Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mercredi 28 juin 2006

2 [Audience publique]

3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]

4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 13.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier, pourriez-vous,

6 s'il vous plaît, citer l'affaire.

7 M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour. Il s'agit de l'affaire IT-00-39-

8 T, le Procureur contre Momcilo Krajisnik.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur le Greffier.

10 J'aimerais que nous passions à huis clos ou huis clos partiel. Y a-t-il

11 quelqu'un dans la galerie publique ? Je ne vois rien. C'est la même chose

12 de toute façon.

13 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes maintenant à huis clos.

14 [Audience à huis clos]

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11 Pages 26413-26419 expurgées. Audience à huis clos.

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13 [Audience publique]

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

15 Questions de la Cour :

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Subotic, pourriez-vous tout

17 d'abord nous donner votre nom ?

18 R. Bogdan Subotic.

19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Votre date de naissance ?

20 R. Le 25 avril 1941, à Turjak, municipalité de Gradiska, en Bosnie-

21 Herzégovine.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci. Avez-vous reçu un exemplaire de

23 la déclaration qui a été compilée par le Juriste de la Chambre, qui a été

24 traduite en serbo-croate et qui vous a été envoyée le 8 juin de cette

25 année ? Vous avez bien reçu copie de ce document ?

26 R. Tout à fait.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avez-vous eu l'occasion de lire cette

28 déclaration ?

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1 R. Oui, je l'ai eue.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Voulez-vous y apporter des corrections ?

3 R. Il y a juste quelques coquilles. Je n'ai pas eu l'occasion de

4 m'entretenir avec M. Zahar. Tout n'a pas été rapporté exactement selon le

5 déroulement de notre conversation. Le début et la fin de notre conversation

6 ne figurent pas à ce compte rendu. Pourtant, ils sont très importants, en

7 ce qui me concerne, en tout cas. De plus, si cette déclaration vous est

8 accessible, est accessible à la Défense, est accessible à l'Accusation, je

9 ne vois pas comment ils vont arriver à savoir quelles étaient les questions

10 qui m'ont été posées. J'ai déjà eu une expérience avec les enquêtes de la

11 Chambre du Tribunal de La Haye, et les choses se faisaient différemment.

12 Donc, j'aimerais vous poser une question, s'il vous plaît.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais je tiens d'abord à vous donner

14 un peu d'information à propos de ce document.

15 R. Très bien.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cette déclaration a été rédigée pour

17 faire une synthèse, si je puis dire, de l'essentiel des faits que vous avez

18 relatés lors de votre interview, de votre interview qui a été rédigée. Les

19 parties ont aussi le compte rendu verbatim de votre interview pour des

20 raisons de moyens de preuve, évidemment. Les parties ont à la fois accès à

21 la synthèse et au compte rendu verbatim. Donc, je suis d'accord avec vous.

22 Tout ce que vous avez dit n'est pas entièrement reflété dans ce document,

23 dans ce document de synthèse, mais les parties ainsi que les Juges ont

24 accès aussi au PV, à vos propos verbatim.

25 J'en reviens à la question que vous vouliez me poser, mais je vous demande

26 une fois de plus, mis à part les petites coquilles dont vous avez parlé, y

27 a-t-il des choses dans cette déclaration qui ne reflètent pas exactement

28 l'interview, l'entretien que vous avez eu avec les enquêteurs ? Y a-t-il

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1 quelque chose que vous aimeriez corriger ou qui, à votre avis, est erroné ?

2 R. Monsieur le Président, lors des conversations que j'ai eues avec M.

3 Zahar, je n'avais pas accès aux déclarations que j'avais faites en 1997 et

4 1998. Pratiquement toutes les questions qui m'ont été posées avaient trait

5 à ces deux anciennes déclarations que j'avais faites. J'ai peut-être

6 répéter verbatim mes déclarations que j'avais faites en 1997 et 1998, mais

7 je ne peux pas le garantir d'avoir vraiment répété des choses de façon

8 identique. C'est pour cela que je vous demande aujourd'hui, lors de cette

9 audience, enfin je vous demande, quand on me pose les mêmes questions que

10 celles qui m'ont été posées lors de mon interview avec Zahar, j'aimerais

11 savoir aussi quelles sont les réponses que j'ai données en 1997 et 1998.

12 J'aimerais que le compte rendu me soit lu dans ma propre langue pour ce qui

13 est de l'interview, ou plutôt des dépositions que j'ai données à l'époque.

14 C'était des informations qui étaient encore très proches de mon esprit, de

15 ma mémoire. Les événements venaient juste d'arriver. Ils étaient étayés par

16 de nombreux documents. Il y a des centaines de ces documents qui ont été

17 donnés au Tribunal de La Haye. J'ai fait partie d'ailleurs de tout ceci à

18 l'époque. Mais je ne peux pas garantir que dans la conversation que j'ai

19 eue avec Zahar, je puisse répéter verbatim ce que j'ai dit en 1997 et 1998.

20 Or, pourtant, ce sont ces déclarations-là qui, à mon avis, sont les plus

21 fidèles puisque c'était très près chronologiquement des événements.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Monsieur Subotic, il est vrai que

23 quand on compare vos dépositions précédentes avec la déclaration que vous

24 avez faite il y a quelques semaines, quelques questions peuvent être

25 soulevées, en tout cas, en ce qui concerne la Chambre. C'est vrai que nous

26 avons des questions, cela nous a mené à certaines interrogations. Il est

27 évident que quand il y aura des contradictions entre les dépositions, nous

28 vous interrogerons à ce propos. Cela dit, la Chambre comprend bien qu'en

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1 1997, les événements étaient encore très frais dans votre mémoire, et

2 maintenant, nous sommes quand même dix ans plus tard, pratiquement dix ans

3 plus tard.

4 Pour revenir à ma question, voulez-vous, oui ou non, corriger la

5 déclaration, donc la synthèse qui a été faite ? Ma question suivante est de

6 savoir si vous voulez ajouter quoi que ce soit avant que vous n'adoptiez

7 officiellement cette déclaration comme étant une déclaration que vous avez

8 bel et bien faite, qui reflète bien ce que vous avez dit.

9 R. J'aimerais demander une correction. Il y a deux erreurs à la page 5.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'imagine que c'est la

11 page 5 de la version en B/C/S.

12 R. Tout à fait.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourriez-vous nous dire exactement ce

14 qui, à votre avis, est erroné dans votre langue, donc en B/C/S, pour que

15 les interprètes puissent vérifier ainsi que nous.

16 M. TIEGER : [interprétation] J'imagine, que tout comme le nôtre,

17 l'exemplaire de M. Subotic a été numéroté. Ce sont les paragraphes qui sont

18 numérotés. Donc, ce serait peut-être plus facile de s'y retrouver grâce aux

19 numéros de paragraphes.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Nous parlons de la page 5.

21 Mais de quel paragraphe ?

22 R. Nous parlons du paragraphe 17.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.

24 R. La ligne 3, la troisième ligne du paragraphe 17. Il est écrit ici que

25 j'étais vice-président de la municipalité de Banja Luka en tant que

26 lieutenant. Mais j'étais colonel.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ecoutez, de toute façon en anglais, on

28 vous a promu colonel. Vous êtes bel et bien colonel et non pas lieutenant

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1 comme en B/C/S. Il semblerait que l'erreur ne soit que dans la version en

2 serbe.

3 R. Très bien. Tant mieux.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maintenant, c'est sur le PV. Y a-t-il

5 d'autres corrections ?

6 R. Oui, c'est toujours à la page 5, paragraphe 17, dernière phrase. Voici

7 ce qui est écrit : "Dans l'ex-Yougoslavie, j'ai été élu en tant que

8 représentant de la JNA de Banja Luka. J'ai été élu en tant que membre du

9 gouvernement municipal." Ce n'est pas membre exactement, mais en tant que

10 député plutôt que membre, donc député.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous voulez parler de l'assemblée

12 municipale ? Je ne sais pas de quoi vous parlez là. Pour nous, l'assemblée

13 s'appelle --

14 R. Vous pouvez l'envisagez de la sorte, en effet. J'étais uniquement

15 député, c'est-à-dire que j'étais élu. Bon, un député, ce n'est pas grand-

16 chose; c'est juste un poste provisoire dans le monde politique. J'étais

17 militaire de profession, bien sûr. Alors que "membre", là, enfin, en tout

18 cas, en B/C/S, cela signifie que l'on appartient uniquement qu'à une seule

19 sphère. Donc, là, il faudrait plutôt mettre député.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Nous allons corriger la chose.

21 Y a-t-il d'autres rectificatifs, Monsieur Subotic ?

22 R. Paragraphe 23, page 7. Je peux y aller ?

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

24 R. Ici, dans la dernière phrase, on dit : "Si à titre privé" - et cela se

25 rapporte à M. Krajisnik - "si à titre privé, il a eu quoi que ce soit à

26 voir, je ne suis pas au courant de la chose. Mais il n'a pas eu les

27 compétences de communiquer quelque décision que ce soit à l'intention de

28 quiconque." Il faudrait que cela se lise :

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1 "S'il y a eu des liens quelconques à titre privé, je n'en savais rien. Il

2 n'avait pas les attributions nécessaires pour communiquer quelques

3 décisions que ce soient parce que personne n'était tenu de se conformer à

4 ses ordres. Il y a une différence entre décision et ordre.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Certes. Dans la version anglais, on voit

6 le mot "ordre," ce qui fait qu'il n'est point nécessaire de procéder à des

7 rectificatifs quelconques dans la version anglaise. Compte tenu du

8 commentaire que vous venez d'apporter, il conviendra de se pencher sur la

9 version B/C/S parce que cette déposition a d'abord été rédigée en anglais

10 et ensuite traduite en B/C/S.

11 Je voudrais proposer aux parties en présence et de demander à M.

12 Subotic, mais je vais y revenir plus tard.

13 Monsieur Subotic, vous êtes en train de nous dire que ce sont là les

14 corrections que vous aimeriez voir faites. Nous allons en prendre soin. Il

15 s'agit là de points très importants. J'aimerais vous demander si vous

16 souhaiteriez ajouter quoi que ce soit. Il s'entend que vous souhaiteriez

17 certainement ajouter bon nombre de choses, mais est-ce que vous voulez

18 ajouter quelque chose qui voudrait modifier une chose, une chose qui

19 voudrait modifier la signification de votre déposition ?

20 R. Monsieur le Président, je n'ai pas la possibilité de décider d'une

21 chose pareille en ce moment-ci. Je veux ménager la possibilité au travers

22 des questions que vous poserez si vous avez besoin de complément ou

23 d'éclaircissement de le dire et je me mets à votre disposition pour les

24 apporter.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, nous allons le faire.

26 Je proposerais aux parties en présence la chose suivante : nous allons

27 convier M. Subotic à signer sa déposition et nous demanderons à M. Le

28 Greffier d'audience une cote d'enregistrement, après avoir procédé aux

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1 corrections en version en B/C/S, étant donné que le problème ne se pose pas

2 en version anglaise. Ensuite, nous pourrions continuer si les deux parties

3 sont d'accord sur cette façon de procéder.

4 M. HARMON : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

5 M. JOSSE : [interprétation] Oui.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Subotic, nous allons procéder à

7 ces petites rectifications, et suite à cela, il vous sera présenté un

8 document afin que vous puissiez le signer, et ce document deviendra par la

9 suite pièce à conviction. Nous n'allons pas vous demander de répéter tout

10 ce que vous avez déjà dit puisque c'est déjà couché sur papier, mais pour

11 le public, il conviendrait de donner lecture du résumé de votre déposition

12 afin que le public ait une impression sur ce que votre déposition contient.

13 Avant de faire cela, Monsieur le Greffier, voulez-vous nous donner une

14 cote ?

15 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce C3, Messieurs les Juges.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La cote sera le C3.

17 Je crois que tout un chacun dispose du texte de la déposition ?

18 M. HARMON : [interprétation] Oui, bien sûr, Monsieur le Président.

19 M. JOSSE : [interprétation] En effet.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Une fois versée au dossier, vous

21 allez recevoir une nouvelle copie.

22 M. JOSSE : [interprétation] Est-ce que vous êtes en train de parler du

23 résumé ?

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, non. Je suis en train de parler de

25 déposition toute entière.

26 M. JOSSE : [interprétation] Oui, mais nous l'avons déjà.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, vous l'avez, mais vous n'avez pas

28 reçu le résumé, le résumé a été préparé. Je vais vous donner lecture du

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1 résumé comme d'habitude, et ce résumé n'est pas pièce à conviction, c'est

2 destiné à l'information du public.

3 La déposition sera versée, elle, au dossier en application de l'article

4 89(F) une fois signée.

5 Je me propose à présent de reprendre avec le résumé de la déposition du

6 témoin avec les petites rectifications que le témoin a mentionnées.

7 Pour ce qui est de votre déposition, son résumé serait le suivant,

8 Monsieur Subotic :

9 En 1992 vous avez été adjoint du commandant de l'école militaire pour

10 les forces blindées à Banja Luka. Le Pr Koljevic est venu à Banja Luka pour

11 vous demander d'accepter les fonctions de ministre de la Défense. A la date

12 du 8 avril 1992, vous êtes allé à Pale pour mettre en place un ministère de

13 la Défense. Pendant à peu près un an, vous avez assumé ces fonctions de

14 ministre de la Défense.

15 Le premier des pas que vous ayez entrepris en qualité de ministre de

16 la Défense a été celui de la rédaction d'une loi portant sur la Défense et

17 Forces armées. Le rôle du ministre de la Défense a été essentiellement

18 politique. Les fonctions de celui-ci étaient strictement limitées. Le

19 ministère de la Défense n'a pas fait partie de la chaîne de commandement de

20 l'armée. Ce qui fait que le ministre de la Défense n'a pas été celui qui a

21 pris des décisions concernant le commandement au sein de l'armée.

22 Vous n'avez pas reçu de rapports de combat et l'armée n'avait pas

23 l'obligation de vous fournir de tels rapports.

24 Vous avez déclaré que pendant cette période, à savoir, du 8 avril

25 1992 au 12 mai de la même année, les forces armées des Serbes de Bosnie

26 n'ont été organisées de façon appropriée. Il n'y a pas eu de commandement

27 Suprême. Les unités se trouvaient être auto organisées. Dans la période qui

28 a suivi, à savoir, depuis le 12 mai 1992 jusqu'à la fin de l'année 1992,

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1 vous avez présenté des rapports rien qu'au gouvernements et au commandant

2 suprême, à savoir, au président de la république.

3 Vous avez également déclaré que les Serbes de Bosnie, avant le début

4 du conflit, n'ont pas eu de plan pour ce qui était de s'emparer de

5 territoires. Vous avez également dit qu'il y a eu beaucoup de peur

6 justifiée auprès de la population serbe de Bosnie et que les efforts des

7 Serbes avaient été dirigés vers la préservation de la Yougoslavie. Vous

8 avez dit également que vous avez eu de bonnes relations avez M. Krajisnik.

9 Vous avez dit qu'il n'y a pas eu de dédoublement des fonctions de part et

10 d'autre et que les obligations de M. Krajisnik, elles, étaient strictement

11 définies. Il a participé à bon nombre de réunions en sa qualité de

12 président du Parlement.

13 M. Krajisnik n'avait pas l'autorité nécessaire pour ce qui était de

14 donner quelque ordre que ce soit. Il a tout simplement présidé aux réunions

15 de l'assemblée et a procédé à la signature des décisions prises par cette

16 dernière.

17 En votre qualité de ministre de la Défense, vous n'avez pas été d'accord

18 avec la façon dont le général Mladic a conduit les affaires militaires, ce

19 qui vous a amené à proposer votre démission à l'assemblée des Serbes de

20 Bosnie dès août 1992. Le problème avec Mladic, d'après vous, a été celui de

21 le voir se comporter en commandant du Grand état-major. Vous avez averti

22 l'assemblée du fait qu'il ne vous était pas possible de fonctionner sous

23 deux commandants en même temps, à savoir, sous le commandement de Mladic et

24 du Dr Karadzic.

25 Vous avez décrit Mladic comme étant têtu, obsédé par sa propre

26 personnalité, et comme une personne qui n'a pas tenu compte des opinions

27 d'autrui. En votre qualité d'intellectuel, vous vous considérez étant très

28 proche du premier ministre Djeric, du ministre des Affaires étrangères,

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1 Buha, et du président Karadzic.

2 Pour ce qui est de la prolifération des armes, vous avez déclaré qu'un

3 tiers des armes à l'école de Banja Luka, dont vous avez eu le commandement,

4 avait abouti entre les mains de l'administration de la RAK à Banja Luka et

5 que cela a été utilisé par les Serbes locaux de Banja Luka.

6 Vous avez également déclaré que l'autorité, pour ce qui était de rendre des

7 décisions, était celle du commandement Suprême à la tête de quoi se

8 trouvait le président de la république. Et lui prenait ses décisions après

9 avoir consulté les membres du commandement Suprême.

10 M. Krajisnik a participé à la stratégie militaire rien qu'en sa qualité de

11 membre du commandement Suprême.

12 Pour ce qui est des opérations stratégiques, celles-ci ont été élaborées

13 par le Grand état-major, et c'est Mladic qui en a été chargé. Et lui

14 présentait cela pour information au commandement Suprême.

15 Vous avez également déclaré que les régions qui composaient la

16 Republika Srpska n'ont pas comportées de pouvoirs militaires pour ce qui

17 est de cette date du 12 mai 1992. Pour ce qui est du mois d'avant, ils se

18 sont appuyés sur les unités de la Défense territoriale, mais pendant la

19 période en question, il n'y a point eu d'opérations militaires d'envergure.

20 Vous avez également déclaré que Vojin Vuckovic, le chef des Guêpes jaunes,

21 un groupe paramilitaire, a visité Pale dans la deuxième moitié de juillet

22 1992. A ce moment-là, vous avez rédigé un ordre présidentiel disant qu'à

23 partir du 12 mai, toutes les unités armées se devaient d'être placées sous

24 le commandement de l'armée de la Republika Srpska. Vous avez expliqué à

25 Vuckovic le fait que les unités paramilitaires ne devaient plus être

26 tolérés.

27 Dans votre déposition, vous dites que vous n'avez pas eu d'information

28 directe concernant des camps illégaux sur le territoire de la Republika

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1 Srpska. Vous avez appris par les médias de l'existence des camps de Manjaca

2 et Omarska, mais vous avez cru que ces informations étaient fabriquées de

3 toutes pièces. Le président de la Republika Srpska a donné des ordres pour

4 ce qui est de procéder à des vérifications concernant les allégations

5 relatives à l'existence de ces camps.

6 Vous avez également précisé que vous n'étiez pas au courant des attaques

7 des Serbes de Bosnie à l'encontre du village de Glogova à la date du 9 mai

8 1992, pas plus que vous n'avez eu de connaissance des allégations relatives

9 au pilonnage sans discernement de la ville de Sarajevo entre le 15 et le 20

10 juin 1992. Si tant est que Radovan Karadzic a véritablement donné des

11 ordres de pilonner Sarajevo, avez-vous déclaré, vous l'auriez su.

12 Vous n'avez également pas entendu parler des opérations de la vallée de la

13 Japra en fin mai 1992 pendant laquelle quelque 4 000 personnes originaires

14 d'agglomérations musulmanes auraient été déplacées vers le village de

15 Blagaj Japra par des forces serbes. Et vous avez déclaré que si une

16 opération de cette nature a été conduite, il n'y avait aucune corrélation

17 entre ceci et les autorités civiles de Pale.

18 Un incident dont vous avez toutefois entendu parler a porté sur les

19 exécutions en masse de détenus musulmans à Koricanske Stijene. Vous avez

20 déclaré que le Dr Karadzic a reçu un rapport au sujet de ces incidents du

21 MUP de Banja Luka. Il a organisé une session ad hoc de la présidence. Vous

22 avez reçu l'ordre d'aller à Banja Luka pour vous renseigner et de présenter

23 un rapport, une chose que vous avez faite.

24 Ceci met fin au résumé de votre déposition.

25 Les Juges auraient quelques questions supplémentaires à vous poser. Il

26 conviendrait de commencer par cela.

27 Nous vous demanderons au tout début de vous pencher sur le paragraphe 24 de

28 votre déposition. Avez-vous sous les yeux votre déposition ?

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1 R. Oui.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Au paragraphe 24 de votre déposition,

3 vous parlez d'une session de l'assemblée des Serbes de Bosnie qui s'est

4 tenue le 12 août 1992. A l'intention des parties en présence, je précise

5 qu'il s'agit de la pièce à conviction P583, intercalaire 87.

6 Une transcription vous sera communiquée par Mme l'Huissière et à ce sujet,

7 j'aimerais vous demander ou plutôt, je vais vous donner lecture d'un

8 passage dudit compte rendu et je vous demanderais de le commenter. Je

9 commencerais ma lecture au bas de la page 57, version anglaise.

10 Il s'agirait pour ce qui est de la version B/C/S, ce serait la partie de

11 votre intervention commençant page 54 de cette version B/C/S et cela va

12 jusqu'à peu près une page au-delà de l'endroit où je commencerais ma

13 lecture. Je me propose d'abord de donner lecture de la partie où c'est vous

14 qui intervenez. Vous dites : "Laissez-moi vous dire d'abord ceci. Personne

15 ne m'informe de quoi que ce soit de ce qui se passe au sein de l'armée."

16 Monsieur Subotic, avez-vous retrouvé ce passage ?

17 R. Oui, je l'ai retrouvé.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] "Deuxièmement," et là je vous cite,

19 "Deuxièmement, je ne participe à aucune décision pour ce qui est de l'armée

20 de la Republika Srpska. Je n'ai le droit de donner aucun ordre à la VRS. Je

21 ne suis pas en mesure de répondre à mes devoirs les plus élémentaires à

22 l'égard du gouvernement qui me demande de fournir des informations

23 quotidiennes ainsi que de formuler des suggestions, et ainsi de suite. En

24 ma qualité de ministre de la Défense, je n'ai pas été impliqué dans quelque

25 négociation que ce soit au nom du gouvernement de la Republika Srpska

26 concernant tant des questions militaires que d'autres questions. Je n'ai

27 été jamais consulté en quoi que ce soit. Toutes mes comparutions devant le

28 public, en ma qualité de ministre de la Défense, ne se basaient que sur le

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1 sentiment personnel que j'avais des choses et ce que j'avais pu constater

2 par moi-même. Je n'ai pas eu de pièces officielles qui étayeraient ces

3 points de vue."

4 Dans le paragraphe d'après, je continue à vous citer. Vous dites : "Avec le

5 Grand état-major de l'armée, je n'ai peu ou pas de contacts. En ma qualité

6 de ministre de la Défense, je ne me suis jamais entretenu avec le

7 commandant du Grand état-major. Ce n'est que très rarement que j'ai eu des

8 contacts avec d'autres membres du commandement. Ce n'est que quand cela a

9 été nécessaire que ces contacts ont eu lieu de leur côté à eux. Il ne m'a

10 pas été possible d'entrer en contact avec eux jusqu'à il y a un mois."

11 Un peu plus loin dans cette intervention, vous dites que vous avez

12 répondu au général MacKenzie que vous vous trouviez essentiellement sur le

13 terrain. Et vous dites, je cite une fois de plus que vous avez inspecté les

14 lignes de front de la Republika Srpska sur votre propre initiative sans

15 être annoncé, sans escorte et sans être reçu par quiconque.

16 Ma première question pour vous est la suivante, Monsieur Subotic : pouvez-

17 vous nous dire combien de personnel il y avait au sein du ministère de la

18 Défense en août 1992 ?

19 R. Je ne m'en souviens pas exactement, mais je dirais que c'était un

20 nombre relativement faible d'employés, une trentaine, je pense, pour ce qui

21 est du ministère même, du siège du ministère, parce qu'il y a eu également

22 des organisations locales, à savoir, les départements militaires et les

23 sections militaires dans les municipalités, d'antennes du ministère sur le

24 terrain.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, certes. Pourriez-vous nous dire si

26 ces 30 personnes ont été réparties par section au sein du ministère ? En

27 avez-vous eu des sections, et si oui, quel type de répartition de tâches y

28 avait-il ?

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1 R. J'avais un adjoint. J'avais un secteur chargé de la logistique, ou nous

2 appelons cela la sécurisation des arrières. Puis, j'avais une section

3 chargée des finances. J'avais un département juridique, un département

4 chargé de la mobilisation et des affaires liées au personnel.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ces départements ont-ils eu le même

6 nombre d'employés ? Pouvez-vous, par exemple, nous dire combien d'employés

7 il y avait par secteur ? Par exemple, pour la logistique, combien y avait-

8 il de personnes, d'après vos souvenirs ?

9 R. Cinq ou six personnes.

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Aux finances, le même nombre ?

11 R. Trois ou quatre.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pour ce qui est des affaires

13 juridiques ?

14 R. Egalement deux, trois, voire quatre, à peu près.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Tâches liées à la mobilisation ?

16 R. Là, il y en a eu un peu plus, une dizaine.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et les questions liées au personnel ?

18 R. A peu près la même chose, pas plus de cinq personnes. Je ne sais pas au

19 juste.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans cette intervention dont on vient de

21 donner lecture tout à l'heure, vous précisez que vous vous êtes procuré

22 certaines informations à titre personnel, sans que cela ne soit étayé à

23 titre officiel. Qu'aviez-vous à l'esprit comme informations ?

24 R. Informations qui se rapportaient à l'armée, à la conduite des

25 différentes opérations.

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] De quelle façon vous êtes-vous procuré

27 ces informations-là ?

28 R. Pour l'essentiel, c'était les rapports qu'obtenait le commandement

Page 26434

1 Suprême, à savoir, le président de la république qui, pour certaines

2 parties de ces rapports, ont été convoyées vers le ministère avec des

3 requêtes visant à résoudre des questions, ou s'il y avait des demandes

4 formulées par l'armée vis-à-vis du gouvernement concernant notamment les

5 approvisionnements visant à satisfaire les besoins de la guerre, le premier

6 ministre me donnait cela à étudier. Ou alors, des personnes venaient-elles

7 à s'adresser directement à nous, des individus, des gens qui étaient de

8 passage, et cetera.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ceci semble être quelque peu différent

10 du début de votre déposition où vous indiquez : "Laissez-moi vous dire ce

11 qui suit. Personne ne m'informe de ce qui se passe au sein de l'armée."

12 C'est ce que vous y avez dit. Dans la réponse que vous venez de donner,

13 j'entends que vos informations provenaient, pour l'essentiel, des rapports

14 obtenus par le commandant suprême, le président de la république, et que

15 des parties desdits rapports se trouvaient être convoyées vers le

16 ministère.

17 Est-ce que vous pouvez expliquer ?

18 R. Cela se rapportait seulement aux déclarations qui se rapportaient au

19 ministère de la Défense; logistique, mobilisation.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Certes. Alors, dois-je comprendre que

21 lorsque vous indiquez que vous vous êtes procuré certaines informations

22 vous-même, c'était des informations qui ne se rapportaient pas à la

23 logistique, mais à des questions opérationnelles ?

24 R. Non. Quand j'ai eu l'occasion de visiter, d'inspecter, voir comment les

25 gens étaient approvisionnés, comment ils vivaient, comment ils se

26 nourrissaient mais sans l'approbation du commandant du Grand état-major, je

27 n'avais pas le droit d'aller dans les secteurs où il y avait des conflits.

28 Je ne pouvais me rendre que dans des lieux de cantonnement d'unités.

Page 26435

1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Quand je vous ai posé la question de

2 savoir de quel type d'informations il s'agissait là, vous avez auparavant

3 dit que c'était des informations relatives à l'armée et à la conduite de

4 certaines opérations. Alors, j'ai cru comprendre qu'il s'agissait au moins

5 d'informations relatives aux opérations.

6 R. Non. Cela concernait l'approvisionnement, la logistique.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez dit que vous n'aviez pas eu la

8 permission de vous rendre sur les positions où les unités étaient

9 cantonnées ou positionnées.

10 R. Oui, c'est cela.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans votre discours prononcé lors de la

12 réunion de l'assemblée, vous avez dit que vous n'avez jamais parlé au

13 commandant de l'état-major, et que très rarement, vous avez eu des contacts

14 avec d'autres membres du commandement, mais également, que vous vous étiez

15 rendu sur toutes les lignes de front de la République serbe, de la

16 Republika Srpska. J'essaie simplement de comprendre ce que vous vouliez

17 dire par vous vous étiez rendu sur la ligne de front. Et vous avez dit que

18 vous n'aviez pas le droit de vous rendre à certains endroits, qu'il vous

19 était nécessaire d'obtenir la permission de commandants militaires que vous

20 pouviez contacter avec beaucoup de mal. Est-ce que vous pourriez préciser

21 un peu votre point, élaborez, je vous prie, car ce que vous dites lors des

22 observations faites dans votre discours ne correspondent pas tout à fait

23 avec les réponses que vous avez données ici devant nous ?

24 R. Voyez-vous, Monsieur le Juge, j'étais général, j'étais ministre de la

25 Défense. Très souvent, je portais un uniforme et j'endossais mon uniforme

26 seulement lorsque je m'approchais des unités militaires ou lorsque j'allais

27 les voir. C'était tout à fait normal que j'aille les voir puisque j'étais

28 leur ministre de la Défense. Je me rendais là également lorsqu'il y avait

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1 des fêtes, et cetera. Mais également, selon la loi et selon mon devoir, il

2 m'a fallu être présent lors de ces fêtes. A chaque fois que j'avais

3 l'occasion, je me rendais sur place pour être vu. C'était une obligation

4 morale de ma part de me rendre là-bas, d'être sur place et de voir si les

5 gens sont bien approvisionnées, si ce qu'on leur a envoyé s'était bien

6 rendu, et cetera. Mais je n'avais pas la possibilité de me rendre sur les

7 lignes de front qui étaient prises par un conflit qui faisait l'objet d'une

8 bataille, d'un combat, et cela faisait partie de mes tâches et obligations.

9 Je savais que je n'avais pas le droit de me rendre sur les lignes qui

10 étaient engagées dans ces échanges de tir, je ne pouvais me rendre que sur

11 les lignes de Défense pour rendre visite aux hommes qui étaient cantonnés

12 dans les casernes ou dans les tranchées pendant une période plus longue.

13 Donc, c'est à ce moment-là que je pouvais aller les voir. Je pouvais

14 également rendre visite au commandement des unités qui n'étaient pas

15 situées peut-être directement sur les lignes de front, mais peut-être tout

16 près des lignes de front. De ce fait, je n'ai jamais été, comme on dirait,

17 en contact avec le feu, avec les tirs. Ce n'était pas logique, cela ne me

18 convenait pas, mais c'était ainsi; c'était ce qu'il fallait faire. C'était

19 une des raisons pour lesquelles j'ai soumis ma résignation.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous pourriez nous donner

21 deux exemples de situation lorsque vous vous êtes rendu sur les lignes de

22 front, lorsque vous êtes allé visiter les troupes, même si vous n'étiez pas

23 tout à fait près des positions de combat ? Est-ce que vous pourriez nous

24 donner quelques exemples sans entrer trop en détail ?

25 R. Voyez-vous, par exemple, je me souviens très bien des unités de

26 Majevica, que je suis allé visiter sur la ligne Gradacac. Je ne me souviens

27 pas d'autres endroits, mais c'était là sur une ligne qui se trouve entre

28 Gradacac, Pelagic, donc sur Majevica. Les unités qui se trouvaient à cet

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1 endroit-là, lorsque j'allais leur rendre visite, n'étaient pas en situation

2 de combat. C'est-à-dire qu'ils attendaient, ils étaient prêts, ils étaient

3 en situation d'attente. Je les ai trouvés dans des tranchées. J'ai vu, j'ai

4 examiné, j'ai examiné les tranchées, j'ai constaté comment ils étaient

5 habillés, comment ils étaient nourris, et cetera. Je me souviens d'avoir

6 parlé avec les hommes et je me souviens avoir été quelque peu étonné.

7 Voilà, pour vous donner un exemple typique, j'ai été étonné de voir dans

8 ces tranchées, sur les positions de défense, d'avoir trouvé un très grand

9 nombre de soldats musulmans qui faisaient partie de l'armée serbe. Je

10 m'étais entretenu avec eux également.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourriez-vous nous dire

12 ceci, lorsque vous vous êtes rendu là-bas, c'était quand, et dans quelle

13 municipalité puis-je trouver Majevica ?

14 R. C'est les municipalités de Bijeljina.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Merci. Bijeljina. Est-ce que

16 vous pouvez nous dire une date approximative à laquelle vous vous étiez

17 rendu dans cette municipalité ?

18 R. Je dirais que c'était au mois d'août. En fait, c'était l'été. Je ne

19 suis pas tout à fait certain du mois. C'était peut-être même en début

20 septembre. Il faisait chaud, je me souviens bien de cela.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'accord. Merci. Dans votre discours,

22 vous dites également que ce n'était qu'en juillet 1992 que vous aviez été

23 en mesure d'entrer en contact avec les membres du commandement de l'armée.

24 Qu'est-ce qui a fait en sorte que ce contact en juillet était devenu

25 possible ?

26 R. Probablement, ma plainte que j'avais formulée auprès du président de la

27 république, du gouvernement plutôt, car le président avait demandé un

28 certain nombre de propositions. Enfin, il avait demandé que je lui donne

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1 des propositions. Et probablement, lorsqu'il y a eu des réunions

2 précédentes, il m'avait posé un certain nombre de questions, et je lui

3 avais dit que je n'étais pas du tout au courant de la situation de façon

4 directe. Je présume qu'il s'était entretenu avec des membres de l'état-

5 major. Il m'a dit par la suite : "Rendez-vous sur place, examinez la

6 situation, vérifiez le tout." C'est ainsi, qu'à l'époque, je n'ai pas eu

7 d'empêchements. Ensuite, je me souviens de m'être rendu auprès d'une unité

8 sur la rivière Save qui se trouve entre Brod et Svilaj. Donc, les unités se

9 trouvaient sur les rives de la rivière Save. Ces unités tenaient les

10 positions qui se trouvaient des deux côtés de la rivière, donc du côté

11 serbe, sur la rive droite de la Save. Je m'étais rendu sur place pour

12 visiter une région assez étendue. Il y avait deux brigades qui étaient

13 cantonnées sur cette ligne, qui protégeaient la rive droite de la Save.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] De quelle région s'agit-il ? Pourriez-

15 vous être un peu plus précis, je vous prie ?

16 R. C'était entre Orasje, jusqu'à Brod. Il s'agit d'une ligne qui fait

17 environ 30 kilomètres.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vois. Je l'ai trouvé. C'est dans la

19 partie nord-ouest située tout près de la frontière croate; est-ce exact ?

20 R. Oui, la rivière Save agissait en tant que frontière avec la Croatie. Et

21 du côté bosnien, il y avait des unités du corps de Banja Luka.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Je vois.

23 Le Juge Hanoteau souhaiterait vous poser une question, Monsieur.

24 M. LE JUGE HANOTEAU : Monsieur, dans ce même ordre d'idées, dans ce

25 registre de questions qui viennent de vous être posées, vous avez dit :

26 [interprétation] "Je n'ai pas eu la permission de me rendre auprès de

27 certaines unités de combat ou les unités étaient cantonnées." [en français]

28 Et aussi ajoutez : [interprétation] "Je n'avais pas le droit de me rendre

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1 voir les unités qui étaient impliquées."

2 R. Oui, tout à fait. C'est exactement ce que j'ai dit.

3 M. LE JUGE HANOTEAU : Ma première question : où était-il écrit que vous

4 n'aviez pas le droit de visiter les unités qui étaient impliquées dans le

5 combat ? Est-ce qu'il y avait une disposition formelle qui vous

6 l'interdisait ?

7 R. Non, non. La réponse était non. Il n'y a pas eu de disposition

8 officielle. Si je faisais mon apparition dans un secteur, je venais à être

9 arrêté par la police militaire ou par une unité militaire quelconque.

10 Celle-ci mes prévenait de l'ordre du commandant du Grand état-major, qui

11 sera porté à l'interdiction de voir quiconque accéder aux zones de combat.

12 Quand je disais à ces gens-là que j'étais ministre de la Défense et que

13 j'étais censé voir, on me disait qu'il y avait des ordres explicites disant

14 que personne ne devait entrer dans les zones des activités militaires. Je

15 rebroussais mon chemin, parce que je ne voulais pas que ces soldats

16 viennent à avoir à répondre de leurs comportements et j'en informais, pour

17 ma part, le premier ministre.

18 M. LE JUGE HANOTEAU : Il y a eu des cas où vous vous êtes présenté sur des

19 zones de combat et on vous a refusé l'accès; c'est bien cela ?

20 R. J'ai essayé, oui. J'ai essayé d'y aller, mais je n'ai pas pu passer. Et

21 là où il n'y a pas eu d'opération de combat, là où les unités n'étaient que

22 cantonnées, là, il n'y a pas eu d'interdiction de cette nature, ce qui fait

23 que j'ai pu à quelques endroits inspecter de telles unités parce que

24 personne ne m'a arrêté.

25 M. LE JUGE HANOTEAU : Combien de fois cela vous est arrivé de vous heurter

26 à un refus d'accès au terrain de combat ?

27 R. Je n'en suis pas tout à fait certain pour le dire affirmativement, mais

28 je crois pouvoir quand même dire avoir été stoppé au moins une dizaine de

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1 fois. J'en ai régulièrement informé le premier ministre. Et lui, en

2 informait le président de la république.

3 M. LE JUGE HANOTEAU : Est-ce qu'il vous est arrivé de demander

4 l'autorisation du commandement pour aller sur ces zones de combat où vous

5 auriez pu légitimement, en tant que ministre de la guerre, vouloir

6 constater sur les lieux ce qui se passait, vous auriez pu demander

7 l'autorisation ?

8 R. Mon honneur ne me permettait pas ce type d'humiliation. En ma qualité

9 de ministre de la Défense, je n'avais rien à demander au chef du Grand

10 état-major. J'avais un président de la république, j'avais un premier

11 ministre et je ne lui ai pas fourni l'opportunité de manipuler comme bon

12 lui semblait de ce que je pouvais faire ou pas. Quand j'ai présenté cette

13 question aux réunions, à l'une desdites réunions, le général Mladic se

14 trouvait à être présent et il a dit : "Toi, Ministre, veille aux vivres,

15 aux munitions, aux couvertures et les opérations ne te regardent pas." Et à

16 ce moment-là, j'ai décidé de démissionner.

17 M. LE JUGE HANOTEAU : Je vous remercie.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourriez-vous me dire, je vous prie,

19 quand vous vous rendiez sur les lieux, de quelle façon vous le faisiez ?

20 R. Je voyageais à bord d'une jeep et j'étais toujours accompagné d'un

21 homme, c'était le chauffeur. Je n'avais pas d'escorte, je n'avais aucun

22 autre membre avec moi. Il n'y avait pas d'hommes avec moi.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous vous déplaciez des fois

24 à bord d'un hélicoptère ?

25 R. Non, non. Ce n'était pas disponible.

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Subotic, je vois qu'il est

27 l'heure de la pause et je vais passer à un autre sujet après la pause, et

28 nous reprendrons nos travaux dans 25 minutes. La nouvelle version de votre

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1 déclaration avec les légères corrections sera peut-être prête après la

2 pause et nous vous demanderons à ce moment-là de la signer.

3 C'est l'heure de la pause et nous reprendrons à 11 heures.

4 --- L'audience est suspendue à 10 heures 34.

5 --- L'audience est reprise à 11 heures 07.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Subotic, la déclaration

7 corrigée a été préparée. Il n'est pas nécessaire de signer les documents

8 tout de suite. Je vous demanderais de signer la page de garde plus tard.

9 Vous verrez le document en B/C/S et vous pourrez nous le remettre plus

10 tard.

11 Je crois qu'il n'est pas nécessaire de demander à M. Subotic de

12 signer ou de poser ses initiales sur la version anglaise tout du moins, je

13 ne crois pas que c'est nécessaire mais nous allons demander aux interprètes

14 et M. Zahar de signer, le témoin de signer les versions en langue anglaise.

15 Monsieur Subotic, je souhaiterais poursuivre en vous posant un certain

16 nombre de questions.

17 Le conférencier qui a pris la parole après vous, Monsieur Subotic, ce

18 12 août était le Dr Karadzic et je parle toujours de cette même session de

19 l'assemblée. Ensuite, a pris la parole

20 M. Bijelic, vous le retrouverez à la page 61 en anglais. D'abord,

21 dites-nous, Monsieur, qui était M. Bijelic ?

22 R. Je ne me souviens pas tout à fait bien de lui. Si je me souviens bien,

23 c'était un député. Je ne me souviens pas de son nom. Je pourrais

24 reconnaître son visage et sa stature, il était un peu petit de taille. Je

25 ne sais pas de quelle municipalité il provenait. Je ne me souviens plus. Il

26 était peut-être de la Krajina, je ne sais pas. Peut-être de Dubica mais en

27 tout cas il venait des alentours de Dubica, mais je ne me souviens pas

28 précisément de son prénom.

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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vais vous donner lecture d'une partie

2 du discours qu'a prononcé M. Bijelic. Il a dit : "Un très grand nombre de

3 choses ne sont pas bonnes dans l'armée, selon mon expérience. J'espérais

4 que nous pourrions débattre de cette question aujourd'hui. J'avais cru que

5 c'était le résultat de cela. Un très grand nombre d'armées se rendent sur

6 les champs de bataille de la Republika Srpska et je ne sais pas à qui ils

7 appartiennent. Ils font une guerre privée. Je ne sais pas au nom de qui ils

8 le font.

9 Je croyais que M. Subotic allait dire quelque chose sur le sujet. Ceci

10 pourrait être des raisons très importantes selon moi, et il nous faudrait

11 en parler aujourd'hui. Je sais de quelle façon l'armée a été créée.

12 Toutefois, en ce moment-ci, lorsque nous aurons l'armée, lorsque nous

13 aurons la présidence de Guerre, ma question est la suivante : qui a besoin

14 des unités paramilitaires ? Qui constituent ces unités paramilitaires ? Au

15 nom de qui ces gens se battent et pour qui ? Je veux en entendre un peu

16 plus là-dessus et je vais demander à M. Subotic de nous en parler,

17 d'élaborer sur la question."

18 Monsieur Subotic, vous n'avez pas eu la possibilité de répondre à M.

19 Bijelic car la discussion de l'assemblée est passée à autre chose. Mais ces

20 questions posées par M. Bijelic, de quelle façon est-ce que vous auriez

21 répondu aux questions posées par M. Bijelic si vous aviez eu l'occasion et

22 la possibilité d'y répondre ?

23 R. Bien, voilà. J'aurais dit sensiblement ceci : nous avons formé l'armée

24 le 12 mai. Ce jour-là, une décision a été adoptée ou prise, mais l'armée a

25 été constituée de façon formelle autour du 20, ou pour être bien honnête

26 avec vous, vers la fin de 1992, car nous n'avions pas pu en un mois ou en

27 une semaine mettre de l'ordre dans tout cela. Vous savez déjà de par mes

28 déclarations que les dispositions de la loi relative à l'armée ont toutes

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1 été faites de façon très précise et à temps, et toutes les dispositions

2 avaient été faites pour la création de l'armée. Ces dispositions, je peux

3 le dire avec certitude, englobaient toutes les unités et elles étaient

4 arrivées jusqu'à chaque formation militaire. Je le sais avec certitude,

5 cela a été vérifié par certains systèmes d'administration, un système

6 d'ordre, et cetera, et je peux le confirmer que ces dispositions étaient

7 parvenues entre les mains de l'armée. Mais je ne peux pas vous garantir que

8 tout cela avait été fait à temps puisque comme vous le voyez ici, M.

9 Bijelic, en réalité, avait tout à fait raison dans sa déclaration à ce

10 moment-là, lorsque cette session de l'assemblée avait été tenue. C'était

11 peu de temps après la création de l'armée, donc une période assez courte.

12 Ces unités n'avaient pas encore été complètement placées sous le

13 commandement de la JNA, ou plutôt, je me reprends, l'armée de la Republika

14 Srpska, devrais-je dire. Mais je peux dire avec une certaine certitude qu'à

15 la fin de 1992, il y avait environ 90 % de tout ceci qui avait été élaboré,

16 la subordination, et cetera. Il y avait peut-être certaines exceptions,

17 mais dans la guerre, vous savez, les exceptions ne sont pas rares.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Vous parlez d'unités. Vous dites

19 que s'agissant d'unités, elles n'étaient pas toutes placées sous le

20 commandement de la JNA ou plutôt de la Republika Srpska. De quel genre

21 d'unités parlez-vous lorsque vous dites cela ?

22 R. Vous savez, dans ma déclaration, je l'ai expliqué, je présume que vous

23 avez lu mes déclarations. C'est-à-dire qu'avant la création formelle de

24 l'armée, il y avait des groupes ou appelons-les unités, pelotons, petites

25 formations, comme vous voulez, de Défense territoriale dans les

26 municipalités, localités, communes locales. C'était dans l'ensemble de la

27 Bosnie-Herzégovine et non pas seulement dans la Republika Srpska. Vous

28 savez que la Défense territoriale existait en Yougoslavie en tant que

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1 système organisé. Il y avait une loi sur la Défense nationale, la Défense

2 territoriale, qui englobait également la Défense civile. Tout ceci

3 fonctionnait conformément aux dispositions de la loi, et c'étaient des

4 formations de la république et des municipalités qui n'étaient pas

5 subordonnées à la JNA. Lorsque la guerre a éclaté en Bosnie-Herzégovine,

6 ils ont commencé à s'organiser. Il est certain que les unités musulmanes

7 avaient formé leurs propres groupes dans leur communauté, les Serbes

8 avaient formé leurs propres groupes également. Lorsque je parlais d'unités,

9 je me référais aux groupes qui étaient créés à l'extérieur du système de

10 l'armée lorsque l'armée n'était pas encore créée de façon officielle. Donc,

11 nous ne parlons pas de brigades ou de bataillons, mais nous parlons plutôt

12 de formations dans les localités.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Je vois que vous avez mentionné les

14 unités de la Défense territoriale. Est-ce que les unités de la police

15 pouvaient faire partie de ces mêmes groupes ? Est-ce que vous incluez

16 également ces derniers ?

17 R. Oui, tout à fait, puisque les unités de la police étaient également

18 existantes au niveau local. Comme elles existaient au niveau local, elles

19 se trouvaient dans les communautés politiques, dans les municipalités et

20 dans les républiques, et cetera. Dans la loi sur la Défense nationale, il a

21 été prévu qu'en cas d'état de guerre, toutes les unités, toutes les

22 formations armées soient placées sous le commandement de l'armée et fassent

23 partie d'une seule et même formation, alors que jusqu'à ce moment-là,

24 chacun existait un peu pour soi.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais quand vous nous avez dit que

26 ces unités n'étaient pas encore subordonnées, est-ce que vous incluiez

27 aussi les unités paramilitaires ?

28 R. Absolument.

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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, M. Bijelic parlait de l'existence

2 de plusieurs armées plus ou moins mal organisées en train de combattre

3 leurs propres guerres, vous pensez qu'il avait raison ?

4 R. Oui, il avait plus ou moins raison. Enfin, peut-être pas dans les

5 détails, mais c'est comme cela qu'il ressentait la chose, c'est comme cela

6 qu'il voyait la chose. Par exemple, il y avait les Guêpes jaunes, cela

7 n'était pas être des unités, ce sont des groupes de cinq ou dix hommes qui

8 faisaient un peu des choses, enfin, sur la base -- j'en ai déjà parlé.

9 Quand cette personne est venue me voir, j'en ai parlé. Donc, c'étaient les

10 opinions de M. Bijelic. On ne peut pas dire que c'était un phénomène de

11 masse, cela dit. Mais peut-être qu'au cours de ces voyages dans la

12 république, il a rencontré par hasard ces petits groupes qui n'étaient

13 peut-être même pas en uniforme complet, d'ailleurs. Peut-être qu'il a

14 trouvé leur conduite un peu étonnante. Mais les ordres avaient été donnés,

15 tout avait été très précisément réglementé, cela j'en suis sûr. Je le sais

16 parce que j'y ai été impliqué personnellement, dans ces travaux. Il y avait

17 un contrôle. Cela dit, on parle quand même d'une période de temps

18 extrêmement courte. Je ne veux pas que la faute retombe sur quelqu'un

19 d'autre, mais c'est vrai que nous étions tous responsables de cela, toutes

20 les personnes qui travaillaient là-dessus. Cela dit, on était en guerre. Je

21 pense que vous savez bien ce qui se passe pendant la guerre, où que soit

22 cette guerre. Même aujourd'hui, les plus grandes puissances, les plus

23 grandes organisations mondiales ne sont pas capables de tout gérer, de tout

24 contrôler. Nous, certainement, à notre petite échelle, on est encore moins

25 capable de le faire.

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais quand vous dites : "Tous, nous

27 tous qui étions en charge de ces travaux étions responsables de cela,"

28 c'est quoi "cela", pour vous, exactement ?

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1 R. A ce moment-là, c'est cette période de temps où les groupes ont dû être

2 pressurés, si je puis dire, pour se trouver sous le commandement de

3 l'armée. C'est cela que je veux dire. A cette époque-là, il y avait des

4 arrestations de groupes. Les Guêpes jaunes, par exemple, avaient été

5 connues aussi sous d'autres sobriquets qu'ils s'étaient d'ailleurs

6 attribués eux-mêmes. Donc, le président de l'Etat, le commandant en chef a

7 rédigé un ordre, et je sais que vous l'avez parce que je le connais parce

8 que j'ai été impliqué dans le fait qu'on vous ait donné ces documents. Il y

9 avait cet ordre que le MUP serbe arrête toutes les personnes armées qui

10 n'avaient pas les documents militaires adéquats avec eux, les désarmer, les

11 arrêter et ensuite les traiter de façon adéquate, enfin, être placées sous

12 arrestation pour être ensuite jugées par les militaires. Alors je ne sais

13 pas très bien, je ne peux pas vous garantir que ceci ait été fait comme

14 cela avait été ordonné, cela dit. C'est peut-être à cela que fait allusion

15 M. Bijelic dans sa discussion. Je ne dis pas qu'il a tort, enfin, il a vu

16 un groupe, il a sans doute raison.

17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous dites : "A la fin 1992, nous avons

18 réussi à exécuter 90 % de notre mission qui était que tous ces groupes

19 soient subordonnés." Pouvez-vous nous dire, en août, donc au moment de

20 cette séance de l'assemblée, où vous en étiez de l'avancement de cette

21 mission ? Est-ce qu'il y avait 50, 70 % des groupes qui étaient maîtrisés

22 en août ?

23 R. Pour être objectif, je crois qu'on en était à peu près à 70 % en août.

24 Mais je veux dire une chose, c'est qu'après cette séance de l'assemblée, le

25 problème a été vraiment pris au sérieux, bien plus au sérieux

26 qu'auparavant. Enfin, c'était une humiliation. J'ai démissionné, donc il y

27 a quand même eu un choc et la situation, du coup, a pu s'améliorer beaucoup

28 plus rapidement parce que les gens se sont un peu rendu compte de ce qui se

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1 passait.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais quand vous faisiez vos tournées,

3 avez-vous observé de visu ce dont parle M. Bijelic ?

4 R. Non. A dire vrai, à trois ou quatre occasions, je me suis rendu compte

5 qu'il y avait en effet ces groupes, les guêpes blanches, par exemple. A

6 Sarajevo, il y avait un autre groupe aussi, enfin, je ne connais plus son

7 sobriquet, mais c'était un groupe qui comprenait environ une dizaine

8 d'hommes. Donc, c'était une mission qu'on m'avait personnellement donnée,

9 d'y aller, de leur parler, et tout ceci a été maîtrisé en un jour. Pour ce

10 qui est de la Sava et des autres territoires où je me suis rendu, là, je

11 n'ai pas rencontré ce type de groupes ou d'unités, ni à Bijeljina non plus

12 d'ailleurs.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Paragraphe 24 de votre déclaration, vous

14 dites, et je cite : "Je n'étais pas d'accord avec la façon dont le général

15 Mladic conduisait les affaires et commandait l'armée. En tant que

16 professionnel, je ne voulais pas continuer à travailler dans ce sens et

17 c'est pour cela que j'ai donné ma démission." Pourriez-vous nous donner

18 quelques détails sur les désaccords qui existaient entre vous et le général

19 Mladic à propos de la conduite des opérations militaires ?

20 R. Ici déjà, je vous ai un petit peu parlé du général Mladic. Je vais

21 donner un exemple de plus, d'ailleurs. C'est ce qui est arrivé le jour de

22 Saint-Vitus, bon le jour du saint patron de l'armée de la Republika Srpska.

23 J'espère que vous savez pourquoi il y a Saint-Vitus; c'est quand il y a eu

24 la bataille du Kosovo. Quand la première Saint-Vitus a été fêtée la

25 première fois, il n'y avait pas encore de guerre. Il y avait eu une grande

26 fête à Sokolac, donc c'était une fête militaire, une fête officielle. Le

27 général Mladic a passé les troupes en revue puisqu'il était le chef de

28 l'armée. On m'a demandé à moi aussi de passer les troupes en revue avec

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1 lui, mais cela dit, je n'ai pas eu le droit de monter sur l'estrade avec

2 lui. Donc, ce n'était pas pour la gloriole que je voulais être sur

3 l'estrade.

4 Tout au fond de moi, je suis antimilitariste. Bien sûr, je suis un

5 militaire, mais je suis un antimilitariste, en fait, donc ce n'est pas pour

6 cela que je me suis senti offensé. Il ne m'a pas offensé parce qu'il n'a

7 pas voulu m'accepter sur l'estrade, mais il a offensé toute l'armée, tous

8 ceux qui étaient présents. Je sais que le général Mladic, il a une grande

9 personnalité, il a du caractère, et il pense qu'il est le seul à être

10 intelligent et qu'il est le seul à savoir tout sur tout parce que les

11 autres ne savent absolument rien. C'est comme cela qu'il se comporte. Je

12 savais très bien que finalement, on n'avait pas toujours la même opinion.

13 Il avait un peu peur de moi, parce que je regardais la vérité en face et

14 j'indiquais aux dirigeants de l'Etat, aussitôt qu'il admettait ses erreurs,

15 en quoi il avait été arrogant, et cetera. Bon, j'essayais quand même

16 d'élever le conflit avec lui. Comme vous avez vu, lors de la séance de

17 l'assemblée, je n'ai pas dit quoi que ce soit à propos du général Mladic,

18 en tout cas rien de très péjoratif. J'ai dit la vérité, quelques faits

19 peut-être un peu brutaux, mais je ne voulais pas être celui qui amènerait

20 la discorde. Vous savez, je crois en Dieu, je crois toujours en Dieu, donc

21 j'ai une autre opinion du monde, une autre vision du monde, une autre

22 vision de la vie que Mladic. Idéologiquement, nous n'étions pas du tout sur

23 la même longueur d'onde.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais alors vous venez de dire : "Il

25 avait peur de moi, parce que je regardais la vérité et je n'avais pas peur

26 de dire aux dirigeants de l'Etat quelles étaient les conclusions erronées

27 auxquelles M. Mladic était arrivé."

28 Donc quand vous parlez de ces fameux dirigeants de l'Etat, à qui

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1 faites-vous allusion ?

2 R. Bien, ceux avec qui j'étais en contact. C'est à eux que je faisais

3 allusion, ceux avec qui j'étais en contact quand j'étais ministre au sein

4 du gouvernement, et plus tard, le président Karadzic, quand j'étais son

5 conseiller. Comme j'ai déjà dit dans ma déclaration - vous l'avez peut-être

6 remarqué, d'ailleurs ? - l'armée de la Republika Srpska avait un règlement

7 pour ce qui est de la conduite de la guerre. Le règlement pour les

8 régiments, brigades, divisions qui étaient à la base de l'armée populaire

9 de la Yougoslavie, et tous, nous autres, officiers, nous connaissions le

10 règlement et nous le respections.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais j'aimerais une réponse plus

12 précise. Vous avez dit : "Tous ceux avec qui j'étais en contact alors que

13 j'étais ministre dans ce gouvernement." J'aimerais que l'on se concentre

14 sur cette période. Avec qui étiez-vous en contact ? Ces personnes,

15 pourriez-vous nous donner leurs noms ou nous donner leur postes ? Quelles

16 sont ces personnes qui, selon vous, faisaient partie de la direction de

17 l'Etat ?

18 R. Pour ce qui est de l'armée, cette question à propos de ma relation avec

19 Mladic, là, j'avais des contacts avec le premier ministre pour lui faire

20 part de certains désaccords, puis le commandant en chef aussi, le

21 commandant suprême, c'est-à-dire, le Dr Karadzic. Je n'allais pas vraiment

22 pas plus loin, en tout cas, en ce qui concerne les relations avec Mladic.

23 Pour ce qui est de la logistique, des questions qui n'avaient à voir avec

24 le commandement et le contrôle, là, j'étais en relation avec d'autres

25 membres du gouvernement.

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Mais alors, ces conclusions

27 erronées, selon vous, c'était quoi ces fameuses conclusions erronées ?

28 R. Dans quel contexte ? Je ne comprends pas bien votre question.

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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans une de vos réponses, vous avez dit

2 que M. Mladic avait peur de vous parce que vous attiriez l'attention des

3 dirigeants de l'Etat sur les conclusions erronées auxquelles il était

4 arrivé.

5 R. Oui, oui, maintenant, je comprends. Maintenant, je vois à quoi vous

6 voulez en venir. Les dirigeants de l'Etat, enfin à ma connaissance en tout

7 cas, tous les dirigeants de l'Etat, toute la direction de l'Etat, vraiment,

8 ils s'efforçaient d'arriver à un accord de paix, coopérer avec la FORPRONU,

9 coopérer avec les représentants internationaux qui se trouvaient à Bosnie à

10 l'époque, et cetera. Ils s'efforçaient vraiment de trouver une solution

11 alors que l'armée a toujours eu une attitude bien différente. Dans une des

12 déclarations, si je me souviens bien en 1992, vous savez, on dit à chaque

13 soldat qu'il faut vaincre l'ennemi. Dans chaque école de guerre, c'est

14 toujours ce qu'il vous apprend; il faut vaincre l'ennemi. Si un soldat, du

15 point de vue orthodoxe de la chose, c'est ce qu'il compte faire; il veut

16 vaincre l'ennemi. L'armée du général Mladic avait des opinions qui étaient

17 bien différentes de celles du président de l'Etat, du gouvernement et des

18 autres, et même des députés de l'assemblée. Il voulait réaliser son

19 objectif, réaliser sa mission qui était ce qu'elle était. Cela dit, la

20 situation était telle, qu'à l'époque, on ne pouvait pas l'autoriser à le

21 faire. Pourtant, il avait ce point de vue très orthodoxe sur son objectif,

22 sa mission. Sa mission, c'était de vaincre l'ennemi, d'obliger l'ennemi à

23 capituler. C'était son obsession. J'avais un point de vue beaucoup plus

24 politique. Je sais bien que personne ne gagne dans une guerre; il n'y a que

25 des victimes. Cela, je le comprenais. C'est cela à quoi je faisais allusion

26 quand je parlais "des conclusions erronées".

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si j'ai bien compris, d'après vous, le

28 général Mladic avait qu'une seule obsession; c'était la victoire militaire

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1 sur le terrain, alors que les politiques, eux, cherchaient à obtenir ce

2 qu'ils voulaient par le biais de négociations; c'est cela ?

3 R. Oui, tout à fait, c'est cela. C'est comme cela que j'ai interprété tout

4 ce que j'ai vu.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez dit aux dirigeants de l'Etat

6 que ces conclusions étaient erronées ?

7 R. Bien sûr, bien sûr. Ils le comprenaient bien d'ailleurs.

8 Le président Koljevic, par exemple, c'était notre contact avec la FORPRONU

9 puisque son anglais était très bon. C'était lui qui était en charge des

10 négociations et des contacts. C'était toujours lui qui s'entretenait avec

11 toutes ces agences, ces représentants, et cetera. Il devait toujours

12 dépasser les obstacles, la résistance offerte par l'armée. Bien que je

13 doive dire que dans certaines situations il est vrai que les représentants

14 internationaux étaient plutôt en faveur de l'autre camp, ils avaient

15 tendance à être assez subjectifs, et parfois, l'armée avait raison quand

16 même. Le général Mladic, parfois avait raison. Par exemple, pour ce qui est

17 du mont Igman, là, c'est évident. Je vous en parle en tant que soldat

18 professionnel. L'opération a été arrêtée uniquement parce que les Serbes

19 avaient un avantage. Lord Owen était responsable. Il a convaincu les

20 dirigeants, et les Musulmans, ensuite, ont créé un véritable chaos après

21 cette opération. Ils ont fait venir les Moudjahiddines et ils ont fait

22 d'autres choses. Cela a fait escalader la situation, ça l'a fait empirer.

23 Cela nous a amenés à de nombreuses erreurs.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Pouvez-vous nous dire, si vous le

25 savez, bien sûr, qui a pris la décision à propos de l'opération sur le mont

26 Igman ?

27 R. Quelle décision, d'arrêter l'opération qui avait été conduite

28 par Mladic?

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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, l'ordre d'arrêter l'opération.

2 R. Oui, c'est Karadzic qui a pris la décision, et c'est là qu'ils se sont

3 vraiment disputés, Mladic et Karadzic.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous savez si Karadzic a pris cette

5 décision de lui-même ou s'il en a parlé avec d'autres ? Savez-vous un petit

6 peu qu'elle est la genèse de cette prise de décision ? Comment cela c'est

7 passé ?

8 R. Non, je ne me souviens pas bien. Il y avait une séance du commandement

9 en chef pour que la décision soit prise. La décision a été prise très, très

10 rapidement. Je crois qu'il l'a prise suite aux pressions exercées par Lord

11 Owen ou peut-être parce que Lord Owen lui avait fait des promesses qu'il

12 n'entendait pas tenir d'ailleurs. C'est pour cela qu'il a pris la décision.

13 Mais je vous dis, en tant que soldat, si cette décision n'avait pas été

14 prise, les Serbes auraient pris Sarajevo. Les citoyens de Sarajevo

15 demandaient publiquement à Mladic de leur permettre de quitter la ville.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Mais vous avez parlé du

17 commandement en chef, du commandement Suprême. J'aimerais que nous

18 regardions un petit peu le paragraphe 13 de votre déclaration. Vous dites

19 là que le commandement Suprême, le commandement en chef était un organe de

20 conseil qui conseillait le président de la République.

21 Tout d'abord, pouvez-vous nous dire quand ce commandement Suprême,

22 commandement en chef a commencé à fonctionner ?

23 Avez-vous trouvé le passage ? C'est aux paragraphes 30 et 31 de votre

24 déclaration.

25 R. Je cherche. Je crois que cela se trouve dans ma première déclaration,

26 n'est-ce pas ? Je ne sais pas lire l'anglais, donc il faudra que quelqu'un

27 puisse le trouver à ma place.

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vais vous le lire. Vous nous dites

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1 que vous en avez parlé dans votre première déclaration. Donc, j'aimerais

2 savoir si vous savez quand ce commandement Suprême est devenu

3 opérationnel ? Pourriez-vous, s'il vous plaît, répondre à ma question ?

4 Ensuite, je vous indiquerai où se trouve exactement le texte auquel je fais

5 allusion, aux paragraphes 30 et 31 de votre déclaration.

6 R. Je ne me souviens pas bien combien de mois cela a pris. Je crois que

7 c'était vers la fin 1992. Ce n'était pas juste après la création de

8 l'armée. Peut-être même que cela n'a commencé à fonctionner qu'en 1993, au

9 tout début 1993. Cela a pris des mois, cela ne s'est pas fait tout de

10 suite.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Comme je vous l'ai dit, je

12 vais vous indiquer quel est le passage de votre première déclaration qui

13 est concernée. Nous allons d'abord passer au paragraphe 31 de votre

14 dernière déclaration. Dans ce paragraphe 31, en page 8, vous nous dites, M.

15 Krajisnik était impliqué en ce qui concerne la stratégie militaire

16 uniquement en tant que membre du commandement Suprême, au commandement en

17 chef. Cela dit, vous nous dites aussi que le commandement Suprême n'a pas

18 été mis en place immédiatement après la création de l'armée. En effet, ici,

19 cette Chambre a établi que ce commandement Suprême n'a pas commencé à

20 fonctionner avant le 30 novembre 1992. Est-ce que vous savez si

21 M. Krajisnik était impliqué dans des affaires de stratégie militaire avant

22 la date à laquelle ce commandement Suprême aurait commencé à fonctionner,

23 c'est-à-dire, fin novembre, avant la fin novembre 1992 ?

24 R. Je n'ai pas connaissance qu'il ait été impliqué dans quoi que ce soit

25 de ce type. Très franchement, moi non plus je n'étais pas impliqué là-

26 dedans non plus. Je suis devenu membre du commandement Suprême plus tard,

27 quand Krajisnik en est devenu membre aussi, donc vers la fin de l'année.

28 Vous m'avez confirmé que c'était en fin novembre. A ma connaissance, il

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1 n'aurait pas possiblement pu être impliqué de toute façon. Quant à savoir,

2 en revanche, s'il s'entretenait avec le président, cela, je n'en sais

3 absolument rien.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Au paragraphe 32 de votre dernière

5 déclaration, vous faites à nouveau référence à ce commandement Suprême. A

6 qui le général Mladic faisait-il rapport des opérations stratégiques avant

7 la création de ce commandement Suprême, enfin, à votre connaissance,

8 puisque si cet organe a commencé à fonctionner qu'à la fin novembre, à qui

9 faisait-il rapport avant que cet organe ne fonctionne ?

10 R. Je serai franc, très franc. Je crois qu'il ne faisait rapport à

11 personne. Si tant est qu'il faisait rapport à qui que ce soit, cela aurait

12 été au président Karadzic, et uniquement à lui. Enfin, cela, c'est mon

13 opinion personnelle, très personnelle. Je ne crois même pas qu'il faisait

14 rapport à Karadzic, cela, j'en suis presque sûr. Enfin, c'est une

15 conviction personnelle; je ne peux rien prouver. C'est ce que je ressentais

16 à l'époque. J'ai toujours d'ailleurs la même opinion, j'ai toujours la même

17 opinion.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, vous nous dites qu'il était un

19 électron libre, si je puis dire. Il faisait tout seul, il était le seul

20 responsable; c'est cela que j'ai cru comprendre ?

21 R. Bien, "entièrement seul," électron libre, je ne sais pas si on peut le

22 dire quand même. A mon avis, en effet, jusqu'à la création de ce

23 commandement Suprême, il agissait de son propre chef, vraiment, de son

24 propre chef. Je pense vraiment pouvoir le dire.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si vous dites qu'il agissait de son

26 propre chef, qu'il ne faisait pas rapport de ses activités, est-ce que cela

27 signifie aussi qu'il ne recevait pas d'ordres ?

28 R. Non, pas nécessairement. Ils se consultaient, ils se mettaient d'accord

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1 sur certaines choses, en tout cas, à ma connaissance. De toute façon, je

2 n'étais pas vraiment impliqué dans ce type de consultation au niveau de

3 l'état-major principal. Tout simplement parce que personne ne m'y invitait

4 d'ailleurs ni le commandant en chef ni Mladic. Je sais qu'ils se

5 rencontraient soit dans le bureau du président ou à l'état-major. Ils

6 parlaient, ils discutaient au début, avant la création du commandement

7 Suprême. Alors, je ne sais pas dans quelle mesure ils se rencontraient. Je

8 ne sais pas vraiment de quoi ils parlaient, ce sur quoi ils se mettaient

9 d'accord, et cetera. Cela dit, après l'établissement et la création du

10 commandement Suprême, normalement j'étais là, je savais ce qui était

11 discuté, je savais quelles étaient les conclusions qui avaient été prises,

12 quelles étaient les décisions aussi qui avaient été prises. Donc, je ne

13 peux pas vraiment vous dire grand-chose à propos de la période précédant

14 la création du commandement Suprême.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maintenant, ce que je comprends de votre

16 réponse, vous nous dites : "Je ne crois pas qu'il faisait rapport à qui que

17 ce soit. Et si tant est qu'il faisait rapport à quelqu'un, cela aurait été

18 uniquement au président Karadzic." Vous venez de nous expliquer qu'ils

19 s'entretenaient l'un et l'autre, ils se mettaient d'accord l'un et l'autre,

20 mais vraiment entre quat'z'yeux.

21 R. Je pense qu'il en a été ainsi jusqu'à la création de ce commandement

22 Suprême.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. J'aimerais à présent me référer à

24 un paragraphe de votre déclaration, déclaration précédente, celle que vous

25 avez faite auprès du bureau du Procureur en 1997. Il s'agit du paragraphe

26 30 de cette déclaration. Je me propose de vous citer ce que vous avez dit.

27 Vous ne l'avez qu'en anglais. Je vais en donner lecture, et vous allez

28 entendre la traduction dans vos écouteurs.

Page 26456

1 M. JOSSE : [interprétation] Est-ce qu'on va donner une cote à cela,

2 Monsieur le Président ?

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pour le moment, je vais juste citer, et

4 on verra ce qu'il en adviendra pour voir si cela deviendra une pièce à

5 conviction ou pas.

6 M. JOSSE : [interprétation] Merci.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'en ai déjà donné lecture, mais

8 j'enchaîne. "Quand le chef du Grand état-major a présenté une proposition,

9 le président avec ses adjoints, Koljevic et Plavsic, ainsi qu'avec le

10 président de l'assemblée et le représentant, voire, du ministère de la

11 Défense ou du ministère de l'Intérieur ou encore d'un autre organe

12 compétent, s'entretenaient de ce sujet à une réunion conjointe, la

13 proposition venait ensuite à être adoptée." Puis, vous ajoutez au

14 paragraphe 31 pour dire que : "Cela a été le cas avec la plupart des

15 opérations militaires." Alors, dans la déposition de cette année, de 2006,

16 au paragraphe 31, et là, je me propose de donner lecture de cette

17 déposition que vous avez faite récemment, vous avez dit : "M. Krajisnik a

18 participé à la création de la stratégie militaire rien qu'en qualité de

19 membre du commandement Suprême qui se trouvait être une instance

20 consultative. Par conséquent, il pouvait donner son opinion, il en avait le

21 droit, mais il n'avait pas le droit de prendre des décisions."

22 Quel a été le rôle joué par M. Krajisnik, aidez-moi à comprendre ? A-t-il

23 été membre de ce groupe qui était là pour approuver les propositions

24 présentées par le Grand état-major ou se trouvait-il être membre d'une

25 instance purement consultative qui vaquait à des questions militaires ?

26 R. Monsieur le Président, j'ai la transcription de ma déclaration du mois

27 d'avril 1998 faite au bureau du Procureur à ce sujet, parce qu'à l'occasion

28 de l'interrogatoire complémentaire, avril 1998, ils m'ont posé une question

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1 analogue à celle que vous venez de poser. Je vais vous donner lecture de ma

2 réponse complète, qui est celle que je pourrais fournir en l'occurrence,

3 même maintenant. Pour ce qui est de cette déclaration faites en 1998, j'ai

4 dit : "Le commandement Suprême est un organe consultatif du président de la

5 république qui, en application de la constitution, se trouve être le

6 commandant suprême. Le commandant suprême est constitué --"

7 M. JOSSE : [interprétation] Je m'excuse de vous interrompre. Il s'agit de

8 la page 4, tout en bas de la page.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Vous l'avez, parfait. C'est de cela qu'il

11 s'agit. Vous voulez en prendre lecture vous-même ou vous voulez que je le

12 lise ?

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous pouvons en prendre lecture nous-

14 mêmes, mais peut-être si vous nous dites que votre réponse serait la même,

15 peut-être pourriez-vous la donner et nous pourrions comparer, mais comme

16 vous avez donné lecture, disons qu'il faudrait voir si c'est exactement la

17 même question qui vous a été posée.

18 M. JOSSE : [interprétation] Monsieur le Président, puis-je faire une

19 observation, je vous prie ?

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

21 M. JOSSE : [interprétation] Nous sommes en train de voir si ces documents

22 vont être versés au dossier, parce qu'il faut le savoir, soit nous devons

23 en prendre lecture ou s'ils sont versés --

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, oui. Je suis d'accord.

25 M. JOSSE : [interprétation] Merci.

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

27 M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, excusez-moi, mais à ce

28 sujet, je pense me souvenir que la pratique antérieure à ce sujet était la

Page 26458

1 suivante, si mes souvenirs sont bons, et il me semble que cela s'est passé

2 lors de la présentation des éléments de preuve de l'Accusation : le

3 document recevait une cote et les portions de texte qui ont fait l'objet de

4 l'attention principale à l'occasion de l'interrogatoire ont été versées au

5 dossier plutôt que de procéder au versement du document entier. Si l'on

6 laisse entendre qu'une autre approche devrait être adoptée, il faudrait que

7 nous ayons connaissance de l'approche et ce, dès que possible.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Josse, nous en avons parlé à

9 plusieurs reprises pour ce qui est du versement du document en entier ou --

10 M. JOSSE : [interprétation] Je voudrais réserver la position prise par la

11 Défense pour ce qui est de contre-interroger le témoin sur la totalité du

12 document ou des parties.

13 M. TIEGER : [interprétation] Personne ne laisse entendre --

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai cru comprendre que c'est à la fin

15 du témoignage du présent témoin que nous nous pencherons sur ce qui a fait

16 l'objet d'un contre-interrogatoire, interrogatoire et contre-interrogatoire

17 concernant les éléments figurant dans la déclaration; est-ce que j'ai bien

18 compris ?

19 M. TIEGER : [interprétation] Oui, et c'est ce qui est conforme à la

20 pratique antérieure. Je crois que personne n'a voulu laisser entendre que

21 ce qui consiste à choisir des aspects pertinents d'un document exclurait le

22 reste du document du contre-interrogatoire. La question qui se pose c'est

23 de savoir quelle est la quantité du document qui a été utilisée à

24 l'interrogatoire principal et au contre-interrogatoire pour ne faire en

25 sorte que ces parties seulement soient versées au dossier et pas d'autres.

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous convierais, Monsieur le

27 Greffier, à donner une cote à cette interview datée du 4 février 1998.

28 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera C4.

Page 26459

1 M. JOSSE : [interprétation] Et pour ce qui est de la déclaration --

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La déclaration, pour ce qui est de

3 l'octroi d'une cote en ce moment, -- n'anticipant rien, la décision finale

4 pour ce qui est du versement en entier ou par fragment.

5 M. JOSSE : [interprétation] Précisément.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je crois, Monsieur le Greffier, que nous

7 aurions maintenant un C5.

8 M. LE GREFFIER : [interprétation] En effet.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce serait la déclaration du témoin datée

10 du 9 décembre, du 11 décembre et du 12 décembre 1997.

11 M. JOSSE : [interprétation] Rien d'autre à dire en cette phase-ci. Je crois

12 que nous avons clairement fait savoir que c'est une question importante à

13 nos yeux et que cela devra être tiré au clair le moment voulu.

14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

15 Monsieur le Témoin, vous avez fourni une réponse durant l'interview de

16 décembre 1997, là où il a été question du président avec ses adjoints

17 Koljevic et Plavsic, le président de l'assemblée et voire, un représentant

18 du ministère de la Défense ou du ministère de l'Intérieur, pour discuter

19 des questions qui ont fait l'objet de propositions présentées par le chef

20 de l'état-major à une réunion conjointe, qui finissaient par être adoptées.

21 Dans l'autre document, la question que je vous ai posée visait à vous

22 faire fournir des éclaircissements, pour ce qui est contenu dans vos

23 déclarations au paragraphe 31 de 2006 parce que là, vous avez dit que M.

24 Krajisnik n'a été impliqué dans la stratégie militaire qu'en sa qualité de

25 membre du commandement Suprême. Comme vous vous êtes référé à la réponse

26 que vous avez apportée précédemment, j'aimerais attirer votre attention sur

27 le fait qu'en 1997, vous vous êtes référé dans votre déclaration au

28 président de l'assemblée et vous vous êtes référé à une réunion conjointe

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1 avec le président. Je voudrais vous demander de nous dire concrètement quel

2 a au juste été le rôle de M. Krajisnik ?

3 R. Dans ce domaine de la stratégie militaire, vous voulez dire, n'est-ce

4 pas ?

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

6 R. Permettez-moi, Monsieur le Président, de faire une observation avant,

7 et j'aimerais que vous en teniez compte. Dans ce paragraphe 31 de ma

8 déclaration du mois de mai de cette année, qui découle de l'interview que

9 j'ai eue avec M. Zahar, j'ai absolument donné la priorité à mes

10 déclarations de 1997 et 1998, parce que là, je n'ai fait que répondre à des

11 questions auxiliaires qu'il aurait posées. Je voudrais que vous en teniez

12 compte parce que je ne modifie en aucune partie les déclarations que j'ai

13 faites en 1997 et 1998, ni maintenant ni à quelque moment que ce soit. Je

14 les maintiens. Je voudrais que ces déclarations-là aient la priorité parce

15 qu'au bout de 12 ans, je n'ai plus pu me rappeler de ce que j'ai dit dans

16 mes déclarations antérieures. Ces déclarations-là, celles dont je parle,

17 ont été signées et contresignées à chaque page par mes soins. Je sais ce

18 qui donne lieu à confusion. Je vous précise qu'au bureau du Procureur à

19 l'occasion de mon audition complémentaire, il m'a été demandé des

20 éclaircissements au sujet de cette déclaration en anglais, à savoir, le

21 paragraphe 31 dont vous m'avez donné lecture tout à l'heure.

22 Je dirais qu'au bout de trois ou quatre mois, décembre à avril, j'ai

23 apporté ces éclaircissements. Ce qui signifie que d'après les connaissances

24 qui sont les miennes, Krajisnik, en sa qualité de président de l'assemblée

25 populaire, n'a participé au niveau de la stratégie militaire que lorsqu'il

26 est devenu membre de ce commandement Suprême. J'affirme en toute

27 responsabilité que je n'ai aucun renseignement et aucune connaissance pour

28 ce qui est de sa participation aux questions de stratégie militaire avant

Page 26461

1 que d'être devenu membre de ce commandement Suprême. Tout comme cela est le

2 cas pour moi, peut-être ai-je été présent à une réunion quelconque, mais je

3 n'avais aucun poids en ma qualité de membre du commandement Suprême,

4 j'avais le droit d'émettre un avis et de défendre cet avis. Et là, je suis

5 en train d'expliquer aux Juges de la Chambre et de dire que le commandement

6 Suprême est une instance consultative du président de la république. Après

7 avoir démissionné aux fonctions de ministre de la Défense, je suis devenu

8 conseiller individuel du président de la république.

9 Vous m'excuserez, Monsieur le Président, mais pour faire une comparaison,

10 la question qui se pose c'est de savoir si vous prêtez une oreille

11 attentive à chaque conseil qui vous est donné par M. Zahar; moi aussi, j'ai

12 eu des conseillers qui m'ont conseillé, mais cela a été à mois de décider

13 si j'allais prêter oreille ou pas à leurs conseils. Cela dot être tout à

14 fait clair. Je n'ai pas d'information pour ce qui est de dire, avant

15 l'établissement du commandement Suprême, si d'autres personnes ont été

16 impliquées. Peut-être n'ai-je pas de connaissance à ce sujet et je ne peux

17 pas affirmer ceci ou cela.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez nous dire jusqu'à quel moment

19 M. Koljevic a été membre de la présidence ?

20 R. M. Koljevic a été membre de la présidence, à vrai dire, jusqu'à

21 quelques mois avant son décès. Je n'arrive pas exactement à m'en souvenir.

22 Je dirais à peu près qu'il l'a été jusqu'à la réunion relative au plan

23 Vance-Owen, à peu près. Je n'arrive plus à me souvenir des dates exactes

24 parce que, d'après ce que j'en ai su, puisque j'ai été présent à cette

25 session de l'assemblée concernant le plan Vance-Owen, avec la présence du

26 Grec, de M. Milosevic et autres, je dirais que M. Koljevic a dissocié son

27 opinion de celle du reste de la direction serbe. Il a évolué dans une

28 direction autre, mais il était aussi malade d'après ce que j'ai appris. Je

Page 26462

1 ne sais pas vous répondre très précisément à votre question, mais c'est à

2 peu près jusqu'à cette période-là qu'il l'a été.

3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans votre déclaration datée de 1997,

4 vous avez indiqué que ces questions ont été étudiées à une conférence

5 conjointe. Qui a fait partie de cette instance conjointe ?

6 R. De quelle conférence parlez-vous là ? Pouvez-vous être un peu plus

7 concret, je vous prie ?

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Certes. Je vais vous donner lecture de

9 ce passage. Dans cette déclaration, il est dit : "Lorsque le chef du Grand

10 état-major présentait une proposition, le président avec ses adjoints,

11 Koljevic et Plavsic, avec le président de l'assemblée et voire, avec le

12 ministre de la Défense ou le ministre de l'Intérieur, ou encore l'instance

13 qui exerçait un contrôle, la question était examinée à une conférence

14 conjointe pour être adoptée ensuite."

15 Vous êtes en train de parler là d'une conférence conjointe.

16 R. C'est ce que j'ai dit dans ma déclaration. Je ne puis que le confirmer,

17 à savoir que le président Karadzic, pour l'essentiel, lorsqu'il s'est agi

18 et je précise que nous parlons encore de la période antérieure à la

19 création du commandement Suprême pour qu'il n'y ait pas de confusion.

20 Jusqu'à ce moment-là, étant donné que le président Karadzic n'avait pas

21 disposé d'un commandement Suprême, d'un organe consultatif, avait pour

22 coutume de consulter l'une quelconque des parties que j'ai énumérées ici.

23 Je n'en ai pas été informé à moins d'être contacté moi-même. Il avait

24 coutume de contacter quelqu'un d'autre encore pour consulter les gens. Je

25 sais que, sans précédent aucun, il avait coutume de consulter les deux

26 membres, Koljevic et Plavsic, en leur qualité de membres de la présidence.

27 Cela, je le sais pour sûr. Tous les autres que j'ai mentionnés, et moi

28 compris, Krajisnik compris, le ministre de la Police également, on était

Page 26463

1 convoqués suivant sa volonté, ses besoins, ses nécessités. Je ne peux

2 qu'émettre des conjectures pour ce qui est des moments où il a fait appel à

3 nous et des moments où il n'a pas fait appel à nous. C'était une décision

4 qui était personnelle. C'est ce que j'ai essayé d'expliquer. Je ne sais pas

5 si vous avez pu me suivre.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. J'ai compris que la partie dont

7 j'ai donné lecture dans votre déclaration se rapportait à la période où le

8 commandement Suprême n'avait pas encore été mis en place.

9 Le Juge Hanoteau a une question pour vous.

10 M. LE JUGE HANOTEAU : Dans quelle circonstance "Supreme Command" a été

11 créé ? A la suite de quel événement ou de quelle réunion, de quelle

12 discussion ?

13 R. Je vais vous le dire. Après l'opération d'Igman, jusqu'à laquelle nous

14 n'avons pas eu de commandement Suprême, et où il y a eu - j'oserais le

15 dire, peut-être ai-je tort, mais c'est mon opinion à moi, je me limite à

16 mon opinion à moi, à ce moment-là, il y a eu des divergences graves entre

17 le général Mladic et le commandant suprême. Je crois que Karadzic, à ce

18 moment-là, a compris qu'en termes simples, dans ces circonstances-là, il ne

19 devrait pas ou il n'aurait pas le droit, je ne sais pas trop comment

20 m'exprimer, qu'il ne devrait pas prendre ces décisions seul avec Mladic. Il

21 s'agissait d'avoir recours à plusieurs autres personnes. Plusieurs autres

22 personnes y voyaient mieux.

23 C'était là une cause commune et il n'était pas question pour deux

24 hommes seuls de prendre ce type de décisions. Je crois que c'est ce qui l'a

25 incité, lui, Karadzic, en sa qualité de commandant suprême à créer un

26 commandement Suprême, parce que c'est une pratique habituelle dans les

27 armées sur le territoire de l'ex-Yougoslavie et dans les Balkans, d'une

28 manière générale et dans des situations de guerre, cela existe dans bon

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1 nombre d'armées et d'autres armées du monde. Cela s'appelle peut-être

2 autrement, mais en somme, cela se résume à la même chose. Je crois que

3 c'est ce qui l'a incité à conclure la nécessité de créer ce commandement

4 Suprême. Karadzic a compris au final qu'il s'était laissé prendre

5 s'agissant des assurances que lui avait faites Lord Owen. Je vous le dis en

6 ma qualité de militaire, en ma qualité de professionnel.

7 M. LE JUGE HANOTEAU : Est-ce que cela a pu avoir aussi pour origine le fait

8 que le général Mladic ne rendait compte à personne ? Vous avez dit : "Pour

9 être tout à fait franc, je ne pense pas qu'il faisait des rapports à

10 quiconque. S'il en faisait, c'était seulement au président Karadzic. Cela,

11 c'est ma conviction personnelle. Je ne pense d'ailleurs qu'il ne rapportait

12 pas tout à lui."

13 Est-ce que cela a pu avoir, le fait qu'il agisse d'une façon aussi

14 autonome, est-ce que cela a pu avoir pour conséquence de voir apparaître ce

15 "Supreme Command" ?

16 R. Entre autres, je le pense. Je n'ai aucune preuve, personne ne me l'a

17 expliqué, personne ne me l'a dit, ni Karadzic ni qui que ce soit d'autre,

18 mais j'ai personnellement estimé que cela pouvait être l'une des raisons.

19 M. LE JUGE HANOTEAU : Entendu. A cette époque où le général Mladic ne

20 rapportait pas ce qu'il faisait, est-ce que vous avez entendu ou compris

21 que des actions militaires avaient dépassé les attentes du pouvoir

22 politique ?

23 R. Je ne dirais pas que cela ait été tout à fait conforme, mais selon la

24 façon dont cela a été fait, j'ai des doutes. Si le président de la Chambre

25 le permet, il y a des raisons plus profondes que j'aimerais expliquer.

26 M. LE JUGE HANOTEAU : Répondez à ma question, s'il vous plaît. Est-ce que

27 vous avez entendu, est-ce qu'il y a eu des informations qui vous sont

28 parvenues suivant lesquelles l'action militaire avait pu dépasser les

Page 26465

1 attentes, les espérances de l'autorité politique ?

2 R. J'en ai eu, partant de mes réflexions militaires, de mes réflexions de

3 général, de ministre. J'ai eu des points de vue de ce genre parce que ce

4 n'est pas du tout la façon dont je procéderais moi-même.

5 M. LE JUGE HANOTEAU : -- plus précisément.

6 R. Entendons-nous bien. Je suis au courant d'une opération, si vous

7 permettez, j'irai dans le concret, une opération qui s'est produite à Zepa

8 lorsqu'il y a eu des combats pour un relais de retransmission des ondes

9 télévision. Je ne sais pas si c'était aussi pour les communications radio.

10 Enfin, c'était un poste de retransmission. Le général Mladic a envoyé dans

11 cette opération son adjoint, le général Milovanovic, de son propre gré à

12 lui. Là, l'unité militaire, pour être concret, l'unité militaire de Pale

13 est tombée dans une embuscade de l'armée musulmane, et il y a eu un

14 massacre. Il a été tué un grand nombre de soldats. A Pale, cela a donné

15 lieu à un état d'urgence. Le président a même mis sur pied une commission

16 d'Etat pour examiner les circonstances, dont j'ai fait partie aux côtés

17 d'autres membres, mais il n'y avait rien à examiner. C'était une opération

18 imprudente, une opération militairement mal réfléchie, mal analysée, mal

19 préparée, et ainsi de suite. Alors, si vous voulez bien le permettre, il

20 importe de dire encore ceci. Concernant cette autonomie à Mladic, une

21 erreur a été commise. Je l'ai dit dans ma déclaration. Peut-être n'avez-

22 vous pas bien saisi, mais je vais expliquer.

23 Lorsqu'il y a eu création d'un Grand état-major, j'ai rencontré un

24 premier problème en ma qualité de ministre de la Défense. Le général Mladic

25 était quelqu'un d'astucieux. Il a imposé à la direction de la Republika

26 Srpska l'appellation de Grand état-major. Or, dans les armées du monde,

27 cela n'existait pas. Il a voulu, il a imposé que le 12 mai, il soit nommé

28 commandant du Grand état-major. Cela n'existait nulle part au monde. Il

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1 était commandant, et Karadzic était commandant aussi.

2 M. LE JUGE HANOTEAU : Vous avez déjà expliqué beaucoup là-dessus dans votre

3 interview. Pour les questions que je vous ai posées, je vous remercie de

4 vos réponses.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai une autre question à ce sujet, qui

6 s'enchaîne sur les questions précédentes. Vous venez de donner l'exemple du

7 général Mladic qui allait au-delà du cadre de ce à quoi s'attendait la

8 direction politique de sa part. Vous avez dit que le résultat en a été

9 mauvais puisque militairement, l'opération n'a pas été conduite de façon

10 convenable. Vous est-il arrivé de voir le général Mladic aller au-delà du

11 cadre qui faisait partie de l'expectative de la direction politique alors

12 que les résultats ou l'issue en a été sur le plan militaire positive ? Est-

13 il arrivé ce type de situation ?

14 R. Je n'ai pas de renseignements de ce type. J'ai des réflexions à moi,

15 mais je ne peux pas les étayer avec des données concrètes, quoique sur un

16 plan intime, je pense, je considère qu'il y a eu des opérations, certaines

17 opérations où les choses se sont passées conformément à ce que vous venez

18 de dire. Pour être plus concret, je dirais que l'opération Igman, là, le

19 général Mladic avait tout à fait raison. Je le pense en ma qualité de

20 militaire.

21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Certes, je comprends. Mais j'ai cru

22 comprendre que là, il s'était conformé aux instructions de la direction

23 politique. Ma question était, et je vais la répéter, y a-t-il eu des

24 exemples où le général Mladic est allé au-delà des cadres impartis ou fixés

25 par la direction politique tout en réalisant des succès militaires, ce

26 faisant ?

27 R. Ecoutez, je ne sais pas si c'est un succès militaire ou une catastrophe

28 militaire. La question peut être discutée. Mais l'un des exemples est celui

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1 de Srebrenica. La direction politique n'a pas demandé à Mladic de s'emparer

2 de Srebrenica. Je le sais pour sûr, je sais qu'une directive en ce sens n'a

3 pas été donnée.

4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je me propose de vous interrompre à cet

5 endroit-ci. Je voudrais que nous nous concentrions sur les événements en

6 1992 et non pas sur les phases ultérieures. Alors, auriez-vous un exemple à

7 fournir pour 1992 ?

8 R. Non, je ne sais pas, je ne m'en souviens pas.

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Est-ce que cela signifie, et je

10 vais essayer de poser la question d'une façon différente, est-ce qu'il y a

11 eu des actions ou des opérations militaires sous le commandement du général

12 Mladic qui ne seraient pas allées au-delà du cadre ou des expectatives de

13 la direction politique ?

14 R. Croyez-moi bien que je ne m'en souviens pas. En ce moment-ci, je

15 n'arrive pas.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Parce que je vous ai convié à nous

17 donner des exemples où il est sorti du cadre des instructions de la

18 direction politique. Là, ce que je suis en train de vous demander, c'est en

19 corrélation avec les opérations où il est resté dans le cadre des

20 instructions ou des expectatives de la direction politique.

21 R. En 1992, il n'y a pas eu d'opérations véritablement sérieuses, si l'on

22 excepte l'opération Igman. Ultérieurement, il y a des exemples dans la

23 phase finale ou dans la deuxième moitié de la guerre. Il y a certains

24 exemples, mais je ne saurais vous donner maintenant d'autres exemples

25 précédant la fin 1992, mis à part Zepa, exemples que je devrais ou que je

26 pourrais mentionner réellement.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, poursuivons donc. A la fin du

28 paragraphe 45 de la déclaration que vous avez donnée aux Juges de la

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1 Chambre, vous dites, je cite: "Je déclare que Radovan Karadzic n'a jamais

2 donné d'ordre selon lequel il avait demandé le pilonnage de Sarajevo, car

3 si un tel ordre avait existé, j'en aurais eu connaissance certainement."

4 Comment pouvez-vous être absolument certain que vous auriez su qu'un tel

5 ordre existait en juin 1992, si effectivement cet ordre existait, car si

6 j'ai bien compris, vous n'étiez pas dans la chaîne de commandement et vous

7 n'étiez pas le conseiller du Dr Karadzic à l'époque, de toute façon ? Alors

8 comment pouvez-vous déclarer ceci avec un si grand degré de certitude qu'il

9 n'avait jamais donné d'ordre concernant le pilonnage de Sarajevo ? Je parle

10 du mois de juin 1992, bien sûr.

11 R. Je peux seulement dire ceci. Lorsqu'en 1997 et 1998, nous avions

12 préparé la documentation des archives du président de la république, ceci

13 avait été demandé par le juge d'instruction, j'ai fait partie de l'équipe

14 en question et nous n'avons jamais trouvé ou rencontré de tel ordre dans

15 les archives. Je vous parle donc d'ordres écrits. A ma connaissance, et

16 plus particulièrement plus tard, et je présume que c'était ainsi même

17 avant, mais le président Karadzic ne donnait jamais d'ordres militaires de

18 façon orale. Donc, je n'ai pas connaissance de tel fait. C'est pour cela

19 que j'ai été aussi clair et aussi explicite et que j'ai dit avec un si

20 grand degré de certitude que si un tel ordre existait, j'en aurais

21 certainement eu connaissance. A la suite d'une demande de faire une

22 recherche des archives, nous avons remis tous les ordres que nous avions

23 trouvés dans les archives auprès du juge d'instruction, mais nous n'avons

24 jamais trouvé de tels ordres. Je sais qu'un pilonnage a eu lieu et j'ai

25 connaissance d'un très grand nombre de cas, et M. Krajisnik en est au

26 courant aussi, lorsque depuis Sarajevo, de Bijelasnica, on a pilonné notre

27 bâtiment, le bâtiment dans lequel les organes du gouvernement

28 fonctionnaient et travaillaient à Pale, et à un certain moment donné, les

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1 unités ripostaient avec des ripostes individuelles, alors que si je parle

2 de pilonnages qui provenaient en notre direction, c'était également du

3 pilonnage individuel. C'est ce qu'on appelle, dans le jargon militaire, un

4 échange de tir.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous dites donc que le président

6 Karadzic n'aurait jamais donné d'ordres militaires par voie orale. Vous

7 nous avez expliqué qu'avant que le commandement Suprême n'eut été créé à la

8 fin du mois de septembre 1992, que le général Mladic se concertait avec M.

9 Karadzic. Je vais essayer de retrouver vos propos pour vous citer

10 textuellement. Je crois que vous avez dit, et corrigez-moi si je ne

11 m'abuse, qu'ils se sont mis d'accord sur des questions ou ils se mettaient

12 d'accord sur des questions. Est-ce que cela veut dire que c'était autre

13 chose que d'émettre un ordre ? Est-ce qu'ils auraient pu peut-être se

14 mettre d'accord sur cette question et que par la suite, vous n'avez jamais

15 trouvé d'ordre écrit, car ils s'étaient déjà mis d'accord sur la question ?

16 R. Pour vous dire honnêtement, je crois que le commandement Suprême, et

17 d'ailleurs, en fait, je lui ai proposé, je lui ai proposé -- déjà je lui ai

18 conseillé de lire un certain nombre de dispositions militaires, de

19 règlements militaires. Avant de lancer des opérations à caractère plus

20 corsé, soit des opérations militaires stratégiques ou des opérations

21 opérationnelles, pour vous parler dans le jargon militaire, il avait

22 toujours demandé l'avis et ensuite il signait les documents.

23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais vous parlez de quelle époque

24 exactement ? Car je vous ai demandé de vous concentrer sur l'année 1992.

25 R. En fait, je parle de la période depuis la création du commandement

26 Suprême et de la création de l'armée. D'abord, la création de l'armée et

27 ensuite, plus tard, le commandement Suprême. Lors des sessions de

28 discussion au sein du commandement Suprême, on en discutait, mais après les

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1 discussions suivaient les ordres, alors que s'agissant des opérations de

2 plus petite envergure comme celle-ci, s'agissant de Zepa, je ne suis pas

3 tout à fait certain que cette opération avait été menée à la suite d'un

4 ordre du président et je ne suis pas non plus certain que Mladic l'en a

5 informé. Il a peut-être pris la décision de faire cela, mais ce n'était pas

6 une opération, c'était une unité qui était d'une taille de la compagnie.

7 S'agissant d'une unité comme cela, ce n'est pas le commandement Suprême qui

8 prend des décisions concernant une telle unité, c'est quand le corps est

9 impliqué; cela, c'est au niveau d'une brigade. Ce sont des unités de plus

10 petite taille, comme des brigades, par exemple, ici.

11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vais voir si je vous ai bien compris,

12 si j'ai bien compris la situation telle qu'elle se présentait avant que le

13 commandement Suprême n'eut été créé en 1992.

14 Si je comprends bien, et corrigez-moi si je ne m'abuse, que la situation

15 était la suivante. Le général Mladic, M. Karadzic, ces deux, discutaient et

16 se concertaient sur les opérations, tout du moins s'il y avait des

17 opérations de grande envergure, opérations importantes. Comme vous avez dit

18 en 1997 dans votre déclaration à laquelle vous avez ajouté aujourd'hui que

19 vous avez décrit la situation avant la création du commandement Suprême, et

20 dans d'autres, vous avez parlé, dans la déclaration de Koljevic, Plavsic,

21 président de l'assemblée et ministre de l'Intérieur et le ministre de la

22 Défense, étaient consultés non pas à chaque fois, mais c'étaient des

23 événements spécifiques. Lors d'événements spécifiques, ces derniers étaient

24 consultés, donc on demandait leur avis et ceci menait à en arriver à un

25 accord commun dans lequel le général Mladic et Karadzic se mettaient donc

26 d'accord, et c'était la base des ordres. Comme vous nous avez dit, vous

27 n'étiez pas du tout au courant que des ordres avaient été donnés, à moins

28 que ces ordres n'aient été émis par écrit. Est-ce que je vous ai bien

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1 compris, est-ce que c'était la façon de procéder ? Est-ce que c'était ce

2 qui se passait en 1992, par exemple du début de 1992 jusqu'à la fin

3 novembre de cette même année ?

4 R. Oui. C'est tout à fait cela. Je crois que vous avez entièrement raison.

5 Vous avez tout à fait bien saisi.

6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.

7 Je regarde maintenant l'heure, Monsieur Subotic, et je propose de

8 prendre une autre pause, une deuxième pause de 20 minutes. Pendant cette

9 pause, pourriez-vous, je vous prie, examiner les déclarations corrigées ?

10 Je vous demanderais d'apposer vos initiales sur chaque page et de signer la

11 page de garde qui est en B/C/S.

12 Nous reprendrons nos travaux à midi 50.

13 --- L'audience est suspendue à 12 heures 30.

14 --- L'audience est reprise à 13 heures 00.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de poursuivre, je souhaiterais

16 aborder quelques questions très pratiques. Vendredi, le vendredi de cette

17 semaine où la journée sera un peu différente que d'habitude, c'est-à-dire

18 que nous allons commencer l'audience à 11 heures, dans la salle d'audience

19 numéro III et pas à 9 heures. Ensuite nous poursuivrons jusqu'à 14 heures,

20 et ensuite nous prendrons une pause d'une heure pour poursuivre de 15

21 heures à 18 heures. Ce n'est que pour vendredi, ce vendredi-ci que l'heure

22 changera de cette façon-ci.

23 J'ai une autre demande. Au cours du témoignage fait par M. Krajisnik

24 le 15 juin, à deux reprises on a fait une référence à une visite rendue par

25 des journalistes accompagnés par M. Ostojic. Ces journalistes s'étaient

26 rendus dans des camps et une référence a été faite relative à un entretien

27 ou un article, c'est peut-être la même chose, quelque chose qui a été

28 publié dans Kozarski Vjesnik, et, on a dit à plusieurs reprises, à ce

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1 moment-là, qu'il s'agissait de documents que nous avions, c'est dans vos

2 documents, c'est ce que l'on voit à la page du compte rendu d'audience qui

3 porte le numéro

4 25 828, la dernière fois qu'on a fait allusion à ces documents.

5 Nous avions quelques difficultés à repérer cet article du Kozarski

6 Vjesnik ou l'entretien. Je demanderais aux parties de bien vouloir nous

7 venir en aide pour essayer de trouver cet article, de nous dire de quoi il

8 s'agit.

9 M. STEWART : [interprétation] Monsieur le Président, certainement. Pour ce

10 qui est de la Défense, je ferai de mon mieux pour essayer de retrouver ce

11 passage de cet article.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pour le bureau du Procureur cela va sans

13 dire, n'est-ce pas ?

14 M. TIEGER : [interprétation] Oui, certainement, Monsieur le Président. Je

15 ne peux pas vous donner de réponse immédiate, mais nous allons certainement

16 nous pencher sur la question afin de vous venir en aide le plus rapidement

17 que possible.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Poursuivons maintenant avec M.

19 Subotic.

20 Dans le paragraphe 46 de votre déclaration, c'est le paragraphe qui suit

21 celui auquel j'ai fait allusion avant la pause, et lorsque vous avez parlé

22 du déplacement allégué des milliers de Musulmans dans la vallée de Japra,

23 vous avez dit et je cite : "Ils," c'est-à-dire, vous parliez de groupes qui

24 avaient mené les attaques, "n'avaient absolument aucun lien avec les

25 autorités civiles de Pale, puisqu'en tant que membre du gouvernement

26 j'aurais eu connaissance de cela."

27 En même temps, nous avons vu que vous avez formulé un grief auprès de

28 l'assemblée, que vous avez été laissé dans le noir à plusieurs reprises.

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1 Comment est-ce que vous auriez pu être si certain que les incidents se

2 déroulaient dans des municipalités tel l'incident allégué que je viens de

3 mentionner dans la vallée de Japra ? Comment est-ce que vous pouvez le dire

4 avec une telle certitude que vous en auriez eu connaissance ?

5 R. Puisqu'il s'agissait de la Krajina, c'est une région qui était

6 partiellement impliquée dans les conflits, les informations provenant des

7 municipalités, des députés dans les municipalités, parvenaient à Pale au

8 sein du gouvernement, des fois même étaient débattues lors des séances de

9 l'assemblée. C'est sur cette base que j'affirme, qu'en tant que membre du

10 gouvernement, j'aurais eu connaissance d'un tel incident. Cet incident n'a

11 pas fait l'objet d'un débat, n'a pas été présenté aux réunions du

12 gouvernement. Je ne sais pas s'ils ont défini la période exacte de 1992. Je

13 ne sais pas si M. Zahar m'a donné une période précise. Est-ce que vous

14 auriez peut-être cette information, Monsieur le Président ? Pourriez-vous

15 me dire, je vous prie ?

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, certainement. Nous parlons des mois

17 de juin, juillet 1992, environ.

18 R. Voyez-vous, Monsieur le Président, je dois vous dire qu'à l'époque on

19 avait déjà établi des liens téléphoniques avec Krajina. Des liens

20 téléphoniques et d'autres moyens de communication nous permettaient de

21 communiquer avec la Krajina. Je pense personnellement que c'est quelque

22 chose qu'on aurait su au sein du gouvernement ou au sein du MUP car le MUP

23 faisait partie du gouvernement. C'est ainsi que j'ai pu le déclarer avec

24 une telle certitude dans ma déclaration.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous dites également que vous estimez

26 personnellement que cela aurait été connu du gouvernement alors que dans

27 votre déclaration, vous dites : qu'il n'y avait aucun lien avec les

28 autorités civiles à Pale, car en tant que membre du gouvernement j'en

Page 26474

1 aurais eu connaissance. Ce n'est pas tout à fait clair, à mon sens. Je ne

2 comprends pas ce que vous voulez dire exactement.

3 R. Voyez-vous, Monsieur le Président, il s'agissait d'un très grand nombre

4 de personnes. Voyez-vous c'est un chiffre de 4 000 personnes. Ce n'est pas

5 quatre personnes. Ce n'est pas 40 personnes, c'est bien 4 000 personnes.

6 J'estime qu'aucun organe municipal ou aucun organe policier n'aurait gardé

7 cela sous silence sans en aviser Pale d'abord. Puisque cela n'a jamais fait

8 objet de quelque discussion que ce soit, c'est pour cela que je peux

9 l'affirmer. Je ne peux pas concevoir qu'un tel événement ait pu se passer

10 et que personne n'en ait la moindre idée, alors que les moyens de

11 communications fonctionnaient déjà très bien à l'époque.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous êtes en train de nous

13 dire que cela ne s'est pas produit parce que vous n'aviez pas connaissance

14 de cela ou parce qu'il était inconcevable d'envisager qu'une opération de

15 telle envergure se passe et que vous en ayez pas connaissance ? Si vous

16 n'aviez pas été informé de ceci, vous estimez que cela ne s'est jamais

17 déroulé. C'est ce que vous semblez dire dans votre déclaration, n'est-ce

18 pas ?

19 R. Je ne peux pas comprendre ni concevoir qu'un événement, pour ne pas

20 l'appeler opération, mais qu'un événement d'une telle proportion puisse se

21 dérouler sans que les autorités de Pale en soient informées. J'ai fait

22 partie de ces autorités gouvernementales de Pale. C'est ce que j'affirme,

23 c'est ce que je vous dis. Je n'avais aucun moyen de l'apprendre. Je n'avais

24 aucune information concernant ceci. La première fois que j'ai entendu

25 parler de cet incident, c'était lorsque M. Zahar m'a posé une question

26 concernant cet événement.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous croyez que cet incident ne s'est

28 pas déroulé parce que vous et les autres n'aviez pas été informés de

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1 l'incident ? Est-ce que c'est ainsi que je dois comprendre votre réponse ?

2 R. Oui, tout à fait. S'il y avait eu un incident d'une telle envergure,

3 d'un incident aussi important, il semble impossible que l'on n'ait pas eu

4 connaissance de cela.

5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Les Juges de cette Chambre ont entendu

6 des éléments de preuve qui semblent indiquer qu'un tel événement s'est bel

7 et bien déroulé et que ce n'est pas seulement des ouï-dire, mais il y a des

8 documents à l'appui et il y a des photos à l'appui également. Si vous dites

9 cet incident n'aurait pas pu se dérouler puisque nous n'avions pas entendu

10 parler d'un tel événement aussi important, d'une telle envergure, je dois

11 vous informer que la Chambre n'a pas encore rendu sa décision, mais elle a

12 entendu un très grand nombre d'éléments de preuve et de témoignages.

13 R. Je n'ai aucune raison de douter de vos propos, mais j'ai toutes les

14 raisons du monde de douter que d'autres personnes de Pale auraient pu avoir

15 connaissance de cet incident. Je ne peux pas concevoir que des personnes de

16 Pale aient pu avoir été informées de cela sans que personne n'en parle,

17 sans qu'aucune campagne ne soit lancée. C'est ce que je peux vous infirmer.

18 Je ne sais pas si cet événement s'est déroulé ou non, si vous avez des

19 éléments de preuve à l'appui que cet événement s'est bel et bien déroulé, à

20 ce moment-là, je ne peux pas le démentir, mais je n'ai absolument aucune

21 information, je n'ai aucune idée de savoir pourquoi on n'a pas parlé de

22 cette information. Comme je vous dis, la première fois que j'ai entendu

23 parler de cet événement, c'était lorsque M. Zahar m'a posé une question

24 concernant cet événement. Je n'en avais jamais entendu parler, ni à

25 l'époque, ni plus tard.

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je devrais peut-être établir un lien un

27 peu plus étroit entre ce que nous voyons au paragraphe 46. Je voudrais

28 informer les parties de ceci : les déclarations du témoin n'étaient pas

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1 faites concernant le déplacement des milliers de Musulmans, mais

2 l'information concernait plutôt le lien, enfin le témoin parlait des gens

3 qui avaient lancé des attaques envers des autorités civiles. Je crois qu'il

4 nous faudrait être un peu plus précis pour scinder ces deux éléments. Il

5 faudrait peut-être effectivement être un peu plus clair et dire dans quel

6 cadre cette Chambre a reçu des éléments de preuve, documentaires, des

7 photographies.

8 Je vais passer au prochain sujet, mais seulement après que le Juge Hanoteau

9 ait posé une question au témoin.

10 M. LE JUGE HANOTEAU : Monsieur Subotic, la guerre ayant cessé, les mois et

11 les premières années étant passées, est-ce que vous avez été au courant des

12 faits qui peuvent constituer que des crimes de guerre ont été commis sans

13 que vous en ayez été informé au moment où cela s'est passé ? Est-ce que

14 vous avez découvert dans les années suivantes que des événements vous

15 avaient échappé ?

16 R. Oui, tout à fait. J'avais entendu parler de tels événements, mais je

17 n'ai pas découvert moi-même rien de précis. J'ai lu ce genre de propos dans

18 les médias. J'en avais entendu parler de par les organisations

19 internationales. J'ai entendu les réactions des personnes et il est certain

20 --

21 M. LE JUGE HANOTEAU : [hors micro] Veuillez nous expliquer, s'il vous

22 plaît, comment cela ait pu vous échapper au moment où cela ils ont été

23 commis ?

24 R. Je ne le sais pas, Monsieur le Juge. Comment voulez-vous que je sache ?

25 Car je vous dis que pour tout ce qui s'est passé quelque part sur le

26 territoire de la république, pour tous les événements qui se sont déroulés,

27 les gens de Pale auraient reçu des informations, ils auraient réagi. Je ne

28 sais pas du tout. Je ne suis pas au courant de quelque situation que ce

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1 soit sans que le gouvernement de Pale en ait pris connaissance et en ait

2 parlé. Je n'ai jamais entendu parler d'un tel événement.

3 M. LE JUGE HANOTEAU : Merci, Monsieur.

4 M. TIEGER : [interprétation] Je suis désolé, mais si je pouvais un petit

5 peu avoir des éclaircissements sur le dernier point que vous avez soulevé

6 avant de donner la parole au Juge Hanoteau, à propos du paragraphe 46.

7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Pour ce qui est du paragraphe 46,

8 il y a deux questions qui sont soulevées dans ce paragraphe. Je crois que

9 j'ai commencé ma question de la façon suivante, j'ai demandé au témoin

10 pourquoi il avait une telle certitude en ce qui concerne le fait selon

11 lequel il n'y avait aucun lien entre les groupes qui avaient effectué des

12 attaques et les autorités civiles à Pale. Ce n'était pas le problème auquel

13 je pensais quand j'ai fait référence aux éléments de preuve que cette

14 Chambre avait reçus. Je ne pensais pas tellement aux photographies

15 d'autocars, ce n'était pas en mon esprit. Ce n'était pas tellement ce lien

16 entre Pale et le groupe qui avait effectué des attaques, mais j'avais

17 quelque chose d'autre en tête, et c'est pour cela que j'étais un peu

18 inquiet d'avoir créé une certaine confusion dans les esprits. Ce qui ne

19 signifie pas qu'il n'y ait pas d'élément de preuve à ces propos, mais ce

20 n'était pas à cela que je faisais référence, en tout cas dans ma tête;

21 j'avais peur qu'il y ait une confusion d'un côté pour ce qui est des

22 éléments de preuve portant sur le déplacement des Musulmans et les liens

23 entre les autorités civiles à Pale et les groupes qui avaient effectué ces

24 attaques.

25 M. TIEGER : [interprétation] C'est sûrement pour cela que je me suis

26 levé d'ailleurs, car c'est ce que j'avais compris. Quand j'ai écouté la

27 réponse du témoin, je pense que ce à quoi il a répondu avait trait au

28 nombre de personnes qui avaient été déplacées, alors que dans la

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1 déclaration, ce n'était pas vraiment ce qui était écrit.

2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, j'ai bien compris cela. Quand j'ai

3 cité ces mots-là et j'ai parlé des liens entre les attaques et les

4 autorités civiles à Pale. Il y a sans doute une confusion qui s'est faite à

5 ce moment-là. Ce qui ne signifie pas qu'à Pale les gens n'étaient au

6 courant quand même, vu l'envergure de la chose. J'ai remarqué que quand on

7 passe d'un sujet à l'autre, on risque de créer confusion. C'est pour cela

8 que j'ai été inquiet en plus d'être à l'origine de la confusion qui a pu

9 être créée dans les esprits.

10 Nous allons poursuivre.

11 Monsieur Subotic, ce n'est pas grave. C'était juste un petit point de

12 procédure qui, pour vous, n'est pas essentiel.

13 Au paragraphe 26 de votre déclaration, vous dites

14 qu'intellectuellement vous aviez un très grand respect pour le premier

15 ministre Djeric, le ministre des Affaires étrangères, le

16 Pr Buha et le président Karadzic. C'étaient les personnes que vous

17 respectiez le plus. Ressentiez-vous le même respect pour M. Krajisnik et la

18 même approche intellectuelle des choses, si je puis dire, ou est-ce que

19 votre relation avec M. Krajisnik était différente ?

20 R. Vous savez, j'étais très peu en relation avec M. Krajisnik. En

21 fait, nous ne travaillions pas du tout dans les mêmes domaines. De plus, il

22 ne prenait pas de décisions pour ce qui est, en tout cas, de mon travail.

23 Il n'émettait pas d'ordres. On se rassemblait, bien sûr, lors des séances

24 de l'assemblée; quand j'y allais, je le voyais. C'était plutôt le premier

25 ministre que je voyais tous les jours, puisque je devais discuter de

26 problèmes avec lui, et je voyais aussi le ministre des Affaires étrangères,

27 Buha, qui est aussi membre du gouvernement. Je le voyais tous les jours,

28 ainsi que le président Karadzic en tant que président de l'Etat, chef

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1 d'état et commandant suprême, c'était quelqu'un que je voyais tous les

2 jours. C'est pour cela que j'ai dit cela. Je ne voulais pas dire que je ne

3 m'entendais pas avec M. Krajisnik, mais c'est juste que nous n'étions pas

4 tellement en contact. Parce qu'on ne travaillait pas du tout dans le même

5 domaine. Pour ce qui est des affaires routinières, je n'avais pas de

6 contact avec lui, je n'avais pas de problèmes spéciaux avec le président

7 Krajisnik en tant que président de l'assemblée. Je n'avais pas besoin de le

8 voir et besoin de m'entretenir avec lui puisqu'on travaillait dans des

9 domaines très différents. J'ai répondu à une question qui m'a été posée par

10 M. Zahar. Je lui ai répondu très spontanément. Je lui ai parlé très

11 spontanément des personnes de qui je me sentais proche intellectuellement.

12 Ce qui ne voulait absolument pas dire que je n'aimais pas M. Krajisnik.

13 C'était quelqu'un de très sympathique, il avait beaucoup d'esprit, qui

14 savait très bien tenir l'assemblée, tenir les débats. Il était comme cela

15 avec tout le monde, pas uniquement avec moi.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Maintenant, j'aimerais vous

17 parler du paragraphe 29. Vous nous parlez de matériels qui ont été pris

18 depuis l'école de Banja Luka. J'ai une question à propos de cela. Pourriez-

19 vous nous dire quand ces armes ont été prises à l'école ?

20 R. C'est au début de la guerre, en avril 1992. Avant cela, j'étais le

21 commandant de cette école, avant de prendre le poste de ministre de la

22 Défense. Il s'agissait de l'école des blindés de la JNA. Tous les tankistes

23 allaient s'y former. Il y avait là

24 énormément d'équipements. Il y avait des matériels pédagogiques qui

25 venaient de l'armée yougoslave, qui ne s'appelait plus la JNA d'ailleurs.

26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Je ne suis pas très intéressé dans

27 cette école en tant que telle, mais c'est plutôt les armes qui

28 m'intéressent. Ont-elles été volées ? Ont-elles été enlevées ? Ont-elles

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1 été partagées sur la base d'un accord quelconque ? Vous dites qu'elles ont

2 été prises. Dans quelles circonstances ces armes ont-elles été prises ?

3 R. J'étais déjà à Pale à ce moment-là en tant que ministre de la Défense.

4 On m'a informé. C'est le président de la municipalité d'ailleurs qui m'a

5 informé, feu M. Radic, qui m'a informé de la chose. C'était une réaction

6 des citoyens, en fait. Quand l'armée est arrivée pour retirer son matériel

7 militaire de cette école, les gens de Banja Luka sont descendus dans la

8 rue, sont allés voir le représentant de l'armée de la Yougoslavie, et ils

9 leur ont dit : "Vous pouvez pendre votre matériel pédagogique, vous pouvez

10 prendre les effectifs. Nous n'avons pas d'unités ici, il faut qu'on se

11 défende, la guerre a commencé." Alors, je n'ai pas su grand-chose à ce

12 propos, enfin, je ne savais pas grand-chose sur ce qui se passait. Il me

13 semble qu'un tiers des armes ont été laissées. Une portion de ces armes a

14 été donnée à la police de la Krajina, surtout des véhicules transport de

15 troupes, des petits équipements, quelques chars; deux ou trois chars.

16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Pour répondre à ma question

17 précédente, vous avez dit que les armes ont été prises en avril. Selon ce

18 que vous venez de nous dire, si j'ai bien compris, il s'agissait ce qui

19 avait été laissé par la JNA après que celle-ci se soit retirée ?

20 R. Dans cette école, on s'est retirés de l'école en

21 avril 1992. Bien sûr, il y a des unités qui se sont retirées plus tard dans

22 la région de Sarajevo, que je connais. D'ailleurs, dans la république

23 d'ailleurs, il y a d'autres cas dont j'ai connaissance. Mais pour ce qui

24 est de cette école-là à Banja Luka, c'était en avril, cela, j'en suis sûr.

25 Beaucoup de gens sont partis, les équipes pédagogiques, l'équipement, les

26 ordinateurs, et cetera, tout est parti.

27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Cela me surprend. Ce qui me

28 surprend, c'est que vous nous avez dit qu'il restait encore des Musulmans

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1 au sein de l'armée, alors que vous étiez en train de faire votre visite des

2 lignes de séparation. Et là, vous nous avez fait une réponse à propos des

3 Serbes qui ont obtenu ces armes. Je vous ai demandé s'il y avait eu un

4 accord. J'aimerais savoir si vous savez si une partie de ces armes se sont

5 retrouvées finalement entre les mains de non-Serbes ?

6 R. Je ne le pense pas, pas ces armes qui venaient de cette école. Je ne

7 pense vraiment pas que cela soit le cas.

8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourriez-vous nous donner des détails

9 supplémentaires sur ce qui s'est passé ? Vous nous avez déjà dit que vous

10 en avez entendu parler par ce M. Radic. Avez-vous des détails

11 supplémentaires sur le sort de ces armes, pour savoir comment, selon vos

12 dires, elles sont finalement arrivées entre les mains de l'administration

13 de la RAK à Banja Luka ?

14 R. Ils ont tout simplement laissé sur place des armes, une partie

15 des armes. Les unités territoriales de la Krajina ont pris ce qui restait.

16 Il y en avait qui étaient déjà formés à l'époque, d'autres qui étaient en

17 formation. Il n'y avait pas de conflit armé en Banja Luka en 1992. De

18 nombreux habitants musulmans de Banja Luka sont restés au sein des unités

19 de la Défense territoriale de Banja Luka là-bas. Certains d'ailleurs ont

20 reçu des pensions d'invalidité. Ils étaient déjà des anciens combattants de

21 la guerre précédente. Enfin, Banja Luka, c'était un peu spécial en Bosnie.

22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Passons maintenant au paragraphe 47 de

23 votre déclaration. Vous faites référence ici à un incident, un incident de

24 Koricanske Stijene, sur lequel M. Karadzic va a demandé d'enquêter. Donc,

25 vous décrivez une réunion ad hoc. Savez-vous qui a organisé cette réunion

26 ad hoc de la présidence où l'on a parlé de cet incident ?

27 R. Je ne sais pas qui a organisé la réunion. Le président nous a dit qu'il

28 avait reçu un télégramme de la MUP de Banja Luka et qu'il avait aussi reçu

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1 un appel de la Croix-Rouge internationale ou d'une autre organisation

2 internationale quelconque. Il me semble bien que c'était comme la Croix-

3 Rouge internationale, qui avait exactement la même information. Il nous a

4 tous rassemblés rapidement d'ailleurs, pronto, parce qu'il était

5 extrêmement fâché, il était très en colère. D'après ce que j'ai compris sa

6 réaction, il soupçonnait une unité militaire d'être responsable de ce fait.

7 Cette unité militaire, je ne me souviens plus de son nom, c'était juste en

8 face de Koricanske Stijene. Pourriez-vous m'aider ? Est-ce que quelqu'un

9 pourrait m'aider ?

10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, je pense que personne ne peut vous

11 aider. C'est vous le témoin. Si vous ne le savez pas, qui pourrait savoir ?

12 R. Attendez. Il faut que je me souvienne. C'est sur la route de Vlasic.

13 Peut-être que M. Krajisnik pourrait se souvenir du nom de cet endroit. J'ai

14 un trou de mémoire. Je ne m'en souviens absolument plus.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Quand cela vous reviendra, vous nous en

16 ferez part. Sinon, nous vivrons sans savoir.

17 Cette réunion ad hoc a été organisée, comme vous le dites, extrêmement

18 rapidement. Vous souvenez-vous qu'il y ait eu d'autres réunions ad hoc de

19 ce type de la présidence pour parler de points d'actualité, de problèmes

20 d'actualité ? Est-ce que vous savez s'il y eu d'autres types de réunions ad

21 hoc organisées comme cela du jour au lendemain, très rapidement ?

22 R. Non. Non, dans cette période de temps en 1992, je ne m'en souviens pas.

23 Peut-être qu'il y en a eu plus tard, mais en 1992, je ne pense pas qu'il y

24 a eu d'autres que celui-là.

25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne parle pas de réunions ad hoc qui

26 ont été organisées pour parler de ce type de questions, mais de n'importe

27 quel événement qui aurait obligé la présidence à immédiatement organiser

28 une réunion très rapidement pour parler d'un sujet brûlant.

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1 R. Oui, oui, il y en a eu. Par exemple, il y a eu l'affaire de Zepa, par

2 exemple. Je crois que c'était un petit peu avant celle dont on parle au

3 paragraphe 46. Enfin, cela est à peu près au même temps, au même moment

4 peut-être. Je ne me souviens plus très bien des dates. Mais quand il y a eu

5 la chose à Zepa, quand il y a eu ces soldats qui ont été tués, les soldats

6 dirigés par le général Milovanovic, il y avait une séance en soirée où on a

7 essayé de voir comment réagir. Les organisations internationales aussi ont

8 été impliquées. M. Akashi et d'autres. Je crois qu'il y avait 54 morts,

9 quelque chose comme cela. Les chiffres ne sont pas précis. La situation

10 était très, très douloureuse, très, très pénible. Donc, la réaction a été

11 celle dont je vous ai parlé.

12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que c'est arrivé plus souvent,

13 quand il y avait une urgence, un événement urgent ? Est-ce qu'on pouvait

14 organiser comme cela, pratiquement sans préavis, une réunion de la

15 présidence ? Est-ce que c'est arrivé plusieurs fois ?

16 R. Je ne pourrais pas dire vraiment souvent. C'est selon les besoins. Vous

17 savez, cela dépendait des événements.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Mais vous savez, la Chambre a vu

19 des documents, a vu les VP aussi de réunions de la présidence. Il semble

20 qu'elles se sont organisées un peu au petit bonheur la chance, de temps en

21 temps. Parfois, il y en a deux de suite, parfois, il y en a deux dans la

22 journée. Ensuite, il y a plus de temps qui était un peu plus long. Donc, à

23 votre connaissance, y avait-il fréquemment ce type de réunions de la

24 présidence ad hoc organisées très rapidement pour réagir à quelque chose ?

25 R. D'après moi, ces réunions se tenaient selon les besoins. Je dis bien

26 selon les besoins. Parce que si la situation nécessitait une rencontre, il

27 n'y avait pas d'heure déterminée à l'avance ou de façon formelle. Cela se

28 faisait ad hoc.

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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourriez-vous nous dire

2 approximativement à combien de réunions vous avez participé où tous les

3 membres de la présidence étaient présents aussi, donc des réunions assez

4 restreintes ?

5 R. Il est difficile de le dire à présent. J'ai été présent, disons, quand

6 on m'a convié. Il y a eu bon nombre de réunions dont je n'ai même pas été

7 mis au courant. Mais eux, ils avaient coutume -- excusez-moi, ils avaient

8 coutume de convoquer des personnes dont la présence était d'actualité dans

9 une situation déterminée, pour entendre des informations, pour faire

10 prendre des mesures, et ainsi de suite. Nous autres, qui étions à

11 l'extérieur à la présidence, n'étions pas convoqués très souvent, pas si

12 souvent que cela. Je pourrais, par exemple, vous dire que cela dépendait de

13 la situation. Disons, deux ou trois fois par mois, en moyenne. Pour

14 l'essentiel, cela dépendait de la situation.

15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Tieger.

16 M. TIEGER : [interprétation] Je viens juste de me rappeler, qu'auparavant,

17 il y a eu une question soulevée à propos de 1992, par rapport à ce qui

18 s'est passé après 1992. Je ne sais pas si c'est clair ou non dans le compte

19 rendu.

20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'allais justement traiter de ce sujet.

21 Si nous nous concentrons sur 1992, Monsieur Subotic, vous avez dit deux ou

22 trois fois par mois. Est-ce que cela veut dire que quand vous étiez

23 ministre de la Défense, pendant cette période, vous étiez convié deux à

24 trois fois par mois pour participer à ce type de réunions ad hoc ?

25 R. C'est à peu près cela. Les réunions, elles se tenaient certainement

26 plus souvent. Je ne sais pas à quelle fréquence. Je ne pouvais pas le

27 savoir.

28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Mais vous avez été convié deux à

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1 trois fois par mois au cours de cette période où vous étiez ministre de la

2 Défense. Vous avez été convié deux à trois fois par mois à ces types de

3 réunions ad hoc. C'est bien cela, n'est-ce pas ? A ces réunions, il y avait

4 M. Karadzic, Mme Plavsic, le

5 Pr Koljevic. Y avait-il aussi d'autres personnes qui étaient fréquemment

6 présentes lors de ces réunions ?

7 R. Oui, des fois, il y avait que Krajisnik de présent. Des fois, c'était

8 Mico Stanisic. Des fois, le premier ministre Djeric. Dans d'autres cas,

9 d'autres ministres encore. Cela dépendait des questions qui étaient

10 examinées. Des fois, il y avait le ministre des Affaires étrangères, M.

11 Buha, lorsqu'il a été question des négociations, entretiens avec des

12 délégations étrangères ou des entretiens à Cutileiro ou que sais-je encore.

13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Monsieur Subotic, je pense

14 que le moment est venu de s'arrêter pour la journée. Nous n'avons pas

15 d'audience demain, puisqu'il y a une plénière à laquelle doivent faire

16 partie tous les Juges. Donc, il n'y aura pas d'audience. Cela dit, nous

17 aimerions vous revoir dans un autre prétoire, le prétoire III à 11 heures,

18 vendredi.

19 Monsieur Subotic, je tiens à vous dire que vous ne devez parler à personne

20 de la déposition que vous avez faite jusqu'à présent et que vous allez

21 faire vendredi. Il faut que vous reveniez vendredi. Vous pouvez maintenant

22 suivre Mme l'Huissière qui va vous escorter hors du prétoire.

23 J'aimerais maintenant passer à huis clos partiel.

24 [Le témoin se retire]

25 [Audience à huis clos partiel]

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8 [Audience publique]

9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de lever la séance, Monsieur le

10 Greffier, j'ai reçu un exemplaire en B/C/S de la déclaration de M. Subotic,

11 le numéro C3 nous a été donné.

12 M. STEWART : [interprétation] Je tiens à vous demander une chose. La ligne

13 privilégiée de M. Krajisnik avait été interrompue au cours de sa déposition

14 et normalement aurait dû être remise en fonctionnement. Or, cela ne

15 fonctionne toujours pas. Il me semble que c'est la Chambre de première

16 instance qui doit prendre les mesures nécessaires pour s'assurer que le

17 service est rétabli.

18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, nous allons le faire, bien sûr.

19 Cela dit, nous ne sommes pas compétents pour tout problème technique qui

20 aurait pu intervenir. Cela c'est hors de notre compétence.

21 M. STEWART : [interprétation] Oui, oui. Je comprends bien. Il faudrait

22 indiquer que la Chambre de première instance maintenant est prête à

23 rétablir le service.

24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien, nous allons le faire, et

25 maintenant nous allons lever la séance.

26 Nous reprendrons vendredi à 11 heures en salle d'audience III.

27 --- L'audience est levée à 13 heures 56 et reprendra le vendredi 30 juin

28 2006, à 11 heures 00.