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1 Le mardi 11 mars 2008
2 [Audience publique]
3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
4 [L'accusé Pavkovic n'est pas présent]
5 --- L'audience est ouverte à 14 heures 15.
6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bonjour à tout le monde.
7 Maître Aleksic, vous voulez dire quelque chose.
8 M. ALEKSIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Vu la décision de
9 la Chambre qui a été rendue hier, nous retirons notre requête qu'on a
10 déposée hier.
11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il s'agissait de la requête pour vous
12 accorder une prorogation du délai.
13 M. ALEKSIC : [interprétation] Oui.
14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci. Donc cela est retiré.
15 Maître Ivetic, quel est votre témoin suivant ?
16 M. IVETIC : [interprétation] Notre témoin suivant est
17 M. Milivoje Mihajlovic.
18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
19 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Mihajlovic, bonjour.
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.
22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous prie de prononcer la
23 déclaration solennelle pour dire la vérité en lisant à voix haute le texte
24 qui vous été remis.
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
26 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
27 LE TÉMOIN: MILIVOJE MIHAJLOVIC [Assermenté]
28 [Le témoin répond par l'interprète]
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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci. Vous pouvez vous asseoir.
2 Maintenant Me Ivetic procédera à l'interrogatoire principal, qui représente
3 M. Lukic.
4 Maître Ivetic, vous avez la parole.
5 M. IVETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
6 [Le témoin répond par l'interprète]
7 Interrogatoire principal par M. Ivetic :
8 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Mihajlovic. Aux fins du compte
9 rendu, d'abord pouvez-vous décliner votre identité à la Chambre de première
10 instance ?
11 R. Je m'appelle Milivoje Mihajlovic.
12 Q. Pendant la séance de récolement vous vous prépariez à témoigner devant
13 cette Chambre. Avez-vous eu l'occasion de rencontrer l'équipe de la Défense
14 de Sreten Lukic, pour préparer votre déclaration écrite ?
15 R. Oui.
16 M. IVETIC : [interprétation] Est-ce que M. l'Huissier pourrait remettre au
17 témoin l'exemple en papier du document 6D1630 pour que le témoin puisse
18 examiner proprement ce document.
19 Q. Monsieur, d'abord, regardez ce document et dites-nous si vous
20 reconnaissez ce document en tant que déclaration écrite que vous avez
21 préparée avec les membres de l'équipe de Défense de Sreten Lukic pour être
22 utilisée dans cette affaire ?
23 R. Oui.
24 Q. Très bien. Avez-vous eu l'occasion de parcourir la déclaration pour
25 s'assurer que la teneur de la déclaration est exacte et reflète exactement
26 les propos qui étaient les vôtres avant de l'avoir signée ?
27 R. Oui.
28 Q. Aujourd'hui vous avez prononcé la déclaration solennelle et si je vous
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1 posais les mêmes questions aujourd'hui au même sujet, donneriez-vous les
2 mêmes réponses et les mêmes informations que dans cette déclaration écrite
3 ?
4 R. Oui, certainement.
5 M. IVETIC : [interprétation] Monsieur le Président, est-ce qu'on peut
6 maintenant verser au dossier le document 6D1530. Je ne crois pas que j'ai
7 d'autres documents pour ce qui est de ce témoin pour ce qui est du
8 versement au dossier de ces documents.
9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
10 M. IVETIC : [interprétation]
11 Q. Monsieur Mihajlovic, j'aimerais vous poser des questions concrètes et
12 courtes, quelques questions complémentaires par rapport à votre
13 déclaration. D'abord, qu'est-ce que vous pouvez nous dire pour ce qui est
14 de l'année 1998 et 1999 et de l'existence des stations de télévision et
15 radio à Pristina et qui émettaient les programmes en albanais ?
16 R. Il y avait radio Pristina et télévision Pristina, c'était une entité et
17 les programmes qui ont été émis étaient en albanais.
18 Q. Je m'excuse. Nous attendons à ce que tout cela soit consigné au compte
19 rendu. Qui a financé le travail de ces stations radio et télévision ?
20 R. C'était l'Etat de Serbie qui a financé le fonctionnement de la station
21 radio et télévision Pristina.
22 Q. Combien d'heures par jour les programmes ont été émis ?
23 R. C'était 16 heures et demie de programmes radio, et trois heures et
24 demie de programmes de télévision en albanais par jour.
25 Q. Pourriez-vous nous décrire généralement parlant les programmes qui ont
26 été émis par la radio et par la télévision Pristina ?
27 R. Il s'agissait des journaux, ensuite des reportages de divertissement,
28 d'information, de culture à la télévision. Il y avait également des films
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1 et à la radio il y avait des émissions dramatiques.
2 Q. Dans votre déclaration écrite au paragraphe 7, à la page 3 en serbe, et
3 aux pages 3 et 4 en anglais, dans la traduction en anglais, vous avez
4 déclaré qu'il y avait eu 25 magazines différents ainsi que de journaux en
5 albanais qui existaient de façon officielle, qui ont été connus de façon
6 officielle. Est-ce qu'en 1998 et 1999, on pouvait les acheter, et si oui où
7 ?
8 R. Oui, à tous les kiosques on pouvait les acheter dans toutes les villes
9 de la province.
10 Q. Est-ce que l'une de ces 25 éditions ou titres dont vous avez parlé, que
11 vous avez identifiés comme étant magazines et journaux, ont été financés
12 par les autorités serbes ou yougoslaves ?
13 R. Buj ku, exclusivement Buj ku pour les agriculteurs et c'est ensuite
14 jusqu'en 1998 ce journal a été financé par l'Etat. Tous les autres journaux
15 ont été privés, et par la suite ce journal a commencé à publier des
16 articles politiques, du domaine politique.
17 Q. Vous dites que certains de ces journaux étaient des porte-parole en
18 quelque sorte de l'UCK. Dites-nous, quels étaient les articles en albanais
19 publiés dans ces journaux qui vous ont poussé à penser que peut-être ils
20 auraient dû les interdire mais cela n'était pas le cas ?
21 R. Deux journaux en particulier, des journaux d'information qui
22 correspondaient à l'UCK, Kombi, nation en traduction et une gazette à
23 "shqiptare." Le journal albanais qui a été publié une fois en deux semaines
24 et qui publiait des communiqués et des entretiens des commandants locaux de
25 l'UCK de Drenica, de Podujevo, de Kosovska Mitrovica et de Metohija. Ces
26 textes de ces articles étaient de nature à inciter la haine interethnique
27 et j'ai été étonné de voir que ces journaux n'avaient pas été interdits. On
28 pouvait les acheter à tous les kiosques partout dans la province avec
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1 d'autres journaux et d'autres publications en serbe.
2 M. IVETIC : [interprétation] Une correction à apporter au compte rendu,
3 Monsieur le Président, à la page 4, lignes 20 à 23, je pense que le témoin
4 a déclaré que Bujku était un journal destiné aux agriculteurs et que par la
5 suite il s'agissait d'un journal qui publiait des articles politiques et
6 financé jusqu'en 1998 de sources privées. Nous pouvons demander au témoin
7 de nous expliquer cela. Et je pense que les autres journaux étaient
8 financés de sources privées. Mais on peut demander au témoin de nous
9 clarifier cela. Je n'ai pas écouté en fait la traduction en anglais et je
10 ne peux pas dire ce qui a été exact.
11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pouvez-vous nous dire quel type de
12 journal était Bujku ou comment ce journal a été publié ?
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Bujku a été financé par l'Etat. Plus tard,
14 lorsque ce journal a commencé à publier des articles politiques, de nature
15 politique, ce journal est devenu un journal financé de sources privées.
16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Quelle était donc la source de
17 financement d'autres journaux ?
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Notamment de sources privées.
19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
20 Maître Ivetic, continuez.
21 M. IVETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
22 Q. Maintenant est-ce qu'on peut passer à un sujet qui a un lien avec le
23 sujet précédent. Au paragraphe 37 de votre déclaration, je crois qu'il
24 s'agit des pages 12 et 13 en anglais et en serbe, il s'agit de la page 10.
25 Q. Vous avez parlé de programmes de la télévision albanaise et dans ces
26 programmes on disait aux gens de quitter le Kosovo. D'abord qui émettait
27 les programmes de cette télévision ?
28 R. C'était l'Etat d'Albanie, c'était la télévision Tirana.
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1 Q. Est-ce que vous pouvez nous dire en s'appuyant sur vos observations en
2 1998 et 1999, s'il y avait beaucoup d'antennes satellites, récepteurs
3 d'antennes satellites à Pristina, est-ce que cela était nécessaire pour
4 regarder ces programmes de télévision satellite de la République d'Albanie
5 ?
6 R. Presque toutes les maisons et tous les appartements à Pristina avaient
7 une antenne satellite pour pouvoir regarder les programmes de la télé
8 Tirana.
9 Q. Savez-vous, en fait vous nous avez parlé des programmes, des programmes
10 qui ont été émis par cette télévision, mais savez-vous pourquoi dans ces
11 programmes on disait aux gens de quitter le Kosovo-Metohija ?
12 R. Ces programmes de télévision émettaient constamment des programmes sur
13 le Kosovo-Metohija et avant et durant les frappes aériennes il y avait des
14 informations émises dans ces programmes selon lesquelles la guerre allait
15 éclater entre l'OTAN et la Yougoslavie, et les gens ont conclu qu'il
16 fallait qu'ils partent le plus vite possible du Kosovo-Metohija.
17 Q. Mis à part les programmes dont nous avons parlé jusqu'ici, pouvez-vous
18 nous dire si vous saviez qu'il y avait des stations radio illégales qui
19 émettaient des programmes ou qui fonctionnaient sur le territoire de la
20 province serbe du Kosovo-Metohija en 1998 et 1999 ?
21 R. A la mi-1998 et durant 1999, il y avait des stations radio illégales.
22 Il y avait une station radio qui s'appelait Slobodna Kosovo, ou le Kosovo
23 libre, qui émettait des informations en albanais, ainsi que des pièces de
24 musique, et cette station a influé constamment sur l'ambiance parmi le
25 peuple albanais dans la province. Les entretiens accordés des commandants
26 locaux de l'UCK ont été émis et dans des moments critiques ils appelaient
27 les gens à se déplacer ou à quitter leurs villages et ils ont été connus
28 comme organe de l'UCK.
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1 Q. Vous dites que des entretiens accordés par les commandants locaux de
2 l'UCK ont été émis dans ces programmes. Savez-vous de quel endroit cette
3 station Slobodna Kosovo émettait ces programmes ?
4 R. Nous ne savions pas depuis quel endroit ces programmes ont été émis,
5 mais à Drenica, avant tout à Metohija sur le territoire de Kosovska
6 Mitrovica on pouvait écouter très bien les programmes de cette station
7 radio ou de ces stations radio parce qu'il y en avait probablement plus.
8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Juste un instant, s'il vous plaît.
9 Pour ce qui est de l'appellation de cette station radio, cette station
10 utilisait la langue serbe ?
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non, ils utilisaient la langue albanaise.
12 Parce que --
13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'est parce que dans le compte rendu
14 il apparaît Slobodna Kosovo. C'est serbe, n'est-ce pas ?
15 LE TÉMOIN : [interprétation] En traduction en serbe, cette station radio
16 s'appelait Slobodna Kosovo, Kosove Elire en albanais.
17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
18 Maître Ivetic, continuez.
19 M. IVETIC : [interprétation]
20 Q. Monsieur Mihajlovic, vous avez dit aux lignes 22 à 23 à la page 7 du
21 compte rendu - en fait pouvez-vous nous dire si vous connaissiez les
22 appellations de ces stations radio privées ou illégales qui émettaient des
23 programmes de différentes régions en tant qu'organes de l'UCK ou bien d'une
24 autre faction séparatiste albanaise armée ?
25 R. Cette station radio s'appelait Slobodna Kosovo et tous les journaux
26 d'information ont commencé par les mots : Vous écoutez la radio Slobodna
27 Kosovo.
28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Il m'est difficile de suivre cela,
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1 parce que dans l'interprétation en anglais nous recevons constamment
2 Slobodna Kosovo. Cette appellation, est-ce que les interprètes peuvent nous
3 aider, nous expliquer pourquoi cela est traduit de cette façon en anglais.
4 L'INTERPRÈTE : Note de la cabine anglaise : Parfois il est d'habitude de
5 garder les noms originaux. La traduction littérale en anglais serait : Free
6 Kosovo.
7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien.
8 Continuez, Maître Ivetic.
9 M. IVETIC : [interprétation] Merci.
10 Q. Monsieur Mihajlovic, pouvez-vous nous dire, pour ce qui est de ce
11 centre de médias à Pristina, qui a décidé de le former ?
12 R. Ça a été l'association des journalistes en tant que la seule
13 association des journalistes de la Serbie qui existait à l'époque sur le
14 territoire de la République qui a formé ce centre de médias.
15 Q. Faisiez-vous partie de cette association qui a décidé de créer un centre
16 de médias ou "media centre," ou est-ce que je peux dire que vous étiez
17 parmi l'un des fondateurs de ce centre médias ?
18 R. Oui, j'étais parmi ceux qui ont pris l'initiative de former ce centre
19 média.
20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce qu'il y avait des journalistes
21 albanais qui étaient membres de cette association ?
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Vous pensez à l'association des journalistes
23 de la Serbie ?
24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui.
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Il y en avait, pas beaucoup, mais il y en
26 avait. Il y avait des journalistes albanais parmi les membres de cette
27 association.
28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Ivetic, continuez.
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1 M. IVETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
2 Q. Je crois que cela se trouve dans la déclaration du témoin, mais
3 pourriez-vous quand même tirer ce point au clair par rapport à ce centre
4 médias à Pristina. Il y avait des gens d'appartenance ethnique albanaise.
5 Est-ce qu'ils y travaillaient ?
6 R. Il y avait à peu près 20 personnes qui y travaillaient. La plupart
7 d'entre eux étaient Serbes. Il y avait quelques Albanais et il y avait même
8 une Syrienne qui travaillaient en tant que membres du personnel de ce
9 centre de médias.
10 Q. Comment les directeurs et d'autres personnels du centre de médias ont
11 été choisis ?
12 R. Il y avait un comité qui s'occupait du choix des directeurs et de
13 rédacteurs en chef, et nous, nous nous occupions du choix d'autres membres
14 du personnel du centre.
15 Q. Quel était le financement de ce centre de médias ? Comment obteniez-
16 vous des moyens financiers ?
17 R. Nous organisions des conférences de presse qu'il fallait faire payer
18 par ceux qui ont demandé à ce que ces conférences de presse soient
19 organisées. Les journalistes qui travaillaient au centre de médias
20 travaillaient de temps à autre en tant que pigistes. De cette façon-là ils
21 ont contribué au financement du centre médias et 15 % de leur pige a été
22 versé à la caisse du centre de médias.
23 Q. Avez-vous demandé des dons des entreprises privées ?
24 R. Moi, non, mais une dizaine d'entreprises privées ont fait des dons au
25 centre de médias. Par exemple, il s'agissait d'une photocopieuse, trois
26 appareils de télévision, des rideaux pour les locaux du centre de médias,
27 et le reste existait déjà dans les locaux du Grand hôtel où le centre de
28 médias travaillait.
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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Ivetic, juste un instant, s'il
2 vous plaît.
3 Monsieur Mihajlovic, vous dites que ceux qui tenaient des conférences de
4 presse devaient payer pour ces conférences de presse. Qu'est-ce que cela
5 veut dire : ceux qui tenaient des conférences de presse ? Pouvez-vous nous
6 donner des exemples pour voir quel est le lien entre les deux ?
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Au centre de médias, des responsables des
8 partis d'opposition en Serbie tenaient des conférences de presse et tout le
9 monde payait 500 marks allemands pour une conférence de presse à l'époque.
10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
11 Maître Ivetic, continuez.
12 M. IVETIC : [interprétation]
13 Q. Est-ce qu'il y avait des institutions ou des organisations étrangères
14 qui, elles aussi, louaient des locaux du centre de
15 presse ?
16 R. Oui. Il s'agissait des organisations non gouvernementales qui
17 organisaient des conférences de presse au centre de médias. A tous les
18 moments, il y avait au moins 100 ou 150 journalistes étrangers au centre de
19 médias.
20 Q. Je crois que dans votre déclaration vous parlez des locaux de l'hôtel
21 Grand qui ont été utilisés par le centre de médias. Je pense que c'est au
22 paragraphe 10, à la page 4 de votre déclaration dans la traduction en
23 anglais. Pouvez-vous nous dire comment obteniez-vous de l'équipement qui
24 vous a été nécessaire ? Pouvez-vous nous donner des choses techniques, de
25 l'équipement, mis à part les locaux, parce que vous nous avez déjà parlé de
26 cela ?
27 R. J'ai déjà dit qu'une entreprise de Valjevo nous a donné une
28 photocopieuse. Plusieurs appareils télévision nous ont été donnés
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1 d'entreprises privées du Kosovo ou de la Serbie centrale. Nous nous sommes
2 acheté des appareils téléphoniques. Il n'y avait pas beaucoup d'équipements
3 et nous n'avions que trois ordinateurs.
4 Q. Tous les salaires et tous les frais qui ont été versés pour le
5 personnel y compris, quel était le salaire mensuel du personnel du centre
6 de médias ?
7 R. C'était à peu près 1 000 $ pour tous les salaires. Pour le carburant et
8 autres frais, on avait 2 000 $ par mois. Pour tout le fonctionnement, il
9 fallait 3 000 $ par mois.
10 Q. Envoyiez-vous des rapports par rapport au fonctionnement du centre de
11 médias; si oui, à qui ?
12 R. Tous les mois, on envoyait des rapports à l'association des
13 journalistes de la Serbie qui était notre fondateur, et il y avait un
14 rapport annuel qui a été envoyé à la fin de l'année à l'Association des
15 journalistes également.
16 Q. Aviez-vous eu des contacts avec l'OSCE et la Mission de vérification au
17 Kosovo et aviez-vous une coopération avec eux ?
18 R. Nous avons bien coopéré avec l'OSCE et la MVK, parce qu'ils étaient à
19 l'hôtel Grand et ils ont eu des contacts avec nous ainsi qu'avec des
20 journalistes étrangers qui étaient descendus dans cet hôtel.
21 Q. Maintenant, paragraphe 28 de votre déclaration, et en serbe cela se
22 trouve à la page 9, et en anglais c'est à la page 4 -- mais cela ne peut
23 pas être sur cette page. Je crois qu'en anglais cela devrait se trouver à
24 la page 10. Vous avez dit que vous avez dîné avec Shaun Byrnes qui était
25 chef de la KDOM. Pendant ces réunions, est-ce que M. Byrnes s'est plaint
26 pour ce qui est du niveau de coopération avec le MUP serbe et en
27 particulier avec Sreten Lukic qui était à l'état-major du MUP à Pristina ?
28 R. Non, il ne s'était pas plaint pour ce qui est de la coopération avec la
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1 police serbe. Nous avons parlé de Duroslav Vujin [phon] et de Ranko Perenic
2 qui étaient des journalistes enlevés de Radio Pristina. M. Byrnes a insisté
3 à ce qu'il rencontre les membres de leurs familles, parce que jusqu'au jour
4 d'aujourd'hui ces deux journalistes n'ont pas été retrouvés. Mais il n'a
5 jamais dit que la coopération avec la police ait été mauvaise. Au
6 contraire, je pense que cette coopération était excellente.
7 Q. Une dernière question par rapport à M. Byrnes. Pendant ce même dîner ou
8 pendant des réunions ultérieures, n'a-t-il jamais dit --, s'est-il jamais
9 plaint de la police serbe qui aurait commis des crimes contre les citoyens
10 albanais au Kosovo-Metohija ?
11 R. Non, j'ai eu l'impression que son travail était de contrôler les
12 commandants locaux de l'UCK.
13 Q. Merci. Maintenant, je vais passer à un autre sujet. Qui était votre
14 contact principal au sein du ministère de l'Intérieur de la Serbie, et de
15 quelle unité organisée ou structure organisée du MUP serbe ces personnes
16 étaient ?
17 R. C'était le porte-parole du MUP, Bozidar Filic, qui travaillait au SUP
18 de Pristina, dans la police de Pristina.
19 Q. Y avait-il des incidents quand vous conduisiez des journalistes locaux
20 ou internationaux sur le terrain et quand vous avez été attaqué par l'UCK
21 ou d'autres séparatistes armés albanais ou par les membres d'autres
22 mouvements criminels ?
23 R. Il y avait un incident à la fin du mois de juillet en 1998. Quand nous
24 rentrions d'Orahovac il y avait une colonne de 40 véhicules et dans cette
25 colonne il y avait des représentants de médias étrangers, pour la plupart
26 d'entre eux. Nous rentrions d'Orahovac et nous avons été attaqués. Une
27 partie de la colonne a été coupée et a rebroussé chemin et deux véhicules
28 ont continué dans la direction de Pristina. Dans l'un de ces véhicules
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1 étais moi-même. Il y avait le véhicule de la BBC qui a été touché par un
2 projectile. Mis à part cet incident, j'ai dit que les membres de l'UCK ont
3 enlevé les journalistes de la Radio Pristina, Juroslav [phon] Slavuj et
4 Ranko [phon] Perenic, ainsi que les journalistes de Tanjug. Juro Slavuj et
5 Ranko Perinic n'ont jamais été retrouvés, ainsi que le journaliste du
6 Tanjug, Nebojsa Radosevic et son caméraman, qui ont été libérés 25 jours
7 après leur enlèvement.
8 Q. Avez-vous eu l'occasion de séjourner ou de résider dans Kosovo Polje;
9 et si oui, quand ?
10 R. Je résidais dans Kosovo Polje depuis mon âge de 5 ans jusqu'en fin juin
11 1999.
12 Q. Pouvez-vous nous expliquer un petit peu comment se présentait, en
13 termes de position géographique, comment se présentait Kosovo Polje ?
14 R. Kosovo Polje est une municipalité comptant environ 12 000 habitants. Il
15 y avait une rue principale menant vers Pristina, quelques rues encore.
16 C'était un nœud ferroviaire également dans Kosovo Polje et il y avait
17 évidemment une gare ferroviaire également, le nœud étant le nœud
18 ferroviaire des plus importants de Kosovo-Metohija.
19 Q. Nous avons pu entendre ici la déposition de quelques témoins, notamment
20 celle du général Vasiljevic ou de Gajic, qui eux, faisaient état du fait
21 que des groupes paramilitaires, d'abord les Loups de la Drina et les Tigres
22 d'Arkan possédaient leur base à Kosovo Polje. Premièrement, je vous pose la
23 question à vous qui êtes de la région et qui, au cours de la période
24 pertinente, étiez un professionnel, journaliste professionnel et qui a
25 rapporté de là-bas, qui couvrait ce terrain : est-ce que vous pouvez dire,
26 quant à vous, que de telles allégations seraient fondées de réalisme ?
27 R. Je ne pense pas que ceci se trouve à fonder de réalisme et de réalité.
28 A Pristina, Kosovo Polje, il y avait lieu de dire qu'à une distance de 6
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1 kilomètres de Pristina il pouvait y avoir évidemment 2 000 journalistes
2 étrangers en période de 1998 et 1999. Quant à moi, je n'ai jamais entendu
3 de telles informations, parce que j'habitais Kosovo Polje.
4 Q. Maintenant, dans le paragraphe 15 de votre déclaration, page 5 en
5 version anglaise, vous faites la description des attaques lancées par des
6 terroristes, et j'emprunte votre propre parole, vous disiez que ces
7 attaques "empruntaient toujours une même formule."
8 A quelle fréquence se faisaient ces attaques suivant la même formule,
9 d'après vous ?
10 R. Ces attaques avaient lieu vers le milieu du 1998, et en 1998 surtout,
11 presque tous les jours depuis Pec à Klina, et Pec à Prizren et Orahovac.
12 Q. A titre de clarification de ce sujet-là, vous mentionnez à la page 14,
13 lignes 12 à 16, vous dites qu'il y avait une municipalité de Kosovo Polje,
14 et pour ce qui est de la population, il y avait environ 12 000 résidents.
15 Pour être sûr, serait-il bon de dire juste que la ville proprement dite
16 comptait moins d'habitants ?
17 R. Non, non, la ville proprement dite comptait 12 000 habitants.
18 Q. Fort bien. Nous avons pu entendre dans ce prétoire des dépositions
19 selon lesquelles un avocat nommé Kelmendi, Bajram Kelmendi a été assassiné.
20 Est-ce que vous-même avez eu des connaissances personnellement concernant
21 cet assassinat; si oui, de qui tenez-vous de telles informations et comment
22 se présentaient ces informations ?
23 R. Je connaissais bien Bajram Kelmendi. Je sais qu'il a été assassiné à
24 Pristina dans son appartement. Nous avons communiqué -- diffusé là-dessus.
25 Plus tard, nous avons pu entendre dire que c'était des éléments criminels,
26 une équipe serbo-albanaise mixte qui était à l'origine de tout cela, et
27 que, paraît-il, on lui avait, en faisant des braquages et effractions de
28 son appartement, volé une importante somme d'argent de son coffre à lui.
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1 Q. Avez-vous eu l'occasion de rencontrer des membres de sa famille pour
2 parler de cela ?
3 R. J'ai pu rencontrer plus tard son épouse qui, elle, a été concernée,
4 très troublée par tout cela.
5 Q. A-t-elle été en mesure de confirmer certains de ces détails dont vous
6 êtes en train de faire état, à savoir sur ce qu'on disait en ville au sujet
7 de son assassinat ?
8 R. Le tout, j'ai pu l'entendre après son meurtre. Lui, a été tué, son fils
9 également. Mais cette femme a été troublée, profondément troublée. Nous
10 avons pu échanger quelques phrases tout simplement. Elle aussi ne pouvait
11 parler d'autre chose que de ce que nous avons pu entendre en ville. Nous
12 n'avions pas d'autres preuves là-dessus.
13 Q. Merci, Monsieur Mihajlovic, d'être venu pour déposer ici. Comme je vous
14 ai dit déjà lors des récolements, nous avons fait entrer pas mal d'éléments
15 de vos propos dans cette déposition qui est la vôtre.
16 M. IVETIC : [interprétation] C'est ainsi que se termine mon interrogatoire
17 principal.
18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
19 Monsieur Mihajlovic, peut-on dire qu'un seul de ses fils a été tué de
20 concert avec Kelmendi ?
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense bien, Monsieur le Président, qu'il
22 n'y avait qu'un seul de ses fils qui a été tué. Je ne me souviens pas de
23 quoi que ce soit d'autre.
24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
25 Maintenant, y a-t-il parmi les autres conseils de la Défense qui
26 aurait quelque chose à demander au témoin. Si tel n'est pas le cas, le
27 témoin serait contre-interrogé par l'Accusation.
28 Monsieur Hannis, à vous.
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1 Contre-interrogatoire par M. Hannis :
2 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Mihajlovic.
3 R. Bonjour.
4 Q. Outre la langue serbe, quelles sont les autres langues que vous
5 parlez, que vous pratiquez, vous comprenez ?
6 R. Je peux dire qu'il s'agit d'albanais et d'anglais.
7 Q. Dans le cadre de votre déclaration, soit la pièce à conviction 6D1530,
8 il y a certains éléments sur lesquels je voudrais bien vous contre-
9 interroger. Dans le paragraphe 3 de votre déclaration, vous faites mention
10 au sujet de "l'UCK comme quoi il y avait une déclaration en 1997 où l'UCK
11 se disait responsable d'un acte de terroriste."
12 Ensuite, vous dites que : "Parmi les officiers, les leaders des
13 Albanais du Kosovo, Ibrahim Rugova avant tout, disait que d'abord cette
14 organisation n'existait pas, l'UCK, et que ce n'était que pur produit des
15 services secrets serbes."
16 Lorsque vous parlez de "leaders politiques, des officiels politiques"
17 dans la première phase de votre déclaration, à qui pensiez-vous très
18 exactement, à qui vous référiez-vous ?
19 R. Evidement, je me référais d'abord à Ibrahim Rugova, à Fehmi Agani; à
20 Adem Demaqi, qui s'est fait tuer par des -- qui était quelqu'un qui avait
21 une importante influence parmi les politiques, ensuite il y avait Ljuljeta
22 Pulja Beciri, Kuce Jashari, et Jusuf Buxhovi, je pense.
23 Q. Vous êtes en train de dire que chacun d'entre eux disait que l'UCK
24 n'existait pas ? Vous le dites et vous le disiez sérieusement ?
25 R. Oui, oui, en 1997, oui.
26 Q. Quant à l'année 1998, est-ce que vous étiez rétracté, vous avez changé
27 d'avis pour dire autre chose sur l'UCK ou pour dire que l'UCK existait ?
28 R. En 1998, Andem Demaqi était devenu le porte-parole de l'UCK.
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1 Q. En fait, les autorités serbes n'avaient-elles pas pendant si longtemps
2 nié l'existence de l'UCK; pendant des années entières les autorités serbes
3 n'utilisaient que le terme de la "soi-disant armée UCK".
4 M. IVETIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai à soulever une
5 objection au sujet de cette question, particulièrement lorsqu'il s'agit de
6 dire que la Chambre de première instance avait déjà traité de cette
7 question dans différentes langues. C'est-à-dire, il serait tout à fait
8 inadéquat, pas très bien fondé, d'impliquer l'expression "soi-disant," ceci
9 ne va pas être la même chose en anglais.
10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ce n'est pas évidemment la façon dont
11 il faut procéder, Maître Ivetic.
12 Il ne s'agit pas évidemment de présenter en noir et blanc pour dire
13 qu'il s'agit évidemment de quelque chose qui n'a pas été défini de façon
14 tout à fait adéquate.
15 Poursuivez, Maître Hannis.
16 M. HANNIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
17 Q. Dans le paragraphe 6, Monsieur le Témoin, vous dites que l'UCK avait
18 des conférences de presse, le Koha Ditore comme journal, ne condamnait pas
19 les attaques en province. Avez-vous voulu dire dans le cadre de votre
20 déposition, qu'aucun de ces organes, aucun de ces journaux n'a jamais
21 dénoncé un quelconque acte de terrorisme perpétré par l'UCK ?
22 R. En 1997, 1998, aucun organe, aucun journal en albanais n'avait condamné
23 les actes terroristes perpétrés par l'UCK.
24 Q. Est-ce que dire que Koha Ditore n'avait jamais dit, par exemple, que M.
25 Rugova devait être responsable du fait que son attitude n'a pas été sévère
26 ni rigoureuse à l'égard de l'UCK ?
27 R. Oui, mais ceci ne veut pas dire pour autant que la violence aurait été
28 condamnée.
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1 Q. Fort bien. D'après le paragraphe 7 de votre déclaration, vous dites
2 qu'il y avait 27 [comme interprété] magazines ou journaux en albanais
3 publiés à Pristina.
4 R. Oui.
5 Q. Vous faites mention de Kombi, de Gazeta "shqpiptare" qui étaient
6 pratiquement les organes de l'UCK. Je suppose que le Bujku et le Koha
7 Ditore n'étaient pas les organes de l'UCK ?
8 R. Non. Bujku et Koha Ditore ne disséminaient surtout pas une haine sur
9 des bases raciales, mais ils ne faisaient que communiquer les déclarations
10 faites par des officiels de l'UCK.
11 Q. Dans le paragraphe 7 de votre déclaration, vous dites : "Il est
12 intéressant de voir que dans ces revues" et vous vous référez au journal
13 Kombi, à la revue Gazeta "shqpiptare," "des termes utilisés pour présenter
14 les Serbes ont toujours été péjoratifs." Je ne peux pas prononcer ce terme-
15 là, mais je voulais savoir quels étaient les propos empruntés par vous pour
16 parler des Albanais du Kosovo ? Avez-vous parlé d'Albanais ou de Siptar ?
17 R. Nous parlions seulement d'Albanais.
18 Q. Est-ce parce que vous considériez, quant à vous, que l'expression de
19 "Siptar", le terme de "Siptar" serait péjoratif ?
20 R. Non. Le terme de Siptar n'est pas péjoratif. Les Albanais eux-mêmes,
21 quand ils parlent d'eux-mêmes, ils disent "Onjion" [phon] siptar, c'est-à-
22 dire : Je suis Albanais. Ce n'est pas évidemment un terme péjoratif. Je
23 sais qu'il y avait des Albanais qui, eux, protestaient lorsqu'on les
24 traitait de Siptar. Et moi, personnellement, j'utilisais à leur encontre le
25 terme d'Albanais.
26 Q. Vous faites référence à certaines publications dans le cadre du
27 paragraphe 7 de votre déclaration. De toute évidence, vous disiez, vous,
28 que ces organes, ces revues n'étaient pas capables de subvenir à leur mode
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1 de financement et qu'il y avait évidemment une assistance venue de
2 l'extérieur, étant donné le nombre d'exemplaires qu'ils étaient en mesure
3 de publier.
4 Comment et de quelle façon ceci était évident ?
5 R. Evidemment, c'est que dans ces revues on pouvait lire des articles qui
6 ont été d'ailleurs financés par ce qu'on appelait : Votre patrie vous
7 appelle, c'est-à-dire pour [en B/C/S] dans l'original.
8 Q. Est-ce qu'on ne peut pas dire que le centre de médias qui était le
9 vôtre ne pouvait pas recevoir une assistance financière de l'extérieur ?
10 R. Qu'est-ce que vous voulez dire par assistance depuis l'intérieur ?
11 Q. Mais vous parliez de dons qui vous ont été accordés en équipement que
12 vous avez reçus, de dons de différentes compagnies et propriétés, ne
13 serait-il pas de parler d'une assistance qui venait de l'extérieur ?
14 R. Oui, bien sûr, lorsqu'on parlait de trois téléviseurs et de trois
15 ordinateurs.
16 Q. Et c'était tout, en totalité, tout ce que vous avez reçu de ces
17 différentes compagnies privées ?
18 R. Oui, c'était tout, tout ce que nous avons pu recevoir de la part des
19 compagnies privées.
20 Q. Vous n'avez pas reçu de dons, aucun financement ?
21 R. Non, il n'y avait guère besoin de se faire accorder des dons
22 financiers.
23 Q. Vous dites dans le cadre du paragraphe 7 : "On peut supposer que
24 certains, comme le journal Koha Ditore, ont été financés par des organismes
25 internationaux."
26 Que veut dire, que supposez-vous ?
27 R. Tout le monde supposait, les journalistes albanais et serbes le
28 supposaient. Il y avait même des textes parus dans les organes en albanais
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1 qui disaient que Koha Ditore se faisait financer depuis l'étranger. D'abord
2 dans le journal Zeri i Rinise.
3 Q. Est-ce que vous avez essayé de faire quelque chose pour vérifier tout
4 cela ?
5 R. Non, je n'ai fait aucune tentative et je n'ai pas eu le moyen
6 d'ailleurs de vérifier quoi que ce soit dans ce sens-là.
7 Q. Dans le paragraphe 10 de votre déclaration, vous êtes en train
8 d'expliquer qu'en date du 16 avril 1998, vous avez lancé un centre de
9 médias de Pristina. Comment avez-vous réussi à monter ce coup à cette
10 époque-là ? Comment et pourquoi ? Que s'est-il passé à cette époque-là ?
11 R. A cette époque-là était en croissance le nombre de journalistes
12 étrangers qui affluaient vers Pristina. Il s'agissait de gens qui n'avaient
13 pas un centre depuis lequel ils pouvaient communiquer, envoyer évidemment
14 leurs rapports, et eux, ils devaient tout de même être aidés. J'ai voulu
15 éviter tout chaos ou toute désinformation et j'ai cru que l'organisation à
16 la mise sur pied d'un tel centre de médias était tout à fait bien fondé,
17 professionnellement parlant bien fondé et justifié.
18 Q. Etait-ce une idée à vous personnellement ?
19 R. C'était une idée à moi, bien sûr, depuis plusieurs années, mais je
20 n'avais pas eu de chance avant, parce que nombreuses étaient mes fonctions
21 auxquelles j'ai dû répondre. Alors, je crois que c'était vraiment une toute
22 dernière minute venue où il a fallu mettre sur pied un centre de médias.
23 Q. N'y a-t-il pas eu de discussions menées comme quoi le tout devait être
24 monté avec et en coopération avec le ministère de l'Information à l'échelle
25 de la République ou à l'échelle de la province à cette époque-là ?
26 R. Non, il n'y avait pas eu de débats là-dessus. Le ministre de
27 l'Information d'alors ne s'est jamais rendu au centre de médias à Pristina.
28 Au gouvernement de la province, il y avait un secrétariat à l'information,
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1 mais eux ils n'étaient pas dotés de capacité nécessaire. D'ailleurs, ils
2 n'étaient pas désireux du tout de faire quelque chose du genre.
3 Q. Avec qui vous étiez mis à parler de cela au sein du secrétariat à
4 l'information ? Pouvez-vous nous passer des noms ?
5 R. Je me suis entretenu avec Bosko Drobnjak, secrétaire à l'information à
6 cette époque-là.
7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Que voulez-vous dire, Monsieur
8 Mihajlovic, lorsque vous êtes en train de faire état de gouvernement de la
9 province ?
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Je me réfère aux autorités de la province,
11 c'est-à-dire, il s'agit du Conseil exécutif de la province en place encore
12 à cette époque-là en 1998.
13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] En avril 1998, qui était à la tête de
14 cette autorité ?
15 LE TÉMOIN : [interprétation] C'était Veljko Odalovic qui était le préfet ou
16 le sous-préfet à cette époque-là, si ma mémoire est bonne.
17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci beaucoup.
18 Monsieur Hannis, c'est à vous.
19 M. HANNIS : [interprétation]
20 Q. Dans le paragraphe 10, vous dites : "Il y avait un accord tacitement
21 accordé par des gens du gouvernement."
22 Que voulez-vous dire par là, "tacitement, il y avait un accord
23 accordé tacitement" ?
24 R. Tout simplement il s'agissait que ces gens-là n'allaient pas soulever
25 de problèmes.
26 Q. Très bien. A qui fait-on référence au sein du gouvernement, s'agit-il
27 de Bosko Drobnjak encore ?
28 R. Peu importe s'il s'agit du secrétariat à l'information ou s'il s'agit
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1 de quelqu'un qui serait au sein du parti au pouvoir, des problèmes auraient
2 pu survenir si évidemment il y avait eu une volonté de le faire. Tout
3 simplement, on aurait pu dire à l'adresse du directeur de l'hôtel de nous
4 empêcher évidemment de jouir de locaux qui se trouvaient dans l'hôtel, et
5 c'était tout.
6 Q. Lorsque vous faites référence au parti au pouvoir, à qui vous faites
7 référence ?
8 R. Il s'agit de parti à l'échelle évidemment de Pristina local ou en
9 province. Peu importe, tout dépend pour qui nous serions considérés comme
10 une gêne quelconque.
11 Q. Vous dites que vous avez pu obtenir un agrément, un accord tacite de la
12 part des gens du gouvernement. A qui faites-vous référence au sein du parti
13 ?
14 R. Je pense à Vojislav Zivkovic, président du SPS de Kosovo-Metohija et
15 qui, lui, professionnellement parlant, a préalablement été journaliste lui
16 aussi.
17 Q. Peut-on dire que cet accord a pu faciliter votre travail pour mettre
18 sur pied ce centre de médias, les locaux du centre dans l'hôtel Grand ?
19 R. Non.
20 Q. Vous avez dit : "Des locaux nous ont été alloués."
21 Par qui ?
22 R. Par le directeur de l'hôtel Grand. Je crois qu'il s'appelait Djorovic
23 de nom de famille, Djorovic.
24 Q. Est-ce que vous avez dû payer tous ces locaux, la location de ces
25 locaux ?
26 R. Non. Lui, il considérait que tous ces gens-là devaient être des
27 journalistes qui devaient descendre dans cet hôtel, et que pratiquement à
28 côté des journalistes, et hormis les journalistes, il n'y avait pas de
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1 chambre disponible au sein de l'hôtel même.
2 Q. Probablement évidemment les affaires marchaient mieux grâce à tout
3 cela, n'est-ce pas, les affaires de l'hôtel, n'est-ce pas ?
4 R. Oui.
5 Q. Très bien. Dans le cas du paragraphe 9 -- 10 plutôt, vous dites : "Ma
6 tâche consistait à aider à ce qu'il y ait moins d'effusion de sang dans le
7 Kosovo, sachant que les médias pouvaient apaiser la situation."
8 Comment voyiez-vous, d'après vous, comment se présentait cette
9 fonction de médias qui pouvait calmer la situation, apaiser tout
10 cela ?
11 R. Je pensais, je le pense encore, que les médias devraient dire la vérité
12 sans faire passer de commentaires et sans évidemment ajouter de l'huile sur
13 le feu, surtout lorsqu'il s'agit de période de crise et des terrains qui se
14 trouvaient en crise.
15 Q. Maintenant, vous venez de m'arracher à la bouche ce que je voulais vous
16 poser comme question. Je voulais parler de votre expérience de journaliste
17 professionnel pour vous demander si vous n'étiez pas d'accord pour dire que
18 souvent, très souvent, les médias sont en train de calmer la situation en
19 ajoutant, en versant de l'huile sur le feu ?
20 R. Je suis d'accord avec vous.
21 Q. Dans le cadre du point 11 de votre déclaration, vous
22 dites : "Toutes les opérations menées par la police à l'encontre de la
23 terreur perpétrée par les séparatistes albanais ont été dénoncés, condamnés
24 par la communauté internationale."
25 Je suis d'accord avec vous que la communauté internationale, par
26 exemple, lorsqu'elle est considérée sous forme des résolutions des Nations
27 Unies, en 1998 il y en avait deux, servaient à condamner les actions menées
28 par la police. Mais d'après les expériences qui étaient les vôtres, peut-on
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1 dire que la communauté internationale dénonçait toutes les opérations de la
2 police ?
3 R. Ces deux résolutions permettent de voir qu'on traitait de toutes les
4 actions menées par la police.
5 Q. Bien. Mais pour emprunter les termes de résolutions proprement dites,
6 ne s'agit-il pas de dire que les résolutions ont été libellées pour
7 dénoncer l'usage de force non proportionnée à l'égard des civils, il ne
8 s'agit pas seulement de parler de quoi que ce soit d'autre, mais de parler
9 de la force qui a été pratiquée de façon à prendre pour cible des civils ?
10 R. Oui.
11 Q. Dans le paragraphe 17 vous parlez d'un événement dans le village de
12 Opterusa, lorsqu'une reporter allemande, Renata Flotau, a pu interviewer
13 une victime d'un certain crime. Pouvez-vous savoir ce quel en a rapporté ?
14 R. Je ne sais pas si elle en a rapporté, mais je sais qu'elle a pu trouver
15 la victime de ce crime et qu'elle l'a interviewée.
16 Q. Fort bien. Au sujet de cette femme toujours, nous sommes maintenant en
17 train de parler du paragraphe 26 de votre déclaration, vous dites que des
18 journalistes étrangers faisaient preuve d'un comportement tout à fait
19 différent. "Il y en avait qui étaient venus au Kosovo pour se mettre à la
20 recherche d'histoires selon lesquelles la police serbe tuait des enfants
21 albanais, mais il y avait des professionnels qui se mettaient à la
22 recherche d'arguments et de preuves au sujet de tout."
23 Comment voyez-vous Renata Flotau à cette lumière-là ? Etait-ce une
24 professionnelle peut-être ou peut-être des autres ?
25 R. Sur de telles bases, je dirais que Renata Flotau était plutôt une
26 journaliste professionnelle et objective. Je dis bien plutôt.
27 Q. Est-ce que vous l'avez considérée comme quelqu'un de fiable pour juger
28 de ce dont elle rapportait, ce qu'elle écrivait ?
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1 R. Comme je vous l'ai déjà dit, il y avait de 2 000 à 2 500 journalistes
2 pour cette période d'un an, je n'ai pas pu évidemment m'occuper de
3 fiabilité qui devait être celle de chacun de ces journalistes pour
4 vérifier.
5 Q. Est-ce que vous avez pu lire ses écrits pour Der Spiegel en avril 1999
6 lorsqu'elle a traité de Rugova pour dire qu'il a été assigné à résidence ?
7 R. Oui, je crois avoir lu cet article.
8 Q. Avez-vous essayé de vérifier si cette histoire, cet article était exact
9 ?
10 R. Oui, j'étais chez Ibrahim Rugova. J'ai conduit un groupe de plusieurs
11 journalistes étrangers et c'était à l'occasion de la visite de
12 l'ambassadeur de Russie à Belgrade, Juri Kotov, si je ne me trompe.
13 Q. Si vous vous souvenez de ce qu'elle a écrit Renata Flotau dans son
14 article, vous sauriez que c'est en fait l'occasion où elle a réussi de fuir
15 de cette maison à l'occasion de l'arrivée de l'ambassadeur de Russie avec
16 des journalistes ?
17 R. Non. Je l'ai retrouvée dans la maison d'Ibrahim Rugova. Nous avons
18 échangé quelques paroles, alors que les journalistes étaient en train de
19 filmer Ibrahim Rugova et l'ambassadeur de Russie. Elle voulait savoir si sa
20 voiture se trouvait toujours devant l'hôtel Grand. Je ne crois pas qu'elle
21 ait eu besoin de fuir avec des journalistes ce jour-là, parce qu'un ou deux
22 jours auparavant un autre journaliste avait rendu visite à cette même
23 maison.
24 Q. Bien. Alors vous ne saviez pas qu'elle se trouvait dans la maison avec
25 M. Rugova pendant plusieurs jours avant cet événement ?
26 R. Non.
27 Q. Bien. Paragraphe 18 : "Le comportement des médias en albanais à cet
28 époque était bizarre."
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1 Je n'arrive pas à comprendre, en fait, ce qui est indiqué ici au
2 paragraphe 18. Qu'est-ce que vous voulez dire, des médias en albanais;
3 c'est ça ?
4 R. Oui, c'est vrai. Je pensais à l'époque, et je le pense toujours, il est
5 très bizarre, la situation où les médias ne condamnent pas la violence.
6 Q. Vous avez également dit : "Il n'y a jamais eu de condamnation de
7 crimes, seulement, et on mettait tout le temps l'accent sur les crimes à
8 l'encontre des Albanais" ?
9 R. Oui.
10 Q. Donc ça veut dire qu'ils condamnaient les crimes, mais seulement ceux
11 commis à l'encontre des Albanais, qui avaient pour conséquence des victimes
12 albanaises ?
13 R. Oui.
14 Q. Bien. Ne peut-on pas dire qu'il en était de même s'agissant des
15 journalistes serbes, des médias serbes qui parlaient seulement des crimes
16 commis par des Albanais à l'encontre des Serbes ?
17 R. Il y a eu des médias qui n'ont fait condamner que des crimes commis
18 contre les Serbes, mais il y en a eu d'autres qui ont également condamné
19 les crimes commis sur des Albanais, et une condamnation très forte.
20 Q. Quels sont ces médias serbes ?
21 R. Vreme, Nin, Danas, Blic, probablement encore quelques-uns à Belgrade.
22 Q. Au Kosovo y a-t-il eu, à l'époque, des médias serbes condamnant des
23 crimes qui auraient été commis par des Serbes à l'encontre des Albanais ?
24 R. Oui, il y en a eu. Par exemple, Radio Pristina qui condamnait des
25 crimes commis sur des Albanais ou des Serbes.
26 Q. Bien. Paragraphe 20, vous indiquez : "Pendant que le centre de médias
27 fonctionnait entre le 18 avril 1998 et le 28 juin 1999, j'étais le seul à
28 rédiger les informations."
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1 R. C'est exact.
2 Q. Bien. Combien de personnes travaillaient au centre de médias ? Vous
3 nous avez dit qu'il y en avait une vingtaine, n'est-ce pas ?
4 R. C'est exact.
5 Q. Vous étiez le seul à rédiger les articles publiés par le centre de
6 média ?
7 R. C'est exact.
8 Q. Combien d'articles ou de reportages ont été publiés pendant cette
9 période, entre 18 avril 1998 et le 28 juin 1999 ?
10 R. Je ne peux pas vous donner une réponse précise, mais en moyenne, il y a
11 eu cinq à huit informations par jour sur des événements au Kosovo.
12 Q. En plus de cela, vous vous déplaciez au Kosovo, donc vous étiez souvent
13 sur le terrain, n'est-ce pas ?
14 R. Oui, c'est exact.
15 Q. Encore une question. Vous avez dit que le 28 juin 1999, vous êtes resté
16 encore dix jours ou à peu près après le départ des forces serbes ?
17 R. Oui.
18 Q. Personne n'a jamais essayé de dire que ce que vous avez écrit était
19 faux ?
20 R. C'est exact.
21 Q. Donc personne s'est jamais plaint de la teneur de vos articles ?
22 R. Ecoutez, nous ne faisions pas des articles de fond, il n'y avait que
23 des informations et personne n'a jamais mis en question un seul fait
24 figurant dans ces articles que nous publiions, que ce soit des médias
25 étrangers ou de yougoslaves.
26 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Juste une question. Quelles étaient
27 vos sources pendant que vous travailliez là-bas, étant donné que vous étiez
28 souvent au Grand hôtel ?
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'étais pas tout le temps à l'hôtel,
2 j'étais également sur le terrain. Mes sources étaient mes collègues
3 journalistes partout au Kosovo, également des directeurs des cliniques, des
4 hôpitaux, des chefs des districts, des présidents des communes locales ou
5 des municipalités, mes collègues albanais. Chaque fois où je recevais une
6 information, j'essayais de la croiser avec les informations d'autres
7 sources.
8 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Merci.
9 M. HANNIS : [interprétation]
10 Q. Bien. Seriez-vous d'accord avec moi pour dire, qu'à peu près mars 1999
11 et juin 1999, qu'il n'y avait pas vraiment de médias albanais fonctionnant
12 de manière appropriée au Kosovo ? Toutes les maisons d'édition étaient
13 fermées, la plupart des journalistes ou des reporters avaient déjà quitté
14 le Kosovo ou étaient en train de se cacher ?
15 R. Non, il n'y avait pas de médias en dehors des stations radio, de la
16 radio Kosovo libre, s'agissant d'autres médias, tout simplement, comme il
17 n'y avait pas de liberté de mouvement dans la province à cause des
18 bombardements de l'OTAN, il ne pouvait pas y avoir de publications.
19 Q. La radio Kosovo libre n'a jamais mis en question les articles écrits
20 par vous pendant cette période ?
21 R. Je n'ai pas vraiment eu le temps pour les écouter tout le temps, mais
22 ils émettaient en général surtout les communiqués de l'UCK.
23 Q. Vous nous avez déjà dit que la chaîne de télévision de Tirana émettait
24 sans cesse des messages destinés aux Albanais les invitant de quitter avant
25 la guerre, à quelle fréquence ?
26 R. Je n'ai pas pu suivre la télévision TV Tirana très souvent, peut-être
27 une à deux fois par semaine. Mais mes collègues apprenaient très rapidement
28 ce qui était mis à la télévision de Tirana et ils en ont parlé.
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1 Q. S'agissant des sources que vous avez mentionnées en répondant à la
2 question du Juge Chowhan, n'est-il pas vrai que le MUP en faisait partie ?
3 R. Oui.
4 Q. Et les sources du MUP comprenaient également les sources du département
5 de Sûreté de l'Etat en plus du ministère de l'Intérieur, n'est-ce pas ?
6 R. Non, ma source était Bozidar Filic qui confirmait les informations ou
7 les démentait.
8 Q. Ma question était au pluriel, donc en plus de Bozidar Filic y avait-il
9 quelqu'un d'autre au sein du MUP ?
10 R. S'agissant de Pristina et des confrontations de grande envergure, j'ai
11 également eu contact avec le colonel Sipka de Prizren, qui me passait des
12 informations sur les événements d'Orahovac à l'époque où il y a eu des
13 confrontations à Orahovac, et il y avait également des personnes, des
14 membres des unités de la police au niveau municipal qui se trouvaient sur
15 le terrain, qui nous servaient de sources au moment où on se trouvait sur
16 le terrain avec d'autres journalistes.
17 Q. Aviez-vous des sources au sein de la VJ en 1998 ?
18 R. C'est un certain Zirojevic qui était chargé de liaison avec les médias
19 au sein de la VJ en 1998, je ne sais pas quel était son prénom, mais il ne
20 le faisait pas très souvent.
21 Q. Y avait-il d'autres sources d'information au sein de la VJ pour vous en
22 dehors de lui ?
23 R. Je pense que c'était seulement lui.
24 Q. Point 21 vous parlez des médecins, des hôpitaux au Kosovo, en tant que
25 des sources fiables ?
26 R. Oui. Il s'agit peut-être des sources les plus fiables qu'il y avait.
27 Q. Mais vous dites également que leurs informations étaient limitées,
28 parce qu'ils avaient des informations portant exclusivement sur des
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1 personnes qu'ils avaient vues et auxquelles ils avaient dispensé des soins.
2 Ils ne pouvaient pas vous dire qui avait commis, qui avait été blessé ou
3 tué, et cetera, et cetera, en dehors de leur hôpital; cela est-il exact ?
4 R. Oui.
5 Q. Etes-vous d'accord avec moi pour dire qu'en 1998 et 1999 un certain
6 nombre d'Albanais du Kosovo pourraient vite être hésitants à ne pas aller
7 très volontiers à l'hôpital de peur d'être suspectés en raison ou à tort
8 d'être terroristes ?
9 R. Peut-être, ce que vous dites est seulement en partie vrai, parce que
10 les blessés devaient aller à l'hôpital, autrement ils mourraient. Il n'y
11 avait pas d'hôpitaux illégaux ou locaux dans cette zone d'après nos
12 informations. Ce qui faisait que la plupart des blessés finissaient dans
13 des hôpitaux où on pouvait leur dispenser les soins appropriés, les
14 meilleurs soins possibles.
15 Q. Sur la base de toutes vos sources, y compris le MUP et la VJ, vous
16 n'avez jamais entendu parler des hôpitaux de campagne ou des médecins
17 libéraux qui traitaient, qui soignaient des terroristes et des civils, des
18 Albanais du Kosovo en dehors des hôpitaux ?
19 R. J'ai entendu dire qu'il y avait de tels hôpitaux, et qu'ils
20 s'occupaient principalement des membres de l'UCK. Je ne pense pas qu'ils
21 soignaient des civils.
22 Q. Pourquoi vous dites cela, qu'ils ne soignaient pas les civils ? Qui est
23 votre source pour cette information ?
24 R. Ma source ce sont mes collègues albanais, journalistes, ainsi que les
25 journalistes étrangers qui avaient des contacts fréquents avec les membres
26 de l'UCK et leurs commandants.
27 M. HANNIS : [interprétation] C'est le temps pour la pause ?
28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Non, vous avez encore 15 minutes.
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1 M. HANNIS : [interprétation] Très bien.
2 Q. Alors vous avez dit dans ce paragraphe que la police vous avait demandé
3 de ne pas publier les noms des personnes tuées ou blessées avant qu'ils
4 n'en informent les familles. Cela me paraît raisonnable. Vous dites
5 également qu'ils vous avaient demandé de retarder la publication de ces
6 informations afin de pouvoir informer les familles d'une manière
7 officielle. Est-ce que vous avez informé des noms des Albanais de Kosovo
8 tués pendant les opérations antiterroristes ?
9 R. A chaque fois où j'ai pu obtenir le nom je les ai publiés.
10 Q. J'aimerais vous présenter une pièce à conviction maintenant, il s'agit
11 de la pièce P3121. Toutes mes excuses, je retire ce document et on va
12 passer à autre chose et revenir à ce document un peu plus tard.
13 Paragraphe 22 de votre déclaration vous dites : "D'une manière générale le
14 travail de votre centre a été évalué d'une manière positive."
15 Je suppose que tout le monde n'était pas d'accord avec cette évaluation.
16 Qui n'était pas d'accord avec cela ?
17 R. Le seul c'était le centre d'information d'Ibrahim Rugova et à une seule
18 occasion.
19 Q. Vous avez fait référence à un journaliste allemand Erich Rathfelder ?
20 R. Rathfelder.
21 Q. Oui, je pense que dans votre déclaration ce nom est écrit de la manière
22 suivante, R-a-t-f-e-l-d-e-r, Ratfelder, mais en fait sur internet on voit
23 que son nom s'écrit différemment avec un "h" en plus. Vous faites référence
24 à ce journaliste quand vous parlez d'Orahovac. Vous souvenez-vous de cela ?
25 R. Oui.
26 Q. Est-il vrai que vous lui avez parlé en personne après qu'il ait publié
27 cette histoire et que vous lui avez dit qu'il était peut-être mieux pour
28 lui de partir parce que sa sécurité ne pouvait plus être garantie ?
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1 R. C'est exact.
2 Q. Qui est-ce qui mettait ce journaliste en danger?
3 R. Je pensais à ce moment-là que le plus grand danger pour lui
4 représentait le fait qu'il avait publié une information fausse, quelque
5 chose qui n'était absolument pas fondé. J'avais l'impression qu'il
6 s'agissait d'une information publiée sur commande. Je pensais à l'époque,
7 et je le pense toujours, que la plus grande menace pour ce journaliste à
8 l'époque et maintenant étaient les personnes qui lui avaient passé cette
9 commande.
10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Cela figure-t-il dans la déclaration,
11 Monsieur Hannis ?
12 M. HANNIS : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, on parle du
13 paragraphe 22, mais on fait référence à ce fait pour la première fois au
14 paragraphe 18. Là, le témoin indique: "Je me souviens d'un exemple de la
15 situation où le journaliste Rathfelder a écrit un article pour plusieurs
16 journaux allemands sur l'existence d'une fosse de masse à Orahovac, une
17 charnière."
18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui. Merci.
19 M. HANNIS : [interprétation]
20 Q. Est-ce que vous savez qu'une équipe de médecins légistes allemande
21 s'est rendue en juillet 1999 dans cette région et qu'ils ont pu
22 s'entretenir avec la personne qui avait passé cette information à M.
23 Rathfelder ?
24 R. Non, je ne suis pas au courant de cela.
25 Q. Savez-vous qu'il y a eu des excavations dans la zone d'Orahovac ?
26 R. Non.
27 Q. Savez-vous que M. Rathfelder a publié une histoire, un article, après
28 son départ de Serbie, très vite après cet incident, en juillet ou août 1998
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1 ?
2 R. Non, je ne suis pas au courant de cela.
3 Q. Il a écrit dans cet article que c'est vous qui lui avez dit qu'il
4 pourrait être en danger à cause des Serbes qui n'étaient pas contents à
5 cause de cet article portant sur la Croatie ?
6 R. Non, je ne lui ai pas dit cela.
7 Q. Paragraphe 27, vous dites : "Les membres des organisations
8 internationales telles que l'OSCE, la MVK et autres bombardaient l'opinion
9 publique avec des informations sur les violations des droits des Albanais
10 comme si les civils serbes n'existaient pas." En dehors de l'OSCE et de la
11 MVK, quelles sont les organisations internationales dont vous parlez ici,
12 auxquelles vous faites référence ? Vous faites référence également à la
13 Croix-Rouge internationale, n'est-ce pas ?
14 R. Oui.
15 Q. Et, "Human Rights Watch" aussi?
16 R. Oui, c'est exact.
17 Q. Est-ce que vous avez suivi le procès de Slobodan Milosevic, la partie
18 consacrée au Kosovo ?
19 R. Non.
20 Q. Ce procès ici, avez-vous suivi un peu ce procès par les médias, la
21 télévision, autrement ?
22 R. Non.
23 Q. Vous n'êtes pas au courant, vous n'avez pas entendu ce qu'a dit lors de
24 sa déposition un employé de "Human Rights Watch", Fred Abrahams ?
25 R. Non.
26 Q. Vous ne savez pas qu'il avait rédigé un rapport sur des victimes serbes
27 au Kosovo en 1998 et 1999 ?
28 R. Non, je ne suis pas au courant de son existence.
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1 Q. Donc vous n'avez pas examiné tous les rapports de la MVK ou d'autres
2 organisations internationales, n'est-ce pas ?
3 R. Non, je ne l'ai pas fait. Mon travail était d'amener les journalistes
4 aux endroits où il y aurait eu des charnières pour qu'ils puissent voir
5 d'eux-mêmes s'il y en avait ou pas. Mais moi-même, je ne le savais pas s'il
6 y avait ou pas à cet endroit particulier, un endroit donné, une charnière
7 ou pas.
8 Q. Juste un instant. Je parle maintenant d'Orahovac. Je parle de votre
9 déclaration qui figure au paragraphe 27 où vous dites : "C'est comme si les
10 civils serbes n'existaient pas." Mais comment se faisait-il alors que vous
11 avez dit cela, que les organisations internationales bombardaient l'opinion
12 publique avec des informations portant sur les violations des droits des
13 Albanais. Sur quoi fondez-vous vos déclarations puisqu'on vient d'établir
14 que vous n'avez pas pu examiner tous les rapports ?
15 R. Je n'ai jamais vu d'information portant sur des dizaines de villages,
16 sur une dizaine de villages au Kosovo-Metohija qui avaient été complètement
17 vidés de Serbes, où il n'y avait plus de Serbes du tout.
18 Q. Paragraphe 36, vous parlez de bombardement de l'OTAN, de son début, et
19 de la peur qui régnait des bombes de l'UCK, parmi les Albanais également la
20 peur de la police et de l'armée en confrontation avec l'UCK. Cela était un
21 problème pour beaucoup d'Albanais civils, n'est-ce pas, les combats entre
22 l'armée, la police et l'UCK, parce que parfois les civils étaient des
23 gardes collatéraux, ils se faisaient tuer ou ils étaient blessés lors de
24 ces confrontations ?
25 R. Oui, parce qu'il n'y avait aucun moyen de distinguer les civils de
26 l'UCK parfois. Vous pouvez voir ça, on a vu sur le terrain des membres de
27 l'UCK qui portaient les vêtements civils alors qu'ils portaient des armes.
28 Q. Paragraphe 37, vous dites que vous avez publié sur la BBC l'information
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1 selon laquelle la police avait arrêté plus de 700 personnes qui avaient
2 commis des crimes. A quel moment avez-vous publié cet article, cette
3 information ?
4 R. Je ne me souviens pas de date exacte, je pense que c'était en mai 1999.
5 J'ai reçu cette information du sous-préfet du Kosovo et cette information a
6 été avancée lors de la session extraordinaire du Conseil exécutif
7 transitoire qui s'est tenue ce jour-là et pour moi, ça représentait une
8 source d'information plutôt fiable indépendamment du chaos qui prévalait à
9 Pristina à l'époque.
10 Q. Est-ce que c'était M. Odalovic ou M. Andjelkovic, ce sous-préfet ? Je
11 n'avais pas compris cela.
12 R. C'est M. Odalovic.
13 Q. Est-ce que cette information comprenait également le détail sur le type
14 de crimes dont étaient accusées les 700 personnes arrêtées ?
15 R. Non.
16 Q. Donc vous ne savez pas si parmi les 700 personnes il y avait des
17 personnes soupçonnées d'avoir commis des crimes de guerre contre les civils
18 ?
19 R. Non, je ne sais pas. Je pense que cela comprenait toutes sortes de
20 crimes.
21 Q. Savez-vous si la grande majorité de ces crimes était composée de crimes
22 contre propriété, donc des vols, et cetera.
23 R. Non, je ne sais pas.
24 Q. Paragraphe 38 de votre déclaration, vous avez déclaré que le jour de la
25 signature des accords de Kumanovo, les rues de Pristina étaient pleines
26 d'Albanais, ce qui vous a convaincu que seulement un petit nombre de
27 personnes avait quitté la ville de Pristina.
28 Etiez-vous à Pristina à chaque jour en mars et avril 1999 ?
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1 R. Peut-être pas chaque jour, mais disons, que chaque soir je devais être
2 à Pristina.
3 Q. Lors de vos voyages, déplacements sur le terrain, des allers-retours
4 entre le centre de médias et chez vous, pendant cette période, n'avez-vous
5 pas remarqué des centaines ou des milliers de civils qui se dirigeaient
6 vers la gare ?
7 R. Je n'ai pas remarqué que quelqu'un les dirigeait. Mais j'ai pu voir des
8 personnes, des groupes de personnes qui se dirigeaient vers la gare.
9 Q. Des groupes très nombreux ?
10 R. Disons, des groupes d'une dizaine de personnes. J'ai vu de tels groupes
11 de personnes se diriger vers la gare de Kosovo Polje, gare ferroviaire ou
12 la gare des cars à Pristina.
13 Q. M. Filic vous a-t-il passé l'information dont disposait le MUP portant
14 sur le nombre de Siptar ou d'Albanais, d'Albanais de Kosovo civils qui
15 avaient quitté le pays pendant les quatre ou cinq premières semaines de
16 guerre ?
17 R. Je ne crois pas qu'il l'ait fait. Nous recevions ce genre d'information
18 principalement des médias étrangers qui informaient des nombres croissants
19 quotidiennement.
20 Q. Acceptiez-vous les chiffres qu'ils vous avançaient comme fiables ?
21 R. Je n'avais aucun moyen pour les vérifier. J'ai pu constater que les
22 médias, le CNN ou Times en parlaient, mais je ne suis pas allé en Macédoine
23 pour voir de mes propres yeux les camps dont parlaient les médias étrangers
24 occidentaux.
25 Q. Vous n'avez pas essayé de vous renseigner auprès de vos sources de la
26 VJ ou du MUP des nombres de civils qui avaient déjà quitté le pays ou qui
27 s'apprêtaient à le quitter ?
28 R. Ecoutez, pendant le bombardement je n'ai pas eu beaucoup de contacts
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1 avec M. Filic. J'ai très rarement eu l'occasion de le voir à cette époque-
2 là.
3 M. HANNIS : [interprétation] Peut-on faire la pause
4 maintenant ?
5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, juste un instant.
6 Pourriez-vous nous dire la chose suivante : y avait-il des médias serbes
7 présents sur la frontière, ou à la proximité de la frontière ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Je peux vous l'expliquer, si vous le
9 souhaitez.
10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, ça m'intéresserait.
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Les médias serbes de Pristina, leurs
12 mouvements en direction de la frontière albanaise et macédonienne étaient
13 rendus difficiles par le fait que la route était bloquée par des points de
14 contrôle de la police ou par des points de contrôle de l'UCK, donc ils ne
15 pouvaient tout simplement pas arriver jusqu'à la frontière.
16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
17 Nous allons faire une pause maintenant, Monsieur Mihajlovic, je vous
18 demande maintenant de quitter le prétoire accompagné de l'huissier et d'y
19 revenir dans 25 minutes.
20 Nous reprenons à 16 heures 05 minutes.
21 [Le témoin quitte la barre]
22 --- L'audience est suspendue à 15 heures 46.
23 --- L'audience est reprise à 16 heures 06.
24
25
26 [Le témoin vient à la barre]
27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Hannis, vous avez la parole.
28 M. HANNIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
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1 Q. Monsieur Mihajlovic, est-ce que cela vous surprendrait d'entendre que
2 dans un rapport du MUP daté du 1er mai 1999, l'état-major du MUP à Pristina
3 a envoyé un rapport au ministère de l'Intérieur à Belgrade en disant qu'à
4 peu près 715 000 Siptar avaient quitté le pays et c'était jusqu'au 30 avril
5 1999 ? Vous étiez au courant du fait que les gens quittaient la province en
6 grand nombre ?
7 R. Je savais que les gens quittaient la province, mais cela me
8 surprendrait, parce que je pensais qu'à l'époque ce nombre de personnes qui
9 auraient quitté la province était trop élevé.
10 Q. Mais vous n'avez pas de raison pour ne pas être d'accord avec ce qui
11 figure dans les rapports du MUP, n'est-ce pas ?
12 R. S'il s'agit d'une information exacte, je n'ai pas de raison pour ne pas
13 être d'accord avec.
14 Q. J'aimerais vous montrer la pièce P3111. Il s'agit d'une photographie et
15 j'aimerais vous demander si vous pouvez identifier les personnes qui sont
16 sur cette photographie.
17 R. Oui, je reconnais l'homme qui est assis et qui porte, je suppose, un
18 tee-shirt bleu.
19 Q. C'est la deuxième personne à gauche dans le premier rang ?
20 R. C'est exact.
21 Q. Comment s'appelle-t-il ?
22 R. C'est le cameraman de Associated Press et je pense que son prénom est
23 Srdjan.
24 Q. Connaissez-vous son nom de famille ?
25 R. Je pense que son nom de famille est Nedeljkovic, mais je n'en suis pas
26 certain.
27 Q. Associated Press vient d'où ? Savez-vous de quel bureau il était ?
28 R. Je pense que c'était le bureau de Associated Press de Belgrade.
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1 Q. Vous ne reconnaissez pas d'autres personnes qui figurent sur cette
2 photographie ?
3 R. Non.
4 Q. Très bien. J'aimerais vous poser une question concernant les locaux où
5 se trouvaient vos bureaux à Grand hôtel. A quel étage se trouvaient vos
6 bureaux ?
7 R. Mes bureaux se trouvaient au premier étage du Grand hôtel.
8 Q. D'avril 1998 au juin 1999 ?
9 R. Oui.
10 Q. Etiez-vous au courant du fait qu'en été 1998 un nombre d'hommes
11 politiques étaient venus de Belgrade; M. Minic, Andjelkovic, Matkovic,
12 Sainovic et Matko Sainovic ? Etiez-vous au courant de leurs visites ?
13 R. Oui, non seulement ces hommes politiques. Il y avait de nombreux
14 ministres du gouvernement de la Serbie venaient à Pristina et au Kosovo.
15 Par exemple, Vuk Draskovic, il venait. Je l'ai rencontré. Le président de
16 la Serbie, Milovan Milutinovic venait pour assister aux réunions des
17 Albanais peu de temps avant cela.
18 Q. Etiez-vous au courant de la formation d'un organe qui s'appelait le
19 Conseil exécutif provisoire pour le Kosovo ?
20 R. Oui.
21 Q. Qui étaient les membres de cet organe et qui était à la tête de cet
22 organe ?
23 R. A la tête du Conseil exécutif provisoire était Zoran Andjelkovic, et
24 les membres de ce conseil exécutif étaient Bosko Drobnjak pour
25 l'information. Pour les minorités, il y avait un journaliste de la
26 rédaction pour les programmes en langue rom de Radio Pristina. Je ne me
27 souviens pas de son nom. Je pense qu'il y avait au sein de ce conseil
28 plusieurs secteurs; secteur chargé de l'économie, de l'agriculture. Ratko
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1 Jocic [phon], je me souviens, était chargé de l'agriculture et il y avait
2 d'autres membres qui travaillaient par secteur qui étaient chargés des
3 activités particulières.
4 Q. Etiez-vous au courant ou avez-vous entendu parler d'un organe
5 s'appelant commandement conjoint pour le Kosovo-Metohija ? Avez-vous jamais
6 entendu cette expression ?
7 R. Cette expression en 1998 et 1999, je ne l'ai pas entendue et je ne
8 savais pas non plus qu'un organe conjoint ou commandement conjoint existait
9 à l'époque.
10 Q. Ma question était : Avez-vous entendu cette expression avant le jour
11 d'aujourd'hui ?
12 R. Je pense que dans la presse Belgrade j'ai lu quelque part cette
13 expression récemment, mais à l'époque je ne connaissais pas cette
14 expression.
15 Q. De quelle fréquence voyiez-vous M. Minic, M. Andjelkovic et M.
16 Matkovic, ainsi que M. Sainovic au Kosovo en 1998, disons, entre le 20
17 juillet et la fin d'octobre 1998 ? Seulement pendant cette période de
18 temps, dites-nous, quelle fréquence vous les voyiez ?
19 R. Peut-être cinq ou six fois.
20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, Maître Fila.
21 M. FILA : [interprétation] Monsieur le Président, je n'ai rien contre ces
22 questions, mais lorsqu'on pose des questions concernant un groupe de
23 personnes, trois ou quatre personnes, il y a des insinuations, parce qu'il
24 a déjà répondu qu'il y avait d'autres hommes politiques. Pourquoi il ne
25 pose pas de questions concernant ces cinq hommes politiques ?
26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Hannis, je pense que vous
27 devez reformuler votre question.
28 M. HANNIS : [interprétation] J'ai compris votre remarque, Monsieur le
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1 Président. J'ai essayé tout simplement de ne pas perdre beaucoup de temps,
2 mais je pense que j'ai perdu en fait pas mal de temps.
3 Q. Quelle fréquence voyiez-vous M. Sainovic entre la mi-juillet 1998 et la
4 fin d'octobre 1998 à Pristina ?
5 R. Peut-être trois ou quatre fois.
6 Q. Pendant cette période-là, étiez-vous quotidiennement à Pristina ?
7 R. Presque tous les jours.
8 Q. Je pense qu'avant vous nous avez parlé, vous avez dit que c'était la
9 plupart du temps dans les soirées que vous étiez là-bas à Pristina, parce
10 que dans la journée vous auriez pu être sur le terrain ?
11 R. Oui.
12 Q. Merci. J'aimerais vous poser des questions portant sur un incident qui
13 est arrivé dans la région de Donje et de Gornje Obrinje à la fin du mois de
14 septembre 1998. Savez-vous à quel incident je fais référence ?
15 R. Je ne le sais pas.
16 Q. Vous n'êtes pas au courant d'un événement qui lors duquel un membre de
17 civil aurait été massacré par les forces serbes dans la région de ces
18 villages vers la date du 26 septembre 1998 ?
19 R. Pouvez-vous m'aider en me disant de quelle façon cela a été fait ?
20 Q. Bien, il y avait des informations dans la presse internationale portant
21 sur cet événement. Vous ne vous souvenez pas de cela ?
22 R. Pouvez-vous me dire comment cet événement s'est produit et peut-être
23 qu'après je m'en souviendrais.
24 Q. Bien. Il a été allégué que quelques membres de la famille Delilaj, D-e-
25 l-i-l-a-j - et je pense que j'ai bien prononcé le nom de famille - y
26 compris plusieurs enfants en bas âge, qui avaient moins de 10 ans, ont été
27 tués pendant des actions antiterroristes menées dans cette région. Vous ne
28 savez pas que cela s'est passé ?
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1 R. S'il s'agit d'un groupe de personnes qui ont été tuées sur une remorque
2 de tracteur, je me souviens de cela, si c'est ça.
3 Q. Non, il ne s'agit pas de remorque du tracteur. C'était dans leur maison
4 que cela s'est passé, et également ils étaient dans les bois vers lesquels
5 ils ont couru pour s'y cacher et c'était tout près de leur maison. Vous ne
6 vous souvenez pas de cela ?
7 R. Non.
8 Q. Permettez-moi de vous montrer la pièce P2827. Il s'agit de lettre
9 envoyée au président Milutinovic de la part du ministre adjoint chargé des
10 informations. Il s'agit de la page de couverture, ensuite la lettre
11 d'accompagnement.
12 M. HANNIS : [interprétation] Est-ce qu'on peut afficher la page suivante en
13 anglais et en serbe.
14 Q. Vous allez voir qu'il s'agit du 1er octobre 1998. C'est la date qui y
15 figure. Le ministre adjoint informe le président Milutinovic que, je cite :
16 "Des rapports envoyés dans les médias à l'ouest et dans la presse albanaise
17 parlent du présumé massacre des civils albanais par la police serbe à
18 Gornje Obrinje au Kosovo et que ces rapports ont repris des mesures d'une
19 campagne dans des médias internationaux."
20 Dans le deuxième paragraphe il est dit : "Il était évident qu'il s'agit des
21 manipulations dans les médias pour ce qui est de ce présumé massacre."
22 Ensuite, dans le troisième paragraphe, il est écrit : "Les responsables du
23 ministère de l'Intérieur ont contesté cela, à savoir que leurs membres
24 auraient mené des opérations contre les civils et ont ajouté qu'une enquête
25 serait lancée."
26 A la troisième page en anglais : "Une enquête serait menée pour ce qui est
27 de ce présumé crime pour lequel ils ont appris dans les médias de l'ouest."
28 Donc le MUP était au courant de cela, le ministre adjoint également et il
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1 en a informé le président Milutinovic. Vous ne vous souvenez pas de cela ?
2 R. Je ne me souviens pas. Il y avait pas mal de tels événements, et j'ai
3 lu un article là-dessus, mais je ne me souviens pas de cet événement
4 particulier.
5 Q. Les informations là-dessus sont arrivées jusqu'au président de la
6 république ?
7 M. IVETIC : [interprétation] Objection. On demande au témoin d'émettre des
8 conjectures.
9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Hannis, je pense que Me
10 Ivetic a raison.
11 M. HANNIS : [interprétation] Très bien.
12 Q. Monsieur, je vais vous dire également que cela était l'objet de
13 discussions à la réunion du conseil suprême de la Défense le 4 octobre 1998
14 où M. Milosevic, mais si vous n'avez pas entendu parler de cela --
15 R. Oui.
16 Q. Personne d'entre vos collègues journalistes des pays de l'Europe de
17 l'ouest qui étaient au centre de médias à l'époque ne vous a pas parlé de
18 cela ?
19 R. Peut-être qu'ils m'ont parlé de cela, mais je ne me souviens pas de
20 détail de tout cela.
21 Q. Mais vous nous avez dit que votre pratique était de vérifier des
22 histoires de tel type. Dans votre déclaration, vous nous avez dit comment
23 vous avez couru au stade au moment vous avez entendu que dans les médias à
24 l'ouest il a été rapporté que 100 000 civils y ont été détenus.
25 R. Oui.
26 Q. Est-ce qu'il y avait une procédure à suivre pour permettre aux
27 journalistes de rester au Kosovo après le début des frappes aériennes de
28 l'OTAN ?
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1 R. Je pense qu'il y avait une procédure à suivre, qu'au centre de presse
2 tous les journalistes recevaient des laissez-passer. Les locaux et les
3 étrangers pouvaient y rester. Ils ne devaient disposer que de cartes
4 d'identité délivrées par des rédactions de leurs médias, de leur rédaction.
5 Q. Votre travail au centre de médias n'était pas de décider quels
6 journalistes étrangers pourraient y rester ? Cela ne relevait pas de votre
7 compétence ?
8 R. Non, cela ne relevait pas de ma compétence. Je n'ai pas été habilité à
9 prendre de telles décisions.
10 Q. Connaissiez-vous un journaliste qui s'appelait Antonio Russo qui était
11 au Kosovo en 1999 avant l'éclatement de la guerre ?
12 R. Je ne me souviens pas. Il y avait 2 500 journalistes là-bas et je ne
13 peux pas retenir les noms de tous ces journalistes.
14 Q. Vous ne savez pas qu'il y avait un contingent de journalistes étrangers
15 à qui il a été dit, juste avant les frappes aériennes, qu'ils devaient
16 quitter la province parce qu'on ne les considérait pas comme journalistes
17 qui étaient bienvenus ?
18 R. C'était la décision du gouvernement de la Serbie et nous n'avions pas
19 de contacts avec le gouvernement. Il s'agissait du ministère chargé des
20 informations au sein du gouvernement qui s'en occupait.
21 Q. Est-ce qu'on peut afficher P2900. Monsieur Mihajlovic, par rapport à
22 cette pièce, j'ai quelques questions à vous poser. Il s'agit d'une partie
23 d'un rapport de Zoran Andjelkovic, qui était président du conseil exécutif,
24 et ce rapport a été envoyé au président Milutinovic. J'aimerais qu'on
25 affiche la première page en anglais et la page 9 en serbe; page 13 en
26 anglais et la page 9 en B/C/S.
27 Monsieur, sur l'écran, pouvez-vous voir le paragraphe intitulé : "Le
28 secrétariat chargé des informations" ? Je pense que --
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1 R. Hm-hm.
2 Q. Au deuxième paragraphe il est dit : "Une semaine avant le début de
3 l'agression criminelle, avec l'implication du ministère des Informations,
4 les journaux en albanais ont été interdits, qui semaient de la haine, de la
5 discordance en invitant l'OTAN à venir, qui ont contribué à ce que
6 l'agression des criminels de l'OTAN se répande."
7 Vous avez vu cela ?
8 R. Juste un instant, s'il vous plaît. Oui, je vois cela et j'étais au
9 courant de cela.
10 Q. Dans le paragraphe suivant il est dit : "A la veille des bombardements,
11 une réunion a été tenue avec les directeurs et les rédacteurs des médias
12 électroniques, et des journaux au Kosovo-Metohija, et avec les responsables
13 du bureau de Pristina, où on a parlé des préparations pour travailler dans
14 de telles conditions."
15 Avez-vous assisté à cette réunion ?
16 R. Je pense que non. Miladin Jovic était là-bas, à cette réunion. Il était
17 directeur de la radiotélévision de Pristina.
18 Q. Très bien. Savez-vous qui étaient les responsables du bureau de
19 Pristina ?
20 R. Oui. Il s'agissait des "politika," Tanjug, Beta, et c'étaient des chefs
21 de bureau de ces médias. Je suppose qu'ici il s'agit des médias de Belgrade
22 qui avaient leurs bureaux là-bas.
23 Q. Bien. Et vous ne receviez pas d'information du secrétariat chargé des
24 informations portant sur les journalistes étrangers à qui on a demandé de
25 quitter les provinces parce qu'ils n'étaient pas bienvenus à l'époque ?
26 R. Non, je n'ai pas reçu d'information du secrétariat chargé des
27 informations là-dessus. J'ai vu tout simplement des gens qui sont montés à
28 bord des autocars et qui ont quitté Pristina.
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1 Q. Une dernière chose par rapport à ce sujet. Il s'agit d'un rapport que
2 vous aurez rédigé. C'est la pièce P3123. Je m'excuse, Monsieur Mihajlovic,
3 je n'ai pas ce document en serbe, seulement en anglais. Il s'agit de
4 rapport qui vous a été attribué et c'était en février 1991. Ce rapport
5 parle des questions liées au Kosovo. Est-ce qu'on peut aller au sixième
6 paragraphe --
7 M. IVETIC : [interprétation] Monsieur le Président, cela est la deuxième
8 fois qu'on reçoit quelque chose du bureau du Procureur où il y a des
9 parties qui sont expurgées. Je ne vois pas pourquoi cela aurait été
10 expurgé. Si cela va devenir une pratique adoptée, pourquoi expurger
11 certaines parties dans ces documents ?
12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Hannis, votre réponse ?
13 M. HANNIS : [interprétation] Il ne s'agit pas ici de la teneur du document,
14 mais de la source d'où le document provient. Je ne pense pas que cela soit
15 pertinent ou nécessaire pour la question que j'aimerais poser au témoin
16 concernant quelque chose qu'il aurait peut-être écrit ou peut-être pas.
17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui. Probablement, auriez-vous dû dire
18 que c'était la base de votre question au moment où vous avez annoncé la
19 présentation de ce document pour éviter ces problèmes liés à la
20 présentation de documents et pour donner à la Défense la possibilité
21 d'examiner leur position. S'il vous plaît, procédez ainsi dans le futur.
22 M. HANNIS : [interprétation] Je vais le faire, Monsieur le Président.
23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Posez votre question.
24 M. HANNIS : [interprétation]
25 Q. Je vais commencer par le sixième paragraphe où il est dit : "Le sondage
26 qui a été mené par le journal en albanais le plus populaire, Zeri i Rinise,
27 la plupart des Albanais pensent que la solution des problèmes du Kosovo est
28 de s'intégrer avec l'Albanie. Plus de la moitié des personnes enquêtées
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1 pensaient que cela se passerait très vite avec l'intervention des forces
2 étrangères. Seulement 7 % ont appuyé le dialogue avec les Serbes, pendant
3 que 31 % étaient en faveur de la lutte armée contre la Serbie."
4 Dans le paragraphe suivant, il est dit : "Les autorités serbes n'ont pas
5 beaucoup de choix lorsqu'il s'agit du Kosovo-Metohija. Ensuite, ils
6 continuent à mener la politique dans laquelle les Albanais ont toutes les
7 intentions."
8 Est-ce vrai qu'en 1991 la plupart des Albanais ont été remplacés aux
9 positions les plus hautes au gouvernement et dans l'économie ?
10 R. Oui, c'est vrai. Mais il ne faut pas utiliser le terme "enlevés," parce
11 que les Albanais à l'époque ont tous signé une déclaration selon laquelle
12 ils ne voulaient pas travailler au Kosovo pendant que la Serbie gouvernait
13 au Kosovo. C'était un appel du leader de l'Union démocratique du Kosovo,
14 Ibrahim Rugova.
15 Q. Bien. Je lis ce qui est en traduction en anglais où il est dit :
16 "éliminer des positions les plus importantes." Donc vous n'êtes pas
17 d'accord pour dire que ce sont les termes que vous avez utilisés dans votre
18 rapport ?
19 M. IVETIC : [interprétation] Monsieur le Président, encore une fois, nous
20 ne savons pas que ce rapport c'est le rapport du témoin. On nous a dit que
21 c'est le seul exemplaire de cela, et je ne sais pas comment il est possible
22 de dire qu'il s'agisse d'une traduction --
23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Ivetic, la question est basée
24 sur la version en anglais du rapport.
25 M. IVETIC : [interprétation] Mais nous ne savons pas quelle est la source
26 du rapport.
27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ecoutons maintenant le témoin qui a
28 écrit l'article.
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1 Monsieur Hannis, continuez.
2 M. HANNIS : [interprétation] Merci.
3 Q. Est-ce qu'il faut que je répète ma question ? Vous souvenez-vous
4 pourquoi vous avez écrit cet article ou ce rapport ?
5 R. Vous pouvez être éliminé ou vous pouvez vous éliminer vous-même; en
6 tout cas, vous êtes éliminé.
7 Q. Vous souvenez-vous avoir écrit cet article ?
8 R. Je suppose que je l'ai écrit, oui.
9 Q. Sur la deuxième page, il y a encore une chose à propos de laquelle
10 j'aimerais vous poser des questions, au troisième paragraphe en partant du
11 bas de la page. Vous avez dit que : "Les Albanais font 90 % de la
12 population." Est-ce que c'est vous qui avez écrit cela ?
13 R. Oui.
14 Q. A l'époque, en 1991, c'était vrai, n'est-ce pas, au Kosovo-Metohija ?
15 R. Oui, c'était l'information qui circulait dans tous les médias albanais
16 à l'époque et j'ai utilisé cette information en tant que journaliste.
17 Q. Je suppose que vous avez utilisé cette information, parce que vous
18 l'avez considérée comme étant exacte et correcte ?
19 R. Oui, c'était l'information qui était habituellement utilisée dans les
20 médias et circulait dans les médias.
21 Q. Merci.
22 M. HANNIS : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, je n'ai plus de
23 questions.
24 Q. Merci, Monsieur Mihajlovic.
25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci, Monsieur Hannis.
26 Questions de la Cour :
27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Mihajlovic, pour ce qui est
28 de la dernière partie de votre témoignage, il y a quelques instants vous
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1 avez fait référence aux Albanais qui ont signé une déclaration selon
2 laquelle ils ne voulaient pas travailler à leurs postes pendant que la
3 Serbie gouvernait le Kosovo et ils ont quitté leurs postes de travail à
4 l'incitation de M. Rugova. Nous avons entendu ici des témoignages selon
5 lesquels les employés devaient signer une déclaration d'allégeance à l'Etat
6 Serbe et que cela a causé du ressentiment par rapport à la période de temps
7 dont vous avez parlé. Quel est le lien entre cela et la déclaration à
8 laquelle vous avez fait référence ?
9 R. J'ai vu une déclaration de tel type à l'époque. Il s'agit de
10 déclarations individuelles de certains directeurs d'entreprises qui
11 demandaient cela à leurs employés, à leurs ouvriers albanais, mais ce
12 n'était pas la pratique adoptée au Kosovo généralement.
13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] J'ai une autre question pour vous.
14 Peut-être n'ai-je pas bien capté ou entendu la réponse et ceci devrait être
15 fait. Pendant votre carrière, vous dites qu'en 1999 et en l'an 2000, vous
16 avez été reporter de l'AFP. Qu'est-ce que cela veut dire être reporter de
17 l'AFP ?
18 R. J'ai été au poste de producteur chargé de mission au profit de l'agence
19 France-Presse, notamment au profit de leurs journalistes, les journalistes
20 de l'AFP au Kosovo.
21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous dites plus tard que vous avez été
22 également chargé de mission de l'ATPN; c'est quoi ça ?
23 R. Il s'agit de "Associated Press Television News".
24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
25 [La Chambre de première instance se concerte]
26 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Je vais, quant à moi, vous demander
27 quelques informations complémentaires; puis-je le faire ?
28 R. Oui.
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1 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Vous avez travaillé également pour la
2 BBC ?
3 R. Oui.
4 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Avez-vous jamais écrit un reportage
5 pour la BBC portant sur la crise en question et avez-vous fait preuve de
6 quelques suggestions portant solution au problème ? Est-ce que vous pouvez
7 vous rappeler si oui; et si oui, dites-nous, en quelle date ?
8 R. Oui, je peux me rappeler. J'ai travaillé pour la section en diffusion
9 en serbe de la BBC, mais ils ne demandent pas de commentaires ni de
10 rubriques. Tout simplement, ils nous demandent de rapporter sur évidemment
11 les actualités. Par conséquent, je n'ai pas eu l'occasion de faire quelque
12 chose qui serait une opinion à moi.
13 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Est-ce qu'on vous a interviewé peut-
14 être au sujet de la crise, au sujet de la solution au problème ?
15 R. La BBC m'avait interviewé en l'an 2000 au moment où j'avais déjà quitté
16 le Kosovo, et encore une fois il s'agissait de cette crise à l'époque.
17 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Au sujet de la crise ou au sujet de
18 quelque chose d'autre dans Kosovo ?
19 R. Au sujet de Kosovo, d'une manière générale.
20 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Est-ce que vous vous rappelez la date
21 de cette interview ?
22 R. Non, je ne m'en souviens pas.
23 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Avez-vous fait mention de ce rapport
24 dressé par vous en février 1991 ? Est-ce que vous en avez fait référence
25 quelconque dans cette interview accordée à la BBC en l'an 2000 ?
26 R. Je ne m'en souviens pas. Je ne sais pas si j'ai mentionné quoi que ce
27 soit du genre.
28 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Personne ne vous a posé de questions
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1 au sujet de ce rapport, personne parmi les correspondants ou reporters de
2 la BBC ?
3 R. Non, non.
4 M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Je vous remercie.
5 [La Chambre de première instance se concerte]
6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Ivetic, y a-t-il un
7 interrogatoire complémentaire ?
8 M. IVETIC : [interprétation] Non, Monsieur le Président. Je vous remercie.
9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Mihajlovic, ceci conclut
10 votre déposition. Vous pouvez quitter le prétoire accompagné par
11 l'huissier.
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
13 [Le témoin se retire]
14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Ivetic, quel est votre
15 prochain témoin à citer à la barre ?
16 M. IVETIC : [interprétation] Notre prochain témoin sera
17 M. Aleksandar Kostic.
18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
19 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
20 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bonjour, Monsieur Kostic.
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.
22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] S'il vous plaît, faites lecture de la
23 déclaration solennelle qui sera la vôtre, où vous serez tenu de dire la
24 vérité.
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
26 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
27 LE TÉMOIN: ALEKSANDAR KOSTIC [Assermenté]
28 [Le témoin répond par l'interprète]
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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie. Veuillez prendre
2 siège, s'il vous plaît.
3 Vous allez être interrogé par M. Ivetic, qui lui, assure la Défense de M.
4 Lukic.
5 A vous, Maître Ivetic.
6 M. IVETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
7 Interrogatoire principal par M. Ivetic :
8 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Kostic.
9 R. Bonjour.
10 Q. Je vous prie de décliner votre identité, votre nom et prénom, pour le
11 compte rendu d'audience.
12 R. Je m'appelle Aleksandar Kostic.
13 Q. Egalement, voulez-vous nous présenter très brièvement votre biographie,
14 y compris votre formation, brièvement.
15 R. Je suis né le 25 mars 1965 à Belgrade. Je suis juriste diplômé. J'ai
16 commencé à travailler pour le ministère de l'Intérieur en 1997. Mon premier
17 poste de travail était à la police des frontières où je devais m'occuper
18 des étrangers au siège du ministère de l'Intérieur de la République de
19 Serbie. D'où on m'a diligenté pour me faire instruire en matière de police
20 criminelle, police scientifique surtout. J'ai ensuite vaqué aux occupations
21 du parquet, c'est-à-dire, cette fois-ci j'étais le juge en matière de
22 simple police de 2000 à 2004. En 2001 j'ai été muté vers la section chargée
23 des recherches de crimes de guerre et des recherches au sujet de personnes
24 portées déplacées et disparues. Je me trouve encore toujours dans cette
25 même section, il s'agit de service qui a pour tâche la recherche de tous
26 crimes de guerre dans le département dans la section de l'administration du
27 MUP, ministère de l'Intérieur de la République de Serbie.
28 Q. Nous reviendrons à tout cela pour parler de cette section pour laquelle
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1 vous avez travaillé et vous travaillez encore. Mais permettez-moi de vous
2 demander comme suit : à la fin de la guerre, la guerre au Kosovo menée
3 contre l'OTAN, quand le MUP de Serbie a commencé à amplifier les efforts en
4 vue de conduire les investigations et toutes les interventions en vue de
5 faire des recherches sur des auteurs potentiels de crime depuis la guerre ?
6 R. Pour autant que je m'en souvienne, il s'est agi évidemment d'abord de
7 recherche et au sein du MUP en mai 2001, le ministère de l'Intérieur a
8 engagé des activités en vue de recueillir toute information et
9 investigation concernant ces fosses communes, ces charniers. C'est dans ce
10 sens-là qu'un groupe de travail a été formé par le ministre de l'Intérieur,
11 pour autant que j'ai pu savoir, à la tête duquel le groupe de travail se
12 trouvait Sreten Lukic, chef du ressort de sécurité publique. Ce groupe de
13 travail s'est vu constitué par des professionnels de police scientifique,
14 il s'agissait évidemment de gens qui étaient formés et bien versés dans la
15 problématique et qui n'observaient aucun dilemme lorsqu'il s'agit
16 évidemment de juger tous leurs collègues et toutes personnes responsables
17 de tels actes au pénal perpétrés. Une toute première tâche a été de savoir
18 si ces fosses communes et si les cadavres et les corps étaient les victimes
19 des hostilités cette fois-ci dans ces conflits de guerre et si ces
20 personnes ont été tuées et par quels moyens ils ont été tués.
21 Après quoi le procès organisé, ainsi il s'agissait d'organiser la
22 compétence des autorités compétentes en terme de géographie. Par
23 conséquent, pour Batajnica, la fosse commune de Batajnica, c'était le
24 tribunal du district de Belgrade; pour Perucac, il s'agissait de parler
25 d'Uzice; le Tribunal d'Uzice de district; et pour dire pour les tous
26 derniers charniers Petrovo Selo c'était le Tribunal de Negotin qui était
27 responsable. Ce groupe de travail d'abord a dû procéder à un énorme nombre
28 d'interviews avec tous ceux qui auraient pu avoir un écho quelconque, un
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1 vent quelconque au sujet des fosses communes. Le tout ainsi recueilli a dû
2 être acheminé vers le parquet, c'est-à-dire, vers le bureau du procureur.
3 En octobre 2001 a été mis sur place une section chargée de crimes de
4 guerre, il s'agissait de toute une première unité spécialisée en la matière
5 pour la République de Serbie qui devait être saisie par tout ce qui était
6 considéré comme crimes de guerre, le parquet saisi ainsi a eu son poste à
7 Belgrade seulement deux ans et demi plus tard. Par conséquent, le MUP,
8 ministère de l'Intérieur s'est vu prêt à faire éclater en plein jour la
9 vérité sur tout ce qui était considéré comme crimes de guerre dans le
10 territoire de l'ancienne RSFY.
11 Q. Vous venez de mentionner le fait que tout ceci s'était passé au temps
12 où Sreten Lukic se trouvait à la tête du ressort de sécurité publique.
13 Savez-vous quand M. Sreten Lukic a été nommé chef du ressort de la sécurité
14 publique du MUP de Serbie ?
15 R. Je peux dire que lorsque les hostilités dans le Kosovo, les conflits
16 armés dans le Kosovo ont pris fin, Sreten Lukic a été muté au poste du chef
17 des polices de frontière chargé des étrangers et de l'administration de la
18 chose au sein du ministère, et il était adjoint du chef de ressort de la
19 sécurité publique à laquelle fonction il demeure jusqu'au 31 janvier 2001,
20 à quel moment il a été nommé chef du ressort sécurité publique après les
21 changements démocratiques opérés en République de Serbie.
22 Q. Maintenant, essayons d'y aller pas à pas pour traiter de tous ces
23 différents sujets. Vous venez de faire mention de différents organes, de
24 différentes instances du MUP qui ont été mises en place en vue d'organiser
25 les investigations et les instructions pour chacune de ces matières, de
26 chacun de ces sujets. Indépendamment des fonctions qui étaient les vôtres
27 préalablement, dites-nous, à quel moment vous-même vous avez entamé vos
28 fonctions, vous êtes entré dans ces fonctions au MUP pour travailler en vue
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1 de l'investigation sur tous les crimes de guerre lorsque ceci était votre
2 fonction
3 primaire ?
4 R. Le 1er octobre 2001 a été mise en place cette division, cette section
5 chargée des instructions cette fois-ci lorsqu'il s'agissait de personnes
6 portées disparues. Dragan Furdulovic qui était chef de sa section a été
7 pratiquement membre de ce groupe de travail formé par le ministère. C'est
8 ainsi que la continuité de ces affaires a été assurée. Quant à moi, le 27
9 novembre 2001, j'ai été nommé membre de cette section qui était chargée de
10 faire des investigations et des recherches au sujet et sur des crimes de
11 guerre.
12 Q. A la suite des changements démocratiques survenus comme vous dites
13 "opérés," comme vous dites en Serbie, et après qu'il y ait eu des
14 changements après l'autorité de Slobodan Milosevic, lorsqu'une coalition
15 démocratique était venue au pouvoir, qui au sein du MUP de Serbie a donné
16 cette première idée, impulsion pour que des travaux soient davantage
17 encouragés en vue de recherches à faire en matière de crimes de guerre ?
18 R. A cette époque-là c'était le ministre Dusan Mihajlovic lui-même et
19 Sreten Lukic qui ont, pour ainsi dire, donné cette première impulsion pour
20 qu'on puisse faire des investigations dans ce sens-là pour révéler le tout
21 concernant les fosses communes et les crimes commis en République de
22 Serbie. Eux-mêmes, eux deux, ils ont été à la base de cette première
23 action. Ce fut une toute première forme organisée en République de Serbie
24 qui devait être en fait un travail professionnel à faire dans le domaine de
25 l'investigation à faire sur tous crimes de guerre en Serbie.
26 Q. Essayons maintenant de nous concentrer sur certains détails plus
27 concrets. Donc après cette toute première action faite par
28 M. Lukic et le ministre, il y a eu, comme vous dites, ce groupe de travail
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1 mis en place. Dites-moi, quels étaient les pouvoirs de ce groupe de
2 travail, les pouvoirs qui ont été conférés par le ministre Sreten Lukic en
3 la matière ?
4 R. Pour autant que je sache, les pouvoirs qui ont été conférés à ce groupe
5 de travail étaient très larges. Les membres de groupe de travail étaient
6 habilités à procéder à des conversations pour information avec toute
7 personne qui aurait pu donner de bonnes informations sur les forces
8 communes. Ceux-ci étaient les membres du MUP, mais également ceux-ci
9 pouvaient être des civils qui pouvaient détenir telle ou telle
10 connaissance. Le tout ayant été d'ailleurs réalisé par le groupe de
11 travail.
12 Q. Je crois vous avoir entendu dire également que sur la base d'une
13 documentation qui a été recueillie et qui a été livrée par ce groupe de
14 travail à des parquets différents, dans différentes régions, je ne me suis
15 pas tout à fait sûr d'avoir bien repéré à quel moment un parquet a été mis
16 en place en vue du jugement de tous les auteurs des crimes de guerre.
17 R. Etant donné qu'une toute première initiative était venue du MUP et que
18 le tout devait être jugé, les tribunaux ordinaires, or les tribunaux
19 ordinaires n'étaient pas habilités, par conséquent c'était les parquets qui
20 devaient en être saisis. On a ressenti comme un besoin de mettre sur pied
21 un parquet spécialisé. Une fois que le tout a été reformulé par le
22 ministère à l'encontre des auteurs d'actes au pénal et une fois qu'ont été
23 mis en place les organes et les autorités nécessaires, c'était les
24 tribunaux d'exception et les parquets d'exception qui ont agi, mais
25 également il faut dire que le parquet réglementaire devait être saisi
26 également.
27 Et c'est ainsi qu'en 2003 une section toute spéciale en matière de
28 parquet a été mise en place. Un service a été mis en place également. La
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1 loi ne servant qu'à pratiquement confirmer ce qui existait déjà comme une
2 section, comme une instance à part au sein du ministère de l'Intérieur.
3 Q. Nous vous avons entendu parler de ce qui a été fait comme une toute
4 première action, une première initiative donnée au sujet des forces
5 communes de Batajnica et à deux autres sites. Le MUP qu'a-t-il fait très
6 concrètement pour essayer de révéler les auteurs de crimes de guerre au
7 moment où Sreten Lukic se trouvait à la tête du ressort qui était le
8 service de sécurité publique ? Quels étaient d'autres cas qui ont été
9 révélés et quelles étaient vos toutes premières investigations ?
10 R. Les toute premières affaires concernaient Podujevo. Il y avait 19
11 civils mis à mort fin mars, il s'agissait des affaires qui ont été
12 d'ailleurs jugées en Serbie. Des plaintes au pénal ont été dressées et des
13 accusations ont été dressées au sein du parquet de Prokoplje. Mais ces
14 jugements n'ont pas pu être menés à bien à Prokoplje, voilà pourquoi cette
15 compétence a été déléguée vers Belgrade. Le tribunal de district, à cette
16 époque-là, il a fallu recueillir toutes pièces à conviction concernant les
17 factions paramilitaires des Skorpions qui appartenaient au MUP. Il a fallu
18 identifier les auteurs de crimes, il a fallu identifier les témoins, parce
19 que parmi les témoins il y avait également des Albanais qui étaient venus
20 d'Angleterre à Belgrade pour déposer. Ils venaient également du Kosovo, de
21 même fallait-il assurer toutes mesures de protection au profit des témoins
22 Goran Stoparic, par exemple, lui, il a déposé également ici. Il a fallu lui
23 assurer toutes mesures de protection. Je représente cette ample genèse qui
24 concernait les travaux qui étaient les nôtres lorsque évidemment les
25 conflits armés étaient en cours et plus tard après que les conflits armés
26 ont pris fin. Ce qui est très étroitement lié aux fosses communes, il
27 s'agit de dire que deux affaires ont été identifiées par le groupe de
28 travail sur la base des preuves qui ont été fournies. D'abord, il
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1 s'agissait des cartes d'identité et d'autres papiers de la famille Berisha,
2 on parlait de cela comme étant Berisha Suva Reka et une seconde affaire
3 concernait les frères Bytyqi. Leurs corps ont été retrouvés dans une fosse
4 commune de Petrovo Selo. Il s'agit de ces deux affaires dont s'est trouvé
5 saisi ce groupe de travail. Voilà, il s'agissait de ces deux affaires.
6 Aussitôt après, une autre affaire a été lancée, c'est-à-dire,
7 Sjeverin. C'est-à-dire l'enlèvement et le meurtre de plus de 17 personnes
8 en 1992 dans la localité de Mioce. Et une toute première plainte au pénal
9 qui a été portée contre six personnes cette fois-ci pour lesquelles ces
10 personnes il y a eu une suspicion bien fondée. Il s'agissait de Milan Lukic
11 et de cinq autres personnes. Milan Lukic n'était pas à disposition, les
12 cinq autres personnes ont été interpellées et ont été écrouées. A cette
13 époque-là, c'est le parquet de district de Belgrade qui était saisi.
14 Vladimir Vukcevic a été l'adjoint du procureur général et c'est grâce à
15 cette affaire qu'il a conduite qu'il est devenu le procureur général en
16 matière de crimes de guerre. Voilà les toute premières affaires.
17 Ce que j'ai omis de dire c'est que Sreten Lukic, de même que le
18 ministre de l'Intérieur, est à la base de tout recueillement de pièces à
19 conviction concernant, il s'agissait de documents et de pièces disponibles,
20 bien sûr, qui devaient servir de base de tout jugement à l'encontre des
21 personnes responsables de ces actes et crimes. Il s'agit de dossier, de ce
22 vaste dossier intitulé Kosovo-Metohija. De même au sein du MUP d'autres
23 activités ont été lancées en vue de recueillir toutes les informations
24 concernant les personnes enlevées et portées disparues dans Kosovo-
25 Metohija. Ainsi un classeur a été mis sur pied qui devait être compatible
26 avec des organismes internationaux. Il s'agit de documentation et
27 d'information concernant les personnes portées disparues, ensuite, bien
28 entendu, pour essayer de juger les auteurs de tels crimes.
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1 Au début de ces travaux, il a fallu recueillir les documents
2 concernant les actes perpétrés par l'UCK, cette Armée de libération du
3 Kosovo, de concert avec d'autres structures et instances, il a fallu
4 recueillir, systématiser tous les documents relatifs. Et cela, selon les
5 sites d'exécution et cette ample documentation a été communiqué au Tribunal
6 de La Haye via le ministère de la Justice de Serbie. Il s'agit donc d'un
7 travail de longue haleine et il s'agit d'amples travaux dont devait être
8 saisie cette nouvelle section, nouvelle unité d'organisation.
9 Q. Nous y reviendrons tout à l'heure. Vous avez fait mention d'un
10 autre incident. Vous avez parlé de Sjeverin. Suis-je dans mon droit de dire
11 que tout cela concernait la période de temps d'avant la guerre au Kosovo ?
12 Il s'agit peut-être d'autres affaires, d'autres cas qui s'étaient produits
13 avant le conflit de Kosovo pour lesquelles affaires lesquels cas il y a eu
14 de nouveaux officiels et d'autres officiels outre le ministre Mihajlovic et
15 son adjoint Sreten Lukic, lorsqu'il a fallu faire des investigations pour
16 révéler les auteurs de ces actes de guerre ?
17 R. Oui, il s'agit de Severin, mais il s'agit d'un autre cas de Strpce, en
18 1993. Il s'agit de voir l'enlèvement de Musulmans de Bosnie-Herzégovine. Il
19 s'agit d'une affaire qui a eu lieu à Bijelo Polje à l'encontre de Nebojsa.
20 Il a fallu donc le voir identifier les témoins. Il a fallu faire un recueil
21 de tout document, identifier les témoins et les citer à la barre de Bijelo
22 Polje, de la cour de Bijelo Polje. Fallait-il travailler dans le cadre
23 d'une vaste opération et très complexe en coopération avec le Monténégro et
24 il a fallu ensuite coopérer avec les tribunaux de Jagodina et de Despotovac
25 de Serbie. Les témoins ont été en sécurité. Ils ont dû témoigner devant la
26 haute cour de Bijelo Polje, or, le président de la haute cour s'est adressé
27 au ministre pour le féliciter de la coopération menée par les membres du
28 MUP de Serbie à cette occasion.
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1 Une troisième affaire des plus éclatantes porte sur la mort donnée à
2 200 prisonniers de guerre dans le domaine d'Ovcara en novembre 1991 --
3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Kostic, Ovcara est de loin en
4 dehors des cadres de la présente affaire. Vous venez de faire référence à
5 Sjeverin. S'agit-il d'un intitulé, d'un certain site, ou s'agit-il de nom
6 de gens qui ont été impliqués ? Qu'est-ce que cela a à voir avec le Kosovo
7 ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Ceci n'a rien à voir avec le Kosovo --
9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien. Très bien. En ce qui me
10 concerne, cela suffit alors.
11 S'il vous plaît, écoutez attentivement les questions qui vous ont été
12 posées.
13 M. IVETIC : [interprétation] Monsieur le Président, il a bien écouté ma
14 question. Je lui ai demandé s'il y avait, en dehors du Kosovo, d'autres
15 sites où, par exemple, ils ont pu être impliqués.
16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui. Maître Ivetic, moi, ma
17 préoccupation c'est d'avoir entendu faire mention de l'année 1992, et en
18 principe j'ai bien peur que nous risquons de nous perdre. Au moins tel est
19 mon cas, parce qu'une réponse a été donnée qui me semble être beaucoup trop
20 longue pour que je puisse l'enchaîner à quelque chose qui fait l'objet de
21 ce que nous écoutons.
22 Par conséquent, j'ai perdu le fil rouge que je vois dans votre question.
23 Par conséquent, essayez d'écouter -- peut-être ai-je fait une erreur
24 lorsque je me suis dit que vous ne deviez pas vous en occuper - essayez de
25 vous concentrer en donnant vos réponses et occupez-vous de l'essentiel,
26 s'il vous plaît. Me Ivetic est là pour vous poser d'autres questions, pour
27 vous demander d'autres informations.
28 A vous, Maître.
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1 M. IVETIC : [interprétation]
2 Q. Vous venez de mentionner Ovcara. Je pense que cela nous suffira.
3 S'agit-il des affaires -- non, je retire la question. J'ai déjà démontré ce
4 que je voulais.
5 Toutes ces affaires sont actuellement jugées devant les cours
6 nationales de la République de Serbie ou de la République de Monténégro,
7 s'agissant de certaines entre elles ?
8 R. Oui. Monsieur le Président, j'aimerais juste préciser quelque chose :
9 la section chargée des crimes de guerre avait la compétence territoriale
10 couvrant le territoire de l'ex-Yougoslavie dans son intégralité. Cela
11 signifie que la section en question s'occupait de tous les crimes de guerre
12 et non pas seulement de ceux commis au Kosovo, et c'est pour cette raison-
13 là que j'ai donné la réponse tout à l'heure.
14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Kostic, vous êtes beaucoup
15 plus jeune que moi et vous avez certainement beaucoup plus de temps pour
16 vous occuper de toutes les questions qui concernent les Balkans, alors que
17 moi, je dois m'occuper exclusivement de Kosovo et de voir comment ces
18 affaires-là ont été gérées plutôt que de m'occuper de la totalité de l'ex-
19 Yougoslavie.
20 Maître Ivetic.
21 M. IVETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, mais je vous
22 fais remarquer aussi que cela indique de quel type de policier il s'agit
23 ici, quel type de policier était Sreten Lukic au moment où il a pris ses
24 fonctions où il a pu enquêter sur les crimes et prendre des mesures,
25 déclencher des actions appropriées. Je pense que cela fait une partie très
26 importante de la procédure.
27 Q. Monsieur Kostic, nous avons déjà vu quelques documents émanant de
28 différents organes. Vous avez fait référence à quelques-uns d'entre eux.
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1 Pourriez-vous nous décrire la genèse de ce groupe de travail au sein du MUP
2 ?
3 R. Durant mai 2001, un groupe de travail a été formé afin d'enquêter des
4 crimes de guerre parce que le besoin en a paru. Nous avons compris qu'il y
5 avait besoin d'une unité organique permanente qui allait s'en occuper. En
6 octobre un département a été créé au sein de la section chargée de crime
7 organisé et Dragan Furdulovic a été nommé --
8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Attendez. Une question : vous avez
9 parlé deux fois de cet organe en le qualifiant d'unité organique, mais vous
10 nous avez dit que cela était créé officiellement en même temps que le
11 bureau de procureur, pour les crimes de guerre, qui était créé deux ans
12 plus tard. Alors que s'est-il passé exactement en 2001 ? Y a-t-il eu une
13 décision, ou un ordre, ou cette instance a été créée d'une manière
14 officieuse ?
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, l'organisation du MUP
16 est régie par le règlement interne du MUP, et ce règlement prévoit la
17 création d'une nouvelle unité organique, de l'administration chargée de la
18 lutte contre le crime organisé, et au sein de cette unité il y a eu un
19 département chargé des crimes de guerre dont la création s'est déroulée
20 pendant une période assez longue. Donc il ne s'agit pas d'une création ad
21 hoc. C'est tout simplement quelque chose qui avait déjà été prévu par le
22 règlement mais qui a pris un bon moment pour être mis en œuvre.
23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Alors il n'était pas nécessaire de
24 prendre décision portant création de ce département ? Comment vous l'avez
25 fait ?
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Tout simplement, le département a été créé
27 conformément au règlement interne régissant la structure du ministère. Ce
28 règlement, il prévoit tout simplement -- c'est un organigramme. Il régit
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1 l'organisation interne du ministère, toutes les unités organiques de ce
2 ministère.
3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Alors que s'est-il passé en 2003 au
4 moment où le bureau de procureur chargé de poursuivre les crimes de guerre
5 a été créé ?
6 LE TÉMOIN : [interprétation] En 2003, une loi a été adoptée portant sur la
7 compétence des organes d'Etat s'agissant des auteurs des crimes de guerre,
8 et à ce moment-là le bureau de procureur chargé des crimes de guerre a été
9 créé conformément à cette loi en tant qu'un organe spécial, indépendant, en
10 dehors du bureau de procureur général --
11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, mais y a-t-il eu quelque chose de
12 spécial qui a été fait ?
13 LE TÉMOIN : [interprétation] La loi prévoyait qu'il fallait créer une unité
14 organique spécialisée chargée des enquêtes sur les crimes de guerre, ce qui
15 avait déjà été fait au sein du ministère de l'Intérieur en 2001. C'est tout
16 simplement ça.
17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'était très important. Vous pouvez
18 poursuivre.
19 M. IVETIC : [interprétation]
20 Q. Ce règlement interne qui régissait le fonctionnement du ministère
21 entier prévoyait l'existence d'un département spécifique chargé d'enquêter
22 sur les crimes de guerre. Quelle administration au sein du MUP a mis en
23 œuvre cette règle préexistante ? Qui était le ministre et son adjoint à
24 l'époque ?
25 R. C'était Dusan Mihajlovic, le ministre de l'Intérieur à l'époque, et
26 c'est lui qui a été autorisé de mettre en œuvre le règlement. Une
27 explication : si le ministère prend connaissance des infractions dont
28 quelqu'un devrait s'occuper, il est tenu à former une unité qui serait
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1 chargée de s'en occuper et il est tenu également d'organiser la formation
2 d'entraînement des personnes qui sont capables de s'occuper de ces
3 infractions. Comme ça, au sein du MUP, il a été reconnu qu'il fallait
4 enquêter les crimes de guerre et une unité organisationnelle avait été
5 créée deux ans et demi avant l'adoption de la loi, et cela est tout à fait
6 possible et acceptable.
7 Q. [aucune interprétation]
8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien. Allez-y, Maître Ivetic.
9 M. IVETIC : [aucune interprétation]
10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] J'ai l'impression que ma question
11 n'était pas très utile, ou plutôt le contraire.
12 Allez-y. Faites comme vous voulez.
13 M. IVETIC : [interprétation]
14 Q. Vous êtes devenu à un moment donné chef du service chargé d'enquêter
15 sur les crimes de guerre. A quel moment ?
16 R. Le 3 avril 2006.
17 Q. Au moment où vous êtes devenu chef de ce service, le chef du RJB, le
18 ressort de la sécurité publique, c'était Sreten Lukic ou quelqu'un d'autre
19 ?
20 R. Non, c'était Miroslav Milosevic et j'ai été nommé à mon poste par le
21 ministre Dragan Jocic.
22 Q. Très bien. Avez-vous quelque chose à nous dire au sujet de -- je retire
23 cette question.
24 Quelles sont les informations dont vous disposez au sujet de l'assistance
25 fournie, de l'aide fournie par Sreten Lukic au groupe de travail et à
26 d'autres entités ou d'autres organes en création qui étaient chargés
27 d'enquêter et de dévoiler les crimes de guerre à tous ces organes qui plus
28 tard sont devenus le service dont vous êtes le chef aujourd'hui ?
Page 24112
1 R. D'après ce que j'en sais, M. Sreten Lukic qui, à l'époque, était le
2 chef du ressort, fournissait le soutien entier aux membres du groupe de
3 travail en vue de recueillir toutes les informations portant sur les
4 auteurs des crimes et les éléments de preuve. Au moment où j'ai commencé
5 mon travail au sein du département, il y avait un grand nombre de
6 documents, des accords ou des autorisations signés et donnés faits par
7 Sreten Lukic afin de permettre le fonctionnement du département.
8 Je peux illustrer cela, par exemple, par le document du 18 juin 2002 par
9 lequel Sreten Lukic a donné son accord pour mener un entretien avec Obrad
10 Stevanovic; Goran Radosavljevic, qui à l'époque était le chef de la
11 gendarmerie; Milan [phon] Vucelic; Ljubo Miralic [phon]. Personne n'est
12 resté intouchable. Le département avait obtenu l'autorisation de prendre
13 contact avec tous les membres du MUP qui pouvaient avoir des connaissances
14 sur des crimes de guerre, concrètement l'affaire des frères Betiqi, aussi
15 l'affaire Berisha Suva Reka.
16 Il y a eu des autorisations semblables pour beaucoup, beaucoup
17 d'affaires et tout cela était censé nous faciliter le travail et c'était
18 bien le cas.
19 Q. Merci. Dans le cadre de votre travail, avez-vous eu la possibilité ou
20 l'occasion de rencontrer personnellement le général Lukic à l'époque où
21 vous vous trouviez, tous les deux, dans l'administration des frontières ?
22 Pourriez-vous, le cas échéant, nous donner vos impressions s'agissant de
23 lui en tant que policier de profession et de quelle manière gérait-il cette
24 administration ?
25 R. Je travaillais dans cette administration à partir de 1997. Après le
26 conflit, Sreten Lukic est devenu chef de cette administration des
27 frontières chargées des étrangers. Quand il est arrivé il a demandé qu'on
28 lui fournisse toutes les lois, tous les règlements, toutes les dépêches
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1 contenant les instructions portant sur le fonctionnement de cette
2 administration. Il a demandé l'application stricte des lois et des
3 règlements. C'est ce qui le caractérise. C'est le principe sur lequel il se
4 basait dans la gestion de cette administration.
5 Q. Merci. Passons maintenant à un incident concret qui a été enquêté.
6 C'était ce premier cas du camion frigorifique avec des corps de personnes
7 du Kosovo transportés en Serbie. Est-ce que vous avez eu l'occasion de
8 discuter avec Bozidar Protic dans le cadre de cette enquête ?
9 R. Oui. Dans le cadre de cette affaire j'ai pu m'entretenir à plusieurs
10 reprises avec Bozidar Protic. Je pense même plus que 15 fois. Nous n'avons
11 pas fait des procès-verbaux pour chacun de ces entretiens, mais c'était
12 seulement au bout de quatre ou cinq entretiens que nous faisions un procès-
13 verbal ou un document portant sur les entretiens passés.
14 Q. Bien. Dans le cadre des entretiens avec M. Protic, a-t-il changé sa
15 version de faits ou pas ?
16 R. Il modifiait souvent sa version de faits. Ça dépendait de son humeur,
17 de son état. Parfois on voyait qu'il était troublé, parfois il pleurait,
18 parfois tout allait bien. Très souvent il n'arrivait pas à répéter ce qu'il
19 avait dit la fois précédente.
20 Q. Avez-vous aperçu des contradictions sur les plusieurs déclarations
21 qu'il avait faites soit à vous, soit aux enquêteurs s'agissant de Batajnica
22 et les frères Betiqi ?
23 R. Oui, souvent nous avons pu nous rendre compte de contradictions, parce
24 qu'il n'arrivait pas à se souvenir exactement des événements. Certains
25 événements qui ont eu lieu après le conflit du Kosovo, il les mettait en
26 relation avec les événements qui avaient eu lieu pendant le conflit. Il
27 n'arrivait pas à être très précis s'agissant des personnes avec lesquelles
28 il avait des contacts pendant la guerre de Kosovo. Donc il y a eu très
Page 24114
1 souvent des contradictions. Nous avons dû vérifier ces dires et nous avons
2 pu arriver à la conclusion qu'un certain nombre de choses qu'il nous avait
3 dites n'étaient pas vraies.
4 Q. Quand est-ce que M. Protic a mentionné pour la première fois Sreten
5 Lukic, concernant cette affaire du déplacement des corps de Kosovo vers les
6 sites à l'intérieur de la Serbie ?
7 R. La première fois il a fait référence à lui, au printemps 2006, et cela
8 lors de plusieurs entretiens.
9 Q. Combien d'entretiens ont-ils été conduits par vous avec cette personne,
10 combien d'entretiens pendant lesquels il n'avait pas fait référence à
11 Sreten Lukic, à peu près ?
12 R. Je dirais, plus que sept.
13 Q. Bien. Vous nous avez dit que vous aviez essayé de vérifier les
14 informations avancées par M. Protic et que vous avez établi que certains
15 éléments n'étaient pas vrais. Pourriez-vous nous donner quelques exemples,
16 comme ça, de quelques informations ?
17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Attendez. Vous lui demandez de donner
18 des informations comme ça. N'existe-t-il pas de documents portant sur ces
19 choses-là ?
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, bien sûr, il y a des procès-verbaux des
21 entretiens. Mais comme je vous ai dit, nous ne faisions pas un procès-
22 verbal à chaque fois, mais au bout de quatre ou cinq entretiens. Comme il
23 était très troublé, comme il était imprécis et tout ça, nous souhaitions
24 d'abord vérifier. Par exemple, si quelqu'un nous dit une chose aujourd'hui
25 et une autre chose le lendemain, donc nous essayions de vérifier les choses
26 avant de rédiger un compte rendu.
27 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien. Ce que vous avez rédigé, ces
28 documents-là, où est-ce qu'ils se trouvent ?
Page 24115
1 LE TÉMOIN : [interprétation] Au service chargé d'enquêter sur les crimes de
2 guerre.
3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
4 Maître Ivetic.
5 M. IVETIC : [interprétation] Je crois que quelques-uns de ces documents
6 sont déjà versés au dossier ou ont du moins été communiqués aux parties au
7 procès. Alors je pourrais essayer d'établir une liste de ces documents pour
8 que la Chambre puisse voir de quel type de document il s'agit.
9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui. Je vous remercie.
10 M. STAMP : [interprétation] Juste pour les besoins du compte rendu, il y a
11 586, une note portant sur cette déclaration du
12 4 juin 2001, c'est la pièce à conviction P586; ensuite P2816, le procès-
13 verbal ou la déclaration recueillie par le juge d'instruction Dilparic;
14 puis P2187 [comme interprété], déclaration faite devant le procureur chargé
15 des crimes de guerre de Belgrade, en date du 29 juin 2006.
16 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais seulement une de ces déclarations
17 est potentiellement une déclaration faite au MUP, n'est-ce pas ?
18 M. STAMP : [interprétation] Il y a une autre déclaration faite au ministère
19 de l'Intérieur, c'est 6D196, c'est un extrait qui avait été présenté déjà
20 dans le prétoire, mais j'essaie de retrouver un exemplaire de cette
21 déclaration dans son intégralité. J'ai déjà demandé à la Défense de nous la
22 fournir. Ça fait déjà un moment qu'on a des soins d'obtenir ce document,
23 mais depuis 2007 nous n'avons pas réussi à l'obtenir. Evidemment, on n'a
24 pas réussi à la faire traduire non plus.
25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Ivetic ?
26 M. IVETIC : [interprétation] Je sais que M. Stamp a parlé à mon collègue M.
27 Lukic ces derniers jours et je dois dire également qu'il y a des
28 déclarations de 2006 que le bureau du Procureur nous a communiquées il y a
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1 quelques mois seulement. Mais bon --
2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien. Merci.
3 M. IVETIC : [interprétation] Je vais demander au témoin de préciser quelque
4 chose.
5 Q. Est-ce que les membres du MUP étaient également présents lors de ces
6 entretiens devant -- ou les interrogatoires menés devant le juge
7 d'instruction ? Quel était leur rôle dans ces circonstances ?
8 R. Non, ils n'étaient pas présents devant le juge d'instruction, mais
9 devant le procureur adjoint chargé des crimes de guerre. C'est-à-dire,
10 après plusieurs entretiens conduits avec Bozidar Protic afin d'obtenir la
11 confirmation des éléments qu'il avait donnés préalablement, nous avons
12 demandé au procureur adjoint chargé des crimes de guerre de se rendre dans
13 les locaux du MUP de la Serbie pour être présent, conformément à la loi,
14 pendant l'entretien, et c'est sur la base de cet entretien qu'un procès-
15 verbal a été élaboré. Cela signifie que ce sont les membres du MUP qui ont
16 conduit l'entretien, que le procureur adjoint chargé des crimes de guerre
17 était présent pendant l'entretien, et cette personne s'appelle Dragoljub
18 Stankovic. Alors suite à plusieurs entretiens conduits avec Bozidar Protic,
19 il y a eu un procès-verbal.
20 M. IVETIC : [interprétation] Peut-on faire maintenant une pause ?
21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien.
22 M. IVETIC : [interprétation] D'accord.
23 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur le Témoin, vous pouvez
24 maintenant sortir du prétoire accompagné par l'huissier.
25 [Le témoin quitte la barre]
26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous allons reprendre notre travail à
27 6 heures.
28 --- L'audience est suspendue à 17 heures 29.
Page 24117
1 --- L'audience est reprise à 18 heures 02.
2 [Le témoin vient à la barre]
3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Ivetic, vous pouvez continuer.
4 M. IVETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
5 Q. Monsieur Kostic, nous en avons fini de parler de M. Protic. Maintenant,
6 j'aimerais vous poser une question concernant cet incident, l'incident qui
7 est lié au camion frigorifique, et on a parlé de cela avec M. Protic
8 pendant cet entretien. Avec combien d'autres personnes l'entretien a été
9 mené par rapport à cet incident et est-ce qu'une autre de telles personnes
10 a mentionné l'implication de Sreten Lukic de quelque façon que ce soit ?
11 R. Je ne me souviens pas du nombre exact de ces personnes qui ont été
12 impliquées à cet incident, mais je pense qu'on a eu des entretiens avec
13 toutes ces personnes et je pense qu'il y avait moins de dix personnes, mis
14 à part le chauffeur, et personne n'a mentionné Sreten Lukic comme étant la
15 personne avec laquelle ils auraient eu des contacts.
16 Q. Le dernier sujet que je vais aborder par rapport à
17 M. Protic. Sur la base du contact que vos services avaient avec lui et pour
18 ce qui est des mesures que vous avez prises pour essayer de vérifier les
19 informations qui lui ont été données, pensez-vous que ses informations à
20 lui sont crédibles pour ce qui est de cette affaire --
21 M. STAMP : [interprétation] Cela est --
22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ne répondez pas à la question pour le
23 moment.
24 M. STAMP : [interprétation] Je pense, Monsieur le Président, qu'il peut
25 témoigner des faits et de ses observations, mais pour ce qui est des
26 jugements à apporter là-dessus, c'est réservé à la Chambre uniquement, et
27 il ne peut pas en parler à ce stade.
28 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Ivetic.
Page 24118
1 M. IVETIC : [interprétation] Vous voulez que je réponde pendant que le
2 témoin est dans le prétoire ?
3 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui.
4 M. IVETIC : [interprétation] Bien. La question que j'ai posée était de
5 savoir si le MUP serbe a des informations pour ce qui est de la plainte au
6 pénal qui aurait été la première indication montrant que quelqu'un avait
7 commis un crime. Je lui ai demandé tout simplement de me donner des
8 commentaires. Pour ce qui est des conclusions de la Chambre, je ne lui
9 demande pas de me dire si le MUP serbe avait pris la décision en s'appuyant
10 sur les informations données par le témoin, s'il y avait des débats
11 suffisamment crédibles pour qu'une plainte au pénal soit déposée.
12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ce n'était pas la question que vous
13 avez posée tout à l'heure. J'ai remarqué que la question n'a pas été une
14 question complète, mais il semble que cela se limite sur la crédibilité de
15 Protic; ou peut-être ai-je mal compris cela ?
16 M. IVETIC : [interprétation] Bien, il n'y avait pas de témoins jusqu'ici
17 qui ont abordé cela.
18 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien. Merci.
19 M. IVETIC : [imperceptible]
20 [La Chambre de première instance se concerte]
21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] L'objection sera retenue, parce que le
22 témoin ne peut pas donner des commentaires portant sur la crédibilité. En
23 d'autres termes, il ne peut pas apprécier la crédibilité d'un autre témoin,
24 et c'était en fait à quoi portait la question ici. Maître Ivetic, s'il vous
25 plaît, procédez.
26 M. IVETIC : [interprétation] Monsieur le Président, puis-je poser une
27 question de portée générale pour savoir si une plainte au pénal avait été
28 jamais déposée pour ce qui est de Sreten Lukic et cette question ?
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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Certainement, mais la réponse est
2 probablement oui; de la part de ce Tribunal pour l'ex-Yougoslavie.
3 M. IVETIC : [interprétation] Mais --
4 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Si vous posez cette question de façon
5 très spécifique --
6 M. IVETIC : [interprétation] Oui.
7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] -- vous pouvez le faire, bien sûr.
8 M. IVETIC : [interprétation] Ce sera ma question.
9 Q. Monsieur Kostic, est-ce que sur la base de l'instruction qui a été
10 menée par rapport à cela, est-ce que le MUP serbe avait jamais déposé une
11 plainte au pénal contre Sreten Lukic ?
12 R. Non. Ni au cours de l'instruction du ministère de l'Intérieur, on n'a
13 pas pu conclure que Sreten Lukic y aurait participé --
14 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Kostic, vous avez répondu à
15 la question et il ne faut pas que vous donniez de commentaire autre que la
16 réponse à la question.
17 Maître Ivetic, continuez.
18 M. IVETIC : [interprétation] Maintenant, je vais aborder un autre sujet.
19 Q. Nous avons mentionné, dans de différents cas dans lesquels le MUP avait
20 fini des enquêtes et avait transmis les dossiers à des procureurs pour
21 continuer, avoir la suite des affaires - je sais que c'est délicat - et
22 j'ai compris qu'il y a encore des enquêtes en cours au MUP; est-ce vrai ?
23 R. Oui, c'est vrai. Il s'agissait des affaires, par exemple, Suva Reka, le
24 meurtre de la famille de Berisha; c'était en 2002 que cette affaire a été
25 ouverte, où Sreten Lukic était le chef du secteur. Les dossiers, tous les
26 documents, toutes les déclarations ont été transmises au parquet chargé des
27 crimes de guerre. Après quoi, en 2005, ont été arrêtés sept des membres du
28 MUP ou d'anciens membres du MUP.
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1 Q. Continuez.
2 R. La deuxième affaire, c'est le meurtre des frères Bytyqi. L'affaire a
3 été ouverte après que les charniers à Petrovo Selo ont été découverts, et
4 contre six personnes maintenant il y a des poursuites au pénal qui ont été
5 entamées devant la chambre chargée des crimes de guerre à Belgrade.
6 Egalement, il y a d'autres affaires pour lesquelles les procès ont été
7 ouverts, mais ce n'est pas fini parce qu'il s'agit des affaires très
8 complexes et il est très difficile de mener un terme à tous ces procès.
9 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous chevauchez, Maître Ivetic.
10 M. IVETIC : [interprétation] Je m'excuse.
11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais il faut clarifier un point.
12 L'affaire Suva Reka est toujours en cours, n'est-ce pas ?
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Le MUP a collecté des moyens de preuve, a
14 mis en détention certaines personnes, et maintenant le procès est en cours
15 devant la chambre chargée de crimes de guerre dans le cadre du tribunal
16 régional de Belgrade.
17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je comprends cela. Mais par rapport
18 aux frères Bytyqi, est-ce que vous dites que l'enquête menée par le MUP est
19 toujours en cours ?
20 LE TÉMOIN : [interprétation] Il y a des procès contre six personnes auprès
21 du tribunal de district à Belgrade, mais le MUP n'a pas encore identifié
22 tous les auteurs de cette infraction pénale, donc on travaille toujours là-
23 dessus.
24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
25 Maître Ivetic, continuez.
26 M. IVETIC : [interprétation]
27 Q. Maintenant, la question que j'ai pour vous - et la question a plusieurs
28 facettes - mis à part l'incident dont on a parlé et dans d'autres
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1 entretiens que vous avez eus avec de différentes personnes, témoins, et
2 cetera, par rapport aux allégations concernant les crimes de guerre au
3 Kosovo-Metohija et par rapport auquel il y avait des procès devant les
4 juridictions serbes et des enquêtes du MUP, est-ce que l'une des personnes
5 qui a été interrogée a jamais parlé de l'implication de Sreten Lukic, de
6 quelque façon que ce soit, dans l'une de ces affaires ?
7 M. STAMP : [interprétation] Je ne sais pas si la réponse serait utile.
8 Peut-être qu'il n'est pas nécessaire de soulever d'objection, mais je ne
9 pense pas --
10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'est probablement cela --
11 M. STAMP : [interprétation] -- preuve.
12 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je pense que c'est une partie de
13 témoignage qui est pertinent, Monsieur Stamp, mais il n'y a pas lieu de
14 soulever d'objection si vous n'avez pas de base pour cela. Donc permettons
15 au témoin de répondre à cette question.
16 LE TÉMOIN : [interprétation] Après avoir eu les entretiens avec les
17 personnes en question et sur la base des documents collectés, on n'a pas pu
18 constater que Sreten Lukic ait été impliqué dans les crimes sur le
19 territoire du Kosovo-Metohija.
20 M. IVETIC : [interprétation] On a déjà mentionné des dossiers pour ce qui
21 est du Kosovo-Metohija --
22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ce n'était pas vraiment la réponse à
23 cette question, parce que la question qui vous a été posée était pour
24 savoir s'il a été mentionné pour ce qui est de ces affaires, et la réponse
25 était non. Je pense que vous avez déjà répondu à cette question.
26 Maître Ivetic, continuez.
27 M. IVETIC : [interprétation]
28 Q. Je pense que vous avez déjà expliqué pour ce qui est du dossier du
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1 Kosovo-Metohija.
2 M. IVETIC : [interprétation] Monsieur le Président, si vous avez plus de
3 questions pour ce qui est du dossier du Kosovo-Metohija, il y a un témoin
4 qui va venir pour témoigner de ce dossier et qui a plus de connaissance là-
5 dessus que M. Kostic.
6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien.
7 M. IVETIC : [interprétation]
8 Q. Nous avons entendu un témoin protégé lors de cette affaire, qui a parlé
9 des allégations portant sur certains événements et certains crimes et il a
10 dit que ces crimes ont été commis. Il y avait un article dans le journal
11 Danas qui a été publié là-dessus. Mais je ne peux pas aller en détail. On
12 peut parler de cela en huis clos partiel, mais j'aimerais montrer avec la
13 permission de M. Stamp une photographie, c'est P2629, nous savons tous de
14 quoi je parle. Je pense que cette photographie ne se trouve pas sur la
15 liste de pièces à conviction pour ce qui est de ce témoin. Je pense qu'il
16 est facile d'identifier l'incident en s'appuyant sur la photographie plutôt
17 que d'aller en détail pour ce qui est des informations qui sont protégées.
18 M. STAMP : [interprétation] Je ne suis pas certain de savoir de quoi
19 il s'agit et je pense que la photographie est dans le classeur et si le
20 témoin en sait quelque chose on peut peut-être lui montrer cela et poser
21 des questions.
22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donc c'est pour éviter d'aller à
23 huis clos partiel, apparemment.
24 M. IVETIC : [interprétation] Oui.
25 Il s'agit de 2629 -- P2629 qui est sur nos écrans.
26 Q. Monsieur, êtes-vous au courant des enquêtes - ça sera ma question
27 - l'un de mes témoins Dragan Milenkovic, qui est également connu sous le
28 nom Sisarka, le Juge lui a posé des questions par rapport à cet incident.
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1 Est-ce que vous savez s'il y avait eu une enquête dans le système serbe qui
2 a été menée dans le système serbe ?
3 R. Nous analysions plusieurs photographies obtenues des
4 organisations intergouvernementales -- non gouvernementales et cela a été
5 publié dans les médias, mais je ne pense pas qu'une enquête ait eu lieu
6 pour ce qui est de cette photographie particulière.
7 Q. Merci. Juste un instant, s'il vous plaît.
8 Je pense que je n'ai plus de questions pour vous. Merci, Monsieur
9 Kostic.
10 M. IVETIC : [interprétation] J'ai fini mon interrogatoire principal.
11 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci, Maître Ivetic.
12 Monsieur Stamp procédera au contre-interrogatoire au nom du bureau du
13 Procureur.
14 Monsieur Stamp, vous avez la parole.
15 M. STAMP : [interprétation] Merci.
16 Contre-interrogatoire par M. Stamp :
17 Q. [interprétation] Bonjour.
18 R. Bonjour.
19 Q. Tout d'abord, j'aimerais qu'on éclaircisse la chronologie des
20 événements. Vous avez témoigné de plusieurs choses, de choses différentes.
21 L'acte d'accusation dans cette affaire accuse certains des accusés de
22 crimes de guerre commis au Kosovo et l'acte d'accusation a été devenu
23 document public en mars 1999. Où travailliez-vous en mars 1999 ?
24 R. En mars 1999, je travaillais dans l'administration de la police des
25 frontières pour les étrangers au siège du ministère de l'Intérieur à
26 Belgrade.
27 Q. M. Lukic ou le général Lukic est devenu chef du secteur de sécurité
28 publique le 31 janvier 2001; est-ce que c'est ce que vous avez dit ?
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1 R. Oui.
2 Q. Où travailliez-vous à l'époque ?
3 R. Je travaillais toujours à l'administration de la police des frontières
4 chargée des étrangers et des affaires administratives au même siège du
5 ministère.
6 Q. Le groupe de travail qui était chargé de l'enquête portant sur les
7 cadavres qui ont été retrouvés a été formé en mai 2001. Où travailliez-vous
8 à l'époque ?
9 R. Au même endroit.
10 Q. En mai 2001, avez-vous participé à l'une des réunions ou discussions
11 avec le ministre ou le général Lukic pour ce qui est de la formation de ce
12 groupe de travail ?
13 R. Non.
14 Q. Vous avez dit que le général Lukic était en fait l'un des initiateurs,
15 l'une des personnes qui a pris l'initiative pour ce qui est de la formation
16 de ce groupe. Sur quoi fondez-vous votre opinion là-dessus ?
17 R. Lorsque j'ai commencé à travailler dans le secteur pour les crimes de
18 guerre, j'ai eu accès à ces documents et je disposais des informations
19 portant sur la formation du groupe de travail parce que Dragan Furdulovic,
20 chef de secteur a été mon supérieur, il était membre de ce groupe de
21 travail. Egalement, Dragan Karleusa qui était mon supérieur et qui était
22 adjoint du chef de l'UBPOK, de cet organe-là et il était également membre
23 du groupe de travail et c'est comme cela que j'ai obtenu ces informations,
24 en leur parlant.
25 Q. Lorsque ce groupe de travail a été mis en place, peut-on dire qu'à
26 cette époque-là en la République fédérale de Yougoslavie - comment ferais-
27 je pour poser cette question - plutôt, dites-nous, le fait que des corps,
28 des cadavres ont été trouvés dans le Danube et qu'on les a retirés ces
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1 cadavres était quelque chose qui faisait l'objet de tous les écrits en
2 Serbie ?
3 R. Sur la base des informations qui ont été diffusées par des masses
4 média, notamment la revue 92 de Timok, nous a permis d'avoir de telles
5 informations. Ce fut pratiquement une toute première information pour
6 mettre en place le groupe de travail en la matière et qui devait s'occuper
7 évidemment des investigations pour évidemment mener des enquêtes sur tous
8 ces événements.
9 Q. En d'autres termes, pourrions-nous maintenant nous préoccuper de la
10 pièce à conviction P586 s'y rapportant. Or, ce groupe de travail est le
11 résultat de ce qui a pu être vu, publié par des médias privés, lesquels
12 médias ont révélé qu'en 1999 des corps ont été trouvés et que ces corps ont
13 été dissimulés. Le procureur de Negotin a confirmé qu'en 1999 ces cadavres
14 ont été dissimulés comme ça, par conséquent révélés par les services
15 compétents.
16 R. Quelle est la question dans tout cela ?
17 Q. Je voulais dire que ceci servait de circonstances dans lesquelles ce
18 groupe de travail a été mis sur pied, le groupe de travail était formé à
19 cause de ce qui a été publié par la presse, confirmation faite aussi par le
20 procureur de Negotin comme quoi, en vérité, ces corps, ces cadavres ont été
21 découverts en 1989 [comme interprété] et dissimulés dans ces circonstances-
22 là.
23 R. Oui. Le groupe a été établi justement pour savoir plus sûr l'exactitude
24 des informations qui ont été publiées.
25 Q. Voyez-vous vous avez une note de service portant sur les entretiens
26 pour information menée avec Bozidar Protic le 4 juin 2001.
27 Où est-ce que vous avez été employé à cette époque-là ?
28 R. Comme je vous l'ai déjà dit, j'ai travaillé dans le cadre des services
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1 chargés de la police des frontières. Je me suis occupé dans le bureau
2 évidemment des étrangers et affaires administratives. Ce n'est que depuis
3 le 27 novembre 2001 que j'ai commencé à travailler dans le cadre de ce qui
4 vous intéressait tout à l'heure dans votre question.
5 Q. Oui, je comprends. Maintenant le bureau chargé d'enquêter sur des
6 crimes de guerre, quand est-ce qu'il a été mis en place ?
7 R. Le 1er octobre 2001, suite donnée à ce qui a été effectué sous forme de
8 travaux ou du groupe de travail, c'est susmentionné.
9 Q. Par conséquent vous avez commencé à y travailler une fois le groupe de
10 travail formé, c'est-à-dire, cet office formé. En général, dites-nous si
11 vous saviez qu'il y avait des initiatives à l'échelle internationale et
12 locale prises par des diplomates et divers officiels politiques qui tous
13 ont fait des pressions pour qu'en Serbie soit mis en place une instance
14 d'enquête qui devait être chargée des enquêtes à mener sur des crimes de
15 guerre.
16 M. IVETIC : [interprétation] Monsieur le Président, une objection que j'ai
17 à soulever. Quand il s'agit évidemment des fondements même avancés par le
18 Procureur, il s'agit évidemment d'un domaine dangereux. Le témoin nous a
19 dit qu'il ne savait pas d'où tout cela venait et émanait; par conséquent,
20 pour continuer nous devons exiger un huis clos partiel.
21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je ne vous suis pas tout à fait. La
22 question me semble parfaitement pertinente. Lui voulait savoir s'il y avait
23 des initiatives prises à l'échelle -- interventions locales, et cetera.
24 M. IVETIC : [interprétation] D'accord.
25 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Allez-y.
26 M. STAMP : [interprétation]
27 Q. Sans entrer dans des détails, est-ce qu'il y avait des initiatives de
28 ce genre-là ?
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1 R. De telles initiatives ont vu le jour en 2002 et 2003. Mais pour autant
2 que je le sache, au moment où nous en parlions tout à l'heure, de telles
3 initiatives n'existaient pas.
4 Q. Pour autant que je le sache, vous n'avez pas participé quant à vous
5 dans des discussions concernant les enquêtes menées en Serbie sur des
6 crimes de guerre, n'est-ce pas ?
7 R. Plus tard j'ai pu participer à des conférences organisées par des
8 organismes non gouvernementaux et internationaux au sujet de la formation
9 des instances de l'Etat qui devaient s'occuper des enquêtes sur des crimes
10 de guerre. A cette époque-là, les représentants d'organisations
11 internationales ne savaient pas que ceci avait été déjà chose faite. Au
12 sein du MUP, il y avait déjà une instance pareille; par conséquent, eux ils
13 voulaient évidemment pour que soient mises en place de telles instances au
14 MUP de la Serbie. Par conséquent, soit qu'il n'y avait pas d'initiatives de
15 ce genre ou bien celles-ci se sont faites tardives.
16 Q. Vous venez de sortir des cadres de la question que je vous ai posée.
17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vois là, Monsieur Stamp, sans pause
18 aucune, là dans le compte rendu d'audience, on n'a pas pu voir la
19 traduction in extenso de la question que vous avez posée.
20 M. STAMP : [interprétation] Je voulais plutôt arrêter le témoin.
21 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, je comprends.
22 M. STAMP : [interprétation]
23 Q. Je suppose qu'en 2001, personnellement, vous n'avez pas assisté à des
24 conversations portant formation d'un quelconque groupe de travail qui
25 devrait être saisi de la guerre, c'est-à-dire, des crimes de guerre ?
26 R. Cela est exact, je n'y ai pas pris part. Je n'ai pas pu participer à de
27 tels débats.
28 Q. Très bien. Par conséquent, pour l'ensemble de votre déposition pour
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1 savoir qui est à l'origine de tout cela, qui a pris des initiatives, ne se
2 fonde que sur ce qui vous a été dit par la suite, plus tard ?
3 R. Non. On peut évidemment avoir certaines connaissances et informations
4 directement grâce à des conversations menées par des représentants
5 d'organismes internationaux qui, à cette époque-là, n'ont pas pu se
6 familiariser avec le fait qu'il y avait lieu de parler de la mise en place
7 d'une section chargée d'enquêtes sur des crimes de guerre.
8 Q. Oui, d'accord. Mais en 2001, avez-vous pu rencontrer des représentants
9 du TPIY ?
10 R. Non.
11 Q. Savez-vous d'une manière générale si des représentants du TPIY
12 s'étaient rendus en Yougoslavie, s'ils ont peut-être déposé de telle ou
13 telle requête, et cetera ?
14 R. J'en savais quelque chose grâce à des médias, mais directement, lorsque
15 j'ai pu travailler dans le cadre du bureau de la section qui était la
16 mienne, je n'ai pas eu de contacts directs.
17 Q. Essayons de procéder par ordre chronologique, s'il vous plaît. Vous
18 n'avez pas pris part à l'enregistrement de la toute première déclaration de
19 la part de M. Protic, mais vous avez été impliqué dans l'enregistrement de
20 la déclaration faite en date du
21 2 octobre 2002, n'est-ce pas ?
22 R. Oui, c'est exact.
23 Q. Avez-vous pris part à l'enregistrement ou récolement d'une quelconque
24 autre déclaration de la part de M. Protic ? Quand je dis enregistrement ou
25 récolement, je veux dire par écrit.
26 R. Oui. Ceci a été fait en 2006.
27 M. STAMP : [interprétation] Maintenant nous allons voir ce qu'en dit la
28 pièce à conviction 6D196. Il s'agit là d'un texte tiré de la déclaration au
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1 sujet de la déclaration dont on nous a promis évidemment la communication
2 d'un exemplaire. Est-ce que vous avez un exemplaire sur vous ? Vous venez
3 de dire que vous avez pris part à l'enregistrement de ce compte rendu, ce
4 procès-verbal, de ces déclarations.
5 R. Non.
6 Q. Vous-même vous avez été le procès-verbaliste, ce que je peux voir dans
7 ce document. Qui étaient les membres de cette équipe qui a pris part ?
8 R. Il y avait Gvozden Gagic et Dusan Lakcevic. Personnellement j'ai pris
9 part à l'enregistrement de cette déclaration, mais moi, j'ai fait ce
10 travail physiquement. C'est pour ça que je signe le document en ma qualité
11 de procès-verbaliste. Personnellement, je sais que j'ai pris part à
12 l'enregistrement de cette déclaration.
13 Q. Quel était votre grade à cette époque-là ?
14 R. J'avais le grade de lieutenant et j'ai été chargé d'une mission
15 concernant les crimes de guerre et les recherches à faire au sujet de
16 personnes portées disparues.
17 Q. Oui. Je me souviens que vous avez dit cela à plusieurs reprises. Mais
18 cette fois-ci je voulais tout simplement savoir qui étaient les membres de
19 cette équipe, comment se présentait leur grade et qui ont été vos
20 supérieurs lors du récolement de cette
21 déclaration ?
22 R. Gvozden Gagic était lieutenant-colonel et Dusan Lakcevic était un
23 officiel du MUP à la retraite. Il avait son cabinet d'avocat. Il n'était
24 pas membre du MUP cette fois-ci, mais il a été engagé de la part du MUP,
25 docteur ès science et avocat, professionnellement parlant.
26 Q. Avez-vous eu la possibilité de lire ce procès-verbal -- pardon, il
27 s'agit d'un entretien pour information avec M. Protic en date du 4 juillet
28 2001 ?
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1 R. Oui, nous avons dû --
2 Q. Quelles --
3 R. -- d'abord prendre connaissance de l'ensemble de la documentation le
4 concernant avant de procéder à cet entretien pour information.
5 Q. Vous nous avez déjà répondu, mais dites-moi, quelles étaient les
6 contradictions qu'on pourrait relever entre cette déclaration et l'autre à
7 l'enregistrement de lequel vous avez pris part lorsque vous avez été nommé
8 membre de l'équipe opérationnelle ?
9 R. On ne peut pas dire que des contradictions ont été évidentes, mais ceci
10 se profilera seulement sous forme de contradictions lorsqu'on devait
11 traiter de la manière dont les cadavres ont été transférés, combien de
12 fois, par exemple, en combien de tours de transfert, et cetera. Par
13 conséquent, on ne pouvait pas voir très exactement en quoi consistait le
14 compte rendu et ce que reflétait le compte rendu pour savoir très
15 exactement ce qui s'était produit en vérité.
16 Q. Oui, je comprends.
17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Si vous ne réalisez pas la sauvegarde
18 de cet enregistrement portant contradiction, comment justifiez-vous la
19 décision prise pour vous fonder sur la déposition de telle ou telle
20 personne ou non, lorsqu'il vous faudra, par exemple, créer un dossier
21 portant sur telle ou telle affaire ?
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Lorsque vous avez des entretiens pour
23 information avec une personne, cette personne peut vous dire qu'il ne
24 pouvait plus se rappeler très exactement, ou bien plus tard, il dit que
25 oui, je me souviens maintenant de ceci ou de cela. Or, pour finaliser le
26 tout, nous devons faire entrer ce que nous avons considéré comme étant les
27 contradictions dont fait état tel ou tel témoin, à savoir il y a des trous
28 de mémoire ou peut-être il mélange des éléments ou peut-être il ne dit pas
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1 la vérité ou peut-être il y a d'autres éléments qui nous permettent d'avoir
2 connaissance d'autres choses et lesquelles autres choses ont été déjà
3 vérifiées et confirmées par d'autres témoins. C'est comme ça que nous
4 procédons.
5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais où se trouvent ces notes ?
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Les notes finalisées ce sont les notes que
7 vous avez sous vos yeux maintenant.
8 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Non, non, non. Vous venez de dire tout
9 à l'heure que : "Lors des entretiens pour information, nous pouvons noter
10 certaines contradictions. Nous en prenons acte, nous les enregistrons quant
11 à la façon dont les témoins font la description des événements…"
12 Où se trouvent ces notes maintenant ?
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Cela exige un peu plus de temps. Si vous avez
14 le temps que vous pouvez me conférer pour vous expliquer comment nous
15 procédons, quelle est la méthodologie de notre travail, cela paraîtra plus
16 clair à vos yeux.
17 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ma question est très simple : où se
18 trouvent ces notes ?
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Toutes ces notes se trouvent dans les blocs-
20 notes des enquêteurs. Lors des enquêtes, les personnes chargées des
21 investigations prennent note de ce qui a été dit par telle ou telle
22 personne. Ces notes n'ont pas été considérées comme formelles. Elles se
23 trouvent dans les blocs-notes divers de chacun des enquêteurs. Et lorsqu'on
24 doit finaliser le tout, évidemment il faut que le tout entre dans le cadre
25 de la note formelle. Tout le reste est informel ou officieux.
26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Avez-vous sur vous votre bloc-notes à
27 vous ?
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Bien sûr que non.
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1 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Pourquoi dites-vous "bien sûr que non"
2 ? Cela me semble un petit peu saugrenu venir ici pour déposer sur telle ou
3 telle chose, alors que vous êtes auteur et vous disposez de notes et vous
4 disposez d'un bloc-notes qui contiennent tout cela.
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Il y a un dossier et des documents qui sont
6 considérés comme officiels et d'autres qui concernent la façon dont les
7 interviews ont été menées. Ce que vous avez sous vos yeux est un document
8 officiel. Le reste serait officieux, et par conséquent ne saurait être
9 utilisé. Voilà pourquoi j'ai dit "bien entendu que non."
10 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Par conséquent, la version officielle
11 serait maintenant des ordures tout simplement ou à rejeter, alors que la
12 version officieuse évidemment pourrait être quelque chose qui serait fiable
13 pour nous et sur quoi nous devons nous fonder ?
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je n'ai pas dit cela.
15 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien.
16 Redonnons la parole à M. Stamp.
17 M. STAMP : [interprétation]
18 Q. Bien. Maintenant s'agissant de celle qui est maintenant sous vos yeux,
19 dites-nous, c'est vous qui avez pris les notes lors de cet entretien ?
20 R. Oui, j'ai noté tout ce qu'il a dit, non pas dans un bloc-notes, mais
21 sur une feuille de papier du format A4.
22 Q. Cela signifie que ce procès-verbal est le résultat de vos notes ?
23 R. Oui. Ce sont les thèses, les idées principales que j'ai notées pendant
24 que le témoin parlait. Il n'y a pas d'autres notes. On fait cela tout
25 simplement pour avoir une esquisse, un plan d'entretien par thème qui
26 permet par la suite de rédiger un procès-verbal final de l'entretien que
27 l'intéressé peut signer.
28 Q. Bien. Passons maintenant à la déclaration faite par
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1 M. Protic en 2006. Vous avez dit --
2 M. STAMP : [interprétation] S'il vous plaît, pièce 2817, si l'on peut
3 l'afficher.
4 [La Chambre de première instance se concerte]
5 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur Stamp. Veuillez
6 poursuivre.
7 M. STAMP : [interprétation]
8 Q. Vous avez dit que vous avez eu un rôle dans le recueillement de cette
9 déclaration. En fait, dans cette déclaration, est-ce qu'on peut voir quel
10 était votre rôle ? Cela figure-t-il dans la déclaration ou pas ?
11 R. Oui, j'ai pris part dans le recueillement de cette déclaration, et cela
12 est reflété dans les initiales qu'on peut voir ici.
13 Q. Très bien.
14 R. En bas, au-dessous de l'en-tête de ce document. Vous voyez ici, il y a
15 les initiales DJ/AK. Si vous souhaitez, je peux vous expliquer ce que ces
16 lettres désignent.
17 Q. Ça veut dire que ce sont vos initiales, n'est-ce pas, AK ?
18 R. Oui.
19 Q. Très bien.
20 R. Donc j'étais présent lors de l'entretien, mais je n'étais pas présent
21 au moment où le procès-verbal de l'entretien a été rédigé. Cela a été fait
22 par mon collègue Dragan Jenic, et c'est pour cette raison-là que mon nom
23 n'apparaît pas sur le procès-verbal, la version finale. J'étais absent pour
24 des raisons professionnelles. Mais par contre, on peut voir mes initiales
25 là, qui prouvent le fait que j'ai participé et que j'étais présent lors de
26 cet entretien.
27 Q. Bien. Mais l'audition de l'intéressé, n'était-elle pas menée par le
28 procureur Stankovic ? C'est ce que vous avez dit tout à l'heure.
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1 R. Dragoljub Stankovic était présent. Il travaillait ensemble avec nous, à
2 savoir, Dragan Jenic était là, Dragoljub Stankovic, et moi-même.
3 Q. Très bien. Peut-on passer à la pièce P2824. Bien. Avez-vous été
4 impliqué dans une affaire contre des policiers ou des anciens membres du
5 MUP portant sur leur participation aux événements de Petrovo Selo, quand
6 les cadavres ont été cachés à Petrovo Selo, dissimulés ? Je pense que le
7 procès a eu lieu en 2007.
8 R. Quelle est l'affaire à laquelle vous faites référence concrètement ?
9 Q. Nous avons ici le compte rendu de la déposition de Bozidar Protic
10 devant la Chambre de la cour de district de Belgrade et portant sur la
11 chambre chargée de juger les crimes de guerre concernant les cadavres
12 retrouvés à Petrovo Selo. Avez-vous participé à l'enquête portant sur cette
13 affaire ?
14 R. J'ai participé à deux affaires concernant Petrovo Selo. Il y avait une
15 fosse commune à Petrovo Selo et il y avait également le meurtre des frères
16 Bytyqi. Alors ces deux affaires sont liées à Petrovo Selo, et quand vous me
17 demandez, avez-vous participé à l'affaire de Petrovo Selo, je ne peux pas
18 vous répondre sans que vous ne me précisiez si vous pensez à une affaire ou
19 à l'autre.
20 Q. Non, ça ne concerne pas l'affaire des frères Bytyqi, mais celle de la
21 fosse commune. Bien. Nous allons maintenant voir le numéro de référence.
22 Peut-être que cela vous permettrait de voir si vous avez été impliqué dans
23 cette affaire.
24 R. Cette référence-là, c'est un numéro de référence de la cour de
25 district.
26 Q. Très bien.
27 R. Cela ne m'aide pas à identifier l'affaire.
28 Q. Mais savez-vous que Protic a déposé devant la cour de district de
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1 Belgrade concernant Petrovo Selo en 2007 ?
2 R. Cela relève du juge d'instruction. Je sais qu'on l'avait convoqué à
3 plusieurs fois. Je sais qu'il a déposé, mais je ne sais pas maintenant de
4 quoi il s'agit exactement. De toute façon, il s'agit ici d'une déposition
5 devant le juge d'instruction.
6 Q. Non --
7 R. Je peux être un peu plus précis si vous le permettez.
8 Q. Mais savez-vous s'il a témoigné, Protic ?
9 R. Lors de nos entretiens, Protic m'a dit à plusieurs reprises qu'il avait
10 témoigné à plusieurs reprises devant le juge d'instruction Milan Dilparic,
11 donc je le sais.
12 Q. Et c'est devant la cour de district de Belgrade ?
13 R. Oui. C'est un juge d'instruction auprès de la cour chargée de juger des
14 crimes de guerre à Belgrade, et vous pouvez le voir dans ce document.
15 Q. Est-ce que la chambre chargée de juger les crimes de guerre de la cour
16 de district à Belgrade est la même chose que le bureau de juge
17 d'instruction ?
18 R. Vous savez, la chambre chargée de juger les crimes de guerre fait
19 partie de la cour de district de Belgrade et est composée de plusieurs
20 juges magistrats de siège et des juges d'instruction. Par exemple, dans une
21 chambre nous avons deux juges d'instruction et plusieurs juges de siège.
22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce la seule page du document dont
23 nous disposons ?
24 M. STAMP : [interprétation] Non, Monsieur le Président, mais nous allons
25 voir maintenant. Peut-on passer à la deuxième page du document.
26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Peut-être qu'on pourra y voir quel est
27 le statut exactement du juge en question.
28 M. STAMP : [interprétation]
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1 Q. Pourriez-vous, sur la base de ce que vous voyez maintenant, nous dire
2 s'il s'agit d'un procès ou d'une audition devant le juge d'instruction ?
3 R. Il s'agit du compte rendu de la déposition devant un juge
4 d'instruction. En fait -- non, attendez, on ne voit pas. Non, non, toutes
5 mes excuses. Mais voyez ici, on dit : "Le président de la chambre," et cela
6 signifie qu'il s'agit en fait du procès et non pas de la mise en état.
7 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, c'est ce qui est indiqué là,
8 c'est qu'il s'agit d'un procès.
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Et je suppose que cela doit concerner
10 l'affaire des frères Bytyqi, parce que c'est la seule affaire où il y a
11 déjà eu un procès, et l'affaire des fosses communes, elle est encore dans
12 la phase de la mise en état.
13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Avez-vous parlé à Protic depuis le 8
14 février 2007 ?
15 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai parlé à Protic avant son arrivée à La
16 Haye pour témoigner ici devant le Tribunal. Le service chargé d'enquêter
17 sur les crimes de guerre est tenu d'agir conformément aux requêtes émanant
18 du Tribunal pénal de La Haye et le juge d'instruction d'être témoin. Alors
19 il avait refusé d'être témoin à charge et je l'ai rencontré à ce moment-là
20 pour lui expliquer que c'était son devoir et que le rôle de la République
21 de Serbie était de lui permettre de remplir son devoir de témoin.
22 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
23 Monsieur Stamp.
24 M. STAMP : [interprétation]
25 Q. Combien de chauffeurs avez-vous auditionnés concernant le transport des
26 cadavres du Kosovo vers la Serbie et les mesures prises afin de les cacher
27 ?
28 R. Je ne peux pas vous donner un nombre précis, mais j'ai auditionné
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1 chacun qui y avait participé - peut-être moins de 10 - et qui avait des
2 connaissances directes ou indirectes sur cette question.
3 Q. Protic étant un des chauffeurs.
4 R. Oui.
5 Q. Vous souvenez-vous d'un autre chauffeur ?
6 R. Je n'ai peut-être pas été suffisamment précis tout à l'heure. J'ai dit
7 que j'ai auditionné tous ceux qui avaient quelque chose à voir avec le
8 transport. Cela signifie non pas seulement les chauffeurs, mais également
9 ceux qui sécurisaient le transport.
10 Q. Oui. Mais moi, ce que je vous demande, c'est si vous avez auditionné
11 les chauffeurs. Peut-être que je me suis mal exprimé tout à l'heure. Avez-
12 vous auditionné d'autres chauffeurs en dehors de Protic ?
13 R. Non pas d'autres chauffeurs, mais j'ai auditionné des membres du
14 dispositif sécuritaire, ceux qui étaient avec eux dans les véhicules.
15 Q. Oui, oui, je comprends bien cela. Mais étant donné que Protic lui-même
16 était chauffeur, alors je voulais savoir ce qui en était d'autres
17 chauffeurs. Vous avez fait référence à deux affaires que votre équipe a
18 enquêté, à savoir l'affaire de Suva Reka, et vous avez déféré cette affaire
19 en 2002 ?
20 R. En 2003, nous avons déféré cette affaire au bureau du procureur chargé
21 d'enquêter sur les crimes de guerre, au moment de sa création tout
22 simplement. Nous avons complété l'enquête de police et nous avons
23 pratiquement établi ce qui s'était passé.
24 Q. Bien. Un acte d'accusation portant sur ces événements a été établi le
25 25 avril 2006. Le savez-vous ?
26 R. Oui. Le procureur, après avoir reçu ces documents, a déposé une requête
27 devant le juge d'instruction. Ensuite, c'est le juge d'instruction qui a
28 mené son enquête entre 2003 et 2005 sur la base des documents fournis par
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1 le MUP. Sur la base de tout cela, il a été établi qu'il y avait des raisons
2 pour croire que certaines personnes étaient des auteurs de ces crimes,
3 ensuite ces personnes, ces sept personnes ont été arrêtées.
4 Q. Cela signifie-t-il que le procureur a eu besoin de trois ans à peu près
5 pour établir un acte d'accusation, c'est-à-dire, entre le moment où vous
6 lui avez remis les documents et la fin de son enquête ?
7 R. Non. Le procureur a dû déposer une demande de déclencher l'enquête
8 devant le juge d'instruction. C'est le juge d'instruction qui a conduit
9 l'enquête, et cela a duré, il est vrai, deux ans.
10 M. STAMP : [interprétation] Bien. Merci, Monsieur le Président. Je n'ai
11 plus de questions pour ce témoin.
12 Q. Merci, Monsieur Kostic.
13 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci, Monsieur Stamp.
14 Une question que j'aurais dû vous poser déjà avant. Avez-vous participé
15 personnellement à l'enquête concernant les corps trouvés à Petrovo Selo ou
16 votre implication personnelle et directe se limite à l'affaire de Suva Reka
17 et des frères Bytyqi ?
18 LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai été impliqué dans toutes les affaires.
19 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, Maître Zecevic.
20 M. ZECEVIC : [interprétation] Une correction au compte rendu, page 81,
21 lignes 4, 5, 6. Il a été dit que l'acte d'accusation a été établi en mars
22 1999 et qu'il a été rendu public en mars 1999, ce qui est faux. Il
23 s'agissait de mai 1999. Page 81, lignes 4, 5, 6.
24 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.
25 M. ZECEVIC : [interprétation] Merci.
26 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Des questions supplémentaires, Maître
27 Ivetic ?
28 M. IVETIC : [interprétation] Non, je ne pense pas. Nous allons en terminer
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1 avec la déposition de ce témoin juste à l'heure.
2 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien.
3 Merci de votre témoignage, Monsieur Kostic. Vous pouvez maintenant quitter
4 le prétoire accompagné de l'huissier. Merci.
5 [Le témoin se retire]
6 M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bien. Nous reprendrons le travail
7 demain à deux heures et quart.
8 --- L'audience est levée à 18 heures 59 et reprendra le mercredi 12 mars
9 2008, à 14 heures 15.
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