Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le vendredi 22 août 2008

  2   [Plaidoiries]

  3   [Audience publique]

  4   [L'accusé Lazarevic est absent]

  5   [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

  6   --- L'audience est ouverte à 9 heures 02.

  7   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Bonjour à toutes et à tous. Nous

  8   allons poursuivre nos débats aujourd'hui en écoutant la fin de la

  9   plaidoirie de Me Sepenuk pour son client M. Ojdanic.

 10   M. SEPENUK : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 11   Hier, nous étions en train de parler du général Ojdanic et du fait qu'il

 12   prônait un recours minimum à l'armée. Il estimait que c'est au MUP qu'il

 13   fallait faire appel pour protéger la population, il allait donc moins loin

 14   que le général Perisic et le général Dimitrijevic, parce que lui il

 15   craignait, le général Ojdanic, que ça ne puisse mener à une guerre et dans

 16   son rapport d'expert, le général Radinovic a conclu à partir de la réunion

 17   du 10 juillet 1998 que le général Ojdanic, je cite : "S'oppose à une

 18   utilisation directe de la VJ pour défendre la population civile dans des

 19   localités où cela entraînerait forcément une guerre généralisée au Kosovo-

 20   Metohija."

 21   Dans le même ordre d'idée lors d'une réunion du 19 juin 1998, le général

 22   Ojdanic a déclaré que s'agissant de la mise en place d'une armée de réserve

 23   en Serbie pour aider aux opérations au Kosovo, je cite : "Je ne pense pas

 24   qu'on peut envoyer cette unité à partir de la Serbie sans que la décision

 25   ait été prise par les organes compétents." P921, page 15.

 26   Et lors de la réunion de la direction collégiale du 24 août 1998, pièce

 27   3D513, le général Dimitrijevic a déclaré que la VJ avait été "engagée de

 28   manière assez importante" avec le MUP dans les opérations antiterroristes.

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  1   Le général Dimitrijevic était préoccupé et il craignait que cela ne

  2   fournisse un motif pour les attaques aériennes." Page 11.

  3   Le général Ojdanic, après avoir fait noter que selon lui les unités de la

  4   VJ "étaient beaucoup trop engagées en dehors de la zone frontalière" page

  5   13, a dit ce qui suit : "Le général Aco," c'est-à-dire le général

  6   Dimitrijevic, "a eu raison de poser cette question au sujet de l'emploi

  7   très étendu de la VJ aux côtés du MUP. Il se trouve que sur la totalité du

  8   territoire dans les zones intérieures, ce sont pour l'essentiel des champs,

  9   ce sont les unités de l'armée yougoslave qui sont au commande et selon ce

 10   qui a été dit ici ce n'est pas une bonne chose."

 11   Le général Ojdanic ensuite a donné son accord au général Dimitrijevic en

 12   disant que oui, effectivement, les frappes aériennes pouvaient "venir très

 13   bientôt" et il a mis en garde contre une utilisation exagérée de la VJ

 14   auprès du MUP dans les opérations antiterroristes.

 15   La Chambre de première instance se souviendra de la déposition du général

 16   Dimitrijevic en réponse à une question du Juge Bonomy. Le général

 17   Dimitrijevic a dit qu'avant et après être devenu chef de

 18   l'état-major général, le général Ojdanic je cite : "A insisté que l'armée

 19   s'acquitte des fonctions prévues par la constitution et par les

 20   dispositions statutaires." Donc je ne pense pas qu'ici il s'écarte de cette

 21   idée, à savoir "que la pire manière d'avoir recours à l'armée c'était la

 22   manière dont on avait recours à elle à ce moment-là justement."

 23   Le Juge Bonomy ne s'est pas satisfait de cette réponse, il a pensé qu'elle

 24   n'était pas suffisamment précise et il a dit, je cite : "Est-ce que le

 25   général Ojdanic, tout comme vous, était opposé à une utilisation poussée de

 26   l'armée contre le terrorisme ?" Et le général Dimitrijevic a répondu : "Je

 27   crois que oui, Monsieur le Président." Page 26 732 du compte rendu

 28   d'audience.

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  1   Et c'est effectivement ce que nous montre le dossier. Si bien que cela ôte

  2   toute crédibilité aux affirmations sans fondement de l'Accusation au

  3   paragraphe 768 de son mémoire selon lesquelles et je cite : "Le 25 décembre

  4   1998, Ojdanic a proposé la mise à pied du chef de la 3e Armée Samardzic qui

  5   avait critiqué le rôle de la VJ dans les opérations internes."

  6   Les références données à cet égard par le bureau du Procureur ne confortent

  7   pas cette affirmation et il est manifeste, quoi qu'il en soit, que le

  8   général Ojdanic partageait l'opinion du général Perisic et du général

  9   Dimitrijevic au sujet du rôle limité que devait jouer la VJ dans les

 10   opérations internes. Et je pense que la Chambre se souviendra que le

 11   général Samardzic est devenu l'inspecteur en chef de l'armée. Il a

 12   participé très activement aux réunions de la direction collégiale après

 13   avoir quitté le commandement de la 3e Armée. Donc on ne peut pas parler de

 14   mise à pied comme le dit l'Accusation.

 15   On peut dire donc en résumé que l'Accusation se trompe lorsqu'elle affirme

 16   que le général Ojdanic voulait utiliser l'armée de manière plus étendue que

 17   ça n'avait été prôné par le général Perisic ou par le général Dimitrijevic.

 18   Comme nous l'avons vu, en réalité, rien n'indique que le général Ojdanic,

 19   au moment où il est devenu chef d'état-major, ait voulu utiliser la VJ au-

 20   delà du nécessaire pour répondre aux provocations de l'UCK et préparer aux

 21   attaques aériennes de l'OTAN ou à une invasion terrestre.

 22   Et je ne répéterai pas tout ce qui figure dans notre mémoire au sujet des

 23   membres de l'état-major général qui ont tous dit, lorsqu'ils sont venus

 24   ici, qu'il n'y a pas eu de modification de la stratégie au moment où le

 25   général Ojdanic a pris la place du général Perisic en tant que le chef de

 26   l'état-major de l'armée.

 27   Je passe maintenant à un autre sujet. L'Accusation affirme que le général

 28   Ojdanic, avant la guerre, avait l'intention de violer ces obligations au vu

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  1   du droit international et l'Accusation nous dit que ceci établit par ses

  2   actions contre les provocations de l'UCK pendant qu'il était adjoint du

  3   chef d'état-major. Nous avançons tant qu'à nous que l'Accusation se trompe

  4   ici. Je crois qu'il faut commencer en toute logique par la réunion

  5   collégiale du 10 juillet 1998, pièce 3D641. Puisque lors de cette réunion,

  6   le général Ojdanic déclare, je cite : "S'agissant d'une opération

  7   antiterroriste, je n'en ai pas connaissance, mais je voudrais insister sur

  8   une chose : à cause du général Dimitrijevic, nous savons tous que les

  9   représentants diplomatiques et militaires sont en permanence sur zone et

 10   ils vont suivre de très près tout ce qui se passe au Kosovo-Metohija, y

 11   compris l'engagement des unités du MUP serbe et l'armée yougoslave."

 12   Si bien, qu'on voit que dès le 10 juillet 1998, le général Ojdanic "n'avait

 13   pas connaissance d'une telle opération antiterroriste," je reprends ses

 14   dires. Et la raison pour laquelle il n'était pas au courant de cette

 15   opération, bien, on l'apprend grâce à celui qui intervient tout de suite

 16   après lui lors de cette réunion collégiale, le général Dimitrijevic, en

 17   effet dit la chose suivante, je cite : "Pour ce qui est des activités

 18   antiterroristes, elles sont mises en œuvre également et tout bien

 19   considéré, elles ont été planifiées et préparées pour que les forces du MUP

 20   ne paraissent jamais en être à l'origine, mais semblent toujours répondre

 21   aux attaques. Je n'en ai pas parlé, mais c'est déjà ce qui est en train de

 22   se produire là-bas."

 23   On voit donc ici la situation résumée en deux mots. Dimitrijevic a dit

 24   qu'il n'avait aucune information au sujet d'une opération antiterroriste

 25   qui confirme les éléments de l'espèce, à savoir que le général Ojdanic n'a

 26   appris l'existence de cette opération que le jour de cette réunion

 27   collégiale, le 10 juillet 1998.

 28   La Chambre de première instance se souviendra également des preuves qui ont

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  1   été apportées au sujet de la plainte formulée par le général Ojdanic qui

  2   disait ne pas être informé des opérations de combat. On se souviendra de la

  3   déposition du général Radinovic, l'expert militaire qui expliquait que le

  4   général Ojdanic entretenait des relations assez tendues avec le général

  5   Perisic, et ceci n'avait pas été amélioré par le veto formulé par le

  6   général Perisic quant aux thèmes que le général Ojdanic voulait aborder

  7   dans sa thèse, parce que selon Radinovic c'était malgré tout un thème très

  8   intéressant, au moins digne d'intérêt.

  9   Dans sa déposition et dans son rapport d'expert, le général Radinovic a

 10   confirmé que le général Ojdanic n'était pas au courant des opérations de

 11   combat ou des opérations antiterroristes, pièce 3D1116, pages 77, 79, et le

 12   général Obradovic a dit que le général Ojdanic n'avait pas participé à des

 13   réunions ou signé des documents ayant trait à la promulgation de la

 14   directive antiterroriste du 28 juillet 1998, directive au nom du général

 15   Perisic, et n'a rien non plus à avoir avec son exécution. Pages 14 942 à 43

 16   du compte rendu d'audience.

 17   Je pense qu'on peut dire qu'avant de devenir chef d'état-major, le seul

 18   moment où on peut relier le général Ojdanic avec les activités

 19   antiterroristes, c'est le moment où il est adjoint du chef d'état-major et

 20   où en tant que tel le général Ojdanic fait un briefing aux attachés

 21   militaires le 27 août 1998, c'est une réunion à laquelle participe le

 22   colonel John Crosland. Et là, une fois encore, l'Accusation et le colonel

 23   Crosland n'ont pas compris ce qui se passait.

 24   Le colonel Crosland avait fait une première déclaration au bureau du

 25   Procureur en 1998, il avait déposé également dans l'affaire Milosevic et

 26   depuis lors on lui avait montré une vidéo du général Ojdanic présentant une

 27   opération conjointe contre des villages albanais menée par les forces de la

 28   VJ et du MUP.

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  1   Pendant le procès, Mme Carter, représentante de l'Accusation, pose la

  2   question suivante au colonel Crosland, je cite :

  3   "Question : Il faut savoir exactement de quelle période nous parlons

  4   avant de remettre cette vidéo où on voit Ojdanic qui dit : 'regardez cette

  5   opération conjointe, quelle était la stratégie du parti au sujet des

  6   opérations conjointes entre le MUP et la VJ ?'

  7   Réponse : Bien, la stratégie officielle c'était qu'il n'y avait pas de

  8   collusion entre la VJ et le MUP.

  9   Question : Oui. Mais quand vous avez préparé la vidéo à Ojdanic et que vous

 10   l'avez mis devant le fait accompli, est-ce qu'à ce moment-là, leur position

 11   officielle a changé, est-ce qu'ils ont reconnu la VJ avait participé à des

 12   opérations conjointes ?

 13   Réponse : Je crois que non, non. Il y avait des éléments de preuve factuels

 14   qu'il était impossible ou difficile de réfuter, mais ils n'ont pas voulu

 15   reconnaître la véracité de ce que l'on voyait dans ces éléments de preuve."

 16   Pages du compte rendu d'audience 9 799 [comme interprété] à

 17   9 790.

 18   Nous savons maintenant que le colonel Crosland a fini par reconnaître

 19   pendant mon contre-interrogatoire qu'il n'avait pas présenté cette vidéo au

 20   général Ojdanic en personne contrairement à ce qu'il avait dit précédemment

 21   dans d'autres déclarations ou dans une déposition antérieure. Mais il a dit

 22   qu'il avait "sans doute" remis la vidéo au colonel Negovan Jovanovic,

 23   l'officier de liaison chargé des contacts avec les attachés militaires.

 24   Page 9 891 du compte rendu d'audience.

 25   La Chambre de première instance se souviendra également de la déposition

 26   catégorique du colonel Jovanovic qui a affirmé qu'aucune vidéo de ce type

 27   ne lui avait été présentée a lui ni d'ailleurs à aucun membre de son état-

 28   major. Page 14 911 du compte rendu d'audience.

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  1   Je me rappelle, Monsieur le Président, que vous avez parlé d'agonie en

  2   décrivant l'état d'esprit dans lequel vous vous trouviez au moment de

  3   décider du versement au dossier de l'audition de M. Perisic et on peut

  4   facilement deviner dans l'état d'esprit dans lequel se trouvait le général

  5   Ojdanic au moment où Mme Carter a demandé au colonel Crosland assez

  6   brusquement ce qui s'était passé quand il avait fourni cette vidéo à

  7   Ojdanic "quand il lui avait mis sous les yeux."

  8   En fait, le plus important ici c'est que Crosland n'a jamais remis

  9   cette vidéo au général Ojdanic. C'est tout à fait par hasard qu'on l'a

 10   découvert. Ça n'a rien à voir avec mon contre-interrogatoire, j'ai

 11   simplement eu beaucoup de chance. Et ça nous montre à quel point on peut

 12   facilement se tromper, ça montre à quel point notre système pénal peut être

 13   fragile. Vous vous souviendrez également que le colonel Crosland,

 14   contrairement à ce qu'il avait dit dans l'affaire Milosevic, contrairement

 15   à d'autres déclarations selon laquelle -- bien, il a reconnu donc

 16   contrairement à ce qu'il avait dit à ce moment-là, M. Paddy Ashdown n'avait

 17   pas présenté au général Ojdanic les photographies des opérations conjointes

 18   de la VJ et du MUP à l'automne 1998. Le colonel Crosland avait donc tenu

 19   des propos erronés sous serment à ce sujet dans l'affaire Milosevic et dans

 20   l'espèce également.

 21   S'agissant maintenant de l'intention délictueuse du général Ojdanic avant

 22   la guerre, je voudrais revenir sur l'argument de l'Accusation selon

 23   laquelle le général Ojdanic avait connaissance des crimes par la RSFY et

 24   les forces serbes au Kosovo en 1998 alors qu'il était adjoint du chef

 25   d'état-major, paragraphes 787 à 788 du mémoire.

 26   D'après l'Accusation, de ce fait le général Ojdanic était informé du fait

 27   que les unités dont on présumait qu'elles avaient commis ces crimes

 28   allaient continuer à en commettre de semblables pendant la période visée à

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  1   l'acte d'accusation. Mais le fait est que l'Accusation n'a prouvé la

  2   perpétration d'aucun crime précis par les forces serbes au cours de l'année

  3   1998 et elle a encore moins prouvé que le général Ojdanic avait

  4   connaissance de ces crimes supposés. Les deux seuls paragraphes du bureau

  5   du Procureur qui sont consacrés à ce thème, paragraphes 787 et 788, ne font

  6   pas mention de la perpétration de crimes par les forces serbes. Tout au

  7   plus, il y est question d'une utilisation excessive de la force.

  8   Au paragraphe 787, l'Accusation n'évoque pas des crimes, mais parle des

  9   éléments de preuve fournis par le colonel Crosland, des informations qu'il

 10   a fournies lors de la réunion des attachés de défense du 27 août 1998. A ce

 11   moment-là, il avait été dit que supposément la force avait été utilisée de

 12   manière excessive par les forces de la VJ et du MUP dans la zone de Prilep-

 13   Glodjane et ceci avait entraîné une crise humanitaire. Le général Ojdanic

 14   avait reconnu que c'était le cas.

 15   Nous avons déjà parlé de l'utilisation supposée de la force par les forces

 16   serbes de manière disproportionnée, pages 52 à 62 de notre mémoire. En plus

 17   de ce qu'il a dit lors de la réunion des attachés militaires d'août 1998

 18   selon laquelle il fallait répondre à la violence croissante des attaques de

 19   l'UCK. Le colonel Crosland, lui, a ajouté que du point de vue militaire

 20   ceci était tout à fait logique, page 9 803 du compte rendu d'audience.

 21   Autre paragraphe du mémoire du bureau du Procureur au sujet de la

 22   perpétration supposée de certains crimes en 1998. C'est un paragraphe qui

 23   ne porte pas non plus sur des crimes, mais sur "la préoccupation de la

 24   communauté internationale au sujet du niveau de violence qui est

 25   actuellement constaté au Kosovo." Paragraphe 788 du mémoire.

 26   Dans son mémoire, le bureau du Procureur déclare que "Ojdanic était informé

 27   de ces préoccupations, et ceci, par le biais des rapports de 'Human Rights

 28   Watch,'" paragraphe 788. Ici encore on va un peu loin dans la logique du

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  1   côté du Procureur, on joue un petit peu avec la logique. Le bureau du

  2   Procureur, pour prouver que le général Ojdanic était informé de ces

  3   événements, fait référence à une lettre du 20 juillet 1998 envoyée par

  4   "Human Rights Watch" aux différents services du gouvernement serbe et

  5   notamment à la VJ. La Chambre de première instance se souviendra que M.

  6   Fred Abrahams a déposé ici en disant qu'il avait effectivement envoyé cette

  7   lettre. Cette lettre, elle porte la cote P544, elle a été envoyée par fax à

  8   la VJ et aux services d'information du commandement chargé du Kosovo. Elle

  9   contient un certain nombre de demandes d'informations au sujet des forces

 10   de la VJ et certaines de ces demandes portent sur des informations à

 11   caractère confidentiel.

 12   La lettre a été envoyée pendant une période de vacances, et le

 13   destinataire, quel qu'il ait été, se voyait donner dix jours pour répondre

 14   à cette lettre alors que la VJ était occupée et on avait beaucoup de pain

 15   sur la planche puisqu'elle combattait les activités terroristes. Il n'y a

 16   rien dans cette lettre qui conforte l'affirmation de l'Accusation selon

 17   laquelle le général Ojdanic, qui était alors le chef de l'état-major

 18   adjoint, ait jamais reçu cette lettre ou en ait jamais été informé.

 19   Je ne vais pas passer plus de temps sur cette lettre, je me contenterai de

 20   renvoyer la Chambre de première instance au contre-interrogatoire que j'ai

 21   effectué du témoin Abrahams, pages 892 à 899 du compte rendu d'audience.

 22   Vous y trouverez, je pense, tout ce que vous voulez savoir au sujet de

 23   cette question. Cette lettre n'a vraiment aucun intérêt en l'espèce, elle

 24   n'aurait jamais dû être mentionnée même par le bureau du Procureur. Tout

 25   ceci illustre une fois encore à quel point la thèse de l'Accusation prend

 26   l'eau.

 27   Autre chose que je souhaite mentionner ici, ce sont les déclarations

 28   erronées faites par l'Accusation au sujet du général Andjelkovic et de

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  1   certains de ses propos. Il était à l'époque chef du secteur chargé des

  2   transmissions et des opérations électroniques.

  3   Le général Andjelkovic a déclaré lors d'une direction  collégiale

  4   tenue le 2 février 1999 la chose suivante. Ses propos sont repris au

  5   paragraphe 260 du mémoire de l'Accusation : "S'il est vrai que les

  6   subordonnés font des choses qu'ils ne devraient pas faire et envoient des

  7   rapports en affirmant qu'ils n'ont pas fait de telles choses et si nous

  8   avons des informations exactes selon lesquelles ils ont bien commis ces

  9   actes et que personne ne s'est vu demander des comptes au sujet de ces

 10   actes, je ne peux pas accepter ce genre de choses et je pense qu'on a

 11   raison d'en parler et de soulever la question de notre compétence."

 12   L'Accusation implique par là en présentant ces observations du général

 13   Andjelkovic qu'il y a eu manquement à l'obligation de signaler la

 14   perpétration de crimes. Mais ce dont ne nous parle pas le bureau du

 15   Procureur c'est ce qu'a dit le général Andjelkovic lors de sa déposition,

 16   pages 16 400 à 16 401 du compte rendu d'audience. Il parlait de cette

 17   réunion que je viens d'évoquer : "Il s'agissait de l'utilisation excessive

 18   des téléphones portables et des postes radio mobiles. Nous avons envoyé des

 19   mises en garde à ce sujet, nous avons demandé aux unités subordonnées

 20   d'arrêter d'utiliser ce type d'équipement de manière abusive. Mais personne

 21   n'a fait attention à notre mise en garde et surtout, d'ailleurs, les unités

 22   du MUP. C'est la raison pour laquelle j'ai évoqué cette question. Est-ce

 23   qu'on avait la compétence suffisante pour donner un ordre et faire en sorte

 24   que ce type de pratique cesse immédiatement ? Voilà ce dont il était

 25   question."

 26   Cette déposition suivait ce qu'avait dit le général Andjelkovic au sujet du

 27   contrôle des mouvements de l'UCK par les forces de la RSFY en écoutant les

 28   conversations par téléphones portables et par radios mobiles, page 16 399

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  1   du compte rendu d'audience.

  2   Voilà quelle était la logique des observations du général Andjelkovic lors

  3   de cette réunion collégiale. On a vraiment du mal à comprendre comment le

  4   bureau du Procureur n'a pas saisi la nature exacte de ces propos, d'autant

  5   plus que le bureau du Procureur se trompe encore en citant de manière

  6   erronée ces propos et en les interprétant de manière erronée au paragraphe

  7   835, note de bas de page 2 101 de leur mémoire.

  8   Maintenant, je voudrais parler un peu plus avant du moment où le général

  9   Ojdanic est devenu chef de l'état-major général le 27 novembre 1998 au

 10   début de la guerre.

 11   Nous savons qu'après l'offensive des forces serbes contre l'UCK, les

 12   forces serbes avaient récupéré l'essentiel du territoire qui était

 13   auparavant occupé par l'UCK. Nous avons également un grand nombre

 14   d'éléments de preuve indiquant qu'à partir de l'automne 1998 et jusqu'au

 15   début de la guerre en mars 1999, nous savons que les terroristes ont

 16   continué leurs attaques, leurs provocations. Il y a même eu escalade de ce

 17   type de pratique et violation du cessez-le-feu. A ce moment-là, l'UCK a

 18   occupé à nouveau le territoire qu'il avait abandonné précédemment. Voilà la

 19   réalité difficile à laquelle était confronté le général Ojdanic au moment

 20   où il a pris le poste de commandant de l'état-major général le 27 novembre

 21   1998. Il devait s'assurer que la VJ s'acquittait de ses responsabilités aux

 22   termes des accords d'octobre et, dans le même temps, il lui fallait réagir

 23   à la menace constante posée par les actions et les provocations de l'UCK,

 24   il lui fallait répondre à la menace de bombardement et à une éventuelle

 25   intervention terrestre de l'OTAN sur son territoire.

 26   Selon nous, il a réagi de manière honorable, humaine, que ce soit

 27   dans les affaires de Podujevo ou Racak, il a réagi de manière modérée

 28   lorsqu'il a choisi de ne pas faire appel aux étudiants des écoles

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  1   militaires ou de ne pas faire appel à des unités de la VJ pour ce faire.

  2   Mais nous en parlons de manière détaillée dans notre mémoire.

  3   Contrairement aux arguments du bureau du Procureur, toutes les

  4   actions entreprises par le général Ojdanic et l'état-major général au cours

  5   de cette période constituaient une réaction légitime aux menaces et aux

  6   provocations de l'UCK ainsi qu'à la menace potentielle des forces de

  7   l'OTAN. 

  8   Je l'ai dit dans notre mémoire, mais je souhaiterais quand même

  9   revenir sur un certain nombre de points afférents à cette question dans son

 10   mémoire, paragraphes 744 à 747 du mémoire, le bureau du Procureur déclare

 11   que le général Ojdanic était favorable à une stratégie de distribution

 12   d'armes aux non-Albanais. Paragraphe 744, on peut lire : "Ojdanic n'a pas

 13   inversé cette pratique. Il a poursuivi cette pratique de distribution

 14   d'armes aux civils non- Albanais. Pourtant, il était conscient du danger

 15   que ce type de pratique pouvait poser."

 16   Ceci est complètement faux. Aucun élément ne conforte cette affirmation. Le

 17   fait est qu'on n'a pas continué à distribuer d'armes aux civils non-

 18   Albanais après la prise de poste du général Ojdanic à la tête de l'état-

 19   major général. Le bureau du Procureur déforme les faits, parce que son

 20   objectif était de mettre de l'ordre dans le système au lieu de faire appel

 21   à des soldats mercenaires ou free-lance, si l'on peut dire.

 22   Ceci se trouve aux paragraphes 22 à 54 de notre mémoire en clôture.

 23   Mardi, M. Hannis a essayé de faire le lien entre les crimes figurant à

 24   l'acte d'accusation et le général Ojdanic en invoquant la directive du 16

 25   janvier 1998 [comme interprété], la directive Grom 3, directive du général

 26   Ojdanic. M. Hannis a évoqué un certain nombre d'ordres du commandement

 27   conjoint et un certain nombre de zones du Kosovo où des crimes auraient été

 28   commis. Le Juge Bonomy a demandé à M. Hannis de lui expliquer si tous ces

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  1   événements étaient en rapport avec la directive Grom 3, et M. Hannis a dit

  2   que oui.

  3   Nous avons parlé longuement de Grom 3 aux paragraphes 196 à 203 de notre

  4   mémoire. Notre position est très simple. Grom 3 était une mesure

  5   parfaitement légitime et nécessaire visant à répondre aux menaces

  6   importantes auxquelles devait faire face la RSFY. La Chambre  de première

  7   instance devra simplement se pencher sur le libellé de la directive. Celle-

  8   ci ne visait pas à expulser les civils albanais de souche ou à commettre un

  9   quelconque acte criminel. L'Accusation n'a pas réussi à établir un lien

 10   entre Grom 3 et l'entreprise criminelle commune alléguée, ou quelque acte

 11   répréhensible que ce soit. Ce qui semble préoccuper M. Hannis pour ce qui

 12   est de Grom 3, c'est le plan visant à anéantir les forces terroristes. Il

 13   en est question également dans la directive du général Perisic prise à

 14   l'été précédent. En cas d'attaque de l'OTAN, la VJ devait défendre le pays

 15   et mener une guerre sur deux fronts. Cela n'avait rien à voir avec

 16   l'expulsion de civils albanais, bien au contraire.

 17   A la fin de son réquisitoire, M. Hannis a prié la Chambre de première

 18   instance d'examiner les événements de façon chronologique afin de voir ce

 19   qui se passait ailleurs en même temps.

 20   Nous sommes d'accord, et plus tard je mentionnerai la réunion de la

 21   direction collégiale qui a eu lieu le même jour, lorsque le général Ojdanic

 22   a insisté sur le fait que les réfugiés devaient être autorisés à rentrer

 23   chez eux. Un peu plus tard, je mentionnerai également l'annonce faite par

 24   le général Ojdanic deux jours avant le 7 avril 1999, lorsqu'il a déclaré

 25   que les Albanais devaient être autorisés à rentrer chez eux et à travailler

 26   et que tous devaient travailler ensemble afin d'établir la paix.

 27   L'Accusation a également prétendu que la VJ avait amassé ses troupes

 28   faisant preuve de mauvaise foi pendant l'année 1999. 

Page 27133

  1   La souveraineté de la RSFY était gravement menacée par l'UCK et nous avons

  2   de nombreux documents qui l'attestent. Bislim Zyrapi, le chef d'état-major

  3   de l'UCK au cours de la période qui nous intéresse, a déclaré qu'en mars

  4   1999 l'UCK constituait une force de 17 000 à

  5   18 000 membres, page 5 959 à 5 960 du compte rendu, et contrôlait une

  6   partie importante du territoire du Kosovo, page 6 017 du compte rendu

  7   d'audience. Sans même évoquer les tactiques délibérées utilisées par cette

  8   organisation terroriste, l'UCK représentait, bien entendu, une cible

  9   militaire légitime. De plus, tandis que la VJ a largement respecté les

 10   accords d'octobre, l'UCK a réoccupé des positions dont elle s'était retirée

 11   plus tôt, saisissant les occasions qui se présentaient à elle, d'après ce

 12   qu'a affirmé le général DZ, pièce

 13   2 508, paragraphe 189. D'autres témoins en ont parlé, et nous évoquerons

 14   cela en détail dans notre mémoire.

 15   Alors que la menace de l'UCK était bien réelle, l'état-major général de la

 16   VJ devait également se préoccuper de la possibilité d'une invasion

 17   terrestre des forces de l'OTAN, ou éventuellement d'une compagne de

 18   bombardements. Lors de la réunion collégiale tenue le 18 février 1999, en

 19   réaction au fait que l'OTAN devait augmenter ses effectifs en Macédoine

 20   pour compter 8 000 hommes, le général Ojdanic a expliqué : "Nous devons

 21   défendre le pays si nous sommes attaqués. Les hommes politiques et les

 22   diplomates feront tout leur possible pour essayer de résoudre la situation

 23   de manière pacifique." Pièce P937, page 16.

 24   Le mois suivant, le 11 mars, le général Ojdanic est revenu sur les

 25   allégations de l'occident selon lesquelles la Serbie ne respectait pas les

 26   accords d'octobre. Le général Ojdanic a déclaré que l'OSCE savait

 27   pertinemment pourquoi la VJ avait déployé davantage de troupes dans le

 28   secteur. Il a expliqué que l'OTAN faisait venir

Page 27134

  1   9 500 hommes, je cite: "Nous ne savons pas s'ils auront recours à ces

  2   forces pour nous envahir, mais nous ne pouvons pas rester là à ne rien

  3   faire et sans être préparés." Pièce P935, page 1.

  4   En outre, il y avait des informations crédibles indiquant que l'UCK et

  5   l'OTAN travaillaient main dans la main. L'UCK recevait notamment des armes

  6   de la part de l'OTAN, pièce 3D1035, paragraphe 2.1. Les forces terroristes

  7   étaient entraînées par l'OTAN, pièce 3D584, page 2. La Chambre se

  8   souviendra également du témoignage du général Dimitrijevic sur ce point. Il

  9   est également intéressant de noter ce que le témoin à charge John Crosland

 10   a déclaré lorsqu'il a dit que la communauté internationale souhaitait un

 11   changement de régime au Kosovo, et que l'UCK servait d'outil pour faire en

 12   sorte que ce changement devienne une réalité, comme Me O'Sullivan a rappelé

 13   hier, page 9 865 et 9 866 du compte rendu, pièce 3D510, paragraphe 25.

 14   Nous parlons également de cette soi-disant accumulation de forces en toute

 15   mauvaise volonté de la part de la VJ aux paragraphes 85 à 97 de notre

 16   mémoire en clôture.

 17   S'agissant de la période qui a précédé la guerre, je souhaite revenir

 18   également du témoignage fait sur ce point par le général Dimitrijevic. Il

 19   portait essentiellement sur le fait de savoir si le général Ojdanic

 20   recevait des rapports exacts de la part de la 3e Armée du Corps de Pristina

 21   pour ce qui est d'établir si les provocations violant les accords de

 22   cessez-le-feu provenaient de l'UCK ou des forces serbes. Les deux incidents

 23   mentionnés par Dimitrijevic lors de la réunion de la direction collégiale

 24   et au procès concernaient Podujevo et Racak. S'agissant de Podujevo, le

 25   général Dimitrijevic a déclaré qu'après enquête de l'état-major général, il

 26   avait été établi qu'il s'agissait d'une manœuvre tout à fait légitime, et

 27   pour ce qui est de Racak, le général Dimitrijevic a ajouté que l'armée

 28   n'était pas impliquée et que le général Ojdanic avait insisté pour faire

Page 27135

  1   toute la lumière sur ces événements. Aucun autre incident n'a été mentionné

  2   par Dimitrijevic, et rien au dossier ne permet de conclure que les actions

  3   menées par les forces serbes étaient quoi que ce soit d'autre que des

  4   actions légitimes, comme ce fût le cas à Podujevo et à Racak.

  5   En tout état de cause, le général Curcin a répondu à la question du général

  6   Dimitrijevic sur la question de savoir si les rapports adressés à l'état-

  7   major général reflétaient fidèlement la teneur des rapports des unités

  8   subordonnées. Souvenons-nous du témoignage du général Obradovic, membre de

  9   l'état-major général. Je cite : Question : "Là encore nous voyons que le

 10   général Dimitrijevic laisse entendre que les rapports qui provenaient du

 11   Corps de Pristina n'étaient pas nécessairement exacts s'agissant des

 12   activités du corps. S'agit-il d'une conclusion exacte ? Peut-on dire que le

 13   chef de la sécurité de la VJ affirmait que ces rapports du Corps de

 14   Pristina n'étaient pas nécessairement exacts s'agissant des activités du

 15   Corps de Pristina ?" Il s'agissait d'une question posée par M. Stamp lors

 16   du contre-interrogatoire.

 17   Réponse du témoin : "La thèse prônée ici par le général Dimitrijevic,

 18   comme vous pouvez le voir, c'est qu'il recevait des informations provenant

 19   de certaines sources à l'ouest. Il rencontrait souvent le colonel Crosland.

 20   Donc en occident, on pense que le MUP et l'armée menaient des opérations de

 21   ratissage. Voilà la théorie. Et le fait est que le chef de l'état-major

 22   général et la direction collégiale dans son ensemble insistaient pour que

 23   toute la vérité soit faite et que l'on sache quelle était la situation dans

 24   les unités."

 25   Ce qu'affirme le général Dimitrijevic n'est rien de nouveau. "Ce

 26   n'est pas que nous ne voulions pas savoir ou que nous ne savions pas. Il

 27   n'y avait aucune raison pour nous de ne pas faire confiance à nos

 28   subordonnés. Nous n'avions aucune raison de douter des informations que

Page 27136

  1   nous recevions. Nous n'avions aucune raison de penser qu'elles n'étaient

  2   pas fiables."

  3   De plus, comme nous l'avons indiqué dans notre mémoire, le général

  4   Ojdanic tout comme le général Curcin et d'autres ont pris des mesures lors

  5   des réunions de la direction collégiale afin de répondre aux mises en garde

  6   du général Dimitrijevic et afin de continuer à surveiller de près la

  7   véracité, l'exactitude des rapports et à donner des ordres en ce sens.

  8   Le général Ojdanic a ajouté qu'il s'adresserait au commandant de la

  9   3e Armée pour parler de cette question. Comme l'a dit le général

 10   Dimitrijevic dans sa déposition, lorsque le général Ojdanic a dit qu'il

 11   avait l'intention de faire quelque chose, il le faisait.

 12   Le général Ojdanic n'avait aucune intention malveillante, comme l'a

 13   reconnu le général Dimitrijevic lui-même, qui a déclaré que le général

 14   Ojdanic était "en colère" lorsqu'il recevait des informations erronées et

 15   qu'il voulait sincèrement établir la vérité et faire ce qui s'imposait. La

 16   seule personne qui a véritablement soulevé la question de la transmission

 17   des rapports, le général Dimitrijevic, était catégorique tout comme les

 18   autres membres de l'état-major général lorsqu'il a affirmé qu'il n'existait

 19   aucun plan visant à expulser les Albanais du Kosovo. Le général

 20   Dimitrijevic a nié l'existence d'un tel plan et ceci m'amène au dernier

 21   point que je souhaiterais aborder dans le cadre de ma plaidoirie, à savoir

 22   la raison pour laquelle les réfugiés ont quitté le Kosovo.

 23   Comme nous l'expliquons dans notre mémoire, aux pages 125 à 128, et

 24   comme il est également mentionné dans les mémoires des coaccusés, il existe

 25   un certain nombre d'explications possibles à ce fait si l'on examine les

 26   éléments de preuve du dossier. Premièrement, le fait que l'OTAN procédait à

 27   des bombardements et les menaces y afférentes. Deuxièmement, le fait qu'il

 28   existait des combats opposant les forces serbes et l'UCK et que ces combats

Page 27137

  1   allaient sans doute se poursuivre. Troisièmement, les actions menées par

  2   l'UCK afin de chasser les civils pour créer une crise humanitaire et à se

  3   servir de ces civils comme de boucliers contre les forces serbes. Et

  4   quatrièmement, le fait qu'il y ait eu des actes de haine, de vengeance ou

  5   motivés par des mobiles peu glorieux.

  6   Il existe des éléments de preuve au dossier dont nous parlons dans

  7   nos mémoires en clôture permettant d'étayer ces quatre explications

  8   possibles. Pour ce qui est du général Ojdanic, il est manifeste que ce

  9   dernier pensait tout comme les autres membres de l'état-major général que

 10   c'était l'UCK et non pas les forces serbes qui étaient responsables de

 11   l'exode des Albanais de souche hors du Kosovo. Dès le 4 mars 1999, avant la

 12   guerre, le général Dimitrijevic a fait rapport à la direction collégiale

 13   pour indiquer que des éléments de renseignements avaient été reçus

 14   concernant les activités très organisées de l'UCK qui cherchaient à

 15   déplacer les civils pour créer une crise humanitaire et provoquer une

 16   réaction de la communauté internationale. P933, page 9.

 17   Les débats tenus au sein de la direction collégiale le 9 avril 1999

 18   sont particulièrement importantes pour comprendre ce que le général Ojdanic

 19   savait de l'exode de la population du Kosovo. Le général Krga, chargé de la

 20   division du renseignement, a décrit cet exode comme "le retrait planifié de

 21   l'UCK et des Siptar hors du Kosovo-Metohija ce qui a créé une situation

 22   humanitaire très difficile." Page 5 de la réunion de la direction

 23   collégiale qui constitue la pièce P929.

 24   Le colonel Gajic de l'administration chargée de la sécurité a déclaré

 25   lors de cette même réunion "qu'après avoir anéanti," je

 26   cite : "Les forces terroristes au Kosovo, certains éléments avaient réussi

 27   sans doute de manière planifiée à se replier vers l'Albanie et la Macédoine

 28   et le Monténégro." Il avait prévu que les terroristes contraindraient les

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  1   Albanais et les non-Albanais à quitter le Kosovo. Il poursuit en ajoutant,

  2   je cite : "Que l'ennemi mènera des activités planifiées visant à repousser

  3   les Siptar afin d'accuser l'armée et l'Etat de procéder à un nettoyage

  4   ethnique et à un génocide ce qui permettra de créer une situation

  5   permettant la conduite d'opérations de la part de l'OTAN contre nos

  6   forces." Pages 8 à 11 de la pièce P929.

  7   En réalité, les débats tenus au sein de la direction collégiale

  8   démontrent que l'état-major du commandement Suprême s'inquiétait d'une

  9   attaque terrestre de la part des forces terroristes qui s'étaient mêlées

 10   aux 400 000 réfugiés. Ils ont proposé de déclarer publiquement que les

 11   personnes non armées et réfugiés "ne pouvaient pas être manipulés," je

 12   cite, et que les réfugiés devaient être autorisés à rentrer à leurs

 13   domiciles. Pages 33 et 34 de la réunion de la direction collégiale tenue le

 14   9 avril 1999, pièce P929.

 15   Ce même jour, à savoir le 9 avril 1999, le général Ojdanic a émis une

 16   directive où il était dit que l'armée s'attendait à une infiltration de

 17   l'UCK sous prétexte de garantir le retour des réfugiés, il convenait

 18   d'accueillir les réfugiés à la frontière, d'organiser leur accueil, l'armée

 19   devait apporter son concours aux autres instances du gouvernement pour que

 20   l'on s'occupe des réfugiés, il fallait empêcher que l'UCK se mêle aux

 21   réfugiés et s'infiltre ainsi sur le territoire et il fallait que l'ennemi

 22   soit traité conformément aux dispositions pertinentes du droit

 23   international humanitaire. Pièce P1281.

 24   Il est manifeste qu'à la date du 9 avril 1999, au niveau de l'état-

 25   major du commandement Suprême, le déplacement des réfugiés était considéré

 26   comme une tactique de l'UCK visant à obtenir le soutien de la communauté

 27   internationale. On considérait que ceci allait à l'encontre des intérêts de

 28   l'armée, que le retour des réfugiés n'était pas -- et devait être facilité.

Page 27139

  1   On ne peut pas dire qu'il s'agisse là d'une entreprise criminelle commune

  2   visant à expulser les Albanais du Kosovo.

  3   Souvenons-nous également de l'annonce faite par le général Ojdanic le

  4   7 avril 1999, à savoir le jour où les Serbes ont déclaré unilatéralement un

  5   cessez-le-feu, encourageant ainsi les réfugiés à rentrer chez eux. Nous en

  6   parlons au paragraphe 263.I de notre mémoire. Il est intéressant de noter

  7   que dans le cadre des arguments présentés en application de l'article 98

  8   bis, M. Hannis a dit la chose suivante s'agissant des réfugiés, page 12 594

  9   du compte rendu d'audience, je cite : "Nous ne disons pas que certaines de

 10   ces personnes ne sont pas parties en raison des bombardements. Nous

 11   n'affirmons pas que certaines de ces personnes n'ont pas quitté leurs

 12   villages car l'UCK leur a dit, mais ce que nous disons c'est qu'un juge

 13   raisonnable du fait peut raisonnablement conclure, au-delà de tout doute

 14   raisonnable, que ces personnes sont parties en raison des actions violentes

 15   qui étaient menées et de la force exercée par la police serbe et la VJ."

 16   Allons dans le sens de M. Hannis et partons de l'idée que la fuite

 17   des réfugiés était due en partie aux actions menées par les forces serbes.

 18   Bien entendu, il appartient à l'Accusation de prouver que ces expulsions

 19   étaient le résultat d'un plan, d'une entreprise criminelle commune visant à

 20   modifier la composition ethnique au Kosovo. Or, si l'on examine le

 21   comportement du général Ojdanic avant la guerre, nous ne trouvons aucune

 22   élément permettant d'attester d'une quelconque intention de participer à

 23   une entreprise criminelle commune visant à expulser les Albanais du Kosovo.

 24   Le général Ojdanic savait, tout du moins en 1997, comme il ressort de

 25   ses interventions devant la direction collégiale, que la manière la plus

 26   courte et la plus rapide de perdre le Kosovo était de faire la guerre.

 27   Comme il l'a dit lors de la réunion du 29 juin 1998, pièce P927, je cite :

 28   "Je considère personnellement que la diplomatie et la politique est la

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  1   seule solution. Je suis fermement convaincu de cela en tant que soldat.

  2   Quiconque pense que le monde nous autorisera à régler le problème du

  3   Kosovo-Metojiha par la force se voile la face."

  4   Dans le droit fil de ce qui vient d'être dit lors de la réunion du 10

  5   avril, alors qu'il était adjoint au chef d'état-major, le général Ojdanic a

  6   fait ces commentaires très intéressants, pièce 3D657, pages 1 et 2. Je

  7   souhaiterais que l'on affiche cela à l'écran.

  8   Il s'agit de commentaires très intéressants et je vous rappelle cela

  9   en rapport avec la question posée par le Juge Bonomy à Mme Kravetz, mardi

 10   dernier. Est-ce qu'ils pensaient vraiment qu'ils pouvaient vaincre l'OTAN

 11   et chasser tous les Albanais du pays ? Alors les propos que nous voyons

 12   repris ici sont-ils ceux d'un homme qui souhaitait faire la guerre,

 13   expulser les Albanais du Kosovo sous le prétexte fallacieux d'un

 14   bombardement de l'OTAN ? Est-ce qu'il s'agit là des propos tenus par un

 15   homme qui veut se servir de la guerre pour œuvrer à la réalisation d'une

 16   entreprise criminelle commune ? Non, voilà ce qu'a dit le général Ojdanic,

 17   je cite : "Je ne vais pas me pencher sur les rouages de la politique

 18   internationale. Je vais vous donner mon évaluation de la situation, à

 19   savoir que la RSFY ne gardera pas le Kosovo en faisant la guerre. Nous

 20   devons trouver des solutions politiques et diplomatiques. Sinon, nous, en

 21   tant que peuple, en tant qu'Etat, allons droit à la catastrophe.

 22   "Je souhaiterais parler de l'évolution possible de la situation au

 23   Kosovo. Je pense qu'à l'avenir les Albanais continueront à exercer des

 24   pressions par le biais d'activités terroristes car cela a donné des

 25   résultats jusqu'à présent. Ces activités vont petit à petit s'intensifier,

 26   le but étant qu'elles deviennent si intenses que le MUP ne puisse plus y

 27   faire face, le MUP étant la seule force compétente et internationalement

 28   reconnue…"

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  1   Nous avons un problème à l'écran. C'est la raison pour laquelle d'habitude

  2   je ne me sers pas de ces techniques modernes.

  3   M. LE JUGE BONOMY : [aucune interprétation]

  4   M. SEPENUK : [interprétation] "Une situation ainsi imposée, d'après moi,

  5   serait perfide et le but recherché serait de contraindre la République

  6   fédérale de Yougoslavie d'engager l'armée yougoslave pour détruire les

  7   groupes terroristes. Une telle décision prise par la République fédérale de

  8   Yougoslavie donnerait aux Albanais le droit de s'opposer aux forces de la

  9   VJ et du MUP avec toute la puissance dont il dispose. En termes pratiques,

 10   cela constituerait une insurrection armée de notre point de vue, cela ne

 11   serait pas considéré comme tel par la communauté internationale. Ainsi ils

 12   pourront légaliser cette rébellion armée.

 13   "Je suis convaincu que si nous devions nous engager dans une telle

 14   activité, la communauté internationale ne va pas rester là sans rien faire,

 15   mais fera tout ce qui est en son pouvoir pour protéger les Albanais malgré

 16   tout ce que nous devrons subir pour survivre. En ce qui concerne l'armée

 17   yougoslave, je pense que la décision d'engager l'armée yougoslave pour

 18   combattre contre les groupes terroristes serait une décision importante et

 19   difficile. Nous savons combien d'entre eux sont là, leur puissance, nous

 20   savons quelles tactiques il faut appliquer pour les détruire et les forces

 21   qu'il faut engager pour les anéantir. Impliquer l'armée yougoslave pour

 22   détruire les groupes terroristes serait les condamner. Cela voudrait dire

 23   la guerre."

 24   Ces commentaires ont été faits le 10 avril 1998 alors que le général

 25   Ojdanic était adjoint au chef d'état-major.

 26   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais en quoi tout cela est pertinent

 27   par rapport aux événements de l'été 1998 ?

 28   M. SEPENUK : [interprétation] Ce qui s'est passé c'est que le général

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  1   Ojdanic a parlé de l'intensification des activités de l'UCK qui a réoccupé

  2   les zones précédemment occupées. On a considéré qu'il a été nécessaire

  3   d'avoir recours à la VJ. Le général Ojdanic a vu qu'on était au bord du

  4   désastre, mais comme le MUP ne pouvait pas faire face seul à la situation,

  5   la VJ devait être utilisée. Même le colonel Crosland l'a reconnu, et ce, en

  6   raison de l'intensification des activités de l'UCK. C'est la raison pour

  7   laquelle j'ai dit que le général Ojdanic avait fait des commentaires très

  8   intéressants.

  9   Et voilà ce qu'il dit en avril 1998 -- tout ce qu'il a dit, en fait, s'est

 10   réalisé. Il avait prévu tout cela. Il savait qu'une guerre au Kosovo était

 11   futile et qu'on ne pouvait pas la gagner. Le général Ojdanic a donc fait

 12   tout ce qui était en son pouvoir pour s'assurer que la guerre n'allait pas

 13   avoir lieu et il pensait qu'il fallait utiliser de façon limitée et modérée

 14   l'armée. Sinon, cela conduirait à la guerre, et tout comme le fait de ne

 15   pas coopérer avec la MVK, à les conduire au bombardement de l'OTAN et à la

 16   guerre.

 17   Et je dirais que le comportement du général Ojdanic avant la guerre était

 18   en rapport avec les menaces constituées par l'UCK et l'OTAN, l'armement des

 19   civils, l'amassement des troupes au printemps 1999. Le comportement du

 20   général Ojdanic pendant toute la période précédant la guerre est le

 21   comportement de quelqu'un d'innocent. La conclusion de l'Accusation selon

 22   laquelle le général Ojdanic était membre d'une entreprise criminelle

 23   commune visant à expulser les Albanais du Kosovo n'est pas la seule

 24   conclusion raisonnable à laquelle on peut parvenir sur la base des éléments

 25   de preuve.

 26   M. O'SULLIVAN : [interprétation] A plusieurs reprises, Me Sepenuk a utilisé

 27   le terme "lest" en anglais et non pas "less." Page 24, lignes 11 à 13.

 28   Parfois, ça change la signification de la phrase.

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  1   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donnez-moi un exemple. Page 24.

  2   M. O'SULLIVAN : [interprétation] Page 24, lignes 11 à 13. Cela peut semer

  3   la confusion dans les esprits.

  4   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je suis sûr que cela sera corrigé.

  5   M. VISNJIC : [aucune interprétation]

  6   M. LE JUGE BONOMY : [aucune interprétation]

  7   M. SEPENUK : [interprétation] Nous avons passé dans les pages 1 à 100 de

  8   notre mémoire, nous indiquons que le bureau du Procureur n'a pas présenté

  9   d'éléments de preuve indirects visant à prouver qu'il existait bel et bien

 10   un plan visant à expulser les Albanais du Kosovo avant la guerre et pendant

 11   celle-ci. Comme nous l'avons indiqué dans notre mémoire, chaque membre de

 12   l'état-major général ayant déposé au procès a catégoriquement réfuté qu'il

 13   existait un tel plan. Tout ce que M. Hannis a pu faire hier, c'est indiquer

 14   que tous les officiers qui ont témoigné avaient une raison de mentir, ou

 15   n'étaient pas informés.

 16   Bien entendu, ce sont vous, les Juges de la Chambre, qui devez en

 17   dernier lieu statuer sur la crédibilité des témoins, et nous ne connaîtrons

 18   votre point de vue sur la question qu'au moment où le jugement sera rendu.

 19   Cependant, je note que le seul officier de l'état-major général dont la

 20   crédibilité a sérieusement été remise en doute n'a pas été contesté par le

 21   bureau du Procureur, mais par le Juge Bonomy. Je vous renvoie à l'échange

 22   entre le Juge Bonomy et le général Obradovic, assistant au chef des

 23   opérations auprès de l'état-major général le 6 septembre 2007, pages 15 162

 24   à 15 165 du compte rendu d'audience. Alors voilà, le Juge Bonomy a posé des

 25   questions au témoin. Ce dernier esquivait les questions et heureusement Mme

 26   le Juge Kamenova est intervenue à la page 15 164. Voilà ce qui est dit dans

 27   le compte rendu d'audience.

 28   Me Visnjic et moi-même, nous nous souvenons bien du fait que le Juge Bonomy

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  1   s'est entretenu avec le Juge Kamenova. Nous nous en souvenons comme si

  2   c'était hier, car nous aussi étions assez frustrés de ce qui se passait et

  3   du fait que le général Obradovic refusait de répondre directement, qu'il

  4   éludait la question. La Juge Kamenova, qui comprend le serbe, a indiqué

  5   sans doute au Juge Bonomy qu'il y avait un problème de traduction dans un

  6   document, et que c'était la source du problème. Mais aucun de mes confrères

  7   n'a relevé cette erreur. Pourtant, le Juge Kamenova l'a relevée. Je me

  8   souviens en tout état de cause qu'il y avait un problème, mais si le Juge

  9   Kamenova n'était pas intervenue le problème aurait été pire. Vous n'étiez

 10   pas satisfait de la réponse du témoin. Le Juge Kamenova a

 11   dit : "Non, c'est simplement un problème de traduction. Il n'y a pas de

 12   problème." Finalement, le président de la Chambre en a convenu. Là encore,

 13   tout cela pour dire qu'il est facile de se tromper. Donc inutile de tirer

 14   des conclusions hâtives comme l'a fait le bureau du Procureur en l'espèce

 15   lorsqu'il a porté des jugements erronés sur le général Ojdanic.

 16   En tout état de cause, comme je l'ai dit, tous les membres de l'état-

 17   major général qui ont témoigné au procès ont catégoriquement réfuté qu'il

 18   existait un plan visant à expulser les Albanais du Kosovo, et aucun plan de

 19   la sorte n'est mentionné dans les nombreux documents présentés par la

 20   Défense d'Ojdanic, notamment dans les réunions de la direction collégiale

 21   de l'état-major général, les réunions quotidiennes de l'état-major général,

 22   les rapports de combat de la 3e Armée, les rapports de combat de l'état-

 23   major du commandement Suprême, et les rapports de l'administration chargée

 24   de la sécurité, tous joints en annexe à notre mémoire.

 25   Il n'existe aucun élément de preuve, aucun témoignage indiquant que le

 26   général Ojdanic a jamais exprimé son accord, a jamais eu vent ou a jamais

 27   participé ou aidé ou encouragé la moindre entreprise criminelle commune, la

 28   moindre opération ayant pour objectif d'expulser les Albanais du Kosovo.

Page 27146

  1   L'Accusation n'a pas prouvé sa thèse pour ce qui est de la responsabilité

  2   individuelle du général Ojdanic en application de l'article 7(1).

  3   Avant de parler de la responsabilité du commandement du général Ojdanic, je

  4   souhaiterais répondre brièvement aux commentaires présentés par M. Stamp

  5   concernant les rapports des Dr Ball et Fruits. J'ai entendu la critique

  6   concernant l'expertise du Dr Fruits, mais lorsque le Dr Ball a dit "le

  7   culte de la vache morte" lors d'une convention à Las Vegas, lorsqu'il a dit

  8   que nous avons entendu un applaudissement lorsque le président Slobodan

  9   Milosevic a été extradié [phon] à La Haye, et c'est ce qui figure au

 10   transcript à la page 10 273.

 11   Le Dr Ball a affirmé qu'il n'avait aucune donnée dans son rapport

 12   concernant les activités des forces serbes. Ce fait, d'après le Dr Fruits,

 13   a éliminé la possibilité de conclure du point de vue statistique que les

 14   forces serbes étaient responsables de la migration et des morts au Kosovo.

 15   Je n'ai rien entendu dire de l'Accusation pour contredire cette affirmation

 16   du Dr Fruits.

 17   Le Dr Fruits a également dit qu'il y avait des lacunes concernant les

 18   données s'agissant des attaques de l'UCK et des bombardements aériens de

 19   l'OTAN. Le Dr Fruits a noté qu'il y avait au moins dix bombardements de

 20   l'OTAN les 3 et 4 avril 1999, alors que le Dr Ball, selon ses données, nous

 21   dit qu'il n'y avait que deux bombardements aériens ces jours-là. Les

 22   données du Dr Fruits parlent au moins de six dates lorsque des

 23   bombardements aériens ont eu lieu, alors que le Dr Ball nous dit qu'il n'y

 24   avait pas du tout de bombardements aériens. Je ne suis pas tout à fait

 25   surpris que l'on puisse considérer que le Dr Ball n'a pas fait d'effort

 26   pour obtenir de l'information s'agissant des bombardements aériens de

 27   l'OTAN, et ne soit pas allé chercher ces informations auprès de l'OTAN

 28   même. Il a essayé d'obtenir les données concernant les bombardements de

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  1   l'OTAN du département d'Etat des Etats-Unis, département de la Défense, en

  2   faisant un appel téléphonique. Mais il n'a pas fait d'autres efforts. Je

  3   n'ai rien entendu de la part de l'Accusation pour contredire ce témoignage

  4   du Dr Fruits.

  5   En dernier lieu, M. Stamp a essayé de critiquer le Dr Fruits, parce qu'il

  6   dit qu'il n'a pas fait tout ce qu'il a pu pour obtenir les données précises

  7   concernant les bombardements aériens. M. Stamp excuse le Dr Fruits d'avoir

  8   donné une réponse un peu désinvolte en disant que ça lui aurait pris

  9   simplement quelques jours pour rédiger ce rapport. Le fait de citer le Dr

 10   Fruits dans cette affaire est simplement inapproprié.

 11   Mais je souhaiterais maintenant parler du comportement du général Ojdanic

 12   pendant la guerre et de sa responsabilité de commandement au sein de la VJ

 13   en tant que chef d'état-major au cours des 78 jours de la guerre.

 14   Avant d'analyser toutefois la responsabilité du commandement du général

 15   Ojdanic et des forces de la VJ, nous affirmons que les forces du MUP n'ont

 16   pas été subordonnées à la VJ pendant la guerre au Kosovo. C'est un fait

 17   qu'accepte le bureau du Procureur dans son mémoire en clôture, car il

 18   n'indique à aucun moment donné qu'une subordination ait eu lieu. Plutôt, le

 19   bureau du Procureur adopte une nouvelle position disant que - et cela

 20   figure au paragraphe 246 - "Lorsque l'état de guerre a été déclaré le 24

 21   mars 1999, on ne s'est pas complètement conformé à la subordination

 22   complète et totale aux effectifs de la VJ afin d'effectuer des opérations

 23   de combat. Plutôt, les unités du MUP se sont engagées dans des activités de

 24   combat conjointes sur la base d'une décision du commandement conjoint." Le

 25   général Ojdanic n'avait pas de contrôle effectif du MUP, tel qu'il est

 26   établi dans notre mémoire en clôture aux paragraphes 454 à 478.

 27   Ce manque de contrôle effectif effectué par le MUP est également vrai pour

 28   dire que les autres forces paramilitaires du Kosovo n'étaient pas

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  1   subordonnées aux forces de la VJ, alors que le bureau du Procureur, au

  2   paragraphe 110 de son mémoire, affirme que les unités du MUP étaient

  3   élargies avec des unités et des formations paramilitaires est en fait une

  4   absence de toute indication d'un lien qui pouvait exister entre les forces

  5   de la VJ et les paramilitaires.

  6   Mais il faudrait également dire que le général Ojdanic ni l'état-major

  7   principal ne savait que des crimes avaient été commis, les rapports

  8   concernant les crimes ayant été commis par le MUP devaient être envoyés au

  9   ministère de l'Intérieur et de cette chaîne de commandement-là, ce qui

 10   présente un système complètement indépendant de rapports.

 11   Dans son rapport d'expert militaire, à la pièce 3D1176 [comme

 12   interprété], au paragraphe 134, à la page 121, le général Radinovic affirme

 13   qu'à la suite de son examen de tous les documents pertinents s'agissant des

 14   éléments de preuve, aucun crime de guerre commis par le MUP n'a été

 15   rapporté à l'état-major principal de la VJ.

 16   Une lettre alléguée qui aurait été envoyée au général Pavkovic par

 17   l'état-major principal le 25 mai 1999 et qui parle de crimes graves commis

 18   par les forces du MUP n'a jamais été reçue par le général Ojdanic ni aucun

 19   autre membre de l'état-major principal. D'autres détails concernant

 20   l'authenticité de cette lettre, la pièce P1459, figurent aux paragraphes

 21   242 à 249 de notre mémoire en clôture.

 22   Excusez-moi, on vient de me dire que je parle trop rapidement, donc

 23   je vais ralentir. Désolé.

 24   Maintenant, pour revenir aux questions relatives à la responsabilité du

 25   commandement du général Ojdanic, son commandement sur les forces de la VJ.

 26   La seule question qui doit être établie c'est l'établissement d'un lien

 27   supérieur subordonné. Le seuil minimal pour reconnaître qu'un lien de

 28   subordonné supérieur existe est la capacité du supérieur d'effectuer un

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  1   contrôle effectif sur ses subordonnés, à savoir que "il faut qu'il y ait

  2   une capacité matérielle qui puisse exister pour prévenir ou empêcher les

  3   crimes commis par ses subordonnés." C'est axiomatique, puisque le général

  4   Ojdanic n'a pas eu la capacité matérielle pour prévenir ou punir le

  5   comportement criminel dont il n'avait pas connaissance.

  6   Maintenant, quels sont les éléments de preuve qui étaient connus du général

  7   Ojdanic concernant des crimes spécifiques qui figurent à l'acte

  8   d'accusation ? Nous affirmons qu'il n'avait aucune connaissance d'aucun

  9   crime.

 10   Vous avez entendu le témoignage du général Vasiljevic, que les brigades

 11   avaient une pratique générale, à savoir de soumettre des rapports de combat

 12   au Corps de Pristina, rapports de combat réguliers. Ensuite, le

 13   commandement du Corps condensait les informations dans un seul rapport qui,

 14   par la suite, était envoyé à la 3e Armée. Ensuite, la 3e Armée faisait une

 15   synthèse des rapports et les envoyait plus loin à l'état-major principal du

 16   commandement Suprême.

 17   Il n'y a absolument aucun élément de preuve qui pourrait nous indiquer que

 18   le général Ojdanic ou le commandement Suprême ait reçu quelque rapport

 19   quotidien que ce soit. Il n'y a aucun témoignage de personnes qui sont

 20   venues témoigner qui ait attiré l'attention du général Ojdanic que des

 21   crimes avaient été commis. Ceci est confirmé par le militaire expert, le

 22   général Radinovic, qui a dit dans son rapport que les rapports de combat de

 23   la 3e Armée ne contenaient absolument aucune information concernant des

 24   crimes, qu'ils ne faisaient pas du tout état d'un seul crime qui aurait été

 25   commis. Pièce 3D1116, paragraphes 330, page 202.

 26   Bien sûr, le fait que le général Ojdanic n'a pas reçu de rapports ne met

 27   pas fin à notre présentation, c'est-à-dire que le général Ojdanic aurait pu

 28   être tenu responsable en vertu de l'article 7 (3) s'il avait des raisons de

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  1   croire que des crimes avaient été commis par ses subordonnés et qu'il ait

  2   manqué à son obligation de prendre des mesures nécessaires et raisonnables

  3   pour empêcher et punir les auteurs de ces crimes.

  4   Je vais maintenant revenir à l'affirmation du bureau du Procureur, à savoir

  5   que le général Ojdanic savait ou avait des raisons de savoir qu'un crime

  6   allait être commis ou était commis par un subordonné. Maintenant, je vais

  7   me livrer au même exercice qu'a fait M. Fila hier, je vais y aller

  8   paragraphe par paragraphe. Ça va prendre un peu de temps, mais le bureau du

  9   Procureur se trompe tellement dans son mémoire que nous ne pouvons pas

 10   outrepasser ceci. Il faut absolument que nous informions les Juges de la

 11   Chambre de tous ces faits.

 12   La première affirmation du bureau du Procureur concernant ceci est que

 13   "Ojdanic savait que des milliers d'Albanais du Kosovo avaient été expulsés

 14   par la force du Kosovo," paragraphe 791. Bien sûr, ce qui est important ici

 15   c'est la phrase "expulsés par la force." Il n'y a absolument rien dans le

 16   mémoire du bureau du Procureur qui fait trait à une connaissance du général

 17   Ojdanic.

 18   Dans son mémoire, le bureau du Procureur fait référence à un briefing

 19   du 3 avril 1999 du commandement de l'état-major où le colonel Krga aurait

 20   dit que "L'OTAN a établi qu'il y avait 500 000 réfugiés," et suggère que

 21   des points de contrôle de réfugiés avaient été établis. En réponse

 22   maintenant au paragraphe 791, "Ojdanic a simplement dit 'Préparez des

 23   rapports sur les réfugiés.'" Laissant une impression complètement erronée

 24   que le général Ojdanic voulait simplement ignorer de façon cavalière

 25   l'existence du problème des réfugiés. Le bureau du Procureur, encore une

 26   fois, vous met sur une mauvaise piste lorsqu'il tire hors du contexte ces

 27   extraits.

 28   Le briefing de l'état-major du commandement Suprême dont fait

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  1   référence le bureau du Procureur s'est déroulé le 3 avril 1999. Cette

  2   réunion a commencé à 20 heures 30, pièce 3D721. Et juste une demi-heure

  3   plus tard, à 20 heures, le général Krga a présenté un rapport du

  4   renseignement, un briefing, à l'état-major, 3D911, disant que les

  5   représentants américains avaient dit qu'un protectorat "devait être établi

  6   sur les frontières albanaises pour vérifier le retour des Siptar albanais

  7   dans cette zone." Document 3D911, page 1.

  8   Le général Krga, dans son rapport du renseignement, dit également que

  9   "la nécessité d'établir un protectorat au KIM est également quelque chose

 10   de très important et que c'est quelque chose auquel il faut absolument

 11   procéder."

 12   Le rapport de Krga se termine avec la proposition de ce rapport, il a

 13   dit : "Afin d'éviter d'être démonisés dans les médias, je propose que nos

 14   organes se trouvant sur les frontières soient organisés pour réceptionner

 15   les réfugiés siptar qui retournent au KIM et que ceci devrait être rapporté

 16   dans les médias."

 17   C'est dans le cadre de ce contexte que le général Ojdanic a dit "préparez-

 18   vous de réfuter ces questions concernant les réfugiés," c'est dans ce

 19   cadre-là. Cette phrase du général Krga était tirée hors du contexte

 20   puisqu'il a dit à l'état-major principal qu'il fallait "préparez les points

 21   de contrôle."

 22   Maintenant, le bureau du Procureur n'a pas pu établir rien de plus concret

 23   lorsqu'il cite le témoignage du colonel Milan Novkovic qui était le

 24   commandant de l'état-major principal chargé de l'information et du moral

 25   chez qui le général Ojdanic s'était trouvé lorsqu'il a dit "préparez-vous

 26   de réfuter la question des réfugiés." C'est quelque chose que nous pouvons

 27   voir à la pièce 3D721 au point 2.

 28   Maintenant, j'aimerais vous citer le compte rendu d'audience

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  1   16269-77 [comme interprété] où le colonel Novkovic dit : "Nous n'allons pas

  2   nier le fait qu'il y a des réfugiés albanais."

  3   Mais comme le dit le colonel Novkovic, il dit : "C'est la raison pour

  4   laquelle nous avons pensé et c'est la raison pour laquelle c'était une

  5   décision du collège que quelqu'un devrait prendre la parole et dire quelle

  6   est la vérité en termes approximatifs en parlant de chiffres exacts."

  7   Il n'y a aucun doute que le général Ojdanic et l'état-major principal

  8   suivaient le problème de réfugiés. En fait, le bureau du Procureur a même

  9   fait référence à une séance de briefing le 12 mai 1998 [comme interprété]

 10   au sein de l'état-major dans lequel le général Krga dit : "Concernant le

 11   problème des réfugiés, ce problème est une question qui est abordée lors de

 12   toutes les conférences," au paragraphe 791.

 13   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Sepenuk, est-ce qu'il y a

 14   quelque élément de preuve, à savoir de ce qui est dit ou de quelles sont

 15   les réponses qui avaient été données à la suite de l'instruction "préparez-

 16   vous de nier l'existence des réfugiés" ?

 17   M. SEPENUK : [interprétation] Je ne crois pas, je ne le sais pas.

 18   De nouveau, concernant le sujet, à savoir si le général Ojdanic

 19   savait que des expulsions forcées avaient eu lieu de réfugiés, tel que le

 20   dit le bureau du Procureur au paragraphe 791 : "Un combat de rapport du

 21   Corps de Pristina du 31 mars 1999 dans lequel on voit que le MUP et les VTO

 22   dirigeaient les réfugiés siptar vers la République d'Albanie."

 23   Pour appuyer cette affirmation, le bureau du Procureur fait

 24   simplement référence à la pièce P2930, point 4, un rapport du groupe de

 25   commande du Corps de la Pristina qui fait état que des "réfugiés siptar"

 26   sont dirigés vers la République d'Albanie.

 27   Mais ce que le bureau du Procureur omet de mentionner c'est que ce

 28   rapport a été envoyé par le groupe de commandement du Corps de Pristina au

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  1   centre des Opérations du Corps de Pristina et que ce rapport n'avait pas

  2   été envoyé à l'état-major principal. C'est donc la raison pour laquelle le

  3   général Ojdanic ne l'a jamais vu. C'est bien ce qui démontre qu'il n'avait

  4   aucune connaissance de ceci. Toutefois, même s'il avait pu voir ce document

  5   à ce moment-là, ce document n'aurait pas sonné l'alarme. La raison pour

  6   laquelle ces réfugiés "ont été dirigés" c'était pour assurer leur sécurité.

  7   Goran Jevtovic, qui est le membre de la VJ ayant rédigé ce rapport en

  8   question, il s'agit de la pièce P2930, stipule que cette zone était remplie

  9   de mines et d'obstacles, qu'il y avait des unités prêtes à mener des

 10   activités de combat et qu'il était nécessaire, pour la sécurité des civils,

 11   de les diriger dans des lieux sûrs, vers des zones sûres. Pièce 5D1385,

 12   paragraphe 22.

 13   Cette protection et le bien-être des civils qui étaient dirigés à

 14   l'extérieur des zones qui étaient minées est corroboré par le témoignage du

 15   Dr Delic, transcript 19 306 à 307, et Halimi, transcript 4 492. En fait,

 16   c'est que le bureau du Procureur simplement tire quelques phrases du

 17   rapport général et omet de peindre la situation complète.

 18   Maintenant ayant omis d'établir que le général Ojdanic avait eu

 19   connaissance que des Kosovars albanais avaient été expulsés par la force,

 20   le bureau du Procureur maintenant affirme une autre chose c'est que

 21   "Ojdanic savait que des crimes avaient été commis au Kosovo." Paragraphe

 22   792.

 23   Le bureau du Procureur établit huit exemples concernant la

 24   connaissance du général Ojdanic, à savoir que des crimes avaient été commis

 25   et conclut au paragraphe 793 que malgré sa connaissance des crimes commis

 26   Ojdanic, et je cite : "N'a pris aucune action concrète, n'a rien fait de

 27   concret."

 28   Nous allons maintenant examiner chacun de ces huit incidents, un par

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  1   un, pour vous démontrer à quel point ceci est erroné.

  2   Le bureau du Procureur prétend que "Le 3 avril 1999 au cours d'un

  3   briefing de l'état-major, Krga avait fait rapport des problèmes concernant

  4   le pillage et que 32 volontaires de la 175e Brigade d'infanterie avaient

  5   été renvoyés." En fait, c'est le colonel Gajic qui avait fait ce rapport et

  6   non pas Krga. Tel que nous pouvons le voir dans la pièce 3D721, ces

  7   volontaires qui avaient été renvoyés, avaient été bel et bien renvoyés du

  8   Kosovo. Dans cette même réunion de l'état-major principal du 3 avril 1999,

  9   le général Ojdanic répond à cet incident concernant le pillage par les

 10   volontaires et dit, je cite : "Le commandement du 3e Corps d'armée doit

 11   expliquer pourquoi ces 32 étaient ensemble et non pas répartis dans les

 12   unités." 3D721, page 2.

 13   Le fait de diviser des volontaires et de ne pas leur permettre de

 14   servir au sein de la VJ en tant que groupe était en conformité avec les

 15   ordres du général Ojdanic concernant l'admission des volontaires tel que

 16   nous l'avons expliqué dans notre mémoire aux paragraphes 269 à 271.

 17   De plus, le témoignage de Gajic qui a été cité mais non pas expliqué

 18   par le bureau du Procureur, 15 332 à 33 --

 19   Je vais ralentir. Les interprètes m'avisent. J'espère que c'est la dernière

 20   fois que l'on m'avise de ralentir. Je vais vraiment faire de mon mieux pour

 21   essayer de ralentir mon débit. Désolé.

 22   Dans tous les cas, le témoignage de Gajic confirme que ces hommes qui

 23   avaient commis ces crimes avaient été arrêtés et avaient été trouvés

 24   coupables alors que les autres membres ou le restant de l'unité avait été

 25   renvoyé du Kosovo-Metohija. Alors voilà de ce qui est de cette affirmation

 26   du bureau du Procureur qui se trouve au paragraphe 793 de leur mémoire

 27   visant à dire que : "Ojdanic n'a pas pris d'action concrète."

 28   Le prochain exemple qui est cité par le bureau du Procureur du "5 avril

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  1   1999, au cours d'une session de briefing de l'état-major principal, le

  2   colonel Gajic a dit que 'des bandes se livraient à des vols et pillaient la

  3   population locale au Kosovo.'" Mais ceci ne veut pas dire que c'est une

  4   négation qui de façon réaliste pouvait nous dire qu'il s'agissait de forces

  5   de la VJ lorsqu'on parle de "bandes" ni du MUP ni de paramilitaires ou de

  6   civils hors de tout contrôle agissant de leur propre chef, outre le fait

  7   qu'un système de justice militaire avait été établi par le général Ojdanic

  8   et la VJ pour arrêter les auteurs des crimes.

  9   La prochaine affirmation du bureau du Procureur est la suivante, je cite :

 10   "Au mois d'avril 1999, les organes de sécurité du Corps de Pristina avaient

 11   reçu un rapport du MUP relatif à l'exécution de 20 civils à Mali Alas au

 12   mois d'avril 1999, selon ce rapport ça aurait été commis par la 252e

 13   Brigade blindée. Le chef de la sécurité du Corps de Pristina avait fait ce

 14   rapport à Vasiljevic."

 15   Mais ce que le bureau du Procureur omet de mentionner c'est que Vasiljevic

 16   n'a pas appris le meurtre de ces civils ou en fait n'a appris de

 17   l'existence du meurtre de ces civils qu'au début du mois de mai 1999

 18   lorsqu'il a été au Kosovo. Et le général Vasiljevic et le général Ojdanic

 19   n'avaient pas connaissance de ceci à l'époque.

 20   Et ce que le bureau du Procureur n'a pas non plus mentionné c'est que cette

 21   affaire a été transférée à une cour civile. Ceci nous avait été expliqué

 22   dans le témoignage d'un témoin Mladenovic qui a dit qu'à la suite d'une

 23   enquête menée par le procureur militaire, il a été décidé qu'aucun

 24   personnel, aucun membre militaire n'avait pris part à ces meurtres, mais

 25   que c'était plutôt des meurtres commis par des civils de cette région.

 26   Transcript 21 260 à 21 261.

 27   La prochaine affirmation du bureau du Procureur, et je cite

 28   que : "Le 18 avril 1999, au cours d'une session de briefing de l'état-major

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  1   principal, Gajic avait fait part de viol commis par la 52e Brigade de

  2   défense aérienne d'artillerie et de roquettes et que des pillages avaient

  3   eu lieu à Djakovica."

  4   On parle de cette affaire au paragraphe 261, mais en fait ce que le bureau

  5   du Procureur omet de dire, c'est que les personnes avaient été emprisonnées

  6   et qu'un procès avait eu lieu contre les auteurs de ces crimes.

  7   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Oui, mais la note en bas de page nous

  8   dit qu'il y a eu un procès.

  9   M. SEPENUK : [interprétation] Oui, effectivement, mais la façon dont ceci a

 10   été présenté par le bureau du Procureur n'a pas été très clair. Oui,

 11   effectivement, il y a une note en bas de page, mais je crois que cette

 12   phrase aurait dû figurer - en fait, que ceci aurait dû figurer dans le

 13   texte.

 14   La prochaine affirmation du bureau du Procureur est que, je cite : "Le 26

 15   avril 1999, autour de cette date, le commandement Suprême a reçu une

 16   requête par le Corps de Pristina d'exhumer des corps qui se trouvaient

 17   enfouis dans des fosses à Kosovo. Lazarevic a dit que c'étaient des membres

 18   de l'armée qui étaient responsables de ces crimes." 

 19   Tout ce que nous pouvons dire c'est qu'on a envoyé une personne médico-

 20   légale pour exhumer les corps mais ceci nie la possibilité que quelqu'un

 21   ait essayé de faire un plan pour essayer de cacher ou de dissimuler ces

 22   meurtres et qu'on a admis, bien sûr, que c'étaient les membres de la VJ qui

 23   étaient responsables de ceci.

 24   La prochaine affirmation du bureau du Procureur est : "Qu'au début du mois

 25   de mai 1998 [comme interprété], l'administration de la sécurité de la VJ

 26   avait été informée que des crimes avaient été commis au Kosovo et que des

 27   groupes de volontaires étaient présents sur place. Farkas a inspecté les

 28   organes de sécurité au Kosovo entre le 5 et 6 mai 1999, et à son retour a

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  1   fait un rapport à Ojdanic lui disant que des crimes avaient été bel et bien

  2   commis au Kosovo et qu'on n'a pas fait état de ces crimes au commandement

  3   de l'état-major et qu'il y avait, bien sûr, des vols, des pillages et des

  4   viols."

  5   Bien sûr, ce que le bureau du Procureur omet de dire c'est que Farkas

  6   avait été envoyé au Kosovo par le général Ojdanic au début du mois de mai,

  7   plus particulièrement pour enquêter sur les problèmes dont il avait pris

  8   connaissance. Les éléments de preuve nous permettent de dire que le général

  9   Ojdanic a réagi de façon très forte lorsqu'il a entendu dire que les crimes

 10   avaient été faits et des mesures proactives étaient faites pour découvrir

 11   d'autres crimes commis au cours des semaines qui ont suivi, y compris

 12   surtout lors des réunions qui ont eu lieu avec le général Pavkovic, le

 13   président Milosevic et d'autres. Cette question était abordée dans notre

 14   mémoire aux paragraphes 334 à 352.

 15   La prochaine affirmation du bureau du Procureur est, je cite, que : "Le 6

 16   mai 1999, l'état-major principal et le service chargé du renseignement

 17   auraient informé le général Clark 'qu'une situation existait disant que la

 18   VJ continue de procéder au nettoyage ethnique au Kosovo.'"

 19   Mais maintenant, le général Clark – il est très bien difficile de

 20   comprendre ce que le bureau du Procureur voulait dire - c'est comme s'ils

 21   essayaient de dire que le général Clark, l'ennemi, en fait, au mois de mai

 22   1999 ne savait pas ce qui se passait, et j'espère que nous avons pu

 23   démontrer que le bureau du Procureur a omis de prouver ceci au paragraphe

 24   791.

 25   La dernière allégation du bureau du Procureur est que : "Le

 26   8 mai 1998 [comme interprété] le lieutenant-colonel Stevan Dujrovic,

 27   l'adjoint de la sécurité du Corps de Pristina, a rencontré Vasiljevic à

 28   Belgrade et l'a informé des crimes qui avaient été commis contre les civils

Page 27159

  1   par les militaires. On parlait ici de viols et de deux meurtres. Vasiljevic

  2   lui a donné l'instruction de préparer un rapport.

  3   Ces faits sont analysés au paragraphe 339 de notre mémoire. Dans la partie

  4   de notre mémoire, on voit que le général Ojdanic commence à recevoir toute

  5   une série d'informations en mai 1999, au sujet de crimes qui n'ont pas fait

  6   l'objet de plaintes ou de rapports. Il est question à ce moment-là des

  7   mesures qu'il a prises, des mesures actives qu'il a prises pour remédier à

  8   ces défaillances. Vasiljevic déclare qu'il avait eu l'impression que

  9   c'était la première fois que le général Ojdanic entendait parler de ces

 10   crimes.

 11   Ce fait, nous le développons abondamment dans notre mémoire, et ce fait,

 12   c'est que le général Ojdanic n'a pas reçu d'information complète au sujet

 13   des activités de la VJ sur le terrain au Kosovo. Soyons plus précis. Le

 14   général Ojdanic n'avait pas connaissance des crimes commis à une grande

 15   échelle ou des crimes qui allaient être commis. Il n'avait pas suffisamment

 16   de connaissance de ces faits pour qu'on puisse dire qu'il en était informé

 17   et qu'il avait l'obligation d'enquêter. Le fait qu'il n'ait pas été informé

 18   des crimes supposément commis par les forces de la VJ, ceci est détaillé

 19   aux paragraphes 256 à 262 de notre mémoire en clôture.

 20   On voit, par exemple, que les généraux Curcin et Simic, ainsi que le

 21   colonel Ivkovic, parmi d'autres au sein de l'état-major de la VJ, ont

 22   déclaré, lors de leurs dépositions, que le commandement Suprême n'était pas

 23   informé de violations massives du droit humanitaire international, mais ont

 24   simplement reçu des informations relatives à des activités criminelles

 25   isolées et non organisées, commises par des soldats individuels. Il

 26   s'agissait d'activités et d'agissements criminels qui avaient été élucidés

 27   avec réussite, pièce 3D1121, paragraphe 27. Pièce 3D1089, paragraphe 11.

 28   Pièce 3D1117, paragraphes 13 et 27.

Page 27160

  1   Le texte de tous les rapports de la déclaration collégiale, les rapports de

  2   combat du commandement Suprême, les rapports quotidiens, les rapports de

  3   l'administration chargée de la sécurité et les rapports de la 3e Armée sont

  4   en annexe de notre mémoire. Quand on examine ces éléments documentaires

  5   extrêmement conséquents, on voit qu'il n'y a aucun exemple de cas où le

  6   général Ojdanic aurait eu connaissance des crimes contre l'humanité commis

  7   à grande échelle au Kosovo. Au contraire, conformément aux témoins que vous

  8   avez entendus ici, à ce que nous ont dit ces témoins, si on examine les

  9   rapports de combat de 3e Armée et du Corps de Pristina, on voit que l'état-

 10   major du commandement Suprême était informé de manière générale de la

 11   perpétration de certains crimes au Kosovo, et on l'assurait de manière

 12   systématique que ces crimes faisaient l'objet des mesures adéquates de la

 13   part des organes de la justice militaire.

 14   Puisque nous en sommes en train de parler des crimes commis à grande

 15   échelle, je voudrais faire une petite digression et parler du paragraphe

 16   221 du mémoire du général Pavkovic. Dans ce mémoire et dans ce paragraphe,

 17   il est question d'un article du journal Politika en date du 5 mai 1999,

 18   pièce 4D406. Dans cet article, il est question de crimes extrêmement graves

 19   et nombreux commis au Kosovo. Il est question de l'arrestation de plusieurs

 20   centaines de criminels et de prononcer de nombreuses peines allant de cinq

 21   à 20 ans d'emprisonnement pour ces crimes. C'est ce qu'on peut lire dans le

 22   mémoire de Pavkovic.

 23   La Défense Ojdanic, dans des écritures déposées le 15 novembre 2007, ont

 24   présenté des objections à plusieurs titres contre le versement de cet

 25   article de presse directement par les conseils de la Défense. Une des

 26   objections qui a été faite, c'est le manque de fiabilité d'un article de

 27   presse. La Défense Ojdanic a indiqué que lorsqu'il s'agit de crimes de

 28   guerre, les éléments de preuve les plus convaincants, ce sont les rapports

Page 27161

  1   de combat du 3e Armée, et la Défense a également ajouté que la teneur même

  2   de cet article avait été réfutée par le général Radomir Gojevic lors de sa

  3   déposition, lui qui était l'officier juriste en chef de l'état-major

  4   général, surtout en ce qu'il s'agit des crimes commis à grande échelle et

  5   des peines très longues prononcées.

  6   Dans la décision rendue par la Chambre de première instance le 28 novembre

  7   2007, paragraphe 6, pièce 4D406, il a été établi que les articles de presse

  8   ne peuvent être versées au dossier pour prouver l'exactitude de leur

  9   contenu. Nous avançons donc que la Chambre ne doit pas tenir compte du

 10   paragraphe 221 du mémoire de Pavkovic.

 11   J'ajouterais que cet article n'est donc pas recevable pour prouver la

 12   véracité des faits qu'il présente. Vous vous souviendrez que la Défense

 13   Ojdanic n'a pas eu d'objection quant à la recevabilité de cet article pour

 14   montrer que ces faits avaient été portés à la connaissance des intéressés

 15   et que la MUP avait pris des mesures au sujet de ces crimes. On le voit

 16   dans la déposition du témoin Mijatovic, pages 22 547 à 549 du compte rendu

 17   d'audience.

 18   Le Juge Bonomy avait bien indiqué quelle était la distinction à faire

 19   à ce sujet pour l'admission de ce document. Maintenant, parlons du général

 20   Ojdanic, des informations qu'il avait au sujet de ces crimes. Le général

 21   Vasiljevic a déclaré qu'Ojdanic l'avait envoyé, lui et le général Gajic au

 22   Kosovo pour obtenir des informations supplémentaires au sujet des crimes

 23   commis, des pillages, et cetera. Le général Vasiljevic, pendant cette

 24   enquête, a appris que du côté du commandement de l'armée à Pristina, on

 25   avait décidé de ne pas signaler certains crimes à la hiérarchie et à

 26   l'état-major du commandement Suprême. Le général Vasiljevic dit également

 27   que la 3e Armée avait enquêté sur ces crimes et avait estimé qu'il n'était

 28   pas nécessaire d'en informer la hiérarchie. Page ou 8 647 à 8 651 du compte

Page 27162

  1   rendu d'audience.

  2   Je vais m'interrompre ici brièvement pour parler de ce que nous dit le

  3   bureau du Procureur au sujet du manquement du général Ojdanic à ses

  4   obligations de prendre des mesures disciplinaires contre le général

  5   Pavkovic, à cause du comportement de ce dernier avant et pendant la guerre.

  6   L'Accusation affirme tout d'abord que Pavkovic a envoyé des rapports

  7   inexacts à l'état-major général en affirmant que l'UCK et non pas les

  8   forces serbes qui étaient en premier lieu responsables des actes de

  9   provocation commis avant la guerre.

 10   Nous avons déjà évoqué cette question en signalant notamment qu'il

 11   n'existait aucune information précise en dehors des insertions faites par

 12   le général Dimitrijevic, informations selon lesquelles ces rapports

 13   auraient été inexacts. Dimitrijevic a déclaré lors de sa déposition que

 14   lorsque le général Ojdanic a dit qu'il allait rencontrer le général

 15   Pavkovic à ce sujet justement. Il n'a eu aucune raison de mettre en doute

 16   cette affirmation étant donné que le général Ojdanic était un homme de

 17   parole généralement.

 18   L'Accusation affirme en autre que le commandement de la 3e Armée n'a pas

 19   signalé un certain nombre de crimes à l'état-major général au cours de la

 20   guerre. Cependant, comme on le voit dans la déposition du général

 21   Vasiljevic, si ces crimes n'ont pas été portés à la connaissance de l'état-

 22   major général, ils ont fait l'objet des mesures qui s'imposaient par les

 23   commandements situés à des échelons inférieurs. On peut donc dire qu'il y a

 24   eu plutôt ici communication lacunaire et qu'on ne peut pas vraiment parler

 25   d'une tentative délibérée de ne pas fournir les informations qui

 26   s'imposaient. Nous développons ceci aux paragraphes 250 à 255 de notre

 27   mémoire en clôture.

 28   En réalité, il n'existait aucune raison justifiant la prise de mesures

Page 27163

  1   disciplinaires contre le commandement de la 3e Armée alors qu'on était en

  2   pleine campagne de bombardements de l'OTAN et que l'UCK menait ses

  3   opérations séparatistes et terroristes. Nous estimons qu'il aurait été

  4   irresponsable de changer de commandant en plein milieu de la guerre vu les

  5   circonstances, en dépit de ce que nous disent les généraux Hannis et Stamp

  6   qui veulent ici se substituer au général Ojdanic, prendre sa place avec le

  7   recul.

  8   Ceci étant dit, il n'en reste pas moins que le général Ojdanic a demandé

  9   des comptes au général Pavkovic, il l'a convoqué à Belgrade à la mi-mai

 10   1999 une fois qu'il a été informé de crimes commis à grande échelle, que

 11   cette information lui a été fournie par les généraux Farkas et Vasiljevic.

 12   Le général Pavkovic a donné les explications qui s'imposaient à M.

 13   Milosevic et à d'autres lors de la réunion à Belgrade. Le général Ojdanic a

 14   ensuite pris les mesures nécessaires pour procéder aux enquêtes qui

 15   s'imposaient en envoyant ses propres officiers, Vasiljevic et Gajic, sur le

 16   terrain. La nature de leurs activités sur le terrain est présentée aux

 17   paragraphes 363 à 375 de notre mémoire.

 18   De plus, on a essayé d'élucider ces crimes en prenant des mesures dictées

 19   par le général Ojdanic avec, notamment sept visites au Kosovo pendant la

 20   guerre pour l'état-major général. Pièce 3D1116, page 171, pièce 3D1115,

 21   paragraphe 20. Il y a eu également 83 inspections au niveau des bataillons

 22   et des brigades.

 23   Il est important de constater que le général Simic a déclaré que ces

 24   inspections n'ont pas indiqué à l'état-major général que des crimes avaient

 25   été commis sur le terrain par les forces de la VJ, pièce 3D1089 et 3D489.

 26   Autre exemple significatif des efforts entrepris par le général

 27   Ojdanic c'est ce qu'on voit, c'est ce qui s'est passé une fois qu'il a reçu

 28   la lettre de Louise Arbour le 2 mai [comme interprété] 1999. Il a

Page 27164

  1   immédiatement envoyé cette lettre au service juridique de l'armée, il a

  2   demandé que l'on procède à l'élaboration d'un ordre pour empêcher les

  3   crimes de guerre et en punir les auteurs. Il en a résulté un ordre selon

  4   lequel "tout officier ayant connaissance de la perpétration de violation

  5   des principes, des règles et des règlement du droit international en temps

  6   de guerre et qui ne mettait pas en œuvre de mesures disciplinaires ou

  7   n'engageait pas de procédures pénales serait tenu pénalement responsable de

  8   ce fait." Pièce 3D483.

  9   On voit donc que le général Ojdanic s'est acquitté de ses obligations

 10   au titre de l'article 7(3) du Statut, il a pris les mesures nécessaires et

 11   raisonnables pour empêcher que des crimes ne soient commis et en punir les

 12   auteurs. Ceci figure de manière détaillée aux paragraphes 516 à 534 de

 13   notre mémoire en clôture.

 14   On verra, par exemple, que pendant la guerre, le général Ojdanic a

 15   donné 18 ordres qui avaient pour objectif d'assurer le respect du droit de

 16   la guerre. Ces ordres, nous les présentons pratiquement tous dans notre

 17   mémoire. Ils sont, d'autre part, énumérés à la pièce 3D1116, paragraphes

 18   153 à 154 du rapport d'expert du général Radinovic.

 19   De plus, au cours des réunions quotidiennes de l'état-major général,

 20   on parlait régulièrement du respect du droit humanitaire. Ces réunions font

 21   l'objet des développements du général Radinovic dans son rapport d'expert,

 22   pièce 3D1116, pages 155 à 157. Enfin, je sais pas si c'est paragraphes 155

 23   à 157 ou pages 155 à 157.

 24   Je me demande, Monsieur le Président, si le moment ne serait pas bien

 25   choisi pour faire la pause parce que je vais passer à un autre sujet.

 26   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Aurez-vous encore besoin de beaucoup

 27   de temps pour en terminer ?

 28   M. SEPENUK : [interprétation] Non, pas du tout, dix à 15 minutes, disons 15

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  1   minutes.

  2   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Dans ces conditions, nous allons

  3   suspendre l'audience jusqu'à 11 heures 15.

  4   --- L'audience est suspendue à 10 heures 44.

  5   --- L'audience est reprise à 11 heures 17.

  6   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Sepenuk.

  7   M. SEPENUK : [interprétation] Oui, merci.

  8   M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Excusez-moi, mais je vais vous poser

  9   d'emblée une question pour ne pas vous interrompre dans votre élan

 10   rhétorique.

 11   A la page 44, ligne 2, ce que j'ai cru comprendre c'est que les échelons

 12   inférieurs n'avaient pas fait rapport d'un certain nombre de choses, mais

 13   est-ce qu'ils l'ont fait délibérément ou pas, et vous répondez que non,

 14   c'est tout simplement par inadvertance, il n'y a pas d'intention délibérée.

 15   Ensuite, vous nous parlez d'une communication qui ne fonctionne pas très

 16   bien et à cause de cela le général n'a pas reçu ces informations. Est-ce

 17   que c'est l'indice d'une défaillance de la part des chefs militaires ou

 18   est-ce qu'il y a intention délibérée ? Si c'est fait par inadvertance,

 19   c'est un peu étrange. Est-ce que ce genre de choses peut se produire dans

 20   une armée où règne la discipline comme il se doit ?

 21   Ensuite, il y a Louise Arbour qui évoque un certain nombre de questions,

 22   qui parle de communication, et cetera, et là on prend des mesures qui

 23   s'imposent. Voilà des éléments qui m'ont un petit peu intrigué, donc je

 24   voudrais vous demander de bien vouloir répondre à ce questionnement pour

 25   que je puisse bien vous comprendre.

 26   M. SEPENUK : [interprétation] Le général Vasiljevic, lui, a estimé qu'il y

 27   avait négligence, que les crimes étaient effectivement poursuivis et il

 28   estimait qu'il n'était pas nécessaire que ce soit communiqué aux échelons

Page 27166

  1   supérieurs, et lui était convaincu que les crimes ont fait l'objet des

  2   poursuites nécessaires, je vais en reparler.

  3   Bien entendu, il y a peut-être eu une défaillance dans la qualité du

  4   commandement, dans la qualité du contrôle. Moi, je dis, je ne le nie pas,

  5   que ces crimes auraient dû être signalés aux instances supérieures. Mais il

  6   n'y a pas de négligence criminelle ici, il n'y a pas d'intention

  7   criminelle. Ç'aurait été une intention ou une négligence criminelle si les

  8   crimes avaient été signalés mais pas punis. Mais le fait qu'on n'ait pas

  9   signalé ces crimes, c'est le résultat d'un hasard, ça s'est fait par

 10   inadvertance. Je ne peux en dire plus.

 11   M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Mais est-ce qu'il n'y avait pas un

 12   système de filière de renseignement qui s'occupait de ce genre de choses,

 13   qui informait le chef de l'état-major principal de ce qui se passait ? Est-

 14   ce que les actions nécessaires étaient

 15   prises ? Je n'ai pas très bien compris finalement ce qui s'est fait, je me

 16   demande si vous pourriez me répondre.

 17   M. SEPENUK : [interprétation] Oui, effectivement, il y avait une filière

 18   chargée du renseignement, mais qui s'occupait essentiellement de l'OTAN et

 19   de l'UCK. Puis, bien entendu, il y avait l'administration chargée de la

 20   sécurité qui traitait des crimes et de ce genre de choses. J'aimerais vous

 21   expliquer mieux quelle était la nature de ces problèmes de communication,

 22   mais en ce qui me concerne, en ce qui concerne la Défense de mon client, ce

 23   qui importe c'est que ces crimes ont fait l'objet de rapports et qu'au bout

 24   du compte, ils ont fait l'objet de poursuites.

 25   Est-ce que ma réponse vous convient, Monsieur le Juge ?

 26   M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Je vous remercie de votre réponse.

 27   [La Chambre de première instance se concerte]

 28   M. LE JUGE CHOWHAN : [interprétation] Ma consoeur me demandait si vous

Page 27167

  1   aviez bien compris quand j'ai parlé de Louise Arbour, qui était Procureur

  2   de ce Tribunal.

  3   M. SEPENUK : [interprétation] Oui, tout à fait, bien entendu que je connais

  4   Louise Arbour.

  5   J'étais en train de démontrer que le général Ojdanic s'était acquitté de

  6   ses obligations au titre de l'article 7(3), qu'il avait pris les mesures

  7   raisonnables et nécessaires pour punir les crimes et en punir les auteurs.

  8   On a parlé d'un certain nombre d'ordres qu'il a donnés et qui étaient

  9   conformes au droit pénal international.

 10   Au paragraphe 825 de son mémoire, le Procureur affirme que la distribution

 11   de 1 300 exemplaires du règlement aux combattants était manifestement

 12   insuffisante "étant donné que le Corps de Pristina comptait 14 000 hommes."

 13   Cette assertion repose sur une mauvaise interprétation du dossier par le

 14   bureau du Procureur, et j'aimerais préciser la chose.

 15   La Chambre de première instance se souviendra de cette petite brochure

 16   plastifiée de quatre pages, la pièce 3D988, qui portait le titre de

 17   "règlements relatifs au comportement des soldats." Il y était résumé

 18   quelles étaient les obligations des soldats qui devaient traiter les

 19   combattants et les civils de manière humaine. Je suis sûr que vous vous

 20   souvenez de cette petite brochure plastifiée que les soldats pouvaient

 21   mettre dans leur poche ou dans leur portefeuille.

 22   Le général Gojevic, officier chargé des affaires juridiques au sein de

 23   l'état-major général de l'armée et le général Farkas, chargé de la

 24   sécurité, ont déclaré  dans leur déposition que cette petite brochure avait

 25   été distribuée à tous les soldats de l'armée au début de la guerre. Gojevic

 26   l'a déclaré à la page 16 647 à 48 du compte rendu d'audience, Farkas à la

 27   page 16 315.

 28   Comme par hasard, le bureau du Procureur ne tient aucun compte de ces

Page 27168

  1   propos et déclare aux paragraphes 824 à 825 de son mémoire que seuls 350

  2   exemplaires de cette brochure ont été distribués aux soldats du Corps de

  3   Pristina. Selon nous, ici, une fois encore, le bureau du Procureur s'est

  4   trompé, mais pour être juste envers le bureau du Procureur, il est possible

  5   qu'il ait été induit en erreur par ce qui figure dans le rapport de

  6   l'expert Radinovic aux paragraphes 186 à 190. Dans ce rapport, paragraphe

  7   189, il est indiqué que 350 de ces brochures, sur un total de 1 300

  8   exemplaires, ont été distribuées aux soldats de la 3e Armée.

  9   En réalité, ce qui a apparemment fait l'objet d'une distribution, comme

 10   cela a été indiqué dans la déclaration du témoin à décharge pour Ojdanic,

 11   le général Gajic, pièce 3D1084, paragraphe 145, ce qui a été distribué ce

 12   sont "1 300 exemplaires de la brochure de la Croix-Rouge internationale."

 13   Dans cette brochure, on reprend les obligations qui sont celles des

 14   combattants au regard du droit humanitaire international, page 15 277 du

 15   compte rendu d'audience. Quoi qu'il en soit, ce que nous ont dit les

 16   généraux Gojic et Farkas c'est que chaque soldat a reçu un exemplaire du

 17   règlement relatif au comportement des soldats, et ceci a été conforté dans

 18   le rapport d'expert du général Radinovic. Si le bureau du Procureur avait

 19   pris la peine de lire ce qui figure en bas de la même page, il aurait vu

 20   que le général Radinovic avait déclaré : "Ces formules synthétiques peuvent

 21   être facilement imprimées dans une brochure en format de poche, si bien que

 22   c'est pour cela que ce règlement s'est retrouvé dans la poche de tous les

 23   soldats de la VJ au Kosovo-Metohija." Paragraphe 191 de la pièce 3D1116.

 24   Donc il est clair que tous les soldats de la VJ ont reçu un exemplaire de

 25   cette brochure.

 26   Le général Ojdanic, nous le savons, s'est acquitté de son obligation de

 27   prévenir les crimes, mais il a également fait en sorte que toutes les

 28   mesures raisonnables et nécessaires soient prises pour poursuivre et

Page 27169

  1   sanctionner les criminels. Quelques heures à peine après le début des

  2   frappes aériennes de l'OTAN, dans la soirée du 24 mars 1999, le général

  3   Ojdanic a ordonné que tous les tribunaux militaires et les procureurs

  4   militaires qui devaient être actifs en temps de guerre soient mobilisés

  5   effectivement et qu'ils s'organisent de manière efficace. En moins d'une

  6   semaine, le chef des services juridiques de l'état-major général avait

  7   inspecté tous les organes judiciaires de l'armée en temps de guerre au sein

  8   de la 3e Armée et avait établi qu'ils étaient "prêts à s'acquitter de leurs

  9   obligations conformément à leur compétence. Toutes les ressources en

 10   matière de personnel étaient présentes." Pièce 3D804, paragraphe 3.3.

 11   Exemple de ce qui a été fait dans le cadre du système judiciaire militaire,

 12   annexe G de notre mémoire en clôture qui montre que le général Ojdanic a

 13   reçu des informations sur l'état de fonctionnement des organes judiciaires

 14   63 fois pendant les 78 jours de la guerre. Bien entendu, le système

 15   militaire judiciaire connaissait certains problèmes qui ont été corrigés

 16   dès qu'ils étaient identifiés.

 17   Le général Gojevic, qui était à la tête de la section juridique de l'état-

 18   major général, a déclaré que le 12 mai 1999, il avait écrit un rapport à

 19   l'état-major du commandement Suprême dans lequel il affirmait que, je cite

 20   : "Le volume et la complexité du travail que doivent accomplir les organes

 21   judiciaires militaires est excessif vu la situation actuelle, mais qu'après

 22   avoir pris les mesures nécessaires et surmonté les difficultés initiales,

 23   les organes de la justice militaire sont maintenant pleinement

 24   opérationnels." Paragraphe 2.3 de la pièce P2826.

 25   D'autre part, le général Gojevic a dit - et c'est très important - qu'il

 26   n'avait connaissance d'aucun crime de guerre qui ait été signalé et qui

 27   n'aurait pas fait l'objet d'une enquête, puis pris en charge par le système

 28   judiciaire pénal. Page 16 686 du compte rendu d'audience.

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  1   Nous devons noter que le général Ojdanic lui-même a interrogé le général

  2   Gojevic après la guerre. Il s'interrogeait sur le nombre relativement

  3   faible de poursuites pour crimes graves. Et nous avons noté la réponse du

  4   général Gojevic au général Ojdanic au paragraphe 310 de notre mémoire. Je

  5   pense que c'est important et intéressant de répéter cela parce que ces

  6   mots, cette réponse, finalement, sont d'une grande logique. J'espère que ça

  7   sera aussi logique pour la Chambre de première instance. Il a dit : "En

  8   temps de guerre, c'est très difficile de trouver les auteurs de crimes et

  9   les identifier, parce que ces criminels se cachent avec beaucoup

 10   d'habilité. Il y a une atmosphère de crainte qui règne, si bien que même

 11   ceux qui sont à proximité de ces criminels, des auteurs de ces crimes

 12   hésitent à les dénoncer. Et même lorsque cela ne concerne que des

 13   combattants, il semble qu'il en aille de même. Ça, c'est l'aspect négatif

 14   de la solidarité. Mais c'est courant, il est classique de voir que tous les

 15   soldats sont liés par des liens de solidarité quelles que soient les

 16   circonstances." Page 16 685 du compte rendu d'audience.

 17   Avec la fin de la guerre et quand on a commencé à prendre connaissance au

 18   niveau du commandement Suprême d'un certain nombre de crimes, il y a eu une

 19   réunion d'information qui a été organisée par l'état-major du commandement

 20   Suprême. D'après les notes émanant de cette réunion, pièce 3D493, le

 21   général Farkas a signalé qu'on avait analysé de manière complète tous les

 22   problèmes relatifs aux crimes contre le droit humanitaire. Il a déclaré que

 23   la plupart des atrocités et des crimes graves, du pillage au viol, avaient

 24   fait l'objet d'enquête et avaient été transmis aux organes de la justice

 25   militaire. Il a dit que 95 % des auteurs de ces crimes avaient été arrêtés

 26   ou faisaient l'objet d'enquête.

 27   Lors de cette réunion, le général Ojdanic a émis un document par lequel il

 28   a ordonné que les instances judiciaires militaires hiérarchisent la manière

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  1   dont les crimes devaient être poursuivis et indiquant que les violations du

  2   droit international devaient être la priorité absolue, pièce 3D487.

  3   Par conséquent, les éléments de preuve versés au dossier indiquent que le

  4   général Ojdanic n'avait pas vent des crimes visés à l'acte d'accusation.

  5   Par conséquent, il n'avait pas la capacité ou le devoir de les prévenir ou

  6   de les punir. Les éléments de preuve indiquent également qu'il a été

  7   véritablement informé du fait que le mouvement de la population était le

  8   résultat des bombardements de l'OTAN ou des actions menées par l'UCK et non

  9   pas par l'armée. Les éléments de preuve montrent également que lorsqu'il a

 10   été informé des violations du droit international humanitaire de la part de

 11   membres de l'armée déployés au Kosovo, il a pris des mesures immédiates de

 12   façon répétée afin de diligenter des enquêtes, de prévenir et de punir les

 13   responsables de ces crimes.

 14   En examinant la jurisprudence pertinente en la matière pour ce qui est des

 15   commandants de haut rang tels que le général Ojdanic, on se rend compte que

 16   les actions prises par ce dernier étaient celles qui s'imposaient. La

 17   jurisprudence est détaillée dans notre mémoire et je ne reviendrai pas là-

 18   dessus. J'indiquerais simplement que pendant la guerre le général Ojdanic

 19   se trouvait la plupart du temps dans une casemate à plusieurs centaines de

 20   mètres sous la terre dans les sous-sols de Belgrade et qu'il était

 21   totalement tributaire des informations qu'il recevait de ses subordonnés.

 22   Son pays faisait l'objet de frappes aériennes importantes, d'une

 23   insurrection de grande envergure, et on prévoyait une invasion terrestre

 24   imminente.

 25   Nous vous demandons de tenir compte de cela, lorsque vous examinerez les

 26   actions prises par le général Ojdanic afin de déterminer s'il a fait ce qui

 27   s'imposait en tant que commandant situé en haut de la hiérarchie.

 28   Et pour conclure, veuillez examiner la situation globale afin de déterminer

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  1   si le général Ojdanic était véritablement responsable de l'expulsion et du

  2   meurtre des Albanais tel qu'il y est reproché, que ce soit en application

  3   de sa responsabilité pénale ou de sa responsabilité de supérieur

  4   hiérarchique. L'Accusation en l'espèce bénéficie du soutien d'une partie

  5   importante de la communauté internationale, elle dispose de moyens

  6   considérables mis à sa disposition non seulement par l'OTAN et les membres

  7   de l'OTAN, mais également par la Serbie. L'Accusation a eu accès aux

  8   conversations ou aux propos tenus en toute sincérité par le général

  9   Ojdanic, que ce soit au moment où il était sous surveillance ou dans le

 10   cadre des procès-verbaux des réunions de la direction collégiale de l'état-

 11   major général ou lorsque l'on se penche sur les propos tenus par les

 12   témoins initiés qui sont venus déposer au procès, notamment les généraux

 13   Vasiljevic et Dimitrijevic. L'Accusation a eu accès à tous les ordres

 14   donnés avant, pendant et après la guerre et à tous les rapports de combat.

 15   Sur la base de ces sources, vous verrez qu'il n'y a aucune preuve, rien du

 16   tout, aucune preuve permettant de conclure à la culpabilité du général

 17   Ojdanic, et ce, pour une seule raison, parce qu'il est innocent.

 18   Vous êtes des Juges chevronnés. Vous savez ce qui est juste, vous savez

 19   qu'il faut établir la preuve au-delà de tout doute raisonnable, vous savez

 20   reconnaître une preuve au-delà de tout doute raisonnable. L'Accusation n'a

 21   pas fait ce qu'elle avait à faire, non pas parce qu'elle n'a pas entrepris

 22   d'efforts suffisants, non pas parce qu'elle n'a pas bien plaidé, tout

 23   simplement parce que le général Ojdanic n'est pas coupable. Pour déclarer

 24   le général Ojdanic coupable, il faut écarter les propos du témoin à charge,

 25   le général Vasiljevic, qui a indiqué que le général Ojdanic a fait tout ce

 26   qu'il pouvait pour élucider les crimes commis au Kosovo. Vous devez écarter

 27   les propos du témoin de la Chambre, le général Dimitrijevic, qui a confirmé

 28   que le général Ojdanic était tout à fait sincère dans ses efforts visant à

Page 27174

  1   obtenir des informations précises du Kosovo et écarter les témoignages de

  2   nombreux officiers de l'armée yougoslave qui sont venus déposer ici en

  3   personne ou par le biais de vidéoconférences pour vous raconter ce qu'il en

  4   était.

  5   Il est difficile d'imaginer un comportement plus exemplaire de la part d'un

  6   chef militaire pendant la guerre. Le général Ojdanic a organisé des

  7   conférences, a donné des ordres, a distribué des brochures, a sélectionné

  8   les volontaires et il a empêché la présence de paramilitaires au sein de

  9   ses forces afin de garantir que les normes du droit international

 10   humanitaire étaient respectées. Lorsqu'il a eu vent de problèmes, il a

 11   ordonné que des enquêtes soient diligentées, il a envoyé des émissaires en

 12   son nom, il a amélioré le système de justice militaire, il a prévenu le

 13   président Milosevic, il a prôné la création d'une commission d'enquête au

 14   niveau national et il a demandé personnellement aux Albanais de rester chez

 15   eux. Pendant tous les combats, il n'a jamais demandé quoi que ce soit

 16   d'autre, il n'a jamais voulu la guerre.

 17   Me Visnjic et moi-même avons été tout à fait honorés de défendre les

 18   intérêts du général Ojdanic. Ce n'est pas un criminel, c'est un homme bon,

 19   un bon soldat, un bon commandant. Il a été accusé de manière injuste.

 20   Les événements qui sont survenus au Kosovo en 1999 sont tragiques, certes,

 21   mais il faut prononcer un jugement rationnel et la Chambre doit reconnaître

 22   que le général Ojdanic était en faveur de la paix et de la conciliation et

 23   non pas de la guerre et de la discrimination. Par conséquent, nous

 24   demandons qu'il soit acquitté de tous les chefs qui lui sont reprochés dans

 25   l'acte d'accusation.

 26   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Est-ce que vous en avez terminé de

 27   votre plaidoirie ?

 28   M. SEPENUK : [interprétation] Oui.

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  1   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Vous avez simplement peur de quitter

  2   votre siège; c'est cela ?

  3   M. SEPENUK : [interprétation] Oui, j'en profite encore un peu.

  4   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci, Maître Sepenuk, de nous avoir

  5   présenté votre plaidoirie.

  6   Nous allons maintenant entendre la plaidoirie présentée pour le compte de

  7   M. Pavkovic.

  8   Maître Ackerman, vous avez la parole.

  9   M. ACKERMAN : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président, Madame et

 10   Monsieur les Juges. Bonjour à toutes les personnes présentes dans ce

 11   prétoire. Je dirais que dans une certaine mesure, je partage les sentiments

 12   de Me Fila quant aux arguments que l'on peut présenter au bout de deux ans,

 13   sachant que vous avez écouté attentivement tout ce qui s'était déroulé

 14   pendant ces deux années. Vous avez fait preuve de diligence, d'une

 15   diligence remarquable et nous sommes tous honorés d'avoir plaidé devant une

 16   Chambre de première instance de cette qualité. Mais comme vous le savez,

 17   les avocats sont comme des chevaux de course, lorsqu'ils sont prêts à être

 18   lâchés ils courent jusqu'à ce que vous leur disiez de s'arrêter, donc je me

 19   lance.

 20   Nous en arrivons à la fin d'une longue route poussiéreuse et parfois non

 21   goudronnée. Je ne vais pas essayer de résumer tous les témoignages et

 22   toutes les pièces que nous avons eu l'occasion d'entendre et de voir

 23   pendant deux ans. Je me contenterai d'examiner la thèse de l'Accusation et

 24   je vous demanderai de la rejeter. Il m'arrivera parfois de faire référence

 25   au mémoire présenté par le bureau du Procureur et à son réquisitoire, mais

 26   ce, de façon exceptionnelle.

 27   Vous avez entendu trois de mes confrères avant moi. Tous, comme vous n'avez

 28   pas manqué de remarquer, ont fait preuve de critique à l'égard du mémoire

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  1   de l'Accusation. Ils vous ont dit que l'Accusation vous avait induits en

  2   erreur, qu'elle avait manqué de précision et c'est assez remarquable dans

  3   une affaire de cette envergure. Il me faut reconnaître que j'ai été

  4   perplexe lorsque j'ai vu le mémoire du Procureur, lorsque j'ai vu ce qui

  5   était dit, lorsque j'ai vu la manière dont les notes de bas de page ne

  6   corroboraient pas ce qui figurait dans le corps du texte. Je dois dire que

  7   j'ai beaucoup de respect pour M. Hannis et pour ses collaborateurs, si

  8   bien, que je ne sais pas comment il est possible que ce mémoire se présente

  9   de cette manière, je vais revenir là-dessus un peu plus tard.

 10   Je me rallie aux arguments présentés sur ce point par mes confrères et je

 11   vous exhorte à examiner de près ce qui est indiqué dans le mémoire du

 12   Procureur afin de vous assurer qu'il y ait des éléments qui étayent ce qui

 13   est dit dans le texte.

 14   Vous savez tous qu'au moment où vous devrez vous pencher sur les éléments

 15   de preuve présentés en l'espèce, vous devrez, comme c'est de votre devoir,

 16   c'est ce que requiert le droit, vous devrez, disais-je, évaluer, apprécier

 17   les éléments de preuve afin de vous assurer qu'ils respectent les critères

 18   requis et vous devez vous assurer que l'Accusation s'est acquittée de sa

 19   tâche et a bien prouvé la culpabilité des accusés au-delà de tout doute

 20   raisonnable. M. Hannis vous a dit que vous deviez adopter l'hypothèse la

 21   plus vraisemblable, mais il sait que ce n'est pas ainsi que fonctionne le

 22   droit. Vous devez appliquer le droit et je sais que vous le ferez. Vous

 23   savez que s'il y a deux conclusions raisonnables qui s'offrent à vous, vous

 24   devez choisir celle qui profite à l'accusé.

 25   Il y a certaines questions que vous devrez vous poser en appréciant les

 26   éléments de preuve présentés en l'espèce. M. Stamp a parlé de la

 27   crédibilité des témoins. M. Hannis a parlé de cela aussi, et tous deux ont

 28   laissé entendre que leurs témoignages étaient loin d'être crédibles.

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  1   Je dirais que l'affaire a été jugée à un moment particulièrement

  2   défavorable mais c'est ainsi. Nous jugeons les événements survenus au

  3   Kosovo alors même que l'on tient des pourparlers en rapport avec

  4   l'indépendance du Kosovo. Par conséquent, il y avait des considérations

  5   politiques des deux côtés lorsque les témoins sont venus témoigner. Ces

  6   témoins devaient avoir cela à l'esprit. Ils pensaient sans doute à

  7   l'incidence qu'aurait leur témoignage sur les efforts entrepris pour

  8   obtenir l'indépendance du Kosovo. Gardez cela à l'esprit lorsque vous

  9   apprécierez le témoignage de ces personnes.

 10   Me O'Sullivan a parlé brièvement de l'objectif véritable de l'intervention

 11   de l'OTAN. On a annoncé au public qu'il s'agissait d'une action visant à

 12   empêcher une crise humanitaire. A ce stade, nous savons bien que ce n'était

 13   pas le cas. Il s'agissait ni plus ni moins que d'un prétexte à ce que je

 14   qualifierais d'un effort visant à faire tomber Milosevic. Le but était un

 15   changement de régime. Il ne s'agissait pas d'éviter une crise humanitaire.

 16   De nombreux témoignages corroborent ce fait, notamment celui de John

 17   Crosland qui a dit de quoi il en retournait. Il savait quel était

 18   l'objectif.

 19   Puis lorsqu'on se penche sur l'acte d'accusation dressé en l'espèce,

 20   il est intéressant de noter que s'il y avait une crise humanitaire à ce

 21   moment-là qui - pour moi cela implique la commission de crimes, des

 22   expulsions, des meurtres, quelque chose de ce genre, quelque chose que l'on

 23   pourrait qualifier de crise humanitaire étant le fait d'individus. Pourtant

 24   le premier crime visé dans l'acte d'accusation a été commis le 24 mars,

 25   date du début des bombardements de l'OTAN. C'est là qu'a commencé la crise

 26   humanitaire, d'après l'acte d'accusation.

 27   J'ai la chance de représenter le général Pavkovic dans le cadre de ce

 28   procès. Le général Pavkovic est un homme intelligent, un soldat de métier

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  1   dont les qualités ont été reconnues pendant toute la durée de sa carrière

  2   militaire. Pendant toute sa carrière exemplaire, il a toujours été premier

  3   de sa promotion. Il a toujours été promu en premier. Ses supérieurs

  4   hiérarchiques lui ont toujours décerné d'excellentes notes. Souvenez-vous

  5   en, tout cela figure au dossier.

  6   Souvenez-vous de Shaun Byrnes qui a dit en parlant du général

  7   Pavkovic que c'était un homme direct, professionnel. Il a dit que c'était

  8   la crème de la crème des soldats et qu'il ne se lançait pas sur de grandes

  9   leçons sur l'histoire serbe ou la politique serbe. Il a dit qu'il avait

 10   dirigé la VJ de façon professionnelle et honorable pendant le conflit et

 11   avant celui-ci. La VJ était placée sous le commandement du général

 12   Pavkovic. Le général Pavkovic insistait pour que les hommes placés sous ses

 13   ordres se comportent de façon professionnelle et honorable, et ne tolérait

 14   pas l'attitude inverse.

 15   Puisque nous parlons de Shaun Byrnes, revenons sur ce qu'il a dit au sujet

 16   des allégations relatives à la force excessive qui aurait été utilisée. Les

 17   pilonnages de la VJ menés à l'arme lourde ne visaient pas à causer des

 18   pertes, mais il s'agissait d'avertir la population civile de l'imminence

 19   d'une action et du fait qu'il fallait évacuer la zone.

 20   Alors pour étayer mon affirmation sur laquelle vous devez acquitter le

 21   général Pavkovic, je vous renvoie aux éléments de preuve relatifs à la

 22   réunion tenue à Belgrade les 16 et 17 mai. A cette occasion, le général

 23   Ojdanic a demandé au général Pavkovic de venir à Belgrade afin de

 24   s'entretenir au sujet de rumeurs qu'il aurait entendues à propos de crimes

 25   qui auraient été commis.

 26   Pavkovic s'est présenté à Belgrade le 16. Il a rencontré Ojdanic et

 27   d'autres, le lendemain il a rencontré Milosevic. Vous vous souviendrez de

 28   ces deux réunions. Pavkovic a demandé que l'on crée une commission

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  1   d'enquête afin de se pencher sur la question afin de déterminer si des

  2   crimes avaient été commis, et dans l'affirmative qui était responsable de

  3   ces crimes. Il voulait aller au cœur des choses. Il voulait avoir le fin

  4   mot de l'affaire.

  5   Alors, le fait qu'il ait demandé cela prouve bien qu'il était

  6   convaincu que le résultat de l'enquête n'allait pas l'impliquer. Il a

  7   recommandé cela, parce que lui ne se sentait pas responsable de ce qui se

  8   passait, mais il savait bien qu'il y avait quelque chose qui n'allait pas

  9   et que quelqu'un devait se pencher sur la question. Il est intéressant de

 10   noter que le général Ojdanic, puis le lendemain le général Ojdanic et

 11   Sainovic, ont convenu avec Pavkovic qu'il était nécessaire de faire cela.

 12   Ils ont demandé à Milosevic que cela soit fait. Milosevic n'a pas souhaité

 13   que ce fût le cas, nous ne savons pas pourquoi. Tout ce que nous savons,

 14   c'est qu'à la fin de cette réunion, Milosevic a exhorté plusieurs personnes

 15   à rester après le départ des membres de l'armée. Il serait intéressant de

 16   savoir ce qui s'est passé ensuite lors de cette deuxième réunion.

 17   Je peux vous assurer que si le général Ojdanic avait proposé que l'on

 18   crée une telle commission, si le général Pavkovic avait refusé,

 19   l'Accusation aurait disposé d'éléments de preuve à charge importants contre

 20   le général Pavkovic. Mais comme ce n'est pas le cas, cela prouve son

 21   innocence.

 22   Vous avez entendu de nombreux éléments relatifs à la thèse de l'Accusation

 23   concernant l'entreprise criminelle commune, le fameux plan visant à

 24   modifier la composition ethnique, le fait que l'on s'était servi des

 25   bombardements de l'OTAN pour dissimuler ce qui se passait. Je ne vais pas

 26   m'appesantir là-dessus parce que vous en avez suffisamment entendu sur la

 27   question, mais l'Accusation selon nous n'a pas du tout prouvé tout cela au-

 28   delà de tout doute raisonnable. Nous détaillons notre propos dans notre

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  1   mémoire en clôture. Tout cela est très bien exposé dans le mémoire en

  2   clôture présenté par la Défense Ojdanic.

  3   L'Accusation, dès le premier jour du procès et dans son mémoire également,

  4   avance que l'on peut prouver l'existence d'une entreprise criminelle

  5   commune en considérant le témoignage des personnes, des victimes qui ont

  6   quitté le Kosovo, en tenant compte du fait que des personnes ont été tuées,

  7   qu'il y a eu des viols, que tous ces faits se sont produits sur l'ensemble

  8   du territoire du Kosovo, ce qui montre d'après l'Accusation qu'il existait

  9   un plan.

 10   Mais si l'on examine n'importe quelle guerre, peu importe laquelle,

 11   que se passe-t-il ? En temps de guerre, lorsqu'il y a des bombardements les

 12   gens s'en vont. Certains sont tués, il y a des viols, d'autres crimes, des

 13   pillages notamment. Tout cela arrive. Le fait que la guerre au Kosovo

 14   ressemble à n'importe quelle autre guerre ne montre pas pour autant qu'il

 15   existait une entreprise criminelle commune, un plan. Ça montre simplement

 16   qu'il s'agit d'une guerre comme une autre, et que dans une guerre il se

 17   produit certaines choses. Cela ne prouve absolument pas qu'il y avait une

 18   entreprise criminelle commune.

 19   Le deuxième jour du procès, page 82 du compte rendu d'audience, M. Hannis

 20   s'est livré à un exercice consistant à évoquer la directive donnée par

 21   Ojdanic, Grom 3. Il a montré une série d'ordres reprenant de la 3e Armée,

 22   puis des ordres reprenant du Corps de Pristina adressés au niveau de la

 23   brigade, et ainsi de suite, pour montrer que les actions menées ont d'abord

 24   été ordonnées aux plus hauts échelons de la hiérarchie, puis que toutes les

 25   informations et les consignes ont été transmises le long de la chaîne de

 26   commandement afin d'être mises en œuvre sur le terrain, conformément à la

 27   directive Grom 3.

 28   Il s'agit d'ordres rédigés dans le cadre de la loi. Il s'agissait d'actions

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  1   militaires qui s'imposaient contre les terroristes. On n'ordonne pas à la

  2   commission de quelque crime que ce soit. Il s'agit d'ordres que l'on trouve

  3   dans n'importe quelle organisation militaire professionnelle qui cherche à

  4   protéger les frontières de l'Etat, et qui cherche à faire face à une

  5   insurrection terroriste en même temps. Tout cela ne prouve aucun des crimes

  6   reprochés dans l'acte d'accusation. Cela n'indique pas qu'il y avait une

  7   entreprise criminelle commune.

  8   Dans son exposé, M. Hannis a proposé plusieurs possibilités. Il a soulevé

  9   des questions et vous devez faire preuve de prudence. Il s'agit d'une

 10   affaire pénale, je vous le rappelle. Donc toutes les allégations doivent

 11   être prouvées au-delà de tout doute raisonnable. Les doutes, les

 12   possibilités ne suffisent pas à justifier une déclaration de culpabilité.

 13   Au paragraphe 696 du mémoire en clôture de l'Accusation notamment,

 14   l'Accusation essaye de montrer que certains des événements survenus en 1998

 15   prouvent certains faits survenus en 1999. Il est dit notamment que le

 16   général Pavkovic et d'autres personnes avaient appris certaines choses en

 17   1998, et par conséquent devaient être au courant de ce qui se passait en

 18   1999, du fait que des crimes étaient sur le point d'être commis. Ils

 19   auraient dû faire quelque chose parce qu'il s'agissait des mêmes forces.

 20   Mais tout d'abord, vous n'avez entendu aucun témoignage indiquant qu'il

 21   s'agissait des mêmes forces. En fait, d'après les témoignages, ce n'était

 22   pas le cas. 

 23   Les gens qui étaient déployés sur le terrain lors des combats étaient

 24   des recrues qui étaient déployées au Kosovo, qui étaient relevées, il y

 25   avait une rotation permanente. Et c'est la raison pour laquelle le général

 26   Pavkovic ne cesse d'envoyer des ordres dans lesquels il insiste sur le

 27   respect des droits de la guerre, car il savait que tous les 30 jours il y

 28   avait une relève et il voulait rappeler à ses commandants qu'ils devaient

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  1   dire à leurs hommes de respecter la loi et le droit applicable.

  2   Il y a eu beaucoup de fumée, beaucoup de thèses avaient été présentées

  3   quant à l'emploi illégal de la VJ au Kosovo en 1999 [comme interprété] et

  4   c'est quelque chose dont on a énormément parlé dans ce procès. Vous

  5   connaissez la loi, vous l'avez vue et vous savez très bien que la VJ aurait

  6   pu fonctionner de façon légale, tel qu'il a été le cas en 1998. Je crois

  7   que toute cette question de l'emploi illégal de la VJ est un écran de fumée

  8   créé par l'état-major principal et Perisic car ils étaient jaloux, ils

  9   craignaient une perte de pouvoir.

 10   Perisic était réellement préoccupé, car il avait peur que le général

 11   Pavkovic emploie d'une certaine façon la VJ d'une façon illicite, il était

 12   le commandant en charge, c'était le général. Tout ce qu'il aurait pu faire,

 13   c'est simplement de le démettre de ses fonctions, mais il n'avait pas fait

 14   cela.

 15   Je crois que tout ceci est inventé. Ceci a découlé d'une lettre que Perisic

 16   a envoyée à Milosevic et de ses griefs quant à l'emploi de la VJ. Je crois

 17   que tout ceci a été cité hors contexte et ça a créé un peu de confusion

 18   dans l'esprit de mes collègues. Car ce que dit Perisic, il dit : "Nous ne

 19   devrions pas nous servir de la VJ contre les terroristes au Kosovo." Ce

 20   n'est pas du tout ce qu'il dit. Il dit plutôt : "Pour employer la VJ contre

 21   les activités terroristes au Kosovo, il faut déclarer un état d'urgence, un

 22   état de guerre. Faisons cela. Déclarons un état d'urgence, déclarons un

 23   état de guerre. Il faut organiser une campagne de grande envergure." Mais

 24   le général Perisic n'a pas fait ceci, dans un contexte diplomatique, il

 25   n'aurait pas pu déclarer ce que Perisic demandait, c'est-à-dire de déclarer

 26   un état de guerre ou un état d'urgence.

 27   Il est dit que l'armée a été employée de façon inconstitutionnelle et c'est

 28   une thèse que nous avons déjà entendue. Mais je crois que j'ai déjà dit de

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  1   façon très claire dans les arguments présentés dans ma lettre en

  2   application de l'article 98 bis, si l'Accusation peut trouver quelque part

  3   dans la constitution, une disposition de la constitution qui a fait l'objet

  4   d'une violation par l'emploi de l'armée, dites-nous où elle se trouve, mais

  5   ce n'est pas arrivé. Vous pouvez lire la constitution, Monsieur le

  6   Président, Mesdames, Monsieur le Juge, tant que vous le voulez, mais vous

  7   ne verrez absolument rien dans cette constitution qui fait état de l'emploi

  8   inconstitutionnel de l'armée.

  9   Le paragraphe 856 du mémoire du Procureur se lit comme suit : "Samardzic a

 10   essayé d'initier des procédures disciplinaires contre Pavkovic." Vous ne

 11   verrez aucun élément de preuve, vous ne trouverez aucun élément de preuve

 12   direct selon lequel le général Pavkovic s'est servi des unités du Corps de

 13   Pristina à l'exception d'un ordre venant le long de la chaîne de

 14   commandement. Aucun élément ne permet de croire aussi autre chose, car il

 15   n'y a pas eu d'élément non corroboré par Dimitrijevic que Samardzic a fait

 16   des efforts pour entreprendre des mesures disciplinaires contre Pavkovic,

 17   et j'affirme que Dimitrijevic fait partie de cette idée qu'avait Perisic.

 18   Au paragraphe en note en bas de page 856, le bureau du Procureur s'appuie

 19   fortement sur le témoignage de Samardzic, ils disent également que ceci a

 20   été corroboré par la pièce P922, mais cette pièce ne fait pas du tout état

 21   des efforts de Samardzic visant à discipliner Pavkovic outre que le fait de

 22   citer cela en appui à leur affirmation.

 23   64, ligne 13, il faudrait lire au compte rendu d'audience, témoignage de

 24   Samardzic et on devrait dire Dimitrijevic.

 25   Je vous affirme, d'après cette affirmation, qu'il s'agissait d'une

 26   invention de toutes pièces de Dimitrijevic. Vous vous rappellerez qu'on a

 27   parlé de l'évaluation de la performance du général de Nebojsa Pavkovic

 28   entre la période du 29 juin 1997 au 10 janvier 1999, une évaluation rédigée

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  1   par le général Samardzic dans laquelle Dimitrijevic vous dit qu'on a essayé

  2   d'initier une procédure disciplinaire contre lui et il parle en évoquant le

  3   général Pavkovic qui était le commandant du 3e Corps d'armée du Corps de

  4   Pristina : "Il a démontré des qualités supérieures et qu'il s'est amélioré

  5   de façon continue au cours du temps à la suite des postes très importants

  6   qu'il a occupés au sein du Corps de Pristina et à l'état-major principal de

  7   l'armée yougoslave. Grâce à ses résultats et à ses qualités

  8   intellectuelles, le général Pavkovic a été promu au rang du général de

  9   corps d'armée de façon exceptionnelle. Son évaluation a été évaluée avec le

 10   grade exceptionnel." Je crois que le général Vasiljevic vous a dit que

 11   c'était le grade le plus élevé qu'il aurait pu obtenir.

 12   Au paragraphe 701, le bureau du Procureur, dans leur mémoire, dit que : "Le

 13   président Djukanovic a soulevé la question de crimes possibles commis au

 14   Kosovo." J'aimerais souligner crimes possibles commis au Kosovo. "Il a

 15   voulu soulever la question des crimes possibles commis au Kosovo en

 16   insistant sur le fait que le Corps de Pristina et ses actions n'ont pas

 17   toujours été en accord avec le rôle constitutionnel d'une armée et des

 18   décisions du conseil Suprême de la Défense."

 19   Cette préoccupation exprimée par Djukanovic ne soulève pas la

 20   question de crimes possiblement commis au Kosovo. C'est irresponsable de

 21   dire ceci. Il n'a jamais soulevé de question de crimes possiblement commis

 22   au Kosovo. Il ne faisait que répéter ce que disait Perisic à savoir qu'il

 23   parlait de l'emploi inconstitutionnel de l'armée au Kosovo alors que nous

 24   savons tous qu'il n'y a pas eu d'emploi inconstitutionnel de cette

 25   dernière.

 26   M. O'Sullivan vous a très clairement expliqué dans sa plaidoirie que

 27   lorsqu'on lui a montré des documents supplémentaires, Djukanovic, lors

 28   d'une réunion, a affirmé être satisfait avec les documents reçus.

Page 27186

  1   Nous avons également entendu parler des événements de 1998 au Kosovo, et on

  2   a affirmé que la VJ a fait emploi d'une force disproportionnée. Vous verrez

  3   dans le mémoire du Procureur au paragraphe 709 une référence dans laquelle

  4   on parle de Naumann qui avait dit que Milosevic a eu connaissance de cinq à

  5   sept incidents qui faisaient état de l'emploi exagéré de force.

  6   Il n'y est pas réellement rendu d'examen approfondi dans cette affaire, à

  7   savoir ce que cette phrase voulait dire "d'emploi de force disproportionnée

  8   ou exagérée." Nous n'avons que quelques opinions de réservistes qui se

  9   trouvaient au Kosovo à ce moment-là et nous savons que eux, ces derniers,

 10   pensaient que ces forces disproportionnées, ces effectifs, ces forces

 11   exagérées avaient été utilisées. C'est un drôle de concept de plusieurs

 12   façons. Voilà, en fait, en réalité, c'est qu'il ne pouvait pas se servir

 13   d'armes lourdes contre des personnes qui lancent des roches ou des pierres

 14   ou des flèches. Je suis d'accord pour dire que l'emploi d'une artillerie

 15   lourde contre ces derniers serait un emploi d'une force exagérée.

 16   Mais je n'ai pas cru comprendre que la force qui doit être utilisée doit

 17   être plus ou moins la même que la force employée par la personne qui

 18   attaque afin de pouvoir avoir le même nombre de morts des deux côtés.

 19   Clairement, cela ne peut pas vouloir dire cela, mais il semblerait que

 20   l'Accusation propose cela, c'est que les Serbes auraient dû laisser l'UCK

 21   tuer plus de leurs hommes plutôt que d'essayer de riposter ou d'employer

 22   une force.

 23   L'argument que les forces serbes se sont servies d'artillerie alors que le

 24   parti opposé n'en avait pas, j'affirme que ce n'est pas la loi, ça n'a

 25   jamais été la loi et cela ne figure nulle part dans la loi. Prenez

 26   n'importe quelle guerre, vous verrez que ça n'a jamais été le cas. De toute

 27   façon, que veut dire cette force exagérée ou disproportionnée? De quelle

 28   façon est-ce que l'on peut parler de force exagérée, par exemple, si on

Page 27187

  1   pense du fait de lancer des bombes à éclatement dans un pays qui n'a pas de

  2   capacité d'antidéfense aérienne ? Les fragmentations et les munitions

  3   telles que les bombes à l'uranium sont peut-être à ce moment-là quelque

  4   chose dont on pourrait parler, mais les frappes aériennes de l'OTAN n'ont

  5   pas lancé de telles bombes sur le territoire.

  6   Donc il y avait une insurrection du terroriste et vous avez tout à fait le

  7   droit d'essayer de riposter avec des armes lourdes. Il n'est pas nécessaire

  8   d'envoyer les soldats, les fantassins ou des membres de l'infanterie sur le

  9   terrain pour qu'ils soient abattus.

 10   J'allais justement vous parler d'une allégation complètement farfelue qui

 11   figure au paragraphe 104 selon laquelle Ojdanic aurait dû discipliner

 12   Pavkovic. M. Sepenuk en a parlé de façon très claire.

 13   Alors q'est-ce que ceci, de toute façon, cette discipline aurait dû être, à

 14   discipliner ? Pourquoi ? Est-ce qu'il y a quelque élément de preuve nous

 15   permettant de croire que Pavkovic était en train de commettre des crimes

 16   pour lesquels il aurait dû être sanctionné ? Y a-t-il des éléments de

 17   preuve nous permettant qu'il faisait quoi que ce soit outre que d'être

 18   soldat complètement exceptionnel et exemplaire et qui obéissait aux ordres

 19   qui lui avaient été donnés ?

 20   Vous savez, lorsque vous êtes un officier au sein d'une armée, vous avez

 21   l'obligation d'obéir aux ordres que vous recevez à moins que ces ordres ne

 22   représentent une violation de la loi. Prenez n'importe quel ordre dans

 23   cette affaire et vous ne trouverez pas de tels ordres, ce sont des ordres

 24   que le général Pavkovic a suivi et qu'il ne violait pas la loi.

 25   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Monsieur Ackerman, quel paragraphe

 26   est-ce dans le mémoire du bureau du Procureur ?

 27   M. ACKERMAN : [interprétation] Ma note dit 104.

 28   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Ce n'est pas la note 104, mais ce

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  1   n'est pas grave. Veuillez poursuivre, je vous prie.

  2   M. ACKERMAN : [interprétation] Il y a également eu des allégations selon

  3   lesquelles il n'aurait pas éventuellement envoyé des rapports de façon

  4   appropriée. Je vais parler d'une fausse allégation quant à l'emploi illégal

  5   de la VJ, mais je ne sais pas ce que l'Accusation pense lorsqu'elle affirme

  6   qu'Ojdanic aurait dû le sanctionner pour quelque chose.

  7   Ojdanic a envoyé Vasiljevic au Kosovo et Farkas, également, pour voir ce

  8   qui se passait sur le terrain. Ces derniers sont revenus lui disant "qu'ils

  9   avaient conclu que tous les crimes qui avaient été commis avaient l'objet

 10   de procédures judiciaires et que les auteurs de crimes étaient [inaudible].

 11   Donc 80 % [comme interprété]  des crimes et qu'il n'y a pas problème, aucun

 12   problème."

 13   C'est au paragraphe 837, Monsieur le Président.

 14   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

 15   M. ACKERMAN : [interprétation] Je souhaiterais maintenant de vous parler

 16   d'une autre question très importante qu'avance l'Accusation, c'est la

 17   violation des accords d'octobre. J'avance que c'est un des arguments peut-

 18   être le plus farfelu qu'ils aient pu présenter. Vous savez, si vous n'avez

 19   pas d'éléments de preuve à l'appui de l'acte d'accusation, à ce moment-là,

 20   vous pouvez vous pencher sur d'autres choses et accuser des personnes de

 21   toutes sortes de choses pour faire en sorte que ces derniers –- pour qu'on

 22   jette une nouvelle lumière sur ces derniers.

 23   Vous savez, ce n'est pas contre la loi de violer les accords d'octobre et

 24   dans cet acte d'accusation, on ne trouve aucune charge pour faire état de

 25   la violation des accords d'octobre. Ce n'est qu'un écran de fumée.

 26   Au paragraphe 776, ils affirment qu'Ojdanic a aidé de façon délibérée à ce

 27   que les accords soient violés. Au paragraphe 781, ils affirment que le fait

 28   de violer les accords d'octobre ont permis à qu'une solution pacifique ne

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  1   soit pas faite au Kosovo. De quelle façon est-ce que c'est fait ? L'UCK a

  2   pris un avantage de Serbes, ont élargi leurs forces. Le fait de violer ces

  3   accords n'a pas du tout mis un frein aux solutions de paix. Ce sont les

  4   accords eux-mêmes qui  ont mis en difficulté la réalisation des accords de

  5   paix, car cela les mettait dans une position [inaudible] même, menaient le

  6   même type d'attaques contre les Serbes et les Albanais.

  7   Même l'Accusation est d'accord pour dire que l'UCK ait tiré un avantage de

  8   la situation. M. Hannis a dit mercredi dernier que l'UCK a repris du poil

  9   de la bête. Il vous l'a dit dans le contexte dans lequel il vous a dit que

 10   la stratégie 1998 antiterroriste était un échec et qu'une nouvelle

 11   stratégie devait être créée, mais en réalité, la stratégie de 1998 a

 12   fonctionné, ensuite les accords d'octobre ont donné des restrictions aux

 13   Serbes, ce qui a permis à l'UCK d'entrer par une porte ouverte.

 14   Vous vous rappellerez d'une conversation interceptée qui a eu lieu entre

 15   deux membres de l'UCK. C'est ce qui figure au paragraphe 120 de notre

 16   mémoire, donc l'un des membres de l'UCK disait à

 17   l'autre : Les vérificateurs sont arrivés. Les choses allaient bien se

 18   passer. Ils ne vont pas nous attaquer, mais vous pouvez les attaquer.

 19   Faites attention à vos maisons pendant la nuit. Gardez les champs pendant

 20   la nuit. Menez à bien vos attaques, ensuite vous reviendrez à la base.

 21   Nous pouvons conclure plusieurs choses. Garder vos maisons pendant la nuit,

 22   ceci veut dire qu'ils étaient dans la nuit, ils étaient dans leur maison

 23   pendant la nuit, ils étaient protégés par les villageois. Donc ils

 24   sortaient, ils menaient à bien leurs attaques. Ils revenaient par la suite

 25   dans leurs villages. Ils ne portaient pas, bien sûr, les uniformes. Mais

 26   c'était exactement les mêmes choses que nous avions [inaudible] façon de

 27   fonctionner. Le Procureur affirme que Pavkovic inventait de toutes pièces

 28   que l'UCK attaquait les forces serbes, mais qu'ils ne faisaient que faire

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  1   semblant d'attaquer les forces serbes, mais ils disent qu'ils avaient

  2   exactement fait ceci. Nous savons que les observateurs ne faisaient aucun

  3   effort vraiment sérieux pour contraindre l'UCK.

  4   Et le Juge Nosworthy, comme elle l'a dit, lorsque les Serbes ont pris part

  5   à cet accord, ils devaient certainement s'entendre qu'il aurait une

  6   certaine sorte de parité entre les forces opposantes. Ils devaient

  7   s'attendre à ce que l'UCK aurait une certaine restriction, recevrait une

  8   certaine restriction, tout comme eux, avaient eu une restriction, mais en

  9   réalité, ceci allait faire exactement ce que les pouvoirs occidentaux

 10   allaient dire, c'est que cet accord allait amener un cessez-le-feu, mais au

 11   lieu de ceci, ce qui est arrivé, c'est que l'UCK n'a fait que prendre

 12   beaucoup plus de forces et pouvait se déplacer partout. Vous vous

 13   rappellerez de la déclaration faite par John Crosland à ce sujet.

 14   Pendant que j'étais en train d'écouter les arguments présentés par

 15   l'Accusation, il me semblait qu'ils parlaient presque de Serbes qui avaient

 16   envahi un pays indépendant d'un tiers pays, qu'ils auraient de façon

 17   illégale envahi un pays tiers. Mais il ne faut pas oublier que ce sont des

 18   événements qui se sont déroulés dans leur pays. Ces événements se

 19   déroulaient en Serbie, là où leur armée avait complètement le droit de se

 20   trouver. C'est un endroit qui était leur endroit, un territoire qui était

 21   le leur. Vous venez tous de pays différents, et dites-moi, que se

 22   passerait-il si une insurrection telle que celle-ci avait lieu dans votre

 23   pays ? Si des terroristes essayaient de s'emparer de votre pays ? Je crois

 24   que vous auriez fait face au problème presque de la même façon que les

 25   Serbes, c'est-à-dire d'essayer de trouver une solution pour sauver leur

 26   pays, et vous feriez sans doute la même chose.

 27   Ce que les Serbes ont fait en 1998, lorsqu'ils ont fait venir des forces

 28   supplémentaires vers la fin, ceci a sans doute sauvé beaucoup de vies. Nous

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  1   ne savons absolument pas quelle serait l'ampleur de l'hécatombe si on

  2   aurait permis à l'UCK toute liberté au Kosovo à la suite des accords

  3   d'octobre.

  4   Ensuite, il faut se poser la question : quelle est la pertinence des

  5   violations de ces accords dans cette affaire en l'espèce ? On pourrait

  6   trouver une pertinence, j'affirme, si le bureau du Procureur pouvait

  7   démontrer que toutes les forces additionnelles emmenées au Kosovo étaient

  8   contre les accords quant à la commission de la guerre au Kosovo. Mais nous

  9   n'avons absolument aucun élément de preuve pour voir que les soldats et les

 10   unités qui avaient été emmenés au Kosovo, que ceci avait été fait en

 11   violation des accords d'octobre. Ce n'est encore une fois qu'un écran de

 12   fumée.

 13   Ils prétendent que Pavkovic avait emmené la 72e Brigade spéciale au Kosovo

 14   sans l'autorité, et ceci montre que Pavkovic tout seul violait les accords

 15   d'octobre, mais ils ne font que vous renvoyer à la pièce P1947, le document

 16   où Pavkovic demande une resubordination de cette brigade au Corps de

 17   Pristina. Mais ils omettent de vous renvoyer au dos P1948, qui est l'ordre

 18   du 19 février du général Ojdanic dans lequel il ordonne la resubordination

 19   de cette unité à la 3e Armée, je cite : "Dans le but de mener à bien des

 20   missions antiterroristes et antisabotage."

 21   Donc de nouveau, le général Pavkovic ne fait qu'obéir aux ordres qu'il

 22   recevait, et le but n'était pas de se trouver aux abords du Kosovo. C'était

 23   pour être au Kosovo, je cite: "Dans le but de mener à bien des tâches ou

 24   une mission antiterroriste et antisabotage." Il ne pouvait pas mener des

 25   opérations antiterroristes à l'extérieur du Kosovo, bien sûr. C'est un

 26   autre argument qu'ils utilisent contre le général Pavkovic et ils devaient

 27   savoir que c'est un faux argument. Ce n'est pas un argument qui tient la

 28   route.

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  1   Au paragraphe 25, je passe à un autre sujet, qui se trouve dans le mémoire

  2   du bureau du Procureur, dit, je cite : "Tous les accusés ont partagé les

  3   sentiments de Milosevic concernant le Kosovo et lui étaient dévoués,

  4   loyaux." Ensuite, on dit : "Des personnes telles Nebojsa Pavkovic étaient

  5   près de lui également." Et ils citent que, s'agissant de Vasiljevic, à la

  6   pièce P2600, paragraphe 21.

  7   Que des personnes comme Vasiljevic -- en fait, on ne parle pas du

  8   tout de liens très étroits entre Vasiljevic et ce dernier, liens qui

  9   existaient entre Pavkovic et Milosevic. Donc ce sont des liens indirects,

 10   des liens de famille indirects qui auraient pu influencer leur relation et

 11   non pas des liens familiaux très étroits.

 12   Au paragraphe 137, l'Accusation parle de la mise à pied de certains

 13   officiers…

 14   Page 72, ligne 15, j'ai parlé de liens personnels étroits et non pas de

 15   liens de famille étroits.

 16   Donc je vous parle maintenant du paragraphe 137 : "Le PV de la SDC parle

 17   d'éléments de preuve concrets, à savoir que les membres de l'entreprise

 18   criminelle commune Milosevic et Milutinovic ont mis à pied des personnes

 19   qui ne voulaient pas mettre à bien les objectifs de l'entreprise criminelle

 20   commune et…" Non. C'est une allégation qui est complètement infondée. Le

 21   bureau du Procureur s'est employé de la phrase éléments de preuve concrets.

 22   Que veut dire éléments de preuve concrets ? Ce sont des éléments de preuve

 23   qui ne peuvent être réfutés et qui ne peuvent pas être contrecarrés. Ils

 24   disent que cette pièce prouve de façon concrète que Milosevic et

 25   Milutinovic ont mis à pied des personnes qui n'étaient pas désireuses de

 26   mener à bien les objectifs de l'entreprise criminelle commune.

 27   Et j'aimerais savoir si vous trouvez que ceci vraiment démontre clairement

 28   cela. Absolument pas. Où sont les éléments de preuve qui démontrent que

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  1   Pavkovic voulait mettre en œuvre les objectifs de l'entreprise criminelle

  2   commune ? Vous ne pouvez pas trouver cela nulle part. Nulle part Pavkovic

  3   dit: D'accord, je vais déporter des personnes, je vais tuer des personnes.

  4   Cela ne se trouve pas dans ces documents. C'est la raison pour laquelle je

  5   dis que cette pièce n'est pas du tout une pièce telle qu'ils le prétendent.

  6   Il n'a jamais tué d'Albanais. D'où sortent-ils cette idée qu'il a fait tout

  7   pour mettre à bien les objectifs ? Je crois que c'est une tentative

  8   désespérée de l'Accusation de prouver quelque chose. Ce n'est même pas

  9   logique que de dire ce genre de chose.

 10   Paragraphe 916, en parlant de Pavkovic de nouveau. Il se lit comme suit, je

 11   cite : "Il avait l'autorité de démettre de leurs fonctions des soldats et

 12   des commandants. Pendant la guerre, Pavkovic se rendait sur le terrain afin

 13   d'inspecter les unités. Pavkovic avait également la capacité de démettre de

 14   leurs fonctions des volontaires qui ont pris part aux activités

 15   criminelles."

 16   Bien, la question que vous devez vous poser est de savoir quand est-ce que

 17   nous avons appris, dans le cadre du procès, que Pavkovic a eu connaissance

 18   de volontaires très précis ? Quand est-ce qu'on lui a donné des noms de

 19   volontaires qui auraient commis des activités illicites et qu'il n'a pas

 20   démis de leurs fonctions ? Où est-ce que nous pouvons voir qu'il savait

 21   qu'il y avait des soldats qui avaient commis des crimes de guerre et qu'il

 22   n'a pas renvoyés. Nulle part. Nulle part vous ne trouverez ces éléments de

 23   preuve. C'est la raison pour laquelle je dis que cette affirmation n'a

 24   aucun impact et ne fait aucun sens.

 25   Pourquoi est-ce que le bureau du Procureur ne dit pas, par exemple, si

 26   Perisic disait la vérité, il avait l'autorité de démettre de ses fonctions

 27   Pavkovic mais il ne l'a pas fait ? Pourquoi est-ce que le bureau du

 28   Procureur n'argue pas ce genre de thèse-là, par exemple ?

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  1   Je voudrais maintenant passer à la question d'armement et de désarmement,

  2   paragraphe 872. Pavkovic a fait appel au Corps de Pristina pour surveiller

  3   le comportement de la population albanaise et désarmer les civils albanais

  4   le long de la zone frontalière.

  5   Pourquoi, qu'on me dise pourquoi, vu la situation qui était celle qui

  6   régnait au Kosovo à l'époque, pourquoi était-ce une si mauvaise idée que

  7   cela que de désarmer les Albanais, les Albanais qui s'étaient soulevés

  8   contre les Serbes ? Pourquoi est-ce que c'était une si mauvaise idée que

  9   cela ? Comme je l'ai dit précédemment, quand on se retrouve confronté à une

 10   telle insurrection, si ça avait été votre cas, est-ce que vous n'auriez pas

 11   voulu prendre des mesures pour y mettre un terme ? Combien de vies ont été

 12   sauvées grâce à cette opération de désarmement ? Combien de vies a-t-on

 13   sauvées en prenant ces armes à des terroristes potentiels qui auraient

 14   œuvré pour l'UCK ? Vous avez entendu l'extrait d'une conversation

 15   interceptée où il était dit, "Sortez, menez à bien une action et retournez

 16   au village." Et c'est ce qui se passait, la VJ allait dans ces villages

 17   près de la frontière et prenait les armes qui s'y trouvaient. Ils ne

 18   menaient pas à bien des opérations pour ensuite se réfugier dans leurs

 19   villages comme on l'a entendu ici. Enlever ces armes était une manière de

 20   sauver des vies. Ce n'est pas un crime. C'est quelque chose de tout à fait

 21   raisonnable. Il s'agissait de rétablir la paix, de sauver des vies.

 22   Combien de vies auraient pu être sauvées si on avait désarmé l'IRA plus tôt

 23   qu'on ne l'a fait ? Combien de vies ? Des centaines, peut-être ? On n'en

 24   sait rien.

 25   Nous savons que les terroristes ne portaient pas toujours des uniformes,

 26   que parfois ils vivaient dans les villages. Nous savons qu'ils tuaient des

 27   Serbes et les Albanais qui étaient favorables aux Serbes, ils avaient

 28   beaucoup d'armes. Les désarmer, c'était répondre à la violence et aux

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  1   meurtres, c'était sauver des vies, et rien n'indique qu'on ait procédé à

  2   des meurtres de manière totalement aveugle comme l'affirme l'Accusation.

  3   Rien dans le dossier ne l'indique.

  4   Paragraphe 873. Dès juin 1998, Pavkovic a délivré un ordre aux fins

  5   d'organiser les habitants non en unités de défense locale. Il s'agissait

  6   également de les armer avec des fusils à lunette, des fusils automatiques

  7   et des fusils semi-automatiques ainsi que des mitraillettes.

  8   Une fois encore on déforme la vérité. On affirme que Pavkovic a pris cette

  9   mesure, qu'elle relève de la responsabilité de Pavkovic et qu'il

 10   distribuait des armes à des civils non-Albanais.

 11   Vous savez déjà, Mesdames, Messieurs les Juges, après l'avoir entendu au

 12   cours des réquisitoires et plaidoiries et au cours du procès, vous savez

 13   que ceci s'est fait suite à un ordre reçu par Pavkovic de Samardzic, et

 14   vous savez qu'au cours d'une réunion, Samardzic a expliqué comment il en

 15   était venu à délivrer cet ordre. Là où on essaie de vous induire en erreur

 16   c'est lorsqu'il s'agit de la nature même de cet ordre.

 17   Si vous examinez la pièce P1415, l'ordre signé par Pavkovic, vous

 18   constaterez qu'il y fait référence au fait que cet ordre est rendu

 19   conformément à l'ordre qui avait été précédemment délivré à la 3e Armée,

 20   numéro 168-104, et à qui donne-t-il des armes ? Paragraphe 1, procéder à la

 21   préparation technique et à la distribution de munition aux appelés

 22   militaires affectés aux unités de guerre du Corps de Pristina dans la

 23   région militaire de Pristina et sur la 202e base logistique. Il ne s'agit

 24   pas de civils non-Albanais, ici. Il s'agit d'appelés. Est-ce que

 25   l'Accusation est en train de nous dire que c'est illégal de donner des

 26   armes aux soldats, à ces conscrits, à ces appelés ? Voilà exactement ce à

 27   quoi revenait cet ordre.

 28   Paragraphe 126 où il est question de l'armement de la population non-

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  1   siptar. L'Accusation avance des affirmations qui ne sont pas justifiées :

  2   "L'absence d'ordres écrits définissant les missions de la population non

  3   albanais indique que les commandants sur le terrain ont donné des

  4   instructions verbales pour ce faire et pour organiser ses troupes sur le

  5   terrain." Or, rien dans le dossier ne conforte cette affirmation. Dans le

  6   compte rendu d'audience, il est simplement question d'assurer la sécurité

  7   de certains points sur les routes, de certaines installations, rien de

  8   plus. Gergar, qui a déposé à ce sujet, a dit que dans sa zone de

  9   responsabilité, il n'y avait même pas de civils non-Albanais qui étaient

 10   armés, donc il n'a jamais eu ce type de difficulté. Une fois encore, on

 11   essaie de vous induire en erreur. Qu'est-ce qui est au dossier qui indique

 12   que des crimes ont été commis par ces gens-là ? Rien. Rien ne l'indique. Et

 13   leur donner des armes, ce n'est pas un crime. Ç'aurait été un crime si on

 14   les avait armés en leur ordonnant de commettre des crimes ou en les

 15   incitant à les commettre, or ceci n'a pas été prouvé, ce n'est pas au

 16   dossier.

 17   Si vous prenez ce qui est affirmé par l'Accusation et si vous regardez ce

 18   que cela implique, a contrario, on voit que ça ne tient pas debout, donc

 19   parfois l'argument de l'Accusation est assez difficile à suivre et manque

 20   de sérieux.

 21   On nous a dit que Pavkovic n'avait pas rendu compte. Mais rendu compte de

 22   quoi ? Tout d'abord, l'Accusation reconnaît que ça n'a eu aucun impact. Au

 23   paragraphe 740 : "En dépit des manquements par le commandement de la 3e

 24   Armée à ses obligations de rendre compte, Ojdanic a reçu les informations

 25   pertinentes en provenance d'autres sources." Donc ça ne fait aucune

 26   différence, d'après l'Accusation. Ce n'est pas quelque chose dont vous

 27   devez non plus tenir compte, vous. Ça n'a aucune pertinence ici, cette

 28   question.

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  1   Je voudrais revenir à la question posée par M. le Juge Chowhan à Me Sepenuk

  2   au sujet de ces comptes rendus, de ces rapports. Vous avez parlé de la

  3   lettre de Louise Arbour. Je crois qu'il convient de se souvenir que cette

  4   lettre a été envoyée le 26 mars. Il est impossible que Louise Arbour ait eu

  5   quelque information que ce soit au sujet de ce qui se passait au Kosovo le

  6   26 mars. C'est absolument impossible.

  7   L'Accusation nous dit que de par cette lettre les intéressés étaient

  8   informés de ce qui se passait, qu'on en était conscient, voilà tout.

  9   S'agissant de l'obligation de comptes rendus et de signaler ces crimes, ça

 10   concerne les procureurs militaires. Voilà ceux qui doivent être informés.

 11   Le droit nous l'indique, les témoins nous l'ont dit. Le commandant de la

 12   brigade et l'officier chargé de la sécurité ou du renseignement au sein de

 13   la brigade doivent le faire, doivent prendre contact avec le procureur

 14   militaire. Vasiljevic et Farkas, c'est ce qu'ils vous ont dit. Ils ont dit

 15   qu'au niveau des brigades, on réagissait à ces crimes, on engageait les

 16   poursuites nécessaires et ils estimaient que s'il n'y avait pas de

 17   problème, il était inutile de rendre compte en amont de la voie

 18   hiérarchique, et de ce fait il n'y a pas eu de rapport fait dans la voie

 19   hiérarchique de la sécurité qui était distincte de l'autre dans l'armée, et

 20   leur travail à eux était justement de réagir à ces crimes, de les signaler

 21   aux tribunaux militaires et d'en faire rapport. Voilà, ça c'est une chose.

 22   Pour ce qui est des rapports de combat, leur objectif était d'indiquer le

 23   travail accompli par les procureurs militaires et les tribunaux militaires,

 24   et vous verrez que dans tous les rapports de combat de la 3e Armée, il y a

 25   toujours un paragraphe qui concerne les activités du bureau du procureur

 26   militaire. C'est ce qui devait figurer dans les rapports de combat, et

 27   c'est ce qui y figurait également. Donc il n'y a pas de manquement mis en

 28   évidence ici.

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  1   Et il n'y a aucun élément dans le dossier indiquant qu'à quelque

  2   moment que ce soit on ait abandonné les poursuites pour crimes de guerre. A

  3   aucun moment le Procureur militaire n'a dit : "Bon, on va cesser de mener à

  4   bien ces poursuites. Ça suffit." Ce qui s'est passé est la chose suivante :

  5   la guerre a pris fin, les Serbes ont dû partir du Kosovo et beaucoup de

  6   soldats ont quitté l'armée donc il a fallu transférer les affaires aux

  7   instances judiciaires civiles. Ça a entraîné une situation de chaos. Mais

  8   si vous regardez ce qui s'est passé depuis la guerre, vous constaterez que

  9   de nombreuses poursuites ont été engagées devant les tribunaux civils pour

 10   crimes commis par des soldats au Kosovo pendant cette guerre. Donc les

 11   Serbes n'ont pas mis un terme aux poursuites. Ça s'est poursuivi.

 12   On a affirmé que Pavkovic n'a pas fait rapport de ces faits alors qu'il en

 13   était informé. Dans son mémoire, l'Accusation réfute pratiquement elle-même

 14   cette affirmation, parce que parfois dans les arguments qu'elle présente

 15   contre un coaccusé, elle fournit des éléments en faveur d'un autre

 16   coaccusé.

 17   On nous parle de Sainovic dans ce mémoire au paragraphe 711 et

 18   l'Accusation nous dit que : "Pavkovic a dit qu'il avait informé Sainovic du

 19   fait qu'il avait vu à Prolom Banja des membres des Skorpions qui portaient

 20   des uniformes semblables aux uniformes de l'OTAN."

 21   L'INTERPRÈTE : Les interprètes n'ont pas saisi la suite de ce

 22   passage.

 23   M. ACKERMAN : [interprétation] Il a donc informé Sainovic de ces faits. On

 24   voit que quand Pavkovic est informé de quelque chose il en informe

 25   Sainovic.

 26   Paragraphe 555, "Il s'agit là des mesures nécessaires et raisonnables

 27   destinées à punir ou à prévenir. Les mesures en question, ce sont les

 28   mesures que peut effectivement prendre un supérieur hiérarchique et il faut

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  1   les évaluer au cas par cas. Il s'agit d'évaluer le niveau de contrôle

  2   effectif du commandant en question, et c'est ça qui va permettre à la

  3   Chambre de décider s'il a pris les mesures qui s'imposaient pour empêcher

  4   que les crimes ne soient commis ou pour en sanctionner les auteurs. De

  5   manière générale, on peut dire que les mesures nécessaires, ce sont les

  6   mesures appropriées permettant au supérieur de s'acquitter de ses

  7   obligations et montrant qu'il a sincèrement, qu'il a sérieusement essayé de

  8   prévenir ou de punir, et les mesures raisonnables, ce sont les mesures que

  9   ce supérieur hiérarchique a la capacité matérielle de prendre.

 10   Or là, on a une description qui correspond pratiquement mot pour mot

 11   à mon client, parce qu'il correspond tout à fait à la description qui vient

 12   d'être faite ici par l'Accusation.

 13   Je crois qu'on trouve quelque 27 ordres de Pavkovic versés au

 14   dossier. Dans ces ordres, il ordonne que l'on respecte le droit de la

 15   guerre. Il ordonne que l'on respecte les règles applicables en temps de

 16   guerre, et il indique que s'il y a manquement à ces obligations, il y aura

 17   rapidement sanction. A 27 reprises il le fait. Est-ce qu'il aurait dû le

 18   faire une vingt-huitième fois ? Est-ce que c'est ce que dit l'Accusation ?

 19   Est-ce qu'il aurait dû le faire 30 fois ? Que se serait-il passé s'il

 20   n'avait rendu que 15 ordres ? Est-ce qu'à ce moment-là il serait coupable ?

 21   Je n'en sais rien. Mais si vous regardez la situation de tout autre chef

 22   militaire à son niveau pendant cette période, je me demande si vous

 23   parviendriez à trouver 27 ordres de ce type. Je pense qu'ici on a à faire à

 24   des efforts absolument exceptionnels de sa part pour prévenir et punir.

 25   Monsieur le Président, je peux, si vous souhaitez, m'interrompre

 26   maintenant. Je continuerai ensuite à parler de l'obligation de prévenir et

 27   de punir. J'en aurai à peu près pour dix minutes. Je ne sais pas ce que

 28   vous décidez.

Page 27201

  1   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous allons suspendre, Maître

  2   Ackerman, et nous reprendrons à 13 heures 45.

  3   --- L'audience est levée pour le déjeuner à 12 heures 45.

  4   --- L'audience est reprise à 13 heures 47.

  5   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Ackerman.

  6   M. ACKERMAN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Madame,

  7   Messieurs les Juges. J'espère que vous avez mangé avec bon appétit. Moi,

  8   oui. Si bien que là je m'assoupi un peu à cause de la digestion.

  9   On me dit qu'il faudrait que je précise un certain nombre de choses. J'ai

 10   parlé des 27 ordres de Pavkovic au sujet du respect du droit de la guerre.

 11   Je sais que précédemment j'ai expliqué qu'il y a eu un tel nombre d'ordres

 12   parce qu'il y avait sans cesse des nouvelles recrues qui arrivaient, donc

 13   il fallait être sûr que ces recrues soient informées de ces ordres.

 14   Autre élément qui entre en ligne de compte c'est qu'il recevait des ordres

 15   qui lui venaient du général Perisic ou du général Ojdanic ou du général

 16   Samardzic. Donc il se contentait de transmettre ces ordres dans le cadre de

 17   ces attributions, si bien, que cet effort qu'il faisait ça ne venait pas

 18   uniquement de lui, c'était quelque chose qui était manifeste tout au long

 19   de la voie hiérarchique au sein de la VJ. J'espère que j'ai précisé ainsi

 20   mon propos.  

 21   Paragraphe 833. L'Accusation vous dit de manière assez dramatique que

 22   Gojevic a déclaré que seuls 12 % des crimes dont ont été saisis les

 23   tribunaux militaires étaient des crimes de guerre, des crimes contre la

 24   personne, tels que ceux qui figurent à l'acte d'accusation. Or moi, je vous

 25   dis que ce pourcentage il est élevé, parce que l'essentiel du travail des

 26   tribunaux, c'était normalement notamment désertion et crimes de ce type.

 27   Donc s'il y a 12 % des poursuites qui concernent des crimes de guerre,

 28   meurtres et autres, je crois que le pourcentage est vraiment élevé. Ça

Page 27202

  1   montre que le travail était fait de manière exceptionnelle, de manière

  2   excellente, surtout si on réfléchit à une chose. Tout ceci, ça s'est

  3   produit pendant une période de temps vraiment limitée. Regardez combien de

  4   temps il nous a fallu à nous pour préparer le procès en l'espèce. Combien

  5   d'années se sont écoulées depuis les événements du Kosovo avant que

  6   l'affaire ne soit mise en état, avant que l'Accusation ne soit prête à

  7   plaider ici. Le fait donc que les intéressés n'aient pas été jugés pendant

  8   les 70 jours qu'a duré la guerre, ça ne veut rien dire. C'était impossible

  9   de toute façon. Il nous faut en tirer aucune conséquence.

 10   Paragraphe 836 : "Après sa visite au Kosovo en juin 1999, Farkas a informé

 11   Ojdanic lui-même de cette espèce de problème de communication, de la

 12   défaillance dans le système de compte rendu. Farkas a déclaré que des

 13   mesures avaient été prises pour punir les auteurs des crimes, et qu'en fait

 14   il y avait tout simplement un problème au niveau des rapports. L'Accusation

 15   nous dit que ce n'est pas crédible vu le petit nombre de crimes qui ont

 16   fait l'objet de poursuites, étant donné le nombre de crimes qui figurent à

 17   l'acte d'accusation."

 18   Là, je reprends les arguments que je vous ai présenté précédemment. Moi,

 19   j'estime que ce pourcentage de 12 %, ça montre que le travail réalisé était

 20   de qualité.

 21   L'Accusation nous dit qu'il y a eu des remplacements à certains postes pour

 22   que les intéressés agissent selon les désirs de Milosevic. Alors les deux

 23   individus en question nommés par Milosevic, ce sont Vasiljevic et Farkas.

 24   L'Accusation s'appuie sur leurs dépositions. On nous dit qu'ils ont été

 25   nommés, parce qu'ils devaient contribuer à la réalisation d'entreprise

 26   criminelle commune. Alors dans ces conditions, pourquoi ils ne sont pas

 27   assis ici, derrière

 28   moi ?

Page 27203

  1   Ce sont des gens qui étaient nommés par Milosevic pour aller sur place et

  2   voir ce qui se passait. C'est tout. Rien n'indique qu'ils aient eu une

  3   relation particulière avec Milosevic ou ses amis, ou qu'ils dissimulaient

  4   quoi que ce soit. Quand on est chef militaire, comme l'étaient Pavkovic et

  5   Ojdanic, on envoie des gens sur le terrain pour vérifier ce qui se passe

  6   parce qu'on a confiance en eux. On choisit des gens de confiance, et rien

  7   n'indique que Vasiljevic ou Farkas n'étaient pas des gens dignes de foi

  8   pour mener à bien ce travail. Quand il vous faut un rapport, on est en

  9   droit de l'accepter, ce rapport, en tout cas plus que n'importe quel

 10   article de presse écrit par un journaliste à Bruxelles, un journaliste qui

 11   écoute les déclarations de Jamie Shea. Ecouter les briefings de Jamie Shea

 12   au nom de l'OTAN et toutes les sottises qui étaient débitées à ce moment-

 13   là, c'est vraiment la pire source que l'on puisse imaginer.

 14   Paragraphe 900, il s'agit ici du fait que Pavkovic aurait été au courant

 15   des crimes commis. On nous dit que Pavkovic était au courant au début de

 16   l'avril 1999 de l'existence d'un charnier dans la zone d'Izbica. Pavkovic

 17   dit en avoir entendu parler. Il a été informé cependant par ses subordonnés

 18   qu'aucun membre de la VJ n'avait été impliqué, si bien qu'il n'a pris

 19   aucune mesure, sinon, qu'il a signalé la chose à l'état-major du

 20   commandement Suprême, si bien qu'on peut dire qu'il a fait ce qu'il devait

 21   faire.

 22   Qu'est-ce qu'il aurait dû faire de plus ? Il a entendu parler de cet

 23   événement. Il a enquêté. On lui a expliqué qu'aucun de ses subordonnés,

 24   aucune des personnes sur qui il exerçait un contrôle effectif n'était

 25   impliquée. Il a signalé la chose. Il a enquêté. Il a fait un rapport

 26   contenant ses conclusions, et voilà. Il était en droit de croire ce que lui

 27   disaient ceux qu'il avait envoyés enquêter sur place.

 28   Paragraphe 902, les ordres donnés par Pavkovic montrent qu'il était au

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  1   courant des agissements criminels de ces hommes. On voit le document du 17

  2   avril avec une mise en garde : "D'après certains rapports, dans certains

  3   cas les dispositions du droit international n'ont pas été respectées au

  4   cours des opérations de combat. Certains commandements et certaines unités

  5   n'ont pas pris les mesures nécessaires pour mettre un terme aux crimes de

  6   meurtre, de pillage."

  7   Il fait ce qu'il a à faire dans ces cas-là. Quand il apprend ce genre de

  8   chose, il envoie un ordre en disant qu'il ne va pas accepter ce genre de

  9   chose, ce genre d'agissement. C'est ce qu'il tenu de faire aux termes du

 10   droit, et il le fait.

 11   Paragraphe 903 maintenant : "Au début du mois de mai, Farkas, ainsi que

 12   d'autres membres de l'état-major du commandement Suprême, analyse les

 13   systèmes de compte rendu au sein de la 3e Armée. Farkas découvre que

 14   Pavkovic reçoit les informations au sujet de l'agissement criminel de ses

 15   subordonnés, mais n'a pas transmis ces informations en amont de la voie

 16   hiérarchique, et pour préciser ce qu'il en était, pour comprendre mieux, il

 17   rencontre Pavkovic."

 18   Une fois encore, le bureau du Procureur n'a pas compris ce qu'il en était.

 19   Si vous regardez la déposition de Farkas, on voit que Farkovic [comme

 20   interprété] n'a pas dit que Pavkovic recevait ces rapports et ne les

 21   transmettaient pas. Il a simplement dit que ces rapports, ils étaient

 22   établis au niveau de la brigade mais qu'ils n'étaient pas ensuite transmis

 23   plus haut, si bien que les personnes chargées de la sécurité au sein de la

 24   brigade, les commandants des brigades, ce sont eux qui ne rendaient pas

 25   compte de ce qui se passait au Corps de Pristina ni à la 3e Armée, si bien

 26   que Pavkovic n'était pas en mesure de savoir ce qui se passait.

 27   Voici ce que dit Pavkovic. Je le cite mot pour mot. Je cite : "Oui, il y

 28   avait des différences, et la différence c'est qu'il y a eu des crimes

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  1   commis et il y a eu des mesures, des mesures qui avaient été édictées et

  2   qui n'ont pas été respectées. Il y a eu des rapports réguliers jusqu'au

  3   niveau de la brigade et au niveau du commandement de la brigade, mais

  4   ensuite ces informations ne nous ont pas été communiquées, ce qui m'aurait

  5   permis d'avoir connaissance des agissements criminels commis dans cette

  6   zone."

  7   Bien entendu, on peut se poser une question. On doit se poser une question.

  8   Qu'est-ce que ça aurait changé ? Puisque ces gens étaient poursuivis,

  9   étaient sanctionnés, puisqu'il y avait des procès qui se déroulaient aussi

 10   rapidement que possible, à ce moment-là quel était l'intérêt de faire des

 11   rapports ?

 12   Paragraphe 920, "Etant donné que d'après le Procureur le système de justice

 13   militaire fonctionnait bien, les auteurs des crimes commis contre les

 14   civils albanais et le fait qu'il n'y ait pas de rapport sur ce type

 15   constitue un problème, puisque ces crimes n'étaient pas retransmis ou

 16   transférés aux tribunaux militaires."

 17   Premièrement, ceci n'a aucun impact sur Pavkovic. Rien n'indique ici qu'il

 18   avait connaissance des crimes commis, ou s'il en est informé qu'il n'ait

 19   pas signalé la chose aux autorités compétentes. Le bureau du Procureur n'a

 20   fourni aucune liste indiquant les crimes commis contre des citoyens

 21   albanais qui n'auraient pas l'objet de poursuites, puisque ces poursuites,

 22   elles continuent aujourd'hui, à l'heure où je vous parle."

 23   Pour que le paragraphe que je viens de citer ait une pertinence quelconque

 24   contre Pavkovic, l'Accusation devait montrer quelles étaient les

 25   subordonnés de Pavkovic qui avaient commis ces crimes, qui n'avaient pas

 26   été poursuivis. Il aurait fallu montrer que Pavkovic avait connaissance de

 27   ces faits, qu'il n'avait rien fait ou qu'il avait dissimulé ces

 28   informations. Or, rien de tout ceci n'a été montré, n'a été établi pour

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  1   aucun crime.

  2   Je souhaite maintenant parler très brièvement des faits. Nous en parlons en

  3   détail dans notre mémoire et dans les autres mémoires qui vous ont été

  4   présentés. Au paragraphe 612 [comme interprété], l'Accusation vous parle

  5   des viols qui ont été perpétrés, voilà ce qui est dit : "Les viols

  6   n'étaient pas des actes isolés qui étaient le fait d'individus isolés, leur

  7   but était de terroriser la population et d'obliger les gens à fuir leur

  8   domicile." Aucun élément de preuve n'étaye cette affirmation. Bien entendu,

  9   qu'il y a eu des viols. Penchez-vous sur n'importe quelle guerre quelle

 10   qu'elle soit. Il s'agit de jeunes soldats qui n'occupent pas

 11   particulièrement un rôle dans la société, ce genre d'incidents se produit

 12   même si on essaye d'empêcher que ce soit le cas, il s'agit généralement

 13   d'incidents isolés qui n'ont rien à voir avec la guerre, mais qui sont le

 14   fait de personnes échappant à tout contrôle. Alors il faut prouver que des

 15   viols ont été commis. 

 16   Ils ont été commis, certes, mais cela ne veut pas dire pour autant

 17   qu'il s'agissait de crimes de guerre.

 18   Au paragraphe 313, le MUP et la VJ ont saisi les papiers d'identité des

 19   réfugiés afin de les empêcher de rentrer au Kosovo.

 20   Premièrement, pour ce qui est de la saisie des pièces d'identité, cela ne

 21   s'est pas fait de façon généralisée. Cela ne faisait pas partie d'un plan.

 22   M. le Juge Bonomy a remarqué que dès le premier jour, les Serbes ne

 23   pouvaient pas croire qu'ils allaient vaincre l'OTAN et empêcher les

 24   Albanais de rentrer chez eux. C'est absurde que de croire cela.

 25   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] C'est moi qui ai posé cette question,

 26   Maître Ackerman.

 27   M. ACKERMAN : [interprétation] En effet.

 28   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous tirerons des conclusions sur ce

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  1   point en temps voulu.

  2   M. ACKERMAN : [interprétation] Je ne voulais pas proposer la moindre

  3   conclusion. Je dirais simplement qu'il n'y a pas eu d'effort organisé

  4   visant à saisir ces documents.

  5   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Avant d'attendre la réponse de M.

  6   Hannis sur ce point, peut-être qu'il serait utile qu'il nous dise si l'un

  7   quelconque des témoins a perdu ses papiers. Nous avons vu et entendu de

  8   nombreux éléments de preuve concernant ces activités, mais je ne suis pas

  9   certain que l'un quelconque des témoins ait perdu ses papiers. Peut-être

 10   qu'il y en a eu.

 11   Maître Ackerman.

 12   M. ACKERMAN : [interprétation] Je vous ai dit un peu plus tôt que pour

 13   examiner les allégations du Procureur, il convenait également de voir le

 14   revers de la médaille. Alors, que ce serait-il passé, par exemple, si les

 15   Serbes avaient décidé qu'il valait mieux empêcher qui que ce soit de

 16   quitter le Kosovo, de fermer les frontières, car sinon, quelqu'un pourrait

 17   penser que nous sommes responsables d'expulsion. Donc ils auraient pu

 18   fermer les frontières afin de maintenir tous les Albanais à l'intérieur du

 19   pays.

 20   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Excusez-moi, Maître Ackerman. Veuillez

 21   poursuivre.

 22   M. ACKERMAN : [interprétation] Donc ils auraient pu garder tous les

 23   Albanais à l'intérieur du pays tandis que l'OTAN procédait aux

 24   bombardements, il y aurait eu des morts. Dans ce cas, on aurait dit qu'on

 25   se serait servi de ces personnes comme de boucliers humains. L'Accusation

 26   aurait avancé que l'on se serait servi de ces personnes comme boucliers

 27   humains, que l'on aurait empêché que ces personnes trouvent abri quelque

 28   part.

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  1   Je ne vois pas où est le problème si l'on autorise les Albanais à quitter

  2   le pays, même s'ils ont été encouragés par certains de le faire, il y avait

  3   des bombardements. C'était dangereux. Ce n'était pas un endroit sûr. Donc

  4   on pouvait tout à fait partir et revenir plus tard lorsque la situation

  5   s'était améliorée.

  6   Il y a environ deux millions de personnes qui ont quitté l'Iraq. Personne

  7   ne les a contraints à le faire. Des milliers de personnes ont quitté

  8   l'Ossétie lorsque la Georgie a engagé ses forces là-bas. Ils ne sont pas

  9   encore rentrés. Lorsqu'il y a des bombardements, il y a toujours des

 10   réfugiés. Les gens ont peur, ils veulent fuir la situation.

 11   Certes, les expulsions se sont déroulées dans des conditions

 12   difficiles mais c'était la meilleure chose à faire que de partir vu la

 13   situation, tout le monde savait ce qu'il en était. Certains ont décidé de

 14   s'installer dans d'autres pays.

 15   Au paragraphe 318, l'Accusation passe en revue les éléments de preuve

 16   concernant les faits. Il arrive fréquemment que l'on note qu'il est dit que

 17   ces actes ont été commis par les forces de la RSFY et de la Serbie. Le

 18   général Pavkovic n'exerçait pas de contrôle effectif sur les forces de la

 19   RSFY et de la Serbie. Cela n'a pas été prouvé lorsque l'Accusation parlait

 20   des forces de la RSFY et de la Serbie, en fait, ces actes ont été commis

 21   par des personnes dont l'identité n'est pas connue. Nous ne savons de qui

 22   il s'agit alors on les appelle les forces de la RSFY et de la Serbie. Peut-

 23   être que ce n'est pas vrai.

 24   Examinons un incident mentionné aujourd'hui lorsque l'on a parlé de

 25   personnes qui avaient été tuées, on a finalement déterminé que ceci avait

 26   été le fait de civils et ces civils ont été poursuivis pour les actes que

 27   leur ont été reprochés. Si l'on n'avait pas connu leur identité, on les

 28   aurait appelés les forces de la RSFY et de la Serbie. En d'autres termes,

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  1   les personnes dont l'identité n'est pas connue.

  2   Paragraphe 362, le début des opérations menées par la VJ et le MUP

  3   correspond au moment où des crimes ont été commis dans le secteur de

  4   Pristina et des attaques menées contre les villages de la municipalité,

  5   puis on peut lire : "Il n'y avait pas d'autres forces armées importantes

  6   dans ce secteur à l'époque où les crimes ont été commis." Rien n'étaye

  7   cette affirmation. Comment le saurait-on ? Aucun élément de preuve n'a été

  8   présenté sur ce point.

  9   Au paragraphe 627 on parle de "massacres et d'autres crimes commis au

 10   Kosovo en 1998 et en 1999, lesquels étaient d'une telle ampleur et avaient

 11   été commis sur un territoire tellement vaste qu'ils ne pouvaient pas être

 12   gardés secret et étaient de notoriété publique."

 13   Je ne connais aucun élément de preuve attestant ce fait qu'il soit de

 14   notoriété publique, je ne pense pas que tout le monde était au cours de ça.

 15   La plupart de ces faits ont été découvert après la guerre lorsqu'on a pu

 16   s'entretenir avec les témoins concernés. Il n'y a aucun élément de preuve

 17   sur ce point.

 18   Dans son propos liminaire, Mme Kravetz vous a parlé du fait que des

 19   personnes étaient transférées par train hors de Pristina. Voilà ce qu'elle

 20   a dit : "Ces civils ont été transportés à bord de train jusqu'à la

 21   frontière macédonienne et comme nous l'ont dit plusieurs témoins, dont un

 22   qui travaillait à la gare d'Urosevac au cours de la dernière semaine du

 23   mois de mars, première semaine du mois d'avril, la fréquence des trains

 24   entre Pristina et Urosevac jusqu'à la frontière macédonienne a été

 25   augmentée tout comme le nombre de voitures transportées par train, et ce,

 26   afin de permettre l'expulsion de nombreuses personnes hors de la province."

 27   Là encore, ce n'est pas vrai. Je vous renvoie à la déposition de Bucaliu,

 28   le 8 septembre, qui a été contre-interrogé par Me Aleksic. Le Juge Bonomy

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  1   lui a demandé pourquoi il évoquait tout cela puisqu'il existait un

  2   registre. Me Aleksic a dit qu'il essayait de prouver qu'entre mars et avril

  3   rien ne s'était passé. Les trains ont fonctionné pendant cinq jours, après

  4   cela il y avait un train tous les deux jours. Donc on n'a pas augmenté le

  5   nombre de trains, et le Juge Bonomy a dit que l'on ne peut pas présenté

  6   d'arguments sur ce point. Alors personne ne le conteste. Ensuite, on dit la

  7   chose suivante : "M. Bucaliu, dites-nous, il n'y a pas d'information

  8   concernant le nombre de passagers et le nombre de wagons, n'est-ce pas ?

  9   "Réponse: Oui, malheureusement, c'est vrai. Nous n'avons pas les chiffres."

 10   Mme Kravetz vous a dit à la page 14 du compte rendu de la première journée

 11   d'audience que la Défense avait proposé plusieurs explications sur les

 12   raisons du départ de la population. Les bombardements de l'OTAN, le fait

 13   que l'UCK avait forcé la population à partir. Nous avons entendu des

 14   arguments sur ce point, le fait que les gens partaient parce qu'il y avait

 15   des combats. Nous avançons que ceci n'explique pas le départ de la

 16   population. A l'occasion de l'audience relative aux demandes

 17   d'acquittement, nous avons entendu M. Hannis nous dire, page 12 594 du

 18   compte rendu, "Nous n'affirmons pas que certaines de ces personnes ne sont

 19   pas parties en raison des bombardements. Nous n'affirmons pas que certains

 20   d'entre eux n'ont pas quitté leurs villages parce que l'UCK le leur a

 21   demandé." Donc ce n'est pas seulement la Défense qui avance ces arguments.

 22   M. Hannis lui-même vous a dit que certaines personnes sont parties en

 23   raison des bombardements de l'OTAN et parce qu'elles avaient été

 24   contraintes de partir par l'UCK.

 25   Le problème, c'est que nous n'avons pas de chiffres sur le nombre de

 26   personnes qui sont parties en raison des bombardements de l'OTAN et en

 27   raison du fait qu'elles avaient été contraintes de partir par l'UCK, donc

 28   nous ne savons pas si ce chiffre est supérieur à dix ou pas. Enfin, nous

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  1   devons simplement accepter le témoignage des personnes qui avaient peut-

  2   être une raison de vous raconter le récit qu'elles vous ont fait.

  3   A la page 3 510 du compte rendu d'audience de la première journée, M. le

  4   Juge Bonomy a demandé à M. Stamp ce qu'il pensait de la responsabilité des

  5   accusés s'agissant des massacres de Meja. M. Stamp a répondu que les

  6   victimes avaient été tuées par la VJ et le MUP, ceci ne figure pas au

  7   dossier. Dans notre mémoire en clôture, nous indiquons que le témoin Pnishi

  8   n'a pas dit que la VJ avait commis ces crimes. Peraj a dit que la VJ

  9   n'avait pas été impliquée dans ces meurtres ni dans l'inhumation des corps.

 10   Le seul témoin qui applique la VJ, c'est le témoin Dedaj qui a raconté au

 11   moins trois versions des faits sur ce qu'elle avait vu, alors selon moi,

 12   son témoignage ne peut pas être accepté, en tout cas, il ne constitue pas

 13   une preuve au-delà de tout doute raisonnable.

 14   M. Stamp et d'autres n'ont eu de cesse d'utiliser l'expression "massacre",

 15   "des massacres ont été commis au Kosovo." Monsieur le Président, Mesdames

 16   et Monsieur les Juges, je sais ce qui s'est passé au Rwanda. Des millions

 17   de personnes ont été tuées. Moi, j'appelle ça un massacre. Je sais ce qui

 18   s'est passé à Srebrenica où quelque 8 000 personnes ont été tuées. A mes

 19   yeux, il s'agit d'un massacre, mais je pense que dans le contexte de

 20   l'espèce, parler de massacre est une exagération. Cela ne s'applique pas au

 21   Kosovo. Bien entendu, des crimes ont été commis, des crimes sont commis

 22   pendant toutes les guerres, mais en l'occurrence, il ne s'agit pas de

 23   massacre.

 24   Je vais parler du commandement conjoint dans un instant. Au paragraphe 201,

 25   l'Accusation affirme la chose suivante : "Même si la composition du

 26   commandement conjoint a été modifiée en 1999, puisque Minic et Matkovic ne

 27   se trouvaient plus au Kosovo, Lukic, Pavkovic et Lazarevic sont restés

 28   membres du commandement conjoint." Or, aucun élément de preuve n'étaye

Page 27213

  1   cette affirmation. Il n'y a aucune référence, aucune source. On affirme

  2   cela, un point c'est tout. 

  3   Même si le commandement conjoint s'était réuni fréquemment au cours

  4   de l'année 1999, et d'après nous, ce n'est pas le cas, mais même si cela

  5   avait été le cas, Pavkovic n'était plus commandant du Corps de Pristina. Sa

  6   participation aux réunions du commandement conjoint en 1998 était en

  7   qualité de commandant du Corps de Pristina. Je pense que Samardzic a

  8   assisté à deux de ces réunions peut-être au cours de cette période. Je n'ai

  9   pas fait le compte. Mais après qu'il ait été muté à la 3e Armée, il n'avait

 10   plus à assister à ces réunions. Il s'agissait de réunions tactiques et pas

 11   stratégiques. Il n'était pas chargé des opérations, de l'aspect stratégique

 12   des choses. Les affirmations concernant la composition du commandement

 13   conjoint ne sont pas étayées par les éléments de preuve. Tout ce que cela

 14   prouve, éventuellement, c'est que Vasiljevic a dit avoir assisté à ces

 15   réunions au mois de juin, avoir assisté à une rencontre où Pavkovic était

 16   présent, Lazarevic également, mais ça ne veut pas dire pour autant qu'ils

 17   étaient membres du commandement conjoint. Pavkovic aurait pu faire la même

 18   chose que Samardzic à deux ou trois reprises, c'est-à-dire assister à ces

 19   réunions s'il se trouvait dans le secteur.

 20   Au paragraphe 228, l'Accusation dit la chose suivant au sujet du

 21   commandement conjoint : "Lorsque le commandement conjoint donnait des

 22   ordres, les subordonnés étaient chargés de faire la liaison avec leurs

 23   homologues au sein de la VJ et du MUP au niveau des brigades de la VJ, des

 24   détachements des PJP, et c'est à ce niveau-là que l'on peaufinait les

 25   détails du plan pour ce qui est des activités sur le terrain."

 26   Ce n'est pas le bon paragraphe. Le paragraphe qui m'intéresse dit que

 27   Pavkovic appliquait les ordres du commandement conjoint. Je pense qu'il est

 28   important que vous accordiez une attention toute particulière à la pièce

Page 27214

  1   4D91, qui est l'un des documents les plus importants en l'espèce. Comme

  2   dirait Hannis, c'est mon document préféré. Il s'agit d'un ordre de

  3   Samardzic adressé à Pavkovic en date du 30 juillet 1998. Par cet ordre, il

  4   définit ses missions à l'égard du commandement conjoint. Il lui dit

  5   qu'avant de venir aux réunions, il doit informer le chef d'état-major de

  6   toute demande éventuelle, expliquer les propositions relatives à

  7   l'engagement des forces et tout ce qui concerne les renforts. Il doit

  8   obtenir un accord préalable avant de se rendre à la réunion, puis une fois

  9   à la réunion, il doit bénéficier du soutien du chef d'état-major auquel

 10   Samardzic a confié certaines fonctions au poste de commandement avancé.

 11   Après la réunion, il est tenu de faire rapport au chef d'état-major

 12   en lui indiquant quelles propositions ont été acceptées, s'il y a eu

 13   d'autres demandes découlant des propositions présentées, il doit lui

 14   demander les autorisations nécessaires. Ensuite, il doit informer le

 15   commandement conjoint des décisions éventuelles prises par le chef d'état-

 16   major concernant ces demandes.

 17   Il n'a jamais été autorisé à faire quoi que ce soit qui était proposé

 18   par le commandement conjoint avant d'obtenir l'approbation du général

 19   Samardzic ou de son adjoint, le chef d'état-major. C'est ce qui est dit

 20   dans cet ordre, et c'est la raison pour laquelle cet ordre est

 21   particulièrement important.

 22   Je pense que Me Fila en a parlé. Me Fila a rappelé que M. Stamp a promu en

 23   quelque sorte Djakovic en disant qu'il était membre du commandement

 24   conjoint, alors qu'il n'y a aucun élément de preuve attestant ce fait. Il

 25   prenait simplement des notes. On dit qu'il était présent, mais il n'était

 26   pas membre du commandement conjoint lors de ces réunions.

 27   Au deuxième jour du réquisitoire, M. Hannis a longuement parlé du

 28   commandement conjoint, comme si ce commandement conjoint était une entité

Page 27215

  1   malveillante, néfaste, vile. Aux Etats-Unis, on parle de chefs d'état-major

  2   de QG conjoint. Dans vos pays d'origine, il y a des organisations

  3   similaires, en fait, les forces doivent coordonner leurs activités. L'armée

  4   américaine a parfois besoin du soutien de l'aviation pour poser de telle ou

  5   telle opération. Il faut tenir des réunions conjointes, coordonner les

  6   choses. Chaque organisation militaire dans le monde dispose d'une entité

  7   chargée de la coordination. Ce fût le cas au cours de la guerre qui nous

  8   intéresse.

  9   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais ici le problème est de

 10   savoir si les personnes étaient membres ou pas du commandement conjoint.

 11   Certains des accusés ont dit qu'il n'y avait pas de commandement conjoint.

 12   C'est bien là le problème. Donc on ne peut pas vraiment comparer les

 13   choses.

 14   M. ACKERMAN : [interprétation] Je m'exprime uniquement au nom d'un

 15   accusé. Je vous parle de ce que j'ai constaté, et je vous parle de ce que

 16   démontrent les éléments de preuve.

 17   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Mais n'essayez pas de simplifier

 18   à outrance les choses. Certaines personnes ayant une expérience directe de

 19   la manière dont les choses fonctionnent en Serbie et en RSFY à l'époque ne

 20   sont pas toutes du même avis. Tous ne sont pas d'accord sur la nature de

 21   cette entité. Enfin, j'utilise le mot "nature" de façon large, faute de

 22   trouver un meilleur terme.

 23   M. ACKERMAN : [interprétation] Je souhaiterais dire quelque chose,

 24   mais je vais me retenir. Enfin, je dirais quand même la chose suivante : il

 25   faut comprendre que la République fédérale de Yougoslavie était en plein

 26   développement, en pleine création lorsque ces événements se sont produits.

 27   Auparavant il s'agissait de la Yougoslavie, puis ce n'était plus la

 28   Yougoslavie. C'est devenu une entité qui ne comprenait plus désormais que

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  1   la Serbie et le Monténégro. Donc il a fallu réécrire toutes les lois. Il a

  2   fallu revoir la constitution. Il a fallu tout revoir, tout réécrire. Au

  3   début, on n'arrive pas toujours à ses fins du premier coup et on fait des

  4   erreurs. C'est la raison pour laquelle le Règlement de procédure et de

  5   preuve de ce Tribunal a été modifié à 37 reprises, parce que la première

  6   version n'était pas satisfaisante. Donc on peut toujours trouver des

  7   erreurs d'ailleurs. Mais là il s'agit en quelque sorte d'une organisation

  8   toute neuve qui est en train de se créer, qui a pu commettre des erreurs et

  9   donc tout cela évoluait. On était en train de créer la République fédérale

 10   de Yougoslavie. Donc veuillez garder ça à l'esprit pour comprendre pourquoi

 11   les règles appliquées par le conseil de la Défense suprême, la

 12   constitution, tout cela semble être parfois contradictoires. C'est la

 13   raison pour laquelle au sein des  forces de sécurité il n'y avait pas de QG

 14   conjoint, comme nous pouvons le voir dans nos pays respectifs. Il n'y a pas

 15   eu la possibilité de voir quelles seraient les modalités de la coordination

 16   entre les différents éléments des forces de sécurité. Cela s'est fait de

 17   façon ad hoc, petit à petit, au dernier moment, lorsqu'on s'est rendu

 18   compte qu'il a fallu faire en sorte d'éviter les tirs entre les forces

 19   alliées. Voilà comment ça s'est passé. Mais bon, c'est à vous de déterminer

 20   quelle était la situation. Toujours est-il qu'à mes yeux, il ne s'agissait

 21   pas d'un organe malveillant. En tout cas, rien ne le prouve. Donc vous

 22   pouvez lire toutes les notes que vous voulez à ce sujet. Rien ne prouve que

 23   cette entité oeuvrait à la réalisation d'une entreprise criminelle commune.

 24   Rien ne prouve que cette entité planifiait la commission de quelque crime

 25   que ce soit.

 26   Et mon collègue Me Aleksic vous a demandé de bien garder à l'esprit

 27   qu'il s'agissait de deux organes bien distincts. La VJ était placée sous le

 28   contrôle de la fédération, tandis que le MUP était placé sous le contrôle

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  1   de la Serbie.

  2   Pour ce qui est de la poursuite des activités du commandement

  3   conjoint en 1999, l'Accusation a évoqué la réunion au cours de laquelle

  4   tout le monde a parlé des modalités de fonctionnement du commandement

  5   conjoint en 1999. Souvenez-vous de ce qu'a dit le général Pavkovic, dans le

  6   document P1468, page 160. Il a dit que selon lui, le commandement conjoint

  7   devait cesser d'exister.

  8   J'en viens maintenant au paragraphe 891. Fin mars 1999, Pavkovic

  9   était au courant de l'exode des civils. Il savait également que les

 10   Albanais de souche qui quittaient le pays se voyaient confisquer leurs

 11   pièces d'identité. Alors parlons de l'exode des civils. Il ne s'agit pas

 12   nécessairement d'un crime. L'OTAN était en train de procéder aux

 13   bombardements. Nous étions au mois de mars, et le bon sens nous dit que ces

 14   personnes fuyaient les bombardements. C'est ce que pensait sans doute

 15   Pavkovic en 1999.

 16   Deuxièmement, parlons de la confiscation des papiers d'identité. Le

 17   bureau du Procureur cite sa déclaration, mais omet de mentionner qu'après

 18   qu'il a été informé de la situation, il a diligenté une enquête. Il a

 19   appris que l'armée n'était pas impliquée dans ces confiscations de papiers.

 20   L'armée n'était pas la police des frontières. Bien entendu, il voulait

 21   mettre un terme à ces agissements, mais les responsables n'étaient pas

 22   placés sous son contrôle effectif.

 23   Paragraphe 893. On peut lire : Pavkovic était au courant des crimes

 24   commis par les forces de la RSFY, de la Serbie, qui opèrent au Kosovo en

 25   1999. Il existe un rapport selon lequel 32 plaintes au pénal ont été

 26   déposées à l'encontre d'auteurs de crimes la veille du rapport. Il s'agit

 27   d'un rapport provenant des tribunaux. Pavkovic avait ordonné que l'on

 28   établisse ce rapport et qu'on le lui transmette. On voit que des crimes

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  1   font l'objet de poursuites. Des plaintes sont déposées au pénal. Cela veut

  2   dire que ces affaires sont renvoyées devant les tribunaux, ils disent qu'il

  3   existe des éléments de preuve à l'encontre de Pavkovic. En fait, on voit

  4   que Pavkovic fait quelque chose.

  5   On peut lire que l'armée fait rapport sur des tentatives de meurtre,

  6   des meurtres et toutes sortes d'agissements répréhensibles. Ce n'est pas

  7   mentionné dans le rapport de la 3e Armée. En fait, il s'agit de deux choses

  8   différentes. On parle de 32 plaintes au pénal, mais il s'agit d'infractions

  9   bien différentes. On n'a pas cherché à dissimuler les choses, mais les

 10   tribunaux ont présenté leurs informations à l'état-major général de leur

 11   propre chef, et ceci n'avait rien à voir avec la chaîne de commandement. 

 12   Il y a aussi une allégation, mais --

 13   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Maître Ackerman, pourriez-vous nous

 14   préciser une référence, je vous prie. La pièce P1468, vous y aviez fait

 15   référence. Vous avez évoqué l'opinion du général Pavkovic selon laquelle il

 16   estimait que le commandement conjoint ne devrait pas exister. Pourriez-vous

 17   me donner, je vous prie, la référence. Le compte rendu d'audience fait état

 18   de la page 160, mais il n'y a pas 160 pages. Je croyais que vous aviez dit

 19   peut-être qu'il s'agissait de la page 60. En fait, il n'y a pas 160 pages.

 20   M. HANNIS : [interprétation] Je crois qu'il y avait 163 pages en anglais,

 21   Monsieur le Président. C'est soit vraiment la page 160  ou 161.

 22   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Donc vous faisiez  référence au

 23   document en anglais. Très bien. Merci beaucoup.

 24   M. ACKERMAN : [interprétation] Il y a une allégation dans le mémoire de

 25   l'Accusation, mais il me semble l'avoir perdue temporairement. C'est une

 26   allégation qui porte sur le fait que Pavkovic savait que des crimes avaient

 27   été commis par des volontaires, qui étaient dans les, enfin, des

 28   volontaires dans la brigade ou partout dans toutes les brigades, donc tous

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  1   les volontaires qui se trouvaient dans les brigades. Mais je n'ai pas la

  2   référence. Ce que dit ce document, le document P1938, à la page 2, c'est

  3   que le 1er avril 1999, seulement quelques jours après, 25 volontaires sont

  4   retournés du Corps de Pristina. Sept d'entre eux avaient été retenus pour

  5   avoir fait une rébellion, avoir tué des personnes, avoir pillé et violé,

  6   pour l'insubordination et pour le fait d'avoir déserté. Ces meurtres

  7   avaient eu lieu, il y avait parmi eux une femme aussi, et un volontaire et

  8   cette femme ont été tués.

  9   Maintenant ce qui n'est pas tout à fait clair, c'est qu'il n'y a pas

 10   vraiment de précision quant à savoir quels sont les crimes qui ont été

 11   commis. C'est un groupe de volontaires parmi lesquels quelques personnes

 12   avaient fait preuve d'insubordination, sept d'entre eux. Ça ne porte

 13   absolument pas sur la responsabilité du général Pavkovic.

 14   Au paragraphe 202 du document P1281, page 2, la police avait leur propre

 15   quartier général à la tête duquel se trouvaient leurs officiers. En fait,

 16   s'agissant de l'information ce que faisaient les effectifs des unités de la

 17   police, cette information peut être donnée par les commandants et les

 18   membres du commandement conjoint. Et l'Accusation semble dire que les

 19   éléments de preuve portés contre Pavkovic, ils semblent dire que Pavkovic

 20   n'avait pas de contrôle sur les membres du MUP et que ce n'étaient pas des

 21   personnes sur lesquelles il avait un contrôle effectif, en tous les cas.

 22   Le paragraphe 870 : Pavkovic s'est servi de ses unités subordonnées pour

 23   commettre des crimes. Il n'a absolument aucun élément de preuve à l'appui

 24   de cette affirmation. Aucun élément de preuve ne nous prouve qu'il se soit

 25   servi de ses unités subordonnées pour commettre des crimes. Le fait que des

 26   crimes avaient été commis ne prouve absolument pas ce type d'affirmation.

 27   Ils doivent prouver la connaissance et l'intention. Nous savons que des

 28   soldats américains, britanniques ont commis des crimes en Iraq, mais ceci

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  1   ne veut pas dire que les généraux britanniques et les généraux américains

  2   se sont servis d'eux pour commettre des crimes. Il faut démontrer qu'ils

  3   avaient l'intention que ces derniers commettent des crimes, qu'ils avaient

  4   été envoyés sur place pour commettre des crimes, non pas seulement que ces

  5   derniers se sont adonnés à des crimes. La commission de crimes n'est pas

  6   suffisante -- si ceci aurait été suffisant pour faire en sorte que les

  7   commandants et les dirigeants soient coupables, à ce moment-là, toutes nos

  8   généraux et tous nos dirigeants seraient dans des prisons, il n'y aurait

  9   pas d'armée. Nous n'aurions pas de commandants.

 10   Je vais essayer de terminer, Monsieur le Président, rapidement. Je voudrais

 11   simplement soulever un point qui, selon moi, est important et qui est

 12   intéressant. Le paragraphe 228 [comme interprété] du mémoire de

 13   l'Accusation. L'Accusation semble dire qu'il y a des éléments de preuve

 14   selon lesquels ont peut voir que des personnes qui ne participaient aux

 15   activités de combat avaient été blessées par balle. M. Stamp vous en a

 16   parlé dans son réquisitoire, il y a quelques jours.

 17   Lorsque j'ai vu cette affirmation, ceci m'a frappé. Comment est-ce qu'on

 18   peut savoir cela ? Comment est-ce qu'on peut savoir qu'il y avait des

 19   personnes qui avaient été blessées par balle lorsqu'elles n'étaient pas

 20   engagées dans des activités de combat, donc je me suis penché sur cette

 21   question. Le problème avec ce témoignage, Baraybar se base sur des

 22   statistiques, fonde sa connaissance sur des statistiques qui lui sont

 23   donnés par d'autres activités de combat.

 24   D'abord, il dit que si ces personnes avaient participé aux opérations de

 25   combat, il aurait dû y avoir beaucoup plus de blessures par éclats d'obus

 26   que par balle. Oui, effectivement, ceci pourrait être vrai et c'est peut-

 27   être quelque chose qui est typique dans une situation de guerre où des

 28   armes, autres que des fusils, sont employées. Mais s'il s'agit d'une

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  1   situation de guerre dans laquelle on ne se sert que de fusils, à ce moment-

  2   là, cette affirmation n'a absolument aucun sens. Les fusils ne produisent

  3   pas d'éclats d'obus, d'éclats. Donc à la suite de ceci, s'il s'agit d'un

  4   échange de tirs, il est tout à fait probable que des personnes soient

  5   blessées par des balles, par balle.

  6   Et la deuxième chose que ce dernier avait dit, le témoin avait dit

  7   normalement qu'on ne voyait pas de types de blessures par balle dans des

  8   situations de combat où le combattant porte des gilets pare- balles. Il est

  9   infirmé, nous le savons, que très souvent l'UCK combattait sans gilet pare-

 10   balles. Très souvent, ils étaient vêtus de civil. Donc de nouveau, si on

 11   prend seulement des données statistiques nous provenant d'autres

 12   conditions, d'autres armées ou d'autres armes provenant d'autres armées,

 13   essayons de voir quel est le nombre de corps présentant des blessures par

 14   balle. A ce moment-là, ceci ne nous démontre absolument rien, ça n'a rien à

 15   voir.

 16   Peut-être que statistiquement parlant ce sont des chiffres qui sont

 17   tout à fait corrects si l'on prend des statistiques, des chiffres de

 18   d'autres guerres, mais ceci ne peut pas être à l'appui de l'affirmation

 19   selon laquelle "Les forces de la RSFY avaient tué ces personnes dans le

 20   cadre de l'exécution d'un plan mené ou envisagé par l'entreprise criminelle

 21   commune." Comme j'ai dit, les forces de la RSFY en Serbie, cela veut dire

 22   des personnes inconnues. Il n'y a absolument aucun élément de preuve,

 23   aucune preuve portant à croire que ces morts sont la suite d'une entreprise

 24   criminelle commune.

 25   Le paragraphe 271, le Procureur affirme que des unités paramilitaires

 26   avaient été engagées dans des activités de combat avec les unités de la VJ.

 27   Je crois qu'il n'a aucun élément de preuve à l'appui de cette affirmation

 28   non plus.

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  1   Le paragraphe 850 donne un très bon exemple du fait qu'il faut faire

  2   attention aux notes en bas de page : "Pendant la période de l'acte

  3   d'accusation, Pavkovic a examiné le travail, la discipline de toutes les

  4   unités du Corps de Pristina et toutes les personnes qui y sont

  5   subordonnées. Note en bas de page 2 129 faisant référence à la pièce

  6   P1078."

  7   Cette pièce P1078, Monsieur le Président, Madame, Monsieur les Juges, il

  8   s'agit d'un rapport pour l'année 1998. Cette pièce ne porte pas du tout sur

  9   l'année 1999. Elle n'a absolument rien à voir avec l'acte d'accusation,

 10   avec la période couverte par l'acte d'accusation. Voilà, j'ai couvert ce

 11   point.

 12   Paragraphe 888 : "Un autre sujet qui était débattu souvent lors des

 13   réunions du commandant conjoint était l'incendie criminel," et c'est

 14   quelque chose qui a été mentionné par Sainovic au mois d'août, il me

 15   semblait que ce n'était pas un sujet fréquent. J'ai fait des recherches et

 16   j'ai trouvé qu'en réalité, dans les 864 [comme interprété] pages de ces

 17   notes, on ne fait référence qu'à quatre reprises d'incendies criminels,

 18   donc je ne sais pas si c'est un sujet qui est fréquemment débattu ou pas.

 19   Ce qui est important, c'est qu'à chaque fois qu'on a mentionné ce point,

 20   c'était mentionné dans le contexte suivant : c'est absolument

 21   impermissible, on ne devrait pas permettre ce genre de chose, il ne faut

 22   pas incendier des maisons. On ne disait jamais "Non, vous n'incendiez pas

 23   suffisamment de maisons, il faut incendier plus de maisons." Ce n'est pas

 24   le genre de propos que l'on retrouve dans ces PV.

 25   Tout ce paragraphe dont fait référence le bureau du Procureur ne

 26   parle pas de plans à commettre des crimes, mais il fait état des efforts

 27   visant à prévenir la commission de crimes.

 28   Le paragraphe 271 du mémoire de l'Accusation démontre que Pavkovic

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  1   donne des ordres aux personnes de faire attention dans le cadre des

  2   opérations antiterroristes pour ne pas endommager des bâtiments

  3   résidentiels, et cet ordre avait été émis le même jour que Sainovic

  4   mentionne qu'il y a un problème à cet égard.

  5   Je crois que l'ordre de Pavkovic a été donné avant que Sainovic fasse

  6   ce commentaire puisque les réunions étaient tenues dans la soirée.

  7   Le paragraphe 905. Dans ce paragraphe, l'Accusation parle de l'acte

  8   d'accusation contre Milosevic, Milutinovic, Sainovic, Ojdanic et que cet

  9   acte d'accusation a été rendu public compte tenu des allégations détaillées

 10   concernant la déportation, les transferts forcés, des viols, des meurtres,

 11   ainsi de suite, et que ceci avait notifié Pavkovic sur le fait que des

 12   crimes systématiques et généralisés avaient été commis, ensuite ils disent

 13   que le lendemain Pavkovic a obtenu un rapport de Lazarevic sur l'omission

 14   du MUP d'être resubordonné à la VJ, et le jour suivant, Pavkovic a écrit

 15   son rapport, c'est la pièce P1459, c'est un sujet qui est encore un sujet

 16   qui est contesté, et la position du Procureur sur ceci est que ceci a été

 17   rédigé en réponse à ce que Pavkovic a appris concernant l'acte d'accusation

 18   contre Milosevic et consorts. J'affirme que c'est simplement faux. L'acte

 19   d'accusation contre Milosevic et consorts n'a été rendu public que le 27

 20   mai. Vous verrez notre mémoire, au paragraphe 240, on en fait état. Il y a

 21   également une ordonnance de la Chambre qui a été donnée afin que ceci ne

 22   soit pas rendu public jusqu'au 27 mai et nous en faisons référence dans

 23   notre mémoire.

 24   Monsieur le Président, ce n'était pas le cas comme nous avons ici où

 25   l'on peut s'asseoir pendant des heures, penser à diverses situations,

 26   prendre des décisions et ensuite prendre une journée de plus et réfléchir

 27   sur les questions de nouveau. Tout ceci, tout ce qui est arrivé s'est passé

 28   dans le cadre d'un chaos général qui régnait dans un contexte de guerre,

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  1   dans le cadre des opérations qui se déroulaient de façon quotidienne.

  2   Effectivement, il y avait aussi des personnes qui faisaient des erreurs, et

  3   des fois on omettait d'informer certaines personnes de certaines choses,

  4   alors je voulais simplement que vous teniez compte de ceci.

  5   Pour le compte rendu d'audience, je voudrais simplement que l'on

  6   adopte certaines portions des mémoires de mes collègues, Milutinovic 117,

  7   de 182 à – en fait, 117 à 244 du mémoire Milutinovic, et 12 à 151 pour

  8   Ojdanic.

  9   Je voudrais que ceci soit consigné au compte rendu d'audience, ces

 10   passages-là de mes collègues prononcés dans le cadre de leur plaidoirie.

 11   Maintenant, Monsieur le Président, jusqu'à mardi et mercredi de cette

 12   année, j'avais passé deux ans dans un procès, et ensuite mardi et mercredi

 13   j'ai appris qu'il s'agissait de quelque chose d'autre. Il s'agit d'une

 14   affaire du mauvais emploi de la VJ au Kosovo en 1998, il s'agit d'une

 15   affaire concernant la violation des accords d'octobre, il s'agit d'une

 16   affaire portant sur l'omission de rendre compte. C'est ce que nous avons

 17   appris alors que nous avons écouté le réquisitoire de l'Accusation. Mais ce

 18   que nous n'avons pas appris, c'est qui était les personnes qui avaient

 19   commis les crimes. Qui était leur supérieur ? Est-ce que ces personnes

 20   savaient que les crimes avaient été commis ? Est-ce que ça a été couvert ?

 21   Est-ce que le général Lazarevic avait connaissance des crimes commis, que

 22   c'étaient des membres de la VJ ? Est-ce que le général Lazarevic a informé

 23   le général Pavkovic de ces faits ? Est-ce que le général Pavkovic a omis de

 24   le dire aux procureurs militaires ? C'est ce qui fait une affaire de crimes

 25   de guerre, mais ce n'est pas du tout ce que l'on a entendu ici, on n'a pas

 26   du tout parlé de cela, pas une seule fois.

 27   Ce dont on a parlé, c'est que des crimes de grande envergure ont été

 28   commis, et que les accusés qui sont présents ici occupaient des postes très

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  1   haut placés, que le général Pavkovic n'a pas pris les mesures nécessaires

  2   pour prévenir que les choses se passent, que le général Pavkovic a pris

  3   certaines mesures mais pas suffisamment. Ceci n'est pas un procès de crimes

  4   de guerre.

  5   M. Hannis voudrait que vous appliquiez un point de vue dont il essaie

  6   de vous suggérer, mais je crois que vous devriez réfléchir à tout ceci et

  7   prendre vos décisions en examinant le tout.

  8   M. Hannis vous demande de suivre la maxime si ça parle comme un canard, ça

  9   marche comme un canard, bien, c'est sûrement un canard. J'étais au Texas un

 10   jour et une requête avait été faite pour supprimer certains éléments de

 11   preuve. Il s'agissait d'un homme qui fumait des cigares alors qu'il était

 12   sur le banc, et ce procureur ne portait pas non plus de toge, et de l'autre

 13   côté il y avait une jeune femme, un procureur, j'ai présenté mes arguments

 14   et le président lui a dit, "Chère Madame, ce chien ne va pas aller à la

 15   chasse." Voilà, c'est une petite histoire.

 16   Il n'y a aucun élément de preuve ici qui vous porterait à trouver coupable

 17   le général Pavkovic. Je vous encourage à faire votre travail, je vous

 18   demande de l'acquitter de toutes les charges qui sont retenues contre lui.

 19   J'aimerais dire que c'est un grand privilège de me trouver ici devant vous,

 20   et je suis ici depuis plus de 11 ans et demi, tout comme M. Fila. Je

 21   partage son opinion sur ceci. Ce Tribunal fait presque partie de ma vie. Un

 22   quart de ma vie en tant qu'avocat s'est passé ici, et je suis très fier

 23   d'avoir pu me trouver ici, j'apprécie énormément et je voudrais remercier

 24   ce Tribunal et tout son personnel, je voudrais remercier ses Juges, ses

 25   Procureurs, ses interprètes, enfin toutes les personnes ici présentes qui

 26   ont pris part aux travaux de ce Tribunal et qui ont fait en sorte que cette

 27   expérience en soit une mémorable en ce qui me concerne. Vous m'avez permis

 28   de faire partie d'un club très sélectif, et je vous en remercie, et ceci

Page 27227

  1   comprend, bien sûr, vous, les quatre Juges qui sont là.

  2   J'ai été assisté de mon co-conseil, M. Aleksandar Aleksic de Belgrade, et

  3   je sais qu'il a énormément apprécié le fait de pouvoir avoir été ici, et je

  4   voudrais lui dire merci d'avoir été un assistant excellent dans cette

  5   affaire qui est très difficile.

  6   Je vais devoir quitter La Haye demain, Monsieur le Président, Mesdames,

  7   Monsieur le Juge, je ne pourrai pas être ici la semaine prochaine, et donc

  8   c'est un au revoir. Vous vous souviendrez peut-être que je vous ai déjà dit

  9   que là où je voudrais vraiment me trouver, c'est en haut d'une montagne en

 10   train de respirer l'air frais, de me reposer. Voilà, c'est là que j'irai.

 11   Ce n'est peut-être pas une montagne, c'est peut-être un terrain de golf,

 12   mais je vais pouvoir me reposer. Voilà, je vous invite tous à me joindre,

 13   tout ce que vous avez à faire, c'est de venir au Texas et de demander pour

 14   moi, et je vous verrai peut-être là-bas.

 15   Merci.

 16   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Ackerman,

 17   des arguments que vous avez présentés et de votre plaidoirie. Et puisque

 18   vous n'aurez pas l'opportunité d'ajouter quelque chose à la fin de cette

 19   affaire, je voudrais vous remercier à mon nom et au nom de mes collègues

 20   pour la façon dont vous avez mené votre défense, et d'avoir fait tout ceci

 21   de façon très digne. Les Juges aussi, je dois vous dire que pour nous, vous

 22   avoir devant nous a été une expérience extraordinaire.

 23   M. ACKERMAN : [interprétation] Je vous remercie beaucoup, Monsieur le

 24   Président.

 25   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Nous allons maintenant entendre Me

 26   Lazarevic, mais avant cela est-ce vous pourriez nous dire si M. Lazarevic

 27   sera là lundi ?

 28   M. BAKRAC : [interprétation] Je ne sais pas, mais mon collègue M. Cepic et

Page 27228

  1   moi avions planifié d'aller lui rendre visite. Tout ce que je sais pour

  2   l'instant, c'est qu'il se trouve encore à l'hôpital du quartier

  3   pénitentiaire. Je vais m'informer de la question lorsque j'irai lui rendre

  4   visite, mais je ne crois pas qu'il y aura de problème. Nous allons pouvoir

  5   continuer, bien sûr, notre travail en son absence, si c'est le cas.

  6   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Très bien, alors je vous écoute.

  7   Veuillez continuer, Maître Bakrac.

  8   M. BAKRAC : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président.

  9   Mesdames, Messieurs les Juges, bonjour à tous et à toutes, à toutes les

 10   personnes présentes dans ce prétoire. Je sais avec certitude qu'après les

 11   plaidoiries de M. Ackerman, je sais que ce que je vais dire sera presque

 12   redondant puisque mes collègues vous ont déjà remercié et ont déjà présenté

 13   leur gratitude et leur plaisir d'avoir pu être là, mais je voudrais me

 14   joindre à eux, car moi aussi j'ai eu un énorme privilège et un très grand

 15   plaisir de défendre le général Lazarevic devant ce Tribunal et devant cette

 16   Chambre de première instance. J'ai effectivement pris un énorme plaisir à

 17   présenter mes arguments, même si je ne suis pas tout à fait sûr que vous

 18   avez toujours pu apprécier mes arguments, mais j'espère que nous serons

 19   tous satisfaits de vos propos, votre parole en guise de clôture.

 20   Mais avant de commencer la présentation de mes arguments, je voudrais

 21   vous informer que notre Défense a adopté la tactique de l'Accusation, même

 22   si nous savons que c'est une tactique qui ne sera pas couronnée de succès.

 23   Avec votre permission, je voudrais vous demander de me permettre de

 24   m'adresser à vous en répondant à certaines allégations présentées par M.

 25   Hannis, et mon collègue M. Cepic vous parlera de la sixième Défense et des

 26   crimes. Donc avec votre permission, je voudrais à la toute fin aborder

 27   l'état dans lequel se trouve mon client pour ce qui est de tous les

 28   éléments de preuve que nous allons présenter, et je vais vous parler de

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  1   notre proposition quant à la peine.

  2   Mes éminents collègues qui ont présenté leurs arguments de part et

  3   d'autre avant moi ont plutôt parler de la thèse que l'Accusation affirme

  4   concernant l'entreprise criminelle commune, et à ce sujet je voudrais

  5   simplement ajouter brièvement quelques observations personnelles pour ce

  6   qui est des éléments de preuve présentés devant cette Chambre de première

  7   instance à l'appui de cette thèse.

  8   L'Accusation affirme que le but d'une entreprise criminelle commune visait

  9   à modifier l'équilibre ethnique au Kosovo en se servant de moyens

 10   criminels, en présentant une atmosphère criminogène pour essayer

 11   d'effectuer un contrôle serbe sur le territoire, et par le biais de cette

 12   plaidoirie et en écoutant tous les éléments de preuve entendus jusqu'à

 13   maintenant, nous n'avons jamais entendu le Procureur parler ou nous dire de

 14   quelle façon cette modification de l'équilibre ethnique aurait pu assurer

 15   un contrôle serbe sur ce territoire. Nous n'avons jamais vu de liens

 16   existant entre cette entreprise visant à chasser une partie de la

 17   population albanaise du Kosovo, et de quelle façon est-ce que ceci

 18   permettrait aux forces serbes d'effectuer plus de contrôle sur le

 19   territoire. Je crois que l'Accusation a l'obligation de nous donner ce

 20   genre de détail et de nous expliquer le fond et les raisons d'une telle

 21   entreprise criminelle d'une si grande envergure.

 22   Je voudrais attirer l'attention des Juges de la Chambre sur certains

 23   faits allégués par l'Accusation dans son mémoire.

 24   L'Accusation affirme que pendant la période couverte par l'acte

 25   d'accusation, il y avait environ 1 700 000, 1 800 000 Albanais. Je vous

 26   parle du paragraphe 44 du mémoire en clôture de l'Accusation. Selon le

 27   Procureur - et je vous renvoie au paragraphe 81 de l'acte d'accusation - il

 28   y avait au Kosovo entre 5 à 10 % de Serbes.  L'équilibre entre les Albanais

Page 27230

  1   et les Serbes en 1999, à l'époque couverte par l'acte d'accusation, avait

  2   été de 90 à 10.

  3   Dans son réquisitoire du 20 août de cette année, le Procureur M. Hannis, a

  4   affirmé de façon très précise que l'Accusation affirme que l'intention des

  5   accusés n'était pas de chasser l'ensemble de la population, mais une partie

  6   importante de cette dernière, et il prétend que de 700 à 800 000 personnes

  7   représentent cette partie importante de la population, et que c'était

  8   l'intention de l'entreprise criminelle commune.

  9   En prenant pour acquis que les affirmations et les allégations de mon

 10   éminent confrère M. Hannis sont exactes, dans une telle constellation,

 11   configuration de population où on aurait eu 1 100 000 Albanais et 150 à 200

 12   000 Serbes, nous arrivons à un nouvel équilibre, une nouvelle proportion

 13   selon laquelle on pourrait dire qu'il y avait 80 % d'Albanais et 20 % de

 14   Serbes si on prend l'affirmation que les Serbes ne quittaient pas non plus

 15   le territoire.

 16   Je pose la question aux Juges de la Chambre de savoir de quelle façon est-

 17   ce que ce nouveau rapport de force pourrait changer de façon substantielle

 18   le rapport de force qui aurait pu permettre un contrôle serbe plus

 19   important sur ce territoire ? Nous n'avons pas reçu de réponse à cette

 20   question et nous n'avons certainement pas reçu d'éléments de preuve non

 21   plus. Le Procureur n'a jamais essayé de démontrer par un seul élément de

 22   preuve, un seul document qui nous permettait de voir qu'une telle

 23   entreprise existait si elle existait effectivement.

 24   Ce que nous affirmons c'est que les allégations du Procureur au sujet du

 25   dessein de l'entreprise criminelle commune, ces allégations sont totalement

 26   inacceptables, on le voit immédiatement, elles sont dénuées de tout

 27   fondement. Il y a de nombreux témoins, il y a de nombreux éléments de

 28   preuve documentaires au dossier qui peuvent permettre de brosser un tableau

Page 27231

  1   complètement différent de la situation et des raisons qui ont incité les

  2   Albanais du Kosovo à quitter le territoire et d'ailleurs ils n'étaient pas

  3   les seuls à le faire, il y en a eu d'autres.

  4   La Défense développe ce point de manière détaillée dans son mémoire du

  5   paragraphe 483 au paragraphe 505, je souhaiterais mentionner certains de

  6   ces éléments, car je pense qu'ils sont importants pour la Chambre de

  7   première instance. Commençons par le témoin à charge, Sandra Mitchell, page

  8   588 du compte rendu d'audience, elle dépose et elle explique que jusqu'au

  9   20 mars 1999, elle travaillait au sein de la mission de l'OSCE et que le

 10   plan de contrôle des réfugiés date seulement du 22 mars, parce que ce

 11   problème de réfugiés est apparu uniquement à ce moment-là, il n'existait

 12   pas auparavant. Si on regarde la période concernée, on voit que la mise en

 13   œuvre de ce plan commence avec les menaces de bombardements de l'OTAN avec

 14   le départ de la mission de l'OSCE du Kosovo. Ce témoin ajoute en outre

 15   qu'il y a également des civils serbes qui sont partis de la province à ce

 16   moment-là.

 17   Un autre témoin à charge, Adnan Merovci, a déclaré que le 21 mars, il avait

 18   vu des réfugiés se diriger vers la frontière avec la Macédoine, on trouvera

 19   ceci à la pièce P2588, paragraphe 43.

 20   Autre témoin à charge, Bislim Zyrapi, chef d'état-major de l'UCK, pages 5

 21   991 à 5 992 du compte rendu d'audience et pages 5 997 à 5 998 de ce même

 22   compte rendu, il déclare que la population civile albanaise avançait avec

 23   l'UCK et que lui-même, il en donnait l'ordre à la population albanaise du

 24   village de Bellanice de partir.

 25   Ce que je viens de dire a trait à la pièce P2547 en date du 11 avril 1999.

 26   Autre témoin à charge, le général Drewienkiewicz, il a dit que ce qui

 27   figurait dans la pièce P680 était exact et que dans la région du général

 28   Jankovic, l'UCK a ordonné à la population de partie et la population s'est

Page 27232

  1   exécutée, page 7 932 du compte rendu d'audience.

  2   Nous avons entendu beaucoup de témoins à décharge évoquer ces événements,

  3   mais en raison du manque de temps, je vais simplement évoquer Milutin

  4   Filipovic, parmi d'autres. Il a dit que dans la zone de Pristina et aux

  5   alentours, des tracts avaient été distribués en albanais, des tracts dans

  6   lesquels l'UCK exhortait la population civile à quitter le Kosovo et à

  7   prendre la direction de l'Albanie et de la Macédoine. Page 11 984 du compte

  8   rendu d'audience.

  9   Tout ceci nous mène à penser que la population a quitté la zone à cause

 10   soit de pressions exercées par l'UCK, d'instructions de l'UCK ou bien à

 11   cause des bombardements imminents de l'OTAN. L'objectif de tout ceci était

 12   de montrer qu'il y avait un désastre humanitaire en cours qui était causé

 13   par les Serbes et on voit bien les conséquences de tout ceci aujourd'hui.

 14   Il faut se souvenir des règles qui sont en vigueur ici au Tribunal, et on

 15   peut considérer que la thèse de l'Accusation pourrait l'adopter si c'était

 16   la seule déduction possible à partir des éléments de preuve présentés. Or,

 17   il apparaît manifestement que le Procureur n'a pas présenté de manière

 18   suffisamment convaincante sa thèse au sujet de l'existence d'un plan et de

 19   la mise en œuvre de ce plan. Ceci n'a pas été prouvé au-delà de tout doute

 20   raisonnable.

 21   Parallèlement à toutes ces pièces, à toutes ces dépositions, il faut

 22   maintenant s'interroger sur les véritables raisons qui ont incité les

 23   Albanais à partir du Kosovo. Au premier abord, la solution qui semble la

 24   plus logique, plus logique que la thèse de l'Accusation, cette thèse qui

 25   était que l'objectif était de modifier l'équilibre démographique de la

 26   province pour permettre aux Serbes d'être en majorité.

 27   Je ne veux pas nier le fait que certains aient dit aux Albanais de manière

 28   individuelle qu'ils devaient aller voir Clinton ou aller voir les Albanais.

Page 27233

  1   Me Ackerman vous en a parlé, c'était la guerre après tout et il s'est passé

  2   des choses encore plus graves, il y a eu des meurtres, il y a eu des viols.

  3   Il est exact, d'ailleurs finalement pas si étonnant que cela, que certains

  4   individus aient tenu des propos de ce genre à l'intention des Albanais,

  5   mais il s'agit là d'incidents isolés et en aucune manière ceci ne peut être

  6   considéré comme étant la preuve de l'existence d'un plan tel qu'il a été

  7   défini par le Procureur.

  8   Le Procureur, d'autre part, fait l'allégation suivante : à partir des

  9   ordres de l'état-major général de l'armée de Yougoslavie, à partir surtout

 10   de l'ordre Grom 3 de la 3e Armée du Corps de Pristina, on nous dit qu'à

 11   partir de ces ordres, il y a eu d'autres ordres qui ont été donnés sous le

 12   prétexte de lutter contre les terroristes albanais et qu'en réalité, il

 13   s'agissait d'une campagne dirigée contre la population civile et on veut

 14   nous faire croire que les endroits où les combats ont eu lieu sont

 15   justement les endroits où les crimes visés à l'acte d'accusation ont été

 16   commis. A partir de ces éléments, le Procureur nous dit que cela prouve

 17   indéniablement l'existence du plan.

 18   D'après la Défense, la thèse ainsi présentée par l'Accusation n'est que

 19   conjectures, il s'agit d'hypothèses, de suppositions, nous n'avons aucun

 20   élément concret, aucune preuve permettant d'établir au-delà de tout doute

 21   raisonnable qu'il en a bien été ainsi et que les allégations avancées à cet

 22   égard par l'Accusation sont exacts. Je pense donc qu'il en est ainsi.

 23   Avant que je ne poursuive mon développement au sujet des ordres et des

 24   directives, j'aimerais mettre en évidence devant la Chambre de première

 25   instance les contradictions qui se sont dégagées du réquisitoire de

 26   l'Accusation. Je parle du moment où l'Accusation a essayé de nous faire

 27   croire que ces décisions, ces ordonnances étaient un rideau de fumée qui a

 28   permis de commettre un certain nombre de crimes. M. Hannis, page 8 du

Page 27234

  1   compte rendu du 19 août, a parlé de ces ordres du commandement conjoint

  2   pour le Kosovo-Metohija, il a dit que depuis la Deuxième guerre mondiale,

  3   ce type de plan ne fait plus jamais l'objet d'aucun document officiel,

  4   personne ne couche cela sur le papier, personne n'en parle ouvertement.

  5   Mais peu avant de tenir ces propos, page 3 du même compte rendu d'audience,

  6   M. Hannis a déclaré que M. Milosevic avait, en octobre 1998, dit aux

  7   généraux Naumann et Clark, il leur avait dit de manière tout à fait

  8   catégorique et franche que la solution définitive au problème du Kosovo

  9   apparaîtrait au printemps et qu'on ferait ce que l'on avait déjà fait à

 10   Drenica en 1946, c'est-à-dire qu'on les rassemblerait tous pour les

 11   exécuter.

 12   Apparemment, c'est la thèse de l'Accusation même si ce n'est pas d'une

 13   clarté absolue.

 14   Alors pourquoi M. Milosevic a-t-il dit à des représentants de hauts niveaux

 15   de l'OTAN quel était son plan pour le printemps, pourquoi dans ces

 16   conditions est-ce qu'on aurait tenté de dissimuler les ordres permettant de

 17   mener à bien ce type d'action ? Il y a manifestement une contradiction dans

 18   les arguments de l'Accusation.

 19   D'autre part, la Défense affirme que les ordres dont il est question, les

 20   ordres de l'état-major général de l'armée de la Yougoslavie, Grom 3 ordre

 21   de la 3e Armée et du Corps de Pristina, nous affirmons que ces ordres

 22   étaient légitimes et que les ordres en question et les ordres qui en ont

 23   découlé n'avaient uniquement pour objectif de dissimuler des plans visant

 24   la population albanaise. De nombreux éléments de preuve montrent de manière

 25   claire et sans aucune ambiguïté que ceci était justifié. La Défense

 26   développe ceci aux paragraphes 605 à 628 de son mémoire en clôture.

 27   Dans toute armée digne de ce nom, dans toute organisation digne de ce nom,

 28   même si elle n'est pas confrontée au type de menace que je vais évoquer

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  1   dans la suite de ma plaidoirie, donc dans n'importe quelle organisation,

  2   dans n'importe quelle armée, on a forcément un programme de défense. Ici

  3   même, dans ce bâtiment, il existe un plan destiné à l'évacuation du

  4   personnel en cas d'incendie, par exemple. Alors pourquoi faudrait-il aller

  5   dans le sens de M. Hannis, pourquoi penser que nous avons ici affaire à un

  6   plan qui a été forcément adopté pour dissimuler un plan dirigé contre la

  7   population civile ?

  8   Je voudrais vous rappeler que c'est justement un témoin à charge, Dusan

  9   Loncar, qui a déclaré que l'UCK s'était servi de la présence de la MVK pour

 10   se réorganiser, pour se renforcer, pour se renforcer, pour s'armer, pour se

 11   préparer dans son combat contre les forces serbes. Ce témoin avait ajouté

 12   que l'UCK se servait souvent des civils, en particulier des femmes et des

 13   enfants, comme boucliers humains, page 7 617 du compte rendu d'audience,

 14   c'est ce qui est dit et le témoin ajoute que lors de ses contacts avec le

 15   général Drewienkiewicz, il a souvent été question de l'offensive du

 16   printemps de l'UCK qui s'annonçait, page 7 619 du compte rendu d'audience.

 17   Un autre témoin à charge, Shaun Byrnes, a déposé ici même, et il a déclaré

 18   que tous les observateurs internationaux au Kosovo savaient pertinemment

 19   que les Albanais s'étaient dotés d'armes avant les accords d'octobre. Pages

 20   12 217 à 12 218 du compte rendu d'audience.

 21   Ciaglinski, un autre témoin à charge, confirme qu'au cours des négociations

 22   qui ont eu lieu à Paris, l'UCK avait intensifié le rythme de ses attaques.

 23   Page  6902 du compte rendu d'audience.

 24   Autre pièce à charge, pièce P638, un rapport de la mission de l'OSCE,

 25   référence DZ 5 du 1er janvier 1999, et ceci nous montre que  les attaques de

 26   l'UCK et la violation des accords de paix ou de la trêve rendent plus

 27   difficile une solution politique.

 28   Autre document venant de l'OSCE, pièce P649, information émanant d'une

Page 27236

  1   réunion avec les officiers de liaison et les représentants de l'UCK, on

  2   arrive à la conclusion suivante : quelle que soit l'issue de la prochaine

  3   série de négociations, l'UCK était déterminée à poursuivre les combats.

  4   Il y a aussi les nombreux rapports qui viennent des organes de sécurité du

  5   Corps de Pristina et de la 3e Armée et qui indiquent exactement la même

  6   chose.

  7   Nous avons demandé à la Chambre de première instance de se pencher sur ces

  8   documents, 3D1050, 3D1052, et 3D1053.

  9   Il y a également la pièce 5D1241, c'est un clip de la BBC qui montre des

 10   manœuvres de l'UCK sur le mont Drenica, dans le village de Klecka le 29

 11   janvier 1999. Nous y voyons également des combattants en tenue civile ainsi

 12   que des femmes portant les armes. Le général Lazarevic en a parlé dans le

 13   cadre de sa déposition, page 17 771 du compte rendu d'audience.

 14   Outre ce que je viens de mentionner, l'état-major général de l'armée de

 15   Yougoslavie disposait de renseignements indiquant qu'en Macédoine, au début

 16   de l'année 1999, 10 00 à 12 000 hommes de l'OTAN ont été déployés. Il y

 17   avait environ 100 chars et 36 hélicoptères. On s'attendait à ce que l'OTAN

 18   planifie des frappes aériennes et une invasion terrestre. Les frappes

 19   aériennes de l'OTAN ont été annoncées en février 1999, Me O'Sullivan en a

 20   parlé dans le cadre de sa plaidoirie.

 21   A partir du territoire de la République de Macédoine, il y avait un afflux

 22   de soldats de l'UCK et d'armes. Il s'agissait de créer un corridor. Je vous

 23   renvoie aux pièces 3D1048 et 5D253 qui en parlent.

 24   Dans ce contexte militaire et politique, il était tout à fait naturel,

 25   logique et légitime que l'armée adopte des plans, des directives et des

 26   ordres visant à défendre le pays et la souveraineté de l'Etat, que ce soit

 27   face aux forces de l'OTAN dont l'agression était en train de se préparer,

 28   et qui a eu lieu, comme nous avons pu le constater, et face à l'UCK qui

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  1   agissait de l'intérieur et qui était puissante.

  2   Si l'on analyse l'ordre du commandement du Corps de Pristina P2808 qui vous

  3   a été présenté par mon confrère, M. Hannis, ordre daté du 16 février 1999

  4   et portant sur l'anéantissement des terroristes siptar dans la région de

  5   Malo Kosovo, que l'on connaît également sous le nom de Lab ou Podujevo,

  6   Drenica et Malisevo, le numéro du registre est 455-1, on voit qu'outre les

  7   missions de nature purement militaire confiées aux unités des corps, le

  8   général Lazarevic a empêché que les membres du corps d'armée pénètrent dans

  9   les zones habitées. Il a mis en garde les membres du corps d'armée en leur

 10   rappelant qu'ils ne devaient pas violer les règles du droit international

 11   de la guerre. Si vous vous penchez sur la pièce P2808, vous constaterez que

 12   tout ce que je viens de dire est exact.

 13   Je demande aux Juges de la Chambre de tenir compte d'un autre élément de

 14   preuve qui corrobore tout ce que je viens de dire. Il illustre de la

 15   manière la plus flagrante, je pense, le fait que les ordres en question

 16   étaient légitimes. La pièce que j'ai à l'esprit a toutefois été versée au

 17   dossier sous pli scellé, donc je demande que nous passions brièvement à

 18   huis clos partiel.

 19   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Fort bien, Maître Bakrac. Nous allons

 20   passer à huis clos partiel.

 21   [Audience à huis clos partiel]

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 26   [Audience publique]

 27   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci.

 28   M. BAKRAC : [interprétation] Le document que nous venons de voir montre

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  1   sans la moindre équivoque que les ordres et les consignes qu'il mentionnait

  2   étaient justifiés.

  3   Un membre du Corps de Pristina a déclaré qu'outre la concentration

  4   importante des forces de l'UCK dans les secteurs de Drenica, Malo Kosovo et

  5   Podujevo les forces multinationales de l'OTAN pouvaient atterrir là et

  6   faire la liaison avec l'UCK. Page 21 817 du compte rendu d'audience.

  7   Cet ordre initial, pièce 2808, a donné lieu à d'autres ordres portant

  8   l'entête commandement conjoint pour le Kosovo-Metohija. Le général

  9   Lazarevic a déclaré dans sa déposition qu'il s'agissait d'ordres du

 10   commandement du Corps de Pristina et qu'il s'agissait d'actions menées pour

 11   appuyer le MUP. M. Hannis a ajouté que ces ordres découlaient de l'ordre

 12   portant la cote P2808, l'ordre d'origine, et qu'il portait sur le

 13   territoire où les faits reprochés dans l'acte d'accusation se sont

 14   déroulés.

 15   Nous entendons démontrer que ces ordres, et nous en avons 16 qui ont été

 16   versés au dossier, sur ces 16 ordres donc, seuls quatre correspondent ou

 17   ont un rapport avec les faits de l'espèce. P2015, P1968, P1969 et P1975.

 18   Si vous examinez les régions mentionnées dans l'acte d'accusation et si

 19   vous procédez à une comparaison avec les 12 ordres restants, vous

 20   constaterez que ces ordres mentionnent des actions qui devaient être menées

 21   dans des secteurs où aucun crime n'a été commis.

 22   S'il s'agissait véritablement d'ordres ayant pour but de dissimuler des

 23   plans visant à commettre des crimes à l'encontre d'Albanais de souche,

 24   alors on se pose la question suivante : pourquoi alors seuls quatre de ces

 25   ordres seraient en rapport avec les faits ? Pourquoi pas tous ? La réponse

 26   est claire. Le fait est que l'Accusation ne dispose d'aucun élément de

 27   preuve permettant d'étayer sa thèse. Le bureau du Procureur se livre à des

 28   conjectures, ni plus ni moins.

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  1   Si l'on analyse la teneur de ces ordres, on voit qu'il y avait un

  2   ordre logique pour ce qui est de la teneur de ces ordres dans la chaîne de

  3   commandement. On peut conclure sans la moindre équivoque qu'il ne

  4   s'agissait pas d'un écran, qu'on n'a pas cherché à dissimuler les crimes

  5   commis à l'encontre de civils albanais sous prétexte de combattre l'UCK

  6   comme l'affirme l'Accusation.

  7   Nous rappelons aux Juges de la Chambre que le général Vasiljevic,

  8   témoin à charge, s'est vu présenter un ordre émanant du commandant du Corps

  9   de Pristina, P2014, ce témoin, le témoin Vasiljevic, a dit que cet ordre

 10   était un document classique rédigé de façon précise, professionnelle, qu'il

 11   s'agissait d'un document de grande qualité. Pages 8 732 et 8 734 du compte

 12   rendu d'audience.

 13   Me Ackerman a déjà dit que je serais d'accord avec mon éminent

 14   confrère, M. Hannis, qui vous a demandé d'appliquer certains principes,

 15   enfin, je dirais que si un document est intitulé ordre et si, vu le

 16   contexte, on voit que c'est un document de grande qualité, c'est sans doute

 17   un ordre et pas autre chose.

 18   Monsieur le Président, Mesdames et Monsieur les Juges, je

 19   souhaiterais aborder un autre sujet et je constate qu'il ne nous reste que

 20   deux minutes, alors peut-être que le moment serait bien venu de lever

 21   l'audience, et je vous présente mes excuses, Monsieur le Président. Mon

 22   collègue Me Cepic vient de recevoir un courrier électronique. M. Lazarevic

 23   est toujours à l'hôpital du quartier pénitentiaire.

 24   M. LE JUGE BONOMY : [interprétation] Merci. Nous allons reprendre nos

 25   débats lundi matin. Il nous faudra suspendre l'audience à 11 heures 45, car

 26   il y a une séance plénière et nous sommes tenus d'y assister.

 27   Si à ce moment-là nous sommes informés qu'il y a du temps disponible lundi

 28   pour le reste de la journée, nous en profiterons et mardi pareil. Mais

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  1   peut-être que ce sera impossible car il y a d'autres affaires. Alors dès

  2   que nous serons informés des modifications éventuelles du calendrier, nous

  3   vous en informerons en conséquence. Nous reprendrons en tout cas lundi

  4   matin à 9 heures, et nous siégerons jusque 11 heures 45.

  5   --- L'audience est levée à 15 heures 29 et reprendra le lundi 25 août 2008,

  6   à 9 heures.

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