Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   (Mardi 20 mars 2001.)

  2   (L'audience est ouverte à 9 heures 30.).

  3   (Audience publique avec mesures de protection.)

  4   (Suite de l'interrogatoire principal du témoin FWS-69 par Mme Uertz-

  5   Retzlaff.)

  6   M. le Président (interprétation): Citez l'affaire, s'il vous plaît.

  7   Mme Chen (interprétation): Monsieur le Président, il s'agit de l'affaire

  8   IT-97-25-T, le Procureur contre Milorad Krnojelac.

  9   M. le Président (interprétation): Madame Uertz-Retzlaff, vous avez la

 10   parole.

 11   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Merci, Monsieur le Président. Bonjour

 12   Monsieur.

 13   Est-ce que vous pouvez m'entendre maintenant?

 14   Témoin FWS-69 (interprétation): Oui, je vous entends bien.

 15   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Bonjour Monsieur.

 16   Témoin FWS-69 (interprétation): Bonjour.

 17   Question: Hier, vous nous avez dit que vous aviez vu M. Krnojelac au

 18   moment où 75 détenus ont été emmenés. Avez-vous vu aussi des soldats dans

 19   l'enceinte du KP Dom lorsque ceci s’est produit?

 20   Réponse: Non, je n'en ai pas vu.

 21   Question: Savez-vous ce qu'il était advenu de ces 75 détenus?

 22   Réponse: Je ne sais pas ce qu'il s'est passé avec eux. Mais pour parler de

 23   ces détenus-là, je n'en connais pas un qui aurait donné de ses nouvelles.

 24   Une fois qu'ils étaient sortis par le portail, on ne sait plus ce qu'il

 25   était advenu d’eux.


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  1   Question: Vous nous avez dit hier aussi que vous avez vu M. Krnojelac au

  2   cours d'une alerte qui était donnée. Est-ce que vous pouvez vous rappeler

  3   à quel moment ceci s'était produit?

  4   Réponse: Je ne peux pas vous dire avec exactitude quand. Je sais qu'il y

  5   avait une alerte mais je ne peux pas vous citer les dates.

  6   Question: Pouvez-vous nous dire, au moins, de quelle époque de l'année il

  7   s'agissait? Etait-ce au début de votre détention ou à la fin?

  8   Réponse: C'était au mois de juillet ou août, ou peut-être septembre. Très

  9   vraisemblablement au mois de septembre, octobre. Je ne sais pas, en tout

 10   cas ce n'était pas au début de ma détention.

 11   Question: Etait-ce le jour ou plutôt vers la soirée ou le soir?

 12   Réponse: Non, ce n'était pas le soir, mais c'était dans les heures de

 13   l'après-midi.

 14   Question: Vous nous avez dit hier aussi que vous avez été interrogé et

 15   Paprica vous a dit quelque chose de l'existence d'une cellule de crise et

 16   que dans cette cellule de crise il y avait aussi votre directeur du camp.

 17   A quel moment vous a-t-il dit cela, Paprica?

 18   Réponse: Il me l'a dit lorsque j'ai été interrogé dans son bureau.

 19   Question: Y a-t-il eu d'autres personnes, Starovic ou Gagovic que vous

 20   avez mentionnés, qui étaient présents?

 21   Réponse: Ils étaient présents, Starovic, Paprica, Gagovic. De temps en

 22   temps Mita Rasevic était là. Ils entraient et sortaient mais je ne sais

 23   pas si à ce moment-là il me l'a dit, si Rasevic était présent.

 24   Question: Quant à Starovic et Gagovic, ont-ils dit quoique se soit? Ont-

 25   ils ajouté quelque chose à ce que Paprica vous a dit ou ont-ils gardé le


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  1   silence?

  2   Réponse: Je ne me souviens pas les avoir entendu dire quoique ce soit. Je

  3   ne m'en souviens vraiment pas.

  4   Question: Hier, vous nous avez dit aussi en parlant de ce journaliste qui

  5   était venu au camp qui enregistrait, qui prenait des vues, le directeur

  6   était-il présent? A-t-il piloté ces journalistes? Qu'est-ce qu'il a fait

  7   lui pendant ce temps-là?

  8   Réponse: Il était présent, il se tenait plutôt près de la grande porte

  9   menant de l'enceinte vers le bâtiment administratif. Il était présent dans

 10   l'enceinte du camp, oui.

 11   Question: Etait-il venu ensemble avec eux, avec ces journalistes? Est-ce

 12   que vous vous en souvenez?

 13   Réponse: D'abord, il était venu au début même de leur visite. Ils sont

 14   venus tous par le portail et puis jusqu'à l'usine de meubles, il les a

 15   suivis. Probablement, il leur a montré tous ces différents établissements

 16   et installations du KP Dom, depuis le portail.

 17   Question: Vous avez dit que très vraisemblablement il les a informés en

 18   leur présentant ces différentes installations du KP Dom.

 19   Réponse: Je ne sais pas ce qu'il a dit, ce qu'il a pu dire, je sais qu'il

 20   était en leur compagnie.

 21   Question: Avez-vous vu M. Krnojelac dans l'enceinte du camp ou dans le

 22   bâtiment même en compagnie de militaires?

 23   Réponse: Vous vous référez au bâtiment où étaient détenus les hommes. Je

 24   ne l'ai jamais vu là-bas, mais dans l'enceinte même, je l'ai vu avec des

 25   militaires.


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  1   Question: Est-ce que vous pouvez savoir qui étaient ces militaires ou ce

  2   militaire?

  3   Réponse: Je le voyais à plusieurs reprises. Une fois, je l'ai vu dans

  4   l'enceinte même où il traversait le préau avec Boro Ivanovic. Une autre

  5   fois, je l'ai vu traverser la cour en compagnie d'un militaire. Je ne sais

  6   pas quel était son grade, je sais que cette personne avant la guerre était

  7   économiste. Il se nommait et prénommait Milos Dragicevic Ensuite, il y

  8   avait d'autres militaires qui portaient des mallettes en cuir jaune

  9   propres à des officiers. C'était un certain Sivsic de Brod, de Maglaj, il

 10   était technicien sanitaire.

 11   Question: Et lorsque vous avez aperçu M. Krnojelac avec tous ces

 12   militaires, qu'ont-ils fait? Sont-ils passés par le bâtiment ou à côté du

 13   bâtiment où étaient les détenus?

 14   Réponse: Ils sont passés à côté du bâtiment 1 et 2. Ils se sont passés

 15   près de la cantine pour bavarder un moment et puis ils allaient de long en

 16   large. Je ne sais pas ce qu'ils pouvaient se dire les uns aux autres.

 17   Question: Et quant à Boro Ivanovic, l'avez-vous vu vous-même à la prison?

 18   L'avez-vous vu à plusieurs reprises?

 19   Réponse: Je l’ai vu à plusieurs reprises, très souvent d'ailleurs.

 20   Souvent, il pouvait être seul. Il était capable d'adresser la parole à des

 21   détenus serbes qui étaient en treillis de camouflage. Il pouvait même

 22   avoir des dialogues assez à haute voix avec eux. Mais nous, on ne pouvait

 23   pas évidemment deviner, on ne pouvait pas entendre ce qu'ils se disaient

 24   les uns aux autres.

 25   Question: Monsieur Ivanovic, a-t-il adressé aussi la parole à des détenus


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  1   musulmans?

  2   Réponse: Il ne pouvait pas le faire parce qu'ils étaient tous dans leur

  3   salle, sauf ceux à qui il a été évidemment ordonné de nettoyer ou de

  4   travailler dans le préau. Mais je ne l'ai jamais vu parler avec ces gens-

  5   là.

  6   Question: Avez-vous vu M. Ivanovic entrer dans le bâtiment où étaient

  7   installés les détenus serbes?

  8   Réponse: Je ne l'ai pas vu, je ne m'en souviens pas.

  9   Question: Vous avez dit que vous avez pu voir M. Krnojelac en compagnie

 10   d'un militaire nommé Dragicevic. Est-ce que vous pouvez nous dire quelle

 11   était la position, la fonction de Milos Dragicevic?

 12   Réponse: Je ne pouvais pas et je ne peux pas savoir quelle était sa

 13   fonction. Je sais qu'il portait un uniforme militaire mais quant à sa

 14   mission ou sa fonction je n'en sais pas grand-chose.

 15   Question: Et pour ce qui est de cette autre personne nommée Sipcic, savez-

 16   vous quelle était sa fonction dans l'armée?

 17   Réponse: Non, je ne sais pas non plus.

 18   Question: Vous avez dit tout à l'heure que M. Gagovic était l'adjoint du

 19   directeur et que c'est en cette qualité qu'il s'était présenté. Lorsque

 20   vous l’avez vu vous-même, que portait-il?

 21   Réponse: Pour ce qui est de son pantalon je ne m'en souviens plus, mais il

 22   portait une jaquette en cuir plutôt courte, de couleur jaune.

 23   Question: Quelle était la fonction de Savo Todovic au KP Dom?

 24   Réponse: Je ne me souviens pas de cet homme-là. On m'a dit qu'un certain

 25   Savo Todovic existait, mais à en juger d'après ce que j'ai pu entendre je


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  1   crois qu'il était plutôt assigné dans cette usine de meubles où les gens

  2   travaillaient, où les détenus travaillaient.

  3   Question: Et M. Rasevic, lui, quelle était sa fonction?

  4   Réponse: Je ne peux pas vous le dire avec exactitude, mais nous autres

  5   détenus nous savions qu'il était le commandant des policiers, des gardes,

  6   de l'ensemble des gardes.

  7   Question: Le voyiez-vous quotidiennement au KP Dom?

  8   Réponse: Vous pensez à Rasevic?

  9   Question: Oui.

 10   Réponse: Oui, très souvent, très très souvent on le voyait.

 11   Question: Et que portait-il, quelle était sa tenue?

 12   Réponse: Sa tenue était celle de policier, que portait avant les

 13   policiers, le personnel pénitentiaire du KP Dom. Ce n'était pas un

 14   uniforme militaire, c'était plutôt une tenue de policier.

 15   Question: Hors M. Rasevic et les gardes, était-il préposé à veiller sur

 16   l'ensemble des détenus, Serbes et Musulmans à la fois?

 17   Réponse: Je ne sais pas à quoi ils étaient préposés, mais en tout cas on

 18   peut dire que sous la surveillance de ces gardes-là se trouvaient

 19   également les détenus serbes; ce sont ceux-là qui faisaient leur appel,

 20   qui les faisaient sortir pour le petit déjeuner, le déjeuner, etc. Mais

 21   dans l'intervalle, ils pouvaient circuler, ils étaient libres, ils

 22   pouvaient jouer au ballon, au volley-ball, etc..

 23   Question: Vous avez dit que vous avez été détenu au KP Dom jusqu'au 8

 24   décembre 1992. Dans quelles circonstances avez-vous quitté le KP Dom?

 25   Réponse: J'ai quitté le KP Dom un matin en date du 8 décembre. Nous étions


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  1   sortis, on nous a fait sortir pour le petit déjeuner, nous avons été

  2   alignés devant la cantine. C'était une journée froide, des flaques d'eau

  3   étaient couvertes de gelée. Un garde était venu, le garde d'appel de ce

  4   matin là. Il nous a fait sortir moi et quelques autres, qui étions, nous,

  5   de la pièce où nous étions, pour nous ordonner de préparer nos affaires

  6   parce que nous avons dû être échangés. Alors nous étions deux ou trois à

  7   rentrer dans notre pièce. Les autres étant partis pour le petit déjeuner.

  8   Plus tard, on nous a dit que nous devions prendre nous aussi notre petit

  9   déjeuner, prendre nos affaires pour être échangés. Lorsque nous étions de

 10   retour dans notre pièce, juste pour dire adieu à ces gens-là qui étaient

 11   dans notre pièce, nous étions sortis dans le préau, on s'est rassemblé

 12   dans la cantine même, nous étions une douzaine.

 13   On nous a servi le petit déjeuner, après quoi on nous a alignés devant le

 14   portail. Là, on devait attendre une dizaine ou une quinzaine de minutes,

 15   en ligne. Après on nous a fait sortir par le portail. C'est là aussi qu'on

 16   nous a fouillés. Les gardes faisaient l'inspection de nos affaires, ils

 17   s'intéressaient à ce que nous avions sur nous, quelques articles ou ce qui

 18   auraient été nos notes ou des papiers.

 19   Moi, je me souviens que j'avais quelques recettes sur le repiquage ou sur

 20   les techniques de plantation de tomates ou de fleurs, on m'a pris tout

 21   cela évidemment. J'avais aussi un morceau de pain que l'un des cuisiniers

 22   m'avait donné à la cantine, on me l’a pris. Et puis après, on est sorti.

 23   Question: Monsieur le témoin, nous n'avons guère besoin de tous ces

 24   détails parce que nous avons déjà pu remarquer que vous avez une

 25   excellente mémoire, que vous êtes fort sensible à des détails. Mais pour


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  1   l'instant, nous n'en avons pas trop besoin.

  2   Par qui avez-vous été pris lorsque..., sous le contrôle de qui avez-vous

  3   été pris lorsque vous étiez sorti du KP Dom?

  4   Réponse: C'était un Deutz, c'est un véhicule militaire, une espèce de

  5   camion bâché. Il y avait deux bancs à bord de cette carrosserie. Nous

  6   avons été pris donc sous le contrôle de certains militaires, couleur vert-

  7   gris olivâtre. Alors, on a fait d'abord une liste de nous autres. Eux

  8   aussi nous ont fouillé pour savoir ce que nous avions sur nous. Le petit

  9   morceau de pain que j'avais sur moi, eux-aussi s'y intéressaient, ils

 10   l'ont jeté. A côté on a vu ce véhicule et on devait se mettre à bord de

 11   cette voiture pour que ces gens-là, ces militaires s'occupent de quelques

 12   paperasses.

 13   Question: Vous avez dit qu'ils ont d'abord établi une liste des détenus.

 14   Cela signifie-t-il qu'ils devaient y entrer vos noms pour établir une

 15   liste?

 16   Réponse: Oui, oui, il s'agissait bien d'une liste de détenus.

 17   Question: Vous avez dit qu'eux aussi s'occupaient à feuilleter des papiers

 18   et des dossiers, qu'est-ce que c'était comme papier?

 19   Réponse: Je ne sais pas ce que c'était. En tout cas, j'ai vu qu'ils

 20   sortaient des papiers et puis après, ils faisaient l'appel nominal un à un

 21   de sorte que nous puissions monter dans le camion.

 22   Question: Ont-ils remis quelques pièces, quelques documents au personnel

 23   du KP Dom, ou bien ont-ils reçu du personnel du KP Dom des papiers

 24   quelconques vous concernant?

 25   Réponse: Je ne sais pas. Je ne sais rien là-dessus.


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  1   Question: Où vous a-t-on emmenés ensuite?

  2   Réponse: Lorsqu'on s’est mis définitivement dans ce véhicule, il y avait

  3   toujours un militaire d'un côté du siège et un autre militaire de l'autre

  4   côté du siège. Nous étions donc 12 détenus et deux militaires, 14. Ils ont

  5   baissé la bâche, on ne savait pas où se dirigeait le véhicule. Il y avait

  6   même certaines haltes mais nous, on ne savait pas où nous étions jusqu'à

  7   un moment où le véhicule s’est arrêté. Ils ont enlevé la bâche. Lorsqu'on

  8   a jeté un regard pour savoir où on était, je ne pouvais que supposer qu'on

  9   était dans le village de Miljevina surnommé aussi...C'est là que l'on

 10   s'est arrêté.

 11   Pour parler de ce processus de voyage, dirais-je, depuis le KP Dom, nous

 12   avons été tabassés sans cesse. Il y avait un de ces militaires qui nous a

 13   tabassés, l'autre le faisait moins. Il avait un chapeau sur la tête. Pour

 14   lui adresser la parole on le désignait de vojvoda. Lorsque le véhicule

 15   s'est arrêté, ces deux gens-là se sont reposés, j'ai pu voir à côté un

 16   petit ruisseau dont l'eau était claire et limpide. J'ai vu des maisons

 17   incendiées.

 18   Et puis après j'ai vu qu'ils ont jeté dans le véhicule les restes d'un

 19   veau. C'était un pied de veau. On a vu que c'était empesté et sale. On

 20   nous a ordonné de manger de cette viande-là, on nous a même ordonné de

 21   bouffer de ce sabot de pied de veau. Moi, j'étais tout ensanglanté parce

 22   qu'on m'avait cassé le nez. Nous avons tous été exténués.

 23   A un moment donné, l'homme qui se tenait dans le cockpit de la voiture, un

 24   gros barbu, il était avec un pistolet mitrailleur. Il nous a ordonné de

 25   jeter dehors ce pied de veau. Après, c'est lui qui a dit à d'autres de ne


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  1   plus nous toucher. Et puis après, le véhicule a repris le chemin.

  2   Plus tard, ...

  3   Question: Monsieur, permettez-moi de vous arrêter une seconde. Je voulais

  4   vérifier quelque chose parce que dans le transcript, il est dit: "ils nous

  5   ont interdit de manger la partie sale du sabot de pied de veau."

  6   Où vous ont-ils emmenés à la fin de tout cela?

  7   Réponse: Où ils nous ont emmenés?

  8   Question: Oui, où vous ont-ils emmenés?

  9   Réponse: Ils nous emmenés à Kalinovik. Depuis cet endroit-là, ils nous ont

 10   emmenés directement à Kalinovik. A Kalinovik, on s'est arrêtés devant un

 11   bâtiment, c'était en plein centre de Kalinovik. Une fois de plus, on a

 12   enlevé la bâche et l'homme barbu au pistolet mitrailleur nous a apporté du

 13   pain. Et comme c'était peu, évidemment, il nous a apporté un autre pain.

 14   D'autres militaires étaient venus pour nous regarder de plus près, des

 15   femmes qui nous yeutaient aussi. Alors, on a dit aux soldats de ne plus

 16   nous battre parce que nous avions vraiment l'air misérable.

 17   Ensuite, on a continué le chemin pour arriver jusqu'à...

 18   Question: Monsieur, permettez-moi de vous interrompre. C'est trop de

 19   détails, nous n'en avons pas besoin. Où étiez-vous installé à Kalinovik?

 20   De quel bâtiment s'agissait-il?

 21   Réponse: On ne peut pas savoir. C'était une maison nommée Barutana,

 22   poudrière. Je sais seulement qu'à l'entrée il y avait une rampe. On nous a

 23   fait entrer dans le bâtiment, on nous a dit que c'est là où «vous allez

 24   loger, c'était réservé pour vous». Cette salle Barutana, cette poudrière,

 25   était énorme. Une espèce de salle à 12 piliers. Il y avait des palettes


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  1   sur lesquelles on devait se coucher. Nous avons reçu 12 couvertures sales,

  2   quelques matelas militaires, eux aussi très sales.

  3   On nous a dit que c'est là où on devait coucher. On nous a dit aussi qu'un

  4   dîner nous serait servi, en nous précisant que c'est le lieu où nous

  5   devions évidemment vivre dorénavant. Mais, pour ce qui est de cet endroit,

  6   c'était plein de souris de tous côtés.

  7   Question: Monsieur le témoin, juste pour vous interrompre une seconde,

  8   pendant combien de temps êtes-vous resté à Kalinovik?

  9   Réponse: J'étais arrivé à Kalinovik le 12 décembre et j'ai été échangé...

 10   Non, à Kalinovik je suis arrivé le 8 décembre et j'ai été échangé le 12

 11   décembre. Par conséquent, j'y ai passé trois jours. Le quatrième jour,

 12   j'ai été échangé .

 13   Question: Savez-vous contre qui vous avez été échangé?

 14   Réponse: Je ne le sais pas. C'est toujours à raison d'un détenu qu'on nous

 15   échangeait. Un jour, et puis un autre jour et le troisième jour toujours

 16   un détenu a été échangé. Mais contre qui je ne le sais pas. J'ai été le

 17   troisième par ordre. Donc la troisième journée de notre séjour.

 18   Question: Bon, d'accord.

 19   Nous avons déjà parlé de vos souffrances d'ordre physique que vous avez

 20   ressenties lors de votre détention. Avez-vous des séquelles d'ordre

 21   psychologique étant donné les circonstances de vie et de séjour, étant

 22   donné tout ce que vous avez dû vivre au KP Dom?

 23   Réponse: Quant à ces séquelles, je les ressens encore aujourd'hui. Au

 24   sortir du KP Dom, j'ai dû passer des visites médicales très détaillées.

 25   J'étais venu à Split, on m'a pesé, je pesais 54 kilogrammes au sortir de


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  1   Kalinovik. Il me semble que c'était les moments les plus durs de ma vie.

  2   J'avais la fièvre, la nausée, la diarrhée. J'avais du mal à bouger mon

  3   corps. Lorsque j'étais venu à Trnovo, on me disait que j’allais mourir, on

  4   voulait me faire une perfusion mais on ne pouvait pas trouver ma veine à

  5   tel point j'étais perdu, desséché.

  6   On a essayé de me transporter à Split, presque en catastrophe. C'est le 20

  7   decembre seulement que j'étais venu à Split pour être hospitalisé. C'est

  8   là où l'on m'a donné un secours médical approprié et il a été constaté que

  9   je souffrais d’insuffisance de vitamines, que j'étais épuisé. Mon corps

 10   était couvert presque de couleur noire, je dirais. On m'a dit qu'un de mes

 11   reins s'était délogé, qu'il y avait trois kystes sur ce rein-là. On a

 12   passé la radio de ma tête, on s'est occupé de mon coeur aussi.

 13   On m'a dit que moyennant les soins appropriés, et surtout si je bougeais

 14   un petit peu, on m'a dit que je devais monter sur le Mont de Marjan près

 15   de Split presque tous les jours, que je devais prendre beaucoup de

 16   vitamines et de fruits et que j'avais des chances évidemment d'améliorer

 17   ma santé.

 18   Question: Pendant combien de temps a duré cette hospitalisation?

 19   Réponse: Je ne sais pas combien de jours, mais juste le temps de faire

 20   tous ces différents examens médicaux.

 21   Mais pour parler d'aujourd'hui, pour parler de ces séquelles, j'en ai

 22   encore aujourd'hui. Je fais des rêves. Ces traumatismes pèsent lourdement

 23   sur moi. Je revis toutes ces scènes atroces. La nuit je sursaute, je me

 24   réveille, je crie. Et même aujourd'hui, lorsque je suis dans une cité

 25   quelconque, dans un lit quelconque, quand je suis seul, je crois que je


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  1   vais sentir ce couteau qui m'a été mis sous la gorge, sur la nuque.

  2   Par conséquent, je regarde toujours le chemin que je vais prendre. Je suis

  3   très méfiant.

  4   Voilà les problèmes qui sont les miens et il me semble que je dois vivre

  5   avec.

  6   Question: Merci, Monsieur le témoin.

  7   Monsieur le Président voilà ce que l'accusation avait comme questions à

  8   poser pour ce témoin.

  9   (Contre-interrogatoire du Témoin FWS-69 par Me Bakrac.)

 10   M. le Président (interprétation): Maître Bakrac, vous avez la parole pour

 11   le contre-interrogatoire.

 12   M. Bakrac (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

 13   Bonjour, Monsieur. Je suis Mihajlo Bakrac, défenseur de l'inculpé Milorad

 14   Krnojelac.

 15   Témoin FWS-69 (interprétation): Bonjour.

 16   M. Bakrac (interprétation): Je vous prie tout d'abord de bien m'entendre

 17   et je vous prie de ménager une pause toutes les fois où vous aurez entendu

 18   une question, étant donné que nous parlons la même langue et que les

 19   traducteurs doivent traduire ce que nous disons.

 20   Vous avez pu entendre que tout à l'heure on travaillait dans d'autres

 21   langues. Par conséquent, je vous prie de ménager une petite pause lorsque

 22   vous aurez entendu mes questions et de répondre ensuite de sorte que les

 23   traducteurs puissent se charger de leur travail.

 24   Monsieur, le 21 et le 22 octobre 1995 avez-vous fait une déposition au

 25   Bureau du Procureur sur ce que vous venez de témoigner?


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  1   Témoin FWS-69 (interprétation): Je peux répondre?

  2   Cette déposition, je l'ai faite je ne sais pas en quelle année, mais je

  3   l'ai faite cette déposition.

  4   Question: Est-ce vrai que le 12 décembre 1992 vous avez fait une

  5   déclaration au poste de sécurité publique de Trnovo?

  6   Réponse: C'est exact, mais il ne s'agit pas de la date du 12 mais du 13

  7   décembre.

  8   Question: Vous a-t-on donné lecture de ces dépositions et les avez-vous

  9   signées?

 10   Réponse: Oui, on me les a lues, et je ne sais plus si je les ai signées.

 11   Question: Et c'est ce que vous avez fait de votre propre gré, vous l'avez

 12   fait bénévolement, c'étaient vos déclarations?

 13   Réponse: Oui, c'est bien cela.

 14   Question: Hier, lors de l'interrogatoire principal, vous avez relaté les

 15   débuts mêmes du conflit de Foca. Je vais vous poser quelques questions

 16   concernant ce que vous avez dit dans vos dépositions pour voir si vous

 17   vous y tenez toujours et si cela est exact.

 18   Vous avez dit qu'une première réunion politique était le meeting du parti

 19   de l'action démocratique sur les rives de la Drina et qu'à cette occasion-

 20   là 100.000 personnes s'étaient rassemblées. Etait-ce exact?

 21   Réponse: Je ne sais pas si c'était une première réunion politique sur les

 22   rives de la Drina, et s'il y avait 100.000 personnes. On le disait, je ne

 23   pouvais pas le savoir, mais en tout cas il y avait une réunion politique

 24   de ce genre-là.

 25   Question: Vous avez dit exactement: "C'était une grande réunion, une très


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  1   grande réunion et 100.000 personnes y ont participé".

  2   Réponse: Sans doute que c'est vrai et c'est ce que l'on disait. Moi, je

  3   n'ai pas compté toutes les personnes présentes, mais on disait qu'il y a

  4   eu 100.000 personnes.

  5   M. le Président (interprétation): Monsieur le témoin, pourriez-vous, s'il

  6   vous plaît, observer une pause un peu plus longue que celle que vous

  7   observez pour l'instant, puisque les interprètes ont besoin de quelques

  8   instants pour traduire vos propos. Donc cette pause est nécessaire.

  9   Témoin FWS-69 (interprétation): Très bien, merci Monsieur le Président.

 10   M. Bakrac (interprétation): Monsieur le Président, j'ai posé la question

 11   au sujet des 100.000 personnes et dans le procès-verbal, dans le compte

 12   rendu d'audience, on parle de 100 personnes. Moi j'ai parlé de 100.000

 13   personnes.

 14   M. le Président (interprétation): Les interprètes viennent de dire qu'il a

 15   parlé de 100 personnes. L'interprète rajoute qu'il a à deux reprises parlé

 16   de 100 personnes.

 17   M. Bakrac (interprétation): Très bien, alors je lui pose la question

 18   suivante. Est-ce que nous parlons de 100.000 personnes ou de 100

 19   personnes?

 20   Témoin FWS-69 (interprétation): 100.000 personnes.

 21   Question: Est-il exact également que vous avez dit que des Musulmans se

 22   sont rendus à ce rassemblement, les Musulmans de toute la Bosnie de

 23   Sandzak et que les Croates étaient venus de Zagreb ainsi que les Croates

 24   de Bosnie et les Musulmans de Bosnie et qu'ils ont tous participé à ce

 25   rassemblement?


Page 4154

  1   Réponse: Je ne sais pas d'où ils venaient. Je sais qu'il y a sans doute eu

  2   des Musulmans de la Bosnie toute entière, mais je n'en suis pas certain

  3   puisque moi je ne faisais partie d'aucun comité. Je ne lisais pas, je ne

  4   savais pas, je ne sais pas d'où ils venaient. Je ne sais pas qui a

  5   participé à ce rassemblement.

  6   Question: Moi, je lis ce que vous avez déclaré dans votre déclaration

  7   préalable.

  8   Réponse: Moi j'ai dit qu'ils venaient de la Croatie, de la Bosnie toute

  9   entière, c'est ce que l'on disait. C'est ce qui est le plus probable. Le

 10   plus probable est qu'ils étaient venus de partout. Mais écoutez, ce n'est

 11   pas important.

 12   Question: Est-il exact aussi que vous avez dit que le drapeau croate et le

 13   drapeau bosniaque avaient été reliés pendant ce rassemblement?

 14   Réponse: Je ne sais pas si j'ai dit cela. Je ne me souviens pas mais c'est

 15   vrai que ces deux drapeaux avaient été liés.

 16   Question: Et pourquoi le drapeau serbe n'avait-il pas été lié avec ces

 17   deux autres drapeaux?

 18   Réponse: Je ne sais pas.

 19   Question: Je vais vous lire ce que vous avez dit dans votre déclaration

 20   préalable et vous allez me dire si c'est exact. Je cite: "Les Serbes

 21   étaient vraiment irrités, pas contents par ce rassemblement. Les rapports

 22   entre les Serbes et les Musulmans se sont détériorés.", fin de citation.

 23   Réponse: C'est exact, tout au moins en ce qui concerne les Serbes que je

 24   fréquentais. Mes collègues me disaient qu'ils avaient été vraiment irrités

 25   par cela, et qu'ils étaient mécontents.


Page 4155

  1   Question: Est-ce qu'après cela il y a eu un rassemblement serbe sur le

  2   stade de foot? Un rassemblement qui était beaucoup plus petit et moins

  3   important que celui-ci?

  4   Réponse: Oui, c'est exact.

  5   Question: Monsieur, puisque vous me demandez si vous pouvez parler, est-ce

  6   que vous pouvez me regarder et moi je vais vous faire un signe de ma main

  7   à l'instant où je verrai que les interprètes ont terminé d'interpréter mes

  8   propos. Donc, si on procède comme cela, ce serait peut-être plus facile.

  9   Est-ce que aussi avant les débuts de la guerre, les Serbes de la ville

 10   étaient mécontents parce que les Musulmans avaient commencé à retirer

 11   leurs enfants de l'armée yougoslave, de la JNA? Est-ce que vous avez parlé

 12   de cela dans votre déclaration préalable?

 13   Réponse: Je ne me souviens pas de cela.

 14   Question: Je cite: "les Serbes ont organisé un rassemblement public sur la

 15   place principale à Foca. Et le thème principal était de débattre du fait

 16   que les Musulmans n'envoient pas leurs enfants dans la JNA."

 17   Avant, vous avez donc parlé de cela. Vous avez dit que les parents ne

 18   permettaient pas à leurs enfants de rejoindre les rangs de l'armée

 19   yougoslave.

 20   Réponse: Oui, c'était comme cela mais je ne suis pas allé à cette réunion

 21   c'est ce que disaient les gens.

 22   Question: Vous avez dit que c'était vrai, n'est-ce pas?

 23   (Réponse inaudible.)

 24   Question: Avant la guerre, est-ce que vous savez si les Musulmans avaient

 25   une cellule de crise?


Page 4156

  1   Réponse: Je ne sais pas.

  2   Question: A la page 5,, vous avez dit: "La radio de Sarajevo a dit que les

  3   Musulmans avaient une cellule de crise et que les défendeurs Musulmans se

  4   sont échappés, ce sont enfuis vers Ustikolina." Est-ce correct?

  5   Réponse: C'est correct, c'est ce qu'ils ont dit à la radio.

  6   Question: Dans votre déposition au cours de l'examen de l'interrogatoire

  7   principal, vous avez dit que mardi le 7 avril, vous vous êtes rendu à

  8   votre travail, vous êtes parti travailler de Jelec, vous vous êtes dirigé

  9   vers Foca.

 10   Réponse: Oui, oui je suis parti travailler et je ne sais pas si c'était

 11   vraiment le 7 mais c'était autour de cette date-là, peut-être le 6.

 12   Question: Ensuite, vous avez dit que vous êtes retourné à Jelec pour ne

 13   pas rester à Foca parce que vous aviez peur de rester bloquer à Foca si

 14   jamais il y avait des barrages routiers.

 15   Réponse: Oui c'est exact, que je suis arrivé à Foca, c'était un mardi

 16   probablement le 7 et comme je n'avais pas de missions particulières à mon

 17   travail, je n'avais pas quelque chose de particulier à faire, je suis

 18   rentré chez moi vers 12 heures.

 19   Question: Monsieur, nous avons déjà entendu cela mais moi je vous ai

 20   demandé s'il est exact que vous avez quitté Foca ce même jour et que vous

 21   êtes revenu à Jelec pour ne pas vous retrouver bloqué par les barrages

 22   routiers dans la ville de Foca?

 23   Réponse: C'est exact.

 24   Question: Est-ce que vos enfants sont restés à Jelec ou bien est-ce qu'ils

 25   sont partis à Foca avec vous?


Page 4157

  1   Réponse: Ils n'étaient pas avec moi, ils sont restés à Jelec.

  2   Question: Mais, vous êtes allé à l'école. Pourquoi vos enfants n'allaient-

  3   ild pas à l'école?

  4   Réponse: Ce jour-là, les enfants ne sont pas allés à l'école.

  5   Question: Pourquoi alors vous, vous êtes allé à l'école, vous êtes allé

  6   enseigner à l'école alors que vous n'avez pas laissé vos enfants aller à

  7   l'école?

  8   Réponse: Je ne les ai pas pris pour des raisons de sécurité. Ils sont

  9   restés, ils ne sont pas venus avec moi, c'est exact.

 10   Question: Merci Monsieur. Vous avez dit qu'on vous a dit à Jelec que vous

 11   alliez recevoir un fusil, est-ce qu'on vous a donné un fusil?

 12   Réponse: Non, je ne l'ai pas reçu, on ne me l'a pas donné et personne ne

 13   m'a dit d'ailleurs que j'allais recevoir un fusil.

 14   Question: Vous avez dit que les habitants de Jelec s'étaient mis d'accord

 15   de rendre leurs armes pour terminer tout cela par la voie pacifique. Est-

 16   il exact que Besevic a convaincu les villageois de Jelec de rejoindre la

 17   lutte armée et de ne pas rendre leurs armes?

 18   Réponse: Moi je n'ai pas assisté à cette réunion mais j'ai entendu dire

 19   que Besevic, quand il est arrivé, a dit que ceux qui voulaient, pouvaient

 20   rejoindre leur unité, ceux qui ne voulaient pas le faire, qui ne

 21   souhaitaient pas le faire, ils n'étaient pas obligés de le faire, que

 22   c'était une décision individuelle et qu'il n'était pas venu défendre

 23   Jelec, qu'il était venu défendre la Bosnie-Herzégovine.

 24   Ce jour-là, le jour où il a fallu rendre les armes, à midi, Besevic était

 25   arrivé le matin même de ce même jour et c'est comme cela que nous n'avons


Page 4158

  1   pas rendu les armes. Tout cela est tombé à l'eau.

  2   Question: Besevic est arrivé accompagné de combien de soldats?

  3   Réponse: Il portait un uniforme de camouflage, 4 ou 5 soldats. Il y en

  4   avait encore 5, 6, 10 qui portaient des vêtements civils et des fusils de

  5   chasse.

  6   Question: Monsieur, vous avez dit hier que vous aviez un pistolet.

  7   Réponse: Oui, c'est exact.

  8   Question: Est-ce que vous avez été arrêté en ayant ce pistolet?

  9   Réponse: Oui, j'ai été arrêté avec ce pistolet. Je peux vous expliquer de

 10   quelle façon j'ai été arrêté. Vous le voulez?

 11   Question: Je vous ai juste demandé si vous étiez en possession de votre

 12   pistolet au moment où vous avez été arrêté?

 13   Réponse: Au moment où j'ai été arrêté, je n'avais pas de pistolet.

 14   Question: Vous en êtes sûr?

 15   Réponse: J'en suis sûr.

 16   Question: Monsieur, je vais vous donner lecture de la déclaration que vous

 17   avez donnée au centre de sécurité publique à Trnovo, c'est-à-dire d’une

 18   partie de cette déclaration préalable.

 19   Je cite: «Jasmin Beckovic m’a fouillé personnellement et il a trouvé mon

 20   pistolet, calibre 7.62 millimètres, marque CB. Donc, il m'a pris ce

 21   pistolet. Il l’a suspendu à son ceinturon. Et il a aussi trouvé un

 22   couteau.» Fin de citation.

 23   Réponse: Quand Jasmin m'a fouillé, il n'a trouvé que mon couteau, je

 24   n'avais pas de pistolet. Quand ils m'ont fait marcher devant eux comme

 25   bouclier humain, eh bien, je suis arrivé jusqu'à l'endroit où nous nous


Page 4159

  1   étions abrités des tirs, donc l'endroit où nous nous étions couchés dans

  2   la forêt. Et donc, ils ont fouillé cet endroit et dans une veste, dans la

  3   poche d'une veste d'un homme qui était couché là-bas avec nous, qui avait

  4   passé la nuit là-bas avec nous, il a trouvé le chargeur d'un pistolet. Et

  5   là, il m'a dit clairement: «Ecoutez, vous avez un pistolet, vous devez me

  6   rendre ce pistolet, sinon on va vous tuer». Moi, je lui ai répondu que mon

  7   pistolet, pendant que j'ai fouillé? avec mes enfants, sur une centaine de

  8   mètres avec mes enfants, eh bien, j'ai enlevé mon pistolet et je l'ai

  9   caché sous une pierre. Donc, j'ai laissé mon pistolet là-bas et je lui ai

 10   dit que je l'ai laissé là-bas. Je lui ai dit où se trouvait donc mon

 11   pistolet.

 12   Et je lui ai dit pour quelle raison j'avais laissé ce pistolet, parce que

 13   ma fille avait disparu et je ne voulais pas aller la chercher avec mon

 14   pistolet. Je ne voulais pas aller la chercher armé, donc je suis parti à

 15   sa recherche sans arme.

 16   Je lui ai montré l'endroit où j'avais laissé mon pistolet. Je lui ai

 17   montré cet endroit, nous l'avons trouvé, le pistolet se trouvait sous le

 18   rocher, et je lui ai donné mon pistolet. Je lui ai rendu mon pistolet.

 19   Question: Monsieur, êtes-vous un chasseur?

 20   Réponse: Non, je suis pêcheur, pêcheur sportif enregistré depuis 1964.

 21   Question: Vous avez dit hier au cours de l'interrogatoire principal que

 22   vous disposiez de jumelles. D'où venait ces jumelles?

 23   Réponse: Eh bien, j’avais une petite paire de jumelles que ma fille avait

 24   reçue de son cousin d'Allemagne. C'étaient de toutes petites jumelles pour

 25   regarder les matches de foot. C'est elle qui les avait. Elles étaient


Page 4160

  1   toutes petites, donc elles n’étaient pas très puissantes.

  2   Question: Vous ne les aviez pas?

  3   Réponse: Non, non, elles étaient chez elle. Et quand on l'a attrapée,

  4   elle, ils ont trouvé cette paire de jumelles et on lui a confisqué cela.

  5   Question: Au cours de l'interrogatoire principal, vous avez dit que vous

  6   regardiez à l'aide de cette paire de jumelles?

  7   Réponse: Oui, nous regardions les obus tomber sur Jelec, en sortant de ce

  8   petit bosquet où nous avons passé la première, la deuxième et la troisième

  9   nuit. Nous sortions sur une clairière. A l'aide de cette paire de

 10   jumelles, moi, une autre personne et mes enfants nous regardions les obus

 11   tomber sur Jelec.

 12   Question: Si vous n'aviez pas de jumelles, pourquoi alors cette personne a

 13   dit: «Tiens, un éclaireur!».

 14   Réponse: Eh bien, il a dit cela parce qu'il pensait qu'il y avait des

 15   soldats là-bas, et il pensait que c'était moi l'éclaireur de cette armée,

 16   de cette unité.

 17   Question: Monsieur, pourquoi vous avez dit au centre de sécurité publique

 18   qu'on a trouvé le pistolet sur vous, que vous l'aviez avec vous?

 19   Réponse: Mais bien sûr qu'il était sur moi! Je le portais souvent, mais à

 20   ce moment-là précis, je ne l'avais pas.

 21   Question: Cette personne que vous avez mentionné, Jasmin Beckovic, qu'elle

 22   était sa nationalité?

 23   Réponse: Il était Musulman.

 24   Question: Est-ce que c'est lui qui vous a arrêté?

 25   Réponse: Devant ce peloton d'exécution, ils appellent ça Cesalj, eh bien,


Page 4161

  1   en aval et en amont il y avait une vingtaine ou une trentaine de soldats,

  2   aussi bien en amont qu'en aval. Ils avaient chargé leur fusil et celui qui

  3   avait son fusil braqué sur moi, eh bien, il a ordonné à Beckovic, à Jasmin

  4   Beskovic, de me fouiller. Donc il m'a fouillé, il m'a enlevé mon pantalon,

  5   il m'a enlevé mes bottes, il a pris mon couteau.

  6   Question: Très bien, nous avons déjà entendu cela.

  7   Moi, tout ce que je voulais savoir c'était qu'elle était l'appartenance

  8   ethnique de Jasmin Beckovic, donc Jasmin était présent parmi ces personnes

  9   qui vous ont arrêté?

 10   Réponse: Moi, je ne l'ai pas reconnu tout de suite, mais quand l'autre m'a

 11   pris par la gorge et quand il a voulu me tuer, eh bien c'est là qu'il m'a

 12   dit: «Ecoute, est-ce que tu me connais?», et je lui ai dit que je le

 13   connaissais bien, et c'est lui-même qui s'est présenté en disant qu'il

 14   s'appelait Jasmin Beckovic.

 15   Question: Donc de nationalité musulmane?

 16   Réponse: Oui, Musulman.

 17   Question: Merci.

 18   Hier, Monsieur, vous avez dit qu'une femme, des enfants et les hommes âgés

 19   avaient été arrêtés avec vous. Où se trouvaient les jeunes hommes de

 20   Jelec?

 21   Réponse: Eh bien, tout le monde fuyait le village, et je ne sais pas où

 22   ils se sont éparpillés dans cette colline. Il y en a qui sont partis à

 23   gauche, il y en a qui sont partis à droite. Je ne sais pas où ils étaient

 24   exactement.

 25   M. le Président (interprétation): Monsieur, vous répondez beaucoup trop


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  1   vite aux questions du conseil. Pourriez-vous, s'il vous plaît attendre. Me

  2   Bakrac, vous a proposé de vous faire un signe de sa main puisqu'il sait à

  3   quel moment l'interprétation est terminée. Pourriez-vous observer donc ce

  4   signe qu'il va vous faire.

  5   Témoin FWS-69 (interprétation): Très bien, merci.

  6   M. Bakrac (interprétation): Est-ce que ce jeune homme de Jelec était parti

  7   suivre Besevic?

  8   Réponse: Quand nous sommes partis, Besevic est parti vers la colline. Nous

  9   étions toujours dans le village. Et il a dit: «Ceux qui veulent se joindre

 10   à moi, eh bien ils peuvent venir, mais ceux qui ne veulent pas ils ne sont

 11   pas obligés de le faire». Moi, j'ai vu en effet deux ou trois jeunes

 12   hommes le suivre. C'est tout ce que j'ai vu.

 13   Question: C'est ce que vous avez vu, vous, n'est-ce pas?

 14   Réponse: Oui.

 15   Question: Hier, Monsieur, vous avez dit, vous avez parlé d'un certain

 16   Cosovic. Qui était Cosovic? Etait-ce un civil ou bien un soldat? Si

 17   c'était un soldat, quel était son grade, son unité?

 18   Réponse: C'était à Brod, quand on nous a emmenés. Moi, je connaissais

 19   Cosovic d'avant. Il portait un uniforme de camouflage. Je ne connaissais

 20   pas son prénom. Donc il portait un uniforme de camouflage, un uniforme

 21   militaire.

 22   Question: Un uniforme de police militaire ou bien de l'armée ordinaire?

 23   Réponse: Je ne sais pas. Je ne sais pas, soit l'armée ordinaire, soit...

 24   Ecoutez, je ne sais pas, je ne sais pas.

 25   Question: Dans votre déposition préalable, vous avez dit que vous avez


Page 4163

  1   reconnu Cosovic. Vous avez dit que c'était lui le commandant de la police

  2   militaire à Foca et que c'était aussi votre ex-élève de l'école. Qu'est-ce

  3   qui est vrai là dedans?

  4   Réponse: Il est exact que Cosovic était mon élève. Il a fait les études

  5   pour devenir serveur. Mais à partir du moment où j'ai été arrêté, quand je

  6   suis arrivé dans le camp, on disait dans le camp qu'il était le commandant

  7   de la police militaire. Donc, c'est ce que l'on disait. Il y avait des

  8   histoires comme quoi c'était lui le commandant de la police militaire.

  9   Question: Vous avez mentionné Zeljo, Jankovic, et une troisième personne

 10   qui avait été présente. Qu'est-ce qu'ils étaient eux, quelles étaient

 11   leurs fonctions?

 12   Vous avez dit que vous avez reconnu Zeljo, que vous avez reconnu Jankovic,

 13   et que vous connaissiez la troisième personne de vue. Donc quelle était la

 14   fonction de ces personnes, et qui étaient ces personnes?

 15   Réponse: Ils portaient tous des uniformes de camouflage. Je ne sais pas

 16   quelles étaient leurs fonctions.

 17   Question: Dans la déclaration préalable que vous avez donnée en 1995, vous

 18   avez dit que ces trois personnes avaient été membres de la police

 19   militaire.

 20   Réponse: C'est sans doute que c'est vrai. Si Cosa l’était, sans doute que

 21   eux aussi ils étaient membres de la police militaire aussi. C'est ce que

 22   j'imagine tout au moins.

 23   Question: Merci, Monsieur.

 24   Dites-nous quel était le nombre maximum de personnes enfermées dans votre

 25   dortoir?


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  1   Réponse: Le nombre maximum de personnes détenues dans la pièce n°18, au

  2   mois de juin ou fin juillet, ce chiffre tournait autour de 70, 80

  3   personnes.

  4   Question: Et d'après les informations dont vous disposez, quel était le

  5   nombre maximum de détenus musulmans au KP Dom?

  6   Réponse: Nous faisions le compte des personnes dans chaque pièce au KP

  7   Dom. Le chiffre le plus élevé était le chiffre de 780, mais nos chiffres

  8   ne concordaient pas parce que c'étaient plusieurs équipes qui avaient fait

  9   ces comptes, et donc il y avait un écart d'à peu près une vingtaine de

 10   personnes. Je dirais qu'il y a eu entre 780 et 800 personnes.

 11   Question: Vous avez dit: «Dans ma pièce, il y a eu au maximum 80

 12   prisonniers, et dans la prison, pour autant que je le sache, le nombre de

 13   prisonniers de détenus le plus élevé s'élevait à 600 personnes au mois de

 14   juin».

 15   Réponse: C'est ma déclaration préalable, à moi?

 16   Question: Oui.

 17   Réponse: Peut-être que cette déclaration préalable est erronée. Je me

 18   souviens très bien qu'il y avait des personnes qui comptaient les

 19   personnes. On comptait les personnes alors qu'elles se rendaient au

 20   déjeuner. On les comptait au sortir des bâtiments pour se rendre au

 21   déjeuner, au petit déjeuner, etc.. Donc, il y avait des personnes, des

 22   équipes qui comptaient pour chaque bâtiment, et ensuite nous avons

 23   additionné ces chiffres et nous sommes arrivés à un chiffre total absolu

 24   de 750, 780 personnes.

 25   Mais comme nos comptes ne correspondaient pas, il y avait donc cet écart


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  1   de 20 ou 30 personnes.

  2   Et nous avons aussi pris en compte les personnes qui se trouvaient dans la

  3   cellule d'isolement.

  4   Question: Merci, Monsieur, vous n'avez pas besoin de rentrer dans tous ces

  5   détails. Dites-moi juste la chose suivante. Vous avez dit une chose en

  6   1995 et vous avez dit une chose hier en 2001. Pouvez-vous me dire lequel

  7   des 2 chiffres est exact, correspond à la vérité? Est-ce que vous êtes

  8   arrivé à d'autres conclusions suite à des conversations que vous avez eues

  9   avec d'autres personnes plus tard?

 10   Réponse: Je n'ai pas eu d'autres conversations avec d'autres personnes. Ce

 11   n'est pas comme cela que je suis arrivé à ce chiffre. Normalement j'aurais

 12   dû dire qu'il y avait entre 780 et 800 personnes. Et je ne sais pas de

 13   quelle façon il y a ce chiffre de 600 personnes dans ma déclaration

 14   préalable, mais peut-être qu'ils ont fait une erreur en notant tout cela.

 15   Question: Très bien. Merci, Monsieur.

 16   Hier au cours de votre déposition, donc au cours de l'interrogatoire

 17   principal, et vous l'avez répété aujourd'hui aussi, vous avez dit que vous

 18   avez vu le directeur Krnojelac dans l'enceinte de la prison en compagnie

 19   des militaires qui portaient un uniforme militaire, et qui portaient un

 20   pistolet. Est-ce que dans votre déclaration préalable vous avez mentionné

 21   cette visite des journalistes?

 22   Réponse: Je ne sais pas, peut-être que oui, peut-être que je l'avais

 23   omise, que je l'avais oubliée, je ne sais pas.

 24   Question: Puisque vous avez bien mentionné cette visite des journalistes

 25   dans la déclaration préalable, que vous avez donnée aux représentants du


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  1   Bureau du Procureur, est-ce que dans votre déclaration préalable vous avez

  2   dit que Krnojelac était en compagnie de journalistes, qu'il était avec

  3   eux?

  4   Réponse: Sans doute que oui.

  5   Question: Je vais vous donner lecture d'un passage assez bref d'une phrase

  6   de votre déclaration préalable, je cite: «Deux jours avant leur arrivée,

  7   on a ordonné aux prisonniers de nettoyer les pièces. On nous a coupé les

  8   cheveux, on nous a rasé, on nous a amenés pour nous laver. J'ai vu des

  9   journalistes britanniques à partir de là fenêtre de ma pièce. Ils

 10   discutaient avec des détenus au rez-de-chaussée, en leur proposant, en

 11   leur offrant des cigarettes, jusqu'à ce que les Serbes n’arrivent et

 12   n'interrompent tout enregistrement, parce que les détenus tendaient leurs

 13   mains à travers les fenêtres pour recevoir ces cigarettes que tout le

 14   monde voulaient tant». Fin de citation.

 15   Pourquoi, quand vous avez dans votre déclaration préalable, quand vous

 16   avez parlé de cette visite des journalistes anglais, n'avez-vous pas

 17   mentionné le fait que vous venez de mentionner aujourd'hui pour la

 18   première fois, donc en 2001, le fait que le directeur Krnojelac était avec

 19   eux?

 20   Réponse: Parce que je ne m'en suis pas rappelé. Peut-être que je n'y ai

 21   pas pensé, tout simplement.

 22   Question: Très bien.

 23   Est-ce que vous avez parlé aux enquêteurs du Bureau du Procureur de votre

 24   inter rogatoire au KP Dom?

 25   Réponse: Je ne sais pas, mais sans doute que oui.


Page 4167

  1   Question: Est-ce qu'au sujet de cet interrogatoire, à aucun moment vous

  2   avez dit qu'un des enquêteurs vous a dit que Milorad Krnojelac était

  3   membre de la cellule de crise?

  4   Réponse: Sans doute que je l'ai dit.

  5   Question: Vous en êtes sûr?

  6   Réponse: Non, je ne suis pas sûr à 100 %, mais je pense que je l'ai dit,

  7   oui sans doute.

  8   Question: J'ai le journal officiel de l'assemblée municipale du comité

  9   exécutif de la municipalité de Foca concernant l'établissement de la

 10   cellule de crises. Donc, est-ce que vous êtes sûr que vous avez dit aux

 11   enquêteurs qui étaient les membres de la cellule de crise de cette cellule

 12   de que Milorad Krnojelac était membre de cette cellule de crise?

 13   Réponse: Je pense que je l'ai dit à un million de %.

 14   Question: Je vais vous lire ce que vous avez dit, ce que vous avez

 15   déclaré. Il s'agit de la page 3, je vais donner lecture. Je cite: "Après

 16   j'ai appris des autres prisonniers du KP Dom que les membres de la cellule

 17   de crise de Foca étaient Vojo Maksimovic, Velibor Ostojic, Dr Mandic, Miro

 18   Stanic et Cedo Zelovic.", fin de citation. A aucun moment, vous ne

 19   mentionnez Milorad Krnojelac. Il s'agit de votre déclaration préalable

 20   datant de 1995.

 21   Réponse: Quand ai-je fait cette déclaration?

 22   Question: Vous avez fait cette déclaration au Bureau du Procureur en 1995.

 23   Réponse: Eh bien, j'ai peut-être oublié depuis. J'ai peut-être oublié de

 24   le dire à ce moment-là.

 25   Question: Vous vous en souvenez aujourd'hui alors?


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  1   (Réponse inaudible du témoin.)

  2   M. le Président (interprétation): Voulez-vous, s'il vous plaît répondre à

  3   cette question Monsieur. Vouliez-vous y répondre?

  4   M. Bakrac (interprétation): Oui, ma question Monsieur le témoin c'était:

  5   "Vous vous en souvenez maintenant?", vous n'avez pas répondu.

  6   Témoin FWS-69 (interprétation): Oui, je m'en suis souvenu maintenant.

  7   Question: Merci. Veuillez, s'il vous plaît me dire ce qui vous a rafraîchi

  8   la mémoire et ce qui vous a rappelé ce fait.

  9   Réponse: Ce qui m'a fait me rappeler?

 10   Question: Oui, aujourd'hui en 2001.

 11   Réponse: Eh bien, ce qui m'a fait m'en souvenir, c'est que quand j'ai fait

 12   ma déclaration dans le bureau de Paprica, Paprica m'a dit: "Cette

 13   déclaration que vous faites ne vaut rien du tout, vous n'avez absolument

 14   rien dit. Et si vous revenez pour un interrogatoire, vous allez être passé

 15   à tabac. Ceci va être passé en revue par la cellule de crise, je vais en

 16   faire 5 ou 6 copies.". Il a donné les destinataires de ces copies et

 17   ensuite Vojo a dit: "Je connais cet homme, il dit la vérité, il n'a été

 18   impliqué dans rien du tout. Si la cellule de crise nous renvoie cette

 19   déclaration, vous allez être passé à tabac.". Je ne me souviens pas de

 20   tous ces gens mais c'était fini.

 21   Ensuite Paprica a dit: "Bon, il faudra me donner tous les détails." Ils

 22   m'ont donné ma déclaration pour que je la relise. Je n'avais pas mes

 23   lunettes donc je n'ai pas bien vu, je n'ai pas pu vraiment la lire et je

 24   le leur ai dit d'ailleurs. Ensuite Vojo m'a pris la déclaration, et m'a

 25   dit: "Tout est écrit ici comme vous l'avez dit, et tout donc à été


Page 4169

  1   consigné.". D'un côté il y avait une page entière et au recto c'était

  2   pratiquement plein également et il m'a montré l'endroit où je devais

  3   apposer ma signature. Il m'a demandé de signer en indiquant mon nom et mon

  4   prénom pour remplir tout l'espace disponible pour que personne ne puisse

  5   rajouter quoique ce soit ultérieurement. C'était la fin de mon

  6   interrogatoire, c'est là que j'ai signé.

  7   Question: Comment se fait-il que vous ne vous soyiez souvenu d'aucun de

  8   ces détails en 1995?

  9   Vous avez dit lorsque vous avez parlé de cet interrogatoire que vous avez

 10   été interrogé dans le bâtiment administratif par Starovic et Paprica, mais

 11   vous n'avez jamais parlé de ce détail, vous n'avez jamais dit que Milorad

 12   Krnojelac était avec vous. Vous n'avez jamais dit dans votre déclaration

 13   au Bureau du Procureur au sujet de votre interrogatoire dans le bureau

 14   Paprica, que vous aviez appris à ce moment-là que Milorad Krnojelac avait

 15   été membre de la cellule de crise.

 16   Réponse: Vous voulez dire que la seule chose que j'ai omis de mentionner

 17   c'était ce qui avait trait au directeur?

 18   Question: Vous n'avez rien dit, vous n'avez pas dit que Starovic et

 19   Paprica vous avaient parlé de cela.

 20   Réponse: J'ai dit que Starovic m'avait dit de signer en indiquant mon

 21   prénom et mon nom de famille. Vous voulez dire que je n'ai pas dit cela

 22   dans ma déclaration?

 23   Question: Non.

 24   Réponse: Vraiment je n'ai aucune idée de ce qu'ils ont pu consigner et je

 25   ne sais pas si tout est exact.


Page 4170

  1   Question: Avec l'aide de l'huissier, je souhaiterais montrer au témoin le

  2   journal officiel de la municipalité de Foca, ainsi que la décision

  3   relative à la mise en place de la cellule de crise. Je souhaiterais que le

  4   témoin examine ce document et voit si Milorad Krnojelac figure sur cette

  5   liste.

  6   M. le Président (interprétation):Je ne sais pas si c'est à ce témoin qu'il

  7   convient de présenter ce document. Il n'a jamais été avancé qu'il ait vu

  8   ce document. Je pense que la façon la plus appropriée de procéder ce

  9   serait d'abord de lui montrer sa déclaration, pour qu'il convienne

 10   qu'aucun de ces éléments n'y figurent ou à défaut demander à l'accusation

 11   si elle accepte le fait que sa déclaration ne contient pas ces éléments.

 12   Je pense que la deuxième procédure est la meilleure et qu'elle nous

 13   permettra d'autre part de gagner énormément de temps.

 14   M. Bakrac (interprétation): Monsieur le Président, je suis d'accord avec

 15   vous. C'est sur le coup, spontanément, que j'ai décidé de lui présenter ce

 16   document. Mais je suis d'accord avec vous. En effet ce n'est peut-être pas

 17   la personne la mieux appropriée à qui présenter ce document et nous

 18   attendrons donc avant de présenter cette pièce.

 19   Mais excusez-moi, je vous ai peut-être interrompu.

 20   M. le Président (interprétation): Ce que je disais, c'est que vous pouvez

 21   demander le versement au dossier de ce document, le journal officiel, à

 22   tout moment. L'accusation pourra éventuellement vous demander de prouver

 23   l'authenticité de documents, s'ils le souhaitent, mais il est possible

 24   qu'ils acceptent que ce soit versé au dossier.

 25   Mais je pense qu'il est inutile de présenter ce document au témoin


Page 4171

  1   aujourd'hui parce qu'il n'a jamais dit qu'il l'avait vu. Ce qu'il a dit se

  2   base sur ce que lui a dit un tiers. Et ce tiers ne lui a peut-être pas

  3   rapporté des faits qui étaient exacts. Vous pouvez procéder de la manière

  4   dont vous le souhaitez. Moi c'était une suggestion que je vous faisais sur

  5   la meilleure procédure à adopter.

  6   M. Bakrac (interprétation): Je suis d'accord.

  7   Monsieur le témoin, est-ce qu’à aucun moment avant l'interrogatoire

  8   principal qui a eu lieu hier, est-ce que vous avez à aucun moment dit que

  9   vous saviez que Milorad Krnojelac était membre de la cellule de crise?

 10   Réponse: Je l'ai entendu dire par tout le monde. Enfin, je ne peux pas

 11   vous dit qui était tout le monde, mais enfin c'était la rumeur qui voulait

 12   cela au camp, que les gens qui étaient mentionnés étaient à la cellule de

 13   crise, ainsi que le directeur du camp Milorad Krnojelac.

 14   Et ce n'est pas quelque chose que j'ai inventé comme vous semblez vouloir

 15   l'insinuer. Il y a beaucoup de gens au camp qui savaient qu'il appartenait

 16   à la cellule de crise.

 17   Question: Mais pourquoi ne l'avez-vous jamais dit précédemment, c'est ma

 18   question? Est-ce que vous convenez que vous n'avez jamais parlé de cela

 19   dans aucune des déclarations que vous avez faites au Bureau du Procureur

 20   aussi bien qu'au centre de service de sécurité?

 21   Réponse: J'ai peut-être oublié.

 22   Question: En parlant aux enquêteurs du Bureau du Procureur ou au centre

 23   des services de sécurité, est-ce que vous avez mentionné à aucun moment le

 24   fait que vous ayez vu Milorad Krnojelac lors de cet exercice que vous nous

 25   avez décrit?


Page 4172

  1   Réponse: Peut-être que oui, peut-être que non.

  2   Question: Dans le cadre de votre interrogatoire principal hier, vous nous

  3   avez dit que vous avez vu Milorad Krnojelac arborant un uniforme qui

  4   normalement est porté par un officier.

  5   Comment êtes-vous en mesure de faire la distinction entre les différents

  6   types d'uniformes?

  7   Réponse: Eh bien ce que j'ai dit hier, précisément c'est qu'il portait un

  8   uniforme vert olive de soldat, et que ça ressemblait assez aux uniformes

  9   portés par les sous-officiers dans l'armée yougoslave. Mais, en fait, cela

 10   ressemble plus à l'uniforme d'un officier que d'un simple soldat. J'ai dit

 11   c'était un uniforme soit de sous-officier soit d'officier, mais pas

 12   l'uniforme du simple soldat en tout cas.

 13   Question: C'est justement ce que je vous demande. Quels sont les éléments

 14   précis qui vous permettent de faire ainsi la distinction entre ces

 15   différents types d'uniformes?

 16   Réponse: Eh bien, cet uniforme verdâtre, vert olive, a l’effet d'une

 17   étoffe de meilleure qualité, alors que si vous regardez l'uniforme d'un

 18   simple soldat, eh bien, c'est fait avec un tissu de bien moindre qualité,

 19   tout le monde le sait.

 20   Question: Donc vous êtes en train de nous dire que depuis votre fenêtre

 21   vous étiez en mesure de voir la différence dans la qualité du tissu?

 22   Réponse: Bien entendu, cela peut se voir même depuis la fenêtre. On peut

 23   même le voir depuis un avion! Bien entendu que je l'ai vu.

 24   Cela, c'est une question extrêmement provocante que vous me posez. Bien

 25   entendu que je peux voir la différence entre les tissus. On sait bien ce


Page 4173

  1   que c'est qu'un uniforme de soldat et un uniforme d'officier. On sait très

  2   bien les types d'uniformes portés par les officiers, les sous-officiers et

  3   les soldats. Il est indéniable que là il s'agissait de types d'uniformes

  4   porté par un sous-officier ou par un officier, mais jamais de la vie par

  5   un simple soldat.

  6   Question: Est-ce qu'il avait des insignes quelconques?

  7   Réponse: Cela, je ne l'ai pas vu. Je n'ai même pas dit que je l'avais vu.

  8   Il avait un ceinturon, il avait un pistolet à droite, dans son ceinturon.

  9   Question: Les uniformes des soldats du rang et les uniformes des sous-

 10   officiers ou des officiers, est-ce qu’ils sont différenciés par les

 11   insignes qu'ils portent?

 12   Réponse: Oui, mais je n'ai pas pu voir les insignes, je n'ai pas pu voir

 13   les galons.

 14   Question: Vous avez donc vu qu'il y avait une différence au niveau du

 15   tissu, mais pas les insignes. Vous n'avez même pas pu voir s'ils portaient

 16   ou non des insignes?

 17   Réponse: Oui, c'est exact. C’est exact, je ne l'ai pas remarqué.

 18   Question: Mais cet uniforme de sous-officier ou d'officier, de quoi était-

 19   il constitué?

 20   Réponse: Pantalon, chemise, ceinturon, pistolet, chaussures, je ne sais

 21   pas exactement de quel type. Je ne sais pas s'il portait un couvre-chef ou

 22   non. Je ne me souviens plus s'il était nu-tête ou pas. Je me souviens

 23   simplement du pantalon, de la chemise, du ceinturon et du pistolet.

 24   Question: Hier, vous avez dit, et vous l'avez répété aujourd'hui, que vous

 25   avez vu Krnojelac dans la cour lorsqu'a eu lieu cet échange de 75


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  1   prisonniers. Est-ce que vous vous en êtes souvenu seulement aujourd'hui,

  2   est-ce que cela fait partie de ces choses dont vous vous souvenez

  3   uniquement aujourd'hui, parce que vous ne l'avez jamais dit précédemment?

  4   Réponse: Ce jour-là, et d'ailleurs je l'ai dit hier.

  5   Question: Monsieur, je vous prie de ne pas répéter ce que vous avez dit

  6   hier. Nous savons bien ce que vous avez dit hier. Moi, ce que je vous

  7   demande c'est pourquoi vous n'avez jamais mentionné la chose précédemment,

  8   que ce soit au Bureau du Procureur ou au centre de service de sécurité à

  9   Trnovo? Est-ce que vous vous en êtes souvenu uniquement hier?

 10   Réponse: Je ne l'ai jamais dit parce que personne ne m'a jamais posé la

 11   question et puis ce n'était pas important. Il aurait pu y être, mais il

 12   n'avait pas à y être.

 13   Avant on n'était jamais entré dans tous ces détails. Personne par exemple

 14   ne m'a jamais demandé combien de personnes étaient parties ce jour-là. Ils

 15   ne sont pas entrés dans les détails, tout simplement.

 16   Question: Donc, le Bureau du Procureur ne vous a demandé aucun détail, ne

 17   s'est pas intéresser en ce qui concernait Milorad Krnojelac.

 18   Réponse: Où ça?

 19   Question: Dans la déclaration que vous avez faite précédemment.

 20   Réponse: Pas le genre de détails en tout cas que nous évoquons

 21   aujourd'hui. Et puis il est probable que je ne me souvenais pas de tout.

 22   Et ils n'ont pas posé des questions à ce sujet.

 23   Question: Vous voulez nous dire qu'ils n'ont pas posé de questions au

 24   sujet de Milorad Krnojelac.

 25   Réponse: Bien sûr que non, en tout cas je ne m'en souviens pas. Je suis


Page 4175

  1   dans l'impossibilité de m'en souvenir.

  2   Question: S'il vous plaît, vous nous dites qu'il passait par la porte en

  3   métal. Est-ce que c'est là la seule sortie de l'enceinte?

  4   Réponse: L'entrée principale c'est la seule entrée, mais il y en a une qui

  5   est près de l'atelier de menuiserie mais utilisée principalement par les

  6   véhicules, les camions, les voitures, etc.

  7   Mais en ce qui concerne les personnes, les piétons, ils utilisaient la

  8   porte métallique, la porte principale lors d’échanges de choses de ce

  9   genre.

 10   Question: Est-ce qu'il s'agit encore de quelque chose dont vous vous

 11   souvenez uniquement aujourd'hui, lorsque vous nous avez dit que vous avez

 12   vu le directeur avec Boro Ivanovic, Sipcic et Dragicevic?

 13   Réponse: Personne ne m'a posé de questions à ce sujet et si je ne l'ai pas

 14   mentionné précédemment c'est pour cela. C'est parce qu'on ne m'a pas posé

 15   la question.

 16   Question: Vous vous en souvenez donc uniquement aujourd'hui?

 17   Réponse: Non, ce n'est pas exact. Je m'en suis toujours souvenu. Je l'ai

 18   toujours gardé en mémoire.

 19   Question: Monsieur, est-ce que vous savez si Ibrahim Sandel a été passé à

 20   tabac au KP Dom?

 21   Réponse: Je ne sais pas. Je n'ai jamais vu ça.

 22   Question: Est-ce qu'il était au KP Dom lorsqu'on vous y a emmené.

 23   Réponse: Il est arrivé au KP Dom, comme je l'ai dit hier, 10 jours ou 15

 24   jours ou 5 jours après moi. Je ne sais pas exactement.

 25   Question: Dans votre interrogatoire principal, hier, Monsieur, vous avez


Page 4176

  1   dit qu'une femme vous a parlé de la disparition de 12 personnes. Quand

  2   cette femme vous a-t-elle raconté cela?

  3   Réponse: Vous voulez dire que vous voulez les détails?

  4   Question: Non, je ne veux pas les détails. Je vous demande simplement

  5   quand cette femme vous a raconté cela?

  6   Réponse: Eh bien, j'ai appris la chose quand je suis arrivé à Split. Des

  7   gens m'ont appelé à Split, des gens qui cherchaient les membres de leur

  8   famille, mari, amis etc. Ces gens voulaient se renseigner au sujet de ce

  9   qui était arrivé aux gens qui étaient au camp. J'ai répondu que je

 10   connaissais ces gens et qu'ils étaient restés au camp.

 11   Et puisque ces gens le savaient, je vais vous dire clairement ce que cet

 12   homme…

 13   Question: Non, monsieur, je voudrais simplement vous dire quand cette

 14   femme vous a parlé de ces 12 personnes, c'était après votre libération,

 15   c'était à Split alors?

 16   Réponse: C'était à Split en janvier ou en février 1993.

 17   Question: Hier, vous avez parlé de Dzemo Balic, est-ce que vous aviez dit

 18   précédemment que Dzemo Balic vous avait parlé de ce jeune homme placé en

 19   cellule d'isolement?

 20   Réponse: Vous voulez dire avant. Je ne sais pas, sans doute, mais je ne

 21   sais pas.

 22   Question: Non, vous ne l'avez pas mentionné précédemment.

 23   Réponse: Cet homme dans la cellule d'isolement?

 24   Question: Oui.

 25   Réponse: Je ne m'en souvenais pas. C'est sans doute pourquoi je n'en ai


Page 4177

  1   pas parlé avant.

  2   Question: Vous avez dit qu'il y avait deux hommes dénommés Balic, quels

  3   étaient leurs prénoms?

  4   Réponse: Celui que je connais c'était Dzemo, lui, était dans ma salle. Un

  5   autre Balic quand on l'a emmené, quand on l'a fait traverser la cour, il a

  6   été passé à tabac sauvagement, il était couvert de bleus. Il y avait trois

  7   ou quatre personnes avec lui qu'on avait fait venir du village de

  8   Marinkovici, l'un d'eux était Hasanbegovic l'autre Deleut. Ils ne sont pas

  9   venus dans la salle où j'étais. Ils ont traversé la cour, on les a emmenés

 10   dans les cellules d'isolement.

 11   Question: Est-ce que vous connaissiez Balic précédemment?

 12   Réponse: Non. Je connaissais Dzemo mais je ne connaissais pas l'autre. Je

 13   ne connaissais même pas son prénom je sais simplement que son nom de

 14   famille était Balic.

 15   Question: Ce sont les gens qui étaient dans la salle où vous étiez détenus

 16   qui vous l'ont dit?

 17   Réponse: Oui.

 18   Question: Vous avez parlé de quelqu'un qui était surnommé Triva, qui

 19   était-ce?

 20   Réponse: C'est Obren Obrenovic un garde au KP Dom, au camp du KP Dom. Je

 21   sais qu'il était diplômé en médecine.

 22   Question: Je n'ai pas besoin de tous les détails le concernant. Je

 23   voudrais simplement savoir si vous êtes sûr que Triva c'était son surnom

 24   et d'où cela venait?

 25   Réponse: Oui, oui on l'appelait généralement Triva. Tout le monde avait


Page 4178

  1   des surnoms.

  2   Question: Vous nous dites que c'était le seul qui avait un gourdin en

  3   bois.

  4   Réponse: Oui. Oui c'était le seul.

  5   Question: C'était le seul parmi les gardes dans ce cas?

  6   Réponse: Oui, je n'ai vu personne d'autre.

  7   Question: Est-il exact que dans les salles où les prisonniers étaient

  8   détenus, les vitres étaient recouvertes de papier?

  9   Réponse: Oui.

 10   Question: Est-ce qu'il y avait des fenêtres dans les salles de détention

 11   qui étaient peintes en blanc?

 12   Réponse: Elles avaient déjà été peintes précédemment. C'était comme cela

 13   quand on y est arrivé. Personne n'a peint les fenêtres pendant que nous

 14   étions détenus, c'était une peinture grisâtre.

 15   Question: Est-ce qu'il y avait de la peinture sur les vitres?

 16   Réponse: Non. Mais, il y avait des feuilles de papier, du papier. Parfois

 17   il y avait des vitres dans les fenêtres mais quand les vitres étaient

 18   cassées, on mettait du papier. Avant, il y avait des dessins accrochés au

 19   mur et quand les vitres étaient cassées, on prenait ces dessins qui

 20   étaient au mur pour remplacer les vitres. C'est ce que l'on faisait pour

 21   essayer de garder un peu de chaleur dans les pièces.

 22   Question: Vous avez parlé de Halim Dedovic, était-il dans votre salle?

 23   Réponse: Non.

 24   Question: Est-ce qu'il y avait un deuxième Halim Dedovic?

 25   Réponse: Pas à ma connaissance. Je connais un Halim Dedovic


Page 4179

  1   personnellement. C'était un coiffeur de Foca mais je n'en connais pas

  2   d'autres.

  3   Question: Dans la déclaration que vous avez faite au Bureau du Procureur,

  4   vous dites, je cite: "Une autre journée Nedzib Babalija, Durgut, Ibrahim

  5   Sandal, et Halim Dedovic ont été emmenés de ma pièce et ont été emmenés au

  6   bâtiment administratif où ils ont été passés à tabac.", fin de citation.

  7   Réponse: Je n'ai pas parlé de Halim Dedovic en disant qu'on l'avait emmené

  8   du bâtiment où j'étais, je n'ai jamais dit cela. Et d'ailleurs jamais

  9   aucun d'entre eux n'a été emmené. Halim Dedovic, non, Durgut non plus et

 10   Nedzib Babalija non plus. On ne les a pas faits sortir. Nedzib Babalija

 11   est venu dans ma salle depuis Miljevina, c'est celui qui quand il est

 12   arrivé avait été passé à tabac, déjà.

 13   Question: Monsieur, au même endroit, vous avez dit qu'on avait fait sortir

 14   ces personnes pour les emmener au bâtiment administratif et vous avez dit:

 15   "Ils m'ont parlé de tout cela quand ils sont revenus."

 16   Alors où est la vérité? Est-ce que vous vous êtes trompé à ce moment-là ou

 17   bien est-ce qu'on s'est trompé en consignant vos propos quand vous vous

 18   êtes entretenu avec les représentants du Bureau du Procureur?

 19   Réponse: Ce que je vous dis aujourd'hui c'est la vérité. Je ne me souviens

 20   pas de ce que j'ai dit avant. Ils sont arrivés dans ma salle depuis

 21   Miljevina, Mujo Durgut...

 22   Question: Ne répétez pas cela. Donc ce que vous nous dites, c'est ce qui

 23   figure dans votre déclaration au Bureau du Procureur, n'est pas exact?

 24   Réponse: Qu'on les a emmenés jusqu'au portail pour qu'ils soient passés à

 25   tabac?


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  1   Question: Oui et qu'ensuite ils sont revenus dans la salle où vous étiez

  2   détenu et qu'ils vous ont raconté la chose.

  3   Réponse: Il est vrai qu'on ne les a pas emmenés jusqu'au portail d'entrée

  4   pour qu'ils soient passés à tabac et pour les ramener ensuite. Cela, ce

  5   n'est pas vrai.

  6   M. le Président (interprétation): Maître Bakrac, le moment est peut-être

  7   bien choisi pour observer une pause.

  8   Je vous rappelle que lorsqu'un témoin n'accepte pas ce que vous lui dites

  9   au sujet de sa déclaration, vous devez établir ce fait. Nous ne souhaitons

 10   pas simplement accepter le versement au dossier des déclarations

 11   uniquement pour prouver ce genre de chose. Moi, ce que je vous propose,

 12   c'est de demander à l'accusation de manière informelle si elle accepte ce

 13   que vous dites au sujet de la déclaration.

 14   Ensuite on pourra consigner la chose et éviter ainsi une avalanche de

 15   papiers. Mais s'il n'y a pas d'accord, à ce moment-là, on pourra demander

 16   le versement au dossier dans ce but.

 17   Mais vous ne pouvez pas simplement affirmer quelque chose à un témoin sans

 18   le prouver.

 19   Nous allons maintenant observer une pause d'une demi-heure.

 20   (L'audience, suspendue à 11 heures, est reprise à 11 heures 30.)

 21   M. le Président (interprétation): A vous, Maître Bakrac.

 22   M. Bakrac (interprétation): Monsieur le Président, étant donné que je

 23   devais m'arrêter une seconde pour demander à l'accusation si formellement

 24   le témoin pourrait dire, comme il a dit, que dans cette déposition faite

 25   au Bureau du Procureur il n'a pas fait mention du fait que Milo Krnojekac


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  1   était en compagnie des journalistes lorsque ceux-ci s'étaient rendus en

  2   visite à la prison ; ensuite qu'il n'a pas mentionné non plus que

  3   l'enquêteur du Bureau lui aurait dit que Milorad Krnojelac était membre de

  4   la cellule de crise, et que celui-ci ne l'a pas mentionné ; ensuite que le

  5   témoin n'a pas mentionné non plus avoir vu Milorad Krnojelac au cours de

  6   cette journée où l'alerte a été donnée, qu'il n'a pas mentionné non plus

  7   avoir vu Krnojelac en compagnie de militaires, à savoir Ivanovic,

  8   Dragicevic, Sipcic, ce qu'il vient de mentionner au cours de son

  9   interrogatoire principal aujourd'hui.

 10   M. le Président (interprétation): Madame Uertz-Retzlaff?

 11   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Cela est correct et exact, Monsieur

 12   le Président.

 13   M. le Président (interprétation): Oui, d'accord. Alors là, je vous prie de

 14   bien vouloir toujours signaler à l'accusation en temps utile et opportun

 15   de sorte que l'on puisse le vérifier dans les résumés des dépositions du

 16   témoin.

 17   A vous Maître Bakrac.

 18   M. Bakrac (interprétation): Je vous remercie.

 19   Ce matin, nous avons traité de quelques déclarations qui d'ailleurs ont

 20   traité de ce qui était dit par le témoin lors de ses dépositions.

 21   Il a été dit que Nedzib Babalija, Muhad Trgota, et Halid Dedic ont été

 22   sortis de leur Chambre pour être tabassés. Alors il a dit que d'autres lui

 23   en ont parlé lorsque ces gens-là étaient de retour dans leur pièce.

 24   Je voudrais maintenant demander à l'accusation son accord. Il s'agit de la

 25   page 10 en version BCS et je crois page 11 en version anglaise. Oui, c'est


Page 4182

  1   bien cela. Il s'agit donc de la page 11 en version anglaise, cinquième

  2   fragment.

  3   M. le Président (interprétation): Madame Uertz-Retzlaff?

  4   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui, Monsieur le Président, cela est

  5   correct.

  6   M. le Président (interprétation): Merci.

  7   A vous, Maître Bakrac?

  8   M. Bakrac (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

  9   Je vais poursuivre le contre-interrogatoire pendant un court temps, il me

 10   semble.

 11   Monsieur le témoin, vous avez parlé d'un incident lié à la personne nommé

 12   Sabcic ou Sacic, la personne qui a été chargée de passer des messages.

 13   Vous avez dit que ces messages, il devait les passer à Muratovic et à

 14   Malkic. Est-ce vrai?

 15   Témoin FWS-69 (interprétation): Oui, c'est exact.

 16   Question: Et vous avez dit qu'il se trouvait dans le bâtiment n°1, ce

 17   Sabcic?

 18   Réponse: Oui, mais il s'appelait Sacic.

 19   Question: Oui, Sacic.

 20   Vous avez dit aussi que Muratovic et Malkic étaient dans la salle au-

 21   dessus de la vôtre.

 22   Réponse: Ils étaient dans la même pièce que moi.

 23   Question: Ils étaient dans votre pièce alors. Comment Sacic leur a-t-il

 24   transmis des messages?

 25   Réponse: Est-ce que je peux expliquer un peu les détails de tout cela?


Page 4183

  1   Question: Ne descendez pas trop dans le détail mais essayez de dire s'il a

  2   transmis ou pas ces messages-là?

  3   Réponse: Je vais le dire en deux ou trois phrases. A partir d'un étage, il

  4   a tout simplement pris une ficelle où se trouvait au bout de la ficelle un

  5   morceau de papier, lequel morceau de papier a été d'abord repéré par un

  6   garde, le garde Sipcic.

  7   Lui, il a pris le papier, et il a fait venir Sacic pour lui demander ce

  8   que tout ceci devait signifier. Lorsque l'autre était sorti, il a dit

  9   qu'il voulait par ce moyen-là transmettre un message à quelqu'un pour

 10   porter à sa connaissance ce qui se passait, enfin pour l'informer des

 11   événements.

 12   Alors, lorsqu'on le lui a demandé, on a demandé s'il y avait d'autres

 13   personnes qui s'occupaient de ces messages, de ces messageries de ce

 14   genre-là, alors que, lui, il le faisait dans notre bâtiment, Avdo

 15   Muratovic et Malkic.

 16   Alors on a fait venir Malkic et Muratovic, qui devaient faire un rapport

 17   cette fois-ci, pour les interroger dans la salle des gardes au rez-de-

 18   chaussée du bâtiment où nous étions. Alors, il y avait encore Muhadif

 19   Mucic(?). Et c'est là que ces 4 personnes ont été interrogées, enquêtées.

 20   On voulait savoir la raison pour laquelle ils passaient tous ces messages

 21   et c'est ainsi qu'ils les ont passés à tabac, etc..

 22   Question: Dans votre déposition faite par vous au Bureau du Procureur et

 23   concernant cet incident, vous avez dit entre autres que cette personne-là

 24   a été tabassée, mais au sujet du même incident a été tabassé la personne

 25   dont le nom figure sur la liste que vous avez sous vos yeux -je ne sais


Page 4184

  1   pas de quelle pièce à conviction il s'agit- laquelle personne serait

  2   désignée comme étant un de vos cousins.

  3   Réponse: Mon cousin à moi?

  4   Question: Oui.

  5   Réponse: Non, mais ceci ne s’est pas produit à cette occasion-là. Je n'ai

  6   pas dit dans ma déposition qu'il a été tabassé à la lumière de ce dont on

  7   vient de parler. Et puis il n'était pas mon cousin. Ce n'était pas mon

  8   cousin qui était tabassé à cette époque-là.

  9   Question: Je vais vous dire exactement ce que vous avez déposé. Vous avez

 10   dit que votre cousin y était mêlé et qu'ils se passaient les messages l'un

 11   à l'autre.

 12   Il s'agit de la page 10 en version BCS, septième fragment: «Un jour, Avdo

 13   Muratovic, Sacic, Fahrudin Malkic et...», je ne dirai pas le nom, mais le

 14   nom désigne votre cousin selon la pièce à conviction, «... ont été passés

 15   à tabac par le garde Obren Obrenovic parce qu'ils ont été pris lorsqu'ils

 16   s'envoyaient des messages les uns aux autres depuis les étages supérieurs

 17   vers les étages inférieurs. Je les ai vu tabasser par les gardes dans la

 18   pièce qui était réservée aux gardes».

 19   Qu'est-ce qu'il y a de vrai là dedans? Ce que vous avez déposé au Bureau

 20   du Procureur ou ce que vous venez de relater aujourd'hui?

 21   Réponse: Elle est exacte cette déposition faite par moi au Bureau du

 22   Procureur, mais il ne s'agit pas là de citer mon cousin germain. Lui, il

 23   n'y était pas mêlé, à cette affaire, autant que je sache.

 24   Question: Il ne s'agit pas seulement de cette différence. Vous avez dit

 25   aussi qu'ils étaient tabassés parce que qu'ils s'échangeaient des messages


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  1   entre eux, ils s'envoyaient des messages entre eux. Aujourd'hui, vous

  2   dites autre chose.

  3   Réponse: Comment autre chose? Puisque je dis la même chose. Ils se sont

  4   envoyés des messages et ils étaient en coopération, Sacic, Malkic et Avdo.

  5   Question: Et comment pouvaient-ils s'échanger des messages puisque Sacic

  6   était dans un autre bâtiment, et vous dites maintenant que c'est depuis

  7   les étages supérieurs qu'on envoyait les messages vers le rez-de-

  8   chaussée,.

  9   Alors qui a vendu la mèche, c'est-à-dire qui les a trahis en disant que

 10   d'autres avaient envoyé les messages?

 11   Réponse: Cela est exact. Je ne sais pas comment ces messages ont été

 12   envoyés. Je sais seulement que Sacic envoyait du haut de l'étage des

 13   messages vers le rez-de-chaussée. A qui? Je ne le sais pas. Lorsqu'il a

 14   été pris dans cette opération et quand on l'a interrogé, il a dit que ce

 15   sont Malkic et Avdo qui le faisaient également. Voilà ce que j'ai dit

 16   aujourd'hui.

 17   M. le Président (interprétation): Monsieur, je dois vous rappeler la

 18   nécessité d'attendre la fin de la question avant de vous lancer dans la

 19   réponse. Autrement vous rendez difficile, impossible le travail des

 20   traducteurs.

 21   Nous voyons très bien ce que vous vouliez dire, mais vous ne pouvez pas

 22   aider si vous ne permettez pas aux traducteurs évidemment de s'occuper de

 23   leur travail.

 24   A vous, Maître Bakrac.

 25   M. Bakrac (interprétation): Merci, Monsieur le Président, de cette


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  1   suggestion.

  2   Conformément à ce que vous avez dit, je vais demander à ma collègue si

  3   dans la déposition faite au Bureau du Procureur, le témoin a fait mention

  4   de ce cousin germain qui était mêlé à cet incident, et que le cousin

  5   germain aurait parlé de ces messages, et que le témoin a remarqué que ces

  6   messages ont été envoyés d'un étage vers le rez-de-chaussée, et vice

  7   versa.

  8   Il s'agit de la page 10 en version BCS et de la page 11 en version

  9   anglaise.

 10   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui, cela est correct.

 11   M. le Président (interprétation): Je ne sais pas, Maître Bakrac, en quoi

 12   consiste l'importance et la pertinence de ceci. J'aimerais bien vous voir

 13   vous occuper de questions vraiment pertinentes, importantes, et ne pas

 14   vous voir vous occuper uniquement de jeux de circonstances.

 15   M. Bakrac (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

 16   Monsieur, vous avez dit que vous avez vu Halim Konjo qu'on a fait sortir

 17   pour le tabasser. A-t-il été sorti lui tout seul?

 18   Témoin FWS-69 (interprétation): C'est exact, le 12 ou le 13 juin, Halim

 19   Konjo n'a pas été seul quand on l’a fait sortir pour le tabasser. Il y

 20   avait probablement Enes Uzunovic et l'autre qui était le commandant de la

 21   police routière, Nurko Nisic.

 22   A partir de cette journée-là, il n'y avait pas seulement un détenu qu'on

 23   faisait sortir, ils étaient trois ou quatre, et plusieurs à faire, à être

 24   sortis.

 25   Question: Monsieur, au cours de l'interrogatoire principal, vous avez dit


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  1   que Nurko Nicic a été sorti le second jour, pas le même jour où Halim

  2   Konjo a été sélectionné.

  3   Réponse: Je dis une fois de plus que ceci pouvait évidemment avoir lieu le

  4   second jour, peut-être le quatrième jour, le cinquième jour. Ce que je

  5   voulais dire hier, ce que je dis c’est au cours de ces 5 ou 6 premières

  6   journées de détention.

  7   Question: Je vais vous dire ce que vous avez dit dans votre déposition au

  8   Bureau du Procureur. «En date du 12 juin vers les 21 ou 22 heures, 4

  9   détenus ont été sélectionnés».

 10   Par conséquent, vous avez été très précis dans la date. Et leurs noms

 11   étaient Halim Konjo, Nurko Nicic, Zulfo Veiz et Munib Veiz.

 12   Réponse: C'est exact, c'est correct.

 13   Question: Donc il est correct de dire qu'en date du 12, ces 4 personnes

 14   ont été sélectionnées. On les a fait sortir ensemble.

 15   Réponse: Oui, c'est exact.

 16   Question: Merci.

 17   Monsieur, avez-vous jamais dit auparavant dans le cadre des dépositions

 18   faites par vous soit au centre de sécurité publique soit au Bureau du

 19   Procureur, que vous avez pu entendre dire par Milorad Krnojelac que le KP

 20   Dom allait être fermé, et qu'il y aurait des gens qui seraient relâchés,

 21   libérés, d'autres échangés, et qu’un troisième groupe serait délogé vers

 22   un autre camp? L’avez vous dit au Bureau du Procureur?

 23   Réponse: Vous voulez dire préalablement?

 24   Question: Oui.

 25   Réponse: Je ne peux pas en être sûr mais très vraisemblablement que oui.


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  1   Question: Je demande à l'accusation de se mettre d'accord formellement si

  2   dans la déposition préalablement faite par lui, cette mention a été faite

  3   quant à ces personnes-là, à déloger etc.. Si jamais Milorad Krnojelac

  4   aurait dit à qui que ce soit quelque chose de pareil.

  5   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Ceci n'a pas été mentionné dans le

  6   cadre de l'accusation.

  7   M. le Président (interprétation): Je vous remercie.

  8   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, si vous

  9   permettez, une remarque complémentaire, le témoin n'a jamais dit avoir

 10   entendu Krnojelac dire cela, mais il a dit que c'était de la part de

 11   Paprica qu'il a appris cela et pas de Krnojelac.

 12   M. le Président (interprétation): Oui, ceci ne figure pas dans la

 13   déposition. A vous Maître Bakrac.

 14   M. Bakrac (interprétation): Merci. Je voudrais que l'huissier place sur le

 15   rétroprojecteur la photo 40747. Et surtout la photo du bas de page, la

 16   photo inférieure. Il s'agit de la photo numéro 407477.

 17   (L'huissier s'exécute.)

 18   Je prie le témoin de me montrer les fenêtres à partir desquelles il a pu

 19   entendre toutes ces scènes de passage à tabac qui ont eu lieu au KP Dom.

 20   Témoin FWS-69 (interprétation): Est-ce qu'il faut que je montre la fenêtre

 21   de la pièce où j'ai été moi-même?

 22   Question: Non, non, non. Sur cette photo pouvez-vous montrer les fenêtres

 23   à partir desquelles provenaient les bruits des scènes de passage à tabac?

 24   (Le témoin indique l'endroit sur la photographie.)

 25   Réponse: C'est à partir de ces deux fenêtres, voilà ces deux fenêtres au


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  1   rez-de-chaussée.

  2   Question: Pour le compte rendu d'audience, citons que sur la photographie

  3   407477, le témoin montre la première et la seconde à gauche par rapport à

  4   la porte en métal qui représente l'entrée du bâtiment principal à partir

  5   de l'enceinte du camp. Merci.

  6   Je prie l'huissier de placer sur le rétroprojecteur le plan du bâtiment.

  7   (L'huissier s'exécute.)

  8   Monsieur le témoin, avant d'entendre ma question, dites-nous s'il vous

  9   plaît, les fenêtres que vous venez de montrer, d'où venaient ces bruits de

 10   passage à tabac, et il s'agit de la pièce d'où étaient évidemment

 11   sélectionnés Durko Veiz, Munib Veiz et Halim Konjo.

 12   Réponse: Vous voulez dire que c'est de là-bas que les bruits venaient?

 13   Question: Oui bien sûr et est-ce que les bruits venaient depuis ces

 14   pièces-là dont vous venez de montrer les fenêtres?

 15   Réponse: Oui, c'est bien cela.

 16   M. le Président (interprétation): Oui, s'il vous plaît, pouvez-vous

 17   ménager une petite pause entre les questions et les réponses.

 18   M. Bakrac (interprétation): Oui, je tâcherai de le faire monsieur le

 19   Président. Je vous remercie.

 20   Monsieur le témoin, il s'agit là du plan du KP Dom. Ce qui m'intéresse

 21   moi, c'est de vous voir nous montrer maintenant l'endroit, c'est-à-dire la

 22   pièce dans laquelle vous avez été interrogé, vous.

 23   Témoin FWS-69 (interprétation): Je n'arrive pas à me débrouiller pour

 24   reconnaître sur ce plan, sur cette photo, mais je peux vous faire une

 25   description de l'endroit où j'ai été interrogé.


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  1   Question: Une fois que vous êtes passé de par la porte en métal, vers le

  2   couloir, menant vers la sortie ou l'entrée si vous voulez, principale du

  3   KP Dom, vous êtes-vous dirigé vers la gauche ou la droite du bâtiment

  4   administratif?

  5   Réponse: Je me dirigeais vers la gauche du bâtiment administratif, c'est-

  6   à-dire en passant par la porte en métal, on passe par une autre porte, et

  7   puis après lorsqu'on devait venir à l'étage pratiquement supérieur, on

  8   devait tourner à gauche, lorsqu'on parle de cette interrogation.

  9   Question: Il s'agit donc de la même partie du bâtiment d'où, d'après vous,

 10   devaient provenir les bruits des passages à tabac?

 11   Réponse: Lorsqu'on entre depuis l'extérieur au KP Dom, les fenêtres des

 12   pièces dans lesquelles on passait les gens à tabac, se trouvent à droite.

 13   Or, moi, lorsque j'allais pour être interrogé, moi j'empruntais le côté

 14   gauche, j'empruntais un escalier pour monter un étage.

 15   M. le Président (interprétation): En dépit des promesses faites par vous,

 16   de respecter un petit peu le rythme auquel on parle, c'est-à-dire je crois

 17   qu'on devrait tout de même attendre un petit peu, parce que toutes les

 18   fois vous réagissez à toutes les questions et à toutes les réactions trop

 19   tôt, ce qui rend difficile le travail.

 20   Témoin FWS-69 (interprétation): Je m'excuse pour ma part.

 21   M. Bakrac (interprétation): Vous avez été interrogé dans la partie du

 22   bâtiment qui est opposée à l'autre, si je comprends bien, d'où, d'après

 23   vous, provenaient les bruits des passages tabac?

 24   Témoin FWS-69 (interprétation): Lorsqu'on sort de l'enceinte, c'est à

 25   gauche. Mais lorsqu'on entre dans le bâtiment depuis l'extérieur, alors


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  1   ces pièces-là se trouvent à droite.

  2   Question: Par conséquent, l'endroit où vous avez été interrogé se trouve à

  3   l'opposé dans le bâtiment administratif de l'endroit où les passages à

  4   tabac ont eu lieu.

  5   Réponse: Lorsqu'on sort de la prison, on passe par deux couloirs, ensuite,

  6   il y a un petit escalier menant vers un étage, moi, j'allais à droite

  7   alors que les fenêtres que j'ai montrées étaient bien sous les endroits où

  8   les passages à tabac ont eu lieu, elles se trouvent à gauche.

  9   M. Bakrac (interprétation): Merci monsieur. A quel étage se trouvait cette

 10   pièce où vous avez été interrogé?

 11   Réponse: Très vraisemblablement à ce premier étage, il n'y avait qu'un

 12   seul étage, à partir du rez-de-chaussée, il y avait un étage.

 13   Question: Dans votre déposition, de même que lors de l'interrogatoire

 14   principal, vous avez parlé des personnes qui ont été sélectionnées pour

 15   être tabassées. Les avez-vous vues, toutes ces personnes qui ont été

 16   sélectionnées, ou peut-être en avez-vous entendu parler par d'autres?

 17   Réponse: Quant à ces personnes-là, je les ai vues sortir lorsqu'elles

 18   étaient sélectionnées et je les ai énumérées ainsi.

 19   Question: Vous avez dit de même que pour certains passages à tabac vous

 20   avez entendu des tirs, des coups de feu. D'où venaient-ils ces tirs?

 21   Réponse: On entendait, pour ainsi dire, et à vrai dire chaque nuit, des

 22   tirs au KP Dom ou en dehors du KP Dom. Des tirs provenant de différentes

 23   armes. Pourquoi tous ces tirs? On n'en savait rien. Mais je sais seulement

 24   qu'au moment où s'apaisaient les cris et hurlements, lorsque les passages

 25   à tabac cessaient, c'est depuis cet endroit-là, où ces gens-là étaient


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  1   tabassés, qu'on entendait des coups de feu, sporadiques, de pistolet ou de

  2   fusil, mais sporadiques je dis bien, et certainement pas en rafale.

  3   Question: Etes-vous d'accord avec moi pour dire que lors de votre

  4   déposition au Bureau du Procureur vous avez parlé des tirs qui venaient

  5   depuis la direction du pont sur la la Drina?

  6   Réponse: Oui depuis cette direction-là, des tirs venaient mais il y en

  7   avait des sporadiques et en rafale.

  8   Question: Je vous parle maintenant de tirs qui sont liés à ce que vous

  9   venez de dire, à ces scènes de passage à tabac.

 10   Réponse: Oui, c'est bien cela.

 11   Question: Est-ce bien de ces tirs-là qu'il s'agit pour dire qu'ils

 12   pouvaient provenir depuis la direction du pont sur la Drina?

 13   M. le Président (interprétation): Vraiment les traducteurs se plaignent de

 14   vous voir trop rapide dans votre débit, Maître Bakrac. Je sais que vous

 15   voulez passer par tout cela le plus rapidement possible, mais ceci ne nous

 16   mène nulle part. Je crois que nous avons perdu la majeure partie de vos

 17   questions à cause de la rapidité de votre débit.

 18   Je vous prie de reprendre les mêmes questions et de le faire à un rythme

 19   plus lent.

 20   M. Bakrac (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

 21   Monsieur, vous venez d'expliquer comme quoi chaque soir vous avez entendu

 22   des tirs au KP Dom et autour du KP Dom. Je suis très concret.

 23   Dites-nous quelque chose au sujet des tirs que vous avez pu entendre une

 24   fois que les cris et les hurlements s'étaient arrêtés. Vous avez dit qu'il

 25   s'agissait de tirs sporadiques.


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  1   Je vous demande maintenant si vous êtes d'accord avec moi pour dire que

  2   vous avez dit dans votre déposition au Bureau du Procureur, que vous avez

  3   entendu ces tirs comme étant de provenance depuis la direction du pont sur

  4   la Drina?

  5   Témoin FWS-69 (interprétation): Je suis d'accord, je l'ai dit. Mais je

  6   suis d'accord pour dire aussi que les tirs provenaient de l'endroit où les

  7   passages à tabac se passaient.

  8   Question: Monsieur, mais qu'y a-t-il d'exact entre ces 2 dépositions? Vous

  9   dites maintenant que vous êtes d'accord avoir dit qu'il s'agit de tirs de

 10   provenance depuis la direction du pont sur la Drina. Maintenant, vous

 11   dites qu'is provenaient plutôt de l'endroit où les gens étaient tabassés.

 12   Réponse: Les deux dépositions sont exactes.

 13   Question: Dans votre déposition au Bureau du Procureur, vous avez dit que

 14   vous n'avez pas pu entendre ces tirs provenir de l'endroit où les gens ont

 15   été tabassés.

 16   Réponse: Peut-être que j'ai oublié de le dire, mais je dois être très

 17   précis pour dire que jamais on n'a fait preuve de tant de précision pour

 18   m'interroger comme on le fait ici maintenant, détail par détail, dans le

 19   plus menu détail.

 20   Dans mes dépositions préalables, jamais on ne s'est intéressé à des

 21   détails de tant de précision, comme c'est le cas ici, lorsque je devais

 22   parler de tel ou tel exemple ou lorsque j'ai été interrogé à deux reprises

 23   préalablement.

 24   Question: Monsieur, il ne s'agit pas seulement ici de savoir si les

 25   questions sont posées avec précision ou imprécision, mais il s'agit de


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  1   savoir si au sujet d'un même fait vous parlez de deux façons différentes.

  2   Au Bureau du Procureur en 1995, vous avez dit que ces tirs-là sont à

  3   considérer à la lumière des passages à tabac et qu'ils devaient provenir

  4   depuis la direction du pont de la Drina. Mais il n'était pas exact que

  5   vous les avez entendus venir de la pièce où les passages à tabac ont eu

  6   lieu.

  7   Réponse: Ceci est exact que j'ai parlé du pont sur la Drina. Je l'ai peut-

  8   être dit et que les gens, peut-être, n'ont pas fait entrer dans le compte

  9   rendu, lorsque j'ai dit que les tirs provenaient également des pièces où

 10   les gens ont été tabassés. Mais je le dis maintenant et, généralement

 11   parlant, ces tirs on pouvait les entendre chaque nuit dans l'enceinte et

 12   en dehors de l'enceinte.

 13   Question: Merci monsieur, mais lorsque vous parlez des pièces, pour parler

 14   des tirs, vous les avez montrées tout à l'heure en montrant les fenêtres

 15   sur la photo. Et c'est ce dont vous vous souvenez maintenant?

 16   Réponse: Je m'en souviens maintenant, mais je le savais à cette époque-là

 17   parce que je ne l'avais jamais oublié.

 18   Question: Mais vous ne l'avez pas dit.

 19   Réponse: Je ne l'ai pas dit parce qu'on ne me l'a pas demandé. Personne ne

 20   me l'a demandé.

 21   Question: Merci.

 22   Monsieur, connaissez-vous Isakovic Ismet et Safet Avdic

 23   Réponse: Isakovic Ismet appelé Karson, originaire de Gorazde je le

 24   connais. Il était dans la même pièce que moi. Et Safet Avdic, ingénieur

 25   des forêts, eh bien, il était dans la même Chambre que moi. Oui je le


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  1   connais.

  2   Question: Est-ce qu'ils ont séjourné pendant toute la période de votre

  3   détention dans la même pièce que vous?

  4   Réponse: Non, pas pendant toute cette période. Ils sont venus du bâtiment

  5   n°1 au mois de juin, juillet, août.

  6   Question: Quant au mois de juin, juillet ou août, quand ils sont arrivés

  7   dans votre pièce, est-ce qu’ils ont passé le reste de leur temps, c'est-à-

  8   dire jusqu'au jour de votre libération, dans la même pièce que vous?

  9   Réponse: Je ne suis pas sûr, mais en tout cas, on a déménagé un groupe de

 10   ma pièce et on l'a déménagé à l'étage dans une autre pièce. Je ne sais pas

 11   laquelle. Alors est-ce que Karsonet Safet Avdic avaient été amenés avec

 12   eux, je ne sais pas. Mais je sais que d'autres personnes y ont été amenées

 13   et je peux les énumérer.

 14   Question: Non, merci. Ce n'est pas nécessaire.

 15   Dites-nous si vous connaissez le gardien qui s'appelle Risto Ivanovic?

 16   Réponse: Oui je pense que je le connais.

 17   Question: Et comment était-il?

 18   Réponse: C'était le meilleur. Il était très, très bien.

 19   Question: Merci. Vous avez mentionné votre échange. Vous avez dit, et je

 20   souhaite le répéter parce que je n'ai pas réagi à l'époque à cause du

 21   compte rendu d'audience, est-ce que je vous ai bien compris, est-ce que

 22   vous avez dit que c'est un camion militaire Deutz qui est venu vous

 23   chercher? Un camion militaire?

 24   Réponse: Oui, oui, c'est exact.

 25   Question: Et vous avez dit que ce sont les soldats qui vous ont pris en


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  1   charge?

  2   Réponse: Oui.

  3   Question: Et est-ce que c'est exact que vous avez dit que ces soldats vous

  4   ont confisqué vos objets de valeur?

  5   Réponse: Oui c'est exact, des montres, de l'argent, etc.

  6   Question: Donc, vous avez eu sur vous au KP Dom, de l'argent, des montres

  7   etc.

  8   Réponse: Moi, quand je suis arrivé au KP Dom, je n'avais pas d'argent et

  9   Rasim Kajgana qui m'a donné 50.00 dinars. Il m'a dit: "Tiens, c'est pour

 10   toi, pour Kajgana". En ce qui concerne ma montre, eh bien, je l'ai eue au

 11   KP Dom.

 12   Question: Donc vous l'avez eue pendant toute cette période de détention,

 13   cette montre, votre montre au poignet, au KP Dom et Rasim Kajgana vous a

 14   donné 5 000 dinars.

 15   Réponse: Oui, c'est exact.

 16   M. Bakrac (interprétation): Merci. Je n'ai plus de questions pour ce

 17   témoin.

 18   M. le Président (interprétation): Des questions supplémentaires?

 19   (Interrogatoire principal supplémentaire du témoin FWS-69 par Mme Uertz-

 20   Retzlaff.)

 21   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui, Monsieur le Président.

 22   Monsieur, pour revenir sur la conversation que vous avez eue à Trnovo dans

 23   le centre en 1992, je voudrais demander à l'huissier de montrer au témoin

 24   l'original du document, le document qui porte la cote ID1.3.1

 25   (L'huissier s'exécute.)


Page 4197

  1   Monsieur, pourriez-vous examiner ce document?

  2   Je pense que je n'ai pas besoin de le lire. Est-ce que vous pourriez donc

  3   lire ce document, regarder ce document, identifier, si vous le pouvez,

  4   votre signature.

  5   Témoin FWS-69 (interprétation): Oui, c'est ma signature à moi.

  6   Question: Merci. Et quand vous regardez cette déclaration préalable, elle

  7   s'étend sur 3 pages et demie, n'est-ce pas? Il y a le numéro de page qui

  8   figure en bas. Donc, s'agit-il bien des 3 pages et demie? C'est bien la

  9   longueur de cette déclaration préalable?

 10   Réponse: Oui.

 11   Question: Vous pouvez mettre cette déclaration préalable sur le côté.

 12   Mais, je vais vous poser la question suivante: vous souvenez-vous de la

 13   longueur de cet interrogatoire?

 14   Réponse: A Trnovo?

 15   Question: Oui.

 16   Réponse: Oui cela a duré une après-midi, la moitié de la journée, une

 17   après-midi, pour autant que je me souvienne.

 18   Question: Vous souvenez-vous quel était l'objet de ces questions, qu'est-

 19   ce qui les intéressait le plus?

 20   Réponse: Je me souviens très bien, le thème principal, ce qu'ils voulaient

 21   savoir c'est combien il restait de prisonniers dans le camp, c'est ce qui

 22   les intéressait le plus. Il voulait savoir si j'étais en mesure d'énumérer

 23   les gens, de donner leur nom, leur prénom, et combien sont restés derrière

 24   moi. C'est ce qu'ils m’ont dit, c’est ce qui les intéressait le plus.

 25   C'était leur mission principale.


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  1   Question: Est-ce que vous leur avez raconté en détail les circonstances de

  2   votre arrestation à Jelec, est-ce que vous leur avez raconté en détail les

  3   mauvais traitements et les passages à tabac que vous avez vécus, que vous

  4   avez endurés avant d'arriver au KP Dom?

  5   Réponse: Je ne saurais vous donner les détails, mais si je me souviens

  6   très bien, ils m'ont posé des questions de façon globale. Ils ne sont pas

  7   rentrés dans le détail, c'était assez rapide.

  8   Question: Est-ce que vous leur avez aussi raconté quelles étaient les

  9   personnes qui avaient été battues au KP Dom, quelles étaient les personnes

 10   qui étaient portées disparues ou qui ont disparu du KP Dom? Est-ce que

 11   vous leur avez donné des noms, des détails, beaucoup de détails?

 12   Réponse: Je pense que oui, autant que je pouvais. Je leur ai donné ce

 13   qu'ils ont demandé. Mais ils m'ont bien dit que le but principal de cet

 14   interrogatoire était d'apprendre combien de personnes sont restées

 15   derrière, au camp.

 16   Et quand je n'arrivais pas à me rappeler du nom de certaines personnes, eh

 17   bien, ils me laissaient réfléchir pour essayer de me rappeler soit du nom,

 18   du prénom, soit du nom et du prénom, de ce que je pouvais.

 19   Question: Vous a-t-on ont posé des questions concernant la hiérarchie qui

 20   prévalait dans la prison à cette occasion-là? Vous en souvenez-vous?

 21   Réponse: Non, je ne sais pas qui était le principal, qui était le chef,

 22   qui faisait quoi. Je ne sais pas exactement, sans doute qu'ils m’ont posé

 23   cette question-là, mais moi je ne savais pas répondre en détail, qui était

 24   le directeur, qui faisait partie de la hiérarchie. Je ne me souviens pas

 25   qu'on m’ait posé cette question-là, sans doute que non.


Page 4199

  1   Question: Est-ce que les conseils de la défense sont d'accord sur le fait

  2   que ni Krnojelac ni Todovic, ni aucun autre ou Rasevic, ni aucune autre

  3   personne de la hiérarchie de la prison n'est mentionnée dans cette

  4   déclaration?

  5   M. le Président (interprétation): Il y a un dicton en anglais, Maître

  6   Bakrac. Tout le monde est logé à la même enseigne, Maître Bakrac.

  7   M. Bakrac (interprétation): Je suis d'accord, Monsieur le Président.

  8   M. le Président (interprétation): Je suis très content de cette

  9   collaboration qui existe dans ce procès, et j'aurais bien voulu qu'elle

 10   existe au niveau du Tribunal. Merci.

 11   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Est-ce que la défense est d'accord

 12   aussi que le témoin a donné beaucoup de noms de personnes qui sont restées

 13   derrière lui, et que c'est aux pages 3 et 4 dans la version en anglais, où

 14   il y a un chapitre où l'on énumère les personnes qui ont été battues au KP

 15   Dom.

 16   M. Bakrac (interprétation): La défense est d'accord.

 17   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Nous allons maintenant passer à votre

 18   déclaration, la déclaration que vous avez donnée au mois d'octobre 1995

 19   devant les enquêteurs du Bureau du Procureur.

 20   Je voudrais montrer avec l'aide de l'huissier ce document en langue

 21   anglaise. Il s'agit du document ID 130.

 22   (L'huissier s'exécute.)

 23   Témoin FWS-69 (interprétation): C'est bien ma signature. Je l'ai signé,

 24   c'est bien ma signature à moi. Alors, l'aspect physique de ce document,

 25   écoutez, je ne m'en rappelle plus très bien. C'est là que je le revois, je


Page 4200

  1   vois comment ils sont, mais en ce qui concerne ma signature, c'est bien ma

  2   signature à moi.

  3   Question: Très bien.

  4   Si vous regardez la dernière page du texte, est-ce que vous voyez qu'il

  5   s'agit bien d'une déclaration qui consiste en 14 pages?

  6   Réponse: C'est exact, moi j'ai tout signé, tout cela ce sont mes

  7   signatures, tout cela est exact. Tout est exact, tout va bien.

  8   Question: Monsieur, vous souvenez-vous quel était l'objet de cet

  9   interrogatoire, quels étaient les thèmes principaux?

 10   Réponse: Au moment où j'ai fait cette déclaration préalable en 1995, ce

 11   qui les intéressait le plus, si j'ai bien compris votre question, je vous

 12   ai bien compris? Est-ce que je peux commencer?

 13   Question: Oui, oui.

 14   Réponse: Ils ont commencé depuis le début. Ils m’ont demandé comment avait

 15   commencé la guerre à Foca, comment s’est développé la situation, où

 16   j’étais moi, à quel moment j’avais été arrêté, de quelle façon, de quelle

 17   façon on m'avait amené jusqu'à Foca.

 18   Ils m'ont demandé toute la chronologie et que je leur raconte tout

 19   chronologiquement, et au cours de l'interrogatoire, ils ont eu

 20   l'impression que tout cela durait un peu trop longtemps alors ils m'ont

 21   demandé de ne pas rentrer dans le détail, d'essayer de raconter ces

 22   événements le plus brièvement possible, puisque ceci prenait trop de

 23   temps. Donc, voilà, nous avons abrégé un peu jusqu'à la description du

 24   jour de ma libération et ma sortie de Foca.

 25   Question: Est-ce que la défense est d'accord sur le fait que sur les 9


Page 4201

  1   premières pages de cette déclaration préalable, donc jusqu'à la moitié de

  2   la neuvième page en version anglaise, on parle effectivement de la

  3   situation politique et de ce qu'a vécu le témoin avant son arrestation à

  4   Jelec, avant son arrivée au KP Dom.

  5   M. Bakrac (interprétation): Oui, Monsieur le Président, Madame

  6   et Monsieur les Juges, la défense est d'accord sur ces faits.

  7   M. le Président (interprétation): Merci.

  8   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Est-ce que la défense est d'accord

  9   sur le fait que sur la page 12 le témoin concernant M. Krnojelac dit, je

 10   cite: "Mico Krnojelac était le chef du KP Dom à Foca, Gagovic était son

 11   remplaçant." fin de citation, et qu'ensuite, il ne mentionne plus

 12   Krnojelac, sauf à la dernière page, à la dernière ligne et aussi au sujet

 13   de la mort de Halim Konjo.

 14   M. Bakrac (interprétation): Oui, oui, oui,. Nous sommes d'accord avec ce

 15   que vous venez de dire, concernant donc les mentions de Krnojelac, sauf

 16   que l'accusation n'a pas donné lecture du fait que le témoin a continué à

 17   parler au sujet de la direction du KP Dom, il a parlé aussi de Mitar

 18   Rasevic, Todovic, les enquêteurs etc. Donc, il s'agit d'un paragraphe qui

 19   concerne la structure de la direction hiérarchique qui prévalait au KP

 20   Dom. Donc vous n'avez donné lecture que d'une partie de ce paragraphe,

 21   alors que tout le paragraphe parle de la direction de façon globale, de la

 22   direction du KP Dom.

 23   M. le Président (interprétation): Je n'ai pas très bien compris à quoi

 24   vous vous référez. Est-ce qu’il y a d'autres mentions de votre client M.

 25   Krnojelac? Car si j'ai bien compris, l'accusation demande juste à


Page 4202

  1   démontrer que, dans la déclaration préalable, on fait mention de votre

  2   client, mais de façon très sommaire, sans donner de détails. Et donc, si

  3   j'ai bien compris, ce que vous voulez dire c'est qu'il y a autre chose

  4   dans cette déclaration préalable qui concerne votre client.

  5   M. Bakrac (interprétation): Non, non, monsieur le Président, je suis

  6   d'accord sur le fait que mon client est mentionné de la façon dont l'a dit

  7   le Procureur, que Mico Krnojelac était le directeur du KP Dom à Foca et

  8   que son remplaçant était Gagovic. Mais ce que je veux dire, c'est que dans

  9   tout le paragraphe après par la suite, on parle de la hiérarchie au niveau

 10   de la direction du KP Dom, de la structure hiérarchique.

 11   Mais nous sommes bien d'accord sur le fait…sur ce qu'a lu l'accusation.

 12   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je peux, en effet, lire ce paragraphe

 13   et vous donner lecture du paragraphe en entier, mais j'ai évité de le

 14   faire car il y a beaucoup trop de noms de gardiens que l'on mentionne dans

 15   ce paragraphe. Il s'agit du paragraphe où l'on parle de tous ces gens,

 16   faisant partie de la direction et les gardiens.

 17   M. le Président (interprétation): Oui, en effet, c'est très difficile pour

 18   vous de prononcer tous ces noms, mais peut-être que vous pourriez donner

 19   la lecture de ce paragraphe de façon lente et, comme cela, les interprètes

 20   vont le prononcer de façon correcte.

 21   Je cite: "Mico Krnojelac était le directeur du KP Dom à Foca. Son

 22   remplaçant était Gagovic, le commandant de la police au KP Dom était Mitar

 23   Rasevic, nom de père Dorde. Todovic était le directeur des ateliers au KP

 24   Dom.

 25   Les enquêteurs au KP Dom étaient Zoran Paprica, Vojo Starevic et Vladicic.


Page 4203

  1   Les gardiens au KP Dom était Predrag Stefanovic appelé Predo, Cancar,

  2   Vladicic, Blagojevic, Zoran Matovic, Obren Obrenovic, Perisic, Elcic,

  3   Dobrilo Pljevaljcic, Roko, Micevic, Risto Ivanovic, Milivoje Milutinovic,

  4   Vukovic, Milic, Savic appelé "Kostolomac", Miro Burilo, Prodanovic,

  5   Kunarac, Koroman, et Milutin Mladenovic. Fin de citation.

  6   Vous parlez de cela?

  7   M. Bakrac (interprétation): Oui, oui, bien sûr.

  8   M. le Président (interprétation): Très bien, je pense que ceci suffit.

  9   Madame Uertz-Retzlaff?

 10   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Concernant la page 10, en langue

 11   anglaise, le paragraphe 2, je vais le lire.

 12   Les nuits entre le 12 et le 13 juin, et le 22, 23 juin 1992, ah, excusez-

 13   moi, je vais indiquer aux interprètes où cela se trouve. Il s'agit de la

 14   page 9, du paragraphe numéro 7, je cite. Les nuits entre le 12 et le 13

 15   juin et le 22 et le 23 juin 1992 étaient les pires. Le 12 juin, vers 21

 16   heures ou 10 heures du soir, on a fait sortir 4 prisonniers. Ils

 17   s'appelaient Halim Konjo, Nurko Nisic, Zulfo Veiz et Munib Veiz. Ce jour-

 18   là, étaient de garde Blagojevic, Elcic et Vukovic. Et c'est eux qui

 19   appelaient les prisonniers pour les amener dans le bâtiment administratif.

 20   Le 18 juin, j'ai appris de [expurgé] que le directeur

 21   du KP Dom, Krnojelac, lui a dit que Halim Konjo est décédé dans la cellule

 22   d'isolement.

 23   Je suis désolée, je viens de mentionner le nom de cette personne. Je pense

 24   que ceci doit être expurgé. J'aurais dû utiliser ses initiales.

 25   RG était son ex collègue, l'ex collègue de Krnojelac, aussi enseignant,


Page 4204

  1   j'avais l'habitude de prendre un café avec lui au KP Dom, se reprend

  2   l'interprète, tous les 10 jours. J'ai appris par la suite que le corps de

  3   Munib Veiz a été retrouvé dans la Drina au niveau de Gorazde, fin de

  4   citation.

  5   Etes-vous d'accord que l'on parle de RG, dans ce paragraphe?

  6   M. Bakrac (interprétation): Oui, oui. Je suis d'accord.

  7   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Ensuite, il y a un autre paragraphe

  8   que je voudrais lire et je voudrais que la défense me donne son accord là-

  9   dessus.

 10   Donc, il s'agit du paragraphe où l'on parle de l'interrogatoire qu'a subi

 11   le témoin.

 12   M. le Président (interprétation): Dans la version en langue BCS, il s'agit

 13   de quel paragraphe?

 14   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): La version en langue BCS, un instant,

 15   je vous prie.

 16   Il s'agit de la page n°9, le quatrième paragraphe en langue BCS. Je cite:

 17   "20 jours après que je sois arrivé au KP Dom, j'ai été interrogé par Zoran

 18   Paprica et Vojo Starovic dans les bâtiments administratifs. Je n'ai pas

 19   été battu, je n'ai jamais été battu au KP Dom.", fin de citation. Est-ce

 20   que la défense est d'accord sur le fait que c'est la seule fois où dans

 21   cette déclaration préalable on parle des interrogatoires ou de

 22   l'interrogatoire qu'a subi le témoin, et qu'ensuite ils suivent quelques

 23   pages ou plusieurs pages de descriptions de passages à tabac?

 24   M. Bakrac (interprétation): Oui, la défense est d'accord sur ces faits.

 25   M. le Président (interprétation) : Très bien, merci.


Page 4205

  1   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le témoin, quand vous êtes

  2   venu témoigner à La Haye, était-ce en effet la première fois qu'on vous a

  3   posé des questions détaillées concernant M. Krnojelac, là où vous l'avez

  4   vu, ce que vous avez entendu à son sujet? Je parle de tous les détails le

  5   concernant.

  6   Témoin FWS-69 (interprétation): Quand on m'a invité...

  7   M. Bakrac (interprétation): Je suis désolé, Monsieur le Président, Madame

  8   et Monsieur les Juges, mais j'ai une objection.

  9   Quand l'accusation parle de détails le concernant, eh bien, la défense a

 10   déjà à travers ces questions dit, et je pense que l'accusation sera

 11   d'accord là-dessus, que le témoin a parlé des faits que maintenant au

 12   cours de l'interrogatoire principal il met en relation avec Milorad

 13   Krnojelac.

 14   Et si l'on pose la question de cette façon-ci, à savoir que le témoin n'a

 15   pas parlé au cours de son témoignage de Milorad Krnojelac, ceci apparaît

 16   différent quand il a énuméré les membres de la cellule de crise, il n'a

 17   pas mentionné Krnojelac, pas à l'époque.

 18   Ensuite il a parlé de cette visite des journalistes et il n'a pas

 19   mentionné Krnojelac. Il n'a pas mentionné le directeur dans sa déclaration

 20   préalable mais il l'a mentionné au cours de son interrogatoire principal.

 21   Et je pense que c'est cela la différence.

 22   M. le Président (interprétation): Maître Bakrac, je pense que nous avons

 23   déjà parlé à plusieurs reprises de cela.

 24   Quand les enquêteurs posent des questions au témoin, eh bien, ils posent

 25   le plus de questions possibles au sujet des événements. Et à ce moment-là


Page 4206

  1   on ne sait pas exactement qui est la personne qui va être accusée, qui va

  2   faire l'objet de l'Acte d'accusation, et c'est bien différent de ce qui se

  3   passe devant la jurisprudence nationale.

  4   Ensuite, quand on a recueilli toutes ces dépositions, on les donne à

  5   quelqu'un qui va élaborer un Acte d'accusation.

  6   Donc, vous, vous avez avancé un argument qui est très bien, et nous allons

  7   devoir réfléchir là-dessus.

  8   Mais le Procureur a aussi le droit de vous répondre à travers les

  9   questions supplémentaires qui vont être posées au témoin.

 10   Et donc, maintenant, le témoin nous donne des détails, pas sur la façon

 11   dont votre client a été impliqué ou non, ou au sujet de votre client, mais

 12   au sujet de sa position au sein du KP Dom, c'est-à-dire, si j'ai bien

 13   compris, la question qu'on lui pose est d'une autre nature.

 14   Mais vous ne pouvez pas critiquer le Procureur en disant que c'est la

 15   première fois qu'on lui pose ce genre de détails. C'est tout ce que le

 16   Procureur fait, et donc il est juste qu'il ait le droit de poser ces

 17   questions. Et la question du poids que nous allons attribuer à ces

 18   questions, eh bien, cela relève de nous.

 19   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je vais vous reposer ma question.

 20   Est-ce que c'est ici à La Haye qu'on vous a posé des questions spécifiques

 21   concernant Krnojelac et ses fonctions?

 22   Témoin FWS-69 (interprétation): Eh bien, des questions spécifiques, non,

 23   on ne m'a pas posé des questions spécifiques au sujet de Krnojelac. On m'a

 24   demandé de raconter dans l'ordre chronologique ce qui s'est passé et ce

 25   que j’ai fait, si j'ai bien compris les questions qu'on m'a posées.


Page 4207

  1   Et on m'a aussi demandé si le directeur du KP Dom était Krnojelac. Et nous

  2   tous, qui nous trouvions dans le camp, eh bien, nous savions que c'était

  3   lui le directeur. C'était indéniable. Nous le savions à cause des détenus,

  4   à cause des gardiens, de tout le monde. Nous savions que c'était lui le

  5   directeur du KP Dom.

  6   Question: Monsieur le témoin, ce n'est pas la nature de ma question. Je

  7   vous ai demandé si c'est ici à La Haye que l'on vous pose pour la première

  8   fois des questions détaillées concernant Krnojelac? Ce qu'il portait,

  9   quelle était sa fonction exacte, etc.? Est-ce que c'est ici à La Haye que

 10   l'on vous pose pour la première fois ces questions détaillées?

 11   Réponse: Oui, je vous comprends maintenant. C'est vrai que personne ne m'a

 12   posé de telles questions avant. Ils ne m'ont pas posé des questions aussi

 13   détaillées. Ils m'ont posé des questions comme je vous les ai déjà

 14   décrites, on je m'a pas vraiment posé des questions en détail. Ce n'était

 15   pas que des questions qui concernaient le directeur. Ce qu'ils voulaient

 16   savoir, c'était mon périple, qui je connaissais, ce que j’ai fait, par où

 17   je suis passé, etc..

 18   Question: Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges, ce sont les

 19   questions que le Procureur souhaitait demander.

 20   M. le Président (interprétation): Monsieur le témoin, je vous remercie de

 21   votre témoignage et maintenant vous pouvez partir.

 22   Témoin FWS-69 (interprétation): Merci.

 23   (Le témoin FWS-69 est reconduit hors du prétoire.)

 24   (Questions relatives à la procédure.)

 25   (Audience publique.)


Page 4208

  1   M. le Président (interprétation): Monsieur Smith, est-ce que le témoin 122

  2   est le témoin que nous allons entendre maintenant?

  3   M. Smith (interprétation): Effectivement, Monsieur le Président. Il n'a

  4   pas demandé de mesures de protection, en l'espèce.

  5   M. le Président (interprétation): Quel est son nom?

  6   M. Smith (interprétation): Amor Masovic. Il est président de la commission

  7   d'Etat pour la localisation des personnes disparues en Bosnie.

  8   M. le Président (interprétation):Merci.

  9   M. Smith (interprétation): Avant de faire entrer le témoin, vous avez sans

 10   doute reçu une chemise de documents qui est une nouvelle version d'une

 11   chemise qui vous avez déjà été remise précédemment.

 12   Certains documents ont été éliminés par rapport au début de l'affaire,

 13   puisque nous avons estimé qu'ils n'étaient plus pertinents.

 14   Nous avons ajouté un certain nombre de documents parce que nous estimons

 15   qu'ils sont pertinents vu le témoignage de la personne que nous allons

 16   entendre.

 17   La défense a reçu un exemplaire de cette liasse de documents. Ils ont reçu

 18   la plus grande partie des informations il y a quelques semaines, un

 19   document qui porte la cote 240/5 notamment, qui est une liste de détenus

 20   au KP Dom qui sont toujours portés disparus, et que la commission leur a

 21   fourni la semaine dernière.

 22   M. le Président (interprétation): Merci.

 23   M. Smith (interprétation): Nous avons essayé de nous mettre d'accord sur

 24   les documents, mais il se trouve que beaucoup de ces documents sont des

 25   résumés et reprennent les dossiers détenus par la commission.


Page 4209

  1   Du fait de l'importance et des documents qu’il faudrait consulter pour

  2   appuyer ces résumés, à ce stade il n'y a pas eu d'accord entre la défense

  3   et l'accusation en ce qui concerne ces documents du fait du manque de

  4   fondement donc pas d'accord en ce qui concerne la fiabilité de ces

  5   documents.

  6   Et donc, nous ne sommes pas en mesure de nous mettre d'accord ou pas.

  7   M. le Président (interprétation): Est-ce que cela va être le sujet de la

  8   déposition du témoin?

  9   M. Smith (interprétation): Oui.

 10   M. le Président (interprétation): Je vous demande de continuer à

 11   communiquer pour voir si vous pouvez arriver à un accord entre défense et

 12   accusation. Il est possible que Me Bakrac souhaite contre-interroger le

 13   témoin avant de prendre une décision à ce sujet.

 14   M. Smith (interprétation): Effectivement.

 15   (Le témoin Amor Masovic est introduit dans la salle d'audience.)

 16   M. le Président (interprétation): Monsieur, veuillez, s'il vous plaît,

 17   prononcer la déclaration solennelle en lisant le document qui vous est

 18   présenté.

 19   M. Masovic (interprétation): Je déclare solennellement que je dirai la

 20   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 21   M. le Président (interprétation): Veuillez vous asseoir, Monsieur Masovic.

 22   (Le témoin s’assoit.)

 23   M. Smith (interprétation): Monsieur le Président, avant que je n'entame

 24   l'interrogatoire principal, le témoin a sous les yeux un classeur qui

 25   correspond à la grande majorité des documents qui ont été préparés par


Page 4210

  1   lui-même et qu'il va consulter.

  2   M. le Président (interprétation): Cela va sans doute nous permettre de

  3   gagner beaucoup de temps.

  4   (Interrogatoire principal du témoin, M. Amor Masovic, par M. Smith.)

  5   M. Smith (interprétation): Monsieur Masovic, bonjour. Quel est votre nom,

  6   prénom et quelle est votre activité professionnelle?

  7   M. Masovic (interprétation): Bonjour, je m'appelle Amor Masovic. Je suis

  8   avocat de profession et je suis président de la commission d’Etat chargée

  9   de la localisation des personnes disparues en Bosnie-Herzégovine. Je suis

 10   également président de la commission fédérale de Bosnie-Herzégovine

 11   chargée de la recherche des personnes disparues.

 12   M. Smith (interprétation): Vous êtes également membre du Parlement de

 13   Bosnie-Herzégovine, n'est-ce pas?

 14   Réponse: Oui.

 15   Question: Quand la commission d’Etat chargée de la localisation des

 16   personnes disparues a-t-elle été mise en place, en quelle année?

 17   Réponse: Elle a été mise en place en avril 1996.

 18   Question: Et avant avril 1996, est-ce que le personnel, les gens qui

 19   travaillent au sein de cette commission, travaillaient déjà au sein d'une

 20   autre institution?

 21   Réponse: Oui, c'est exact. En fait, ce qui se passe c'est que pratiquement

 22   tous les gens qui travaillent pour la commission, travaillaient pour ce

 23   que l'on appelait la commission d’Etat chargée de l'échange de prisonniers

 24   de guerre, de personnes privées de leur liberté, et c'était une commission

 25   également chargée de maintenir des listes ou les dossiers des personnes


Page 4211

  1   disparues ou décédées en Bosnie-Herzégovine.

  2   Question: Pour faire court, comment appelait-on cette commission?

  3   Réponse: La commission d'Etat pour l'échange des prisonniers de guerre.

  4   Question: Et quand cette commission chargée de l'échange des prisonniers

  5   de guerre a-t-elle été mise en place?

  6   Réponse: En avril 1992, au début avril.

  7   Question: Et pendant la guerre, est-ce que les autorités serbes et les

  8   autorités croates avaient également des commissions semblables chargées de

  9   l'échange des prisonniers de guerre?

 10   Réponse: Oui.

 11   Question: Quand la commission serbe chargée de l'échange des prisonniers

 12   de guerre a-t-elle été mise en place?

 13   Réponse: Je crois qu'elle a été mise en place très rapidement, en juin,

 14   peut-être même en mai 1992.

 15   Question: Et quand la commission croate a-t-elle été mise en place?

 16   Réponse: Elle a été mise en place même avant, puisqu'elle fonctionnait par

 17   le biais du HVO, et je crois que cela a été mis sur pied avant avril même,

 18   parce qu'il y avait déjà eu des combats entre les Croates de Bosnie et les

 19   Serbes de Bosnie.

 20   Question: Quand vous dites HVO, vous entendez par là le conseil de la

 21   défense croate?

 22   Réponse: Oui.

 23   Question: En 1997, est-ce que la commission croate et la commission de

 24   Bosnie se sont fondues sous une même appellation et sous une même

 25   responsabilité politique, et se sont transformées en commission fédérale


Page 4212

  1   pour la localisation des personnes disparues?

  2   Réponse: C'est exact. En juillet 1997, on a mis en place la commission

  3   fédérale de Bosnie-Herzégovine, à laquelle participent aussi bien les

  4   Musulmans que les Croates de Bosnie.

  5   Question: En pratique, est-ce que la commission croate et la commission

  6   bosniaque fonctionnent de manière indépendante sous cette égide commune?

  7   Réponse: On peut décrire la situation de cette façon. On peut dire

  8   qu’elles travaillent de manière indépendante, bien que sur le papier et

  9   officiellement il s'agit de la commission fédérale de la Bosnie-

 10   Herzégovine.

 11   Question: En ce qui vous concerne, quand avez-vous commencé à travailler

 12   pour la commission d’Etat chargée de l'échange des prisonniers de guerre?

 13   Réponse: En août, dans la deuxième moitié du mois d'août 1992.

 14   Question: Quel était votre poste quand vous avez commencé?

 15   Réponse: Au départ j'étais membre de cette commission, ensuite j'ai été le

 16   président par intérim, et puis enfin jusqu'à la fin du conflit en Bosnie-

 17   Herzégovine je suis devenu président de cette commission.

 18   Question: En avril 1996, avez-vous été nommé président de la commission

 19   d’Etat chargée de la localisation des personnes disparues?

 20   Réponse: Oui, la nouvelle commission, commission nouvellement établie pour

 21   chercher les personnes disparues.

 22   Question: Pendant la guerre, quel était le rôle essentiel, la fonction

 23   essentielle de la commission d’Etat chargée de la localisation des

 24   prisonniers de guerre? Quel était votre objectif principal?

 25   Réponse: Eh bien, l'objectif principal, son rôle principal, on peut le


Page 4213

  1   voir rien qu'à la lecture du nom, il s'agissait de retrouver, de localiser

  2   les personnes qui étaient dans les prisons de l'ennemi, ainsi que les

  3   personnes qui avaient été privées de leur liberté pendant le conflit.

  4   Il s'agissait également de tenir des registres des personnes blessées et

  5   tuées, ainsi que des civils et militaires qui avaient disparu pendant les

  6   conflits armés qui ont eu lieu sur le territoire de l'ex-Yougoslavie.

  7   C’est-à-dire qu’en plus de tenir ces registres, la commission avait pour

  8   tâche d'engager des négociations avec l'ennemi, et d'essayer de faire

  9   libérer des prisons et des camps de l'ennemi le plus de détenus possibles,

 10   en particulier les civils qui avaient été faits prisonniers, qui avaient

 11   été arrêtés.

 12   Question: Dans la période qui a suivi la guerre, mettons à partir de 1996,

 13   est-ce que la nature du travail de la commission a changé?

 14   Question: Avez-vous entendu ma question?

 15   Réponse: Non, je n'ai pas eu de traduction, j'ai entendu en anglais

 16   uniquement.

 17   Question: Je vais essayer de nouveau. Dans la période qui a suivi la

 18   guerre, à partir de 1996, est-ce que la nature du travail de la commission

 19   a évolué par rapport à la nature de ce qu'elle faisait pendant la guerre?

 20   Réponse: Oui, si l'on peut dire, la commission d’Etat chargée de l'échange

 21   des prisonniers de guerre s'intéressait principalement aux personnes

 22   vivantes qui avaient été faites prisonnières, alors que cette commission-

 23   là se chargeait des personnes qui avaient été portées disparues. C’est-à-

 24   dire que, malheureusement, le plus souvent il s'agit de personnes qui très

 25   vraisemblablement sont décédées dans l'intervalle. La plupart de ces


Page 4214

  1   personnes disparues sont maintenant décédées.

  2   Donc, en fait, ce que l'on fait, c'est que l'on recherche des personnes

  3   qui sont mortes pendant la guerre parce qu'il s'est passé tellement de

  4   temps depuis.

  5   Question: Et une bonne partie du travail que vous faites dans le cadre,

  6   après la guerre, depuis la fin de la guerre, consiste à mettre en place ou

  7   à coordonner des exhumations en Bosnie pour essayer de trouver les

  8   personnes disparues, n'est-ce pas?

  9   Réponse: Oui.

 10   Question: Est-ce que vous pouvez être un peu plus précis, quel est le rôle

 11   que joue la commission dans les exhumations qui sont menées en Bosnie?

 12   Réponse: Le rôle de la commission, c'est que sur la base d'informations

 13   que nous recevons à partir de diverses sources, nous essayons de localiser

 14   les individus ou plutôt des fosses communes et des endroits où sont

 15   enterrés des personnes individuelles.

 16   Ensuite, nous signalons où se trouvent ces fosses communes. C'est-à-dire

 17   que si nous estimons qu'il y a toujours des corps enterrés à cet endroit à

 18   ce moment-là, nous en informons les autorités de Bosnie-Herzégovine,

 19   c'est-à-dire le Procureur général, les tribunaux, ainsi que les membres de

 20   la commission d'état. Donc tous ces gens participent ou assistent à

 21   l'exhumation, parfois nous assistons également à l'autopsie des victimes.

 22   Notre objectif, in fine, est également de prendre contact avec les membres

 23   de la familles des personnes décédées quand nous estimons que les

 24   personnes que nous avons identifiées sont peut-être les membres de leur

 25   famille. Ensuite, nous entrons en contact avec les membres des familles et


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  1   avec les communautés d'origine de ces personnes disparues.

  2   Question: Et quels sont les critères qui sont utilisés par la commission

  3   pour décider de mettre en place une enquête au sujet d'un site possible

  4   d'exhumation, quant à déterminé s'il y a eu effectivement ou non crime de

  5   guerre, ou si une personne est morte de mort naturelle ou non?

  6   Réponse: Je vous ai déjà dit que nous faisons appel à toutes les sources

  7   possibles qui peuvent nous amener à trouver un site où un certain nombre

  8   de personnes ont été enterrées. Quand je parle de ces sources, eh bien, ce

  9   qui se passe, c'est que nous entrons d'abord en contact avec les membres

 10   de la famille des personnes disparues, ensuite avec des témoins éventuels,

 11   que ce soit des témoins directs, des gens qui étaient présents pendant les

 12   opérations de liquidation, qui ont survécu à ces opérations ; ou que ce

 13   soit des témoins indirects, à savoir des gens qui ont appris de manière

 14   indirecte qu'il y avait des tombes ou des fosses communes.

 15   D'autre part, en dehors des membres de la famille, nous avons recours à

 16   d'autres sources, les rapports de police, les rapports des tribunaux, les

 17   informations fournies par la Croix-Rouge internationale, par les

 18   organisations locales de la Croix-Rouge. Nous utilisons également des

 19   information reçues par les autorités locales.

 20   Question: Et votre autorité quant aux enquêtes sur des sites d'exhumation

 21   potentielle, ne s'exerce qu'au regard de morts qui apparaissent

 22   apparemment être dues à des circonstances non naturelles et pas

 23   naturelles, n'est-ce pas?

 24   Réponse: C'est exact, sur la base de la décision prise par le gouvernement

 25   de Bosnie-Herzégovine pour la mise en place de cette commission, nous


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  1   sommes tenus d'enquêter sur les personnes disparues pendant le conflit. Et

  2   il s'agit de personnes qui ont été tuées pendant la guerre. Nous ne nous

  3   intéressons pas aux personnes qui sont peut être mortes en 1992 ou 1993,

  4   qui sont peut être mortes pendant cette période de mort naturelle.

  5   Question: Et à partir de 1996, depuis la fin de la guerre, quelle est la

  6   relation qu'entretient votre commission avec la partie croate de la

  7   commission, ainsi que la commission serbe?

  8   Réponse: Eh bien, à partir de 1996, du point de vue juridique, du point de

  9   vue officiel, il y a toujours deux commissions: la commission d'Etat de

 10   Bosnie-Herzégovine d'une part, et puis la commission chargée de l'échange

 11   des prisonniers de guerre qui est toujours rattachée à l'armée croate, le

 12   HVO.

 13   Et en 1997, une entité, une commission différente a été mise en place, la

 14   commission fédérale pour les personnes disparues. Donc, ceci a eu lieu en

 15   1997 et j'ai déjà dit qu'officiellement, juridiquement, depuis lors il n'y

 16   a plus qu'une commission, et que cette instance fonctionne de façon

 17   indépendante. Je veux parler de celle qui représente le conseil de la

 18   défense croate.

 19   Question: En 1996, il y a eu un accord entre la commission croate, avant

 20   qu'elle ne devienne la commission fédérale, et ainsi que les Serbes de

 21   Bosnie, la commission de la Republika Srpska au sujet des exhumations.

 22   Quelle était la nature de cet accord?

 23   Réponse: Cet accord on l'appelle l'accord de Banja Luka. Il a été conclu à

 24   Banja Luka en Republika Srpska en juin 1996, et il a été conclu à

 25   l'initiative des représentants du haut représentant en Bosnie-Herzégovine.


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  1   Il implique les trois anciens belligérants, à savoir la commission d'Etat

  2   du conseil de la défense croate et celui de la Republika Srpska.

  3   Essentiellement, cet accord a trait aux exhumations. Il donne la

  4   possibilité aux autorités d'une des entités de franchir les frontières

  5   administratives pour se rendre sur le territoire de l'autre entité et d'y

  6   pratiquer des exhumations.

  7   Voilà l'essence de cet accord. C'est ainsi, par exemple, que la commission

  8   serbe peut venir sur le territoire de la fédération de Bosnie-Herzégovine

  9   depuis le territoire de la Republika Srpska, et y mener à bien toutes les

 10   activités nécessaires à une exhumation.

 11   Question: En pratique, est-ce que la commission de la Republika Srpska et

 12   la partie bosnienne de la commission fédérale et la partie croate de la

 13   fédération, est-ce que donc, ces trois différentes entités que je viens de

 14   définir, s'intéressent aux exhumations de personnes qui sont de la même

 15   origine ethnique, qui ont la même origine qu'eux-mêmes?

 16   Réponse: Eh bien, la commission serbe ne s'intéresse qu'aux victimes

 17   serbes. C'est-à-dire des victimes qui étaient des serbes de Bosnie. La

 18   commission d'état, plutôt la commission fédérale de la localisation des

 19   personnes disparues, s'intéresse à toutes les victimes, mais en majorité,

 20   aux victimes qui étaient de la même appartenance ethnique que la

 21   commission en question.

 22   Question: Depuis la guerre, combien de Musulmans de Bosnie ont été exhumés

 23   en Bosnie à peu près?

 24   Réponse: Eh bien, on peut dire 10.500. Je crois que 6.500 personnes ont

 25   été exhumées par la commission d'Etat de la localisation des personnes


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  1   disparues et 4.000 ont été exhumées par des représentants du Tribunal. Je

  2   pense là aux victimes de Srebrenica.

  3   Question: Savez-vous combien de Serbes de Bosnie ont été exhumés environ?

  4   Réponse: Je ne dispose pas des informations pertinentes à cet effet, mais

  5   d'après les informations dont je dispose, je crois que leur chiffre…le

  6   chiffre va de 1.200 à 1.500.

  7   Question: En ce qui concerne les Croates de Bosnie?

  8   Réponse: Environ 500, moins de 500.

  9   Question: Pendant la guerre, quelle était la relation qui prévalait entre

 10   les trois commissions? Je parle d'échange de prisonniers, est-ce que vous

 11   aviez des contacts fréquents?

 12   Réponse: Oui, des contacts très fréquents. Parfois, c'était une fois par

 13   semaine sur territoire neutre ; c'est-à-dire sur des territoires contrôlés

 14   par les forces des Nations Unies, ce que l'on appelait la Forpronu ou

 15   peut-être sur les lignes de séparation, entre les belligérants, entre les

 16   forces militaires. C'est là que ces contacts avaient lieu et c'était des

 17   contacts très fréquents, comme je vous l'ai dit.

 18   En tout cas, c'était des contacts beaucoup plus fréquents que tout autre

 19   type de contact entre les belligérants de l'époque.

 20   Question: Et pendant la guerre, est-ce que vous représentiez la commission

 21   d'Etat de Bosnie?

 22   Réponse: Oui, oui j'en étais le vice Président, mais en réalité, j'étais

 23   celui qui travaillait le plus sur le terrain.

 24   Question: Et quand des échanges de prisonniers étaient organisés, qui

 25   était votre contact au sein de la commission d'Etat croate ou la


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  1   commission serbe? Je parle du niveau hiérarchique de la personne à qui

  2   vous vous adressiez. Est-ce que c'était le chef de cette commission ou

  3   bien est-ce que vous vous adressiez aux personnes qui détenaient les

  4   prisonniers en question?

  5   Réponse: Exclusivement avec les personnes qui étaient habilitées par la

  6   partie adverse à agir au nom de la commission.

  7   Il y avait des noms différents. Par exemple, la commission serbe

  8   s'appelait la commission centrale, alors que la commission croate

  9   s'appelait la commission pour l'échange des prisonniers de guerre. Donc

 10   uniquement avec leur commission.

 11   Question: Vous n'aviez donc pas de contacts avec les personnes qui avaient

 12   capturé les prisonniers?

 13   Réponse: Non, non, non, on n'avait pas de contacts ni d’accès aux

 14   installations de détention, aux camps, à la prison, etc..

 15   Question: Pendant la guerre, est-ce qu’il y avait un quartier général où

 16   siégeait la commission d'Etat?

 17   Réponse: Pendant toute la guerre, le quartier général de la commission

 18   d'Etat était à Sarajevo.

 19   Question: Y avait-il des bureaux locaux, des bureaux régionaux qui

 20   relevaient de la commission d'Etat?

 21   Réponse: Oui, par exemple, pendant la deuxième partie de la guerre, c'est-

 22   à-dire de 1993 jusqu'à la fin de la guerre, eh bien, il y avait des

 23   services, plusieurs services de la commission d’Etat qui ont été mis en

 24   place dans diverses villes qui étaient contrôlés par la commission d’Etat

 25   Gorazde, Tuzla, Bihac, Mostar, Travnik.


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  1   Question: Combien y avait-il de personnes qui travaillaient au sein de la

  2   commission d'Etat en 1992, lorsque vous avez commencé à y travailler?

  3   Réponse: Je crois que pendant cette période il y avait de 12 à 15

  4   personnes qui travaillaient au sein de la commission d'Etat.

  5   Question: En 1992, quand vous avez commencé, est-ce que dans la

  6   commission, ainsi que tous ses employés au bureau de Sarajevo, il y avait

  7   déjà des gens qui travaillaient ailleurs?

  8   Réponse: A l'époque, au quartier général de la commission de Sarajevo, il

  9   y avait environ 7 personnes qui y travaillaient. Et il y avait certaines

 10   personnes qui travaillaient sur le terrain dans les villes que j'ai

 11   mentionnées, ainsi qu'à Trnovo par exemple, à Ilidza, Hadzici, à Konjic,

 12   ainsi que dans quelques autres villes je crois.

 13   Question: Et si on examine la partie bosnienne de la commission d’Etat

 14   chargée de la localisation des personnes disparues, est-ce que c'est le

 15   même nombre d'employés aujourd'hui que lorsque cette organisation a

 16   commencé son travail en 1992?

 17   Réponse: Actuellement, nous sommes 15 personnes qui sommes employées à

 18   temps plein au sein de la commission. D'autre part, nous faisons également

 19   appel à des bénévoles, à savoir à des gens qui travaillent pour la

 20   commission mais qui ne sont pas officiellement employés à temps plein par

 21   la commission.

 22   Question: Et actuellement sur les 15 employés combien d'entre eux

 23   travaillent au bureau de Sarajevo?

 24   Réponse: Sept, y compris moi-même.

 25   Question: Est-ce que vous avez toujours travaillé au bureau de Sarajevo,


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  1   pour la commission?

  2   Réponse: A partir d'août 1992 jusqu'au jour d'aujourd'hui.

  3   Question: Est-ce que le bureau maintient des registres de personnes

  4   exhumées, de personnes portées disparues?

  5   Réponse: Oui.

  6   Question: Pendant la guerre, quels types de registres ou de dossiers

  7   étaient tenus de manière générale, au sujet des prisonniers de guerre, des

  8   personnes disparues?

  9   Réponse: Concrètement, nos premières sources, enfin si vous parlez de

 10   dossiers, je l'ai déjà dit dans le cadre de mes remarques liminaires, nous

 11   avons consigné donc les noms des personnes privées de leur liberté en

 12   raison du conflit, des prisonniers de guerre.

 13   Nous avons également consigné le nom des personnes blessées, tuées et

 14   aussi des personnes portées disparues pendant la guerre.

 15   Et pendant la guerre, d'autres autorités, telles que le ministère de la

 16   Santé, se sont occupées des dossiers des personnes tuées, alors que, nous,

 17   nous avons continué à enregistrer les noms des personnes privées de leur

 18   liberté, des prisonniers de guerre, et aussi des personnes qui ont disparu

 19   pendant le conflit.

 20   Enfin, après la signature des accords de paix de Dayton, à partir de cette

 21   date, nous avons également tenu les dossiers des personnes exhumées

 22   puisqu'il est devenu possible de faire des exhumations sur le territoire

 23   ennemi après les accords de Dayton.

 24   Pendant la guerre, nous n'avions pas accès aux localités où des civils ou

 25   bien des soldats ont été tués. Donc lorsque c'était sous territoire


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  1   ennemi, on ne pouvait pas y accéder.

  2   Question: Depuis la fin de la guerre, est-ce que vous tenez toujours des

  3   registres de personnes portées disparues?

  4   Réponse: Oui.

  5   Question: Est-ce qu'il s'agit de dossiers qui se trouvent au bureau

  6   central de votre organisation ou bien est-ce que ce sont des dossiers dont

  7   certaines parties se trouvent dans les bureaux régionaux de votre

  8   organisation?

  9   Réponse: Les dossiers étaient centralisés, c'est-à-dire que toutes les

 10   informations viennent à notre bureau central de Sarajevo. D'autre part,

 11   dans certaines régions, il y a également des dossiers relatifs aux

 12   personnes portées disparues, mais aux personnes portées disparues dans

 13   cette région en question.

 14   Par exemple, notre bureau à Tuzla au nord de Sarajevo tient les dossiers

 15   de personnes qui sont portées disparues sur le territoire de la Republika

 16   Srpska, c'est à côté de Srebrenica, Zvornik Bijeljina, etc.. Et puis, il y

 17   a d'autres bureaux qui tiennent des dossiers qui ont trait à des personnes

 18   qui habitaient dans la région.

 19   Mais, au bout du compte, toutes les informations sont communiquées à notre

 20   bureau de Sarajevo.

 21   M. Smith (interprétation): Monsieur le Président, peut-être le moment est-

 22   il bien venu pour faire une pause.

 23   M. le Président (interprétation): Avant d'observer la pause, je ne sais

 24   pas s'il est nécessaire pour nous de lire tous les dossiers juridiques qui

 25   viennent des tribunaux de Sarajevo, tous les dossiers de ce genre. En tout


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  1   cas, ils sont tous en BCS. Je remarque qu'à l’exception de certains

  2   documents, des documents 8 et 9, nous n'avons pas de traduction.

  3   M. Smith (interprétation): A ce stade, Monsieur le Président, nous

  4   n'envisageons pas de demander le versement au dossier de ces dossiers.

  5   Il est possible que nous ayons une interprétation différente de la défense

  6   de ces documents et, à ce moment-là, il y a, de toute façon, une

  7   traduction résumée qui est fournie. Mais, à l’heure actuelle, nous ne

  8   souhaitons pas verser ces documents au dossier.

  9   M. le Président (interprétation): Bien, tant que vous avez bien compris

 10   qu’on ne nous a pas remis le mauvais dossier, parce que cela arrive et

 11   c’est cela qui m’inquiétait.

 12   Nous allons maintenant lever l’audience jusqu'à 14 heures 30.

 13   (L'audience, suspendue à 13 heures, est reprise à 14 heures 31.)

 14   M. le Président (interprétation): C'est à vous Monsieur Smith.

 15   M. Smith (interprétation): Monsieur Masovic avant la pause vous avez parlé

 16   des données concernant les prisonniers de guerre qui se trouvaient

 17   centralisées dans un bureau à Sarajevo, le bureau centralisé. Vous avez

 18   aussi dit que les bureaux régionaux ont été organisés de façon permanente

 19   en 1993. Et vous avez dit qu'en 1992 vous croyez qu'un certain nombre de

 20   personnels de cette commission de l'Etat travaillaient sur le terrain dans

 21   un certain nombre d'endroits, comme par exemple Trnovo.

 22   M. Masovic (interprétation): Oui.

 23   Question: Pendant cette période au cours de 1992, donc à partir du début

 24   de la guerre en Bosnie, par exemple avril 1992 jusqu'à la fin, vous

 25   receviez des informations des membres de la commission travaillant sur le


Page 4224

  1   terrain concernant les prisonniers de guerre et les personnes disparues?

  2   Réponse: Oui, en effet nous avons reçu ces informations de façon continue

  3   à partir du mois d'avril 1992, donc de toute la Bosnie-Herzégovine et en

  4   particulier de ce département, le département régional, municipal. La

  5   commission municipale se trouvant à Trnovo.

  6   Question: Et ces commissions régionales, étaient-elles obligées d'envoyer

  7   leurs informations au bureau de Sarajevo?

  8   Réponse: Oui, à part leurs documentations, ils étaient obligés d'envoyer

  9   ces documents, toutes les informations dont ils disposaient concernant

 10   l'échange de prisonniers de guerre à cette commission centrale, le

 11   quartier général de la commission se trouvant à Sarajevo.

 12   Question: Concernant les données, les informations concernant les

 13   exhumations et les personnes disparues, est-ce qu'on vous a demandé

 14   récemment, est-ce que le Bureau du Procureur vous a demandé récemment de

 15   faire un résumé de ces matériaux, de ces documents que vous aviez dans

 16   votre bureau à Sarajevo?

 17   Réponse: Oui.

 18   Question: Est-ce que vous avez aujourd'hui sur vous le résumé de ces

 19   documents?

 20   Réponse: Oui.

 21   Question: Concernant les exhumations, pourriez-vous dire à la Chambre quel

 22   est le genre de documents dont vous disposiez?

 23   Réponse: Il faut dire tout d'abord que les exhumations ont un lien avec

 24   les statuts des personnes portées disparues. Au début de mon témoignage,

 25   j'ai dit que malheureusement aujourd'hui, huit années après le début de la


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  1   guerre, presque toutes les personnes disparues, portées disparues ou

  2   plutôt toutes les personnes sont malheureusement mortes, tuées et elles

  3   ont été tuées au cours du conflit qui s'est déroulé dans la Bosnie-

  4   Herzégovine pendant la guerre. Donc nous recueillons ces informations

  5   depuis 1992. Déjà en 1992 nous avons noté les premières disparitions, les

  6   premièrs meurtres de civils et de soldats.

  7   Et dans la période après la guerre, après l'accord de Banja Luka de 1996

  8   concernant des exhumations entre les entités, nous nous sommes rendus sur

  9   le territoire qui avait été tenu par les forces Serbes de Bosnie et les

 10   Croates de Bosnie pendant la guerre, et nous avons commencé à travailler

 11   sur les exhumations de fosses communes en trouvant des individus, en

 12   localisant des individus, des corps d'individus qui avaient été

 13   enregistrés chez nous comme des personnes disparues.

 14   Question: Donc par rapport aux données dont vous disposez, aux documents

 15   que vous avez, pouvez-vous nous dire quel genre de document vous

 16   conservez? Des documents policiers, juridiques, de quel genre de document

 17   s'agit-il?

 18   Réponse: Eh bien, nous avons une base de données informatiques qui

 19   contient un certain nombre d'éléments de base concernant la personne

 20   portée disparue ou bien s'il se trouve que le corps de cette personne a

 21   été exhumé, concernant son exhumation.

 22   Il s'agit de son nom, de son prénom, du nom de son père, l'année de

 23   naissance, le lieu de naissance, le lieu d'habitation, la date et la place

 24   de la disparition de la personne concernée et si cette personne avait été

 25   enregistrée auprès du comité de la Croix-Rouge internationale. Eh bien


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  1   dans notre base de données, on peut trouver aussi le numéro

  2   d'immatriculation ou le code sous lequel cette personne avait été

  3   enregistrée auprès du comité international de la Croix-Rouge, ainsi qu'un

  4   certain nombre d'autres informations où l'on note les documents qui ont

  5   précédé la disparition de la personne. Et si la personne a été trouvée ou

  6   bien si elle a été exhumée, cette donnée va être aussi entrée dans la base

  7   de données.

  8   A part cela, dans nos archives il existe un certain nombre de rapports

  9   écrits, que pendant toute la période de la guerre et dans la période après

 10   la guerre nous recevions de ce département. Il s'agit donc de nos

 11   commissions à nous, mais aussi d'autres organes d'information, d'organes

 12   politiques de renseignements de police, de militaires ou bien de

 13   présidence de guerre, de municipalité, de la Croix-Rouge internationale,

 14   etc..

 15   Question: Est-ce que vous avez aussi des documents juridiques concernant

 16   la conduite de ces exhumations?

 17   Réponse: Une fois par an, quand on a terminé le processus des exhumations

 18   prévues pour l'année, les tribunaux émettent des rapports annuels

 19   concernant les exhumations qui ont été conduites au cours de l'année

 20   précédente.

 21   Question: Quand on exhume les corps des civils bosniens musulmans, est-ce

 22   qu'il y a des membres des commissions qui participent à ces exhumations?

 23   Réponse: Toujours, sans aucune exception, des membres de la commission

 24   d'Etat sont présents à chaque exhumation, qu'il s'agisse du bureau central

 25   de Sarajevo ou bien des commissions au niveau régional, Gorazde, Travnik,


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  1   Tuzla, Zenica, etc..

  2   Question: Est-ce qu'il faut que ces membres de commission fassent un

  3   rapport intérimaire pour des besoins internes concernant le résultat de

  4   l'exhumation et concernant la conduite, le processus de l'exhumation?

  5   Réponse: Oui bien sûr. On y consigne le nom du lieu où l'exhumation s'est

  6   déroulée ainsi que du lieu-dit, si c'est possible. Aussi, s'il est

  7   possible, on indique les cotes de la localité, le type du tombeau trouvé,

  8   c'est-à-dire jusqu'à 5 victimes, ou bien d'une fosse commune, jusqu'à 5

  9   victimes ou plus.

 10   Si l'on peut avoir des suppositions quant à l'identité des victimes, on va

 11   noter ces premières informations concernant l'identité supposée. Ensuite,

 12   ce sont les tribunaux qui vont établir l'identité définitive. En tout cas,

 13   cette identification préliminaire va nous permettre de savoir quels

 14   membres de famille nous devons éventuellement contacter pour leur en

 15   parler.

 16   Question: Est-ce que le gouvernement bosniaque vous demande de détenir des

 17   documents, des informations concernant une documentation concernant ces

 18   personnes disparues et les exhumations?

 19   Réponse: Oui, nous sommes obligés de les faire et d'informer le

 20   gouvernement une fois par an concernant les efforts fournis pour trouver

 21   les personnes disparues et les exhumations.

 22   Question: Concernant les exhumations conduites dans la municipalité de

 23   Foca, je voudrais vous montrer un document, une carte. Il s'agit du

 24   document 240/1, il s'agit d'un numéro d'identification fourni par le

 25   Procureur.


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  1   Peut-on le placer sur le rétroprojecteur?

  2   M. le Président (interprétation): Pendant que vous faites cela, je

  3   voudrais savoir si nous allons entendre quoi que ce soit concernant les

  4   procédures qui s'ensuivent pour confirmer l'identité présumée d'une

  5   personne.

  6   M. Smith (interprétation): Oui, monsieur le Président.

  7   Monsieur Masovic, si vous regardez le document qui porte le numéro

  8   d'identification 240/1 et qui se trouve à côté de vous sur le

  9   rétroprojecteur, reconnaissez-vous ce document?

 10   Réponse: Oui, il s'agit d'une carte avec les frontières d'avant la guerre

 11   de la municipalité de Foca où sont marquées les localités où des

 12   exhumations avaient été conduites, se trouvant à 10 endroits à peu près

 13   différents. Donc ces 10 localités différentes correspondent aux

 14   communautés locales, une ou plusieurs, ainsi que le numéro de localité des

 15   endroits où les exhumations avaient été conduites ainsi que le nombre de

 16   victimes trouvées dans ces localités.

 17   Question: Est-ce que cette carte avait été élaborée par les personnels de

 18   votre bureau?

 19   Réponse: Oui, cette carte a été préparée par les personnels de la

 20   commission étatique avec son siège à Sarajevo.

 21   Question: Est-ce qu'on peut laisser cette carte sur le rétroprojecteur. Je

 22   vais vous demander de regarder le document suivant qui porte la cote 240/1

 23   (sic), il s'agit d'un index concernant la carte.

 24   Question: Est-ce que vous reconnaissez ce document?

 25   Réponse: Oui, je reconnais ce document.


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  1   Question: Pourriez-vous nous expliquer très brièvement de quelle façon il

  2   existe un rapport entre ce document et la carte?

  3   Réponse: Ce document montre 10 localités différentes sur lesquelles des

  4   exhumations avaient été conduites, des exhumations de victimes venant de

  5   la municipalité de Foca pendant la période entre 1996 jusqu'à l'an 2000.

  6   Je vous ai déjà dit qu'il s'agit du numéro d'ordre de la localité, ensuite

  7   le numéro assigné au village ou à la ville où cette exhumation a eu lieu

  8   ainsi que le numéro du site, s'il est possible de le donner, ensuite le

  9   nombre de corps trouvés, le nombre de corps identifiés et le nombre de

 10   corps non identifiés. Ce partage est basé sur le critère de communauté

 11   locale en respectant ces divisions.

 12   Question: Est-ce que vous avez supervisé la préparation de cet index, de

 13   ce tableau?

 14   Réponse: Oui, c'est nous qui l'avons élaboré et nous l'avons fait comme

 15   cela vient de m'être présenté.

 16   M. le Président (interprétation): Je suis désolé d'insister là-dessus mais

 17   quand on dit identifier, est-ce qu'il s'agit des personnes identifiées de

 18   façon provisoire, de façon présumée identifiée, ou bien des

 19   identifications finales?

 20   M. Smith (interprétation): Identification finale, définitive, Monsieur le

 21   Président. Il y a une autre liste 240/3 qui parle des identifications

 22   entre 375 et 430 corps. Et ceci va expliquer de quelle façon ces

 23   identifications se font.

 24   M. le Président (interprétation): Je voulais juste savoir s'il s'agissait

 25   des identifications provisoires ou bien, c'est-à-dire que j'étais un


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  1   inquiet par cette phrase provisoire.

  2   M. Smith (interprétation): Je vais essayer de clarifier ceci avec le

  3   témoin mais il s'agit d'une identification définitive.

  4   Monsieur Masovic, pourriez-vous regarder le document qui porte la cote

  5   240/3, reconnaissez-vous ce document?

  6   M. Masovic (interprétation): Oui.

  7   Question: Que montrent ces documents?

  8   Réponse: Ce document est un tableau des victimes identifiées sur le

  9   territoire de la municipalité de Foca donc des victimes exhumées et

 10   identifiées. Il s'agit d'une liste de 375 victimes identifiées, exhumées

 11   entre 1996 et l'an 2000 sur le territoire de la municipalité de Foca.

 12   Question: Est-ce que je peux vous demander de nous expliquer brièvement de

 13   quelle façon a-t-on pu identifier ces corps, quels étaient les processus

 14   d'identification, quels efforts avaient été faits pour identifier ces

 15   corps?

 16   Réponse: L'identification des victimes est faite par une commission

 17   séparée à la tête de laquelle se trouve un juge du tribunal cantonal. Donc

 18   les membres de cette commission sont les juges ainsi qu'un médecin légiste

 19   ainsi que les membres du service de criminologie et des techniciens en

 20   médecine légiste.

 21   Dans ce cas-là, l'identification est faite sur la base de la

 22   reconnaissance par les membres de la famille qui venaient à la morgue et

 23   qui reconnaissaient les objets personnels, des vêtements, des chaussures

 24   ou éventuellement des fractures ; des éléments particuliers dont les

 25   familles avaient connaissance avant la mort. Et donc un pourcentage assez


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  1   haut de sexe féminin avait été identifié alors qu'en moyenne, il n'y a que

  2   12 % de femmes parmi les victimes. Et on a pu constater que sur le

  3   territoire de Foca, le pourcentage des femmes identifiées, exhumées, monte

  4   à 40 %, c'est-à-dire qu'il s'agit de 145 victimes, femmes, identifiées.

  5   Question: Donc est-ce que ces identifications, les identifications de ces

  6   375 victimes sont définitives et non pas provisoires?

  7   Réponse: Oui, il s'agit de victimes identifiées. Les identifications sont

  8   corroborées par les certificats émis par des médecins légistes.

  9   Question: Merci. Monsieur l'huissier, nous en avons terminé avec ce

 10   document. Le document placé sur le rétroprojecteur. Et le document que

 11   vous utilisez pour élaborer ce document, s'agit-il des mêmes documents que

 12   ceux dont vous avez déjà parlé tout à l'heure?

 13   Réponse: Oui, oui, bien sûr.

 14   Question: Qui vous donne ces documents de base pour élaborer ce résumé?

 15   Réponse: Cette documentation vient de la commission de l'Etat. Nos sources

 16   sont des rapports de police, des tribunaux, ainsi que des rapports des

 17   médecins légistes.

 18   Question: Et peut-être aussi des rapports venant de votre personnel, des

 19   personnes faisant partie de votre bureau qui ont participé aux

 20   exhumations.

 21   Réponse: Oui, se sont nos rapports internes et qui avaient été élaborés

 22   par les membres de la commission de l'Etat et qui participent aux

 23   exhumations, aux autopsies et aux identifications des victimes.

 24   Question: Pendant combien de temps après la fin de l'exhumation, avez-vous

 25   commencé à recevoir ces documents qui représentent la source de ces


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  1   résumés?

  2   Réponse: Ceci dépend surtout du nombre de victime exhumées.

  3   S'il s'agit d'une fosse commune où on peut trouver plusieurs centaines de

  4   victimes, eh bien cette période va être plus longue, elle peu durer

  5   jusqu'à 30 jours. S'il s'agit des fosses d'une taille moins importantes,

  6   eh bien, ces rapports vont arriver le jour même de la conduite des

  7   exhumations.

  8   Question: Par rapport à la municipalité de Foca, outre le document reçu

  9   par votre bureau, est-ce que vous-même vous avez participé à certaines

 10   exhumations qui se sont déroulées sur le territoire de la municipalité de

 11   Foca?

 12   Réponse: Oui, j'ai participé en tant que chef d'équipe de cette commission

 13   d'Etat à un certain nombre d'exhumations qui se sont déroulées sur le

 14   territoire de la municipalité de Foca.

 15   Question: Concernant ce document, le document que votre bureau reçoit et

 16   qui ont un lien avec des exhumations, est-ce que vous examinez ces

 17   documents quand ils arrivent dans votre bureau, ou bien est-ce qu'on les

 18   met dans les archives sans que vous ne les voyiez?

 19   Réponse: Tous les rapports concernant les exécutions je les examine et

 20   c'est uniquement après ma vérification qu'on les rentre, qu'on rentre un

 21   certains nombre d'informations venant de ces documents dans notre base de

 22   données informatiques.

 23   Question: Et pour préparer votre témoignage d'aujourd’hui, est-ce que vous

 24   avez examiné ces documents de source, utilisés pour élaborer ces résumés?

 25   Réponse: Oui, nous avons utilisé des rapports, des rapports des tribunaux


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  1   juridiques ainsi qu'un certain nombre de déclarations de témoins qui ont

  2   participé éventuellement aux exhumations, ensuite les rapports de médecins

  3   légistes, des présidences de guerre et des commissions locales.

  4   Question: Je vais vous poser un certain nombre de questions concernant le

  5   résultat des exhumations qui ont été conduites dans la municipalité de

  6   Foca. Combien de corps ont été exhumés?

  7   Réponse: Sur 156 localités différentes, qui se trouvent dans 10 groupes de

  8   localités, ont été exhumées en totalité, 430 victimes pendant la période

  9   allant de 1996 jusqu'à l'an 2000.

 10   Question: Vous avez dit que 375 corps ont été identifiés, ce qui veut dire

 11   que 55 victimes n'ont toujours pas été identifiées?

 12   Réponse: Oui, malheureusement l'identité de 55 n'a toujours pas été

 13   établie.

 14   Question: Sur ces 375 victimes identifiées, est-ce qu'il y a eu des

 15   victimes identifiées en temps que ex-détenus du KP Dom à Foca?

 16   Réponse: Oui, dans deux cas nous avons constaté qu'il s'agissait de

 17   personnes qui avaient été vues pour la dernière fois au KP Dom de Foca.

 18   Question: Quels sont les noms de ces deux individus?

 19   Réponse: Murat Srneta et Halid Konjo.

 20   Question: Ces deux personnes... On fait référence à ces deux personnes

 21   dans la pièce du Procureur P55.2. Il s'agit du tableau 13 dans le dossier,

 22   donc il s'agit du rapport du Tribunal de Gorazde concernant ces

 23   exhumations. Ils viennent de la pièce à conviction 55/2, sauf que

 24   maintenant nous disposons d'une traduction plus complète de ces rapports.

 25   M. le Président (interprétation): Merci.


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  1   M. Smith (interprétation): Etiez-vous présent sur le site au moment de

  2   l'exhumation de ces deux ex-détenus, Murat Srneta et Halid Konjo?

  3   M. le Président (interprétation): Excusez-moi, Monsieur Smith, mais je ne

  4   vois pas où se trouve ce tableau n°13, ou l'intercalaire n°13?

  5   M. Smith (interprétation): Dans la partie du dossier, Monsieur le

  6   Président. C'est le dernier intercalaire.

  7   M. le Président (interprétation): Ecoutez cela ne me paraît pas clair,

  8   mais en tout cas vous dites qu'il s'agit de la pièce 55/2?

  9   M. Smith (interprétation): Oui, c'est bien cela. Ce document se trouve

 10   dans le dossier qui se trouve sous vos yeux.

 11   M. le Président (interprétation): Merci.

 12   M. Smith (interprétation): Pourriez-vous montrer sur la carte qui se

 13   trouve devant vous où ont été trouvés ces deux corps, le corps de Srneta

 14   Murat et de Halid Konjo?

 15   M. Masovic (interprétation): Oui, je suis en mesure de vous le montrer, de

 16   vous montrer l'endroit exact où ont été exhumés les corps de ces deux ex-

 17   détenus du KP Dom de Foca.

 18   Question: Et vous êtes en train de montrer le village de Previla.

 19   Réponse: Le village de Previla au nord de la ville de Foca.

 20   Question: Monsieur le Président, il s'agit du groupe 2 sur la carte. Est-

 21   ce que ces deux corps se trouvaient à côté d'autres corps?

 22   Réponse: Oui, en réalité, il s'agissait d'une fosse commune dans laquelle

 23   nous avons trouvé 7 victimes.

 24   Question: Et ces victimes ont été exhumées quand?

 25   Réponse: Je pense qu'il s'agit du mois de novembre 1997.


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  1   Question: Sur la base de quelles informations vous et les officiels, les

  2   autorités, vous êtes-vous basé pour vous rendre précisément à ce temps-là

  3   pour retrouver ces corps?

  4   Réponse: Eh bien, un Serbe de Bosnie et de la région est en contact avec

  5   la police de Gorazde. Il a découvert qu'à côté de sa maison circulaient un

  6   groupe d'à peu près... de 12 prisonniers en tout, et que ce groupe avait

  7   été escorté et que peu de temps après il a entendu des coups de feu.

  8   Question: Est-ce que cette personne a dit à quel moment cela s'est

  9   produit, quelle année, quelle date?

 10   Réponse: C'est possible que cela ait été dit à la police de Gorazde mais

 11   moi je ne dispose pas de cette information en tout cas.

 12   Question: Pourriez-vous nous décrire les sites de l'exhumation quand vous

 13   êtes arrivé là-bas? Et pouvez-vous nous aussi dire aussi dans quel état se

 14   trouvait les corps?

 15   Réponse: Oui, nous avons emprunté un chemin de bois, à travers un bois

 16   vers Previla et à peu près à une dizaine de mètres de cet endroit dans...,

 17   il y a un ruisseau asséché, qui s'assèche très souvent. D'ailleurs il n'y

 18   a de l'eau dans ce ruisseau uniquement au printemps et vers la fin de

 19   l'automne. Donc dans cette région à peu près à cet endroit qui a à peu

 20   près 3 mètres de largeur et 10 mètres de longueur, c'est-à-dire 30 mètres

 21   carrés en tout, nous avons trouvé des restes de squelettes de 7 victimes

 22   en tout. C'est le tribunal et les membres du Tribunal de Gorazde qui y ont

 23   participé et qui ont aidé les experts en médecine légale et criminologique

 24   de Foca, avec l'aide d'un expert en criminologie des Etats-Unis.

 25   Donc, ces squelettes n'étaient pas complets parce que l'eau avait lavé un


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  1   certain nombres d'os, des os avaient été éparpillés. Ce sont probablement

  2   des animaux qui les avaient emportés, puisque 5 années sont passées depuis

  3   la liquidation de ces victimes.

  4   Question: Est-ce que, d'après cette scène, vous pouviez arriver à une

  5   conclusion concernant les circonstances de leur mort?

  6   Réponse: Par rapport à ce qui avait été dit par ces témoins, par rapport

  7   aux dires des experts, des experts en criminologie, il apparaît qu'ils ont

  8   été fusillés par un peloton d'exécution.

  9   Question: Est-ce que des balles ont été trouvées sur le site?

 10   Réponse: Je ne me souviens pas de cela, je ne sais pas si des balles ont

 11   été trouvées sur le site même, mais, en tout cas, si tel est le cas, cela

 12   est consigné dans le rapport de police qui avait été élaboré par la police

 13   de Gorazde. Ce sont les policiers qui se sont occupés de cette partie-là

 14   du travail.

 15   Question: Est-ce que ces corps avaient été en surface ou bien est-ce

 16   qu'ils avaient été enterrés?

 17   Réponse: Il était évident que ces corps n'avaient pas été enterrés, que la

 18   liquidation s'était déroulée à cet endroit même, c'est-à-dire dans le lit

 19   du ruisseau et que les corps sont restés dans le lit du ruisseau qui

 20   s'était asséché.

 21   Je suis arrivé à cette conclusion car des parties du squelette avaient été

 22   retrouvées aussi bien dans la boue que dans le sable. Et il y avait aussi

 23   des cailloux qui ont recouvert des parties des os, probablement l'eau qui

 24   avait amené des cailloux.

 25   Question: Halim Konjo et Murat Srneta ont-ils été identifiés?


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  1   Réponse: Halim Konjo a été identifié par son épouse. Murat Srneta a été

  2   identifié par son beau-père, c'est-à-dire le père de sa femme.

  3   Question: Donc, les deux hommes sont Musulmans de Bosnie?

  4   Réponse: Oui, ils sont tous les deux Musulmans de Bosnie.

  5   Question: Et c'est à Gorazde qu'un rapport a été établi, rapport du

  6   procès-verbal d'exhumation. Peut-on dire qu'une carte quelconque,

  7   matricule d'identification serait retrouvée sur ce site-là pour Sulejman

  8   Celik?

  9   Réponse: La carte d'identification de Sulejman Celik a été retrouvée à une

 10   profondeur d'environ, si je me souviens bien, 20 à 30 centimètres. Lorsque

 11   nous avons recherché plus en profondeur, nous avons retrouvé des menus os,

 12   des phalanges de ses mains et de ses pieds. Et lorsque nous avons retrouvé

 13   cette carte d'identification, il s'agissait bien d'une carte du membre de

 14   la confédération des syndicats de Bosnie-Herzégovine, le nom du membre

 15   étant Sulejman Celik.

 16   Question: Sulejman Celik est-il identifié comme étant une personne

 17   disparue?

 18   Réponse: Oui, il a été identifié par cette commission d'Etat comme étant

 19   l'une de ces personnes considérées comme portées disparues.

 20   Question: Ces 3 personnes qui ont été identifiées, eh bien, déjà parlant

 21   de cette affaire, il a été dit que ces 3 personnes ont été sélectionnées

 22   en septembre 1992 pour faire partie du groupe parti pour la cueillette des

 23   prunes?

 24   M. le Président (interprétation): Faut-il avoir une carte de membre de

 25   syndicat pour aller à la cueillette des prunes? Chose étrange de les voir


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  1   garder ces cartes d'identité pendant qu'ils étaient en détention.

  2   M. Smith (interprétation): Sur 375 corps identifiés, vous avez mentionné

  3   qu'il y a eu bon nombre de femmes. Pouvez-vous nous dire combien de femmes

  4   il y avait dans ces groupes-là?

  5   M. Masovic (interprétation): Oui. Environ 30% du total des corps exhumés

  6   sont représentés par des femmes. Par conséquent, il s'agit vraiment d'un

  7   pourcentage fort élevé par rapport à la moyenne des femmes exhumées. Nous

  8   avons donc exhumé environ 6.500 victimes et là, on peut dire que sur le

  9   total de 6.500 environ 20% revient aux femmes. Mais à Foca, il y avait 39%

 10   de femmes.

 11   Question: De quelle nationalité étaient les victimes?

 12   Réponse: Sur 375 victimes, 374 sont les Musulmans de Bosnie et dans un cas

 13   il s'agissait d'une femme qui serait d'origine du Monténégro, qui était

 14   mariée à un Musulman de Bosnie.

 15   Question: Comment s'appelait-elle?

 16   Réponse: Elle s'appelait Micunovic, nom de jeune fille Jelena, mais nom

 17   marital Srnja.

 18   Question: Où l'avez-vous identifiée?

 19   Réponse: Au numéro 309, pièce d'identification 240/3.

 20   Question: Pouvez-vous nous dire sur ce nombre de personnes identifiées,

 21   pouvez-vous nous dire de quelle nationalité il s'agissait?

 22   Réponse: Aux yeux de tout doute raisonnable, on peut présumer qu'il

 23   s'agissait toujours de Musulmans de Bosnie.

 24   Question: Comment supposez-vous tout cela, sur la base de quoi?

 25   Réponse: Ces victimes sont localisées dans les villages habités par les


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  1   Musulmans de Bosnie dans le cadre la municipalité de Foca, ne serait-ce

  2   qu'à en juger d'après leurs costumes, surtout des costumes de femmes. On

  3   peut toujours constater qu'il s'agissait d'un costume de femmes bosniennes

  4   et à en juger d'après les témoignages des personnes qui ont survécues aux

  5   liquidations et aux fusillades, on peut toujours conclure qu'il s'agissait

  6   de Musulmans de Bosnie, qu'il s'agissait de Bosnien.

  7   Question: Dans votre documentation, vous faites entrer aussi que 24 corps

  8   ont été exhumés dans le site de Ratina. Page 3, ligne 9, site 107.

  9   Monsieur le Président, il s'agit du document 240/1. Vous y êtes à la page

 10   3 de votre document, neuvième ligne, localité n°107.

 11   Réponse: Oui, il s'agit bien du site 107 de Ratina.

 12   Question: Ici, il est inscrit que 24 corps ont été exhumés mais qu'aucun

 13   de ces corps n'a été identifié. Vous êtes-vous rendu vous-même sur ce

 14   site?

 15   Réponse: Oui.

 16   Question: Pouvez-vous nous montrer sur cette carte où se situe ce site?

 17   (Le témoin montre le site sur la carte.)

 18   Pour le compte rendu d'audience, le témoin est en train de montrer le

 19   groupe de sites n°6.

 20   Quelles étaient les informations que vous avez tenues, les informations

 21   détenues par les autorités qui vous ont fait penser qu'il fallait se

 22   rendre sur ce site-là pour retrouver ces 24 corps?

 23   Réponse: Dans ce cas-là, il s'est agit d'une fusillade d'exécution massive

 24   ou une personne a survécu sur les victimes. Sur les victimes, il a été

 25   tiré avec des armes automatiques. Et au cours de la guerre, un des


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  1   employés du bureau qui est le mien, a pu contacter (sic) avec et l'autre

  2   l'a emmené justement sur le site de Ratina pour lui montrer le site, pour

  3   dire qu'il s'agissait de détenus.

  4   Question: D'où venaient-ils ces détenus? Que vous a-t-il dit?

  5   Réponse: Je ne sais pas si je peux être précis en répondant à cette

  6   question, mais il me semble qu'il s'agissait de détenus de Kalinovik qui à

  7   bord de deux camions ou de deux cars ont été emmenés jusqu'au site en

  8   question.

  9   Après quoi, l'un des véhicules, soit le camion ou le car, ont été arrêtés

 10   pour faire sortir du véhicule 25 détenus, y compris le témoin. C'est là où

 11   le témoin a vu l'exécution de ces détenus. L'autre camion a continué son

 12   chemin et nous n'avons pas jusqu'à maintenant encore localisé, non plus

 13   que retrouvé les victimes, c'est-à-dire le reste.

 14   Question: Vous a-t-il dit aussi si ces victimes étaient des Serbes, des

 15   Musulmans ou des Croates?

 16   Réponse: Il s'agit d'un témoin qui connaissait fort bien l'identité de

 17   toutes ces 24 victimes et c'est lui qui nous a dicté la liste ainsi

 18   établie par nous.

 19   Question: De quelle nationalité étaient ces victimes?

 20   Réponse: Ils étaient tous des Musulmans de Bosnie. Le témoin les

 21   connaissait, les avait connues avant.

 22   Question: A quel moment a-t-il dit qu'ils ont été liquidés.

 23   Réponse: Je ne détiens pas cette donnée-là mais l'employé de mon bureau,

 24   lui, quant à lui qui s'est rendu sur le site, disait qu'il était capable

 25   de nous dire également cette donnée-là. Il doit la connaître, autrement


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  1   dit.

  2   Quant à moi je ne peux dire qu'il s'agissait de l'année 1992 sans préciser

  3   plus en détail quoi que ceci.

  4   Question: Alors succinctement, pouvez-vous nous dire ce que vous avez vu

  5   lorsque vous vous êtes rendu sur ce site-là?

  6   Réponse: Environ à une distance de 50 ou 60 mètres en dessous de la route

  7   où nous avons arrêté notre véhicule, nous avons retrouvé les vestiges

  8   d'une étable. Ce n'était que les fondations en pierre, pierres en bloc et

  9   dans l'enceinte de ce qui devait être l'intérieur de cette étable se

 10   trouvait des tôles, des pièces de tôle au nombre de 25. Ces tôles-là sont

 11   anciennement des tonneaux en tôle et c'est tout ce que nous avons trouvé.

 12   Tout était évidemment sous la brousse, ronciers et herbes sauvages.

 13   Question: Sur 430 corps exhumés, pouvez-vous nous dire où ces gens-là

 14   résidaient avant? A Foca ou ailleurs?

 15   Réponse: Tous ou presque la totalité de ces gens-là, en 1992, habitaient

 16   les différentes localités de la municipalité de Foca. Nous avons procédé à

 17   des vérifications sur la base du recensement de la population de Bosnie-

 18   Herzégovine en 1991. Par conséquent, nous avons procédé selon ce que les

 19   membres de leur famille respective qui les ont identifiés, nous ont dit

 20   pour nous permettre d'établir la documentation aussi complète. Nous

 21   pouvons dire que l'écrasante majorité de ces gens-là venait de la

 22   municipalité de Foca.

 23   Question: Sur la base du procès-verbal d'exhumation, pouvez-vous nous dire

 24   si vous avez des conclusions auxquelles vous avez pu aboutir pour savoir

 25   où se trouvaient les sites où les corps ont été exhumés par rapport à leur


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  1   résidence?

  2   Réponse: Je n'ai pas très bien saisi cette question.

  3   Question: Est-ce que, sur la base des données ainsi recueillies, vous avez

  4   pu constater à quelle distance se trouvaient les sites où vous avez

  5   retrouvé les corps par rapport aux localités où résidaient les victimes?

  6   Réponse: Il s'agissait d'un site tout à fait abandonné, il s'agit d'une

  7   localité forestière, d'un site forestier, et je pense que toutes les

  8   victimes ont été emmenées très loin de leurs maisons respectivement, mais

  9   je peux croire, toujours assurer, que ces gens-là étaient résidents de la

 10   municipalité de Foca.

 11   Question: Maintenant, nous disons qu'il s'agit d'une grande majorité de

 12   gens qui ont été exhumés et qui étaient des anciens résidents de Foca.

 13   Pouvez-vous faire une conclusion pour dire qu'ils ont été exhumés près de

 14   leurs maisons respectives, près de Foca, ou loin de leurs maisons?

 15   Réponse: Ils ont tous été exhumés loin de la municipalité de Foca, mais il

 16   y en a qui ont été exhumés non loin de leur lieu de résidence. Il y en a

 17   qui ont été exhumés sur leurs terres, dans leur domaine, non loin de leurs

 18   maisons familiales et nous avons pu conclure comme quoi, probablement, ces

 19   gens-là étaient restés chez eux, sur leurs terres, sans avoir peur de se

 20   faire tuer. Maintenant, malheureusement, on ne peut que constater qu'ils

 21   ont eu tort. Par conséquent, dans la majeure partie de ces hameaux, ces

 22   gens-là ont été retrouvés non loin de leurs maisons, près de leurs

 23   étables, sur leurs terres. En général, je parle de ces parties de la

 24   municipalité de Foca où les Musulmans de Bosnie-Herzégovine sont en

 25   écrasante majorité.


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  1   Question: D'après les données que vous détenez, c'est-à-dire d'après vos

  2   registres et informations, peut-on dire qu'il y a une période pendant

  3   laquelle on pourrait dire que toutes ces personnes ont été tuées ou bien

  4   sont mortes?

  5   Réponse: Oui, pour la majeure partie de ces gens-là, on peut dire qu'ils

  6   ont été tués dans l'intervalle d'avril à septembre 1992.

  7   Question: Et quelle était le plus souvent la cause de la mort?

  8   Réponse: Pour la plupart des cas, la cause de la mort sont les blessures

  9   perforantes qui leur ont été faites avec des armes automatiques.

 10   Question: Sur la base des connaissances qui sont les vôtres et de vos

 11   procès-verbaux, pourrez-vous dire quel est le pourcentage de ces gens-là

 12   qui ont été exécutés?

 13   Réponse: Il est difficile de le dire maintenant, mais parlons en

 14   pourcentage pour dire qu'environ 90% du total de ces gens-là ont été

 15   victimes des exécutions de masse.

 16   Question: Et comment, pour ainsi dire, pouvons-nous dire approximativement

 17   que les 10% restants de ces victimes ont trouvé la mort d'après vos

 18   procès-verbaux?

 19   Réponse: Je peux parler de l'ensemble de la Bosnie-Herzégovine, il n'y a

 20   pas que la municipalité de Foca, pour dire que différents étaient les

 21   moyens de liquidation. Les médecins légistes en ont parlé. Il s'agissait

 22   de fusillades moyennant armes automatiques, mais d'autres gens ont été

 23   liquidés à bout portant, le canon de l'arme leur étant porté à la nuque ou

 24   sous la gorge ou au niveau de la tête. Ensuite, nous avons trouvé des cas

 25   où les blessures mortelles ont été apportées de sorte que les victimes ont


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  1   été égorgées.

  2   Question: Excusez-moi, Monsieur Masovic, peut-être vous pouvez vous

  3   limiter à la municipalité de Foca, pour parler des 10% restant du total

  4   des victimes sur vos registres, quelle était la cause de leur mort?

  5   Réponse: Presque pour tous les cas, sauf évidemment quelques cas où une

  6   mort naturelle a été constatée par le médecin légiste, dans la majeure

  7   partie des cas la mort a été causée par une blessure causée par une arme

  8   automatique.

  9   Question: Vous avez également inscrit dans votre registre 240/1 que 9

 10   corps ont été exhumés sur le site intitulé Mazoca. Il s'agit de la page 5,

 11   lignes 10 et 11. Vous êtes-vous rendu vous-même sur ce site?

 12   Réponse: Oui, je me suis rendu sur ce site-là. Il s'agit du site de Mazoca

 13   où 2 corps ont été exhumés. Je m'excuse, il s'agit évidemment des numéros

 14   de site 91 et 92 que nous avons remis ainsi à la commission d'Etat, à

 15   Masoca I: 9 victimes, à Mazoca II: 2 victimes, et j'étais présent moi-même

 16   à ces exhumations.

 17   Question: Qu'avez-vous vu de particulier sur ce site où l'on a retrouvé 9

 18   victimes, très brièvement s'il vous plaît?

 19   Réponse: A Masoca I, il s'agissait de 9 corps dans une fosse commune en

 20   plein verger. Après autopsie, il a été constaté que tous ont été fusillés.

 21   Et après identification des victimes, on a constaté qu'il s'agissait des

 22   membres de la famille nommée Rikalo.

 23   Pour ce qui est du site Mazoca I, premier site, 2 parmi ces victimes

 24   étaient des femmes. A Mazoca II, les victimes ont été exhumées au pied

 25   d'un arbre, je crois que c'était un prunier. Il s'agit de deux hommes qui


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  1   ont été enterrés ensemble. Sur leur corps, une pièce de tôle étant jetée,

  2   tôle qui devait témoigner d'un reste d'une voiture, d'une carrosserie

  3   quelconque.

  4   Question: De quelle nationalité étaient ces deux personnes qui ont été

  5   ainsi exhumées?

  6   Réponse: Tous ont été identifiés et tous étaient des Musulmans de Bosnie.

  7   Question: Venaient-ils du même village de Mazoca?

  8   Réponse: Oui, c'étaient tous des habitants du village de Mazoca d'avant-

  9   guerre qui sont restés chez eux.

 10   Question: Pouvez-vous nous montrer sur cette carte où se situe le village

 11   de Mazoca?

 12   Le témoin est en train d'indiquer que le village de Mazoca se trouve dans

 13   le cadre du groupe de sites numéro 10, évidemment document, code pour

 14   identification 240/1, où se trouvaient toutes ces maisons. Combien de

 15   maisons y a-t-il eu à Mazoca?

 16   Réponse: De 25 à 30 pour parler de ce site où nous avons travaillé, c'est-

 17   à-dire non loin de ce verger.

 18   Question: Lorsque vous êtes arrivé à Mazoca, avez-vous pu rencontrer les

 19   villageois de ce village?

 20   Réponse: Nous avons été pour ainsi dire escortés par les membres de ces

 21   familles respectives qui étaient à la recherche de leurs membres de

 22   famille. Ces gens-là n'habitaient plus Mazoca, ils habitaient d'autres

 23   localités de la fédération de Bosnie-Herzégovine. Mais ce jour-là, ils

 24   étaient avec nous pour nous escorter.

 25   Question: Quant à eux, ont-ils pu faire des conclusions quelconques pour


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  1   savoir pour quelles raisons certaines maisons ont été identifiées

  2   entièrement, d'autres en partie, alors qu'il y avait des maisons qui

  3   étaient restées intactes?

  4   Réponse: La fille de l'une des victimes a attiré mon attention sur le fait

  5   que les maisons de la majeure partie des victimes qui ont été liquidées et

  6   dont nous avons pu exhumer les corps, que leurs maisons étaient restées

  7   intactes, que leurs maisons n'ont pas été incendiées. Elles sont en bon

  8   état. Il s'agit d'ailleurs des maisons de tous ceux qui, en 1992 avant que

  9   n'éclate évidemment la guerre, c'est-à-dire les charges par l'armée serbe,

 10   ont pu évacuer ce territoire pour aller vers le Monténégro ou vers le

 11   territoire libéré. Alors là, ces gens-là n'ont plus de maison, leurs

 12   maisons ont été soit détruites jusqu'à la fondation même, soit incendiées.

 13   Question: Outre cette femme qui a été exhumée et qui était serbe, qui

 14   était mariée à un Musulman, à part cette femme-là dans le groupe de ces

 15   375 corps, vous avez dit que tous les autres étaient Musulmans?

 16   Réponse: Oui, les autres 374 corps sont les corps de Musulmans, mais il

 17   est au-dessus de tout doute raisonnable que les restants des corps non

 18   identifiés sont les corps de Musulmans de Bosnie.

 19   Question: Monsieur le Président, nous n'avons pas eu de traduction.

 20   M. le Président (interprétation): Est-ce que vous vous souvenez peut-être

 21   de ce que vous avez traduit ou peut-être faut-il reprendre la question. Il

 22   faudrait peut-être refaire la question.

 23   M. Smith (interprétation): Monsieur Masovic, outre cette femme qui était

 24   serbe, sur ces 375 Musulmans de Foca, c'était tous des Musulmans de Foca?

 25   Est-ce correct de dire ainsi?


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  1   M. Masovic (interprétation): Oui, ils sont tous musulmans, les Musulmans

  2   de Foca. Et au-dessus de tout doute raisonnable, je crois que les autres,

  3   les 55 restants qui n'ont pas encore été identifiés sont également des

  4   Musulmans.

  5   Question: Outre cette femme?

  6   M. le Président (interprétation): Il a dit au-dessus de tout doute

  7   raisonnable. Et ce que nous devons savoir aussi sur la base de quoi il

  8   devrait faire une telle conclusion?

  9   M. Smith (interprétation): Oui, Monsieur le Président, de profession et de

 10   métier, il est avocat. Nous devons savoir ce que signifient ses paroles.

 11   M. le Président (interprétation): Oui, nous ne devons pas entrer dans le

 12   détail, mais il doit y avoir un explication.

 13   M. Smith (interprétation): Oui, il en a déjà fait une de ces explications.

 14   Peut-être il pourrait nous faire une versions succincte, résumée.

 15   M. le Président (interprétation): La dernière fois, on a parlé de

 16   costumes, de vêtements etc, de ces victimes qui habitaient ce même

 17   village. S'il s'agit évidemment du même genre de cas, on pourrait peut-

 18   être répéter. La question est la suivante: pour quelle raison pouvez-vous

 19   dire que pour parler de ces 55 corps, au dessus de tout doute raisonnable,

 20   il s'agirait de Musulmans, sur la base de quoi cette constatation, cette

 21   conclusion à moins qu'il n'y ait quelque chose évidemment de ce que vous

 22   avez déjà parlé?

 23   Réponse: Si je me souviens bien, j'ai dit précédemment -et je le

 24   maintiens- que les témoins qui nous amenaient sur les sites où avaient

 25   lieu des liquidations, les endroits où nous avons trouvé ces corps


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  1   identifiés, donc les témoins ont affirmé que les victimes étaient des

  2   Musulmans de Bosnie. On a pu tirer les mêmes conclusions des vêtements

  3   portés par les victimes et également du fait qu'ils venaient de villages

  4   dont la population était musulmane. C'est donc ma conclusion et pour moi

  5   c'est une conclusion qui est au-delà de tout doute raisonnable. Il est au-

  6   delà de tout doute raisonnable qu'il s'agit de Musulmans de Bosnie.

  7   M. le Président (interprétation): Je n'entends pas contester votre

  8   conclusion Monsieur le témoin, mais je pense que vous nous seriez plus

  9   utile si vous nous disiez si les personnes qui ont été identifiées en tant

 10   que Musulmans de Bosnie ou plutôt si ceux qui ont dit que les victimes

 11   étaient des Musulmans de Bosnie, les connaissaient avant leur mort?

 12   Réponse: Dans certains cas oui, mais dans le cadre du processus

 13   d'identification les membres des familles qui ont participé au processus

 14   d'identification, n'ont pas été en mesure de confirmer avec certitude

 15   qu'il s'agissait toujours de membres de leur famille, parce qu'il y avait

 16   des parties de corps qui avaient été brûlées, d'autres ne permettaient

 17   aucune identification. Donc, dans certains cas, par exemple de Ratine,

 18   cette grange où il y avait 24 corps, nous savions exactement qui étaient

 19   les personnes concernées. Mais comme les corps avaient été brûlés après

 20   l'exécution, tout ce dont nous disposons ce sont des restes humains, des

 21   restes de squelettes et nos experts de médecine légale n'ont pas été en

 22   mesure de dire avec certitude quelle partie de squelette appartenait à

 23   quelle victime. Donc en ce qui concerne ces 24 victimes nous les avons

 24   enregistrées comme étant des personnes non identifiées mais nous savons

 25   avec certitude qu'il s'agissait de Musulmans de Bosnie parce qu'une


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  1   personne a survécu à cet incident et nous l'a confirmé.

  2   M. le Président (interprétation): Oui, vous nous l'avez déjà dit

  3   précédemment et jusqu'à un certain point. J'imagine que vous avez dû vous

  4   appuyer sur le fait que s'il y a eu un grand nombre de personnes

  5   identifiées de cette façon qui étaient des Musulmans de Bosnie, vous êtes

  6   partis du principe que ceux qui les accompagnaient étaient également des

  7   Musulmans de Bosnie, même si on ne les a pas identifiés, c'est votre

  8   logique?

  9   M. Masovic (interprétation): Je dirais que c'est plus qu'une supposition.

 10   Cela va plus loin.

 11   M. le Président (interprétation): Alors, comment qualifieriez-vous cela

 12   alors?

 13   M. Masovic (interprétation): Eh bien, on peut partir du principe sur la

 14   base de tous les éléments qui sont à notre disposition, qu'il s'agit de

 15   Musulmans de Bosnie.

 16   M. le Président (interprétation): Monsieur Smith, je vous laisse le

 17   témoin. Pour moi, c'est toujours une supposition. Il a d'ailleurs utilisé

 18   ce terme. Mais je pense aux éléments de preuve que nous avions déjà

 19   entendu dans cette affaire et la façon dont les choses ont été prouvées.

 20   C'est un des éléments à prendre en compte.

 21   M. Smith (interprétation): Je pense que nous en avons dit autant que nous

 22   le pouvions à ce sujet, Monsieur le Président.

 23   M. le Président (interprétation): Bien.

 24   M. Smith (interprétation): En dehors de la femme serbe, avez-vous

 25   connaissance d'autres noms musulmans qui ont été exhumés dans la


Page 4250

  1   municipalité de Foca, oui ou non?

  2   M. Masovic (interprétation): Non.

  3   Question: Maintenant je souhaiterais évoquer les registres que vous tenez

  4   concernant les personnes portées disparues. Quel type de registre tenez-

  5   vous pour enregistrer quelqu'un comme personne disparue dans votre bureau?

  6   Réponse: Eh bien, nous avons une base de données informatisées que nous

  7   avons réalisé sur la base de rapports faits oralement ou sur la base

  8   d'informations de rapports donnés par les membres des familles des

  9   personnes concernées, ou d'autres sources comme par exemple les dossiers

 10   ou les registres tenus par CICR, ou nous utilisons également des listes

 11   qui nous ont été communiquées par les autorités locales sur le terrain

 12   pendant et après la guerre.

 13   Question: Est-ce que vous disposez de dossiers venant de la police ou de

 14   l'armée, dossiers relatifs aux personnes portées disparues?

 15   Réponse: Nous avons en effet des documents écrits, c'est-à-dire des

 16   documents venant des tribunaux de la police, qui avaient été établis à

 17   l'intention du Bureau du Procureur. Nous disposons également de rapports

 18   militaires, de rapports des renseignements militaires.

 19   Question: Est-ce que vous avez des déclarations de témoins dans les

 20   dossiers relatifs aux personnes disparues?

 21   Réponse: Oui, des déclarations de témoins ou des déclarations faites par

 22   les membres de la famille des personnes disparues, des gens qui ont été

 23   aussi parfois témoins d'incidents au cours desquels la personne mentionnée

 24   a disparu.

 25   Question: Vous avez dit précédemment que votre organisation est tenue de


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  1   tenir des registres relatifs aux exhumations.

  2   Est-ce que vous avez la même obligation, l’obligation de tenir des

  3   registres complets en ce qui concerne les personnes portées disparues et

  4   signalées comme telles?

  5   Réponse: Oui.

  6   Question: Est-ce que les dossiers que vous tenez à votre bureau sont

  7   utilisés autrement que pour d'éventuelles poursuites judiciaires. Est-ce

  8   que le gouvernement utilise vos dossiers pour une raison ou une autre, ou

  9   bien est-ce que d'autres organisations utilisent vos dossiers, vos

 10   archives pour des affaires ayant trait aux personnes portées disparues?

 11   Réponse: On peut dire que ces dossiers, ces archives sont utilisés par les

 12   personnes des familles de ceux qui sont portés disparus, parce qu'après

 13   avoir signalé la disparition d'une personne la famille en question reçoit

 14   un certificat signifiant que la personne a été portée disparue. Et sur la

 15   base de ce certificat les autorités locales en Bosnie-Herzégovine leur

 16   ouvre un certain nombre de droits, des droits destinés aux membres

 17   survivants de la famille de la personne portée disparue.

 18   Et puis, il y a aussi certaines organisations internationales qui traitent

 19   de l'immigration vers les pays occidentaux, donc ces organisations

 20   accordent un traitement de faveur à un certain type de personnes. Je pense

 21   en particulier à ceux qui ont vu un des membres de leur famille

 22   disparaître.

 23   Question: Est-ce qu'il y a d'autres organisations qui utilisent vos

 24   archives ou vos dossiers, comme la Croix-Rouge par exemple?

 25   Réponse: A la demande de tribunaux locaux, de Procureurs locaux, nous


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  1   pouvons communiquer nos dossiers relatifs aux personnes disparues, des

  2   dossiers qui peuvent être utilisés dans des tribunaux, qui s'intéressent

  3   aux crimes de guerre, que ce soit des tribunaux nationaux ou

  4   internationaux. Et nous répondons également aux demandes déposées par les

  5   familles auprès de la Croix-Rouge internationale.

  6   Question: Je vais vous demander maintenant de vous reporter au document

  7   portant la cote 240/4. Est-ce que vous reconnaissez ce document?

  8   Réponse: Oui.

  9   Question: Que contient ce document?

 10   Réponse: Ce document est une liste de personnes actuellement portées

 11   disparues de la municipalité de Foca.

 12   Question: Est-ce que cette liste a été établie sur vos instructions au

 13   sein de la commission d'Etat?

 14   Réponse: Oui, oui. Suite à mes instructions et sur la base de nos

 15   informations et de nos dossiers concernant les personnes en question.

 16   Question: Je vais vous demander de vous reporter au document portant la

 17   cote 240/5. Est-ce que vous reconnaissez ce document?

 18   Réponse: Oui. C'est mon bureau qui a également établi ce document.

 19   Question: Quelle est la nature de ce document?

 20   Réponse: Il s'agit d'une partie des personnes portées disparues dans la

 21   municipalité de Foca, des personnes qui ont été vues pour la dernière fois

 22   au KP Dom de Foca. Il y a en tout 265 personnes.

 23   Question: Je vous demande de vous reporter à la dernière page de ce

 24   document, on voit ici qu'il y a 266 personnes.

 25   Réponse: Oui.


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  1   Question: Dans votre réponse précédente, vous nous avez dit que le nombre

  2   de ces personnes s’élevait à 265. Est-ce que c’est exact ou bien est-ce

  3   266?

  4   Réponse: Il me semble avoir dit 266, peut-être les interprètes ont-ils mal

  5   entendu.

  6   Question: Bien. En tout cas, c’est clair maintenant, c'est ce qui compte.

  7   Afin d'établir ce document, à combien de sources avez-vous fait appel pour

  8   chaque individu mentionné ici, pour vous permettre d'arriver à la

  9   conclusion que la personne en question était au KP Dom et qu'elle est

 10   toujours portée disparue? A combien de sources d'information avez-vous

 11   fait appel pour confirmer chaque entrée qui figure dans ce document?

 12   Réponse: Eh bien, nous utilisons deux sources au moins, et dans certains

 13   cas nous faisons appel parfois à quatre sources d'informations

 14   indépendantes.

 15   Question: Est-ce qu'il y a des gens qui sont inclus dans vos dossiers mais

 16   qui ne sont pas inclus dans ce document qui, pour vous, ont été

 17   enregistrés comme ayant été au KP Dom, et étant toujours disparus, en plus

 18   de ces 266 personnes, sur cette liste?

 19   Réponse: Dans nos dossiers, je crois qu'il y a au moins 35 personnes qui

 20   ont été consignées comme ayant été vues pour la dernière fois au KP Dom à

 21   Foca. Donc on n'a pas pu confirmer qu'elles avaient disparues au KP Dom.

 22   Elles ne figurent donc pas dans cette liste de 266 noms, bien qu'elles

 23   aient été vues pour la dernière fois au KP Dom.

 24   Question: En ce qui concerne ces 730 personnes de la municipalité

 25   municipalités de Foca qui sont disparues, je voudrais savoir à quel moment


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  1   ces personnes ont-elles disparues ou la majorité d'entre elles? Pendant

  2   quelle année?

  3   Réponse: Eh bien, à partir du début du conflit on a cessé de déposer des

  4   déclarations. A partir de 1993, nous avons des dossiers complets relatifs

  5   aux personnes qui ont disparu sur le territoire de la municipalité de

  6   Foca.

  7   Question: Est-ce qu'on peut identifier une période de temps précise

  8   pendant laquelle la majorité de ces personnes ont disparu?

  9   Réponse: A partir du début avril jusqu'à la fin septembre 1992, il y en a

 10   un petit nombre, je crois que c’est moins de 20, qui ont disparu en 1993.

 11   Question: Concernant les 730 personnes disparues, je voudrais savoir

 12   combien de temps après que vous avez appris leur disparition, combien de

 13   temps après ce moment, le rapport a-t-il été établi?

 14   Réponse: Eh bien, cela dépend, parce que parfois c'est le même jour, le

 15   jour même où on a emmené quelqu'un, sa disparition est enregistrée à

 16   partir du jour où on est venu le chercher chez lui, mais en moyenne je

 17   crois que le délai est de 15 à 30 jours, délai qui s'écoule entre le

 18   moment où la personne disparaît et le moment où on dépose une déclaration

 19   de disparition et où nous consignons la personne dans nos dossiers.

 20   Question: Est-ce que vous-même vous avez participé au traitement et à la

 21   réception de ces déclarations de disparitions?

 22   Réponse: Toutes ces déclarations me sont communiquées avant que les

 23   éléments essentiels ne soient entrés et saisis dans notre base de données.

 24   Mais il est arrivé que des témoins viennent qui soient en mesure de

 25   témoigner sur la disparition d'un grand nombre de personnes qui ont


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  1   disparu toutes en même temps le même jour. Dans ces conditions, ce que

  2   j'ai fait, c’est d'interroger moi-même ces témoins. Dans d'autres cas où

  3   les témoignages sont moins complexes à traiter, ce sont mes assistants qui

  4   s'en occupent.

  5   Question: Mais pour ce qui concerne la période qui a commencé à partir de

  6   1992 et pendant toute la guerre, je voudrais savoir combien d'assistants

  7   aviez-vous à votre disposition qui traitaient de ces déclarations de

  8   disparitions?

  9   Réponse: Eh bien, vous aviez 6 employés à la commission centrale à

 10   Sarajevo et 8 à 10 employés je crois qui étaient en mission sur le terrain

 11   dans diverses localités, contrôlées par diverses forces.

 12   Question: Précédemment vous avez dit que ces déclarations étaient faites

 13   aussi bien oralement que par écrit. Qui, généralement, signalait la

 14   disparition d'une autre personne?

 15   Réponse: On peut parler de déclarations. Généralement, en ce qui concerne

 16   les déclarations orales, elles étaient réalisées par les membres de la

 17   famille ou des gens qui avaient été témoins des incidents au cours

 18   desquels la personne avait disparu, tandis que les déclarations ou

 19   rapports écrits venaient des autorités, par exemple de la police, diverses

 20   commissions, présidence de guerre, commissions chargées d'échanges de

 21   prisonniers de guerre, etc..

 22   Question: Et les familles qui vous signalaient la disparition de parents,

 23   est-ce que ces gens venaient en personne vous voir ou bien est-ce qu’ils

 24   utilisaient le téléphone? On peut mettre en évidence un comportement

 25   récurrent et généralisé?


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  1   Réponse: Cela dépendait du lieu où la disparition a eu lieu. Si une

  2   personne disparaissait à un endroit où les membres de la famille ou les

  3   témoins étaient en mesure de venir nous contacter à Sarajevo, à ce moment-

  4   là ils venaient à Sarajevo nous le dire. Mais si cela se passait ailleurs,

  5   eh bien, on nous signalait la chose, on nous transmettait ces informations

  6   dans les villes dont j'ai déjà parlé: Mostar, Tuzla, Travnik, Zenica,

  7   Hadzici, Ilidza, etc..

  8   M. le Président (interprétation): Monsieur le témoin, vous parlez un petit

  9   peu vite pour que les interprètes puissent vous suivre.

 10   Question: Monsieur le Président j'ai encore 45 minutes en ce qui concerne

 11   l'interrogatoire principal de ce témoin. Mais ma confrère a une requête à

 12   vous présenter concernant les témoins suivants. Nous nous demandions si

 13   nous pourrions présenter cette requête maintenant?

 14   M. le Président (interprétation): Bien, d'accord.

 15   Monsieur Masovic, nous allons vous laisser partir maintenant. Nous avons

 16   un certain nombre de questions à traiter demain avant la pause et nous

 17   nous retrouverons demain matin à 9 heures 30.

 18   (Le témoin est reconduit hors du prétoire.)

 19   (Questions relatives à la procédure.)

 20   Donc je vous écoute Madame Uertz-Retzlaff.

 21   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Monsieur le Président, il y a une

 22   question que je peux aborder en audience publique, pour l'autre je

 23   demanderai que nous passions à huis clos partiel.

 24   M. le Président (interprétation): Bien.

 25   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Première chose donc, cela a trait au


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  1   témoin 137, que l'on doit normalement entendre la semaine prochaine par

  2   vidéo conférence.

  3   Le Bureau du Procureur a pris contact avec ce témoin aujourd'hui. Le

  4   témoin a consulté un médecin. Et maintenant il est en mesure de voyager,

  5   il a reçu de nouveaux médicaments et à cause du changement de temps et

  6   parce qu'il va mieux, il peut maintenant voyager, et il est prêt à venir

  7   témoigner ici à La Haye.

  8   Je pense que c'est une solution préférable de le faire venir ici,

  9   puisqu'il peut voyager.

 10   M. le Président (interprétation): Est-ce que vous êtes en train de dire

 11   que le temps à La Haye la semaine prochaine sera aussi bon

 12   qu'actuellement?

 13   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Le témoin souffre de rhumatismes. Ce

 14   qui s’est passé, c’est qu’il reçoit maintenant de nouveaux médicaments,

 15   qui lui conviennent mieux. C'est le printemps, là où il habite, et il va

 16   beaucoup mieux.

 17   M. le Président (interprétation): S'il peut venir bien entendu c'est

 18   préférable.

 19   Je suis sûr que Maître Bakrac ne le contesterait pas. Fort bien.

 20   Donc que souhaitez-vous que nous fassions, annuler l’ordonnance relative à

 21   la visio conférence?

 22   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui, pour ce témoin, mais pas pour

 23   l'autre, parce que nous avons 2 témoins à Sarajevo, et l'autre ne peut pas

 24   venir.

 25   M. le Président (interprétation): Quand avez-vous l'intention de faire


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  1   venir 137?

  2   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): La semaine prochaine. Il va venir en

  3   fait la semaine prochaine, le même jour où il était prévu de l’entendre

  4   par visio conférence.

  5   M. le Président (interprétation): Notre Greffière d'audience devra quand

  6   même se déplacer là-bas. Bien.

  7   Donc nous pouvons modifier l’ordonnance, en stipulant que la visio

  8   conférence ne concernera plus le témoin 137.

  9   Souhaitez-vous maintenant passer à huis clos partiel pour la question

 10   suivante?

 11   Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Oui, s’il vous plaît.

 12   (Audience à huis clos partiel.)

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  6   (L’audience est levée à 16 heures.)

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