LA CHAMBRE DE PREMIÈRE INSTANCE
Composée comme suit :
Mme le Juge Florence Ndepele Mwachande Mumba, Président
M. le Juge Antonio Cassese
M. le Juge David Anthony Hunt
Assistée de :
Mme Dorothee de Sampayo Garrido-Nijgh, Greffier
Ordonnance du :
5 janvier 2000
LE PROCUREUR
C/
GOJKO JANKOVIC
JANKO JANJIC
ZORAN VUKOVIC
DRAGAN ZELENOVIC
RADOVAN STANKOVIC
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ORDONNANCE RELATIVE À LA REQUÊTE DE LACCUSATION AUX FINS
DE NON-DIVULGATION DÉPOSÉE LE 29 DÉCEMBRE 1999
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Le Bureau du Procureur :
M. Dirk Ryneveld
Mme Peggy Kuo
Mme Hildegard Uertz-Retzlaff
Le Conseil de la Défense :
M. Goran Jovanovic, pour Zoran Vukovic
1. La Chambre de première instance du Tribunal international chargé de poursuivre les personnes présumées responsables de violations graves du droit international humanitaire commises sur le territoire de lex-Yougoslavie depuis 1991 (« le Tribunal international ») est saisie de la Requête aux fins de non-divulgation déposée le 29 décembre 1999 par lAccusation ("la Requête") demandant à la Chambre dannuler lordonnance relative à lacte daccusation modifié établi contre Zoran Vukovic et quatre autres accusés délivrée le 28 décembre 1999 par le Juge Wang. La raison de cette demande est que lAccusation a, par inadvertance, demandé la divulgation de tous les éléments justificatifs et des mandats darrêt afférents audit acte daccusation modifié et elle demande à présent que ces éléments justificatifs et mandats darrêt ne soient pas rendus publics.
2. Bien que seul laccusé Zoran Vukovic
ait été arreté et que sa comparution initiale se soit déroulée le
29 décembre 1999 devant la Chambre de premicre instance II, cette
dernière est compétente pour entendre la Requête portant sur les cinq accusés.
Larticle 62 du Règlement de procédure et de preuve ("le
Règlement") en dispose clairement :
"Après le transfert dun accusé au siège du Tribunal, le Président attribue immédiatement laffaire à une Chambre de première instance." (Non souligné dans loriginal)
Bien que le Président ne puisse délivrer lordonnance portant attribution de laffaire quune fois un accusé transféré, le libellé de larticle 62 du Règlement dispose clairement que cette attribution porte sur toute laffaire dont laccusé fait partie et pas seulement sur le seul accusé dont la comparution initiale a eu lieu. Ainsi, dans le cas dune affaire impliquant plusieurs accusés et pour toutes les modifications subséquentes, la Chambre de première instance conserve la compétence globale sur lensemble de laffaire et sur tous les accusés, même si la comparution initiale de chacun dentre eux na pas encore eu lieu. Il nest plus nécessaire de délivrer de nouvelles ordonnance portant attribution à chaque nouveau transfert dun accusé au siège du Tribunal.
3. Les poursuites engagées contre Zoran Vukovic sinscrivent dans le cadre dun acte daccusation initial, daté du 18 juin 1996, formulé r lencontre des accusés Dragan Gagovic, Dragoljub Kunarac, Radomir Kovac, Gojko Jankovic, Janko Janjic, Dragan Zelenovic, Radovan Stankovic et lui-meme, portant le numéro daffaire IT-96-23. Bien quelle ait, par inadvertance, nommé laffaire "Le Procureur c/ Dragoljub Kunarac", Mme le Président McDonald a, par une ordonnance datée du 5 mars 1998, attribué laffaire portant ce numéro à la Chambre de première instance II. La page de garde de ladite ordonnance reprenant les noms des huit accusés et lutilisation du numéro daffaire global dans son dispositif montrent clairement que Mme le Président McDonald navait pas lintention dattribuer uniquement la procédure relative à Dragoljub Kunarac. Cette interprétation est étayée par lOrdonnance relative à la composition de la Chambre de première instance II en lespèce, délivrée le 15 juillet 1998 par le vice-Président Shahabuddeen, se référant à laffaire comme suit : "Le Procureur c/ Dragan Gagovic et consorts". Lordonnance portant attribution de laffaire Zoran Vukovic r la Chambre de premicre instance II, délivrée le 28 décembre 1999 par Mme le vice-Président Mumba, était donc purement déclaratoire.
4. La modification de lActe daccusation initial en date du 19 août 1998 consistait en une expurgation des charges retenues contre laccusé Dragoljub Kunarac de manière à ce quil y ait à présent un document se rapportant uniquement à lui. Il en a été de même pour laccusé Radomir Kovac dont les charges ont été expurgées de lacte daccusation initial et directement jointes à celles retenues contre laccusé Dragoljub Kunarac dans le deuxième acte daccusation modifié du 6 septembre 1999. Les charges retenues contre les cinq accusés restant, dont Zoran Vukovic, ont alors été expurgées et réunies dans un troisicme acte daccusation modifié, confirmé le 7 octobre 1999 par le Juge Nieto-Navia. Ce dernier a également ordonné la non-divulgation au public du troisième acte daccusation modifié, des éléments justificatifs et des mandats darrêt jusquà leur signification à tous les accusés. La raison principale en est, selon lAccusation, la crainte que, dès quil aura appris son identification claire, laccusé Zoran Vukovic tente de se dissimuler r la justice ou de porter atteinte r des témoins essentiels.
5. Dans sa requête du 28 décembre 1999, le Procureur a demandé au Juge de permanence, le Juge Wang, dautoriser la divulgation au public du troisième acte daccusation modifié, ainsi que des éléments justificatifs et mandats darrêt y afférent. Dans son ordonnance du 28 décembre 1998, le Juge Wang a pleinement fait droit à la demande du Procureur. Dans la présente Requête, le Procureur prétend à présent que la demande de divulgation au public naurait pas dû englober les éléments justificatifs et les mandats darrêt car pareille divulgation est susceptible de porter gravement atteinte à la sécurité des victimes et des témoins. Cependant, le Procureur ne voit aucune objection à la divulgation au public du troisième acte daccusation modifié.
6. Le problème a été abordé oralement lors de la comparution initiale en audience publique de laccusé Zoran Vukovic. Ledit accusé et son conseil ne se sont opposés en rien à lintention du Procureur de demander au Juge Wang de modifier son ordonnance.
7. La Chambre de première instance convient avec le Procureur que les éléments justificatifs ne devraient pas être divulgués au public. En effet, en règle générale, ces derniers ne sont jamais divulgués. Toutefois, il est inutile dordonner la non-divulgation des mandats darrêt des quatre accusés restant étant donné que lacte daccusation initial a toujours été public et que lacte daccusation modifié le sera dorénavant. Les accusés en déduiront automatiquement que lacte daccusation sera suivi par lémission de mandats darrêt à lencontre de chacun dentre eux. De plus, bien quelle nait pas été déposée sous le sceau de la confidentialité, la Requête mentionne elle-même les mandats darrêt et le problème a été débattu en audience publique lors de la comparution initiale du 29 décembre 1999. Ainsi, lexistence de mandats darrêt lancés contre les accusés restant est déjà connue du public. Le Procureur na pas avancé dans la Requête que la divulgation de la teneur spécifique des mandats darrêt, par opposition au simple fait de leur existence, pourrait porter un quelconque préjudice aux victimes et aux témoins.
PAR CES MOTIFS, la Chambre de première instance
REJETTE la Requête pour ce qui est de la non-divulgation des mandats darrêt et
FAIT DROIT à la Requête pour ce qui est des éléments justificatifs. LOrdonnance délivrée le 28 décembre 1999 par le Juge Wang est, en conséquence, modifiée aux fins de ne pas divulguer au public les éléments justificatifs étayant lacte daccusation modifié confirmé le 7 octobre 1999 par le Juge Nieto-Navia.
Fait en anglais et en français, la version en anglais faisant foi.
Le Président de la Chambre de première instance II
(signé)
Mme le Juge Mumba
Fait le cinq janvier 2000
La Haye (Pays-Bas)
[Sceau du Tribunal]