 entre autres. Il disait que personne n'était en train de remettre cela en

16 question. C'est évident. On ne peut pas quand même avoir à la fois le

17 beurre et l'argent du beurre. Il est évident que les gens qui sont de ces

18 zones, qui ethniquement n'appartenaient pas aux Serbes et qui étaient

19 Serbes à ce moment-là, ces gens-là, bien sûr, étaient en train de

20 protester. Ils voulaient rester là. C'est donc la réponse que Karadzic

21 leur fait.

22 Ce que vous m'avez lu est assez correct, mais je vous explique un

23 petit peu le contexte.

24 M. TIEGER : [interprétation] Je vois qu'il est très tard.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En effet. Nous allons faire la pause et

26 nous reprendrons à 1 heure moins 10.

27 --- L'audience est suspendue à 12 heures 31.

28 --- L'audience est reprise à 13 heures 00.

Page 24962

1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'aimerais que nous passions à huis clos

2 partiel pour un très bref moment, s'il vous plaît.

3 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

4 [Audience à huis clos partiel]

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9 (expurgé)

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16 (expurgé)

17 [Audience publique]

18 Monsieur Tieger, vous pouvez reprendre votre contre-interrogatoire.

19 M. TIEGER : [interprétation] Merci.

20 Q. Monsieur Krajisnik, plus tôt ce matin, nous avons regardé le

21 rassemblement qui s'est tenu, je crois, en août 1994 à Banja Luka, où entre

22 autres, M. Brdjanin a pris la parole ainsi que M. Kupresanin et vous-même.

23 Vous avez fait des commentaires sur l'intervention de M. Kupresanin après

24 que celle-ci ait été étudiée. Au 11:59:31 du transcript, vous avez dit la

25 chose suivante, je cite :

26 "Oui, cela fait référence aux Musulmans, mais je n'ai pas fait un

27 commentaire sur M. Brdjanin. C'était une discussion complètement fausse. Je

28 faisais un commentaire sur la déclaration de Kupresanin. De façon

Page 24963

1 rhétorique, j'ai dit que cette déclaration était magnifique, mais je

2 n'étais pas d'accord avec lui. Je vais maintenant faire un commentaire sur

3 la déclaration de M. Kupresanin. M. Kupresanin a nié l'existence des

4 Musulmans. Il a dit que c'étaient d'ex-Serbes et tout le monde a applaudi.

5 Ils applaudissaient toutes sortes d'inepties de ce style. D'ailleurs, et

6 par inadvertance, j'ai dit que les Musulmans qui ne voulaient pas être des

7 Serbes et que nous devions les croire, ce que je voulais dire, c'est qu'ils

8 avaient le droit d'être Musulmans. C'est cela que je vous dis aujourd'hui,

9 et je le pense encore aujourd'hui. Puis, je voulais dire à tous ces gens-là

10 que c'est bien d'être un Serbe, et que c'est quand même dommage de ne pas

11 vouloir être Serbe. Mais on ne peut pas dire à quelqu'un qu'il doit être

12 Serbe, s'il veut être Musulman. C'est évident. Je devais le dire ainsi

13 parce qu'il y avait beaucoup de gens là. Je ne pouvais pas dire devant tout

14 le monde : Kupresanin, vous êtes un criminel. C'était un homme politique.

15 Je ne pouvais pas dire cela. J'ai dit très

16 gentiment : Bien, je pense qu'il faut les croire quand ils disent qu'ils

17 sont Musulmans. On n'a pas le droit, je crois de forcer quelqu'un à être un

18 Serbe s'il n'est pas Serbe. C'est ce que je voulais dire, en fait. Je

19 n'étais pas en train de réfuter le droit que les Musulmans avait à voir à

20 être une nation."

21 Monsieur Krajisnik, ce n'est pas la seule fois, ce n'est pas la première

22 fois que vous avez répondu aux commentaires de M. Kupresanin à propos des

23 Musulmans en tant que nation, n'est-ce pas ?

24 R. Je ne m'en souviens pas. J'ai peut-être fait des déclarations là-dessus

25 à d'autres fois. Cela dit, ici, il s'agissait du rassemblement à Banja

26 Luka.

27 Excusez-moi, est-ce que l'interprétation est-elle correcte ? Ai-je vraiment

28 dit que Kupresanin était un criminel ? Cela a dû être mal interprété. Je

Page 24964

1 n'ai pas employé le mot "criminel." En tout cas, je n'ai pas voulu

2 l'employer. Cela, c'est sûr. J'ai plutôt dit qu'il avait dit quelque chose

3 qui était mal. Donc, je ne peux pas dire que c'est un criminel. Il est

4 juste extrémiste et il dit des choses qui sont erronées.

5 M. TIEGER : [interprétation] Passons maintenant à la 24e Séance de

6 l'assemblée des Serbes de Bosnie, qui s'est tenue le

7 8 janvier 1993. Si nous pouvions tout d'abord regarder la page 78 de la

8 version anglaise et la page 02149934 de la version en B/C/S.

9 Q. En anglais, les commentaires de M. Kupresanin commencent en bas de la

10 page et en B/C/S au milieu de la page.

11 Ici, M. Kupresanin, encore, reprend la question de savoir si les Musulmans

12 sont bel et bien une nation, et je cite : "Nous avons déjà évoqué cette

13 idée plusieurs fois par le passé. Messieurs, la nation musulmane est-elle

14 une nation ? La nation qui a été créée par Tito en 1974, a reçu une

15 position comme celle des Grecs."

16 Ensuite, il poursuit toujours sur les mêmes sujets comme vous le voyez en

17 disant qu'il s'agit d'une illusion. Il dit que : "Il est vrai que les Turcs

18 ont été présents pendant 500 ans, mais que les Turcs ont été chassés ainsi

19 que les Autrichiens, ainsi que les Allemands. Pourtant, la Bosnie n'est pas

20 serbe mais musulmane, un pays qui n'existe pas. Est-ce que ce sont encore

21 des idioties serbes ? Bien, si nous refaisons cette erreur, nous faisons

22 une erreur élémentaire comme on ferait à l'école élémentaire. A mon avis,

23 il faut réfuter les Musulmans en tant que nation lors de la prochaine

24 séance de l'assemblée."

25 Il dit que ce n'est pas un point de vue maximaliste mais un point de vue

26 réaliste.

27 Vous répondez ensuite, et je cite : "Je pense que M. Kupresanin a raison,

28 et j'avais tort quand j'ai dit : Ne nous mettez pas avec eux, parce que si

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1 vous les mettez avec nous, on ne saura pas quoi en faire. Je pense qu'il

2 convient de corriger ceci. Il faut prendre position en ce qui concerne la

3 question de savoir si les Musulmans sont bel et bien une nation. On a une

4 suggestion qui semblerait dire qu'il s'agit d'une secte musulmane

5 d'orientation turque, mais cela créerait de la discorde dans le monde

6 musulman. L'Arabie Saoudite et d'autres pays musulmans considèrent que les

7 Turcs ne sont pas de vrais Musulmans, parce qu'ils boivent et qu'ils

8 mangent comme toutes les autres personnes. On sait très bien qu'ils ne sont

9 pas très religieux. Nous pouvons prendre position en ce qui concerne cela,

10 mais il est évident que nous allons toujours tomber sur la même question.

11 Nous pouvons essayer de débattre de cette question. Nous pouvons aussi

12 atteindre des conclusions et les comprendre dans ces conclusions. Ensuite,

13 vous dites : Vojo, tu avais raison et j'avais tort. Vous reprenez : Mais on

14 peut dire, c'est un groupe religieux d'orientation turque. Ceci est très

15 important à dire, parce qu'ils ne sont pas du monde musulman, mais ce sont

16 des Musulmans avec une orientation turque. C'est tout à fait différent de

17 ce que sont les véritables Musulmans. Quelqu'un a-t-il quelque chose à dire

18 quand on dit que les Musulmans ne sont pas une nation ? Qu'en est-il d'une

19 définition qui serait la suivante ?"

20 Ensuite, il y a eu une intervention de M. Corda. Vous reprenez la parole,

21 puis M. Knezevic prend la parole, et ensuite, vous dites : "On va

22 maintenant ôter les Musulmans de la Serbie et de la nation serbe une bonne

23 fois pour toutes ? Messieurs, il faut qu'on se mette d'accord une bonne

24 fois pour toutes, et qu'on dise que les Musulmans, en tant que nation,

25 c'est une création communiste. On ne peut pas accepter cette nation

26 artificielle. Nous considérons que les Musulmans sont une secte, sont un

27 groupe, sont en partie d'origine turque. Quelqu'un a-t-il quelque chose à

28 ajouter ? Non. Dans ce cas-là il faudrait voter à propos de ces

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1 conclusions. Ensuite, on passe au vote et les conclusions sont adoptées à

2 l'unanimité."

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je n'arrive pas à trouver la ligne à

4 propos de la serbitude [phon], enfin du peuple serbe.

5 M. TIEGER : [interprétation] C'est à la page 80, 3e paragraphe, et c'est

6 sous le chapitre "président."

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. C'est à la page suivante.

8 M. TIEGER : [interprétation] Je vous l'ai dit, il s'agit d'une intervention

9 de M. Corda, et ensuite, M. Krajisnik reprend la parole. Cela, c'est en bas

10 de la page 79, et cela continue ensuite en haut de la page 80.

11 Q. Monsieur Krajisnik, c'est la deuxième fois que vous avez parlé après

12 l'intervention de M. Kupresanin. On le trouve à la

13 page 02149935.

14 R. Je l'ai trouvé.

15 Q. Oui. Vous dites : "Je vais vous expliquer pourquoi cela ne va pas. Ils

16 veulent qu'on dise qu'on est tous pareils. Ils veulent que l'on crée une

17 nation, mais nous sommes tous de religion différente. Il faut bien que nous

18 annoncions que nous sommes différents. Eux, ce sont un groupe qui a une

19 orientation turque. Donc, il faut que nous acceptions qu'ils ont un groupe

20 turc ou je ne sais pas comment, mais il faut qu'on leur donne des atouts

21 dans leur --. Si on dit qu'ils sont un groupe, on va leur permettre d'être

22 une nation indépendante. Ils seraient ravis de dire qu'ils sont d'origine

23 turque comme les Siptars. Mais il faudrait que nous, nous leur disions ce

24 qu'ils sont vraiment. Ce sont des incroyants. C'est une nation sans nation,

25 c'est-à-dire, une nation qui aimerait être une nation, mais qui n'a pas les

26 arguments pour devenir une véritable nation."

27 Monsieur Krajisnik, quand vous avez répondu ainsi à -- vous avez fait ce

28 commentaire en réaction à l'intervention de

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1 M. Kupresanin en 1994 en disant que vous n'étiez pas d'accord avec lui,

2 mais que vous ne vouliez pas réfuter aux Musulmans le droit d'être des

3 nations, ce qu'il disait était complètement faux, n'est-ce pas ?

4 R. Tout à fait, c'est correct. Ici, ce que Momcilo Krajisnik dit est une

5 des stupidités. Ce n'est pas bon. Je n'ai jamais pensé cela, en fait. Si je

6 pouvais être complètement séparé de ce Momcilo Krajisnik, je le ferais. Il

7 faudrait que je le relise, certes. Parce que j'avais sans doute des raisons

8 pour redire ce que j'ai dit. Mais la raison, certes, ne justifie pas les

9 moyens.

10 Q. Monsieur Krajisnik, quelle que soit la position que vous prenez

11 maintenant par rapport aux commentaires de l'époque, il n'empêche que vous

12 les avez proférés à l'époque en 1993, en janvier 1993. Et sur la base de

13 cette opinion, de cette position que vous aviez prise, vous avez formulé et

14 adopté les fameuses conclusions que nous venons de lire, n'est-ce pas ?

15 R. Il faudrait retrouver. Il doit y avoir une intervention de quelqu'un

16 d'autre - je m'en souviens - quelqu'un qui avait repris tout cela. Je crois

17 que Savo Knezevic avait repris cela aussi. J'ai tiré les conclusions, parce

18 qu'il a été débattu du plan Vance-Owen. Tout ce débat de ma part, tous ces

19 propos sont démesurés, sont erronés. Ils ne sont pas corrects du tout,

20 parce que je n'ai jamais nié le droit aux Musulmans de l'existence d'une

21 nation. Cela n'a rien à voir de toute manière. Cette intervention est tout

22 à fait authentique, et je regrette beaucoup de voir que ce Momcilo

23 Krajisnik ait dit cela.

24 Il faudrait au moins que je retrouve la raison pour laquelle j'ai dit

25 ce que j'ai dit pour que le sache pour moi-même. Parce que si on se penche,

26 il devait y avoir quelqu'un au niveau de la réunion, qui avait proféré des

27 choses de ce genre. Je sais ce que Kupresanin a dit.

28 Moi, de façon maladroite, de façon qui manque de correction à part

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1 entière, j'ai repris ces propos, et personne ne doit se voir renier le

2 droit de se déclarer comme étant Serbe, Croate ou tout ce qu'il voudra, ou

3 Musulman. Je dois vous dire que je me souviens de cette intervention à moi.

4 Je m'en souviens vaguement. Je me souviens de propos en ce sens. Si vous me

5 le permettez, je me proposerai de relire ce que les autres ont dit avant

6 moi, et je crois savoir que j'ai dû reprendre les propos de quelqu'un

7 d'autre. Mais je n'étais pas censé proférer quoi que ce soit de ce genre.

8 Je pense que c'est inadmissible, et ce n'est pas une bonne chose. Mais

9 j'accepte toute critique ou constatation qui dirait que les choses se sont

10 effectivement dites de la sorte.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Tieger, je suppose que M.

12 Krajisnik va avoir l'occasion de le faire, parce que je crois comprendre

13 que son intention est de prendre ce procès-verbal avec lui vers l'unité de

14 Détention afin d'être à même de commenter les raisons qui l'on incité à

15 prononcer ces propos.

16 M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, d'après ce que je crois

17 comprendre, M. Krajisnik aura la possibilité de prendre l'un quelconque des

18 documents qui lui sont présentés ici. J'ai déjà mentionné que nous avons

19 pensé qu'il n'était pas nécessaire pour lui de faire des copies de

20 documents qu'il avait déjà, mais le PV de la 24e Session, nous l'avons, et

21 ce n'est pas un problème que de le lui confier.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] M. Krajisnik aura l'opportunité de le

23 prendre, n'est-ce pas ?

24 M. TIEGER : [interprétation] Oui. Cela doit également être reflété par le

25 compte rendu d'audience à présent.

26 M. JOSSE : [interprétation] Je crois qu'il ne faut pas perdre de vue le

27 fait que dans les classeurs il y a les sessions allant de 1 à 23. Puis,

28 vient ensuite le 24 et celles qui suivent.

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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je crois que le 24 on en avait parlé

2 déjà dès le début. On l'a intégré. Toujours est-il que

3 M. Krajisnik l'a maintenant.

4 M. JOSSE : [interprétation] Merci beaucoup.

5 M. TIEGER : [interprétation]

6 Q. Monsieur Krajisnik, j'aimerais que nous revenions maintenant à l'année

7 1991, et plus particulièrement à ce que vous avez dit au sujet de

8 l'intervention du discours tenu par M. Karadzic à l'occasion de la session

9 de l'assemblée de Bosnie aux dates du 14 et 15 octobre. J'imagine que

10 c'était le 14 au soir, et tout le matin du 15, session où il a dit : "Ceci

11 est la voie que vous souhaitez voir prendre par la Bosnie-Herzégovine.

12 C'est la même route de souffrance et d'enfer, qui a été prise par la

13 Slovénie et la Croatie. Ne pensez pas que vous allez amener la Bosnie-

14 Herzégovine vers l'enfer et sauver le peuple musulman d'une extinction

15 possible, parce que le peuple musulman ne sera pas à même de se défendre si

16 guerre il y avait."

17 Alors, M. Stewart vous a donné lecture de cela pendant l'interrogatoire

18 principal. Il vous avait expliqué les commentaires faits par le Dr Karadzic

19 en disant qu'il s'agissait d'une répétition pure et simple de ce que M.

20 Filipovic avait déjà proféré auparavant. Si j'ai bien compris, cela a été

21 l'explication que vous aviez apportée en disant qu'il s'agissait là d'un

22 aspect bénin du commentaire fait par M. Karadzic; est-ce bien vrai ?

23 R. J'ai expliqué à l'intention de M. Stewart ce que Karadzic a déclaré et

24 ce qu'ont enregistré les médias, les journaux pour ce qui est des raisons

25 de cette déclaration qui a tellement bouleversé l'opinion publique. J'ai

26 proposé cela aux Juges de la Chambre dans le cadre du DVD que j'ai fourni.

27 Pour ce qui est de la déclaration en tant que telle, si cela vous

28 intéresse, je peux vous apporter un commentaire à présent pour vous.

Page 24970

1 Q. Si je vous ai bien compris - et je vous prie de me rectifier si j'ai

2 tort - vous avez voulu que les Juges de la Chambre comprennent que les

3 remarques faites par le Dr Karadzic ne devraient pas être mal interprétées

4 et être considérés comme étant une menace parce qu'il a dit qu'il ne

5 faisait que répéter les propos du Dr Filipovic. Est-ce que c'est en

6 substance ce que vous avez dit ?

7 R. Il y a deux éléments. J'ai apporté un fait nouveau en disant que M.

8 Karadzic avait expliqué pourquoi il a fait ce type de déclaration à

9 l'assemblée, et ce document, je vous l'ai déjà remis. Pour ce qui est,

10 entre guillemets, de la qualité de cette déclaration, je vous prie de

11 prendre en considération ce qui suit : j'ai relu dix fois ces déclarations,

12 mais jamais devant le Tribunal on a présenté la totalité de son

13 intervention. Il a dit trois ou quatre fois au moins : je ne menace pas, je

14 ne menace pas. Il serait bon de voir la totalité de son discours. Quand il

15 a fait ce discours, je me suis senti mal à l'aise, mais je n'ai pas cru

16 comprendre qu'il menaçait. J'ai compris que c'était un avertissement. Si

17 vous relisez la totalité du livre, vous verrez qu'il y a trois ou quatre

18 pages où il suppliait tout un chacun de faire en sorte qu'il y ait un

19 accord d'obtenu, et il disait : je ne menace pas. Il priait les deux autres

20 parties.

21 Alors on a pris cette partie-là, ce bout-là pour le placer dans

22 l'opinion publique qui sonne mal, qui sonne comme étant une menace. J'ai

23 relu dix fois la même chose. Je sais ce qui est écrit et je sais ce qu'il a

24 dit. Il y a aussi l'enregistrement vidéo.

25 Q. Quand vous dites cela n'a pas été une menace, est-ce que cela signifie

26 que le Dr Karadzic aurait dit quelque chose du style ne nous poussez pas à

27 faire ceci ?

28 R. M. Karadzic a dit : je ne menace pas, je ne menace pas, je ne menace

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1 pas. Puis, il a dit ce que vous venez de dire dans un autre contexte, mais

2 il a bien dit qu'il ne menaçait pas. Il a dit : je ne menace pas, je vous

3 en prie, je ne menace pas. Il l'a dit à plusieurs reprises, donc j'ai bien

4 compris que ce n'était pas une menace, mais un avertissement, parce que si

5 les Musulmans avaient eu peur, ils n'aurait pas voté pour le mémorandum, la

6 plate-forme, mais ils l'ont fait, parce que s'ils avaient compris cela

7 comme étant une menace, ils ne l'auraient probablement pas fait. Mais c'est

8 une déclaration comme celle de ma part tout à l'heure.

9 Q. Est-ce que je vous ai bien compris ? Vous auriez cité des remarques

10 faites par M. Filipovic aux fins d'expliquer aux Juges de la Chambre qu'il

11 ne s'agissait pas là d'une menace, parce que le Dr Filipovic a dit la même

12 chose.

13 R. J'ai présenté aux Juges de la Chambre un fait nouveau qu'ils ignoraient

14 que je connaissais. Alors quand on a parlé des raisons pour lesquelles M.

15 Karadzic avait parlé de cela, il a dit ce qu'il a dit aux médias. Donc,

16 j'ai voulu expliquer aux Juges de la Chambre ce fait-là. J'ai voulu qu'ils

17 comprennent comment il a expliqué les raisons qui l'ont animé à l'époque

18 pour faire ce type de déclaration.

19 Q. Bien, peut-être serait-il bon de voir ce qu'il a dit dans le concret,

20 ce que M. Filipovic a dit. A cet effet, je voudrais que nous nous référions

21 à l'intercalaire numéro 26.

22 R. Je ne sais pas ce que M. Filipovic a dit. Je ne puis parler que de ce

23 qui est écrit ici. Je ne me souviens pas de la déclaration de M. Filipovic.

24 M. TIEGER : [interprétation] Excusez-moi un instant, Monsieur le Président.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

26 [Le conseil de l'Accusation se concerte]

27 M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, nous en avons terminé

28 avec le premier paquet de documents et il faut que nous allions récupérer

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1 le suivant.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

3 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

4 M. JOSSE : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, mais est-ce

5 que mon éminent confrère a un sommaire pour ces pièces ?

6 M. TIEGER : [interprétation] S'il n'y en a pas un de disponible à

7 l'instant, je suis certain du fait que l'on pourra vous le fournir.

8 M. JOSSE : [interprétation] C'est parfait. Je voulais juste savoir si vous

9 l'aviez à l'instant.

10 M. TIEGER : [interprétation]

11 Q. Monsieur Krajisnik, j'aimerais attirer votre attention sur la page

12 03531269, et je me réfère au haut de la page.

13 M. TIEGER : [interprétation] Alors, en version anglaise, ce serait vers la

14 moitié de la page.

15 Q. La partie dont je suis en train de parler vient tout de suite après les

16 renseignements statistiques quand on parle de 90 % et quelques --

17 R. De quelle session s'agit-il ici ?

18 Q. Vous voulez parler de la date ?

19 R. Oui, c'est une session de l'assemblée de Bosnie-Herzégovine, mais

20 j'aimerais savoir quelle est la session et quelle est la date, si cela ne

21 vous donne pas trop de mal.

22 Q. Ici, c'est M. Filipovic qui est en train de parler à la session de

23 l'assemblée du Parlement de Bosnie, session à laquelle le Dr Karadzic a

24 également tenu un discours.

25 R. Mais est-ce que c'est la même session ?

26 M. JOSSE : [interprétation] Est-ce que vous pouvez nous donner la date, je

27 vous prie ?

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] On s'est déjà penchés sur plusieurs

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1 sessions où le Dr Karadzic a pris la parole, et l'une d'entre elles était

2 la 42e.

3 M. TIEGER : [interprétation] Je vois que c'était la première date des dates

4 de session, Monsieur le Juge.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors c'est le 14, 15 --

6 M. TIEGER : [interprétation] Non, non, cela devait être le 10, mais je vais

7 vérifier plus.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le 10 de quel mois ?

9 M. TIEGER : [interprétation] Octobre, je crois, mais je vais encore

10 revérifier.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, alors faites-moi savoir quand vous

12 aurez vérifié.

13 M. TIEGER : [interprétation]

14 Q. "Qu'est-ce que cela signifie ? Cela signifie que la séparation de la

15 SAO de la Krajina ne constituera rien d'autre que si ce n'est la création

16 de territoires ethniquement purs, parce que la conséquence de la

17 régionalisation va être un transport de la population, un transfert de la

18 population. Nous avons déjà ce transfert, par exemple les "Mudjahers"

19 [phon] de l'Herzégovine arrivent déjà en Bosnie. Des "Mudjahers" vont de

20 Sipovo, ils vont de Kljuc, et nous allons assister à un nettoyage ethnique

21 du territoire, mais ce nettoyage ethnique du territoire, compte tenu des

22 rapports quantitatifs, ne va pas aboutir à une Krajina de Bosnie

23 ethniquement pure ou à majorité musulmane ou de la Bosnie-Herzégovine, du

24 reste de la Bosnie, mais cela va être encore une fois de plus la Bosnie-

25 Herzégovine ou ce qu'il en restera, où il vivra une fois de plus ensemble

26 des Serbes, des Croates et des Musulmans, où il y aura 50 % de Musulmans,

27 donc il y aura une majorité de leur part, et nous allons avoir une

28 répétition de l'histoire. Qu'est-ce que cela signifie ? Cela va signifier

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1 un processus permanent de dissolution de Bosnie-Herzégovine, de

2 démantèlement, et ce qui m'intéresse encore, c'est parce que je suis

3 convaincu que le démantèlement de la Bosnie-Herzégovine et que sa

4 régionalisation, son rapetissement vers ce qu'il en restera va également

5 être par la suite soumis à d'autres régionalisations et d'autres

6 dissolutions, et ce sera le début de la fin de mon peuple; c'est la raison

7 pour laquelle nous nous devons de faire face aux causes de ce processus."

8 Alors maintenant, Monsieur Krajisnik, ici, il s'agit d'une claire

9 expression de la préoccupation de M. Filipovic, concernant les objections

10 qu'il avait à faire au sujet de ce que le SDS était en train de réaliser du

11 point de vue de la régionalisation de la Bosnie ou d'une division ethnique

12 de la Bosnie, n'est-ce pas ?

13 R. C'et ce que M. Filipovic a dit. Il a dit qu'il fallait que nous nous

14 concertions, parce que si concertation il n'y avait pas, il y aurait

15 démantèlement de la Bosnie-Herzégovine. Il a proféré ces propos, il a

16 prononcé ces propos à l'occasion de l'accord historique, et tout le reste

17 de cette intervention vient en explication. Il a dit que s'il n'y avait pas

18 un accord de réalisé, mon peuple disparaîtrait. Il est vrai qu'il ne l'a

19 pas dit dans les termes utilisés par M. Karadzic.

20 Q. M. Filipovic était en train d'exprimer ses appréhensions concernant ce

21 qu'il adviendrait des Musulmans s'ils tombaient entre les mains des Serbes

22 de Bosnie ou du SDS, n'est-ce pas ? S'il n'y avait pas accord ?

23 R. Non. Ecoutez, je vais vous donner lecture de la phrase.

24 "La cause, c'est que les Serbes estiment que la Bosnie-Herzégovine ne

25 leur garantit pas les droits qu'ils souhaitent avoir. Nous devons ouvrir la

26 possibilité d'entretiens francs et réclamer des accords. C'est la seule

27 logique politique et la seule voie à prendre, parce qu'aucune autre façon

28 de faire, si ce n'est la guerre dans les conditions d'aujourd'hui, ne

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1 saurait assurer un ordre durable, une sécurité, une intégrité territoriale

2 et une souveraineté de la Bosnie-Herzégovine."

3 Q. Là, il a exprimé dans le passage que j'ai lu, il a exprimé son

4 inquiétude pour dire que l'impact que cela aurait à l'égard des Musulmans

5 de Bosnie, s'agissant de la politique et des actions du SDS, devait être

6 d'une certaine nature. C'est ce qui l'inquiétait ?R. Oui. Vous aviez parlé

7 de la régionalisation et je dirais que oui. Il était contre la

8 régionalisation parce qu'il estimait que l'on était en train de subdiviser

9 la Bosnie, et historiquement, il voulait que la Bosnie-Herzégovine reste en

10 Yougoslavie. C'était la position de M. Filipovic, et c'est la position

11 qu'il est en train de présenter ici.

12 Q. Oui, mais au-delà de ceci, l'idée au terme de laquelle le Dr

13 Karadzic n'aurait fait que citer les propos de M. Filipovic en justifiant

14 ou expliquant la nature de ces remarques, c'est là quelque chose que M.

15 Filipovic lui-même n'a pas seulement nié, mais qu'il a expliqué en disant

16 que cela était complètement faux, n'est-ce pas ? Parce que le Dr Filipovic,

17 comme bon nombre d'autres personnes présentes, a compris que le Dr Karadzic

18 était en train de proférer des menaces à l'égard des Musulmans.

19 R. Cela, cette intervention a eu lieu avant le discours de

20 M. Karadzic. La signification de ces mots, ici, est claire. M. Filipovic

21 dit : "Si nous ne tombons pas d'accord, si nous n'aboutissons pas à un

22 accord, il y a un péril de voir mon peuple disparaître." M. Karadzic a dit

23 quelque chose de ressemblant. Qu'a dit M. Karadzic aux journaux ? C'est son

24 opinion à lui, comment, donc, il a justifié la déclaration qu'il a faite

25 devant le Parlement. Je n'ai pas dit -- ce n'est pas moi qui ai fait cette

26 déclaration, c'est M. Karadzic.

27 Mais vous remarquerez que M. Filipovic qui s'emploie en faveur d'une

28 Bosnie-Herzégovine intégrale au sein de la Yougoslavie, donc en faveur d'un

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1 accord historique, il est en train de dire que s'il n'y a pas d'accord et

2 s'il y a régionalisation, la Bosnie disparaîtrait et que son peuple

3 disparaîtrait. M. Karadzic a dit la même chose, il a dit : "Il faut que

4 nous arrivions à un accord." Relisez, je n'ai pas compris les choses ainsi.

5 Il n'y a pas eu de menaces de la part de M. Filipovic ni de M. Karadzic.

6 Peut-être l'autre partie a-t-elle compris les choses autrement, mais --

7 peut-être les deux parties comprennent-elles les choses différemment. Mais

8 si vous relisez la déclaration dans son intégralité, vous verrez bien, vous

9 verrez bien que ce que je dis est vrai.

10 Q. Monsieur Krajisnik, ce que j'affirme à votre intention, c'est que

11 M. Filipovic a compris cela comme étant une menace, et le Dr Karadzic avait

12 entendu faire une menace. A l'époque, vous avez compris qu'il y avait

13 menace ou avertissement d'extinction ou de destruction physique des

14 Musulmans.

15 R. Monsieur le Procureur, retrouvez, je vous prie, la date de cette

16 session. Cela doit dater d'avant la déclaration de M. Karadzic, et M.

17 Filipovic ne peut pas comprendre des propos qu'il n'a pas entendus comme

18 étant des menaces. Il avait redouté la régionalisation et il s'employait en

19 faveur d'une impossibilité de voir la Bosnie-Herzégovine démantelée. Prenez

20 donc la date, vous verrez que ce que Karadzic a dit date du 14 ou 15

21 octobre, et voyez la date de cette session-ci.

22 Q. Plutôt que de débattre de la logique de tout ceci, j'aimerais que

23 nous nous penchions sur l'intercalaire 27. Nous allons essayer de dissocier

24 la question en trois parties.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il n'empêche que la date de cette

26 assemblée de la Bosnie, vous avez dit que cela devait être le 10 octobre,

27 cela devient pertinent du point de vue de la réponse de M. Krajisnik.

28 M. TIEGER : [interprétation] Je pense qu'il n'est pas essentiel --

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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais vous avez dit que

2 M. Filipovic --

3 M. TIEGER : [interprétation] Mais, je ne pense que ce soit là une question

4 qui ait précédé ou des éléments qui aient précédé les remarques faites par

5 le Dr Karadzic.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais la compréhension qu'a M. Filipovic

7 de ces propos comme étant des menaces ne se fonde pas du tout, donc ?

8 M. TIEGER : [interprétation] Non, pas du tout.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] -- ce qu'il a dit le 10 octobre ?

10 M. TIEGER : [interprétation] Non.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien.

12 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

13 M. TIEGER : [interprétation]

14 Q. [aucune interprétation]

15 R. Ce que je voudrais savoir, c'est est-ce qu'on conteste ou pas que cette

16 déclaration-ci précède celle de Karadzic ? C'est tout ce que je veux

17 savoir. Oui, c'est bon, vous pouvez continuer.

18 Q. A l'intercalaire 27, il y a un article du mois de mars 1994 de la plume

19 de M. Filipovic. Monsieur Krajisnik, je voudrais attirer votre attention

20 sur plusieurs de ces segments. Le premier passage se trouve en version

21 anglaise à la page 2. Je crois que c'est en toute première page de

22 l'article imprimé où M. Karadzic [comme interprété] dit : "Dans mon

23 intervention bien connue au niveau de la session du Parlement de Bosnie-

24 Herzégovine, Karadzic n'a fait que concrétiser et exemplifier la stratégie

25 de la menace génocidaire en adressant celle-ci à l'égard de la Bosnie-

26 Herzégovine. Ce programme s'est fondé sur la position suivante : Soit vous

27 allez accepter la Yougoslavie, soit vous allez disparaître en tant qu'Etat

28 et peuple."

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1 Alors, je crois que nous pouvons tomber d'accord pour dire que M. Filipovic

2 laisse entendre clairement la façon dont il a interprété les remarques de

3 M. Karadzic en disant qu'il s'agissait de menace adressée à l'égard du

4 peuple musulman, menace disant qu'il serait physiquement détruit en leur

5 qualité de peuple; est-ce exact ?

6 R. En 1994, il a fait ce commentaire. En 1991, il s'employait en faveur,

7 tout comme Karadzic, en faveur du fait que la Bosnie reste en Yougoslavie.

8 Ce sont des faits. Je parle du mois de juin 1991. Alors, en effet, c'est un

9 commentaire qu'il a fait en 1994, s'agissant d'une déclaration de M.

10 Karadzic datant de 1991. Un mois avant cela, il s'était employé en faveur

11 d'une Bosnie au sein de la Yougoslavie. Lui et M. Zulfikarpasic avaient

12 proposé cet accord historique. Il continue à dire que cet accord, de nos

13 jours encore, il continue à dire que cet accord aurait sauvé la Bosnie-

14 Herzégovine.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Krajisnik, je me dois de vous

16 interrompre. Ici, j'ai l'impression que nous avons une fois de plus la même

17 chose, à savoir, la façon dont M. Filipovic a compris le langage de M.

18 Karadzic.

19 M. JOSSE : [interprétation] M. Karadzic, Monsieur le Président.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Karadzic, je crois avoir dit

21 Karadzic. Le transcript, le compte rendu dit "Karadzic."

22 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est égal.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, non, ce n'est pas égal. Vous savez

24 bien que les Juges de la Chambre ne voient pas les choses de cet œil-là.

25 Une fois de plus, il y a plusieurs choses de mélangées. Quoique M.

26 Filipovic à l'époque était favorable à la Yougoslavie, ceci n'exclut pas la

27 possibilité de le voir nous dire en 1994, que la formulation avait eu

28 l'allure d'une menace. Vous êtes en train de mélanger des faits et une

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1 argumentation. Alors, je vous convie d'abord à vous pencher sur ce qui est

2 écrit ici pour voir si vous pouvez tomber d'accord avec les dires de M.

3 Tieger aux termes desquels en 1994 du moins, une fois qu'il a entendu ces

4 commentaires proférés par le Dr Karadzic ou lorsqu'il s'est penché dessus

5 pour y réfléchir ultérieurement, il a conclu qu'il s'agissait d'une menace.

6 C'est une autre question maintenant que de savoir mise de côté cette

7 menace, qu'il était favorable au fait de rester en Yougoslavie que ce soit

8 en 1991 ou 1994. Nous essayons d'éviter qu'il y ait mélange des choses tant

9 dans les questions que dans les réponses.

10 Je sais que je vous interromps, mais je vois l'heure.

11 Toujours est-il, qu'avant que de lever l'audience, Monsieur Krajisnik, et

12 avant que de vous donner instruction de ne vous entretenir avec personne au

13 sujet de votre témoignage passé ou futur, je dois dire qu'il nous faudra

14 revoir les textes en B/C/S et anglais fournis par le service de traduction.

15 Maître Josse, vous avez parfaitement raison. Il s'est avéré nécessaire de

16 réexaminer tout ceci. Du moins, je le pense pour les lignes les plus

17 pertinentes. Au niveau du compte rendu d'audience, on pouvait lire : "Je

18 pensais, lorsqu'on nous traçait des cartes, qu'il devait y avoir le plus

19 possible de territoires serbes, et même là où les Serbes n'étaient pas en

20 majorité."

21 Une fois le réexamen effectué, nous en sommes arrivés au texte suivant, à

22 l'époque où des cartes ont été dessinées, tracées : "J'ai estimé qu'il

23 devait y avoir le plus possible de territoires serbes conformément aux

24 principes prévus par les accords de Lisbonne, sans pour autant être

25 mégalomane et réclamer des secteurs où les Serbes n'avaient pas eu la

26 majorité."

27 Toute une partie du texte en anglais n'a pas fait partie du compte rendu

28 d'audience. Je dirais que cette partie-là change la signification de cette

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1 partie du témoignage à part entière pour

2 180 degrés.

3 M. JOSSE : [interprétation] Je suis reconnaissant aux Juges de la Chambre

4 d'avoir organisé cela. Merci.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cela veut dire que le compte rendu sera

6 revu et que le compte rendu final va refléter les propos tenus par M.

7 Krajisnik dans son témoignage.

8 Nous allons lever l'audience pour aujourd'hui et reprendre demain

9 matin à 9 heures dans cette même salle d'audience. Je tiens à rappeler aux

10 parties en présence que nous allons devoir terminer demain quelque 20

11 minutes plus tôt que d'habitude.

12 M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, puis-je vous demander

13 de nous restituer le classeur pour extraire les parties pertinentes qui ont

14 déjà été utilisées pour --

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Je crois que cela devrait être fait

16 avant que M. Krajisnik ne quitte le bâtiment ?

17 M. TIEGER : [interprétation] Oui, certainement.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, Madame la Greffière, veillez à ce

19 que cela soit confié à M. Krajisnik et que le document soit rendu à M.

20 Tieger.

21 L'audience est levée.

22 --- L'audience est levée à 13 heures 50 et reprendra le mercredi 31

23 mai 2006, à 9 heures 00.

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