Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mercredi 30 août 2006

2 [Audience publique]

3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

5 --- L'audience est ouverte à 14 heures 15.

6 LE TÉMOIN: SHUKRI GERXHALIU [Reprise]

7 [Le témoin répond par l'interprète]

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bonjour, Monsieur Gerxhaliu.

9 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Mesdames et

10 Messieurs les Juges.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous allons poursuivre votre

12 déposition. N'oubliez pas la déclaration solennelle que vous avez faite en

13 début de votre déposition lundi. Elle reste en vigueur et s'applique aux

14 propos que vous allez tenir aujourd'hui.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Marcussen, vous avez la

16 parole.

17 M. MARCUSSEN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

18 Interrogatoire principal par M. Marcussen : [Suite]

19 Q. [interprétation] Docteur Gerxhaliu, je vais simplement chercher à

20 préciser quelques points aujourd'hui suite à ce que nous avons dit lundi.

21 C'est à ce moment-là que vous avez expliqué que Sheribane était allé à la

22 police pour dire qu'il y avait eu un assassinat le 31 mai 1999. Je vais

23 vous demander d'être le plus bref possible dans vos réponses, car nous

24 avons peu de temps aujourd'hui.

25 Vous avez dit qu'on avait dit à la police que d'autres crimes avaient été

26 commis. Quel genre de crimes ou d'infractions étaient-ce ? Est-ce que

27 c'était des vols, des actes de violence, des assassinats ? Pourriez-vous,

28 en quelques mots, nous dire de quels crimes ou infractions il s'agissait ?

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1 R. Je pensais surtout à des assassinats, des meurtres commis

2 occasionnellement dans la rivière de Studime au cours du mois de mai. Je

3 regarde la date précise. Le 14 mai, six civils ont été tués. Le 23, neuf

4 jeunes filles albanaises ont été tuées, et cela s'est souvent passé, mais,

5 quant à eux, ils ont tout nié.

6 Q. Je vous remercie. Donc, vous avez parlé à la police de ces crimes.

7 Savez-vous si la police a mené des enquêtes ?

8 R. Pour ce qui est des premiers dont j'ai parlé, ils ont tout nié, bien

9 sûr.

10 Q. Alors pourquoi êtes-vous allez déposer plainte le 31 mai auprès de la

11 police suite à ces assassinats ?

12 R. Je l'ai fait pour qu'ils viennent voir de leurs propres yeux la famille

13 de Seladin Gerxhaliu. Toute sa famille, tous les membres de sa famille ont

14 été exécutés. Mon oncle et son fils habitent un peu plus loin. Ils sont

15 venus plus tard et sont venus voir.

16 Q. Si je comprends bien votre déclaration préalable, la police a bien

17 réagi le 31 mai ? Est-ce que les policiers ont alors examiné les corps qui

18 se trouvaient dans la maison familiale ?

19 R. Mon père, Salihu, et d'autres cousins ont contacté la police, mais je

20 n'étais pas là. Il m'était impossible de contacter la police, mais je sais

21 que la police est venue sur les lieux et a photographié les cadavres ce

22 jour-là. Puis, la police a dit à mes parents d'attendre jusqu'au moment où

23 la police leur dirait ce qu'il fallait faire des cadavres, après quoi ils

24 ont dit qu'on pouvait enterrer ces cadavres.

25 Q. Est-ce que vous avez vu les corps alors qu'ils se trouvaient encore

26 dans la maison ?

27 R. Après que la police soit venue, quelques villageois ont transporté les

28 corps au cimetière avec moi. J'ai des photos des cadavres, photos qui ont

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1 été prises par mes parents. Moi-même, j'ai pris des photos lorsque nous

2 avons emmené les corps au cimetière. J'ai vu les corps avant de les emmener

3 au cimetière et avant de les enterrer.

4 Q. Est-ce que vous avez ramassé des corps qui gisaient là à la maison ou

5 est-ce que vous les avez ramassé ailleurs ?

6 R. Oui. Ils étaient tous entassés dans une pièce. Je n'ai pas pu le dire

7 avant, parce que je ne voulais pas heurter ou blesser les membres de la

8 famille, mais, effectivement, on les avait tous mis dans une même pièce, à

9 l'exception de ces trois personnes que j'ai mentionnées auparavant; mon

10 oncle et ses deux fils. J'ai transporté tous ces corps.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Quand on parle d'une pièce ici, veut-

12 on parler d'une tombe ?

13 M. MARCUSSEN : [interprétation]

14 Q. Docteur Gerxhaliu, lorsque vous avez ramassé ces corps, lorsque vous

15 êtes allé les chercher, est-ce que vous avez sorti les corps de la maison

16 dans laquelle ces personnes avaient été tuées ?

17 R. Oui. Oui, nous avons sorti les corps de la maison, à trois corps près,

18 ces trois personnes avaient été exécutées à un kilomètre de la maison. Il

19 s'agissait de mon oncle et de ses deux fils. Les autres, la vielle dame,

20 les enfants et la belle-fille, ont tous été tués à l'intérieur de la

21 maison. Je le répète: nous avons emmené ces corps au cimetière de là.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous demande de regarder la liste

23 qui figure dans la déclaration préalable. Vous l'avez sous les yeux.

24 Examinez plus précisément le paragraphe 32.

25 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je pense qu'il faudra fournir un exemplaire

26 de la déclaration préalable au témoin. Nous en avons un sur support papier

27 --

28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'était pour tirer une chose au clair,

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1 pour savoir lesquels n'avaient pas été trouvés dans la maison. Est-ce que

2 vous pouvez y veiller, Monsieur Marcussen ?

3 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je pense que ceci figure au paragraphe 30

4 de la déclaration préalable. C'est cela. Les trois personnes mentionnées

5 dans la version en anglais, au paragraphe 30, sont Xhemajl, Seladin, et le

6 fils de Seladin, à savoir Shaban.

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît. On fait

8 référence à un oncle et deux fils, donc cela ne cadre pas là.

9 M. MARCUSSEN : [interprétation] D'accord.

10 Q. Docteur Gerxhaliu, vous avez parlé de trois personnes. Comment

11 s'appellent-elles ? Je parle des personnes qui ont été tuées à un kilomètre

12 de la maison.

13 R. Seladin, c'est le propriétaire de la maison, père de six fils et d'une

14 fille, qui ont été tués. Shaban, c'est le fils aîné de Seladin, mais il

15 n'avait que 16 ans. Alors que Xhemajl, c'est mon oncle, ou plutôt c'est le

16 fils de l'oncle de Seladin, qui est allé sauver la vie de Seladin.

17 Q. Pour que tout soit clair, ces trois personnes qui ont été exécutées à

18 environ un kilomètre de la maison sont Xhemajl, Seladin et Shaban ?

19 R. Oui.

20 Q. Merci.

21 M. MARCUSSEN : [interprétation] Il y a neuf membres de la famille qui

22 avaient été tués dans la maison, et leurs noms se trouvent au paragraphe 32

23 de la déclaration préalable.

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

25 M. MARCUSSEN : [interprétation]

26 Q. Un dernier point. Lorsque vous êtes allés chercher dans cette maison,

27 est-ce que la police les avait déplacés ces corps ou est-ce que vous avez

28 trouvé ces corps dans la position qu'avaient ces corps lorsque ces

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1 personnes ont été tuées ?

2 R. La police, un juge d'instruction et un médecin qui était venu en tant

3 que réfugiée de Croatie, Natalija Tasi, c'est comme cela qu'elle s'appelait

4 - je la connaissais avant, effectivement - ces personnes ont examiné les

5 corps et les ont un peu déplacés. Ce qui veut dire qu'avant mon arrivée,

6 ces corps avaient été déplacés.

7 Q. L'équipe chargée de l'enquête a-t-elle interrogé des personnes, a-t-

8 elle recueillie des déclarations, à votre connaissance ?

9 R. Mon père, Salihu, a été interrogé. Il a été le premier entré dans la

10 pièce après avoir trouvé les trois personnes qui avaient été tuées à une

11 certaine distance de la maison. On a posé des questions à mon père à propos

12 de moi, à propos du lieu où je me trouvais, car ils me connaissaient. Mon

13 père leur a menti. Il leur a dit que j'étais à Skopje, en Macédoine.

14 Q. Est-ce que quelqu'un d'autre est venu enquêter sur les lieux ou est-ce

15 qu'il y a eu une seule enquête, à savoir celle-là ?

16 R. On a enquêté que ce jour-là, le 31 mai, d'abord il y a eu cette équipe

17 dont j'ai parlée, qui est venue quand je n'étais pas là. Je vous l'ai dit

18 aussi. Je me cachais ailleurs, mais j'étais informé. Puis, il y a une

19 équipe qui est venue simplement pour informer les gens qui étaient là

20 qu'ils pouvaient enterrer les corps. Je ne sais pas s'il y a eu d'autres

21 enquêtes.

22 J'ai entendu dire que le 6 juin, il y a une autre équipe qui est venue, une

23 équipe conjointe, mixte, qui est allée sur les lieux du crime et là où les

24 trois personnes avaient été tuées et il y a eu cet affrontement avec l'UCK.

25 Cela, c'était la deuxième fois, mais ils ont ramassé des douilles ou

26 d'autres éléments qui les intéressaient, et d'après ce qu'on m'a dit il y a

27 eu des combats.

28 Q. D'après ce que vous savez, est-ce que quelqu'un n'a jamais été traduit

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1 en justice pour l'assassinat de ces 12 personnes dont nous avons parlé ?

2 R. Non. En tout cas, je n'en ai pas entendu parler. J'ai simplement

3 entendu dire qu'on n'a jamais jugé quelqu'un -- pas pour ici, pour la

4 famille dont je parle.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Docteur Gerxhaliu, l'équipe qui était

6 allée sur les lieux le 6 juin, d'après vous, c'était une équipe

7 d'enquêteurs chargés d'une instruction ?

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne peux vous dire que ce que j'ai entendu,

9 à savoir que c'étaient des membres de la police ainsi des membres de

10 l'armée qui composaient cette équipe et qui allaient là pour mener une

11 enquête. Mais c'est Fatbardha, ma cousine, qui les a vus avec sa mère et

12 une autre cousine. Elles ont emmené l'équipe là où s'étaient passés ces

13 événements. C'est tout ce que je sais.

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] D'après ce que vous avez compris, est-

15 ce que l'UCK a empêché ces personnes de mener leur enquête ?

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Mais comme me l'ont dit les personnes dont

17 j'ai déjà parlé, ils ont franchi la ligne de neutralité, et un peu plus

18 loin, là où s'étaient trouvées les victimes, c'est un peu par accident

19 qu'ils ont rencontré les forces de l'UCK et qu'il y a eu un affrontement.

20 C'était parce qu'ils avaient franchi cette ligne et qu'ils étaient tombés

21 sur l'UCK à cette grange, disons. C'est comme cela qu'on l'appelle.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

23 M. MARCUSSEN : [interprétation] Pas d'autres questions à ce stade de la

24 procédure. Merci, Monsieur le Président. Peut-être au niveau des questions

25 supplémentaires.

26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

27 Maître O'Sullivan.

28 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Nous aurons d'abord le contre-

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1 interrogatoire mené par le général Ojdanic, par le général Pavkovic, par M.

2 Sainovic, par M. Milutinovic, par le général Lazarevic et enfin par le

3 général Lukic.

4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Visnjic, vous avez la parole.

5 Contre-interrogatoire par M. Visnjic :

6 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur. Je m'appelle Tomislav Visnjic, je

7 défends les intérêts du général Ojdanic.

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Un instant. Excusez-moi de vous

9 interrompre, Maître Visnjic.

10 Monsieur, vous avez mentionné des photos; est-ce que vous les avez sur

11 vous ?

12 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Certaines photos ont été prises par

14 des parents à vous et d'autres par vous-même; c'est bien cela ?

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas entendu l'interprétation.

16 Maintenant, oui.

17 Les photos des membres de la famille de Seladin ont été prises par

18 mon cousin Fatbardha, avec un autre cousin, Sela, dans la maison, alors que

19 les autres photos, elles ont été prises au cimetière. Nous les avons prises

20 ensemble, et j'ai amené la pellicule. Mais j'ai aussi les photos sur moi.

21 Donc, j'ai apporté les négatifs. Je les avais déjà donnés au Tribunal

22 auparavant.

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Quel jour avez-vous pris vos

24 photographies à vous ?

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce même jour, avant que ces personnes soient

26 enterrées, à savoir le 31 mai. Certaines des photos ont été prises à 11

27 heures, et d'autres vers 15 heures, avant l'enterrement proprement dit.

28 Toutes ces photos ont été prises le même jour.

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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie. Un instant, s'il

2 vous plaît, Maître Visnjic.

3 [La Chambre de première instance se concerte]

4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Docteur Gerxhaliu, souhaitez-vous que

5 nous examinions ces photos ?

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Je vous en serais reconnaissant. Je les

7 ai sur moi. Je ne sais pas si le Tribunal a la pellicule ou les photos.

8 C'est comme vous voulez.

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Prenez ces photos, Madame l'Huissière.

10 Il y a un numéro apposé à chacune de ces photographies au verso,

11 apparemment un paraphe, également. Comment se fait-il que ce numéro et ce

12 paraphe se trouvent sur chacune des photos ?

13 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce n'est pas moi qui l'ai fait. Je ne sais pas

14 qui l'a fait. Mais je reconnais toutes les personnes qui figurent sur ces

15 photos. Ce sont tous des cousins, des cousines à moi.

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Marcussen.

17 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je pense que je peux vous aider en ce qui

18 concerne les paraphes. Je pense qu'il y a sur chacune des photos, au verso,

19 un numéro et un paraphe, photos fournies par le témoin en 2002. Je pense

20 que ce sont des copies qu'on lui a remises annotées.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous n'aviez pas l'intention de

22 demander le versement de ces photographies ?

23 M. MARCUSSEN : [interprétation] Exact. Hier, nous avons informé la Défense

24 du fait que le Dr Gerxhaliu nous avait donné ces photos en 2002. C'est

25 simplement ce matin, c'est seulement ce matin que la Défense a reçu ces

26 photos.

27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

28 Maître Visnjic, peut-être que je vous demande trop si je vous demande

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1 de confirmer ceci au nom de toutes les équipes de la Défense. Est-ce que

2 l'on accepte le fait que cette famille a été massacrée ou est-ce que vous

3 allez contester la chose ?

4 M. VISNJIC : [interprétation] Je ne peux m'exprimer qu'au nom de mon

5 client. Nous avons mené notre propre enquête qui montre clairement qu'il y

6 a eu un crime d'assassinat à cet endroit. Plusieurs personnes ont été

7 assassinées, mais ceci étant, c'est tout ce que je peux dire, effectivement

8 plusieurs personnes ont été assassinées. C'est tout ce que je peux dire.

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que ceci s'applique aux trois

10 personnes qui ne se trouvaient pas dans la maison ?

11 M. VISNJIC : [interprétation] Il faudrait que je fasse le décompte, mais

12 sans doute que oui. Je ne sais pas comment je pourrais vous confirmer ceci

13 sur-le-champ, mais je peux vous dire que nous n'avons pas de documents en

14 tant que tels. Nous avons les résultats de notre propre enquête, nous

15 voulions l'utiliser au moment du contre-interrogatoire, mais nous n'avons

16 pas un jeu complet de documents. Vous saurez quels sont nos résultats. Il y

17 a des autorités qui ont mené une enquête sur les lieux, mais je ne peux pas

18 vous donner une réponse complète, car je n'ai pas tout le document.

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Si on ne conteste pas véritablement

20 que ces personnes ont été assassinées, il n'est pas nécessaire d'identifier

21 des personnes dans ce prétoire. On peut le faire hors prétoire. Je voudrais

22 simplement savoir s'il y a une équipe de la Défense qui conteste un fait de

23 meurtre. Bien sûr qu'il y aura une discussion sur la question de la

24 responsabilité quant à ces meurtres, mais est-ce qu'on accepte l'idée qu'il

25 y a eu ces meurtres ?

26 M. VISNJIC : [interprétation] Exact, même si je pense qu'on a mentionné

27 neuf personnes qui auraient été assassinées. Je ne sais pas combien de

28 photographies le Dr Gerxhaliu vous a remises. Nous pourrons peut-être tirer

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1 ceci au clair plus tard avec l'Accusation.

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci, Monsieur le Témoin, de nous

3 avoir donné ces photos. Si ceci ne vous dérange pas, nous allons les garder

4 un certain temps, mais peut-être que la question sera élucidée au cours de

5 la journée. Nous allons voir. Nous vous savons gré d'avoir fourni cette

6 déclaration.

7 Maintenant, Me Visnjic va poursuivre son interrogatoire.

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Gardez-les tant

9 que vous voulez. C'est pour vous que je les ai apportées.

10 Contre-interrogatoire par M. Visnjic :

11 Q. [interprétation] Bonjour Monsieur Gerxhaliu.

12 M. VISNJIC : [interprétation] Peut-on montrer la pièce 3D65 au témoin ?

13 Pièce 3D65. Je ne pense pas que ce soit la bonne pièce. Cela devrait

14 être une carte.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Marcussen.

16 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je voulais simplement signaler que

17 l'Accusation n'a pas été avisée des documents que la Défense souhaitait

18 utiliser. Je ne m'oppose pas à ce que Me Visnjic vous montre une carte, je

19 voulais simplement vous l'indiquer.

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

21 M. VISNJIC : [interprétation] Mais je croyais que cela avait été communiqué

22 il y a trois jours et que tout ceci se trouvait dans le système.

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais ce qu'on vous dit, c'est que vous

24 auriez dû remettre une liste des documents que vous aviez l'intention

25 d'utiliser au cours du contre-interrogatoire.

26 M. VISNJIC : [interprétation] Je suis d'accord. C'est peut-être une

27 omission de notre part, mais j'espère qu'au cours du contre-interrogatoire,

28 nous pourrons comprendre que l'Accusation et le bureau du Procureur avaient

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1 été informés dans les temps.

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Poursuivez, Maître Visnjic.

3 M. VISNJIC : [interprétation] Peut-on montrer la pièce 3D65 au témoin ? La

4 voici, très bien.

5 Q. Docteur, cette carte montre une partie de la municipalité de Vucitrn.

6 Par rapport à celle que vous avez vue hier, celle-ci est un peu plus

7 claire. Je voudrais vous demander d'indiquer la ligne de délimitation entre

8 les positions de l'UCK et les positions serbes avant que n'éclate la guerre

9 entre le 20 et 24 mars 1999. Je pense à cette partie qui va du côté de

10 Sudimlja de Slavkovce. C'est la zone opérationnelle appelée Llap, me

11 semble-t-il. Inutile de nous indiquer où se trouve notamment Salju [phon].

12 R. Pour ce qui est de la zone opérationnelle Llap, elle était

13 opérationnelle à Podujeve. Je ne sais pas où se trouvait la ligne de

14 délimitation. J'étais médecin. Je m'occupais uniquement de logistique, ce

15 qui veut dire que je travaillais dans les hôpitaux. Je ne suis pas celui

16 qui peut répondre à votre question à propos de la zone opérationnelle Llap,

17 parce que c'était une zone tout à fait différente. Pour ce qui est de la

18 zone de Shala, je crois l'avoir déjà indiquée, où elle se trouve, en tout

19 cas où se trouve sa ligne de délimitation.

20 Q. Si ceci ne vous pose pas problème, je vais vous demander de tracer une

21 fois de plus la ligne qui va entre Shala et les forces serbes dans votre

22 municipalité à vous, avant le début de la guerre, entre le 21 et le 24,

23 s'il vous plaît.

24 R. Je vous l'ai dit, je suis médecin. Je ne suis pas un expert en

25 cartographie. Mais si vous insistez, je vais vous montrer à peu près, je

26 vais essayer de vous montrer à peu près où se trouvait cette ligne. Vous

27 avez Studime e Eperme, puis vous avez Sllakovc, Samadrexha. Les forces

28 serbes --

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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pour des raisons qui ne sont pas de

2 votre ressort, Monsieur, ceci ne nous aide pas. Est-ce que vous regardez à

3 la ligne, la même ligne que celle qui a été tracée sur une carte hier, ou

4 plutôt lundi ?

5 M. VISNJIC : [interprétation] J'essaie simplement de demander au témoin de

6 me montrer une de ces lignes, parce qu'il en a montré sept hier. Moi, il ne

7 m'en faut qu'une. Puis, j'aurai d'autres questions à lui poser à ce propos.

8 C'est la même ligne, mais c'est une ligne sur les sept qui se trouvaient

9 là. Je pense que cette carte est plus précise, vu les questions que je

10 voudrais poser au témoin. C'est là la raison qui me pousse à poser cette

11 question.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais nous voulons nous assurer que

13 nous avons une certaine continuité dans les éléments de preuve. Vous ne

14 pouvez vraiment pas utiliser cette autre carte de lundi ? Vous avez

15 vraiment besoin de celle-ci ?

16 M. VISNJIC : [interprétation] Enfin, je me disais que cela allait causer

17 beaucoup de confusion. Il n'y a qu'une localité qui m'intéresse. Une fois

18 que cette ligne aura été tracée, j'aurai une question à poser à propos de

19 cette localité, et on pourra passer à autre chose.

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous n'allez pas demander de quel côté

21 de la ligne cette localité se trouve ? Est-ce que votre question va être

22 plus compliquée ?

23 M. VISNJIC : [interprétation] Oui, on peut prendre cette démarche, et on

24 peut lui montrer la carte de lundi. Mais voici comment je vais m'y prendre.

25 Q. Monsieur Gerxhaliu, dites-moi ceci, s'il vous plaît. L'UCK -- je me

26 reprends.

27 Dans votre déclaration, vous dites que l'UCK tenait 80 % du

28 territoire à Vucitrn; est-ce exact ?

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1 R. Oui.

2 Q. Conviendrez-vous avec moi de ceci ? C'est qu'en fait, ce que vous avez

3 tracé, c'est beaucoup moins que 80 % de la municipalité ?

4 R. C'est une estimation que je vous cède parce qu'ici, on a Cicavica,

5 Studime e Eperme, et tous les hameaux autour de ce village. Je vous ai fait

6 part de mon avis.

7 Q. Je suis d'accord. Vous avez maintenant parlé de Studimlja, mais qu'en

8 est-il de Svracak, Donji et Gornji ? Est-ce que ces endroits étaient

9 contrôlés par l'UCK avant que n'éclate la guerre en 1999 ?

10 R. Sfaracak ?

11 Q. Oui.

12 R. Les deux Sfaracak se trouvaient sous le contrôle des forces de l'ex-

13 Yougoslavie. Ces forces étaient positionnées à Sfaracak. Là, il y a un

14 relief, une colline stratégique, alors qu'à Studime e Poshteme, ils étaient

15 positionnés dans le quartier de Rashica.

16 Q. Depuis quand avaient-ils ces positions à Svracak ?

17 R. Sfaracak e Poshteme, mais cela, c'était plus tard. Mais à Sfaracak i

18 Eperm à Studime, c'était en mars. Je ne sais pas quand exactement. Mais je

19 peux vous dire qu'ils ont tenu ces positions qui étaient contrôlées pendant

20 toute cette période.

21 Q. Pourquoi au paragraphe 6 de votre déclaration vous dites que Svracak

22 était sous le contrôle des forces serbes depuis la fin du mois d'avril ?

23 R. Quant au fait de savoir si c'était le mois d'avril ou le mois de mars,

24 je ne peux pas vous répondre. Dans ma déclaration préalable, je n'ai évoqué

25 qu'un certain nombre de choses. Je pense que le fait de savoir si c'était

26 le mois mars ou mois d'avril n'importe pas. La question était de savoir où

27 les forces de l'ex-Yougoslavie étaient stationnées à partir du mois de mars

28 sur ces deux collines, à ces deux endroits. Si vous souhaitez obtenir des

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1 dates précises, j'ai un carnet, et vous trouverez plus de détails alors que

2 j'ai dit cela très brièvement uniquement.

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Visnjic, où trouve-t-on cela

4 dans la déclaration préalable ?

5 M. VISNJIC : [interprétation] Au paragraphe 6.

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, voilà, j'ai trouvé, merci.

7 M. VISNJIC : [interprétation]

8 Q. En réalité, vous ne savez pas si c'était au mois de mars ou au mois

9 d'avril, ou alors ce que vous affirmez dans votre déclaration préalable est

10 inexact ?

11 R. Ecoutez, Monsieur, je souhaite indiquer une chose. A Sfaracak e Eperme,

12 il y avait des habitants serbes, et cette zone était toujours sous le

13 contrôle des autorités serbes et yougoslaves.

14 Quant à la date d'arrivée des forces serbes et quant à la date à

15 laquelle ils ont pris position à cet endroit, je l'ignore. Mais ce que je

16 peux dire, c'est qu'ils contrôlaient cette zone. Ils pouvaient s'y

17 installer quand ils le souhaitaient parce que cette zone était sous leur

18 contrôle, comme je l'ai dit. Mais je le répète, j'ignore la date exacte de

19 leur arrivée.

20 Q. Vous affirmez que ce territoire n'a jamais été sous le contrôle de

21 l'UCK et que l'UCK n'a jamais déployé d'opérations sur cette zone ?

22 R. Où ? Où exactement ?

23 Q. Sur le territoire de Svracak, le haut et le bas.

24 R. Je ne peux vous répondre sur quelque chose que j'ignore. Par contre, ce

25 que je sais, c'est que l'on voit Sfaracak i Eperm de ma maison, et certains

26 de mes patients y habitent. Par conséquent, je m'y rendais fréquemment et

27 je savais qu'il y avait des mouvements de forces serbes à cet endroit-là.

28 Quant à l'autre Sfaracak, il se trouve derrière une colline, et je ne

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1 pouvais pas le voir depuis ma maison.

2 Je ne peux vous confirmer que des choses que j'ai vues de mes propres

3 yeux. Sfaracak i Eperm et Studime e Poshteme, ces deux localités ont

4 toujours été contrôlées par les autorités de l'ex-Yougoslavie jusqu'à

5 l'arrivée des forces de l'OTAN au Kosovo.

6 Q. Très bien, Docteur. Passons à un autre point.

7 A plusieurs reprises dans le compte rendu d'audience dans l'affaire

8 Milosevic, vous avez dit que vous avez soigné de la même manière, de

9 manière égale des Albanais et des Serbes. Il s'agit là des pages 4 111 et

10 4 112 du compte rendu d'audience au moment où M. Milosevic vous a demandé

11 si vous étiez au courant de l'assassinat d'Albanais de la part de l'UCK ou

12 du fait que des Albanais avaient été blessés par l'UCK. Vous avez dit que

13 c'était inexact. Alors maintenant, je vous pose la question suivante :

14 affirmez-vous encore que l'UCK n'a jamais blessé ou tué d'Albanais ?

15 R. Je ne sais pas. Je n'ai pas entendu parler de tels cas, je n'ai jamais

16 vu de cas où l'UCK aurait tué ou blessé un Albanais.

17 A l'époque, pendant ce procès, au moment de ce procès, j'ai indiqué

18 que je travaillais à l'hôpital et que je soignais quiconque en avait

19 besoin. Par conséquent, pour répondre à votre question, je ne suis pas en

20 mesure de confirmer quelque chose dont je n'ai pas entendu parler ou que je

21 n'ai pas vu.

22 Q. Ce que j'indique uniquement, c'est qu'au compte rendu d'audience du

23 procès Milosevic, page 4 119 du compte rendu d'audience, vous n'avez pas

24 dit que vous ne saviez pas, mais vous avez dit que c'était inexact.

25 R. Je ne suis pas en mesure de confirmer quelque chose que j'ignore. Je ne

26 peux pas dire que quelqu'un a tué quelqu'un d'autre si je ne l'ai pas vu.

27 Pour moi, ce n'est pas vrai.

28 Q. Bien. Par conséquent, nous comprenons mieux ce que vous entendez par

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1 inexact.

2 Est-ce que dans la même affaire, page 4 117 du compte rendu

3 d'audience, vous avez bien dit que la police aux postes de contrôle passait

4 à tabac et faisait subir des mauvais traitements aux habitants des villages

5 qui étaient contrôlés par l'UCK ? Savez-vous si quiconque n'a jamais subi

6 de mauvais traitement de la part de l'UCK ?

7 R. Vous voulez dire, à des postes de contrôle ?

8 Q. Je songeais aux zones contrôlées par l'UCK, territoires contrôlés par

9 l'UCK.

10 R. Dans les territoires contrôlés par l'UCK, je n'ai jamais pu observer un

11 mauvais traitement quelconque ou un passage à tabac quelconque de la part

12 de soldats de l'UCK. A Dakovce, qui se trouve sur la route vers Pristina à

13 proximité de Vucitrn, il y avait un poste de contrôle de la police serbe

14 qui ressemblait à un poste frontière. Tout le monde était frappé à cet

15 endroit-là, surtout les villageois qui vivaient dans des zones contrôlées

16 par l'UCK. J'ai soigné bon nombre de personnes qui avaient été passées à

17 tabac à ces postes de contrôles, dont certains ont des séquelles encore à

18 ce jour.

19 M. VISNJIC : [interprétation] J'aimerais que l'on montre au témoin la pièce

20 3D61.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Marcussen.

22 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je ne vais pas répéter ce que j'ai dit au

23 sujet du fait que nous n'avons pas reçu de liste au préalable, mais je

24 souhaitais demander à mon confrère s'il existait une traduction en anglais

25 de ce document.

26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Apparemment, il n'y en a pas pour

27 l'instant. Il n'y en a pas dans le système. Est-ce le cas ? L'avez-vous

28 trouvé ?

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1 Maître Visnjic, apparemment il n'y a pas de version anglaise de ce

2 document.

3 M. VISNJIC : [interprétation] Dans ce cas, cela doit être une erreur de

4 notre part, il doit exister une version anglaise parce qu'il s'agit là d'un

5 document provenant de la base du bureau du Procureur. J'ignore exactement

6 où nous l'avons trouvé. Je suis sûr que sa traduction existe, je ne sais

7 pas où elle est maintenant.

8 Mais puis-je tout de même poser une question au témoin ?

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Un instant, je vous prie. Il s'agit là

10 du deuxième document pour lequel M. Marcussen affirme que suite à un accord

11 entre toutes les parties, on a décidé qu'une liste des documents ou autres

12 éléments utilisés lors du contre-interrogatoire devaient faire l'objet

13 d'une divulgation, d'une communication au moment où le témoin commence à

14 déposer. En l'occurrence, cela aurait dû avoir lieu lundi, ce qui permet à

15 l'Accusation de se préparer et ce qui évite ce type de problème.

16 Il y a donc deux questions différentes qui se posent : le fait que

17 les documents se trouvent dans le système, et deuxièmement, le fait de

18 fournir une liste de ces documents à chaque fois pour chaque témoin. Or,

19 apparemment, cela ne semble pas avoir été le cas en l'espèce, Maître

20 Visnjic.

21 M. VISNJIC : [interprétation] Monsieur le Président, je suis entièrement

22 d'accord, mais pour ce qui est de la communication et de la divulgation de

23 ces documents, c'est vendredi après-midi déjà qu'ils ont été introduits

24 dans le système.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Non, mais ce n'est pas ce que j'étais

26 en train de dire. La bonne marche du procès est facilitée par la fourniture

27 d'une liste. Il ne s'agit pas là d'une infraction majeure; en l'occurrence,

28 il s'agit tout de même d'une règle qu'il faut s'efforcer de respecter, qui

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1 s'applique à tous, à l'Accusation au moment il y aura contre-interrogatoire

2 de leur part de vos témoins. Par conséquent, je vous demanderais de bien

3 garder cela présent à l'esprit et de toujours fournir à l'avance une liste

4 à l'Accusation des documents que vous souhaitez utiliser dans le contre-

5 interrogatoire.

6 Je vous propose de poursuivre.

7 Monsieur Marcussen.

8 M. MARCUSSEN : [interprétation] En réalité, notre commis des affaires a

9 retrouvé un projet de traduction de ce document avec une grande efficacité.

10 Par conséquent, nous pourrions peut-être l'envoyer par courrier

11 électronique au conseil de la Défense, et peut-être que tout le monde

12 pourra consulter ce document dans la salle d'audience.

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien.

14 M. VISNJIC : [interprétation] Très bien. Je vous suis reconnaissant. En

15 tout état de cause, je souhaite vous préciser que ce n'était nullement

16 notre intention de rendre la tâche du Procureur plus difficile, et je crois

17 même que nous avions déjà pris toutes les mesures qui s'imposaient.

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien.

19 M. VISNJIC : [interprétation]

20 Q. J'attire votre attention sur le point 8, qui est un rapport ordinaire

21 d'opérations de Pristina, du district de Pristina.

22 On voit au point 8 de ce document que le 24 septembre 1998, dans

23 l'après-midi, un groupe de trois Siptar du village de Samodreza se sont

24 dirigés sur des tracteurs, et cetera; est-ce exact ?

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Visnjic, vous avez été trop

26 rapide, j'en ai bien peur. Votre question n'a pas pu être traduite. Nous

27 avons entendu l'interprétation du début.

28 M. VISNJIC : [interprétation]

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1 Q. Ma question est la suivante : est-ce que Cecelija était contrôlé par

2 l'UCK ? Est-ce exact ?

3 R. Oui.

4 Q. Pouvez-vous me dire si le village de Samodreza était contrôlé par

5 l'UCK ?

6 R. La moitié du village, le quartier de Basholl, était contrôlé par l'UCK,

7 alors que la partie inférieure du village se trouvait sous le contrôle des

8 forces ex-yougoslaves qui tenaient des positions sur une colline dans le

9 quartier de Llazoviq. C'est là que se trouvaient stationnées les forces

10 serbes. Il y a eu des affrontements dans cette zone à différentes reprises.

11 Après le 2 mai, les forces serbes ont avancé et sont arrivées dans le

12 quartier de Basholl et se sont arrêtées à cet endroit-là. Elles ne

13 pouvaient plus continuer.

14 Par conséquent, jusqu'au 2 mai, ils se trouvaient dans le quartier de

15 Llazoviq à Samadrexha, et après cette date, après le 2 mai 1999, ils sont

16 arrivés.

17 L'INTERPRÈTE : Est-ce que Me Visnjic pourrait attendre la fin de la

18 réponse ?

19 M. VISNJIC : [interprétation]

20 Q. Mais je vous ai posé une question au sujet du mois d'octobre et

21 du mois de septembre 1998. La question était si Samodreza était sous le

22 contrôle de l'UCK en septembre et en octobre 1998. C'est à ce moment-là que

23 vous parcouriez les villages pour soigner les blessés.

24 R. Si vous souhaitez obtenir des explications plus précises, alors voilà

25 ce que je pourrais dire. Je me rendais souvent à Novoselle et à Samadrexha

26 dans l'ambulance officielle dont je disposais, et Samadrexha était contrôlé

27 par les forces que j'ai décrites. Quand à Ceceli, il a toujours été

28 contrôlé par l'UCK.

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1 Q. Bien. Merci, Docteur.

2 Est-ce que vous avez entendu que l'UCK à Cecelija avait détruit un

3 tracteur et avait menacé la prochaine fois de liquider trois Siptar dans le

4 village de Samodreza, qui étaient des représentants du village et qui

5 étaient partis s'entretenir et discuter avec l'UCK ?

6 R. C'est la première fois que j'entends parler d'un tel incident, et étant

7 donné que j'ai prononcé la déclaration solennelle, je ne suis pas en mesure

8 de vous confirmer cela.

9 Q. Merci. Au moment où vous parcouriez ces villages, avez-vous remarqué

10 que la population se déplaçait, c'est-à-dire qu'elle quittait les villages

11 d'un côté ou de l'autre ?

12 R. De quelle période parlez-vous ?

13 Q. La période qui va du mois d'octobre 1998 au mois de mars 1999, donc

14 avant le début de la guerre.

15 R. Je ne peux pas vous confirmer quoi que ce soit. J'ai dit un certain

16 nombre de choses dans ma déclaration préalable, et maintenant, dans ma

17 déposition j'ai confirmé un certain nombre de choses. Peut-être qu'il y a

18 eu de tels déplacements de population. Je parle des déplacements de ma

19 famille dans ma déclaration préalable. Pour les autres, peut-être qu'il y a

20 eu des cas analogues, mais un certain nombre d'années s'est écoulé et je ne

21 peux pas confirmer ou infirmer quoi que ce soit.

22 Q. Si je vous montre à présent le document 3D62.

23 M. VISNJIC : [interprétation] J'espère qu'il existe une traduction anglaise

24 pour ce document. Je n'ose même pas demander si c'est le cas.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je crois que malheureusement, nous

26 n'avons pas non plus de traduction pour ce document, mais je crois que nous

27 nous en tirerons avec l'interprétation des interprètes. Par contre, je vous

28 demanderais de lire un peu plus lentement.

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1 M. VISNJIC : [interprétation] Bien. Merci, Monsieur le Président.

2 Q. Docteur, il s'agit là d'une liste qui montre une liste de villages d'où

3 des habitants ont été chassés, des Serbes et des Monténégrins qui ont été

4 chassés par l'UCK. Voilà un certain nombre de villages où vous vous êtes

5 rendu, notamment Gornji Svracak; est-ce exact ?

6 R. J'avais des patients à cet endroit-là, mais c'était avant la guerre. Il

7 s'agissait là de Serbes. Les patients étaient des Serbes, et j'allais leur

8 rendre visite très souvent.

9 Q. Je parle précisément de la période qui va être du mois d'octobre 1998

10 et le mois de mars 1999.

11 M. VISNJIC : [interprétation] Est-ce que l'Huissière pourrait peut-être

12 montrer à nouveau le haut de la page pour que le témoin voit bien ? Merci.

13 Q. Est-ce que vous vous êtes rendu dans un autre de ces villages, Dolak,

14 Donji Stanovci, Mijalic [phon] ou Taradza ?

15 R. Non. A l'exception de Sfaracak le haut, qui se trouvait à proximité de

16 ma maison, où j'avais des patients.

17 L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas saisi le nom de famille.

18 M. VISNJIC : [interprétation] Est-ce qu'on pourrait montrer le bas de la

19 page, s'il vous plaît ? Merci. Est-ce qu'on pourrait légèrement remonter la

20 page à l'écran. Merci.

21 Q. A présent, Docteur, est-ce que vous arrivez à reconnaître un quelconque

22 des villages énumérés ici sur cette liste ?

23 R. Pendant la même période ? Ou pendant la guerre ?

24 Q. Pendant la période allant d'octobre 1998 à mars 1999.

25 R. Non. A l'exception de Svaracak plus haut. Il y avait un homme âgé de 90

26 ans qui était malade, et c'était l'un de mes patients. Par conséquent, je

27 m'y rendais souvent pour l'examiner.

28 Q. Vous n'alliez pas à Samodreza ?

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1 R. Si, je me suis rendu à Samodrexha, mais je ne pouvais pas y aller en

2 passant par le poste de contrôle. En règle générale, je passais par le

3 village de Sfaracak pour me rendre à Samodrexha.

4 Q. Par conséquent, vous avez traversé des territoires qui n'étaient pas

5 contrôlés par la police serbe; est-ce exact ?

6 R. J'empruntais généralement cette route que j'ai évoquée, et non pas la

7 route où se trouvait le poste de contrôle, parce que je n'osais pas passer

8 par là.

9 Q. Donc, vous passiez par Svarcak parce que là il n'y avait pas de postes

10 de contrôle; est-ce exact ?

11 R. J'allais à Sfaracak, et je rentrais en général en passant par Studime e

12 Eperme, en passant par Ceceli et Samadrexha, et c'est en empruntant une

13 route entre ces deux villages que je rentrais à la maison.

14 Q. Merci pour cette réponse. Pendant que vous étiez à Samodreza, avez-vous

15 pu constater que les habitants quittaient les lieux ? Par exemple, des

16 Serbes et des Monténégrins, c'est-à-dire 20 maisons de la période entre le

17 27 octobre 1998 jusqu'au mois de mars 1999 ?

18 R. Non, parce que je ne me suis pas rendu sur place pendant cette période.

19 Je n'ai pas vu cela. Je ne sais pas quand ils sont partis, si ce qui s'est

20 passé. Je ne sais rien à ce sujet. Je ne l'ai pas vu quitter les lieux.

21 M. VISNJIC : [interprétation] Est-ce qu'on pourrait peut-être faire

22 descendre la page.

23 Q. Est-ce que vous ne vous êtes jamais rendu dans l'un quelconque des

24 villages qui sont énumérés ici : Milivoda Strova, Bencuk, Bivoljak,

25 Glavotina, Mijalic, Drvare, Shalce et Kolo ?

26 R. Pour ce qui est des villages que vous avez mentionnés, non, je ne me

27 suis pas rendu. Je n'ai pas eu la possibilité de me rendre dans l'un

28 quelconque de ces villages.

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1 M. VISNJIC : [interprétation] Pouvons-nous montrer la page suivante de ce

2 document.

3 Q. Docteur, en page 2 on trouve également une liste de villages. Est-ce

4 que l'un quelconque de ces noms vous est familier ?

5 R. Oui.

6 Q. Par exemple, Cecelija; n'est-ce pas ?

7 R. Nous l'appelons Ceceli. Ici on voit Cecelija. Mais cela ne pose pas de

8 problème.

9 Q. Avez-vous remarqué Slakovce ou à Cecelija, ou à Cecilija, que là aussi

10 certaines maisons avaient été abandonnées ? L'avez-vous remarqué ?

11 R. Les mouvements de population variaient. Puisque vous insistez, voici ce

12 dont je m'en souviens. Au cours de l'offensive de septembre 1998, un

13 certain nombre de maisons ont été désertées à Ceceli et à Sllakovc, mais si

14 mon souvenir est bon, les personnes qui avaient quitté les lieux y sont

15 revenues. Là, je parle de l'offensive du mois de septembre 1998, aux

16 environs du 5 septembre.

17 Q. Non, Docteur, je vous parle du 27 octobre 1998 et de la période qui a

18 débuté à cette date qui s'est poursuivie jusqu'au 15 mars 1999, comme on

19 peut le dire dans ce document. Je vous pose la question parce que sur ce

20 territoire-là, l'UCK était opérationnelle, et qu'en raison des activités de

21 l'UCK, un certain nombre de personnes ont été déplacées. Seriez-vous

22 d'accord avec moi là-dessus ?

23 R. Je ne peux pas être d'accord avec vous. La seule chose que je puisse

24 dire, c'est que le 15 septembre 1998, une offensive serbe a été lancée et

25 qu'avant cela les gens de Shale e Bajgore, Ceceli et Samadrexha, toutes ces

26 personnes ont quitté leurs maisons, et sont revenues ensuite, mais je ne

27 peux pas vous dire quand elles sont revenues ni quelle est la proportion de

28 personnes qui sont revenues. Je n'ai pas compétence pour le faire.

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1 Q. Docteur, entre le 27 octobre 1998 et le 15 mars 1999, pourquoi 220

2 personnes d'origine serbe et monténégrine quitteraient-elles cinq villages

3 et 93 Rom quitteraient-ils trois villages ? On voit que ces chiffres qui

4 s'appliquent aux cinq villages, qui ont fait l'objet d'une purification ou

5 d'un nettoyage ethnique complet, et l'on voit également l'exemple de ces

6 trois villages qui a été donné, qui a fait l'objet d'un nettoyage ethnique

7 partiel de sa population rom. Ce territoire n'était-il pas sous le contrôle

8 de l'UCK, et n'est-ce pas là la raison pour laquelle ces personnes ont

9 quitté les lieux ?

10 M. MARCUSSEN : [interprétation] Monsieur le Président.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui.

12 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je crois que le témoin a dit qu'il ne

13 savait pas, et je crois qu'ici on lui demande de formuler des spéculations

14 quant aux motifs qui ont poussé ces gens à partir.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il me semble que la question n'a pas

16 été bien traduite. Monsieur Visnjic, la question que vous vouliez poser

17 était-elle la suivante : si le territoire n'était pas sous le contrôle de

18 l'UCK, pourquoi ces gens auraient-ils quitté les lieux ?

19 M. VISNJIC : [interprétation] Ce que je voulais dire, Monsieur le

20 Président, c'est que dans le territoire où agissait l'UCK, des Serbes, des

21 Rom et des Albanais ont quitté les lieux, comme le dit le document.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Docteur, avez-vous la moindre

23 information sur le mouvement de personnes, personnes de ces villages entre

24 octobre et mars ?

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai déjà dit, et je le

26 répète sans ambages, que je n'ai d'informations que sur les déplacements

27 des personnes qui ont dû quitter leurs maisons en raison de l'offensive

28 lancée par les Serbes le 15 septembre. C'était quelque chose que l'on

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1 pouvait observer directement. Je ne peux pas dire qu'il n'y a pas eu

2 d'autres déplacements. Il y en a eu d'autres, mais je n'y ai pas assisté.

3 Je ne peux donc pas les confirmer.

4 M. VISNJIC : [interprétation]

5 Q. Mais, Docteur --

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Veuillez reformuler une autre

7 question. Excusez-moi, Monsieur Marcussen.

8 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je ne sais pas si j'ai bien compris mon

9 collègue, M. Visnjic, mais d'après la traduction que j'ai du document, le

10 dernier paragraphe, il me semble que c'est ce à quoi fait référence M.

11 Visnjic. Le dernier paragraphe ne dit pas que les villages dont provenaient

12 ces 220 personnes étaient situés dans des zones tenues par l'UCK. Je crois

13 que c'est une conclusion du rapport où cette distinction n'est pas faite.

14 C'est vrai que c'est un petit peu difficile lorsque l'on n'a pas de

15 traduction du document et lorsque l'on n'a pas non plus eu le temps de

16 consulter préalablement le document en question.

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Formulez votre question, la prochaine

18 question. Posez la prochaine question, Monsieur Visnjic.

19 M. VISNJIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Dans

20 l'intervalle, nous avons reçu la traduction sur papier.

21 Q. Docteur, j'aimerais que l'on vous présente une pièce de la Défense. Il

22 s'agit de 3D66.

23 M. VISNJIC : [interprétation] Monsieur le Président, avant que l'on

24 montre ce document au témoin, et vous venez d'ailleurs de recevoir la

25 traduction de la pièce 3D62, c'est un document officiel émanant du

26 ministère de l'Intérieur de Serbie, numéro 350/39, portant la date du 15

27 mars 1999. Dans ce document, on trouve une liste de villages où ont été

28 observés des mouvements de population. On présente également la composition

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1 ethnique de la population et l'on y voit également les raisons de ces

2 mouvements.

3 Q. Nous avons maintenant devant nous une autre carte. C'est un

4 agrandissement d'une autre carte. Il y a une zone en particulier qui

5 m'intéresse; la zone entre Gornja et Donja Sudimlja. C'est une zone que

6 vous connaissez bien. Pourquoi m'intéressai-je à cette carte ? Parce que

7 l'on y voit ce ruisseau que vous avez mentionné à plusieurs reprises entre

8 Gornja et Donja Sudimlja qui suit, dans une grande mesure, la route, n'est-

9 ce pas exact ?

10 R. Si.

11 Q. Pouvez-vous indiquer sur cette carte l'endroit où se trouvait votre

12 tracteur la nuit du 2 au 3 mai ?

13 R. Je l'ai déjà indiqué sur l'autre carte. Je ne sais pas pourquoi je

14 devrais recommencer. Vous avez l'autre carte ? Bien entendu, si c'est

15 nécessaire, je peux recommencer, mais je sais que je l'ai déjà fait.

16 Q. S'il vous plaît, veuillez-vous exécuter. Je vais vous demander

17 également de localiser deux autres endroits sur cette carte. Peut-être que

18 ceci nous permettra de jeter davantage de lumière sur les choses.

19 R. Le convoi était ici à Studime e Eperme, jusqu'à l'entrée, Studime e

20 Poshteme. Il y a une colline par ici. Je ne suis pas très doué avec les

21 cartes, je dois le dire.

22 Q. Pourriez-vous nous indiquer l'endroit où se trouvait le tracteur ?

23 R. La deuxième moitié de la colonne, la colonne était très longue. Entre

24 les deux Studime. Si l'on la divise en plusieurs parties, je dirais que je

25 me trouvais dans la seconde, à l'arrière, en fait.

26 Q. Très bien. Dans votre village, y a-t-il un endroit appelé -- excusez-

27 moi si je prononce mal - Mahala Zusi ou quelque chose de ce genre ?

28 R. Nos villageois habitaient dans ce quartier et leurs noms de famille

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1 étaient Zhushi.

2 Q. Pouvez-vous indiquer ce lieu, plus ou moins, là où vivaient vos

3 voisins ?

4 R. Studime, c'est un point. Tous les différents quartiers composaient

5 Studime. C'est là que nous habitions.

6 Q. Lorsque l'on parle de Mahala Zusi, c'est Donji Studime ou c'est Gornji

7 Studime ?

8 R. Ce n'est pas Mahalla ou un quartier. C'est simplement quelques

9 familles, trois ou quatre, qui vivaient ensemble et avec ma famille. C'est

10 là que nous vivions dans cette partie de Studime; dans la partie inférieure

11 de Studime, en fait.

12 Q. C'est une partie de Donja Studime, mais en direction de Gornji Studime;

13 c'est cela ?

14 R. Non. Dans la direction de la partie haute de Studime, il y a le

15 quartier de Rashica, alors que nous, comme je l'ai dit, nous habitions

16 ensemble, ma famille et la famille Zhusi.

17 Q. A quoi cela correspond sur la carte, Docteur ? Est-ce que c'est trop

18 petit pour que vous puissiez l'indiquer ?

19 R. Comprenez-moi bien; il ne s'agit que d'un point sur la carte.

20 Nous habitions ensemble, Gerxhaliu et Zhusi, ma famille et les Zhusi.

21 Q. Merci. Il y a quelque chose qui s'appelle Mahala ou le village de

22 Sfaracak, ou Mahalla Sfaracak. Excusez-moi, Mahalla Sfaracak ou le village

23 de Sfaracak, ce serait Sfaracak, je suppose. Il n'y a pas d'autres

24 localités avec un nom semblable dans l'ensemble du territoire, n'est-ce

25 pas, dans ce territoire-ci, dans cette zone ?

26 R. Permettez-moi d'apporter une explication. Dans la partie inférieure du

27 village, près du ruisseau, vivaient les familles Gerxhaliu et Zhushi, mais

28 il y avait aussi un certain nombre de Karsniqis. Dans la partie supérieure

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1 du quartier, il y avait nos voisins; Srvarcali, qu'ils s'appelaient.

2 C'était leur nom de famille, Srvarcali. Ce n'est pas le nom d'un endroit,

3 c'est un nom de famille, Srvarcali.

4 Q. Bien. Donc ceci, c'est aussi une partie de Donja Sudimlja, n'est-ce pas

5 ?

6 R. Oui, il y a la partie haute, avec Svarcali, la famille Svarcali, et il

7 y a notre quartier à nous, dont j'ai parlé, où nous habitions.

8 Q. Merci. J'aimerais demander le versement de ce document au dossier. Je

9 dirai simplement que la ligne rouge qui traverse la route entre Gornja et

10 Donja Sudimlja, c'est l'endroit où se trouvaient le tracteur et la colonne,

11 d'après le témoin. Le point à côté de Donja Sudimlja, c'est l'endroit où se

12 trouvaient plus ou moins sa maison et la maison de la famille Zhushi.

13 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Messieurs

14 les Juges, il s'agira de la pièce IC 23.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

16 M. VISNJIC : [interprétation] Monsieur le Président, pour votre

17 information, cette carte IC 23 a rapport avec la pièce IC 21 de la page

18 2 453 du compte rendu de cette audience de lundi.

19 Q. Docteur, le 3 mai, vous êtes revenu dans la zone qui se situe entre

20 Gornja et Donja Sudimlja. Des corps ont été récupérés et identifiés et, par

21 la suite, inhumés. Ma question est la suivante : l'UCK s'est-elle

22 immédiatement emparée de la région située ou surplombant le village de

23 Gornja Sudimlja ?

24 R. Oui. Au matin du 3 mai, lorsque j'y suis allé, c'est un peu plus tard,

25 ils avaient pris position dans la partie supérieure de Studime. Je parle

26 des soldats de l'UCK.

27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Visnjic, la question a été

28 traduite de la manière suivante : "Votre retour dans la zone entre Gornji

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1 et Gornja Sudimlja," dans le transcript anglais en tout cas. Or, je pense

2 que vous avez dit la zone située entre Donja et Gornja Sudimlja, n'est-ce

3 pas ?

4 M. VISNJIC : [interprétation] Tout à fait, Monsieur le Président. Je ne

5 suivais pas le compte rendu d'audience, mais vous avez raison.

6 Q. La question était donc : l'UCK a-t-elle pris le contrôle de la zone

7 entre les villages de Gornja et de Donja Sudimlja ?

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] La réponse est tout à fait claire. Le

9 témoin a bien compris la question. Je voulais simplement m'assurer que le

10 compte rendu soit tout à fait clair, puisqu'il est important que nous

11 identifiions les lieux comme il convient.

12 M. VISNJIC : [interprétation] Pourrions-nous montrer au témoin la pièce

13 3D70 ? C'est une note officielle émanant du ministère de l'Intérieur serbe,

14 de Serbie, et portant la date du 3 juillet 2001. Si ce document n'a pas

15 reçu de cote, je tiens néanmoins à préciser qu'il figure ici dans le

16 système. Je le vois. Il y a une traduction juste en dessous.

17 Monsieur le Président, ce document est un document qui a été remis à notre

18 équipe juste avant le début du procès dans le cadre d'une communication,

19 remis donc par le gouvernement de Serbie.

20 Q. Docteur, il y a quelques instants, vous avez parlé de la réaction des

21 forces serbes face au compte rendu d'assassinat. J'aimerais vous poser la

22 question suivante. Savez-vous que le 3 mai 1999, le poste de police de

23 Vucitrn a tenté de procéder à une enquête sur place pour voir ce qui

24 s'était passé dans la région entre Gornja et Donja Sudimlja et qu'ils ont

25 été attaqués par l'UCK ? Etiez-vous présent à ce moment-là ?

26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Excusez-moi. Est-ce que ceci peut

27 avoir trait au même incident ? Parce que je pensais que tout à l'heure nous

28 parlions du 31 mai lorsque nous parlions de l'autre incident.

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1 M. VISNJIC : [interprétation] Non, Monsieur le Président. Ce dont on parle

2 ici, c'est du 2 et du 3 mai, l'incident grave au moment où la colonne a été

3 arrêtée dans sa progression.

4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Excusez-moi. J'avais mal compris votre

5 question. Poursuivez.

6 M. VISNJIC : [interprétation] Oui, c'est moi qui avais oublié de dire à

7 quel numéro de paragraphe je faisais référence.

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Poursuivez.

9 M. VISNJIC : [interprétation]

10 Q. Docteur, savez-vous que la police serbe le 3 mai a tenté de mener à

11 bien une enquête sur place et que la police a fait l'objet d'une attaque de

12 l'UCK ?

13 R. Non. Je ne le savais pas. Je n'avais jamais entendu parler de cela.

14 Q. Saviez-vous que des tirs ont été essuyés sur le lieu même de Mahala

15 Zusi, là où se trouvaient précisément votre maison ainsi que celles

16 d'autres familles ?

17 R. C'est la première fois que j'entends cela.

18 Q. Vous serez d'accord avec moi pour reconnaître qu'à partir du 3 mai et

19 par la suite, l'UCK contrôlait le territoire, et ce, jusqu'à la fin de la

20 guerre ? Je parle du territoire qui se trouve au-dessus de Gornja Sudimlja.

21 R. Effectivement. Il y avait un certain contrôle qui était exercé jusqu'à

22 Studime e Eperme, mais pas au-delà de ce point-là, parce que les forces

23 serbes, avec des chars et d'autres types d'armes, étaient déployées sur

24 place et il était impossible pour l'UCK d'aller plus loin jusqu'à l'arrivée

25 de l'OTAN. Studime e Poshteme était aux mains des forces serbes.

26 Q. Alors, comment se fait-il que la police ait été attaquée à deux

27 reprises à proximité de chez vous le 3 mai 1999 et au cours de la deuxième

28 enquête menée sur place, sur les lieux le 5 juin 1999, si cette zone avait

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1 été contrôlée par la police ?

2 R. Comme je l'ai déjà dit, vers le 5 ou le 6 juin, et à propos de cet

3 événement, cet incident, j'ai entendu de certaines personnes, la femme de

4 mon oncle qui était sur place, qu'elle avait dit à la police où se

5 trouvaient les positions de l'UCK, mais je n'y ai pas assisté directement.

6 Q. Je dois vous interrompre. Vous avez déjà dit cela.

7 J'aimerais vous poser la question : si effectivement la police serbe

8 contrôlait la zone, comme vous l'avez dit, alors comment expliquer qu'elle

9 ait été attaquée à proximité de votre maison à deux reprises par l'UCK ?

10 Avez-vous une explication ?

11 R. La police serbe n'est jamais venue près de chez moi. Je ne les ai

12 jamais vus s'approcher et personne ne m'a jamais raconté qu'elle s'était

13 approchée de chez moi. Mais --

14 Q. Très bien. Voici ma question. Est-ce que l'UCK a avancé à proximité de

15 chez vous ?

16 R. J'ai déjà dit dans ma déclaration qu'il était fréquent que des membres

17 de l'UCK viennent en voiture au cours de la soirée, lorsque j'allais

18 jusqu'à eux avant de finir mon travail --

19 Q. Non, Docteur, nous parlons de la période de la guerre, mai 1999. Voilà

20 donc ma question. En mai 1999, est-ce que l'UCK s'approchait de chez vous ?

21 R. Je n'étais pas chez moi, je ne peux donc pas vous dire quoi ce soit.

22 Mais je sais qu'à Sfaracak i Eperm, Rashica et ailleurs, donc sur ces deux

23 collines, il y avait des forces de l'ancienne armée yougoslave, et je pense

24 qu'il était impossible pour l'UCK de s'emparer de cette zone puisque cette

25 zone était contrôlée par les forces serbes, les forces yougoslaves.

26 Q. Votre frère, Selaadin, n'était-il pas membre de l'UCK ?

27 R. Il aidait l'UCK, mais je ne suis pas sûr qu'il en ait été membre. Je

28 sais qu'il l'a aidé.

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1 Q. Il les aidait depuis le début ?

2 R. Je ne peux pas m'exprimer à sa place. Je ne peux m'exprimer qu'en mon

3 nom propre. Je sais qu'il les a approvisionnés en nourriture, en

4 médicaments, lorsqu'il le pouvait. Mais je ne pense pas qu'il n'ait jamais

5 été armé ou qu'il n'ait jamais porté l'uniforme. Je ne l'ai jamais vu vêtu

6 d'un uniforme.

7 Q. Je vais essayer de vous rafraîchir la mémoire.

8 M. VISNJIC : [interprétation] J'aimerais que l'on montre la pièce D71 au

9 témoin. Je crois que c'est cette pièce-là. Ce document existe sur papier et

10 ne figure pas dans le système.

11 M. MARCUSSEN : [interprétation] Monsieur le Président, vous vous êtes

12 tourné vers moi, je vous le confirme. J'ai reçu un exemplaire de ce

13 document juste avant le début de l'audience. A part cela, la situation qui

14 s'applique à tous les autres documents se répète ici.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous nous intéresserons au document

16 juste après la pause, pause qui nous mènera, Monsieur Visnjic, jusqu'à 15

17 heures 55, ou plutôt 16 heures 05.

18 Autre chose. Avant la pause, au cours de cette pause-ci et au cours de la

19 suivante, j'aimerais que les parties se mettent d'accord sur la question de

20 l'identification des victimes du 31 et la question de savoir si oui ou non

21 nous avons besoin de ces photos. Il serait utile de les voir, mais faut-il

22 que nous les versions au dossier, ou pouvons-nous traiter de la question

23 d'une autre manière ?

24 Merci beaucoup.

25 --- L'audience est suspendue à 15 heures 44.

26 --- L'audience est reprise à 16 heures 09.

27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Visnjic, poursuivez, s'il vous

28 plaît.

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1 M. VISNJIC : [interprétation] Avant de poursuivre, Monsieur le Président,

2 je voudrais vous informer du fait que j'ai discuté pendant la pause avec M.

3 Marcussen, et nous nous sommes mis d'accord, les corps de ces 12 personnes

4 qui ont été tuées et, pour nous, s'agissant de la façon dont nous voyons

5 les circonstances de ces décès, il nous est impossible d'accepter les dires

6 du témoin, du moins, pour le moment. Grâce à notre propre enquête, nous

7 allons essayer d'obtenir des documents du constat qui s'est fait; cela veut

8 dire, manifestement, constat effectué à l'époque par les autorités de la

9 République de Serbie.

10 A mon avis, il est inutile de conserver les photographies, car le

11 nombre de personnes concernées n'est pas contesté. C'est neuf plus trois.

12 Je crois que ceci suffira pour le moment. Bien sûr, c'est aussi que ces

13 personnes ont été assassinées.

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie.

15 Monsieur le Témoin, je vais vous rendre ces photos. Nous savons que le

16 bureau du Procureur dispose de copies. Apparemment, il n'y a pas

17 contestation sur le fait que 12 personnes ont été assassinées. Je vous l'ai

18 dit déjà, il a été utile de voir ces photos, mais il n'est pas nécessaire

19 que nous les conservions.

20 M. VISNJIC : [interprétation] Pendant que le témoin examine le document

21 qu'on vient de lui remettre, avant que cette note de service ne disparaisse

22 de l'écran, je voudrais vous dire ceci : ce document de la Défense concerne

23 également la page 2 465 du compte rendu d'audience de lundi lorsque le

24 témoin a fait état du fait qu'il avait dit à la police qu'il y avait eu un

25 crime.

26 Q. Docteur, si vous le voulez bien, nous allons poursuivre votre contre-

27 interrogatoire. Vous avez examiné avec soin le document que vous avez sous

28 les yeux. Voici ce que je vous demande maintenant. Seladin, votre frère, a

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1 bien fourni des armes à l'UCK, et plus tard, est-ce qu'il est devenu

2 combattant dans la 142e ou plutôt dans la 141e Brigade de l'UCK; est-ce

3 exact ?

4 R. Ce que j'ai dit plus tôt, c'est que j'étais médecin. Je m'occupais de

5 la logistique et que je travaillais à l'hôpital. Seladin, oui, j'ai été

6 informé qu'il avait aidé l'UCK en fournissant des vivres notamment, mais

7 puisqu'ici j'ai prêté serment, je ne peux pas confirmer ce que vous dites.

8 Je n'exclus pas la possibilité qu'il ait été membre. Cependant, jamais je

9 ne l'ai jamais vu armé ou en uniforme. Au cours de cette période, il ne

10 m'était même pas possible de voir mes propres enfants. Cela a été vrai

11 pendant deux ou trois semaines, a fortiori pas Seladin, et vous voyez sur

12 les photos qu'il est en vêtements civils.

13 Q. Combien de soldats l'UCK comptait-elle ? Ou plutôt, combien de soldats

14 avez-vous soigné ?

15 R. Je ne sais pas. Je l'ai dit dans ma déclaration préalable. J'avais

16 trois pièces ou salles dans l'hôpital; une réservée aux blessés, qu'ils

17 soient civils ou militaires, les deux autres étant réservées aux femmes et

18 aux enfants. Je dirais que de 70 à 80 % des patients étaient civils. En ce

19 qui concerne des combattants, ils étaient moins nombreux. Je ne peux pas

20 vous dire de façon certaine combien de soldats blessés de l'UCK il y avait.

21 Je ne peux vous présenter ceci que sous l'angle professionnel qui est le

22 mien.

23 Q. Maintenant, vous me dites qu'en fait il ne vous est pas possible de

24 dire combien de soldats l'UCK avait, alors que vous étiez bien leur

25 médecin ?

26 R. Oui. J'étais médecin, mais pour toute la population et aussi pour

27 l'UCK. Je n'avais aucune raison de savoir quoi que ce soit ou de

28 m'intéresser à la question, et c'est vrai encore aujourd'hui. J'ai fait

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1 preuve de beaucoup de professionnalisme et j'avais beaucoup de travail

2 professionnel, d'exercice de mon métier à faire.

3 Q. Fort bien.

4 M. VISNJIC : [interprétation] Peut-on montrer au témoin la pièce de la

5 Défense 3D63.

6 Q. C'est un autre rapport établi par le MUP de Serbie; 498/99, c'est le

7 numéro d'ordre. La date est celle du 5 juin 1999. Ce rapport affirme que la

8 police militaire et les organes militaires chargés de l'enquête avaient une

9 patrouille qui assurait la sécurité de ce déplacement, que toutes ces

10 personnes se sont rendues dans le village de Donja Sudimlja le 5 juin 1999

11 afin d'établir un constat sur les lieux. Ces personnes ont été attaquées

12 par des bandes terroristes siptar. Au cours de cette attaque, un véhicule a

13 été endommagé, un autre a dû être abandonné sur place. Une personne a été

14 blessée et un fusil automatique est resté sur les lieux, ainsi qu'un

15 pistolet. On ajoute dans ce rapport, notamment, que l'attaque a été menée à

16 l'aide d'un lanceur de roquettes multiples. Est-ce que vous aviez déjà vu

17 ce document, Docteur ?

18 R. Non, je ne l'ai jamais vu. Je n'ai pas entendu parler, je n'ai vu

19 aucune preuve montrant qu'il y aurait eu un affrontement avec l'UCK près de

20 la maison de Seladin, parce que sa maison, elle est tout près de la mienne.

21 Ce jour-là, je suis allé à Ulqin. J'ai entendu dire qu'il y avait eu des

22 combats dans la partie haute du village, près d'un ruisseau. Je n'exclus

23 pas cette possibilité, mais je ne peux pas non plus la confirmer. Il me

24 faudrait plus de détails, des noms, des noms de famille. Je vous ai donné

25 des détails. Vous dites que le 24 septembre, trois Albanais ont été

26 tabassés, qu'ils se trouvaient à bord d'un tracteur, mais vous ne donnez

27 pas les noms de ces Albanais. Comment voulez-vous que je vous dise si c'est

28 un fait ou pas. J'ai entendu dire que ce jour-là --

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1 Q. Docteur, jusqu'à la date d'aujourd'hui, vous avez fait plusieurs

2 déclarations. Comment se fait-il que vous n'ayez jamais mentionné cet

3 événement ? Comment se fait-il que ce soit seulement aujourd'hui que vous

4 parlez de cette attaque ?

5 R. Je vous l'ai dit, j'en ai parlé, mais il faut faire une distinction

6 très nette entre des choses que j'ai vues et des choses que j'ai entendues.

7 J'ai entendu dire que ceci avait eu lieu, que ceci s'était produit dans la

8 zone de neutralité, près du ruisseau dans le quartier de Rashica. Ce sont

9 des habitants de mon village qui me l'ont dit, mon père aussi, la femme de

10 mon oncle, et quand je suis aussi rentré d'Ulqin.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je voudrais une précision. C'est sans

12 doute de ma faute, mais Seladin, le Seladin en question dans la pièce que

13 vous alliez présenter au témoin, Maître Visnjic, mais que vous n'avez pas

14 présentée, est-ce le même homme que celui qui est mentionné au paragraphe

15 30 de la déclaration préalable ?

16 M. VISNJIC : [interprétation] Exact, Monsieur le Président. Il s'agit bien

17 du même homme. Je voudrais montrer cette pièce au témoin, mais je voulais

18 d'abord aborder ces deux points.

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Attendez. Je termine. Dans la

20 déclaration préalable, dit-on qu'il était le frère de l'accusé -- excusez-

21 moi, mais le frère du témoin ? Pourriez-vous m'aider, Monsieur Marcussen ?

22 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je ne pense pas, Monsieur le Président. Moi

23 aussi, j'essaie de vérifier.

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'est seulement maintenant que je m'en

25 rends compte. Je m'en rends compte peut-être d'un lien de parenté entre ces

26 deux hommes, alors que j'ai lu cette déclaration plusieurs fois déjà.

27 M. MARCUSSEN : [interprétation] Paragraphe 27, me semble-t-il, il est dit

28 ceci : "Je me souviens que ce soir-là j'ai pris un thé avec mon cousin,

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1 Seladin au balcon."

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Alors, ce n'est pas le frère ?

3 M. MARCUSSEN : [interprétation] Mais le témoin n'a rien dit qui irait dans

4 le sens opposé, mais enfin la question précise ne lui a pas été posée. Je

5 ne sais pas si on peut lui poser la question.

6 Q. Seladin, était-il votre frère ou votre cousin ?

7 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est moi qui ai demandé des précisions à

8 propos du 24 et du 28. Seladin, c'était un de mes cousins. Son père et mon

9 grand-père étaient frères. Donc, ce n'est qu'un cousin et un voisin aussi.

10 M. IVETIC : [interprétation] Si M. Marcussen veut poser les questions

11 supplémentaires, ce n'est pas correct.

12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Asseyez-vous. Ecoutez, soyez

13 raisonnable. On essaie simplement de tirer quelque chose au clair. Pourquoi

14 est-ce qu'il faut chaque fois qu'on croit qu'on se trouve dans un tribunal

15 américain quand vous venez dans ce prétoire ? Ne pensez-vous pas qu'on

16 essaie de maîtriser du mieux que nous pouvons la procédure aussi pour

17 établir les faits ?

18 Maître Visnjic, si je vous ai interrompu, c'est parce que jusqu'à présent

19 le témoin l'a dit très clairement, enfin d'après ce que j'avais compris,

20 c'est qu'il s'agissait du frère, en réponse à votre question. Maintenant,

21 apparemment, ce n'est pas son frère. Est-ce que vous le saviez, vous ?

22 M. VISNJIC : [interprétation] C'est aussi juste maintenant que je m'en suis

23 rendu compte qu'apparemment ce n'était pas son frère.

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je suis content de voir que je n'étais

25 le seul à être un peu perturbé ou le seul qui ne sache pas trop où nous en

26 sommes.

27 M. VISNJIC : [interprétation]

28 Q. Je vais vous montrer un nouveau document; 3D64. Ici, vous avez un acte

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1 du tribunal militaire attaché au commandement du Corps de Pristina, le

2 numéro d'ordre est KR 199/99. Ce procès-verbal mentionne le même événement

3 que celui mentionné dans le document précédent portant la cote 3D63, sauf

4 qu'ici ce sont les organes militaires qui se trouvaient sur les lieux qui

5 ont établi ce procès-verbal.

6 Seladin Gerxhaliu et Hatboma Gerxhaliu, qui sont ces hommes ? Ce sont

7 des parents à vous aussi, n'est-ce pas ?

8 R. Seladin Gerxhaliu est un cousin, oui. C'est le fils de mon oncle. Mais

9 l'autre, Hatboma Gerxhaliu, c'est une dame, mais je ne sais pas qui elle

10 est. Je lis bien le cyrillique et si je parviens à comprendre, on parle ici

11 plutôt de Hatboma, mais je crois que l'orthographe n'est pas correcte.

12 Q. Est-ce qu'il existe quelqu'un dans votre famille que cela pourrait

13 être ?

14 R. Cela pourrait être Fatbardha.

15 Q. Monsieur Gerxhaliu, dernier paragraphe de ce procès-verbal - est-ce

16 qu'on peut baisser, on peut voir défiler ce document - on dit que le juge

17 d'instruction et son équipe se sont rendus sur les lieux où apparemment

18 cette douille avait été trouvée, et c'est à peine à 300 mètres de chez

19 vous. C'est à ce moment-là que le véhicule du juge d'instruction a été

20 touché alors qu'il quittait les lieux.

21 R. Ce serait passé quel jour ?

22 Q. Le 5 juin 1999.

23 R. Je vais vous demander de ne pas semer la confusion dans mon esprit à

24 cause des dates, parce que c'est ce jour-là que je suis allé à Ulqin, et je

25 vous l'ai déjà dit, j'avais entendu dire qu'il y avait eu un combat mais

26 pas près de chez moi. Il n'y a pas eu de combat près de chez moi, à

27 proximité de ma maison, parce que les forces serbes, l'armée et la police

28 étaient là, tout près.

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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Visnjic, selon vous, ce

2 document porte sur quelle enquête ou une enquête sur quoi ?

3 M. VISNJIC : [interprétation] C'est une enquête menée suite à l'assassinat

4 de 12 personnes, enquête ou constat effectué le 5 juin 1999. C'est la

5 deuxième étape de l'enquête, si j'ai réussi à bien comprendre les choses.

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, oui. C'est bien ce que je

7 croyais, moi aussi, avoir compris, jusqu'au moment où je vois qu'on

8 mentionne une douille. Alors, ce n'était pas une enquête --

9 M. VISNJIC : [interprétation] Oui, c'est exact. C'est exact, Monsieur le

10 Président, l'endroit où on a trouvé cette douille, et c'est le parent

11 appelé Hatboma, ou quelque chose comme cela. C'est la douille qui a été

12 remise par cette personne à la police, et cette personne a emmené la police

13 à l'endroit où cette douille a été trouvée. C'était simplement à quelque

14 centaine de mètres de la maison du témoin. Ils ont été attaqués et ceci

15 avait été expliqué de façon plus détaillée dans le document précédent,

16 3D63. Là, ils ont été attaqués et ils ont dû laisser le véhicule, et un

17 blessé, et ainsi de suite, comme le décrit le document précédent.

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous n'êtes pas censé déposer. Je vous

19 demande de simplement répondre à la question que je vous ai posée.

20 Avançons, parce que ce témoin n'a pas de connaissances directes

21 personnelles de ces événements.

22 M. VISNJIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

23 Q. Dans votre déclaration préalable -- un instant, s'il vous plaît. Au

24 paragraphe 10, vous déclarez -- et si nous revenons au 2 mai. Le convoi qui

25 allait de Slakovace à Vucitrn, il y avait environ 40 000 personnes dans ce

26 convoi. Dans la déclaration que vous avez fournie le 18 juin 1999 à Ulcinj,

27 déclaration fournie aux enquêteurs du bureau du Procureur, vous déclarez

28 qu'il y avait 20 000 personnes dans ce convoi. D'où vient cette

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1 différence ? Comment est-ce que ce chiffre a doublé pour passer de 20 000 à

2 40 000 ?

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je ne lis pas cela dans le paragraphe

4 10. Ou peut-être --

5 M. VISNJIC : [interprétation] Excusez-moi, je me suis trompé. C'est au

6 paragraphe 11.

7 M. MARCUSSEN : [interprétation] Puis-je intervenir, Monsieur le Président ?

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui.

9 M. MARCUSSEN : [interprétation] Me Visnjic pourrait-il préciser de quelle

10 déclaration il parle quand il parle d'une déclaration du 18 juin 1999 ? Il

11 y avait eu des notes, mais il n'y a pas d'entretien ou d'interrogatoire

12 mené par le bureau du Procureur. J'aimerais que la clarté soit faite sur ce

13 point.

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce possible, Maître Visnjic ?

15 M. VISNJIC : [interprétation] Mais j'avais compris que c'était un document,

16 des notes venant d'un entretien avec le représentant du bureau du

17 Procureur. C'était le Témoin 33, et la page est K00186. C'est cette

18 déclaration que le témoin a fournie à Ulcinj, le 18 juin 1999. C'était

19 Muriel Rodrigues qui avait pris ces notes.

20 M. LE JUGE BONOMY : [aucune interprétation]

21 M. MARCUSSEN : [interprétation] Oui, j'ai bien ce document. Mais la commis

22 à l'affaire vérifie une fois de plus. A notre connaissance, ce ne sont pas

23 des notes recueillies par le bureau du Procureur, mais plutôt par le groupe

24 de crise ou le Groupe international de crise.

25 M. VISNJIC : [interprétation] Ce n'est pas comme cela que je présenterais

26 les choses. C'est parce que nous, nous avons reçu ceci sous une forme tout

27 à fait différente de la forme utilisée ou du formulaire, du type de

28 document utilisé par ce Groupe international de crise. Peut-être est-ce

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1 votre système qui nous pose problème une fois de plus ?

2 M. MARCUSSEN : [interprétation] Apparemment, ce sont des notes recueillies

3 par quelqu'un qui travaillait pour ce Groupe international de crise. Autre

4 exemple de document qui, par la suite, a été saisi dans une base de

5 données.

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Au bout du compte, peu importe qui a

7 recueilli des notes, ce qui compte, c'est que c'est une déclaration qui,

8 apparemment, serait différente, même si ce n'est pas si simple que cela.

9 Posez votre question, Maître Visnjic, et surtout, n'oubliez pas que ce qui

10 nous intéresse, ce sont les questions importantes, et pas les questions qui

11 sont plutôt mineures, secondaires.

12 M. VISNJIC : [interprétation] J'avais posé cette question au témoin déjà.

13 Q. Le 18 juin 1999, vous dites, Monsieur le Témoin, qu'il y avait 20 000

14 personnes dans ce convoi. En 2000, cependant, vous dites qu'il y en avait

15 40 000. Expliquez-nous cette différence.

16 M. VISNJIC : [interprétation] Dans l'intervalle, peut-on présenter au

17 Témoin la pièce P1231. Enfin, pourrait-on la préparer ?

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] On laisse entendre qu'il y a une

19 différence entre les chiffres. Pouvez-vous vous expliquer ?

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. C'était en juin,

21 je pense, que j'ai fourni cette déclaration à un enquêteur. Même à cette

22 époque-là, j'ai parlé de 40 000 personnes. Il y a peut-être eu une erreur

23 au moment de la traduction, au moment de la saisie de ce que j'ai dit. Mais

24 j'insiste une fois de plus : à Ulqin déjà, j'ai déclaré qu'il y avait 40

25 000 personnes dans ce convoi. C'est un chiffre approximatif, parce que je

26 n'avais pas compté chacune de ces personnes, bien entendu, mais c'est le

27 nombre que j'ai donné à l'époque et que j'ai répété plus tard, 40 000.

28 M. VISNJIC : [interprétation]

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1 Q. Bien. Lorsque vous avez dit que l'UCK vous a donné l'ordre de quitter

2 le territoire de Cecelija et de Slakovce parce qu'ils ne pouvaient plus le

3 défendre, quelles sont les instructions qui ont été données aux civils ?

4 Est-ce qu'on leur a dit de prendre la route allant à Vucitrn ?

5 R. Je l'ai dit aussi dans ma déclaration préalable. On m'a proposé d'y

6 aller, mais j'ai rejoint ma famille qui se trouvait dans le convoi, et

7 comme on n'avait rien à manger et pas de moyens, pas de toilettes, pas de

8 sanitaire, il y avait des maladies qui commençaient à se propager parmi les

9 membres du convoi, de la colonne, et nous avons dû quitter de Sllakovc en

10 direction de Ceceli dans l'espoir de pouvoir arriver en Macédoine ou en

11 Albanie ou encore au Monténégro.

12 Excusez-moi, je voulais simplement terminer. Je vous demanderais de ne pas

13 me harceler, et c'est aussi de toute façon dans l'intérêt des interprètes.

14 Certains d'entre nous espéraient survivre en dépit du fait que nous savions

15 que nous allions devoir traverser deux positions dans le quartier de

16 Rashica ainsi qu'à Sfaracak i Eperm --

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, mais vous ne répondez pas à la

18 question, c'est pour cela que je vous interromps. Nous avons déjà beaucoup

19 d'éléments dans la déclaration écrite, donc essayons de nous borner à

20 répondre aux questions posées.

21 Où est-ce qu'on trouvera dans la déclaration préalable qu'il a reçu

22 l'ordre de l'UCK de partir ?

23 M. VISNJIC : [interprétation] Dans le compte rendu, oui.

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Voici la question posée. Lundi, vous

25 aviez dit que l'UCK vous avait donné l'ordre de partir, parce que l'UCK ne

26 pouvait plus défendre ce territoire. Est-ce qu'on vous a dit d'emprunter un

27 itinéraire précis ?

28 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. On ne nous a pas donné d'indications à

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1 suivre. Ils ont dit simplement qu'ils ne pourraient plus nous protéger.

2 C'est pour cela qu'on a dû prendre cette route pour aller à Ceceli --

3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous avez répondu à la question, et si

4 Maître Visnjic veut vous en poser une autre, il le fera. Essayons de

5 limiter les réponses aux questions posées.

6 M. VISNJIC : [interprétation]

7 Q. Est-ce qu'ils vous ont dit d'aller en Macédoine ou en Albanie,

8 Docteur ?

9 R. Non, non. Personne ne nous a rien dit. C'est ce que nous voulions,

10 nous.

11 Q. J'aimerais vous montrer une pièce de l'Accusation, P1231, dont j'ai

12 parlé précédemment. Il s'agit là d'un rapport du MUP. Je vous demanderais

13 d'examiner le troisième paragraphe qui dit : "17 000 à 19 000 habitants ont

14 quitté le territoire de la municipalité de Vucitrn de leur plein gré, dans

15 leurs propres véhicules à moteur."

16 A votre connaissance, Docteur, s'agit-il de ce qui s'est effectivement

17 passé ? Est-ce que ce chiffre est exact ?

18 R. Je ne peux pas vous le confirmer, car je n'étais pas en mesure des les

19 compter.

20 Q. Pouvez-vous nous confirmer si 8 000 personnes sont restées ?

21 R. Ce que je sais et ce que j'ai dit dans ma déclaration préalable, c'est

22 qu'entre le 2 et le 4 mai, ma famille se trouvait à la coopérative agricole

23 de Vushtrri, et étant donné qu'ils n'avaient pas les moyens de se rendre

24 soit en Albanie, soit en Macédoine, ils sont rentrés. Mais quant au fait de

25 savoir combien sont partis et combien sont restés, il s'agit là de quelque

26 chose auquel je ne peux pas m'exprimer.

27 Q. Par conséquent, votre famille voulait aller en Macédoine ou en Albanie,

28 mais elle n'a pas pu le faire, car elle n'en avait pas les moyens ? C'est

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1 cela, la conclusion que vous tirez, n'est-ce pas ?

2 R. Oui, oui. C'est ce que je conclus.

3 M. VISNJIC : [interprétation] Je vous remercie. Je n'ai plus de questions à

4 poser, Monsieur le Président.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci, Maître Visnjic.

6 Maître Aleksic.

7 M. ALEKSIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je pense que Me

8 Visnjic, mon confrère, a été très complet. Je n'aurai que quelques

9 questions supplémentaires.

10 Contre-interrogatoire par M. Aleksic :

11 Q. [interprétation] Je m'appelle Aleksandar Aleksic, et c'est avec Me

12 Ackerman que je défends les intérêts du général Nebojsa Pavkovic. J'ai

13 quelques questions à vous poser qui, j'espère, seront très précises. Je

14 vais vous demander d'essayer de répondre aussi de façon très concise, de

15 préférence par oui ou par non.

16 Docteur Gerxhaliu, nous avons une première déclaration préalable que vous

17 avez fournie après les événements qui font l'objet de votre déposition.

18 C'est une déclaration faite à une organisation qui s'appelle Groupe

19 international de crise. Est-ce que vous vous souvenez avoir fait cette

20 déclaration ?

21 R. Bonjour, Monsieur. Qu'est-ce que vous me dites, là ? Vous parlez de

22 quelle déclaration ? Quand, comment ?

23 Q. Monsieur, le bureau du Procureur nous a communiqué votre déclaration,

24 une déclaration que vous avez faite à ce groupe, "International Crisis

25 Group", que nous appellerons GIC désormais, lorsque vous étiez sans doute à

26 Ulcinj. Vous ne donnez pas de détails en ce qui concerne la date. Vous

27 l'avez sans doute faite le 18 juin 1999, lorsque vous étiez encore à

28 Ulcinj.

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1 R. Oui, c'est cela.

2 Q. Dans cette déclaration préalable, vous décrivez plusieurs incidents.

3 Prenons le troisième, qui concerne les événements du 2 mai. Vous avez dit

4 que le convoi a vu quelques soldats s'approcher, vous le dites dans cette

5 déclaration, et vous décrivez ces hommes qui se sont approchés du convoi

6 comme étant des paramilitaires portant des masques verts et noirs, des

7 bandanas, avec le visage peint; est-ce exact ?

8 R. Oui.

9 Q. Un peu plus loin dans cette même déclaration fournie au GCI, vous

10 faites état d'un incident survenu le 31 mai 1999. Vous décrivez ces

11 effectifs, et lorsque vous parlez des forces serbes, vous dites que c'était

12 des forces paramilitaires; est-ce exact ?

13 R. Oui. Il y avait des militaires et des paramilitaires.

14 Q. Monsieur Gerxhaliu, dans votre déclaration préalable, il est dit : "Le

15 témoin pense à des forces paramilitaires." Est-ce de cette façon-là que

16 vous avez interprété les choses qui ont eu lieu le 31 mai ?

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais ceci confirme uniquement

18 qu'apparemment, ce n'est pas une déclaration, on dit que ce sont les

19 impressions qu'a eues la personne à qui ce témoin s'adressait.

20 M. MARCUSSEN : [interprétation] Monsieur le Président --

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Un instant.

22 M. ALEKSIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président. Je

23 vais passer à autre chose.

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

25 M. ALEKSIC : [interprétation] Je passerai à autre chose que cette

26 déclaration.

27 Q. Docteur, vous dites que vous avez été membre de l'UCK et que de jour

28 vous travailliez à l'hôpital d'Etat, et que de nuit vous travailliez dans

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1 les hôpitaux de campagne de l'UCK pour y soigner les membres de l'UCK, et

2 ceci à partir de 1998; est-ce exact ?

3 R. Oui. ****

4 Q. Vous est-il arrivé de soigner un blessé serbe, respectant ainsi le

5 serment d'Hippocrate ?

6 R. Je n'ai pas eu l'occasion de soigner des blessés serbes parce que,

7 s'ils avaient des blessés, ils ne les amenaient pas à notre hôpital, ils

8 les envoyaient dans un service mieux équipé en ville.

9 Q. Merci. Un peu plus loin, à la page 3 de la déclaration préalable que

10 vous avez fournie au Bureau du procureur, et je ne pense pas que ceci soit

11 contesté, il n'est pas contesté qu'il y avait des affrontements quotidiens

12 entre l'UCK et l'armée serbe, ce qui veut dire que vous étiez tout le temps

13 occupé; est-ce exact ?

14 R. Oui, j'étais très occupé tout le temps, c'est exact, parce que j'étais

15 pratiquement le seul médecin.

16 Q. Merci. Pouvez-vous nous dire quel était votre éloignement des combats ?

17 A quelle distance vous vous trouviez au plus près et au plus loin par

18 rapport à ces combats ?

19 R. Je n'ai jamais été à proximité immédiate des combats, au milieu des

20 combats. Je me trouvais toujours à l'hôpital qui aujourd'hui a été

21 transformé en musée. J'ai entendu des tirs, mais c'était à plusieurs

22 kilomètres de là.

23 Q. Merci. Dans la suite de votre déclaration, vous dites que le 31 mai au

24 matin, vers 4 heures du matin, vous avez entendu que l'ancienne caserne

25 serbe avait été touchée par deux obus.

26 R. Ce n'étaient pas des grenades à main, mais il y a eu deux explosions de

27 la part des forces de l'OTAN.

28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] De quel paragraphe s'agit-il, Maître

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1 Aleksic ?

2 M. ALEKSIC : [interprétation] Monsieur le Président, il s'agit de la page

3 7, du deuxième paragraphe de la page 7, le paragraphe 28.

4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci, Maître Aleksic, merci.

5 Q. Je vous prie de m'excuser, Monsieur le Témoin, je n'avais pas à

6 l'esprit grenades à main. C'est un problème de traduction, mais vous avez

7 bien répondu.

8 Vous avez dit, on peut voir cela aux lignes 15 et 16 du compte rendu

9 d'audience, page 8, qu'il y avait une quantité importante de munitions dans

10 cette caserne. Savez-vous si quiconque se trouvait dans cette caserne ?

11 R. Je l'ignore. Je sais uniquement qu'il s'agissait d'une ancienne caserne

12 et qu'elle a été bombardée par les avions de l'OTAN. Ici, on voit qu'il est

13 question de "deux obus." Je ne sais pas de quoi il s'agissait exactement,

14 mais je sais que c'étaient des explosions très importantes qui nous ont

15 réveillés tôt le matin.

16 Q. Merci. Une dernière question. Vous dites au terme de votre déclaration

17 que vous avez quitté ensuite le Kosovo, et qu'une fois que vous vous êtes

18 rendu en Serbie, que vous étiez passé en Serbie, il n'y avait plus aucun

19 problème; est-ce exact ?

20 R. Oui.

21 Q. Merci.

22 M. ALEKSIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je n'ai

23 pas d'autres questions pour ce témoin.

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci, Maître Aleksic.

25 Maître Fila.

26 M. FILA : [interprétation] Nous n'avons pas de questions. Merci, Monsieur

27 le Président.

28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître O'Sullivan.

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1 M. O'SULLIVAN : [interprétation] Nous n'avons pas de questions.

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Cepic.

3 M. CEPIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. J'aurais des

4 questions à poser à ce témoin.

5 Contre-interrogatoire par M. Cepic :

6 Q. [interprétation] Je me présente, Djuro Cepic, et je fais partie de

7 l'équipe de Défense de M. Vladimir Lazarevic. Je vais proposer un certain

8 nombre de questions, et pour que cela aille aussi vite que possible, je

9 vous demanderais de répondre de façon concise et claire. Pour ma part, je

10 m'efforcerai d'être aussi clair que possible.

11 M. CEPIC : [interprétation] J'aimerais que l'on montre la pièce P4 de

12 l'Accusation et la partie qui concerne la minute 4, seconde 20.

13 [Diffusion de cassette vidéo]

14 M. CEPIC : [interprétation] Arrêtez.

15 [Diffusion de cassette vidéo]

16 M. CEPIC : [interprétation] Je demanderais que l'on fasse une pause ici,

17 sur cette image-là, merci.

18 Q. La personne que nous voyons ici à l'écran, vous serez d'accord avec moi

19 pour dire qu'elle porte l'uniforme de l'ex-JNA ou de l'armée yougoslave;

20 est-ce exact ?

21 R. Je ne vois pas très clairement. Je vois quelqu'un de dos.

22 Q. Je vous demande de vous prononcer sur l'uniforme qu'il porte et la

23 couleur de cet uniforme.

24 R. C'est très fou, je n'arrive pas à voir.

25 Q. Mais est-ce que vous arrivez à voir qui se trouve sur cette image ?

26 R. Non. Je ne sais pas qui c'est, mais je vois que là, il y a des

27 Albanais.

28 Q. Bien. Est-ce que vous êtes d'accord avec moi pour dire qu'il s'agit là

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1 d'un membre de l'UCK ?

2 R. Je ne peux ni confirmer ni affirmer ce que vous dites. Je ne vois qu'un

3 insigne sur cette image, et l'image elle-même n'est pas claire.

4 Q. Docteur Gerxhaliu, quel uniforme portait l'UCK ?

5 R. Ils portaient des uniformes de camouflage verts et ils avaient leur

6 propre insigne où on pouvait lire : UCK. La police militaire, elle portait

7 des uniformes sombres, noirs, avec son propre emblème.

8 Q. Est-ce que les membres de l'UCK portaient des vêtements civils et des

9 armes à la main ?

10 R. Non.

11 Q. Merci.

12 M. CEPIC : [interprétation] J'aimerais que l'on montre la suite de cette

13 séquence.

14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Avant que nous n'avancions, qu'est-ce

15 que cette séquence vidéo est censée représenter ?

16 M. CEPIC : [interprétation] Il s'agit là d'un élément que ce témoin a

17 apporté, d'un élément de preuve qu'il a apporté, c'est-à-dire un film

18 montrant le convoi du 2 mai, et le témoin dit que les membres de l'UCK

19 portaient un uniforme donné, d'une couleur donnée, alors cette séquence

20 vidéo --

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Un instant, je vous prie. J'aimerais

22 savoir exactement ce que représente ce film. On n'y fait pas référence dans

23 la déclaration préalable du témoin. Par conséquent, j'aimerais être au

24 clair quant à la nature de cette séquence vidéo.

25 M. CEPIC : [interprétation] Cette séquence a été communiquée dans

26 l'ensemble de pièces de l'Accusation en rapport avec ce témoin. Il s'agit

27 là des événements du 2 mai 1999, ou c'est ainsi que j'ai pu le comprendre,

28 du moins pour l'instant. Nous avons reçu cette séquence vidéo avec la liste

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1 des éléments de preuve de l'Accusation, et elle porte la cote P4.

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

3 Monsieur Marcussen.

4 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je suis d'accord avec mon éminent confrère

5 pour dire que cela concerne les événements du 2 mai. J'ai cru comprendre

6 qu'il s'agit d'une vidéo qui a été prise après les événements, donc le 3 ou

7 le 4, qui ne montre pas à proprement parler le convoi, et peut-être que

8 cette séquence était en rapport avec les inhumations. Mais cela a été amené

9 par un autre témoin. Je ne sais pas si --

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Cela suffira pour l'instant.

11 Je vous demande de poursuivre, Maître Cepic.

12 M. CEPIC : [interprétation] Très bien.

13 Je vous demanderais de montrer la suite de cette vidéo.

14 [Diffusion de la cassette vidéo]

15 M. CEPIC : [interprétation] Pour que nous ne perdions pas de temps,

16 pourrions-nous revenir en arrière, une minute plus tôt ? Une minute en

17 arrière, s'il vous plaît, c'est-à-dire à partir de 3 minutes 20 secondes.

18 Pourrions-nous faire un arrêt sur l'image ici, à 3 minutes 30 ? Pourrait-on

19 faire un arrêt sur l'image à 3 minutes 30, s'il vous plaît, 3 minutes 30

20 secondes ? Encore un peu, je vous prie. Ici, pouvons-nous faire un arrêt

21 sur l'image ici ?

22 Q. Est-ce qu'on voit ici à l'image un membre de l'UCK, ou plutôt deux ?

23 Est-ce qu'à droite, on a un membre de l'UCK ?

24 R. On ne voit pas très clairement.

25 M. CEPIC : [interprétation] Est-ce qu'on pourrait peut-être diffuser la

26 suite de cette vidéo ?

27 [Diffusion de la cassette vidéo]

28 M. CEPIC : [interprétation]

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1 Q. Est-ce qu'à droite de l'homme en uniforme, on voit un membre de l'UCK ?

2 R. Je ne le reconnais pas. Je peux reconnaître le premier, parce qu'il

3 porte cet uniforme et cet insigne. Pour ce qui est du deuxième, peut-être

4 est-il membre de la police militaire de l'UCK ou quelqu'un qui a volé une

5 arme à quelqu'un d'autre, qui a pris une arme à quelqu'un d'autre. Mais

6 pour celui qui porte l'uniforme, je peux confirmer que c'était un membre de

7 l'UCK.

8 Q. Mais s'il était membre de la police militaire de l'UCK, il semble

9 porter des vêtements civils.

10 J'aimerais savoir si l'on voit un membre de la police militaire de

11 l'UCK qui porte des vêtements civils et qui porte un fusil avec une crosse

12 en bois à la main.

13 R. La personne qui porte des vêtements civils, je ne sais pas s'il porte

14 des vêtements civils ou alors s'il porte un uniforme noir. Peut-être qu'il

15 a pris une arme à un autre membre de l'UCK, et cet autre membre de l'UCK,

16 peut-être qu'il est en train de lui porter son arme. J'étais civil moi-même

17 et je ne portais jamais d'arme.

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] M. Marcussen souhaitait intervenir.

19 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je crois que le compte rendu a finalement

20 été éclairci. Je ne pense pas que le témoin ait dit qu'il s'agisse là d'un

21 membre de la police militaire de l'UCK.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Non, il ne l'a pas dit. Il ne l'a pas

23 dit la première fois non plus, et je pense que sa position est claire : il

24 ne sait pas.

25 Maître Cepic.

26 M. CEPIC : [interprétation]

27 Q. Mais à ce moment-là, pourquoi porte-t-il un sac à dos et pourquoi

28 porte-t-il un fusil à l'épaule droite, tout comme l'autre personne qui

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1 porte aussi un sac à dos sur son dos ?

2 R. Je crois qu'il porte l'arme de l'homme qui est en uniforme. En tout

3 cas, c'est ce que je suppose, mais je ne peux pas l'affirmer avec

4 certitude.

5 M. CEPIC : [interprétation] Pouvons-nous diffuser la suite de la vidéo,

6 s'il vous plaît ?

7 [Diffusion de la cassette vidéo]

8 M. CEPIC : [interprétation] Je vous prie de faire un arrêt sur l'image ici.

9 M. CEPIC : [interprétation]

10 Q. L'homme qui porte une veste sombre, une veste de ski, pouvez-vous être

11 d'accord avec moi pour dire qu'il s'agit là aussi d'un membre de l'UCK ?

12 R. Non, je ne suis pas d'accord. Tous les membres de l'UCK portaient

13 l'uniforme, portaient des armes et étaient différents des civils. J'étais

14 le seul à l'UCK qui était civil.

15 Q. Mais alors pourquoi il y en a un qui porte un pantalon de camouflage,

16 qui porte un blouson, un anorak et quelque chose sur le dos ? Nous allons

17 revenir ultérieurement à ce dont il s'agit.

18 R. Je crois qu'il s'agit là de détails dont nous ne devons pas parler ici.

19 Je l'ai dit très clairement : tous les membres de l'UCK devaient porter des

20 uniformes et des armes. Là, nous avons peut-être quelqu'un qui demande à un

21 ami ou à une connaissance de lui garder son arme parce qu'il veut manger

22 quelque chose ou parce qu'il doit se rendre quelque part, dire bonjour à

23 quelqu'un.

24 M. CEPIC : [interprétation] Je vous demanderais de diffuser la suite de la

25 séquence vidéo, s'il vous plaît.

26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Uniquement si vous souhaitez montrer

27 autre chose, si vous souhaitez passer à autre chose.

28 M. CEPIC : [interprétation] Je vous prie de m'excuser, mais j'ai encore des

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1 questions à poser --

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous ne devez pas vous excuser par

3 avance. Si j'estime que vous avez épuisé un point, je vous demanderai de

4 passer à autre chose, mais c'est à vous de décider comment vous souhaitez

5 mener votre contre-interrogatoire, à condition que cela mène quelque part.

6 M. CEPIC : [interprétation] Je vous demanderais de diffuser la suite de la

7 vidéo et de ne pas revenir en arrière.

8 [Diffusion de la cassette vidéo]

9 M. CEPIC : [interprétation]

10 Q. Que porte sur le dos la personne qui porte un gilet dont nous avons

11 parlé tout à l'heure, qui porte un gilet civil ?

12 R. Est-ce qu'on pourrait peut-être avancer un peu, pour qu'on voie mieux ?

13 [Diffusion de la cassette vidéo]

14 LE TÉMOIN : [interprétation] Pour moi, il ne porte rien.

15 Q. Très bien.

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais apparemment, il est bien en train

17 de porter quelque chose à l'épaule, non ?

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce qu'on pourrait peut-être remontrer ?

19 Parce que là, vous me demandez ce qu'il portait sur son dos. Je ne vois

20 rien sur son dos.

21 [Diffusion de la cassette vidéo]

22 LE TÉMOIN : [interprétation] Il ne porte rien.

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] La personne qui porte une veste

24 matelassée d'une couleur plus ou moins violette, qui est à côté de la

25 personne qui porte un chapeau, une casquette, que porte-t-il sur son épaule

26 gauche ?

27 LE TÉMOIN : [interprétation] Vous voulez dire, cette personne-là qui se

28 trouve de l'autre côté ? La personne au milieu ? La personne qui porte cet

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1 anorak violet ?

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui.

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Je crois qu'il est en train de porter quelque

4 chose qui ressemble à une arme, mais l'autre, lui, ne porte rien.

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien, passons à autre chose.

6 M. CEPIC : [interprétation] J'aimerais que l'on diffuse la suite de la

7 vidéo à partir de la minute 4, la minute 4.00.

8 [Diffusion de la cassette vidéo]

9 M. CEPIC : [interprétation] Oui, je vous demanderais de diffuser la suite.

10 Voilà. Stop.

11 Q. Sur la droite de l'image, on voit quelqu'un qui porte une veste noire,

12 qui porte un jean et qui porte un béret avec un insigne et qui porte

13 également un fusil à l'épaule droite. Est-ce que c'est un membre de l'UCK ?

14 R. Je ne pense pas.

15 Q. Mais alors, de qui s'agit-il, pour qu'il puisse se promener librement

16 avec une arme comme cela ? Est-ce que ce serait peut-être un soldat serbe ?

17 R. Non. C'est peut-être un parent d'un soldat, un membre de la famille

18 d'un soldat qui lui aurait confié son arme pour faire autre chose. Je ne

19 vois pas très bien son béret; peut-être que lui aussi appartient au soldat

20 en question.

21 Q. Celui qui est à l'extrême gauche, qu'on voit avec un fusil à la main,

22 est-ce que lui aussi serait un parent de quelqu'un ? Oui, celui-là, oui,

23 qui lui aussi porte des vêtements civils.

24 R. Ecoutez, je n'étais pas présent, mais voilà ce que je pense. Pour

25 autant que j'ai pu le savoir, tous les membres de l'UCK étaient armés. Mais

26 peut-être qu'à un moment donné, ils devaient confier leur arme à quelqu'un

27 d'autre pour aller s'occuper de telle ou telle affaire.

28 Q. Donc, vous nous affirmez que vous ne figuriez pas dans le convoi des

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1 réfugiés, alors qu'avant, vous nous avez dit que vous vous trouviez dans ce

2 convoi; alors où se situe la vérité ?

3 R. Voilà quelle est la vérité. Je me trouvais quelque part au milieu de ce

4 convoi, et pas là, comme vous l'affirmez, parce que comme je vous l'ai dit,

5 ce convoi faisait plusieurs kilomètres de long.

6 Q. Merci.

7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous étiez sur le point d'intervenir

8 au sujet de la date ?

9 M. MARCUSSEN : [interprétation] Oui.

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ne vous inquiétez pas, nous saurons

11 nous débrouiller avec ce genre de chose.

12 M. CEPIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Un instant, je vous prie.

14 Docteur, peut-être pourrait-on avancer que des personnes loyales à la cause

15 des Albanais qui ont participé à ce conflit pensent qu'il faille à tout

16 prix affirmer que des civils ou que des personnes qui étaient civiles, par

17 ailleurs, n'aient pas pris les armes, à savoir que l'UCK était une

18 organisation militaire à proprement parler bien structurée, car peut-être

19 estime-t-on que les civils qui sont allés jusqu'à porter des armes et à les

20 utiliser devraient être protégés. Si vous pensez que vous devez protéger

21 ces personnes en déposant ici, vous auriez tort d'être de cet avis, parce

22 que vous ne rendriez pas service aux habitants du Kosovo qui souhaitent que

23 justice soit faite. Il est important que nous apprenions par vous la

24 totalité de la vérité, car votre déclaration solennelle vous engage à nous

25 dire toute la vérité.

26 Je ne suis pas en train de commenter votre déposition, mais je ne

27 fais qu'exprimer une préoccupation, à savoir que l'on parle de personnes

28 portant des vêtements civils qui auraient participé à des combats ou à des

Page 2577

1 activités liées à des combats contre les forces serbes. Nous souhaitons

2 absolument faire la lumière sur cela. Nous savons que vous étiez médecin,

3 que vous avez soigné des combattants blessés. Par conséquent, je vous

4 demanderais de bien garder cela présent à l'esprit au moment où vous

5 répondez aux questions des conseils de la Défense qui vous demandent si

6 parfois les personnes qui ont participé aux activités de l'UCK portaient

7 des vêtements civils, au moins en partie, plutôt qu'un uniforme au sens

8 strict.

9 Maître Cepic.

10 M. CEPIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

11 Q. Docteur Gerxhaliu, avez-vous fait votre service militaire au sein de la

12 JNA ?

13 R. Je vous prie de m'excuser, mais j'aimerais ajouter quelque chose en

14 guise d'explication.

15 J'ai prononcé une déclaration solennelle par laquelle je me suis

16 engagé à dire la vérité, et comme je vous l'ai dit, je ne suis en mesure ni

17 de confirmer ni d'infirmer qu'il y a eu des membres de l'UCK qui portaient

18 des vêtements civils. Je ne peux que confirmer ce que j'ai vu de mes

19 propres yeux. Si je n'ai vu que des membres de l'UCK portant un uniforme,

20 alors c'est ce que je dirai, c'est ce que je suis en mesure de confirmer.

21 Je souhaite également que les personnes responsables rendent des

22 comptes parce que les innocents, indépendamment de leur appartenance

23 ethnique, devraient vivre ensemble dans l'optique d'une intégration à

24 l'Europe et à la démocratie.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je suis pleinement conscient de cela,

26 Docteur, et je suis prêt à reconnaître que votre déposition dans le cadre

27 de cette affaire a montré que vous étiez prêt à faire preuve de franchise

28 et à reconnaître un certain nombre de choses en toute franchise quant aux

Page 2578

1 activités de l'UCK.

2 Mais vous devez bien comprendre que si à chaque fois que l'on vous

3 montre quelqu'un qui porte une arme, vous nous dites qu'il est peut-être en

4 train de la garder parce qu'un ami lui a confiée, il est très difficile

5 pour nous, compte tenu d'un certain nombre de considérations et de bon

6 sens, d'accepter ce type d'explication. Par conséquent, je souhaitais faire

7 cette mise en garde dans l'optique de vos réponses aux questions suivantes.

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

9 M. CEPIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. J'aimerais passer

10 à une autre question, car je crois que nous avons reçu des réponses claires

11 sur ce point, en tout cas, c'est là mon point de vue.

12 Q. Dans votre déclaration préalable, vous avez dit dans quelle direction

13 allait ce convoi de Slavkovace jusqu'à Cecelija, puis jusqu'à Gornja et

14 Donja Sudimlja, donc du nord vers le sud; est-ce exact ? Est-ce la

15 direction qui a été empruntée ?

16 R. Oui.

17 Q. Merci. A la page 4, un peu plus loin, au paragraphe 5 de la version

18 anglaise, et à la page 5, paragraphe 5 de la version en albanais, vous

19 dites que près du convoi se trouvaient des membres de l'armée serbe et des

20 paramilitaires et qu'ils sont venus du nord, tandis que vous, vous vous

21 cachiez dans la remorque de votre tracteur de manière à ne pas être

22 reconnu. Aviez-vous peur que des Serbes de la zone vous reconnaissent ?

23 R. J'avais peur de tout le monde, parce qu'en tout état de cause, les

24 Serbes de la zone armés, les paramilitaires, les militaires, ils

25 exécutaient tous les jeunes dans le convoi. J'ai déjà déposé sur certains

26 incidents qui ont eu lieu dans la partie du convoi dans laquelle je me

27 trouvais.

28 Q. Ce n'est pas la question que je vous ai posée. Docteur, Monsieur, je

Page 2579

1 vous invite à répondre de manière brève et concise à mes questions, et

2 claire.

3 Voici la question que j'aimerais maintenant vous poser. Les gens qui se

4 sont approchés du convoi portaient-ils des foulards, des bandanas autour du

5 cou ?

6 R. Certains en portaient, d'autres pas. Ils portaient différents

7 uniformes, parce que comme je l'ai dit, ils se sont approchés du convoi à

8 quatre reprises.

9 Q. Avec du maquillage sur le visage, n'est-ce pas ? Leur visage était

10 maquillé, recouvert de maquillage ?

11 R. Oui.

12 Q. Ils étaient âgés de 30 à 40 ans, n'est-ce pas ?

13 R. Ecoutez, l'obscurité tombait, et j'aurais du mal à dire quel âge ils

14 avaient, mais effectivement ils étaient de différents âges.

15 Q. Ce ne sont pas les gens que nous avons vus il y a quelques instants au

16 convoi. Où se trouvaient-ils à ce moment-là ?

17 R. Cela, c'était le 3 juin. Là, on parle du soir du 2 juin.

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous parlons de mai, pas de juin.

19 Mais effectivement, la question est tout à fait pertinente. La

20 question est la suivante. Même si le film a été tourné le 3 ou le 4 mai, où

21 sont les gens que nous voyons sur ces images le 2 mai ?

22 Si j'ai bien compris la question.

23 M. CEPIC : [interprétation] Tout à fait bien, Monsieur le Président. Mais

24 nous sommes en train de parler de la soirée du 2 mai.

25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Alors, la question qui vous est posée,

26 c'est où étaient les gens que l'on a vus sur les images correspondant au 2

27 mai ? Les avez-vous vus, les uns ou les autres ?

28 LE TÉMOIN : [interprétation] Comme je l'ai dit dans ma déclaration, les

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1 membres de l'UCK ont emmené les blessés le 2 mai. Avec l'unité de l'UCK,

2 ils sont partis en direction de Dumnica pour se rendre dans un lieu plus

3 stratégique. Les membres avaient abandonné le convoi. Il n'y avait plus que

4 moi de l'UCK en tant que civil sur place. Alors que le 3, lorsque cette

5 vidéo a été tournée, ils sont revenus, ils ont pris ces positions afin que

6 l'enterrement des victimes puisse avoir lieu.

7 M. CEPIC : [interprétation]

8 Q. Merci. Quelle a été la distance parcourue par le convoi le 2 juin --

9 pardon, le 3 mai ? Où s'est arrêté le convoi le 3 mai ?

10 R. Il n'y avait plus de convoi le 3 mai. Les survivants du convoi se sont

11 installés à la coopérative agricole tandis que je suis reparti à mon point

12 de départ.

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Alors qu'est-ce qu'on voit sur cette

14 vidéo ?

15 LE TÉMOIN : [interprétation] Cette vidéo a sans doute été réalisée le jour

16 où les soldats de l'UCK se sont repositionnés de manière à pouvoir enterrer

17 les morts. Ces véhicules, ces tracteurs qui étaient restés sur place, comme

18 je l'ai dit, le 3 mai, la route était saturée de tracteurs, de véhicules.

19 Certains avaient été brûlés, d'autres pas, certains avaient été endommagés,

20 et près de ces tracteurs et de ces véhicules, comme je l'ai évoqué dans ma

21 déclaration, il y avait plus de 100 personnes qui avaient été tuées. Il y

22 avait plus de 100 cadavres.

23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que vous êtes en train de nous

24 dire que cette vidéo ne montre pas la présence d'une colonne, d'un convoi ?

25 LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que cette vidéo a été réalisée le 3

26 mai. Les images ne montrent pas la colonne, parce que je l'ai dit, après le

27 3 mai, il n'y avait plus de colonne.

28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci. Bien.

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1 M. CEPIC : [interprétation] Si vous me le permettez, Monsieur le Président,

2 si vous me le permettez, sans abuser du temps qui nous est imparti,

3 j'aimerais montrer un segment de cette vidéo où l'on voit ce convoi en

4 route.

5 Un instant, s'il vous plaît.

6 [Diffusion de cassette vidéo]

7 M. CEPIC : [interprétation]

8 Q. N'est-ce pas là un convoi en mouvement, Docteur ?

9 R. Oui, mais là, c'est ce que l'on voit du 3 mai, à savoir les véhicules

10 qui sont restés sur place et les gens, parce que tous les 40 000 ne

11 pouvaient pas se rendre à la coopérative agricole le 2 mai.

12 Q. Mais vous disiez que le 2 mai au soir, le convoi avait été complètement

13 démantelé, en quelque sorte, qu'il n'en restait pratiquement plus rien ?

14 R. Le 2 mai, le convoi s'est séparé en deux parties. Une partie s'est

15 dirigée vers la coopérative, et l'autre, vous savez ce qui s'est passé,

16 certaines personnes ont été tuées, 200 environ. Le 3 mai, de nombreuses

17 personnes sont revenues sur les lieux pour voir ce qui s'était passé et se

18 sont rassemblées pour procéder aux funérailles.

19 Q. Mais vous avez dit qu'il y avait 40 000 personnes dans ce convoi et que

20 200 personnes ont été tuées. Ceci nous laisse avec 39 800 personnes. Alors,

21 qu'en est-il de ces 39 800 personnes ? Où étaient-elles, combien d'entre

22 elles sont allées à Zadruga, à la coopérative ?

23 R. Je ne saurais le dire. Il faisait nuit et c'était une question d'être

24 ou de ne pas être, comme on dit. Je sais que la majorité est partie là-bas,

25 mais une partie des gens est restée. Ils sont venus le lendemain pour voir

26 qui avait survécu ou qui était parti et pour assister à la cérémonie

27 funéraire.

28 Q. Docteur, si sur chaque tracteur, dans chaque charrette, remorque, il y

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1 avait disons une moyenne de cinq personnes, quelle devrait être la longueur

2 du convoi ou de la colonne en question pour que puissent s'y trouver 40 000

3 personnes ?

4 R. Il y avait plus de cinq personnes par tracteur. Il y avait également

5 d'autres véhicules, pas seulement les tracteurs, et énormément de personnes

6 se déplaçaient à pied, la majorité, d'ailleurs. Il y avait des gens dans

7 des charrettes, dans des voitures, et cetera. Alors à mon avis, le convoi

8 faisait plusieurs kilomètres de long. Malheureusement, je n'ai pas été en

9 mesure de le mesurer d'un bout à l'autre, mais je sais que ce convoi était

10 long. D'après mes estimations, il y avait environ 40 000 personnes dans ce

11 convoi, voire plus.

12 Q. Docteur Gerxhaliu, pourriez-vous me dire quelle est la distance entre

13 Slakovce et Cecelija, et quelle est la distance jusqu'à Gornja Sudimlja ?

14 R. Je n'ai jamais véritablement mesuré la distance entre Sllakovc et

15 Ceceli, mais on peut couvrir cette distance en une demi-heure à peu près.

16 De Ceceli à Studime e Eperme, il faut gravir une colline et ensuite

17 redescendre. La route est un peu escarpée, c'est difficile à pied, mais à

18 l'époque j'étais plus mince. Je faisais dix kilos de moins, alors j'avais

19 plus de facilité à me déplacer.

20 Comme je l'ai dit au début, je n'ai jamais mentionné la moindre

21 distance. Il faudrait s'adresser à des experts pour cela, pas à moi.

22 Q. Vous n'avez donc pas d'idée précise s'agissant des distances dans cette

23 zone dans laquelle vous êtes né ?

24 R. Cela ne m'intéressait pas, parce que je me rendais rarement de ce côté

25 pendant la guerre.

26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je crois que la fin de la dernière

27 question c'était : "Je n'ai jamais mesuré," plutôt que "Je n'ai jamais

28 mentionné." C'est ce qui apparaît dans le compte rendu anglais. J'ai peut-

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1 être tort. Peut-être que les interprètes pourraient réécouter et vérifier.

2 L'INTERPRÈTE : Les interprètes confirment il s'agit bien de mesurer, non

3 pas de mentionner.

4 M. CEPIC : [interprétation] Monsieur le Président, nous pourrions peut-être

5 faire la pause, si vous jugez que le moment est venu.

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous avez encore beaucoup de

7 questions ?

8 M. CEPIC : [interprétation] J'en ai encore pour dix minutes, peut-être 15,

9 en fonction des réponses.

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pensez-vous que nous allons terminer

11 aujourd'hui de ce témoin ou pas ?

12 Maître Ivetic ?

13 M. IVETIC : [interprétation] Je vais essayer, Monsieur le Président. Je

14 vais revoir mes questions au cours de la pause. Je souhaiterais

15 effectivement en avoir terminer aujourd'hui et permettre à l'Accusation de

16 poser ses questions supplémentaires également.

17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci beaucoup. Nous reprendrons à 18

18 heures.

19 --- L'audience est suspendue à 17 heures 30.

20 --- L'audience est reprise à 18 heures 02.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Cepic.

22 M. CEPIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

23 Q. J'aimerais revenir à ce que nous disions avant la pause. Monsieur

24 Gerxhaliu, vous avez décrit le convoi, la colonne, avec le nombre de

25 personnes qui s'y trouvaient et ses mouvements. D'après votre description,

26 j'estimerais à 40 kilomètres de long la longueur de ce convoi, ce qui

27 serait la distance entre Slakovce, si l'on passe par Gornja ou Donja

28 Sudimlja, et de trois à trois kilomètres et demi, n'est-ce pas ?

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1 R. Non, c'est impossible. Impossible qu'il s'agit d'une distance de trois

2 kilomètres et demi, parce que de chez moi à Studime e Eperme, il faudrait

3 marcher pendant une heure. Même pas à vol d'oiseau, ce n'est pas du tout

4 une estimation réaliste de la distance.

5 Q. Pas plus de 15 kilomètres au maximum ?

6 R. Peut-être, plus ou moins. Mais je n'ai pas mesuré cette distance moi-

7 même. Je ne pourrais confirmer avec exactitude la distance que vous venez

8 d'évoquer.

9 Q. Merci. Passons à un autre point. Aujourd'hui, c'est inscrit au compte

10 rendu, vous avez parlé de l'événement qui a eu lieu le 2 mai 1999. Je vous

11 ai posé des questions sur les personnes qui se sont approchées du convoi.

12 Ceci figure à la page 59 du compte rendu d'audience d'aujourd'hui, et vous

13 avez dit qu'il commençait à faire noir et que vous ne parveniez pas, vous

14 n'étiez pas parvenu à distinguer quel était leur âge. Vous avez dit,

15 toutefois, que certains portaient des bandanas autour du cou et qu'ils

16 portaient différents uniformes. Je suppose que vous n'avez pas pu

17 apercevoir leur couvre-chef, n'est-ce pas ?

18 R. Il m'était difficile d'observer ce qui se passait, puisque j'étais à

19 moitié caché dans le tracteur, comme je l'ai dit dans ma déclaration. J'ai

20 surtout entendu ce qu'ils ont dit. Ils parlaient de leurs offensives, de la

21 communication entre eux, mais je n'ai pas vu grand-chose. Quelque chose,

22 mais c'est surtout leurs propos que j'entendais.

23 Q. Je vous remercie. Dans ce même passage de votre déposition, vous avez

24 dit que ces gens, que vous aviez du mal à voir, étaient arrivés dans des

25 véhicules blindés, transporteurs de troupes et dans quelques jeeps; c'est

26 exact ? C'est bien ce que vous avez dit ?

27 R. Oui, effectivement. Ils sont arrivés en véhicules, en transporteurs de

28 troupes, avec tout le matériel militaire dont ils disposaient.

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1 Q. Bien entendu, vous étiez caché, et comme vous l'avez dit plus tôt, vous

2 n'avez pas pu observé les choses précisément.

3 R. Je n'étais pas complètement caché; j'étais à moitié caché. Il y a

4 certaines choses que j'ai vues et d'autres que je n'ai pas vues. Mais comme

5 je l'ai dit, c'est surtout les propos, ce qu'ils disaient que j'entendais.

6 Q. Vous serez d'accord avec moi pour reconnaître que les militaires

7 n'étaient pas les seuls à utiliser des transporteurs de troupes, n'est-ce

8 pas ?

9 R. Je ne sais pas comment était organisée l'armée, l'armée yougoslave à

10 l'époque. Peut-être que la police disposait de ce type de véhicules

11 également. Je n'ai parlé que ce que j'ai vu de mes propres yeux dans ma

12 déclaration.

13 Q. Merci. Vous reconnaîtrez que vous aviez de meilleurs souvenirs de ces

14 événements en 1999, juste après qu'ils se sont produits, n'est-ce pas ?

15 R. Ces événements sont gravés dans ma mémoire. Je ne les oublierai jamais.

16 J'ai dit plus tôt que j'ai un journal dans lequel j'ai noté ces événements.

17 L'évocation de ces événements aujourd'hui est très difficile, peut-être

18 moins pour moi, puisque je suis médecin, mais pour d'autres, l'évocation de

19 ces événements est douloureuse.

20 Q. Docteur Gerxhaliu, le 18 juin 1999, vous avez fait une déclaration à

21 Ulcinj. Cette déclaration a fait l'objet d'une demande de versement au

22 dossier dans le cadre de cette affaire par le bureau du Procureur. Dans

23 cette déclaration, vous faites état d'un certain nombre de faits matériels

24 dans une version différente. Vous y dites que les personnes qui se sont

25 approchées du convoi ressemblaient davantage à des paramilitaires qu'à des

26 membres de la police, qu'ils portaient des cagoules, que leur visage était

27 enduit de maquillage et qu'ils portaient des bandanas verts ou noirs; est-

28 ce exact ?

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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Cepic, vous êtes en train de

2 citer les impressions de quelqu'un tirées des mots du témoin, plutôt que le

3 récit exact fait par ce dernier ?

4 M. CEPIC : [interprétation] Monsieur le Président, je cite des éléments

5 communiqués par l'Accusation.

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui. Vous les avez, mais pas moi. Est-

7 ce qu'il y a une cote ou est-ce que ces éléments pourraient apparaître à

8 l'écran ?

9 M. CEPIC : [interprétation] Donnez-moi un instant, s'il vous plaît.

10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui.

11 M. CEPIC : [interprétation] Dans l'anglais, plus précisément, c'est la page

12 K0218781.

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Non. Le seul numéro qui pourrait nous

14 intéresser, c'est un numéro correspondant à la version électronique. Or, il

15 ne me semble pas que nous disposions de ce document sous version

16 électronique.

17 M. CEPIC : [interprétation] Je m'excuse, Monsieur le Président, mais ceci

18 fait partie d'un ensemble de pièces qui nous a été présenté par le bureau

19 du Procureur. C'est le bureau du Procureur qui nous l'a communiqué.

20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ce ne peut être qu'une pièce dont le

21 versement est demandé, que si cette pièce porte une cote commençant par la

22 lettre P et si ceci figurait dans le résumé présenté au titre de l'article

23 65 ter par l'Accusation. Ceci prend trop de temps. Je ne vais pas vous

24 permettre de poser cette question, puisque nous n'avons pas la pièce

25 correspondante et que d'après les questions précédentes nous n'avons pas de

26 raisons de penser que c'est un récit donné par le témoin. Il s'agit

27 simplement des impressions tirées du témoignage du témoin par la personne

28 qui l'a interrogé. Donc, passons à autre chose.

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1 M. CEPIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Nous n'avions pas

2 l'intention de ne pas gaspiller notre temps précieux. Je voulais juste

3 simplement indiquer que nous avions reçu ce document de l'Accusation.

4 Q. Docteur Gerxhaliu, dans votre déclaration --

5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Excusez-moi.

6 Monsieur Marcussen.

7 M. MARCUSSEN : [interprétation] Je suis un peu préoccupé par ce qui

8 apparaît au compte rendu maintenant. J'aimerais que nous réglions la chose.

9 Ce n'est pas une pièce de l'Accusation; ce n'est pas non plus un document

10 dont l'Accusation demande le versement. J'ai le document avec moi et peut-

11 être mon collègue sera d'accord avec moi pour reconnaître que sur la

12 première page du document, il est dit : "Sur le terrain, nous étions

13 encerclés par les forces de police et les forces armées serbes." Il n'y est

14 aucunement question des paramilitaires. Je crois que le compte rendu n'est

15 plus très clair, maintenant.

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous travaillons sur les faits, nous

17 ne travaillons pas sur des questions, Monsieur Marcussen. Je crois que tout

18 ceci est inutile. Poursuivons.

19 M. CEPIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

20 Q. Docteur Gerxhaliu, dans votre déclaration de 2000, vous avez dit, et

21 vous l'avez confirmé hier, ceci figure maintenant au compte rendu, vous

22 avez donc parlé dans cette déclaration du bombardement. C'est dans votre

23 déclaration, dans la version anglaise, page 3, paragraphe 3; et dans la

24 version albanaise, page 4, paragraphe 1; dans la version B/C/S, paragraphe

25 3, paragraphe 3. Vous y dites, alors que vous vous déplaciez le long du

26 ruisseau, vous avez essuyé des tirs des chars et que les feuilles et les

27 branches étaient arrachées des arbres. Bien entendu, vous n'étiez pas en

28 mesure d'apercevoir ces chars, n'est-ce pas ?

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1 R. J'ai déjà dit que ce ruisseau ou ce cours d'eau faisait deux à trois

2 mètres de profondeur, et que les chars tiraient de la colline dans les

3 quartiers environnants, et qu'au moment des tirs, les projectiles

4 sectionnaient les branches. Chaque fois que ces tirs avaient lieu, nous

5 devions interrompre notre mouvement et nous ne bougions plus, parce que,

6 sinon, nous aurions été touchés. C'est vrai je ne voyais pas très

7 précisément de l'endroit où il se trouvait. Chaque fois qu'il y avait des

8 tirs, nous nous mettions à l'abri.

9 Q. Si j'ai bien compris, vous étiez en contrebas. Vous étiez relativement

10 plus bas que l'endroit où se trouvaient les chars, n'est-ce pas ?

11 R. C'est exact. Les chars étaient positionnés sur deux collines

12 stratégiques. A partir de là, ils pouvaient contrôler Sfaracak jusqu'à

13 Vushtrri, tout ce territoire, avec Studime e Poshteme. Le ruisseau était en

14 contrebas.

15 Q. Merci. Cela suffira. Merci, Docteur.

16 Je suppose que vous ne vous y connaissez pas particulièrement en

17 balistique, n'est-ce pas ?

18 R. Je suis médecin et je ne m'y connais pas.

19 Q. Merci. Savez-vous, Docteur, qu'un char ne peut pas ouvrir le feu selon

20 un angle négatif ? Pour être plus clair, un char ne peut cibler aucune

21 cible qui se trouve plus bas que lui.

22 R. Ecoutez, il n'y avait pas seulement des chars sur place. Il y avait

23 également des lance-roquettes et d'autres types de matériel militaire. Ces

24 branches, ces arbres qui ont été touchés, ils se trouvaient plus haut.

25 C'est la raison pour laquelle nous ne craignions pas que des balles nous

26 touchent, parce que nous, nous étions en contrebas, près du ruisseau.

27 Q. Là, vous parlez de "balles," alors que plutôt vous avez parlé d'obus,

28 de chars. Alors, où est la vérité ?

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1 R. La seule chose que je peux dire, c'est qu'ils utilisaient toute sorte

2 d'équipement militaire pour tirer. Comme je l'ai dit, les arbres au-dessus

3 de nos têtes étaient touchés. Alors s'agissait-il de fragments d'obus ou de

4 balles ou d'autres projectiles encore, je n'en sais rien. La seule chose

5 que je sais, c'est que des branches sont tombées sur le sol et que dès que

6 des projectiles étaient tirés, nous nous mettions à l'abri.

7 Q. Au compte rendu d'audience de votre déposition dans le procès

8 Milosevic, vous avez affirmé que ces positions de la VJ avaient été ciblées

9 de façon très précise par l'OTAN; est-ce exact ?

10 R. Lorsque nous parlons de la caserne qui est située à la sortie du côté

11 droit de Vushtrri --

12 Q. Je ne vous posais pas de question à propos de la caserne. Je peux vous

13 citer le passage concerné, page 4 123, déposition du 2 mai 2002. Une

14 question a été posée à propos des bombardements de l'OTAN et vous avez

15 répondu ceci : "Dans notre région, les bombes de l'OTAN ont été très

16 précises. Elles n'ont pris pour cibles que les positions serbes."

17 C'est ce que vous avez alors déclaré; est-ce exact ?

18 R. Oui. Les cibles ou les tirs de l'OTAN ont été très précis. J'ai pu

19 vérifier après la guerre les endroits où les obus étaient tombés.

20 Q. Dans votre déclaration préalable, au paragraphe 28,

21 Me Aleksic vous a d'ailleurs posé une question à ce propos. Vous dites que

22 le 31 mai, vers 4 heures du matin, la caserne de Vucitrn a été bombardée;

23 est-ce exact ?

24 R. Oui. Je l'avais déjà dit d'ailleurs.

25 Q. Si je vous soumettais cette idée, à savoir que ce n'est pas la caserne

26 qui a été touchée cette nuit-là mais, plutôt, l'usine qui s'appelait Mile

27 Zakic à Vucitrn qui a été frappée ?

28 R. Il n'y a pas d'usine qui s'appelle comme cela à Vushtrri, il n'y a que

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1 l'usine Llamkos. J'ai d'ailleurs apporté la liste des personnes qui ont

2 abandonné leurs postes de travail à l'usine pour rejoindre l'armée. C'est

3 la première fois que j'entends parler d'une usine qui s'appellerait Mile

4 Zakic.

5 Q. Ce n'était pas l'objet de ma question. Je vous remercie.

6 R. Faut-il que je vous explique ceci, Mesdames et Messieurs les Juges ? Je

7 le répète, il n'y a pas d'usine portant ce nom à Vushtrri.

8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie. Nous avons compris.

9 M. CEPIC : [interprétation] Je n'ai pas d'autres questions.

10 LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie.

11 Maître Ivetic.

12 M. IVETIC : [interprétation] Merci.

13 Contre-interrogatoire par M. Ivetic :

14 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur. Je m'appelle Dan Ivetic. Je suis un

15 des avocats de M. Sreten Lukic. Il y a aussi Ozren Ogrizovic aujourd'hui et

16 Me Lukic avec moi. Quelques questions à vous poser et j'espère en avoir

17 terminé aujourd'hui.

18 Je voudrais enchaîner sur une question posée par Me Visnjic. Il s'agissait

19 de la pièce 3D71. Je me demande si vous avez toujours cette pièce sous les

20 yeux ou devant vous à l'écran.

21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous demandons à l'avoir à l'écran.

22 M. IVETIC : [interprétation] Je pense que c'était uniquement un document

23 papier qui avait été distribué.

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Fort bien.

25 M. IVETIC : [interprétation]

26 Q. Je vois que vous avez maintenant ce document devant vous. J'attends que

27 les Juges disposent eux aussi d'un exemplaire.

28 Ce carnet de l'Armée de libération du Kosovo, à propos des martyres de

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1 l'UCK -- prenez la quatrième page. J'espère que c'est la même que la

2 mienne. On voit la photographie d'un homme, un de ces martyres de l'Armée

3 de libération du Kosovo. Seladin Gerxhaliu, est-ce votre cousin, votre

4 voisin dont vous avez parlé plus avant dans votre déposition lorsque vous

5 avez parlé de l'enterrement de ce monsieur le 31 mai 1999 ? S'agit-il de la

6 même personne ?

7 R. Bonjour, je vous salue, moi aussi, M. Ivetic.

8 Effectivement, c'est bien le même homme. C'est bien de celui-là que j'ai

9 parlé.

10 Q. Je vous remercie.

11 M. IVETIC : [interprétation] Je demande le versement de ce document parce

12 que je pense que mon confrère ne l'a pas fait.

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

14 M. IVETIC : [interprétation]

15 Q. Vous avez dit que vous aviez soigné des blessés de l'UCK, et vous avez

16 indiqué quels étaient les hôpitaux de campagne de l'UCK dans la

17 municipalité de Vucitrn. Pourriez-vous en quelques mots nous dire où se

18 trouvaient les principales bases de l'UCK dans la région ?

19 R. Je ne sais pas. Pourquoi voulez-vous que je connaisse toutes les bases

20 de l'UCK ? Mais, j'ai entendu dire qu'il y en avait une à Melenica, une à

21 Majden, dans les zones près de Studime e Eperme, en Dumnica et aussi dans

22 d'autres endroits. Mon objectif était de faire office de médecin, pour

23 soigner les blessés et les malades.

24 Q. Fort bien. Je vais dès lors vous poser une question : n'est-il pas vrai

25 de dire que le 27 mars 1999, vous et votre famille avez décidé d'aller à

26 Slakovce parce qu'il y avait une forte présence, une espèce de base ou de

27 poste de l'UCK, à cet endroit; est-ce exact ?

28 R. Sllakovc, non, ce n'était pas à Sllakovc mais de Studime e Eperme. Au-

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1 dessus, il y avait un secteur qui était protégé par l'UCK. Je ne sais pas

2 exactement combien il y avait de membres de l'UCK dans cette zone, mais ma

3 femme a des parents dans la région et c'est là que j'avais coutume de

4 rester tout en exerçant mes fonctions de médecin.

5 Q. Bien. Veuillez, Monsieur, consulter votre déclaration préalable versée

6 par le bureau du Procureur; la pièce P2275, paragraphe 7. Vous décrivez la

7 façon dont vous dites que c'était des policiers qui étaient venus chez vous

8 à votre recherche. Je veux vous demander : est-ce qu'on savait, est-ce que

9 c'était de notoriété publique dans votre collectivité ou votre communauté

10 que vous travailliez avec l'UCK et que vous en étiez l'un de ces membres ?

11 R. Oui. C'était de notoriété publique. Tout le monde le savait. C'était

12 une armée de volontaire. Personne ne m'a forcé à en venir membre. Bien

13 entendu, j'avais des obligations, des devoirs envers la nation. Il y avait

14 cette volonté de se libérer qui m'a poussé à rejoindre l'armée.

15 Q. Vous avez dit qu'il fallait que nous fassions une distinction très

16 nette entre ce que vous aviez vu et ce que vous aviez entendu dire par une

17 tierce personne. Lundi, vous avez dit que votre famille était partie en

18 raison d'ordres qui avaient été donnés. Soyons très clair. Vous,

19 personnellement, vous n'avez été témoin d'aucune situation où on aurait

20 donné l'ordre à une famille de quitter sa maison; est-ce exact ?

21 R. Le jour où ma famille est partie, j'étais à la clinique. C'est là que

22 j'ai reçu cet ordre. Je le dis dans ma déclaration préalable. C'est un

23 ordre qui m'a été donné par celui qui était alors le chef de la clinique,

24 le directeur.

25 Pour ce qui est des familles Rashica Svarcali, elles ont toutes reçu cet

26 ordre. Au moment où je suis arrivé, elles étaient déjà parties. Je vous

27 donne une explication. La famille Rashica, elle est partie en direction de

28 Pristina, mais on les a repoussés au poste de contrôle de Dakovce. Quand

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1 ils sont venus en avril --

2 Q. Vous l'avez déjà dit. Je voulais simplement une précision. Nous n'avons

3 pas beaucoup de temps. Je veux terminer aujourd'hui.

4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Une question à ce stade. Vous avez

5 confirmé cela en réponse à une question posée par Me Ivetic. Vous avez

6 confirmé que vous étiez membre de l'UCK. Est-ce que vous avez porté

7 l'uniforme de l'UCK ?

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je n'ai jamais eu d'uniforme de l'UCK,

9 mais j'en étais membre. J'étais aussi un partisan de l'UCK, mais je n'ai

10 jamais porté l'uniforme.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Poursuivez, Maître Ivetic ?

12 M. IVETIC : [interprétation] Merci.

13 Q. N'est-il pas établi que votre famille a quitté la maison en avril 1999,

14 en raison du fait que des personnes que vous dites que c'étaient des

15 policiers, étaient venues à votre recherche, et allaient revenir à la

16 charge tant qu'ils ne vous trouveraient pas ? Est-ce que ce n'est pas là la

17 raison véritable qui vous a poussé à partir davantage qu'un ordre qui avait

18 été donné par quelqu'un ?

19 R. Il y avait beaucoup de va-et-vient. Les choses bougeaient beaucoup.

20 Lorsque ma famille est partie une première fois en mars, c'était suite à

21 cet ordre qui avait été donné et qui avait été donné dans tous les

22 quartiers. Je me suis beaucoup déplacé. J'ai beaucoup bougé. Je suis revenu

23 plusieurs fois à la maison. Je suis revenu en avril, puis en mai, puis vers

24 la mi-mai. En avril, lorsqu'ils sont venus, ils ont pris quelques

25 véhicules. Ils ont demandé à ma femme où j'étais. Je me cachais chez un

26 voisin, à Shana [phon]. C'est comme cela qu'elle s'appelait. Quand je

27 rentrais chez moi, je restais en général pas très longtemps. Je voyais

28 comment ma famille se portait. Il est même arrivé que je n'aie pas vu ma

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1 famille pendant deux ou trois semaines d'affilée.

2 Q. Je vous interromps parce que maintenant vous parlez du mois d'avril.

3 Est-ce que, tout d'abord, vous avez vu de vos propres yeux les personnes,

4 les individus qui sont venus chez vous parce qu'ils étaient à votre

5 recherche ?

6 R. Non. J'étais déjà parti.

7 Q. Bien. Serait-on dès lors en droit de dire que la description qui est

8 faite de ces personnes se fonde sur ce que votre femme a vu, pas sur ce que

9 vous, vous avez vu ?

10 R. Vous parlez de quelle personne-là ?

11 Q. Je parle de celles qui sont venues chez vous entre le 7 et le 10 avril,

12 paragraphe 7 de votre déclaration préalable.

13 R. C'est ma femme qui leur a parlé. Je l'ai dit dans ma déclaration.

14 Q. Bien. Vous avez tracé une carte et vous avez délimité une région qui se

15 composait uniquement des secteurs de la municipalité où l'UCK avait un

16 contrôle absolu à 100 % des villages; est-ce exact ?

17 R. Est-ce que vous pourriez répéter la question, parce que je n'ai pas

18 bien suivi.

19 Q. Volontiers. Lundi, le Procureur vous a demandé de tracer plusieurs

20 lignes sur une carte qui montrait, qui délimitait les zones contrôlées par

21 l'UCK. Je voudrais une précision. Ces lignes que vous avez tracées, est-ce

22 qu'elles délimitaient des régions qui se trouvaient sous le contrôle

23 complet de l'UCK, mais vous n'avez pas délimité les régions où l'UCK avait

24 des sympathisants, ou du personnel, des effectifs qui s'y trouvaient; est-

25 ce exact ?

26 R. C'est exact. J'ai passé des lignes vers la montagne. C'était une zone

27 contrôlée par l'UCK, mais à partir du 8 janvier, lorsque huit soldats ont

28 été capturés, des préparatifs ont été entamés et une attaque a été lancée

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1 et ils nous ont massacrés.

2 Q. Je crois qu'on n'y parviendrait jamais si je ne vous demande des

3 questions plus précises.

4 Parlons de la présence de l'UCK. Est-ce que l'UCK n'avait pas des

5 effectifs et des sympathisants dans les zones tenues par les Serbes, y

6 compris dans la ville de Vucitrn même, ou Vushtrri en albanais ?

7 R. Oui, bien sûr, forcément. Je ne sais pas.

8 Q. Bien. Est-ce que vous connaissez notamment un village avoisinant; celui

9 de Bukosh ?

10 R. Oui, plus ou moins.

11 Q. Savez-vous si à Bukos il y avait une présence de l'UCK en 1998 et

12 1999 ?

13 R. Non, je ne sais pas. Parce que Bukos est de l'autre côté de la rivière.

14 C'est très loin de chez nous. Je n'y ai jamais été.

15 Q. Bien. D'après des services que vous avez offerts ou prêtés au sein de

16 l'UCK, peut-on dire que ces services étaient de plus en plus nécessaires

17 après octobre 1998, après l'accord Holbrooke-Milosevic, parce que l'UCK a

18 essayé de renforcer ses activités et ses attaques à l'époque ?

19 R. Je ne sais pas si mes services ont été requis plus fréquemment, mais je

20 sais que chaque fois qu'on a eu besoin de moi, je suis allé car j'ai prêté

21 le serment d'Hippocrate et j'avais le devoir d'aider tout le monde. Tout ce

22 que je peux vous dire c'est que je n'ai jamais fait de distinction entre

23 les personnes que j'ai soignées.

24 Q. Est-ce que vous avez dû prêter serment à l'UCK ? Si ce serment a

25 existé, quel en était le libellé ?

26 R. Non, je n'ai jamais prêté serment. J'ai uniquement prêté le serment

27 d'Hippocrate lorsque j'ai terminé mes études de médecine.

28 Q. Bien. Pour ce qui est des armes qu'avait l'UCK, d'après ce que vous

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1 avez vu, peut-on dire qu'il y avait des Kalachnikov, des fusils

2 automatiques ?

3 R. Je ne m'y connais pas vraiment en armements, mais en règle générale ils

4 avaient des Kalachnikov, des petites bombes, des grenades, où -- mais je

5 n'ai pas vu grand-chose d'autre.

6 Q. Avez-vous remarqué s'ils avaient des Zolja, des lance-roquettes Zolja

7 ou des mortiers ?

8 R. Non, je ne les ai jamais vus. Enfin, je me suis occupé de mon travail.

9 Q. Saviez-vous que lorsque l'UCK s'emparait d'un village, les personnes

10 qui ne soutenaient pas l'UCK, que ce soit des Serbes, civils serbes, des

11 Albanais ou des membres d'autres communautés, en général, les personnes qui

12 ne soutenaient l'UCK étaient chassées par l'UCK de ce dit village ?

13 R. Cela je ne l'ai jamais su. C'est la première fois que je l'entends

14 dire. En septembre 1998, lorsqu'on parlait de tous les Albanais, lorsque M.

15 Visnjic me posait les questions, il n'a pas bien expliqué les noms des

16 personnes concernées, donc c'est la première fois que j'entends parler.

17 Q. Bien. Je vais me servir de vos propres termes. Vous ne pouvez confirmer

18 ni affirmer ce fait, ce fait que l'UCK aurait chassé des personnes de ce

19 village.

20 R. Je ne l'ai jamais vu, alors comment est-ce que je pourrais mentir ?

21 J'ai juré de dire la vérité. Je vous ai uniquement relaté ce que j'avais vu

22 ou entendu dire. Jamais je n'ai vu ni entendu parler du fait que quelqu'un

23 aurait été chassé de chez lui par l'UCK.

24 Q. Il y a peut-être un problème de traduction. Je n'ai pas voulu dire que

25 vous mentiez, Monsieur, ni quoi que ce soit de ce genre. Je cherche tout

26 simplement des éclaircissements.

27 Vous avez dit que vous saviez quelque chose, j'y reviens, paragraphe 11 de

28 votre déclaration préalable au bureau du Procureur, le 2 mai 1999, un ordre

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1 est arrivé de l'UCK, qui demandait aux civils albanais de quitter la

2 région. Puisque vous étiez membre de l'UCK, est-ce que c'était là la

3 procédure habituelle de l'UCK que de donner l'ordre à des populations,

4 habitant dans une zone que l'UCK contrôlait, de quitter des régions

5 précises ?

6 R. Ce n'était pas un ordre strict à proprement parler. C'était plus un

7 avertissement à l'intention de la population leur disant que les zones de

8 Llap et Shala étaient tombées aux mains de l'ennemi, donc on leur

9 conseillait de partir, car sinon ils risquaient de tomber aux mains des

10 forces serbes qui avançaient en direction de Sllakovc.

11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] J'aimerais peut-être éclaircir le

12 début de la réponse. J'ai cru entendre : ce n'était pas un ordre strict à

13 proprement parler.

14 M. IVETIC : [interprétation] Oui, c'est ce que j'ai entendu également.

15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

16 M. IVETIC : [interprétation]

17 Q. A votre connaissance, est-ce que de tels ordres avaient été émis par

18 l'UCK précédemment ou après le 2 mai à d'autres reprises ?

19 R. Non. Je n'ai jamais entendu parler de cela.

20 Q. D'ailleurs, comment est-ce que l'UCK communiquait de tels ordres à la

21 population ?

22 R. Vous voulez dire l'ordre du 2 mai ?

23 Q. Oui.

24 R. C'est un membre de l'UCK qui était informé de ce qui se passait sur la

25 ligne de front et il nous a dit de partir. Il n'y a pas eu d'ordre

26 spécifique, mais il nous a dit que les positions de l'UCK avaient été

27 prises par des forces yougoslaves, des forces serbes. C'était en quelque

28 sorte un ordre, en tout cas c'est la façon dont nous l'avons interprété,

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1 c'était une instruction.

2 Q. Très bien. Après cela, Monsieur, vous avez rejoint votre famille dans

3 le convoi; est-ce exact ?

4 R. Ma famille ne se trouvait pas très loin de l'hôpital où je travaillais.

5 Par conséquent, je suis allé dire bonjour à ma famille et ils m'ont emmené

6 avec eux. Ils souhaitaient que je les rejoigne.

7 Q. Aucun membre de l'UCK n'a tenté de vous empêcher de rejoindre votre

8 famille, n'est-ce pas ?

9 R. Non, personne. Ils m'ont demandé de m'occuper des blessés et ils ont

10 dit : "Qu'ils allaient attendre que le dernier blessé arrive; nous n'allons

11 pas nous rendre." Ils ne m'ont pas demandé de rester, donc je suis allé

12 avec ma famille.

13 Q. Est-il possible que d'autres membres de l'UCK aient également pris une

14 décision analogue et ont également rejoint leurs familles dans le convoi.

15 R. Les autres membres de l'UCK n'avaient pas leurs familles à proximité,

16 en tout cas, pas à ma connaissance. J'ai dit plusieurs fois que, d'après ce

17 que je pouvais voir, j'étais le seul sur place, parce que je me suis

18 déplacé le long du convoi lorsque des villageois, du même village que moi,

19 me demandaient d'aller à tel ou tel endroit. Pour autant que j'ai pu le

20 voir, de l'endroit où je me trouvais, c'est-à-dire, le milieu du convoi,

21 jusqu'à l'endroit où se trouvait Ibrahim Mulliqi avec le drapeau blanc.

22 Q. Monsieur, au paragraphe 15 de votre déclaration, vous dites que des

23 personnes armées se sont approchées du convoi aux alentours de 17 heures et

24 ont commencé à s'approcher des tracteurs en exigeant de l'argent des

25 personnes qui se trouvaient là. Vous nous décrivez un certain nombre

26 d'uniformes que portaient ces hommes. J'aimerais donc vous poser un certain

27 nombre de questions en rapport avec cela.

28 Premièrement, est-il exact de dire que vous n'avez pas vu de membres de la

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1 police serbe, c'est-à-dire, des membres du ministère de l'Intérieur ? Est-

2 il exact que vous n'avez pas vu de membres de la police du ministère de

3 l'Intérieur à cet endroit-là, à ce moment-là ?

4 R. J'ai dit plusieurs fois, dans cette affaire, que j'ai plutôt entendu un

5 certain nombre de choses que vu ce qui se passait, car la nuit tombait et

6 je suis entièrement convaincu qu'il y avait à la fois des forces du

7 ministère de l'Intérieur et de l'armée et également des réservistes, qu'il

8 s'agisse de militaires ou de paramilitaires, ils étaient là, tous ensemble.

9 Q. Avant cet incident, auparavant, avez-vous eu la possibilité de voir les

10 uniformes portés par la police et portés par les membres des forces du

11 ministère de l'Intérieur ?

12 R. Je travaillais en ville jusqu'aux frappes de l'OTAN. Bien sûr, j'ai pu

13 le voir.

14 Q. Pouvez-vous nous décrire, de façon détaillée, à quoi ressemblait

15 l'uniforme de police habituel que vous connaissiez ?

16 R. A l'époque, cet uniforme était une sorte d'uniforme bleu, uniforme de

17 camouflage bleu, alors que l'armée, elle, portait un uniforme vert. Les

18 paramilitaires, eux, portaient des uniformes différents avec des bandanas

19 et autres.

20 Q. Monsieur, j'aimerais, pour l'instant, que vous nous décriviez

21 uniquement les uniformes du ministère de l'Intérieur. Est-ce que ces

22 uniformes portaient une quelconque marque sur la poitrine ou sur la

23 manche ?

24 R. Oui. Sur la manche, il y avait quelque chose, mais cette nuit-là, dans

25 cette semi obscurité, j'ai pu voir qu'il y avait des uniformes de

26 camouflage bleus et verts, mais je n'arrivais pas à très bien voir ce qui

27 se passait, parce que je me cachais à moitié, comme je l'ai dit.

28 Q. Peut-on dire sans se tromper, Monsieur, que cette nuit-là, la nuit du 2

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1 mai, si je ne m'abuse, vous n'avez pas été en mesure de voir si les

2 uniformes que vous avez vus, et plus particulièrement les uniformes bleus

3 que vous avez vus, portaient quoi que ce soit sur la manche ou sur la

4 poitrine ?

5 R. Je ne peux pas dire que je les ai vus de façon très claire, parce que

6 de l'endroit où je me trouvais, je ne pouvais les voir. Mais je sais très

7 bien et tout le monde l'a dit, il s'agissait de forces de tous ces autres

8 organes que j'ai évoqués, qui ont tous participé à cette opération.

9 Q. Monsieur, une fois de plus, j'aimerais revenir à ce que vous avez dit

10 précédemment dans votre déposition aujourd'hui même. En réponse à une

11 question posée par l'un de mes confrères, n'avez-vous pas dit que vous

12 deviez établir une distinction très claire entre ce que vous avez vu et ce

13 que vous avez entendu ? Je vous demanderais de faire en sorte que votre

14 réponse soit parfaitement claire. Qu'avez-vous vu personnellement ? Je

15 crois que dans votre réponse, vous avez dit que vous n'étiez pas en mesure

16 de voir quoi que ce soit, compte tenu de l'endroit où vous vous trouviez,

17 par conséquent, je vais passer à autre chose.

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Avant que vous ne poursuiviez,

19 j'aimerais dire la chose suivante : personnellement, je ne peux pas --

20 M. IVETIC : [interprétation] Je crois qu'il a dit qu'il a vu un certain

21 nombre de choses et qu'il a dit que ses conclusions se fondaient sur ce que

22 tous les autres ont vu et ce que tous les autres savaient. Je peux donc lui

23 poser des questions supplémentaires si vous le souhaitez, mais --

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Si cela vous satisfait, vous pouvez

25 passer à autre chose.

26 M. IVETIC : [interprétation] Je crois que ce qui compte plutôt, c'est si

27 les Juges sont satisfaits.

28 Q. Alors, Monsieur --

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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui. Alors la réponse qui a été

2 fournie et d'ailleurs, je ne sais même pas si le compte rendu d'audience

3 est exact au moment où il est dit : "Je ne peux dire avec exactitude si je

4 les ai vus de façon précise." Je pense en réalité qu'il n'était pas en

5 mesure de les voir. Oui. Bien. Je crois que vous pouvez passer à autre

6 chose.

7 Mais une question tout de même auparavant. Docteur, avez-vous vu, en

8 réalité, la façon dont les personnes qui se sont approchées du convoi

9 étaient habillées ? Avez-vous vu ce qu'ils portaient comme vêtements, de

10 vos propres yeux ?

11 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai vu qu'ils portaient des uniformes de

12 camouflage bleus, noirs et verts. J'ai entendu que ceux qui portaient des

13 uniformes bleus et des uniformes foncés parlaient à mon épouse et lui ont

14 demandé de leur remettre de l'argent, argent que j'ai donné à ma fille et

15 elle le leur a donné.

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien. Voilà vous avez une réponse,

17 Maître Ivetic.

18 M. IVETIC : [interprétation] Très bien.

19 Q. Comme question de suivi, j'aimerais poser une autre question, peut-être

20 qu'elle a déjà été posée. En rapport avec ces personnes qui portaient ces

21 uniformes de différentes couleurs, est-il exact de dire, Monsieur, que vous

22 n'étiez pas en mesure de voir ou de discerner peut-être, doit-on dire,

23 aucune épaule ou aucun insigne pouvant figurer sur leur uniforme ?

24 R. Il m'était impossible de voir quelles pouvaient être les épaulettes

25 qu'ils pouvaient porter éventuellement, compte tenu de l'endroit où je me

26 trouvais.

27 Q. Bien, merci. C'est parfaitement clair pour moi.

28 Dans ce cas peut-on affirmer, Monsieur, que d'autres personnes ou

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1 plutôt passons à autre chose.

2 Vous avez parlé précédemment de la période de la nuit du 11 au 12 et

3 vous avez décrit des véhicules qui arrivaient de Vucitrn, ou Vushtrri, et

4 vous nous avez dit qu'il y avait deux ou trois voitures qui étaient des

5 voitures de police typiques. Premièrement, est-il exact que ces véhicules

6 venaient de la direction opposée par rapport aux autres militaires que vous

7 nous avez décrits précédemment ?

8 R. Oui. Ils venaient de Vushtrri et ils allaient en direction de Vushtrri

9 le haut. J'étais en train d'écouter ce qu'ils disaient. Est-ce que je peux

10 vous répéter ce qu'ils disaient ?

11 Q. Je ne sais pas si cela répond à ma question. Je crois que vous avez

12 répondu à ma question et il nous reste très peu de temps, par conséquent,

13 je préfère passer à autre chose pour que nous puissions conclure et que

14 vous ne deviez pas revenir demain.

15 Pouvez-vous nous décrire ces véhicules de police typiques, à quoi ils

16 ressemblaient ? Vous nous avez déjà dit dans votre témoignage que vous ne

17 pouviez pas voir quelle était leur couleur, mais pourriez-vous nous dire

18 quelle était la marque de ces véhicules, quel était le modèle ?

19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] De quel paragraphe s'agit-il ?

20 M. IVETIC : [interprétation] Il s'agit du paragraphe 24 de la déclaration

21 préalable.

22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Etes-vous en mesure de répondre,

23 Docteur ?

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. J'ai expliqué cela

25 ici. Ils sont arrivés à bord de voiture Zastava 101 et je pouvais pas voir

26 de quelle couleur étaient ces véhicules, de façon très nette, mais je sais

27 qu'ils étaient verts ou plutôt bleus. Je crois que c'étaient des véhicules

28 de la police et de l'armée qui se sont approchés de l'endroit où je m'étais

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1 réfugié et ils étaient en train de dire, entre eux, qu'ils devaient

2 assainir le terrain. A un moment donné, ils se sont arrêtés. L'un d'entre

3 eux, qui était le chef probablement, a dit : "Retournons en arrière parce

4 que nous n'avons plus de carburant." De l'endroit où je me cachais, j'ai vu

5 qu'ils faisaient demi-tour et qu'ils rentraient de l'endroit d'où ils

6 venaient et il y avait des cadavres des deux côtés au bord de la route.

7 M. IVETIC : [interprétation]

8 Q. Monsieur, peut-être pourrais-je attirer votre attention sur deux

9 paragraphes. Sur le paragraphe 22, qui se trouve deux paragraphes plus

10 haut. Vous nous relatez là ce que votre femme vous a raconté et vous

11 n'avez, en réalité, pas été le témoin des événements qui sont décrits au

12 paragraphe 22, qui vous ont été rapportés par votre épouse, n'est-ce pas ?

13 R. A quoi faites-vous référence ?

14 Q. Les personnes qui ont été sorties de leurs véhicules et qui ont été

15 abattues.

16 R. Peut-être que vous avez confondu deux choses. Quelles sont les

17 personnes qui ont été sorties de leurs voitures et qui ont été tuées, de

18 quoi s'agit-il ?

19 Q. Au paragraphe 22 de votre déclaration préalable, vous nous dites que

20 votre épouse vous a raconté un certain nombre de choses, notamment le fait

21 que des personnes ont été sorties de leurs voitures et ont été abattues.

22 Vous avez donc entendu parler de ces événements, c'est votre épouse qui

23 vous les a rapportés et vous n'avez pas été le témoin de ces événements,

24 n'est-ce pas ? Alors, est-il possible que votre épouse soit moins à même de

25 reconnaître tel ou tel uniforme que vous ?

26 R. Mon épouse n'a rien à voir avec ce convoi qui est revenu parce que,

27 après que ma femme est partie avec l'autre partie du convoi vers la

28 coopérative agricole, les autres, donc les personnes dans les véhicules,

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1 sont rentrées en allumant leurs phares --

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] On est en train de vous poser une

3 question précise. Vous devez avoir un chiffre 22 en face d'un paragraphe.

4 M. IVETIC : [interprétation] Oui, je pense que la version en albanais porte

5 les numéros en face des mêmes paragraphes.

6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Prenez le paragraphe 22, vous voyez ce

7 qui y figure, il y est question --

8 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il est question du fait que plusieurs

10 membres d'une famille ont été sortis d'un tracteur qui se trouvait devant

11 le vôtre, la question est la suivante : est-ce que votre épouse serait

12 peut-être moins à même de reconnaître avec précision un uniforme que vous ?

13 LE TÉMOIN : [interprétation] A la fois mon épouse et moi-même sommes en

14 mesure de distinguer tel ou tel uniforme. Cela n'est pas un problème. Ces

15 personnes-là se trouvaient dans un tracteur près de nous et il s'agissait

16 probablement de membres de notre famille parce 36 membres de la famille

17 Gerxhaliu sont morts.

18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous demanderais de répondre à la

19 question qui a trait à la reconnaissance des uniformes et qui n'est pas

20 liée aux événements eux-mêmes.

21 M. IVETIC : [interprétation] Merci.

22 Q. Vous nous avez dit que les véhicules sont partis au milieu de la nuit

23 et là je parle à nouveau du paragraphe 24. Après le départ de ces

24 véhicules, combien de temps cela a-t-il pris pour que l'UCK apparaisse et

25 commence à rassembler les corps et à les enterrer ?

26 R. L'UCK est arrivée le lendemain, le 3 juin. Mais, je ne les ai pas vus

27 parce que je suis arrivé par la suite. J'étais épuisé.

28 M. IVETIC : [interprétation] On peut lire 3 juin au compte rendu

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1 d'audience, je pense avoir entendu 3 mai.

2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'était le 3 mai.

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je crois que c'était le 3 mai.

4 M. IVETIC : [interprétation]

5 Q. Très bien, donc c'est une erreur au compte rendu d'audience. C'est ce

6 que vous avez dit en fait. Est-ce qu'à un moment donné vous avez soigné

7 quelqu'un du nom de Jetish Xhafa, qui avait une blessure au front qui avait

8 été blessé par une balle au front ?

9 R. Oui. Son père et lui ont été emmenés pour être enterrés mais quelqu'un

10 ensuite l'a emmené à l'hôpital, parce qu'il avait perdu connaissance. J'ai

11 vu qu'il était en vie. Je lui ai donc prodigué tous les soins nécessaires.

12 J'ai dû extraire une balle de son front.

13 Q. Monsieur, la balle que vous avez extraite était-elle entière ou

14 s'agissait-il d'un fragment de balle ?

15 R. C'était une balle, une balle entière. Je crois d'ailleurs qu'il a

16 encore conservé cette balle, à ce jour. J'ai réussi à extraire cette balle.

17 Q. Avez-vous été en mesure de dire si cette balle provenait d'un fusil ou

18 d'un pistolet ?

19 R. Je crois qu'elle provenait d'un fusil, d'un fusil automatique, mais je

20 ne peux pas en être sûr. Parce que comme je vous l'ai dit, je connais mal

21 les armes et j'espère ne jamais avoir cette connaissance des armes.

22 Q. Monsieur, sur la base de votre expérience médicale, d'abord, quelle est

23 votre spécialisation dans le domaine médical ?

24 R. Ma spécialisation, c'est la médecine du travail, mais après, j'ai fait

25 une spécialité de médecin généraliste.

26 Q. Avez-vous un avis de médecin sur la question de savoir si cette balle a

27 été tirée à bout portant ou pas ?

28 R. J'ai vu d'autres cas de personnes qui ont été tuées. Elles avaient été

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1 toutes tuées à bout portant. Mais ici, je pense que le coup est parti d'une

2 certaine distance.

3 Q. Nous parlons de Jetish Xhafa ?

4 R. Oui. Maintenant, il est en bonne santé. On l'a presque enterré vivant

5 deux fois.

6 M. IVETIC : [interprétation] Malheureusement, j'ai encore quelques

7 questions, mais je vais passer à un autre sujet. Est-ce que nous pouvons

8 nous arrêter maintenant ?

9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Ivetic, je voudrais savoir

10 aussi qu'il n'y a pratiquement aucun fondement qui ait été donné avant de

11 livrer cet avis.

12 M. IVETIC : [interprétation] Oui je sais. Cela vaut ce que cela vaut.

13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je pense que vous avez une indication

14 très claire de la situation.

15 M. IVETIC : [interprétation] Oui.

16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il faudra que vous reveniez, Monsieur.

17 L'audience va reprendre demain, à 14 heures 15. J'espère que nous

18 pourrons, demain, terminer votre déposition. Je vous rappelle, une fois de

19 plus, qu'il est important de ne parler d'aucune facette de votre témoignage

20 ici avant que votre déposition ne soit terminée demain.

21 Monsieur Hannis.

22 M. HANNIS : [interprétation] J'aurais voulu faire une requête, une demande

23 orale.

24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pas le temps. Je sais que vous aviez

25 le souhait de le faire, mais il faudra attendre à la fin de l'audition de

26 ce témoin. Je pense que la Défense est maintenant au courant de la

27 situation et que la question pourra être réglée rapidement demain.

28 M. HANNIS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] L'audience est levée.

2 --- L'audience est levée à 19 heures 03 et reprendra le jeudi 31 août 2006,

3 à 14 heures 15.

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