Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 (Mardi 28 novembre 2000.)

2 (Audience sur requêtes.)

3 (Audience publique.)

4 (L'audience est ouverte à 10 heures.)

5 (Les cinq accusés sont introduits dans le prétoire.)

6 M. le Président: Veuillez vous asseoir. Bonjour, cabine technique.

7 Bonjour, interprètes. Bonjour, Bureau du Procureur.

8 Je vois que nous que nous sommes en présence d'une composition et peut-

9 être vaut-il mieux présenter le Bureau. Madame Hollis, s'il vous plaît,

10 voulez-vous présenter le Bureau du Procureur?

11 Mme Hollis (interprétation): Je vous remercie, Monsieur le Président.

12 Bonjour, Madame et Monsieur les Juges.

13 Je m'appelle Brenda Hollis. Nous avons aussi dans l'équipe de l'accusation

14 M. Waidyaratne, mais nous avons de sus Mme Somers qui est un avocat

15 chevronné qui travaille au Bureau du Procureur et qui remplace aujourd'hui

16 Michael Keegan. En janvier ou en février, ce sera Mme Somers qui

17 s'occupera de ce procès en qualité de premier substitut du Procureur.

18 M. le Président: Je vois que nous avons également M. Saxon.

19 Mme Hollis (interprétation): Oui, Monsieur le Président,

20 M. le Président: Du côté de la défense, s'il vous plaît, en commençant par

21 Me K. Simic.

22 M. K. Simic (interprétation): Bonjour, Madame et Messieurs les Juges. Nous

23 avons la même composition pour la défense. J'ai à mes côtés M. Branko

24 Lukic, mon co-conseil.

25 M. le Président: Maître Nikolic?

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1 M. Nikolic (interprétation): Bonjour, Madame et Messieurs les Juges. Pas

2 de modification en ce qui nous concerne: nous avons Mme Nikolic et M.

3 O'Sullivan dans l'équipe de la défense.

4 M. Fila (interprétation): Bonjour, Madame et Messieurs les Juges. Même

5 composition: nous avons Zoran Jovanovic et moi-même, M. Toma Fila.

6 M. le Président: Maître Stojanovic?

7 M. Stojanovic (interprétation): Bonjour, Monsieur le Président, Madame et

8 Monsieur les Juges.

9 Il y a eu certaines modifications. Nous avons un nouveau co-conseil, M.

10 Deretic Miodrag, qui est un avocat de Prijedor. Je pense qu'il serait

11 intéressant de faire remarquer qu'il est le premier avocat venant de

12 Prijedor. Nous le savons parfaitement, nous avons beaucoup de procès

13 devant ce Tribunal concernant des faits qui se sont produits sur le

14 territoire de Prijedor. Cette innovation sera sans doute utile pour la

15 Chambre de première instance. Merci, Monsieur le Président.

16 M. J. Simic (interprétation): Bonjour, Madame et Messieurs les Juges. Je

17 défends M. Dragoljub Prcac. Nous avons la même composition d'équipe, avec

18 moi-même, M. Simic, et M. Dusan Masic.

19 M. le Président: Merci beaucoup. Nous accueillons de tout cœur toutes les

20 nouvelles personnes présentes soit du côté du Procureur soit du côté de la

21 défense.

22 Madame Lauer, pouvez-vous annoncer l'affaire? Il n'est jamais trop tard

23 pour bien faire et nous allons le faire quand même.

24 Mme Lauer: Il s'agit de l'affaire IT-98-30/1T, le Procureur contre

25 Miroslav Kvocka, Milojica Kos, Mlado Radic, Zoran Zigic et Dragoljub

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1 Prcac.

2 M. le Président: Merci beaucoup. Je crois que nous voilà dans les

3 conditions de commencer nos travaux. Comme vous le savez, les parties ont

4 été requises de se préparer à discuter d'un certain nombre de questions

5 dans l'ordonnance portant calendrier en date du 23 novembre. Nous allons

6 prendre ces questions dans l'ordre indiqué.

7 Ainsi, nous allons d'une certaine façon avoir une audience pour entendre

8 les arguments sommaires une fois qu'il y a déjà des développements écrits

9 dans ces requêtes, soit la requête d'acquittement du côté de la défense et

10 la réponse du Procureur. Nous allons donc entendre ces arguments

11 sommairement; après, nous ferons une conférence de mise en état pour

12 préparer la défense.

13 Nous allons à présent commencer par la défense. Je donne la parole au

14 conseil de défense de M. Kos vu que la défense de M. Kvocka n'a pas

15 présenté une requête d'acquittement. Je donne donc la parole au conseil de

16 la défense de M. Kos.

17 M. O'Sullivan (interprétation): Monsieur le Président, puis-je avoir la

18 parole?

19 M. le Président: Je vous en prie, Maître O'Sullivan. Vous pouvez

20 commencer.

21 M. O'Sullivan (interprétation): Je vous remercie. Bonjour, Monsieur le

22 Président, Madame et Monsieur les Juges.

23 Je ne sais pas pourquoi, mais je reçois la version BCS dans mes écouteurs.

24 M. le Président: Vous avez fait beaucoup de progrès, Maître O'Sullivan.

25 M. O'Sullivan (interprétation): Je l'entends mais je ne sais pas si je le

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1 comprends, Monsieur le Président.

2 Bonjour. Vous le savez, au nom de l'accusé Kos, nous avons déposé une

3 requête d'acquittement le 6 novembre. Je vais intervenir à cet égard.

4 J'ai deux objectifs: je veux tirer au clair certains aspects de la requête

5 que nous avons déposée et je veux aussi répondre aux écritures déposées

6 par l'accusation le 20 novembre.

7 Dans nos écritures, nous avons déclaré que le régime à appliquer à une

8 requête déposée en vertu de l'Article 98bis est déterminé par le Statut et

9 le Règlement du Tribunal et par les précédents déjà établis dans ce cadre.

10 S'agissant de la jurisprudence, nous nous basons sur deux décisions. Nous

11 vous faisons état dans notre requête: il y a l'affaire Kordic et la

12 décision prise dans ce procès en avril 2000, le 6 avril 2000, et la

13 décision Kunarac, en date du 3 juillet 2000. Ces deux décisions

14 fournissent une interprétation et une application de la version actuelle

15 de l'Article 98bis.

16 Pouvons-nous nous pencher rapidement sur l'Acte d'accusation? Vous le

17 saurez, Madame et Messieurs les Juges, le 13 octobre de cette année, un

18 Acte d'accusation conjoint a été déposé en ce procès, qui inclut des

19 annexes A à E. Ces listes font partie de l'Acte d'accusation en vertu

20 d'une décision prise par la Chambre précédente qui avait conduit ce

21 procès. Il y a la décision du 12 avril 1998; dans ladite décision, la

22 Chambre avait donné l'ordre à l'accusation de fournir davantage de détails

23 en ce qui concerne l'Acte d'accusation. Le 31 mai 1999, un Acte

24 d'accusation modifié a été déposé, qui comprenait des annexes A à D, ce

25 qui a été modifié pour devenir A à E. Là, étaient précisées les charges

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1 retenues contre l'accusé.

2 Nous estimons qu'aucun moyen de preuve n'a été avancé; en tout cas, que

3 les moyens avancés sont insuffisants pour soutenir une demande de

4 condamnation sur l'un ou plusieurs des chefs d'accusation retenus dans

5 l'Acte d'accusation. La Chambre devrait donc prendre une décision

6 d'acquittement eu égard à ces chefs d'accusation.

7 Permettez-moi d'évoquer rapidement ces chefs d'accusation retenus contre

8 l'accusé Kos, où nous disons dans ce cadre qu'aucun moyen de preuve n'a

9 été apporté. Pourquoi? Pourquoi le disons-nous?

10 Nous disons que rien n'a été prouvé pour montrer qu'il y avait un lien

11 entre l'accusé Kos et les camps de Keraterm et de Trnopolje, ou en ce qui

12 concerne les personnes détenues à ces endroits. Rien n'est venu prouver

13 que les neuf personnes suivantes, reprises à l'annexe B, aient été

14 victimes de persécutions, d'actes inhumains et d'atteintes à la dignité de

15 la personne. Ces neuf personnes sont Refic Begulic, Mehmed Hadzic, Husein

16 Hodzic, Senad Husic, Safet Ilic, Sakib Jakupovic, Besim Kodzic, Sakib

17 Islamovic et Ferid Mujcic.

18 De surcroît, au paragraphe 46 de la réponse déposée par l'accusation,

19 l'accusation dit -je cite- "que l'accusation accepte le fait que,

20 apparemment, aucun moyen de preuve n'a été admis en ce qui concerne les

21 personnes susmentionnées".

22 Enfin, en vertu des chefs d'accusation AA3 et par rapport à la référence

23 faite à l'annexe B, aucun moyen de preuve n'a été apporté qui établit un

24 lien entre l'accusé Kos et l'allégation de mauvais traitements infligés à

25 Day Petrovdan.

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1 La Chambre devrait donc prendre une décision d'acquittement en faveur de

2 l'accusé M. Kos, eu égard à ces aspects et ces questions reprises dans

3 l'Acte d'accusation.

4 Parlons des chefs 4 et 5: meurtres. Là non plus, aucune preuve n'a été

5 apportée, selon lesquelles les six personnes suivantes auraient été

6 assassinées par l'accusé M. Kos. Une personne reprise à la liste A porte

7 le nom d'Izmet Hodzic. Quatre personnes reprises à la liste B sont Becir

8 Medunjanin, Hankin Ramic, Mehmedalija Sarajlic ainsi que Miroslav Soljaja.

9 La personne reprise aux annexes C et E porte le nom de Durat Dautovic.

10 Dans sa réponse, l'accusation n'a avancé aucun argument face aux éléments

11 que nous avions apportés concernant ces six personnes. Nous estimons qu'un

12 jugement d'acquittement devrait être rendu eu égard à ces allégations de

13 meurtre. Ce sont les chefs d'accusation de l'Acte d'accusation pour

14 lesquels aucune preuve n'a été apportée. Nous pensons que, pour les autres

15 aspects, il n'y a pas eu suffisamment de preuves apportées.

16 Parlons tout d'abord du Témoin AV qui a déposé devant vous, Madame et

17 Messieurs les Juges. Nous avançons que ce témoin n'a pas dit la vérité,

18 car il a impliqué la participation de M. Kos eu égard à ces allégations de

19 mauvais traitements. Aucun témoin n'est venu déposer pour dire qu'il y

20 aurait eu des mauvais traitements infligés par M. Kos au Témoin AV. Ce qui

21 veut dire que le Témoin AV est le seul à être venu déposer sur ce point en

22 particulier.

23 Permettez-moi de vous rappeler rapidement ce qu'a dit le Témoin AV dans sa

24 déposition -références: page 5861 du compte rendu d'audience. Le Juge Wald

25 posait des questions au Témoin AV. Elle lui a demandé ceci:

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1 "- Avez-vous eu l'occasion de voir l'accusé présent au moment où… Krle

2 était présent, au moment où un détenu aurait subi des mauvais traitements,

3 à l'un quelconque de ces endroits?

4 - Réponse: J'étais, là, debout devant eux. On m'a forcé à gifler d'autres

5 détenus vu l'ordre qui avait été donné.

6 Juge Wald: Vous nous dites maintenant qu'à un moment donné, vous avez vu…

7 Ou plutôt disons quand il vous a donné l'ordre de gifler quelqu'un

8 d'autre, de frapper quelqu'un d'autre. Est-ce bien ce que vous nous dites?

9 - Réponse: Oui".

10 Lorsqu'il y a eu contre-interrogatoire supplémentaire, suite à une

11 question posée par les Juges, le Témoin AV a persisté à maintenir la

12 version des faits qu'il avait offerte, alors qu'il n'en avait pas parlé

13 avant que la Juge Wald lui pose la question.

14 Au début de la page 5863, le Témoin AV a déclaré ceci -je cite-: "Lorsque

15 Kos donnait l'ordre à quelqu'un de frapper un autre, il fallait le faire.

16 On ne pouvait pas y faire objection." Il a dit que cela avait été une

17 expérience traumatisante pour lui et qu'il ne l'oublierait jamais.

18 Cependant, lorsqu'il a été confronté à ses dires, le Témoin AV a changé de

19 version des faits. Nous estimons que ceci fait la preuve de ce qu'il

20 n'avait pas dit la vérité.

21 S'agissant de la déclaration qu'il avait fournie au Bureau du Procureur,

22 on lui a posé une question:

23 "- Mais vous n'avez pas dit que Krle vous avait donné l'ordre de frapper

24 quelqu'un, de gifler quelqu'un?

25 - Réponse: Non.

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1 - Question: Il ne vous a jamais donné l'ordre de frapper qui que ce soit,

2 n'est-ce pas?

3 - Réponse: Non".

4 Le Témoin AV n'est pas digne de foi, Monsieur le Président. Il a menti au

5 Juge Wald. Il a essayé d'embellir son histoire, son récit de façon

6 persistante mais il a fini par reconnaître que M. Kos ne lui avait jamais

7 donné l'ordre de gifler qui que ce soit. Est-ce que le Témoin AV a menti?

8 Parce que son témoignage est le seul qui a été apporté s'agissant des

9 allégations de mauvais traitements infligés par M. Kos sur cette personne.

10 On ne peut donc accorder aucune valeur probante, aucune crédibilité à sa

11 déposition qui devrait être ignorée.

12 Nous estimons dès lors qu'il faut rendre un jugement d'acquittement en

13 faveur de l'accusé M. Kos, eu égard à cet aspect des chefs d'accusation 1

14 à 3.

15 Le dernier domaine dans lequel les moyens de preuve apportés ont été

16 insuffisants concerne trois allégations de meurtre portées contre l'accusé

17 Kos. Nous disons qu'il y a insuffisance de moyens de preuve pour entraîner

18 la condamnation de M. Kos s'agissant des allégations de meurtre perpétrés

19 sur Crnalic.

20 Le seul témoin qui ait déposé pour affirmer que M. Kos avait abattu et tué

21 la personne Crnalic, c'était le Témoin AI et nous disons que ce témoin

22 n'était pas digne de foi. Il s'est trompé lorsqu'il a affirmé que c'était

23 Kos le responsable. Je me permets de vous rappeler ces faits-ci: le Témoin

24 AI a dit avoir pensé que Kos n'était pas originaire de Prijedor, que

25 l'homme à qui il attribuait l'identité de Kos n'était pas de Prijedor. Au

Page 6610

1 vu des traits du visage et aussi de la façon de parler de Kos, Kos est de

2 Prijedor. Nous l'avons dit dans nos écritures, étant donné l'état physique

3 dans lequel se trouvait la personne à l'époque, le Témoin AI n'a plus un

4 souvenir fiable des événements.

5 Il est quand même très important de relever le fait que le Témoin AI n'a

6 pas identifié un gardien qui portait le nom de Drazenko Predojevic qui,

7 selon lui, l'a désigné pour subir des mauvais traitements. Pourquoi

8 affirmons-nous une telle chose? L'accusation sait très bien qui est

9 Predojevic. Il a été mis en accusation par le Bureau du Procureur. Sa

10 photo a été montrée au témoin suivant de l'accusation, le témoin B, qui

11 l'a reconnu -il s'agit de la pièce 3/69(B)-, nous disant que la capacité

12 qu'avait ce Témoin AI de se souvenir des faits et des personnes impliquées

13 n'est pas digne de foi.

14 Mais il y a d'autres raisons que nous avançons et qui nous poussent à

15 croire que ce témoin n'était pas digne de foi. Il y a eu d'autres témoins

16 de l'accusation, deux, qui sont venus dire que quelqu'un d'autre que

17 l'accusé Kos aurait tiré sur Crnalic et l'aurait tué. Monsieur Sivac,

18 Nusret Sivac, est venu déposer pour dire que le garde qui aurait tué

19 Crnalic était cagoulé et avait coutume de monter la garde entre la "maison

20 blanche" et la Pista. Donc aucune preuve n'a été apportée de ce que Kos

21 avait cette fonction. L'autre témoin, Kermim Mesanovic, a dit que Kos

22 était présent au moment des faits mais qu'il était assis à une table, dans

23 le coin gauche, du côté de la "maison blanche". Rien ne prouve que Kos

24 aurait été porteur d'une arme et l'aurait utilisée.

25 Les second et troisième meurtres -et ce seront les derniers éléments que

Page 6611

1 j'avance pour prouver l'insuffisance des moyens de preuve- portent sur

2 deux allégations de meurtre sur les personnes répondant au nom de Abdulah

3 Puskar et Silvije Saric. Une fois de plus, dans ce cas, un seul témoin est

4 venu déposer eu égard à ces allégations. Il s'agissait du témoin J. Et

5 nous disons que cette femme n'est pas digne de foi lorsqu'elle a dit

6 qu'elle croyait que Kos était présent au moment où ces deux hommes étaient

7 passés à tabac. Rien ne prouve qu'elle ait pu reconnaître la voix de Kos

8 et elle ne l'a pas reconnue dans le prétoire au moment de sa déposition.

9 Et nous disons que les moyens de preuve montrent que Kos n'était pas

10 présent dans le camp au moment où ces passages à tabac auraient été

11 commis. Et, dans la déclaration qu'elle a fournie en 1995 au Bureau du

12 Procureur, déclaration dont elle dit qu'elle l'a faite de plein gré et en

13 tout respect de la vérité, ce Témoin J n'a jamais dit que Kos aurait été

14 présent au moment de ces passages à tabac.

15 J'ai consacré un certain temps à la question de l'identification. Lorsque

16 je vous ai affirmé qu'il y avait insuffisance de moyens de preuve où nous

17 disons que la question de l'identification revêt une grande importance, en

18 vertu de notre requête déposée conformément à l'Article 98bis, parce que

19 nous avons la déposition d'un seul témoin par rapport à ces allégations,

20 nous nous fondons sur les décisions Kunarac et Kordic dans ce cadre.

21 Et s'agissant de Crnalic, le Témoin AI est le seul témoin dont nous disons

22 d'ailleurs que cette personne n'est pas fiable et s'est trompée. Et nous

23 avons deux autres témoins qui sont venus dire que c'était quelqu'un

24 d'autre que l'accusé Kos qui avait abattu Crnalic.

25 Pour ce qui est de Puskar et Saric, de même un seul témoin est venu

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1 déposer les concernant. Il s'agissait du Témoin J. Et comme nous l'avons

2 fait valoir par rapport à la déclaration fournie en 1995 qui, des dires

3 mêmes du témoin, était le meilleur souvenir qu'il avait de toutes ses

4 expériences, alors que cette déposition a été faite peu de temps après les

5 faits, ce témoin J n'avait pas impliqué l'accusé Kos.

6 Je terminerai par ces considérations, Madame et Messieurs les Juges.

7 L'Article 98bis exige que la Chambre prenne une décision d'acquittement

8 lorsque les moyens de preuve apportés ne suffisent pas pour entraîner une

9 condamnation, eu égard à l'une ou plusieurs des infractions retenues.

10 Chacun des événements, chacune des personnes précisées dans notre requête

11 montre qu'il y a insuffisance de moyens de preuve, soit parce qu'il n'y a

12 tout simplement aucun moyen de preuves apporté, soit parce que ces moyens

13 ne suffisent pas et qu'ils sont peu dignes de foi.

14 Que ce soit dans la décision Kordic ou de Kunarac, il est dit que,

15 lorsqu'il y a insuffisance de moyens de preuve, l'accusé a le droit à

16 l'abandon des poursuites contre lui à ce stade de la procédure. Nous

17 demandons respectueusement que vous preniez une décision d'acquittement en

18 vertu de l'Article 98bis, s'agissant de l'accusé Kos, comme nous l'avons

19 demandé dans la requête déposée en son nom le 6 novembre 2000.

20 Je vous remercie, Monsieur le Président.

21 M. le Président: Merci beaucoup, Maître O'Sullivan. Maître Fila?

22 M. Fila (interprétation): Monsieur le Président, je vais vous présenter la

23 défense de M. Radic.

24 La défense de l'accusé Radic maintient tous les arguments qui sont

25 présentés dans le document écrit demandant la mise en liberté de l'accusé

Page 6613

1 Radic, mais ici même, aujourd'hui, je me contenterai de redire quelques-

2 uns des arguments de la défense en disant quelques mots également de la

3 réponse du Procureur à ces arguments.

4 Je crois que, dans la situation présente -et je prends en compte la

5 réponse du Procureur-, ce qui est pertinent et ce dont il convient de

6 parler est la prise en compte indispensable des Articles 7.1 et 7.3 du

7 Statut. Car, si nous nous penchons sur les chefs d'accusation 1 à 3, ainsi

8 que les chefs 4 à 5 et les chefs 8 à 10 de l'Acte d'accusation, il

9 apparaît indispensable de les examiner en rapport avec les Articles 7.1 et

10 7.3 du Statut.

11 Parlons pour commencer du rôle de l'accusé Mlado Radic et de la position

12 qui était la sienne dans le camp d'Omarska. La défense a soutenu et

13 présenté des éléments de preuve au sujet de la position de l'accusé Radic

14 qui permettent de mieux comprendre l'autorité exercée par lui dans ce

15 camp. La défense estime que le Procureur n'a pas présenté de moyens de

16 preuve suffisants pour démontrer, au-delà de tout doute raisonnable, que

17 l'accusé Radic exerçait un quelconque pouvoir au sein du camp d'Omarska.

18 Les moyens de preuve présentés par le Procureur sont de nature telle qu'il

19 ne peut s'agir, dans le meilleur des cas, que de preuves secondaires,

20 indirectes.

21 Donc, dans la réponse du Procureur, s'agissant du point de vue défendu

22 dans cette réponse, la défense est entièrement d'accord pour admettre que

23 l'Article 98bis du Règlement de Procédure et de Preuve stipule que la

24 Chambre peut, sur la base des éléments de preuve présentés, prononcer un

25 jugement de culpabilité mais ce n'est pas pour la Chambre une obligation.

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1 Et la défense considère que, s'agissant de cet article mentionné par le

2 Procureur dans sa réponse écrite et compte tenu des éléments de preuve

3 présentés, il n'apporte pas la preuve, au-delà de tout doute raisonnable,

4 que la position et le statut de l'accusé Radic correspondent à ce qui est

5 défini dans l'Acte d'accusation. Or, c'est bien de là qu'il faut partir,

6 n'est-ce pas, si l'on veut établir un lien entre les positions du

7 Procureur et l'Article 7.3 du Statut.

8 Sur la base des éléments présentés, des éléments de preuve, nous n'avons

9 pas été capables de vérifier au-delà de tout doute raisonnable que Mlado

10 Radic, en application de l'Article 7.1, était l'auteur direct des actes

11 criminels mentionnés dans l'Acte d'accusation. Il ne peut donc y avoir

12 aucune espèce de responsabilité criminelle impliquée.

13 La défense a souligné que l'accusé Radic, dans son témoignage, a indiqué

14 avoir joui d'une certaine forme d'autorité. Mais, par ailleurs, le

15 Procureur n'a encore une fois pas apporté les moyens de preuve nécessaires

16 pour prouver que cette forme d'autorité lui permettait d'une quelconque

17 façon de sanctionner les actes d'un tiers en rapport avec l'Acte

18 d'accusation. Il n'existe rien dans la déposition de l'accusé Radic qui

19 permette de se prononcer dans ce sens. Les éléments de preuve présentés ne

20 l'ont pas démontré et je répète donc ce que j'ai déjà dit, à savoir qu'il

21 ne s'agit que de conclusions communiquées par d'autres détenus, donc de

22 preuves indirectes. Autrement dit, le fait de conclure que l'accusé Radic

23 était en mesure d'exercer l'autorité d'un chef d'équipe de gardiens, comme

24 cela est stipulé dans l'Acte d'accusation, n'a été mentionné

25 qu'indirectement. En 1994, l'Acte d'accusation indique que l'accusé Radic

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1 a été placé au poste de chef de police du camp d'Omarska, ce qui n'a pas

2 été démontré par les témoignages entendus ici.

3 La défense aimerait maintenant parler des conditions d'existence dans le

4 camp qui sont prises par le Procureur comme preuves d'un comportement

5 inhumain dans ce camp. Il n'a pas été prouvé que Radic pouvait de façon

6 générale, c'est-à-dire sur tous les plans, modifier les conditions de

7 détention dans le camp. A cet égard, nous parlerons des conditions

8 d'hygiène, de l'identité des détenus, de la nourriture et de

9 l'alimentation en eau utilisée pour boire. Nous en avons beaucoup parlé au

10 cours du procès.

11 Les tentatives ponctuelles de l'accusé Radic d'apporter une aide sur ce

12 plan ont été mentionnées. Aucun élément de preuve présenté au cours du

13 procès ne permet de penser que l'accusé Radic pouvait effectivement

14 intervenir ou pouvait effectivement modifier les conditions de détention

15 d'un nombre très important de détenus. Je répète donc que, lorsque ces

16 tentatives ont eu lieu, elles ne pouvaient avoir lieu que sur un plan

17 ponctuel. L'accusé Radic, dans ces conditions a bien apporté son aide.

18 Les témoins de l'accusation et le témoignage de l'accusé Radic lui même ne

19 démontrent pas à cet égard la possibilité qu'aurait eu l'accusé Radic de

20 modifier de façon générale les conditions d'existence dans le camp. J'ai

21 déjà indiqué ce que l'on peut entendre par conditions d'existence dans le

22 camp et donc quelles étaient les conditions particulières qu'il importait

23 éventuellement de modifier.

24 La défense estime que les éléments de preuve présentés ne permettent pas

25 non plus de décider, au-delà de tout doute raisonnable, que l'accusé Radic

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1 pouvait modifier le régime de détention, c'est-à-dire les règles

2 applicables aux détenus, s'agissant de circonscrire ou d'élargir leur

3 liberté de circulation ou d'avoir des contacts avec leur famille, ce qui

4 eût été une façon entre autres de modifier les conditions de vie dans le

5 camp.

6 Donc aucun élément de preuve présenté au cours du procès ne permet de

7 déterminer, au-delà de tout doute raisonnable, que l'accusé Radic avait la

8 possibilité de permettre aux détenus des contacts avec leur famille et, de

9 cette façon, de modifier ou d'améliorer les conditions de détention.

10 Parlons à présent de l'application des lois de Bosnie-Herzégovine. Encore

11 une fois, à cet égard, aucun élément de preuve présenté ne permet de

12 démontrer qu'un homme ayant la position de l'accusé Radic pouvait modifier

13 l'application de ces lois durant le conflit, conflit dont l'existence a

14 été confirmée de façon certaine.

15 Toutes les lois de la Bosnie-Herzégovine ont fait l'objet de dérogations

16 dans ces conditions de guerre. En tant que policier -et il existe des

17 preuves formelles prouvant que l'accusé était policier à cette époque,

18 alors qu'aucun élément de preuve n'a été présenté pour prouver le

19 contraire-, l'accusé Radic, donc en cette qualité, n'avait pas la

20 possibilité d'appliquer une quelconque loi en dehors des ordres qu'il

21 recevait de ses supérieurs.

22 Voilà en bref les positions présentées par la défense dans ses écritures.

23 La défense signale également que le débat se poursuivra au sujet des chefs

24 d'accusation 14 à 17. J'ai déjà fait état de la réponse du Procureur et je

25 dis encore une fois que la défense a pris en compte toutes les obligations

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1 contenues dans l'Article 98bis du Règlement, par conséquent la nécessité

2 de disposer d'éléments de preuve permettant de juger, permettant de

3 prononcer un jugement de culpabilité.

4 Donc, s'agissant de l'accusé Radic, à cette phase du procès, la défense

5 estime qu'il n'est possible de poursuivre le procès et de maintenir les

6 charges qu'en rapport avec les chefs 14 à 17 de l'Acte d'accusation.

7 Merci, Monsieur le Président.

8 M. le Président: Merci aussi. Donc maintenant, la défense de M. Zigic.

9 Maître Stojanovic?

10 M. Stojanovic (interprétation): Monsieur le Président, je vous remercie.

11 Je vais m'efforcer d'être aussi bref que possible comme d'habitude. Je

12 pense qu'il importe de mettre l'accent sur la réponse du Procureur et que

13 je n'ai pas besoin de revenir sur tout ce qui figure dans nos écritures.

14 Nous maintenons bien sûr tous les arguments présentés dans notre document

15 écrit, y compris après la réponse du Procureur. Nous estimons qu'à cette

16 phase de la procédure, la norme qui prévoit de prononcer un jugement au-

17 delà de tout doute raisonnable doit s'appliquer. Et la défense, s'agissant

18 de l'application de ce principe, n'est pas dans l'obligation de répondre.

19 La défense d'ailleurs n'y répondra pas et ne posera aucune condition au

20 prononcé d'une sentence par rapport aux actes retenus contre l'accusé.

21 Nous estimons que la norme de la preuve au sein de cette institution ne

22 doit absolument pas être en deçà des normes appliquées par les tribunaux

23 nationaux, qu'il s'agisse de crimes de guerre ou de crimes courants.

24 Indépendamment de l'horreur dont il a été question ici, horreur marquant

25 des atrocités dont je conviens qu'elles ont eu lieu, bien sûr, il convient

Page 6618

1 de prendre en compte la responsabilité individuelle mais s'agissant, par

2 exemple, de ces infractions, d'infractions mineures telles des insultes

3 verbales, je n'admettrai jamais que, pour prouver une telle infraction, il

4 faut présenter davantage d'éléments de preuve que pour prouver un crime de

5 guerre majeur.

6 De nombreux éléments vous ont été soumis, notamment la requête du

7 Procureur.

8 J'aimerais souligner un certain nombre d'éléments que l'on trouve

9 d'ailleurs dans cette requête. Au paragraphe 66 de la réponse du

10 Procureur, s'agissant de l'assassinat de M. Mesic, infraction retenue

11 contre mon client, il est dit qu'un fait suffit à le prouver, à savoir

12 qu'un témoin a indiqué que cette personne existait et qu'elle a bien été

13 tuée et que, par ailleurs, Zigic était constamment et régulièrement

14 présent dans le camp de Keraterm. Ceci ne constitue pas un élément de

15 preuve suffisant; c'est tout à fait manifeste. Nous mettons en cause en

16 effet de la façon la plus ferme qui soit la présence régulière et

17 constante de l'accusé Zigic au camp de Keraterm.

18 Dans notre document écrit, nous avons noté qu'il n'existait pas un seul

19 élément de preuve signalant que M. Zigic aurait tué un certain Jasmin

20 Izeiri, ni même d'ailleurs que cet Izeiri était présent dans le camp de

21 Keraterm. Le Procureur ignore cet argument en indiquant que le témoin

22 Icic, Hase Icic, affirme que cet homme est mort à Omarska. Je pense que le

23 Procureur d'ailleurs a présenté un témoin disant que cet homme avait été

24 tué à Omarska, alors que l'Acte d'accusation indique que Zigic aurait tué

25 cet homme à Keraterm.

Page 6619

1 Je pense donc que cette divergence en considération des paragraphes 78, 80

2 et 81 de la réponse du Procureur, où nous voyons qu'une objection est

3 présentée par rapport au fait que la défense de Zigic a mis en cause la

4 forme de l'Acte d'accusation, doit être mentionnée quelques instants ici.

5 Je tiens à souligner que ceci est sans doute un malentendu, car nous

6 n'avons jamais remis en cause la forme de l'Acte d'accusation.

7 Le paragraphe 78 porte sur le crime de persécution. Nous ne disons pas que

8 l'Acte d'accusation est réfutable dans sa forme; nous disons simplement

9 que rien ne permet de prouver que c'est l'accusé Zigic qui est l'auteur

10 des actes mentionnés dans l'Acte d'accusation à cet égard.

11 Le paragraphe 80 de la réponse du Procureur porte sur d'autres actes

12 inhumains: crimes contre l'humanité en vertu de l'Article 5 du Statut. A

13 cet égard, nous n'avons pas dit que l'Acte d'accusation était réfutable

14 dans sa forme, nous avons simplement dit que le Procureur n'avait apporté

15 aucun élément de preuve démontrant que cet acte a été perpétré. Aucun fait

16 n'a été signalé qui pourrait tomber sous le coup de cette norme.

17 Le paragraphe 81 de la réponse du Procureur concerne la proposition de la

18 défense eu égard à l'application de l'Article 3 du Statut. Là encore, nous

19 n'avons pas dit qu'il y avait défaut de l'Acte d'accusation dans la forme,

20 nous n'avons pas non plus dit que nous mettions en cause l'existence d'un

21 conflit armé international; ce point a déjà été couvert par une décision

22 du Tribunal. Mais nous estimons que l'état de guerre doit absolument être

23 prouvé. Or le Procureur, dans la présentation de ses arguments, n'a

24 démontré à aucun moment qu'il existait bien un état de guerre.

25 Malgré tous nos efforts, il y a un certain nombre de points que nous

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1 sommes incapables de comprendre, par exemple, certaines constructions de

2 droit de la part du Procureur; je crois que l'on voit cela au paragraphe

3 85 de la réponse du Procureur où nous lisons, par exemple, que le

4 Procureur doit maintenir l'accusation selon laquelle Zigic aurait

5 contraint un certain nombre de détenus à des actes de fellation, même si

6 pas une seule preuve ne le démontre. Donc le Procureur admet qu'il

7 n'existe aucune preuve mais il affirme que cette allégation, cette

8 accusation doit être maintenue dans l'Acte d'accusation.

9 Même chose pour les accusations liées à Cirkic: le Procureur affirme que

10 cela doit être maintenu dans l'Acte d'accusation, tout en maintenant dans

11 le même temps qu'il n'existe pour prouver cet acte aucun élément de

12 preuve.

13 Nous ne pouvons admettre de telles constructions juridiques. Notre

14 position est très simple: elle consiste à dire qu'il convient de démontrer

15 si ceci a été fait ou pas, et s'il existe une seule preuve le démontrant

16 ou aucune.

17 Autre position du Procureur, relative à notre argument selon lequel il

18 n'existe aucune preuve démontrant que Zigic aurait passé à tabac un

19 certain Fikret Alic et Fahrudin Hrustic. Deux témoins ont parlé d'un

20 passage à tabac subi par un certain Fikret Hrustic mais, bien entendu, ces

21 témoins n'ont pas dit que M. Zigic aurait eu le moindre rapport avec ce

22 passage à tabac ni même qu'il y aurait assisté. Mais le problème le plus

23 important du point de vue de la défense, s'agissant de la réponse de ces

24 deux témoins, c'est qu'ils ont dit que Fikret Hrustic aurait été passé à

25 tabac à Omarska alors que l'Acte d'accusation sur ce point précis, parle

Page 6621

1 de Keraterm.

2 Et il y a encore toutes sortes de détails qui nous permettent d'affirmer

3 que nous ne pouvons accepter la position du Procureur. D'ailleurs, je

4 demanderai au Procureur de bien vouloir nous communiquer les annexes dont

5 il parle au paragraphe 86: nous ne les avons pas encore reçues mais cela

6 ne nécessite pas, je crois, que l'on fasse une obstruction exagérée à la

7 suite de la procédure.

8 C'est tout ce que j'avais à dire. Nous examinerons cette annexe plus tard.

9 Je vous remercie.

10 M. le Président: Merci beaucoup, Maître Stojanovic. Maintenant la défense

11 de M. Prcac, Maître Jovan Simic, s'il vous plaît.

12 M. J. Simic (interprétation): Bonjour, Monsieur le Président. Bonjour,

13 Madame et Monsieur les Juges.

14 La défense de M. Dragoljub Prcac tient à signaler d'abord qu'elle demande

15 un jugement d'acquittement pour tous les actes retenus contre l'accusé et

16 pas seulement contre des actes particuliers ou s'agissant d'événements

17 particuliers, comme le Procureur a essayé de le dire dans son

18 interprétation.

19 Je pense qu'après analyse des éléments de preuve présentés au cours de ce

20 procès par l'accusation, la défense a pu montrer que ces éléments étaient

21 insuffisants. Rien ne prouve, au-delà de tout doute raisonnable, que

22 Dragoljub Prcac est coupable des crimes retenus contre lui dans l'Acte

23 d'accusation.

24 Au départ, nous tenons à parler de l'Acte d'accusation en tant que tel.

25 L'Acte d'accusation est-il bien sensé établir un cadre ou est-il sensé

Page 6622

1 présenter un certain nombre d'éléments à la convenance du Procureur?

2 L'accusé Dragoljub Prcac, en tant qu'adjoint du commandant du camp

3 d'Omarska, dans la période qui va du 24 mai au 30 août, est accusé de

4 responsabilité par rapport aux actes retenus contre lui, dans les chefs

5 d'accusation 1 à 3, 4 à 5 et 8 à 10.

6 Pour autant que nous considérions que l'Acte d'accusation est un document

7 formel, et que le procès doit être équitable, ce qui implique donc que la

8 défense sait quelles sont les charges retenues contre son client et que

9 l'accusé le sait également, nous devrions admettre que le Procureur devait

10 prouver que l'accusé occupait bien ce poste dans la période en question,

11 et que les actes mentionnés dans l'Acte d'accusation ont bien été commis.

12 Je me permettrai une petite digression pour parler d'un incident; ensuite,

13 je parlerai d'un ou deux autres incidents que je citerai à titre

14 d'exemples.

15 Au départ de mon intervention, j'aimerais dire que nous avons, après

16 l'arrestation, accepté qu'un certain nombre de faits soient jugés. Nous

17 avons dit qu'il n'y aurait pas dépôt de requête sur la forme de l'Acte

18 d'accusation et que nous nous efforcerions de nous entendre, de nous

19 mettre d'accord sur cette forme de l'Acte d'accusation. Mais la chose n'a

20 pas été possible: le Procureur ne nous a pas communiqué tous les documents

21 nécessaires en temps utile.

22 En effet, si je me souviens pour le Témoin K et sa déposition, la défense

23 a signalé que nous ne savions pas que ce témoin allait parler de M. Prcac;

24 nous ne connaissions pas les documents qui auraient dû être communiqués à

25 la défense par rapport à cette déposition. Ceci est confirmé, c'est écrit

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1 dans le compte rendu d'audience: le Témoin K dit avoir eu des

2 conversations avec le Procureur, avoir mentionné M. Prcac, avoir dit

3 qu'elle allait témoigner au sujet de M. Prcac, mais le Procureur ne nous a

4 rien dit à ce sujet.

5 Aujourd'hui, à ce stade de la procédure, le Procureur s'appuie sur le

6 témoignage du Témoin K, en essayant d'utiliser comme critère

7 l'établissement de la crédibilité de ce témoin. La défense ne va pas

8 entrer dans des considérations de crédibilité mais, sur le plan des faits,

9 pour qu'un fait soit admis, il faut comparer les diverses dépositions

10 émanant de plusieurs témoins. Et la défense a toujours agi de cette façon:

11 elle n'a jamais passé outre le témoignage d'un témoin, à la différence du

12 Procureur qui a agi de la façon inverse.

13 Je vais vous donner quelque exemples pour illustrer cette situation qui

14 constitue une façon de donner une image factuelle des événements

15 complètement différente de la réalité. Il est signalé que l'accusé

16 Dragoljub Prcac était présent pendant toutes les équipes de gardiens.

17 C'est Nusret Sivac qui a dit cela; ceci ne figure pas au compte rendu

18 d'audience, ce fait n'est pas indiqué au compte rendu d'audience.

19 Je ne vais pas entrer dans le détail de la déposition du témoin. En tout

20 cas, cette formulation ne se trouve pas dans son témoignage. Il n'est pas

21 question de toutes les équipes de gardiens mais simplement que, de temps

22 en temps, il donnait des listes à lire aux gardiens.

23 Un peu plus loin, il est affirmé que M. Dragoljub Prcac jouait un rôle

24 particulier et que le Témoin F a dit ceci, que le Témoin K dit cela. Donc

25 que certains témoins ont confirmé et que cela suffit pour dire que M.

Page 6624

1 Dragoljub Prcac était l'adjoint du camp. Mais on ne dit rien du fait que

2 nous sommes en présence de deux témoins et que nous avons, pour notre

3 part, entendu de 37 témoins au cours du procès. Sur ces témoignages de 37

4 témoins, 17 témoins n'ont pas mentionné l'accusé Prcac et sa position dans

5 le camp mais quelques rares témoignages suffisent. Le Procureur avait

6 toute possibilité d'interroger ces témoins, de leur demander ce que

7 faisait M. Prcac, ce qu'il était, etc. La défense affirme, sur la base de

8 l'audition de ces témoins, qu'ils ne savaient pas quelle était la position

9 exercée par M. Dragoljub Prcac ou qu'il ait pu avoir la moindre

10 responsabilité. Ni même d'ailleurs qu'il était dans le camp dans les

11 périodes pertinentes.

12 Il y a aussi 25 témoins qui ne reconnaissent même pas M. Prcac, qui

13 auraient pu, s'ils l'avaient vu, dire: "Je le reconnais, il était

14 présent". Mais ils ne le reconnaissent pas.

15 Treize témoins, quant à eux, disposent de certaines informations. Sur ces

16 treize témoins, selon notre analyse, sept témoins ont certaines

17 informations. Sur ces sept, cinq sont des femmes. La question se pose de

18 savoir quel était le rôle et si, oui ou non, le Procureur pouvait prouver,

19 au-delà de tout doute raisonnable, et s'il a réussi à le prouver, que M.

20 Prcac était l'adjoint du commandant, un homme qui ne s'est jamais promené

21 dans le camp, que personne n'a vu ou que certains n'ont vu que

22 sporadiquement, ici ou là.

23 Le Procureur revient à présent sur ses positions. Il dit: "Oui. Peut-être

24 que si l'on pouvait prouver, y compris que M. Prcac n'était pas l'adjoint

25 du commandant, sa seule présence implique une certaine responsabilité."

Page 6625

1 Des situations de ce genre ont déjà été vues devant ce Tribunal mais, dans

2 ce cas, il convient et il importe de prouver qu'il avait une fonction

3 officielle ou qu'il était adjoint du commandant. Le Procureur affirme que

4 Prcac était adjoint du commandant, la défense dit donc que la preuve doit

5 en être apportée car, dans le cas contraire, il faudrait que le Procureur

6 apporte un élément de preuve montrant que l'accusé Prcac occupait un autre

7 poste qui lui-même était associé à un certain pouvoir, à une certaine

8 autorité et donc à la possibilité d'exercer cette autorité.

9 Deuxième question: la question du temps. On accuse M. Prcac d'un certain

10 nombre d'actes commis dans la période qui va du 24 mai au 30 août. Pas un

11 seul des témoins de l'accusation n'a confirmé cela. Pas un seul élément de

12 preuve n'a été présenté qui permette de penser que M. Prcac soit arrivé

13 dans le camp avant la mi-juillet. Tous les témoins de l'accusation qui ont

14 été entendus, ont été interrogés sur le moment où M. Prcac est arrivé

15 affirment qu'il est arrivé à la fin du mois de juillet, à la mi-juillet,

16 qu'on l'a vu devant l'entrée du camp mais personne n'a dit qu'il était

17 arrivé avant. Et le Procureur aujourd'hui nous dit: "Quoi qu'il en soit,

18 le cadre temporel n'a pas une importance considérable."

19 A cela, moi, je ne trouve aucune réponse. Je ne vois pas, je ne comprends

20 pas comment le Procureur peut ne pas définir la période concernée par ces

21 accusations sans même poser la question de savoir si l'accusé Prcac était

22 présent dans cette période ou pas. La défense affirme que, dans aucune

23 situation judiciaire, il n'est possible de rendre quelqu'un responsable

24 d'un acte qui se serait produit dans une période n'ayant aucun rapport

25 avec la présence ou l'absence de l'accusé. Le Procureur a déclaré que M.

Page 6626

1 Prcac avait eu certains contacts, avait connu certaines personnes par le

2 passé et que, sur la base de ces contacts passés, on peut admettre qu'il

3 ait été de temps en temps présent dans le camp. Il est même tenté de nous

4 faire croire que M. Prcac était un policier d'active. Aucun témoin ne l'a

5 dit dans son témoignage. Tous les témoins entendus, en témoignage direct

6 ou en contre-interrogatoire, au sujet de M. Prcac, à qui l'on a demandé si

7 M. Prcac était retraité, ont dit: "Oui, je pense qu'il était retraité."

8 Pas un seul témoin entendu n'a dit penser que M. Prcac exerçait son

9 activité professionnelle en tant que policier.

10 Si nous prenons pour critère celui que voudrait l'accusation, à savoir que

11 la seule présence de M. Prcac suffit pour entraîner la condamnation,

12 s'agissant de ce qui s'est passé au camp d'Omarska et au regard des

13 charges retenues contre lui, par rapport au moment où il ne se trouvait

14 pas dans le camp, nous savons que nous avons un acte d'accusation et qu'il

15 y avait eu un Acte d'accusation qui accusait directement des gardes en

16 tant qu'auteurs des faits, mais que cet acte d'accusation a été abandonné.

17 Ce Tribunal est censé juger uniquement les personnes qui peuvent être

18 tenues responsables, en qualité de commandants ou en tant qu'auteurs

19 directs d'infractions. A un moment donné, l'accusation a tenté de fournir

20 une interprétation particulière aux listes. Elle a voulu faire valoir ceci

21 à titre purement illustratif.

22 Cependant, au paragraphe 39 de l'Acte d'accusation, le Procureur dit ceci:

23 "Kos, Prcac, Radic, et Kvocka ont commis ou encouragé à la commission de

24 tortures et de passages à tabac à l'encontre de Musulmans, de Croates de

25 Bosnie et ils l'ont fait par une participation directe aux actes décrits

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1 dans l'Acte d'accusation, ainsi que dans les annexes A à E. Ce qui veut

2 dire que, dans ce paragraphe, l'accusation dit de façon directe qu'il y a

3 des charges retenues à l'encontre d'individus particuliers au vu de faits

4 particuliers. Et ces actes ont été précisés dans les annexes ou listes.

5 La défense a procédé à la liste de ces éléments et elle affirme qu'aucun

6 moyen de preuve apporté en ce qui concerne des actes individuels ne prouve

7 que ces actes aient été commis au moment où M. Prcac était présent dans le

8 camp. Les dates ici fournies, qui nous ont été fournies par l'accusation,

9 n'ont pas pu être contestées. Sur les six meurtres concernés, aucun ne

10 s'est produit au moment où Prcac se trouvait au camp d'Omarska: ils

11 avaient été commis auparavant.

12 Il est dès lors très important que cette Chambre soit au courant du fait

13 que Dragoljub Prcac se trouvait dans le camp à partir de la mi-juillet

14 jusqu'au 16 août, si l'accusation n'est pas en mesure d'apporter la preuve

15 d'un rapport hiérarchique supérieur.

16 Pour ce qui est des actes inhumains, des actes de torture, ceux-ci n'ont

17 pas été commis au moment de la présence de M. Prcac dans le camp. Nous

18 avons d'ailleurs présenté nos arguments dans nos écritures; vous pourrez

19 en prendre connaissance, Madame et Messieurs les Juges.

20 Est-ce que l'accusation est en mesure d'affirmer que Dragoljub Prcac a

21 effectivement participé à la création du camp, car aucun moyen de preuve

22 n'a été apporté par l'accusation dans ce sens. Je le répète, aucune preuve

23 ne montre que cela a été le cas. Il est arrivé plus tard, au moment où le

24 système fonctionnait déjà, où tout se passait de façon quasi automatique.

25 Nous pourrions nous demander ce qu'il a été en mesure de faire par la

Page 6628

1 suite, mais ceci ne pourrait être considéré que s'il dispose d'un certain

2 degré de pouvoir.

3 Mais ce pouvoir, il ne l'avait pas. C'est ce que nous soutenons. Nous

4 l'avons déjà dit, c'était un homme qui participait à l'administration du

5 camp. C'était un employé qui s'occupait des questions administratives.

6 Aucun témoin à charge n'est venu nous dire qu'il avait une espèce de

7 responsabilité de commandant, de supérieur hiérarchique. Maintenant,

8 l'accusation essaie d'élargir ce concept de la responsabilité du supérieur

9 hiérarchique, s'agissant des auteurs directs, des gardiens travaillant

10 dans le camp. Les charges retenues contre eux ont été abandonnées. Alors

11 comment peut-on retenir des charges à l'encontre de M. Prcac, si tous ceux

12 qui se trouvaient au même niveau que lui en ce qui concerne le pouvoir ou

13 l'autorité, si toutes les charges à leur encontre ont été abandonnées?

14 Comment peut-on prouver qu'il était l'adjoint du commandant? Simplement

15 parce que quelqu'un est parti et que quelqu'un d'autre l'a remplacé?

16 La défense demande à la Chambre d'essayer de prendre en compte les

17 déclarations de tous les témoins et pas de tel ou tel témoin, comme l'a

18 fait l'accusation. Nous avons besoin d'un procès équitable comme l'exige

19 l'Article 98bis, et cela veut dire que tous les moyens de preuve présentés

20 soient examinés dans leur ensemble. Il ne sert à rien de retenir ce que

21 dit un témoin plutôt qu'un autre comme l'a fait l'accusation. On ne peut

22 pas oublier les autres témoignages, on ne peut pas oublier les 35 autres

23 témoignages. On ne peut pas simplement tenir compte de ce que deux témoins

24 ont dit.

25 La défense pose une autre question importante. Ici aussi, quand on voit la

Page 6629

1 façon dont l'accusation a présenté ses moyens de preuve contre l'accusé

2 Prcac, on peut se demander ce qui se passerait si nous disions que, vu ce

3 qui a été présenté par l'accusation, nous ne voulons pas poursuivre la

4 présentation de nos éléments de preuve.

5 Nous aimerions évoquer un autre élément, à savoir ce qu'a dit

6 l'accusation: elle a présenté des arguments qui tiennent à la crédibilité

7 accordée au témoin. Ce n'est pas la défense qui soulève la question de la

8 crédibilité, ce n'est pas ce que nous disons dans nos écritures; nous ne

9 disons pas qu'il faut attacher foi à tel ou tel témoignage plutôt qu'à un

10 autre. Nous voulons simplement vous présenter les faits, Madame et

11 Messieurs les Juges, afin que vous puissiez déterminer des éléments précis

12 et savoir si les charges retenues contre l'accusé doivent être acceptées.

13 Sur les sept témoins que nous avons entendus, l'un a dit que Prcac était

14 l'adjoint du commandant. Un autre est venu dire qu'il était le commandant

15 responsable. Un autre a dit qu'il était commandant, l'autre a dit qu'il

16 était directeur, les autres ne savaient pas. Il y avait, en tout, 32

17 témoins. Mais si nous voyons le dénominateur commun entre tous ces

18 témoignages, la plupart ne savaient pas quelles étaient ses fonctions. On

19 sait simplement qu'il déambulait avec une liste en main. Maintenant,

20 l'accusation essaye de manipuler ces listes pour dire la chose suivante,

21 elle dit: "Oui, M. Prcac a appelé par leurs noms les détenus. Et, d'après

22 le témoignage de certains détenus venus à la barre, ici, ces témoins ainsi

23 appelés ont disparu sans laisser de trace. D'autres ont dit que d'autres

24 gardiens appelaient d'autres détenus." Il n'est pas contesté que, le 6

25 août, au moment où les détenus sont partis de Trnopolje pour Manjaca, ce

Page 6630

1 n'était pas M. Prcac qui appelait les noms. Il y avait d'autres gardiens

2 qui effectuaient cette tâche.

3 L'accusation essaye aussi de manipuler le fait qu'il avait appelé des

4 femmes lorsqu'il est allé à Trnopolje le 3 août et que certaines de ces

5 femmes ont disparu. C'est vrai que ces femmes ont disparu, on ne sait

6 toujours pas où elles sont, mais on ne sait pas à quel moment elles ont

7 disparu. Nous ne savons pas si M. Prcac était jusqu'au bout dans le camp.

8 Est-ce qu'il a été là jusqu'au 6 août car, du 6 au 31 août, il n'était pas

9 présent dans le camp.

10 Autant de faits tels qu'ils sont, de faits qu'il faut examiner dans toute

11 leur complexité. Nous n'avons pas le droit, à ce stade de la procédure,

12 d'isoler tel ou tel fait, tel ou tel témoignage. Nous n'avons pas le droit

13 de procéder à une interprétation erronée.

14 M. le Président: Je profite de cette pause pour vous dire qu'il faut

15 terminer. Donc, vous avez au moins 4 à 5 minutes de plus pour terminer.

16 Vous pouvez organiser votre travail.

17 M. J. Simic (interprétation): Oui. Merci, Monsieur le Président. Je

18 m'appelle Simic et, après avoir dit ce que j'ai dit, il n'est pas

19 nécessaire…

20 M. le Président: Je n'ai pas, je crois, dit Stojanovic. Je crois que j'ai

21 dit Jovan Simic.

22 M. J. Simic (interprétation): Monsieur le Président, j'arrivais au terme

23 de mon exposé. La présente Chambre devra examiner les faits de façon

24 complète, de façon générale et sans isoler les éléments comme l'accusation

25 le voudrait. Je vous remercie, Monsieur le Président.

Page 6631

1 M. le Président: Merci beaucoup, Maître Jovan Simic. Nous allons faire une

2 pause d'une demi-heure et après, nous reviendrons pour entendre la réponse

3 du Procureur.

4 Pour que vous le sachiez, notre intention est de travailler, plus ou

5 moins, jusqu'à 13 heures et après, l'après-midi, si nécessaire. Si

6 nécessaire, l'après-midi, nous travaillerons à partir de 14 heures. C'est-

7 à-dire, que nous travaillerons jusqu'à 13 heures, nous prendrons une pause

8 d'une heure pour déjeuner et, après, nous reprendrons à 14 heures.

9 (L'audience, suspendue à 11 heures 14, est reprise à11 heures 47.)

10 (Les cinq accusés sont introduits dans le prétoire.)

11 M. le Président: Veuillez vous asseoir.

12 Madame Hollis, vous avez maintenant la parole, s'il vous plaît.

13 Mme Hollis (interprétation): Je vous remercie, Monsieur le Président.

14 Vous avez entendu les arguments de la défense aujourd'hui. C'est en fait

15 le résumé de ce qu'ils ont présenté par écrit et auquel nous avons fourni

16 réponse. Nous allons donc nous exprimer de façon très brève en nous

17 concentrant sur les arguments présentés.

18 L'accusation fait valoir que le premier élément que vous devez prendre en

19 compte et sur lequel vous devez vous prononcer est ceci: quelle est la

20 portée de l'article invoqué? Nous faisons valoir que nombre des arguments

21 présentés par la défense ne tiennent pas, car ils dépassent la portée de

22 cet article. Or, cet article est celui qui détermine les actions que vous

23 allez prendre.

24 Le champ d'application de cet article est très clair: un jugement

25 d'acquittement par rapport aux infractions retenues ne porte pas sur les

Page 6632

1 faits matériels allégués à l'appui des infractions retenues dans l'Acte

2 d'accusation. Ce ne sont pas les qualifications juridiques des actes. Or,

3 ceci c'est ce qui est repris à l'Article 7. Car si vous examinez l'article

4 entrepris, les Articles 2, 3 et 5, en l'occurrence, les infractions

5 retenues ne se modifient pas en fonction du mode de responsabilité ou en

6 fonction de la qualification juridique des infractions commises, comme

7 nous l'alléguons, par l'accusé.

8 L'Article 4 montre que les infractions retenues se modifient en fonction

9 du mode de responsabilité. Vous avez ainsi le génocide et la possibilité

10 de complicité dans la commission du génocide. Vous avez aussi la

11 possibilité d'avoir tentative de génocide et complicité en matière de

12 génocide. Ce sont les chefs d'accusation de l'Article 4 qui montrent qu'il

13 y a bien une différence, s'agissant des infractions à la base des chefs

14 d'accusation, en fonction de la qualification des actes ou omissions de

15 l'accusé. Or, l'Article qui nous concerne ou les Articles, les Articles 3

16 et 5, sont différents.

17 Les arguments présentés en vertu de l'Article 7.1 ne tombent pas sous le

18 coup du champ d'application de l'Article 98bis. C'est parce que vous

19 n'allez pas les acquitter au regard des Articles 7.1 ou 7.3, vous les

20 acquitteriez au vu des crimes et des chefs d'accusation retenus contre les

21 accusés. C'est pour cette raison que si, par exemple, vous examinez le

22 98bis, vous n'acquittez pas quelqu'un pour un incident tombant sous le

23 coup du chef d'accusation puisque l'on parle ici des chefs d'accusation

24 retenus.

25 Quelles sont les infractions considérées? Ce sont les chefs repris dans

Page 6633

1 l'Acte d'accusation 1 à 3. Ces chefs d'accusation sont présentés à la page

2 10. Quels sont-ils? Persécution, actes inhumains, atteintes à la dignité

3 de la personne; voilà ici les infractions incriminées.

4 Et quelles sont les catégories générales de victimes? Quels sont les

5 cadres temporels repris dans l'Acte d'accusation? Examinez le paragraphe

6 24, il vous donne les paramètres à prendre en considération pour ces

7 infractions et, au paragraphe 24, il est précisé que les accusés sont

8 accusés pour la période allant entre le 24 mai et le 30 août. Ils sont

9 accusés d'avoir persécuté des Musulmans, des Croates de Bosnie et tout

10 autre non-Serbe dans la région de Prijedor pour des raisons politiques,

11 raciales ou religieuses. Ce sont les paramètres qu'il faut appliquer pour

12 ce chef d'accusation.

13 Mais examinez les autres chefs d'accusation. Vous constaterez que le même

14 type de procédure est suivi. Vous avez le chef d'accusation en tant que

15 tel -meurtre-, puis vous avez un paragraphe qui qualifie ou qui vous donne

16 une qualification des victimes et du cadre temporel, cadre très large.

17 Examinons les annexes ou listes. Elles se contentent de fournir davantage

18 de détails mais qui relèvent des chefs plus généraux. Vous devez répondre

19 à la question suivante qui est de savoir si l'Article 98bis vous confère

20 l'autorité nécessaire pour déclarer qu'il y a acquittement face à des

21 incidents précis repris dans un chef d'accusation. Parce qu'une infraction

22 dont vous acquitteriez un accusé, vous le feriez si vous estimez qu'il n'y

23 a pas de moyen de preuve avancé par rapport à un aspect, à un incident qui

24 est repris, qui est englobé dans le chef plus général. Cela veut-il dire

25 qu'il n'est pas accusé et qu'il n'est pas coupable de meurtre? Parce que

Page 6634

1 cela voudrait dire que vous ignoreriez tous les autres meurtres.

2 Nous faisons valoir que vous devez d'abord déterminer quel est le champ

3 d'application de l'Article 98bis. Selon nous, ce champ d'application est

4 déterminé par les chefs d'accusation retenus et qui reprennent des actes

5 cumulatifs, plusieurs victimes s'échelonnant sur une longue période de

6 temps.

7 L'Article 98bis ne prévoit pas, dès lors, qu'il y ait déclaration

8 d'acquittement pour un incident spécifique repris dans le cadre de ces

9 chefs d'accusation. Et la jurisprudence dans le Tribunal n'est pas

10 toujours dans ce sens; nous l'avons déjà vu, par exemple, dans l'affaire

11 Blaskic: qui a agi dans le cadre de l'autorité générale dont bénéficiait

12 cette Chambre mais nous estimions que ces actions ou ces actes relevaient

13 de ce qui était alors le nouvel Article 98bis. Mais nous faisons valoir

14 que ceci n'est pas permis par l'Article 98bis.

15 Lorsque vous aurez déterminé quel est le champ d'application de cet

16 article, il faut examiner les autres allégations avancées par l'accusé.

17 Là, il faut examiner l'article pour voir si ces allégations tombent sous

18 le coup de cet article.

19 Quelles sont les normes à appliquer? Nous vous avons présenté les normes

20 qu'il faut, selon nous, appliquer. Cette norme n'est pas celle de la

21 preuve au-delà de tout doute raisonnable, le niveau d'exigence est

22 moindre. Examinons un instant ce que demande la loi lorsqu'elle parle de

23 preuve au-delà de tout doute raisonnable. Ce que cela veut dire, c'est que

24 si vous examinez l'ensemble des moyens de preuve, que vous en déterminez

25 la valeur probante et la crédibilité, une seule explication plausible ne

Page 6635

1 peut prévaloir, et c'est la présomption et la conclusion de culpabilité.

2 Lorsque vous examinez une requête déposée en vertu de l'Article 98bis, ce

3 n'est pas la norme appliquée ou plutôt ce l'est peut-être. Il faut se

4 demander s'il y a des éléments de preuve qui ont été présentés qui, si on

5 leur accordait foi, permettraient d'apporter la preuve de chacun des

6 éléments constitutifs de l'infraction. C'est là la norme appliquée et

7 c'est une des normes moindres. Est-ce que vous pourriez déclarer une

8 personne coupable? C'est cela qu'il faut se demander et ce n'est pas s'il

9 y a une explication raisonnable qui est la preuve au-delà de tout doute

10 raisonnable.

11 Lorsque vous appliquez la norme visée à l'Article 98bis, les questions de

12 crédibilité ne sont pas à se poser maintenant; il faut les examiner à la

13 fin du procès. Il ne faut pas examiner la question de la crédibilité, de

14 la fiabilité.

15 Nous faisons également valoir que l'Article 98bis détermine que la partie

16 requérante doit respecter certaines exigences pour préciser là où il y

17 aurait eu insuffisance de moyens de preuve et doit vous en apporter la

18 preuve. Il ne suffit pas de dire, de façon globale, qu'il y a insuffisance

19 de moyens de preuve à charge. Selon nous, ce n'est pas un fondement

20 adéquat pour déclencher l'Article 98bis et permettre l'acquittement.

21 Voyons les arguments qui vous ont été avancés aujourd'hui. Nous constatons

22 que nombre d'entre eux porte sur le champ d'application de l'Article

23 98bis. Je pense que l'exemple le plus illustratif qui montre qu'il faut

24 définir ce champ d'application et l'appliquer en conséquence, ce sont ces

25 exemples où nous avons admis par écrit qu'apparemment, il n'y a pas de

Page 6636

1 preuve d'existence d'archives ou de documents à l'appui de meurtres

2 isolés.

3 Que faire dans un tel cas? Si le champ d'application de l'Article 98bis

4 est celui que nous avançons, à savoir qu'il faut examiner des crimes

5 incriminés ou faisant l'objet de chefs d'accusation, c'est-à-dire les

6 meurtres de façon générale, à ce moment-là, vous ne pourrez pas dire qu'il

7 y a acquittement. Car rien ne le permet.

8 Si votre décision est autre, si vous estimez qu'il vous est possible de

9 faire une déclaration d'acquittement pour certaines parties d'un chef

10 d'accusation, à ce moment-là, vous auriez peut-être une démarche

11 différente. Mais ceci nous permet de bien cerner cette catégorie

12 d'accidents spécifiques.

13 C'est précisément cela qui est plus difficile pour vous, sans doute: c'est

14 de déterminer le champ d'application de l'Article 98bis. Selon nous, après

15 avoir entendu les arguments tant oraux qu'écrits de la défense, je pense

16 qu'il y a eu une mauvaise qualification des moyens de preuve. Ils disent,

17 ces avocats de la défense, que nous avons fait de même.

18 Finalement, ce qui sera la preuve, c'est ce qui aurait été consigné dans

19 l'Acte ou dans le dossier de l'audience ou dans tel ou tel document. On a

20 fait référence au compte rendu d'audience ce matin. Mais nous, nous disons

21 que, si vous examinez ce qui est dit dans ce compte rendu d'audience, ceci

22 va corroborer ce que nous faisons valoir, nous, en tant qu'accusation.

23 Mais ce sera bien sûr vous, Madame et Messieurs le Juges, qui jugerez, une

24 fois que vous aurez examiné ce qui se trouve consigné dans le comptes

25 rendus de cette affaire.

Page 6637

1 Mais examinons de plus près les arguments mêmes. Prenons-les un par un.

2 Voyons ce qui concerne l'accusé Kos: en fait, ce sont des arguments

3 avancés contre l'accusation et non contre le témoin. Apparemment, nous

4 n'aurions pas demandé au témoin AI d'identifier la photographie de

5 Drazenko Predojevic. Si la défense a des difficultés avec l'accusation,

6 ceci ne devrait pas retomber sur le témoin. Si le témoin n'avait pas bien

7 identifié une personne aussi importante, nous l'aurions dit à la défense,

8 car cela aurait pu avoir des conséquences importantes. Mais cela n'a pas

9 été le cas.

10 La défense dit que nous n'avons pas montré cette photographie aux témoins.

11 C'est peut-être une attaque dirigée contre l'accusation, mais pas contre

12 la crédibilité de ces témoins et, ceci, pour autant que vous estimiez

13 qu'il soit important d'examiner cette question.

14 S'agissant du paragraphe 10 des écritures de l'accusé Kos, là où il dit

15 qu'aucun moyen de preuve n'a été apporté pour montrer que M. Kos aurait

16 tué Becir Medunjanin, Miroslav Solaja ou quelques autres personnes, nous

17 estimons qu'il s'agit d'une allégation générale à laquelle nous n'avons

18 pas à répondre.

19 Nous estimons que le compte rendu d'audience, le dossier de cette instance

20 montre qu'il y a d'autres preuves apportées de ces meurtres. Ce qu'il faut

21 plutôt examiner ici, c'est le mode de responsabilité qui peut être la

22 question de savoir si ce mode de responsabilité peut être limité à ce

23 stade de la procédure ou si la qualification juridique des infractions

24 peut se terminer ici.

25 Nous avons dit que nous avons retenu ces charges contre l'accusé pour des

Page 6638

1 incidents précis et nous avons dit que tout mode de responsabilité peut

2 s'appliquer ainsi que tout mode de qualification de ces infractions, en

3 vertu de l'Article 7.1 ou du 7.3. Et s'il y a possibilité d'application de

4 l'un quelconque de ces critères, il y a culpabilité. Donc, il ne faut pas

5 nécessairement qu'il ait lui-même tiré la gâchette pour tuer cet accusé ou

6 qu'il l'ait battu pour qu'il soit accusé. Vous pourrez même sans cela

7 déterminer qu'il est coupable.

8 Nous avons des éléments de preuve montrant le poste qu'il occupait au

9 camp, sa présence constante au camp. Nous avons des preuves des conditions

10 prévalant dans le camp. Il y a des éléments, des événements notoires qui

11 se sont produits dans ce camp, à savoir des passages à tabac, des actes de

12 torture.

13 Nous estimons qu'il y a au moins un mode de responsabilité qui pourrait

14 être invoqué ici pour déclarer sa culpabilité face à ces moyens de preuve:

15 c'est l'idée du dessein commun, de l'objectif commun, reprit par la

16 Chambre d'appel Tadic, en tant que mode de responsabilité, en vertu de

17 l'Article 7.1.

18 Quant à savoir si une personne a déposé pour prouver telle ou telle chose

19 ou pas, nous faisons valoir ici que Nusret Sivac est venu déposer devant

20 vous et vous a dit Krle était responsable de l'équipe au moment où Crnalic

21 a été tué. L'accusé Kos fait référence à un témoignage, mais en fait, ces

22 questions relatives à une déclaration antérieure n'en font pas la preuve.

23 Maintenant, j'aimerais passer à l'accusé M. Radic. Là aussi, nous faisons

24 valoir que beaucoup des arguments avancés reposent sur le fait, déjà

25 évoqué, que les Articles 7.1 ou 7.3 sont des chefs d'accusation retenus et

Page 6639

1 qu'on ne pourrait pas déclarer quelqu'un acquitté en vertu de l'Article

2 7.1 ou en vertu du 7.3. On peut déclarer quelqu'un acquitté par rapport

3 aux chefs repris dans l'Acte d'accusation.

4 S'agissant de la distinction opérée par le conseil de la défense, entre la

5 connaissance indirecte et les conclusions, eu égard à des preuves ou des

6 moyens de preuve normaux, nous disons que vous pouvez condamner quelqu'un

7 même si aucun document ne montre que telle ou telle personne occupait tel

8 ou tel poste. Mais il faudrait voir, à ce stade de la procédure, s'il y a

9 des moyens de preuve à l'appui de la présence de l'accusé dans le camp.

10 Ce qui vous permettrait de qualifier juridiquement les comportements de

11 l'accusé comme vous le voulez, à savoir en vertu du 7.1 ou du 7.3, et vous

12 pourriez déterminer qu'il y a un mode de responsabilité par rapport aux

13 moyens de preuve entendus. A ce moment-là, il faut poursuivre ce procès et

14 entendre les témoins à décharge.

15 Parlons maintenant des arguments avancés l'accusé Zigic.

16 Des commentaires ont été formulés à l'égard de Izeiri. S'il y a

17 contestation à propos des moyens de preuve et des témoignages, il faut

18 revoir le témoignage de ce témoin. A cet égard, la défense a raison de

19 dire que, dans nos arguments écrits, nous avions dit que Hase Icic avait

20 dit que cet homme était mort à Omarska. Si vous examinez la référence du

21 compte rendu d'audience que nous avons citée dans nos écritures, vous

22 verrez que Hase Icic a dit qu'un jeune Albanais avait été sorti de la

23 salle 2 à Keraterm. Ce qui veut dire que la déposition du témoin port sur

24 la salle 2 à Keraterm et pas sur le camp d'Omarska.

25 La défense a dit ne pas avoir reçu la liste concernant cet accusé précis.

Page 6640

1 L'annexe n°2 de la réponse généralisée à la requête d'acquittement, en ce

2 qui concerne l'accusé Zigic, a été déposée. Si la défense ne l'a pas

3 reçue, nous demandons au Greffe de soumettre à la défense l'annexe n°3.

4 Voyons ce que nous dit l'avocat de l'accusé Prcac.

5 Là aussi, nous disons que la norme appliquée est incorrecte, que ce n'est

6 pas le critère de la preuve au-delà du doute raisonnable qu'il faut

7 appliquer. L'avocat de l'accusé Prcac a dit qu'en fait nous allions…, que

8 la seule présence suffisait à soutenir que la requête n'avait pas de

9 fondement. Mais la seule présence n'est pas une responsabilité pénale,

10 comme on l'a fait valoir dans l'affaire Tadic.

11 Selon nous, des preuves ont été apportées pour montrer que la présence de

12 l'accusé Prcac n'était pas une simple présence mais que c'était une

13 présence dans le cadre du fonctionnement continu et persistant d'un camp

14 de détention où étaient maltraitées les victimes et que c'est une présence

15 qui va bien au-delà de la seule et simple présence. Et que c'est là un des

16 éléments qualifiant juridiquement l'infraction, ce qui entraîne sa

17 responsabilité pour les crimes commis dans camp.

18 Nous estimons que la seule ou simple présence ne suffit pas. Selon nous,

19 en ce qui concerne l'accusé Prcac, les éléments de preuve apportés

20 montrent qu'il y a plus, davantage qu'une simple et seule présence.

21 L'avocat de l'accusé Prcac nous a dit notamment, dans un exemple que nous

22 avions cité, à savoir que Nusret Sivac avait dit que Prcac se trouvait

23 dans le camp pour toutes les équipes et qu'il donnait des ordres. Là,

24 l'avocat de la défense dit que le compte rendu d'audience ne le montre

25 pas. Mais nous vous fournissons des références eu égard au témoignage de

Page 6641

1 Sivac et nous nous contentons de vous renvoyer aux pages 41 et 32, et à la

2 ligne 19.

3 Le Juge Riad, à cet endroit-là, pose une question -je cite-: "S'agissant

4 de Prcac, vous dites qu'il donnait des ordres aux gardes. Mais est-ce que

5 vous avez aussi vu s'il était le commandant d'une des équipes?"

6 La réponse, qui commence à la ligne 24 de la même page, dit: "Ce n'était

7 pas un commandant d'équipe. Il faisait partie de toutes les équipes. Il

8 lui arrivait même de venir la nuit, très souvent d'ailleurs, au camp et il

9 avait coutume d'apporter des listes sur lesquelles figuraient les noms des

10 détenus".

11 Page 4126 du compte rendu d'audience, en réponse à une question posée par

12 l'avocat de M. Prcac, ligne 9, on demande ceci:

13 - "Est-ce que vous avez vu Drago qui était en train de donner des ordres à

14 qui que ce soit?

15 - Réponse: Oui." (ligne 10.)

16 Ligne 11: "A qui?". Ligne 12: "Aux gardes".

17 Il y a aussi contestation sur les éléments de preuve qui auraient été

18 consignés au dossier mais cela ne peut être résolu que par l'examen de ce

19 dossier. Nous avons soumis les arguments par écrit en ce qui concerne la

20 question du cadre temporel du moment des faits et nous estimons qu'au

21 moment des faits, lorsqu'on parle du moment des faits, il faut situer ceci

22 entre le 24 mai et le 30 août. Il faut que les crimes aient été commis au

23 cours de cette période. Mais à quel moment de cette période, à quel moment

24 que ce soit, ils sont couverts par l'Acte d'accusation.

25 On a également fait référence au paragraphe 39 de l'Acte d'accusation.

Page 6642

1 Nous estimons que ce paragraphe intervient pour déterminer les éléments

2 constitutifs de l'infraction et sur les modes de responsabilité, et qu'il

3 ne porte pas sur les chefs mêmes.

4 Nombre de ces accusés ont discuté la question des annexes. Il suffit pour

5 cela de voir le paragraphe liminaire de chacun des chefs et de chacune des

6 listes. Vous verrez qu'on fait une référence générale à tous les

7 prisonniers d'Omarska au cours des dates que je viens de citer, de tous

8 les prisonniers d'Omarska et de Keraterm pour Zigic, pour les trois camps,

9 Omarska, Keraterm et Trnopolje pour Zigic.

10 C'est ainsi que chacune de ces listes reprend toutes ces personnes et les

11 moments au cours desquels ces accusés ont commis ces crimes. Nous estimons

12 que c'est le champ d'application à retenir pour l'Article 98, une fois la

13 bonne norme appliquée.

14 Et si vous appliquez cette norme aux moyens de preuve, vous devrez

15 conclure qu'il faut débouter la défense de sa requête et vous allez

16 poursuivre l'examen des preuves pour les chefs retenus dans l'Acte

17 d'accusation.

18 Je vous remercie, Monsieur le Président.

19 M. le Président: Nous allons donner la parole à chaque conseil qui veut

20 intervenir et pas pour la réplique. Et pas pour plus de cinq minutes.

21 Donc maintenant, Maître O'Sullivan.

22 M. O'Sullivan (interprétation): Merci, Monsieur le Président. Je relèverai

23 deux choses.

24 Tout d'abord, s'agissant du champ d'application, comme l'a dit Mme Hollis,

25 champ d'application du 98bis, selon moi, ceci est à voir en rapport avec

Page 6643

1 l'Acte d'accusation et avec ses annexes: ces annexes donnent les noms

2 d'individus et d'événements précis et allèguent la responsabilité de

3 certains accusés. Ces listes selon nous constituent des chefs d'accusation

4 retenus contre chacun des accusés.

5 Madame Hollis a raison de dire que si nous prenons, ne serait-ce qu'un

6 exemple de la liste B, en ce qui concerne Kos -et vous allez le faire bien

7 sûr une fois que vous allez passer aux délibérations- pour voir s'il

8 s'agit d'allégations générales ou larges à l'encontre de tous les

9 prisonniers avec des dates, c'est vrai. Mais suivent alors sept noms. Et

10 l'ordonnance rendue par la Chambre précédente qui disait qu'il fallait

11 donner des détails, comment faut-il l'interpréter? De la façon suivante:

12 c'est que les sept noms qui suivent sont prononcés comme allégations

13 retenues contre Kos.

14 C'est là la lecture qu'il faut faire de ces arguments, c'est là

15 l'interprétation qu'il faut faire de l'Article 98bis. Et s'il n'y a pas de

16 moyens de preuve ou si ces derniers sont insuffisants, vous devez prendre

17 une décision d'acquittement.

18 Permettez-moi d'attirer votre attention également sur la décision Kunarac.

19 Lorsque vous allez délibérer, je vous demanderai d'examiner le paragraphe

20 26 de ladite décision. La Chambre a effectivement rendu une décision

21 d'acquittement à l'encontre d'une personne précise dans le cadre d'un chef

22 d'accusation vu l'insuffisance des moyens de preuve apportés.

23 Vous constaterez également, toujours dans ce paragraphe 26, que la Chambre

24 Kunarac a appliqué les mêmes normes que la Chambre Kordic ne l'a fait. Je

25 vous demanderai, Madame et Messieurs les Juges, de revoir ces points.

Page 6644

1 Mon deuxième argument est plus spécifique. Je reviens à ce que disait Mme

2 Hollis à propos de Nusret Sivac, à propos du fait que la déclaration

3 préalable de ce dernier lui avait été lue. Vous savez, seuls les extraits

4 pertinents sont donnés pour lecture à un témoin et tout ceci s'inscrit

5 dans le compte rendu d'audience, dans le dossier de l'instance. Ceci

6 constitue un moyen de preuve. Et sauf le respect que je dois à Mme Hollis,

7 Nusret Sivac n'a pas désavoué ce qu'il avait dit; il l'a confirmé et il a

8 dit que c'était une déclaration exacte. Qu'a-t-il dit à l'audience? Il a

9 dit que la personne qui, apparemment, a tué Crnalic n'était pas Milica

10 Kos.

11 Voilà ce que j'ai à vous dire, Monsieur le Président.

12 M. le Président: Merci beaucoup, Maître O'Sullivan, et notamment merci

13 pour la concision.

14 Donc Maître Jovanovic, s'il vous plaît?

15 M. Jovanovic (interprétation): Merci, Monsieur le Président. L'Article du

16 Statut prévoit que le Tribunal international a compétence d'engager des

17 poursuites contre des personnes responsables d'infractions et de

18 violations graves du droit humanitaire international sur le territoire de

19 l'ex-Yougoslavie à partir de 1991, conformément donc au Statut de ce

20 Tribunal. Je reviens donc sur le champ d'application de l'Article 7.1 et

21 7.3 du Statut au sens du Procureur vis-à-vis de Radic. La position exercée

22 par Radic dans ce cadre doit être celle d'une personne responsable d'après

23 le Procureur.

24 Les Articles 2, 3, 4, 5 du Statut doivent correspondre à la teneur des

25 Articles 7.1 et 7.3. cependant. Donc, pour qu'une personne soit considérée

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1 comme responsable de la commission de ces actes criminels, cette personne

2 doit exercer les positions mentionnées ou comprises dans les Articles 7.1

3 et 7.3 du Statut. Et c'est seulement à partir de là que les autres

4 articles, liés aux 7.1 et 7.3 et qui prévoient les actes criminels dont

5 j'ai déjà parlé, peuvent entrer en application. Autrement dit, les actes

6 criminels mentionnés dans certains chefs de l'Acte d'accusation ne peuvent

7 pas être considérés indépendamment de l'Article 7.1 et 7.3 du Statut. Si

8 la position de l'accusé, telle qu'elle est mentionnée dans ces deux

9 articles du Statut n'est pas déterminée, un élément permettant de

10 confirmer l'acte criminel, dont l'accusé est accusé, est absent. C'est en

11 s'appuyant sur cet argument que la défense affirme qu'un élément de preuve

12 tout à fait crucial manque, puisque la position de l'accusé Radic n'a pas

13 été prouvée par le Procureur.

14 La même chose pour les conditions d'existence dans le camp. Le statut de

15 l'accusé Radic n'a donc pas été conforme -et c'est le premier point- ni

16 par conséquent sa possibilité d'agir d'une quelconque façon sur les

17 conditions d'existence dans le camp ou plutôt sur leur amélioration.

18 Voilà. C'est ce que j'avais à dire. Je vous remercie, Monsieur le

19 Président.

20 M. le Président: Merci aussi, Maître Jovanovic. Je passe maintenant la

21 parole à Me Stojanovic.

22 M. Stojanovic (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

23 J'aurais simplement deux brèves remarques à faire. Nous ne considérons pas

24 que cette Chambre de première instance se trouve dans l'obligation de

25 continuer pour certains événements dont il n'existe aucun élément de

Page 6646

1 preuve permettant de penser que notre client les a commis. Nous ne voyons

2 donc aucune possibilité pour la Chambre de continuer à retenir ces charges

3 contre notre client.

4 Ce procès est un procès très complexe, très cher, très coûteux et je pense

5 que cela nous aiderait tous de simplement mettre un terme à la discussion

6 d'événements pour lesquels il n'existe pas la moindre trace de preuve

7 qu'ils auraient été commis par cet accusé.

8 La même remarque s'applique aux allégations du Procureur au sujet de

9 l'acquittement partiel par rapport à certains chefs d'accusation à ce

10 stade du procès.

11 Le Procureur affirme que cet acquittement partiel serait inacceptable, si

12 j'ai bien compris sa position. Je pense que ce genre d'argument

13 permettrait de tirer la conclusion que la Chambre ne pourrait pas

14 prononcer un tel jugement, y compris avant la fin du procès. Et l'accusé

15 doit donc à ce moment-là être acquitté par rapport à ces chefs

16 d'accusation maintenant. Et je ne pense pas que l'argument du Procureur

17 soit acceptable. Je vous remercie.

18 M. le Président: Merci beaucoup, Maître M. Stojanovic.

19 Maître Jovan Simic, s'il vous plaît?

20 M. J. Simic (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

21 La défense voudrait d'abord rappeler aux Juges de cette Chambre que la

22 composition de la présente Chambre de première instance était pratiquement

23 la même qui a rendu la décision Jelisic. La défense estime que c'est dans

24 l'autre affaire que les critères corrects ont été appliqués, critères qui

25 devraient s'appliquer également dans la présente affaire.

Page 6647

1 S'agissant de la position du Procureur au sujet de la déposition de M.

2 Nusret Sivac, la défense soutient à dire qu'il est inacceptable de sortir

3 certains faits de leur contexte, car le fait de prendre en compte un

4 témoignage isolé de cette façon fait perdre toute signification à

5 l'ensemble de la déposition: celle-ci devient donc une demi vérité.

6 D'après la défense, une demi vérité est pire qu'un mensonge.

7 Le témoin Nusret Sivac a dit que M. Prcac était présent dans toutes les

8 équipes. Cela signifierait qu'il était présent à chaque changement

9 d'équipes. Le Procureur dit donc que M. Prcac était présent au moment des

10 relèves d'équipes. Le Procureur affirme qu'il était présent, qu'il

11 assistait à la relève, que chez lui qui faisait la relève et qu'il avait

12 donc une responsabilité. Alors que le témoin n'a pas dit cela. Il a dit:

13 "L'accusé était présent; on l'a vu dans toutes les équipes". De la même

14 façon, le témoin dit "qu'il ne savait pas ce que faisait M. Prcac, qu'il

15 l'a vu avec à la main des listes et que, de temps en temps, il lui

16 arrivait de remettre ces listes aux gardiens". Et c'est la fin de son

17 témoignage.

18 Le témoin n'a jamais dit qu'il était présent au moment de la relève des

19 équipes de gardiens. Or, c'est là-dessus que s'appuie le Procureur; c'est

20 une demi vérité puisque le témoin n'a dit qu'une chose: c'est qu'il a vu

21 le témoin dans toutes les équipes sur une journée, sur 24 heures. Et rien

22 de plus.

23 Voilà ce que je voulais vous dire, Monsieur le Président.

24 M. le Président: Oui, merci beaucoup, Maître Jovan Simic. Je crois que mes

25 collègues ont des questions. Monsieur le Juge Fuad Riad, avez-vous quelque

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1 question?

2 M. Riad (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

3 Bonjour, Madame Hollis. J'aimerais vous poser une question de nature

4 générale. Je ne vais pas examiner les requêtes au fond. Je voudrais vous

5 poser une question à propos de l'interprétation que vous avez du champ

6 d'application de l'Article 98bis.

7 En quintessence, vous estimez que le 98bis ne prévoit de condamnation que

8 sur un chef d'accusation et non pas sur un chef d'accusation

9 partiellement, ou sous un de ses aspects.

10 Je voudrais que vous m'éclairiez davantage sur ce point. Pourriez-vous

11 poursuivre votre exposé à la lumière de plusieurs éléments, de plusieurs

12 facteurs, dont le premier est une autre règle, plus ou moins générale, que

13 je connais en français: "Qui peut le plus, peut le moins".

14 Si l'on peut déclarer l'acquittement sur un chef d'accusation, on peut le

15 faire aussi pour une partie de ce chef d'accusation. En l'espèce, est-ce

16 que ceci intervient dans l'intérêt de la défense ou pas? Est-ce que ceci

17 lèse, d'une quelconque manière, l'accusation? Est-ce que ceci se ferait

18 dans l'intérêt du Tribunal ou pas? Est-ce qu'une telle interprétation vous

19 léserait vous, en tant qu'accusation? Est-ce qu'elle serait plutôt

20 favorable à la défense dans la mesure où la charge de la preuve apportée

21 par l'accusation serait moindre? Est-ce qu'il y aurait donc une charge

22 moindre en ce qui concerne l'obligation de preuve? Ceci nous permettrait

23 aussi d'agir rapidement.

24 Autant de facteurs pour lesquels je vous demande d'intervenir. Pourquoi

25 pensez-vous que le 98bis ne prévoie que les chefs d'accusation complets et

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1 non pas une partie de ces chefs d'accusation?

2 Et puis, j'ai une petite question aussi à l'intention de Me Simic. Là non

3 plus, je ne lui demanderai pas de s'étendre trop longtemps. Vous avez dit

4 que M. Prcac se contentait de lire des listes; et je replace ceci en

5 rapport avec ce que vous avez dit à son propos, à savoir qu'il n'avait

6 qu'une fonction administrative. Est-ce que je vous ai bien compris?

7 M. J. Simic (interprétation): Oui.

8 M. Riad (interprétation): Donc il ne donnait que la lecture des noms

9 figurant sur une liste, quoi qu'on fasse de ces personnes, vous estimez

10 que là, ce n'est pas un ordre mais plutôt un simple acte administratif? Il

11 faisait donc fonction d'employé en quelque sorte, simplement?

12 M. J. Simic (interprétation): Oui, Monsieur le Juge. Il lisait les noms

13 inscrits sur la liste dont il n'était pas l'auteur. Il le faisait sur

14 ordre, sur l'ordre de quelqu'un. Il avait le même statut, exactement le

15 même niveau d'autorité que les autres gardiens. Il n'y a pas de

16 différence: il y en avait qui gardaient une guérite de gardien et d'autres

17 qui lisaient les listes. D'ailleurs, ce n'était pas sa responsabilité, sa

18 tâche permanente.

19 Sa tâche permanente consistait à être au poste de garde et, de temps en

20 temps, il fallait qu'il donne lecture des noms qui figuraient sur une

21 liste, sur ordre de Zeljko Meakic ou de quelqu'un d'autre. Il y a un

22 certain nombre de témoins qui l'ont dit: il lisait ces noms à l'émetteur

23 radio.

24 D'autre part, Monsieur le Juge, il y a d'autres gardiens qui ont lu

25 également les noms sur les listes. C'est arrivé le 6 août, c'est arrivé

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1 également le 3 août au moment où les femmes ont été transférées à

2 Trnopolje. Il a été dit que d'autres gardiens, lorsque le camp

3 fonctionnait normalement et pas seulement avant sa fermeture, lisaient

4 également des listes de ce genre. Donc, ce n'est pas une responsabilité

5 qui lui est propre, mais c'est une tâche qu'il avait à accomplir dans le

6 cadre de ses devoirs administratifs.

7 M. Riad (interprétation): Le fait de lire ces listes, tout en sachant que

8 cela signifiait pour les personnes dont le nom était cité, vous estimez

9 que c'était quand même une simple fonction administrative, ce qu'aurait

10 fait n'importe quel employé?

11 Mme Hollis (interprétation): Monsieur le Juge, j'aimerais vous renvoyer à

12 un témoignage précis. Il s'agissait de mon collègue, M. Saxon, qui

13 interrogeait le Témoin U. Il a dit que c'était Dragoljub Prcac qui

14 déterminait laquelle de ces femmes serait transférée à Trnopolje et

15 laquelle resterait dans le camp.

16 Le Témoin U a répondu en disant: "Non! Il n'avait aucune compétence de

17 décision. Il n'était là que pour lire les noms inscrits sur la liste. Il

18 ne faisait rien d'autre".

19 Et d'ailleurs, il existe également le témoignage du témoin Omer Mesan qui

20 a, lui aussi, été mal interprété par le Procureur. Ces hommes lisaient les

21 listes, ils lisaient les noms inscrits sur les listes et c'est à ce

22 moment-là qu'un certain nombre de personnes ont dit qu'il y avait

23 cinquante personnes de plus que les personnes dont les noms figuraient sur

24 les listes. Ce qui montre bien qu'ils ne savaient même pas qui exactement

25 était dans le camp, qui était sur les listes et ce qui allait être fait

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1 des personnes dont les noms figuraient sur les listes.

2 Omer Mesan a été considéré par le Procureur comme quelqu'un qui savait ce

3 qui allait être fait. Ce n'était pas le cas. Il ne s'agissait que de lire

4 la liste.

5 M. le Président: Vous voulez une réponse, Madame Hollis?

6 M. Riad (interprétation): Maintenant ou au moment où mes collègues

7 auraient terminé; à vous de décider, Madame Hollis.

8 Mme Hollis (interprétation): Si vous me permettez, je crois qu'il serait

9 plus simple que je vous fournisse une réponse dès maintenant. En ce qui

10 concerne l'adage selon lequel "Qui peut le plus, peut le moins", je pense

11 que tout est fonction des termes repris dans les règles statutaires, dans

12 le Règlement ou le Statut, que vous appliquez ici.

13 Vous voyez que la peine maximale, c'est la réclusion à vie pendant la vie

14 naturelle de cette personne. On pourrait donc faire moins.

15 M. le Président: Madame Hollis, quand les conseils parlent entre eux avec

16 les écouteurs, on peut entendre. Vous vous rendez compte que, quand vous

17 parlez avec les écouteurs, vous ne contrôlez pas votre volume de voix.

18 Excusez-moi de vous rappeler à l'attention parce que nous voudrions suivre

19 la réponse, Madame Hollis. Excusez-moi. Allez-y, Madame Hollis.

20 Mme Hollis (interprétation): Je vous remercie, Monsieur le Président. Nous

21 estimons qu'on ne peut pas toujours faire moins si l'on peut faire plus,

22 tout est fonction du Règlement ou du Statut qui parle de ce point.

23 Voyons le 98bis. Selon nous, c'est un article dont le champ d'application

24 est limité. En effet, ce qu'il fait, c'est qu'en fait, il arrête à mi-

25 chemin, avant la présentation des moyens à décharge et ce serait prématuré

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1 que de faire rendre un jugement d'acquittement. Nous estimons que le champ

2 d'application est limité. Nous ajoutons que les termes eux-mêmes montrent

3 qu'il y a limitation du champ d'application. L'article aurait pu dire

4 qu'il y avait acquittement pour tout ou partie d'un chef d'accusation. Or,

5 il ne le dit pas, il parle de l'infraction.

6 Pourquoi? Parce que c'est un article qui ne prône pas une définition trop

7 large mais qui encourage à une définition plus étroite. Parce qu'elle

8 interpose à un jugement à mi-parcours dans le déroulement d'un procès. On

9 réduit davantage le champ d'application plutôt qu'on le ne l'élargit.

10 Voilà ce que nous aimerions dire en réponse à cette maxime que vous avez

11 citée.

12 Quant à savoir si c'est dans l'intérêt de la défense, nous disons qu'au

13 niveau philosophique, bien sûr, c'est toujours dans l'intérêt de la

14 défense d'abandonner telle ou telle poursuite sur un incident donné. Si

15 vous utilisez certains arguments, alors, voyez tous les faits matériels

16 repris dans un Acte d'accusation; vous pourriez les filtrer. Et ceci, bien

17 sûr, pourrait être d'un intérêt général pour la défense, effectivement.

18 Mais est-ce que ceci aide la défense dans la mesure où tel ou tel chef

19 d'accusation est déclaré abandonné? Non, je ne pense pas. Est-ce que c'est

20 d'un intérêt quelconque pour nous ou est-ce que ceci nous est nuisible?

21 Difficile de le dire, Monsieur le Juge.

22 Que se passerait-il si, au cours de la présentation des témoins à

23 décharge, un des témoins à décharge apportait la preuve qu'il y a eu

24 meurtre de l'une de ses victimes? Normalement, si vous voyez les chefs

25 d'accusation, vous pourriez peut-être tenir compte de cet élément au

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1 moment du délibéré final. Si vous acquittez un accusé à mi parcours du

2 procès, vous ne pourriez plus le faire. Je pense que, dans ce sens, c'est

3 peu improbable mais je pense que, dans cette mesure, ceci pourrait être

4 quelque part nuisible à l'accusation, mais aussi n'allant pas dans le sens

5 d'une décision définitive que vous devrez rendre, à savoir ce qui s'est

6 passé dans ces camps, comme nous l'avons repris dans l'Acte d'accusation.

7 Est-ce que ce serait expéditif? Est-ce que ce serait là faire preuve

8 d'économie judiciaire? Nous avons terminé la présentation de nos témoins à

9 charge, ce qui veut dire que les moyens, vous les avez déjà. Je ne vois

10 pas où interviendrait l'économie judiciaire si l'on avait une déclaration

11 de jugement maintenant, sur des éléments déjà versés au dossier, ou pas.

12 Je ne pense pas que ceci accélérerait ou retarderait le déroulement du

13 procès.

14 Voilà que j'aurais à vous dire, Monsieur le Juge, en réponse à vos

15 questions.

16 M. Riad (interprétation): Permettez-moi d'ajouter une explication:

17 pourquoi vous ai-je posé cette question? Parce que je reprenais le critère

18 que vous aviez évoqué à ce propos. Vous aviez dit qu'il ne devrait y avoir

19 aucun moyen de preuve établi de façon raisonnable pour entraîner

20 condamnation. Ce serait la norme appliquée pour déclarer qu'il y a

21 acquittement. Vous venez de dire que l'accusation a terminé la

22 présentation de ses moyens à charge. Elle n'a donc plus de preuve à

23 apporter.

24 Ici, je veux simplement comprendre. C'est pour cela que je vous pose la

25 question. Donc, vous n'avez plus l'occasion d'apporter davantage de

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1 preuves s'agissant d'un incident précis ou d'un élément d'un crime. Vous

2 n'avez plus de moyens de preuve à apporter et, au vu de ce que vous avez

3 déjà soumis, si l'on estime qu'il n'y a pas de chance raisonnable de

4 condamnation, une fois que la Chambre se saisit de ces questions, est-ce

5 que ceci réduirait les obligations de la défense puisque la défense

6 n'aurait pas à apporter des témoins ou des moyens de preuve tendant à

7 réfuter quelque chose qui aurait déjà été éliminé de l'Acte d'accusation?

8 Parce que cela aurait été abandonné vu l'absence de preuve raisonnable.

9 Cela pourrait rendre le processus un peu plus net, si vous voulez,

10 puisqu'il ne serait pas nécessaire d'apporter des preuves à décharge pour

11 des éléments à charge qui n'auraient plus été retenus. Ce serait une

12 économie d'argent pour le Tribunal. Mais si vous estimez que ceci perturbe

13 l'équilibre général du procès, c'est autre chose.

14 Mme Hollis (interprétation) : Tout d'abord, rappelez-vous qu'il n'y a pas

15 d'obligation de la part de la défense. Elle ne doit rien prouver ni

16 réfuter quoi que ce soit.

17 Si maintenant, il n'y a pas de preuve à apporter sur tel ou tel incident

18 précis, la défense ne doit même pas en parler, elle n'a aucune obligation

19 dans ce sens. Ceci n'impose aucune obligation à la défense. Elle n'en a

20 jamais eu, elle ne l'a jamais au pénal. Quelle que soit cette obligation,

21 elle peut décider de présenter tel ou tel document, mais uniquement si

22 elle le défend. Il n'y a pas de soulagement de ses obligations, de

23 diminution des questions puisqu'il n'y a pas d'obligation en tant que

24 telle.

25 Maintenant, si vous voyez tel ou tel élément constitutif d'une infraction,

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1 voici ce que nous estimons: si l'accusation avait retenu comme chefs

2 d'accusation contre ces accusés un chef spécifique d'accusation pour

3 chacune des victimes citées, si nous l'avions fait à ce moment-ci de la

4 procédure, en vertu du 98bis, vous pourriez peut-être faire une

5 déclaration de jugement s'agissant de ces chefs spécifiques qui portent

6 sur des accusations spécifiques, pour meurtre de victimes spécifiques pour

7 lequel nous n'aurions pas apporté de moyen de preuve. S'il y avait de tels

8 chefs spécifiques en vertu du champ d'application de cet article, vous

9 pourriez déclarer l'acquittement.

10 Mais nous revenons dès lors à la question du champ d'application. Nous

11 avons déjà fait part de notre position: nous estimons que, pour le moment,

12 il ne peut pas y avoir déclaration d'acquittement parce que ce sont des

13 chefs cumulatifs qui reprennent plusieurs victimes. On ne peut donc pas

14 déclarer que personne n'est coupable. Si nous avions des chefs

15 spécifiques, peut-être que cela aurait été le cas, mais cela n'aurait pas

16 été le cas.

17 Voilà ce que vous avez à décider pour ce qui est du chef d'accusation de

18 l'article. Merci.

19 M. Riad (interprétation): Je vous remercie une fois de plus.

20 M. le Président: Attendez un peu. Je vois que la sténotypiste anglaise a

21 des problèmes. Avez-vous une remplaçante? Donc vous pouvez avoir une

22 petite pause. Vous pouvez continuer?

23 Mme Wald (interprétation): J'ai une question à poser à Mme Hollis,

24 plusieurs d'ailleurs. Voici la première. Une question qui enchaîne sur

25 celle posée par M. le Juge Riad. Je pense en effet que vous essayez de

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1 franchir un obstacle difficile ici. Je sais qu'en théorie, le chef

2 d'accusation est celui de meurtre et il y a des incidents qui sont cités à

3 l'appui de ce chef dans les annexes. Mais je reviens toujours au fait que

4 la Chambre initiale avait dit qu'il fallait que vous fournissiez ces

5 listes afin de donner l'occasion à la défense de se préparer en vue du

6 procès. En d'autres termes, vous n'aurez pas pu vous contenter de dire:

7 "Voilà, vous êtes coupable de meurtre en vertu de l'Article 3 ou de

8 l'Article 5". Cela n'aurait pas été admis par la Chambre, je crois, à

9 moins bien sûr qu'il y ait eu ces listes ou annexes.

10 Maintenant, nous en arrivons à la fin de la procédure où vous avez

11 présenté certains incidents pour lesquels vous n'aviez pas de moyens de

12 preuve. Vous dites: "Gardez-les jusqu'à la fin, il se peut que les témoins

13 à décharge présentent des éléments qui permettront d'apporter la preuve

14 pour nous".

15 Mais si j'étais avocat de la défense, moi, je ne serais pas très rassuré

16 par cela. Je me dirais que tant que ces incidents restent dans l'Acte

17 d'accusation et n'avaient pas été rejetés par la Chambre après dépôt d'une

18 requête d'acquittement, je devrai me préparer en tant qu'avocat de la

19 défense.

20 Pourquoi faut-il se débarrasser de ces éléments généraux, alors que nous

21 passons à la présentation des moyens à décharge et que nous allons nous

22 concentrer sur ces éléments qui auraient mérité déclaration

23 d'acquittement, vu la requête. Pourquoi garder tout ce bois mort dans

24 l'espoir que, peut-être, la preuve sera apportée à leur encontre dans la

25 deuxième partie du procès?

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1 Ceci revient à la question fondamentale qui vous est posée, à savoir quel

2 est le champ d'application du 98bis?

3 Je vais vous donner un certain temps mais c'est un peu comme "Alice au

4 pays des merveilles": vous savez qu'il y a des mots et c'est à nous de les

5 interpréter. Et pour moi, le 98bis dit qu'en aucune circonstance, on ne

6 peut rejeter un des incidents. Il y a déjà deux autres Chambres qui ont

7 déjà pris cette voie, vous l'avez dit vous-même. Je crois que la question

8 n'est pas claire. Le tout est de prendre une décision qui ait du sens,

9 tant pour la bonne administration de la justice que pour ce procès. Mais

10 maintenant, je vous laisse terminer.

11 Mme Hollis (interprétation): Je pense que puisque, selon nous, c'est un

12 article dont le champ d'application est limité, parce que ceci

13 équivaudrait à une décision prise à mi parcours, il faut voir ce que

14 disent les termes de cet article.

15 Par rapport à d'autres articles, vous avez dit aussi, vous, en tant que

16 Juge, qu'il faut avoir une interprétation étroite pour les déclarations

17 sous serment. Ici, on parle des infractions retenues et c'est bien cela

18 qu'il faut considérer. Lorsque vous souvenez de l'ordonnance rendue par la

19 Chambre, c'était pour avoir un supplément de détails; nous estimons que ce

20 sont des faits matériels à l'appui des chefs d'accusation qui sont

21 cumulatifs puisqu'ils reprennent des allégations de meurtres perpétrés sur

22 plusieurs personnes. Ceci ne transforme pas pour autant cette

23 interprétation en chef individuel par meurtre.

24 C'est important, car c'est important pour bien interpréter le bon sens.

25 Nous estimons que ceci ne transforme pas le chef cumulatif en chef

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1 individuel et il faut s'en tenir aux termes de cet article qui, selon

2 nous, limitent l'interprétation et empêchent qu'il y ait acquittement.

3 Nous estimons qu'il n'y a pas grand chose d'autre à faire pour ce qui est

4 des incidents particuliers. Il n'y a donc pas obligation, ni de la part de

5 la Chambre ni de la part des accusés, car les accusés ont examiné la

6 question. Et là, pour ce qui est d'un incident précis, nous avons dit

7 qu'il n'y avait pas de preuve, donc ils n'ont pas à revenir.

8 Mme Wald (interprétation): Vous estimez donc que c'est un argument qui

9 porte sur l'interprétation de l'article parce que, pour vous, il n'y a pas

10 d'obligation?

11 Je prends ceci simplement comme exemple; si nous disons que les six ou

12 sept meurtres imputés à Kos et pour lesquels apparemment il n'y a pas de

13 preuve, alors on dirait: "Eh bien, on laisse tomber cela", mais on n'a pas

14 pour autant abandonné le chef d'accusation de meurtre. Vous avez encore

15 celui qui dépend de l'Article 3, de l'Article 5, donc vous n'êtes pas

16 lésés. Si ce n'est qu'effectivement, si des arguments sont apportés par la

17 défense dans sa présentation à propos de ces incidents, cela aurait été

18 abandonné; donc vous n'en auriez plus eu la possibilité. Et vous dites que

19 deux Chambres ont déjà opéré de la sorte?

20 Mme Hollis (interprétation) : Oui.

21 Mme Wald (interprétation): Donc, nous nous comprenons bien?

22 Mme Hollis (interprétation): Oui, et nous faisons valoir qu'il est peu

23 probable que, par la présentation des moyens à décharge, il y ait des

24 preuves apportées mais, si c'est le cas, cela voudrait dire qu'on a

25 abandonné des incidents très importants dans le cadre d'un chef

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1 d'accusation très important.

2 Et que feriez-vous de ces nouveaux moyens de preuve apportés? Ce ne sont

3 pas nécessairement des moyens que nous aurions apporté. Donc nous revenons

4 à la question de savoir ce qu'englobent les chefs d'accusation, si l'on

5 parle bien des infractions.

6 Mme Wald (interprétation): Et comment allez soutenir la charge ou la

7 preuve dans ce scénario si vous estimez maintenant? Bon, vous estimez:

8 "Voilà, nous n'avons pas apporté de preuve dans la présentation de nos

9 témoins" et si, apparemment, dans la présentation des témoins de la

10 défense, quelque chose apparaît, à ce moment-là, vous êtes-vous acquitté

11 de votre charge de la preuve?

12 Mme Hollis (interprétation): A ce moment-là, effectivement, il y aurait

13 au-delà de tout doute raisonnable, et vous devrez l'admettre, parce qu'à

14 ce moment-là, ce serait utilisé uniquement pour contredire les preuves de

15 l'accusation. Tout ce qui est présenté au moment de la décharge peut être

16 utilisé pour prendre votre décision et tout est fonction de ce que va dire

17 la personne au cours de sa déposition. Mais cela pourrait constituer le

18 fondement qui vous permettrait d'inclure un nouvel incident dans le cadre

19 du chef d'accusation général.

20 Mme Wald (interprétation): J'ai une deuxième série de questions à votre

21 intention.

22 Vous nous avez dit qu'à votre avis, nous devrions examiner telle ou telle

23 théorie précise de la responsabilité à ce stade, que ceci interviendrait

24 plus tard. Je vous cite: "Tout mode de responsabilité pourrait entraîner

25 déclaration de culpabilité". Mais je dois dire qu'à mon avis, si nous nous

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1 demandons s'il y a suffisamment de preuves pour entraîner une culpabilité,

2 après délibération de la Chambre, ceci doit être relégué à la théorie de

3 la responsabilité.

4 Je m'explique: vous avez fait des références par écrit et oralement aussi,

5 vous avez fait référence à la théorie du dessein commun, mais je ne sais

6 pas très bien ce que vous entendez par cette théorie. Il y a un ou deux

7 paragraphes dans l'affaire Tadic qui n'ont pas été appliqués. Mais, pour

8 moi, la théorie du dessein commun n'a jamais été appliquée. Il y a

9 quelques lignes dans l'affaire Kupreskic mais c'est tout à fait différent.

10 A ma connaissance, ceci n'a jamais été appliqué à un procès portant sur un

11 camp de concentration. Par conséquent, ceci ne m'aide pas beaucoup que

12 vous disiez: "Mais M. Prcac, on peut le déclarer coupable en vertu de

13 cette théorie du dessein commun". Et vous dites que la simple présence ne

14 suffit pas, qu'il faut ajouter le côté notoire de sa présence, son statut.

15 Je ne sais pas quels sont les textes que vous invoquez qui prouveraient

16 que, si c'était le cas, on pourrait faire machine arrière et l'on pourrait

17 dire que M. Prcac est responsable pour des choses qui se sont même

18 produites avant son arrivée au camp.

19 Ce n'est pas ce que vous dites, bien sûr, mais ce qui m'étonnerait encore

20 plus, c'est que l'une quelconque de ces personnes, à l'exception de Zigic

21 à qui l'on reproche des incidents spécifiques qui se sont produits à

22 Keraterm et à Trnopolje, j'ai repris votre annexe et je n'y trouve pas un

23 seul mot à cet égard en ce qui concerne les deux autres. Donc je ne vois

24 pas ce que vous entendez par la théorie du dessein commun. Est-ce que cela

25 s'adresse aux chefs? Est-ce que c'est rétroactif? Même antérieur à la

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1 période où il était dans le camp? Donc, je ne sais pas ce que je suis

2 censée évaluer pour savoir s'il y a suffisamment de moyens de preuve.

3 Je crois qu'à un moment donné tout ceci devra être tiré au clair. J'ai lu

4 les comptes rendus du procès de Nuremberg, je connais les détails mais ce

5 n'est pas simplement une baguette magique qu'on agite pour invoquer les

6 Saints Sacrements et aussi le dessein commun. Je n'attends pas de vous que

7 vous me fournissiez une explication circonstanciée mais je pense que c'est

8 important pour nous, pour décider.

9 Mme Hollis (interprétation): Merci d'avoir attiré notre attention sur ce

10 point Madame le Juge. Dans ce Tribunal, la Chambre d'appel Tadic s'est

11 penchée longuement.

12 Mme Wald (interprétation): Oui, il y a eu pratiquement quelques pages sur

13 le diktat.

14 Mme Hollis (interprétation): Effectivement. Voyez cette décision d'appel

15 lorsqu'on parle des modes de responsabilité.

16 Mme Wald (interprétation): Je l'ai lue.

17 Mme Hollis (interprétation): Donc, on examine d'abord la 195, lorsqu'un

18 examen précis de l'affaire montre qu'en général, la jurisprudence englobe

19 trois catégories distinctes de responsabilités collectives. Ceci se

20 poursuit jusqu'au paragraphe 228.

21 Mme Wald (interprétation): Oui. J'ai lu la totalité mais je ne pense pas

22 que ceci fournisse réponse à nos questions.

23 Mme Hollis (interprétation): On parle des camps de concentration et du

24 dessein commun. Mme Wald (interprétation): Mais on dit que c'est un des

25 trois modes de responsabilité collective, sans pour autant répondre à

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1 l'une quelconque des questions auxquelles nous devons répondre ici et

2 auxquelles je devrai répondre pour savoir si, à l'usage de sa théorie du

3 dessein commun, M. Prcac ou l'un des deux autres seraient tenus

4 responsables. De quoi? Quelle serait la portée, le champ d'application de

5 leur responsabilité?

6 M. le Président: Je profite de la pause pour vous dire que, comme vous

7 parlez la même langue, les interprètes ont des difficultés à vous suivre

8 et vous ne faites pas de pause. C'est toujours cela que nous disons à nos

9 confrères de la défense. Nous sommes dans la même situation. Comme je

10 parle ici plutôt le français, il y a l'opportunité de faire une pause.

11 Mais les interprètes ont des difficultés. Tenez compte de cela, s'il vous

12 plaît.

13 Mme Wald (interprétation): Je vous prie de m'excuser, Monsieur le

14 Président.

15 Les interprètes: Nous vous remercions, Monsieur le Président.

16 Mme Hollis (interprétation): Oui, on m'a demandé de tenir compte de ce

17 point et je vous présente également mes excuses.

18 Monsieur le Président, Madame et Messieurs les Juges, je vous dis que cet

19 arrêt de la Chambre d'appel vous donne les éléments dont vous manquez. Si

20 vous regardez ce qui s'est passé dans les camps, à savoir le contexte dans

21 lequel ces individus -et notamment l'accusé- ont agi, il importe de tenir

22 compte de cela. Cela vous fournit les éléments du dessein commun, de

23 l'entreprise commune, de ce qui se passait dans la municipalité de

24 Prijedor.

25 Là, des conclusions déjà prises par cette Chambre sont importantes

Page 6663

1 également, à savoir que les mauvais traitements subis par les personnes

2 dans ces camps avaient un rapport avec l'attaque systématique et

3 généralisée qui a eu lieu dans le cadre du conflit armé.

4 C'est dans ce contexte et en utilisant les éléments de preuve qui ont été

5 apportés à cet effet, au sujet d'un certain nombre d'infractions, qu'en

6 dernière analyse, en tant que Chambre de d'instance et en tant que Juges

7 individuels, vous pouvez, avec les qualifications juridiques nécessaires,

8 rendre une décision de culpabilité par rapport aux accusés.

9 Par exemple, Madame le Juge, si nous prenons ce qui s'est passé à Omarska

10 avant l'arrivée de Prcac, peut-il être considéré coupable dans le cadre du

11 dessein commun pour des actes commis avant son arrivée dans le camp? Nous

12 disons que vous pouvez très bien estimer que c'est impossible. Cependant

13 ce qui s'est passé avant son arrivée apporte la preuve du mode d'existence

14 dans le camp et de l'existence d'un dessein commun.

15 Mme Wald (interprétation): Mais il y a un point qui me dérange un peu:

16 Keraterm et Trnopolje. Etes-vous en train de dire que le dessein commun,

17 auquel il participait à Omarska, peut permettre de prononcer une décision

18 de culpabilité pour responsabilité par rapport à ce qui s'est passé à

19 Trnopolje et Keraterm. Je ne parle pas de Zigic mais des autres.

20 Mme Hollis (interprétation): Nous disons que, vu l'importance de ce

21 dessein commun, nous pouvons intervenir également sur l'autre camp, car le

22 dessein commun est plus large qu'un dessein individuel. Dans la

23 qualification juridique, la conduite de l'accusé à Omarska intervient.

24 Nous estimons que cette conduite est pertinente par rapport à tout ce qui

25 s'est passé dans les autres camps.

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1 Maintenant, est-ce que vous allez juger la responsabilité de ce qui s'est

2 passé dans les autres camps par rapport à ce qui s'est passé dans les

3 autres camps? Nous ne le savons pas. Ce ne sera pas nécessairement le cas,

4 mais nous disons que le contexte est pertinent. C'est lui qui permet

5 finalement de déterminer le mode de responsabilité; s'il y en a un qui

6 s'est appliqué dans la commission des actes ou des omissions. Parce que

7 finalement, ce sont ces actes et ces omissions que vous allez examiner

8 pour vous prononcer.

9 En déterminant le champ d'application de cette responsabilité et en tenant

10 compte de la doctrine du dessein commun, il y a aussi une troisième

11 catégorie selon laquelle on peut estimer qu'on n'avait pas l'intention

12 d'obtenir le résultat particulier que l'on a obtenu, à l'endroit où la

13 chose a été faite, etc. C'est à prendre en compte également.

14 Mme Wald (interprétation): Merci, j'ai compris.

15 M. le Président: Madame Hollis, je peux être d'accord avec votre notion

16 fondamentale, à savoir l'examen du mode de responsabilité, mais je crois

17 que vous savez où se situe mon problème. A savoir que personne, en tout

18 cas moi, je n'ai rien trouvé de ce genre dans l'arrêt Tadic. Rien qui me

19 permette de déterminer ce que vous, vous appelez un dessein commun de

20 responsabilité, celui dont vous êtes en train de parler ici.

21 Je suppose que cette notion peut être définie plus précisément plus tard,

22 mais ce que vous venez de me dire m'apporte déjà une certaine aide. Je

23 vous remercie.

24 Mme Hollis (interprétation): Je vous prie de m'excuser, Madame la Juge, si

25 j'ai peut-être été un petit peu obtuse à certains moments, mais j'ai

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1 essayé de traiter ce point. J'espère que cela vous aidera.

2 M. le Président: Oui, Madame Hollis. Encore d'une certaine façon lié à

3 cette question que nous venons de discuter, j'aimerais bien avoir vos vues

4 à propos de quelque doute que j'ai maintenant. J'aimerais l'éclaircir pour

5 mon travail et je vais vous demander votre aide.

6 Vous vous rappelez qu'au début, cette affaire a été Radic, Kvocka, Zigic

7 et Kos. Zigic était dans cette affaire par rapport aux événements à

8 Omarska, mais il était aussi dans une autre affaire, l'affaire Simic, je

9 crois, par rapport aux faits Keraterm et Trnopolje. Il y a eu un moment où

10 l'affaire Zigic a passé avec tout pour cette affaire. Donc il est venu, il

11 était déjà à cette affaire pour Omarska. Il est venu ici aussi, pour

12 Trnopolje et Keraterm.

13 Est-ce que je vois bien, Madame Hollis?

14 Mme Hollis (interprétation): Oui, Monsieur le Président.

15 M. le Président: Donc, ma question est la suivante: avant que Zigic vienne

16 à cette affaire, avec Trnopolje et Keraterm, les autres accusés à l'époque

17 -Radic, Kvocka et Kos- étaient déjà responsables même de cette théorie, du

18 point de vue du Procureur pour les événements de Keraterm ou Trnopolje? Ou

19 bien non?

20 Mme Hollis (interprétation): Monsieur le Président, si nous excluons Zigic

21 de la discussion, les événements de Keraterm et de Trnopolje ont

22 pertinence dans les charges retenues contre ces accusés, car ils font

23 partie de ce qui s'est passé à Prijedor, de façon générale. Ils font

24 partie du nettoyage ethnique des non-Serbes hors de la municipalité.

25 Dans ce contexte, les éléments sont significatifs. Le contexte est

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1 également significatif parce que, dans ces camps, un certain nombre

2 d'éléments permettent d'étayer le fait qu'il y avait un régime en vigueur

3 au sein de la municipalité de Prijedor, qui se caractérisait par la

4 répression à l'égard des non-Serbes dans les camps. Donc le contexte est

5 également significatif.

6 Pourquoi est-ce significatif? C'est significatif pour étayer des éléments

7 de droit commun; également pour prouver l'intention et les intentions

8 indirectes. C'est également significatif pour des qualifications

9 juridiques du comportement des accusés, des modes de responsabilité, si

10 vous voulez; et si nous revenons à la preuve, eh bien, le dessein commun:

11 prouver donc que tout cela allait au-delà des camps de concentration et du

12 mode de vie existant dans ce camp de concentration. Ces éléments sont,

13 dans ce cas, pertinents par rapport à l'ensemble et à tous les camps.

14 Si nous examinons les chefs d'accusation eux-mêmes, persécution par

15 exemple, le paragraphe 24 de l'Acte d'accusation indique pour l'essentiel

16 que ces hommes ont été coupables de persécution contre les Musulmans de

17 Bosnie, les Croates de Bosnie et d'autres non-Serbes dans le secteur de

18 Prijedor, pour des motifs politiques, religieux et raciaux. Alors, si vous

19 examinez ces mots, vous constaterez qu'il n'est pas dit qu'ils étaient

20 coupables de ce qui s'est passé à Keraterm ou Trnopolje, précisément.

21 Nous sommes d'avis qu'à la fin de ce procès, lorsque les Juges de cette

22 Chambre auront délibéré, les critères qui seront pris en compte, les

23 critères établissant la responsabilité dans le cadre d'un dessein commun,

24 entre autres, permettront aux Juges de prononcer un jugement de

25 culpabilité à l'égard de ces accusés, y compris dans d'autres camps, parce

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1 qu'ils ont participé à un dessein commun. Leur objectif, dans ces autres

2 camps, consistait à poursuivre le régime déjà en vigueur à Omarska ou à

3 continuer à commettre les violences qui ont été retenues contre eux.

4 Vous pourrez aussi estimer qu'ils avaient l'intention de commettre ces

5 autres violences. Donc le dessein commun est avéré, à moins d'avoir

6 limiter leur intention aux événements d'Omarska, mais en sachant que ce

7 régime de conduite répréhensible couvrirait également les crimes commis à

8 Keraterm et Trnopolje.

9 Dans la théorie du dessein commun, si vous participez à un dessein commun

10 et que vous ne visez pas un objectif particulier mais que ce résultat

11 particulier est prévisible, raisonnablement, à partir de ce que vous êtes

12 en train de faire, vous pouvez être considéré comme responsable pénalement

13 de ce qui s'est fait ailleurs également.

14 Donc, Monsieur le Président, Madame, Messieurs les Juges, dans vos

15 délibérations, vous pouvez conclure à leur responsabilité vis-à-vis de ces

16 autres actes ou de ces autres comportements répréhensibles.

17 La question se réduit au degré de responsabilité, car il y a un moment où

18 l'on doit se demander si ces hommes travaillant dans tel ou tel camp

19 étaient responsables et méritaient la sentence que vous leur infligerez.

20 S'il ne s'agissait que d'un camp, vous pourrez prononcer une sentence plus

21 légère que s'il s'agit de plusieurs camps. Mais la détermination vous

22 appartient et, dans la théorie du dessein commun, le mode de

23 responsabilité peut s'appliquer à tous les camps.

24 M. le Président: Madame Hollis, devant ce que vous venez de nous dire,

25 puis-je conclure que dans l'affaire Simic, les accusés dans l'affaire

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1 Simic sont aussi responsables pour tout ce dont on discute ici, par

2 rapport au camp d'Omarska?

3 Mme Hollis (interprétation): Je crois que la question qui se pose ici,

4 c'est: à quoi se rapporte la responsabilité, n'est-ce pas, Monsieur le

5 Président? Je crois également que c'est un des problèmes évoqués par Mme

6 le Juge Wald, comme étant un problème qui se posait à elle,

7 personnellement.

8 A notre avis, c'est une question qui ne peut être résolue qu'au terme de

9 ce procès, parce que les chefs d'accusation existent. Mais nous pensons

10 que ce qui permettra de se prononcer, c'est à quel moment, telle ou telle

11 personne est entrée dans le dessein commun. Même si un accusé est arrivé

12 au camp, disons, à la fin du mois de juillet -ce n'est pas le cas ici,

13 mais prenons cela comme exemple-: à la fin du mois de juillet, cette

14 personne arrive; si cette personne s'est jointe au dessein commun avant et

15 que vous, les Juges de la Chambre, vous pouvez déterminer que ce qui s'est

16 passé dans le camp était raisonnablement prévisible, eh bien, dans ce cas,

17 oui: ces personnes peuvent être considérées comme coupables de ce qui

18 s'est passé dans le camp, même avant leur arrivée dans le camp.

19 C'est un point de droit. Ce n'est pas un point de droit, à notre avis,

20 qu'il importe de discuter pour prononcer ou pas un jugement d'acquittement

21 mais nous disons que le point de droit se situe au niveau de la

22 participation d'une personne à un dessein commun. Si des éléments de

23 preuve existent, par rapport à des événements survenus avant, ils sont

24 tout de même pertinents, car ils permettent de prouver la continuité, la

25 permanence du dessein en question.

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1 Tel ou tel individu n'a pas besoin d'être présent au début du processus.

2 Il peut se joindre au processus plus tard. C'est là que se trouve le

3 défaut des arguments présentés par le conseil de la défense de l'accusé

4 Prcac. Il n'est pas nécessaire que vous soyez présent dès le début. Du

5 moment que vous montez à bord du bateau, votre responsabilité est

6 impliquée. Donc, à quel moment sont-ils responsables?

7 M. le Président: …(hors micro). Je ne sais pas. Peut-être que je vais

8 essayer de faire la pause maintenant pour reprendre la conférence de mise

9 en état après.

10 Mais peut-être, Madame Hollis, pourriez-vous terminer ce point? Nous

11 ferons la pause une fois que… maintenant que nous n'avons pas la

12 possibilité d'avoir un compte rendu. Rien n'est écrit maintenant, car nous

13 n'avons pas la sténotypiste.

14 Je crois que le plus pratique, c'est de faire la pause maintenant. Après,

15 nous reprendrons pour finir votre point et nous commencerons la conférence

16 de mise en état pour discuter des autres questions dont nous devons

17 discuter.

18 Voilà. Une heure de pause. Conférence de mise en état.

19 (L'audience, suspendue à 13 heures 5, est reprise à 14 heures 9.)

20 M. le Président: Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît.

21 <En anglais> Madame Hollis, comme vous le voyez, pour le compte rendu,

22 vous étiez "they don't have to be in at the beginning. Maybe we will see

23 what happened"

24 (Interprétation): Peut-être va-t-on pouvoir voir ce qui se passe à la fin.

25 Puisque vous avez terminé ce matin en disant: "Ils n'ont pas besoin d'être

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1 là au début".

2 Mme Hollis (interprétation): Monsieur le Président, j'ai lu la dernière

3 partie du compte rendu d'audience et j'ai lu aussi, dans cette fin du

4 compte rendu de ce matin, la phrase: "Ils peuvent se jointe à…".

5 J'ai également rappelé le principe évoqué ce matin par le Juge Riad: "Qui

6 peut le plus, peut le moins". Nous avons convenu que ce principe ne peut

7 pas s'appliquer à l'Article 98bis, mais il peut s'appliquer à ce que j'ai

8 dit moi-même, Monsieur le Président.

9 Je n'ai rien d'autre à ajouter, à moins que vous ayez des questions

10 supplémentaires à me poser.

11 M. le Président: J'ai encore une question, Madame Hollis.

12 Je vous ai donc posé la question de savoir si, dans l'affaire Zigic, les

13 accusés allaient aussi répondre pour les exactions commises à Omarska.

14 Mais je vous poserai peut-être la question d'une autre façon: avant de

15 joindre à l'affaire Omarska les exactions pour lesquelles Zigic était

16 responsable à Trnopolje et Keraterm, est-ce que la configuration de l'Acte

17 d'accusation a changé ou non? C'est-à-dire avant de joindre Zigic,

18 Keraterm et Trnopolje, est-ce que les accusés déjà présents à Omarska

19 étaient des responsables pour les exactions commises à Keraterm et

20 Trnopolje, ou bien ont-ils été, si je puis dire, seulement responsables

21 avec l'arrivée de Zigic à Trnopolje et Keraterm? Vous comprenez ma

22 question?

23 Mme Hollis (interprétation): Monsieur le Président, là encore, pour

24 apporter une réponse claire à votre question, il nous faut relire les

25 chefs d'accusation et le libellé utilisé dans ces chefs d'accusation.

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1 Si nous examinons les accusations de meurtre retenues contre quatre

2 accusés, en tout cas contre trois accusés avant l'arrivée de Zigic, dans

3 ces chefs relatifs aux meurtres, il est question des prisonniers

4 d'Omarska.

5 Dans les chefs relatifs à la torture, je pense que, dans les paragraphes

6 pertinents, il est question des prisonniers d'Omarska.

7 Si nous nous penchons sur les chefs relatifs aux persécutions -je crois en

8 avoir déjà parlé-, j'ai déjà dit que les termes utilisés dans ces chefs

9 d'accusation parlent de la région de Prijedor, donc une région plus vaste.

10 Dans ce contexte, Monsieur le Président, nous suggérons ce qui suit: pour

11 les chefs 1 à 3, impliquant Kvocka, Radic, Kos et, plus tard, Prcac, il

12 est possible pour les Juges de cette Chambre, compte tenu du libellé

13 utilisé dans l'Acte d'accusation, de prononcer une condamnation de

14 culpabilité par rapport à ce qui s'est passé dans les autres camps, en

15 s'appuyant sur un mode de responsabilités connu sous le terme "dessein

16 commun".

17 C'est le troisième mode de responsabilité, à savoir que l'on se joint à un

18 objectif, à un dessein commun, en ayant l'intention de faire un certain

19 nombre de choses. Mais d'autres crimes ont été commis qui ne rentrent pas,

20 qui ne sont pas couverts par l'intention initiale mais étaient

21 raisonnablement prévisibles comme devant en découler. Dans le cadre de ce

22 mode de responsabilité, les Juges de cette Chambre peuvent conclure,

23 d'après nous, que la responsabilité existe pour les crimes commis à

24 Keraterm et Trnopolje. Les mots utilisés dans l'Acte d'accusation

25 permettent aux Juges de se prononcer dans ce sens.

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1 Nous disons également qu'il s'agit d'une décision à rendre au moment du

2 jugement final. Ce n'est pas une décision à rendre dans le cadre de

3 l'application de l'Article 98bis.

4 J'espère avoir répondu à votre question, Monsieur le Président.

5 M. le Président: Merci beaucoup, Madame Hollis. J'aimerais encore en venir

6 à un autre aspect. C'est une question qui a été abordée par mes collègues.

7 Vous nous dites que, par exemple, le chef d'accusation "meurtre" inclut

8 plusieurs personnes. Je crois que, pour la définition de meurtre, si l'on

9 peut dire, pour le cadre abstrait de meurtre où l'on doit voir les

10 éléments de l'infraction, il n'existe pas un élément spécifique d'avoir

11 plusieurs personnes tuées.

12 C'est-à-dire, quand vous dites dans l'Acte d'accusation "plusieurs

13 personnes", il suffit d'avoir une personne morte pour maintenir le chef

14 d'accusation. Donc, dans le sens que M. le Juge Fuad Riad a demandé, si

15 l'on dit déjà, comme vous l'admettez, qu'il y a des preuves suffisantes…

16 D'une certaine façon, vous dites donc que vous vous placez dans la

17 jurisprudence Kordic pour affirmer que vous avez failli prouver le meurtre

18 de certaines personnes.

19 Si la Chambre acquitte les accusés concernés par rapport à cette personne

20 précise, est-ce que l'on touche le chef d'accusation? A la fin, le chef

21 d'accusation exige comme élément de fraction non d'avoir tué plusieurs

22 personnes, mais il suffit d'en avoir tué une.

23 Voudriez-vous réagir à cela? Comme je vous l'ai dit, dans le cadre

24 abstrait de la définition du meurtre, on exige le meurtre d'une personne,

25 pas de plusieurs personnes. C'est un peu mon doute. Quel est votre avis?

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1 Mme Hollis (interprétation): Monsieur le Président, dans les chefs

2 d'accusation 4 et 5 au moins, mais également à l'encontre de l'accusé

3 Zigic, dans les chefs d'accusation 6 et 7 également, si nous regardons le

4 paragraphe 34, nous trouvons déterminée une période qui va du 24 mai au 30

5 août et également la définition des victimes. Et il est indiqué que

6 "Kvocka, Prcac, Kos et Radic ont participé aux meurtres de prisonniers -au

7 pluriel- dans le camp d'Omarska, notamment de ceux dont les noms figurent

8 en annexe".

9 Donc les noms mentionnés dans les annexes font partie d'un univers de

10 victimes. La même remarque s'applique pour les chefs 6 et 7, au paragraphe

11 37, même période de temps. Accusé: Zigic. "Tout seul ou avec d'autres, il

12 a pénétré dans les camp d'Omarska et de Keraterm, et participé aux

13 meurtres de prisonniers -au pluriel." Ensuite, nous lisons "en rapport

14 avec les annexes A à D, s'agissant des victimes".

15 Donc s'agissant de ces charges de meurtres concernant plus d'une personne,

16 nous disons, Monsieur le Président, qu'à la conclusion de ce procès, il

17 est possible de prononcer une condamnation de culpabilité par rapport aux

18 charges 4 et 5 mais, selon ma pratique, c'est exceptionnel que l'on

19 prononce la culpabilité pour un meurtre d'une seule personne. Donc, il

20 faut que les éléments constituants à l'infraction de meurtre existent,

21 même s'il s'agit d'une seule victime. Il faut, autrement dit, avoir le nom

22 ou ne pas avoir le nom de la personne tuée, mais que l'accusé voie ses

23 actes ou ses omissions qualifiés juridiquement de telle façon que cela

24 permette de le voir répondre de la responsabilité pénale vis-à-vis de ces

25 meurtres et également d'une intention préexistante.

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1 Vous pouvez donc prononcer une déclaration, une condamnation pour

2 culpabilité d'une personne uniquement, mais cela transformerait chaque

3 victime en un chef distinct dans l'Acte d'accusation. Dans notre

4 argumentation, nous disons que nous n'avons pas, dans le Règlement, la

5 possibilité de spécifier les victimes, car il n'y a pas de chef de meurtre

6 individuel, pour chacune des victimes prises séparément. Les annexes ne

7 nous donnent pas des chefs d'accusation de meurtre individuel. Ce sont

8 simplement des détails supplémentaires à l'appui des charges relatives à

9 des meurtres multiples.

10 M. le Président: Très bien. Je crois que nous n'avons pas d'autres

11 questions. De cette façon, nous finissons l'audience pour entendre la

12 requête ou les requêtes d'acquittement des conseils de défense. Et donc

13 nous allons poursuivre nos travaux avec la conférence de mise en état qui

14 avait été annoncée et avec l'ordre du jour que nous avions déjà annoncé

15 aussi.

16 Donc l'accusation a utilisé 53 jours d'audience afin de présenter ses

17 éléments de preuve à charge contre les cinq accusés. La défense devrait en

18 principe bénéficier du même nombre de jours pour présenter ses moyens de

19 preuve à décharge.

20 La Chambre estime que chaque accusé devrait bénéficier d'au moins deux

21 semaines pour présenter ses moyens de preuve à décharge. Sur ce point,

22 j'aimerais bien entendre et voir quelles sont les vues de chaque conseil

23 de défense, notamment sur le nombre de témoins qu'il estime présenter.

24 Il faut dire une chose avant de donner la parole. Comme vous le savez,

25 nous devons discuter de cette requête d'acquittement. La Chambre n'a pas

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1 encore pris de décision, mais nous savons déjà une chose: c'est que la

2 défense va continuer au moins pour quelques accusés, au moins pour

3 l'accusé qui n'a pas déposé une requête d'acquittement et au moins pour

4 quelques accusés qui ont quand même déjà expressément admis de continuer à

5 discuter. Nous allons donc discuter de cela sous la réserve de la décision

6 de la Chambre, c'est-à-dire pour le pire, si je peux dire comme cela, pour

7 le pire.

8 Les nombreux conseils de la défense vont dire quels sont leurs projets,

9 quel est leur plan pour la présentation des moyens à décharge, à commencer

10 maintenant pour celle-ci. Quel est le nombre de témoins que chaque conseil

11 prévoit de présenter comme témoins à décharge?

12 Après avoir dit cela, je donne la parole à Me Krstan Simic.

13 M. K. Simic (interprétation): Merci, Monsieur le Président. Je dois

14 souligner que la question dont nous allons débattre à présent est d'une

15 certaine façon liée à l'audience qui a précédé, audience au cours de

16 laquelle ont parlé les représentants de l'accusation et de la défense,

17 ainsi que les Juges de la Chambre.

18 Notre position consiste à dire d'emblée que la pratique en vigueur ici

19 constitue un problème, car elle s'écarte de celle de tous les systèmes

20 judiciaires existants. Vous vous rappellerez peut-être au début du procès

21 lorsque, dans une plaisanterie, j'ai dit que j'espérais que M. Niemann

22 n'allait pas me mettre en état d'arrestation. Or, aujourd'hui nous venons

23 d'entendre la représentante du Bureau du Procureur, Mme Hollis, confirmer

24 sa théorie selon laquelle la doctrine du dessein commun équivaut à une

25 responsabilité commune et collective.

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1 Parlons d'un individu qui occupe une certaine position et qui prend… qui,

2 de l'avis de la défense, est dans une situation très complexe. Nous avons

3 –je dois le dire- beaucoup de mal à organiser notre défense.

4 L'Article 98bis comporte une autre disposition qui permettrait à la

5 Chambre de première instance de rendre une décision d'acquittement ou de

6 rendre une décision "pro motu". Au vu des éléments présentés au cours de

7 la présente affaire, je dois dire que pas un seul témoin n'a mentionné le

8 fait que M. Kvocka était présent lors d'un seul meurtre, d'un seul

9 incident, d'une seule torture.

10 Mme Hollis (interprétation): L'Article 98bis vient d'être évoqué par le

11 conseil de la défense et l'accusation élève une objection. En effet, le

12 conseil n'a soumis aucune écriture, aucun document: nous estimons donc

13 qu'actuellement, il est inacceptable, il n'est pas correct pour le conseil

14 de la défense d'invoquer l'Article 98bis.

15 M. le Président: Maître Krstan Simic, j'étais en train de savoir où vous

16 vous voudriez arriver, parce que la question que je vous ai posée, c'est

17 la présentation des moyens de défense à décharge, et notamment du nombre

18 des témoins. Je peux comprendre que vous vous voudriez dire que vous êtes

19 dans des conditions difficiles pour penser et organiser votre défense.

20 Mais cela n'est pas nécessaire de reprendre tout le débat que nous avons

21 déjà fini. Maintenant, nous avons ouvert une autre page.

22 Donc voilà: quelle est votre réponse par rapport à cette question du

23 nombre de témoins que vous estimez présenter comme moyens à décharge?

24 M. K. Simic (interprétation): Monsieur le Président, j'accepte votre

25 intervention mais je voulais tout de même terminer. Cette question place

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1 la défense dans une situation telle que finalement, nous risquons de faire

2 le travail du Procureur.

3 Lorsque je dis que nous risquons de faire le travail du Procureur, je

4 déclare que la défense a l'intention de citer 27 témoins. Elle a également

5 six témoins éventuels, potentiels et il y aura deux témoins experts et

6 deux affidavits, deux témoins par affidavit. Ce que je voudrais dire,

7 c'est que nous sommes placés dans une situation désormais où nous sommes

8 responsables de ce qui s'est passé dans toute la région de Prijedor et au-

9 delà. C'est donc de tout cela que nous devons nous occuper. Nous devons

10 nous occuper de l'organisation du camp; or, le Procureur nous a communiqué

11 un grand nombre de documents qui démontrent que l'organisation du camp

12 était dans leurs possibilités.

13 M. le Président: Maintenant, si vous vouliez discuter de cela, vous

14 devriez avoir déposé une requête d'acquittement pour en discuter. A

15 présent, c'est de la défense et de ses moyens que nous discutons

16 maintenant. Vous nous avez dit: 27 témoins, 2 témoins experts. Conformez-

17 vous, s'il vous plaît, aux questions.

18 M. K. Simic (interprétation): Bien. 21 témoins par affidavit et nous avons

19 également l'intention de citer à la barre un représentant du Bureau du

20 Procureur pour traiter de questions d'identification, remettre en cause

21 ces identifications.

22 Donc le temps minimal dont nous avons besoin est de deux à trois semaines

23 mais, bien sûr, tout dépend de ce qui se passera par le truchement des

24 écritures.

25 On sait bien ici qu'il est facile de prévoir sur un temps théorique mais

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1 qu'on ne sait pas très bien ce qui se passera dans la pratique. Le

2 comportement de l'accusation crée cette balance dont le balancier peut

3 aller dans un sens ou dans un autre. C'est la raison pour laquelle nous

4 pressentons une liste de témoins assez longues. Nous déposerons une

5 requête avant le 15 qui contiendra la liste de ces témoins et les faits

6 sur lesquels ils ont l'intention de témoigner.

7 En ce qui concerne le mémoire préalable au procès, il a été déposé le 15

8 septembre 1999 et nous estimons que nous avons déjà indiqué les grandes

9 lignes de la défense de M. Kvocka dans ce document écrit. Je vous

10 remercie, Monsieur le Président.

11 M. le Président: Vous avez peut-être devant vous l'ordonnance du 23

12 novembre, l'ordonnance de la Chambre. Là, dans cette ordonnance nous avons

13 fixé l'ordre du jour. Notamment le point II: Conférence de mise en état, à

14 la même date, afin d'aborder les points qui suivent et ils sont indiqués.

15 Nous allons les traiter un par un pour bien organiser nos travaux, car

16 nous travaillons avec cinq conseils et donc il faut bien organiser les

17 travaux. Maintenant, nous en sommes seulement à considérer le nombre des

18 témoins que la défense de chacun des accusés entend citer et, après, nous

19 préciserons toute une série de points que vous voyez sur l'ordonnance,

20 chacun pour chacun. C'est mieux que de les traiter tous dans la globalité.

21 Maintenant, je donnerai la parole à Me Nikolic pour traiter la question du

22 nombre de témoins que la défense entend citer.

23 M. Nikolic (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

24 Mais ce chiffre que je dois vous soumettre, je ne peux le faire, si vous

25 me le permettez, qu'après quelques mots d'introduction. Vous m'autorisez à

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1 les prononcer?

2 M. le Président: Votre parcours va vous amener à trouver le numéro que

3 vous ne savez pas encore, Maître Nikolic, ou bien avez-vous déjà le nombre

4 de témoins?

5 M. Nikolic (interprétation): Pour être concret, Monsieur le Président…

6 M. le Président: Rapidement, Maître Nikolic.

7 M. Nikolic (interprétation): En réponse à cette question, je m'appuierai

8 sur l'Article 82 du Règlement, où il est question de procès joints ou

9 disjoints. Chaque accusé a droit, dans un procès joint, à être jugé comme

10 s'il avait un procès individuel.

11 Le nombre de témoins dépend grandement de la décision de la Chambre par

12 rapport à la requête de la défense, en vertu de l'Article 98bis du

13 Règlement, déposé le 6 octobre par la défense, ainsi que de la

14 présentation des éléments de preuve relatifs à l'accusé Kvocka, qui seront

15 entendus avant ceux de l'accusé Kos. A ce moment précis, la défense

16 prévoit de citer à la barre environ quinze témoins, mais en fonction des

17 circonstances que je viens d'évoquer, ce chiffre pourrait éventuellement

18 être divisé par deux.

19 La défense a besoin, elle le répète, d'un procès équitable et rapide mais,

20 en même temps, elle pense qu'il est tout à fait capital que le procès ne

21 dure pas un temps exagéré. C'est la raison pour laquelle elle déclare que,

22 selon son appréciation, elle pense avoir de besoin de cinq à sept jours

23 pour la présentation de ses éléments de preuve mais elle insiste également

24 pour que soit respecté l'Article 82 du Règlement de procédure et de preuve

25 de ce Tribunal.

Page 6680

1 M. le Président: Très bien, Maître Nikolic. Nous allons continuer avec les

2 autres points. Maître Fila, vous avez droit, une fois que nous avons

3 établi cela, à deux ou trois mots d'introduction et, après, vous devez

4 répondre à la question du nombre de témoins, s'il vous plaît.

5 M. Fila (interprétation): Monsieur le Président, la situation est très

6 simple. Y aura-t-il ou n'y aura-t-il pas de témoins entendus devant un

7 officier instrumentaire à Banja Luka? Si ces dépositions devant officier

8 instrumentaire se font, alors j'aurai besoin de deux semaines qui me

9 suffiront, dix-neuf témoins, trois ou autre témoins experts, nous verrons,

10 et quelques témoins par affidavits qui ne prendront pas très longtemps. Si

11 ces dépositions devant officier instrumentaire se déroulent à Banja Luka,

12 il y aura quarante huit témoins, plus quatre témoins experts et j'aurais

13 besoin de sept jours de procès, si elles n'ont pas lieu. Voilà ma réponse.

14 M. le Président: Merci, Maître Fila. Donc maintenant, Maître Stojanovic?

15 M. Stojanovic (interprétation): Merci, Monsieur le Président. Je

16 n'abuserai pas de votre temps en vous détaillant les problèmes qui sont

17 les nôtres. Mais nous aimerions vous faire connaître une information

18 provisoire: nous avons l'intention d'entendre vingt-deux témoins

19 réguliers, trois devant officier instrumentaire, huit témoins alternatifs

20 -je répète que tout ceci est encore assez provisoire- et trois témoins

21 experts. Mais cela vous aidera peut-être de savoir que M. Zigic sera

22 entendu au nombre des témoins et nous prévoyons de l'auditionner pendant

23 plusieurs jours.

24 Maintenant, je ne suis pas sûr d'avoir bien compris ce que vous pensiez en

25 parlant de deux semaines. Aviez-vous en tête deux fois cinq jours de

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1 travail? Quoi qu'il en soit, notre position consisterait à dire que nous

2 aurons besoin, en tout état de cause, de davantage de temps, car notre

3 client est le seul accusé pour les trois camps. Nous savons bien combien

4 de temps a été consacré à Omarska. Pour Zigic, il faudra parler beaucoup

5 plus longtemps de Keraterm et ensuite de Trnopolje. Donc, l'audition de

6 tous ces témoins, en principe, devrait nécessiter un peu plus de temps que

7 les deux semaines dont vous avez parlé, Monsieur le Président. Je vous

8 remercie.

9 M. le Président: Merci beaucoup. Maître J. Simic?

10 M. J. Simic (interprétation): Monsieur le Président, la défense de M.

11 Prcac prévoit d'entendre au Tribunal de La Haye quatorze à seize témoins.

12 Et parmi eux, un témoin expert, ainsi que seize témoins par affidavit. Il

13 nous faudra avoir un entretien avec les représentants du Bureau du

14 Procureur. Nous avons demandé cet entretien. Il aura lieu aujourd'hui ou

15 demain, car un certain nombre de témoins qui n'ont pas été cités par le

16 Procureur, nous les citerons de notre côté. Et cela constituerait un

17 certain nombre de témoins au total qui entrerait dans le délai mentionné

18 par vous, à savoir deux semaines.

19 Mais je dis également qu'un certain nombre de choses dépendent de ce qui

20 se passera à Banja Luka et de la décision que la Chambre rendra sur

21 l'Article 98bis. Dans certaines circonstances, si tout va bien, nous

22 pourrions réduire le nombre de témoins que nous citerons à la barre et

23 donc avoir besoin de moins de temps que ce que je viens d'indiquer. Merci.

24 M. le Président: Merci beaucoup, Maître Jovan Simic.

25 Donc ce nombre de témoins que nous savons, que nous avons déjà considéré

Page 6682

1 est provisoire.

2 Nous prenons un peu connaissance de la dimension de la défense; c'est donc

3 provisoire.

4 Il est nécessaire quand même de discuter après éventuellement des mémoires

5 préalables qui vont être présentés par la défense. Il faut les étudier, il

6 faut en discuter. Mais on doit commencer quand même avec une idée.

7 Il y a un autre aspect que j'aimerais bien considérer avec vous, c'est le

8 nombre de témoins avec mesures de protection. Afin de ne pas perdre de

9 temps d'audience, la défense des accusés peut-elle faire savoir, avant le

10 commencement de la présentation des éléments de preuve à décharge, quelles

11 mesures de protection des témoins elle envisage et pour quels témoins?

12 Maître Krstan Simic, avez-vous une idée maintenant?

13 M. K. Simic (interprétation): Monsieur le Président, Madame et Monsieur

14 les Juges, nous n'avons pas l'intention de demander des mesures de

15 protection. A une exception près, j'aimerais vous l'expliquer. La défense

16 a l'intention de citer à la barre un témoin qui avait aussi été cité par

17 l'accusation, qui a déjà déposé et nous demanderons, en ce qui le

18 concerne, les mêmes mesures de protection que celles dont il avait été

19 bénéficiaire en tant que témoin à charge. Alors que s'agissant des autres

20 témoins, ils déposeront avec leur nom, leur nom de famille mais sans

21 aucune mesure de protection. Merci.

22 M. le Président: Très bien, Maître Krstan Simic. Merci beaucoup.

23 Maître Nikolic?

24 M. Nikolic (interprétation): Madame et Messieurs les Juges, vu sous cet

25 angle, je pense qu'il nous faudra peut-être demander des mesures de

Page 6683

1 protection pour un seul témoin mais tout sera fonction, une fois de plus,

2 du nombre de témoins lorsqu'on déterminera les détails précis. Merci.

3 M. le Président: Okay. Merci beaucoup, Maître Nikolic. Maître Fila, s'il

4 vous plaît?

5 M. Fila (interprétation): Monsieur le Président, je vais malheureusement

6 vous fournir la même réponse. S'il y a prise de dépositions par officier

7 instrumentaire, à Banja Luka, comme je l'ai déjà dit dans mes écritures du

8 14 décembre 1999, là vous disposez de tous les faits par écrit. A ce

9 moment-là, ces témoins demanderont des mesures de protection, s'ils ne

10 peuvent pas déposer à Banja Luka, pour venir à La Haye et pour en

11 retourner. Et aussi des sauf-conduits.

12 A ce moment-là, s'il n'y a pas de déposition, il n'y aura pas 48 témoins

13 mais 19. Et là je demanderai les mêmes mesures une fois ces témoins

14 arrivés à La Haye. Ceux qui viennent de toutes façons, ceux qui viennent

15 indépendamment des dépositions ou pas déposeront sans mesure de

16 protection. Mais tout dépend de ce qui va se faire à Banja Luka. Je vous

17 remercie, Monsieur le Président.

18 M. le Président: Nous verrons ce que nous ferons à Banja Luka; c'est un

19 autre point à discuter par la suite. Excusez-moi de ne peut-être pas vous

20 donner l'ordre qui était convenable pour vous. Maître Stojanovic, s'il

21 vous plaît?

22 M. Stojanovic (interprétation): Je vous remercie, Monsieur le Président,

23 Madame et Monsieur les Juges. Nous avons déposé nos écritures hier et nous

24 demandons des mesures de protection, toutes les mesures disponibles

25 d'ailleurs, pour un seul témoin. Mais pour le moment, nous ne pensons pas

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1 que ces mesures de protection soient indispensables pour d'autres témoins.

2 Nous verrons ce que le temps dira. Merci.

3 M. le Président: Maître Jovan Simic?

4 M. J. Simic (interprétation): Monsieur le Président, pour l'instant, la

5 défense de M. Prcac ne demande pas de mesures de protection pour l'un

6 quelconque des témoins qu'elle va citer à la barre, que ces dépositions ou

7 que ces auditions se fassent ici ou à Banja Luka.

8 M. le Président: Merci beaucoup, Maître Jovan Simic. Une autre question à

9 considérer. Excusez-moi de vous faire lever plusieurs fois mais c'est un

10 bon exercice après être resté ici beaucoup de temps. L'autre point, ce

11 sont les résumés des faits au sujet desquels chaque témoin déposera.

12 L'Article 60ter(G), comme vous le savez, requiert que la défense donne un

13 résumé des faits au sujet desquels chaque témoin déposera. Cela permet une

14 meilleure rationalisation de la présentation des éléments de preuve. En

15 effet, la Chambre souhaite que les témoins appelés à témoigner ne déposent

16 pas sur des faits qui ne sont pas contestés ou ont été l'objet du constat

17 judiciaire.

18 J'ajoute que les conseils de la défense pourraient même s'entendre afin de

19 présenter des témoins communs lorsque, par exemple, il est reproché un

20 crime commun à tous les accusés. Donc nous sommes encore dans cette vision

21 provisoire, prospective de la défense. Il faut quand même tenir compte que

22 le Procureur doit au minimum se préparer pour le contre-interrogatoire,

23 c'est-à-dire que le Procureur doit avoir l'information sur les événements

24 ou les faits à propos desquels chaque témoin vient déposer.

25 Donc, en tenant compte de tout cela, je donne la parole maintenant à Me

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1 Krstan Simic pour la question des résumés des témoins. Où en êtes-vous par

2 rapport à cette question?

3 M. K. Simic (interprétation): Monsieur le Président, jusqu'au 15, qui est

4 la date butoir, d'ici à là, nous allons vous présenter tous les résumés en

5 conformité avec la date butoir que vous avez prescrite. Merci.

6 M. le Président: Très bien, Maître Krstan Simic. Maître Nikolic?

7 M. Niemann (interprétation): Nous allons bien entendu communiquer ces

8 résumés à la partie adverse, avant la présentation des moyens à décharge.

9 C'est ce que je demanderai. Merci.

10 Avant la présentation des moyens à décharge pour M. Kos.

11 M. le Président: D'accord. Très bien, Maître Nikolic.

12 Maître Fila?

13 M. Fila (interprétation): Monsieur le Président, nous devons d'abord

14 régler une question qui se pose ici. La voici: est-ce un procès équitable

15 si les avocats des cinq accusés vous présentent, le 15, un résumé de leur

16 défense, même si les témoins ne seront appelés à témoigner que trois ou

17 quatre mois après? Ou sommes-nous censés présenter ces résumés avant la

18 présentation individuelle de chaque accusé?

19 J'aimerais savoir si toutes les cinq équipes de défense doivent présenter

20 ces résumés en même temps, ce qui ne nous convient pas, bien sûr. Par

21 exemple, lorsque M. Simic en aura terminé, est-ce que Me Nikolic va

22 présenter ses moyens et ainsi de suite?

23 Dans ce sens, j'aimerais que la Chambre se prononce et nous respecterons

24 la décision prise par les Juges, quelle qu'elle soit. Je vous remercie.

25 Voulez-vous que j'acquitte de cette tâche d'ici au 15? Si vous le voulez,

Page 6686

1 je le ferai, mais je préférerai l'autre option. En effet, de cette façon,

2 nous verrons quels sont les moyens apportés par les conseils qui

3 présenteront leurs témoins auparavant? Et l'accusation recevra bien sûr

4 ces résumés dans un délai de huit à dix jours avant la présentation de mes

5 moyens de défense à moi.

6 M. le Président: Oui, merci beaucoup, Maître Fila. Nous allons avoir les

7 réactions du côté de l'accusation, de Mme Hollis, à propos de tout ce qui

8 est dit ici.

9 De toutes façons, au moins dans mon esprit, il y avait l'idée que la

10 présentation, l'ordre de présentation des témoins à décharge se ferait

11 selon la présentation dans l'ordre de l'acte d'accusation, c'est-à-dire ce

12 que nous faisons ici maintenant: en premier lieu, l'accusé Kvocka, après

13 Kos, après Radic, après Zigic, après Prcac. Voilà, selon l'ordre de l'acte

14 d'accusation, chaque conseil présentera ses moyens à décharge dans cet

15 ordre. Nous tiendrons donc compte de cela.

16 De toute manière, je vais donner la parole à tous sauf, Madame Hollis, si

17 vous voulez répondre à chaque question. Que préférez-vous, Madame Hollis?

18 Vous pouvez choisir; parfois, il est possible de pouvoir choisir, parfois

19 non.

20 Mme Hollis (interprétation): Monsieur le Président, …

21 M. le Président: La question est seulement de savoir si vous préférez

22 prendre la parole pour vous prononcer sur toutes les questions que nous

23 allons aborder avec la défense ou si vous préférez intervenir après chaque

24 considération?

25 Mme Hollis (interprétation): Monsieur le Président, nous n'avons pas de

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1 réponse à la plupart des questions posées parce que c'est quelque chose

2 qui concerne la Chambre et la défense. Nous n'aimerions intervenir que sur

3 un point: celui de savoir à quel moment les accusés doivent vous fournir

4 ces résumés. Est-ce que nous pouvons intervenir sur ce point maintenant?

5 M. le Président: Oui, peut-être que cela peut nous aider.

6 Mme Hollis (interprétation): Tout d'abord, nous ne pensons pas que ce

7 serait violer que ce serait violer la règle du procès équitable si tous

8 les accusés communiquaient leur résumé d'ici au 15 décembre. D'autant que

9 ceci permettrait le meilleur déroulement du procès.

10 Pourquoi? Parce qu'il y a une différence dans le Règlement entre la

11 communication effectuée par le Procureur et la communication que doit

12 faire la défense. Rien dans le Règlement ni dans le Statut ne dit quoi que

13 ce soit à ce propos, si ce n'est qu'il y a l'avis de défense positif qui

14 exige communication par la défense à l'accusation de la teneur des

15 dépositions, à l'exception de l'article 65ter.

16 Par conséquent, si nous voyons quelle est la situation, l'accusation doit

17 communiquer toutes les déclarations préalables de témoins à la défense et

18 doit aussi fournir ses résumés, en vertu du 65ter. Le seul instrument du

19 Règlement par lequel l'accusation est informée de la teneur des

20 dépositions des témoins, c'est par le moyen du 65ter. Pour nous permettre

21 de poursuivre le procès et de bien préparer les contre-interrogatoires, il

22 faut que nous recevions ces résumés bien à l'avance, avant la déposition

23 des témoins. Nous pensons qu'il ne suffit pas que l'accusation reçoive ces

24 résumés huit ou dix jours avant que soient présentés les moyens à décharge

25 d'un accusé en particulier. Parce que ce résumé est la seule information

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1 que nous ayons à propos de ce que dira ce témoin et nous n'avons pas

2 suffisamment de temps, à ce moment-là, pour bien nous préparer au contre-

3 interrogatoire. Cette situation est différente de celle qui se présente

4 pour l'accusé parce que les règles de communication sont différentes.

5 Nous demandons dès lors que vous demandiez à la défense de vous fournir

6 ces résumés d'ici au 15 décembre. Nous demandons également que ce soient

7 des résumés suffisamment détaillés pour nous permettre de procéder à un

8 bon contre-interrogatoire des témoins.

9 Mme Wald (interprétation): J'ai une question à vous poser, Madame Hollis.

10 Votre situation est différente de celle de la défense, mais il y a un

11 obstacle supplémentaire pour la défense: en théorie -en pratique aussi,

12 j'en suis sûre-, l'accusation sait ce qu'elle va défendre comme thèse

13 avant de commencer le procès. Elle connaît quels seront ses témoins, alors

14 que nous avons ici cinq accusés différents. Il se peut que certains

15 témoins, comparaissant pour M. Kvocka, disent des choses qui pourraient

16 avoir des implications pour les autres accusés, par exemple pour Kos. Et

17 je pense que vous allez peut-être vous en tenir à votre règle, mais qu'il

18 faut faire preuve d'une certaine souplesse aussi, c'est-à-dire qu'il

19 faudra peut-être avoir la possibilité de proroger les délais si quelque

20 chose survient qui n'avait pas été prévu.

21 Mme Hollis (interprétation): Nous convenons de cela et cet article du

22 Règlement s'applique à l'accusation car, au moment de la présentation de

23 nos témoins à charge, des questions peuvent survenir qui pourraient

24 trouver une solution ailleurs. Nous nous tenons aux termes de l'article

25 lorsqu'on parle de la communication des déclarations des témoins déjà

Page 6689

1 reconnus. Si, par la suite, vous avez d'autres témoins, il faut

2 communiquer leur déclaration également.

3 Bien sûr que des témoins peuvent être ajoutés ou retirés de la liste qu'on

4 avait au départ, suivant le cours du procès.

5 Mme Wald (interprétation): Oui, je pensais aussi à un témoin en

6 particulier, le témoin A. Si nous apprenons le 15 décembre que le Témoin A

7 est le témoin de M. Kos et qu'il dit: "Voilà, je vais déposer" et puis, au

8 cours de la présentation des témoins pour Kvocka, certains éléments de

9 preuve sont avancés et qui feraient que M. Kos doit évoquer d'autres

10 aspects que pourrait évoquer le témoin en question, peut-être que

11 l'accusation indignée va faire objection à ce qu'on dépasse disons le

12 champ d'application ou la portée du résumé présenté.

13 Mme Hollis (interprétation): Nous ne le ferions pas, Madame le Juge. Je

14 pense que nous avons besoin d'un certain temps pour procéder au contre-

15 interrogatoire de choses qui sont un peu surprenantes pour nous mais il

16 faut, bien sûr, de la souplesse pour permettre ce genre de circonstances.

17 M. le Président: Oui, très bien donc. De toutes façons, Me Fila avait

18 soulevé cette question de présenter ensemble ou non et il a dit qu'il se

19 soumettrait à la décision de la Chambre. De toutes façons, nous pourrions

20 quand même avoir une idée de ce que pensent les conseils de la défense. Si

21 les conseils de la défense sont d'accord, il n'est pas nécessaire de

22 décider de la question. De toutes façons, on peut peut-être considérer

23 cette question spécifique à la fin et nous allons continuer avec les

24 questions que nous avions à traiter. Je vois maintenant que c'était à Me

25 Stojanovic de se prononcer sur cette question des résumés. Donc, avez-vous

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1 déjà préparé quelque chose? Et quelle est l'extension, etc.?

2 M. Stojanovic (interprétation): Monsieur le Président, j'ai mentionné des

3 écritures déposées avant-hier, lorsque j'évoquais la question des témoins.

4 J'ai fourni des informations concernant les faits sur lesquels porteront

5 les auditions de ce témoin. Je ne sais pas si ceci sera suffisant pour

6 l'accusation. Je ne sais pas si celle-ci va demander un complément

7 d'information. Je pense que nous serons en mesure de fournir ces

8 informations supplémentaires mais seulement au moment où nous allons

9 débuter la présentation de nos moyens à décharge pour M. Zigic.

10 Je ne pense pas être en mesure de respecter ce délai du 15 décembre vu les

11 circonstances qui prévalent. Notamment le fait que l'équipe de la défense

12 a connu quelques modifications, sans parler bien sûr de la situation dans

13 laquelle se trouvent les témoins et les autres accusés. Merci.

14 M. le Président: Merci, Maître Stojanovic. Maître Jovan Simic?

15 M. J. Simic (interprétation): Monsieur le Président, nous avons comme

16 position la même position que celle présentée par Me Nikolic et Me Fila:

17 Nous pensons également qu'il serait équitable que tous nos documents

18 soient communiqués juste avant le début de la présentation de nos moyens à

19 décharge. Mais la Chambre sait que la défense avait accepté de commencer

20 le procès 45 jours à peine après l'arrestation de l'accusé Prcac, ce qui

21 veut dire que nous n'avons eu que 45 jours pour nous préparer. Nous

22 travaillons d'arrache-pied à la présentation du procès et puis, nous avons

23 eu les témoins à charge. Ce n'est que récemment que nous avons commencé à

24 préparer notre défense. Je pense que ce serait la moindre des choses en

25 matière d'équité que nous bénéficiions d'un délai supplémentaire pour que

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1 nous déposions nos résumés et donc de ne pas devoir respecter la date du

2 15 décembre.

3 Permettez-moi d'insister sur d'autres éléments, deux aspects en

4 particulier. Nous avons reçu les résumés de l'accusation le jour même de

5 l'audience. Ce n'était peut-être pas vrai tous les jours, mais revenons au

6 cas du Témoin K pour lequel nous n'avons reçu aucune information; mais

7 cette déposition a été acceptée par la Chambre en dépit de ce fait. Donc,

8 je crois qu'il faut nous en tenir à cette ordonnance qui déclarait que ces

9 résumés devaient être déclarés sept jours avant la comparution du témoin

10 en question.

11 M. le Président: Oui, c'est notre intention de maintenir pour la défense

12 les mêmes conditions qui ont fonctionné pour l'accusation. Par conséquent,

13 les mêmes décisions que nous avons prises par rapport à la présentation

14 des moyens à charge vont être considérées pour la présentation des moyens

15 à décharge. C'est le minimum que l'on puisse faire.

16 De toute façon, il faut bien tenir compte que, si ce que Me Jovan Simic

17 vient de dire est vrai, c'est vrai que la défense a reçu un nombre

18 considérable de toute une série d'éléments qui ont donné à la défense la

19 perspective des témoins de tout le camp du Procureur. Maintenant, le

20 Procureur, s'il ne reçoit seulement que le résumé, il est complètement

21 vide et sans savoir quelque information sur le camp de la défense. Il faut

22 donc bien tenir compte de cela.

23 Mais nous allons voir, nous allons continuer dans cette perspective et la

24 Chambre devra prendre les décisions, car le Procureur doit répondre au

25 mémoire préalable de chaque conseil. Et là, le Procureur a tout à fait le

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1 droit de dire: "Bon, ce résumé est insuffisant pour moi. Il faut le

2 détailler un peu plus".

3 Vous vous rappelez peut-être bien que nous avons passé et discuté beaucoup

4 de temps dans la présentation des moyens à charge à propos des détails des

5 déclarations et de plusieurs déclarations qui étaient quand même dans les

6 mains de la défense: des déclarations prêtées aux autorités de Bosnie, des

7 déclarations prêtées au Procureur; plusieurs déclarations pour le même

8 témoin. Comme vous vous le rappelez, il y a eu un moment où j'ai dit: "Il

9 faut tenir compte que, pour la défense, il faut aussi détailler quelque

10 chose pour le Procureur sinon les choses, l'affaire reste un peu

11 déséquilibrée".

12 Mais pour le moment je crois qu'il faut essayer de mettre quelque chose

13 par écrit et, après, nous aurons la réaction du Procureur. Le Procureur

14 doit dire si oui ou non… Ce n'est quand même pas à moi maintenant de dire

15 ce que veut le Procureur. Le Procureur le dira.

16 Donc pour continuer cette approche générale, nous avions parlé des

17 résumés. Peut-être qu'il y avait encore des questions relatives aux

18 témoins. Ce résumé doit indiquer les points de l'Acte d'accusation sur

19 lequel chaque témoin sera entendu: c'est dans la règle. Il faut, lorsque

20 la défense présente ses résumés, qu'elle indique aussi les chefs

21 d'accusation par rapport auxquels le témoin vient déposer.

22 Nous avions déjà parlé de la durée des témoignages, nous allons donc

23 passer un peu ce point car les différents conseils ont touché cette

24 question. Vous, vous allez l'écrire. Nous allons passer à la question qui

25 peut peut-être conditionner un peu plus le dessein de l'affaire, de la

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1 défense: ce sont les dépositions par officier instrumentaire. Oui ou non?

2 Combien de témoins? Quelques conseils ont déjà touché le nombre des

3 témoins qu'ils pensent présenter pour des dépositions quand ils ont touché

4 le nombre des témoins. Et aussi où: ici à La Haye, à Banja Luka ou à un

5 autre endroit?

6 Donc, déposition peut-être avec tous ces éléments: plus ou moins combien

7 de témoins, préférence pour ici ou en dehors du Tribunal, ici à La Haye

8 dans le Tribunal ou en dehors et comment nous allons organiser cela? C'est

9 la question vue de façon générale.

10 Seulement, maintenant d'une façon générale, j'aimerais bien à voir les

11 vues de chaque conseil.

12 Maître K. Simic?

13 M. K. Simic (interprétation): Je vous remercie, Monsieur le Président.

14 La défense de M. Kvocka a été favorable à l'idée des dépositions par

15 officiers instrumentaires à un moment donné. Pourquoi? Parce que nous

16 devions attendre l'ouverture du procès. Mais maintenant que le procès se

17 déroule, nous n'allons pas demander ce type de déposition. Nous aimerions

18 vous soumettre les témoins qui sont importants pour que vous puissiez nous

19 rendre le jugement idoine. Je pense donc qu'il est inutile de revenir sur

20 la question des dépositions puisque ceci ne nous concerne pas directement.

21 M. le Président: Très bien, merci. Donc Maître Nikolic?

22 M. Nikolic (interprétation): Monsieur le Président, Madame et Monsieur les

23 Juges, la défense était favorable à l'idée des dépositions par officier

24 instrumentaire pendant que c'était la Chambre III qui était saisie de

25 l'affaire et que l'on communiquait la liste des témoins. Nous pensions

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1 avoir 12 témoins qui seraient entendus de la sorte mais, depuis, dans

2 l'intervalle, nous avons abandonné l'idée d'avoir un témoin qui déposerait

3 par officier instrumentaire. Il ne nos en reste donc que 11. Là, tout

4 dépendra de la décision prise par la Chambre au regard de l'article 98bis

5 et en ce qui concerne aussi l'accusé Kvocka et les moyens qu'il va

6 présenter. Mais tout dépend de l'endroit où se feraient ces dépositions.

7 Pour l'instant, nous ne savons pas où ceci pourrait avoir lieu.

8 Nous préférons Banja Luka, nous l'avons toujours préféré comme lieu de

9 déposition et je pense que nous étions parvenus à un accord avec les

10 témoins selon lesquels les dépositions seraient recueillies et seraient

11 communiquées à la partie adverse. Nous avions dit aux témoins que cela se

12 passerait à Banja Luka. Nous restons favorables à l'idée.

13 La seule chose dont nous soyons sûrs, c'est que, si des dépositions sont

14 recueillies à Banja Luka, nous aurions moins que onze témoins.

15 M. le Président: Merci, Maître Nikolic. Maître Fila, je crois que vous

16 avez déjà parlé un peu à ce sujet, mais allez-y maintenant.

17 M. Fila (interprétation): Tout d'abord, Monsieur le Président, j'aimerais

18 vous dire que la défense a déjà communiqué 98% des déclarations des

19 témoins, ou 90%, à l'accusation au début du procès. Le Greffe et

20 l'accusation savent de quoi parleront ces témoins, à l'exception de

21 quelques-unes de ces déclarations que nous n'avons pas encore reçues.

22 S'il y a déposition à Banja Luka, dans ce cas de figure, nous aurons trois

23 témoins et quatre experts qui comparaîtront ici; le reste se fera à Banja

24 Luka: c'est moins cher et là, nous pourrons aussi nous acquitter de la

25 tâche plus rapidement.

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1 Si des dépositions sont recueillies à La Haye, cela ne fait pas de

2 différence: c'est un peu comme si nous avions demandé à comparaître des

3 témoins qui comparaîtraient ici. Si ce n'est que, s'il y a déposition, la

4 Chambre peut faire autre chose. Au départ, nous avions parlé de 19

5 témoins.

6 C'est tout ce que j'avais à dire. Je vous remercie.

7 M. le Président: Très bien. Maître Stojanovic?

8 M. Stojanovic (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

9 Nous avons un témoin dont nous aimerions recueillir les propos par voie

10 d'officier instrumentaire. En fait, il s'agit de plusieurs témoins: trois

11 pour le moment mais il se peut que ce chiffre s'accroisse en vertu des

12 dépositions prises à Banja Luka, même si je ne veux pas nécessairement me

13 prononcer sur l'utilité ou l'opportunité d'avoir ces dépositions à Banja

14 Luka. Nous allons revenir sur la question de façon plus détaillée par la

15 suite.

16 Nous estimons qu'il serait préférable d'avoir ces dépositions recueillies

17 à Banja Luka. Merci.

18 M. le Président: Merci, Maître Stojanovic. Maître Jovan Simic?

19 M. J. Simic (interprétation): Monsieur le Président, la défense de M.

20 Prcac ne prévoit qu'un témoin par déposition par officier instrumentaire.

21 Nous avons discuté avec ce témoin et, au cours de cet entretien, ce témoin

22 a insisté pour venir à La Haye. Si les dépositions sont recueillies à

23 Banja Luka, nous pourrions réduire le nombre de témoins, ainsi que le

24 nombre de journées d'audience nécessaires en vue de la comparution de ces

25 témoins à La Haye. Je le répète, ceci permettrait de réduire le nombre de

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1 moitié, le nombre de journées d'audience.

2 Cependant, il y aurait d'autant plus de témoins par déposition mais ceci

3 ne signifierait pas un temps d'audience supérieur.

4 M. le Président: Merci beaucoup, Maître Jovan Simic.

5 Par rapport à cette question des dépositions, comme vous vous le rappelez,

6 nous avions considéré à l'époque cette question. L'orientation que nous

7 avions prise était que nous pourrions éventuellement déplacer un officier

8 instrumentaire, avec toutes les autres personnes nécessaires pour cette

9 tâche, au moins une semaine et seulement une semaine. Vous avez peut-être

10 cette idée pour des raisons de sécurité.

11 Je pense donc maintenant qu'on doit renouveler cette question du point de

12 vue d'exécuter. La Chambre est ici au complet mais, de toutes façons, nous

13 allons peut-être prendre en considération tous ces éléments que vous nous

14 fournissez maintenant et la Chambre prendra une décision notamment de

15 nommer un officier instrumentaire, peut-être le juriste de la Chambre.

16 Après, comme vous l'avez déjà connu par rapport à l'autre Chambre qui a

17 essayé d'organiser les dépositions, l'officier instrumentaire aurait des

18 contacts, des réunions avec les conseils et avec les parties pour

19 organiser toutes ces dépositions.

20 Il convient donc de bien tenir compte de certaines conditions: une semaine

21 seulement et il faut donc voir le nombre de personnes qu'il est nécessaire

22 d'entendre, etc.. Tout cela doit être décidé déjà par l'officier

23 instrumentaire que la Chambre pourra nommer pour cette question. Nous

24 allons donc reprendre tous ces éléments d'information que vous nous avez

25 communiqués et, après, nous déciderons.

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1 Maintenant, nous passons à autre question. Je crois que nous avons déjà…

2 Madame Hollis?

3 Mme Hollis (interprétation): Monsieur le Président, eexcusez-moi, mais

4 autorisez-vous l'accusation à formuler quelques brefs commentaires au

5 sujet des dépositions?

6 Merci. Monsieur le Président, nous faisons remarquer tout d'abord, en

7 quelques mots, que, selon l'Article 90, il est stipulé qu'en principe, les

8 témoins sont entendus par la Chambre et qu'à l'Article 71, il est stipulé

9 que, dans l'intérêt de la justice, il est possible de donner l'ordre

10 d'entendre le témoin par déposition.

11 Notre position consiste à dire que nous sommes favorables à l'audition de

12 témoins devant un officier instrumentaire, quel que soit le temps

13 nécessaire, si la défense peut apporter la preuve que ces témoins, en

14 d'autres circonstances, refuseraient d'être cités à la barre ou que leur

15 déposition ne peut pas être entendue dans d'autres circonstances. Il est

16 possible, Monsieur le Président, que ces témoins déposent pendant une

17 semaine, un peu comme un spectacle. Si tel devait être le cas, il faudrait

18 peut-être que les Juges de cette Chambre tiennent compte de ce fait et

19 autorisent un délai supérieur à une semaine.

20 Mais, avant que vous ne décidiez d'autoriser les dépositions, nous disons

21 ce qui suit. Premièrement, la défense devrait démontrer dans quelle mesure

22 l'intérêt de la justice est en cause et justifie l'audition de ces témoins

23 autrement qu'à La Haye. En effet, franchement, Monsieur le Président,

24 Madame et Monsieur les Juges, si le témoin est prêt à témoigner et à venir

25 à La Haye, pourquoi n'est-il pas entendu en direct?

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1 Deuxièmement, s'il est prouvé qu'un témoin ne peut pas faire le voyage,

2 par exemple -et il y a des témoins qui apparemment ne peuvent pas faire le

3 voyage-, nous proposons, Monsieur le Président, de considérer

4 l'alternative du témoignage par vidéo. Comme vous le savez, c'est un moyen

5 très pratique d'entendre les témoins, qui a très bien fonctionné par le

6 passé.

7 Vous avez dit, n'est-ce pas, Monsieur le Président, Madame et Monsieur les

8 Juges, que vous allez consacrer encore une réflexion à ce sujet et je vous

9 propose de commencer votre réflexion tout à fait au début, c'est-à-dire

10 par l'intérêt de la justice. En fonction des contraintes qui vont dans

11 l'intérêt de la justice, ne serait-il pas préférable que les témoins

12 soient entendus par vidéo plutôt que devant l'officier instrumentaire.

13 Mais en fait, si vous êtes convaincus que les dépositions sont nécessaires

14 dans l'intérêt de la justice, nous demandons, Monsieur le Président, que

15 ces dépositions se poursuivent jusqu'à leur terme, même si elles doivent

16 durer plus d'une semaine. Et nous appuyons la demande de la défense qui

17 dit que, si les dépositions doivent se faire, il serait bon –pour la vidéo

18 c'est la même chose- que cela se passe à partir de Banja Luka. Merci,

19 Monsieur le Président.

20 M. le Président: Oui, Maître Fila. Vous parlez au nom de tous les conseils

21 ou est-ce que les autres conseils…?

22 M. Fila (interprétation): Monsieur le Président, j'aimerais que nous

23 rembobinions le film. Pour nous, cela n'a pas d'importance que ça se passe

24 à Banja Luka ou à Tuzla, qu'à Banja Luka, il s'agisse de dépositions ou de

25 témoignages par vidéo. L'important, c'est qu'il s'agit de témoins qui,

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1 pour diverses raisons et surtout par peur, n'ont pas envie de venir à La

2 Haye. C'est la raison pour laquelle nous avons fait nos propositions sinon

3 elles n'auraient pas existé.

4 Mais j'accepte tout ce qu'a dit Mme Hollis, notamment s'agissant d'une

5 possibilité que le délai d'audition dure plus longtemps qu'une semaine.

6 Même s'il s'agit de deux ou trois semaines, leur audition ne coûte

7 pratiquement rien. Il n'y a plus de voyage, il n'y a plus de séjour à La

8 Haye et l'audition se passerait beaucoup plus rapidement. Je dis

9 simplement que la vidéo, ça coûte assez cher, j'en ai déjà fait

10 l'expérience. La défense dit donc que cela lui est égal mais elle demande

11 simplement que toute l'aide du Tribunal lui soit apportée pour que ces

12 témoins soient entendus.

13 Permettez-moi d'ajouter un mot: l'alternative à toutes ces solutions

14 serait l'affidavit, mais par affidavit, les Juges ne voient pas le visage

15 de la personne qui parle. C'est simplement une déclaration écrite. Qu'il

16 s'agisse de prononcer une déclaration solennelle ou qu'il s'agisse d'une

17 déclaration sous serment, de toute façon, il reste une chose: c'est que le

18 visage de la personne n'est pas vu. C'est la raison pour laquelle j'ai

19 proposé les dépositions.

20 M. le Président: Oui, vous savez que le propos des dépositions, c'est

21 clairement d'accélérer les débats. Accélérer surtout, comme vous savez, le

22 temps. Le problème que nous avons ici dans le Tribunal, c'est le temps des

23 Juges. Nous essayons donc vraiment de faire tout ce que nous pouvons

24 faire. En dehors de la salle d'audience, on doit le faire. Et je crois que

25 nous allons arriver au moment où les témoins qui viennent au prétoire sont

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1 les témoins qui témoignent directement sur la responsabilité de l'accusé –

2 si je peux dire-, sur les actes et les comportements de l'accusé. Toutes

3 les autres choses, si on peut dire, comme l'histoire militaire, la

4 politique, la composition ethnique, les éléments relatifs à la

5 personnalité, les éléments relatifs par exemple à la peine etc. ou

6 éventuellement des éléments relatifs à des circonstances générales qui

7 souvent se répètent et deviennent répétitifs, toutes ces choses doivent

8 être résolues par d'autres moyens. C'est-à-dire, c'est vrai que le

9 principe d'oralité, c'est le principe d'oralité, mais il faut vraiment

10 aller pour admettre des preuves écrites. Sinon il n'est pas possible de

11 faire le travail dans un temps utile. Comme vous le savez, il y a des

12 systèmes juridiques où la preuve se fait essentiellement par écrit. Et

13 donc pourquoi pas? Il faut entendre les témoins oralement quand il faut

14 les voir les yeux dans les yeux et il faut avoir d'autres instruments pour

15 accélérer la procédure.

16 La Chambre doit tenir compte aussi -et la Chambre remercie beaucoup les

17 parties pour la contribution et l'assistance qu'elles viennent de donner-,

18 la Chambre doit aussi considérer un principe d'équité: le principe

19 équitable de présentations des moyens de preuve. Donc la Chambre se

20 préoccupe aussi de cet aspect.

21 Voilà toute une série de raisons qui peuvent être présentes dans la

22 décision de la Chambre, quand la Chambre va prendre sa décision.

23 Merci pour le moment. Merci beaucoup.

24 Je crois qu'il y a encore d'autres questions à poser. Peut-être que nous

25 avons touché un peu de tout, des affidavits, etc.. Je crois que je ne vais

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1 peut-être pas traiter plus spécifiquement cette question mais il y a au

2 moins cette question des pièces à conviction. C'est un point qui vient

3 dans l'Article 65ter.

4 Certains conseils de la défense ont déjà soumis des listes de pièces à

5 conviction; je crois qu'il est peut-être besoin de les actualiser, car

6 toutes ces choses sont arrivées il y a beaucoup de temps et ces pièces à

7 conviction à l'époque avaient été déposées avec l'indication que c'était

8 un peu provisoire. Maintenant, quoique provisoirement, nous sommes en

9 train de nous rapprocher du définitif. Par conséquent, j'aimerais bien

10 savoir quelle est la situation maintenant quant à la présentation des

11 pièces à conviction que chaque conseil entend présenter. Maître Krstan

12 Simic?

13 M. K. Simic (interprétation): Monsieur le Président, je n'ai pas réussi à

14 prendre la parole pour m'exprimer sur les témoins et je vous demande

15 l'autorisation de poser une brève question.

16 Il y a un problème grave qui se pose ici, à savoir le nombre des accusés

17 égal à cinq.

18 Maître Nikolic a parlé de l'Article 82 du Règlement et, pour ma part, il

19 m'intéresserait, surtout si je pense à l'Acte d'accusation, de savoir ce

20 qui va se passer. Je sais quelle a été la pratique dans l'affaire Celebici

21 mais est-ce que tous les conseils de la défense de tous les accusés vont

22 interroger les témoins? Car, dans ce cas, nous sommes dans une situation

23 où il serait impossible de contrôler le temps.

24 M. le Président: Excusez-moi. C'est le point 7 de l'ordre du jour: nous

25 n'en sommes pas encore arrivés là.

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1 M. K. Simic (interprétation): Oui, mais je parle de Kvocka et de Radic. Je

2 pensais à Kvocka et Radic et pas précisément aux témoins. C'est ça que

3 j'avais en tête mais je peux en parler plus tard. Alors je reviens sur les

4 éléments de preuve et je parlerai de cela au point 7.

5 La présente équipe de défense a déposé une liste de 56 ou 57 pièces à

6 conviction et ces pièces figureront sur une liste définitive qui sera

7 utilisée au cours de l'interrogatoire des témoins et qui sera versée au

8 dossier. Cette liste sera déposée en temps utile.

9 M. le Président: Merci beaucoup, Maître Krstan Simic. Maître Nikolic?

10 M. Nikolic (interprétation): Monsieur le Président, la position de la

11 présente équipe de défense sur cette question est la suivante. La défense

12 a l'intention de présenter un certain nombre de documents à titre

13 d'éléments de preuve, mais le nombre de ces éléments de preuve dépend

14 encore une fois de la décision qui sera rendue par la Chambre au sujet de

15 la requête de la défense, ainsi que de la présentation de la défense de

16 l'accusé Kvocka. Le Procureur recevra ces documents dans les délais et

17 aura le temps nécessaire pour vérifier l'authenticité de ces documents,.

18 Cela ne pose absolument aucun problème.

19 M. le Président: Très bien. Maître Nikolic, merci beaucoup. Maître Fila?

20 M. Fila (interprétation): Monsieur le président, la présente équipe de

21 défense ne dispose pas d'éléments de preuve écrits qui n'ont pas encore

22 été utilisés. Je vous donne donc une très bonne nouvelle: je ne vais plus

23 vous infliger de nouveaux éléments de preuve écrits. Ce que j'avais, je

24 l'ai déjà déposé et remis.

25 M. le Président: Je vous remercie beaucoup de nous donner ce cadeau.

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1 Maintenant, Maître Stojanovic, s'il vous plaît.

2 M. Stojanovic (interprétation): Monsieur le Président, s'agissant de la

3 liste des témoins qui a été remise par nous, il y a quelque temps, nous

4 avons également remis avec la liste des témoins la liste des pièces à

5 conviction.

6 Je dois dire que, dans les derniers jours, alors que la défense était en

7 plein travail pour organiser son travail, nous avons établi cette liste

8 qui est tout de même une liste préalable. Et c'est au début, juste avant

9 l'audition de nos témoins à décharge, que nous pourrons vous donner une

10 version définitive de cette liste. Merci.

11 M. le Président: Merci beaucoup, Maître Stojanovic. Maître Jovan Simic?

12 M. J. Simic (interprétation): Monsieur le Président, la défense de M.

13 Prcac va communiquer tous les documents dont elle dispose en ce moment,

14 avant la date limite du 15 décembre. Mais nous nous réservons le droit,

15 puisque nous recueillons de nouveaux documents dans le cadre de l'enquête

16 qui n'est pas terminée, de soumettre à la Chambre des documents qui

17 seraient éventuellement découverts plus tard.

18 M. le Président: Très bien. On travaille avec tellement d'ardeur qu'on en

19 oublie le temps: je remarque maintenant que nous travaillons depuis

20 presque 1 heure 25. Peut-être faudrait-il faire une pause. Nous ne pouvons

21 pas encore finir et donc il faut vraiment faire une pause pour reposer

22 tout le monde. Nous allons donc faire une pause d'une demi-heure et,

23 après, nous continuerons l'ordre du jour.

24 (L'audience, suspendue à 15 heures 24, est reprise à 15 heures 54.)

25 (Les cinq accusés sont introduits dans le prétoire.)

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1 M. le Président: Nous reprenons nos travaux.

2 En disant qu'on ne peut pas dépasser 17 heures, il faut peut-être être

3 plus direct et concis. La question maintenant est de savoir si les parties

4 ont l'intention de faire une déclaration liminaire.

5 Maître Krstan Simic, de combien de temps plus ou moins pensez-vous avoir

6 besoin? C'est à vous, Monsieur Krstan Simic.

7 M. K. Simic (interprétation): Monsieur le Président, j'ai un problème. Je

8 n'entends pas le bon canal d'interprétation.

9 M. le Président: Maintenant, personne n'a parlé, ils sont tous égaux.

10 C'est déjà réglé? Allez-y maintenant.

11 M. K. Simic (interprétation): Tout va bien maintenant, Monsieur le

12 Président.

13 Nous avons déjà dit, en introduction, que nous allions entendre deux

14 témoins experts. L'un de ces deux témoins experts sera l'homme qui a rendu

15 le rapport psychiatrique à la demande du Tribunal. Le second parlera de

16 l'organisation de la police.

17 M. le Président: Pardon, Maître Krstan Simic, où sommes-nous? Nous sommes

18 dans la question de déclaration liminaire, Article 84. Est-ce que la

19 défense pense faire une déclaration?

20 M. K. Simic (interprétation): Je n'entendais pas l'interprétation,

21 Monsieur le Président. Je vous prie de m'excuser, je n'avais pas entendu.

22 M. le Président: Etes-vous en train de faire une déclaration liminaire,

23 Article 84? Et combien de temps?

24 M. K. Simic (interprétation): Oui, Monsieur le Président. Nous avons

25 l'intention de faire une déclaration liminaire qui durera entre trois et

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1 quatre heures.

2 M. le Président: Très bien. Maître Nikolic, s'il vous plaît?

3 Mme Nikolic (interprétation): Oui, Monsieur le Président…

4 M. le Président: Maintenant, c'est moi qui n'ai pas…

5 Mme Nikolic (interprétation): Oui, Monsieur le Président, la réponse est

6 courte. La réponse est oui et elle durera une heure, au maximum.

7 M. le Président: Très bien, c'est court comme la réponse! Merci beaucoup,

8 Maître Nikolic.

9 Maître Fila, s'il vous plaît?

10 M. Fila (interprétation): Même chose que Me Nikolic. Merci, Monsieur le

11 Président.

12 M. le Président: Maître Stojanovic?

13 M. Stojanovic (interprétation): Monsieur le Président, nous avons

14 également l'intention de faire une déclaration liminaire et elle durera de

15 deux à trois heures.

16 M. le Président: Maître Jovan Simic, s'il vous plaît?

17 M. J. Simic (interprétation): Monsieur le Président, nous aurons aussi une

18 déclaration liminaire d'une heure, maximum.

19 M. le Président: Très bien. Une autre question: c'est le contre-

20 interrogatoire et contre-interrogatoire croisé des accusés Kvocka et

21 Radic.

22 Vous savez que ces accusés ont témoigné pour leur propre défense au début

23 du procès. Nous nous sommes mis d'accord pour que le contre-interrogatoire

24 des accusés n'ait pas lieu avant la fin de la présentation des moyens de

25 preuve à décharge.

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1 Peut-être maintenant une question pour le Procureur: quand le Procureur

2 pense-t-il que le contre-interrogatoire de ces accusés pourrait avoir

3 lieu?

4 Mme Hollis (interprétation): Monsieur le Président, quand pensons-nous

5 qu'il aura lieu ou quand préférerions-nous qu'il ait lieu?

6 M. le Président: Que vous préféreriez?

7 Mme Hollis (interprétation): Nous préférerions qu'il y ait contre-

8 interrogatoire à la fin de la présentation des éléments de preuve.

9 M. le Président: A la fin des moyens à décharge, c'est cela que je dois

10 comprendre, Madame Hollis?

11 Mme Hollis (interprétation): Oui, pour ce qui est de chaque accusé, après

12 que chaque accusé aura présenté ses moyens de preuve.

13 M. le Président: Très bien. Même point pour les conseils de M. Kvocka et

14 M. Radic: Maître Krstan Simic, pour vous, le moment de contre-

15 interrogatoire de M. Kvocka?

16 M. K. Simic (interprétation): Monsieur le Président, je considère que,

17 s'agissant de la défense de M. Kvocka, il faudrait commencer par le

18 contre-interrogatoire pour que le Procureur ait défini, de façon

19 définitive, sa position.

20 M. le Président: Et par rapport à M. Radic?

21 M. K. Simic (interprétation): Je pense la même chose.

22 M. le Président: Très bien, merci beaucoup.

23 Une autre question est de savoir si les conseils de M. Kvocka et M. Radic

24 souhaitent aussi procéder à un contre-interrogatoire croisé. Maître K.

25 Simic?

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1 M. K. Simic (interprétation): Monsieur le Président, j'avais commencé à

2 aborder ce point, il y a quelques instants. On m'a demandé d'en parler

3 maintenant. Nous considérons que c'est un point tout à fait important.

4 Nous en avons d'ailleurs discuté ensemble, entre les conseils de la

5 défense, pendant la pause. Il s'agit du contre-interrogatoire et de

6 l'audition des témoins de la défense.

7 Je m'appuie sur l'Article 82 du Règlement qui se lit comme suit: "En cas

8 d'instances jointes, chaque accusé a les même droits que s'il était jugé

9 séparément". Dans ce cadre, nous avons le droit de déterminer comment se

10 fera le contre-interrogatoire. Le contre-interrogatoire doit être limité

11 aux questions évoquées au cours de l'interrogatoire principal; c'est ce

12 qui est prévu. Il est possible également de traiter de la crédibilité du

13 témoin et, selon les circonstances, la Chambre est autorisée à décider

14 qu'un certain nombre de questions pertinentes peut être posé au témoin,

15 également.

16 Cela ouvre un champ de questions très important, car il y a cinq accusés.

17 Donc, dans quelles limites se situeront les interrogatoires de ces

18 témoins? Notre position -je crois que c'est également la position favorite

19 des autres conseils- est la suivante: c'est la présentation de mes

20 éléments de preuve. Ce sont mes témoins et je n'ai rien contre le fait que

21 le Procureur pose au témoin qui a hésité toutes les questions pertinentes,

22 pour peu qu'elles ne portent que sur Kvocka, qu'il s'agisse des témoins

23 cités pour Kos ou pour Kvocka. Mais le Procureur n'a pas la possibilité de

24 les interroger sur des points totalement extérieurs à ce qui les

25 concernent.

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1 C'est ce qui nous amène également à penser que les conseils de la défense

2 des autres accusés ne devraient pas être autorisés à interroger ces

3 témoins, car il s'agit de l'affaire Kvocka. C'est donc le rapport qui

4 s'établit entre Kvocka et le Procureur au cours du procès.

5 Pour autant que d'autres dispositions soient décidées -et je pense qu'il

6 convient de respecter le Règlement de procédures et de preuves dans ce

7 cas-là-, il serait possible de déterminer le temps d'interrogatoire. Moi,

8 j'ai déterminé provisoirement que nous entendrons quatre personnes pendant

9 vingt minutes chacune. Cela risquerait de nous mettre dans une situation

10 absolument chaotique, si tous les éléments de la défense devaient pouvoir

11 intervenir et si la même chose était faite pour les cinq accusés.

12 M. le Président: Merci beaucoup, Maître Krstan Simic. Maître Fila?

13 M. Fila (interprétation): Je pense que le Tribunal devrait rendre une

14 décision sur ce point. Dans le cas contraire, nous nous verrons confrontés

15 à un problème très important, car toutes sortes de suppositions peuvent se

16 matérialiser. Je ne vais pas entrer dans les détails. Tout est possible,

17 absolument tout. Il faudrait qu'il y ait décision de la Chambre avec, bien

18 sûr, consultation de Mme Hollis. C'est à vous qu'appartient la décision.

19 Merci.

20 M. le Président: Madame Hollis, sur ce point du contre-interrogatoire

21 croisé des accusés Kvocka et Radic. Peut-être nous savons déjà que M.

22 Zigic va se présenter comme témoin; nous ne le savons pas encore.

23 Indépendamment de cela, d'une façon générale, sur les contre-

24 interrogatoires croisés, avez-vous une opinion?

25 Mme Hollis (interprétation): Pour ce qui est des restrictions imposées à

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1 la teneur du contre-interrogatoire, nous ne sommes pas d'accord avec

2 l'interprétation de l'Article 89H. Je pense qu'il faut examiner aussi le

3 3(i) puisque ceci autorise la partie qui procède au contre-interrogatoire

4 de dépasser la portée de l'interrogatoire principal pour toutes les

5 questions touchant à la crédibilité du témoin. Lorsqu'il y a des

6 dépositions importantes pour l'administration de la preuve, à ce moment-

7 là, la partie qui procède au contre-interrogatoire peut aller plus loin.

8 Pour ce qui est du contre-interrogatoire de Radic, nous avons deux raisons

9 de le demander: d'abord, parce qu'il y a la légation que nous avons

10 soumise dans l'Acte d'accusation, à savoir qu'il avait un rang supérieur

11 aux autres, ce qui veut dire que la conduite des autres aurait un impact

12 sur le degré de responsabilité des deux accusés, Kvocka et Prcac.

13 Puis, revenons à la théorie dont nous avons discuté précédemment,

14 s'agissant de la doctrine du dessein commun. Le contre-interrogatoire

15 relatif à d'autres crimes, d'autres incidents qui se sont produits dans le

16 camp pourrait avoir une pertinence certaine pour déterminer la culpabilité

17 de l'accusé. Pour ce qui est du contre-interrogatoire de Radic et Kos, je

18 pense là, nous pourrions aussi examiner des points qui sont importants

19 pour la preuve que nous voulons administrer, qui dépasserait le contre-

20 interrogatoire. Toujours en nous fondant sur la théorie du dessein commun,

21 nous pourrions parler d'autres actes commis dans le camp.

22 Nous ne serons donc pas limités pour ce qui est de la teneur, comme semble

23 le suggérer la défense.

24 Si votre question porte sur la question de savoir dans quel ordre nous

25 procéderions au contre-interrogatoire par rapport aux autres accusés, nous

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1 pensons qu'en fin de compte, c'est une question qui doit être décidée par

2 vous. Nous pourrions contre-interroger le témoin après qu'il y ait eu

3 contre-interrogatoire des témoins et de l'accusé par les autres accusés.

4 M. le Président: Très bien. Merci beaucoup, Madame Hollis.

5 Maintenant, par rapport aux conseil de défense Kos et Prcac, en admettant

6 que nous sachions déjà par rapport aux conseils de la défense de Zigic, je

7 voudrais savoir si ces accusés vont témoigner pour leur propre défense ou

8 non.

9 Maître Nikolic?

10 M. Nikolic (interprétation): Monsieur le Président, en vertu de l'article

11 85C, l'accusé peut, s'il le souhaite, comparaître en qualité de témoin

12 pour sa propre défense. Et puis, il y a décision de Celebici, D90-6.1 du 4

13 avril 1998, dans laquelle il est dit que l'accusé peut déterminer le

14 moment où il veut comparaître en tant que témoin pour sa propre défense,

15 au n°1.

16 Deuxièmement, l'accusé peut déposer à tout moment lorsqu'il présente ses

17 moyens de preuve. Cela est invoqué par l'article 21.4G du Statut. C'est là

18 que ceci est prévu.

19 La défense vous a dit quel temps elle entend utiliser; nous n'allons pas

20 dépasser ce temps et sa déposition se fera dans ce cadre-là.

21 M. le Président: Donc, pour être bref, M. Kos témoignera pour sa propre

22 défense?

23 M. Nikolic (interprétation): Ce n'est pas ce que j'ai dit, Monsieur le

24 Président. Je n'ai pas tenu ces propos, Monsieur le Président.

25 M. le Président: D'accord. Mais ma question est de savoir s'il va

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1 témoigner ou non pour sa propre défense.

2 M. Nikolic (interprétation): Je ne sais pas encore, Monsieur le Président.

3 En ce moment, je ne le sais pas encore.

4 M. le Président: Vous nous le direz à un moment donné? C'est cela?

5 M. Nikolic (interprétation): Oui, effectivement.

6 M. le Président: Très bien, merci.

7 Maître Jovanovic, est-ce acquis que M. Zigic témoignera pour sa propre

8 défense? Nous avons bien compris?

9 M. Jovanovic (interprétation): Oui, Monsieur le Président.

10 M. le Président: Monsieur Jovan Simic, par rapport à M. Prcac?

11 M. J. Simic (interprétation): Monsieur le Président, nous adoptons la même

12 position que celle adoptée par la défense de M. Kos.

13 M. le Président: Très bien. Maître K. Simic?

14 M. K. Simic (interprétation): Monsieur le Président, Madame et Monsieur

15 les Juges, permettez-moi de réagir à ce que disait Mme Hollis en l'espace

16 d'une phrase.

17 Madame Hollis, je suis tout à fait d'accord avec vous sur un point: la

18 défense ne veut pas limiter ce que peut demander l'accusation si ce sont

19 des questions pertinentes, mais il faut qu'elles soient en rapport avec M.

20 Kvocka; elle peut poser toutes les questions qu'elle veut. C'est là la

21 position que nous adoptons sur ce point. Madame Hollis et moi-même sommes

22 d'accord: elle n'aura à subir aucune restriction. Mais, si le témoin ne

23 mentionne que Zigic et personne d'autre, eh bien, voilà, ce sera ainsi

24 limité.

25 C'est ce que nous essayons de faire comprendre.

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1 M. le Président: La Chambre prendra une décision. Les parties ont déjà

2 donné leurs arguments et nous pourrons prendre une décision à propos de

3 cette question.

4 Maintenant, je crois que nous devons aller, peut-être un peu plus

5 précisément, au calendrier. Si je peux vous résumer tout ce dont on a

6 discuté jusqu'à présent, je vous renverrai à l'article 65ter-G, où vous

7 trouvez en synthèse tous les éléments dont nous avons discuté en détail,

8 plus ou moins. C'est-à-dire qu'à l'issue de la présentation des moyens à

9 charge et avant la présentation des moyens à décharge, le Juge de la mise

10 en état ordonne à la défense de déposer une liste des témoins que la

11 défense entend citer, en précisant, pour chaque conseil, tous les éléments

12 qui y sont mentionnés et, deuxièmement, une liste des pièces à conviction

13 que la défense entend présenter en appui des moyens qu'elle invoque, en

14 précisant -à chaque fois que possible- si l'accusation conteste ou non

15 leur authenticité.

16 Vous voyez, c'est un peu la règle miroir de l'autre que nous avons

17 utilisée pour la mise en état de l'accusation, de la présentation des

18 moyens à charge. Maintenant, pour synthèse de tout le travail que nous

19 avons développé aujourd'hui pour la mise en état, vous avez cette règle

20 dont vous allez tenir compte pour répondre.

21 Maintenant la question du calendrier. Dans les prévisions que nous avons

22 faites avec la base que nous vous avons donnée, le Procureur a pris 53

23 jours pour présenter ses moyens à charge. En principe -je dis bien en

24 principe-, il incombe à chaque conseil de la défense de disposer d'au

25 moins deux semaines. Je répète: au moins deux semaine, en principe.

Page 6713

1 Vous allez écrire vraiment le temps pour qu'on puisse aussi réellement

2 programmer. Car vous connaissez bien la façon dont nous travaillons. Nous

3 allons dire, au début de la présentation des moyens à charge, quel est le

4 moment prévu de finir. Nous avons toujours dit que c'est une organisation;

5 comme organisation de travail, c'est un instrument de travail, c'est-à-

6 dire que c'est un instrument pour nous servir mais pas à nous de servir

7 l'instrument.

8 Nous allons donc établir cette prévision, que nous allons partager avec

9 vous et nous allons voir. Donc, le calendrier des audiences proposées est

10 le suivant. Nous allons donc du 22 au 25 janvier, du 5 au 8 février, du 12

11 au 16 février, du 5 ou 30 mars, du 2 au 13 avril, du 23 au 27 avril. Comme

12 vous le savez, le 16 et le 30 avril sont des jours de congé, pas

13 d'audience durant la semaine du 16 au 20 avril. Après, du 1er au 18 mai,

14 nous prévoyons ici la fin de la présentation des moyens de preuve à

15 décharge, du 28 mai au 1er juin pour la réplique du Procureur, du 12 au 15

16 juin pour la duplique de la défense, un jour pour chacun des membres de la

17 défense, et du 2 au 10 juillet, réquisitoires et plaidoiries.

18 Le calendrier relatif au dépôt des mémoires préalables de la défense: vous

19 avez déjà l'ordonnance qui présenterait le calendrier de la présentation

20 des moyens de preuve à décharge, dépôt des mémoires préalables de la

21 défense le 15 décembre, et réponse du Procureur le 5 janvier.

22 Conférence préalable à la présentation des moyens de preuve à décharge: le

23 12 janvier. Je corrige l'heure: à 10 heures, pas à 16 heures comme il est

24 indiqué. Nous avions dit 16 heures car nous avions une autre affaire ce

25 jour et donc, à la fin de l'affaire, nous prévoyions d'avoir cette

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1 conférence préalable. Maintenant que nous n'avons pas cette affaire cette

2 journée, nous fixons l'heure: 10 heures.

3 Je pense qu'il serait peut-être possible, si nécessaire, d'avoir une

4 conférence de mise en état pour discuter des mémoires préalables de la

5 défense et des réponses du Procureur. On pourrait prévoir une conférence

6 de mise en état dans la semaine du 8 janvier. Nous savons qu'il y a le

7 Noël orthodoxe que nous respectons aussi et nous prenons cela en

8 considération. Donc ou le 8, ou le 9 ou le 10, on pourrait avoir une

9 conférence de mise en état mais, si nécessaire, c'est-à-dire que nous

10 allons revoir tous vos matériaux. Si nous avons besoin d'une conférence de

11 mise en état, nous vous convoquerons pour cette conférence de mise en

12 état. Si nous n'avons pas besoin de cette conférence de mise en état, le

13 12 janvier est déjà établi pour la conférence préalable.

14 Je crois que le calendrier tel que je vous l'ai présenté pour présentation

15 des moyens à décharge, pour l'évolution de plusieurs phases de la

16 présentation de la défense est une prévision. Nous avons ce calendrier

17 pour la préparation de la mise en état et donc, nous entrerons en contact

18 avec vous si nous avons besoin. Je crois que nous avons passé tout l'ordre

19 du jour. Maintenant, j'aimerais bien demander aux parties s'il y a quelque

20 chose qui soit urgent de traiter encore.

21 Je donne la parole à Mme Hollis.

22 Mme Hollis (interprétation): Merci, Monsieur le Président. Nous aimerions

23 vous faire part d'une question et nous voudrions que ceci soit consigné au

24 dossier d'audience.

25 Rappelez-vous, à la fin de la présentation de nos moyens à charge, nous

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1 avions la pièce 3/167A, B et C dont nous avions demandé l'admission au

2 dossier. Il s'agit d'une compte rendu de l'entretien avec Prcac. Vous

3 saviez pour A la version anglais, B, c'était la version BCS et le C, ce

4 sont les trois documents présentés à l'accusé au cours de cet entretien.

5 Après la fin de la présentation de nos moyens, l'avocat de M. Prcac a

6 examiné ce compte rendu. Il ne semble pas s'opposer au versement de ce

7 dossier pour ce qui est de l'exactitude du contenu. Nous demandons le

8 versement de cette pièce au dossier. Il s'agit de la pièce 3/167A, B et C.

9 M. le Président: Madame Hollis, j'ai un peu l'idée que vous avez déposé

10 une requête pour éclaircir la situation d'autres pièces à conviction. Je

11 crois que oui. Nous avons cette requête pour décider encore.

12 Mme Hollis (interprétation): Monsieur le Président, nous avons déposé une

13 requête aux fins d'éclaircissement et de versement au dossier de pièces à

14 conviction. Je crois que ceci avait été déposé peu de temps après la fin

15 de la présentation de nos moyens de preuve et vous n'en avez pas encore

16 décidé. J'essayais simplement de vous en parler, car il y avait eu déjà

17 dépôt et que la décision n'avait pas encore été prise.

18 M. le Président: Donc, peut-être qu'on peut prendre une décision en même

19 temps mais, de toute façon, je crois que j'aimerais bien entendre Me Jovan

20 Simic. Je crois que vous avez envoyé par écrit votre position, Maître

21 Jovan Simic, quant à cette pièce?

22 M. J. Simic (interprétation): Oui, Monsieur le Président. Vous avez tout à

23 fait raison. Nous avons informé le Procureur: effectivement il n'y a pas

24 de différence si l'on compare le transcript avec l'original. Nous avons

25 examiné ce document et il vous incombe désormais, Madame et Messieurs les

Page 6716

1 Juges, de vous prononcer.

2 M. le Président: Merci.

3 Mme Hollis (interprétation): Une dernière chose, au cours de la

4 présentation de nos moyens, lorsqu'un témoin a fait la déclaration

5 solennelle, nous n'avons pas l'autorisation de contacter ce témoin. Je me

6 demande si vous avez l'intention d'appliquer la même procédure pour les

7 témoins à décharge. Une fois que ce témoin aura fait sa déclaration

8 solennelle, la défense ne peut plus contacter ce témoin.

9 Cet article du Règlement ou cette règle; si on l'affinait, consisterait à

10 vous demander ce qu'il en serait si c'était un accusé qui déposait. Une

11 fois que cet accusé aura prêté serment, est-ce que la règle s'applique ou

12 pas?

13 Nous aimerions avoir une réponse de votre part, non pas maintenant, mais

14 simplement pour que vous examiniez la question.

15 M. le Président: Je ne sais pas quelle est la position de mes collègues.

16 Je parle pour moi-même. Nous allons appliquer la même règle pour les

17 témoins de la défense, c'est-à-dire qu'après avoir prêter serment, ils ne

18 doivent plus être contactés. C'était la règle, la décision. Mais la

19 décision acceptait quand même, sauf des circonstances vraiment

20 exceptionnelles -et je crois que nous avons utilisé quelques circonstances

21 exceptionnelles-, je crois quand même que l'accusé est témoin, d'accord,

22 mais il est l'accusé. Donc, ma position est que je crois que peut-être, ce

23 serait le cas où l'on devrait faire une exception.

24 De toute façon, je vais discuter de cette question avec mes collègues et

25 l'on peut décider, sauf si mes collègues sont déjà d'accord avec cette

Page 6717

1 opinion, on peut quand même décider. Mais je ne voudrais quand même pas

2 les confronter avec cela. Je crois que le témoin, l'accusé comme témoin,

3 je crois qu'il a un statut un peu différent; si un accusé dépose une, deux

4 ou trois journées ou une semaine, je crois que c'est un peu compliqué pour

5 la relation entre le conseil de défense et l'accusé pour sa communication,

6 d'imposer la règle d'une façon stricte. Mais c'est mon idée.

7 De toute façon, on va considérer cela, on se prononcera. On pourrait peut-

8 être quand même entendre le côté de la défense à propos de cette question.

9 Je vois Me Fila: je ne sais pas si vous parlez au nom de tous les

10 conseils, Maître Fila?

11 M. Fila (interprétation): Monsieur le Président, cette conversation n'a

12 pas lieu d'être puisque M. Kvocka et M. Radic ont déjà déposé il y a près

13 d'un an. Si nous nous en tenons à l'application stricte du Règlement, je

14 n'aurais plus eu l'occasion de parler avec mon client depuis. Par

15 conséquent, la situation elle-même est la réponse qu'il faut fournir à la

16 question. Merci.

17 M. Nikolic (interprétation): Je n'ai qu'une question, Monsieur le

18 Président, afin que tout soit clair dans mon esprit. Le 15 décembre, là,

19 on demande le dépôt des déclaration liminaires ou des mémoires préalables:

20 est-ce que c'est conformément au 65ter-G?

21 M. le Président: Oui.

22 M. Nikolic (interprétation): Ce sont les noms des témoins, les résumés des

23 faits, les chefs d'accusation.

24 M. le Président: Oui, c'est cela, Maître Nikolic. Les mémoires préalables

25 à la défense sont gouvernés par cette règle.

Page 6718

1 M. Nikolic (interprétation): Je suis tout à fait d'accord avec vous,

2 Monsieur le Président. Cependant, il y a eu une discussion ici qui s'est

3 poursuivie mais qui allait dans un autre sens. Le 22 janvier, nous allons

4 commencer par la présentation des moyens pour l'accusé Kvocka. Le temps

5 estimé à cet égard est de deux semaines; dix jours ouvrables, et il y a

6 une pause jusqu'au 5 mars, entre le 16 février et le 5 mars.

7 Je pense que si nous gardons à l'esprit l'article 82 que nous voulons

8 appliquer, je pense que c'est le temps qui est indiqué là qui devrait

9 constituer le temps approprié au cours duquel l'accusé Kos présentera ses

10 moyens. Et c'est à ce moment-là que se déclencherait l'article 65ter-G.

11 C'est seulement à ce moment là que l'article peut s'appliquer de façon

12 spécifique et concrète. Sinon, s'il nous faut déposer notre mémoire d'ici

13 au 15 décembre, nous ne pourrons discuter des choses que de façon

14 abstraite.

15 M. le Président: Mais, Maître Nikolic, si j'ai bien compris votre

16 argument, vous dites que vous n'êtes pas en condition de déposer le

17 mémoire préalable selon le réquisit de la règle parce que vous restiez un

18 peu dans une discussion abstraite: c'est cela que je dois comprendre?

19 M. Nikolic (interprétation): Oui, d'une certaine façon, c'est vrai,

20 Monsieur le Président, car je ne saurai pas, d'ici au 15 décembre, si

21 j'aurai reçu la décision prise par la Chambre, suite à la requête déposée

22 en vertu du 98bis.

23 M. le Président: D'accord. C'est un peu pour cela que j'ai dit que nous

24 aurons peut-être besoin d'une nouvelle conférence de mise en état avant la

25 conférence préalable, c'est-à-dire avec les éléments que vous avez.

Page 6719

1 Le problème est le suivant: si nous attendons d'être en condition de

2 commencer vraiment le procès, on ne pourra peut-être pas le commencer

3 avant la fin janvier. Mon raisonnement est celui-ci: vous posez sur le

4 papier votre dessein de défense pour le pire, c'est-à-dire dans

5 l'hypothèse où la Chambre ne fera pas droit à vos requêtes. Entre-temps,

6 la Chambre publiera peut-être cette semaine, peut-être demain ou après-

7 demain -je ne sais pas- mais cette semaine peut-être, elle va publier sa

8 décision. Et là, ou vous avez la décision et vous établissez encore un

9 autre dessein, si possible, ou la décision arrive après que vous ayez

10 écrit tous vos matériaux et donc là, on aura peut-être besoin d'avoir une

11 conférence de mise en état pour affiner une nouvelle fois les choses avant

12 la conférence préalable. C'est un peu ce schéma que nous avons dans la

13 base de l'organisation des choses comme elles ont été organisées. C'est

14 pour aller vite et pour travailler un peu.

15 M. Nikolic (interprétation): Oui, Monsieur le Président. Ça, c'est un

16 aspect des choses mais il y a aussi la question des moyens de défense de

17 Kvocka qui aura une incidence certaine sur la situation de mon client.

18 Lorsque je vois le calendrier que vous suggérez, je pense que la défense

19 de l'accusé Kos s'intègre parfaitement dans ce calendrier. Nous n'avons

20 pas pour intention de manipuler les dates que vous avez suggérées; nous

21 voulons cependant avoir l'occasion de permettre à l'accusé Kos de faire

22 l'objet d'un procès individuel en vertu de l'Article 82.

23 M. le Président: Oui, mais tous les accusés bénéficient d'un procès

24 individuel. Il n'y a pas de situation spéciale pour M. Kos ici. La règle

25 est applicable à tous les accusés.

Page 6720

1 M. Nikolic (interprétation): Je conviens bien que cette règle s'applique à

2 tous les accusés, qui sont tous dans la situation où ils doivent être

3 jugés comme s'ils étaient jugés séparément. D'ailleurs, M. Fila a parlé de

4 ce point également, pour même cette raison. Je souligne que, de cette

5 façon, en agissant comme nous le faisons, nous ne remettrons absolument

6 pas en cause le calendrier que vous venez de développer devant nous,

7 Monsieur le Président. Vous pouvez en être sûr.

8 Je vais essayer d'être plus clair peut-être puisque mon confrère, Me Fila,

9 me demande de l'être. Lorsque la défense de l'accusé Kvocka aura été

10 présenté dans un délai de cinq jours, donc cela nous amène du 16 février

11 au 20 février, la défense de l'accusé Kos pourra déposer son mémoire en

12 application de l'Article 65ter(G). Ce qui fait deux semaines à peu près

13 avant le début de l'audition des éléments de preuve de l'accusé Kos à

14 décharge.

15 M. le Président: Peut-être qu'il y a ici une question qu'il faut

16 reprendre. Je ne sais pas si nous avions déjà décidé… Je crois que nous

17 avions dit que nous reviendrons sur la question de savoir si tous les

18 accusés vont déposer les mémoires préalables le 15 ou non? Mais j'avais

19 dans ma tête que oui, que tous les accusés allaient déposer le mémoire

20 préalable, tous le 15. Même l'ordonnance n'est pas adressée spécifiquement

21 à un accusé, mais à tous les accusés.

22 M. Nikolic (interprétation): C'est exact, Monsieur le Président. C'est ce

23 qui est écrit dans le texte mais, durant la présente conférence de mise en

24 état, nous souhaitions vous présenter un certain nombre d'arguments qui se

25 retrouvent dans le Règlement de procédure et de preuve. En dehors de

Page 6721

1 l'Article 82 du Règlement qui a déjà été cité, nous avons également

2 l'Article 21.4(B) et (G) du Statut, l'Article 83 du Règlement, l'Article 2

3 du Règlement et l'Article 85(C) du Règlement. Ce sont tous ces articles du

4 Règlement sur lesquels nous nous appuyons pour présenter notre position.

5 M. le Président: Mais votre position est pour dire que vous n'allez pas

6 présenter le mémoire préalable le 15, mais à une autre date.

7 M. Nikolic (interprétation): Monsieur le Président, dire que je ne le veux

8 pas est peut-être un petit peu brutal. La seule chose que je veux, c'est

9 d'avoir la possibilité, l'autorisation d'utiliser le Règlement et de

10 soumettre mon mémoire à la fin, après la fin de la présentation des

11 éléments de preuve de l'accusé Kvocka. Après moi, il faudrait que Me Fila

12 puisse agir de même; après Me Fila, Me Stojanovic et enfin la défense de

13 M. Prcac.

14 JONCTION A VERIFIER (Nous en avons discuté entre nous, entre conseils de

15 la défense, aujourd'hui et nous avons tous la même position, à part le

16 défenseur de M. Kvocka qui passe en premier.

17 M. le Président: Un moment, s'il vous plaît.

18 (Les Juges se concertent sur le siège.)

19 M. le Président: Maître Nikolic. Je crois que maintenant, nous comprenons

20 bien votre question. Je crois que c'était un peu un dialogue de sourds

21 entre nous, excusez-moi.

22 J'aimerais bien quand même entendre un peu la position de la défense.

23 C'est celle-ci donc: le mémoire préalable Kvocka, après le mémoire

24 préalable Kos, après Radic, après Zigic, après Prcac. Peut-être pourrait-

25 on expliquer pourquoi cette façon de faire, Maître Nikolic? Pourquoi ne

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1 pas rendre les mémoires préalables tous en même temps et, après, on fait

2 la séquence? Ou, si je puis dire, est-ce que le droit d'un accusé à avoir

3 un procès individuel peut être lésé par le fait de présenter le mémoire

4 préalable tous en même temps?

5 M. Nikolic (interprétation): Je vais répéter ce que j'ai déjà dit. La base

6 sur laquelle s'appuie la présente équipe de défense pour déterminer sa

7 position, c'est l'Article 82 du Règlement qui traite des instances

8 disjointes ou jointes. Tout ceci est très clair pour la défense car, en

9 cas d'instances jointes, chaque accusé a les mêmes droits que s'il était

10 jugé séparément. Je viens de citer l'Article 82.

11 M. le Président: Déposer les mémoires préalables à la date du 15 peut

12 léser ce droit d'individualité? En quoi?

13 M. Nikolic (interprétation): Parce que, dans ce cas-là, le mémoire serait

14 clair, concis et parfait. S'il pouvait être déposé plus tard, la

15 présentation des moyens de preuves liés à l'accusé Kvocka serait terminée.

16 M. le Président: La même raison était valable pour tous les autres? Ou

17 est-ce seulement le cas entre des relations entre Kvocka et Kos?

18 M. Nikolic (interprétation): Non. Ce que les autres conseils ont dit

19 correspond à ce que je viens de dire, parce que pour eux aussi la

20 situation serait plus claire, après avoir entendu les moyens de preuve à

21 décharge de Kvocka et de Kos; pour celui qui me suit.

22 Une petite digression, Monsieur le Président, si vous me la permettez.

23 Lorsque le procès était entendu par la Chambre de première instance III et

24 qu'on a discuté de la question des dépositions devant l'officier

25 instrumentaire, nous avons déjà parlé des multiples témoins et du risque

Page 6723

1 de chevauchement de témoignages de différents témoins. Je pense que nous

2 éviterions le problème en le réglant de la même façon. Nous pourrions

3 entendre la présentation des moyens de preuve liés à un accusé, terminer

4 l'audition de ces moyens relatifs à un accusé avant de commencer

5 l'audition des moyens de preuve à décharge du deuxième accusé, etc. La

6 défense, dans ce cas, respecterait les dispositions de l'Article 60ter(G)

7 et j'espère que les mémoires de la défense pourraient être plus clairs.

8 Mme Wald (interprétation): Maître Nikolic, pouvez-vous citer d'autres

9 exemples relevant du tribunal où il y aurait eu jonction d'instances et où

10 l'on aurait procédé de la sorte? Vous avez peut-être un co-conseil qui a

11 travaillé dans l'affaire Celebici qui pourrait vous en parler ou évoquer

12 d'autres cas?

13 M. Nikolic (interprétation): Oui, l'affaire Celebici.

14 M. le Président: Pardon. Je suivrais un peu cette suggestion de Mme le

15 Juge Wald. Est-ce que Maître O'Sullivan peut nous dire maintenant comment

16 les choses se sont passées à Celebici, de ce point de vue-là? Maître

17 O'Sullivan, s'il vous plaît?

18 M. O'sullivan (interprétation): Effectivement, au moment de l'affaire

19 Celebici, l'Article 65ter n'existait pas. Le Tribunal, en vertu des

20 pouvoirs qui lui sont conférés et en vertu de l'Article 54, avait ordonné

21 que la défense, au moment de la présentation de ses moyens de preuve,

22 communiquerait à l'accusation les informations dont elle disposait.

23 C'est un peu moins complet que ce que dit l'Article 65ter mais la défense

24 n'avait pas l'obligation de communiquer ses informations avant que chacun

25 des accusés n'ait commencé la présentation de ses moyens à lui. Donc ce

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1 n'était pas tous les accusés d'un coup qu'on avait eus, mais il fallait

2 que se soit fait à un moment raisonnable, avant le début de la

3 présentation des moyens de l'autre accusé.

4 Permettez-moi d'ajouter que c'est ainsi qu'est structuré l'Article. C'est

5 une disposition qui relève de la communication, cet article 65ter. Ce qui

6 compte, le point clef, c'est la date à laquelle est déclenchée la

7 communication et, pour qu'il y ait équité entre les accusés, il ne

8 faudrait pas que tout se passe en même temps, afin qu'il n'y ait pas de

9 différence entre le premier accusé, le second et ainsi de suite.

10 Je pense que c'est lié aussi à la présomption d'innocence, à la charge de

11 la preuve et de l'équité pour ce qui est du moment où se fait la

12 communication. Il ne serait pas juste qu'on exige de chacun des accusés

13 qu'il communique ses mémoires en même temps. Ce n'est pas ce que prévoit

14 l'Article. Il faudrait que les dates soient échelonnées.

15 M. le Président: Madame Hollis, avez-vous une idée à propos de cette

16 question, s'il vous plaît?

17 Mme Hollis (interprétation): Merci, Monsieur le Président. Permettez-moi

18 quelques commentaires. Tout d'abord, si vous examinez l'Article 82, selon

19 nous, en fait, la faille fondamentale dans ces arguments que vous venez

20 d'entendre, c'est que les conseils de la défense partent du principe ou

21 impliquent que cet Article 82 exige que les présentations, faites en vertu

22 du 65ter, soient présentées à un moment proche dans le temps du début de

23 la présentation des moyens de preuve.

24 L'Article ne l'exige pas. C'est la nécessité de l'équité du procès. Ce

25 n'est pas comme si chacun des accusés faisait l'objet d'un procès

Page 6725

1 individuel. Nous estimons qu'il incombe à la Chambre de décider pour

2 savoir à quel moment ces écritures doivent être soumises en vertu du

3 65ter.

4 S'il n'y avait qu'un accusé et s'il devait y avoir un retard de trois ou

5 quatre mois entre la fin de la présentation des moyens à charge et le

6 début des moyens à décharge, avec un seul accusé, la Chambre pourrait

7 déclarer que les documents du 65ter(G) soient soumis peu de temps après la

8 fin des présentations des moyens à charge. Donc, rien ne dit, ni dans cet

9 article ni dans le Statut, que la défense fournisse les informations

10 demandées par le 65ter seulement au moment où elle va commencer la

11 présentation de ses moyens. L'Article dit "peu de temps après la

12 présentation des moyens à charge" et "avant le début" des moyens à

13 décharge, ce qui est une période assez longue. Mais on avait dit qu'il

14 serait préférable d'attendre un peu avant d'avoir ces mémoires de la

15 défense, car il serait plus précis. Je pense qu'on a une interprétation un

16 peu trop rigide de ce 65ter(G), parce que c'est le conseil de la défense.

17 Ils vous l'ont dit d'ailleurs, ils ne savent pas combien de témoins ils

18 vont citer et ils disent qu'ils vont devoir présenter tous les moyens.

19 Mais ils peuvent très bien fournir ces informations concernant ces témoins

20 d'ici au 15 décembre.

21 Si les décisions que vous allez prendre sur la requête pour demande

22 d'acquittement, ou si les éléments de preuve apportés lors de la

23 présentation des moyens des autres accusés venaient à modifier la nature

24 des témoins dont ils auraient besoin, s'il n'y avait plus ces témoins,

25 simplement ils se contenteraient d'informer la Chambre et l'accusation qui

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1 n'avait pas cité ces témoins qui ne seraient plus nécessaires et ce n'est

2 pas là une chose difficile à faire. Mais si vous demandez leurs écritures

3 le même jour, je pense que c'est une meilleure façon pour structurer le

4 procès. En effet, de cette façon, vous avez reçu toutes les écritures le

5 même jour, et, pour la date suivante prévue pour la réponse de

6 l'accusation, l'accusation doit le faire aussi. Sinon l'accusation va

7 répondre par voie de cinq écritures différentes, ce qui demandera du temps

8 supplémentaire.

9 Vous savez qu'une date serait réservée pour chacun des dépôts et il faudra

10 accorder un certain délai à l'accusation pour qu'elle y réponde, ce qui ne

11 fera que retarder le procès. Nous ne pensons pas que le Statut ou le

12 Règlement exige qu'il y ait dépôt de ce mémoire juste avant la

13 présentation des moyens d'un accusé particulier. La question est de savoir

14 comment on peut structurer au mieux le déroulement du procès.

15 Et il y a un sous-produit de l'article 65ter: la question de la

16 communication. Nous pensons que plus la partie adverse en l'occurrence

17 aura de temps pour préparer sa réponse, ou son contre-interrogatoire,

18 mieux elle le fera. Et si ses témoins n'étaient plus appelés, ceci n'est

19 pas un préjudice, ne lèse pas l'accusé et la défense peut tout à fait

20 structurer ses moyens en fonction des circonstances.

21 Nous pensons que vous avez le pouvoir nécessaire pour déterminer à quel

22 moment il faut faire ces dépôts. Cela pourrait être le 15 décembre. Mais

23 il se peut qu'un facteur modifie les choses. L'avocat de Prcac dit ne pas

24 avoir eu le temps de se préparer et, s'ils peuvent vous convaincre de ce

25 qu'il n'ont pas disposé de suffisamment de temps pour se préparer et

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1 préparer ces écritures, à ce moment-là, ce serait une raison différente

2 qui vous permettrait de leur accorder un délai supplémentaire. Mais je

3 pense que c'est quelque chose que vous devriez examiner une fois qu'ils

4 auraient modifié cette demande.

5 Mme Wald (interprétation): Avez-vous l'expérience d'autres procès

6 conjoints en vertu du 65ter?

7 Mme Hollis (interprétation): Non, je ne peux rien vous dire avec

8 certitude.

9 Mme Wald (interprétation): Mais même avec un peu de certitude?

10 Mme Hollis (interprétation): Je ne sais pas si cette procédure a déjà été

11 utilisée. Bien sûr qu'il y avait l'affaire Celebici, mais je ne sais pas

12 s'il y a eu d'autres affaires de ce genre. Mais je ne peux pas là me

13 prononcer de façon certaine.

14 M. Riad (interprétation): Madame Hollis, vous semblez penser qu'il n'y a

15 pas préjudice subi par la défense en l'occurrence puisque cette défense

16 peut modifier le nombre des témoins qu'elle entend citer et ceci, bien

17 sûr, à sa convenance. Elle peut diminuer ce nombre de témoins. Mais qu'en

18 serait-il dans le cas inverse: est-ce qu'elle pourrait appeler plus de

19 témoins une fois qu'ils auront ce qu'on vont dire les témoins, les témoins

20 de l'autre accusé?

21 Ils pourraient estimer qu'ils ont besoin de davantage de témoins. A ce

22 moment-là, est-ce qu'ils ne seraient pas lésés si on leur demandait de

23 prendre une décision d'emblée?

24 Mme Hollis (interprétation): C'est un point tout à fait important,

25 Monsieur le Juge, et je pense qu'au cours de cette matinée, le Juge Wald a

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1 également évoqué cette question. Nous pensons que s'il y a dépôt, en vertu

2 du 65ter(G), ou s'il y a dépôt du Procureur en vertu du 65ter, ceci ne

3 devrait pas empêcher la partie requérante de présenter des moyens de

4 défense, pour autant qu'ils peuvent motiver qu'il y ait une modification

5 des circonstances.

6 Mais c'est vrai qu'ils présentent ce mémoire deux mois avant la

7 présentation de leurs témoins, aussi tôt auparavant car, même dans la

8 présentation de leurs propres moyens, il se peut qu'un témoin dise quelque

9 chose qui nécessite la comparution d'autres témoins.

10 Aujourd'hui, nous avons la nécessité d'avoir des procès rapides. C'est

11 important comme facteur mais nous pensons qu'un procès rapide ne peut pas

12 se faire aux dépens d'un procès juste et équitable. La Chambre a donc le

13 pouvoir -et a utilisé ce pouvoir auparavant- d'ajuster la procédure à la

14 situation qui se présente. S'il y a un impératif de justice qui exige

15 qu'il y ait modification de l'ordre, à ce moment-là, la défense devrait

16 avoir la possibilité de le faire, tout comme l'accusation l'aurait aussi.

17 Donc, ce n'est pas un problème, il n'y a pas préjudice.

18 M. Riad (interprétation): Merci.

19 M. Fila (interprétation): Monsieur le Président, je me rends bien compte

20 que le temps passe mais il faut quand même que nous nous comprenions bien

21 sur un point. Dans ce que Mme Hollis vient de dire, il est sous-entendu

22 que je dois vous demander l'autorisation pour modifier le nom d'un témoin,

23 ou ajouter des témoins, ou en enlever à la liste. C'est quelque chose qui

24 peut se faire si je reçois votre autorisation alors que, si c'est la

25 proposition de Me Nikolic, qui est acceptée, je n'ai aucune autorisation à

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1 demander. Cinq jours après la présentation des éléments à décharge de Kos,

2 je peux décider tout seul quels sont les témoins que je présenterai. Cela

3 était un point.

4 Et le deuxième est le suivant. Si le souci de cette Chambre de première

5 instance est un procès équitable, je demande pourquoi M. Kvocka aurait la

6 priorité; pourquoi, pour la présentation de ses éléments à décharge, il

7 aurait quinze jours de préparation alors que, pour le dernier accusé

8 Prcac, ce délai serait beaucoup plus long. Est-ce que c'est fair-play?

9 Troisième argument, je vous rappellerai que M. Radic a été arrêté sur la

10 base du témoignage de quelqu'un, le témoin A, et nous avons reçu trois

11 incriminations supplémentaires du Procureur il y a vingt jours. Le

12 Procureur n'a pas respecté le Règlement au sujet des résumés des

13 dépositions. Soit nous ne les avons pas reçus du tout, soit M. Saxon nous

14 les a communiqués le matin même de l'audition du témoin, c'est-à-dire

15 quinze minutes avant d'entendre le témoin concerné.

16 J'aimerais que vous nous disiez -et je vous présente cette demande-,

17 j'aimerais que vous demandiez à la partie adverse, à titre d'exemple, s'il

18 est possible d'étendre la période comprise dans l'acte d'accusation de

19 1995 à 2000?

20 Si cela est équitable alors, cette équité peut s'appliquer à moi

21 également. Je veux pouvoir, cinq jours après la fin des éléments de la

22 présentation des éléments de preuve à décharge de Kos, présenter la liste

23 de mes témoins sans demander d'autorisation supplémentaire ou la

24 compréhension même de Mme Hollis. Si Mme Hollis avait bénéficié d'une

25 compréhension de ce genre en 1995, elle aurait dû accuser Mlado Radic de

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1 tout ce dont elle l'a accusé dans une période ultérieure, en septembre ou

2 en août.

3 Voilà ce que je voulais dire et je vais vous donner une nouvelle fois cet

4 exemple de la remise des documents par M. Saxon cinq minutes avant le

5 début de l'audience. Si je venais à l'audience, comme M. Keegan, pour dire

6 tout d'un coup à la partie adverse, finalement ce n'est pas ce témoin qui

7 va venir aujourd'hui: il y a eu un problème, c'est un autre témoin,

8 maintenant on nous parle de quinze jours. Il faut que je vous dise quel

9 jour tel ou tel témoin va venir et quelle question je lui poserai.

10 Et si les choses changent, il faudra que je demande à la Chambre de

11 manifester de la compréhension à mon égard. Pourquoi serais-je tenu à cela

12 puisque le Procureur n'a pas été tenu aux mêmes obligations. Si l'exemple

13 était différent, je m'y plierais mais je ne pense pas qu'un chat et un

14 chien puissent se comparer. J'espère que cela peut se traduire. Merci.

15 M. le Président: Maître K. Simic, avez-vous des choses nouvelles à

16 ajouter? Il est 5 heures moins 5.

17 M. K. Simic (interprétation): Oui, Monsieur, j'ai quelque chose à dire. En

18 principe, cette discussion ne me concerne pas. Cependant, il y a quelque

19 chose qui concerne la présentation de mes moyens à décharge. Tout le monde

20 essaie de déterminer ses critères. Disons que le temps réservé à M. Kvocka

21 sera l'aune à laquelle on va mesurer les autres dépositions. C'est la

22 raison pour laquelle, moi, j'ai besoin de tout le temps nécessaire.

23 Que se passera-t-il si, par exemple, on me donne dix jours alors que j'ai

24 besoin de quinze jours et si quelqu'un, par la suite, demande davantage de

25 jours? On dirait: "Eh bien, ce n'est pas nécessaire car, dans la

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1 présentation des moyens Kvocka, on n'a pas fait pareil".

2 Il s'agit de voir comment on va répartir le temps. Ce sont les dix ou

3 douze premiers jours qui serviront donc de critères par rapport à ce qui

4 se va se dérouler par la suite, mais nous ne voulons pas que ceci nous

5 lèse et favorise tous les autres.

6 M. le Président: Je voudrais demander à Me Jovan Simic: êtes-vous préparé,

7 Maître Jovan Simic, pour donner une réponse générale, sans être précise,

8 par rapport à la défense de M. Prcac, maintenant?

9 M. J. Simic (interprétation): Monsieur le Président, je ne suis pas encore

10 tout à fait sûr au jour d'aujourd'hui. Nous avons parlé avec pas mal de

11 témoins. Certains avaient peur de témoigner à cause de leur environnement,

12 d'autres avaient peur que leur témoignage puisse aboutir à des

13 conséquences négatives pour eux.

14 M. le Président: Vous pouvez dire tout cela dans votre mémoire préalable,

15 dire: "Je suis certain par rapport à cela et j'ai besoin encore de savoir

16 cela et cela". Etes-vous en condition de dire cela dans votre mémoire

17 préalable?

18 M. J. Simic (interprétation): Oui, je le peux.

19 M. le Président: Je vous demande un instant, s'il vous plaît.

20 (Les Juges se concertent sur le siège.)

21 M. le Président: La Chambre rend la décision suivante: les différents

22 mémoires préalables à la défense vont être déposés à la même date. Cette

23 date va être déterminée par la publication de la décision de la Chambre

24 sur la requête d'acquittement et donc les mémoires préalables doivent être

25 déposés dix jours après la publication de la décision. Le Procureur aura

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1 une semaine pour répondre aux différents mémoires préalables. Voilà.

2 C'est le mieux que nous puissions trouver maintenant. Nous comprenons que

3 tout est un peu en suspens parce que nous n'avons pas rendu notre

4 décision.

5 Nous avons essayé de discuter cette condition, mais je crois que c'est

6 plus clair pour toutes les parties de déposer les mémoires préalables

7 après la décision, après dix jours, sur la publication de la décision. Le

8 Procureur répondra une semaine après le mémoire préalable. Donc voilà la

9 décision.

10 Il est 17 heures et il faut vraiment terminer pour nous tous. Je crois que

11 nous sommes fatigués.

12 Je disais donc qu'il est vraiment 17 heures. Nous avons beaucoup travaillé

13 aujourd'hui. Je dois quand même remercier les parties pour leur

14 disponibilité et pour avoir voulu commencer le matin, car nous nous sommes

15 rendus compte que, dans les deux heures que nous avions prévues, c'était

16 tout à fait impossible de discuter ce dont nous avions à discuter.

17 C'est vrai aussi que nous avions marqué l'heure parce que nous n'avions

18 une autre affaire. Dès que nous avons appris que nous avions cette

19 affaire, nous avons voulu changer. Je remercie les parties, soit le

20 Procureur, soit les conseils de défense d'avoir tout fait pour être ici.

21 Permettez-moi maintenant… Si j'ai bien compris, Mme Hollis ne travaillera

22 pas avec nous le matin. C'est cela que j'ai compris: le matin, Madame

23 Hollis?

24 Mme Hollis (interprétation): Tout dépend du temps qu'il faudra à Mme

25 Somers pour se familiariser avec le procès, afin qu'elle puisse vraiment

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1 travailler efficacement. Si cela se passe avant le mois de janvier, je ne

2 participerai pas au procès. Mais si elle a besoin d'un peu plus de temps,

3 je l'aiderai bien sûr durant le mois de janvier. Je ne sais pas.

4 C'est comme pour beaucoup d'autres choses qui se sont dites aujourd'hui,

5 tout est contingent.

6 M. le Président: Okay. Nous allons voir de toute façon.

7 Je profite du moment pour souhaiter un bon Noël aux personnes qui le

8 célèbrent, une bonne année aux personnes qui le souhaitent; aussi une

9 bonne année, un bon Noël orthodoxe pour les personnes qui le célèbrent.

10 Voilà, je crois que nous avons beaucoup de choses à faire et à travailler.

11 Nous avons beaucoup travaillé aujourd'hui. Je vous remercie encore une

12 autre fois. Je remercie particulièrement les interprètes qui ont aussi

13 beaucoup travaillé.

14 Les interprètes: Merci, Monsieur le Président.

15 M. le Président: Il faut vraiment terminer. Nous sommes tous vraiment

16 fatigués. Donc, à une prochaine fois et je lève la séance.

17 (L'audience est levée à 17 heures 4.)

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