Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le jeudi 7 février 2013

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 31.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à toutes et à tous dans nos

  6   prétoires et dans les pièces adjacentes.

  7   Madame la Greffière d'audience, veuillez citez l'affaire, s'il vous

  8   plaît.

  9   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président,

 10   Messieurs les Juges, affaire IT-09-92-T, le Procureur contre Ratko Mladic.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'après les informations que nous avons

 12   reçues aucun point n'a été signalé comme devant être traité à titre

 13   préalable. Est-ce que vous pouvez nous le confirmer ?

 14   Mme BIBLES : [interprétation] C'est cela, Monsieur le Président.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Alors, est-ce que nous

 16   pouvons, s'il vous plaît, faire entrer le témoin.

 17   En attendant, je tiens à faire consigner au compte rendu d'audience un

 18   élément d'information au sujet des comptes rendus d'audience sous la cote

 19   MFI P403. Des comptes rendus d'audience revus et corrigés ont été présentés

 20   par l'Accusation, et le Greffe pourra désormais remplacer les anciennes

 21   versions par les nouvelles, et la nouvelle version du P403 est désormais

 22   versée au dossier.

 23   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Banbury, je

 25   suppose que c'est bien vous.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur, avant de commencer avec votre

 28   déposition, en application de notre Règlement de procédure et de preuve,


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  1   vous devez prononcer une déclaration solennelle.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

  3   Bonjour. Je déclare que je dirai la vérité, toute la vérité et rien que la

  4   vérité.

  5   LE TÉMOIN : ANTHONY BANBURY [Assermenté]

  6   [Le témoin répond par l'interprète]

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Banbury. Vous

  8   pouvez vous asseoir.

  9   Pour commencer, c'est Mme Bibles qui vous interrogera, elle représente le

 10   bureau du Procureur, elle est à droite par rapport à votre place.

 11   Madame Bibles.

 12   Mme BIBLES : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Bonjour.

 13   Interrogatoire principal par Mme Bibles :

 14   Q.  [interprétation] Monsieur le Témoin, pouvez-vous, s'il vous plaît,

 15   décliner votre identité.

 16   R.  Je suis Anthony Nathan Banbury.

 17   Q.  Pourriez-vous préciser les dates de votre mission en Bosnie-Herzégovine

 18   pendant que vous travailliez pour les Nations Unies ?

 19   R.  A partir du 9 avril 1994 jusqu'au 1er mai 1995 en Bosnie; et plus tard,

 20   j'ai été basé à Zagreb en Croatie à partir du 1er mai 1995 jusqu'en novembre

 21   1995.

 22   Q.  Monsieur Banbury, est-il exact de dire que vous avez fait une

 23   déclaration au bureau du Procureur et que vous êtes déjà venu déposé devant

 24   ce Tribunal dans l'affaire contre Radovan Karadzic, et que vous avez déposé

 25   au sujet de votre travail sur le terrain ?

 26   R.  Oui, cela est exact.

 27   Q.  Est-ce que vous avez fourni partiellement cette déclaration par écrit ?

 28   R.  Oui.


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  1   Q.  Une première fois en 1997 ?

  2   R.  C'est exact.

  3   Q.  Et puis en 2009 ?

  4   R.  Oui.

  5   Mme BIBLES : [interprétation] Je demande l'affichage du document 28667 de

  6   la liste 65 ter, s'il vous plaît.

  7   Q.  Monsieur Banbury, à partir du moment où le document sera affiché à

  8   l'écran, je vais vous inviter à examiner la première page, et en

  9   particulier la signature qui figure sur la page; la reconnaissez-vous ?

 10   R.  Oui, c'est ma signature.

 11   Mme BIBLES : [interprétation] Pourriez-vous afficher dans la version

 12   anglaise la page 53 dans le prétoire électronique, s'il vous plaît.

 13   Q.  Et je vais de nouveau vous demander si vous reconnaissez la signature

 14   qui figure ici ?

 15   R.  Oui, là encore, nous avons ma signature.

 16   Q.  Est-ce que vous avez eu l'occasion de relire votre déclaration de 2009

 17   dans le cadre des préparatifs à la déposition ici ?

 18   R.  Oui.

 19   Q.  Je vous invite à examiner la paragraphe 14, page 4 de la version

 20   anglaise, et page 5 de la version en B/C/S dans le prétoire électronique.

 21   Alors, est-ce que vous pouvez nous dire si vous souhaitez apporter des

 22   corrections à ce paragraphe ?

 23   R.  Oui, la deuxième ligne du paragraphe 14 se lit comme suit : "à la date

 24   du 23 avril 1993, ou à peu près à ces dates-là", il faudrait corriger par

 25   "1994".

 26   Q.  Compte tenu de cette correction que vous venez d'apporter, la Chambre

 27   peut-elle estimer que la teneur de cette déclaration est exacte ?

 28   R.  Oui.


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  1   Q.  Si l'on posait aujourd'hui des questions comparables à celles qui vous

  2   ont été posées au moment où vous avez fourni cette déclaration, est-ce que

  3   vos réponses seraient les mêmes ?

  4   R.  Oui, en substance elles seraient les mêmes.

  5   Q.  Maintenant que vous avez prononcé votre déclaration solennelle, pouvez-

  6   vous confirmer l'exactitude et la véracité de cette déclaration ?

  7   R.  Oui, tout à fait, absolument.

  8   Mme BIBLES : [interprétation] Maintenant que nous avons répondu aux

  9   critères requis, nous demandons le versement au dossier de l'espèce du

 10   document 28667.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, Madame la Greffière d'audience.

 12   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Le document 28667 se voit attribuer la

 13   cote P874, Monsieur le Président, Messieurs les Juges.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le document P874 est versé au dossier.

 15   Mme BIBLES : [interprétation] Je souhaite donner lecture d'un bref résumé

 16   de la déclaration du témoin. A l'intention du public, nous avons fourni des

 17   exemplaires de cette déclaration aux cabines d'interprétation, et j'ai

 18   expliqué au témoin pourquoi nous allons faire cet exercice.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous en prie.

 20   Mme BIBLES : [interprétation] Anthony Banbury a travaillé pour les Nations

 21   Unies en ex-Yougoslavie d'avril 1994 jusqu'à la fin du conflit. Dans un

 22   premier temps, il a été chargé des affaires civiles au QG de la FORPRONU

 23   basé à Sarajevo jusqu'au 1er 1995. Par la suite, il a travaillé en tant

 24   qu'assistant du représentant spécial du Secrétaire général, M. Yasushi

 25   Akashi. Dans l'exercice de ces deux rôles, M. Banbury a eu l'occasion

 26   d'être présent aux réunions avec les dirigeants des parties belligérantes,

 27   il a rédigé des rapports, des télégrammes, des lettres, et autres

 28   correspondances au nom de ses supérieurs.


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  1   M. Banbury affirme que la population de Sarajevo a souffert à cause d'une

  2   campagne permanente de pilonnage et de tirs embusqués dirigés contre les

  3   civils. M. Banbury a fréquemment assisté aux réunions avec la direction

  4   bosno-serbe. Au cours de ces réunions, M. Banbury a pu constater qu'ils

  5   étaient en mesure d'influer sur les conditions à Sarajevo, et ce, par le

  6   biais du contrôle qu'ils pouvaient exercer sur l'approvisionnement en

  7   services municipaux, la liberté de mouvement, et le niveau de pilonnage ou

  8   de tirs embusqués, entre autres.

  9   J'en ai terminé, Monsieur le Président, avec la lecture de ce résumé.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Madame Bibles.

 11   Mme BIBLES : [interprétation]

 12   Q.  Monsieur Banbury, il nous faudra tenir compte de la nécessité de

 13   ménager une pause entre les questions et les réponses pour que les

 14   interprètes puissent nous suivre.

 15   Alors, Monsieur Banbury, si nous nous penchons sur les paragraphes 2 à 4 de

 16   votre déclaration, nous y trouvons votre parcours professionnel. Je n'ai

 17   que quelques questions supplémentaires à vous poser à ce sujet.

 18   Premièrement, vous avez travaillé pour la FORPRONU, est-ce que cela était

 19   la première fois que vous avez été employé par l'ONU ?

 20   R.  Non, j'avais déjà eu des emplois avant cela pour les Nations Unies,

 21   donc avant d'être engagé au sein de la FORPRONU. La première fois que j'ai

 22   travaillé pour l'ONU, c'était en tant que chargé de la protection des

 23   droits de l'homme à la frontière entre la Thaïlande et le Cambodge dans les

 24   camps pour des personnes déplacées. J'ai passé deux années dans le cadre de

 25   cette mission. Puis après cela, j'ai travaillé brièvement au sein de

 26   l'organisation des Etats américains à Haïti. Et nous avons été chassés du

 27   pays, donc cela a mis un terme à mon mandat, et c'est avril 1994 que je

 28   suis venu travailler en Bosnie.


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  1   Q.  Est-ce que vous pouvez nous résumer vos activités professionnelles à

  2   partir de l'année 2009 lorsque vous avez signé votre déclaration ?

  3   R.  Peu après la signature de cette déclaration, j'ai changé de poste. A

  4   l'époque j'étais directeur régional pour l'Asie du Programme alimentaire

  5   mondial; j'étais basé à Bangkok. Et puis à partir de juin 2009, je suis

  6   venu occuper le poste que j'occupe actuellement; je suis assistant du

  7   Secrétaire général chargé de l'appui sur le terrain, je suis basé au QG des

  8   Nations Unies à New York, et à ce poste, en substance, je dois fournir un

  9   appui organisationnel aux différentes missions de maintien de paix et

 10   missions politiques que nous déployons de par le monde.

 11   Q.  Alors, revenons maintenant à l'époque où vous étiez en poste en

 12   Yougoslavie. Est-ce que vous pourriez brièvement nous décrire les fonctions

 13   que vous y avez occupées, les deux postes que vous avez eus.

 14   R.  Alors, au premier poste, j'étais chargé des affaires civiles

 15   officiellement, mais en fait, le rôle que j'ai joué n'était pas celui-là au

 16   sens traditionnel du terme. La FORPRONU avait des responsables des affaires

 17   civiles déployés en Bosnie et à différents endroits en Croatie, et cetera,

 18   qui s'occupaient de ce travail au sens traditionnel du terme, donc en

 19   travaillant avec les communautés locales. Mais moi, j'étais plutôt chargé

 20   des affaires politiques, j'étais le représentant du Secrétaire général.

 21   Donc, initialement c'était M. Andreev, et après c'était M. Aguilar. Et en

 22   cette qualité, je l'accompagnais ou je les accompagnais aux réunions

 23   quasiment tous les jours, réunions avec des représentants des parties

 24   belligérantes, avec la communauté diplomatique, avec d'autres entités

 25   onusiennes, des réunions internes de la FORPRONU. L'homologue militaire

 26   initialement c'était le général Rose, après c'était le général Smith. Et en

 27   fonction de la nature de la réunion, il y a eu aussi des réunions avec des

 28   parties tierces, et à l'issue de ces réunions, je rédigeais des rapports à


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  1   l'attention du QG de la FORPRONU et j'essayais de résumer le contenu

  2   factuel de la réunion. Et enfin, à la fin du document, j'essayais de

  3   fournir sous forme analytique mon commentaire de la réunion, les mesures à

  4   prendre à venir éventuellement, les enjeux. J'essayais d'apporter une

  5   assistance à nos supérieurs hiérarchiques basés à Zagreb en leur permettant

  6   de comprendre les enjeux des réunions que je suivais.

  7   Q.  Lors de ces réunions, si vous étiez présent et si à la réunion il y

  8   avait aussi parmi les personnes présentes des représentants du gouvernement

  9   de Sarajevo, alors généralement, c'était qui qui représentait ce côté-là ?

 10   R.  Généralement, c'était le président Izetbegovic, le premier ministre

 11   Silajdzic, le vice-premier ministre Ganic, et aussi le ministre Muratovic.

 12   Q.  Et lorsque vous étiez présent aux réunions avec les Bosno-Serbes, avec

 13   leur direction, d'après vous qui les représentait généralement ?

 14   R.  Du côté de la partie bosno-serbe, ceux avec qui j'ai eu des contacts

 15   c'était le Dr Karadzic, le Pr Koljevic, le général Mladic, le général

 16   Gvero, le général Tolimir, M. Krajisnik. Et parfois c'était aussi M.

 17   Zametica.

 18   Q.  Et puis vous êtes venu occuper votre deuxième poste à Zagreb, et à

 19   partir de ce moment-là, qui étaient vos interlocuteurs lors des réunions

 20   auxquelles vous assistiez ?

 21   R.  Je suis devenu assistant spécial du représentant spécial du Secrétaire

 22   général, ce que j'interprète, le 1er mai 1995 j'étais basé à Zagreb, et au

 23   fond, mes fonctions et mes responsabilités étaient très comparables, mais

 24   maintenant, compte tenu de la nature des responsabilités de mon supérieur

 25   hiérarchique, je ne me focalisais plus sur la Bosnie, mais nous

 26   travaillions aussi beaucoup avec les pouvoirs croates, avec les autorités

 27   de Zagreb, et en Serbie, ceux de Belgrade. Donc, il y avait le président

 28   Tudjman, le président Milosevic, M. Sarinic du côté croate, puis le général


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  1   Perisic du côté serbe.

  2   Q.  En plus de ces réunions, quelles sont d'autres sources d'information

  3   sur lesquelles vous vous êtes fondé pour rédiger vos rapports et vos

  4   appréciations ?

  5   R.  Au fond, je rédigeais deux types de rapport surtout. Donc, d'un côté,

  6   je rédigeais des rapports sur les réunions auxquelles j'avais assisté, donc

  7   c'était factuel sur ce qui s'était passé lors de la réunion, et en plus

  8   j'apportais mon analyse. Et aussi, je rédigeais des rapports hebdomadaires

  9   réguliers pendant que j'étais posté en Bosnie. Donc, pour résumer les

 10   événements de la semaine. Donc, ce qui s'était passé au cours de la semaine

 11   passée, quelle en était l'importance. Donc, je rédigeais cela, c'est M.

 12   Andreev qui signait, et c'était lui qui l'adressait officiellement à notre

 13   QG à Zagreb. Moi-même et d'autres collègues qui rédigeaient cela essayaient

 14   de se baser sur toutes les sources que nous pouvions trouver. Donc, c'était

 15   un éventail assez large de sources. Nous avions des contacts réguliers avec

 16   la communauté diplomatique, avec les organisations humanitaire, avec la

 17   presse locale de tous bords, que ce soit bosnien, croate ou serbe. Nous

 18   avions nos employés locaux qui suivaient la presse de très près, la radio,

 19   la télévision, la presse écrite, et qui nous fournissait une analyse des

 20   éléments-clé qui étaient publiés par la presse. Et nous étions, me semble-

 21   t-il, en mesure de nous faire une idée assez précise, et aussi nous nous

 22   appuyions sur les rapports de nos affaires civiles, militaires de la

 23   FORPRONU, qui était déployée sur le terrain et qui était déployée à

 24   différents endroits sur la totalité du terrain en Bosnie. Donc, c'étaient

 25   aussi des rapports hebdomadaires qui émanaient d'eux. Donc, nous les

 26   prenions en compte. La FORPRONU avait des contacts sur le plan formel,

 27   informel avec la communauté diplomatique, avait des réunions avec les

 28   parties belligérantes, la presse locale, donc cela nous donnait une idée


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  1   assez complète de ce qui se passait, et donc c'est ce que j'ai essayé de

  2   faire figurer dans mes rapports hebdomadaires.

  3   Q.  Pendant que vous étiez en mission en ex-Yougoslavie, est-ce que vous

  4   aviez le sentiment de la gravité des événements dont vous étiez témoin lors

  5   de ces réunions ou négociations ?

  6   R.  Ça été une coïncidence, mais n'empêche que cela a eu un effet très

  7   important sur moi, à savoir le fait que j'ai été déployé en Bosnie le 9

  8   avril 1994, c'était tout de suite après l'apogée de la crise de Gorazde.

  9   Donc, je suis descendu de l'avion, je suis arrivé à mon nouveau QG, et tout

 10   le monde était en train de parler d'avoir recours aux frappes aériennes de

 11   l'OTAN, l'épée bleue, comme ils l'ont appelée, les généraux étaient très

 12   occupés. Et le lendemain, l'OTAN a eu recours pour la première fois à ses

 13   appareils, pour la première fois de l'histoire de l'organisation. Donc,

 14   littéralement depuis les premiers moments que j'ai passés dans le pays,

 15   j'ai eu effectivement le sentiment que c'étaient des choses très

 16   importantes qui étaient en train de se produire. Bien entendu, je lisais la

 17   presse et je savais ce qui se passait dans la guerre de l'extérieur, mais

 18   maintenant j'étais sur place, et je pense que de jour en jour, au

 19   quotidien, on était conscients du fait qu'on était en train de vivre des

 20   moments d'importance historiques, et d'écrire l'histoire. Et j'avais

 21   vraiment l'impression que cela se passait, en fait, de deux manières très

 22   importantes. D'un côté il y avait l'aspect humanitaire, si vous voulez, ou

 23   humain, et on voyait de quelle manière les gens étaient affectés par ce qui

 24   se passait, et je voyais cela tous les jours. Cela ne pouvait pas vous

 25   laisser indemne, on voyait ce qui arrivait aux gens, de quels que bords

 26   qu'ils soient, et puis on voyait qu'il y avait ces souffrances terribles du

 27   côté de la population. Donc, les communautés déchirées, les familles

 28   séparées, des communautés entières détruites.


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  1   Et puis d'autre part, de quelle manière avait-on également la sensation

  2   qu'on était en train d'écrire l'histoire là-bas, c'était parce que, avec

  3   les gens avec qui j'étais en contact professionnel tous les jours, sont en

  4   train de prendre des décisions, qu'il s'agisse d'employés des Nations Unies

  5   ou d'autres parties, eh bien, ils prenaient des décisions qui,

  6   effectivement, avaient une incidence sur les événements. Donc, ils

  7   écrivaient l'histoire. Donc, le fait d'avoir recours aux frappes aériennes

  8   de l'OTAN, de ne pas le faire, de laisser les appareils survolés le

  9   territoire, de laisser passer les convois à Gorazde ou non, l'incidence de

 10   ces événements était très importante, et parfois c'était une situation de

 11   vie ou de mort, de paix ou de guerre, et j'avais effectivement au quotidien

 12   cette sensation qu'on était en train d'écrire l'histoire en Bosnie-

 13   Herzégovine pendant que j'y étais.

 14   Q.  Alors, quelle incidence cela a eu sur les efforts que vous avez

 15   déployés afin d'observer les événements qui se produisaient ?

 16   R.  J'avais la sensation que c'était très important et aussi que c'était un

 17   très grand privilège qui m'a été donné. En fait, lorsqu'un chargé des

 18   affaires civiles se voyait déployer en Bosnie, quelqu'un qui arrivait pour

 19   la première fois, comme c'était mon cas, on l'envoyait dans des bureaux

 20   régionaux, y passer un an à Gorazde ou Gornji Vakuf ou ailleurs, enfin un

 21   endroit de ce type-là. Mais quelle qu'en était la raison, M. Andreev a

 22   décidé de m'attacher à son bureau personnel, à partir du premier jour.

 23   Donc, ça été un privilège, un privilège de pouvoir être témoin de ces

 24   événements d'importance historique, et je pense que cela m'a donné le

 25   sentiment d'une très grande responsabilité que j'avais d'essayer

 26   d'enregistrer de manière très précise, très juste, très fidèle, les

 27   événements qui se produisaient. Donc, c'est ce que j'ai essayé de faire

 28   dans mes notes, de transcrire ces événements de manière très exactes, donc


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  1   les propos d'un tel ou d'un tel, et essayer de relayer ces éléments

  2   d'information le long de notre filière hiérarchique vers nos supérieurs.

  3   Q.  Est-ce que vous avez pu observer les tactiques et les stratégies

  4   pratiquées par les différentes parties intéressées au cours des

  5   négociations ?

  6   R.  J'ai été présent à des dizaines et des dizaines de réunions avec les

  7   responsables, et le plus souvent les numéros un des différentes parties.

  8   Et, effectivement, j'ai pu observer l'approche qu'ils adoptaient aux

  9   négociations.

 10   Q.  Est-ce que vous pourriez décrire quel a été le style de Ratko Mladic au

 11   cours de ces négociations ?

 12   R.  Le général Mladic, dirais-je, est un homme très intelligent, un

 13   stratège. J'ai toujours été impressionné par la manière qu'il avait de se

 14   saisir des questions par sa capacité de penser. En termes de stratégie, je

 15   dirais que c'était l'un des plus capables, des plus intelligents, les plus

 16   grands stratèges parmi les protagonistes que j'ai pu observer de quels que

 17   bords que ce soient, y compris du côté des Nations Unies. Il était très

 18   efficace au cours des réunions, il s'appuyait sur un mélange de charme,

 19   dirais-je, et pratiquement de harcèlement, et donc avec son charisme, son

 20   charme, cela avait une incidence sur les parties présentes, et lorsqu'il

 21   s'appuyait sur son charme, donc cela nous donnait une image plus positive

 22   de la personne, plus plaisante, et puis si on était opposés, alors c'était

 23   un peu moins agréable. Et c'était un bon négociateur, dirais-je.

 24   Q.  Est-ce que vous avez pu remarquer des techniques ou des stratégies

 25   précises auxquelles il aurait eu recours, particulièrement pour ce qui est

 26   de ces négociations avec les Nations Unies ?

 27   R.  Eh bien, la stratégie principale que j'ai remarquée du côté bosno-serbe

 28   est d'emblée pendant la crise de Gorazde, mais c'est devenu encore plus


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  1   prononcé avec le temps, c'était lorsqu'il était question du recours à la

  2   force par l'OTAN et par les Nations Unies. Je pense que c'était clair que

  3   les Bosno-Serbes ne voulaient pas que les Nations Unies ou l'OTAN ait

  4   recours à la force contre eux. Ils ne voulaient pas qu'il y ait une partie

  5   combattante qui se dresse contre eux. Et je pense que le général Mladic

  6   cherchait à nous empêcher de le faire de la manière suivante : à chaque

  7   fois qu'on était sur le point de le faire ou, effectivement où on allait

  8   recourir à la force, et en particulier c'était à l'emploi des appareils de

  9   l'OTAN, à ce moment-là par le truchement d'une escalade, il cherchait à ce

 10   que les Bosno-Serbes, à la fin de cette crise, se retrouvent dans une

 11   position de supériorité par rapport aux Nations Unies, et que nous, on soit

 12   dans une position bien pire que celle à partir de laquelle on était partis.

 13   Donc, c'est le schéma qui s'est répété x fois lorsque nous avons eu recours

 14   aux frappes aériennes ou aux appareils de l'OTAN. Donc, ils fermaient les

 15   aéroports qui avaient une importance vitale pour nous, ils nous empêchaient

 16   de circuler, et comme ça nous ne pouvions pas réapprovisionner nos forces

 17   dans les enclaves. Ils empêchaient le passage des convois humanitaires, ils

 18   prenaient des otages, et refusaient de négocier. Donc à chaque fois, à

 19   chaque fois que nous avions recours à la force, nous nous retrouvions dans

 20   une position pire que celle du départ, donc cela avait un effet tant

 21   opérationnel que psychologique, dirais-je, sur les Nations Unies et sur la

 22   FORPRONU, et aussi sur les représentants des Nations Unies en ex-

 23   Yougoslavie.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Mladic, j'ai remarqué les

 25   expressions de votre visage à plusieurs reprises et la façon dont vous avez

 26   cherché à communiquer avec d'autres personnes présentes de ce prétoire, y

 27   compris avec moi-même. J'ai relevé votre réaction, et dans une certaine

 28   mesure votre réponse aux propos du témoin. Je vous donne pour instruction


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  1   de ne plus le faire, car vous êtes parfaitement informé des conséquences

  2   qui s'en suivront si vous continuez, si vous persistez dans cette voie,

  3   consistant à exprimer des pensées ou des émotions, même sans recourir aux

  4   moindres mots quant à la déposition d'un témoin.

  5   Veuillez poursuivre, Madame le Procureur.

  6   Mme BIBLES : [interprétation]

  7   Q.  Vous avez indiqué que le premier jour de votre affectation

  8   correspondait à la première frappe de l'OTAN à Gorazde. Alors, paragraphes

  9   10 à 22 de votre déclaration, vous décrivez les circonstances qui

 10   prévalaient sur place ainsi que la position qui était celle de la direction

 11   bosno-serbe sur le plan des négociations. Alors, concentrons-nous sur cette

 12   période des mois d'avril et de mai 1994, de quelle façon les actions des

 13   Serbes de Bosnie ont-elles eu un influence sur les négociations de paix,

 14   leurs actions par rapport à Gorazde, je veux dire.

 15   R.  Gorazde représentait une crise majeure sur le plan politique,

 16   humanitaire et militaire pour la FORPRONU, ainsi que pour la population de

 17   Gorazde, le recours à des frappes aériennes par l'OTAN pour la toute

 18   première fois, le fait que des appareils britanniques aient été abattus par

 19   les Bosno-Serbes, que des soldats britanniques aient été tués à Gorazde,

 20   tout ceci a été à l'origine non seulement d'une crise majeure pour les

 21   Nations Unies, mais également nous a contraint à nous poser très

 22   sérieusement la question de ce qu'était notre rôle en Bosnie-Herzégovine et

 23   de ce qu'était notre relation avec les Bosno-Serbes. Je crois que la

 24   direction bosno-serbe et, en particulier au sein du général Mladic,

 25   voyaient très clairement les faiblesses et les points de vue de

 26   vulnérabilité des Nations Unies. Quand je parle de "vulnérabilité", je

 27   pense concrètement à la volonté politique de suivre une politique plus

 28   musclée, et je crois que les Bosno-Serbes se sont montrés très habiles à


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  1   exploiter ces faiblesses des Nations Unies. Ils l'ont fait en combinant

  2   l'utilisation de la force et des mesures dont je crois qu'elles se passent

  3   de commentaires puisqu'elles visaient les Nations Unies, mais cela était

  4   visible également lors des réunions des négociations que nous avons eues,

  5   ils ont compris qu'ils étaient en position de force, et cela les

  6   conduisaient à adopter une position particulièrement intraitable. Ils

  7   avaient des positions très rigides. Ceci a été utilisé par eux de façon

  8   assez efficace pour augmenter leur marge de manœuvres par rapport à nous,

  9   et au final, atteindre leurs objectifs non seulement dans le secteur de

 10   Gorazde mais sur le plan également des relations stratégiques en général

 11   entre les Bosno-Serbes et la FORPRONU.

 12   Q.  Je voudrais maintenant attirer votre attention sur le paragraphe 19; en

 13   version anglaise, ceci figure en page 6 de la version anglaise; page 7 en

 14   B/C/S. Au paragraphe 19, vous dites :

 15   "En assortissant leur proposition de paix de conditions déraisonnables, ils

 16   perpétuaient la guerre."

 17   Est-ce que vous pourriez nous décrire quelles étaient ces conditions posées

 18   par les dirigeants bosno-serbe ?

 19   R.  Eh bien, dans ce contexte précis, ils faisaient référence au

 20   pourcentage du territoire qui devait revenir aux Bosno-Serbes dans le cadre

 21   de tout accord de paix éventuel. Ils mettaient en avant également la

 22   largeur du corridor devant relier les parties occidentales et orientales de

 23   la Bosnie dans le secteur de Brcko. Ils exigeaient également un accès à la

 24   mer. Et, certes, il est normal dans le cadre de négociations d'aller peut-

 25   être au-delà des positions que vous voulez atteindre et pour lesquelles

 26   vous êtes prêts à faire un compromis, je crois que c'est allé bien au-delà

 27   de ceci dans ce cas précis. C'était une stratégie très couramment employée

 28   par la direction bosno-serbe pendant toute la durée de la guerre, qu'il


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  1   s'agisse de la direction militaire ou de la direction civile. Les autorités

  2   disaient une chose, qu'il s'agisse d'affirmer qu'ils voulaient la paix,

  3   qu'ils voulaient un échange de prisonniers de guerre, qu'ils voulaient que

  4   les services municipaux soient rétablis en termes d'approvisionnement à

  5   Sarajevo, mais dans les faits et en réalité, l'objectif qu'ils cherchaient

  6   à atteindre était très différent. C'est ce que nous avons observé. Moi, je

  7   l'ai observé d'innombrables fois en toutes ces occasions où ils ont pris

  8   des positions totalement déraisonnables plaçant dès lors la responsabilité

  9   de faire les concessions nécessaires pour répondre à ces exigences sur les

 10   épaules de leurs interlocuteurs, qu'il s'agisse des Nations Unies, des

 11   Croates, des Bosniaques, et les Nations Unies étaient dans une position

 12   particulièrement difficile.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Bibles, tout ceci apparaît très

 14   clairement à 90 %, je dirais, à la lecture de la déclaration du témoin.

 15   Alors, vous pourriez évidemment redemander au témoin de nous parler du

 16   corridor ou de l'exigence de 50 % du territoire, mais il s'agit d'un témoin

 17   en application de l'article 92 ter, dont la déclaration est assez longue.

 18   Est-ce que vous pourriez, s'il vous plaît, éviter les répétitions et poser

 19   des questions qui ajoutent véritablement quelque chose à ce que nous avons

 20   pu lire.

 21   Mme BIBLES : [interprétation] Oui.

 22   Q.  Alors, reprenons un peu de distance. D'avril à septembre 1994, est-ce

 23   que vous pourriez nous décrire l'évolution de la situation sur le plan

 24   politique et militaire pendant cette période et la façon dont elle a

 25   influencé la direction bosno-serbe ?

 26   R.  Eh bien, suite à la crise de Gorazde, il y a eu des pressions

 27   diplomatiques importantes de la part d'acteurs tiers, ce qui a permis

 28   d'obtenir ce qui est connu sous le nom d'accord de Genève, je crois que


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  1   c'était au mois de juin ou à partir de juin. Ceci a permis d'améliorer la

  2   situation générale en Bosnie, mais comme cela a souvent été le cas

  3   lorsqu'il y avait une forme ou une autre d'accord politique qui était

  4   obtenu, cela n'a pas duré très longtemps. Car l'accord politique était

  5   davantage le résultat de pressions externes que d'une réévaluation et d'un

  6   repositionnement fondamentaux de la part de l'une ou de l'autre des parties

  7   au conflit quant à ce qui constituaient leurs objectifs de guerre à leurs

  8   intérêts fondamentaux. Et bien que la situation se soit améliorée en juin

  9   et juillet, dès le mois d'août, les choses ont de nouveau empiré et le

 10   processus politique a été pratiquement réduit à néant de nouveau et les

 11   événements sur le plan militaire reprenaient de nouveau le dessus.

 12   Q.  Concernant le soutien dont bénéficiait la direction bosno-serbe dans

 13   ses relations avec toutes les différentes entités à partir de septembre

 14   1994, est-ce que les relations qu'ils avaient étaient plus fortes ou bien

 15   est-ce qu'elles ont commencé à s'affaiblir ?

 16   R.  Les relations avec quelles entités ?

 17   Q.  Eh bien, avec la direction située à Pale et d'autres entités tant en

 18   ex-Yougoslavie que sur la scène internationale.

 19   R.  Eh bien, je crois que peu à peu on a assisté à un isolement croissant

 20   des Bosno-Serbes. Avec le temps, ils perdaient le soutien de certains

 21   acteurs-clé qui n'étaient pas nécessairement leurs alliés mais sur lesquels

 22   ils avaient pu s'appuyer, qui avaient été un soutien pour eux. Alors, que

 23   ce soit à Moscou ou à Belgrade ou, dans une certaine mesure à Paris ou à

 24   Londres, nous avons, je crois, pu observer qu'il y avait chez un nombre

 25   croissant d'acteurs tiers cette perception selon laquelle la position

 26   bosno-serbe était une position déraisonnable avec laquelle ils ne

 27   souhaitaient pas être associés, et ils souhaitaient que les Bosno-Serbes se

 28   positionnent de façon plus raisonnable en vue d'un accord de paix ou d'un


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  1   cessez-le-feu. Et la perception qui se dégageait était que les Bosno-Serbes

  2   rendaient tout cela très difficile à obtenir.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Bibles, je vous invite à relire

  4   avec moi votre dernière question. Vous parlez du "soutien reçu par les

  5   Bosno-Serbes dans le cadre de leurs relations avec ces entités et d'autres

  6   entités." Ensuite, on vous a demandé de préciser "avec quelles entités", et

  7   vous avez répondu dans votre question qu'il s'agissait des rapports "avec

  8   la direction à Pale et d'autres entités." Donc, vous posez une question

  9   relative aux rapports entre la direction bosno-serbe et la direction qui se

 10   trouvait à Pale. Et je dois dire que je suis un peu perdu, j'ai un peu de

 11   mal à comprendre où vous voulez en venir. Je vous suggère donc de poser des

 12   questions aussi claires que possible à ce témoin des faits. En ce moment,

 13   vous êtes en train d'essayer d'obtenir de sa part une analyse politique,

 14   une évaluation de situation. Je ne suis pas en train de dire qu'il n'y a

 15   pas de pertinence à faire cela et que nous ne sommes pas curieux de

 16   l'entendre, mais cela apparaît comme pour le moins vague lorsque vous posez

 17   à ce témoin la question de ces relations entre les Bosno-Serbes et la

 18   direction de Pale. Je crois qu'il serait bon peut-être de vous interroger

 19   là-dessus.

 20   Mme BIBLES : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, je vais essayer

 21   d'être plus explicite quant aux parties auxquelles je me réfère.

 22   Q.  Monsieur Banbury, passons à l'automne 1994. Y avait-il des secteurs en

 23   Bosnie-Herzégovine qui dépendaient tout particulièrement des convois d'aide

 24   ?

 25   R.  Oui. Il y avait un très grand nombre de personnes à travers tout le

 26   territoire de la Bosnie qui dépendaient de l'aide humanitaire, quelle que

 27   soit la partie considérée, mais ceux qui en dépendaient le plus étaient les

 28   habitants des enclaves de Bosnie orientale et dans une certaine mesure


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  1   aussi à Bihac.

  2   Q.  Quelle était votre compréhension de la position des Nations Unies à cet

  3   égard, à savoir les Nations Unies devaient-elles jouir d'une liberté de

  4   circulation dans ces secteurs ?

  5   R.  Eh bien, le Conseil de sécurité dans ses résolutions a indiqué très

  6   clairement qu'une liberté totale de circulation devait être accordée aux

  7   Nations Unies afin qu'elles puissent s'acquitter de leurs tâches et assumer

  8   leurs responsabilités, responsabilités qui initialement s'articulaient

  9   avant tout autour de l'aide humanitaire, je parle de la Résolution 776 et

 10   d'autres, avant d'inclure un certain nombre d'autres aspects. Mais il était

 11   tout à fait clair que l'un des rôles cruciaux de la FORPRONU était

 12   d'apporter son soutien au passage de l'aide humanitaire destinée aux civils

 13   qui en avaient besoin et que la liberté de circulation devait être accordée

 14   par toutes les parties afin que cet objectif puisse être atteint.

 15   Q.  Très brièvement, est-ce que vous pourriez nous dire s'il y avait

 16   effectivement une liberté de circulation vers ces secteurs à l'automne 1994

 17   ?

 18   R.  La FORPRONU n'a jamais joui de ce que nous pourrions décrire comme une

 19   liberté de circulation en Bosnie. Nous étions constamment entravés dans nos

 20   mouvements, que ce soit dans le passage et la fourniture de l'aide

 21   humanitaire ou dans d'autres activités.

 22   Q.  Vous avez décrit en détail dans votre déclaration ce qu'il en est, mais

 23   est-ce que vous pourriez nous dire si vous avez été en mesure de déterminer

 24   dans quelle mesure ces entraves, ces restrictions dont vous avez souffert

 25   résultaient d'actions à l'échelon local ou si elles étaient le résultat de

 26   décisions ou d'actions intervenant à un échelon plus élevé au sein de la

 27   direction bosno-serbe ?

 28   R.  Eh bien, le sujet de la liberté de circulation était souvent débattu,


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  1   abordé par la direction de la FORPRONU avec ses interlocuteurs du côté

  2   bosno-serbe, avec le Dr Karadzic et ses collègues des autorités civiles;

  3   avec le général Mladic et ses collègues des forces armées. Nous ne cessions

  4   de remettre ce sujet sur la table, et nos interlocuteurs étaient un peu

  5   plus conscients de la responsabilité qui était la leur par rapport au

  6   mandat qui nous avait été confié par le Conseil de sécurité. Ils étaient un

  7   peu plus conscients de leur échec à remplir ces responsabilités. Et en

  8   dépit des requêtes adressées fréquemment par M. Akashi, ils ont refusé de

  9   nous accorder cette liberté de circulation dont nous avions besoin et à

 10   laquelle nous avions le droit.

 11   Q.  En rédigeant des lettres adressées à différents acteurs en ex-

 12   Yougoslavie concernant ces différentes restrictions et entraves, est-ce que

 13   vous étiez au courant de la teneur particulière de ces lettres et de la

 14   façon dont elles influenceraient peut-être le cours des événements décrits

 15   ?

 16   R.  Oui. La FORPRONU a toujours essayé de se montrer très respectueuse de

 17   toutes les parties. Nous avons toujours accordé le respect que nous

 18   estimions être dû à toutes les parties, mais nous avons également accordé

 19   la plus haute priorité à la mise en œuvre de notre mandat et à remplir nos

 20   responsabilités envers tous, tous les peuples de la Bosnie-Herzégovine.

 21   Nous avons essayé de maintenir un équilibre, que ce soit dans les lettres

 22   que nous écrivions, au cours des réunions, en restant cordiaux,

 23   respectueux, et en nous concentrant sur le travail qui était à faire.

 24   Q.  Au paragraphe 78, vous décrivez la rédaction d'une lettre -- vous dites

 25   que vous avez rédigé une lettre de M. Andreev à M. Karadzic, vous décrivez

 26   le processus, en tout cas --

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Bibles, comment le témoin

 28   pourrait-il ne pas être au courant de la teneur d'une lettre si vous le


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  1   présentez comme le rédacteur de cette dernière ? C'était votre question,

  2   n'est-ce pas ?

  3   Mme BIBLES : [interprétation] J'essaie d'obtenir une explication quant à la

  4   reconnaissance ou à la familiarité que le témoin avait de l'échelle sur

  5   laquelle on pouvait se déplacer en termes de teneur de la lettre qui était

  6   adressée en optant un ton de plus en plus dur, si cela était nécessaire.

  7   J'essaie de replacer le document suivant qui nous intéresse dans son

  8   contexte.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce que vous avez demandé c'est si le

 10   témoin, en tant que rédacteur de la lettre, était au courant de la teneur

 11   de cette dernière. J'ai un peu de mal à comprendre comment, si vous rédigez

 12   un document, vous pouvez ne pas être au courant de la teneur de ce dernier.

 13   Donc, je crois que cela est par définition le privilège et le rôle même du

 14   rédacteur d'un document. Donc, est-ce que vous pourriez en venir, s'il vous

 15   plaît, à des points pertinents aussi rapidement que possible.

 16   Mme BIBLES : [interprétation] Je voudrais que nous affichions le document

 17   numéro 10586 de la liste 65 ter à l'écran, page numéro 2 dans les deux

 18   versions.

 19   Q.  Est-ce que vous pourriez nous expliquer en termes diplomatiques la

 20   teneur qui a été choisie et vous avez utilisée dans cette lettre précise ?

 21   R.  Ceci était une lettre dans laquelle nous avons utilisé des formulations

 22   particulièrement explicites. M. Andreev, je crois, était quelqu'un qui

 23   cherchait sincèrement à comprendre les points de vue de toutes les parties

 24   au conflit. En tant qu'officier russe, je crois qu'il avait une capacité

 25   particulière à comprendre le point de vue des Serbes et à établir de façon

 26   générale des rapports positifs avec les autorités bosno-serbes, ce qui

 27   était une bonne chose. Donc, il avait un rôle particulier à jouer qui était

 28   différent de celui que d'autres officiers pouvaient jouer. Compte tenu de


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  1   la gravité de la situation en Bosnie au moment de la rédaction de cette

  2   lettre, notamment suite à la crise à Bihac fin novembre 1994, j'ai estimé

  3   qu'il était à tout le moins approprié pour M. Andreev, sinon vital pour

  4   lui, d'utiliser des formulations tout à fait directes et claires avec M.

  5   Karadzic, pour qu'il n'y ait absolument aucun malentendu quant à la gravité

  6   de la situation et quant à la responsabilité qui était celle de la

  7   direction bosno-serbe, qui n'était pas seule responsable, mais qui avait

  8   une responsabilité dans la situation et ce qu'elle était devenue. Nous

  9   voulions qu'ils comprennent parfaitement leurs responsabilités et ce qu'il

 10   adviendrait si jamais ils ne changeaient pas de position. Nous voulions

 11   qu'il n'y ait aucun malentendu.

 12   Mme BIBLES : [interprétation] Monsieur le Président, l'Accusation

 13   souhaiterait demander le versement du document 10586 de la liste 65 ter.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière.

 15   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Le document 10586 reçoit la cote P875.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] P875 est versé au dossier.

 17   Veuillez poursuivre.

 18   Mme BIBLES : [interprétation]

 19   Q.  Au paragraphe 75 de votre déclaration, vous décrivez une réunion entre

 20   le général Rose et d'autres acteurs au sujet de la position de l'OTAN en

 21   Bosnie. Je relève que nous avons là un exemple de réunion au cours de

 22   laquelle le général Mladic n'était, en fait, pas présent. Quelle est votre

 23   expérience de ces négociations, est-ce que vous diriez qu'un accord pouvait

 24   être obtenu sans l'accord du général Mladic et sans son autorisation ?

 25   R.  Eh bien, dans l'expérience qui est la mienne, toute décision d'une

 26   certaine importance, tout accord d'une certaine importance prise ou

 27   concédée par les Serbes de Bosnie et qui aurait eu également des

 28   conséquences sur le plan militaire ne pouvait être obtenu qu'avec l'accord


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  1   du général Mladic. Il y a eu de nombreuses conversations, discussions, et

  2   négociations qui ont été menées en son absence, et cela ne pouvait

  3   signifier qu'une de deux choses : ou bien les sujets de la discussion ne se

  4   jouaient pas à un niveau qui nécessitait sa participation, ou bien il

  5   s'agissait d'une décision ou d'un accord qui n'allait pas pouvoir être pris

  6   dans la salle de négociations au sujet desquels on allait en référer à lui,

  7   ou alors au sujet desquels il avait déjà donné son accord par rapport à une

  8   position très précise. Tout ça était très clair pour moi, en tout cas elle

  9   l'est devenue avec le temps.

 10   Q.  Passons à la fin de 1994, est-ce que vous pourriez brièvement nous dire

 11   si vous avez participé aux négociations du 31 décembre 1994 jusqu'à

 12   l'accord de cessation des hostilités ?

 13   R.  Oui, c'est le président Carter qui m'a affecté auprès du représentant

 14   spécial du Secrétaire général en tant que conseiller politique de la

 15   FORPRONU. J'étais le seul membre de la FORPRONU des Nations Unies à faire

 16   partie de la délégation du président Carter, et je l'ai accompagné lors de

 17   toutes ses réunions avec les différentes parties.

 18   Q.  Est-ce que vous pourriez nous dire si le général Mladic a activement

 19   participé à ces négociations ?

 20   R.  Eh bien, concernant les négociations du président Carter avec les

 21   Bosno-Serbes, le général Mladic était en principe présent, mais je ne

 22   dirais pas qu'il participait activement aux réunions officielles. Bien

 23   entendu, j'ignore le rôle exact qu'il a pu jouer en coulisses, mais quant

 24   aux discussions avec le président Carter, ces dernières étaient

 25   généralement menées par le Dr Karadzic.

 26   Q.  Passons maintenant au printemps de 1995, à partir du paragraphe 92 à

 27   peu près, vous nous indiquez que cet accord a commencé à se déliter.

 28   Mme BIBLES : [interprétation] Alors, est-ce que nous pourrions afficher le


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  1   document 10592 de la liste 65 ter, s'il vous plaît. Et ceci fait l'objet de

  2   références aux paragraphes 93 et 94. Pourrions-nous passer à la page numéro

  3   3 en anglais, et la page numéro 6 en B/C/S dans le prétoire électronique,

  4   s'il vous plaît.

  5   Q.  J'attire votre attention sur le paragraphe numéro 7, il y est indiqué :

  6   "Il apparaît de façon plus en plus claire que l'intention de la VRS est

  7   d'autoriser la fourniture d'approvisionnement indispensable à notre survie

  8   au sein des enclaves, mais non pas de permettre l'approvisionnement qui

  9   nous sera nécessaire pour notre fonctionnement."

 10   Alors, est-ce que c'était là un nouveau point de négociation en termes de

 11   niveau de contrôle de la liberté de circulation dans les négociations avec

 12   les Bosno-Serbes ?

 13   R.  Eh bien, je ne dirais pas que c'était un point nouveau. Ceci a été

 14   instrumentalisé pendant toute la durée du conflit en tant que moyen de

 15   pression considérable sur les Nations Unies. Ce qui était peut-être un

 16   petit peu nouveau ou, en tout cas, qui a changé à l'époque, était ce que

 17   j'ai assimilé à une décision prise par les Serbes de Bosnie consistant à

 18   essayer de véritablement trouver un moyen de neutraliser les Nations Unies

 19   et de neutraliser notre capacité d'actions en Bosnie orientale, et ce,

 20   notamment en réduisant de façon radicale notre capacité à approvisionner

 21   nos personnels sur place et à livrer une aide humanitaire. Je crois que

 22   c'était là deux objectifs principaux sur place. Il y avait l'objectif

 23   opérationnel consistant à réduire les livraisons de vivres, de carburant

 24   destiné à nos troupes. Ces dernières devaient parfois dormir dans des

 25   locaux non chauffés, devaient parfois patrouiller sur des ânes, à dos

 26   d'ânes, elles devaient patrouiller à pied, elles ne pouvaient pas utiliser

 27   de groupes électrogènes. Donc tout ceci restreignait notre capacité

 28   opérationnelle. Et il y avait également un effet psychologique très


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  1   important sur la FORPRONU, je crois sur certains dirigeants de la FORPRONU

  2   même, tant en Bosnie orientale qu'à Sarajevo, et même à Zagreb, parce que

  3   nous sommes devenus dépendants des Serbes quant à notre capacité à

  4   fonctionner et même à tout simplement nous maintenir et vivre. Très

  5   souvent, la direction bosno-serbe, notamment le général Mladic et d'autres,

  6   disaient : Eh bien, nous faisons ceci parce que le gouvernement bosno-

  7   musulman utilise cette enclave à des fins militaires, et cetera, donc vous

  8   devez d'abord obtenir un changement de comportement de leur part, et si

  9   vous y arrivez, nous vous permettrons de vous réapprovisionner.

 10   Donc, nous nous sommes retrouvés dans une position où nous aurions dû

 11   supplier la direction de Pale de nous accorder un réapprovisionnement en

 12   vivres et en carburant, et certaines personnes ont fini par reprocher au

 13   gouvernement bosno-musulman cette situation. Je crois que c'était

 14   particulièrement vrai de certains dirigeants des enclaves. C'était une

 15   stratégie très intelligente, très habilement pensée de la part des Bosno-

 16   Serbes, parce que cela leur a permis de renverser complètement une

 17   situation dans laquelle nous nous sommes finalement -- ça a renversé

 18   complètement la situation parce que nous souhaitions aller dans le sens des

 19   Bosno-Serbes, les satisfaire et améliorer notre image auprès d'eux, alors

 20   qu'en fait nous nous sommes retrouvées très en colère envers le

 21   gouvernement bosno-musulman en raison de toutes ces restrictions placées

 22   par les Bosno-Serbes sur la FORPRONU.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Bibles, je surveille également

 24   l'heure. Il est temps de faire une pause. Nous pouvons d'ores et déjà

 25   inviter le témoin à quitter la salle d'audience. Nous vous attendons,

 26   Monsieur le Témoin, de nouveau dans 20 minutes.

 27   Madame Bibles, est-ce que vous êtes dans les clous sur le plan du temps qui

 28   vous a été alloué ?


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  1   Mme BIBLES : [interprétation] Oui, tout à fait. Je suis même un petit peu

  2   en avance.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.

  4   [Le témoin quitte la barre]

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce qui signifie que vous aurez besoin de

  6   combien de temps encore après la pause ?

  7   Mme BIBLES : [interprétation] Encore une quinzaine de minutes.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Quinze minutes. Très bien.

  9   Dans ce cas-là, nous allons reprendre à 11 heures moins cinq, et vous aurez

 10   fini vers 11 heures 10. Nous reprendrons donc nos débats à 11 heures moins

 11   cinq.

 12   --- L'audience est suspendue à 10 heures 32.

 13   --- L'audience est reprise à 10 heures 58.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je souhaite brièvement passer à huis

 15   clos partiel, s'il vous plaît.

 16   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel,

 17   Monsieur le Président, Messieurs les Juges.

 18   [Audience à huis clos partiel]

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 23   [Audience publique]

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Madame la Greffière.

 25   Faites entrer le témoin dans le prétoire, s'il vous plaît.

 26   Madame Bibles.

 27   Mme BIBLES : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaite saisir

 28   cette occasion pour demander le versement au dossier du document que nous


Page 8222

  1   avons examiné tout à l'heure, il s'agit du document 65 ter 10592.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je n'entends pas d'objection.

  3   Madame la Greffière.

  4   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Le document 10592 recevra la cote D876.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] P876 est versé au dossier.

  6   Vous aurez encore besoin de 15 minutes, n'est-ce pas, Madame Bibles ? Vous

  7   pouvez maintenant continuer dès que le témoin prendra place.

  8   [Le témoin vient à la barre]

  9   Mme BIBLES : [interprétation] Monsieur le Président, en fait, j'anticipe

 10   que j'aurai besoin d'encore moins de temps que cela.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Merci.

 12   Mme BIBLES : [interprétation]

 13   Q.  Monsieur Banbury, je demanderais à attirer votre attention sur les

 14   paragraphes 94 et 95 de votre déclaration. Je souhaiterais également faire

 15   remarquer que M. Banbury a une copie de sa déclaration devant lui. Au

 16   paragraphe 94, vous parlez d'une déclaration qui a été faite par le général

 17   Mladic, remarque faite au général Smith :

 18   "'L'augmentation des tirs embusqués dans la région de Sarajevo par l'armée

 19   des Serbes de Bosnie était en réaction des victimes serbes causées dans le

 20   cadre des offensives militaires lancées par le gouvernement bosnien…"

 21   Au paragraphe 95 de votre déclaration, vous dites que vous aviez compris

 22   par ceci que Mladic faisait allusion aux tirs par des tireurs embusqués à

 23   l'encontre des civils. Pourriez-vous nous expliquer pourquoi ?

 24   R.  Les victimes de tirs embusqués à Sarajevo étaient principalement ou la

 25   vaste majorité était des civils. Le fait de tirer par des tireurs

 26   embusqués, il ne s'agit pas d'une utilisation de forces aléatoires, ce

 27   n'est pas une question de dire que les personnes se trouvaient au mauvais

 28   endroit au mauvais moment. Le tireur embusqué tire, prend pour cible des


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  1   civils, dans ce cas-ci il s'agissait de civils à Sarajevo.

  2   Q.  Merci. Un peu plus tôt dans votre déclaration, vous avez dit que vous

  3   aviez observé un aspect important, il s'agissait de l'impact humain.

  4   Qu'est-ce que vous avez pu remarquer pendant que vous vous trouviez en ex-

  5   Yougoslavie s'agissant de l'impact humain qu'avaient les actions de Ratko

  6   Mladic en Bosnie, donc de l'impact sur la population ?

  7   R.  S'agissant d'une personne travaillant pour les Nations Unies ou pour

  8   toute personne d'ailleurs, étant témoin de l'impact de la guerre en Bosnie

  9   était très difficile parce qu'il y avait un très grand nombre de civils qui

 10   avaient été déplacés, tués, les familles avaient été séparées, des crimes

 11   terribles avaient été commis à l'encontre des femmes, et donc ceci se

 12   déroulait de façon quotidienne et autour de nous, de nous travaillant pour

 13   la FORPRONU. Et je ne crois pas que le personnel onusien était arrivé sur

 14   place -- de toute façon, moi je n'étais pas là pour voir qui avait tort et

 15   qui avait raison. Nous n'étions pas là pour prêter main-forte à une partie

 16   et ne pas le faire pour l'autre quand nous étions là pour aider les civils,

 17   et malheureusement les conséquences de la guerre pour la population civile

 18   avaient empiré au fil du temps. Indépendamment de la nationalité ou de

 19   l'appartenance ethnique du jeune enfant ou d'une vieille mère qui est tuée,

 20   sur laquelle on tire et qui en meurt, vous savez, j'ai habité à Sarajevo

 21   pendant 15 mois pendant la guerre, et ce qu'a fait l'armée serbe de Bosnie

 22   à l'encontre de la population de cette ville, indépendamment de qui il

 23   s'agissait, de Musulmans de Bosnie, de Serbes, de Croates, ils avaient

 24   carrément terrorisé la ville. Les gens ne savaient pas chaque fois qu'ils

 25   franchissaient le seuil de leur porte s'ils allaient pouvoir revenir, les

 26   mères qui voyaient leur enfant franchir le seuil de leur porte ne savaient

 27   pas si l'enfant, la mère, le père allait revenir. Et donc, les gens ne

 28   savaient pas s'ils allaient être tués par un mortier qui est tiré de façon


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  1   indiscriminée dans la ville ou par un tireur embusqué ou par autres moyens

  2   létaux. Enfin, les gens pouvaient trouver la mort de cette façon-ci, et

  3   donc un très grand nombre de personnes avaient été tuées. Donc, l'impact

  4   humanitaire était terrible, mais l'effet psychologique surtout sur la

  5   population de la ville était terrible. J'avais un grand nombre d'amis qui

  6   étaient Musulmans de Bosnie et ils avaient souffert terriblement, leurs

  7   familles, eux, oui, certainement, parce qu'il faisait très froid, ils

  8   n'avaient pas d'électricité, ils n'avaient pas de nourriture non plus, mais

  9   il s'agissait d'une terreur que ces personnes ressentaient de vivre dans

 10   une ville, non pas seulement parce qu'elle était assiégée mais parce que la

 11   population civile trouvait la mort de façon routinière.

 12   Mme BIBLES : [interprétation] Ceci met fin à mon interrogatoire.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Bibles, j'aimerais vous poser une

 14   question s'agissant de ce que le témoin avait pu observer s'agissant de

 15   l'impact humain des actions de Ratko Mladic à l'encontre de la Bosnie. Le

 16   témoin a plutôt donné une réponse concernant l'impact de la guerre dans la

 17   dernière partie de sa réponse, de la population. Alors, j'aimerais savoir

 18   et j'aimerais que le témoin nous précise et nous dise si toutes ces misères

 19   de la guerre étaient directement, selon lui, attribuées à M. Mladic, ou

 20   bien étaient-ce seulement les actions de l'armée des Serbes de Bosnie, car

 21   c'était là votre question. Pourriez-vous donc, je vous prie, préciser votre

 22   réponse et nous dire si c'étaient les actions de Ratko Mladic ou si

 23   c'étaient la guerre et les activités de l'armée des Serbes de Bosnie pour

 24   laquelle vous nous avez répondu.

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je suis vraiment désolé, Monsieur le

 26   Président, et je me vois navré de ne pas avoir répondu de façon plus

 27   précise tout à l'heure. Effectivement, toute cette misère qui a été endurée

 28   par la population, qu'il s'agisse de la population de Sarajevo ou ailleurs


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  1   en Bosnie était le résultat d'un très grand nombre de facteurs qui auraient

  2   pu aller au-delà des actions de l'armée des Serbes de Bosnie, au-delà en

  3   fait du général Mladic. Toutefois, il n'existe aucun doute dans mon esprit,

  4   et fondé sur mon expérience personnelle, que s'agissant de la population de

  5   Sarajevo mais également pour la population de Gorazde, de Zepa, de

  6   Srebrenica, de Tuzla, et de la population de plusieurs autres villes de

  7   Bosnie, s'agissant des civils, que l'armée des Serbes de Bosnie avait

  8   terrorisé cette population psychologiquement et physiquement, et qu'il y a

  9   également aucun doute dans mon esprit, et ce, fondé sur mes observations,

 10   que le général Mladic était incontestablement le dirigeant de l'armée des

 11   Serbes de Bosnie, qu'il prenait des décisions, qu'il donnait des ordres; on

 12   mettait en œuvre ses ordres. Et l'armée des Serbes de Bosnie faisait

 13   exactement ce qu'elle devait faire. Elle obéissait les ordres de ses

 14   dirigeants. Et donc, ce terrible sort enduré par la population civile à

 15   Sarajevo pendant la période pendant laquelle j'y étais était rendue presque

 16   intenable par ou en raison de l'armée des Serbes de Bosnie, et ce, à la

 17   suite des ordres donnés par le général Mladic.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

 19   Le Juge Fluegge a également une question pour vous.

 20   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Si je puis, j'ai une question de

 21   suivi à la suite de ce que vous venez de nous dire. Au cours des réunions

 22   pendant lesquelles vous avez rencontré le général Mladic, est-ce que vous

 23   avez soulevé vos préoccupations concernant vos observations, concernant

 24   l'impact que ces actions avaient sur la population civile ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Juge, de façon générale dans les

 26   réunions, je ne me prononçais pas. J'étais un officier junior et j'étais là

 27   simplement pour prendre des notes essentiellement. Un peu plus tard, il

 28   m'arrivait de me prononcer, de parler, mais c'était normalement mes


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  1   supérieurs qui menaient les négociations et qui menaient les pourparlers,

  2   qui prenaient la parole. Mais j'ai pu entendre mes supérieurs du côté civil

  3   et militaire soulever à d'innombrables reprises auprès du général Mladic et

  4   du Dr Karadzic, et auprès de leurs collègues, des préoccupations très

  5   profondes que nous avions sur l'impact de leurs actions et les décisions de

  6   l'armée des Serbes de Bosnie sur les civils, qu'il s'agisse de morts civils

  7   causées par les tirs embusqués ou par les tirs de mortier ou qu'il s'agisse

  8   de l'impact humanitaire que leurs actions avaient sur la population en

  9   bloquant, par exemple, l'acheminement de l'aide humanitaire, et cetera.

 10   Mais nous faisions également la même chose s'agissant du camp adverse, que

 11   leurs actions pouvaient créer ou créaient effectivement un impact négatif

 12   sur les civils.

 13   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Est-ce que vous vous rappelez de la

 14   réaction du général Mladic lorsque, par exemple, cette question aurait été

 15   soulevée, quelle était sa réaction ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Cette question a été soulevée à d'innombrables

 17   reprises, mais normalement il y avait toujours une combinaison soit de

 18   jeter le blâme sur le camp adverse pour leurs actions ou d'établir un lien,

 19   comme dans l'exemple récent que je viens de vous donner, par exemple de

 20   dire que c'est que une -- enfin, d'établir une action des Serbes de Bosnie

 21   en rapport avec quelque chose qui est complètement non relié; par exemple,

 22   quelque chose qui aurait été engendré par eux en raison d'une activité qui

 23   se serait déroulée ailleurs, sur la ligne de front, par exemple, et en

 24   raison de leurs victimes sur la ligne de front. Donc, il s'agissait soit

 25   d'un effort de justifier le comportement ou de nier le comportement ou une

 26   expression de dire que, bon, il n'était pas au courant de ce qui se

 27   passait, ou de dire qu'il allait diligenter une enquête, ou il s'agissait

 28   des fois de minimiser l'incident qui lui aurait été mentionné. Donc,


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  1   normalement, il y avait une combinaison de justification, de déni, et de

  2   dire qu'il allait peut-être mener une enquête.

  3   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Stojanovic, est-ce que vous

  5   êtes prêt à mener un contre-interrogatoire ?

  6   M. STOJANOVIC : [interprétation] Oui, tout à fait, Monsieur le Président.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Banbury, vous serez maintenant

  8   contre-interroger par Me Stojanovic, qui est le conseil de M. Mladic.

  9   Contre-interrogatoire par M. Stojanovic :

 10   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur. J'imagine que vous avez sous les

 11   yeux votre déclaration, n'est-ce pas ?

 12   R.  Oui, tout à fait.

 13   Q.  Je vais essayer de passer en revue certains points de votre

 14   déclaration. Si je vous ai bien compris, lorsque vous avez eu 30 ans, le

 15   lendemain de votre 30e anniversaire, vous êtes arrivé en Bosnie-

 16   Herzégovine; est-ce exact ?

 17   R.  Oui, c'est tout à fait juste.

 18   Q.  Etes-vous d'accord pour dire que vous étiez un homme relativement jeune

 19   et que l'on vous a confié de la sorte une tâche bien difficile ?

 20   R.  Oui, je suis d'accord avec vous, tout à fait.

 21   Q.  Est-ce que l'on vous avait informé de la situation en Bosnie, est-ce

 22   que vous saviez ce qui allait vous attendre, est-ce que vous saviez à quoi

 23   vous deviez vous attendre lorsque vous êtes arrivé en Bosnie-Herzégovine en

 24   avril 1994 ? Aviez-vous été briefé ?

 25   R.  J'ai obtenu -- j'avais une expérience importante, pertinente au sein

 26   des Nations Unies s'agissant des zones de conflit et après le conflit, et

 27   ce, avant mon arrivée en Bosnie, et ceci m'a permis de mener à bien mes

 28   tâches. Concernant maintenant le briefing que j'aurais obtenu sur le


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  1   conflit en Bosnie, effectivement, j'ai eu un briefing complètement habituel

  2   qui se fait toujours et qui est donné, en fait, aux personnels onusiens

  3   lorsque ces derniers arrivent à Zagreb, enfin lorsque ces derniers

  4   arrivent, se présentent sur le terrain, et dans mon cas c'était lorsque je

  5   suis arrivé à Zagreb quelques jours avant de me rendre en Bosnie.

  6   Q.  Au paragraphe 5 de votre déclaration, et Monsieur le Président, je

  7   demanderais que l'on puisse avoir à l'écran P874, et d'y afficher le

  8   paragraphe 5. Vous avez décrit la façon dont vous aviez compris votre rôle

  9   aujourd'hui un peu plus tôt. Toutefois, j'aimerais vous demander de nous

 10   préciser certains points. Par exemple, au paragraphe 5 de la version en

 11   langue anglaise, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, nous

 12   retrouverons ceci à la page suivante.

 13   Et, entre autres, vous y dites que votre mission consistait d'interpréter

 14   le mandat de la FORPRONU et de l'expliquer, de l'expliquer aux collègues

 15   occupant des fonctions militaires, surtout lorsqu'il s'agissait du

 16   commandant chargé de la Bosnie-Herzégovine, le général Michael Rose, et

 17   s'agissant également du général Rupert Smith et de son personnel.

 18   Pourriez-vous expliquer aux Juges, s'il vous plaît, en quoi consistait

 19   cette tâche qui était la vôtre, c'est-à-dire d'expliquer le mandat de la

 20   FORPRONU ?

 21   L'INTERPRÈTE : Cabine française : veuillez interpréter dans la phrase

 22   précédente et garder expliquer.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Pour commencer, il a fallu établir une étude

 24   très sérieuse des résolutions qui avaient été adoptées par le Conseil de

 25   sécurité des Nations Unies concernant le mandat de la FORPRONU; et par la

 26   suite, sur la base de cette étude, et comme je détiens un diplôme en droit

 27   international ceci m'a aidé à comprendre, à analyser les résolutions, et

 28   donc je devais tenter d'expliquer à mes supérieurs du côté civil mais


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  1   également du côté des officiers, des hauts officiers militaires,

  2   d'expliquer quelle était la signification de ces résolutions dans un

  3   contexte donné. Très souvent, l'interprétation était contextuelle, par

  4   exemple, s'agissant de la crise de Gorazde, quelle était notre

  5   responsabilité, ce que nous devions faire, qu'est-ce que nous étions

  6   autorisé de faire. Et donc, c'étaient aux dirigeants, bien sûr, de décider

  7   de ce qu'il fallait faire. Parce que, par exemple, ils n'étaient pas

  8   nécessairement obligés, des fois, de faire quelque chose, mais ils avaient

  9   simplement l'autorisation de le faire. Et donc, c'était principalement de

 10   cette façon-ci que j'ai tenté et j'ai essayé de les aider à comprendre

 11   quelles étaient leurs responsabilités et quelles étaient les compétences

 12   qu'ils avaient s'ils devaient choisir d'avoir recours à cette autorité.

 13   Q.  Mais est-ce que nous sommes d'accord pour dire que le mandat de la

 14   FORPRONU pouvait avoir été interprété de façon différente, et ce, par les

 15   membres de la FORPRONU même ? Est-ce que vous seriez d'accord avec moi ?

 16   R.  Oui, c'est tout à fait exact. Malheureusement, pour des raisons bien

 17   différentes, les résolutions du Conseil de sécurité contenaient un degré

 18   d'ambiguïté qui donnait lieu à de diverses interprétations ou des

 19   interprétations différentes. Et des fois, il s'agissait d'une tâche bien

 20   difficile parce que des fois les militaires voulaient quelque chose de

 21   clair et de définitif, et des fois, nous n'arrivions pas à leur donner des

 22   réponses claires et précises concernant leurs questions.

 23   Q.  Et ces interprétations différentes des mandats de la FORPRONU

 24   s'agissant des situations de crise dans lesquelles, par exemple, vous-même

 25   vous vous êtes trouvé, il s'agissait de quelque chose qui se présentait de

 26   façon constante sur le terrain; ai-je raison là-dessus ?

 27   R.  Oui.

 28   Q.  Merci bien. J'aimerais maintenant que l'on examine ensemble le


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  1   paragraphe 11 de votre déclaration. Il s'agit, bien sûr, du P874.

  2   M. STOJANOVIC : [interprétation] Et Monsieur le Président, Messieurs les

  3   Juges, je demanderais que l'on affiche dans le système du prétoire

  4   électronique un document qui est le 65 ter 10641.

  5   Q.  Au paragraphe 11, Monsieur, vous parlez justement de ce document et

  6   vous donnez une réponse à la suite d'une question posée par le Procureur,

  7   et j'aimerais simplement préciser certains points. Pour commencer, si je

  8   vous ai bien compris, il s'agissait d'un télégramme, et ce télégramme ou ce

  9   document, si vous voulez, a été rédigé par trois auteurs; suis-je en droit

 10   de dire ainsi ?

 11   R.  Oui, c'est exact.

 12   Q.  Il s'agit de Dejan Mihov, David Harland et vous-même, n'est-ce pas ?

 13   R.  Oui, c'est exact.

 14   Q.  Je vous pose cette question parce que je vous demanderais de vous

 15   pencher sur le paragraphe 4 de ce document en B/C/S, et en anglais il

 16   s'agit de la page suivante.

 17   M. STOJANOVIC : [interprétation] Il a été question de ceci au point 11 de

 18   la déclaration du témoin, donc il n'y a pas nécessairement recoupement.

 19   Q.  Premièrement, ce que je voudrais savoir, c'est ceci : pouvez-vous vous

 20   rappeler qui est l'auteur de cette partie-ci du message ou du rapport en

 21   date du 18 avril 1994 ?

 22   R.  Je crois que nous avons participé ensemble à la rédaction de ce

 23   document. Nous avons tous les trois joué un rôle, ce qui veut dire que

 24   certains d'entre nous ont rédigé un certain nombre de paragraphes, d'autres

 25   ont rédigé d'autres paragraphes, et à la suite nous avons passé en revue

 26   l'ensemble du document, ce qui nous a permis de faire des commentaires

 27   également.

 28   Q.  Donc, c'est également votre position liée à ce qui a été cité au


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  1   paragraphe 4 en tant que texte qui doit être remis au conseil, n'est-ce pas

  2   ?

  3   R.  Eh bien, il est probable que l'un d'entre nous ait rédigé le paragraphe

  4   4, mais les trois, lorsque nous avons rédigé l'ensemble du document, nous

  5   avons eu l'occasion également de passer en revue ce paragraphe-là.

  6   Q.  Et dans ce paragraphe, on peut lire, entre autres, qu'en cas d'un

  7   départ massif, de personnes déplacées de Gorazde à Sarajevo et dans

  8   d'autres régions placées sous le contrôle du gouvernement de Bosnie-

  9   Herzégovine, engendrerait une plus forte radicalisation du gouvernement de

 10   Bosnie-Herzégovine et probablement une continuation du conflit. Et vous

 11   avez dit ce que vous pensez là-dessus, et en reprenant ce que vous avez

 12   déclaré au paragraphe 11 de votre déclaration, je souhaite vous poser la

 13   question suivante : quelles sont ces expériences qui sont les vôtres qui

 14   vous ont permis de conclure que ceci représenterait l'un des plus grands

 15   obstacles à la paix, comme vous l'avez déclaré au paragraphe 4 ?

 16   R.  Je pense qu'il n'est pas très probable que je sois l'auteur du

 17   paragraphe 4. Je pense que c'est sûrement l'un de mes deux collègues.

 18   Q.  Et si je vous disais que c'était M. Harland qui en est l'auteur, est-ce

 19   que vous seriez d'accord avec moi ?

 20   R.  Je ne sais pas lequel de nous trois a rédigé ce paragraphe. Je suis

 21   vraiment désolé, je ne me souviens plus. Mais je pense que c'est fort

 22   probablement M. Mihov, j'aurais plutôt pensé ceci, mais si vous me dites

 23   que c'est M. Harland je crois qu'il est tout à fait possible que ce soit

 24   lui, effectivement.

 25   Q.  Très bien. Ce n'est pas une affirmation, mais je vous pose cette

 26   question pour une raison bien simple, est-ce que vous vous diriez que je

 27   serais en droit de dire que vous, au point 11 de votre déclaration, en

 28   fait, vous faites un commentaire sur quelque chose que quelqu'un d'autre a


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  1   dit, c'est-à-dire que c'est quelque chose que l'un de vous trois ait

  2   rédigé; est-ce que c'est exact ?

  3   R.  Excusez-moi, je ne comprends pas la question.

  4   Q.  Je vais reformuler la question. Je vous demande pardon. Bien. Alors,

  5   vous faites un commentaire ici et vous dites ce que l'on a voulu dire au

  6   paragraphe 4, n'est-ce pas. Au point 11 de votre déclaration, maintenant je

  7   souhaite seulement vous demander de me confirmer qu'en réalité vous faites

  8   un commentaire sur quelque chose que quelqu'un d'autre ait rédigé et que

  9   c'est une interprétation qui est la vôtre d'un texte qui appartient à

 10   quelqu'un d'autre. Suis-je en droit de dire ceci ?

 11   R.  Oui, vous avez tout à fait raison.

 12   Q.  Alors, étant donné que vous êtes en train d'interpréter ceci, qu'est-ce

 13   que dans ce paragraphe représente la position de vous trois lorsque vous

 14   dites que cette situation et l'influence des unités militaires de l'ABiH,

 15   composées de personnes déplacées de Bosnie orientale, représentent l'un des

 16   obstacles principaux de la paix ?

 17   R.  Je peux seulement parler pour moi-même et je ne peux pas me prononcer

 18   au nom de mes collègues, mais si je comprends bien, d'après moi, nous

 19   avions évalué la situation comme ceci : là où il y a un déplacement de la

 20   population et lorsqu'il y a déplacement violent de personnes, d'incendies

 21   des maisons, de terribles crimes parfois commis à l'encontre des femmes,

 22   des deux côtés, que ceci, de façon tout à fait naturelle, ferait en sorte

 23   que les survivants, les familles seraient hostiles envers les personnes

 24   ayant commis ces actes et s'opposeraient très profondément à tout type de

 25   réconciliation avec les auteurs et cherchant sinon pas une vengeance mais

 26   au moins une victoire sur le camp adverse, et donc ces personnes seraient

 27   moins enclines à souhaiter établir des compromis. Et donc, je pense que les

 28   communautés, les personnes, les unités composées de personnes qui sont des


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  1   personnes déplacées et qui ont été déplacées par le biais de la violence en

  2   Bosnie orientale, ces personnes auraient moins tendance à souhaiter arriver

  3   à des compromis avec le parti qui, selon elles, est le responsable de ces

  4   actes plutôt que d'établir des compromis avec des personnes qui n'étaient

  5   pas nécessairement responsables de ces violences.

  6   Q.  Je vous pose justement cette question parce que j'aimerais savoir si

  7   d'après vous ou si votre expérience lors de votre séjour en Bosnie-

  8   Herzégovine était les deux parties…

  9   [La Chambre de première instance se concerte] 

 10   M. STOJANOVIC : [interprétation] Puis-je continuer, Monsieur le Président ?

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourriez-vous recommencer votre

 12   question. Vous avez dit : "Sur la base de votre expérience obtenue au cours

 13   de votre séjour en Bosnie-Herzégovine…" et par la suite vous avez fait une

 14   pause. Alors, vous pouvez continuer.

 15   M. STOJANOVIC : [interprétation]

 16   Q.  Très bien. Est-ce que vous diriez que, par exemple, cette matrice de

 17   vengeance en raison de sévices subis par des parties serait quelque chose

 18   qui pourrait avoir une incidence sur les deux parties belligérantes ?

 19   R.  De manière générale, c'est dans la nature humaine, dirais-je, et pour

 20   ce qui est plus concrètement de la Bosnie et de ces trois parties en

 21   présence, je pense que c'est dans la nature humaine simplement que lorsque

 22   vous voyez que quelque chose d'atroce a été fait à un membre de votre

 23   famille, à votre voisin, cela vous met en colère, et vous exigez la

 24   justice, et d'une certaine manière vous voulez vous venger. Vous voulez que

 25   l'on demande à ceux qui l'ont commis d'être tenus responsables pour cela,

 26   et je pense que c'est une réaction humaine qui se produit partout, de

 27   quelle que personne, de quelle unité militaire qu'il s'agisse, et que cela

 28   peut s'appliquer à toutes les parties en présence dans le conflit en


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  1   Bosnie.

  2   Q.  Alors, prenons maintenant le paragraphe 6 de ce document, où il est dit

  3   :

  4   "La situation est toujours très instable. L'infanterie musulmane, qui a pu

  5   quitter Sarajevo grâce à la zone d'exclusion totale, déstabilise maintenant

  6   toute la ligne de confrontation à l'ouest et sur le plateau de Nisici…"

  7   Alors, j'aimerais savoir ce que vous voulez dire par là, cette "infanterie

  8   musulmane, musulmane de Bosnie qui est maintenant libérée de Sarajevo" ?

  9   R.  Ce n'est pas nécessairement moi qui suis l'auteur de ce paragraphe,

 10   mais ce que cela signifie, me semble-t-il, c'est que parce qu'il y a eu

 11   effectivement cet accord, accord sous l'égide du Conseil de sécurité et des

 12   Nations Unies sur la mise en œuvre d'une zone d'exclusion totale autour de

 13   Sarajevo, que cela a réduit l'intensité du conflit dans la zone, et que la

 14   conséquence en est que les parties ont pu redéployer leurs effectifs et

 15   leurs moyens militaires qui avaient précédemment été concentrés dans la

 16   zone de Sarajevo, ils ont pu les redéployer vers d'autres emplacements.

 17   Q.  Très bien. Alors, prenons maintenant le paragraphe 10 ici, où il est

 18   dit :

 19   "Le Conseil doit préciser le plus rapidement possible l'idée des zones de

 20   sécurité…"

 21   Alors, est-ce que vous pourriez dire aux Juges de la Chambre si à un moment

 22   quelconque la mission de la FORPRONU en Bosnie-Herzégovine s'est vu

 23   expliquer par le Conseil de manière officielle l'idée des zones de

 24   sécurité, ou bien est-ce que cette question, est-ce que les différences

 25   d'interprétation de cette notion, de cette idée reste, en fait, jusqu'à la

 26   fin de votre mission en Bosnie-Herzégovine ?

 27   R.  La seule explication ou le seul éclaircissement qui a été reçu par la

 28   FORPRONU de la part du Conseil de sécurité sur la signification des zones


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  1   de sécurité, c'était dans ce qui figurait dans les résolutions relatives à

  2   cela, et plus précisément les Résolutions 824 et 836. Donc, nous n'avons

  3   pas reçu d'éclaircissement là-dessus de la part du Conseil de sécurité et

  4   la FORPRONU a dû interpréter les résolutions et ses attributions, toute

  5   seule en fait.

  6   Q.  Plus concrètement, je voudrais savoir la chose suivante : aurais-je

  7   raison de dire que ces différences d'approche, ces différences

  8   d'interprétation de l'idée même des zones de sécurité ne répondent pas à la

  9   question qui est de savoir si la FORPRONU "doit tolérer le fait que l'armée

 10   bosno-musulmane s'en sert à des fins militaires" ?

 11   R.  Les deux principales résolutions du Conseil de sécurité qui s'occupent

 12   des zones de sécurité n'imposent pas cette obligation aux forces

 13   gouvernementales de se retirer des zones de sécurité. La Résolution 836

 14   expressément exige de la part des Bosno-Serbes de retirer leurs forces des

 15   zones de sécurité à une distance sûre des zones de sécurité. Et par cette

 16   obligation, donc on s'adresse expressément aux forces bosno-serbes tout en

 17   ne disant rien sur les obligations des forces du gouvernement de Sarajevo.

 18   Donc, c'est ainsi que j'ai pu en conclure, et je n'étais pas le seul, que

 19   les forces bosno-musulmanes n'étaient pas tenues de retirer leurs forces

 20   militaires des zones de sécurité.

 21   Q.  Mais seriez-vous d'accord avec moi pour dire que d'autres

 22   interprétations étaient en cours également, à savoir que l'armée bosno-

 23   musulmane dans ces enclaves, dans ces zones de sécurité, aurait dû être

 24   désarmée et que la FORPRONU aurait dû s'en charger dans le cadre de son

 25   mandat ?

 26   R.  Les points de vue différaient au sein de la FORPRONU et ailleurs sur le

 27   rôle qui devait être joué par les militaires de BiH, et s'ils pouvaient ou

 28   non être présents dans les zones de sécurité. Pour la plupart, ces


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  1   différences de vue ne se basaient pas sur les différentes interprétations

  2   des résolutions du Conseil de sécurité et des obligations qu'elles

  3   entraînaient; plutôt, les différences de point de vue résultaient de

  4   l'appréciation qui était celle de certains, à savoir que si les forces du

  5   gouvernement de Sarajevo restaient présentes dans les zones de sécurité,

  6   cela causait des problèmes, et constituaient un facteur de déstabilisation

  7   et qu'il serait mieux que ces forces, soit ne restent pas là soit ne

  8   déploient aucune activité dans les zones de sécurité. Mais c'était plutôt

  9   une appréciation opérationnelle, et non pas une interprétation de droit.

 10   Q.  Si on admettait que l'ABiH n'était pas tenue de démilitariser les zones

 11   de sécurité, qu'elle pouvait rester sur place, garder ses armes, voire

 12   mener des attaques à partir des zones de sécurité, est-ce que d'après

 13   l'interprétation que vous venez de nous donner cela signifie que l'armée

 14   des Serbes de Bosnie ne serait pas en droit de s'opposer à ce type

 15   d'activités puisqu'elle serait tenue de respecter les termes de la

 16   Résolution 836 ?

 17   R.  Il me semble que cela ressort clairement de la Résolution 824 ainsi que

 18   de la Résolution 836, qu'il n'y a là aucune ambiguïté sur le plan des

 19   obligations qui étaient celles de l'armée des Serbes de Bosnie ou de toute

 20   autre force, à savoir de ne pas attaquer les six zones de sécurité. Il n'y

 21   avait pas de disposition qui leur aurait permis d'attaquer ces zones.

 22   Q.  Alors, êtes-vous d'accord avec moi pour affirmer que ces différences de

 23   point de vue n'ont cessé de causer des problèmes au cours des pourparlers

 24   qui ont eu lieu avec les représentants de l'armée bosno-serbe ?

 25   R.  Oui.

 26   Q.  Très bien. Merci. Et pour finir, je vais vous inviter à regarder le

 27   paragraphe 11 de ce document.

 28   M. STOJANOVIC : [interprétation] Page suivante en B/C/S, dernier


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  1   paragraphe.

  2   Q.  Où il est dit comme suit :

  3   "Le mandat qui a été confié à la FORPRONU l'a forcée à entrer dans un

  4   conflit de faible intensité l'opposant aux Serbes…"

  5   Et il est dit par la suite :

  6   "Notre mandat doit être tel qu'il nous permettra de coopérer avec les

  7   Serbes, ou bien tel qu'il nous permettra d'avoir la force d'imposer notre

  8   volonté. Il ne peut pas être - comme il l'est à l'heure actuelle - à mi-

  9   chemin entre les deux."

 10   Et c'est ce que vous abordez dans votre déclaration au paragraphe 12. Je ne

 11   voudrais pas me répéter, mais je vais juste vous demander brièvement : à un

 12   moment quelconque pendant que vous étiez en Bosnie-Herzégovine - et lorsque

 13   je vous dis à vous, je ne pense pas à vous personnellement, Monsieur - est-

 14   ce que vous avez reçu une autre présentation ou interprétation du mandat de

 15   la FORPRONU par rapport au moment où ce télégramme a été rédigé ?

 16   R.  Non, pas pour ce qui est de la substance des choses. Il y a eu quelques

 17   attributions supplémentaires qui ont été confiées à la FORPRONU, mais au

 18   fond, le mandat n'a jamais été modifié en profondeur. Donc, cette ambiguïté

 19   n'a pas été levée.

 20   Q.  Pouvons-nous être d'accord sur le fait que tout le temps cela a en fait

 21   entraîné en conflit de faible intensité, latent, avec les Serbes, comme

 22   vous le dites ici ?

 23   R.  Je ne pense pas que la FORPRONU ait été opposée aux Bosno-Serbes de

 24   manière constante dans le cadre d'un conflit, certainement pas

 25   militairement. Cela ne s'est produit que très brièvement, mais pour la

 26   plupart, nous n'étions pas en conflit militaire quel qu'il soit contre les

 27   Serbes, mis à part ces périodes très, très brèves. Certes, il y a eu des

 28   tensions politiques entre la FORPRONU et les Bosno-Serbes tout au long de


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  1   la période, ça oui.

  2   Q.  Très bien. Alors, pour terminer, juste une question que m'impose

  3   pratiquement votre réponse, si la traduction que j'ai reçue est bonne. Vous

  4   m'avez dit à certains moments la FORPRONU s'est trouvée engager dans un

  5   conflit contre les Serbes. Donc, nous sommes bien d'accord pour dire qu'il

  6   y a eu des moments où l'intensité de ce conflit a été très grande et que

  7   des mesures très énergiques ont dû être employées par l'OTAN à ces moments-

  8   là ?

  9   R.  Oui, sauf que je limiterais cela, lorsque vous dites des mesures très

 10   énergiques de l'OTAN, effectivement elles ont été utilisées. Quant à savoir

 11   si elles étaient nécessaires ou non, ça c'est une question à voir. On peut

 12   avoir des opinions différentes là-dessus.

 13   Q.  J'aimerais savoir si vous avez le sentiment que ce conflit a été une

 14   situation où l'OTAN est devenue partie belligérante opposée à l'armée des

 15   Serbes de Bosnie ? Vous en parlez dans votre déclaration, et je vais

 16   revenir à cela.

 17   R.  Non, absolument pas.

 18   Q.  Très bien.

 19   M. STOJANOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je vais demander le

 20   versement de ce document. Il figure sur la liste 65 ter.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière.

 22   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Le document 10641 se voit attribuer la

 23   cote D186.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D186 est versé au dossier.

 25   M. STOJANOVIC : [interprétation] Je vous remercie.

 26   Q.  Je vais reparler des paragraphes 18 et 19 de votre déclaration, mais

 27   pour l'instant je voudrais que l'on aborde le paragraphe 24. Un document

 28   vous a été présenté ici.


Page 8240

  1   M. STOJANOVIC : [interprétation] Je vais demander qu'on l'affiche dans le

  2   système du prétoire électronique, Monsieur le Président. 09738 de la liste

  3   65 ter.

  4   Q.  Monsieur, vous parlez de ce document au paragraphe 24 de votre

  5   déclaration, et je me permets de rappeler que dans l'affaire Karadzic ce

  6   document a fait l'objet également de l'interrogatoire. Et si je vous ai

  7   rafraîchi votre mémoire --

  8   M. STOJANOVIC : [interprétation] Je voudrais maintenant demander

  9   l'affichage du document 1D00708 dans le e-court, s'il vous plaît.

 10   Q.  Monsieur, vous vous souviendrez peut-être, dans l'affaire Karadzic vous

 11   avez déjà eu l'occasion de voir ce document. Dites-moi si vous avez besoin

 12   d'un peu de temps pour en prendre connaissance. Très brièvement, je vais

 13   vous poser quelques questions qui portent sur l'interprétation du document

 14   que nous venons de voir à l'instant. Donc, nous avons ici un document qui a

 15   été envoyé par le poste de commandement avancé du VKRS où, au paragraphe 1,

 16   il est dit :

 17   "Le 27 avril…"

 18   M. STOJANOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, il serait peut-être

 19   utile de voir qui est l'auteur de ce document. La page suivante, s'il vous

 20   plaît, puis nous reviendrons.

 21   Q.  Donc, nous avons le général Milan Gvero qui signe ce document. Donc, le

 22   27 avril 1994, lors d'une réunion conjointe réunissant des représentants du

 23   VKRS - et je vais vous demander de nous aider, si vous pouvez, sur la

 24   signification de cette abréviation - avec les représentants des Nations

 25   Unies, à savoir M. De Mello et le général Soubirou, il a été constaté que

 26   l'accord portant sur le cessez-le-feu de Gorazde a été passé, un accord a

 27   été passé entre M. Akashi et le président Karadzic, et il a été mis en

 28   œuvre entièrement conformément à ce qui a été convenu et conformément à la


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  1   Résolution du Conseil de sécurité 913.

  2   "Il est convenu que les militaires de la VRS dans les secteurs prévus

  3   ci-dessus," donc de 3 kilomètres, "porteront désormais des vêtements civils

  4   car il s'agit de personnes du cru qui n'ont pas d'autres vêtements puisque

  5   leur village a été brûlé par les Musulmans. Un accord a été obtenu

  6   également sur le fait qu'en partie les policiers porteront des vêtements

  7   civils désormais et que tous les problèmes relatifs à la FORPRONU seront

  8   résolus par voie de concertation."

  9   Question : est-ce que vous avez eu l'occasion de voir ce document ?

 10   R.  Oui, il me semble que oui.

 11   Q.  Et l'abréviation VKRS, est-ce que cela signifie le commandement Suprême

 12   de la Republika Srpska ?

 13   R.  Oui, c'est ainsi que je l'entends.

 14   Q.  Et le général Milan Gvero écrit au nom du commandement Suprême à ce

 15   moment-là lorsqu'il informe les unités qui sont mentionnées ici en tant que

 16   destinataires ?

 17   R.  Je ne suis pas du tout un expert sur le plan des transmissions et des

 18   communications au sein de l'armée des Bosno-Serbes. Oui, c'est ce que l'on

 19   peut penser de ce document, mais je ne peux pas vous le confirmer.

 20   Q.  Merci. Mais ce qui est le plus important ici : à un moment donné, avez-

 21   vous appris que lors de cette réunion entre M. De Mello, le général

 22   Soubirou, M. Akashi et M. Karadzic, est-ce que cet accord a été passé que

 23   des soldats de la VRS allaient se changer en vêtements civils comme cela

 24   figure ici dans les secteurs mentionnés ?

 25   R.  J'ai accompagné M. De Mello de Sarajevo à Gorazde après que cet accord

 26   a été obtenu entre M. Akashi et M. Karadzic. M. De Mello était à la tête

 27   des affaires civiles de la FORPRONU, il était basé à Zagreb, et il a été

 28   envoyé par M. Akashi pour aider à résoudre la crise de Gorazde. M. De Mello


Page 8242

  1   était un responsable haut placé et il était à la tête du premier convoi de

  2   la FORPRONU de Sarajevo à Gorazde suite à cet accord. Et donc, j'étais

  3   présent sur place à ce moment-là et il y avait la question des forces

  4   serbes qui restaient dans la zone d'exclusion totale de 3 kilomètres, et

  5   c'était une cause de désaccord entre la FORPRONU et les responsables bosno-

  6   serbes, et du côté de la FORPRONU, ce que nous avions compris également et

  7   ce que nous avions accepté également, c'était que grâce à cet accord entre

  8   le Dr Karadzic et M. Akashi, l'ensemble des forces serbes était tenu de

  9   quitter cette zone d'exclusion totale de 3 kilomètres. Donc, s'il y avait

 10   des individus qui étaient du cru, normalement de la rive droite de la Drina

 11   surtout, donc s'il y avait des personnes qui avaient été enrôlées dans

 12   l'armée ou dans la police et qui souhaitaient rester sur place en tant que

 13   civils, eh bien, à ce moment-là ils étaient libres de le faire dans la

 14   mesure où ils abandonnaient leur uniforme militaire ou leur uniforme de la

 15   police et ils ne portaient plus leur arme. Donc, ils n'avaient pas le droit

 16   de rester sur place en tant que membres d'unités militaires ou de la police

 17   simplement en changeant de vêtements. Donc, je pense qu'il y avait un

 18   désaccord entre la FORPRONU et les Serbes de Bosnie sur ce point-là.

 19   Q.  En conviendriez-vous avec moi, en connaissant la manière dont était

 20   structurée l'armée bosno-serbe, que ces soldats normalement étaient

 21   originaires de la zone de Gorazde ?

 22   R.  Je ne peux pas vous répondre là-dessus puisque je ne suis pas au

 23   courant de cela. Je pense que très probablement, pour certains d'entre eux,

 24   c'était le cas, mais je ne peux pas vous le confirmer quant à savoir si

 25   l'ensemble relevait de cette catégorie-là.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stojanovic, vous regardez

 27   l'heure. Est-ce que vous voulez poser votre dernière question ou est-ce que

 28   vous pensez que le moment de la pause est venu ?


Page 8243

  1   M. STOJANOVIC : [interprétation] Un seul document me reste, Monsieur le

  2   Président, avec votre autorisation, et j'en aurai terminé. Ce sera très

  3   bref.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Allez-y, je vous en prie.

  5   M. STOJANOVIC : [interprétation] Je demande l'affichage du document

  6   1D00717, s'il vous plaît, dans le prétoire électronique. 717.

  7   Q.  Vous voyez ce document qui s'affiche devant nous. Monsieur, je ne sais

  8   pas si vous avez déjà eu l'occasion de voir ce document. Il porte la date

  9   du 16 avril 1994, donc cela se situe au moment de la crise de Gorazde. Il

 10   émane de l'état-major principal de l'armée de la Republika Srpska. Il est

 11   signé par le général Ratko Mladic et il s'intitule : "Traitement des civils

 12   et des prisonniers de guerre de Gorazde". Où il est dit, entre autres, au

 13   point 1 :

 14   "J'ordonne de la manière la plus rigoureuse tout traitement inhumain,

 15   harcèlement ou liquidation physique de la population civile, des

 16   prisonniers de guerre et des membres d'organisations internationales."

 17   Au point 2 :

 18   "Tous les commandements et tous les membres de la VRS sont tenus d'isoler

 19   et de protéger la population civile de Gorazde en les réinstallant à des

 20   endroits qui s'y prêtent."

 21   Au point 5 :

 22   "On interdit toute destruction de biens meubles et immeubles sur le

 23   territoire libéré par la voie d'incendie ou de démolition."

 24   Donc, j'aimerais savoir si vous savez que dans Gorazde et aux alentours,

 25   pendant ces moments de crise, cet ordre du général Mladic a été respecté ?

 26   Vous souvenez-vous d'un geste quelconque qui aurait été contraire aux

 27   termes de cet ordre ?

 28   R.  Est-ce que je peux avoir juste quelques instants pour lire le texte. Il


Page 8244

  1   me semble, en fait, que je n'ai jamais eu l'occasion de voir ce texte

  2   précédemment.

  3   D'après ce que j'ai vu sur place, cet ordre n'a pas été entièrement exécuté

  4   par les unités militaires bosno-serbes à Gorazde et dans les alentours à ce

  5   moment-là.

  6   Q.  Alors, c'est après la pause que je vais vous interroger sur la partie

  7   qui constitue la violation de cet ordre.

  8   M. STOJANOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, nous pouvons

  9   prendre une pause.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Madame la Greffière -- nous avons

 11   déjà eu un document précédemment à l'écran, et en fait, vous êtes passé

 12   tout de suite à l'autre. Alors, est-ce que pendant la pause vous voudriez

 13   bien, s'il vous plaît, voir exactement quels sont les numéros 65 ter pour

 14   lesquels vous souhaitez demander le versement.

 15   Pour l'instant, occupons-nous de celui-ci.

 16   Madame la Greffière d'audience.

 17   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Le document D717 devient la pièce D187.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D187 est versé au dossier. Je voudrais

 19   que l'on fasse une pause maintenant. Monsieur Stojanovic, est-ce que vous

 20   pouvez nous passer une feuille avec les numéros des documents dont vous

 21   souhaitez demander le versement, cela nous permettrait d'avancer beaucoup

 22   plus rapidement. Le témoin peut se faire raccompagner par Mme l'Huissière.

 23   [Le témoin quitte la barre]

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons faire une pause, et

 25   nous reprendrons à 12 heures 20.

 26   --- L'audience est suspendue à 12 heures 01.

 27   --- L'audience est reprise à 12 heures 22.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Peut-on faire venir le témoin dans la


Page 8245

  1   salle d'audience.

  2   Monsieur Groome.

  3   M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, juste une information

  4   pour les Juges de la Chambre, nous en avons déjà parlé plus tôt dans la

  5   semaine, il s'agit du temps supplémentaire nécessaire pour terminer la

  6   déposition du témoin. J'ai parlé avec Me Stojanovic, mais apparemment il

  7   n'y aura pas besoin d'octroyer du temps supplémentaire. Me Stojanovic

  8   assure pouvoir en terminer dans l'horaire normal.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Hier déjà, les Juges de la Chambre ont

 10   considéré qu'il n'y aurait probablement pas lieu de prolonger l'audience

 11   d'aujourd'hui. Je crois que nous serons tout à fait dans les temps pour

 12   conclure la déposition de ce témoin.

 13   [Le témoin vient à la barre]

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître, veuillez poursuivre.

 15   M. STOJANOVIC : [interprétation] J'ai oublié de vous demander le

 16   versement au dossier du document daté du 27 avril 1994, que j'ai présenté

 17   au témoin. Il porte le numéro 1D708.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière.

 19   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] 1D708 reçoit la cote D188.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D188 est versé au dossier.

 21   Y a-t-il autre chose, Maître ?

 22   M. STOJANOVIC : [interprétation] Non, Monsieur le Président. Mais il y en

 23   aura d'autres.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Qu'en est-il du numéro 9738 de la liste

 25   65 ter, vous n'en demandez pas le versement ?

 26   M. STOJANOVIC : [interprétation] En effet.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien.

 28   Veuillez poursuivre.


Page 8246

  1   M. STOJANOVIC : [interprétation] Merci.

  2   Q.  Monsieur le Témoin, si vous vous en souvenez, nous en sommes restés à

  3   votre réponse selon vous, l'ordre du général Mladic du 16 avril 1994 n'a

  4   pas été respecté de façon systématique. Alors, est-ce que vous pourriez

  5   vous rappeler en quoi cet ordre n'a pas été totalement respecté; et si oui,

  6   où et par qui ?

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que nous pourrions avoir

  8   l'affichage à l'écran de nouveau de ce document pour pouvoir suivre.

  9   M. STOJANOVIC : [interprétation] 1D717.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est à l'écran.

 11   M. STOJANOVIC : [interprétation] Il a déjà reçu une cote D187, qui est donc

 12   le numéro sous lequel il a été versé.

 13   Q.  Allez-y, Monsieur le Témoin.

 14   R.  Eh bien, cet ordre du 16 avril 1994 intervient à un moment où nous nous

 15   trouvons en plein milieu de la crise, si bien qu'il ne s'applique pas, il

 16   ne saurait s'appliquer aux événements antérieurs au 16 avril 1994. Il y

 17   avait beaucoup de problèmes avant cette date. Ceci dit, il y en a eu

 18   également beaucoup après, je crois qu'il y a eu des destructions

 19   importantes de biens. Par exemple, lorsque j'ai accompagné ce premier

 20   convoi conduit par M. De Mello, c'était un convoi de la FORPRONU qui

 21   cheminait de Sarajevo à Gorazde, et lorsque très tard dans la nuit nous

 22   nous sommes rapprochés de Gorazde, il était près de minuit, j'ai vu de

 23   nombreuses maisons incendiées, qui brûlaient toujours. Alors, il est

 24   possible que certaines de ces maisons aient été détruites précédemment,

 25   plus tôt. Mais, en tout cas, celles qui étaient encore en flammes venaient

 26   juste d'être détruites. Il y avait de nombreuses carcasses d'animaux. Donc,

 27   je crois qu'après le 16 avril, à Gorazde et autour de Gorazde, il y a eu de

 28   nombreuses destructions de biens. Il y a aussi eu un soldat de la FORPRONU


Page 8247

  1   qui a été tué dans le secteur de Gorazde. Le traitement réservé aux civils

  2   après le 16 avril, eh bien, était tel que l'aide humanitaire acheminé par

  3   les Nations Unies, l'aide humanitaire approprié ne passait certainement pas

  4   en raison des entraves imposées par l'armée des Serbes de Bosnie. Je crois

  5   que tant dans sa forme que dans son esprit, cet ordre a connu de nombreuses

  6   violations importantes après le 16 avril, violations du fait de la VRS, des

  7   forces serbes de Bosnie à Gorazde et autour de Gorazde.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous pourriez nous parler

  9   brièvement de certaines d'entre-elles. Alors, la première interdiction qui

 10   figure ici est celle de traitement cruel, ainsi que de la destruction

 11   physique, et des abus infligés, de l'abus de la population civile. Est-ce

 12   que vous avez observé quelles que violations que ce soient de cet ordre qui

 13   se rapporterait à ceci ? Est-ce que ceci faisait déjà partie de votre

 14   première réponse ?

 15   LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, la première partie comprenait toute

 16   une série de concepts différents : le traitement cruel, la destruction

 17   physique de la population civile, les mauvais traitements, les prisonniers

 18   de guerre, les membres d'organisations internationales, mais alors si on

 19   essaie d'interpréter aussi littéralement que possible ce qui est écrit :

 20   destruction physique de la population civile, je ne crois pas, enfin

 21   personnellement, je n'ai pas -- en dehors du fait que la population de

 22   Gorazde était dans son ensemble captive, prisonnière, avec un accès très

 23   limité à l'aide humanitaire, et en proie à une attaque militaire visant

 24   l'enclave, qui comprenait la destruction, le bombardement de la zone ayant

 25   entraîné des victimes civiles, je crois que c'est tout ce que je pourrais

 26   dire dans cette première partie.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Deuxième catégorie, la réparation et la

 28   protection de la population civile ainsi que son transfert à destination de


Page 8248

  1   lieux plus appropriés. Est-ce que ceci a bien été fait et est-ce que vous

  2   savez sur quoi se fondait cet ordre ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] La population civile n'a pas été séparée, bien

  4   que les autorités ou les forces armées bosno-serbes auraient pu séparer la

  5   population civile de Gorazde des forces armées. C'était une petite enclave;

  6   tout était mélangé. Mais il n'y avait pas de transferts de population, en

  7   tout cas pas dont j'ai eu connaissance à l'époque. Et je ne sais pas

  8   exactement quelle intention sous-jacente correspond à cette partie de

  9   l'ordre figurant au paragraphe numéro 2. Il y aurait plusieurs

 10   possibilités.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, les mauvais traitements infligés

 12   aux prisonniers de guerre, et cetera, est-ce que vous avez des éléments à

 13   ce sujet.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Non.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et quatrièmement :

 16   "Tous les membres des organisations internationales devront être protégés

 17   sur le territoire de la Republika Srpska et logés et traités conformément à

 18   leur mandat."

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, concernant ces deux commentaires,

 20   Monsieur le Président, tout d'abord il y a eu le soldat de la FORPRONU qui

 21   a été tué. Et si l'on laisse de côté l'appareil de l'OTAN qui a été abattu,

 22   le meurtre de ce soldat de la FORPRONU est un exemple particulier de non-

 23   respect de cet ordre. De façon plus générale concernant la dernière partie

 24   de ce paragraphe, à savoir "les traiter et leur offrir une sécurité

 25   conformément à leur mandat," eh bien, certainement ils ne se sont pas vus

 26   accorder le traitement dont nous avions besoin conformément à notre mandat,

 27   c'est-à-dire la liberté de circulation, la capacité d'opérer et de circuler

 28   librement à destination de Gorazde et à l'intérieur du secteur de Gorazde.


Page 8249

  1   Nous ne pouvions pas déplacer nos personnels librement depuis Sarajevo,

  2   disons, vers Gorazde. Et une fois arrivés sur place, nous ne pouvions pas

  3   circuler librement, nous ne pouvions pas livrer l'aide humanitaire qui

  4   était nécessaire. Donc, je crois que très clairement cette partie de

  5   l'ordre n'a pas été appliquée.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Eh bien, peut-être que l'ordre a été

  7   appliqué mais pas jusqu'au point où on aurait pu affirmer que cela a été

  8   fait en conformité avec votre mandat ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. C'est ce que je

 10   voulais dire lorsque je parlais de la dernière partie de ce paragraphe.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Des commentaires concernant la

 12   destruction de biens meubles et immeubles ?

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, rien de plus que ce que j'ai déjà dit.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Quoi que ce soit, peut-être, concernant

 15   les moyens techniques confisqués ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je n'ai aucune connaissance personnelle

 17   de ceci.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.

 19   A vous, Maître.

 20   M. STOJANOVIC : [interprétation] Merci.

 21   Q.  Monsieur le Témoin, à votre connaissance, cet avion, ce Sea Harrier, a-

 22   t-il été détruit avant que cet ordre ne soit émis par le général Mladic ou

 23   après ?

 24   R.  Je ne sais pas exactement, parce que c'était vraiment à la même époque.

 25   Je ne sais pas, excusez-moi. Peut-être était-ce avant, mais je ne sais pas.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pouvez vous asseoir, Monsieur

 27   Mladic. Si vous avez besoin de procéder à une consultation urgente, vous

 28   avez une demi-minute et vous devez parler à voix basse; si cela n'est pas


Page 8250

  1   suffisant, vous devrez attendre la pause suivante.

  2   [Le conseil de la Défense et l'accusé se concertent]

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez continuer, Maître.

  4   Et Monsieur Mladic, veuillez vous asseoir.

  5   M. STOJANOVIC : [interprétation] Merci.

  6   Q.  Monsieur le Témoin, je ne vais plus vous poser que quelques questions

  7   au sujet de cette crise de Gorazde. Est-ce que vous serez d'accord avec moi

  8   pour dire qu'avant ces affrontements à Gorazde il y a eu de nombreux

  9   incidents à la source desquels se trouvaient des actions à l'intérieur de

 10   la zone protégée de Gorazde, actions qui avaient été lancées contre des

 11   villages serbes environnants et qui étaient des provocations ?

 12   R.  Comme je l'ai dit précédemment, je ne suis arrivé que le 9 avril, dans

 13   la mesure où ces incidents s'étaient produits, ils s'étaient probablement

 14   déjà produits, et donc, je n'ai pas personnellement connaissance de cela.

 15   J'ai entendu des plaintes de la part des autorités bosno-serbes, il y avait

 16   des rapports au sujet de tels incidents, mais je n'ai pas directement

 17   connaissance de cela. Les rapports de la FORPRONU concernant de tels

 18   incidents se penchaient sur des incidents survenus avant mon arrivée; et

 19   d'ailleurs, notre capacité à rendre compte de tels incidents était elle-

 20   même limitée en raison des restrictions imposées à notre liberté de

 21   circulation.

 22   Q.  Avez-vous été en mesure de vous familiariser personnellement et

 23   directement avec le ce que contenait l'entrepôt de la JNA qui se trouvait

 24   en banlieue de Gorazde, et notamment d'apprendre tout ce qui pouvait s'y

 25   trouver en terme de ressources logistiques et autres ? Est-ce que vous avez

 26   quel que élément que ce soit à ce sujet ?

 27   R.  Non.

 28   Q.  Est-il exact que le pilote de l'avion abattu était Britannique ?


Page 8251

  1   R.  Oui, absolument, c'est ce que j'en sais en tout cas. C'était un

  2   appareil britannique piloté par un Britannique.

  3   Q.  Est-ce que le membre de la FORPRONU qui a été tué, ce Britannique, a

  4   été tué dans le cadre d'une mission de la FORPRONU ou bien est-ce qu'il

  5   était en fait en train de guider des appareils de l'OTAN ?

  6   R.  Si ma mémoire est bonne, il y a eu deux officiers britanniques tués,

  7   deux membres du personnel britannique tués à Gorazde. Ils étaient tous les

  8   deux membres de la FORPRONU.

  9   Q.  Mais est-ce qu'ils étaient en mission de guidage des appareils ?

 10   R.  Pas que je le sache. Ceci dit, si tel avait été leur mission, il aurait

 11   été assez probable que je n'en sois pas au courant à cause de la nature

 12   même de ce type d'opérations militaires. Mais je ne sais pas, en tout cas.

 13   Q.  Merci. Nous avons déjà interrogé des généraux qui ont déposé avant

 14   vous. Est-ce que vous serez d'accord avec moi pour dire qu'on n'a jamais

 15   réussi à déterminer d'où venaient les balles qui ont tué ces membres de la

 16   FORPRONU et que ceci est toujours resté controversé ?

 17   R.  Eh bien, selon moi, la FORPRONU était parvenue à la conclusion que ces

 18   tirs provenaient du territoire contrôlé par les Bosno-Serbes.

 19   M. STOJANOVIC : [interprétation] Dans ce cas, regardons ensemble le

 20   document numéro 18775 de la liste 65 ter. Alors, Messieurs les Juges,

 21   malheureusement, nous n'en disposons que d'une version anglaise. Et

 22   j'attire votre attention sur le paragraphe numéro 3. Il s'agit du

 23   télégramme envoyé par M. de Lapresle le 25 avril 1994 à M. Annan. Au

 24   paragraphe numéro 3, il est indiqué que :

 25   "La situation à Gorazde s'est stabilisée, que la VRS s'est retirée à

 26   environ 3 kilomètres de la ligne dont Akashi et Karadzic avait convenu."

 27   Que la Bosnie-Herzégovine n'est d'aucune aide parce que ces tireurs

 28   embusqués ont ouvert le feu sur ceux qui se retiraient de ces lignes, et


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  1   qu'au moins 13 soldats de la VRS ont été blessés dans la direction

  2   d'Ustipraca. Est-ce que vous vous rappelez ce document ? Est-ce que vous

  3   avez eu l'occasion de le voir ?

  4   R.  Je ne m'en souviens pas. Il est très peu probable que j'ai vu ce

  5   document à l'époque puisque ce télégramme chiffré a été envoyé depuis

  6   Zagreb, alors que moi à l'époque j'étais basé à Sarajevo, et d'ailleurs, ce

  7   jour-là j'étais déjà à Gorazde. Donc, nous n'avions pas accès à ces

  8   télégrammes chiffrés à Gorazde.

  9   Q.  Est-ce qu'à quel que moment que ce soit on vous a informé de ce type de

 10   situation ? Est-ce qu'on vous a donné ce type d'information indiquant que

 11   des soldats de l'ABiH, pendant le retrait de soldats de la VRS,

 12   conformément à l'accord Akashi-Karadzic, avaient tiré sur des soldats de la

 13   VRS ?

 14   R.  J'étais informé de la plupart des opérations et des événements

 15   militaires d'importance relatifs à Gorazde, et un incident comme celui-ci

 16   était le genre d'incident que nous aurions classé comme très grave. Mais je

 17   ne me rappelle pas cet incident précis de l'époque, peut-être est-ce

 18   simplement dû au temps qui s'est écoulé depuis, cela je ne le nie pas.

 19   Q.  Et en admettant que ceci se soit passé, est-ce que cela aurait

 20   constitué une violation de l'accord Karadzic-Akashi de la part de l'ABiH ?

 21   R.  Eh bien, pour vous répondre, il me faudrait réexaminer les termes

 22   précis de l'accord en question, ainsi que recueillir davantage

 23   d'information concernant cet incident précis, mais c'est tout à fait

 24   possible.

 25   Q.  Merci. Conviendrez-vous que lors de votre séjour sur place vous aviez

 26   des informations, une expérience, vous indiquant que l'ABiH opérait dans la

 27   zone de sécurité de Gorazde et qu'il s'agissait d'une armée équipée et

 28   fonctionnant comme une unité militaire tout à fait régulière et habituelle


Page 8253

  1   en 1994 ?

  2   R.  Eh bien, selon moi, il y avait certainement des éléments de l'ABiH

  3   présents à Gorazde qui s'efforçaient de fonctionner comme des forces

  4   armées. Cependant, j'ignore s'ils opéraient comme des forces armées au sens

  5   plein du terme. Parce que, fondamentalement, ils étaient complètement

  6   isolés, entourés par les forces qui étaient leurs ennemis, et, par

  7   conséquent, ils devaient agir de façon tout à fait différente. Par exemple,

  8   du point de vue des ressources auxquelles ils avaient accès et de la

  9   logistique, il y avait un problème très important. Mais je conviens qu'il y

 10   avait des éléments des forces armées du gouvernement de Bosnie-Herzégovine

 11   présents à Gorazde qui agissaient sur le plan militaire.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je voudrais poser une question

 13   supplémentaire concernant ceci : est-ce qu'il y avait des instruments

 14   juridiques internationaux, des Résolutions du Conseil de sécurité, ou

 15   d'autres accords applicables qui auraient proscrit la présence de ces

 16   éléments à Gorazde et leur action en tant que forces armées ?

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, Monsieur le Président, d'après ce que

 18   je me rappelle et ce que je comprends, il n'y avait aucune exigence,

 19   obligation juridique découlant des Résolutions du Conseil de sécurité ou

 20   des accords convenus entre les parties qui aurait exigé un retrait des

 21   soldats bosno-musulmans hors des zones de sécurité, y compris Gorazde, ou

 22   qui aurait exigé d'eux de restreindre leurs activités dans la zone de

 23   sécurité de Gorazde au point qu'ils n'auraient plus agi en qualité de

 24   forces armées, selon moi, en tout cas.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.

 26   Il semble que M. Mladic souhaite vous remettre une note. Veuillez

 27   poursuivre, Maître.

 28   M. STOJANOVIC : [interprétation]


Page 8254

  1   Q.  Je vais revenir à la question que nous avons déjà abordée au sujet des

  2   zones de sécurité. Est-ce que conformément à cette compréhension des zones

  3   de sécurité qui est la vôtre, il aurait été légitime en cas d'attaque

  4   effectuée par l'ABiH ? Ou par une formation se trouvant à l'intérieur d'une

  5   telle zone de sécurité de riposter à de telles attaques du point de vue de

  6   la VRS ?

  7   R.  C'était là la source de difficultés constantes pour la FORPRONU et ceci

  8   concerne le débat que nous avons déjà eu au sujet de la notion même de zone

  9   de sécurité et les précisions qui ont été demandées. Parce que selon moi,

 10   les obligations juridiques découlant des Résolutions numéro 824 et 836 du

 11   Conseil de sécurité des Nations Unies revenaient à imposer des restrictions

 12   très importantes aux Bosno-Serbes, et notamment à l'armée des Serbes de

 13   Bosnie qui était donc restreinte et avait des obligations, à savoir ne pas

 14   attaquer les zones de sécurité, se retirer à une distance sûre de ces zones

 15   de sécurité. Mais les mêmes résolutions n'avaient pas les mêmes exigences à

 16   l'égard des forces du gouvernement de Bosnie-Herzégovine. Donc, d'un point

 17   de vue juridique, les forces du gouvernement de Bosnie-Herzégovine

 18   pouvaient lancer des attaques à partir des zones de sécurité. Et si tel

 19   était le cas, la VRS avait l'interdiction de riposter. Sur le plan

 20   juridique, et conformément aux Résolutions du Conseil de sécurité, ainsi

 21   qu'au mandat de la FORPRONU, alors la question de savoir si ceci était

 22   juste, équitable, si c'était sage est une autre question.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il n'est pas possible d'interrompre le

 24   témoin pendant qu'il répond à une question -- Monsieur Mladic, Monsieur

 25   Mladic, vous ne pouvez pas parler à voix haute.

 26   M. STOJANOVIC : [interprétation] Je crois qu'il y a de nouveau un problème

 27   pour M. Mladic dans la réception, l'écoute de l'interprétation.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Donc, ceci sera résolu et


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  1   nous attendrons que ce soit résolu. Dites quelques mots pour que nous

  2   puissions voir si M. Mladic entend bien l'interprétation. Est-ce que vous

  3   entendez l'interprétation maintenant ? Un instant. Nous allons attendre la

  4   résolution du problème par les techniciens.

  5   Monsieur Mladic, il est tout à fait superflu de parler de ceci. Nous

  6   allons résoudre ce problème technique et nous attendrons jusqu'au moment où

  7   il sera réglé. Est-ce un problème technique, est-ce que c'est un problème

  8   de réglage des canaux ?

  9   [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'aimerais savoir si M. Mladic peut

 11   m'entendre dans une langue qu'il comprend ?

 12   L'ACCUSÉ : [interprétation] J'entends l'interprétation, mais je demanderais

 13   que tout ce que je n'ai pas entendu me soit interprété.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stojanovic, pour la prochaine

 15   pause, je ne sais pas de combien de temps il nous faudra, mais on pourrait

 16   peut-être demander à Mme la Greffière d'imprimer les deux dernières pages

 17   du compte rendu d'audience, représentant la période pendant laquelle M.

 18   Mladic n'a pas entendu les propos qui ont été dits. Vous trouverez une

 19   solution, car nous avons le transcript, n'est-ce pas, en langue anglaise,

 20   donc j'imagine que vous allez pouvoir trouver une solution adéquate. Entre-

 21   temps, veuillez poursuivre, je vous prie.

 22   M. STOJANOVIC : [interprétation] Certainement, Monsieur le Président.

 23   Q.  Monsieur, je vais vous poser une autre question concernant Gorazde --

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais il faudrait d'abord permettre au

 25   témoin de terminer sa réponse par rapport à la question précédente.

 26   M. STOJANOVIC : [interprétation] Je pensais qu'il avait terminé, en fait,

 27   Monsieur le Président, et qu'il avait répété la même position qu'il avait

 28   lorsqu'il nous l'a expliquée lors du premier volet d'audience.


Page 8256

  1   Q.  N'est-ce pas ?

  2   R.  En fait, j'allais justement terminer ma réponse, mais je pense que, de

  3   façon générale, en substance, j'ai répondu à la question. Je vous remercie,

  4   Monsieur le Président.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Vous pouvez maintenant poser votre

  6   prochaine question.

  7   M. STOJANOVIC : [interprétation] Merci beaucoup.

  8   Q.  J'aimerais vous poser une question qui m'a été donnée en guise

  9   d'instruction par le général Mladic : est-ce que vous savez si dans le

 10   cadre de la zone de sécurité de Gorazde il existait une fabrique qui

 11   produisait des munitions et qui était appelée Pobide [phon] Gorazde, et

 12   est-ce que vous savez s'il y avait également une industrie pour des

 13   produits chimiques, azote, à Vitkovici ?

 14   R.  J'avais entendu certaines informations selon lesquelles les forces

 15   bosno-musulmanes à Gorazde produisaient leurs propres munitions, d'une

 16   certaine façon, en quelque sorte, mais je n'ai pas de connaissance directe

 17   d'une telle usine. Je ne l'ai pas vu de mes propres yeux, mais j'avais des

 18   informations, j'en avais entendu parler. J'ignore, toutefois, le nom de

 19   cette usine, et je n'ai pas entendu parler non plus d'une usine fabriquant

 20   des produits chimiques à Gorazde. J'ignore le nom de cette usine.

 21   Q.  Et ce que vous aviez entendu dire, si ceci avait été vrai, d'après vos

 22   propres connaissances - je parle de votre compréhension - du concept de

 23   "zone de sécurité", est-ce que ce que vous aviez entendu, est-ce que ceci

 24   constituerait une violation de ce qu'on appelle une zone de sécurité en

 25   vertu du droit international, à savoir que l'on y produisait des munitions,

 26   si, effectivement, l'on y produisait des munitions ?

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stojanovic, si vous faites

 28   référence au concept d'une zone de sécurité en vertu du droit


Page 8257

  1   international, je vous invite de nous dire ce à quoi vous faites référence,

  2   précisément. Est-ce que c'est parce qu'il s'agit d'une zone de sécurité

  3   conclue entre les parties, ou est-ce que c'est parce que le concept était

  4   utilisé dans les Résolutions du Conseil de sécurité, telles 824 et 836. Il

  5   faudrait distinguer clairement et savoir clairement de quoi vous parlez en

  6   ce moment, pour être vraiment très précis.

  7   M. STOJANOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, dans le cadre des

  8   préparatifs, j'ai lu les deux Résolutions du Conseil de sécurité, étant

  9   donné que cela fait déjà plusieurs années que je suis intéressé par la

 10   question de Srebrenica et que je m'occupe de ceci. Donc, ce sont les

 11   Résolutions qui permettent une ambiguïté quant à l'interprétation, à la

 12   compréhension, et c'est ce dont nous a parlé également le témoin.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, mais je vous demande simplement une

 14   chose très simple : je voulais simplement savoir si c'était en violation

 15   des zones de sécurité telles que définies par les Résolutions du Conseil de

 16   sécurité, ou est-ce que vous parlez d'une autre définition. A ce moment-là,

 17   le témoin pourra avoir un point de référence clair pour répondre à votre

 18   question.

 19   Donc, si de telles usines étaient présentes, est-ce que ceci aurait

 20   représenté une violation des zones de sécurité telles que définies par les

 21   Résolutions du Conseil de sécurité 824 et 836 ?

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, la présence, par

 23   exemple, d'une usine de munitions dans la zone de sécurité, d'après ma

 24   compréhension à moi, ne représenterait pas une violation des Résolutions

 25   824 ou 836, ou violation de quelle qu'autre résolution portant sur le

 26   conflit en Bosnie.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

 28   Veuillez continuer, Maître Stojanovic.


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  1   M. STOJANOVIC : [interprétation] Merci bien. Justement, je voulais entendre

  2   l'interprétation du témoin. Et je voudrais maintenant demander que l'on

  3   verse au dossier le document 65 ter 18775.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière.

  5   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Le document 18775 recevra la cote D189,

  6   Monsieur le Président, Messieurs les Juges.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stojanovic, est-ce que vous

  8   seriez d'accord que le document porte une cote MFI, avant que l'on obtienne

  9   une traduction en B/C/S ?

 10   M. STOJANOVIC : [aucune interprétation]

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je demanderais que vous répétiez, s'il

 12   vous plaît. Nous n'avons pas entendu l'interprétation de vos propos.

 13   M. STOJANOVIC : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président. Je

 14   suis d'accord avec votre proposition. Je demanderais le versement au

 15   dossier de ce document sous une cote provisoire MFI, en attendant la

 16   traduction du même document en B/C/S.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D189 est versé au dossier aux fins

 18   d'identification. Veuillez continuer, je vous prie.

 19   M. STOJANOVIC : [interprétation] Je vous remercie.

 20   Q.  Je vous demanderais, Monsieur, de prendre le paragraphe 27 de votre

 21   déclaration, et il s'agit du document P874. Vous parlez d'une situation

 22   portant sur une crise. C'est une situation liée à la mise en liberté d'un

 23   représentant de la FORPRONU. Si vous vous en souvenez, l'on a déjà parlé de

 24   ceci, mais je voudrais attirer votre attention sur une partie précise du

 25   paragraphe 24. Vous dites ici que M. Andreev a rencontré M. Karadzic le 31

 26   mai 1994, et que Karadzic lui a dit que la personne en question sera

 27   libérée dès que les Serbes auront obtenu une confirmation écrite

 28   établissant son statut en tant que membre de la FORPRONU, et que cette


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  1   erreur ne sera pas répétée.

  2   Alors, très brièvement, est-ce que vous seriez d'accord avec moi pour dire

  3   que cet incident est survenu lorsqu'on a vu que dans le véhicule du membre

  4   de la FORPRONU en question, il y avait des personnes qui n'avaient pas une

  5   attestation ou une accréditation, et qui avaient sur eux plus de 300 000

  6   marks allemands, et qu'ils allaient apporter cet argent à Sarajevo ?

  7   R.  Je suis au courant de cet incident. Je ne me souviens pas de la somme

  8   d'argent qui aurait supposément été trouvée à bord du véhicule, quoique je

  9   n'ai aucune raison de contester le montant que vous me citez. Maintenant ce

 10   qui est important ici, c'est de savoir si les personnes avaient cette

 11   accréditation. Maintenant, il s'agit quand même d'une différence

 12   fondamentale d'opinions entre les membres de la FORPRONU et les autorités

 13   serbes de Bosnie, quant aux droits de transporter le personnel, de

 14   transporter les biens, d'autres personnes accompagnantes, de transporter

 15   des biens pour les opérations, par exemple. Et beaucoup trop souvent, il

 16   arrivait que les autorités serbes de Bosnie et les autorités militaires aux

 17   points de contrôle arrêtaient les membres de la FORPRONU, faisaient sortir

 18   des personnes de nos véhicules, les emprisonnaient, prenaient des biens,

 19   c'est-à-dire ils confisquaient des biens de nous. Et ceci était une

 20   violation sérieuse des obligations des autorités serbes de Bosnie violant

 21   la résolution du Conseil de sécurité nous permettant mouvement sans

 22   entrave. Et ceci était une source constante, une entrave constante à la

 23   façon dont nous pouvions mener les opérations. Et c'est l'un des exemples

 24   de ce type d'incident.

 25   Q.  Mais dans cet incident, il a été établi que l'une des personnes qui se

 26   trouvait à bord du véhicule, c'est-à-dire un représentant de la FORPRONU --

 27   on a demandé à un représentant de la FORPRONU d'entrer dans le véhicule, de

 28   passer le point de contrôle et de faire entrer à Sarajevo une quantité de


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  1   marks allemands, de 300 000 marks allemands. Est-ce que ce fait, dans ce

  2   cas concret, est exact ?

  3   R.  Je ne suis pas tout à fait sûr si c'est exact, peut-être que le membre

  4   de la FORPRONU ait fait une erreur ou il a peut-être fait quelque chose de

  5   mal, quelque chose qu'il n'aurait dû pas faire. Toutefois, la réponse à

  6   ceci -- et je le sais de par mon expérience à l'époque et du poste que

  7   j'occupais, mais les autorités en question - et dans ce cas-ci il

  8   s'agissait des autorités serbes de Bosnie à ce moment-là - la réaction est

  9   de faire en sorte que ce soit nous qui prenions des actions nécessaires.

 10   Mais ils ne peuvent pas fouiller un véhicule de l'ONU, prendre des biens

 11   qui se trouvent à l'intérieur du véhicule onusien et d'arrêter des

 12   personnes à l'intérieur de ces véhicules non plus. Et donc, je crois que

 13   les militaires serbes de Bosnie étaient en violation flagrante des

 14   privilèges accordés aux membres de l'ONU et des immunités en vertu du droit

 15   international et des résolutions du Conseil de sécurité.

 16   Q.  Est-ce que ce membre de la FORPRONU a été libéré le lendemain ?

 17   R.  Il a été libéré peu de temps après. Il est tout à fait probable que

 18   cela soit le lendemain. Je ne peux pas vous dire que ce soit exactement le

 19   lendemain, mais il a été libéré peu de temps après.

 20   M. STOJANOVIC : [interprétation] Je demande, Monsieur le Président, que

 21   l'on verse au dossier le document 65 ter 10650, il s'agit d'un jeu de

 22   documents, et c'est un jeu de documents qui a été mis sur la liste de

 23   l'Accusation et dans l'ordre présenté par l'Accusation, et le numéro de ce

 24   jeu de documents est 10650. Il porte sur un incident précis.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stojanovic, la Chambre est bien

 26   intéressée à savoir de quoi il s'agit s'agissant de ces documents. Pour

 27   l'instant, nous ne les avons pas vus. Nous sommes bien intéressés à

 28   apprendre de quoi il s'agit, effectivement, mais nous sommes quelque peu


Page 8261

  1   réticents à faire verser au dossier des documents dont nous ignorons la

  2   teneur. Pourriez-vous nous décrire brièvement de quoi il s'agit.

  3   M. STOJANOVIC : [interprétation] Certainement, Monsieur le Président. C'est

  4   un document qui a été rédigé par le témoin qui est présent ici ce matin, en

  5   date du 8 juin 1994. Ces documents nous parlent de l'événement qui a

  6   survenu. Ensuite, il y a une lettre que M. Viktor Andreev ait adressée à M.

  7   Radovan Karadzic, dont on parle d'ailleurs également dans la déclaration de

  8   ce témoin qui a été versée au dossier et qui porte également sur cet

  9   événement. Ensuite, il y a également un document qui a été rédigé par le

 10   témoin d'aujourd'hui en date du 6 juin 1994, et qui porte sur une lettre

 11   que M. Viktor Andreev ait adressée au Pr Koljevic liée justement à cet

 12   événement.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que tout ceci figure dans le

 14   document 65 ter 10650 ou bien faites-vous référence à d'autres documents 65

 15   ter ? Car je vois seulement des téléfax envoyés.

 16   M. STOJANOVIC : [interprétation] Non, Monsieur le Président, d'après ce que

 17   j'ai obtenu des collègues de l'Accusation, l'ensemble du document, donc 65

 18   ter 10650, contient ce que je vous ai mentionné, donc il s'agit d'un résumé

 19   de tous ces événements dont il est question dans la déclaration du témoin.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Madame Bibles.

 21   Mme BIBLES : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

 22   il serait peut-être utile de faire afficher 10650, parce que la page

 23   couverture décrit le fait que le 8 juin, une série de documents ont été

 24   faxés. Et donc, il s'agit de documents faxés et le fax lui-même décrit

 25   qu'il s'agit d'une série de documents portant sur cet incident, et ceci est

 26   décrit d'ailleurs au paragraphe 27 de la déclaration du témoin.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Alors maintenant, nous savons

 28   de quoi il en retourne et ce que Me Stojanovic demande comme versement au


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  1   dossier. Bien. Comme il n'y a pas d'objection, j'imagine que vous souhaitez

  2   demander un versement direct car vous n'avez pas montré ce document au

  3   témoin, mais ce document porte sur les questions sur lesquelles il a

  4   déposé, et donc le fait de faire verser au dossier directement cette série

  5   de documents n'a pas reçu d'objection de la part de l'Accusation. Et nous

  6   l'avons à l'écran de toute façon. Nous pourrions même en faire une vraie

  7   pièce.

  8   Monsieur Banbury, dites-nous, s'il vous plaît, est-ce que vous voyez le

  9   document qui est affiché à l'écran devant vous, est-ce que vous vous

 10   souvenez d'avoir rédigé ce document ?

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui et oui. Je réponds par l'affirmative aux

 12   deux questions que vous m'avez posées.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien.

 14   Donc, Madame la Greffière, quelle en sera la cote ?

 15   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Le document 10650 recevra la cote D190.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D190 a été versé au dossier.

 17   Veuillez poursuivre, je vous prie.

 18   M. STOJANOVIC : [interprétation] Merci bien.

 19   Q.  Pourrons-nous prendre ensemble le paragraphe 35 de votre déclaration,

 20   qui porte le numéro P874. Et je demanderais que l'on affiche dans le

 21   prétoire électronique le document 65 ter 09467. Monsieur, il s'agit d'un

 22   rapport que M. Akashi a envoyé à M. Annan. La date est le 14 juillet 1994,

 23   l'on y parle des réunions avec les ministres étrangers de la Grande-

 24   Bretagne et de la France, Douglas Hurd et Alain Juppé, avec les parties

 25   belligérantes. Je vous demanderais de commenter avec moi quelques éléments.

 26   Prenons maintenant le troisième paragraphe de ce document. L'on y décrit,

 27   un résumé d'une conversation que le ministre Douglas Hurd a eu avec les

 28   représentants des membres de la Fédération de Bosnie-Herzégovine. J'imagine


Page 8263

  1   que vous-même, comme il est indiqué ici en êtes l'auteur; est-ce que c'est

  2   exact, Monsieur ?

  3   R.  Oui, quoique je devrais mentionner que le télégramme codé, c'est-à-dire

  4   la page qui a été montrée un peu plus tôt est une page de garde ou un

  5   télégramme de couverture que le QG de la FORPRONU avait annexé au rapport

  6   et l'a envoyé au QG de New York. Je n'ai pas moi-même rédigé la première

  7   page ou la page de garde, mais c'est la page de garde qui a été rattachée,

  8   comme je vous explique.

  9   Q.  Bien. Maintenant ma question porte sur le paragraphe 3 de ce document.

 10   Et c'est un texte qui a été rédigé par vous-même, n'est-ce pas ?

 11   R.  Oui, oui, le rapport entier est mon texte à moi. C'est moi qui en

 12   l'auteur, mais ce n'est que le télégramme qui a été envoyé en guise de page

 13   de garde qui n'est pas le mien, et donc tout ce texte est un texte que j'ai

 14   rédigé moi-même, y compris le paragraphe numéro 3.

 15   Q.  Bien. Donc le ministre Hurd en conversation avec les représentants de

 16   la Fédération, plus concrètement Izetbegovic, lui posent la question

 17   suivante, à savoir s'il était possible que les Serbes en Bosnie aient créé

 18   une confédération avec la République fédérale de Yougoslavie, comme cela a

 19   déjà fait avec la Croatie ? Et la deuxième question est de savoir s'il voit

 20   une possibilité ici, et donc il dit que, non il ne voit pas ceci comme

 21   possibilité et il met en exergue une question sur laquelle je voudrais vous

 22   poser une question. Il dit que la seule possibilité pour un rapport

 23   particulier entre les Serbes de Bosnie et la Serbie serait possible

 24   seulement si l'on établissait les liens similaires entre le gouvernement

 25   bosnien et les Musulmans de Sandzak. Et en réponse à la deuxième question,

 26   Izetbegovic a dit qu'il ne croyait pas qu'il était possible de procéder à

 27   un échange de territoire. Donc ma question est la suivante : où se trouve

 28   Sandzak, cette région qui a été mentionnée ici dans votre résumé ?


Page 8264

  1   R.  A l'époque, Sandzak se trouvait dans la République fédérale de

  2   Yougoslavie.

  3   Q.  Est-ce que cette position de M. Izetbegovic avait été mentionnée pour

  4   la première fois ou bien est-ce que c'était quelque chose que vous aviez

  5   déjà entendu, vous l'aviez-vous déjà entendu de sa bouche auparavant ?

  6   R.  Je ne me souviens pas, je suis désolé.

  7   Q.  Vous ne souvenez pas s'il aurait dit quelque chose de similaire ou bien

  8   s'il aurait dit quelque chose de semblable avant cette réunion avec M. Hurd

  9   ?

 10   R.  Je ne me souviens pas si je l'avais entendu dire, mentionner ceci ou

 11   avoir cette position soit personnellement ou dans les médias avant cette

 12   réunion.

 13   Q.  Bien. Et au point 5 de votre résumé s'agissant de cette même

 14   conversation -- et je demande de passer à la page suivante en B/C/S et de

 15   passer à la page suivante également en version anglaise. L'on y dit ceci,

 16   on dit que M. Hurd aurait dit à M. Izetbegovic qu'il était important

 17   d'accepter la réalité et que le fait de dire qu'il était absolument

 18   impossible que les Serbes de Bosnie interrompent tous les liens avec la

 19   Serbie parce que ce genre de liens existeraient de toute façon. Et lui a

 20   dit qu'il était absolument impossible que les Musulmans de Bosnie

 21   comprennent que l'OTAN n'allait pas mener leur guerre. Alors, pourriez-vous

 22   nous expliquer de quoi il en est ? Premièrement, pourriez-vous nous dire

 23   pourquoi pensez-vous qu'il met en garde les Bosniens pour leur dire que

 24   l'OTAN n'allait pas mener leur guerre ? Et pourquoi a-t-il dit qu'ils

 25   n'allaient pas informer les Serbes de la demande présentée par Izetbegovic

 26   ?

 27   R.  Le rôle de l'OTAN dans le conflit de la Bosnie, particulièrement

 28   d'après ce que je dirais, ou à partir de février 1994 était que l'OTAN


Page 8265

  1   n'allait pas -- en fait, il existait un espoir très fort du côté du

  2   gouvernement bosnien que l'OTAN allait devenir un allié dans la guerre

  3   s'agissant du conflit avec les Serbes de Bosnie. Et donc ils voulaient ceci

  4   pour des raisons politiques et militaires. C'est ce qu'ils croyaient en

  5   ceci, et je pense qu'ils ont essayé d'atteindre cet objectif ou de

  6   convaincre les hommes politiques que l'OTAN était en train de combattre à

  7   leur côté. Et d'autre part, les Serbes de Bosnie avaient peur de l'OTAN,

  8   ils ne souhaitaient pas que l'OTAN engage une guerre contre eux. Donc ici

  9   le secrétaire étranger de l'un des membres permanents du Conseil de

 10   sécurité et un membre de l'OTAN présente sa position, tout du moins la

 11   position du Royaume-Uni sur le rôle de l'OTAN.

 12   A savoir -- enfin je vous dirais les conjectures, je ne sais pas si vous

 13   voulez que je le fasse, mais pour répondre à votre première question, à

 14   savoir pourquoi le président Izetbegovic ou le ministre Hurd aurait dit au

 15   président Izetbegovic qu'il n'allait pas le dire aux Serbes de Bosnie,

 16   c'est parce qu'il avait pensé que la menace des actions militaires de

 17   l'OTAN étaient une source qui leur permettait de négocier avec les Serbes

 18   de Bosnie, puissante. Et que la menace était soit enlever, et que si la

 19   menace était enlevée, le pouvoir qu'avait la communauté internationale sur

 20   les Serbes de Bosnie, pour faire en sorte qu'ils acceptent une paix, serait

 21   amoindrie de cette façon-là.

 22   Q.  Merci. Mais ne pensez-vous pas, Monsieur, qu'à chaque fois que les

 23   négociations mettent fin sur des négociations de paix ou autres, les

 24   autorités de Bosnie-Herzégovine avaient toujours de nouvelles demandes, et

 25   dans ce cas-ci, lorsqu'on négociait avec le Groupe de contact on présentait

 26   d'autres demandes concernant des liens spécifiques avec une partie ou avec

 27   la population d'une autre région de l'ex-Yougoslavie, donc la région qui

 28   faisait partie de la République fédérale de Yougoslavie ?


Page 8266

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En fait, vous avez posé environ 17

  2   questions en une, Maître Stojanovic. Pourriez-vous, je vous prie, vous

  3   focalisez sur des aspects particuliers de votre question.

  4   M. STOJANOVIC : [interprétation] Je vais donc simplifier.

  5   Q.  Est-ce qu'il vous est arrivé qu'au cours des négociations réunissant

  6   les parties belligérantes pendant votre travail en Bosnie l'une des parties

  7   belligérantes adresse toujours de nouvelles exigences à l'autre, et vice

  8   versa, et que cela remette toujours à plus tard toute signature d'accord de

  9   paix ?

 10   R.  De part et d'autre on essayait - et c'était en règle générale -

 11   essayait de renforcer leur position au cours des négociations et d'obtenir

 12   un maximum d'appui international à leur cause. Je pense que c'était de

 13   manière générale que l'on voyait, cela. A partir du moment où la communauté

 14   internationale ou le Groupe de contact avait formulé une proposition, un

 15   plan de paix, à partir du moment où la communauté internationale avait

 16   couché noir sur blanc une proposition, le gouvernement de Sarajevo se

 17   plaignait ou essayait de renforcer leur position jusqu'à ce que l'on ne

 18   finalise la proposition. Mais bien sûr, on avait toujours des questions de

 19   principe qui faisaient partie de ces propositions. Le gouvernement bosnien

 20   essayait alors de bien les rendre inuables pour que cela ne puisse plus

 21   être modifié. Donc, je pense qu'ils ont toujours formulé de nouvelles

 22   exigences. Ce qu'ils essayaient de faire, c'était d'empêcher que l'autre

 23   partie ne modifie des questions telles que la question d'intégrité

 24   territoriale, ce qui, effectivement, plaçaient les Bosno-Serbes dans une

 25   situation très difficile, parce que les propositions internationales

 26   allaient comporter, en règle générale, ces exigences-là qui correspondaient

 27   à ce que souhaitait la partie musulmane, et c'est ça qui incitait alors les

 28   Serbes de Bosnie de formuler des exigences supplémentaires.


Page 8267

  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stojanovic, je regarde l'heure.

  2   Je pense qu'il nous faut faire une pause. Le témoin pourra se faire

  3   raccompagner par Mme l'Huissière. Nous allons faire une pause de 20

  4   minutes.

  5   [Le témoin quitte la barre]

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons reprendre à 13 heures 45.

  7   --- L'audience est suspendue à 13 heures 23.

  8   --- L'audience est reprise à 13 heures 46. 

  9    M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Faisons entrer le témoin. En attendant,

 10   je tiens à préciser aux fins du compte rendu d'audience, à la fin de la

 11   journée d'audience vendredi dernier, le 1er février, la Chambre a versé au

 12   dossier de l'affaire le document 22565E de la liste 65 ter en tant que

 13   pièce P841 par le truchement du Témoin Martin Bell. Il convient de préciser

 14   que tout comme dans le cas des autres extraits vidéo qui ont été proposés

 15   au versement par l'Accusation par le truchement de ce témoin, la pièce P841

 16   aurait dû recevoir une cote aux fins d'identification en attendant que la

 17   transcription n'a pu être vérifiée par le CLSS. Par conséquent, le statut

 18   de la pièce P841 est à présent le statut d'une pièce MFI. Je vous remercie.

 19   [Le témoin vient à la barre]

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stojanovic, vous avez la parole.

 21   M. STOJANOVIC : [interprétation]

 22   Q.  Monsieur, est-ce que nous pouvons continuer ?

 23   R.  Oui.

 24   Q.  Très bien. Merci. Vous vous souviendrez, nous étions en train de parler

 25   de ce document que vous avez rédigé à l'issue des réunions tenues par MM.

 26   Hurd et Juppe avec les parties belligérantes. Et je voudrais à présent

 27   m'intéresser au point 5, où vous avez commenté les propos de M. Hurd, où il

 28   a dit qu'il était important que la partie musulmane de Bosnie comprenne que


Page 8268

  1   l'OTAN n'allait pas faire la guerre pour eux, à leur place. Alors, pendant

  2   votre travail en Bosnie-Herzégovine, est-ce que vous avez pu arriver à

  3   cette conclusion-là, à savoir qu'il se pourrait que l'OTAN mène la guerre

  4   en leur nom ? Est-ce que la direction de Bosnie-Herzégovine a pu avoir

  5   cette impression-là ?

  6   R.  A de nombreuses occasions, j'ai entendu différents membres de la

  7   direction des Bosniens parler de ce que le rôle joué par l'OTAN devrait

  8   être. Et il m'a semblé que c'était plus leur souhait de ce que le rôle joué

  9   par l'OTAN devrait être qu'une conclusion à laquelle ils étaient arrivés

 10   sur ce que l'OTAN ferait. Et je pense qu'ils ont toujours eu le sentiment

 11   qu'ils étaient des victimes de ce conflit, que les Nations Unies, l'OTAN et

 12   le monde entier devraient faire davantage pour leur venir en aide, et

 13   qu'ils aspiraient beaucoup à ce que l'OTAN se range à leur côté dans ce

 14   conflit. Quant à savoir s'ils étaient arrivés à la conclusion que l'OTAN le

 15   ferait, effectivement, ça, je ne le sais pas.

 16   Q.  Merci. Et pour terminer avec ce document, une question qui porte sur le

 17   paragraphe 8 de ce document. Après les réunions avec la direction de la

 18   Fédération de Bosnie-Herzégovine, ces deux ministres se sont rendus à Pale

 19   et se sont entretenus à Pale avec M. Karadzic. Si je vous ai bien compris

 20   au point 8 -- merci, je pense que nous avons le texte qu'il nous faut.

 21   Donc, vous êtes arrivé à la constatation que Karadzic aurait affirmé en

 22   cette occasion-là, face aux deux ministres, qu'il était nécessaire que la

 23   Republika Srpska obtienne une forme d'identité internationale sur le plan

 24   juridique. Pendant ces entretiens avec les chefs de file de pays très

 25   importants faisant partie du Groupe de contact, et je parle bien du mois de

 26   juillet 1994, est-ce que l'on a articulé cette forme d'identité

 27   internationale sur le plan juridique qui semblerait satisfaisante à la

 28   partie serbe ?


Page 8269

  1   R.  Pourriez-vous, s'il vous plaît, répéter votre question. Je ne suis pas

  2   sûr d'avoir bien compris la question.

  3   Q.  Je vais la poser sous une forme plus brève. A cette occasion-là, la

  4   direction bosno-serbe a-t-elle évoqué des modalités quelles qu'elles

  5   soient, une articulation formelle de cette identité internationale et

  6   juridique de la Republika Srpska, quelque chose qui leur aurait semblé

  7   satisfaisant ?

  8   R.  Je ne sais pas ou je ne me souviens pas si cette réunion a été très

  9   approfondie, mais de manière générale il me semble que lors de cette

 10   réunion, tout comme lors d'autres contacts qui ont eu lieu, la direction

 11   bosno-serbe avait au fond deux objectifs : premièrement - et c'est ce qui

 12   se reflète dans ce paragraphe - ils ne souhaitaient pas que sur le plan

 13   juridique ils fassent partie de la même entité que les Bosniens ou la

 14   direction des Bosniens; et puis, deuxièmement, ils souhaitaient constituer

 15   une sorte de confédération avec la Serbie et ils souhaitaient être libres

 16   de prendre des décisions indépendantes, donc quelque chose qui ne

 17   dépendraient pas d'autres instances de pouvoir telles que Sarajevo. C'est

 18   de cette manière-là que j'ai interprété leurs deux objectifs.

 19   Q.  Est-ce que cela s'inscrit dans ce qui a été accepté fin 1995 par les

 20   accords de Dayton, ce qui a été conféré à la Republika Srpska ?

 21   R.  Je pense qu'il y a là des différences de taille.

 22   Q.  Ces différences, d'après les termes des accords de Dayton, résident-

 23   elles dans les attributions plus ou moins grandes qui ont été données à la

 24   Republika Srpska par rapport à ce qui a été présenté comme prise de

 25   position par le Dr Karadzic à ce moment-là ?

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stojanovic, les Juges de la

 27   Chambre ont l'impression que vous essayez de recentrer le cœur du présent

 28   procès sur toutes sortes de négociations. Alors, je ne dis pas que ceci


Page 8270

  1   n'est pas entièrement pertinent, mais ce n'est certainement pas au cœur du

  2   sujet. La question de savoir si les parties en définitive ont fini par

  3   obtenir ou non ce qu'elles souhaitaient exigerait une analyse allant bien

  4   au-delà de ce qui est pertinent en l'espèce, si l'on s'interroge aussi

  5   quant au caractère raisonnable des demandes, et cetera. Donc, je vous prie

  6   de garder ceci à l'esprit.

  7   M. STOJANOVIC : [interprétation] Très bien, Monsieur le Président.

  8   Q.  Alors, Monsieur le Témoin, est-ce que vous êtes en mesure de répondre;

  9   si ce n'est pas le cas, je passerai à la suite.

 10   R.  Les dispositions des accords de Dayton ont accordé à la Republika

 11   Srpska moins que ce que le Dr Karadzic a présenté comme étant leurs

 12   objectifs lors de cette rencontre avec deux ministres. Je parle de la

 13   question de la personnalité juridique de la Republika Srpska.

 14   Q.  Merci. Je voudrais simplement en finir avec ce document en attirant

 15   votre attention sur le point numéro 11 de ce même document. Il y est dit :

 16   Lors de la conférence de presse ayant fait suite à la réunion, les

 17   commentaires des Serbes, et notamment de Karadzic, n'ont pas rendu compte

 18   de la teneur des discussions précédentes et les Serbes dans leurs

 19   commentaires ont été plus posés.

 20   Est-ce que vous avez une explication, une brève explication quant à cela --

 21   ou plutôt, pourquoi la teneur de cette discussion n'a-t-elle pas été

 22   communiquée lors de cette conférence de presse ?

 23   R.  Eh bien, très fréquemment, les discussions qui avaient lieu lors de

 24   réunions qui n'étaient pas publiques étaient particulièrement complexes et

 25   impliquaient toute une série de sujets assez difficiles d'accès au commun

 26   des mortels et difficiles d'accès même aux journalistes. Donc, je crois

 27   qu'en s'adressant à la presse il est assez naturel de constater que ce qui

 28   est annoncé est largement en deçà de ce qui a pu être discuté lors de la


Page 8271

  1   réunion. De plus, les positions qui ont pu être prises de façon privée lors

  2   d'une réunion peuvent très bien faire l'objet d'une réserve tout à fait

  3   légitime de la part d'un représentant officiel qui ne souhaitera pas les

  4   annoncer en public, ou peut-être face à la partie adverse de façon publique

  5   également. Donc, c'était quelque chose de tout à fait habituel sur le plan

  6   tactique, les représentants de chacune des parties ont utilisé cette façon

  7   de procéder.

  8   Q.  Merci. Je voudrais maintenant que nous examinions le document numéro

  9   08149 de la liste 65 ter.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître, n'avez-vous pas l'intention de

 11   demander le versement du document précédent ?

 12   M. STOJANOVIC : [interprétation] Non, Monsieur le Président. Je pense que

 13   cela reviendrait à surcharger le dossier de l'espèce et rien de plus. Mais

 14   je vous remercie.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais Maître, vous avez fait de

 16   fréquentes références à ce qui figure à tel et tel paragraphe et ceci

 17   risque donc d'être absent. C'est pourquoi je me permets de vous suggérer

 18   d'en demander le versement. Vous avez demandé au témoin de se concentrer

 19   sur ce qui figurait dans tel et tel paragraphe, vous lui avez demandé

 20   comment il l'interprétait, et cetera. Les Juges de la Chambre, bien

 21   entendu, souhaiteraient disposer de l'ensemble des éléments au dossier.

 22   Madame la Greffière, je vous en prie.

 23   Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Le document numéro 09467 de la liste 65

 24   ter reçoit la cote D191, Messieurs les Juges.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et il est versé au dossier.

 26   M. STOJANOVIC : [interprétation]

 27   Q.  Merci. Alors ici, nous avons le document que vous évoquez aux

 28   paragraphes numéros 41 et 42 de votre déclaration. Je voudrais simplement


Page 8272

  1   vous prier de nous donner un très bref commentaire de ceci. Parce que dans

  2   ce cas précis, vous parlez également du général Mladic et de sa présence.

  3   Alors, est-ce qu'on peut lever peut-être l'ambiguïté ou le doute sur la

  4   date à laquelle cette réunion s'est tenue. Parce que dans votre

  5   déclaration, au paragraphe numéro 41, il est indiqué que cette réunion se

  6   serait tenue le 21 juillet 1994, alors que si nous lisons votre rapport,

  7   j'ai l'impression qu'il s'agit du 21 juin 1994, et que ça a été envoyé le

  8   22 juin. Alors, qu'est-ce qui est exact ?

  9   R.  Je lis la date du document comme celle du 22 juillet. Le sujet du

 10   document indique que la réunion s'est tenue le 21 juillet. Et dans les

 11   remarques introductives, on voit "Moi, Viktor Andreev, a rencontré hier à

 12   Jahorina…" et cetera, et cetera, ce qui renvoie à la date de la réunion,

 13   alors que celle du document est la date du 22 juillet, donc au 22 juillet

 14   on se réfère à la date de la veille, le 21. Et ce que je comprends, c'est

 15   que la réunion s'est tenue le 21 juillet.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je vois où vous voulez en venir,

 17   Maître.

 18   M. STOJANOVIC : [interprétation] Merci.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans la traduction, on lit 22 juin 1994.

 20   Donc, il semblerait qu'il y ait une erreur de traduction. L'original, quant

 21   à lui, est tout à fait clair. Par conséquent, il conviendra de corriger

 22   cette traduction.

 23   Est-ce que l'Accusation peut peut-être s'en charger, puisqu'il s'agit d'une

 24   pièce à charge -- alors, qui n'a pas encore été versée mais qui figure sur

 25   la liste des pièces à charge de l'Accusation sous le régime de l'article 65

 26   ter. Est-ce que vous pouvez fournir une traduction corrigée avec la bonne

 27   date ?

 28   Mme BIBLES : [interprétation] Nous le ferons, Monsieur le Président. Et je


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  1   crois que ceci a été versé comme la pièce P764, mais --

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] De toute façon, il faut corriger la

  3   date.

  4   Maître, si vous posez ce genre de questions, vous pourriez peut-être

  5   consulter également le texte original. C'est ce que je vous suggère. Donc,

  6   quelqu'un qui, en tout cas, serait en mesure de vérifier pourrait vous être

  7   utile afin d'éviter de passer du temps sur ce genre de questions. Et après

  8   avoir constaté ce genre de décalage, vous pouvez toujours contacter

  9   l'Accusation pour informer cette dernière qu'il y a une erreur dans la

 10   traduction. Ainsi, vous n'avez pas à y consacrer du temps dans le prétoire.

 11   Veuillez poursuivre.

 12   M. STOJANOVIC : [interprétation] Merci.

 13   Q.  Monsieur le Témoin, au point numéro 2 de ce résumé et du message qui

 14   est envoyé, dont je suppose que vous en êtes également l'auteur, en tout

 15   cas c'est ce qui est indiqué ici, on peut lire que le général Rose a

 16   adressé des protestations en raison des tirs qui ont visé des avions de

 17   l'ONU au cours des 24 heures précédentes. Pour autant que vous vous en

 18   souveniez, c'était la partie musulmane qui avait ouvert le feu à partir

 19   d'un bâtiment se trouvant du côté contrôlé par les forces musulmanes, en

 20   tout cas selon les informations qui vous ont été fournies par le général

 21   Galic. Alors, voici ma question : est-ce que cette information que je viens

 22   de citer a été ou non confirmée après que vous avez rédigé ce rapport ?

 23   R.  Excusez-moi, mais je ne m'en souviens pas.

 24   Q.  Très bien. Je vous prie dans ce cas de vous reporter au point 3(c) qui

 25   aborde la question des prisonniers de guerre. On y cite les propos du

 26   général Mladic. Il aurait dit que :

 27   "'…les Serbes ne sauraient pardonner aux organisations internationales le

 28   non-respect de l'accord relatif à la libération des prisonniers.'"


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  1   Pourriez-vous dire aux Juges de la Chambre de quels prisonniers le général

  2   Mladic est en train de parler dans les propos qui sont là cités, et de quel

  3   accord relatif à la libération de ces prisonniers il est ici question ?

  4   R.  Il y avait des prisonniers de guerre de façon constante tenus par les

  5   deux camps, des prisonniers de guerre en faisant référence au personnel

  6   militaire, bien sûr, capturé par l'une des parties, et le personnel

  7   militaire de l'autre partie. On ne fait pas référence ici aux civils qui

  8   sont des prisonniers de guerre par définition. Mais donc, l'accord auquel

  9   on fait référence ici est, si je ne m'abuse, un accord conclu entre les

 10   autorités serbes de Bosnie et le gouvernement bosnien, les autorités du

 11   gouvernement bosnien contenant des dispositions pour la libération pour les

 12   deux côtés des différents prisonniers de guerre. Il y a peut-être eu

 13   quelques exigences sur les dispositions relatives au personnel disparu, qui

 14   était toujours une question assez contestée. Mais je pense que ce qui est

 15   intéressant ici dans cette phrase que vous avez lue, dans ce paragraphe,

 16   c'est que le général Mladic s'attendait à ce qu'il y ait une obligation de

 17   la FORPRONU pour remplir les obligations auxquelles devait se plier le

 18   gouvernement bosnien. Et le général Mladic et d'autres blâmaient souvent la

 19   FORPRONU pour les actions ou le manque d'actions du côté du gouvernement

 20   bosniaque. Et donc, il ne s'agissait pas, bien évidemment, d'une obligation

 21   juridique de la FORPRONU dans ces accords pour, par exemple, libérer les

 22   prisonniers bosniens au gouvernement bosnien. Mais nous essayions d'être là

 23   en tant que négociateurs pour leur venir en aide.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur, je vous ai entendu dire, et

 25   c'est quelque chose que l'on retrouve également dans le compte rendu

 26   d'audience, vous avez dit : "On ne fait pas référence aux civils qui sont

 27   par définition des prisonniers de guerre," j'imagine que vous vous êtes

 28   trompé, vous vouliez dire qui, par définition, ne sont pas des prisonniers


Page 8275

  1   de guerre.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, effectivement, je pensais avoir dit

  3   qu'ils n'étaient, par définition, pas des prisonniers de guerre. Je me suis

  4   mal exprimé. C'est effectivement ce que je voulais dire. Je m'en excuse.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Ceci est maintenant consigné

  6   au compte rendu d'audience. Veuillez poursuivre, je vous prie.

  7   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] En fait, une autre précision à la

  8   ligne 19, page 78, vous avez dit ici que :

  9   "Il ne s'agissait pas d'une obligation juridique de la FORPRONU pour, par

 10   exemple, libérer les prisonniers bosniaques détenus par les autorités du

 11   gouvernement bosniaque."

 12   Donc, j'imagine que vous vouliez dire les prisonniers serbes de Bosnie ?

 13   C'est cela que vous vouliez dire ?

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je me suis encore une fois trompé. Je

 15   suis vraiment désolé. C'est ce que, effectivement, je voulais dire. Merci,

 16   Monsieur le Juge.

 17   M. STOJANOVIC : [interprétation] Merci.

 18   Q.  Et ici, le général Mladic a mentionné concrètement des détenus à

 19   Gorazde et à Tarcin. Est-ce que vous aviez des informations à l'époque

 20   selon lesquelles les détenus que vous avez décrits un peu plus tôt se

 21   trouvaient encore à Gorazde à l'époque ?

 22   R.  Non, pas vraiment, mais seulement de façon générale. J'étais au courant

 23   que le gouvernement bosniaque détenait des prisonniers, mais en dehors de

 24   cela, rien de précis.

 25   Q.  Et j'aimerais vous demander ceci encore une fois, en fait, vous dites

 26   ici que le général Mladic a également mentionné Tarcin. Pourriez-vous

 27   expliquer aux Juges de la Chambre où se situe Tarcin, et si vous savez, et

 28   si à l'époque il y avait des détenus, je parle de civils, placés sous le


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  1   contrôle de l'ABiH ?

  2   R.  Je ne suis pas très bien au fait du problème de Tarcin. Si je me

  3   souviens bien, c'est une question qui a précédé mon arrivée en Bosnie, mais

  4   c'était un problème qui existait avant mon arrivée, mais qui était souvent

  5   mentionné par les Serbes de Bosnie, et c'est un problème où peu de progrès

  6   ont été accomplis au fil du temps. Je sais qu'il y avait un problème, mais

  7   je n'ai jamais très bien compris quels étaient les détails entourant la

  8   question des prisonniers de Tarcin.

  9   Q.  Et dites-moi, aviez-vous entendu parler d'un camp situé au "silo" de

 10   Tarcin, où les civils serbes avaient été détenus ?

 11   R.  Oui, j'en ai entendu parler, mais je ne m'y suis jamais personnellement

 12   rendu à cet endroit-là.

 13   Q.  Je souhaiterais appeler votre attention sur le point (d) du paragraphe

 14   3, où de nouveau vous résumez les propos du général Mladic dans lesquels il

 15   dit que les Serbes étaient fort inquiets du fait que l'armée de la

 16   Fédération s'armait de nouveau avec l'aide des Etats étrangers. Est-ce que

 17   d'après vos informations cette conclusion qui était la sienne était vraie ?

 18   R.  Si la question est de savoir -- ou en fait, excusez-moi, vous me

 19   demandez si j'avais compris que la Fédération était en train de s'armer de

 20   nouveau ?

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Peut-être que la question n'est pas très

 22   claire. Parce que la citation qui a été mentionnée contient quelques

 23   affirmations ou déclarations. Tout d'abord, est-il exact que les Serbes

 24   étaient inquiets du fait que l'on se réarmait ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, effectivement, je crois que oui, ils

 26   étaient inquiets concernant ce fait. 

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Deuxièmement, est-ce que la Fédération

 28   agissait en coopération avec les Etats étrangers dans le contexte du


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  1   réarmement ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] D'après ma compréhension des choses, et ce,

  3   basée principalement sur les rapports issus des médias, oui, effectivement,

  4   c'était le cas.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stojanovic, je regarde l'heure,

  6   il est 14 heures 15.

  7   Monsieur Banbury, nous allons lever l'audience pour aujourd'hui. Et

  8   j'aimerais demander à Me Stojanovic de nous dire à quel moment il pense

  9   pouvoir conclure le contre-interrogatoire, et cela pourrait être

 10   intéressant également pour vous, Monsieur le Témoin.

 11   M. STOJANOVIC : [interprétation] Oui, effectivement, Monsieur le Président.

 12   Je pense que je vais pouvoir conclure dans le temps qui nous a été imparti,

 13   c'est-à-dire avant la fin de l'audience de demain.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, bien sûr, mais il y a peut-être des

 15   questions supplémentaires qui seront posées. Donc de combien de temps

 16   pensez-vous avoir encore besoin, si vous me dites par exemple j'ai besoin

 17   d'un premier volet d'audience ou de toute l'audience de demain, moins 45

 18   minutes, je pense qu'il ne serait pas difficile de conclure que vous allez

 19   pouvoir conclure à ce moment-là.

 20   M. STOJANOVIC : [interprétation] Oui, c'est cela, Monsieur le Président.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous pensez que vous allez pouvoir

 22   conclure suffisamment à temps pour permettre à l'Accusation de poser des

 23   questions supplémentaires, si cela est possible également le temps pour les

 24   questions posées par les Juges.

 25   Donc voilà, Monsieur Banbury, vous serez heureux d'apprendre que vous allez

 26   sans doute pouvoir terminer votre audition avant la fin de la journée de

 27   demain.

 28   Donc je voudrais également vous instruire de ne pas vous entretenir avec


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  1   qui que ce soit de la déclaration vous avez faite ici aujourd'hui, et de ne

  2   pas en parler à qui que ce soit s'agissant du témoignage que vous êtes sur

  3   le point de donner demain. Donc je vous attends de nouveau dans cette même

  4   salle d'audience, à 9 heures 30, demain matin.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, certainement. Merci, Monsieur le

  6   Président.

  7   [Le témoin quitte la barre]

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans la mesure où il pourrait exister

  9   quelle que confusion que ce soit concernant P00764, à savoir si la pièce a

 10   été versée au dossier ou seulement de façon provisoire sous une cote MFI,

 11   Mme la Greffière m'apprend qu'il s'agit d'un document qui a été versé au

 12   dossier sous une cote provisoire MFI, et qu'il ne s'agissait pas d'une

 13   pièce définitive.

 14   Donc la séance est levée, nous reprendrons nos travaux demain matin,

 15   vendredi, le 8 février, à 9 heures 30 du matin, dans la salle d'audience

 16   numéro I. Donc j'ai donné une mauvaise information au témoin, je demande à

 17   la Section chargée des Témoins et des Victimes de faire en sorte que le

 18   témoin puisse se présenter en salle d'audience numéro I.

 19   La séance est levée.

 20   --- L'audience est levée à 14 heures 16 et reprendra le vendredi, 8 février

 21   2013, à 9 heures 30.

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