Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 TRIBUNAL PENAL INTERNATIONAL AFFAIRE N° IT-95-16-T

2 POUR L'EX-YOUGOSLAVIE

3 Vendredi 19 Mars 1999

4 L'audience est ouverte à 9 heures.

5 (Le témoin est introduit dans le prétoire.)

6 Mme Ameerali (interprétation). - Bonjour Monsieur le Président,

7 l'affaire n° IT-95-16-T, le Procureur contre Zoran Kupreskic,

8 Mirjan Kupreskic, Vlatko Kupreskic, Drago Josipovic, Dragan Papic,

9 Vladimir Santic.

10 M. le Président (interprétation). - Merci. Bonjour.

11 Maître Terrier, je vous en prie.

12 M. Terrier. - Bonjour, Monsieur le Juge. Bonjour

13 Monsieur Alilovic. Je souhaiterais, Monsieur Alilovic, que nous revenions

14 à cette déclaration que vous avez faite à la fin de votre témoignage

15 d'hier, déclaration qui m'a paru un peu énigmatique. Je vais vous poser la

16 question des propos qu'a pu tenir ce jeune garçon que vous avez accueilli

17 chez vous. Je vous demanderais si vous avez raconté tout ce qui s'était

18 passé. Est-ce que vous vous souvenez de la déclaration que vous avez faite

19 à ce moment-là ?

20 M. Alilovic (interprétation). - Oui. Je me souviens et je me

21 souviens de ce qu'il m'a raconté, parce que le jeune homme a passé douze

22 jours. Le treizième jour, il est parti. Nous avons parlé de beaucoup de

23 choses et, ce que je me dois de vous dire, c'est que son frère n'a pas

24 participé vraiment au cours du dernier conflit, il n'en était pas

25 coupable, si je peux dire ainsi. En revanche, la première fois, oui, et

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1 j'ai dit même qu'il a eu des baffes à cause de ça. Il a même porté des

2 explosifs en provenance de l'usine de Vitez. Vous avez entendu parler de

3 grandes usines Principsejio et dans ce cadre-là de Vitez et c'est la

4 raison pour laquelle il m'en a parlé.

5 Moi, je me souviens, j'ai travaillé dans cette usine, j'ai gardé le

6 souvenir et je ne sais plus maintenant ce que je pourrais dire davantage

7 en ce qui concerne ce jeune homme qui avait séjourné chez moi.

8 M. Terrier. - Ce jeune homme vous a dit que son frère avait été

9 tué ?

10 M. Alilovic (interprétation). - Oui.

11 M. Terrier. - Ce jeune homme vous a dit que l'on avait tenté de

12 le tuer, lui ?

13 M. Alilovic (interprétation). - Il m'a dit que son frère a été

14 tué, qu'il a été tué à 200 mètres par rapport à sa maison, que le deuxième

15 soldat avait dit : "Ce n'est pas l'enfant qui est coupable, laissez

16 l'enfant partir". Donc c'est ce deuxième soldat qui lui a demandé d'aller

17 vers la route principale, ce qu'il a fait. Il est allé jusqu'à la route,

18 les autres soldats l'ont trouvé et ils l'ont emmené jusqu'à chez moi.

19 M. Terrier. - Parlons, Monsieur Alilovic, de ces deux soldats

20 qui ont amené cet enfant chez vous. Est-ce que vous les connaissiez ?

21 M. Alilovic (interprétation). - Non. Excusez-moi, je voulais

22 tout simplement terminer. Je ne les ai plus jamais revus, mais ce qui est

23 intéressant, c'est que le soldat, il m'avait appelé par mon prénom, alors

24 que moi je ne le connaissais pas du tout.

25 M. Terrier. - J'allais effectivement faire cette remarque. Est-

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1 ce que vous avez vu leur voiture ?

2 M. Alilovic (interprétation). - Oui. J'ai vu leur voiture. Elle

3 était juste devant ma cour, donc entre la route principale et la cour.

4 M. Terrier. - De quel type de voiture s'agissait-il ?

5 M. Alilovic (interprétation). - Je ne peux pas vous le dire

6 exactement, parce que je n'ai pas vu, je ne l'ai pas vue de très près, je

7 veux dire.

8 M. Terrier. - Parlons maintenant des trois soldats qui sont

9 venus par la suite chez vous, dont deux ont téléphoné. Est-ce que vous les

10 connaissiez ?

11 M. Alilovic (interprétation). - Non.

12 M. Terrier. - Est-ce que vous connaissiez les soldats ou

13 certains des soldats qui étaient au bungalow ?

14 M. Alilovic (interprétation). - Non, non. Je ne connaissais pas

15 du tout. Il y avait très peu de soldats dans le bungalow et, de toute

16 façon, tous sont arrivés de l'extérieur, ce n'étaient pas les gens que je

17 connaissais.

18 M. Terrier. - Est-ce que vous étiez déjà allé au bungalow ?

19 M. Alilovic (interprétation). - Compte tenu du fait que j'ai des

20 champs en face du bungalow et j'ai traversé la route principale pour me

21 rendre jusqu'au champ et puis je suis également passé par le bungalow, je

22 n'avais pas besoin d'y rentrer et puis il a peut-être été interdit que j'y

23 rentre. De toute façon, je n'ai même pas essayé d'y rentrer.

24 M. Terrier. - Mais est-ce que vous connaissiez certains des

25 soldats qui se trouvaient là ?

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1 M. Alilovic (interprétation). - Non.

2 M. Terrier. - Lorsque ces trois soldats sont arrivés chez vous,

3 est-ce que la maison Pezer avait déjà été mise à feu ?

4 M. Alilovic (interprétation). - Oui. Tôt le matin, la maison de

5 Pezer a été incendiée et puis ces soldats-là sont arrivés vers 9 heures,

6 mais la maison a été déjà incendiée.

7 M. Terrier. - Vous n'avez pas vu de quelle direction venaient

8 ces soldats, de la direction d'Ahmici ou de la direction du bungalow ?

9 M. Alilovic (interprétation). - Je ne sais rien. Ce que je sais,

10 c'est que les tirs m'avaient réveillé.

11 M. Terrier. - Est-ce que vous savez dans quelle direction ils

12 sont repartis ? Dans la direction du bungalow ou dans la direction

13 d'Ahmici ?

14 M. Alilovic (interprétation). - Ces trois soldats, ceux qui

15 étaient chez moi et qui ont appelé, qui ont téléphoné, ils sont partis en

16 direction du bungalow.

17 M. Terrier. - Parlons du quatrième soldat. Si j'ai bien compris

18 vos déclarations, le quatrième soldat est arrivé alors que les trois

19 autres étaient encore là ?

20 M. Alilovic (interprétation). - Oui.

21 M. Terrier. - Tous ces soldats avaient, si j'ai bien compris vos

22 déclarations, le même type d'uniforme et les mêmes insignes ?

23 M. Alilovic (interprétation). - Un de ces soldats portait un

24 uniforme noir et les deux autres portaient des uniformes de camouflage,

25 alors que le quatrième, qui est arrivé après, lui aussi portait un

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1 uniforme de camouflage.

2 M. Terrier. – Est-ce que vous aviez déjà vu ce quatrième soldat

3 qui est arrivé ?

4 M. Alilovic (interprétation). - Non. Non, non.

5 M. Terrier. – Pourtant, il semble qu'il y avait une sorte de

6 lien avec la famille de votre femme.

7 M. Alilovic (interprétation). – Non, non absolument pas, il n'y

8 avait pas de lien avec mon épouse, car ma femme, elle est du village d'où

9 il venait ; elle connaissait sa mère et son père, mais elle ne connaissait

10 pas ce jeune homme, parce qu'il était jeune.

11 M. Terrier. – Pour clarifier le transcript, car une de vos

12 réponses n'a pas été inscrite, vous ne connaissiez ni les trois premiers

13 soldats, ni le quatrième et vous n'aviez…

14 M. Alilovic (interprétation). - Non.

15 M. Terrier. – …auparavant jamais vu l'un ou l'autre de ces

16 soldats ?

17 M. Alilovic (interprétation). – Non, non.

18 M. Terrier. – Vous avez dit hier que ce quatrième soldat était

19 en pleurs et évoquait le massacre de sa famille survenu à Ducina. C'est

20 bien cela ?

21 M. Alilovic (interprétation). - Oui. Il faut que je vous

22 répète ?

23 M. le Président. - Il n'y a pas de réponse de la part du témoin

24 à votre question.

25 M. Terrier. – En effet, Monsieur le Président. Monsieur le

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1 témoin, pour que les choses soit bien claires sur la transcription, je

2 disais que vous ne connaissiez aucun des soldats qui sont venus chez vous

3 ce matin, ni les trois premiers, ni le quatrième et, auparavant, vous ne

4 les aviez jamais vus.

5 M. Alilovic (interprétation). - C'est vrai, vous avez raison, je

6 ne les ai jamais vus, je ne les connaissais pas, je ne connaissais même

7 pas le jeune homme, celui qui est arrivé, le quatrième. Je ne savais même

8 pas qu'il était fils de Jure Kegelj. Au moment où il me l'a dit bien

9 évidemment, je le savais.

10 M. Terrier. – Est-ce que vous savez à quelle période le massacre

11 de la famille de ce soldat s'est produit, a été commis ?

12 M. Alilovic (interprétation). – Eh bien, les trois semaines

13 après le deuxième conflit d'Ahmici.

14 (Parenthèse de l'interprète) : Maître Terrier, c'est tout ce que

15 le témoin avait dit.

16 M. Terrier. – Monsieur le témoin, je repose ma question, je ne

17 suis pas sûr que vous l'ayez comprise. Ce témoin est en pleurs, parce que

18 sa famille a été massacrée à Ducina ; c'est ce que vous nous avez dit

19 hier. Ma question est la suivante : est-ce que vous savez ou est-ce qu'il

20 vous a dit à quelle période s'est produit ce massacre ?

21 M. Alilovic (interprétation). - Je pense que ce massacre s'était

22 passé trois semaines avant. Ce soldat, le quatrième qui est arrivé,

23 n'était pas à la maison ce jour-là. Il y avait d'autres frères et sœurs et

24 puis sa mère également qui était à la maison, les enfants également. Et

25 c'est la raison qu'il pleurait, il me racontait cela, il est parti de chez

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1 moi en pleurant et il m'avait dit, il avait dit à mon épouse et à moi-même

2 qu'on lui avait tué sa mère et son père et les cinq frères ; qu'ils

3 avaient pris un enfant, un petit garçon de quatre ans qu'ils ont empalé et

4 qu'ils ont laissé comme ça. C'est ce qu'il m'avait raconté. Moi je ne

5 pouvais strictement rien répondre à une telle

6 chose parce que je n'avais plus de mots. Je suis resté sans mots.

7 M. Terrier. – Ce que cet homme vous a dit s'est produit, à votre

8 connaissance, trois semaines avant qu'il vous en parle ; c'est bien cela ?

9 M. Alilovic (interprétation). - Les trois semaines avant qu'il

10 m'en parle.

11 M. Terrier. – Est-ce que vous savez d'où venait ce soldat

12 lorsqu'il s'est présenté chez vous ?

13 M. Alilovic (interprétation). - Je ne sais pas.

14 M. Terrier. – Est-ce que vous savez dans quelle direction il est

15 reparti ?

16 M. Alilovic (interprétation). - Oui. Je sais, il est parti en

17 direction du bungalow et il y avait les trois autres soldats qui étaient

18 avec lui.

19 M. Terrier. – Ils sont partis ensemble en direction du

20 bungalow ? Ces trois soldats semblaient se connaître ?

21 M. Alilovic (interprétation). - Oui. Tous les quatre sont partis

22 ensemble.

23 M. Terrier. – Vous avez dit hier, Monsieur Alilovic, que votre

24 frère Tomislav était très effrayé par la présence de ces soldats.

25 M. Alilovic (interprétation). - Oui.

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1 M. Terrier. – Vous avez dit aussi que s'il était effrayé, c'est

2 parce qu'il craignait que ces soldats ne l'emmène faire la guerre, en

3 quelque sorte.

4 M. Alilovic (interprétation). - Mon frère était dans une autre

5 pièce, ma femme et moi-même dans l'autre et puis les trois soldats sont

6 rentrés dans la maison. Puis, il y avait une porte, il a ouvert un petit

7 peu la porte qui était entrebâillée et puis ils l'ont vu dans la pièce.

8 Eux-mêmes, ils avaient peur et puis ils ont dit : "Mais pourquoi te

9 caches-tu ?" alors que lui, en effet, il ne se cachait pas, mais c'est

10 comme ça. Il avait l'air et, eux, ils pensaient que lui, il se cachait,

11 c'est la raison pour laquelle ils ont pointé même une arme sur lui.

12 M. Terrier. - Mais pour quelles raisons se cachait-il de ces

13 soldats ? De quoi avait-il peur ? Est-ce que vous pouvez nous le

14 rappeler ?

15 M. Alilovic (interprétation). - Non, non. Il ne se cachait pas,

16 mais il venait de se réveiller, de se lever, il n'était pas habillé, il a

17 entrouvert la porte et puis il était en train de s'habiller et c'est comme

18 ça, il a donné l'air qu'il se cachait. Ces soldats donc le pensaient,

19 qu'il se cachait. C'est la raison pour laquelle également il se cachait,

20 parce que la porte n'était pas ouverte, mais entrouverte.

21 C'est là où je… ils m'ont dit, ce n'est pas moi, c'est plutôt

22 eux qui ont dit : "Qui se trouve de l'autre côté ?" alors moi j'ai

23 rétorqué, j'ai dit : "C'est mon frère".

24 M. Terrier. - Mais je vous rappelle, Monsieur Alilovic, que hier

25 vous nous avez dit que votre frère avait très peur d'être mobilisé.

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1 M. Alilovic (interprétation). - Oui. Mon frère avait peur d'être

2 mobilisé effectivement et sept à dix jours plus tard, il est retourné en

3 Allemagne.

4 M. Terrier. - Mais comment savait-il qu'il risquait d'être

5 mobilisé ou qu'il pouvait l'être ?

6 M. Alilovic (interprétation). - La guerre a commencé et, comme

7 il est apte pour aller combattre, enfin il était en âge de combattre, il

8 craignait qu'éventuellement on aurait pu le mobiliser et puis bien

9 évidemment on aurait pu lui proposer de rejoindre les rangs et de

10 combattre.

11 M. Terrier. - Est-ce que c'est vous qui lui avez dit que ce

12 risque existait ?

13 M. Alilovic (interprétation). - Non, je ne le lui ai pas dit,

14 c'est lui qui bien évidemment s'en rendait compte.

15 M. Terrier. - Est-ce que Tomislav est plus âgé que vous ? Est-ce

16 que c'est votre frère aîné ou est-ce que c'est votre cadet ?

17 M. Alilovic (interprétation). - Il a 18 ans de moins.

18 M. Terrier. - Vous avez dit hier, Monsieur Alilovic, que vous

19 aviez d'excellentes relations avec Zoran et Mirjan Kupreskic, qui sont vos

20 voisins.

21 M. Alilovic (interprétation). - Oui. J'étais toujours et je suis

22 toujours en très bons termes avec mes voisins, je n'ai jamais haï qui que

23 ce soit, ni les Croates, ni les Musulmans, ni les Serbes ; d'ailleurs

24 aujourd'hui, je ne hais personne, ni les uns, ni les autres.

25 M. Terrier. - Vous les considériez comme vos voisins, c'est-à-

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1 dire...

2 M. Alilovic (interprétation). - Bien sûr.

3 M. Terrier. - Est-ce qu'il est arrivé que vous les receviez chez

4 vous ?

5 M. Alilovic (interprétation). - Mais bien sûr. Ils venaient

6 prendre un café chez moi et puis ils travaillaient chez moi également, ils

7 travaillaient sur les champs. Nous nous rendions visite fréquemment et

8 puis on s'entraidait également. Il n'y avait absolument aucune distinction

9 que l'on faisait entre nous, que ce soient des Musulmans, que ce soit

10 moi... C'était une tradition, une coutume chez nous.

11 M. Terrier. - Est-ce que vous vous souvenez à cette époque-là

12 être allé chez eux ? Chez l'un ou chez l'autre ?

13 M. Alilovic (interprétation). - Je n'ai pas compris.

14 M. Terrier. - Est-ce que vous vous souvenez si, à cette époque-

15 là, je parle du mois d'avril 93, vous vous souvenez être allé soit chez

16 Zoran Kupreskic, soit chez Mirjan Kupreskic ?

17 M. Alilovic (interprétation). - Non. Non, non. Je ne me souviens

18 pas et puis je ne pense pas avoir été en visite chez eux.

19 M. Terrier. - Mais vous avez dit que vous alliez souvent en

20 visite.

21 M. Alilovic (interprétation). - Il y a 2 ou 3 ans, oui, mais en

22 93, je ne suis pas allé une seule fois chez leurs parents, ni chez eux.

23 M. Terrier. - Est est-ce que qu'en 93 ou en 92, Zoran et

24 Mirjan Kupreskic venaient chez vous ?

25 M. Alilovic (interprétation). - Non. Je ne me souviens pas et

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1 puis mon épouse non plus, elle ne m'avait pas dit qu'ils étaient venus

2 chez nous.

3 M. Terrier. - Mais lorsque vous avez dit tout à l'heure que

4 Zoran et Mirjan Kupreskic et vous mêmes, vous vous rencontriez

5 fréquemment, à quelle époque vous vous référez ?

6 M. Alilovic (interprétation). - Je pensais au dimanche ou bien

7 éventuellement à un certain nombre de manifestations ou des

8 rassemblements. Il y avait des célébrations diverses, c'est lors de ces

9 célébrations que je les rencontrais.

10 M. Terrier. - Lorsque vous avez dit tout à l'heure que Zoran et

11 Mirjan Kupreskic pouvaient travailler dans votre champ, c'est ce que vous

12 avez dit, à quelle époque vous vous référez ?

13 M. Alilovic (interprétation). - Moi, je l'ai dit et puis je

14 pensais que les Musulmans pouvaient venir travailler chez moi, comme

15 c'était le cas. Hazim Pezer pendant des années a travaillé sur les champs

16 et avec les chevaux, autour de mes chevaux, il s'occupait de mes chevaux,

17 mais je n'ai pas parlé des autres. Je n'ai pas parlé des Kupreskic.

18 M. Terrier. - Je vous demande une seconde, Monsieur le

19 Président.

20 Bien. Pour que les choses soient parfaitement claires,

21 Monsieur Alilovic, je vais, avec l'autorisation du Tribunal, vous reposer

22 la question. Vous nous dites que, jamais à cette époque-là, et je parle

23 de 1992, 1993, jamais à cette époque-là, Zoran et Mirjan Kupreskic ne sont

24 venus à votre maison ou sur votre propriété ?

25 M. Alilovic (interprétation). - Non. Je l'affirme. Ils n'avaient

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1 pas besoin de s'y rendre et puis ils ne sont pas venus. Moi non plus, je

2 ne suis pas allé chez eux. Je ne me souviens pas y aller, ni chez l'un, ni

3 chez l'autre.

4 M. Terrier. - Avez-vous déjà à l'époque ces excellentes

5 relations que vous avez évoquées avec eux ?

6 M. Alilovic (interprétation). - Oui. Oui. J'étais en bons termes

7 et toujours.

8 M. Terrier. - Je vous demande une seconde, Monsieur le

9 Président.

10 Je vous remercie, Monsieur Alilovic, je n'ai pas d'autres

11 questions, Monsieur le Président.

12 M. le Président (interprétation). - Merci.

13 M. Alilovic (interprétation). - Merci à vous également.

14 M. le Président (interprétation). - Maître Radovic ?

15 M. Radovic (interprétation). - Je ne vais pas être très long.

16 Hier, le Procureur a essayé de démontrer que vous étiez un témoin peu

17 crédible. Tout d'abord, il vous a posé la question si éventuellement vous

18 connaissiez un autre Jozo Alilovic à part vous. Eh bien, ce Jozo Alilovic,

19 il y a un certain nombre de témoins qui disaient qu'il se trouvait au pont

20 de Radak. Ce qui m'intéresse, Monsieur, c'est de dire aux Juges si

21 véritablement il y a un Jozo Alilovic qui existe ou non. Je pense que, par

22 la suite, vous avez dit qu'il y avait un Jozo Alilovic qui vivait à Vitez.

23 Est-ce que c'est vrai ?

24 M. Alilovic (interprétation). - Oui, effectivement, il y a un

25 Jozo Alilovic à Vitez.

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1 M. Radovic (interprétation). - Et quel est son surnom ?

2 M. Alilovic (interprétation). - Bego, son surnom.

3 M. Radovic (interprétation). - Il se diffère par rapport à vous

4 selon son surnom ?

5 M. Alilovic (interprétation). - Oui.

6 M. Radovic (interprétation). - Lentement, est-ce que vous

7 connaissez les personnes qui habitent Donja Rovna ?

8 M. Alilovic (interprétation). - Oui.

9 M. Radovic (interprétation). - Est-ce qu'un surnom Josko vous

10 dit quelque chose ?

11 M. Alilovic (interprétation). - Oui, c'est ce que je voulais

12 vous dire, mais Josko, il n'est pas dans la municipalité de Vitez, mais la

13 municipalité de Busovaca.

14 M. Radovic (interprétation). - Ce que je vous demandais, c'est

15 de savoir quel était son nom ?

16 M. Alilovic (interprétation). - Josko Alilovic. Il peut-être

17 Jozo, mais de toute façon, tous, nous l'appelons Josko Alilovic.

18 M. Radovic (interprétation). - Pourquoi vous n'en avez pas parlé

19 hier ?

20 M. Alilovic (interprétation). - Je n'en ai pas parlé, parce il

21 n'est pas à Vitez ni dans la municipalité de Vitez, il est dans la

22 municipalité de Busovaca et, moi, je ne me suis pas concentré sur

23 Busovaca.

24 M. Radovic (interprétation). - Et ce jeune homme qu'on a

25 conduit, il y avait les deux soldats qui l'ont accompagné dans votre

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1 maison, on en a parlé, on ne va pas mentionner son nom, est-ce que ce

2 jeune homme savait comment vous vous appeliez ?

3 M. Alilovic (interprétation). - Oui et comment il le savait.

4 M. Radovic (interprétation). - Dites, est-ce que pour vous,

5 c'est étrange que ces soldats-là également savaient comment vous vous

6 appeliez ?

7 M. Alilovic (interprétation). - Hier, je l'ai dit que j'étais un

8 petit peu étonné de voir que moi je ne reconnais pas des soldats, pas un

9 sur les quatre, alors qu'eux, ils me connaissaient. Ils m'ont appelé en

10 prononçant mon nom Jozo.

11 M. Radovic (interprétation). - Mais est-ce que ce jeune homme,

12 au moment où il s'est arrêté devant chez vous, avait dit éventuellement

13 comment vous vous appeliez ?

14 M. Alilovic (interprétation). - Probablement. C'est probablement

15 lui qui avait dit comment je m'appelais.

16 M. Radovic (interprétation). - Dites, à quel moment étiez-vous

17 garde-chasse ? De quelle année à quelle année ? Vous avez dit je pense le

18 moment où vous êtes arrêté, mais est-ce

19 que vous pouvez nous donner des précisions à ce sujet-là ?

20 M. Alilovic (interprétation). - Je pense pendant 20 ans. J'ai

21 été garde-chasse pendant 20 ans et je le suis encore maintenant.

22 M. Radovic (interprétation). - D'accord. Dites-nous quel était

23 le secteur que vous protégiez ?

24 M. Alilovic (interprétation). - J'étais garde-chasse au niveau

25 de la route Poculica jusqu'à Kuber, enfin tout ce secteur qui couvre

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1 Poculica et ensuite Zenica et puis Kaonik et Kuber.

2 M. Radovic (interprétation). - Et vous avez dit que votre frère

3 se trouvait dans la pièce qui était à côté, que la porte était

4 entrouverte.

5 M. Alilovic (interprétation). - Oui.

6 M. Radovic (interprétation). - Et cette pièce se trouvait dans

7 quelle maison ?

8 M. Alilovic (interprétation). - Dans la vieille maison.

9 M. Radovic (interprétation). - Et ce jeune homme, nous en avons

10 parlé, quand ces soldats l'ont accompagné, votre frère se trouvait dans la

11 pièce à côté, ce jeune homme se trouvait où à ce moment-là très précis ?

12 M. Alilovic (interprétation). - Dans la cuisine.

13 M. Radovic (interprétation). - Est-ce que vous pouvez préciser

14 encore une fois ?

15 M. Alilovic (interprétation). - Nous étions dans la cuisine tous

16 les deux.

17 M. Radovic (interprétation). - C'est tout, Monsieur le

18 Président, je n'ai plus de questions.

19 M. le Président (interprétation). - Merci. Nous n'avons plus de

20 questions ? Monsieur Alilovic, merci d'être venu déposer devant nous à

21 La Haye, vous pouvez désormais vous retirer. Je vous remercie.

22 M. Alilovic (interprétation). - Je vous remercie.

23

24 (Le témoin est reconduit hors du prétoire.)

25 (Le témoin est introduit dans le prétoire.)

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1 M. le Président (interprétation). – Bonjour, Monsieur Vidovic.

2 M. Vidovic (interprétation). - Bonjour, Monsieur le Président.

3 M. le Président (interprétation). – Veuillez donner lecture de

4 la déclaration solennelle, s'il vous plaît.

5 M. Vidovic (interprétation). - Je déclare solennellement que je

6 dirai la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

7 M. le Président (interprétation). – Merci. Veuillez vous

8 asseoir.

9 Maître Slokovic Glumac vous avez la parole.

10 Mme Glumac (interprétation). - Merci. Bonjour, Monsieur Vidovic,

11 veuillez vous présenter.

12 M. Vidovic (interprétation). - Je m'appelle Dragan Vidovic. Je

13 suis né le 10 janvier 1960 dans le village de Pirici qui fait partie de la

14 municipalité de Vitez.

15 Mme Glumac (interprétation). – Monsieur Vidovic, veuillez

16 indiquer sur la photographie aérienne, qui se trouve à votre droite,

17 l'endroit où se situe votre maison, où vous habitiez à l'époque et où vous

18 habitez aujourd'hui.

19 M. Vidovic (interprétation). - Est-ce que je peux me lever ?

20 Mme Glumac (interprétation). - Mais bien sûr.

21 M. Vidovic (interprétation). - Est-ce que vous auriez

22 l'obligeance de répéter votre question ?

23 Mme Glumac (interprétation). - Votre maison, où se trouve-t-

24 elle ? Dans quelle partie du village ?

25 M. Vidovic (interprétation). - A 250, 300 mètres de distance de

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1 la route principale. A cet endroit-ci, à peu près.

2 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que vous pouvez distinguer

3 votre maison sur la carte aérienne ?

4 M. Vidovic (interprétation). - Ma maison, oui, oui, c'est ici.

5 Juste ici.

6 Mme Glumac (interprétation). - Qui étaient vos voisins les plus

7 proches ? Étaient-ce des Croates dans ce quartier ?

8 M. Vidovic (interprétation). – Eh bien, mes voisins les plus

9 proches, mes premiers voisins étaient les Kupreskic ; dans la partie haute

10 il y avait Mirko, Gordana Vidovic.

11 Mme Glumac (interprétation). – Pourriez-vous nous montrer leurs

12 maisons sur la photographie aérienne, par rapport à la vôtre.

13 M. Vidovic (interprétation). - Voici les maisons des Kupreskic,

14 quant à la maison de Gordana Vidovic, elle est ici.

15 Mme Glumac (interprétation). - Et qu'en est-il de

16 Mirko Vidovic ?

17 M. Vidovic (interprétation). - Sa maison est là aussi.

18 Mme Glumac (interprétation). - Quels étaient vos voisins

19 musulmans les plus proches ?

20 M. Vidovic (interprétation). - Il y avait Suljo Pezer, son frère

21 Smail Pezer.

22 Mme Glumac (interprétation). - Et de quel côté de la route

23 habitait-il ?

24 M. Vidovic (interprétation). - Du côté droit. Il y avait

25 Hazim Ahmic, Abdulah Ahmic, Sakib Pezer, ainsi que son fils Zakir Pezer et

Page 8036

1 ils sont du côté gauche. Je parle ici de Sakib et de Zakir Pezer dont les

2 maisons se trouvent du côté gauche.

3 Mme Glumac (interprétation). - Il y a une route qui vient à

4 Ahmici et qui, en fait, est une bifurcation par rapport à la route

5 principale. Par rapport à cette route, où se situent les maisons ? De quel

6 côté étaient les maisons musulmanes et où se trouvaient les maisons

7 croates dans cette partie du village ?

8 M. Vidovic (interprétation). - La plupart des Croates se

9 trouvaient du côté gauche, alors que les Musulmans étaient du côté droit.

10 Il n'y avait que trois maisons croates du côté gauche : il y avait la

11 maison de Vlatko Kupreskic, Zoran Kupreskic et Ante Kupreskic ; il s'agit

12 là du père de Mirjan Kupreskic.

13 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce qu'il y avait des maisons

14 croates du côté droit de la route, si l'on voit cette route principale qui

15 traverse Ahmici et on voit aussi la route qui mène à Ahmici-le-haut. Est-

16 ce que, de ce côté-là de la route, il y avait des maisons croates ?

17 M. Vidovic (interprétation). - Si vous voyez la route qui mène à

18 Gornji Ahmici, Ahmici-le-haut, là il n'y a pas de maisons croates, ce sont

19 toutes des maisons musulmanes.

20 Mme Glumac (interprétation). - Je vous remercie,

21 Monsieur Vidovic, veuillez vous rasseoir.

22 J'ai ici une reproduction de la photographie aérienne. Veuillez

23 y indiquer votre maison et vous garderez d'ailleurs pendant quelques

24 instants cette photographie, parce que vous allez y apposer d'autres

25 annotations. Veuillez remettre les photocopies aux Juges.

Page 8037

1 Mme Ameerali (interprétation). - Il s'agit du document D05/2.

2 (L'huissier s'exécute.)

3 M. Vidovic (interprétation). - Vous voulez que j'indique ma

4 maison ?

5 Mme Glumac (interprétation). - Oui.

6 M. Vidovic (interprétation). - Voilà donc, c'est la maison qui

7 se trouve de ce côté-ci.

8 Mme Glumac (interprétation). - Et à côté de votre maison,

9 qu'est-ce que c'est ? Un bosquet, un bois ?

10 M. Vidovic (interprétation). - Non, il y a simplement un pin.

11 C'est un seul arbre.

12 Mme Glumac (interprétation). - Pourriez-vous également indiquer

13 sur cette photographie aérienne l'endroit où se trouve la maison de

14 Mirko Vidovic par rapport à la

15 vôtre ? Inutile d'apposer un cercle, contentez-vous de nous la montrer du

16 pointeur.

17 M. Vidovic (interprétation). - C'est ici précisément.

18 Mme Glumac (interprétation). - Et qu'en est-il de la maison de

19 Gordana Vidovic ?

20 M. Vidovic (interprétation). - C'est ici.

21 Mme Glumac (interprétation). - Ce qui veut dire que, dans cette

22 partie du village, c'était là les trois maisons croates qu'il y avait ?

23 M. Vidovic (interprétation). - Tout à fait.

24 Mme Glumac (interprétation). - Quand les patrouilles

25 villageoises, les gardes villageoises ont-elles commencé à fonctionner à

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1 Ahmici ? Qui les a commencées ? Est-ce qu'il s'agissait de gardes

2 conjointes ? De patrouilles conjointes ? Comment ça s'est passé ?

3 M. Vidovic (interprétation). - Au début, ce sont les musulmans

4 qui ont commencé les patrouilles de nuit. Je pense que cela a dû se passer

5 en janvier ou février 92. Puis, vers le mois d'avril ou de mai, nous aussi

6 nous veillions au bon ordre des routes, nous les Croates.

7 Mme Glumac (interprétation). - Vous parlez de ces gardes

8 villageoises uniquement dans ce quartier du village, que vous vous

9 habitiez, ou est-ce que vous parliez de garde villageoise pour toute la

10 région d'Ahmici, Pirici, Santici ?

11 M. Vidovic (interprétation). - Oui, je ne sais pas ce qui se

12 passait là.

13 Mme Glumac (interprétation). - De quoi parlez-vous alors

14 précisément ?

15 M. Vidovic (interprétation). - Moi, je ne parle que des gardes

16 villageoises qu'il y avait dans notre partie du village.

17 Mme Glumac (interprétation). - Vous avez commencé à faire des

18 patrouilles de nuit, dites-vous, vers avril-mai 92. Est-ce que vous aviez

19 encore des rapports avec les gardes musulmanes ?

20 M. Vidovic (interprétation). - Je pense que, le soir, nous

21 allions ensemble, nous partions ou nous parcourions les routes ensemble.

22 Il arrivait qu'eux passent à la partie supérieure, vers la partie qu'ils

23 occupaient, mais nous nous rencontrions la plupart du temps.

24 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce qu'il y avait une

25 structure de commandement organisé ?

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1 M. Vidovic (interprétation). - Non.

2 Mme Glumac (interprétation). - Parmi les gardes pour organiser

3 ces services ?

4 M. Vidovic (interprétation). - Non.

5 Mme Glumac (interprétation). - A l'époque, disposiez-vous d'une

6 arme ?

7 M. Vidovic (interprétation). - Non.

8 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que les Musulmans, eux,

9 avaient des armes à l'époque ?

10 M. Vidovic (interprétation). - Pour autant que j'ai pu en juger,

11 que je le vois lorsque nous nous rencontrons au cours de ces patrouilles

12 de nuit, je n'ai vu qu'un fusil que portait Omer Ahmic et je crois que

13 c'était une arme qui avait été confectionnée de façon artisanale.

14 Mme Glumac (interprétation). - Quand les Musulmans ont ils

15 commencé à s'armer ? Savez-vous à quel moment ils ont reçu des armes ?

16 M. Vidovic (interprétation). - Début mai, j'étais chez moi et

17 puis venant de la direction de Vitez, donc de la route principale en

18 direction d'Ahmici-le-haut, un camion est passé devant ma maison, au

19 volant se trouvait Muhamed Pezer et je me souviens bien, c'était un camion

20 vert, et à l'intérieur de ce camion, j'ai vu beaucoup d'armes, d'armement,

21 de caisses de munitions, de douilles.

22 Mme Glumac (interprétation). - Avez-vous vu le type d'armes

23 qu'ils ont amené dans le village ?

24 M. Vidovic (interprétation). - Eh bien à bord de ce camion, il y

25 avait trois musulmans debout, en tout cas un était debout et il tenait à

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1 la main un M53.

2 Mme Glumac (interprétation). - Avez-vous pu déterminer le type

3 d'armes qu'il y avait à l'intérieur du camion ?

4 M. Vidovic (interprétation). - J'ai pu constater que c'était

5 surtout des fusils, des armes automatiques.

6 Mme Glumac (interprétation). - Vous nous dites que cela s'est

7 passé au début du mois de mai 92 ?

8 M. Vidovic (interprétation). - Oui.

9 Mme Glumac (interprétation). - Avez-vous appris, avez-vous

10 entendu dire que des Croates avaient reçu des armes de Slimen ?

11 M. Vidovic (interprétation). - Non, jamais je n'ai entendu dire

12 ça de personne, mais je sais que nous, les Croates qui habitions dans

13 cette partie du village, n'avons rien reçu de qui que ce soit et nous

14 n'étions pas non plus au courant.

15 Mme Glumac (interprétation). - Vous avez parlé de ces

16 patrouilles disons conjointes. Elles ont duré combien de temps ?

17 M. Vidovic (interprétation). - Jusqu'à l'été. Et puis pour les

18 patrouilles de nuit, Mirko Vidovic et Mirjan Kupreskic étaient présents,

19 ils sont allés à l'école élémentaire d'Ahmici à l'intérieur, mais on les a

20 éjectés. Nous n'avions plus le droit d'entrer dans cette école, nous,

21 Croates, ce qui veut dire qu'à partir de ce moment là, nous n'avons plus

22 fait de patrouille conjointe.

23 Mme Glumac (interprétation). - Et qu'est-ce qu'il avait à

24 l'intérieur de l'école ?

25 M. Vidovic (interprétation). - Un émetteur radio. Ils étaient de

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1 faction de façon ininterrompue.

2 Mme Glumac (interprétation). - De quel émetteur s'agissait-il ?

3 M. Vidovic (interprétation). - Le groupe 12.

4 Mme Glumac (interprétation). - Comment savez-vous qu'ils

5 montaient la garde jour et nuit près de l'émetteur radio ?

6 M. Vidovic (interprétation). - Moi, j'habite tout près, il y a

7 que 70 mètres à peu près qui me séparent de l'école et la nuit, je voyais

8 qu'il y avait toujours une ampoule qui brûlait dans une classe de l'école

9 et j'ai pu le voir aussi pendant la journée lorsque je passais devant

10 l'école.

11 Mme Glumac (interprétation). - Fort bien. Par la suite, il n'y a

12 plus eu de patrouille conjointe, n'est-ce pas ?

13 M. Vidovic (interprétation). - C'est exact.

14 Mme Glumac (interprétation). - Après tout ce qui s'est passé,

15 pourriez-vous nous dire si c'était des patrouilles conjointes organisées

16 où par exemple il y avait deux Croates et deux Musulmans qui faisaient la

17 patrouille de nuit régulièrement ou est-ce que c'était plus… vous vous

18 rencontriez, est-ce qu'il y avait un horaire ?

19 M. Vidovic (interprétation). - Non, non, il n'y avait pas

20 d'horaire. Par hasard, nous nous rencontrions. C'est comme cela que cela

21 se passait.

22 Mme Glumac (interprétation). - Dans votre quartier du village,

23 Pirici, là vous avez dit qu'il y avait des maisons croates. Qui montait la

24 garde ? Qui faisait ces tours de garde ?

25 M. Vidovic (interprétation). - Vous parlez des Croates ?

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1 Mme Glumac (interprétation). - Oui, je parle des Croates.

2 M. Vidovic (interprétation). - Et bien je vais commencer par

3 moi-même et puis il y avait Mirko Vidovic, Zoran Kupreskic,

4 Mirjan Kupreskic, Ivica Kupreskic et puis Mirko Sakic, Drago Gergic,

5 Miro Shamija, Nicolas Shamija. Est-ce que je les ai cités tous ? Je ne

6 sais pas. Je ne me souviens pas. Nous étions à peu près 14.

7 Mme Glumac (interprétation). - C'est le nombre que vous avez

8 établi ?

9 M. Vidovic (interprétation). - Oui.

10 Mme Glumac (interprétation). - Vous avez donné par exemple le

11 nom de Mirko Sakic. Est-ce qu'il faisait régulièrement ces patrouilles ?

12 M. Vidovic (interprétation). - Non. Quelquefois, cela suscitait

13 des querelles entre nous, mais lui n'a fait peut-être que deux ou trois

14 tours de garde du village.

15 Mme Glumac (interprétation). - Pensiez-vous qu'il lui incombait,

16 que c'était son devoir de monter la garde aussi ?

17 M. Vidovic (interprétation). - Absolument. C'était son village

18 et, si c'est mon devoir à moi, c'est le sien lui aussi.

19 Mme Glumac (interprétation). - Vous faisiez partie des forces de

20 réserve de la police pendant un certain temps, n'est-ce pas ?

21 M. Vidovic (interprétation). - Oui.

22 Mme Glumac (interprétation). - Qui était le commandant des

23 forces de réserve de la police dans le village ?

24 M. Vidovic (interprétation). – Eh bien, le commandant des forces

25 de la police de réserve, c'était Zahid Ahmic.

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1 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce Zahid Ahmic était croate

2 ou musulman ?

3 M. Vidovic (interprétation). - Musulman.

4 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que des armes ont été

5 fournies aux membres de la police de réserve ?

6 M. Vidovic (interprétation). - Oui. A un moment de l'année 1991,

7 lorsqu'on a fourni des armes à ces forces de police de réserve.

8 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que vous avez reçu une

9 arme à ce moment-là ?

10 M. Vidovic (interprétation). - Oui.

11 Mme Glumac (interprétation). - Et cette arme, vous l'aviez chez

12 vous ? Est-ce que vous l'avez gardée chez vous ?

13 M. Vidovic (interprétation). – Deux ou trois mois plus tard,

14 j'ai été avisé par mon entreprise qu'il fallait que je me présente au

15 travail. Je suis allé à mon lieu de travail et c'est là que j'ai restitué

16 mon arme et l'uniforme que j'avais de la police de réserve.

17 Mme Glumac (interprétation). - A qui avez-vous remis arme et

18 uniforme ?

19 M. Vidovic (interprétation). - Puisque Zahid Ahmic était le

20 commandant, c'est à lui que j'ai remis l'uniforme et l'arme.

21 Mme Glumac (interprétation). - Combien de membres de la police

22 de réserve y avait-il dans le village, à votre avis ? Ou qui soient restés

23 membres après vous ?

24 M. Vidovic (interprétation). - Si mes souvenirs ne me trompent

25 pas, il y avaient Sakib Ahmic, je ne me souviens pas, mais je crois que,

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1 lui, effectivement, est resté dans ces rangs. Il y avait aussi Kermo.

2 Mme Glumac (interprétation). - Vous ne vous souvenez que des

3 deux noms que vous venez de citer ?

4 M. Vidovic (interprétation). – Oui.

5 Mme Glumac (interprétation). - Fort bien. Vous avez continué à

6 travailler ?

7 M. Vidovic (interprétation). – A Viendeniza, c'était une société

8 commerciale où j'avais déjà travaillé auparavant. J'ai repris mes

9 anciennes activités.

10 Mme Glumac (interprétation). - Vous aviez été renvoyé à la

11 maison, pour ainsi dire -parce qu'il n'y avait pas assez de travail- au

12 chômage technique ?

13 M. Vidovic (interprétation). - Oui.

14 Mme Glumac (interprétation). – Ce qui veut dire que de mars 1992

15 jusqu'à… je ne sais pas quelle date, vous avez travaillé a Viedovica ?

16 M. Vidovic (interprétation). – Eh bien, jusqu'au moment où le

17 second conflit a commencé.

18 Mme Glumac (interprétation). - Fort bien. Est-ce qu'à un moment

19 donné, vous avez appartenu de façon active à une unité du HVO avant le

20 16 avril 1993 ?

21 M. Vidovic (interprétation). - Non.

22 Mme Glumac (interprétation). - Vous êtes-vous jamais rendu sur

23 la ligne de front contre les Serbes ?

24 M. Vidovic (interprétation). – Non, j'avais un emploi. J'étais

25 employé, je ne suis pas allé sur la ligne de front.

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1 Mme Glumac (interprétation). - Parlons du premier conflit, celui

2 du 20 octobre 1992. De quoi vous souvenez-vous ? Des événements précédents

3 immédiatement le début du conflit ? Qu'est-ce qui s'est passé la veille,

4 le 19 octobre ? Est-ce que vous aviez des renseignements vous indiquant

5 que quelque chose allait se produire ?

6 M. Vidovic (interprétation). - Nous ne savions rien, tout

7 paraissait normal, je suis allé au travail, j'en suis revenu comme

8 d'habitude.

9 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que vous savez si un

10 barrage routier avait été érigé à proximité du cimetière ?

11 M. Vidovic (interprétation). - Non, je n'étais pas au courant.

12 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que vous saviez qu'il y

13 avait un autre barrage routier quelque part ?

14 M. Vidovic (interprétation). – Oui, je savais qu'il y avait un

15 barrage routier établi sur la route qui va à Ahmici à l'entrée du village,

16 car il y est resté plusieurs jours et je passais par là lorsque j'allais

17 au travail à Vitez, lorsque je revenais de Vitez.

18 Mme Glumac (interprétation). - Sur quelle route se trouvait ce

19 barrage routier ?

20 M. Vidovic (interprétation). - A l'entrée même d'Ahmici. A vingt

21 ou trente mètres de distance de la route principale.

22 Mme Glumac (interprétation). - Et quel aspect présentait ce

23 barrage routier ?

24 M. Vidovic (interprétation). - Il y avait des espèces de chevaux

25 d'arçon et une poutre qui avaient été placée sur ces deux morceaux de

Page 8046

1 bois. Il y avait aussi des mines qui avaient été posées, une mine de

2 chaque côté de la route, une mine antichar.

3 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce qu'il y avait autre chose

4 sur la route ?

5 M. Vidovic (interprétation). - Je crois que quelque chose avait

6 été bâti ou construit avec des blocs et ceci, c'était à droite lorsque

7 l'on va vers Ahmici. Ils étaient assis sur ces blocs lorsqu'ils étaient de

8 faction près du barrage.

9 Mme Glumac (interprétation). - Quand vous parlez d'"eux", c'est

10 qui ?

11 M. Vidovic (interprétation). - Les Musulmans.

12 Mme Glumac (interprétation). - Vous nous avez dit que ce barrage

13 routier restait là plusieurs jours.

14 M. Vidovic (interprétation). - Oui.

15 Mme Glumac (interprétation). - Et que faisaient les Musulmans à

16 ce barrage routier ? Qu'avaient-ils pour fonction ?

17 M. Vidovic (interprétation). – Eh bien, ils vérifiaient

18 l'identité de quiconque entrait dans le village, ils demandaient à ces

19 personnes d'arrêter et les fouillaient. Le soir, ils m'ont même arrêté,

20 moi, à mon retour de Vitez ; lorsqu'ils se sont rendus compte que c'était

21 moi, ils m'ont laissé passer.

22 Mme Glumac (interprétation). – Ont-ils érigé ce barrage routier

23 de leur propre initiative ou en accord avec les Croates ?

24 M. Vidovic (interprétation). - Non, il n'y avait pas d'accord

25 avec les Croates ; ils l'ont fait de leur propre initiative.

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1 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que vous leur avez demandé

2 ce qu'ils faisaient à cet endroit ? Est-ce que vous leur avez dit que

3 votre maison n'était pas loin ? Est-ce que vous vous êtes plaint d'être

4 stoppé par eux ?

5 M. Vidovic (interprétation). - Non. Je ne leur ai pas parlé,

6 mais cela m'embêtait quand même puisque ma maison n'était pas loin.

7 Mme Glumac (interprétation). - Et les personnes qui tenaient ce

8 barrage routier, étaient-elles en uniforme ou avaient-elles des vêtements

9 civils ?

10 M. Vidovic (interprétation). - Certains avaient un uniforme,

11 d'autres étaient en civil.

12 Mme Glumac (interprétation). - Et qu'en est-il d'armes ?

13 M. Vidovic (interprétation). - Ils étaient armés d'armes

14 automatiques. Chacun des hommes, à ce barrage routier, avait une arme

15 automatique.

16 Mme Glumac (interprétation). - Vous souvenez vous le 19 octobre…

17 D'abord, à quelle heure d'habitude rentriez-vous chez vous du travail ?

18 M. Vidovic (interprétation). - J'avais coutume de rentrer du

19 travail vers 15 heures 30 et ça s'est passé comme ça ce jour-là.

20 Mme Glumac (interprétation). - Vous souvenez-vous du nombre

21 d'hommes qui tenaient ce barrage routier ?

22 M. Vidovic (interprétation). - Je ne sais plus combien il y en

23 avait. Trois, quatre, peut-être cinq.

24 Mme Glumac (interprétation). - Connaissiez-vous ces personnes,

25 étaient-elles du village ?

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1 M. Vidovic (interprétation). - Oui.

2 Mme Glumac (interprétation). - Avez-vous des noms ?

3 M. Vidovic (interprétation). - Il y avait sous Suljo Ahmic, je

4 me souviens de lui, il y avait aussi Mines Ahmic, Suad Ahmic, qui était là

5 aussi. Qui y avait-il d'autre ? Je ne me rappelle plus.

6 Mme Glumac (interprétation). - Et ce soir-là, ce jour-là,

7 qu'avez-vous fait ?

8 M. Vidovic (interprétation). - J'étais rentré du travail et j'ai

9 vaqué à mes occupations quotidiennes. Ce soir-là, c'était mon tour d'aller

10 monter la garde à partir de 11 heures jusqu'à 1 heure du matin. J'ai fait

11 la patrouille avec Mirko Vidovic.

12 Mme Glumac (interprétation). - Et ces patrouilles, comment

13 étaient-elles organisées ? Quand commençaient-elles ? Quand finissaient-

14 elles et de quelle durée étaient-elles ?

15 M. Vidovic (interprétation). - Elles commençaient à 19 heures,

16 se terminaient à 7 heures du matin.

17 Mme Glumac (interprétation). - Fort bien. Donc vous, vous

18 commenciez à 11 heures, n'est-ce pas ? Votre tour de garde commençait à

19 11 heures et poursuit jusqu'à 13 heures. Est-ce qu'il s'est passé quelque

20 chose d'inusité ce jour-là ?

21 M. Vidovic (interprétation). - Que dire ou comment dire ? Nous

22 passions la relève au tour de garde suivant. Nous sommes allés à la maison

23 de Niko Sakic.

24 Mme Glumac (interprétation). - Bien. Poursuivez, Monsieur.

25 M. Vidovic (interprétation). - Puis nous avons été remplacés par

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1 Miro Samija et Drago Perkic. C'est alors que Mirko Vidovic, qui faisait le

2 tour de garde avec moi, est rentré chez lui et moi je suis rentré chez

3 moi. Alors que je passais devant la maison, ou plus exactement de l'étable

4 de Gordana Vidovic, j'ai vu venant de la direction d'Ahmici-le-haut un

5 groupe important de soldats armés.

6 M. Vidovic (interprétation). - Comment est-ce que vous avez vu

7 cela ?

8 M. Vidovic (interprétation). - Étant donné qu'on a une bonne vue

9 depuis l'étable en direction de l'entrepôt de Vlatko Kupreskic où il y

10 avait une lumière qui brûlait, je voyais bien, j'aurais même pu faire le

11 décompte des hommes faisant partie de ce groupe si j'avais voulu.

12 Mme Glumac (interprétation). - Eh bien, combien de soldats y

13 avait-il, à peu près, d'après vous ?

14 M. Vidovic (interprétation). - De 30 à 40.

15 Mme Glumac (interprétation). - Et comment étaient-ils vêtus ?

16 Étaient-ils en uniforme, avez-vous pu voir ?

17 M. Vidovic (interprétation). - Je me suis dissimulé derrière

18 l'étable, j'ai attendu qu'ils passent devant. Ils n'étaient qu'à

19 cinq mètres de distance de moi. C'est ainsi que j'ai pu voir que certains

20 étaient en uniforme et d'autres en vêtement civil.

21 Mme Glumac (interprétation). - Avez-vous vu dans quelle

22 direction ils sont partis ?

23 M. Vidovic (interprétation). - Mais bien sûr. D'abord, j'étais

24 très curieux moi-même, je les ai suivis du regard et ce groupe est entré

25 dans l'école primaires d'Ahmici.

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1 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que vous avez averti

2 quelqu'un, qui que ce soit de cela ?

3 M. Vidovic (interprétation). - J'ai trouvé cela un peu bizarre

4 qu'un tel groupe, aussi important, arrive à ce moment-là de la nuit, mais

5 ils avaient déjà fait des exercices ou s'étaient entraînés auparavant et

6 je me suis dit "Oh, ça ne fait partie que d'un exercice" et je n'ai pas

7 pensé qu'il était nécessaire d'informer qui que ce soit. Pour moi, ce

8 n'était rien de vraiment spécial ou particulier.

9 Mme Glumac (interprétation). - A l'époque, est-ce qu'il était

10 courant de voir des groupes d'hommes armés, de 30 à 40 hommes armés, sans

11 pour autant opposer de réaction ?

12 M. Vidovic (interprétation). - Non, ce n'était pas quelque chose

13 de courant, je n'avais jamais vu un tel groupe auparavant. On n'avait pas

14 eu de problème avant et je me suis dit qu'il n'y en aurait pas à ce

15 moment-là.

16 Mme Glumac (interprétation). - Il n'y avait pas eu beaucoup de

17 conflits auparavant opposants Croates et Musulmans ? C'est ça que vous

18 voulez dire ?

19 M. Vidovic (interprétation). - Oui, précisément.

20 Mme Glumac (interprétation). - Fort bien. Et qu'est-ce que vous

21 avez fait après cela ? Vous avez vu ces hommes qui entraient dans l'école,

22 qu'avez-vous fait ?

23 M. Vidovic (interprétation). - Je suis entré chez moi et je suis

24 allé me coucher.

25 Mme Glumac (interprétation). - A quelle heure vous êtes vous

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1 réveillé et qu'est-ce qui vous a réveillé ?

2 M. Vidovic (interprétation). - Vers 5 heures du matin, j'ai été

3 réveillé par une détonation très forte. Je me suis levé, tous ceux qui se

4 trouvaient dans la maison, mes parents, ma femme, mes enfants, se sont

5 levés, nous avions peur. Nous nous sommes habillés et puis nous nous

6 sommes assis là, sans trop savoir ce qui se passait. Une heure et demi

7 s'est écoulée, je pense, et vers 6 heures 30, nous avons entendu des coups

8 de feu très drus venant de la mosquée, du cimetière, de la route

9 principale. C'est du moins ce que je pouvais estimer depuis la maison en

10 question.

11 Mme Glumac (interprétation). - Avez-vous quitté votre maison ?

12 M. Vidovic (interprétation). - Non, nous n'avons pas quitté la

13 maison, il était impossible de sortir, parce qu'il y avait des balles qui

14 volaient partout et qu'il y en avait même qui tombaient du toit de ma

15 maison. Nous avions vraiment peur. On entendait les balles.

16 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que vous entendiez les

17 balles tomber ?

18 M. Vidovic (interprétation). - Tout à fait. C'est pour ça qu'on

19 n'osait pas quitter la maison. Puis vers à peu près 7 heures 30, il y a eu

20 une petite accalmie et nous nous sommes

21 précipités vers l'abri de Niko Sakic. Celui qui se trouve dans la maison

22 de Niko Sakic.

23 Mme Glumac (interprétation). - Pourquoi être allés là ? Pourquoi

24 ne pas être restés à la maison ? Est-ce que votre maison n'avait pas un

25 cellier, un sous-sol ?

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1 M. Vidovic (interprétation). - On avait peur. On avait peur de

2 ces coups de feu. C'était la première fois que ça nous arrivait, c'est la

3 raison pour laquelle nous avons quitté la maison pour nous échapper.

4 Mme Glumac (interprétation). - Donc vous avez installé votre

5 famille dans le sous-sol de Niko Sakic et vous, où êtes vous allé ?

6 M. Vidovic (interprétation). - Moi, je ne suis pas entré dans

7 l'abri, je suis passé par le haut de la maison de Niko.

8 Mme Glumac (interprétation). - Et qui avez-vous rencontré là ?

9 M. Vidovic (interprétation). - J'ai vu mes voisins Slavko et

10 Mirko Sakic, Zoran Kupreskic, Mirjan son frère, il y avait aussi

11 Milutin Vidovic, Zravko Vrebac, Miro Vidovic, il y avait aussi

12 Miroslav Puda et d'autres. Il se peut que je ne me souvienne pas de tous

13 les noms.

14 Mme Glumac (interprétation). - Quelle heure était-il à peu

15 près ? Pourriez-vous nous dire si cela s'est passé le matin ?

16 M. Vidovic (interprétation). - Vers 7 heures 45 du matin.

17 Mme Glumac (interprétation). - Combien de temps êtes vous resté

18 devant cette maison ? Est-ce que vous vous êtes éloigné ensuite, est-ce

19 que vous vous êtes rendu ailleurs ?

20 M. Vidovic (interprétation). - Non, non, nous n'y sommes pas

21 restés longtemps, parce que les balles continuaient à voler vers cette

22 maison, nous pouvions d'ailleurs entendre des branches se romprent dans

23 les arbres. Donc nous nous sommes déplacés de 20 à 30 mètres et nous nous

24 sommes cachés dans un petit creux, ce qui était d'ailleurs un abri

25 naturel, parce qu'effectivement, là, les balles ne pouvaient pas nous

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1 atteindre.

2 Mme Glumac (interprétation). - Donc il s'agit d'une dépression

3 qui se trouve près de la maison de Niko Sakic ?

4 M. Vidovic (interprétation). - C'est vrai. C'est la propriété

5 d'Ivo Kupreskic.

6 Mme Glumac (interprétation). - Pouvez-vous nous montrer sur la

7 carte où se trouve cette dépression, ce creux, dans quelle forêt cela se

8 trouve et comment s'appelle cette forêt qui entoure cette dépression ?

9 (Le témoin s'exécute.)

10 M. Vidovic (interprétation). - Ça se trouve ici. C'est là que se

11 trouve cette dépression. Cette dépression appartient à Ivo Kupreskic et

12 cette forêt, ce petit bois, appartient à mon père, Stipan Vidovic.

13 Mme Glumac (interprétation). - Comment s'appelle cette forêt ?

14 M. Vidovic (interprétation). - Elle s'appelle la forêt de

15 Stipan.

16 Mme Glumac (interprétation). - Donc vous vous trouviez dans

17 cette dépression ?

18 M. Vidovic (interprétation). – Oui, oui. Nous nous trouvions là,

19 ici, voilà, au tout début de la dépression.

20 Mme Glumac (interprétation). - Vous pouvez-vous asseoir

21 maintenant.

22 Et ce même jour, est-ce que vous avez participé, d'une manière

23 ou d'une autre, aux événements ?

24 M. Vidovic (interprétation). – Non, non. Nous sommes restés là

25 toute la journée.

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1 Mme Glumac (interprétation). - Mais où avez-vous dormi cette

2 nuit-là et où se trouvait votre famille la nuit ?

3 M. Vidovic (interprétation). - Cette nuit-là, j'ai dormi dans

4 l'étable d'Ivo Kupreskic. Quant à ma famille, elle se trouvait dans

5 l'abri, dans la maison de Niko Sakic, c'est là qu'ils ont passé la nuit.

6 Mme Glumac (interprétation). – Qu'en est-il de l'étable

7 d'Ivo Kupreskic ? S'agit-il de la maison qui se trouve juste à côté de la

8 dépression ? Juste dans la partie où se trouvent les maisons

9 des Kupreskic ?

10 M. Vidovic (interprétation). - Oui, tout à fait à gauche,

11 immédiatement dès que l'on quitte la dépression, c'est là que commence la

12 propriété de cette famille.

13 Mme Glumac (interprétation). - Quand est-ce que les activités de

14 combat se sont arrêtées dans le village ? Quand est-ce que les échanges de

15 coups de feu se sont arrêtés ? Quand est-ce que la situation d'est

16 calmée ?

17 M. Vidovic (interprétation). - A un moment donné dans l'après-

18 midi, les coups de feu se sont arrêtés, on n'en entendait plus.

19 Mme Glumac (interprétation). – Avez-vous pu remarquer que les

20 Musulmans quittaient le village ?

21 M. Vidovic (interprétation). - Oui. Vers 11 heures à peu près,

22 depuis cette dépression, je me suis ensuite rendu à ma maison pour voir ce

23 qui s'y passait, voir s'il y avait des dégâts. Lorsque je suis revenu pour

24 me rendre vers la maison de Niko Sakic, en direction de la dépression,

25 j'ai vu des Musulmans de Zume qui se rendaient dans la direction de

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1 Gornja Ahmici.

2 Mme Glumac (interprétation). – Savez-vous si vos voisins

3 musulmans ont quitté le village ?

4 M. Vidovic (interprétation). - Oui. Ils sont partis, ils ont

5 quitté le village.

6 Mme Glumac (interprétation). - Quand sont-ils revenus ?

7 M. Vidovic (interprétation). - Peut-être trois ou quatre jours

8 plus tard. Ils sont revenus à ce moment-là chez eux. On voyait de la fumée

9 qui sortait de leur cheminée, ce qui était un signe de leur présence.

10 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que vous savez qui s'était

11 mis d'accord sur les conditions de retour de ces Musulmans ? Est-ce que ce

12 retour a été discuté, assorti de conditions ? Est-ce qu'il y a eu donc des

13 discussions avec les Musulmans dans ce sens ?

14 M. Vidovic (interprétation). – Non, non. Je ne me souviens de

15 rien de ce genre.

16 Mme Glumac (interprétation). - Ils sont revenus de leur propre

17 chef ?

18 M. Vidovic (interprétation). - Oui.

19 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que quelqu'un avait

20 garanti leur sécurité ? Est-ce qu'on leur a demandé de rendre les armes ?

21 Vous souvenez-vous de cela.

22 M. Vidovic (interprétation). - Je me souviens que quelqu'un

23 avait demandé que l'on rende, effectivement, des fusils automatiques qui,

24 d'ailleurs, ont été repris au barrage routier près du cimetière. Cela

25 avait été effectivement une demande. Sinon je ne me souviens pas d'autres

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1 conditions.

2 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce qu'il avait été convenu à

3 cette époque, donc après le conflit, d'essayer de mettre sur pied un

4 barrage routier conjoint à Ahmici où il y aurait tant des Musulmans que

5 des Croates ?

6 M. Vidovic (interprétation). – Oui, je me souviens effectivement

7 qu'il y a eu une réunion et qu'à cette réunion, il y a eu un accord suite

8 à cela qui fut adopté, visant à établir un barrage routier à l'entrée

9 d'Ahmici et qu'il y aurait deux Croates et deux Musulmans à ce barrage. Ce

10 serait eux qui feraient le contrôle ensemble.

11 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que cela a été mis en

12 pratique ?

13 M. Vidovic (interprétation). – Oui, au début. Je me souviens

14 très bien que, moi aussi, je fus de garde là-bas, une fois. Je m'y

15 trouvais avec Zoran Kupreskic, donc, en tant que Croate, il y avait Zoran

16 et moi et, du côté musulman, il y avait Mines Ahmic et Suad Ahmic.

17 Mme Glumac (interprétation). - Ce barrage routier a duré combien

18 de temps avec cette composition ?

19 M. Vidovic (interprétation). – Cela n'a pas duré très longtemps.

20 Je crois que je n'y étais qu'une seule fois, je n'ai fait qu'un seul tour

21 de garde.

22 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que vous savez si les

23 Croates ont veillé à protéger les maisons musulmanes pendant la période où

24 les Musulmans étaient partis ? Est-ce qu'ils ont organisé des gardes

25 autour de ces maisons ?

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1 M. Vidovic (interprétation). - Les Croates qui se trouvaient

2 proches ou à côté de ces maisons ont veillé naturellement sur ces maisons

3 de sorte que personne ne vienne les voler, parce que ça pouvait se

4 produire ce genre de choses.

5 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que vous pourriez nous

6 dire ce qui s'est passé le 19, donc la veille du conflit ? Est-ce que vous

7 avez vu Zoran Kupreskic ce jour-là ?

8 M. Vidovic (interprétation). - Oui. Lorsque je suis revenu du

9 travail, donc vers 3 heures 30 de l'après-midi, j'ai eu un appel de

10 Zoran Kupreskic. Il m'a demandé si je pouvais l'accompagner pour ramener

11 des planches, alors je l'ai aidé à cette tâche. J'avais un camion, donc on

12 a ainsi déchargé ses planches.

13 Mme Glumac (interprétation). - Mais où avez-vous amené ces

14 planches ?

15 M. Vidovic (interprétation). - Elles venaient de Rovna et je

16 l'ai aidé à les décharger.

17 Mme Glumac (interprétation). - Après le premier conflit, après

18 le 20 octobre 1992, est-ce que vous avez vu des armes dans votre partie du

19 village ?

20 M. Vidovic (interprétation). – Oui, oui j'en ai vu. Je les ai

21 vues passer, il y avait des armes. Je les ai vues pendant la journée.

22 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que c'étaient des armes

23 que l'on emportait pendant les gardes ? Est-ce que les tours de garde se

24 faisaient avec des armes ?

25 M. Vidovic (interprétation). - Oui. Ces armes servaient aux

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1 tours de garde. Donc les personnes qui faisaient les gardes étaient

2 armées.

3 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que vous avez vu des

4 Musulmans aller vers le front ?

5 M. Vidovic (interprétation). - Oui. Il y avait un front qui se

6 trouvait près de Fizako à l'époque, à Kekeci. Je sais qu'ils s'y sont

7 rendus.

8 Mme Glumac (interprétation). – Avez-vous vu comment ils se sont

9 rendus sur le front ? Est-ce qu'il y avait de l'équipement, du matériel ?

10 M. Vidovic (interprétation). – Oui, bien sûr. Ils se sont rendus

11 vers le front avec des armes, certains portaient des uniformes, d'autres

12 pas. Ils se sont rassemblés devant l'école d'Ahmici.

13 Mme Glumac (interprétation). - Votre maison se trouvait à côté

14 de cette école ?

15 M. Vidovic (interprétation). – Oui, à moins de 50 mètres.

16 Mme Glumac (interprétation). - Donc vous avez pu les voir se

17 rassembler devant l'école, n'est-ce pas ? C'était là qu'était leur point

18 de rassemblement, leur point de départ ?

19 M. Vidovic (interprétation). - Oui.

20 Mme Glumac (interprétation). - Quelle taille avaient ces

21 groupes ? Ces équipes étaient composées de combien de personnes ?

22 M. Vidovic (interprétation). - Je n'en sais rien d'une façon

23 précise, mais il s'agissait de groupe d'une vingtaine de personnes, à peu

24 près.

25 Mme Glumac (interprétation). – Avez-vous pu remarquer le moment

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1 où ils sont revenus du front vers le village ?

2 M. Vidovic (interprétation). – Oui, oui je m'en souviens, je

3 m'en souviens quand ils sont revenus du front. Ils se sont alignés là-bas

4 et puis, pour la première fois… enfin c'est la première fois que, moi,

5 j'ai pu entendre les ordres, les commandements, les ordres et puis

6 "Allah Akbar", etc. Puis, il y avait des coups de feu, donc ce n'était

7 certainement pas agréable à entendre d'aussi près.

8 Mme Glumac (interprétation). - Vous avez dit, au début, que les

9 Croates n'étaient pas armés lorsque vous avez entamé ces tours de garde.

10 Je ne parle pas de tous les Croates du village, je parle uniquement de

11 vous et des membres de votre équipe de garde, ceux qui participaient à ces

12 patrouilles et je voudrais savoir quand ils ont pu obtenir des armes ?

13 Pouvez-vous nous le dire ?

14 M. Vidovic (interprétation). - Je peux vous dire en tout cas de

15 manière sûre quand moi j'ai obtenu une arme, c'était suite à la chute de

16 Jajce, il y avait pas mal de réfugiés de Jajce et on pouvait acheter des

17 armes à ces personnes. J'ai acheté ainsi un fusil semi-automatique, un

18 Papuk.

19 Mme Glumac (interprétation). - Mais les autres dont vous avez

20 parlé, qui se trouvaient près de la maison de Niko Sakic le 20, c'étaient

21 donc tous vos voisins, n'est-ce pas ?

22 M. Vidovic (interprétation). - Oui.

23 Mme Glumac (interprétation). - Donc vous les avez vus faire

24 partie des tours de garde ?

25 M. Vidovic (interprétation). - Oui.

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1 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que ces personnes

2 disposaient d'armes au cours du premier conflit ?

3 M. Vidovic (interprétation). - Uniquement un. Je me souviens

4 Mirko Sakic, uniquement lui avait un fusil de chasse. Pour les autres, eh

5 bien, les autres d'entre nous ne disposaient pas d'armes. Je ne me

6 souviens pas avoir vu une seule arme portée par un autre de notre groupe

7 et moi, je n'en avais pas de toute façon.

8 Mme Glumac (interprétation). - Ensuite, lorsque vous avez obtenu

9 des fusils, donc vous avez pu en acquérir un fin octobre ?

10 M. Vidovic (interprétation). - Oui.

11 Mme Glumac (interprétation). - Mais les autres ont-ils également

12 obtenu des

13 armes ? Est-ce qu'ils sont venus faire ces patrouilles armés ?

14 M. Vidovic (interprétation). - Oui, oui. Je sais que Zoran avait

15 également une carabine de chasse et c'est Kupreskic qui lui a donné cette

16 arme. Mirko Sakic lui aussi a acheté une Kalachnikov également de ces

17 personnes d'ailleurs qui revenaient de Jajce. Là, on pouvait tous trouver

18 des armes à l'époque.

19 Mme Glumac (interprétation). - Que s'est-il passé au cours de

20 ces gardes, après le conflit en novembre ?

21 M. Vidovic (interprétation). - Eh bien, il n'y en avait plus

22 beaucoup d'entre nous. Au début, nous avons continué nos patrouilles de

23 manière régulière et puis, au fil du temps, certains ne venaient plus au

24 moment où leur tour venait. Et parfois pendant, je ne sais pas, deux à

25 trois jours, il n'y avait pas de patrouille.

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1 Mme Glumac (interprétation). - Mais vous avez dit que vous étiez

2 14, n'est-ce pas ?

3 M. Vidovic (interprétation). - Oui. Mais le soir, il n'y en

4 avait que six qui faisaient partie de notre tour de garde.

5 Mme Glumac (interprétation). - C'étaient six équipes de

6 deux heures ?

7 M. Vidovic (interprétation). - Oui, de 7 heures à 7 heures. Donc

8 cela veut dire que tous les soirs, nous avions des tours de garde, ce qui

9 fait qu'il était assez normal que les gens avaient des choses à faire, ils

10 étaient parfois fatigués, ils revenaient du travail.

11 Mme Glumac (interprétation). - Alors comment avez-vous essayé de

12 régler ces problèmes des gardes ?

13 M. Vidovic (interprétation). - Nous nous sommes mis d'accord,

14 parce que dans cette partie du village, Zoran était, comment dire, un

15 homme exemplaire. Nous avions tous confiance en lui et nous avions donc

16 convenu que c'était lui qui allait régler les problèmes de ces personnes

17 qui ne venaient pas à leur tour de garde. Est-ce que c'était justifié ou

18 non, car,

19 quand quelqu'un était absent pendant deux ou trois jours, si des gens

20 étaient absents pendant deux ou trois jours, comme par exemple

21 Mirjan Kupreskic il partait, il était absent pendant deux à trois jours,

22 certains s'en plaignaient. Donc étant donné ce genre de situation, il y

23 avait des problèmes, ils disaient : "Si lui, il ne fait pas son tour de

24 garde, moi non plus je ne prends pas mon tour de garde, etc."

25 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce qu'il y avait une espèce

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1 d'horaire ?

2 M. Vidovic (interprétation). - Ce n'était pas vraiment un

3 véritable horaire. On s'est mis d'accord, quand on avait du temps ou si

4 d'autres avaient quelque chose à faire jusqu'à minuit, par exemple, à

5 cette condition on disait à cette personne de venir de 5 à 7, mais il n'y

6 avait pas vraiment de grille horaire.

7 Mme Glumac (interprétation). - Donc vous avez participé à ces

8 patrouilles tous les jours ?

9 M. Vidovic (interprétation). - Oui, tous les jours.

10 Mme Glumac (interprétation). - Très bien. Donc vous nous disiez

11 que c'était comme ça que vous avez essayé d'organiser ces gardes, après le

12 conflit. Alors ça a fonctionné pendant combien de temps et pendant combien

13 de temps est-ce que Zoran Kupreskic a rempli cette fonction ?

14 M. Vidovic (interprétation). - Très brièvement, car il y avait

15 pas mal de problèmes. Il n'y avait personne qui pouvait vraiment régler

16 ces problèmes. Donc vers la fin janvier, disons, nous nous sommes mis

17 d'accord que j'allais continuer ce type de travail, puisque Zoran, lui,

18 avait davantage d'obligations. Il était employé à Vitez. Alors j'ai essayé

19 de faire quelque chose, mais ça ne marchait pas très bien et un peu plus

20 tard, nous avons carrément abandonné. S'il y avait une attaque serbe à

21 Bugojno, à ce moment-là, nous aurions repris, mais ça n'a pas duré

22 longtemps.

23 Mme Glumac (interprétation). - Donc s'il y avait des

24 difficultés, des problèmes

25 dans notre environ immédiat, alors nous nous rencontrions à nouveau ?

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1 M. Vidovic (interprétation). - Oui, c'est comme ça que ça

2 fonctionnait.

3 Mme Glumac (interprétation). - Mais donc à l'époque du deuxième

4 conflit le 16 avril, vous étiez en quelque sorte responsable, n'est-ce

5 pas ?

6 M. Vidovic (interprétation). - Oui, oui. C'est ça, les choses

7 sont restées comme cela.

8 Mme Glumac (interprétation). - Bon très bien. Vous travaillez

9 toujours à Vjetrenica à l'époque ? Qui est Mesud Sivro ?

10 M. Vidovic (interprétation). - C'était un de mes bons amis.

11 C'est d'ailleurs toujours un de mes bons amis.

12 Mme Glumac (interprétation). - Mais d'où vient-il ? Il est

13 Musulman ou Croate ?

14 M. Vidovic (interprétation). - Il est Musulman. Nous travaillons

15 ensemble dans cette société commerciale de Vjetrenica.

16 Mme Glumac (interprétation). - Quels furent vos contacts avec

17 lui ?

18 M. Vidovic (interprétation). - Vu que nous travaillions dans la

19 même entreprise, il était chauffeur d'un petit camion, une petite

20 camionnette et bien souvent, il me ramenait du boulot. C'était plus facile

21 pour moi. Bon, je ne devais pas payer non plus à ce moment-là mon ticket

22 de bus.

23 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce qu'il vous ramenait des

24 choses ?

25 M. Vidovic (interprétation). - Parfois, si j'avais besoin de

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1 choses à Vitez, si je devrais me faire ramener des choses, il le faisait.

2 Si j'avais besoin de transporter quelque chose depuis ma maison, il

3 m'aidait aussi.

4 Mme Glumac (interprétation). - Quelle couleur était sa petite

5 camionnette ?

6 M. Vidovic (interprétation). - Verte, avec une bâche bleue.

7 Mme Glumac (interprétation). - Ça lui appartenait ou ça

8 appartenait à l'entreprise, ce camion ?

9 M. Vidovic (interprétation). - Elle appartenait à l'entreprise

10 de Vjetrenica, il n'en était que le chauffeur.

11 Mme Glumac (interprétation). - A quel rythme venait-il vous

12 rendre visite avant la guerre ?

13 M. Vidovic (interprétation). - Souvent, très souvent. Je peux en

14 tout cas vous dire quand il n'est pas venu pratiquement, mais je peux vous

15 dire qu'il venait souvent, en voiture d'ailleurs. Il me conduisait.

16 Mme Glumac (interprétation). - Pouvez-vous me dire si, au début,

17 avant la guerre donc en février ou en mars, est-ce qu'il y avait des

18 problèmes avec les Musulmans dans le village ? Que les Croates avaient

19 empêché les Musulmans de rejoindre les tours de garde ?

20 M. Vidovic (interprétation). – Non, on ne leur a jamais interdit

21 de faire partie de ces gardes. On n'aurait pas pu le faire, nous n'étions

22 que fort peu et je sais que, pendant un certain le temps, nous étions

23 convenus que leurs gardes et nos gardes n'iraient pas sur cette route.

24 Mme Glumac (interprétation). - Quelle route ?

25 M. Vidovic (interprétation). - Depuis la route principale vers

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1 Gornji Ahmici, ou Ahmici-le-haut, parce que, soi-disant, il y avait des

2 civils qui passaient, nous ne voulions pas les effrayer. Ce n'était pas

3 très agréable de se trouver comme ça face à face à une personne armée.

4 Mme Glumac (interprétation). - Donc il s'agissait d'un accord

5 qui s'appliquait tant aux Musulmans qu'aux Croates ?

6 M. Vidovic (interprétation). – Oui, oui. Nous nous étions mis

7 d'accord que nous n'allions pas patrouiller le long de cette route et eux

8 non plus n'allaient pas le faire. Ce n'était

9 pas une interdiction, c'était quelque chose que nous étions convenus entre

10 nous.

11 Mme Glumac (interprétation). - Pourquoi avez-vous dit que vous

12 ne pouviez pas les empêcher de faire leurs gardes ?

13 M. Vidovic (interprétation). - Mais nous étions fort peu. Nous

14 n'aurions pas pu faire quoi que ce soit. Ils étaient plus nombreux que

15 nous, nous n'aurions pas osé les empêcher de faire quoi que ce soit.

16 Mme Glumac (interprétation). – Avez-vous remarqué combien de

17 personnes venaient faire les gardes côté musulman ? Est-ce que ces tours

18 de garde se faisaient également par deux ou bien plus nombreux ?

19 M. Vidovic (interprétation). - Il y en avait beaucoup plus,

20 toujours plus : au moins quatre, parce qu'il y avait pas mal de personnes

21 qui, n'étant pas aptes au service, pouvaient faire partie de ces tours de

22 garde. Parfois ils étaient six.

23 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que vous pouvez estimer

24 combien d'hommes aptes au service se trouvaient à Ahmici ?

25 M. Vidovic (interprétation). - En ce qui concerne les villageois

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1 qui se trouvent à Ahmici, eh bien franchement, je ne peux pas être tout à

2 fait précis. Je dirai 140 à 150 à peu près. Bon, bien sûr, on n'a jamais

3 compté, je ne les ai jamais comptés.

4 Mme Glumac (interprétation). - Y avait-il d'autres personnes

5 autres que les villageois ?

6 M. Vidovic (interprétation). – Oui, j'ai rencontré des gens que

7 je n'avais jamais vus précédemment. Bien que je sois du village, il y

8 avait là des gens que je n'avais jamais rencontrés.

9 Mme Glumac (interprétation). - Certains témoins ont dit que la

10 population d'Ahmici avait doublé après la chute de Jajce. Est-ce que vous

11 êtes d'accord avec cela ?

12 M. Vidovic (interprétation). - Je ne sais pas si elle a doublé,

13 mais je sais qu'il y

14 avait pas mal de gens qui sont arrivés et que je n'avais jamais vus

15 précédemment.

16 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que vous pouvez nous dire

17 si vous vous souvenez du Bairam de 1993 ?

18 M. Vidovic (interprétation). - Oui, je m'en souviens, vu que je

19 me trouvais dans un groupe de danse folklorique. Zoran et Mirjan faisaient

20 partie de ce groupe. Il y avait des Musulmans avec lesquels nous nous

21 entendions bien et nous nous sommes rendus à Gornji ou Vitez-le-haut, où

22 nous avons fait un spectacle et j'ai participé à ce spectacle.

23 Mme Glumac (interprétation). - Mais où s'est fait ce spectacle ?

24 Est-ce que vous vous en souvenez ?

25 M. Vidovic (interprétation). - Dans Vitez-le-haut, à Marala.

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1 Mme Glumac (interprétation). - C'était quoi ? C'était une

2 célébration du Bairam ?

3 M. Vidovic (interprétation). – Oui, effectivement, c'était une

4 fête, la fête de Bairam.

5 Mme Glumac (interprétation). - Vous vous souvenez de la date ?

6 M. Vidovic (interprétation). - Vers mars, je pense. Je ne me

7 souviens plus précisément, mais en 1993.

8 Mme Glumac (interprétation). - Vous souvenez-vous de la fête de

9 Pâques de cette année ?

10 M. Vidovic (interprétation). - Oui. A Pâques, nous sommes allés

11 à Mali Mosunj faire le chemin de croix et nous avons, là aussi, fait le

12 même spectacle de Pâques, le même que pour la fête de Bairam et les

13 Musulmans nous ont accompagnés, ceux qui faisaient partie du groupe de

14 danses folkloriques.

15 Mme Glumac (interprétation). - Vous souvenez-vous du

16 15 avril 1993 ?

17 M. Vidovic (interprétation). – Oui, oui je m'en souviens bien.

18 Mme Glumac (interprétation). - Qu'avez-vous fait ?

19 M. Vidovic (interprétation). – Et bien comme tous les jours, vu

20 que j'avais un travail, eh bien je me suis rendu à mon travail le matin

21 vers 7 heures, je suis revenu vers 15 heures 30...

22 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que vous avez eu des

23 informations ?

24 M. Vidovic (interprétation). - Non, je n'ai eu aucune

25 information.

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1 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que vous avez regardé la

2 télévision de Vitez ?

3 M. Vidovic (interprétation). – Non, je ne pouvais plus la capter

4 et c'est toujours le cas, d'ailleurs, car nous sommes dans une région où

5 on ne peut pas capter cette chaîne.

6 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que vous avez entendu

7 parler du kidnapping de Visko Kovic et du fait que son escorte a été tuée

8 ce jour-là ?

9 M. Vidovic (interprétation). – Non, je ne savais rien du tout.

10 Je n'ai rien entendu ce jour-là.

11 Mme Glumac (interprétation). - Vous n'avez rien entendu ?

12 M. Vidovic (interprétation). – Non, je n'ai rien entendu.

13 Mme Glumac (interprétation). - Que s'est-il passé le soir ?

14 M. Vidovic (interprétation). - Eh bien, entre 2 heures et

15 2 heures 30 j'ai reçu un coup de téléphone de Nenad Santic qui avait des

16 problèmes et que je devais venir me rendre chez lui, alors je me suis

17 préparé, je me suis rendu à cette maison.

18 Mme Glumac (interprétation). - Où est la maison de

19 Jozo Livancic ?

20 M. Vidovic (interprétation). - Près de la route principale, dans

21 la direction de Rovna, c'est-à-dire à gauche de la rue principale vers

22 Rovna.

23 Mme Glumac (interprétation). – Peut-on voir la maison de

24 Jozo Livancic sur la photo ?

25 M. Vidovic (interprétation). - Elle devrait être là. Oui, je la

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1 vois d'ici. Attendez. Voilà la route principale. C'est quelque part là que

2 se trouve la maison de Jozo Livancic.

3 Mme Glumac (interprétation). – Bon, très bien. Donc de l'autre

4 côté de la route, n'est-ce pas ?

5 M. Vidovic (interprétation). - Oui.

6 Mme Glumac (interprétation). - Qui avez-vous rencontré là-bas ?

7 M. Vidovic (interprétation). - Lorsque je suis arrivé à la

8 maison de Jozo Livancic, j'ai trouvé lui-même, Jozo Livancic, son fils

9 Celio Livancic, Nenad Santic, Anto Covic, Ivo Vujovic et mon oncle

10 Simo Vidovic. J'y étais aussi. Jevco, le surnom, sinon c'est

11 Ivica Vidovic.

12 Mme Glumac (interprétation). - Dites-moi, s'il vous plaît, de

13 quoi avez-vous parlé ?

14 M. Vidovic (interprétation). - Je dois dire que Jevco qui, à

15 l'époque, travaillait à la défense civile, il nous a dit que la situation

16 n'était vraiment pas bonne, que par conséquent il y avait un certain

17 nombre d'informations selon lesquelles les Musulmans, éventuellement,

18 attaqueraient les Croates et que, nous autres qui y habitons, que nous

19 devions évacuer nos voisins, nos amis, nos familles dans un abri.

20 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que ces gens-là avaient un

21 certain nombre, également, de tâches à remplir ? Est-ce qu'ils

22 travaillaient dans des organisations différentes ?

23 M. Vidovic (interprétation). - Ce sont les gens qui

24 travaillaient à la défense civile, ils étaient membres de la défense

25 civile. Ils avaient chacun une certaine tâche à remplir dans le secteur où

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1 ils habitaient. Si jamais par exemple il y avait quelque chose qui se

2 passait à ce moment-là, ils auraient pu réagir et évacuer comme j'ai dit

3 les familles et les voisins.

4 Mme Glumac (interprétation). - Et Nenad Santic, est-ce que, lui,

5 il a été membre également de la défense civile et, si éventuellement il y

6 était, quelle était la fonction de

7 Nenad Santic parce que c'est lui qui vous a appelé de venir dans la maison

8 d'Ivo Livancic ?

9 M. Vidovic (interprétation). - Je ne sais pas s'il était membre

10 de la défense civile, mais je sais qu'il était membre du SDZ et je sais

11 qu'il a été informé également sur tout ce qui se passait.

12 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que vous savez qui vous a

13 convoqué ? Qui a convoqué cette réunion, ce type de réunion ?

14 M. Vidovic (interprétation). - Si on peut appeler cela la

15 réunion. Nous avons été convoqués par Ivica Vidovic, surnommé Gefco.

16 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce qu'éventuellement

17 Nenad Santic vous avait convoqués ? C'est là, ce que je vous pose comme

18 question.

19 M. Vidovic (interprétation). - Je ne sais pas. Je pense que

20 c'est Jevco qui avait transmis de toute façon cette information. Est-ce

21 que c'est Jevco qui avait été informé par Nenad ou c'est Nenad qui a

22 informé Jevco ? Cela je ne peux pas vous le dire.

23 Mme Glumac (interprétation). - Je pense que nous avons terminé.

24 M. le Président (interprétation). - D'accord.

25 (L'audience, suspendue à 10 heures 30, est reprise à 11 heures.)

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1 M. le Président (interprétation). - Maître Glumac ?

2 Mme Glumac (interprétation). - Merci, Monsieur le Président.

3 Monsieur Vidovic, nous pouvons poursuivre. Vous avez dit que

4 vous ne savez qui avait convoqué la réunion, c'est bien cela ce que j'ai

5 compris.

6 M. Vidovic (interprétation). - C'est vrai.

7 Mme Glumac (interprétation). - Santic ou Vidovic ?

8 M. Vidovic (interprétation). - Oui.

9 Mme Glumac (interprétation). - Que vous avez été en contact avec

10 Ivica Vidovic ?

11 M. Vidovic (interprétation). - Oui.

12 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que vous savez qui a été

13 chargé de la défense civile pour Ahmici, Santici et Pirici ?

14 M. Vidovic (interprétation). - Oui.

15 Mme Glumac (interprétation). - Qui ?

16 M. Vidovic (interprétation). - C'était Ivica Vidovic qui était

17 chargé de la défense civile.

18 Mme Glumac (interprétation). - Quand cette organisation a

19 commencé à développer ses activités ?

20 M. Vidovic (interprétation). - A l'époque où il y avait des

21 raids aériens par les Serbes, à ce moment-là c'était à Busovaca que nous

22 étions organisés et à Princip également.

23 Mme Glumac (interprétation). - Quand est-ce que vous avez été

24 chargé de suivre ce qui se passait dans votre secteur et éventuellement

25 d'envisager l'évacuation des villageois et que cela passe par vous ?

Page 8072

1 M. Vidovic (interprétation). - A partir du moment où il y a eu

2 ce conflit de Busovaca, Ivica Vidovic surnommé Jevco m'avait appelé et il

3 m'a dit, il m'a plutôt demandé si j'étais d'accord pour me charger donc

4 d'une telle tâche, si j'avais suffisamment de temps, si jamais il fallait

5 que je le contacte, si je pouvais en disposer. Moi, j'avais accepté.

6 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que tous ceux qui étaient

7 regroupés au sein de la défense civile assistaient à cette réunion ?

8 M. Vidovic (interprétation). - Non. Je sais que Niko Sakic

9 n'était pas présent alors qu'il aurait dû être présent.

10 Mme Glumac (interprétation). - Et pourquoi il n'y était pas ?

11 Est-ce que vous avez parlé avec lui par la suite ?

12 M. Vidovic (interprétation). - Niko n'avait pas le téléphone et,

13 le plus probablement, on n'a pas pu le joindre parce qu'on nous a appelés

14 par téléphone et Niko n'avait pas le téléphone. Je suppose que c'était une

15 des raisons pour lesquelles il n'est pas venu.

16 Mme Glumac (interprétation). - Ivica Vidovic, Jevco, que vous a-

17 t-il dit ?

18 M. Vidovic (interprétation). – Il m'a dit qu'il y avait un

19 certain nombre de problèmes, qu'il était possible également que des

20 Musulmans nous attaquent, que je devais informer d'abord ma famille,

21 ensuite d'autres voisins et les diriger vers les abris. Il m'a dit

22 également, comme ce n'était pas très loin pour moi, de me rendre chez

23 Niko Sakic, d'aller chez Niko Sakic et de lui demander également d'aller

24 alerter les autres.

25 Mme Glumac (interprétation). - Et vous êtes parti où par la

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1 suite ?

2 M. Vidovic (interprétation). - Après ça, je suis allé dans la

3 direction de la maison de Niko Sakic, je l'ai réveillé et je lui ai

4 transmis ce que Jevco m'avait dit. En d'autres termes, que lui-même devait

5 se charger de réveiller d'abord les membres de sa famille, ensuite les

6 villageois et de les diriger vers l'abri.

7 Mme Glumac (interprétation). - Comment êtes-vous allé jusqu'à la

8 maison de Niko ?

9 M. Vidovic (interprétation). - Mais à pied.

10 Mme Glumac (interprétation). - Et une fois que vous vous êtes

11 rendu chez Niko Sakic, où êtes-vous allé ?

12 M. Vidovic (interprétation). – Ensuite, je suis allé du côté

13 des Kupreskic et j'ai réveillé Zoran et Ivica Kupreskic. J'ai demandé

14 également qu'ils réveillent les membres de leur famille, tous

15 les Kupreskic, et de se diriger vers les abris et ensuite, moi, je suis

16 retourné chez moi. J'ai réveillé mes parents, j'ai réveillé ma femme, mes

17 enfants ; j'ai demandé qu'ils se préparent et qu'ils devraient se rendre

18 dans l'abri. Ensuite, j'ai réveillé également ma tante, Manda,

19 Gordana Vidovic, sa mère. Une fois que je les ai réveillées, je suis allé

20 dans la maison

21 de Slavko Vidovic et c'est là où Ilija Badro habitait avec son épouse et

22 ses deux enfants.

23 Je l'ai réveillé, je lui ai dit exactement la même chose et

24 comme son beau-père est à Rovna, il est parti avec son épouse et ses

25 enfants à Rovna alors que moi, je suis rentré chez moi pour prendre mes

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1 parents, mon épouse avec mes enfants et puis ma tante, Manda.

2 Mme Glumac (interprétation). - Et vous les avez emmenés où ?

3 M. Vidovic (interprétation). - Quand je suis retourné, ils

4 étaient déjà prêts et nous sommes allés dans l'abri de Niko Sakic.

5 Mme Glumac (interprétation). – Pourriez-vous dire, à peu près, à

6 quelle heure ça s'est passé ? Combien avant les tirs qui avaient

7 commencé ? Quelle était l'heure s'il vous plaît ? Est-ce que vous avez une

8 idée ?

9 M. Vidovic (interprétation). - Je suis parti de chez moi à

10 5 heures 10 ou 5 heures 05 je pense ; je ne suis pas sûr. Mais

11 5 heures 05, 5 heures 10.

12 Mme Glumac (interprétation). - Ensuite vous avez emmené votre

13 famille ?

14 M. Vidovic (interprétation). – Oui, au moment où nous sommes

15 arrivés jusqu'à la maison de Niko Sakic, jusqu'à sa cave. Mais ma famille

16 est restée dans l'abri alors que moi, je suis resté devant la maison de

17 Niko Sakic.

18 Mme Glumac (interprétation). - De quel côté de la maison ?

19 M. Vidovic (interprétation). - Du côté de la route ou plutôt du

20 côté du garage de Niko Sakic.

21 Mme Glumac (interprétation). - Qui avez-vous vu sur place ? Est-

22 ce qu'il y avait des voisins ?

23 M. Vidovic (interprétation). – Oui, il y avait Mirko Sakic qui

24 était parmi les autres. Ensuite, Dragan Samija, Miroslav Pudza, ensuite

25 Milutin Vidovic, je ne me souviens plus des autres.

Page 8075

1 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que vous avez vu

2 Niko Sakic ?

3 M. Vidovic (interprétation). – Oui, il était tout le temps. Il

4 descendait dans l'abri et puis il remontait. Il était tout le temps.

5 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que vous avez vu quelqu'un

6 arriver ?

7 M. Vidovic (interprétation). - En provenance de Zume, il y avait

8 un groupe de soldats qui s'approchaient ; ils étaient armés, bien armés,

9 et ils portaient des uniformes.

10 Mme Glumac (interprétation). - Comment était ce groupe de

11 soldats ? Est-ce que vous pouvez les décrire un peu plus ?

12 M. Vidovic (interprétation). - On a pu tout de suite constater

13 qu'il s'agissait d'un groupe qui était tout particulier. Ils étaient

14 armés, ils avaient des peintures sur le visage, ils portaient des

15 uniformes.

16 Mme Glumac (interprétation). - Quel genre d'uniforme ?

17 M. Vidovic (interprétation). - Ils avaient des uniformes de

18 camouflage.

19 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce qu'il y en avait qui

20 portaient des uniformes noirs ?

21 M. Vidovic (interprétation). - Oui. Il y avait des gens qui

22 portaient des uniformes noirs.

23 Mme Glumac (interprétation). - Et quelles armes portaient-ils ?

24 M. Vidovic (interprétation). - Ils portaient tous des armes

25 automatiques et puis il y en avait qui avaient des Zoljad, des types

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1 d'armes, de fusils Zoljad. Il y avait également des RPG, des lance-

2 roquettes.

3 Mme Glumac (interprétation). - Les RPG dont vous parlez, quel

4 est le type de munitions que l'on utilise pour les RPG ?

5 M. Vidovic (interprétation). - Mais ce sont les lance-roquettes

6 et puis il y avait des munitions également qu'ils portaient avec.

7 Mme Glumac (interprétation). - Et qu'est-ce que vous avez

8 conclu ? De quelle unité s'agissait-il d'après vous ?

9 M. Vidovic (interprétation). - Comme j'avais vu qu'il y en avait

10 qui portaient des ceinturons blancs, moi je me suis dit que c'était la

11 police militaire. C'est ce type de ceinturon qu'ils portaient.

12 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que les soldats des unités

13 opérationnelles portent de tels types d'armes ?

14 M. Vidovic (interprétation). - Je ne sais pas.

15 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que vous avez reconnu

16 quelqu'un qui était dans cette unité ?

17 M. Vidovic (interprétation). - J'ai reconnu Mirjan Santic, le

18 défunt Mirjan Santic maintenant.

19 Mme Glumac (interprétation). - Comment l'avez-vous reconnu ?

20 M. Vidovic (interprétation). - Mais il n'a pas eu de peinture

21 noire sur le visage et c'est comme ça que j'ai pu le reconnaître.

22 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que vous le connaissiez

23 bien ?

24 M. Vidovic (interprétation). - Oui. C'était notre voisin, il

25 vivait à Santic avec nous.

Page 8077

1 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que lui-même, compte tenu

2 qu'il habitait Santic, pouvait connaître bien ce terrain ?

3 M. Vidovic (interprétation). - Oui, bien évidemment, ce n'est

4 pas une région qui est très étendue et puis lui se rendait souvent

5 également jusqu'à l'entrepôt et puis jusqu'à l'entrepôt de

6 Vlatko Kupreskic, il connaissait bien le terrain. Il se déplaçait souvent

7 dans sur ce terrain.

8 Mme Glumac (interprétation). - Qu'est-ce qu'il avait fait dans

9 l'entrepôt de Vlatko Kupreskic ?

10 M. Vidovic (interprétation). - Mais il prenait des vivres, des

11 produits alimentaires, ce dont il avait besoin.

12 Mme Glumac (interprétation). - Vous voulez dire qu'il se rendait

13 dans son magasin ?

14 M. Vidovic (interprétation). - Oui.

15 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que ce magasin qui se

16 trouvait dans l'entrepôt de Vlatko Kupreskic était le seul magasin qui

17 était ouvert dans ces trois villages, Santici, Pirici et Ahmici ?

18 M. Vidovic (interprétation). - Oui. A cette époque-là, c'était

19 le seul magasin qui avait été ouvert, pratiquement tous les villageois,

20 tous nos voisins allaient s'approvisionner dans ce magasin.

21 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que vous pouvez nous dire

22 maintenant où, dans quelle direction ces soldats sont partis ?

23 M. Vidovic (interprétation). - Ils sont venus en provenance de

24 Zume, ils sont passés à côté du garage de Niko Sakic et, ensuite, il sont

25 partis dans la direction de l'entrepôt de Vlatko Kupreskic.

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1 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que vous savez à quelle

2 unité appartenait Mirjan Santic ?

3 M. Vidovic (interprétation). - J'ai appris qu'il était dans une

4 unité surnommée Jokeri.

5 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que vous savez où les

6 Jokeri avaient-ils leur siège ?

7 M. Vidovic (interprétation). - C'est par ouï-dire que j'avais

8 appris qu'il se trouvait au bungalow, mais de toute façon, je ne le savais

9 pas.

10 Mme Glumac (interprétation). - Vous voulez dire que vous

11 n'alliez pas à

12 bungalow ?

13 M. Vidovic (interprétation). - Non, non seulement que je

14 n'allais pas dans le bungalow, mais je ne passais même pas par cette

15 route, j'ai appris qu'il y avait cette unité qui se trouvait à bungalow.

16 Mme Glumac (interprétation). - Merci.

17 M. le Président (interprétation). - Maître, je voudrais

18 intervenir. Est-ce qu'il n'y a pas eu un petit lapsus linguae. Il y a

19 quelques questions de cela, n'avez-vous pas parlé de Mirjan Santic, mais

20 vous avez dit peut-être "Mirjan Kupreskic", je ne pense pas que ce soit

21 exact ?

22 Mme Glumac (interprétation). - Non, j'ai parlé de Mirjan Santic,

23 je n'ai pas mentionné le nom de Mirjan Kupreskic, ce n'est pas possible.

24 M. Blaxill (interprétation). - Il y a peut-être donc erreur au

25 compte rendu anglais.

Page 8079

1 Mme Glumac (interprétation). - C'est une erreur.

2 M. Vidovic (interprétation). - Vous avez bien dit,

3 Maître Glumac, vous avez bien dit.

4 Mme Glumac (interprétation). - J'ai prononcé Mirjan Santic et je

5 n'ai pas parlé bien évidemment d'un autre nom de famille. Merci beaucoup à

6 Maître Blaxill et je vais demander bien évidemment que l'on corrige ce nom

7 dans le compte rendu. Il s'agit de Mirjan Santic qui était membre de

8 l'unité des Jokeri. D'accord.

9 Vous avez entendu par conséquent que cette unité se trouvait à

10 bungalow ?

11 M. Vidovic (interprétation). - Oui.

12 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que vous avez entendu

13 encore quelque chose d'autre ? Est-ce que vous avez appris à qui

14 appartenait cette unité ?

15 M. Vidovic (interprétation). - Ce que je savais, c'est qu'il

16 faisait partie intégrante de la police militaire et du HVO. C'est ce que

17 j'avais appris. De toute façon, moi, je ne savais

18 pas personnellement, mais je n'ai pas lu où que ce soit cette information.

19 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que vous voulez maintenant

20 s'il vous plaît vous lever et montrer sur la photographie aérienne d'où

21 venait cette unité et la direction qu'ils ont prise par la suite et

22 surtout nous montrer l'endroit où vous étiez ?

23 (Le témoin s'exécute.)

24 Mme Glumac (interprétation). - Ils sont arrivés d'où, s'il vous

25 plaît ?

Page 8080

1 M. Vidovic (interprétation). - Je suis là, je suis au niveau du

2 garage de Niko Sakic, et j'ai mentionné le groupe de soldats que j'ai vu.

3 Ils sont venus en provenance de Zume et ils se sont dirigés vers

4 l'entrepôt.

5 Mme Glumac (interprétation). - Je vais vous demander de montrer

6 également ou plutôt de marquer la flèche sur la photo que vous avez sur le

7 rétroprojecteur de marquer leur itinéraire par une flèche. A quel endroit

8 vous vous êtes trouvé ?

9 M. Vidovic (interprétation). - Moi, j'étais à cet endroit-là,

10 devant le garage. Eux, ils sont arrivés en provenance de Zume, ils se sont

11 dirigés vers l'entrepôt.

12 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que cette partie, c'est à

13 côté de la forêt ? Y avait-il un chemin à côté ?

14 M. Vidovic (interprétation). - Oui. Il y a un chemin étroit, un

15 chemin où peuvent passer des piétons et pas des voitures. Donc un chemin

16 de piétons.

17 Mme Glumac (interprétation). - Y a-t-il un autre chemin de

18 l'autre côté, en contrebas de la forêt et qui mène du côté des maisons

19 de Kupreskic ?

20 M. Vidovic (interprétation). - Moi, je pense que c'est plutôt en

21 haut à droite, donc vous allez vers les maisons de Kupreskic et c'est tout

22 droit. Il y a une route effectivement, un chemin un peu plus large.

23 Mme Glumac (interprétation). - Et il s'agit des deux chemins

24 piétons ?

25 M. Vidovic (interprétation). - Oui.

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1 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que vous voyez Zoran et

2 Mirjan Kupreskic à ce moment-là ?

3 M. Vidovic (interprétation). - Une fois que ce groupe est passé,

4 Zoran et Mirjan sont arrivés également en provenance de Zume. Eux

5 également, ils s'arrêtent au niveau du garage, là où nous étions.

6 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce qu'ils sont restés à ce

7 niveau-là ? A côté du garage ?

8 M. Vidovic (interprétation). - Mirjan est resté alors que Zoran,

9 il a vu les réfugiés qui habitaient dans les maisons de Kupreskic et,

10 quand il les a vus sortir, il les a emmenés en direction de Zume, il les a

11 emmenés jusqu'à l'abri, là où se trouvait déjà sa famille.

12 Mme Glumac (interprétation). - Et d'où sont venus ces réfugiés ?

13 Est-ce que vous les avez vus ?

14 M. Vidovic (interprétation). - Ils sont venus en provenance des

15 maisons de Kupreskic et puis ils se sont retrouvés au niveau du garage et

16 Zoran les a accompagnés.

17 Mme Glumac (interprétation). - Vous voulez dire qu'ils ont

18 emprunté l'autre chemin de piétons ?

19 M. Vidovic (interprétation). - Oui.

20 Mme Glumac (interprétation). - Et les tirs ont commencé à quelle

21 heure ? Quand est-ce que vous avez entendu les tirs pour la première fois

22 et qu'est-ce que vous avez fait à ce moment-là ?

23 M. Vidovic (interprétation). - A 5 heures 30, approximativement.

24 J'ai entendu des tirs très violents en provenance des maisons de Kupreskic

25 et, en même temps, il y avait les tirs qui venaient de la route, notamment

Page 8082

1 en provenance du cimetière Topolsko.

2 Mme Glumac (interprétation). - Et vous, vous êtes parti où ?

3 M. Vidovic (interprétation). - Les balles sifflaient, il y avait

4 également les branches

5 qui étaient touchées, ça vous l'entendez. Nous, on s'est cachés dans cette

6 dépression.

7 Mme Glumac (interprétation). - Pourquoi êtes-vous parti dans ce

8 vallon, dans cette dépression ? Pourquoi avez-vous choisi cet endroit-là ?

9 M. Vidovic (interprétation). - Tout premièrement parce qu'on ne

10 voulait pas être trop loin par rapport à l'abri et protéger nos familles

11 qui se trouvaient dans cet abri. Ensuite, la configuration du terrain

12 était telle que c'était un abri naturel, ce vallon était un abri naturel,

13 cette dépression. Par conséquent, rien ne pouvait nous toucher, enfin on

14 ne risquait pas d'être touché par des balles.

15 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que ce jour-là vous êtes

16 resté dans cette dépression ?

17 M. Vidovic (interprétation). - Oui. Toute la journée.

18 Mme Glumac (interprétation). - Et qui est resté avec vous ?

19 M. Vidovic (interprétation). - Nous sommes venus en courant dans

20 cette dépression. Au bout de deux ou trois minutes, Zoran est arrivé

21 également en courant et en provenance de la maison de Niko Sakic. Il y

22 avait Zoran Kupreskic, Mirjan Kupreskic, Miro Sakic, Dragan Samija,

23 Miro Vidovic et moi-même, si j'ai gardé le souvenir, enfin j'ai oublié

24 peut-être quelques uns.

25 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que vous avez vu

Page 8083

1 Mirko Sakic ?

2 M. Vidovic (interprétation). – Oui. Niko Sakic, de temps à

3 autres, venait nous voir. Mais, nous aussi, on sortait de temps en temps

4 de ce vallon, de cette dépression pour aller voir ce qui se passait avec

5 nos familles. Et nos parents également voulaient nous voir, parce que nos

6 parents avaient peur pour nous et nous on avait peur pour nos parents.

7 C'est comme ça qu'on allait les voir de temps à autre.

8 Mme Glumac (interprétation). - Quand vous dites "nous", vous

9 pensez a qui ?

10 M. Vidovic (interprétation). - Je pense aux Croates, aux Croates

11 qui étaient dans

12 cette dépression.

13 Mme Glumac (interprétation). - Et qui est allé voir ses

14 parents ? Est-ce que vous pouvez dire les noms ?

15 M. Vidovic (interprétation). – Moi-même je suis allé à deux ou

16 trois reprises pour voir mes parents. Zoran, Mirjan, Mirko également

17 faisaient la même chose. Quand je dis "nous", je pense que tous ceux qui

18 étaient dans cette dépression, de temps à autres, on allait voir les

19 membres de notre famille.

20 Mme Glumac (interprétation). - Vous voulez dire que toutes ces

21 familles étaient dans le même abri ?

22 M. Vidovic (interprétation). - Non. Ma famille était dans l'abri

23 de Niko Sakic et la famille de Zoran Kupreskic et de Mirjan Kupreskic

24 plutôt, se trouvait dans l'abri de la maison de Jozo Vrebac, alors que la

25 famille de Zoran Kupreskic se trouvait dans la maison de Milutin Vidovic.

Page 8084

1 Mme Glumac (interprétation). - Et la famille de Sakic se

2 trouvait où ?

3 M. Vidovic (interprétation). – Mais dans leur propre maison.

4 Mme Glumac (interprétation). – Dragan Samija ?

5 M. Vidovic (interprétation). - Ils étaient chez eux. Chez

6 Niko Sakic.

7 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que vous vous souvenez, ce

8 premier matin, qu'est-ce qui s'était passé, éventuellement, qui vous aurez

9 marqué ?

10 M. Vidovic (interprétation). - Oui. Je me souviens entre

11 10 heures 30 et 11 heures, en provenance des maisons Kupreskic,

12 Nikola Omazic est arrivé en courant ; il nous a dit que Mirjan Santic a

13 été tué et qu'il faudrait donc aller du côté de la forêt pour ramasser le

14 corps de Santic et le remporter jusqu'au garage de Niko Sakic.

15 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que vous l'avez fait ?

16 M. Vidovic (interprétation). - Oui. Mirjan Kupreskic,

17 Zoran Kupreskic et moi-

18 même, nous sommes allés au abord de cette forêt et jusqu'à cet endroit-là,

19 c'est Nikola et Ivica Kupreskic qui ont transporté le corps de Santic.

20 Ensuite, c'est nous qui l'avons pris, donc Mirjan et moi-même avec Zoran.

21 Nous l'avons transporté dans le garage.

22 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce qu'il est resté dans le

23 garage ?

24 M. Vidovic (interprétation). – Nikola Omazic est allé avertir le

25 premier cousin de Mirjan Santic et c'était son cousin Milan Samija qui

Page 8085

1 était à 250 mètres par rapport au garage de Niko Sakic et depuis, je ne

2 l'ai plus revu, je parle de Nikola Omazic.

3 Mme Glumac (interprétation). - Où se trouve la maison de

4 Nikola Omazic ?

5 M. Vidovic (interprétation). - Elle n'est pas très loin. Elle

6 est à 300 mètres.

7 Mme Glumac (interprétation). - Entendu. Est-ce que votre famille

8 reste dans cet abri pendant la journée entière ?

9 M. Vidovic (interprétation). - L'après-midi, vers 16 heures, ils

10 ont quitté l'abri, cet abri et ils sont partis dans l'abri de

11 Niko Vidovic.

12 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que tout le monde est

13 parti ou bien votre famille ?

14 M. Vidovic (interprétation). - Tous sont partis dans l'abri de

15 Niko Vidovic.

16 Mme Glumac (interprétation). - Et vous ?

17 M. Vidovic (interprétation). - Moi je suis resté dans la

18 dépression avec les autres personnes qui étaient avec moi pendant tout ce

19 temps-là.

20 Mme Glumac (interprétation). - Je vais demander maintenant de

21 visionner une cassette. Ce n'est pas très long, c'est 15 minutes à peu

22 près. Mais nous avons essayé de montrer ces chemins et il y a bien

23 évidemment un certain nombre de sections qui peuvent être accélérées. Mais

24 je pense que ce serait utile également pour les Juges et pour le Procureur

25 de voir quelles sont ces distances entre les maisons des Kupreskic, entre

Page 8086

1 les abris. Je vais également demander à l'huissier de m'aider, de donner

2 également le texte de la cassette aux

3 interprètes.

4 (L'huissier s'exécute.)

5 Mme Ameerali (interprétation). - La cote sera D106/2, le compte

6 rendu étant la pièce D106a/2.

7 (Projection de la vidéocassette.)

8 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que vous voulez bien s'il

9 vous plaît accélérer cette partie de la cassette ? On va revenir par la

10 suite.

11 (Le technicien s'exécute.)

12 M. Vidovic (interprétation). - Dans le village de Pirici,

13 municipalité de Vitez, nous sommes à un endroit dénommé Dolina, qui est la

14 propriété d'Ivo Kupreskic, et à proximité de cet endroit, Dolina ou

15 vallon, se trouve le bois qui appartient à mon père Stepan Vidovic.

16 Dolina est exactement à l'ouest de la maisons ou des maisons

17 des Kupreskic dans la direction de Zume et puis depuis cette Dolina, nous

18 nous déplaçons en direction des maisons Kupreskic.

19 Mme Glumac (interprétation). - Monsieur Vidovic, quelle est la

20 maison que nous voyons-là ? A qui appartient-elle ?

21 M. Vidovic (interprétation). - A gauche, on arrive d'abord à la

22 maison d'Ivica Kupreskic. Derrière le pin, nous allons bientôt voir la

23 maison d'Ivo Kupreskic.

24 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que cette propriété

25 existait en 1993 ?

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1 M. Vidovic (interprétation). - Non, ceci a été construit plus

2 tard.

3 Mme Glumac (interprétation). - Et à qui appartient cette maison

4 que nous voyons sur la droite ?

5 M. Vidovic (interprétation). - Elle appartient à Ivo Kupreskic.

6 Mme Glumac (interprétation). - Ce n'est pas une étable-là, c'est

7 véritablement une maison ?

8 M. Vidovic (interprétation). - Oui, c'est véritablement une

9 maison. Nous sommes maintenant devant la maison de Branko Kupreskic.

10 Voilà, la maison de Josip Kupreskic, celle d'Ivica Kupreskic et celle du

11 père, Ivo Kupreskic.

12 Vers l'est, par rapport aux maisons des Kupreskic, on voit des

13 maisons musulmanes. C'est la partie centrale d'Ahmici que vous voyez-là.

14 Nous nous trouvons désormais devant la maison de

15 Mirjan Kupreskic et il y a aussi la maison de Zoran Kupreskic. Là, c'est

16 la vue que l'on a depuis la maison de Zoran de la maison de Sakib.

17 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce qu'il y a un chemin, un

18 sentier qui relie la maison de Sakib à la maison de Zoran en passant par

19 la dépression ?

20 M. Vidovic (interprétation). - On voit là la maison de

21 Sakib Ahmic.

22 Nous sommes maintenant devant la maison de Sakib Ahmic et c'est

23 la vue que l'on a depuis la maison de Sakib de la maison de Mirjan et

24 Zoran Kupreskic, de leur maisons à eux deux. On voit depuis la maison de

25 Sakib Ahmic la maison de Vlatko Kupreskic pour modus.

Page 8088

1 Nous sommes maintenant devant la maison de Josip Kupreskic qui

2 a, en annexe, un garage sur le côté. Nous passons des maisons Kupreskic et

3 nous allons en direction de cette dépression qui est une propriété

4 d'Ivo Kupreskic.

5 Mme Glumac (interprétation). - Donc vous partez de la maison

6 d'Ivo Kupreskic, celle qui est le plus près de la dépression ?

7 M. Vidovic (interprétation). - C'est exact.

8 Mme Glumac (interprétation). - Où se trouve l'étable

9 d'Ivo Kupreskic ?

10 M. Vidovic (interprétation). - Vers la droite. Si on descend ce

11 sentier, c'est derrière la ferme.

12 Mme Glumac (interprétation). - Donc c'est en contrebas par

13 rapport à la ferme ?

14 M. Vidovic (interprétation). - Tout à fait.

15 Mme Glumac (interprétation). - Ce chemin que vous suivez, ce

16 sentier, est-ce celui que l'on emprunte généralement pour aller des

17 maisons Kupreskic vers les maisons des… ou la maison de Santic ?

18 M. Vidovic (interprétation). - Oui. Voici cette dépression dont

19 nous avons parlé tout du long et maintenant, nous allons vers la maison de

20 Niko Sakic.

21 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que c'est le sentier qui

22 traverse cette dépression ?

23 M. Vidovic (interprétation). - Oui. Voici la maison de

24 Niko Sakic. Nous venons de longer le garage.

25 Mme Glumac (interprétation). - Le bâtiment que nous avons vu

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1 avant le garage, c'est la maison ?

2 M. Vidovic (interprétation). - Oui.

3 Mme Glumac (interprétation). - Et ce sentier, où mène-t-il ?

4 M. Vidovic (interprétation). - A Zume. Maintenant, c'est un

5 chemin asphalté. On pouvait aller en voiture jusqu'à la maison de Niko.

6 Mme Glumac (interprétation). - Quelle est la première maison que

7 l'on voit à droite ? A qui appartient-elle ?

8 M. Vidovic (interprétation). – A Ilko Brhada. Vous voulez parler

9 de la maison que l'on voit à l'instant même ?

10 Mme Glumac (interprétation). - Oui. Est-ce que c'est un

11 carrefour, là ?

12 M. Vidovic (interprétation). - Oui. En direction de la maison de

13 Nikola Omazic qui est de l'autre côté.

14 Mme Glumac (interprétation). - Nous sommes en train de dépasser

15 quelques maisons. Est-ce que ce sont là toutes des maisons croates ?

16 M. Vidovic (interprétation). – Oui, aujourd'hui. Il y a

17 Anto Pudza à gauche, Milan Samija et puis, 100 mètres plus avant à droite,

18 il y a quelques maisons musulmanes : celle de Ramo Bilic, Zijad Bilic.

19 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce qu'il y avait des maisons

20 Strmonja près de cet endroit ?

21 M. Vidovic (interprétation). - Oui. C'était la maison de Miralem

22 et de sa famille.

23 Mme Glumac (interprétation). - A qui appartiennent ces maisons ?

24 M. Vidovic (interprétation). - A droite, nous voyons les maisons

25 des Bilic, Ramo, Zijad Bilic, ainsi que le frère qui, lui, est en

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1 Autriche ; il s'appelle Miralem Strmonja.

2 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce qu'on voit là des toits à

3 plusieurs versants ? A quatre versants ?

4 M. Vidovic (interprétation). - Oui.

5 Mme Glumac (interprétation). – Et qu'est-ce qu'il en est des

6 maisons des Croates ?

7 M. Vidovic (interprétation). - Le toit est à deux pentes, à deux

8 versants.

9 Commentaires vidéo: nous sommes maintenant devant la maison de

10 Niko Vidovic. C'est là que se trouvait l'abri destiné aux civils.

11 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce qu'il y avait, à

12 l'intérieur de cet abri, les membres de votre famille au cours de l'après-

13 midi ?

14 M. Vidovic (interprétation). - Oui, depuis quatre heures le

15 matin. Maintenant nous allons vers la maison de Milutin Vidovic.

16 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que nous sommes toujours

17 sur ce chemin qui mène à la maison de Jozo Vrebac et de Milutin Vidovic,

18 en traversant la partie croate du village ?

19 M. Vidovic (interprétation). - Oui. Nous traversons là la partie

20 des maisons croates.

21 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que nous sommes toujours à

22 Santici ?

23 M. Vidovic (interprétation). – Non, maintenant nous sommes à

24 Zume, au lieu-dit Zume.

25 Mme Glumac (interprétation). - Mais cela fait partie de

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1 Santici ?

2 M. Vidovic (interprétation). - Oui.

3 Mme Glumac (interprétation). - On pourrait peut-être accélérer

4 la diffusion pour arriver à ces deux abris.

5 (Le technicien s'exécute.)

6 Mme Glumac (interprétation). - Fort bien. Nous pouvons ralentir

7 ici et revenir à la projection normale.

8 M. Vidovic (interprétation). - Nous sommes désormais à la maison

9 de Milutin Vidovic. Nous allons partir de cette maison de Milutin Vidovic

10 vers la maison de Jozo Vrebac.

11 Mme Glumac (interprétation). - Là, c'est la maison opposée en

12 face de celle qui appartient, dites-vous, à Joso Vrebac ?

13 M. Vidovic (interprétation). - Excusez-moi, je n'ai pas tout à

14 fait saisi votre question, je n'ai pas compris. Nous sommes maintenant

15 devant la maison de Jozo Vrebac.

16 Mme Glumac (interprétation). - Quelle est la maison qui est face

17 à celle de Jozo Vrebac ?

18 M. Vidovic (interprétation). - Il s'agit de l'abri du beau-fils

19 de Jozo.

20 Mme Glumac (interprétation). - Comment s'appelait-il ce beau-

21 fils ?

22 M. Vidovic (interprétation). - Il est de Macédoine, je ne sais

23 pas comment il s'appelle exactement. Je crois qu'il se prénommait Dragan.

24 Mme Glumac (interprétation). - Ce qui veut dire que la maison

25 qui était face à celle de Jozo, la jaune, c'était l'abri ?

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1 M. Vidovic (interprétation). - Oui.

2 Mme Glumac (interprétation). - Dites-nous, cette cassette, quand

3 a-t-elle été réalisée ?

4 M. Vidovic (interprétation). - Juste avant Noël. La veille de

5 Noël plus précisément.

6 Mme Glumac (interprétation). - L'année dernière ?

7 M. Vidovic (interprétation). - Oui, l'année dernière.

8 Mme Glumac (interprétation). - Fort bien, Monsieur Vidovic. Est-

9 ce que vous êtes resté dans cette dépression le second et le troisième

10 jours ?

11 M. Vidovic (interprétation). - Oui. Les personnes que j'ai

12 citées déjà et moi-même nous y sommes tous restés là le deuxième et le

13 troisième jour.

14 Mme Glumac (interprétation). - Et où dormiez-vous ?

15 M. Vidovic (interprétation). - Dans l'étable d'Ivo Kupreskic,

16 étable que nous avons vue d'ailleurs sur la cassette.

17 Mme Glumac (interprétation). - C'était l'étable qui se trouvait

18 en contrebas des bâtiments de ferme, du corps de ferme d'Ivo Kupreskic,

19 n'est-ce pas ?

20 M. Vidovic (interprétation). - Oui.

21 Mme Glumac (interprétation). - Les deuxième et troisième jours,

22 est-ce que ces mêmes personnes, que vous avez déjà nommées, sont restées

23 avec vous ? Je parle des personnes qui étaient avec vous le premier jour.

24 M. Vidovic (interprétation). - Oui, nous y sommes restés tout le

25 temps ensemble.

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1 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que vous avez un moment

2 quitté Ahmici, est-ce que vos familles sont parties ?

3 M. Vidovic (interprétation). - Oui, oui. Le lendemain, le second

4 jour du conflit, dans la soirée, les membres de ma famille ont quitté

5 l'abri de Niko Vidovic et sont allés en direction de Rovna.

6 Mme Glumac (interprétation). - Et combien de temps ont-ils passé

7 à Rovna ? Chez qui sont-ils restés ?

8 M. Vidovic (interprétation). - Ils ont passé une journée ou deux

9 chez Zvonko Santic. C'est mon oncle. C'est là qu'ils sont allés à Rovna.

10 Mme Glumac (interprétation). - Au cours du troisième jour,

11 qu'avez-vous fait ? Qu'est-ce qu'il vous est arrivé ce jour-là ?

12 M. Vidovic (interprétation). - Au cours de la troisième journée,

13 deux membres de la police militaire sont arrivés. Ils nous ont emmenés

14 vers une espèce de ligne de front à Pirici. C'était là, la première fois

15 que nous étions montés jusqu'aux maisons musulmanes. Nous avons vu

16 qu'elles avaient été incendiées, rasées par les flammes et qu'il y avait

17 des victimes, des Musulmans morts, tués.

18 Mme Glumac (interprétation). - Qui avez-vous vu et qu'avez-vous

19 vu ?

20 M. Vidovic (interprétation). - Lorsque nous avons dépassé la

21 maison d'Enver Ceric, nous avons vu que sa maison avait été brûlée et il

22 était là gisant au sol, mort avec son fils. Je sais que Zoran a pleuré,

23 car ça avait été des bons amis, Enver et lui. Puis nous avons vu la maison

24 de Hazrudin Ahmic, de son père Munib Ahmic et la maison avait également

25 été incendiée.

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1 Mme Glumac (interprétation). - Quel chemin avez-vous suivi pour

2 aller à Pirici ?

3 M. Vidovic (interprétation). - Il y a un sentier que nous avons

4 pris. Nous avons pris un raccourci. Nous avons traversé les champs.

5 C'était la façon la plus rapide d'y arriver.

6 Mme Glumac (interprétation). - Et où êtes-vous resté à Pirici ?

7 Où vous a-t-on dit d'aller à Pirici même ?

8 M. Vidovic (interprétation). - Les premières maisons de Pirici à

9 notre arrivée à cet endroit… C'est à cet endroit que nous avons rencontré

10 pour la première fois Slavko Papic. C'était lui qui décidait de

11 l'affectation des personnes qui allaient creuser. Étant donné que j'étais

12 au courant, que je savais que c'était un officier de réserve de l'ancienne

13 armée, je me suis dit qu'il était informé et que c'était là la raison pour

14 laquelle on lui avait confié cette tâche. C'est bien comme ça que les

15 choses se sont passées. Nous avons commencé à creuser à cet endroit.

16 Mme Glumac (interprétation). - Qui a été emmené à Pirici ce

17 jour-là avec vous ?

18 M. Vidovic (interprétation). - Le groupe tout entier. Tout ce

19 groupe qui s'était trouvé dans la dépression dont j'ai parlé.

20 Mme Glumac (interprétation). – Zoran, Mirjan ?

21 M. Vidovic (interprétation). - Eux aussi était là, Mirko Santic,

22 Dragica Samija.

23 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que vous avez creusé des

24 tranchées à cet endroit ?

25 M. Vidovic (interprétation). - Oui. Un petit peu. Même si on ne

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1 savait pas ce qu'il fallait creuser comme tranchées, nous avons creusé des

2 trous dans lesquels nous allions pouvoir nous cacher.

3 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que vous avez parlé avec

4 ces membres de la police militaire qui vous avaient emmené à cet endroit ?

5 M. Vidovic (interprétation). - Oui. Vingt mètres avant d'arriver

6 à l'endroit où nous nous sommes arrêtés, un de ces deux hommes nous a dit

7 qu'il fallait bien surveiller cette ligne. Je le cite, il a dit : "En

8 effet, si les Musulmans fond une percée à cet endroit, ils vont vous faire

9 la même chose que ce que nous, nous leur avons faits".

10 Mme Glumac (interprétation). – A qui pensez-vous quand vous

11 dites "nous" ?

12 M. Vidovic (interprétation). – Ces deux membres de la police

13 militaire.

14 Mme Glumac (interprétation). - A Pirici, êtes-vous resté

15 longtemps ?

16 M. Vidovic (interprétation). - On y a passé la nuit. Puis Slavko

17 Papic est arrivé. Il a dit à notre groupe que nous devions aller à Ahmici-

18 le-haut. Nous avions peur. On a commencé à discuter avec lui, on n'a pas

19 voulu partir tout de suite du premier coup, mais au bout d'une journée ou

20 deux, nous avons dû aller à l'endroit qu'il avait désigné. Nous y avons

21 creusé là et nous y sommes restés jusqu'à la fin de la guerre.

22 Mme Glumac (interprétation). - Fort bien. Je vous remercie,

23 Monsieur le Président. Je n'ai plus de questions à poser à ce témoin.

24 M. le Président (interprétation). – Merci.

25 Mme Glumac (interprétation). - Est-ce que les pièces suivantes

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1 peuvent être versées au dossier D105/2, 106, 107/2. Je n'ai peut-être pas

2 très bien suivi les cotes.

3 M. le Président (interprétation). – 105, 106…

4 Mme Glumac (interprétation). – Non, pas 7.

5 M. le Président (interprétation). – Il n'y a pas de 107, il y

6 a 106/A. Y a-t-il une objection ?

7 M. Blaxill (interprétation). – Non.

8 M. le Président (interprétation). – Fort bien, cette pièce est

9 versée au dossier.

10 M. Susak (interprétation). – Monsieur le Président, excusez-moi.

11 Je pensais qu'il n'y avait pas de questions supplémentaires, mais

12 Me Puliselic veut poser des questions au témoin.

13 M. Puliselic (interprétation). - Merci, Monsieur le Président.

14 Je tenais simplement à poser une question à M. Vidovic. La voici :

15 Monsieur Vidovic, vous avez dit être originaire de Pirici et y vivre.

16 M. Vidovic (interprétation). - Oui.

17 M. Puliselic (interprétation). - Y a-t-il une autre personne

18 dénommée Dragan Vidovic dans la région de Pirici, Santici ou Ahmici ou

19 ailleurs ?

20 M. Vidovic (interprétation). - Oui. Dans ces endroits que vous

21 venez de citer, à l'époque, il y avait six Dragan Vidovic. A l'heure

22 actuelle, il y en a cinq, car Dragan Vidovic de Buhine Kuce a été tué.

23 M. Puliselic (interprétation). – Comment s'appelait votre père ?

24 M. Vidovic (interprétation). – Stipo.

25 M. Puliselic (interprétation). - Comment s'appelaient les pères

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1 de ces autres personnes ?

2 M. Vidovic (interprétation). - Dragan Vidovic, fils de Zado,

3 Dragan Vidovic, fils de Nikica, Drago Vidovic, fils de Franjo,

4 Dragan Vidovic, fils d'Ivica et Dragan Vidovic, celui qui a été tué à

5 Buhine Kuce et son père s'appelait Anto.

6 M. Puliselic (interprétation). - Il y a donc six personnes

7 dénommées Dragan Vidovic ?

8 M. Vidovic (interprétation). - C'était le cas à l'époque.

9 M. Puliselic (interprétation). - Je n'ai plus de questions à

10 poser. Merci, Monsieur le Président.

11 M. le Président (interprétation). – Merci. Maître Blaxill, vous

12 avez la parole.

13 M. Blaxill (interprétation). - Merci, Monsieur le Président.

14 M. Blaxill (interprétation). - Bon après-midi, Monsieur Vidovic.

15 Je m'appelle Mickael Blaxill, je suis un des substituts assigné à cette

16 affaire et, à la suite de l'interrogatoire principal, j'aimerais vous

17 poser plusieurs questions.

18 Pouvons-nous remonter au moment où vous avez commencé à déposer

19 en ce qui concerne la garde villageoise ? Vous avez dit qu'il s'agissait

20 d'un effort conjoint concerté de coopération au début de 1992, c'est-à-

21 dire qu'il y avait coopération entre Musulmans et Croates. Est-ce bien ce

22 que vous avez dit ?

23 M. Vidovic (interprétation). - Oui.

24 M. Blaxill (interprétation). – Mais, si je vous ai bien compris,

25 n'avez-vous pas dit que chaque groupe de garde villageoise fonctionnait à

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1 proximité de votre partie du village, du quartier où vous habitiez dans le

2 village ? Est-ce bien exact ?

3 M. Vidovic (interprétation). - Oui. C'est exact. Nous étions

4 proches de nos maisons pour ces tours de garde. Nous ne nous sommes pas

5 aventurés plus loin.

6 M. Blaxill (interprétation). - Pour ce qui est de votre

7 participation au début 1992 à ces gardes villageoises, avant le premier

8 conflit, je vais vous demander d'indiquer sur la grande photographie

9 aérienne la surface que vous patrouilliez en compagnie de vos collègues.

10 Cela peut être tout à fait approximatif.

11 M. Vidovic (interprétation). - Je peux le faire.

12 (Le témoin s'exécute.)

13 Donc nous nous rendions dans cette direction ; voilà les maisons

14 qui se trouvent là, celles-ci et les maisons des Kupreskic, ici. Nous ne

15 sommes pas aventurés plus loin que cela.

16 M. Blaxill (interprétation). - Les gardes musulmanes qui

17 patrouillaient dans la même région, est-ce qu'en fait, eux se trouvaient

18 dans d'autres parties du village par rapport à vous ?

19 M. Vidovic (interprétation). - Oui. Les Musulmans, les gardes

20 musulmans que j'ai vus avec lesquels nous nous trouvions, se trouvaient

21 ici, dans cette partie-ci, voyez-vous, depuis la route principale jusqu'à

22 la maison d'Anto Kupreskic. Nous ne sommes pas allés plus loin. Je suppose

23 qu'ils avaient leurs troupes de garde dans cette partie-là et dans cette

24 partie-ci.

25 M. Blaxill (interprétation). - Vous pouvez vous rasseoir. Je

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1 vous remercie.

2 Donc, au départ, d'après ce que vous avez dit, il semblait qu'il

3 n'y avait pas vraiment d'armes ? Que ces gardes villageoises, qu'elles

4 soient musulmanes ou croates, patrouillaient sans armes. Est-ce bien

5 cela ?

6 M. Vidovic (interprétation). - Oui.

7 M. Blaxill (interprétation). - Ensuite, on vous a posé une

8 question où on vous a dit que les Musulmans s'étaient armés et vous avez

9 parlé d'un camion. Alors j'aimerais bien que vous reveniez un petit peu en

10 détail, ce que vous avez pu remarquer concernant ce camion, où

11 l'avez-vous vu et quand ?

12 M. Vidovic (interprétation). - Bon, j'ai pu remarquer ce camion

13 qui se trouvait devant ma maison, à 20 mètres de moi. J'ai vu passer ce

14 camion sur la route principale, qui venait de la route principale, et qui

15 se rendait vers Ahmici-le-haut. C'était un camion vert avec Muhamed Pezer

16 qui était au volant. Je le connaissais.

17 M. Blaxill (interprétation). - Est-ce que ce camion avait des

18 insignes ou un marquage particulier ?

19 M. Vidovic (interprétation). - Oui. Il s'agissait d'un camion

20 privé, ce qui fait que sur la porte se trouvait le nom du propriétaire du

21 camion. Je n'ai pas pu lire cette indication, mais je sais que c'était son

22 camion. Je le sais.

23 M. Blaxill (interprétation). - Pouvez-vous nous décrire un petit

24 peu la carrosserie ? Comment se présentait-il ? Pouvez-vous vous nous

25 décrire ce camion, sa carrosserie ?

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1 M. Vidovic (interprétation). - C'était un camion à benne sans

2 bâche, donc je pouvais voir les armes, je pouvais voir les caisses de

3 munitions et ce camion, comme je vous l'ai dit, dans ce camion se

4 trouvaient deux Musulmans, l'un tenait une arme automatique.

5 M. Blaxill (interprétation). - Là donc, vous parlez d'un camion

6 à benne. Est-ce que dès lors l'arrière est comme une espèce de grand

7 espace vide qui peut se basculer et se vider ? C'est de cela que vous

8 parlez, c'est ce type-là de camion dont il s'agit ?

9 M. Vidovic (interprétation). - Oui. Je sais. Vous savez, moi,

10 j'ai aussi un permis de conduire et je peux conduire ce type de camions à

11 benne, donc je vois bien ce que c'est que ce camion à benne versante, je

12 connais. C'est ça.

13 M. Blaxill (interprétation). - Donc la partie arrière est assez

14 profonde puisqu'on peut la charger et puis décharger ? Donc c'est tout de

15 même une benne assez profonde ?

16 M. Vidovic (interprétation). - Non. En fait, à l'arrière, c'est

17 assez plat, ce qui fait que je pouvais voir ce qu'il y avait dedans.

18 M. Blaxill (interprétation). - Donc vous pouviez voir la charge

19 dans ce véhicule et vous voyez plutôt cette charge par l'arrière plutôt

20 que par les côtés, si je vous ai bien compris ? Est-ce que c'est bien

21 cela, parce que, là, les parois sont plus basses à l'arrière ?

22 M. Vidovic (interprétation). - En fait, ce camion venait de la

23 direction d'Ahmici quand il est passé. Forcément, à un moment donné, il se

24 trouvait devant moi, donc je pouvais le voir, je pouvais voir cette

25 charge, ce chargement depuis l'arrière du camion, et puis j'ai vu aussi ce

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1 qu'il tenait dans les mains.

2 M. Blaxill (interprétation). - Est-ce que vous vous trouviez

3 debout sur la route, à ce moment-là, n'est-ce pas ? Est-ce que vous pouvez

4 nous dire où vous vous trouviez par rapport au camion ? Vous vous trouviez

5 sur la route ?

6 M. Vidovic (interprétation). - Oui, j'étais au niveau de la

7 route, mais vu que c'était à une petite distance, j'ai tout de même pu

8 voir.

9 M. Blaxill (interprétation). - Pendant combien de temps est-ce

10 que vous avez pu être en mesure de voir par l'arrière de ce camion ?

11 M. Vidovic (interprétation). - Disons, peut-être 30 à

12 40 secondes.

13 M. Blaxill (interprétation). - Vous nous aviez dit avoir vu des

14 caisses à l'intérieur de ce camion, n'est-ce pas ?

15 M. Vidovic (interprétation). - Oui.

16 M. Blaxill (interprétation). - vous souvenez-vous de combien de

17 caisses il s'agissait ?

18 M. Vidovic (interprétation). - Non. Non, je ne me souviens plus.

19 J'ai vu des caisses, des caisses vert olive. Je savais qu'il s'agissait de

20 caisses militaires et j'ai supposé qu'elles contenaient des munitions.

21 M. Blaxill (interprétation). - Donc vous avez supposé que ces

22 caisses brunâtres ou verdâtres contenaient des munitions, mais vous n'avez

23 pas vu de véritables munitions ?

24 M. Vidovic (interprétation). - Si je me souviens bien, je vous

25 ai parlé des caisses, je n'ai pas parlé de munitions, j'ai dit que j'ai vu

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1 les armes.

2 M. Blaxill (interprétation). - Alors, écoutez, pour être tout à

3 fait précis, ce que vous nous dites, c'est que vous avez vu des caisses,

4 des caisses qui semblaient d'après leur forme et leur couleur être des

5 caisses militaires. C'est bien cela que vous avez vu, n'est-ce pas ?

6 M. Vidovic (interprétation). - Oui. Oui, ça je le sais. Je sais

7 qu'il s'agit de caisses militaires.

8 M. Blaxill (interprétation). - Est-ce que certaines de ces

9 caisses n'étaient peut-être pas recouvertes par un couvercle ?

10 M. Vidovic (interprétation). - Ça je n'ai pas vu. Je n'ai pas vu

11 d'autres caisses.

12 M. Blaxill (interprétation). - Ai-je raison de dire alors,

13 Monsieur, que votre suggestion selon laquelle vous avez vu les Musulmans

14 s'armer, que toutes ces déclarations reviennent en fait à 30 secondes au

15 cours desquelles vous avez vu des caisses apparemment militaires, à

16 l'arrière d'un camion ? Est-ce que c'est cela que vous êtes en train de

17 nous dire ?

18 M. Vidovic (interprétation). - Je vous dis que j'ai vu sur ce

19 camion dans la benne des armes. Je ne peux pas vous dire précisément

20 combien, mais des armes automatiques. J'ai vu des fusils PAP, qui sont

21 évidemment différents des armes automatiques, et puis j'ai vu ces caisses

22 dont je vous ai dit que je supposais qu'elles contenaient des munitions.

23 M. Blaxill (interprétation). - Vous nous dites ceci pour les

24 caisses, mais vous avez vu donc des armes également se trouver à l'arrière

25 de ce camion ?

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1 M. Vidovic (interprétation). - Oui. Oui, c'est ce que j'ai dit.

2 M. Blaxill (interprétation). - Et vous avez observé ça

3 évidemment de manière très brève ; vous n'avez pas pu compter ? Vous ne

4 savez pas combien il y en avait ?

5 M. Vidovic (interprétation). – Non, non. Non je ne peux pas vous

6 dire cela.

7 M. Blaxill (interprétation). - Nous pouvons maintenant passer à

8 la fin de

9 l'année 1992. Le système de patrouilles villageoises est en fonction et

10 vous nous avez signalé qu'il y avait, quelquefois, des problèmes

11 concernant la disponibilité de l'un ou l'autre pour faire partie de ces

12 tours de garde ; M. Zoran Kupreskic a essayé de régler ces difficultés.

13 Est-ce bien cela ?

14 M. Vidovic (interprétation). – Oui.

15 M. Blaxill (interprétation). - Est-ce que M. Kupreskic est

16 devenu, en quelque sorte, connu parmi ces gardes comme étant la personne

17 qui essayait de régler les tours de garde de chacun ?

18 M. Vidovic (interprétation). - C'est-à-dire ces gens se

19 connaissaient et ils savaient que c'était lui qui s'occupait de cela. En

20 tout cas qui essayait de faire quelque chose.

21 M. Blaxill (interprétation). - En tant que groupe de garde,

22 aviez-vous des contacts ou liaisons quelconques avec les membres de la

23 défense civile pour cette région ?

24 M. Vidovic (interprétation). - Au cours de cette période, je ne

25 sais pas. Je ne sais pas si quelqu'un est jamais venu nous dire quoi que

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1 ce soit ou attirer notre attention sur quelque chose de particulier.

2 M. Blaxill (interprétation). - Vous avez signalé que vous aviez

3 vous-même repris cette mission de M. Zoran Kupreskic. C'est à quelle

4 époque que vous vous êtes occupé de ces questions administratives entre

5 les gardes du village ?

6 M. Vidovic (interprétation). - Écoutez, je ne suis pas sûr de

7 comprendre ce que vous dites. Questions administratives, qu'entendez-vous

8 par là ? Administratives, ça veut dire quoi ? En fait, nous essayions de

9 nous mettre d'accord. Si quelqu'un ne venait pas, on essayait de voir ce

10 qui se passait, parce que quelqu'un se plaignait, alors j'allais voir la

11 personne qui n'était pas venue, pourquoi elle n'était pas venue. Si

12 c'était justifié, s'il y avait une bonne raison. alors, à ce moment-là, je

13 disais : "Bon, tu viendras une autre fois" et, à la fin janvier, comme

14 vous le disiez, il s'agissait d'un devoir.

15 M. Blaxill (interprétation). - Étant donné que vous essayiez de

16 régler les difficultés, vous aviez dit que cette tâche vous est revenue en

17 janvier 1993 ou autour de cette date-là.

18 M. Vidovic (interprétation). - A la fin janvier 1993.

19 M. Blaxill (interprétation). - Oui. Écoutez, peut-être que le

20 moment est venu de faire une pause maintenant, si vous le voulez bien.

21 M. le Président (interprétation). – Alors pause d'une quinzaine

22 de minutes.

23 (L'audience, suspendue à 12 heures 10, est reprise à

24 11 heures 30.)

25 M. le Président (interprétation). – Maître Blaxill.

Page 8105

1 M. Blaxill (interprétation). - Merci, Monsieur le Président.

2 Monsieur Vidovic, je voudrais vous ramener à la partie un peu

3 plus tardive de 1992 où vous nous avez dit que, pendant une certaine

4 époque, vous aviez été officier de police de réserve. Police civile ou

5 police militaire ? Quel type d'organisation ? De quel type d'organisation

6 s'agissait-il ?

7 M. Vidovic (interprétation). - Il s'agissait de la police

8 civile.

9 M. Blaxill (interprétation). - Lorsque vous avez quitté cette

10 force de police de réserve, pouvez-vous nous dire à quel moment cela s'est

11 passé ?

12 M. Vidovic (interprétation). - Eh bien, je suis resté au sein de

13 cette force de police pendant deux ou trois mois ; donc c'était vers avril

14 ou mai que je suis parti, mais je ne peux plus vous dire cela avec

15 précision.

16 M. Blaxill (interprétation). - 1992, j'imagine ?

17 M. Vidovic (interprétation). - Oui, 1992... Non, non 1991.

18 M. Blaxill (interprétation). - Est-ce que vous aviez des

19 obligations vis-à-vis de la police en cas d'émeutes etc. ? Ou bien est-ce

20 que vous avez vraiment quitté la police une fois pour toutes ?

21 M. Vidovic (interprétation). – Non, il s'agissait vraiment d'un

22 départ définitif. Je suis parti, parce que je devais aller travailler.

23 J'avais d'autres activités, je ne pouvais plus continuer.

24 M. Blaxill (interprétation). - Ensuite, vous avez travaillé.

25 Vous étiez donc civil jusqu'au début du deuxième conflit, c'est-à-dire en

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1 avril 1993 ?

2 M. Vidovic (interprétation). - Oui.

3 M. Blaxill (interprétation). – Revenons-en au premier conflit,

4 si vous le voulez bien, qui s'est produit le 20 octobre 1992. Vous nous

5 disiez que, la veille, vous aviez été travailler comme d'habitude, n'est-

6 ce pas ?

7 M. Vidovic (interprétation). - Oui.

8 M. Blaxill (interprétation). - Vous aviez également évoqué un

9 barrage qui avait été établi par des Musulmans dans le village.

10 M. Vidovic (interprétation). - Oui.

11 M. Blaxill (interprétation). – Savez-vous à quelle époque ce

12 barrage a été établi ? S'agissait-il du 19 octobre ou bien était-il déjà

13 là plus tôt ? Est-ce que vous vous souvenez de quand ?

14 M. Vidovic (interprétation). – Avant, le barrage a été établi

15 plusieurs jours avant le début du conflit.

16 M. Blaxill (interprétation). - Donc, pendant plusieurs jours,

17 vous vous êtes rendu à votre travail, vous êtes revenu, vous êtes donc

18 passé par ce barrage routier ?

19 M. Vidovic (interprétation). - Je me suis rendu au travail, mais

20 j'ai longé donc ce barrage pendant plusieurs jours avant le conflit.

21 M. Blaxill (interprétation). - Pouvez-vous nous indiquer sur la

22 photographie où se trouvait ce barrage ? Quelle en était la position ?

23 M. Vidovic (interprétation). – Eh bien, comme nous l'avons

24 indiqué, c'était sur la route vers Ahmici, à 15-20 mètres de là, tout près

25 de l'étable de Sakib Ahmic, qui se trouve ici.

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1 M. Blaxill (interprétation). - Je vous remercie, vous pouvez

2 reprendre place, merci de nous avoir montré cela.

3 Bien. Monsieur Vidovic, est-ce que vous avez entendu vers le

4 19 octobre parler de toutes autres formes de barrages routiers qui

5 auraient été établies dans la région ?

6 M. Vidovic (interprétation). - Non. Non je n'ai pas entendu

7 parler de cela.

8 M. Blaxill (interprétation). - Est-ce que vous avez entendu

9 parler d'activités qui se seraient produites ce 19 autour du cimetière

10 catholique de la route qui va de Vitez à Busovaca ?

11 M. Vidovic (interprétation). - Non, je n'ai pas entendu parler

12 de quoi que ce soit.

13 M. Blaxill (interprétation). - Avez-vous entendu parler de

14 l'établissement d'un barrage ou de quelque chose du genre près du

15 cimetière le 20 octobre, au moment où le conflit a éclaté ?

16 M. Vidovic (interprétation). - Eh bien, le 19, je n'ai entendu

17 parler de rien, mais le lendemain, c'est-à-dire le 20 dans l'après-midi,

18 j'ai entendu qu'il y avait un barrage qui avait été établi. C'est

19 d'ailleurs à cet endroit que le conflit a démarré.

20 M. Blaxill (interprétation). - Est-ce que, pendant les journées

21 qui ont précédé le 20 octobre, est-ce que vous avez pu savoir la raison

22 pour laquelle les Musulmans avaient établi ce petit barrage sur la route

23 qui mène au village d'Ahmici ? Est-ce qu'on vous a expliqué le pourquoi de

24 l'existence de ce barrage ?

25 M. Vidovic (interprétation). - Non, non. Personne ne m'a

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1 expliqué cela, donc je ne savais pas pourquoi ce barrage avait été érigé.

2 M. Blaxill (interprétation). - Est-ce que les personnes qui se

3 trouvaient à ce barrage

4 faisaient partie des gardes musulmans de ce village ? Est-ce que vous vous

5 souvenez de cela ?

6 M. Vidovic (interprétation). - Oui.

7 M. Blaxill (interprétation). - Est-ce que, jusqu'à ce moment-là,

8 vous aviez encore toujours cette coopération ou en tout cas des contacts

9 entre les gardes musulmans et croates, vous vous parliez toujours à cette

10 époque-là donc en octobre 1992 ?

11 M. Vidovic (interprétation). - Oui. Oui. Nous continuions à nous

12 parler jusqu'au moment dont je vous ai parlé. Nous continuions du reste

13 nos patrouilles ensemble.

14 M. Blaxill (interprétation). - Donc, au cours de ces activités

15 que vous meniez ensemble, est-ce que vous ou certains de ces collègues ont

16 jamais posé la question de la raison de ce barrage à vos camarades gardes

17 musulmans ?

18 M. Vidovic (interprétation). - Eh bien, nous montions la garde

19 ensemble avant donc l'établissement de ce barrage et, moi, je ne savais

20 pas qu'ils allaient l'établir, autrement j'aurais posé la question.

21 M. Blaxill (interprétation). - Mais, Monsieur Vidovic, vous en

22 tant que garde villageois, est-ce que vos activités visant à protéger la

23 sécurité, les intérêts des habitants croates de votre région, c'est bien

24 comme ça que vous envisagiez votre activité ?

25 M. Vidovic (interprétation). - Oui. Tant les Croates et les

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1 Musulmans, parce que c'est pour ça que nous faisions cela. Nous étions là

2 pour protéger cette région dont nous parlons.

3 M. Blaxill (interprétation). - Lorsque ce barrage est apparu

4 soudainement et que les citoyens devaient passer par ce barrage et subir

5 des vérifications, vous ne vous êtes jamais préoccupé de savoir pourquoi

6 les Musulmans avaient établi ce barrage ?

7 M. Vidovic (interprétation). - En fait, il n'y avait personne à

8 qui je pouvais le demander.

9 M. Blaxill (interprétation). - Mais lorsque vous passiez par ce

10 barrage pendant les

11 journées qui ont précédé le 20 octobre, je suppose que vous aviez dit

12 d'ailleurs que vous aviez reconnu les personnes qui étaient à ce barrage,

13 qui étaient elles-mêmes des gardes villageoises ?

14 M. Vidovic (interprétation). - Oui.

15 M. Blaxill (interprétation). - Je suppose donc qu'il s'agissait

16 de personnes que vous connaissiez personnellement, n'est-ce pas ?

17 M. Vidovic (interprétation). - Oui, tout à fait.

18 M. Blaxill (interprétation). - Vous en aviez... on peut donc

19 dire que c'étaient de bonnes connaissances, voire même peut-être vos amis

20 avant le conflit ?

21 M. Vidovic (interprétation). - Oui.

22 M. Blaxill (interprétation). - Est-ce qu'alors n'aurait-il pas

23 été assez simple de votre part de pouvoir leur poser la question de savoir

24 pourquoi ils avaient pris cette mesure ?

25 M. Vidovic (interprétation). - Oui. Après qu'ils... en fait, ils

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1 n'autorisaient plus l'entrée aux Croates dans l'école primaire et j'ai vu

2 que leurs relations avec nous devenaient un peu plus tendues.

3 M. Blaxill (interprétation). - Donc vous avez interprété cette

4 mesure comme étant effectivement la manifestation que les relations entre

5 les communautés croates et musulmanes devenaient plus tendues ?

6 M. Vidovic (interprétation). - Eh bien, oui. Après cela, oui.

7 Oui. Oui, c'est comme ça qu'on pourrait décrire la chose.

8 M. Blaxill (interprétation). - En tant que garde, vous et vos

9 collègues, vous aviez de manière volontaire assumé cette tâche de

10 protection des habitants croates, n'est-ce pas ?

11 M. Vidovic (interprétation). - Oui.

12 M. Blaxill (interprétation). - Y a-t-il d'autres mesures que

13 vous auriez prises au moment où vous avez remarqué l'existence d'un

14 barrage musulman ? Est-ce que vous avez

15 déclaré cela auprès d'une autorité officielle quelconque ?

16 M. Vidovic (interprétation). - Non. Non, je n'ai contacté

17 personne et je ne savais pas non plus très bien qui j'aurais pu contacter

18 pour demander le pourquoi de l'existence de ce barrage.

19 M. Blaxill (interprétation). - Bien. Est-ce que nous pouvons

20 revenir au 19 octobre ? Je pense que vous aviez dit avoir vu une trentaine

21 ou une quarantaine de soldats qui sont entrés dans l'école primaire, ce

22 soir-là. C'est bien cela, n'est-ce pas ?

23 M. Vidovic (interprétation). - Oui. Oui, c'est tout à fait

24 correct.

25 M. Blaxill (interprétation). - Pouvez-vous nous décrire leur

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1 habillement ? Que portaient-ils ?

2 M. Vidovic (interprétation). - Pour certains, ils portaient des

3 uniformes de camouflage, d'autres portaient des vêtements civils, des

4 vêtements normaux.

5 M. Blaxill (interprétation). - Est-ce que ces personnes étaient

6 armées ?

7 M. Vidovic (interprétation). - Oui. J'ai vu que chacun d'entre

8 eux portait une arme.

9 M. Blaxill (interprétation). - *Pouvez-vous nous dire s'il

10 s'agissait de Croates ou de Musulmans ? Des autochtones ou des gens qui

11 venaient de l'extérieur ?

12 M. Vidovic (interprétation). - Vu qu'ils étaient arrivés de

13 Gornje, de Ahmici-le-haut, je suppose qu'il s'agissait de Musulmans, mais

14 quant à savoir s'il s'agissait de villageois, ça je ne pouvais pas voir de

15 manière précise qui ils étaient.

16 M. Blaxill (interprétation). - A quelle heure de la journée sont

17 arrivés ces soldats ?

18 M. Vidovic (interprétation). - Il ne s'agissait pas de la

19 journée, il s'agissait de la soirée.

20 M. Blaxill (interprétation). - Donc en fait il faisait trop noir

21 sans doute pour pouvoir identifier ces personnes ? Vous pouviez simplement

22 voir s'ils portaient des uniformes ou pas ?

23 M. Vidovic (interprétation). - Oui, en fait je ne reconnaissais

24 pas leur visage, parce que je me trouvais à une cinquantaine de mètres de

25 la maison de Modus où il y avait de la lumière. Donc j'ai vu le groupe,

Page 8112

1 j'ai vu leurs vêtements, j'ai vu leurs armes, je ne pouvais pas

2 reconnaître leur visage de cette distance.

3 M. Blaxill (interprétation). - Donc 50 mètres. Est-ce qu'il y

4 avait de la lumière dans la maison de Modus ou bien est-ce que la lumière

5 se trouvait à l'extérieur de sa maison ?

6 M. Vidovic (interprétation). - La lumière se trouvait devant et,

7 en fait, la route était éclairée, la route le long de laquelle le groupe

8 de soldats s'est déplacé.

9 M. Blaxill (interprétation). - J'avais noté que vous aviez dit

10 vous-même que vous aviez remarqué qu'il y avait quelque chose de bizarre

11 dans l'arrivée de cette trentaine, quarantaine de soldats. Est-ce bien

12 correct ?

13 M. Vidovic (interprétation). - Oui.

14 M. Blaxill (interprétation). - Cependant, vous nous dites

15 ensuite n'avoir pris aucune mesure pour informer qui que ce soit du fait

16 que ces hommes se soient présentés à l'école primaire d'Ahmici ?

17 M. Vidovic (interprétation). - C'est correct. Je n'ai informé

18 personne.

19 M. Blaxill (interprétation). - Alors vous nous avez déjà dit,

20 Monsieur, qu'en tant que garde villageois, vous aviez déjà assisté à

21 l'apparition de ce barrage musulman à l'entrée du village. Ensuite, à la

22 fin de la journée du 20 octobre, vous avez vu arriver une trentaine ou

23 plus d'hommes armés arriver dans le village et vous nous dites que vous

24 n'avez pas ressenti l'utilité d'informer qui que ce soit de cet

25 événement ?

Page 8113

1 M. Vidovic (interprétation). - Oui. Oui. Je n'ai pas pensé que

2 ce fut nécessaire puisque jusqu'au 20, il n'y avait jamais eu d'incidents

3 entre les Musulmans et les Croates ; il n'y avait pas eu d'échanges de

4 tirs, ni de tueries, donc rien qui me permettrait de tirer la conclusion

5 que quelque chose était en train de se préparer.

6 M. Blaxill (interprétation). - Lorsque vous avez vu ces soldats,

7 vous nous dites vous être caché pour ne pas être vu par eux. Est-ce bien

8 cela ?

9 M. Vidovic (interprétation). - Oui.

10 M. Blaxill (interprétation). – Donc, à la fin du 19 octobre, je

11 suppose que vous vous êtes mis au lit sans penser même qu'il puisse y

12 avoir le moindre problème provenant des Musulmans dans les environs. Est-

13 ce bien cela ?

14 M. Vidovic (interprétation). – Oui, c'est cela.

15 M. Blaxill (interprétation). - Nous avons déjà entendu, dans

16 cette Chambre, qu'au début de la matinée, vers 5 heures, on a entendu des

17 détonations, que les gens ont été réveillés et que ce fut votre cas, vous

18 avez été réveillé suite à un bruit d'explosion. N'est-ce pas ?

19 M. Vidovic (interprétation). - Oui. Cette détonation a eu lieu

20 vers 5 heures du matin et c'est ça qui m'a réveillé.

21 M. Blaxill (interprétation). - Et ensuite, il y a eu une

22 intensification de cet échange de tirs et vous avez entendu les balles

23 siffler près de votre maison. Est-ce bien cela ?

24 M. Vidovic (interprétation). - Oui. Cette détonation donc a eu

25 lieu vers 5 heures. J'ai entendu des tirs et des balles qui tombaient sur

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1 le toit de ma maison.

2 M. Blaxill (interprétation). - Je crois avoir entendu que vous

3 avez dit qu'au cours de cette journée, vous avez trouvé abri dans cette

4 dépression. N'est-ce pas ?

5 M. Vidovic (interprétation). - Oui. Après avoir emmené ma

6 famille dans l'abri, nous nous sommes rendus dans la dépression.

7 M. Blaxill (interprétation). - Une autre personne, qui a dit

8 qu'elle se trouvait dans la dépression, a dit qu'il y avait un

9 Dragan Vidovic, fils de Niko, Nikola. C'était le Dragan Vidovic qui se

10 trouvait dans la dépression, d'après vous ?

11 M. Vidovic (interprétation). - Oui. Dragan, Ice, c'est comme ça

12 qu'on l'appelait.

13 M. Blaxill (interprétation). - Il se trouvait avec vous, avec le

14 groupe qui se trouvait dans la dépression ?

15 M. Vidovic (interprétation). - C'est le matin que je l'avais vu

16 et comme la journée passait, je ne le voyais plus.

17 M. Blaxill (interprétation). – Est-il exact de dire qu'au cours

18 de cette journée, certains d'entre vous partaient pour peu ou plus de

19 temps et puis revenaient à la dépression ? Est-ce que ceci s'est produit

20 au cours du 20 octobre dans la dépression ?

21 M. Vidovic (interprétation). - Oui. Moi, comme je l'ai déjà dit,

22 moi aussi je me suis déplacé à plusieurs reprises, mais tous les autres

23 également qui étaient avec moi et dont les familles se trouvaient dans

24 l'abri. Eux aussi ils se rendaient jusqu'à cet endroit.

25 M. Blaxill (interprétation). – Il semblerait qu'au cours de la

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1 nuit, dans la nuit du 19 au 20 octobre, si je vous ai bien compris,

2 Monsieur, vous avez passé une nuit dans une étable ou une grange, celle

3 d'Ivica Kupreskic.

4 M. Vidovic (interprétation). - Je n'ai pas parlé

5 d'Ivica Kupreskic, mais de son père Ivo Kupreskic.

6 M. Blaxill (interprétation). – Excusez-moi, effectivement. Je

7 suis à blâmer. Ivo Kupreskic et non pas Ivica.

8 M. Vidovic (interprétation). - C'est cela.

9 M. Blaxill (interprétation). – Est-il exact de dire que ce corps

10 ou ce bâtiment se trouve au même niveau que les maisons, les autres

11 maisons des Kupreskic ?

12 M. Vidovic (interprétation). - En contrebas, quelque peu plus

13 bas par rapport à la maison d'Ivo Kupreskic. C'est en arrière quelque peu

14 et un peu plus bas.

15 M. Blaxill (interprétation). - Est-ce que ce bâtiment était

16 vulnérable ? Pouvait-il être une cible s'il y avait toutes ces balles qui

17 sifflaient ?

18 M. Vidovic (interprétation). - Oui. Éventuellement, une balle

19 aurait pu arriver

20 jusqu'à cet endroit-là, mais il faut dire que nous, on n'était pas

21 tellement connaisseur non plus de tout ce qui allait advenir. Par

22 conséquent, on s'est cachés là où on pensait que c'était le plus sûr.

23 M. Blaxill (interprétation). - Vous étiez là pour vous protéger

24 par un toit, certes, mais, vu les violences qui ont éclaté ce jour-là,

25 vous aviez suffisamment de sagesse pour emmener vos familles dans des

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1 abris ; c'est ce que vous avez fait et c'est dans ces abris qu'ils ont

2 passé toute la journée, n'est-ce pas ?

3 M. Vidovic (interprétation). - Oui,

4 M. Blaxill (interprétation). – Et vous avez manifesté

5 suffisamment de sagesse et de sentiment d'auto préservation pour aller

6 dans cette dépression où vous ne seriez pas sur la trajectoire de

7 certaines balles qui sifflaient dans les environs, dans les parages ? Est-

8 ce bien cela ?

9 M. Vidovic (interprétation). - C'est tout à fait exact.

10 M. Blaxill (interprétation). – Et pourtant, lorsqu'il s'agit de

11 chercher refuge pour la nuit -avec tout le respect que je vous dois- vous

12 semblez avoir choisi un endroit qui était moins sûr que ne l'était la

13 dépression ou l'un des abris qui se trouvait dans une des maisons du

14 village. Est-ce que ce n'est pas le cas, Monsieur ?

15 M. Vidovic (interprétation). - Je suis parti dans la grange,

16 dans l'étable juste pour chercher le toit sous lequel on pouvait quand

17 même dormir un petit peu, parce qu'on ne pouvait pas rester passer la nuit

18 dans la dépression, sinon on ne pouvait pas aller dans nos maisons, parce

19 qu'il y avait une peur quand même qui nous a envahis.

20 M. Blaxill (interprétation). - Il semble qu'au cours de cette

21 période et au cours du lendemain, un grand nombre de Musulmans, si ce

22 n'est la totalité des Musulmans d'Ahmici, ont quitté le village, n'est-ce

23 pas ?

24 M. Vidovic (interprétation). - Oui. J'ai vu un certain nombre de

25 personnes, de

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1 Musulmans plutôt, qui habitaient Zume. Ce n'était pas un nombre très

2 important.

3 M. Blaxill (interprétation). - Est-ce que vous avez appris, à ce

4 moment-là, qu'un nombre important des Musulmans du village avait

5 déménagé ? Est-ce que vous avez appris cela au cours des jours suivants ?

6 M. Vidovic (interprétation). - Oui. On m'avait dit le lendemain

7 que les Musulmans ont quitté le village.

8 M. Blaxill (interprétation). – Et êtes-vous au fait des

9 circonstances de leur retour ? Parce que je pense que, quatre jours plus

10 tard, ils sont revenus au village. C'est ce que vous avez dit.

11 M. Vidovic (interprétation). - Oui. J'ai dit qu'il y a trois ou

12 quatre jours, ils sont retournés. Ultérieurement, j'ai appris que les

13 Croates avaient demandé les quatre fusils automatiques que les Musulmans

14 avaient confisqué sur le barrage qui se trouvait à côté du cimetière

15 Tolposko.

16 M. Blaxill (interprétation). – Vous souvenez-vous de la personne

17 qui, au nom de la communauté croate, a participé à des pourparlers, à des

18 contacts ou négociations visant à convaincre les Musulmans de la nécessité

19 du retour ?

20 M. Vidovic (interprétation). - Non. Je ne me souviens pas. En ce

21 qui concerne ces réunions, moi, je n'étais pas au courant, je ne savais

22 absolument rien.

23 M. Blaxill (interprétation). - Est-ce que, grâce à des liens

24 d'amitié personnelle avec telle ou telle personne, est-ce que vous auriez

25 appris quelle était l'identité des personnes ayant assisté à ces réunions

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1 et mené ces négociations ?

2 M. Vidovic (interprétation). - Je l'ai déjà dit auparavant, ça

3 ne m'intéressait pas. Je n'ai même pas posé de questions à ce sujet-là et

4 puis personne ne m'en a parlé.

5 M. Blaxill (interprétation). - Mais il est exact de dire que la

6 majorité de la population musulmane, effectivement, est rentrée dans ses

7 foyers ?

8 M. Vidovic (interprétation). - Oui. Après le premier conflit,

9 tous sont retournés à la maison.

10 M. Blaxill (interprétation). - Vous avez fait référence au fait

11 que vous aviez vu un certain nombre de soldats. N'avez-vous pas supposé

12 que c'étaient des soldats musulmans qui, de temps à autre, se

13 rassemblaient près de l'école ? Vous vous en souvenez ?

14 M. Vidovic (interprétation). - Oui, je m'en souviens.

15 M. Blaxill (interprétation). - Vous avez laissé entendre que

16 c'étaient des personnes qui allaient combattre au front. Est-ce exact ?

17 M. Vidovic (interprétation). - C'est exact. C'est ce que j'ai

18 appris et j'ai vu également qu'ils partaient sur un théâtre d'opération.

19 Ils étaient habillés comme ça.

20 M. Blaxill (interprétation). – Ai-je raison de penser que

21 c'était la ligne de front qui opposait ou qui les opposait aux Serbes de

22 Bosnie contre qui ils luttaient depuis un certain temps déjà ?

23 M. Vidovic (interprétation). - Oui. Les Musulmans allaient sur

24 les lignes de front contre les Serbes.

25 M. Blaxill (interprétation). - C'est un domaine d'intérêt qui

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1 peut susciter votre intérêt, mais, apparemment, nous avons entendu dans ce

2 prétoire ceci : il y avait des sources de tension considérable entre les

3 deux communautés croate et musulmane fin 1992. Cela était dû à

4 l'indifférence manifestée par la population musulmane à l'égard de ce

5 qu'on appelle généralement "l'agression serbe". En d'autres termes, ils ne

6 voulaient pas combattre les Serbes. Est-ce que vous avez jamais eu

7 l'occasion d'entendre de tels propos ?

8 M. Vidovic (interprétation). – Non, je n'ai pas entendu de tels

9 propos. Je sais qu'ils sont allés lutter contre les Serbes, ils sont allés

10 à Kekocici, ils sont allés à Visoko également et de l'autre côté de cette

11 ligne de front se trouvaient les Serbes, donc j'ai vu les Musulmans

12 passer, lutter contre les Serbes.

13 M. Blaxill (interprétation). – Est-ce qu'il y avait des soldats

14 croates participant à des combats contre les Serbes dans la région ?

15 M. Vidovic (interprétation). - Oui. Les Croates allaient de

16 l'autre côté, du côté de Vlacic, à ma connaissance. C'est là où se

17 trouvait la ligne de front.

18 M. Blaxill (interprétation). - Nous avons aussi entendu dire

19 qu'un ou qu'une si ce n'est pas la grande cause du conflit qui s'est

20 produit le 20 octobre 1992, c'est qu'un barrage musulman avait tenté de

21 stopper des troupes croates du HVO qui venaient par la ligne de Jajce pour

22 lutter contre les Serbes et que c'est par la force que le HVO avait

23 éliminé ce barrage, ce qui avait été à l'origine de ce conflit du

24 20 octobre. Est-ce que bien la raison que vous avez entendue ?

25 M. Vidovic (interprétation). - Oui. Plus tard on avait parlé,

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1 justement, que la cause de ces événements était le barrage en question.

2 M. Blaxill (interprétation). - J'essaie de tirer ceci au clair.

3 Vous essayez de nous dire qu'au sein d'Ahmici, vous avez vu des groupes de

4 soldats musulmans allant sur la ligne de front pour combattre les Serbes,

5 mais ce n'est pas logique -sauf le respect que je vous dois. Les Croates

6 et les Musulmans se battraient à propos de quelqu'un qui monte au front,

7 qui monte au front pour lutter contre l'ennemi commun. Or, c'est bien cela

8 que vous nous suggérez ?

9 M. Vidovic (interprétation). - Pas de réponse du témoin.

10 M. Blaxill (interprétation). - Dernière chose avant de passer à

11 autre chose.

12 Vous dites qu'après la chute de Jajce, c'est à ce moment-là que

13 vous, vous avez acheté un fusil semi-automatique.

14 M. Vidovic (interprétation). - Oui.

15 M. Blaxill (interprétation). – Pourriez-vous situer cela au mois

16 près ? Est-ce que c'était la fin 1992, début 1993 que vous avez procédé à

17 cet achat ?

18 M. Vidovic (interprétation). - Je pense que c'était au mois de

19 novembre.

20 M. Blaxill (interprétation). - Bon. Disons qu'au cours du mois

21 de novembre, jusqu'au début 1993, je parle là de décembre et de janvier,

22 que vos gardes, vos patrouilles villageoises continuaient à tourner comme

23 ça avait été le cas auparavant.

24 M. Vidovic (interprétation). - Mais il faut dire ici qu'après la

25 chute de Jajce, nous avons été déjà armés, nous avons disposé des armes.

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1 M. Blaxill (interprétation). - Donc maintenant nous avons deux

2 gardes villageoises distinctes, l'une musulmane, l'autre croate, et les

3 deux sont armées, c'est bien cela ?

4 M. Vidovic (interprétation). - C'est ça.

5 M. Blaxill (interprétation). - Mais même si le climat n'est plus

6 aussi coopératif parmi eux qu'auparavant, se maintient un sentiment de

7 respect mutuel, réciproque ? Est-ce bien exact ?

8 M. Vidovic (interprétation). - Oui, oui.

9 M. Blaxill (interprétation). - Et je crois qu'à ce moment-là,

10 vous, vous aviez pris la relève en janvier 1993 de Zoran Kupreskic, lui

11 qui avait été l'homme essayant de régler les problèmes autour des

12 patrouilles villageoises croates. C'est bien ce que vous avez dit, n'est-

13 ce pas ?

14 M. Vidovic (interprétation). - Oui, ça je l'ai dit. C'était à la

15 fin du mois de janvier.

16 M. Blaxill (interprétation). - Les rapports seraient donc restés

17 tout à fait paisibles et pacifiques jusqu'en avril 1993 ?

18 M. Vidovic (interprétation). - Oui.

19 M. Blaxill (interprétation). - Il n'y a plus d'incidents, de

20 barrages routiers ni de problèmes. C'est bien clair ?

21 M. Vidovic (interprétation). - Oui. C'est exact.

22 M. Blaxill (interprétation). - Étant donné le problème

23 généralisé des tensions entre les communautés, est-ce que vous aviez une

24 filière de communication mise en place qui vous permettait de faire état

25 d'incidents s'étant produits à qui que ce soit ?

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1 M. Vidovic (interprétation). - Non. Non, nous n'avons aucune

2 filière de communication. On ne savait même pas qui il fallait appeler ou

3 de qui avoir l'information. Nous avons patrouillé, nous avons pratiquement

4 gardé nos propres maisons.

5 M. Blaxill (interprétation). - Sauf le respect que je vous dois,

6 est-ce que ce n'est pas bizarre que vous travaillez un peu dans le vide

7 comme ça ? Qu'est-ce que vous auriez fait si quelque chose était vraiment

8 arrivé, si des soldats, mettons, étaient venus, avaient fait irruption

9 dans la nuit alors que vous étiez de garde et que vous deviez défendre

10 votre communauté ainsi attaquée. Quelle mesure auriez-vous prise ?

11 M. Vidovic (interprétation). - Mais si jamais il y avait un

12 incident pareil qui se produisait, à ce moment-là, on aurait appelé la

13 police civile. Ce sont eux qui, dans ce cas-là, auraient réglé l'incident.

14 M. Blaxill (interprétation). - Et cette police civile, où est-ce

15 qu'elle était installée, ou est-ce que vous auriez dû passer un coup de

16 fil ?

17 M. Vidovic (interprétation). - A Vitez, cette station ou le

18 siège de la police civile.

19 M. Blaxill (interprétation). - Mais je pense qu'à ce moment-là,

20 le HVO existait depuis un certain temps déjà.

21 M. Vidovic (interprétation). - Moi, je ne savais pas, c'est-à-

22 dire qu'il y avait un certain nombre de rumeurs bien évidemment qui

23 couraient. Je savais qu'il y avait un certain HVO qui a été créé, mais

24 comme je n'ai pas fait partie de cette organisation, de ce HVO à ce

25 moment-là, je faisais mon travail.

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1 M. Blaxill (interprétation). - Mais est-ce que vous ne

2 travailliez pas à Vitez ? Attendez que je me rafraîchisse la mémoire ou

3 bien faites-le, parce que je peux me tromper.

4 M. Vidovic (interprétation). - Oui, oui.

5 M. Blaxill (interprétation). - Mais, à ce moment-là, début 1993,

6 vous ne saviez pas qu'à toute fin pratique, le contrôle administratif de

7 la municipalité était tenu par le HVO, par les militaires du HVO, vous

8 n'avez rien remarqué, vous ne vous en êtes pas rendu compte ?

9 M. Vidovic (interprétation). - Ça, je l'ai entendu dire, mais je

10 ne savais vraiment pas ce que cela voulait dire.

11 M. Blaxill (interprétation). - Mais ainsi que tout autre

12 citoyen, vous étiez au courant de ces choses-là ? Vous connaissiez ces

13 noms ?

14 M. Vidovic (interprétation). - Oui.

15 M. Blaxill (interprétation). - En face, hypothétiquement, à une

16 telle situation, vous n'auriez pas pensé à contacter le HVO qui était le

17 pouvoir établi, installé dans la région afin d'assurer la protection des

18 citoyens ?

19 M. Vidovic (interprétation). - Non. Je l'ai déjà dit, si jamais

20 il y avait un incident qui se produisait, dans ce cas-là, on aurait appelé

21 la police civile.

22 M. Blaxill (interprétation). - Je reviendrai avec plus de

23 détails sur le moment de la réunion des premières heures du matin au

24 16 avril 1993, mais vous souvenez-vous qu'il y avait des représentants de

25 la police civile à cette réunion qui s'est déroulée dans la maison de

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1 Jozo Livancic ?

2 M. Vidovic (interprétation). - Non. Il n'y avait pas de membres

3 de la police civile qui s'y trouvaient.

4 M. Blaxill (interprétation). - Fort bien, merci. Parlons du

5 début avril 1993. Puis, nous arrivons à la journée du 15 avril. Vous qui

6 habitiez le village, est-ce que vous aviez la moindre idée s'il y allait

7 bientôt y avoir des violences dans votre région ?

8 M. Vidovic (interprétation). - Non. Ça, je ne savais pas, je ne

9 pouvais même pas m'imaginer qu'une chose pareille aurait pu se produire.

10 Je me disais que cela allait se passer par

11 la voie pacifique, éventuellement quelques petits incidents.

12 M. Blaxill (interprétation). - Pourtant, le 15 avril 1993, vous

13 ne pensiez pas qu'il vous fallait adopter des mesures de façon à protéger

14 votre famille, rien de ce genre ? C'était un jour normal comme les autres,

15 c'est bien cela ?

16 M. Vidovic (interprétation). - Oui. Je peux dire que cette

17 journée-là, c'était une journée normale, je suis parti au travail comme je

18 l'ai dit, j'ai passé la journée au travail.

19 M. Blaxill (interprétation). - Et je suppose que la veille de la

20 nuit du 15 au 16, vous êtes allé vous coucher et vous dites avoir été plus

21 tard éveillé par un appel téléphonique. Pourriez-vous confirmer l'heure à

22 laquelle d'après vous vous avez reçu ce coup de fil ?

23 M. Vidovic (interprétation). - Je pense que c'était entre

24 2 heures 30 et 3 heures du matin.

25 M. Blaxill (interprétation). - Ce coup de fil vous a été passé

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1 vers 2 heures 30 ou 3 heures du matin ? C'est bien ce que vous nous

2 dites ?

3 M. Vidovic (interprétation). - Oui, c'est exact.

4 M. Blaxill (interprétation). - Je crois que vous avez dit avoir

5 entendu la voix de feu Nenad Santic qui vous demandait d'aller à la maison

6 de Jozo Livancic, c'est bien cela ?

7 M. Vidovic (interprétation). - Oui, c'est ça.

8 M. Blaxill (interprétation). - Est-ce que vous étiez au courant

9 de tout lien ou du moins de tout pouvoir venant du HVO dont était investi

10 M. Nenad Santic ?

11 M. Vidovic (interprétation). - Non. Je ne savais pas. A vrai

12 dire, je ne savais pas qu'il était chargé de fonctions au sein du HVO,

13 mais je sais en revanche qu'il était membre du parti du HDZ, qu'il avait

14 des informations et qu'il en disposait.

15 M. Blaxill (interprétation). - Au moment où vous, vous recevez

16 cette demande de la part de M. Santic qui vous dit d'aller à la maison de

17 Jozo Livancic, est-ce que vous lui avez demandé pourquoi vous deviez y

18 aller à ce moment-là ?

19 M. Vidovic (interprétation). - Je l'ai déjà dit. Il m'avait

20 informé qu'il y avait un certain nombre de problèmes et que par conséquent

21 il allait me donner des précisions, mais que, de toute façon, je dois

22 aller réveiller les autres.

23 M. Blaxill (interprétation). - Avez-vous compris, est-ce que

24 vous saviez pourquoi vous, vous aviez été retenu, sélectionné pour un tel

25 appel téléphonique ?

Page 8126

1 M. Vidovic (interprétation). - Oui. En janvier 1993, on m'a

2 nommé membre de la défense civile et c'est moi qui étais chargé des civils

3 dans le secteur que j'habitais.

4 M. Blaxill (interprétation). - Quelles étaient les personnes qui

5 étaient habilitées à vous désigner à ce poste de la défense civile ?

6 M. Vidovic (interprétation). - Je ne sais pas. Ce que je sais

7 c'est qu'Ivica Vidovic, surnommé Jevco, est venu me voir. Il a discuté un

8 peu avec moi et ensuite il a dit que, eux, ils considèrent que moi je suis

9 une personne qui pourrait remplir une telle mission. Il m'avait tout

10 simplement demandé si j'étais d'accord et moi normalement j'avais accepté.

11 M. Blaxill (interprétation). - Ce que vous nous dites, c'est

12 qu'en réalité, quand vous parlez du pronom "ils" au pluriel, il s'agit en

13 fait de M. Ivica Vidovic, surnommé Jevco, si je prononce mal, excusez-moi.

14 M. Vidovic (interprétation). - Oui, oui, Jevko.

15 M. Blaxill (interprétation). - A quelle heure vous souvenez vous

16 être arrivé à la maison de Jozo Livancic ce matin-là ? Le matin du

17 16 avril ?

18 M. Vidovic (interprétation). - Je ne sais pas exactement

19 l'heure, mais je pense que c'était après 3 heures du matin.

20 M. Blaxill (interprétation). - Vous nous avez fourni une liste

21 des personnes présentes, permettez-moi de les citer pour voir si tout le

22 monde est cité ou si nous avons omis quelques personnes. Jozo Livancic en

23 personne ?

24 M. Vidovic (interprétation). - Oui.

25 M. Blaxill (interprétation). - Jozo Livancic ?

Page 8127

1 M. Vidovic (interprétation). - Oui.

2 M. Blaxill (interprétation). - Joljo Livancic était-ce le fils

3 de Jozo ?

4 M. Vidovic (interprétation). - Oui. Joljo Livancic est le fils

5 de Jozo Livancic.

6 M. Blaxill (interprétation). - Est-ce le même jeune homme qui

7 est mort au combat quelques jours plus tard ?

8 M. Vidovic (interprétation). - Oui. C'est lui qui a été tué.

9 M. Blaxill (interprétation). - Est-il exact de dire que ce jeune

10 homme se trouvait sur une ligne de front à Kuber lorsque ceci s'est

11 produit malheureusement ?

12 M. Vidovic (interprétation). - J'ai appris ultérieurement, mais

13 plus tard, qu'il a été tué là haut.

14 M. Blaxill (interprétation). - Saviez-vous à quelle unité

15 militaire il appartenait, ou quelles fonctions il avait au sein des rangs

16 militaires, lorsque vous l'avez vu, dans la nuit du 15 au 16, ce jeune

17 M. Livancic ?

18 M. Vidovic (interprétation). - Non. Je ne savais même pas qu'il

19 appartenait à une unité quelconque.

20 M. Blaxill (interprétation). - Mais que portait-il,

21 Joljo Livancic lorsque vous êtes arrivé à cette maison-là ? Est-ce que

22 qu'il avait un uniforme quelconque ?

23 M. Vidovic (interprétation). - Je ne suis pas sûr, mais il

24 semble ce qu'il portait un uniforme de camouflage. Mais je n'en suis pas

25 sûr.

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1 M. Blaxill (interprétation). - Qu'en était-il de

2 M. Jozo Livancic ? Est-ce qu'il portait un uniforme quelconque ou est-ce

3 qu'il était en vêtement civil ? Que portait-il ?

4 M. Vidovic (interprétation). - Je pense qu'il portait un

5 vêtement civil, mais je n'ai vraiment pas fait attention à ceci. C'est la

6 raison pour laquelle je ne m'en souviens pas.

7 M. Blaxill (interprétation). - M. Nenad Santic était présent lui

8 aussi, n'est-ce pas ?

9 M. Vidovic (interprétation). – Oui, oui.

10 M. Blaxill (interprétation). – Est-ce qu'il était en vêtements

11 civils ou est-ce qu'il portait un uniforme ou partie d'uniforme ?

12 M. Vidovic (interprétation). - Si je me souviens bien, il avait

13 une veste, mais une fois de plus, je me dois de vous dire que n'en suis

14 pas sûr.

15 M. Blaxill (interprétation). - Qu'est-ce que vous dites ? Rien

16 qu'une veste. Donc, vous voulez dire que la seule partie d'uniforme qu'il

17 portait, c'était une veste de treillis, de camouflage ? Ou était-ce

18 simplement une veste civile ? Un veston ?

19 M. Vidovic (interprétation). - Je pense qu'il s'agissait d'une

20 veste de camouflage, mais je n'en suis pas sûr. Je ne me souviens pas.

21 M. Blaxill (interprétation). - Il y avait aussi parmi les

22 personnes présentes à cette réunion… Était-ce Anto Kovic ? Ou Covic ?

23 M. Vidovic (interprétation). - Kovic.

24 M. Blaxill (interprétation). - Merci. Et puis un certain

25 M. Ivo Vidovic ou Simo Vidovic ? Et puis Ivica Vidovic ? Est-ce exact ?

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1 M. Vidovic (interprétation). – Simo Vidovic. Je n'ai pas parlé

2 d'Ivo Vidovic. A ma connaissance, j'ai parlé d'Ivica Vidovic, Jevco.

3 M. Blaxill (interprétation). - C'est peut-être parce que j'ai

4 mal écrit. Est-ce qu'il y a un certain Ivo Vidovic ?

5 M. Vidovic (interprétation). – Ah oui ! Ivo Vidovic, oui. Ça

6 c'est vrai.

7 M. Blaxill (interprétation). - Excusez-moi, c'est moi qui avait

8 mal écrit. Comment ces personnes-là étaient-elles habillées ? Est-ce

9 qu'elles étaient en civil ou en uniforme militaire ?

10 M. Vidovic (interprétation). - Je pense qu'ils portaient tous

11 des vêtements civils. Ce sont les personnes âgées, je dis, je pense.

12 M. Blaxill (interprétation). - Vous dites que c'est surtout

13 Jevko qui a parlé. Est-ce exact ?

14 M. Vidovic (interprétation). - C'est exact.

15 M. Blaxill (interprétation). - Vous souvenez-vous si

16 M. Nenad Santic a, lui aussi, contribué à la discussion ?

17 M. Vidovic (interprétation). - Ce que moi j'ai entendu cette

18 nuit, dans la maison de Jozo Livancic, c'était Livancic Ivica qui l'avait

19 dit, surnommé Jevko c'est lui.

20 M. Blaxill (interprétation). - Essayez de vous replacer à ce

21 moment-là avec le plus de précision possible. Pourriez-vous essayer de

22 vous remémorer les instructions ou les informations qui vous ont été

23 fournies ? Qu'est-ce qu'on vous a dit ?

24 M. Vidovic (interprétation). - Jevko, autrement dit

25 Ivica Vidovic, a dit qu'il a été informé que les Musulmans pourraient

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1 attaquer les Croates, que, par conséquent, il fallait que je me rende chez

2 Niko Sakic pour lui dire d'abriter les membres de ma famille et mes

3 voisins dans l'abri.

4 M. Blaxill (interprétation). - Vous a-t-on fourni la moindre

5 information ou explication quand au moment qu'il supposait être le moment

6 choisi par les Musulmans pour cette attaque ?

7 M. Vidovic (interprétation). – Non, non. Aucune autre

8 information. Je n'ai reçu aucune autre information.

9 M. Blaxill (interprétation). - Vous vous souvenez de l'heure à

10 laquelle vous avez reçu ces renseignements ? Vous étiez arrivé vers

11 3 heures du matin. Quelle heure était-il à ce moment-là ?

12 M. Vidovic (interprétation). - J'ai déjà dit que je suis arrivé

13 après 3 heures, 3 heures 10, 3 heures 15 et cela aurait pu être à

14 3 heures 30, 4 heures moins vingt éventuellement.

15 M. Blaxill (interprétation). - On vous a donné cette information

16 peu de temps après votre arrivée ? Je n'ai pas tout à fait compris la

17 réponse qui a été donnée. Vous dites qu'à 3 heures 10, 3 heures 15, vous

18 êtes arrivé. Est-ce à ce moment-là que vous êtes arrivé ou est-ce à ce

19 moment-là qu'on vous a donné l'information ?

20 M. Vidovic (interprétation). - J'ai dit que c'est après 3 heures

21 que je suis arrivé, donc à 3 heures 10, pour parler précisément. C'est là

22 où nous nous sommes assis et c'est là où il nous a transmis le message

23 disant que notre entretien a duré jusqu'à 3 heures 30, quelque chose comme

24 ça. A 3 heures 40.

25 M. Blaxill (interprétation). - Vous recevez ces renseignements.

Page 8131

1 Par la suite, on vous instruit, on vous donne l'instruction de vous

2 acquitter de cette tâche de protection civile d'emmener les gens aux

3 abris. Vous a-t-on donné des renseignements supplémentaires quant à la

4 direction d'où viendrait cette attaque ?

5 M. Vidovic (interprétation). - Non. On ne nous a pas donné une

6 telle information.

7 M. Blaxill (interprétation). - Je pense que vous nous avez déjà

8 dit -excusez-moi si là nous nous répétons- mais n'avez-vous pas déjà dit

9 qu'on ne vous avait pas non plus dit qu'on attendait cette attaque, qu'on

10 craignait cette attaque à telle ou telle heure ?

11 M. Vidovic (interprétation). - Oui c'est comme ça que je l'ai

12 dit.

13 M. Blaxill (interprétation). – Oui, je ne voulais pas ici faire

14 de doublons, mais j'avais perdu de vue si on avait passé la question ou

15 pas. Vous avez donc reçu ces informations, il est 3 heures, 3 heures 40 du

16 matin. A quelle heure êtes-vous parti de la maison de Jozo Livancic ?

17 M. Vidovic (interprétation). - Je pense que c'était 4 heures

18 moins vingt. Ça devait être à 4 heures moins vingt.

19 M. Blaxill (interprétation). - Et de là, où êtes-vous d'abord

20 allé ?

21 M. Vidovic (interprétation). – Jevko m'a dit que je devais me

22 rendre chez Niko Sakic, car lui aussi également aurait dû se rendre chez

23 lui pour en parler et, comme j'ai dit, il n'a pas été informé, donc il

24 n'était pas sur place avec moi.

25 M. Blaxill (interprétation). - Nous revenons aux personnes

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1 présentes à cette réunion. Vous souvenez-vous avoir revu l'une quelconque

2 de ces personnes au cours de cette journée du 16 avril ? Est-ce que vous

3 avez rencontré l'une ou l'autre de ces personnes à un autre endroit ?

4 M. Vidovic (interprétation). - Non.

5 M. Blaxill (interprétation). - J'aimerais revenir à une autre

6 chose un instant. Nous parlons de ce jeune homme hier Gifko Livancic qui a

7 malheureusement perdu la vie.

8 Monsieur le Président, peut-on renvoyer à la pièce D39/2 ? Je ne

9 pense pas qu'il s'agisse-là… qu'il pourrait être reconnu ou qui devrait

10 être reconnu par le témoin, mais je vais lui demander d'examiner un des

11 noms qui figurent dans ce document. Si j'ai bien compris, on a là la liste

12 des pertes ou des blessés parmi les membres du HVO.

13 Est-ce qu'on pourrait montrer cette pièce au témoin ? Vous avez

14 sous les yeux un document, Monsieur Vidovic.

15 M. Vidovic (interprétation). - Oui.

16 M. Blaxill (interprétation). - Je comprends que vous n'êtes pas

17 à l'origine de ce document, mais à le regarder, est-ce que vous pensez que

18 c'est une liste de personnes, de soldats qui ont trouvé la mort, qui

19 travaillaient dans des formations du HVO ? Est-ce que ce n'est pas la

20 brigade Vitezkazi ?

21 M. Vidovic (interprétation). – Eh bien, en lisant les noms qui

22 sont inscrits sur cette liste, je ne peux pas conclure quoi que ce soit.

23 Je vois qu'il y a Gifko Livancic, de père Jozo, je sais qu'il a été tué.

24 Ça, je le sais. N° 8.

25 M. Blaxill (interprétation). - Si je vous disais que le témoin,

Page 8133

1 par le truchement

2 duquel ces informations ont été versées, si ce témoin nous suggérait que

3 Gevko Livancic faisait partie de la police militaire, est-ce que ceci

4 éveille certains souvenirs ou est-ce que vous ne savez tout simplement pas

5 cela ?

6 M. Vidovic (interprétation). - Non. Je ne sais pas que lui il a

7 été membre de la police militaire, que Gevko a été membre de cette police.

8 M. Blaxill (interprétation). - Je vous remercie, Monsieur

9 l'huissier.

10 Merci, Monsieur le Témoin, nous n'avons plus besoin de ces

11 pièces. Mais il y a un autre facteur. A ce moment-là, au moment où vous

12 quittez la réunion, Gevko Livancic était à coup sûr dans la région, dans

13 la zone d'Ahmici. Il était à la maison de son père à ce moment-là ? C'est

14 bien exact ?

15 M. Vidovic (interprétation). - Oui, c'est exact, mais ce n'est

16 pas la région d'Ahmici.

17 M. Blaxill (interprétation). - Ce n'est pas loin n'est-ce pas ?

18 M. Vidovic (interprétation). - Ça dépend, mais ce n'est pas tout

19 près.

20 M. Blaxill (interprétation). - Quelle est la distance qui

21 séparait cette maison où il se trouvait du village en tant que tel ? Du

22 village d'Ahmici ?

23 M. Vidovic (interprétation). - Je peux vous dire quelle était la

24 distance depuis ma maison. Un kilomètre et demi jusqu'à deux kilomètres.

25 M. Blaxill (interprétation). - Entre votre maison et Ahmici ?

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1 M. Vidovic (interprétation). - Non, je ne parle pas d'Ahmici, je

2 parle de ma maison jusqu'à la maison de Gevko Livancic.

3 M. Blaxill (interprétation). - Entre votre maison et celle de

4 Gevko Livancic ?

5 M. Vidovic (interprétation). – Oui.

6 M. Blaxill (interprétation). - Est-ce que l'on voit cette maison

7 sur cette grande photographie aérienne ? Vous pourriez nous montrer où se

8 trouve la maison Livancic ? Ou est-ce qu'on ne la voit pas sur cette

9 photo ?

10 M. Vidovic (interprétation). - Je peux jeter un coup d'œil sur

11 la carte et essayer de la trouver. Voilà, c'est à cet endroit-là.

12 M. Blaxill (interprétation). - C'est à cet endroit-là ?

13 M. Vidovic (interprétation). – Oui.

14 M. Blaxill (interprétation). - Grand merci, Monsieur.

15 Veuillez vous rasseoir. Vous êtes allé à la maison de M. Sakic.

16 Il vous a fallu combien de temps pour aller de la maison Livancic à la

17 maison de M. Niko Sakic ?

18 M. Vidovic (interprétation). - Comme c'était la nuit et je suis

19 allé à pied, j'ai mis une quinzaine de minutes. Entre quinze et vingt

20 minutes.

21 M. Blaxill (interprétation). - Je suppose que vous étiez à pied.

22 C'est bien cela ?

23 M. Vidovic (interprétation). – Oui, oui.

24 M. Blaxill (interprétation). - Merci. Vous êtes arrivé à la

25 maison de M. Niko Sakic…

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1 M. Vidovic (interprétation). - Oui.

2 M. Blaxill (interprétation). - Combien de temps y avez-vous

3 passé pour lui donner des conseils sur ce qu'il devait faire avant d'aller

4 plus loin ?

5 M. Vidovic (interprétation). - Si j'ai mis vingt minutes pour me

6 rendre chez lui, à ce moment-là, je devais être chez lui à quatre heures.

7 Je ne suis pas resté longtemps. Deux, trois minutes, quatre minutes.

8 M. Blaxill (interprétation). - Et de sa maison à lui, où êtes-

9 vous allé ?

10 M. Vidovic (interprétation). – Ensuite, je suis allé jusqu'à la

11 maison d'Ivica Kupreskic et Zoran Kupreskic.

12 M. Blaxill (interprétation). - Et combien de temps vous a-t-il

13 fallu pour y aller ? Deux, trois minutes ?

14 M. Vidovic (interprétation). – Non, pas en deux, trois minutes

15 tout à fait. Peut-être cinq, six minutes. Le chemin n'est pas bon, il

16 faisait sombre et puis c'est une petite vallée, donc… cinq, six minutes.

17 M. Blaxill (interprétation). – Serait-il exact de dire que vous

18 aviez averti les membres de la famille Kupreskic vers 4 heures 15,

19 4 heures 20 ?

20 M. Vidovic (interprétation). - Quatre heures et quarts.

21 M. Blaxill (interprétation). - Et puis vous êtes passé par ces

22 différents foyers de la famille Kupreskic. Ou êtes-vous allé par la

23 suite ?

24 M. Vidovic (interprétation). - J'ai réveillé Ivica et Zoran

25 Kupreskic, j'ai donné des explications et je suis retourné chez moi dans

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1 ma maison pour réveiller mes parents, mon épouse et mes enfants et puis

2 les voisins autour de moi.

3 M. Blaxill (interprétation). - Quelle heure était-il lorsque

4 vous êtes arrivé chez vous ?

5 M. Vidovic (interprétation). - Chez moi ? Eh bien, à

6 quatre heures 30, 5 heures moins 20, approximativement. Je ne sais pas

7 exactement. Je ne suis pas vraiment sûr en ce qui concerne le temps.

8 M. Blaxill (interprétation). - Donc il semblerait que vous êtes

9 d'abord allé chez M. Niko Sakic parce que manifestement on ne l'avait pas

10 encore contacté, et lui avait aussi des tâches dans le cadre de la défense

11 civile dont il devait s'acquitter. Est-ce que la famille Kupreskic faisait

12 partie des personnes qu'il vous fallait avertir et pour qu'elle aille à

13 l'abri ?

14 M. Vidovic (interprétation). - Oui. Eux aussi étaient parmi les

15 gens que j'aurais dû informer si jamais de tels incidents se produisent.

16 M. Blaxill (interprétation). - De l'endroit où vous étiez, il

17 était plus rapide d'aller directement chez les Kupreskic que d'aller chez

18 vous ? Vous pouviez vous charger de les

19 avertir plus rapidement ?

20 M. Vidovic (interprétation). - Mais j'avais obligation de les

21 réveiller. J'avais donc dû les réveiller. Ensuite ce sont eux qui se

22 chargeaient de réveiller les autres alors que moi je devais réveiller les

23 voisins qui étaient autour de ma maison.

24 M. le Président (interprétation). - Maître Blaxill.

25 M. Blaxill (interprétation). - J'y pensais précisément,

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1 précisément.

2 M. le Président (interprétation). - Est-ce que vous voulez

3 quelques minutes de plus ?

4 M. Blaxill (interprétation). - Je pense que quelques minutes ne

5 suffiront pas mais le moment est bienvenu pour opérer une césure. Nous

6 allons poursuivre lundi. Nous travaillerons de 9 à 13 heures et puis de

7 14 heures 30 à 17 heures 30. Fort bien, l'audience est levée.

8 (Le témoin est reconduit hors du prétoire.)

9 L'audience est levée à 13 heures 30.

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