Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   TRIBUNAL PENAL INTERNATIONAL   AFFAIRE N° IT-95-16-T

  2   POUR L'EX-YOUGOSLAVIE  

  3   Mardi 16 Mars 1999

  4   L'audience est ouverte à 9 heures.

  5   (Le témoin est introduit dans le prétoire.)

  6   Mme Ameerali (interprétation). - Bonjour Monsieur le Président.

  7   L'affaire IT-95-16-T, le Procureur contre Zoran Kupreskic,

  8   Mirjan Kupreskic, Vlatko Kupreskic, Drago Josipovic, Dragan Papic,

  9   Vladimir Santic.

 10   M. le Président (interprétation). – Bonjour. Maître Susak ?

 11   M. Susak (interprétation). – Monsieur le Président, après avoir

 12   examiné un certain nombre de choses et après m'être consulté également

 13   avec mon collègue, je pense qu'il ne faut pas poser de questions, parce

 14   que je n'ai pas de questions d'une importance toute particulière à poser.

 15   M. le Président (interprétation). – Merci. Maître Terrier ?

 16   M. Terrier. – Bonjour, Monsieur le Juge. Bonjour Monsieur le

 17   témoin. Mon nom est Franck Terrier, je suis l'un des avocats de

 18   l'accusation et, comme cela vous a certainement été dit, je vais vous

 19   poser quelques questions à la suite de votre témoignage d'hier.

 20   Je voudrais tout d'abord savoir si vous avez tenu un journal des

 21   événements que vous avez vécus au cours de la guerre.

 22   M. Kupreskic (interprétation). - Non. Je n'ai pas tenu le

 23   journal.

 24   M. Terrier. – Je vous posais cette question, car vous nous avez

 25   donné hier beaucoup de précisions et vos souvenirs sont apparus


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  1   extrêmement détaillés.

  2   Ma première question se rapporte aux relations que vous

  3   entreteniez avec les Musulmans habitant à Ahmici. Vous nous avez dit, bien

  4   entendu, que ces relations étaient excellentes ; je voudrais savoir tout

  5   de même si elles n'ont pas évolué de manière défavorable dans le courant

  6   de l'année 1992 et le début de 1993 et, si c'est le cas dans l'affirmatif,

  7   je voudrais que vous nous expliquiez pour quelles raisons cela s'est

  8   produit.

  9   M. Kupreskic (interprétation). - Il n'y avait pas de dégradation

 10   des relations avec des amis avec lesquels j'étais en très bons termes,

 11   notamment avec les témoins de mon mariage, avec mes premiers voisins que

 12   je rencontrais régulièrement et avec lesquels j'avais l'occasion, de temps

 13   à autre, de prendre une boisson dans un café.

 14   M. Terrier. – Est-ce que la construction de la mosquée basse à

 15   Ahmici, la mosquée avec le minaret, en 1990 peut-être, sauf erreur de ma

 16   part, n'a pas provoqué des discussions, n'a pas modifié le climat qui

 17   régnait entre les communautés à Ahmici ?

 18   M. Kupreskic (interprétation). - Je ne le dirais pas et ceci, à

 19   cause du fait que de nombreux Croates ont aidé M. Hazim Ahmic, celui qui

 20   avait construit sa mosquée privée. Les Croates lui ont permis d'abord

 21   d'obtenir un certain nombre de papiers, dont il avait besoin pour

 22   construire cette mosquée, ensuite, il avait beaucoup de difficultés avec

 23   ses propres voisins d'Ahmici-le-haut, donc des Musulmans. Et même au

 24   moment où le minaret aurait dû être posé, il ne pouvait pas trouver des

 25   clous d'une dimension toute particulière, et c'est moi qui lui avait


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  1   acheté les clous à Kakanj. C'était une très grande quantité. C'est moi qui

  2   lui ai remis ces clous sous forme de donation, justement pour la

  3   construction de cette mosquée.

  4   Par la suite, je pourrais rajouter également qu'au moment où on

  5   avait inauguré cette mosquée, il y avait un très grand nombre

  6   d'invitations qui ont été envoyées aux Croates.

  7   M. Terrier. – Et vous même étiez présent à l'inauguration de

  8   cette mosquée ?

  9   M. Kupreskic (interprétation). - Oui, moi aussi j'y étais

 10   présent.

 11   M. Terrier. – Monsieur Kupreskic, vous avez dit hier que la

 12   population d'Ahmici avait doublé en 1993, au début de 1993 par l'afflux de

 13   réfugiés. Est-il exact de dire que ces réfugiés qui se sont installés à

 14   Ahmici en grand nombre étaient pour la plupart Musulmans ?

 15   M. Kupreskic (interprétation). - Au moment où Jajce est tombée,

 16   il y avait des Croates et des Musulmans qui étaient partis de cette ville.

 17   Tous sont restés entre une journée et deux journées dans le secteur de

 18   Vitez. Cependant, un très grand nombre de Croates, qui ont été chassés de

 19   leur foyer, ne souhaitaient pas rester à Vitez et c'est la raison pour

 20   laquelle ils ont poursuivi leur chemin en direction de Tomislavgrad et en

 21   Herzégovine. En revanche, la population musulmane est restée, je parle des

 22   réfugiés, dans le secteur de la Bosnie centrale.

 23   M. Terrier. -  Mais Monsieur Kupreskic, comment expliquer ce

 24   phénomène ? Les réfugiés croates ne s'installent pas dans la région de

 25   Vitez ni à Ahmici, vont vers Tomislavgrad ou plus loin encore vers


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  1   l'Herzégovine alors que les réfugiés musulmans, eux, s'installent en

  2   Bosnie centrale. Comment est-ce que vous l'expliquez ?

  3   M. Kupreskic (interprétation). - Je ne sais pas comment

  4   pourrais-je expliquer une telle attitude, mais à ce moment-là, moi, j'ai

  5   mis à la disposition des réfugiés les deux maisons dont les propriétaires

  6   étaient mes frères, car à cette époque-là encore le village Didak, dont

  7   j'ai parlé, n'était pas encore tombé, par conséquent les réfugiés

  8   n'étaient pas encore chassés. Ces réfugiés sont restés dans ces deux

  9   maisons entre deux et trois jours. Par la suite ils sont partis une fois

 10   de plus vers la direction de Tomislavgrad et plus loin en Herzégovine. Il

 11   y en a qui sont partis en Croatie, d'autres encore sont partis à

 12   l'étranger, en Allemagne, aux Pays-Bas et partout où les gens pouvaient

 13   trouver des amis ou des cousins pour s'y installer.

 14   M. Terrier. - Mais tout de même, dans la région de Bosnie

 15   centrale, dans la région de Vitez, de Busovaca, ces réfugiés pouvaient, et

 16   vous l'avez montré d'ailleurs, aisément trouver un endroit où se loger,

 17   pouvaient obtenir l'aide d'amis ou de membres de leur famille. Ce n'est

 18   pas cela qui les a conduits à aller plus loin.

 19   Est-ce que l'explication peut tenir dans le climat politique ou

 20   la composition ethnique de la Bosnie centrale à cette époque ? Est-ce que

 21   c'est là l'explication de ce souhait des réfugiés croates d'aller plus

 22   loin, de ne pas s'arrêter à Vitez ?

 23   M. Kupreskic (interprétation). - Malheureusement, je ne pourrai

 24   pas répondre à cette question, je ne sais pas.

 25   M. Terrier. - Monsieur Kupreskic, je voudrais maintenant que


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  1   nous évoquions vos activités professionnelles et en particulier les

  2   affaires dont vous aviez la charge à cette époque-là dans la région de

  3   Vitez. Tout d'abord, il me semble que vous exploitiez à Vitez même, dans

  4   la ville de Vitez, un restaurant. C'est bien exact ?

  5   M. Kupreskic (interprétation). - C'est exact.

  6   M. Terrier. - Lorsque vous avez quitté, avec vos enfants et

  7   votre épouse, Vitez pour l'Allemagne, quelles dispositions avez-vous

  8   prises pour l'exploitation de ce restaurant ?

  9   M. Kupreskic (interprétation). - Compte tenu du fait que mon

 10   beau-frère était également dans l'hôtellerie au moment où je m'apprêtais à

 11   partir en Allemagne, j'ai mis ce restaurant à la disposition de mon beau-

 12   frère. C'est lui qui était à la tête donc de ce restaurant jusqu'à la

 13   veille du conflit.

 14   M. Terrier. - Mais vous êtes vous-même resté le propriétaire de

 15   ce restaurant ?

 16   M. Kupreskic (interprétation). - Oui. Je suis resté le

 17   propriétaire du restaurant, mais je lui ai loué et il l'a pris en

 18   location.

 19   M. Terrier. - Ce restaurant existe-t-il toujours aujourd'hui ?

 20   M. Kupreskic (interprétation). - Oui, oui, il existe encore

 21   aujourd'hui et aujourd'hui, c'est mon épouse qui s'en occupe.

 22   M. Terrier. - Parlons maintenant de la société dont le nom était

 23   d'abord Stefani Bosna, puis ensuite Sutra à partir de novembre 1992. Nous

 24   avons un document qui établit ce changement de dénomination sociale, qui a

 25   été versé hier sous la cote D23/3. Je


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  1   voudrais que vous nous disiez pour quelle raison vous avez changé le nom

  2   de cette société ?

  3   M. Kupreskic (interprétation). - En ce qui concerne le

  4   changement de ma société, c'était une simple raison : j'ai cessé de

  5   travailler avec la Grèce et j'ai créé mon entreprise comme Stefani ; cette

  6   dénomination sociale tirait l'origine du fait que j'avais coopéré avec une

  7   entreprise correspondante en Grèce. Par la suite, j'ai cessé cette

  8   activité avec la Grèce et j'ai désigné l'entreprise selon un surnom qui a

  9   été connu à cette époque-là et que l'on donnait à notre famille.

 10   M. Terrier. – Vous voulez dire que la société grecque avec

 11   laquelle vous travailliez s'appelait elle-même Stefani ?

 12   M. Kupreskic (interprétation). - Oui. A Athènes, c'était

 13   Stefani Athènes, il y avait Stefani Ljubljana à la tête de laquelle se

 14   trouvait M. Stefan Duskan et moi ; j'avais créé l'entreprise

 15   Stefani Bosna.

 16   M. Terrier. – Je comprends. Est-ce que vous pouvez nous dire, en

 17   parlant de la société Sutra, quelle est sa forme juridique et quel rôle

 18   précisément y joue M. Vlatko Kupreskic ? Y jouait, à l'époque, M. Vlatko

 19   Kupreskic ?

 20   M. Kupreskic (interprétation). - Vlatko Kupreskic travaillait à

 21   SPS à Vitez. Il est de formation économiste et, compte tenu du fait que la

 22   société ne fonctionnait plus, il était au chômage technique. Moi, je

 23   voulais tout simplement profiter de ses capacités professionnelles, compte

 24   tenu qu'il est diplômé de sciences économiques. C'est la raison pour

 25   laquelle je l'ai engagé, je l'ai employé dans mon entreprise. Après un


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  1   certain nombre de missions que je lui avais confiées, je l'ai nommé

  2   copropriétaire de l'entreprise.

  3   M. Terrier. – Mais quelle est la forme juridique de cette

  4   entreprise ? S'agit-il d'une société anonyme dont la responsabilité est

  5   illimitée ? S’agit-il d'une société de personnes ? Je me réfère à des

  6   catégories de droit commercial qui, je crois, existent dans le droit

  7   croate.

  8   M. Kupreskic (interprétation). - Il s'agissait d'une entreprise

  9   à responsabilité

 10   illimitée.

 11   M. Terrier. – Le capital de cette société était réparti entre

 12   quelles personnes ?

 13   M. Kupreskic (interprétation). – Non, le capital était

 14   uniquement le mien.

 15   M. Terrier. – Est-ce qu'à un moment ou l'autre, avant avril 1993

 16   ou après avril 1993, M. Vlatko Kupreskic est devenu l'un des propriétaires

 17   de cette société ?

 18   M. Kupreskic (interprétation). - Il a été tout simplement

 19   copropriétaire. Au moment où il avait construit cette installation

 20   utilitaire pour les ventes en gros et cet entrepôt dont on a beaucoup

 21   parlé, à ce moment-là il est devenu copropriétaire.

 22   M. Terrier. – Quelle était l'activité principale de cette

 23   société ? Nous parlons de la période 1992, fin 1992, début 1993. Quelle

 24   était l'activité principale de Sutra ?

 25   M. Kupreskic (interprétation). - En général, il s'agissait des


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  1   ventes de marchandises telles que vivres, vêtements… vous voyez de tels

  2   types d'articles.

  3   M. Terrier. – Où est-ce que vous achetiez ces articles ?

  4   M. Kupreskic (interprétation). - Nous avons acheté ces produits

  5   en gros en Croatie, en Herzégovine et nous avons complété également les

  6   marchandises, parce que nous avons pu trouver un certain nombre de

  7   marchandises à Kiseljak.

  8   M. Terrier. – Et à qui revendiez vous ces marchandises ? De

  9   quelle manière ?

 10   M. Kupreskic (interprétation). - Nous avons vendu les

 11   marchandises à tous les acheteurs, aussi bien en gros qu'en détail.

 12   M. Terrier. – Est-ce qu'il est possible d'avoir une idée du

 13   volume de vos activités, c'est-à-dire peut-être de votre chiffre

 14   d'affaire ? Le montant global des achats que vous faisiez, par exemple,

 15   sur une année ? Est-ce que c'est possible ?

 16   M. Kupreskic (interprétation). - Peut-être entre 200 000 DM.

 17   M. Terrier. – Par an ?

 18   M. Kupreskic (interprétation). -  C’était en 1992, le chiffre

 19   d'affaire.

 20   M. Terrier. – En 1992 alors ? Est-ce que l'exploitation

 21   (inaudible)…

 22   M. Kupreskic (interprétation). - Oui, c'était en 1992.

 23   M. Terrier. – Est-ce qu'en 1992 l'exploitation de votre société

 24   a été bénéficiaire ?

 25   M. Kupreskic (interprétation). – Oui, oui.


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  1   M. Terrier. – Largement bénéficiaire ? Est-ce que vous pouvez

  2   évaluer le montant des bénéfices que vous avez réalisé en 1992 ?

  3   M. Kupreskic (interprétation). – Eh bien, c'était une période

  4   déjà lointaine, mais je ne pourrais pas vous répondre très exactement. De

  5   toute façon on était largement bénéficiaire.

  6   M. Terrier. – Quelle a été l'évolution de cette situation

  7   financière de la Sutra en 1993 ?

  8   M. Kupreskic (interprétation). – En 1993, nous avons poursuivi

  9   nos activités normalement jusqu'au 15 avril ou bien je dirai même jusqu'au

 10   16 avril, au moment où nous avons cessé nos activités. Jusqu'à ce moment-

 11   là, toutes les activités se développaient tout à fait normalement.

 12   Nous n'avons pas fait un bilan, la guerre a coupé toutes ces

 13   activités et ce que nous avons souhaité bien évidemment, c'est que toutes

 14   ces marchandises qui sont restées à notre disposition puissent être

 15   transformées en argent, donc que l'on écoule sur le marché cette

 16   marchandise, car en partie, l'armée nous a confisqué une quantité de la

 17   marchandise, et notamment des vivres et des cigarettes qui se trouvaient

 18   sur le stock.

 19   M. Terrier. - Est-ce qu'il est donc juste de dire que vous étiez

 20   en 92-93 un homme d'affaire prospère en Bosnie centrale ?

 21   M. Kupreskic (interprétation). - Oui, on pourrait le dire.

 22   M. Terrier. - Est-ce qu'il est exact que vous avez en 94, du

 23   moins rapidement après le conflit, retrouvé cette prospérité, que vous

 24   avez même développé largement vos activités commerciales et je me réfère

 25   en particulier à ce que vous avez dit hier quant à l'importation du


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  1   monde entier d'un nombre considérable de moutons ?

  2   M. Kupreskic (interprétation). - Oui. J'ai repris mes activités

  3   en avril 94 et je dois dire qu'à ce moment là, les prix étaient très très

  4   élevés, notamment en Bosnie centrale et, certes, tout le monde ne pouvait

  5   pas se déplacer pour aller chercher les marchandises. Nous sommes arrivés

  6   donc à ce niveau assez élevé auquel nous étions parvenus déjà avant la

  7   guerre.

  8   En ce qui concerne les marchandises que j'ai importées

  9   d'Australie en 96, c'était effectivement une quantité assez importante,

 10   parce que la communauté islamique était au contact direct avec la banque

 11   australienne qui avait une succursale à Vienne et c'est après que nous

 12   avons pu prendre, nous avons importé les moutons grâce donc à ce prêt que

 13   nous avons pu obtenir en passant par la communauté islamique.

 14   En ce qui concerne le transport, nous sommes passés par le

 15   chantier naval de Farez, de la compagnie Farez, et nous avons payé

 16   1 600 000 DM pour le transport de ces moutons.

 17   M. Terrier. - Nous pouvons par conséquent dire, si je me réfère

 18   au chiffre que vous venez de donner, que vous êtes aujourd'hui un homme

 19   d'affaire important.

 20   M. Kupreskic (interprétation). - C'est vrai.

 21   M. Terrier. - Revenons à la période 92-début 93. Je voudrais que

 22   vous nous expliquiez quelle relation vous aviez avec les autorités du HVO

 23   pour la conduite de vos affaires.

 24   M. Kupreskic (interprétation). - Je peux vous dire que je

 25   n'avais pas de très grands problèmes, car chaque fois quand j'en avais


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  1   besoin, quand j'avais besoin par exemple d'obtenir une autorisation pour

  2   voyager moi-même ou pour les marchandises à transporter, j'avais tout de

  3   suite obtenu les autorisations. Le fait même que j'étais quelqu'un qui

  4   avait proposé la meilleure offre des paquets divers en 92 en témoigne

  5   également. Je n'ai jamais eu de problème de ce genre-là.

  6   M. Terrier. - Nous pouvons dire par conséquent que vous

  7   entreteniez d'excellentes

  8   relations avec les autorités du HVO ?

  9   M. Kupreskic (interprétation). - Oui, oui, en très bons termes.

 10   M. Terrier. - Qui étaient les responsables du HVO avec lesquels

 11   vous étiez en contact ? Quel était leur nom ?

 12   M. Kupreskic (interprétation). - A cette époque-là, c'était

 13   M. Ivica Santic, c'est lui qui était le maire.

 14   M. Terrier. - Oui. Néanmoins, dans le domaine économique ou dans

 15   le domaine de l'approvisionnement, il y avait d'autres personnes qui

 16   étaient responsables ?

 17   M. Kupreskic (interprétation). - Oui. A cette époque-là, c'était

 18   Dragan… je ne peux plus me souvenir de son nom de famille.

 19   M. Terrier. - Peu importe. A cette époque-là, vous aviez des

 20   concurrents en Bosnie centrale ?

 21   M. Kupreskic (interprétation). - Oui.

 22   M. Terrier. - Comment se fait-il que vous parveniez si

 23   régulièrement et si facilement à supplanter vos concurrents auprès des

 24   autorités responsables de l'approvisionnement du HVO ?

 25   M. Kupreskic (interprétation). - Un certain nombre d'entreprises


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  1   avaient d'autres affaires et d'autres activités, moi je me suis occupé

  2   notamment de fournir les aliments, enfin les produits alimentaires sur le

  3   marché, j'avais d'autres activités, pas tellement. Il y avait d'autres

  4   compagnies, mais le marché, bien évidemment, fonctionnait selon l'offre et

  5   l'offre que j'avais était la meilleure, comme je l'ai dit.

  6   M. Terrier. - Est-ce que, pour être si bien considéré par les

  7   autorités du HVO, il n'y avait pas un certain nombre de conditions à

  8   remplir ?

  9   M. Kupreskic (interprétation). - Oui, il y avait des conditions

 10   à remplir. Tout premièrement, il fallait que les marchandises soient d'une

 11   bonne qualité, que l'on respecte

 12   toutes les conditions, que l'on se fasse rembourser, que les prix soient

 13   les meilleurs.

 14   M. Terrier. - Est-ce que vous vous rendiez souvent en dehors de

 15   Bosnie à cette époque-là ? Je parle toujours de la période deuxième

 16   semestre 92, début 1993.

 17   M. Kupreskic (interprétation). - Oui. Assez souvent.

 18   M. Terrier. - Où est-ce que vous alliez pour vos affaires ?

 19   M. Kupreskic (interprétation). - Le plus souvent, je me suis

 20   rendu en Croatie, en Herzégovine pour des affaires, compte tenu du fait

 21   que la grande quantité de marchandises provenait de ces deux endroits.

 22   M. Terrier. - Lorsque vous êtes revenu à Ahmici le

 23   19 octobre 1992, vous avez dit hier que vous reveniez de Split à ce

 24   moment-là et que vous avez découvert un barrage à l'entrée d'Ahmici. Est-

 25   ce que vous reveniez d'un voyage d'affaires de cette sorte ?


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  1   M. Kupreskic (interprétation). - Tout premièrement, à vous

  2   parler du 19 octobre : oui. Le 19 octobre, j'étais à Split et je revenais

  3   de Split.

  4   M. Terrier. - Est-ce que vous étiez seul au cours de ce voyage ?

  5   M. Kupreskic (interprétation). - Oui. J'étais seul.

  6   M. Terrier. - Est-ce qu'habituellement, lorsque vous vous

  7   rendiez en voyage d'affaires à Split ou en Croatie, vous étiez seul ?

  8   M. Kupreskic (interprétation). - Cela dépend. Des fois, j'étais

  9   seul, et par moment également Vlatko m'accompagnait.

 10   M. Terrier. - Pour quelle raison est-ce que Vlatko Kupreskic

 11   vous accompagnait ? Est-ce qu'il y avait une raison particulière pour

 12   cela ?

 13   M. Kupreskic (interprétation). - Oui. Il était diplômé de

 14   sciences économiques, il avait beaucoup d'amis avec lesquels il était

 15   encore en contact et qui travaillaient dans des entreprises différentes

 16   avec lesquelles nous avons contactés. C'est la raison pour laquelle

 17   également nous avons profité de ces amitiés pour pouvoir obtenir un

 18   certain nombre d'affaires.

 19   M. Terrier. - Est-ce que l'on peut avoir une idée de la

 20   fréquence de vos voyages en Croatie à cette époque ? Étaient-ils mensuels,

 21   bimensuels, hebdomadaires ?

 22   M. Kupreskic (interprétation). - En moyenne, une fois par

 23   semaine.

 24   M. Terrier. - Est-ce que vous avez déjà été condamné

 25   Monsieur Kupreskic ?


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  1   M. Kupreskic (interprétation). - Non.

  2   M. Terrier. - Vous ne vous souvenez pas avoir été condamné en

  3   décembre 1985 ?

  4   M. Kupreskic (interprétation). - Pardon. C'était une

  5   condamnation avec sursis. Excusez-moi. J'ai oublié.

  6   M. Terrier. - Pour quel motif cette condamnation a-t-elle été

  7   prononcée ?

  8   M. Kupreskic (interprétation). - C'était une sentence qui a été

  9   prononcée pour une raison qui était la suivante : il n'y avait pas

 10   d'essence à cette époque-là, moi à l'époque j'avais un restaurant qui se

 11   trouvait entre Zenica et Jepce et comme il y avait une très grande pénurie

 12   en essence et ma maison se trouvait à 50 kilomètres à peu près par rapport

 13   à ce restaurant, un ami m'avait offert 120 litres d'essence, qu'il m'avait

 14   donnés, car il disposait d'une citerne. J'ai donc pris cette essence,

 15   cette quantité d'essence ; ensuite, il y a la police qui est arrivée, il y

 16   avait quelqu'un qui m'avait dénoncé, nous étions au Tribunal à Zaridovici

 17   et c'est comme ça qu'une sentence a été prononcée.

 18   M. Terrier. - Une sentence a été prononcée pour vol. Est-ce

 19   exact ?

 20   M. Kupreskic (interprétation). - Oui. C'est comme ça.

 21   M. Terrier. - Venons en maintenant, Monsieur Kupreskic, aux

 22   circonstances dans lesquelles votre famille et vous-même...

 23   M. le Président (interprétation). - Maître Radovic ?

 24   M. Radovic (interprétation). - Monsieur le Président, le

 25   Procureur a probablement des données exactes et, bien évidemment, on parle


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  1   probablement d'un article très précis en fonction duquel la sentence a été

  2   prononcée, c'est la raison pour laquelle je vais demander au Procureur de

  3   nous citer l'article selon lequel la sentence a été prononcée, car selon

  4   ce que Kupreskic venait de nous dire, ce n'était pas le vol, mais c'est

  5   qu'il y avait eu une quantité d'essence qui a été mise à sa disposition,

  6   c'est-à-dire celui qui lui a mis à la disposition cette quantité d'essence

  7   était quelqu'un qui avait volé, pas lui. Par conséquent, c'est extrêmement

  8   important que le Procureur nous cite l'article en fonction duquel la

  9   sentence a été prononcée.

 10   M. le Président (interprétation). - Merci. Maître Par ?

 11   M. Par (interprétation). - Juste un petit quelque chose à propos

 12   de cette sentence. Tout ce qui a été prononcé comme sentence en 1985,

 13   elles ont été effacées car ce sont les sentences qui ne sont plus en

 14   vigueur, selon la législation en vigueur.

 15   M. le Président. - Merci. Peut-être pourriez-vous,

 16   Maître Terrier, nous donner les éléments essentiels de ce dossier parce

 17   qu'en principe, de l'arrêt de la sentence, etc., parce qu'en principe

 18   toute question concernant le dossier pénal d'un témoin n'est pas

 19   pertinente, sauf si la partie qui interroge le témoin nous dit pourquoi,

 20   quelle est la pertinence des questions concernant le dossier pénal.

 21   M. Terrier. - Monsieur le Président, en posant cette question au

 22   témoin -et le témoin, je pense, nous a éclairé suffisamment-, je

 23   souhaitais aider le Tribunal -peut-être l'ai-je fait maladroitement, si

 24   c'est le cas, je vous prie de m'en excuser- à évaluer la crédibilité de ce

 25   témoin. Le témoin nous a dit qu'effectivement il avait été condamné pour


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  1   vol en 1985, à une peine prononcée avec sursis, je n'y attache pas

  2   davantage d'importance que cela. Je veux bien dire à Me Radovic que

  3   l'article de loi sur la base duquel le témoin a été condamné est

  4   l'article, sauf erreur de ma part, 147 paragraphe 1…

  5   M. Radovic (interprétation). - Il avait tout simplement passé

  6   sous silence, il n'a pas volé. Il avait acheté de celui qui avait volé.

  7   C'est cela ce que je veux préciser.

  8   M. May (interprétation). – Avez-vous des documents à ce propos,

  9   Maître Terrier ? Il n'est pas nécessaire de le faire maintenant, mais en

 10   temps voulu, vous pourriez peut-être

 11   communiquer ces documents à la défense pour régler la question ?

 12   M. Terrier. – Entendu Monsieur le Juge.

 13   J'en viens maintenant, Monsieur le Témoin, au départ donc de

 14   votre famille et de vous-même en Allemagne en mars 1992. Vous nous avez

 15   dit que cette décision avait été prise pour assurer la sécurité de votre

 16   famille, de votre épouse et de vos enfants, de vos trois fils. Vous nous

 17   avez dit qu'en mars 1992, la situation en Bosnie centrale était

 18   particulièrement incertaine, qu'elle était menaçante et que vous aviez la

 19   possibilité d'obtenir pour votre famille un logement en Allemagne. C'est

 20   bien cela ?

 21   M. Kupreskic (interprétation). - Oui. C'est cela.

 22   M. Terrier. – Je voudrais que vous nous expliquiez pour quelles

 23   raisons il a été décidé à ce moment-là, un an plus tard en avril 1993, de

 24   ramener toute votre famille sur Ahmici ?

 25   M. Kupreskic (interprétation). - Essentiellement, j'étais ému,


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  1   parce que mon fils cadet m'avait dit qu'il en avait tellement assez de

  2   l'Allemagne que si je ne venais pas le chercher, il allait se jeter du

  3   troisième étage. Ça, je l'ai déjà déclaré. Est-ce qu'il y a quelque chose

  4   de plus important que les enfants ?

  5   M. Terrier. – Je ne conteste pas vos raisons bien entendu.

  6   Simplement, ma question est la suivante : votre épouse nous a dit, ici, en

  7   déposant il y a quelques temps, que si elle était rentrée, c'est parce que

  8   vous l'aviez assurée que la situation s'était arrangée. Qu'en avril 1993

  9   la situation était meilleure en Bosnie centrale qu'elle ne l'était en

 10   mars 1992. Qu'est-ce que vous pensez de cette déclaration de votre

 11   épouse ?

 12   M. Kupreskic (interprétation). - Je voudrais présenter les

 13   choses comme cela : à cette époque-là, la situation s'était vraiment

 14   tassée. En fait, il n'y avait pas de problèmes dans cette zone à

 15   l'exception de cette première escarmouche à Ahmici et ça, d'après moi,

 16   c'était déjà passé. En effet, beaucoup de gens s'étaient réconciliés les

 17   uns les autres ; on avait recommencé

 18   à mener une vie normale, les gens étaient à la terrasse des cafés et je me

 19   suis dit tout simplement qu'il ne devrait plus y avoir de problèmes.

 20   M. Terrier. – Lorsque vous êtes parti en mars 1992, quelles

 21   étaient vos intentions à vous-même ? Votre famille devait s'installer à

 22   Essen chez votre frère, mais pour vous-même, quelles étaient vos

 23   intentions ? Est-ce que vous aviez l'intention de rester en Allemagne ou

 24   de rentrer ?

 25   M. Kupreskic (interprétation). - J'avais l'intention de rester


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  1   en Allemagne quand je suis parti avec mes enfants, avec ma femme en

  2   mars 1992. Cependant, mon père m'avait parlé des menaces, on avait menacé

  3   que la maison soit détruite, que nos biens soient confisqués, c'est pour

  4   ça que je suis revenu.

  5   M. Terrier. – Mais vous nous avez dit en effet hier que vous

  6   étiez considéré comme un déserteur quand vous vous êtes rendu en

  7   Allemagne. Mais qui vous considérait comme un déserteur ?

  8   M. Kupreskic (interprétation). – Eh bien, les Croates bien

  9   entendu, je parle des officiels croates.

 10   M. Terrier. – Est-ce que cela ne signifie pas que tous les

 11   Croates, tous les citoyens croates de Bosnie centrale à cette époque-là

 12   étaient considérés comme mobilisés de fait et nous sommes en mars 1992,

 13   donc au tout début, avant même la création du HVO. Tous les citoyens

 14   croates étaient considérés comme mobilisés au service de la nation

 15   croate ?

 16   M. Kupreskic (interprétation). – Moi, je ne présenterais pas les

 17   choses comme cela. Je ne suis pas prêt à dire qu'ils étaient considérés

 18   comme mobilisés. Il s'agissait simplement de menaces qui avaient été

 19   faites par des particuliers et mon père en avait entendu parler. Il m'a

 20   appelé et m'a dit : "Il faut que tu reviennes". Il m'a dit : "Si tu ne

 21   reviens pas, tes biens risquent d'être confisqués et tu risques d'être

 22   considéré comme déserteur".

 23   M. Terrier. – Est-ce que vous avez le nom de ces particuliers

 24   qui ont proféré des

 25   menaces contre vous et vos biens ?


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  1   M. Kupreskic (interprétation). - Vous voyez, c'est mon père qui

  2   m'a dit ça au téléphone. Lui-même l'avait entendu dire par d'autres

  3   personnes, c'étaient des rumeurs de village. Alors vous donner des noms de

  4   particulier, je n'en sais rien, je n'étais pas là et lui n'était pas en

  5   mesure de me le dire.

  6   M. Terrier. - Cela signifie que ceux qui vous menaçaient ou qui

  7   menaçaient vos biens appartenaient à ce village ?

  8   M. Kupreskic (interprétation). - Non. Ils n'étaient pas du

  9   village. C'étaient des gens qui appartenaient aux autorités croates de

 10   l'époque.

 11   M. Terrier. - Lorsque vous êtes revenu d'Allemagne, au mois de

 12   mai 1992, sauf erreur de ma part, vous nous avez dit hier que vous aviez

 13   contribué à rapporter en Bosnie centrale de l'aide humanitaire, en

 14   particulier des médicaments. Je voudrais savoir par qui cette opération a-

 15   t-elle été financée ? Comment vous avez obtenu les autorisations

 16   nécessaires et éventuellement qui vous a mandaté pour cette mission ?

 17   M. Kupreskic (interprétation). - L'ensemble de l'aide

 18   humanitaire, les médicaments, les véhicules, tout ça, était organisé par

 19   un de mes parents, Vlado Susic, qui tient un restaurant à Feldbert, mais

 20   il m'a désigné pour l'aider, parce qu'il avait besoin de gens pour emmener

 21   les véhicules en Bosnie centrale. On était convenus qu'une partie des

 22   médicaments devrait être distribuée à Novi Travnik ; et deux véhicules (et

 23   je conduisais la Granada) devaient être aussi donnés à Novi Travnik et le

 24   reste à Vitez.

 25   M. Terrier. - Et comment était financée cette opération ?


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  1   M. Kupreskic (interprétation). - On a fait une collecte, c'est

  2   Vlado Susic qui a fait une collecte et les gens de Feldbert et des

  3   environs, les gens de Bosnie centrale, amenaient leur contribution, que ce

  4   soit en médicaments ou en argent, en numéraire. En tout cas, c'est ce

  5   qu'il m'avait dit. Il y avait trois personnes qui en étaient responsables.

  6   Si quelqu'un venait avec du numéraire, on utilisait cet argent pour

  7   acheter des véhicules, des médicaments. Si quelqu'un donnait des

  8   médicaments, on les renvoyait sur la Bosnie centrale.

  9   M. Terrier. - Venons en maintenant, Monsieur Kupreskic, à cette

 10   période qui suit le premier conflit, le conflit du mois d'octobre 1992.

 11   Vous nous avez parlé d'une réunion qui a suivi ce conflit, réunion au

 12   cours de laquelle le retour des Musulmans a été décidé. Vous nous avez dit

 13   hier qu'au cours de cette réunion, qu'à cette réunion, ont pris par

 14   Nenad Santic, Pero Skopljak et Zoran Kupreskic. Est-ce que cela signifie

 15   que ces trois personnes étaient, chacun à leur niveau et chacun dans leur

 16   sphère géographique, des dirigeants ?

 17   M. Kupreskic (interprétation). - Non, ce n'est pas comme ça que

 18   je vois les choses. Il y a une raison bien simple à cela. Fuad et

 19   Ano Sverbic avaient insisté pour que cette réunion se tienne. C'étaient

 20   d'excellents amis de Zoran et c'est un ingénieur mécanique, il travaillait

 21   dans la même société qu'eux. Donc ils ont appelé Zoran pour lui demander

 22   de tenir une réunion si possible avec les acteurs principaux de la

 23   municipalité et y faire venir certains représentants. Donc, ils devaient

 24   venir où que se tienne la réunion.

 25   Ainsi, la réunion s'est tenue sur la terrasse de ma maison. J'en


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  1   ai entendu parler lorsque ma tante m'a appelé à Vitez au restaurant où

  2   j'étais à cette époque-là, donc je suis arrivé à la réunion par la suite,

  3   tandis que Pero Skopljak qui représentait les Croates Vitez, c'était ce

  4   genre de représentants, et puis il y avait Karlso Sulejman, j'en ai parlé

  5   hier.

  6   M. Terrier. - Vous nous dites que Pero Skopljak représentait les

  7   Croates de Vitez, représentait les Croates de Ahmici, Santici et Pirici ?

  8   M. Kupreskic (interprétation). - Vous voyez, hier, j'ai

  9   également déclaré que Nenad Santic était celui qui avait créé le HDZ dans

 10   cette région et alors probablement, je ne suis pas sûr, mais j'imagine que

 11   c'était lui le représentant principal des Croates de la région, mais je

 12   n'en suis pas sûr. Zoran devait organiser la réunion à l'initiative de

 13   M. Berbic Fuad et des autres.

 14   M. Terrier. – Est-ce que vous pouvez nous dire quelles décisions

 15   ont été prises au cours de cette réunion ?

 16   M. Kupreskic (interprétation). - Ce que je sais, dans la mesure

 17   où je m'en souviens, des décisions ont été prises : essentiellement,

 18   chacun devait travailler avec ses propres gens dans la région où il vivait

 19   et, bien sûr, il s’agissait de ramener la situation au statu quo ante ;

 20   chacun devait parler avec les siens pour que la vie reprenne son cours de

 21   manière à ramener des patrouilles conjointes qui monteraient la garde à

 22   l'entrée du village. J'ai décidé d'être le premier représentant pour

 23   montrer que nous, ça ne nous posait pas de problèmes.

 24   M. Terrier. – Est-ce que vous vous souvenez d'une décision

 25   consistant à ordonner aux Musulmans de remettre leurs armes ?


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  1   M. Kupreskic (interprétation). - Non, pas à cette réunion chez

  2   moi. J'ai entendu dire que l'on avait parlé, lors d'une réunion

  3   précédente, de ce genre de choses. Je crois que c'était le premier ou le

  4   second jour après le début du conflit. Que certains quatre fusils devaient

  5   être rendus. Ils avaient été pris à l'armée lorsqu'il y avait eu une mise

  6   en garde à une barricade près du cimetière et un véhicule aussi avait été

  7   confisqué. Mais le véhicule, lui, a été rendu, pas les fusils. Ça, j'en ai

  8   entendu parler. Autrement dit, on n'en a pas parlé sur la terrasse de ma

  9   maison.

 10   M. Terrier. – Mais est-ce que vous avez été informé d'une

 11   décision consistant à demander ou sommer les Musulmans d'Ahmici et Santici

 12   de remettre leurs armes ?

 13   M. Kupreskic (interprétation). – J'en ai entendu parler, mais je

 14   n'étais pas à la réunion.

 15   M. Terrier. – Qu'est-ce que vous savez de cette réunion au cours

 16   de laquelle cette décision a été prise d'ordonner aux Musulmans de

 17   remettre leurs armes ?

 18   M. Kupreskic (interprétation). - Tout ce que j'en sais, je viens

 19   de vous le dire. C'est ce que j'avais entendu dire.

 20   M. Terrier. – Donc ce que vous savez, c'est que cette décision a

 21   été prise au cours d'une autre réunion, mais vous ne savez pas qui était

 22   présent ?

 23   M. Kupreskic (interprétation). - Non, je sais que ce genre de

 24   décision avait été prise, mais je ne sais vraiment pas qui assistait à

 25   cette réunion.


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  1   M. Terrier. – Parlons des patrouilles, d'abord conjointes puis

  2   ensuite séparées, qui ont été assurées pour la sécurité des habitants

  3   d'Ahmici, Santici et Pirici. Par qui étaient organisées ces patrouilles du

  4   côté croate ?

  5   M. Kupreskic (interprétation). -  Croyez-moi, je n'en sais rien.

  6   Quand je suis rentré d'Allemagne, ces patrouilles, ces gardes avaient déjà

  7   été mise en place. Tout ce qui me restait, c'était de m'y ajouter, parce

  8   qu'ils m'avaient plus ou moins traité en déserteur. Ils m'ont dit : "Tu

  9   dois te joindre à ces patrouilles", donc j'ai trouvé le temps et j'ai

 10   rempli ce devoir. Mais ça, c'était seulement le soir ; dans la journée, il

 11   n'y avait pas de patrouille au village, mais il y avait des gens en

 12   sentinelle à côté du radio qui était dans la cour de l'école.

 13   M. Terrier. – Est-ce que vous-même et vos amis croates, lorsque

 14   vous faisiez ces patrouilles, vous étiez en uniforme ?

 15   M. Kupreskic (interprétation). - Pas à cette époque.

 16   M. Terrier. – Est-ce que vous disposiez d'une arme ?

 17   M. Kupreskic (interprétation). - Je sais que seul Mirko Sakic

 18   avait un fusil à cette époque et Zdravko Vrebac lors du premier conflit.

 19   M. Terrier. – A quelle époque est-ce que vous avez revêtu un

 20   uniforme ?

 21   M. Kupreskic (interprétation). - J'ai endossé un uniforme de 10

 22   à 15 jours après le premier conflit.

 23   M. Terrier. – Revenons à 1992, fin 1992 début 1993, à ces

 24   patrouilles. Est-ce que vos cousins Vlatko Kupreskic, Mirjan Kupreskic et

 25   Zoran Kupreskic assuraient eux aussi ces patrouilles ?


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  1   M. Kupreskic (interprétation). - Zoran et Mirjan, oui. Pas

  2   Vlatko. Il n'était pas apte au service militaire en Yougoslavie non plus.

  3   M. Terrier. – Venons-en maintenant au mois d'avril 1993 et à ce

  4   voyage à Split. Je voudrais que… je demanderai à M. l'huissier de remettre

  5   au témoin la pièce de la défense D24/3.

  6   (L'huissier s'exécute.)

  7   M. Terrier. - Monsieur Kupreskic, ce document vous a été soumis

  8   hier, est-ce que vous en êtes le signataire ?

  9   M. Kupreskic (interprétation). - Non. C'est M. Vlatko Kupreskic

 10   qui l'a signé.

 11   M. Terrier. - Est-ce que vous pouvez nous l'expliquer, peut-être

 12   l'avez vous déjà fait hier, et dans ce cas je vous prie de m'en excuser,

 13   mais je n'ai pas très bien saisi l'explication de ce document, la raison

 14   d'être de ce document. Pourquoi a-t-il été établi ? A qui a-t-il été

 15   remis ?

 16   M. Kupreskic (interprétation). - Ce document. En fait, toute

 17   personne qui voyage au nom de son entreprise doit disposer d'un document

 18   de ce genre qui justifie cet objectif, son voyage d'affaires et les coûts

 19   afférents au voyage.

 20   M. Terrier. - Est-ce que c'est une règle qui avait été instaurée

 21   en raison des circonstances, c'est-à-dire une règle instaurée par le HVO,

 22   par la communauté croate, ou est-ce que c'est une règle qui existait

 23   durant l'ancienne Yougoslavie ?

 24   M. Kupreskic (interprétation). - C'était un règlement qui

 25   existait dans l'ancienne Yougoslavie et, à partir de ce document, on


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  1   établit un rapport montrant ce qui a été fait pendant ce voyage

  2   d'affaires, c'est-à-dire à quel accord on est arrivé et cela sert à

  3   justifier les charges encourues lors de ce voyage d'affaires.

  4   M. Terrier. - Est-ce que le HVO avait expressément maintenu ces

  5   règles de l'ancienne Yougoslavie ?

  6   M. Kupreskic (interprétation). - Je n'en sais rien. Je ne sais

  7   pas s'il respectait tous les règlements, mais en tout cas il en a repris

  8   certains.

  9   M. Terrier. - Ce document qui se trouve devant vous était remis,

 10   montrait une autorité. Quelle autorité ?

 11   M. Kupreskic (interprétation). - Non. Ce document ne précise pas

 12   de quelle autorité il s'agit. Là, il s'agit d'un document qui porte sur

 13   l'entreprise. C'est un document d'entreprise.

 14   M. Terrier. - J'ai bien compris que c'était un document

 15   d'entreprise, mais c'est un document qui n'est pas destiné à être remis à

 16   une autorité pour justifier par exemple d'une autorisation ?

 17   M. Kupreskic (interprétation). - C’est vrai, mais il est produit

 18   sur l'ensemble de l'année et on fait un bilan final à la fin de l'année. A

 19   ce moment-là, on l'envoie à l'inspectorat des revenus de la municipalité

 20   où l'entreprise est enregistrée.

 21   M. Terrier. - Le document D24/3 qui se trouve devant vous est la

 22   photocopie d'un original ?

 23   M. Kupreskic (interprétation). - Oui. C'est vrai.

 24   M. Terrier. - Est-ce que l'original n'a pas été envoyé à une

 25   administration comme vous venez de le dire ?


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  1   M. Kupreskic (interprétation). - Non, l'original n'est pas

  2   envoyé à un service administratif quelconque, il faut que nous gardions

  3   ceci dans nos dossiers, dans nos archives de façon que, s'il y a une

  4   inspection, s'il y a un inspecteur des services fiscaux qui vient sur

  5   place, il peut constater si tout est en ordre.

  6   M. Terrier. - Je comprends.

  7   M. Kupreskic (interprétation). - Le document demeure au sein de

  8   l'entreprise.

  9   M. Terrier. - Parlons maintenant de ce voyage de Vitez à Split.

 10   Pouvez-vous nous

 11   rappeler à quelle date vous êtes parti, à quelle heure vous êtes parti et

 12   à quelle heure vous êtes arrivé à Split ? Je ne vous demande pas bien

 13   entendu un récit de ce voyage -que vous nous avez déjà fait hier-, je vous

 14   demande simplement la date et les heures.

 15   M. Kupreskic (interprétation). - Nous sommes partis le 14 au

 16   matin, il devait être 6 heures du matin à peu près, et nous sommes arrivés

 17   à Split entre 13 et 14 heures.

 18   M. Terrier. - Qu'est-ce que vous avez fait lorsque vous êtes

 19   arrivé à Split ?

 20   M. Kupreskic (interprétation). - Nous sommes allés sur la place

 21   du marché, il y avait des amis à nous qui apportaient des marchandises en

 22   provenance directe de Turquie. Là, il était question de jeans et lorsque

 23   nous faisons de tels voyages, à cause de ma femme, nous profitons de

 24   l'occasion pour emporter la quantité de jeans qui est nécessaire et le

 25   plus possible de tailleurs pour que ceci soit emmené dans la voiture. Et


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  1   par la suite, nous sommes allés chercher ma femme à l'aéroport le soir.

  2   M. Terrier. - Est-ce que vous pouvez nous dire quelle est la

  3   nature de la transaction commerciale à laquelle vous avez procédé à ce

  4   moment-là et qui justifie le déplacement de Vlatko Kupreskic en votre

  5   compagnie ?

  6   M. Kupreskic (interprétation). - Nous étions ensemble dans une

  7   maison assez grande qui s'appelle que Koteks qui se trouve à Split ; je

  8   parle d'une firme. C'est là que nous discutions de l'acquisition d'une

  9   grande quantité de sel.

 10   M. Terrier. – Donc ce jour-là, à Split, vous n'avez pas

 11   seulement acheté des jeans, vous avez aussi négocié un marché portant sur

 12   des quantités importantes de sel ?

 13   M. Kupreskic (interprétation). - Oui, avec cette firme de Split

 14   Koteks.

 15   M. Terrier. – Avez-vous signé, établi des documents

 16   commerciaux ?

 17   M. Kupreskic (interprétation). - A cette occasion, nous avons

 18   négocié les termes du contrat, mais l'envoi à proprement parler s'est fait

 19   30 jours plus tard puisqu'il n'avait pas été possible de répondre à nos

 20   besoins sur-le-champ.

 21   M. Terrier. – Est-ce qu'il existe un seul document commercial

 22   établi par vous ou l'un de vos partenaires croates se référant à cette

 23   rencontre le 14 avril 1993 à Split, à laquelle Vlatko Kupreskic a

 24   participé ?

 25   M. Kupreskic (interprétation). - Vous savez, il y a longtemps de


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  1   cela, il ne m'est plus possible de dire s'il existe un tel document.

  2   M. Terrier. – Est-ce que ces jeans, ces textiles que vous avez

  3   achetés sur le marché, est-ce qu'ils ont été payés par une traite ou un

  4   chèque bancaire ?

  5   M. Kupreskic (interprétation). - Les jeans ont été achetés

  6   comptant, en liquide.

  7   M. Terrier. – De ce voyage commercial du 14 avril 1993 à Split,

  8   il ne reste donc aucune trace commerciale ou bancaire ?

  9   M. Kupreskic (interprétation). - Tout ce que nous avions avait

 10   été inscrit dans un registre que nous tenions et qui portait sur les

 11   marchés que nous pouvions passer. Nous l'avons fait par la suite, c'est

 12   avec Koteks que nous avons traité effectivement.

 13   M. Terrier. – Puis-je vous demander d'être aussi précis que

 14   possible pour ce qui concerne le nom, l'adresse de la compagnie où vous

 15   êtes allé négocier pour le marché de sel et le nom des personnes que vous

 16   avez rencontrées ?

 17   M. Kupreskic (interprétation). – Eh bien, je sais pour

 18   l'essentiel qu'il s'agissait de la firme Koteks de Split, mais je ne suis

 19   pas en mesure de vous dire aujourd'hui quel était le nom des personnes que

 20   nous avons rencontrées à cette occasion ; il faudrait que je vérifie ces

 21   noms dans mes notes étant donné le temps qui s'est écoulé depuis.

 22   M. Terrier. – Je voudrais prier Monsieur l'huissier de soumettre

 23   au témoin la pièce D25/3 qui a été versée hier au dossier du Tribunal.

 24   (L'huissier s'exécute.)

 25   Monsieur Kupreskic, ce document a été établi par le HVO, signé


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  1   par Marjan Skopljak. Est-ce qu'il est exact de dire que Marjan Skopljak

  2   était une personne que

  3   vous connaissiez très bien ?

  4   M. Kupreskic (interprétation). - Effectivement, c'est tout à

  5   fait exact.

  6   M. Terrier. – Il est exact de dire que ce document a été établi

  7   par le HVO à votre demande ?

  8   M. Kupreskic (interprétation). - C’est exact.

  9   M. Terrier. – Est-ce que cette demande a été formulée par écrit

 10   ou simplement verbalement ?

 11   M. Kupreskic (interprétation). - Par écrit.

 12   M. Terrier. – Quel type de document écrit avez-vous fourni pour

 13   obtenir cette autorisation ?

 14   M. Kupreskic (interprétation). - Nous avons rédigé une espèce de

 15   mémo, de mémorandum de l'entreprise par lequel nous demandions

 16   l'autorisation de nous déplacer en voyage d'affaire pour tel ou tel

 17   négoce. C'est alors qu'ils délivraient à partir de ce document que nous

 18   leur remettions, qu'ils délivraient le permis.

 19   M. Terrier. – Est-ce que, lorsque vous avez fait cette demande,

 20   vous avez précisé quelles devaient être les dates de votre voyage

 21   d'affaire ?

 22   M. Kupreskic (interprétation). - Oui. J'ai précisé ces dates

 23   dans ma requête écrite. Il s'agissait du 13. C'est le 13 avril en vue

 24   du 14. De manière générale, il était coutumier de demander une période

 25   plus longue, ce qui voulait dire que si vous rentriez plus tôt, ça ne


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  1   posait pas de problèmes.

  2   M. Terrier. – Est-ce que c'est vous qui avez fixé comme date de

  3   votre voyage la période allant du 14 avril au 24 avril ?

  4   M. Kupreskic (interprétation). – Eh bien, en règle générale,

  5   nous obtenions dix jours, dix journées pour de tels déplacements.

  6   M. Terrier. – Est-ce qu'il vous arrivait de faire des

  7   déplacements d'une dizaine de

  8   jours ?

  9   M. Kupreskic (interprétation). – Oui, oui. J'ai même passé des

 10   périodes de temps plus longues ; par exemple, quand j'ai rendu visite à ma

 11   famille en Allemagne. Là, je demandais trente jours pour ce déplacement.

 12   M. Terrier. – Donc ces dates qui figurent sur l'autorisation de

 13   voyage n'impliquent pas que vous ayez interrompu ou abrégé votre voyage

 14   pour rentrer plus vite qu'il n'était prévu ?

 15   M. Kupreskic (interprétation). - Il arrivait que nous utilisions

 16   un même permis à deux reprises. Supposons que si nous étions partis le 14

 17   pour la première fois, que nous étions rentrés le 15, cela voulait dire

 18   que le 20, nous pouvions repartir à nouveau et revenir avant le 24. Mais

 19   si nous n'étions pas rentrés avant le 24, ceci entraînait automatiquement

 20   des problèmes aux différents barrages routiers que nous devions franchir,

 21   tenus par le HVO. En l'absence de ce document, il était carrément

 22   impossible de se déplacer.

 23   M. Terrier. - Sur ce document qui figure devant vous, on peut

 24   voir un timbre, timbre humide sans doute, qui mentionne le franchissement

 25   d'une frontière à Metkovic le 14 avril 1993. Par qui a été apposé ce


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  1   timbre sur ce document ?

  2   M. Kupreskic (interprétation). - Eh bien ce timbre a été apposé

  3   par le policier qui se trouvait à ce poste frontière. Il arrivait qu'il

  4   n'examine même pas le document.

  5   M. Terrier. - Mais de quel policier s'agit-il ? Est-ce qu'il

  6   s'agit d'un policier du HVO ou est-ce qu'il s'agit d'un policier de la

  7   République de Croatie ?

  8   M. Kupreskic (interprétation). - Il s'agissait de policiers de

  9   la République de Croatie.

 10   M. Terrier. - Est-ce que ce timbre que l'on peut voir sur la

 11   pièce D25/3 établit dans quel sens la frontière a été franchie ?

 12   Est-ce que la frontière a été franchie le 14 avril de Bosnie

 13   vers la Croatie ou de Croatie vers la Bosnie  ?

 14   M. Kupreskic (interprétation). - De la Bosnie en direction de la

 15   Croatie en passant par Metkovic.

 16   M. Terrier. - Quand vous avez franchi au retour cette même

 17   frontière au même endroit, mais cette fois de Croatie vers la Bosnie, rien

 18   ne vous a été demandé ?

 19   M. Kupreskic (interprétation). - Eh bien, en premier lieu, nous

 20   n'avons pas franchi la frontière au même poste frontière, nous l'avons

 21   franchie à un autre endroit, à celui de Crveni Grm, en d'autres termes,

 22   sur la route qui va à Ljubuski. Et là, ils n'ont effectivement pas

 23   estampillé le document puisque nous quittions la Croatie.

 24   M. Terrier. - Au retour, vous n'avez pas franchi la frontière à

 25   Metkovic. C'est ce que j'avais cru comprendre.


Page 7695

  1   M. Kupreskic (interprétation). - Non.

  2   M. Terrier. - J'aimerais, et là je sollicite des instructions du

  3   Tribunal, nous avons, le bureau du Procureur a entendu M. Vlatko Kupreskic

  4   le 11 juin 1998 dans le cadre de l'article 63 du Règlement, c'est-à-dire à

  5   la demande expresse de M. Vlatko Kupreskic et en présence de ses avocats,

  6   Me Krajina, Me Par et Me Gradac.

  7   Cette rencontre a été enregistrée par vidéo et elle a donné lieu

  8   à une transcription de tout ce qui a été déclaré par M. Vlatko Kupreskic à

  9   cette occasion. Aussitôt, le jour même d'ailleurs, le 11 juin 1998, une

 10   copie des bandes vidéo a été remise aux avocats de M. Vlatko Kupreskic,

 11   comme il est prescrit dans le Règlement de procédure et de preuve.

 12   J'aimerais à cette occasion évoquer certaines des déclarations

 13   de M. Vlatko Kupreskic, faites le 11 juin 1998, et remettre à votre

 14   Tribunal les bandes vidéo de cette audition et la transcription de cette

 15   même audition. J'indique à votre Tribunal que, peu avant le début de cette

 16   audience, nous avons remis aux avocats qui n'en disposaient pas la

 17   transcription de cette d'audition, mais bien entendu, Me Par et

 18   Me Krajina, ici présents, en disposent depuis le mois de juin 1998.

 19   J'indique aussi à votre Tribunal que cette audition se rapporte

 20   à la situation de l'accusé Vlatko Kupreskic, mais ne se rapporte pas à la

 21   situation des autres accusés ici présents. Je m'en rapporte donc à la

 22   décision de votre Tribunal, en souhaitant pouvoir m'y référer sur quelques

 23   points très précis.

 24   M. le Président. - Vous avez cité l'article 64.

 25   M. Terrier. - 63, Monsieur le Président.


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  1   M. le Président. - 63, oui.

  2   (Les Juges se consultent sur le Siège.)

  3   M. Par (interprétation). - Monsieur le Président, Monsieur le

  4   Président !

  5   M. le Président (interprétation). - Maître Par, vous avez la

  6   parole.

  7   M. Par (interprétation). - Madame et Messieurs les Juges, nous

  8   sommes les défenseurs de Vlatko Kupreskic et nous pouvons apporter la

  9   confirmation de tout ce qui a été dit par notre éminent collègue de

 10   l'accusation, s'agissant de la question de l'audition et des documents et

 11   bandes vidéo y affairant que nous avons reçus à cette occasion. Nous ne

 12   contestons pas non plus qu'il s'agisse là d'éléments que le Procureur soit

 13   tout à fait justifié à utiliser. Toutefois, nous estimons qu'à ce stade de

 14   la procédure, il est inutile, il n'y a aucun intérêt à présenter des

 15   éléments apportés par Vlatko Kupreskic à l'égard de ce témoin.

 16   Nous proposons que ceci soit évoqué au moment où ce sera

 17   Vlatko Kupreskic qui fera sa déposition. On pourra ainsi peut-être émettre

 18   des doutes sur la crédibilité d'autres déclarations préalables de témoins,

 19   mais nous ne voyons aucun intérêt à avancer ce qu'aurait dit

 20   Vlatko Kupreskic à ce témoin-ci aujourd'hui, d'autant que le Procureur a

 21   toute latitude de poser des questions au témoin afin d'apporter la preuve

 22   de ce qu'il veut faire.

 23   Nous suggérons que le Tribunal n'autorise pas le Procureur à

 24   présenter ces pièces à cet instant. Le Procureur pourra pourtant les

 25   présenter au moment de la déposition de l'accusé.


Page 7697

  1   M. Terrier. – Monsieur le Président, très brièvement, je

  2   souhaite répondre à

  3   Me Par.

  4   Il me semble que dans les déclarations faites librement le

  5   11 juin 1998 par M. Vlatko Kupreskic, on peut relever un certain nombre de

  6   contradictions flagrantes avec ce qu’a déclaré le témoin devant ce

  7   Tribunal et cela à propos du voyage à Split, des circonstances de ce

  8   voyage. Je souhaite résoudre, et peut-être est-ce possible, ces

  9   contradictions. Peut-être n'est-ce pas le moment de déposer et remettre au

 10   dossier du Tribunal ce document, du moins je souhaite être autorisé à

 11   évoquer verbalement, en me référant à ce document sous le contrôle de

 12   Me Krajina et de Me Par, et rappeler ce qu'a dit à ce moment-là

 13   M. Vlatko Kupreskic pour obtenir le point de vue du témoin.

 14   Si nous laissons passer cette occasion, lorsque

 15   M. Vlatko Kupreskic témoignera -s'il témoigne- nous n'aurons plus ici le

 16   témoin pour obtenir son point de vue sur les déclarations faites par

 17   M. Vlatko Kupreskic.

 18   (Les Juges se consultent sur le Siège.)

 19   M. le Président. – Oui, nous considérons en effet que ce

 20   document ne devrait, à ce stade, ne devrait pas être versé au dossier,

 21   mais que d'autre part, là, vous avez raison, il peut être utile de faire

 22   ressortir ce que vous considérez des contradictions, mais dans ce cas,

 23   donc dans ce cadre limité, pourriez-vous poser des questions toutefois

 24   d'une manière neutre pour ainsi dire, c'est-à-dire sans faire référence

 25   aux déclarations de Vlatko Kupreskic, référence explicite. Vous comprenez


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  1   bien ce que je viens de dire ? C'est-à-dire vous avez sous les yeux le

  2   document, les avocats de la défense ont aussi ce document, vous pouvez

  3   faire allusion à ce document, vous pouvez vous baser sur ces documents

  4   pour poser des questions au témoin.

  5   Nous considérons que c'est plus approprié de ne pas dire "voilà

  6   ce que M. Vlatko Kupreskic a dit" à ce stade-là.

  7   M. Terrier. – Bien Monsieur le Président, je vais me conformer

  8   aux instructions du Tribunal.

  9   Monsieur le Témoin, ne peut-on pas penser que ce voyage de Vitez

 10   à Split et ensuite, de Split à Vitez, a duré non pas deux jours, mais

 11   trois jours et qu'en réalité, vous avez passé une nuit à Split et une

 12   seconde nuit chez cet ami dont vous avez parlé hier ?

 13   M. Kupreskic (interprétation). -  Non. En effet, ça ne s'est pas

 14   passé comme ça. Nous sommes bien arrivés à Split le premier jour, nous

 15   avons fait nos affaires, nous sommes allés à l'aéroport, nous y avons

 16   trouvé ma femme, il y a eu une heure de trajet en voiture, un peu moins,

 17   de Split à Baske Vode ; c'est là que nous avons passé la nuit, parce que

 18   nous étions chez un bon ami de la famille et nous avons poursuivi notre

 19   route le lendemain. Pourquoi serions-nous restés deux jours ?

 20   M. Terrier. – Ne peut-on pas penser, Monsieur le Témoin, pour ce

 21   qui concerne la partie commerciale de ce voyage, il s'agissait

 22   exclusivement d'acheter des produits textiles et qu'il n'a pas été

 23   question de négociations portant sur du sel ?

 24   M. Kupreskic (interprétation). – Bon, bien sûr, on pourrait le

 25   penser. Cependant, nous avons effectivement eu ces négociations, si vous


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  1   voulez, en parallèle, mais dans cette situation précise où Vlatko me

  2   tenait compagnie pour que je n'aie pas à voyager seul.

  3   M. Terrier. – Est-ce qu'il n'est pas logique de penser que,

  4   nécessairement, des documents à caractère commercial (contrats, traites ou

  5   des documents à caractère bancaire) ont été signés au cours de ce voyage

  6   d'affaire ?

  7   M. Kupreskic (interprétation). - On pourrait le penser, bien

  8   sûr, mais nous n'avons pas signé de contrat ce jour-là, ceci ne s'est fait

  9   que plus tard. En fait, au cours de ces discussions, ces négociations ,

 10   nous nous sommes contentés de nous mettre d'accord pour, en fait,

 11   négocier, passer le contrat un mois plus tard.

 12   M. Terrier. – Est-ce qu'il ne serait pas logique de penser, dans

 13   ces conditions, Monsieur le Témoin, qu'un accord -s'il y a eu accord ce

 14   jour là entre vous et vos partenaires commerciaux- nécessairement, une

 15   proposition de contrat y fasse référence, même s'il a été

 16   établi, si ce contrat a été établi un mois plus tard ?

 17   M. Kupreskic (interprétation). - Voyez, ce n'aurait pas été

 18   possible un mois plus tard, parce qu'il y avait un conflit et nous étions

 19   pratiquement dans l'impossibilité de quitter la région, ceci

 20   jusqu'en 1994. Mais à cette occasion-là, nous nous sommes mis d'accord de

 21   principe, nous sommes convenus qu'un mois plus tard, nous obtiendrons

 22   certaines quantités de sel qui viennent des marais salants de Pâques.

 23   M. Terrier. – Bien. Maintenant je ne me réfère plus aux

 24   documents dont nous avons parlé tout à l'heure, mais j'aimerais

 25   comprendre, Monsieur le Témoin, pour quelles raisons M. Vlatko Kupreskic


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  1   vous a accompagné, car, selon ce que vous dites, il semble qu'à la fois

  2   M. Vlatko Kupreskic était une sorte de négociateur que vous souhaitiez

  3   avoir à vos côtés et aussi qu'il s'agissait simplement -c'est ce que vous

  4   venez de dire je crois il y a quelques instants- de vous épargner le fait

  5   d'avoir à voyager seul.

  6   M. Kupreskic (interprétation). - Mais bien sûr. Tout d'abord, je

  7   partais en déplacement, en voyage, je voulais voir s'il était possible de

  8   conclure quelques affaires, d'acheter des jeans et en même temps d'aller

  9   chercher ma femme. Étant donné qu'à l'époque, il n'était pas conseillé de

 10   se déplacer seul, il y avait déjà eu des assassinats sur ce tronçon de la

 11   route entre Novi Travnik et Cebicic, des personnes avaient été arrêtés,

 12   stoppées et puis tuées, surtout si elles avaient de l'argent sur elles.

 13   M. Terrier. – En toute hypothèse, ce n'est pas pour négocier les

 14   jeans sur le marché de Split que vous avez emmené Vlatko Kupreskic avec

 15   vous ?

 16   M. Kupreskic (interprétation). - Non, pas tout à fait. Il avait

 17   des amis à Split. Ce sont ses amis qui avaient acheminé les jeans depuis

 18   la Turquie jusqu'à Split. Nous nous sommes contentés d'aller chercher ces

 19   jeans, c'est tout. Nous sommes passés par chez Koteks afin de voir les

 20   personnes de qui nous avions acheté des marchandises auparavant.

 21   M. Terrier. – Est-ce que vous disposez de l'original du document

 22   qui se trouve

 23   devant vous ? Le document coté D26/3 ?

 24   M. Kupreskic (interprétation). - Non. Je n'ai pas ce document,

 25   mais je pense qu'effectivement, mon avocat a une copie de ce document.


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  1   M. Terrier. – Est-ce qu'il n'est pas possible d'en avoir

  2   l'original ?

  3   M. Kupreskic (interprétation). - Je ne l'ai pas sur moi, ici

  4   même.

  5   M. Terrier. – Est-ce que vous en disposez chez vous à votre

  6   domicile en Bosnie ? A Vitez ?

  7   M. Kupreskic (interprétation). – Non, ce n'est pas possible que

  8   je l'aie, car il n'y a qu'un original à ce document et cet original, il

  9   est entre les mains d'un conseil de la défense.

 10   M. Terrier. – Il n'est pas perdu ? L'original n'est pas perdu ?

 11   Vous l'avez remis à un conseil ?

 12   M. Kupreskic (interprétation). - Non. Je ne pense pas qu'il ait

 13   été perdu. Il ne devrait pas être perdu, puisque je l'ai remis à la femme

 14   de Vlatko Kupreskic qui rassemblait ces documents à l'intention de

 15   M. Vlatko Kupreskic.

 16   Quant à savoir si ce document est toujours entre les mains de

 17   Ljubuska Kupreskic ou si c'est désormais le conseil de la défense qui

 18   l'a ? Ça je ne sais pas.

 19   M. Terrier. – Monsieur le Président, peut-être est-il temps de

 20   faire une brève interruption ?

 21   M. le Président. – Oui, d'accord.

 22   (L'audience, suspendue à 10 heures 30, est reprise à 11 heures).

 23   M. le Président (interprétation). - Maître Terrier, vous avez la

 24   parole.

 25   M. Terrier. - Merci Monsieur le Président. Monsieur le témoin,


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  1   vous nous avez expliqué hier, comme l'avait fait votre épouse un peu

  2   avant, qu'après l'aéroport vous vous êtes

  3   rendu chez un ami et vous avez passé à cet endroit la nuit du 14 au

  4   15 avril 1993. Hier, sur une question de Me Par, vous nous avez montré sur

  5   une carte l'endroit où vous avez passé la nuit, l'endroit où habite cet

  6   ami.

  7   Ma question est la suivante : est-ce qu'il existe une quelconque

  8   trace écrite de ce séjour que vous avez passé, vous, votre épouse et

  9   M. Vlatko Kupreskic chez cet ami ? Est-ce que vous avez payé une chambre

 10   par un chèque bancaire ou par un paiement par carte bleue ? Est-ce que

 11   vous avez annoncé votre arrivée par un fax ou tout autre moyen écrit qui

 12   constituerait une trace de ce séjour ? Est-ce que cela existe ?

 13   M. Kupreskic (interprétation). - Non, ça n'existe pas. Tout

 14   simplement, il s'agissait d'un très très bon ami, nous l'avons appelé

 15   quand nous étions à Split. Nous lui avons dit que nous allions passer

 16   cette nuit, pour passer chez lui, c'est tout et lui, en tant que notre

 17   ami, il ne nous a pas fait payer.

 18   M. Terrier. - J'en viens maintenant à votre retour le

 19   15 avril 1993 à Ahmici, Santici en fin d'après-midi. Vous nous avez dit

 20   que vous êtes arrivé vers 18 heures 30 et que vous vous êtes, à ce moment-

 21   là, séparé de Vlatko Kupreskic que vous avez déposé devant sa maison. Est-

 22   ce que vous lui avez donné des instructions pour la journée du lendemain,

 23   des instructions à caractère professionnel ?

 24   M. le Président (interprétation). - Maître Par, je vous en

 25   prie ?


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  1   M. Par (interprétation). - Monsieur le Président, je pense que

  2   le témoin avait parlé de 6 heures 30. De toute façon, nous pouvons le

  3   vérifier dans la transcription.

  4   M. Terrier. - Maître Par a tout à fait raison, j'ai dit

  5   d'ailleurs, sauf lapsus de ma part, j'ai dit 6 heures 30. Effectivement,

  6   c'est 6 heures 30.

  7   Ma question, Monsieur le témoin, est la suivante, je vous la

  8   répète : est-ce que vous avez donné à M. Vlatko Kupreskic, ce 15 avril au

  9   soir, des instructions professionnelles pour la journée du lendemain ?

 10   M. Kupreskic (interprétation). - Oui, déjà en cours de voyage

 11   depuis Novi Travnik jusqu'à Vitez, que nous allons laisser chez lui les

 12   jeans et que, le lendemain matin, lui-même, il allait se charger de

 13   transporter une quantité de ces jeans jusqu'à Travnik, jusqu'à sa sœur qui

 14   a une boutique et déposer les jeans chez elle. Nous sommes passés chez

 15   lui, nous avons déchargé la voiture et puis mon épouse et moi-même, nous

 16   avons poursuivi le chemin jusqu'à notre maison.

 17   M. Terrier. - Comment est-ce que vous expliquez que votre

 18   épouse, lorsqu'elle a témoigné et que je lui ai demandé ce que vous

 19   transportiez comme marchandises, a été incapable de le dire ? Elle a

 20   affirmé n'avoir pas vu ce que vous transportiez, alors que vous venez de

 21   dire qu'elle a assisté au déchargement.

 22   M. Kupreskic (interprétation). - Mais ce n'est pas mon épouse

 23   qui avait aidé pour décharger la voiture. Elle a vu sa cousine et puis

 24   avec l'épouse de Vlatko, elle est rentrée à la maison. Ce n'est pas cela

 25   qui l'intéressait. Par conséquent, c'est moi-même avec Vlatko qui avons


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  1   déchargé. Il n'y avait pas une quantité grande pour qu'elle y participe.

  2   M. Terrier. - Hier, vous avez relaté la soirée que vous avez

  3   passée à votre domicile, en compagnie d'amis et de personnes de votre

  4   famille et vous avez cité beaucoup des personnes qui sont venues rendre

  5   visite en particulier à votre épouse qui revenait d'Allemagne.

  6   Devant ce Tribunal, un autre témoin Mirko Sakic a fait des

  7   déclarations un peu différentes sur les personnes qui étaient présentes et

  8   sur les déclarations et les conversations qui ont eu lieu à ce moment-là.

  9   Il a indiqué en particulier que Zoran et Mirjan étaient présents, mais non

 10   leur épouse, et que Vlatko Kupreskic était présent. Qu'est-ce que vous en

 11   dites ?

 12   M. Kupreskic (interprétation). - Je ne sais pas ce que

 13   Mirko Sakic a dit. Ce que je sais, c'est que, ce soir-là, Zoran et Mirjan

 14   sont passés nous voir, leur épouse, mais l'épouse de Zoran et Zoran lui-

 15   même sont restés très peu de temps, parce qu'eux-mêmes ils avaient des

 16   invités chez eux. Mais de toute façon, les invités se relayaient, il y

 17   avait des cousins, des amis,

 18   juste pour nous saluer. Mon épouse et moi-même, nous avons discuté, nous

 19   avons plaisanté quelque peu et chacun est rentré chez lui par la suite. On

 20   a bien évidemment bu un petit verre et ensuite chacun est retourné chez

 21   soi.

 22   M. Terrier. - Vous avez dit hier que le 16 avril à 4 heures du

 23   matin quelqu'un est venu sonner à votre porte pour vous dire que les

 24   Musulmans allaient attaquer le village et qu'il convenait de trouver un

 25   refuge. Vous nous avez dit que cette personne était Dragan Vidovic. Est-ce


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  1   que vous pouvez nous expliquer qui était Dragan Vidovic ?

  2   M. Kupreskic (interprétation). - Dragan Vidovic était mon

  3   voisin, mon voisin qui habitait à 150 mètres par rapport à ma maison. Il a

  4   travaillé à cette époque-là à la protection civile et je ne peux pas

  5   savoir d'où il tenait cette information. Il est un fait que c'est lui qui

  6   m'a réveillé, moi-même et, ensuite, j'ai réveillé ma famille, les membres

  7   de ma famille.

  8   M. Terrier. – Est-ce que Dragan Vidovic faisait partie d'une

  9   unité militaire du HVO ?

 10   M. Kupreskic (interprétation). - A cette époque-là, non, il a

 11   été membre de la protection civile.

 12   M. Terrier. – Est-ce que, lorsqu'il s'est présenté à votre porte

 13   le 16 avril à 4 heures du matin, il était en uniforme ?

 14   M. Kupreskic (interprétation). - Je ne me souviens pas. Il

 15   faisait sombre encore. Il a frappé sur ma porte, il a dit de ne pas

 16   allumer les lumières et, de toute façon, je ne me souviens pas

 17   véritablement quels genres de vêtements il portait.

 18   M. Terrier. – Est-ce que vous vous souvenez s'il portait une

 19   arme ?

 20   M. Kupreskic (interprétation). - Non, ça je n'ai pas vu. J'ai

 21   dit que, tout de suite, il nous a suggéré de rester dans le noir, enfin de

 22   ne pas allumer les lumières.

 23   M. Terrier. – Lorsque vous avez quitté votre maison, votre

 24   épouse, vos trois fils et vous-même pour rejoindre l'abri qui vous a été

 25   assigné, comment est-ce que vous étiez habillé ?


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  1   M. Kupreskic (interprétation). – Moi, je portais un vêtement

  2   civil.

  3   M. Terrier. – Est-ce que vous aviez une arme ?

  4   M. Kupreskic (interprétation). - Non. Non, à ce moment-là, je ne

  5   portais pas d'arme.

  6   M. Terrier. – Vous nous avez dit hier que vous avez conduit

  7   votre famille en direction de l'abri de Vrebac, mais que vous les avez

  8   laissés aller devant, à hauteur de la maison d'Ivica Vidovic et que vous

  9   êtes revenu sur vos pas en direction de votre maison. Comment est-ce que

 10   vous pouviez être sûr que votre famille serait accueillie à l'abri de

 11   Vrebac ? Qu'il y aurait, par exemple, suffisamment de places pour les

 12   abriter ?

 13   M. Kupreskic (interprétation). - Tout d'abord, je n'ai pas dit

 14   que je les ai laissés dans la maison d'Ivica Vidovic, mais je les ai

 15   laissés à côté de la maison d'Ivica Vidovic, car ils ont poursuivi la

 16   route en direction de la maison de Jozo Vrebac. Nous étions en liens de

 17   parenté avec Jozo Vrebac également ; il était témoin de mon mariage. Par

 18   conséquent, je ne me posais la question s'il y aurait de la place ou pas.

 19   J'étais un petit peu perdu, je ne savais pas ce que je faisais.

 20   M. Terrier. – Comment est-ce que vous pouviez être sûr -puisque

 21   vous parliez d'une attaque des forces musulmanes sur le village- que

 22   l'abri de Vrebac serait une zone sûre ? Qu'aucun tir ne pourrait

 23   l'atteindre et que la zone dangereuse, c'était seulement la zone

 24   d'Ahmici ?

 25   M. Kupreskic (interprétation). - Je ne le savais pas, mais ce


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  1   que je sais, c'est que chaque fois, quand il y avait une alerte à ce

  2   moment-là, il s'agissait d'un abri qui était le plus important, le plus

  3   grand et tous se déplaçaient dans cette direction-là. Même avant que je

  4   retourne d'Allemagne, les gens le faisaient. J'en ai été averti et je

  5   savais que c'était un abri vers lequel il fallait se diriger.

  6   M. Terrier. – Et vous aviez, par conséquent, lorsque vous avez

  7   laissé devant la maison de M. Ivica Vidovic votre famille continuer vers

  8   cet abri, vous étiez certain que dans cet abri ils seraient non seulement

  9   accueillis, mais aussi pleinement en sécurité ?

 10   M. Kupreskic (interprétation). - Non. Je n'étais absolument pas

 11   en sécurité nulle part. A mon avis, en ce qui me concerne, je ne le

 12   pensais pas. Mais c'est Dragan qui m'avait suggéré, il m'avait dit de

 13   m'acheminer dans cette direction. Je ne sais pas si lui disposait

 14   d'informations plus complètes, ça je ne le sais pas.

 15   M. Terrier. – Vous nous avez dit hier que vous êtes donc revenu

 16   sur la route en direction de votre maison plus précisément pour aller

 17   rencontrer les réfugiés qui habitaient dans les maisons de vos frères et

 18   que, sur ce chemin, vous avez rencontré d'abord Zoran et sa famille,

 19   Mirjan et sa famille et qu'ensuite, à proximité de la maison de

 20   Mirko Sakic, vous avez rencontré des soldats. J'ai bien compris votre

 21   déposition hier ?

 22   M. Kupreskic (interprétation). - Au moment où je rentrais de la

 23   maison d'Ivica Vidovic, j'ai rencontré d'abord les parents de Zoran et

 24   Mirjan et ensuite, au niveau de la maison de Pudza, j'ai rencontré Zoran

 25   et Mirjan avec leur famille et Mirjan qui transportait sa belle-mère dans


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  1   une brouette. Devant la maison de Mirko Sakic, comme je marchais

  2   rapidement, j'ai rencontré ce groupe de soldats qui se dirigeait vers

  3   l'entrepôt. Mais au moment où moi-même j'ai emmené ma famille dans l'abri,

  4   j'avais appelé Marica qui se trouvait dans la maison de Branko et Manda

  5   qui se trouvait dans la maison de Josip, mon frère. C'est là où elles

  6   m'avaient dit toutes les deux qu'elles en avaient marre de ces alarmes qui

  7   étaient des fausses alarmes et qu'elles ne voulaient pas partir. Mais au

  8   moment où j'ai rencontré les soldats, je me suis dit que c'était beaucoup

  9   plus sérieux, que quelque chose pouvait leur arriver. C'est la raison pour

 10   laquelle j'ai couru vers chez elles pour leur demander de quitter quand

 11   même leurs maisons respectives et d'aller vers cet abri. Je ne sais pas si

 12   j'ai été clair maintenant.

 13   M. Terrier. – Monsieur le Témoin, revenons à ces soldats que

 14   vous rencontrez sur la route. Vous vous trouvez, eux et vous, sur la même

 15   route et vous allez dans la même direction ?

 16   M. Kupreskic (interprétation). - Oui. Parce qu'ils étaient

 17   devant moi et je les ai rattrapés.

 18   M. Terrier. – J'ai un peu de mal à comprendre comment il se fait

 19   que, dans ces conditions, vous ne les ayez pas croisés, ces mêmes soldats,

 20   au moment où vous conduisiez votre famille en direction de l'abri de

 21   Vrebac ?

 22   M. Kupreskic (interprétation). - Voyez-vous, pourquoi ? Parce

 23   qu'il y avait au moins cinq autres chemins qu'ils auraient pu emprunter en

 24   venant d'autres provenances, et pas, donc, prendre le chemin que j'avais

 25   pris. Ils auraient pu également venir en provenance de la route


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  1   principale, en provenance également de la maison de Niked Sakic, des

  2   maisons de Pudza ; ils auraient pu également traverser un chemin de la

  3   forêt entre la maison de Pudza et la maison de Mirko Sakic. Par

  4   conséquent, ils sont arrivés d'en haut et il n'est pas tout à fait

  5   obligatoire qu'ils passent le même chemin que moi j'avais traversé en

  6   prenant ma famille pour les emmener dans cet abri.

  7   M. Terrier. - Vous ne pensez pas logique de penser que ces

  8   soldats étaient certainement venus à bord d'un véhicule, que ce véhicule

  9   s'était arrêté sur la route ou à proximité de la route et en particulier

 10   peut-être à Pirici ou Zume ? Avez-vous jamais su où leur véhicule s'était

 11   arrêté ?

 12   M. Kupreskic (interprétation). - Je n'ai jamais su et je ne sais

 13   toujours pas comment ils sont arrivés, mais c'est la première fois où j'ai

 14   rencontré devant la maison de M. Sakic, ça je le sais.

 15   M. Terrier. - Combien étaient-ils à peu près ?

 16   M. Kupreskic (interprétation). - Il s'agissait d'un groupe d'une

 17   trentaine de soldats.

 18   M. Terrier. - Comment étaient-ils habillés selon votre

 19   souvenir ?

 20   M. Kupreskic (interprétation). - Au moment où je les ai

 21   rattrapés, il faisait encore sombre, mais je pouvais remarquer qu'il y en

 22   avait qui portaient des uniformes de camouflage et d'autres des uniformes

 23   noirs. Ils avaient des peintures noires sur le visage, ils portaient des

 24   bandes noires et puis des brassards bleu clair. Voilà.

 25   M. Terrier. - Est-ce que vous avez reconnu l'un ou l'autre


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  1   d'entre eux ?

  2   M. Kupreskic (interprétation). - Non. Ce n'était absolument pas

  3   possible de reconnaître qui que ce soit, car ils étaient vraiment

  4   peinturlurés de telle façon que c'était impossible de les reconnaître.

  5   M. Terrier. - Est-ce que vous leur avez parlé ? Est-ce que vous

  6   leur avez posé des questions sur ce qui se passait ?

  7   M. Terrier. - Non. Je n'ai pas parlé avec eux. Je suis parti

  8   tout de suite à gauche et eux, ils ont continué la route vers l'entrepôt.

  9   Ils ne se sont pas arrêtés et je ne pouvais pas leur parler.

 10   M. Terrier. - Vous avez dit hier qu'après cette rencontre avec

 11   les soldats, vous étiez revenu chez vous, qu'à ce moment-là, vous aviez

 12   appelé votre cousin Vlatko Kupreskic pour vous assurer qu'il rejoignait

 13   lui aussi un abri, que vous étiez allé ensuite dans la maison de votre

 14   frère Josip. Est-ce qu'à un moment ou l'autre de cette matinée par la

 15   suite, ou même de cette journée du 16 avril, vous avez aperçu ou rencontré

 16   Vlatko Kupreskic ?

 17   M. Kupreskic (interprétation). - Non, je n'ai plus rencontré

 18   Vlatko Kupreskic. Je l'ai entendu au téléphone une fois que je suis

 19   rentré, quand j'ai envoyé Mme Marica et Mme Manda et quand je suis allé

 20   vers ma tante pour lui demander, la supplier d'aller dans l'abri. C'est là

 21   où j'ai appelé Vlatko, je l'ai appelé au téléphone, j'ai dit que j'ai vu

 22   un groupe de soldats et que lui-même avec sa famille, il devait se cacher

 23   dans cet abri.

 24   M. Terrier. - Mais par la suite, vous ne l'avez pas vu et vous

 25   ne savez pas où il a


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  1   passé cette journée ?

  2   M. Kupreskic (interprétation). - Après, j'ai appris qu'il était

  3   parti dans la direction de l'entrepôt. Il n'y a que son père qui était

  4   resté, parce qu'il avait la hanche fracturée et il ne voulait pas se

  5   déplacer.

  6   M. Terrier. - Ma question, Monsieur le témoin, ne se rapporte

  7   pas à ce que vous avez appris, mais à ce que vous avez vu personnellement

  8   ce jour-là. Vous n'avez pas vu Vlatko Kupreskic ce jour-là ?

  9   M. Kupreskic (interprétation). - Exception faite les moments où

 10   je suis allé dans l'abri pour porter les denrées alimentaires, je l'ai

 11   rencontré. Je ne sais pas si c'était à 13 heures ou bien éventuellement à

 12   18 heures, je ne me souviens pas exactement de l'heure où je l'ai vu, mais

 13   je l'ai vu devant l'abri.

 14   M. Terrier. - Vous voulez dire l'abri de Vrebac ?

 15   M. Kupreskic (interprétation). - Oui, devant l'abri de Vrebac.

 16   Devant, oui.

 17   M. Terrier. - Devant l'abri de Vrebac. Vous avez vu

 18   Vlatko Kupreskic soit à 13 heures, soi à 18 heures ?

 19   M. Kupreskic (interprétation). - Oui. Ou bien à 13 heures ou

 20   18 heures, mais je pense que c'était plutôt 18 heures. Je pense que

 21   c'était déjà la nuit.

 22   M. Terrier. - Je voudrais que vous nous expliquiez pour quelle

 23   raison vous avez jugé nécessaire de rester là où vous êtes resté pendant

 24   la plus grande partie de cette journée, c'est-à-dire dans la chaufferie de

 25   la maison de votre frère Josip, alors que vous vous trouviez seul ? Vous


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  1   étiez proche des combats, si c'étaient des combats, et que tous vos amis,

  2   tous les membres de votre famille se trouvaient plus loin, soit dans la

  3   dépression, soit encore dans les différentes maisons de Zume. Est-ce que

  4   cet endroit où vous êtes resté était un endroit qui vous a paru

  5   particulièrement sûr ?

  6   M. Kupreskic (interprétation). - A ce moment-là, j'ai eu

  7   l'impression que c'était un

  8   endroit le plus sûr et même plus sûr que celui de l'abri. Mais de toute

  9   façon, ce n'était pas loin par rapport à ma maison, ce n'était pas loin

 10   non plus par rapport à la maison de ma tante, cette tante dont j'ai parlé

 11   qui était très âgée. Il y avait également des possibilités pour moi de me

 12   déplacer, pour prendre les vivres, pour les apporter à l'abri et puis je

 13   voyais également les maisons, je me disais que si jamais elles étaient

 14   incendiées, j'allais essayer de m'en occuper. Voilà, c'était la raison

 15   pour laquelle je suis resté à cet endroit.

 16   M. Terrier. - J'aimerais comprendre Monsieur Kupreskic, parce

 17   que vous nous dites que vous avez par exemple reçu la visite de deux

 18   soldats dans la matinée, assez tôt dans la matinée, deux soldats dont le

 19   comportement, avez-vous dit hier, vous a terrorisé, bien que cet endroit

 20   paraisse donc très exposé, peu sûr, vous restez là sans bouger et sans

 21   trouver nécessaire de rejoindre vos amis et votre famille dans un endroit

 22   plus à l'écart. Je ne comprends pas pourquoi vous êtes resté à cet endroit

 23   tout seul et, semble-t-il, en position d'être menacé par les soldats.

 24   M. Kupreskic (interprétation). – Ça me paraît que c'était tout à

 25   fait normal que j'aie eu peur à partir du moment où il y avait un soldat


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  1   qui avait pointé son fusil sur moi. Il m'avait demandé également qui

  2   j'étais. Bien évidemment que j'avais peur ! Mais j'ai sorti une bouteille

  3   à ces soldats, ils ont bu un coup et puis ils sont partis. Moi, je suis

  4   resté encore à cet endroit-là. Je ne peux pas véritablement vous dire,

  5   vous donner les précisions ; je ne sais pas pourquoi je suis resté là-bas,

  6   sauf des raisons que je vous ai énumérées tout à l'heure.

  7   M. Terrier. – Ces deux soldats auxquels vous avez servi du

  8   brandy, ils vous ont dit être membres de l'unité des Jokers. Est-ce que

  9   vous connaissiez cette unité ?

 10   M. Kupreskic (interprétation). - Oui. J'ai entendu dire qu'il y

 11   avait une unité appelée Jokeri, mais je ne savais pas trop de choses là-

 12   dessus. Je ne savais pas véritablement qu'il s'agissait d'une unité

 13   spéciale, mais ce matin-là, ils me l'ont dit.

 14   M. Terrier. – Est-ce que vous étiez déjà passé devant le

 15   bungalow avant ce

 16   16 avril 1993 ?

 17   M. Kupreskic (interprétation). - Oui. Je suis passé à côté de

 18   bungalows ; je savais qu'il y avait une unité également qui y était

 19   installée mais je ne pourrais même pas vous dire maintenant de quelle

 20   unité il s'agissait. Mais je savais qu'il y avait une armée qui était là-

 21   dedans. Enfin, je savais qu'il y avait des soldats là-dedans.

 22   M. Terrier. – Vous nous avez parlé hier de Nicolas Omazic.

 23   Comment, lorsque vous l'avez rencontré, était habillé Nicolas Omazic ?

 24   Etait-il en uniforme ou non ? Portait-il une arme ou non ?

 25   M. Kupreskic (interprétation). - Je ne me souviens pas comment


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  1   il était habillé. Je pense qu'il avait une arme, un fusil. Il était

  2   quelque peu ivre, il titubait, mais je ne pourrais pas vous dire ce qu'il

  3   portait.

  4   M. Terrier. – Il résulte d'un document qui a été versé au

  5   dossier du Tribunal au cours d'une précédente audience, sous la cote D354,

  6   P354 pardon, que ce Nikola Omazic était ce jour-là à Ahmici en service

  7   dans le cadre du HVO. Qu'est-ce que cela appelle comme commentaires de

  8   votre part ?

  9   M. Kupreskic (interprétation). - Je pense que ce n'est pas vrai.

 10   Je ne pense pas qu'il ait été en service ce jour-là, mais je sais que je

 11   l'ai rencontré la première fois à l'entrée du vallon, au moment où je suis

 12   allé demander quelques personnes pour m'aider, pour porter le cadavre de

 13   Mirjan Santic, dont le corps se trouvait déjà dans son garage. Nicolas,

 14   Zoran et Mirjan et Dragan Vidovic l'ont transporté plus loin et ensuite,

 15   je n'ai plus revu Nikola. Je ne peux pas vous dire où il se trouvait.

 16   M. Terrier. – Monsieur Kupreskic, un témoin qui a déposé devant

 17   ce Tribunal sous le pseudonyme "H" a déclaré avoir vu le 15 avril 1993, la

 18   veille donc des événements qui nous préoccupent, des soldats du HVO

 19   déposer devant votre maison -ou dans votre maison- des matériels à

 20   caractère militaire. Quel commentaire cela appelle-t-il de votre part ?

 21   M. Kupreskic (interprétation). - Il n'aurait pas pu être témoin

 22   de cela. En effet, il n'y avait pas d'équipement militaire chez moi. Il

 23   n'y avait que des camions qui amenaient des marchandises à la maison, des

 24   marchandises à vendre, c'était amené à l'entrepôt. Si, chez Vlatko, dans

 25   son entrepôt il n'y avait plus de place, on les amenait chez moi, donc, il


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  1   s'agissait d'un débordement de marchandises, d'un surplus de marchandises

  2   qui venait chez moi ; il n'y avait pas du tout d'équipement militaire chez

  3   moi.

  4   M. Terrier. – Est-ce que jamais vos activités commerciales ont

  5   pu porter sur des matériels à caractère militaire ? Je ne parle pas

  6   seulement de matériel d'armement, de systèmes d'armes, mais je parle aussi

  7   de matériel à caractère militaire, comme par exemple des uniformes ou tous

  8   ces objets dont peuvent avoir besoin les militaires qui sont en service.

  9   M. Kupreskic (interprétation). - A l'époque, il n'y avait rien

 10   d'intéressant. Par contre, à la fin de la guerre, à ce moment-là, on a

 11   reçu des offres, il y avait une demande d'uniformes militaires et c'est

 12   pour ça que ma société aussi a offert des uniformes militaires. Mais ça,

 13   c'était vers 1994 et 1995. Par exemple des couvertures ou d'autres

 14   survêtements.

 15   M. Terrier. – Par conséquent, vous n'avez jamais exercé une

 16   activité commerciale se rapportant, avant avril 1993, à des matériels

 17   spécifiquement militaires et en particulier, certainement pas à des

 18   armements ?

 19   M. Kupreskic (interprétation). - Jamais.

 20   M. Terrier. – Vous avez dit avoir vu, à plusieurs reprises au

 21   cours de cette journée, Zoran et Mirjan Kupreskic. Est-ce que vous vous

 22   souvenez comment l'un et l'autre étaient habillés ?

 23   M. Kupreskic (interprétation). – Eh bien, il me semble me

 24   souvenir que Mirjan avait un uniforme militaire et Zoran était habillé

 25   d'une chemise de camouflage qui était beaucoup trop grande pour lui ; cela


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  1   m'aurait mieux été. Je crois qu'il portait aussi des jeans, il me semble.

  2   M. le Président. – Je m'excuse, mais, en français, j'ai entendu

  3   dire "uniformes militaires". Peut-être que je me trompe. Mirjan portait un

  4   uniforme militaire ?

  5   M. Terrier. – Oui, vous avez raison, Monsieur le Président,

  6   c'est ce que j'ai entendu. Monsieur le Témoin...

  7   M. le Président. – Tandis que dans le texte, ici, on dit "civil

  8   uniform".

  9   M. Terrier. – Je vais reposer la question à Monsieur le Témoin.

 10   Monsieur le Témoin, est-ce que vous pouvez nous redire de quelle

 11   manière, selon votre souvenir, Mirjan Kupreskic était habillé ce

 12   16 avril ?

 13   M. Kupreskic (interprétation). - Avec des vêtements civils, mais

 14   j'ai peut-être parlé d'uniformes civils. En fait, il portait des vêtements

 15   civils. Il portait des vêtements civils complètement, tandis que Zoran,

 16   lui, avait une chemise de camouflage ainsi qu'un pantalon.

 17   M. Terrier. – Cette notion d'uniforme civil que vous employez,

 18   est-ce qu'elle existait à l'époque ?

 19   M. Kupreskic (interprétation). - Je voulais parler de vêtements

 20   civils, je me suis trompé de mots simplement. J'ai parlé d'uniformes

 21   civils, mais je me suis trompé, je voulais dire des vêtements civils.

 22   M. Terrier. – Est-ce que Zoran et Mirjan Kupreskic étaient armés

 23   lorsque vous les avez vus ce 16 avril ?

 24   M. Kupreskic (interprétation). - Oui. Zoran portait une carabine

 25   de chasse et Mirjan, un M48.


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  1   M. Terrier. – Hier, Monsieur le Témoin, on vous a montré un

  2   registre, un document et on vous a demandé d'authentifier ou non la

  3   signature de Mirjan Kupreskic. Sur ce document qui porte la cote D353

  4   -sauf erreur de ma part- vous avez affirmé que ce n'était pas la signature

  5   de Mirjan Kupreskic et vous nous avez dit en être parfaitement certain,

  6   car dans le cadre de ses activités professionnelles dans le cadre de la

  7   société Sutra, Mirjan Kupreskic

  8   signait beaucoup de documents.

  9   Ma question est la suivante : est-ce que vous avez apporté à

 10   La Haye, ou est-ce que vous pourriez transmettre à La Haye -peut-être par

 11   l'intermédiaire de l'avocat de Mirjan Kupreskic- un specimen de la

 12   signature de Mirjan Kupreskic ?

 13   M. Kupreskic (interprétation). - Je l'ai amené et je l'ai remis

 14   aux avocats.

 15   M. Terrier. – Est-ce que vous connaissez, vous êtes en mesure

 16   d'authentifier la signature de Zoran Kupreskic ?

 17   M. Kupreskic (interprétation). - Non, parce que je n'ai pas eu

 18   de relations particulières avec Zoran. Mais Mirjan m'a envoyé des

 19   documents tous les jours avec sa signature et c'est pour ça que je connais

 20   très bien sa signature.

 21   M. Terrier. – Vous avez dit hier que vous avez quitté Ahmici et

 22   que, maintenant, vous habitiez à Vitez et que, si vous avez déménagé,

 23   c'est largement lié à ces événements dont nous parlons, ces événements

 24   de 1993. Vous nous avez dit que, de la même manière, les familles de

 25   Mirjan et de Zoran Kupreskic habitaient à Vitez et pour les mêmes raisons


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  1   que vous, semble-t-il. Est-ce qu'il y a une raison pour laquelle

  2   M. Vlatko Kupreskic et sa famille sont restés, eux, vivre à Ahmici ?

  3   M. Kupreskic (interprétation). – Non, je ne sais vraiment pas

  4   pourquoi Zlatko est resté là-bas. Ça le regarde.

  5   M. Terrier. – Monsieur le Président, j'en ai terminé ; je n'ai

  6   pas d'autres questions à poser.

  7   M. le Président. - Merci.

  8   M. le Président (interprétation). – Maître Glumac ?

  9   Mme Glumac (interprétation). - Merci, Monsieur le Président.

 10   Monsieur Kupreskic, en rapport avec cette réunion que vous avez

 11   évoquée et qui a eu lieu sur la terrasse de votre maison après le premier

 12   conflit, c'est-à-dire en octobre 1992,

 13   pourriez-vous nous dire… Vous avez également déclaré que vous êtes au

 14   courant d'une décision concernant la restitution de fusils. De quelle

 15   décision s'agissait-il ? De combien de fusils ? Quels fusils ? De quelle

 16   décision s'agissait-il ?

 17   M. Kupreskic (interprétation). - Je crois déjà avoir répondu. On

 18   l'a évoqué à la réunion la restitution de ces fusils et la décision a été

 19   prise lors de réunions intérieures, une réunion. J'ai dit qu'il était

 20   question de quatre fusils et qu'un véhicule avait été confisqué à un

 21   contrôle. Je ne peux vraiment pas vous en dire davantage. C'est ce que

 22   j'ai entendu dire.

 23   Mme Glumac (interprétation). - Lors de cette réunion, est-ce

 24   qu'on a également décidé que des sentinelles seraient postées à l'entrée

 25   du village ?


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  1   M. Kupreskic (interprétation). – Oui, c'est cela. D'ailleurs je

  2   l'ai déjà dit.

  3   Mme Glumac (interprétation). - Vous souvenez-vous de l'évolution

  4   de la réunion ? Autrement dit, quelles décisions ont été prises et si on a

  5   évoqué des décisions officielles ? Quelle était l'atmosphère de la

  6   réunion ?

  7   M. Kupreskic (interprétation). - Eh bien, tout d'abord, je suis

  8   arrivé un petit peu en retard à la réunion, parce que j'étais à Vitez,

  9   comme je l'ai dit, et ma tante m'a téléphoné là-bas ; c'est pour ça que je

 10   suis arrivé en retard. Ils avaient déjà parlé de certaines questions, donc

 11   c'est seulement plus tard que je les ai rejoints. On avait quelques

 12   bouteilles, on a bu un peu et j'ai suggéré, le cas échéant, que je

 13   pourrais prendre mon poste, que je pouvais travailler enfin, me mettre en

 14   sentinelle. Donc il n'y avait pas beaucoup de problèmes là-dessus.

 15   Mme Glumac (interprétation). – Pourriez-vous nous redire qui

 16   représentait les Musulmans ?

 17   M. Kupreskic (interprétation). - Pour les Musulmans, il y avait

 18   Kalco Sulejman, le représentant de la municipalité.

 19   Mme Glumac (interprétation). - Et qui était M. Kalco Sulejman à

 20   la municipalité ?

 21   M. Kupreskic (interprétation). - Il était responsable, je crois,

 22   du service de la

 23   défense. Quelque chose comme ça. En tout cas, je crois à cette époque.

 24   Mme Glumac (interprétation). – Kalco Sulejman était là pour les

 25   Musulmans. Qui d'autre était là ? Il y avait d'autres Musulmans ?


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  1   M. Berbic Fuad était là ?

  2   M. Kupreskic (interprétation). – Berbic Fuad, Ahmic Mud et un

  3   autre militaire.

  4   Mme Glumac (interprétation). – Savez-vous à quel titre il était

  5   à cette réunion ? Est-ce qu'il était en uniforme ? Est-ce qu'il

  6   représentait l'armée ? Est-ce qu'il était là à un autre titre ?

  7   M. Kupreskic (interprétation). - Je ne saurais vous dire.

  8   Mme Glumac (interprétation). - Est-ce qu'il portait l'uniforme ?

  9   M. Kupreskic (interprétation). - Je ne sais plus.

 10   Mme Glumac (interprétation). -Comment savez-vous qu'il était

 11   militaire à cette époque ?

 12   M. Kupreskic (interprétation). - Je savais qu'il avait été dans

 13   un établissement de formation militaire dans le système du JNA et je crois

 14   que c'est pour ça qu'il représentait l'armée. J'essaie de me souvenir, je

 15   crois qu'il portait un uniforme.

 16   Mme Glumac (interprétation). - Savez-vous ce qu'il a fait

 17   d'autre ?

 18   M. Kupreskic (interprétation). - Non.

 19   Mme Glumac (interprétation). - Très bien. Dites-nous, Ahmici,

 20   c'était quelle municipalité ?

 21   M. Kupreskic (interprétation). - C'était la municipalité de

 22   Vitez.

 23   Mme Glumac (interprétation). - Quelles étaient les fonctions de

 24   Pero Skopljak ?

 25   M. Kupreskic (interprétation). - Je ne m'en souviens pas. Je


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  1   sais qu'il avait différentes fonctions. A un moment, il était chef de

  2   police, il était président du SDZ pendant une certaine période, mais à

  3   cette époque-là, je ne me souviens vraiment plus de quelle fonction il

  4   s'acquittait.

  5   Mme Glumac (interprétation). - Et faisait-il partie des

  6   autorités municipales ?

  7   M. Kupreskic (interprétation). - Je crois que oui.

  8   Mme Glumac (interprétation). - Cette autorité a-t-elle été créée

  9   pour Vitez, pour la municipalité ou pour la ville ?

 10   M. Kupreskic (interprétation). - Pour la municipalité de Vitez,

 11   ce qui est normal.

 12   Mme Glumac (interprétation). - Pourriez-vous nous montrer sur la

 13   carte la zone où les maisons de Jose Vrebac apparaissent ainsi que Vilovic

 14   et Milutin Vidovic ? De quelle partie s'agit-il ?

 15   (Le témoin s'exécute.)

 16   M. Kupreskic (interprétation). - Voici Jozo Vrebac et voici

 17   l'abri.

 18   Mme Glumac (interprétation). - Monsieur Kupreskic, pouvez-vous

 19   vous déplacer que l'on puisse voir la photo ?

 20   M. Kupreskic (interprétation). - Voici la maison de

 21   Milutin Jusevic et voici l'abri et la maison de Jabrica.

 22   Mme Glumac (interprétation). - Et comment appelle-t-on cette

 23   partie du village ?

 24   M. Kupreskic (interprétation). - On l'appelle Santici.

 25   Mme Glumac (interprétation). - Dites-nous : dans cette partie,


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  1   les maisons ici, combien y avait-il de Musulmans là-bas ?

  2   M. Kupreskic (interprétation). - Il y avait des Musulmans dans

  3   cette partie également.

  4   Mme Glumac (interprétation). - Non, ce que je demande, c'est

  5   pour la partie que vous avez montrée.

  6   M. Kupreskic (interprétation). - Vous voulez dire cette partie-

  7   là ?

  8   Mme Glumac (interprétation). - Oui.

  9   M. Kupreskic (interprétation). - Il n'y avait pas de maisons

 10   musulmanes, il y en avait seulement de l'autre côté du ruisseau. Je crois

 11   que là aussi c'était une maison musulmane aussi et puis par là, dans ce

 12   coin-là, Vilici.

 13   Mme Glumac (interprétation). - Dans cette zone d'ensemble,

 14   c'est-à-dire autour de la route, combien y a-t-il de maisons ?

 15   M. Kupreskic (interprétation). - Dans cette zone globale, cette

 16   partie-là, de l'ordre de cinq ou six maisons, pas plus.

 17   Mme Glumac (interprétation). - Qu'en est-il des maisons croates,

 18   combien y en avait-il ?

 19   M. Kupreskic (interprétation). - Il y en avait beaucoup plus. Je

 20   ne sais pas le chiffre précis, mais ça devait être de l'ordre d'au moins

 21   une cinquantaine de ménages.

 22   Mme Glumac (interprétation). - Merci. Vous pouvez vous rasseoir.

 23   Désolé, puisque vous êtes debout, pourriez-vous nous montrer un autre

 24   endroit ? L'endroit où vous avez vu Zoran et Mirjan Kupreskic.

 25   M. Kupreskic (interprétation). - A quoi faites-vous allusion ?


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  1   Mme Glumac (interprétation). - Je pense au matin du 16, quand il

  2   se rendait à l'abri.

  3   M. Kupreskic (interprétation). - C'était aux alentours de

  4   Pudzine Kuce dans cette partie-là.

  5   Mme Glumac (interprétation). - Vous avez également déclaré que

  6   les troupes que vous avez vues à la maison de Cekecic, que ces troupes

  7   auraient pu se rendre là par différents itinéraires. Quel itinéraire

  8   existait dans ce coin-là ?

  9   M. Kupreskic (interprétation). - Regardez la carte, vous voyez

 10   qu'il y a une route ici, ils auraient pu prendre cette route-là, ils

 11   auraient pu prendre la route par le haut. Il y a un chemin ici, il y a un

 12   chemin et puis une petite route ici, il y a une autre route là. Ils

 13   auraient pu utiliser n'importe lequel de ces circuits, ils auraient pu

 14   aussi venir de cette direction, par là, en utilisant cet route-là. Il

 15   s'agit de petits chemins qu'ils auraient tous pu utiliser.

 16   Mme Glumac (interprétation). - Merci. Vous avez vu dans quelle

 17   direction ils allaient. Où les avez-vous vus précisément ? Est-ce que

 18   c'était au premier endroit près de Nikosacico ?

 19   M. Kupreskic (interprétation). - Oui, la première fois que je

 20   les ai vus, c'était là et ils ont été dans la direction de l'entrepôt.

 21   Mme Glumac (interprétation). - Vous ne savez pas dans quelle

 22   direction, de quelle direction ils étaient venus ?

 23   M. Kupreskic (interprétation). - Non.

 24   Mme Glumac (interprétation). - Et vous ne pouvez pas nous le

 25   dire ?


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  1   M. Kupreskic (interprétation). - Non.

  2   Mme Glumac (interprétation). - Merci. Vous pouvez vous rasseoir.

  3   Dites-nous, s'il vous plaît, étiez-vous membre du HDZ à

  4   l'époque ?

  5   M. Kupreskic (interprétation). - Non.

  6   Mme Glumac (interprétation). - Savez-vous si Zoran et Mirjan

  7   étaient membres ?

  8   M. Kupreskic (interprétation). - Non, ils n'étaient certainement

  9   pas membres, Zoran en particulier. On a fait beaucoup pression sur Zoran

 10   pour qu'il rejoigne le HDZ, Slavko Milicevic surtout avait fait pression

 11   sur lui. Je crois qu'il est allé le voir une dizaine de fois au moins pour

 12   le convaincre de rejoindre le HDZ, mais Zoran n'était pas d'accord.

 13   Mme Glumac (interprétation). - Comment le savez-vous ? Comment

 14   savez-vous que Slavko Milicevic a demandé à Zoran de rejoindre le HDZ ?

 15   M. Kupreskic (interprétation). - Je le savais, parce que j'étais

 16   là à plusieurs occasions quand il l'a rattrapé et il lui avait dit qu'ils

 17   avaient besoin de quelqu'un comme lui, parce que c'était un intellectuel ;

 18   il était sorti de l'université, etc. A chaque fois, Zoran disait

 19   non, il n'acceptait pas.

 20   Mme Glumac (interprétation). – Êtes-vous au courant de ce que

 21   Mirjan Kupreskic, alors qu'il travaillait pour vous -c'est-à-dire après la

 22   guerre- a eu des contacts avec M. Emir Perenda dont vous avez parlé ? Et

 23   je crois que vous avez précisé que vous aviez effectué des transactions

 24   importantes pour la Communauté islamique en 1995.

 25   M. Kupreskic (interprétation). - Oui, Mirjan travaillait avec


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  1   moi tout le temps et, à de nombreuses reprises, il a emmené Emir de Vitez

  2   à Travnik chez lui, car Emir n'avait pas de véhicules propres. Donc, il

  3   l'emmenait constamment. Il emmenait des marchandises aux Musulmans avec

  4   des paiements à tempérament. Parfois, j'étais au courant, mais pas

  5   toujours. Par exemple, Mustafa Didic, que l'on appelait Dida, qui était

  6   dans un groupe folklorique avec lui et qui se lamentait en disant que sa

  7   famille ne pourrait pas survivre et il lui a parlé pendant deux jours et

  8   Mirjan a dit d'accord et jusqu'à présent, il n'a jamais payé ses

  9   marchandises.

 10   Mme Glumac (interprétation). - En ce qui concerne Emir Perenda,

 11   vous le connaissez bien ?

 12   M. Kupreskic (interprétation). – Oui, je peux dire que je le

 13   connaissais bien.

 14   Mme Glumac (interprétation). – Avez-vous parlé à Emir Perenda à

 15   propos d'Emir Kupreskic ?

 16   M. Kupreskic (interprétation). - Oui. J'ai parlé de Kupreskic

 17   avec Emir Perenda. Perenda n'a connu Mirjan Kupreskic qu'après la guerre ;

 18   il l'aimait bien en tant que personne.

 19   Mme Glumac (interprétation). – Savez-vous que, dès que cette

 20   mise en accusation a été effectuée, Emir Perenda et Mirjan Kupreskic se

 21   sont vus ?

 22   M. Kupreskic (interprétation). - Après l'acte d'accusation, oui.

 23   Mme Glumac (interprétation). - Après l'acte d'accusation

 24   de 1995, après que Mirjan Kupreskic se soit rendu compte.

 25   M. Kupreskic (interprétation). – Oui, ils se sont vus et Emir


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  1   était surpris

  2   d'apprendre que Mirjan Kupreskic avait été mis en accusation, parce qu'il

  3   le connaissait bien.

  4   Mme Glumac (interprétation). - Est-ce qu'Emir Perenda a parlé de

  5   Mirjan Kupreskic et de sa réaction à l'acte d'accusation ?

  6   M. Kupreskic (interprétation). - Oui. Il a dit qu'il était très

  7   touché. C'est normal, parce que, d'après moi, Mirjan n'aurait pas dû être

  8   accusé de ces chefs d'accusation.

  9   Mme Glumac (interprétation). - Pouvez-vous nous dire, en ce qui

 10   concerne ces activités de Zoran et de Mirjan Kupreskic après la guerre

 11   -vous nous avez dit que vous saviez que les deux avaient travaillé- est-ce

 12   que vous pouvez nous dire si Zoran a été à l'étranger avec le groupe

 13   folklorique ?

 14   M. Kupreskic (interprétation). – Oui, parce que ce groupe

 15   folklorique de Vitez était inimaginable sans Zoran et Mirjan.

 16   Mme Glumac (interprétation). - Un petit instant, s'il vous

 17   plaît.

 18   Encore une question en rapport avec les jeans que vous avez

 19   achetés au marché en 1992. Vous nous en avez parlé ?

 20   M. Kupreskic (interprétation). - Oui.

 21   Mme Glumac (interprétation). - Où les avez-vous achetés,

 22   acquis ? Est-ce que vous les avez achetés dans une boutique ou à un

 23   particulier ou à un marchand ambulant ?

 24   M. Kupreskic (interprétation). - A un particulier qui avait un

 25   étal au marché.


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  1   Mme Glumac (interprétation). - A cette époque, est-ce qu'il

  2   était habituel, pour quelqu'un tenant un étal au marché, d'être réglé par

  3   virement bancaire ? En particulier des gens qui venaient d'un autre État ?

  4   M. Kupreskic (interprétation). - Non. Aux marchés, aux étals, on

  5   payait tout en numéraire, comme aujourd'hui.

  6   Mme Glumac (interprétation). - En ce qui concerne les

  7   négociations que vous avez eues auprès de Koteks à Split…

  8   M. Kupreskic (interprétation). - Oui ?

  9   Mme Glumac (interprétation). - Vous avez dit que vous aviez reçu

 10   une sorte d'avis de mémo.

 11   M. Kupreskic (interprétation). - Oui. J'ai mon agenda, parce que

 12   j'utilise toujours cet agenda. Je ne l'ai jamais jeté, donc je garde cet

 13   agenda.

 14   Mme Glumac (interprétation). - Donc c'est une sorte de carnet où

 15   vous notez vos rendez-vous d'affaire ? Vos négociations d'affaire ? Si

 16   vous aviez passé une transaction ou non, etc ?

 17   M. Kupreskic (interprétation). - Oui.

 18   Mme Glumac (interprétation). - Donc vous ne l'avez pas jeté cet

 19   agenda ?

 20   M. Kupreskic (interprétation). - Je ne crois pas. Je crois que

 21   je dois l'avoir quelque part, mais je ne suis pas absolument sûr de

 22   pouvoir le trouver.

 23   Mme Glumac (interprétation). - Très bien. Je vous remercie,

 24   Monsieur le Président.

 25   M. le Président (interprétation). – Merci, Maître Glumac. Maître


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  1   Par ?

  2   M. Par (interprétation). - Je serai très bref pour apporter une

  3   précision en rapport avec la pièce D27/3. Je vais demander l'aide de

  4   l'huissier afin que la pièce que je viens de citer soit remise au témoin

  5   et soit placée sur le rétroprojecteur.

  6   (L'huissier s'exécute.)

  7   Monsieur Kupreskic, la pièce est en route. Dans l'attente de

  8   celle-ci, il apparaît, du contre-interrogatoire qu'il reste des doutes

  9   quand au passage, quand au poste frontière que vous avez franchi, lorsque

 10   vous avez franchi la frontière. Puisque vous avez indiqué l'itinéraire que

 11   vous avez emprunté de Vitez à Split ainsi que votre itinéraire de retour,

 12   je vais vous demander d'indiquer par une flèche la direction que vous avez

 13   prise et quelle route vous avez suivie pour parvenir à Split ?

 14   M. le Président (interprétation). - Pouvez-vous arrêter, s'il

 15   vous plaît ? Est-ce que ce document pourrait être remis aux Juges ?

 16   (L'huissier s'exécute.)

 17   (Les Juges se consultent sur le Siège).

 18   M. Par (interprétation). - Est-ce que je peux poursuivre,

 19   Monsieur le Président ?

 20   M. le Président (interprétation). - Je vous en prie.

 21   M. Par (interprétation). - Monsieur Kupreskic, je vais vous

 22   demander d'indiquer, apparemment vous avez indiqué par une flèche la

 23   direction que vous avez prise de Vitez à Split, je vous demanderais

 24   d'apposer le chiffre 1 à cette première direction. Puis je vois que vous

 25   avez déjà tracé une flèche pour le voyage de retour. Apposez-y le


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  1   chiffre 2.

  2   (Le témoin s’exécute.)

  3   Je vous remercie.

  4   Monsieur le Président, je n'ai plus de question à poser à ce

  5   témoin.

  6   M. le Président (interprétation). - Nous n'avons pas de question

  7   à vous poser M. Kupreskic, je vous remercie d'être venu déposer devant

  8   nous. Vous pouvez vous retirer.

  9   M. Kupreskic (interprétation). - Je vous remercie.

 10   M. le Président (interprétation). - Passons au témoin suivant.

 11   (Le témoin est reconduit hors du prétoire.)

 12   M. le Président (interprétation). - Bonjour, Madame Vidovic. Je

 13   vais vous demander de donner lecture de la déclaration solennelle.

 14   Mme Vidovic (interprétation). - Je déclare solennellement que je

 15   dirai la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 16   M. le Président (interprétation). - Je vous remercie. Veuillez

 17   vous asseoir. Maître Radovic ?

 18   M. Radovic (interprétation). - Monsieur le Président, Madame et

 19   Monsieur le Juge, pour l'interrogatoire principal, c'est Me Par également

 20   qui voulait pouvoir procéder et Me Krajina également, s'il vous plaît.

 21   Bonjour, Madame Vidovic.

 22   Mme Vidovic (interprétation). - Bonjour.

 23   M. Radovic (interprétation). - Est-ce que vous pouvez décliner

 24   votre identité, le nom, le prénom, la date de votre naissance, le nom de

 25   votre père ?


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  1   Mme Vidovic (interprétation). - Je m'appelle Ljuba Vidovic, je

  2   suis née en 1944, le 12 mai, de père Iva de Busovaca et je me suis mariée

  3   à Vitez.

  4   M. Radovic (interprétation). - Où est-ce que vous habitez

  5   actuellement ?

  6   Mme Vidovic (interprétation). - A Santici dans ma maison n° 73.

  7   M. Radovic (interprétation). - Dites-nous : en 1993, quand la

  8   guerre a commencé, est-ce que vous étiez mariée ou bien vous étiez veuve ?

  9   Mme Vidovic (interprétation). - J'étais à cette époque-là veuve.

 10   M. Radovic (interprétation). - Dites combien d'enfants aviez-

 11   vous ?

 12   Mme Vidovic (interprétation). - Quatre. Un fils et trois filles.

 13   M. Radovic (interprétation). - A l'époque où la guerre a

 14   commencé, vous avez vécu avec qui ?

 15   Mme Vidovic (interprétation). - Toute seule.

 16   M. Radovic (interprétation). - Pendant la guerre, nous avons

 17   entendu que vous aviez une famille nombreuse. Est-ce que vous pouvez nous

 18   dire également si dans votre famille, il y avait également des personnes

 19   qui ont été tuées ou blessées ?

 20   Mme Vidovic (interprétation). - Oui. Tout premièrement, c'est

 21   mon beau-frère, ensuite le fils d'un de mes beaux-frères, ensuite d'un

 22   deuxième et troisième beau-frère également. Les fils ont été tués.

 23   M. Radovic (interprétation). - Et la petite fille ?

 24   Mme Vidovic (interprétation). - Elle a perdu sa main.

 25   M. Radovic (interprétation). - Où ?


Page 7731

  1   Mme Vidovic (interprétation). - Au centre même de Vitez, elle a

  2   été blessée.

  3   M. Radovic (interprétation). - Est-ce qu'elle est en vie ?

  4   Mme Vidovic (interprétation). - Oui, elle est au Danemark.

  5   M. Radovic (interprétation). - Toute seule ?

  6   Mme Vidovic (interprétation). - Non, avec sa famille, avec son

  7   père, avec les trois sœurs et avec sa mère.

  8   M. Radovic (interprétation). - Est-ce que vous l'avez

  9   rencontrée ?

 10   Mme Vidovic (interprétation). - En 1995. En 1994, elle avait dit

 11   qu'elle souhaitait voir la grand-mère et puis il m'avait envoyé, son père,

 12   l'argent pour pouvoir payer mon billet d'aller et c'est comme ça que je

 13   suis allée voir ma petite fille.

 14   M. Radovic (interprétation). - Est-ce que maintenant elle a une

 15   prothèse ?

 16   Mme Vidovic (interprétation). - Oui, elle a une prothèse

 17   effectivement et maintenant elle peut pratiquement utiliser cette main.

 18   M. Radovic (interprétation). - Et maintenant, elle est au

 19   Danemark, elle y habite ? 

 20   Mme Vidovic (interprétation). - Oui, elle est ressortissante au

 21   Danemark.

 22   M. Radovic (interprétation). - Est-ce qu'à la veille de la

 23   guerre, vous avez travaillé, vous étiez maîtresse de maison ?

 24   Mme Vidovic (interprétation). - J'étais maîtresse de maison.

 25   M. Radovic (interprétation). - Qu'est-ce que vous avez fait


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  1   comme formation ?

  2   Mme Vidovic (interprétation). - L'enseignement obligatoire. 

  3   M. Radovic (interprétation). - C'est combien d'années de classe

  4   que vous avez faites ?

  5   Mme Vidovic (interprétation). - Cinq.

  6   M. Radovic (interprétation). - Est-ce que vous étiez intéressée

  7   pour ce qui se passait au niveau politique ?

  8   Mme Vidovic (interprétation). - Jamais.

  9   M. Radovic (interprétation). - Est-ce que vous savez quelque

 10   chose au sujet de ce premier conflit qui s'est passé entre les Musulmans

 11   et les Croates au mois d'octobre 1992 ?

 12   Mme Vidovic (interprétation). - Oui. Je me souviens que les

 13   Musulmans avaient dressé les barrages, je sais également qu'il y avait

 14   quelques petits incidents qui se sont produits à cet endroit-là, mais de

 15   toute façon c'était loin et puis je ne m'en souviens pas.

 16   M. Radovic (interprétation). - Est-ce que vous vous souvenez

 17   vous-même également d'un certain nombre de choses ? Vous-même ?

 18   Mme Vidovic (interprétation). - Oui, je me souviens que mon

 19   premier voisin est arrivé chez moi avec son épouse et avec ses enfants. Il

 20   avait peur et c'est la raison pour laquelle il s'est abrité chez moi. Il a

 21   passé une nuit chez moi.

 22   M. Radovic (interprétation). - C'était lors du premier conflit ?

 23   Mme Vidovic (interprétation). - Oui, lors du premier conflit.

 24   M. Radovic (interprétation). - Est-ce que vous savez quelque

 25   chose qui s'est passé entre le premier conflit et le début de la guerre,


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  1   le 16 avril 1993 ?

  2   Mme Vidovic (interprétation). - Il y avait des patrouilles qui

  3   ont été organisées, ceux qui voulaient s'assurer un peu plus, parce qu'il

  4   y avait également l'agression serbe, l'aviation que nous craignions.

  5   M. Radovic (interprétation). - Est-ce que vous savez un peu plus

  6   en détails ces questions-là ?

  7   Mme Vidovic (interprétation). - Non, parce que, de toute façon,

  8   je ne faisais pas la politique.

  9   M. Radovic (interprétation). - Vous souvenez-vous de ce que vous

 10   avez fait le 15 avril 1993, c'est-à-dire à la veille de la guerre ?

 11   Mme Vidovic (interprétation). - Qui s'en souviendrait ? Vous

 12   savez une ménagère, c'est une ménagère, elle pense à ce qu'elle va

 13   cuisiner à ses enfants le soir.

 14   M. Radovic (interprétation). - Eh bien, ce jour-là, avant que la

 15   guerre n'éclate, est-ce que ce jour était d'une quelconque façon différent

 16   de tous les autres jours qui s'étaient écoulés depuis ?

 17   Est-ce qu'il est possible de ménager une petite pause après que

 18   j'ai posé la question, à l'intention des interprètes.

 19   Je répète ma question, Madame : la veille du conflit, était-ce

 20   là un jour en quelque façon différent des autres jours ?

 21   Mme Vidovic (interprétation). - Pas du tout, c'était un jour

 22   comme les autres.

 23   M. Radovic (interprétation). - Est-ce que des voisins vous ont

 24   mise en garde, vous on dit que des jours plus dangereux allaient bientôt

 25   arriver ?


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  1   Mme Vidovic (interprétation). - Pas du tout.

  2   M. Radovic (interprétation). - Pourriez-vous nous dire ce qui

  3   s'est produit le 16 avril 1993 ?

  4   Mme Vidovic (interprétation). - Eh bien en 1993...

  5   M. Radovic (interprétation). - Mais avant de parler du 16 avril,

  6   je vais vous demander d'avoir l'amabilité de nous indiquer sur la carte où

  7   se trouve votre maison. Vous avez devant vous une photographie aérienne

  8   d'Ahmici, je vais vous demander de prendre le pointeur et de nous indiquer

  9   votre maison sur cette carte.

 10   (Le témoin s'exécute.)

 11   M. Radovic (interprétation). - Pourriez-vous vous déplacer un

 12   peu, Madame, vous écarter, vous mettre sur le côté de façon que les Juges

 13   puissent voir l'emplacement de votre maison ?

 14   Mme Vidovic (interprétation). - Voici la maison de

 15   Ante Vidocevic, voilà la maison de Ivo Vidovic , ici c'est la maison de

 16   Mico Ilic, la maison de Ramic Ramis, la maison de ma fille, la maison de

 17   Rero Poteljak et voici la mienne et voici la maison du fils de mon gendre,

 18   voici la maison de notre parent et voici la maison d'un autre de mes

 19   parents.

 20   M. Radovic (interprétation). - Vous venez de citer toute une

 21   série de maisons. Pourriez-vous nous redonner les noms et nous indiquer

 22   les maisons musulmanes ?

 23   Mme Vidovic (interprétation). - Voici la maison de Ramo Ramic,

 24   Reju Poluljak, voici la maison de Reju Poluljak.

 25   M. Radovic (interprétation). - Étaient-ce là vos seuls voisins


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  1   musulmans ?

  2   Mme Vidovic (interprétation). - Oui.

  3   M. Radovic (interprétation). - Je vous remercie, Madame,

  4   veuillez-vous asseoir.

  5   Vous venez d'indiquer votre maison, Madame, sur la carte. Est-ce

  6   que sur ce lotissement, il n'y avait qu'une maison ou est-ce qu'il y en

  7   avait deux ?

  8   Mme Vidovic (interprétation). - Ma maison ? Une seule maison.

  9   M. Radovic (interprétation). - Et où se trouvait la maison de

 10   votre fille ?

 11   Mme Vidovic (interprétation). - De l'autre côté de la route,

 12   plus loin au-delà de la maison de Ramo Ramic.

 13   M. Radovic (interprétation). - Pouviez-vous nous donner le nom ?

 14   Mme Vidovic (interprétation). - De ma fille ? Lydia Sula.

 15   M. Radovic (interprétation). - Et votre maison, Madame, votre

 16   ancienne maison ? Je vais ainsi la qualifier. En quel état était-elle ?

 17   Mme Vidovic (interprétation). - Eh bien, c'était une vieille

 18   bâtisse, il n'y avait pas de fondation en ciment, pas de dalle. J'ai donc

 19   emménagé dans la maison de ma fille.

 20   M. Radovic (interprétation). - Donc là il y avait des poutres en

 21   bois ?

 22   Mme Vidovic (interprétation). - Oui.

 23   M. Radovic (interprétation). - Et qu'en est-il de la maison de

 24   votre fille ?

 25   Mme Vidovic (interprétation). - C'était une maison à trois


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  1   étages avec du ciment armé, du béton armé.

  2   M. Radovic (interprétation). - Y avait-il des caves, un

  3   cellier ?

  4   Mme Vidovic (interprétation). - Non.

  5   M. Radovic (interprétation). - Quand avez-vous emménagé chez

  6   votre fille ?

  7   Mme Vidovic (interprétation). - A mon retour de l'abri.

  8   M. Radovic (interprétation). - Ce qui veut dire qu'au début de

  9   la guerre, vous habitiez dans votre maison et puis au retour de l'abri,

 10   pour avoir plus de sécurité, vous êtes allée habiter chez votre fille ?

 11   Mme Vidovic (interprétation). - Oui.

 12   M. Radovic (interprétation). - Où se trouvait votre fille ?

 13   Mme Vidovic (interprétation). - A Zenica.

 14   M. Radovic (interprétation). - A Zenica, je vois. Est-ce que

 15   votre fille venait de Zenica, est-ce qu'elle a passé toute la guerre à

 16   Zenica ?

 17   Mme Vidovic (interprétation). - Elle a passé toute la totalité

 18   de la guerre jusqu'au cessez-le-feu à Zenica.

 19   M. Radovic (interprétation). - Que s'est-il passé lors du

 20   premier jour des hostilités chez vous ?

 21   Mme Vidovic (interprétation). - Le matin, vers 4 heures du

 22   matin, un soldat est venu me réveiller. J'ai regardé ma montre et j'ai vu

 23   qu'il était 4 heures du matin, j'étais tout à fait terrifiée, je lui ai

 24   dit : "Mais pourquoi est-ce que vous venez ici, qui êtes vous ?". Il a

 25   dit : "Peu importe qui je suis, allez à l'abri, si vous avez du bétail,


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  1   occupez-vous en et puis allez-y." J'ai donc fait tout ce qui était

  2   nécessaire dans la maison, il n'y avait pas encore de coups de feu, je

  3   suis allé à l'abri.

  4   M. Radovic (interprétation). - Veuillez ralentir le débit,

  5   Madame.

  6   Le soldat qui vous a réveillée, à quoi ressemblait-il ? Qu'est-

  7   ce qui s'est passé ? Est-ce qu'il a frappé à la porte, à la fenêtre ?

  8   Mme Vidovic (interprétation). - Il a frappé à la porte.

  9   M. Radovic (interprétation). - Si j'ai bien compris, vous avez

 10   alors ouvert la porte.

 11   Mme Vidovic (interprétation). – Oui.

 12   M. Radovic (interprétation). - Et qu'avez-vous vu de l'autre

 13   côté de la porte ? Est-ce que vous avez allumé la lampe ?

 14   Mme Vidovic (interprétation). – Non. Non, il m'a dit de ne pas

 15   allumer, mais plutôt d'ouvrir la porte, de ne rien craindre et de me

 16   lever. Je suis sortie, je ne connaissais pas cet homme ; il était en

 17   treillis, il avait le visage peinturluré, je ne l'ai pas reconnu. Il m'a

 18   dit : "Occupez-vous de votre bétail et puis allez à l'abri".

 19   M. Radovic (interprétation). – Quel était l'aspect de ce

 20   soldat ?

 21   Mme Vidovic (interprétation). - Eh bien, il avait le visage

 22   couvert de peinture noire, il avait un uniforme de camouflage.

 23   M. Radovic (interprétation). – Et son visage, à quoi

 24   ressemblait-il ?

 25   Mme Vidovic (interprétation). – Eh bien, je vous ai dit qu'il


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  1   était grimé, qu'il avait

  2   de la peinture noire dessus.

  3   M. Radovic (interprétation). - Quelle était la couleur ?

  4   Mme Vidovic (interprétation). - Je ne me souviens plus

  5   exactement de la couleur.

  6   M. Radovic (interprétation). - Avez-vous remarqué si le témoin

  7   était armé ou pas ?

  8   Mme Vidovic (interprétation). - En toute franchise, il avait une

  9   arme, mais je ne m'y connais pas beaucoup en armes.

 10   M. Radovic (interprétation). – Est-ce qu'il était seul ou est-ce

 11   qu'il était accompagné d'un autre soldat ?

 12   Mme Vidovic (interprétation). - Il était seul.

 13   M. Radovic (interprétation). - Est-ce que c'était un homme de la

 14   région ou est-ce que vous ne le connaissiez pas du tout ?

 15   Mme Vidovic (interprétation). - Jamais je ne l'avais vu de ma

 16   vie, je ne le connaissais pas du tout cet homme-là.

 17   M. Radovic (interprétation). - Avez-vous, par la suite, appris

 18   qui il était ?

 19   Mme Vidovic (interprétation). – Non.

 20   M. Radovic (interprétation). - Ce qui revient à dire que vous ne

 21   connaissez toujours pas l'identité de ce soldat ? Vous n'avez jamais

 22   appris quelle était son identité ?

 23   Mme Vidovic (interprétation). – Jamais.

 24   M. Radovic (interprétation). – Monsieur le Président, nous en

 25   sommes maintenant à un stade où l'on parle de choses plus concrètes. Le


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  1   témoin ne va pas comparaître longtemps, nous pourrions peut-être

  2   poursuivre après la pause. Nous en terminerons de ce témoin au cours de la

  3   journée. Nous pourrions peut-être poursuivre après la pause et nous en

  4   terminerons de ce témoin au cours de la journée.

  5   (L'audience, suspendue à midi 15, est reprise à midi 30.)

  6   M. le Président (interprétation). – Maître Radovic, vous avez la

  7   parole.

  8   M. Radovic (interprétation). - Madame Vidovic, nous allons

  9   poursuivre. Je crois que nous en étions restés au moment où nous parlions

 10   de la première journée de cette guerre du 16 avril 93. Vous aviez été

 11   réveillée par un soldat que vous ne connaissiez pas. Est-ce bien exact ?

 12   Mme Vidovic (interprétation). - Oui.

 13   M. Radovic (interprétation). – Il vous a donc réveillée. Qu'avez

 14   -vous fait ?

 15   Mme Vidovic (interprétation). - Je suis allée à l'étable pour

 16   m'occuper de mon bétail et puis lorsque tout cela a été réglé, je me suis

 17   dirigée vers l'abri. Il devait être 5 heures et demi, 6 heures du matin.

 18   J'ai vu que beaucoup de personnes se dirigeaient vers cet abri, il y avait

 19   des femmes et des enfants.

 20   M. Radovic (interprétation). - Et de quel abri s'agissait-il ?

 21   Mme Vidovic (interprétation). - Il se trouvait à la maison de

 22   Jozo Vrebac, dans la maison de sa fille Jelena. C'était le seul abri de

 23   taille qu'il y avait et qui présentait une quelconque sécurité dans la

 24   région.

 25   M. Radovic (interprétation). - Pourquoi être allée à cet abri-là


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  1   plutôt qu'à un autre ?

  2   Mme Vidovic (interprétation). - Parce que c'était là qu'il y

  3   avait le plus de sécurité, il était enfoui dans le sol.

  4   M. Radovic (interprétation). - Est-ce que quelqu'un vous a dit

  5   d'aller à cet endroit ou est-ce que c'est vous qui avez tiré cette

  6   conclusion qu'il y avait là plus de sécurité qu'ailleurs ?

  7   Mme Vidovic (interprétation). - Nous sommes à l'abri lorsqu'il y

  8   avait le passage des avions.

  9   M. Radovic (interprétation). - Quel avion ?

 10   Mme Vidovic (interprétation). - Ceux de l'armée communiste

 11   yougoslave.

 12   M. Radovic (interprétation). - A quelle heure êtes-vous arrivée

 13   à cet abri ?

 14   Mme Vidovic (interprétation). - 5 heures et demi, 6 heures du

 15   matin, je ne sais plus exactement, je n'ai plus regardé ma montre.

 16   M. Radovic (interprétation). - Y avez-vous trouvé dans cet abri

 17   des personnes que vous connaissiez ?

 18   Mme Vidovic (interprétation). - Eh bien, je connaissais chacun

 19   des occupants, puisque c'étaient tous des gens du village.

 20   M. Radovic (interprétation). - J’aimerais obtenir davantage de

 21   renseignements concernant Zoran et Mirjan Kupreskic. Les avez-vous vus à

 22   cet endroit ?

 23   Mme Vidovic (interprétation). - Oui. Lorsqu'ils sont arrivés

 24   plus exactement, Mirjan et sa femme Ljuba, ainsi que leurs deux enfants

 25   sont venus. Puis Zoran a laissé sa femme et ses enfants à la maison de


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  1   Milutin Vidovic.

  2   M. Radovic (interprétation). - Comment savez-vous cela que Zoran

  3   a laissé sa femme et ses enfants chez Milutin Vidovic ?

  4   M. Radovic (interprétation). - J'étais sur le trottoir devant la

  5   maison et je l'ai vu.

  6   M. Radovic (interprétation). - Et là vous avez vu Zoran et sa

  7   famille qui sont entrés dans la maison de Milutin Vidovic, est-ce exact ?

  8   Mme Vidovic (interprétation). - Oui.

  9   M. Radovic (interprétation). - Quelle heure était-il à ce

 10   moment-là ?

 11   Mme Vidovic (interprétation). - Vers 6 heures, peu de temps

 12   avant 6 heures. Je ne me souviens plus exactement.

 13   M. Radovic (interprétation). - Pourriez-vous décrire les

 14   vêtements que portait Mirjan ?

 15   Mme Vidovic (interprétation). - Il portait des vêtements civils.

 16   M. Radovic (interprétation). - Qu'est-ce que ça veut dire pour

 17   vous des vêtements civils ?

 18   Mme Vidovic (interprétation). - Eh bien, il n'était pas habillé

 19   en soldat.

 20   M. Radovic (interprétation). - Et qu’en était-il de Zoran ?

 21   Mme Vidovic (interprétation). - Je l'ai vu au moment où il est

 22   venu rendre visite, voir sa femme et ses enfants. Il avait une espèce de

 23   veste en treillis bigarrée. Il avait une paire de jeans.

 24   M. Radovic (interprétation). - Quand vous parlez de veste

 25   bigarrée, est-ce que cela fait partie d'un uniforme militaire ou est-ce


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  1   une veste civile ?

  2   Mme Vidovic (interprétation). - Eh bien, c'est une veste de

  3   camouflage à plusieurs couleurs.

  4   M. Radovic (interprétation). - Donc est-ce que c'est là une

  5   partie d'uniforme ?

  6   Mme Vidovic (interprétation). - Oui.

  7   M. Radovic (interprétation). - Savez-vous combien de fois ce

  8   jour-là vous avez vu Zoran Kupreskic ?

  9   Mme Vidovic (interprétation). - Zoran et Mirjan sont venus voir

 10   leur femme et enfants respectifs, environ trois fois.

 11   M. Radovic (interprétation). - Vous dites trois fois, Madame.

 12   Vous parlez de cette première journée de la guerre ?

 13   Mme Vidovic (interprétation). - Oui.

 14   M. Radovic (interprétation). - Pourriez-vous nous donner un

 15   temps approximatif ? Quand les avez-vous vus ?

 16   Mme Vidovic (interprétation). - Vers 10 heures, 13 heures, peut-

 17   être 15 heures 30 environ.

 18   M. Radovic (interprétation). - Et est-ce que vous aviez une

 19   montre ? Est-ce que ces indications, vous les fournissez à partir de ces

 20   observations ?

 21   Mme Vidovic (interprétation). - Oui, à peu près.

 22   M. Radovic (interprétation). - Combien de temps avez-vous passé

 23   dans cet abri ?

 24   Mme Vidovic (interprétation). - Jusqu'à 19 heures ce soir-là.

 25   M. Radovic (interprétation). - Et qu'avez-vous fait à ce moment-


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  1   là ?

  2   Mme Vidovic (interprétation). - Eh bien, je suis allée chez ma

  3   fille.

  4   M. Radovic (interprétation). - Alors que vous étiez toujours

  5   dans cet abri, est-ce que vous avez entendu des coups de feu ?

  6   Mme Vidovic (interprétation). - Oui.

  7   M. Radovic (interprétation). - Avez-vous pu établir d'où

  8   venaient ces coups de feu ?

  9   Mme Vidovic (interprétation). - Qui sait. Vous savez quand on

 10   est dans un abri, on ne sait pas trop d'où viennent les tirs.

 11   M. Radovic (interprétation). - Pourriez-vous nous dire à quel

 12   moment approximatif ces tirs ont commencé ?

 13   Mme Vidovic (interprétation). - Vers 5 heures 30. Moi, je suis

 14   allée en courant entre les maisons en direction de cet abri.

 15   M. Radovic (interprétation). - Dès votre arrivée à cet abri, les

 16   coups de feu ont commencé à retentir ?

 17   Mme Vidovic (interprétation). - C’est exact.

 18   M. Radovic (interprétation). - Avez-vous vu des flammes ou des

 19   reflets de flamme ou quoi ce se soit, des lueurs qui vous ont fait

 20   conclure que les maisons étaient en feu ?

 21   Mme Vidovic (interprétation). - Non. On n'a pas vu de maisons en

 22   flammes, puisque nous étions de l'autre côté de la route.

 23   M. Radovic (interprétation). - Vous êtes donc rentrée chez vous,

 24   mais plus exactement à la maison de votre fille ?

 25   Mme Vidovic (interprétation). - Oui.


Page 7744

  1   M. Radovic (interprétation). - Donc, cela s'est passé aussi le

  2   premier jour ?

  3   Mme Vidovic (interprétation). - Oui.

  4   M. Radovic (interprétation). - Comment ce premier jour de la

  5   guerre avez-vous osé rentrer chez vous ?

  6   Mme Vidovic (interprétation). - Mais vous savez, j'ai des

  7   petits-enfants et il y avait beaucoup de femmes et d'enfants. Il y avait

  8   beaucoup de bruit.

  9   M. Radovic (interprétation). - Dans l'abri, vous voulez dire ?

 10   Mme Vidovic (interprétation). - Oui. Du coup, je suis allée chez

 11   ma fille, parce que c'était un endroit sûr. Je suis allée chez moi, je me

 12   suis occupée de mon bétail, j'ai vu Ramo Ramic qui était debout sur le

 13   seuil de sa porte.

 14   M. Radovic (interprétation). - Qui est-ce ?

 15   Mme Vidovic (interprétation). - C’est mon voisin.

 16   M. Radovic (interprétation). - Que s'est-il passé ?

 17   Mme Vidovic (interprétation). - Je lui ai demandé de venir à la

 18   maison de ma fille. Sa femme et son enfant étaient à Zenica et il a dit

 19   qu'il y avait six autres femmes et des enfants... et un enfant plus

 20   exactement, qu'ils pouvaient tous venir à la maison de ma fille. Ce qu'ils

 21   ont fait.

 22   M. Radovic (interprétation). - Que s'est-il alors passé ? Toutes

 23   ces personnes sont allées chez vous ? Est-ce que Ramo Ramic est croate ou

 24   musulman ?

 25   Mme Vidovic (interprétation). - Musulman.


Page 7745

  1   M. Radovic (interprétation). - Et qu’en est-il des cinq ou six

  2   personnes qui l'ont accompagné ?

  3   Mme Vidovic (interprétation). - Ce sont tous des Musulmans.

  4   M. Radovic (interprétation). - Donc ce sont tous des Musulmans.

  5   Je vous remercie, Madame. Ces personnes musulmanes ont donc passé un

  6   certain temps chez vous. Est-ce que des personnes les ont importunées

  7   d'une quelconque façon ?

  8   Mme Vidovic (interprétation). - Personne.

  9   M. Radovic (interprétation). - Est-ce que vous aviez peur de la

 10   présence de ces personnes chez vous ?

 11   Mme Vidovic (interprétation). - Non, personne ne les a embêtées.

 12   Tous nos voisins savaient que les Musulmans étaient chez moi.

 13   M. Radovic (interprétation). - Personne ne vous a posé de

 14   difficultés de ce fait-là ?

 15   Mme Vidovic (interprétation). -  Non, mais ce n'était pas une

 16   situation très facile.

 17   M. Radovic (interprétation). - Ceci s'est donc produit dans la

 18   soirée du 16 ou du 17 ?

 19   Mme Vidovic (interprétation). - Non, le 17. Ils sont venus dans

 20   la soirée du 16, mais ceci s'est produit le 17.

 21   M. Radovic (interprétation). - Et qu'est-il advenu des six

 22   Musulmans qui se trouvaient dans la maison de Ramo Ramic ?

 23   Mme Vidovic (interprétation). - Quelqu'un les a accompagnés, les

 24   a escortés depuis ce centre de collecte de Zenica. Deux d'entre eux sont

 25   restés chez moi, Ramo et sa femme.


Page 7746

  1   M. Radovic (interprétation). - Donc certaines personnes sont

  2   allées à ce centre de rassemblement. Combien de personnes y avait-il ?

  3   Mme Vidovic (interprétation). - Six femmes et un enfant.

  4   M. Radovic (interprétation). - Est-ce que ces personnes sont

  5   toujours en vie aujourd'hui ?

  6   Mme Vidovic (interprétation). - Tout à fait.

  7   M. Radovic (interprétation). – Ces personnes, pourquoi sont-

  8   elles parties de chez vous ?

  9   Mme Vidovic (interprétation). - Je n'avais pas assez de places

 10   vous savez. C'était une maison assez récente mais qui n'était pas encore

 11   tout à fait terminé ni parfaitement aménagée.

 12   M. Radovic (interprétation). – Et qu'en était-il de Ramo Ramic

 13   et de sa femme qu'on surnommait Drvica ? Vous les avez laissés là ?

 14   Est-ce que quelqu'un est venu chez vous le 18 ?

 15   Mme Vidovic (interprétation). - Mejra Rasidovic, une grand-mère,

 16   que l'on appelait Rasidovca, elle est venue.

 17   M. Radovic (interprétation). - C'était la grand-mère de qui ?

 18   Mme Vidovic (interprétation). - D'une certaine personne.

 19   M. Radovic (interprétation). - Et la mère de qui ?

 20   Mme Vidovic (interprétation). - De Sakib Ahmic. Elle est la

 21   grand-mère de Mejra.

 22   M. Radovic (interprétation). - Et qui est Sakib Ahmic ?

 23   Mme Vidovic (interprétation). - Le fils de cette autre personne.

 24   M. Radovic (interprétation). - Si j'ai bien compris, la mère de

 25   Sakib est venue chez vous ? Est-ce bien exact ?


Page 7747

  1   Mme Vidovic (interprétation). - Oui.

  2   M. Radovic (interprétation). – A ce moment-là, où se trouvait

  3   votre petite fille ?

  4   Mme Vidovic (interprétation). - Elle se trouvait chez sa mère,

  5   chez ma fille.

  6   M. Radovic (interprétation). – Donc avec sa mère ?

  7   Mme Vidovic (interprétation). - Avec sa grand-mère.

  8   M. Radovic (interprétation). - Quel était l'aspect de la mère de

  9   Sakib Ahmic quand elle est venue chez vous ?

 10   Mme Vidovic (interprétation). – Eh bien, elle portait le costume

 11   traditionnel des vieilles dames musulmanes.

 12   M. Radovic (interprétation). - Qui ressemblait à quoi ?

 13   Mme Vidovic (interprétation). – Elle avait un foulard et elle

 14   avait aussi le type de pantalon, les "dimje" comme ils les appellent, que

 15   ces femmes portent.

 16   M. Radovic (interprétation). - Qu'est-ce que c'est ce type de

 17   pantalon ?

 18   Mme Vidovic (interprétation). - Ce sont des pantalons larges

 19   tout à fait larges, amples.

 20   M. Radovic (interprétation). - Est-ce que vous connaissiez,

 21   auparavant, Sakib Ahmic ?

 22   Mme Vidovic (interprétation). - Oui.

 23   M. Radovic (interprétation). – Et que saviez-vous de lui ?

 24   Mme Vidovic (interprétation). – Eh bien, c'était Sakib Ahmic ;

 25   il a toujours été là, ainsi que ses frères. C'étaient nos voisins proches.


Page 7748

  1   La fille de sa sœur Merez était là ; je la connaissais.

  2   M. Radovic (interprétation). - Mais vous n'aviez pas de rapports

  3   particulièrement amicaux avec lui ?

  4   Mme Vidovic (interprétation). - On n'était pas des grands amis,

  5   mais on n'était pas des ennemis non plus, vous savez.

  6   M. Radovic (interprétation). – Et que s’est-il produit à ce

  7   moment-là lorsque la mère de Sakib Ahmic est venue chez vous ?

  8   Mme Vidovic (interprétation). – Eh bien, elle est arrivée devant

  9   la maison de Mejra.

 10   M. Radovic (interprétation). - Est-ce que vous pourriez parler

 11   lentement, Madame ? Cette partie est importante et tout doit être consigné

 12   dans le dossier.

 13   Mme Vidovic (interprétation). - Donc elle est arrivée devant la

 14   maison de Ramo Ramic ; je l'ai vue par la fenêtre par hasard. Je me suis

 15   dirigée vers elle, il y avait des coups de feu, j'ai dû emprunter un

 16   chemin détourné pour y arriver.

 17   J'ai dit : "Bonjour Aldovsa" ; elle a dit : "Bonjour, où est

 18   Ramo et Mejra ?" "Chez moi", j'ai dit. Elle m'a embrassée, elle m'a pris

 19   par le bras et je l'ai emmenée à la maison. Elle a pris quelque chose à

 20   boire, nous lui avons fait un petit café, nous l'avons aidée à se reposer

 21   un peu. Elle était légèrement blessée. Elle avait été blessée par une

 22   balle. J'ai demandé si elle voulait voir un médecin. Elle m'a dit : ce

 23   n'est pas nécessaire d'appeler un médecin, contente-toi d'appliquer

 24   quelque chose sur la plaie, de la panser. Elle ne voulait pas voir de

 25   médecin.


Page 7749

  1   M. Radovic (interprétation). – Cette femme, Mme Ura Rasidovica,

  2   combien de temps est-elle restée ?

  3   Mme Vidovic (interprétation). – Huit jours, elle est partie le

  4   neuvième jour.

  5   M. Radovic (interprétation). – Elle est partie avec qui ?

  6   Mme Vidovic (interprétation). - Avec Ramo et Mejra.

  7   M. Radovic (interprétation). – Et où sont-ils partis ?

  8   Mme Vidovic (interprétation). - A Zenica, à Perare.

  9   M. Radovic (interprétation). – Monsieur le Président, j'aimerais

 10   poser une question au témoin à propos des personnes qui les ont emmenés à

 11   Zenica. Est-ce que nous pourrions passer à huis clos partiel puisque je

 12   vais évoquer certains noms ?

 13   M. le Président (interprétation). – (Signe affirmatif de la

 14   tête)

 15   M. le Président (interprétation). – Nous sommes à huis clos

 16   partiel.

 17   Huis clos partiel

 18   (expurgée)

 19   (expurgée)

 20   (expurgée)

 21   (expurgée)

 22   (expurgée)

 23   (expurgée)

 24   (expurgée)

 25   (expurgée)


Page 7750

  1   (expurgée)

  2   (expurgée)

  3   (expurgée)

  4   (expurgée)

  5   Audience publique

  6   M. Radovic (interprétation). - Comment s'appelle le père de

  7   Mirko Sakic ?

  8   Mme Vidovic (interprétation). – Il s'appelle Mirko, Niko –

  9   pardon- Sakic.

 10   M. Radovic (interprétation). - Madame, de quoi avez-vous parlé

 11   avec la mère de Sakib Ahmic ? Avez-vous parlé de ce qui se passait, des

 12   événements ?

 13   Mme Vidovic (interprétation). - Oui. Le premier jour de la

 14   guerre...

 15   M. Radovic (interprétation). – Et avant, vous avez parlé des

 16   moments précédents ? Le moment où elle était revenue chez vous ?

 17   Mme Vidovic (interprétation). - Oui. Nous avons parlé de ce que

 18   Sakib était venu. Lorsqu'il est venu à la porte, elle a ouvert la porte et

 19   elle a dit : "C'est toi mon fils ?"

 20   M. Radovic (interprétation). - Veuillez parler lentement,

 21   Madame, nous tenons à vous suivre. Veuillez répéter.

 22   Mme Vidovic (interprétation). – Lorsqu'il qu'il est arrivé à la

 23   maison de sa mère, il a frappé à la porte et a dit : "Ouvre la porte,

 24   Maman". Mais elle ne l'a pas reconnu au premier abord, parce qu'il avait

 25   été un peu brûlé. Elle a dit : "Comment as-tu été brûlé ?" Il a répondu


Page 7751

  1   qu'il se trouvait sous une botte de foin et que des soldats avaient mis le

  2   feu à cette botte de foin. Elle lui a donné des chaussettes, un paquet de

  3   cigarettes et il est parti.

  4   M. Radovic (interprétation). - Vous a-t-elle relaté ce qu'avait

  5   dit son fils quant au sort qui avait été réservé aux personnes qui se

  6   trouvaient dans sa maison ?

  7   Mme Vidovic (interprétation). - Il a dit qu'il ne savait rien.

  8   Qu'il s'était échappé alors que cette botte de foin était en feu et qu'il

  9   était parti en direction de la fumée pour qu'il puisse s'y dissimuler.

 10   M. Radovic (interprétation). - Mais vous a-t-elle dit ce qui

 11   était arrivé à son fils et à sa belle-fille ?

 12   Mme Vidovic (interprétation). - Il avait dit que son fils était

 13   tué en route.

 14   M. Radovic (interprétation). - Vous ne vous souvenez plus des

 15   détails ?

 16   Mme Vidovic (interprétation). - C’est exact. Il avait dit que

 17   son fils et son petit-fils avait été tués, mais je ne me souviens pas s'il

 18   avait parlé de l'endroit où cela s'est passé.

 19   M. Radovic (interprétation). – Et qu'en est-il de sa belle-

 20   fille ?

 21   Mme Vidovic (interprétation). - Je ne m'en souviens plus.

 22   M. Radovic (interprétation). – A-t-il dit à sa mère qui était

 23   responsable de ces actes ?

 24   Mme Vidovic (interprétation). - Sa mère lui a demandé qui en

 25   était responsable et il a dit : "Je ne peux pas le dire, je ne peux pas le


Page 7752

  1   dire, parce que je ne sais pas".

  2   M. Radovic (interprétation). – Madame, si je vous ai bien

  3   comprise, vous avez demandé à cette dame si c'était le cas ?

  4   Mme Vidovic (interprétation). - Non. C'est elle qui en a parlé

  5   de son plein gré, à sa propre initiative, personne ne l'a forcée.

  6   M. Radovic (interprétation). - Comment ont-ils appris qu'il y

  7   avait eu cette discussion entre vous et la mère de Sakib Ahmic ?

  8   Mme Vidovic (interprétation). – Eh bien, je regardais la

  9   télévision de Bosnie-Herzégovine ; il y avait un procès et Sakib Ahmic

 10   était témoin à ce procès. Il a dit que Mirjan avait donné naissance à

 11   Zoran, que c'était lui qui avait mis le feu, que lui Sakib se trouvait

 12   derrière le divan et je suis allé le dire à sa mère.

 13   M. Radovic (interprétation). - Qu'avez-vous dit à sa mère ?

 14   Mme Vidovic (interprétation). - Je lui ai dit qu'il avait dit

 15   qu'il se trouvait près de la botte de foin. C'est ce qu'il avait dit à sa

 16   mère et qu'il ne se trouvait pas dans la maison.

 17   M. Radovic (interprétation). – Cette émission télévisée diffusée

 18   par la télévision de Bosnie-Herzégovine, était-ce une émission intitulée

 19   "Les jours de La Haye ou les heures de La Haye" ?

 20   Mme Vidovic (interprétation). - Oui.

 21   M. Radovic (interprétation). - Je n'ai pas saisi tous les

 22   détails de la mère de Sakib Ahmic, de son histoire. Dites-nous, Madame,

 23   est-ce que Sakib avait vu ce qui s'était passé dans sa propre maison ?

 24   Mme Vidovic (interprétation). - Il avait vu que sa maison était

 25   en proie aux flammes, que son petit-fils et que son fils avaient été tués.


Page 7753

  1   C'est ce que j'ai cru comprendre.

  2   M. Radovic (interprétation). – Mais est-ce qu'il a dit où il se

  3   trouvait, lui, lorsque son fils et son petit-fils avaient été tués ?

  4   Mme Vidovic (interprétation). - Il se trouvait dans la botte de

  5   foin.

  6   M. Radovic (interprétation). – Mais comment pouvait-il voir ce

  7   qu'il se passait dans la maison s'il était sous cette botte de foin ?

  8   Mme Vidovic (interprétation). – Je ne sais pas, c'est ce qu'il a

  9   dit à sa mère.

 10   M. Radovic (interprétation). - Et cette botte de foin, où se

 11   trouvait-elle ?

 12   Mme Vidovic (interprétation). - A proximité de sa maison, je

 13   suppose.

 14   M. Radovic (interprétation). - Ce qui m'intéresse, en ce qui

 15   concerne l'histoire, c'est qu'elle avait tout simplement raconté ce que

 16   Sakib lui avait dit. Elle avait dit qu'elle n'était pas au courant.

 17   Mme Vidovic (interprétation). – Oui.

 18   M. Radovic (interprétation). - Est-ce que vous pouvez me dire,

 19   maintenant, si Sakib Ahmic, lors de ce témoignage a parlé de vous

 20   également ?

 21   Mme Vidovic (interprétation). - Oui. J'ai vu mon nom dans le

 22   journal Novi List de Rijeka. Il avait dit que c'est grâce à moi qu'il a

 23   été sauvé.

 24   M. Radovic (interprétation). - Je vais demander à l'huissier de

 25   vous soumettre, Messieurs les Juges également, cet article Novi List de


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  1   Rijeka, le journal, le nouveau journal de Rijeka, la traduction.

  2   Mme Ameerali (interprétation). - Le document marqué D14/1.

  3   (L'huissier s'exécute.)

  4   M. Radovic (interprétation). - Regardez le journal et dites-moi,

  5   s'il vous plaît, ou dites plutôt aux Juges s'il s'agit de l'article dont

  6   vous avez parlé.

  7   M. le Président (interprétation). – Désolé de vous interrompre.

  8   Est-ce que vous pourriez nous donner la date de la parution de cet

  9   article ?

 10   M. Radovic (interprétation). - Le témoin a juste l'extrait de ce

 11   journal que je peux montrer aux Juges, mais il n'y a pas de date. La date

 12   ne figure pas sur l'extrait.

 13   Mme Vidovic (interprétation). - C'est ma sœur qui m'avait envoyé

 14   de Rijeka l'extrait du journal.

 15   M. Radovic (interprétation). - C'est arrivé de Rijeka et

 16   Novi List, le journal en question, n'est pas vendu à Vitez. C'était

 17   probablement au moment où Sakib Ahmic témoignait dans l'affaire Blaskic

 18   probablement, car c'est à cette époque-là qu'à la télévision de Bosnie ce

 19   témoignage a été diffusé. C'est là où il a parlé de notre témoin comme

 20   d'une personne qui avait sauvé sa mère, quelques Musulmans. Si vous vous

 21   souvenez, au moment où dans notre affaire Sakib Ahmic a été cité, il avait

 22   dit justement que sa mère a été sauvée par le témoin. Par conséquent, nous

 23   avons maintenant devant nous le témoin dont parlait Sakib Ahmic ici même,

 24   dans ce prétoire et il a dit que c'est grâce à elle que sa mère a été

 25   sauvée.


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  1   M. Radovic (interprétation). - Est-ce que je peux poursuivre,

  2   Monsieur le Président ?

  3   Je pense que c'est terminé. Je n'ai rien de plus.

  4   M. le Président (interprétation). – Merci, Maître Radovic.

  5   Maître Krajina vous avez la parole.

  6   M. Krajina (interprétation). – Madame Vidovic.

  7   Mme Vidovic (interprétation). - Oui, je vous écoute.

  8   M. Krajina (interprétation). – Je suis conseiller de l'accusé

  9   Vlatko Kupreskic et je vais vous poser un certain nombre de questions qui

 10   le concernent, si vous voulez bien me répondre et répondre aux Juges.

 11   Pouvez-vous me dire, tout d'abord, si vous connaissez

 12   M. Vlatko Kupreskic ?

 13   Mme Vidovic (interprétation). - Oui.

 14   M. Krajina (interprétation). – Je vais terminer d'abord. Est-ce

 15   que vous connaissez les membres de sa famille ? Est-ce que vous pouvez

 16   dire si vous connaissez d'autres membres de sa famille ?

 17   Mme Vidovic (interprétation). - Je connais Vlatko, je connais

 18   son épouse, je connais les parents, je connais les enfants, je connais

 19   tout le monde.

 20   M. Krajina (interprétation). – Depuis quand ?

 21   Mme Vidovic (interprétation). - Depuis que je suis arrivée à cet

 22   endroit-là. Depuis mon mariage.

 23   M. Krajina (interprétation). – Et pendant combien de temps vous

 24   les avez connus ?

 25   Mme Vidovic (interprétation). – Mais depuis 1962, au moment où


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  1   je suis arrivée dans leur village.

  2   M. Krajina (interprétation). – A partir de 1962 ?

  3   Mme Vidovic (interprétation). – Oui.

  4   M. Krajina (interprétation). – Vous avez dit, par ailleurs, que

  5   dans l'abri, dans la maison de Jozo Vrebac, de sa sœur plus précisément,

  6   vous étiez restée le 16 avril pendant la journée entière le 16 avril 1993,

  7   depuis 6 heures du matin jusqu'à tard le soir, n'est-ce pas ? Jusqu'à

  8   19 heures le soir ?

  9   Mme Vidovic (interprétation). - Oui.

 10   M. Krajina (interprétation). – Est-ce que vous pouvez également

 11   dire aux Juges si vous êtes restée de manière continue dans cet abri ou,

 12   éventuellement, vous êtes sortie de l'abri ?

 13   Mme Vidovic (interprétation). - Je suis allé à deux reprises

 14   pour nourrir le bétail. C'est tout près.

 15   M. Krajina (interprétation). – Deux fois dix minutes, vous êtes

 16   partie ?

 17   Mme Vidovic (interprétation). - Oui.

 18   M. Krajina (interprétation). – Est-ce que nous pouvons conclure,

 19   de tout ce que vous avez dit tout à l'heure, que vous avez passé dans cet

 20   abri pratiquement à partir de 6 heures du matin jusqu'à 19 heures du soir

 21   le 16 avril et qu'il y avait à deux reprises donc que vous vous êtes

 22   déplacée pour aller nourrir le bétail ?

 23   Mme Vidovic (interprétation). – Oui, c'est effectivement ça.

 24   M. Krajina (interprétation). – Est-ce que vous pouvez nous dire

 25   maintenant si vous avez vu quelqu'un, enfin, les membres de la famille de


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  1   Vlatko Kupreskic dans l'abri ? Est-ce que vous avez vu Vlatko également et

  2   qui vous avez vu ?

  3   Mme Vidovic (interprétation). - J'ai vu Vlatko, j'ai vu son

  4   épouse, j'ai vu les enfants et j'ai vu sa mère, parce que le père est

  5   resté à la maison.

  6   M. Krajina (interprétation). – A quel moment vous les avez vus

  7   pour la première fois ?

  8   Mme Vidovic (interprétation). - Ce matin-là, tous sont arrivés.

  9   M. Krajina (interprétation). – C'était quelle heure ?

 10   Mme Vidovic (interprétation). – 5 heures et demi, 6 heures.

 11   M. Krajina (interprétation). – Entendu. Est-ce que vous vous

 12   souvenez ce que portait Vlatko ? Est-ce qu'il était en vêtements civils ?

 13   Mme Vidovic (interprétation). -  Vlatko portait des vêtements

 14   civils.

 15   M. Krajina (interprétation). – Est-ce qu'il a été armé ?

 16   Mme Vidovic (interprétation). – Non.

 17   M. Krajina (interprétation). – Entendu. Est-ce que vous savez

 18   combien Vlatko Kupreskic est-il resté en pendant la journée dans cet

 19   abri ?

 20   Mme Vidovic (interprétation). - Il est resté compte tenu que son

 21   oncle, Anto, ne l'a pas vu jusqu'à 10 heures 30. Il avait dit : "Je vais

 22   voir mon père" pour voir s'il était encore vivant.

 23   M. Krajina (interprétation). – Vous voulez dire qu'il est sorti

 24   de l'abri à 10 heures 30 ?

 25   Mme Vidovic (interprétation). – Oui.


Page 7758

  1   M. Krajina (interprétation). – Est-ce que vous l'avez revu dans

  2   cet abri ce jour-là ?

  3   Mme Vidovic (interprétation). – Oui, parce que je suis resté

  4   parmi tout le monde et parce que nous sommes restés tous dans l'abri. Je

  5   l'ai vu rentrer et puis il a été heureux, il était content, il a dit :

  6   "Papa est en vie, il est en bonne santé".

  7   M. Krajina (interprétation). – Et c'était à quelle heure ?

  8   Mme Vidovic (interprétation). - C'était l'après-midi, peut-être

  9   15 heures 30 ou 4 heures. Je n'ai pas vraiment eu la montre. Je ne sais

 10   pas.

 11   M. Krajina (interprétation). – Entendu. Donc à 15 heures 30 à

 12   16 heures, et c'est là où il vous a dit que son père était en bonne santé

 13   et qu'il était vivant ?

 14   Mme Vidovic (interprétation). - Oui.

 15   M. Krajina (interprétation). – Est-ce que, pour vous, c'était

 16   quelque peu étrange ? Parce que qu'il s'agissait d'un abri où normalement

 17   se rendaient les vieillards, les femmes, les invalides. Est-ce que pour

 18   vous, vous avez trouvé que ce n'était pas tout fait normal de voir Vlatko

 19   à cet endroit-là ?

 20   Mme Vidovic (interprétation). – Non, ce n'était pas anormal pour

 21   moi parce que lui, il n'a pas fait son service militaire, c'était

 22   quelqu'un qui avait des problèmes de cœur.

 23   M. Krajina (interprétation). – Vous voulez dire qu'il n'était

 24   pas apte pour faire son service militaire ?

 25   Mme Vidovic (interprétation). – Effectivement, c'est cela que je


Page 7759

  1   veux dire.

  2   M. Krajina (interprétation). – Je vais maintenant vous poser

  3   encore quelques autres questions si vous voulez bien. Est-ce que vous avez

  4   rencontré à plusieurs reprises avant ce conflit Vlatko ?

  5   Mme Vidovic (interprétation). - Oui.

  6   M. Krajina (interprétation). – Est-ce que vous l'avez vu portant

  7   l'uniforme ou une arme ?

  8   Mme Vidovic (interprétation). - Non. Lui, il travaillait dans un

  9   magasin, il vendait les marchandises.

 10   M. Krajina (interprétation). – Est-ce que vous l'avez vu ?

 11   Mme Vidovic (interprétation). - Oui parce que je me suis rendue

 12   dans son magasin pour acheter les marchandises.

 13   M. Krajina (interprétation). – Est-ce que vous l'avez vu porter

 14   l'uniforme ?

 15   Mme Vidovic (interprétation). - Non, jamais.

 16   M. Krajina (interprétation). – Est-ce que vous avez entendu

 17   parler dans le village, est-ce que vous savez si Vlatko était engagé sur

 18   le plan politique ? Est-ce qu'il assistait à des réunions différentes ?

 19   Est-ce qu'il appartenait à des unités militaires ?

 20   Mme Vidovic (interprétation). - Non. Ce qui l'intéressait,

 21   c'étaient ses affaires. Enfin, c'était certainement pas la politique qui

 22   l'intéressait, c'était son magasin où il travaillait.

 23   M. Krajina (interprétation). - Est-ce que vous pouvez me dire,

 24   selon vos souvenirs et vos connaissances, comment Vlatko se comportait

 25   vis-à-vis des gens en général et des Musulmans ?


Page 7760

  1   Mme Vidovic (interprétation). - Mais il était toujours en bons

  2   termes avec tout le monde et même maintenant, ils viennent dans sa

  3   boutique, ils achètent. Moi aussi, je me rends souvent dans sa boutique et

  4   j'achète les marchandises.

  5   M. Krajina (interprétation). - Monsieur le Président, je ne vais

  6   pas être long, beaucoup de questions ont été posées à ce témoin.

  7   Madame Vidovic, je vais vous poser une seule question et cette

  8   fois-ci, en connexion avec une autre personne, et je vais vous demander,

  9   Monsieur le Président, si éventuellement, nous pouvons passer à huis clos

 10   partiel très brièvement parce qu'il va s'agir d'un témoin qui était ici et

 11   qui était un témoin protégé.

 12   M. Krajina (interprétation). - Merci. Est-ce que vous

 13   connaissez, Monsieur...

 14   Mme Ameerali (interprétation). - Attendez, attendez !

 15   Huis clos partiel

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 24   (expurgée)

 25   Audience publique


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  1   M. le Président (interprétation). - Je vous remercie, Maître

  2   Krajina.

  3   Maître Terrier, vous avez la parole.

  4   M. Terrier. - Merci, Monsieur le Président.

  5   Bonjour, Madame. Mon nom est Franck Terrier, je suis l'un des

  6   avocats de l'accusation, je vais vous poser quelques questions ; je ne

  7   pense pas en avoir pour très longtemps.

  8   Je voudrais d'abord que vous m'éclairiez sur un point. Nous

  9   avons reçu, à propos de votre témoignage, deux résumés, deux sommaires, et

 10   ces sommaires sont un peu différents l'un de l'autre sur un point qui est,

 11   à mon sens, important, c'est-à-dire l'heure à laquelle vous avez été

 12   réveillée et l'heure à laquelle vous avez, ce 16 avril 1993, rejoint

 13   l'abri.

 14   Dans l'un des résumés, il est indiqué que vous avez été

 15   réveillée à 4 heures du matin le 16 avril 1993, ce que vous avez confirmé

 16   tout à l'heure, et dans l'autre, il est indiqué qu'à 5 heures 30, lorsque

 17   les tirs ont commencé sur Ahmici, vous avez rejoint l'abri de Jozo Vrebac.

 18   Est-ce que vous pouvez résoudre cette contradiction et nous dire très

 19   précisément, aussi précisément que vos souvenirs le permettent bien

 20   entendu, à quelle heure vous avez été réveillée ou alertée ce 16 avril au

 21   matin ?

 22   Mme Vidovic (interprétation). - Oui. J'ai été réveillée à

 23   4 heures, mais il fallait d'abord que je nourrisse le bétail. Je ne suis

 24   pas allée tout de suite à l'abri. Et quand vous avez peur, à ce moment-là,

 25   vous vous perdez et je ne peux pas vous dire, donc, l'heure exacte, mais


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  1   c'était 5 heures et demie, 6 heures parce qu'il fallait quand même...

  2   j'avais des porcs, j'avais également du bétail dans mon étable, il fallait

  3   les nourrir.

  4   M. Terrier. - Je comprends parfaitement, Madame, que ce soit

  5   difficile, effectivement, de donner une heure précise ; est-ce que vous

  6   aviez une montre sur vous ?

  7   Mme Vidovic (interprétation). - Non, pas à la maison, mais à

  8   l'abri, on avait une montre ou plutôt un réveil.

  9   M. Terrier. - Mais peut-être pouvez-vous être plus affirmative

 10   et précise sur le point suivant ?

 11   Vous avez dit, et je vous demande si vous le confirmez, que

 12   lorsque vous êtes arrivée à l'abri de Jozo Vrebac, les tirs n'avaient pas

 13   encore commencé. C'était encore le silence sur Zume, Santici, Ahmici ?

 14   Est-ce bien exact ?

 15   Mme Vidovic (interprétation). - J'ai dit qu'au moment où les

 16   tirs commençaient, j'étais dans l'étable et puis j'ai couru entre les

 17   maisons, parce que ce n'est pas loin.

 18   M. Terrier. - Je me permets d'insister, Madame, pour savoir si

 19   vous êtes absolument certaine de vos souvenirs, car sur l'un des deux

 20   résumés qui nous ont été remis et qui se rapportent à votre témoignage, il

 21   est indiqué que vous êtes arrivée à l'abri de Jozo Vrebac avant que les

 22   tirs commencent.

 23   Mme Vidovic (interprétation). - Non, j'ai dit que j'étais dans

 24   l'étable au moment où on a commencé à tirer et quand les tirs sont devenus

 25   violents, j'ai couru pour aller vers l'abri entre les maisons.


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  1   M. Terrier. - Donc il y a une erreur sur ce résumé qui nous a

  2   été remis.

  3   De la même manière, lorsque, sur l'un de ces résumés, vous

  4   évoquez les soldats... le soldat, enfin la manière dont vous avez été

  5   réveillée à 4 heures du matin, vous parlez de "soldats dont les figures

  6   étaient peintes avec de la peinture" ; vous parlez de plusieurs soldats.

  7   Or, tout à l'heure, vous n'avez parlé que d'un seul soldat.

  8   Mme Vidovic (interprétation). - Il y avait un soldat qui m'a

  9   réveillée, un seul, et lui, il portait effectivement les peintures sur le

 10   visage.

 11   M. Terrier. - Mais à ce moment-là, vous n'avez vu qu'un seul

 12   soldat, vous n'avez pas vu plusieurs soldats ?

 13   Mme Vidovic (interprétation). - Oui, oui.

 14   M. Terrier. - Est-ce que, plus tard, dans cette journée du

 15   16 avril, à un moment quelconque de cette journée, vous avez vu d'autres

 16   soldats ?

 17   Mme Vidovic (interprétation). - Non, parce que j'étais dans

 18   l'abri.

 19   M. Terrier. – Je voudrais, avec l'assistance de M. l'huissier,

 20   que soit soumis à Mme le Témoin la pièce de la défense D13/1.

 21   (L'huissier s'exécute.)

 22   Madame, est-ce que cette maison qui se trouve photographiée, en

 23   particulier visible sur la photo N° 1 de cet album, est bien la maison où

 24   vous avez trouvé un abri ? C'est bien cela ?

 25   Mme Vidovic (interprétation). - Oui.


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  1   M. Terrier. – Est-ce que, en vous aidant de ces photographies,

  2   vous pouvez nous dire où vous êtes allée dans cette maison, lorsque vous y

  3   êtes arrivée le 16 avril au matin ?

  4   Mme Vidovic (interprétation). - Là, c'est l'entrée et puis il y

  5   a une cave et c'est la porte. C'est la porte d'entrée. Il y a les trois

  6   portes même.

  7   M. Terrier. – Est-ce que vous vous souvenez dans quelle pièce

  8   vous vous êtes rendue ?

  9   Mme Vidovic (interprétation). - Il y avait une très grande pièce

 10   où il y avait des femmes et des enfants, donc des adultes. Il y en avait

 11   également dans le couloir.

 12   M. Terrier. – Et vous-même, dans quelle pièce est-ce que vous

 13   vous êtes rendue ?

 14   Mme Vidovic (interprétation). – Moi, personnellement, j'étais

 15   avec mes voisins dans le couloir, dans cette partie.

 16   M. Terrier. – Cette partie que l'on peut voir sur quelle

 17   photographie, Madame ?

 18   Mme Vidovic (interprétation). - Devant cette porte, parce qu'il

 19   fallait également descendre. Il y avait des escaliers pour descendre dans

 20   la cave.

 21   M. Terrier. – Est-ce que l'on peut dire que c'est cette partie

 22   de la cave que l'on voit au-delà de la porte visible sur la photographie

 23   N° 3 ?

 24   Mme Vidovic (interprétation). - Voilà. Il y a des escaliers, il

 25   faut descendre l'escalier pour rejoindre une pièce qui se trouve dans la


Page 7766

  1   cave.

  2   M. Terrier. – C'est là que vous étiez ?

  3   Mme Vidovic (interprétation). - Oui. C'est là.

  4   M. Terrier. – Est-ce qu'il y avait la lumière électrique quand

  5   vous êtes arrivée ?

  6   Mme Vidovic (interprétation). - Oui. Au début, oui. Ensuite, la

  7   lumière a été coupée et puis il n'y en avait plus.

  8   M. Terrier. – Est-ce qu'il y avait, à l'endroit où vous vous

  9   trouviez, une bonne lumière, une bonne luminosité après que la lumière

 10   électrique ait été coupée ?

 11   Mme Vidovic (interprétation). - Non. On ne voyait pas

 12   clairement. Il fallait brûler les cierges. On avait des bougies et voilà,

 13   c'est comme ça qu'on voyait.

 14   M. Terrier. – Est-ce que vous vous souvenez à quel moment est

 15   arrivé M. Vlatko Kupreskic et sa famille ? En particulier sa femme et ses

 16   enfants ? A quel moment sont-ils arrivés ?

 17   Mme Vidovic (interprétation). - Ils sont arrivés tout de suite

 18   après moi. Tout de suite. Après moi, ils sont arrivés jusqu'à la rue.

 19   M. Terrier. – Lorsque vous les avez vus arriver, à quel endroit

 20   est-ce que vous vous trouviez ? A l'endroit que vous avez indiqué tout à

 21   l'heure ?

 22   Mme Vidovic (interprétation). – Moi, j'étais devant. Juste

 23   devant la maison N° 1.

 24   M. Terrier. – Combien de temps êtes-vous restée devant la maison

 25   N° 1 ?


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  1   Mme Vidovic (interprétation). - Je suis restée pendant une heure

  2   parce qu'il y avait des tirs qui venaient dans bas et puis, la maison de

  3   Jozo a été protégée. Je ne voyais pas clair.

  4   M. Terrier. – Je ne suis pas sûr que nous nous comprenions bien.

  5   Vous m'avez dit tout à l'heure que, lorsque vous êtes arrivée, vous êtes

  6   descendue dans la cave, qu'il y avait d'abord de la lumière puis, ensuite,

  7   qu'il n'y a plus eu de lumière, qu'ensuite vous avez allumé des bougies et

  8   là, vous venez de me dire que vous êtes restée une heure à l'extérieur. Je

  9   ne comprends pas très bien.

 10   Mme Vidovic (interprétation). - Mais ça s'est passé après. La

 11   lumière, on l'a eue pendant un premier temps. Ensuite, donc, on est

 12   descendus et puis on est remontés pour ne pas empêcher les enfants qui

 13   étaient en bas et puis voilà ; ça se passait comme ça.

 14   M. Terrier. – Mais est-ce que vous avez le souvenir très précis,

 15   compte tenu du de fait que vous ne portiez pas de montre vous

 16   personnellement, de l'heure à laquelle vous êtes remontée, du temps que

 17   vous avez passé en bas ? Est-ce que vous avez un souvenir très exact de

 18   tout cela ?

 19   Mme Vidovic (interprétation). - Mais qui pourrait s'en

 20   souvenir ? Sept ans se sont passés.

 21   M. Terrier. – C'est pour cette raison que je vous pose cette

 22   question, car je ne veux pas vous inviter à dire des choses que vous ne

 23   pouvez pas dire. Parce qu'il est fort normal, il est fort compréhensible,

 24   il est tout à fait naturel que vous ayez oublié certaines choses, mais je

 25   vous demande aussi de ne pas affirmer des choses précises qui ne seraient


Page 7768

  1   pas conformes à vos vrais souvenirs.

  2   Donc, est-il exact de dire, Madame, que vous avez trouvé refuge

  3   dans cette maison ? Vous avez passé un certain temps dans la cave ? Vous

  4   avez passé un certain temps à l'extérieur devant la maison ? Mais vous

  5   n'êtes plus vraiment en mesure de dire, aujourd'hui, à quelle heure vous

  6   êtes descendue dans la cave, à quelle heure vous êtes remontée, combien de

  7   temps vous avez passé dans la cave, combien de temps vous avez passé à

  8   l'extérieur. Tout cela est, aujourd'hui, un peu difficile à dire compte

  9   tenu de ce qu'à l'époque, vous n'aviez pas de montre et compte tenu du

 10   temps qui s'est écoulé. Est-ce que c'est exact ? Est-ce que ce que je dis

 11   est exact ?

 12   Mme Vidovic (interprétation). - Au moment où je suis arrivée

 13   dans l'abri, la famille de Kupreskic est arrivée avec moi et nous sommes

 14   passés tous par la même porte. C'était à 5 heures et demi, 6 heures ; je

 15   ne peux pas vous dire à la minute près.

 16   Ensuite, nous sommes tous descendus dans l'abri et quand, par

 17   exemple, on voulait allumer une cigarette, on sortait pour fumer la

 18   cigarette à l'extérieur. Mais en gros, le gros de temps, on l'a passé dans

 19   la cave. Donc c'est là où on se voyait à l'extérieur si on allumait une

 20   cigarette.

 21   M. Terrier. – Donc, vous nous dites maintenant, Madame Vidovic,

 22   que vous êtes descendue dans la cave pratiquement en même temps que

 23   Vlatko Kupreskic et sa famille et que Vlatko Kupreskic et sa famille sont

 24   restés dans cette cave tout comme vous ?

 25   Est-ce que je peux appeler votre attention sur le fait, Madame,


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  1   que nous avons un témoin qui se trouvait présent dans cette même maison

  2   que vous avez sans doute remarqué dans cet abri Mme Antica Kupreskic, qui

  3   a remarqué l'arrivée de M. Vlatko Kupreskic et de sa famille, mais qui

  4   nous a dit que Vlatko Kupreskic était remonté, n'était pas resté dans la

  5   cave. Seule son épouse et ses enfants étaient restés dans cette cave.

  6   Est-ce que cela correspond à vôtre souvenir de la même manière ?

  7   Mme Vidovic (interprétation). - Il est resté devant la porte et

  8   on est descendus à l'abri. Il était là tout le temps jusqu'à que ce

  9   qu'Oncle Anto commence à pleurer et ait demandé ce qu'il était arrivé à

 10   son frère.

 11   M. Terrier. – Madame, il est très difficile d'être précis,

 12   évidemment, compte tenu de l'écoulement du temps, compte tenu aussi peut-

 13   être des circonstances que vous avez vécues qui étaient certainement

 14   dramatiques, mais vous venez de nous dire que Vlatko Kupreskic, si j'ai

 15   bien compris, est resté en dehors de la maison, devant la porte de la

 16   maison, pendant que vous descendiez dans l'abri ? Est-ce que c'est bien

 17   cela ?

 18   Mme Vidovic (interprétation). - Oui. C'est ça. Il descendait, il

 19   remontait ; on n'était pas tous au même endroit, on ne pouvait pas tous

 20   s'asseoir au même endroit.

 21   M. Terrier. – Donc, Vlatko Kupreskic, selon ce que vous nous

 22   dites maintenant, n'est pas resté dans le sous-sol de cette maison jusqu'à

 23   l'heure que vous avez dite tout à l'heure qui était, je crois, 10 heures

 24   du matin ? Il n'est pas resté tout le temps jusqu'à 10 heures du matin ?

 25   Mme Vidovic (interprétation). - C'est cela.


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  1   M. Terrier. – Est-ce que vous-même êtes restée tout le temps

  2   dans le sous-sol de la maison ?

  3   Mme Vidovic (interprétation). – C'est ça. 15 minutes,

  4   10 minutes, 5 minutes. Je suis allée m'occuper du bétail, mais quand je

  5   suis venu, je l'ai vu et c'était avant 11 heures. Il devait être 10 heures

  6   lorsque son oncle lui a demandé d'aller voir ce qui se passait avec son

  7   père. Il se trouve que l'on a regardé notre montre à ce moment-là.

  8   M. Terrier. – Vous avez dit tout à l'heure que vous n'aviez pas

  9   de montre, Madame.

 10   Mme Vidovic (interprétation). - Je ne sais pas si c'était une

 11   montre ou une horloge, il y avait quelque chose dans l'abri.

 12   M. Terrier. – Je voudrais que, Madame, vous me parliez de vos

 13   voisins, Ramo Ramic, que vous avez accueilli dans votre maison le soir du

 14   16 avril 1993.

 15   Mme Vidovic (interprétation). - Oui.

 16   M. Terrier. – Vous nous avez dit tout à l'heure que la maison de

 17   M. Ramo Ramic et de sa famille a été détruite le lendemain 17 avril. C'est

 18   bien cela ?

 19   Mme Vidovic (interprétation). - Oui.

 20   M. Terrier. – A votre avis, pour quelles raisons cette maison a-

 21   t-elle été détruite ce jour-là ?

 22   Mme Vidovic (interprétation). - Je ne sais malheureusement pas.

 23   Malheureusement, je ne sais pas.

 24   M. Terrier. – Est-ce que vous avez vu, le 16 ou le 17 avril,

 25   votre autre voisin musulman Reuf Podojak et sa famille ?


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  1   Mme Vidovic (interprétation). - Le même jour, ils ont été vers

  2   Poculica. Le 16 vers 9, 10 heures, je ne sais plus exactement, ils sont

  3   partis et ils sont toujours vivants.

  4   M. Terrier. – Sont-ils partis de leur plein gré ou ont-ils été

  5   obligés de partir ?

  6   Mme Vidovic (interprétation). - Je ne saurais pas dire. C'est ce

  7   que j'ai entendu dire.

  8   M. Terrier. – Lorsque vous avez rencontré, puis ensuite reçu

  9   dans votre maison, la mère de Sakib Ahmic, dans quel état était-elle ?

 10   Dans quel état d'esprit se trouvait-elle ?

 11   Mme Vidovic (interprétation). - Elle était dans un état

 12   épouvantable. C'est une vieille femme.

 13   M. Terrier. – Quel âge avait-elle en 1993?

 14   Mme Vidovic (interprétation). - Elle avait plus de 70 ans à

 15   cette époque. Je ne sais plus exactement combien.

 16   M. Terrier. – Donc sur ce que Sakib Ahmic aurait dit à sa mère,

 17   vous nous rappelez les propos que vous a tenus sa mère, âgée de 70 ans et

 18   dans un état d'esprit extrêmement difficile -on peut le comprendre- et

 19   vous nous dites ce que vous vous souvenez aujourd'hui des propos tenus par

 20   cette femme ?

 21   Mme Vidovic (interprétation). - Quand elle s'était rafraîchie et

 22   qu'elle s'était restaurée, elle nous a dit elle-même comment son fils

 23   était venu chez elle et l'expérience qu'il avait eue et que je viens de

 24   raconter il y a un moment.

 25   M. Terrier. – Est-ce que son récit vous a paru extrêmement


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  1   précis ? Extrêmement clair ? Est-ce qu'elle vous a paru avoir une idée

  2   extrêmement exacte de ce qui s'était produit ? Est-ce qu'elle était

  3   vraiment affirmative ?

  4   Mme Vidovic (interprétation). - Nous ne lui avons pas posé de

  5   questions. Elle nous a parlé d'elle-même et puis, quand j'ai vu ça à la

  6   télévision, j'ai eu l'impression que cela faisait "clic" et je me suis dit

  7   c'est Mme Kupreskic que je ne connaissais pas depuis longtemps.

  8   C'était difficile pour moi de saisir que des enfants innocents étaient là,

  9   par terre.

 10   M. Terrier. – Est-ce que vous habitez toujours Ahmici, Madame ?

 11   M. Terrier. – A Santic même, N° 73.

 12   M. Terrier. – Vous habitez toujours au même endroit qu'à

 13   l'époque ? Dans la même maison ?

 14   Mme Vidovic (interprétation). - Pendant la guerre, j'étais chez

 15   ma fille et un obus est tombé devant la maison. Cela a brisé les vitres et

 16   la maison, c'est-à-dire ma propre maison a été reconstruite désormais.

 17   M. Terrier. – Je n'ai pas d'autres questions, Monsieur le

 18   Président. Je vous remercie Madame.

 19   M. le Président. - Merci.

 20   Maître Radovic ?

 21   M. Radovic (interprétation). - J'aurais quelques questions à poser au

 22   témoin pour préciser un certain nombre de points ? Pourriez-vous nous dire

 23   quelle était la relation entre Mejra et Sakib ? Mejra est la mère et Mejra

 24   et Sakib étaient frère et soeur, donc Mejra est quoi par rapport à Sakib ?

 25   Mme Vidovic (interprétation). - C'est sa cousine. C'est la fille


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  1   de sa sœur, donc c'est son oncle. C'est ça.

  2   M. Radovic (interprétation). - Quand vous parliez à la mère de

  3   Sakib Ahmic, est-ce que c'est vous qui avez entamé la conversation sur

  4   Sakib ou est-ce que c'est elle qui a commencé à en parler ?

  5   Mme Vidovic (interprétation). - Elle nous en a parlé d'elle-

  6   même. Après s'être reposée, elle a commencé à parler.

  7   M. Radovic (interprétation). - Lorsqu'elle a commencé son

  8   histoire, elle a raconté toute son histoire, vous l'avez interrompue avec

  9   des questions ?

 10   Mme Vidovic (interprétation). - Non. Elle a parlé de son propre

 11   gré.

 12   M. Radovic (interprétation). - Est-ce qu'elle vous aurait

 13   expliqué, lorsque son fils Sakib lui avait rendu visite, où se trouvait sa

 14   maison exactement ? Où se trouvait la maison ?

 15   Mme Vidovic (interprétation). - A Ahmici.

 16   M. Radovic (interprétation). - A vol d'oiseau, quelle est la

 17   distance de chez vous ?

 18   Mme Vidovic (interprétation). - De l'ordre de 500 mètres.

 19   M. Radovic (interprétation). - Un peu plus loin, si vous prenez

 20   le chemin ?

 21   Mme Vidovic (interprétation). - Oui.

 22   M. Radovic (interprétation). - Mais c'est en bas de la colline,

 23   il me semble ?

 24   Mme Vidovic (interprétation). - Oui. Bien sur, j'y vivais, alors

 25   je sais.


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  1   M. Radovic (interprétation). - Est-ce que vous pourriez nous

  2   dire, si elle a expliqué, pourquoi son fils Sakib est venu voir sa vieille

  3   mère qui vivait toute seule et pourquoi il l'a laissée toute seule dans la

  4   maison et ne l'a pas emmenée avec lui ?

  5   Mme Vidovic (interprétation). - C’est ce qu’elle se demandait.

  6   Il a demandé des cigarettes, des chaussettes et c’est tout.

  7   M. Radovic (interprétation). - Est-ce qu'elle vous a dit que

  8   lorsque Sakib a terminé sa visite chez elle, les tirs avaient déjà

  9   commencé dans la direction de sa maison ?

 10   Mme Vidovic (interprétation). - Non, elle ne nous a pas dit ça.

 11   M. Radovic (interprétation). - Mais elle-même ne pouvait pas

 12   expliquer pourquoi son fils s'échappait sans l'emmener ?

 13   Mme Vidovic (interprétation). - Non, elle ne pouvait pas

 14   l'expliquer.

 15   M. Radovic (interprétation). - En ce qui concerne la question de

 16   l'accusation, pouvez-vous nous dire quelles étaient vos relations avec vos

 17   voisins musulmans ?

 18   Mme Vidovic (interprétation). - Très bonnes.

 19   M. Radovic (interprétation). - Vos voisins croates, quelles

 20   étaient leurs relations avec leurs voisins musulmans ?

 21   Mme Vidovic (interprétation). - On s'invitait les uns les

 22   autres. On les invitait pour la Noël et il nous invitait pour une autre

 23   fête.

 24   M. Radovic (interprétation). - Est-ce que vos voisins croates

 25   ont cherché à chasser leurs voisins musulmans ?


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  1   Mme Vidovic (interprétation). - Absolument pas.

  2   M. Radovic (interprétation). - Est-ce que vous et vos voisins

  3   croates étiez déterminés à chasser vos voisins musulmans ?

  4   Mme Vidovic (interprétation). - Non, pour ma part. Et mes

  5   voisins, je ne sais pas, et je ne peux parler pour mes voisins, plutôt

  6   non.

  7   M. Krajina (interprétation). - A l'époque, je n'ai que deux

  8   questions courtes. A l'époque, à cette époque-là, vers 5 heures 30 à

  9   6 heures, jusqu'à 10 heures 30, lorsque vous étiez dans l'abri ou devant

 10   l'abri, vous aviez dit que les adultes rentraient pour sortir fumer une

 11   cigarette, etc. Est-ce que vous étiez là tout le temps ?

 12   Mme Vidovic (interprétation). - Je l’ai déjà dit, je suis partie

 13   un petit moment, parce qu'il y a cinq, dix minutes jusqu'à l'étape et j'ai

 14   voulu m'occuper du bétail. Vous savez, je ne regardais pas constamment

 15   l’horloge ou la montre.

 16   M. Krajina (interprétation). - A partir de votre témoignage,

 17   pouvez-vous confirmer avec certitude que Vlatko Kupreskic était avec sa

 18   famille dans cet abri le 16 avril sans interruption de 6 heures à

 19   10 heures 30 environ ?

 20   Mme Vidovic (interprétation). - Oui, je le peux.

 21   M. Krajina (interprétation). - Et qu'il n'a pas quitté devant

 22   l'abri ? Seulement lorsqu'il a été voir si son père était vivant. C'était

 23   vers 11 heures 30. Et à ce moment-là, il était là tout le temps ?

 24   Mme Vidovic (interprétation). - Oui.

 25   M. Krajina (interprétation). - Je n'ai pas d'autres questions.


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  1   M. le Président (interprétation). - Nous n'avons pas d'autres

  2   questions, Madame Vidovic. Merci d'être venue déposer devant nous, vous

  3   pouvez maintenant vous retirer.

  4   L'audience est levée, elle reprendra demain à 9 heures.

  5   (Le témoin est reconduit hors du prétoire.)

  6   L'audience est levée à 13 heures 30.

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