Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le mardi 10 juillet 2012

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 13 heures 04.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à toutes les personnes présentes

  6   dans ce prétoire.

  7   Madame la Greffière d'audience, veuillez citer l'affaire, je vous prie.

  8   Mme LA GREFFIERE : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Il s'agit

  9   de l'affaire IT-09-92-T, le Procureur contre Ratko Mladic.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Madame la Greffière

 11   d'audience.

 12   Et avant que nous poursuivions le contre-interrogatoire du témoin, j'ai

 13   l'impression, Maître Lukic, que M. Mladic a un problème, un problème

 14   technique visiblement.

 15   L'ACCUSE : [interprétation] Je n'entends rien du tout.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Mladic, est-ce que vous

 17   entendez maintenant ?

 18   Vous entendez ? Fort bien. Merci, Monsieur Mladic.

 19   Maître Lukic, hier je vous ai dit que la Chambre ne comprenait pas toujours

 20   les questions que vous posiez, le raisonnement qui sous-tendait ces

 21   questions, et vous avez plus ou moins dit que vous pouviez nous fournir une

 22   explication et je vous avais dit que je ne souhaitais pas que vous le

 23   fassiez en présence du témoin. Donc, si vous souhaitez vous expliquez

 24   brièvement en une ou deux minutes, certes, je vous donne la possibilité de

 25   le faire maintenant. Si vous pensez que cela sera utile, fournissez-nous

 26   cette explication; sinon, nous ferons entrer le témoin dans le prétoire.

 27   M. LUKIC : [interprétation] Dans le cadre de ce contre-interrogatoire, nous

 28   nous efforçons de montrer qu'étant donné qu'il n'y a pas de corps, il n'y a


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  1   pas d'élément de preuve, à savoir ces meurtres ne se sont pas passés, ce

  2   témoin ne se trouvait pas sur les lieux au moment où il l'a indiqué, et si

  3   certaines choses se sont passées, ce qui s'est passé était du fait des gens

  4   de la région, de civils, voilà. Voilà ce que nous visons.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Donc la Défense avance que les

  6   personnes dont les noms figurent dans l'annexe de l'acte d'accusation n'ont

  7   pas été tuées là-bas; c'est cela ?

  8   M. LUKIC : [interprétation] Etant donné que nous avons reçu cette liste

  9   seulement hier, il va falloir que nous nous penchions sur cette liste,

 10   parce que nous avons pu quand même mener une enquête depuis hier, et je

 11   vais lui montrer trois certificats de décès qui correspondent à des noms

 12   qui figurent sur la liste --

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Bien. Bien.

 14   M. LUKIC : [aucune interprétation]

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai bien compris maintenant pourquoi

 16   vous posez ces questions, et la Chambre est plus à même de comprendre

 17   maintenant.

 18   M. LUKIC : [interprétation] Si vous m'y autorisez. A propos de la durée --

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, justement, j'allais en parler.

 20   Voilà ce que je voulais vous dire : l'Accusation avait demandé deux heures

 21   et l'Accusation a en fait utilisé deux heures et 14 minutes exactement.

 22   Hier, au début du contre-interrogatoire, vous aviez indiqué votre intention

 23   d'utiliser 60 % de ce temps, à savoir 80 minutes. Vous vous êtes déjà

 24   exprimé pendant plus de 40 minutes. Alors il se peut que la situation

 25   évolue aujourd'hui, mais au vu des questions que vous posiez au témoin,

 26   nous pensions que 80 minutes devraient amplement suffire. Ceci étant dit,

 27   si vous avez mené à bien votre enquête à propos de ces personnes, qui, je

 28   suppose, n'étaient pas mentionnées dans la première déclaration ou dans la


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  1   déclaration préalable ? Puisqu'il s'agit d'un nouvel élément, alors ? La

  2   Chambre ne lit pas forcément toutes les déclarations lorsque le témoin

  3   comparait dans le prétoire. Mais si les noms de ces victimes sont tout à

  4   fait nouveaux, il se peut que cela change la situation.

  5   Madame Bibles.

  6   Mme BIBLES : [interprétation] Il se peut que certains noms soient nouveaux.

  7   Un ou deux, me semble-t-il, il va falloir que je vérifie cela --

  8   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

  9   Mme BIBLES : [interprétation] -- mais il y en a d'autres qui figuraient

 10   dans des déclarations précédentes.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc il y a des noms qui figurent déjà

 12   dans certaines déclarations - je suppose que vous êtes d'accord, Maître

 13   Lukic - alors que d'autres n'y figurent pas.

 14   M. LUKIC : [interprétation] Alors, voilà ce dont je me 

 15   souviens : il a vu certes mentionner ces noms, mais il avait dit qu'il

 16   s'agissait de personnes qui avaient quitté Vecici, mais il n'avait pas

 17   indiqué qu'il s'agissait de personnes qui avaient été tuées.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais hier la question qui avait été

 19   posée était : est-ce que vous les avez vues pour la dernière fois dans le

 20   tunnel ou à l'extérieur du tunnel. Voilà ce dont il était question hier.

 21   Donc, merci pour vos explications.

 22   Je souhaiterais que l'on fasse maintenant entrer le témoin dans le

 23   prétoire.

 24   [La Chambre de première instance se concerte]

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Groome, la Chambre s'est

 26   interrogée, s'est demandé en fait si elle allait entendre votre réponse aux

 27   quatre requêtes urgentes immédiatement au début de cette audience ou après

 28   la déposition de M. Pasic. La Chambre préférerait en terminer avec la


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  1   déposition de M. Pasic et ensuite nous entendrons votre réponse.

  2   M. GROOME : [interprétation] Bien. Je vous remercie.

  3   [Le témoin vient à la barre]

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Pasic.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'aimerais vous rappeler que vous êtes

  7   toujours tenu de respecter la déclaration solennelle que vous avez

  8   prononcée hier au début de votre déposition, déclaration en vertu de

  9   laquelle vous avez indiqué dire la vérité, toute la vérité et rien que la

 10   vérité.

 11   LE TÉMOIN : ELVEDIN PASIC [Reprise]

 12   [Le témoin répond par l'interprète]

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Me Lukic va reprendre le fil de son

 14   contre-interrogatoire.

 15   Maître Lukic.

 16   M. LUKIC : [aucune interprétation]

 17   Contre-interrogatoire par M. Lukic : [Suite]

 18   Q.  [interprétation] Une fois de plus, bonjour, Monsieur.

 19   R.  Bonjour.

 20   Q.  Nous allons revenir à votre départ de Garici pour revenir à Bilice.

 21   Alors, à Bilice, votre frère s'y trouve déjà, n'est-ce pas ?

 22   R.  Excusez-moi, mais je n'entends pas --

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est le canal numéro 4. Est-ce que vous

 24   souhaitez entendre la question en B/C/S à nouveau ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors ce sera le canal 6.

 27   M. LUKIC : [interprétation] Non, le témoin va suivre en anglais, c'est plus

 28   facile pour lui.


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  1   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous pourriez répéter votre

  3   question.

  4   M. LUKIC : [interprétation] Certainement.

  5   Q.  Vous avez quitté Garici pour aller à Bilica. A ce moment-là, à votre

  6   arrivée à Bilica, votre frère s'y trouve déjà, n'est-ce pas ?

  7   R.  C'est exact, Maître.

  8   Q.  Et il vous a dit que Bilica n'allait pas tenir longtemps. Combien de

  9   gens y a-t-il à participer aux combats pour Bilica ou dans Bilica ? Je ne

 10   sais pas si je prononce bien le nom de la localité.

 11   R.  Je ne sais absolument pas combien de soldats se trouvaient là-bas.

 12   Q.  Bien. Mais savez-vous nous dire combien de morts ou de blessés il y a

 13   eu dans ces combats ?

 14   R.  Non.

 15   Q.  Bon. Alors, vous avez dit que vous étiez dans une localité puis vous

 16   êtes allé dans une autre; en somme, vous vous êtes déplacé librement,

 17   n'est-ce pas ?

 18   R.  Oui, je pourrais répondre par l'affirmative, mais en fait, la plupart

 19   du temps nous nous sommes déplacés pendant la nuit pour éviter -- pour

 20   éviter tout contact avec les Serbes…

 21   R.  Est-ce que vous avez traversé des lignes de feu, de tir ? Parce que

 22   quand vous arrivez à Bilice, puis vous êtes allé à Vecici. Comment

 23   réussissez-vous à faire cela si des combats font rage ?

 24   R.  Lorsque nous sommes allés de Garici à Vecici, en fait, il y avait eu la

 25   trêve qui avait été signée, cette trêve de cinq jours qui avait été conclue

 26   entre la population de Vecici et les Serbes. Donc, là, nous étions

 27   autorisés à nous déplacer, à marcher…

 28   Q.  Fort bien. Est-ce que vous savez nous dire : les gens de Vecici, ils


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  1   font partie de quelle formation militaire ?

  2   R.  Les gens de Vecici, c'étaient des gens du coin qui essayaient de se

  3   défendre des Serbes.

  4   Q.  Saviez-vous que ces gens-là faisaient partie de la Défense territoriale

  5   de Kotor Varos --

  6   R.  Non, moi je ne me souviens pas s'il y avait une armée. Je ne me

  7   souviens pas, en fait.

  8   Q.  Vous ne vous souvenez pas. Bon.

  9   Après cela, vous êtes retourné vers Garici. Certaines personnes sont

 10   restées, dites-vous, à Bilice. Est-ce que nous pouvons dire que ces gens à

 11   Bilice se sont rendus aux forces serbes et se sont rendus à Travnik en

 12   toute sécurité; est-ce que cela est exact ?

 13   R.  C'est exact. Après que mon frère nous a informés qu'il avait appris

 14   qu'ils allaient se rendre, ma mère avait peur parce qu'ils avaient entendu

 15   parler de convois précédents, de gens qui étaient partis de Kotor Varos, et

 16   là ils avaient enlevé en fait les enfants et les garçons aux mères. Et

 17   c'est là qu'il nous a proposé de revenir, de repartir à Garici. Et puis par

 18   la suite, nous nous sommes rendus compte que la plupart des gens qui

 19   étaient à Bilice et qui se sont rendus ont effectivement survécu. Mais il y

 20   a beaucoup d'hommes qui, en fait, ont été brutalisés à Brdo Vlasici, mais

 21   la plupart ont survécu, certes.

 22   Q.  Saviez-vous -- parce que vous dites que vous ne savez pas, mais avez-

 23   vous été mis au courant de la formulation d'un ultimatum ? Avez-vous, donc,

 24   ouï dire que la Croix-Rouge internationale était venue à Vecici au temps du

 25   cessez-le-feu ? Est-ce que vous avez été là-bas ? Est-ce que vous avez vu

 26   arriver ces gens de la Croix-Rouge ?

 27   R.  Non, Maître.

 28   Q.  Vous ne les avez pas vus ?


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  1   R.  Non, non, je n'ai vu personne de la Croix-Rouge lorsque je me suis

  2   trouvé à Vecici.

  3   Q.  Vous n'avez pas assisté à des réunions des chefs militaires de Vecici

  4   avec des gens qui étaient venus pour négocier; c'est bien cela ?

  5   R.  Non, absolument pas. Vous savez, moi j'étais juste avec mon père

  6   de toute façon. Il m'avait tellement manqué lorsque nous avions été

  7   séparés.

  8   Q.  Donc on peut tirer une conclusion qui est celle de dire : si tant est

  9   qu'il y ait eu des pourparlers, un ultimatum, vous avez probablement pu en

 10   avoir vent ?

 11   R.  Comme je vous l'ai déjà dit, lorsque nous étions à Garici, d'après mon

 12   cousin Akif Pasic, il nous avait dit qu'ils avaient effectivement signé une

 13   trêve avec les Serbes. Alors, de cela je suis informé parce que nous étions

 14   dans la même pièce. Pour ce qui est des autres choses, le temps que je me

 15   trouvais à Vecici, non, je n'en ai absolument aucune idée.

 16   Q.  Seriez-vous d'accord avec moi pour dire qu'à Vecici il y avait environ

 17   1 000 hommes armés ?

 18   R.  Je n'en sais rien. Je n'en sais absolument rien.

 19   Q.  Les gens qui ont quitté Vecici à vos côtés étaient armés, n'est-ce pas

 20   ? Ils n'ont pas laissé leurs armes à Vecici pour s'en aller sans ?

 21   R.  Non. Je dirais que pour ce qui est du groupe que nous avons rejoint --

 22   bon, il y avait beaucoup de personnes, il y avait des hommes. J'ai vu des

 23   armes, c'est vrai, mais toutes les personnes du groupe n'avaient pas toutes

 24   des armes.

 25   Q.  Est-ce que vous saviez que les combats à Vecici et autour de Vecici

 26   s'étaient déroulés à partir du mois de mai et ont duré jusqu'au mois de

 27   novembre 1992 ?

 28   R.  Oui, Maître. D'ailleurs, je dois dire que j'ai vécu cela puisque nous


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  1   nous sommes déplacés, et lorsque nous nous trouvions à Cirkino Brdo, j'ai

  2   assisté à des frappes aériennes sur Vecici. Lorsque nous étions à Garici,

  3   nous avons vu des combats entre les gens de Vecici et les forces serbes,

  4   oui. Et lorsque je me suis trouvé à Bilice, il y avait donc un quartier de

  5   Bilice où il y avait des combats avec les Serbes sur la ligne de Kotor

  6   Varos. Alors, oui, oui, bien sûr que je le sais, cela.

  7   Q.  Merci. Savez-vous qui est-ce qui a approvisionné les gens de Vecici

  8   avec des armes et des uniformes ? Puisque vous nous avez dit que votre

  9   frère avait œuvré en la matière, pour ce qui est de ces approvisionnements

 10   ?

 11   R.  Mon frère -- enfin, je n'ai pas dit -- enfin, moi, ce que j'ai dit en

 12   fait, c'est que mon frère devait amener l'eau et les vivres à la ligne de

 13   front. Pour ce qui était de savoir qui les approvisionnait, comme nous

 14   savons tous pertinemment, Vecici et Kotor Varos étaient absolument

 15   encerclés par les Serbes, donc moi je ne sais pas, je ne sais pas s'ils

 16   étaient approvisionnés en armes ou en quoi que ce soit à partir de Vecici

 17   et vers Vecici. Tout ce que je sais, c'est que mon frère était jeune, et du

 18   fait de sa jeunesse c'est lui donc qui amenait aux personnes de la ligne de

 19   front de l'eau et des vivres.

 20   Q.  Bon. Merci. Avez-vous appris là combien de gens étaient tombés dans les

 21   combats suite à des pilonnages, combien de morts il y a eu, puisque vous

 22   avez passé deux jours à Vecici avant que de quitter la localité de Vecici,

 23   n'est-ce pas ?

 24   R.  Oui, c'est exact. J'ai appris de la part de ces personnes, lorsque je

 25   me trouvais à l'école à Grabovica, que lorsque -- bon, il y a un des

 26   gardes, en fait, qui nous a posé la question -- ils savaient qu'il y avait

 27   des frappes aériennes sur Vecici et ils voulaient savoir combien de

 28   personnes avaient été tuées à la suite des frappes aériennes, et les gens


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  1   qui vivaient à l'époque à Vecici ont répondu qu'il y avait environ 1 000

  2   [comme interprété] personnes qui avaient été tuées. Pendant que moi je me

  3   suis trouvé à Vecici, il y avait une trêve, si ce n'est que la deuxième

  4   nuit les bombardements ont commencé, mais je ne sais pas en fait combien de

  5   personnes sont mortes. Et je n'ai absolument aucune idée du nombre total de

  6   victimes tombées.

  7   Q.  Est-ce que nous pouvons tirer la conclusion suivante : les gens de

  8   Vecici ont décidé de ne pas se rendre aux forces serbes, mais de sortir

  9   moyennant combat de cet encerclement ?

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic, est-ce que vous pourriez

 11   peut-être poser une question et pas des questions multiples. Alors, une

 12   chose c'est de ne pas se rendre, et une autre chose c'est de combattre.

 13   Est-ce que vous pourriez peut-être scinder tout cela.

 14   M. LUKIC : [interprétation]

 15   Q.  Puisque M. le Juge Orie me le demande, je vais vous poser deux

 16   questions à la place. Est-ce que ces gens de Vecici étaient encerclés par

 17   des Serbes ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Est-ce qu'ils ont décidé de se battre pour se sortir de cet

 20   encerclement plutôt que de se rendre ?

 21   R.  La population civile a décidé de se rendre. Les hommes, je dirais qu'il

 22   y avait environ entre 500 à 700 personnes, environ, qui ont décidé de se

 23   rendre vers Travnik, là où le passage était sûr, parce qu'en fait nous

 24   avions tous peur d'être détenus à Banja Luka et à Skender Vakuf.

 25   Q.  Donc ceux qui n'étaient pas des civils, et vous étiez en leur

 26   compagnie, vous, quatre garçons et trois femmes, et ce reste des 500 à 700

 27   personnes est allé se battre ?

 28   R.  Il y avait dix femmes, cinq à six garçons, oui, oui, et effectivement,


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  1   la plupart des hommes -- en fait, nous, nous avons commencé à nous diriger

  2   vers cet endroit sûr. 

  3   Q.  Merci.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi, Monsieur le Président, est-ce que

  5   vous pourriez me mettre sur le canal anglais, parce que j'entends -- ce

  6   n'est pas l'anglais que j'entends.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, oui, tout à fait.

  8   Entre-temps, j'ai remarqué que vous venez juste de refaire la même chose,

  9   en fait, à savoir vous posez officiellement deux questions, mais la

 10   deuxième question est exactement la même question multiple. Donc, à

 11   nouveau, vous demandez au témoin : est-ce qu'ils se sont soit rendus, soit

 12   est-ce qu'ils ont combattu ? Est-ce que vous pourriez peut-être éviter de

 13   présenter ce genre de suggestions implicites que le témoin ne remarque

 14   peut-être pas. Mais je vous ai quand même demandé de ne pas le faire, alors

 15   essayez de ne pas le refaire par la petite porte comme cela dans

 16   [imperceptible]. 

 17   M. LUKIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre.

 19   M. LUKIC : [interprétation]

 20   Q.  Alors, vous nous avez dit que vous êtes tombé dans une embuscade, qu'il

 21   y avait eu deux morts, puis vous vous sépariez les uns des autres et vous

 22   regagniez un autre groupe, puis vous êtes à nouveau encerclé. Alors,

 23   combien d'hommes y a-t-il eu de tués la fois où vous avez été encerclé à

 24   nouveau ?

 25   R.  Excusez-moi, est-ce que vous pourriez répéter votre question. C'est

 26   parce qu'en fait j'entends -- ce n'est pas l'anglais. Est-ce que vous

 27   pourriez répéter la question.

 28   Q.  Certainement. Combien de gens ont été tués -- d'abord, vous êtes tombé


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  1   dans une embuscade. Il y a eu deux morts. Puis, maintenant, vous vous

  2   séparez en deux groupes. Vous regagnez ou vous rejoignez le deuxième

  3   groupe, puisque vous vous avez rejoint les uns les autres; vous soufflez un

  4   peu, vous vous reposez. Puis vous êtes à nouveau encerclé et vous tombez

  5   sous les tirs. Et vous nous avez décrit les balles qui pleuvaient autour.

  6   Alors, combien, cette fois-là, il y a eu de personnes à avoir été tuées, si

  7   tant est que vous le savez ?

  8   R.  Comme je l'ai déjà indiqué, lors de la première embuscade, Zec et ses

  9   deux fils sont morts; lors de la deuxième embuscade, Besim a perdu sa jambe

 10   lorsqu'il a marché sur une mine. Donc il y a environ une dizaine de

 11   personnes qui sont mortes. Lorsque nous nous sommes trouvés au nouveau du

 12   plateau, donc, et là je dirais qu'il y avait des gens qui sont tombés, qui

 13   sont morts -- bon, je ne sais pas. Après, nous, nous avons appris que Besim

 14   avait fini par se tuer parce qu'il demandait que quelqu'un l'achève. Mais

 15   bon, je vous dirais qu'une dizaine de personnes ont perdu la vie dans cette

 16   rivière. Bon, je ne sais pas ce qui s'est passé de l'autre côté, combien de

 17   victimes il y a eu.

 18   Q.  Bon. Merci. Alors une dizaine de personnes, d'hommes, tombent sur des

 19   mines et ils sont tués là. Alors, sur votre groupe, il y a quelque 200

 20   hommes qui ont traversé la rivière et ils ont continué à vos côtés. Ce

 21   groupe a continué à se battre de l'autre côté. Mais où sont passés les

 22   autres, c'est-à-dire le reste des 700 ? Il y en a peut-être eu 25 de tués,

 23   d'après ce que vous avez pu voir vous-même.

 24   R.  Je sais que lorsque nous nous trouvions dans le tunnel, nous avions

 25   compté environ 200 personnes, entre 150 et 200 personnes. Je ne sais pas ce

 26   qui s'est passé, si ce n'est que lorsque nous étions en train de prier,

 27   j'ai vu ce qui se passait de l'autre côté. Je suppose que les gens ont

 28   opposé une résistance aux Serbes et ont décidé de combattre. A un moment


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  1   donné, ils nous demandaient de venir, ils nous faisaient signe. Je suppose

  2   qu'ils appartenaient donc à ce groupe. Mais je ne sais pas combien de

  3   personnes se trouvaient là. Tout ce que je sais, c'est qu'ils nous

  4   faisaient signe et que si nous avions été les rejoindre, en tout cas, au

  5   lieu d'aller dans le tunnel, nous aurions peut-être eu une meilleure chance

  6   de survivre.

  7   Q.  Merci. Vous avez parlé du groupe qui vous a emmené depuis le tunnel

  8   jusqu'à Grabovica, et vous parlez d'une femme qui était soldat. C'était une

  9   femme militaire qui portait un uniforme, n'est-ce pas ?

 10   R.  Oui, oui. Oui, il s'agissait d'un uniforme de camouflage serbe, c'était

 11   une femme. Elle avait une arme. Non, elle n'était pas avec notre groupe.

 12   Pour autant que je sache, il n'y avait aucune femme qui avait des armes

 13   dans notre groupe, donc c'était une Serbe.

 14   Q.  Merci. J'ai compris. Alors, ce groupe qui vous a conduit en direction

 15   de Grabovica, vers l'école, de quoi avaient-ils l'air, ces gens ?

 16   Portaient-ils des uniformes différents, des uniformes identiques ? Avaient-

 17   ils des armes, tous ou pas ? Que portaient-ils sur la tête ? Est-ce que

 18   vous pouvez être plus précis à ce sujet ?

 19   R.  Oui, tout à fait. Lorsque nous sommes arrivés dans la cour -- donc nous

 20   étions en train de marcher et on nous a dit de ne pas regarder à droite ou

 21   à gauche. Moi je me souviens que nous étions dans la cour et que nous

 22   regardions les soldats qui étaient alignés en face de nous. Moi j'ai

 23   remarqué qu'ils portaient tous un uniforme de camouflage. Et puis, il y en

 24   avait certains qui avaient au niveau du bras gauche ou de l'avant-bras

 25   gauche un drapeau, un drapeau avec des rayures, un drapeau rayé, et ils

 26   étaient tous en uniforme de camouflage. Je n'ai pas vu de couvre-chefs, si

 27   ce n'est ce –- bon, le général, par exemple, le général, lui, il avait des

 28   décorations, des étoiles sur l'épaule. Bon, ils ne portaient pas de


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  1   masques. Ils n'avaient rien sur la tête. Ils avaient l'air d'être plutôt

  2   une armée organisée.

  3   Q.  Bien. Alors, cet homme qui portait une espèce de chapeau s'adresse à

  4   vous, il avait cette espèce de casque, en fait, qui est un casque de mineur

  5   avec cette lampe d'éclairage dessus. Et il vous a dit que les hommes

  6   allaient payer. Pourquoi les hommes devaient-ils payer ? Est-ce qu'il a

  7   élaboré, est-ce qu'il a donné des raisons ?

  8   R.  Tout ce dont je me souviens, c'est qu'il nous a dit nous allions passer

  9   une nuit dans cette école, et le lendemain, vous allez aller vers Travnik,

 10   rien ne va vous arriver, et que les hommes vont payer pour cela.

 11   Q.  Moi, ce qui m'intéresse encore, c'est ceci : quand vous étiez dans

 12   cette école, à la lecture de différentes déclarations, je n'ai pas très

 13   bien compris. Est-ce que votre mère est allée voir votre père à l'étage ?

 14   R.  Ma mère n'était pas avec moi. Je ne sais pas d'où cela sort, mais ma

 15   mère, elle était à Vecici. Elle était restée à Vecici. Et, en fait, elle

 16   n'était pas avec moi dans la salle de classe ou à l'école --

 17   Q.  Fort bien. Merci.

 18   Parce que dans la déclaration cet homme aurait dit que les

 19   combattants allaient payer. Non pas la totalité des "hommes", mais les

 20   "combattants".

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic, lorsque vous faites

 22   référence à une déclaration, la Chambre aimerait savoir à quelle

 23   déclaration vous faites référence, parce que, comme je vous l'ai déjà dit,

 24   c'est un témoin qui vient déposer ici.

 25   M. LUKIC : [interprétation] Je pense que nous avons précisé la situation.

 26   Il y avait, certes, présence de combattants --

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais vous avez fait référence à une

 28   déclaration. Moi je voudrais bien savoir à quelle déclaration. C'est tout


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  1   ce que je voulais vous dire.

  2   Poursuivez.

  3   M. LUKIC : [interprétation]

  4   Q.  Le matin à Grabovica, vous étiez à l'école. Vous sortez et il y a des

  5   civils qui vous attendent à l'extérieur. C'était pour l'essentiel des

  6   femmes et des enfants, n'est-ce pas ?

  7   R.  Et il y avait des personnes âgées, oui, c'est exact.

  8   Q.  Des femmes, des enfants et des vieillards. Et vous êtes attaqués, vous

  9   devez passer par une haie d'hommes, et dedans il y a des femmes, des hommes

 10   et des vieillards à la composer ?

 11   R.  C'est exact, oui, entre l'école et l'autobus. Oui, c'est cela.

 12   Q.  Et une femme toute vêtue de noir vous a saisi et a essayé de vous

 13   égorger avec un couteau qu'elle avait à la main ? Et un soldat vous aide,

 14   il vous arrache des mains de cette femme et il vous emmène jusqu'à cet

 15   autocar. Donc ce soldat vous a, en somme, sauvé la vie ?

 16   R.  Oui, oui, il m'a sauvé la vie. Il m'a sauvé la vie en me jetant dans

 17   l'autobus. Je ne sais pas si j'aurais survécu, mais le fait est en fait

 18   qu'il m'a sauvé la vie.

 19   Q.  Bon. Et après cela, vous ne savez ce qu'il est arrivé à Grabovica. Une

 20   fois que vous vous en allez, vous avez passé un quart d'heure à bord de

 21   l'autocar, là sur place, et puis vous partez. Vous ne savez pas ce qui

 22   s'est passé après, n'est-ce pas ?

 23   R.  Je ne sais pas ce qui s'est passé, mais ce dont je suis absolument sûr

 24   et certain – de toute façon, j'ai appris après parce qu'ils ont retrouvé la

 25   dépouille de mon oncle – ils ont tous été tués là-bas, mon père et puis

 26   tous les autres.

 27   Q.  Mais moi je vous ai demandé et je dis que vous ne saviez pas

 28   personnellement ce qui s'est passé une fois que vous êtes parti ? Mais


Page 631

  1   puisque nous sommes en train de parler de cela, vous avez mentionné hier

  2   Nedzad Menzil.

  3   M. LUKIC : [interprétation] Et j'aimerais qu'on nous affiche au prétoire

  4   électronique le 65 ter 6661, s'il vous plaît. Alors, c'est affiché, semble-

  5   t-il.

  6   Q.  Vous avez un document en langue anglaise sous les yeux, n'est-ce pas ?

  7   R.  Oui.

  8   M. LUKIC : [interprétation] Nous n'avons pas besoin de la version en serbe

  9   puisque le témoin lit l'anglais. Alors je crois qu'il suffit de montrer la

 10   version anglaise. C'est bon.

 11   Q.  Alors, je vais vous dire –- un, deux, trois, quatre, cinquième ligne à

 12   partir du haut sous le mot "statement of reasons". A la cinquième ligne, il

 13   est dit que :

 14   "Muharem Menzil avait cherché à établir la mort de son fils."

 15   Il a dit :

 16   "'Mon fils a été tué par des extrémistes chetniks dans un endroit appelé

 17   Duboko, dans la municipalité de Kotor Varos, le 3 novembre 1992.'"

 18   Alors, Monsieur, est-ce que vous saviez que Nedzad Menzil a en fait été tué

 19   dans une localité qui s'appelait Duboko, et non pas à Grabovica ?

 20   R.  Non, je ne sais pas. Je sais que son père était là et que ce Nedzad

 21   avait mon âge. Je ne sais pas s'il s'agit de la même personne, mais en tout

 22   cas on lui a tiré dessus au niveau de l'estomac. Donc je ne sais rien

 23   d'autre.

 24   Q.  Bon. Document suivant, s'il vous plaît.

 25   M. LUKIC : [interprétation] Oui, j'aimerais demander le versement au

 26   dossier de ce document.

 27   Mme BIBLES : [interprétation] Je n'ai pas d'objection, Monsieur le

 28   Président.


Page 632

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière d'audience, quelle

  2   en sera la cote ?

  3   Mme LA GREFFIERE : [interprétation] Le document 6661 deviendra le document

  4   D1.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le document D1 est versé au dossier.

  6   Poursuivez.

  7   M. LUKIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

  8   Document suivant maintenant, il s'agit du 6665 de la liste 65 ter.

  9   Q.  Ici, Munira Opakic, originaire de Hrvacini, demande à ce que son fils,

 10   Sevad Opakic, soit déclaré mort. On part de la troisième ligne :

 11   "Son fils était membre de la TO de Kotor Varos et il a disparu le 3

 12   novembre 1992 avec un autre grand groupe de personnes…"

 13   Dans l'original on dit "combattants", donc il y a une erreur de traduction.

 14   Et je voudrais qu'il y ait une correction, une rectification de faite au

 15   niveau de la traduction de ce document. Les gens des cabines

 16   d'interprétation peuvent voir la version serbe où le mot "saboraca" a été

 17   utilisé.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que ce terme pourrait être

 19   vérifié - alors, bien entendu, une correction officielle devrait être faite

 20   par le CLSS - mais pour juste voir si les parties sont d'accord qu'il y a

 21   bel et bien eu une erreur de traduction dans le document, et j'aimerais que

 22   cela soit vérifié pendant la pause.

 23   Ou alors, nous pourrions peut-être inviter le témoin à lire le passage en

 24   question en B/C/S, Maître Lukic.

 25   M. LUKIC : [interprétation]

 26   Q.  Monsieur Pasic, est-ce que vous pouvez encore lire le 

 27   B/C/S ? Si on vous affiche la version en B/C/S, est-ce que vous seriez

 28   capable de la lire, s'il vous plaît ?


Page 633

  1   R.  Oui.

  2   M. LUKIC : [interprétation] Qu'on nous montre donc la version B/C/S sur nos

  3   écrans.

  4   Q.  On voit au milieu "obrazlozenje", exposé des motifs en traduction. Et

  5   je vous demande de commencer par la troisième ligne, "dans sa

  6   proposition…," et je vous prie de donner lecture de cette phrase en entier

  7   jusqu'à la fin de cette phrase.

  8   R.  Est-ce que vous voulez que je lise --

  9   Q.  Oui, oui, s'il vous plaît. A partir de la troisième ligne, à commencer

 10   par "u svom prijedlogu…" --

 11   R.  "Dans sa proposition, la requérante indique que son fils était membre

 12   de la Défense territoriale, la TO, de Kotor Varos et qu'à l'occasion d'une

 13   tentative de percer en date du 3 novembre 1992 dans le secteur de

 14   Grabovica, avec un groupe assez important de co-combattants, il est tombé

 15   dans une embuscade tendue par des Chetniks et depuis lors on a perdu toute

 16   trace de lui."

 17   Q.  Merci. Vous nous avez dit que vous avez vu dix personnes de tuées dans

 18   une embuscade. Vous n'avez pas vu ce qui s'était passé de l'autre côté.

 19   Mais est-ce que vous admettez qu'il y a possibilité que cet homme ait été

 20   tué à l'occasion de cette embuscade, dans laquelle il est tombé avec des

 21   co-combattants à lui ?

 22   R.  Absolument pas, parce que juste avant que nous n'arrivions dans le

 23   tunnel il était dans le même groupe, parce que je l'entendais, il était à

 24   côté de moi, il avait été blessé à Vecici lors du bombardement et donc il

 25   émettait des bruits étranges. Il était là dans le tunnel, et nous sommes

 26   tous allés à Grabovica. Je le vois, je le vois encore auprès de moi.

 27   Q.  Est-ce que vous pensez qu'Opakic Munira, sa mère, a fourni des

 28   renseignements erronés au tribunal municipal à Sanski Most ?


Page 634

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic, est-ce que vous pourriez

  2   peut-être demander des précisions de façon appropriée. La mère n'était pas

  3   présente apparemment, visiblement, donc la première question - et cela est

  4   valable pour ce document et pour les autres documents - quelles sont les

  5   sources d'information ? Et poser la question ou demander à quelqu'un si

  6   quelqu'un d'autre ne pas dit la vérité, pour poser ce genre de question

  7   encore faudrait-il savoir si la personne a reçu elle-même les informations

  8   ou si elle a été témoin oculaire passif de ce qui s'est passé, parce que

  9   dire la vérité dépend de ce que vous savez lorsque vous faites une

 10   déclaration. Alors, je vous demanderais de bien vouloir demander les

 11   précisions idoines plutôt que de laisser entendre de façon implicite que

 12   cette personne a observé ce qui s'était passé et qu'après elle ait fait une

 13   déclaration en disant la vérité.

 14   M. LUKIC : [interprétation] Je n'ai pas dit qu'elle n'avait pas dit la

 15   vérité, mais elle a donné la mauvaise information au tribunal.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais là il y a une suggestion qui

 17   se glisse là-dedans. Quelle est l'information exacte; quelle est

 18   l'information inexacte ? L'information qu'elle a donnée c'est une

 19   information qu'elle a peut-être obtenue d'une source quelconque.

 20   Maintenant, poser cette question à ce témoin, cela n'a pas de sens, n'est-

 21   ce pas ?

 22   M. LUKIC : [interprétation] Oui, mais pour moi ça a un sens.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ecoutez, poursuivez --

 24   M. LUKIC : [aucune interprétation]

 25   M. LUKIC : [interprétation] -- et n'oubliez pas ce que je viens de vous

 26   dire.

 27   M. LUKIC : [interprétation]

 28   Q.  Je vais en terminer avec les pillages qui ont eu lieu à Vlasic. Vous


Page 635

  1   dites qu'à 15 mètres quatre groupes de personnes avaient bondi d'on ne

  2   s'est où et -- alors, est-ce que vous sortiez de vos autocars ou est-ce que

  3   les gens qui vous ont volé vos objets, qui vous ont pillé, étaient montés à

  4   bord des autocars ? Vous souvenez-vous de cela ?

  5   R.  Je m'en souviens très, très bien. Tous les autocars ont été garés. Bon,

  6   ils étaient garés et ils laissaient les autobus les uns après les autres

  7   aller vers cette allée, et je m'en souviens très bien. Ils laissaient

  8   passer deux ou trois bus puis ils les arrêtaient. Et nous, nous étions dans

  9   le dernier autocar qui avait rejoint ce groupe, et nous ne sommes jamais

 10   revenus dans l'autocar. On nous a juste dit d'aller par là-bas et de

 11   marcher lentement, et alors que nous étions en train de marcher, ces

 12   soldats nous ont sauté dessus. Ils avaient le visage couvert, dissimulé, et

 13   ils nous demandaient de l'argent, de l'or, et ce, à quelques mètres à

 14   chaque fois. Je pense que cela nous est arrivé trois ou quatre fois. Il y

 15   avait différents groupes de personnes qui nous ont demandé cela.

 16   Q.  A quelle distance se trouvait l'un des groupes de l'autre groupe ?

 17   Quelle est la distance que vous deviez parcourir pour arriver, pour

 18   rattraper le groupe précédent ?

 19   R.  Je ne m'en souviens pas exactement, mais ce dont je me souviens, c'est

 20   que -- bon, ils nous ont fait nous déshabiller. Moi je courais et je

 21   courais parce que j'essayais de rattraper ma mère qui était devant en fait.

 22   Donc j'ai dépassé des gens qui avaient été délibérés avant moi, mais

 23   j'essayais tout simplement de rattraper ma mère.

 24   Q.  Je vais poser la question autrement. Est-ce qu'un groupe pouvait voir

 25   l'autre groupe ? Etaient-ils suffisamment près pour voir l'autre groupe ?

 26   R.  Oui. Oui, oui. Nous avons pu rattraper l'autre groupe. Bon, il y avait

 27   des gens qui n'arrivaient pas à bien marcher, enfin les civils. Bon, je ne

 28   sais pas pour les soldats, je ne sais pas quelle était la distance.


Page 636

  1   Q.  Ceux qui vous ont volé vos effets, est-ce qu'ils pouvaient se voir

  2   entre eux ? Est-ce que l'un de ces groupes pouvait voir ce que faisait

  3   l'autre groupe ?

  4   R.  Ecoutez, je n'en sais rien. J'étais terrifié, donc je n'en sais rien.

  5   Je ne sais s'ils pouvaient se voir. Je n'en sais rien. En fait, ce que je

  6   voulais, c'était retrouver ma mère. Voilà, c'est tout.

  7   Q.  Vous nous avez dit que la première fois on vous a tout pris, il ne

  8   restait pas même une aiguille, au niveau du tunnel j'entends; c'est bien

  9   cela ? Ensuite, un premier groupe vous a dépossédé de tous vos effets. Puis

 10   vous avez continué. Puis, à nouveau, un autre groupe de pilleurs à Vlasic

 11   vous vole des effets alors que vous avez déjà été dépossédés de tout ce que

 12   vous aviez. Moi, je ne comprends pas. Que pouvait, donc, ce quatrième

 13   groupe prendre auprès de vous ? Parce que, est-ce que vous avez pu cacher

 14   la première fois, la deuxième fois et la troisième fois des objets,

 15   s'agissant donc de ces groupes qui étaient venus vous déposséder de vos

 16   effets ?

 17   R.  Mais il faudrait que je dise que nous, nous avons rejoint les autocars,

 18   les civils, qui venaient de Vecici. Dans notre autocar, nous n'avions plus

 19   rien. Nous avions été complètement dépouillés à Grabovica. Je sais donc que

 20   ces gens réclamaient constamment de l'argent. Et moi, je me souviens

 21   d'ailleurs qu'il y en avait un qui avait un couteau, il m'a dit : Est-ce

 22   que tu as des sous ? J'ai dit : Non, je n'ai rien. Je me souviens de ce

 23   soldat. Et tous les groupes, chaque groupe était arrêté de la même façon,

 24   donc ils cherchaient dans leurs effets personnels. Donc il y a eu un moment

 25   où moi, en fait, je marchais littéralement sur les vêtements des gens,

 26   parce qu'en fait ce qui les intéressait, c'étaient les objets précieux. Ils

 27   faisaient la même chose à chaque groupe. Moi je n'avais plus rien. Je

 28   n'avais rien. Je ne sais pas si les autres dans l'autocar avaient encore


Page 637

  1   des choses, mais le but de la manœuvre c'était d'obtenir le maximum de

  2   choses. Moi je ne sais pas ce qu'ils ont pu obtenir. Moi je n'avais plus

  3   rien.

  4   Q.  Merci, Monsieur Pasic.

  5   M. LUKIC : [interprétation] Messieurs les Juges, je voudrais demander le

  6   versement au dossier du 6665 au dossier. Je sais que je m'y prends un peu

  7   tard.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Bibles.

  9   Mme BIBLES : [interprétation] Pas d'objection.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Madame la Greffière d'audience, le

 11   document…

 12   Mme LA GREFFIERE : [interprétation] Le document 6665 devient le document

 13   D2.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le document D2 est versé au dossier.

 15   Poursuivez.

 16   M. LUKIC : [interprétation]

 17   Q.  Monsieur Pasic, merci d'avoir répondu à mes questions. C'est tout ce

 18   que j'avais à vous poser comme questions. Merci encore.

 19   R.  Merci.

 20   [La Chambre de première instance se concerte]

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Bibles, avez-vous des questions

 22   supplémentaires à poser au témoin ?

 23   Mme BIBLES : [interprétation] Oui, quelques questions.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je vous en prie.

 25   Mme BIBLES : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 26   Nouvel interrogatoire par Mme Bibles :

 27   Q.  [interprétation] J'aimerais dans un premier temps, Monsieur Pasic, vous

 28   poser quelques questions à propos de questions qui vous ont été posées hier


Page 638

  1   lors du contre-interrogatoire.

  2   Mme BIBLES : [interprétation] Il s'agit de la page 605, lignes 3 [comme

  3   interprété] à 8.

  4   Q.  On vous a posé une question à propos de la différence entre les

  5   villages -- donc il y avait les villages musulmans avec, dans ces villages

  6   musulmans, certaines personnes qui opposaient une résistance, alors que

  7   dans d'autres ce n'étaient pas le cas. Vous vous souvenez de cette question

  8   ?

  9   R.  Oui.

 10   Q.  Est-ce que vous savez si le village de Dabovci a signé ce document

 11   d'allégeance ?

 12   R.  Oui, absolument, et je vais vous dire pourquoi, parce qu'à un moment

 13   lorsque nous nous trouvions à Garici, j'ai décidé d'aller avec ma mère

 14   parce que nous avions été informés à propos de ma sœur -- non, nous

 15   voulions aller la voir. Donc nous sommes allés de Garici à Dabovci pour la

 16   voir. Donc nous étions très, très heureux de la voir parce que nous étions

 17   très préoccupés de notre sœur mutuelle. Et ils avaient signé ce certificat

 18   ou ce document d'allégeance envers les Serbes. Dabovci l'a fait, tout comme

 19   Cirkino Brdo.

 20   Q.  Pour ce qui est des villageois de Dabovci, est-ce que vous savez

 21   justement s'ils ont été –- s'ils ont connu -- si on les a laissés en paix,

 22   en fait, et s'ils ont survécu pendant la guerre ?

 23   R.  Absolument pas. Après qu'ils ont signé ce document d'allégeance aux

 24   Serbes, nous avons appris que des choses absolument épouvantables leur

 25   étaient arrivées. Ma sœur, son mari, beaucoup d'hommes de Dabovci, pour ne

 26   pas dire tous les hommes de Dabovci –-

 27   M. LUKIC : [interprétation] Objection, parce que cela dépasse le cadre de

 28   l'interrogatoire principal. Et moi, je n'en ai pas du tout parlé pendant


Page 639

  1   mon contre-interrogatoire de cela.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Bibles.

  3   Mme BIBLES : [interprétation] Monsieur le Président, hier – et je pense que

  4   je vous ai donné la référence de la page et des lignes – une question a été

  5   posée au témoin, on lui a demandé si son village s'était vu accordé un

  6   traitement différent parce qu'il n'avait pas voulu signer le document

  7   d'allégeance et il y a des questions qui ont été posées à propos des

  8   villages qui avaient signé ce document d'allégeance. Donc je pense que je

  9   peux tout à fait –- enfin, il me semble que je suis tout à fait autorisée à

 10   poser ce genre de questions lors des questions supplémentaires, après le

 11   contre-interrogatoire.

 12   [La Chambre de première instance se concerte]

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Objection refusée.

 14   Poursuivez, Madame Bibles.

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Lorsque nous étions à Garici, nous avons

 16   remarqué que les maisons étaient incendiées à Dabovci. Il y a des gens qui

 17   ont été pris de Dabovci, certains ont été emmenés à Vrbanjci et puis à

 18   Kozara, qui est connu. Et puis lorsque nous nous sommes rendus à Vecici,

 19   nous avons appris en parlant à Elvir Lihovic qu'il avait été le seul à

 20   survivre. Moi j'étais avec ma mère dans la pièce lorsqu'elle lui a posé la

 21   question et qu'elle lui a dit : Qu'est-ce qui s'est passé ? Comment cela

 22   fait que tu as survécu ? Il a raconté que les soldats étaient arrivés dans

 23   le village et qu'ils ont donné l'ordre aux hommes de se regrouper d'abord

 24   et ils les ont fait entrer dans une grange, y compris son cousin et puis un

 25   de ces amis très proches. Donc ils ont tous été enfermés dans cette grange,

 26   et là les soldats serbes ont criblé de balles cette grange. Son ami s'est

 27   approché à lui. Donc ils sont tombés par terre, ce qui fait qu'il était en

 28   dessous et les balles n'ont pas traversé, ne sont pas arrivées jusqu'à lui.


Page 640

  1   Ils ont incendié tout cela, ils ont jeté des grenades. Lui, il a réussi à

  2   s'échapper en cassant une fenêtre et en allant jusqu'à la rivière. Tous les

  3   autres civils ont été emmenés, y compris ma sœur. Et d'ailleurs, il avait

  4   dit qu'il avait été le seul survivant, que c'était son ami qui lui avait

  5   sauvé la vie parce qu'en fait le corps de son ami l'avait protégé des

  6   balles. Et puis, en dépit de l'incendie et des grenades, il a réussi à

  7   casser la fenêtre, à sortir de la grange jusqu'à la rivière, et c'est le

  8   seul qui a survécu, puis il s'est retrouvé avec nous à Grabovica.

  9   Mme BIBLES : [interprétation]

 10   Q.  Et quand l'avez-vous vu pour la dernière fois ?

 11   R.  Je l'ai vu dans le tunnel, il était tout près de nous, parce que nous

 12   essayions de rester regroupés, lorsque nous sommes sortis du tunnel et que

 13   nous nous sommes dirigés vers ce champ. Il était là-bas avec nous.

 14   Q.  Et finalement, lorsque vous vous êtes retrouvé dans la salle de classe

 15   dans l'école de Grabovica, vous avez vu des camions militaires, des hommes,

 16   des lumières. Est-ce qu'il y avait des hommes qui résistaient, qui

 17   opposaient une résistance ou qui combattaient à ce moment-là ?

 18   R.  Absolument pas. Ils avaient de toute façon les mains liées derrière le

 19   dos. Je me souviens, je m'en souviens parfaitement, très bien. Il pleuvait

 20   cette nuit-là. Il pleuvait beaucoup. Ils avaient les mains liées derrière

 21   le dos. On les a emmenés au deuxième étage. Ils ne combattaient pas, ils ne

 22   résistaient pas. Ils avaient les mains liées. Ils n'avaient pas d'armes,

 23   ils n'avaient rien du tout. Ils marchaient avec la tête courbée.

 24   Q.  Et à votre connaissance, est-ce que quelqu'un a retrouvé les restes de

 25   votre père ?

 26   R.  Monsieur le Juge, si vous m'y autorisez, puisque je suis en train de

 27   revivre ce cauchemar maintenant, je dois vous dire que j'ai eu un rêve, que

 28   j'ai rêvé à mon père la nuit dernière. Et pour la première fois depuis,


Page 641

  1   j'ai pu revoir son visage. Enfin j'ai pu voir son visage. Hier, j'étais

  2   heureux parce que j'ai vu son visage pour la première fois, parce que j'ai

  3   beaucoup de rêves ou de cauchemars et je n'arrivais jamais à voir son

  4   visage. Dans mes rêves, j'essaie toujours de l'attraper. Donc c'était en

  5   2007, me semble-t-il, qu'ils ont retrouvé des restes mortels de mon oncle,

  6   enfin, une partie de -- enfin, c'était un morceau de son doigt. Ca a été

  7   retrouvé à Plitska. Vous savez, mon père me manque encore plus maintenant

  8   que je suis moi-même devenu père et que j'ai moi-même mes propres enfants.

  9   Parce que chaque fois, tout ce que je fais avec mes enfants, en fait, me

 10   fait revivre cela, ce souvenir. Et s'il y a des gens qui m'écoutent, s'ils

 11   ont des informations, qu'ils viennent, qu'ils s'adressent à moi et qu'ils

 12   me permettent de retrouver la trace de mon père, la trace de mes cousins,

 13   s'il vous plaît. Mon père me manque terriblement. Voilà mon appel.

 14   Mme BIBLES : [interprétation] Monsieur le Juge, je n'ai plus de questions à

 15   poser.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Pas de questions pour

 17   l'Accusation.

 18   Maître Lukic, est-ce que les questions supplémentaires qui viennent d'être

 19   posées au témoin vous incitent à poser d'autres questions supplémentaires ?

 20   M. LUKIC : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

 22   [La Chambre de première instance se concerte] 

 23   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Pasic --

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Pasic, le Juge Moloto va vous

 25   poser une question.

 26   Questions de la Cour : 

 27   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] J'ai juste une question à vous poser,

 28   Monsieur Pasic. Est-ce que vous avez retrouvé votre 


Page 642

  1   mère ?

  2   R.  Oui. Lorsque nous sommes arrivés à Travnik, nous nous sommes retrouvés.

  3   Elle habite aux Etats-Unis. Elle vit avec ma sœur et avec mon frère

  4   également.

  5   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup.

  6   R.  [aucune interprétation]

  7   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Pasic, étant donné que nous

  9   n'avons pas d'autres questions, ni moi, ni les autres Juges, ni les autres

 10   parties, je vous demande d'attendre encore quelques secondes.

 11   Maître Lukic, étant donné que le témoin n'était pas présent lorsque vous

 12   avez annoncé que vous alliez fournir trois certificats de décès.

 13   Maintenant, mis à part le fait de savoir s'il s'agit des documents qui sont

 14   des certificats de décès, est-ce qu'il y en a un qui manque… ?

 15   M. LUKIC : [interprétation] J'ai vu que je n'avais plus beaucoup de temps.

 16   Le troisième est le même que les deux autres.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'accord. C'est donc la même chose.

 18   M. LUKIC : [aucune interprétation]

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous avez des problèmes,

 20   Madame Bibles, à ce que ceci soit versé au dossier ?

 21   Mme BIBLES : [interprétation] Non. Je pense que c'est en fait la référence

 22   65 ter 6664 --

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic, si vous souhaitez verser

 24   ce document directement, la Chambre ne s'y opposera pas.

 25   M. LUKIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, si cela ne vous

 26   dérange pas, c'est le 6664 --

 27   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

 28   M. LUKIC : [aucune interprétation]


Page 643

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est un document similaire, n'est-ce

  2   pas ?

  3   M. LUKIC : [interprétation] Oui, simplement un nom différent.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, très bien. J'ai bien compris.

  5   Madame la Greffière d'audience, pouvez-vous donner une cote.

  6   Mme LA GREFFIERE : [interprétation] Le document de la liste 65 ter 6664

  7   recevra la cote D3.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D3 est versé au dossier.

  9   Monsieur Pasic, il n'y a plus d'autres questions. Par conséquent, je

 10   souhaiterais vous remercier d'être venu de si loin aujourd'hui et d'avoir

 11   répondu aux questions qui, dans une certaine mesure, vous ont obligé à vous

 12   remémorer une période de votre vie qui a peut-être été difficile. Nous vous

 13   remercions d'être venu. Nous vous souhaitons un bon retour chez vous.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Peut-on faire sortir le témoin du

 16   prétoire.

 17   [Le témoin se retire]

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Après le départ du témoin, avant de

 19   donner à l'Accusation la possibilité de faire comparaître le témoin

 20   suivant, je voudrais traiter de questions d'ordre procédural. Tout d'abord,

 21   nous souhaiterons donner une décision orale. Il s'agit d'une décision

 22   concernant les écritures de l'Accusation qui ont été déposées pour modifier

 23   la liste des témoins au vu des décisions des Juges de cette Chambre de

 24   première instance sur les faits jugés.

 25   Le 2 mai 2012, la Chambre de première instance a rendu sa quatrième

 26   décision sur les faits admis concernant la procédure de présentation des

 27   éléments de preuve en réplique. Dans cette décision, les Juges de la

 28   Chambre ont donné l'ordre à l'Accusation de déposer une notification dans


Page 644

  1   la semaine suivant la décision pour informer les Juges de la Chambre des

  2   nombres d'heures qui ne seraient pas utilisées ainsi que le nombre et les

  3   identités des témoins qui ne seraient pas appelés à comparaître compte tenu

  4   des décisions de la Chambre de première instance sur les faits jugés.

  5   La Chambre a sciemment choisi un délai d'une semaine compte tenu du

  6   fait que l'instruction en question avait déjà été mentionnée dans sa

  7   première décision sur les faits jugés, qui a été déposée le 28 février

  8   2012. Le 13 mars 2012, l'Accusation avait demandé que la date butoir fixée

  9   au départ pour cette notification soit reportée jusqu'à ce que la quatrième

 10   décision de la Chambre de première instance soit rendue. Le 29 mars 2012,

 11   durant une Conférence de mise en état, la Chambre de première instance a

 12   fait droit à la demande de l'Accusation. Cependant, la Chambre de première

 13   instance a également précisé que cette date butoir ne pourrait pas aller

 14   au-delà d'une semaine à compter du dépôt de la quatrième décision et a

 15   également réitéré, et je cite la décision, "que l'Accusation devrait déjà

 16   se préparer au dépôt de cette décision." Et je voudrais demander aux

 17   parties de relire la page du compte rendu d'audience numéro 268.

 18   Comme ceci a été mentionné dans la décision numéro 4 déposée le 2 mai

 19   2012. Le 9 mai 2012, l'Accusation a déposé ses écritures en avançant qu'il

 20   serait prématuré de prendre toute décision sur la non-comparution de

 21   témoins tant que les demandes d'autorisation en appel de la Défense n'aient

 22   été déposées en ce qui concerne les première, seconde et troisième

 23   décisions sur les faits jugés de la Chambre de première instance.

 24   L'Accusation avançait qu'elle aurait besoin de sept semaines pour

 25   réexaminer la question avant de pouvoir apporter les modifications à la

 26   liste des témoins au titre de l'article 65 ter.

 27   Le 27 juin 2012, la Chambre a autorisé l'appel contre les première,

 28   deuxième et troisième décisions sur les faits jugés. En ce qui concerne les


Page 645

  1   écritures de l'Accusation, la Chambre tout d'abord souhaiterait préciser

  2   qu'elle n'avait pas donné instruction à l'Accusation de modifier la liste

  3   des témoins au titre de l'article 65 ter. La Chambre ne s'attendait pas à

  4   ce que les témoins soient retirés de la liste des témoins ou soient placés

  5   sur une "liste de réserve", tel que ceci avait été avancé par l'Accusation

  6   dans le dépôt de ses écritures. Pour être plus clair, l'instruction de la

  7   Chambre était que l'Accusation "dépose une notification indiquant le

  8   nombre d'heures qui ne seraient pas utilisées ainsi que le nombre et les

  9   identités des témoins qui ne seraient pas appelés à comparaître au vu du

 10   fait que les Juges en première instance allaient dresser un constat

 11   judiciaire sur les faits proposés, recensés dans les première, deuxième et

 12   troisième décisions."

 13   La Chambre souhaiterait saisir cette occasion également pour

 14   expliquer les motifs associés à cette instruction. L'objectif était de

 15   s'assurer que l'Accusation, en tant que partie qui demandait que ces faits

 16   jugés fassent objet d'un constat judiciaire par les Juges de la Chambre,

 17   puisse examiner activement ceci et réduire la masse des éléments de preuve

 18   qu'elle comptait présenter dans cette affaire au vu des constats

 19   judiciaires qui avaient été dressés.

 20   Un des principaux motifs de l'article 94 du Règlement de procédure et

 21   de preuve est l'économie judiciaire, et un des effets juridiques du fait

 22   qu'une Chambre de première instance dresse un constat judiciaire concernant

 23   les faits jugés par une autre Chambre de première instance est de permettre

 24   à la partie qui propose de présenter ses éléments de preuve de ne pas avoir

 25   à le faire. De plus, en dressant un constat judiciaire concernant des faits

 26   jugés, ceci évite de présenter deux fois des éléments de preuve liés aux

 27   mêmes faits en question, à moins qu'une autre partie les remette en

 28   question en présentant des éléments de preuve contradictoires.


Page 646

  1   Compte tenu du fait que la Chambre de première instance avait

  2   autorisé l'appel contre la décision sur les faits jugés, la Chambre de

  3   première instance rappelle qu'elle s'attendait pleinement à ce que

  4   l'Accusation ne présente pas des éléments de preuve qui étaient déjà

  5   mentionnés dans les faits jugés qui avaient fait l'objet d'un constat

  6   judiciaire durant la période précédant la décision de la Chambre d'appel.

  7   Ceci devrait être clair d'après l'instruction que je viens de lire, et je

  8   vais répéter donc une partie. Je cite :

  9   "Pour chaque témoin viva voce et pour chaque requête au titre des

 10   articles 92 bis, ter, quater, et 94 bis, la Chambre de première instance

 11   s'attend à que les parties examinent très soigneusement les éléments de

 12   preuve qui sont associés aux faits jugés et, par conséquent, quels sont

 13   ceux qui ne s'avèreraient pas nécessaires et, ainsi, de réduire le montant

 14   des éléments de preuve qui seront présentés."

 15   Fin de citation.

 16   Par conséquent, les Juges de cette Chambre décident qu'en ce qui

 17   concerne les témoins qui ont comparu durant la période transitoire, c'est-

 18   à-dire avant l'arrêt de la Chambre d'appel, l'Accusation devrait examiner

 19   au cas par cas les éléments de preuve qu'elle a l'intention de présenter

 20   par le truchement de ces témoins conformément aux instructions figurant

 21   dans la décision que nous venons de lire.

 22   Une fois que l'arrêt sera prononcé par la Chambre d'appel,

 23   l'Accusation devra déposer une notification dans les sept semaines qui

 24   suivront la décision de la Chambre d'appel en faisant état pour tous les

 25   témoins qui sont encore recensés sur leur liste de témoins le nombre

 26   d'heures qui ne seront pas utilisées ainsi que le nombre et les identités

 27   des témoins qui ne seront pas amenés à comparaître au vu des décisions de

 28   cette Chambre de première instance sur les faits jugés.


Page 647

  1   Ceci conclut la décision de cette Chambre de première instance.

  2   Monsieur Groome, les Juges de cette Chambre souhaiteraient entendre

  3   la réponse de l'Accusation aux quatre requêtes de la Défense qui ont été

  4   déposées hier, à savoir demande d'ajournement, demande de report du contre-

  5   interrogatoire de M. Dannatt, non-présentation d'un document Harland et non

  6   présentation de 26 autres documents Harland. Ceci, donc, résume vos

  7   requêtes.

  8   M. GROOME : [interprétation] Merci. Est-ce que vous avez une préférence

  9   quant à l'ordre que je dois utiliser ?

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Peut-être le report, ensuite la non-

 11   présentation d'un document mentionné par Harland en troisième et les 26

 12   documents en quatrième. Mais tant que c'est clair, faites-le dans l'ordre

 13   que vous souhaitez.

 14   M. GROOME : [interprétation] Je vais commencer par notre demande de

 15   reporter le contre-interrogatoire du général Dannatt.

 16   Il s'agit d'un expert de l'Accusation, un expert militaire qui devait

 17   déposer aujourd'hui. L'Accusation rappelle qu'elle ne s'opposera pas à une

 18   demande raisonnable de la Défense pour faire recomparaître le général

 19   Dannatt pour un contre-interrogatoire supplémentaire. C'est une possibilité

 20   que les Juges de la Chambre ont également envisagée dans le paragraphe 18

 21   de sa décision du 5 juillet concernant la présentation du premier volet des

 22   éléments à charge. Et nous pensons qu'il y a une erreur au paragraphe 13 de

 23   la requête de la Défense, étant donné que celui-ci laisse penser que les

 24   Juges de cette Chambre n'avaient pas envisagé que le général Dannatt

 25   pouvait revenir pour un deuxième contre-interrogatoire. La décision de la

 26   Chambre de première instance concernant le général Dannatt ne prend pas en

 27   compte la possibilité -- ou n'envisage pas la possibilité de faire

 28   recomparaître le témoin, si la Défense avait des motifs suffisants


Page 648

  1   justifiant un nouveau contre-interrogatoire -- je suis désolé. La Chambre a

  2   permis à la Défense de faire ceci. Et nous pensons que la possibilité de

  3   faire recomparaître le général Dannatt pour un deuxième contre-

  4   interrogatoire, si ceci est justifié, est suffisant pour protéger les

  5   droits de l'accusé. Cependant, en ce qui concerne la possibilité de la

  6   Défense de se préparer au contre-interrogatoire du général Dannatt pour le

  7   premier contre-interrogatoire, je vais répondre aux trois points qui sont

  8   avancés dans la requête de la Défense ainsi que dans la requête de la

  9   Défense concernant le général Dannatt déposée le 2 juillet.

 10   La Défense avance qu'elle n'a pas eu suffisamment de temps pour se

 11   préparer au contre-interrogatoire du général Dannatt pour diverses raisons;

 12   tout d'abord, parce que la Défense n'a reçu le CV du général Dannatt que

 13   récemment, notamment pour sa version en B/C/S; deuxièmement, le général

 14   Dannatt est le troisième témoin dans la présentation des éléments à charge,

 15   alors qu'au départ il était considéré comme le 23e témoin; troisièmement,

 16   la Défense a reçu certains documents concernant le général Dannatt au cours

 17   de la semaine qui vient de s'écouler. Ces arguments portent à confusion.

 18   Tout d'abord, le CV du général Dannatt est présenté par le menu dans son

 19   rapport actuel ainsi que dans le rapport précédent qui avait été établi

 20   dans le cadre du procès Krstic. La Défense a eu accès à ces documents dès

 21   le mois de novembre 2011, tant dans la version originale anglaise que dans

 22   sa traduction en B/C/S. La Défense a, par conséquent, eu tout le temps

 23   nécessaire pour passer en revue son CV, et un des membres de l'équipe de la

 24   Défense de M. Mladic est le conseil qui a procédé au contre-interrogatoire

 25   du général Dannatt dans l'affaire Krstic, et je crois que c'est lui qui

 26   procédera au contre-interrogatoire dans ce procès-ci. Deuxièmement, comme

 27   les Juges de cette Chambre l'ont mentionné dans sa décision du 5 juillet en

 28   ce qui concerne le calendrier pour le premier volet de ce procès, la date


Page 649

  1   de déposition du général Dannatt n'a pas changé et a été fixée dès le 13

  2   avril. Par conséquent, la Défense a eu un préavis clair et suffisant de la

  3   date de déposition du général Dannatt. La seule différence c'est que moins

  4   de témoins vont déposer avant que lui ne dépose.

  5   Enfin, la Défense a reçu certains documents au cours de la semaine qui

  6   vient de s'écouler. Il s'agit du rapport du général Dannatt qui mentionne

  7   des documents importants en recensant soit leur cote 65 ter, soit leur

  8   référence ERN. Au paragraphe 4 du rapport, il est également mentionné que

  9   le général Dannatt a examiné d'autres documents pour se préparer à ce

 10   rapport, mais ce sont des documents qu'il n'a pas cités et qu'il n'a pas

 11   utilisés pour l'élaboration des conclusions dans ce rapport.

 12   Par conséquent, je voudrais également revenir sur une décision prise

 13   dans l'affaire Stanisic/Simatovic du 11 mars 2011, à savoir que les Juges

 14   d'une Chambre évaluent la communication des éléments liés à un rapport

 15   d'expert au cas par cas, et il y a également une décision qui a été prise

 16   dans l'affaire Gotovina et consorts le 27 août 2009 faisant état du fait

 17   que la Défense n'a aucune obligation de communiquer à l'Accusation des

 18   documents ou des communications qui seraient associés à la préparation ou à

 19   l'élaboration d'un rapport d'expert ou dans le cadre de la déposition d'un

 20   même expert.

 21   La Défense n'a pas demandé que les documents en question lui soient

 22   transmis jusqu'à il y a environ deux semaines. A ce moment-là, nous sommes

 23   tombés d'accord avec la Défense et nous leur avons dit que nous

 24   transmettrions un exemplaire du classeur de l'Accusation que nous avions

 25   préparé pour notre équipe qui reprenait toutes les pièces citées dans son

 26   rapport. Ces documents ont été communiqués à la Défense dans le contexte de

 27   la communication globale de documents pour cette affaire. Nous avons

 28   également accepté de fournir un compendium des différents documents qui


Page 650

  1   avaient été fournis au général Dannatt mais que celui-ci n'a pas utilisés

  2   pour élaborer son rapport. La Défense était d'accord avec cette

  3   proposition, et nous avons fourni le classeur ainsi que cette liste. La

  4   Défense maintenant se plaint que ce compendium reprend des documents qui

  5   n'ont pas de cotes ERN. Les documents, en fait, sont composés dans leur

  6   totalité d'une version précédente de l'acte d'accusation de ce procès ainsi

  7   que de trois listes de personnalités au sein de la VRS. Ces informations

  8   sont tout à fait disponibles pour le grand public.

  9   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, l'Accusation a fourni les

 10   documents associés à l'élaboration du rapport du général Dannatt à la

 11   Défense suite à la demande de la Défense. Comme nous avons dit, nous nous

 12   engageons à ne pas nous opposer à faire recomparaître le général Dannatt

 13   pour un deuxième contre-interrogatoire, mais nous pensons que la Défense a

 14   eu suffisamment de temps pour se préparer à son contre-interrogatoire dès

 15   la fin de l'interrogatoire principal du général Dannatt. Et, par

 16   conséquent, on devrait s'attendre à ce que la Défense puisse procéder à ce

 17   contre-interrogatoire immédiatement à l'issue de l'interrogatoire

 18   principal.

 19   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, pour ce qui est de ma

 20   réponse à la demande pour un ajournement basé sur un changement dans les

 21   lignes directrices. La Défense, hier, a déposé une requête demandant un

 22   ajournement de six mois sur la base de la décision des Juges de la Chambre

 23   modifiant ses orientations en ce qui concerne l'article 92 bis, l'article

 24   92 ter et l'article 92 quater. Cette requête a été déposée à la dernière

 25   heure dans le cadre de la préparation du procès. Et la Défense avance que

 26   cette modification récente de l'orientation de la Chambre créé des

 27   obstacles importants dans les préparatifs de la Défense et va à l'encontre

 28   des droits à un procès équitable de l'accusé. La Défense n'a pas fait


Page 651

  1   valoir cet argument auparavant, même si les orientations de la Chambre ont

  2   été disponibles depuis plusieurs mois. La Défense n'a jamais avancé que ces

  3   lignes directrices avaient des conséquences néfastes sur le droit à un

  4   procès équitable et ils ne devraient, par conséquent, pas les utiliser dans

  5   ce contexte.

  6   De plus, les dépôts d'arguments précédents concernant les lignes

  7   directrices n'ont jamais laissé penser que ces lignes directrices

  8   constituaient des règles absolues auxquelles devrait se fier la Défense

  9   pour la préparation de son procès, comme c'est le cas dans cette requête.

 10   Au paragraphe 4 de la requête de la Défense du 16 avril 2012, il est

 11   mentionné que :

 12   "Il s'agit purement et simplement de lignes directrices."

 13   Les Juges de la Chambre ont répété que ces modifications ne

 14   s'appliqueraient que dans des circonstances exceptionnelles et qu'elle ne

 15   le ferait qu'avec un énoncé des motifs très clairs. La Défense, par

 16   conséquent, ne peut pas simplement se baser là-dessus pour modifier une

 17   décision des Juges de la Chambre. De plus, la Défense ne semble pas pouvoir

 18   prouver que ceci a un impact significatif pour la préparation de ce procès.

 19   Même si les Juges de la Chambre ne prennent pas en compte cet argument, la

 20   Défense essaie d'expliquer pourquoi ses préparatifs ont été minés par la

 21   décision du paragraphe 9 de la requête, où elle recense cinq arguments.

 22   Tout d'abord, la Défense se plaint du fait que la décision permet à

 23   l'Accusation de déposer plusieurs déclarations de témoins si la deuxième

 24   déclaration est une déclaration supplémentaire ou porte sur un sujet

 25   différent. Deuxièmement, la Défense critique la décision des Juges de la

 26   Chambre ayant adopté une approche plus souple de la présentation des

 27   éléments de preuve pour des dépositions de témoins déposant au titre des

 28   articles 92 bis et 92 ter. Troisièmement, les délais de l'Accusation pour


Page 652

  1   les témoins relevant de l'article 92 ter ont augmenté alors que la Défense

  2   n'a pas reçu de temps supplémentaire pour son contre-interrogatoire.

  3   Quatrièmement, la Défense remet en question la décision des Juges de la

  4   Chambre de permettre l'utilisation d'éléments de preuve du compte rendu

  5   d'audience dans certains cas.

  6   Enfin, la Défense se plaint que, compte tenu de cette décision,

  7   l'Accusation a la possibilité de présenter des documents supplémentaires

  8   dans le cadre des questions supplémentaires. Cet argument, en fait, ne

  9   reflète pas exactement la décision des Juges de la Chambre, ni les

 10   orientations, ni la jurisprudence du Tribunal. La décision est tout à fait

 11   cohérente par rapport à la jurisprudence de ce Tribunal.

 12   En ce qui concerne le fait que la Défense soit en mesure de se

 13   préparer de manière générale, et ceci est plus particulièrement pertinent

 14   pour les deux premiers points avancés par la Défense, l'Accusation n'a pas

 15   modifié les documents qui seront utilisés pour les témoins déposant au

 16   titre de l'article 92 ter. La Défense sait ce que l'Accusation déposera

 17   pour chacun des témoins qui vont déposer au cours des deux prochaines

 18   semaines, et dans la plupart des cas pour un mois à venir, voire plus. Ceci

 19   permet à la Défense d'avoir suffisant de temps pour se préparer.

 20   La Défense ne reflète pas exactement les décisions en matière

 21   d'octroi de temps pour la déposition des témoins. Les Juges de la Chambre

 22   avaient déjà accepté les évaluations de durées des interrogatoires

 23   principaux de l'Accusation le 24 avril 2012, à la page 314 du compte rendu

 24   d'audience. Même si le temps accordé au contre-interrogatoire n'était pas

 25   précisément la question dans la décision, les Juges de la Chambre ont été

 26   très clairs - par exemple, au paragraphe 11 de sa décision concernant le

 27   Témoin Harland, au paragraphe 13 en ce qui concerne les Témoins Kingori,

 28   Koster et Schmitz - que le temps octroyé à la Défense pour le contre-


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  1   interrogatoire serait évalué après que le témoin ait déposé dans le cadre

  2   de l'interrogatoire principal.

  3   L'argument de la Défense concernant l'utilisation de comptes rendus

  4   d'audience comme élément de preuve porte également à confusion. La décision

  5   explique certaines circonstances qui permettront d'accepter le versement

  6   comme élément de preuve de parties d'un compte rendu d'audience. Comme la

  7   Défense l'a reconnu dans ses écritures déposées le 16 avril, les

  8   orientations permettent également de modifier cette procédure.

  9   Enfin, la Défense avance que cette décision modifie les orientations

 10   qui permettent à l'Accusation de présenter des éléments de preuve durant

 11   les questions supplémentaires. Ceci est incorrect. La décision, simplement,

 12   reconnaît le fait que les parties peuvent, en fait, accepter de verser au

 13   dossier des éléments de preuve durant le contre-interrogatoire; et si la

 14   partie qui procède au contre-interrogatoire aborde un nouveau sujet, la

 15   partie qui fait comparaître un témoin peut également présenter de nouveaux

 16   documents durant les questions supplémentaires. Ces orientations n'ont pas

 17   été abordées dans ce contexte.

 18   Monsieur le Président, ceci constitue la réponse de l'Accusation à

 19   cette requête. Je vois qu'il nous reste deux minutes avant la pause. Peut-

 20   être que mes autres réponses seront plus brèves.

 21   [La Chambre de première instance se concerte]

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous pensez que vous pouvez

 23   conclure en l'espace de sept ou huit minutes ?

 24   M. GROOME : [interprétation] Oui.

 25   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

 26   M. GROOME : [interprétation] Alors, la troisième requête que la Défense a

 27   déposé hier en ce qui concerne la non-utilisation du document de la liste

 28   65 ter 04472, un rapport sur Srebrenica dont M. Harland, notre témoin


Page 654

  1   suivant, est l'auteur.

  2   Comme je l'ai dit hier à Me Lukic et aux Juges de la Chambre, je n'ai pas

  3   l'intention d'utiliser ce document ni de le verser au dossier même si M.

  4   Harland est l'auteur de ce rapport. J'ai également dit à Me Lukic que

  5   j'avais des difficultés à envisager certaines circonstances qui

  6   justifieraient que je demande le versement de ce dossier durant les

  7   questions supplémentaires de M. Harland. M. Lukic a informé les Juges de la

  8   Chambre et l'Accusation ce matin qu'il avait en fait d'autres intentions,

  9   c'est-à-dire qu'il souhaitait un engagement de la part de l'Accusation que

 10   celle-ci ne verse jamais ce rapport au dossier quelle que ce soit

 11   l'évolution du procès. Monsieur le Président, Messieurs les Juges, il

 12   s'agit d'une demande en abstraction. Le moment voulu viendra peut-être si

 13   l'Accusation demande le versement de ce rapport. On ne peut pas demander à

 14   l'Accusation de répondre en théorie à ce type de question. Mais je m'engage

 15   si le moment se faisait, si le moment survenait, que l'Accusation avertira

 16   la Défense dès que cela sera possible de façon à ce qu'elle puisse trouver

 17   des remèdes auprès des Juges de la Chambre le moment voulu et compte tenu

 18   du contexte qui justifiera ou pas le versement de ce rapport.

 19   Et enfin, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, pour ce qui est de la

 20   demande dans le but d'obtenir un recours à la non-utilisation des pièces à

 21   conviction par le truchement de M. Harland, pièces à conviction qui ne

 22   figurent pas sur la liste des pièces. En application des consignes données

 23   par la Chambre de première instance, le 6 juillet 2012, l'Accusation a

 24   déposé un corrigendum à sa demande au titre de l'article 92 ter pour M.

 25   Harland. Et en annexe, il y avait la déclaration expurgée du témoin ainsi

 26   qu'un jeu révisé de pièces connexes. La Défense a été informée que

 27   l'Accusation avait l'intention de demander le versement au dossier de la

 28   déclaration de M. Harland du mois d'avril 2009 étant donné que la première


Page 655

  1   requête au titre de l'article 92 ter a été déposée le 2 avril 2012. Dans

  2   son corrigendum, l'Accusation a diminué le nombre de pièces qu'elle

  3   souhaitait verser au dossier comme pièces connexes, toujours dans un souci

  4   de respecter les consignes très explicites données par la Chambre eu égard

  5   à ce témoin et conformément aux principes directeurs donnés par la Chambre.

  6   L'Accusation indique qu'aucun des 26 documents énumérés au paragraphe 5 de

  7   la demande de la Défense ne font partie de la liste des pièces que

  8   l'Accusation a fournie à la Défense. Deux de ces documents sont la

  9   déclaration expurgée du témoin ainsi qu'un corrigendum où certaines

 10   coquilles moins importantes ont été rectifiées. La Défense dispose de ces

 11   deux documents depuis le 11 novembre 2011.

 12   Et j'aimerais indiquer à la Chambre ou rappeler, plutôt, à la Chambre,

 13   qu'ils ne font pas partie de la liste des pièces à conviction du fait des

 14   consignes données explicitement par la Chambre le 19 janvier 2012, page du

 15   compte rendu d'audience 156, et je cite :

 16   "La Chambre accepte la proposition présentée par le Procureur pour ne pas

 17   inclure ces anciennes déclarations dont il n'a pas l'intention de demander

 18   le versement au dossier en l'espèce. Il s'agit donc de l'écriture du 10

 19   février en application de l'article 65 ter. Ces futures déclarations ont

 20   été rédigées conformément aux instructions qui nous ont été données parce

 21   que l'Accusation a l'intention de les verser au dossier, et cela devra être

 22   donné à la Défense aussitôt qu'elles seront terminées."

 23   Donc l'Accusation a parfaitement respecté cette consigne. Les deux autres

 24   documents, Messieurs les Juges, sont un recueil de cartes, et nous y

 25   faisons référence comme un recueil de cartes où nous trouvons des cartes et

 26   des photographies de la zone de Sarajevo, et le deuxième document est tout

 27   simplement une photographie prise par satellite de la zone de Sarajevo et

 28   autour de Sarajevo avec les quartiers qui sont indiqués et les lignes de


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  1   front et de confrontation qui sont également indiquées. Si cela nous permet

  2   de faciliter ou de trouver une solution au problème, l'Accusation est tout

  3   à fait disposée à poser des questions de fond à M. Harland lorsque ces

  4   documents lui seront présentés, mais n'a pas l'intention de demander leur

  5   versement au dossier. Une cote provisoire leur sera attribuée jusqu'au

  6   moment où nous pourrons en parler plus précisément.

  7   Voilà, j'en ai terminé.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Groome. La

  9   Chambre va examiner pendant la pause la façon dont elle pourra réagir à ces

 10   quatre requêtes et nous verrons si les parties auront une autre possibilité

 11   de présenter des arguments ou des écritures ou si la Chambre décidera sur

 12   la base des demandes ou des réponses. Nous allons examiner cela pendant la

 13   pause et nous vous tiendrons informés.

 14   La Chambre aimerait également, avant que nous ne fassions la pause, vous

 15   parler d'une question de calendrier. Car le bureau du Procureur a changé de

 16   point de vue, me semble-t-il, à propos de l'audience de vendredi. Car hier

 17   il me semble qu'il n'y avait pas d'objection indiquée et nous avions prévu,

 18   donc, de commencer l'audience à 9 heures vendredi, mais il semblerait que

 19   pour des raisons impérieuses l'Accusation nous demande de bien vouloir

 20   commencer à 11 heures vendredi. Avant que la Chambre ne tranche la

 21   question, j'aimerais savoir si cela poserait des problèmes à la Défense ?

 22   M. LUKIC : [interprétation] Non, Monsieur le Président.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, bien. Je vais consulter mes

 24   collègues.

 25   [La Chambre de première instance se concerte]

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] L'audience de vendredi commencera donc à

 27   11 heures, il s'agit de l'audience de cette semaine.

 28   M. GROOME : [aucune interprétation]


Page 657

  1   [La Chambre de première instance se concerte]

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Lukic, je vois que vous

  3   souhaitez intervenir.

  4   M. LUKIC : [interprétation] Oui, oui, très brièvement.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je vous en prie.

  6   M. LUKIC : [interprétation] Je voulais tout simplement vous parler de la

  7   requête relative à M. Dannatt. Nous avons déposé cette requête ou cette

  8   demande et je vous dirais qu'il y a encore quatre documents qui font défaut

  9   pour le moment. Nous avons mis à jour, ceci étant, la liste.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais est-ce que vous en avez informé

 11   l'Accusation ? Est-ce que vous avez demandé à ce que les documents qui vous

 12   font défaut vous soient fournis le plus rapidement possible ?

 13   M. LUKIC : [interprétation] Mais il y a déjà un retard --

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce n'est pas la question que je vous ai

 15   posée. Est-ce que vous leur avez demandé de fournir ces documents le plus

 16   rapidement possible ?

 17   M. LUKIC : [interprétation] Nous sommes en train de vérifier la question.

 18   Notre stagiaire est en train d'étudier la question, car il y a encore

 19   quatre documents qui nous manquent.

 20   M. GROOME : [interprétation] Ecoutez, je reste ici pendant la pause avec

 21   Mme Stewart et nous verrons comment trouver une solution pour Me Lukic.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Eh bien, nous verrons. Lorsque vous

 23   aurez les cotes des documents, Monsieur Groome, nous verrons en fait si

 24   cette question pourra être réglée après la pause.

 25   Pause que nous allons prendre maintenant, et nous allons reprendre à

 26   15 heures 05.

 27   --- L'audience est suspendue à 14 heures 37.

 28   --- L'audience est reprise à 15 heures 07.


Page 658

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vais d'abord informer les parties de

  2   ce que nous allons faire à propos des quatre demandes qui ont été déposées

  3   hier. Je vais dans un premier temps m'intéresser à la demande présentée par

  4   la demande [comme interprété] aux fins de surseoir au contre-interrogatoire

  5   de M. Richard Dannatt. Pour ce qui est de cette demande, la Chambre prendra

  6   une décision lorsque l'interrogatoire principal de M. Dannatt sera terminé,

  7   et la Chambre décidera à ce moment-là si elle donnera la possibilité aux

  8   parties de présenter brièvement leurs arguments oralement.

  9   La deuxième demande est la demande présentée par la Défense aux fins

 10   d'ajourner le procès ou, à défaut, de reconsidérer les conseils amendés

 11   relatifs au versement au dossier et à la présentation des éléments de

 12   preuve. La Chambre va donner dans une petite minute aux parties la

 13   possibilité de présenter d'autres arguments s'ils souhaitent le faire. Et

 14   la Chambre a l'intention de rendre une décision plus tard cette semaine ou

 15   au début de la semaine prochaine. Pour le moment, la Chambre ne voit pas

 16   pourquoi elle devrait suspendre le procès tant que cette décision n'aura

 17   pas été rendue.

 18   Troisièmement, il s'agit de la décision urgente aux fins d'empêcher

 19   l'Accusation d'utiliser ou de verser au dossier le document 4472 de la

 20   liste 65 ter. La Chambre a décidé que cette requête ou demande avait été

 21   présentée de façon un peu prématurée et, par conséquent, il n'est pas fait

 22   droit à cette demande, ce qui ne signifie pas pour autant qu'elle ne pourra

 23   pas être représentée.

 24   La quatrième demande qui est une demande urgente par laquelle la Défense

 25   demande à ce que l'Accusation n'ait pas la possibilité, ne soit pas

 26   autorisée à utiliser ou à verser au dossier des pièces à conviction par le

 27   truchement du Témoin Harland, pièces à conviction qui ne figuraient pas sur

 28   la liste précédemment. Nous considérons également que cette demande est


Page 659

  1   beaucoup trop prématurée, et c'est la raison pour laquelle la Chambre n'y

  2   fait pas droit, ce qui ne signifie pas pour autant que ladite demande ne

  3   pourra pas être représentée. Si vous avez des objections à propos du

  4   versement ou de la présentation de ces documents, nous entendrons vos

  5   objections. Ce qui signifie, Maître Lukic, que vous avez la possibilité de

  6   répondre brièvement aux arguments avancés par l'Accusation avant la pause à

  7   propos de votre demande aux fins de suspension du procès. Si vous me dites

  8   vouloir le faire un peu plus tard cet après-midi, je vous en donnerais la

  9   possibilité après la prochaine pause, par exemple, si tel est votre

 10   souhait.

 11   M. LUKIC : [interprétation] Je peux en terminer très vite avec cette

 12   question maintenant.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si tel est votre choix, je vous en prie,

 14   Maître Lukic.

 15   M. LUKIC : [interprétation] Cette demande, si je l'ai bien comprise, a été

 16   présentée fondamentalement car de nouveaux documents ont été présentés ou

 17   parce qu'il est envisagé de présenter de nouveaux documents lors des

 18   questions supplémentaires ? Est-ce qu'il s'agit bien de la demande en

 19   question ?

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il y a eu quatre demandes déposées lundi

 21   : donc il s'agissait de surseoir au contre-interrogatoire de M. Richard

 22   Dannatt; deuxièmement, il s'agissait du Témoin Harland, et là il s'agissait

 23   du document à propos duquel vous avez informé la Chambre ce matin que vous

 24   n'alliez pas le retirer en dépit du fait que l'Accusation a dit qu'elle

 25   n'allait pas en demander le versement au dossier; et l'autre porte, je

 26   pense, aux 26 documents. Mais je vous invite maintenant à présenter votre

 27   réaction à propos de la quatrième demande.

 28   M. LUKIC : [interprétation] Visiblement, il y a une certaine confusion qui


Page 660

  1   règne parmi notre équipe, et je vous demande donc de bien vouloir envisager

  2   la solution qui consistait à revenir sur cette question après la deuxième

  3   pause.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. C'est ce que nous ferons.

  5   M. LUKIC : [aucune interprétation]

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que l'Accusation est disposée à

  7   faire comparaître le deuxième témoin, M. Harland ?

  8   M. GROOME : [interprétation] Tout à fait, nous sommes prêts à faire rentrer

  9   M. David Harland dans le prétoire.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais avant que cela ne soit fait, avant

 11   que le témoin n'entre dans le prétoire, j'aimerais rappeler à l'Accusation

 12   le critère qui a été énoncé pour les documents connexes, et je m'en réfère

 13   à nos conseils, à nos principes directeurs : présentation claire des

 14   éléments de preuve, avec une préférence pour les documents plus succincts

 15   et explication des déclarations.

 16   Alors, si j'ai suivi les différents arguments qui ont été présentés et les

 17   différentes écritures, nous avons maintenant 15 documents associés à ce

 18   témoin ?

 19   M. GROOME : [interprétation] Quatorze, Monsieur le Président.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien, 14. Alors, il y en a au moins un,

 21   le document 10015, il s'agit de l'évaluation politique des Nations Unies de

 22   l'année 1994, pour ce document, je pense que nous y faisons référence dans

 23   nos orientations. Nous nous demandons, nous, ou la Chambre se demande s'il

 24   était véritablement nécessaire de présenter ce document. Alors je consulte

 25   la liste - et lorsque je dis "je", j'entends la Chambre, et c'est ce que

 26   nous avons fait - nous avons examiné la liste et nous avons, par exemple,

 27   l'impression que le document 10030, qui est un télégramme de la FORPRONU du

 28   15 août 1994, pour ce document-ci, nous comprenons parfaitement votre


Page 661

  1   souhait de verser ce document au dossier. Il en va de même pour le document

  2   28049, réunion avec Mladic du 29 septembre 1993; il en va également de même

  3   pour la lettre de M. Harland destinée à M. Akashi, document 28058, lettre

  4   du 19 octobre 1994; ou vous avez encore le document 28051, réunion avec M.

  5   Mladic du 12 janvier 1995. Alors, pour ces documents qui figurent encore

  6   sur la liste, nous comprenons fort bien pourquoi vous souhaitez toujours

  7   les verser au dossier conformément à nos conseils ou orientations. Mais

  8   pour beaucoup de ces documents sur la liste dont des extraits figurent dans

  9   la déclaration du témoin ou qui sont même cités, nous nous interrogeons et

 10   nous demandons s'il est bien nécessaire de les verser au dossier en dépit

 11   du fait que le témoin les ait examinés et que certains passages en sont

 12   soit cités, soit recopiés. Donc ne l'oubliez pas lors de l'interrogatoire

 13   principal avec le témoin lorsque vous demanderez le versement au dossier

 14   des documents connexes.

 15   M. GROOME : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Et

 16   permettez-moi de vous présenter une suggestion. En fait, je n'allais pas

 17   demander le versement au dossier des pièces connexes avant la fin de

 18   l'interrogatoire principal. Neuf de ces pièces, je vais poser des questions

 19   bien précises au témoin, et je suis tout à fait disposé à respecter et à

 20   reprendre à mon compte les conseils et orientations de la Chambre ainsi que

 21   les raisons qui ont été présentées et qui expliquent pourquoi l'Accusation

 22   souhaite demander le versement au dossier de ces 14 pièces. Je suis préparé

 23   à le faire. Je pense que cela est beaucoup plus logique, d'ailleurs, que la

 24   Chambre entende d'abord ce que M. Harland a à dire à propos de neuf de ces

 25   documents, mais bon, je suis tout à fait disposé à faire ce que la Chambre

 26   voudrait que je fasse.

 27   [La Chambre de première instance se concerte]

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La Chambre n'a absolument aucune


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  1   objection à cette façon de procéder.

  2   Est-ce que le témoin pourrait entrer dans le prétoire.

  3   M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président --

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

  5   M. GROOME : [interprétation] -- en attendant qu'il n'arrive dans le

  6   prétoire, il faut savoir que dans votre décision du 3 juillet, au

  7   paragraphe 6, vous demandez une information mise à jour quant aux pièces

  8   connexes, ce que nous avons fait, et vous demandez également une mise à

  9   jour pour ce qui est des faits déjà jugés. Et je suis disposé à vous

 10   fournir un rapport à ce sujet, je vous parle maintenant des faits déjà

 11   jugés, et indiquer à la Chambre comment je me propose de procéder.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si vous pouvez le faire avant que le

 13   témoin n'entre dans le prétoire.

 14   M. GROOME : [interprétation] Oui, tout à fait.

 15   Donc l'Accusation a examiné les décisions prises par la Chambre eu égard

 16   aux faits déjà jugés et a identifié les faits pour lesquels il y avait

 17   recoupement avec ou des doublons avec la déposition de M. Harland ou encore

 18   lorsqu'il s'agit d'éléments qui sont extrêmement proches. Dans les cas où

 19   il y a un recoupement avec la déposition de M. Harland, je ne vais pas

 20   demander des éléments de preuve et j'indiquerai à la Chambre qu'il s'agit

 21   de tel fait précis. Mais il y a des exemples où même s'il n'y a pas de

 22   recoupement, le lien est très, très proche, en fait, entre les deux, et il

 23   se peut qu'il soit utile à la Chambre que l'Accusation indique, d'après

 24   elle, quels faits sont très, très proches dans l'ensemble des éléments de

 25   preuve qui vont être abordés avec le témoin. Et j'espère, d'ailleurs, que

 26   cela est conforme à ce qu'attend la Chambre quant à notre façon d'utiliser

 27   les faits déjà jugés.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous avons entendu votre explication. Je


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  1   ne pense pas que Me Lukic souhaite intervenir à ce sujet. Pour le moment,

  2   nous allons laisser cela en l'état et voir comment vous allez procéder.

  3   M. GROOME : [interprétation] En dernier lieu, Monsieur le Président, pour

  4   ce qui est de l'élément Sarajevo de l'affaire, nous avons préparé un

  5   recueil de cartes et les photographies où les lieux sont cités. J'espère

  6   que cela sera utile à la Chambre. J'en ai des exemplaires pour la Chambre.

  7   Nous les avons fournis à la Défense de M. Mladic. Et je pense qu'il serait

  8   approprié de demander à Me Lukic s'il a des objections à ce que la Chambre

  9   reçoive ce recueil de cartes.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic, vous avez des objections à

 11   ce que la Chambre reçoive ce recueil de cartes ?

 12   M. LUKIC : [interprétation] Absolument pas.

 13   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Harland. Monsieur

 15   Harland, je suppose, pour reprendre la formule classique, s'il en fut.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui, tout à fait.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Harland, avant que vous ne

 18   commenciez votre déposition, le Règlement de procédure et de preuve stipule

 19   que vous devez prononcer une déclaration solennelle dont le texte vous est

 20   maintenant donné par M. l'Huissier. Je vous invite à la prononcer.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, tout à fait.

 22   Je déclare solennellement que je dirai la vérité, toute la vérité et

 23   rien que la vérité.

 24   LE TÉMOIN : DAVID HARLAND [Assermenté]

 25   [Le témoin répond par l'interprète]

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur Harland. Veuillez vous

 27   asseoir.

 28   Vous allez dans un premier temps répondre aux questions qui vous


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  1   seront posées par M. Groome.

  2   M. GROOME : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] M. Groome qui représente le bureau du

  4   Procureur.

  5   Monsieur Groome, je vous en prie.

  6   M. GROOME : [interprétation] Merci beaucoup.

  7   Interrogatoire principal par M. Groome :

  8   Q.  [interprétation] Est-ce que vous pourriez décliner votre identité pour

  9   le compte rendu d'audience ?

 10   R.  David John Harland.

 11   Q.  Monsieur Harland, avez-vous jamais travaillé pour les Nations Unies,

 12   avez-vous été basé en Bosnie-Herzégovine ?

 13   R.  Oui.

 14   Q.  Pendant quelle période ?

 15   R.  A partir du printemps de l'année 1993 jusqu'en 1999.

 16   Q.  Et est-ce qu'il y a eu un lieu précis où vous avez été basé en Bosnie ?

 17   R.  J'ai passé le plus clair de mon temps à Sarajevo.

 18   Q.  Monsieur Harland, est-il vrai que vous avez fourni des dépositions ou

 19   que vous avez fourni des éléments d'information au bureau du Procureur et

 20   que vous avez déjà témoigné devant ce Tribunal dans d'autres affaires à

 21   propos de votre travail en Bosnie ?

 22   R.  Oui, c'est exact.

 23   Q.  Avez-vous fourni ces éléments sous forme, en partie, d'une déclaration

 24   écrite ?

 25   R.  Oui, tout à fait.

 26   M. GROOME : [interprétation] J'aimerais que M. l'Huissier affiche le

 27   document de la liste 65 ter 28315. Il s'agit d'une déclaration de M.

 28   Harland qui a été prise pendant plusieurs jours et qui est signée le 4


Page 665

  1   septembre 2009, me semble-t-il, mais il va falloir que je vérifie en fait.

  2   Il s'agit bel et bien du 4 septembre 2009.

  3   Q.  Monsieur Harland, lorsque ce document sera affiché sur votre écran,

  4   j'aimerais vous demander d'examiner la première page, notamment la

  5   signature au bas de la page, et est-ce que vous pouvez nous dire si vous

  6   reconnaissez cette signature.

  7   [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Groome, il semblerait qu'il y

  9   ait un petit problème technique, que le document ne soit toujours pas

 10   affiché sur nos écrans, donc je vous demande une petite minute de patience.

 11   M. GROOME : [interprétation] Et en attenant que le problème technique ne

 12   soit réglé, je vous dirais que j'ai un document sans annotation si cela

 13   peut nous être utile.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons dans un premier temps

 15   essayer de voir combien de temps il va falloir attendre pour que le

 16   problème technique soit réglé.

 17   M. GROOME : [interprétation] Nous pouvons donc demander l'affichage du

 18   document.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il est maintenant sur nos écrans.

 20   M. GROOME : [interprétation]

 21   Q.  Monsieur Harland, regardez donc cette première page, notamment la

 22   signature.

 23   R.  Mais le document n'est pas encore affiché sur mon écran.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur l'Huissier, pourriez-vous, je

 25   vous prie, voir quel est le problème. Est-ce que vous pourriez aider --

 26   non, c'est le témoin, Monsieur l'Huissier, qui n'a pas le document sur son

 27   écran. Je pense qu'il se peut qu'il y ait différentes explications.

 28   Maître Lukic, est-ce que vous avez des problèmes à ce qu'un document papier


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  1   soit remis au témoin entre-temps ?

  2   M. LUKIC : [interprétation] Non, non, pas du tout, Monsieur le Président.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bon, nous allons remettre ce document

  4   papier au témoin en attendant que le problème technique soit réglé.

  5   [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le problème technique ne semble pas

  7   avoir été réglé, mais je pense que nous pouvons utiliser le document

  8   papier. Nous, de toute façon, nous avons ce document sur nos écrans.

  9   M. GROOME : [interprétation]

 10   Q.  Vous avez maintenant le document 28315 de la liste 65 ter. Est-ce que

 11   vous pouvez regarder la première page et la signature.

 12   R.  Oui, il s'agit de ma signature.

 13   Q.  J'aimerais vous demander maintenant de vous reporter à la dernière

 14   page. Le document est signé à nouveau, et est-ce que vous pouvez nous

 15   indiquer s'il s'agit de votre signature ?

 16   R.  Oui.

 17   Q.  Alors, mettez de côté ce document.

 18   M. GROOME : [interprétation] Et j'aimerais maintenant que le document 28318

 19   de la liste 65 ter soit présenté au témoin. Il s'agit d'un document signé

 20   par M. Harland le 4 mai 2010. C'est un document dont le titre est comme

 21   suit : "Précisions et corrections apportées à la déclaration." Donc, une

 22   fois de plus, M. l'Huissier en a un document papier, et je souhaiterais que

 23   ce document soit remis à M. Harland.

 24   Q.  Monsieur Harland, le 4 mai 2010, avez-vous signé un document intitulé :

 25   "Précisions et corrections à la déclaration" ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Et est-ce que ce document apporte des modifications secondaires à la

 28   déclaration qui fait l'objet de la cote 28315 ?


Page 667

  1   R.  Oui.

  2   Q.  Et si la Chambre venait à examiner votre déclaration de pair avec les

  3   précisions et les corrections apportées à la déclaration que vous avez

  4   fait, est-ce que cela correspondrait à un document fidèle pour ce qui est

  5   de votre déposition ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Et aujourd'hui, si je vous posais des questions semblables à celles qui

  8   vous ont été posées lorsque vous avez fait votre déclaration, est-ce que

  9   vous y répondriez de la même façon ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Alors, vous avez maintenant prononcé la déclaration solennelle, est-ce

 12   que vous confirmez la véracité et l'exactitude de cette déclaration ?

 13   R.  Oui.

 14   M. GROOME : [interprétation] Donc je ne vais pas demander le versement au

 15   dossier de ce document tant que le problème technique n'est pas réglé pour

 16   que tout le monde puisse voir le document. Je vois que le technicien est

 17   dans le prétoire, donc visiblement le problème n'a pas toujours été réglé.

 18   Donc il faut savoir en fait, Messieurs les Juges, que certaines

 19   Chambres de première instance ont pour pratique d'entendre un résumé de la

 20   déposition écrite du témoin, résumé qui est lu et versé au dossier à partir

 21   du moment où les critères posés à l'article 92 ter ont bel et bien été

 22   déterminés. Est-ce que vous souhaitez que je le fasse ?

 23   [La Chambre de première instance se concerte]

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

 25   M. GROOME : [interprétation] David Harland était responsable des affaires

 26   civiles et conseiller politique auprès du commandant de la FORPRONU en

 27   Bosnie-Herzégovine à partir du mois de juin 1993 jusqu'à la fin du conflit.

 28   Il était cantonné à Sarajevo et est resté à Sarajevo au service des Nations


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  1   Unies jusqu'en 1999. M. Harland est arrivé à Sarajevo un an environ après

  2   le début des hostilités et a fréquemment participé à des réunions avec les

  3   dirigeants de toutes les parties au conflit, notamment avec M. Karadzic et

  4   M. Mladic. Il a participé aux négociations portant notamment sur la liberté

  5   de mouvement pour les civils et la FORPRONU ainsi que la reprise des

  6   services de base à Sarajevo. M. Harland a été la personne qui a rédigé les

  7   grands documents politiques pour la FORPRONU et il a rédigé de nombreux

  8   rapports hebdomadaires et des rapports spéciaux. Le Secrétaire général des

  9   Nations Unies lui avait également demandé de rédiger un rapport relatif aux

 10   événements à Srebrenica pendant l'été de l'année 1995, rapport qu'il a

 11   déposé en 1997.

 12   La déposition de M. Harland porte sur les événements qui se sont

 13   déroulés à Sarajevo. Il a indiqué qu'un grand nombre d'obus tombaient sur

 14   Sarajevo la plupart des jours, avec des périodes d'accalmie importantes

 15   pendant le cessez-le-feu de l'année 1994. Ces bombardements tombaient de

 16   façon tout à fait aléatoire sur une ville densément peuplée et n'avaient

 17   pas d'objectif militaire visible. Il faut savoir également que les services

 18   de base et les vivres, les services de base étant l'approvisionnement en

 19   eau, en électricité et en gaz, étaient essentiellement contrôlés par les

 20   Serbes de Bosnie, et ces services ont été très médiocres et ont parfois été

 21   interrompus par les actes intentionnels de l'un ou des deux camps. M.

 22   Harland a rencontré M. Mladic une vingtaine de fois entre l'année 1993 et

 23   l'année 1995. Il décrit ses observations, les observations qu'il a faites

 24   de M. Mladic et les observations qui l'ont incité à considérer M. Mladic

 25   comme un commandant ayant parfaitement le contrôle et le commandement sur

 26   ses subordonnés militaires.

 27   J'en suis arrivé à la fin du résumé. Je pense que le problème

 28   technique a été réglé, et M. Harland semble indiquer qu'il a maintenant sa


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  1   déclaration devant lui.

  2   Q.  Donc, est-ce que je peux vous demander de confirmer cela, Monsieur

  3   Harland ? Est-ce que cette déclaration correspond au document papier qui

  4   vous a été remis ?

  5   R.  Oui.

  6   M. GROOME : [interprétation] Alors je pense que nous allons maintenant

  7   demander le versement au dossier de la déclaration de M. Harland ainsi que

  8   ses corrections. Il s'agit des documents 28315 et 28318 de la liste 65 ter.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic, M. Groome a demandé le

 10   versement de la déclaration de M. Harland.

 11   M. LUKIC : [interprétation] Nous n'avons pas d'objection.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il y avait également un document

 13   modifiant le précédent qui va être versé au dossier.

 14   Dans ce cas-là, Madame la Greffière d'audience, pouvez-vous donner les

 15   cotes.

 16   Mme LA GREFFIERE : [interprétation] Le document 28315 deviendra la pièce

 17   P1, et le document 28318 deviendra la pièce P2.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Les pièces P1 et P2 vont donc être

 19   versées au dossier.

 20   Monsieur Groome, veuillez continuer.

 21   M. GROOME : [interprétation]

 22   Q.  Monsieur Harland, les paragraphes 3 à 6 de votre déclaration résument

 23   votre parcours professionnel. Etant donné que ces informations ont changé

 24   depuis que vous avez signé cette déclaration, est-ce que vous pourriez

 25   rapidement nous dire quel a été votre parcours depuis ce document.

 26   R.  Je suis à l'heure actuelle directeur d'une fondation suisse qui assure

 27   la promotion de la médiation et du dialogue dans le contexte des conflits

 28   armés.


Page 670

  1   Q.  Et après avoir signé cette déclaration, mais avant d'avoir pris ce

  2   poste que vous venez de décrire, pourriez-vous nous décrire les postes que

  3   vous avez occupés et les endroits où vous avez travaillé ?

  4   R.  Entre ma déposition -- ou du moins durant ma déposition dans l'affaire

  5   Karadzic en 2010, j'étais chef adjoint par intérim de la mission des

  6   Nations Unies en Haïti, et avant cela j'étais directeur pour l'Europe et

  7   l'Amérique latine du Département européen des opérations de maintien de la

  8   paix, et je pense que le reste figure dans le document.

  9   Q.  Monsieur Harland, dans le paragraphe 30 de votre déclaration, vous

 10   parlez des connaissances que vous aviez de la ligne de confrontation autour

 11   de Sarajevo. Etant donné que vous avez vécu et que vous avez travaillé à

 12   Sarajevo pendant aussi longtemps que vous l'avez fait, est-ce que de

 13   manière générale vous connaissez bien les quartiers et le grand Sarajevo ?

 14   R.  Oui.

 15   M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

 16   est-ce que je pourrais demander au représentant du Greffe d'afficher le

 17   document de la liste 65 ter 28319 sur nos écrans. Il s'agit d'une carte qui

 18   reprend différents éléments d'image satellite de la zone de Sarajevo et du

 19   grand Sarajevo avec certaines annotations.

 20   [Le conseil de l'Accusation se concerte]

 21   M. GROOME : [interprétation] Compte tenu de la résolution de la carte, cela

 22   prendra peut-être une minute ou deux, mais j'ai quelques éléments à

 23   présenter. Une version de cette carte figure dans le livret de cartes à la

 24   page 2. Avant de poser des questions au témoin concernant cette pièce, je

 25   voudrais rappeler que cette Chambre de première instance a dressé un long

 26   constat judiciaire sur les faits précédemment jugés en ce qui concerne les

 27   lignes de confrontation autour de Sarajevo. A savoir, 1919 à 1922, 1948 et

 28   1949, 1954 à 1959, 1961 à 1964, 1966 et 1967, 1975, 1986 et 2020 à 2021.


Page 671

  1   L'Accusation ne va pas poser des questions à M. Harland sur la ligne de

  2   confrontation et n'utilise cette carte que pour donner une représentation

  3   graphique aux Juges de la Chambre de ces différents éléments.

  4   Q.  Monsieur Harland, en préparation à votre déposition aujourd'hui, est-ce

  5   que je vous ai demandé de consulter plusieurs cartes ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Est-ce que la carte que nous voyons sur nos écrans, c'est-à-dire la

  8   carte qui porte la référence 65 ter 28319, est une des cartes que je vous

  9   ai demandé de consulter ?

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Qu'est-ce qui est représenté sur cette carte ?

 12   R.  Eh bien, la zone métropolitaine de Sarajevo et ses environs.

 13   Q.  Et compte tenu du fait que vous travaillez à Sarajevo et que vous

 14   connaissez la ville, à quoi correspondent les lignes rouges? R.  Il s'agit

 15   des positions avancées des forces serbes à un moment donné.

 16   Q.  Qu'en est-il des lignes bleues ?

 17   R.  Elles représentent les positions avancées de l'armée de Bosnie à

 18   l'époque.

 19   Q.  Au paragraphe 30 de votre déclaration, vous expliquez pourquoi vous

 20   connaissez bien tout cela. Vous avez dit que ces lignes de confrontation ne

 21   sont qu'une évaluation. D'après vous, est-ce qu'il s'agit d'une bonne

 22   évaluation des lignes de confrontation dans les environs de Sarajevo ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  La carte a des localités qui sont en jaune. J'aimerais savoir si ces

 25   localités représentent fidèlement les endroits où se trouvaient ces

 26   localités sur le terrain ?

 27   R.  Oui.

 28   M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président --


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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Groome, vous parlez des lignes

  2   bleues et des lignes rouges, est-ce que vous pourriez, s'il vous plaît,

  3   relire les réponses et re-consulter la carte et essayer de voir si ceci ne

  4   peut pas peut-être porter à confusion. Vous avez donc dans les zones

  5   urbaines une première série de lignes rouges. Nous n'avons pas encore

  6   entendu de déposition à ce sujet, mais d'après l'acte d'accusation je crois

  7   que la thèse de l'Accusation est que les Serbes se trouvaient dans les

  8   environs de Sarajevo et que les troupes de la présidence se trouvaient à

  9   l'intérieur de Sarajevo. Or, je vois pour commencer les lignes rouges.

 10   M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, peut-être que je n'ai

 11   pas été clair.

 12   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation] 

 13   [La Chambre de première instance se concerte]

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] A l'écran il y a une carte qui ressemble

 15   beaucoup à la carte numéro 2 -- la page 2 de notre recueil de cartes, mais

 16   apparemment ce n'est pas la même. Et d'ailleurs, les couleurs sont

 17   totalement inversées à celles qu'on trouve.

 18   M. GROOME : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président. Je

 19   comprends que ceci puisse semer la confusion dans votre esprit, et il n'est

 20   peut-être pas judicieux d'utiliser les deux cartes.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et surtout si vous avez interverti les

 22   couleurs.

 23   M. GROOME : [interprétation] L'Accusation va utiliser la carte qui est sur

 24   le système de prétoire électronique, et je m'assurerai que la version

 25   papier soit corrigée dès que possible.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous attendrons la version finale. Mais

 27   en attendant donc, nous essaierons de nous débrouiller avec ce que nous

 28   avons.


Page 673

  1   M. GROOME : [interprétation] Je crois avoir versé cette pièce au dossier --

  2   mais c'est lié donc à la requête qu'a déposée Me Lukic hier. Donc je ne

  3   sais pas s'il est toujours opposé au versement de cette carte maintenant

  4   qu'il a entendu la déposition du témoin.

  5   M. LUKIC : [interprétation] Est-ce que nous pourrions répondre à cette

  6   question à l'issue de la déposition, parce que pour l'instant nous ne

  7   savons pas vraiment ce qui est représenté par cette carte.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je ne sais pas si vous avez une copie

  9   papier. Mais je crois que cette carte représente les lignes de

 10   confrontation de 1995 et qu'elles sont restées inchangées pendant cette

 11   année. Si j'ai bien compris, Monsieur Groome ? A moins que le témoin puisse

 12   confirmer --

 13   M. GROOME : [interprétation]

 14   Q.  Monsieur Harland, est-ce que vous pourriez rapidement nous expliquer

 15   comment fonctionnaient les lignes de confrontation et dans quelle mesure

 16   elles ont changé durant votre séjour à Sarajevo ?

 17   R.  Elles ont très peu changé durant ma période sur place, c'est-à-dire du

 18   printemps 1993 à la fin 1995.

 19   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

 20   M. GROOME : [aucune interprétation]

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] C'était plus ou moins la représentation.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais en 1995 il y a eu des légères

 23   différences, n'est-ce pas ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] De petites différences s'opéraient lorsqu'il y

 25   avait l'armée de Bosnie qui, après une offensive, gagnait un peu de

 26   terrain, mais c'était peu significatif.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Continuez, Monsieur Groome.

 28   M. GROOME : [interprétation] Au paragraphe 30 de la déclaration, M. Harland


Page 674

  1   parle d'une autre carte concernant des lignes de confrontation. Il s'agit

  2   d'une carte de la VRS qui porte la référence ERN 05059848 dans la

  3   déclaration. Je fais remarquer pour les besoins des Juges de la Chambre que

  4   cela figure aux pages 56 et 57 du livret de carte que vous avez devant

  5   vous.

  6   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, pourrait-on afficher maintenant

  7   sur les écrans le document de la liste 65 ter 28316. Il s'agit d'une

  8   version électronique de la carte que vous avez devant vous dans votre

  9   recueil de carte. J'aimerais que l'on passe maintenant à la page sur le

 10   système du prétoire électronique numéro 65. Cette page, Monsieur le

 11   Président, Messieurs les Juges, est une carte plus détaillée des lignes de

 12   confrontation qui vont permettre à cette Chambre de première instance au

 13   fur et à mesure que nous avons la déposition concernant Sarajevo. La carte

 14   récapitulative est ensuite assortie d'une série de cartes qui sont des

 15   versions élargies de la première carte divisée en 16 parties égales. Ces

 16   cartes en version agrandie figurent aux pages 65 à 81 sur le système de

 17   prétoire électronique et dans le recueil de cartes aux pages 58 à 74.

 18   Q.  Monsieur Harland, dans le cadre de la préparation à votre déposition,

 19   est-ce que je vous ai demandé de consulter cette série de cartes qui

 20   représentent une carte récapitulative de Sarajevo ainsi que 16

 21   agrandissements ?

 22   R.  Oui.

 23   Q.  Est-ce que vous avez déjà vu ces cartes ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Est-ce que je vous ai demandé de vous concentrer plus particulièrement

 26   sur les lignes qui étaient tracées sur cette carte et est-ce que je vous ai

 27   demandé de vérifier si cela représentait fidèlement et exactement les

 28   lignes de confrontation dans les environs de Sarajevo ?


Page 675

  1   R.  Oui.

  2   Q.  Est-ce que vous avez étudié ces lignes et, selon vous, est-ce qu'elles

  3   représentent fidèlement les lignes de confrontation ?

  4   R.  Oui, effectivement, c'est une représentation fidèle de ces lignes de

  5   confrontation.

  6   M. GROOME : [interprétation] J'aimerais que le document de la liste 65 ter

  7   28316 reçoive une cote provisoire aux fins d'identification, c'est un

  8   recueil donc de cartes de Sarajevo. Ce recueil sera utilisé par toute une

  9   série de témoins durant la présentation des éléments à charge et ceci

 10   constituera la base également pour les contenus qui seront identifiés par

 11   toute une série de témoins. L'Accusation versera cette pièce une fois que

 12   tous les éléments constitutifs de son contenu auront été obtenus par les

 13   différents témoins.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous parlez d'un recueil de cartes, est-

 15   ce que c'est celui que vous nous avez fourni ?

 16   M. GROOME : [interprétation] Oui.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En fait, il s'agit de cartes et de

 18   photos, n'est-ce pas ?

 19   M. GROOME : [interprétation] Oui.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'accord, c'est très clair. Et je

 21   suppose que vous remplacerez la carte de la page 2 avec d'autres couleurs,

 22   et vous donnerez donc la permission à Mme la Greffière d'audience de

 23   changer cette page dans le livret.

 24   Madame la Greffière d'audience, pourrions-nous réserver une cote aux fins

 25   d'identification ?

 26   Mme LA GREFFIERE : [interprétation] Le document portant la référence 28316

 27   recevra la cote P3 aux fins d'identification.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.


Page 676

  1   Poursuivez.

  2   M. GROOME : [interprétation]

  3   Q.  Monsieur Harland, selon vous, est-ce que la topographie de la ville de

  4   Sarajevo a eu un impact sur les événements qui s'y sont déroulés entre 1992

  5   et 1995 ?

  6   R.  Oui, et dans une grande mesure.

  7   Q.  Veuillez nous expliquer.

  8   R.  Le centre-ville de Sarajevo se trouve dans une vallée très escarpée et

  9   assez longue, comme on le voit sur la carte. Et de manière générale, la

 10   population civile dans la ville et ceux qui défendaient la ville pour le

 11   compte de l'armée de Bosnie se trouvaient dans une zone à forte densité de

 12   population dans la vallée. Et de manière générale, les forces serbes qui

 13   assiégeaient la ville contrôlaient les zones qui étaient plus élevées.

 14   M. GROOME : [interprétation] Est-ce que l'on pourrait passer au paragraphe

 15   276 de la pièce P1, il s'agit de la déclaration de M. Harland. C'est à la

 16   page 83 en version originale en anglais et à la page 59 en version B/C/S.

 17   Q.  Monsieur Harland, les deux premières phrases du paragraphe 276 se

 18   lisent comme suit, et je vous cite :

 19   "Les Serbes avançaient souvent avant le début de la guerre que 65 % du

 20   territoire de Bosnie-Herzégovine étaient détenus par les Bosno-Serbes, par

 21   exemple, si l'on s'en tient aux titres de propriété. Mon propre service a

 22   fait des recherches en la matière et nous ne sommes pas d'accord avec cette

 23   conclusion."

 24   Pourrais-je vous demander de donner plus de détails sur les études que vous

 25   avez faites et ce que vous avez trouvé.

 26   R.  Eh bien, nous avions accès aux cadastres pour Sarajevo. Dans nos

 27   bureaux nous avons également recruté un statisticien de profession afin de

 28   déterminer si ce qu'avançaient les uns et les autres était vrai ou pas. Et


Page 677

  1   pour la question de la propriété terrienne, le Pr Koljevic, un des vice-

  2   présidents de la Republika Srpska, avançait souvent que 65 % des terres en

  3   Bosnie-Herzégovine étaient serbes et que, par conséquent, c'était le

  4   territoire que devrait recevoir les Serbes. Nous nous sommes penchés sur

  5   ces chiffres et il s'en est avéré qu'une grande partie du territoire non

  6   habité ou que des terres qui étaient la propriété de l'Etat étaient en fait

  7   alloués aux Serbes sur les cartes ou dans les déclarations provenant des

  8   autorités de Pale.

  9   Q.  Est-ce que vous avez vérifié ce qui était avancé ici ?

 10   R.  Oui. Les données du cadastre n'ont pas confirmé que les Serbes

 11   contrôlaient ou détenaient 65 % du territoire de Bosnie-Herzégovine. Bien

 12   au contraire, de grandes parties du territoire étaient des territoires

 13   nationalisés ou qui n'étaient pas habités.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Puis-je poser une question pour obtenir

 15   de la précision.

 16   Vous avez dit que vous aviez accès à certains documents du cadastre.

 17   Ensuite, vous avez mentionné le cadastre. Vous avez dit quelquefois. Donc

 18   vous avez dit au départ que vous avez accès à "certains" documents du

 19   cadastre, ensuite vous avez eu accès au cadastre.

 20   Alors, pourriez-vous nous dire si vous avez vraiment eu accès à tous les

 21   documents vous permettant d'étayer votre thèse ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Je parle de toutes les archives du cadastre

 23   qui n'ont pas été mises à la disposition de mes services. Certaines de ces

 24   archives étaient disponibles, et pour le reste du territoire pour lequel

 25   nous n'avions pas ces archives, nous disposions de données secondaires

 26   comme, par exemple, les résultats du recensement de 1990. Mais nous

 27   n'avions pas la totalité des archives du cadastre.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que les données issues du


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  1   recensement permettent de déterminer qui est propriétaire des terres ou

  2   simplement qui les occupe ? Est-ce qu'il est mentionné qui est propriétaire

  3   ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Il est mentionné votre lieu de résidence

  5   et votre appartenance ethnique, si vous avez décidé de la renseigner, parce

  6   que vous pouviez en fait choisir parmi diverses catégories comme, par

  7   exemple, Musulman, Serbe, Croate, Yougoslave, et cetera.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors comment cela a pu vous aider à

  9   déterminer qui était propriétaire de quoi ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, ce qui était avancé par le Pr

 11   Koljevic et les autorités serbes laissait penser que 65 % de la Bosnie-

 12   Herzégovine leur appartenait. Soit parce qu'on était propriétaire ou parce

 13   que historiquement ça appartenait aux Bosno-Serbes. Une fois que nous nous

 14   sommes penchés sur la question et compte tenu des documents que nous avions

 15   à notre disposition, ceci n'a pas été confirmé.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Harland, vous critiquez les

 17   méthodes utilisées par M. Koljevic plutôt que de répondre à ma question. Ma

 18   question était la suivante : comment avez-vous pu savoir, d'après les

 19   résultats du recensement, qui était propriétaire ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non, vous ne pouvez pas le savoir par le

 21   recensement.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc ma question reste entière :

 23   comment, d'après les données du recensement, pouvez-vous savoir qui était

 24   propriétaire ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, ce n'était pas possible, sauf que cela me

 26   permettait de savoir qui vivait à quel endroit, que ce soit une parcelle

 27   privée ou une parcelle sociale, ou une parcelle nationalisée ou appartenant

 28   à l'Etat. Je crois que c'étaient les trois catégories dans le système


Page 679

  1   d'avant-guerre. Ceci ne figurait pas dans le recensement de 1991. Vous avez

  2   raison.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc le résultat du recensement ne vous

  4   permet pas de savoir qui était propriétaire de tel ou tel pourcentage des

  5   terres ?

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et vous avez dit que vous aviez des

  8   données secondaires telles que le recensement de 1990, qui permettait, en

  9   fait, de combler les archives que l'on ne vous avait pas fournies, archives

 10   du cadastre, par exemple ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Mais, par exemple, il y avait des grandes

 12   parties du territoire qui n'étaient pas peuplées et qui avaient été

 13   attribuées par Pale aux Serbes, mais qui figuraient dans le recensement

 14   comme étant des parcelles non habitées et, par conséquent, nous avons jugé

 15   qu'il n'était pas exact de les attribuer à une ou l'autre des communautés.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais vous dites "nous sommes partis du

 17   principe" qu'on ne pouvait pas les attribuer à l'une ou l'autre des

 18   communautés. Est-ce que vous êtes d'accord pour dire qu'une partie de vos

 19   vérifications était basée sur des postulats plutôt que sur des faits ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez continuer, Monsieur Groome.

 22   M. GROOME : [interprétation] Pourrais-je demander qu'on passe au paragraphe

 23   260 de la déclaration de M. Harland, qu'on trouve à la page 79 dans la

 24   version originale et 56 en B/C/S.

 25   Q.  Monsieur Harland, dans ce paragraphe vous mentionnez que vous avez eu

 26   la possibilité de consulter différents documents qui, d'après l'Accusation,

 27   ont été rédigés par M. Mladic, et vous avez conclu qu'il semblait,

 28   effectivement, que ces documents avaient été écrits de la main de la même


Page 680

  1   personne. Je voudrais qu'il soit très clair qu'il s'agit de votre opinion

  2   que vous avez exprimée ici, qui n'est pas basée sur une expertise

  3   particulière que vous possèderiez, mais qu'il s'agit simplement d'une

  4   observation, comme tout profane pourrait le faire; est-ce exact ?

  5   R.  Oui. J'ai simplement comparé le texte que l'on m'avait donné avec un

  6   échantillon authentique. En fait, il s'agissait d'inscriptions que le

  7   général Mladic avait apposées derrière une photo, et j'avais vu que c'était

  8   lui qui l'avait apposée. Mais je n'ai pas d'expertise en graphologie.

  9   M. GROOME : [interprétation] Pourrais-je maintenant demander que l'on passe

 10   aux paragraphes 32 et 33 de la déclaration de M. Harland. Il s'agit des

 11   paragraphes que l'on trouve aux pages 9 en version originale et 7 pour la

 12   traduction.

 13   Q.  Monsieur Harland, les paragraphes 32 et 32 présentent les trois

 14   catégories de bombardement dont étaient victimes les habitants de Sarajevo,

 15   c'est-à-dire bombardement tactique en réponse à des opérations militaires;

 16   et ce que vous avez décrit comme des réponses œil pour œil, dent pour dent,

 17   c'est-à-dire des échanges de tirs d'obus entre les positions de l'ABiH et

 18   les positions bosno-serbes; et ensuite, vous avez décrit des bombardements

 19   qui permettaient d'insuffler un sentiment de terreur, et vous avez dit que

 20   ceci avait pour objectif "de s'assurer que la population éprouve un

 21   sentiment de peur d'isolement et d'isolation." Ma question est donc de

 22   savoir si vous avez une idée de la répartition entre ces trois catégories

 23   de bombardement ?

 24   R.  Eh bien, en moyenne nous recensions environ mille impacts d'armes

 25   lourdes dans la partie contrôlée par le gouvernement de Sarajevo, et ceci

 26   chaque jour pendant toute la période de la guerre durant laquelle j'ai

 27   séjourné à Sarajevo, ce qui représente pratiquement la totalité de la

 28   guerre. De manière générale, au quotidien, la plupart des bombardements, je


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  1   dirais plus de la moitié, étaient des bombardements globaux visant à

  2   terroriser la population sans pour autant avoir de cibles militaires. Nous

  3   consultions les cartes des observateurs militaires des Nations Unies tous

  4   les soirs, et nous notions la répartition relativement aléatoire des points

  5   d'impact de ces bombardements dans les zones civiles. Et puis, vous aviez,

  6   bien sûr, lorsqu'il y avait des opérations tactiques, lorsque l'armée de

  7   Bosnie essayait de percer les lignes de confrontation à un endroit donné,

  8   dans ce cas-là il y avait une plus forte concentration d'un nombre

  9   important d'obus dans cette région. Et ces obus, donc,  tombaient

 10   principalement dans la catégorie de campagne tactique.

 11   Q.  Au paragraphe 38 dans votre déclaration, que l'on trouve à la page 10

 12   dans la version originale et à page 8 dans la version traduite, vous

 13   décrivez huit leviers qu'utilisait M. Karadzic pour exercer une pression

 14   sur le gouvernement. Pour les sept de ces huit leviers, vous décrivez le

 15   bombardement, les tireurs embusqués contre les civils, la restriction de

 16   l'accès à ce dont on avait besoin pour vivre normalement, et ceci, donc,

 17   dirigé contre la population civile. Dans le paragraphe 39, vous mentionnez

 18   que tout ceci était utilisé de concert. Vous en concluez qu'en utilisant

 19   ces leviers de manière uniforme, et en même temps, il y avait donc un degré

 20   de contrôle central important. Est-ce qu'il y avait autre chose, mis à part

 21   l'application de ces leviers de pression qui vous laissait penser que ce

 22   contrôle était centralisé ?

 23   R.  Oui. De temps en temps, les dirigeants serbes disaient très directement

 24   qu'ils allaient fermer Sarajevo ou qu'ils allaient exercer une certaine

 25   pression, comme ils le disaient, sur Sarajevo afin d'encourager le

 26   gouvernement à négocier un accord de paix avec des critères qu'eux avaient

 27   fixés. Par exemple, au début de l'année 1995, ils étaient très explicites à

 28   notre endroit au sujet de la fermeture de l'aéroport, et pourquoi ils


Page 682

  1   avaient coupé l'eau, par exemple, pourquoi l'approvisionnement en

  2   nourriture avait été bloqué  et pourquoi les bombardements montaient.

  3   Q.  Vous décrivez ensuite l'utilisation de ces huit leviers comme en fait

  4   "un robinet qui permettait de réguler la terreur," et que vous pourriez

  5   donc en moduler le débit ?

  6   R.  Eh bien, le même jour, par exemple, vous aviez des restrictions en eau,

  7   en approvisionnement en gaz, en électricité, vous aviez les tireurs

  8   embusqués, vous aviez l'artillerie, mais de temps en temps ils avaient peur

  9   également que l'OTAN intervienne d'un point de vue militaire, et ne le

 10   cachait pas. Donc par exemple, en août 1993, durant la crise du mont Igman,

 11   ils avaient très peur que l'OTAN intervienne. Et il en a été de même en

 12   février 1994, après l'incident de Markale I, et il en a été de même vers la

 13   fin de la guerre lors d'un autre incident. Et puis ensuite, en février

 14   1994, lorsqu'ils ont accepté de donner un peu plus de mou autour de

 15   Sarajevo, eh bien, on pouvait observer que le même jour les tirs embusqués

 16   s'arrêtaient, les bombardements s'arrêtaient, et l'eau commençait à nouveau

 17   à couler à flot.

 18   M. GROOME : [interprétation] Est-ce que je pourrais demander que l'on

 19   affiche le document de la liste 65 ter 10630, et je voudrais que M. Harland

 20   ait la possibilité de s'orienter.

 21   Q.  Monsieur Harland, pourriez-vous nous dire quand vous aurez eu la

 22   possibilité de parcourir ce document qui porte la date du 15 octobre 1993,

 23   et dont vous semblez être l'auteur. Et il est 

 24   intitulé : "Réunion avec Karadzic et Krajisnik"; est-ce exact ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Est-ce que je peux vous demander maintenant de vous pencher sur le

 27   paragraphe numéro 3, et de le lire en votre for intérieur.

 28   R.  J'ai lu.


Page 683

  1   Q.  Ma question est celle de savoir si vous avez été physiquement présent à

  2   l'occasion de cette réunion ?

  3   R.  Oui.

  4   Q.  Ce paragraphe fait un résumé de la conversation entre le général

  5   Briquemont et M. Karadzic. Et je voudrais vous demander de nous expliquer

  6   la deuxième phrase de ce paragraphe qui commence par "il", et ça se

  7   rapporte au général Briquemont, ce "il". Alors il dit:

  8   "Il a insisté pour dire qu'il n'y avait aucune finalité militaire, mais que

  9   ça causait beaucoup de dégâts politiques aux Serbes."

 10   Alors est-ce que vous pouvez élaborer cette déclaration de façon plus

 11   étoffée ?

 12   R.  Oui. Le général Briquemont et les commandants de la FORPRONU qui

 13   l'accompagnaient ont très souvent indiqué la chose auprès de la direction

 14   Pale, parce que ce modèle de pilonnage de la ville ne servait qu'à

 15   terroriser la population et ne portait ou n'occasionnait que des pertes

 16   civiles. Or, ça n'améliorait pas matériellement parlant les positions

 17   militaires serbes, et c'était le point de vue des officiers militaires.

 18   Alors cela se soldait par des pertes civiles tout à fait superflues, qui

 19   étaient préjudiciables à la façon dont on percevait les Serbes. Et c'était

 20   un argument qui a été souvent présenté. C'est ce qui apparaît dans le

 21   document, et il semblerait qu'il n'y a rien d'exceptionnel dans ces propos.

 22   C'est un point qui a été très souvent évoqué.

 23   Q.  Le général Mladic, était-il présent à l'occasion de ces présentations

 24   de propos de ce type ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  La troisième phrase de ce paragraphe dit :

 27   "Le Dr Karadzic a déclaré qu'il a donné des ordres pour ce qui était de

 28   faire stopper les pilonnages et les tirs des tireurs embusqués."


Page 684

  1   Alors vous souvenez-vous s'il y a eu des conditions de posées à cet effet ?

  2   En d'autres termes, est-ce qu'il a exprimé des réserves pour ce qui est de

  3   son aptitude à donner des ordres visant à faire cesser les pilonnages et

  4   les tirs des tireurs isolés ?

  5   R.  Je ne peux pas vous le dire avec une certitude à 100 % pour savoir si

  6   ça s'est passé à cette réunion-ci ou à une autre, mais ce que je puis vous

  7   dire c'est que le Dr Karadzic très souvent a dit : Oui, j'ai été d'accord

  8   pour que X ou telle chose soit faite, et puis il y a eu des individus, des

  9   renégats qui ont continué à tirer. Et lorsque nous apportions des éléments

 10   de preuve de la part de la FORPRONU, pour ce qui est d'une poursuite des

 11   tirs ou de violations de ce qui avait été convenu, il disait que c'étaient

 12   des individus désobéissants qui l'avaient fait. Mais de notre avis, ce

 13   n'était probablement pas vrai.

 14   Q.  La dernière phrase de ce paragraphe fournit un commentaire au sujet de

 15   ce que Karadzic a dit. Je cite :

 16   "Il a dit que le principal problème c'étaient les tirs et les pilonnages de

 17   la part des Musulmans, et qu'il serait probablement 'forcé de s'emparer de

 18   la partie musulmane de Sarajevo si ces tirs de tireurs isolés ne

 19   s'arrêtaient.'"

 20   Alors, d'abord, d'après votre rapport, il aurait dit que "si les Musulmans

 21   n'arrêtaient pas de pilonner Sarajevo", et vous mettez cela entre

 22   guillemets, ainsi que les tirs des tireurs isolés. Est-ce que c'est bien ce

 23   que Karadzic a dit verbatim ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Est-ce que vous vous souvenez s'il a parlé anglais ou B/C/S?

 26   R.  A ce moment-là, il a parlé en anglais.

 27   Q.  Est-ce que vous pouvez placer cette déclaration de la part de M.

 28   Karadzic dans un contexte déterminé ?


Page 685

  1   R.  Eh bien, le Dr Karadzic, lorsqu'il était confronté à des protestations

  2   en raison de morts de civils du fait de tirs de tireurs isolés ou de

  3   pilonnage, en général, il prenait une position offensive, il adoptait une

  4   position offensive, et il disait qu'il était arrivé quelque chose à la

  5   population serbe autour de la ville, et il cherchait à faire tourner le

  6   débat ou évoluer le débat le plus loin possible de l'élément qui a suscité

  7   l'entretien à l'origine. Il a présenté d'abord le fait que c'était

  8   généralement des individus qui échappaient à son contrôle.

  9   Q.  Est-ce que vous avez pu vérifier ce type d'information, telle que

 10   fournies par le Dr Karadzic ?

 11   R.  Oui. Ce qui est particulier au sujet de la position, et j'imagine que

 12   c'est la raison pour laquelle je suis ici, c'est que j'ai pris des notes à

 13   l'occasion de ces réunions et je vivais dans la ville même de Sarajevo.

 14   Donc ces réunions se tenaient à Pale, et je revenais dans mon appartement à

 15   Sarajevo. Donc je pouvais tout d'abord, au petit (a), voir ce qui se

 16   passait au niveau des tirs, des pilonnages, s'il y avait de l'eau ou pas,

 17   ou s'il y avait continuation des attaques; et puis, nous avions des

 18   briefings au quotidien à l'intention de la totalité des officiers

 19   militaires, des officiers du niveau des bataillons, des observateurs

 20   militaires et autres niveaux d'activité militaire qui étaient contrôlés par

 21   les Serbes. Donc oui, j'ai été capable de vérifier la chose de tout à fait

 22   près.

 23   M. GROOME : [interprétation] Messieurs les Juges, les faits jugés 1731 à

 24   1737 posent des bases factuelles pour ce qui est de ce que les observateurs

 25   militaires ont consigné dans leurs écrits, et l'Accusation va limiter sa

 26   présentation des éléments de preuve à ce que M. Harland a dit à cet effet.

 27   Q.  Alors, en sus -- à part les observateurs militaires des Nations Unies,

 28   est-ce que votre bureau recevait des informations de la part de sources


Page 686

  1   autres, exception faite des sources militaires ?

  2   R.  Oui. Les "UNMO" n'étaient qu'un seul élément de l'appareil qui était en

  3   place. La majeure partie de l'appareil d'observation, c'étaient les

  4   bataillons - et à Sarajevo, c'étaient pour l'essentiel des bataillons

  5   français - qui tenaient des positions d'observation au niveau des lignes de

  6   front. Et d'une façon générale, les informations précises pour ce qui est

  7   de la situation militaire venaient de deux parts. Cela venait des

  8   observateurs militaires des Nations Unies qui étaient des effectifs

  9   plurinationaux, et il y avait les observateurs militaires et des bataillons

 10   nationaux qui venaient de plusieurs pays. Donc nous obtenions des

 11   informations en provenance de sources autres, ce qui nous a permis de

 12   vérifier et de confirmer les différents incidents pour constater si cela

 13   était vrai ou pas.

 14   Q.  Monsieur Harland, dans votre déclaration et dans certains rapports

 15   contemporains que vous avez rédigés vous-même, il est fait état d'un

 16   certain nombre de menaces explicites ou implicites faites par le général

 17   Mladic. Alors, avant que d'attirer votre attention sur certains de ces

 18   documents concrets et de vous poser des questions concrètes, je voudrais

 19   vous demander de décrire à l'intention des Juges de la Chambre en termes

 20   généraux la façon dont le général Mladic avait coutume de recourir à des

 21   menaces lors des négociations.

 22   R.  Très bien. En fait, les rencontres avec le général Mladic ou les

 23   réunions avec le général Mladic avaient quelque chose de tout à fait

 24   caractéristique; d'abord il avait coutume d'inviter un visiteur,

 25   primordialement c'était mon chef, le commandant de la FORPRONU, et il

 26   organisait une présentation. D'habitude nous présentions des protestations

 27   et nous proposions des actions, et le général Mladic restait assis de façon

 28   tout à fait tranquille pendant une période relativement longue et il


Page 687

  1   prenait des notes dans son journal. Et très souvent, il laissait les

  2   interlocuteurs parler longtemps, dix, 15, 20 minutes. Et alors, il prenait

  3   la parole et, de façon tout à fait agressive, il avait coutume de présenter

  4   des éléments qui n'étaient pas souvent logiquement bien connectés, c'était

  5   un mélange de menaces, d'aperçu historique et de commentaires au sujet de

  6   la situation telle qu'elle se présentait sur le moment même. Alors, en

  7   fait, ces documents représentent des résumés. On n'a pas consigné la

  8   totalité des menaces proférées par le général Mladic. Parce qu'à la plupart

  9   de ces réunions, lorsqu'il exposait des choses, il y avait souvent des

 10   menaces de proférées soit contre la population bosnienne ou contre les

 11   Nations Unies ou les deux.

 12   M. GROOME : [interprétation] Je voudrais qu'on nous montre maintenant le

 13   document 10007 de la liste 65 ter. Il s'agit d'un document daté du 9

 14   février 1994. L'auteur de ce document est M. Harland, et c'est intitulé :

 15   "Evaluation hebdomadaire de situation politique en Bosnie-Herzégovine." Je

 16   voudrais que le témoin ait l'opportunité de prendre connaissance de ce

 17   document pour s'y retrouver, et ce, en voyant d'abord la première page.

 18   Q.  Une fois que vous aurez cette première page, je vais vous demander si

 19   vous reconnaissez le document en question.

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Le document comporte plusieurs pages. Est-ce que vous avez eu

 22   l'opportunité de vous pencher dessus avant que de venir aujourd'hui dans le

 23   prétoire ?

 24   R.  Oui.

 25   Q.  Est-ce que ce document est l'une des évaluations hebdomadaires que vous

 26   aviez élaborées pour informer vos supérieurs hiérarchiques aux Nations

 27   Unies pour ce qui est des événements de la semaine en Bosnie ?

 28   R.  Oui.


Page 688

  1   Q.  Avant que je ne vous demande quoi que ce soit au sujet des menaces dont

  2   vous faites état dans ce document, je voudrais demander que nous nous

  3   penchions sur quelque chose d'autre. Et à cet effet, je voudrais qu'on se

  4   penche sur le bas de la page 4 dans l'original --

  5   [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

  6    M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez continuer, Monsieur Groome.

  7   M. GROOME : [interprétation] Je voudrais qu'on se penche sur le bas de la

  8   page 4 de la version originale, et pour ce qui est de la traduction ça se

  9   trouve en bas de page numéro 6.

 10   Q.  Je voudrais attirer votre attention sur le paragraphe qui commence par,

 11   je cite :

 12   "Les Serbes de Bosnie ont accepté un accord de cessez-le-feu avec le

 13   gouvernement de la Bosnie-Herzégovine en date (9 février 1994)."

 14   Vous souvenez-vous de ce cessez-le-feu ?

 15   R.  Oui.

 16   Q.  Est-ce que cet accord a été mis en œuvre tel qu'indiqué dans l'énoncé

 17   de ce texte pour ce qui est de la date du 10 février 1994 ?

 18   R.  Oui, il a été mis en œuvre de façon tout à fait bonne.

 19   Q.  Ce rapport fait état d'un premier pilonnage du marché de Markale à la

 20   date du 5 février 1994, et il est dit, je cite :

 21   "Les Serbes de Bosnie ont agi de façon très mauvaise pour ce qui est de ce

 22   massacre de la place du marché.

 23   "La première réaction de l'armée serbe a été de bloquer la totalité de

 24   l'aide à la Bosnie-Herzégovine si l'enquête internationale n'exonérait pas

 25   les Serbes de toute responsabilité à cet effet.

 26   "Le jour d'après, suite à la forte réaction internationale, les Serbes ont

 27   modifié leurs positions de 180 degrés."

 28   Alors, ma question au sujet de ce paragraphe est celle-ci : vous souvenez-


Page 689

  1   vous de la façon dont cette menace initiale de couper toute arrivée d'aide

  2   avait été formulée ?

  3   R.  Non.

  4   Q.  Vous souvenez-vous de la façon dont vous avez eu vent de ce qui avait

  5   été fourni comme réaction de la part de l'armée des Serbes de Bosnie et de

  6   leur QG ?

  7   R.  D'abord, quand cela venait du QG de l'armée serbe, cela normalement

  8   nous avait été présenté de façon orale par le chef d'état-major de l'armée

  9   serbe, à savoir le général Milovanovic, et il avait coutume de communiquer

 10   la chose à l'officier de liaison de l'UNMO qui se trouvait installé dans

 11   son QG. Et les messages de l'armée des Serbes venaient normalement de cette

 12   façon. Parfois ils venaient directement à nous. Parfois c'était le

 13   téléphone qu'on faisait fonctionner, parfois c'était le général Mladic qui

 14   appelait le commandement pour la Bosnie-Herzégovine. Et je dois reconnaître

 15   que dans ce cas concret je ne me souviens pas du tout comment cela nous est

 16   arrivé.

 17   Q.  J'attire votre attention sur le premier paragraphe entier

 18   de la page 5. La traduction se trouve en haut de la page 7. La première

 19   phrase de ce paragraphe se lit comme suit :

 20   "Le 7 février 1994, Karadzic a fait une menace à peine voilée pour ce qui

 21   est d'attaquer les effectifs de la FORPRONU si l'OTAN lançait des frappes

 22   aériennes pour faire cesser le siège de Sarajevo."

 23   Puis-je vous demander d'abord de nous dire de façon plus concrète ce qui

 24   était contenu dans cette menace.

 25   R.  Une fois de plus, je n'arrive pas à me souvenir de la façon concrète

 26   dont cette menace a été faite. D'habitude je me trouvais dans la pièce où

 27   le Dr Karadzic proférait des menaces de ce type, mais j'ai l'impression que

 28   ceci avait, dans ce cas concret, été une déclaration publique faite après


Page 690

  1   une réunion que nous avions eue avec lui. Les médias attendaient. Et il me

  2   semble que cela avait été une menace proférée de façon publique, mais je ne

  3   m'en souviens pas de façon nette.

  4   M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, l'Accusation voudrait

  5   demander le versement au dossier de la pièce 65 ter 10007.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En l'absence d'objection, Madame la

  7   Greffière, quelle sera la référence, la cote ?

  8   Mme LA GREFFIERE : [interprétation] Le document 10007 deviendra la pièce à

  9   conviction P4, Messieurs les Juges.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bon, P4 sera versé au dossier.

 11   Veuillez continuer.

 12   M. GROOME : [interprétation] Messieurs les Juges, je voudrais qu'on nous

 13   montre sur nos écrans de la liste 65 ter qui porte la référence 28049.

 14   C'est un document dont l'auteur est M. Harland et il est daté du 29

 15   septembre 1993. Son titre est celui-ci : "Réunion avec la direction des

 16   Serbes de Bosnie." Il s'agit d'un document contemporain et qui constitue en

 17   fait des notes de réunion rédigées par M. Harland, cela est évoqué dans la

 18   déclaration aux paragraphes 57 à 59, et l'Accusation va demander que ce

 19   soit versé au dossier comme pièce associée.

 20   Q.  Alors, Monsieur Harland, une fois de plus, je vous demande de vous

 21   pencher sur la première page et nous dire si c'est vous qui avez rédigé la

 22   chose ?

 23   R.  Ca, c'est un document dont je me souviens bien mieux que de celui qu'on

 24   a vu tout à l'heure.

 25   Q.  Au premier paragraphe, le document identifie les participants en disant

 26   le général Briquemont et d'autres personnes des Nations Unies qui avaient

 27   été présentées, et du côté des Serbes de Bosnie on dit qu'étaient présents

 28   Radovan Karadzic et Ratko Mladic. Au paragraphe 59 de votre déclaration,


Page 691

  1   vous identifiez Mladic comme étant l'un des interlocuteurs principaux à

  2   l'occasion de cette réunion. Puis-je vous demander de nous décrire son

  3   comportement et le ton qu'avait pris cette réunion ?

  4   R.  Il était très sûr de soi, belliqueux -- mais la raison pour laquelle je

  5   me souviens de cette réunion, c'est le fait qu'en plein milieu de la

  6   réunion, un jeune homme est entré, un jeune officier serbe est entré en

  7   apportant des nouvelles en provenance de Sarajevo où les Bosniens avaient

  8   voté au sujet du plan de paix Owen-Stoltenberg. Et le général Mladic a

  9   demandé au jeune homme s'ils avaient accepté le plan de paix. Et le jeune

 10   homme a dit : Non. Et Alija - ils appelaient le président Izetbegovic par

 11   Alija, ils le désignaient ainsi - il demandait plus de territoire. Et le

 12   général Mladic a ri et répondu qu'il aurait bien aimé être plus jeune et

 13   plus beau, mais ça n'allait pas se produire.

 14   Alors, le ton de la réunion montrait qu'il était sûr de soi, mais il

 15   n'était pas satisfait du fait d'apprendre que le gouvernement bosnien avait

 16   rejeté le plan de paix Owen-Stoltenberg, et il a évoqué une série de

 17   mesures très strictes qu'il avait l'intention de prendre pour accroître les

 18   pressions exercées à l'encontre du gouvernement de Bosnie.

 19   Q.  Je voudrais maintenant qu'on se penche sur le paragraphe numéro 3. Il

 20   est dit, je cite :

 21   "Il n'était pas très porté sur la coopération pour ce qui est de

 22   l'évacuation des soldats blessés."

 23   Vous souvenez-vous du contexte de cette déclaration ?

 24   R.  Le contexte était le suivant : des soldats des Nations Unies qui

 25   avaient été blessés ou qui se trouvaient être malades, ils nécessitaient

 26   des garanties de toutes les parties pour pouvoir se déplacer en toute

 27   sécurité à bord d'ambulances pour être évacués par les lignes de

 28   confrontation jusqu'à l'aéroport de Sarajevo. Alors, quels étaient les


Page 692

  1   soldats qui se trouvaient être blessés à l'époque, ça, je ne m'en souviens

  2   pas.

  3   Q.  Est-ce qu'on vous a expliqué pourquoi l'évacuation des soldats blessés

  4   des Nations Unies se trouvait être liée ou connectée avec la signature de

  5   certains accords de paix par les soins du gouvernement bosnien ?

  6   R.  Non, ce n'était pas le cas, mais c'était un comportement habituel.

  7   Lorsque le gouvernement bosnien faisait quelque chose qu'ils n'appréciaient

  8   pas, la direction de Pale proférait des menaces de représailles, soit à

  9   l'égard de la population bosnienne, soit à l'égard de la direction

 10   bosnienne, voire encore des Nations Unies.

 11   M. GROOME : [interprétation] Est-ce qu'on peut passer à la page 2 de ce

 12   document, je vous prie. La traduction peut être retrouvée au prétoire

 13   électronique, page 2.

 14   Q.  La première ligne du paragraphe 61 [comme interprété] se trouve être

 15   illisible, mais on peut  lire le reste. A partir de la deuxième phrase :

 16   "Le général Mladic a proféré un certain nombre de menaces à peine voilées

 17   contre la FORPRONU. Par exemple, s'il n'y avait sous pression de l'embargo

 18   sur les carburants, il disait qu'il s'emparait du carburant là où il le

 19   trouverait. Et il a dit qu'il allait mettre en place une nouvelle

 20   politique, 'ce que les Serbes n'allaient pas obtenir, n'appartiendrait à

 21   personne.'"

 22   Alors, ma première question est celle de savoir si les parties du

 23   paragraphe qui viennent d'être citées, c'est bien ce qu'a dit le général

 24   Mladic, et est-ce qu'on vous a bien traduit la chose à l'occasion de la

 25   réunion ?

 26   R.  Oui.

 27   Q.  Ma question suivante est celle-ci : quand vous avez dit des "menaces à

 28   peine voilées" --


Page 693

  1   R.  Le général Mladic établissait une corrélation entre différentes choses.

  2   Par exemple, s'il n'y avait pas d'accès à du carburant, la FORPRONU n'en

  3   aurait pas non plus, l'UNHCR n'en aurait pas non plus, donc ils avaient

  4   recours à des menaces à peine déguisées. Ils procédaient à un blocage vis-

  5   à-vis de ceux qui représentaient la communauté internationale.

  6   Q.  Et quel est l'impact que cela avait sur la FORPRONU pour ce qui est de

  7   l'obtention du carburant ?

  8   R.  Eh bien, si la FORPRONU ne recevait pas de carburant, ils ne pouvaient

  9   pas se déplacer et voir ce qui se passait sur les lignes de front, et

 10   j'imagine que c'est ce qu'ils voulaient. Et donc, il n'aurait pas été

 11   possible pour eux d'escorter les convois de vivres destinés à la population

 12   civile dans les secteurs contrôlés par le gouvernement de Bosnie.

 13   M. GROOME : [interprétation] Messieurs les Juges, je voudrais maintenant

 14   qu'on nous montre le 65 ter 09986 sur nos écrans. Alors, il s'agit d'un

 15   document dont l'auteur est M. Harland qui est daté du 3 novembre 1993 et

 16   son titre est : "Evaluation hebdomadaire de la situation politique en

 17   Bosnie-Herzégovine." Et ce qui m'intéresse en particulier dans ce texte de

 18   M. Harland, c'est les paragraphes 66 à 71. Je demanderais également que

 19   ceci soit versé au dossier comme une pièce de l'Accusation associée à celle

 20   qui a été versée au dossier.

 21   Q.  Monsieur Harland, est-ce que le document qui apparaît sous vos yeux sur

 22   l'écran vous l'avez déjà vu avant votre témoignage ?

 23   R.  Oui.

 24   M. GROOME : [interprétation] Je voudrais qu'on nous montre le bas de la

 25   page 5 dans la version originale et la page 6 de la version traduite, de la

 26   traduction.

 27   Q.  Le paragraphe commence par ceci :

 28   "Les Serbes ont également exercé des pressions à l'égard de Gorazde et le


Page 694

  1   commandant de l'armée serbe, Mladic, avait proféré de fortes menaces à leur

  2   encontre."

  3   Est-ce que vous pouvez décrire avec plus de détails, si possible, ce que

  4   vous vouliez dire par cette phrase, en particulier pour ce qui est du

  5   timing des menaces que vous attribuez à M. Mladic.

  6   R.  De quel paragraphe êtes-vous en train de parler ?

  7   Q.  Il s'agit du bas de la page 5, le paragraphe qui commence par, je cite

  8   :

  9   "Les Serbes ont commencé à exercer des pressions à l'égard de Gorazde…"

 10   R.  Oui.

 11   Q.  Vous le voyez ?

 12   R.  Oui, oui. Eh bien, il s'agit d'une période où les Serbes s'étaient plus

 13   centrés sur Gorazde et ils ont commencé à limiter l'accès à ce secteur, et

 14   c'est ce qui a précédé à une attaque qui a été lancée au début du printemps

 15   qui suivait.

 16   M. GROOME : [interprétation] Je voudrais qu'on se penche vers la moitié

 17   inférieure de la page 6 dans l'original, et il s'agit de la page 2 de la

 18   version traduite.

 19   Q.  Les paragraphes en question sont particulièrement pertinents pour ce

 20   qui est de l'avis de l'Accusation dans ce procès, et nous allons poser

 21   plusieurs questions complémentaires à ce sujet. Je cite :

 22   "Mladic est dangereux. Il est frustré en tant que commandant militaire et

 23   en tant qu'individu. En sa qualité de commandant militaire, il a été très

 24   efficace, mais pour ce qui est de ses efficacités sur le champ de bataille,

 25   ça n'a pas été confirmé au niveau des activités politiques. Alors, il

 26   semble blâmer la direction politique de s'emparer. En sa qualité

 27   d'individu, Mladic se trouve marginalisé. Lorsque la guerre faisait rage,

 28   était à son apogée, il était en position centrale. Et il disait que le


Page 695

  1   général Cot et le général Briquemont étaient en train de l'ignorer" --

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Groome, j'ai remarqué que votre

  3   rapidité de lecture perturbe le travail des interprètes. Je vous prie de

  4   ralentir.

  5   M. GROOME : [interprétation] Oui, je vais faire une halte et je réajusterai

  6   ma vitesse d'élocution. Merci.

  7   Alors :

  8   "A l'occasion d'une réunion avec le chef d'état-major de la FORPRONU

  9   qui a reçu des menaces, entre autres, il a été dit qu'il tuerait tout un

 10   chacun dans les enclaves orientales (exception faite des enfants) si les

 11   prisonniers de guerre n'étaient pas relâchés avant le 10 novembre."

 12   Q.  Que vouliez-vous dire, que Mladic se faisait de plus en plus dangereux

 13   ?

 14   R.  Eh bien, il était plus belliqueux dans ses propos, lorsqu'il faisait

 15   ces menaces, plus belliqueux qu'avant.

 16   Q.  Et quelle est votre évaluation et sur quoi se basent votre évaluation

 17   et vos dires au terme desquels il était plus dangereux, tel que vous venez

 18   de l'énoncer ?

 19   R.  Eh bien, à l'occasion des réunions avec lui, il disait et ses collègues

 20   autour de lui, ses collègues militaires autour de lui, étaient tout à fait

 21   clairs pour ce qui est d'affirmer que la direction politique civile n'avait

 22   pas fait son travail de façon appropriée et qu'il s'agissait de prendre

 23   d'autres activités militaires, s'emparer de deux villes de plus à ne plus

 24   restituer par la suite.

 25   Q.  Et pour ce qui est de cette menace consistant à éliminer des civils

 26   dans les enclaves orientales, étiez-vous physiquement présent lorsqu'il a

 27   proféré ces menaces ?

 28   R.  Oui. En fait, il a proféré ce type de menaces à plusieurs reprises


Page 696

  1   devant d'autres personnes encore, et moi j'ai consigné ce qu'il a dit à

  2   l'occasion des réunions où j'étais présent. Ce n'était pas la première fois

  3   qu'il proférait ce type de menaces.

  4   Q.  Alors, si on prend cela au pied de la lettre, il semblerait que cette

  5   déclaration est plutôt préoccupante. Est-ce que vous ou d'autres

  6   responsables des Nations Unies étaient préoccupés par cette déclaration de

  7   M. Mladic ?

  8   R.  Oui.

  9   Q.  Est-ce que cela a été perçu comme une menace lancée comme cela, ou est-

 10   ce que cela a été symptomatique ou vous paraissait peut-être symptomatique

 11   d'un autre phénomène ?

 12   R.  Vous savez, lorsque vous parliez avec le général Mladic, ça ne relevait

 13   pas vraiment du cadre d'un discours rationnel. Ce n'était pas une

 14   conversation ou une discussion comme celle que nous avons maintenant. Nous

 15   avions protesté, par exemple. Nous protestions, puis ensuite il se lançait

 16   dans une attaque verbale. Je pense en fait qu'il faut savoir -- bon, il se

 17   lançait dans ce genre de déclarations. S'il avait l'occasion justement de

 18   proférer ces menaces, il le faisait, mais il ne s'agissait pas

 19   véritablement de déclarations ou de plans.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Groome.

 21   M. GROOME : [interprétation] Oui. Est-ce que vous pensez que le moment

 22   serait peut-être venu de faire la pause ?

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je pense que vous m'avez très bien

 24   compris.

 25   Nous allons faire une pause et nous reprendrons à 17 heures 52 exactement -

 26   - 17 heures 55 alors, puisque mes collègues sont plus généreux. Donc 17

 27   heures -– ou plutôt, non, non, 16 heures 55. Et est-ce que vous pourriez

 28   vous assurer, Monsieur Groome, que nous ayons deux fois cinq minutes qui


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  1   seront disponibles à la fin de l'audience pour que les parties puissent en

  2   fait présenter leurs réactions après ce que la Chambre a dit. Très bien.

  3   M. GROOME : [interprétation] Oui.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons faire une pause.

  5   --- L'audience est suspendue à 16 heures 33.

  6   [Le témoin quitte la barre]

  7   --- L'audience est reprise à 17 heures 04.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce qu'on pourrait faire entrer

  9   le témoin dans le prétoire.

 10   Et je m'excuse car nous commençons avec un certain retard. Je pense

 11   que je vais profiter de ce petit moment pour consigner certaines choses au

 12   compte rendu d'audience. Je dirai, dans un premier temps que le 9 mai 2012,

 13   l'Accusation a déposé une demande urgente par laquelle elle demande une

 14   prorogation jusqu'au 30 juin 2012, la date butoir pour sa liste 65 ter

 15   révisée. Le 9 mai, puisqu'il faut savoir qu'à l'époque ou qu'à ce moment-là

 16   la date butoir était le jour suivant, à savoir le 10 mai 2012, la Chambre,

 17   par le biais d'une communication informelle, a fait droit à cette

 18   prorogation temporaire jusqu'à ce qu'une décision définitive relative à la

 19   demande soit rendue et que cette décision soit versée au compte rendu

 20   d'audience ou au dossier.

 21   Le 14 mai 2012, la Défense a répondu en indiquant qu'elle ne

 22   s'opposait pas à ladite demande. Le 7 juin 2012, par le biais d'une

 23   communication informelle, la Chambre a fait droit à la prorogation demandée

 24   pour le dépôt de la liste des témoins en application de l'article 65 ter,

 25   et ce, jusqu'au 30 juin 2012, et cette décision est devenue maintenant

 26   officielle.

 27   [Le témoin vient à la barre]

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Harland, si vous m'autorisez


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  1   juste une petite seconde de plus.

  2   Je souhaiterais dire que le 30 juin 2012, qui d'ailleurs était un

  3   samedi, l'Accusation a déposé sa liste révisée en application de  l'article

  4   65 ter. Le 4 juillet 2012, la Chambre a demandé, par le biais d'une

  5   communication informelle, que l'Accusation dépose un addendum à sa liste de

  6   témoins révisée pour que certains résumés de témoins qui faisaient encore

  7   défaut soient inclus. Et cette demande est maintenant officielle.

  8   Je m'excuse, Monsieur Harland, nous vous avons fait attendre.

  9   Et, Monsieur Groome, vous êtes prêt à continuer votre interrogatoire

 10   principal ?

 11   M. GROOME : [interprétation] Oui, tout à fait.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre.

 13   M. GROOME : [interprétation]

 14   Q.  Monsieur Harland, j'aimerais maintenant attirer votre attention sur le

 15   mois de février 1994. Car le 5 février 1994, le marché de Markale a été

 16   bombardé pour la première fois et cela s'est soldé par un nombre

 17   considérable de victimes. Au cours des journées et des semaines suivantes,

 18   il y a eu un changement considérable pour ce qui était de la quantité de

 19   bombardements et des activités des tireurs embusqués contre Sarajevo ?

 20   R.  Oui.

 21   Q.  Est-ce que vous pouvez expliquer de façon succincte ce qui a abouti à

 22   la diminution des activités des tireurs embusqués et des bombardements et à

 23   quoi est-ce que l'on peut attribuer cela ?

 24   R.  Oui. L'OTAN a lancé un certain nombre de menaces suivant lesquelles

 25   l'OTAN allait s'engager du point de vue militaire, et il était question

 26   éventuellement de frappes aériennes. Je pense que les dirigeants serbes ont

 27   considéré que ces menaces étaient tout à fait crédibles, ce qui fait que

 28   les Serbes ont coopéré relativement, et je pense qu'il y a même eu


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  1   lorsqu'on a appelé cette zone d'exclusion pour les armes lourdes ou quelque

  2   chose de ce goût-là, et en vertu de cela ils ont accepté d'évacuer les

  3   armes ou de les déposer dans certaines zones. Et puis, ils ont mis en

  4   application l'accord assez vite jusqu'à, je pense, ce qu'ils aient commencé

  5   à penser que la menace était révolue. 

  6   Q.  Monsieur Harland, est-ce que pendant les négociations il a été question

  7   des négociations, puisqu'il était question des endroits où les civils

  8   étaient ciblés par les tireurs embusqués, est-ce qu'à un moment donné vous

  9   avez considéré le rôle et l'objectif des tireurs embusqués ?

 10   R.  Oui. Il y a eu de longues négociations qui ont commencé en 1994 –-

 11   Q.  Monsieur Harland, avant que vous ne continuiez. Est-ce que vous pouvez

 12   nous expliquer ce qu'est un paravent contre les tireurs embusqués, peut-

 13   être à l'intention des personnes qui ne connaissent pas ou qui ne sont pas

 14   familiers avec ce terme ?

 15   R.  Oui, tout à fait. Les tireurs embusqués opéraient des deux côtés de la

 16   ligne de confrontation et ils essayaient de tuer des cibles qu'ils

 17   pouvaient identifier. Alors, il y a eu des techniques qui étaient utilisées

 18   pour limiter le nombre de victimes qui tombent sous les balles des tireurs

 19   embusqués. C'est qu'en fait, vous mettez des espèces d'écrans en plastique

 20   qui faisaient office en quelque sorte –- qui étaient utilisés comme des

 21   rideaux, ce qui fait que les tireurs embusqués ne pouvaient pas voir les

 22   civils ou les cibles qui se trouvaient de l'autre côté de la ligne. Il y a

 23   eu des autres techniques qui consistent à utiliser un [inaudible], et à les

 24   empiler à raison de deux ou trois pour qu'une fois de plus les tireurs

 25   embusqués n'aient pas une ligne de visée absolument claire par rapport aux

 26   cibles. Donc il y a eu de longues négociations en 1994 avec les deux camps

 27   à propos des mesures qui pourraient être prises justement pour minimiser

 28   les activités des tireurs embusqués. Alors, les Serbes ont indiqué pendant


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  1   la plupart des négociations qu'ils ne voulaient pas que ces types de

  2   barrières soient érigées, et ils ne voulaient pas autoriser la FORPRONU à

  3   poursuivre les équipes des tireurs embusqués lorsqu'ils avaient été

  4   reconnus et identifiés.

  5   Q.  Et, en fait, le but de ces négociations était de limiter ces tireurs

  6   embusqués ?

  7   R.  Oui. En fait, ils ne cachaient pas du tout le fait que dans la ville de

  8   Sarajevo, cibler les civils – et c'étaient les tireurs embusqués qui le

  9   faisaient – était une des méthodes retenues pour justement terroriser la

 10   ville, pour exercer des pressions sur le gouvernement de la Bosnie, et ce,

 11   de faire en sorte d'obtenir une résolution du conflit à des conditions qui

 12   leur auraient été beaucoup plus favorables.

 13   Q.  Monsieur Harland, alors j'aimerais maintenant que nous nous

 14   intéressions à la période de l'été 1994. C'est aux paragraphes 134 à 178 de

 15   votre déclaration que vous évoquez cela. Et j'aimerais vous poser quelques

 16   questions précises à propos de certains des documents que vous décrivez

 17   dans ces paragraphes de votre déclaration.

 18   M. GROOME : [interprétation] J'aimerais demander que le document 03485 de

 19   la liste 65 ter soit affiché. Il s'agit d'un rapport rédigé par M. Harland,

 20   rapport qui porte la date du 10 octobre 1994 et qui est intitulé : "Réunion

 21   avec le général Mladic à Jahorina." L'Accusation, d'ailleurs, demandera le

 22   versement au dossier de cette pièce connexe.

 23   Q.  Alors, une fois de plus, Monsieur Harland, j'aimerais vous demander de

 24   bien vouloir examiner ce document et de nous indiquer si vous êtes en

 25   mesure de le reconnaître comme un document que vous avez rédigé et est-ce

 26   que vous avez eu la possibilité de l'examiner avant votre déposition

 27   aujourd'hui ?

 28   R.  Oui.


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  1   Q.  Alors, ce rapport a trait à une réunion entre le général Rose et le

  2   général Mladic. Et j'aimerais vous poser une question précise à propos d'un

  3   passage du document qui figure à la page 2 du document d'origine, qui se

  4   trouve à la page 3 dans le système e-court pour la traduction en B/C/S.

  5   Donc, en fait, j'aimerais vous demander de vous intéresser au paragraphe 8,

  6   et la partie du paragraphe qui m'intéresse et à propos de laquelle je vais

  7   vous poser une question commence par les mots suivants, je cite :

  8   "Il est manifeste que le général Mladic ne sait pas véritablement

  9   clairement comment mettre un terme à la guerre, mais le plan du Groupe de

 10   contact ne peut absolument pas être accepté par lui."

 11   Alors, en quelques phrases, est-ce que vous pourriez nous dire, nous

 12   résumer le plan du Groupe de contact ?

 13   R.  Oui. Le Groupe de contact était un groupe composé des Etats-Unis, du

 14   Royaume-Uni, de la France, de l'Allemagne et de la Russie. C'était une

 15   tentative qui avait été faite pour faire en sorte que les parties acceptent

 16   plus aisément l'accord de paix parce que tous leurs amis, en fait, avaient

 17   un dénominateur commun et une position commune. Parce qu'il y a eu des

 18   plans précédents, le plan Vance-Owen, le plan Owen-Stoltenberg, auxquels se

 19   ralliaient certains, mais pas tout le monde, et là il s'agissait d'avoir un

 20   plan auquel se ralliaient les grands protagonistes -– enfin, plutôt les

 21   grandes puissances et les amis des factions belligérantes. Alors, le plan

 22   du Groupe de contact a été mis au point en 1994 et sa caractéristique

 23   principale était qu'il s'agissait du premier plan qui envisage une division

 24   de la Bosnie en une Republika Srpska et une Fédération, et c'est la

 25   première fois qu'un plan est envisagé comme hypothèse de travail, le fait

 26   que la Fédération se verrait octroyée 51 % du territoire et la Republika

 27   Srpska 49 %.

 28   Q.  Que voulez-vous dire lorsque vous avez dit que Mladic ne savait pas


Page 702

  1   clairement comment mettre un terme à la guerre ?

  2   R.  D'après les discussions que nous avons eues avec le général Mladic, il

  3   semble qu'ils n'avaient vraiment aucune stratégie mis à part celle de semer

  4   la terreur au sein de la population civile. Ils allaient s'emparer de

  5   terres, de villes ou de faire quitter les populations, de les cantonner

  6   dans des zones de plus en plus exiguës, et ensuite ils couperaient l'eau,

  7   le gaz, l'électricité. Ils ouvriraient le feu contre eux, ils leur feraient

  8   subir les bombardements, et ils attendaient que le gouvernement prenne une

  9   position qui était plus proche de leurs objectifs de guerre. Et ils ont été

 10   très frustrés de voir que le gouvernement de Bosnie, d'une certaine

 11   manière, a refusé de jouer le jeu. Et, en fait, ils n'ont jamais eu

 12   d'autres plans pour gagner la guerre, malgré cet avantage énorme qu'ils

 13   avaient en terme de matériel militaire.

 14   Q.  J'aimerais maintenant attirer votre attention sur les zones de sécurité

 15   des Nations Unies, les enclaves orientales, donc Srebrenica, Zepa et

 16   Gorazde.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant cela, j'aimerais avoir une

 18   précision, tant du niveau des questions que des réponses d'ailleurs.

 19   Lorsque vous avez dit qu'il était évident que le général Mladic ne savait

 20   pas clairement comment mettre un terme à la guerre. Compte tenu de votre

 21   réponse, est-ce que vous parliez uniquement de ce qui s'est passé à

 22   Sarajevo à l'époque, ou est-ce que vous parliez de la guerre en général,

 23   c'est-à-dire sur tout le territoire de la Bosnie-Herzégovine ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, je parlais de la

 25   guerre sur tout le territoire de la Bosnie-Herzégovine.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'accord. Et vous avez dit qu'ils

 27   allaient s'emparer de terre, de villes, ils allaient tuer ou obliger la

 28   population à quitter tel ou tel endroit, qu'ils allaient les cantonner dans


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  1   des zones de plus en plus exiguës et qu'ils allaient couper l'eau, le gaz

  2   et l'électricité. Est-ce que vous pourriez nous donner des exemples

  3   d'autres localités où l'eau était coupée, le gaz, l'électricité ?

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, dans la poche de Bihac –- enfin, pour

  5   ce qui est du gaz, il n'allait que jusqu'à Sarajevo. Le gazoduc vient de

  6   Russie, puis passe par la Hongrie, puis la Serbie et traverse Zvornik et

  7   couvre ensuite deux petites localités, Kladanj et Olovo, mais le gaz était

  8   vraiment pour Sarajevo. Mais dans d'autres zones, ils pouvaient en fait

  9   réguler l'approvisionnement en eau, en électricité. Lorsqu'ils étaient

 10   proches de la ligne de confrontation, ils pouvaient le faire de partout.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous pouvez nous donner trois

 12   exemples de localités où l'eau était coupée ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, je dirais que l'exemple le plus

 14   facile à citer, ce sont les enclaves à l'est. Dans ces enclaves,

 15   l'électricité était toujours contrôlée par les Serbes -- ou principalement

 16   par les Serbes. Peut-être qu'ils contrôlaient également une partie de

 17   l'approvisionnement en eau, mais je ne pourrais pas être plus précis pour

 18   ce qui est de l'eau. Donc l'exemple le plus simple c'est les aliments et

 19   l'électricité.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc vous nous dites qu'il est possible

 21   qu'ils aient coupé l'eau ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais quand je vous demande d'être plus

 24   précis, et je vous demande trois exemples, vous nous donnez simplement des

 25   zones assez vagues. Est-ce que je vous ai bien compris ?

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est exact. Je ne confirmerais pas qu'ils

 27   contrôlaient l'approvisionnement en eau comme ils le faisaient à Sarajevo.

 28   Sarajevo était un cas spécial parce que l'eau était pompée à partir d'une


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  1   localité qui s'appelait Bacevo, qui était juste de l'autre côté de la ligne

  2   de confrontation. Lorsqu'il y avait une possibilité, je pense qu'ils l'ont

  3   fait ailleurs. Mais je ne sais pas s'ils avaient autant de possibilité

  4   ailleurs. Je ne sais pas parce que j'étais, moi, principalement basé à

  5   Sarajevo.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez parlé de l'électricité et de

  7   l'eau et du gaz, mais à part Sarajevo, il n'y a plus que l'électricité.

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, sans les autres exemples, il

 10   s'agit d'une déclaration assez globale, alors que vous n'avez pas vraiment

 11   de connaissance de ce qui s'est passé à l'extérieur de Sarajevo ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Non. Le gaz -- il n'y a qu'un seul gazoduc,

 13   donc lorsqu'ils pouvaient couper l'approvisionnement ils le faisaient.

 14   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] A Kladanj et à Olovo, ils coupaient souvent

 16   les vannes. Je pense que c'était un Mali Zvornik, qui la dernière ville où

 17   il y avait une vanne. Donc, lorsqu'ils avaient la possibilité, ils le

 18   faisaient. Mais maintenant, pour ce qui est de l'eau, qui est un système

 19   beaucoup plus réparti sur le territoire, je ne pourrais pas me prononcer

 20   plus en détails.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Groome, continuez.

 22   M. GROOME : [interprétation]

 23   Q.  Monsieur Harland, est-ce que la stratégie que vous venez de décrire

 24   avait un impact sur la capacité de la FORPRONU à distribuer l'aide

 25   humanitaire ?

 26   R.  Oui. Il existait une politique délibérée rendant la distribution de

 27   l'aide humanitaire plus difficile. Les convois étaient bloqués. Des

 28   restrictions de mouvement très strictes étaient imposées. Par exemple, à un


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  1   moment donné, il était interdit de faire voyager des convois le vendredi.

  2   La distribution de l'aide alimentaire ne pouvait se faire, par exemple,

  3   qu'à partir de points de distribution en Republika Srpska, et cetera. Donc

  4   il s'agissait d'une politique très délibérée et ouvertement reconnue de la

  5   part des dirigeants serbes et d'autres également du côté des Serbes visant

  6   à restreindre la marge de manœuvre des Nations Unies pour répondre aux

  7   besoins humanitaires de la population.

  8   Q.  J'aimerais donc revenir aux zones de sécurité des Nations Unies, et

  9   plus particulièrement à Srebrenica. Et je voudrais me concentrer sur la

 10   zone géographique qui était considérée comme étant la zone de sécurité de

 11   Srebrenica.

 12   M. GROOME : [interprétation] J'aimerais maintenant que l'on affiche le

 13   document de la liste 65 ter 05726. Il s'agit d'un rapport du lieutenant-

 14   colonel Baxter du 7 mars 1995 qui a pour titre : "Réunion avec le général

 15   Smith et le général Mladic le 7 mars 1995."

 16   Q.  Monsieur Harland, ma première question à votre attention est de savoir

 17   si vous reconnaissez ce document ?

 18   R.  Oui. Je n'en suis pas l'auteur, mais je le reconnais.

 19   Q.  Est-ce que vous connaissiez le lieutenant-colonel Baxter durant votre

 20   séjour en Bosnie ?

 21   R.  Oui, très bien.

 22   Q.  J'aimerais maintenant me concentrer sur le paragraphe 5 de ce rapport

 23   dans mes questions, que l'on peut trouver à la page 2 tant en version

 24   originale qu'en version B/C/S. Ce paragraphe est intitulé, et je cite :

 25   "Aspects militaires et démilitarisation des enclaves." Et il relate des

 26   discussions entre Mladic et Smith en ce qui concerne Srebrenica. Durant

 27   cette discussion, Mladic fait part de sa connaissance de la taille

 28   géographique des trois zones de sécurité en Bosnie orientale, et en ce qui


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  1   concerne Srebrenica, il dit qu'il s'agit d'une zone de 4,5 kilomètres sur 1

  2   kilomètre. Ma question est la suivante : j'aimerais savoir comment les

  3   Nations Unies concevaient les frontières de la zone de sécurité de

  4   Srebrenica durant la période de la réunion, c'est-à-dire en mars 1995 ?

  5   R.  Eh bien, d'après les Nations Unies, pour ce qui est donc des zones

  6   sécurisées, il s'agissait de zones qui se trouvaient à l'intérieur des

  7   lignes de confrontation au moment où ces zones avaient été déclarées zones

  8   de sécurité par le Conseil de sécurité.

  9   Q.  Et quelles étaient leur taille approximative ou leur surface

 10   approximative, si vous vous en souvenez ?

 11   R.  De mémoire, je dirais que c'étaient en fait des surfaces de 10

 12   kilomètres sur 10, peut-être que pour Srebrenica c'était un peu moins.

 13   Donc, au total, une centaine de kilomètres carrés. Et le général Mladic

 14   disait qu'il avait l'intention de réduire cette superficie à 4 ou 5

 15   kilomètres, donc, en fait, il allait en grignoter 90 % à peu près.

 16   M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je

 17   voudrais également attirer votre attention sur les faits jugés 1272 et 1280

 18   qui sont liés à cet aspect, et je me baserai sur ces faits jugés pour

 19   obtenir d'autres éléments de preuve de la part de M. Harland.

 20   Q.  Monsieur Harland, à la fin du paragraphe 5, nous voyons le terme

 21   "commentaire" en caractères gras.

 22   R.  Oui.

 23   Q.  On peut trouver ceci en haut de la page 3 pour la traduction. Le terme

 24   "commentaire" est suivi par :

 25   "Une interprétation de cet échange c'est que Mladic a peut-être trahi une

 26   de ses préoccupations militaires importantes, à savoir qu'il n'avait peut-

 27   être pas la possibilité militaire de combattre sur deux fronts et qu'en cas

 28   d'attaques contre les Serbes de Krajina et d'attaques par la BiH en Bosnie


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  1   centrale, il cherchait peut-être à se concentrer sur les enclaves, du moins

  2   pour commencer."

  3   Est-ce que vous êtes en mesure de comprendre ce commentaire ?

  4   R.  Oui. Eh bien, la FORPRONU pensait que même si les Serbes étaient très

  5   bien armés, ils n'avaient pas suffisamment d'hommes. Durant l'année 1995,

  6   cette préoccupation est devenue encore plus prononcée puisqu'ils ont vu

  7   l'armée de Bosnie s'étoffer tout comme l'armée de la République de Croatie,

  8   et, par conséquent, ils avaient peur d'une contre-offensive militaire

  9   venant tant des Bosniens du centre de la Bosnie que de Croates qui venaient

 10   de l'autre côté de la frontière, et c'est en fait ce qui s'est produit. Et

 11   Baxter pensait que Mladic semblait dire qu'afin de se préparer contre cela,

 12   les Serbes devraient en fait éliminer, voire réduire de manière

 13   significative les enclaves détenues par les Bosno-Musulmans à l'est, de

 14   façon à libérer les troupes pour le cas où d'autres offensives ou d'autres

 15   fronts s'ouvriraient.

 16   Q.  [aucune interprétation]

 17   R.  Mais moi, je n'étais pas présent à cette réunion.

 18   Q.  Merci. Monsieur Harland, au paragraphe 210 de votre déclaration, vous

 19   parlez du fait que des bombardements lourds avaient recommencé à se

 20   produire sur Sarajevo, et vous mentionnez, et je vous cite :

 21   "Le 30 juin 1995, le colonel Meille a écrit au général Milosevic en se

 22   plaignant d'attaques contre des cibles civiles dans la ville de Sarajevo en

 23   utilisant des bombes très puissantes."

 24   Je voudrais vous poser une question en ce qui concerne un rapport qui a été

 25   rédigé durant cette même période.

 26   M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je

 27   souhaiterais que l'on affiche le document de la liste 65 ter 15749 sur les

 28   écrans. Il s'agit d'un rapport rédigé par M. Harland qui est intitulé :


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  1   "Secteur Sarajevo, rapport de situation hebdomadaire." Il porte la date du

  2   2 juillet 1995. L'Accusation va verser ceci comme pièce associée.

  3   Q.  Monsieur Harland, une fois que vous avez vu ce document sur les écrans,

  4   est-ce que vous pourriez nous dire si vous reconnaissez ce document et si

  5   vous en êtes l'auteur ?

  6   R.  Oui.

  7   Q.  Je voudrais qu'on passe maintenant à la page 2 du document, juste au

  8   milieu de la page, et d'ailleurs cette phrase se retrouve au même endroit

  9   sur la traduction en B/C/S. Et on peut lire, je cite :

 10   "Ils semblent assez confiants et pensent qu'ils vont pouvoir contenir

 11   l'offensive du gouvernement bosnien, et ils ont dit qu'ils allaient lancer

 12   des contre-attaques punitives contre les zones urbaines."

 13   Est-ce que je pourrais vous demander de développer cette phrase qui figure

 14   dans votre rapport.

 15   R.  Eh bien, à cette époque, au printemps 1995, l'armée bosnienne a lancé

 16   plusieurs tentatives, d'ailleurs elle le faisait ça et là, pour ce qui est

 17   d'opérer une percée du siège de Sarajevo; et comme d'habitude, ils ont

 18   échoué. Nos interlocuteurs de l'armée de Bosnie nous ont fait savoir qu'ils

 19   allaient augmenter les pilonnages et leurs tirs de tireurs isolés ainsi que

 20   les autres activités militaires le long des lignes de confrontation pour

 21   les punir.

 22   M. GROOME : [interprétation] Penchons-nous sur la page numéro 3 de la

 23   version originale au prétoire électronique, et il s'agira de la page 2 pour

 24   la traduction, vers le bas de cette page, où on voit qu'il dit qu'il y a

 25   des activités de tirs de tireurs isolés d'accentuées ou d'augmentées dans

 26   la vieille ville, du centre-ville.

 27   Q.  Est-ce que vous vous trouviez à proximité de ce centre de la ville de

 28   Sarajevo ?


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  1   R.  Oui. Ce n'était pas un événement isolé. Ce que j'ai voulu,

  2   c'était mentionner cet incident concret, parce que dans mon rapport je

  3   préférais faire état des choses dont j'avais eu à connaître

  4   personnellement. Et là, c'est un mineur qui a été tué dans l'une des

  5   grandes rues de Sarajevo non loin de la mosquée d'Ali Pasa [comme

  6   interprété]. Moi je descendais à ce moment-là le long d'une rue qui coupait

  7   la rue Djure Djakovica sous angle droit, et je revenais d'une visite rendue

  8   à un ami qui lui habitait à la rue Vrazova. J'ai entendu un cri, et il y a

  9   eu un remue-ménage. Et quand j'ai tourné le coin, j'ai vu un vélo et ce

 10   jeune blessé, qui s'est avéré être mort en fait, ainsi qu'une foule de gens

 11   qui essayaient de s'approcher pour l'aider ou pour le tirer de là. Mais les

 12   tirs avaient continué, ce qui fait que personne ne pouvait s'approcher. Je

 13   ne peux pas affirmer que il s'agit d'un incident isolé de ce type. J'ai

 14   rapporté l'incident par un concours de circonstances parce que j'en sais un

 15   peu plus.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Groome, vous avez encore

 17   deux minutes. Mais si vous avez besoin d'une dizaine de minutes, veuillez

 18   garder cette mise en garde à l'esprit.

 19   M. GROOME : [interprétation] Eh bien, j'ai peut-être encore une

 20   question et on pourra en finir pour la journée.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Allez-y.

 22   M. GROOME : [interprétation]

 23   Q.  Au premier paragraphe de la page 3 de l'original et de la traduction,

 24   vous décrivez trois explosions d'obus au niveau du bâtiment qui abritait le

 25   QG de la FORPRONU à la date du 29 juin 1995. Vous dites que c'est

 26   délibérément qu'on avait ciblé le QG de la FORPRONU. Pouvez-vous nous dire

 27   sur quoi vous fondez cette affirmation ?

 28   R.  J'étais à la tête des affaires civiles dans le secteur de Sarajevo et


Page 710

  1   mon bureau se trouvait dans le même bâtiment que l'endroit où se trouvait

  2   le QG des soldats français. Et à côté, mon voisin d'à côté, c'était le

  3   colonel Meille, qui était commandant par intérim. Et il m'a communiqué des

  4   informations liées au renseignement et il m'a parlé de la nature de

  5   l'événement. Et il s'est avéré, comme cela souvent a été le cas, que les

  6   Serbes avaient ciblé le QG de la FORPRONU pour suivre ce qui se passait,

  7   ils le faisaient régulièrement. Ils pilonnaient au mortier, par exemple,

  8   des appareils qui nous permettaient de détecter les mortiers et ils

  9   bombardaient les postes d'observation - dans le cas concret, le QG des

 10   observateurs.

 11   Q.  Merci.

 12   M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, je vais en terminer

 13   pour ce qui est de la journée d'aujourd'hui.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.

 15   Alors, nous avons des questions liées à la procédure à aborder. Vous êtes

 16   libre de vous en aller, mais je dois au préalable vous donner instruction

 17   de ne parler à personne de votre témoignage, celui que vous avez fait

 18   jusqu'à présent ou celui qui va suivre demain. Alors nous allons vous

 19   revoir demain matin, le 11 juillet. Veuillez suivre M. l'Huissier pour

 20   quitter le prétoire.

 21   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 22   [Le témoin quitte la barre]

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Lukic, vous avez cinq minutes à

 24   votre disposition.

 25   M. LUKIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 26   Messieurs les Juges, je vous remercie de l'opportunitéé que vous m'avez

 27   fournie de présenter des arguments complémentaires pour ce qui est de notre

 28   requête liée à un ajournement du procès suite aux modifications survenues


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  1   dans les instructions de la Chambre pour ce qui est de la présentation des

  2   éléments de preuve en application des articles 92 ter et 92 bis. Je tiens

  3   d'abord à souligner le fait que toutes nos requêtes devraient être prises

  4   en considération sous la lumière de toute une série de circonstances. Il

  5   convient de se pencher sur le contexte où il y a eu de sérieux manquements

  6   à l'obligation de communiquer les pièces. Nous avons reçu des pièces après

  7   bon nombre de parties de la procédure préalable au procès. Et nous sommes

  8   encore en train de faire face à d'autres obstacles et vos instructions

  9   constituent pour nous des difficultés complémentaires parce que nous avons

 10   fondé les préparatifs de la Défense partant des lignes directrices qui ont

 11   été émises par les Juges de la Chambre. Nous avions compris qu'il n'y en

 12   aurait pas, mais suite à l'arrivée du premier témoin, les lignes

 13   directrices ont été modifiées. Or, pour la Défense, c'est un problème

 14   qu'elle ne peut pas surmonter si facilement.

 15   Je voudrais évoquer un point évoqué par M. Groome. En page 35 du compte

 16   rendu d'audience d'aujourd'hui, il y est dit qu'il faudrait interdire à la

 17   Défense d'objecter concernant les lignes directrices parce que la Défense

 18   n'a jusqu'à présent pas indiqué que les changements intervenus au niveau

 19   des instructions risqueraient d'influer sur l'équité du procès. Mais avec

 20   tout le respect que je vous dois, pas moins de 19 fois dans différentes

 21   présentations ou différents écrits, nous avons répondu au 92 ter présenté

 22   par l'Accusation. Et nous avons toujours présenté comme argument premier

 23   les objections que nous évoquions pour ce qui était de la volonté de

 24   l'Accusation de dévier des lignes directrices, parce que toute déviation

 25   portait préjudice à la Défense à moins que la Défense ne bénéficie d'un

 26   temps complémentaire pour le contre-interrogatoire, et dans bon nombre de

 27   cas de figure, plusieurs heures de plus que l'Accusation. La Chambre a

 28   jusqu'à présent répondu de façon favorable aux demandes de l'Accusation.


Page 712

  1   En plus, le 16 avril 2012, nous avons présenté une requête pour répondre à

  2   une requête de l'Accusation relative au réexamen des lignes directrices, et

  3   dans ces écritures nous avons une fois de plus évoqué les problèmes

  4   concrets relatifs à la position adoptée par l'Accusation et nous avons dit

  5   que sans les lignes directrices en vigueur actuellement, la présentation

  6   des éléments se présentera tout à fait autrement à moins que les Juges de

  7   la Chambre n'en prennent conscience, et c'est la position de la Défense. Et

  8   il n'est pas exact de dire que la Défense n'a pas évoqué le problème

  9   jusqu'à présent. Nous avons été tout à fait conséquents jusqu'à présent et

 10   nous avons le droit de demander un remède juridique auprès des Juges de la

 11   Chambre comme nous le faisons dans nos écritures.

 12   Et je voudrais, deuxièmement, évoquer l'argumentation présentée par M.

 13   Groome aux pages 36 et 37. En effet, on dit que la Défense avait

 14   connaissance depuis plus d'un mois que l'Accusation avait l'intention

 15   d'entendre ces témoins et qu'elle a eu suffisamment de temps et plus que

 16   suffisamment de temps. Je dois souligner comment la chose se présente dans

 17   d'autres affaires similaires. Dans l'affaire Karadzic, il y a eu une

 18   décision de rendue disant que 90 jours suffisaient pour que la Défense se

 19   prépare une fois qu'elle aura reçu la totalité des documents. Donc je ne

 20   vois aucun fondement pour ce qui est de l'affirmation avancée par M. Groome

 21   pour dire que 30 jours étaient suffisants. Nous avons le droit d'être

 22   traités de façon équitable comme cela a été le cas dans d'autres affaires.

 23   Et nous demandons aux Juges de la Chambre d'accorder à votre client

 24   l'exercice de son droit à un procès équitable.

 25   Avec tout le respect que je dois, si depuis huit mois on nous dit que

 26   les règles qui vont être appliquées sont telles et telles et si quelques

 27   jours avant le début du procès tout à coup on nous dit de but en blanc que

 28   les règles allaient être différentes, eh bien, ceci constitue un changement


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  1   inéquitable et dramatique.

  2   Et je voudrais également parler de l'utilisation des documents aux

  3   questions complémentaires. Ceci doit être pris en considération en

  4   corrélation avec la décision relative au 92 ter et les requêtes à cet effet

  5   qui ont été présentées jusqu'à présent. Toutes les objections relatives à

  6   des parties de déclaration doivent être prises en considération une fois

  7   que le témoin sera entendu. Jusqu'à présent rien n'a été tranché, et nous

  8   ne savons pas encore à ce jour ce qu'il va se passer et nous ne savons pas

  9   du tout quels vont être les éléments de preuve qui vont être montrés aux

 10   différents témoins. En plus nous avons bon nombre de documents qui

 11   accompagnent le témoin Harland que l'Accusation a réservé pour ce qui est

 12   la présentation dans ses questions complémentaires. Il est impossible pour

 13   la Défense d'avoir un droit de vue sur la totalité des éléments de preuve

 14   si l'Accusation a la possibilité de réserver jusqu'à la dernière minute les

 15   documents qu'elle va utiliser pour ce qui est de ses questions

 16   supplémentaires. Alors, nous avons fait savoir qu'il y a des documents qui

 17   ne sont pas conformes aux lignes directrices, et nous soulignons que le 2

 18   juillet 2012 nous avons reçu un e-mail de l'Accusation qui se trouve être

 19   signé par M. Dermot Groome et où on identifie au moins 15 documents que

 20   l'Accusation ne proposera pas pour versement au dossier étant donné les

 21   lignes directrices formulées par la Chambre au sujet des pièces à

 22   conviction associées. Alors, l'Accusation se réserve le droit de verser ces

 23   documents au dossier si le témoin témoigne en ce sens et si c'est contesté.

 24   Mais bien sûr que nous allons contester. Que voulez-vous que nous fassions

 25   d'autre ? Alors, l'Accusation s'attend à ce que nous contestions la

 26   totalité des affirmations, c'est ce que nous faisons.

 27   Par conséquent, il est tout à fait clair que l'Accusation utilise les

 28   lignes directrices pour nous déposséder stratégiquement parlant des pièces


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  1   à conviction qu'elle se propose d'utiliser pour les sortir à l'occasion des

  2   questions complémentaires et empêcher la Défense d'aborder ces documents

  3   dans son contre-interrogatoire. Et nous maintenons ce que nous avons déjà

  4   dit dans notre contre-interrogatoire. Nous lançons un appel à l'égard des

  5   Juges de la Chambre pour que ceux-ci prennent en considération la totalité

  6   des problèmes auxquels nous devons faire face, y compris la quantité énorme

  7   de documents qui ont été tardivement communiqués, c'est-à-dire à moins de

  8   60 jours avant le procès, et nous avons maintenant ces changements de

  9   lignes directrices, ce qui nous amène en situation à devoir réexaminer des

 10   déclarations faites par les témoins dans d'autres affaires précédemment

 11   diligentées. Et nous devons nous pencher sur plus d'éléments de preuve dans

 12   une période de temps plus courte. C'est un travail énorme pour la Défense.

 13   Nous avons besoin de plus de temps pour nos préparatifs et pour le contre-

 14   interrogatoire s'il y a plus de documents qui sont versés au dossier par le

 15   biais de ces documents [comme interprété]. Et nous devons présenter nous

 16   aussi beaucoup plus d'éléments de preuve pour réfuter les éléments de

 17   preuve présentés par l'Accusation.

 18   En somme, ce serait l'argumentation que nous avions à présenter pour étayer

 19   les demandes ou les requêtes que nous avons présentées. Merci, Messieurs

 20   les Juges.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur Lukic.

 22   Monsieur Groome, si je puis vous dire, vous avez encore cinq minutes et je

 23   vous prie de vous limiter strictement à ces quatre à cinq minutes parce que

 24   nous sommes déjà à près de 6 heures moins le quart.

 25   M. GROOME : [interprétation] Je crois que je vais avoir besoin de moins de

 26   temps que cela.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Allez-y.

 28   M. GROOME : [interprétation] Il y a quelques éléments que je voudrais


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  1   évoquer pour ce qui est de la réfutation ou de ma réplique. Je pense que M.

  2   Lukic n'a pas, de façon équitable, caractérisé les lignes directrices parce

  3   qu'il en parle comme si c'étaient des règlements ou des articles du

  4   règlement de présentation des éléments. Et je crois que M. Lukic, qui n'est

  5   pas informé, pourrait considérer qu'il s'agit du Règlement de procédure et

  6   de preuve, or ce n'est pas le cas. La Chambre a exprimé de son avis ce qui

  7   serait la façon la plus sage de procéder pour ce qui est de mettre en œuvre

  8   certaines des règles.

  9   Je pense que l'Accusation a déjà fait la preuve qu'elle n'a pas l'intention

 10   de faire objection quand les interruptions sont raisonnablement motivées

 11   pour assurer l'équité. Mais nous ne voyons pas dans les écritures de la

 12   Défense des éléments qui indiqueraient que la Défense subit des préjudices.

 13   Et nous ne voyons aucune justification pour ce qui est d'un report aussi

 14   long de six mois.

 15   Et pour finir, Monsieur le Juge, nous estimons que l'utilisation de ces

 16   documents aux questions complémentaires semble différer de façon

 17   considérable de l'interprétation qu'en fait M. Lukic. M. Lukic interprète

 18   les lignes directrices de la Chambre comme si l'Accusation avait la

 19   possibilité de retenir des pièces à conviction pour des raisons tactiques

 20   ou stratégiques pour les présenter à l'occasion de ses questions

 21   complémentaires. Or, ce n'est pas la façon dont nous comprenons les choses.

 22   L'Accusation comprend la chose de façon suivante. Nous avons l'intention de

 23   présenter des documents qui n'ont pas été versés au dossier conformément

 24   aux lignes directrices sous les conditions tout à fait déterminées : par

 25   exemple, dans le cas de M. Harland, si M. Lukic conteste des éléments du

 26   témoignage de M. Harland du type, par exemple, s'il avait eu une réunion à

 27   telle date avec M. Mladic. Et si M. Lukic conteste ceci, l'Accusation

 28   estimerait nécessaire de présenter des notes de prises à l'occasion de la


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  1   réunion en question. Mais si M. Lukic ne conteste rien que l'interprétation

  2   que M. Harland fait d'une réunion, l'Accusation ne pense pas qu'elle aurait

  3   le droit de présenter des notes de prises pendant ladite réunion. C'est

  4   ainsi que nous interprétons les lignes directrices.

  5   Merci, Messieurs les Juges.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur Groome.

  7   Nous allons lever dans une minute. Je vais faire deux observations.

  8   La première des observations que je vais faire, c'est la façon dont vous

  9   avez parlé des pièces à conviction associées. Monsieur Groome, vous avez

 10   annoncé que vous alliez demander le versement à la fin de l'audition du

 11   témoin, mais ceci ne modifie pas le fait que la Chambre se trouve être

 12   préoccupée. Parce que ça fait un grand nombre de pièces associées qui sont

 13   lues au témoin ou que le témoin lit lui-même, puis on lui pose des

 14   questions au sujet de tel et tel paragraphe, dont il est l'auteur; on voit

 15   la date du document; et on voit de quoi il s'agit. Par conséquent, la

 16   Chambre se pose la question de savoir à quoi sert une demande de versement

 17   au dossier et en quoi ceci va compléter le procès-verbal de l'audition en

 18   sus de ce qui s'y trouve déjà. Alors, je pense qu'il faut véritablement

 19   demander le versement au dossier de ce qui est nécessaire et indispensable.

 20   M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai présenté une

 21   requête pour ce qui est de la totalité des documents que nous avons

 22   préparés pour versement au dossier et nous allons informer les Juges de la

 23   Chambre de ceci.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bon, je voulais juste vous faire savoir

 25   que les Juges de la Chambre ont des préoccupations dans un certain autre

 26   nombre de cas de figure.

 27   Et nous estimons aussi que l'Accusation a jusqu'à présent utilisé une heure

 28   et demie. Alors vous avez demandé deux heures d'interrogatoire au


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  1   principal, et nous nous attendons à ce que vous finissiez dans à peu près

  2   une demi-heure demain.

  3   M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, étant donné les faits

  4   jugés, jusqu'à présent je crois pouvoir en terminer dans une dizaine de

  5   minutes.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Dans ce cas, nous allons lever

  7   l'audience pour aujourd'hui et nous allons reprendre demain, mercredi 11

  8   juillet 2012, dans cette même salle d'audience, à 9 heures du matin.

  9   --- L'audience est levée à 17 heures 48 et reprendra le mercredi 11 juillet

 10   2012, à 9 heures 00.

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