Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le lundi 22 septembre 2008

  2   [Audience publique]

  3   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 14 heures 15.

  5   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je comprends que les deux parties

  6   ont des questions à évoquer. La Chambre a elle-même quelques questions à

  7   évoquer aussi. La première est le fait que les  deux équipes de la Défense

  8   ont reçu l'ordre de déposer la liste des témoins qui seront cités pour la

  9   Défense, et si l'article 98 bis établit qu'il y aurait lieu de poursuivre,

 10   cette liste doit contenir tous les renseignements nécessaires conformément

 11   aux dispositions de l'article 65 ter (g)(i) et doit être également déposée

 12   avec une liste de pièces comme prévu à l'article 65 ter (g)(ii). Compte

 13   tenu du calendrier des interruptions de cette affaire tel que déjà annoncé,

 14   la Chambre de première instance demande que ces renseignements lui soient

 15   fournis au plus tard le vendredi 17 octobre 2008.

 16   La Chambre actuellement est sur le point de rendre sa décision sur la

 17   requête présentée le 8 septembre et qui demandait à pouvoir remplacer VG-42

 18   pour VG-85 et que VG-64 pour VG-71. Il est fait droit à cette demande, mais

 19   l'Accusation doit noter que conformément aux termes de sa décision, la date

 20   la plus proche pour ces dépositions sera le 27 octobre, et la raison de

 21   cela c'est pour donner à la Défense suffisamment de temps pour se préparer.

 22   Alors, je vais demander qui doit maintenant intervenir en premier,

 23   Monsieur Groome, vous avez des questions à évoquer.

 24   M. GROOME : [interprétation] Au fur et à mesure que l'affaire progresse, je

 25   vois que parmi mes responsabilités est de façon à pouvoir poursuivre de la

 26   façon la plus efficace, et l'un des témoins que nous avons essayé d'ajouter

 27   le 8 septembre 2008, c'est le Témoin VG-137.  Il s'agit d'un Serbe, un

 28   auteur de crimes qui a fait l'objet d'une condamnation. Une déclaration a


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  1   été enregistrée sur vidéo pendant l'été, mais ce n'est que la semaine

  2   dernière que nous avons en fait eu la transcription de cela. Après avoir

  3   examiné l'ensemble de la transcription et vu les conséquences du point de

  4   vue sécurité pour la famille de ce témoin, il y a des implications du point

  5   de vue sécurité qui n'ont rien à voir avec la Défense de l'accusé en

  6   l'espèce, mais des questions de sécurité générale, je pense qu'il serait

  7   dans l'intérêt de la justice que je ne cite pas ce témoin à comparaître

  8   pour le moment. Donc je vais retirer notre demande qui visait à ajouter le

  9   Témoin VG-137.

 10   Bien sûr, je présente mes excuses au conseil de la Défense et au

 11   personnel de la Chambre, aux juristes qui peuvent avoir déployé des efforts

 12   pour cela déjà, mais je pense que mes obligations sont de continuer à

 13   réapprécier la liste des témoins et de la réduire lorsque c'est possible.

 14   Monsieur le Président, la semaine dernière lorsque j'ai déposé le

 15   calendrier des témoins pour cette semaine, j'ai mentionné le témoin Zehra

 16   Turjacanin, et il y a un point d'interrogation sur la question de savoir si

 17   elle serait en mesure de déposer le jeudi qui vient. Elle est arrivée à La

 18   Haye et notre intention était de la faire entendre jeudi. J'ai une demande

 19   de la Chambre qui pensait qu'il était préférable peut-être que sa

 20   déposition commence et se termine en une seule journée. Je pense que ceci

 21   pourrait lui causer certains problèmes.

 22   Par conséquent, je sais qu'à l'origine nous avions demandé et qu'on

 23   nous avait accordé trois heures pour l'examiner. Ma demande et mon

 24   intention seraient de réduire mon interrogatoire à 1 heures 45 minutes. Je

 25   voudrais donc demander si nous pouvions commencer sa déposition jeudi

 26   matin, terminer jeudi après-midi. Je voudrais prier la Chambre d'examiner

 27   cette demande de sorte que même si nous étions un peu en avance du

 28   calendrier mercredi, nous ne ferions pas en sorte que sa déposition ne


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  1   commence le jeudi matin.

  2   Maintenant, cette semaine nous avons prévu de faire entendre deux

  3   experts qui ont consacré une bonne partie de leur temps pour savoir ce qui

  4   s'était passé à Visegrad. D'après la décision de la Chambre, nous avons eu

  5   l'intention pour cette semaine de produire ces témoins et le rapport qu'ils

  6   ont fait de façon à ce qu'ils puissent se prêter à un contre-

  7   interrogatoire. En ce qui concerne leur déposition, il semble qu'il puisse

  8   y avoir quelques avantages à leur demander d'ajouter quelques éléments de

  9   preuve supplémentaires. Par exemple, à la suite de l'affirmation d'un moyen

 10   de défense d'alibi, nous avons cité plusieurs témoins pour réfuter cet

 11   alibi. Une partie de ces témoins dans leur déposition ont parlé de meurtre

 12   d'autres personnes qui sont nommées. Mme Tabeau a examiné les données et

 13   les sources disponibles pour ces noms et est en mesure de fournir des

 14   renseignements en ce qui concerne les dates qui ont été enregistrées comme

 15   étant la date de leur décès.

 16   Maintenant, les dates sont parfois approximatives et sont déterminées

 17   par les informations qui vous ont été fournies par les membres des familles

 18   pour, par exemple, dire quand ils ont vu la victime pour la dernière fois.

 19   Toutefois, avec cette mise en garde, ils peuvent fournir des éléments

 20   permettant de corroborer le fait que ces victimes ont bien été tuées, et

 21   fournit une date approximative.

 22   Elle a également examiné les sources et les données qui servent de

 23   base à cela et a créé un tableau des victimes qui sont nommées dans l'acte

 24   d'accusation et est en mesure de fournir des renseignements analogues pour

 25   des personnes qui ont été portées disparues.

 26   Elle est également en train de préparer pour sa déposition un point

 27   essentiel qui permet de résumer de façon succincte son rapport et de

 28   présenter de façon graphique ses premières conclusions. Parmi celles-ci, il


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  1   y a un croquis ou un graphe qui montre les dates et il y a un élément

  2   statistique concernant ces meurtres à Visegrad. Je pense qu'il pourrait

  3   être utile à la Chambre de voir cet exposé et d'entendre ses explications.

  4   Je pense que pour ces deux questions on pourrait en traiter en

  5   approximativement 50 minutes. Je voudrais donc demander à la Chambre de

  6   bien vouloir examiner si l'Accusation serait autorisée à consacrer environ

  7   50 minutes pour entendre Mme Tabeau sur ces autres questions.

  8   De même, le Dr John Clark, ce collègue qui a procédé à l'examen des

  9   restes humains trouvés à Slap est arrivé à La Haye au cours du week-end. Sa

 10   déposition de l'affaire Vasiljevic sera admise conformément à une décision

 11   prise par la Chambre. Une grande partie des restes qu'il a examinés ont

 12   maintenant été identifiés. Pour trois d'entre eux il y a des victimes qui

 13   sont donc nommées dans l'acte d'accusation. L'Accusation, par conséquent,

 14   demande environ 10 minutes pour examiner et entendre le Dr Clark et qu'il

 15   puisse parler de certains dossiers précis, de particulier et notamment les

 16   rapports d'autopsie précis en ce qui concerne ces trois cas, ces trois

 17   examens qu'il a effectués pour des victimes qui sont nommées dans l'acte

 18   d'accusation.

 19   Merci, Monsieur le Président.

 20   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Monsieur Groome.

 21   M. GROOME : [interprétation] Votre microphone, s'il vous plaît.

 22   [La Chambre de première instance se concerte]

 23   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Pourriez vous, s'il vous plaît,

 24   Monsieur Groome, nous préciser quelle est la situation en ce qui concerne

 25   Mme Tabeau. Est-ce qu'elle viendrait déposer au cours de la même journée

 26   que Zehra Turjacanin ?

 27   M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, comme je l'ai déjà dit

 28   tout à l'heure, parce qu'elle travaille dans le même bâtiment, je la décris


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  1   comme étant une personne que l'on peut appeler à très brefs délais dès

  2   qu'un créneau se présenterait. Dans la pièce que nous avons déposée jeudi

  3   dernier, nous avons dit qu'elle pourrait peut-être déposer aujourd'hui

  4   parce que nous avons prévu que nous nous trouverions un peu en avance du

  5   calendrier aujourd'hui du fait que la Chambre a reporté l'audition du

  6   Témoin VG-42 qui devait se faire aujourd'hui. Donc elle serait le deuxième

  7   témoin que nous citerions cette semaine.

  8   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

  9   Oui, Maître Cepic.

 10   M. CEPIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 11   D'abord pour répondre aux questions qui ont été évoquées par mon ami et mon

 12   confrère M. Groome, nous n'élevons pas, bien sûr, d'objections, c'est-à-

 13   dire que Zehra Turjacanin pourra comparaître au cours d'une seule journée,

 14   donc à ce sujet, nous n'élevons pas d'objection.

 15   Nous voudrions demander que l'ensemble des documents de l'Accusation

 16   qui ont trait au Témoin VG-137 puisse nous être communiqué. Peut-être que

 17   ce serait utile à la Défense, nous ne le savons pas encore. Je voudrais

 18   également évoquer certaines autres questions. L'une est que l'admission

 19   d'une pièce que nous avons utilisée la semaine dernière avec le témoin

 20   Nurko Dervisevic. C'est sur la feuille contenant les pseudonymes, mais nous

 21   avons oublié de demander que cette pièce à conviction soit admise au

 22   dossier.

 23   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous l'admettrons.

 24   M. CEPIC : [interprétation] Je vous remercie beaucoup, Monsieur le

 25   Président.

 26   M. LE GREFFIER : [interprétation] La pièce 2D18, sous pli scellé.

 27   M. CEPIC : [interprétation] Je voudrais maintenant évoquer une autre

 28   question très importante qui a trait aux témoins qui sont prévus cette


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  1   semaine, en particulier vendredi en fin d'après-midi nous avons été

  2   informés par le bureau du Procureur que nous avions reçu de nouvelles

  3   communications qui avaient trait aux témoins de cette semaine, de sorte que

  4   samedi nous avons vérifié et nous avions reçu 1 304 pages qui avaient trait

  5   au témoin Ewa Tabeau, et 1 004 pages qui avaient trait à John Clark, et 284

  6   pages qui avaient trait au témoin Mirsad Tokaca.

  7   Dimanche après-midi nous avons reçu des documents supplémentaires, et dans

  8   cette communication nous avons trouvé une pièce que le bureau du Procureur

  9   a l'intention d'utiliser avec ce témoin. Il s'agit d'un curriculum vitae,

 10   le CV mis à jour d'Ewa Tabeau, mais dans tous ces documents et dans les

 11   documents antérieurs nous n'avons pas reçu de données ou de sources

 12   concernant le rapport d'expert d'Ewa Tabeau en ce qui concerne Visegrad.

 13   Ceci veut dire que le recensement de la population de 1991 et de 1997 pour

 14   ce qui est du registre des électeurs, essentiellement parce que Mme Tabeau

 15   a cité ceci dans son rapport d'expert, ces sources sont fiables et

 16   pertinentes pour nos objectifs.

 17   Vendredi matin nous avons été invités par le bureau du Procureur par

 18   courrier électronique de se mettre en rapport avec eux et d'examiner tous

 19   les documents qui avaient trait à ce témoin, mais ce matin, lorsque nous

 20   avons demandé les documents en question, le document de base de ce rapport,

 21   nous avons reçu comme réponse que les documents en question étaient

 22   couverts par les dispositions de l'article 70. Alors pour nous, c'est une

 23   source de confusion, parce qu'à notre avis ces documents ne peuvent pas

 24   être couverts par les dispositions de l'article 70, parce que l'article

 25   70(a) précise que ces rapports, les mémorandums et autres documents

 26   internes préparés par une partie ou des représentants en ce qui concerne la

 27   préparation d'une affaire ne font pas l'objet de communication et de

 28   notification en vertu de ces dispositions, mais dans la situation actuelle,


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  1   nous n'avons pas demandé des documents précédemment mentionnés. Nous avions

  2   simplement demandé que les documents demandés par une institution publique,

  3   qui étaient essentiels et forment la base du rapport d'expert, puissent

  4   nous être communiqués. Donc nous n'allons pas nous trouver prêts à un

  5   contre-interrogatoire sans les documents en question, parce que comme nous

  6   l'avons dit, c'est la base du rapport et nous avons besoin effectivement de

  7   ces documents pour pouvoir nous préparer.

  8   Je vous remercie.

  9   [La Chambre de première instance se concerte]

 10   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Alarid.

 11   M. ALARID : [interprétation] Monsieur le Président, je voulais informer les

 12   membres de la Chambre de certains points. Enfin, je ne voulais pas faire du

 13   doublon avec ce qu'a dit Me Cepic, mais c'était une de nos grandes

 14   préoccupations et nous avons effectivement déposé une demande pour qu'il

 15   n'y ait pas ce témoignage de l'expert de l'Accusation en se fondant sur le

 16   fait que la communication était tardive et le refus également de fournir

 17   les documents prévus ou couverts par l'article 70 conformément aux

 18   Règlements et procédures.

 19   Je ne pense pas que cette demande vous a déjà été présentée, bien que nous

 20   l'ayons déposée par écrit ce matin, donc c'est sur cela que nous nous

 21   sommes essentiellement centrés ce matin.

 22   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Non, je voulais dire une autre

 23   chose. Je n'ai pas l'intention de consacrer beaucoup de temps à ce point,

 24   parce qu'il y a d'autres façons de régler ces problèmes. Par exemple,

 25   Maître Cepic, si vous estimez que quelque chose n'entre pas dans les

 26   prévisions de l'article 70, à ce moment-là vous pouvez déposer une requête

 27   à cet effet et il fera l'objet d'une décision.

 28   Mais j'aimerais entendre ce qu'a à dire M. Groome sur la question des


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  1   communications tardives des documents qui semblent très volumineux, plus de

  2   1 000 pages, et brièvement également sur l'autre question évoquée par Me

  3   Cepic.

  4   M. GROOME : [interprétation] Je demande à M. Van Hooydonk de pouvoir donner

  5   les chiffres précis. A la fin de la semaine dernière, les deux experts

  6   avaient fait certains travails en ex-Yougoslavie. Nous avons communiqué ces

  7   documents en vertu de l'article 66 et de l'article 68. Nous avons envoyé

  8   une lettre à ce sujet la semaine dernière disant qu'il ne s'agissait pas de

  9   déclaration antérieure de ce témoin qui avait trait à quoi que ce soit à

 10   Visegrad, ou quoi que ce soit qui avait à voir avec cette affaire et qu'il

 11   n'y avait rien dans cela qui soit à décharge, mais qu'ils avaient travaillé

 12   dans ce domaine et qu'ils avaient fait beaucoup de travail dans d'autres

 13   parties de la Bosnie et de la Croatie en ex-Yougoslavie. Donc il n'y a pas

 14   de confidentialité en ce qui concerne ces documents. Si vous voulez accéder

 15   à ces documents, nous pouvons les fournir, et je pense que les conseils de

 16   la Défense voulaient effectivement avoir accès à ces documents. Je demande

 17   donc à M. Van Hooydonk de me donner les chiffres précis pour ce qui est de

 18   si l'on utilise une partie de ces documents, si nous étions censés

 19   communiquer cette partie ou l'ensemble par courtoisie à l'égard des

 20   conseils de la Défense, bien que ce n'était pas couvert par les règles de

 21   communication prévues par le Règlement. Donc, dès que j'aurais les

 22   renseignements, je pourrais rendre compte aux membres de la Chambre.

 23   En ce qui concerne l'autre question évoquée par Me Cepic, ce qui

 24   constitue une très grande base de données ou deux grandes bases de données

 25   pour ce qui est des registres des électeurs pour l'ensemble du pays en

 26   Bosnie-Herzégovine, il s'agit là de 9 millions et demi de fiches, et

 27   chacune de ces fiches contient environ de 50 à 60 variables ou des donnée.

 28   Donc cela fait des milliards d'éléments dont il faut tenir compte, vu


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  1   l'importance des renseignements qui sont contenus là, le volume des

  2   renseignements.

  3   Ewa Tabeau n'a jamais fourni ceci dans une autre affaire. Elle a reçu

  4   ceci en vertu d'un accord couvert par l'article 70. Je ne suis pas sûr,

  5   mais je peux me renseigner à ce sujet. Elle a dit que ça avait eu lieu dans

  6   le passé lorsque les équipes de la Défense avaient engagé leurs propres

  7   démographes et elle a eu la possibilité de mettre à disposition une base de

  8   données pour notre bureau afin qu'ils puissent faire les vérifications sur

  9   la base de données. Si c'est ça que le conseil de la Défense demande, c'est

 10   quelque chose qui peut être fait. Je pense qu'il y a une différence aux

 11   autres cas dans lesquels Ewa Tabeau avait déposé, comme dans les affaires

 12   de Srebrenica où les victimes et les accusés étaient -- où il y avait des

 13   actes d'accusation qui correspondaient à certaines preuves. On n'est pas en

 14   train d'essayer d'établir si telle ou telle personne qui a été tuée se

 15   trouve bien dans les évaluations de cette base de données, mais nous

 16   pouvons mettre cela à la disposition de la Défense si elle le souhaite. Il

 17   faudra peut-être une semaine pour avoir une pièce, des ordinateurs, et là

 18   encore je ne suis pas sûr que les conseils de la Défense apprécient

 19   vraiment ce qu'ils sont en train de demander. Je ne sais pas s'ils se

 20   rendent compte du type de documents  pour des personnes qui n'ont pas une

 21   formation en démographie. Je pense que c'est quelque chose qui nécessite le

 22   fait de disposer à un expert en matière de démographie.

 23   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Cepic, pourriez-vous --

 24   M. CEPIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je vous remercie

 25   beaucoup de cette possibilité. Nous avons juste demandé les documents qui

 26   avaient trait à la municipalité de Visegrad, qui étaient la base de ce

 27   rapport, et rien de plus que cela. Je vous remercie.

 28   [La Chambre de première instance se concerte]


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  1   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je n'ai pas l'intention de me

  2   prononcer sur aucune de ces questions. Si l'une des parties veut présenter

  3   une requête ou une demande à la Chambre, elle peut le faire.

  4   Veuillez maintenant faire entrer le témoin.

  5   M. ALARID : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai encore une

  6   question préliminaire à évoquer.

  7   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous avez une autre question

  8   préliminaire ?

  9   M. ALARID : [interprétation] Oui, s'il vous plaît, Monsieur le Président.

 10   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Bien.

 11   M. ALARID : [interprétation] En fait, je ne sais pas où commencer, Monsieur

 12   le Président.

 13   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ceci semble inquiétant, Maître

 14   Alarid.

 15   M. ALARID : [interprétation] En fait oui, c'est le cas, parce que

 16   maintenant je vais évoquer une question d'assistance effective pour des

 17   conseils, et je fais ceci parce que, vu le commentaire que vous m'avez fait

 18   vendredi, cette réputation qui serait de déformer les faits ou des éléments

 19   de preuve, ceci m'a fortement blessé. Je l'ai pris très au sérieux, parce

 20   que la dernière chose que je veuille faire devant ce Tribunal, c'est qu'il

 21   y n'ait la moindre question concernant mon intégrité.

 22   Je trouve que ceci est très grave, parce que je prends ça très à

 23   cœur. Je suis entré dans cette procédure et ce procès de façon très

 24   sérieuse, et quand vous avez un défenseur public qui doit travailler et

 25   qu'on doit choisir de défendre un tel client, on ne choisit pas en

 26   l'occurrence. Mais je voudrais penser que ce que nous avons dit comme

 27   argument en ce qui concerne le processus, compte tenu les contraintes de

 28   temps, à quel point ceci a été difficile de se préparer dans le temps


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  1   imparti par la Chambre. Je suis désolé de me plaindre, en fait  on ne va

  2   pas se plaindre chaque fois qu'on peut le faire, mais ce que vous avez dit

  3   m'a très fortement touché, Monsieur le Président, et je voudrais tout

  4   d'abord vous expliquer un tout petit peu ce que ça représente pour nous

  5   notre travail quotidien, ce qu'on nous demande de faire malgré le fait que

  6   je sois conseil principal dès avant juin et je n'avais pas d'aide avant

  7   cela. Donc j'ai été en quelque sorte prêté comme conseil, même comme co-

  8   conseil, depuis le mois de février dans cette affaire et il y avait une

  9   cinquantaine de requêtes présentées en l'espèce en juillet. La liste des

 10   témoins a dû être refaite, transformée, reformulée. De nouveaux témoins

 11   dont on n'avait jamais entendu parler ont dû être ajoutés. Il y en a eu 42

 12   qui ont été remplacés. Nous avons passé des semaines à cela.

 13   J'ai l'impression de perdre mon temps parce que pour être honnête,

 14   Monsieur le Président, si vous avez déjà condamné mon client sur la base de

 15   63, à ce moment-là, nous n'avons plus qu'à rentrer chez nous. Nous devrions

 16   rentrer chez nous parce qu'à ce stade, s'il y a 21 chefs d'accusation, tout

 17   ceci portant sur différents meurtres et atrocités d'un type ou d'un autre

 18   où il s'agit de persécution, des victimes qui ont été violées, et cetera,

 19   je suis désolé, mais ce n'est pas une question d'alibi. Si on se ramène la

 20   question de l'alibi par la petite porte en ce qui concerne le véhicule

 21   Passat et ce qui a été redit par Behija Zukic aujourd'hui et le témoin qui

 22   n'était pas présent pour savoir si Milan Lukic était présent à ce moment-là

 23   --

 24   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Lorsque le témoin viendra, vous

 25   pourrez présenter ces arguments --

 26   M. ALARID : [interprétation] Mais --

 27   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] -- et nous les examinerons.

 28   M. ALARID : [interprétation] C'est ce que nous voulons essayer de prouver,


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  1   Monsieur le Président. J'ai fait cinq copies dans mon classeur pour le

  2   Témoin 63 et j'ai été en mesure de le faire dans le temps imparti que la

  3   Chambre m'avait donné. Il y a six déclarations pour ces témoins sur 15

  4   jours [comme interprété]. Lorsque nous essayons d'éclairer ceci, je dois

  5   dire que -- je suis très mécontent de moi-même si vous êtes vous-même

  6   mécontent alors que ceci vous est présenté. Tout est ici sur la table.

  7   Donc vous pouvez comprendre ce que cela prend pour interroger un

  8   témoin sur ces choses qui sont arrivées. Cette femme était une victime, je

  9   n'ai aucun doute dans mon esprit. J'ai dû même la faire pleurer à un moment

 10   donné, mais est-ce que ça prouve quelque chose ? Je dois poser les

 11   questions au témoin, et la question c'est que peut-être que je ne m'exprime

 12   pas exactement comme il le fallait pour ce qui est des citations. Donc --

 13   cette déclaration qui est faite selon le fait que le témoin a dit que Milan

 14   Lukic tenait une tête décapitée. Dans une déclaration en prévision du

 15   procès de Boban Simsic, elle a dit que Milan Lukic, la tête qui était

 16   tenue, elle en a parlé dans cette déclaration de Boban Simsic. En fait, il

 17   y a là trois déclarations opposées. Si j'avais moi-même un cabinet de huit

 18   avocats, je pourrais peut-être essayer de répondre à tout cela. Mais je

 19   souhaite dire aux membres de la Chambre ce que je vous dis aujourd'hui,

 20   j'ai toute une liste de témoins du 17 octobre, et je crains que -- à moins

 21   que vous ne pensiez que nous ne perdions notre temps.

 22   C'est la seule façon dont je peux procéder, la façon dont j'ai fait.

 23   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Alarid, je voudrais examiner

 24   ce que --

 25   M. ALARID : [interprétation] Maintenant, je vois que c'est très important,

 26   vous comprenez. Est-ce que nous pouvons reprendre cette photographie ? Je

 27   parle de 1D10-1620, pour les membres de la Chambre.

 28   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Qu'est-ce que c'est --


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  1   M. ALARID : [interprétation] Toute la question est de savoir si c'est vrai.

  2   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais nous ne voulons pas voir si

  3   nous pouvons nous prononcer sur cette question sans voir les pièces que

  4   vous présentez.

  5   M. ALARID : [interprétation] Parce que moi --

  6   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Qu'est-ce que --

  7   M. ALARID : [interprétation] Je voudrais expliquer quelle est la position -

  8   -

  9   M. LE JUGE ROBINSON : [aucune interprétation]

 10   M. ALARID : [interprétation] Monsieur le Président, en dépit du fait que

 11   pour l'ensemble des 21 chef d'accusation contre nous, nous devons répondre

 12   à chacun de ces chefs d'accusation et nous ne disposons pas du temps

 13   nécessaire pour chacune de ces questions et pour apprécier ceci à tel ou

 14   tel niveau, donc je suis censé m'occuper d'une affaire où il y aurait 300

 15   victimes, des meurtres en masse comportant des viols à tel ou tel niveau.

 16   Je ne crois pas qu'il y ait abus de procédure là, je prends tout ceci très

 17   au sérieux --

 18   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît, Maître

 19   Alarid.

 20   [La Chambre de première instance se concerte]

 21   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je voudrais poser une question

 22   concernant Sredoje Lukic. M. Cepic est son conseil et M. Dieckmann est co-

 23   conseil, n'est-ce pas ? Dans ce cas-là, je ne comprends pas très bien

 24   pourquoi M. Milan Lukic c'est plus volumineux.

 25   M. ALARID : [interprétation] C'est l'application pratique de règles qui ne

 26   tiennent pas compte des circonstances : l'exécution de ces règles ne permet

 27   pas un procès en bonne et due forme. Je ne peux pas parler en public de

 28   cette question du greffe parce que certaines de ces questions concernent


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  1   les relations de précédents clients et ses interactions avec le précédent

  2   conseil et les problèmes qui viennent du fait que mon prédécesseur m'a

  3   laissé l'affaire telle quelle. Actuellement, je suis dans une situation

  4   excessivement difficile où on me met la pression pour faire les choses très

  5   rapidement. Ce n'est pas une affaire de niveau 1 parce qu'avec le niveau 1,

  6   on a un assistant, et cetera --

  7   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je voudrais trouver une solution

  8   pratique à tout ceci, Maître.

  9   [La Chambre de première instance se concerte]

 10   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Alarid, les arguments que

 11   vous avez présentés concernant l'absence d'un co-conseil ont été soumis au

 12   greffe ?

 13   M. ALARID : [interprétation] Jusqu'au point qu'ils me disent qu'il faudrait

 14   faire appel au Président, et le fait est que je vais effectivement le

 15   faire.

 16   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais vous n'avez pas suivi --

 17   M. ALARID : [interprétation] Monsieur le Président, --

 18   M. LE JUGE ROBINSON : [aucune interprétation]

 19   M. ALARID : [interprétation] Mais quand est-ce que j'aurais eu le temps,

 20   Monsieur le Président, on vient au travail chaque jour, et j'aimerais

 21   vraiment voir le document 1D10-1620.

 22   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je ne veux pas regarder ce document.

 23   J'écoute vos arguments je considère comme arguments substantiels, quelque

 24   chose qui pourrait avoir une influence sur l'équitabilité du procès.

 25   M. ALARID : [interprétation] Il a fallu que je travaille chez moi sur cette

 26   affaire. J'ai travaillé avec d'autres personnes, et ensuite on a travaillé

 27   avec des témoins. Ensuite, je n'ai pas reçu de financement. J'ai un

 28   enquêteur, un traducteur et mon assistant juridique et ils veulent que


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  1   j'engage un co-conseil. Mais voici ce qu'ils disent ici : regardez s'ils

  2   prendraient moins d'argent. Donc je dois parler de budget avec ces gens. Il

  3   faut que je joue, parce que le greffe ne veut pas payer ce qu'il faut.

  4   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Alarid, on va procéder de la

  5   manière suivante. Nous allons examiner cette question. La Chambre doit

  6   faire très attention. Quand une question d'équitabilité se présente, la

  7   Chambre a bien entendu compétence, mais comme vous l'avez fait remarquer,

  8   normalement, pour remettre en question une décision du greffe, c'est de

  9   passer par le Président. Nous allons examiner, cependant, cette question,

 10   et nous allons vous informer de la décision que nous aurons prise.

 11   En attendant, je voudrais rappeler à votre attention le fait que nous avons

 12   répondu en quelque sorte à la pression que vous subissez en réduisant la

 13   période de cinq à quatre jours. Nous ne sommes pas insensibles à votre

 14   demande.

 15   M. ALARID : [interprétation] J'ai pris note de ce que vous avez dit. C'est

 16   effectivement quelque chose qui m'a fait plaisir, je me suis senti

 17   respecté, mais lors de la pause, vous l'avez enlevé. Donc j'ai eu

 18   l'impression, qu'est-ce que je dois faire ? Je me demandais ce que je

 19   devais faire.

 20   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Qu'est-ce qu'on a enlevé ?

 21   M. ALARID : [interprétation] Le temps. Le temps. Vous avez d'abord donné du

 22   temps, ensuite vous avez repris une semaine, et cetera. Comment peut-on

 23   préparer nos arguments quand il y a une victime de viol, par exemple, qui

 24   dit deux choses différentes par rapport à son témoignage, puis l'autre

 25   personne qui a vu que son ami a été tué, et cetera. Cela me dégoûte, moi

 26   aussi. Le fait est que je pense néanmoins que nous avons des moyens

 27   présentés.

 28   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Alarid.


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  1   M. ALARID : [interprétation] Qu'est-ce que je peux faire, cependant, car je

  2   ne peux pas aller en Bosnie. Je voulais avoir cette occasion.

  3   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Alarid, nous allons prendre

  4   en considération ce que vous avez dit, et demain nous vous informerons de

  5   notre opinion là-dessus, mais bien entendu la Chambre a sa propre

  6   juridiction à prendre en compte. Nous sommes une institution, il y a

  7   différents organes avec différentes responsabilités qui doivent être prises

  8   en compte.

  9   Monsieur Groome.

 10   M. GROOME : [interprétation] Bien sûr l'Accusation tient beaucoup à

 11   l'équitabilité aussi.

 12   M. Ivetic est arrivé la semaine dernière et a été un co-conseil très habile

 13   dans d'autres affaires, donc peut-être si la Chambre veut considérer

 14   éventuellement également la possibilité de le nommer en tant que co-

 15   conseil, car il travaille en quelque sorte déjà sur cette affaire et il a

 16   déjà été co-conseil dans des affaires connexes.

 17   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, nous en tiendrons compte, mais

 18   ce n'est pas la Chambre --

 19   M. ALARID : [interprétation] Oui, ce serait peut-être une bonne idée. Là

 20   aussi, j'ai essayé d'obtenir gain de cause, mais je n'ai pas eu de réponse,

 21   mais je pense qu'ils ne veulent pas qu'une certaine situation se produise

 22   au niveau du budget. En tout cas, pour que M. Ivetic puisse prendre cette

 23   position, je pense qu'il faudra pas mal de temps qui se passe pour que

 24   d'autres choses se passent entre-temps.

 25   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

 26   M. ALARID : [interprétation] Autre chose, Jelena Rasic, cette personne

 27   s'occupe d'une enquête en Bosnie, elle est menacée. Elle reçoit des SMS de

 28   menaces sur sa propre vie, et à un moment donné, je vais devoir la ramener


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  1   ici pour qu'elle puisse témoigner de la dangerosité de son rôle et des

  2   choses comme ça. Toutes ces choses-là sont extrêmement difficiles à obtenir

  3   pour moi, et je n'ai pas le choix actuellement que d'envoyer quelqu'un sur

  4   le terrain pour faire quelque chose que j'estime très dangereux pour elle.

  5   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je ne dis pas que ce n'est pas

  6   important, mais comme je vous l'ai déjà dit, nous allons examiner la

  7   question, et dans la mesure où nous le pouvons, nous vous informerons de

  8   notre point de vue demain.

  9   On va appeler le témoin. Merci.

 10   Je voulais vous dire, Maître Alarid, que je vous ai dit que vous alliez

 11   mettre en place une réputation de déformation de lecture de dépositions. Je

 12   n'ai jamais voulu eu aucun cas indiquer que c'était de votre part une

 13   malveillance intentionnelle.

 14   M. ALARID : [interprétation] Cela montre que je ne suis pas suffisamment

 15   préparé. Je pense que vous méritez un contre-interrogatoire d'une bien plus

 16   belle qualité. Nous sommes en train d'écouter des gens extrêmement

 17   précieux. Je suis dans une position extrêmement difficile, parce que je ne

 18   suis pas en mesure de les interroger convenablement.

 19   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous avez dû très bien travailler

 20   devant un jury, j'imagine, Maître Alarid.

 21   M. ALARID : [interprétation] J'aime bien parler aux gens --

 22   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci beaucoup.

 23   Le témoin.

 24   M. WEBER : [interprétation] Bonjour. L'Accusation appelle le Témoin VG-82.

 25   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] VG-82, très bien. On a passé

 26   maintenant environ une quarantaine de minutes.

 27   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 28   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Que le témoin fasse la déclaration


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  1   solennelle, s'il vous plaît.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

  3   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

  4   LE TÉMOIN: TÉMOIN VG-82 [Assermenté]

  5   [Le témoin répond par l'interprète]

  6   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous pouvez vous asseoir. Monsieur

  7   Weber, commencez.

  8   M. WEBER : [interprétation] L'Accusation demanderait à ce que soit donnée

  9   au témoin la feuille des pseudonymes.

 10   Interrogatoire principal par M. Weber : 

 11   Q.  [interprétation] VG-82, on vous a accordé un certain nombre de mesures

 12   de protection, y compris l'utilisation d'un pseudonyme. Si vous regardez la

 13   feuille devant vous, est-ce que vous voyez votre propre nom ?

 14   R.  Oui. En effet, je vois mon nom sur la feuille.

 15   Q.  Est-ce que votre date de naissance apparaît également sur la feuille ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Pouvez-vous signer cette feuille.

 18   M. WEBER : [interprétation] L'Accusation voudrait faire verser cette

 19   feuille au dossier.

 20   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce P115.

 21   M. WEBER : [interprétation]

 22   Q.  VG-82, avez-vous fait une déposition auprès des enquêteurs du Tribunal

 23   le 31 octobre 1997, de même que le 26 janvier 2001 ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Avez-vous pu passer en revue votre déclaration dans votre langue avant

 26   de vous rendre ici aujourd'hui ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Si on vous posait aujourd'hui les mêmes questions qu'on vous avait


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  1   posées à l'époque, est-ce que vos réponses seraient aujourd'hui les mêmes ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  La déposition que vous avez fournie, est-ce qu'elle est véridique et

  4   précise, pour autant que vous le sachiez ?

  5   R.  Oui.

  6   M. WEBER : [interprétation] A ce stade, l'Accusation voudrait faire verser

  7   la pièce 185 au titre de 65 ter au dossier.

  8   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

  9   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ceci prendra la cote P116, sous pli

 10   scellé.

 11   M. WEBER : [interprétation]

 12   Q.  VG-82, dans votre déposition vous parlez de Milan Lukic en tant que

 13   votre étudiant. Quand est-ce que Milan Lukic a été votre étudiant ?

 14   R.  Sans doute l'année scolaire 1982-83.

 15   Q.  A quel endroit fut-il votre étudiant ?

 16   R.  Dans l'école secondaire à Visegrad.

 17   Q.  Quelle était votre position dans cette école secondaire ?

 18   R.  J'étais enseignant.

 19   Q.  Quels sont les âges des étudiants qui vont à cette école secondaire ?

 20   R.  Leurs années de naissance, c'est à partir de 1974 jusqu'à 1978 -- non

 21   pardon, de 1964 à 1968.

 22   Q.  Vous parlez des années de naissance de 1964 à 1968. Est-ce qu'il y a eu

 23   des années en particulier parmi celles-là où vous avez enseigné dans cette

 24   école secondaire ?

 25   R.  Oui. J'ai travaillé à cette école dans l'année scolaire 1981-82 et

 26   l'année scolaire 1982-83.

 27   Q.  Ces dates de naissance ou ces années de naissance, est-ce que ces dates

 28   correspondent aux élèves que vous auriez eus dans votre école pendant les


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  1   années où vous y enseigniez ?

  2   R.  Oui, oui, c'est ça.

  3   Q.  Quelle est la classe dans laquelle se trouvait Milan Lukic lorsque vous

  4   étiez son enseignant ?

  5   R.  Il était dans la deuxième année de l'école secondaire lorsque je lui ai

  6   enseigné. Il était dans la classe de 29, c'est-à-dire la classe pour les

  7   cuisiniers et les garçons de restaurants et de cafés.

  8   Q.  Milan Lukic, faisait-il partie d'un programme concernant l'industrie

  9   hôtelière ?

 10   R.  Oui. Il suivait ce programme et je me souviens très bien qu'il était

 11   dans la rangée de devant, avec Izet Tabakovic.

 12   Q.  Pendant combien de temps ces élèves passaient dans cette école

 13   secondaire ?

 14   R.  Le programme de l'école secondaire durait trois à quatre ans selon le

 15   type d'enseignement, soit généraliste soit professionnel. Pour ce qui était

 16   de Milan Lukic, cela durait trois ans. Pour les ingénieurs, cela prenait

 17   quatre ans.

 18   Q.  VG-82, je vous demanderais de regarder autour de vous, ici aujourd'hui.

 19   Est-ce que vous pouvez nous dire si vous reconnaissez quelqu'un ici à part

 20   moi-même et M. Groome ?

 21   M. ALARID : [interprétation] Objection standard vis-à-vis de la forme

 22   d'identification.

 23   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, noté.

 24   M. WEBER : [interprétation]

 25   Q.   VG-82, êtes-vous en mesure de voir toutes les personnes présentes ici

 26   dans le prétoire ?

 27   R.  Oui, je vois tout le monde, et je reconnais deux personnes ici.

 28   Q.  Pouvez-vous nous donner les noms des personnes que vous reconnaissez


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  1   dans le prétoire ?

  2   R.  A ma gauche, dans la troisième rangée, la deuxième personne à partir du

  3   mur, c'est Milan Lukic. A côté de lui, troisième personne dans la dernière

  4   rangée, c'est Sredoje Lukic.

  5   Q.  Vous parlez là des deuxièmes et troisièmes personnes à la dernière

  6   rangée, est-ce que vous comptiez à partir de votre gauche ou à partir de

  7   votre droite ?

  8   R.  Je compte à partir de ma gauche. A ma gauche, en comptant à partir de

  9   gauche à droite, il s'agit des deuxièmes et troisièmes personnes.

 10   M. WEBER : [interprétation] Est-ce que le procès-verbal peut faire état du

 11   fait que Milan Lukic et Sredoje Lukic ont été identifiés comme étant

 12   respectivement la deuxième et la troisième personne à partir de la gauche.

 13   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

 14   M. WEBER : [interprétation] Pas d'autres questions.

 15   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

 16   Maître Alarid.

 17   Contre-interrogatoire par M. Alarid : 

 18   Q.  [interprétation] VG-82, je m'appelle Jason Alarid et je suis le

 19   conseil de Milan Lukic. Est-ce que je pourrais vous poser un certain nombre

 20   de questions ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Vous avez pu regarder votre déposition datant de 1994, de même que

 23   celle qui a été faite auprès du TPIY en 2001 et 1997, n'est-ce pas ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Une chose que je n'ai pas comprise c'est comment une déposition

 26   pourrait dater à la fois de 1997 et 2001, mais sous la forme d'une seule

 27   déposition. Pouvez-vous nous l'expliquer ?

 28   R.  D'après ce que je sais, il y aurait deux dépositions; une qui a été


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  1   donnée à propos de Behija Zukic, et la deuxième déposition qui concernait

  2   moi-même et l'exécution à laquelle j'ai survécu. Donc, en fait, il y aurait

  3   au total deux dépositions.

  4   Q.  Donc deux dépositions faites auprès du TPIY, à savoir trois en tout ?

  5   La raison pour laquelle j'en parle, c'est parce que dans mon fichier, ce

  6   qui m'a été divulgué par l'Accusation c'est une déposition datant de 1994

  7   faite auprès du MUP à Gorazde, puis j'ai une déposition faite auprès du

  8   TPIY qui dit qu'il y a eu des entretiens le 31 octobre 1997 et le 26

  9   janvier 2001, à savoir quatre années d'intervalle. Est-ce que vous pouvez

 10   nous l'expliquer ?

 11   R.  Peut-être que nous ne nous sommes pas compris. J'ai dit que j'ai fait

 12   deux dépositions, l'une concernant Behija Zukic et une autre qui me

 13   concernait moi personnellement. J'ai fait une déposition à Gorazde et une

 14   deuxième déposition, je l'ai donnée plus tard à l'enquêteur. Donc une

 15   déposition a été faite à Gorazde, puis il y en a une autre qui a été faite

 16   auprès de l'enquêteur. Il s'agit de deux sujets différents et deux

 17   dépositions.

 18   Q.  Est-ce qu'il y a eu une déposition faite en 1997 que vous avez pu

 19   revoir et signer, que cela vous concernait vous ou Behija Zukic ? Est-ce

 20   que vous avez revu et signé quelque chose en 1997 ?

 21   R.  J'ai eu l'occasion de revoir chacune de mes dépositions.

 22   Q.  Est-ce que vous vous souvenez d'avoir fait une déposition en 1997

 23   auprès d'un enquêteur du TPIY ?

 24   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Weber.

 25   M. WEBER : [interprétation] Objection. La question n'est pas très claire.

 26   Il n'y a que deux dépositions que le TPIY a communiquées. Il n'y en a que

 27   deux qui existent. La déposition au moment où le témoin a été interrogé en

 28   1997, je pense que le témoin l'a signée en 2001. Peut-être que Me Alarid


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  1   voudrait attirer l'attention du témoin à ce propos. Le témoin a clairement

  2   indiqué qu'il n'y avait que deux dépositions.

  3   M. ALARID : [interprétation] Cela a un peu élucidé les choses pour moi,

  4   mais j'aurais préféré que cela vienne du témoin.

  5   Q.  Vous avez été interrogé en 1997; est-ce exact ?

  6   R.  Je crois que c'était en 1997, c'était le moment où j'ai fait cette

  7   déposition à Gorazde. Plus tard, en 2001 si je ne m'abuse, j'ai fait une

  8   autre déposition auprès des enquêteurs.

  9   Q.  En 2001 -- ou plutôt, en 1997, est-ce qu'un papier a été préparé du

 10   fait de ce premier entretien avec l'enquêteur du TPIY pour que vous

 11   puissiez le relire ?

 12   R.  Peut-être vous devriez reposer votre question, parce que je n'ai pas

 13   très bien compris.

 14   Q.  J'ai une déposition selon laquelle il y a eu deux entretiens, en 2001

 15   et en 1997. Voici ma question : est-ce que quelqu'un vous a préparé une

 16   déclaration préliminaire en 1997 pour que vous puissiez la relire et

 17   éventuellement la signer ?

 18   R.  Je sais que j'ai signé une déposition, et je crois que c'était en 2001,

 19   je vous parle de la déposition que j'ai faite auprès des enquêteurs. Ça,

 20   c'est la déposition de 2001.

 21   Q.  Ma question suivante c'est si vous n'avez rien signé en 1997, est-ce

 22   qu'il y a eu néanmoins quelque chose qui vous a été préparé de façon à

 23   mettre noir sur blanc l'entretien et pour que vous puissiez effectivement

 24   vérifier la précision des propos même si vous ne l'avez pas signé ?

 25   R.  D'après la succession des événements à Visegrad, même à cette époque,

 26   l'époque de la guerre, quand il y avait des gens qui pensaient qu'il était

 27   impossible de garder des archives ou des justificatifs de certaines choses,

 28   en réalité, on avait déjà commencé à mettre sur le papier même avant que la


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  1   guerre ne se termine. Après les accords de Dayton, la tâche s'en est

  2   trouvée facilitée. Mais même avant, pendant la guerre, nous avons essayé de

  3   récolter des documents et des justificatifs concernant tout ce qui s'est

  4   passé à Visegrad.

  5   Q.  Du point de vue temporel, est-ce qu'on peut dire que vos dépositions

  6   concernant Milan Lukic ou votre connaissance de Milan Lukic précèdent

  7   le 1er juin 1992 ?

  8   R.  Pour ce que je sais de Milan Lukic, la déclaration concernait la guerre

  9   et ce qui s'est passé pendant la guerre. J'ai fait une déclaration

 10   décrivant ce qui s'était passé pendant la guerre.

 11   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je ne suis pas sûr de bien

 12   comprendre la question. Est-ce que vous lui demandez s'il a donné des

 13   déclarations concernant --

 14   M. ALARID : [interprétation] Concernant --

 15   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] -- Milan Lukic avant le 1er juin

 16   1992 --

 17   M. ALARID : [interprétation] Non, j'ai très mal formulé ma question

 18   apparemment. Je vais l'expliciter.

 19   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

 20   M. ALARID : [interprétation]

 21   Q.  Non. Ce que je vous demande, Monsieur, c'est n'est-il pas vrai que dans

 22   votre déclaration vous avez parlé de ce qui, d'après vous, s'était passé

 23   concernant Behija Zukic, la Passat rouge, et le rôle de Milan Lukic dans

 24   tout cela, n'est-ce pas ?

 25   R.  Ce n'est pas ce que j'ai pu croire ou, à mon sens, c'est ce que j'ai vu

 26   de mes propres yeux. J'ai également entendu des choses à ce propos. Cela

 27   concerne ce qui s'est passé en 1991 et 1992 là-bas pendant la guerre.

 28   Q.  Mais serait-il exact de dire qu'en ce qui concerne notre déclaration


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  1   concernant Milan Lukic, votre rôle ou ce que vous avez vu, tout cela s'est

  2   passé avant le 1er juin 1992, n'est-ce pas ?

  3   R.  Ce qui s'est passé concernant Behija Zukic a eu lieu au mois de mai

  4   1992. Ce qui m'est arrivé, cela s'est produit en juin, le 11 juin 1992.

  5   Nous parlons du mois de mai et du mois de juin 1992.

  6   Q.  Ce qui vous est arrivé en juin 1992 c'est que vous avez été emmené et

  7   arrêté par des Serbes que vous ne connaissiez pas et avez failli être

  8   exécuté, n'est-ce pas ?

  9   R.  Oui, c'est vrai.

 10   Q.  Tout ce que vous savez au sujet de Milan Lukic ou avez pu observer au

 11  sujet de Milan Lukic, cela s'est passé avant le 1er juin et se rapporte à la

 12   mort de Behija Zukic, n'est-ce pas ?

 13   R.  C'est vrai. Avant le 1er juin, Behija Zukic est morte au mois de mai.

 14   Mais cela ne veut pas dire que Milan Lukic n'a pas poursuivi ses activités

 15   dans les mois qui ont suivi même si cela ne concerne pas forcément mon

 16   propre cas au mois de juin.

 17   Q.  Cela ne s'applique pas à ce que vous avez pu observer et ce dont vous

 18   allez nous parler sous serment, n'est-ce pas ?

 19   R.  Auriez-vous l'obligeance de préciser votre question ?

 20   Q.  Vous ne pouvez donc pas nous dire sur la base de connaissances

 21   personnelles que vous avez vu Milan Lukic faire quoi que ce soit après

 22   l'incident concernant Behija Zukic.

 23   R.  Je suivais de près tout ce qui se passait même après ce qui s'est passé

 24   avec Behija Zukic, car je me trouvais toujours dans la zone de la

 25   municipalité de Visegrad. J'y suis resté.

 26   Q.  Par la suite, vous étiez animé d'une certaine curiosité et vous suiviez

 27   l'actualité plutôt que d'avoir été témoin vous-même de ce que Milan Lukic

 28   aurait où n'aurait pas fait après fin mai 1992, n'est-ce pas ?


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  1   R.  Après la fin du mois de mai 1992 et en juin. Jusqu'au 11 juin 1992,

  2   j'ai été témoin oculaire de ce qui s'est passé à Visegrad car je me

  3   trouvais à Visegrad même, au centre de la ville. Après le 11 juin, je

  4   n'étais plus en mesure de suivre ce qui se passait ou ce que faisait Milan

  5   Lukic puisqu'à ce moment-là la ville avait déjà été nettoyée.

  6   Q.  Mais vous pensiez avoir vu Milan Lukic pour la dernière fois avant la

  7   fin du mois de juin 1992, n'est-ce pas ?

  8   R.  Oui. Le 11 juin, c'est jusqu'à cette date que j'ai pu le voir dans la

  9   ville, et non pas après cette date.

 10   Q.  Est-ce que vous nous dites aujourd'hui que vous l'avez vu en ville

 11   entre, disons, le 1er et le 11 juin ?

 12   R.  Oui, c'est exact.

 13   Q.  Est-ce que vous avez déclaré cela dans une déposition par le passé ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Où au juste l'avez-vous vu, prenons, par exemple, le 1er juin ?

 16   R.  Permettez-moi de vous dire que cela fait tout de même 17 ans que ces

 17  choses se sont produites. Vous me parlez du 1er juin précisément. Je ne vois

 18   personne qui pourrait se souvenir au juste de ces détails. Mais on le

 19   voyait en ville tous les jours avec cette Passat couleur rouge cerise, et

 20   parfois il se promenait en ville sans voiture. Il avait également la

 21   réputation de se promener à Visegrad à pieds nus afin qu'on ne puisse pas

 22   entendre ses pas alors qu'il s'approchait d'une maison ou d'une

 23   installation.

 24   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur le Témoin, vous dites on le

 25   voyait tous les jours en ville avec cette Passat. L'avez-vous vu vous-même

 26   ? Etes-vous parmi ceux qui l'ont vu ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai pu le voir en ville, oui. Parfois,

 28   pendant la journée, nous devions sortir pour acheter quelques provisions ou


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  1   du pain au centre-ville. La circulation était très limitée en raison du

  2   fait qu'il n'était simplement pas possible de se déplacer parfois. Il y

  3   avait des situations dans lesquelles quelqu'un disait : "Voilà Lukic qui

  4   arrive. Voilà la Passat qui arrive." Cela signifiait à quiconque se

  5   trouvait dans les parages de tenter de quitter la rue dès que possible.

  6   M. ALARID : [interprétation]

  7   Q.  Est-ce que vous vous rendez compte que vous n'avez déclaré rien de tout

  8   cela dans votre rapport de 1997/2000 ?

  9   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous voulez dire déclaration.

 10   M. ALARID : [interprétation]

 11   Q.  Est-ce exact ?

 12   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous parlez de rapport, mais n'est-

 13   ce pas une déclaration ?

 14   M. ALARID : [interprétation] Oui, pardon. Déclaration.

 15   Q.  N'est-il pas vrai que dans votre déclaration de 1997 ou 2001, vous

 16   n'avez jamais dit que vous aviez vu Milan Lukic dans une Passat ou à pieds

 17   nus qui se promenait entre le jour où le cadavre de Behija Zukic a été

 18   emporté de sa maison et le 11 juin quand vous êtes parti ?

 19   R.  Dans ma déclaration, la seule mention de Milan Lukic se rapporte à

 20   l'incident concernant Behija Zukic. Je n'ai pas parlé de ces choses dans ma

 21   déclaration, j'ai seulement parlé de ce qui est arrivé à Behija Zukic, ce

 22   que j'ai pu voir, ce que j'ai entendu dire en parlant à des gens parfois au

 23   téléphone.

 24   Q.  J'aimerais savoir ce que vous avez vu, où vous étiez et à quel moment

 25   quand vous l'avez vu à pieds nus ou se promenant ?

 26   M. WEBER : [interprétation] Une objection.

 27   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Weber.

 28   M. WEBER : [interprétation] Il s'agit de plusieurs questions.


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  1   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Il faudrait distinguer entre

  2   ces différentes questions.

  3   M. ALARID : [interprétation]

  4   Q.  Alors prenons le 1er juillet 1992, où avez-vous vu Milan Lukic pour la

  5   première fois ?

  6   M. WEBER : [interprétation] Monsieur le Président --

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Le premier endroit où j'ai vu Milan Lukic

  8   après le 1er juillet --

  9   M. LE JUGE ROBINSON : [aucune interprétation]

 10   M. WEBER : [interprétation] Je voudrais juste apporter une correction au

 11   compte rendu où il est question du 1er juillet. Je pense que mon confrère

 12   voulait parler du 1er juin.

 13   M. ALARID : [interprétation] En effet.

 14   M. WEBER : [interprétation] Je voulais juste --

 15   M. ALARID : [interprétation] En effet, j'entendais plutôt le 31 mai.

 16   M. WEBER : [aucune interprétation]

 17   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien. Merci.

 18   M. ALARID : [interprétation]

 19   Q.  Monsieur, auriez-vous l'obligeance de réitérer votre réponse ? Après le

 20   31 mai 1992, où avez-vous vu Milan Lukic pour la première fois ?

 21   R.  Pour la première fois, je l'ai vu dans un café dans une rue de Visegrad

 22   près d'un bâtiment connu comme le numéro 8. C'est ainsi que l'on décrivait

 23   ce bâtiment qui était très connu, le numéro 8. Il y avait un café derrière

 24   l'immeuble où Milan se rendait souvent. Je ne sais pas s'il en était

 25   propriétaire, mais ce café se trouve juste derrière l'immeuble connu sous

 26   le nom de numéro 8 sur la route qui relie le centre-ville à Prelovo et

 27   l'endroit où il était né, Rujiste.

 28   Q.  Se trouvait-il dans le café ?


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  1   R.  Oui. Oui, tout à fait.

  2   Q.  Où étiez-vous ?

  3   R.  Après le meurtre de Behija Zukic, moi-même et d'autres personnes qui

  4   vivions dans le quartier nous nous sommes rapprochés de la ville même parce

  5   qu'ils nous avaient dit que la police serbe n'avait pas les effectifs

  6   nécessaires pour garantir la sécurité de tous et on savait qu'il y avait

  7   des meurtres qui avaient été commis. On nous avait recommandé de nous

  8   rapprocher de la ville même afin de faciliter la maîtrise de la situation.

  9   Lorsque je suis arrivé sur place, nous sommes allés dans cet immeuble connu

 10   sous le nom de numéro 8 parce que c'est là où habitait mon gendre. Il nous

 11   a donc hébergés, moi-même, ma femme et mon enfant.

 12   Q.  Quelques jours plus tôt, vous étiez caché dans un grenier, je crois, et

 13   vous avez vu le cadavre de Behija Zukic par un petit trou dans le toit,

 14   n'est-ce pas ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Mais avant cela, vous ne saviez pas qu'elle était morte jusqu'à ce que

 17   quelqu'un vous le dise parce que vous vous cachiez sous le pont, n'est-ce

 18   pas, pour éviter d'être pris ?

 19   R.  Oui, nous étions cachés sous le pont. Nous nous sommes cachés à partir

 20   du moment où Behija Zukic nous a dit que son mari, Dzemo Zukic, son fils

 21   Faruk Zukic, Fehim Tabakovic et ses deux fils, ainsi qu'Izet Tabakovic et

 22   d'autres encore avaient été emmenés dans son camion, un grand camion que

 23   possédait Behija Zukic, et ces personnes avaient été emmenées dans ce

 24   camion.

 25   Q.  Je vous ai demandé si vous étiez caché sous un pont. Je sais que vous

 26   avez beaucoup de choses à dire, mais j'aimerais que vous vous concentriez

 27   sur certaines choses.

 28   Donc vous étiez caché sous le pont, n'est-ce pas ?


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  1   R.  Cette nuit-là, je me trouvais sous le pont qui avait été détruit,

  2   lorsque l'usine hydroélectrique qui se trouvait à proximité avait été

  3   incendiée.

  4   Q.  Et je parle du principe qu'ensuite vous vous êtes réfugié chez votre

  5   gendre. C'est là où vous avez été hébergé par la suite, n'est-ce pas ?

  6   R.  Je me trouvais à Dusce parce que la centrale hydroélectrique ne

  7   fonctionnait plus et les fuites d'eau avaient causé beaucoup de dégâts,

  8   donc je me trouvais chez mon frère Hilmo.

  9   Q.  Dans cet immeuble numéro 8 ?

 10   R.  Non. Je vais essayer d'être plus clair. Après tous ces événements,

 11   après le meurtre de Behija Zukic, j'ai déménagé, je me suis rendu chez mon

 12   gendre au numéro 8. Et plus tôt, j'étais hébergé chez mon frère dans le

 13   quartier à proximité de l'endroit où j'habitais.

 14   Q.  Très bien. Et lorsque vous vous trouviez dans le bâtiment numéro 8,

 15   vous vous cachiez, n'est-ce pas ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Donc je pars du principe que les fenêtres étaient fermées, les volets

 18   étaient fermés et les rideaux étaient tirés, n'est-ce pas ?

 19   R.  Oui. De façon générale en tout cas. Les fenêtres ne donnaient pas sur

 20   le café, mais plutôt sur le bâtiment de la société Distribucija, mais de

 21   façon générale nous ne pouvions pas vraiment regarder par la fenêtre. Nous

 22   étions obligés de nous cacher sous le lit ou le canapé, si quelqu'un venait

 23   frapper à notre porte.

 24   Q.  Donc comment avez-vous pu voir Milan Lukic au café du numéro 8, et

 25   pouvez-vous me dire quel jour vous l'avez vu au café sur les 11 jours en

 26   question ?

 27   R.  Je pense avoir déjà répondu assez clairement. Je pouvais le voir

 28   lorsque je sortais du numéro 8. Je vous ai dit que de temps en temps nous


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  1   devions sortir pour nous approvisionner en pain et en lait, puisque nous

  2   avions quitté nos domiciles, il fallait bien aller acheter à manger. Donc

  3   nous sortions pour nous approvisionner.

  4   Q.  Mais n'est-il pas vrai que pendant la période concernée, il y avait de

  5   nombreux extrémistes serbes à Visegrad ?

  6   R.  Oui, mais comme je vous l'ai dit, on sortait tout de même.  Aussi vite

  7   que possible on allait se rendre au magasin pour acheter du lait ou

  8   d'autres provisions et on essayait de rentrer aussi vite que possible.

  9   Puis par la suite ce n'était même plus possible, nous avons envoyé nos

 10   épouses afin qu'elles aillent faire les achats et de veiller à ce qu'il n'y

 11   ait aucun homme dans la rue.

 12   Q.  Entre le 1er et le 11 juin, à quelle date avez-vous vu Milan Lukic au

 13   café ?

 14  R.  Peut-être les premiers jours du mois de juin, le 1er ou le 2, mais c'est

 15   très difficile d'être précis parce qu'il a passé beaucoup de temps au café.

 16   Q.  Etait-il au café tous les jours et vous l'avez vu tous les jours ?

 17   R.  Les jours où je quittais la maison, quand je sortais pour acheter des

 18   provisions. Si je ne sortais pas, et je ne sortais pas tous les jours, je

 19   ne pouvais pas le voir.

 20   Q.  On vous a demandé de venir témoigner devant nous pour réfuter une

 21   défense d'alibi, donc il est très important pour nous que vous puissiez

 22   nous dire exactement et avec certitude à quelle date vous l'avez vu.

 23   R.  Comme je vous l'ai dit, il est très difficile 17 ans plus tard de vous

 24   donner une date exacte. Bientôt vous allez peut-être me demander à quelle

 25   heure exactement je l'ai vu. Mais jusqu'au 11 juin, le début de la fête

 26   Bajram, j'ai quand même essayé de sortir de temps en temps quand je pensais

 27   que ce n'était pas trop risqué.

 28   Q.  Donc vous nous dites qu'en dépit du fait que vous étiez obligé de vous


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  1   cacher dans un grenier ou sous un pont, il vous est également arrivé de

  2   vous promener en plein jour pour aller faire des courses ?

  3   R.  Je vous ai déjà expliqué, nous essayions de sortir, de faire de très

  4   brèves sorties. Il y avait des magasins très proches dans ce quartier qu'on

  5   appelle Mezalin. Il y a des magasins tout près. On pouvait sortir et entrer

  6   en très peu de temps.

  7   Q.  Combien de fois êtes-vous sortis plutôt que d'envoyer votre épouse ?

  8   R.  Disons une fois par jour. Je ne voulais pas prendre plus de risques.

  9   Q.  Donc vous nous dites que vous êtes sorti chaque jour entre le 1er et le

 10   11 juin ?

 11   R.  Oui.

 12   Q.  En plein jour ?

 13   R.  Oui, évidemment. Pendant la journée puisque les magasins étaient

 14   forcément ouverts.

 15   Q.  Si vous saviez que l'on emmenait des hommes et qu'ils disparaissaient,

 16   qu'on ne les revoyait plus, n'aurait-il pas été plus prudent de vous

 17   approvisionner suffisamment pour ne pas devoir ressortir ?

 18   R.  Les choses, les événements ne s'étaient pas encore accélérés ou

 19   intensifiés. A ce moment-là, seuls deux meurtres avaient été commis. Le

 20   premier visant la famille Smajic, Medo Smajic et sa femme. C'était le

 21   premier meurtre. Ensuite le meurtre de Behija Zukic, et à ce moment-là les

 22   gens n'avaient pas pleinement conscience de la manière dont les choses

 23   allaient évoluer.

 24   Q.  Avant cette date, le Corps d'Uzice était déjà entré dans la ville,

 25   n'est-ce pas ?

 26   R.  Avant quelle date ?

 27   Q.  Avant la date du décès de Behija Zukic.

 28   R.  Oui. Le Corps d'Uzice est arrivé le 14 avril.


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  1   Q.  Ce Corps d'Uzice avait commis de nombreux crimes à l'encontre des

  2   Musulmans en ville, n'est-ce pas ?

  3   R.  Ils étaient en train d'imposer leur contrôle de la ville, mais les

  4   meurtres n'ont réellement commencé à s'intensifier qu'après le retrait du

  5   Corps d'Uzice.

  6   Q.  Le Corps d'Uzice avait désarmé les Musulmans, n'est-ce pas ?

  7   R.  Je ne pense pas qu'il y avait réellement des armes. Il n'y avait pas

  8   vraiment de quoi désarmer la population. Lorsque la centrale

  9   hydroélectrique a été abandonnée, tous les Musulmans ont quitté Visegrad.

 10   Lorsqu'ils sont entrés chez eux, ils n'ont pas eu le droit de rentrer chez

 11   eux avec des armes.

 12   Q.  Pendant l'occupation de la ville par le Corps d'Uzice, des hommes

 13   musulmans ont disparu, n'est-ce pas ?

 14   R.  Oui. Comme je vous l'ai dit, les gens ont été emmenés et ont subi des

 15   fouilles. Le Corps d'Uzice était cantonné à Bikavac. Il y avait surtout des

 16   entretiens, des interrogatoires menés par le Corps d'Uzice en ville.

 17   Q.  Dans votre déclaration de 1997 et 2001, vous avez dit que les Aigles

 18   blancs ont participé à l'offensive visant Dobrun le 6 avril 1992, n'est-ce

 19   pas ?

 20   R.  Oui, c'est vrai. Le 6 avril 1992, les Aigles blancs ont lancé une

 21   offensive contre la municipalité de Dobrun, qui est tout près de la

 22   frontière avec la Serbie. La Serbie en tant que pays.

 23   Le 6 avril, les Aigles blancs ont attaqué Dobrun. Il y a des

 24   documents qui en attestent et ces documents montrent les noms, les prénoms,

 25   les détails des membres des Aigles blancs, leurs règles de conduite, et ils

 26   avaient également leur propre bannière, leur propre drapeau.

 27   Q.  Vous avez entendu dire que la population musulmane avait été rassemblée

 28   dans un stade de foot, n'est-ce pas, le stade à Visegrad et le colonel


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  1   Jovanovic s'était adressé à eux, n'est-ce pas ?

  2   R.  Oui. J'avais entendu que l'on avait emmené des gens au stade.

  3   L'objectif étant sans doute de les déporter, le nettoyage. L'objectif étant

  4   d'utiliser ou de les emmener en cars pour les emmener dans d'autres pays ou

  5   d'autres zones.

  6   Q.  N'est-il pas vrai que dans le discours qu'il a fait au stade, le

  7   colonel Jovanovic a dit qu'il ne maîtrisait pas les Aigles blancs ?

  8   R.  Je ne me trouvais pas moi-même au stade. Franchement, je ne me souviens

  9   pas de ce que j'ai pu entendre dire. Cela dit, la situation était encore

 10   supportable tant que le Corps d'Uzice était sur place. Mais tout a changé

 11   une fois qu'ils sont partis.

 12   Q.  Ou peut-être était-ce une tentative délibérée de désarmer la population

 13   musulmane, puis de les inciter à rentrer chez eux et de venir ainsi

 14   victimes d'une action policière bien organisée ?

 15   R.  Toutes les personnes qui sont rentrées chez elles sont rentrées sans

 16   armes et n'opposaient aucune résistance. C'était tout à fait exclu. On peut

 17   dire que l'objectif était en effet de faire en sorte que les gens rentrent

 18   chez eux, puis on sait ce qui s'est passé par la suite.

 19   Q.  Parlons de la manière dont vous avez appris à connaître Milan Lukic.

 20   Vous vous souvenez précisément qu'il était dans une de vos classes ?

 21   R.  Oui, je m'en souviens, très précisément. Je vous ai dit dans quelle

 22   classe, le numéro, le département, le domaine dans lequel il faisait ses

 23   études. Je peux vous donner de plus amples détails, si vous le souhaitez.

 24   Q.  Mais n'est-il pas vrai que dans votre déposition vous avez dit que vous

 25   n'avez pas forcément reconnu M. Lukic et que c'est M. Tabakovic qui vous a

 26   dit ou vous a rappelé qu'il avait été dans une de vos classes ?

 27   R.  Lorsque Milan Lukic est venu d'Obrenovac en Serbie à Visegrad, il s'est

 28   comporté d'une manière qui a attiré l'attention de nombreuses personnes. En


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  1   tant qu'individu, la manière dont il se comportait suscitait un certain

  2   intérêt. Nous avons essayé d'en savoir plus à son sujet en raison de son

  3   comportement. Izet Tabakovic, qui était dans la même classe que lui, n'est

  4   qu'une seule source d'information parmi d'autres.

  5   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons maintenant faire la

  6   pause, Maître Alarid.

  7   --- L'audience est suspendue à 15 heures 44.

  8   --- L'audience est reprise à 16 heures 08.

  9   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Maître Alarid.

 10   M. ALARID : [interprétation]

 11   Q.  M. Tabakovic est celui dont vous avez dit que c'était un camarade

 12   d'école ou un camarade de classe de Milan Lukic; c'est bien cela ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Il était en classe dans quelle année avec lui ?

 15   R.  Je pense que c'était l'année scolaire 1982-1983. Ils se trouvaient en

 16   cinquième.

 17   Q.  Mais en réalité vous ne pouviez pas vous le rappeler. Vous avez eu

 18   besoin que cet autre jeune vous dise ou vous rappelle plutôt, qu'il se

 19   trouvait dans votre classe. N'est-ce pas ce que vous dites ?

 20   R.  Ce jeune n'est que l'une des sources, je vous l'ai dit il y a un

 21   moment. Izet Tabakovic et Farhudin Cocalic étaient ses camardes de classe.

 22   Puis il y a encore une autre source que j'ai vérifiée et, effectivement,

 23   qui m'a convaincu que c'était un de mes anciens élèves.

 24   Q.  Quelle est cette autre source, s'il vous plaît ?

 25   R.  D'abord, il y a mes propres recherches, ma propre enquête que j'ai

 26   faite le concernant parce que pendant un moment il avait été absent de

 27   Visegrad, ayant poursuivi ses études à Belgrade avant de revenir dans notre

 28   région. Donc pendant un moment, je ne l'ai plus vu. Puis j'ai essayé de


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  1   réunir davantage de renseignements pour avoir un tableau complet, et

  2   l'autre source ce sont ces deux jeunes.

  3   Q.  Où avez-vous fait ces recherches ou cette enquête ?

  4   R.  En ville, en contact avec des personnes d'origines ethniques à la fois

  5   bosniaque, les Musulmans de Bosnie et des Serbes. Les deux communautés

  6   communiquaient encore entre elles.

  7   Q.  Qu'en est-il, par exemple, des dossiers scolaires ?

  8   R.  Les dossiers scolaires existent. Il y a des annuaires ou des fascicules

  9   annuelles qui sont gardées à l'école et archivées pendant un certain nombre

 10   d'années et on peut les vérifier.

 11   Q.  Donc vous êtes absolument certain que ce Milan Lukic, lors de son année

 12   de cinquième dans le secondaire, a été votre élève et que vous l'avez

 13   personnellement enseigné; c'est bien cela ?

 14   R.  Oui.

 15   Q.  Vous en êtes certain de cela à 100 %. C'est ça votre réponse, vous en

 16   êtes sûr ?

 17   R.  J'en suis tout à fait certain.

 18   Q.  Vous pensez que les archives de l'école, les annuaires, pourront

 19   permettre de vérifier cela. C'est ça que vous nous dites ?

 20   R.  Oui, parce que ces registres annuels qui sont conservés concernant

 21   chacune des classes existent et sont archivés.

 22   Q.  Si je vous disais que ce Milan Lukic n'était pas l'un de vos élèves et

 23   a suivi des études différentes, est-ce que ça changerait votre déposition ?

 24   R.  Je vous dis que je suis convaincu qu'il était dans ce cours, dans cette

 25   classe précise à l'école et j'enseignais dans toutes les classes de la

 26   sixième jusqu'à la terminale dans cette école, et il y avait en tout 11

 27   classes différentes -- notamment avec des enseignements professionnels ou

 28   qui pouvaient conduire à différentes professions.


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  1   Q.  Qu'en serait-il, par exemple, pour la métallurgie ?

  2    R.  Il y avait un cours en métallurgie, et j'ai enseigné aussi cette

  3   classe. Il y en avait pour des serruriers, il y en avait pour les

  4   chaudronniers, des utilisateurs de tours et des techniciens dans la

  5   métallurgie. Il y avait toutes ces formations possibles à l'école et j'ai

  6   également enseigné cela.

  7   Q.  Bien --

  8   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] A combien d'élèves avez-vous

  9   enseigné en tout ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Dans cette école secondaire, il y avait

 11   environ 1 500 élèves, donc on prenait son tour. Il y est vraisemblable que

 12   j'aie enseigné à environ la moitié de ce total, c'est-à-dire de 700 à 800

 13   élèves qui suivaient différents cours lors de différentes années.

 14   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maintenant, le dernier cours dans

 15   lequel vous dites qu'était Milan, combien y aurait-il eu d'élèves dans

 16   cette classe ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Ces classes avaient un effectif qui pouvait

 18   aller jusqu'à 30 élèves. Jusqu'à 30 élèves dans chaque salle de classe.

 19   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce qu'il y a quoi que ce soit de

 20   précis ou de spécifique concernant Milan Lukic qui vous permet de vous le

 21   rappeler comme étant l'un de vos élèves ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Au cours de cette période, on ne le remarquait

 23   pas particulièrement. Il était jeune, il avait dans les 17 ans. A ce

 24   moment-là, il n'était pas très remarquable parce qu'il ne savait pas lui-

 25   même à l'époque ce qui allait se passer dans les dix années suivantes. S'il

 26   l'avait su, peut-être que son comportement aurait été différent même à

 27   l'époque.

 28   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Maître Alarid.


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  1   M. ALARID : [interprétation]

  2   Q.  Mais dans votre déclaration de 1997 et 2001, vous avez dit que :

  3   "C'était un élève qui n'était pas très remarquable et, franchement," dites-

  4   vous, "je ne me le rappelle pas clairement à l'époque." N'est-ce pas vrai ?

  5   R.  C'est ce que j'ai dit il y a un instant. Il n'était pas

  6   particulièrement remarquable à l'époque. Toutefois, après les événements

  7   qui ont eu lieu dix ans plus tard, son comportement a changé. Mais lui-même

  8   n'aurait pas été capable de dire quelle personne il deviendrait dix ans

  9   plus tard.

 10   Q.  Parce que le Milan Lukic qui, croyez-vous, allait à cette école et que

 11   vous avez enseigné n'était pas un élève agressif ou ne se battait pas ou

 12   quoi que ce soit; c'est cela ?

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  2  [Audience à huis clos partiel][Confidentialité partiellement levée par une ordonnance de la Chambre]  

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  7   Q.  Après la mort de Behija Zukic, vous avez entendu dire que des membres

  8   de votre communauté étaient allés porter plainte au commandant en chef,

  9   Risto Perisic, n'est-ce pas ?

 10   R.  C'est exact.

 11   Q.  N'est-il pas vrai que Risto Perisic était le chef de la police ainsi

 12   qu'un haut fonctionnaire, un membre important de la cellule de Crise et du

 13   Parti SDS ?

 14   R.  Risto Perisic était un de mes anciens camarades de classe -- pardon, un

 15   de mes anciens camarades de travail, un collègue au travail. Nous avions

 16   travaillé ensemble notamment au centre de cette école secondaire. Il

 17   enseignait le serbe. Lorsque la guerre a éclaté, lorsque les opérations

 18   militaires ont commencé, Risto Perisic est devenu le chef du MUP. Donc il

 19   était le chef du MUP, membre du SDS et membre de la cellule de Crise. Il se

 20   trouvait dans le premier cercle du SDS.

 21   Q.  Faisant partie du premier cercle du SDS, c'était le SDS qui avait la

 22   direction absolue de la police à Visegrad après la scission, n'est-ce pas ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  N'est-il pas vrai que Dragan Tomic était le commandant de la police

 25   sous les ordres de Perisic ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  N'est-il pas vrai que de nombreux Musulmans ont été arrêtés par la

 28   police qui se trouvait sous le contrôle de Risto Perisic ?


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  1   R.  Oui.

  2   Q.  Un grand nombre de ces Musulmans n'ont plus jamais été revus et on n'a

  3   plus jamais entendu parler d'eux, n'est-ce pas ?

  4   R.  Oui.

  5   Q.  Vous avez entendu dire que Milan Lukic vivait à Obrenovac, n'est-ce pas

  6   ?

  7   R.  Oui. Après avoir achevé deux années d'école secondaire, il a poursuivi

  8   sa scolarité à l'école de police à Belgrade. Vous pouvez vous demander

  9   comment il se fait qu'il y ait eu autant de Lukic dans la police et je vous

 10   le dirai. Ils avaient un parent à Belgrade, un certain Lukic, qui était

 11   secrétaire du ministère de l'Intérieur. En l'occurrence, du ministre.

 12   Ainsi, un grand nombre de Lukic ont été acceptés dans la police en service

 13   actif après avoir achevé une formation.

 14   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Alarid, vous avez déjà

 15   consacré 55 minutes à ces questions, et je vais vous en accorder encore

 16   dix.

 17   M. ALARID : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 18   Q.  Donc vous ne dites pas que ce Milan Lukic a terminé ses études en

 19   devenant cuisinier, n'est-ce pas ?

 20   R.  Alors qu'il terminait sa deuxième année du secondaire ou la cinquième,

 21   comme il n'y avait pas suffisamment de policiers d'active formés, un

 22   concours a été présenté de la manière suivante : après deux années de

 23   quelle que soit la formation dans le secondaire, on pouvait poursuivre en

 24   suivant une formation dans la police pour devenir un policier d'active, un

 25   policier professionnel. Suivant cette voie, Milan Lukic, qui était

 26   d'origine ethnique serbe, ainsi Samir Dedic, qui était Bosnien d'origine,

 27   ont poursuivi leur scolarité dans l'école de police, parce que le père de

 28   Samir Dedic était également policier, Hasim Dedic. Ces deux-là ont continué


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  1   leur scolarité, en se réorientant à partir des classes de secondaire qu'ils

  2   avaient faites pour passer à une formation dans la police.

  3   Q.  Donc est-il bien clair que les renseignements que vous avez obtenus

  4   concernant ce Milan Lukic, qui avait quitté Obrenovac et avait poursuivi

  5   ses études à l'école de police, c'était par le truchement du père de Samir

  6   Dedic ? C'est là que vous avez effectué vos recherches, n'est-ce pas ?

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 14   M. ALARID : [interprétation] Monsieur le Président, sommes-nous encore en

 15   audience à huis clos partiel ? Oui ?

 16   Est-ce que l'huissière pourrait m'aider en prenant le feuillet qui

 17   porte ce pseudonyme et le présenter au témoin, s'il vous plaît.

 18   Q.  Monsieur le Témoin, ce que l'on vous présente là, c'est un feuillet sur

 19   lequel figurent des pseudonymes. Tout comme dans votre cas, d'autres

 20   témoins se sont vus accorder des mesures de protection, et je voudrais vous

 21   demander si vous savez qui est VG-115 ?

 22   R.  Non.

 23   Q.  Combien de personnes se trouvaient au bâtiment 8 lorsque vous vous y

 24   trouviez avant de partir ?

 25   R.  Dans quel bâtiment ?

 26   Q.  L'endroit où vous vous cachiez avant que vous ne puissiez partir le 11

 27   juin.

 28   R.  Au numéro 8, il y avait plusieurs familles de Musulmans de Bosnie. Il y


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  1   avait la famille de Teufo Tankovic. C'est lui que je connaissais et il y

  2   avait sa femme.

  3   Q.  Je ne veux pas vous interrompre, mais est-ce qu'à un moment quelconque

  4   vous avez connu ce -- le bâtiment 8 ? C'est juste une question. Même si

  5   vous ne connaissiez pas ces personnes personnellement, est-ce que vous

  6   saviez qui elle était ?

  7   R.  Je n'ai ni entendu parler d'eux, ni ne les ai vus.

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  4   [Audience publique]

  5   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Alarid, j'étais rendu un

  6   petit peu perplexe par ce que vous avez dit dans vos remarques concernant

  7   les circonstances dans lesquelles la Chambre a donné sa décision avant que

  8   -- J'ai fait en sorte qu'il y ait une enquête et voici ce qui s'est passé.

  9   La Chambre a rendu une décision seulement par rapport au Témoin VG-42. Nous

 10   n'avons pas rendu de décision concernant les autres témoins concernés par

 11   la requête de l'Accusation. Et vous, vous avez répondu concernant VG-42.

 12   M. ALARID : [interprétation] Oui. J'aimerais que 42 et 65 soient séparés.

 13   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je voulais être parfaitement clair à

 14   ce sujet. Il n'y a pas eu de décision rendue par la Chambre concernant

 15   n'importe quel autre témoin pour lequel vous n'avez pas eu l'occasion de

 16   répondre.

 17   M. ALARID : [interprétation] Merci.

 18   Encore une dernière question. Le témoin n'a pas pu donner de date

 19   spécifique concernant les accusations du mois de juin, et au mieux il a été

 20   en mesure simplement de faire des commentaires à propos de sa déclaration.

 21   Je pense qu'étant donné ceci, son témoignage devrait être radié. Si le

 22   Tribunal juge que ce n'est pas valable, à ce moment-là j'aimerais que sa

 23   déclaration auprès du MUP soit versée au dossier.

 24   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Groome, avez-vous entendu

 25   cela ?

 26   Voici ce qu'a dit Me Alarid, que le témoin vient de témoigner non pas

 27   pour refuser l'alibi mais qu'il a fait des commentaires sur d'autres

 28   affaires.


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  1   M. WEBER : [interprétation] Je voudrais attirer l'attention de la Chambre

  2   sur la décision qui a été rendue le 29 août 2008, et la Chambre à ce

  3   moment-là a permis au témoin, en particulier aux paragraphes 28 et 29. Ce

  4   témoin a reçu l'autorisation de la Chambre pour présenter des moyens

  5   concernant trois témoins d'alibi pour la Défense, MLD 5, 6 et 7. Cela

  6   tombait dans le domaine de moyen de preuve en réfutant les alibis dans le

  7   contexte dans lequel le témoin apparaît devant la Chambre. La Chambre a

  8   trouvé dans ce cas que le témoin pouvait être pertinent en ce qui concerne

  9   la réfutation de ces moyens de preuve d'alibi.

 10   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je sais que la Chambre l'a permis,

 11   mais ce n'est pas ce que je voulais dire. Est-ce que les moyens que nous

 12   venons d'entendre peuvent être classifiés comme types de moyens en

 13   réfutation d'alibi.

 14   M. WEBER : [interprétation] Nous n'avons pas d'objection vis-à-vis de la

 15   demande de la Défense pour pouvoir faire admettre la déclaration de 1994,

 16   et ça pourrait se faire. Le témoignage d'aujourd'hui pourrait se faire sous

 17   la forme de la 92 ter.

 18   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] En tant que Juge des faits, la

 19   Chambre devra déterminer quel est le poids à attacher à ces différents

 20   moyens.

 21   M. ALARID : [interprétation] Qu'est-ce que je peux dire, je suis d'accord

 22   qu'ils avaient mis ce témoin dans leur liste, mais du point de vue de la

 23   réfutation de l'alibi, à savoir dire que telle personne n'était pas là ou

 24   était là, ce témoin n'a pas dit que : " Milan était ici et n'était pas là."

 25   Peut-être que pendant les 11 jours il l'a vu dans un café, mais cela ne

 26   peut pas réfuter l'alibi. L'un des arguments présentés par mon prédécesseur

 27   au mois de janvier, en ce qui concerne l'alibi, c'est que Milan n'était pas

 28   toujours dans la Passat, donc actuellement nous sommes toujours en train de


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  1   suivre cette Passat rouge cerise, mais cela ne veut pas dire que la

  2   personne n'était pas là alors qu'il l'était. S'il avait dit, par contre :

  3   "Je l'ai vu le 7 juin", mais il ne l'a pas dit. C'est pour cela que j'ai

  4   présenté ma demande.

  5   [La Chambre de première instance se concerte]

  6   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Weber.

  7   M. WEBER : [interprétation] Les trois témoins qui ont été soumis par le

  8   conseil de la Défense, à savoir MLD 5, 6 et 7, ils ont tous indiqué que

  9   d'autres que Milan Lukic ont conduit la Passat rouge et ont remis en

 10   question le fait qu'il ait pu tuer Behija Zukic. Le premier témoin,

 11   lorsqu'il témoignait ici, le conseil a été assez emphatique pour dire que

 12   la question de la possession et de l'utilisation de la Passat était

 13   importante. Nous avons appuyé ce témoin pour cette question de la

 14   réfutation de l'alibi pour présenter des moyens qui pourraient ou ne

 15   pourraient pas aller à l'encontre de ce qui avait déjà été dit par les

 16   précédents témoins, à savoir les trois témoins de la Défense MLD 5, MLD 6

 17   et MLD 8.

 18   [La Chambre de première instance se concerte]

 19   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous avons entendu les arguments

 20   faits par Me Alarid, et nous allons les considérer.

 21   Monsieur Groome.

 22   M. GROOME : [interprétation] J'ai dit que j'allais enquêter sur la question

 23   de la communication vendredi, et j'ai des informations.

 24   Concernant Ewa Tabeau, 955 pages au total ont été données au conseil

 25   de la Défense. La moitié d'entre elles, 466 pages, sont ses propres

 26   rapports concernant des affaires qui n'ont aucun lien avec celle-ci, et ont

 27   été données simplement par courtoisie à la Défense, et pas pour faire

 28   l'objet de communication. Il s'agit de cas qui concernent les événements de


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  1   Srebrenica en 1995, l'affaire Prlic, et des affaires qui viennent de la

  2   Krajina. Donc, ils n'ont aucun rapport avec notre affaire.

  3   Il y avait également 200 pages de son rapport concernant Vasiljevic.

  4   Tout ceci a déjà été communiqué. Ce qui a été communiqué vendredi, c'est la

  5   copie qui porte les numéros ERN, parce qu'elle y fait référence dans son

  6   rapport. Donc ça, c'est 200 pages.

  7   On a également communiqué 175 pages de son rapport dans l'affaire

  8   Milosevic, et la traduction B/C/S de celui-ci. La version anglaise du

  9   rapport Milosevic a été communiquée au mois de mars 2007.

 10   En quelque sorte, sur les 955 pages dont il est question, plus de 800 déjà

 11   ont été données à la Défense à leur demande ou avaient déjà été

 12   communiquées.

 13   Concernant le Dr John Clark, nos personnes chargées de l'informatique ont

 14   fait une vérification sur le nom de John Clark, et ont identifié des

 15   milliers de documents. Neuf cents de ces documents concernent des examens

 16   de la police scientifique dans lesquels il a été impliqué d'une manière ou

 17   d'une autre, et qui concernent Slap, à savoir la fosse commune où beaucoup

 18   des victimes de Visegrad ont été enterrées. Neuf cents quatre documents ont

 19   été communiqués -- ou plutôt pages, dont 100 pages sont du texte et 800

 20   pages sont des dessins des cadavres qui montrent où se trouvaient les

 21   cadavres et quels étaient les coups subis par les personnes en question.

 22   Ces documents représentent les rapports de 131 examens par la police

 23   scientifique, pas tous effectués par Clark. Parmi ces 131, seuls trois sont

 24   directement pertinents à notre affaire, et ont été identifiés aux bénéfices

 25   du conseil de la Défense. Donc neuf pages de texte en tout.

 26   Ces affaires donnent lieu à de nombreux documents, et c'est pour cela que

 27   j'ai demandé à mes aides de faire la communication selon l'article 66 et

 28   l'article 68, et d'attirer l'attention du conseil de la Défense s'il existe


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  1   d'autres documents qui pourraient les intéresser. Voici pour ce qu'il y ait

  2   des documents que nous allons présenter vendredi.

  3   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous allons maintenant écouter le

  4   témoin suivant.

  5   M. GROOME : [interprétation] Le témoin suivant est Mme Ewa Tabeau.

  6   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

  7   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Faites en sorte que le témoin fasse

  8   la déclaration solennelle.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 10   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 11   LE TÉMOIN: EWA TABEAU [Assermentée]

 12   [Le témoin répond par l'interprète]

 13   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous pouvez vous asseoir.

 14   Une minute, Madame Marcus.

 15   [La Chambre de première instance se concerte]

 16   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Madame Marcus.

 17   Monsieur Cepic.

 18   M. CEPIC : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, si vous me le

 19   permettez, j'aimerais répondre à M. Groome. Celui-ci a déclaré que les

 20   documents ne sont pas pertinents. Alors à ce moment-là, pourquoi ceci ont-

 21   ils été communiqués ? Nous avions 1 334 pages à examiner depuis samedi

 22   matin. Donc je n'étais pas en mesure de faire le tri.

 23   M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, je pense --

 24   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je pense que c'était par courtoisie,

 25   n'est-ce pas, Monsieur Groome ?

 26   M. GROOME : [interprétation] A la fin de la semaine dernière, j'ai rédigé

 27   une lettre pour faire part de l'existence de ces documents, leur demandant

 28   s'il voulait qu'on les mette à leur disposition. C'est ce qui a été fait,


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  1   car la réponse a été affirmative.

  2   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Voilà. Donc vous l'avez demandé.

  3   M. CEPIC : [interprétation] Non. Il a dû y avoir une confusion. M. Cole

  4   nous a invités par courriel à venir voir tous les documents, des documents

  5   qui n'avaient rien à voir avec cela et qui ne devaient pas être

  6   communiqués. C'était l'invitation de M. Cole, alors que nous parlons

  7   d'autre chose ici.

  8   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Alarid.

  9   M. ALARID : [interprétation] De toutes les façons, tout ceci nous a été

 10   proposé vendredi, et il n'y avait que le week-end. Notre première réponse a

 11   été que selon l'article 90, que pour ce faire il fallait nous laisser

 12   rentrer dans le bâtiment. C'est pour cela que j'ai fait une requête pour

 13   empêcher que puisse témoigner le témoin d'aujourd'hui. Je ne veux pas

 14   retirer cette requête, mais nous ne sommes pas dans une bonne position pour

 15   le contre-interrogatoire aujourd'hui, étant donné ce qu'il en est de la

 16   communication.

 17   M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président --

 18   M. ALARID : [interprétation] Début du vendredi. Je suis désolé.

 19   M. GROOME : [interprétation] Mme Tabeau est tout à fait disponible, en

 20   particulier pour examiner cette base de données portant sur 9,5 millions.

 21   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Nous allons le faire lors de

 22   l'interrogatoire principal.

 23   Mme MARCUS : [interprétation] Merci.

 24   Interrogatoire principal par Mme Marcus : 

 25   Q.  [interprétation] Docteur Tabeau, bonjour.

 26   R.  Bonjour.

 27   Q.  On a fait appel à vous pour témoigner en tant qu'expert. Est-ce que

 28   vous pouvez informer le Tribunal quel est votre domaine d'expertise.


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  1   R.  Je suis spécialiste de la démographie. Je me suis plus récemment

  2   occupée des études de conflit, victimes de conflit, la démographie du

  3   conflit, en d'autres termes, mais j'ai une formation de statisticienne.

  4   J'ai étudié la statistique et l'économie. J'ai eu un master dans ce

  5   domaine. Ensuite, j'ai eu un doctorat en démographie mathématique.

  6   Mme MARCUS : [interprétation] Le 23 juillet 2008, la Chambre a décidé que

  7   le Dr Tabeau est effectivement un expert, et je ne vais pas donc me

  8   prolonger sur la question de ses qualifications professionnelles.

  9   J'aimerais demander à ce qu'on puisse visionner le document ID 0641-6000.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi. J'ai besoin d'un petit peu

 11   d'assistance. Je crois que j'ai appuyé sur certains boutons par mégarde.

 12   Voilà. J'ai perdu le procès-verbal.

 13   Mme MARCUS : [interprétation] Je viens d'être informée par l'huissier que

 14   le document n'est pas trouvable. Si vous me donnez une minute, je vais

 15   essayer de sortir une copie papier.

 16   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Allez y.

 17   Mme MARCUS : [interprétation] J'ai une copie papier en anglais du

 18   curriculum vitae du Dr Tabeau, en langue anglaise.

 19   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Cepic.

 20   M. CEPIC : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, si vous me le

 21   permettez, il s'agit du document qui nous a été communiqué ce matin, n'est-

 22   ce pas ? Merci.

 23   Mme MARCUS : [interprétation] Il s'agit de la version mise à jour --

 24   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous l'avez communiqué ce matin,

 25   Madame Marcus, seulement ce matin ?

 26   Mme MARCUS : [interprétation] C'est la version à jour du curriculum vitae

 27   du Dr Tabeau. Comme elle avait déjà été autorisée comme expert,

 28   l'Accusation n'a pas imaginé qu'il fallait faire autrement, mais si vous en


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  1   décidez autrement, nous allons évidemment suivre votre décision.

  2   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, je vois. Si elle avait déjà été

  3   autorisée, il n'y a pas de problème. Mais cela ne veut pas dire que la

  4   Défense n'est pas à même de poser des questions à ce sujet.

  5   Mme MARCUS : [interprétation] Bien.

  6   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

  7   Mme MARCUS : [interprétation]

  8   Q.  Docteur Tabeau, pouvez-vous nous confirmer qu'il s'agit bien là d'une

  9   version mise à jour de votre curriculum vitae ?

 10   R.  Oui, une version succincte avec les principaux points dans ma carrière

 11   et mes publications.

 12   Q.  Si on devait vous poser davantage de questions concernant vos

 13   qualifications, est-ce qu'on pourrait trouver ces informations dans ce

 14   document ?

 15   R.  Oui.

 16   Mme MARCUS : [interprétation] Je voudrais faire verser ce document au

 17   dossier.

 18   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce à conviction

 19   P117.

 20   Mme MARCUS : [interprétation] Le Dr Tabeau a préparé un rapport d'expert

 21   qui contient un résumé, en quelque sorte, du résultat de ses enquêtes.

 22   J'aimerais demander à l'huissière de nous assister en faisant en sorte de

 23   voir cette présentation sur PowerPoint.

 24   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Cepic.

 25   M. CEPIC : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, s'il s'agit là des

 26   listes que nous avons reçues hier par courriel, je ne vois pas leur

 27   pertinence et je ne pense pas que ces documents soient fiables. Je ne vois

 28   non plus quelles sont les sources de ces documents.


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  1   Mme MARCUS : [interprétation] Je pense que le conseil de la Défense se

  2   réfère à deux diagrammes, c'est-à-dire des documents qui vont venir plus

  3   tard dans le témoignage du Dr Tabeau. Ces diagrammes sont une façon abrégée

  4   de demander au Dr Tabeau d'utiliser ses compétences en matière de

  5   démographie pour nous dire ce qu'elle sait concernant les personnes qui

  6   manquent et qui sont dans l'acte d'accusation et dont les noms figurent

  7   dans les moyens de preuve. Je pourrais lui demander de passer chaque nom en

  8   revue un par un, ou je peux préparer un diagramme et demander au Dr Tabeau

  9   plus exactement, de préparer un diagramme d'après une analyse basée sur

 10   leur examen des bases de données concernant les victimes individuellement.

 11   Voici les outils que nous a préparés le Dr Tabeau, visant à une meilleure

 12   présentation des informations.

 13   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Cepic.

 14   M. CEPIC : [interprétation] De notre point de vue, ces questions ne nous

 15   paraissent pas essentielles, du moins c'est ce qui nous semble. Mais je

 16   voudrais demander à mon éminent collègue : c'est quoi ce que nous allons

 17   voir et sur quoi va commenter le témoin ?

 18   Mme MARCUS : [interprétation] Ce que --

 19   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Alarid.

 20   Mme MARCUS : [interprétation] Je suis désolée.

 21   M. ALARID : [interprétation] Notre point de vue, ce n'est pas simplement la

 22   question que nous n'avons pas encore reçu la présentation PowerPoint, mais

 23   il y a également la question de la requête de l'Accusation pour verser le

 24   rapport mis à jour de l'expert.

 25   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Donc c'est quoi votre position,

 26   Maître Alarid ? Vous n'êtes pas en mesure de donner votre réponse ?

 27   M. ALARID : [interprétation] Cela fausse un peu tout le fait qu'on présente

 28   les choses sous forme de présentation PowerPoint. On n'est même pas obligé


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  1   de répondre.

  2   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais vous avez le droit de répondre.

  3   M. ALARID : [interprétation] Mais on le verse avant --

  4   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je ne l'ai pas encore versé au

  5   dossier.

  6   M. ALARID : [aucune interprétation]

  7   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous demande quelle serait votre

  8   réponse à ce stade ?

  9   M. ALARID : [interprétation] Alors nous avons une objection.

 10   Mme MARCUS : [interprétation] Ce que j'allais faire, le conseil de la

 11   Défense a raison, ces extraits proviennent effectivement du rapport mis à

 12   jour et qui n'a pas encore été versé. On peut peut-être contourner ce

 13   problème. On pourrait présenter la présentation PowerPoint. Il n'y a rien

 14   là-dedans qui ne paraisse pas dans les rapports, mais les rapports

 15   contiennent beaucoup de texte alors que dans la présentation PowerPoint, on

 16   a des graphiques, ce qui accélère les choses. Dans chaque référence, vous

 17   allez voir le lien avec la page du rapport d'expert. C'est à la Chambre de

 18   décider. Mais on pourrait marquer aux fins d'identification le rapport

 19   d'expert, et selon la décision, j'aurai effectivement demandé que le

 20   rapport d'expert mis à jour soit versé au débat après la présentation faite

 21   par PowerPoint.

 22   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Cepic.

 23   M. CEPIC : [interprétation] Merci.

 24   La date est le 21 septembre 2008, d'après les informations de

 25   l'Accusation. Il date d'hier, en quelque sorte.

 26   Mme MARCUS : [interprétation] Effectivement. La polygraphie que nous allons

 27   examiner plus tard et la présentation PowerPoint ont été préparées pendant

 28   le week-end, et nous faisons appel au Dr Tabeau en substitution du Témoin


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  1   VG-42, ceci expliquant cela.

  2   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous n'allons pas pour l'instant

  3   accepter le rapport à jour. Nous allons le marquer aux fins

  4   d'identification, et vous êtes autorisée à présenter l'exposé PowerPoint.

  5   Mme MARCUS : [interprétation] Merci.

  6   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce rapport portera la cote P118, marqué

  7   aux fins d'identification.

  8   Mme MARCUS : [interprétation]

  9   Q.  Docteur Tabeau, voyez-vous la diapositive qui apparaît sur votre écran

 10   devant vous ?

 11   L'INTERPRÈTE : Le témoin demande si elle peut voir à côté de l'écran le

 12   procès-verbal.

 13   Mme MARCUS : [interprétation] J'ai des copies papier de cette présentation.

 14   Comme je n'avais pas l'intention de verser ceci au dossier, en tout cas pas

 15   dans son intégralité. Il s'agit simplement d'extraits qui nous intéressent,

 16   et cela nous permettrait d'ailleurs de résoudre ces problèmes techniques

 17   que nous avons.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai deux copies si vous voulez distribuer

 19   l'autre.

 20   L'INTERPRÈTE : Note de l'interprète de la cabine anglaise. Est-ce qu'une

 21   copie pourrait être donnée aux interprètes également ?

 22   Mme MARCUS : [interprétation] Nous allons commencer avec la diapo 5, page

 23   5.

 24   Q.  Docteur Tabeau, est-ce que vous pouvez nous décrire en termes

 25   génériques de quoi traite votre rapport ?

 26   R.  Deux thèmes principaux. Tout d'abord, les changements dans la

 27   composition ethnique pendant la période entre le début du conflit et

 28   jusqu'à la fin de celui-ci et concernant les nombres d'IDP et de réfugiées


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  1   dans la région de Visegrad en Bosnie. Le deuxième thème c'est l'analyse des

  2   personnes portées disparues depuis la région de Visegrad et depuis la

  3   municipalité de Visegrad.

  4   Q.  Page 6. Est-ce que cette liste représente d'autres affaires devant ce

  5   Tribunal pour lesquelles cette méthodologie a été utilisée ?

  6   R.  Il s'agit maintenant du premier thème, à savoir l'analyse de la

  7   composition ethnique, les IDP des réfugiés. Oui, en effet, cette liste

  8   représente les affaires du TPIY où cette méthode a été utilisée en même

  9   temps qu'une étude similaire. Notre principale étude s'est faite dans

 10   l'affaire de Slobodan Milosevic portant sur un nombre de municipalités

 11   beaucoup plus grandes. A l'époque, il y avait 47 municipalités en Bosnie,

 12   et les résultats présentés dans ce rapport proviennent de l'étude qui avait

 13   été faite dans le cadre de l'affaire de Slobodan Milosevic.

 14   Q.  Page 7.

 15   M. CEPIC : [interprétation] Je pense que pour les interprètes, la tâche est

 16   de plus en plus difficile car Mme Marcus et le témoin parlent la même

 17   langue et ne laissent pas suffisamment de temps entre la question et la

 18   réponse.

 19   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] En effet. Veuillez observer un temps

 20   de pause.

 21   Mme MARCUS : [interprétation] Très bien.

 22   Q.  Première question. Est-ce que vous pouvez nous expliquer quel est

 23   l'objectif de cette partie-là de votre analyse ?

 24   R.  L'objectif principal était de présenter et d'obtenir des statistiques

 25   fiables concernant la composition ethnique et le nombre de personnes

 26   déplacées en interne et de réfugiés qui étaient originaires de la région de

 27   Visegrad. Les sources possibles qui pouvaient être utilisées pour ce type

 28   d'analyse sont limitées, voire inexistantes quand il s'agit de périodes


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  1   spécifiques pendant le conflit. Donc c'est un réel défi, et nous avons

  2   identifié les sources pertinentes et suggéré la méthodologie la plus

  3   adéquate pour réaliser cet objectif.

  4   La région que nous avons analysée dans le cadre de ce rapport, je dis

  5   "nous" parce que le rapport initial fut rédigé de concert avec un co-

  6   auteur, Jakub Bijak, que j'ai moi-même rédigé l'étude portant sur Visegrad.

  7   Lorsque l'on a étudié ce domaine, l'analyse ne s'est pas fondée uniquement

  8   sur la municipalité de Visegrad mais également un certain nombre de

  9   municipalités avoisinantes dans la région de Visegrad. Donc ces

 10   municipalités ont été incluses dans l'étude, notamment Srebrenica,

 11   Bratunac, Vlasenica, pour ne mentionner que quelques municipalités.

 12   J'aimerais à un moment donné pouvoir vous montrer toute la région sur une

 13   carte.

 14   Q.  Oui, passons à la page 8. Cette carte représente-t-elle la portée

 15   géographique ou l'étendue géographique de votre étude ?

 16   R.  Oui. En haut, à droite vous voyez un carré qui montre bien où se situe

 17   la région de Visegrad dans la partie orientale de Bosnie-Herzégovine à la

 18   frontière avec la Serbie. Il s'agissait de l'axe principal de notre étude.

 19   Aux alentours, il y avait Srebrenica, Bratunac, Vlasenica, Han Pijesak,

 20   Sokolac, Rogatica, Cajnice et Rudo. Nous avons laissé de côté Gorazde étant

 21   donné que cette municipalité-là était divisée dans les accords de Dayton et

 22   dans les municipalités ainsi divisées, il y avait des mouvements de

 23   population très importants, donc on ne pouvait pas comparer la situation

 24   dans cette municipalité-là avec celle dans d'autres municipalités.

 25   Q.  Nous avons également mis sur le rétroprojecteur la présentation en

 26   question afin que le Dr Tabeau puisse montrer avec le pointeur ce dont il

 27   est question.

 28   Pour en revenir aux sources, Dr Tabeau, pourriez-vous nous dire brièvement


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  1   quelles sources ont été utilisées pour cette partie de votre étude ?

  2   R.  Nous nous sommes fondés sur deux sources principales. D'une part, le

  3   recensement de la population en 1991 effectué en mars 1991 dans le pays

  4   tout entier en Bosnie-Herzégovine et aussi l'ex-Yougoslavie dans son

  5   ensemble. La deuxième source que nous avons utilisée pour la période post-

  6   conflit était le registre des électeurs pour la période allant de 1997 à

  7   1998. Mais comme point de départ pour notre analyse, le recensement de 1991

  8   était la seule source principale, la meilleure source que l'on puisse

  9   imaginer pour une telle étude.

 10   Q.  Pouvez-vous nous expliquer pour quelle raison le recensement est, à

 11   votre avis, l'une des meilleures sources que l'on puisse utiliser pour une

 12   telle étude ?

 13   R.  Un recensement de la population est une étude exhaustive de la

 14   population dans quelque pays que ce soit, effectué à peu près tous les 10

 15   ans puisque cela représente un effort considérable. Comme je l'ai dit, ce

 16   recensement concerne la population tout entière de tel ou tel pays, et de

 17   nombreuses caractéristiques de la population. En Bosnie le recensement de

 18   1991 s'étend à des questions se rapportant à la population elle-même et

 19   aussi à d'autres questions comme l'agriculture, que nous avons laissée de

 20   côté. Nous nous sommes fondés sur les données décrivant la population de

 21   Bosnie-Herzégovine.

 22   Q.  Par quelle méthode avez-vous abordé les carences du recensement ?

 23   R.  Tout d'abord j'aimerais mentionner les défauts, les carences. La

 24   principale carence en ce qui concerne les données du recensement étant le

 25   fait que lorsque les données ont été transférées et informatisées, on a

 26   utilisé les techniques de l'OCR, enregistrement optique ou saisie optique

 27   de caractère, et pendant ce processus des erreurs ont eu lieu. On peut voir

 28   ces erreurs en ce sens que certains noms de personnes sont erronés. Il y a


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  1   des erreurs d'orthographe et d'autres erreurs encore. Les autres catégories

  2   ont été moins touchées par ces erreurs que les noms propres.

  3   Afin d'éliminer ces erreurs, puisque les noms nous importaient beaucoup du

  4   point de vue de la méthodologie, nous avons utilisé plusieurs techniques.

  5   Dans le cadre d'au moins trois grand projets, nous avons procédé à la

  6   correction des erreurs d'orthographe concernant les noms. Tout d'abord nous

  7   avons utilisé un programme informatique pour déceler des combinaisons de

  8   lettres qui n'existent tout simplement pas dans la langue bosniaque. Nous

  9   avons eu des personnes qui parlent la langue couramment ou dont c'est la

 10   langue maternelle qui ont identifié ces combinaisons qui sont tout

 11   simplement impossibles. Donc elles ont été identifiées et remplacées par

 12   celles qui paraissent les plus probables.

 13   Deuxième méthode que nous avons utilisée, elle consiste en la rédaction de

 14   listes de noms et nous avons demandé encore une fois à des personnes dont

 15   le B/C/S est la langue maternelle de corriger les noms.

 16   Et la troisième méthode se fondait sur les différents ménages ou foyers.

 17   Nous avons tenté d'identifier la manière exacte d'épeler le nom ou les noms

 18   pour chaque foyer. Une fois que le nom de famille avait été identifié, tous

 19   les autres membres de la famille dont les noms étaient erronés, leurs noms

 20   ont été corrigés.

 21   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] De combien de temps avez-vous

 22   besoin, Madame Marcus, pour interroger ce témoin ?

 23   Mme MARCUS : [interprétation] Nous essayons de mener à bien cet

 24   interrogatoire dans une période aussi raisonnable que possible. Nous avions

 25   estimé 50 minutes. Je ferai de mon mieux pour m'en tenir à cette

 26   estimation.

 27   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien.

 28   Mme MARCUS : [interprétation]


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  1   Q.  Nous allons passer maintenant à la page 10. Pouvez-vous nous dire qui

  2   figure ou qui est inclus dans les registres des électeurs.

  3   R.  Dans le registre des électeurs, l'on trouve toutes les personnes

  4   éligibles qui pouvaient voter dans les élections locales en Bosnie-

  5   Herzégovine en 1997 et 1998. Ceux qui n'y figurent pas sont ceux qui

  6   n'étaient pas éligibles, qui n'avaient pas le droit de vote, qui étaient

  7   trop jeunes, notamment.

  8   Q.  Passons à la page 11. Pouvez-vous brièvement nous décrire les méthodes

  9   que vous avez utilisées pour effectuer cette étude ?

 10   R.  Notre objectif était de produire des statistiques fiables sur la base

 11   de sources d'origine, c'est-à-dire le recensement et le registre des

 12   électeurs, afin de nous fonder sur des données individuelles.

 13   L'appartenance ethnique était une caractéristique importante de la

 14   population, et pour en tenir compte dans le cadre de notre étude, nous

 15   avons dû comparer les données dans le recensement au registre des

 16   électeurs. Donc la partie la plus importante de la méthodologie consistait

 17   à comparer ces deux sources. Nous avons également, par la suite, effectué

 18   des comparaisons avec la liste des personnes portées disparues, nous les

 19   avons comparées au recensement pour les mêmes raisons, étant donné que

 20   l'appartenance ethnique ne figure pas dans la liste des personnes portées

 21   disparues et le registre des électeurs.

 22   Q.  Pouvez-vous nous dire quelle définition de l'appartenance ethnique a

 23   été utilisée ?

 24   R.  La définition qui découle du recensement de la population  --

 25   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Cepic.

 26   M. CEPIC : [interprétation] Pardon, mais je pensais avoir entendu une

 27   question directrice, mais en fait non, ça va.

 28   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien, continuez.


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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que je peux continuer ?  L'appartenance

  2   ethnique se fondait sur les dossiers, les fichiers du recensement. Il y

  3   avait une question concernant l'appartenance ethnique. Chaque personne

  4   avait le droit de s'identifier en donnant la réponse qui lui paraissait le

  5   plus opportune. C'était une question ouverte. Il y avait quelque 100

  6   catégories dans les données du recensement. Nous avons regroupé ces 100

  7   catégories en quatre groupes principaux. Les personnes qui se disaient

  8   Serbes ont été qualifiées de Serbes, les personnes qui se qualifiaient de

  9   Musulmans ou Bosniaques ont été qualifiés de Musulmans, les Croates ont été

 10   qualifiés de Croates, et toutes les autres ethnies, y compris les

 11   Yougoslaves, ont été classés dans la dernière catégorie que nous avons

 12   qualifiée de la catégorie autres.

 13   Il n'était pas si difficile d'identifier l'appartenance ethnique grâce aux

 14   correspondances établies entre les données du recensement et le registre

 15   des électeurs, ainsi que les registres du CICR concernant les personnes

 16   portées disparues. Il a été assez facile de transférer les informations du

 17   recensement au registre des électeurs ou les listes de personnes portées

 18   disparues. Donc c'était un aspect essentiel de notre méthodologie fondée

 19   sur une seule définition de l'appartenance ethnique et sur la base des

 20   définitions issues de cette question ouverte posée dans le cadre du

 21   recensement.

 22   Mme MARCUS : [interprétation]

 23   Q.  Page 13. Pouvez-vous nous expliquer comment vous avez identifié qui

 24   tombait dans la catégorie des personnes déplacées en interne, et qui était

 25   qualifié de réfugié ?

 26   R.  Nous nous sommes fondés sur une approche statistique et non juridique.

 27   D'après cette approche, une personne déplacée en interne est une personne

 28   qui résidait au lendemain du conflit dans une municipalité différente de


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  1   celle qui figure dans le recensement. Donc pour décider qui était déplacé

  2   ou non, nous avons comparé les lieux de résidence des personnes tels que

  3   consignés, donc le lieu de résidence d'une part avant le conflit dans le

  4   cadre du recensement de 1991, et d'autre part pour la période après le

  5   conflit, les registres d'électeurs.

  6   Il en va de même en ce qui concerne les réfugiés, à une différence près,

  7   les réfugiés ne sont pas les personnes qui se sont déplacées à l'intérieur

  8   des frontières de la Bosnie-Herzégovine, mais celles qui ont quitté le pays

  9   et sont parties à l'étranger.

 10   Q.  Page 14. Dans votre rapport, vous faites référence à des nombres

 11   minimaux. Pouvez-vous nous expliquer ce que cela veut dire ?

 12   R.  Cela se réfère aux nombres qui se fondent sur les registres qui ont été

 13   comparés les uns aux autres. Sur la base de ces comparaisons, il a été

 14   possible de produire ce que l'on appelle nombres minimaux. Tous ces nombres

 15   peuvent être étayés par des listes de personnes dont les noms sont donnés

 16   et d'autres détails aussi, mais nous savons que c'est une sous-évaluation.

 17   Je ne devrais pas parler d'évaluation, mais il s'agit d'un nombre qui est

 18   inférieur au nombre réel. Nous savons que ces chiffres sont incomplets. Il

 19   s'agit bien de statistiques fiables qui se fondent sur des données fiables,

 20   mais nous savons que ces chiffres ne sont pas complets, et nous pouvons

 21   nous référer à d'autres sources, par exemple, celle du HCR, qui faisait

 22   état d'un nombre bien plus élevé de personnes déplacées à l'intérieur du

 23   pays.

 24   Q.  J'aimerais en venir à la page 16. Pouvez-vous nous dire ce que

 25   représente ce tableau.

 26   R.  C'est un tableau extrait du rapport, le tableau 3A et qui illustre la

 27   composition ethnique de la municipalité de Visegrad tant en termes de

 28   chiffres qu'en termes de pourcentages. Vous voyez la colonne concernant le


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  1   recensement de 1991 où il est fait état des chiffres qui ressortent du

  2   recensement. Puis vous voyez les personnes qui avaient le droit de vote en

  3   1997 et 1998, raison pour laquelle le total est inférieur au total pour la

  4   municipalité.

  5   Puis vous voyez à la colonne suivante des données échantillon. Ainsi, le

  6   chiffre total, 9 241 ne représente pas la population de 1997 dans son

  7   ensemble, mais simplement un échantillon assez large. Puis nous avons

  8   inclus les conclusions principales en termes de pourcentage qui font

  9   fiables. Peu importe qu'elles étaient obtenues sur la base du recensement

 10   ou du registre des électeurs, on peut partir du principe que ces

 11   pourcentages sont fiables et reflètent de manière fiable leur composition

 12   ethnique. Nous voyons, par exemple, que le pourcentage de Serbes en 1991

 13   était de 32,6 %, et ce chiffre est passé, d'après le registre des électeurs

 14   en 1997, est passé à 95,9 %. Pour les Musulmans, la situation était quelque

 15   peu différente. Le chiffre est passé de 62,5 % à moins de 1 %, et ainsi de

 16   suite pour chaque groupe ethnique.

 17   Q.  Pouvez-vous nous dire, au bas de la page, quelles sont les conclusions

 18   qui ont été tirées du tableau ou du graphique que l'on voit au bas de la

 19   page ?

 20   R.  Ce graphique montre les pourcentages extraits du tableau 3A. Chaque

 21   groupe ethnique y figure séparément. Nous voyons une très forte hausse du

 22   pourcentage de Serbes et la baisse spectaculaire du pourcentage des

 23   Musulmans. On voit sur ce graphique que la population musulmane est presque

 24   réduite à néant à Visegrad.

 25   Q.  Passons maintenant à la page 17. Pouvez-vous nous dire brièvement ce

 26   que représente ce tableau, et quelles conclusions ont pu en être tirées ?

 27   R.  Il s'agit du tableau 3B, issu également du rapport, et qui consiste en

 28   deux parties. Mais ici, je vous montre uniquement la partie comportant les


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  1   pourcentages et non les chiffres absolus, mais vous voyez les chiffres

  2   absolus dans le rapport même.

  3   Il faut lire ce tableau ligne par ligne. Pour chaque appartenance ou

  4   chaque groupe ethnique, on voit la distribution correspondant au lieu de

  5   résidence post-conflit. Pour le premier groupe, on voit que pendant la

  6   période après le conflit, les Serbes résidaient principalement encore à

  7   Visegrad. Il est question de 96,9 % à la première ligne. Cette municipalité

  8   signifie que ce sont ceux qui, au sein de la population initiale décrite

  9   dans le recensement, ne sont pas partis ailleurs. Ils sont restés à

 10   Visegrad.

 11   Donc d'après ce tableau, 96,9 % sont restés à Visegrad. Par la force des

 12   choses, les pourcentages de ceux qui ont été enregistrés dans d'autres

 13   municipalités de Bosnie ou d'autres lieux, ces pourcentages sont

 14   extrêmement faibles. Autres municipalités, moins de 1 %, et à l'étranger,

 15   2,2 %.

 16   En ce qui concerne les Musulmans, la situation est radicalement différente.

 17   Sur la rubrique, cette municipalité, on voit le pourcentage infime de 0,01

 18   % pour ce qui est de Visegrad et la période post-conflit, et tous les

 19   autres, c'est-à-dire 99,9 % de la population musulmane qui venait de

 20   Visegrad, se retrouvent soit dans d'autres municipalités, soit à

 21   l'étranger, dans un autre pays.

 22   Il en va de même pour les autres groupes, et leur répartition par lieu de

 23   résidence, répartition entre Visegrad, d'une part, et ailleurs, d'autre

 24   part. Mais pour résumer tout cela, on peut dire que quelque 65 % de la

 25   population de Visegrad, antérieur à la guerre, se retrouvait déplacé ou

 26   avait quitté le pays, 65 %, toutes ethnies confondues.

 27   Parmi ces groupes ethniques, presque tous les Musulmans avaient quitté la

 28   municipalité. Parmi les autres non-Serbes, quelques Croates et quelques


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  1   autres sont restés sur place, et d'autres sont partis. De façon générale,

  2   quelque 63 % des non-Serbes ont quitté Visegrad. Une majorité, par

  3   conséquent. Bien entendu, j'ai mis l'accent sur le fait que 97 % des Serbes

  4   sont restés à Visegrad.

  5   Bien sûr cela a eu un impact sur la composition ethnique de la municipalité

  6   au lendemain de la guerre. Suite à ces développements, la municipalité

  7   était largement dominée par les Serbes en 1997. La très grande majorité de

  8   la population était Serbe.

  9   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien. Nous devons faire la

 10   pause maintenant.

 11   --- L'audience est suspendue à 17 heures 35.

 12   --- L'audience est reprise à 18 heures 10.

 13   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Madame Marcus.

 14   Mme MARCUS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Avant que je ne

 15   reprenne, il y a juste une brève question de procédure que je voudrais

 16   évoquer en ce qui concerne le précédent témoin. Apparemment mon collègue M.

 17   Weber a présenté le document 185 de la liste 65 ter, qui a été admis au

 18   dossier comme pièce P116, mais en l'occurrence cette pièce faisait déjà

 19   partie de la liste 65 ter avec une cote antérieure, un numéro qui précédait

 20   cela. Donc il s'agissait du 143 de la liste 65 ter. Nous demandons s'il

 21   serait possible d'utiliser le numéro d'origine de la liste 65 ter, plutôt

 22   qu'un doublon, 185.

 23   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, ça permettra d'éviter une

 24   confusion. La greffière va nous le dire.

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que je pourrais revoir la transcription

 26   ?

 27   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Alarid.

 28   M. ALARID : [interprétation] Je voudrais également demander que l'on prenne


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  1   en compte la déclaration au MUP de 1994 de ce même témoin, que celle qui

  2   avait été téléchargée comme 2D02-0001.

  3   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, nous admettons cela au dossier.

  4   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, le document est

  5   admis sous la cote 1D52, sous pli scellé.

  6   Mme MARCUS : [interprétation]

  7   Q.  Madame Tabeau, dans l'intérêt d'efficacité et parce que l'ensemble de

  8   votre déposition c'est votre rapport d'expert qui a reçu une cote

  9   provisoire d'identification, nous souhaiterions maintenant passer à la

 10   dernière page de l'exposé PowerPoint, c'est-à-dire la page 24.

 11   Je voudrais vous demander, s'il vous plaît, d'expliquer ce que nous

 12   voyons sur le tableau à main droite en haut, c'est-à-dire les figures 3 et

 13   4 de la page 19 de votre rapport d'expert.

 14   R.  Ces deux tableaux proviennent de la deuxième partie du rapport dans

 15   lequel le nombre de personnes portées disparues de la municipalité de

 16   Visegrad et de la région de Visegrad a été analysé. Le tableau du haut

 17   montre la répartition en ce qui concerne les personnes portées disparues

 18   pour la municipalité de Visegrad en fonction du mois de disparition. Je

 19   suis en train de parler de ce tableau-ci. Voilà un tableau.

 20   Mme MARCUS : [interprétation] Je crois que Mme Tabeau souhaiterait que nous

 21   utilisions le rétroprojecteur, et elle est en train de désigner le tableau

 22   avec le stylet. Donc peut-être que --

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Comme j'ai dit, les personnes portées

 24   disparues dont on a dit qu'elles étaient portées disparues dans la

 25   municipalité de Visegrad sont indiquées ici avec l'indication du mois de

 26   disparition pendant l'ensemble du conflit, en commençant en avril 1992,

 27   jusqu'à la dernière personne qui est inscrite pour août 1995. J'ai vérifié

 28   l'ensemble du tableau ce matin, et je n'ai vu aucun chiffre pour la période


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  1   suivant août 1995.

  2   A l'évidence, les chiffres les plus élevés concernant les personnes

  3   portées disparues ont fait l'objet d'un rapport en mai, juin et juillet

  4   1992. Le maximum absolu correspond à juin 1992. Ça,  c'est pour le premier

  5   tableau, le tableau du haut.

  6   Quant au tableau du pays, ayant démontré que le nombre le plus

  7   important de personnes portées disparues c'était au cours du printemps et

  8   de l'été 1992, à ce moment-là le tableau du bas montre la répartition des

  9   disparitions suivant les jours de disparition à compter d'avril 1992

 10   jusqu'à la fin de juin 1992. Le 15 mai est là quelque part. En partant de

 11   cette journée, les chiffres sont très nettement plus élevés, hauts et plus

 12   hauts. Pour la deuxième partie du mois de mai, c'est la première période où

 13   il y a eu à l'évidence une activité accrue pour ce qui est de ces

 14   disparitions, puis pour le mois de juin jusqu'au 20 juin et les derniers

 15   jours de juin.

 16   Du côté du 25 mai, du 14 juin et du 20 juin, pour ces trois journées-

 17   là, nous avons les données maximales où les chiffres sont les plus élevés

 18   au cours de la période.

 19   Q.  Je vous remercie.

 20   Mme MARCUS : [interprétation] Je voudrais demander, s'il vous plaît, à la

 21   greffière de présenter à l'écran le document ID 0641-6041.

 22   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Cepic.

 23   M. CEPIC : [interprétation] Nous n'avons pas ce document sur notre liste,

 24   tout au moins sous ce numéro de sorte que -- pourrions-nous savoir ce

 25   qu'est ce document ?

 26   Mme MARCUS : [interprétation] Oui. Il s'agit d'un document qui a reçu une

 27   cote ERN ce matin. C'est le premier de deux tableaux qui ont été préparés

 28   par Mme Tabeau. Le premier tableau contient le nom des victimes qui sont


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  1   nommées dans l'acte d'accusation, et le deuxième tableau contient d'autres

  2   noms.

  3   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Maître Cepic.

  4   M. CEPIC : [interprétation] Monsieur le Président, avec votre permission,

  5   j'ai déjà bien souligné notre objection, mais je souhaite la répéter. Je ne

  6   vois aucune base à l'authenticité ou la fiabilité des renseignements

  7   présentés de cette manière. Nous avons déjà l'acte d'accusation avec ses

  8   annexes. Nous avons le rapport d'expert témoin d'août 2001 avec certaines

  9   annexes, et ceci, c'est quelque chose de tout à fait nouveau, un troisième

 10   document qui n'entre dans aucune des deux catégories précédentes. Là

 11   encore, permettez-moi de le répéter : je ne vois absolument aucun

 12   fondement, aucune base pour permettre de croire l'authenticité de ce

 13   document.

 14   Mme MARCUS : [interprétation] Monsieur le Président, j'étais sur le point

 15   de vous donner les bases, fondements d'authenticité. Il s'agit là d'une

 16   liste de noms tirés de l'acte d'accusation. Elle a été communiquée à

 17   l'unité de Mme Tabeau, et elle-même et son personnel ont procédé à des

 18   recherches, et le résultat de ces recherches figure sur ce tableau.

 19   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Non, non, non. Il faut que vous

 20   obteniez une déposition du témoin sur ce point.

 21   Mme MARCUS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Est-ce que je

 22   peux poser des questions à Mme Tabeau ?

 23   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

 24   Mme MARCUS : [interprétation]

 25   Q.  Madame Tabeau, est-ce que vous reconnaissez le tableau que vous voyez à

 26   l'écran devant vous ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Pourriez-vous nous dire ce que c'est ce tableau ?


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  1   R.  C'est la liste des victimes d'après les annexes que l'on trouve dans

  2   l'acte d'accusation de l'affaire Lukic et Lukic. C'est une liste qui est

  3   encore plus longue que les renseignements qui figurent dans les annexes à

  4   l'acte d'accusation. Il y a là différents blocs de variables qui sont

  5   incluses et que je peux expliquer, mais ce que nous voyons à l'écran c'est

  6   un certain nombre de données, de points, de variables, qui ont comme code L

  7   et L, et ces points proviennent en partie de l'acte d'accusation pour ce

  8   qui est des noms, des âges ou âges approximatifs des victimes. En outre, il

  9   y a également des renseignements fournis par les familles qui ont été

 10   inclus. Il y a des variables supplémentaires dans le tableau général qui

 11   commence avec les données du recensement. Un certain nombre de variables

 12   sont indiquées dans le recensement et l'élément suivant --

 13   Q.  Excusez-moi de vous interrompre --

 14   R.  Oui. Les blocs suivants sont les variables appelées les électeurs et

 15   DDPR. Ce sont les sources qui rendent compte de la population qui a survécu

 16   --

 17   Q.  Madame Tabeau, la --

 18   R.  -- après le conflit et ainsi de suite. Oui.

 19   Q.  Excusez-moi de vous interrompre, mais pouvez-vous confirmer que ce

 20   tableau a bien été préparé par vous et votre personnel ?

 21   R.  Oui.

 22   Q.  Pouvez-vous confirmer que vous avez examiné les résultats et que vous

 23   êtes satisfaite en ce qui concerne leur exactitude ?

 24   R.  Oui. J'ai effectivement examiné les résultats, et j'ai résumé les cas

 25   où il y avait des chevauchements par rapport aux diverses sources que nous

 26   avons analysées avec les listes de victimes.

 27   Q.  Excusez-moi. Est-ce que vous pourriez confirmer que si la Chambre de

 28   première instance avait des questions à vous poser en ce qui concerne


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  1   chacune de ces entrées de ce tableau, vous seriez en mesure d'apporter ces

  2   éclaircissements ?

  3   R.  Bien entendu, dans la mesure où les renseignements qui figurent sur le

  4   tableau général seront pris en considération.

  5   Mme MARCUS : [interprétation] Je voudrais maintenant demander que ce

  6   tableau soit versé au dossier comme élément de preuve.

  7   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Cepic.

  8   M. CEPIC : [interprétation] Monsieur le Président, nous nous opposons à

  9   cette demande jusqu'au moment où nous aurons pu nous-mêmes analyser le

 10   document et le vérifier. Comme l'a dit mon confrère, nous n'avons reçu ce

 11   document que ce matin et mon assistante et moi-même, en l'occurrence,

 12   n'avons pas eu la possibilité de vérifier les références de ce document et

 13   voir si tout correspond bien, également du point de vue des autres sources

 14   que l'Accusation indique comme fondement de ce tableau.

 15   Mme MARCUS : [interprétation] Monsieur le Président, peut-être qu'il

 16   pourrait recevoir une cote aux fins d'identification et on pourrait

 17   demander son versement au dossier comme élément de preuve à la suite des

 18   questions que la Défense aura pu poser.

 19   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Le document doit être marqué

 20   pour identification.

 21   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ça devient la pièce numéro P119, cote

 22   provisoire pour identification.

 23   Mme MARCUS : [interprétation] Je voudrais maintenant demander à l'huissière

 24   de présenter le document ID 0641-6040.

 25   Et pour votre information, Monsieur le Président, ceci sera mon tout

 26   dernier sujet.

 27   Q.  Madame Tabeau, est-ce que vous reconnaissez le tableau qu'on voit à

 28   l'écran devant vous ?


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  1   R.  Oui.

  2   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Cepic.

  3   M. CEPIC : [interprétation] Brièvement, Monsieur le Président, c'est

  4   toujours la même objection en ce qui concerne le document précédent.

  5   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

  6   Mme MARCUS : [interprétation]

  7   Q.  Pourriez-vous dire aux membres de la Chambre ce que représente ce

  8   tableau, s'il vous plaît.

  9   R.  C'est la liste des victimes -- enfin, une liste qui nous a été fournie

 10   par l'équipe chargée du procès Lukic et Lukic. On nous a demandé de

 11   vérifier toutes les références de cette liste avec l'une des sources

 12   principales que nous avons utilisées pour notre rapport de façon à ce qu'on

 13   puisse procéder à toutes les vérifications des références en l'espèce. Il

 14   s'agit là de la liste de personnes portées disparues établie par le CICR.

 15   Q.  Pouvez-vous confirmer que ceci est bien un tableau préparé par vous-

 16   même et votre personnel ?

 17   R.  Oui, je le confirme.

 18   Q.  Pouvez-vous confirmer que vous avez examiné les résultats et que vous

 19   êtes satisfaite de l'exactitude du document ?

 20   R.  Oui, je peux le confirmer.

 21   Q.  Pouvez-vous confirmer que si la Chambre de première instance ou la

 22   Défense avait des questions à vous poser concernant chacune des entrées de

 23   ce tableau, vous seriez en mesure de fournir des éclaircissements ?

 24   R.  Oui.

 25   Mme MARCUS : [interprétation] Je voudrais également demander que l'on verse

 26   au dossier ce document avec une cote pour identification.

 27   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

 28   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Document est admis en tant que pièce


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  1   P120 avec une cote pour identification.

  2   Mme MARCUS : [interprétation]

  3   Q.  Madame Tabeau, en ce qui concerne ces deux tableaux que nous venons

  4   juste de marquer pour identification, pourriez-vous nous parler brièvement

  5   des dates et des points exacts ou des inexactitudes de la fiabilité

  6   concernant les dates de décès ou les dates de disparition ?

  7   R.  Pour ce qui est des dates, les points concernant les données, il est

  8   difficile de se rappeler très exactement. Mais il arrive souvent que les

  9   dates ne soient pas présentées de façon absolument exacte ou pas complète,

 10   par rapport aux personnes qui ont rendu compte à ce sujet. Donc avec la

 11   liste du CICR, il y a disons 30 % dans l'édition de 2005 en ce qui concerne

 12   la date de naissance qui ne serait pas nécessaire pour avoir des éléments

 13   complets avec toutes ces parties nécessaires, le jour, le mois, l'année

 14   dont il serait rendu compte, mais lorsqu'on en vient à l'année de

 15   naissance, alors il n'y en a que quelques-uns dans l'ensemble de la liste

 16   de 22 000 fiches qui ne soient pas disponibles. Une dizaine, une douzaine

 17   ne comportent pas l'année de naissance.

 18   Mais d'une façon générale, ce n'est pas seulement pour la liste du

 19   CICR. Dans de nombreuses sources, tout particulièrement les sources qui ont

 20   été utilisées sans pouvoir utiliser de cartes d'identité ou de passeports

 21   ou documents rendant compte de la date de naissance, noir sur blanc, ces

 22   dates ne sont pas directement indiquées. Plus particulièrement si la date a

 23   été recueillie dans des circonstances chaotiques ou dans une situation

 24   juste précédant certains événements dramatiques, alors ceci a eu évidemment

 25   une incidence sur la qualité de ce qui est indiqué et il y a donc certaines

 26   carences que l'on peut voir également en ce qui concerne les dates.

 27   Je parle de dates de naissance, mais la même chose vaut également

 28   pour les dates de disparition ou date de décès. De nombreuses sources avec


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  1   lesquelles nous avons dû travailler ont été établies par des personnes qui

  2   n'étaient pas professionnelles, et pas par des statisticiens. Il y avait

  3   des volontaires ou des membres  d'organisations non gouvernementales qui

  4   voulaient communiquer les renseignements qu'ils avaient obtenus de telle ou

  5   telle personne. Ces dates sont simplement indiquées avec les insuffisances,

  6   soit qu'elles soient incomplètes ou qu'elles comportent certaines erreurs.

  7   Donc les références et vérifications, nous avons vu parfois de petites

  8   différences pour ce qui était de la date de naissance ou de disparition, ou

  9   de décès.

 10   Q.  Je vous remercie, Madame Tabeau. Je n'ai pas d'autres questions.

 11   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Madame Marcus.

 12   Nous avons entendu les arguments présentés par Me Alarid et Me Cepic, en

 13   particulier ceux présentés par Me Alarid. Me Alarid s'est plaint du

 14   caractère tardif de la communication des documents et du fait qu'il n'avait

 15   pas eu suffisamment de temps pour préparer un contre-interrogatoire. La

 16   Chambre pense que ce point est fondé dans cet argument, et à la lumière de

 17   cela, nous allons reporter le contre-interrogatoire jusqu'à mercredi de

 18   cette semaine.

 19   Alors, Monsieur Groome, est-ce que ceci s'adapte bien dans votre

 20   programme ? Comment ça s'adapte ?

 21   M. GROOME : [interprétation] Je pense que nous pouvons ajuster les choses

 22   puisque nous n'avons pas été en mesure de parler à Mme Tabeau. Je voudrais

 23   lui demander si elle a prévu de prendre des congés dans un avenir proche,

 24   ou si nous pouvons lui demander si elle est disponible mercredi prochain

 25   pour un contre-interrogatoire.

 26   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Madame Tabeau, est-ce que vous serez

 27   libre sur-le-champ ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je ne serai pas disponible vendredi.


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  1   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Pas disponible.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne suis pas disponible vendredi, mais

  3   mercredi et jeudi, je serai là.

  4   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je pense qu'on pourrait terminer le

  5   contre-interrogatoire mercredi certainement.

  6   M. GROOME : [interprétation] Je ferai les ajustements nécessaires au

  7   calendrier.

  8   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Dans ce cas, Madame Tabeau, nous

  9   pouvons vous remercier pour le moment et vous pouvez vous retirer.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 11   [Le témoin quitte la barre]

 12   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Avez-vous un autre témoin ?

 13   M. GROOME : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Il y a le Dr John

 14   Clark qui attend dehors.

 15   En attendant le témoin, est-ce que je pourrais soulever une brève question

 16   pour la Chambre.

 17   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

 18   M. GROOME : [interprétation] J'ai entendu la décision concernant Témoin VG-

 19   42, et j'ai bien pris note de la décision de la Chambre. Je voudrais

 20   m'excuser auprès de la Chambre si j'ai laissé entendre que j'anticipais sur

 21   la décision de la Chambre. Non, ce que je voulais c'était de m'assurer

 22   qu'il n'y ait pas de hiatus dans les temps.

 23   Aussi, concernant des requêtes vis-à-vis d'un certain nombre de

 24   témoins dans un effort visant à s'assurer que le programme ne soit pas

 25   retardé et évidemment, il y a des problèmes de passeport où il faut parfois

 26   trois semaines. J'ai demandé à certains membres du personnel de travailler

 27   avec les témoins pour obtenir les passeports mais si la Chambre pense que

 28   cela n'est pas souhaitable, j'arrêterai de le faire. Ce n'est pas pour


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  1   anticiper pour telle ou telle décision de la Chambre. C'est simplement que

  2   si la Chambre autorise l'inclusion de ces témoins, je voudrais que le temps

  3   qui s'écoule entre la décision et le moment de les faire venir soit le plus

  4   court possible.

  5   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Dans ces circonstances-là, votre

  6   pratique est acceptable.

  7   Maître Cepic.

  8   M. CEPIC : [interprétation] Je voudrais profiter de ces quelques minutes

  9   pour demander à l'Accusation de bien vouloir communiquer les documents le

 10   plus tôt possible et en temps et en heure à partir de ce moment afin que

 11   notre travail soit facilité et rendu plus efficace. Merci.

 12   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous avez entendu ce blâme.

 13   M. GROOME : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

 14   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 15   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Veuillez faire prononcer la

 16   déclaration solennelle au témoin.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 18   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 19   LE TÉMOIN: JOHN CLARK [Assermenté]

 20   [Le témoin répond par l'interprète]

 21   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous pouvez vous asseoir et on va

 22   commencer.

 23   M. GROOME : [interprétation] C'est Mme Mazzocco qui va faire

 24   l'interrogatoire principal dans ce cas précis.

 25   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Madame Mazzocco, commencez.

 26   Mme MAZZOCCO : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 27   Interrogatoire principal par Mme Mazzocco : 

 28   Q.  [interprétation] Pouvez-vous nous dire votre nom ?


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  1   R.  John Clark.

  2   Q.  Docteur Clark, pouvez-vous donner au Tribunal une description de votre

  3   formation, de votre profession et les tâches qui vous ont été données dans

  4   un contexte international ?

  5   R.  Je suis chargé de la médecine légale. Je suis un médecin et je suis

  6   spécialiste dans le domaine de savoir comment les gens sont morts par le

  7   truchement d'examens post-mortem. Je me suis préoccupé surtout des

  8   blessures sur les cadavres et des personnes qui sont mortes du fait de

  9   quelque chose de suspect. Je suis un spécialiste de la médecine légale

 10   depuis 25 ans, surtout aux Etats-Unis et en Ecosse, là où je suis basé

 11   actuellement, et en Angleterre.

 12   Q.  Vous avez travaillé dans un contexte international ?

 13   R.  Ma principale contribution a été le travail que j'ai fait pendant trois

 14   ans, de 1999 à 2001, où j'ai été médecin légiste en chef en Bosnie et en

 15   Croatie pour le TPIY chargé de l'emplacement où on stocke les cadavres.

 16   J'étais chargé des examens post-mortem.

 17   Q.  Merci.

 18   Mme MAZZOCCO : [interprétation] J'aimerais qu'on voie sur l'écran le

 19   document de la liste 65 ter portant le numéro 2-21 [comme interprété].

 20   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] D'où êtes-vous, Docteur ?

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Désolé, j'ai pas précisé. Je suis de Glasgow.

 22   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Glasgow. Vous êtes Ecossais.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je suis Ecossais.

 24   Mme MAZZOCCO : [interprétation]

 25   Q.  Docteur Clark, est-ce que vous voyez devant vous votre curriculum

 26   vitae à jour ?

 27   R.  Oui.

 28   Mme MAZZOCCO : [interprétation] J'aimerais faire verser ce curriculum


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  1   vitae au dossier qui porte le poste actuellement occupé par le témoin et

  2   son expérience professionnelle.

  3   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

  4   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira du document P121.

  5   Mme MAZZOCCO : [interprétation]

  6   Q.  Vous avez dit que vous étiez médecin légiste en chef lors de

  7   l'opération du TPIY en Bosnie-Herzégovine. Quelles étaient les années en

  8   question ?

  9   R.  1999, 2000 et 2001.

 10   Q.  Nous avons entendu des moyens selon lesquels beaucoup de personnes ont

 11   été tuées à Visegrad. Est-ce que vous avez pu examiner toutes ces victimes

 12   ?

 13   R.  Je ne sais pas combien de gens ont été tués à Visegrad. Je pense,

 14   d'après ce que j'ai compris, qu'il y en a eu beaucoup. Ma seule

 15   participation dans cette région concernait un site que nous avons appelé le

 16   site de Slap. Il y a eu 131 cadavres. C'était un exercice particulier que

 17   nous avons mené à la fin de l'année 2000 et à nouveau en 2001.

 18   Q.  Est-ce que vous avez travaillé ensemble avec le comité bosniaque ?

 19   R.  Oui. C'est assez inhabituel car la plupart du travail que nous faisons

 20   et que nous avions fait pour le Tribunal, à la fois en terme d'exhumation

 21   et là où on stocke les cadavres, dans ce cas précis le site de Slap,

 22   c'étaient les gens de la commission bosniaque qui ont fait l'exhumation et

 23   qui nous ont remis les cadavres. Le Tribunal n'a fait que faire les examens

 24   post-mortem. Ensuite nous avons remis à nouveau ces cadavres au comité

 25   bosniaque.

 26   Q.  Qui signait le rapport d'autopsie ?

 27   R.  Il y avait toujours présents trois médecins légistes qui faisaient

 28   l'examen ensemble. Il y avait trois tables. Ce serait le médecin légiste


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  1   chargé de l'examen en question qui signerait le rapport d'autopsie.

  2   Cela étant dit, il y a eu beaucoup de discussions entre nous à propos

  3   de ce que nous voyions, de façon à ce qu'il n'y ait qu'une personne qui

  4   fasse le rapport, les deux autres personnes participaient également.

  5   Q.  Vous avez dit que vous avez examiné 131 cadavres. Est-ce que vous

  6   pouvez nous donner le sexe et l'âge de ces cadavres ?

  7   R.  Je n'ai pas mon rapport avec moi, mais je crois que 114 environ étaient

  8   des hommes. J'ai une copie de mon propre rapport si je peux le consulter.

  9   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui. Vous êtes autorisé à le faire.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] La plupart d'entre eux étaient des hommes. Je

 11   peux vous le dire. Oui. Je vois ici : 114 des 131 cadavres étaient des

 12   hommes, 14 étaient des femmes et dans trois cas nous n'avons pas pu

 13   déterminer quel était leur sexe. Il s'agissait surtout de personnes jeunes.

 14   Mme MAZZOCCO : [interprétation]

 15   Q.  Est-ce qu'on a assigné des noms à ces cadavres ?

 16   R.  Oui. La commission bosniaque a donné des chiffres aux cadavres alors

 17   qu'ils les exhumaient au fur et à mesure. Pour une raison que je ne connais

 18   pas, cela a commencé avec le numéro 317, mais en tout cas, quand ils nous

 19   ont remis ces cadavres, on a continué avec ce système de numérotation. Nous

 20   mettions d'abord des lettres à la fin, puis à la fin, une note concernant

 21   le site sur lequel on travaillait. Donc le numéro qu'on utilisait était en

 22   quelque sorte la suite du numéro qui était affecté par la commission

 23   bosniaque.

 24   Q.  Est-ce que vous pouvez nous décrire quelles sont les principales

 25   difficultés avec ce type d'examen ?

 26   R.  Il s'agissait tous de cadavres qui étaient sous forme de squelette.

 27   Tous les tissus avaient disparu, il ne restait que le squelette et les os

 28   étaient tous mélangés, en quelque sorte, donc mélangés avec des tissus de


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  1   vêtements et d'autres morceaux de matériaux. Il fallait faire avec ces

  2   squelettes, avec ces restes.

  3   Mais notre travail consistait à essayer de retrouver des signes de

  4   blessures et essayer d'établir la cause du décès. Tout ce qu'on pouvait

  5   faire, c'était les blessures occasionnées aux os. Si quelqu'un avait été

  6   blessé d'une façon qui ne laissait pas de traces sur les os, on n'aurait

  7   pas pu le constater.

  8   De même, nous devions tenir à l'esprit que les blessures peuvent être

  9   occasionnées aux os même après le décès, et qu'il est très difficile en

 10   examinant seulement les os de déterminer si ces blessures ont été subies

 11   pendant que la personne était en vie ou déjà morte. Par conséquent, il nous

 12   fallait avoir l'esprit extrêmement ouvert, et il était probable que ces

 13   cadavres auraient pu être endommagés après le décès, à cause du fait qu'ils

 14   étaient dans une fosse, parce qu'ils ont été touchés, et cetera, et cetera.

 15   Mais avec de l'expérience, nous avons pu reconnaître ce qui était

 16   probablement dû à une opération après le décès ou non. En tout cas, voilà

 17   la principale difficulté; ne traiter qu'avec des os et déterminer si des

 18   blessures ont été occasionnées avant ou après le décès.

 19   Deuxième difficulté, savoir quelle était l'origine. Est-ce que c'était une

 20   balle ? Est-ce qu'il y avait un objet non contondant, une arme blanche, et

 21   cetera. Ça, c'était une autre tâche que nous devions mener à bien.

 22   Troisième, même lorsqu'on a pu identifier une blessure, même si on établit

 23   que c'est du fait d'une balle, et cetera, est-ce qu'on peut dire que

 24   c'était forcément la cause du décès. Les personnes ne meurent pas du fait

 25   qu'un os a été fracturé, mais plutôt des blessures occasionnées aux tissus

 26   qui entourent l'os. Donc ce n'était pas toujours facile de déterminer si la

 27   blessure constatée était à l'origine du décès.

 28   Donc pas mal de difficultés au niveau de l'interprétation, et il


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  1   fallait tout le temps tenir compte de cela.

  2   Q.  Comment avez-vous pu déterminer qu'une blessure a été causée par une

  3   balle ou par rapport à d'autres causes ?

  4   R.  Quand une balle touche un os, les dommages sont caractéristiques,

  5   surtout lorsque la vitesse en question est très élevée. L'os est

  6   complètement fragmenté. Il y a énormément de dégâts. Beaucoup de ces os

  7   étaient en milles morceaux, mais grâce aux anthropologues, nous avons pu

  8   parfois les remettre ensemble et trouver un trou, et lorsque nous trouvions

  9   un tel trou, là on était quasiment convaincus que c'était la cause du

 10   décès. D'ailleurs, parfois on y constatait parfois des fragments de balle.

 11   Q.  Est-ce qu'il était possible de déterminer si un fusil grande vitesse a

 12   été utilisé ou si c'était une arme à feu de main ?

 13   R.  Quasiment toutes ces blessures ont été le fait de fusils à grande

 14   vitesse. Avec une arme à feu, une arme de main, le trou n'est pas le même.

 15   Dans le cas de ces armes, le trou est assez propre, alors qu'avec le fusil

 16   à grande vitesse, il y a énormément de fractures tout autour. C'était la

 17   majorité des cas, d'ailleurs.

 18   Dans deux cas, cependant, nous avons trouvé des balles d'armes de

 19   poing, et dans ces deux cas nous avons trouvé que c'était un peu

 20   l'exception à la règle, c'est-à-dire que c'était ces armes de poing qui

 21   étaient à l'origine du décès plutôt que de ces fusils à grande vitesse.

 22   Q.  Avez-vous pu établir quelle était la direction du feu, la position de

 23   la victime et celle de l'attaquant ?

 24   R.  Parfois, mais pas toujours. Là aussi, cela dépend de la façon dont une

 25   balle traverse l'os. Dans certains cas, quand une balle traverse la tête

 26   depuis l'arrière et ressort à l'avant, là on peut le constater, simplement

 27   par la forme qui est laissée par la balle sur le crâne.

 28   La plupart du temps, dans le cas de balles dans le crâne, c'était


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  1   assez facile. Mais avec d'autres os, c'est beaucoup moins facile. En fin de

  2   compte, nous n'avons pu déterminer la direction que dans certains cas, et

  3   nous en avons fait une liste dans le rapport. Par exemple, parmi tous les

  4   cas de balles dans la tête, la plupart était dirigée depuis l'arrière ou

  5   latéralement sur la tête, très peu depuis l'avant de la tête et de temps en

  6   temps depuis le haut du crâne.

  7   Pour répondre à votre question, c'était variable. Ces balles étaient tirées

  8   de différentes directions.

  9   Q.  A quel stade de ce processus ces cadavres ont-ils été montrés aux

 10   familles pour éventuellement les identifier ?

 11   R.  C'était après que notre travail a été terminé. En règle générale, nous,

 12   nous regardions les blessures pour établir la cause du décès. On le faisait

 13   ce qu'on pouvait à aider à l'identification en faisant des mesures du

 14   squelette, voir s'il s'agissait d'un homme ou d'une femme, en recherchant

 15   des documents ou faisant des photographies des vêtements et d'essayer

 16   d'établir des documents.

 17   Nous mettions ces documents à la disposition de la commission

 18   bosniaque, et je sais qu'eux, ensuite, ils montraient les vêtements, les

 19   restes, les documents, et cetera, aux membres de la famille pour essayer

 20   d'établir l'identité.

 21   Je devrais rajouter, pour chaque cadavre on prenait un échantillon d'os

 22   pour des analyses ADN. A l'époque, les tests d'ADN sur de l'os étaient

 23   vraiment à leurs débuts. Il n'était pas possible de faire ces tests à

 24   l'époque, alors qu'aujourd'hui, c'est tout à fait possible, et récemment,

 25   beaucoup d'analyses de tests ADN ont été faites à partir de ces os.

 26   Q.  Merci.

 27   Mme MAZZOCCO : [interprétation] J'aimerais demander à l'huissière de

 28   visionner le document qui porte le numéro 1 dans la liste 65 ter.


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  1   Q.  Docteur Clark, est-ce qu'il s'agit du rapport que vous avez signé en

  2   tant que médecin légiste en chef qui donne un résumé des résultats de sites

  3   de la fosse de Slap ?

  4   R.  Oui. Ce qui se passait après les examens post-mortem, les 131 examens

  5   qui ont été faits par moi-même et mes collègues, c'était que j'ai extrait

  6   des informations et j'ai fait ce rapport final.

  7   Mme MAZZOCCO : [interprétation] J'aimerais faire verser son rapport au

  8   dossier.

  9   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

 10   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce P122.

 11   Mme MAZZOCCO : [interprétation] Je voudrais maintenant qu'on puisse

 12   visionner la page 10 de ce document numéro 1 de la liste 65 ter. Pourrions-

 13   nous voir le dessin 6 en gros plan. L'image sur la gauche, l'image 6.

 14   Q.  Pouvez-vous nous expliquer vos conclusions concernant cette photo

 15   concernant le rapport d'autopsie 361 ?

 16   R.  Vous voyez là en haut l'omoplate, puis cinq côtes. Evidemment, ce n'est

 17   pas la position anatomique normale, mais simplement pour pouvoir mieux

 18   prendre une photo. On voit qu'il y a au milieu de l'omoplate, le trou qui a

 19   été fait par la balle, puis un peu plus bas vous voyez aussi des trous dans

 20   les côtes.

 21   En voyant ces trous, cela représente pour nous typiquement des blessures

 22   par balle. Il y a cinq trous, mais sans doute représentent-ils l'itinéraire

 23   d'une même balle en raison du positionnement des côtes par rapport à

 24   l'omoplate. Donc c'est l'itinéraire typique d'une balle qui traverse la

 25   partie supérieure du torse.

 26   Mme MAZZOCCO : [interprétation] Pourrions-nous maintenant voir le document

 27   dont la cote est X008/0291. Je répète, X008/0291.

 28   Q.  S'agit-il du rapport d'autopsie concernant le cadavre 361 ?


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  1   R.  Oui.

  2   Q.  Cela se rapporte à la photo que nous venons de voir. Dans ce cas,

  3   était-il possible d'identifier la cause de la mort ?

  4   R.  Nous avons estimé que la cause du décès était cette blessure par balle,

  5   blessure au thorax. Nous savons, en tant que médecins légistes, que l'on a

  6   des organes essentiels sous l'omoplate, les poumons, le cœur et ainsi de

  7   suite, donc il est raisonnable de penser que ces organes-là auraient été

  8   blessés et que cela aurait provoqué le décès.

  9   Q.  A-t-il été possible dans ce cas précis de déterminer la direction du

 10   tir ?

 11   R.  Plus bas sur la page, ou à la page 2, il semblait que le tir soit venu

 12   de derrière.

 13   Mme MAZZOCCO : [interprétation] J'aimerais demander le versement au dossier

 14   de ce document.

 15   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

 16   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce P123.

 17   Mme MAZZOCCO : [interprétation] J'aimerais demander à l'huissière de nous

 18   montrer le document 0638/3236.

 19   Q.  Reconnaissez-vous le chiffre en haut de la page sur la droite ?

 20   R.  Cela correspond sans doute au système de numérotation que nous

 21   utilisions, 361/00. Je n'ai aucune raison de croire qu'un autre système de

 22   numérotation avait été utilisé, donc je pense que cela concerne le cadavre

 23   que nous avons déjà vu.

 24   Q.  Pouvez-vous nous expliquer la procédure suivie en ce qui concerne ce

 25   document ?

 26   R.  Nous avons remis les cadavres à la commission bosniaque et nous n'avons

 27   plus été impliqués par la suite. Mais je sais, puisque je suis resté dans

 28   la région à l'époque, qu'ils ont instauré un processus d'identification.


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  1   Peu après, les proches ont été invités à se rendre sur place afin

  2   d'examiner les effets personnels et les vêtements. Je ne peux qu'imaginer

  3   qu'au fur et à mesure que les proches identifiaient les cadavres, ce

  4   formulaire a été rédigé par la commission. Mais il ne s'agit pas d'un

  5   formulaire officiel, autant que je le sache, mais je sais que c'était une

  6   procédure en cours.

  7   Q.  Merci.

  8   Mme MAZZOCCO : [interprétation] J'aimerais demander le versement de ce

  9   document.

 10   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

 11   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce P124.

 12   Mme MAZZOCCO : [interprétation] Je demanderais à l'huissière de bien

 13   vouloir nous montrer le document qui porte la cote X007/7947.

 14   Q.  Docteur Clark, pouvez-vous nous décrire ce que vous voyez à l'écran ?

 15   R.  Il s'agit encore une fois d'un rapport d'autopsie effectué ou rédigé en

 16   mai 2001, SPO1/378B.

 17   Q.  Concernant quel cadavre -- vous l'avez dit, pardon.

 18   R.  Oui.

 19   Q.  A-t-il été possible d'identifier la cause du décès ?

 20   R.  Oui. Encore une fois, cette personne est décédée d'une blessure par

 21   balle au thorax.

 22   Mme MAZZOCCO : [interprétation] J'aimerais demander le versement de ce

 23   document.

 24   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

 25   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce P125.

 26   Mme MAZZOCCO : [interprétation] J'aimerais enfin demander que l'on nous

 27   montre le document X007/9454.

 28   Q.  Docteur Clark, s'agit-il du rapport d'autopsie rédigé par votre équipe


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  1   concernant le cadavre 328 ?

  2   R.  Oui, SP01/328B, rédigé en novembre 2000, je pensais que cet homme était

  3   sans doute décédé en raison de sa blessure par balle au thorax. C'était une

  4   conclusion moins certaine qu'en ce qui concerne les deux autres cadavres,

  5   mais il semblait y avoir des dégâts causés par balle sur le côté droit du

  6   thorax et il y avait également des trous de balle dans ses vêtements. Donc

  7   je me suis dit que la cause le plus probable de décès était une blessure

  8   par balle au thorax.

  9   Mme MAZZOCCO : [interprétation] J'aimerais demander le versement de

 10   ce document.

 11   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.

 12   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Il s'agira de la pièce P126.

 13   Mme MAZZOCCO : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions,

 14   Monsieur le Président.

 15   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci.

 16   Maître Alarid.

 17   M. ALARID : [interprétation] Oui. Est-ce que nous allons entamer le contre-

 18   interrogatoire, puisqu'il est déjà 19 heures ?

 19   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Non. En fait, nous allons poursuivre

 20   jusqu'à 19 heures 10.

 21   M. ALARID : [interprétation] D'accord. Oui, j'avais oublié.

 22   Contre-interrogatoire par M. Alarid : 

 23   Q.  [interprétation] Docteur Clark, d'après les données recueillies à Slap,

 24   cela aurait été juste de dire qu'aucun de ces cadavres ne provenait à

 25   l'origine de Slap ? En d'autres termes, il ne s'agissait pas d'un site

 26   d'exécution ?

 27   R.  Non, pas autant que je le sache. Il s'agissait de cadavres, qui avaient

 28   été enterrés individuellement, et d'après ce que nous avions compris,


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  1   avaient été emportés par la rivière.

  2   Q.  Vous avez obtenu ces informations de tiers. Mais s'agissait-il d'une

  3   évaluation de l'emplacement où se trouvaient les cadavres, une évaluation

  4   donc exhaustive ou est-il possible que d'autres aient été amenés sur place

  5   d'autres endroits ?

  6   R.  Oui, c'est tout à fait possible.

  7   Q.  Serait-il exact de dire qu'il y a très peu d'information concernant le

  8   lieu où ces personnes ont en fait été tuées ? Il est donc possible de dire

  9   que vous ne pouviez pas dire exactement où la personne avait été tuée.

 10   R.  En effet.

 11   Q.  En vertu du rôle que vous avez joué, vous n'avez pas participé à

 12   l'identification des cadavres par les familles, n'est-ce pas ?

 13   R.  Non, je n'ai joué aucun rôle. Cela s'est effectué dans la région où je

 14   travaillais et je n'étais qu'observateur.

 15   Q.  En ce qui concerne les cadavres, vous avez dit ou il ressort des

 16   documents, qu'il était même difficile d'évaluer l'âge de certains.

 17   R.  Oui. Nous n'avons pas déterminé l'âge nous-mêmes. Cela a été fait par

 18   des anthropologues qui nous ont transmis leurs informations, mais ils

 19   donnaient une fourchette, par exemple, une fourchette de 20 à 30 ans. Il

 20   est très difficile de manière générale de déterminer l'âge d'une personne

 21   sur la base des os, et cela devient de plus en plus difficile plus la

 22   personne est âgée.

 23   Q.  Il ressort de vos conclusions que le site de la fosse était très

 24   désorganisé ?

 25   R.  Non, je ne dirais pas que cela ressort de nos conclusions. Je pense que

 26   dans une certaine mesure le site était remarquablement bien organisé. J'ai

 27   pu visiter ce site après l'exhumation, et d'après ce que j'ai pu

 28   comprendre, il s'agissait surtout de tombes individuelles.


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  1   Q.  Mais il y avait une certaine contamination. Les corps étaient trop

  2   rapprochés ou avaient été manipulés, parce qu'il semblerait que certains

  3   squelettes n'étaient que partiels.

  4   R.  Oui, c'est exact. Je n'ai pas assisté à l'exhumation. Peut-être y a-t-

  5   il eu transfert de quelques os par-ci, par-là, mais je ne pense pas qu'il

  6   serait juste de dire qu'il y avait eu manipulation ou erreur dans la

  7   manipulation.

  8   Q.  Au pire des cas, il a pu y avoir quelques erreurs commises concernant

  9   la manipulation des corps ?

 10   R.  Je ne crois pas être en mesure de répondre à la question.

 11   Q.  D'après vous, combien de personnes ont manipulé un cadavre avant que

 12   vous ne l'analysiez ?

 13   R.  Je dirais peut-être deux ou trois personnes qui étaient appliquées, qui

 14   ont participé à l'exhumation, qui ont mis le cadavre dans une housse

 15   mortuaire et après, cette housse n'était pas ouverte avant que je n'examine

 16   le corps.

 17   Q.  Et vous avez dit que les dépouilles étaient squelettisées [phon] ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Est-il vrai que vous avez reçu quelques squelettes incomplets ?

 20   R.  Pour certains il y avait des parties manquantes.

 21   Q.  Vous êtes parti du principe que les cadavres avaient été -- ou certains

 22   os avaient été séparés ailleurs ou sur le site de la fosse commune ?

 23   R.  Il pouvait y avoir plusieurs raisons, et je me suis inspiré de mon

 24   expérience avec d'autres fosses communes, ou quelque soit l'expérience des

 25   personnes qui ont effectué l'exhumation, il se peut qu'il y ait une

 26   confusion entre quelques petites parties des cadavres. Je pense qu'il y en

 27   fait trois raisons pour lesquelles certaines parties pouvaient être

 28   manquantes. Tout d'abord, très souvent il ne s'agissait que de petits os de


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  1   la main ou du poignet. Ce sont des os très difficiles à retrouver. On les a

  2   simplement laissés dans le sol sans doute.

  3   En deuxième lieu, il est possible effectivement qu'en mettant un cadavre

  4   dans une housse, de temps en temps il y a quelques parties qui seront mises

  5   dans la mauvaise housse. Je n'en sais rien, mais c'est une possibilité.

  6   La troisième possibilité, c'est que même avant d'être enterré il y avait

  7   des parties manquantes, un membre, par exemple, qui n'était déjà pas

  8   présent lors de l'inhumation. Je ne peux pas savoir dans quel état se

  9   trouvait le cadavre avant l'inhumation, si les cadavres étaient déjà

 10   décomposés, par exemple.

 11   Q.  Même pour ce qui est d'évaluer la direction des balles, serait-il juste

 12   de dire que sans tissu mou, vous pouvez vous tromper, tout simplement parce

 13   qu'une balle à haute vélocité peut causer un trou bien circulaire au point

 14   de sortie ?

 15   R.  Je ne suis pas sûr de vous suivre.

 16   Q.  Sur l'omoplate, vous avez dit qu'il s'agissait sans doute d'une balle

 17   qui venait de derrière.

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Mais il est possible également que l'on aurait vu les mêmes dégâts si

 20   cela avait été une balle tirée depuis l'avant ?

 21   R.  Oui, c'est possible. Nous cherchons en fait du biseautage. En d'autres

 22   termes, le diamètre du trou au point d'entrée est plus petit que le

 23   diamètre au point de sortie. C'est souvent ce que l'on voit sur le crâne,

 24   et cela peut aussi se produire sur l'omoplate ou les côtes. Je ne me

 25   souviens pas de ce qu'il en est pour ce cas bien précis, mais nous étions

 26   assez confiants que le tir venait de derrière.

 27   Q.  On peut imaginer qu'il y avait eu déflection de la balle ?

 28   R.  Non, la balle aurait touché les côtes en premier, aurait touché


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  1   l'omoplate tout d'abord et puis les côtes.

  2   Q.  Serait-il exact de dire que certaines blessures auraient pu résulter de

  3   combats ? Il n'est pas possible de dire s'il s'agit de blessures civiles ou

  4   pendant le combat ?

  5   R.  Non, ce n'était pas possible sur la base de la médecine légale.

  6   M. ALARID : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions.

  7   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci. Monsieur Cepic ?

  8   M. DIECKMANN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. J'ai moins de

  9   20 questions. Il me faudrait peut-être 20 minutes.

 10   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous devrons donc nous retrouver

 11   demain et poursuivre demain.

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Très bien.

 13   M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Demain dans l'après-midi, à 14

 14   heures 15.

 15   --- L'audience est levée à 19 heures 08 et reprendra le mardi 23

 16   septembre 2008, à 14 heures 15.

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