Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mardi 5 juin 2007

2 [Audience d'appel]

3 [Audience publique]

4 [L'appelant est introduit dans le prétoire]

5 --- L'audience est ouverte à 14 heures 18.

6 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Bonjour tout le monde dans le

7 prétoire.

8 Monsieur le Greffier, pouvez-vous appeler l'affaire s'il vous plaît.

9 M. LE GREFFIERE : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Il

10 s'agit de l'affaire IT-03-66-A, le Procureur contre Fatmir Limaj, Haradin

11 Bala et Isak Musliu.

12 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] -- et de suivre l'audience par le

13 truchement de l'interprétation ?

14 L'APPELANT BALA : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

15 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je vous remercie.

16 Je souhaiterais que l'Accusation se présente.

17 Je m'excuse, Monsieur Bala, vous pouvez prendre place.

18 Mme BRADY : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Je suis Helen

19 Brady au nom de l'Accusation. J'ai avec moi Shelagh McCall, Stephan Wirth,

20 Kristina Carey ainsi que Katharina Margetts, ainsi que notre commis aux

21 affaires Sebastiaan van Hooydonk. Nous aurons également demain dans l'appel

22 pour M. Bala et M. Musliu et

23 M. Limaj, M. Steven Wirth, qui ne peut pas être avec nous aujourd'hui.

24 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je vous remercie.

25 Je souhaite que la Défense de M. Bala se présente.

26 M. GUY-SMITH : [interprétation] Bonjour. Je me présente.

27 Me Gregor Guy-Smith ainsi que Me Richard Harvey. Nous sommes aidés par nos

28 assistants juridiques, M. Willemsen ainsi que sa collègue.

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1 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je vous remercie.

2 Maître Mansfield, veuillez vous présenter.

3 M. MANSFIELD : [interprétation] Je vous remercie. Bonjour. Je m'appelle Me

4 Michael Mansfield, et je représente l'intérêt de Fatmir Limaj, avec notre

5 co-conseil Karim Khan. Nous sommes aidés par notre assistante juridique

6 Michelle Butler qui est assise derrière nous aujourd'hui.

7 M. LE JUGE POCAR: [interprétation] Je vous remercie.

8 Et pour M. Musliu.

9 M. TOPOLSKI : [interprétation] Je vous remercie. Je suis

10 Me Michael Topolski et je suis aidé de M. Steven Powles ainsi que Mlle

11 Butler.

12 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je vous remercie.

13 Je note que M. Limaj et M. Musliu ne sont pas présents. La Chambre

14 d'appel avait indiqué le 10 mai 2007 que s'ils décidaient d'exercer leur

15 droit à être présents pendant cette audience relative à l'appel, tel que

16 prévu par l'article 21(4)(d) du Statut, ils auraient dû communiquer leur

17 intention par écrit au plus tard le

18 22 mai 2007 pour que des mesures appropriées puissent être prises. Je

19 remarque et je note aux fins du compte rendu d'audience, que ni

20 M. Limaj ni M. Musliu ont informé la Chambre d'appel de cette intention.

21 Il s'agit de l'audience consacrée à l'appel dans l'affaire le

22 Procureur contre Fatmir Limaj, Haradinaj Bala et Isak Musliu. J'aimerais

23 brièvement résumer l'appel dont est saisie la Chambre d'appel ainsi que la

24 procédure que nous allons suivre aujourd'hui. Cet appel a trait à des

25 crimes qui ont été commis entre le mois de mai jusqu'au 26 juillet 1998,

26 dans le camp et la prison de Lapusnik/Llapushnik ainsi que dans les

27 montagnes Berisa/Berisha, qui se trouvent situées au centre du Kosovo. Il

28 s'agit du rôle qui aurait été joué lors de ces événements par Fatmir Limaj,

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1 Haradinaj Bala et Isak Musliu, qui étaient membres de l'Armée de libération

2 du Kosovo à l'époque.

3 Haradin Bala et l'Accusation interjettent appel du jugement rendu le 30

4 novembre 2005 par la Chambre de première instance numéro II, composée de M.

5 le Président Parker et des Juges Thelin et Van Den Wyngaert. La Chambre de

6 première instance a considéré que Fatmir Limaj et Isak Musliu n'étaient pas

7 coupables de tous les chefs d'inculpation incriminés dans l'acte

8 d'accusation et a considéré Haradin Bala coupable des chefs d'accusation

9 ayant consisté à aider et inciter à commettre la torture, étant considérés

10 comme une violation des lois et coutumes de la guerre. Il s'agit du chef

11 numéro 4. Puis, nous avons le chef numéro 6, à savoir pour avoir commis,

12 aidé et incité à commettre des traitements cruels, considérés comme une

13 violation des droits et coutumes de la guerre. Nous avons également le chef

14 d'inculpation numéro 10 pour avoir commis un meurtre ou assassinat, ce qui

15 représente une violation des lois et coutumes de la guerre.

16 La Chambre de première instance a condamné Haradin Bala à une peine

17 unique d'emprisonnement de 13 ans. L'Accusation a interjeté appel des

18 acquittements de Fatmir Limaj et d'Isak Musliu ainsi que de certaines

19 parties du jugement et de la peine octroyée à Haradin Bala.

20 Haradin Bala a déposé son acte d'appel le 30 décembre 2005, et a exposé

21 neuf motifs d'appel. Le 9 mai 2006, il a déposé son mémoire d'appel ainsi

22 qu'une notice aux fins de retrait du troisième, cinquième, septième et

23 neuvième motif d'appel. L'Accusation a déposé son mémoire de l'intimé le 19

24 juin 2006. M. Bala a déposé le

25 4 juillet 2006 son mémoire en réplique. Le 10 juillet 2006, l'Accusation a

26 déposé un corrigendum à son mémoire de l'intimé, et dans ce corrigendum,

27 plusieurs erreurs et plusieurs coquilles ont été rectifiées.

28 L'Accusation a déposé son acte d'appel le 30 décembre 2005, ainsi que son

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1 mémoire d'appel le 15 mars 2006. Le 27 mars 2006, l'Accusation a déposé une

2 requête aux fins d'une variante de l'acte d'appel, conformément à l'article

3 108. Fatmir Limaj et Isak Musliu ont déposé tous les deux leurs mémoires de

4 l'intimé le 2 mai 2006, et Haradin Bala a déposé son mémoire en réplique le

5 8 mai 2006. L'Accusation a déposé son mémoire en réplique le 23 mai 2006.

6 Je vais maintenant brièvement résumer les motifs d'appel.

7 Haradin Bala a évoqué cinq moyens d'appel. Par le premier moyen

8 d'appel, Haradin Bala allègue que la Chambre de première instance l'a

9 identifié de façon inexacte comme étant la personne appelée "Shala," un

10 gardien de prison au camp de Lapusnik/Llapushnik.

11 Par son deuxième moyen d'appel, Haradin Bala indique que la Chambre de

12 première instance a commis une erreur un indiquant qu'il avait été présent

13 et qu'il avait pertinemment participé aux meurtres commis dans les

14 montagnes Berisa/Berisha.

15 Par son quatrième moyen d'appel, Haradin Bala avance que la Chambre de

16 première instance a estimé de façon erronée qu'il avait fait subir un

17 traitement cruel au Témoin L-12.

18 Par son sixième moyen d'appel, Haradin Bala indique quelle est sa défense

19 par rapport à son alibi, qui à son avis, a été de façon erronée réfuté par

20 la Chambre de première instance.

21 Finalement, par le huitième moyen d'appel, Haradin Bala avance que la

22 Chambre de première instance a estimé que les Témoins L-04 et L-06 étaient

23 crédibles, et ce, de façon erronée, ce qui a entraîné des erreurs

24 factuelles ainsi qu'un déni de justice.

25 Pour ce qui est de Haradin Bala, l'Accusation a présenté deux moyens

26 d'appel. Par son premier moyen d'appel, l'Accusation conteste les

27 conclusions et constatations de la Chambre de première instance, eu égard à

28 l'existence d'une entreprise criminelle commune dont le but était de faire

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1 subir des sévices aux civils serbes et aux Albanais du Kosovo perçus comme

2 des collaborateurs dans la prison et le camp de Lapusnik.

3 A titre subsidiaire, par le deuxième motif d'appel, l'Accusation indique

4 que la Chambre de première instance a commis une erreur en exerçant son

5 pouvoir d'appréciation et en imposant une peine de 13 ans d'emprisonnement.

6 L'Accusation évoque trois moyens d'appel eu égard aux acquittements

7 de Fatmir Limaj et Isak Musliu.

8 Par son premier motif d'appel, l'Accusation conteste le fait que la

9 Chambre de première instance a utilisé la norme de la preuve au-delà de

10 tout doute raisonnable eu égard à la participation personnelle de Fatmir

11 Limaj et d'Isak Musliu dans le camp et la prison de Lapusnik. L'Accusation

12 avance notamment que la Chambre de première instance a adopté à titre

13 erroné une approche parcellaire pour apprécier, évaluer les moyens de

14 preuve, et a utilisé et appliqué la norme de la preuve à des faits

15 individuels qui ne devaient pas être prouvés au-delà de tout doute

16 raisonnable. De surcroît, l'Accusation avance que la Chambre de première

17 instance a utilisé une norme de la preuve qui n'était pas au-delà de tout

18 doute raisonnable, mais plutôt une norme qui a accepté n'importe quel

19 doute, notamment des erreurs qui ne se fondaient pas sur des moyens de

20 preuve, sur la logique et sur le bon sens.

21 Par le deuxième moyen d'appel, L'Accusation, de surcroît, conteste

22 l'utilisation de la norme de la preuve au-delà de tout doute raisonnable eu

23 égard à la position de commandement et de contrôle de Fatmir Limaj et

24 d'Isak Musliu, ce qui incluait d'ailleurs le commandement par rapport aux

25 soldats de l'UCK qui se trouvaient dans cette prison de Lapusnik.

26 Puis finalement, par le troisième motif d'appel, l'Accusation répète

27 qu'elle conteste les conclusions dégagées par la Chambre de première

28 instance eu égard à l'existence d'une entreprise criminelle commune, dont

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1 le but était de faire subir des sévices aux civils serbes et aux Albanais

2 du Kosovo considérés comme des collaborateurs dans le camp de Lapusnik.

3 Pendant cette audience consacrée à l'appel, les conseils peuvent

4 présenter les motifs d'appel dans l'ordre qu'ils considéreront le plus

5 approprié pour la présentation de leurs moyens, mais je les exhorterais à

6 ne pas répéter verbatim ce qui se trouve déjà dans leurs mémoires.

7 J'aimerais également remarquer que par le truchement d'une lettre du 30 mai

8 2007, la Chambre d'appel a invité les parties à aborder des questions

9 précises pendant cette audience, des questions qui ne devront pas être

10 réitérées. J'aimerais insister sur le fait que cela a été indiqué sans pour

11 autant porter préjudice à toute question que les parties ou la Chambre

12 d'appel souhaitera soulever, et ne constitue pas une expression de l'avis

13 du bien-fondé de l'appel.

14 J'aimerais maintenant rappeler les critères applicables aux erreurs de fait

15 et de droit alléguées durant l'appel. Cet appel n'est pas un procès de

16 novo, et l'appelant ne doit pas se contenter de répéter ses moyens de

17 preuve déjà avancés en première instance. Au-delà de cela, conformément à

18 l'article 25 du Statut, l'appelant doit limiter ses arguments à des erreurs

19 alléguées de droit qui annulent la décision, ou des erreurs alléguées de

20 fait qui ont entraîné un déni de justice. De surcroît, il faut rappeler que

21 l'appelant a pour obligation de fournir des références précises aux idées

22 étayant ses arguments pendant l'appel.

23 Cette audience va se dérouler conformément à l'ordonnance portant

24 calendrier, présentée par la Chambre d'appel le 10 mai 2007. Le conseil

25 pour Haradin Bala va présenter ses arguments cet après-midi pendant une

26 heure et demie. Il y aura une demi-heure de pause, puis l'Accusation

27 apportera sa réponse pendant une heure et demie, à la suite de quoi le

28 conseil de M. Haradin Bala pourra répondre pendant une demi-heure.

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1 L'audience reprendra demain avec l'appel de l'Accusation, et les réponses

2 des conseils pour Fatmir Limaj et Isak Musliu, et ce, conformément à

3 l'ordonnance portant calendrier émise le 10 mai 2007.

4 Il serait extrêmement utile à la Chambre d'appel que les parties

5 puissent présenter leurs arguments de façon précise et claire. J'aimerais

6 rappeler aux parties que les Juges peuvent les interrompre à tout moment

7 pour leur poser des questions, ou qu'ils peuvent préférer poser leurs

8 questions à la fin de chaque présentation de la part des parties. Pour ce

9 qui est de la procédure d'aujourd'hui, j'aimerais maintenant inviter le

10 conseil de M. Bala à présenter ses arguments afin d'étayer son appel.

11 Je vous en prie, Maître Guy-Smith, vous avez la parole.

12 M. GUY-SMITH : [interprétation] Je serais tout à fait heureux de le faire,

13 Monsieur le Président, mais avant de le faire je vous dirais que j'ai un

14 petit problème technique, car je n'ai pas de compte rendu d'audience sur

15 nom écran. J'ai écouté, bien entendu, ce que vous avez dit, mais je n'ai

16 pas été en mesure de lire sur mon écran vos propos.

17 M. LE JUGE POCAR: [interprétation] Est-ce que nous pouvons peut-être régler

18 ce problème ?

19 Est-ce que le problème a été réglé ?

20 M. GUY-SMITH : [interprétation] Oui, tout à fait.

21 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Vous avez la parole.

22 L'INTERPRÈTE : [hors micro]

23 M. GUY-SMITH : [interprétation] Il faut savoir que la cheville ouvrière des

24 arguments de l'Accusation présentés contre Haradin Bala portent sur le

25 problème de l'identification, et c'est par cela que je commencerai. Nous

26 connaissons tous fort bien les caprices de l'identification. Il faut savoir

27 que les annales du droit pénal sont truffées de cas d'identification

28 erronée. Ce Tribunal --

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1 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Maître Guy-Smith, il y a un problème

2 car les interprètes ne vous entendent pas.

3 M. GUY-SMITH : [interprétation] Il semblerait que les problèmes techniques

4 me poursuivent d'un prétoire à l'autre, mais je suis sûr que nous allons

5 finir par régler ce genre de problème.

6 Dans l'affaire Kunarac, ce Tribunal a reconnu que les éléments de preuve

7 relatifs à l'identification sont par nature très incertains. Il faut faire

8 preuve de circonspection lorsque l'on admet, accepte des moyens de preuve

9 visant l'identification, parce que un témoin tout à fait honnête peut se

10 tromper et se fourvoyer en matière d'identification.

11 Et avant d'aller de l'avant, j'aimerais vous poser la question

12 suivante : s'il n'y avait pas eu de moyen de preuve portant sur une

13 identification à partir de photos et si le seul moyen de preuve présenté à

14 la Chambre de première instance à l'encontre de Haradin Bala avait été un

15 certain nombre de témoins qui auraient identifié un auteur de crimes comme

16 ayant un âge compris entre la quarantaine et cinquantaine, ayant des

17 cheveux noirs, une moustache et dont la description ressemblait

18 généralement à la description de Haradin Bala, l'on convient de se demander

19 si la Chambre de première instance aurait conclu à sa condamnation ?

20 C'est une description qui, d'ailleurs, ressemble à 10 ou 15 % de la

21 population du Kosovo. Je le dis en guise d'observation. Cela ne fait pas

22 partie du dossier de l'affaire et je ne le revendique pas en tant que tel.

23 Mais s'il l'avait fait, si la Chambre de première instance en avait

24 conclu à cette condamnation, est-ce que cette Chambre aurait confirmé cette

25 condamnation ? Car, en fait, l'identification faite par des témoins

26 oculaires n'a pas été seulement au cœur de ce procès, mais a été le seul

27 moyen de preuve, en un sens, qui a permis d'établir des liens entre lui et

28 les chefs d'inculpation pour lesquels il a été condamné. Car il n'y a pas

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1 d'empreintes digitales, il n'y a pas d'empreintes de pieds, il n'y a pas de

2 journal de bord, il n'y a pas de registre, il n'y a pas de vêtements, il

3 n'y a pas de photos hormis -- il n'y a pas d'autres photos ou de moyens de

4 preuve objectifs qui permettent d'identifier Haradin Bala. Ne l'oublions

5 pas, lorsque nous allons aborder la suite qui a des liens avec

6 l'identification de M. Bala.

7 La Chambre de première instance s'est fondée sur des éléments de

8 preuve de sept témoins et qui ont permis de déterminer que Haradin Bala

9 était la même personne que le gardien appelé Shala dans ce camp de

10 prisonniers. Il me semble qu'il s'agit du paragraphe 602 [comme interprété]

11 du jugement. Ces témoins ont étaient Vojko Bakrac, Ivan Bakrac, L-04, L-12

12 et L-96, et L-07. Il y a également la question relative à un autre témoin

13 qui était le Témoin L-64. Toutefois, L-64 a donné un avis différent que

14 nous aborderons de manière différente, ou de manière légèrement différente.

15 Parmi ces témoins, deux témoins, L-96 et Ivan Bakrac ont vu des

16 séries de photos et ils ont identifié parmi ces photos Haradin Bala. Pour

17 ce qui est du Témoin L-96, la Chambre de première instance a considéré en

18 règle générale que ces moyens de preuve ou les moyens de preuve qu'il

19 présentait n'étaient pas suffisants et pouvaient entraîner le doute si ces

20 moyens de preuve étaient considérés de façon isolée et nécessitaient donc

21 d'être corroborés avant de pouvoir les utiliser. Eu égard à Ivan Bakrac, la

22 Chambre de première instance a estimé - et ils se basaient sur la pièce à

23 conviction 83, qui d'ailleurs, va être examinée aujourd'hui, donc la

24 Chambre de première instance, disais-je, a utilisé cette pièce 83 qui était

25 d'ailleurs une série de photos et qui montraient que la ressemblance avec

26 Haradin Bala était bonne. Ils ont estimé que d'identification d'Ivan Bakrac

27 était telle qu'elle pouvait être acceptée. Toutefois, en faisant cavalier

28 seul, en quelque sorte, la Chambre de première instance n'était pas en

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1 mesure de considérer que Haradin Bala avait été identifié comme étant Shala

2 le gardien de prison.

3 Trois de ces témoins ont regardé des séries de photos et n'ont pas

4 été à même de l'identifier. Parmi ces trois témoins, un témoin, le père

5 d'Ivan Bakrac, Vojko Bakrac, n'a pu identifier personne à partir de cette

6 série de photos. Lors du jugement, il a été indiqué que potentiellement

7 cela était le résultat de la qualité médiocre de la reproduction

8 photographique. Je pense que nous pouvons dire en toute légitimité que dans

9 leur mémoire de l'intimé, l'Accusation - et il s'agit des paragraphes 1.4 à

10 1.43 - indique que les photographies qui faisaient partie de cette série de

11 photos qui ont été montrées à Vojko Bakrac étaient exactement les mêmes que

12 les photographies qui ont été montrées à Ivan Bakrac.

13 [Le conseil de la Défense se concerte]

14 M. GUY-SMITH : [interprétation] Et je me demande si nous avons des

15 exemplaires de cela. J'indiquerais à l'intention de la Chambre d'appel que

16 je dispose d'exemplaires de ces séries de photos.

17 Je renvoie la Chambre d'appel à l'intercalaire 3, c'est là que vous avez

18 cette série de photos. Vous verrez qu'il y a une certaine ressemblance avec

19 Haradin Bala. Est-ce que l'Accusation a reçu cette série de photos ?

20 Excusez-moi, Madame Brady.

21 Comme je le disais, on voit une certaine ressemblance avec

22 M. Bala à la photo numéro 8. Si la Chambre peut regarder ces photos -- je

23 pense que là, c'est l'Accusation qui nous communique ces documents.

24 Est-ce que la Chambre peut examiner la série de photos qui se trouve

25 à l'intercalaire. Ce faisant, vous verrez que M. Bala se trouve à la place

26 numéro 4, et c'est la série de photos qui avait été soumise à la Chambre et

27 dont celle-ci disait qu'elle avait certaines difficultés à cause de la

28 mauvaise qualité des photos. Ceci soulève une autre question, question que

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1 j'aborderai lorsque je parlerai du renversement de l'obligation de la

2 preuve, dans quelques instants, afin qu'on ait une certaine précision

3 s'agissant des photos qui ont été montrées à Bakrac ainsi qu'à son père.

4 Mais je pense qu'il est peut-être utile de voir ces photos.

5 Pour ce qui est des photos montrées à L-04 et à L-12 - moi, j'ai

6 beaucoup de difficulté.

7 Pour ce qui est des photos montrées à L-04 et à L-12, elles sont

8 perdues ces photos, on ne les a plus. Il était reconnu et convenu qu'on a

9 montré à ces personnes des séries de photos qui contiennent la photo de M.

10 Bala. Il n'y a pas eu identifications.

11 Qu'est-ce que ceci fait d'emblée ? Ceci modifie l'analyse effectuée

12 par la Chambre de première instance. Elle ne s'appuie plus sur sept témoins

13 ayant identifié M. Haradin Bala, mais sur quatre témoins aussitôt. C'est ce

14 qui se passe. Qu'est-ce que la Chambre fait et où affirmons-nous qu'il y a

15 une erreur de fond, une erreur matérielle, une erreur en droit. C'est que

16 s'agissant de l'erreur en matière d'identification évoquée au paragraphe

17 627 du jugement, la Chambre a dit qu'elle doit : "Partir du postulat selon

18 lequel il y avait suffisamment de ressemblance dans les photos, photos qui

19 étaient suffisamment bonne qualité que pour permettre l'identification."

20 Cette déclaration en tant que telle, en soi, lorsqu'on dit que ceci est une

21 base suffisante est rassurante. Mais ce libellé est un libellé qui

22 porterait à croire que la base d'appui est telle que, comme il n'y a pas eu

23 possibilité d'identification et qu'il y a eu, en fait, identification

24 négative, la Chambre doit accorder un poids certain au fait qu'il n'y a pas

25 eu possibilité d'identification. Mais ce n'est pas le cas. La Chambre,

26 lorsqu'elle a décidé du poids à accorder à cette erreur en matière

27 d'identification, a dit que cet échec était peut-être indiqué par d'autres

28 facteurs tels que l'absence d'incertitude et le fait de faire une erreur en

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1 matière d'identité sur un innocent. Ce libellé, vous le retrouverez au

2 jugement au paragraphe 627.

3 Sans aller plus loin pour le moment, s'agissant de la question de

4 l'identification négative ou par défaut, lorsqu'on a décidé de n'accorder

5 aucun poids à cet élément, la Chambre de première instance a, ce faisant,

6 déplacé le fardeau de la preuve. C'était désormais la Défense qui devait

7 apporter la preuve. Elle a ainsi mis en place une situation par laquelle

8 ces identifications négatives - et ceci a été reconnu, la décision en droit

9 le reconnaît - sont tout aussi importantes qu'une identification positive,

10 mais ici nous avons deux raisons qui sont chacune aussi plausibles pour

11 l'existence d'une identification négative. On n'a pas reconnu Bala parce

12 que ce n'était pas lui tout simplement; l'autre c'était, comme la Chambre

13 de première instance a dit, c'est que comme on craignait de faire une

14 erreur sur l'identité. Le fait de ne pas avoir utilisé cet élément qui est

15 bénéfique en droit au niveau des circonstances atténuantes en cette

16 instance.

17 Malheureusement, cette erreur a été aggravée. Elle a été aggravée par

18 le fait qu'on a autorisé des témoins à identifier

19 M. Bala dans le prétoire. Ce genre d'identifications dans un prétoire a été

20 utilisé eu égard aux témoins dont je viens de parler. Je viens de parler

21 des témoins L-04 et L-12. Ce qui veut dire qu'en fin de compte, la Chambre

22 de première instance en est arrivée à une conclusion, une situation, où

23 elle s'est appuyée dans une certaine mesure, même si c'est dans une mesure

24 limitée, même si nous ne sommes pas sûrs, s'est appuyée sur

25 l'identification dans le prétoire pour statuer et se prononcer sur la

26 question de savoir si M. Bala avait effectivement participé à ces

27 agissements et ainsi se prononcer sur sa culpabilité.

28 A cet égard, on a l'affaire le Procureur contre Kamuhanda. Là, nous

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1 avons un arrêt, notamment c'est au paragraphe 243, qui précise qu'il faut

2 rejeter ou désapprouver l'utilisation d'identifications dans le prétoire,

3 que c'est en fait une erreur. L'Accusation le reconnaît dans sa réponse au

4 paragraphe 1.4, à savoir que la Chambre a eu tort de s'appuyer sur ce genre

5 d'identifications. Elle renforce l'erreur en disant que même si la Chambre

6 de première instance a accordé un certain poids, même si c'était un poids

7 minime, sur l'identification en prétoire, une telle erreur n'invalide pas

8 la décision.

9 Quelle est la situation ? Puisque la condamnation de M. Bala s'appuie sur

10 identification faite par sept individus séparés, mais sur ces sept

11 individus, nous avons trois qui doivent être repoussés, déboutés par

12 décision en droit par ce Tribunal. Ce que nous faisons valoir c'est qu'à ce

13 stade de la procédure, le fait de s'appuyer sur ces identifications ne

14 représentait pas une erreur, et le fait qu'on ait dit que ceci n'invalide

15 pas la décision du droit, à notre avis, ceci est une erreur de logique et

16 intervient pour dire qu'il y a eu erreur judiciaire.

17 Qu'est-ce qui s'est passé - et je tiens compte de ce que vous avez dit.

18 Vous avez dit qu'il ne nous fallait pas répéter tout ce que nous avons dit

19 dans nos écritures - que s'est-il ici passé. Il y a eu une série d'erreurs

20 individuelles en matière d'application qui ont été façonnées ensemble pour

21 décider qu'elles entraînaient condamnation. Et je pense que ce sera un peu

22 comme si - bien sûr, on peut prendre toute une série de métaphores, mais je

23 pense qu'il y en a une que je préfère pour le moment, puisque je vis à La

24 Haye où il y a beaucoup de maisons de brique - si on devait construire une

25 mur sans mortier, ce mur ne tiendrait pas debout. La faiblesse du mur est

26 provoquée directement par le fait qu'il n'y a pas de liant, ce qui est

27 nécessaire pour qu'on soit à l'aise et qu'on se sente en sécurité

28 s'agissant de la solidité du mur. Je rapporte la métaphore à une

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1 identification. Bien sûr, on peut construire un mur très haut, mais au bas

2 du mur, et si on s'appuie sur ce mur, vous verrez, il va tomber.

3 Je ne me livre pas et je n'incite pas la Chambre à se livrer à un jeu pour

4 savoir combien il peut y avoir d'identifications positives ou négatives.

5 Mais quand on regarde ce qui s'est passé, franchement, honnêtement, la

6 Chambre devrait avoir des doutes, et des doutes certains sur la faculté

7 qu'il y a à utiliser ces identifications pour conclure au fait que M. Bala

8 était bien le gardien de cette prison, connu sous le nom de Shala.

9 On peut s'appuyer en partie sur le fait qu'il a un nom, son nom, et

10 qu'il est aussi surnommé Shala. Pendant le procès, des éléments de preuve

11 sont venus nous dire qu'il y avait quelqu'un d'autre qui portait ce même

12 nom. Il est reconnu, au moment même où je vous parle, que cette personne

13 avait une stature, un aspect très différent de celui de M. Haradin Bala.

14 Mais le fait qu'ils aient le même surnom, et si vous assortissez ceux-ci

15 aux différents éléments de la description que je vous ai fait au départ,

16 dans cette équation, on n'a pas nécessairement la somme, la conclusion qu'a

17 tirée la Chambre de première instance.

18 C'est très important, et c'est peut-être là qu'il y a une différence

19 nette, pas seulement au niveau de l'opinion, mais de l'avis quant à la

20 façon dont les éléments de preuve ont été analysés. La présomption

21 d'innocence, elle existe, elle exige, c'est qu'il faut apporter la preuve

22 au-delà de tout doute raisonnable. La Chambre d'appel dans l'arrêt

23 Ntagerura, Bagambiki et Imanishimwe a abordé cette question. Si des faits

24 qui sont essentiels pour une décision de culpabilité nonobstant l'appui

25 d'autres faits, ceci va semer un doute dans l'esprit des Juges de la

26 Chambre de première instance qui vont se demander si la preuve a

27 véritablement été abordée au-delà de tout doute raisonnable. S'il y a un

28 lien qui n'est pas prouvé au-delà de tout doute raisonnable, la Chambre ne

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1 va pas conclure à la culpabilité.

2 On affirme qu'ici il y a plusieurs liens dans le cadre de

3 l'identification de M. Bala qui ne tiennent pas. D'abord parce qu'il y a

4 trois de ces liens qui sont négatifs, et s'agissant de l'identification en

5 prétoire, ce sont des moyens qui sont inadmissibles en droit, si l'ont veut

6 se prononcer sur l'identité de l'accusé.

7 Avant de poursuivre - et je ne sais pas si votre silence signifie que

8 vous avez ou pas des questions sur l'identification, mais je pense que

9 c'est le cas - si vous avez des questions portant sur l'identification, je

10 vous le demande maintenant, sinon je vais aborder un autre sujet, je peux

11 passer à un autre sujet.

12 M. GUY-SMITH : [interprétation] Les éléments de preuve présentés au

13 procès en ce qui concerne l'état de santé de M. Bala, ces éléments de

14 preuve ne sont pas mis en doute, et c'est important de le rappeler. Il n'y

15 a pas eu de contestation, ils sont incontestés. La Chambre de première

16 instance a été saisie d'éléments venant non pas d'un seul médecin, mais de

17 deux médecins qui sont venus dire que M. Bala souffrait d'une maladie,

18 disons, cardiaque. La gravité de cette maladie n'a pas particulièrement

19 bien été expliquée, sans doute notamment parce que cela tenait de la

20 période au cours de laquelle il a été examiné par ces médecins, mais tous

21 ont reconnu qu'il a un problème cardiaque, d'arythmie. Je pense qu'à

22 l'époque, il avait une mauvaise circulation, une condition qu'on appelle

23 cyanotique et on lui a préconisé de ne pas se livrer à des activités trop

24 éprouvantes.

25 Pourquoi est-ce que ceci est important le fait que la Chambre n'a pas

26 tenu compte de ces éléments de preuve incontestés et incontestables,

27 pourquoi est-ce que ceci est important ? Bien sûr, j'accepte l'idée selon

28 laquelle il peut y avoir des divergences tout à fait de bon sens sur ce que

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1 peut ou ne peut pas faire tel ou tel individu, s'agissant de faits à

2 établir. Mais s'agissant de la procédure intentée contre M. Bala, il ne

3 fait aucun doute que le type d'activités qui ont été retenues contre lui -

4 et je pense plus précisément au fait qu'on l'a accusé de sévices répétés à

5 un moment donné - je pense qu'on l'a accusé d'avoir asséné 59 coups ainsi

6 que ce périple dans les monts Berisa. L'Accusation, elle-même,

7 reconnaissait que même une personne en bonne santé aurait du mal à sortir

8 indemne d'un tel périple. Ce sont là des activités physiques qui sont

9 impossibles à un homme qui souffre de sa maladie. En tout cas,

10 raisonnablement, il n'est pas possible raisonnablement de faire ce genre de

11 chose. On peut croire raisonnablement qu'il n'était pas à même de s'adonner

12 à ces activités. Quelles sont les normes qui s'appliquent ? Si je comprends

13 bien le droit qui s'applique ici, dans ce Tribunal, sil y a une question

14 qui permet deux options, dont l'une est favorable à l'accusé -- là aussi,

15 c'est une conclusion, une déduction logique, et bien, c'est celle que devra

16 retenir la Chambre de première instance.

17 Si ces éléments de preuve au procès avaient été contestés, s'il y

18 avait eu des contradictions, quelles qu'elles soient en ce qui concerne son

19 état de santé, les éléments que nous avons présentés au nom de M. Bala, ce

20 qui faisait que la question même de son état de santé aurait été assortie

21 d'un point d'interrogation. A ce moment-là, peut-être, peut-être

22 qu'effectivement, on aurait eu un résultat différent, mais ce n'est même

23 pas sûr. Mais étant donné que l'Accusation a décidé de ne pas contester ces

24 éléments relatifs à son état de santé, le fait que la Chambre de première

25 instance ait conclu que ces éléments de preuve médicaux étaient trop

26 spéculatifs, trop incertains, à savoir qu'il n'était pas possible de

27 conclure raisonnablement qu'il était incapable de se livrer à ces activités

28 qui lui ont été reprochées, ce genre de conclusion de la Chambre de

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1 première instance, à notre avis, est déraisonnable et contraire au droit.

2 A plusieurs reprises il a été affirmé - et en tout cas depuis Tadic -

3 il a été affirmé que toute ambiguïté doit être soupesée en faveur de

4 l'accusé. Je renvoie la Chambre d'appel au jugement de première instance de

5 Tadic, paragraphe 31. Un instant, s'il vous plaît.

6 Dans la décision qu'elle a prise, la Chambre de première instance, à notre

7 avis, s'est appuyée uniquement sur les dires de

8 L-96 pour conclure et établir que M. Bala était présent et avait participé

9 en personne aux meurtres commis dans les monts Berisa. Cette décision pose

10 un problème, une difficulté particulière, la voici. En fait, il y a deux

11 versants à cette difficulté. Tout d'abord, celui-ci, ces témoins sont venus

12 parler de ce périple entamé en direction de ces monts, et ces témoins-là

13 n'ont pas fait une identification positive de M. Bala. En fait, ils n'ont

14 pas pu le reconnaître dans la série de photos qui leur ont été montrées. La

15 Chambre l'a dit très clairement. S'agissant de la déposition des éléments

16 de preuve présentés par L-96, ce que dit ce témoin était très entaché de

17 doutes, et aucune Chambre ne retiendrait ce genre de témoignage à moins

18 qu'il ne soit corroboré.

19 L-96, c'était une personne qui était prête à dire d'un homme innocent qu'il

20 avait été garde du camp. L-96 n'avait pas d'état d'âme à l'idée de

21 permettre qu'un innocent soit identifié et traduit devant ce Tribunal pour

22 y être poursuivi. Heureusement pour ce jeune homme, il y a eu des éléments

23 de preuve indépendants et objectifs qui lui ont permis de rester en liberté

24 et de se retrouver en liberté avant le début du procès. Si ceci ne s'était

25 pas passé - et en fait on peut remercier le bureau du Procureur, car il

26 avait trouvé ces éléments de preuve. Effectivement, il y avait des éléments

27 de preuve objectifs et ils ont permis à cet homme d'échapper à des

28 poursuites.

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1 La Chambre de première instance l'a dit, elle n'était pas prête à accepter

2 et à s'appuyer sur les éléments de preuve présentés uniquement par L-96 en

3 ce qui concerne les questions matérielles, substantielles, et pour ce qui

4 était d'accorder un certain poids, une certaine valeur probante à une

5 partie de ce qu'il a dit. Ce qui a été confirmé par d'autres éléments

6 présentés à la Chambre. Ceci est mentionné au paragraphe 26. Il est le seul

7 à affirmer que Haradin Bala se serait trouvé à un lieu qu'on a appelé le

8 site d'exécution, et qu'il aurait participé à l'assassinat de ces personnes

9 dans les monts Berisa.

10 Nous faisons valoir qu'il n'y a pas objectivement d'éléments de

11 preuve qui viennent corroborer ou établir ce qu'a affirmé L-96, puisqu'il

12 n'y a pas de témoins ayant identifié Haradin Bala dans la série de photos,

13 qui l'aurait identifié comme étant celui qui a escaladé les monts Berisa

14 alors qu'il souffrait d'une maladie cardiaque.

15 Nous avons évoqué par écrit des moyens concernant le rejet

16 inéquitable la défense d'alibi. Là, nous vous demandons de vous référer à

17 nos écritures, car nous pensons que nous y avons regroupé suffisamment

18 d'arguments pour vous permettre de prendre la décision qui s'impose. Dans

19 le même sens, s'agissant des questions concernant L-04 et L-06, les

20 déclarations qu'ils ont fait aux autorités serbes, là aussi nous nous

21 appuyons sur nos écritures déjà versées au dossier.

22 Je pense que ceci nous amène aux questions posées par la Chambre

23 d'appel dans la lettre qu'elle a envoyée aux parties. Peut-être que j'ai

24 mal compris la teneur de cette lettre, ou que je m'en suis écarté un peu,

25 mais j'aurais voulu en parler demain après avoir entendu l'appel formé par

26 l'Accusation. Je me disais que c'était là un moment plus propice pour le

27 faire, mais à vous de juger, bien entendu. Voici mon sentiment vu la

28 question qui a été posée, c'est une question qui intervient dans l'appel de

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1 l'Accusation. Puis, je me dis qu'il est préférable sans doute d'intervenir

2 plus tard. Puis, je vois que Mme Brady opine, donc sans doute qu'elle a

3 interprété les choses comme moi. Je ne sais pas ce que vous en pensez,

4 Madame et Messieurs les Juges. Vous aviez parlé de ces modalités, de la

5 structure des arguments que nous présentons. Je ne sais pas ce que vous

6 voulez faire, Monsieur le Président, Madame et Messieurs les Juges.

7 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Ecoutez, c'est à vous de savoir dans

8 quel ordre vous voulez traiter les différents points. C'est à vous de

9 choisir le moment opportun. Vous avez la parole pour l'instant. C'est à

10 vous de voir.

11 M. GUY-SMITH : [interprétation] Etant donné que j'aurai plus de temps

12 demain, je traiterai de ces problèmes demain.

13 [Le conseil de la Défense se concerte]

14 M. GUY-SMITH : [interprétation] A moins qu'il y ait des questions de la

15 Chambre, je vais laisser la parole à mes collègues de l'autre partie.

16 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Très bien.

17 Je vois qu'il n'y a pas de questions.

18 M. GUY-SMITH : [interprétation] On pourrait interpréter cela comme on veut,

19 qu'il n'y ait pas de questions. On peut être optimiste ou pessimiste, c'est

20 à voir.

21 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Je pense que vous en avez terminé avec

22 votre argumentation ?

23 M. GUY-SMITH : [interprétation] Pour l'instant, oui.

24 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Nous sommes en avance sur le programme,

25 Je vais demander à l'Accusation de prendre la parole et de nous donner sa

26 réponse.

27 Mme McCALL : [interprétation] Merci. Je vais parler des deux moyens de

28 l'appel de M. Bala qui portent sur l'identification et sur l'alibi. Il

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1 s'agit des moyens 1 et 6 de l'appel. Ma collègue, Mme Carey, parlera du

2 moyen 2 de l'appel de M. Bala, c'est-à-dire le moyen portant sur les

3 meurtres dans les monts Berisha. Elle répondra aussi aux arguments

4 présentés par la Défense à propos de l'état physique de M. Bala. Tout ceci

5 porte aussi sur le moyen 4 de l'appel. A moins qu'il y ait des questions

6 bien spécifiques, l'Accusation n'a pas l'intention de traiter du moyen 8

7 spécifiquement dans sa présentation orale. Mous compterons plutôt sur nos

8 écritures pour ce moyen.

9 Avant de répondre aux arguments faits à propos de M. Bala, j'aimerais

10 clarifier deux points que M. Guy-Smith a déjà abordés. Il est correct de

11 dire que les parties étaient d'accord pour dire que la Chambre de première

12 instance s'est trompée en donnant un poids probatif aux identifications en

13 prétoire. Mais les parties ne sont pas d'accord sur les conséquences de

14 cette erreur. La Défense considère qu'il s'agit d'une erreur qui invalide

15 la décision et qu'il convient de revenir sur la condamnation. L'Accusation

16 considère qu'au vu des circonstances en l'espèce c'est une erreur qui n'a

17 pas de conséquence.

18 Le deuxième point portant sur l'identification, porte sur les séries de

19 photos montrées à Vojko Bakrac. Lors du procès, les parties se sont mises

20 d'accord pour dire qu'en 2002 on avait montré à ce témoin une série de

21 photos où il n'avait reconnu personne. C'est au compte rendu à la ligne 1

22 371. La série de photos a été versée au dossier en tant que pièce DB1. Or,

23 il y a eu deux erreurs faites à ce moment-là. Tout d'abord, la première

24 porte sur la date à laquelle on a montré cette série de photos à M. Bakrac,

25 c'était en 2003. Deuxièmement, il s'agit d'une copie uniquement de la série

26 de photos et non pas l'original. Là les parties sont à nouveau en désaccord

27 à propos de la conséquence de cette erreur. La position de la Défense, en

28 association avec l'erreur à propos de l'identification en prétoire, on en

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1 arrive à un déni de justice. Alors que l'Accusation considère que certes,

2 c'était tout à fait désolant que ce soit arrivé, mais cela n'a absolument

3 aucune conséquence sur le verdict qui a été rendu par la Chambre.

4 Cet appel porte sur le fait de savoir si la Chambre de première

5 instance a conclu avec raison et a prouvé au-delà de tout doute raisonnable

6 que Haradin Bala était bien l'auteur des crimes pour lesquels il a été

7 condamné. Tout d'abord, je tiens à parler de l'identification et de l'alibi

8 à propos de ce critère d'examen. Pour que son appel réussisse, Haradin Bala

9 doit prouver qu'aucune Chambre de première instance raisonnable, en

10 appliquant correctement le droit, aurait pu être satisfaite au-delà de tout

11 doute raisonnable qu'il était bien l'auteur des crimes, c'est-à-dire qu'il

12 était bien le garde de prison dénommé Shala. Or, il a échoué à ce faire. Il

13 déclare qu'il devrait y arriver. Si la Chambre de première instance avait

14 correctement appliqué le droit à propos des identifications dans le

15 prétoire, et s'il n'y avait pas eu l'erreur sur la série de photos de Vojko

16 Bakrac, parce que là l'échec d'identifier M. Bala à partir d'une série de

17 photographies qui a été commise par L-04, L-12 et Vojko Bakrac créerait un

18 doute raisonnable. Nous considérons que cela ne satisfait pas aux critères

19 d'examen. Même s'il y a des erreurs qui ont été faites par la Chambre de

20 première instance pour ce qui est de ces deux points portant sur

21 l'identification, aucune Chambre de première instance raisonnable n'aurait

22 donné un tel poids à ces échecs d'identification pour en arriver à un doute

23 raisonnable. Cela n'aurait pas résulté en un doute raisonnable à cause de

24 tout le corpus immense de moyens de preuve qui ont été acceptés par la

25 Chambre de première instance et qui montrent tous que Haradin Bala est

26 l'auteur de ces crimes.

27 De plus, l'évaluation de la Chambre de première instance de son alibi

28 comme étant incroyable, incomplet et incohérent est parfaitement

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1 raisonnable et n'est pas acceptée par les erreurs effectuées dans le cadre

2 de l'identification. La conclusion de la Chambre de première instance était

3 correcte, c'est-à-dire qu'il n'y a rien à propos de son alibi et rien à

4 propos de ces moyens de preuve portant sur sa condition physique qui

5 peuvent provoquer un doute raisonnable, soit pris indépendamment, soit pris

6 ensemble.

7 Pour ce qui est de l'identification, quand il a décidé que Haradin Bala

8 était l'auteur de ces crimes, la Chambre de première instance avait

9 énormément de preuves à sa disposition permettant de l'identifier. Tout

10 d'abord et principalement, le fait que l'auteur de ces crimes, le garde

11 appelé Shala, avait dit lui-même qu'il était bel et bien Haradin Bala.

12 Haradin Bala a aussi admis que son pseudonyme était Shala. Il a été

13 identifié sur une série de photographies par trois témoins oculaires

14 différents. Tous les témoins victimes ont donné exactement la même

15 description physique de l'auteur, qui est exactement celle de Haradin Bala.

16 M. Guy-Smith, aujourd'hui, n'a parlé que des moyens portant sur

17 l'identification directe, et principalement l'identification à partir de

18 séries de photos et les identifications en prétoire. Les moyens de preuve

19 qui, selon lui, n'étaient pas suffisants pour prouver l'identité de Haradin

20 Bala au-delà de tout doute raisonnable, étaient les identifications

21 visuelles. Il se fonde sur le fait que quand on a demandé à des témoins de

22 montrer quel était Haradin Bala, l'auteur sur la série de photos, trois

23 témoins n'ont pas réussi à le faire. Il s'agit de L-04, L-12 et Vojko

24 Bakrac.

25 Il considère qu'il y a deux erreurs ici. Tout d'abord, il considère

26 que la décision de la Chambre de première instance de ne pas accorder de

27 poids à ces échecs d'identification était une erreur, parce qu'à moins que

28 l'Accusation n'a pas réussi à montrer qu'il y avait un doute raisonnable

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1 qui était soulevé, à moins que l'Accusation n'arrive à prouver que la photo

2 de l'auteur n'était pas sur la série de photos.

3 Ensuite, il dit qu'en décidant de ne pas donner de poids à cet échec

4 d'identification, la Chambre de première instance s'est basée faussement

5 sur ces identifications en prétoire. S'il n'y avait pas eu les erreurs au

6 départ, selon lui, les trois échecs d'identification auraient soulevé un

7 doute raisonnable. Nous considérons que ceci est sans fondement.

8 L'Accusation est d'accord pour dire que la décision de la Chambre de

9 première instance d'accorder un certain poids aux identifications en

10 prétoire, est une contradiction de sa décision précédente qui était de

11 n'accorder aucun poids aux échecs d'identification de deux autres témoins,

12 L-04 et L-12. C'est très clair quand on lit d'ailleurs le paragraphe 631 du

13 jugement. Comme M. Guy-Smith vient de le dire, la Chambre de première

14 instance parle de sept personnes qui ont identifié Bala, de sept personnes

15 différentes. Il y a à la fois identification sur une série de photos et

16 identifications en prétoire. Ce paragraphe ne traite que de

17 l'identification visuelle de cette personne. Quand on lit le paragraphe

18 dans son contexte, en reprenant tous les moyens de preuve portant sur

19 l'identification qui ont été acceptés par la Chambre de première instance,

20 il devient apparent que les identifications en prétoire n'ont joué qu'un

21 tout petit rôle dans la conclusion atteinte par la Chambre de première

22 instance sur laquelle il n'y avait aucun doute, et leur décision aurait été

23 identique s'ils n'avaient accordé aucun poids probant aux identifications

24 en prétoire.

25 De toute façon, quand on lit correctement le paragraphe 631 du

26 jugement, on voit que la Chambre de première instance a à la fois utilisé

27 l'identification visuelle en prétoire et sur série de photos, pour éliminer

28 la possibilité d'une erreur de toute bonne foi qui, bien sûr, peut toujours

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1 arriver lorsqu'on procède à une identification. A notre avis, cela ne

2 signifie absolument pas que la Chambre de première instance n'était pas

3 satisfaite par les identifications par série de photos individuelles qui

4 elles étaient crédibles et tout à fait fiables. A notre avis, il s'agissait

5 juste de quelque chose qui avait été ajouté en supplément pour protéger

6 l'accusé d'une erreur d'identification éventuelle. Si la Chambre de

7 première instance n'avait pas utilisé l'association de l'identification à

8 la fois en prétoire et sur série de photos de cette façon-là, pour éliminer

9 la possibilité d'une erreur en toute bonne foi, elle aurait quand même

10 réussi à trouver, grâce aux autres moyens de preuve incriminant Haradin

11 Bala, qu'il s'agissait bien de cette personne-là au-delà de tout doute

12 raisonnable.

13 Maintenant, je vais aborder la façon dont la Chambre de première instance a

14 procédé pour arriver à une décision à propos des échecs d'identification

15 sur série de photos, alors que les témoins ont réussi à identifier

16 positivement la personne lors d'une identification au prétoire. Il s'agit

17 ici d'identifications auxquelles ont procédé les témoins L-04 et L-12 au

18 paragraphe 627.

19 Les séries de photos où les témoins L-04 et L-12 n'ont pas réussi à

20 identifier Bala, n'étaient pas versées au dossier. Ce qui signifie que la

21 Chambre de première instance ne pouvait pas savoir s'ils n'avaient pas

22 réussi à identifier cette personne à cause de la qualité de la

23 photographie. Ce serait une explication certes, qui pourrait expliquer

24 pourquoi ils n'auraient pas accordé de poids.

25 La Chambre de première instance a reconnu que cette série de photos

26 n'était pas versée au dossier. Ils n'ont pas pu utiliser l'explication de

27 mauvaise qualité, ceci à l'encontre de la présomption d'innocence. La

28 Chambre de première instance a considéré, en faveur de l'accusé, que la

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1 série de photos était de bonne qualité et que la photo de Haradin Bala

2 était suffisamment ressemblante pour permettre une identification.

3 Ayant saisi ces hypothèses, la Chambre de première instance pouvait

4 déclarer expressément que l'erreur identifiée pouvait indiquer qu'à l'avis

5 du témoin L-04 et L-12, qu'aucune des personnes montrées sur cette photo,

6 n'était l'homme qu'ils connaissaient sous le nom de Shala. Paragraphe 627.

7 Il y a aussi la possibilité qu'ils n'ont pas réussi à identifier la

8 personne du fait d'autres facteurs : incertitude, peur de faire une erreur,

9 ou aussi pression de leurs pairs. La Chambre de première instance n'a pas

10 atteint cette conclusion à propos d'un manque de preuves. La Défense

11 considère que l'Accusation doit éliminer tout ceci parce que l'auteur

12 n'était pas présenté avec d'autres personnes dans une présentation.

13 Mais à notre avis, ce ne serait correct que si l'échec permettait

14 d'arriver à un doute raisonnable, au vu de tous les moyens de preuves

15 présentés dans le procès. On ne peut pas prendre cet échec d'identification

16 seul. L'Accusation ne peut pas éliminer la possibilité qu'il y avait un

17 certain doute, du fait de cet échec d'identification. Il y a énormément de

18 preuves fiables et crédibles qui incriminaient toutes Haradin Bala. Quel

19 que soit le poids que la Chambre de première instance a donné à ces échecs

20 d'identification, elle n'a pas fait d'erreur pour ce qui est des

21 identifications en prétoire. Il y avait aussi d'autres preuves qui

22 montraient que les échecs d'identification du départ ne peuvent pas

23 résulter en un doute raisonnable. Ceci est ma réponse. La façon dont la

24 Chambre de première instance a géré le processus d'identification en

25 prétoire est exemplaire.

26 C'est la première fois qu'il y a eu cette identification en prétoire,

27 c'était le témoin L-07, et c'était à propos de Fatmir Limaj. C'est au

28 compte rendu 805 à 807. Le conseil de M. Limaj n'a pas soulevé d'objections

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1 à ce procédé, mais a fait un commentaire pour ce qui est du poids qui

2 serait attribué à cette identification. L'Accusation était d'accord ainsi

3 que la Chambre d'ailleurs que tout le problème, c'était le poids à

4 accorder. Au cours de l'identification en prétoire, il y avait problème,

5 puisque le témoin a parlé de la couleur de la cravate que M. Limaj portait

6 pour l'identifier. Il y a eu un problème de couleur aussi. Il y a eu une

7 certaine confusion. Ensuite, le conseil de M. Limaj a demandé s'il était

8 prêt à se lever pour être identifié. C'est exactement ce qui s'est passé.

9 Pour ce qui est aussi des preuves apportées par L-07, le conseil de

10 M. Bala n'était pas contre une identification en prétoire, mais il a fait

11 exactement le même commentaire à propos du poids à y accorder. M. Bala lui

12 aussi s'est levé pour être identifié. C'est au compte rendu d'ailleurs,

13 page 811.

14 Pour ce qui est de plus, quel que soit le poids qui allait être donné

15 à ces identifications en prétoire, la Chambre de première instance a

16 toujours bien dit qu'elle serait extrêmement prudente quand elle évaluerait

17 ce type d'identifications, en confirmant d'ailleurs qu'elle lui accorderait

18 très peu de poids. Au

19 paragraphe 627 du jugement, il est bien clair que la Chambre de première

20 instance a considéré qu'il y avait énormément de danger à accepter ce type

21 d'identification en prétoire par ce type de témoin. Une raison pour cela,

22 est qu'ils avaient déjà vu ces personnes à la télévision lors de la

23 couverture médiatique des procès.

24 La conclusion de la Chambre de première instance c'est : "qu'il

25 fallait être extrêmement prudent pour ce qui est des identifications en

26 prétoire faites par L-04 et L-12, en reconnaissant bien qu'ils auraient

27 bien pu faire une erreur."

28 A notre avis, bien que les identifications en prétoire ont reçu un

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1 certain poids qui leur a été donné par la Chambre de première instance, ce

2 poids était extrêmement faible et n'a pas été suffisant pour pouvoir

3 suggérer que ces identifications en prétoire ont permis de surmonter les

4 échecs d'identification qui avaient été effectués préalablement lors d'une

5 série de photographies.

6 Maintenant, pour ce qui est de Vojko Bakrac, on ne lui a pas demandé

7 de faire une identification en prétoire. Là, c'est un peu différent. Le

8 fait qu'il n'ait pas réussi à identifier la personne à partir d'une série

9 photographique, se trouve au paragraphe 604. Or, cette paragraphie [phon]

10 montre bien que, bien que la pièce DB1 était une copie de la série de

11 photographies et non pas l'originale, ceci n'est pas important. La Chambre

12 de première instance a fait remarquer qu'elle ne savait pas s'il s'agissait

13 d'un original ou d'une copie et qu'ils ne pouvaient pas décider et évaluer

14 pourquoi le témoin n'avait pas réussi à identifier la personne. Autre point

15 qui va en faveur de l'accusé, ils ont remarqué qu'étant donné que Vojko

16 Bakrac n'avait pas réussi à identifier cette personne, les références

17 faites par lui et par d'autres témoins à Shala ne pouvaient pas être des

18 références à Haradin Bala. La Chambre de première instance a pesé et a

19 ajouté l'échec de Vojko Bakrac. Il n'a pas réussi à identifier la personne

20 sur la série de photographies, et ceci a été pris en compte. Cela montre

21 que la Chambre de première instance connaissait bien que le témoignage du

22 Pr Wagernaar, selon lequel ces échecs d'identification pourraient être

23 importants et ne doivent pas être négligés. Il s'agit des pages 7 223 et 7

24 224.

25 Maintenant, pour ce qui est de l'identification en tant que telle

26 dans le jugement. Paragraphe 20, il est écrit que :

27 "Ce sont les faits cumulatifs des preuves, c'est-à-dire toutes les

28 preuves qui ont été apportées, qui traitent de l'identification d'un accusé

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1 qui doivent être pesées afin de déterminer si l'Accusation a prouvé au-delà

2 de tout doute raisonnable que chaque accusé est bel et bien l'auteur des

3 crimes qui lui sont reprochés."

4 Quand on prend cela en compte, quand on lit tout le passage du

5 jugement appelé : "Haradin Bala a-t-il bien identifié au camp de

6 prisonniers Llapushnik ?" Il s'agit du paragraphe 623 à 633. Il est clair

7 que pour trouver l'identité de l'auteur au-delà de tout doute raisonnable,

8 la Chambre de première instance ne s'est pas basée principalement sur les

9 identifications en prétoire ni sur les identifications visuelles. Ceci est

10 remarqué d'ailleurs au

11 paragraphe 20 du jugement, où il est écrit : "Les identifications visuelles

12 ne sont qu'une partie des moyens de preuve qui sont pris en compte."

13 Maintenant, l'identification a-t-elle été prouvée au-delà de tout doute

14 raisonnable, la Chambre de première instance s'est appuyée sur toute une

15 gamme de moyens de preuve bien autres que l'identification visuelle, ce

16 dont nous a parlé M. Bala. Tout d'abord, les témoins ont parlé du

17 traitement qu'ils avaient reçu des mains du garde Shala. Ils en ont donné

18 une description physique. Ils ont décrit quelles étaient ses fonctions au

19 camp. Ils ont tous déclaré qu'il avait ce pseudonyme, Shala. C'est après

20 avoir examiné ces preuves que la Chambre de première instance s'est

21 déclarée satisfaite que tous les témoins victimes parlaient d'une seule et

22 même personne. Cela se trouve au paragraphe 621.

23 Le véritable problème devant la Chambre de première instance, en fait,

24 était de savoir si cette personne était bien Haradin Bala, et ce, au-delà

25 de tout doute raisonnable.

26 Les témoins ont donné une description physique de Shala. Ils ont

27 donné l'âge, sa taille, ses cheveux, sa mauvaise dentition, sa moustache.

28 La Chambre de première instance a trouvé que ces descriptions

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1 correspondaient parfaitement à l'apparence de Haradin Bala, paragraphe 621

2 - et voici où je ne suis pas d'accord avec ce qu'a dit M. Guy-Smith à

3 propos d'une description générale qui correspondrait à 90 % de la

4 population albanaise - ce n'est pas vrai, parce que certains traits de la

5 description étaient plus importants. Les témoins ont décrit Shala comme

6 ayant entre la quarantaine et la cinquantaine. C'est beaucoup plus

7 important que dans la normale, parce que les soldats de l'UCK d'habitude

8 n'avaient pas cet âge-là. La plupart des soldats étaient beaucoup plus

9 jeunes. Bien sûr, Bala à l'époque était dans sa quarantaine. Donc, toutes

10 ces descriptions pointaient bien vers Haradin Bala.

11 Bala n'a pas contesté que son pseudonyme était Shala et qu'il faisait

12 partie de l'UCK. Nous avons aussi des moyens de preuve à propos de ceci qui

13 nous viennent de personnes qui le connaissaient. Le Dr Zeqir Gashi le

14 connaissait depuis dix à 15 ans avant la guerre, et a témoigné aux 5621 à

15 5623 que Bala était bel et bien un soldat de l'UCK à Lapusnik et qu'il

16 était connu sous le nom de Shala. Ruzdhi Karpuzi, un autre soldat de l'UCK

17 dont le pseudonyme était aussi Shala, a témoigné en disant qu'il partageait

18 ce pseudonyme avec Haradin Bala. Vous trouvez cela au compte rendu 3139.

19 Bien sûr, aucun de ces moyens de preuve ne relie nécessairement Bala avec

20 le garde de prison Shala. Mais ce lien a été prouvé au-delà de tout doute

21 raisonnable par deux éléments de preuve. Tout d'abord, il y avait deux

22 soldats de l'UCK appelés Shala à Lapusnik lors de la période de référence.

23 Vous avez cela dans le jugement au

24 paragraphe 622. Il y avait Haradin Bala et Ruzdhi Karpuzi. L'Accusation a

25 éliminé toute possibilité que Ruzdhi Karpusi puisse être le garde appelé

26 Shala. Ceci a été effectué au travers de différents moyens de preuve.

27 Karpuzi, d'abord, a témoigné à propos de ses obligations et de ses

28 fonctions dans l'UCK, qui étaient principalement d'observer un point de

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1 contrôle serbe. Il a aussi dit qu'il n'avait jamais été dans le bâtiment

2 utilisé comme prison. Vous trouvez cela au compte rendu 3085 à 3083.

3 Ensuite, L-64, un autre soldat de l'UCK, a dit que les gardes à la prison

4 étaient Haradin Bala et un autre soldat appelé Murrizi. Compte rendu 4444-

5 4445.

6 Ensuite, la description du garde Shala ne correspondait absolument pas à

7 Karpuzi. Karpuzi avait huit ans de moins que Bala, était plus grand de 15

8 centimètres, ne portait pas de moustache et surtout il boitait. Vous

9 trouvez cela au jugement au paragraphe 622.

10 Ensuite, deuxième élément de preuve qui vous donne le lien entre

11 Haradin Bala et Shala, ce sont les moyens de preuve apportés par L-07, l'un

12 des témoins victimes. Il a déclaré qu'il avait rencontré Shala dans une

13 station d'essence en 1999, donc une année après les crimes, et quand il lui

14 a dit : Bonjour, Shala, le garde a dit : "Mon vrai nom, c'est Haradin

15 Bala." Vous avez cela à la

16 ligne 810. L'auteur de ces crimes lui-même d'ailleurs a dit qu'il

17 s'appelait Haradin Bala. Au paragraphe 825 du jugement, quand on le lit on

18 voit bien qu'il s'agit d'un élément de preuve impérieux qui a été accepté

19 au-delà de toute réserve par la Chambre de première instance.

20 Nous considérons que tous ces éléments de preuve ne sont pas affectés

21 par l'erreur portant sur les indices d'identification en prétoire. Tous les

22 moyens de preuve incriminaient directement Haradin Bala et montraient bien

23 que cela excluait tout autre personne appelée Shala à Lapusnik.

24 Donc, pour ce qui est des identifications visuelles, à notre avis, les

25 erreurs d'identification sur série de photos sont elles aussi sans

26 conséquence. La Défense a fait référence à deux identifications sur série

27 de photos de Haradin Bala, celles d'Ivan Bakrac et de L-96. Pourtant L-64

28 aussi a identifié Bala - l'Accusation est d'accord pour dire que c'est

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1 principalement les témoignages d'Ivan Bakrac et de L-96 qui ont identifié

2 Haradin Bala sur les séries de photos.

3 La Défense considère que la Chambre de première instance a concédé

4 qu'il y avait des erreurs, ou du moins un certain disfonctionnement à

5 propos de ces deux identifications. Mais à notre avis, ceci ne représente

6 pas correctement le point de vue de la Chambre de première instance à

7 propos d'une identification de cette série de photos par Ivan Bakrac, et

8 cela ne reconnaît pas non plus la crédibilité inhérente de l'identification

9 par L-96, et toute inquiétude à propos de son témoignage peut être tempéré

10 par le fait de l'identification en tant que telle.

11 En parlant d'Ivan Bakrac d'abord. Contrairement à ce qu'a dit la Défense,

12 la Chambre de première instance n'a eu aucune hésitation à propos de la

13 crédibilité et de la fiabilité d'Ivan Bakrac, y compris son identification

14 à partir d'une série de photos de Haradin Bala. Au paragraphe 624 du

15 jugement, la Chambre de première instance déclare que l'identification par

16 Ivan Bakrac est tout à fait importante à cause "du soin, de l'honnêteté, de

17 la compétence et de toute la fiabilité qu'il a montrée lors de toutes les

18 questions auxquelles il a répondu."

19 A notre avis, cela montre bien que la Chambre de première instance a

20 accepté la crédibilité et la fiabilité d'Ivan Bakrac et de son

21 identification de Bala, et la Chambre de première instance a réitéré ainsi

22 que ce jeune homme avait pu voir Shala à de nombreuses reprises. Shala

23 était très respectueux envers lui et son père. Il avait joué aux échecs

24 avec lui. De plus, la Chambre de première instance déclare que cette

25 identification a été immédiate et sans hésitation. Donc, la Chambre de

26 première instance a pris en compte les moyens de preuve apportés par le

27 témoin Wagenaar à propos des identifications sur série de photos, mais a

28 déterminé que ceci n'empêchait pas de dire qu'Ivan Bakrac avait vraiment

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1 identifié la personne sans hésitation et de façon extrêmement fiable.

2 Pour ce qui est de la dernière, la Chambre de première instance a peut-être

3 été capable de ne se tenir qu'à cette identification, tout en étant

4 extrêmement prudente et tout en tenant compte des intérêts de l'accusé.

5 Mais la décision de ne pas se fier sur une seule identification, à notre

6 avis, n'était pas qu'elle n'acceptait pas sans aucune réserve

7 l'identification par Ivan Bakrac. Ils étaient juste en train de mettre une

8 sauvegarde pour protéger les intérêts de l'accusé.

9 A notre avis, d'ailleurs, le nombre important de moyens de preuve qui

10 avaient déjà été abordés, à la fois des moyens de preuve indirects et

11 directs, et ceci a été rencontré lors de deux identifications

12 supplémentaires par série de photos. En fait, l'une des identifications

13 formelles a été faite par L-96; l'autre, qui est beaucoup moins importante,

14 par L-64. L-96 a reconnu Haradin Bala sur la série de photos immédiatement.

15 La critique de la Défense par rapport au fait que la Chambre de première

16 instance accepte cette identification formelle est que la procédure n'a pas

17 été suivie de façon exacte. Ils ont avancé les mêmes arguments en première

18 instance. Mais tout vice dans la procédure, en lui demandant s'il aurait

19 voulu avoir davantage de temps ou s'il voulait quitter la pièce et revenir,

20 tout cela s'est passé après qu'il a reconnu Bala parmi la série de photos.

21 La Chambre de première instance a entièrement considéré la procédure au

22 paragraphe 613 et a indiqué que lors de l'identification il n'y avait pas

23 eu de vice de forme. Bala n'a pas montré pourquoi la Chambre de première

24 instance a été déraisonnable de parvenir à cette idée.

25 La deuxième critique est que la Chambre de première instance n'aurait

26 pas dû accepter l'identification de L-96 sans corroboration, ce qui était

27 requis en général pour sa déposition. Bala avance que

28 L-96 n'a pas corroboré, parce que la Chambre de première instance n'a pas

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1 considéré que l'identification d'Ivan Bakrac s'était faite sans faille. Et

2 lorsqu'on lit l'évaluation faite par la Chambre de première instance de

3 l'identification faite par Ivan Bakrac, il est évident qu'il y a pas de

4 vice, qu'il n'y a pas de défaillance. L-96 a été corroboré par Ivan Bakrac,

5 par les moyens de preuve avancés par L-07, à savoir que Shala lui-même

6 avait admis qu'il était Haradin Bala. Il y a des preuves indirectes qui

7 convergent toutes vers Bala. Quoi qu'il en soit, la Chambre, quelle que

8 soit l'hésitation que la Chambre de première instance aurait pu avoir à

9 propos de la sincérité de L-96, ce qui ne fait absolument pas objet de

10 litige, c'est que lorsqu'on lui a montré une série de photos avec huit

11 photos qui ressemblaient toutes à la description de Shala, L-96 a

12 immédiatement retenu la photo de Haradin Bala. Il n'avait pas vu Bala à la

13 télévision ou dans des photos avant de le faire. Compte rendu d'audience

14 2396, il n'avait pas vu Shala depuis son évasion des monts Berisha, compte

15 rendu d'audience 2396. Cela, en fait aurait pu être considéré par la

16 Chambre de première instance comme pouvant éliminer toute préoccupation à

17 propos de la crédibilité de L-96.

18 La question de la crédibilité n'a pas d'impact sur le processus

19 d'identification. Il faut indiquer de façon très, très claire, même si la

20 Chambre de première instance a invoqué -- ou évoqué, plutôt, une méfiance

21 générale à l'égard de L-96; donc pourquoi est-ce qu'il a choisi la photo de

22 Haradin Bala et non pas la photo de quelqu'un d'autre. C'est à ce moment-là

23 que le manque de crédibilité a été avancé, mais cela n'est pas du contrôle

24 ou de la maîtrise de L-96. Et pourtant, c'est la photo de Haradin Bala

25 qu'il a choisie, il l'a choisie immédiatement. En demandant que cela soit

26 corroboré, la Chambre de première instance a péché par excès de prudence,

27 et cela, en faveur de l'accusé. Pour résumer à propos de l'identification,

28 M. Bala conteste le jugement en disant qu'il expose ces griefs, parce que

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1 la Chambre de première instance a décidé de ne pas accorder de poids au

2 fait que L-4 et L-12 n'ont pas réussi cette identification formelle, et à

3 cause du fait que Vojko Bakrac -- ce qui a été dit par Vojko Bakrac pouvait

4 représenter un doute raisonnable, et la Chambre de première instance n'a

5 pas reçu les identifications qui ont été faites dans le prétoire, et que

6 cela aurait pu constituer un doute raisonnable.

7 En avançant cette idée - et nous pensons qu'il encourage la Chambre à

8 ne prendre en considération que l'identification visuelle, et nous avançons

9 qu'il s'agit là d'un exercice absolument artificiel et que si la Chambre de

10 première instance devait s'engager là-dedans, cela l'empêcherait de

11 recouper des éléments de preuve par rapport à d'autre éléments de preuve

12 qu'ils ont acceptés, ce qui est une partie absolument fondamentale de cette

13 procédure, lorsqu'il s'agit de déterminer si cela a pu être prouvé au-delà

14 de tout doute raisonnable.

15 Nous avançons, lorsque nous examinons la totalité des éléments de

16 preuve qui incriminent Haradin Bala, qu'il n'a pas pu prouver qu'aucune

17 Chambre de première instance raisonnable aurait pu prouver au-delà de tout

18 doute raisonnable qu'il était l'auteur des crimes pour lesquels il a été

19 condamné. Quel que ce soit le poids accordé à la Chambre de première

20 instance au manquement d'identification, au vu des autres conclusions, la

21 Chambre de première instance aurait dégagé la même conclusion que s'il n'y

22 avait pas eu de doutes raisonnables suivant lesquels Haradin Bala était le

23 gardien Shala. Par conséquent, nous considérons que premier moyen de preuve

24 doit être rejeté.

25 Je sais, Monsieur le Président, que j'ai déjà dépassé le temps prévu,

26 il me reste que dix minutes. Je souhaiterais aborder l'alibi.

27 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Nous n'avons pas de questions, donc

28 vous pouvez encore parler pendant dix minutes.

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1 Mme McCALL : [interprétation] Pour ce qui est du moyen d'appel 6, il s'agit

2 du moyen d'appel eu égard à la façon dont la Chambre de première instance a

3 considéré l'alibi de M. Bala, et bien entendu, l'Accusation accepte que

4 l'alibi n'est pas une défense. Ce qui est requis à ce sujet, même lorsqu'on

5 donne des éléments de preuve d'un alibi, c'est que l'Accusation doit

6 prouver ses moyens à charge au-delà de tout doute raisonnable. Cela est

7 exprimé de cette façon, à savoir l'accusé doit être acquitté s'il y a une

8 possibilité raisonnable suivant laquelle l'alibi est vrai, est véridique.

9 En décidant si Haradin Bala avait été identifié de façon formelle au-

10 delà de tout doute raisonnable, la Chambre de première instance a évalué et

11 apprécié tous les éléments de preuve présentés à charge et à décharge,

12 notamment les éléments de preuve ayant des liens avec son alibi et son état

13 physique - et cela fait l'objection des paragraphes 634 à 650 du jugement.

14 La Chambre de première instance avait évalué les éléments de preuve étayant

15 l'alibi de Bala ainsi que son état physique et a considéré que cela était

16 incomplet, peu logique et finalement non convaincant.

17 Bala indique qu'il y a une erreur de droit, à savoir que la Chambre

18 de première instance a renversé la charge de la preuve en lui demandant de

19 prouver que son alibi était logique et crédible et non pas seulement

20 plausible, et que la Chambre de première instance a dégagé une conclusion

21 négative eu égard à son alibi parce qu'il n'a pas déposé sous serment. Il

22 n'y a pas eu d'erreur dans la façon dont la Chambre de première instance a

23 étudié l'alibi -- la charge de la preuve. Dans son mémoire, Bala transforme

24 ou convertit le critère suivant lequel l'alibi doit être une possibilité

25 raisonnable en un critère qui exige de lui qu'il ne produise seulement un

26 alibi plausible. D'aucuns pourraient se demander si la plausibilité, si ce

27 concept englobe le concept de ce qui est raisonnable.

28 Toutefois, après avoir évalué tous les éléments de preuve relatifs à

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1 l'identification, la Chambre de première instance a indiqué, cruciverbis

2 [phon], qu'avant de parvenir à sa conclusion ultime sur la question de

3 l'identification, elle voudrait évaluer, apprécier deux autres questions, à

4 savoir l'alibi et l'état physique, paragraphe 633. Nous avançons que c'est

5 une approche tout à fait exacte qui a été adoptée par la Chambre de

6 première instance, à savoir pour voir, compte tenu de tous les éléments de

7 preuve présentés, si cela peut évoquer ou peut susciter un doute

8 raisonnable.

9 L'ordre choisi par la Chambre de première instance pour mener à bien

10 son analyse des éléments de preuve prouve que l'Accusation n'a pas renversé

11 la chope de la preuve, à savoir si l'on envisage tous les éléments de

12 preuve à charge, il faut voir, en fait, s'ils peuvent être présentés au-

13 delà de tout doute raisonnable. Après avoir décidé que l'Accusation n'a pas

14 laissé de doute raisonnable, la Chambre de première instance a envisagé les

15 éléments de preuve de la Défense sur l'alibi et l'état physique afin de

16 savoir si cela soulevait un doute raisonnable. Ce faisant, la Chambre de

17 première instance aura bien entendu gardé à l'esprit tout doute qui est

18 resté après la présentation des moyens à charge, même si ces doutes

19 n'atteignaient pas le niveau d'un doute raisonnable.

20 Et en menant à bien cette analyse des éléments de preuve dans cet

21 ordre, cela signifie que la Chambre de première instance a laissé jusqu'au

22 dernier moment la possibilité suivant laquelle il pourrait y avoir un doute

23 raisonnable cumulatif qui aurait pu être soulevé. Après avoir envisagé tous

24 les éléments de preuve à charge et à décharge, la Chambre de première

25 instance a conclu au paragraphe 650, qu'il n'y avait pas de doute

26 raisonnable en dépit du fait que l'alibi avait été présenté en dépit des

27 éléments de preuve visant la santé ou l'état de santé de Bala. Il n'y a pas

28 d'indication, d'après l'analyse menée à bien par la Chambre de première

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1 instance ou d'après la façon dont elle a exprimé sa conclusion, qu'elle

2 avait exigé de Bala de prouver son alibi. Donc la charge de la preuve n'a

3 pas été renversée.

4 J'aimerais maintenant aborder le deuxième argument avancé par

5 M. Bala en expliquant sa décision de ne pas déposer sous témoin. En fait,

6 il s'agit véritablement d'un grief exposé à propos de la façon dont la

7 Chambre de première instance a utilisé cette déposition qui n'a pas été

8 faite sous serment par M. Bala. Il indique que cela n'est pas un élément de

9 preuve, que cela n'aurait pas dû être utilisé pour évaluer la crédibilité

10 et la fiabilité de ces témoins invoquant son alibi, et qu'il n'est pas

11 juste d'utiliser cet argument contre lui, parce que de toute façon cela

12 n'était pas complet, était beaucoup trop général et qu'il n'y avait pas

13 suffisamment de détails.

14 Madame, Messieurs les Juges, M. Bala a mené à bien sa défense sur la

15 base d'un alibi, et il ne peut pas, en fait, en appel, essayer de présenter

16 une déclaration exhaustive qui n'est pas faite sous serment. Une

17 déclaration faite hors serment est un moyen de preuve et, conformément à

18 l'article 84, la Chambre de première instance a tout à fait le droit d'y

19 accorder le poids qu'elle considère approprié. Bala n'a pas expliqué

20 pourquoi la Chambre de première instance n'avait pas eu raison de

21 considérer sa déposition, qui n'a pas été faite sous serment, comme elle

22 l'a fait. Le fait qu'en fin de compte son alibi n'a pas été considéré comme

23 une base logique et crédible ne signifie pas que la Chambre de première

24 instance a dégagé une conclusion négative du fait de son manquement à

25 témoigner. Cela ne fait que mettre en exergue le manque de fondement solide

26 fourni par sa déclaration qui n'a pas été faite sous serment, que Bala

27 reconnaît d'ailleurs lui-même comme étant incomplète et trop générale. La

28 Chambre de première instance n'a donc pas commis d'erreur à cet égard.

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1 Je pense que le moment est venu de faire une pause, Monsieur le

2 Président.

3 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Si cela vous convient, tout à fait, je

4 pense que nous pouvons avoir une pause d'une demi-heure et nous reprendrons

5 à 16 heures 30.

6 --- L'audience est suspendue à 15 heures 58.

7 --- L'audience est reprise à 16 heures 31.

8 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Nous reprenons nos travaux, et je

9 redonne la parole à l'Accusation qui va poursuivre la présentation de ses

10 arguments.

11 Mme McCALL : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

12 Avant la pause, j'évoquais le moyen d'appel de M. Bala par rapport à

13 l'alibi où il disait qu'en fait la Chambre avait renversé la charge de la

14 preuve, et il se plaignait de la façon dont la Chambre avait traité sa

15 déclaration hors serment. Dans son mémoire, il dit que la Chambre de

16 première instance a dit dans le jugement que le témoignage des témoins

17 alibis ne va pas nier nécessairement la preuve selon laquelle Bala était

18 resté à Lapusnik. Et il dit que ceci montre que la Chambre de première

19 instance a exigé de lui qu'il prouve l'alibi.

20 Ceci n'a peut-être pas été bien formulé par la Chambre, mais il faut

21 voir le contexte. Comme pour les moyens de preuve concernant

22 l'identification, la Chambre a bien soupesé la crédibilité des témoins

23 invoquant l'alibi, et ceci est dit dans le jugement aux paragraphes 634 à

24 647.

25 Les deux parties ont déposé des écritures dans lesquelles elles

26 présentent des arguments relatifs aux éléments de preuve. Je ne veux pas

27 les reprendre ici, mais vous verrez ce que dit l'Accusation à propos des

28 ces éléments de preuve au chapitre 4, parties D et E de la réponse, pages

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1 43 à 56.

2 A notre avis, lorsqu'on examine la façon dont la Chambre a effectué

3 cette analyse, tout comme lorsqu'on voit comment elle a analysé les

4 éléments concernant l'identification, la Défense n'a pas montré en quoi

5 l'évaluation de la Chambre, s'agissant de la crédibilité et de la

6 fiabilité, aurait été déraisonnable. A notre avis, Bala marque simplement

7 son désaccord avec la Chambre de première instance et il n'est pas d'accord

8 pour dire qu'une telle conclusion de la Chambre aurait été raisonnable.

9 Je vais m'arrêter là et je vais vous inviter à rejeter le

10 motif 6. Si vous avez des questions, je serais ravie d'y répondre. S'il n'y

11 a pas de questions, je vais maintenant passer la parole à Mme Carey qui va

12 évoquer le motif numéro 2.

13 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Fort bien. Vous pouvez désormais

14 aborder les autres motifs.

15 Mme CAREY : [interprétation] Bonjour, Madame et Messieurs les Juges.

16 Je vais vous parler du motif 2, s'agissant de la présence de Haradin Bala

17 et de sa participation aux assassinats du mont Berisa. Il y a trois sous-

18 motifs dans lesquels la Défense affirme qu'aucune Chambre de première

19 instance raisonnable - si elle avait bien appliqué le droit - n'aurait pu

20 décider au-delà de tout doute raisonnable que Bala était physiquement

21 capable de participer à la marche du mont Berisa, qu'il n'a pas rebroussé

22 chemin avant d'arriver au site d'exécution et qu'il n'a pas tiré.

23 De l'avis de l'Accusation, les conclusions tirées par la Chambre sont

24 exactes et soutenues par beaucoup d'éléments de preuve tout à fait fiables.

25 Je vais reprendre l'ordre de présentation des sous-motifs. Je ne vais pas

26 évoquer le motif 4 qui concerne la capacité physique qu'avait Bala de

27 battre le témoin L-12 de façon détaillée, mais les déficiences, les

28 défaillances de l'argumentation de la Défense dans le deuxième motif se

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1 retrouvent dans le quatrième.

2 La Défense ne se penche pas sur les conclusions de la Chambre. Elle ne

3 démontre pas comment, quand on voit la totalité des éléments de preuve, la

4 Chambre aurait tiré des conclusions déraisonnables. Nous avons deux thèmes

5 communs qu'on retrouve dans tous les sous-motifs de la Défense. La Défense

6 demande d'abord à la Chambre d'appel de se mettre à la place de la Chambre

7 de première instance et de regarder des éléments de preuve comme si c'était

8 un procès de novo. Dans chacun de ses arguments, la Défense présente des

9 arguments qui lui semblent pertinents et demande à la Chambre d'appel de se

10 prononcer sur la question de savoir si ces éléments de preuve soulèvent un

11 doute raisonnable. Ce faisant, la Défense ne répond pas à la norme d'appel,

12 à savoir qu'une Chambre de première instance raisonnable appliquant bien le

13 droit pourrait être convaincue au-delà de tout doute raisonnable que Bala

14 était présent dans les monts Berisa et avait participé à l'assassinat de

15 neuf prisonniers.

16 Deuxièmement, la Défense voudrait que la Chambre d'appel sélectionne

17 certains éléments de preuve particuliers pour procéder à une analyse isolée

18 plutôt que de voir l'ensemble des éléments de preuve. Cette démarche, elle

19 a été bien présentée aux paragraphes 40 à 42 de la réplique de la Défense,

20 où la Défense dit qu'il aurait fallu examiner de façon isolée les éléments

21 de preuve, que ce soit pour l'identification de Bala ou pour

22 l'identification des prisonniers qui ont entrepris cette marche dans les

23 monts Berisa.

24 C'est une stratégie de diviser pour régner, et ceci donne

25 l'impression que ces éléments de preuve identifiés par la Défense soulèvent

26 un doute raisonnable alors que ceci ne le fait pas. Les conclusions de la

27 Chambre de première instance quant à la participation de Bala étaient

28 raisonnables à la lumière de l'ensemble des éléments de preuve.

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1 Le premier motif d'appel de la Défense illustre bien ces deux thèmes.

2 Elle dit que les arguments sur sa capacité physique soulèvent un doute

3 raisonnable quant à sa présence dans les monts Berisa. En fait, il fait

4 semblant de tenir compte de l'évaluation que fait la Chambre. Elle le dit

5 au paragraphe 136 de son mémoire d'appel. Plus loin, dans les paragraphes

6 137 à 144, la Défense invite la Chambre d'appel à examiner d'un œil nouveau

7 les éléments de preuve. Mais ceci voudrait dire que la Chambre d'appel

8 devrait ignorer les éléments examinés par la Chambre de première instance

9 et demande à la Chambre d'appel de n'examiner qu'un seul aspect de ces

10 éléments de preuve, à savoir les éléments de preuve concernant l'état de

11 santé.

12 La Chambre de première instance se devait d'examiner tous les

13 éléments de preuve pour d'abord décider si les éléments à charge pouvaient

14 prouver au-delà de tout doute raisonnable la participation de Bala, et pour

15 ce qui est de son alibi ou de son état de santé, si ceux-ci pouvaient

16 soulever un doute raisonnable. La Chambre a eu raison de conclure que la

17 totalité des éléments de preuve établissent la présence de Bala et sa

18 participation au-delà de tout doute raisonnable.

19 La Chambre, dans ses conclusions, examine les éléments suivants. Vous

20 trouverez ces références aux paragraphes 447 à 457 du jugement ainsi qu'au

21 paragraphe 2.2 jusqu'au paragraphe 2.4 de la réponse donnée par écrit par

22 l'Accusation.

23 La Chambre a d'abord examiné le témoignage direct de cinq témoins.

24 Ils ont dit qu'un garde appelé Shala avait participé à leur détention au

25 camp de Lapusnik. Ces témoins ont dit que c'est ce Shala, cet homme du

26 camp, qui les avait accompagnés le

27 26 juillet 1998 dans les monts Berisa. Ils ont dit que pendant l'offensive

28 serbe ce jour-là, Shala et Murrizi avaient rassemblé des prisonniers pour

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1 les faire partir vers les monts Berisha. Au cours de cette marche, ce même

2 garde, ce Shala, avec Murrizi, a divisé le groupe, a relâché un des groupes

3 et ce même garde Shala avec Murrizi, et éventuellement un troisième soldat

4 de l'UCK ont fait marcher le deuxième groupe vers une clairière où ces

5 hommes ont assassiné neuf de ces prisonniers.

6 La Chambre de première instance a également conclu que le garde Shala

7 du camp et des monts Berisa était Haradin Bala. Ceci était évoqué dans le

8 détail par les arguments présentés par Mme McCall s'agissant de

9 l'identification. Je ne vais donc pas répéter ces arguments.

10 La Défense soutient qu'en dépit de ces témoignages directs, l'élément

11 de son état de santé soulève un doute raisonnable quant à sa présence, mais

12 cet argument ne tient pas compte des éléments de preuve présentés

13 s'agissant des conditions de la marche et des participants à cette marche.

14 Quand vous voyez ces conclusions et que vous les associez aux cinq témoins

15 directs qui ont dit que le garde Shala était avec eux au cours de cette

16 marche, il est clair que l'élément de preuve de la santé de Bala ne soulève

17 pas de doute raisonnable. Les conclusions de la Chambre et les références

18 qu'elle présente s'agissant des conditions de la marche et de la condition

19 des partisans se retrouvent aux paragraphes 447 à 457 du jugement. Je vais

20 vous les résumer.

21 Le 26 juillet 1998, il faisait chaud. Les témoins disent que le

22 sentier, le chemin était difficile. Ils ont parcouru environ

23 4 kilomètres en tout. Au cours de la première partie de cette marche,

24 c'était surtout une montée, il a fallu 40 minutes. Puis, il y a eu une

25 pause d'environ deux heures. Dans le deuxième tronçon, avec le deuxième

26 groupe, ce fut par monts et par vaux, et il y a eu une autre pause.

27 Le groupe de prisonniers qui entreprenaient cette marche, c'étaient

28 des hommes qui étaient emprisonnés depuis au moins six semaines, alors

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1 qu'ils étaient attachés, enchaînés à un des murs avec un sceau plein

2 d'excréments qui faisait office de toilette. Il y avait parmi ces hommes

3 des personnes âgées dont plusieurs avaient subi des sévices sévères pendant

4 la détention. Ils avaient des côtes cassées, un sternum cassé notamment

5 pour l'un d'entre eux. Un des prisonniers avait une jambe cassée. Il a

6 fallu que d'autres prisonniers les soutiennent ou les transportent pendant

7 cette marche. Aucun de ces prisonniers n'avait mangé depuis trois ou quatre

8 jours.

9 Si vous voyez l'ensemble des éléments de preuve, il prouve que Bala

10 était un des membres de l'UCK qui s'est contenté d'escorter ces prisonniers

11 tellement affaiblis. La santé de Bala, au regard de ces éléments de preuve,

12 ne soulève pas de doute raisonnable quant à sa présence.

13 S'agissant de l'erreur de droit invoquée dans la deuxième partie du

14 sous-motif, la Chambre, dit la Défense, a renversé la charge de la preuve,

15 a exigé de la Défense qu'elle prouve son incapacité physique au-delà de

16 tout doute raisonnable. Le résultat logique de cet argument de la Défense

17 dans cette section serait qu'une fois que la Défense aurait présenté la

18 moindre preuve, elle constituerait l'absence de tout doute raisonnable, à

19 moins que l'Accusation ne démontre de façon spécifique que cet élément de

20 preuve n'était pas crédible ou fiable. Ce n'est pas correct.

21 L'analyse faite par la Chambre est tout à fait correcte. Elle a

22 d'abord vu si l'Accusation avait présenté des moyens qui permettaient

23 d'apporter la preuve au-delà de tout doute raisonnable, puis a regardé s'il

24 y avait dans le dossier des éléments qui suscitaient ce doute raisonnable.

25 Elle a examiné les éléments médicaux, elle a tiré une conclusion illustrée

26 par le fait qu'il y avait cinq témoins qui avaient identifié Shala, qu'on a

27 identifié comme étant Bala pendant la marche, et que les éléments de preuve

28 médicaux ne prouvaient pas qu'il n'aurait pas pu être présent. Par

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1 conséquent, la Chambre a conclu qu'il n'y avait aucun doute raisonnable.

2 Par conséquent, la Défense ne montre pas qu'une Chambre, en

3 appliquant bien le droit, aurait pu être convaincue au-delà de tout doute

4 raisonnable qu'il n'aurait pas pu être présent ni participer à cette marche

5 dans le mont Berisa. C'était la seule conclusion que pouvait tirer la

6 Chambre. Parce que les éléments de preuve médicaux, pris de la façon la

7 plus favorable, étaient qu'un effort physique pénible n'était pas

8 conseillé.

9 Paragraphes 648 et 649, la Chambre examine les éléments de preuve

10 médicaux suivants. Paragraphe 648, elle dit qu'il souffrait d'angine de

11 poitrine, de haute pression artérielle et d'arythmie. Par conséquent, on

12 lui avait conseillé de n'avoir que des exercices légers, d'éviter de

13 s'épuiser. La Chambre conclu également, au paragraphe 648, qu'en dépit du

14 fait que Bala avait des problèmes de tension et d'arythmie depuis avant

15 1998, ça ne l'avait pas empêché de rejoindre l'UCK. Elle conclut également

16 que même si pendant longtemps il avait eu des travaux assez légers à faire,

17 pendant son service dans l'UCK, il avait également participé à des actions

18 militaires véritables.

19 Ceci a porté la Chambre à conclure qu'en dépit de son état de santé,

20 Bala était à même de se livrer à ces activités pénibles de combat, ou qu'il

21 n'avait pas toujours rechigné à exécuter des tâches pénibles militaires

22 exigées par l'UCK à cause de son état de santé.

23 Dans son mémoire de réplique, la Défense nous dit ceci : même si les deux

24 médecins n'ont pas témoigné pour dire qu'il était physiquement incapable

25 d'entreprendre cette marche dans les monts Berisha, les éléments de preuve

26 étaient suffisamment convaincants pour susciter un doute raisonnable.

27 Paragraphe 149 de son mémoire d'appel. La Défense dit que le Dr Gashi dit

28 ceci : "Ce n'aurait pas été possible qu'une personne qui souffre d'une

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1 maladie vasculaire aussi grave se livre à des exercices physiques aussi

2 difficiles."

3 Le Dr Gashi ne s'est pas vu soumettre d'élément particulier concernant ce

4 périple, la distance, le relief, le temps permis pour les pauses, la durée

5 des pauses. On ne lui a pas non plus dit dans quel état étaient les autres

6 participants à cette marche.

7 La Défense, dans son paragraphe 35, nous dit que ces faits

8 supplémentaires n'ont pas de pertinence, mais s'il n'y a pas ces faits,

9 l'avis du médecin est tout à fait hypothétique.

10 Mme CAREY : [interprétation] Je m'excuse auprès des interprètes car

11 je suis un peu rapide.

12 L'opinion du Dr Gashi est parfaitement hypothétique, et ne vient pas

13 soutenir la suggestion formulée par la Défense.

14 La Défense insiste beaucoup pour dire que ces éléments médicaux n'ont

15 pas été contestés, mais sont sans pertinence, car tout ce qu'elle prouve,

16 c'est qu'il avait un problème cardiaque, et que des efforts pénibles

17 n'étaient pas conseillés. Par ailleurs, la Chambre de première instance

18 avait été saisie du témoignage direct de sa participation à la marche,

19 l'identification de Bala en tant que Shala, les éléments de preuve

20 concernant le type de marche entreprise ainsi que l'état de santé dans

21 lequel se trouvait les participants ainsi que les éléments médicaux

22 concernant l'état de santé de Bala. Lorsque ces éléments sont pris dans

23 leur ensemble, comme l'exige d'ailleurs la loi, le droit, ceci ne laisse

24 aucun doute. Il a bien participé à cette marche dans les monts Berisa. La

25 Défense n'a pas prouvé, que la conclusion de la Chambre de première

26 instance était une conclusion qu'aucune Chambre raisonnable appliquant bien

27 le droit, aurait pu tirer.

28 L'Accusation relève que même si elle n'a pas répondu au quatrième

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1 motif d'appel de la Défense, concernant la capacité physique qu'avait Bala

2 de frapper le Témoin L-12 dans le camp d'emprisonnement, on y trouve les

3 mêmes défaillances. Dans le quatrième motif, la Défense dit que l'élément

4 de preuve concernant son état physique soulève des doutes raisonnables

5 quant à la capacité qu'il aurait de frapper d'un bâton le témoin pendant

6 longtemps, le Témoin L-12. Tout comme dans le premier sous-motif.

7 L'argumentation de la Défense ne tient pas compte du témoignage direct,

8 tant de la victime L-12, que de la victime L-04, celui qui était enchaîné à

9 côté du Témoin L-12, qui a reconnu Shala comme état celui ayant infligé ces

10 sévices. La Défense exagère l'élément de preuve médical, car personne n'a

11 voulu parler de la capacité qu'avait Bala de frapper une personne pendant

12 une durée prolongée. Par conséquent, ce quatrième motif devrait être

13 rejeté.

14 Prenons maintenant le deuxième et le troisième sous-motif.

15 La Défense y fait valoir que la Chambre n'a pas tenu compte

16 d'éléments prouvant l'innocence, à savoir qu'il n'était pas présent sur le

17 site d'exécution et qu'il n'avait pas participé aux assassinats. S'agissant

18 du troisième sous-motif, même si ces deux sous-motifs sont étroitement

19 liés, nous, nous passerons sur nos écritures, et je ne parlerai que du

20 deuxième sous-motif.

21 La déduction selon laquelle il n'était pas présent ou serait parti du

22 site d'exécution est un élément que la Chambre n'avait pas, vu le

23 témoignage direct de L-96, qui était corroboré de façon matérielle par

24 d'autres éléments tout à fait fiables. C'est un exemple qui est donné ici

25 de cette stratégie d'isolement, d'isoler les éléments où la Défense se

26 concentre sur un seul élément, comme si c'était le seul élément qu'aurait

27 que la Chambre aurait dû prendre en compte.

28 La Défense dit qu'il y avait deux catégories d'éléments de preuve

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1 s'agissant de ce qui s'est passé sur le site d'exécution dans les monts

2 Berisa. Nous avons la déposition du Témoin L-96 ainsi que les rapports

3 balistiques et médico-légaux. D'après la Défense, la déposition du Témoin

4 L-96 n'est pas corroborée. Elle doit donc être exclue. Une fois que c'est

5 fait, dit la Défense, il ne reste plus à la Chambre que le rapport

6 balistique, le rapport médico-légal qui ne suffisent pas à établir la

7 culpabilité de Bala, parce que ceux-ci n'excluent pas individuellement la

8 supposition raisonnable qu'il n'était pas là sur les sites d'exécution.

9 Je voudrais revenir sur un des points évoqués par M. Guy-Smith s'agissant

10 de la crédibilité de L-96. Ce dernier n'a jamais identifié Agim Murtezi sur

11 une série de photos. Ceci se voit au compte rendu d'audience, à la page 2

12 671 [comme interprété]. Il a dit qu'il avait appris de deuxième main que

13 Murrizi, l'autre garde de l'UCK, s'appelait, en fait, Agim Rrutezi [comme

14 interprété]. Ceci se trouve à la page 2 509 et à la page 2 510 du compte

15 rendu d'audience. Vous avez entendu cet argument, la Chambre de première

16 instance aussi, et le dossier le montre. Il n'a jamais identifié - L-96, je

17 parle, n'a jamais identifié Agim Murtezi comme l'a dit la Défense. En fait,

18 la Défense, en faisant ce résumé, ignore le fait que ce témoignage a été

19 corroboré de façon matérielle par d'autres éléments, que si la Défense, à

20 savoir le rapport balistique et le rapport médico-légal, mais aussi par

21 beaucoup d'autres éléments acceptés par la Chambre de première instance, et

22 que la Défense ignore tout simplement ou n'évoque pas.

23 La Chambre de première instance, paragraphe 541 [comme interprété], a eu

24 raison de s'appuyer sur le témoignage direct de

25 L-96, s'agissant de la présence et de la participation de Bala au mont

26 Berisa. L-96 parle des faits suivants sur le site d'exécution : que Bala

27 dirigeait la marche du deuxième groupe de prisonniers vers la clairière, et

28 a donné l'ordre à ce groupe de s'asseoir. Puis Bala a rejoint Murrizi et le

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1 troisième soldat, et a dit : Voilà maintenant votre peine de mort. Il a

2 chargé sa kalachnikov. L-96 a dit aussi qu'il avait entendu des rafales de

3 tirs venant de deux kalachnikovs. Jugement, paragraphe 451.

4 La Chambre a examiné de façon très minutieuse le témoignage de L-96 dans

5 tout le jugement. Si elle s'est appuyée sur lui, c'est parce qu'elle a

6 estimé que ceci était suffisamment corroboré par les Témoins L-10, L-04, L-

7 06 et L-12, mais aussi par le rapport balistique et médico-légal. Ces

8 éléments sont longuement discutés au paragraphe 447 à 457 du jugement.

9 Plusieurs témoins ont parlé du rôle important joué par Bala dans la

10 direction de la marche. Il leur a dit de se mettre en rangs en se tenant la

11 main. Il a donné des instructions à Murrizi pour dire par où aller. Il a

12 divisé les prisonniers en deux groupes auprès du cerisier et il a donné les

13 papiers de décharge pour le premier groupe. Ces mêmes témoins ont vu Bala

14 repartir dans le sens inverse vers le deuxième groupe dans lequel se

15 trouvait L-96 et les neuf personnes dont on a retrouvé les corps sur les

16 sites d'exécution. La Chambre tient aussi compte du fait que L-96 a pu

17 conduire les enquêteurs vers le charnier et que ces corps ont été

18 effectivement identifiés dans le rapport médico-légal. Elle tient compte

19 aussi du fait que des douilles des balles de deux kalachnikovs ont été

20 trouvées sur le site d'exécution.

21 Aux paragraphes 448 et 456 du jugement, L-96 dit que Bala et le

22 troisième soldat avait chacun une kalachnikov, et Murrizi, lui, il avait un

23 fusil M-48. L-10 a dit que Bala et le troisième soldat avaient une arme

24 automatique et que Murrizi avait un fusil. L-04 a dit que Bala avait

25 toujours une arme automatique. Même si la Chambre n'identifie pas bien Bala

26 et Murrizi comme ayant une kalachnikov, les éléments restent clairs. Les

27 conclusions de la Chambre sont largement corroborées par les éléments de

28 preuve tels que cités aux paragraphes 453 et 453.

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1 Quand on voit le témoignage direct de L-96 et tous les autres

2 éléments à l'appui, la Chambre n'avait pas la possibilité, d'après les

3 éléments de preuve, de dire qu'il avait rebroussé chemin. Elle devait

4 conclure l'inverse. Il n'y avait pas de preuve montrant qu'il aurait

5 rebroussé chemin. Les conclusions que vous demande la Défense sont des

6 conjectures. La Défense n'a pas montré en quoi une Chambre raisonnable,

7 appliquant bien le droit, aurait pu se convaincre qu'il n'était pas présent

8 sur le site d'exécution. Par conséquent, ce sous-motif doit être rejeté.

9 Comme je vous l'ai dit, pour ce qui est du troisième sous-motif, nous

10 allons nous baser sur nos écritures. Par conséquent, en conclusion, pour

11 les motifs susmentionnés et mentionnés dans le mémoire en réplique et pour

12 mes arguments ainsi que ceux de

13 Mme McCall, tous les motifs invoqués par la Défense de M. Bala devraient

14 être rejetés. Merci.

15 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Ceci conclut-il les présentations

16 orales de l'Accusation ?

17 Mme McCALL : [interprétation] Oui.

18 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Dans ce cas, maintenant je donne

19 la parole à la Défense, à l'appelant pour sa réplique.

20 Maître Guy-Smith, vous avez la parole.

21 M. GUY-SMITH : [interprétation] Tout d'abord, je voudrais traiter le

22 problème du Témoin L-96. Nous faisons valoir que L-96 est un menteur. C'est

23 une personne qui, lorsqu'elle a été confrontée au fait, qu'il était prêt à

24 accuser un innocent de crimes très graves, et d'ailleurs épouvantables. Ce

25 témoin a dit à ce moment-là qu'il avait déjà vu cet homme à la télévision,

26 et quand on lui a demandé s'il présenterait des excuses à cet homme, ici

27 dans ce prétoire, dans le boxe des témoins, a déclaré qu'il n'était pas

28 prêt à faire cela.

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1 L-96 est la seule personne qui déclare et qui affirme que Haradin

2 Bala était présent au site d'exécution des monts Berisa. Ce qui est très

3 intéressant, c'est que l'Accusation vient juste de nous suggérer que

4 plusieurs personnes, L-04, L-12, L-06 et L-10, ont tous déposé pour dire

5 que Haradin Bala faisait partie de la marche allant du camp aux monts

6 Berisa. Ce n'est pas vrai. Ce n'est pas ça. C'était Shala qui était

7 présent. Le problème ici c'est Shala. Il faut savoir si Haradin Bala a été

8 correctement identifié comme étant le gardien de prison, Shala.

9 Tout est là. Comme je l'ai déjà dit, je le répète, L-04 et L-12 n'ont

10 pas identifié qui que ce soit dans la série de photos. Il n'y a pas eu de

11 poids accordé à leurs témoignages. L-06 et L-10 ont identifié Haradin Bala

12 en prétoire, mais la Chambre a concédé qu'elles avaient là fait une erreur.

13 En se basant sur uniquement ces preuves, je me demande vraiment si une

14 Chambre de première instance raisonnable, en appliquant le droit, pourrait

15 en conclure que Haradin Bala peut bel et bien être identifié comme ce

16 Shala, ce Shala qui a gravé le mont Berisa, sans aborder le problème de son

17 état physique.

18 Etant donné qu'ici nous parlons des éléments de preuve indirects, des

19 déductions éventuelles qui peuvent être faites, c'est tout ce que l'on a

20 ici. Il n'est pas très clair quant à savoir si avec ces moyens de preuve on

21 peut en déduire une autre conclusion raisonnable que celle à laquelle est

22 arrivée la Chambre de première instance. Dans l'arrêt Celebici, la Chambre

23 a déclaré : "S'il y a une autre conclusion qui pourrait être raisonnable ou

24 qui pourrait être une déduction raisonnable à propos des moyens de preuve

25 présentés et qui va en faveur de l'innocence de l'accusé, celui-ci doit

26 être acquitté."

27 Pour ce qui est des problèmes de l'état de santé de M. Bala qui est

28 avéré, je vous demande la chose suivante. Cet élément ne pourrait-il pas

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1 être pris en compte pour en déduire, de façon raisonnable, que cette

2 personne ne peut être qu'innocente ? Parce que l'état de santé de Haradin

3 Bala était tel qu'il ne pouvait absolument pas faire les activités

4 auxquelles s'est prêté Shala. Il me semble que c'est une déduction tout à

5 fait raisonnable, quel que soit d'ailleurs le problème d'identification. Je

6 pense qu'on ne peut être que convaincu de cela.

7 Ce qui s'est passé ici, en matière d'identification, et les

8 conclusions quant à l'identification, m'inquiète énormément, surtout ce qui

9 est au paragraphe 627 du jugement et surtout le libellé employé dans ce

10 paragraphe. Pourtant ce qui est arrivé me semble clair. Ayant pu déterminer

11 qu'ils ne pouvaient pas arriver à quelque conclusion que ce soit en ce qui

12 concerne les identifications négatives, celles-ci ont été mises de côté et

13 n'ont pas été prises en compte. La Chambre de première instance, au

14 paragraphe 631, a dit ce qui suit pour ce qui est des moyens de preuve

15 portant sur l'identification :

16 "Alors qu'aucun des sept identifications, lorsqu'elles sont prises en

17 compte indépendamment, ne permettent à la Chambre de déduire que Shala est

18 bel et bien Haradin Bala, étant donné qu'il y a des possibilités de faire

19 des erreurs de toute bonne foi qui ont été identifiées précédemment, au vu

20 des circonstances étudiées," et ce qui m'intéresse, c'est ce qui vient,"en

21 revanche, l'association de ces sept identifications indépendantes permet,

22 de l'avis de la Chambre, d'exclure toute possibilité d'erreur."

23 Alors, trois quand même ont été négatives. Trois identifications

24 étaient négatives. Et en prétoire, deux sont des identifications qui sont -

25 - qui ne sont pas désapprouvées de la cour, ou qui sont entachés de

26 suspicion, puisque ce sont des identifications directes, et finalement il

27 nous reste plus que l'identification du L-96, qui me rappelle la vieil

28 adage, ce qui, "assus in omnibus," et d'utiliser ce type de processus

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1 d'identification pour arriver à une condamnation est au mieux dangereux. Il

2 y a une affaire célèbre aux Etats-Unis impliquant l'accusation d'un prêtre

3 catholique, le père Bernard Pagano, aussi appelé le gentleman bandit, qui

4 était accusé de plusieurs vols, de cinq vols en tout. Cinq témoins

5 oculaires indépendants, donc cinq personnes ont identifié le père Pagano en

6 disant que c'était bien lui le voleur, que c'était lui le coupable. Il a

7 été argumenté que leurs cinq témoignages se corroboraient. Fort

8 heureusement, grâce à Dieu, le vrai bandit a fait les aveux. Ainsi, le père

9 Pagano a pu entrer dans son presbytère. Je compte sur vous pour opérer de

10 la sorte.

11 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Merci.

12 Donc, je pense que ceci conclut votre réplique.

13 M. GUY-SMITH : [interprétation] Oui. Mais demain je reprendrai la

14 parole.

15 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Bien sûr. Y a-t-il des questions

16 des Juges ?

17 M. TOPOLSKI : [interprétation] Je ne dois pas parler avant

18 15 heures 30 demain, mais j'aimerais dire quelque chose avant que nous

19 levions la séance. Par courtoisie, je dis : J'avais donné à

20 Mme Brady avant le début de cette audience un document que nous préparons

21 tous en Angleterre avant tout appel, c'est-à-dire, en fait, le fil rouge de

22 nos écritures que nous allons faire pour M. Musliu. Donc nous avons fait

23 cela. Nous avons des exemplaires qui sont disponibles aussi pour les Juges

24 de la Chambre. Nous comprenons bien que cette Chambre n'est pas habituée à

25 obtenir ce type de document, mais ce document existe. Il est disponible si

26 vous voulez voir et, bien sûr, vous le pourrez. Cela pourra peut-être

27 permettre d'abréger mon discours, ce qui sera peut-être considéré par vous

28 comme quelque chose de bénéfique. Mais de toute façon, c'est à vous d'en

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1 juger.

2 [La Chambre d'appel se concerte]

3 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] J'ai rapidement consulté mes collègues,

4 et comme vous l'avez dit ce n'est pas une coutume courante dans ce

5 Tribunal. Nous n'acceptons pas ce type de mémoire écrit juste à la veille

6 de l'audience. Mais nous sommes ravis de savoir que vous l'avez communiqué

7 à la partie adverse, mais nous n'allons pas utiliser ce document.

8 M. TOPOLSKI : [interprétation] Très bien.

9 M. MANSFIELD : [aucune interprétation]

10 M. LE JUGE POCAR : [aucune interprétation]

11 M. MANSFIELD : [interprétation] J'ai autre chose à aborder. J'ai donné à

12 l'Accusation, Mme Brady, un document qui est une tentative de réponse à vos

13 questions, un certain niveau de détail en faisant référence aux moyens de

14 preuve, et cetera. J'avais l'intention dès demain matin de vous fournir ce

15 document à moins, bien sûr, que vous ne vouliez pas. Vos questions ont été

16 reçues il y a très peu de temps, et je pense que cela économiserait

17 énormément de temps en audience. De plus, l'Accusation a déjà le document

18 en main. Il sera peut-être un petit peu modifié pendant la nuit, mais

19 j'aimerais juste vous dire que je compte vous le présenter demain matin.

20 Bien sûr, je suis entre vos mains pour savoir ce que je vais en faire.

21 C'est un document, en fait, qui ne fait que quatre pages, avec des notes de

22 pied de page, qui est une réponse à vos questions.

23 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Avez-vous quelque chose à dire du côté

24 de l'Accusation.

25 Mme BRADY : [interprétation] Oui, tout à fait. Jusqu'à présent, je n'ai pas

26 vraiment pu étudier ce document en détail, mais je suis ravie que la

27 Défense nous l'ait communiqué. Nous n'avons pas l'intention de déposer un

28 document avec des réponses à vos questions. Nous le ferrons lors de notre

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1 discours de demain. Nous n'avons pas de problèmes avec ce document qui

2 répond aux questions pour qu'il soit déposé auprès du greffe. Il est vrai

3 qu'il parle des moyens de preuve en détail. Il pourrait peut-être réduire

4 les heures que nous allons passer en audience. C'est un document qui est

5 différent du document de Me Topolski. Donc, nous n'avons aucune objection à

6 propos de ce type de réponses aux questions sous cette forme-là.

7 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Très bien. Il n'y a pas d'objection de

8 l'Accusation. Dans ce cas-là, nous admettrons ce document et nous versons

9 au dossier.

10 M. MANSFIELD : [aucune interprétation]

11 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Mais demain matin, bien sûr.

12 M. MANSFIELD : [interprétation] Oui, demain matin.

13 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] Demain matin, donc. Déposez-le demain

14 matin.

15 Mme MANSFIELD : [aucune interprétation]

16 M. LE JUGE POCAR : [interprétation] S'il n'y a plus de points à aborder,

17 nous pouvons donc lever la séance et nous reprendrons demain à 9 heures du

18 matin pour l'appel formé par l'Accusation.

19 --- L'audience est levée à 17 heures 16 et reprendra le

20 mercredi 6 juin 2007, à 9 heures 00.

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