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1 (Mercredi 5 juillet 2000.)
2 (Audience publique.)
3 (L'audience est ouverte à 9 heures 35.)
4 (Le témoin, Dragoljub Kunarac, est interrogé par M. Prodanovic.)
5 Mme le Président (interprétation): Peut-on citer le numéro de l'affaire?
6 Melle Lauer: Affaire IT-96-23-T, IT-96/1-T, le Procureur contre Dragoljub
7 Kunarac, Radomir Kovac, et Zoran Vukovic.
8 Mme le Président (interprétation): Bonjour, nous poursuivons
9 l'interrogatoire principal de l'accusé Kunarac. Maître Prodanovic, vous
10 avez la parole.
11 M. Prodanovic (interprétation): Bonjour, Madame la Présidente. Merci. Je
12 vais vous rappeler où nous nous sommes arrêtés hier.
13 C'était le 7 juillet, vous avez dit avoir passé la nuit du 7 juillet dans
14 le village de Sorlaci. Avant de vous poser des questions concernant ce qui
15 s'est passé pendant les jours qui ont suivi, je vais vous poser la
16 question de savoir si vous disposiez des armes d'artillerie. Là, je parle
17 de l'action concrète dont vous avez parlé.
18 M. Kunarac (interprétation): Ce premier jour, lorsque nous y sommes
19 arrivés, pas encore mais à la fin de l'opération, nous avions un canon
20 T35. C'est un canon placé sur le véhicule qui peut se déplacer tout seul,
21 et le calibre en a été 100 millimètres.
22 Question: Est-ce que vous pouvez nous dire à quel moment ce véhicule
23 autotracté est apparu?
24 Réponse: Ce véhicule est arrivé à la position le 20 juin.
25 Question: Juin ou juillet?
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1 Réponse: Juillet, je me corrige. Donc le 20, il est arrivé au village de
2 Sorlaci. C'est à partir de là qu'il a commencé à agir. Ensuite, il a
3 poursuivi son chemin vers Cerova Ravan.
4 Question: La question qui se pose est de savoir si ce jour même ce
5 véhicule est apparu là-bas ou plus tôt.
6 Réponse: Le véhicule s'est dirigé vers nous plus tôt, mais n'a pas pu
7 nous rejoindre à cause des problèmes dans la route entre Cvilin et
8 Sorlaci. C'est pour cela que l'arrivée a été retardée, le véhicule n'a pas
9 pu poursuivre son chemin.
10 Question: Vous avez dit qu'il n'a pas pu poursuivre son chemin. Pourquoi?
11 Réponse: Tout d'abord, cette route que nous utilisions afin d'acheminer
12 les vivres et les équipements, la route était trop étroite pour que le
13 véhicule autotracté puisse se déplacer. Il y a eu des endroits où il
14 n'était pas possible de faire des manoeuvres permettant de traverser la
15 route. Et comme je l'ai dit hier, il y a eu une érosion de la route au
16 cours de la nuit. Dans la nuit entre le 7 et le 8, il y a eu un grand trou
17 dans la route, donc aucun véhicule n'a pu passer; non pas seulement ce
18 véhicule autotracté.
19 Tout d'abord, il a fallu élargir la route afin de permettre à ce véhicule
20 d'arriver jusqu'à nous et de poursuivre jusqu'à Gabelic Kosa et le reste.
21 Question: Est-ce que vous pourriez nous dire comment étaient déployées
22 les unités du groupe tactique par rapport aux positions musulmanes?
23 Réponse: Vous parlez de la nuit du 7 au 8?
24 Question: Oui, le 8.
25 Réponse: Le 8 au matin -comme je l'ai déjà dit-, au cours de la nuit du
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1 7, nous étions déjà arrivés jusqu'aux positions à Gabelic Kosa où il n'y a
2 pas eu de forces ennemies. Nous avons vu sur une autre pente une autre
3 colline qui se trouve à une distance de 650 mètres à vol d'oiseau? et à
4 une distance de 200 mètres par rapport à la rive de la Drina, que c'est là
5 que se trouvaient les forces musulmanes. Au cours de la nuit du 7, trois
6 ou quatre groupes constitués de cinq à six personnes sont restés dans
7 Gabelic Kosa. Le 7 au soir, vers 20 heures du soir, le feu a été ouvert du
8 côté droit, devant nous.
9 Question: Je vais vous arrêter là. Vous avez dit qu'il s'agissait là de
10 la zone de responsabilité du 5ème Bataillon.
11 Réponse: Oui.
12 Question: Où était déployé le 5ème Bataillon, s'il vous plaît?
13 Réponse: Le 5ème Bataillon avait les lignes de front après Juca
14 seulement, à partir de Goli Vrh en suivant le col de Perici jusqu'au
15 monument. Il s'agissait d'une distance d'un kilomètre, un kilomètre et
16 demi, il s'agissait des lignes de front fortifiées dont ils disposaient
17 dans cette région. Les habitants des villages de Ocenice et Brocani
18 montaient la garde autour de ces villages, Moncenice et l'autre village
19 que j'ai mentionné.
20 Question: Vous avez dit que vous faisiez partie, que vous dépendiez du
21 commandement de la compagnie de Josanica. Elle faisait partie de quel
22 bataillon?
23 Réponse: La compagnie de Josanica faisait partie du 5ème Bataillon et
24 était donc placée sous le commandement du 5ème Bataillon, parce qu'elle en
25 faisait partie.
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1 Question: Est-ce que vous pourriez nous dire quel est le nom et le prénom
2 du commandant du 5ème Bataillon? Et est-ce que vous savez s'il a été sur
3 place ces jours-là?
4 Réponse: Ces jours-ci, le commandant du 5ème Bataillon était Boro
5 Ivanovic. Nous l'appelions Boro, je ne sais pas s'il s'appelait Borivoje
6 ou Boro. Tout au long de cette opération au cours de ces 15 jours à peu
7 près, il est resté sans arrêt à Preljuca. C'est là que se trouvait
8 également le commandement du Bataillon.
9 Question: Nous parlons maintenant de la compagnie de Josanica dont vous
10 faisiez partie. Vous avez dit, hier, qu'entre Sorlaci et Gabelic Kosa et
11 Cerova Ravan une partie de la route a été détruite par des courants d'eau.
12 Pourriez-vous nous dire ce à quoi ressemblait l'approvisionnement en
13 équipement?
14 Réponse: Il était prévu de recevoir des équipements sur les lignes de
15 front en les acheminant par des petits camions de capacité de deux tonnes.
16 Mais comme la route a été détruite, à partir de ce moment là, pendant les
17 dix à douze jours que nous avons passé dans ces positions, nous avons dû
18 prendre les vivres à l'endroit où la route a été détruite. Puis, nous
19 avons dû aller jusqu’aux positions où j'ai été le 7, vers Gabelic Kosa.
20 C'est là que nous avons mis les vivres dans un autre véhicule. Puis, nous
21 avons utilisé cet autre véhicule afin de distribuer la nourriture, les
22 équipements, les vivres à des endroits autour de la Gabelic Kosa où se
23 trouvaient des positions, et à partir d'où des opérations militaires
24 étaient menées contre les forces de l'ennemi.
25 Question: Si j'ai bien compris, les équipements et les vivres arrivaient
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1 jusqu'à Sorlaci, jusqu'à l'endroit où la route était détruite. Ensuite, la
2 nourriture était emmenée jusqu'au véhicule Polonez. Et ensuite, pouvez-
3 vous nous dire qui distribuait les vivres aux gens sur les positions?
4 Réponse: Le 8 au matin, nous étions à Gabelic Kosa. Notre tâche de cette
5 journée était d'y rester en secret, de ne pas dévoiler l'endroit où se
6 trouvaient nos positions. Moi, j'étais en contact avec le commandant de la
7 compagnie qui m'a dit que le 9 il était prévu d'attaquer l'ennemi qui se
8 trouvait devant nous.
9 Ce jour-là, donc le 8, tous les gens ont pris la nourriture à Sorlaci et
10 ils l'ont gardé pour eux-mêmes. A partir de ce jour-là, on acheminait les
11 vivres avec ce véhicule-là, jusqu'à Gabelic Kosa, jusqu'à la moitié du
12 mont Gabelic Kosa. A partir de cet endroit-là, la nourriture a été
13 distribuée individuellement, à tout le monde.
14 Question: Qui conduisait ce véhicule Polonez?
15 Réponse: La plupart du temps c'était moi. Le 9 dans l'après-midi, ou le
16 10, je l'ai fait puisque le 9, dans l'après-midi, nous avons essayé de
17 mener l'opération militaire; nous et puis aussi l'autre partie du
18 Bataillon qui était à Preljuca, qui a essayé d'agir contre Cerova Ravan.
19 Mais tout ce que nous avons réussi à faire était de détruire deux
20 blockhaus juste à côté de la rivière de la Drina.
21 A partir de cette position, le feu a été ouvert la veille contre les gens
22 qui se déplaçaient en longeant la Drina. Nous n'avons pas eu d'autres
23 réussites. Ce jour-là, il était déjà nécessaire d'acheminer les
24 équipements et les vivres de même que les munitions, afin de pouvoir
25 poursuivre l'opération. J'ai reçu la tâche de contrôler cette partie de la
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1 route.
2 Puisqu'il était déjà difficile de se déplacer, le commandant de la
3 compagnie qui était mon commandant à moi, m'a donnée la tâche de contrôler
4 la route entre le village Gabelici jusqu'à la maison de Branko -je ne me
5 souviens pas de son nom de famille-, jusqu'à l'endroit où il avait sa
6 maison qui a été incendiée par la suite. J'ai vérifié cette partie de la
7 route. J'ai pu dire que cette partie de la route était en sécurité. A ce
8 moment-là, on m'a dit pour la première fois de conduire la voiture en
9 prenant cette route-là. J'ai mis les vivres et les équipements dans le
10 véhicule et j'ai pris la route. A partir d'un certain endroit, je suis
11 arrivé à un terrain vide où l'ennemi pouvait me voir. Effectivement,
12 l'ennemi m’a vu et a ouvert le feu contre moi.
13 Après cet incident, personne n'acceptait plus d’emprunter cette même route
14 afin de conduire ce véhicule. Et donc -j'en parlerai plus tard également-,
15 c'était surtout moi qui conduisais la voiture sur cette partie du chemin.
16 Question: Vous avez dit, en ce qui concerne une partie de la route que
17 vous avez empruntée avec ce véhicule, que dans cette partie de la route on
18 a ouvert le feu sur vous.
19 Réponse: Oui.
20 Question: Compte tenu de ce fait, pouvez-nous dire de quelle partie de la
21 journée il s'agissait? Quand est-ce que vous vous déplaciez en conduisant
22 ce véhicule?
23 Réponse: La première fois c'était dans l'après-midi, donc la visibilité
24 était bonne. Le lendemain, il a fallu de nouveau acheminer la nourriture,
25 les vivres. Moi, j'ai proposé que l'on attende la tombée de la nuit avant
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1 qu'il fasse complètement noir, moment où je pouvais conduire sans allumer
2 les feux, mais tout en pouvant voir la route pour que ce soit plus
3 difficile aux autres de m'apercevoir. Cette nuit-là, pour la première
4 fois, j'ai ramené la voiture de Gabelici jusqu'à Potok et c’est là que
5 nous avons chargé les vivres dans le véhicule. La nuit était presque déjà
6 tombée, mais j'ai pu conduire et on a ouvert le feu sur moi de nouveau.
7 Ceci se reproduisait tous les jours.
8 Pendant que nous étions dans cette région-là, régulièrement ceci nous
9 arrivait. Parfois, les gens pariaient entre eux pour savoir si j'allais
10 être touché par balle la fois d’après ou pas. Mais, heureusement, pendant
11 ces dix jours j'ai réussi à rester saint et sauf et à ne pas être atteint.
12 Question: Comme la route a été interrompue, pouvez-vous nous dire si
13 cette interruption de la route a ralenti l'action?
14 Réponse: Dans le cadre de l'ordre, il a été prévu que le 5ème Bataillon
15 et le 2ème Bataillon partent ensemble le neuf, lancent ensemble une attaque
16 contre les lignes de l'ennemi. Nous, nous sommes partis, comme je l'ai
17 déjà dit, nous avons eu des réussites tout à fait sans importance, mais le
18 1er et le 2ème Bataillon se sont acquittés de leur partie de leurs tâches
19 et sont arrivés jusqu’aux positions qu'ils ont pu tenir. Mais puisque la
20 route a été bloquée, nous n'avons pu rien faire tant que le véhicule
21 autotracté n'est pas arrivé jusqu'à chez nous.
22 Par la suite, la route a été débloquée, la pelleteuse a été employée, mais
23 il a fallu attendre que la terre se sèche puisqu'il s'agit d'une région où
24 il y a beaucoup de terrains, de glissements. Il a donc fallu attendre
25 quelques jours que le la terre sèche. Et puisqu'il pleuvait, ceci a
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1 retardé la suite de notre opération.
2 Question: Est-ce que la route a été débloquée? Si oui, à quel moment ceci
3 s'est produit?
4 Réponse: La pelleteuse est arrivée jusqu'à Gabelic Kosa deux ou trois
5 jours avant le 19. Le commandant de la compagnie m'avait dit que la
6 pelleteuse avait déjà commencé à travailler dans d'autres parties de la
7 route depuis cinq, six jours. Elle a commencé son travail dans la partie
8 près du village de Cvilin. Nous étions à une distance d'un kilomètre et
9 demi à deux kilomètres de cette partie de la route où la route était
10 détruite. Nous avons entendu que la pelleteuse a dû faire le travail
11 pendant un ou deux jours, puisque sept à huit mètres de la route étaient
12 complètement détruits. La pente à cet endroit est très raide, il a donc
13 fallu faire un grand trou et faire beaucoup d'excavations afin de pouvoir
14 dégager la route. Elle est donc arrivée jusqu'à Gabelic Kosa le 18 ou le
15 19.
16 Question: Est-ce que vous savez qui a effectué ce travail avec la
17 pelleteuse?
18 Réponse: J'ai rencontré cette personne lorsqu'elle est arrivée. Je pense
19 qu'il s’appelait Ivan ou Ivo Pavlovic, c'était lui qui manipulait cette
20 pelleteuse. J'ai passé un ou deux jours après son arrivée. J’ai passé deux
21 jours après son arrivée et je l’ai aidé à dégager la suite de la route
22 vers Cerova Ravan.
23 Question: Si j'ai bien compris, la route a été dégagée le 19 ou le 20?
24 Réponse: Le 18, il a terminé la partie de la route vers Gabelic Kosa,
25 jusqu'à Gabelic Kosa où nous nous trouvions. Et puis, nous avions le
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1 projet de faire en sorte que le véhicule autotracté puisse agir à partir
2 de cette position-là puisque la visibilité était bonne.
3 Question: Justement c'était ma question suivante. Est-ce qu'il a reçu une
4 autre tâche lorsqu'il est arrivé, Ivo Pavlovic?
5 Réponse: C'est ce que je suis en train de dire. A partir de ce moment-là,
6 il a reçu l'ordre de dégager la route, d'ouvrir, de créer une route afin
7 de relier cette position à Cerova Ravan puisqu'il existait déjà une route,
8 mais elle contournait Josanica et d'autres villages. Donc, il nous a fallu
9 créer une route de longueur de quelques kilomètres afin de nous relier
10 directement à Cerova Ravan. Nous avions donc un seul véhicule qui agissait
11 depuis Gabelic Kosa.
12 A l'aide de ce véhicule auto tracté, nous avons pu détruire les blockhaus
13 afin de pouvoir procéder à d'autres travaux.
14 Question: Est-ce que vous pouvez nous dire comment vous avez pu
15 déterminer l'emplacement à partir duquel le véhicule auto tracté devait
16 attaquer les ennemis?
17 Réponse: Au cours de toutes ces journées pendant lesquelles j'ai
18 participé aux opérations de combat -il s'agissait-là de huit à neuf
19 jours-, après ces opérations, on m'a demandé d'examiner le terrain pour
20 savoir quel est l'endroit à partir duquel il sera le plus facile de lancer
21 des attaques d'infanterie. J'ai dû vérifier qu'il n'y a pas eu de mines
22 posées, pas de champs de mines dans la région que je devais proposer. Si
23 oui, je devais le désamorcer ou le marquer. J'ai donc pu voir, lorsque je
24 faisais ces activités de reconnaissance, où se trouvaient les blockhaus.
25 Nous étions toujours dans le cadre d'un groupe et le commandant, lorsqu'il
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1 a vu ces positions, il a dit que c'était le meilleur endroit où l'on
2 pouvait placer le véhicule autotracté. Il a dit que c'est là qu'il a fallu
3 préparer les fortifications et les tranchées. A partir de cet endroit-là,
4 la visibilité était très, très bonne vis-à-vis des positions ennemies.
5 C'est là que nous avons commencé à faire ce travail.
6 Question: Vous avez dit qu'Ivo Pavlovic a reçu une nouvelle tâche, à
7 savoir de faire la route entre la route principale et la position où
8 devait être placé le véhicule autotracté. Est-ce que vous pouvez nous dire
9 dans quelles conditions il a travaillé?
10 Réponse: Lorsque la pelleteuse est arrivée jusqu'à Gabelic Kosa et
11 lorsque les travaux ont été poursuivis vers Cerova Ravan, il s'agissait
12 d'un moment où on pouvait voir la région, où les travaux étaient effectués
13 depuis les lignes de l'ennemi, donc le risque était réel d'ouvrir le feu
14 contre lui. Puis, il était également possible de l'atteindre en utilisant
15 les lance-roquettes, puisqu'il s'approchait à une distance de 450 mètres
16 des lignes de l'ennemi, ce qui est une distance qui peut être couverte par
17 les lance-roquettes à main.
18 Question: Puisqu'il a dû travailler près de l'ennemi, est-ce que vous
19 pouvez nous dire comment Ivo Pavlovic a pu continuer à faire son travail
20 avec sa pelleteuse dans cette situation dangereuse?
21 Réponse: Tout d'abord, lorsque nous sommes arrivés à l'endroit où il a
22 fallu faire des excavations, il n'a pas accepté de travailler avant d'être
23 protégé des tirs éventuels de l'ennemi. Le commandant en a été informé et
24 il a proposé une sorte de bouclier soit créé en métal et soit placé sur la
25 pelleteuse même. C'est ainsi qu'il a pu poursuivre son travail et c'est
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1 ainsi qu'il a pu être protégé. Ceci a été fait le premier jour. Je pense
2 que dès le 19, il avait cette partie blindée autour de son véhicule. A
3 partir de ce jour-là, il a commencé à faire les travaux vers Cerova Ravan.
4 Question: A votre avis, est-ce que ceci a ralenti l'opération en tant que
5 telle?
6 Réponse: Eh bien, ce tronçon de 1,5 kilomètres de route, on aurait
7 normalement pu le terminer en un jour. Comme il y avait une espèce de
8 bouclier sur la pelleteuse la visibilité était réduite pour le conducteur.
9 Il pouvait voir par la fenêtre, par la vitre, mais beaucoup moins
10 facilement que précédemment. Théoriquement, il aurait pu finir en un jour
11 mais, en fait, les travaux ne se sont terminés que le 20 au soir pour
12 rétablir la route avec Cerova Ravan. Comme je l'ai déjà dit, s'il n'y
13 avait pas eu cette espèce de bouclier sur la pelleteuse, nous aurions pu
14 terminer les travaux beaucoup plus vite.
15 Question: Ce véhicule autotracté a pu atteindre cet endroit surélevé. Je
16 voudrais savoir si ce fait a facilité les choses ou cela a-t-il entraîné
17 des difficultés?
18 Réponse: Les déplacements de ce véhicule auto tracté…. Enfin, ce document
19 s'est mis en route pour nous rejoindre le 14 ou 15, mais il a été ensuite
20 coincé, s'est embourbé parce que -comme je l'ai déjà dit-, le terrain
21 était en pente, une pente très accentuée, un terrain très difficile, donc
22 il a fallu venir à son secours quand il a été coincé. C'est le bulldozer,
23 la pelleteuse qui a été obligée de venir l'aider. Ensuite, sur la route
24 qui venait de Gabelic Kosa, la même chose s'est reproduite. La route de
25 Gabelic Kosa, Cerova Ravan, même chose, parce que -comme je l'ai dit-, la
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1 route n'était pas en très bon état, donc ce camion, ce véhicule avait
2 beaucoup de mal à se déplacer. De plus, il y avait des glissements de
3 terrain, il fallait sans cesse récupérer le véhicule, le dégager.
4 Donc, ce véhicule est arrivé le 21, à huit heures du matin.
5 Question: Ce jour du 21 juillet, quand le véhicule est arrivé sur cette
6 colline, sur cette élévation, est-ce qu'il s'est mis en action?
7 Réponse: Eh bien, le 20, tous les préparatifs avaient été menés à bien
8 pour une attaque d'infanterie. Nous avions localisé les positions de
9 l'ennemi, nous avions coupé les fils de fer barbelés si bien qu'on pouvait
10 passer, traverser le champ de mines et que le véhicule puisse entrer en
11 service immédiatement. Il a donc détruit environ sept à huit blockhaus
12 entre Gabelic Kosa et Cerova Ravan.
13 Tout de suite après, nous avons continué nos opération en direction de
14 Cerova Ravan. Alors qu'il se déplaçait dans cette direction, une attaque
15 d'infanterie a été lancée et nous sommes parvenus à mener à bien la
16 mission qui nous avait été confiée le neuf, c'est-à-dire onze jours avant.
17 Question: Après le début de la mise en service de ce véhicule autotracté,
18 qu'est-ce que vous avez fait?
19 Réponse: Eh bien, moi-même et une dizaine de volontaires qui
20 appartenaient à la compagnie à laquelle j'appartenais, nous nous sommes
21 vus confier une mission qui était la suivante: c’est-à-dire une fois que
22 le véhicule autotracté avait détruit ces blockhaus, nous étions censés
23 lancer une attaque d'infanterie et attaquer les blockhaus qui avaient été
24 détruits, les tranchées. Donc avancer et poursuivre cette offensive de
25 l'infanterie, prendre le contrôle de cette partie de la ligne de front et
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1 nous y maintenir. Moi-même, j'y ai mené l'attaque sur le premier blockhaus
2 ennemi à Cerova Ravan.
3 Question: Le témoin Subasic Osman qui a témoigné ici même, nous a dit
4 quelque chose que je souhaiterais vous rappeler. Il a dit que les forces
5 musulmanes ayant probablement remarqué l'arrivée du véhicule autotracté
6 ont quitté ses positions le 19 juillet 1992. Est-ce exact?
7 Réponse: Eh bien, je peux vous dire que le 21, après l'engagement de ce
8 véhicule autotracté, la résistance des éléments d'infanterie de l'ennemi
9 présents dans les blockhaus n'a pas été très dynamique. Mais il est
10 possible qu'à partir du 19, lorsque la pelleteuse est arrivée, ils nous
11 aient vus sur la route vers Cerova Ravan.
12 On ne peut donc pas penser qu'à ce moment-là leurs forces se sont
13 préparées à se retirer parce que l'arrivée de nos véhicules signifiait,
14 pour eux, qu'il leur serait impossible de garder le contrôle de la ligne
15 de front. Le fait que nous ayons pris la ligne pendant trois, sur trois
16 kilomètres et demis s'ajoute au fait que nous n'avons trouvé aucun cadavre
17 de soldats ennemis sur cette ligne de front. Cela signifie qu'ils
18 s'étaient préparés à l'évacuation, et qu'ils étaient allés sur l'élévation
19 suivante à environ 700 à 800 mètres.
20 Question: Toujours en me référant au témoignage de Osman Subasic, je
21 voudrais vous dire qu'il a affirmé qu'ils avaient des informations au
22 sujet de la présence, de votre présence à cet endroit, de la présence de
23 la pelleteuse. Il y avait également les pluies, la pluie est tombée très
24 fort. Qu'avez-vous à répondre?
25 Réponse: Eh bien, j'ai bien écouté ce témoin et je suis d'accord avec ce
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1 qu'il a dit. Mais moi, j'affirme que l'excavatrice n'est pas arrivée au
2 début de l'offensive, elle est arrivée au bout de cinq ou six jours
3 seulement. Il n'est donc pas possible qu'ils aient vu la pelleteuse avant
4 le 14 ou 15 juillet. A partir de ce moment-là, à partir du 15 juillet
5 -comme je l'ai déjà dit-, la pelleteuse, pendant deux jours, a travaillé à
6 élargir ce tronçon de la route. Cela nous donne donc le 16 ou 17 juillet.
7 Ensuite, nous avons perdu une journée entière parce que nous avions passé
8 cette journée à fabriquer le bouclier pour la pelleteuse. Donc le 19 et le
9 20, nous avons travaillé sur la route vers Cerova Ravan. C'est vrai que
10 ces jours-là il était possible de voir la pelleteuse. On peut dire que la
11 pelleteuse était visible à partir de leur position du 15 juillet jusqu'à
12 la fin de l'opération, c'est-à-dire jusqu'au 21 juillet.
13 Question: Est-ce que ce jour-là, de votre côté, quelqu'un a été blessé,
14 quelqu'un qui se trouvait en votre compagnie?
15 Réponse: Après la prise de ces blockhaus, les premiers qui se trouvaient
16 au point le plus élevé à Cerova Ravan, j'ai reçu une mission. Le
17 commandant du bataillon était déjà arrivé parce qu'il menait un groupe
18 d'hommes qui avait lancé une attaque à partir de Preljuca contre cette
19 partie de la ligne de front près de Cerova Ravan, vers le village de Neva
20 Kovic.
21 Il est venu en personne à Cerova Ravan et il m'a ordonné de poursuivre,
22 d'aller tout le long, de parcourir tout le long de la ligne de front.
23 Comme je l’ai déjà dit précédemment, j'avais remarqué qu'il y avait un
24 champ de mines, il y avait des mines à fragmentation, différents types de
25 mines.
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1 Au début, je me suis contenté d'enlever les fils, les détonateurs, parce
2 que je voulais éviter que nos hommes marchent sur les mines et ne les
3 déclenchent. Tous les deux ou trois blockhaus il y avait des mines, donc
4 j'ai récupéré les détonateurs, les fils, pour éviter que ces mines ne
5 soient déclenchées. Ensuite, nous sommes descendus vers la Drina. Ensuite,
6 ceux qui étaient de la compagnie Josanica m’ont escorté pendant que je
7 faisais ce travail. La nuit Goran Miljacic avait été blessé. Nous étions
8 près de la Drina, nous avons dû le transporter pour l'emmener vers la
9 nouvelle partie de la route qui allait de Cerova Ravan à Gabelic Kosa,
10 parce qu'il était nécessaire de le transporter à l'hôpital.
11 Question: Pouvez-vous me dire dans quelles circonstances Goran a été
12 transporté à l'hôpital et quand est-ce que cela s'est produit?
13 Réponse: J'ai dit qu'il a été blessé juste avant la tombée de la nuit,
14 entre 20 heures 15 et 20 heures 50. Nous étions au bas de Zubovic Kosa,
15 c’est-à-dire que nous étions pratiquement au bord de la Drina. L'attaque a
16 été lancée de Zubovic, c'est un village. Parce que, alors que nous
17 passions le long de cette ligne, nous, des hommes sont venus dans les
18 tranchées, dans les blockhaus, mais n'ont pas bougé. Ils avaient
19 simplement la mission de passer la nuit dans ces blockhaus. Ensuite, ils
20 ont mené des missions de reconnaissance pour voir où se trouvaient les
21 positions.
22 C'est un terrain, un territoire extrêmement difficile. Zubovic Kosa c'est
23 une sorte de colline aux pentes extrêmement escarpées. Nous l'avons donc
24 emmené là-haut, nous étions sept à porter cet homme blessé. Je suis monté
25 dans un véhicule, j'étais avec. Il y avait un infirmier qui s'appelait
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1 Veselin, je ne me souviens pas de son nom de famille. Ranko Gavran était
2 le chauffeur, il était censé conduire. C'était lui qui était censé
3 conduire le véhicule mais, en fait, il n'était pas là. C'est donc moi qui
4 ai conduit le véhicule jusqu'à l'hôpital, nous y sommes arrivés vers 22
5 heures 30, 23 heures.
6 Question: Entre le 6 et le 21 juillet, est-ce que vous avez vu Blagojevic
7 et Marko? Est-ce qu'ils faisaient partie de la compagnie Josanica?
8 Mme le Président (interprétation): Vous avez parlé de juin. Vous ne voulez
9 pas plutôt dire juillet?
10 M. Prodanovic (interprétation): Oui, c'est effectivement juillet dont il
11 s'agit.
12 M. Kunarac (interprétation): Marko Matovic était le chef de la compagnie
13 Josanica, alors que Vaso Blagojevic, lui, c'était seulement un membre de
14 cette compagnie. Marko Matevic, je lui parlais pratiquement tous les
15 jours, et Vaso je le voyais également. Vaso Ivanovic et un certain Goran,
16 ce sont les hommes qui m'ont accompagné pendant ces dix jours. Donc ces
17 deux hommes étaient constamment à Gabelic Kosa en ma compagnie.
18 Question: Pendant cette période, alors que vous vous trouviez à cet
19 endroit, vous dites que vous avez passé la nuit du 7 à Sorlaci, le village
20 de Sorlaci. Les autres nuits, où les avez-vous passées?
21 Réponse: Les autres nuits, je les ai passées à Gabelic Kosa comme tous
22 les autres hommes. Nous étions 80 environ de la compagnie Josanica.
23 Pratiquement chaque nuit on s'occupait de garder les lignes que nous
24 avions capturées. Moi, j'étais plus particulièrement chargé des missions
25 de reconnaissance et d'essayer de trouver un moyen d'enfoncer les lignes
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1 de front.
2 A plusieurs reprises, nous avons essayé de lancer des offensives
3 d'infanterie directes contre ces blockhaus, mais en raison de la
4 configuration du terrain c'était complètement impossible. C'était
5 impossible avant l'arrivée du véhicule autotracté, parce que Zubovici Kosa
6 où se trouvait cette ligne, c'est un endroit aux pentes extrêmement
7 prononcées.
8 On pouvait arriver sous les blockhaus sans trop se faire remarquer, mais
9 il était absolument impossible de lancer une attaque contre ces blockhaus.
10 Donc, cela aurait été complètement impossible de les prendre. Tous les
11 jours on essayait de lancer des attaques contre une partie de la ligne de
12 front pour essayer, au moins, de capturer une tranchée ou bien un
13 blockhaus pour poursuivre l'attaque contre les autres bunkers qui se
14 trouvaient sur la même ligne.
15 Question: Vous nous dîtes qu'avec Goran Miljacic vous êtes arrivés le
16 soir en sa compagnie le 21 juillet. Est-ce que c'est le premier jour où
17 vous êtes allé à Foca depuis le 6 juillet?
18 Réponse: Eh bien, à partir du 23 juin, j'étais à Dragocava. J'ai été
19 transféré à Preljuca. A ce moment-là, j'ai seulement traversé Foca. Là, je
20 suis allé directement à Preljuca. En tout cas, ce qui est sûr, c'est qu'à
21 partir du 6 et jusqu'au 21, je n'ai pas passé une seule seconde dans un
22 autre endroit que Gabelic Kosa et Cerova Ravan. Chaque nuit, pendant cette
23 période, je l'ai passée dans ce coin-là. J'ai participé à ces opérations,
24 à ces opérations de combat que j'ai décrites, tous les jours. Tous les
25 hommes qui se trouvaient là, ils étaient 70 à 80, peuvent en témoigner.
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1 J'ai déjà dit, que le soir, en début de soirée, j'allais du village de
2 Gabelic vers cette partie de la route sur laquelle il fallait travailler.
3 Cela, je l'ai fait jusqu'au 17 ou 18. Ensuite, je rentrais.
4 Ensuite, après que la pelleteuse ait réussi à faire son travail, moi j'ai
5 reçu la tâche de garder l'engin de construction dans la forêt. Nous sommes
6 donc restés dans la forêt, nous avons gardé le véhicule, l'engin, pour
7 empêcher l'ennemi de venir pendant la nuit le détruire. Donc il n'y a pas
8 une seule seconde que j'ai passé en dehors de cette région. Le plus loin
9 où je sois allé, c'est la première nuit à Sorlaci, le village de Sorlaci.
10 Ensuite, à partir de Gabelic Kosa, je ne suis jamais remonté en amont.
11 Question: Madame la Présidente, Messieurs les Juges, nous avons maintenant
12 deux documents dont nous souhaitons demander le versement. Le premier
13 document est une lettre de l'hôpital, une lettre de sortie de l'hôpital
14 pour Goran Miljacic, personne dont nous a parlé le témoin. Ceci montre
15 très clairement que, le 21 juillet, cette personne est arrivée à l'hôpital
16 où elle est restée jusqu'au 25 juillet 1992.
17 L'autre pièce à conviction est un certificat délivré par le poste
18 militaire de Srbinje. A l'époque, il y avait des combats à Cerova Ravan,
19 c'est la teneur de ce certificat. Pendant toute cette période, l'accusé se
20 trouvait dans cette région.
21 Vous avez reçu ces documents et j'ai suivi les instructions qui m'avaient
22 été données par le Greffe, j'ai fait des photocopies pour communiquer les
23 documents au Greffe. Sinon tout le monde, ici, dans le prétoire, dispose
24 déjà des documents.
25 M. Hunt (interprétation): Oui, mais il faudrait nous aider à trouver les
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1 documents dans le volume que vous nous avez remis, parce que ces documents
2 ne sont pas toujours présentés dans un ordre chronologique ou logique.
3 Mme le Président (interprétation): Je crois que la greffière d'audience
4 peut nous aider en ce qui concerne les cotes et les numéros.
5 M. Prodanovic (interprétation): Ce volume commence par 91, et les
6 documents sont les documents 93 et 99.
7 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Si vous me permettez d'intervenir,
8 d'après la liste que vous nous avez remise, le document de l'hôpital est
9 le document numéro 92.
10 Mme le Président (interprétation): Mais celui dont dispose la greffière
11 d'audience?
12 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): 93, c'est le document de l'hôpital.
13 Mme le Président (interprétation): Et l'autre document?
14 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je crois qu'il s'agit du document 99.
15 Mme le Président (interprétation): Y a-t-il des objections quant à
16 l'admission de ces documents?
17 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Non.
18 Melle Lauer: Le document qui portait le numéro 93, document présenté par
19 la défense, sera enregistré au titre des pièces à conviction sous le
20 numéro D78.
21 Le document présenté qui a été présenté sous le numéro 99 de la défense,
22 qui est ce certificat rendu par le poste militaire de Srbinje et qui
23 portait le numéro 99, sera enregistré par le Greffe sous le numéro D79 des
24 pièces de la défense.
25 Mme le Président (interprétation): Merci. Nous pouvons poursuivre.
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1 M. Prodanovic (interprétation): Poursuivons. Qu'avez-vous fait après votre
2 arrivée à l'hôpital, le 21 juillet?
3 M. Kunarac (interprétation): Quand j'ai amené Miljacic à l'hôpital, je
4 suis resté un certain temps à l'hôpital en sa compagnie jusqu'à ce qu'il
5 soit officiellement pris en charge. On l'a emmené pour lui faire faire des
6 radios et pour lui faire subir d'autres examens. Il s'est changé, il a
7 enfilé le pyjama fourni par l'hôpital et moi, j'ai pris ses vêtements qui
8 étaient tachés de sang. Il avait été blessé, une balle lui avait traversé
9 le bras, elle avait également traversé son estomac. Mais il a eu de la
10 chance en un sens, parce que ce n'étaient pas des blessures très graves,
11 il n'a pas été touché au niveau de l'os du bras. En ce qui concerne son
12 estomac, il a simplement été blessé au niveau des abdominaux, il n'y avait
13 donc pas de blessures internes. J'ai pris ses vêtements ensanglantés, j'ai
14 été chez mes parents où j'ai pris un bain. J'ai demandé à ma mère de laver
15 mes vêtements ainsi que les siens. Cette nuit du 21 au 22, je l'ai passée
16 chez mes parents.
17 Question: Le 22 juillet, vous étiez chez vous le matin, c'est là que vous
18 vous êtes réveillé?
19 Réponse: Oui.
20 Question: Que s'est-il passé ce jour-là et les jours qui ont suivi?
21 Réponse: Ce jour-là, quand je me suis levé, ma mère avait déjà lavé ses
22 vêtements ainsi que mon uniforme. Elle avait tout nettoyé, repassé
23 également. J'ai dit que la veille j'étais arrivé à l'hôpital vers 23
24 heures, avant qu'il ne soit pris en charge officiellement, c'était déjà
25 minuit.
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1 Donc j'ai pris le même véhicule, je me suis rendu à l'hôpital, je lui ai
2 rendu ses vêtements, vêtements qui avaient été nettoyés et repassés. Là,
3 j'ai trouvé à l'hôpital le commandant du Bataillon, je lui ai parlé. Il
4 m'a dit que le véhicule que je conduisais -parce que je lui ai demandé où
5 est-ce que je devais amener le véhicule-, il m'a dit de l'emmener au
6 quartier général de la Brigade qui s'occuperait de le rendre à la Brigade,
7 à la compagnie Josanica qui allait continuer à utiliser ce véhicule comme
8 ambulance.
9 C'est ce que j'ai fait, nous sommes allés ensemble au quartier général,
10 nous avons parlé à un certain nombre de gens qui m'ont donné des ordres
11 verbaux au sujet de ma mission suivante, qui était de me rendre sur la
12 position de Dragocava.
13 A partir de cette position, nous devions observer et mener des mesures de
14 reconnaissance vers Slatina. C'était la zone de compétence du 5ème
15 Bataillon. Cela se trouve vers Godine sur la Cehotina et un peu plus loin
16 sur la Slatina, c'est donc à l'opposé de Prcica. Donc, le 22, j'étais
17 censé mener à bien cette mission. A ce moment-là, le commandant du
18 Bataillon m'a dit que les hommes qui m'avaient assisté pendant ces 15
19 jours, à Gabelic Kosa et Cerova Ravan, il m'a dit que ces hommes-là, le
20 22, étaient revenus de Gabelic Kosa et Cerova Ravan et que, le lendemain,
21 il se présenterait, il serait de nouveau disponible.
22 Moi, j'ai dit que pour ce qui était du travail de reconnaissance, c'était
23 quelque chose qui était très différent de ce que j'avais fait jusqu'à ce
24 moment-là. Avant cela, notre travail consistait essentiellement à
25 travailler avec des mines. Là, on me demandait de mener à bien des
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1 missions de reconnaissance. J'ai dit personnellement que je pouvais
2 accepter cette mission, mais que je préférais à ce moment-là le faire avec
3 un groupe de quatre, cinq, voire six hommes, mais seulement s'il
4 s'agissait de volontaires parce que j'étais tout à fait conscient de la
5 difficulté de cette mission, c'est une mission extrêmement dangereuse.
6 Donc, j'avais besoin d'hommes qui étaient prêts à mener à bien cette
7 mission.
8 Question: Où avez-vous passé la nuit du 22?
9 Réponse: Après cette nuit-là, après m'être entretenu avec le commandant
10 du Bataillon au quartier général, et après avoir parlé également à
11 quelqu'un qui appartenait au service de sécurité de la brigade. Je suis
12 retourné au domicile de mes parents où j'ai passé la nuit. Je suis arrivé
13 chez eux avant la tombée du jour, vers 17 heures ou 18 heures.
14 Question: Vous avez donc passé la nuit à cet endroit? La nuit du 22 au 23?
15 Réponse: Oui, la nuit du 22 au 23, je l'ai passée au domicile de mes
16 parents.
17 Question: Et le jour suivant, le 23 juillet, que s'est-il passé au début
18 de la journée?
19 Réponse: Très tôt le matin ma mère est venue me réveiller parce qu'elle
20 avait entendu une sirène. Vers 7 heures moins le quart ou 7 heures du
21 matin les sirènes se sont déclenchées, cela signifiait qu'il y avait
22 danger. Tous les hommes qui étaient de repos, tous les militaires qui
23 étaient de repos étaient censés se présenter auprès de leur unité.
24 Immédiatement je me suis habillé, j'ai pris mon équipement. Le temps était
25 très nuageux, j'ai pris le blouson en cuir de mon frère parce que moi, je
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1 n'avais qu'un tee-shirt kaki et une tenue de camouflage. Donc, je suis
2 allé au quartier général du 5ème Bataillon, là où devaient se retrouver les
3 hommes du 5ème Bataillon, c'était au lycée.
4 Question: Ensuite, qu'avez-vous fait? Est-ce qu'on vous a donné une
5 mission précise?
6 Réponse: Eh bien, je me suis rendu à l'endroit où nous étions censés nous
7 réunir. Je suis parti depuis le domicile de mes parents qui se trouve à
8 côté de l'église, à côté du cimetière orthodoxe de Foca. Je suis passé
9 devant le cimetière, le long de la rivière Cehotina, vers le centre de la
10 ville pour me rendre au lycée. Là, devant l'ancien club de la JNA à Foca,
11 j'ai vu un groupe important d'hommes, il y avait également le commandant
12 de la Brigade de Foca.
13 Il disait aux hommes qu'il fallait qu'ils se préparent rapidement pour une
14 offensive dans la zone de responsabilité du 2ème Bataillon, qu'il fallait
15 se préparer à une attaque, mener une attaque dans la zone frontalière de
16 Jabuka. D'après ce qu'il savait, il y avait beaucoup de blessés, la
17 situation était inquiétante, n'était pas très prometteuse. On m'a demandé
18 de me rendre là-bas et de faire tout ce que je pouvais.
19 Question: Avec qui êtes-vous parti et comment êtes-vous parti?
20 Réponse: Il m'a vu là pour la première fois le 22, au moment où j'ai
21 parlé avec le commandant du 5ème Bataillon, ainsi qu'avec un remplaçant du
22 commandant chargé de la sécurité. Mais il était là aussi au cours de mes
23 actions de reconnaissance à Cerova Ravan. Et là, il avait dit qu'il serait
24 bien que je me rende là-bas avec plusieurs autres personnes pour voir
25 exactement où se trouvait l'ennemi et dans quelle direction il se
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1 déplaçait. Est-ce qu'il s'est déplacé dans la direction de Kosova Luka ou
2 vers la Foca, ou bien dans la direction de Jabuka vers Ustikolina. Il m'a
3 donc dit de me rendre sur place pour lui rapporter la situation dans la
4 zone.
5 Donc, sept ou huit autres personnes se sont portées volontaires, je suis
6 sûr que Milika Kovacevic était là. Il avait un véhicule, c'était un
7 véhicule qu'on appelait Fico, Zastava 750; il y avait un autre véhicule de
8 marque Zastava 101. Il y avait quelques autres personnes qui sont parties
9 avec cette autre voiture. Donc on est parti tous ensemble, en direction de
10 Previla pour voir quelle était la situation là-bas.
11 Question: A quel moment êtes-vous arrivé dans le village de Previla?
12 Réponse: Vers huit heures et demis à peu près. Nous sommes arrivés au
13 poste de commandement du 2ème Bataillon, mais nous n'avons trouvé personne
14 là-bas puisque tous les commandants étaient déjà sur le terrain, dans la
15 zone de responsabilité de ces bataillons. Nous avons trouvé beaucoup de
16 femmes, d'enfants, de vieillards. Ils nous ont dit que l'attaque avait
17 déjà commencé.
18 Moi, je n'ai jamais été auparavant dans cette région autour de Jabuka. Je
19 leur ai demandé si la route était pratiquable, et si c'était le cas,
20 pendant combien de temps puisque je devais avancer le plus possible dans
21 le terrain, dans cette zone de responsabilité. Ils m'ont dit que je
22 pouvais aller jusqu'à un village, le village de Milotine qui est à peu
23 près à un kilomètre, un kilomètre et demi de là. Nous nous sommes donc
24 rendus jusqu'à Milotine. Ensuite, avec nos deux voitures, nous nous sommes
25 rendus dans les autres villages, les autres villages qui ont suivi.
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1 Donc je pense que le premier village où nous sommes arrivés à pied après
2 avoir laissé la voiture à Milotine, était le village qui s'appelait -je
3 crois- Milotine 2. Là, nous avons rencontré sept, huit personnes plus
4 jeunes plutôt, qui protégeaient le village. C'est-à-dire qu'ils étaient en
5 train de monter la garde pour protéger les civils qui étaient en train de
6 fuir. Nous nous sommes joints à eux. Il était déjà neuf heures, neuf
7 heures et demis du matin. Nous avons pu voir que dans le village suivant
8 -je ne me souviens pas du nom de ce village, mais c'est le premier village
9 après Kozan à 700 ou 800 mètres à vol d'oiseau du village de Pusjena.
10 Donc nous avons vu déjà qu'il y avait des incidents et des tirs dans les
11 villages suivants. Moi-même, ainsi que les cinq ou six hommes qui m'ont
12 suivi, ainsi que les personnes que nous avons trouvé dans le village, nous
13 nous sommes déployés dans le village pour résister en cas d'attaque.
14 J'avais proposé que l'on fasse cela, et nous l'avons fait.
15 Question: Avez-vous trouvé des réfugiés sur place?
16 Réponse: A Previla, quand je suis arrivé à Previlaa jusqu'au poste de
17 commandement, le quartier général du 2ème Bataillon, j'ai trouvé un grand
18 nombre de civils qui étaient déjà arrivés de Jabuka, des réfugiés. Ils
19 m'ont tous dit que l'attaque sur leur village avait débuté ce matin, à 5
20 heures. C'est une région assez grande, assez habitée, où il y a pas mal de
21 villages, de hameaux plutôt -puisque chaque hameau avait dix ou quinze
22 fermes ou maisons. C'était donc des hameaux qui avaient chacun entre
23 trente et cinquante habitants.
24 Ils ont tous dit la même chose, ils ont tous dit que l'attaque sur leur
25 village, sur leur hameau, avait commencé vers cinq ou six heures du matin.
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1 Quand nous sommes arrivés à Podstinjena qui était le dernier village dans
2 cette région, nous n'avons trouvé que sept, huit personnes armées. Ils
3 n'étaient pas bien armés évidemment, ils n'avaient qu'un ou deux fusils
4 semi-automatiques. En ce qui concerne les autres, ils avaient quelques
5 fusils de chasse et quelques fusils M48 de l'ex-armée yougoslave. Nous
6 n'avons pas trouvé de civils dans ce village, nous avons pas trouvé, ce
7 jour-là, un seul civil vivant sortir de cette région de Jabuka en
8 direction de Previla.
9 Question: Vous avez dit que c'était la zone de responsabilité du 2ème
10 Bataillon. Est-ce que vous avez été subordonné au commandement du 2ème
11 Bataillon?
12 Réponse: Dans mon entretien, j'avais dit que ma première mission, la
13 mission d'attaquer Jabuka… il s'agissait d'une zone qui était partagée
14 entre le 2ème et le 3ème Bataillon. La première était la zone vers
15 Miljevina, donc le 3ème; alors que le 2ème Bataillon allait vers Jabuka et
16 Previla. C'était donc une zone à cheval, une zone à responsabilité qui
17 dépendait de deux bataillons: du 2ème et du 3ème Bataillon.
18 Moi, j'ai reçu l'ordre du chef du groupe tactique. Comme j'étais dans la
19 zone de responsabilité du 2ème et du 3ème Bataillon, à ce moment-là, je
20 recevais l'aide, le support logistique du 2ème Bataillon mais -comme je
21 l'ai déjà dit-, au moment où je suis arrivé au quartier général du 2ème
22 Bataillon le commandant n'était pas là. Alors, j'ai agi de mon propre
23 chef, je n'ai pas consulté le commandant de Bataillon, mais j'ai suivi les
24 ordres du commandant de la Brigade.
25 Question: Donc, ce jour-là, le 23, avez-vous su quels étaient les
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1 villages serbes qui avaient été incendiés? Je vous prie de vous rapprocher
2 de la carte et de nous montrer cette région.
3 Mme le Président (interprétation): L'huissier peut-il aider l'accusé avec
4 le microphone et tout le reste, s'il vous plaît?
5 M. Kunarac (interprétation): La carte est un peu loin, ce n'est pas très
6 commode.
7 Mme le Président (interprétation): Huissier, pourriez-vous aider le témoin
8 pour que les interprètes puissent l'entendre, pour qu'il puisse
9 convenablement montrer ce qu'il souhaite montrer sur la carte?
10 M. Kunarac (interprétation): Cette région de Jabuka est placée en contre-
11 bas de la Jahovina. La Brigade de Foca tenait le plus au nord la colline
12 de Stolac. Ensuite, ces lignes allaient jusqu'à Mekopine en descendant la
13 route vers Previla. C'est à Previla que se trouvait le quartier général du
14 2ème Bataillon.
15 Le village de Jabuka se trouve au pied de Jahovina. Il y a beaucoup de
16 villages dans cette région. J'ai dit que je me suis rendu en voiture
17 jusqu'au village de Milotine. C'est le premier village dans la région de
18 Previla. Je suis arrivé jusqu'au village de Podstijena. Là on peut voir la
19 cote 13. Ces deux villages n'avaient pas été incendiés. En revanche, les
20 autres villages, Slavcici, Prijeklade, Drazevo, Marevo, Modro Polje.
21 Donc j'ai dit Slavicici, Drazevo, Marevo, Modro Polje, donc les villages
22 que l'on pouvait voir à partir de cet endroit, j'ai pu voir que tous ces
23 villages avaient été incendiés. Les réfugiés qui s'étaient réfugiés de ce
24 village m'ont dit que ce matin-là, le village de Stojkovici ainsi que
25 d'autres villages, d'autres hameaux serbes au pied de la Jahovina avaient
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1 été incendiés. Tous les villages serbes, à part Podstijena, Milotine et un
2 ou deux petits villages près de Previla, Bosanovici n'ont pas été
3 incendiés ce jour-là.
4 Tous les autres villages ont été brûlés et les habitants de ces villages
5 se sont réfugiés en direction de Previla. Ceux qui n'ont pas pu fuir ont
6 été tués sur-le-champ. Aucun témoin vivant n'a été échangé ou trouvé ou
7 pris vivant.
8 Au cours des quatre ou cinq jours qui ont suivi, j'ai appris qu'il y a eu
9 des personnes qui avaient été prises vivantes. Elles ont subi le martyre,
10 elles ont été torturées et tuées par la suite.
11 Question: Est-ce que ce jour-là, le 23, vous avez reçu des informations
12 concernant les victimes et les personnes tuées?
13 Réponse.: Ce jour-là, j'ai déjà dit, que je suis arrivé vers 9 heures et
14 demie, j'ai parlé avec quelques villageois. Ils étaient au nombre de sept
15 ou huit. Je pense que l'un d'entre eux s'appelaient de Goran Maslo, je
16 crois. Il venait de l'un de ces deux villages dont je viens de parler,
17 Milotine 1 ou 2. Aucun membre de sa famille n'avait été tué, car ces deux
18 villages n'avaient pas été attaqués. Et donc, on a pu parler parce qu'il
19 n'était pas tellement ému, il n'avait perdu personne. Il n'y a pas eu de
20 victime dans sa famille, alors que tous les autres avaient perdu
21 quelqu'un, une mère, un père, un frère. Et d'après tout ce récit, nous
22 avons pu conclure qu'il y a eu beaucoup de victimes civiles. A l'époque,
23 j'ai pensé que plus que 60 ou 70 personnes avaient été tuées dans ce
24 village.
25 Question: Que se passe-t-il ensuite ce jour-là?
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1 Réponse: Ce jour-là, j'ai déjà dit que j'avais proposé à ce groupe de
2 personnes d'essayer de nous organiser pour essayer de défendre au moins ce
3 village-là. Parce que j'avais une jumelle, et je pouvais voir plus loin et
4 j'ai donc vu que, finalement, dans le village qui était en train de
5 brûler, il n'y avait pas beaucoup d'hommes. Ils étaient entre 25, 30ou 35.
6 Ils se déplaçaient dans le village en brûlant tout devant eux, en tuant le
7 bétail. Moi, je leur ai proposé de nous organiser, d'essayer de résister.
8 Et nous l'avons fait. Ensuite, nous nous sommes approchés du village où
9 ils se trouvaient. Nous avons ouvert le feu, il y a eu l'échange de tirs.
10 Nous avons blessé une personne parmi les forces ennemies. Et ils ont
11 commencé à se retirer.
12 Au moment où nous avons fait cet échange de tirs, on a ouvert le feu sur
13 nous, de la côte Kozanj. Cette côte se trouve à peu près à 600 ou 700
14 mètres à vol d'oiseau de l'endroit où nous étions. Nous avons donc été
15 obligés de nous retirer vers un village, le village qui s'appelle
16 Podstijena, puisqu'il se trouve juste au pied d'un rocher. J'ai donc
17 discuté avec les hommes qui étaient avec moi, et j'avais proposé que nous
18 partions vers Kozanj. J'avais proposé que l'on essaie de prendre Kozanj,
19 puisque c'était une colline qui dominait la région et qui offrait une très
20 bonne vue sur beaucoup de villages avoisinants. On pouvait voir
21 pratiquement la moitié de la région de Jabuka à partir de cette colline.
22 Question: Est-ce que l'attaque musulmane s'est arrêtée ce jour?
23 Réponse: J'ai déjà dit que, lorsque je suis arrivé dans le village
24 Podstijena, il était entre 9 heures et dix heures, en tout cas pas plus
25 que 10 heures du matin. Les Musulmans étaient toujours en train de tirer
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1 et d'incendier les villages suivants. Et on entendait aussi les tirs venir
2 de Jabuka et des villages avoisinants. Mais les hommes du 2ème Bataillon
3 s'étaient déjà organisés, ils avaient ouvert le feu, et les Musulmans
4 n'ont donc pas continué leur attaque.
5 Quand je suis arrivé à Podstijena, j'ai envoyé un télégramme chiffré au
6 commandant la Brigade. J'avais aussi un poste-radio portable, et j'ai
7 envoyé un message disant qu'ils sont arrivés jusqu'à cet endroit, qu'il y
8 avait un cessez-le-feu provisoire mais que l'on ne pouvait pas prévoir des
9 mouvements qui allaient suivre. J'ai aussi dit que l'on pouvait clairement
10 voir que l'ennemi était présent en grand nombre puisque tous ces villages,
11 qui étaient quand même éparpillés dans la région, avaient été attaqués. Et
12 dans chaque village, dans l'attaque sur chaque village, entre 30 et 40
13 hommes ont participé à ces attaques. L'ennemi s'est approché de tous ces
14 villages, et ils ont conduit des attaques éclaires vers 5, 6 heures du
15 matin sur tous ces villages. Dans la matinée, tous ces villages avaient
16 été pris et les habitants s'étaient enfuis. Les autres, ceux qui n'ont pas
17 pu s'enfuir, ont été tués.
18 Question: A quel moment avez-vous trouvé les premiers cadavres?
19 Réponse: Moi, j'avais parlé avec ces hommes de Podstijena mais à partir
20 de là, je ne pouvais pas voir la situation sur le terrain. Je ne pouvais
21 pas voir quels étaient les mouvements de l'ennemi. Je leur ai donc proposé
22 d'essayer de prendre Kozanj puisque cette colline vraiment dominait le
23 terrain. Et comme on avait ouvert le feu sur nous depuis Kozanj, j'avais
24 tout de suite compris que, finalement, les forces ennemies sur Kozanj
25 n'étaient pas très importantes. Nous avons fait un grand détour, nous
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1 sommes passés par Miljevina, et nous avons mené une attaque sur Kozanj
2 pratiquement de Rudi Brdo, c'est-à-dire des positions d'où attaquaient les
3 forces ennemies. Nous avons donc mené notre attaque, nous avons réussi à
4 faire une attaque surprise, nous avons tué deux soldats ennemis et nous
5 avons trouvé cinq cadavres, des Serbes qui, à l'époque, n’agissaient pas
6 dans le cadre du 2ème Bataillon, mais c'était des villageois qui avaient
7 monté la garde sur Kozanj . Nous avons trouvé cinq cadavres, mais on nous
8 a dit que trois autres hommes manquaient. On les a trouvés plus tard,
9 puisqu'ils s'étaient enfuis de Kozanj. Ils s'étaient enfuis dans une
10 grotte, il y avait un blessé parmi eux. Et ces trois hommes ont réussi à
11 survivre à l'attaque sur Kozanj .
12 Question: Pourriez-vous nous dire jusqu’à quel moment vous êtes resté là-
13 bas?
14 Réponse: Je suis resté dans la région de Jabuka. au cours des trois ou
15 quatre jours suivants. Je suis sûr que nous avons trouvé le dernier
16 cadavre le 26, pratiquement dans la nuit. Nous l'avons trouvé à la tombée
17 de la nuit et nous l'avons enterré pratiquement dans la nuit. Tous les
18 cadavres que nous avons trouvés au cours de ces jours-là, nous tentions de
19 les enterrer dans des cimetières, sur place, dans le village. Mais en ce
20 qui concerne les autres cadavres, comme il faisait très très chaud puisque
21 nous étions déjà au mois de juillet, ces cadavres étaient en état de
22 décomposition déjà au bout de 24 heures. Nous étions donc obligés de les
23 enterrer immédiatement sur place.
24 Question: A partir du 23 jusqu'au 26, entre le 23 et 26, vous avez trouvé
25 combien de cadavres et vous en avez enterrés combien?
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1 Réponse: J'ai dit que nous avons trouvé ces six cadavres tous seuls, à
2 Kozanj. A partir du moment où nous avons pris Kozanj, les villageois de
3 Jabuka étaient déjà partis à la recherche des leurs, puisque les forces
4 musulmanes s'étaient retirées. Entre le village de Mareno et Drazevici, il
5 y avait des positions qui avaient été laissées, qui n'étaient plus
6 actives, donc les villageois étaient partis à la recherche des leurs.
7 Un homme plutôt âgé avait trouvé son fils, le corps de son fils qui avait
8 été tué. Il savait où se trouvait ce corps, il l'a trouvé. En manipulant
9 le corps de son fils, il y a eu un accident parce que les Musulmans
10 avaient tué son fils, l'avaient massacré, ils avaient inscrit la lettre
11 "U" sur son front. Ils avaient laissé une grenade dans le dos du fils.
12 Quand le père a commencé à manipuler le corps de son fils la grenade s'est
13 activée et le père a été blessé. Il a été blessé aux jambes.
14 A ce moment-là, j'ai reçu l'ordre du deuxième commandant du 2ème Bataillon
15 d'accompagner ces villageois, de rester avec eux. Je leur ai donné ordre
16 de ne pas s'approcher des cadavres avant que je n'ai vérifié s'il y avait
17 des mines placées sur les cadavres. Après avoir vérifié cela, seulement
18 après avoir vérifié, j'ai laissé les civils s'approcher des cadavres. Nous
19 avons donc trouvé plus de 40 cadavres. C'était tous des civils.
20 Evidemment, je ne compte pas les cinq cadavres des personnes trouvées plus
21 tôt, c'étaient des cadavres de personnes plus jeunes qui auraient pu être
22 aptes à combattre.
23 Tous les autres, ces 40 cadavres que nous avons trouvés étaient des
24 cadavres de personnes âgées, de femmes, d'enfants, des cadavres qui
25 avaient été mutilés. Nous avons aussi trouvé beaucoup de cadavres dans les
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1 maisons, dans les bâtiments. On ne pouvait même pas appeler cela des
2 cadavres, c'était vraiment des restes humains. Les villageois
3 recueillaient ces restes, essayaient de les enterrer sur place. En ce qui
4 concerne le nombre de victimes civiles, de cadavres de civils que nous
5 avons trouvés, je crois qu'ils étaient au nombre de 40 ou 50.
6 Question: Où passiez-vous vos nuits pendant ces quelques jours?
7 Réponse: Le 23, après la prise de Kozanj, j'ai passé la nuit sur la
8 montagne, sur la colline de Kozanj. Nous étions 7, 8, 10 à peu près et, le
9 lendemain matin, plusieurs personnes sont venues avec des chevaux pour
10 charger les cadavres et pour les enterrer. Je sais qu'un cadavre avait été
11 enterré sur place, puisqu'il venait d'un village plutôt lointain. Il
12 s'appelait Benko, je crois, c'est comme cela qu'on l'appelait. Comme toute
13 sa famille avait péri, ils l'ont enterré sur place à Kozanj. En ce qui
14 concerne les autres, ils ont réussi à tracter tous les autres cadavres.
15 J'ai donc passé cette nuit-là à Kozanj.
16 Pour les autres nuits, la nuit du 24, du 25, du 26, nous dormions sur
17 place, sur le terrain, puisque nous étions partis à la recherche des
18 cadavres. Nous nous arrêtions sur place à la nuit tombée. Puisque j'étais
19 accompagné de tous ces civils qui étaient en train de chercher aussi les
20 cadavres de leurs cousins, de leur famille. Souvent, ils avaient trouvé
21 les cadavres, mais ils ne pouvaient pas s'approcher parce que je leur
22 avais dit de ne pas manipuler les cadavres. Nous passions nos nuits sur
23 place. Les Musulmans s'étaient retirés vers leurs positions, à Grebina,
24 les positions à Grebak. Ils avaient leurs positions à Grebak depuis le
25 début du mois d'avril.
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1 Question: Est-ce que vous pourriez essayer de répondre à ma question de
2 façon plus précise?
3 Vous avez dit que vous avez passé vos nuits sur place?
4 Réponse: Oui, j'affirme qu'entre le 23 et le 26, la nuit du 26, j'ai
5 passé toutes mes nuits dans la région de Jabuka.
6 Question: Merci. Madame la Présidente, je pense que ce moment est
7 opportun pour faire une pause.
8 Mme la Présidente (interprétation): Oui, nous allons interrompre la séance
9 et faire une pause jusqu'à 11 heures 30.
10 (L'audience, suspendue à 11 heures, est reprise à 11 heures 30.)
11 Mme le Président (interprétation): L'interrogatoire principal continue.
12 Maître Prodanovic.
13 M. Prodanovic (interprétation): Merci, Madame la Présidente.
14 Lorsque vous avez enterré les cadavres, le 26 juillet, où êtes-vous allé
15 ensuite?
16 M. Kunarac (interprétation): Comme je l'ai déjà dit, le dernier cadavre
17 que nous avons trouvé enterré, nous l'avons enterré le soir du 27; en fait
18 nous l'avons enterré pendant la nuit. Après cela, nous sommes allés à
19 Previla. Nous sommes arrivés vers minuit, vers une heure et demie du
20 matin. J'ai passé la nuit à l'école de Previla. C'est là que se trouvait
21 le commandement, c'est là que j'ai passé la nuit. Le matin, le 27, il y a
22 eu des camions qui sont venus afin de transporter des civils qui
23 habitaient toujours à Previla. C'est avec eux que je suis allé à Foca. A
24 ce moment-là, j'ai poursuivi mon chemin jusqu'au commandement de brigade,
25 à Dragocava. C'est là que j'ai fait un rapport auprès du commandant chargé
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1 de la sécurité concernant mes activités effectuées dans cette région,
2 pendant cette période-là.
3 Question: Savez-vous où ont été hébergés les réfugiés du village de
4 Jabuka?
5 Réponse: Comme j'ai pris le même camion qu'un grand nombre de réfugiés
6 de Jabuka, je sais que les camions se sont arrêtés devant le lycée de Foca.
7 Ils sont allés au lycée alors que moi, j'ai poursuivi mon chemin vers
8 Velecevo. Je me suis rendu au quartier général de la brigade.
9 Question: Vous parlez là du lycée d'Aladza?
10 Réponse: Oui, il s'agit du seul lycée qui se trouve à Foca, celui-ci se
11 trouve dans la quartier d'Aladza?
12 Question: Est-ce que dans ce lycée, des réfugiés musulmans étaient logés
13 également au début du mois de juillet? Je vais terminer ma question. Vous
14 avez entendu les dépositions des témoins de l'accusation, est-ce qu'il
15 s'agit du même endroit?
16 Réponse: Le Procureur a montré plusieurs fois au témoin la photo du
17 lycée. Effectivement, il s'agit du même bâtiment que celui qui a été
18 montré par le Procureur. Les témoins qui ont témoigné ici, avaient été
19 placés, logés dans ce même lycée auparavant.
20 Question: Vous avez dit que vous êtes retourné le 27 juillet 1992. Où
21 avez-vous passé les jours qui ont suivi?
22 Réponse: Comme je l'ai dit, le 27, lorsque je suis arrivé au matin, je
23 suis arrivé à Foca vers 9 heures, 9 heures et demis, j'ai poursuivi mon
24 chemin jusqu'au quartier général. Je me suis entretenu avec le commandant
25 de la Brigade, je lui ai fourni un rapport concernant ce qui s'est passé à
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1 Jabuka, concernant la manière dont j'analysais ce que nous avons vu sur le
2 terrain en ce qui concerne tous ces cadavres, etc.
3 L'adjoint du commandant chargé de la sécurité assistait à cette
4 conversation. J'ai appris, par la suite, qu'il a été remplacé par le
5 commandant de la brigade et qu'une autre personne a pris ses fonctions. A
6 ce moment-là, moi, j'ai reçu l'ordre d'aller à Dragocava avec ces quelques
7 autres personnes qui étaient avec moi, qui étaient membre du 5ème Bataillon
8 tout comme moi. Nous devions aller à Dragocava afin de continuer de faire
9 des activités de reconnaissance vers Podila et Slatina conformément aux
10 instructions que j'avais reçues le 22, c'est-à-dire avant cet incident lié
11 à l'attaque contre Jabuka.
12 Ce jour-là, je suis allé directement à Dragocava, dans l'après-midi. C'est
13 là que se trouvait déjà un groupe de cinq ou six personnes. Ils étaient
14 déjà dans la région, ils étaient déjà actifs dans les activités de
15 reconnaissance. Je me suis joint à eux, j'y suis resté jusqu'à l'attaque
16 contre Preljuca qui a eu lieu le 29 juillet dans la matinée. A ce moment-
17 là, j'ai quitté cette région…
18 Question: Nous en parlerons plus tard.
19 Réponse: Le 27, je suis allé à Dragocava. Là, je suis resté et je
20 faisais des activités de reconnaissance vers Slatina jusqu'au 29 au matin.
21 Question: Où avez-vous passé la nuit du 27 et du 28? Est-ce que vous vous
22 en souvenez?
23 Réponse: En ce qui concerne le 27, je me souviens que je suis resté
24 entre Godine et Okoliste, dans la forêt, derrière le village de Brusana.
25 Là aussi il s'agissait de la zone de responsabilité du 5ème Bataillon. Il
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1 n'y a pas eu de lignes de front, de lignes de défense à cet endroit, à
2 Okoliste. Il y a eu autour de l'église un groupe de 10 à 15 personnes qui
3 assurait le contrôle et la sécurité de cette région.
4 Moi, en ce qui concerne la nuit du 27 et 28, je suis resté dans cette
5 région-là, donc vers Okoliste. Je faisais des activités de reconnaissance
6 vers Slatina, il s'agit de la municipalité, entre les municipalités de
7 Foca et Cajnic.
8 Question: Vous avez dit que vous y êtes resté jusqu'au 29 juillet?
9 Réponse: Le 29 juillet, j'y étais toujours. Dans la matinée, j'ai entendu
10 des coups de feu à Preljuca; Preljuca était au-dessus de Okoliste. Je suis
11 allé au matin vers Godjevno, j'ai eu une communication radio, j'ai
12 demandé ce qui se passait, on nous a dit qu'une voiture allait venir nous
13 chercher, que tout le monde devait se regrouper. Ils nous ont dit que
14 l'attaque avait été lancée contre Preljuca et que nous devions tous nous
15 rencontrer avec les venus. Il nous a transportés tous jusqu'à Preljuca,
16 Godjevno.
17 Là, je suis allé avec le nouveau commandant chargé de la sécurité vers la
18 ligne de front qui avait été attaquée. C'est la ligne que nous avons, dont
19 nous avons pris le contrôle auparavant le 21 mais là, ils l'ont attaquée.
20 Vers 10 heures du matin déjà j'étais à Cerova Ravan. J'étais accompagné de
21 six ou sept personnes qui, auparavant, avaient participé avec moi aux
22 activités de reconnaissance, mais nous avons tous été regroupés et mutés à
23 Cerova Ravan.
24 Question: Vous avez dit que Preljuca avait été attaquée. Par rapport à
25 Cerova Ravan, où se trouve Preljuca? Est-ce que c'est derrière les lignes
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1 de la défense serbe par rapport à Foca?
2 Réponse: En ce qui concerne le site de Preljuca, il se trouve -comme je
3 l'ai déjà dit-, au-dessus de Cerova Ravan, le sommet le plus haut est Goli
4 Vrh, il se trouve à une altitude de 1306 mètres. Comme je l'ai dit, c'est
5 là qu'une tranchée circulaire avait été creusée auparavant. Lorsque nous
6 avons pris le contrôle de Cerova Ravan, là,cela se trouve au-dessous de
7 Preljuca donc à 923 -ce sont les coordonnées. Donc Preljuca, Goli Vrh,
8 Cerova Ravan jusqu'à la Drina, toutes ces régions étaient contrôlées par
9 le 5ème Bataillon, c'est là que se trouvait la ligne de front.
10 Lorsque j'ai passé quelques jours dans le cadre d'une mission de
11 reconnaissance, c'est de l'autre côté, ici, dans le village de Gacko,
12 Godjevno est à peu près ici. A ce moment-là, j'étais actif dans les
13 activités de reconnaissance dans cette direction-là, vers Slatina. C'est
14 seulement dans cette partie-là, ici, que la défense qui existait, c'est
15 autour de Okoliste -les coordonnées 1101. On peut voir sur la carte qu'il
16 y existe une église orthodoxe. C'est là que j'ai passé ces deux jours à
17 Okoliste. Preljuca est la partie la plus élevée sur la rive droite de la
18 Drina. C'est là que la ligne de la défense se trouvait, et à Preljuca
19 était la fin de la ligne de front fortifiée. Le reste de la ligne de front
20 était des lignes de front officieuses. Les villages assuraient leur propre
21 sécurité. Les villageois montaient la garde eux-mêmes. Le commandant
22 chargé de la sécurité m’a dit qu'il a fallu faire de la reconnaissance et
23 contrôler les forces musulmanes qui existaient dans la région vaste de
24 Slatina. L'idée était d'utiliser nos forces de Preljuca, Banaca, Dubja,
25 Trkuca afin de les relier aux forces à Cajnik. Encore une fois, cette
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1 partie-là, nous ne voyons pas cela sur la carte, donc de relier ces deux
2 forces-là afin de sécuriser toute la région sur la rive droite de la
3 Drina. Afin d'empêcher les pénétrations de l'ennemi qui risquaient de
4 mettre à mal les villages de Brusine qui étaient peuplés exclusivement de
5 la population Serbe.
6 Question: Donc vous avez reçu une nouvelle mission, qui vous a accompagné?
7 Réponse: Comme je l’ai dit, j’ai été accompagné, escorté de personnes
8 qui avaient été avec moi le même jour à Jabuka.. Ils se sont portés
9 volontaires pour aller Jabuka déjà et leurs noms figuraient sur la liste
10 du 5ème Bataillon, comme le mien. Il y a eu Gaga, Bano, Miga; Puko.
11 Ensuite, même si dans le 1er Bataillon, il y a eu Kovacevic Milika, Uros
12 Radovic et Miroslav Kontic, eux aussi s'étaient portés volontaires pour
13 aller avec moi à Jabuka. Lorsque nous avons terminé ce que nous avions à
14 faire à Jabuka, ils sont rentrés avec moi à Foca. Eux, ils ne sont pas
15 allés avec moi dans le cadre de la reconnaissance de Slatina. Ils sont
16 restés à Foca, ils devaient retourner dans la zone de responsabilité de
17 leur propre bataillon.
18 Question: Est-ce que vous pouvez nous dire quelle est la distance entre
19 Preljuca et Foca?
20 Réponse: Nous n'avons pas l'image complète sur la carte mais, à vol
21 d'oiseau, il s'agit d'une distance de 12 ou 13 kilomètres. Il faut savoir
22 qu'il s'agit là d'un terrain montagneux. Le sommet le plus élevé de
23 Preljuca est à une attitude de 1300 mètres. Par exemple, de Godzen, qui
24 est à une distance de 12 kilomètres de Foca, pour arriver à Preljuca, il
25 faut compter une heure et demie ou deux heures. Pour rentrer à Godzen, il
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1 est possible d'entrer en une heure. D'autre part, en partant de Cvilin,
2 qui se trouve à 12 kilomètres de Foca en aval de la Drina, il est possible
3 d'y aller, d’y arriver en une heure et demie jusqu’à Preljuca ou deux
4 heures. Ensuite, il est possible de retourner en une heure. Preljuca est
5 donc sur la rive droite de la Drina. Il s'agit donc d'une élévation autour
6 de la municipalité de Foca et la plupart des villages serbes s'y trouvent.
7 Question: Comment êtes-vous allé sur le site de Preljuca?
8 Réponse: J'ai déjà dit que le matin, lorsque les coups de feu ont éclaté,
9 j'ai été contacté par la radio, le commandement. J'ai contacté le centre
10 de communication, j'ai demandé ce qui se passait. J'ai reçu l’information
11 par télégramme qu'une attaque avait été lancée et que nous devions y aller
12 de toute urgence. Un camion est venu, il nous a transporté jusqu'à Foca.
13 Là j'ai eu l'entretien. Jusqu’à Foca via Velecevo, j'ai parlé avec le
14 nouveau commandant chargé de la sécurité, Borivoje Ivanovic. Après c'était
15 le commandant du 5ème Bataillon.
16 Il a pris ses fonctions après la chute de Jabuka parce que celui qui était
17 avant le commandant chargé de la sécurité, après le massacre qui a eu lieu
18 à Jabuka où nous avons perdu, je crois, au total 57 personnes dont 45
19 civils, ce commandant a été remplacé. Une procédure a été intentée contre
20 lui à cause de l'incapacité de s'acquitter de ses tâches. A ce moment-là
21 donc, avec le nouveau commandant chargé de la sécurité Borivoje Ivanovic,
22 nous avons pris le même camion, par le biais de Cvilin, GabelicKosa et
23 Cerova Ravan. Nous avons emprunté ce chemin-là.
24 Question: Combien de temps vous a-t-il fallu afin de vous approcher de
25 Preljuca?
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1 Réponse: Nous sommes arrivés à Cerova Ravan vers 10 heures du matin, 11
2 heures peut-être. A ce moment-là, lorsque nous y sommes arrivés, les gens
3 qui contrôlaient la ligne à Cerova Ravan, ils nous ont dit que dans la
4 matinée, dès l'aube, une attaque avait été lancée contre eux. Ils ont dit
5 qu'ils ont réussi à défendre cette partie de la ligne de front. Moi, j'ai
6 reçu la tâche de l'adjoint du commandant chargé de la sécurité de partir
7 avec un petite groupe de personnes, faire des activités de reconnaissance
8 vers Preljuca, pour voir ce qui s'y passait puisque le bataillon qui était
9 stationné à Preljuca était constitué d'environ 150 personnes. Ce matin-là,
10 ils étaient complètement dispersés. Une partie des personnes ont réussi à
11 se retirer jusqu'à Cerova Ravan, afin de se joindre aux défenseurs. Un
12 grand nombre de personnes était encore porté disparues ce matin-là. Je
13 suis donc parti avec quelques autres personnes qui avaient contrôlé la
14 ligne à Preljuca auparavant et qui connaissaient la région de Preljuca.
15 Nous étions huit à neuf et on est allés vers Preljuca. Vers midi, nous
16 nous sommes approchés de Preljuca.
17 Question: Lorsque vous vous êtes approchés de Preljuca, est-ce que vous
18 avez entrepris quoi que ce soit?
19 Réponse Au premier moment, lorsque je suis arrivé en haut, j'ai vu
20 simplement ce à quoi la situation ressemblait à Preljuca. J'ai vu que les
21 forces ennemies ont pris le contrôle de l'ensemble de la ligne de front de
22 Preljuca, qu'ils sont entrés dans les tranchées et les blockhaus qui
23 avaient été contrôlés auparavant par nos forces à nous. Par la suite, je
24 suis allé dans la forêt, au-dessus du village de Novakovici. J'ai vu,
25 c'est là que se trouvait le commandement de. Preljuca .Ce n'était pas à
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1 Kolovar mais à peu près au milieu de la colline. Et j'ai vu un grand
2 groupe de soldats Musulmans qui portaient des cadavres, et qui les
3 entassaient à un endroit.
4 A ce moment-là, j'ai envoyé par le biais de communication radio un
5 télégramme bref, concernant la situation et mon estimation de la
6 situation. A ce moment-là, je considérais qu’à Preljuca, il y avait
7 environ 100 personnes du côté des forces ennemies qui participaient aux
8 opérations. Par le biais des communications radio, j'ai reçu la réponse
9 par télégramme. Ils nous ont dit qu'il fallait qu'on continue à faire nos
10 activités, que nos forces de Josanica et d'un autre endroit était déjà
11 parties. Et qu'ils allaient venir nous renforcer afin de lancer une contre
12 attaque et reprendre le contrôle de Preljuca.
13 Question: Vous avez dit que vous avez vu des soldats musulmans qui
14 enterraient des cadavres. De quels cadavres s'agissait-il?
15 Réponse: A ce moment-là, j'étais à une distance de 350 à 400 mètres par
16 rapport à eux. Je regardais par les jumelles. A ce moment-là, je n'étais
17 pas sûr qu'il s'agissait de leurs soldats morts, des soldats qui sont
18 morts au moment où ils prenaient le contrôle de la ligne de front ou bien
19 s'il s'agissait de nos soldats à nous. Mais lorsque j'ai vu qu'ils
20 jetaient les cadavres dans un trou. Et la cuisine du Bataillon se trouvait
21 près de cet endroit, donc il y avait un trou où on jetait les restes de
22 nourriture, etc., lorsque j'ai vu qu'ils jetaient dans ce même trou les
23 cadavres, j'ai compris qu'il s'agissait des cadavres de nos collègues, des
24 soldats appartenant à nos forces qui sont morts dans le cadre de cette
25 attaque dans la matinée. Il les donc rassemblés et ils les ont jetés à cet
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1 endroit.
2 Question: Que s'est-il passé ensuite en ce qui concerne ces cadavres?
3 L'avez-vous remarqué?
4 Réponse: J'étais conscient du fait, qu'à ce moment-là, nous étions au
5 nombre de huit. A ce moment-là, après Luca, il y avait au moins 100
6 soldats ennemis. J'étais conscient du fait que nos forces qui étaient
7 parties de Okoliste et Jacenica, qu'il leur fallait au moins encore 45
8 minutes afin de venir jusqu'à nous et j'ai décidé de rester sur place et
9 d'attendre leur arrivée afin de pouvoir lancer une opération ensemble,
10 avec eux.
11 A ce moment-là, j'ai vu que les soldats musulmans arrosaient les cadavres
12 de pétrole. L'un d'eux a mis en flammes une couverture, et il a jeté cela
13 sur les cadavres qui ont commencé à brûler. A ce moment-là, j'ai perdu
14 patience, je ne pouvais pas supporter de voir cela et j'ai ouvert le feu
15 sur ce groupe de soldats. Ce groupe était constitué de 30 à 40 soldats,
16 ils étaient tous ensemble. La scène même de ces cadavres qui brûlaient et
17 leurs cris de joie pendant que les cadavres brûlaient, tout ceci m'a fait
18 perdre patience, perdre le contrôle de moi-même. Même si j'étais à une
19 distance de 350 à 400 mètres, j'ai ouvert le feu, j'ai commencé à tirer
20 des rafales. Les autres qui étaient avec moi ont commencé aussi à tirer
21 des rafales. Nous avons donc pratiquement commencé l'attaque contre
22 Preljuca.
23 Question: Est-ce qu'il y a eu un combat?
24 Réponse: Lors de ce premier incident, lorsque nous avons ouvert le feu
25 sur ce groupe de personnes, j'ai vu que quelques personnes ont
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1 effectivement été atteintes -je ne sais pas s'ils sont morts ou s'ils ont
2 simplement été blessés.
3 A ce moment-là, ils ont ouvert le feu sur nous à partir de toutes nos
4 positions, à nous, auparavant, alors que nous, nous étions à l'endroit où
5 il y avait des blockhaus et tout. Nous avons donc pu nous abriter, nous
6 avons accepté de riposter et de mener le combat, même si nous ne pouvions
7 pas faire grand-chose. L'un des nôtres a été blessé au bras, c'était
8 quelqu'un qui était à mes côtés; heureusement, la blessure n'était pas
9 grave. Nous l'avons évacué et nous y sommes restés jusqu'à la fin du
10 combat.
11 Question: Combien de temps a-t-il duré, ce conflit?
12 Réponse: J'ai ouvert le feu vers 12 heures et demie peut-être. Il faut
13 savoir qu'ils ont riposté de manière assez violente au début. Nous, nous
14 ripostions de notre part plutôt de manière sporadique, presque pas du
15 tout. Vers une heure, nos forces sont arrivées, les forces qui avaient
16 quitté auparavant Okoliste et Jocenica. C'est à ce moment-là qu'un combat
17 un peu plus important a été mené contre eux. Vers 4 heures ou 5 heures de
18 l'après-midi, nous avons pu regagner le contrôle de ces positions, et
19 repousser les Musulmans vers le carrefour et vers les zones où se
20 trouvaient leurs lignes de front, les zones contrôlées par eux.
21 Question: Lorsque les forces musulmanes se sont retirées, qu'est-ce que
22 vous avez fait ensuite?
23 Réponse: Lorsqu'ils se sont déjà retirés, et nous pouvions suivre leurs
24 déplacements, ils se déplaçaient d'un blockhaus à l'autre, d'une tranchée
25 à l'autre; moi je suis allé tout de suite jusqu'à l'endroit où ils avaient
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1 brûlé les cadavres de nos soldats. J'étais parmi les premiers à m'y
2 rendre. A ce moment-là, j'ai trouvé des cadavres pratiquement calcinés. Il
3 y a eu huit soldats appartenant à nos forces qui s'y trouvaient; leurs
4 corps avaient complètement brûlé, étaient complètement carbonisés.
5 Question: Lorsque vous avez trouvé les cadavres, qu'avez-vous fait
6 ensuite?
7 Réponse: Lorsque nous avons déjà repris le contrôle de Preljuca,
8 L’ancien commandant du 5ème Bataillon qui était à ce moment-là l'adjoint du
9 commandant chargé de la sécurité, Borivoje Ivanovic est arrivé, il est
10 arrivé sur place. Au début, nous n'avons pas touché les cadavres, nous
11 avons essayé de déplacer l'un d'eux mais puisqu'ils avaient été calcinés,
12 dès que l'on se mettait à déplacer l'un quelconque de ces cadavres, le
13 cadavre se décomposait. Il a donc demandé qu'une équipe sanitaire soit
14 envoyée de l'hôpital, afin de transporter ces cadavres jusqu'à l'hôpital.
15 Je sais qu'avec cette équipe médicale une équipe de la télévision est
16 venue et ils ont filmé les cadavres. Parce que les cadavres qui étaient
17 calcinés, avant de les déplacer, étaient tels qu'il était encore possible
18 de reconnaître la personne. Mais dès que l'on se mettait à toucher, à
19 déplacer les cadavres, ils se décomposaient et il n'était plus possible de
20 reconnaître la personne.
21 De toute façon, j'ai passé la nuit ensuite à Preljuca. J'étais sur place
22 quand ils ont recueilli les cadavres et les ont transportés à l'hôpital de
23 Foca.
24 Question: Pouvez-vous nous dire d'où était originaire ces personnes et si
25 vous les connaissiez?
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1 Réponse: Eh bien, ce jour-là, quand Preljuca a été attaquée, il y avait
2 une compagnie d'hommes qui venaient de Zavajta, de Celebici, ils faisaient
3 partie du 5ème Bataillon. Mon père vient de Zavajta, il est né là-bas.
4 L'un des jeunes hommes qui avaient été tués, je le connaissais. C'était le
5 fils d'un certain Radovic et il a été tué ce matin-là, ce jeune homme.
6 En ce qui concerne les autres hommes qui ont trouvé la mort, ils étaient
7 tous de Mestrevac, de Zavajta et de Celebici.
8 Question: Est-ce que les cadavres ont été emportés à l'hôpital ce jour-là?
9 Réponse: Oui. L'officier qui était l'adjoint du commandant de la
10 sécurité a appelé une équipe sanitaire qui se trouvait à l'hôpital. Ils
11 sont venus, ils ont ramassé tous les cadavres, ils les ont placés dans
12 leur véhicule et les ont emmenés à l'hôpital de Foca.
13 Question: Où avez-vous passé cette nuit-là, la nuit du 29 juillet?
14 Réponse: Quand nous avons repris notre ligne, les hommes qui avaient
15 quitté la ligne le matin, qui étaient allés en direction de Cerova Ravan
16 sont revenus, mais il manquait toujours un trentaine d'hommes. Nous
17 n'avions aucune idée de l'endroit où ils se trouvaient ce soir. J'ai passé
18 la nuit à Preljuca avec les hommes qui m'accompagnaient. Je suis allé avec
19 ceux qui gardaient les bâtiments ce soir-là, et j'y suis resté jusqu'au 31
20 juillet.
21 Question: Un témoin, Osman Subacic, un témoin donc a confirmé qu'un
22 document qui lui a été montré était bien véridique. Il s'agissait d'un
23 ordre du 5 juillet 1992, pièce à conviction de l'accusation numéro 2. Il a
24 confirmé que cela avait été trouvé pendant les combats à Preljuca le 29
25 juillet 1992. Est-ce que c'est là l'épisode dont vous nous parlez?
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1 Réponse: C'est un document qui a été présenté par l'accusation, j'ai pu
2 examiner ce document. Ce document a été confisqué à cet endroit, parce que
3 le commandement du bataillon se trouvait à Preljuca et tous les documents
4 qui se trouvaient sur place sont tombés entre les mains de l'ennemi. Parce
5 que, comme je l'ai dit, ils ont entamé l'attaque extrêmement tôt le matin,
6 vers 5 heures du matin. Vers 7 heures, ils avaient pris le contrôle de
7 toute notre ligne de défense à Preljuca.
8 Ils ont pris un véhicule qui se trouvait à Preljuca, il s'agissait d'une
9 Golf. Quand nous revenus à Preljuca, le soir, nous sommes entrés dans
10 l'immeuble du commandement et nous avons remarqué que tous les documents
11 qui se trouvaient au poste de commandement avaient disparu, l'ennemi
12 l'avait pris.
13 Donc l'ordre qui a été évoqué par Subacic, c'est un ordre qui a été
14 récupéré le 29 juillet lors de l'attaque sur Preljuca.
15 Question: Est-ce que cela signifie qu'il disait la vérité en ce qui
16 concerne ce point de détail?
17 Réponse: Osman lui-même a dit qu'il combattait du côté musulman, je crois
18 qu'il était l'adjoint du commandant chargé de la sécurité. En tout cas, il
19 a dit la vérité au sujet de cette offensive en particulier. Je suis
20 convaincu qu'il disposait de toutes les informations relatives à nos
21 pertes à Preljuca, ainsi que de l'épisode des cadavres qui ont été brûlés.
22 Mais, lorsqu'on lui a posé la question, ils ne se souvenait plus de rien.
23 En tout cas, il a dit la vérité en affirmant que Preljuca avait été
24 attaquée le 29, que la ligne avait été prise mais que nous l'avons reprise
25 le même jour.
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1 Question: Vous nous dîtes que vous êtes resté là jusqu'au 31 juillet -si
2 j'ai bien compris.
3 Réponse: Comme je l'ai dit, j'ai passé la nuit du 29 au 30 à Preljuca.
4 Le lendemain matin, donc le matin du 30, sur la base de toutes les
5 informations que j'avais reçues, j'en ai déduit que deux hommes étaient
6 encore portés manquants. Moi, j'étais sûr que j'avais vu les Musulmans se
7 replier parce que je pouvais très bien les voir d'où j'étais et j'étais
8 certain qu'ils n'avaient emmené aucun prisonnier. On m'a donné l'ordre
9 d'inspecter la zone pour les retrouver.
10 Question: Je vais vous demander de ralentir un peu.
11 Réponse: Ce jour-là, on m'a envoyé chercher ces deux hommes qui
12 manquaient. J'ai passé toute la journée à les chercher, mais je ne les ai
13 pas trouvés ce jour-là. La nuit du 30 au 31 juillet, je l'ai passée à
14 Preljuca.
15 Question: Est-ce que cet homme on l'a trouvé et est-ce que vous savez qui
16 c'était?
17 Réponse: Eh bien, moi, j'étais à Preljuca pendant cette période, je ne
18 l'ai pas trouvé le 30. Le lendemain on m'a donné d'autre mission, mais il
19 n'avait pas été trouvé. Après, j'ai entendu dire qu'il avait été trouvé
20 deux jours plus tard, qu'il avait été blessé en essayant de sortir de
21 Preljuca, il avait donc été blessé, il s'était caché à 600 ou 700 mètres
22 de Preljuca. Il avait été blessé à la jambe, il ne pouvait pas marcher.
23 Il nous avait vus alors que nous essayions de les chercher, mais il ne me
24 connaissait pas personnellement, il a eu peur, il a eu peur de se
25 manifester. Donc on a trouvé les deux hommes. L'un avait été blessé et
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1 l'autre avait fui dans la direction de Foca. Il s'est présenté au
2 commandement du Bataillon trois ou quatre jours plus tard. A ce moment-là,
3 on a appris qu'il était encore vivant.
4 Question: Connaissez-vous le nom de famille de celui qui était blessé à
5 la jambe?
6 Réponse: Je sais que c'est quelqu'un qui est né à Mestrevac, c'était le
7 concierge de l'école d'un village de la région. Là, je ne me souviens pas
8 de son nom. Plus tard, je l'ai revu. Il avait été blessé, il avait été
9 blessé très grièvement et ses blessures s'étaient infectées du fait de la
10 chaleur qui régnait à l'époque. Les médecins ont eu beaucoup de mal à
11 sauver sa jambe et il est, aujourd'hui, invalide.
12 Question: Que s'est-il passé le 31 juillet?
13 Réponse: Le 31 juillet, on m'a fait venir au commandement du Bataillon.
14 Je me suis entretenu au téléphone avec le commandant adjoint chargé de la
15 sécurité. Il m'a dit qu'il allait envoyer une voiture pour nous chercher,
16 qu'il fallait que j'aille à Kalinovik, que c'était urgent. Il m'a dit au
17 téléphone que le col de Rogoj était tombé. Le col de Rogoj se trouvait
18 entre la Brigade de Foca et la Brigade de Kalinovik.
19 C'était un col sur la route qui menait à Sarajevo, qui se trouvait à
20 environ 50 kilomètres de Foca dans la direction de Sarajevo.
21 Question: Avez-vous pris la route de Kalinovik et à quel moment? A quelle
22 heure êtes-vous parti?
23 Réponse: Ils ont envoyé une voiture ou plutôt une camionnette, un camion
24 pour venir me chercher. Ce camion ou cette camionnette est arrivé à
25 Preljuca. Nous étions six ou sept, les hommes qui avaient participé aux
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1 missions de reconnaissance avec moi précédemment. Nous sommes tous allés à
2 Kalinovik ou plutôt en direction de Kalinovik. Quand je suis arrivé à
3 Foca, j'ai reçu un ordre verbal disant que je devais me présenter au
4 commandant de la brigade de Kalinovik qui me donnerait des instructions
5 supplémentaires. Je suis allé à Kalinovik, j'y suis allé à la caserne, j'y
6 suis arrivé dans l'après-midi, vers 14 heures ou 15 heures.
7 Question: Vous nous dites que vous vous êtes rendu aux commandement de la
8 brigade de Kalinovik. Vous a-t-on, à ce moment-là, donné des instructions,
9 vous a-t-on expliqué pourquoi on vous avait demandé de venir?
10 Réponse: Quand je suis arrivé là de Preljuca, j'ai parlé au commandant
11 adjoint chargé de la sécurité à Preljuca. Il m'a dit qu'il savait que le
12 col de Rogoj était tombé aux mains des forces musulmanes, mais qu'il ne
13 disposait d'aucune information au sujet du mouvement des forces
14 musulmanes. C'était le point de rencontre entre les zones de compétence
15 des Brigades de Foca et de Kalinovik. Il risquait donc d'y avoir
16 séparation des deux Brigades.
17 Il m'a dit de me rendre auprès du commandant de la brigade de Kalinovik,
18 qu'il me dirait ce qu'il fallait faire. Il s'agissait, en fait, de
19 missions de reconnaissance et d'observation pour voir ce que faisait
20 l'ennemi et quels étaient les déplacements de cet ennemi qui se déplaçait
21 en direction de ces deux municipalités.
22 Question: Est-ce que vous vous souvenez si l'on vous a dit que des
23 soldats serbes avaient été fait prisonniers?
24 Réponse: Lorsque je suis arrivé au commandement de la Brigade de
25 Kalinovik, dans le camp du haut -c'est ainsi qu'on l'appelait-, il y avait
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1 une caserne de la JNA auparavant. J'ai rencontré le commandant de la
2 Brigade qui était l'assistant du commandement chargé de la sécurité. Il
3 avait reçu des informations, je ne sais pas s'il les avait reçues par
4 téléphone ou par radio.
5 En tout cas il savait que je venais, il m'a dit que Trnovo était tombé,
6 que le col de Rogoj était également tombé et, que pour l'instant, il ne
7 savait pas combien d'hommes avaient été tués. Mais il savait, en tout cas,
8 qu'il y avait au moins 50 hommes qui avaient été faits prisonniers au col
9 de Rogoj. C'étaient des hommes qui servaient une pièce d'artillerie. L'un
10 d'eux a réussi à s'échapper mais il a pu, avant de s'échapper, assister à
11 la capture de ses camarades.
12 Question: Madame la Présidente, Messieurs les Juges, la défense souhaite
13 montrer une vidéo au sujet du col de Rogoj, ainsi que des hommes qui ont
14 été faits prisonniers. Il n'y a pas de dialogue ou de commentaire sur
15 cette vidéo. C'est une vidéo de cinq minutes qui nous permet de voir les
16 uniformes des hommes prisonniers qui sont faits prisonniers et les
17 uniformes des soldats qui les ont faits prisonniers.
18 Mme le Président (interprétation): L'accusation a-t-elle une objection?
19 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Non.
20 Mme le Président (interprétation): Maître Prodanovic, vous pouvez y aller.
21 M. Prodanovic (interprétation): Je vais demander à la cabine technique de
22 lancer la vidéo.
23 (Diffusion de la vidéo.)
24 M. Prodanovic (interprétation): Je remercie la cabine technique.
25 Donc, vous avez vu cette vidéo. Est-ce que vous pouvez me dire si vous
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1 connaissez les hommes qui ont été faits prisonniers?
2 Réponse: Lorsque je suis arrivé à Kalinovik pour la première fois le 31,
3 je ne connaissais aucun de ces hommes. Mais j'ai entendu dire les noms de
4 certains d'entre eux. Plus tard, Serevo Brn qui faisait partie de ce
5 groupe qui a été fait prisonnier, j'ai fait sa connaissance en 1995 avant
6 que moi-même je ne sois blessé dans la région de Kalinovik.
7 Je me suis entretenu avec lui, il m'a raconté qu'il avait été fait
8 prisonnier pendant l’offensive sur le col de Rogoj qui a eu lieu les 30 et
9 31 juillet. Il faisait partie de ce groupe de prisonniers. Il m'a raconté
10 l'épreuve qui avait été celle des treize hommes qui avaient été faits
11 prisonniers. Il m'a raconté ce qu'avaient été ses premiers jours de
12 captivité. Il a parlé de cet incident auquel on a fait brûler le drapeau
13 serbe que nous venons de voir.
14 Question: Ces personnes ont donc été faites prisonnières le 31 juillet?
15 Réponse: Ces hommes ont été faits prisonniers au col de Rogoj. C’est-à-
16 dire le 31 juillet au matin. Ces hommes ont été faits prisonniers au col
17 de Rogoj. Il s'agissait d'une équipe de serveurs d'artillerie, c'est-à-
18 dire que c'étaient des gens qui s'occupaient de pièces d'artillerie. Ils
19 se trouvaient sur place, ils se trouvaient à cet endroit quand nos forces
20 tenaient encore le col de Rogoj. C’étaient tous des gens qui venaient de
21 la Brigade de Kalinovik.
22 Question: Dans ce film, on a pu voir les uniformes des prisonniers
23 serbes. De quel type d'uniforme s'agissait-il?
24 Réponse: Comme on a pu le voir, tous portaient les uniformes de type vert
25 olive. Les anciens uniformes de la JNA qui étaient également portés par
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1 les membres de la Défense territoriale. C’étaient les uniformes de la
2 Défense territoriale de l’ex-Yougoslavie.
3 Question: Vous avez également pu voir l'uniforme d'un soldat appartenant
4 à l'armée de Bosnie-Herzégovine. De quel type d'uniforme s'agit-il?
5 Réponse: Je l'ai vu à l'image, bien que ce ne soit pas très visible. Je
6 me souviens avoir vu ce type d'uniforme lors de mes missions de
7 reconnaissance dans la région. J’ai souvent vu ce type d’uniforme au col
8 de Rogoj et ailleurs. Tous ces hommes portaient des uniformes qui étaient
9 en très, très bon état. Nous avons pu également le constater sur les
10 cadavres que nous avons pu voir ou trouver. C'était tous des uniformes
11 faits aux Etats-Unis, c'étaient des uniformes de l'armée américaine.
12 Question: Dans ces images, nous avons vu très brièvement deux soldats
13 musulmans. Avez-vous été en mesure de reconnaître l'un d'entre eux?
14 Réponse: Au moment où le drapeau commence à brûler, on voit un homme qui
15 a un bandeau sur la tête ou qui a une sorte de couette, c'était Mirsad
16 Catic. Je l'ai vu à la télévision à cette époque et plus tard. Il a
17 souvent donné des interviews à la télévision.
18 Je sais que Mirsad Catic était le commandant du Groupe tactique numéro 2.
19 Son poste de commandement se trouvait au mont Igman. Sur la base de ce qui
20 s'est passé ultérieurement et des informations que nous avons reçues grâce
21 à nos services de renseignements, nous savons que c'était le commandant du
22 Groupe tactique numéro 2. Il avait reçu la mission de lancer une offensive
23 pour reprendre le contrôle de la zone de Kalinovik, Foca et de Trnovo
24 également. Sa mission consistait à faire le lien, la jonction avec les
25 forces qui se trouvaient à Grebak pour ensuite faire la jonction avec les
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1 forces qui se trouvaient à Gorazde. Il devait donc lancer une offensive à
2 Gorazde Bodine.
3 Question: Vous avez également pu voir les armes de deux soldats et Mirsad
4 Catic ainsi que d'autres soldats que l'on voit uniquement de dos?
5 Réponse: Oui, l'un des soldats que l'on voit à l'image a dans la main un
6 fusil automatique avec un bipied ou un trépied. J'ai déjà vu cette vidéo
7 précédemment. Je sais que Mirsad Catic avait toujours un fusil à canon
8 court qui fonctionnait avec des balles. Je sais que c'était ce type d'arme
9 qu'il portait tout le temps.
10 Question: Est-ce que vous savez si ce type d'arme est autorisé par les
11 conventions de Genève?
12 Réponse: Moi, je ne connaissais pas par coeur les conventions de Genève.
13 Mais je sais en tout cas que l'arme dont il s’agit est une arme
14 extrêmement dangereuse, qu'avec ce type d'arme il n'y a pas de blessés. Si
15 vous êtes touché par une arme de ce type, eh bien, la moitié de votre
16 corps explose.
17 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Je voudrais m'opposer à ce type de
18 questions. Nous avons déjà dit que nous ne sommes pas là pour parler des
19 crimes commis par les Musulmans mais pour ceux qui sont reprochés aux
20 trois accusés.
21 Mme la Présidente (interprétation): Maître Prodanovic, vous avez entendu
22 les reproches formulés par la représentante de l'accusation.
23 M. Prodanovic (interprétation): La question était une question que j'ai
24 posée suite aux dépositions des témoins Alic et Nogo qui ont dit, dans ce
25 prétoire, qu'ils faisaient tout ce qui était possible pour appliquer les
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1 conventions de Genève. Ils nous ont dit qu'ils en parlaient
2 systématiquement. En vous montrant cette vidéo, je voulais remettre en
3 question la crédibilité de ces deux témoins et les déclarations qu'ils ont
4 faites dans le cadre de leurs dépositions. C'était mon seul et unique
5 objectif.
6 M. Hunt (interprétation): Avez-vous présenté cet argument aux témoins, à
7 savoir leur avez-vous dit qu'ils utilisaient ce type d'armement?
8 M. Prodanovic (interprétation): Monsieur le Juge, je voulais montrer cette
9 vidéo aux témoins, mais si vous vous souvenez bien on ne m'a pas permis de
10 le faire.
11 M. Hunt (interprétation): (inaudible)
12 M. Prodanovic (interprétation): L'accusation a fait une objection.
13 M. Hunt (interprétation): Et cette objection a été acceptée par la
14 Chambre?
15 M. Prodanovic (interprétation): Oui.
16 M. Hunt (interprétation): Pourtant, vous revenez à la charge. On a déjà
17 parlé de cette question à l'envie. Mais vous n'êtes, je pense, d'aucune
18 utilité à la Chambre ni d'ailleurs à votre client en continuant à
19 insister. Essayons de traiter de ce qui nous intéresse ici, à savoir
20 déterminer si les trois accusés présents dans ce prétoire ont commis des
21 crimes de guerre.
22 M. Prodanovic (interprétation): Je prends note de votre intervention, et
23 je vais en finir avec ces questions, ne plus poser de questions de ce
24 type.
25 Monsieur Kunarac, le 31 juillet, vous êtes donc arrivé à Kalinovik. A ce
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1 moment-là quelle mission vous a-t-on donné? Et est-ce que vous êtes resté
2 au quartier général de Kalinovik ou êtes-vous allé quelque part?
3 M. Kunarac (interprétation): Eh bien, dès que je suis arrivé à la caserne,
4 une fois que j'ai parlé aux responsables de la Brigade de Kalinovik, on
5 m'a donné une mission qui consistait à aller à Dobro Polje. Nos forces
6 étaient encore Dobro Polje, elles ne s'étaient pas encore repliées.
7 J'avais pour mission de mener à bien les missions de reconnaissance vers
8 le col de Rogoj pour voir ce qui se passait dans cette zone, parce que
9 nous n'avions pas d'idée bien précise de ce qui se passait dans cette
10 zone.
11 J'avais pour mission d'ensuite faire rapport au quartier général pour
12 signaler combien il y avait d'hommes présents sur place, et pour aider à
13 la préparation de nos troupes. Je suis allé vers Dobro Polje et je dois
14 dire que je ne connaissais pas bien la zone. Je n'y avais jamais été
15 auparavant. J'ai demandé au commandant de la Brigade de nommer deux ou
16 trois personnes qui se seraient portées volontaires pour m'accompagner
17 dans cette opération de reconnaissance, des gens qui connaissaient la
18 région. Je suis donc allé vers Dobro Polje avec trois hommes de la Brigade
19 de Kalinovik.
20 Question: Donc vous êtes parti de Dobro Polje et où êtes-vous allé
21 ensuite? Ensuite où avez-vous résidé?
22 Réponse: A Dobro Polje…
23 Mme la Présidente (interprétation): Il faut que la greffière d'audience
24 donne une cote officielle à la vidéo puisque nous l'avons vue.
25 Mme Lauer: La vidéo prendra la cote D80 des pièces de la défense.
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1 Mme la Présidente (interprétation): Merci. Vous pouvez continuer maître
2 Prodanovic.
3 M. Prodanovic (interprétation): Merci.
4 M. Kunarac (interprétation): J'ai dit que j'avais emprunté ce même
5 véhicule, le camion qui m'a emmené jusqu'à Kalinovik. Ce camion
6 m'attendait, je l'ai emprunté pour aller à Dobro Polje. Le camion a fait
7 demi-tour et je me suis présenté au commandant de la compagnie qui était
8 présent. J'ai demandé encore deux ou trois hommes qui, normalement,
9 devraient se porter volontaires pour accomplir cette action de
10 reconnaissance. Je sais que deux d'entre eux étaient frères, des frères
11 Brzuli qui tenaient un café à Dobro Polje. Ils y habitent aujourd'hui
12 encore d'ailleurs.
13 Nous nous sommes donc dirigés vers l'école de Rogoj. On nous a dit que
14 l'ennemi avait capturé nos pièces d'artillerie à cet endroit. Tout
15 d'abord, nous devions voir ce qu'il en était de ces pièces d'artillerie
16 pour voir si l'ennemi s'apprêtait à utiliser ces pièces d'artillerie
17 contre nos positions.
18 Question: Il était quelle heure, à peu près, au moment où vous êtes
19 arrivé au col de Rogoj?
20 Réponse: Nous sommes restés à Kalinovik 10 ou 15 minutes au maximum.
21 Nous sommes donc arrivés à Dobro Polje vers 17 heures. Nous sommes partis à
22 pied à Rogoj. Comme nous marchions lentement, puisque nous traversions un
23 bois, nous sommes arrivés au col à l'endroit d'où nous pouvions voir nos
24 pièces d'artillerie. Il était pratiquement 20 heures. Il s'agissait de la
25 fin juillet, début du mois d'août, et la nuit tombe à cette époque vers 9
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1 heures. Nous sommes donc arrivés avant la tombée de la nuit au col de
2 Rogoj.
3 Question: Quand vous y êtes arrivé, qu'avez-vous fait?
4 Réponse: J'avais les matériels de reconnaissance, j'avais une paire de
5 jumelle, j'ai trouvé un endroit convenable, un point de vue d'où je
6 pouvais voir aussi bien le col de Rogoj que les positions de l'ennemi, des
7 pièces d'artillerie. Il s'agissait donc de 6 obusiers et 6 mortiers de 120
8 millimètres. Toutes ces pièces d'artillerie étaient toujours dans la même
9 position qu'auparavant, elles étaient tournées vers Bijelasnica, donc vers
10 les positions qui, auparavant, avaient été tenues par des Musulmans. Ces
11 pièces avaient donc le même emplacement qu'avant. J'ai vu beaucoup
12 d'ennemis, beaucoup de soldats ennemis.
13 A ce moment-là, au moment où je suis arrivé sur le col de Rogoj, il y
14 avait entre 60 et 80 hommes autour des pièces d'artillerie sur cette
15 clairière à côté du col de Rogoj.
16 Question: Que s'est-il passé ensuite? Pourriez-vous nous dire sous le
17 commandement de qui vous étiez lorsque vous êtes arrivé au col de Rogoj?
18 Avez-vous fait un rapport à qui que ce soit?
19 Réponse: Au moment où je suis arrivé là-bas, j'ai vu que ces soldats ne
20 faisaient pratiquement rien avec ces pièces d'artillerie, puisque la nuit
21 était presque tombée. Ils ne faisaient rien, ils ne faisaient pas
22 d'entretien, ils ne nettoyaient pas ces pièces. J'ai vu qu'en réalité, ils
23 étaient en train de se disputer entre eux, puisque je n’étais pas loin.
24 J'étais à peu près à 100 mètres de là. J'ai vu aussi qu'ils portaient des
25 insignes différentes sur les uniformes. J’ai vu aussi qu’ils avaient tous
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1 des uniformes de camouflage qui étaient dépareillés. Il y en avait qui
2 portaient des insignes sur leurs épaules, c'est-à-dire des lys blancs qui
3 sont des emblèmes musulmans, d'autres avaient des insignes croates du HVO.
4 Donc, comme la nuit était en train de tomber, moi, j'ai téléphoné au
5 commandant de la brigade de Kalinovik pour l’informer de la situation
6 actuelle à Rogoj. Comme je relevais de la responsabilité de sa brigade, à
7 l'époque, en réalité de son bataillon qui tenait les lignes à Dobro Polje,
8 je l'ai utilisé comme intermédiaire pour communiquer avec mon commandement
9 à moi. Tous les ordres m'ont donc été émis par le commandant de la brigade
10 de Kalinovik, et je lui ai aussi transmis tous mes rapports.
11 Question: Est-ce qu'ils vous ont donné des conseils, est-ce qu'ils vous
12 ont dit ce que vous deviez faire? Quels étaient les plans par rapport aux
13 actions futures?
14 Réponse: Quand je l'ai informé de la situation, quand je lui ai
15 communiqué mon point de vue par rapport à la situation de Rogoj, j'ai reçu
16 l'ordre de continuer la mission de reconnaissance, de continuer à observer
17 la situation. Il est exact qu'il m'a demandé s'il était possible
18 d'observer les mouvements de l'ennemi alors qu'il faisait nuit.
19 Mme le Président (interprétation): Vous pouvez continuer, maître.
20 M. Kunarac (interprétation): J'ai donc reçu l'ordre de continuer à
21 observer les mouvements de troupes ennemies, sur le col de Rogoj. Puisque
22 cette nuit-là on pouvait voir tout de même, même s'il faisait nuit, j'ai
23 donc continué ma mission de reconnaissance de ces lignes.
24 M. Prodanovic (interprétation): Est-ce qu'on vous a informé des intentions
25 des forces serbes?
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1 Réponse: Au cours de cette conversation, quand on m'a donné l'ordre de
2 donner ma mission de reconnaissance, le commandant de la brigade de
3 Kalinovik m’a dit qu'au cours de la nuit et de la matinée, qu'il fallait
4 que j'observe bien la situation pour faire rapport tôt dans la matinée, et
5 de l'informer de la situation sur le terrain -de ce que j'en pensais
6 d'ailleurs-, pour voir s'il était possible de lancer une attaque sur les
7 positions musulmanes à Rogoj pour reprendre les pièces d'artillerie que
8 les Musulmans avaient pris, confisquées à nos forces.
9 Question: Où avez-vous passé la nuit du 31 juillet?
10 Réponse: Le 31 juillet, j'ai déjà dit, je suis tout d’abord allé à Rogoj.
11 J’ai effectué une mission de reconnaissance au cours de la nuit. Ensuite,
12 je suis revenu près de Rogoj pour observer les mouvements de l'ennemi sur
13 le col de Rogoj. J'ai passé la nuit là-bas. C'est-à-dire quand vous partez
14 vers Sarajevo, au-dessous de Bandjerica, il y avait un endroit d’où j'ai
15 pu observer Rogoj et j'ai passé la nuit sur le terrain.
16 Question: Pourriez-vous nous décrire la journée suivante, la journée du
17 1er août?
18 Réponse: A l'aube déjà j'ai pu remarquer que, sur le plateau du col de
19 Rogoj, il y avait moins de forces que la veille. J'ai pu voir qu'il n'y
20 avait absolument pas d'activité. Ils ne faisaient que monter des gardes
21 habituelles, des gardes qui étaient sur des positions avancées par rapport
22 au col, au plateau de Rogoj, à 30 ou 40 mètres de là. Mais sur le plateau
23 même, il n'y avait absolument pas d'activité, ils ne manipulaient pas les
24 armes, ils ne manipulaient pas les pièces d'artillerie, ils ne creusaient
25 pas de tranchées. Vraiment il ne se passait rien.
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1 J'ai aussi remarqué qu'une partie des troupes manquaient. J'ai vu que
2 finalement la seule armée qui restait, c’était la partie de l'armée qui
3 portait les insignes de l’armée de Bosnie-Herzégovine, donc les lys, alors
4 que la partie des troupes qui portaient les insignes du HVO n'était pas
5 là.
6 Ils avaient donc un échiquier, un échiquier croate sur leurs épaules. Moi,
7 je suis allé jusqu'à Dobro Polje, j'ai appelé le commandant au téléphone,
8 je lui ai fait rapport. Je lui ai dit aussi que si la situation ne
9 changeait pas au cours de la journée, s'ils ne reçoivent pas de renforts,
10 je considérais qu'il serait possible de reprendre les pièces d'artillerie
11 et de mener une attaque. C'est d'ailleurs ce que j'ai fait le 1er au matin
12 vers 9 heures du matin. C’est-à-dire que j'ai fait ce rapport vers 9
13 heures du matin, le 1er août.
14 Question: Est-ce que la contre-offensive a eu lieu à Rogoj?
15 Réponse: Après avoir envoyé ces rapports, j'ai envoyé mes hommes pour
16 regarder, observer la situation sur le col de Rogoj. Le commandant m’a dit
17 qu'il allait transmettre mon point de vue au commandement, et qu'il était
18 tout à fait possible qu'une contre-attaque soit ordonnée pour reprendre le
19 col de Rogoj. Il m'a aussi indiqué que j'allais être informé par la
20 liaison radio de cela, et que j'allais recevoir les autres instructions
21 par la liaison radio.
22 Question: Pourriez-vous nous dire à quel moment vous avez été informé de
23 l'attaque que devaient effectuer les Serbes?
24 Réponse: C'était dans l'après-midi, j'ai reçu ce message par la radio.
25 J'ai reçu en réalité un télégramme assez bref qui m'informait que nos
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1 forces étaient arrivées à Dobro Polje, que je devais descendre jusqu'à
2 Dobro Polje pour les informer de la situation sur le terrain, pour que nos
3 forces puissent se préparer à l'offensive et à l'attaque pour reprendre le
4 col de Rogoj.
5 Question: Le 1er août, où avez-vous passé la nuit du 1er août?
6 Réponse: J'ai dit que le 1er août, vers 16 heures, j'ai reçu un
7 télégramme m'informant que nos forces étaient arrivées sur le territoire
8 de Dobro Polje, et que je devais donc descendre à Dobro Polje. J'y suis
9 allé, alors que mes hommes sont restés sur le terrain pour observer
10 l’évolution de la situation. Moi, je leur ai dit que j'allais revenir moi
11 aussi au cours de la nuit. Je suis donc descendu à Dobro Polje, j'ai fait
12 le rapport sur l'évolution de la situation sur le terrain. Je leur ai
13 aussi fait part de mon point de vue de la situation, de ma compréhension
14 de la situation, je leur ai dit où se trouvaient exactement les forces
15 ennemies.
16 Après cela, je suis à nouveau monté sur le mont de Rogoj pour rejoindre
17 mes hommes. C’est là que j'ai passé la nuit, j'étais là au matin du 2
18 août.
19 Question: Que se passe-t-il le 2 août? Y a-t-il eu des combats?
20 Réponse: Le 2 août au matin, vers sept heures, sept heures et demis du
21 matin, j'ai pu remarquer qu'un véhicule civil arrivait de la direction de
22 Dobro Polje. J'ai vu une femme sortir de ce véhicule et on a renvoyé cette
23 femme vers Dobro Polje. Moi, je l'ai suivie du regard, ensuite je l'ai
24 suivie. Elle est arrivée à Dobro Polje. Elle avait un message pour le
25 commandement de la brigade de Kalinovik. Dans ce message écrit, il était
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1 dit que les Musulmans avaient à Rogoj, juste à côté des obusiers, qu'ils
2 avaient 30 ou 40 personnes, des prisonniers, qu'ils proposaient un
3 échange. Ils proposaient aussi que l'échange de prisonniers ait lieu avant
4 midi.
5 Moi, j'ai été sûr qu'il n'y avait pas de prisonniers dans ce bâtiment
6 parce que, même s'il y avait eu 30 ou 40 personnes emprisonnées à
7 l'intérieur de ce bâtiment, je suis sûr que de toute façon, pendant toute
8 la période où j'ai observé ce bâtiment, je suis sûr que quelqu'un aurait
9 été obligé de sortir pendant tout ce temps. Moi, je n'ai vu personne
10 sortir et elle a dit aussi qu'elle-même avait été enfermée dans ce café à
11 Rogoj. Je ne l'ai pas vue sortir de là.
12 J'ai fait part de ma propre opinion et j'ai dit que les Musulmans
13 voulaient gagner du temps, qu'ils voulaient s'organiser. C'est que ce que
14 j'ai pensé. Nous avons donc reçu l'ordre du commandement de notre brigade,
15 puisqu'un groupe de personnes de notre brigade était venu. Parmi eux il y
16 avait aussi des membres dirigeants, des personnels dirigeants de la
17 brigade, on nous a dit de nous rendre là-bas. S'il n'y avait pas d'échange
18 avant midi, que nous devions lancer l'attaque, pour reprendre les
19 positions, nos positions que les Musulmans avaient repris deux ou trois
20 jours auparavant.
21 Question: Vous ne nous avez pas dit si des combats avaient eu lieu?
22 Réponse: Après 12 heures, les combats ont commencé puisque la brigade de
23 Kalinovik, quand elle a reçu ce message, a envoyé une réponse disant
24 qu'ils étaient prêts à procéder à l'échange à 12 heures. Tout était prêt
25 du côté serbe pour procéder à un échange de prisonniers à 12 heures. Vers
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1 12 heures, cette femme est revenue à nouveau, elle a apporté à nouveau un
2 message venant du côté musulman où on nous a informé que les Musulmans
3 n'étaient pas prêts, qu'ils avaient d'autres prisonniers qu'ils tenaient,
4 qu'ils voulaient les amener au col de Rogoj et qu'ils ne pouvaient
5 procéder à cet échange qu'à 16 heures.
6 Nous avons reçu l'ordre, à ce moment-là, de lancer l'attaque sur le col de
7 Rogoj et de reprendre ses positions. L'attaque a débuté vers 12 heures, 12
8 heures 15, en tout cas au tout début de l'après-midi.
9 Question: Avez-vous participé à cette attaque?
10 Réponse: Comme pendant tout ce temps, j'ai affirmé que j'étais certain
11 qu'il n'y avait pas de prisonniers dans cette maison où il y avait ce café
12 à Rogoj. J'étais absolument sûr que cette maison était vide. Les hommes de
13 la brigade de Kalinovik, qui étaient là, ils craignaient que j'ai tort et
14 qu'il y ait quand même des prisonniers dans cette maison. Ils avaient peur
15 qu'on ne les tue ces prisonniers. Ils hésitaient à donner l'ordre de
16 lancer l'attaque.
17 Comme il n'y avait personne d'autre, alors j'ai pris sur moi pour lancer
18 l'attaque sur cette position, sur ce café, sur cette position où se
19 trouvaient les pièces d'artillerie. Moi, je me suis porté garant qu'il n'y
20 aurait pas de victimes, car j'étais sûr qu'il n'y avait pas de prisonniers
21 dans ce café. C'est comme cela que j'ai reçu l'ordre du commandement mixte
22 des brigades de Foca et Kalinovik de me rendre avec des volontaires à
23 Rogoj pour lancer l'attaque.
24 Le 2 août, dans l'après-midi, j'ai lancé l'attaque sur le café de Rogoj,
25 j'ai lancé l'attaque sur cet endroit où se trouvaient nos pièces
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1 d'artillerie. Nous avons repris le col de Rogoj. Les combats ont duré à
2 peu près jusqu'à une heure, une heure et demi sur le col lui-même. Déjà, à
3 la tombée de la nuit, il y avait des combats autour de Karaula, dans les
4 endroits à gauche et à droite du col de Rogoj, Karaula et Bandjerica.
5 Question: Est-ce que ces côtes Bandjerica et Karaula font partie du col
6 de Rogoj?
7 Réponse: Le col de Rogoj, en réalité c'est un plateau. La route
8 magistrale qui relie Foca à Sarajevo passe par ce plateau. Si vous voulez,
9 Karaula et Bandjerica, ce sont les côtes qui se trouvent à gauche et à
10 droite de cette route, au niveau du plateau de Rogoj.
11 Evidemment, tout cela fait partie de la région de Rogoj, du site de Rogoj.
12 Question: Pourriez-vous nous dire à quelle heure les combats se sont
13 achevés ce jour-là?
14 Réponse: En ce qui concerne les combats sur le col de Rogoj donc les
15 combats pour reprendre les pièces d'artillerie, nous avons réussi à les
16 reprendre avant une heure de l'après-midi. Après cela, nous avons commencé
17 pour ainsi dire à chasser l'ennemi qui s'est retiré vers Trnovo. Nous
18 avons réussi à élargir le territoire pris, à dégager Rogoj pour permettre
19 à nos unités de logistique de reprendre ces pièces d'artillerie.
20 Car c'était le véritable but de cette attaque. Le but de l'attaque était
21 la reprise des pièces d'artillerie.
22 En ce qui concerne ces combats qui se déroulaient à gauche et à droite du
23 plateau de Rogoj, ce sont bien ces combats qui se sont terminés vers 16
24 heures de l'après-midi. Les assauts d'infanterie se sont arrêtés vers 16
25 heures, donc Karaula et Bandjerica avaient été prises aussi.
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1 Question: Est-ce que ce soir-là vous êtes parti vers Foca?
2 Réponse: Après la prise du col de Rogoj et après la reprise des pièces
3 d'artillerie, il est exact que j'ai envoyé un télégramme par la liaison
4 radio pour que l'on organise le sauvetage -pour ainsi- dire des pièces
5 d'artillerie. Il fallait les sortir de cet endroit. J'ai aussi donné la
6 mission pour que des positions vers Trnovo soient prises, pour sécuriser
7 la région.
8 Donc, une heure ou une heure et demi après notre prise de Rogoj, un
9 véhicule est parti de Trnovo sur lequel était monté un char, un canon
10 antiaérien de 20 millimètres. Nous avons tendu une embuscade sur la route
11 entre Trnovo et Rogoj. Nous avons réussi à prendre ceci des forces
12 musulmanes. Avec ce véhicule au début de la soirée, vers 8 heures, 8
13 heures et quart, je suis parti de Rogoj, ainsi que tout ce convoi composé
14 des unités arrières, des unités de logistique, etc., qui sont venues aider
15 à la prise de Rogoj.
16 Nous sommes arrivés à Foca vers 23 heures avec le véhicule ennemi que nous
17 avions pris. Nous nous sommes dirigés directement vers les quartiers
18 généraux de la brigade. Sur ce véhicule il y avait ce canon antiaérien.
19 Question: Avez-vous remarqué une insigne, est-ce que quelque chose était
20 écrit sur le canon?
21 Réponse: Comme je l'ai dit, nous avons pris ces positions entre Rogoj et
22 Trnovo. Comme la vue à partir de cet endroit est très bonne, moi, j'ai pu
23 voir qu'il y avait un véhicule qui se dirigeait vers Rogoj. Ce véhicule
24 avait été coloré de couleur bigarrée, un canon antiaérien à trois canons
25 avait été monté sur le véhicule.
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1 Nous avons donc pris cette arme, le canon antiaérien à trois tubes, une
2 personne a péri pendant l'action. Moi, je suis monté sur le canon, j'ai
3 déjà eu l'occasion de voir un tel canon. J'ai pu remarquer que cette arme
4 était différente des canons qui avaient été utilisés par l'armée
5 yougoslave auparavant. Il y avait quelques détails qui étaient différents,
6 les poignées étaient différentes, les pédales qui servent à activer les
7 canons et sous le siège. Il y avait une plaque qui avait sept centimètres
8 de longueur et 12 centimètres de hauteur où il était écrit en langue
9 serbo-croate ou bosniaque "le cadeau au peuple de Bosnie-Herzégovine de
10 l'Arabie Saoudite". C'est ce qui était écrit sur la plaque.
11 Ensuite, il y avait quelque chose écrit en langue Arabe. Pendant l'attaque
12 et pendant la prise du véhicule, nous avons percé les deux pneus avant et
13 les deux pneus arrière du camion de sorte, qu'avec ces pneus qui avaient
14 crevé, eh bien, nous l'avons conduit comme cela dans cet état-là jusqu'à
15 travers le mont de Rogoj.
16 Question: Je pense que le moment est bon pour faire une pause.
17 Mme le Président (interprétation): Oui, nous faisons une pause jusqu'à 14
18 heures 30.
19 (L'audience, suspendue à 13 heures, est reprise à 14 heures 30.))
20 Mme le Président (interprétation): Bonjour, nous poursuivons
21 l'interrogatoire principal. Maître Prodanovic, est-ce que je peux vous
22 demander de terminer cinq minutes plus tôt que prévu puisque nous devrons
23 discuter d'un point?
24 M. Prodanovic (interprétation): Oui, j'y penserai Madame la Présidente.
25 Mme le Président (interprétation): Merci.
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1 M. Prodanovic (interprétation): Monsieur Kunarac, vous avez dit que le 2
2 août, lorsque les Serbes sont restés à Rogoj, vous êtes parti pour Foca
3 dans la soirée. Pouvez-vous nous dire qui est resté à Rogoj?
4 M. Kunarac (interprétation): Comme je l'ai déjà dit, nous avons pris le
5 contrôle du col de Rogoj vers 13 heures. En ce qui concerne les routes
6 autour de Bandjerica et Karaula, les luttes ont eu lieu vers 17 heures, 18
7 heures. Tout de suite après la prise de contrôle du col de Rogoj, la même
8 nuit, il a été organisé que les pièces d'artillerie se retirent. Ceci a
9 été organisé à partir de la brigade de Kalinovik. Ils se sont donc retirés
10 du col de Rogoj, alors que nous, nous avons pris le contrôle de Rogoj.
11 Ensuite, nous sommes partis à la direction de Trnovo. Il y a donc eu deux
12 camions qui sont venus et qui retiraient les pièces d'artillerie vers
13 Dobro Polje et vers Kalinovik, et ensuite ils revenaient. La brigade de
14 Trnovo avait subi un échec deux, trois jours plus tôt et ils ont
15 transporté les membres également. Donc 20 à 30 personnes sont arrivées
16 avec la brigade.
17 Le commandant de l'unité a dit que lui avait reçu la tâche de contrôler
18 Rogoj et de retirer ces pièces d'artillerie. Jusqu'alors, avant ce moment-
19 là, nous avions déjà pris le contrôle de ce canon tritube, et nous
20 l'avions déjà placé sur le col de Rogoj. Au moment où, eux, ils ont
21 organisé le transport de ces obusiers, j'ai demandé qu'ils me rendent
22 possible d'avoir au moins le véhicule sur lequel était placé ce canon
23 tritube, parce que je souhaitais transporter, transférer cette pièce
24 d'artillerie jusqu'à notre brigade puisqu’il s'agissait là d'une pièce
25 d'artillerie qui avait été capturée.
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1 Question: Il n'est pas nécessaire d'entrer dans tous les détails, y
2 compris les détails qui ne sont pas nécessaires. Dites-moi qui a pris le
3 contrôle de la position après votre départ?
4 Réponse: Avant 20 heures du soir, ce sont les unités de la brigade de
5 Kalinovik qui ont pris le contrôle de toutes ces positions. Il s'agissait
6 surtout du bataillon de Trnovo qui avait subi un échec lors de la bataille
7 lancée par les forces musulmanes deux ou trois jours plus tôt.
8 Question: Vous avez dit que vous êtes venu jusqu'à Dobro Polje, et qu'une
9 colonne avait été constituée pour aller vers Foca. Où se trouve Dobro
10 Polje?
11 Réponse: A ce moment-là, j'ai envoyé des gens afin qu'ils cherchent des
12 pneus. Deux sont partis, et ils sont revenus avec des pneus. . Ils n'ont
13 pas pu trouver plus que deux pneus. Nous sommes donc partis vers 20 heures
14 15 vers Dobro Polje.
15 Dobro Polje se trouve à un carrefour sur la route Sarajevo-Foca. C'est là
16 que se trouve la route qui mène à Kalinovik. Cela se trouve à environ
17 cinq, six kilomètres de Rogoj.
18 Question: Lorsque le convoi a été créé à Dobro Polje, où êtes-vous allé?
19 Réponse: Comme je l’ai dit, il était à peu près 20 heures quand nous
20 sommes arrivés à Dobro Polje, 20 heures 15, 20 heures 20 peut-être. Il y a
21 eu d'autres unités sur place, des unités qui avaient participé à l'action
22 qui avait eu lieu dans la même journée, au cours de la même journée à
23 Rogoj. Nous avons créé le convoi et sommes partis dans la direction de
24 Foca.
25 Question: Nous avons un document que nous souhaitons verser au dossier en
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1 tant que pièce à conviction de la défense. Il s'agit du certificat de la
2 poste militaire de Srbinje dont il découle que le 2 août il y a eu des
3 combats à Rogoj, que l'accusé a passé toute cette période là-bas et que,
4 vers 21 heures, il est rentré à Foca. A ce moment-là, il est venu avec ce
5 véhicule qui avait été capturé lors des combats qui ont eu lieu à Rogoj.
6 Il s'agit de notre document numéro 102.
7 Encore une chose, le greffe ma informé du fait qu'en ce qui concerne la
8 cassette que la défense souhaitait verser au dossier, qu’il n'est toujours
9 pas clair si la cassette a été admise ou pas.
10 Mme le Président (interprétation): Quelle cassette, quel document? Vous
11 parlez de ce document particulier?
12 M. Prodanovic (interprétation): La cassette vidéo.
13 Mme le Président (interprétation): Celle que nous avons vue ce matin. Oui.
14 Ceci a été versé au dossier, a reçu une cote.
15 M. Prodanovic (interprétation): C’est la greffière d'audience qui m'a
16 informé du fait que ceci est resté incertain.
17 M. Hunt (interprétation): Ce n’était pas sûr, il n'était pas sûr si ceci
18 était admis en tant que pièce à conviction. C'est ce que vous souhaitez.
19 M. Prodanovic (interprétation): Oui, Monsieur le Juge.
20 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): En ce qui concerne la cassette, le
21 Procureur fait objection et s'oppose à son versement au dossier en tant
22 que pièce à conviction de la défense, pour les mêmes raisons pour
23 lesquelles nous avons fait objection la première fois que la défense a
24 souhaité la montrer.
25 M. Hunt (interprétation): Oui, mais il y a une certaine pertinence puisque
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1 nous pouvons voir la couleur des uniformes.
2 Mme le Président (interprétation): Madame Uertz-Retzlaff, vous avez
3 toujours une objection?
4 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Non, mais je souhaite mentionner le
5 fait qu'il va falloir voir quel est le poids à donner à cette pièce à
6 conviction. Il n'y a pas de temps, il n’y a pas de date, ni rien.
7 Mme le Président (interprétation): Nous allons donc d’abord parler de la
8 cassette, elle sera admise. Nous verrons en ce qui concerne le poids
9 après. Quelle sera la cote officielle, s’il vous plaît?
10 Melle Lauer: La cote officielle de cette cassette vidéo est B80 des pièces
11 de la défense. En ce qui concerne le deuxième document que vient de me
12 soumettre Me Prodanovic, il s'agit donc du document de la défense 102 et
13 il sera identifié au titre des pièces de la défense sous le numéro D81.
14 Mme le Président (interprétation): Le Procureur a-t-il des objections?
15 Ceci n'est toujours pas admis.
16 M. Hunt (interprétation): J'ai une question. Est-ce que nous avons des
17 moyens de preuve indiquant que le commandant Gagovic était avec lui tout
18 le temps, afin de pouvoir faire un tel certificat, émettre un tel
19 certificat?
20 Mme le Président (interprétation): Je ne peux pas le confirmer.
21 M. Hunt (interprétation): A moins de pouvoir l'affirmer ou le confirmer,
22 je ne vois pas comment l'on peut admettre cela. En plus, nous ne savons
23 même pas d'où provient l'information.
24 M. Prodanovic (interprétation): L'information provient du commandement, je
25 suppose qu'il a reçu les informations que l'accusé est venu avec le canon
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1 antiaérien et puis le temps de son arrivée. Je suppose qu'il a vérifié.
2 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Madame la Présidente, d'après la
3 manière dont je comprends ce document, il s'agit plus ou moins d'une
4 déclaration sous serment concernant ce dont Gagovic peut déposer,
5 témoigner. Ceci ne correspond pas aux autres certificats que nous avons
6 reçus ici. Tout ce que nous pouvons voir en ce moment, c'est que Miletin
7 Gagovic a écrit ce document.
8 En ce qui concerne le contenu du document, il s'agit, en effet, d'une
9 déclaration indiquant que cette personne, M. Kunarac, avait été à Rogoj,
10 qu'il est rentré avec un véhicule spécial. Il s'agit là, en effet, d'une
11 déclaration et nous nous opposons à ce que ce document soit admis et
12 utilisé.
13 Mme le Président (interprétation): La Chambre de première instance a
14 décidé que ce document n'est pas admissible en tant que pièce à conviction
15 de la défense. Mais si la défense souhaite verser au dossier le contenu du
16 document, dans ce cas là, il va falloir citer l'auteur du document lui-
17 même, comme cela il pourra en parler de vive voix.
18 Mais, de toute façon, même dans ce cas là le document lui-même ne sera pas
19 admis.
20 M. Hunt (interprétation): En effet, maître Prodanovic, à moins que la
21 personne puisse confirmer qu'il s'agit-là de ces informations personnelles
22 ou que les archives sont tellement complètes qu'il peut affirmer cela avec
23 toute certitude. Dans ce cas-là, il ne serait même pas nécessaire qu'il
24 dépose directement si vous avez d'autres preuves fermes concernant cela.
25 M. Prodanovic (interprétation): Très bien, la défense va essayer de
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1 prouver cela d'une autre manière. D'ailleurs, les témoins de l'accusation
2 l'ont confirmé eux aussi; je ne m'attendais pas à ce genre de problème.
3 Mme le Président (interprétation): Le document a simplement reçu une cote
4 aux fins de l'identification, rien d'autre. Vous pouvez poursuivre.
5 M. Prodanovic (interprétation): Merci.
6 Lorsque vous êtes arrivé à Velecevo, qu'est il arrivé? Pouvez-vous
7 expliquer de quoi il s'agit? C'est quoi Velecevo?
8 M. Kunarac (interprétation): Comme je l'ai dit, à 20 heures 30 nous sommes
9 partis de Dobro Polje. Dans ce convoi, nous avons poursuivi le chemin
10 jusqu'à Velecevo où se trouvait le commandement de la brigade de Foca. Le
11 commandement de la brigade de Foca était situé dans des bâtiments où se
12 trouvait, avant la guerre, la prison pour les femmes. Aujourd'hui, c'est
13 une académie qui est située…
14 Question: A quelle heure arrivez-vous à Velecevo?
15 Réponse: Eh bien, nous n'avons pas pu prendre directement la route
16 goudronnée Foca-Miljevina puisque nous avions peur, comme la brigade de
17 Foca avait donné l'ordre à la brigade de Miljevina de se préparer pour
18 miner une partie de la route Foca-Miljevina.
19 La route avait déjà été bloquée, il y a eu des rochers sur la route, une
20 partie des ponts dans cette partie de la route était déjà minée. C'est-à-
21 dire les mines y étaient posées, afin de pouvoir être activées au cas où
22 l'ennemi ferait une percée. Nous avons donc dû emprunter une vieille route
23 et c'est vers 23 heures que nous sommes arrivés à Velecevo. Nous avons
24 quitté Dobro Polje vers 20 heures 30. Je sais qu'au moment où nous avons
25 quitté Dobro Polje, il a fallu déjà allumer les phares.
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1 Question: Quelle est la distance de Velecevo par rapport à Foca, s'il
2 vous plaît?
3 Réponse: La distance entre Velecevo et Foca est à peu près deux
4 kilomètres, cela se trouve sur la route Foca-Dragocava-Godzen en amont de
5 la Drina, à deux kilomètres de la rivière de Cehotina.
6 Question: Est-ce que vous arrivez à Velecevo dans le véhicule qui avait
7 été capturé au combat?
8 Réponse: Moi-même, j'étais assis sur la capote de ce véhicule, au siège
9 derrière le canon tritube. Le chauffeur était un collègue et on a été sept
10 à huit dans ce véhicule. C'est avec ce véhicule que je suis arrivé à
11 Velecevo. J'avais été assis sur le capot.
12 Question: Combien de temps êtes-vous resté à Velecevo?
13 Réponse: Lorsque nous sommes arrivés à Velecevo, nous avons appris par
14 le biais de la communication radio que nous avions réussi à reprendre le
15 contrôle de Rogoj. Donc, l'information est arrivée à Velecevo, le
16 commandant nous a félicités de ce succès et le véhicule est resté sur
17 place. Par la suite, notre brigade l'a utilisé dans des opérations de
18 défense. J'ai eu cette conversation avec le commandant pendant environ une
19 demi-heure, pas plus. J'étais extrêmement fatigué. Pendant deux nuits
20 avant cela, pendant la nuit entre le 31 et le 1, entre le 1 et le 2,
21 j'étais sur le terrain et j'ai très peu dormi, en ce qui concerne la
22 journée du 2 août, nous avions été impliqués dans des combats à Rogoj. A
23 ce moment-là, le commandant m'a dit que je pouvais rentrer chez moi voir
24 mes parents, que le lendemain matin, à 7 heures, je pouvais retourner au
25 quartier général pour soumettre un rapport complet sur ce qui s'était
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1 passé ces jours-ci à Rogoj.
2 Question: Où êtes-vous parti en quittant Velecevo?
3 Réponse: Puisque je n'avais pas de véhicule -je n'en ai jamais reçu de
4 la part du commandement-, le commandant m'a cédé le véhicule qui était
5 utilisé par le commandement lui-même pour me permettre de revenir auprès
6 de mes parents, de passer la nuit avec eux, et retourner le lendemain
7 matin. Je suis donc allé.
8 Lorsque j'étais sur le chemin près de Livade avant le dépôt, lorsque j'ai
9 entendu une forte détonation provenant de la ville, donc de la direction
10 devant moi, c'était peut-être 23 heures 30, 23 heures 45 au maximum.
11 Question: Qu'avez-vous pensé vis-à-vis de cette explosion?
12 Réponse: Au premier moment, puisque Foca est dans une vallée entourée de
13 collines partout, cette détonation a eu un grand écho. Il était donc
14 difficile de savoir s'il s'agissait d'une seule explosion ou de plusieurs
15 explosions. C'est pour cela que j'ai conclu que peut-être il s'agissait du
16 pilonnage de la ville elle-même, d'une attaque d'artillerie lancée contre
17 la ville.
18 Question: Qu'avez-vous fait ensuite?
19 Réponse: J'ai continué à conduire. Lorsque je suis arrivé jusqu'à
20 l'agglomération d'Aladza qui se trouve à une distance d'un kilomètre par
21 rapport à l'endroit où j'étais au moment de la détonation, j'ai vu que les
22 gens sortaient des bâtiments avoisinants. Ils étaient à moitié nus
23 puisqu'ils étaient déjà au lit. Il n'y avait pas d'électricité, le
24 quartier était dans le noir, personne ne savait ce qui se passait, tout le
25 monde pensait qu'il s'agissait d'un pilonnage. Personne ne pouvait
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1 constater de quelle direction venait la détonation.
2 Donc j'ai poursuivi mon chemin, j'ai passé le pont de Cehotina, ensuite le
3 grand magasin. Près du magasin, il y a eu beaucoup de débris de verres, je
4 suis allé devant le SUP, le poste de police. Là, j'ai vu deux policiers
5 qui se tenaient là. Je me suis approché d'eux, je leur ai demandé ce qui
6 se passait. A l'époque, eux non plus ne savaient pas ce qui s'était passé.
7 Ils m'ont dit: "Quelque chose a explosé à Livade". Ils pensaient que
8 c'était le dépôt des munitions et des équipements militaires à Livade qui
9 avait explosé. Mais je leur ai expliqué que, justement, à ce moment-là,
10 j'étais à Livade et que ce n'était pas vrai, que cela ne pouvait pas être
11 le cas.
12 J'ai essayé de traverser la ville en essayant de voir ce qui se passait. A
13 ce moment-là, lorsque je traversais le centre et que j'allais vers l'autre
14 pont, et lorsque je suis allé encore une fois vers Livade, j'ai vu la
15 fumée, un nuage de poussière qui s'évaporait à partir de l'endroit où se
16 trouvait la mosquée. Je me suis donc dirigé vers ce nuage de poussière. Je
17 suis passé à côté de la société d'automobilistes, mais je n'ai pas pu
18 passer plus loin puisqu'il y a eu beaucoup de morceaux de pierre, puisque
19 la mosquée avait été construite en pierre.
20 Question: Lorsque vous avez pu constater que c'est la mosquée d'Aladza
21 qui avait été démolie, qu'avez-vous fait ensuite?
22 Réponse: Je suis arrivé jusqu'au point où je pouvais arriver en voiture.
23 Je suis sorti de la voiture et j'ai pu voir ce qui s'était passé. Les
24 phares illuminaient l'endroit où se trouvait la mosquée. Les gens aux
25 alentours couraient, ils étaient pris de panique, des gens criaient. Il y
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1 en a eu même qui étaient blessés.
2 Moi, j'ai décidé de poursuivre le chemin et de retourner au commandement
3 de Velecevo. Comme je l'ai dit, le commandement m'avait cédé la voiture
4 dont il se servait normalement. Après cet incident, je me suis dit que
5 probablement ils auraient besoin de la voiture. C'est pourquoi je suis
6 retourné à Velecevo, je suis retourné au quartier général.
7 Question: Pourquoi avez-vous décidé de retourner au quartier général?
8 Réponse: Comme je l'ai dit, le commandant m'a cédé cette voiture, il
9 s'agissait de la voiture dont il se servait normalement lui-même. En me
10 cédant la voiture, il m'a dit qu'il n'avait pas besoin de la voiture
11 pendant la nuit, qu'il n'allait pas l'utiliser. Il a pris mon numéro de
12 téléphone en me disant: si quelque chose arrive, je vais téléphoner.
13 Lorsque j'ai vu cette explosion, je me suis dit qu'il serait normal que le
14 commandant lui-même vienne sur place afin de voir les endommagements
15 puisque les dégâts étaient énormes. La mosquée a été démolie, il y a eu
16 beaucoup d'endommagements sur des maisons et bâtiments avoisinants.
17 Lorsque j'étais sur place, j'ai parlé avec certains voisins, avec
18 certaines personnes qui habitaient aux alentours. Personne ne savait ce
19 qui s'était passé précisément. Donc, à ce moment, j'ai pris la voiture et
20 je suis retourné au quartier général afin de voir ce que je devais faire
21 ensuite.
22 Question: Est-ce que vous savez, est-ce que vous avez entendu dire –
23 puisque l'on sait qu'à ce moment-là il y a eu des échanges de tirs-,
24 savez-vous s'il y a eu des ordres interdisant que l'on incendie les
25 maisons?
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1 Réponse: Pendant que j'étais sur le terrain dans le cadre des missions
2 de reconnaissance, j'avais une petite radio, un petit transistor. Nous
3 pouvions entendre les informations et je peux vous assurer que tous les
4 jours, par le biais de la radio Foca, on diffusait des avertissements
5 indiquant que qui que ce soit qui aurait été vu, trouvé en train de
6 détruire la propriété privée ou d'incendier les maisons allait subir des
7 sanctions disciplinaires et autres. Je savais que cet avertissement avait
8 été lancé par le commandant de la brigade lui-même.
9 Lui-même, il lisait cet avertissement à la radio et les représentants
10 d'autres organisations politiques à Foca le faisaient, de même que les
11 représentants de la station de sécurité publique à Foca. Cet avertissement
12 a été rediffusé quotidiennement. Je sais également que plusieurs personnes
13 ont été arrêtées.
14 Quant aux procédures intentées contre eux par la suite et les sanctions,
15 les peines prononcées, je ne connais pas ces détails. Mais je sais que le
16 soir même, lorsque je suis retourné à Velecevo, lorsque je suis arrivé au
17 portail où j'ai demandé de voir le commandant, moi, j'étais en colère à
18 cause de tout ce qui s'était passé. Je me suis adressé au garde qui se
19 trouvait au portail et je lui ai demandé où se trouvait le commandant. Il
20 m'a demandé pourquoi. Je lui ai dit: "Un idiot a détruit la mosquée, je me
21 demande s'il n'y a pas de morts autour de la mosquée aussi".
22 Il m'a dit que le commandant était dans le quartier général. Alors, je
23 suis allé directement dans le quartier général. C'est là que j'ai vu le
24 commandant qui ne portait pas d'uniforme, il portait un pantalon et un
25 tee-shirt, il se préparait pour aller dormir au moment où l'explosion a eu
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1 lieu.
2 Question: Madame la Présidente, Messieurs les Juges, la défense a un
3 document que la défense a l'intention de verser comme pièce à conviction
4 de la défense.
5 La date du document est le 24 avril 1992. Il a été signé par l'état-major
6 de la cellule de crise. C'est un ordre instruisant le chef de la police
7 serbe, le chef de la police militaire de lancer immédiatement une enquête
8 et de traduire devant le Tribunal militaire les gens responsables pour la
9 destruction de la mosquée. Il s'agissait d'une autre mosquée et il
10 s'agissait, en effet, de la première mosquée qui avait été détruite.
11 Il s'agit du document du 24 avril 1992. Chez nous, ce document porte le
12 numéro 12. Je souhaite remettre cela à la greffière d'audience.
13 M. Hunt (interprétation): Est-ce que vous pouvez nous dire dans quel
14 classeur ceci se trouve? Je vois que l'un des classeurs commence avec le
15 numéro 64, un autre avec le numéro 83 et le troisième, avec le numéro 133.
16 Où est-ce que je peux trouver cela, dans quel classeur?
17 M. Prodanovic (interprétation): Je vais me tourner vers ma collègue, Mme
18 Lopicic, c'est elle qui a préparé les classeurs.
19 Mme Lopicic (interprétation): C'est dans le classeur où se trouve
20 l'expertise militaire du général Radinovic.
21 M. Hunt (interprétation): Cela reste de difficile pour moi.
22 Mme Lopicic (interprétation): Il s'agit du classeur que la défense a remis
23 avec l'expertise militaire du général Radinovic. Il s'agit du numéro 163.
24 Mme le Président (interprétation): Je vais demander à l'accusation de
25 s'exprimer au sujet de ce document.
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1 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Nous estimons que ce document n'a
2 aucune pertinence. En ce qui concerne l'authenticité du document, nous
3 n'avons a priori pas d'objection, cela fait partie du rapport Radinovic.
4 Nous avons une objection générale en matière de pertinence de la totalité
5 ou la quasi totalité de ces documents.
6 Mme le Président (interprétation): Mais quelle est votre objection, quel
7 est le fondement de votre objection pour ce document en particulier?
8 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Ce document n'a aucune pertinence. La
9 mosquée, en question, n'a aucune pertinence ici.
10 M. Hunt (interprétation): Ce n'est pas la mosquée qui a été utilisée pour
11 des fonctions de datation?
12 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Non, c'est complètement différent, ce
13 n'est pas la mosquée Aladza.
14 M. Hunt (interprétation): Alors, quelle est la pertinence, maître
15 Prodanovic? Dans sa déclaration, votre client utilise cet événement pour
16 se situer dans le temps au moment des faits. Alors quelle est la
17 pertinence?
18 M. Prodanovic (interprétation): Ce document est pertinent, Monsieur le
19 Juge, parce que la défense souhaite prouver que les autorités officielles
20 n'étaient absolument pas en faveur d'acte de vandalisme individuel.
21 M. Hunt (interprétation): Oui, mais il ne s'agit, ici, pas de poursuites
22 intentées contre ces personnes. Je ne vois pas l'intérêt que cela
23 représente pour nous.
24 M. Prodanovic (interprétation): Autant que je puisse le voir, dans l'acte
25 d'accusation, vous avez des allégations de portée générale et la défense
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1 estime que le document que nous venons de vous communiquer peut être
2 pertinent.
3 M. Hunt (interprétation): Est-ce que vous pouvez nous indiquer dans l'acte
4 d'accusation les extraits qui correspondent aux documents que vous
5 souhaitez verser au dossier, et les paragraphes qui seraient donc
6 contestés par ce document?
7 M. Prodanovic (interprétation): Dans l'acte d'accusation, à aucun endroit
8 on ne parle de ce document. Mais si on regarde la situation dans sa
9 globalité, et si on souhaite se pencher sur l'allégation de nettoyage
10 ethnique avec la destruction d'immeubles, il faudrait -pour que cela soit
11 avéré-, que les autorités au pouvoir à l'époque soient d'accord et mènent
12 ce genre de politique. C'est pourquoi nous estimons que ce document est
13 pertinent.
14 M. Hunt (interprétation): Oui, mais pour autant ce document n'a aucune
15 pertinence au sujet du fait que ce bâtiment a été incendié. Or, la
16 conclusion qu'on va nous demander de tirer, c'est que des sanctions ont
17 été prises, mais cela n'a pas été le cas. En l'espèce, c'est votre client
18 à qui l'on reproche les faits qui nous intéressent.
19 On nous demande donc, sur la base d'incidents qui ont eu lieu, de la
20 destruction de certains bâtiments, de certaines mosquées, du traitement de
21 Musulmans, c'est qu'il y a eu une offensive dirigée contre la population
22 musulmane, attaque menée par une partie des Serbes.
23 Alors, dans quelle mesure ce document va-t-il à l'encontre de cette
24 allégation?
25 M. Prodanovic (interprétation): Bien, Monsieur le Juge, si vous estimez
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1 que ce document n'est pas pertinent, nous n'allons pas demander à ce qu'il
2 soit versé au dossier, nous allons le retirer.
3 M. Hunt (interprétation): Je pense que ce document n'a aucun intérêt en ce
4 qui concerne la décision que nous avons à prendre. Il est sûr que nous
5 allons être étouffés sous une avalanche de documents si nous acceptons
6 tous les documents relatifs à la destruction des divers bâtiments de la
7 région et dans lesquels il est stipulé que les autorités serbes ont mené
8 une enquête.
9 Mme le Président (interprétation): Cependant, il nous faut quand même une
10 cote.
11 Melle Lauer: Ce document prendra la cote D82.
12 Mme le Président (interprétation): Oui, en effet, uniquement aux fins
13 d'identification, il ne s'agit pas, ici, de verser ce document au dossier,
14 de l'admettre en tant qu'élément de preuve.
15 Vous pouvez continuer, maître Prodanovic.
16 M. Prodanovic (interprétation): Merci.
17 Vous avez donc parlé au commandant. Ensuite, êtes-vous retourné à Foca?
18 M. Kunarac (interprétation): Lorsque je suis arrivé au quartier général,
19 lorsque je suis entré dans le bâtiment, j'ai trouvé le commandant, le chef
20 de la sécurité et ses cinq ou six adjoints, c'est-à-dire les gens qui
21 formaient le commandement. Je leur ai dit ce qui s'était passé.
22 Le commandant a dit à son second, le responsable de la sécurité, il lui a
23 donc donné l'ordre de se rendre sur place immédiatement pour voir ce qui
24 s'était passé, et pour essayer de déterminer exactement ce qui s'était
25 produit. J'ai appelé le commissariat de police et l'officier de permanence
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1 au poste de police a reçu l'ordre de mener une enquête, afin de déterminer
2 quelles étaient les hauteurs de cet acte. Je lui ai parlé.
3 Sur la base de sa réaction et de la réaction des membres du commandement
4 de la brigade, j'ai pu voir que personne au sein du commandement n'avait
5 donné d'ordre pour cet attentat. Ils étaient indignés, ils étaient tout à
6 fait décidés, déterminés à découvrir qui étaient les responsables de cet
7 acte.
8 Si vous me permettez de faire une observation personnelle au sujet de
9 l'atmosphère qui prévalait dans la ville -d'ailleurs c'est la raison pour
10 laquelle je suis allé là-bas-, permettez-moi de vous dire, quand je suis
11 descendu dans la ville j'ai remarqué qu'il y avait en ville des individus
12 totalement incontrôlés; des personnes qui ont utilisé la situation
13 totalement anarchique qui prévalait dans leur propre intérêt.
14 Question: Vous entrez dans les détails, nous risquons un peu de nous
15 égarer. La question que je vous ai posée est de savoir si vous êtes
16 retourné à Foca après avoir rencontré le commandant.
17 Réponse: Non. Je suis resté là ce soir-là, l'officier chargé de la
18 sécurité est allé enquêter sur place. Moi, pendant ce temps, je suis resté
19 au quartier général de la brigade, j'ai attendu son retour. Effectivement,
20 il est revenu 45 minutes plus tard. Il a raconté ce qu'il avait vu sur
21 place. Nous nous sommes entretenus sur la situation à Rogoj, sur ce qui
22 s'était passé ce jour-là et les jours qui avaient précédés.
23 Ce même soir, je me suis rendu auprès du commandant de la brigade, je lui
24 ai fait un rapport au sujet de ce que j'avais vu à Rogoj, je lui ai parlé
25 des mouvements des forces ennemies dans la région, etc. Après cet
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1 entretien qui a duré jusqu'à environ 3 heures du matin, je suis allé dans
2 la salle des gardes, ou plutôt là où étaient logés les gardes qui
3 logeaient dans l'enceinte du quartier général. Je suis donc allé là, j'ai
4 dormi jusqu'à environ 7 heures 30 du matin. A ce moment-là, je me suis
5 levé, j'ai été prendre mon petit déjeuner au quartier général de la
6 brigade.
7 Question: Est-ce que je vous ai bien compris? Cette nuit-là et la soirée
8 du 2, vous les avez passées au quartier général de la brigade, c'est bien
9 cela?
10 Réponse: Je ne sais pas si c'était la police ou les gardes du quartier
11 général. En tout cas, je sais que j'ai passé la nuit au rez-de-chaussée
12 dans une pièce où se trouvaient les militaires qui gardaient l'enceinte du
13 quartier général de la brigade. Il y avait dans ce bâtiment quatre ou cinq
14 pièces avec sept ou dix hommes. Je suis allé dans une pièce où il y avait
15 un lit qui était libre et c'est là que j'ai dormi.
16 Question: Le 3 août, le matin, qu'avez-vous fait, où êtes-vous allé?
17 Réponse: Le matin du 3 je me suis levé, je me suis préparé, je suis allé
18 prendre mon petit déjeuner, je suis allé directement au mess ou plutôt à
19 la cuisine qui se trouvait au rez-de-chaussée. J'ai pris mon petit
20 déjeuner, j'étais à la même table que Drinjak, c'était un jeune homme qui
21 était un membre de la police. Je lui ai parlé. Après avoir parlé au
22 commandant de la brigade quand je l'avais vu le 2 au soir, le commandant
23 de la brigade m'avait dit que le 3 août, il a dit qu'à ce moment-là, ils
24 allaient faire une estimation au sujet des mouvements de l'ennemi et qu'à
25 ce moment-là on déterminerait quelle sera ma mission et dans quelle
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1 direction je devrais aller, dans quelle zone je devrais mener à bien des
2 missions de reconnaissance pour voir si l'attaque de l'ennemi se
3 poursuivait.
4 Quand j'ai dit à Drinjak que j'étais de repos, que je pouvais aller chez
5 moi ce jour-là, il m'a proposé d'utiliser sa voiture. Il a dit que je
6 pouvais l'emprunter pour aller chez moi, chez mes parents. Lui était de
7 service au quartier général donc il n'avait pas besoin de sa voiture. De
8 ce fait, vers 7 heures 30, je suis parti au volant de cette voiture en
9 direction de la maison de mes parents.
10 Je suis passé par le pont qui engendre la Cehotina au centre. J'avais
11 l'intention de passer par le cimetière pour aller vers chez moi et j'ai vu
12 une voiture Jugo qui allait vers moi. La personne qui se trouvait au
13 volant m'a reconnu. Je la connaissais déjà. Elle avait essayé de me parler
14 auparavant. J'ai arrêté mon véhicule et j'ai commencé à parler avec cette
15 personne.
16 Question: Pouvez-vous nous dire de qui il s'agissait?
17 Réponse: Il s'agissait d'une jeune fille, Gordana Draskovic. C'était une
18 journaliste, une journaliste de SRNA, TV SRNA, ainsi que de la maison
19 d'édition, plutôt du journal SRNA. Je me suis arrêté, je lui ai parlée,
20 elle m'a demandé si je pouvais lui consacrer quelques instants. Nous
21 étions tous les deux arrêtés sur la route, nous bloquions la circulation.
22 Nous avons donc garé nos voitures sur le côté de la route et nous avons
23 commencé à parler. Je lui ai dit que je n'avais nulle envie de donner une
24 interview mais elle, c'est la façon dont elle a commencé sa conversation.
25 Elle voulait écrire un article sur les combats qui avaient eu lieu à
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1 Rogoj. Elle voulait savoir comment nous étions parvenus à reprendre le
2 contrôle de l'artillerie, etc., etc. Moi, j'ai dit que je n'avais pas du
3 tout envie de donner d'interview, je ne voulais pas que mon nom soit
4 mentionné de quelque façon que ce soit dans un article de presse ou à la
5 télé ou à la radio.
6 Question: Est-ce qu'elle vous a proposé d'aller prendre un café quelque
7 part?
8 Réponse: Moi, j'avais refusé de lui donner une interview officielle,
9 elle m'a dit: "Eh bien, on pourrait discuter, on pourrait aller discuter,
10 prendre un café, tu n'as jamais le temps.". Parce que déjà, auparavant,
11 elle avait voulu que je lui donne une interview et j'avais refusé au
12 moment des événements de Ravan. Elle m'a dit: "Allons prendre un café".
13 Elle m'a promis que cela ne deviendrait pas une interview officielle,
14 qu'il s'agirait d'une simple conversation tout à fait informelle, qu'on
15 prendrait un café en amis.
16 On est allé à l'hôtel Zelengora qui se trouve à côté, à peu près à 30 ou
17 50 mètres de l'endroit où nous étions arrêtés. On est allé là pour prendre
18 un café. A l'époque, on pouvait prendre un café là-bas le matin, puisqu'il
19 servait le café aux réfugiés, les réfugiés qui étaient logés à l'hôtel.
20 Donc, nous sommes allés à l'hôtel et nous avons continué à discuter.
21 Question: De quoi avez-vous parlé?
22 Réponse: Eh bien, on s'est assis et elle a continué à essayer de me faire
23 parler de Rogoj. Je lui ai dit qu'on s'était mis d'accord pour que je n'en
24 parle pas du tout. Je lui ai dit que je ne voulais absolument pas parler
25 de cela. Si elle voulait effectivement interviewer quelqu'un, il fallait
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1 qu'elle aille au commandement ou ailleurs. A ce moment-là, elle a dit: "Tu
2 ne veux pas donner d'interview, mais il y en a d'autres qui parlent
3 volontiers de toi et qui savent exactement ce que tu fais.".
4 Au début, je n'ai pas vraiment compris ce qu'elle voulait dire par là.
5 J'ai cru qu'elle avait parlé avec certains de ceux qui avaient participé à
6 l'opération de Rogoj, et que quelqu'un avait mentionné ma participation au
7 combat de Rogoj. Alors je lui ai dit: "Tu sais ce qui s'est passé." Je lui
8 ai dit: "S'il te plaît, ne mentionne pas mon nom parce que ma femme et mes
9 enfants ne sont pas sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine", -ils
10 étaient à Tivat au Monténégro.
11 A l'époque, il y avait un grand nombre de réfugiés musulmans comme Serbes
12 qui se trouvaient sur la côte au Monténégro.
13 Je ne voulais pas que mon nom soit mentionné d'une façon ou d'une autre.
14 Alors là, elle a pris un petit ton sarcastique et elle m'a dit: "En fait,
15 tu sais ce que l'on raconte sur toi, ce n'est pas très sympathique c'est
16 plutôt négatif.". Elle avait un ton extrêmement méprisant lorsqu'elle a
17 dit cela, comme si elle pensait: "Comment es-tu capable de faire ce genre
18 de chose à ces pauvres filles?". Je n'avais absolument aucune idée de ce
19 dont elle pouvait bien parler. Je ne comprenais absolument pas de quoi
20 elle parlait, je lui ai dit: "Qu'est-ce que tu veux dire? Qui a dit
21 quoi?".
22 A ce moment-là, elle a commencé à me demander si je savais où se trouvait
23 le centre Partizan, si je savais qui s'y trouvait. Jusqu'à cet instant, je
24 n'avais aucune connaissance de ce qui se passait. Bien entendu, je savais
25 où se trouvait le bâtiment, il était déjà là auparavant. C'était là où se
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1 trouvait le centre sportif. Je ne savais absolument pas ce qui s'est
2 passé.
3 Je ne savais rien de ce qui s'y passait. On a continué à discuter. A ce
4 moment-là, elle a dit: "Mais enfin, j'y suis allée, j'ai parlé avec ces
5 personnes qui s'y trouvent. Et elles ont dit que tu allais là-bas, que tu
6 les a fait sortir, que tu les a maltraitées, que tu les as violées".
7 J'étais stupéfait quand elle m'a dit cela. J'étais également très blessé
8 en tant qu'homme, en tant qu’être humain. Je ne me doutais absolument pas
9 de tout ce qui se passait. Je n'avais absolument rien à voir avec tout
10 cela. Au début, j'ai pensé que c'était une plaisanterie de très mauvais
11 goût, que c'était une sorte de manoeuvre de provocation de sa part. Je lui
12 ai demandé à nouveau: "Mais qui t’a parlé. Qui sont ces personnes?"
13 A ce moment-là, elle a donné quatre noms. Auparavant, je n'avais jamais
14 entendu prononcer ces noms par qui que ce soit. En tout cas, il y a deux
15 noms dont je suis absolument sûr que je ne les avais jamais entendus parce
16 que ce sont des noms extrêmement rares.
17 Question: Je vais vous interrompre, parce que je vais vous rappeler qu'il
18 ne faut absolument pas mentionner ces noms.
19 Réponse: Oui je le comprends. Elle a donné les noms du témoin FWS-87 et
20 de DB, du témoin DB. C'était la première fois de ma vie que j'entendais
21 prononcer ces noms. C’était la première fois que j'entendais ce type de
22 noms d’ailleurs. Ce sont des noms extrêmement rares. Jamais je n’avais
23 entendu ce type de noms précédemment. Elle a également donné deux autres
24 noms. Elle a également mentionné le nom du témoin 75, cela j'en suis sûr.
25 J'étais abasourdi, j’étais complètement stupéfait à ce moment-là. Je
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1 n’arrivais pas à comprendre, à savoir si elle était en train de se moquer
2 de moi ou si elle disait la vérité.
3 Alors, j'ai reposé la question. Elle a répété les noms, elle a dit qu'elle
4 avait parlé avec ces personnes quelques jours auparavant. Ces personnes
5 avaient dit que j'étais venu en personne au gymnase Partisan, que je les
6 avais fait sortir, que je les avais maltraitées, que je les avais violées
7 notamment, entre autre. J'ai écrit le nom de ces quatre personnes qu'elle
8 avait mentionnées parce que, dans une des poches de mon uniforme, j'avais
9 un petit calepin. J'avais toujours un petit calepin quand j'allais sur le
10 terrain, quand je revenais de mission, donc j'avais un calepin où
11 j'écrivais les informations importantes. Ensuite, je transférais ces
12 informations sur des cartes, etc.
13 Question: Je vais vous interrompre. Comment s’est terminée cette
14 conversation avec cette journaliste?
15 Réponse: Eh bien, cette conversation a duré…, mettons une demi-heure ou
16 plus. On a pris un café. Je lui ai dit que je n'avais absolument rien à
17 voir avec tout cela. Elle m'a dit que si je ne la croyais pas, je n’avais
18 qu’à vérifier. Au moment où nous nous sommes quittés, elle a dit qu'elle
19 avait interviewé ces personnes, qu’elle serait tout à fait prête à ce que
20 je lui donne ma version des faits, une interview à ce sujet. Moi, je lui
21 ai donc dit que je n'avais rien à voir avec tout cela. On s’est séparé.
22 Elle a dit qu'elle allait à la poste parce qu’il fallait qu'elle fasse son
23 rapport quotidien pour son entreprise, pour son journal. Elle a dit
24 ensuite que ces personnes avec qui elle avait parlé, avaient parlé des
25 hommes de Zaga, de Zaga lui-même. Ces gens avaient donc dit que Zaga était
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1 venu en personne, les avait fait sortir, que Zaga et ses hommes les
2 avaient violées.
3 A Foca, jusqu'à ce jour, je ne connais personne d'autre qui porte le
4 surnom de Zaga. Le fait qu'elle ait mentionné des hommes du Monténégro,
5 les hommes de Zaga, et puis les endroits qui ont été mentionnés, parce que
6 ces personnes avaient dit avoir été emmenées à Aladza dans le quartier
7 d'Aladza.
8 Tout cela m'a amené à la conclusion qu'il fallait absolument que je vois
9 de quoi il retournait, de voir ce qui se passait, de voir si cette
10 journaliste m'avait menti, ou si elle racontait d'une façon ou d'une autre
11 la vérité.
12 Question: Alors qu’avez-vous fait à ce moment-là?
13 Réponse: J'étais blessé en tant qu'être humain en tant qu'homme. J'avais
14 été agressé, attaqué. Des gens avaient menti à mon sujet, au sujet de
15 chose que je n'avais pas eu le temps de faire, que je n'avais jamais
16 faites. A ce moment-là, je me suis dit que la chose à faire, c’était
17 d’aller à Aladza, de voir ces hommes dont il était possible qu’ils aient
18 dit que c’étaient mes hommes à moi et de voir si un ou plusieurs de ces
19 hommes avaient quoi que ce soit à voir avec ces événements. Je suis donc
20 allé dans le quartier d'Aladza et dans la maison mentionnée dans l'acte
21 d'accusation qui se trouve à la rue Omera Dikica 16.
22 Question: Nous y viendrons. Procédons par ordre.
23 Réponse: Bien. Je suis donc allé dans le quartier d’Aladza pour essayer
24 de voir si ce que m'avait raconté la journaliste avait un fondement
25 quelconque.
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1 Question: Pourquoi vous êtes-vous rendu dans cette maison en particulier?
2 Réponse: Eh bien, elle avait parlé d’Aladza, de Monténégrins. Elle avait
3 parlé de Zaga et des hommes de Zaga. Et dans cette maison, dans le
4 quartier d'Aladza dont j'ai donné l'adresse, il y avait des hommes qui
5 restaient là pendant leur temps de repos. Un de ces quatre hommes était
6 très souvent avec moi sur le terrain, un de ces quatre hommes qui se
7 trouvaient là. Il y avait un autre avec qui je travaillais de temps en
8 temps, un autre très rarement, quant au quatrième il n'a jamais été sur le
9 terrain avec moi. A côté de cette maison se trouvait un appartement où
10 vivaient quatre hommes, quatre Monténégrins. Pendant les deux mois que
11 j'ai passés à Foca, je les ai eus avec moi sur le terrain, une ou deux
12 fois. Je suis donc alllé voir ces hommes pour vérifier si l'un d'entre eux
13 avait quoi que ce soit à voir avec ce que ces personnes avaient raconté à
14 la journaliste.
15 Question: Pouvez-vous nous dire qui a hébergé, qui hébergeait ces hommes
16 dans cette maison?
17 Réponse: La première fois que je suis allé dans cette maison, j'ai appris
18 qu'il y avait un groupe d'hommes qui vivait là. C'était le 22 juin après
19 que Goran Miljacic a été blessé.
20 Question: Vous voulez dire juin ou juillet?
21 Réponse: Je veux parler de juillet après la prise de Cerova Ravan le 22
22 juillet, au moment où je suis allé à l'hôpital pour voir Goran Miljacic
23 qui avait été blessé. A ce moment-là, il m'avait dit que lorsqu’il était
24 de repos, depuis qu'il avait été affecté au 5ème Bataillon, donc il m'a dit
25 que quand il avait des permissions ou autre, il allait dans cette maison,
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1 il habitait dans, ou plutôt dans l’appartement qui se trouvait à côté de
2 cette maison. Il y avait un supermarché au rez-de-chaussée de cet
3 immeuble.
4 Il m'a demandé d'aller dans l'appartement pour y prendre ses effets
5 personnels et pour les laisser chez mes parents à moi parce qu’il savait
6 que, souvent, l'appartement était vide. Il avait peur que ses affaires ne
7 se perdent ou ne soient volées. Je suis donc allé là-bas. Et l'un des
8 hommes, Dragutin Vukovic, Gaga, m’a dit qu’il revenait du terrain. En
9 fait, il avait été avec moi sur le terrain du 6 au 21 à Cerova Ravan. Il
10 avait été en permission à ce moment-là. Il m'a dit qu'il vivait dans la
11 maison au numéro 16 de la rue Omera Dikica, dans la maison qui se trouvait
12 à côté du bâtiment. Kontic lui aussi était dans cette maison, lui aussi
13 avait participé à des opérations avec moi sur le terrain, du 7 au 21. Deux
14 autres hommes de Niksic étaient également logés là, deux autres hommes
15 qu'il connaissait. Il m'a également dit que ces hommes étaient entrés dans
16 cette maison, une maison abandonnée qui était vide. Quand des réfugiés
17 sont arrivés à l'école, parce que les personne qui venaient à Foca, les
18 réfugiés qui ne connaissaient personne à ce moment-là restaient à l'école.
19 C'était le cas également des soldats quand ils étaient en permission,
20 qu'ils attendaient d'aller sur la ligne de front.
21 Quand les réfugiés sont arrivés, les soldats dont je viens de parler ont
22 cherché des maisons abandonnées qu'ils pourraient utiliser. C'est pourquoi
23 ils se sont installés au 16 Omera Dikica.
24 Question: Pourriez-vous décrire la maison? De quoi avait-elle l'air?
25 Réponse: Quand on part du centre médical vers Velecevo, cette maison
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1 était derrière un immeuble à côté du parc, à côté de la première route à
2 droite qui mène vers la mosquée d'Aladza. Il s'agissait d'une maison assez
3 ancienne qui avait été bâtie peut-être même avant la Deuxième Guerre
4 mondiale. Elle avait une cour devant la maison, elle avait une clôture
5 autour. Il y avait un sous-sol ainsi qu'un étage qui était à la hauteur de
6 la route Foca-Godine. On entrait dans la maison depuis cette route qui
7 menait vers la mosquée d'Aladza. C'était donc la première maison que l'on
8 voyait en allant vers la mosquée d'Aladza ou bien, la première maison à
9 partir de la mosquée d'Aladza -si on prend la route dans le sens inverse.
10 Question: Quand vous êtes arrivé dans cette maison ce jour-là, après
11 votre entretien avec la journaliste, êtes-vous entré dans la maison?
12 Réponse: Je suis tout d'abord allé devant l'immeuble, devant cet
13 appartement où était aussi hébergé Miljacic qui, à l'époque, était à
14 l'hôpital car il avait été blessé. J'ai klaxonné avec ma voiture et je
15 leur ai demandé de descendre. Quand ils sont descendus, j'ai parlé avec
16 ces hommes. Il y avait trois hommes plutôt jeunes. Je leur ai demandé
17 s'ils savaient où se trouvait Partisan. Ils m'ont dit qu'ils n'en savaient
18 rien. Je me suis renseigné aussi dans la maison à côté. Les gens qui y
19 étaient m'ont dit qu'ils n'en savaient rien non plus. Il était à peu près
20 8 heures à ce moment. Là, dans cette autre maison, on m'a dit que Gaga
21 était venu, Dragutin, et qu'il voulait déménager chez eux parce que la
22 maison où il était avait perdu toutes ses vitres, toutes les vitres avaient
23 été brisées à cause de l'explosion de la mosquée. Le plafond était
24 endommagé.
25 Donc je suis allé dans la maison. En réalité, je suis allé voir la maison,
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1 je suis allé dans la cour. On y a trouvé 5 ou 6 hommes, des hommes qui y
2 habitaient à l'époque; les 4 qui habitaient là-bas, ainsi que quelques
3 autres personnes que je n'avais jamais vues auparavant. J'ai essayé de me
4 rendre à l'étage de la maison, mais un homme qui était venu avec Kontic
5 -il était venu de Niksic, à l'époque il habitait dans cette maison-, était
6 en train de nettoyer les débris, les dégâts suite à l'explosion. Moi, je
7 leur ai demandé à tous de venir dans la cour pour que l'on puisse parler.
8 Ils étaient à peu près 10 ou 11. Je leur ai demandé s'ils savaient où se
9 trouvait Partisan, si quelqu'un avait dit qui était Zaga, s'il avait connu
10 quelqu'un qui s'était présenté comme Zaga.
11 Ils n'avaient pas l'air de savoir. Ils ont tous dit qu'ils n'en savaient
12 rien, vraiment. Je me souviens que je leur ai dit avec beaucoup d'aplomb
13 que j'allais vérifier cela et que, qui que ce soit d'entre eux faisait
14 quoi que ce soit de mauvais, s'il me mettait en rapport avec ce qui était
15 fait, que j'étais prêt à tuer une telle personne, enfin…, à lui tirer
16 dessus. C'est comme cela que je parlais, avec beaucoup d'aplomb, vraiment.
17 Mais ils ont nié avoir un rapport quelconque avec tous ces événements.
18 Alors je suis parti et Gaga Vukovic m'a suivi.
19 Depuis le jour où je l'ai rencontré et la première fois que je l'ai
20 rencontré, c'était à mon retour de Tjentiste, à une occasion où deux
21 personnes avaient été blessées. Je pense que c'était le 19 ou 20 juin.
22 C'est Kontic qui me l'a fait rencontrer. A l'époque, j'avais rencontré
23 trois autres personnes qui étaient volontaires, qui venaient du Monténégro
24 et qui dépendaient du 5ème Bataillon en tant que volontaires. Pendant tout
25 le temps que j'ai passé sur le terrain, Gaga Vukovic était pratiquement
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1 tout le temps aussi sur le terrain. Il m'a suivi, il est sorti avec moi,
2 il m'a demandé ce qui s'est passé, on s'est assis dans la voiture. Je lui
3 ai tout raconté.
4 Il connaissait mieux ces gens de Niksic que moi car, moi, par exemple, je
5 ne connaissais pas du tout Gaga avant de le rencontrer à Foca. Ces autres
6 personnes, je les connaissais de vue. Kontic, je le connaissais de vue,
7 parce que nous avons fait partie des unités de réserve à une époque. Je ne
8 connaissais pas vraiment la personnalité de ces gens et je ne savais pas
9 vraiment ce qu'ils étaient capables de faire.
10 Question: Je vais vous interrompre. Pouvez-vous me dire où vous êtes allé
11 après cet entretien que vous avez eu avec Gaga?
12 Réponse: Au moment de cet entretien, j'avais vraiment confiance en cet
13 homme car nous avons participé à des missions de combat ensemble. La
14 veille, à Rogoj, il m'avait sauvé la vie. J'en suis sûr, il était plus âgé
15 que moi; 7, 8 ans de plus peut-être, même 10 ans de plus. Je lui ai
16 demandé quelle était son opinion, ce que je devais faire. Il m'a dit:
17 "Ecoute, allons là-bas pour voir qui sont ces gens qui racontent cela,
18 pour voir qui sont ces bandits". Il l'a dit en pensant à des personnes qui
19 faisaient cela, qui se servaient en quelque sorte de mon identité, qui se
20 mettaient en rapport avec cela. J'ai accepté cette proposition, et nous
21 sommes allés tous les deux au Partisan.
22 Question: Pourriez-vous nous dire à quelle heure vous êtes arrivés à
23 Partisan?
24 Réponse: Ma conversation, aussi bien ma conversation avec ces hommes et
25 avec Gaga après…, tout cela a duré de sorte que j'ai pu arriver vers 9
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1 heures moins le quart à Partisan. Puisque le petit déjeuner au quartier
2 général était servi entre 7 heures et 7 heures et demis, ensuite, je n'ai
3 pas parlé plus d'une demi-heure avec la journaliste. Je pense donc qu'il
4 était à peu près 8 heures et demie au moment où je suis arrivé à Partisan.
5 J'ai garé ma voiture sur le parking de Partisan. Dans ma cour, devant
6 cette salle de sport, il y avait une femme, des enfants. Il y avait une
7 femme qui était en train de faire de la lessive, tout près de la clôture.
8 Question: Je vais vous interrompre. Avez-vous réussi à trouver ces femmes
9 à cause desquelles vous y êtes allé?
10 Réponse: Oui, je suis entré dans la salle de sport de Partisan, la porte
11 était ouverte. Devant l'entrée ou dans la cour, je n'ai pas vu un gardien
12 ou une quelconque personne qui se serait occupée de garder ces lieux, de
13 la sécurité. A part ces femmes et ces enfants, je n'ai vu personne
14 d'autre.
15 Je suis entré dans la salle. Il y avait à peu près une cinquantaine de
16 personnes à l'intérieur. Elles étaient assises ou couchées, soit près du
17 mur à droite ou près de la porte. Je me suis avancé de quelques pas, je
18 suis entré dans la salle, je portais un uniforme, j'avais un pantalon et
19 une chemise de camouflage. Je n'avais pas d'arme, je ne portais aucune
20 arme. J'ai dit que je souhaitais parler avec les personnes qui avaient
21 parlé avec une journaliste quelques jours auparavant. J'ai regardé les
22 personnes présentes, mais personne ne s'est levé, personne n'a montré un
23 signe quelconque qu'il voudrait ou elle voudrait me parler. J'ai répété à
24 nouveau que je souhaitais parler avec les personnes qui ont déclaré que
25 Zaga les a emmenées quelque part ou les a violées. Personne ne s'est levé,
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1 j'ai donc sorti le bloc-notes de la poche de mon pantalon. J'ai donné
2 lecture de ces quatre noms: le témoin DB, le 87, 75, et ce quatrième nom
3 qui était le nom d'une femme. Il s'agissait du témoin qui porte le
4 pseudonyme 87. Je ne connaissais pas cette personne, elle était plus jeune
5 que DB.
6 Question: Est-ce que vous pourriez nous répondre si c'était la première
7 fois où vous êtes allé à Partisan cette fois-ci?
8 Réponse: Oui, c'était la première fois où je suis entré dans la cour et
9 dans la salle de Partisan. Jusqu'à cet entretien avec cette journaliste,
10 je ne savais même pas qu'il y avait des personnes qui étaient hébergées à
11 Partisan. C'est la première fois que j'entrais dans les lieux. J'ai bien
12 décrit comment j'y suis allé, comment je suis entré, comment j'ai appelé
13 ces personnes, comment ces personnes se sont levées, elles se sont donc
14 levées, elles m'ont suivi, nous sommes allés dehors, nous sommes sortis
15 dans la cour. Il y a un monument dans la cour. J'étais accompagné de Gaga,
16 Dragutin Vukovic, elles nous ont suivis. Je ne me souviens pas qu'il ait
17 dit un mot à Partisan d'ailleurs.
18 Question: Vous avez dit que ces jeunes filles vous ont suivi dans la
19 cour, devant Partisan. De quoi avez-vous parlé, quelle était la nature
20 de votre conversation?
21 Réponse: Moi, j'allais devant elles, elles m'ont suivi, j'ai voulu leur
22 parler à elles, toutes seules. Je ne voulais pas qu'il y ait d'autres
23 témoins. Je vous ai déjà dit qu'il y avait peut-être une dizaine de
24 femmes, une dizaine d'enfants qui s'affairaient dans la cour, des enfants
25 qui couraient. Il y avait des femmes qui faisaient la lessive, d'autres
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1 assises sur la pelouse dans la cour.
2 Quand je suis arrivé jusqu'au monument, j'ai vu Vida Pavlovic, c'est une
3 femme que je connaissais même avant la guerre. Je la connaissais depuis
4 mon enfance. Pendant qu'elle avait été mariée, elle vivait tous près de
5 chez mes parents. Elle me connaissait depuis que j'étais tout petit,
6 depuis l'école élémentaire pratiquement. Je l'ai donc saluée, je lui ai
7 dit bonjour. Il est vrai qu'elle m'a répondu. Elle m'a dit; "Ah bonjour
8 Zaga, comment cela va? Comment va ta mère? Dis-lui bonjour". Elle était en
9 train d'étendre le linge, parce qu'elle habitait juste à côté dans un
10 petit studio près de la salle de Partisan.
11 Question: Quand ces quatre jeunes filles se sont rapprochées de moi, je
12 leur ai demandé si nous nous étions déjà rencontrés, si elles me
13 connaissaient. Elles m'ont dit non. Elles m'ont dit aussi que c'était la
14 première fois qu'elles me voyaient. Je leur ai demandé si elles
15 connaissaient un certain Zaga, si elles avaient été emmenées quelque part
16 par cette personne. Ces jeunes filles, au moment où Vida m'a appelé Zaga,
17 j'ai déjà dit qu'à Foca tout le monde m'appelait Zaga, depuis que je suis
18 tout petit. J'ai vu aussi qu'à partir du moment où Vida m'avait salué et
19 m'avait dit Zaga, elles avaient rougi, qu'elles avaient baissé les yeux.
20 Je leur ai donc demandé si elles avaient parlé avec une journaliste. Elles
21 ont dit qu'elles n'avaient jamais parlé avec une journaliste, elles ne
22 savaient même pas de quoi je parlais. Je leur ai répété que j'avais parlé
23 avec une journaliste, et que celle-ci m'avait bien dit qu'elles avaient
24 parlé avec elles, qu'elles avaient dit qu'un certain Zaga les avait fait
25 sortir, qu'un certain Zaga les avait violées. Alors, à ce moment-là, je
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1 leur ai demandé: "Laquelle d'entre vous j'ai violée?" Les deux jeunes
2 filles, qui étaient plus jeunes que les autres, la 87 et l'autre n'ont
3 rien répondu.
4 Au moment où je leur posais la question, à savoir laquelle d'entre elles
5 avait parlé avec la journaliste, elles ont regardé dans la direction du
6 témoin 75. Elles ont dit: "Nous n'avons pas parlé avec la journaliste du
7 tout". Alors moi, j'ai reposé la question à DB et à la personne qui porte
8 le numéro 75. Je leur ai demandé si elle avait parlé avec une journaliste,
9 si elle avait mentionné un certain Zaga. Elles m'ont répondu qu'elles ne
10 l'avaient pas fait.
11 A ce moment-là, Dragutin a demandé si elles avaient mentionné un accent
12 monténégrin. Gaga avait un accent monténégrin, c'est un accent spécifique
13 bien particulier qui diffère du langage parlé couramment en Bosnie. Elles
14 ont immédiatement reconnu cet accent monténégrin. Elles ont dit qu'elles
15 n'avaient pas non plus mentionné cet accent.
16 Question: Que s'est-il passé ensuite?
17 Réponse: Comme les deux filles plus jeunes ne disaient rien du tout, en
18 revanche, DB et le numéro 75 avaient admis avoir parlé avec la
19 journaliste. En revanche, elles avaient nié m'avoir mentionné ou avoir
20 mentionné le surnom de Zaga ou l'accent monténégrin. J'ai dit aux deux
21 plus jeunes de retourner à Partisan. A ce moment-là, je leur ai posé la
22 question pour savoir si qui que ce soit les avait fait sortir, les avait
23 emmenées et si c'était vrai, si elles pourraient reconnaître la maison où
24 elles auraient été emmenées.
25 Alors le numéro 75 m'a dit qu'en effet elles avaient été emmenées à
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1 Aladza. Je leur ai demandé qui étaient ces personnes, qui les avaient
2 emmenées dans cette maison. Elles m'ont répondu que non, qu'elles ne
3 savaient pas qui étaient ces personnes. Je leur ai demandé si elles
4 seraient éventuellement en mesure de les reconnaître. Effectivement,
5 toutes les deux m'ont répondu que oui, qu'elles seraient en mesure de le
6 reconnaître. Avec le seul but, l'unique but d'apprendre, de découvrir la
7 vérité, de savoir qui étaient ces personnes qui les avaient maltraitées,
8 qui avaient mentionné mon nom en rapport avec tout cela. J'ai décidé de
9 les prendre avec moi, de leur montrer cette maison pour qu'elles me
10 montrent quelle était cette maison, et quelles étaient ces personnes qui
11 les avaient maltraitées.
12 Question: Dites-nous. Vous avez parlé avec quatre personnes en tout.
13 Pourquoi avez-vous décidé que vous n'alliez emmener que DB et le numéro
14 75.
15 Réponse: DB et le numéro 75, au cours de cette conversation qui a duré
16 entre 20 minutes et une demi-heure, m’ont fait comprendre ou ont avoué
17 -pour ainsi dire-, qu'elles avaient en effet parlé avec la journaliste. Le
18 numéro 75 a en effet dit qu'elle avait dit à la journaliste qu'on lui
19 avait tout fait, qu’on lui a fait subir toutes sortes de choses, mais
20 qu'on ne l'avait pas passée à tabac. DB m’a dit que, elle aussi, elle
21 avait parlé avec la journaliste, mais qu'elle s'était plainte des
22 conditions d'hébergement. Les deux autres, les plus jeunes, m’ont affirmé
23 n'avoir pas parlé avec la journaliste. Elles m’ont juste dit qu’elles
24 avaient été présentes.
25 Et uniquement à cause de cela, uniquement pour cette raison, j'ai décidé
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1 de dire à ces deux jeunes filles plus jeunes de rentrer à Partizan puisque
2 DB et 75 avaient en effet admis, avoué avoir parlé avec quelqu'un. Elles
3 avaient dit que quelqu'un les avaient amenées et fait sortir.
4 Question: Madame la Présidente, il est 15 heures 55. Je pense que nous
5 pourrions interrompre aujourd'hui.
6 Mme le Président (interprétation): Merci de faire attention à l'heure qui
7 passe. Vous allez continuer votre interrogatoire principal demain. Nous
8 souhaiterions aussi répondre à une requête de la défense. La défense a
9 souhaité introduire le témoignage de Mme Jovanka Kunarac à travers le
10 témoignage ou la déposition de l'accusé. Nous souhaiterions donc voir si
11 l'accusation... Il s'agit donc d'une requête en vertu de l'Article 94 ter.
12 Je souhaiterais savoir quelle est la position de l'accusation.
13 Mme Uertz-Retzlaff (interprétation): Il s'agit d'une requête qui avait été
14 déposée le 4 juillet. Nous sommes au courant de cette requête. Nous nous
15 opposons à cela car nous considérons que ceci n'est pas en accord avec
16 l'Article 94 ter, puisque nous souhaitons contre-interroger ce témoin.
17 Mme le Président (interprétation): La Chambre de première instance estime
18 que cette déclaration que vous nous avez soumise en vertu de l'Article 94
19 ter est un des éléments de preuve fournis par Mme Jovanka Kunarac. Notre
20 décision est la suivante: si vous désirez soumettre et présenter ces
21 éléments de preuve, Mme Kunarac doit venir afin de subir un contre-
22 interrogatoire.
23 M. Prodanovic (interprétation): Avec votre permission, Madame la
24 Présidente, Messieurs les Juges, nous n'avions pas l'intention d'appeler
25 ce témoin pour qu'elle vienne en personne, mais si vous le souhaitez elle
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1 le fera. Dans sa déclaration elle se contente de corroborer certains des
2 faits qui sont donnés également par le témoin numéro 92 qui est venu en
3 personne. Madame Kunarac se contente de clarifier des éléments qui avaient
4 déjà été donnés. Nous souhaitions simplement gagner du temps pour préciser
5 certains éléments donnés par l’accusation. Nous ne voulions pas appeler le
6 témoin à venir ici. Ceci, afin d'aider la Chambre et pour ne pas perdre de
7 temps. Mais, ce n'est pas un problème, elle peut venir.
8 Mme le Président (interprétation): Mais quoi qu'il en soit, la Chambre de
9 première instance s'en tient à sa décision. Si vous souhaitez soumettre ce
10 document, il faut que la personne se présente ici, vienne ici pour être
11 contre-interrogée, bien entendu en suivant les instructions que vous
12 donnera votre client.
13 Bien, nous allons maintenant lever l'audience. Je vous prie de m'excuser,
14 monsieur Ryneveld, je ne vous avais pas vu.
15 M. Ryneveld (interprétation): Par courtoisie pour la Chambre, j'ai une
16 requête à vous présenter. Je souhaiterais vous informer que j'ai été
17 affecté à deux autres affaires, dont l'une est traitée par une autre
18 Chambre. Nous travaillons sur un dossier et sur des documents qui doivent
19 être prêts d’ici le 28 juillet. Donc je continuerai à être l'avocat
20 général principal en l'espèce, mais je demandais la permission de la
21 Chambre de m'absenter de temps à autres lorsque ce sera nécessaire.
22 J'espère que la Chambre n'en prendra pas ombrage. Je pensais qu'il était
23 cependant nécessaire de vous le faire savoir par pure courtoisie.
24 M le Président (interprétation): C'est tout à fait normal. Monsieur
25 Ryneveld, vous pourrez vous absenter lorsque ce sera nécessaire et vos
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1 confrères vous représenteront.
2 M. Ryneveld (interprétation): Merci, Madame la Présidente.
3 Mme le Président (interprétation): Nous levons l'audience, nous
4 poursuivrons demain à 9 heures 30.
5 (L’audience est levée à 16 heures.)
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