Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 (Jeudi 31 août 2000.)

2 (Conférence de mise en état.)

3 (Audience publique.)

4 (La séance est ouverte à 15 heures 45.)

5 (Les accusés sont introduits dans le prétoire.)

6 M. le Président: Vous pouvez vous asseoir, s'il vous plaît.

7 Donc bonjour de nouveau à vous tous.

8 Nous reprenons la Conférence de mise en état que nous avions interrompue.

9 Je vous rappelle que les points de l'agenda sont les mêmes que nous avions

10 déjà inscrits. Rien d'autre.

11 Peut-être pourrions-nous maintenant terminer la discussion que nous avions

12 entamée à propos de l'admission de la pièce à conviction D 29/1, le

13 document que Me Krstan Simic voudrait introduire.

14 Ensuite, peut-être, pourrions-nous traiter ensemble plusieurs requêtes du

15 conseil de M. Zigic: donc deux requêtes écrites déposées et une requête

16 orale faite ici pour être inscrite dans l'agenda.

17 Un troisième point: le Procureur a voulu inscrire aussi dans l'ordre du

18 jour la question des affidavits 94ter. Je ne sais pas si l'on pourra

19 encore traiter cela. De toute façon, nous verrons.

20 Le Procureur a voulu aussi parler des rapports et d'autres documents. Nous

21 traiterons aussi de cette question.

22 Et finalement, nous avons cette requête du Procureur pour la consolidation

23 de l'Acte d'accusation et la correction des annexes datées du 29 août et

24 reçues hier. Si, éventuellement, les parties ne sont pas encore prêtes de

25 discuter de cela, on peut laisser tomber ce point et le traiter un peu

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1 plus tard, car ce n'est pas urgent pour l'instant.

2 Voilà l'ordre du jour. Nous commençons donc par le premier point:

3 l'admission de la pièce à conviction D29/1.

4 De toute façon, nous allons reprendre la discussion entamée lundi matin

5 sur ce point. Nous en étions restés sur le fait que la défense n'a pas

6 reçu la version corrigée de la table. Il semblerait que, malgré tout,

7 l'accusation objecte à l'admissions de tels documents qui semblent être de

8 simples documents de travail et non des éléments de preuve. Mais pour

9 l'hypothèse de l'admission, l'accusation veut que soit admise aussi la

10 correction de la table.

11 Je crois que nous avons déjà discuté un peu de cela. Peut-être pour aller

12 un peu plus directement aux conclusions, je donnerai en premier lieu la

13 parole à Me Krstan Simic et ensuite au Procureur.

14 Maître Krstan Simic, c'est à vous.

15 M. K. Simic (interprétation): Monsieur le Président, Madame et Messieurs

16 les Juges, j'ai retrouvé ce document. Il est exact que le Bureau du

17 Procureur a rédigé le texte. Moi, je suis disposé ou plutôt je propose

18 comme pièce à conviction que ce document soit accepté, en effet, pour

19 lequel le Bureau du Procureur avait dit qu'il ne serait pas contestable.

20 Mais en ce qui concerne ce que le Bureau du Procureur avait avancé: que

21 c'est un document qui ne pourrait pas être une pièce à conviction, nous

22 considérons qu'il peut l'être.

23 Tout d'abord, il y a une note officielle que a été rédigée et qui est

24 quelque peu différente pas rapport à ce que le témoin avait dit devant la

25 Chambre. Le témoin a dit que c'est beaucoup plus tard donc qu'il a vu

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1 cette photographie, alors que, par la suite, il a dit qu'il connaît très

2 bien la photographie, que la personne en question était à Omarska mais

3 qu'il ne connaissait pas son nom. Pour nous, ce qui est extrêmement

4 important, c'est que le témoin a dit qu'il voulait identifier Kvocka juste

5 devant son témoignage. D'autant plus que nous savons qu'en Bosnie-

6 Herzégovine, pratiquement chaque jour, nous avons une émission dont

7 l'objectif est de rapprocher les activités au Tribunal, d'affirmer

8 également les activités et les procès: on montre les photos des personnes

9 différentes. C'est la raison pour laquelle l'identification, dans ce cas-

10 là, peut éventuellement être mise en question, non pas parce que c'est une

11 faute du Tribunal ou du Procureur.

12 C'est la raison pour laquelle nous vous demandons d'admettre cette pièce à

13 conviction dans le dossier, car ceci peut vous aider pour apprécier ce qui

14 a été dit par le témoin.

15 M. le Président: Monsieur Keegan, réponse, s'il vous plaît?

16 M. Keegan (interprétation): Oui, merci, Monsieur le Président.

17 En ce qui concerne le témoin qui a déposé, dont la déposition fait l'objet

18 de ces questions, nous n'avons absolument aucune objection à ce que le

19 rapport de l'enquêteur, ainsi que les photographies soient admises,

20 puisque c'est la pièce qui avait été communiquée par l'accusation, dont

21 elle a demandé le versement au dossier.

22 Il s'agit des notes prises par l'enquêteur de la réponse du témoin quand

23 on lui a montré la photographie. Nous avons déjà donc fourni ce document,

24 demandé son versement au dossier.

25 En fait, ce qui nous gêne, c'est que la défense essaie de demander le

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1 versement au dossier d'un tableau qui a été préparé par l'accusation pour

2 aider la défense de façon que, lorsqu'on examine toutes les photographies

3 qui ont été présentées à tous les témoins possibles -puisque nous avons

4 fourni tous ces documents pour les témoins qui ont été appelés mais pour

5 les témoins potentiels-, donc ce tableau devait servir de guide pour

6 savoir qui avait identifié qui.

7 Mais c'était un tableau qui était préparé uniquement dans ce but et non

8 pas pour être fourni comme pièce à conviction. Il s'agissait d'aider la

9 défense. Si nous avions su que la défense souhaitait demander ensuite le

10 versement au dossier de ce document, nous ne l'aurions absolument pas

11 préparé. Si la défense souhaite verser au dossier un document qui comporte

12 un grand nombre d'informations qui peuvent ou ne peuvent pas induire en

13 erreur la Chambre de première instance suivant son interprétation de ce

14 document, c'est cela qui nous gêne.

15 Donc, si vous acceptez ce tableau, à ce moment-là, nous souhaitons pouvoir

16 déposer tous les rapports qui ont permis la création de ce tableau pour

17 voir comment on peut interpréter à juste titre ce tableau. Parce que ce

18 tableau ne reprend pas ce qui a été dit dans les rapports. Il s'agit d'un

19 résumé. Je l'ai déjà expliqué la dernière fois.

20 Et il nous semble que, dans le cadre du travail de ce Tribunal, comme dans

21 d'autres tribunaux, ce que l'on admet comme éléments de preuve, ce sont

22 les meilleurs éléments de preuve disponibles. Or, en l'occurrence, quels

23 sont les meilleurs éléments de preuve disponibles? Ce sont les rapports

24 préparés par les enquêteurs, que nous avons déjà soumis à la Chambre et

25 auxquels a fait référence M. K. Simic.

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1 Ce tableau n'ajoute absolument rien aux informations dont vous disposez

2 déjà. C'est comme si l'on nous demandait de fournir les documents de

3 travail que nous avons produits mais dont nous n'avons jamais envisagé les

4 verser au dossier car il ne sont pas assez complets, ils ne sont pas

5 suffisants. Voici ce que j'avais à rajouter.

6 En ce qui concerne l'intervention des médias et le rôle des médias, ce

7 tableau n'a absolument rien à voir avec cela. Si c'est cela qui inquiète

8 la défense, à ce moment-là, la défense doit demander à chaque témoin s'il

9 ou si elle a vu une émission de télévision en rapport avec l'affaire qui

10 nous intéresse. Je pense que le tableau en question ne peut donner aucune

11 information, d'une manière ou d'une autre, sur ce qui nous intéresse ici.

12 Donc, voilà je pense les éléments qu'il faut prendre en compte dans le

13 cadre de l'étude de l'admissibilité ou non de ce tableau.

14 M. le Président: Maître Krstan Simic, voulez-vous faire quelques

15 observations à la suite de ce que vient de dire M. Keegan?

16 M. K. Simic (interprétation): Très brièvement, une réplique. Ce tableau,

17 ce nouveau tableau contient le rapport de l'enquêteur dans la partie qui

18 concerne M. Kvocka. Par conséquent, le témoin a eu l'occasion de voir une

19 série de photographies. M. Kvocka était le n°3. Le témoin a dit: "Je le

20 connais, je connais cet homme: il était à Omarska. Mais moi, je ne sais

21 pas qui est cette personne". C'est la raison pour laquelle ce tableau a du

22 poids et je considère que le Bureau du Procureur aurait dû justement nous

23 communiquer tout de suite ce tableau.

24 Vous pouvez-vous renseigner auprès du Greffe et vous verrez qu'il y a un

25 résumé du rapport qui accompagne le tableau. Nous maintenons ce que nous

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1 souhaitons. Bien sûr, nous ne sommes pas contre si le Bureau du Procureur

2 considère que ce tableau doit être complété avec une série de

3 photographies; nous n'avons rien contre.

4 M. le Président: Je crois que le Procureur dit qu'il devait être complété

5 avec les rapports, donc plusieurs rapports des témoins qui ont mené à

6 l'élaboration de ce tableau. Vous dites que vous ne faites pas d'objection

7 au versement de ces rapports, si j'ai bien compris ou non, Maître Krstan

8 Simic?

9 M. K. Simic (interprétation): Oui, Monsieur le Président. Si le Bureau du

10 Procureur considère que cela peut aider, nous ne sommes pas contre, car

11 notre objectif, c'est la vérité, la recherche de la vérité.

12 M. le Président: La Chambre décidera de la question comme nous allons le

13 faire. Nous allons discuter maintenant et nous rendrons nos décisions

14 orales. Ce point sera l'objet d'une décision.

15 Nous allons passer maintenant au deuxième point d'ordre du jour, il s'agit

16 de plusieurs requêtes du conseil de M. Zigic, c'est-à-dire il y a deux

17 requêtes écrites et une orale.

18 Je parle concrètement de la requête de la défense sur la première des

19 trois déposées le 22 août 2000 en vue d'obtenir -je cite-: "l'ouverture

20 d'une enquête relative à des allégations d'outrages concernant des

21 contacts pris sans autorisation avec le témoin à charge N".

22 Je dois observer que je me souviens que Mme Hollis a communiqué oralement

23 à la Chambre l'information selon laquelle le témoin N avait reçu un coup

24 de téléphone d'une personne qui s'est identifiée comme un conseil de la

25 défense de M. Zigic.

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1 La Chambre avait demandé à Mme Hollis de déposer une requête écrite au cas

2 où elle entendrait porter des allégations précises. La Chambre n'a pas

3 reçu cette requête à ce jour et a donc considéré qu'aucune allégation

4 précise n'a été portée à l'encontre de la défense de M. Zigic.

5 Donc, je donne la parole à Me Stojanovic; ensuite, je donnerai la parole à

6 M. Keegan.

7 M. Stojanovic (interprétation): Monsieur le Président, Messieurs les

8 Juges, je suis désolé de soulever une question fort désagréable devant

9 cette Chambre. C'est nous qui avons essayé de faire cette enquête, car

10 nous avons essayé d'apprendre entre nous, entre nos collègues et

11 l'assistance juridique, entre l'enquêteur et M. Zigic, si, éventuellement

12 quelqu'un l'a fait ou a essayé de procéder de la manière.

13 Il s'agit d'un geste qui provoque des perturbations et également de manque

14 de confiance en l'équipe de la défense. Il va sans dire que ceci également

15 peut jeter de l'ombre sur l'équipe de la défense, aussi bien quand il

16 s'agit de la Chambre que quand il s'agit du Bureau du Procureur ou de

17 n'importe qui suit ce procès.

18 Très sincèrement, nous savons que nous avons des contraintes, mais nous

19 souhaiterions que le Bureau du Procureur réexamine cette question. Je

20 pense que le Bureau du Procureur sait à peu près qui s'était manifesté. A

21 mon avis, il serait probablement utile que le Bureau du Procureur

22 entreprenne toutes les démarches possibles, tout ce qui en leur possible

23 ou de ne pas affirmer les choses qu'il ne connaît pas. C'est de cette

24 façon là qu'on exerce une pression sur la défense. Mais il est vrai qu'en

25 ce qui nous concerne, nous faisons confiance à l'accusation. Nous croyons

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1 véritablement qu'il ait reçu un tel appel.

2 Mais, d'un autre côté, nous voulons attirer leur attention sur le fait

3 qu'en ce qui nous concerne et notre attitude, il s'agit en effet d'une

4 certaine pression qui est exercée par un certain nombre de milieux, en

5 dehors de ce Tribunal. Je comprends, par conséquent, aussi bien

6 l'accusation que la Chambre, etc. qu'ils peuvent exercer une influence

7 positive pour que l'équipe de la défense fasse son travail de manière

8 correcte. Evidemment, je ne suis pas optimiste plus qu'il ne le faut, mais

9 je considère que le Bureau du Procureur pourrait vraiment faire un effort

10 supplémentaire pour essayer d'établir les faits, voir pourquoi ceci s'est

11 passé.

12 M. le Président: Je viens de donner la parole à Me Krstan Simic. Peut-être

13 que l'on peut introduire une autre question et qu'il pourrait se prononcer

14 sur les deux aspects?

15 La défense de Zigic soutient qu'elle a subi un préjudice moral suite à

16 cette information dans la mesure où la défense de Zigic a été salie. La

17 défense soutient aussi qu'elle est convaincue que cet incident est la

18 conséquence d'une négligence professionnelle d'un certain petit groupe de

19 personnes et parce que certains témoins cités à comparaître devant le

20 Tribunal en font peut-être partie.

21 Enfin la défense de Zigic soutient que, depuis cette communication, elle

22 subit une certaine forme de pression incompatible avec le déroulement du

23 procès. Est-ce que vous êtes en condition d'expliquer un peu plus la

24 nature exacte de ce préjudice, Maître Stojanovic?

25 M. Stojanovic (interprétation): Monsieur le Président, Messieurs les

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1 Juges, je ne pense pas que j'ai dit qu'il y avait un préjudice. Je n'ai

2 jamais parlé de préjudice, je n'ai pas donné cette qualification.

3 Je ne dois pas rappeler à la Chambre ce que veut dire que de

4 vouloir influencer les témoins de l'autre partie de manière non autorisée.

5 Par conséquent, ceci peut mettre en cause même le Tribunal. Et puis, il y

6 a les sanctions qui peuvent s'ensuivre, même avec une peine de sept ans de

7 prison.

8 Par conséquent, nous, nous sommes parfaitement à la disposition

9 de tout le monde et moi, je ne veux pas, par conséquent, prendre en

10 considération ce doute, en ce qui me concerne, moi personnellement. Mais

11 pour mon client et pour l'ensemble de l'affaire, je ne considère pas que

12 c'est une bonne chose. Par conséquent, soi-disant que nous avons fait

13 quelque chose qui n'est pas honnête, qui n'est pas correct, ou que nous

14 avons également soi-disant entrepris quelque chose qui risque d'avoir

15 comme conséquence une peine, une peine très grave, sévère.

16 M. le Président: Merci, Maître Stojanovic.

17 Maître Keegan, c'est vrai que c'est un peu compliqué pour vous maintenant,

18 parce que tout cela s'est passé avec Mme Hollis. Et j'ai déjà dit à Mme

19 Hollis: "Je vais vous dire que je sens que souvent, nous avons beaucoup de

20 problèmes avec le Bureau du Procureur ici, car l'équipe change

21 constamment". Donc, il faut faire attention à cela.

22 Maintenant, je me vois donc dans la situation de vous demander des

23 explications pour des situations qu'à la fin, peut-être, vous n'avez pas

24 vécues. Je ne sais même pas si vous étiez là. Mais vous représentez ici le

25 Bureau du Procureur et, institutionnellement, je dois vous interpeller.

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1 Donc, voilà, vous avez la parole.

2 M. Keegan (interprétation): Oui, Monsieur le Président, merci. On me fait

3 savoir que la nature des allégations était la suivante: la personne qui a

4 contacté le témoin s'est contentée de dire qu'elle, cette personne

5 représentait la défense de Zigic sans donner aucune identification quelle

6 qu'elle soit. Le Bureau du Procureur, bien entendu, généralement, ne se

7 lance pas dans une enquête au sujet de l'équipe de la défense sans

8 autorisation expresse de la Chambre de première instance, en l'espèce.

9 Il y a eu des précédents dans ce sens, dans ce Tribunal, dans d'autres

10 affaires, en ce qui concerne certains conseils de la défense. Mais il me

11 semble que, dans ce type de situation, le seul type d'enquête qui peut

12 être menée, puisque le témoin n'a aucune idée de qui il s'agit, de la

13 personne qui l'a appelé, la seule chose à faire peut-être serait de

14 demander la coopération du gouvernement en question pour obtenir les

15 dossiers des compagnies téléphoniques, les relevés des communications

16 téléphoniques, pour savoir qui a fait cet appel, pour essayer de trouver

17 qui a appelé le numéro du témoin à ce moment-là.

18 Cependant, sans indication spécifique de la Chambre, le Bureau du

19 Procureur ne peut pas véritablement se lancer dans une enquête sur les

20 collègues de la défense. C'est pourquoi, Mme Hollis n'a rien entrepris de

21 plus, parce qu'il n'y avait rien de plus que ces allégations. Et les

22 informations que nous avons fournies, lorsque nous avons révélé ce qui

23 s'était passé, ce sont les seules informations dont nous disposions et que

24 nous avait communiquées le témoin que l'on avait appelé.

25 M. le Président: Monsieur Keegan, et si la réponse, si le résultat, c'est

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1 que -c'est une hypothèse- le coup de fil a été émis d'une cabine

2 téléphonique publique?

3 M. Keegan (interprétation): Oui, justement, Monsieur le Président. C'est

4 la raison pour laquelle nous n'avons pas pris de mesures précises; nous

5 n'avons pas demandé que soient prises des mesures particulières en raison

6 de la nature générale des allégations portées. Nous estimons et nous avons

7 fait savoir à la Chambre que la seule chose qu'on pourrait envisager de

8 faire, ce serait cette enquête sur les relevés de communication, ce qui

9 nécessiterait la coopération du gouvernement en question. Comme vous le

10 dites très justement, cela ne nous fournirait pas forcément des

11 informations très utiles.

12 La question étant donnée, les informations dont nous disposons, c'est de

13 savoir s'il faut prendre des mesures particulières et, sans indication

14 spécifique de la Chambre de première instance, le Bureau du Procureur

15 n'entreprendra pas d'enquête particulière à ce sujet.

16 M. le Président: Une autre question: est-ce que vous avez des informations

17 sur le contenu de la conversation qui a été menée?

18 M. Keegan (interprétation): Un instant, s'il vous plaît, Monsieur le

19 Président.

20 Pas plus que ce que nous avons dit précédemment, c'est-à-dire la personne

21 en question a demandé si la défense pouvait parler au témoin et le témoin

22 a dit non. Il a refusé. Bien entendu, nous avons évoqué cette question

23 parce que la personne en question, c'était un témoin protégé et qu'il y

24 avait une ordonnance qui le concernait au sujet des contacts que l'on

25 pouvait avoir avec lui. C'est donc la seule raison pour laquelle nous

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1 avons soulevé cette question auprès de la Chambre.

2 M. le Président: Maître Stojanovic, avez-vous des idées supplémentaires à

3 ajouter?

4 M. Stojanovic (interprétation): Monsieur le Président, je ne pense pas que

5 je puisse être constructif. Je pense que c'est une question que nous avons

6 soulevée, qui est dans l'intérêt réciproque. Il faut certainement ne pas

7 encourager un tel comportement, que ce soit d'un côté ou de l'autre, quand

8 on parle. Par conséquent, il est absolument indispensable de protéger la

9 renommée du Tribunal et de toutes les parties. Cela, c'est une première

10 chose.

11 Mais, d'un autre côté, il y a encore un point qui ne nous est pas tout à

12 fait clair: nous savons que le Bureau du Procureur s'est mis en contact

13 avec la personne en question au sujet de ce que nous avons posé comme

14 question au Bureau du Procureur: si nous pouvons éventuellement nous

15 mettre, de notre côté, en contact avec le père d'un des témoins.

16 Je ne suis peut-être pas tout à fait correct à l'égard mes confrères du

17 Bureau du Procureur, car mon confrère, Mme Hollis, était quelque peu plus

18 au courant de ce qui s'est passé entre nous; mais c'est le Bureau du

19 Procureur qui s'est mis en contact avec la personne en question qui a dit,

20 ultérieurement, que les conseils de Zigic l'avaient contactée. Je suppose

21 que c'était à peu près à la même période.

22 M. le Président: Nous allons en rester ici. Nous allons rendre aussi une

23 décision.

24 Encore une requête du conseil de Zigic: nous avons une requête pour un

25 complément d'expertise.

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1 La défense de M. Zigic a déposé une requête le 21 juillet dernier, afin

2 que la main de M. Zigic soit examinée par un médecin. Je rappelle que la

3 Chambre avait pris une décision afin que soit effectuée une expertise

4 médico-psychiatrique. Pour se prononcer sur cette requête, je donne la

5 parole à Me Stojanovic.

6 M. Stojanovic (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

7 Nous étions très satisfaits de voir que la Chambre ait pris une telle

8 décision pour cette expertise, mais il y a eu quelques malentendus et

9 quelques circonstances également nouvelles qui se sont produits et qui

10 sont dus à des témoignages qui ont eu lieu. Nous avons demandé

11 l'expertise. Cette requête a été bien spécifiée: Zigic a été victime d'une

12 blessure; nous avons demandé à ce que cette lésion soit examinée de deux

13 points de vue. D'abord, du point de vue psychiatrique -comment ceci aurait

14 pu avoir un effet sur son état psychique- et dans le cadre de l'Acte

15 d'accusation. Et, quelques jours plus tard, nous avons pu voir également

16 qu'il y avait plein de choses qui se sont passées justement au cours de

17 cette période. C'est une première chose.

18 Deuxièmement, nous avons demandé également une autre expertise, un autre

19 expert médical qui aurait pu dire quelles sont les conditions physiques de

20 M. Zigic, notamment en ce qui concerne le moment où il donnait

21 éventuellement des coups à quelqu'un, etc.

22 Enfin, une fois que cette décision par la Chambre aurait été prise, je

23 pense qu'il me faut également attirer votre attention sur le fait qu'il y

24 a une distinction à faire entre la version française et la version

25 anglaise. Dans une version, on parle uniquement de cet aspect psychique

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1 alors qu'on voit également qu'il y a l'autre aspect, sur lequel nous avons

2 compté. Dans la version anglaise, il est bien stipulé qu'il est

3 indispensable de procéder aux expertises de deux types.

4 Et, outre cette blessure, nous avons également, oralement, lors d'une

5 Conférence de mise en état, nous avons demandé que ces mêmes experts

6 fassent un effort supplémentaire et qu'éventuellement ils examinent les

7 oreilles de M. Zigic -qu'elles auraient éventuellement été percées ou non-

8 pour vérifier le témoignage d'un des témoins selon lequel, soi-disant, il

9 portait des boucles d'oreille.

10 Nous avons également soumis une requête au sujet de ces expertises: que

11 ces mêmes experts pourraient également vérifier depuis quand date la

12 cicatrice sur le visage de Zigic. Nous avons dit que cela avait eu lieu en

13 août 1999, par conséquent, bien après les événements dont il est question

14 dans l'Acte d'accusation. Malheureusement, d'après mes informations orales

15 de la part de M. Zigic, ces experts, comme je l'ai dit, étaient d'une

16 seule spécialité: ils ont fait véritablement plein de choses: ils l'ont

17 examiné, mais je ne peux pas dire que tout a été véritablement fait et je

18 ne sais pas quel est le résultat, je n'ai pas encore les résultats dans

19 mes mains.

20 Excusez moi, mais j'ai commis une erreur: j'ai parlé de 1999 mais il

21 s'agit de 1992, quand j'ai parlé également d'un certificat médical et de

22 la mâchoire qui a été blessée. C'est la raison pour laquelle nous avons

23 demandé que l'expert vérifie ce document.

24 M. le Président: Excusez-moi, Maître Stojanovic. J'ai senti un peu le

25 besoin de vous demander si vous allez demander d'autres examens sur

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1 d'autres parties du corps de M. Zigic. Parce que nous avons déjà ordonné…

2 C'était normal d'attendre les résultats du médecin pour, après,

3 expliciter. Nous avons déjà ordonné complémentairement d'examiner les

4 oreilles de M. Zigic; nous allons maintenant peut-être ordonner et

5 communiquer pour examiner aussi la main.

6 Est-ce que vous avez d'autres choses, afin de demander tout d'une fois

7 seulement? Sinon, vous voyez ce qu'on fait: chaque fois qu'il y a un

8 problème, on demande une expertise. Est-ce la dernière chose que vous avez

9 à demander d'examiner d'un point de vue médical?

10 M. Stojanovic (interprétation):Monsieur le Président, je suis vraiment

11 dans une situation inconfortable, mais il est vrai que, dès que j'ai reçu

12 ces informations, j'ai rédigé cette requête. Je ne voudrais pas abuser de

13 votre patience, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, mais je

14 considère que j'aurais commis une erreur si jamais j'avais omis

15 d'introduire une telle requête. Maintenant, j'ai posé cette question à

16 partir du moment où j'ai obtenu un certain nombre d'informations et

17 d'informations fiables.

18 M. le Président: Nous allons décider aussi de cette question. Je crois,

19 Maître Stojanovic, qu'il y avait votre requête orale qui avait à voir avec

20 les documents et la langue. Pouvez-vous nous expliciter un peu? A la fin,

21 je vais donner la parole à M. Keegan pour se prononcer sur tout cela.

22 M. Stojanovic (interprétation): Je suppose, Monsieur le Président, qu'il

23 s'agit d'un certain nombre de documents qui manquent et dont on aura

24 besoin; et que nous devions avoir dans la langue que l'accusé peut

25 comprendre.

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1 Monsieur le Président, je pense qu'il s'agit de la règle 66, une règle

2 tout à fait claire. Il s'agit des déclarations des témoins. Je pense que

3 vous-mêmes, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, outre un certain

4 nombre de décisions prises dans d'autres affaires devant ce Tribunal, vous

5 étiez vous-mêmes également lors d'une Conférence de mise en état et vous

6 avez parlé de manière très expresse mais vous avez dit que les accusés

7 devraient posséder tous les documents en langue qu'ils comprennent.

8 Je suis désolé de devoir le redire, une fois de plus. Evidemment, en ce

9 qui me concerne, cela ne me dérange pas si je reçois une pièce à

10 conviction en langue anglaise. Mais, d'un autre côté, l'accusé pour nous

11 est important: il faut qu'il puisse lire également; pour nous, il est une

12 source d'informations assez importante. De plus, c'est son droit

13 également. La défense est dans l'obligation également de rappeler ce

14 droit.

15 Nous possédons un certain nombre de documents ou plutôt une série de

16 documents mais, d'un autre côté, nous ne possédons pas les traductions. Il

17 y a une liasse, un classeur, par exemple: je vais juste, à titre

18 d'exemple, vous parler du document du 28 avril de cette année. C'est un

19 document confidentiel; je ne sais pas si le Bureau du Procureur connaît de

20 quel document il s'agit; il s'agit donc de l'annexe A et B. Je pense qu'il

21 s'agit d'un document qui contient toute une série de propositions et

22 également d'extraits qui n'ont pas été traduits en langue BCS. Ceci est un

23 exemple que je viens de citer.

24 M. le Président: Avez-vous terminé?

25 M. Stojanovic (interprétation): Oui, Monsieur le Président, oui.

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1 Il serait bon aussi si l'on pouvait véritablement ne pas abuser de la

2 Chambre et de la patience de la Chambre, si l'on pouvait nous-mêmes régler

3 ce problème. Malheureusement, cela ne marche pas.

4 M. le Président: Ma patience commence un peu à s'épuiser.

5 Maître Keegan, sur cette question des examens médicaux et de la langue des

6 documents?

7 M. Keegan (interprétation): En ce qui concerne les examens médicaux,

8 Monsieur le Président, de manière générale, l'accusation ne s'oppose

9 généralement pas à ce genre de choses.

10 En ce qui concerne la datation des cicatrices, nous demanderions par

11 principe s'il est possible tout d'abord de dater une cicatrice: est-ce que

12 c'est scientifiquement possible? Je ne parle pas des cicatrices récentes

13 mais les cicatrices d'il y a neuf ans; je ne suis pas sûr que c'est

14 possible. Il faudrait peut-être justifier une demande d'un tel examen

15 avant que le Tribunal ne décide de demander cet examen et que nous ayons

16 besoin de répondre à cette demande.

17 En ce qui concerne l'examen d'une main, d'une main blessée, bien entendu,

18 cela nous n'avons rien à y opposer.

19 En ce qui concerne les documents, pour vous dire la vérité, moi, je

20 pensais que la défense faisait référence à quelque chose d'autre. Je dois

21 dire que nous faisons tous les efforts nous pouvons pour communiquer à la

22 défense, dans les deux langues, tous les documents que nous avons lorsque

23 cela est possible humainement.

24 En ce qui concerne les documents déposés en vertu de l'Article 65ter, nous

25 n'avons pas demandé la traduction de la part du service de traduction

Page 4585

1 parce qu'il s'agissait d'un document communiqué à la Chambre, déposé

2 auprès de la Chambre. Mais la défense reçoit la version intégrale des

3 informations relatives aux témoins, en BCS. Donc si la défense ne reçoit

4 pas le résumé en BCS, elle reçoit la totalité des déclarations du témoin

5 en BCS, des informations relatives au témoin en BCS, par exemple.

6 Je pensais que le conseil de la défense faisait référence à des

7 déclarations qui avaient été produites par nos enquêteurs ce week-end. Par

8 exemple, il y avait la question des photographies relatives à M. Kvocka où

9 un témoin avait dit quelque chose de différent que ce qu'il avait dit

10 précédemment. Et cela s'est passé pendant le week-end où nous n'avions pas

11 accès au service de traduction. Et du fait que je sais que les conseils de

12 la défense comprennent l'anglais, nous avons choisi avant de faire la

13 traduction de communiquer cette information aussi rapidement que possible

14 à la défense. Je sais que, dans des cas aussi urgents que ceux-là, il y a,

15 au niveau du centre pénitentiaire, quelqu'un qui parle la langue des

16 accusés, qui peut lui expliquer de quoi il s'agit. Nous ferons traduire

17 ces documents aussi rapidement que possible. Donc, en fait, je pensais

18 qu'il parlait de ces documents-là.

19 Mais il est exact que nous avons communiqué un certain nombre

20 d'informations non traduites; nous avons pensé qu'il valait mieux que la

21 défense soit informée de l'existence de ces informations aussi rapidement

22 que possible plutôt que d'attendre que tout cela soit traduit dans les

23 deux langues. Nous sommes tout à fait conscients cependant des décisions

24 de la Chambre en l'espèce et nous nous efforçons de faire tout ce que nous

25 pouvons pour nous y conformer.

Page 4586

1 M. le Président: Maître Stojanovic, avez-vous quelque chose à ajouter?

2 M. Stojanovic (interprétation): Au sujet de cette première question, nous

3 avons remis la documentation médicale et puis le certificat médical du

4 mois d'août. Nous avons également remis le manuscrit du protocole médical.

5 Nous n'avons pas pu obtenir d'autres documents mais, de toute façon, si

6 jamais la Chambre l'exige, nous pouvons véritablement obtenir tous ces

7 documents auprès de la clinique de Prijedor. De toute façon, si le Bureau

8 du Procureur l'exige, nous pouvons assurer tous les originaux. Je pense

9 qu'il y a également une attestation témoignant qu'il s'agit d'un extrait

10 original du dossier médical.

11 Deuxièmement, en ce qui concerne l'unité pénitentiaire qui a un service de

12 traducteurs: pour nous, ce n'est pas suffisant, véritablement. Il s'agit

13 de documents qui sont assez copieux, volumineux et cela m'aurait étonné

14 qu'eux puissent véritablement le faire. Enfin, ce n'est pas l'unité

15 pénitentiaire qui peut aider tout le temps.

16 M. le Président: Merci beaucoup. Nous allons donc passer au troisième

17 point de l'ordre du jour: c'est-à-dire la question des affidavits,

18 soulevée par le Procureur. Peut-être qu'on pourrait associer "des rapports

19 et d'autres documents".

20 C'étaient les deux aspects, Monsieur Keegan, que vous avez bien voulu

21 inscrire dans l'ordre du jour. Pouvez-vous nous éclairer? Quelles sont les

22 questions?

23 M. Keegan (interprétation): Oui, Monsieur le Président.

24 Je vais simplement demander une discussion au sujet de l'application de

25 l'Article 94ter du Règlement. Et c'est un article qui n'a pas très souvent

Page 4587

1 été appliqué dans ce Tribunal. Je n'ai connaissance que d'une application

2 de cet article. Il semble, à la lecture de cet article, qu'en plus de

3 déposer les déclarations sous serment, il faut présenter un témoin qui

4 soumet, qui présente les déclarations. Généralement, il s'agit de

5 l'enquêteur qui se rend sur place, qui va rencontrer les témoins et les

6 accompagne alors qu'ils déposent et qu'ils font leurs déclarations sous

7 serment, leurs affidavits dans le pays où ils se trouvent, devant une

8 instance officielle de ce pays.

9 Moi, je proposais d'adopter une procédure au cours de laquelle les

10 affidavits seraient tout simplement déposés. Si la Chambre le demandait, à

11 ce moment-là, l'accusation pourrait fournir un résumé des procédures

12 utilisées pour recueillir ces affidavits.

13 Deux des déclarations sous serment que nous allons déposer demain ont été

14 recueillies en Bosnie-Herzégovine et sont accompagnées d'un certificat

15 rédigé par un Juge devant lequel ces affidavits ont été donnés. Nous

16 pensons que cela correspondrait à l'Article 94ter et à l'objectif de cet

17 article; j'en ai parlé à la défense. Apparemment, la défense ne s'oppose

18 pas à ce que ces affidavits soient présentés simplement par un des

19 conseils, soit de la défense soit de l'accusation. Bien entendu, il se

20 peut que, dans certains cas, une des parties souhaite avoir des

21 informations bien spécifiques au sujet des déclarations sous serment. Et,

22 bien entendu, les parties sont toujours libres de s'opposer à un affidavit

23 ou à un autre. C'était juste une proposition sur la façon dont ces

24 déclarations sous serment pouvaient soumises à la Chambre. D'après ce que

25 j'ai vu, nous étions plus ou moins d'accord avec la défense à ce sujet, du

Page 4588

1 moment que la Chambre trouve également que cela convient.

2 M. le Président: Peut-être, Monsieur Keegan, pouvez-vous développer

3 l'autre question associée que vous avez bien voulu inscrire dans l'ordre

4 du jour? C'est la question que j'appelle "Des rapports et d'autres

5 documents". Vous, vous savez peut-être mieux que moi ce dont il s'agit. Et

6 après, je donne la parole à la défense pour se prononcer sur les deux

7 aspects.

8 M. Keegan (interprétation): Oui. Il s'agit tout simplement d'une autre

9 question d'intendance que j'avais souhaité évoquer.

10 Comme vous le savez sans doute, avant même que cette Chambre ne soit

11 saisie de la question, il y a une requête aux fins d'admission de preuve

12 documentaire qui a été accordée par une autre Chambre de première

13 instance, une Chambre précédente. Si bien qu'il y a déjà un grand nombre

14 de documents qui ont été versés au dossier. Ces documents, lorsqu'ils ont

15 été déposés, certains de ces documents n'avaient reçu qu'une première

16 traduction, une traduction provisoire. Or, dans toutes les affaires

17 auxquelles j'ai participé dans ce Tribunal, on a toujours demandé une

18 traduction définitive des documents. Maintenant, ces traductions

19 définitives sont disponibles, elles sont prêtes et nous souhaitons

20 soumettre ces traductions définitives et finales de ces documents.

21 La question est de savoir si la Chambre souhaite qu'il y ait une

22 déposition de ces traduction à part, ou bien si nous pouvons nous

23 contenter de fournir ces traductions au Greffe pour qu'il remplace les

24 traductions provisoires ou que nous nous soumettions à la procédure

25 choisie par le Greffe. Bien entendu, nous pouvons fournir des exemplaires

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1 à la défense. Mais en tout cas, nous nous soumettrons à la décision de la

2 Chambre au sujet de ces traductions définitives. Et c'était la raison de

3 ma question.

4 M. le Président: Bien, Monsieur Keegan. Je donne la parole à la défense

5 pour se prononcer sur ces questions: affidavits, rapports et d'autres

6 documents.

7 Je vois que Me O'Sullivan va parler au nom des autres conseils, c'est

8 cela?

9 (Signe affirmatif de Me O'Sullivan.)

10 Très bien, merci. Vous avez la parole.

11 M. O'Sullivan (interprétation): Oui, Monsieur le Président, merci.

12 Je commencerai peut-être par le second point: la nouvelle cotation

13 éventuelle de ces documents. Nous laissons la décision aux Juges de cette

14 Chambre. Je pense que c'est à eux qu'il appartient de savoir s'il convient

15 d'affecter une nouvelle cote à ces documents. Mais, en tout état de cause,

16 nous souhaiterions obtenir une copie de ces versions définitives de

17 traduction. Voilà ce que j'avais à dire sur ce point.

18 Maintenant, les affidavits en application de l'Article 94ter: comme M.

19 Keegan l'a dit, nous avons discuté de la question, nous avons reçu les

20 deux affidavits que l'accusation a l'intention de verser au dossier

21 demain. Nous n'avons pas d'objection à la proposition de M. Keegan et je

22 pense simplement qu'à l'avenir, nous aimerions recevoir ces affidavits un

23 peu plus tôt de façon à dire à l'accusation si nous avons l'intention

24 d'objecter. En tout cas, cela permettrait d'éviter de citer quelqu'un à la

25 barre à cette fin. Cela me semble raisonnable. Je suppose que l'Article

Page 4590

1 94ter du Règlement ne dit rien sur ce point, en tout cas, sur la façon

2 dont les documents doivent être déposés et quel témoignage ils sont censés

3 corroborer. C'est un point important pour la défense, cet Article 94ter.

4 M. le Président: Je vois que Me K. Simic veut ajouter quelque chose à ce

5 que Me O'Sullivan vient de dire, c'est cela?

6 M. K. Simic (interprétation): Monsieur le Président, je suis d'accord avec

7 tout ce que vient de dire Me O'Sullivan. Mais l'accord qui a été conclu

8 entre nous et l'accusation, qui vient d'être présenté par Me O'Sullivan,

9 porte sur un certain nombre de points précis.

10 Pour ma part, je pense qu'il faut qu'une procédure globale soit mise au

11 point. Elle implique des points dont nous n'avons pas encore discuté. Nous

12 avons reçu deux documents et la proposition qui vient d'être faite

13 permettra d'apporter une aide importante au Tribunal. Ces deux documents,

14 déclarations de deux témoins ne répondent pas aux normes requises dans

15 l'article 94ter du Règlement dans lequel il est écrit très clairement que

16 -je cite- "pour prouver un fait en litige, une partie peut proposer de

17 citer un témoin". Autrement dit, il faut qu'il existe un fait en litige et

18 qu'il existe un témoin.

19 Pour ne pas nous répéter, nous pensons que la déclaration en question peut

20 donc être confirmée par la déposition d'un témoin qui dépose après avoir

21 prêté serment dans le cadre de la procédure du Tribunal. Les documents que

22 le Procureur nous a remis sont des déclarations préalables de témoins,

23 c'est-à-dire des dépositions recueillies avant le procès par le Procureur

24 et qui ont été soumises. Ces témoins sont venus au Tribunal à Sanski Most

25 et ont simplement confirmé qu'ils avaient signé leur déclaration sous

Page 4591

1 serment; donc il y a un serment, mais le serment a été prononcé après le

2 recueil de la déposition. Simplement, on informe le témoin qu'il n'a pas

3 le droit de mentir et que, s'il ment, cela aura des conséquences.

4 Donc les documents remis par le Procureur et qui seront proposés pour

5 versement au dossier, demain, ne répondent pas, à notre avis, aux

6 exigences remises par ce Tribunal. Bien entendu, une telle façon de

7 travailler est très utile, très pratique mais elle peut avoir des

8 conséquences négatives. Il est inacceptable pour nous de recevoir des

9 déclarations dans le cadre du processus de communication de pièces. Il ne

10 s'agit pas d'éléments de preuve, à notre avis, dans ce cas-là. Il s'agit

11 simplement d'informations. Ces documents que nous recevons doivent être

12 centrés sur des faits qui peuvent être discutés au cours d'un débat

13 ultérieur dans le cadre duquel la partie concernée doit apporter des

14 preuves.

15 Nous considérons que ce Tribunal a établi des règles et des procédures

16 qu'il convient de respecter. Par conséquent, nous considérons que le

17 Procureur doit nous dire en temps utile quel est le témoin qui sera lié à

18 l'affidavit, quels sont les faits qui sont contestés et, si la défense le

19 juge nécessaire, le témoin doit tout de même pouvoir être cité à la barre

20 et subir un contre-interrogatoire. Pensons aux 20 témoins qui ont fait

21 l'objet d'affidavits sur un total de 57; cela fait un pourcentage de 30 à

22 35% qui donnent lieu à des déclarations qui ne peuvent pas être avérées,

23 qui ne peuvent pas faire l'objet d'une appréciation de la part des Juges

24 de la Chambre.

25 Nous estimons tous, de même, que les éléments de preuve, c'est aux Juges

Page 4592

1 de la Chambre qu'il appartient de les apprécier, d'en apprécier le poids,

2 la valeur. Nous sommes d'accord sur l'accord qui a été conclu, mais nous

3 nous en remettons à votre décision, à la décision des Juges de cette

4 Chambre s'agissant de la procédure globale. Merci

5 M. le Président: Si j'ai bien compris, plus spécifiquement, vous ne faites

6 pas objection, mais vous faites des suggestions pour une procédure plus

7 générale? C'est bien cela que je dois comprendre?

8 M. K. Simic (interprétation): (Signe affirmatif.)

9 M. le Président: Merci pour les suggestions, Maître K. Simic. Maître

10 Keegan, quelque chose à ajouter?

11 Maître Keegan (interprétation): Non, Monsieur le Président. Nous avons

12 simplement besoin d'un éclaircissement quant à la nécessité dans laquelle

13 nous pourrions nous trouver, de spécifier les faits contestés et en

14 rapport avec l'affidavit. Car, à ce moment-là, nous devrions prendre une

15 nouvelle mesure et cela aurait un effet sur la date de dépôt de ces

16 documents. Bien sûr, il importe de garder présent à l'esprit que tous ces

17 accusés plaident non coupable, donc ils contestent tous les faits que l'on

18 trouve dans les charges retenues contre eux. Donc tous les faits peuvent

19 être débattus.

20 C'est pourquoi les affidavits ont une valeur différente des autres

21 documents. Ce ne sont pas les mêmes affidavits que ceux que l'on peut voir

22 présentés devant un Tribunal national où il est simplement question du vol

23 d'une voiture ou de faits d'une portée très limitée.

24 Mais s'agissant des procédures, les affidavits ont été élaborés devant un

25 Juge, ils ont été certifiés. De l'avis du Procureur, ces affidavits ont

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1 été préparés de façon tout à fait conformes aux règles du Tribunal.

2 Mme le Juge Wald (interprétation): Mais vous avez un témoin,

3 indépendamment des documents communiqués, de quelle façon ils l'ont été?

4 Vous avez un témoin qui peut parler de faits contestés et auxquels les

5 documents peuvent être liés?

6 Maître Keegan (interprétation): La plupart d'entre eux parlent de

7 plusieurs faits, pas seulement d'un seul.

8 Madame le Juge Wald (interprétation): Oui, mais vous pouvez préciser de

9 quel témoin il s'agit exactement?

10 Maître Keegan (interprétation): Oui, absolument.

11 M. le Président: Au dernier point que nous avions inscrit dans notre

12 agenda, c'est le problème, c'est la question de la requête du Procureur

13 pour la consolidation de l'Acte d'accusation et la correction des annexes.

14 Avant d'entrer dans la discussion et dans la présentation des questions,

15 j'aimerais bien demander à la défense si les conseils sont prêts à

16 discuter de cela ou non, car nous savons que cette requête a été déposée

17 hier. Comme je vous ai dit dès le début, si la réponse est non, on peut

18 quand même avoir un autre moment pour discuter de cela. Je vois plusieurs

19 signes que non.

20 M. O'Sullivan (interprétation): La défense attend toujours la traduction

21 en BCS. C'est seulement à ce moment-là que nous pourrons en débattre.

22 Mais puisque je suis debout, Monsieur le Président, une demande avait été

23 faite de discuter du calendrier jusqu'au mois d'octobre, Monsieur le

24 Président, si vous le souhaitez.

25 M. le Président: Vous avez tout à fait raison, Maître O'Sullivan. Je vous

Page 4594

1 remercie beaucoup d'avoir attiré mon attention parce que moi-même, je

2 l'avais inscrit ici, mais j'ai oublié.

3 Ce point concernant "la requête du Procureur pour la consolidation de

4 l'acte d'accusation et la correction des annexes" pourrait peut-être

5 attendre. Nous pourrions faire la discussion au moment où vous avez la

6 traduction. Si quelqu'un veut avoir la gentillesse d'informer la Chambre

7 du moment où la version BCS sera disponible, nous serions disponibles pour

8 en discuter.

9 Passons. Maintenant, Maître Stojanovic, j'ai vu que vous aviez quelque

10 chose à dire était-ce quelque chose relatif à ces documents?

11 M. Stojanovic (interprétation): Oui, Monsieur le Président. Je pense que

12 nous pouvons être utiles et nous permettrons peut-être de gagner du temps

13 vis-à-vis des traductions.

14 M. le Président: Maître Stojanovic, quand vous dites que vous pourriez

15 être utiles, j'ai pensé que vous alliez traduire tout de suite; c'est

16 cela, non?

17 M. Stojanovic (interprétation): Croyez-moi, je n'ai pas de version en BCS,

18 mais je crois comprendre que l'annexe est un nouvel Acte d'accusation. Je

19 propose donc au Procureur de bien réfléchir avant d'alourdir le travail de

20 traduction de ces documents.

21 M. le Président: Le Procureur a un défi ici: est-ce que vous voulez

22 répondre?

23 Maître Keegan (interprétation): Oui, Monsieur le Président. Je pense qu'il

24 n'est pas question d'Acte d'accusation. Nous en avons discuté entre nous,

25 après les audiences, et il apparaît que la demande de correction du

Page 4595

1 calendrier peut provoquer un certain débat avec M. Krstan Simic en tout

2 cas.

3 S'agissant de l'Acte d'accusation, bien sûr, nous pensons que c'est

4 simplement un problème administratif, un problème lié à la frappe d'un

5 texte, à la dactylographie d'un texte. Mais, s'agissant de la traduction

6 -et c'est moi qui en ai parlé l'autre jour-, j'ai demandé que l'on demande

7 au Greffe de considérer ces documents peut-être comme prioritaires car,

8 bien entendu, ils sont importants pour les parties.

9 Mais, à mon avis, le travail nécessaire consiste simplement à utiliser

10 l'ordinateur en faisant du coupé/collé ou du copié/collé avec des parties

11 de l'Acte d'accusation Prcac, qui est déjà traduit en BCS, ainsi qu'avec

12 des documents relatifs à Kvocka et autres -l'Acte d'accusation,

13 notamment-, déjà traduits en BCS. Cela ne devrait pas être trop compliqué.

14 Il me semble que la production de la nouvelle version ne devrait pas

15 exiger un délai très long puisque le libellé est absolument identique.

16 Simplement, il convient de le mettre au bon endroit dans le texte et

17 d'ajouter peut-être quelques paragraphes. Mais ce sont les seules

18 modifications prévues. J'espère donc que cela devrait pouvoir être fait

19 assez rapidement.

20 M. le Président: Oui, j'espère que cela puisse être fait rapidement: il

21 s'agit finalement à la fin d'une question presque technique. Vous avez

22 parlé de copié/collé.

23 M. Stojanovic (interprétation): Monsieur le Président, je vous remercie

24 encore une fois pour votre patience et je m'engage à ne pas entrer dans

25 les détails. Je vais simplement citer une modification.

Page 4596

1 M. le Président: Je ne sais pas si le Greffe vous paie par temps

2 d'intervention?

3 M. Stojanovic (interprétation): Il existe tout de même un nouveau

4 paragraphe où il est dit que M. Zigic est responsable de tous les meurtres

5 commis à Keraterm, à Omarska et à Trnopolje. C'est un paragraphe nouveau,

6 Monsieur le Président, et je ne dirai rien de plus.

7 M. le Président: Je crois que le Procureur a bien enregistré sur le compte

8 rendu tout ce que vous venez de dire; il tiendra bien compte de cela.

9 Il faut passer à l'autre question. Je crois que nous tous attendons le

10 calendrier, notamment Me O'Sullivan.

11 Voici ce que nous avons par rapport au calendrier: vous savez déjà pour la

12 fin de cette semaine où il reste un jour. Pour la semaine prochaine, je

13 dois vous dire qu'encore aujourd'hui, je ne sais pas qui a dit que, le 5

14 et le 6 septembre, on n'aurait pas d'audience. J'ai toujours dit de ma

15 bouche: "4, 5, 7 et 8" ou "5 et 8". J'ai dit que le 4, on n'avait pas

16 d'audience. Du 5 au 8, on aurait des audiences. Je ne sais pas qui a

17 inventé d'autres dates. Ce qu'on m'a dit, c'est qu'il y a une différence

18 entre la version française qui dit "du 5 au 8" et la version anglaise qui

19 dit "7, 8". Pour être clair, je crois que dire "5" en français, c'est tout

20 à fait différent de dire "7" en français.

21 Je sais donc que cela a troublé un peu l'organisation des témoins. Quelque

22 chose dont la Chambre se préoccupe c'est le bien-être des témoins. Pour

23 éviter à des témoins de venir, de revenir, d'attendre, etc., je crois

24 qu'on doit bien traiter cette question: les témoins sont les personnes, à

25 mon avis -et je peux peut-être le dire- les plus importantes dans ce

Page 4597

1 prétoire. Je crois que nous oublions souvent cela.

2 Donc le calendrier pour la semaine prochaine: nous allons siéger du 5

3 jusqu'au 8. On ne siégera pas le 4. Après, pour la semaine du 11

4 septembre, on siégera du 11 jusqu'au 15. Pour la semaine du 25 septembre,

5 il était prévu de siéger du 25 au 29, mais des engagements pour tous les

6 Juges du Tribunal sont arrivés, qui empêchent de siéger le 29. Donc le 29

7 septembre, on ne siégera pas.

8 Passons au mois d'octobre. Pour octobre, nous avons la semaine du 2 au 6.

9 Comme vous le savez, le 6 est en principe la fin de la présentation des

10 moyens à charge à titre principal du côté du Procureur. Mais, comme nous

11 avons perdu le 29 et que nous assumons nos engagements, nous avons dit

12 hier, je crois, que le Procureur avait 21 jours; aujourd'hui, nous disons

13 qu'il a 20 jours. Nous allons essayer de récupérer ce jour d'audience dans

14 des sessions supplémentaires les après-midi de la semaine du 25 septembre

15 et de la semaine du 2 octobre.

16 Je regarde maintenant le compte rendu pour ne pas avoir de problème. Sur

17 ce point, la Chambre vous donnera des informations plus précises et

18 définitives.

19 Encore à propos du calendrier, nous avions parlé du besoin d'avoir au

20 moins une Conférence de mise en état de préparation de la défense.

21 Permettez-moi une petite parenthèse: pour le mois de décembre -maintenant

22 on complète-, nous prévoyons siéger dans cette affaire du 4 au 8 décembre

23 et du 11 au 15 décembre.

24 Et le 4 décembre sera le premier jour de présentation des moyens de

25 défense. Donc on commencera vraiment la présentation des moyens à décharge

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1 du côté de la défense. C'est-à-dire qu'entre le 6 octobre et le 4

2 décembre, nous aurons besoin d'au moins une Conférence de mise en état de

3 préparation de la défense. Je crois que, dans une autre Conférence de mise

4 en état, nous avions parlé déjà des semaines du 6 novembre, du 22 novembre

5 ou du 29 novembre.

6 Comme vous le savez, le Règlement de la Chambre dit qu'on doit organiser

7 une conférence de préparation et au moins une conférence préalable de la

8 défense. La Chambre est complètement ouverte et disponible; elle propose à

9 la défense: "Dites-nous quelle est la date qui vous convient?" Car je

10 comprends qu'après avoir fini les moyens à charge, vous allez vous en

11 aller un peu. J'aimerais quand même vous faire revenir dans une occasion

12 qui n'était pas convenable pour vous. Pour moi, je pense que je suis tout

13 à fait disponible pour que quelqu'un de la défense puisse entrer en

14 contact avec M. Olivier Fourmy, par exemple, et lui dire que, pour la

15 défense, c'est le jour X qui nous convient.

16 Je vois qu'il y a déjà un accord. C’est le 6 novembre?

17 M. K. Simic (interprétation): Monsieur le Président, nous sommes

18 absolument tous d'accord sur la date du 6 novembre.

19 M. le Président (interprétation): Fantastique: 6 novembre.

20 Je voudrais vous poser une autre question: il peut arriver que, le 6

21 novembre, on ne puisse pas épuiser toutes les questions de préparation de

22 la défense. Peut-être devra-t-on avoir besoin du 7, notamment pour faire

23 la conférence préalable. C'est-à-dire que j'aimerais bien que vous

24 puissiez considérer le 6 et, si nécessaire, le 7. Au calendrier, nous

25 désignons donc le 6 et le 7 novembre, en sachant qu'on utilise le 7 si

Page 4599

1 l'on en a vraiment besoin. Le 6 et le 7 pour des conférences de mise en

2 état de préparation de la défense de l’affaire Kvocka.

3 D'accord. Et maintenant ce que je peux vous dire, c'est que nous avons

4 déjà établi le calendrier jusqu'en décembre. Peut-être que, dans ces

5 conférences de mise en état, on peut discuter et préparer le calendrier

6 jusqu'à la fin du procès. Je crois que nous avons déjà une certaine idée

7 d'autres conversations mais là, nous allons fixer tout le calendrier

8 jusqu'à la fin de l'affaire.

9 On essaie. Comme je l'ai toujours dit, l'organisation est un instrument de

10 travail. Donc j'ai quand même préféré faire la Conférence de mise en état

11 aujourd'hui suivant la suggestion de M. Keegan, car je sais quand même

12 qu'il y a des personnes qui travaillent ici et qui peuvent avoir déjà des

13 engagements pour demain après-midi; j'essaie toujours de respecter les

14 engagements pour ne pas perturber d'autres possibilités. Donc, sur le

15 calendrier, c'était cela que je voudrais en principe vous communiquer.

16 Nous pouvons quand même voir s'il y a des observations à faire devant

17 cette proposition.

18 Monsieur Keegan, avez-vous quelques commentaires ou suggestions à faire?

19 Vous ne faites pas de commentaire par rapport aux 20 jours: d’accord,

20 c’est interdit.

21 M. Keegan (interprétation): Non, Monsieur le Président. Je voulais

22 simplement dire que l’accusation est tout à fait d'accord pour respecter

23 ce calendrier.

24 M. K. Simic (interprétation): S'agissant du calendrier, j'ai une question

25 à poser. Vous savez que nous avons modifié un petit peu l'application de

Page 4600

1 la pratique de ce Tribunal parce que nous avons commencé par

2 l'interrogatoire de M. Kvocka. Le Procureur a déjà travaillé 20 jours et

3 le début de l'audition des témoins de la défense se rapproche. Pour nous

4 préparer, nous aimerions savoir si le Procureur va utiliser son droit au

5 contre-interrogatoire et, si oui, à quel moment le fera-t-il? Car ceci

6 doit être pris en compte: l’interrogatoire risque d'être long, donc le

7 contre-interrogatoire risque d’être long aussi. Et la défense estime que

8 cela l'aiderait d'être au courant de façon à pouvoir mieux organiser et

9 préparer l'audition des témoins de la défense qui constitue un moment très

10 important et difficile du procès.

11 Nous aimerions savoir si le contre-interrogatoire va avoir lieu maintenant

12 ou un peu plus tard?

13 M. le Président: Très bonne question, Maître Krstan Simic. Je vous

14 remercie beaucoup. Maître Keegan?

15 M. Keegan (interprétation): Oui, Monsieur le Président. Nous avions

16 effectivement l’intention de procéder à ce contre-interrogatoire en

17 application de ce que j'appellerai l'ancienne pratique, c'est-à-dire au

18 début de l'audition des témoins de la défense. Nous n'avons donc pas

19 l’intention de contre-interroger M. Kvocka sur le temps de l'accusation

20 mais au début de la période d'audition des témoins de la défense. Nous ne

21 savons pas exactement comment la défense présentera ses arguments, s’il y

22 aura des faits nouveaux qui seront invoqués dans les témoignages des

23 témoins de la défense.

24 Donc nous pensons procéder à ce contre-interrogatoire à la fin de

25 l'audition de nos témoins et au début de l’audition des témoins de la

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1 défense.

2 M. le Président: Donc on va quand même prévoir et étudier cette question.

3 On peut discuter de cette question lors de la remise en état de

4 préparation de la défense. C'est important quand même. Je crois que nous

5 n'avons pas d'autres questions à discuter pour le moment.

6 (Les Juges se concertent sur le siège.)

7 M. le Président: Je crois que nous sommes encore dans notre temps prévu.

8 Il était prévu de terminer à 5 heures 30.

9 Mes collègues me rappellent qu’il y a cette question que nous avons

10 soulevée aujourd’hui, ce matin: la question de l'interrogatoire principal

11 et du contre-interrogatoire qui a commencé.

12 Peut-être y a-t-il possibilité, du point de vue de l'organisation de la

13 journée suivante, demain, de savoir quel est le résultat par rapport à ces

14 questions de documents et de l'objection que Me Stojanovic a soulevée?

15 Comme nous sommes en session publique, nous pouvons peut-être profiter de

16 ce moment pour discuter de cela. Je ne sais pas par où je vais commencer.

17 Maître Stojanovic, par rapport à cette question de documents, qui ont fait

18 aujourd’hui l’objet de votre objection, par rapport au témoin

19 d’aujourd’hui? Et le résultat de conversations avec le Procureur?

20 M. Stojanovic (interprétation): Si je ne m'abuse, il s'agit du témoin que

21 nous étions censés entendre aujourd'hui. Personnellement, je ferai tout ce

22 qui est en mon pouvoir pour que l'audition de ce témoin soit possible

23 demain car, effectivement, cette objection n’est pas simplement une

24 objection formelle: croyez-moi, je n’ai vraiment pas réussi à lire ces

25 documents.

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1 J'ai pensé que la priorité devait être donnée au nouvel Acte d’accusation.

2 C'est donc ce texte du nouvel Acte d’accusation que j’ai examiné et c'est

3 seulement cette semaine que j’ai reçu tous ces nouveaux documents.

4 Mais mon collègue, mon confrère a reçu à Banja Luka, par courrier, ces

5 documents il y a sans doute une dizaine de jours. Je ne dis pas du tout

6 qu’il s'agit là d’une erreur de la part du Bureau du Procureur, je n'ai

7 aucune intention de blâmer le Procureur pour cela. Je dis simplement que

8 nous n’avons vraiment pas eu un temps suffisant, le temps qui est

9 indispensable pour notre préparation. D’ailleurs, je ne rappellerai pas la

10 règle générale selon laquelle sept jours sont nécessaires pour l'examen

11 des documents. A mon avis, il serait préférable de dire que la durée

12 d’examen des documents doit correspondre au nombre de documents reçus.

13 Mon confrère a donc reçu ces textes à Banja Luka, par courrier, il y a

14 douze jours. Mais il a aussi reçu un certain nombre de documents relatifs

15 au témoin que nous devions entendre aujourd’hui, il y a trois jours, comme

16 moi. Et je rappellerai qu'il y a eu entre-temps la rotation entre mon

17 collègue et moi-même: une partie des documents ont été envoyés à Banja

18 Luka alors qu’ils auraient dû en fait m’être envoyés à moi. Donc mon

19 confrère a dû me faire suivre ces documents.

20 Enfin, tout cela s'est produit par ailleurs au cours de la période des

21 congés estivaux, ce dont -je crois- il convient de tenir compte.

22 En tout cas, pour ce qui nous concerne, nous allons nous efforcer au

23 maximum d'éviter qu'une telle chose ne se reproduise à l'avenir. Nous

24 estimons qu'il n'y a eu aucune erreur de notre part. Nous insistons sur le

25 fait qu'il ne s'agit pas d'une objection formelle, mais simplement d'une

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1 objection liée au fait que, véritablement, je n'ai pas eu le temps de lire

2 un grand nombre des documents liés au témoin que nous étions censé

3 entendre aujourd'hui. Cela étant, j'aurais sûrement le temps de le faire

4 d'ici à demain. Merci.

5 M. le Président: D'accord, Maître Stojanovic. Monsieur Keegan, s'il vous

6 plaît?

7 M. Keegan (interprétation): Oui, Monsieur le Président. Pour que tout soit

8 clair au compte rendu d'audience, nous avons les accusés de réception. Je

9 peux vous dire que les documents ont été envoyés le 18 août. Un document a

10 été envoyé à cette date-là: c'est un document médical relatif au témoin.

11 Cet envoi a été fait avant la rotation des conseils de la défense.

12 D'autres ont été envoyés beaucoup plus tôt, certains en 1999, et ceux qui

13 ont été communiqués en août avaient déjà été communiqués antérieurement.

14 Mais nous avons les reçus sur lesquels figurent des dates, nous pouvons

15 les fournir. Bien entendu, nous allons faire de notre mieux pour que les

16 choses se passent de façon encore plus efficace à l'avenir. Bien entendu,

17 les reçus sont toujours disponibles. Ils nous permettent de confirmer ces

18 dates. Maître Stojanovic a d'ailleurs confirmé qu'il reçoit également des

19 reçus sur ces documents.

20 Voilà, c'est tout pour la question, mais nous aimerions également parler,

21 si vous le voulez bien, des déclarations de témoins et de la façon dont

22 doivent se dérouler les interrogatoires.

23 M. le Président: Oui. Donc vous avez 20 jours, Monsieur Keegan, pour

24 prouver cette efficacité. D'accord?

25 Maître Stojanovic, avez-vous quelque chose à ajouter? Tout est déjà dit et

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1 il n'est pas nécessaire de répéter.

2 M. Stojanovic (interprétation): Non, Monsieur le Président. Mon confrère

3 m'avertit que ce résumé a été reçu le dimanche. Effectivement, ce résumé,

4 il l'a reçu le dimanche. Par conséquent, je pense que tout doit être prêt

5 pour demain; de toute façon, je vais travailler cette nuit.

6 M. le Président: J'espère que l'incident est clos. Mais je vous ai dit

7 plusieurs fois que je sens beaucoup la question de la présence des

8 témoins. Et au moins, je dois vous dire, Maître Stojanovic, que vous

9 pourriez avoir parlé beaucoup avant avec le Procureur pour poser cette

10 question et éviter cette situation d'avoir le témoin dans le prétoire et

11 soulever l'objection.

12 Vous pouvez me dire que la faute, c'était la mienne: d'avoir fait entrer

13 le témoin sans vous donner l'opportunité. Mais dès que vous saviez, dès

14 lundi, que vous alliez soulever cette question, je crois qu'il aurait été

15 préférable de prévenir le Procureur que vous alliez soulever cette

16 objection. A la fin, c'est presque une requête.

17 Donc, j'aimerais bien que les choses se passent bien entre les parties

18 parce que si… Le Procureur est lui aussi en manquement: nous avons déjà

19 parlé de cela hier. Mais nous, nous sommes arrivés à la conclusion qu'il y

20 a des choses qui sont très faciles à résoudre si les parties parlent, ou

21 qui sont très compliquées et désorganisent toute la démarche du procès; et

22 même tous les accusés. Parce qu'à la fin, il n'y a pas ici seulement un

23 conseil, il y a les autres conseils qui souffrent aussi. Et donc, il faut

24 avoir le respect pour tout le monde, pour le témoin, et notamment pour les

25 collègues. Finalement, nous avons perdu beaucoup de temps dont on aurait

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1 pu profiter.

2 Voilà, je crois qu'il faut -et je vous le dis quand même-, peut-être dois-

3 je m'excuser, mais souvent, je me sens au point de perdre la tête. Parce

4 qu'il y a des choses, pour moi, qui ne sont pas acceptables! Il y a des

5 choses qui ne sont pas -si je peux dire- civilisées. Je crois que nous

6 sommes toutes des personnes adultes, civilisées et capables d'avoir une

7 relation normale entre les personnes. C'est donc pour cela que souvent, je

8 me demande moi-même si je ne suis trompé, peut-être que je me suis trompé

9 quand je suis entré ici, parce que ce n'est pas mon style, ce n'est pas ce

10 que j'attends des personnes qui, je crois, sont des personnes

11 raisonnables, qui sont des personnes matures. Et qu'on peut travailler.

12 Je l'espère, cela. J'espère finalement en conclure définitivement, qu'à la

13 fin je me suis trompé vraiment. Je fais toujours appel à la bonne

14 communication entre les personnes. Il y a des choses très simples quand on

15 parle, très compliquées quand on ne parle pas ou quand on cache

16 l'information.

17 Voilà donc, j'aimerais de toute façon -à propos de l'incident- vous dire

18 qu'il y a des choses qu'on peut épargner, il y a de l'argent qu'on peut

19 épargner, il y a des énergies dont on a besoin pour faire d'autres choses,

20 qu'on peut épargner ici. Mais je crois qu'il y a un point où l'on peut

21 épargner beaucoup d'énergie si l'on parle: c'est la question de

22 l'interrogatoire principal, du contre-interrogatoire, des questions

23 complémentaires qui souvent posent des problèmes. Je peux peut-être

24 comprendre, je vous ai dit aujourd'hui que je peux comprendre parce que

25 moi-même, j'ai pris beaucoup de temps à comprendre. J'ai dû étudier et

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1 j'ai peut-être beaucoup à apprendre aujourd'hui. Parce que moi-même, comme

2 vous le savez, je viens d'un système où les choses fonctionnent comme ça,

3 fonctionnent comme chez vous. Mais la Chambre et le droit que nous

4 appliquons ici, c'est le Droit. Ce n'est pas notre droit ou l'autre droit.

5 Ce n'est pas le "common law" ou le "civil law"; c'est le droit du Tribunal

6 qui a été établi.

7 Voilà, avec cette indulgence qu'on doit se demander réciproquement: il

8 faudrait peut-être comprendre quelques lignes au moins, celles où l'on

9 pourrait travailler ensemble. Donc, je m'inclus; je suis disponible aussi

10 pour apprendre. Quoi que j'ai fait, mais de toute façon je… Peut-être

11 qu'on peu. Comme vous le savez, cela c'est un peu réversible: maintenant,

12 le Procureur fait des interrogatoires principaux; vous, la défense, vous

13 faites des contre-interrogatoires. Demain, quand vous présenterez vos

14 témoins de la défense; au contraire, vous ferez des interrogatoires

15 principaux et le Procureur fera des contre-interrogatoires.

16 Et je donne seulement maintenant la parole à M. Keegan pour faire avec

17 nous -et ensuite, je donnerai aussi la parole à la défense- pour faire un

18 peu de brainstorming, pour éclaircir un peu entre nous, si nous le

19 pouvons, la façon dont cela doit fonctionner selon les règles du Tribunal

20 quand même.

21 A propos d'une intervention de Me O'Sullivan, j'avais dit que je pensais

22 quand même que le système n'est pas vraiment et strictement un système

23 "common law" parce que, même au Canada, aux Etats-Unis, il y a des règles

24 qui s'enfuient un peu du système typiquement anglo-saxon. Je crois donc

25 que nous avons ici un système flexible. Mais je voudrais avoir une

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1 procédure uniforme: ou nous allons entendre la procédure comme une

2 procédure stricte et elle doit être stricte pour tous, ou nous entendons

3 qu'il y a une procédure flexible et elle doit être flexible pour tous.

4 Voilà.

5 Monsieur Keegan?

6 M. Keegan (interprétation): Oui, Monsieur le Président. Je voudrais

7 simplement commencer par insister sur le fait que l'accusation comprend

8 tout à fait et est en faveur du droit de l'accusé à un contre-

9 interrogatoire juste et équitable. Bien entendu, cela peut signifier que,

10 dans le contre-interrogatoire, on va aborder les questions qui vont au-

11 delà de l'interrogatoire principal. Par exemple, des questions relatives à

12 la partialité au sujet du témoin que l'on a devant soi ou d'autres

13 témoins. Cela peut également faire référence à d'autres témoins.

14 Mais notre objection repose sur une décision qui a été prise par le

15 Tribunal et par cette Chambre même, en ce qui concerne les déclarations

16 données préalablement. L'accusation a reçu instruction de faire son

17 travail aussi rapidement que possible. Je parle de l'interrogatoire

18 principal. Nous estimons que, pour ce faire, pour mener cela à bien aussi

19 rapidement que possible, nous pensons qu'il faut aller droit au but.

20 Lorsque vous savez qu'en ce qui concerne M. Brkic, nous estimons qu'il y

21 avait des informations le concernant dont il ne se souvenait plus mais qui

22 étaient pertinentes; nous ne les avons cependant pas mentionnées à cause

23 des restrictions qui nous avaient été indiquées en ce qui concerne notre

24 interrogatoire principal. C'est pourquoi je m'opposais à ce que la défense

25 utilise, dans son contre-interrogatoire, la déclaration elle-même. Il ne

Page 4608

1 s'agit pas de savoir si M. Zigic était présent lors d'un incident ou pas,

2 parce qu'on aurait pu traiter de cette question en posant des questions

3 directes et non pas en utilisant la déclaration. Et nous avançons nous

4 que, si la Chambre envisage de permettre à la partie adverse d'utiliser

5 une déclaration dans le contre-interrogatoire, à ce moment-là, il faut

6 permettre à l'autre partie d'utiliser cette déclaration dans le cadre d'un

7 interrogatoire principal. Car, si l'accusation sait que la défense va

8 pouvoir poser des questions au sujet de tous les incidents qui peuvent

9 avoir trait à l'acte d'accusation, quels qu'ils soient et à tous les

10 témoins, à ce moment-là, nous allons nous efforcer de nous préparer en

11 conséquence pour l'interrogatoire principal, pour que la Chambre de

12 première instance ait toutes les informations pertinentes.

13 Parce que le risque pour l'accusation, c'est que, lors d'un interrogatoire

14 supplémentaire, elle ne puisse pas apporter toutes les questions

15 nécessaires. Et, bien entendu, il se peut que, lors de la présentation des

16 moyens à décharge, la même chose se produise pour eux.

17 Nous ne nous opposons pas à l'utilisation des déclarations en tant que

18 telles. Mais si l'utilisation des déclarations est autorisée, à ce moment-

19 là, il faudrait que nous en soyons informés pour que nous puissions

20 préparer en conséquence notre interrogatoire principal et poser les

21 questions pertinentes, dès le début. Bien entendu, nous sommes des gens

22 d'expérience et nous pouvons nous attendre à ce que vont aborder nos

23 collègues de la défense.

24 Donc, voilà notre position et la base de notre objection: nous demandons

25 que, lorsque l'on prend en compte la demande de la défense, on prenne

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1 aussi en compte les besoins de l'accusation pour garantir l'équité des

2 droits de l'accusation.

3 Mme le Juge Wald (interprétation) Monsieur Keegan, pendant les vacances

4 judiciaires, j'ai étudié le Règlement de Procédure et de Preuve. Je sais

5 que vous le connaissez, mais vous savez que le Règlement a été modifié

6 récemment, si bien qu'à l'Article 89H, on peut lire que "le contre-

7 interrogatoire sera limité à l'interrogatoire principal et à des questions

8 relatives à la crédibilité du témoin". D'autre part, je poursuis la

9 lecture de cet article: "la personne qui mène le contre-interrogatoire

10 pourrait demander directement au témoin, pourrait poser au témoin

11 directement des questions qui font référence à quelque chose qu'il a dit

12 précédemment dans une déclaration qui n'a pas été abordée lors de

13 l'interrogatoire principal, afin de montrer sur quoi reposent ces

14 questions, s'il s'agit pour sa question de questions relatives à la

15 crédibilité du témoin ou s'il s'agit du fond de l'affaire". Mais on

16 stipule, ici, que la personne qui mène le contre-interrogatoire l'indique

17 expressément. Mais cela peut être fait dans l'interrogatoire principal,

18 n'est-ce pas, si l'on se rapporte à cet article, n'est-ce pas, Monsieur

19 Keegan?

20 Maître Keegan (interprétation): Oui, c'est justement ce que je dis. On

21 aurait pu poser les questions sans faire référence à la déclaration, on

22 aurait pu demander: "Est-ce que vous étiez présent lorsque telle ou telle

23 personne a été battue?"

24 Ce que nous montre l'expérience ici, c'est que la qualité de déclaration

25 dépend de l'état d'esprit du témoin au moment où il la donne, de la

Page 4610

1 traduction, etc., toutes sortes d'éléments qu'il faut prendre en compte

2 quand on utilise la déclaration en tant que telle.

3 Mme le Juge Wald (interprétation): Justement, je reviens à ma dernière

4 question pour que nous soyons bien d'accord sur la signification de

5 l'Article et du Règlement.

6 Mettons que quelqu'un pose une question, lors du contre-interrogatoire au

7 témoin, au sujet d'un point qui n'a pas été abordé lors de

8 l'interrogatoire principal et lui dit: "Etiez-vous présent lors de tel

9 incident, de l'incident X?". Le témoin répond: "Non".

10 La déclaration dont dispose le contre-interrogateur le stipule

11 expressément, stipule que le témoin était présent à ce moment-là. Est-ce

12 que la personne qui mène le contre-interrogatoire peut faire référence à

13 la déclaration et demander son versement au dossier? Je vous demande ce

14 que vous en pensez.

15 Maître Keegan (interprétation): Dans l'interprétation du Règlement, je dis

16 non. Je dis qu'à ce moment-là, on pourrait dire: "Est-ce que vous avez

17 fait cette déclaration? Est-ce que vous vous souvenez que, dans votre

18 déclaration, vous avez dit que vous étiez présent lors de cet incident?".

19 Mais à ce moment-là, le problème, c'est le problème de l'utilisation de la

20 déclaration.

21 Mme le Juge Wald (interprétation): Oui, justement, en ce qui concerne

22 l'Article 89H, tout ce qui est…

23 M. le Président: J'avais aussi une question. Je ne sais si vous étiez ici

24 quand nous avons discuté de cette question des déclarations préliminaires

25 ou non. Mais l'idée générale des décisions que nous avons prises, c'était…

Page 4611

1 Selon ce que vous avez dit, le témoin a fait des déclarations, plusieurs

2 déclarations. Mais ces déclarations sont importantes pour la partie qui va

3 bâtir son affaire. A la fin, ce qui est vraiment important, c'est ce qu'il

4 dit ici et surtout le droit de l'accusé à contre-interroger les

5 témoins;ici, oralement. A mon avis, il n'y a aucun problème à ce qu'on

6 puisse utiliser les déclarations pour tester la crédibilité, pour dépasser

7 quelque problème d'incompatibilité, d'informations, etc.

8 Mais nous avons quand même discuté et décidé cela, on versait: du côté du

9 Procureur, c'était verser la déclaration. Le témoin vient sous serment et

10 dit: "C'est ça que je dois dire" et, après contre-interrogatoire, la

11 défense s'est opposée à cette procédure. Mais de l'autre côté, la défense

12 a aussi voulu continuer à verser au dossier ces déclarations.

13 Là, la Chambre a d'une certaine façon établi cette orientation. Le

14 Procureur n'utilise pas dans ce sens: je ne verse pas au dossier les

15 déclarations de mes témoins. Là, la défense peut utiliser la déclaration

16 pour tester la crédibilité ou dépasser quelque incohérence, mais ne pas

17 verser au dossier la déclaration. Car ce qui est important, c'est ce

18 témoin ici, comme résultat de cette confrontation, cette attestation de la

19 crédibilité. Osez insister: "Mais vous avez dit l'autre fois… Et

20 aujourd'hui, vous dites cela" Dans certaines façons, amener quelqu'un à

21 conclure, vous mentez une fois. Nous savons quelles sont les conditions de

22 travail et quelle est la valeur de ces déclarations.

23 Pour cette orientation de la Chambre, êtes-vous d'accord avec cette

24 orientation ou avez-vous quelque chose contre?

25 Je comprends un autre point. Quand la Chambre vous a demandé d'aller à

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1 l'essentiel, il y a toute une série de choses certainement que le témoin

2 ne va pas dire ici, car vous allez à l'essentiel de votre point de vue.

3 C'est normal que la déclaration et d'autres choses que le témoin n'a pas

4 dites ici, et si l'objectif était vraiment de répéter ce que le témoin a

5 dit dans la déclaration, ah oui, peut-être qu'on doit revoir, peut-être

6 que la défense pense que l'objectif, c'est que le témoin doit répéter ici

7 tout ce qu'il a dit dans sa déclaration, je crois que la proposition

8 initiale du Procureur était logique. Nous déposons la déclaration, le

9 témoin prête serment et voilà.

10 Excusez-moi, j'allais demander un peu vos réactions à propos de la façon

11 de conduire les choses de ce point de vue.

12 M. Keegan (interprétation): Oui, Monsieur le Président. Bien entendu, cela

13 ne nous gêne pas du tout d'accepter cette prise de position. Mais

14 l'utilisation des déclarations pose des questions pratiques.

15 Nous pensons d'abord qu'il faut donner des raisons valables, une fondation

16 valable. Il faut d'abord demander au témoin: "Est-ce que vous vous

17 rappelez de tel événement?" Si le témoin répond non, nous, nous estimons

18 qu'il n'est pas acceptable que le conseil donne lecture de la déclaration

19 du témoin, mais il doit lui demander: "Avez-vous donné cette déclaration?"

20 Et si le témoin dit "oui", à ce moment-là, il continue à lui poser des

21 questions.

22 Mais ce qui se passe ici, c'est que beaucoup de ces déclarations sont

23 prises dans des conditions un petit peu hasardeuses, que ces déclarations

24 ne sont pas toujours conformes à la vérité, c'est pourquoi elles ne sont

25 pas présentées directement, elles ne sont pas versées directement. C'est

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1 pourquoi nous, du côté de l'accusation, nous présentons des résumés de ces

2 déclarations et pas les déclarations elles-mêmes. Nous n'avons jamais

3 demandé le versement au dossier des déclarations originales. Ce que nous

4 faisons, c'est que nous retirons les informations importantes de ces

5 déclarations. Je crois que c'est Me Fila, c'est lui qui a proposé que nous

6 versions la déclaration au dossier puisque l'information était disponible.

7 Mais nous, bien entendu, nous ne contestons pas le droit de l'accusé de

8 mener un contre-interrogatoire digne de ce nom, mais nous, nous ne voulons

9 pas que ceci soit utilisé contre le témoin. Ce qui nous préoccupait,

10 c'était l'utilisation potentielle de ces déclarations dans le contre-

11 interrogatoire pour la défense.

12 M. le Président: Du côté de la défense, je vois que Me O'Sullivan veut

13 intervenir. Vous avez la parole, Maître O'Sullivan, s'il vous plaît.

14 M. O'Sullivan (interprétation): Je vais parler des questions abordées lors

15 du contre-interrogatoire et de l'interrogatoire supplémentaire.

16 D'abord contre-interrogatoire. Je vais parler de trois choses: tout

17 d'abord, en en parlant de l'Article 90H, en reprenant l'hypothèse posée

18 par le Juge Wald. Je vais également me référer à la décision de la Chambre

19 au sujet de l'utilisation des déclarations dans le cadre du contre-

20 interrogatoire.

21 J'avance que l'interprétation du Juge Wald au sujet de l'Article 90H est

22 la bonne, c'est-à-dire, si l'on part de son hypothèse: s'il y a un

23 événement qui est décrit dans la déclaration et qui n'est pas mentionné

24 lors de l'interrogatoire principal, à ce moment-là, en posant des

25 questions au témoin, il est possible, il est autorisé à l'une des parties

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1 de demander au témoin: "Avez-vous assisté à l'événement X?". Si la

2 personne dit oui, à ce moment-là, on a sa réponse. Si la personne dit non,

3 à ce moment-là, j'avance que l'on peut présenter la déclaration au témoin

4 pour donner la fondation des questions, disant: "Avez-vous fait une

5 déclaration à telle ou telle date?".

6 Ceci va dans le sens de la décision que vous aviez faite sur l'utilisation

7 des déclarations lors du contre-interrogatoire, en donnant lecture des

8 parties de la déclaration qui ont trait à la crédibilité du témoin et qui

9 ont trait à des questions évoquées lors de l'interrogatoire principal.

10 Maintenant, en ce qui concerne l'interrogatoire supplémentaire, il n'y a

11 donc rien dans le Règlement, mais j'ai fait référence à une référence qui

12 a été prise dans l'affaire Kupreskic qui -je pense- est tout à fait

13 valable. Donc, j'avance que l'interrogatoire supplémentaire doit se

14 limiter à ce qui est évoqué lors du contre-interrogatoire. Si, lors du

15 contre-interrogatoire, on utilise une déclaration, cette partie de la

16 déclaration, à ce moment-là, peut être reprise par la partie qui

17 intervient lors de l'interrogatoire supplémentaire.

18 Mais le simple fait de faire référence à une déclaration ne signifie pas

19 que celui qui mène l'interrogatoire supplémentaire peut se lancer dans une

20 étude et une analyse en profondeur de cette déclaration, et l'utiliser à

21 tout bout de champ.

22 Voici donc ma position au sujet de ces deux-points.

23 M. le Président: Je ne sais pas si d'autres conseils de la défense veulent

24 se prononcer avant de donner l'opportunité à... Est-ce que quelqu'un…?

25 Maître Fila?

Page 4615

1 M. Fila (interprétation): Monsieur le Président, Madame et Monsieur les

2 Juges, si je comprends bien Me Keegan, il demande l'égalité des armes. Et

3 je pense que nous ne pouvons qu'abonder dans son sens. Il faut être d'égal

4 à égal. Mais c'est à la Chambre de décider comment on peut y arriver pour

5 respecter l'égalité des armes. Par conséquent, si le Procureur n'a pas

6 davantage de droit, par conséquent, moi non plus; et vous savez bien que

7 ce n'est pas vous qui allez décider jusqu'où va mon droit. Mais, de toute

8 façon, il faut respecter les droits des uns et des autres.

9 Excusez-moi, Monsieur le Président. Juste en ce qui concerne

10 l'identification et la manière d'identifier également les personnes: on a

11 soulevé cette question et nous l'avons peut-être oubliée.

12 Il faudrait peut-être, dans ce contexte, également essayer d'examiner

13 cette variante à faire lever le témoin et puis lui regarde; par

14 conséquent, peut-être qu'il a le casque sur sa tête, qu'il a les pieds qui

15 l'empêchent de le voir et d'identifier l'accusé. Il peut se lever et venir

16 au milieu éventuellement.

17 M. le Président: Je crois que vous avez soulevé un bon point, Maître Fila.

18 C'était un peu ma préoccupation. C'est la question de faire une

19 interprétation correcte et uniforme de la règle. Si elle doit être

20 flexible, elle doit l'être pour les deux parties; si elle est rigide, elle

21 doit être rigide pour les deux parties. Mais, de toute façon, on essaie

22 sur tout. Parce qu'on sait quand même que d'un certain mécanisme

23 d'intervention peut résulter plus d'éclaircissement de la vérité, si l'on

24 peut dire, car on continue toujours à demander -encore aujourd'hui- quelle

25 sera la vérité. Mais de toute façon, on peut toujours éclaircir mieux dans

Page 4616

1 une certaine procédure.

2 Mon point de vue, c'est qu'on doit la maintenir. De toute façon, donc

3 c'était un bon point que je crois que Me Fila a bien soulevé.

4 Maître Stojanovic, avant de passer à M. Keegan?

5 Je vous rappelle quand même qu'il est 5 heures 28, plus ou moins.

6 M. Stojanovic (interprétation): Merci, Monsieur le Président. Madame et

7 Messieurs les Juges, le problème est complexe. Je ne vais pas

8 véritablement entrer dans les détails; je vais essayer d'être bref et dire

9 ce qui est le plus important.

10 Le problème de crédibilité est tout premier. On peut se poser la question

11 s'il y a la crédibilité du témoin qui dit des choses qui sont contraires à

12 l'Acte d'accusation et de ce qui est dans l'Acte d'accusation, ce que

13 d'autres témoins ont dit. Mais, par exemple, il y a mon client qui ne m'a

14 pas donné l'information concernant un chef d'accusation; c'est le Bureau

15 du Procureur qui a été la source de mon information.

16 Par conséquent, à ce moment-là, la question que je me pose, c'est de

17 savoir à quoi servent ces déclarations si ces déclarations m'induisent en

18 erreur ou si je ne peux pas m'y référer? Par conséquent, cela, ce n'est

19 pas correct, tout en acceptant toutes les allégations et tout ce qui m'a

20 été fourni par le Bureau du Procureur.

21 Et je n'ai pas remis en question ce qui m'a été dit. Je dois constater que

22 le témoin a dit qu'il connaît l'événement: il s'agit du meurtre dont on a

23 parlé dans un chef d'accusation. Et c'est là où nous nous sommes arrêtés.

24 Par conséquent, je ne veux pas vraiment blâmer qui que ce que soit, ni

25 reprocher quoi que ce soit à qui que ce soit. Mais je dis qu'il s'agit

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1 d'un problème fort complexe, très délicat. Il y a des approches

2 différentes et des points de vue différents.

3 Et je ne peux que me conformer à ce que vous avez dit tout à l'heure,

4 Monsieur le Président, que nous apprenons tous beaucoup de choses. Moi, je

5 voudrais encore apprendre également davantage.

6 Voilà, c'est mon point de vue. Je considère que c'était véritablement dans

7 l'intérêt de la justice que d'autoriser à ce que je pose les questions.

8 Et, après tout, ces déclarations, je n'aurais pas demandé à ce qu'elles

9 soient versées au dossier. Si je pose un certain nombre de questions qui

10 ont été soulevées, qui sont contenues dans ces déclarations, je n'aurais

11 pas eu à demander à verser au dossier la déclaration. Je n'ai aucune

12 raison de le faire. J'aurais posé la question éventuellement pour savoir

13 si, éventuellement, le témoin avait donné la déclaration quelque peu

14 différente par rapport à ce qu'il disait aujourd'hui, etc. Je n’ai aucune

15 raison de le faire, j'aurais posé la question, éventuellement, pour savoir

16 si le témoin avait donné une déclaration quelque peu différente par

17 rapport à ce qu'il disait aujourd'hui.

18 Par conséquent, je ne suis pas formel dans ce sens-là. Merci, Monsieur le

19 Président.

20 M. le Président: Y a-t-il quelqu'un du côté de la défense qui veut faire

21 un commentaire? Non?

22 Pour terminer, Monsieur Keegan, j’ai vu que vous avez voulu dire quelque

23 chose.

24 M. Keegan (interprétation): Oui Monsieur le Président. Et je serai très

25 concis.

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1 Mais pour reprendre ce qui a été dit à la fin de son intervention par Me

2 O'Sullivan et également d’une certaine façon par Me Stojanovic, c’est la

3 chose suivante: à savoir que, si une déclaration est utilisée pour

4 remettre en cause la crédibilité d’un témoin et que, dans cette

5 déclaration, il y a des éléments qui sont incohérents ou qui sont

6 contradictoires ou contredisent ce qui a été dit précédemment, à ce

7 moment-là, dans ces conditions, il serait -je pense- utile de soumettre

8 une grande partie de la déclaration, voire toute la déclaration pour

9 montrer si le témoin dit ou non la vérité. Car il est possible qu'une

10 personne interprète mal un événement mais, de façon tout à fait

11 appropriée, un autre événement.

12 Je pense que cela irait à l'encontre des intérêts de la justice, d'avoir

13 une interprétation trop restrictive des questions supplémentaires posées

14 au témoin.

15 Car, à ce moment-là, on ne pourrait pas véritablement explorer la

16 crédibilité du témoin. Comme nous venons de systèmes juridiques

17 différents, moi, je voulais être bien sûr que la défense soit consciente

18 des droits dont estime disposer l'accusation dans ce cadre. C’est tout ce

19 que je voulais dire.

20 Je ne conteste absolument pas le droit d’un accusé d’aborder les questions

21 pertinentes lors du contre-interrogatoire. Mais je pense, comme l’a dit Me

22 Fila, que nous aussi, nous devons avoir des droits au cours de

23 l’interrogatoire supplémentaire.

24 M. le Président: Donc nous espérons que nous sommes un peu plus éclairés.

25 Peut-être, je ne sais pas, mais j'avais un peu l'idée, je me proposais un

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1 peu de faire une petite réflexion à partager éventuellement avec les

2 parties.

3 Nous avons rêvé et nous avons quand même préparé un instrument avec

4 plusieurs règles du point de vue pratique. Je crois que je vous en ai

5 parlé quelque temps avant. Ce document est prêt. Nous hésitons quand même

6 à distribuer ce document. Mais je crois qu'avec une petite synthèse sur

7 laquelle les parties seraient d'accord, peut-être que cela pourrait être

8 une référence plus explicative de certaines règles. Mais je vous dis que

9 j'hésite quand même à avancer un peu plus.

10 De toute façon, nous avons échangé des idées, nous pourrions peut-être

11 trouver quelques idées déjà plus claires pour nous conduire dans la fin.

12 Nous verrons.

13 Comme vous savez, nous sommes un Tribunal, la Chambre est un Tribunal et

14 le Tribunal ne peut pas donner une interprétation des règles sans avoir la

15 question concrète. On va voir. De toute façon, je ne crois pas qu’on

16 puisse avancer un peu plus aujourd'hui.

17 Il est 17 heures 35. Nous allons nous arrêter ici. Demain, à 9 heures 30,

18 nous reprendrons. Peut-être que, demain ou peut-être lundi, on rendra des

19 décisions orales par rapport aux questions que nous devions décider.

20 Sans doute que demain, ce sera un peu juste. Ce sera alors mardi, car

21 lundi, nous ne sommes pas ici. De toute façon, la Chambre va essayer de

22 rendre la décision le plus tôt possible pour ne pas laisser les questions

23 dans le vide.

24 Mais demain, nous serons là à 9 heures 30.

25 Donc à demain. (L’audience est levée à 5 heures 35.)