Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   TRIBUNAL PENAL INTERNATIONAL   AFFAIRE N° IT-95-16-T

  2   POUR L'EX-YOUGOSLAVIE  

  3   Vendredi 09 octobre 1998

  4   L'audience est ouverte à 9 heures 05.

  5   M. Bos (interprétation). – Il s'agit de l'affaire IT-95-16-T, le

  6   Procureur contre Zoran Kupreskic, Mirjan Kupreskic, Vlatko Kupreskic,

  7   Drago Josipovic, Dragan Papic, Vladimir Santic surnommé Vlado.

  8   M. le Président (interprétation). – Bonjour à tous.

  9   M. Smith (interprétation). – Bonjour, Monsieur le Président.

 10   Nous avons l'intention d'appeler trois témoins ce matin.

 11   Monsieur Whitworth, le témoin expert néerlandais, ensuite le témoin

 12   numéro 8.

 13   Et je demande à ce que M. Lee Whitworth soit introduit dans le

 14   prétoire.

 15   M. le Président (interprétation). – Maître Krajina, vous

 16   souhaitez intervenir ?

 17   M. Krajina (interprétation). – Non.

 18   M. le Président (interprétation). – Ce n'est pas notre faute, je

 19   l'ai déjà dit, les accusés devraient déjà se trouver tous dans le

 20   prétoire. Tant pis s'ils ne sont pas ici, nous commençons. L'important

 21   c'est qu'il y en ait au moins quelques-uns qui soient présents.

 22   Oui, Maître Smith, je vous redonne la parole.

 23   M. Smith (interprétation). – Je crois que tous les accusés sont

 24   désormais présents.

 25   M. le Président (interprétation). – Eh bien, tant mieux.


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  1   Bonjour, Monsieur, veuillez s'il vous plaît prononcer la déclaration

  2   solennelle.

  3   M. Whitworth (interprétation). – Je déclare solennellement que

  4   je dirai la vérité,

  5   toute la vérité et rien que la vérité.

  6   M. le Président (interprétation). – Je vous remercie, prenez

  7   place.

  8   M. Whitworth (interprétation). – Merci.

  9   M. le Président (interprétation). – Maître Smith, vous avez la

 10   parole.

 11   M. Smith (interprétation). – Bonjour, Monsieur Whitworth, vous

 12   m'entendez bien ?

 13   M. Whitworth (interprétation). – Parfaitement bien.

 14   M. Smith (interprétation). – Vous êtes aujourd'hui enseignant en

 15   Angleterre, n'est-ce-pas ?

 16   M. Whitworth (interprétation). – C'est exact.

 17   M. Smith (interprétation). – Auparavant, vous étiez membre de

 18   l'armée britannique, n'est-ce pas ?

 19   M. Whitworth (interprétation). – C'est exact.

 20   M. Smith (interprétation). – Et vous avez servi notamment en

 21   Bosnie-Herzégovine en 1993 ?

 22   M. Whitworth (interprétation). – Effectivement.

 23   M. Smith (interprétation). – A quel régiment apparteniez-vous à

 24   cette époque-là ?

 25   M. Whitworth (interprétation). – J'étais dans le premier


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  1   bataillon du régiment personnel du Prince de Galles, le régiment du

  2   Yorkshire.

  3   M. Smith (interprétation). – Depuis combien de temps étiez-vous

  4   membre de l'armée britannique avant cette mission en Bosnie ?

  5   M. Whitworth (interprétation). – Environ trois ans.

  6   M. Smith (interprétation). – Et avez-vous fait d'autres missions

  7   sur le terrain avant la Bosnie ?

  8   M. Whitworth (interprétation). – Eh bien, j'ai travaillé à

  9   Belfast pendant environ sept mois, et j'ai également pris part à des

 10   missions de formation.

 11   M. Smith (interprétation). – Pouvez-vous être un peu plus

 12   précis ?

 13   M. Whitworth (interprétation). – Oui, c'est en fait une

 14   formation pour ce qui est du déploiement sur le terrain.

 15   M. Smith (interprétation). – Comment de temps êtes-vous resté en

 16   Bosnie en 1993 ?

 17   M. Whitworth (interprétation). – Je suis arrivé à la moitié du

 18   mois de mai, environ, et je suis resté jusqu'au mois de novembre, il me

 19   semble, début du mois de novembre.

 20   M. Smith (interprétation). – Quel était votre grade ?

 21   M. Whitworth (interprétation). – J'étais capitaine.

 22   M. Smith (interprétation). – Vous avez suivi les cours de

 23   l'école d'officiers de Cheshiers en Grande-Bretagne, n'est-ce-pas ?

 24   M. Whitworth (interprétation). – C'est exact.

 25   M. Smith (interprétation). – Pourriez-vous nous expliquer


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  1   quelles étaient vos tâches principales en Bosnie et où vous étiez basé ?

  2   M. Whitworth (interprétation). – Eh bien, au départ, j'étais

  3   l'officier chargé des transmissions du régiment. J'étais donc responsable

  4   de la gestion des transmissions du quartier général mais, très rapidement,

  5   après notre arrivée, le colonel Alister a tout de suite compris qu'il

  6   fallait établir un réseau de communication très efficace sur le terrain.

  7   Et moi-même et quelques autres officiers avons été nommés officiers de

  8   liaison et nous étions responsables des rapports avec les personnes

  9   locales dans la vallée de la Lasva.

 10   Et c'était donc l'essentiel de ma mission d'assurer cette

 11   mission d'officier de liaison dans la vallée de la Lasva.

 12   M. Smith (interprétation). – Vous avez donc commencé votre

 13   mission au mois de mai. Mais vous avez repris en fait le flambeau après le

 14   régiment du Cheshire qui se trouvait sur place avant vous.

 15   M. Whitworth (interprétation). – C'est exact.

 16   M. Smith (interprétation). – Pourriez-vous nous décrire

 17   précisément ce que vous faisiez dans le cadre de ce poste d'officier de

 18   liaison ? Quelles étaient les personnes auprès desquelles vous essayiez

 19   d'établir des contacts et quels étaient vos objectifs ?

 20   M. Whitworth (interprétation). – Eh bien, nous étions présents

 21   pour essayer de rendre plus aisée la mission du Haut Commissariat aux

 22   Réfugiés des Etats-Unis dans la vallée de la Lasva.

 23   Il fallait notamment que nous établissions des contacts avec

 24   tous les hauts responsables qui se trouvaient sur le terrain dans la

 25   vallée de la Lasva. Je parle des dirigeants politiques, des dirigeants


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  1   civils. Il fallait que nous établissions des liens avec eux qui nous

  2   permettraient de faciliter, justement, le déplacement des convois du HCR

  3   dans et à l'extérieur de la région.

  4   M. Smith (interprétation). - Quelle était précisément votre zone

  5   de responsabilités et les municipalités couvertes ?

  6   M. Whitworth (interprétation). - Il y avait quatre officiers de

  7   liaison et ma zone s'étendait de Travnik jusqu'à Busovaca à toute la

  8   vallée de la Lasva, toute la région de Vitez, notamment.

  9   M. Smith (interprétation). - Et vous établissiez des contacts

 10   avec des gens de l'armée de Bosnie-Herzégovine et du HVO ?

 11   M. Whitworth (interprétation). - C'est exact. Les dirigeants

 12   civils et politiques et militaires des deux côtés.

 13   M. Smith (interprétation). - Au cours de cette période de temps,

 14   vous avez eu l'occasion de rencontrer Vladimir Santic ?

 15   M. Whitworth (interprétation). - Je crois que je l'ai rencontré

 16   à deux reprises.

 17   M. Smith (interprétation). - A quelle date avez-vous rencontré

 18   Vladimir Santic

 19   pour la première fois ?

 20   M. Whitworth (interprétation). - C'était presque au tout début

 21   de la mission, si je m'en souviens bien. C'était à la fin du mois de mai,

 22   au début du mois de juin. Il m'avait demandé d'essayer d'établir des

 23   contacts avec les personnalités clefs de la région de la vallée de

 24   la Lasva et ce jour-là, j'étais parti en quête des hauts représentants des

 25   corps de police de la région de Vitez . J'ai tout d'abord rencontré


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  1   M. Santic que l'on m'a présenté comme étant un haut responsable de la

  2   police de la région de Vitez.

  3   M. Smith (interprétation). - A quel groupe militaire

  4   appartenait-il ?

  5   M. Whitworth (interprétation). - Il était basé au quartier

  6   général du 4e Bataillon militaire de la police.

  7   M. Smith (interprétation). - C'est le HVO.

  8   M. Whitworth (interprétation). - C'est exact. Il était basé à

  9   l'hôtel Vitez lorsque je l'ai rencontré.

 10   M. Smith (interprétation). - Qu'est ce qui vous a poussé, ce

 11   jour-là, à aller voir à sa base de l'hôtel Vitez ?

 12   M. Whitworth (interprétation). - Au tout début de ma mission,

 13   j'ai passé beaucoup de temps à me déplacer en voiture dans la région. Je

 14   me suis présenté aux personnes qui se trouvaient sur place. J'ai essayé de

 15   me familiariser avec la situation. J'ai essayé de comprendre qui étaient

 16   les personnalités les plus importantes dans la région.

 17   Et j'étais sur la route qui menait vers Zenica lorsque j'ai

 18   croisé un bâtiment que, par la suite, nous avons désigné comme étant le

 19   Chalet suisse ou le Bungalow et sur le porche de ce bâtiment, il y avait

 20   quelque 8 ou 10 soldats qui étaient rassemblés. Ils étaient vêtus de façon

 21   tout à fait particulière. J'ai profité de l'occasion.

 22   Je me suis garé et j'ai essayé d'engager la conversation avec

 23   eux. Ils n'étaient pas franchement bienveillants à mon égard et après une

 24   discussion de vingt minutes ou une demi-

 25   heure, je leur ai précisé que moi, en tant qu'officier de liaison, j'étais


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  1   chargé d'essayer de faciliter les convois humanitaires. Il serait bon que

  2   je rencontre leur officier, leur commandant.

  3   Il y avait un homme qui ne cessait d'aller et venir à l'arrière

  4   du Bungalow. Il était beaucoup plus âgé que les soldats qui se trouvaient

  5   sur le porche et, visiblement, il n'était pas du tout ravi de cet

  6   entretien qui avait cours. Les soldats nous ont dit : "Il faut parler à

  7   notre boss, Pasko, vous le trouverez à l'hôtel Vitez." Et c'est sur cette

  8   piste que je me suis lancé. Je suis parti pour l'hôtel Vitez. En fait, je

  9   cherchais le dirigeant de ce groupe de soldats comme faisant partie d'une

 10   unité d'élite, unité d'élite qui avait été extrêmement active et très

 11   impliquée dans tous les succès militaires menés dans la vallée de la

 12   Lasva.

 13   M. Smith (interprétation). - Pourriez-vous décrire un peu plus

 14   précisément les armes que vous avez pu observer entre les mains de ces

 15   hommes au Bungalow et pouvez-vous nous décrire justement ces uniformes

 16   dont vous nous avez parlé ?

 17   M. Whitworth (interprétation). - Oui, comme je l'ai dit, ils

 18   étaient habillés d'une façon toute particulière. Ils étaient tous revêtus

 19   de noir. Il s'agissait de jeunes gens. Ils avaient entre 20, 25, 26 ans

 20   peut-être. Et ils étaient tous en très bonne forme physique, athlétique et

 21   -je l'ai dit- ils étaient majoritairement revêtus de noir par opposition

 22   aux autres uniformes croates qui étaient plus similaires à des uniformes

 23   de l'armée américaine. Ils portaient des couteaux, un ou deux grands

 24   couteaux.

 25   Il y avait également des armes appuyées contre le bâtiment. Il y


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  1   en avait d'ailleurs un certain nombre. Ils étaient très motivés, très

  2   fiers du fait qu'ils appartenaient à cette unité d'élite militaire. Ils

  3   étaient pleins d'assurance et de confiance en eux et manifestement, ils

  4   étaient très fiers d'avoir pris part à tous ces succès militaires. Ils me

  5   l'ont dit à maintes reprises. Ils avaient participé à tous ces événements

  6   qui s'étaient déroulés dans la vallée de la Lasva.

  7   M. Smith (interprétation). - Lorsque qu'on vous a expliqué

  8   qu'ils étaient fiers d'avoir pris part à ces succès militaires, dans la

  9   vallée de la Lasva, avez-vous essayé d'en savoir

 10   un peu plus et d'obtenir plus d'informations ?

 11   M. Whitworth (interprétation). - J'ai essayé d'obtenir d'autres

 12   éléments d'information. C'était une situation un peu délicate. Il y avait

 13   cet homme qui était manifestement un homme plus âgé.

 14   C'était manifestement un homme plus âgé qui avait un grade plus

 15   important et qui ne voulait pas du tout qu'on me dévoile quelque

 16   information que ce soit. Je me suis montré très prudent et très

 17   diplomatique. J'ai dit : "Ah, vous entendez des opérations du type de

 18   celles d'Ahmici." Ils n'ont rien nié ni rien reconnu mais la phrase qu'ils

 19   ont utilisée est la suivante : "Nous avons dit tous les succès

 20   militaires.", fin de citation. J'ai compris ça comme une reconnaissance

 21   implicite du fait qu'ils avaient participé aux événements d'Ahmici.

 22   M. Smith (interprétation). - Et pourquoi avez-vous parlé vous-

 23   même d'Ahmici ? Quelle était la connaissance que vous aviez de ce qui

 24   s'était passé dans ce village ?

 25   M. Whitworth (interprétation). - Eh bien, pendant six semaines,


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  1   avant cet incident, je crois, il y a eu un événement qui est resté à

  2   l'esprit de chacun et notamment au sein de ce régiment du Cheshiers. Nous

  3   savions tous que cela représentait une opération clé dans la vallée de

  4   Lasva et c'était l'opération la plus importante dont il me semblait

  5   évident qu'il fallait que je pose la question à l'époque.

  6   M. Smith (interprétation). - A quelle distance environ se

  7   trouvait le Bungalow d'Ahmici ?

  8   M. Whitworth (interprétation). - Cinq cents ou six cents mètres.

  9   Il y a un bois qui sépare Ahmici de la zone où se trouve le Bungalow.

 10   M. Smith (interprétation). - A quelle distance de Vitez ?

 11   M. Whitworth (interprétation). - C'est à l'extérieur de Vitez. Je

 12   ne sais plus exactement quelle est la distance qui sépare Vitez du

 13   Bungalow.

 14   M. Smith (interprétation). - Vous avez déclaré que ces jeunes

 15   hommes portaient

 16   des uniformes noirs. Avez-vous remarqué s'ils portaient des insignes ?

 17   M. Whitworth (interprétation). - Je n'ai pas, non, pardon ! Il me

 18   semble que certains avaient une espèce d'insigne sur l'épaule ? A-t-il

 19   parlé comme étant l'unité des Jokers ou les Jockeys ? C'est ainsi qu'ils

 20   se sont présentés à moi, à ce moment-là.

 21   Tandis que j'étais là, j'avais une interprètre musulmane qui

 22   m'accompagnait, elle avait très peur et elle a dit : "Vous savez, ces

 23   jeunes gens sont très dangereux". Je crois avoir précisé que, lorsqu'au

 24   début j'ai essayé d'engager la conversation, ils se sont montrés vraiment

 25   hostiles. Ils était très attentifs aux gestes de mon interprète musulmane.


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  1   Moi, après, j'ai essayé d'attirer leur attention sur moi plutôt que sur

  2   elle mais elle m'a bien précisé qu'elle avait entendu leur nom auparavant,

  3   elle était effrayée. Elle savait qu'ils avaient participé à un certain

  4   nombre d'opérations.

  5   M. Smith (interprétation). - Je vais demander que la pièce 119

  6   soit communiquée au témoin, s'il vous plaît.

  7   (Le greffier s'exécute.)

  8   Monsieur Whitworth, pouvez-vous nous dire quel est ce bâtiment

  9   que nous voyons sur la photographie ?

 10   M. Whitworth (interprétation). - Oui, j'identifie parfaitement ce

 11   bâtiment que nous appelions le Chalet suisse ou le Bungalow. Et c'est sur

 12   ce porche, sur ce balcon, que j'ai engagé la conversation avec les jeunes

 13   gens qui s'y trouvaient et il y avait cette grande porte carrée que l'on

 14   voit très bien.

 15   M. Smith (interprétation). - Avez-vous regardé par cette porte

 16   carrée ? Avez-vous pu voir ce qu'il y avait à l'intérieur ?

 17   M. Whitworth (interprétation). - Il faisait très sombre à

 18   l'intérieur. Il y avait des meubles de bois, des bancs, mais on voyait que

 19   c'était un bâtiment très spacieux mais je ne crois pas qu'il avait quoi

 20   que ce soit de particulier au rez-de-chaussée.

 21   M. Smith (interprétation). - Cet entretien dure une vingtaine de

 22   minutes, n'est-ce pas ?

 23   M. Whitworth (interprétation). - Oui.

 24   M. Smith (interprétation). - Avez-vous remarqué si le bâtiment

 25   avait souffert de dégâts avant votre arrivée ?


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  1   M. Whitworth (interprétation). - Non, je n'ai rien remarqué de ce

  2   genre. Je ne crois pas avoir remarqué d'impacts d'armes de petits calibres

  3   ou quoi que ce soit.

  4   M. Smith (interprétation). - Après avoir quitté ce groupe, après

  5   vous être rendu à Vitez, que vous êtes-vous dit sur ce groupe ? Je parle

  6   d'un point de vue militaire. Dans quelle catégorie militaire les

  7   placeriez-vous ?

  8   M. Whitworth (interprétation). - Je l'ai dit, ils semblaient être

  9   très motivés. Ils étaient très bien équipés. Ils étaient très confiants,

 10   très sûrs d'eux. Ils étaient tout à fait fiers de leur formation et de

 11   leurs capacités. C'était visiblement un groupe de jeunes gens qui avaient

 12   participé de façon tout à fait active aux offensives qui avaient été

 13   menées dans la région de la vallée de la Lazva et moi, j'ai pensé qu'ils

 14   étaient directement responsables de toutes les offensives qui avaient été

 15   lancées dans le secteur.

 16   M. Smith (interprétation). - Donc on vous a dit, ils vous ont

 17   dit que leur commandant était Pasko et vous êtes allé à Vitez. Quel était

 18   votre objectif à ce moment-là ?

 19   M. Whitworth (interprétation). - Eh bien simplement, je voulais

 20   me présenter à leur commandant. Ils m'avaient précisé qu'ils constituaient

 21   une unité de police militaire d'élite et ils m'avaient dit qu'il serait

 22   bon que je me présente à leur commandant. Et ils m'avaient -à contre-cœur,

 23   d'une certaine façon- donné son nom et moi je suis parti en direction de

 24   Vitez à la recherche de ce haut responsable militaire de la police appelé

 25   Pasko.


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  1   Je suis arrivé à l'hôtel Vitez. Je me suis entretenu avec un

  2   certain nombre de membres du HVO qui se trouvaient là. Je leur ai dit que

  3   j'avais eu cet entretien avec les membres des Gaucheries. C'était tout au

  4   début de ma mission, j'étais donc depuis peu officier de liaison et donc

  5   je leur ai expliqué que c'était dans l'intérêt de toutes les personnes qui

  6   se trouvaient dans la vallée de Lazva que je rencontre les personnes clés.

  7   J'ai demandé à voir le responsable militaire le plus important du secteur.

  8   Je me suis assis. Après quelque temps, un homme est arrivé. Il

  9   s'est présenté comme étant Vlado -ou peut-être me l'a-t-on présenté comme

 10   étant le commandant de la police militaire le plus haut gradé dans le

 11   secteur. Mais il n'y a pas eu de titre spécifique qui lui ait été attribué

 12   à ce moment-là, on me l'a simplement présenté comme commandant d'un grade

 13   assez important.

 14   M. Smith (interprétation). - Lorsque vous êtes arrivé à l'hôtel

 15   Vitez, quelle conclusion avez-vous tirée ? Ce bâtiment, qu'est-ce qu'il

 16   était à vos yeux ?.

 17   M. Whitworth (interprétation). - Eh bien, j'avais déjà remarqué

 18   qu'il y avait quelques caractéristiques. J'avais déjà remarqué que c'était

 19   là que se trouvait la base du commandement du HVO et moi je cherchais le

 20   commandant de la police militaire. J'ai donc, n'est-ce pas, fait preuve de

 21   bon sens, de logique : cela semblait être l'hôtel Vitez, l'endroit où

 22   j'allais trouver la personne que je cherchais puisque c'était la base du

 23   commandement du HVO. J'ai simplement fait preuve de bon sens pour m'y

 24   rendre. Au-dessus de la porte il y avait un grand signe qui disait

 25   "4e Bataillon de la police militaire, quartier général". Voilà.


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  1   M. Smith (interprétation). - Vous rappelez-vous à quelle

  2   personne vous vous êtes adressé en premier à l'hôtel Vitez pour faire part

  3   de votre requête de voir le commandant des Jokeris ?

  4   M. Whitworth (interprétation). - Je crois que c'était un certain

  5   Darko Jelic qui, par la suite, a été désigné comme étant l'officier de

  6   liaison personnel du commandant Blaskic.

  7   D'ailleurs, dans les mois qui ont suivi, j'ai appris à bien

  8   connaître ce Darko Jelic.

  9   M. Smith (interprétation). - Et lorsque vous avez rencontré cet

 10   homme qui est venu vous voir alors que vous étiez assis là, vous pourriez

 11   décrire cet homme ?

 12   M. Whitworth (interprétation). - Oui, il était bien bâti, une

 13   certaine carrure, pas beaucoup de cheveux, des cheveux blancs grisonnants,

 14   1,70 mètre, 1,80 mètre.

 15   M. Smith (interprétation). - Est-ce que vous vous rappelez de

 16   ces vêtements ?

 17   M. Whitworth (interprétation). - Si je m'en rappelle bien, il

 18   avait un pantalon de combat, il avait une chemise verte. Mais bon, moi, je

 19   ne me suis pas particulièrement focalisé sur ces détails à ce moment-là,

 20   je n'avais pas de raisons de croire qu'il n'était pas le responsable

 21   militaire dont j'avais manifesté le désir de le rencontrer à ce moment-là.

 22   M. Smith (interprétation). - Est-ce qu'il s'est présenté ?

 23   M. Whitworth (interprétation). - Eh bien, il a fallu engager la

 24   conversation. Il n'était pas très intéressé par ma présence. C'est moi qui

 25   ai fait le plus gros effort. Il n'était pas très communicatif. Je crois


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  1   qu'il ne voyait pas l'intérêt d'établir un rapport particulier avec moi.

  2   Donc, j'ai passé dix minutes, un quart d'heure à lui parler.

  3   C'est moi qui parlais le plus. Je lui ai parlé de ma mission,

  4   des objectifs des Nations Unies, de mon rôle, de la façon dont

  5   j'envisageais la possibilité de l'aider. Je souhaitais également pouvoir

  6   faire en sorte que les convois humanitaires puissent se déplacer plus

  7   aisément dans la région. Il n'était pas très ouvert ni très bavard.

  8   M. Smith (interprétation). - Lui avez-vous dit pourquoi vous

  9   vous trouviez là à ce moment précis ? Lui avez-vous dit que vous étiez

 10   allé voir les Jokeris au Bungalow précédemment ?

 11   M. Whitworth (interprétation). - Oui, je lui ai dit. Je lui ai

 12   dit que j'avais discuté avec les membres d'un groupe de membres de la

 13   police. Vous savez, c'est comme cela que l'on engage la conversation,

 14   surtout dans une situation pareille où il n'y avait pas vraiment une

 15   grande confiance qui régnait. Il était toujours bon d'avoir un nom à

 16   l'esprit, de dire : "J'ai parlé avec untel ou untel." Donc, oui, à

 17   l'époque j'ai parlé de ce groupe.

 18   M. Smith (interprétation). - Vous avez cité le nom des Jokeris ?

 19   M. Whitworth (interprétation). - Je crois bien l'avoir fait,

 20   oui.

 21   M. Smith (interprétation). - Et qu'a-t-il répondu à cela ?

 22   M. Whitworth (interprétation). - Je ne crois pas qu'il ait dit

 23   quoi que ce soit de particulier.

 24   M. Smith (interprétation). - Il ne se montrait pas très bavard,

 25   n'est-ce pas, au cours de cet entretien d'une dizaine de minutes ?


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  1   M. Whitworth (interprétation). - Il était vraiment fermé, il ne

  2   voulait pas du tout s'engager dans quelque conversation que ce soit.

  3   M. Smith (interprétation). - Ensuite, vous êtes parti. Avez-vous

  4   été, par la suite, présenté à une personne dénommée Pasko ?

  5   M. Whitworth (interprétation). - Eh bien, oui. Je crois que

  6   c'était un mois ou deux mois plus tard, j'ai été présenté à un certain

  7   Pasko Ljubicic, c'est Darko Jelic, l'officier de liaison, qui me l'a

  8   présenté comme étant le responsable du 4e Bataillon de police militaire.

  9   M. Smith (interprétation). - Et en vous basant sur votre

 10   expérience et sur vos observations dans la vallée de la Lasva, à l'époque,

 11   quelle était l'importance de Santic par rapport à Pasko Ljubicic ? Quels

 12   étaient leurs rapports hiérarchiques, disons ?

 13   M. Whitworth (interprétation). - Lorsque j'ai rencontré

 14   M. Santic, au départ il m'a paru évident qu'il était subordonné à Pasko

 15   qui était le responsable du bataillon de police militaire. Mais nous ne

 16   savions pas exactement en quoi il lui était subordonné. Est-ce que c'était

 17   au sein de la chaîne de commandement du 4e Bataillon ? Est-ce que c'était

 18   au sein des unités qui constituaient le 4e Bataillon ?

 19   Moi, j'ai bien compris que c'était un homme local ce M. Santic.

 20   C'est ce que m'ont fait comprendre les personnes avec lesquelles je me

 21   suis entretenu. Il venait de Vitez mais je ne sais pas exactement quel

 22   était son poste par rapport à celui occupé par Pasko Ljubicic.

 23   M. Smith (interprétation). - Vous pourriez essayer de nous

 24   expliquer quelle était la structure de commandement du 4e Bataillon de

 25   police militaire ? Pouvez-vous nous donner les unités qui constituaient ce


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  1   bataillon et pouvez-vous nous donner les unités qui constituaient ce

  2   bataillon ? Et pouvez-vous nous dire sur quels territoires ce bataillon et

  3   ces unités étaient déployés ?

  4   M. Whitworth (interprétation). - Eh bien, ces éléments

  5   d'information, je les ai recueillis au fur et à mesure de ma mission et de

  6   mes déplacements sur le terrain. Ce n'était pas évident dès l'abord. Il y

  7   avait ces unités qui, je pense, dépendaient ou correspondaient à

  8   différentes municipalités. Il m'a semblé que le 4e Bataillon, en fait,

  9   était déployé sur un territoire assez important, c'était la troisième zone

 10   opérationnelle du HVO. Il y avait dans cette zone Vares, Jepce, Busovaca,

 11   Travnik, Novi Travnik, Vitez.

 12   Puis, j'ai eu toutes sortes d'entretiens qui m'ont permis de

 13   comprendre que le 4e Bataillon militaire était également déployé sur ce

 14   territoire de façon générale et puis il était subdivisé en unités et en

 15   petites compagnies. Il y avait toujours un petit groupe représentant ce

 16   bataillon -que ce soit à Varez, à Jepce, à Vitez.

 17   M. Smith (interprétation). - Donc, Pasko Ljubicic vous a été

 18   présenté comme étant le commandant de toute cette zone ?

 19   M. Whitworth (interprétation). - Précisément. Lorsque j'ai

 20   rencontré les Jokeris, celui-ci m'a été présenté par les Jokeris comme

 21   étant leur commandant à eux. Eux n'ont parlé que de Pasko, mais je pense

 22   qu'ils parlaient de ce Pasko Ljubicic qui était effectivement non

 23   seulement commandant des Jokeris mais commandant du 4e Bataillon.

 24   M. Smith (interprétation). – Pour le détachement de police

 25   militaire basé dans la municipalité de Vitez, quel était, d'après vous, le


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  1   poste occupé par Vladimir Santic dans le sein du HVO, pour ce que vous

  2   avez pu voir en 1992, 1993 ?

  3   M. Whitworth (interprétation). – Eh bien, il est tout à fait

  4   courant pour une unité de quartier général, ou pour une unité de

  5   bataillon, d'être basée là où se trouvent également certains des groupes

  6   qui le composent. Cela permet à ce bataillon d'être protégé au quartier

  7   général, d'être protégé et cela simplifie les choses du point de vue de

  8   l'infrastructure.

  9   Et j'étais conscient du fait que M Santic se trouvait au sein

 10   même de la structure du HVO à l'hôtel. Et lorsque je l'ai rencontré, ce

 11   qui n'était pas tout à fait clair, c'était de savoir s'il était un

 12   commandant de compagnie de la police militaire locale à Vitez qui se

 13   trouvait elle aussi dans l'hôtel, ou bien s'il faisait vraiment partie de

 14   l'état-major du quartier général du bataillon de Pasko Ljubicic.

 15   Et la question était de savoir s'il était subordonné dans ce

 16   sens-là et que c'était pour cela qu'il se trouvait dans l'hôtel Vitez.

 17   Mais je sais que c'était un homme de Vitez, je veux le préciser.

 18   M. Smith (interprétation). – Vous avez parlé de chaque

 19   municipalité qui avait une compagnie, une unité qui avait une taille de

 20   compagnie environ qui représentait la police militaire. Quelle était la

 21   taille de ces compagnies par rapport à la police militaire qui se trouvait

 22   à Vitez ?

 23   M. Whitworth (interprétation). – Un groupe de ce style était

 24   composé d'environ 120 ou 140 soldats. Mais, bien sûr, tout cela variait

 25   selon les secteurs dans lesquels on se trouvait. Moi, j'ai passé jusqu'à


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  1   douze heures ou quatorze heures par jour à me déplacer dans la vallée de

  2   la Lasva et je dirais que les groupes militaires qui étaient présents dans

  3   les différents secteurs comptaient généralement le nombre d'hommes que

  4   j'ai cité tout à l'heure.

  5   Donc, c'étaient généralement des compagnies constituées de

  6   100 hommes et plus. Que ce soit à Busovaca, à Travnik et à Novi Travnik;

  7   les groupes étaient de taille tout à fait similaire.

  8   Il est difficile d'être très précis dans les chiffres parce que

  9   vous vous déplacez, il y a des membres de ces groupes qui sont en

 10   patrouille quelque part, donc on ne les voit pas forcément tous réunis.

 11   Mais il y a eu des occasions où j'ai pu voir des groupes de

 12   30 personnes ou plus qui se déplaçaient lorsque, notamment, des hauts

 13   dignitaires des forces en place se déplaçaient. Cela a été le cas

 14   notamment lorsqu'ils se sont rendus à l'hôpital de Nova Bila.

 15   Donc, on voyait qu'il avait là une force en présence qui était

 16   représentée en nombre considérable. Je parle donc de groupes de 100 hommes

 17   et plus.

 18   M. Smith (interprétation). – Et pour ce qui est des Jockeris,

 19   quelle était la taille de ce groupe ?

 20   M. Whitworth (interprétation). – Eh bien, au vu des

 21   conversations que j'ai pu échanger avec eux, je dirais qu'ils étaient 30

 22   ou plus. Donc ce serait un peloton si vous voulez, une subdivision

 23   d'unité. Et dans une compagnie on trouverait quatre groupes de ce genre.

 24   Donc c'était une des unités composant la structure militaire de la

 25   compagnie.


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  1   M. Smith (interprétation). – Lorsque vous vous êtes adressé à ce

  2   groupe d'hommes qui affirmaient être les Jockeris, ils se sont vanté du

  3   fait qu'ils avaient participé avec succès à toutes les opérations

  4   militaires dans la vallée de la Lasva.

  5   Pourriez-vous dire aux Juges, à partir de vos observations en

  6   Bosnie au cours de ces six mois, si une personne occupant le poste de

  7   Pasko Ljubicic ou le poste de Vladimir Santic, si une telle personne

  8   aurait été inévitablement impliquée dans la planification de telles

  9   opérations ?

 10   M. Whitworth (interprétation). – Vous pensez plus

 11   particulièrement... Est-ce que vous pourriez reformuler votre question ?

 12   M. Smith (interprétation). – Vous avez dit que les Jockeris

 13   étaient une unité militaire et ils affirmaient avoir participé à toutes

 14   les grandes réussites militaires, à toutes les opérations dans la vallée

 15   de la Lasva.

 16   Pourriez-vous dire à la Chambre, à partir de l'opinion que vous

 17   vous êtes forgée sur place, si, inévitablement, une personne étant au

 18   niveau de Vladimi Santic ou de Pasko Ljubicic aurait participé à la

 19   planification, à l'organisation de toute opération militaire importante ?

 20   M. le Président (interprétation). – Maître Pavkovic ?

 21   M. Pavkovic (interprétation). – Bonjour, Madame et Messieurs

 22   les Juges. Monsieur le Président, j'aimerais soulever une objection eu

 23   égard à cet examen, à cet interrogatoire. Au vu des réponses fournies par

 24   ce témoin, il apparaît qu'il ne faisait pas la différence entre les

 25   rapports entre Vlado Santic et Pasko Ljubicic. Il n'a pas établi de


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  1   rapport entre ces deux hommes.

  2   Ce témoin a déclaré qu'il appartenait aux structures locales du

  3   HVO dont le commandement se trouvait à l'hôtel Vitez.

  4   Par conséquent, une question de cette nature semble suggérer

  5   qu'il y avait un lien presque nécessaire, inévitable entre ces deux

  6   hommes, ce qui établit une chaîne de commandement en l'occurrence et ce

  7   disant, le témoin se voit suggérer quelque chose qu'il n'avait pas affirmé

  8   précédemment lorsqu'il avait parlé des liens, des rapports existant

  9   éventuellement entre ces deux personnes qui ont été mentionnées.

 10   M. le Président (interprétation). - Je vous remercie,

 11   Maître Pavkovic. Maître Smith, pourriez-vous reformuler votre question ?

 12   Je vois que cette objection à un certain fondement.

 13   M. Smith (interprétation). - Je vais essayer de demander au

 14   témoin s'il peut établir ce lien, ce rapport entre Vladimir Santic et

 15   Pasko Ljubici ?

 16   M. le Président (interprétation). - Essayez de vous abstenir de

 17   poser des questions sous forme d'hypothèse.

 18   M. Smith (interprétation). - Vous avez dit que Darko Galic était

 19   officier de liaison de M. Blaskic.

 20   M. Whitworth (interprétation). - C'est exact.

 21   M. Smith (interprétation). - Et M. Blaskic était le commandant

 22   de la troisième zone opérationnelle en Bosnie centrale ?

 23   M. Whitworth (interprétation). - Oui.

 24   M. Smith (interprétation). - Vous avez eu affaire avec

 25   Marko Galic assez fréquemment puisqu'il était officier de liaison comme


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  1   vous ?

  2   M. Whitworth (interprétation). - Pratiquement trois, quatre fois

  3   par jour, chaque jour.

  4   M. Smith (interprétation). - Vous a-t-il mis au courant des

  5   liens existant entre Pasko Ljubicic et Vladimir Santic ?

  6   M. Smith (interprétation). - Voici ce qu'il m'a dit : il a dit

  7   que Santic était l'officier supérieur de la police militaire de la région

  8   et il a dit -à propos de Pasko Ljubicic- que c'était son commandant à lui,

  9   qui était commandant de bataillon. Je l'ai déjà dit, il n'est pas facile

 10   d'obtenir des renseignements précis dans de telles circonstances mais,

 11   dans toute chaîne de commandement ordinaire dans une structure militaire;

 12   il y aura une communication directe.

 13   Et pour essayer de répondre à votre question posée précédemment

 14   à propos des Jockeris et de leur éventuelle participation, des liens

 15   éventuellement entre les deux, il serait difficile de ne pas voir de

 16   rapport, eu égard aux opérations militaires qui se sont déroulées dans la

 17   vallée de la Lasva.

 18   Il fallait qu'il y ait un lien stratégique direct. Il était

 19   inévitable qu'il y ait participation d'un commandement local dans les

 20   événements qui se sont produits dans la vallée de la Lasva.

 21   C'est une façon un peu détournée de dire ceci. Je n'ai pas vu de

 22   liens spécifiques directs entre les deux, si ce n'est qu'on m'a dit à

 23   l'époque que l'un était subordonné à l'autre. Mais, quant à savoir quel

 24   était le lien de subordination précis, je ne l'ai pas appris directement à

 25   l'époque.


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  1   M. Smith (interprétation). - J'aimerais qu'on diffuse une

  2   séquence vidéo. Il s'agit de la pièce de l'accusation 253. Pourriez-vous

  3   dire, Monsieur le Témoin, à la Cour si vous reconnaissez des emplacements,

  4   des sites ou des personnes que l'on pourrait voir apparaître dans cette

  5   vidéo ?

  6   (Diffusion de la vidéo.)

  7   M. Whitworth (interprétation). - Voulez-vous que je demande à

  8   arrêter l'image ?

  9   M. Smith (interprétation). - Oui, si vous reconnaissez quoi que

 10   ce soit sur ces images, un lieu, une personnalité, demandez à ce que l'on

 11   fige l'image, s'il vous plaît. Je demanderais à l'huissier d'aider le

 12   témoin pour qu'il voit effectivement ces images de la vidéo sur son écran.

 13   (L'huissier s'exécute.)

 14   Merci.

 15   (Diffusion de la vidéo.)

 16   M. le Président (interprétation). - Maître Pavkovic ?

 17   M. Pavkovic (interprétation). - Monsieur le Président, il se

 18   peut que j'intervienne un peu précocement, mais est-ce que le Bureau du

 19   Procureur pourrait nous dire d'où vient cette cassette et comment il se

 20   l'est procurée avant que celle-ci ne soit diffusée ?

 21   M. le Président (interprétation). - Bien sûr. Mais le Procureur

 22   l'a déjà expliqué, Maître Pavkovic. C'est déjà une pièce versée au

 23   dossier, souvenez-vous-en. Vous verrez. Faites preuve d'un peu de

 24   patience. Qui vivra verra.

 25   M. Pavkovic (interprétation). - Je m'en excuse.


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  1   (Diffusion de la cassette.)

  2   M. Whitworth (interprétation). - Peut-on arrêter l'image à cet

  3   endroit ?

  4   M. Smith (interprétation). - Qui est cette personne à l'image ?

  5   M. Whitworth (interprétation). - C'est une personne que

  6   Darko Krecic m'avait présentée comme étant Pasko Ljubici, commandant du

  7   4e Bataillon de police militaire.

  8   M. Smith (interprétation). - Pouvez-vous pousser dans la

  9   diffusion ?

 10   (Diffusion de la cassette.)

 11   M. Whitworth (interprétation). - Peut-on arrêter l'image ?

 12   M. Smith (interprétation). - Reconnaissez-vous quelqu'un sur

 13   cette image ?

 14   M. Whitworth (interprétation). - Je pense que c'est là

 15   Vladimir Santic, on le voit qu'il se tient la tête de la main.

 16   M. Smith (interprétation). - Et c'est cette personne qui vous a

 17   été présentée à l'hôtel Vitez ?.

 18   M. Whitworth (interprétation). - Tout à fait.

 19   M. Smith (interprétation). - Peut-on poursuivre la diffusion et,

 20   par la suite je vous poserai quelque question ?

 21   (Diffusion de la cassette.)

 22   M. Whitworth (interprétation). - Peut-on arrêter l'image ?

 23   M. Smith (interprétation). - Avez-vous été en mesure de

 24   reconnaître le lieu où ces images ont été filmées ?

 25   M. Whitworth (interprétation). - C'est difficile, vous savez.


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  1   C'était peut-être au chalet, étant donné la structure en A. Mais, vous

  2   voyez que le film n'est pas très clair. C'était, peut-être, effectivement

  3   à l'intérieur du chalet.

  4   M. Smith (interprétation). - Etant donné la structure que l'on a

  5   vue sur cet extrait vidéo ?

  6   M. Whitworth (interprétation). - Oui, vous savez, les murs

  7   étaient pratiquement verticaux, il y avait des bancs contre les murs, puis

  8   toutes sortes de meubles un peu hétéroclites.

  9   M. Smith (interprétation). - Je vous demande de parcourir le

 10   prétoire du regard. Pourriez-vous dire aux Juges si vous reconnaissez

 11   Vladimir Santic ?

 12   M. Whitworth (interprétation). - Tout à fait.

 13   M. Smith (interprétation). - Pourriez-vous l'indiquer du doigt ?

 14   M. Whitworth (interprétation). - Il est assis là-bas et il

 15   sourit.

 16   M. Smith (interprétation). - Peut-on consigner au procès-verbal

 17   que le témoin reconnaît…

 18   M. Whitworth (interprétation). - Il a une chemise pervenche ou

 19   lilas clair et il est assis au bout du prétoire.

 20   M. Smith (interprétation). - Je n'ai plus de questions à poser à

 21   ce témoin

 22   M. le Président (interprétation). - Je vous remercie,

 23   Maître Smith. Maître Pavkovic ?

 24   M. Pavkovic (interprétation). - Je n'ai pas de questions à poser

 25   à ce témoin.


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  1   M. le Président (interprétation). - Les conseils de la

  2   défense... Aucun d'entre eux ne veut poser de questions ? Fort bien. Je

  3   suppose qu'il n'y aura pas d'interrogatoire supplémentaire. Je suppose

  4   qu'on ne verra pas d'inconvénient à ce que le témoin dispose ?

  5   Merci, Monsieur, d'être venu déposer devant nous. Vous pouvez

  6   vous retirer.

  7   M. Whitworth (interprétation). - Je vous remercie, Monsieur le

  8   Président.

  9   (Le témoin est reconduit hors du prétoire.)

 10   M. le Président (interprétation). - Je suppose que nous passons

 11   maintenant à l'audition du témoin néerlandais.

 12   (Le témoin est introduit dans le prétoire.)

 13   Bonjour, Monsieur. Je vais vous demander de bien vouloir lire la

 14   déclaration solennelle, s'il vous plaît.

 15   M. Van Der Peijl (interprétation). – Je déclare solennellement

 16   que je dirai la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 17   M. le Président (interprétation). - Merci.

 18   Maître Terrier, vous avez la parole.

 19   M. Terrier. - Merci, Monsieur le Président. Bonjour, Monsieur

 20   le Témoin. Pouvez-vous dire au Tribunal votre nom et votre profession ?

 21   M. Van Der Peijl (interprétation). – Je m'appelle

 22   Gérard Van Der Peijl et je suis expert en médecine médico-légale au

 23   ministère de la Justice des Pays-Bas.

 24   M. Terrier. - Je vous remercie. Vous avez effectué au mois de

 25   juillet dernier, au mois de juillet 1998, un certain nombre d'examens sur


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  1   des spécimens, sur des échantillons qui ont été prélevés en Bosnie, dans

  2   un village de Bosnie, qui vous ont été remis par M. Prudon. Est-ce exact ?

  3   M. Van Der Peijl (interprétation). – C'est parfaitement exact.

  4   M. Terrier. - Vous avez signé un rapport d'analyses qui est en

  5   date du 29 juillet 1998. Ce rapport est au dossier, Monsieur le Président,

  6   sous la cote 169.

  7   Je vais prier M. l'Huissier de vous soumettre la version en

  8   langue néerlandaise ainsi que la traduction en langue anglaise que j'ai

  9   ici pour le Tribunal.

 10   M. Bos (interprétation). – Le document est marqué 278 et la

 11   version anglaise 278 A.

 12   (L'huissier s'exécute.)

 13   M. le Président (interprétation). – Merci.

 14   M. Terrier. - Monsieur le Témoin, je souhaitais simplement, en

 15   vous soumettant ces deux documents, vous demander si la traduction

 16   anglaise de votre conclusion en particulier, vous paraît absolument

 17   exacte ?

 18   M. Van Der Peilj (interprétation). - Dans les conclusions, il

 19   est indiqué dans la version en anglais qu'il n'y a pas eu d'utilisation de

 20   liquide de propagation d'incendie. Or, dans la version en néerlandais, il

 21   est précisé qu'il n'y a pas eu utilisation d'accélérateurs d'incendie, il

 22   n'y a pas eu détection de telles substances dans les échantillons

 23   analysés. Voici les conclusions telles qu'elles ont été rédigées en

 24   néerlandais.

 25   M. Terrier. - Votre conclusion est donc que vous n'avez pas


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  1   trouvé, au cours de vos examens, d'accélérateurs d'incendie ?

  2   M. Van Der Peilj (interprétation). - Précisément, nous n'avons

  3   rien détecté de cette nature. Voilà la différence que je remarque le plus.

  4   Il y a quelques détails qui varient, mais ils ne sont pas d'une importance

  5   cruciale.

  6   M. Terrier. - Nous ne les examinerons pas. En fait, je n'ai,

  7   Monsieur le Témoin, qu'une question, mais une question importante à vous

  8   poser qui est la suivante : le fait que vous n'ayez pas, au cours vos

  9   examens, découvert de substances inflammables signifie-t-il ou non

 10   qu'aucune substance inflammable n'ait été utilisée pour mettre le feu à

 11   l'endroit où les échantillons ont été prélevés ?

 12   J'indique ce que peut-être vous ne savez pas -et il n'y avait

 13   aucune raison de vous l'indiquer- que l'incendie est du 16 avril 1993, que

 14   ces échantillons ont été prélevés au mois de juillet 1998, que le site où

 15   ces échantillons ont été prélevés est resté pendant toutes ces années

 16   ouvert aux intempéries.

 17   M. Van Der Peilj (interprétation). - En me fondant sur ma propre

 18   expérience et également sur des articles que j'ai pu lire, je n'ai

 19   connaissance d'aucune des évolutions que peuvent subir de telles

 20   substances si elles demeurent sur un lieu ouvert à tous les vents pendant

 21   une longue période de temps. Il y a eu des études qui ont été menées sur

 22   la détérioration de substances telles que la gazoline, la dégradation

 23   micro-bactérienne de ce type de dégradation. Ces études ont révélé qu'il

 24   peut y avoir une dégradation très importante mais sur une période de temps

 25   moins longue que celle dont vous parlez.


Page 4084

  1   En revanche, je suis incapable de vous dire ce qu'il advient de

  2   substances accélératrices d'incendie sur une période de temps aussi

  3   prolongée. Et je ne dispose d'aucun élément d'information sur lequel je

  4   pourrais m'appuyer pour vous dire quoi que ce soit. Je peux simplement me

  5   fonder sur mon expérience pour vous dire deux ou trois choses.

  6   Il y a effectivement une possibilité, celle que nous ne

  7   puissions pas être à même de trouver de traces de substances

  8   accélératrices d'incendie, même si elles ont été utilisées il y a quelques

  9   années. Pourquoi ? Parce que les échantillons qui ont été rassemblés

 10   n'étaient pas des échantillons où se trouvaient dès le départ des traces

 11   d'accélérateurs d'incendie. Ces substances, leur nom le dit bien, sont des

 12   substances accélératrices d'incendie mais, dès lors que l'incendie a

 13   commencé, l'incendie se propage et le bois devient lui-même un matériau

 14   qui conduit l'incendie et aide à la propagation de l'incendie. On peut

 15   avoir des matériaux calcinés où on ne trouve pas de substances

 16   accélératrices. Tout dépend de l'endroit où les échantillons auraient été

 17   trouvés et où l'incendie a réellement commencé.

 18   Il y une deuxième possibilité qui est que toute la substance a

 19   été versée en un seul et même endroit. Parfois, ces substances sont

 20   composées d'éléments volatiles. Par exemple, aux Pays-Bas, on peut penser

 21   à un mélange d'alcool, cela porte un nom très particulier en néerlandais.

 22   C'est un mélange qu'on trouve assez fréquemment dans les maisons. C'est un

 23   produit d'utilisation relativement courant. C'est un mélange de substances

 24   diluantes que l'on utilise dans les peintures. Ce sont des composants très

 25   volatiles qui, après un certain temps, disparaissent complètement,


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  1   impossible de trouver trace de ce type de composants.

  2   Normalement, sur une période de temps peu prolongée, on peut

  3   trouver quelques éléments qui permettent de voir qu'une telle substance

  4   volatile a été utilisée pour la gazoline : 99 % de la gazoline s'évapore

  5   sur une période de quelques jours, mais il reste 1 % qu'on peut trouver et

  6   qui peut nous aider à tirer telle ou telle conclusion. C'est la même chose

  7   avec l'essence diesel.

  8   Lorsqu'on m'a, au début, posé la question de savoir s'il y avait

  9   des substances accélératrices qui avaient été utilisées, lorsqu'on m'a

 10   demandé d'étudier cet échantillon, j'ai dit que je ne pouvais trouver de

 11   substances accélératrices que si ces dernières faisaient partie de la

 12   catégorie que j'ai décrite tout à l'heure. Cela veut dire que, si je n'ai

 13   pas trouvé de substances accélérantes, eh bien, cela veut dire que ces

 14   substances ne faisaient pas partie de la catégorie que j'ai décrite à

 15   l'instant.

 16   Il y a une troisième possibilité dont je voudrais parler, la

 17   possibilité dans le cadre de laquelle il y a eu une telle dégradation

 18   micro-bactérielle de la substance utilisée qu'il a été impossible de

 19   trouver quoi que ce soit à l'heure actuelle.

 20   Donc, pour conclure, il y a trois possibilités principales. Tout

 21   d'abord, les échantillons n'ont pas été collectés sur le site même où les

 22   substances ont été utilisées ; deuxièmement, les matériaux utilisés

 23   étaient en fait des matériaux très volatiles et à l'heure actuelle il est

 24   impossible de trouver de traces ; troisième possibilité, il y a une

 25   dégradation micro-bactérielle très importante. Voilà ce que je tiens à


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  1   dire, voici mes conclusions.

  2   M. Radovic (interprétation). - Je ne voudrais pas que les

  3   services d'interprétation soient indignés mais je crains qu'il ne nous

  4   soit pas possible de comprendre l'interprétation. Serait-il possible qu'on

  5   fasse appel au service d'un autre interprète que celui qui est en train de

  6   fournir l'interprétation à l'heure actuelle.

  7   M. le Président (interprétation). - Voulez-vous parler de

  8   l'interprétation de l'anglais vers le croate ?

  9   M. Radovic (interprétation). - Tout à fait.

 10   M. le Président (interprétation). - Mais j'espère que quelqu'un

 11   dans l'équipe pourra se substituer à l'interprète se trouvant au micro.

 12   Maître Radovic, voudriez-vous que Me Terrier repose sa

 13   question ?

 14   M. Radovic (interprétation). - Nous faisons des efforts

 15   considérables pour suivre ce qui se dit, mais nous allons peut-être

 16   demander des éclaircissements au moment du contre-interrogatoire sur

 17   l'élément que nous n'avons pas compris dans l'intervention du témoin.

 18   M. Terrier. - Je n'avais pas d'autres questions à poser au

 19   témoin que je remercie de toutes ses précisions.

 20   M. le Président (interprétation). - Très bien, parfait. Qui va

 21   procéder au contre-interrogatoire du témoin ?

 22   M. Pavkovic (interprétation). - Monsieur le Président, je n'ai

 23   qu'une question à poser. Me Radovic et Me Glumac auront aussi des

 24   questions à poser témoin.

 25   Monsieur le Témoin, j'ai une question à vous poser, la voici.


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  1   Parmi les échantillons qui vous ont été remis, que vous avez par

  2   conséquent analysés, avez-vous trouvé, détecté la présence de substances

  3   accélératrices de combustion, quelle que soit la nature de ces

  4   substances ?

  5   M. Van der Peijl (interprétation) - Non, je n'ai pas trouvé la

  6   présence d'accélérateur d'incendie quel qui soit.

  7   M. Pavkovic (interprétation). - Je vous remercie.

  8   M. le Président (interprétation). - Merci, Maître Radovic ?

  9   M. Radovic (interprétation). - Je vais enchaîner sur ce que

 10   vient de dire Me Pavkovic. Le Procureur vous a demandé,

 11   Monsieur le Témoin, comment il était possible qu'aucune substance

 12   accélératrice d'incendie n'ait été détectée. Vous êtes expert en matière

 13   légiste. Est-il courant que vous ayez à expliquer pourquoi de telles

 14   substances n'ont pas été détectées ? Ou votre métier consiste-t-il

 15   simplement à savoir si ces substances existent ou pas ? En quoi consiste

 16   votre travail de façon fondamentale, dans un travail de votre type ?

 17   M. Van der Peilj (interprétation) - Aux Pays-Bas, le champ

 18   d'expertise est différent suivant que les personnes font l'analyse

 19   chimique ou font, comme moi, l'analyse technique sur le lieu d'un crime

 20   éventuel. Dans d'autres pays que les Pays-Bas c'est peut-être une seule et

 21   même personne qui fait ces deux choses mais, aux Pays-Bas, on a décidé de

 22   diviser ces activités et de les répartir sur d'autres personnes. Ai-je

 23   ainsi répondu à votre question ?

 24   M. Radovic (interprétation). - Non, parce que chez moi, dans mon

 25   pays, c'est un peu un système semblable.Voici la question, je répète. Est-


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  1   ce qu'un scientifique en matière légiste a pour tâche fondamentale de

  2   déterminer si des substances accélératrices d'incendie existent ou bien a-

  3   t-il pour tâche de d'expliquer pourquoi il n'a pas détecté d'éléments de

  4   ce genre dans des échantillons qu'il aurait reçus ?

  5   M. Van der Peijl (interprétation) - Normalement, je me contente

  6   de rédiger un rapport du type que j'ai fait ici et dans un tribunal

  7   néerlandais où on a des Procureurs, des avocats -tout le monde sait de

  8   quoi je parle. Si aucune substance accélératrice n'a été trouvée, cela ne

  9   veut pas dire de façon définitive qu'aucun accélérateur n'ait été utilisé.

 10   Ici, pour ce Tribunal international, le Procureur m'a demandé de

 11   venir déposer et d'expliquer ce que j'avais dit dans mon rapport pour

 12   apporter des éclaircissements, à savoir que, même si nous n'avons pas

 13   détecté de traces d'accélérateur, ça ne veut pas dire nécessairement

 14   qu'aucun accélérateur n'ait été utilisé dans cet incendie dans le passé.

 15   M. Radovic (interprétation). - Une des raisons pour lesquelles

 16   ce type de conclusion est possible, et votre conclusion est tout à fait

 17   possible en l'état, c'est que l'individu qui a prélevé ces échantillons

 18   n'a peut-être pas choisi le bon endroit pour les prélever ? Ai-je bien

 19   compris ?

 20   M. Van der Peijl (interprétation) - Oui, vous avez bien compris.

 21   Cela veut dire peut-être qu'il n'a pu prélevé l'échantillon au site

 22   adéquat car ce site a peut-être fait l'objet d'une destruction complète.

 23   Il se peut qu'on ne trouve rien du tout qui subsiste de l'incendie.

 24   M. Radovic (interprétation). – La personne qui a prélevé ces

 25   échantillons, d'après la procédure établie jusqu'à présent, c'est une


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  1   personne qui est donc un enquêteur détaché par la police néerlandaise qui

  2   s'est déplacé sur les lieux. Il avait été informé de la déposition du

  3   témoin lorsque le témoin a indiqué l'endroit où cet incendie s'était

  4   produit. Dans de telles circonstances, est-ce que les probabilités sont

  5   minimes de voir que les échantillons qui vous été remis pour analyses

  6   n'aient pas été prélevés au bon endroit ?

  7   M. Van der Peijl (interprétation). – Monsieur Prudon jouit d'une

  8   excellente réputation depuis toujours. A ma connaissance, il a reçu

  9   l'habilitation de la police judiciaire pour faire ce genre d'enquête et je

 10   suppose qu'il a pu retirer les meilleurs résultats de son travail.

 11   Mais s'il ne reste plus rien, s'il n'y a plus aucun échantillon

 12   que l'on puisse retirer d'un accélérateur parce que tout a été consumé, il

 13   n'aurait pas pu prendre cet échantillon.

 14   Il y a une autre possibilité, je n'ai pas vu de photographie du

 15   lieu. Je n'ai pas pu avoir de photographie du lieu encore, mais j'ai cru

 16   comprendre que le bâtiment s'est effondré, pour ainsi dire. Il y avait

 17   beaucoup de décombres et même aux Pays-Bas cela pose des problèmes.

 18   Parce qu'en règle générale, dans une situation normale aux Pays-

 19   Bas, ce qu'un enquêteur fait s'il ne trouve rien après quelques jours, il

 20   va essayer de trouver une armoire ou les restes d'un bureau, quelque chose

 21   qui n'aurait pas été tout à fait consumé. Et si ceci se fait à proximité,

 22   il va essayer de trouver un pied de table par exemple, car c'est là que

 23   vous aurez le plus de chances de trouver des résidus d'accélérateurs.

 24   Parce que ceci aurait été protégé vraiment de la chaleur dégagée au moment

 25   de l'incendie. C'est ce que l'on fait en règle normale.


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  1   Mais je crois que vous avez eu ce témoin à la barre. Il y a eu

  2   des difficultés étant donné les circonstances sur place à procéder de la

  3   sorte.

  4   M. Radovic (interprétation). - Vous avez évoqué une autre raison

  5   qui vous a empêché d'avoir des résultats très exacts, très précis dans

  6   votre analyse. Vous avez dit qu'en fait une espèce d'alliage ou une

  7   combinaison de plusieurs substances chimiques auraient été utilisées, vous

  8   ai-je bien compris ?

  9   M. Van der Peijl (interprétation). – Nombreux sont les

 10   accélérateurs qu'on aurait pu utiliser. Ce sont des liquides très fluides

 11   dont il est possible de provoquer la combustion. Dans une situation

 12   néerlandaise, si on trouve un accélérateur dans pratiquement 50 % des cas,

 13   on va trouver de l'essence qui est utilisée. Mais aux Pays-Bas, aussi à

 14   l'étranger, on peut utiliser beaucoup d'autres accélérateurs, et je vous

 15   ai mentionné, entre autres possibilités, celle-ci : c'est qu'on ait

 16   utilisé plusieurs types d'alcools volatiles. Et cela se passe aux Pays-

 17   Bas.

 18   Je ne sais pas ce qu'il en était en ex-Yougoslavie, je ne sais

 19   pas s'il était possible d'obtenir sur le marché de tels éléments. Mais si

 20   c'était le cas, on ne trouverait aucune trace car ce sont des corps très

 21   volatiles puisqu'ils se seraient oxydés au fil du temps, au fil des

 22   années. Donc je ne m'attendrais pas à trouver quoi que ce soit.

 23   Autre possibilité, c'est que des diluants de peinture aient été

 24   utilisés, qui sont aussi des composants très volatiles et on ne

 25   s'attendrait pas à trouver des résidus, alors qu'on pourrait… Je reformule


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  1   ma pensée. Ce qui pourrait laisser des traces, des résidus, ce sont, par

  2   exemple du fuel, du diesel, parce que si du fuel est utilisé même après

  3   toutes ces années, et même si jamais personne n'a mené une enquête

  4   scientifique en cas d'incendie volontaire, il serait possible de trouver

  5   des traces de certains des éléments de ce fuel.

  6   Mais nombreuses sont d'autres possibilités. Il est possible de

  7   trouver d'autres accélérateurs où il serait normal de ne pas trouver de

  8   traces après tout ce temps qui s'est écoulé.

  9   M. Radovic (interprétation). - Vous venez de nous fournir une

 10   excellente explication des différentes possibilités se présentant en

 11   théorie.

 12   Toutefois, je ne sais pas si on a attiré votre attention pour

 13   ces examens sur ce qu'on avait affirmé. C'est qu'il y avait un témoin

 14   oculaire et que de l'essence avait été utilisée. Qu'en est-il si on

 15   utilise de l'essence ?

 16   M. Van der Peijl (interprétation). – Excusez-moi, est-ce qu'on a

 17   dit qu'un témoin oculaire aurait utilisé de l'essence ?

 18   M. Radovic (interprétation). – Effectivement, ce qui

 19   m'intéresse, c'est de savoir ce que vous pensez d'éventuelles traces de

 20   l'utilisation d'essence, pour autant que l'essence ait été utilisée comme

 21   accélérateur d'incendie de combustion sur les lieux mêmes pour faire

 22   démarrer le feu.

 23   M. Van der Peijl (interprétation). – Tout d'abord, je ne savais

 24   pas qu'il y avait un témoin qui avait affirmé que de l'essence avait été

 25   utilisée. Comme je vous l'ai déjà dit, même si de l'essence avait été


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  1   utilisée…

  2   M. Radovic (interprétation). - Excusez-moi, M. Terrier semble

  3   vouloir intervenir.

  4   M. Terrier. - Je voulais simplement faire remarquer, observer

  5   -peut-être est-ce une objection un peu tardive-, mais il ne paraît pas que

  6   le témoin dont il s'agit, qu'évoque Me Radovic, ait précisé la nature du

  7   produit qu’il a vu effectivement utilisé dans sa maison. Il ne me paraît

  8   pas qu'il ait mentionné spécifiquement de l'essence, essence de voiture

  9   par exemple, comme vient de l'indiquer, à tort, à mon sens, Me Radovic à

 10   l'instant. Je ne me pose pas la question parce que, effectivement, la

 11   question à ce moment-là n'est qu'une hypothèse.

 12   M. le Président. - Néanmoins, cela vaut la peine de la poser.

 13   M. Terrier. - Bien sûr, je tenais à apporter cette précision. Il

 14   s'agit d'une hypothèse formulée par Me Radovic.

 15   M. le Président (interprétation). - Tout à fait hypothétique.

 16   M. Radovic (interprétation). - Mais l'homme auquel je pense -je

 17   ne sais plus si c'est un témoin protégé, donc je ne vais pas mentionner

 18   son nom -, il a parlé d'essence effectivement. Bien sûr, il n'a pas dit si

 19   c'était de l'essence super ou normale, mais effectivement il a parlé de

 20   bouteilles avec de l'essence dedans. D'où ma question en tant qu'hypothèse

 21   et de possibilité et j'aimerais savoir ce que le témoin pense.

 22   M. Van Der Peijl (interprétation). - Effectivement si l'on parle

 23   possibilité théorique, je dirais d'abord ceci. A ma connaissance il n'y a

 24   pas d'études scientifiques réalisées pour voir ce qui se produit après

 25   autant de temps écoulé, si on laisse de l'essence.


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  1   Je sais que pour des périodes de temps plus courtes, déjà

  2   normalement après quelques jours, l'essentiel de l'essence se sera évaporé

  3   à moins qu'il n'y ait une bonne protection, par exemple que ce soit dans

  4   le sol et que la protection soit bonne. Mais le plus gros de l'essence

  5   sera évaporé et 'il resterait plus qu'1 % de l'essence qui au départ

  6   aurait été utilisée.

  7   Ce qui peut se passer, surtout si c'est dans le sol, c'est qu'il

  8   y a des micro-bactéries dans le sol qui s'attaquent aux substances

  9   chimiques qui composent le produit. Et même aux Pays-Bas, nous avons fait

 10   la recherche d'études qui iraient dans ce sens, mais je sais qu'il y a

 11   plusieurs d'études de dégradation de ces substances. Et là ce sont

 12   toujours des périodes beaucoup plus courtes que celles de cinq ans qui

 13   semblent être le cas ici. On voit déjà que la structure des composants

 14   chimiques a disparu, alors que, nous, on utilise souvent des

 15   concentrations pour identifier quelque chose qui ressemblerait à de

 16   l'essence.

 17   M. Radovic (interprétation). - Je vais demander à l'expert, au

 18   témoin de bien vouloir répéter, s'il vous plaît, ce qu'il avait dit, parce

 19   que l'interprète vient de me dire qu'il n'avait pas compris la dernière

 20   phrase.

 21   M. Van Der Peijl (interprétation). - Je ne sais pas si je peux

 22   reprendre mon intervention littéralement, mais je vous ai mentionné trois

 23   possibilités pour expliquer le fait que l'on n'ait pas trouvé de trace

 24   d'accélérateur, même si éventuellement un accélérateur a été utilisé.

 25   Pour l'essence, cela peut être le premier cas, à savoir que les


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  1   échantillons ont été prélevés au mauvais endroit. Je crois vous l'avoir

  2   expliqué en plus de détails. Ou encore il y a

  3   une dégradation micro-bactériologique. Les micro-bactéries auraient mangé

  4   les composantes chimiques de l'essence qui aurait été utilisée au départ.

  5   Nous parlons toujours des hypothèses. Je dispose d'éléments de biographie

  6   scientifique à l'appui de cette hypothèse, que ceci peut se produire, si

  7   la période écoulée est beaucoup plus courte que celle de cinq ans..

  8   M. Radovic (interprétation). - Bien évidemment, nous allons

  9   terminer notre contre-interrogatoire. Vous êtes d'accord avec moi que le

 10   résultat de votre recherche serait le suivant : on n'a pas prouvé par une

 11   méthode scientifique que sur les lieux on avait trouvé les traces des

 12   substances qui auraient servi comme accélérateur de combustion ?

 13   M. Van Der Peijl (interprétation). - Oui, aucune trace, aucun

 14   résidu n'a été détecté par analyse scientifique de ce que je vois de ce que

 15   l'on a appelé des substances accélératrices de combustion.

 16   M. Radovic (interprétation). - Merci, Monsieur le Président, je

 17   n'ai plus de questions à poser.

 18   M. le Président (interprétation). - Merci, Maître Radovic.

 19   Maître Glumac ?

 20   Mme Glumac (interprétation). - Je vous remercie, Monsieur le

 21   Président, je n'ai plus de questions.

 22   M. le Président (interprétation). - Monsieur Terrier ?

 23   M. Terrier. - Pas d'autres questions.

 24   M. le Président (interprétation). - Merci, Monsieur le Témoin,

 25   d'être venu devant nous. Vous pouvez disposer.


Page 4095

  1   (Le témoin est reconduit hors du prétoire.)

  2   M. le Président (interprétation). - Le prochain témoin est le

  3   numéro 8.

  4   M. Terrier. - C'est cela, Monsieur le Président.

  5   M. le Président. - Pas de mesures de protection ?

  6   M. Terrier. - Si, Monsieur le Président.

  7   M. le Président. - Si, ce n'était pas précisé sur la liste.

  8   M. Terrier. - La liste a été établie, Monsieur le Président,

  9   mais nous n'avions pas encore rencontré ce témoin qui souhaite

 10   effectivement des mesures de protection de son visage et de son nom. Ainsi

 11   ce témoin se nommera...  ?

 12   M. le Président. - FF.

 13   M. Terrier. - FF.

 14   M. le Président (interprétation). - Monsieur l'Avocat général,

 15   nous comptons faire une pause dans une demi-heure, dans trente minutes,

 16   ainsi vous pouvez penser que vous pouvez peut-être terminer votre

 17   interrogatoire.

 18   M. Terrier. - Oui.

 19   M. le Président (interprétation). - Est-ce que ce serait

 20   possible ?

 21   M. Terrier. - Oui. Je vais m’y efforcer.

 22   M. le Président (interprétation). - Comme cela, on fera une

 23   pause et on pourra passer au contre-interrogatoire.

 24   (Le témoin est introduit dans le prétoire.)

 25   M. le Président (interprétation). - Bonjour, Madame. Veuillez,


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  1   s’il vous plaît, prononcer la déclaration solennelle ?

  2   Témoin FF (interprétation). - Je déclare solennellement que je

  3   dirai la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

  4   M. le Président (interprétation). - Merci. Vous pouvez vous

  5   asseoir, Madame.

  6   M. Terrier. - Bonjour, Madame. Je vais vous faire remettre un

  7   papier où j'ai inscrit votre nom et je vais vous demander simplement de

  8   confirmer s'il s'agit bien de votre nom.

  9   Témoin FF (interprétation). - Oui.

 10   M. Bos (interprétation). - Pièce 279.

 11   M. Terrier. - Madame, le Tribunal a décidé que vous deviez

 12   bénéficier de mesures de protection, comme vous l'avez souhaité, mesures

 13   de protection de votre visage et mesures de protection de votre nom. De

 14   cette manière, ni votre visage ni votre nom ne peuvent être vus, ne

 15   peuvent être connus à l’extérieur de cette salle. Vous pouvez donc déposer

 16   ici de manière parfaitement sereine et en toute sécurité, et dire tout ce

 17   que vous savez sur les faits dont vous avez été le témoin.

 18   En premier lieu, je voudrais que vous indiquiez au Tribunal où

 19   vous habitiez en 1993 et quelle était la composition de votre famille ?

 20   Monsieur le Président, peut-être pourrions-nous passer quelques

 21   instants à huis clos pour que ces indications puissent être précisément

 22   données à votre Tribunal ? Monsieur l'Huissier, je vais vous demander de

 23   soumettre à Madame le témoin le document suivant.

 24   M. le Président (interprétation). - Nous sommes à huis clos.

 25   Audience huis clos


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 14   Page 4098- expurgée – huis clos.

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  1   (expurgée)

  2   (expurgée)

  3   (expurgée)

  4   (expurgée)

  5   (expurgée)

  6   Audience publique

  7   M. Terrier. – Madame, j'aimerais que nous parlions de la période

  8   qui s'est écoulée entre octobre 1992, le conflit d'octobre 1992, et

  9   avril 1993.

 10   Tout d'abord, pouvez-vous dire depuis combien de temps vous

 11   habitiez à Ahmici ?

 12   Témoin FF (interprétation). - Je vivais à Ahmici pendant

 13   huit ans, entre 1985 jusqu'en 1993.

 14   M. Terrier. - Aviez-vous des relations avec vos voisins

 15   croates ?

 16   Témoin FF (interprétation). – Oui, nous étions en bonnes

 17   relations, on se visitait, on se rendait des visites, on n'avait aucun

 18   problème. Nous, on se rendait chez eux, eux venaient chez nous. On avait

 19   de bonnes relations avec nos voisins croates.

 20   M. Terrier. – Pouvez-vous indiquer au Tribunal qui étaient ces

 21   voisins croates les plus proches ?

 22   Témoin FF (interprétation). - Il y avait d'abord (expurgée)

 23   (expurgée)

 24   (expurgée)

 25   M. Terrier. - Avez-vous ressenti dans les semaines ou les mois


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  1   qui ont précédé avril 1993 un changement d'atmosphère dans le village et

  2   un changement dans les relations entre les communautés croates et

  3   musulmanes ?

  4   Témoin FF (interprétation). - Non. Il n’y avait aucun problème.

  5   Ce n'est que deux mois avant les attaques qu'ils ont commencé à

  6   s'entraîner, qu'ils commençaient à se préparer : ils patrouillaient, ils

  7   se déplaçaient sur les routes, ils portaient des armes, mais on n'avait

  8   jamais eu de problèmes véritablement parlant jusqu’au 16 avril.

  9   M. Terrier. - Est-ce que dans le quartier de Santici où vous

 10   habitiez vous pouviez fréquemment voir des soldats ?

 11   Témoin FF (interprétation). - Oui, je les ai vus parce qu’ils

 12   passaient souvent à côté de ma maison. Ma maison se trouvait à côté de la

 13   route principale, il y avait un trafic et je les ai aperçus. Je les voyais

 14   régulièrement. Ils s’entraînaient, ils s’entraînaient, ils allaient à

 15   Radalkovo, dans la vallée également de Rovna et c'est là où ils

 16   s'entraînaient.

 17   M. Terrier. - Est-ce que vos voisins croates dont vous avez cité

 18   les noms tout à l'heure faisaient partie de ces soldats qui

 19   s'entraînaient ?

 20   Témoin FF (interprétation). - Non. Ce n'étaient pas nos voisins,

 21   c'étaient les autres. Je n'ai jamais aperçu véritablement mes voisins

 22   aller s'entraîner.

 23   M. Terrier. - Est-ce que vous avez aperçu vos voisins vêtus d'un

 24   uniforme militaire ?

 25   Témoin FF (interprétation). - Oui. J'ai vu Drago, il portait un


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  1   uniforme et il faisait partie de patrouille. Je l'ai vu, j'ai vu également

  2   Papic, Lui aussi, il portait l'uniforme. Nenad également, Vlado et Nenad

  3   également portaient des uniformes.

  4   M. Terrier. - Quand vous parlez de Nenad, pouvez-vous dire son

  5   nom complet ?

  6   Témoin FF (interprétation). - Le prénom, c'était Nenad, mais son

  7   nom de famille, je ne m'en souviens pas.

  8   M. Terrier. - Quand vous avez évoqué Drago, pouvez-vous indiquer

  9   son nom de famille ?

 10   Témoin FF (interprétation). - Drago Josipovic, c'était son nom

 11   complet.

 12   M. Terrier. - Dans les jours qui ont précédé le 16 avril 1993,

 13   est-ce que se sont produits des événements qui vous ont inquiétée ou

 14   surprise ?

 15   Témoin FF (interprétation). - Non. Je n'étais pas surprise. Il

 16   n'y avait pas de problème. On n'avait pas de malentendus entre nous. Il

 17   n'y avait pas de différends. Non, rien avant cet événement, rien ne m'a

 18   choquée, rien ne m'a surprise.

 19   M. Terrier. -  Est-ce que votre époux est resté parfaitement

 20   confiant ?

 21   Témoin EE (interprétation). - Mon mari ne se sentait pas

 22   tellement bien. Il avait des doutes. Il n'était pas vraiment confiant. Il

 23   avait dit : "Il y a quelque chose qui se passe, enfin, je sens qu'il y a

 24   quelque chose dans l'air, je ne peux pas l'expliquer". Mais il me disait

 25   souvent ça. Non, il n'était pas confiant, effectivement.


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  1   En ce qui me concerne, je le consolais. Je lui disais que rien

  2   ne se passerait, qu'on n'aurait pas de problème, mais lui avait un

  3   sentiment bizarre.

  4   M. Terrier. - Pour l'expliquer , vous a-t-il mentionné des

  5   choses qu'il avait remarquées dans le village ?

  6   Témoin FF (interprétation). - Non. Il ne m'a pas parlé beaucoup.

  7   Mais il me disait qu'il était un peu tendu et qu'il avait quelques

  8   difficultés au niveau de la respiration. Il ne se sentait pas à l'aise et

  9   il n'était pas bien.

 10   M. Terrier. - Est-ce que la veille du 16 avril 1993, donc dans

 11   la journée du 15 ou dans la soirée du 15 avril, vous-même, vous avez noté

 12   une atmosphère, un climat bizarre dans ce village ?

 13   Témoin FF (interprétation). - Oui. Moi-même et mon mari, nous

 14   nous sommes rendus (expurgée), et au moment où on traversait le

 15  champ sur le retour, j'ai vu quelques soldats devant la maison de (expurgée),

 16   On nous avait observés, nous sommes rentrés chez nous et ce soir-là

 17   c'était une accalmie. Il n'y avait pas de lumière dans leur maison. Il y

 18   avait beaucoup de voitures qui traversaient en direction de Rovna , mais

 19   tout était calme.

 20   M. Terrier. - Etait-ce inhabituel qu'il n'y ait pas de lumière

 21   dans les maisons croates ?

 22   Témoin FF (interprétation). - Oui, c'était assez inhabituel car

 23   normalement il y a des lumières. Car ils habitaient à côté par rapport à

 24   nous, par conséquent on voyait des lumières, mais ce soir-là, il n'y avait

 25   pas de lumières.


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  1   M. Terrier. - Il n'y avait pas de lumières dans les maisons

  2   croates mais y en avait-il dans les maisons musulmanes ?

  3   Témoin FF (interprétation). - Mais nous, on était dans nos

  4   maisons et il y avait des lumières, comme c'était toujours le cas quand la

  5   nuit tombait. On ne s'attendait à rien . On était restés tranquillement

  6   chez nous avec les membres de notre famille, avec nos enfants. Dans le cas

  7   concret, moi, j'étais avec mes enfants.

  8   M. Terrier. - Nous allons revenir maintenant à la journée du

  9   16 avril 1993. Quels sont vos premiers souvenirs de cette journée du

 10   16 avril 1993 ?

 11   Témoin FF (interprétation). - Il y avait les deux détonations

 12   assez violentes qui m'ont réveillée. Je me suis levée, mon mari également,

 13   je me suis dirigée vers la chambre des enfants. J'ai vu que mon fils aîné

 14   était déjà levé, le petit, je l'ai pris dans mes bras. Et je l'ai pris

 15   avec moi dans ma chambre où j'étais avec mon mari.

 16   Je suis retournée de nouveau dans cette chambre à coucher des

 17   enfants, j'ai regardé par la fenêtre et (expurgée) que la maison (expurgée)

 18   était incendiée, également la maison de sa mère était incendiée. On ne

 19   savait pas ce qui se passait, on avait entendu les tirs. Et j'ai pris un

 20   pull-over pour le mettre sur moi.

 21   Et à ce moment-là, une balle est venue en provenance de la

 22   maison de mon beau-frère. Je suis sortie de ma chambre rapidement pour

 23   dire que cette balle malheureusement était passée. J'avais peur que cela

 24   touche la tête de quelqu'un. Donc mon mari est retourné dans la chambre,

 25   il a cherché la balle, il ne l'a pas trouvée, il est revenu vers moi, on a


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  1   pris les enfants et nous les avons emmenés dans la salle de bains. Et

  2   c’est là que nous avons dit que nous allions rester en sécurité. Mon beau-

  3   père et ma belle-mère étaient restés à la porte. Mon mari et mes enfants,

  4   nous étions dans la salle de bains et on ne se parlait pas.

  5   Ensuite, nous avons entendu une voix d’homme qui a demandé de

  6   sortir. Mon beau-père et puis ma belle-mère sont sortis avant moi, et moi

  7   j'ai dit à mon mari qu'il fallait absolument qu'on sorte et qu'il ne

  8   fallait pas attendre. Mon mari est sorti dans le couloir. Il a pris sa

  9   veste, il a pris ses chaussures, moi j'ai pris mon fils cadet, je l'ai

 10   pris dans mes bras. Mon mari est sorti devant moi, avant moi, et moi je

 11   suis restée dans la porte. Je n'ai pas osé sortir dans un premier temps

 12   parce que j'ai entendu les tirs.

 13   Ils ne tiraient pas sur nous mais ils tiraient quand même ; il y

 14   avait un soldat qui était en face et lui, il avait le fusil au bras gauche

 15   et il tirait en l’air. Et puis mon mari est monté. Alors que le soldat

 16   m'avait demandé de s'approcher de lui, moi j'ai dit que j'avais peur et

 17   que je n’osais pas parce que j'avais peur qu'il tue mes enfants alors

 18   qu'il m’avait rétorqué que personne ne ferait rien et que je pouvais me

 19   rapprocher de lui. Donc j'ai couru et je me suis rapproché de lui.

 20   Ma belle-mère est venue tout de suite après moi. Je me suis

 21   retournée, j'ai vu mon beau-frère qui était du côté de sa maison, il avait

 22   demandé aux membres de sa famille de sortir de la maison. Ce soldat avait

 23   ouvert la porte, moi-même, avec mes enfants, nous sommes rentrés dans

 24   cette maison et il nous a enfermés ; et c'est là où il y avait un groupe

 25   de gens. Il y en avait qui sont allé chercher les armes, il y avait un


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  1   autre soldat qui avait briser les vitres de la voiture, d'autres sont

  2   rentrés dans la pièce, ils ont mis le feu dans la pièce, elle s'est mis en

  3   flammes. Ensuite ma belle-soeur et sa fille également sont jointes à nous,

  4   elles ont été enfermées avec nous. Et au bout d'un certain temps, quelques

  5   minutes plutôt, cinq minutes, j'ai entendu cinq tirs au niveau de

  6   l'étable ; c'étaient des tirs qui étaient séparés, pas en rafales, et

  7   ensuite il y avait une accalmie. On n'a rien entendu, il n'y avait plus

  8   personne. Nous sommes restés toujours dans cette maison jusqu'à l'après-

  9   midi.

 10   Nous avons entendu également quelques conversations dans la

 11   cour. Il y avait les deux soldats qui sont arrivés, qui ont ouvert la

 12   porte, qui nous ont posé la question : pourquoi on était là ? On a tout

 13   simplement rétorqué qu'on nous avait enfermés. On nous a demandé où se

 14   trouvaient nos maris, ils nous ont demandé également ce qu'ils portaient.

 15   J'avais raconté à un soldat ce que mon mari avait. Lui, il avait baissé

 16   les yeux, il n'avait pas répondu et il avait dit à ma belle-mère que

 17   beaucoup d'hommes ont été enfermés et envoyés à Busovaca, et il avait dit

 18   que probablement les nôtres se trouvaient à Busovaca également.

 19   Ce soldat nous a dit par ailleurs : "C'est Alija Izetbegovic qui

 20   est coupable. S’il n’y avait pas d’Ajija Izebegovic, la guerre n’aurait

 21   pas commencé. Nous, on lui a répondu. On lui a demandé qu’il nous apporte

 22   de l’eau. Il nous a apporté de l'eau et il nous a apporté également deux

 23   couvertures qu'il avait trouvées au premier étage, et il nous avait

 24   demandé de rester à l'endroit où nous étions, il a dit qu’il ne savait pas

 25   quoi faire avec nous, parce qu’il a dit : "Si jamais il y a d'autres


Page 4106

  1   soldats qui arrivent, ils vont vous tuer également". Donc il nous a

  2   enfermés une fois de plus dans cette maison et nous sommes restés sans

  3   bouger.

  4   Au bout d'un certain temps, ils sont retournés de nouveau, ils

  5   ont ouvert la porte, ils nous ont demandé de sortir dans la cour. Ensuite

  6   Josip est venu, Vinko est venu également, avec lui deux autres soldats qui

  7   les ont accompagnés ; je ne peux pas me souvenir de leurs noms parce que

  8   je ne connaissais pas tout le monde. Ils nous ont dit, quand on a demandé

  9   où se trouvaient nos maris, que tout allait bien se terminer.

 10   Il y avait d'autres femmes qui se sont rendues dans cette cave

 11   de Slavko Vrebac et

 12   que par conséquent, nous pouvions également les rejoindre. Nous sommes

 13   allés dans la cave de Slavko Vrebac et c'est là où nous avons trouvé les

 14   femmes, nos femmes. Nous sommes rentrées dans cette cave. J'ai vu nos

 15   femmes qui pleuraient. On a posé la question et demandé ce qui se passait.

 16   Elles nous ont répondu que nos maris et nos fils ont été tués et

 17   qu'elles avaient vu quand elles partaient de chez elles alors que nous, on

 18   n'était pas au courant. On ne savait pas ce qui s'était passé. C'est dans

 19   cette cave que nous avons passé la nuit.

 20   Le lendemain matin, on nous a dit qu'il fallait partir de cet

 21   endroit-là. Nous ne pouvions pas rester en sécurité parce que les soldats

 22   ne pouvaient pas véritablement nous protéger. C'est la raison pour

 23   laquelle nous avons quitté cette cave et avons traversé les champs. Nous

 24   avons entendu les tirs. On nous a tiré dessus mais nous sommes restés en

 25   bon état, enfin personne n'a été touché et nous sommes arrivés jusqu'à la


Page 4107

  1   maison musulmane et c'est là où un Croate est venu, il nous a dit :

  2   "Surtout, n'ayez pas peur je vais vous emmener par la route principale

  3   jusqu'à Sevrino Selo et c'est là où vos gens vont vous prendre". Et nous

  4   sommes partis en cortège et nous sommes arrivés jusqu'à Sevrino Selo.

  5   C'est là où nous avons été accueillis par nos gens et où nous avons passé

  6   les deux nuits.

  7   Le lendemain matin, une fois, de plus nous sommes partis vers

  8   Poculica où nous sommes restés sept jours. Après quoi, nous sommes allés à

  9   Zenica où je suis restée trois mois. Après quoi, je suis allée jusqu'à

 10   chez ma mère mais je suis d'abord passée par Zume et c'est là où j'ai

 11   trouvé ma mère. Ensuite, je suis retournée à Zenica parce qu'on m'avait

 12   trouvé un appartement et c'est là où je me suis installée et où je vis

 13   avec mes enfants. C'est tout.

 14   M. Terrier. - Je vous remercie. Je vais vous poser quelques

 15   questions pour que vous puissiez préciser certains éléments. Mais, peut-

 16   être, Monsieur le Président, pensez-vous qu'il serait opportun de faire la

 17   pause maintenant, ne serait-ce que pour que le témoin se repose quelques

 18   instants, comme vous voulez ? Avez-vous besoin de vous reposer quelques

 19   instants ?

 20   Témoin FF (interprétation). - Je me sens bien. Je ne suis pas en

 21   mauvais état. On peut poursuivre, c'est à vous de décider.

 22   M. le Président (interprétation). - Oui, jusqu'à 11 heures.

 23   M. Terrier. - Monsieur l'Huissier, je vais vous demander de

 24   remettre sur le rétroprojecteur la photo aérienne. Madame le Témoin, je

 25   veux simplement vous demander de désigner les maisons que vous avez vues


Page 4108

  1   en flammes, ce matin là.

  2   Témoin FF (interprétation). - J'ai vu la maison de (expurgée)

  3   et la maison de sa mère, également (expurgée). Elle était en

  4   flammes, également. J'ai désigné avec le pointeur les trois maisons.

  5   M. Terrier. - Quand vous parlez de la maison (expurgée)  et

  6   de (expurgée)  vous parlez de (expurgée) ?

  7   Témoin FF (interprétation). - Oui, (expurgée).

  8   M. Terrier. - Quand vous parlez de (expurgée), pensez-

  9   vous à (expurgée) ?

 10   Témoin FF (interprétation). - Oui, je pense à (expurgée).

 11   M. Terrier. - Avez-vous vu la maison (expurgée),

 12   (expurgée), en flammes ?

 13   Témoin FF (interprétation). - Non.

 14   M. Terrier. - Avez-vous vu des soldats rassemblés autour de la

 15   maison (expurgée), (expurgée)?

 16   Témoin FF (interprétation). - Il y avait des soldats qui se

 17   trouvaient autour de la remise qui était à côté de sa maison. Ils tiraient

 18   beaucoup mais je n'ai pas vu de soldats. Ils étaient nombreux au moment où

 19   ils nous ont enfermés et où ils sont rentrés dans notre cour.

 20   M. Terrier. - Avez-vous entendu les soldats qui se trouvaient

 21   autour de la maison (expurgée)  (expurgée) ?

 22   Témoin FF (interprétation). - Je ne les ai pas entendus parce

 23   qu'il y avait des échanges de tirs et un bruit assez fort. Je n'ai pas

 24   entendu les soldats, tout au moins pas leur voix mais, au moment où le

 25 soldat m'a enfermé, j'ai entendu (expurgée) dire que sa famille devait sortir


Page 4109

  1   de chez lui, de sa maison.

  2   M. Terrier. - Cette voix que vous avez entendue était-elle celle

  3   d'un soldat ?

  4   Témoin FF (interprétation). - Non, c'est (expurgée) qui avait demandé

  5   aux membres de sa famille de sortir de la maison. Et avant, j'ai entendu

  6   les coups de feu. En ce qui me concerne, moi, c'est un soldat qui m'avait

  7   appelée, fait sortir et qui m'avait enfermée par la suite. Mais je n'ai

  8   pas entendu d'autres voix de soldats. J'ai entendu la voix de (expurgée).

  9   Comme je l'ai précisé, il y avait beaucoup de bruits produits par les tirs.

 10   M. Terrier. - Est-ce que... Quand vous avez été enfermée dans la

 11   grange avec votre belle-mère et vos deux enfants, combien de temps s'est-

 12   il écoulé avant que n'arrive votre belle-soeur ? Je pense que je peux

 13   citer son prénom, je pense que je peux citer son prénom puisqu'il s'agit

 14   d'un témoin. Je parle de (expurgée) et de sa fille.

 15   Témoin FF (interprétation). - (expurgée)  et sa fille (expurgée). Quelques

 16   minutes sont passées et puis elle est revenue. Pas beaucoup de temps.

 17   C'étaient quelques minutes seulement.

 18   M. Terrier. - Dans quel état étaient-elles toutes les deux ?

 19   Témoin FF (interprétation). - Elles étaient terrorisées, mais

 20   nous aussi on étaient terrorisés. C'est tout à fait normal dans une

 21   situation pareille. On ne savait pas quoi se dire, on ne se parlait pas.

 22   M. Terrier. - Madame, je vais vous soumettre un schéma.

 23   J'indique au Tribunal qu'il ne s'agit pas d'un plan à l'échelle mais un

 24   schéma des bâtiments où les faits se sont produits.

 25   M. Bos (interprétation). - Pièce 282.


Page 4110

  1   M. Terrier. - Est-ce que sur ce schéma vous pouvez identifier où

  2   se trouve votre maison ?

  3   Témoin FF (interprétation). - Oui, je peux. C'est ma maison, la

  4   première que j'ai désignée, ensuite il y avait une cuisine d'été que je

  5   montre. Maintenant, il y avait également un garage et un endroit où on

  6   gardait le bois et il y avait également un atelier où on abattait le

  7   bétail et enfin l'étable. Je la désigne maintenant, où il y avait une

  8   toute petite pièce où j'ai été enfermée.

  9   M. Terrier. - Est-ce que vous pouvez montrer sur ce schéma à

 10   quel endroit vous vous trouviez lorsque vous avez vu votre mari et votre

 11   beau-frère amenés par les soldats ?

 12   Témoin FF (interprétation). - Mon beau-père, oui. Eh bien, ici.

 13   Il y avait la porte qui menait vers le premier étage, ensuite il y avait

 14   une deuxième porte également. Mon mari est sorti ainsi que mon beau-père

 15   avant moi et ils ont traversé la cour et ils ont dépassé l'étable. Par la

 16   suite, je ne les ai plus vus. Et moi je suis restée à l'endroit que je

 17   désigne actuellement avec le pointeur jusqu'au moment où, bien évidemment,

 18   je ne me suis pas approchée du soldat quand il m'avait emmenée pour

 19   m'enfermer à l'endroit que j'ai désigné tout à l'heure

 20   M. Terrier. - Est-ce que je peux vous demander, Madame, de

 21   mettre une croix sur cet endroit où vous vous teniez et que vous venez

 22   d'indiquer, cet endroit où vous étiez lorsque votre mari et votre beau-

 23   père ont été emmenés par les soldats ?

 24   Témoin FF (interprétation). - Moi, j'étais à la porte d'entrée

 25   de ma maison. La porte se trouvait à cet endroit-là. Nous avons eu deux


Page 4111

  1   escaliers. Mon mari et mon beau-père sont sortis dans la cour. C’est là où

  2   se trouvait la cour et c'est à partir de cet endroit-là qu'ils les ont

  3   emmenés.

  4   En ce qui me concerne, je suis restée à l'endroit où j'étais

  5   auparavant. Mon mari avait mis des chaussures et, à ce moment-là, le

  6   soldat m'avait demandé de s'approcher de lui, ce que j'ai fait, et il m'a

  7   emmenée dans cette pièce où j'ai été enfermée.

  8   M. Terrier. - Pouvez-vous mettre la lettre "A" sur la première

  9   des croix que vous avez inscrites et qui représente l'endroit où vous vous

 10   teniez ? La lettre A, s'il vous plaît.

 11   (Le témoin s'exécute.)

 12   J'indique pour le transcript que les trois autres croix que vous

 13   avez inscrites sur ce plan représentent le trajet suivi par votre époux et

 14   votre beau-père quand ils ont été emmenés par les soldats. Pouvez-vous

 15   maintenant indiquer sur ce plan par une croix et la lettre "B" l'endroit

 16   où vous êtes entrée dans la grange, la porte de la grange en quelque

 17   sorte ?

 18   Témoin FF (interprétation). - La porte.

 19   M. Susak (interprétation). - Je ne vois absolument rien sur

 20   l'écran et par conséquent je ne peux pas suivre ce qui se passe.

 21   M. le Président. - Nous non plus.

 22   M. Terrier. - Il est difficile de tout faire en même temps.

 23   Mettez une croix à l'endroit où vous êtes entrée dans la grange, s'il vous

 24   plaît. Mentionnez la lettre "B" à cet endroit.

 25   Témoin FF (interprétation). - L'endroit où j'ai mis la petite


Page 4112

  1   croix ?

  2   M. Terrier. - Oui, Madame.

  3   (Le témoin s'exécute.)

  4   Vous avez parlé tout à l'heure de...

  5   M. le Président. - Pourrait-on reprendre tout ce qu'on vient de

  6   dire ? On a en effet le plan sur l'écran. On peut mieux comprendre.

  7   M. Terrier. - Vous avez mentionné, Madame... Maintenant, tout le

  8   monde peut voir le plan et les croix que vous avez apposées sur ce plan.

  9   Il est souhaitable que nous expliquions, que nous réexpliquions maintenant

 10   ce que représentent ces croix. Vous avez mentionné une première croix avec

 11   la lettre "A".

 12   Témoin FF (interprétation). – La lettre "A" représente la sortie

 13   de la maison. C'est par cette porte-là que nous sommes sortis, mon mari et

 14   moi-même, mes enfants, mon beau-père et ma belle-mère. C'est la sortie de

 15   la maison.

 16   M. Terrier. – Vous avez inscrit trois petites croix qui partent

 17   vers la gauche. Que représentent ces trois petites croix ?

 18   Témoin FF (interprétation). – Les trois petites croix

 19   représentent d'abord la cour que mon beau-père et mon mari ont traversée.

 20   Ils ont été emmenés de ce côté-là.

 21   M. Terrier. - S'agit-il du chemin qu'ils ont suivi lorsqu'ils

 22   ont été emmenés ?

 23   Témoin FF (interprétation). – Oui, effectivement.

 24   M. Terrier. – Vous avez une petite croix avec la lettre "B". Que

 25   représente cet emplacement ?


Page 4113

  1   Témoin FF (interprétation). - La lettre "B" montre l'endroit où

  2   je me suis retrouvée. C'était une petite porte que nous avons traversée

  3   pour entrer dans cette pièce où j'étais enfermée avec mes enfants.

  4   M. Terrier. – Lorsque vous êtes allée de votre maison jusqu'à la

  5   grange où vous avez été enfermée avec votre belle-mère et vos deux

  6   enfants, est-ce que vous avez suivi un chemin tout droit, direct ?

  7   Témoin FF (interprétation). – C'est exact.

  8   M. Terrier. - Vous avez parlé tout à l'heure de tirs

  9   automatiques et de cinq tirs espacés. A quel moment avez-vous entendu

 10   cela ?

 11   Témoin FF (interprétation). - J'étais déjà enfermée et au moment

 12   où ma belle-soeur avec sa fille étaient venues se joindre à nous et quand

 13   les soldats sont partis de notre cour, c'est après, au bout de quelques

 14   minutes, que j'ai entendu cinq tirs espacés et çà, c'était au niveau de

 15   l'étable.

 16   M. Terrier. - Avez-vous vu votre maison brûler ?

 17   Témoin FF (interprétation). - Au bout d'un certain temps, la

 18   chambre où la balle a pénétré dans la chambre de (expurgée), la maison a

 19   commencé à s'enflammer et puis, tout de suite après, les flammes ont pris

 20   toute la maison.

 21   M. le Président (interprétation). – Navré, mais il faut prendre

 22   une pause parce que les interprètes travaillent deux heures.

 23   M. Terrier. – J'ai juste quelques questions à poser encore, mais

 24   très peu.

 25   (L'audience, suspendue à 11 heures 05, est reprise à 11 heures


Page 4114

  1   35.)

  2   M. Terrier. - Madame, je vais vous inviter à reprendre le schéma

  3   qui se trouve sur ce bureau et je vais vous demander d'indiquer sur ce

  4   schéma à quel endroit vous vous trouviez de votre maison lorsque vous avez

  5   vu, le matin, les maisons en flammes autour de vous et en particulier la

  6   maison de (expurgée).

  7   M. Furundzija (interprétation). – Vous parlez de

  8   (expurgée)? J'ai vu que sa maison était en flammes au moment où je

  9   me trouvais dans la chambre d'enfants et à ce moment également il y avait

 10   cette balle qui est venue en provenance (expurgée), mais avant,

 11   j'ai regardé par la fenêtre et j'ai vu la maison de (expurgée)  en flammes.

 12   Quand je suis arrivée jusqu'à l'endroit où j'ai été enfermée,

 13   j'ai vu la maison de (expurgée)  qui était en flammes et de mon beau-frère,

 14   la maison n'était pas encore en flammes.

 15   M. Terrier. - Pouvez-vous indiquer sur le plan, sur le schéma de

 16   votre maison où se trouve la fenêtre où vous vous teniez lorsque vous avez

 17   vu tout cela ?

 18   Témoin FF (interprétation). - La fenêtre était à cet endroit-là.

 19   Donc, il y a la (expurgée) et moi j'étais à cet endroit-là avant de

 20   sortir et avant d'être emmenée à l'endroit où j'étais enfermée. Donc,

 21   c'est la chambre d'enfants, il y avait la fenêtre qui était de ce côté de

 22   la maison.

 23   M. Terrier. - Il s'agit donc de la fenêtre qui fait face à la

 24   maison de (expurgée)?

 25   Témoin FF (interprétation). – Oui, c'est vrai.


Page 4115

  1   M. Terrier. - A cet instant, à ce même instant, avez-vous vu des

  2   soldats dans les environs, autour des maisons ?

  3   Témoin FF (interprétation). - Non, les soldats étaient cachés

  4. (expurgée). Mais en

  5   revanche, j'ai entendu les tirs.

  6   M. Terrier. - Pouvez-vous indiquer sur le schéma d'où venaient

  7   ces tirs que vous avez entendus ?

  8   Témoin FF (interprétation). - Ces tirs venaient en provenance de

  9   la remise (expurgée),. La maison est face à notre maison, donc

 10   j'ai entendu les tirs mais ces tirs n'étaient pas adressés à notre groupe,

 11   enfin, ils ne nous tiraient pas dessus.

 12   M. Terrier. - A votre avis, ils tiraient sur quoi ou sur qui ?

 13   Témoin FF (interprétation). - Je ne sais pas, mais c'est

 14   probablement pour nous faire peur qu'ils ont tiré parce qu'on n'était pas

 15   encore sortis de la maison. Par conséquent, ils ont voulu nous faire peur

 16   (expurgée).

 17   M. Terrier. - Vous avez entendu, vous l'avez dit tout à l'heure,

 18   la voix de (expurgée).

 19   Témoin FF (interprétation). - Oui, j'ai entendu la voix de (expurgée)

 20   au moment où je suis ressortie de chez moi et quand je me suis donc

 21   approchée de l'endroit où j'étais enfermée. J'ai entendu la voix de

 22   (expurgée) qui avait demandé aux enfants de sortir de la maison.

 23   (expurgée), il avait appelé les enfants pour sortir.

 24   M. Terrier. - Pouvez-vous indiquer sur le plan où se trouvait

 25 (expurgée) lorsque, si vous l'avez vu, vous l'avez entendu appeler sa famille


Page 4116

  1   pour qu'elle sorte ?

  2   Témoin FF (interprétation). - (expurgée) était devant chez lui, il

  3   était au milieu de son champ. Il y avait à gauche, tout à fait à gauche,

  4   la remise et lui, il était au milieu dans les champs.

  5   M. Terrier. - Puis-je vous demander d'indiquer cet emplacement

  6   approximatif -étant bien entendu qu'il est approximatif- d'une croix avec

  7   la lettre "C", avec le marqueur ?

  8   (Le témoin s'exécute.)

  9   Je vous remercie. Avez-vous vu et à quel moment avez-vous vu les

 10   soldats qui se trouvaient près de votre maison ?

 11   Témoin FF (interprétation). - Est-ce que vous pouvez me

 12   reformuler la question, s'il vous plaît ?

 13   M. Terrier. - Volontiers. A quel moment avez-vous vu les

 14   premiers soldats autour de votre maison ?

 15   Témoin FF (interprétation). - J'ai vu les soldats depuis la

 16   pièce ou j'ai été enfermée au moment où ils se sont regroupés. Il y avait

 17   une toute petite ouverture dans la pièce où nous étions enfermés.

 18   M. Terrier. - J'aurais une dernière question à vous poser. Est-

 19   ce que votre époux disposait d'une arme chez lui ?

 20   Témoin FF (interprétation). - Il y avait des armes à la maison

 21   avant, mais ce sont nos voisins qui nous ont demandé de leur donner et

 22   c'est comme cela que nous sommes restés sans armes.

 23   M. Terrier. - De quels voisins s'agit-il ?

 24   Témoin FF (interprétation). - C'étaient nos voisins (expurgée).

 25   M. Terrier. - Ces voisins (expurgée), connaissez-vous leur nom ?


Page 4117

  1   Témoin FF (interprétation). - (expurgée)

  2   (expurgée)

  3   (expurgée)

  4   M. Terrier. - La question, peut-être que je vais la reformuler :

  5   je vous demandais à (expurgée)  précisément votre mari avait restitué,

  6   remis ses armes ? A quels voisins précisément ?

  7   Témoin FF (interprétation). -(expurgée). C'est lui qui était

  8   commandant principal.

  9   M. Terrier. - S'agit-il de (expurgée)?

 10   Témoin FF (interprétation). - Oui, c'est (expurgée).

 11   M. Terrier. - Connaissez-vous cette personne ?

 12   Témoin FF (interprétation). - Oui, oui, je le connaissais. Je ne

 13   peux pas dire que je l'ai contacté souvent mais je le connaissais. Il

 14   habitait à proximité par rapport à chez moi, (expurgée)

 15,. (expurgée).

 16   M. Terrier. - Il s'agissait, selon vous, du commandant du HVO

 17   local ?

 18   Témoin FF (interprétation). - Oui, oui, c'est cela.

 19   M. Terrier. - Est-ce qu'il s'agit bien du frère de

 20   (expurgée)  ?

 21   Témoin FF (interprétation). - Oui.

 22   M. Terrier. - Vous souvenez-vous à quelle date votre mari

 23   approximativement a remis ses armes à cet homme ?

 24   Témoin FF (interprétation). - Je ne me souviens pas.

 25   M. Terrier. - Je vous remercie, Madame. Monsieur le Président,


Page 4118

  1   je n'ai pas d'autres questions à poser.

  2   M. le Président. - Merci. Maître Pavkovic ?

  3   M. Pavkovic (interprétation). - Monsieur le Président, le témoin

  4   sera contre-interrogé par Me Susak.

  5   M. le Président. - Merci.

  6   M. Susak (interprétation). - Merci, Monsieur le Président.

  7   Monsieur le Président, je vais vous demander de passer à huis

  8   clos étant donné que je vais être obligé de parler de quelques noms mais,

  9   de toute façon, je serai très bref. Je ne serai pas très long.

 10   M. le Président (interprétation). - D'accord.

 11   Audience huis clos

 12   (expurgée)

 13   (expurgée)

 14   (expurgée)

 15   (expurgée)

 16   (expurgée)

 17   (expurgée)

 18   (expurgée)

 19   (expurgée)

 20   (expurgée)

 21   (expurgée)

 22   (expurgée)

 23   (expurgée)

 24   (expurgée)

 25   (expurgée)


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 13   Pages 4119-4122- expurgées – huis clos.

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Page 4123

  1   (expurgée)

  2   (expurgée)

  3   (expurgée)

  4   (expurgée)

  5   (expurgée)

  6   (expurgée)

  7   (expurgée)

  8   (expurgée)

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 10   (expurgée)

 11   (expurgée)

 12   (expurgée)

 13   (expurgée)

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 15   (expurgée)

 16   (expurgée)

 17   (expurgée)

 18   (Le témoin est reconduit hors du prétoire.)

 19   M. le Président. - Vous avez bien d'autres témoins ? Parfait.

 20   M. Moskowitz (interprétation). - Il s'agira d'un témoin protégé

 21   avec protection du visage et du nom. Il s'agira du témoin GG.

 22   M. le Président (interprétation). - Où apparaît ce témoin dans

 23   notre liste ?

 24   M. Moskowitz (interprétation). - Il s'agit du témoin n 10.

 25   (Le témoin est introduit dans le prétoire.)


Page 4124

  1   M. le Président (interprétation). – Bonjour, Madame, veuillez,

  2   s'il vous plaît, prononcer la déclaration solennelle.

  3   Témoin GG (interprétation). - Je déclare solennellement que je

  4   dirai la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

  5   M. le Président (interprétation). - Merci beaucoup. Prenez

  6   place, s'il vous plaît.

  7   (Le témoin s'exécute.)

  8   Témoin GG (interprétation). - Merci.

  9   M. Moskowitz (interprétation). - Je vais faire passer au témoin

 10   une feuille de papier sur laquelle apparaît son nom. Je vais vous

 11   demander, Témoin GG, de regarder cette feuille de papier et de nous dire

 12   s'il s'agit bien là de votre nom ?

 13   Témoin GG (interprétation). - Oui.

 14   M. le Président (interprétation). - Pendant que nous examinons

 15   le nom du témoin, j'ai une question à vous poser : vous nous avez donné

 16   deux déclarations pour ce témoin, c'est tout ? Deux déclarations

 17   préalables ? L'une est datée du 10 juillet 1993, l'autre porte la date du

 18   3 février 1995.

 19   M. Moskowitz (interprétation). - C'est exact, Monsieur le

 20   Président.

 21   M. le Président (interprétation). - Je vous remercie.

 22   M. Moskowitz (interprétation). - Merci, Monsieur le Président.

 23   Vous avez demandé un certain nombre de mesures de protection.

 24   Les Juges ont accédé à votre demande, votre nom sera protégé ainsi que les

 25   traits de votre visage. Je vous assure donc que votre identité ne sera pas


Page 4125

  1   révélée et que personne ne verra votre visage, hormis les personnes qui se

  2   trouvent dans ce prétoire.

  3   Au cours de votre déposition, s'il devient nécessaire pour vous

  4   de citer certains noms, ou s'il est nécessaire pour vous de nous donner

  5   des éléments d'information qui vous permettraient d'identifier qui que ce

  6   soit ou quelque lieu que ce soit, nous passerons à huis clos. Nous en

  7   ferons du moins la demande auprès des Juges et, si les Juges acceptent que

  8   nous passions à huis clos, eh bien votre voix ne sortira pas de ces quatre

  9   murs. Votre identité sera parfaitement protégée, la vôtre et celle des

 10   personnes dont vous serez susceptible de parler.

 11   J'espère que vous m'avez compris et que vous n'hésiterez pas à

 12   me poser des questions.

 13   Témoin GG (interprétation). - Je vous ai bien compris et je n'ai

 14   pas de questions à vous poser.

 15   M. Moskowitz (interprétation). - Quel est votre âge ?

 16   Témoin GG (interprétation). - J'ai 28 ans.

 17   M. Moskowitz (interprétation). - Avant le 16 avril 1993, où

 18   résidiez-vous ?

 19   Témoin GG (interprétation). - Je vivais à Ahmici, dans le

 20   quartier de Zume, pour être plus précise.

 21   M. Moskowitz (interprétation). - Au cours de cette période de

 22   temps, je ne pense pas au 16 avril 1993 en particulier, je pense à une

 23   période de temps qui a précédé cette journée-là, avec qui viviez-vous,

 24   quels étaient les membres de votre famille, pourriez-vous nous dire,

 25   notamment, qui vivait avec vous dans la maison que vous habitiez à


Page 4126

  1   Ahmici ? Vous n'avez pas à nous donner des noms ou des détails trop

  2   précis.

  3   Témoin GG (interprétation). - Je vivais avec mon père, ma mère

  4   et ma soeur.

  5   M. Moskowitz (interprétation). - C'était bien une maison à deux

  6   étages, n'est-ce pas ?

  7   Témoin GG (interprétation). - Je vous demande pardon ?

  8   M. Moskowitz (interprétation). - Il y avait bien un premier

  9   étage et un étage supérieur, n'est-ce pas ?

 10   Témoin GG (interprétation). - Oui, oui.

 11   M. Moskowitz (interprétation). - A quel niveau de la maison

 12   vous-même et votre famille viviez-vous ? A quel étage ?

 13   Témoin GG (interprétation). - Nous vivions à l'étage.

 14   M. Moskowitz (interprétation). - Et comment pouviez-vous passer

 15   du premier étage de cette maison au rez-de-chaussée de la maison ?

 16   Témoin GG (interprétation). - Eh bien, il nous fallait passer

 17   par l'extérieur, et c'est par l'extérieur que nous accédions à l'étage

 18   inférieur.

 19    M. Moskowitz (interprétation). - Donc il y avait une cage

 20   d'escalier à l'extérieur qui vous permettait de passer d'un étage à

 21   l'autre ?

 22   Témoin GG (interprétation). - Oui.

 23   M. Moskowitz (interprétation). - Je vais maintenant demander au

 24   témoin de nous montrer où se trouve sa maison. Alors je pense qu'il est

 25   bon que nous passions à huis clos, Monsieur le Président.


Page 4127

  1   M. le Président (interprétation). - Absolument, nous passons à

  2   huis clos.

  3   Audience huis clos

  4   (expurgée)

  5   (expurgée)

  6   (expurgée)

  7   (expurgée)

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 13   Pages 4128-4130 expurgées – audience à huis clos

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  1   (expurgée)

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  5   (expurgée)

  6   (expurgée)

  7   (expurgée)

  8   (expurgée)

  9   (expurgée)

 10   (expurgée)

 11   (expurgée)

 12   Audience publique

 13   M. Moskowitz (interprétation). - Quelle est la première chose

 14   que vous ayez vu ou entendu le matin du 16 avril 1993 ?

 15   Témoin GG (interprétation). - La première chose qui s'est

 16   passée, c'est que des tirs ont été entendus et c’est ça qui m'a réveillée.

 17   Quelques minutes plus tard, des balles traçantes sont arrivées dans notre

 18   salon

 19   M. Moskowitz (interprétation). - Que s’est-il passé lorsque ces

 20   balles traçantes ont pénétré dans votre salon ? Qu'avez-vous vu ?

 21   Témoin GG (interprétation). - Les balles ont atterri sur le

 22   canapé qui a pris feu. Je suis allé chercher de l'eau et j'ai essayé

 23   d'éteindre les flammes.

 24   M. Moskowitz (interprétation). - Avez-vous entendu des bruits

 25   provenir de l'extérieur de la maison à ce moment-là ? Avez-vous entendu un


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  1   bruit particulier ?

  2   Témoin GG (interprétation). - Des tirs.

  3   M. Moskowitz (interprétation). - Avez-vous essayé de faire quoi

  4   que ce soit ? Avez-vous essayé d'obtenir de l'aide ?

  5   Témoin GG (interprétation). - Eh bien, j'ai saisi le téléphone,

  6   je voulais passer un coup de fil pour essayer de savoir ce qui se passait,

  7   mais la ligne avait été coupée.

  8   M. Moskowitz (interprétation). - Votre mère et vous-même,

  9   qu'avez-vous fait à ce moment-là -et je suppose qu'à ce moment-là vous

 10   êtes toujours au premier étage de la maison, n'est-ce pas ?

 11   Témoin GG (interprétation). - Effectivement, nous sommes au

 12   premier étage, c'est là que nous nous trouvions ; à ce moment-là, j'ai dit

 13   à ma mère que nous ne pouvions plus rester dans cette partie de la maison,

 14   que tout allait brûler. Je lui ai dit qu'il fallait descendre au rez-de-

 15   chaussée.

 16   M. Moskowitz (interprétation). - Et afin de descendre au rez-de-

 17   chaussée, il vous fallait sortir, n'est-ce pas, pour emprunter la cage

 18   d'escalier qui se trouvait à l'extérieur ?

 19   Témoin GG (interprétation). - Effectivement. Tout à fait, on est

 20   obligé de sortir pour descendre l'escalier qui mène au rez-de-chaussée de

 21   la maison.

 22   M. Moskowitz (interprétation). - Est-ce que vous avez vu quoi

 23   que ce soit lorsque vous êtes sortie ?

 24   Témoin GG (interprétation). - Depuis le rez-de-chaussée qui

 25   donne sur la route principale, j'ai vu trois soldats portant l'uniforme et


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  1   puis, sur le côté supérieur de la maison, il y avait deux soldats qui

  2   portaient également des uniformes.

  3   M. Moskowitz (interprétation). - Avez-vous pu observer s'ils

  4   portaient des armes ?

  5   Témoin GG (interprétation). - Oui.

  6   M. Moskowitz (interprétation). - Est-ce qu'ils portaient

  7   vraiment des armes ?

  8   Témoin GG (interprétation). - Oui, ils portaient des armes.

  9   M. Moskowitz (interprétation). - Que s'est-il passé ensuite ?

 10   Vous en souvenez-vous ?

 11   Témoin GG (interprétation). - Lorsqu'ils nous ont aperçus, ils

 12   se sont rassemblés et ils nous ont poussé ma mère et moi-même au rez-de-

 13   chaussée de la maison dans cette pièce qui se trouvait là. Cinq soldats

 14   sont entrés en même temps que ma mère et moi.

 15   M. Moskowitz (interprétation). - Ces soldats vous ont-ils dit

 16   quoi que ce soit, à vous ou à votre mère, alors qu'ils vous poussaient à

 17   l'intérieur de cette pièce au rez-de-chaussée ?

 18   Témoin GG (interprétation). - Ils nous injuriaient, ils

 19   traitaient nos mères de "Balija". Lorsqu'ils sont entrés dans la maison,

 20   ils ont commencé à fouiller partout et ils ont demandé où se trouvait mon

 21   père. La situation était vraiment terrible, le chaos régnait. Chacun

 22   parlait à tort et à travers.

 23   M. Moskowitz (interprétation). - Pourriez-vous décrire la pièce

 24   dans laquelle vous vous trouviez, vous et ces soldats au rez-de-chaussée

 25   de la maison ?


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  1   Témoin GG (interprétation). - Eh bien, on accédait à cette pièce

  2   depuis l'extérieur. Du moins c'était possible d'y accéder depuis

  3   l'extérieur, ce n'était pas une très grande pièce, c'était un salon si

  4   vous voulez.

  5   M. Moskowitz (interprétation). - Est-ce qu'il y avait des

  6   lumières allumées dans cette pièce ?

  7   Témoin GG (interprétation). - Oui.

  8   M. Moskowitz (interprétation). - A quelle distance vous

  9   trouviez-vous de ces soldats alors que vous vous trouviez dans cette

 10   pièce ?

 11   Témoin GG (interprétation). - Nous étions au coude à coude

 12   quasiment. C'est une pièce d'assez petite taille. Nous étions cinq en tout

 13   et puis il y avait ma mère et moi-même. Donc nous étions sept. Donc la

 14   pièce était pleine de monde.

 15   M. Moskowitz (interprétation). - Combien de temps d'après vous

 16   êtes-vous restés dans cette pièce avec ces soldats ce matin-là ?

 17   Témoin GG (interprétation). - Nous y avons passé cinq ou

 18   dix minutes à peu près, mais cela m'a paru une éternité.

 19   M. Moskowitz (interprétation). - Vous avez reconnu l'un

 20   quelconque de ces soldats  ?

 21   Témoin GG (interprétation). - Oui. J'ai reconnu Anto Furundzija.

 22   En effet, à un moment donné, un des soldats voulait que je sorte et que

 23   j'appelle mes voisins et à ce moment-là, je me suis retournée et j'ai

 24   reconnu Anto Furundzija. C'était un de mes anciens camarades d'école, donc

 25   je lui ai demandé si je pouvais mettre des chaussures puisque l'on me


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  1   demandait de sortir et puis je lui ai dit : "Mais enfin, qu'est-ce qui se

  2   passe ?" parce qu'il me connaissait bien et que je le connaissais bien moi

  3   aussi.

  4   M. Moskowitz (interprétation). - Est-ce qu'il vous a répondu

  5   quoi que ce soit lorsque vous lui avez demandé de mettre des chaussures ?

  6   Témoin GG (interprétation). - Il n'a rien dit.

  7   M. Moskowitz (interprétation). - Que portait-il ?

  8   Témoin GG (interprétation). - Il portait un uniforme de

  9   camouflage. Il portait l'insigne des Jokeris sur sa manche et il avait un

 10   trait de peinture noire sur chaque joue.

 11   M. Moskowitz (interprétation). - Est-ce que vous avez eu quelque

 12   difficulté que ce soit à reconnaître cet ancien camarade de classe,

 13   Anto Furundzija ?

 14   Témoin GG (interprétation). - Oui.

 15   M. Moskowitz (interprétation). - Vous a-t-il été difficile de

 16   reconnaître cet ancien camarade de classe Anto Furundzija ?

 17   Témoin GG (interprétation). - Je l'ai reconnu tout de suite sans

 18   aucun doute et je lui ai tout de suite adressé la parole.

 19   M. Moskowitz (interprétation). - Eh bien, je vais demander à ce

 20   que l'on fasse passer au témoin la pièce de l'accusation 249, s'il vous

 21   plaît.

 22   (L'huissier s'exécute.)

 23   Pourriez-vous nous dire quelle est la personne que nous voyons

 24   sur la photographie, pièce de l'accusation 249 ?

 25   Témoin GG (interprétation). - Il s'agit d'Anto Furundzija.


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  1   M. Moskowitz (interprétation). - Et c'est bien l'homme que vous

  2   avez vu dans votre maison le 16 avril 1993 ?

  3   Témoin GG (interprétation). - Oui, mais il était un peu plus

  4   mince à l'époque.

  5   M. Moskowitz (interprétation). - Peut-on maintenant faire passer

  6   au témoin la pièce de l'accusation 45 ?

  7   (L'huissier s'exécute.)

  8   M. le Président (interprétation). - Oui, Maître Radovic ?

  9   M. Radovic (interprétation). - Monsieur le Président,

 10   l'accusation est en train de demander au témoin d'identifier certains

 11   individus. C'est ce qu'il a fait avec cette photographie. Mais il faut

 12   savoir que cet individu fait l'objet d'un autre procès qui est entendu par

 13   cette même Chambre de première instance, alors je ne pense pas qu'il

 14   faille procéder à ce type d'identification alors qu'il s'agit d'un

 15   individu contre lequel les poursuites sont engagées dans une autre

 16   affaire. Cette identification n'a rien à voir avec ce procès. Cet individu

 17   n'est pas un accusé dans cette affaire.

 18   M. le Président (interprétation). - Maître Radovic, vous avez

 19   raison de dire que cette personne se trouve au centre d'un procès qui est

 20   entendu par cette même Chambre de première instance, mais nous avons déjà

 21   tranché la question. Nous n'allons pas tenir compte des éléments de preuve

 22   versés dans le cadre de cette affaire lorsqu'il nous reviendra de tirer

 23   quelques conclusions que ce soit dans le cadre de l'autre procès.

 24   Tout ce qui sera dit ici à propos d'Anto Furundzija ne sera

 25   absolument pas pris en compte dans le cadre de cet autre procès. Nous


Page 4137

  1   respectons ici les principes fondamentaux de la justice et notamment la

  2   question de l'équité d'un procès. Il est hors de question que nous

  3   prenions en compte dans une autre affaire des éléments de preuve versés

  4   dans ce procès-ci. Nous avons déjà tranché la question.

  5   M. Moskowitz (interprétation). - Donc peut-on faire passer au

  6   témoin la pièce 245 ? Témoin GG, est-ce que ce que nous voyons vous dit

  7   quelque chose ?

  8   Témoin GG (interprétation). - Oui. Il s'agit de l'emblème que

  9   portait Anto Furundzija.

 10   M. Moskowitz (interprétation). - Est-ce qu'Anto Furundzija

 11   portait une arme lorsqu'il se trouvait dans votre maison ce matin-là ?

 12   Témoin GG (interprétation). - Oui, je crois qu'il portait un

 13   fusil. En tout cas il y avait un long canon, son arme avait un long canon.

 14   M. Moskowitz (interprétation). - Il me semble que vous avez dit

 15   qu'à un moment donné un soldat vous a demandé de faire quelque chose. Que

 16   vous a-t-il demandé exactement ?

 17   Témoin GG (interprétation). - Il m'a demandé d'appeler mes

 18   voisins, les voisins qui vivaient à côté de ma maison, en face de ma

 19   maison. Ils ont demandé notamment s'il y avait des hommes parmi ces

 20   voisins. Moi j'ai dit : "Je ne sais pas".

 21   Je lui ai demandé de ne pas me faire sortir parce que je venais

 22   de me lever, que dehors il y avait des coups qui étaient tirés. Et à ce

 23   moment-là, l'autre soldat a dit : "Allez, sors" et ma mère et moi-même

 24   avons commencé à sortir. Mais ma mère ne voulait pas partir, elle voulait

 25   rester dans cette pièce où nous nous trouvions mais ils ont dit :


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  1   "Dehors".

  2   M. Moskowitz (interprétation). - Avant de quitter la maison,

  3   est-ce que vous avez vu des soldats utiliser un quelconque appareil de

  4   transmission ?

  5   Témoin GG (interprétation). - Au moment où je sortais, j'ai

  6   baissé les yeux. Je n'avais pas le droit de me retourner mais j'ai juste

  7   jeté un petit coup d'œil vers le bas et j'ai vu un soldat prendre un

  8   talkie-walkie ou quelque chose d'approchant et il a dit : "Tout se passe

  9   très bien, conformément au plan".

 10   M. Moskowitz (interprétation). - Et quand ce soldat a dit "Tout

 11   se passe conformément au plan", est-ce qu'il parlait dans l'un des

 12   talkies-walkies ou à l'un des autres soldats qui se trouvaient dans la

 13   pièce ?

 14   Témoin GG (interprétation). - Il prononçait ces mots dans le

 15   talkie-walkie.

 16   M. Moskowitz (interprétation). – Anto Furundzija était-il

 17   présent au moment où ces paroles ont été prononcées dans ce talkie-

 18   walkie ?

 19   Témoin GG (interprétation). - Oui.

 20   M. Moskowitz (interprétation). – Vous et votre mère vous êtes

 21   donc sorties de la maison suite aux ordres qui vous avaient été donnés par

 22   ces soldats. A ce moment-là, qu'avez-vous vu ou entendu ?

 23   Témoin GG (interprétation). - Nous nous trouvions juste devant

 24   la maison. Nous venions d'en sortir et l'un des soldats a monté les

 25   marches qui montaient au premier étage et il a jeté un coup d'œil en


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  1   direction de la maison (expurgée).

  2   M. Moskowitz (interprétation). - Monsieur le Président, il va

  3   nous falloir repasser à huis clos car j'ai un certain nombre de questions

  4   à poser au témoin qui exige une audience à huis clos.

  5   M. le Président (interprétation). – Très bien.

  6   M. le Président (interprétation). – Nous sommes maintenant à

  7   huis clos.

  8   Audience huis clos

  9  (expurgé)

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 12   Pages 4140 à 4155 - expurgées - audience à huis clos.

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 25   L'audience est levée à 13 heures.