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1 Le mardi 19 mai 2009
2 [Audience publique]
3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 15 heures 05.
5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Cepic, je vois que vous
6 vous êtes blessé et je sais que vous avez du mal à vous tenir debout, donc
7 vous pouvez garder votre siège.
8 Dans le cadre de l'audience d'aujourd'hui, le témoin Wil Fagel
9 viendra déposer. S'agissant de son témoignage, nous le connaissons très
10 bien. Il n'est pas nécessaire de le répéter.
11 Monsieur Weber.
12 M. WEBER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président.
13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Voici ce que je propose de faire.
14 J'aimerais d'abord vous demander de poser des questions au témoin dans le
15 cadre de l'interrogatoire principal pour ce qui est du document 1D25.
16 M. WEBER : [interprétation] Monsieur le Président, je vais faire de mon
17 mieux. Je comprends que la nature de l'opinion qui sera obtenue par le Dr
18 Fagel a été examinée par cette Chambre. Il s'agit d'une comparaison
19 d'écriture et dans ce cas-ci, on a comparé les signatures. La Chambre
20 connaît très bien le processus et la nature inséparable du document 1D25
21 avec les autres documents. Donc si vous me permettez, Monsieur le
22 Président, avec votre permission, je vais essayer d'aborder les questions
23 de la comparaison d'abord et je vais suivre les instructions données par la
24 Chambre.
25 [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]
26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Weber, l'interrogatoire
27 principal ne portera que sur la pièce 1D25 et il vous faudra tenir en
28 compte qu'il ne faut pas des questions directrices, ou plutôt, il ne faut
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1 pas essayer d'obtenir d'autres éléments de preuve de ce témoin, car la
2 Chambre de première instance n'est pas intéressée à d'autres éléments de
3 preuve.
4 M. WEBER : [interprétation] Si je puis, Monsieur le Président, j'aimerais
5 vous demander une précision. Est-ce que la Chambre de première instance me
6 dit que l'Accusation ne peut pas élucider d'autres éléments de preuve pour
7 ce qui est de la comparaison avec le document 1D25 et d'autres documents ?
8 [La Chambre de première instance se concerte]
9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous pouvez vous servir des
10 documents que vous avez fournis, mais vous ne pouvez pas vous servir de
11 pièces.
12 Vous voulez dire quelque chose, Monsieur Alarid ?
13 M. ALARID : [interprétation] Monsieur le Président, si l'Accusation
14 souhaite utiliser la comparaison des signatures des documents qui ne sont
15 pas versés au dossier et pour lesquels on a décidé qu'ils ne seraient pas
16 versés au dossier, à ce moment-là, je voudrais formuler une objection.
17 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, je vous écoute, Monsieur Weber.
18 M. WEBER : [interprétation] En fait, s'il faut examiner ces pièces-ci dans
19 le cadre de la présentation des éléments de preuve, on voit qu'il faut
20 revoir ceci puisqu'il s'agit d'un expert graphologue. A ce moment-là, il
21 faudrait peut-être revoir ceci, mais pourrait-on, je vous prie, voir
22 d'abord comment les choses se déroulent ?
23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Effectivement, on verra en temps et
24 lieu. Je vais me prononcer là-dessus. Commençons pour l'instant.
25 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Que le témoin fasse sa déclaration
27 solennelle, je vous prie.
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
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1 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
2 LE TÉMOIN : WILHELMUES FAGEL [Assermenté]
3 [Le témoin répond par l'interprète]
4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie. Vous pouvez
5 commencer, Monsieur Weber.
6 M. WEBER : [interprétation] Merci Monsieur le Président.
7 Interrogatoire principal par M. Weber :
8 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Fagel.
9 R. Bonjour.
10 Q. Pourriez-vous vous présenter à la Chambre ?
11 R. Bonjour, je m'appelle Wil Fagel. Je travaille en tant qu'expert à
12 l'institut néerlandais.
13 Q. [aucune interprétation]
14 R. Mon travail consiste à comparer les signatures d'un suspect, par
15 exemple, dans le but d'évaluer si l'écriture de cette personne
16 effectivement appartient à la personne.
17 Q. Quel est l'institut médicolégal néerlandais ?
18 R. L'institut médicolégal néerlandais est une agence autonome chapeautée
19 par le ministère de Justice néerlandais et nous nous livrons à plusieurs
20 types d'examens médicolégal [comme interprété].
21 Q. Depuis combien de temps est-ce que vous pratiquez votre métier ?
22 R. En juin, il s'agira de 26 ans.
23 Q. Docteur Fagel, dans le cadre de votre témoignage aujourd'hui, il est
24 très important de ménager des pauses après les questions que je vais vous
25 poser afin de permettre aux interprètes de pouvoir interpréter vos propos
26 et afin que les gens puissent vous suivre. Les personnes présentes dans le
27 prétoire par ailleurs.
28 R. Excusez-moi, effectivement.
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1 Q. Combien de comparaisons de signatures est-ce que vous avez menées au
2 cours des 26 dernières années en tant que graphologue ?
3 R. Je ne les ai pas comptés un par un, mais plus de 2 000 certainement.
4 Q. Est-ce que vous avez des diplômes en tant qu'expert en écriture ?
5 R. Oui, je suis un expert en écriture certifié par l'institut néerlandais
6 et j'ai une nouvelle certification à tous les quatre ans, on me donne une
7 nouvelle certification. Je suis membre du GFS, c'est l'association
8 européenne des experts en écriture et en examen de documents.
9 Q. Est-ce que vous avez été qualifié en tant que témoin expert par ce
10 tribunal ?
11 R. Oui.
12 Q. L'Accusation souhaite verser au dossier le curriculum vitae de ce
13 témoin. Il s'agit du document ERN 0642-9654 jusqu'à 0642-9655.
14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, le document sera versé au
15 dossier.
16 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Cette pièce portera la cote P346.
17 M. WEBER : [interprétation]
18 Q. Sur la base des qualifications du témoin, l'Accusation présente le Dr
19 Fagel en tant que témoin expert en écriture médicolégale. Puis-je
20 poursuivre ?
21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui.
22 M. WEBER : [interprétation]
23 Q. Que représente un examen comparatif dans le cadre de l'institut
24 médicolégal ?
25 R. On compare l'écriture contestée avec des échantillons connus, soit
26 l'écriture ou la signature appartenant à une personne, soit un suspect ou
27 un témoin. Ceci nous permet d'évaluer si l'écriture contestée appartient
28 effectivement à la personne.
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1 Q. Pourriez-vous, je vous prie, nous dire quelles sont les phases
2 d'analyse ?
3 R. Il y a quatre phases. D'abord on procède à l'analyse des traits en
4 question, ensuite nous comparons les échantillons; par la suite, la phase 2
5 consiste à comparer ces traits; la troisième phase consiste à interpréter
6 et à évaluer les similitudes et les différences de ceci; et la dernière
7 phase est la phase de la conclusion, c'est-à-dire que d'après ce que nous
8 avons décelé, nous pouvons arriver à une conclusion.
9 Q. Quelles sont les caractéristiques principales d'un texte manuscrit ?
10 R. Il y a trois catégories principales : la première catégorie, ce sont
11 les caractéristiques de l'écriture générale; la deuxième catégorie est
12 celle de présentation; et la troisième caractéristique qui appartient à
13 cette catégorie générale, ce sont des microcaractéristiques.
14 Q. Que représentent les caractéristiques générales ?
15 R. Les caractéristiques générales sont des traits qui portent sur
16 l'apparence générale de l'écriture telle, par exemple, l'inclinaison de
17 l'écriture, la taille de l'écriture, la qualité de la ligne générale, la
18 pression du stylo, et ainsi de suite.
19 Q. Que sont les caractéristiques de présentation ?
20 R. Quand il s'agit d'un texte manuscrit, les lettres, par exemple, peuvent
21 - ici, on fait référence à la distance entre les mots, la distance entre
22 les marges, la distance aussi entre les lignes ainsi que lorsqu'il s'agit
23 de signatures - on peut très bien faire référence à l'endroit où la
24 signature est placée dans un cadre, dans un rectangle désigné à la
25 signature.
26 Q. Que sont les microcaractéristiques ?
27 R. Les microcaractéristiques sont des proportions, c'est-à-dire - ici, on
28 fait référence à la taille, ou plutôt, aux proportions des éléments qui
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1 sont propres à l'écriture - alors s'il s'agit d'un texte, il pourrait
2 s'agir de lettres, de chiffres, ainsi de suite, et la signature et d'autres
3 schémas qui sont dans le texte écrit.
4 Q. Quelle est la différence que l'on peut faire lorsqu'on compare les
5 signatures, contrairement à un texte manuscrit ?
6 R. De façon générale, lorsqu'on compare les signatures, nous examinons les
7 mêmes traits que nous avons examinés lorsque nous avons comparé un texte
8 manuscrit. Seulement, lorsqu'on compare les signatures, certains traits
9 deviennent plus importants, telles la qualité de la ligne, la pression du
10 stylo, car les signatures sont beaucoup plus souvent sujettes à
11 l'assimilation que les textes manuscrits.
12 Q. Qu'est-ce une signature bonifiée, contrairement à une signature
13 malifiée [phon] ?
14 R. Une signature bonifiée est une signature qui a été écrite par la
15 personne ayant signé. C'est une signature générale normale, mais il y a
16 également une possibilité d'alterner la signature, si l'on veut changer la
17 signature pour un but spécial. Une signature malifiée est une signature qui
18 est simulée, qui a été copiée par une autre personne, qui n'a pas été faite
19 par le signataire. On peut parler de faux, on peut parler d'une personne
20 qui signe de la façon telle que l'on croirait qu'il s'agirait d'une
21 simulation. Egalement si, par exemple, quelqu'un se livre à un faux et ne
22 sait pas très bien à quoi ressemble l'original, la personne peut inventer
23 des signatures. Celle-ci devient une signature fictive, mais le
24 propriétaire de la signature pourrait également, à ce moment-là, signer de
25 façon différente qu'il ne le fait habituellement pour pouvoir nier plus
26 tard que c'est bien lui qui ait signé.
27 Q. S'agissant de cette comparaison, est-ce que c'est accrédité par une
28 institution ?
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1 R. Non, mais nos méthodes et nos procédures sont accréditées par le
2 conseil néerlandais chargé de l'accréditation.
3 Q. Est-ce que vous avez annexé un document décrivant cette méthodologie
4 accréditée à votre rapport en tant qu'annexe ?
5 R. Oui.
6 Q. S'agit-il d'une méthode d'écriture comparative que vous avez employée
7 le 8 octobre 2008 ?
8 R. Oui.
9 M. WEBER : [interprétation] L'Accusation souhaiterait demander que le
10 rapport du 8 octobre 2008 soit versé au dossier avec les annexes. Il s'agit
11 du numéro ERN 0642-8808 à 0642-8820.
12 M. ALARID : [interprétation] Monsieur le Président.
13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Maître Alarid.
14 M. ALARID : [interprétation] Objection, Monsieur le Président, sur la base
15 de la décision prise par la Chambre de première instance, car ce rapport
16 contient des analyses pour lesquelles les éléments de preuve analysés ont
17 été jugés inadmissibles par la Chambre de première instance. Donc le
18 rapport qui porte sur ces signatures devrait également être en soi
19 inadmissible.
20 [La Chambre de première instance se concerte]
21 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous n'allons pas permettre le
22 versement au dossier de ce rapport. Veuillez poursuivre, je vous prie.
23 M. WEBER : [interprétation] Monsieur le Président, puis-je poser des
24 questions directrices ?
25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous voulez poser des questions
26 directrices ?
27 M. WEBER : [interprétation] Oui, je voudrais.
28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous voulez dire poser des questions
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1 directrices ?
2 M. WEBER : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Si ces questions portent sur des
4 questions pour lesquelles il n'y a pas d'objection, alors faites.
5 M. WEBER : [interprétation]
6 Q. Docteur Fagel, vous avez reçu des documents vous permettant de mener
7 une expertise le 15 septembre 2008 s'agissant de l'écriture, n'est-ce pas ?
8 R. Oui.
9 Q. Les documents que vous avez reçus aux fins d'examen et de comparaison
10 étaient cinq documents avec des signatures pour lesquelles on se posait la
11 question et un document avec une signature pour laquelle on avait à qui
12 elle appartenait.
13 R. Oui, c'est exact.
14 Q. Vous avez analysé cinq documents pour lesquels les signatures soumises
15 étaient contestées, vous avez élaboré une comparaison de l'écriture
16 médicolégale, n'est-ce pas ?
17 R. Oui.
18 M. ALARID : [interprétation] Objection, Monsieur le Président.
19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, Monsieur Alarid.
20 M. ALARID : [interprétation] Les cinq documents contestés, d'abord
21 objection à ceci, manque de fondement; deuxièmement, inadmissible, puisque
22 si j'ai bien compris il s'agit de questions inadmissibles pour lesquelles
23 vous avez déjà statué que ces questions étaient inadmissibles.
24 M. WEBER : [interprétation] Monsieur le Président --
25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Est-ce que c'est exact ?
26 M. WEBER : [interprétation] Monsieur le Président, ce témoin a fait un
27 examen. Il fallait absolument qu'il compare le document 1D25 avec d'autres
28 documents --
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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Mais nous n'avons pas permis ceci
2 puisque une décision a été rendue. Donc vous devez vous plier à la décision
3 prise par la Chambre de première instance.
4 M. WEBER : [interprétation] Très bien. Merci.
5 Q. Monsieur Fagel, est-ce que vous pouvez faire un rapport d'expertise sur
6 la base d'un seul document sans pouvoir le comparer à d'autres documents ?
7 R. Je ne suis pas tout à fait certain d'avoir compris votre question, mais
8 je peux simplement comparer deux signatures ou plus. Je ne peux pas
9 comparer une signature avec elle-même.
10 Q. Très bien. Monsieur, si vous avez une signature sur un document, le
11 document qu'on vous a remis pour les fins de l'examen dans cette affaire,
12 qui porte la cote ERN 568 - et qui est le document 1D25 - à moins de
13 pouvoir comparer ce document avec d'autres documents où d'autres signatures
14 figurent - seriez-vous en mesure de donner une opinion éclairée devant ce
15 Tribunal ?
16 R. Je ne peux pas donner d'opinion sur la base d'une seule signature sans
17 comparer la signature avec d'autres signatures. Je ne peux jamais la
18 comparer à quelque chose d'autre, alors je ne peux pas vous donner une
19 opinion. Je ne sais pas si c'est cela que vous voulez dire.
20 Q. Pour ce qui est de cette affaire, vous avez effectivement pu examiné
21 plusieurs signatures, n'est-ce pas ?
22 R. Oui.
23 Q. Vous avez également été en mesure de vous forger une opinion vous
24 permettant d'en arriver à un degré de certitude assez raisonnable, n'est-ce
25 pas ?
26 R. Oui.
27 M. ALARID : [interprétation] Objection, Monsieur le Président. D'abord,
28 élément de preuve inadmissible. C'est une analyse qui a été faite sur la
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1 base de documents inadmissibles, donc objection.
2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Pardon ?
3 M. ALARID : [aucune interprétation]
4 M. WEBER : [interprétation] Monsieur le Président --
5 M. ALARID : [interprétation] Je crois que le témoin peut fournir une
6 opinion, et je crois que si la question avait été posée différemment on
7 aurait pu obtenir une réponse.
8 M. WEBER : [interprétation] M. Alarid aura ample opportunité de poser des
9 questions à ce témoin, mais je voudrais simplement poser des questions pour
10 savoir quelle est la façon dont a procédé le
11 Dr Fagel.
12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Poursuivez, je vous prie.
13 M. WEBER : [interprétation]
14 Q. Pourriez-vous, je vous prie, expliquer ce qu'une comparaison d'écriture
15 représente ?
16 R. D'abord il est tout à fait possible de comparer une signature contestée
17 avec quelques échantillons de référence. Maintenant c'est une autre chose à
18 savoir si cette signature a été ou pas signée par la même personne. Mais si
19 vous avez plusieurs signatures contestées, nous devons d'abord les comparer
20 les unes aux autres pour voir si nous pouvons penser que toutes ces
21 signatures n'ont été écrites pas la même personne et si cette présomption
22 est justifiée. Si elles sont semblables, à ce moment-là, nous pouvons
23 prendre toutes ces signatures pour les comparer avec une signature de
24 référence.
25 Q. Est-ce que c'est ce que vous avez fait dans cette affaire ?
26 R. Oui.
27 Q. Pourriez-vous nous expliquer les observations que vous avez faites
28 vous-même--
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1 M. ALARID : [interprétation] Objection, Monsieur le Président.
2 M. WEBER : [interprétation] Mais je n'ai pas encore posé de question.
3 M. ALARID : [interprétation] Je crois que l'on parle d'une question entre
4 les signatures --
5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Permettez à l'Accusation de poser la
6 question. Quelle est votre question ?
7 M. WEBER : [interprétation] Monsieur Fagel, est-ce que vous avez regroupé
8 quatre signatures ensemble pour pouvoir les comparer entre elles et en les
9 comparant avec une signature connue dans cette affaire ?
10 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ne répondez pas à cette question. Un
11 instant.
12 [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]
13 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Notre décision est la suivante : M.
14 Weber a expliqué que le Procureur a donné à M. Fagel un document et on lui
15 a demandé de comparer le document 1D25 à cinq documents qui ne sont pas les
16 quatre documents du bureau du Procureur que nous avons décidé
17 inadmissibles. Donc vous pouvez poursuivre avec vos questions.
18 M. WEBER : [interprétation]
19 Q. Vous a-t-on fourni un document avec une signature non identifiée qui
20 finissait avec le numéro ERN 568 ?
21 R. Oui.
22 Q. Qu'avez-vous fait avec ce document ?
23 R. Je comparais cette signature à d'autres signatures contestées.
24 Q. Après l'avoir fait, qu'avez-vous fait avec ces signatures ?
25 R. J'ai remarqué que ces signatures étaient très semblables d'une manière
26 générale. J'ai également remarqué quelles étaient tellement similaires
27 qu'on pourrait se dire qu'elles étaient identiques.
28 M. ALARID : [interprétation] Objection. Je pense qu'on revient à la même
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1 question de nouveau. Le témoin demande à l'analyse des échantillons fournis
2 par le bureau du Procureur. Ça fait l'objet d'une décision de la Chambre,
3 donc je demande que cela soit expurgé.
4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ne parlez pas de ceci. Il ne s'agit
5 pas d'une question procédurale.
6 La question qui a été posée par M. Weber, dites-nous, est-ce qu'elle
7 porte sur les cinq documents parmi lesquels se trouvent les quatre
8 documents fournis par le bureau du Procureur et pour lesquels nous avons
9 décidé qu'ils ne seraient pas versés au dossier ?
10 M. WEBER : [interprétation] Mais il s'agit des signatures qui sont
11 identiques, ou du moins c'est ce qui nous semble --
12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Non, vous ne pouvez pas faire ça.
13 M. WEBER : [interprétation] Mais --
14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous avons déjà décidé que ces
15 documents ne seront pas versés au dossier. Ils ne seront pas admissibles.
16 M. WEBER : [aucune interprétation]
17 M. ALARID : [interprétation] Nous nous opposons à ce que le Procureur se
18 substitue au témoin. Il ne faut pas qu'il dépose ici.
19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Il faut respecter la décision de la
20 Chambre.
21 M. WEBER : [interprétation] Oui, mais vous savez, il s'agit d'une signature
22 qui a été ensuite comparée à des signatures connues.
23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] N'essayez pas d'apporter de nouveaux
24 arguments, nous avons déjà décidé. Allez-y.
25 M. WEBER : [interprétation]
26 Q. Est-ce que vous avez eu un document dont le numéro d'identification
27 finissait par 568, et est-ce que vous avez observé quoi que ce soit
28 s'agissant du cachet qui figurait sur ce document ?
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1 R. Je n'ai reçu qu'une copie de ce document, donc je n'ai pas pu établir
2 si le cachet était apposé avant la signature ou après la signature.
3 Q. Vous avez dit avoir reçu seulement une photocopie de ce document. Est-
4 il possible d'exclure une tentative de manipulation avec des signatures
5 s'il s'agit que des photocopies, si vous n'avez que des photocopies
6 disponibles pour effectuer votre analyse ?
7 R. Non, clairement, on ne peut pas exclure cette possibilité.
8 Q. Avez-vous eu l'occasion de comparer la signature contestée du document
9 568 avec une partie de signatures connues qui vous ont été également
10 fournies ?
11 R. Oui.
12 Q. Comment avez-vous effectué ces comparaisons ?
13 R. Tout d'abord je dois regarder l'apparence générale de ces signatures.
14 Je les ai comparées, j'ai essayé de voir si elles se ressemblaient ou pas.
15 Elles se ressemblent de manière générale, mais il y a également un certain
16 nombre de différences entre la signature contestée et la signature de
17 référence, donc la signature connue de Perisic.
18 Q. J'aimerais vous poser quelques questions au sujet des signatures
19 connues avant de passer aux différences. S'agissant de ces neuf documents
20 où figure la signature de Risto Perisic, y avait-il parmi ces documents,
21 une signature originale qui vous a été fournie pour l'analyse ?
22 R. Oui.
23 M. ALARID : [interprétation] Aucun fondement pour cette question,
24 objection. Il n'y a eu aucun commentaire de la par du témoin portant sur
25 les signatures connues.
26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Allez-y, Monsieur Weber.
27 M. WEBER : [interprétation]
28 Q. Docteur Fagel, est-ce que vous avez reçu ces documents où figuraient
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1 des signatures connues de Risto Perisic ?
2 R. Oui, ce que nous appelons d'habitude des signatures de référence. C'est
3 notre terminologie tout simplement.
4 Q. Parmi ces documents, il y avait des signatures originales que vous avez
5 utilisées pour la comparaison.
6 R. Oui, il y avait deux originaux.
7 Q. Sur la base de ces originaux, avez-vous trouvé des indices ou quoi que
8 ce soit vous indiquant que quelqu'un ait essayé de modifier ces signatures
9 ?
10 R. Non, aucun signe de ceci par rapport aux signatures de référence.
11 Q. Et les signatures de référence, avaient-elle suffisamment d'éléments
12 pour vous, pour que vous puissez effectuer l'analyse ?
13 R. Oui.
14 M. WEBER : [interprétation] Bien. Peut-on maintenant afficher le bas du
15 document finissant par 0642-8811. Il s'agit de la page 4 du rapport de
16 témoin qui commence par le numéro ERN 0642-8814.
17 M. ALARID : [interprétation] Objection. Vous avez déjà décidé que ce
18 rapport ne serait pas versé au dossier.
19 M. WEBER : [interprétation] Ecoutez, j'ai l'intention seulement de montrer
20 cette page de rapport au témoin où il décrit la comparaison qu'il a
21 effectuée. J'essaie tout simplement de faciliter sa déposition, rien de
22 plus.
23 [La Chambre de première instance se concerte]
24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Allez-y.
25 M. WEBER : [interprétation] Peut-on afficher la page 4 de ce document, s'il
26 vous plaît, le bas de cette page. Ce qui nous intéresse c'est l'image,
27 l'illustration en bas de cette page.
28 Q. Pourrait-on maintenant voir l'illustration numéro 1 de votre rapport du
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1 8 octobre 2008. Que voit-on dans cette
2 illustration ?
3 R. On voyait la signature contestée, et en bas on a deux signatures de
4 référence.
5 Q. Bien. Veuillez nous décrire les caractéristiques, les différences,
6 entre la signature contestée et les deux signatures de référence.
7 R. Vous allez voir que le premier élément dans la première signature
8 comporte une grande boucle qu'on ne voit pas dans les signatures de
9 référence. En plus de ceci, on voit également une lettre, la lettre "p" et
10 un trait descendant, puis un trait ascendant, alors que dans les signatures
11 de référence, il y a un espace entre ce trait descendant et le trait
12 ascendant. En plus, la boucle ovale de la lettre "p" de la signature
13 contestée ne figure pas dans les signatures de référence. Ensuite, vous
14 voyez ici un mouvement, un geste ondulaire [phon] dans la signature
15 contestée, et cela est très différent de ce qu'on voit dans les signatures
16 de référence. Par ailleurs, dans les signatures de référence, vous avez,
17 vous voyez, un trait descendant à la fin de la signature, alors que dans la
18 signature de référence, le mouvement, le tracé est ascendant. Donc ce sont
19 les différences les plus visibles entre ces signatures.
20 M. WEBER : [interprétation] Bien. Nous allons demander maintenant que cette
21 illustration soit sauvegardée et versée au dossier.
22 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Le document, l'illustration sera
23 versée.
24 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ça sera P347.
25 M. WEBER : [interprétation] Bien.
26 Q. Alors quelles sont vos conclusions à l'issue de cette comparaison entre
27 la signature contestée et les signatures de référence ?
28 R. Je suis arrivé à la conclusion que la signature contestée ne pouvait
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1 pas être la signature de Risto Perisic. C'est lui qui est l'auteur des deux
2 signatures de référence.
3 Q. Bien. Alors vous êtes parvenu à cette conclusion. Avez-vous tiré une
4 conclusion portant sur le fait que ces signatures-là, si la signature
5 contestée est une signature imitée ou simulée, ou pas, bona fide ou mala
6 fide signature ?
7 R. Il s'agit, tous ces --
8 M. ALARID : [interprétation] Objection.
9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Poursuivez.
10 M. WEBER : [interprétation]
11 Q. Est-ce que vous êtes arrivé à une conclusion portant sur la nature de
12 la signature contestée, si elle est bona fide ou mala fide, si elle est
13 simulée ou pas ?
14 R. Oui.
15 Q. Pouvez-vous nous donner cette opinion ?
16 R. Non.
17 M. WEBER : [interprétation] Je n'ai plus de questions.
18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Alarid, allez-y.
19 Contre-interrogatoire par M. Alarid :
20 Q. [interprétation] Vous êtes Docteur Fagel ? Comment vous vous appelez ?
21 R. Ça se prononce Fahel.
22 Q. Je vais essayer de prononcer votre nom comme il faut. Bien, alors,
23 parlons maintenant des signatures de référence pour lesquelles vous pensez
24 qu'il s'agit de signatures bona fide, donc non simulées. Qui est-ce qui
25 vous a fourni ces signatures supposées être bona fide, signatures non
26 simulées ?
27 R. Je dois vous donner un nom ?
28 Q. Non, pas forcément le nom.
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1 R. C'est le Tribunal.
2 Q. Alors quand on vous a donné ces signatures, saviez-vous que la Défense
3 de Milan Lukic était en train d'essayer de faire venir Risto Perisic en
4 tant que témoin ici à La Haye ?
5 R. Non, je n'en savais rien.
6 Q. S'agissant des ces signatures supposément non simulées, vous a-t-on
7 expliqué le contexte, vous a-t-on donné des informations qui portaient sur
8 la date de ces signatures, du contexte où elles ont été utilisées, et
9 cetera ?
10 R. Non, il y a eu que quelques dates qui ont été mentionnées, tout
11 simplement dans le même document où figurait la signature. Il s'agissait
12 des informations qui étaient connues. Je n'avais pas d'autres informations
13 à ma disposition.
14 Q. Donc dans une situation idéale, pour analyser les signatures, vous
15 demanderez à l'auteur d'une signature de vous donner plusieurs
16 échantillons, n'est-ce pas ?
17 R. Oui, s'il y a des signatures contestées qui datent d'il y a plusieurs
18 années, alors on demanderait, notamment dans le cadre d'une enquête,
19 plusieurs échantillons. Parce qu'il est tout à fait possible que la
20 signature change avec le temps.
21 Q. Oui, effectivement. Moi-même, j'ai regardé des documents que j'ai signé
22 moi-même, tels que le permis de conduire, et cetera, qui datent d'il y a
23 longtemps, et j'ai bien remarqué que ma signature a changé avec le temps.
24 Est-ce que cela arrive souvent ?
25 R. Oui, quand on est très jeune, effectivement, par rapport à l'époque où
26 on était très jeune, notre signature peut changer, mais bon, elle change
27 moins plus tard.
28 Q. Mais de toute manière, il y a des modifications ?
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1 R. Oui.
2 Q. Il y a d'autres facteurs qui peuvent avoir un effet sur la signature,
3 qui seraient liés à l'état général, l'état de santé, aux blessures, et
4 cetera, son état mental ou n'importe ?
5 R. Oui.
6 Q. Si on examine ces signatures supposément non simulées ou bona fide,
7 pour le confirmer, normalement, vous aurez demandé plusieurs échantillons ?
8 R. Non. On préfère avoir des signatures qui datent de la même époque que
9 la signature contestée.
10 Q. Mais le bureau du Procureur n'a pas effectué d'enquête ou de recherche
11 particulière essayant d'établir la date de ces signatures ?
12 R. Non.
13 Q. Est-ce que vous savez lire les caractères cyrilliques ?
14 R. Non. Un peu. On me questionne bien.
15 Q. C'est les noms qui sont dactylographiés au-dessus des signatures sont
16 en caractères latins. Par contre, la signature, ça serait peut-être pour
17 vous surprenant de l'entendre, est en cyrillique ?
18 R. Non, ce n'est pas une surprise. Je sais que c'est comme ça.
19 Q. Alors on vous a demandé si "vous avez vu des signes indiquant que
20 quelqu'un avait essayé de modifier la signature de référence ?" Quel type
21 de tentative de ce genre-là vous vous attendriez à retrouver dans une
22 signature de référence pour que vous puissiez répondre à la question du
23 Procureur ?
24 R. Si on voit des traces d'hésitation, beaucoup de moments où le stylo a
25 été levé - je n'arrive pas très bien à trouver des termes adéquats pour
26 expliquer ça - tout cela indiquerait qu'il s'agit là d'une signature
27 falsifiée.
28 Q. Mais si toutes ces signatures ont été falsifiées, comment si elles ont
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1 été falsifiées par une et même personne ?
2 R. Ça veut dire tout simplement que nous disposons des mauvais
3 échantillons pour la comparaison.
4 Q. Mais si cette personne était présente et si on arrivait à identifier
5 ces signatures, alors cela corroborerait votre opinion, n'est-ce pas ?
6 R. [aucune interprétation]
7 Q. Oui.
8 R. Oui.
9 Q. Bien. Ecoutez, mon grand-père était en politique pendant des années, il
10 utilisait un cachet pour signer les documents, et cetera.
11 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Weber.
12 M. WEBER : [interprétation] Objection, ce n'est absolument pas pertinent ce
13 que faisait le grand-père de Me Alarid.
14 M. ALARID : [interprétation] Oui, mais c'est tout simplement une tentative
15 d'introduire ma question.
16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous savez comment il est Me Alarid
17 --
18 M. ALARID : [interprétation] Oui. Merci, Monsieur le Président.
19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] -- alors on va le laisser faire.
20 Allez-y, Maître Alarid.
21 M. ALARID : [interprétation]
22 Q. Alors, dites-nous, s'agissant d'un cachet, quelle est la fonction d'un
23 cachet dans votre analyse, est-ce que ça peut avoir une influence ?
24 R. Tout d'abord, quand il s'agit d'une analyse de signatures, nous
25 essayons d'établir qui a signé un document et nous n'essayons pas du tout
26 d'établir qui a posé un cachet, vous le savez, parce qu'un cachet, ça peut
27 être fait par n'importe qui.
28 Q. Mais je vous pose la question qui porte sur le cachet. Si vous avez un
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1 cachet avec signature, vous pouvez donc avoir à la fois le cachet et la
2 signature comme un seul bloc ?
3 R. Oui.
4 Q. [aucune interprétation]
5 R. Je n'ai pas compris votre question.
6 Q. Par exemple, si je fais une signature et que je l'envoie chez un
7 graveur pour qu'il me grave un cachet avec ma signature pour l'utiliser
8 régulièrement, qu'est-ce que je fais après avec ça ?
9 R. Je ne sais pas ce que vous devez faire --
10 Q. Oui, mais si je veux un nouveau cachet avec signature.
11 R. C'est seulement si vous insistez à utiliser un cachet comme signature.
12 Q. Si je n'aime plus mon permis de conduire, qu'est-ce que ça veut dire,
13 que je dois retourner demander une nouvelle photo.
14 R. Oui.
15 Q. Bien. Mais si cette question contestée faisait partie d'un cachet ?
16 R. Non, ce n'est pas le cas.
17 Q. Est-il possible que des personnes qui ont un rôle dans la vie politique
18 administrative utilisent des cachets gravés avec leur signature
19 quotidiennement ?
20 R. Oui, c'est possible.
21 Q. [aucune interprétation]
22 M. LE JUGE ROBINSON : [aucune interprétation]
23 M. ALARID : [interprétation] Pardon ?
24 M. LE JUGE ROBINSON : [aucune interprétation]
25 M. ALARID : [interprétation] Bien --
26 M. LE JUGE ROBINSON : Je ne vois pas du tout de quelle manière cela est
27 pertinent pour ce dont nous parlons.
28 M. ALARID : [aucune interprétation]
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1 M. LE JUGE ROBINSON : [aucune interprétation]
2 M. ALARID : [interprétation] Je vais essayer de vous montrer de quelle
3 manière cela est pertinent.
4 Q. Vous avez parlé de l'autofalsification, qu'est-ce que cela représente ?
5 R. Quand quelqu'un délibérément modifie son écriture, parfois dans la
6 tentative de cacher qu'il s'agit de son écriture pour pouvoir ensuite dire
7 que c'était quelqu'un d'autre.
8 Q. Bien. Il peut y avoir des pratiques tout à fait contestables dans ce
9 domaine. Mais est-ce que vous pensez que dans le cadre de commission des
10 crimes de guerre, l'autofalsification d'une signature peut avoir une
11 signification ?
12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Comment vous pensez que le témoin
13 peut répondre à votre question ?
14 M. ALARID : [interprétation] Je vais poser ma question.
15 M. LE JUGE ROBINSON : [aucune interprétation]
16 M. ALARID : [interprétation] Je vais essayer de me concentrer maintenant.
17 Q. Donc vous avez dit que vous ne pouvez pas exclure la possibilité qu'un
18 cachet signature ait été utilisé pour ces documents où figure la signature
19 contestée ?
20 R. Je ne peux pas l'exclure, c'est vrai.
21 Q. On vous a sûrement dit que les signatures de référence étaient des
22 signatures authentiques, non simulées. Vous n'avez pas essayé de le faire
23 confirmer par vous-même.
24 R. Non, je n'ai pas essayé de le faire.
25 Q. C'est correct ?
26 R. Oui.
27 R. Bien.
28 M. ALARID : [interprétation] Je n'ai plus de questions.
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1 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien. Allez-y, Maître Weber.
2 Nouvel interrogatoire par M. Weber :
3 Q. [interprétation] Me Alarid vous a posé plusieurs questions sur les
4 signatures authentiques ou bona fide. Est-ce que vous avez pu établir si la
5 signature du document ERN 568 est une signature bona fide ou mala fide ?
6 M. ALARID : [interprétation] Objection, on demande au témoin d'émettre des
7 conjectures. Il n'y a aucun fondement pour cette question.
8 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Le témoin peut répondre.
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Si je regarde une signature en soi, elle seule
10 ne suffit pas pour que je donne une réponse. Il faut que je puisse observer
11 cette signature par rapport à d'autres signatures et c'est seulement alors
12 que je peux arriver à des conclusions.
13 M. WEBER : [interprétation]
14 Q. Cette signature sur le document ERN 568, est-ce une signature mala fide
15 ou pas ?
16 R. Oui, je le crois.
17 Q. Sur la base de quoi ?
18 R. Parce qu'elle correspond exactement à trois autres signatures.
19 M. ALARID : [interprétation] Objection.
20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] C'est le type de question que vous
21 n'êtes pas censé poser. Vous n'êtes pas autorisé à le faire. Vous le savez
22 très bien.
23 M. WEBER : [interprétation] Oui, mais nous allons demander le versement du
24 rapport du Dr Fagel au dossier et nous demanderons à la Chambre de
25 réexaminer sa décision préalable portant sur ce rapport et sur le document
26 1D25.
27 M. ALARID : [interprétation] Nous nous opposons à ceci. Nous savons déjà de
28 quelle manière le témoin a conduit son analyse. Il n'y a aucun moyen qui
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1 nous permettrait d'extraire cette partie-là de rapport d'une manière
2 appropriée.
3 [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]
4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous n'allons pas accepter le
5 versement de ce document.
6 M. WEBER : [interprétation]
7 Q. On vous a posé plusieurs questions sur des signatures de référence qui
8 vous ont été fournies. Il y en a eu neuf en tout, n'est-ce pas ?
9 R. En fait, il y avait en tout sept différentes signatures de référence,
10 parce que parmi ces documents il y avait deux originaux plus deux
11 photocopies des mêmes originaux. Donc en tout, sept documents différents.
12 Q. Oui, mais on vous a fourni neuf documents, n'est-ce pas ?
13 R. Oui.
14 Q. Et parmi les photocopies, il y avait 0024-7267 et
15 0024-7268 --
16 R. Oui.
17 Q. -- qui étaient les photocopies des documents 0064-1896 et 0064-1897 ?
18 R. Oui.
19 Q. Et les autres documents que vous avez utilisés pour la comparaison
20 portaient le numéro ERN 0297-1870 --
21 R. Oui.
22 Q. -- et ERN 0297-1906 --
23 R. Oui.
24 Q. -- 0297-1920 --
25 R. Oui.
26 Q. -- 1297-1924 --
27 R. Oui.
28 Q. -- et le document 0324-6754 jusqu'à 0324-6757 ?
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1 R. Oui.
2 M. WEBER : [interprétation] Pour les besoins du compte rendu, j'indique que
3 le dernier document auquel j'ai fais référence, c'est 0324-6754 jusqu'à 57,
4 est déjà versé au dossier en tant que pièce à conviction P317.
5 Le Procureur va demander le versement de l'annexe au rapport de l'expert
6 qui porte le numéro 0642-8816 jusqu'à 820. C'est une explication de la
7 méthode utilisée.
8 M. ALARID : [interprétation] Pour que tout soit clair, la méthode couvre-t-
9 elle la comparaison mutuelle ?
10 M. WEBER : [interprétation] Me Alarid dispose de ce document. Il peut très
11 bien voir que cela ne figure pas dans le document en annexe.
12 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Bien, nous allons admettre ce
13 document.
14 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera P320 [comme interprété].
15 M. WEBER : [interprétation] Ensuite nous avons en annexe 2, une seule page,
16 0642-8815. C'est la page où figure seulement des signatures de référence
17 que le témoin a utilisé pour effectuer la comparaison.
18 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Ce sera versé au dossier.
19 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera P349.
20 M. WEBER : [interprétation] Ensuite, le Procureur va également demander le
21 versement de neuf documents qui ont été fournis au témoin pour son analyse
22 dont certains font déjà partie du document P317.
23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Très bien.
24 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Ce sera P350.
25 M. WEBER : [interprétation]
26 Q. En ce qui concerne les signatures de référence qui vous ont été
27 fournies, avez-vous pu déterminer, oui ou non, s'il s'agissait d'une
28 variation normale dans ces signatures ?
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1 R. Oui, il y avait des variations, mais des variations normales.
2 Q. En ce qui concerne le fait qu'à un moment donné un individu signe un
3 document, est-ce qu'il peut y avoir des variations des modifications dans
4 la façon dont plus tard il va signer ce document ?
5 R. Oui, c'est ce qu'on appelle les variations naturelles. A chaque fois
6 que l'on écrit une signature, il y a nécessairement toujours des
7 différences.
8 M. WEBER : [aucune interprétation]
9 [Le Conseil de l'Accusation se concerte]
10 M. WEBER : [interprétation]
11 Q. En ce qui concerne les sept signatures qui sont des signatures de
12 référence, y a-t-il une indication quelconque selon laquelle ces documents
13 ne proviendraient pas de la même personne ?
14 R. Non. Ce sont des signatures parfaitement cohérentes les unes entre les
15 autres. Le fait qu'elles aient été écrites par une seule et même personne
16 est corroboré par le fait qu'elles se présentent de façon tout à fait
17 naturelle avec ces quelques variations que j'ai mentionnées mais qui sont
18 parfaitement cohérentes.
19 Q. Il n'y a donc aucun signe de falsification ?
20 R. Non.
21 M. WEBER : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions, Monsieur le
22 Président.
23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Monsieur Weber.
24 Docteur Fagel, ceci met un terme à votre témoignage, nous vous remercions
25 d'être venu ici au Tribunal. Vous pouvez maintenant quitter le prétoire.
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
27 [Le témoin se retire]
28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Cepic, si j'ai bien
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1 compris, vous avez indiqué que -- en fait, je crois que nous devrions être
2 en huis clos partiel.
3 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.
4 [Audience à huis clos partiel]
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27 [Audience publique]
28 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je pense que nous avions indiqué que
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1 vos arguments de clôture devaient durer une heure chacun.
2 M. ALARID : [interprétation] Sous réserve de notre demande en attente,
3 Monsieur le Président, nous avions demandé trois heures dans notre requête
4 pour pouvoir ainsi aller jusqu'à jeudi.
5 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Nous n'autoriserons pas trois
6 heures, Maître Alarid.
7 Monsieur Groome.
8 M. GROOME : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
9 Réquisitoire :
10 M. GROOME : [interprétation] Madame et Messieurs les Présidents, en juillet
11 dernier, le procès de Sredoje et Milan Lukic a débuté. La semaine dernière,
12 l'Accusation a déposé son dossier définitif résumant les éléments de preuve
13 qui sont maintenant soumis à la Chambre et qui établissent la façon dont
14 ces éléments de preuve confirment sans aucun doute la culpabilité des deux
15 accusés. Le dossier donne des détails des éléments de preuve concernant les
16 meurtres des hommes le long de la rivière Drina à Sase et à la scierie de
17 Varda; les éléments de preuve montrent également que plus de centaines ont
18 été brûlés vifs dans les maisons de la rue Pionirska et à Bikavac; les
19 meurtres qui ont été commis et les mauvais traitements infligés aux détenus
20 civils dans le camp d'Uzamnica.
21 Maintenant vous avez probablement lu ce dossier. Je ne vais pas
22 résumer tous ces points.
23 Nous avons rassemblé tous les témoins et toutes les pièces
24 disponibles relatives à cet acte d'accusation. Si l'on prend tous ces
25 documents et tous ces témoignages ensemble et si l'on considère tout cela
26 comme un ensemble de preuves, tout ceci établit sans aucun doute la
27 culpabilité des deux accusés. Des témoins, qui sont aujourd'hui dispersés à
28 travers l'Europe entière pour la plupart, certains ne se sont jamais
Page 7159
1 rencontrés entre eux, n'ont jamais eu l'occasion de se parler entre eux,
2 tous des témoins qui ont fui Visegrad et ont été amenés à La Haye un par un
3 pour témoigner devant vous. Tous ont relaté les épreuves épouvantables
4 qu'ils ont dû subir. Ils ont décrit les actes criminels perpétrés par les
5 deux accusés. Tous leurs témoignages se corroborent les uns les autres et
6 sont, à leur tour, corroborés par toutes les pièces et tous les éléments de
7 preuve. Ce sont donc des témoins qui sont parfaitement fiables et
8 crédibles.
9 Tous les éléments de preuve établissent également sans l'ombre d'un
10 doute que ce sont les deux accusés qui sont les auteurs de ces crimes et de
11 ces actes criminels et qu'ils le faisaient avec préméditation. Cette
12 préméditation est surtout évidente dans les incidents de la rue Pionirska
13 et de Bikavac. Malgré les préparations qu'ils avaient prises, Sredoje et
14 Milan Lukic, au moment de l'incendie de la rue Pionirska, et malgré tous
15 les efforts pour tuer tous ceux qui essayaient désespérément de s'enfuir,
16 un certain nombre de personnes ont survécu à l'incendie, huit personnes.
17 Les six qui vivent encore aujourd'hui ont pu témoigner en personne.
18 Dans la mesure où ils n'avaient pas réussi à détruire tous les
19 membres de la famille Kurspahic, Milan Lukic et Sredoje Lukic ont tiré les
20 leçons de leurs erreurs et ont pris des mesures supplémentaires avant de
21 brûler vif un autre groupe de Musulmans deux semaines plus tard. Ils ont
22 condamné toutes les issues, surtout la porte d'entrée de la maison, avec
23 une porte de garage en acier.
24 L'incendie de Bikavac a été réalisé avec la précision et l'efficacité
25 inhérentes à la préméditation. Ils ont pratiquement réussi à tuer tous ceux
26 qui étaient à l'intérieur. Zehra Turjacanin, la seule survivante, a fui cet
27 enfer uniquement parce qu'elle souhaitait sauver son frère, ses voisins et
28 ses amis d'un destin similaire.
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1 C'est aujourd'hui ma seule occasion de présenter des arguments
2 concernant les dossiers finals des deux accusés, et je sais que la Chambre
3 aura analysé tous les arguments. Je tiens à répondre à un certain nombre de
4 points qui sont soulevés dans ces dossiers.
5 Les avocats de la Défense soulèvent comme raison essentielle pour
6 acquitter les accusés le fait qu'il y a des incohérences qu'ils ont pu
7 identifier dans le dossier final. Ils suggèrent donc que ces incohérences
8 montrent bien que vous ne pouvez pas considérer ces éléments de preuve
9 comme des éléments fiables. Mais Madame la Présidente et Messieurs les
10 Présidents, vous êtes des Juristes expérimentés, vous avez suffisamment
11 d'expérience pour savoir que plusieurs témoins qui relatent un événement le
12 font de différentes perspectives, et invariablement, il y aura des
13 différentes entre leurs récits. Même les témoins qui relatent un certain
14 nombre de choses qu'ils ont vues, s'ils le relatent à plusieurs reprises,
15 il y aura toujours des différences mineures entre les différents récits.
16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Une minute. Monsieur Cepic.
17 M. CEPIC : [interprétation] Je suis désolé d'interrompre, mais nous avons
18 un petit problème de traduction en B/C/S. Il y a du retard.
19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Groome, vous avez entendu
20 cela.
21 M. GROOME : [interprétation] Non, je n'ai pas entendu parce que je n'ai pas
22 le casque, donc je vais faire plus attention pour les interprètes. S'il y a
23 un problème, ils vont certainement me demander de ralentir. Donc je vais
24 poursuivre et je vais essayer d'être moins rapide.
25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, essayez d'être un petit peu
26 moins rapide.
27 M. GROOME : [interprétation] Donc les incohérences qui sont mentionnées par
28 la Défense sont tout simplement fonction de la mémoire humaine, fonction
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1 des différentes personnes qui voient les choses de différentes
2 perspectives. Comme le Témoin VG-13 l'a dit en page 1 089 du procès-verbal
3 :
4 "Tous ceux d'entre nous qui étions là dans ce groupe, personne ne va
5 dire exactement la même chose, parce que nous n'avons pas tous vu la même
6 chose. Il y en a un qui a vu quelque chose. Un autre, autre chose."
7 Cette observation tout à fait judicieuse est précisément le point que la
8 Chambre doit garder à l'esprit lorsqu'elle étudie les éléments de preuve,
9 et c'est exactement ce dont la Chambre dispose dans tous ses éléments de
10 preuve, les récits indépendants des différents témoins.
11 Le groupe très important de la famille Kurspahic qui s'est retrouvé dans
12 l'incendie de la rue Pionirska était réparti sur une zone assez importante.
13 Ils n'étaient pas tous regroupés exactement au même endroit lorsqu'ils se
14 dirigeaient depuis la Place de Visegrad à la maison de Memic sur la rue
15 Pionirska. La maison de Memic avait déjà environ 70 personnes à l'intérieur
16 qui étaient réparties dans différentes pièces sur deux étages différents.
17 Certaines des victimes étaient déjà à l'intérieur de la maison, lorsque
18 d'autres étaient encore en train d'essayer de réveiller les enfants dans la
19 maison de Memic. Et pourtant, la Défense voudrait que vous considériez que
20 tous ces événements de cette journée, puisqu'ils sont décrits de façon
21 assez approximative et de façon assez différente par les différents
22 témoins, elle voudrait que vous pensiez que ces incohérences sont une
23 marque de malhonnêteté de la part des témoins. Les témoins, en réalité, ont
24 simplement relaté en toute honnêteté ce qu'ils ont vu. S'il y a des
25 incohérences, à mon avis, c'est justement une preuve de leur grande
26 honnêteté.
27 Si vous comparez les éléments de preuve de certains des témoins de la
28 Défense, le fait que leurs témoignages soient absolument identiques pour
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1 des événements qui se sont passés il y a 16 ans, cela montre bien que cette
2 cohérence trop importante est une marque de falsification des témoignages.
3 L'expert de la Défense, Dr Hough, a expliqué très clairement que des
4 incohérences sont normales et qu'en elles-mêmes, elles ne signifient pas
5 grand-chose. Il a expliqué que trois des témoins de l'Accusation étaient
6 particulièrement traumatisés et qu'il n'était pas surprenant que le
7 traumatisme se réveille au moment de leur témoignage. Il a expliqué que
8 chez les victimes de traumatisme, il est souvent "très difficile, d'un
9 point de vue émotionnel, de rappeler les souvenirs," car ces souvenirs font
10 revivre à ces personnes leur expérience de traumatismes. Donc le Dr Hough a
11 mentionné :
12 "Le stress est encore accentué par l'anxiété et le processus de
13 rappel des souvenirs qui peut alors entraîner un certain nombre de
14 déformations dans les récits."
15 Si les événements sont relatés dans un ordre relativement différent, c'est
16 normal. Il n'a jamais indiqué que de tels souvenirs pouvaient être
17 considérés comme peu fiables ou que des incohérences pouvaient indiquer
18 qu'il y a manque de fiabilité total. Il a également expliqué que beaucoup
19 d'entre nous savons déjà que tous ces témoignages sont parfaitement vrais
20 et qu'étant donné le nombre d'années écoulées depuis, il serait irréaliste
21 de s'attendre à une cohérence parfaite. Même si l'on regarde ce qu'a dit
22 l'expert de la Défense, les témoins de l'Accusation relatent les événements
23 en toute vérité et sur la base d'éléments de preuve tout à fait
24 incontestables.
25 Je voudrais maintenant aborder la question de l'identification. Comme le
26 Président l'a fait remarquer au début de cette affaire, la question
27 essentielle c'est l'identification. Dans son dossier final, l'Accusation
28 explique en détail chacun des témoins, les survivants qui connaissaient
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1 l'un ou deux des accusés avant le jour où ils ont commis leurs crimes. Les
2 témoins de la Défense de Visegrad, ainsi que les témoins de l'Accusation,
3 sont tous unanimes dans leur évaluation pour dire que du fait de la taille
4 de Visegrad et des habitudes de vie dans cette ville, tout le monde se
5 connaissait, peut-être pas de nom, mais tout le monde au moins se
6 connaissait de vue. Les témoins de l'Accusation ont décrit en détail
7 comment ils connaissaient les accusés, comment ils les avaient reconnus sur
8 les scènes des crimes. Certains ont confirmé les avoir reconnus aussi au
9 Tribunal.
10 Les dossiers de la Défense font un lien tout à fait erroné entre la
11 capacité d'un témoin à décrire un auteur du crime avec leur capacité à
12 reconnaître en laissant entendre que des descriptions incohérentes
13 indiquent donc une reconnaissance qui n'est absolument pas fiable. Mais
14 comme le fait remarquer l'Accusation dans son dossier, il y a une
15 différence très très importante entre notre capacité en tant qu'humain à
16 reconnaître quelqu'un et notre capacité à décrire quelqu'un. Ce sont deux
17 capacités totalement différentes, et si la plupart des gens sont en mesure
18 de reconnaître en toute fiabilité quelqu'un qu'ils connaissent, ensuite
19 décrire quelqu'un est quelque chose de beaucoup plus difficile.
20 Les enfants, les nouveau-nés, bien avant de pouvoir décrire leurs
21 propres parents, sont capables de les reconnaître. La reconnaissance est
22 une capacité instinctive qui nous permet d'identifier rapidement ceux qui
23 présentent un danger et ceux qui, au contraire, représentent pour nous la
24 sécurité. Si vous avez des doutes à ce sujet, je voudrais vous demander de
25 procéder à un exercice tout simple. Chacun d'entre vous, vous pouvez
26 essayer de prendre un morceau de papier et de noter ma taille, mon poids,
27 la couleur de mes cheveux, mon âge, la couleur de mes yeux, et cetera. Même
28 si je suis là devant vous et que vous écrivez tout cela, en fait, il y aura
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1 des différentes très importantes entre ce que chacun d'entre vous aura
2 écrit, parce que même si vous me voyez depuis pratiquement un an ici dans
3 cette salle, pourtant vous avez chacun une façon de me décrire qui sera
4 différente. Vous me reconnaîtrez instantanément, mais vous aurez chacun une
5 façon différente de me décrire.
6 Maintenant, dans la ville de Visegrad il y avait environ 35 officiers de
7 police avant le conflit. Pourquoi serait-il déraisonnable, comme la Défense
8 de Sredoje Lukic le suggère, pourquoi serait-il déraisonnable pour des
9 témoins qui ont connu Sredoje Lukic de le reconnaître soit de vue, soit par
10 son nom ? Reprenez, par exemple, notre expérience ici tous les jours. Il y
11 a plus de 150 membres de la sécurité ici dans ce Tribunal. Même si nous en
12 connaissons certains de nom, la plupart d'entre eux, nous ne les
13 connaissons pas par leur nom, nous les connaissons de vue. Nous les
14 reconnaissons chaque fois que nous entrons dans cette salle d'audience,
15 chaque fois que nous passons les points de contrôle au rez-de-chaussée.
16 Nous les reconnaissons lorsque nous les rencontrons dans un magasin le
17 samedi ou nous les voyons dans une queue de cinéma. C'est de notre capacité
18 innée et instinctive, en tant qu'humains, de reconnaître les autres et nous
19 savons que c'est parfaitement précis, c'est parfaitement fiable, et cela
20 c'est un fait sur lequel la Chambre peut se reposer en toute fiabilité.
21 Les témoins dans cette affaire n'ont cessé de rencontrer Sredoje Lukic
22 pendant toute leur vie, beaucoup plus longtemps même que notre période de
23 travail ici au Tribunal. Le Témoin VG-38 connaissait Sredoje Lukic, il le
24 connaissait bien, même s'il ne connaissait pas son nom. Même si l'on tient
25 compte du fait qu'il a appris son nom la veille de l'incendie, cela ne veut
26 pas dire que sa reconnaissance n'est pas fiable.
27 La Défense a soulevé un certain nombre de questions liées à la crédibilité
28 des différents témoins et je tiens à reprendre certains de ces témoins.
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1 Premier témoin, MLD-025. C'est un témoin qui a déposé au sujet de
2 l'incident de la rivière Drina. Pour cela, j'aimerais que nous passions en
3 session à huis clos total.
4 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Huis clos total.
5 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos
6 total, [comme interprété] Monsieur le Président.
7 [Audience à huis clos partiel]
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27 [Audience publique]
28 --- L'audience est suspendue à 16 heures 29.
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1 --- L'audience est reprise à 17 heures 15.
2 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Plein d'excuses pour notre retard.
3 J'ai dû passer d'avantage de temps que je ne l'avais prévu pour régler une
4 question particulière.
5 Monsieur Groome, c'est à vous.
6 M. GROOME : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
7 Avant la suspension d'audience, j'avais commencé à parler de certains des
8 points précis qui avaient été évoqués en ce qui concerne un témoin en
9 particulier. Je voudrais continuer, tout d'abord, en ce qui concerne VG-
10 115. Les deux ont contesté vigoureusement la déposition de VG-115 parce
11 qu'elle fournit des positions qui sont très dangereuses pour les accusés.
12 Elle est la seule civile serbe qui a eu le courage de se présenter pour
13 décrire ce qui s'est passé pour ces Musulmans, ces voisins musulmans, qui
14 ont fait l'objet d'un nettoyage ethnique en ville, une femme qui n'avait
15 aucun motif contre l'un ou l'autre accusé. Rappelez-vous sa déposition.
16 Elle a témoigné qu'elle avait à peine connu Milan Lukic avant qu'elle ne
17 témoigne, mais elle a dit de l'affection qu'elle avait pour Sredoje Lukic
18 avant que ne commence le conflit.
19 Malgré tous ses efforts, la Défense n'a pas pu établir avec un élément
20 quelconque qu'elle avait un motif d'accusé à tort l'un ou l'autre des
21 accusés. En fait, les preuves de ces motifs sont contenues aux pages 722 à
22 723 du compte rendu où elle dit :
23 "Je suis venue ici pour prouver la vérité, et cette vérité est une petite
24 chose, à savoir que qu'est-ce que ces personnes, les Vengeurs ont fait dans
25 la ville de Visegrad. Je ne défends pas les Musulmans ou le peuple serbe,
26 en l'occurrence. Je suis juste ici pour dire ce que j'ai vu et de quoi j'ai
27 eu l'expérience."
28 En tentant de discréditer ce qu'elle a dit dans sa défense, la Défense a
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1 pris des photographies de la véranda de la maison Smajic où elle se
2 trouvait pendant le feu de la rue Pionirska. Ce qui confirme absolument ce
3 qu'a dit le Témoin VG-115 dans sa crédibilité lorsqu'elle a décrit ce
4 qu'elle pouvait voir du balcon et qu'elle a dit qu'elle avait vu de la
5 fumée et du feu, elle n'a jamais soutenu qu'elle avait vu la maison elle-
6 même. Les photographies montrent clairement que c'est exactement ce qu'elle
7 aurait vu, la fumée et du feu sortant de l'enfer de la maison Omeragic.
8 L'Accusation soutient que tout ce qui concerne ce groupe, il est
9 clair que VG-115 dans sa déposition est véridique, précise et corrobore
10 pour l'essentiel ce qui a été dit. La Défense suggère qu'il faudrait
11 rejeter sommairement sa déposition en se basant sur le fait qu'il y aurait
12 insuffisance de raisonnement dans l'opinion de Vasiljevic, et ceci n'est
13 pas justifié par le dossier présenté à la Chambre. La Chambre a beaucoup
14 plus de preuves et est dans une position bien meilleure pour pouvoir
15 évaluer la crédibilité de VG-115 et les autres témoins de l'Accusation que
16 pour la Chambre Vasiljevic.
17 La Défense de Sredoje Lukic conteste sa description du bas qui serait sur
18 la tête de Sredoje Lukic dans l'après-midi de l'incendie de la rue
19 Pionirska. Elle se rappelle qu'il avait couvert son visage avec ce bas au
20 cours du feu, de l'incendie de Bikavac. Elle dit simplement qu'il le
21 portait sur sa tête, couvrant son crâne rasé. Vous vous rappelez que son
22 crâne avait été rasé lorsqu'il était en captivité. En regardant de près la
23 déposition de VG-115 en ce qui concerne ce bas, ceci est tout à fait
24 logique et compatible avec ce point de vue.
25 Particulièrement révélateur, au point où VG-115 était en train de
26 tenter d'expliquer ceci pendant sa déposition qui est la partie sur
27 laquelle s'est fondée la Défense de Sredoje Lukic dans son mémoire au
28 paragraphe 155, VG-115 a été interrompue de façon répétée par le conseil de
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1 la Défense. Le paragraphe 155 du mémoire de la Défense indique :
2 "VG-115 n'a pas été en mesure de fournir une explication raisonnable
3 et satisfaisante…" de la façon dont elle pouvait identifier Sredoje Lukic
4 alors qu'il portait un bas sur la tête.
5 En fait, VG-115 a été empêchée de s'expliquer. Elle a été interrompue
6 trois fois rien que sur la page 781 pour l'empêcher de décrire pleinement
7 la façon dont Sredoje Lukic portait ce bas sur sa tête. En fait, la façon
8 dans laquelle VG-115 continue de dire qu'il y avait ce bas dans le reste de
9 sa déposition démontre qu'elle décrit le fait qu'il portait sur sa tête
10 pour couvrir ses cheveux et non pas en le portant complètement sur
11 l'ensemble de la tête et sur le visage, comme le suggère la Défense.
12 Quand elle est demandée d'identifier l'accusé à la fin de sa déposition,
13 elle a dit, je cite, sur référence aux deux accusés :
14 "M. Milan Lukic, portant un costume noir; à côté de lui, M. Sredoje Lukic,
15 qui était chauve et portait un bas sur sa tête, mais maintenant il a
16 beaucoup de cheveux."
17 La Défense de Sredoje Lukic tente de discréditer la déposition de VG-013 en
18 soutenant qu'elle ne l'a pas vu pendant l'incendie de Pionirska, et
19 qu'Edhem Kurspahic ne connaissait pas Sredoje Lukic, de sorte qu'elle ne
20 pouvait pas avoir entendu Edhem l'identifier lorsqu'il escortait les gens
21 dans la maison Omeragic.
22 En ce qui concerne Edhem Kurspahic, la Défense s'oppose et compare la
23 déposition de VG-013 avec celle de VG-013 [comme interprété], la remarque
24 qu'il a faite selon laquelle Edhem ne connaissait pas Sredoje Lukic. Edhem
25 était de la même génération que Hasib Kurspahic et était un résident depuis
26 toujours du petit village de Koritnik. Il n'est pas contesté que Sredoje
27 Lukic visitait fréquemment Koritnik, tant pendant qu'il était en patrouille
28 que pour rendre visite à son excellent ami Huso Kurspahic. Edhem aurait eu
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1 la même possibilité de voir Sredoje Lukic lorsqu'il est venu à ce petit
2 village.
3 La réponse de VG-018 au conseil de la Défense selon laquelle Edhem
4 Kurspahic et Sredoje Lukic ne se connaissaient pas l'un l'autre était une
5 conclusion rapide. Elle n'était pas basée sur le fait qu'Edhem le lui
6 aurait dit. C'était une hypothèse de sa part. Le poids des éléments de
7 preuve suggère fortement que cette société patriarcale d'hommes, les hommes
8 se connaissaient les uns les autres et auraient connu Sredoje Lukic comme
9 étant un membre important de la communauté, qui se rendait régulièrement
10 visite au village où il faisait des patrouilles.
11 L'affirmation selon laquelle VG-013 n'a pas vu Sredoje Lukic est sans
12 valeur. Au paragraphe 40 du mémoire de la Défense, ils soutiennent que VG-
13 013 "a clairement attesté qu'elle n'avait pas vu Sredoje Lukic le 14 juin
14 1992."
15 Dans le contexte de sa déposition, il est clair que physiquement elle
16 l'a vu au cours de la journée, et ceci, avec le groupe Lukic qui est revenu
17 pendant la nuit et qu'elle s'est rapidement retournée auprès de la famille
18 Kurspahic, dans la maison Omeragic. VG-013 ne l'a pas vu, mais ça lui
19 aurait été dit par Edhem Kurspahic, par Sredoje Lukic qui était derrière
20 elle.
21 La Défense soutient que VG-013 apparemment ne mentionne pas Sredoje
22 Lukic dans une déclaration vidéo ou une vidéo d'interrogatoire qui a été
23 admise au procès. Il faut noter qu'il s'agit d'un interrogatoire qui a été
24 édité, ne correspond pas à un récit complet de ce qu'a dit VG-013. En fait,
25 l'accent est mis essentiellement sur autre chose que le crime de la rue
26 Pionirska.
27 Veuillez lire, s'il vous plaît, les questions concernant la vidéo au
28 compte rendu, à la page 1 130. M. Cepic place une transcription devant VG-
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1 013 pour voir si elle peut l'authentifier, et il devient clair qu'elle ne
2 peut pas le lire. Alors il lui pose une question, il lui présente une
3 phrase unique disant qu'elle était de Koritnik, qu'elle avait deux fils,
4 une fille et un mari et qu'ils avaient quitté Koritnik parce que ces gens
5 étaient morts. Rien en ce qui concerne l'incendie. Elle est d'accord, et
6 l'on présente l'enregistrement, que si vous lisez la transcription du
7 procès, pendant qu'on est en train de présenter l'enregistrement, VG-013
8 essaye de poser des questions concernant l'enregistrement. Ceci n'est pas
9 une preuve qu'elle n'a pas vu Sredoje Lukic à la rue Pionirska.
10 La Défense, également, n'a pas noté que bien avant la question de cet
11 enregistrement, VG-013 a identifié Sredoje Lukic comme étant l'un des
12 auteurs dans une déclaration écrite de 1995, qui est maintenant versée au
13 dossier comme 1D29. Nous savons également qu'elle a identifié Sredoje Lukic
14 comme étant l'un des auteurs dans la maison de Kurspahic peu de temps après
15 l'incendie.
16 Le mémoire final de Sredoje Lukic met l'accent sur ce qu'il
17 caractérise comme étant une preuve frappante que VG-089, dans une
18 description détaillée et complète de Milan Lukic et les trois hommes qui
19 étaient avec lui le 14 juin, ce qui corrobore la déposition de VG-101.
20 La Défense de Sredoje Lukic suggère que VG-089 est crédible et que ses
21 observations de Milan Lukic et des autres hommes avec lui le jour de
22 l'incendie sont fiables et crédibles. L'Accusation est d'accord avec la
23 position de Sredoje Lukic sur ce point. VG-089, dans ses observations de
24 Milan Lukic à Visegrad le jour de l'incendie, sont effectivement fiables.
25 L'Accusation est également d'accord avec Sredoje Lukic et sa Défense que
26 les éléments de preuve de VG-100 et VG-089, ces deux personnes qui ne se
27 sont jamais rencontrées, corroborent l'un l'autre.
28 Là où nous ne sommes pas d'accord et où les arguments de la Défense
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1 s'effondrent, c'est dans l'affirmation que si Sredoje Lukic n'était pas
2 dans la voiture avec VG-089 au nouveau pont de la ville, il n'aurait pas pu
3 être plus tard à la rue Pionirska. L'argument part d'une hypothèse erronée
4 que tous les auteurs de l'incendie Pionirska se trouvaient dans la voiture
5 avec VG-089 et les deux autres garçons qui ont été tués, et nous savons
6 tout simplement que ceci n'est pas le cas. VG-078 a rappelé qu'il y avait
7 approximativement dix hommes ensemble qui ont participé à cet incendie la
8 nuit. Hasib Kurspahic et VG-115 fournissent le nom d'une partie de ces
9 autres personnes.
10 Lorsque VG-101 a déclaré qu'elle ne pouvait voir que quatre
11 personnes, elle se référait à quatre personnes précises qu'elle pouvait
12 voir à un moment précis, quand on l'a ramenée de la maison de Memic à la
13 maison Omeragic. Il n'y a aucun élément raisonnable de preuve qui suggère
14 qu'il y avait seulement quatre membres du groupe Lukic présents cette nuit-
15 là. Dans leur mémoire final, la Défense de Sredoje Lukic tire davantage de
16 la réponse de VG-038 pour une seule question confuse et demande à la
17 Chambre de tirer des déductions non justifiées de sa réponse. La question
18 et la réponse étaient les suivantes :
19 "Question : Que savez-vous concernant mon client, Sredoje Lukic,
20 c'est seulement de cette nuit-là et pas avant ?
21 Réponse : C'est cela."
22 Il est tout à fait peu clair, d'après le contexte de la question, que les
23 mots "que savez-vous de mon client" visaient à se référer à on ne sait pas
24 à quoi.
25 La Défense suggère que ceci est la preuve que VG-038 ne connaissait pas
26 Sredoje Lukic avant l'incendie de la rue Pionirska, mais qu'on connaissait
27 de vue Sredoje Lukic, que VG-038 connaissait effectivement Sredoje Lukic de
28 vue, en tant que policier. Il a appris son nom le jour de l'incendie de
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1 Pionirska.
2 La Défense de Sredoje Lukic termine sa discussion de la déposition de VG-
3 038 avec une fausse présentation de sa déposition. Au paragraphe 81 de leur
4 mémoire, ils soutiennent que VG-038 a dit dans sa déposition qu'il ne
5 pouvait pas reconnaître les hommes qui étaient venus dans la soirée, parce
6 qu'il faisait sombre et parce qu'il n'osait pas les regarder. Il n'a rien
7 dit de la sorte. En fait, en réponse à la question qui est maintenant dans
8 la pièce de l'Accusation P044, pour ce qui c'est de l'amnésie traumatique
9 de Vasiljevic à la page 1 377, il a déclaré :
10 "Question : Est-ce que vous étiez capable de voir qui est revenu à ce
11 moment-là ?"
12 Réponse de VG-038 :
13 "Oui. Les mêmes quatre hommes qui nous avaient fouillés."
14 VG-024, la Défense de Sredoje Lukic prie à la Chambre de ne pas tenir
15 compte de la déposition de VG-024 en ce qui concerne le fait d'avoir vu
16 Sredoje Lukic à la fin de juin à Visegrad, parce que l'affirmation n'était
17 pas précédemment contenue dans sa déclaration. VG-024 a donné une
18 explication raisonnable de ceci à la page 3 216 du compte rendu. Quand on
19 lui a demandé pourquoi elle ne l'avait jamais mentionné, elle a dit :
20 "Personne ne m'a jamais posé de questions à ce sujet. Aujourd'hui, quand on
21 m'a dit qu'il était soutenu qu'il n'était pas à Visegrad à l'époque, j'ai
22 été un peu déçue parce que je sais cela personnellement, que lui, sa
23 famille, étaient à Visegrad en mai et juin. Ceci m'a amenée à dire que je
24 le connaissais et à dire qu'il était à Visegrad pendant toute cette
25 période."
26 La Défense conteste le fait qu'elle ne pouvait pas se rappeler si elle
27 l'avait vu le 27 ou le 28 juin. Le fait est que, dit-elle, lui et sa
28 famille vivaient à Visegrad jusqu'au jour où elle est partie, et le jour où
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1 elle est partie c'était le 29 juin.
2 La Défense de Sredoje Lukic présente une série d'arguments selon lesquels
3 la déposition de VG-035 n'est pas fiable. Aucun de ces arguments n'est
4 convaincant.
5 Pour commencer, la Défense de Sredoje Lukic suggère que VG-035 a marqué un
6 emplacement erroné lorsqu'on lui a demandé d'apporter une marque sur la
7 photographie pour montrer la maison de Meho Aljic. La Chambre se rappellera
8 d'après cette déposition que la maison dont il est question, la maison de
9 Sadikovic, cette maison n'était plus là. Lorsqu'on a demandé au témoin de
10 marquer un lieu sur le terrain où la maison se trouvait précédemment, il
11 s'agissait d'une photo aérienne. Si la Chambre examine P101 et P102, il
12 sera clair que VG-035 a marqué immédiatement à côté de la maison Sadikovic,
13 une aire qui était libre, simplement du côté ouest de la maison au lieu du
14 côté sud de la maison. J'estime qu'il s'agit d'une erreur sans aucune
15 importance après 16 ans, l'absence de la maison Aljic, et le fait que le
16 témoin était prié de marquer une photographie aérienne. C'est un type de
17 preuve qui, souvent, crée une confusion auprès des témoins.
18 La Défense de Sredoje Lukic a également tenté de contester la déposition de
19 VG-035 en faisant des déclarations erronées concernant l'effet de la
20 déposition du témoin de la Chambre 002. VG-035 et le témoin de la Chambre
21 002 se trouvaient ensemble dans la matinée de l'incendie de Bikavac lorsque
22 Milan et Sredoje Lukic sont entrés chez eux. VG-035 a identifié les deux
23 accusés comme étant présents tandis que le Témoin 002 de la Chambre n'a
24 reconnu que Milan Lukic.
25 La Défense a déclaré que le témoin de la Chambre 002 connaissait Sredoje
26 Lukic parce qu'il avait l'habitude de louer un appartement dans sa maison,
27 et, par conséquent, le fait qu'elle ne l'ait pas reconnu comme étant le
28 deuxième homme contredirait la déposition de VG-035.
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1 Cette affirmation présente erronément la déposition du témoin de la Chambre
2 002. Ce témoin a déclaré que Sredoje Lukic vivait dans cette maison avant
3 qu'elle n'entre dans cette famille par mariage. Elle n'a jamais dit qu'elle
4 le connaissait, et il n'y a aucune raison de supposer qu'elle l'ait fait.
5 La Défense de Sredoje Lukic a refusé de lui poser des questions lorsque
6 cela lui a été proposé en disant à la page 7 084 du compte rendu :
7 "Ceci n'a rien à voir avec l'affaire dont nous sommes saisis."
8 Certainement, ils auraient pu poser des questions pour le point de savoir
9 si elle connaissait Sredoje Lukic, mais on ne l'a pas fait. Le seul élément
10 de preuve dans ce procès est qu'elle connaissait Sredoje Lukic qui vivait
11 dans cette maison dans laquelle elle est entrée avant qu'elle n'épouse son
12 mari et n'entre dans cette maison. Alors qu'une telle déclaration pourrait
13 donner à penser que son mari aurait pu le connaître, ça ne suggère en
14 aucune manière une interprétation, si large soit-elle, qu'elle connaissait
15 Sredoje Lukic lui-même.
16 Notre examen initial du mémoire final de Milan Lukic montre qu'il y a
17 souvent une citation erronée des dépositions. Les contraintes de temps ne
18 nous permettent pas de donner une liste complète de ces déclarations
19 erronées. L'Accusation va, par conséquent, donner juste un exemple ou deux.
20 L'une de ces présentations erronées a trait à VG-035. Au paragraphe 113 de
21 leur déclaration, la Défense affirme que VG-035 a déposé en disant :
22 "Quant à un Milan Lukic blond qui aurait été celui qui aurait commis ces
23 crimes."
24 Il y a là une présentation erronée de la déposition. Au cours de sa
25 déposition, précisément dans les pages qui ont été citées par la Défense,
26 VG-035 a dit que Milan Lukic avait des cheveux brun foncé. Ceci figure aux
27 pages 1 719 des comptes rendus. En plus, dans sa déclaration, que la
28 Défense également cite comme étant la pièce 1D44, elle a également dit très
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1 clairement que Milan Lukic avait "des cheveux brun foncé et courts".
2 L'un des points en ce qui concerne la couleur de ses cheveux : la Défense
3 fait la remarque qu'il y a des différences sur la façon dont les témoins
4 ont décrit la couleur des cheveux de Milan Lukic. Veuillez ne pas omettre
5 de regarder la déposition de VG-142, fonctionnaire serbe qu'il interviewé,
6 comme on le trouve à la page 4 de sa déclaration qui est déposée au dossier
7 pour la pièce P144.
8 VG-142 a appelé dans sa déclaration que quand on a arrêté Milan
9 Lukic, lorsqu'il est allé le trouver, il portait une casquette de fourrure
10 que Milan Lukic a décrit comme étant une casquette celtique traditionnelle.
11 Il a poursuivit en décrivant comment Milan Lukic, qu'on voyait une partie
12 des ses cheveux. VG-142 a pensé que ça avait l'air assez ridicule, a
13 demandé à Milan Lukic, lui a posé des questions sur ce sujet, il a dit que
14 c'était un caprice de son amie.
15 Vous vous rappellerez également que VG-094 dans sa déposition ce
16 jour-là, en ce qui concerne Milan Lukic qui a arrêté sa famille sur la
17 place de Visegrad, l'une des personnes dans la voiture de Milan Lukic était
18 une femme qu'elle a reconnue comme étant la coiffeuse de la ville. Ceci est
19 là un élément de preuve crédible, parce que la chambre de Milan Lukic était
20 pour une raison quelconque en train de se teindre les cheveux à l'époque.
21 Je voudrais faire valoir que les différences entre les témoins qui le
22 voyaient à différents moments en ce qui concernait la couleur de ses
23 cheveux pouvaient également être dues au fait qu'il teignait ses cheveux
24 pendant cette période.
25 Le Défense de Sredoje Lukic tire argument du fait que Hasib, père de
26 Huso n'avait pas mentionné le fait que Sredoje était l'auteur des incendies
27 de la rue Pionirska pendant son interrogatoire enregistré en juillet 1992.
28 Hasib ne s'était pas retrouvé avec Huso avant janvier 1993. Hasib était
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1 clair sur le fait que Sredoje qu'il connaissait bien était l'un des
2 principaux auteurs de l'incendie de Pionirska et qu'il avait laissé son
3 fils Huso la tâche solennelle de nier ce qui s'était passé dans la rue
4 Pionirska.
5 Pourquoi il n'a pas mentionné le nom de Sredoje Lukic dans
6 l'interrogatoire quelques jours après l'incendie. Ceci rappelle la
7 déposition de Huso Kurspahic qu'il avait détruit ses rapports concernant
8 l'incendie en 1993, parce qu'il avait la crainte que les Serbes de Bosnie
9 ne puissent le reprendre. Il a pensé que c'était eux qui sauraient qui
10 avaient identifié les auteurs à Visegrad et que ceci mettrait en danger ces
11 personnes.
12 Quand Hasib a fait cette déclaration, il avait juste quitté Visegrad
13 sachant que le groupe de Lukic essayait activement de le trouver et de le
14 tuer. Bien que Hasib ne se soit pas trouvé là pour nous dire pourquoi il ne
15 les a pas mentionnés nommément, il est raisonnable de déduire qu'il ne l'a
16 pas fait parce qu'il avait peur. Dès qu'il a su qu'il était en sécurité
17 avec son fils, à ce moment-là, il a donné à son fils une liste complète des
18 personnes qui avaient allumé l'incendie. Il n'y a pas d'explication
19 raisonnable de la raison pour laquelle Hasib, par la suite, aurait inventé
20 une participation de Sredoje à ce crime alors qu'il le connaissait si bien
21 et était en rapport d'amitié avec lui.
22 Tout au long de leurs arguments, les membres de la Défense ont
23 implicitement donné à la Chambre de première instance d'analyser les
24 éléments de preuve en l'espèce de façon parfaitement artificielle. Plus
25 particulièrement, la Défense a demandé à la Chambre de regarder les
26 éléments de preuve concernant chaque témoin. Isolément, ils ont demandé si
27 les éléments de preuve concernant tel ou tel témoin pris isolément serait
28 suffisant pour prouver la culpabilité de l'accusé au-delà d'un doute
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1 raisonnable. La Défense préfère cette méthode artificielle d'analyse, parce
2 que ça lui permet d'éviter le fait que ces témoins qui étaient séparés le
3 jour du crime dans la plupart des cas ne puissent corroborer et renforcer
4 les témoignages des uns et des autres. La déposition de l'Accusation,
5 lorsqu'elle a été examinée, établit de façon très claire la culpabilité des
6 deux accusés.
7 La Chambre doit analyser chacun des éléments de preuve en l'espèce à
8 la lumière du dossier du procès dans son ensemble. La totalité des éléments
9 de preuve en l'espèce peint un tableau, donne un tableau des événements sur
10 lesquels est basé l'acte d'accusation, et ce tableau est clair et certain
11 lorsque l'on considère ensemble tous les éléments de preuve.
12 La Chambre dans l'appel Limaj a cité de façon positive en approuvant
13 ce qui suit :
14 "C'est en prenant la totalité des éléments de preuve qui ont trait à
15 l'identification de l'accusé qui doivent être appréciés pour déterminer si
16 l'Accusation a prouvé au-delà d'un doute raisonnable que chacun des accusés
17 était bien un auteur comme c'était allégué."
18 Lorsque l'on prendrait compte de tous les éléments de preuve dans son
19 ensemble, les faits cumulatifs, on comprendra très clairement qu'il
20 s'agissait d'une image très claire de ces crimes qui ont été commis par les
21 accusés.
22 Les deux mémoires suggèrent que les témoins de l'Accusation mentent.
23 Nous nous demandons quel est leur motif, quelle est la raison pour laquelle
24 ces derniers auraient voulu mentir. Nous avons vu à de nombreuses reprises
25 dans le cadre de ce procès, le caractère extraordinaire des femmes de
26 Visegrad. Des femmes qui ont fait l'objet de crimes insupportables afin que
27 leurs enfants puissent survivre. Les femmes qui réfléchissaient rapidement
28 et qui, grâce à cela, aient pu sauver leurs enfants, et des femmes qui ont
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1 commis comme dernier acte sur cette planète le fait de protéger de leurs
2 enfants des flammes. Ce sont des femmes dont l'intégrité est incroyable,
3 dont le courage est incroyable, et ces femmes ne sont pas venues déposer
4 devant ce Tribunal pour alléguer ou accuser faussement qui que ce soit.
5 Elles sont venues parler des personnes qu'elles avaient reconnues et elles
6 ont admis franchement qu'il y avait des auteurs des crimes également
7 qu'elles ne connaissaient pas.
8 Non pas seulement qu'il n'y a pas eu de motifs démontrés pour dire
9 que ces dernières avaient menti, mais on a eu des éléments de preuve très
10 clairs disant qu'elles n'ont absolument pas pu inventer et fabriquer de
11 toutes pièces ces éléments de preuve. Les survivants de la rue Pionirska
12 ont parlé de leurs voisins qui les ont chassés de leurs maisons, qui ont
13 mis tout à l'envers dans leurs maisons et c'est ces derniers qui leur ont
14 causé tant de problèmes. Malgré ceci, personne, aucune de ces personnes ne
15 parlait du fait que ces derniers avaient une participation directe dans
16 l'incendie.
17 Si ces dernières auraient voulu fabriquer les éléments dont elles ont
18 déposé de toutes pièces, elles auraient placé ces deux personnes à cet
19 endroit-là -- ou ces autres personnes, et non pas Milan et certainement pas
20 Sredoje Lukic, des personnes contre lesquelles elle n'avait aucun sentiment
21 d'animosité, mais en fait pour lesquelles elles avaient même une affection.
22 Mais elles les ont placé, Sredoje et Milan Lukic à cet endroit-là
23 simplement, parce que ces derniers étaient bien sur place.
24 Même ceux qui sont morts dans l'incendie, la question se posent de
25 nouveau. Pourquoi dirait-on que c'était les Lukic qui étaient là-bas si
26 cela n'était pas vrai ? Les voix des victimes qui sont mortes dans la rue
27 Pionirska, dans l'incendie de la rue Pionirska, parlent haut et fort aux
28 personnes qui ont survécu. Alors la Défense dit que ces témoins ne peuvent
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1 pas mentir. Si ces témoins, je n'ai pas moi-même choisi ces témoins, ils
2 n'ont pas été choisis par hasard. Ces témoins ont été choisis plutôt par
3 hasard, il y a peut-être d'autres personnes de la rue Pionirska qui
4 auraient mieux pu voir, qui auraient été en meilleure position de voir qui
5 ont été ces auteurs. Mais c'est la destinée qui a choisi les survivants et
6 non pas l'Accusation. Et mon devoir en tant que Procureur international est
7 de faire venir les personnes qui ont survécu devant vous et même si cela
8 présente un énorme défi, contrairement à ce qui aurait pu se passer si on
9 était dans un procès domestique. Il n'y a absolument aucun doute que ces
10 personnes qui sont accusées, sont accusées.
11 Ces personnes présentes également un défi énorme pour vous qui devez
12 juger sur ces faits. Certaines de ces personnes, de par leur propre
13 admission, ont une éducation limitée des fois. Elles sont perdues pour ce
14 qui est de certains détails minimes. Certaines personnes, certaines de ces
15 femmes sont traumatisées. Leur traumatisme est encore très clair à nos
16 yeux, 16 ans plus tard. Mais ceci ne peut pas dire qu'il faut absolument
17 rejeter leurs témoignages.
18 Vous, en tant que Juges internationaux, vous avez été choisis pour juger
19 sur ces faits et vous avez l'expérience nécessaire pour discerner la
20 vérité, pour trouver la vérité, pour évaluer les éléments de preuve
21 entendus par les témoins qui souffrent encore des effets à long terme de
22 ces crimes. Si vous acquitter l'un ou l'autre, ou les deux de ces accusés,
23 vous devez le faire non pas parce que pour ce qui est, non pas parce que
24 les choses sont pas [inaudible]. Si vous acquittez les deux accusés, c'est
25 parce vous pouvez en arriver à cette conclusion, parce que vous ne croyez
26 pas ces victimes, ces témoins. Mais je peux vous dire qu'il n'y a
27 absolument aucune raison de croire que les victimes ont fabriqué de toutes
28 pièces leurs récits. Lorsque vous prenez tout en compte, la seule
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1 conclusion possible que vous puissiez faire, c'est que leurs éléments de
2 preuve établissent la culpabilité des deux accusés.
3 Lorsque l'on examine également le comportement de la Défense de Milan
4 Lukic pendant le procès et leur mémoire donnent des allégations
5 complètement ridicules contre l'Accusation et moi-même. Ceci nous permet de
6 voir le comportement tout au cours de leur procès dans lequel, non pas
7 seulement l'Accusation mais également la Chambre de première instance, le
8 greffier, les gouvernements de Bosnie-Herzégovine et de Serbie ont tous, à
9 quelque moment donné, eu des allégations qui ont été faites à leur
10 encontre. Cela fait cinq mois que j'ai présenté une requête aux Juges de la
11 Chambre de première instance demandant que la Défense de Milan Lukic soit
12 dirigée à moi pour étoffer leurs allégations ou les retirer.
13 Je ne vais pas passer plus de temps sur ces allégations, outre le
14 fait que de dire que malgré le fait que la Chambre ait accordé à la Défense
15 de Milan Lukic la possibilité de mener des enquêtes ou d'étoffer leurs
16 allégations en faisant droit à toute requête qu'ils avaient faite pour
17 contacter les personnes qui, d'après eux, auraient pu prouver ces diverses
18 allégations, aucune de ces personnes n'a été appelée pour témoigner.
19 L'une de ces personnes est le Témoin VG-31. J'ai cité cette personne
20 comme un exemple. Malgré les allégations contre cette personne, malgré le
21 fait que ce dernier n'a pas été appelé, ils prétendent maintenant dans leur
22 mémoire que la Chambre ne leur a pas permis de le faire venir en tant que
23 témoin, ce qui est quelque chose qui est complètement contredit par la
24 décision de la Chambre du 13 mars 2009 permettant que ce dernier soit
25 appelé. Il n'a pas été appelé à la barre; quelqu'un doit certainement en
26 être blâmé.
27 Maintenant la Défense a choisi de ne pas du tout faire valoir aucune
28 preuve et de ne pas étoffer aucune allégation qu'ils ont faite contre
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1 l'Accusation, contre la Chambre et contre le greffier ainsi que contre la
2 Bosnie-Herzégovine et la Serbie. En fait, les seuls éléments de preuve de
3 comportement inadéquat dans ce procès va contre Milan Lukic et son équipe
4 de la Défense. Certaines de ces allégations viennent d'un témoin de la
5 Défense même.
6 Je m'attends à ce que le mémoire présenté par la Défense de la même
7 façon dont ils ont présenté leurs éléments de preuve dans leur mémoire en
8 début du procès. Je ne vais pas répondre à ceci et je vais demander à la
9 Chambre d'insister pour que toute allégation soit soutenue par des éléments
10 de preuve. Il ne faut pas permettre à cette Chambre d'être utilisée à
11 mauvais escient.
12 Je conclus maintenant mon mémoire. Je souhaiterais remercier aux
13 victimes et à leurs familles, et je sais que pour la plupart, nous avons dû
14 rouvrir des blessures très profondes. Ces personnes ont voulu venir et
15 déposer sur des mémoires très pénibles et ceci a permis de contribuer à la
16 vérité. Je voudrais plus particulièrement remercier ces femmes qui ont
17 décrit les horribles attaques qui avaient été faites à leur encontre,
18 sachant très bien que la Chambre ne prendra pas en compte les allégations
19 concernant ces attaques.
20 J'aimerais également remercier le gouvernement de Serbie qui nous a
21 fourni des éléments de preuve qu'ils avaient en leur possession et qui ont
22 fait en sorte que les représentants du gouvernement puissent venir
23 témoigner.
24 J'aimerais également remercier la police actuelle de Visegrad qui, à
25 plusieurs reprises, a permis à moi-même et à mes collaborateurs de venir
26 sur les lieux pour visiter les scènes de crimes. J'espère qu'une telle
27 coopération est un signe qui nous fait voir que la police de Visegrad est
28 une organisation professionnelle protégeant les droits juridiques de tous
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1 citoyens de Visegrad. J'espère également que ces deux exemples de
2 coopération sont une preuve que le Tribunal pénal international est en
3 train d'en arriver à son but, c'est-à-dire de promouvoir une réconciliation
4 dans la région.
5 J'ai encore quelques minutes et je voudrais vous parler de la
6 question de la peine. Il y a une citation du livre de Khaled Hosseini dit,
7 je cite :
8 "Il n'y a qu'un seul péché, c'est le vol. Lorsque vous tuez un homme,
9 vous volez son droit à la vie, vous dérobez une femme de son mari et vous
10 dérobez les enfants de son père."
11 Lorsque l'on voit les choses de cette façon-là, le mal que ces deux
12 accusés ont fait à Visegrad est incalculable. La magnitude de leur vol ne
13 peut jamais être calculée. Nous ne saurons jamais de quelle façon la vie de
14 Meliha Memisevic a été changée le jour où elle a vu Milan Lukic tuer son
15 père de sang-froid. Nous ne saurons jamais ce qui serait advenu de l'enfant
16 qui était âgé de deux jours, qui a brûlé dans l'incendie. Elle aurait eu 17
17 ans maintenant dans quelques jours. Nous ne saurons jamais quelle aurait
18 été la contribution que cette personne aurait faite à sa communauté et à
19 notre planète. Ce qu'ils ont volé des familles de la communauté de Visegrad
20 et de nous, en tant que membres de la race humaine ne peut pas être
21 calculé.
22 Quelqu'un m'a déjà posé une question si j'avais calculé les années
23 des vies humaines prises dans l'incendie de la rue Pionirska. Je me poserai
24 la question suivante : quel est le nombre de vies humaines qui avaient été
25 prises ? C'est très simple. On ne peut pas faire de calcul. Dans l'ex-
26 Yougoslavie, on s'attendait à ce qu'une personne vive au-delà de 70 ans.
27 Hajra Kurspahic était âgée de 60 ans lorsqu'elle est morte brûlée dans
28 l'incendie de Pionirska. Dix ans de sa vie ont été pris. La plupart des
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1 victimes de Bikavac, nous ne savons rien sur eux, outre le souvenir de Mme
2 Turjacanin que la maison de Aljic était remplie, pour la plupart, de jeunes
3 mères et d'enfants.
4 Si nous tenons compte que des victimes des deux incendies dont nous
5 savons, et si nous tenons compte leur âge en ne calculant que leur vie, le
6 chiffre est incroyable : plus de 3 000 ans de vie humaine ont été perdus
7 dans ces incendies.
8 Ce que les accusés ont détruit en juin 1992 est au-delà de ce qu'ils
9 puissent repayer. Même s'ils passaient toute leur vie en prison, ne
10 réussirait pas à les punir.
11 Envoyer un message à des criminels potentiels est très important pour
12 ne pas leur permettre de refaire de crimes semblables. Si vous choisissez
13 de rendre une sentence d'accusés coupables pour la rue Pionirska et
14 Bikavac, je vous demande d'envoyer un message clair aux personnes qui
15 choisiraient un jour de se livrer à des crimes haineux de ce type, à ces
16 personnes qui exploitent les personnes les plus vulnérables dans le chaos
17 d'un conflit.
18 Je vous demanderais de tenir compte de trois choses : la première, si
19 les auteurs de crimes commettent des crimes semblables, il faut comprendre
20 que ces personnes seront trouvées, ensuite vous serez extradiés [phon]. Par
21 la suite vous serez emmenés devant un tribunal où on vous trouvera
22 coupable; et deuxièmement, oui, un procès juste sera mené contre vous,
23 indépendamment du comportement et du sérieux des allégations contre vous,
24 vous aurez un procès juste et équitable; et troisièmement, le message que
25 j'envoie à tous ces criminels potentiels, si vous êtes trouvés coupables de
26 tels crimes contre les personnes les plus vulnérables de cette planète,
27 aucun merci ne sera montré et vous recevrez la peine la plus sévère.
28 La communauté internationale doit poursuivre de façon véhémente les
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1 personnes qui s'adonnent à de tels crimes pendant le conflit.
2 Si la Chambre trouvait les deux accusés coupables pour les incendies
3 de Pionirska et Bikavac, l'Accusation reconnaît qu'à ce moment-là la peine
4 doit être faite de sorte à nous assurer que les deux accusés passent le
5 reste de leur vie en prison, et ça veut dire qu'il s'agirait de la peine la
6 plus sévère dans votre pouvoir.
7 Monsieur le Président, nous avons terminé la présentation et vous
8 avez maintenant tous les éléments de preuve qui vous permettent de trouver
9 les accusés coupables. Toute personne qui ait survécu à ces crimes et qui
10 sont encore en vie a été emmenée devant vous. De plus, pour tout ce qui est
11 des autres témoins qui avaient des éléments de preuve pertinents à vous
12 présenter, ces derniers les ont également présentés. Vous avez maintenant
13 tous les éléments vous permettant de juger et tous les éléments de preuve
14 que vous avez entendus établissent très clairement la culpabilité de
15 Sredoje Lukic et de Milan Lukic au-delà de tout doute raisonnable. C'est
16 maintenant à la Chambre d'évaluer de façon claire et j'espère que vous
17 pourrez bénéficier de tous les éléments qui vous ont été présentés.
18 Merci.
19 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Groome.
20 Monsieur Alarid.
21 M. ALARID : [interprétation] Il nous reste encore une heure. Je vous
22 demanderais de faire une pause courte. Je vous prierais --
23 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous avez besoin d'aller aux
24 toilettes ?
25 M. ALARID : [interprétation] Oui.
26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Bien. Nous allons prendre une pause
27 de dix minutes.
28 M. ALARID : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
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1 --- La pause est prise à 17 heures 58.
2 --- La pause est terminée à 18 heures 12.
3 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Alarid, je vous rappelle que
4 votre demande de trois heures pour votre plaidoirie n'a pas été accordée.
5 Vous pouvez d'ores et déjà débuter.
6 M. ALARID : [interprétation] Monsieur le Président, nous avons besoin de
7 brancher l'appareil pour les transparents et nous avons préparé également
8 des exemplaires pour les parties.
9 Et, Monsieur le Président, avant de débuter, j'aimerais émettre une
10 demande. M. Milan Lukic avait préparé une courte déclaration qu'il aimerait
11 lire à la Chambre. Je comprends parfaitement que l'Accusation ne soit pas
12 d'accord avec ce fonctionnement, mais je pense que l'Accusation pourrait
13 probablement dire qu'il a déjà été autorisé à témoigner, donc ce n'est pas
14 la peine. Mais si vous le voulez bien, nous pourrions autoriser M. Lukic à
15 lire cette déclaration.
16 M. LE JUGE ROBINSON : [aucune interprétation]
17 M. GROOME : [interprétation] Ecoutez, Monsieur le Président, j'ai
18 l'impression que ce n'est pas prévu par le Règlement.
19 [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]
20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Alarid, nous vous proposons
21 donc de débuter dès maintenant votre plaidoirie et nous prendrons une
22 décision à cet égard plus tard.
23 M. ALARID : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
24 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] C'est une demande qui est quelque
25 peu inhabituelle. Ça ne veut pas dire pour autant que je vais la refuser,
26 mais nous allons y réfléchir.
27 M. ALARID : [interprétation] Merci beaucoup. J'apprécie que vous acceptiez
28 de l'étudier.
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1 Plaidoirie de la Défense de Milan Lukic :
2 M. ALARID : [interprétation] Je crois, comme Me Groome l'a dit, il s'agit
3 en fait d'une route très longue, très ardue que nous avons parcourue. Je
4 tiens à remercier la Chambre d'avoir fait preuve de tant de patience face à
5 mon ignorance des procédures et je tiens à remercier tout le personnel du
6 Tribunal et tous ceux qui ont accepté mon manque d'organisation et mon
7 manque de fonctionnalité dans ce domaine. Et j'aimerais même remercier
8 l'Accusation, bien que nous n'ayons pas toujours été d'accord, mais je
9 pense que j'ai toujours été très impressionné par le niveau de candeur et
10 de franchise qui a été la caractéristique de tous nos travaux jusqu'à
11 maintenant.
12 Je voudrais commencer ma plaidoirie, Monsieur le Président, reprenant
13 certaines citations. Je voudrais tout d'abord citer Eleanor Roosevelt :
14 "Faites ce que vous ressentez au plus profond de votre cœur, comme si vous
15 ressentez que c'est cela qui est bien, et vous serez critiqué de toute
16 façon, et vous serez toujours critiqué, que vous le fassiez ou que vous ne
17 le fassiez pas."C'est important, Monsieur le Président, parce que je pense
18 que justement cela correspond au choix que j'ai fait de procéder à cette
19 Défense, et je pense, qu'effectivement, c'est l'une des affaires ici les
20 plus difficiles.
21 Voilà, j'ai voulu faire cette citation parce que : "Si l'on voulait
22 lire l'histoire secrète de nos ennemis, on pourrait probablement trouver
23 dans la vie de chaque individu le chagrin, les souffrances suffisantes
24 pour, justement, désarmer en face toute hostilité." Je crois que c'est
25 important, parce qu'il est important de voir les difficultés de tous, et je
26 pense qu'aucun d'entre nous n'a pris la peine de comprendre tout ce que ces
27 personnes ont enduré.
28 Je voudrais également faire une citation concernant le pont sur la rivière
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1 Drina, parce que je crois que vraiment, à mon avis : "Les personnes
2 ordinaires se souviennent et racontent ce dont elles se souviennent et ce
3 qu'elles peuvent transformer en légende." Je crois que c'est important,
4 parce que toutes ces personnes ordinaires n'ont probablement pas toute la
5 sophistication nécessaire mais ont une image très précise.
6 Je cite M. Marley uniquement parce que cela a été difficile, très
7 difficile, et je crois que j'ai tout fait pour défendre les droits de M.
8 Lukic, malgré toutes les allégations qui avaient été énoncées dès que j'ai
9 commencé à travailler sur cette affaire. Donc je pense qu'il y a eu un
10 certain nombre de difficultés dans le cadre de cette affaire, mais c'était
11 un mal nécessaire, très certainement, qui a rendu les choses très
12 difficiles pour l'Accusation, comme Me Groome l'a dit.
13 Je voudrais citer le Juge Wald, parce qu'avec tout le respect que je dois à
14 la Chambre, nous avons discuté il y a un certain nombre de mois et vous, en
15 tant que Juges, vous examinez les éléments de preuve, vous discutez, et il
16 s'agit ici de décider s'il y a un doute, s'il y a ou non quelque chose au-
17 delà du doute raisonnable. Même si vous pensez que M. Lukic est coupable de
18 quelque chose, ce qui est important, c'est que l'Accusation prouve au-delà
19 de tout doute raisonnable.
20 C'est cela le plus important. Donc il ne s'agit pas, en fait, d'offenser
21 l'intelligence du Tribunal, il s'agit de bien montrer, de bien illustrer à
22 quel point il est difficile de prouver la charge de la preuve au-delà de
23 tout doute raisonnable. Alors, c'est quelque chose qui est très important,
24 d'un point de vue de principe, et avec tout le respect que je dois à
25 l'Accusation, je pense que l'Accusation a effectivement présenté des
26 arguments très valables, mais il s'agit en fait, finalement, comme d'une
27 pièce de monnaie qui peut tomber d'un côté ou de l'autre pour décider si M.
28 Lukic est coupable ou non.
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1 Le doute raisonnable, en soi n'est pas toujours facile à prouver. Donc je
2 vous demanderais, par exemple, d'inverser les rôles, et je voudrais faire
3 allusion à Jerry Spence, avec qui je travaille aux Etats-Unis, sa méthode
4 justement pour enseigner les différents aspects juridiques, c'est justement
5 d'explorer les témoins, d'explorer exactement le plus profond de ce qu'il y
6 a à l'intérieur de la psychologie de chacun, et c'est un petit peu ce qu'a
7 fait pour nous le bureau du Procureur, essayer de nous mettre à un niveau
8 constant d'accusation.
9 Nous pensons que le bureau du Procureur a traité, en fait, cette Chambre
10 dans une grande mesure comme un jury, non pas basé sur la qualité des
11 éléments de preuve, mais sur la quantité des accusations.
12 Je crois que c'est justement de cette façon-là que le bureau du Procureur
13 veut que nous voyions mes clients, à savoir dans cette salle d'audience
14 stérile, que l'on mette tout cela sur le papier, c'est vraiment ce
15 sentiment de culpabilité qui est en train d'être transmis, que les accusés
16 soient coupables ou non. Et si vous êtes accusé pour quelque chose que vous
17 n'avez pas réalisé, vous vous souvenez toujours de la façon dont vous avez
18 ressenti tout cela.
19 Vous savez que cette affaire a évolué au fil du temps et que l'Accusation a
20 modifié la façon de présenter ces différents éléments. Au début, vous
21 auriez juré, d'après l'acte d'accusation, que Milan Lukic et Sredoje Lukic
22 étaient les grands architectes de tout ce qui s'est passé à Visegrad et que
23 personne d'autre n'était responsable. Donc lorsqu'il s'agit de remercier le
24 gouvernement de Serbie, je me demande s'ils ont fait tout ce qu'ils
25 pouvaient pour s'assurer que ces témoins viennent ici.
26 Je crois que c'est important parce que l'Accusation a reculé, a fait marche
27 arrière dans sa présentation, en ce qui concerne le niveau d'autorité et de
28 direction que détenait Milan Lukic et, dans une certaine mesure, Sredoje
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1 Lukic.
2 Maintenant, je vous demande d'examiner tout cela parce que c'est très
3 important. Vous avez vu le transparent concernant Bikavac à tellement de
4 reprises, mais vous savez qu'en fait il s'agit d'une photo qui est très
5 trompeuse, cette photo aérienne, parce que Bikavac est une région, une
6 petite colline. Et pourtant, sur toutes les photos, on a l'impression que
7 c'est une vallée pastorale. En fait, c'est toute la ville, ici, qu'il faut
8 voir, et c'est important pour comprendre la nature de toutes les
9 allégations.
10 Et ici, je vous montre une carte qui est précise, une carte militaire aussi
11 qui montre Rujiste. Pour aller de Rujiste à Visegrad, on pourrait voir
12 simplement une route en terre. C'est un petit peu comme les montagnes du
13 Nouveau-Mexique au nord et au sud, vous avez des personnes au-dessus, au
14 nord et au sud, d'une ligne qui fait que les gens sont très différents, et
15 d'un point de vue ethnique, n'ont pas la même appartenance. Ce sont des
16 gens humbles, mais extrêmement loyaux. Et ce n'est que lorsque je me suis
17 rendu sur place que j'ai enfin réalisé que je comprenais ces gens, parce
18 que si vous allez à certains endroits au Nouveau-Mexique, si vous ne parlez
19 pas espagnol, c'est pareil, vous avez des percées. Des communautés telles
20 que celles-ci, avec lesquels vous ne pouvez pas entrer en contact et que
21 vous ne pouvez pas apprendre à connaître.
22 Alors, cette affaire donc concerne le fils de Mile et Kata, né le 6
23 septembre 1967 à Rujiste. Et je vous demande de décider s'il est un
24 criminel de guerre ou s'il est tout simplement un bouc émissaire, s'il est
25 vraiment quelqu'un qui a dirigé des opérations ou qui n'a fait que suivre.
26 Pour moi, Milan, Milan de Rujiste, est ce petit garçon que l'on voit ici
27 entre sa mère et sa sœur. C'est l'homme ensuite qui a toujours eu le bras
28 posé sur les épaules de quelqu'un dans chaque photo que nous vous avons
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1 montrée, aussi bien adolescent que jeune homme, toujours il apparaît comme
2 une personne extrêmement sociable et souriante. Et je vous demande de
3 regarder ces photos.
4 Vous voyez ici la maison de Milan à Rujiste et MLD. MLD habite juste là, de
5 l'autre côté de ces lignes, la personne qui a témoigné MLD-10 donc, qui
6 vivait là et c'est vraiment difficile de penser et de comprendre pourquoi
7 il a fallu que la corruption se mêle à cette affaire.
8 Alors, avant la guerre, Milan Lukic était un frère, était un adolescent, un
9 étudiant, un jeune homme, un jeune homme drôle qui a travaillé ensuite dans
10 un bar et qui ensuite est devenu officier de police, puis lorsque les
11 choses ont mal tourné est devenu soldat dans l'armée de son pays, et
12 aujourd'hui un fugitif, et même un criminel de guerre, une personne accusée
13 d'être un criminel de guerre. Mais il est aussi devenu père à cette époque,
14 père de famille, et je demande en regardant ces photos, est-ce que vous
15 voyez quelqu'un qui aurait pu faire ce qui a été dit ici ? Et vous voyez
16 ici un enfant qui a été élevé dans une communauté mixte de différentes
17 populations, et vous ne pouvez pas considérer toutes les accusations du
18 Procureur à la légère. Il faut discuter de tous les motifs qui ont été
19 utilisés pour falsifier certains des éléments de preuve qui nous ont été
20 présentés.
21 1D14, ici, Milan Lukic, quelques mois avant la guerre. Ça c'est la personne
22 que les journalistes auraient appelé le chef de guerre de Visegrad. Mais
23 vous voyez bien que si vous voyez cela, c'est très différent de ce qui a
24 été dit.
25 Nous avons ici fait venir le Dr Hough, et clairement, ses qualifications et
26 ses témoignages nous ont montré que si vous accordez de la crédibilité à
27 ces témoignages à ce moment-là, il faut aussi accorder la crédibilité à ce
28 que dit Milan Lukic.
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1 C'est important, Monsieur le Président, parce que l'affaire dans ma
2 juridiction serait rejetée sur la base de, s'il n'y a pas un mandat d'arrêt
3 qui inclut des descriptions totalement opposées sur les personnes
4 suspectées de crimes. Dans le mandat d'Interpol, le mandat international,
5 il était mentionné "les yeux bleus, un grain de beauté, des tatouages," et
6 je suis désolé en ce qui concerne les cheveux blonds qui ont été cités par
7 M. Groome, mais en fait c'étaient les yeux bleus et les cheveux blonds qui
8 avaient été mentionnés et qui auraient été la chose la plus importante.
9 Bien. Maintenant, j'aimerais aborder la question de la rivière Drina et ça
10 c'est très important. C'est ce qu'il y a de plus difficile, parce que vous
11 avez devant vous deux témoins oculaires survivants qui disent que mon
12 client était là et tirait sur eux. Mais vous avez aussi un ancien accusé
13 qui a témoigné dans son propre procès que mon client a tiré sur ces
14 personnes. Donc ça fait beaucoup, effectivement, pour vous, c'est une
15 grosse charge de travail, mais il faut commencer par les choses qui
16 viennent en premier.
17 Donc vous avez VG-014 et VG-032, ça ce sont des choses qui ne sont
18 pas résolues. Il y a des incohérences très importantes entre les témoins
19 oculaires, si vous incluez VG-079 dans l'équation. Et le bureau du
20 Procureur n'a pas réussi à expliquer tout cela par un contre-
21 interrogatoire. Donc vous voyez, le bureau du Procureur n'a pas réussi à
22 rejeter au-delà de tout doute raisonnable les éléments de preuve et d'alibi
23 présentés par Milan Lukic.
24 Je ne veux pas entrer dans un certain nombre de citations de notre
25 mémoire final, mais ici, vous pouvez regarder ces photos. J'ai mis les
26 photos non retouchées et marquées par VG-014 et VG-032, et on leur
27 demandait d'entourer ce qu'ils considéraient comme le grain de beauté
28 auquel on faisait allusion. Et si vous regardez ces marques par rapport aux
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1 photos où il n'y a pas de marques, vous verrez qu'en fait, il n'y a rien
2 là.
3 Je montre ceci, parce que ceci a été présenté par le bureau du
4 Procureur comme étant une photographie de Milan Lukic, l'Aigle blanc,
5 supposé. Ce n'est pas simplement un souvenir photographique parce que j'ai
6 vu ce couvre-chef sur d'autres têtes. Et alors, comment pourrais-je dire,
7 même, ce n'est pas le même, mais le point le plus important ici, c'est que
8 c'est une photographie dans laquelle on ne voit aucun grain de beauté qui
9 puisse être mal interprété par un témoin quelconque, et je pense qu'on peut
10 soutenir que telle est la question.
11 Toujours sceptique ? Où était le grain de beauté ? Regardons un
12 certain nombre d'autres photographies de son visage au fil du temps, et
13 voyons si ce cercle sur le côté de son visage aurait été un grain de beauté
14 qui aurait été enlevé. Je ne pense pas que nous ayons ici quoi que ce soit
15 qui montre qu'il y ait eu quelque chose de ce genre.
16 Maintenant, c'est intéressant, parce que VG-014 avait deux façons de
17 connaître Milan Lukic : l'une, c'était le grain de beauté et cet élément
18 personnel, mais quand elle dit aussi qu'elle avait des rapports avec lui au
19 cours des deux années où ils allaient à l'école, vous avez à votre
20 disposition les rapports scolaires de Milan Lukic, et il est allé donc à
21 l'école pendant toute la période en question. Donc c'est erroné. VG-014 se
22 trompe. Il est allé avec lui à l'école pendant tout le temps, mais est-ce
23 que ceci serait explicable ? C'est en même temps, ils ont été en classe,
24 mais il ne savait pas que Milan Lukic allait à ce moment, et c'était un
25 garçon qui, en fait, n'avait jamais de bagarres avec les personnes
26 d'origine musulmane. Il parlait doucement, il prenait le temps de dire
27 bonjour à VG-014. Et c'est là quelqu'un qui serait à l'avenir un futur
28 criminel de guerre ? Vraiment ?
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1 Donc j'appelle votre attention maintenant sur Novica Lukic, le frère
2 aîné de Milan Lukic. Alors, nous ne sommes pas en train de dire que Novica
3 soit suspect, mais s'il y avait une personne qui, peut-être, parlait à un
4 de mes amis, peut-être VG-014 parlant avec VG-032, ils essayaient de savoir
5 qui on avait essayé de décrire de façon à ce qu'ils puissent voir un grain
6 de beauté, ils ne diraient pas s'ils se rappelaient de Lukic avec un grain
7 de beauté.
8 Donc tout ceci fait que nous n'avons jamais entendu dire que Milan
9 Lukic avait simplement appris cela par ouï-dire. C'est un lien important,
10 parce que ceci touche aux témoignages oculaires et corrobore et a trait à
11 la déposition du témoin oculaire VG-079 qui se trouvait de l'autre côté de
12 la rivière avec des jumelles.
13 Ceci est important. Les déclarations originelles de VG-079, ce
14 n'était pas une Passat. Donc pourquoi est-ce que VG-014 et VG-032 ont donné
15 des motifs de faire cela ? Parce qu'il est facile pour eux de mentir si le
16 seul lien qu'il y avait entre l'accusé était une Passat. C'est trop facile
17 pour eux n'ayant jamais eu à connaître Milan Lukic et simplement parce que
18 tout le monde l'a vu dans une Passat à un moment donné. Ceci aurait un
19 caractère dispositif peut-être si VG-079 ne se trouvait pas de l'autre côté
20 de la rivière voyant une voiture très différente qui, je soutiendrais, ne
21 pourrait pas être interprétée comme étant une Passat, même avec beaucoup
22 d'imagination, et quatre portes au lieu de deux portières. Et ce qui est
23 encore plus avancé que VG-079, avec l'aide de ses jumelles et sans avoir
24 besoin de parler aux autres personnes, était en mesure d'identifier deux
25 des victimes qui ont été nommées à la rivière. Ceci veut dire que les
26 jumelles, si elles sont suffisamment bonnes pour identifier une personne,
27 sont suffisamment bonnes pour identifier une voiture. Elles sont
28 suffisamment bonnes pour identifier les couleurs des uniformes. Elles sont
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1 suffisamment bonnes pour identifier un couvre-chef. Et ce que vous avez
2 c'est VG-079 au tout début qui parle d'uniformes noirs; pas simplement un
3 visage noirci, des uniformes noirs, des couvre-chefs noirs, des foulards
4 noirs avec une tête de mort dessus. C'est absolument opposé à ce qu'est un
5 béret bleu et d'un bleu très particulier, si je peux reconnaître mes amis.
6 Là encore, voici une diapositive qui a trait à cela.
7 J'ai fait cela à titre d'illustration, la raison étant que le témoin
8 a identifié cette toute petite voiture blanche à l'arrière qui aurait été
9 faite en ex-Yougoslavie. Si on regarde cette photographie, c'est important
10 parce que bien qu'on puisse y faire entrer quand même une dizaine de
11 personnes dans ces deux voitures, mais juste une personne serait
12 particulièrement inconfortable si vous ajoutez un soldat de plus. VG-079,
13 dans sa déclaration d'origine, a dit qu'ils étaient dix : sept personnes,
14 trois soldats vêtus de noir.
15 Mitar Vasiljevic semble être à l'essentiel de la question. Il est
16 venu ici, il a déposé sous serment, et il a déclaré ce qu'il avait vu sur
17 la rivière. Il l'a dit pour son propre compte dans son propre procès. Il a
18 donné une déclaration au bureau du Procureur dans son propre procès.
19 Pendant cette période, il s'est présenté comme -- il a dit qu'il se cachait
20 et qu'il n'avait -- on a choisi au niveau de la Chambre de première
21 instance de le croire. Pourquoi ? Parce que VG-014 et VG-032 l'on
22 identifié, l'on reconnu. C'est un exemple parfait de la différence entre
23 connaître quelqu'un et pas, parce que --
24 L'INTERPRÈTE : Est-ce que le conseil pourrait ralentir, s'il vous plaît.
25 M. ALARID : [interprétation] -- vous ne pouvez pas dire que VG-014 ne
26 connaissait pas Mitar. Parce que Mitar, avec la moitié de la ville, parce
27 qu'il était le plus grand soûlaud en ville, nous voulons faire de lui
28 l'architecte de ces meurtres.
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1 Le Dr LaGrange a déposé sur la base de l'histoire présentée en ce qui
2 concerne son alcoolisme, sa boisson, ses pertes de mémoire, il est
3 invraisemblable qu'il avait quelques dommages au cerveau. Est-il
4 vraisemblable que ces dommages au cerveau aient affecté sa mémoire, mais de
5 façon plus importante, vous avez également à examiner l'état de sa mémoire,
6 parce que le jour précédent les événements, Mitar Vasiljevic avait enterré
7 son neveu. Il avait certainement bu et certainement bu le lendemain d'après
8 ce qu'il a lui-même admis. Il était saoul à ce moment-là et pouvait être à
9 nouveau. Ceci pose le problème de sa mémoire.
10 J'ai une diapositive qui traite d'Uzamnica. C'est simplement que dans cette
11 déclaration le professeur dit que Milan Lukic, en entrant dans la prison,
12 aurait fait certaines choses. Toutefois, si vous regardez les déclarations
13 suivantes, les exemples sont fortement exagérés, et nous avons besoin
14 d'explorer pourquoi ces témoins doivent venir une ou deux fois par jour.
15 C'est en fait à cela que cela aboutit.
16 Le meurtre Koric. Nous n'avons pas grand-chose sur cela, Monsieur le
17 Président. Nous avons deux témoins; VG-035 et CW-2. La question en ce qui
18 concerne VG-035, et ceci, je pense, que le problème est que le bureau du
19 Procureur pensait qu'il avait des grains de beauté, les yeux bleus. C'est
20 la personne qu'elle a identifiée comme ça. Elle pensait que le bureau du
21 Procureur lui avait montré un ensemble de photos avec à la fois Sredoje et
22 Milan, mais elle les a identifiés à l'audience. Il n'y avait pas de photos
23 présentées et la déclaration était préparée par Bakira Hasecic. CW-2 a
24 confirmé que Milan Lukic, elle pensait, avait des cheveux blonds, et le
25 frère de Milan vivait avec son mari, et a modifié sa version sur qui avait
26 tiré. Sa déclaration également était préparée par l'association Bakira.
27 L'usine de Varda. Le bureau du Procureur n'a pas établi au-delà d'un doute
28 raisonnable l'identité de Milan Lukic. Pourquoi ? Ils ont pris tous les
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1 témoins. Là encore, pour ce qui est de cette identité, elle est basée
2 uniquement sur l'ensemble des photographies et non pas sur une
3 identification véritable de Milan Lukic. Ils n'ont pas pu réfuter au-delà
4 d'un doute raisonnable l'élément d'alibi. Ils n'ont pas pu rétablir au-delà
5 d'un doute raisonnable l'identité des victimes alléguées. Donc, deux de ces
6 personnes -- il y a un problème qui se pose pour l'identité de ces
7 personnes et de savoir pourquoi, où et quand elles sont décédées.
8 Si on regarde ce lieu, nous voyons à l'écran, il y a là une très
9 grande usine, une immense usine. Nous avons de nombreux dessins faits par
10 le témoin, et où se trouvait le témoin qui aurait identifié dans P190, à
11 une certaine distance, soit sur le balcon de la maison, soit dans une coop
12 chetnik [comme interprété] qui se trouvait à plusieurs centaines de mètres.
13 Ceci fait que je pense que nous avons ici -- je vois dans les premières
14 déclarations que les témoins ont présentées, qui ont été présentées par le
15 bureau du Procureur, Milan Lukic y est allé lui-même. Il est entré dans ce
16 complexe et a fait venir sept hommes qui ont été nommés, les a faits
17 sortir, et ensuite l'une des déclarations des témoins les ont séparés, les
18 ont faits aller en direction de la rivière, ont tiré sur trois d'entre eux,
19 sont revenus pour faire revenir les quatre autres - dont on ne sait pas
20 pourquoi ils auraient attendu là - et les ont faits descendre à leur tour
21 et leur ont tiré dessus aussi. Là encore, du lieu d'observation qui se
22 trouvait à 200 mètres de là, tout ceci est basé sur l'idée de l'hypothèse
23 de la Passat rouge qui se serait trouvée là, et sur rien d'autre.
24 VG-031 a parlé -- Monsieur le Président, nous avons déposé notre
25 requête en ce qui concerne VG-031 au début de décembre. Il n'y a pas eu de
26 décision à ce sujet pour nous permettre de le faire déposer avant le 13
27 mars, près de la fin du procès, et la Chambre n'a pas ordonné à
28 l'Accusation de nous donner les éléments nécessaires à prendre en contact
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1 jusqu'à ce qu'on souhaite arriver au 30 mars, et c'était trop tard. Nous
2 pensons que la déclaration se passe de commentaires d'une perspective de
3 doute raisonnable, et de la même manière, vous voudriez que cet homme, VG-
4 031, n'aurait pas entendu que Milan Lukic était là ? Bien, il n'a pas vu ce
5 qui s'est passé près de la rivière. C'est bien qu'il a vu les deux autres.
6 Mais assurément on pourrait mentionner qu'il aurait mentionné à l'enquêteur
7 ce qu'il avait vu.
8 Là encore, il y a les certificats de décès pour M. Vladic [comme
9 interprété] en particulier, qui serait mort le 30 mai 1992 et non pas le 10
10 juin 1992; et M. Memisevic serait mort le 9 juin, mais ceci, il y en a un
11 qui est suffisamment proche au point de vue date, mais l'autre beaucoup
12 trop éloigné. Notre expert, Clifford Jenkins, a dit que : Vu la qualité de
13 l'enquête, je voudrais que mes enquêteurs fassent davantage de travail
14 avant de l'apporter au Procureur.
15 Pionirska. Ça, c'est le point le plus important, parce que je crois que
16 nous avons eu les témoins les plus importants à ce sujet. Nous pensons que
17 l'Accusation n'a pas réussi du tout. Le bureau du Procureur n'a pas réussi
18 à établir au-delà d'un doute raisonnable l'identité de Milan Lukic comme
19 ayant participé à cela.
20 Ils demandent une condamnation à vie sur la base des éléments de
21 preuve qu'ils ont présentés en l'espèce. Ils n'ont même pas établi au-delà
22 d'un doute raisonnable l'identité des victimes elles-mêmes. Ils ont essayé
23 de modifier leur liste, comme nous avons prouvé que certaines personnes
24 étaient en vie et que les témoins ont menti sur le fait de ne pas les avoir
25 vues. Ils ont menti sur le fait de les avoir vues à des enterrements. Ils
26 n'ont pas corrigé cela, cependant si on prend des procès de meurtre aussi
27 simple que cela d'une personne qui en aurait tuée une autre, si à un moment
28 donné on s'aperçoit que la personne est vivante, l'affaire est rejetée.
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1 Il y a eu un cas très connu aux Etats-Unis dans lequel un monsieur
2 aurait tué sa femme et aurait brûlé la maison et ses victimes vivantes.
3 Alors imaginez si trois des victimes supposées, finalement sont apparues
4 plus tard au Mexique. Que se passerait-il pour le cas d'une seule personne
5 ?
6 Alors la rue Pionirska, c'est important. Juste pour démontrer cela.
7 Ces merveilleuses personnes qu'on n'a pas retrouvées, mais en fait
8 si, on en a retrouvé certaines. Certaines sont en vie et en sont déjà
9 parties, et pourtant, ont été désignées comme décédées par ces témoins,
10 peut-être essayant d'obtenir justice pour des victimes silencieuses ou
11 qu'on n'a pas retrouvées.
12 Ceci est important pour le point essentiel de l'Accusation, pour
13 montrer l'hôtel Visegrad où tous ces mauvais se seraient trouvés, et ceci
14 montre la famille Kurspahic ainsi que d'autres qui ont descendu de leur
15 village et qui ont fini dans le voisinage de Mahala.
16 Ceci montre que l'Accusation a changé sa version. Je n'ai pas eu le
17 temps de revenir sur les pièces Vasiljevic, mais comme vous pouvez le voir,
18 ce diagramme montre qu'il y a des personnes qui prennent la route inverse
19 par rapport à la maison Omeragic. Comme vous le voyez, ce n'est pas ce que
20 les témoins ont dit. Comme vous pouvez le voir, la ligne jaune va derrière
21 ces maisons à Memic, par rapport à des dépositions récentes.
22 L'Accusation nous accuse de présenter des éléments erronés, mais
23 regardez les pièces qui sont présentées dans leur mémoire en clôture. Je ne
24 sais pas ce que ces phares représentent. Je ne sais pas d'où ils viennent.
25 Je ne sais pas si c'est une erreur au compte rendu d'audience, mais si vous
26 examinez les pièces qui étaient là, si vous prenez la pièce P057, qui se
27 trouve au coin inférieur droit de cette pièce, je me souviens très bien
28 d'avoir entendu les éléments de preuve disant qu'il y avait des lumières
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1 sur les maisons qui illuminaient la rivière par où les gens ont fui. Mais
2 ce qui est très important, c'est d'examiner où sont les deux maisons où se
3 sont cachés les Témoins VG-078 et VG-101. Si vous prenez la pièce P57,
4 cette pièce nous démontre qu'il y avait effectivement une petite
5 maisonnette qui se trouvait en haut de la colline, et ces gens n'auraient
6 pu fuir qu'en passant par la colline. Je ne crois pas que c'est un élément
7 de preuve très tangible. Lorsque l'on examine celle-ci, nous pouvons voir
8 cette photo, et nous pouvons voir qu'en réalité, tout ceci se trouve à 50
9 pieds au-dessus du bas.
10 Ceci est la pièce sur laquelle VG-115 nous a parlé. Elle nous a dit
11 que supposément elle a réussi à fuir, parce qu'elle voyait de la fumée du
12 balcon depuis lequel nous avons pris les photos. Voici un document qui a
13 changé où, en réalité, la ligne qui avait été tracée par tous les témoins
14 ne passe pas par le derrière de la maison mais bien par l'avant de la
15 maison, mais ce qui est important, Monsieur le Président, c'est que si vous
16 examinez ces pièces, l'une de ces pièces, c'est que VG-115 avait dit c'est
17 Mitar Vasiljevic qui chevauchait ce cheval blanc et qui criait sur les
18 victimes qui se trouvaient dans la maison. Ceci n'aurait pas été crédible
19 si la Chambre de première instance et si la Chambre d'appel de Vasiljevic,
20 sur la base de son témoignage dans lequel elle avait témoigné dans cette
21 affaire, on prend un homme sur un cheval blanc et cet homme aurait eu une
22 main dans un plâtre, ceci est complètement ridicule.
23 Ils ont également parlé d'une autre chose. Le Témoin VG a dit que le
24 parc était tellement imbibé de kérosène que l'air avait simplement explosé
25 et tout le monde avait sauté. Mais en réalité, le problème avec cette
26 preuve, tout comme l'avait dit M. O'Donnell, qui est un expert qui a parlé
27 sur les explosifs, c'est que s'il y avait suffisamment de fumée pour que
28 ceci explose, il n'y aurait pas eu de survivants. Les gens n'auraient pas
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1 survécu. Cette maison aurait complètement explosé, les gens n'auraient pas
2 pu fuir et on n'aurait pas pu tirer sur ces personnes pendant une demi-
3 heure.
4 Ce qui est important, Monsieur le Président, c'est ce qu'a dit M.
5 O'Donnell, c'est la théorie qui, selon moi, est la vérité : c'est que
6 quelque chose est arrivé sur la rue Pionirska. Je crois qu'à moins que tout
7 le monde ne se trompe et à moins que tout le monde ait été complètement
8 fou, non, ce n'est pas possible. Je crois que ces personnes n'ont pas pu
9 identifier Milan Lukic, ils ne le connaissaient pas, ils ne pouvaient pas
10 l'identifier, et les identifications sont tellement de près liées à Mitar
11 Vasiljevic, mais ce dernier n'aurait pas pu être là puisqu'il s'était cassé
12 la jambe. Alors, toutes les personnes qui avaient dit qu'elles avaient vu
13 Mitar mentaient. Pourquoi ? Parce que ces personnes connaissaient Mitar. Ce
14 n'était pas une question de savoir si peut-être on le connaissait, mais
15 c'était des personnes qui l'avaient vu au restaurant.
16 Un autre point important de ma théorie, pour qu'il puisse y avoir des
17 éclats d'obus sur les murs, il n'aurait pas pu y avoir 60 personnes dans
18 cette petite pièce, parce que ces 60 personnes auraient absorbé ces éclats
19 d'obus. Il n'y aurait pas eu ce schéma sur le mur. Mais en réalité, cela
20 voudrait dire qu'il n'y avait que quelques personnes, pour que l'on puisse
21 voir ces traces d'éclats d'obus.
22 Cette pièce, je crois, s'il y avait eu un incendie, s'il y avait eu
23 quoi que ce soit dans cette pièce, c'était sans doute une grenade à main ou
24 un petit engin explosif, tout petit, qui ait peut-être enflammé la jupe de
25 quelqu'un, peut-être. Mais si vous seriez allé sur les lieux, vous auriez
26 vu une maison qui était encore sur place et n'avait été complètement
27 incendiée.
28 Tous nos experts ont prouvé qu'indépendamment de ce qui s'est passé
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1 il y a 15 ou 16 ans dans cette pièce de la cave de la rue Pionirska, ce
2 n'était pas un incendie complet de la pièce. Il n'y a aucun élément de
3 preuve nous permettant de comprendre ceci. Donc si vous croyez en partie
4 les témoins de l'Accusation, il est tout à fait possible que ces derniers
5 aient pu faire erreur. Pourquoi ? Parce qu'ils ont fui. Mais ma théorie et
6 la chose qui prouve ma théorie, c'est qu'ils ont entendu des voix et des
7 tirs pendant une demi-heure. Nous pouvons tous imaginer la scène. S'il y
8 avait un incendie et si l'incendie avait complètement brûlé partout et
9 qu'il y avait de la fumée, on n'aurait pas entendu les cris.
10 L'officier Jenkins a dit très clairement que tous ces éléments de
11 preuve nous portent à nous poser la question si ces crimes ont eu lieu
12 effectivement ou pas.
13 Je crois que cette affaire est une affaire de viol, en réalité. Je crois
14 qu'il s'agit d'une affaire de fils qui ne sont pas revenus à la maison et
15 d'arrestations individuelles. Je crois que c'est une affaire pour laquelle
16 quelqu'un, croyant quelque chose, ait cherché la justice même si ce n'est
17 pas la bonne charge.
19 (expurgé)
20 (expurgé)
21 (expurgé)
22 (expurgé)
23 (expurgé)
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6 (expurgé)
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9 (expurgé)
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11 Il s'agit ici de quelque chose de très intéressant. C'est un diagramme. Et
12 nous avons emmené une photographie, c'est notre photo de Milan Lukic dans
13 la Passat. Nous vous avons présenté cette photo, car nous n'avons rien à
14 craindre car, comme l'Accusation argue, ils présentent leurs arguments et
15 nous présentons les nôtres. Alors voici un officier de police. Il est assis
16 à côté de Vidoje Andric. Son bras est autour de lui. Rien sur cette
17 photographie ne nous démontre qui a conduit cette voiture. Très clairement,
18 nous pouvons prendre pour acquis que ces deux personnes étaient à bord du
19 véhicule à un moment donné. Mais voilà la question qui se pose --
20 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] On vous demande de ralentir.
21 M. ALARID : [interprétation] Il y a trois jeunes teenagers qui disent avoir
22 été kidnappés par Milan Lukic et par Sredoje Lukic. Ces personnes disent
23 avoir été emmenées jusqu'au pont. Il semblerait que deux personnes auraient
24 été tuées de sang-froid et jetées dans l'eau, alors que deux soldats, dont
25 on n'a pas de description, étaient assis à l'arrière du véhicule. Il y a un
26 greffier d'audience, Marie O'Leary, qui avait fait une présentation de
27 trois jeunes garçons. C'est un dessin animé qui nous illustre à quel point
28 cette erreur est complètement ridicule. De quelle façon est-ce qu'on aurait
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1 pu mettre quatre personnes à l'arrière alors que le témoin ne se souvenait
2 pas du tout de l'entrée et de la sortie du véhicule. Ceci est important,
3 car si vous examinez toute Passat, si vous essayez d'entasser des personnes
4 sur une Passat et de mettre tout ceci sur une vidéo, c'est une présomption
5 complètement ridicule, à moins que le témoin ne puisse témoigner
6 directement d'une situation aussi inconfortable.
7 Mais de nouveau, pour que cette personne ait pu voir deux meurtres de
8 ses amis, par la suite d'être emmené dans une prison et qu'on la laisse
9 partir sans que rien ne se passe, c'est une histoire illogique. C'est
10 simplement pour établir un alibi sans aucun lien logique avec la réalité.
11 Je suis vraiment désolé. Voilà, je pensais à Varda.
12 Le village de Hamdija. L'Accusation avait fait venir Hamdija Vilic.
13 L'Accusation a fait venir ce témoin pour parler d'une possibilité du fait
14 qu'on lui ait offert de l'argent. Alors il avait dit qu'on lui a offert
15 même jusqu'à 100 000 euros pour témoigner. Pour témoigner sur quoi ? Pour
16 témoigner qu'un certain jour il était en conflit avec certains Serbes
17 inconnus; non pas qu'il avait vu Milan Lukic, non pas qu'il ait embrassé
18 Milan Lukic, mais qu'un combat avait eu lieu avec des Serbes un jour. Nous
19 n'avions pas besoin de Hamdija Vilic pour établir ceci. Nous avons un
20 commandant mort documenté par le répétiteur. Ces derniers ont dit, voilà,
21 c'est une route, voilà, c'est une carte et si vous allez là-bas, Monsieur
22 le Président, Madame, Monsieur les Juges, vous verrez qu'il s'agit d'une
23 zone densément verte, c'est une forêt et c'est très difficile de passer et
24 de ne pas voir la route.
25 Cet élément de preuve nous permet de voir que Hamdija Vilic mentait.
26 La chose qui est la plus incroyable, c'est que lorsqu'il a commencé à
27 témoigner, vous n'aviez pas bien remarqué, parce que vous venez de voir
28 quelque chose sur votre ordinateur, mais je me souviens que vous n'aviez
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1 pas pu y porter attention. Vlade était avec Vilic pendant environ une
2 heure, mais il n'a pas pu l'identifier sur la planche d'identification qui
3 a été présentée par l'Accusation. Vlade supposément lui aurait offert 100
4 000 euros, mais il n'a pas pu l'identifier. Mais regardez ces personnes.
5 Hamdija Vilic a dit que le numéro 3 était Milan et que le numéro 8
6 représentait Sredoje. Il s'agit de criminels néerlandais. Donc voilà à quel
7 pion le témoignage de Hamdija est crédible.
8 Parlons maintenant de Bikavac, le 27 juin 1992. De nouveau,
9 l'identification de Milan Lukic. Bien, nous savons très bien que le Témoin
10 VG-114 ou Turjacanin est venue ici et n'a pas pu identifier personne. Elle
11 a regardé dans la pièce et elle n'a pu identifier personne. S'agissant
12 d'autres personnes qui aient pu supposément l'identifier, ces derniers,
13 s'ils avaient été tout près de l'endroit allégué, ces personnes auraient dû
14 être tuées maintenant. Nous ne comprenons pas pourquoi certaines personnes
15 dans ce voisinage n'auraient pas été tuées avec les autres personnes, et
16 tout ce qui vous reste à faire, c'est de regarder cette vue aérienne.
17 Voici une vue aérienne, mais cette vue est meilleure. C'est la pièce
18 qui a été présentée à plusieurs reprises à plusieurs personnes. Lorsque
19 vous prenez le coin supérieur droit, vous verrez que c'est l'endroit où se
20 trouve la maison de Meho Aljic, et il y a environ une trentaine de maisons
21 dans ce triangle. Tous les survivants, supposément, se seraient trouvés
22 dans ce triangle alors qu'ils ont pu venir parler de ce qui est arrivé.
23 Mais ce qui est encore plus important, c'est que la plupart des camps de
24 réfugiés, s'agissant de Mme Turjacanin, ces personnes du camp de réfugiés
25 lui ont parlé, mais je crois que ces personnes ont développé un sentiment
26 pour elle.
27 Zehra Turjacanin, la seule survivante, 70 membres de sa famille, 70
28 voisins, d'autres Musulmans, d'autres amis, elle ne se souvient que de 11
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1 personnes, et trois de ces dites personnes, elle a pu les identifier à
2 Visegrad. Et les 70 personnes, d'où sont-elles venues ? Lorsque vous allez
3 là-bas, vous pouvez voir que les rues sont tellement étroites que deux
4 Jugos ne peuvent pas se passer. Il s'agit d'une colline très étroite et il
5 est absolument impossible de monter en haut de la colline de Bikavac. Donc
6 c'est absolument impossible de passer à côté de là. Mais est-ce qu'ils sont
7 restés à Pionirska ? De quelle façon ? Comment ? Elle prétend avoir fui par
8 une toute petite ouverture.
9 Voici ce qui est important, Monsieur le Président. C'est que ce
10 témoin prétend avoir été incendié dans la maison alors qu'elle a dit aux
11 soldats et aux médecins ou qu'elle avait été brûlée d'une autre façon. La
12 nature de ces brûlures correspond à ce qu'elle a dit aux médecins. Elle a
13 dit : J'ai pris feu, j'ai des cheveux longs et ceci a pris feu. Mais ce
14 témoin avait dit aux personnes qu'elle avait été brûlée dans sa maison par
15 accident. En fait, Monsieur le Président, si vous avez de très longs
16 cheveux et que ces cheveux sont incendiés, qu'est-ce qui va se passer si
17 vous essayez d'éteindre le feu dans vos cheveux ? C'est les bras qui en
18 souffrent et cette personne avait des brûlures au front et aux sourcils.
19 Vous verrez que cette personne n'a eu des brûlures que là. C'est ses
20 cheveux qui étaient en feu, Monsieur le Président, mais elle dit dans sa
21 déclaration qu'elle avait brûlé ses bras sur une porte qui était très
22 chaude, puisqu'il s'agissait d'une porte en métal. Mais pour que vous
23 puissiez ouvrir la porte et si la porte était si enveloppée dans le feu
24 pour pouvoir fuir, c'est absolument impossible.
25 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Monsieur Alarid, je vous arrête ici,
26 parce que vous allez devoir arrêter dans cinq minutes.
27 M. ALARID : [interprétation] Alors elle nous dit que si les fenêtres sont
28 couvertes, s'il y a des meubles contre les fenêtres, de quelle façon est-ce
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1 qu'on a pu jeter des pierres à l'intérieur ? Comment est-ce qu'elle a pu se
2 sauver par la fenêtre ? Elle nous parlait de poudre blanche, personne n'a
3 entendu parler de cette poudre blanche, et ceci qui est établi comme étant
4 un accélérant fiable, et supposément tout ceci est lancé dans la maison et
5 pouf, tout ceci a explosé et tout le monde était en feu ? Ceci est
6 complètement illogique, pour moi, Mme Turjacanin est un témoin hystérique,
7 et c'est la raison pour laquelle la police avait - on me dit de ralentir,
8 Monsieur le Président, et c'est pour cela que j'ai besoin de plus de temps.
9 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Vous pouvez bénéficier d'un autre
10 cinq minutes, et nous nous arrêterons à 19 heures 15. Et bien sûr, ceci
11 représentera la fin de votre présentation.
12 M. ALARID : [interprétation] Donc Mme Turjacanin, supposément, arrive à
13 fuir. Elle arrive à fuir, et qu'est-ce qui se passe
14 ensuite ? En fait, présentez la diapo suivante. Voilà, c'est là que Mme
15 Turjacanin avait nié avoir dit aux personnes qu'elle avait été brûlée par
16 ce cylindre de gaz, même si on lui a montré son propre témoignage.
17 Voilà ce qui est important, Monsieur le Président, car c'est l'original,
18 c'est l'original des déclarations liminaires de l'Accusation, et c'est à ce
19 moment-là qu'ils ont identifié le feu. C'est ce que Mme Turjacanin a
20 identifié comme étant la même chose que la porte du garage. Ici, vous avez
21 une ouverture de 9 pouces de large, c'est ce que tout le monde a dit. Mais
22 regardez bien cette photo, sur la droite, vous voyez que la porte n'est pas
23 suffisamment haute pour pouvoir bloquer une porte habituelle de cour de
24 patio. Si vous regardez sur le côté, les photos qui ont été prises bien
25 avant, plusieurs années avant, vous avez une voiture bleue qui est garée
26 devant le site de Bikavac, et pourtant c'est la maison devant qui a été
27 brûlée, et d'après ce que l'on sait, cet emplacement aurait dû être vide
28 depuis de nombreuses années. Là encore, la porte est trop courte, la
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1 fenêtre est trop petite.
2 C'est intéressant. Pourquoi est-ce que c'est important ? Parce que si vous
3 regardez sur le schéma de Zhera, elle dit la même chose, où le VG-115 dit
4 qu'elle se cachait. Zhera répond que la police et les soldats se cachaient
5 déjà. Alors donc, d'où viennent les
6 victimes ? Vous avez une jeune femme qui est en état de choc avec des
7 brûlures de deuxième et de troisième degré, comment est-ce qu'elle peut
8 faire tout cela ? Comment alors qu'il faut en fait, il s'agissait de fuir.
9 Vous regardez donc ces deux éléments différents, ces deux photos
10 différentes de Bikavac. Ici, vous avez VG-035, aurait été là-haut, en haut
11 à droite. Donc si elle était si près, pourquoi elle n'a pas été amenée là-
12 bas ? Ensuite, si vous regardez VG-058, là vous voyez -- si vous regardez
13 pour accélérer un petit peu plus, le verger dont on parle ici, dont parle
14 le VG-115, c'est aussi là où il y avait Turjacanin. Il y a ces soldats qui
15 ne lui tirent pas dessus parce qu'ils n'ont probablement plus de balle,
16 ensuite ils lui disent de s'arrêter, ils viennent, ils courent derrière
17 elle, peut-être parce qu'ils sont drogués, mais est-ce que vous vous rendez
18 compte à quel point tout cet argument est absolument stupide. La séquence
19 des événements n'est absolument pas possible si elle est train de brûler,
20 si elle est elle-même en feu et qu'elle est en train de courir, tout ce
21 qu'elle veut c'est pouvoir éteindre le feu, et à ce moment-là elle n'est
22 pas donc avec ces personnes. Donc ça n'a absolument aucun sens. Si
23 quelqu'un voulait vous tuer, ne ferait pas cela, ne vous rattraperait pas
24 de cette façon-là.
25 Alors là c'est quelque chose d'encore très important. Zhera et son frère,
26 là justement le frère de Zhera conteste ce qu'elle a dit à deux ou trois
27 égards. D'abord que Milan Lukic était un associé de son frère. Dans sa
28 déclaration à lui, il a bien déclaré : Ma sœur n'a jamais rencontré Milan
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1 Lukic. Alors pourquoi est-ce qu'il aurait dit une chose pareille ?
2 Deuxièmement, Milan Lukic aurait -- enfin plutôt, le frère de Zhera aurait
3 été détenu dans un trou, et c'est grâce à Zhera qu'il aurait été sorti.
4 Mais lui, il dit que : Non, il est sorti bien avant le 27 juin. Donc il
5 n'était pas dans ce trou, donc ça n'a aucun sens, là encore une fois. S'il
6 avait réellement amené sa sœur à Medjedja pendant quatre jours, je pense
7 qu'elle lui aurait expliqué pendant ce temps-là, à son frère, ce qui lui
8 était arrivé, mais elle ne lui a jamais dit. Lui ensuite, l'aurait raconté
9 aux enquêteurs, mais cela n'a jamais été fait.
10 Et encore, ce qui est encore plus important, c'est que Mlle Turjacanin a
11 falsifié tout cela, parce qu'elle voulait absolument insister sur le fait
12 que Mitar Vasiljevic était là-bas. Donc elle l'a très vite identifié sur la
13 photo, mais elle ne savait pas qu'il avait un alibi selon lequel il s'était
14 cassé la jambe et qu'il était à l'hôpital.
15 Donc, je crois, Monsieur le Président, qu'elle devrait être réellement
16 évaluée et traitée, parce que c'est elle la vraie victime dans tout cela,
17 c'est elle qui falsifie toute la situation et les propos. Alors, pourrait-
18 il être possible que l'incendie ne soit même jamais survenu ?
19 Là encore, cette illustration montre bien que nous avons présenté
20 énormément, un grand nombre d'éléments de preuve d'alibi auxquels il n'y a
21 pas eu de réplique.
22 Ici, il est évident que le bureau du Procureur a bien changé sa
23 théorie puisque l'on voit qu'au départ l'Accusation prétendait qu'il était
24 un Aigle blanc, ensuite qu'il faisait partie d'une bande de paramilitaires.
25 Moi, je dis qu'il était tout simplement soldat. Et là vous voyez bien les
26 Aigles blancs. Ici, nous avons fait venir des témoins qui ont identifié ces
27 personnes, des Aigles blancs, à savoir Stevo et Josip.
28 Là encore, je cherche à illustrer l'évolution de la théorie de
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1 l'Accusation, parce que nous, nous avons passé la moitié du procès à
2 montrer que Milan Lukic était un officier de réserve de la police.
3 Et, Monsieur le Président, ici avec ce transparent, nous montrons
4 qu'en fait que l'Accusation choisit de croire en certains témoins et pas en
5 d'autres, parce que dans certains cas les témoins de l'Accusation n'étaient
6 pas du tout fiables ni crédibles, mais néanmoins l'Accusation a choisi de
7 les suivre.
8 Ici, il s'agit de montrer que tous les témoins qui ont dit et
9 prétendu que Mitar Vasiljevic était à la rue Pionirska ou à Bikavac, tous
10 ces témoins mentaient puisque Mitar Vasiljevic était à l'hôpital avec sa
11 jambe cassée.
12 Il n'y a eu aucun témoin du bureau du Procureur qui ne se soit plaint
13 pour des raisons de peur, par exemple. La seule personne qui se soit
14 plainte du Coran dans la salle d'audience, c'est justement Bakira Hasecic.
15 M. Lukic a oublié, n'avait pas mentionné ce point-là.
16 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Maître Alarid, il va falloir
17 que vous mettiez un terme à votre plaidoirie.
18 M. ALARID : [interprétation] Le dernier transparent que je veux
19 montrer, c'était tous les anciens dirigeants. Il y en a certains qui ont
20 été jugés ou qui vont l'être, mais là on a oublié un certain nombre de
21 personnes, par exemple, Bakira Hasecic, elle les connaissait puisqu'elle
22 travaillait avec eux. Brano Savovic.
23 Pourquoi ?
24 Pourquoi est-ce que cela est important, Monsieur le Président ? Si vous
25 regardez Visegrad, en fait c'est une ville qui est très facile de couper de
26 tout le reste. Vous avez une route qui va vers le nord, une autre vers le
27 sud, donc c'est très facile, vous mettez quatre points de contrôle, et vous
28 pouvez complètement couper cette ville du reste du monde. Donc la question
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1 est de savoir si Milan Lukic, comment est-ce qu'il aurait pu justement
2 faire partie des personnes les plus importantes au gouvernement et s'ils
3 étaient sous leur commandement.
4 Si vous regardez tous les rapports, Monsieur le Président, Milan Lukic est
5 essentiellement accusé de viol plus que toute autre chose. Alors pourquoi
6 falsifier et ajouter d'autres choses, d'autres actes criminels qui ne font
7 pas partie de l'acte d'accusation ? Pourquoi est-ce que les témoins doivent
8 ajouter d'autres choses ? La Chambre sait très bien qu'il y a des personnes
9 qui se sont senties menacées par cette association à qui l'on a dit qu'ils
10 allaient perdre leur retraite s'ils ne venaient pas témoigner contre Milan
11 Lukic. Si c'est exactement comme cela que les choses se sont passées, alors
12 tous les éléments de preuve du bureau du Procureur doivent être étudiés
13 très, très en détail.
14 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Merci, Maître Alarid. Je crois que
15 nous avons largement dépassé les cinq minutes que nous vous avions
16 accordées. Je ne sais pas si vous souhaitez terminer en
17 beauté ?
18 M. ALARID : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je pense que la
19 réalité, c'est que cette affaire présentait un intérêt véritable, qui est
20 distinct des crimes dont il s'agit, et je pense que l'Accusation n'a pas
21 enquêté sur les crimes avec le degré de recherche qu'ils auraient dû pour
22 présenter une thèse crédible devant le Tribunal, et je pense que les
23 preuves sont insuffisantes pour pouvoir parvenir à une reconnaissance
24 culpabilité et que donc vous devriez acquitter M. Lukic sur tous les chefs
25 d'accusation.
26 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Je vous remercie.
27 Monsieur Groome.
28 M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, je voudrais demander
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1 que le dernier transparent montré avec tous les témoins qui ont fait des
2 déclarations et qui sont associés aux femmes victimes de guerre fasse
3 l'objet d'une expurgation. Un grand nombre sont des victimes de crimes
4 sexuels, et il y aurait donc à ce moment-là une présentation au public de
5 ce fait, et donc je voudrais demander qu'une expurgation soit faite en ce
6 qui concerne ce transparent.
7 M. LE JUGE ROBINSON : [interprétation] Oui, ceci sera expurgé.
8 Nous levons la séance, et nous reprendrons demain à 14 heures 15.
9 --- L'audience est levée à 19 heures 20 et reprendra le mercredi 20 mai
10 2009, à 14 heures 15.
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