Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 (Mardi 24 avril 2001.)

2 (Audience publique avec mesures de protection.)

3 (L'audience est ouverte à 9 heures 30.).

4 (Les accusés sont introduits dans le prétoire.)

5 M. le Président: Bonjour, veuillez vous asseoir.

6 Bonjour Mesdames et Messieurs. Bonjour cabine technique, bonjour

7 interprètes

8 Interprètes: Bonjour Monsieur le Président.

9 M. le Président: Bonjour Greffe, Bonjour conseils de l'accusation et de la

10 défense.

11 Nous allons donc reprendre notre affaire et je crois que nous avons deux

12 témoins pour aujourd'hui. Je ne sais pas.

13 Maître Deretic ou Maître Stojanovic?

14 M. Deretic (interprétation): Bonjour, Monsieur le Président.

15 C'est tout à fait cela, Monsieur le Président, c'est exact.

16 M. le Président: Sommes-nous en condition d'appeler le témoin à la barre?

17 D'accord?

18 Monsieur l'huissier, pouvez-vous faire entrer le témoin s'il vous plaît?

19 (L'huissier baisse les rideaux.)

20 Maître Deretic, qui va être le témoin s'il vous plaît?

21 M. Deretic (interprétation): Le témoin suivant de la défense, c'est le

22 témoin DD8, Monsieur le Président.

23 (Le témoin DD8 est introduit dans le prétoire.)

24 M. le Président: Bonjour Témoin DD8. M'entendez-vous?

25 Témoin DD8 (interprétation): Je vous entends.

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1 M. le Président: D'accord, vous allez lire la déclaration solennelle que

2 M. l'huissier va vous tendre, s'il vous plaît.

3 Témoin DD8 (interprétation): (Hors micro.)

4 Je déclare solennellement que je dirai la vérité, toute la vérité et rien

5 que la vérité.

6 Interprètes: Nous n'avons pas entendu Monsieur le Président.

7 M. le Président: Vous pouvez vous asseoir, vous rapprocher des micros. Je

8 crois que les interprètes ont eu une difficulté à vous entendre donc nous

9 allons essayer. Vous pouvez vous rapprocher un peu et vous installer le

10 plus confortablement possible.

11 Merci beaucoup d'être venu Témoin DD8. Nous vous appelons ainsi pour vous

12 protéger puisque vous avez demandé des mesures de protection.

13 Pour l'instant, vous allez répondre aux questions que Me Deretic va vous

14 poser et je sais déjà qu'il va demander un huis clos partiel.

15 Je vais demander de passer à huis clos partiel.

16 Encore une petite chose, Témoin: M. l'huissier va vous tendre un papier

17 où, en principe, est inscrit votre nom. Vous répondrez par oui ou non s'il

18 s'agit de votre nom. Pouvez-vous vérifier?

19 Témoin DD8 (interprétation): Oui.

20 M. le Président: Très bien.

21 Nous allons donc passer au huis clos partiel.

22 (Audience à huis clos partiel.)

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4 (Audience publique avec mesures de protection.)

5 Maître Deretic, vous pouvez continuer s'il vous plaît.

6 M. Deretic (interprétation): Témoin DD8, après le déclenchement des

7 opérations de guerre dans la municipalité de Prijedor ainsi que dans l'ex

8 Bosnie-Herzégovine, où vous vous êtes trouvé une fois que ces opérations

9 ont commencé?

10 Témoin DD8 (interprétation): A Prijedor.

11 Question: Savez-vous quand a eu lieu l'attaque sur Prijedor.

12 Réponse: Le 30 mai 1992.

13 Question: Avez-vous vécu des désagréments ce jour-là?

14 Réponse: Oui.

15 Question: Pouvez-vous nous dire ce qui vous est arrivé?

16 Réponse: Je peux. Le 30 mai, vers 16 heures, un groupe de soldats est

17 arrivé, ils m'ont fait sortir de la maison -moi, les membres de ma famille

18 et deux ouvriers- et ils nous ont emmenés à la police où nous sommes

19 restés un petit moment et ils nous ont emmenés vers la salle de sports

20 "Mladost" où nous sommes restés également quelques temps. Et des jeeps,

21 une camionnette, je ne sais trop, sont arrivés et nous ont emmenés dans la

22 cour du poste de police où des autobus nous attendaient pour nous emmener

23 à Keraterm.

24 Question: Avez-vous tous été emmenés à Keraterm à ce moment-là?

25 Réponse: Non, ils ont laissé partir ma femme et mes enfants et ils n'ont

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1 gardé que moi et deux ouvriers.

2 Question: Aviez-vous à ce moment-là un travail, un commerce privé?

3 Réponse: Oui, j'avais ma boulangerie.

4 Question: Vous avez parlé de deux ouvriers, étaient-ce des gens qui

5 travaillaient pour vous dans votre boulangerie?

6 Réponse: Oui.

7 Question: Etaient-ils de nationalité albanaise?

8 Réponse: Oui.

9 Question: Pourriez-vous nous dire s'ils se sont retrouvés avec vous à

10 Keraterm?

11 Réponse: Oui. J'étais avec eux et ces ouvriers étaient un père et son

12 fils. En fait, le 5 juin, ils m'ont relâché mais le père de ce jeune homme

13 est resté là-bas et a été transféré plus tard à Omarska.

14 Question: Vous avez parlé de ce jeune homme, mineur d'âge, qui ensuite a

15 été transféré au centre d'enquête d'Omarska. Pouvez-vous nous dire ce

16 qu’il lui est arrivé par la suite?

17 Réponse: Ce qui lui est arrivé par la suite, c'est qu'il est venu chez moi

18 à la maison.

19 Question: Monsieur le témoin DD8, après votre arrivée au centre d'enquête

20 de Keraterm, avez-vous subi un interrogatoire?

21 Réponse: Oui.

22 Question: Pouvez-vous nous dire où on vous a installé à votre arrivée là-

23 bas?

24 Réponse: Moi, j'étais dans le hangar n°1.

25 Question: Pouvez-vous nous dire qui vous a interrogé?

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1 Réponse: C'est un inspecteur du SUP, Modric, qui m'a interrogé?

2 Question: Connaissiez-vous son prénom?

3 Réponse: Je crois que c'est Gazimir, quelque chose comme ça, je ne sais

4 pas exactement.

5 Question: Durant cet interrogatoire, en dehors des inspecteurs de

6 Prijedor, savez-vous s’il y avait d’autres inspecteurs qui le menaient?

7 Réponse: Oui.

8 Question: D'où venaient ces autres personnes?

9 Réponse: Ils venaient de Banja Luka.

10 Question: Pouvez-vous nous dire dans quelle condition vous avez été

11 interrogé, une fois arrivé dans la pièce où l’on vous a interrogé?

12 Réponse: Comment... je veux dire qu'il a été très correct avec moi, donc

13 je n'ai subi aucune contrainte.

14 Question: A quel sujet vous a-t-on interrogé?

15 Réponse: On m'a d'abord demandé si je possédais des armes, ensuite si je

16 faisais partie d'un parti politique, troisièmement si je cotisais pour ce

17 parti. Ce genre de chose etc.

18 Question: Durant le temps que vous avez passé dans le centre d’enquête de

19 Keraterm, combien de fois avez-vous été interrogé?

20 Réponse: Une fois.

21 Question: Avez-vous subi des violences physiques ou psychiques pendant cet

22 interrogatoire? Vous a-t-on maltraité, frappé?

23 Réponse: Non.

24 Question: Jusqu’à quand êtes-vous resté à Keraterm?

25 Réponse: Jusqu'au 5 juin 1992.

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1 Question: Que vous est-il arrivé à ce moment-là?

2 Réponse: Eh bien, ils m'ont relâché.

3 Question: Vous rappelez-vous qui vous a laissé sortir de Keraterm?

4 Réponse: Je crois que c'était le chef du SUP qui était là.

5 Question: Comment s'appelait-il?

6 Réponse: Simo Drljaca.

7 Question: Avant d'être relâché, avez-vous reçu une feuille de papier avec

8 quelque chose d'écrit dessus?

9 Réponse: Oui. En dehors des heures de couvre-feu dans la rue Mladen

10 Stojanovic n° 15, c'est là que j'habitais et je devais pouvoir circuler.

11 M. Deretic (interprétation): Monsieur le Président, je demanderai à

12 présent à l’huissier de bien vouloir remettre aux Juges de la Chambre

13 ainsi qu'aux collègues de l'accusation et de la défense un document que

14 j'ai ici entre les mains.

15 (L'huissier s'exécute.)

16 Je prierai également Monsieur l'huissier de bien vouloir placer un

17 exemplaire de ce document sur le rétroprojecteur, si possible en version

18 serbe.

19 M. le Président: Madame Thomson, quelle sera la cote?

20 Mme Thomson (interprétation): Oui, Monsieur le Président, c'est la pièce

21 D21/4.

22 M. Deretic (interprétation): Monsieur l'huissier, je vous demanderai de

23 placer la version serbe sur le rétroprojecteur, je vous prie.

24 Monsieur le témoin DD8...

25 M. le Président: Maître Deretic, peut-être serait-il préférable de donner

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1 la version serbe au témoin et placer la version anglaise sur le

2 rétroprojecteur? De cette façon, nous pouvons suivre.

3 M. Deretic (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

4 Mme Somers (interprétation): Monsieur le Président.

5 M. le Président: Oui Madame Somers.

6 Mme Somers (interprétation): Veuillez excuser cette interruption, mais un

7 nom figure sur ce document, il serait sans doute préférable de passer à

8 huis clos partiel de façon que le nom ne soit pas vu grâce au

9 rétroprojecteur, et en tout cas que l'identité de cette personne soit

10 protégée par rapport à la galerie du public.

11 M. le Président: Oui, de toute façon, il est toujours possible de placer

12 le document si la cabine technique ne diffuse pas sur le rétroprojecteur

13 pour l'extérieur. Je crois, pour nous tous, qu'il n'est pas nécessaire de

14 placer le document sur le rétroprojecteur et nous pouvons discuter en

15 session publique sans problème.

16 Interprètes: Nous ne l'avons pas, Monsieur le Président.

17 M. Deretic (interprétation): C'est tout à fait cela, Monsieur le

18 Président. D'ailleurs, je souhaitais à l'instant demander qu'on passe à

19 huis clos partiel compte tenu des informations que l'on trouve dans ce

20 document, de façon que l'identité de ce témoin ne soit pas dévoilée.

21 M. le Président: Peut-être serait-il mieux de passer à huis clos partiel

22 maintenant. De toute façon, les interprètes me disent qu'ils n'ont pas le

23 document, il faut donc faire une prochaine fois une copie pour les

24 interprètes, Maître Deretic, pour qu'ils puissent traduire.

25 (Audience à huis clos partiel.)

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19 (Audience publique avec mesures de protection.)

20 Vous pouvez continuer Maître Deretic.

21 M. Deretic (interprétation): Merci Monsieur le Président.

22 Monsieur le témoin DD8, avant d'arriver au centre d'enquête de Keraterm,

23 connaissiez-vous un homme répondant au nom de Zoran Zigic?

24 Réponse: Oui.

25 Question: Depuis quand le connaissiez-vous?

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1 Réponse: Eh bien, depuis 1983, ou 1984. Je ne saurais le dire exactement.

2 Question: Pouvez-vous nous dire où vous avez fait sa connaissance?

3 Réponse: Oui. J'ai fait sa connaissance à la gare de chemin de fer et la

4 gare routière de Prijedor où il travaillait comme chauffeur de taxi, parce

5 que j'avais des amis qui étaient garçons de café et il y avait un café à

6 cet endroit et c'est comme cela que nous avons fait connaissance.

7 Question: Lorsque vous alliez dans ce secteur de la gare ferroviaire et de

8 la gare routière, est-ce qu'il vous arrivait de sortir en privé avec Zoran

9 Zigic?

10 Réponse: Oui à plusieurs reprises.

11 Question: Dans ces moments-là, ressentiez-vous de la part de Zoran Zigic

12 un quelconque antagonisme à votre égard, une forme de répulsion?

13 Réponse: Non.

14 Question: Connaissait-il votre appartenance ethnique?

15 Réponse: Oui parce que, là-bas, il y avait beaucoup de compatriotes à moi

16 qui avaient des magasins, et il y avait aussi un ami à moi qui était

17 garçon de café qui travaillait à Kozara Turist, nous nous fréquentions

18 assez régulièrement, et je n'ai pas remarqué qu'il se comportait avec moi

19 d'une façon différente de la façon dont il se comportait avec les autres.

20 C'était toujours le même comportement.

21 Question: Avez-vous parfois rencontré Zoran Zigic en compagnie de vos

22 compatriotes?

23 Réponse: Oui, il y en avait à moi des compatriotes, mais il y avait aussi

24 toute sorte d'autres gens, des Serbes, des Croates, des Musulmans, des

25 albanais. Nous nous fréquentions tous les jours, enfin pas forcément tous

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1 les jours mais disons que chaque fois que nous nous rencontrions, nous

2 nous parlions.

3 Question: Quand on vous a emmené au centre d'enquête de Keraterm, y avez-

4 vous vu Zoran Zigic?

5 Réponse: Oui.

6 Question: Pouvez-vous nous dire comment Zoran Zigic était habillé lorsque

7 vous l'avez vu pour la première fois là-bas?

8 Réponse: Il portait un uniforme bigarré et un béret rouge sur la tête, et

9 il avait un bandage, un pansement autour de la main gauche.

10 Question: Lorsque vous le voyiez là-bas, que faisait-il, Zoran Zigic? Vous

11 en souvenez-vous?

12 Réponse: Je ne sais pas trop. Il allait et venait dans l'enceinte, il

13 criait en disant qu'il avait mal à la main. Ce type de chose, des fois il

14 gueulait, des fois il riait. A mon avis, j'avais l'impression qu'il était

15 tout le temps sous l'effet de l'alcool.

16 Question: Monsieur le Président, je vous redemanderai à présent, compte

17 tenu de la nature des questions que je me propose de poser, de retourner à

18 huis clos partiel pour quelques instants seulement.

19 M. le Président: Oui, nous allons donc passer à huis clos partiel.

20 (Audience à huis clos partiel.)

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8 (Audience publique avec mesures de protection.)

9 Oui, Maître Deretic, vous pouvez continuer s’il vous plaît.

10 M. Deretic (interprétation): Merci.

11 Témoin DD8, depuis quand vivez-vous à Prijedor?

12 Témoin DD8 (interprétation): Je vis à Prijedor depuis 1980.

13 Question: Et avez-vous connu des familles albanaises vivants également à

14 Prijedor?

15 Réponse: Je les connais toutes, notamment celles qui géraient des

16 magasins.

17 Question: Avez-vous à quelque occasion que se soit entendu parler d'un

18 albanais, d'un certain Jasmin Izeiri?

19 Réponse: Non.

20 Question: Je rectifie, il s'agit de Jasmin Izeiri.

21 Réponse: Je ne sais pas, je n’ai jamais entendu parler de lui.

22 Question: Merci. Avez-vous connu à Prijedor une famille répondant au nom

23 de famille Izairi?

24 Réponse: Oui.

25 Question: Je m'excuse, Monsieur le Président, mais je dois répéter le nom

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1 de famille car le compte-rendu, ah maintenant ça va.

2 Pouvez-vous, Monsieur le témoin, nous dire où vivait cette famille à

3 Prijedor et que faisait la famille en question?

4 Réponse: Oui, je peux vous le dire. La famille Izairi habitait un village

5 entre Prijedor et Ljubija appelé Hambarine. Ils étaient pâtissiers, ils

6 avaient un magasin près de l'école primaire de Hambarine, ils étaient deux

7 frères avec leurs enfants.

8 Question: Vous souvenez-vous peut-être de leur prénom?

9 Réponse: Oui. L'aîné s'appelle Huzeir. Avant la guerre il est parti en

10 Allemagne. Et le cadet s'appelle Rasim. Il a été interné au camp d'Omarska

11 puis plus tard au camp militaire de Manjaca, puis il a été échangé avec

12 quelqu'un et il vit en Allemagne chez son frère avec sa famille. Ils sont

13 tous en vie sains et saufs.

14 M. Deretic (interprétation): Monsieur le Président, je redemanderais à

15 Monsieur l’huissier de bien vouloir distribuer un document et de faire

16 comme tout à l'heure, c’est-à-dire de placer sur le rétroprojecteur le

17 document en version anglaise et je demanderais de retourner en session à

18 huis clos partiel et de présenter au témoin la version serbe.

19 M. le Président: Huis clos partiel, pourquoi?

20 M. Deretic (interprétation): Vous avez tout à fait raison, Monsieur le

21 Président, nous n'avons pas besoin de ce huis clos partiel étant donné que

22 nous avons déjà ces noms.

23 M. le Président: D'accord, très bien. Quelle sera la cote Madame Thomson?

24 Mme Thomson (interprétation): D22/4.

25 (L'huissier s'exécute.)

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1 M. le Président: Oui, Maître Deretic, continuez s'il vous plaît?

2 M. Deretic (interprétation): Monsieur le témoin, vous nous avez dit qu'à

3 la veille des conflits armés, vous étiez dans les affaires à titre privé

4 est-ce exact?

5 Témoin DD8 (interprétation): Oui.

6 Question: Vous avez maintenant sous les yeux un document qui a été délivré

7 par la commission municipale chargée de l'économie et de la planification

8 publique de Prijedor, est-ce l'organe qui délivrait les permis de travail?

9 Réponse: Oui c'est la seule instance habilitée à délivrer des

10 autorisations de travail, personne d'autre ne peut le faire.

11 Question: Et sans ce document qui se trouve sous vos yeux, sauriez-vous

12 nous dire si Izairi Rasim était censé pouvoir effectuer ou accomplir des

13 activités de pâtissier ou pas?

14 Réponse: C'est cela.

15 Question: Pouvait-il exercer sa profession sans avoir de décision de ce

16 type?

17 Réponse: Non, non, pas du tout.

18 Question: Et vous-même, aviez-vous un document équivalent énoncé à votre

19 nom et prénom?

20 Réponse: Oui tout à fait normal.

21 Question: Et ce document devait-il obligatoirement porter un numéro de

22 protocole?

23 Réponse: Tout à fait.

24 Question: Juste une petite question encore: cette décision est-elle

25 délivrée pour une durée déterminée ou une durée indéterminée?

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1 Réponse: Pour une durée indéterminée.

2 Question: Je vous remercie.

3 Je crois, Monsieur le Président, que nous pouvons retirer le document du

4 rétroprojecteur et je tiens à remercier aussi Monsieur l'huissier.

5 Monsieur le témoin, je vous prie de bien vouloir une fois de plus dire au

6 sujet des frères Izairi, Rasim et Huzeir et leur famille respective si ces

7 gens-là sont de nos jours en vie?

8 Réponse: Oui, ils sont tous en vie. J'ai récemment vu Rasim et je le sais,

9 j'étais avec lui il y a trois mois, il était venu d'Allemagne et nous

10 avons passé deux ou trois heures ensemble étant donné que nous étions amis

11 de longue date et il m'a raconté que tous étaient en bonne santé.

12 Question: Après que vous ayez été relâché de ce centre d'instruction de

13 Keraterm, est-ce que vous avez continué à résider à Prijedor?

14 Réponse: Oui, jusqu'au 25 novembre 1992.

15 Question: Et par la suite, êtes-vous allé quelque part?

16 Réponse: Oui, je suis parti à Belgrade, puis je suis allé chez mon frère à

17 Prizren.

18 Question: Après avoir été relâché de ce centre d'instruction de Keraterm,

19 avez-vous pendant cette période, donc depuis votre libération jusqu'au

20 départ pour Belgrade, voire Prizren, avez-vous revu Zoran Zigic à

21 l'extérieur de l'enceinte de Keraterm?

22 Réponse: Oui, je l'ai vu deux ou trois fois, me semble-t-il, mais en

23 passant, je ne me suis pas attardé en sa compagnie.

24 Question: Pendant votre séjour dans ce centre d'instruction de Keraterm,

25 avez-vous personnellement vu, ou alors entendu dire de la part des gens

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1 qui étaient dans la pièce n°1 avec vous, que Zoran Zigic avait maltraité

2 physiquement qui que ce soit, battu ou alors voire même tuer qui que ce

3 soit?

4 Réponse: Pendant que j'y étais, non.

5 Question: Et dernière question de ma part: pouvez-vous nous dire

6 brièvement quelle est votre position, votre avis concernant la

7 personnalité de Zigic Zoran et ce, datant de la période où vous le voyiez

8 ou le fréquentiez?

9 Réponse: C'était une personne normale, correcte. Je ne saurais quoi vous

10 dire de plus. Nous n'étions pas de grands amis, mais nous étions des

11 connaissances et je n'ai rien remarqué de particulier.

12 Question: Je vous remercie Monsieur le témoin.

13 Monsieur le Président, la défense n'a plus de questions à poser à ce

14 témoin. Toutefois, je vais demander à M. l'huissier de bien vouloir

15 présenter un document de plus qui concerne les déclarations du témoin ici

16 présent.

17 (L'huissier s'exécute.)

18 (La Greffière remet le document aux Juges.)

19 Monsieur le Président, il s'agit là d'un document, à savoir d'une

20 attestation émanant du centre de sécurité publique de Prijedor, disant que

21 sur le territoire de la municipalité de Prijedor il n'y a jamais eu de

22 Jasmin Izeiri qui y ait été déclaré ou qui y ait résidé.

23 M. le Président: Madame Thomson, quelle est la cote? Je crois que c'est

24 clair mais vous allez la dire.

25 Mme Thomson (interprétation): C'est le D23/4.

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1 M. le Président: Maître Deretic, posez la question au témoin. Avez-vous

2 une question pour le témoin avec ce document?

3 M. Deretic (interprétation): Non. J'ai déjà posé les questions afférentes

4 à ce sujet et le témoin s'est déjà prononcé et le document concerne le

5 fait qu'une telle personne n'a jamais existé ou résidé à Prijedor et le

6 témoin lui a dit qu'il ne l'avait pas connue à Keraterm.

7 Mme Somers (interprétation): Je ne vois pas la pertinence de ce document,

8 Monsieur le Président, et peut-être la Chambre voudrait-elle le prendre en

9 considération, peut-être pourrait-elle demander aux conseils de la défense

10 quelle est la pertinence du document en question?

11 M. le Président: Maître Deretic?

12 M. Deretic (interprétation): Monsieur le Président, Madame et Monsieur les

13 Juges, si on lit l'Acte d'accusation mis à charge de notre client, on y

14 dit de la part de l'accusation que notre client a tué M. Jasmin Izeiri et

15 que c'était une personne qui avait vécu et travaillé à Prijedor.

16 Ce document prouve qu'une telle personne n'a jamais existé à Prijedor,

17 tout du moins ce document nous le démontre.

18 M. le Président: Madame Somers.

19 Mme Somers (interprétation): Je m'excuse, Monsieur le Président, mais je

20 ne suis pas d'accord avec le conseil de la défense parce que la

21 déclaration de résidence n'indique pas que toutes les possibilités de

22 rédaction de ce nom ne sont pas épuisées. Cela ne peut pas nous amener à

23 une conclusion parce qu'il y a peut-être une orthographe différente de ce

24 nom.

25 Le témoin a dit qu'il ne reconnaissait pas ce nom et je ne vois pas que ce

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1 témoin-ci serait susceptible de pouvoir témoigner au sujet d'un document

2 émanant d'un centre de sécurité public, donc il ne saurait nous parler de

3 la façon dont le nom doit être orthographié ou d'autres renseignements

4 affairant à l'orthographe.

5 M. le Président: Un moment, s'il vous plaît.

6 (Les juges se concertent sur le siège.)

7 D'accord. Nous avons le document, nous connaissons les positions des

8 parties et ce que nous allons faire le contre-interrogatoire du témoin

9 maintenant. Donc, vous n'avez pas d'autres questions Maître Deretic, c’est

10 cela. D'accord.

11 M. Deretic (interprétation): Pas pour le moment, Monsieur le Président. Je

12 vous remercie.

13 M. le Président: Du côté du Procureur, le témoin DD8 vous allez répondre

14 aux questions du Procureur. Je vois que c'est Madame Somers, vous avez la

15 parole.

16 (Contre-interrogatoire du témoin DD8 par Madame Somers.)

17 Mme Somers (interprétation): Monsieur le témoin DD8, avez-vous subi une

18 quelconque formation dans des matières comme le droit, l'administration

19 publique, la gestion gouvernementale ou la conservation des archives.

20 Etes-vous quelqu'un qui a des compétences, des qualifications

21 particulières dans l'un ou l'autre de ces domaines?

22 Témoin DD8 (interprétation): Non.

23 Question: Etes-vous en mesure de dire que vous avez examiné absolument

24 tous les documents émis par absolument tous les responsables de Prijedor,

25 ce qui vous permettrez de déterminer si un numéro d'ordre ou un autre

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1 numéro, de quelque autre nature que ce soit, figure bien sur le document

2 où il doit figurer. Pouvez-vous nous dire si vous avez ce genre de

3 compétence qui vous permettrait de déclarer avec certitude quel est

4 l’aspect que doit revêtir un document émanant de Prijedor?

5 Réponse: Eh bien, écoutez, j’ai une certaine pratique car j'avais au moins

6 une dizaine de commerces et j'ai toujours reçu absolument tous les

7 documents officiels les concernant, assortis de ce genre de numéros, il ne

8 m’est jamais arrivé d’obtenir un document officiel sans ce numéro, mais en

9 dehors de cela je ne suis pas particulièrement compétent en la matière.

10 Question: Et ce dont vous parlez ce sont des locaux commerciaux, n'est-ce

11 pas? Les magasins dont vous venez de parler, ce ne sont pas des

12 entreprises publiques relevant du gouvernement?

13 Réponse: Eh bien, oui.

14 Question: Donc sur la base de votre expérience limitée, vous appuyant sur

15 les documents relatifs à vos magasins, vous ne pouvez parler que de ce que

16 vous avez vu dans vos magasins, n’est-ce pas?

17 Réponse: Oui.

18 Question: Merci. Vous êtes sorti de Keraterm quel jour? Pouvez-vous nous

19 le rappeler, s'il vous plaît?

20 Réponse: C'était un vendredi, le vendredi 5 juin 1992.

21 Question: Avez-vous jamais résidé à Sanski Most?

22 Réponse: Oui.

23 Question: De quelle à date à quelle date?

24 Réponse: Je suis arrivé à Sanski Most en provenance de Prizren au mois

25 d’août 1996 et je suis retourné à Prijedor tout dernièrement, il y a 2

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1 mois à peu près, je ne me rappelle pas la date exacte, mais de toute façon

2 j'allais aussi à Prijedor y compris quand j'habitais à Sanski Most.

3 Question: Ce que vous avez dit, en déclarant que vous aviez vécu tout le

4 temps à Prijedor depuis 1980 n’est pas tout à fait exact, en fait entre

5 1980 et aujourd'hui vous avez résidé quelques temps à Sanski Most?

6 Témoin DD8 (interprétation): J’habitais…

7 M. le Président: Maître Deretic.

8 M. Deretic (interprétation): Monsieur le Président le témoin n'a jamais un

9 seul instant dit qu'après avoir quitté Prijedor en 1992 il ait passé tout

10 son temps à Prizren ou en tout cas en dehors de Prijedor.

11 M. le Président: Madame Somers.

12 Mme Somers (interprétation): Je vais reformuler ma question, Monsieur le

13 Président.

14 Monsieur le témoin, lorsque vous êtes sorti de Keraterm vous êtes retourné

15 à Prijedor, n’est-ce pas?

16 Témoin DD8 (interprétation): Oui.

17 Question: Dans le même logement que vous possédiez ou dans lequel vous

18 viviez avant d’être arrêté et envoyé à Keraterm?

19 Réponse: Dans le même quartier, mais ma maison avait brûlé pendant que

20 j'étais dans le camp donc j’ai habité dans une partie de la boulangerie et

21 il y avait aussi une cour.

22 Question: Vous avez déclaré connaître Zoran Zigic. Connaissez-vous Dusko

23 Tadic?

24 Réponse: Je ne le connais pas.

25 Question: Vous n'avez eu aucune conversation avec Dusko Tadic à Keraterm,

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1 entre disons le 3 et le 6 juin 1992 ce qui couvre donc la période du 4

2 juin et du 5 juin?

3 Réponse: Non.

4 Mme Somers (interprétation): Je demande un instant de huis clos partiel.

5 M. le Président: Oui, nous allons passer à huis clos partiel.

6 (Audience à huis clos partiel.)

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6 (Audience publique avec mesures de protection.)

7 Mme Somers (interprétation): Oui, nous allons déjà traiter de certaines

8 questions.

9 M. le Président: Oui, Madame Somers.

10 Mme Somers (interprétation): Témoin DD8, veuillez nous dire par quelle

11 procédure vous êtes passé pour récupérer vos biens à Prijedor et si cela

12 avait été les mêmes biens que vous y avez laissés.

13 Pouvez-vous nous donner des clarifications à ce sujet?

14 Témoin DD8 (interprétation): [[expurgée]

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19 M. le Président: Maître Deretic?

20 M. Deretic (interprétation): Monsieur le Président, je crains fort que la

21 collègue Mme Somers ait raison. Au travers des réponses données par le

22 témoin, il finira par dévoiler sa propre identité. Je connais la situation

23 là-bas, on sait fort bien combien de familles il y a de ce type. Je

24 m'excuse d'avoir interrompu, mais c'est dans la meilleure des intentions

25 possibles.

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1 M. le Président: D'accord, très bien. Il sera plus sûr d'expurger cette

2 réponse du témoin, expurger du compte rendu et passer à huis clos partiel.

3 Nous allons passer à huis clos partiel. Nous allons faire la pause plus ou

4 moins à 11 heures, Madame Somers pour que vous sachiez.

5 (Audience à huis clos partiel.)

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23 (Audience publique avec mesures de protection.)

24 (Le témoin DD8 est reconduit hors du prétoire.)

25 Nous allons faire une pause d'une demi-heure.

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1 (L'audience, suspendue à 11 heures, est reprise à 11 heures 40.)

2 M. le Président: Veuillez-vous asseoir s'il vous plaît.

3 (Le témoin DD8 est réintroduit dans le prétoire.)

4 Maître Deretic, avez-vous des questions supplémentaires?

5 (Interrogatoire principal supplémentaire du témoin DD8 par Me Deretic.)

6 M. Deretic (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

7 Témoin, je vous prie de nous dire si vous vous souvenez de la question de

8 mon éminente collègue le Procureur concernant l'uniforme porté par Zigic

9 Zoran? Savez-vous nous dire s'il s'agissait bien d'un uniforme de

10 camouflage?

11 Témoin DD8 (interprétation): Oui.

12 Question: Pendant ces quelques jours que vous avez passés au centre

13 d'instruction de Keraterm, avez-vous remarqué sous le béret dont vous avez

14 parlé…

15 Réponse: Oui?

16 Question: …Si Zoran avait les cheveux teints?

17 Réponse: Je ne sais pas. Il y avait sur son béret une espèce d'insigne

18 mais je ne sais pas trop.

19 Question: Est-ce que vous avez remarqué s'il portait des boucles

20 d'oreille?

21 Réponse: Non.

22 Question: Et ces jours-là, portait-il des espèces de gants sans doigts,

23 donc des mitaines?

24 Réponse: Non. Moi, je n'en ai pas vu.

25 M. Deretic (interprétation): Monsieur le Président, il y a un petit

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1 problème de nature technique. En effet, les questions lors du contre-

2 interrogatoire de ma collègue portaient sur un document auquel se référait

3 cette collègue du Bureau du Procureur.

4 Je me propose donc maintenant de poser des questions supplémentaires qui

5 se réfèreront également au document, mais je ne sais pas comment

6 techniquement parlant nous pourrions surmonter le problème car je n'ai pas

7 ce document à ma disposition et je n'ai pas non plus eu l'opportunité de

8 le voir.

9 M. le Président: Madame Somers?

10 Mme Somers (interprétation): Puis-je répondre?

11 Eh bien, j'ai proposé ce document à Me Deretic et Me Stojanovic mais ils

12 ont dit que ce document ils ne souhaitaient pas le recevoir.

13 Nous avons le document, les cabines ont également reçu le document et je

14 ne comprends pas de quoi il s'agit. Nous avons proposé ce document à la

15 défense avant la pause.

16 M. Deretic (interprétation): Mon collègue Stojanovic m'informe maintenant

17 que cela a effectivement été fait de la sorte mais mon collègue ne me l'a

18 pas dit jusqu'à présent pour ne pas soulever de problème.

19 Nous n'avons pas eu le temps de nous pencher sur le document en question

20 et je m'excuse mais je ne saurai poser de questions car mon collègue ne

21 m'a pas informé de ce fait-là entre-temps.

22 M. le Président: Maître Deretic, c'est votre option.

23 Moi-même, si j'étais à votre place, j'aurais beaucoup de questions à poser

24 mais je ne peux pas faire votre travail, donc vous décidez quoi faire.

25 M. Deretic (interprétation): Etant donné que le collègue Stojanovic s'est

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1 entretenu avec la collègue de l'accusation, je puis vous dire que nous

2 venons de terminer nos questions supplémentaires et je vous remercie.

3 M. le Président: Monsieur le Juge Riad, avez-vous des questions?

4 (Questions au témoin DD8 par M. le Juge Riad.)

5 M. Riad (interprétation): Bonjour Témoin DD8.

6 Témoin DD8 (interprétation): Bonjour.

7 Question: J'ai plusieurs éclaircissements à vous demander.

8 Vous avez en effet dit que vous n'avez subi aucun mauvais traitement

9 pendant que vous vous trouviez au centre d'instruction. Avez-vous remarqué

10 autour de vous que des gens avaient subi ou subissaient des mauvais

11 traitements? Ou étaient-ils tous aussi chanceux que vous?

12 Réponse: Non. Il y avait des gens qui avaient été battus qui étaient

13 amenés à Keraterm. Certains avaient été battus avant d'être amenés et,

14 comme je me trouvais à l'intérieur, je n'ai pas pu voir qui est-ce qui les

15 avait battus. Ceux qui avaient été battus ont été mis à part, et nous

16 n'avions pas eu de contact avec, ni avec ceux qui les avaient battus. Il y

17 avait beaucoup de soldats, beaucoup de policiers.

18 Question: Mais le fait est qu'il y a eu des mauvais traitements?

19 Réponse: Oui. Il y en a eu mais pas à l'intérieur. Juste à l'extérieur.

20 Question: Donc pas du tout dans les pièces?

21 Réponse: Non.

22 Question: Et quand on les appelait, les gens étaient interpellés pour

23 qu'ils sortent pour quelque raison que ce soit?

24 Réponse: Oui, il y a eu des cas de ce genre.

25 Question: Mais vous n'avez pas été interpellé pour sortir de là?

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1 Réponse: Non, ni moi ni mes ouvriers.

2 Question: Oui, je vois. Pendant votre séjour là-bas, vous n'avez pas eu à

3 souffrir de mauvais traitements, mais pour ce qui est de la nourriture et

4 ce type de chose, comment cela se passait-il?

5 Réponse: Non.

6 Question: Et les conditions d'hygiène?

7 Réponse: Les conditions d'hygiène étaient très mauvaises et pendant que

8 j'étais là-bas les denrées alimentaires, il n'y en avait pas. C'étaient

9 surtout les familles qui avaient appris où nous nous trouvions et qui nous

10 apportaient à manger au début.

11 Au début, il n'y avait pas eu de nourriture si ce n'est ce que l'on nous

12 apportait. Par la suite, j'ai appris que l'on servait à manger.

13 Question: Vous avez dit que M. Zigic n'avait commis de violence à l'égard

14 de qui que ce soit pendant votre séjour?

15 Réponse: Pendant que j'étais là-bas, je ne l'ai pas vu et je n'en ai pas

16 entendu parler.

17 Question: Mais vous avez dit que vous vous trouviez toujours à l'intérieur

18 de la pièce. Est-ce que vous pouviez voir ce qui se passait à l'extérieur?

19 Réponse: Non non, à l'extérieur non.

20 Question: Et vous avez dit qu'il était toujours sous influence de l'alcool

21 et qu'il criait. Comment savez-vous alors s'il n'avait pas été violent?

22 Est-ce qu'il criait sur les gens, est-ce qu'il était agressif?

23 Réponse: Eh bien, il criait, il faisait du bruit dans l'enceinte et c'est

24 la raison pour laquelle j'ai supposé qu'il était constamment ivre mais il

25 n'est jamais entré à l'intérieur pour maltraiter quelqu'un.

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1 Pour ce qui est de l'extérieur, je n'en sais rien.

2 Question: Qu'est-ce que vous entendez par l'intérieur? A l'intérieur de la

3 pièce?

4 Réponse: Oui, ce n'est pas une pièce en vérité c'est un hangar, c'est une

5 grande salle.

6 Question: Mais c'était l'une des pièces, pas l'ensemble?

7 Réponse: Ce n'est pas une pièce. Je ne sais comment expliquer: c'est une

8 espèce de garage ou d'entrepôt.

9 Question: Combien de gens y avait-il à l'intérieur?

10 Réponse: Dans la pièce 1, ils étaient environ 120.

11 Question: Et c'est là que vous étiez?

12 Réponse: Oui.

13 Question: 120?

14 Réponse: Oui.

15 Question: Quelle était la taille de cet hangar?

16 Réponse: Je ne sais pas trop vous dire combien de mètres il devait y

17 avoir. 20 mètres de long et trois ou quatre mètres de large. Peut-être ai-

18 je exagéré, moins de 20.

19 Question: Et en comparaison avec cet endroit-ci?

20 Réponse: Non bien plus petit, la moitié de cette salle. Donc c'est bien

21 plus petit. Peut-être ce prétoire donnerait 3 pièces du type de celle où

22 nous étions. Je ne sais pas trop.

23 Question: Concernant un document que nous avons vu, je crois que c'est le

24 D23/4, il s'agit de Izeiri Jasmin qui n'a jamais été enregistré comme

25 résidant sur le territoire de la municipalité de Prijedor, est-ce que vous

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1 avez eu une autorisation de déplacement pour Prijedor donc non pas pour

2 vivre là-bas, mais juste pour se rendre là-bas et se déplacer?

3 Réponse: Je ne sais pas. Je ne sais pas si quelqu'un a par exemple déclaré

4 un type de résidence de ce genre.

5 M. Riad (interprétation): Je vous remercie.

6 M. le Président: Merci beaucoup Monsieur le Juge Riad.

7 Madame la Juge Wald, s'il vous plaît?

8 (Questions au témoin DD8 par Mme la Juge Wald.)

9 Mme Wald (interprétation): Témoin DD8, quelques questions seulement.

10 Quand vous avez vu M. Zigic à Keraterm, vous nous avez dit qu'il était

11 habituellement sous l'effet de l'alcool, qu'il criait, qu'il gueulait, à

12 votre avis, quelle avait été sa tâche, quelles avaient été ses fonctions

13 officielles là-bas s'il en avait eu ou est-ce qu'il allait juste en visite

14 là-bas?

15 Témoin DD8 (interprétation): Je ne le sais pas.

16 Question: Vous n'avez pas pu dire si quand vous le voyiez là-bas il

17 exerçait une tâche régulière bien définie ou il était juste là-bas?

18 Réponse: Je ne saurais vous le dire car je le voyais presque tous les

19 jours. Maintenant je ne sais pas s'il avait une tâche régulière à

20 accomplir ou s'il venait juste comme cela.

21 Question: Vous le voyiez généralement dans la journée, dans la nuit, ou

22 les deux?

23 Réponse: La nuit nous ne voyions personne, mais c'est le jour que je le

24 voyais.

25 Question: Vous le voyiez le jour et vous le voyiez généralement sous

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1 l'effet de l'alcool, et vous ne savez pas s'il était juste là-bas comme

2 cela ou s'il avait une tâche régulière à accomplir?

3 Réponse: Je ne sais pas.

4 Question: Bien. Maintenant pour ce qui est des documents que vous avez

5 signés pour aider certaines familles de personnes décédées, pour ce qui

6 était de leur permettre de toucher des pensions, est-ce que vous savez si

7 ces familles de personnes décédées pour lesquelles vous avez signé des

8 documents, est-ce que ces familles-là vivent encore dans la région de

9 Sanski Most?

10 Je ne veux pas citer de noms, je voudrais juste savoir si ces familles

11 vivent encore là-bas. Je vois qu'il s'agit de 1998, 1999. Maintenant je

12 voudrais savoir si à votre connaissance ces familles vivent encore là-bas?

13 Réponse: Je n'ai pas bien saisi. Vous parlez de ceux...

14 Question: Vous nous avez dit que vous aviez signé des documents, vous avez

15 dit que vous ne saviez pas ce qu'il y avait dans ces documents, mais que

16 c'était censé aider des familles à toucher des pensions, à réaliser des

17 droits pécuniaires pour ce qui était des membres de leur famille qui

18 avaient été tués.

19 Donc je voudrais savoir si vous savez oui ou non si ces familles, au

20 profit desquelles vous avez signé ces documents, vivent encore dans la

21 région?

22 Réponse: Non.

23 Question: Ces familles ne vivent plus dans cette région, elles vivent dans

24 d'autres endroits, c'est bien ce que vous nous dites?

25 Réponse: Je pense que l'une de ces familles vit à Sarajevo et l'autre à

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1 Titovo. C'est ce que je pense, mais je ne n'en suis pas certain.

2 Mme Wald (interprétation): Fort bien, merci.

3 (Questions au témoin DD8 par M. le Président.)

4 M. le Président: Merci beaucoup, Madame la Juge Wald.

5 Témoin DD8, moi-même j'ai des questions.

6 Vous nous dites que vous voyez M. Zigic à Keraterm pendant tous les jours

7 que vous étiez là, tous les jours. Est-ce que jamais vous avez vu son

8 arrivée ou son départ?

9 Témoin DD8 (interprétation): Non, je ne l'ai pas vu. Comme je vous l'ai

10 dit, j'étais surtout à l'intérieur et parfois lorsqu'il m'arrivait de

11 sortir pour aller aux toilettes, je le voyais mais sinon je ne sortais

12 pas. Je ne sortais jamais.

13 Question: Savez-vous s'il conduisait un minibus par exemple?

14 Réponse: Je ne sais pas.

15 Question: Savez-vous s'il conduisait ou arrivait en mobylette?

16 Réponse: Je ne sais pas.

17 Question: Très bien. Pour revenir à vos déclarations, à la déclaration qui

18 a fait objet de questions de Mme Somers, du Procureur. Il y a un moment

19 vous avez dit qu'il s'agissait de déclaration comique.

20 Dites-nous, est-ce que les noms des juges, ce n'est pas nécessaire de

21 répéter, mais vous connaissiez les noms des juges que Mme Somers vous a

22 mentionnés?

23 Réponse: L'un d'entre eux, je le connais. L'autre, je ne connais pas.

24 Question: Est-ce que quelqu'un d'entre eux vous a demandé personnellement

25 de signer les déclarations?

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1 Réponse: Oui.

2 Question: Qu'est-ce qu'il vous a demandé précisément?

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4 [expurgée]

5 [expurgée]

6 Il y avait une femme et un homme, je crois que l'homme était resté sans

7 ses deux fils et il m'avait dit qu'il s'agissait d'envoyer cela à Sarajevo

8 pour que les enfants puissent toucher une pension.

9 Il m'a dit: "J'ai tout rédigé et viens juste signer!" et je lui ai dit:

10 "Il n'y a pas de problème, s'il en est ainsi je vais le faire", et j'ai

11 signé, mais je ne me suis pas assis, je n'ai pas été interrogé, je n'ai

12 pas fait de déclaration et de chose de ce genre.

13 Question: Est-ce qu'il vous a lu la déclaration?

14 Réponse: Non, il y avait cela sur la table. J'y suis allé, j'ai signé,

15 j'étais pressé, j'avais du travail, vous savez, et je suis allé donc en

16 vitesse, j'ai signé et il m'a dit: "Tout va bien. Merci." Alors j'ai dit:

17 "Merci et au revoir." Je n'ai ni copie et je ne sais pas du tout de quoi

18 il s'agissait.

19 Question: Où étiez-vous quand vous avez signé?

20 Réponse: Ils m'ont appelé dans mon magasin et ils m'ont dit: "Tout est

21 prêt, tu n'as qu'à passer et signer."

22 Question: Ils sont venus vous voir dans votre magasin, c'est cela?

23 Réponse: Oui, c'est exact. Le juge est venu dans mon magasin, il a pris

24 son petit déjeuner parce que je faisais du burek et il m'a dit qu'il y

25 avait des gens, une personne qui avait perdu ses deux fils, ses enfants.

Page 10887

1 Il m'a dit: "J'ai tout préparé, une petite déclaration, et il suffira que

2 tu signes pour que l'on envoie cela à Sarajevo afin que ses enfants

3 puissent toucher quelque chose", et je lui ai dit qu'il n'y avait pas

4 problème. A la pause, je suis allé dans son bureau et j'ai signé puisque

5 cela se trouvait près du tribunal.

6 Question: Un moment, s'il vous plaît. Une autre question, Témoin DD8: le

7 juge était seul, venait seul où venait accompagné?

8 Réponse: Seul, seul.

9 Question: Etiez-vous seul ou accompagné?

10 Réponse: Seul.

11 Question: Est-ce qu'il y avait dans votre magasin d'autres personnes qui

12 pouvaient voir votre rencontre?

13 Réponse: S'il y avait beaucoup de gens, beaucoup de clients et il m'avait

14 donc convié à venir à sa table et c'est ce qu'il m'a dit.

15 Question: Il est tout à fait possible que les autres personnes vous aient

16 vu avec le juge, c'est cela?

17 Réponse: Oui, c'est exact.

18 Question: Très bien. Est-ce que vous vous rappelez de la date quand vous

19 avez signé ces déclarations?

20 Réponse: Non. Je n'en ai aucune idée.

21 Question: Très bien. Vous n'avez aucune idée, mais c'était clairement

22 après le conflit, c'est cela?

23 Réponse: Je ne comprends pas. Qu'entendez-vous après le conflit, quel

24 conflit?

25 Question: Après la guerre, peut-être?

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1 Réponse: Oui, tout à fait normal après la guerre.

2 Question: Très bien. Avez-vous une idée de combien d'années après?

3 Réponse: Je pense que cela a dû avoir lieu en 1998, 1999. Je ne sais pas

4 exactement, je pense que c'est plutôt 1998.

5 Question: D'accord, très bien. Ce qui s'est passé par rapport à une

6 déclaration, est-ce que la même chose s'est passée par rapport à l'autre?

7 Réponse: La même chose. Un jeune homme est venu -c'est vous qui avez

8 mentionné le nom, je ne sais plus comment il s'appelait- et il m'avait dit

9 qu'il fallait signer encore un document pour quelqu'un d'autre, une autre

10 personne qui était décédée ou qui avait disparu d'Omarska pour aider cette

11 famille parce qu'il était resté derrière lui une femme et deux enfants.

12 Il m'a dit qu'il y avait une déclaration prête qu'il suffisait de signer.

13 Je suis donc allé avant et j'ai signé, mais cela s'est fait plus tard

14 après cette première déclaration.

15 Question: Très bien. Témoin DD8, je vais vous poser une question, vous

16 répondez si vous voulez ou non: est-ce pour vous habituel de signer sans

17 voir ce que vous signez?

18 Réponse: Eh bien, si on fait confiance à quelqu'un, il n'est pas

19 nécessaire de lire car avant, vous savez la parole de quelqu'un, nul

20 besoin n'était de signer.

21 Question: Est-ce que je peux conclure que vous avez fait confiance à cette

22 personne qui vous a demandé de signer, c'est cela?

23 Réponse: Oui, oui.

24 Question: Si vous pouvez vous transporter à ce moment-là, à cet endroit

25 dans les circonstances dont vous avez déjà parlé, est-ce que vous avez la

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1 possibilité de nous dire quelles ont été vraiment les raisons pour

2 lesquelles vous avez signé?

3 Réponse: Eh bien, j'avais beaucoup de compassion pour ces enfants qui

4 étaient restés sans rien, qui étaient restés sans papa. Leur mère ne

5 travaillait pas et il s'agissait de leur permettre de toucher quelques

6 sous, comme on dit chez nous, quelques dinars.

7 M. le Président: Très bien, Témoin DD8. Nous n'avons pas d'autres

8 questions. Vous avez répondu aux questions de la défense, de l'accusation

9 et des Juges. Nous vous remercions beaucoup d'être venu et nous vous

10 souhaitons un bon retour dans votre lieu de résidence.

11 Il faut attendre un moment pour que l'on puisse baisser les rideaux pour

12 que vous puissiez sortir en sécurité. Ne bougez donc pas.

13 Témoin DD8 (interprétation): Je vous remercie aussi.

14 (Le témoin DD8 est reconduit hors du prétoire.)

15 (Questions relatives à la procédure.)

16 (Audience publique.)

17 M. le Président: Maître Deretic, avant de faire entrer l'autre témoin, je

18 crois que vous allez demander le versement de ces trois pièces à

19 conviction D21/4, D22/4 et D23/4?

20 M. Deretic (interprétation): C'est exact, Monsieur le Président. J'avais

21 l'intention de le faire. A vrai dire, avant de le faire, je dois vous dire

22 sincèrement que mon intention première avait été de changer de place avec

23 mon collègue Stojanovic.

24 M. le Président: Très bien. Madame Somers, nous n'allons pas discuter le

25 D23/4 car nous en avons déjà discuté, mais par rapport aux autres

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1 documents, quelles sont vos vues?

2 Mme Somers (interprétation): Monsieur le Président, pour ce qui est du

3 22/4, nous n'avons pas d'objection et pour ce qui est du 21/4, pas

4 d'objection non plus. Il y a cette objection qui persiste pour le 23/4.

5 M. le Président: La Chambre ordonne donc le versement au dossier des

6 pièces à conviction D21/4 et D22/4.

7 Par rapport au document D23/4, en tenant compte des raisons présentées par

8 les parties et en estimant que le document est pertinent pour l'affaire et

9 que la Chambre se réserve le droit de lui accorder toute la valeur

10 probante, la Chambre admet aussi ce document.

11 Maintenant, Maître Deretic, le prochain témoin.

12 M. Stojanovic (interprétation): Monsieur le Président, si vous le

13 permettez, je me chargerai de procéder à l'interrogatoire principal de M.

14 Barudzija Mirko et je demanderai à l'huissier de le faire entrer.

15 (Le témoin, M. Mirko Barudzija, est introduit dans le prétoire.)

16 Si vous me permettez de vous donner un petit coup de main, nous n'avons

17 pas demandé de mesures de protection pour ce témoin donc il n'est

18 nullement nécessaire de conserver les dispositifs de sécurité.

19 M. le Président: Très bien, donc maintenant, le témoin va prêter serment.

20 Témoin, m'entendez-vous? Bien.

21 M. Barudzija (interprétation): Je vous entends. Je vous entends bien.

22 M. le Président: Vous allez lire la déclaration solennelle que l'huissier

23 va vous tendre s'il vous plaît.

24 M. Barudzija (interprétation): Je déclare solennellement que je dirai la

25 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

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1 M. le Président: Vous pouvez vous asseoir s'il vous plaît.

2 M. Barudzija (interprétation): Merci.

3 M. le Président: Maintenant l'huissier va lever les rideaux.

4 (L'huissier lève les rideaux.)

5 Entre-temps, Maître Stojanovic, hier je suis resté avec l'impression que

6 nous allions commencer avec le témoin expert seulement demain. Je vois que

7 nous avons ici la situation que nous avions d'une certaine façon prévue:

8 un témoin expert est de fait. Est-ce cela, Maître Stojanovic?

9 M. Stojanovic (interprétation): C'est cela Monsieur le Président.

10 M. le Président: Madame Somers, avez-vous des observations par rapport au

11 fait d'avoir ici un témoin expert alors que nous n'avions pas encore pris

12 une décision?

13 Je m'excuse devant vous, Témoin, mais nous avons des petites choses à

14 décider avant votre témoignage. Un moment s'il vous plaît.

15 Mme Somers (interprétation): Monsieur le Président, étant donné qu'à la

16 lumière des discussions avec la Chambre, concernant ce type de témoin que

17 nous avons eu auparavant, nous avons dit que cela arrivait assez souvent,

18 et la question était de savoir si nous allions accepter le rapport

19 d'expert qui a été soumis conformément à l'Article 94 bis quoiqu'il

20 s'agisse ici d'un témoin qui est un témoin combiné.

21 Nous allons procéder au contre-interrogatoire relatif au rapport ainsi

22 qu'au sujet de certains faits et, avec la permission de la Chambre, nous

23 procèderions de la sorte car il ne s'agit pas de dire que nous avons fait

24 une objection, nous avons dit que nous n'acceptions pas ce rapport mais

25 nous souhaitons procéder bien sûr au contre-interrogatoire.

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1 M. le Président: Maître Stojanovic.

2 M. Stojanovic (interprétation): Monsieur le Président, puis-je vous

3 rappeler -peut-être me trompais-je- je crois que la Chambre a déjà pris

4 une décision et a accepté la comparution de ce témoin.

5 M. le Président: Vous pouvez commencer votre travail.

6 Docteur Barudzija, merci beaucoup d'être venu. Vous allez répondre

7 maintenant aux questions que Me Stojanovic va vous poser, s'il vous plaît.

8 Allez-y.

9 (Interrogatoire principal du témoin, M. Mirko Barudzija, par Me

10 Stojanovic.)

11 M. Stojanovic (interprétation): Monsieur le témoin, pour le compte rendu

12 d'audience et pour les personnes présentes ici, pourriez-vous nous donner

13 votre nom et votre prénom?

14 M. Barudzija (interprétation): Mirko Barudzija. Docteur Mirko Baradzija,

15 spécialiste en chirurgie générale.

16 Question: Vous êtes né quand et où?

17 Réponse: Le 2 janvier 1943 dans le village Kuhari près de Sanski Most.

18 Question: Votre situation familiale, quelle est-elle?

19 Réponse: Simple.

20 Question: Etes-vous marié?

21 Réponse: Oui.

22 Question: Avez-vous des enfants?

23 Réponse: J'ai deux enfants et une épouse. Je suis marié.

24 Question: Quelle est votre appartenance ethnique?

25 Réponse: Je suis Serbe.

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1 Question: Quelle est votre religion?

2 Réponse: Orthodoxe.

3 Question: En ce qui concerne votre éducation, qu'est-ce que vous avez fait

4 comme études?

5 Réponse: En 1973, j'ai terminé les études de la faculté de médecine

6 ensuite…

7 Question: Où cela?

8 Réponse: A Belgrade.

9 Question: Et après?

10 Réponse: Après, je suis rentré dans ma ville natale à Sanski Most où j'ai

11 commencé à travailler comme médecin généraliste pendant 5 ans. Ensuite en

12 1978, j'arrive à Prijedor pour suivre une spécialisation en chirurgie

13 générale.

14 Question: Est-ce que vous avez terminé vos études de spécialiste?

15 Réponse: Oui, je l'ai fait au mois d'avril 1984.

16 Question: Où cela?

17 Réponse: A Belgrade.

18 Question: Etes-vous agrégé?

19 Réponse: Oui, depuis deux ans.

20 Question: Que veut dire ce titre?

21 Réponse: C'est un titre honorifique, même s'il y a reconnaissance du

22 travail que j'ai fait dans le domaine de la médecine au cours de longues

23 années.

24 Question: Etes-vous aussi expert médical?

25 Réponse: Oui, enregistré auprès du tribunal de Prijedor.

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1 Question: Depuis quand?

2 Réponse: Je pense depuis 1994.

3 Question: Et l'êtes-vous toujours aujourd'hui?

4 Réponse: Oui, oui je n'ai pas été démis de mes fonctions. On m'appelle

5 toujours pour des missions.

6 Question: Je vais vous poser une question concernant votre expérience et

7 votre pratique médicale: depuis combien de temps travaillez-vous comme

8 médecin?

9 Réponse: Cela fait 28 ans que je suis médecin. Au début, j'ai été médecin

10 généraliste à Sanski Most, ensuite je suis passé à Prijedor pour suivre la

11 spécialisation puis j'ai été interne.

12 Question: Avez-vous travaillé à l'étranger peut-être?

13 Réponse: Après un cours séjour à Prijedor, il y a eu une mission de

14 coopération avec la Libye donc je me suis porté volontaire pour y

15 travailler. Et j'y ai donc travaillé pendant 14 mois dans un hôpital

16 généraliste.

17 Question: Où avez-vous travaillé à Prijedor?

18 Réponse: A Prijedor, j'ai toujours travaillé à l'hôpital.

19 Question: Quel est le nom de cet l'hôpital?

20 Réponse: Eh bien, cet hôpital s'appelle "Dr Mladen Stojanovic" c'est un

21 médecin connu.

22 Question: Depuis quand travaillez-vous dans cet hôpital?

23 Réponse: Depuis le mois de mai 1978.

24 Question: Pourriez-vous nous dire de quel type d'hôpital s'agit-il

25 concernant sa construction, l'équipement, etc.? Je pense à son état depuis

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1 1992 donc depuis la guerre?

2 Réponse: Nous avons commencé à travailler dans cet hôpital qui a commencé

3 à fonctionner en 1986, c'est un grand hôpital avec 500 lits où l'on peut

4 placer beaucoup de patients. Aujourd'hui, c'est un hôpital généraliste et

5 avant c'était un hôpital régional pour la région de Prijedor et Sanski

6 Most, mais aujourd'hui ce n'est plus le cas. C'est un hôpital qui dessert

7 uniquement Prijedor et quelques municipalités aux alentours à cause des

8 circonstances.

9 Question: Pendant la guerre à partir de 1992, pour être plus précis

10 comment s'est passé votre travail? Quelles étaient vos obligations de

11 travail?

12 Réponse: Pour nous les médecins, c'était une période éprouvante du point

13 de vue physique et psychique. Il y avait beaucoup de travail pour nous,

14 beaucoup de patients, beaucoup de blessés, des malades évidemment comme

15 d'habitude, on travaillait jour et nuit. Quand la guerre a commencé

16 pendant 3 semaines, nous avons passé 3 semaines sans arrêt à l'hôpital,

17 nous ne pouvions même pas rentrer chez nous, nous travaillions donc jour

18 et nuit avec les blessés, les malades, les soins intensifs, la chirurgie,

19 etc. Il y avait beaucoup de travail, incroyablement. La charge de travail

20 était incroyable.

21 Question: Quelle était votre fonction à l'époque à l'hôpital, je pense à

22 l'année 1992?

23 Réponse: 1992 au mois de mai ou bien au mois de juin, je suis devenu chef

24 du service de chirurgie pour la partie réservée aux civils qui se

25 trouvaient au deuxième étage.

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1 Question: Cela veut-il dire que vous, en tant que chirurgien, vous avez pu

2 acquérir une grande expérience surtout en ce qui concerne les blessures

3 dues à la guerre?

4 Réponse: Oui, oui, il y en avait vraiment beaucoup. Il y avait beaucoup de

5 gens qui étaient admis à la polyclinique, des gens, des blessés qui

6 passaient par l'ambulance, par les urgences, tous les blessés qui avaient

7 besoin des soins légers; ceux qu'il fallait admettre à l'hôpital étaient

8 admis à l'hôpital et il y en avait qu'il fallait traiter immédiatement,

9 opérer immédiatement.

10 Moi, je me suis occupé des opérations, j'ai opéré un grand nombre de

11 patients et j'ai aussi assisté les autres chirurgiens.

12 Question: Quelle était la situation en 1992 dans votre hôpital, à

13 l'hôpital de Prijedor en ce qui concerne la structure nationale du

14 personnel médical?

15 Réponse: Quand la guerre a commencé, la composition ethnique était mixte.

16 On ne savait pas quelle ethnicité était la mieux représentée. Il y avait

17 beaucoup de gens des trois nationalités et nous travaillions comme des

18 collègues normalement. Evidemment, il existait une certaine nervosité à

19 cause de la nature du travail, du stress.

20 Question: Quelle était votre relation avec les autres médecins, les

21 médecins des autres nationalités?

22 Réponse: Moi, j'ai toujours eu des rapports amicaux. J'ai toujours de bons

23 collègues, j'ai toujours voulu coopérer, collaborer avec mes collègues à

24 cause de leurs connaissances, de leurs aptitudes.

25 Moi, je n'ai pas eu de préjugés. J'étais au-delà des préjugés que je

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1 considérais comme des sentiments bas. Je n'ai jamais eu de tels

2 sentiments.

3 Question: En tant que chef, est-ce qu'il vous est arrivé de licencier

4 quelqu'un.

5 Réponse: Non, moi j'ai toujours demandé à ce que les gens restent.

6 A l'hôpital, nous avions besoin des cadres et comme la guerre a commencé

7 beaucoup de collègues sont partis. Ils ont décidé de poursuivre leur

8 propre chemin et évidemment il était hors de question alors de songer à

9 licencier qui que ce soit puisque nous manquions de personnel.

10 Question: De quel genre de professionnels sagissait-il? Je pense à vos

11 collègues appartenant à d'autres nationalités.

12 Réponse: C'étaient de très bons professionnels. Evidemment, de temps en

13 temps on pouvait apercevoir des signes de nervosité chez certains d'entres

14 eux, mais évidemment on pouvait continuer à collaborer malgré cela.

15 Question: Savez-vous quoi que ce soit au sujet de la prise du pouvoir de

16 la part des Serbes à Prijedor?

17 Réponse: Eh bien, j'ai entendu parler de cela. J'ai entendu dire que cela

18 allait se produire. On ne savait pas exactement qui allait prendre ce

19 pouvoir mais le 1er mai au matin, j'ai entendu dire que ce sont les Serbes

20 qui ont pris le pouvoir le 30 avril 1992.

21 M. le Président: Nous avons déjà entendu cette question. Vous pouvez peut-

22 être aller un peu plus rapidement aux questions sur lesquelles le témoin

23 peut vous répondre plus spécifiquement, s'il vous plaît. La Chambre a

24 entendu beaucoup de témoins sur cette question des conflits.

25 Allez-y s'il vous plaît.

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1 M. Stojanovic (interprétation): Oui Monsieur le Président, je voulais

2 juste voir quel était le point de vue de ce témoin par rapport à ce

3 conflit.

4 Monsieur le témoin, est-ce qu'il y a eu des blessés à ce moment-là qui ont

5 commencé à venir à l'hôpital?

6 M. Barudzija (interprétation): Vers la fin du moi de mai, les blessés ont

7 commencé à affluer, vers le 26 mai.

8 Question: Je vais vous interrompre. Le 30 avril ou le 1er mai, est-ce que

9 ce jour-là, donc après la prise du pouvoir, est-ce qu'il y a eu des

10 blessés?

11 Réponse: Non.

12 Question: Savez-vous quoi que ce soit au sujet de l'attaque menée contre

13 la ville de Prijedor?

14 Réponse: Je suis bien informé de cela. Si vous le voulez, moi je peux vous

15 en donner des détails.

16 Question: Est-ce que vous pourriez nous dire déjà quel moment cela a

17 commencé?

18 Réponse: Le 30 mai. C'est là que cela a commencé à Prijedor.

19 Question: Est-ce que vous pourriez nous dire qui a mené cette attaque?

20 Réponse: Eh bien, il y a des gens de l'extérieur qui sont venus, soi-

21 disant ils ont traversé la Sana et ils ont mené une attaque vers 3 heures

22 30 du matin contre le bâtiment du SUP de la municipalité, les musées etc.

23 Un groupe assez restreint d'ailleurs, une trentaine d'hommes; on les a

24 remarqués tôt dans la matinée. On les a vu passer armés et se diriger vers

25 le SUP. Mon fils les a vus dans la matinée et il a informé la police du

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1 fait que quelque chose était en train de se passer.

2 Question: Est-ce qu'après cette attaque il y a eu des blessés qui sont

3 arrivés à l'hôpital?

4 Réponse: Oui, oui, ce jour-là il y a eu des blessés qui sont arrivés et

5 ils sont arrivés pendant toute la journée. Il y a eu beaucoup de blessés,

6 il y a eu beaucoup de morts. C'était la vraie guerre qui commençait. Il y

7 avait des maisons en flamme, il y avait des tireurs embusqués, il y a eu

8 des batailles de rue etc.

9 Question: Pourriez-vous nous donner un chiffre approximatif de ces

10 blessés?

11 Réponse: Le chiffre habituel que l'on évoque, c'est à peu près une

12 trentaine de blessés pour les 24 heures, appartenant à différentes

13 nationalités.

14 Question: Est-ce que vous avez reçu les blessés appartenant à différentes

15 nationalités?

16 Réponse: Tous les blessés ont été amenés à l'hôpital.

17 Question: Pas seulement les Serbes mais aussi les blessés appartenant à

18 d'autres groupes ethniques?

19 Réponse: Oui, bien sûr. Absolument, les blessés appartenant à toutes les

20 nationalités puisqu'on ne savait pas où les amener d'autre. L'hôpital se

21 trouve sur la route de Banja Luka et d'abord on nous apportait donc des

22 blessés à nous et ensuite ceux que l'on ne pouvait pas garder, on les

23 envoyait à Banja Luka.

24 Question: Est-ce qu'il y a eu des morts ou bien -et je vais être plus

25 précis- est-ce qu'on a apporté les morts à l'hôpital?

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1 Réponse: Eh bien, il existe une règle consistant à ne pas apporter de

2 morts à l'hôpital. On les apporte directement à la morgue et apparemment

3 il y a eu au total 17 personnes décédées appartenant à toutes les

4 nationalités.

5 Question: Est-ce qu'il s'agit donc aussi bien des assaillants que des

6 attaqués?

7 Réponse: Je pense que c'est le chiffre total des personnes décédées ce

8 jour-là. Je ne saurais vous dire combien il y en avait de chaque côté.

9 Question: Et où se trouvait la morgue?

10 Réponse: La morgue se trouve à l'autre bout de l'hôpital, dans la partie

11 de l'hôpital qui est à l'opposé de la ville. C'est là que l'on apporte les

12 morts.

13 Question: Si je vous ai bien compris cette morgue se trouve dans le même

14 bâtiment?

15 Réponse: Oui, dans le même bâtiment, la morgue fait partie du bâtiment de

16 l'hôpital.

17 Question: Est-ce qu'il y avait parmi les blessés des personnes qui ont

18 travaillé à l'hôpital?

19 Réponse: Oui , Goran Dragojevic, c'est un chauffeur de l'ambulance,

20 c'était le premier blessé ce matin-là, le matin où Prijedor avait été

21 attaquée. Moi, je l'ai fait sortir du véhicule, c'était un véhicule civil.

22 Il s'était dirigé vers la ville soit pour amener quelqu'un à l'hôpital

23 soit pour effectuer une mission ou pour des raisons privées, je ne saurais

24 vous le dire.

25 Question: Sa blessure était-elle grave?

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1 Réponse: Oui, oui, oui sa vie était en danger, c'était une blessure très

2 grave et nous étions obligés de l'envoyer de toute urgence à Banja Luka

3 pour lui fournir de meilleurs soins puisque les cas très compliqués nous

4 les envoyions à Banja Luka.

5 Question: A-t-il survécu?

6 Réponse: Oui, mais il est resté invalide très lourd, handicapé très

7 lourdement. Aujourd'hui il travaille à l'hôpital, on lui a aussi accordé

8 un café puisqu'il est invalide de guerre dans l'hôpital.

9 Question: Il a donc un café dans l'hôpital?

10 Réponse: Oui, oui, oui, dans le hall de notre hôpital, il tient un café,

11 une cafétéria plutôt.

12 M. Stojanovic (interprétation): Pourriez-vous nous dire de quelle façon à

13 l'époque, donc la période couverte par l'Acte d'accusation, c'est-à-dire

14 d'avril jusqu'à la fin août 1992, donc de quelle façon pendant cette

15 période-là, a-t-on soigné les blessés ou les malades par rapport à leur

16 appartenance ethnique? Est-ce qu'on a traité de la même façon les Croates,

17 les Serbes et les Albanais?

18 M. le Président: Je crois que nous allons prendre beaucoup de temps,

19 Maître Stojanovic. Je crois que le témoin, le Dr Barudzija, est venu pour

20 parler essentiellement d'un blessé.

21 Maître Stojanovic, quel est votre objectif, avant de préjuger?

22 M. Stojanovic (interprétation): Monsieur le Président, Madame et Monsieur

23 les Juges, moi je souhaite vous présenter la crédibilité de ce témoin

24 ainsi que l'établissement pour lequel il travaillait, qui va nous fournir

25 donc un fond pour établir la crédibilité concernant les faits que nous

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1 souhaitons prouver.

2 M. le Président: Il serait préférable peut-être d'aller au fait. Nous

3 sommes des Juges professionnels, nous n'avons pas besoin de quelqu'un qui

4 vient ici pour dire que le témoin est crédible. Nous voyons cela.

5 Allez-y, comme je vous l'ai dit, ce témoin est venu pour parler d'un

6 blessé concret.

7 Allez-y, s'il vous plaît.

8 Les Juges vont tenir compte de la crédibilité. Il n'y a pas de problème.

9 Allez-y.

10 M. Stojanovic (interprétation): Est-ce que cela veut dire que le témoin

11 n'a pas à répondre à la question que je lui ai posée? Est-ce qu'il va

12 répondre à ma question? Je n'ai pas compris. Ai-je le droit de poser cette

13 question?

14 M. le Président: D'une façon générale, oui. Allez-y.

15 M. Stojanovic (interprétation): Peut-être le témoin a-t-il oublié la

16 question. La question était: quels étaient les soins médicaux fournis aux

17 blessés, aux malades appartenant à différents groupes ethniques?

18 M. Barudzija (interprétation): Je ne l'ai pas oubliée du tout, mais j'ai

19 commencé à répondre à votre question au moment où j'ai été interrompu.

20 Je voudrais donc vous dire que ces traitements étaient corrects à tous les

21 niveaux, moi, j'étais chef du département de chirurgie et je maintiens

22 cela.

23 Question: Je pense que vous n'avez pas répondu précisément à ma question.

24 Je vous ai demandé si on les a soignés et traités de la même façon?

25 Réponse: Oui, oui, oui, en ce qui concerne les soins, les traitements

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1 hygiéniques, la nourriture, les draps, tout. Nous prenions soin de cela

2 depuis le début, nous savions que tout cela c'étaient des hommes et en

3 plus des hommes que nous connaissions. Nous, les médecins, nous ne

4 pensions pas à certaines choses et nous n'avions pas le temps d'ailleurs,

5 nous avions beaucoup de travail.

6 Question: Monsieur Barudzija, connaissez-vous Zoran Zigic?

7 Réponse: Je connais Zoran Zigic depuis le début de la guerre quand il est

8 venu à l'hôpital, et c'est là que je l'ai rencontré et vu pour la première

9 fois.

10 Question: Vous avez fait un diagnostic par écrit, vous l'avez fourni à la

11 défense de M. Zoran Zigic, vous l'avez fait au cours de cette année-là?

12 Réponse: Oui, c'est exact.

13 Question: Je voudrais demander à l'huissier de présenter ce document au

14 témoin. Il s'agit donc du diagnostic qui avait été fourni il y a 25 jours

15 à peu près, il ne s'agit donc pas d'un document nouveau. Plus précisément

16 ce document avait été fourni au Greffe le 30 mars.

17 M. le Président: C'est un rapport d'expert ou est-ce un autre document,

18 Maître Stojanovic?

19 M. Stojanovic (interprétation): Oui, Monsieur le Président, c'est bien ce

20 rapport d'expert et je voudrais demander au témoin de bien confirmer qu'il

21 s'agisse bien de l'opinion d'expert qu'il a fournie à la défense.

22 M. Barudzija (interprétation): Oui, oui c'est bien l'opinion d'expert que

23 j'ai fournie à la défense.

24 M. le Président: Maître Stojanovic, attendez un peu.

25 Madame Thomson, avez-vous attribué une cote, ou ce rapport d'expert a-t-il

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1 déjà un numéro d'enregistrement au Greffe?

2 Nous avons suivi ce critère par rapport aux rapports d'expert de l'accusé

3 M. Radic, c'est-à-dire, nous n'avons pas attribué une cote. Nous avons

4 fonctionné avec le numéro d'enregistrement du Greffe.

5 Pouvez-vous nous expliquer ce qui se passe maintenant avec ces rapports?

6 Il faut les identifier d'une certaine façon.

7 Mme Thomson (interprétation): Monsieur le Président, je souhaiterais

8 attribuer une cote immédiatement puisqu'on utilise ce document en ce

9 moment précis, je voudrais lui attribuer la cote D24/4.

10 M. le Président: Maître Stojanovic, lorsque vous mentionnez et vous vous

11 référez au document, peut-être serait-il mieux de vous référer au document

12 D24/4 pour l'identification?

13 M. Stojanovic (interprétation): Je vous remercie de votre aide, Monsieur

14 le Président.

15 Monsieur le témoin, est-ce que vous maintenez le constat médical que vous

16 avez dressé?

17 Réponse: Oui je le maintiens totalement, je le confirme.

18 Question: Vous vous êtes fondé sur quoi pour élaborer ce constat médical?

19 Je voudrais vous rappeler le fait que vous avez abordé plusieurs thèmes

20 dans votre opinion.

21 Réponse: Peut-être qu’en tant que médecin je ne l'aurais pas fait si je

22 n'avais pas traité moi-même la blessure de M. Zigic et c'est pour cela que

23 j'ai pu facilement accepter de faire ce travail, que j'ai effectué, dans

24 la mesure du possible de mon expérience et de mes connaissances, en tant

25 que médecin, je pense que moi en tant que médecin il n'y aura pas de

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1 problèmes en ce qui concerne mes capacités professionnelles.

2 Monsieur Zigic était mon patient. Quand il a été blessé, il est venu à

3 l'hôpital, il a été examiné aux urgences chez nous, il est venu à pied. Il

4 se tenait debout, donc il marchait, il était escorté par un camarade ou

5 deux camarades.

6 Question: Permettez-moi de vous interrompre. Plus tard, je vous poserai

7 des questions plus concrètes concernant ces détails. Donc la blessure que

8 Zigic a présentée au doigt, donc pour traiter cette blessure, étiez-vous

9 capable de le faire?

10 Réponse: Oui bien sûr, c'était la routine pour nous et évidemment nous

11 établissions un diagnostic et comme le patient peut perdre ce diagnostic,

12 nous l'inscrivons aussi dans un livre du protocole et donc normalement on

13 devrait être capables de retrouver le diagnostic au moins dans ce registre

14 du protocole.

15 Question: Est-ce que vous avez consulté la documentation médicale?

16 Réponse: Oui, j’ai consulté la documentation en me basant sur les copies

17 du registre du protocole concernant le doigt où il est écrit que M. Zigic

18 est venu une première fois et qu'il est venu aussi pour une visite de

19 contrôle concernant la blessure qu'il présentait au niveau de l'index de

20 sa main gauche.

21 Question: Est-ce qu'il y avait un historique de la maladie?

22 Réponse: Non car on l'a renvoyé chez lui, on lui a conseillé de revenir

23 pour une visite de contrôle, on lui a aussi prescrit des médicaments, le

24 patient devait donc revenir pour changer les pansements, pour les visites

25 de contrôle tous les 2 jours car il s'agissait d'une blessure infligée par

Page 10906

1 arme à feu et il y avait un risque d'infection.

2 Question: Est-ce que vous parlez donc de ce premier traitement qu'a subi

3 M. Zigic?

4 Réponse: Oui, il s'agissait de la blessure au niveau de l’index.

5 Question: Dans votre opinion d’expert, vous parlez aussi de la blessure de

6 M. Zigic qu’il a eue le 19 août 1992. Vous vous êtes basé sur quoi pour

7 faire ce constat médical?

8 Réponse: Je n’ai pas vu moi-même personnellement cette blessure mais je me

9 suis fondé sur la documentation médicale qui existait dans ce même livre

10 du protocole. Donc on retrouve le diagnostic de la blessure où il était

11 écrit qu'il présentait une blessure au niveau de la tête et du menton.

12 Question: En ce qui concerne la blessure d'un certain Emsud Bahonjic, vous

13 vous êtes fondé sur quoi pour faire ce rapport?

14 Réponse: Je n’ai pas vu Emsud Bahonjic, je ne l'ai pas traité moi-même

15 mais j'ai fait cette opinion en me fondant sur la documentation. Il était

16 très clair qu'il s'agissait d'une température élevée et de déshydratation.

17 Question: Nous allons parler de ce détail plus tard. Mais concernant la

18 deuxième blessure de M. Zigic et la blessure ou le soin prodigué à M.

19 Bahonjic, est-ce que vous vous êtes fondé sur la documentation qui

20 existait dans votre hôpital?

21 Réponse: Oui, je me suis fondé sur la documentation car je n'ai pas soigné

22 moi-même ces deux patients.

23 Question: Savez-vous nous dire si cette documentation médicale a été prise

24 par quelqu’un d'autre et emportée à l'extérieur de l'hôpital?

25 Réponse: En me préparant pour effectuer ma mission ici et pour avoir des

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1 renseignements très complets, donc marcher sur du sol ferme, je suis allé

2 consulter nos archives et j'ai demandé les protocoles.

3 Les infirmières m'ont dit qu'elles disposaient de certains protocoles

4 datant de 1992, je les ai donc pris, et lorsque j'ai consulté cela dans

5 mon bureau, j'ai vu que Zoran n'y était pas et que Bahonjic n’y était pas

6 non plus et que cela s'est fait ultérieurement.

7 Ces protocoles ne contenaient rien. Ce n'est pas à partir de ces

8 protocoles là que j'ai pu prendre connaissance des blessures subies par

9 MM. Zigic et Emsud Bahonjic.

10 Question: Sauriez-vous nous dire qui a pris cette documentation et où

11 cette documentation a été emportée?

12 Réponse: Un jour, une information a retenti pour dire que des gens des

13 forces internationales étaient venus et se sont adressés au directeur de

14 l'hôpital et, avec son approbation, la documentation leur a été remise

15 sans pour autant avoir été photocopiée auparavant pour laisser des copies

16 à l'hôpital afin que ces dernières puissent s'en servir ultérieurement.

17 Question: Avant cet événement, avant que la documentation n'ait été

18 saisie, avez-vous pu consulter les documents et ces documents ont-il été

19 copiés ou vous a-t-on présenté des copies?

20 Réponse: Des copies ont été présentées, notamment de la part de la Défense

21 mais je n'ai pas pu les retrouver à l'hôpital, du moins pour ce qui

22 concerne MM. Zigic et Bahonjic Emsud. C'est de là que j'ai puisé tous les

23 renseignements que j'ai mis sur papier.

24 Question: Passons maintenant à la blessure du doigt de Zigic, pourriez-

25 vous nous dire quand est-ce que cela est survenu?

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1 Réponse: Cela est arrivé, comme cela est dit ici, le 29 mai 1992. C'est là

2 qu'il est venu pour la première fois chez moi à cause de la blessure qu'il

3 avait à l’index, blessure par arme à feu, et le diagnostic est en latin

4 "Vulnus sclopetaria digiti indicis manus lateralis sinistri", cela veut

5 dire qu'il y a eu amputation de l’index de la main portant blessure par

6 arme à feu, ce qui lui a brisé l'index de la main gauche et il s'agit d'un

7 traumatisme donc d'une blessure par arme à feu.

8 Question: Pouvez-vous nous dire encore quelque chose de plus détaillé au

9 sujet de la blessure. De quoi cela avait-il l'air?

10 Réponse: Je m'en souviens comme si cela c'était passé hier. Cela est resté

11 gravé en mémoire et j'y ai beaucoup pensé en me préparant à venir ici. Je

12 tiens à dire que la blessure datait de quelques heures, de 5 à 6 heures

13 avant que M. Zigic ne vienne à l'hôpital. La blessure était, se présentait

14 comme suit: il y avait des côtés irréguliers, une légère hémorragie et une

15 espèce de suie, comme si quelque chose avait brûlé. Il y avait donc une

16 espèce de couche de suie sur cette superficie. Cela était fort douloureux,

17 le doigt était enflé, la main toute entière était douloureuse mais il

18 avait fait preuve de beaucoup de courage étant donné qu'il ne se plaignait

19 pas beaucoup de la douleur subie. Nous avons donc pu le traiter posément,

20 de façon médicale, à savoir nettoyer la blessure et éliminer mécaniquement

21 les bouts de tissus qui étaient arrachés et tailladés.

22 Nous avons, par la suite, utilisé des désinfectants, à savoir de

23 l'hydrogène, des antiseptiques, une solution iodée et ce, à plusieurs

24 reprises pour empêcher toute possibilité d'infection de cette blessure

25 portée par arme à feu.

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1 Question: Cette présence de suie sur la blessure et cette hémorragie

2 légère, cela vous disait-il quelque chose pour ce qui était de la façon

3 dont la blessure avait été portée?

4 Réponse: Eh bien, cela nous disait que cela a probablement dû être une

5 blessure portée de près, à savoir d'une distance de deux ou trois mètres.

6 Question: Pouvez-vous nous dire s'il s'agissait du point de vue des soins

7 apportés d'un cas plus ou moins grave?

8 Réponse: Pour ce qui est des soins, il ne s'agissait pas de quelque chose

9 de complexe. Ce sont des opérations de routine que l'on effectue de façon

10 aisée, il s'agissait donc de nettoyer, de désinfecter, de placer des

11 pansements ou éventuellement un plâtre.

12 Question: Vous souvenez-vous dans quel état votre patient est arrivé chez

13 vous?

14 Réponse: Monsieur Zigic est arrivé dans un état que j'ai souvent pu voir à

15 l'hôpital, que j'ai l'habitude de voir. Il était posé. Mais ses

16 caractéristiques à lui montraient qu'il avait toujours une attitude

17 sérieuse quand il parlait à voix forte, quelque peu névrosée. Indiquant

18 donc la présence d'une névrose, mais rien de particulier si l'on compare

19 cela à des patients de cette nature.

20 Question: Mais avez-vous par la suite remarqué la présence des faits

21 d'alcool?

22 Réponse: Eh bien, par la suite cela se passait différemment. Il venait

23 souvent sous l'effet de l'alcool, ce qui fait que je l'ai prévenu des

24 effets nocifs que l'alcool avait pour la cicatrisation de sa blessure,

25 étant donné que la circulation sanguine était plus mauvaise; en plus,

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1 l'alcool anéantissait les effets des antibiotiques. Cela pouvait réduire

2 le système, diminuer, restreindre la défense immunologique de l'organisme

3 qui était soumise à une consommation d'alcool.

4 Question: Je vous prie de nous dire maintenant quel est le type

5 d'intervention chirurgicale que vous avez faite au niveau de cette

6 blessure?

7 Réponse: La première fois, il s'agissait de nettoyer la blessure et de

8 placer un pansement, lui donner des médicaments ou prendre rendez-vous

9 pour un premier contrôle.

10 Question: Comment cette blessure avait-elle été protégée? Vous en

11 souvenez-vous?

12 Réponse: Pour ce qui est du contrôle...

13 Question: Excusez-moi, je parle de la première fois.

14 Réponse: Lorsqu'il est venu, la blessure n'était pas protégée du tout. Je

15 n'ai pas remarqué de pansement et il s'agissait de façon claire...

16 Question: Je crois qu'il y a encore un petit malentendu. Quand il est venu

17 la première fois, comment avez-vous pris soin de cette blessure? Comment

18 avez-vous protégé cette blessure? Avez-vous placé un pansement?

19 Réponse: Je crois l'avoir dit, mais je vais le répéter. Je l'ai fait

20 entrer dans la petite salle d'opération, nous avons nettoyé cette blessure

21 et nous avons placé ce premier pansement sur la blessure.

22 Question: Avez vous placé un plâtre?

23 Réponse: Dans mon constat, il est précisé qu'il y a une immobilisation au

24 plâtre. Maintenant de là à savoir si le technicien a effectivement placé

25 un plâtre ou non, je ne sais pas. Nous étions pressés et je ne sais pas si

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1 le technicien l'a ultérieurement fait. Je ne peux pas l'affirmer en ce

2 moment-ci.

3 Question: Mais cette protection de la blessure, de quoi avait-elle l'air?

4 Est-ce que cela faisait de Zigic une personne que l'on remarquait?

5 Réponse: Eh bien, en tout état de cause, étant donné que toute sa main

6 portait un pansement, cela était visible. Ce pansement était de couleur

7 blanche, il portait sa main contre son corps, la main devait se trouver au

8 niveau de la partie droite de sa poitrine. J'ai remarqué qu'il portait

9 cette main comme ceci contre son manteau et je crois qu'il devait la

10 porter ainsi parce qu'il souffrait de douleur.

11 Question: Vous avez fait un geste, mais "comme cela" ne figure pas au

12 compte rendu d'audience, je vous prie de nous expliquer?

13 Réponse: Eh bien, il portait sa main à l'endroit du boutonnement de ce

14 veston.

15 Question: Vers la partie supérieure de son corps de son veston?

16 Réponse: C'est cela.

17 Question: Est-ce que le pansement rendait cette main plus épaisse enfin le

18 pansement et ce que vous avez déjà placé?

19 Réponse: En effet, cela a grossi la main et cette main était enflée ou

20 plus grosse que sa main droite, que l'autre main.

21 Question: Compte tenu de vos qualifications et de votre expérience,

22 pouvez-vous nous déterminer le degré de douleur et la persistance de la

23 douleur dans des blessures de ce type?

24 Réponse: J'ai pas mal d'expérience au niveau de blessures de ce genre, et

25 si l'on suit une classification qui est déjà une classification

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1 communément admise. Il s'agit de trois degrés de douleur. Le premier est

2 un degré de douleur très forte, degré où le patient subit des douleurs

3 très grandes et c'est une phase de douleur qui s'étend sur à peu près 12

4 heures.

5 Après cette phase de douleur intense, qui dure 12 heures, il s'ensuit une

6 deuxième phase, un deuxième degré de douleur donc, une douleur d'intensité

7 moyenne qui dure pendant bien plus longtemps, à savoir dans des cas

8 pareils jusqu'à 3 semaines. Et un troisième degré de douleur, qui est un

9 degré de faible intensité, de douleur de faible intensité, qui s'étire sur

10 quelques six semaines au total mais par la suite encore, nous n'envoyons

11 pas des patients de ce type au travail, mais il est près prévu d'abord

12 d'avoir des soins, un traitement en station de sources thermales, ce qui

13 fait que chez nous ce type de soins dure six mois car le doigt compte

14 beaucoup de nerfs. Ce sont des nerfs sensitifs, ce sont donc des nerfs qui

15 sont là pour la sensation, le toucher et qui enregistrent tous les

16 changements, l'humidité, le toucher, les mouvements, le fait de saisir des

17 objets, le fait de les relâcher, donc tout ce qui est palpation.

18 Question: Cette douleur pouvait-elle être transmise aux bras et à d'autres

19 parties du corps?

20 Réponse: C'est un phénomène normal. La douleur agit sur l'organisme dans

21 son ensemble. Bien entendu, le bras en souffre et notamment l'aisselle qui

22 comporte des glandes lymphatiques et qui enflent et cela est douloureux.

23 C'est ce qui rend les patients de mauvaise humeur, anxieux, soucieux, pour

24 ce qui est de savoir s'il va y avoir des infections, des complications au

25 niveau de la blessure, ce qui fait que le patient est davantage tourné

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1 vers soi et ce, plus que dans des conditions qui sont considérées comme

2 étant normales.

3 Question: Quelles sont les possibilités physiques d'une personne qui est

4 blessée de la sorte, j'entends la possibilité physique pour ce qui est de

5 l'effort, des mouvements plus ou moins intenses?

6 Réponse: Dans des conditions normales, à savoir si le patient s'en tient à

7 ce qui lui est prescrit comme thérapeutique, les possibilités de travail

8 ardues sont, de par mon expérience, exclues. Ce serait très douloureux.

9 Question: Je serais fort concret. Si l'on frappait quelqu'un avec cette

10 main?

11 Réponse: Eh bien, s'il frappait quelqu'un il souffrirait davantage que la

12 personne frappée.

13 Maintenant, de là à savoir s'il y a une technique de le faire, je ne sais

14 vous dire mais, en ma qualité de médecin, je dois vous dire que cela

15 pourrait se faire sous l'effet de médicaments, d'analgésiques très

16 puissants pour neutraliser la douleur et, dans une situation pareille, on

17 pourrait neutraliser la douleur et extérioriser une agressivité.

18 Question: Vous nous avez parlé des degrés de douleur et des possibilités

19 physiques d'une personne blessée de la sorte. En est-il ainsi dans des

20 conditions normales, sous réserve que la blessure ait été traitée de façon

21 normale?

22 Réponse: Il en est ainsi et il ne peut pas en être autrement.

23 Question: Mais si le blessé ne s'en tient pas aux instructions du médecin

24 et s'il n'est pas soigné de façon adéquate, s'il néglige l'hygiène et la

25 blessure de cette hygiène, est-ce que votre constat demeure le même pour

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1 ce qui est de la douleur et des possibilités physiques, des aptitudes

2 physiques?

3 Réponse: Dans ce cas, les choses changent carrément parce qu'il peut y

4 avoir infection s'il n'y a pas d'antiseptique, de médicament. Cela peut

5 mettre en péril la vie de la personne et sans parler des dangers tels que

6 les salissures, la boue.

7 Question: Est-ce que cela prolonge la douleur, la durée de cette douleur?

8 Réponse: Non seulement cela prolonge, mais cela accentue la douleur parce

9 qu'il y a infection, la douleur ne fait que croître.

10 M. Stojanovic (interprétation): Monsieur le Président, je m'excuse, mais

11 je vois qu'il est une heure et je me demande s'il n'est pas l'heure de

12 faire une pause.

13 M. le Président: Oui, nous pouvons faire cette pause. Je vous remercie

14 d'attirer notre attention.

15 Je vais demander à M. l'huissier d'accompagner le Docteur.

16 Nous allons faire une pause déjeuner.

17 (Le témoin, M. Mirko Barudzija est hors du prétoire.)

18 La pause sera de 50 minutes.

19 (L'audience, suspendue à 12 heures 59, est reprise à 14 heures.)

20 M. le Président: Veuillez vous asseoir s'il vous plaît.

21 (Le témoin, M. Mirko Barudzija, est réintroduit dans le prétoire.)

22 Nous allons continuer le témoignage du Dr Barudzija.

23 Maître Stojanovic, vous avez la parole.

24 M. Stojanovic (interprétation): Merci Monsieur le Président.

25 Monsieur Barudzija, nous nous sommes arrêtés aux premiers soins qui ont

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1 été fournis à M. Zigic concernant son doigt.

2 Ma question est la suivante: quelles sont les visites de contrôle qui sont

3 nécessaires, les traitements pour ce type de blessure?

4 M. Barudzija (interprétation): Puisqu'il s'agit d'une blessure par arme à

5 feu, qui est toujours suivie d'une infection et de particules étrangères,

6 le contrôle de la blessure est nécessaire, et il doit être fréquent, au

7 moins le deuxième jour après les soins avec des quantités importantes

8 d'antibiotiques, d'analgésiques et de repos. Tout ceci pour empêcher

9 l'infection de la blessure puisque ce type de blessures est souvent suivi

10 d'infections et c'est pour cela qu'il faut faire attention.

11 Question: Est-ce que M. Zigic est venu pour sa visite de contrôle?

12 Réponse: Monsieur Zigic est venu mais pas de façon régulière. Il n'est pas

13 venu le deuxième jour, mais quelques jours plus tard, et ceci a résulté

14 par une infection de la blessure.

15 Question: Quel était l'état de cette blessure constaté lors des visites?

16 Réponse: Eh bien, on soupçonnait une infection et peut-être même qu'une

17 hospitalisation au département de chirurgie était nécessaire ou possible.

18 Question: Ce que vous venez de dire, c'est-à-dire le contrôle effectué de

19 façon régulière et peut-être l'effet de l'alcool sur le traitement, est-ce

20 que tout ceci apportait des complications au niveau de la blessure?

21 Réponse: Eh bien, cela va de soi. C'était prévisible. Il y a eu donc

22 infection, des complications au niveau de la blessure. Cette partie du

23 corps au niveau du doigt présentait des hématomes, du pus dans la

24 blessure, l'infection.

25 Question: Et quelles étaient les conséquences de cet état de sa blessure

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1 concernant le traitement futur?

2 Réponse: Quand il y a une telle infection présente au niveau de la

3 blessure, eh bien, nous proposons une hospitalisation et M. Zigic a été

4 admis au département militaire de l'hôpital de Prijedor et il a été soigné

5 pendant plusieurs jours avec des changements de pansements réguliers.

6 Question: A cause de cette infection localisée, est-ce qu'il y avait un

7 risque d'infection généralisée au niveau du corps?

8 Réponse: Oui, oui, bien sûr. C'est pour cela qu'il a été admis à l'hôpital

9 parce qu'on ne peut jamais connaître l'évolution de telles infections,

10 puisque si des bactéries entrent dans le système sanguin, la bactérie peut

11 provoquer une infection généralisée.

12 Question: Est-ce qu'il peut y avoir une issue mortelle d'une telle

13 infection généralisée si elle n'est pas soignée?

14 Réponse: Oui, oui. Si l'infection au niveau du sang du système de la

15 circulation n'est pas soignée, eh bien, d'autres organes peuvent être

16 touchés et infectés et il peut y avoir une issue mortelle.

17 Question: Vous avez dit qu'il avait été admis à l'hôpital, est-ce que vous

18 savez à quel moment il a été admis et pendant combien de temps?

19 Réponse: Ceci est écrit ici, je viens de le trouver. Il a été admis le 21

20 juin 1992 au département militaire de l'hôpital et a été gardé jusqu'au 26

21 juin 1992, donc 5 ou 6 jours en tout. Il a donc été admis le 21 juin 1992

22 et il est parti le 26 juin 1992.

23 Question: Savez-vous quelle a été la nature des soins qui lui a été

24 prodiguée pendant son séjour à l'hôpital?

25 Réponse: Eh bien, tous les jours sa blessure était pansée -parfois même on

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1 le fait deux fois par jour-, mais en tout cas au moins une fois par jour

2 de façon quotidienne.

3 Ensuite, l'administration d'antibiotiques par voie intraveineuse

4 directement dans le sang en grande quantité ainsi que les analgésiques, et

5 les chirurgiens doivent aussi nettoyer la blessure, la vider, la nettoyer

6 de façon profonde et complète.

7 Question: Dans votre constat médical, vous dites que vous avez consulté

8 l'historique de la maladie, le n°112, ainsi que la lettre, le certificat

9 de sortie datant du 26 juin 1992, le n°P0054676.

10 Avec la permission de la Chambre, je voudrais demander à l'huissier de

11 m'aider à présenter au témoin expert ce document.

12 (L'huissier s'exécute.)

13 M. le Président: Madame Thomson, quelle en sera la cote?

14 Mme Thomson (interprétation): D25/4.

15 M. Stojanovic (interprétation): Docteur, pourriez-vous dire s'il s'agit

16 bien de ce document d'anamnèse auquel vous faites référence dans votre

17 rapport d'expert?

18 M. Barudzija (interprétation): Oui, il s'agit donc de l'anamnèse, la

19 première qui est faite où l'on voit le nom, le prénom, la date de

20 naissance, les jours de l'admission à l'hôpital.

21 On voit qu'il s'agit donc de la date du 21 juin 1992. On voit aussi le

22 diagnostic qui est écrit en langue latine.

23 Interprètes: Nous n'avons pas saisi le diagnostic.

24 M. Barudzija (interprétation): Il est écrit qu'il a été admis après cette

25 blessure présentée à la main gauche, originaire par arme à feu, et nous

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1 avons aussi la date de la sortie, le 26 juin 1992.

2 M. Stojanovic (interprétation): Monsieur le Président, la défense va

3 proposer l'admission de ce document au dossier. Nous avons aussi proposé

4 la version en langue anglaise, donc D25/4 porte l'indication A et B. Ce

5 document existe aussi bien en langue BCS qu'en langue anglaise.

6 Je propose maintenant que l'on présente à notre témoin expert le deuxième

7 document que j'ai mentionné.

8 (L'huissier s'exécute.)

9 Nous avons aussi une copie en langue anglaise.

10 Interprètes: Le diagnostic en latin est: "Post vulnus scolpetarium manus

11 sinistre."

12 Mme Thomson (interprétation): Ce document portera la cote D26/4.

13 M. Stojanovic (interprétation): Docteur, pouvez-vous dire qu'il s'agit

14 bien du document auquel vous faites référence dans votre rapport?

15 M. Barudzija (interprétation): Le certificat de sortie de l'hôpital où est

16 indiquée la date de l'admission du patient, le 21 juin 1992, la date sa

17 sortie, le 26 juin 1992.

18 Ensuite, les diagnostics où c'est écrit "St post vulnus scolpetarium manus

19 sinistri et amputatio digiti, secundo manus sinistri inflamatio." C'est

20 cela les diagnostics en latin. Il est écrit qu'il a été admis à cause de

21 l'inflation d'une blessure reçue auparavant et qu'il a été soigné par les

22 pansements, l'administration des antibiotiques et des analgésiques.

23 Ensuite, les recommandations du médecin, le repos, le contrôle dans trois

24 jours signés par le chef du département, Dr Barudzija.

25 Moi, je n'ai pas signé ce document ainsi que les docteur du département,

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1 Dr Milic, mais il n'y a pas de signature non plus. La raison pour laquelle

2 je n'ai pas signé cela, c'est donc parce que je n'avais pas toujours le

3 temps de le faire.

4 Pour quelle raison le docteur du département ne l'a pas fait? Peut-être

5 que cette signature existait auparavant et, au fur et à mesure, avec les

6 photocopies, elle a disparu, mais en tout cas, ceci n'est pas tellement

7 important. Il est évident qu'il s'agit d'un document véridique et

8 authentique qui témoigne de la présence du patient au département

9 militaire de l'hôpital de Prijedor pendant cette période.

10 Question: Merci. Ma dernière question concernant cette blessure: est-ce

11 que cette blessure infligée au niveau du doigt a résulté en une invalidité

12 permanente chez M. Zigic?

13 Réponse: Quand il s'agit de la main, cette extrémité du corps que l'on

14 regarde tous les jours, eh bien, il manque un doigt maintenant à cette

15 main. Ceci peut être remarqué par l'environnement et par les patients

16 évidemment. Il existe donc un certain degré d'invalidité et une

17 malformation de la main qui peut avoir des effets, des séquelles

18 psychologiques chez le patient parce que cette main à laquelle manque un

19 doigt, eh bien, elle va perdre de sa valeur et va diminuer

20 psychologiquement le patient. Tout ceci évidemment influe le patient tout

21 au long de sa vie. Cette invalidité est définitive et l'invalidité, la

22 déformation est visible et durable.

23 Question: Je vous remercie. Dans votre opinion d'expert, vous mentionnez

24 d'autres blessures qu'a subies l'accusé Zigic à la date du 19 août 1992.

25 De quel type de blessure s'agit-il?

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1 Réponse: Il s'agit de "vulnus lacerocontusum capitis et manibulae reagiae

2 barbae", donc il s'agit d'une blessure qui a été portée au niveau de la

3 tête et du menton par un couteau, il s'agit donc d'une lacération au

4 niveau cutané, au niveau du menton. C'est l'endroit où la peau est très

5 tendue et donc peut être lacérée très facilement.

6 Cette blessure présente des bords irréguliers, des hématomes, et une

7 insensibilité temporaire à ce niveau-là ressentie donc par les patients.

8 Et au niveau du menton, eh bien, il s'agit du même type de blessure avec

9 les lacérations au niveau de la peau, des hématomes et des saignements

10 puisque les saignements ne sont pas les mêmes quand ils sont provoqués par

11 un objet comme un couteau et par un objet différent.

12 Question: Est-ce que cette blessure au niveau du menton et de la joue est-

13 ce qu'elle peut laisser une cicatrice?

14 Réponse: Eh bien, si cette blessure n'a pas été recousue, traitée de la

15 façon adéquate, si les chirurgiens ne l'ont pas fait, il est bien possible

16 qu'elle reste une cicatrice et qu'elle enlaidisse le visage. S'il s'agit

17 du visage, cela se voit.

18 Question: Monsieur le Président, Madame et Monsieur les Juges, la défense

19 souhaite verser au dossier un autre document. Il s'agit du certificat qui

20 porte le n°02402, qui date du 24 juillet 1992. Ces certificats ont été

21 admis par les directeurs de l'hôpital et nous l'avons aussi bien en langue

22 anglaise qu'en anglais et en BCS.

23 (L'huissier s'exécute.)

24 Mme Thomson (interprétation): Ce certificat portera la cote D27/4.

25 M. Stojanovic (interprétation): Merci.

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1 Monsieur Barudzija, à la fin de votre rapport, vous parlez d'un certain

2 Emsud Bahonjic, vous parlez du traitement qu'il a subi. Est-ce que vous

3 avez soigné personnellement ce patient ou bien est-ce que vous avez

4 élaboré votre rapport en vous basant sur la documentation dont dispose

5 l'hôpital?

6 M. Barudzija (interprétation): En ce qui concerne M. Emsud Bahonjic, moi,

7 je me suis fondé exclusivement sur la documentation médicale dont dispose

8 l'hôpital puisque moi je n'ai pas vu, je n'ai pas soigné ce patient.

9 J'ai élaboré mon rapport d'expert me fondant exclusivement sur la

10 documentation médicale où il est consigné qu'il avait été amené à

11 l'hôpital à deux reprises. La première fois, le 11 juin 1992 et la

12 deuxième fois le 15 juin 1992, qu'il a été amené du centre d'accueil de

13 Keraterm qui présentait donc la fièvre, la déshydratation, c'est-à-dire la

14 perte des liquides du corps causée par la hausse de la température, l'état

15 fébrile ainsi que la transpiration.

16 Il a été dirigé vers le département de médecine interne, il a été examiné

17 par les médecins internes et son diagnostic a été établi, on l'a à nouveau

18 transféré au département de chirurgie où on a procédé à l'examen de son

19 genou. C'est-à-dire où l'on a constaté une blessure, une ecchymose au

20 niveau du genou.

21 On ne voit pas s'il s'agit du genou gauche ou droit. On ne voit pas du

22 tout qu'il y a eu deux fractures, on lui a probablement immobilisé le

23 genou et on lui a conseillé le repos, les pansements avec de l'alcool ou

24 bien les pansements froids. Ce sont donc les soins qui lui sont proposés

25 ainsi qu'une visite de contrôle.

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1 M. le Président: Ce document D27/4 avait à voir avec quels patients?

2 M. Stojanovic (interprétation): Oui.

3 M. le Président: Même M. l'huissier, ici dans ce prétoire, sait qu'il faut

4 présenter le document au témoin. L'huissier attend depuis longtemps là-bas

5 que vous présentiez le document au témoin expert. Sinon vous allez avoir

6 immédiatement l'objection du Procureur, Maître Stojanovic. Vous pouvez

7 confirmer au moins le document avec le témoin. L'huissier attend.

8 M. Stojanovic (interprétation): Je vous remercie, Monsieur le Président.

9 Il s'agit d'un problème technique, vous m'avez aidé le document est là

10 pour corroborer ce que M. Barudzija a déjà dit.

11 Ce document a été émis par quelqu'un d'autre, mais j'accepte bien

12 évidemment votre proposition et je vais demander à M. l'huissier de

13 présenter les documents au témoin. Il s'agit de la blessure au niveau du

14 menton qu'a subie M. Zigic et ce certificat a été émis par le directeur.

15 Est-ce que le témoin peut examiner ce certificat?

16 M. Barudzija (interprétation): Oui, oui moi, j'ai bien ces certificats. On

17 voit que les diagnostics sont un peu plus abrégés puisque l'on ne

18 mentionne pas le menton. On mentionne la mâchoire inférieure et la tête.

19 C'est probablement une omission, c'est le directeur Gojko Krneta, le

20 spécialiste de médecine interne qui a signé ce document. Ce document est

21 correct.

22 Question: Est-ce que l'on y voit le numéro du protocole sous lequel a été

23 enregistré ce patient?

24 Réponse: Oui, oui. Le numéro c'est le 02402 et la date, le 24 juillet

25 2000. Question: Je vais vous demander dans le texte, dans le même du

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1 certificat, est-ce que l'on voit un numéro de protocole?

2 Réponse: C'est bien le numéro que je viens de lire.

3 Question: Mais au-dessous?

4 Réponse: Oui, il y a un numéro 02402. La date, 24 juillet 2000. Le numéro

5 du protocole, c'est le numéro du protocole sous lequel a été enregistré ce

6 certificat.

7 Question: Oui, mais ce certificat se base sur quoi? Il est fondé sur quoi?

8 Pourriez-vous lire le texte?

9 Réponse: Il est écrit: "Le certificat qui certifie qu'au regard du

10 protocole militaire des patients de l'année 1992 sous le n°971, le 19 août

11 1992, M. Zigic Zoran a été examiné. Le diagnostic "Vulnus lacerocontusum

12 capitis et mandibulae". Ce qui est ensuite écrit: "(Une blessure au niveau

13 de la tête et de la mâchoire inférieure)", et c'est signé par le directeur

14 de l'hôpital.

15 Question: Je vous remercie. Je voudrais remercier aussi, Monsieur le

16 Président et la Chambre pour leur aide. Il s'agit du document D27/4.

17 Si je peux revenir sur le traitement de l'autre patient -je remercie M.

18 l'huissier, car nous n'avons plus besoin de ce document- vous avez

19 prononcé le diagnostic relatif à Emsud Bahonjic et vous avez dit que ce

20 patient était revenu à deux reprises, le 11 et le 15 juin, consulter.

21 A-t-il été soigné dans votre département?

22 Mme Somers (interprétation): Objection, Monsieur le Président.

23 Je fais objection à tout interrogatoire relatif à Bahonjic, car il a été

24 indiqué que le témoin ici n'a rien eu à voir avec ce patient, au mieux il

25 pourrait s'appuyer sur les propos d'un tiers. Il n'a pas établi les

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1 documents officiels qui lui permettraient de tirer la moindre conclusion

2 médicale au sujet de l'état d'un homme qu'il n'a jamais rencontré.

3 M. le Président: Maître Stojanovic?

4 M. Stojanovic (interprétation): Monsieur le Président, nous estimons que

5 cette objection ne devrait pas être acceptée car le témoin nous a dit -et

6 il s'agit d'un témoin expert- qu'il appuie son avis exclusivement sur des

7 documents. Par ailleurs, il était le chef de ce département, c'est donc

8 une personne qui connaît très bien son travail et qui connaît bien la

9 documentation en question et qui donne son avis sur la base de documents

10 qui sont à la disposition de son hôpital. Il l'a dit d'ailleurs.

11 M. le Président: Maître Stojanovic, vous pouvez refaire le chemin que le

12 témoin a fait, c'est-à-dire vous avez les documents ici à présenter devant

13 le prétoire pour que l'on puisse discuter? D'accord?

14 J'ai posé une question, je vois le compte rendu. J'ai demandé à Me

15 Stojanovic, s'il peut refaire le chemin que le témoin a fait notamment en

16 s'appuyant dans les documents ici dans le prétoire, c'est une question que

17 je pose Me Stojanovic?

18 M. Stojanovic (interprétation): Monsieur le Président, le témoin l'a fait

19 avant qu'on lui remette le rapport. Il avait la photocopie du protocole.

20 Nous en possédons des exemplaires et l'original se trouve entre les mains

21 du Greffe. Nous avons également la preuve écrite des dates où ces

22 documents ont été établis, donc toute possibilité existe de procéder aux

23 vérifications nécessaires sur base de documents.

24 Dans le rapport du médecin, il est dit également qu'il a étudié les

25 documents protocolaires et qu'il a confirmé la date des soins.

Page 10925

1 M. le Président: Nous savons déjà cela. Nous avons compris votre position.

2 Madame Somers?

3 Mme Somers (interprétation): Jusqu'à présent, Monsieur le Président, le

4 conseil de la défense n'a pas soumis au témoin et le témoin n'a pas

5 présenté spontanément le moindre document relatif à l'état de santé de M.

6 Bahonjic. Nous n'avons aucune indication quant à la nature exacte des

7 documents sur lesquels ce témoin a pu s'appuyer.

8 Ce témoin dans le cadre de l'interrogatoire principal répond à un certain

9 nombre de questions et ce qui est en possession du Procureur n'est pas la

10 question qui se pose. Au mieux ce témoin spécule une phrase sur deux en

11 disant "probablement oui, probablement non". Je pense que ceci est une

12 indication de son manque de connaissance et de son incapacité à fournir un

13 avis médical sur une base factuelle.

14 M. le Président: Je consulte mes collègues.

15 (Les Juges se concertent sur le siège.)

16 M. Barudzija (interprétation): Excusez-moi, Monsieur le Président. Je

17 pourrai peut-être vous aider?

18 M. le Président: Maître Stojanovic, vous allez conduire votre

19 interrogatoire principal. Nous devons finir Maître Stojanoivc, nous devons

20 arriver à la fin. Vous allez faire votre interrogatoire ou montrer au

21 témoin ici le document que le témoin a utilisé ou si vous n'avez pas le

22 document en demandant au témoin quel est le document qui lui permet de

23 dire cela: "Où a-t-il trouvé le document qu'il a utilisé?"

24 C'est au moins cela que vous allez faire. Cela suffit pour la Chambre:

25 faire une idée de l'objet et de la crédibilité une fois que c'est une

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1 chose qui a été touchée ici, le témoin doit donc répondre exactement à ces

2 questions et ne pas dire probablement cela a été fait, probablement ils

3 ont dû faire quelque chose".

4 Non! Qu'est-ce que j'ai vérifié avec la base matérielle qu'ils ont fait?

5 Allez-y.

6 M. Stojanovic (interprétation): Merci beaucoup, Monsieur le Président. Vos

7 remarques m'apportent une aide précieuse.

8 Monsieur Barudzija, sur quelle base vous êtes-vous appuyé pour faire les

9 conclusions que vous avez faites au sujet du traitement subi par une

10 personne répondant au nom d'Emsud Bahonjic?

11 M. Barudzija (interprétation): J'ai prononcé une déclaration solennelle au

12 début de mon témoignage disant que j'allais dire la vérité et toute la

13 vérité. J'ai trouvé cela dans un protocole.

14 M. Stojanovic (interprétation): Monsieur le Président, il faut que je

15 m'explique au niveau de ce protocole. Au moment où le témoignage de M.

16 Zigic était imminent, nous avons soumis au Greffe un certain nombre de

17 documents mais les services du Tribunal ont renvoyé ces documents car ils

18 ont déclaré qu'ils étaient illisibles et pratiquement impossibles à

19 traduire. Nous ne les possédons donc qu'en version BCS. Nous pouvons les

20 soumettre au témoin expert maintenant, en tout cas en partie.

21 M. le Président: Maître Stojanovic, le document n'est pas quand même

22 nécessaire. Il faut seulement demander au témoin, quand il affirme ce

23 qu'il affirme, quelle est la base. Le témoin peut dire quel est le

24 document.

25 Si vous avez le document, vous pouvez montrer le document.

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1 D'accord. Allez-y.

2 M. Stojanovic (interprétation): Le micro n'était pas allumé, Monsieur le

3 Président. Je demanderai l'aide de l'huissier pour remettre au témoin un

4 document qui est une copie d'une partie de ce protocole ou registre.

5 M. Stojanovic (interprétation): Docteur…

6 M. le Président: Quelle est l'identification de ce témoin? Madame Thomson?

7 Mme Thomson (interprétation): Oui, Monsieur le Président, ce document est

8 le document D28/4.

9 M. le Président: Très bien. Continuez, s'il vous plaît, Maître Stojanovic?

10 M. Stojanovic (interprétation): Docteur Barudzija, est-ce qu'en vous

11 appuyant sur ce document -et je vous indique qu'en bas, à gauche, vous

12 trouverez le nom d'Emsud Bahonjic- donc est-ce, en vous appuyant sur ce

13 genre de document, que vous avez appuyé votre rapport?

14 M. Barudzija (interprétation): Je vois le nom ici, mais je ne vois pas le

15 diagnostic. Il y avait un diagnostic, je l'ai vu moi-même. Il devrait se

16 trouver dans ce registre.

17 Question: Peut-être pourriez-vous regarder les pages suivantes?

18 M. Barudzija (interprétation): Maître Stojanovic a dit à juste titre que

19 ce registre avait été un peu désordonné et j'ai des difficultés à me

20 retrouver moi-même.

21 M. le Président: Nous parlons maintenant du document D28/4 mais nous

22 n'avons pas ce document. Quelle est votre idée de procédure? Que pensez-

23 vous faire? Vous pensez utiliser un document avec le témoin, mais ni

24 l'accusation ni les Juges n'ont ce document. Vous pensez distribuer ce

25 document à l'accusation et aux Juges? Quelle est votre idée?

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1 M. Stojanovic (interprétation): Monsieur le Président, un témoin expert, à

2 notre avis, n'a pas besoin de se voir soumettre tous les documents sur

3 lesquels il a appuyé son rapport d'expert car il peut en exister de très

4 nombreux documents de ce genre.

5 Nous pensions interroger ce témoin expert pour lui demander ce qui lui

6 avait servi à formuler les conclusions qui sont les siennes car des

7 documents, il y en a vraiment de très nombreux. Le registre à lui tout

8 seul ne suffit pas, donc nous ne pensions pas demander le versement au

9 dossier ce document qui nous semble être davantage un moyen d'expliquer ce

10 sur quoi le médecin appuie ses conclusions.

11 M. le Président: Il n'est pas nécessaire d'identifier le document.

12 Madame Somers, quelle est votre position?

13 Mme Somers (interprétation): La discussion que nous avons en ce moment

14 concerne un patient décédé que le médecin qui est ici n'a jamais vu et

15 parce que ce témoin s'appuie complètement, je dis bien complètement, sur

16 des éléments de preuve documentaire, il ne serait pas approprié de ne pas

17 demander à ce témoin d'expliquer tous les éléments tirés de chacun des

18 documents sur lesquels il appuie son avis compte tenu du fait qu'il n'a

19 jamais eu le moindre contact avec le patient.

20 Il n'a pas vu dans quel état était le patient à son arrivée ni dans quel

21 état il était pendant la consultation. Il n'a jamais rencontré cet homme

22 donc il appuie uniquement son avis sur des documents ou des rumeurs. Il en

23 dépend à 100%.

24 (Les Juges se concertent sur le siège.)

25 M. le Président: Maître Stojanovic, je crois que peut-être nous nous

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1 sommes enfin bien compris. Mon idée au moins -je ne sais pas si elle est

2 bien exprimée pour le compte rendu- , je vais essayer de parler lentement

3 pour que mes mots passent pour le compte rendu anglais. Je suis bien

4 conscient qu'il y a entre nous des interprètes.

5 Ce que j'ai voulu dire, c'est que nous sommes ici devant un témoin qui n'a

6 pas observé le patient. Il a observé les documents relatifs au patient.

7 L'objet du témoignage à la fin, c'est "qu'avez-vous vu et lu qui vous

8 permettent de conclure cela, cela et cela?"

9 Vos questions doivent donc être seulement au nombre de deux, à mon avis.

10 Si je peux vous dire néanmoins autour de deux questions:

11 La première: qu'est-ce que vous avez vu et lu comme document car sans le

12 document que vous avez vu et lu... Une question, un noyau de questions.

13 L'autre: "quelles sont les conclusions que vous enlevez de votre activité

14 de lecture et de la vision des documents? C'est l'autre noyau de

15 questions. Madame Somers, là, c'est cette orientation que la Chambre va

16 donner à la défense pour l'interrogatoire principal, et nous n'avons pas

17 montré au témoin tous les documents qu'il a vus.

18 Je dirai que nous sommes ici dans un "written cite" pour ne pas dire

19 "hearsay". Nous allons suivre un peu la même technique.

20 Maître Stojanovic, est-ce que vous avez bien compris cela? Allez-y, selon

21 cette direction et suivez cette direction sinon nous n'allons pas arriver

22 à la fin. Si vous sortez de ce chemin, vous aurez Mme Somers de l'autre

23 côté qui va occuper votre temps. Allez-y donc.

24 M. Stojanovic (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

25 Monsieur Barudzija, je vous demande sur la base de quel document vous avez

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1 rendu votre rapport?

2 M. Barudzija (interprétation): J'ai appuyé mon rapport exclusivement sur

3 des documents médicaux, c'est-à-dire sur le registre de l'hôpital relatif

4 aux patients admis à l'hôpital. Il est regrettable que l'on ne trouve pas

5 le diagnostic ici sur les documents que j'ai vus jusqu'à présent, mais je

6 suis sûr d'avoir vu le diagnostic de "status febrilis et dehidratio", ce

7 qui signifie qu'il y avait perte de liquide et forte température. Et un

8 autre diagnostic portait sur des contusions au genou avec bandage fixateur

9 et renvoi du patient à la maison. Il y a aussi "contusio genus" qui

10 signifie contusion au genou.

11 Question: Je prierai Monsieur l'huissier de vous présenter un autre

12 document qui nous permettra de déterminer si c'est bien ce document qui

13 vous a aidé à établir votre premier diagnostic. Nous avons retrouvé ce

14 document et nous pouvons donc vous le soumettre.

15 (L'huissier s'exécute.)

16 Je vois là Emsud Bahonjic, n°3286, né en 1962 à Kozarac. Le diagnostic est

17 "status febrilis dehidratio" et c'est un médecin interne qui a établi ce

18 diagnostic. C'est ce qui est écrit ici, le document est tout à fait

19 correct.

20 M. le Président: A la fin, allez-vous montrer le document au témoin oui ou

21 non?

22 M. Stojanovic (interprétation): Je crois que nous l'avons soumis, nous

23 l'avons montré, distribué.

24 M. le Président: Oui.

25 M. Stojanovic (interprétation): Les deux documents d'où émanent les deux

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1 diagnostics ont été présentés, mais simplement ce sont des copies en

2 langue BCS. J'espère que vous comprendrez nos difficultés.

3 Je possède la preuve selon laquelle le Procureur du Tribunal a pris les

4 originaux le 30 octobre 2000. Il a d'ailleurs établi un certificat à cet

5 effet.

6 M. le Président: Vous n'avez pas les documents sinon on doit identifier le

7 document? C'est la question.

8 M. Stojanovic (interprétation): Monsieur le Président, nous aimerions le

9 faire mais nous ne possédons qu'un exemplaire en BCS.

10 M. le Président: De toute façon pour les faits, il n'est pas nécessaire de

11 montrer les documents au témoin. Si vous suivez notre orientation, vous

12 faites comme vous voulez, mais vous parlez du document. Sinon on va perdre

13 beaucoup de temps, Maître Stojanovic.

14 M. Stojanovic (interprétation): Monsieur le Président, notre intention

15 initiale consistait à ce que le rapport du Dr Barudzija s'appuie sur ces

16 documents. D'ailleurs, nous ne considérons pas que tous les documents sur

17 lesquels il a fondé son rapport doivent être versés au dossier. Nous avons

18 présenté à M. Barudzija ce document, il nous a donné son avis.

19 M. le Président: Suivez les indications que nous avons données, sinon nous

20 allons vers l'arrière. Allez-y?

21 M. Stojanovic (interprétation): Monsieur le Président, nous pensons que le

22 témoin expert a expliqué sur quels documents il a appuyé son rapport donc

23 cela suffit à la défense pour le moment.

24 M. le Président: Continuez donc Maître Stojanovic.

25 M. Stojanovic (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

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1 Monsieur le témoin, pourriez-vous situer ces conclusions dans le temps

2 puisque vous avez parlé de deux documents qui vous ont aidé à vous faire

3 un point de vue. Quel est le diagnostic qui a été prononcé le 11 juin 1992

4 et quel est le diagnostic prononcé le 15 juin 1992?

5 M. Barudzija (interprétation): D'après ce que je vois, le "status febrilis

6 et dehidratio", le premier diagnostic a été prononcé le 11 juin 1992.

7 Question: Est-ce que, selon les documents qui vous ont aidé à rendre votre

8 rapport, une lésion quelconque a été constatée sur le corps d'Emsud

9 Bahonjic?

10 Réponse: Non. A la date du 11 juin 1992 rien ne l'indique. Est-ce que par

11 hasard une telle lésion aurait pu être omise ou passer inaperçue, ce qui

12 est toujours possible, je ne sais pas, mais le diagnostic du chirurgien

13 n'est prononcé que la deuxième fois sous le numéro de référence 3230

14 lorsque le patient est envoyé à la radiographie et lorsque le diagnostic

15 prononcé est un "contusio genus", c'est-à-dire une lésion des tissus mous

16 du genou.

17 Question: Donc c'est la deuxième date?

18 Réponse: Oui, la deuxième date.

19 Question: Laquelle?

20 Réponse: Sans doute le 15 juin 1992 mais cette date, je ne la vois pas

21 dans les parties du registre qui m'ont été soumises, pas plus d'ailleurs

22 que pour la première date.

23 Question: Pouvez-vous nous dire quelle est la nature de ces lésions?

24 Réponse: C'est une lésion corporelle sans gravité qui, normalement avec un

25 soutien léger et un bon respect des recommandations du médecin, guérit en

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1 deux à trois semaines. C'est donc une blessure sans gravité qui n'entraîne

2 aucune séquelle permanente à condition que le patient respecte les

3 instructions médicales qu'il a reçues et donc qu'il ne s'active pas encore

4 davantage par la suite car, dans ce cas, il peut y avoir complication,

5 infection et pus.

6 Question: Est-ce qu'une telle blessure aurait pu conduire Emsud Bahonjic à

7 la mort?

8 Réponse: Dans les conditions que je viens de citer, une telle blessure

9 n'aurait aucunement pu déboucher sur la mort du patient car de toute

10 évidence il s'agit d'une blessure légère et superficielle qui quelquefois

11 peut même guérir sans soins médicaux, mais les soins médicaux sont

12 préférables. De toute façon, il s'agit d'une blessure superficielle.

13 Question: A votre avis, puisque vous êtes un membre du corps médical

14 qualifié, ce patient a-t-il été traité par un personnel qualifié?

15 Réponse: Il est stipulé ici qu'il a vu un chirurgien, qu'un bandage

16 fixateur a été placé sur sa blessure et qu'il est rentré chez lui. C'est

17 ce que je lis.

18 Maître Stojanovic (interprétation): Monsieur le Président, nous n'avons

19 plus de questions pour ce témoin. Je vous remercie Monsieur le témoin de

20 l'aide que vous avez apportée.

21 M. le Président: Merci beaucoup Maître Stojanovic. Je crois que l'on ne va

22 pas commencer le contre-interrogatoire pour à peine 5 minutes.

23 Je vois Maître Jovanovic: vous avez des questions?

24 (Interrogatoire principal du témoin, M. Mirko Barudzija, par Me

25 Jovanovic.)

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1 Maître Jovanovic (interprétation): J'aurai besoin de cinq minutes, si vous

2 me les accordez pour deux questions. Merci.

3 Monsieur Barudzija, je m'appelle Zoran Jovanovic, je suis avocat et je

4 défends Mlado Radic de Prijedor. Je vous demanderai de vous remettre en

5 mémoire le mois de mai 1992 et notamment la partie du mois de mai qui a

6 précédé l'arrivée d'un grand nombre de blessés comme vous l'avez vous même

7 déclaré.

8 Dites-moi, je vous prie, quelle était la situation à l'hôpital du point de

9 vue de l'équipement médical, médicaments, anesthésiques?

10 M. Barudzija (interprétation): Eh bien, voyez-vous, nous étions à ce

11 moment-là déjà dans une période de crise au niveau de l'état en ce qui

12 concerne le paiement des salaires, les logements, et toute sorte d'autres

13 domaines et la situation était assez comparable dans notre hôpital.

14 A cette époque-là, nous avions déjà des difficultés assez importantes du

15 point de vue de l'équipement sanitaire et nous avons dû annuler toutes les

16 opérations prévues, en tout cas les remettre à une date ultérieure pour ne

17 traiter que les cas urgents. Et puis, nous manquions de films pour les

18 radiographies.

19 Question: Excusez-moi de vous interrompre: qu'en était-il des

20 anesthésiques?

21 Réponse: Nous devions également conserver les anesthésiques, les garder

22 comme la prunelle de nos yeux pour les cas les plus urgents et tout autre

23 intervention que les interventions urgentes ont été déclarées non

24 souhaitables. Il fallait donc se concentrer sur les urgences qui en fait

25 se multipliaient puisqu'une guerre donne toujours lieu à de très nombreux

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1 cas urgents. Nous avons donc essayé d'économiser nos réserves.

2 Question: Merci.

3 M. le Président: Je vois au compte-rendu que vous n'avez pas d'autres

4 questions Maître Jovanovic. Est-ce cela? Je n'ai pas reçu la traduction en

5 français mais de toute façon c'est pour confirmer: vous n'avez pas d'autre

6 question?

7 Maître Jovanovic (interprétation): C'est exact Monsieur le Président et je

8 vous remercie.

9 Interprète: Nous nous excusons, Monsieur le Président.

10 M. le Président: Est-ce que d'autres conseils ont d'autres questions à

11 poser? Non?

12 Nous n'allons donc pas commencer aujourd'hui le contre-interrogatoire mais

13 nous avons besoin de cinq minutes pour éclaircir la question des experts

14 pour demain.

15 Docteur Barudzija, aujourd'hui nous allons en rester là et demain, vous

16 allez revenir mais, pour l'instant, j'aimerais bien demander à M.

17 l’huissier d'accompagner le Dr Barudzija.

18 M. Barudzija (interprétation): Merci.

19 (Le témoin, M. Mirko Barudzija, est reconduit hors du prétoire.)

20 (Questions relatives à la procédure.)

21 M. le Président: Donc, nous avons ici une petite question. La question de

22 savoir où nous sommes, Maître Stojanovic, par rapport à la présence dans

23 le prétoire des experts Nedopil et Hoff.

24 M. Stojanovic (interprétation): Monsieur le Président, nous sommes prêts à

25 accepter leur rapport en dehors de tout interrogatoire, ils ont été

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1 choisis par le Greffe. Nous avons demandé d'autres experts mais nous

2 constatons qu'ils n'ont pas été acceptés. Nous acceptons donc les rapports

3 de ces experts.

4 Nous estimons qu’après le témoignage du Dr Baridzija, nous n’avons aucun

5 besoin de poser des questions supplémentaires, nous ne connaissons pas

6 leurs adresses. En tout cas, moi je n'ai jamais eu la possibilité d'entrer

7 en contact avec eux. Nous sommes tout à fait prêts à accepter leur rapport

8 en dehors de tout interrogatoire.

9 M. le Président: Madame Somers, je crois que la seule objection, si je

10 vois bien, vous avez fait objection à l'admission de ces rapports parce

11 que la défense n'aurait pas déposé de requête pour admission des rapports

12 ou du rapport. Et donc si le document est admis, vous vous voudriez

13 contre-interroger les experts, mais je voudrais vous demander, je voudrais

14 savoir quelle est votre position si la Chambre vous dit que nous ne

15 pensons pas que ce soit une omission.

16 Mais cette omission est vraiment importante car à la fin la défense a

17 demandé aux termes de l'Article 74 bis des examens médicaux. La Chambre a

18 ordonné ces examens médicaux. La Chambre pense que c'est vrai que la

19 défense voudrait en principe avoir ces rapports des examens qu'il a

20 demandé de verser au dossier.

21 Donc ma question est de savoir si le fait de pas avoir déposé une requête

22 pour admission des rapports était la seule objection de votre côté ou si

23 vous avez d'autres objections. En tous les cas, quelle est votre position

24 maintenant par rapport à l'admission des rapports?

25 Mme Somers (interprétation): Monsieur le Président, un certain nombre de

Page 10937

1 points sont évoqués dans le rapport que l'accusation souhaiterait étayer

2 par des éléments de preuves complémentaires. Certains éléments évoqués par

3 la défense de Zigic n'ont pas été évoqués au début de la présentation des

4 éléments de preuve de la défense. Donc, certaines questions ont été

5 abordées avec un accent différent parce que je suppose que la consultation

6 d'un médecin allait être demandée par la défense.

7 L'accusation s'est appuyée, en toute bonne foi, sur ce que la défense

8 avait dit quand au témoin qu'elle avait cité à la barre. Vous savez qu’il

9 y a eu des révisions multiples de la liste des témoins et ces experts bien

10 entendu ont été choisis par le Greffe et sont reconnus comme témoins

11 experts mais il y a un certain nombre de points dans ces rapports qui ont

12 besoin d'être éclaircis. Je pense qu'il pourrait être bon pour la Chambre

13 de pouvoir entendre un certain nombre de questions évoquées par le médecin

14 et le patient.

15 Si la Chambre, en raison des contraintes qui pèsent sur elle -je les

16 comprends très bien, nous les subissons tous-, décide d’admettre

17 simplement le rapport, nous demanderions d'avoir la possibilité

18 d'interroger le Dr Nedopil. Je pense l'un des 2 experts suffira, nous

19 aimerions avoir la possibilité d'interroger ce témoin à la fin de la

20 présentation des éléments de preuve de la défense mais sur le temps de la

21 défense. Donc ce serait simplement pour quelques questions peu nombreuses

22 si la Chambre décide d'admettre les documents. Si notre requête ne devait

23 pas être acceptée, je pense que les documents ne serviraient pas

24 totalement leur objectif. Rien à voir avec la qualification des experts,

25 je le répète.

Page 10938

1 M. le Président: Maître Stojanovic, avez-vous un commentaire sur cette

2 suggestion de Madame Somers?

3 M. le Président: Je n'ai pas de traduction.

4 Interprète: Maître Stojanovic n’a pas encore parlé, Monsieur le Président.

5 M. Stojanovic (interprétation): Je vous prie de m'excuser Monsieur le

6 Président. Le 30 mars, nous avons remis au Greffe une requête destinée à

7 obtenir le versement au dossier du rapport des experts, et qu'en

8 application de l'Article 94 bis du Règlement cet élément de preuve soit

9 communiqué à l'accusation. Nous n'avons donc pris aucun retard par rapport

10 à nos obligations et d’ailleurs j’ai obtenu une réponse me disant que tout

11 cela avait déjà été fait.

12 M. le Président: Excusez-moi. Je vous ai donné la parole pour que vous

13 puissiez vous prononcer sur la suggestion de Mme Somers: si la Chambre

14 décide d'admettre le rapport, elle devait avoir au moins 20 minutes pour

15 poser quelques questions à un seul des experts à la fin de la présentation

16 des moyens de preuve à décharge.

17 C'est cette suggestion que j'aimerais bien que vous considériez. Vous êtes

18 d'accord? Si vous n'êtes pas d'accord, vous n'avez pas d'opinion?

19 M. Stojanovic (interprétation): Monsieur le Président, l'accusation est en

20 droit de présenter une telle requête, mais je crois que l'accusation ne

21 devrait pas pouvoir choisir parce que le Dr Hoffman est plus près

22 géographiquement puisque son domicile est à Munich.

23 Moi, je pense que ce qui serait le plus approprié ce serait de citer à la

24 barre les deux experts et de permettre aux questions d'être posées mais

25 nous ne mettons pas de bémol aux droits de l'accusation.

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1 M. le Président: Oui et le moment de le faire?

2 M. Stojanovic (interprétation): Monsieur le Président.

3 M. le Président: C'est très simple, si vous me dites que demain ou après-

4 demain ces deux experts sont là. Pas de problème. Vous venez de me dire

5 que jamais vous avez contacté ces personnes. Je crois donc que c'est très

6 difficile d'obtenir sa présence demain ou après-demain.

7 C'est pour cela, dites-nous, dites-moi, le temps, est-ce que vous êtes

8 d'accord avec la suggestion de Mme Somers notamment pour entendre ces

9 experts à la fin de la présentation des moyens à décharge?

10 M. Stojanovic (interprétation): Absolument, absolument, Monsieur le

11 Président.

12 M. le Président: Madame la Juge Wald me fait remarquer que vous devez

13 faire toutes les choses pour les amener parce qu'ils sont présentés par

14 vous. Est-ce clair pour vous? Ils ne sont pas des témoins du Greffier, ce

15 sont des témoins de la défense de Zigic. Est-ce que vous comprenez que

16 vous devez vous assurer pour faire venir les experts?

17 M. Stojanovic (interprétation): Monsieur le Président, je crois que c'est

18 clair. Bien que nous nous ayons demandé des experts tout à fait

19 différents, nous avons obtenu ces experts, cela nous satisfait. Nous

20 essaierons de le faire avec l'aide du Greffe, bien entendu.

21 M. le Président: Maître Stojanovic, vous aviez demandé les examens

22 médicaux. D'accord. Selon l'Article 74 bis, vous connaissez bien cette

23 règle. D'accord, très bien.

24 Nous allons voir parce que la conséquence, Maître Stojanovic, si vous nous

25 présentez les témoins, il n'y a pas de rapport. C'est dommage parce que le

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1 Tribunal a dépensé l'argent. Mais sinon voyez.

2 D'accord, pas de problème. Nous allons décider de cette question

3 maintenant.

4 (Les Juges se concertent sur le siège.)

5 La Chambre rend sa décision orale et la seule concernant l'admission des

6 rapports d'expertise de la défense de M. Zigic. Vous savez la défense de

7 l'accusé M. Zigic a déposé cinq rapports d'expert. Le Procureur a répondu

8 en date du 12 avril 2001, s'opposant à l'admission des cinq rapports pour

9 les raisons que je ne vais pas répéter ici que vous connaissez bien.

10 La question du rapport du Dr Barudzija est déjà décidée et on ne va pas la

11 considérer. Les rapports au sujet du rapport de M. Nedopil et M. Hoff, la

12 Chambre note que ce rapport a été ordonné par elle suite à la demande de

13 M. Zigic aux termes de l'Article 74 bis du Règlement.

14 Après avoir discuté aujourd'hui, tout à l'heure de cette question, la

15 Chambre décide de garder pour la défense de M. Zigic la possibilité de

16 présenter ces deux témoins experts à la fin de la présentation des moyens

17 à décharge avec la possibilité pour le Procureur de contre-interroger:

18 chacun ou l'un des deux, 20 minutes.

19 Au sujet des rapports de MM. Aleksic et Cejevic, la Chambre note les

20 objections du Procureur ainsi que le fait que les experts seront appelés à

21 témoigner devant la Chambre. La Chambre estime que le Procureur doit avoir

22 l'opportunité de faire valoir ses objections au rapport, y compris la

23 question de conduite des experts durant son contre-interrogatoire.

24 La Chambre admet donc les rapports écrits de M. Aleksic et Cejevic, ces

25 deux experts seront interrogés par la défense en vue de compléter leur

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1 rapport pendant 45 minutes par rapport.

2 Le Procureur bénéficiera du même temps pour contre-interroger chaque

3 expert, et nous procédons de cette façon parce que la défense a voulu

4 interroger aussi les témoins. Je crois qu'avec cette décision la question

5 a été résolue, mais je vois néanmoins Mme Somers debout.

6 Madame Somers?

7 Mme Somers (interprétation): Merci, Monsieur le Président, un

8 éclaircissement simplement. Monsieur Aleksic avait deux rapports. La

9 Chambre admet-elle les deux rapports de M. Aleksic?

10 M. le Président: Oui, les deux rapports.

11 Pour aujourd'hui, je crois que cela suffit et nous avons quand même le

12 cadre pour demain. N'est-ce pas, Maître Stojanovic?

13 C'est la décision qui vous semble nécessaire.

14 M. Stojanovic (interprétation): Oui, Monsieur le Président. Oui, merci.

15 M. le Président: Demain à 9 h 20, nous serons là encore une fois.

16 (L'audience est levée à 15 h 12.)

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