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1 Le jeudi 25 avril 2013
2 [Audience publique]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 35.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à toutes et à tous.
6 Madame la Greffière d'audience, veuillez citer l'affaire, je vous prie.
7 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges.
8 Il s'agit de l'affaire IT-09-92-T, le Procureur contre Ratko Mladic.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Madame la Greffière
10 d'audience.
11 Et j'aimerais dans un premier temps informer tout un chacun que pour des
12 raisons personnelles et urgentes, M. le Juge Fluegge n'est toujours pas en
13 mesure de siéger aujourd'hui, et comme nous l'avons déjà indiqué hier, les
14 Juges estiment qu'il va dans l'intérêt de la justice de continuer à
15 entendre cette affaire, en application de l'article 15 bis. Qui plus est,
16 j'aimerais vous dire que s'il y a encore quelque problème de son, ce qui
17 serait possible si certains microphones sont branchés en même temps, il
18 faut savoir que tout le monde est en train d'essayer de trouver une
19 solution à ce problème, qui n'est toujours pas réglé.
20 Est-ce que vous rappelez-vous faire entrer le témoin, je vous prie, si vous
21 n'avez pas d'autres interventions.
22 [La Chambre de première instance et le Juriste se concertent]
23 [Le témoin vient à la barre]
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Van Duijn.
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'aimerais vous rappeler que vous êtes
27 toujours tenu de respecter la déclaration solennelle que vous avez
28 prononcée au début de votre déposition.
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1 Monsieur McCloskey.
2 M. McCLOSKEY : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Et merci.
3 Nous sommes prêts.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, je vous en prie, c'est à vous.
5 M. McCLOSKEY : [interprétation] Je vous remercie.
6 LE TÉMOIN : LEENDERT VAN DUIJN [Reprise]
7 [Le témoin répond par l'interprète]
8 Interrogatoire principal par M. McCloskey : [Suite]
9 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur.
10 R. Bonjour.
11 Q. Je souhaiterais que nous parlions brièvement de Potocari, nous avons
12 compris que le 12 et le 13 vous y avez travaillé, ce sont les jours où les
13 réfugiés ont été transportés. Et je vais bientôt vous montrer un extrait
14 vidéo et je sais que vous vous en souviendrez cela a été filmé le 13 vous
15 figurez d'ailleurs sur cet extrait vidéo. Mais dans un premier temps est-ce
16 que vous pourriez nous dire en quoi consistait à Potocari votre travail, le
17 12 et le 13 ?
18 R. Le 12 et le 13, fondamentalement je dirigeais les soldats néerlandais
19 qui se trouvaient à l'extérieur de la base. Les autres soldats et les
20 officiers étaient retournés à la base à Potocari, et lorsque je suis revenu
21 des positions d'arrêt, fondamentalement avec mes soldats je me suis
22 positionné entre les réfugiés. Et après la chute de l'enclave lorsque les
23 soldats serbes sont arrivés auprès de nos positions, j'ai commencé à
24 diriger les soldats néerlandais, à aider les réfugiés et à les aider en
25 fait dans la mesure où cela était possible.
26 Q. Et avez-vous assisté à la séparation des hommes en âge de porter les
27 armes, des hommes plus âgés et des jeunes hommes de leurs familles
28 effectuée par les forces serbes à Potocari ?
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1 R. Oui, oui. Pendant la séparation, en fait, nous étions là, nous avons vu
2 comment les soldats serbes ont séparé les hommes en bonne condition
3 physique des autres réfugiés.
4 Q. Et quels efforts avez-vous déployé vous et vos hommes pour essayer
5 d'élucider un tant soit peu les problèmes ou la pression imposée par cette
6 séparation ?
7 R. Mes soldats ont essayé d'aider dans la mesure de leurs moyens, on fait
8 en sorte que les gens restent debout, évitent pour faire en sorte que les
9 gens évitent de tomber du fait de la chaleur, du surencombrement et de
10 situations particulières. Et moi-même, j'ai parlé aux commandants serbes et
11 j'ai essayé de les convaincre de laisser les hommes ou les garçons plus
12 jeunes, et à mon avis, les hommes qui étaient beaucoup trop âgés, qui ne
13 pouvaient pas être des soldats, donc, et essayez de faire en sorte qu'on
14 puisse les laisser partir avec leurs familles, pour qu'ils puissent rester
15 avec leurs familles.
16 Q. Est-ce que vos efforts ont été couronnés de succès lorsqu'il s'agit par
17 exemple d'empêcher la séparation des garçons plus jeunes et des hommes plus
18 âgés ?
19 R. Je dois qu'à chaque fois, que j'ai essayé de les convaincre; cela a
20 porté ces fruits. Ce qui fait que ces hommes ont pu rester avec leurs
21 familles ou ces garçons en tout cas n'ont pas été séparés, ont pu rester
22 avec leurs familles. Mais, bien entendu, il y a eu des incidents, des zones
23 d'ombre, des zones d'ombre que je continue, qui font partie en fait du vécu
24 que j'ai transporté avec moi aujourd'hui lorsque je n'ai pas m'opposer ou
25 demandé aux commandants serbes de laisser partir ces hommes.
26 Et fondamentalement pour répondre à votre question, chaque fois que je leur
27 ai demandé, essayé de les convaincre pour que ces hommes puissent rester,
28 cela a fonctionné.
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1 Q. Alors maintenant --
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'aimerais poser, Monsieur McCloskey une
3 question supplémentaire.
4 Combien de temps avez-vous fait cet effort, Monsieur, combien de temps est-
5 ce que cela a été couronné de succès, cinq fois, 20 fois, 100 fois ? Est-ce
6 que vous pourriez peut-être nous donner une indication à ce sujet ?
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Vous savez, il est très difficile pour fournir
8 ce type d'estimation, Monsieur le Président, mais bon je dirais entre 50 à
9 100 fois par jour ou pour cette journée.
10 M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]
11 M. McCLOSKEY : [interprétation]
12 Q. Alors nous allons maintenant nous intéresser au 13 juillet, et au
13 document P1147. Il s'agit de la vidéo de Srebrenica. Et nous allons
14 visionner à partir de l'arrêt ou du point 05 : 41 jusqu'à 07 : 00. Et de
15 temps à autres, je vais interrompre pour vous poser une question.
16 [Diffusion de la cassette vidéo]
17 M. McCLOSKEY : [interprétation]
18 Q. Est-ce que vous savez qui est ce jeune homme qui porte ce béret bleu ?
19 R. Cela fait très longtemps de cela, mais oui, je le reconnais, c'est moi-
20 même.
21 Q. Alors nous allons poursuivre.
22 [Diffusion de la cassette vidéo]
23 M. McCLOSKEY : [interprétation] Nous avons fait un arrêt sur image 06 : 07
24 : 5.
25 Q. Cette personne dont nous voyons le côté du visage et qui étend le bras
26 vers vous, et qui porte un uniforme de camouflage ou en tout cas une veste
27 de camouflage, comment est-ce que ou sous quel nom est-ce que vous
28 connaissiez cette personne ?
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1 R. Il s'agit du commandant serbe que je connaissais sous le nom de Mane.
2 Q. Est-ce que vous pourriez nous dire brièvement en quoi consistaient vos
3 échanges avec lui, ce jour-là.
4 R. Au cours de ces deux jours, parce que, là, il s'agit du deuxième jour,
5 du 13, mais cela est valable pour le 12 également, il a indiqué de façon
6 très, très claire qu'il était le commandant sur le terrain. Et en fait,
7 c'était lui qui me disait quand allaient arriver les autocars, combien
8 d'autocars allaient arriver, quand est-ce que les réfugiés pouvaient
9 essayer de monter à bord des autocars. Et le 12, j'avais en fait pris des
10 mesures avec lui, il s'agissait plutôt d'un accord, bon vous ne pouvez pas
11 le voir sur cet extrait, mais il faut savoir que la majorité des réfugiés
12 étaient déjà partis. Au début, il y avait un groupe important de réfugiés,
13 et les soldats des Nations Unies se trouvaient parmi ces réfugiés, les
14 aidaient, et à une vingtaine de kilomètres se trouvaient les soldats
15 serbes. Et j'ai fait, j'ai passé en quelque sorte un accord avec Mane pour
16 que les soldats serbes n'aillent pas au milieu des réfugiés, parce que
17 nous, soldats des Nations Unies, nous nous trouvions au milieu de cette
18 foule.
19 Q. Et est-ce qu'il a été identifié, est-ce qu'il vous a dit qui était son
20 commandant à ce moment-là ?
21 R. Il m'a dit que son commandant, en fait je ne connais que son surnom. Le
22 surnom est Stalin.
23 Q. Bien.
24 M. McCLOSKEY : [interprétation] Pour ce qui est des indications et des
25 photographies, nous nous en remettons à la déclaration en application de
26 l'article 92 ter.
27 Et nous allons poursuivre le visionnage de cet extrait vidéo.
28 [Diffusion de la cassette vidéo]
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1 L'INTERPRÈTE : [voix sur voix]
2 M. McCLOSKEY : [interprétation] Bien. Alors nous nous sommes arrêtés au
3 point 06 : 45 : 7.
4 Q. Et j'aimerais maintenant ou aborder avec vous un autre thème qui avait
5 lien avec cela. Est-ce que vous avez eu des contacts personnels avec le
6 général Mladic lors de ces deux jours où vous vous êtes trouvé à Potocari ?
7 R. Oui.
8 Q. Est-ce que vous pourriez nous dire, et je fais appel à votre mémoire,
9 aux détails qu'elle aura retenus, si ce qu'il disait, ce qu'il vous a dit,
10 ce qu'il a dit aux autres personnes qui se trouvaient avec vous, prenez le
11 temps et décrivez-nous du mieux que vous pouvez vos souvenirs.
12 R. La première conversation que j'ai eue avec le général Mladic a été une
13 conversation assez générale, qui a porté sur de nombreux sujets : Le temps,
14 le sport, ou les sports, la situation, est-ce que j'étais un officier, un
15 commandant du Bataillon néerlandais se trouvant sur ces lieux. Et puis cela
16 a évolué progressivement. Il m'a demandé de quel pays je venais. Je dois
17 dire que cette question m'a surpris, parce que je pensais qu'il était
18 absolument évident que je viens des Pays-Bas et que le Bataillon
19 néerlandais venait des Pays-Bas. Mais, par la suite, j'ai compris pourquoi
20 le général Mladic m'a posé cette question, parce qu'à deux mètres de la
21 position où je me trouvais, où je parlais au général Mladic, il y avait
22 quelques soldats néerlandais qui faisaient une pause, qui buvaient de
23 l'eau, juste le long de ma route, sur le bas côté. Il a commencé à montrer
24 du doigt ces soldats, l'un après l'autre en me demandant s'ils étaient
25 également des Pays-Bas. Il a dit Holandija. Donc il m'a dit : "Est-ce que
26 celui-ci vient également de Hollande" ? Bon ils étaient tous, il s'agissait
27 tous de soldats très Néerlandais au physique, très néerlandais, race
28 [inaudible], et le dernier soldat en fait avait une peau très basanée. Je
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1 ne sais pas d'où il venait, mais le fait est que c'était un de nos soldats.
2 Donc c'était un homme de couleur, et le général Mladic m'a demandé au
3 moment où il m'a montré ce soldat, il ne m'a pas demandé d'où il venait. Et
4 il m'a dit ce type : "Est-ce qu'il vient d'Éthiopie ?" Et je lui ai
5 expliqué qu'il était également soldat néerlandais, et que nous étions une
6 société extrêmement multiraciale aux Pays-Bas, et que cela fonctionnait, et
7 que ce soldat était également un soldat néerlandais.
8 Alors le général Mladic m'a dit qu'il pensait que c'était un énorme
9 problème pour les Pays-Bas, que cette société multiraciale néerlandaise. Et
10 il m'a dit, et nous étions à l'époque en 1995, il a dit dans dix ans -- il
11 m'a dit que dix ans, il serait aux Pays-Bas avec ses soldats pour aider les
12 Néerlandais et les protéger --
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Mladic, veuillez rester assis.
14 C'est ma dernière mise en garde. Si vous souhaitez consulter votre conseil
15 --
16 Maître Lukic. Maître Lukic.
17 M. Mladic doit rester debout [comme interprété] et -- il se remet debout,
18 il devra sortir du prétoire. M. Mladic exprime son accord ou son désaccord.
19 Il l'exprime par la gestuelle de son visage, et puis, lorsqu'il n'est pas
20 d'accord, il se met debout et demande une consultation avec vous.
21 Alors, vous savez que nous faisons quand même preuve d'une certaine
22 souplesse pour ce qui est des consultations avec les conseils, mais nous
23 avons déjà dit qu'elles ne pouvaient avoir que pendant les pauses.
24 Monsieur Mladic, je vous demanderais d'attendre que j'aie terminé.
25 Je disais donc que ces consultations ont lieu à deux conditions. A
26 condition, premièrement, que M. Mladic reste assis et, deuxièmement, il
27 peut s'exprimer, mais à voix basse pour que personne dans ce prétoire ne
28 puisse entendre ce qu'il dit, ce qui sera fait s'il chuchote; sinon, les
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1 consultations sont limitées au temps de pause.
2 Cela s'est passé à plusieurs reprises. J'ai déjà mis en garde M. Mladic à
3 plusieurs reprises, je lui ai demandé de ne pas se lever parce que cela
4 peut avoir des conséquences ou un effet très intimidant, et la Chambre
5 n'accepte absolument pas cela.
6 Si M. Mladic souhaite maintenant vous consulter, à ces deux conditions - à
7 savoir, il reste assis et il chuchote - vous avez la possibilité de
8 l'entendre maintenant.
9 [La Chambre de première instance se concerte]
10 [Le conseil de la Défense se concerte]
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'entends M. Mladic. Il faut qu'il parle
12 à voix plus basse, sinon, il devra attendre la pause pour ce faire.
13 Monsieur Van Duijn, nous allons reprendre le fil de votre déposition. Vous
14 étiez en train de nous parler de votre conversation avec M. Mladic, et vous
15 étiez en train de nous dire qu'il vous avait dit que, dans dix ans, il
16 serait aux Pays-Bas pour aider les Néerlandais à les protéger de …
17 Pouvez-vous reprendre donc vos propos.
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Il m'a dit qu'il serait aux Pays-Bas dans dix
19 ans pour protéger les Néerlandais des autres races et des Musulmans
20 également, et je lui ai dit que je n'étais pas d'accord avec lui.
21 M. McCLOSKEY : [interprétation]
22 Q. Comment est-ce que vous avez pu communiquer de façon si détaillée avec
23 le général à ce moment-là ?
24 R. Lors de cette conversation, son interprète -- ou plutôt, l'interprète
25 serbe, a fait l'intermédiaire entre le général Mladic et moi-même.
26 Q. Et est-ce que vous pouvez décrire les autres contacts et communications
27 ou échanges que vous avez eus personnellement avec le général Mladic ce
28 jour-là ?
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1 R. Plus tard ce même jour, il y a eu un incident, cela m'a été relaté et
2 j'ai également entendu qu'une femme avait un comportement hystérique et, à
3 ce moment-là, j'ai fait appel à mon interprète musulman, qui était
4 d'ailleurs l'interprète pour la Compagnie Bravo, à ce moment-là le
5 capitaine Groen était déjà reparti à la base de Potocari. Mais l'interprète
6 était resté et m'a aidé toute la journée. Donc grâce à l'aide de cet
7 interprète, j'ai entendu que cette femme commençait à avoir un comportement
8 hystérique parce qu'elle avait ses cinq enfants dans la foule. Et elle
9 pensait que ses cinq enfants se trouvaient toujours dans cette foule, à
10 l'arrière par rapport à là où elle se trouvait. Donc, à ce moment-là, nous
11 avons arrêté le flux des réfugiés vers les autocars et les camions, et elle
12 a constaté que ses cinq enfants se trouvaient déjà à bord du camion,
13 c'était l'un des derniers camions du convoi, et que le convoi avait déjà
14 commencé à partir. Donc nous avons empêché les réfugiés de continuer à se
15 déplacer, elle était au milieu des réfugiés et elle a commencé à hurler et
16 elle voulait en fait se frayer un chemin à travers la foule. Donc nous
17 l'avons aidée à sortir de la foule et par l'intermédiaire de l'interprète
18 j'ai entendu son histoire et ce qu'elle avait à raconter. Et donc, à ce
19 moment-là, nous avions toujours cet accord qui avait été conclu avec Mane,
20 nous, nous étions entre les réfugiés et les autocars, à savoir à une
21 cinquantaine de mètres de la route où il n'y avait personne. Et puis à côté
22 des autocars, les soldats serbes se trouvaient là et c'est également là en
23 fait qu'ils séparaient les hommes.
24 Donc il y avait également un autre accord tacite suivant lequel les soldats
25 néerlandais ne pouvaient pas passer où aller jusqu'à ce côté. Pour moi, il
26 était absolument évident que je souhaitais réunir cette femme avec ses cinq
27 enfants, donc j'ai demandé à l'interprète s'il pouvait m'aider. Et là, j'ai
28 vu le général Mladic qui se trouvait à côté des autres soldats serbes, donc
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1 dans cette zone où je voulais placer la femme dans l'un des camions, et
2 comme je l'ai déjà, donc ils avaient déjà commencé à partir. Et je savais
3 que c'était la seule personne qui pouvait empêcher que l'on me tire dessus
4 parce que, dans un sens, j'étais en train plus ou moins de franchir ce qui
5 correspondait à une frontière.
6 Donc j'ai demandé à l'interprète d'aller trouver le général Mladic et de
7 lui expliquer ce que je faisais, de lui expliquer que je ne faisais rien
8 d'extraordinaire, de radical, et que je n'étais pas en train d'essayer de
9 briser en quelque sorte l'accord tacite mais que j'essayais tout simplement
10 de faire en sorte que cette femme puisse repartir près de ses enfants.
11 Alors l'interprète musulman hésitait parce qu'il ne voulait pas aller
12 trouver le général Mladic. Je peux comprendre tout à fait, je le
13 comprenais, il était absolument terrifié. Mais je lui ai demandé de
14 m'aider, je lui ai dit : Bon, bien moi de toute façon je vais y aller, donc
15 si vous voulez m'aider vous pouvez le faire, aidez-moi s'il vous plaît.
16 Mais je n'étais pas sûr qu'il allait le faire. Donc j'ai pris la femme avec
17 moi, j'ai commencé à courir, je l'ai placée à bord du camion avec ses cinq
18 enfants. Et lorsque je me suis retourné, j'ai vu que l'interprète était
19 allé trouver le général Mladic et lui parlait. Et étant donné qu'on ne m'a
20 pas tiré dessus, j'en ai conclu que l'interprète avait réussi à convaincre
21 le général Mladic, à faire en sorte de calmer le jeu en fait.
22 Et, bien entendu, ensuite, bon, je me suis rendu auprès de mon interprète
23 et du général Mladic pour voir comment cette conversation évoluait, et par
24 l'intermédiaire de mon interprète, le général Mladic a commencé à me dire
25 qu'il pensait que j'étais complètement fou parce que j'essayais d'aider les
26 réfugiés musulmans de cette façon, que j'étais complètement fou parce que
27 j'étais à leur écoute, et en plus je lui avais envoyé un interprète
28 musulman pour qu'il lui parle directement parce que, à ce moment-là, il
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1 n'avait pas tout à fait compris que l'interprète parlait en mon nom. Et il
2 m'a dit, donc toujours en passant par l'intermédiaire de l'interprète
3 musulman qu'ils tireraient -- qui l'abattrait sur le champ l'interprète si
4 cela venait à se reproduire.
5 Par ailleurs, il y avait aussi une sorte de jeu pervers que le
6 général Mladic a commencé à jouer il a rapproché l'interprète près de lui,
7 il lui a passé un bras autour des épaules, et il a tiré sur sa poitrine en
8 me demandant si je reconnaissais mon interprète, que j'ai été interloqué,
9 et j'ai répondu, Mais, bien sûr, c'est mon interprète, et il m'a dit : Non,
10 vous avez tort. Cet homme qui se tient à côté de moi, c'est quelqu'un de
11 bien, c'est un homme exemplaire, un Serbe et vous devriez le respecter. Et
12 il m'a demandé si je le connaissais -- si je connaissais le général Mladic.
13 J'ai répondu que : Bien sûr, je sais que vous êtes le général Mladic. Et
14 ensuite il m'a dit : Non, je ne suis pas le général Mladic, je suis un
15 Musulman. Tout ce qui me préoccupe dans la vie c'est de faire des bébés. Et
16 puis il a ajouté quelque chose je ne me souviens plus du terme qu'il a
17 utilisé mais c'était une injure, il a parlé de bâtard ou de quelque chose
18 dans ce genre.
19 Alors voilà ce qu'il s'est passé au cours de cette conversation. Et
20 mon interprète musulman a été forcé d'interpréter toutes ces choses-là
21 proférées par le général Mladic.
22 Q. Pour en finir, j'aimerais aborder brièvement un autre sujet.
23 Vous avez dit tout à l'heure qu'à un moment donné vous avez pu voir des
24 documents sur le terrain. Pourriez-vous nous dire à quel moment cela s'est
25 produit et de quel type de document ou de matériel il s'agissait ?
26 R. Eh bien, après ce qui est représenté dans les extraits vidéo que nous
27 venons de voir, la grande majorité des réfugiés est partie, et par
28 conséquent, j'ai eu suffisamment de temps pour me concentrer sur d'autres
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1 questions, par exemple, sur un incident où était impliqué une citerne d'eau
2 que les Serbes ont essayé de prendre avec eux alors que nous avions placé
3 cette citerne à l'endroit où se trouvaient les personnes blessées, qui
4 étaient aidés par les Médecins sans frontières.
5 Alors, à cet endroit, j'ai entendu plusieurs personnes dire -- me parler de
6 la situation qui prévalait près de ce qu'on appelait la "maison blanche".
7 Cette maison blanche se trouvait juste en face de la grille d'entrée qui
8 donnait l'accès à la base de Potocari, et ce qui posait problème devant
9 cette maison blanche, c'est qu'il y avait trop d'hommes qui se voyaient
10 séparés et détenus là-bas, et c'est pourquoi on m'a demandé d'aller voir ce
11 qui s'y passait.
12 Donc je suis allé à la maison blanche, et le commandant serbe, Mane suivi
13 de son interprète m'a accompagné, nous étions sur la pelouse devant la
14 maison, et là-bas, j'ai un grand nombre de passeports et de pièces
15 d'identité et d'autres effets personnels qui étaient amoncelés en face de
16 cette maison blanche.
17 Q. Et est-ce que vous avez fait des observations au sujet de ces documents
18 à qui que ce soit ?
19 R. Eh bien, après avoir évalué la situation et après avoir compris que la
20 maison était bondée d'hommes qui avaient été isolés des autres du reste des
21 réfugiés, j'ai parlé avec Mane qui se trouvait aussi sur le lieu et je lui
22 ai demandé pour quelles raisons ces hommes-là ne pouvaient pas garder leurs
23 passeports, parce que auparavant il m'avait présenté un récit disant que
24 ces hommes avaient été séparés des autres réfugiés parce qu'il s'agissait
25 de procéder à des vérifications et voir s'ils étaient des criminels de
26 guerre, donc il voulait vérifier leur liste pour s'en assurer
27 Donc je lui ai demandé : Mais si un homme n'a pas sa pièce d'identité,
28 comment pouvez-vous vous assurer de qui il s'agit ? Et ensuite, il a souri
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1 et il m'a dit que les hommes qui se trouvaient dans cette maison n'auront
2 plus besoin de leurs documents.
3 Et à ce moment-là, je me suis rendu compte qu'un sort sinistre leur était
4 réservé.
5 Q. Merci d'être venu déposer au Tribunal.
6 M. McCLOSKEY : [aucune interprétation]
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur McCloskey.
8 Maître Ivetic, êtes-vous prêt à contre-interroger le témoin ?
9 M. IVETIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Van Duijn, vous allez
11 maintenant être contre-interrogé par Me Ivetic. Me Ivetic fait partie de
12 l'équipe de la Défense de M. Mladic.
13 Maître Ivetic, à vous.
14 M. IVETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
15 Contre-interrogatoire par M. Ivetic :
16 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Van Duijn.
17 R. Bonjour, Monsieur Ivetic.
18 Q. Monsieur, avant de vous poser quelques questions, je vous conseille de
19 vous concentrer sur les questions que je vous pose afin de fournir des
20 réponses les plus précises possibles. Si jamais vous ne comprenez pas une
21 question que je vous pose, veuillez me le signaler. Si vous avez compris
22 ces instructions, nous pouvons commencer.
23 R. Tout est clair.
24 Q. Très bien. Alors, pour commencer, j'aimerais vous poser la question
25 suivante : Avant d'être déployé dans l'enclave de Srebrenica en 1995, avez-
26 vous reçu une formation; avez-vous suivi un cours concernant le cadre
27 constitutionnel ou juridique en vigueur par la République socialiste
28 fédérative de Yougoslavie ou la République socialiste de Bosnie-Herzégovine
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1 ?
2 R. La formation que j'ai suivie était plutôt de caractère militaire, bien
3 sûr. Dans le cadre de cette formation, on tenait compte de la situation
4 politique, mais l'accent n'était pas placé sur ces aspects politiques. À
5 l'époque, j'avais le grade du commandant de section.
6 Q. Merci, Monsieur. Vous dites que l'entraînement que vous avez suivi
7 avait plutôt un caractère militaire; est-ce que vous avez appris quelque
8 chose sur la structure hiérarchique ou sur l'organigramme du système de la
9 Défense territoriale ou de l'armée de la Republika Srpska ou de l'armée de
10 la BiH ? Etiez-vous au courant des échelons hiérarchiques au sein de ces
11 structures et de leurs modes de fonctionnement ?
12 R. Si mes souvenirs sont bons, nous avons reçu des informations de nature
13 générale concernant ces structures militaires, mais notre formation s'est
14 focalisée surtout sur la zone dans laquelle nous allions être déployés et
15 sur les unités militaires que nous rencontrions, donc on nous a informés
16 surtout au sujet de Srebrenica.
17 Q. Merci, Monsieur. Un autre élément de contexte avant de passer aux
18 détails.
19 Si j'ai bien compris en 1999, donc après votre déploiement en ex-
20 Yougoslavie, vous avez été promu capitaine et vous avez servi comme
21 officier chargé du renseignement au sein de l'armée néerlandaise royale.
22 Ceci figure à la page 5 de la déclaration en vertu de l'article 92 ter,
23 pièce P1154.
24 Alors j'aimerais savoir si vous avez effectué des missions caractéristiques
25 pour un officier chargé du renseignement pendant que vous étiez déployé à
26 Srebrenica dans les rangs du Bataillon néerlandais ?
27 R. Non.
28 Q. Merci, Monsieur. Alors maintenant j'aimerais que vous nous en disiez un
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1 peu plus sur la formation que vous avez reçue et les instructions que vous
2 avez reçues avant d'arriver à Srebrenica.
3 Pour commencer, si j'ai bien compris en tant que commandant de section vous
4 aviez 34 hommes qui vous étaient subordonnés ?
5 R. Je pense que vous venez de citer un chiffre exact, en effet.
6 Q. Et à l'époque, vous aviez 24 ans, tandis que la plupart des hommes sous
7 votre commandement avaient entre 19 et 20 ans; ai-je raison de l'affirmer ?
8 R. Oui, je pense que vous évaluez la chose avec justesse.
9 Q. Ni vous ni les hommes qui vous étaient subordonnés n'aviez aucune
10 expérience au niveau des combats, avant d'être arrivés à Srebrenica; ai-je
11 raison de l'affirmer ?
12 R. Oui, c'est exact.
13 Q. Bon, avant d'arriver à Srebrenica, vous et les autres soldats de votre
14 section, ainsi que tous les autres soldats du Bataillon néerlandais ont
15 suivi une formation dans le cadre des préparatifs de cette mission, et
16 cette formation a été mise sur pied par l'armée néerlandaise royale ?
17 R. En effet.
18 Q. Et pour que tout soit très clair, cette formation qui a été organisée
19 par l'armée néerlandaise royale ne comprenait pas des éléments de formation
20 caractéristiques pour les autres représentants de l'ONU, ne faisant pas
21 partie de l'armée néerlandaise royale ?
22 R. Non, en effet.
23 Q. Alors, dans le cadre de cette formation, cette sur-mesure pour
24 s'adapter à votre mission et qui a été organisée par l'armée néerlandaise
25 royale avant votre déploiement à Srebrenica, on vous a fait une
26 introduction générale sur le contexte historique et sur la façon dont
27 l'enclave de Srebrenica a été mise en place; ai-je raison de l'affirmer ?
28 R. Oui, c'est exact.
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1 Q. Et cette formation taillée sur mesure pour que vous puissiez vous
2 acquitter votre mission comprenait aussi des instructions relatives à la
3 résolution spéciale du Conseil de sécurité de l'ONU, et à l'accord sur le
4 cessez-le-feu qui s'appliquait à l'enclave de Srebrenica ?
5 R. Oui, c'est exact.
6 Q. Un fois votre formation terminée, et une fois vos forces déployées à
7 Srebrenica, en 1995, est-ce que en tant que membre du Bataillon
8 néerlandais, vous avez compris que votre mission visait à faire respecter
9 la résolution du Conseil de sécurité et l'accord sur le cessez-le-feu en
10 vigueur dans l'enclave ?
11 R. Oui, c'est la façon dont nous avons compris notre mission.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, lorsque vous parlez de la
13 résolution prise par le Conseil de sécurité, vous pourriez peut-être nous
14 préciser quelle résolution vous avez à l'esprit.
15 M. IVETIC : [interprétation] Il s'agit de la Résolution de 1993. Donc elle
16 a été adoptée au moment où l'enclave a été mise en place. Je ne peux pas
17 vous citer la cote du document au pied levé, mais nous allons l'étudier en
18 détail et nous allons passer au crible toutes les instructions que ce
19 monsieur a reçues au sujet de sa mission.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc la résolution a été adoptée en
21 1993, l'année où l'enclave a été mise en place. Nous pouvons poursuivre.
22 M. IVETIC : [interprétation] Il s'agit de la pièce P23.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] P23.
24 M. IVETIC : [interprétation] Oui, et qui porte la date du 8 mai 1993.
25 Q. Monsieur, j'aimerais maintenant que nous nous approfondissions un peu
26 ce débat de nature très générale. J'aimerais maintenant me pencher sur la
27 déposition que vous avez faite dans l'affaire Popovic, le 29 septembre 2006
28 pour vérifier que tout ce qui figure dans le compte rendu d'audience est
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1 bien exact.
2 M. IVETIC : [interprétation] Peut-on afficher, s'il vous plaît, le document
3 1D898 de la liste 65 ter.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, vous m'avez référé à la
5 pièce P23. Mais en fait cette pièce ne contient pas la résolution du
6 Conseil de sécurité de l'ONU.
7 Alors pour éviter tout malentendu, je vous signale qu'il faut être très
8 précis quand on se réfère aux instruments juridiques.
9 La pièce P23 est un accord passé entre M. Mladic et M. Halilovic au
10 sujet de la démilitarisation. Nous avons penché brièvement sur ce document,
11 hier, c'est un document où la FORPRONU servait de témoin au moment où
12 l'accord a été passé, et en vertu de cet accord, un certain nombre de
13 tâches ou de missions ont été confiées à la FORPRONU.
14 M. IVETIC : [interprétation] Monsieur le Président, mes questions se
15 basent dans leur totalité sur les entretiens qui ont eu lieu avec ce
16 témoin, et sur ses déclarations préalables qui nous ont été communiquées.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, si vous vous
18 référez à la résolution du Conseil de sécurité de l'ONU, alors il est
19 superflu de vous cacher derrière les autres pour en dissimuler votre
20 erreur, parce que ce n'est pas du tout utile aux Juges de la Chambre.
21 M. McCLOSKEY : [interprétation] Monsieur le Président, je vais peut-être
22 pouvoir être utile à Me Ivetic et aux Juges de la Chambre, il s'agit de la
23 Résolution 824 qui correspond à la pièce P22, et de la Résolution 836 qui
24 correspond à la Résolution P24.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et les deux résolutions datent de 1993 ?
26 M. McCLOSKEY : [interprétation] En effet.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais c'est la raison pour laquelle j'ai
28 demandé de quelle résolution de 1993, il s'agissait.
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1 Maître Ivetic, nous avons deux résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU
2 qui ont été toutes les deux adoptées en 1993. Nous avons par ailleurs un
3 accord portant sur la démilitarisation, donc veuillez formuler vos
4 questions de façon très précise.
5 Vous pouvez poursuivre.
6 M. IVETIC : [interprétation] Merci.
7 J'aimerais qu'on affiche le document 1D898 de la liste 65 ter. Page 3 du
8 document qui correspond à une page du compte rendu d'audience originale --
9 L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas saisi le chiffre.
10 -- j'aimerais que nous nous penchions tout particulièrement sur les lignes
11 18 à 22. Et comme le document n'existe que dans une seule version
12 linguistique, nous pouvons peut-être l'agrandir quelque peu pour que le
13 témoin puisse le déchiffrer plus facilement.
14 Q. Alors Monsieur, j'aimerais vous poser des questions au sujet de
15 l'extrait qui commence à la ligne 8, je cite :
16 "Question. Je n'ai pas l'intention d'approfondir tout ceci, mais quand on
17 examine les sous-titres, on s'aperçoit qu'il devait y avoir le cessez-le-
18 feu, que la région est censée être isolée, que la région est censée être
19 démilitarisée, que les unités paramilitaires et militaires sont censées
20 quitter la région. C'était là le thème de votre mission telle que vous les
21 avez compris, n'est-ce pas ?
22 "Réponse. Oui."
23 Alors pouvez-vous confirmer que cet extrait tiré de votre déposition dans
24 l'affaire Popovic correspond à la vérité, et reflète d'une façon correcte
25 la façon dont vous aviez compris votre mission au moment où vous avez été
26 déployé à Srebrenica, en 1995 ?
27 R. Oui.
28 Q. Et sur la base de quoi avez-vous compris que l'enclave de Srebrenica
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1 devait être démilitarisée ? D'où vient cette interprétation ?
2 R. Je n'ai pas compris votre question, Maître Ivetic.
3 Q. Je vais alors la reformuler.
4 Vous avez compris que votre mission consistait en partie à démilitariser la
5 région par un recours à la force. Alors comment êtes-vous arrivé à cette
6 conclusion, à cette interprétation ? Est-ce que quelque chose qui vous a
7 été communiqué par vos supérieurs hiérarchiques, est-ce quelque chose que
8 vous avez lu dans un document?
9 R. Dans le cadre de notre formation, on nous a fait savoir qu'en partie
10 notre mission consistait à faire respecter et maintenir le cessez-le-feu en
11 vigueur, et à préserver l'intégrité de la zone démilitarisée. Donc c'est
12 quelque chose qu'on m'a appris et qu'on m'a fait savoir au cours de la
13 formation avant d'être déployé.
14 Et j'apporte une petite correction. Nous n'avions pas suffisamment de
15 personnel pour imposer la démilitarisation par un recours à la force, tout
16 ce que nous pouvions faire c'était de maintenir le cessez-le-feu.
17 Q. Mais, Monsieur, une fois que vous avez été employé dans l'enclave,
18 avez-vous eu l'occasion de conclure que ce cessez-le-feu n'existait que sur
19 papier et qu'il ne correspondait pas à la situation sur le terrain ?
20 R. La situation qui prévalait dans l'enclave était différente par rapport
21 à ce qu'on nous a appris au cours de notre formation, en effet.
22 Q. En fait il n'y avait pas de cessez-le-feu respecté sur le terrain; est-
23 ce que vous êtes d'accord avec ce constat ?
24 R. Oui, c'est exact.
25 Q. Je vais me pencher en détail sur ce sujet un peu plus tard, mais
26 permettez-moi de vous posez dès maintenant la question suivante : Est-ce
27 que -- d'après vous, l'enclave n'avait pas été démilitarisée au moment où
28 vous êtes arrivé, est-ce qu'il y avait toujours des groupes de Musulmans de
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1 Bosnie armés qui opéraient au sein de l'enclave au moment où vous avez été
2 déployé ?
3 R. Il existait toujours un groupe armé de Musulmans de Bosnie, ce groupe
4 était opérationnel, cela est exact. La démilitarisation de l'enclave
5 n'avait pas été menée à bout. On avait entamé et un certain nombre de
6 résultats ont été obtenus, mais le processus de la démilitarisation n'avait
7 pas été terminé.
8 Q. Merci, Monsieur. J'aimerais que nous nous penchions maintenant en
9 profondeur sur cette question de la démilitarisation de l'enclave.
10 Pour commencer, j'aimerais vous poser des questions au sujet de la
11 déposition faite par un autre témoin pour voir si vous êtes d'accord avec
12 lui et si cela correspond à vos connaissances ou à vos expériences.
13 M. IVETIC : [interprétation] J'aimerais donc que l'on affiche la pièce
14 P00057 au prétoire électronique --
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, nous avons une pratique
16 qui me semble très bonne, d'abord on essaie d'établir ce que le témoin sait
17 et ne sait pas en lui posant des questions, et ce n'est que par la suite
18 qu'on le confronte avec des dépositions faites par d'autres témoins, donc
19 il est toujours superflu à recourir à cette méthode. Et je vous invite à
20 vous plier à notre pratique habituelle.
21 M. IVETIC : [interprétation] Merci.
22 Q. Monsieur, pendant que vous vous trouviez sur le terrain à Srebrenica et
23 au fur et à mesure que le temps s'écoulait, est-ce que vous avez eu
24 l'impression que le nombre de combattants musulmans était en augmentation
25 et que vous les voyiez plus souvent se promener dans les rues ?
26 R. Je ne peux pas me rappeler des chiffres, je ne sais pas si le nombre de
27 combattants musulmans armés était en hausse, mais comme le temps passait,
28 l'activité s'intensifiait des deux côtés.
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1 Q. Et juste pour préciser, lorsque vous vous servez du terme "activité",
2 j'imagine que vous faites référence à des activités d'ordre militaire ou à
3 des activités de combat.
4 R. En effet. Je pense aux tirs, aux détonations, aux patrouilles, aux
5 activités d'ordre militaire. Oui.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] L'impression que nous avons c'est que la
7 question qui vous a été posée porte sur la présence des Musulmans armés sur
8 les lieux. Et vous dites que leur nombre ait été en hausse ou non, en tout
9 cas, les activités se sont intensifiées. Vous avez ajouté qu'elles se sont
10 intensifiées des deux côtés. Donc faut-il comprendre que les deux parties
11 étaient en présence et se livraient à des activités de combat, que les
12 forces serbes se trouvaient à l'extérieur de l'enclave tandis que les
13 forces musulmanes étaient actives à l'intérieur de l'enclave ? Est-ce ainsi
14 qu'il faut comprendre votre réponse ?
15 LE TÉMOIN : [interprétation] En effet, Monsieur le Président. Les forces
16 serbes étaient plus actives à l'extérieur de l'enclave, en effet.
17 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Et leurs activités, contre quelle
18 cible étaient-elles dirigées ?
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Et bien parfois ils ouvraient le feu tout
20 simplement en direction de la ville. Et puis on les voyait aussi faire des
21 patrouilles, on voyait des véhicules se déplacer à l'extérieur de
22 l'enclave, et nous avons pu suivre toutes ces activités depuis nos postes
23 d'observation. Et puis, bien sûr, nous avions des éléments d'information
24 que nous recevions de l'extérieur de l'enclave grâce à nos patrouilles, et
25 parfois nous étions aussi en contact avec les forces musulmanes.
26 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.
27 M. IVETIC : [interprétation]
28 Q. Est-ce que vous avez, Monsieur, entendu parler, ou avez-vous appris de
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1 quelque façon que ce soit qu'il s'est produit un incident lorsqu'un certain
2 nombre de vos collègues du Bataillon néerlandais ont été capturés par les
3 forces de Musulmans de Bosnie dans la région connue sous le nom du
4 "Triangle de Bandera" ? Si vous en savez quelque chose, veuillez nous
5 communiquer vos connaissances.
6 R. Je n'ai entendu que des récits qui circulaient, tout ce que je sais, je
7 le sais par ouï-dire. Donc oui, j'ai entendu parler de cet incident, mais
8 il ne s'est pas produit dans ma zone de responsabilité.
9 Q. J'ai une question qui s'enchaîne à la question précédente et à savoir :
10 Le triangle Bandera se trouvait le long de la frontière de l'enclave de
11 Srebrenica, donc dans une zone qui était censée être démilitarisée ?
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, pour ce qui est du
13 triangle de Bandera, je pense que nous avons déjà eu des éléments de preuve
14 à cet effet, et nous avons pu constater ce qu'il en est, donc ce n'est pas
15 une question litigieuse.
16 Par conséquent, lorsque nous avons invité Me Lukic à ne poser que des
17 questions qui peuvent nous apporter des éléments nouveaux, il a ignoré
18 notre conseil, parce qu'en fait, ce n'est pas la peine de nous présenter
19 des éléments de preuve sur des sujets qui ne sont pas litigieux.
20 Mais je regarde quelle heure il est et je vois que le moment est venu de
21 faire une pause. Et vous pouvez repenser à vos questions et les reposer
22 après la pause.
23 Monsieur Van Duijn, nous allons faire une pause de 20 minutes. Vous pouvez
24 suivre l'huissière.
25 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]
26 [Le témoin quitte la barre]
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons maintenant faire une pause
28 et nous reprendrons nos travaux à 11 heures moins dix.
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1 --- L'audience est suspendue à 10 heures 31.
2 --- L'audience est reprise à 10 heures 55.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce qu'on peut faire entrer le témoin
4 dans le prétoire, s'il vous plaît.
5 [La Chambre de première instance se concerte]
6 [Le témoin vient à la barre]
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, vous pouvez continuer.
8 M. IVETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
9 Q. Monsieur, est-ce que vous seriez d'accord avec moi pour dire que le
10 personnel ou les effectifs de l'ABiH, que vous avez pu voir lors de votre
11 déploiement dans cette enclave de Srebrenica, avaient souvent disposé
12 d'armes d'infanterie qui semblaient être tout à fait neuves ? Quand je
13 parle d'armes d'infanterie, je veux dire kalachnikovs.
14 R. Je ne dirais pas souvent, mais dans une phase ultérieure, certes, lors
15 de notre mission, nous avons pu voir que les effectifs musulmans avaient
16 possédé des armes toutes neuves.
17 Q. Merci, Monsieur. Je voudrais à présent parler de votre témoignage en
18 application de l'article 92 ter.
19 M. IVETIC : [interprétation] Et à ce titre, je voudrais que l'on nous
20 affiche la pièce P1154. Et je souhaite que l'on nous affiche la page 9 du
21 prétoire électronique. Cela devrait correspondre à la page 2 262 du compte
22 rendu d'audience d'origine, pour ce qui est de numérotation d'origine.
23 Et je voudrais que nous nous concentrions … je m'excuse du
24 contretemps. Il me semble que ce n'est pas la bonne page. Il faudrait qu'on
25 voie 2 262 en haut. J'ai parlé de page 9, et je vois qu'ici on en est à la
26 page 23.
27 Alors 2 262, à savoir la page précédente. Merci.
28 Essayons de nous pencher sur les lignes 10 à 18 du compte rendu en
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1 application du 92 ter.
2 Q. Et ici, Monsieur, si vous pouvez me suivre, vous n'avez pas besoin de
3 lire, je vais faire un résumé pour le compte rendu. Vous parlez de
4 l'armement du Bataillon néerlandais, à quoi vous avez pu accéder, vous avez
5 parlé des conditions climatiques qui étaient celles de Srebrenica, et étant
6 donné qu'il y avait un déploiement dès le début du Bataillon néerlandais,
7 il y avait des armes trop vieilles qui faisaient que les balles tombaient à
8 côté.
9 Alors ceci est-il le résultat de l'impossibilité de réapprovisionner les
10 troupes ?
11 R. Oui, tout cela est exact.
12 Q. Et l'ABiH et les combattants que vous avez pu voir dans l'enclave, est-
13 ce qu'il vous a semblé qu'ils avaient les mêmes difficultés pour ce qui est
14 de leurs armes d'infanterie et de leur lance-roquettes, difficultés
15 auxquelles a dû faire face la partie néerlandaise, ou est-ce qu'ils ont eu
16 tout de même la possibilité de se réapprovisionner ?
17 R. Je n'ai aucune information portant sur les difficultés auxquelles
18 devaient faire face les forces musulmanes pour ce qui est de leur
19 réapprovisionnement.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Puis-je poser une question de suivi.
21 Quelle a été exactement la cause de leur impossibilité à se
22 réapprovisionner ?
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, il n'y a pas eu d'autorisation de
24 fournie par les forces serbes qui avaient pour mission de se trouver sur le
25 secteur OP Papa, qui était sur une route goudronnée par laquelle pouvaient
26 passer les convois, si tant est que la chose était rendue possible. Mais,
27 en somme, la totalité des convois à compter du mois de mars n'obtenaient
28 pas d'autorisation de la part des effectifs serbes.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous avez des connaissances
2 personnelles à ce sujet ? Est-ce que vous avez appris cela par ouï-dire ?
3 Parce que vous avez témoigné à ce sujet, et j'aimerais savoir si c'est une
4 information que vous avez pu recueillir à titre personnel ou est-ce que
5 vous l'avez ouï dire de la bouche de quelqu'un d'autre ? Est-ce que vous
6 pouvez nous en dire plus ?
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, dans des entretiens avec les gens de
8 la logistique, j'ai appris quelles étaient les difficultés pour ce qui
9 était de l'obtention des permis de passer et tout ce qu'il fallait
10 contacter au niveau des forces serbes pour obtenir ces approbations. Et,
11 plus tard, il y a eu, bien entendu, bien des déceptions de leur côté
12 lorsque ces autorisations n'étaient pas délivrées. Et nous avons pu
13 apprendre de la bouche des officiers de la logistique qu'il y avait des
14 convois qui étaient sur la route qui étaient arrêtés à des postes de
15 contrôle dans un autre secteur.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Continuez, Maître Ivetic.
17 M. IVETIC : [interprétation]
18 Q. Monsieur, est-ce que vous avez eu l'occasion d'en entendre parler ou
19 est-ce que vous avez été témoin pour assister à l'approvisionnement des
20 Musulmans de Bosnie ou de faire du commerce avec les Musulmans de Bosnie
21 pour ce qui est d'armes et de munitions, sans se limiter au personnel du
22 Bataillon néerlandais ?
23 R. Je n'ai aucune connaissance ou information à ce sujet.
24 Q. Merci. J'aimerais à présent vous poser quelques questions au sujet de
25 la teneur de votre témoignage dans une autre affaire, Blagojevic et Jokic.
26 M. IVETIC : [interprétation] A ce titre, j'aimerais que l'on nous affiche
27 la pièce 1D896 de la liste 65 ter. Ça devrait être la page 30 du prétoire
28 électronique, et c'est lié au compte rendu page 1 102 de ladite affaire. Je
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1 souhaite que nous nous penchions sur la teneur de la ligne 18 et de celle
2 qui suit.
3 Q. Alors, Monsieur, je vais en donner lecture. Je vous convie à suivre la
4 partie de ce volet. Cela commence à la page suivante et cela commence comme
5 suit :
6 "Question : Bien. Mais toute la finalité poursuivie c'était de faire en
7 sorte que ce secteur, ou cette enclave, se trouve être protégé par les
8 Nations Unies, et les Serbes étaient censés respecter la neutralité de la
9 zone, à condition, bien entendu, que les gens à l'intérieur soient
10 démilitarisés à part entière, n'est-ce pas ?
11 "Réponse : Cela a été la teneur de l'accord, oui.
12 "Question : Bon. Cela a été la teneur de l'accord. Mais une fois que vous
13 êtes arrivé sur le terrain et pendant toute cette période où vous avez été
14 là-bas, ça n'a jamais été démilitarisé, n'est-ce pas ?"
15 M. IVETIC : [interprétation] Page suivante maintenant, s'il vous plaît.
16 Q. "Réponse : Non, pas à part entière. Non.
17 "Question : Alors c'est comme si on disait qu'une femme est un peu
18 enceinte. On est démilitarisé ou on ne l'est pas ?
19 "Réponse : Quand on souhaite démilitariser, on a besoin d'un certain nombre
20 de soldats. Vous allez dans le secteur qui est très grand et vous avez si
21 peu de soldats à votre disposition, donc il n'est pas possible de
22 démilitariser alors que vous n'avez que 200 ou 300 soldats sous vos ordres.
23 "Question : Quand vous parlez de 200 ou 300 soldats, vous êtes en train de
24 parler, bien entendu, du Bataillon néerlandais, n'est-ce pas ?
25 "Réponse : Oui, exactement.
26 "Question : Bien sûr, nous sommes en train de parler de 1995, on a proclamé
27 cette zone comme étant démilitarisée dès 1993, et ce n'est pas la faute du
28 Bataillon néerlandais, mais ceux qui avaient été là-bas avant vous n'ont
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1 pas réussi à faire de cette zone une zone démilitarisée ?
2 "Réponse : Oui, nous savions que les Musulmans avaient des armes, en effet.
3 "Question : Bien. Mais ma question était celle de savoir si tous ceux qui
4 étaient venus avec vous n'avaient pas pris des armes qui se trouvaient là ?
5 "Réponse : Non".
6 Alors, Monsieur, lorsqu'il s'agit de ce fragment de témoignage fourni par
7 vous dans une autre affaire, tel que je viens d'en donner lecture et vous
8 avez pu suivre, est-ce que vous pouvez confirmer pour le compte rendu
9 d'audience ici si cela est conforme à la vérité et si cela reprend de façon
10 précise tout ce que vous avez dit, et dites-nous aussi si vous diriez
11 exactement la même chose si on venait à vous poser la même question sous
12 serment de dire la vérité.
13 R. C'est tout à fait conforme à la vérité et exact.
14 Q. Alors maintenant, une ou deux questions de suivi.
15 Etant donné que le Bataillon néerlandais n'avait pas suffisamment de
16 personnel - il n'avait que 200 ou 300 soldats, cela ne suffisait pas pour
17 démilitariser l'enclave - est-ce que vos collègues, vous, vos commandants
18 ont fait en sorte que les commandants de la FORPRONU à Sarajevo, à Zagreb,
19 en soient informés, le savez-vous ?
20 R. Le fait est que, en juillet 1995, nous n'avons disposé que de 2- à 300
21 soldats, et cela a été dû au fait que les convois d'aide humanitaire qui
22 apportaient des vivres ou des réapprovisionnements pour le Bataillon
23 néerlandais, et les convois qui emmenaient des soldats pour des permissions
24 n'avaient pas non plus été à même de revenir sur place du fait de l'absence
25 d'autorisation pour ce qui était de passer par les postes de contrôle
26 serbes. Ce que je sais -- ce dont j'ai entendu parler, c'est que le colonel
27 Karremans en personne a présenté à plusieurs reprises des rapports au
28 commandement de la FORPRONU pour leur faire savoir qu'il y avait une
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1 situation troublante découlant de ce manque de personnel et de cette
2 carence de fourniture ou d'approvisionnement.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, il y a une suggestion
4 dans votre question qui est celle de laisser entendre que cette
5 démilitarisation avait été la tâche de la FORPRONU, j'imagine. Est-ce que
6 c'est ce que vous avez retrouvé comme terme dans l'accord ? Et si c'est le
7 cas, afin que nous comprenions mieux votre question, veuillez nous le dire.
8 Indépendamment, bien sûr, d'une interprétation juste ou erronée de la chose
9 …
10 M. IVETIC : [interprétation] Ma question était liée au témoignage déjà
11 fourni par ce témoin, parce que quand il a parlé de démilitarisation, j'ai
12 voulu savoir s'il avait été débattu de ce fait, à savoir que cette
13 démilitarisation n'avait pas pu être réalisée et que c'était la tâche qui
14 était la leur.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bon. Maintenant, vous avez l'opinion du
16 témoin. Peut-être pourrais-je moi-même poser la question au témoin.
17 Alors, Monsieur le Témoin, était-ce votre mission à vous que de
18 démilitariser ce secteur, ou est-ce que les parties en présence étaient
19 censées démilitariser ce secteur ? De votre avis, comment la situation se
20 présentait-elle ?
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Notre objectif avait été de maintenir cette
22 zone en tant que zone démilitarisée. A chaque fois que nous avions un
23 contact avec les forces musulmanes, lorsque nous les voyions porter des
24 armes, ça faisait partie de notre mission que d'essayer de nous emparer de
25 ces armes. Mais étant donné le fait que nous n'avions que si peu de
26 personnel, il n'y a pas eu d'activité distincte à ce sujet, si ce n'est de
27 demander aux forces musulmanes de restituer leurs armes pour se conformer à
28 l'accord au terme duquel le secteur était censé être démilitarisé.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais est-ce qu'il devait y avoir une
2 présence militaire des Musulmans, étant donné le régime mis en place ?
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non, ça n'a pas du tout été ce qui a été
4 convenu.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Votre réponse est quelque peu ambiguë.
6 Est-ce que l'accord disait qu'ils ne devaient pas se trouver là-bas ou est-
7 ce que l'accord disait qu'ils devaient se trouver là-bas ?
8 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, ils ne devaient être là-bas.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, il ne devait pas y avoir
10 d'activités militaires de déployés par les effectifs musulmans là-bas. Mais
11 il y en a eu.
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et alors, dans cette mesure, ou dans
14 cetexte quand vous parlez de démilitarisation; est-ce que vous parlez de la
15 nécessité d'éloigner toute présence militaire ou de palier à toute activité
16 militaire ? Est-ce que vous avez compris aussi que vous deviez saisir les
17 armes qui se trouvaient là-bas ? Est-ce que c'est ainsi que vous avez
18 compris le terme de démilitarisation ?
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, au fond lorsque nous constations que
20 ces forces musulmanes possédaient des armes, c'était d'habitude quand ils
21 nous tiraient dessus, quand ils tiraient sur nos patrouilles dans le
22 secteur.
23 Donc dans ce type de situations, il n'a pas eu de débat ou il n'y a pas, si
24 le préférez, eu de demande de faite auprès des soldats musulmans qui nous
25 tiraient dessus de restituer leurs armes. On pouvait ça et là voir que ces
26 hommes musulmans étaient en train de porter des armes, mais dans la plupart
27 des cas de figure, on apprenait qu'ils avaient des armes parce qu'ils
28 étaient en train de nous tirer dessus.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors leur avez-vous dit qu'ils
2 n'étaient pas censés se trouver là ?
3 LE TÉMOIN : [interprétation] Moi, j'ai eu plusieurs contacts avec les
4 commandants musulmans dans le secteur dont j'ai eu la charge, et je précise
5 qu'il s'agissait de la partie nord-est de l'enclave et j'avais dans ce
6 secteur des postes d'observation qui s'appelaient Québec et Roméo, et j'ai
7 parlé à ces soldats musulmans en leur disant qu'ils n'étaient pas censés
8 porter des armes.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais ils n'étaient pas censés
10 se trouver là non plus. On est en train de parler de présence militaire et
11 d'activités militaires.
12 LE TÉMOIN : [interprétation] Il était difficile de faire une distinction
13 très nette entre les réfugiés et la population qui se trouvait dans
14 l'enclave pour dire : Bon, ici on a les réfugiés et les civils et ces
15 hommes-là, eux, sont des soldats. Parce que ça n'a pas été organisé de la
16 sorte. Ils n'étaient pas organisés comme nous avons organisé nous-mêmes.
17 Il est donc difficile de dire nous pouvions nous entretenir avec l'un
18 des hommes du village et il pouvait porter des vêtements civils, et une
19 heure plus tard, il allait prendre ces armes, et il s'en allait l'arme au
20 poing, pour nous tirer dessus à nous ou sur les effectifs serbes.
21 Donc on ne pouvait pas clairement faire la distinction entre la
22 présence militaire et la présence de civils.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Maître Ivetic, veuillez
24 continuer.
25 M. IVETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Vous m'avez
26 demandé si cela faisait partie intégrante de l'accord. L'accord est la
27 pièce P23, c'est signé le 8 mai 1993 par le général Mladic, le général
28 Halilovic et le général Morillon et dans cet accord on décrit le rôle de la
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1 FORPRONU pour ce qui est de la mise en œuvre d'un contrôle, et la mise en
2 place d'une zone démilitarisée à Srebrenica.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Mais de qui devait-on prendre les
4 armes ou saisir les armes en application de cet article 5, Maître Ivetic ?
5 M. IVETIC : [interprétation] Eh bien, toutes les armes qui entraient là,
6 toute personne en possédant, et c'est ce qui dit -- ce que dit la version
7 en serbe : "On ne devrait pas autoriser les soldats à entrer dans cette
8 zone démilitarisée."
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Mais vous avez parlé de la mission
10 de la FORPRONU. Vous avez parlé d'obligations qui sont celles des soldats,
11 n'est-ce pas ? Et vous faites référence au paragraphe 5. Laissez-moi me
12 pencher sur le texte.
13 M. IVETIC : [interprétation] Bien peut-être pourrait-on se pencher sur la
14 version en anglais, parce qu'il y est dit que la FORPRONU allait contrôler
15 la zone démilitarisée et on énumère les détails dont j'ai donné lecture ?
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais de qui devait-on déposséder -- qui
17 devait-on déposséder de ces armes ?
18 M. IVETIC : [interprétation] Mais toutes personnes armées devaient être
19 dépossédées.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bon. Alors toutes personnes armées.
21 Voyons voir. Vérifions. Donnez-moi un instant.
22 "Les non-combattants ceux qui veulent entrer ou qui se trouvent dans la
23 zone démilitarisée, exception faite des membres de la FORPRONU, n'ont pas
24 l'autorisation de posséder ni arme, ni munition, ni explosif. Les
25 munitions, armes, explosifs en leur possession seront saisis par la
26 FORPRONU."
27 Donc ça, ça se rapporte à ceux qui ne sont pas des combattants.
28 M. IVETIC : [interprétation] Ligne suivante, Monsieur le Juge.
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1 "Les combattants ne seront pas autorisés à entrer ou à se trouver dans la
2 zone démilitarisée."
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, je crois que cela n'est
4 pas contesté, je suis en train de regarder vers l'Accusation, donc il n'est
5 pas contesté que c'est ce que les combattants n'étaient pas censés faire.
6 Mais il n'est pas aussi question de saisie d'armes.
7 A l'article 5, dernier paragraphe, il est donné ou il est énuméré les
8 missions concrètes, de la FORPRONU, me semble-t-il. Je serais tout à fait
9 disposé à me pencher sur des dispositions qui énonceraient les tâches de la
10 FORPRONU, et ce qui a été défini ça se trouve au paragraphe 4 de l'article
11 5, mais il se peut que ce soit plus précisé ou énoncé plus en détail
12 ailleurs.
13 Veuillez continuer.
14 M. IVETIC : [interprétation]
15 Q. Monsieur, vous avez témoigné au sujet de difficultés auxquelles les
16 effectifs du Bataillon néerlandais faisaient face parce qu'il ne pouvait
17 revenir de leur permission ce qui faisait que l'enclave était tombée dans
18 une situation où les effectifs de la FORPRONU ne faisaient que diminués. Et
19 donc avant que ces individus ne quittent la zone, cette zone ne se trouve
20 pas être démilitarisée ? Avant qu'ils ne s'en aillent, s'il y avait des
21 membres du bataillon indépendamment de leur nombre, et j'imagine qu'il
22 devait être plus de 300, ces 300 hommes ne suffisaient pas pour
23 démilitariser un secteur de la taille de Srebrenica, n'est-ce pas ?
24 R. C'est tout à fait exact, oui.
25 Q. Alors est-ce que le Bataillon néerlandais ou la FORPRONU, à votre
26 connaissance, avait des chiffres ou des estimations pour ce qui est de la
27 force des Musulmans de Bosnie en arme se trouvant dans l'enclave de
28 Srebrenica en 1995 ?
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1 R. Je ne me souviens pas de cela. Il se peut qu'il y ait eu des
2 évaluations de faites à l'époque, mais je ne m'en souviens pas à présent.
3 Q. Cela se comprend. Le problème auquel vous avez eu à faire face et que
4 vous avez souvent mentionné, à savoir le fait que les membres de la
5 FORPRONU aient essuyé des tirs de la part des Musulmans de Bosnie. Alors
6 indépendamment du fait de savoir si on vous avait tiré dessus à vous ou
7 pas, lorsque vous voyez des Musulmans de Bosnie armés et lorsque vous
8 essayez de les désarmer, ils s'en allaient et ils disparaissaient dans ce
9 terrain qu'ils connaissaient de façon évidente beaucoup mieux que vous,
10 n'est-ce pas ?
11 R. C'est tout à fait exact.
12 Q. Est-il exact de dire aussi que vous n'avez pas eu la possibilité de
13 procéder à l'envoi de toutes les patrouilles que vous aviez envisagées, et
14 vous n'avez donc pas eu la possibilité d'exercer un contrôle sur la
15 totalité du terrain qui tombait sous votre responsabilité ou dans
16 l'accomplissement de votre mission, c'est-à-dire le nord de l'enclave ?
17 R. Cela est tout à fait exact aussi.
18 Q. Alors j'aimerais à présent vous demander quelque chose au sujet d'un
19 individu répondant au nom de Nasir Sabanovic. Est-ce que vous savez nous
20 dire qui c'était en 1995, quelles étaient ses fonctions, et si vous avez eu
21 l'occasion de rencontrer l'individu en question ?
22 R. Nasir Sabanovic était un commandant militaire des Musulmans de Bosnie,
23 dans le secteur de responsabilité qui était le mien. Et la plupart du
24 temps, lorsque je me trouvais au poste d'observation Québec, j'avais des
25 entretiens avec lui au sujet des activités déployées par lui et celles des
26 Serbes de Bosnie de l'autre côté -- à l'extérieur de l'enclave.
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Van Duijn, il n'est point
28 nécessaire de déconnecter votre micro, parce que les problèmes techniques
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1 d'hier ont été surmontés, ce qui fait que nous n'avons plus les bruits que
2 nous avions eus hier. Vous pouvez donc vous concentrer sur les questions et
3 les réponses.
4 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
5 M. IVETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Cela nous aide
6 également.
7 Q. Alors, Monsieur, dites-nous, y a t-il eu des situations où M. Sabanovic
8 ou d'autres responsables militaires des Musulmans de Bosnie vous
9 rencontraient, et est-ce que ces gens qui vous rencontraient, vous et les
10 autres supérieurs du Bataillon néerlandais, portaient des armes ou pas ?
11 R. Certaines fois, Nasir Sabanovic portait sur lui une arme, un pistolet.
12 Q. Est-ce que quiconque du Bataillon néerlandais de la FORPRONU aurait dit
13 à M. Sabanovic qu'il n'était pas censé être armé et est-ce qu'on a essayé
14 de le désarmer ?
15 R. A l'occasion des réunions que j'ai eues avec lui, étant donné qu'il n'a
16 pas eu de rencontres avec mes supérieurs hiérarchiques à moi, donc
17 s'agissant des rencontres que j'ai eues avec lui, je lui ai dit qu'il
18 n'était pas censé porter une arme, mais je n'ai pas essayé de le désarmer.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, même question de suivi.
20 Lui avez-vous dit qu'il n'était même pas censé se trouver dans l'enclave ?
21 Vous lui avez parlé en sa qualité de commandant des effectifs musulmans,
22 des effectifs militaires. Mais tout à l'heure, on a établi qu'il n'était
23 pas censé se trouver là. Vous nous avez expliqué les difficultés que vous
24 avez eues pour ce qui est de définir qui était en fait un combattant et qui
25 n'en était pas. Alors, pour ce qui est de M. Sabanovic, il ne pouvait pas y
26 avoir un doute quel qu'il soit pour ce qui est de son statut militaire.
27 D'un, dites-nous si vous êtes d'accord; et de deux, dites-nous si
28 vous lui avez dit qu'il n'était pas censé se trouver là-bas ?
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1 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je ne suis pas
2 d'accord. Parce qu'à chaque fois que je me suis entretenu avec Nasir
3 Sabanovic, il me disait à chaque fois qu'il ne voulait pas se trouver dans
4 ce type de situation. Et, si mes souvenirs sont bons, à chaque fois que je
5 me suis entretenu avec lui, il portait des vêtements civils. Il n'était
6 jamais venu en uniforme. Et il m'expliquait que compte tenu de la
7 situation, il s'est trouvé forcé à prendre les armes.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Certes. Mais vous l'avez décrit vous-
9 même comme étant un commandant militaire. Est-ce que vous êtes en train de
10 nous dire qu'il n'était pas censé y avoir une présence militaire quelle
11 qu'elle soit ? Vous nous avez parlé des difficultés auxquelles vous avez dû
12 faire face. Indépendamment du fait de porter un uniforme ou pas, vous
13 l'avez considéré comme étant un chef militaire ? Et aux termes de l'accord
14 de démilitarisation, il n'était pas censé y avoir de présence militaire du
15 tout.
16 Alors, le lui avez-vous dit à quelque occasion que ce soit ? Parce que vous
17 nous dites qu'il n'avait pas souhaité lui-même se trouver dans ce type de
18 situation. Mais ça ne change rien aux termes de l'accord passé ?
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, mais la difficulté c'est qu'on savait --
20 on le voyait comme étant un commandant militaire, parce que c'était le seul
21 commandant militaire dans le secteur avec qui j'ai pu m'entretenir, et je
22 pense qu'à une occasion j'ai eu un entretien où il m'a dit qu'il se
23 considérait comme étant un civil.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je suis en train de relire votre
25 réponse. Vous avez dit :
26 "Nasir Sabanovic était un commandant militaire des Musulmans de Bosnie dans
27 ma zone de responsabilité. Et la plupart des fois où j'ai été au poste
28 d'observation Québec, je m'entretenais avec lui au sujet de ses activités
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1 et j'apprenais de sa part ce qu'il pensait des activités déployées par les
2 forces serbes de l'autre côté de l'enclave."
3 Alors, était-il considéré comme étant un civil, si quelqu'un arrivait à
4 bord d'un char en disant : Je suis un civil, vous avez décrit cet homme un
5 chef militaire.
6 Alors, peut-être aurait-il suffit de le lui dire, mais -- peut-être cela
7 aurait-il suffi. Mais il me semble que dans vos réponses, vous faites de
8 lui un civil ou un quasi-civil, mais vous avez discuté avec lui de ses
9 activités en sa qualité de commandant militaire.
10 LE TÉMOIN : [interprétation] Hm-hm.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je suppose que vous semblez dire qu'il
12 eut fallu agir différemment. Mais ma question est simple : lui avez-vous
13 dit que des chefs militaires n'étaient pas censés se trouver là-bas ?
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je ne lui ai jamais dit cela.
15 En fait, j'étais content d'avoir une espèce de filière de
16 commandement face à moi lorsqu'il s'agissait des soldats musulmans dans le
17 secteur. Parce que j'aurais pu m'entretenir avec lui au sujet de tirs
18 échangés qui venaient de l'enclave, de l'intérieur de l'enclave, et
19 notamment lorsqu'on tirait sur nos effectifs à nous, ceux des Nations
20 Unies.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais vous dites que, pour vous, il y
22 avait un avantage pour ce qui était du statu quo, y compris la présence
23 militaire; est-ce que je comprends bien votre réponse ?
24 LE TÉMOIN : [interprétation] C'est tout à fait cela.
25 M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]
26 M. IVETIC : [interprétation]
27 Q. Au cours des échanges que vous avez eus avec M. Nasir Sabanovic, est-ce
28 qu'il a été plutôt honnête à propos de sa participation aux combats et aux
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1 activités de sabotage ? Je pense, par exemple, à des actions militaires
2 telles que -- qui consistaient, par exemple, à sortir de l'enclave, à poser
3 des mines, à détruire des objets militaires serbes.
4 R. Oui, il a été assez honnête à ce sujet. C'est vrai. Il m'a dit qu'il
5 patrouillait à l'extérieur de l'enclave ou qu'il sortait de l'enclave avec
6 une patrouille et, comme vous venez de le décrire, qu'il plaçait des mines
7 et qu'il a d'ailleurs effectué des raids à l'extérieur de l'enclave. C'est
8 vrai.
9 Q. Et est-ce qu'il ne vous a jamais relaté quoi que ce soit à propos de
10 soldats musulmans, ou de lui-même d'ailleurs, qui seraient sortis de
11 l'enclave et qui auraient brûlé des villages serbes entourant l'enclave de
12 Srebrenica ?
13 R. Ecoutez, je ne me souviens pas qu'il ait parlé d'avoir incendié des
14 villages, mais il a parlé, certes, de raids effectués, du fait que des
15 mines avaient été posées, de ce genre d'activités.
16 Q. Alors, maintenant, nous allons prendre un peu de recul par rapport à M.
17 Sabanovic, et j'aimerais vous poser une question plus générale.
18 J'aimerais savoir si vous avez jamais eu l'occasion d'entendre des récits
19 ou de découvrir des incidents ou des événements au cours desquels des
20 soldats musulmans étaient sortis de l'enclave de Srebrenica et avaient
21 brûlé ou incendié des villages serbes ?
22 R. Oui, j'ai entendu parler de cela, et c'était dans d'autres secteurs qui
23 n'étaient pas placés sous ma responsabilité mais qui se trouvaient dans
24 l'enclave.
25 Q. Et la question que j'aimerais vous poser est comme suit. Vous nous
26 dites que vous en avez entendu parler. Est-ce que vous pourriez nous dire
27 quelles sont les sources qui vous ont fourni ces récits qui portaient,
28 donc, sur le fait que les combattants musulmans de Bosnie de Srebrenica
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1 étaient sortis de l'enclave et avaient incendié des villages serbes ?
2 R. C'étaient d'autres commandants, d'autres commandants des Nations Unies,
3 tels que moi-même. Voilà ce que j'entendais.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, alors je suis un peu
5 perplexe par l'une des réponses précédentes, qui m'étonne. Parce que vous
6 avez posé une question : est-ce que vous avez jamais entendu parler ou
7 appris que des soldats musulmans étaient sortis de l'enclave de Srebrenica
8 et avaient incendié des villages serbes.
9 Et votre réponse a été comme suit :
10 "J'ai entendu parler de cela, certes, dans d'autres zones qui ne se
11 trouvaient pas dans ma responsabilité mais qui se trouvaient dans
12 l'enclave."
13 Alors, est-ce que vous vouliez parler de ce qui s'était passé dans
14 l'enclave ou à l'extérieur de l'enclave ? Parce que la question, en fait,
15 qu'on vous avait posée portait sur ce qui se passait à l'extérieur de
16 l'enclave, sur le fait que ces gens étaient sortis de l'enclave.
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, cela ne s'est pas passé dans l'enclave,
18 ce dont je parlais. J'en ai entendu parler par d'autres commandants, des
19 collègues du Bataillon néerlandais, par exemple, qui étaient responsables
20 d'autres zones et qui avaient vu cela depuis leurs postes d'observation ou
21 qui avaient vu des patrouilles ou des commandants musulmans dans cette zone
22 qui quittaient l'enclave, qui pénétraient dans la zone serbe et qui
23 incendiaient des villages.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.
25 Poursuivez, Maître Ivetic.
26 M. IVETIC : [interprétation]
27 Q. Est-ce que vous avez eu l'occasion de parler avec soldats serbes de
28 l'autre côté de la ligne de démarcation, et est-ce qu'ils ont été ouverts
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1 vis-à-vis de vous, est-ce qu'ils ont été plutôt amicaux ?
2 R. Ecoutez, à côté de mon poste d'observation, il y avait une casemate ou
3 un bunker serbe, qui se trouvait juste à l'extérieur de la limite de
4 l'enclave. Bon, nous avons parlé parfois, ils étaient très sympathiques,
5 parfois ils l'étaient moins, mais le fait est que nous avons pu avoir une
6 communication libre avec eux. Ils étaient ouverts, oui.
7 Q. J'aimerais vous poser des questions légèrement différentes à propos de
8 la démilitarisation.
9 M. IVETIC : [interprétation] Et je souhaiterais que le document 1D900 de la
10 liste 65 ter, qui se trouve dans le système e-court, soit affiché. Et
11 premièrement, est-ce que la première page du document pourrait être
12 affichée.
13 Q. Je ne sais pas, Monsieur, si vous préférez l'avoir en néerlandais ou en
14 anglais, mais dans un premier temps je vais vous demander si vous
15 reconnaissez ce document avant de vous poser des questions à propos de ce
16 document. Donc, peut-être que nous allons voir la première page dans un
17 premier temps.
18 R. Peu m'importe, l'anglais ou le néerlandais. Cela me convient.
19 Q. [aucune interprétation]
20 R. Je pense qu'il s'agit de la première page de mon débriefing, qui s'est
21 passé aux Pays-Bas.
22 Q. Je vous remercie. Il s'agit du débriefing qui a eu lieu avec l'armée
23 royale néerlandaise en septembre 1995 ?
24 R. Oui, c'est exact.
25 M. IVETIC : [interprétation] Et j'aimerais maintenant que la page 8 de la
26 version anglaise soit affichée. Elle correspond à la page 7 de la version
27 en B/C/S, et si nous avons besoin de la page néerlandaise, il s'agit
28 également de la page 8.
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1 Q. C'est le premier paragraphe entier de la page anglaise qui m'intéresse,
2 car j'ai quelques questions à vous poser à propos de ce document de
3 débriefing, qui commence comme suit :
4 "Après que le poste d'opération E ait été pris, les Musulmans ont amélioré
5 bon nombre de leurs positions. Ils ont également creusé beaucoup plus de
6 tranchées. Il y a d'autres trous qui ont été ajoutés. Et durant leurs
7 patrouilles, les Musulmans ne les autorisaient plus aller dans Zanik. Nous
8 ne savions pas pourquoi. Il faut savoir que le mont Kvarac 789 était rempli
9 de combattants musulmans à l'époque.
10 "Lors de cette période, la présence des Serbes était si menaçante que nous
11 avons décidé de ne pas faire grand cas des armes des Musulmans.
12 "Dans son secteur, aucune arme n'a été prise aux Musulmans à cette époque-
13 là. Le bataillon a indiqué qu'ils devraient ne pas tenir compte de cela en
14 faisant valoir le droit à la défense légitime. Cela s'est poursuivi pendant
15 un certain temps, il y avait de nombreux Musulmans qui se déplaçaient avec
16 armes. Pendant ses réunions avec la Nations Unies, Nasir avait toujours un
17 pistolet sur lui. Les Musulmans, en règle générale, faisaient en sorte que
18 ces armes ne soient pas vues lorsqu'ils se trouvaient près des postes
19 d'observation. Les membres des Nations Unies avaient essayé de désarmer les
20 Musulmans dès le début. Toutefois, cela n'a pas véritablement souvent
21 abouti parce que les Musulmans s'enfuyaient toujours."
22 Alors, est-ce que vous pouvez confirmer dans un premier temps si ce qui est
23 déclaré ici et ce dont je viens de vous donner lecture est véridique et
24 exact, et est-ce que vous seriez disposé à le répéter ?
25 R. Oui, oui, c'est tout à fait véridique et exact.
26 Q. Là, j'aimerais vous poser un peu plus de questions.
27 Parce que dans le document, il est indiqué que le bataillon avait
28 "indiqué". Alors, j'aimerais savoir qui parmi le Bataillon néerlandais vous
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1 a fait part de ce point de vue et vous a indiqué que votre personnel ne
2 devrait pas tenir compte des armes des Musulmans de Bosnie ?
3 R. Je me souviens qu'à l'époque je me trouvais au poste d'observation
4 Québec et que toutes les communications et directives à l'époque passaient
5 par l'intermédiaire de mon commandant de compagnie, le capitaine
6 Mathijssen.
7 Q. Vous avez utilisé les termes de "communications" et de "directives".
8 Est-ce que vous considérez que cette communication, à savoir fermer les
9 yeux sur les armes des Musulmans de Bosnie, était une directive émanant de
10 vos officiers supérieurs au sein du bataillon ?
11 R. Oui, tout à fait.
12 Q. Est-ce que vous avez également reçu des consignes de la part d'un
13 officier supérieur, par exemple, de votre bataillon, pour taire cette
14 directive, pour ne pas en parler ?
15 R. Non.
16 Q. Fort bien.
17 M. IVETIC : [interprétation] Alors, puisque ce document est maintenant sur
18 nos écrans, j'aimerais aborder un autre thème qui figure sur la même page
19 néerlandaise et anglaise, mais qui se trouve à la page suivante en version
20 serbe. Il s'agit d'un sujet tout à fait différent. Cela se trouve au milieu
21 de la page, juste après la phrase où il est indiqué :
22 "Les Musulmans disposaient d'armes plutôt bonnes, telles que, par exemple,
23 des kalachnikovs relativement récentes."
24 Q. Et j'aimerais en fait vous donner lecture de ce qui suit :
25 "Les Serbes parlaient des largages aériens américains et des hélicoptères
26 des Nations Unies qui avaient des ravitaillements. Il avait vu dans
27 l'obscurité des lumières qui auraient pu provenir d'un hélicoptère. Après
28 cela, le bataillon a demandé à ce que cela soit expliqué, mais en fait, ce
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1 qui a été dit, c'était que ce n'était 'pas disponible' et que c'était 'tout
2 à fait fortuit'. Cet incident s'est passé au moment où l'information a été
3 obtenue des Serbes suivant laquelle il y avait des largages aériens
4 américains. Par la suite, les patrouilles ont trouvé des restes de rations
5 d'urgence américaines, des boîtes de conserve, et cetera, et cetera."
6 Premièrement, il est question de "il", alors il a vu des lumières dans
7 l'obscurité, lumières qui auraient pu venir d'un hélicoptère ?
8 R. Oui, lorsqu'il est question de "il", c'est une référence à moi, tout à
9 fait.
10 Q. Et je dois vous demander si ces renseignements dont je viens de vous
11 donner lecture qui se trouvent dans votre rapport de débriefing sont
12 véridiques et exacts et si vous diriez la même chose si la même question
13 vous était posée aujourd'hui ?
14 R. Oui, c'est exact et véridique.
15 Q. Est-ce que vous pourriez nous expliquer de façon détaillée à quoi
16 correspond ceci, AWACS ?
17 R. Un avion AWACS, pour le décrire, en fait, de façon simple, je vous
18 dirais qu'il s'agit d'un équipement à radar. Lorsque l'avion survole une
19 certaine zone, grâce à cet équipement, il peut détecter toute activité,
20 telle que, par exemple, d'autres avions et des hélicoptères qui sont en vol
21 également dans le même secteur. C'est la raison pour laquelle nous avions
22 posé la question, parce que nous avions parfois entendu dire qu'un avion
23 avec ce dispositif d'AWACS pourrait être mis à notre disposition. Et à
24 l'époque, nous l'avions demandé, parce qu'au cours des jours qui ont
25 précédé cet incident, nous voyions parfois la nuit des lumières, des
26 lumières dans le ciel. Bien sûr, c'était la nuit; il faisait nuit et on
27 voyait les lumières. Et parfois nous entendions également le bruit fait par
28 l'hélicoptère, les hélices de l'hélicoptère. Donc c'est pour cela que,
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1 lorsque nous avons entendu ces bruits et que nous avons vu à nouveau ces
2 lumières, nous avons demandé s'il y avait bel et bien un avion avec ce
3 dispositif AWACS dans la zone, et cela ne s'est pas passé, en tout cas,
4 c'est ce qu'on m'a dit.
5 Q. Et pour que tout soit bien clair aux fins du compte rendu d'audience,
6 ces avions avec ce radar AWACS à bord à quelle force aérienne appartenait-
7 il ou à quel pays, quels étaient les pays qui avaient ce système de radar
8 AWACS à bord de leurs avions, d'après ce que vous savez ?
9 R. Écoutez, je ne suis pas sûr quels sont les pays qui disposaient de ces
10 avions à ce moment-là. Je ne m'en souviens pas.
11 Q. Est-ce que vous vous souvenez au moins s'il s'agissait d'un pays membre
12 de l'OTAN --
13 R. Je ne m'en souviens pas.
14 Q. [aucune interprétation]
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous pourriez peut-être
16 essayer de parler moins vite pour le compte rendu d'audience.
17 M. IVETIC : [interprétation] Excusez-moi.
18 Q. Est-ce que vous-même avez rédigé un rapport à ce sujet hormis le fait
19 que cela soit mentionné, me semble-t-il, dans toutes vos séances de
20 débriefing qui ont suivi votre déploiement ?
21 R. Peut-être seulement dans les rapports relatifs à la mission. Mais je ne
22 sais pas. Je ne sais pas si cela a été fait par écrit ou tout simplement
23 par communication radio.
24 Q. Merci. Alors nous avons parlé d'un incident où vous aviez demandé un
25 avion avec radar AWACS et on vous a dit que cet avion n'était pas
26 disponible. Mais d'après ce que vous dites, je crois comprendre qu'il y
27 avait quand certains -- enfin vous disposiez quand même de certains indices
28 audio et visuel à propos de l'existence d'un hélicoptère qui volait à cet
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1 endroit-là à plusieurs occasions, n'est-ce pas, ou est-ce que cela s'est
2 passé à plusieurs occasions ou à une occasion ?
3 R. A plusieurs occasions. Mais je ne me souviens pas du nombre de façon
4 détaillée.
5 Q. Fort bien. Donc vous indiquez que les patrouilles avaient trouvé des
6 rations, des rations de secours - non, excusez-moi, je vais reprendre ma
7 question -
8 Est-ce que ce type de rations correspondait à la catégorie de rations
9 que l'on voit normalement dans le cadre d'aide humanitaire ou est-ce qu'il
10 s'agissait de rations militaires ?
11 R. Non, il s'agissait de rations militaires.
12 Q. Et -- bon, vous connaissez la situation qui prévalait à Srebrenica
13 pendant l'été de l'année 1995, est-ce que vous pensez que ce type de
14 rations d'urgence militaires auraient pu arriver par d'autres moyens, en
15 d'autres termes, n'auraient pas forcément été emmenés depuis l'extérieur ?
16 R. Non, non, je pense qu'elles avaient dû être emmenées depuis
17 l'extérieur.
18 Q. Je vous remercie. Alors une autre chose à propos de ce document avant
19 que je ne passe à autre chose. Il s'agit dans la version anglaise de deux
20 paragraphes avant la fin. Je vais vous en donner lecture et ensuite je vous
21 poserais quelques questions. Voilà ce qui est écrit :
22 "Il y avait également deux membres des forces SAS britannique, Jim et Dave,
23 qui se trouvaient à l'intérieur de l'enclave, et le bataillon les avait
24 rattachés à 108. Il ne savait pas ce qui étaient les ordres de ces membres
25 du Groupe SAS à l'intérieur de l'enclave. Il avait entendu de la part du
26 lieutenant Caris que ces hommes qui appartenaient au Groupe SAS faisaient
27 office d'officier de liaison pour le général Smith et qu'ils étaient en
28 contact direct avec [inaudible]. Le Bataillon néerlandais les considérait
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1 un peu comme en quelque sorte des empêcheurs de tourner en rond à
2 l'intérieur de l'unité."
3 Alors, premièrement, lorsqu'il est dit : "Il ne savait pas quels étaient
4 les ordres des membres du Groupe SAS à l'intérieur de l'enclave," il s'agit
5 de vous, à nouveau, n'est-ce pas ?
6 R. Oui, oui, tout à fait.
7 Q. Et puis il est écrit dans une phrase : "Il avait entendu de la part du
8 lieutenant Caris que ces hommes du Groupe SAS faisaient office -- étaient
9 utilisés comme une sorte d'officiers de liaison pour le général Smith et
10 étaient en contact direct avec lui."
11 Alors la première fois que nous voyons "il," c'est une référence à vous-
12 même. Vous avez entendu cela de la bouche du lieutenant Caris, et puis le
13 dernier "il" correspond au général Smith ?
14 R. Oui, c'est exact.
15 Q. Et maintenant nous avons obtenu ces précisions; est-ce que vous
16 confirmez que ce dont je viens de vous donner lecture est exact et
17 véridique et je pense aux faits dont il est question ?
18 R. Oui, c'est exact et véridique.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, je voudrais savoir à quoi
20 correspond la référence 108.
21 M. IVETIC : [interprétation] C'était la question que j'allais vous poser.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Fort bien. Excusez-moi. Alors la
23 question que Me Ivetic allait vous poser portait sur la référence au numéro
24 108; à quoi est-ce que cela correspond ?
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Le numéro 108 correspondait -- enfin était le
26 numéro des unités de reconnaissance et de commando qui faisaient partie du
27 Bataillon néerlandais.
28 M. IVETIC : [interprétation]
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1 Q. Et j'ai juste encore une précision à vous demander. Car il me semble
2 que dans votre réponse vous n'avez pas précisé qu'il s'agissait d'une unité
3 de commando de l'Armée royale néerlandaise. Est-ce bien exact ?
4 R. Oui, c'est exact.
5 Q. Est-ce que le Groupe 108 donc avait la même mission que le reste du
6 Bataillon néerlandais ?
7 R. Oui.
8 Q. Et est-ce que ce Groupe 108 présentait ses rapports en utilisant la
9 même chaîne de commandement que le Bataillon néerlandais ?
10 R. Oui.
11 Q. Alors quel était l'effectif, combien d'hommes se trouvaient au sein de
12 cette Unité de Commando néerlandaise, le numéro 108 ?
13 R. C'était une section, mais je ne me souviens pas du nombre exact
14 d'hommes.
15 Q. Est-ce que vous savez si cette Unité 108 était, ou est-ce que vous
16 savez plutôt si leur présence était connue des camps serbes et musulmans ?
17 Est-ce que leur existence donc à Srebrenica était connue ou dissimulée ?
18 R. Il n'y avait pas de présence dissimulée. Ils agissaient en tant
19 qu'Unité spéciale de Reconnaissance au sein du Bataillon néerlandais. Donc
20 ils respectaient les mêmes règles, les mêmes directives.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, je vois l'heure qu'il
22 est. J'aimerais vous demander de pouvoir mettre un terme à votre contre-
23 interrogatoire en une ou deux minutes.
24 M. IVETIC : [interprétation] Oui, oui, tout à fait. J'ai encore une
25 question avant la pause.
26 Q. Est-ce que vous pourriez nous dire - si tant est que vous le sachiez -
27 quel type d'affectations avait été donné à cette Unité 108 lorsqu'ils se
28 sont trouvés dans l'enclave de Srebrenica ?
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1 R. Ils participaient à des patrouilles également notamment des patrouilles
2 de reconnaissance. Mais je n'ai pas d'information à propos des détails de
3 leurs affectations.
4 Q. [aucune interprétation]
5 M. IVETIC : [interprétation] Je pense que le moment est peut-être venu de
6 faire la pause.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Fort bien. Je vais dans un premier
8 temps inviter le témoin à suivre Mme l'Huissière, et je vous demanderais
9 Monsieur de revenir dans 20 minutes.
10 [Le témoin quitte la barre]
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Groome, je vois que vous
12 souhaitez intervenir. Vous ne vous êtes pas levé juste parce que ça va être
13 la pause.
14 M. GROOME : [interprétation] Non, non, je voulais juste soulever une
15 question très brièvement à huis clos partiel.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Nous allons passer à huis clos
17 partiel.
18 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.
19 [Audience à huis clos partiel]
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26 [Audience publique]
27 Mme LA GREFFIÈRE : [aucune interprétation] --
28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] --
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1 C'est une décision qui va être rendue eu égard à la requête présentée
2 de façon urgente par l'Accusation, à propos du témoignage du témoin RM284,
3 l'Accusation ayant demandé qu'il soit entendu dans le cadre d'une
4 vidéoconférence, et cela a été déposé le 5 avril 2013.
5 Au vu de la date qui est proposée pour la déposition, et au vu de la
6 nature urgente de cette demande, de façon exceptionnelle, la Chambre va
7 rendre sa décision de façon orale, les raisons motivant notre décision
8 seront présentées par écrit par la suite.
9 Après avoir pris en considération les arguments présentés par les
10 parties, la Chambre conclut qu'il va dans l'intérêt de la justice
11 d'autoriser ce témoin à témoigner par le biais d'une vidéoconférence, et
12 par conséquent la Chambre fait droit à la requête.
13 J'en ai terminé avec ces deux décisions. Et comme je vous l'ai
14 indiqué, les raisons qui motivent notre décision seront présentées par
15 écrit en temps voulu.
16 Nous faisons une pause, et nous allons reprendre maintenant à 12 h
17 15.
18 --- L'audience est suspendue à 11 heures 57.
19 --- L'audience est reprise à 12 heures 18.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez faire entrer le témoin dans le
21 prétoire, s'il vous plaît.
22 [Le témoin vient à la barre]
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, si vous êtes prêt,
24 vous pouvez reprendre.
25 M. IVETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
26 Q. Monsieur, j'aimerais vous poser quelques questions supplémentaires au
27 sujet de cette Unité 108.
28 Est-ce que l'Unité 108 opérait en fonction des ordres bleus ou des
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1 ordres verts, et dans votre réponse, veuillez nous préciser quelle est la
2 différence entre ces ordres qu'on désignait comme bleus et les ordres qu'on
3 désignait comme verts ?
4 R. Je réponds d'abord à votre première question. L'Unité 108 fonctionnait,
5 elle aussi, conformément aux ordres bleus, qui concernaient les activités
6 quotidiennes du Bataillon néerlandais. Cette unité, donc, faisait partie du
7 Bataillon néerlandais. Cela ne fait aucun doute.
8 Quant à ce que l'on appelait ordres verts, ils concernaient des
9 activités où l'aspect militaire était plus prononcé, et j'ai dû faire face
10 à une telle situation le 9, dans la soirée. Nous sommes allés à bord de
11 deux véhicules de transport de troupes au cours de la nuit, même si ces
12 véhicules étaient de couleur blanche. En tout cas, nous avons essayé de
13 soustraire nos activités aux yeux des observateurs. Donc, c'était une façon
14 militaire de se déplacer vers le sud de l'enclave et d'entamer les travaux
15 sur des positions d'arrêt.
16 Quant à l'Unité 108, elle se conformait à toutes les activités
17 habituelles du Bataillon néerlandais.
18 Q. Merci, Monsieur.
19 M. IVETIC : [interprétation] J'aimerais maintenant revenir sur le document
20 1D900. Et cette fois-ci, j'aimerais que l'on affiche la page 11 de la
21 version anglaise, qui correspond à la page 10 en B/C/S. Je signale qu'il
22 s'agit aussi de la page 11 en néerlandais.
23 Q. C'est un extrait qui concerne le laps de temps que vous avez décrit et
24 qui s'est écoulé entre le 9 et le 10 juillet, lorsque vous vous trouviez
25 sur des positions d'arrêt. Je vous présente d'abord cet extrait, et
26 ensuite, je vais écouter votre réponse.
27 C'est le dernier paragraphe entier sur la page en anglais, et on peut y
28 lire :
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1 "La surveillance de l'espace aérien est revenue en courant, s'est jetée
2 dans un véhicule de transport de troupes qui attendait et a rejoint
3 immédiatement le convoi, sa dernière partie. Il a attendu pendant un moment
4 et ensuite s'est retiré pas à pas".
5 Alors pour commencer, ce "il" dans cet extrait, à qui cela fait-il
6 référence ? S'agit-il de vous ?
7 R. Oui, en effet.
8 Q. Compte tenu de ce fait, pourriez-vous nous confirmer les faits qui sont
9 présentés ici, et est-ce qu'il s'agit d'un récit véridique, d'après vos
10 souvenirs ?
11 R. Oui, la description est véridique et elle est correcte.
12 Q. Et, pour commencer, qu'est-ce que signifie ce sigle YPR ? Est-ce que
13 c'est un acronyme qui se réfère aux véhicules de transport de troupes que
14 vous avez évoqués tout à l'heure ?
15 R. Oui. C'est l'expression néerlandaise pour désigner une certaine marque
16 de véhicules de transport de troupes dont nous utilisions sur place.
17 Q. Et les personnes que vous avez identifiées comme faisant partie de la
18 surveillance aérienne, de qui s'agissait-il ? S'agissait-il des effectifs
19 de l'Unité 108 ?
20 R. Oui. Ils étaient membres de l'Unité 108, renforcés par quelques soldats
21 de la SAS britannique.
22 Q. Ai-je raison d'affirmer que cet incident s'est produit pendant la
23 période qui nous concerne, à savoir entre le 9 et le 10 juillet, lorsque
24 vous vous êtes replié de votre position première pour mettre en place une
25 position d'arrêt ? A moins d'avoir tort, il me semble qu'il s'agit du point
26 2.
27 R. Si mes souvenirs sont bons, cela s'est produit le 11 juillet. Je me
28 repliais de l'emplacement initial où se trouvait ma position d'arrêt au sud
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1 de la ville, en direction de la base de la Compagnie Bravo, qui était
2 cantonnée dans la ville de Srebrenica elle-même, et avant de pénétrer dans
3 la partie sud de la base de Srebrenica, la surveillance aérienne était
4 revenue de sa mission.
5 Q. Monsieur, vous dites que les membres de la surveillance aérienne
6 étaient revenus de leur mission. D'après ce que vous avez pu comprendre,
7 leur mission consistait-elle à fonctionner comme des observateurs qui
8 étaient censés faciliter les activités de l'appui aérien rapproché de
9 l'OTAN, et par conséquent, les frappes aériennes contre les cibles serbes ?
10 R. Oui, c'est ce que nous en savions. Nous avions déjà demandé un appui
11 aérien, et dans ce cas de figure particulier, nous l'avons obtenu. Et la
12 surveillance aérienne s'occupait de détecter ce qui se passait sur le
13 terrain depuis un avion qui était censé assurer l'appui aérien rapproché.
14 Et, bien sûr, je pouvais voir l'effet de leurs activités, puisque les
15 canons antiaériens des Serbes tiraient sur ces avions.
16 Q. Alors, permettez-moi de vous poser une question qui concerne le sujet
17 que nous avons abordé tout à l'heure. Les activités de la surveillance
18 aérienne, qui faisaient appel aux frappes aériennes militaires contre les
19 positions serbes, peuvent-elles être définies comme conformes aux ordres
20 verts, c'est-à-dire aux ordres militaires ou, alors, comme conformes aux
21 ordres bleus, c'est-à-dire les ordres relatifs au maintien de la paix ?
22 R. Voire même dans le cadre des ordres bleus, nous avions la possibilité
23 de faire appel à l'appui aérien. Et dès la soirée du 9, pratiquement tous
24 les ordres qui ont été donnés aux effectifs du Bataillon néerlandais
25 étaient des ordres verts, plus ou moins, parce que nous partions en mission
26 à bord de véhicules de transport de troupes en arborant nos casques bleus,
27 mais de toute façon, il est impossible d'exécuter, dans le sens plein de ce
28 mot, les ordres verts.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, je pense que ce témoin a
2 déjà expliqué qu'il fallait faire une distinction entre les frappes
3 aériennes, d'une part, et l'appui aérien rapproché, d'autre part. Mélanger
4 les deux peut semer la confusion par la suite. Donc, veuillez le garder à
5 l'esprit, s'il vous plaît.
6 M. IVETIC : [interprétation]
7 Q. Pourriez-vous nous dire quelle est la distinction qui sépare l'appui
8 aérien rapproché des frappes aériennes ?
9 R. J'ai évoqué le terme de l'appui aérien rapproché parce que cela faisait
10 partie de notre mandat. L'appui aérien rapproché est une forme d'appui très
11 concrète qu'on fournit grâce à l'aviation. Donc, il s'agit d'aider les
12 unités sur le terrain d'une façon très pointue, très précise.
13 Quant aux frappes aériennes, comme vient de l'indiquer le Juge, elles
14 ont un caractère tout à fait différent. Elles se déroulent à une échelle
15 plus importante, et on n'en isole pas un emplacement précis pour engager
16 des activités.
17 Q. Merci de l'avoir précisé, Monsieur.
18 J'aimerais maintenant revenir sur votre déclaration en application de
19 l'article 92 ter, pièce P1154.
20 M. IVETIC : [interprétation] Il nous faut la page 8 de cette déclaration --
21 ou plutôt, de votre déposition précédente qui se trouve à la page 2 261 du
22 compte rendu d'audience original. En fait, non, c'est la page 9. Oui, c'est
23 la page 2 261. Revenons à la page que nous avions tout à l'heure. Toutes
24 mes excuses.
25 Q. Alors, Monsieur, j'aimerais que vous vous concentriez sur les lignes 13
26 à 16 de ce document. Vous évoquez les postes d'observation et vous
27 expliquez qu'ils ont essayé de faire du troc avec la population locale pour
28 pouvoir mieux manger. Est-ce que vous avez entendu parler ou est-ce que
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1 vous avez été témoin oculaire des activités qui se passaient au noir et qui
2 étaient engagées par les forces armées de la BiH ou l'ABiH à l'intérieur de
3 l'enclave ? Je pense plus précisément à la vente de l'aide humanitaire
4 livrée à l'enclave.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur McCloskey.
6 M. McCLOSKEY : [interprétation] Oui. J'aimerais que nous recourions à la
7 déclaration 92 ter à chaque fois que cela est possible, et, par ailleurs,
8 nous avons ainsi un certain nombre de faits jugés. Donc, j'aimerais qu'on
9 fournisse des références complètes.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si vous souhaitez présenter au témoin
11 les réponses qu'il avait déjà fournies à une autre occasion, il n'est pas
12 très utile, Maître Ivetic, de lui faire lire un tel ou un tel fait jugé.
13 S'il est possible de lui présenter la version originale du compte rendu
14 d'audience, ce serait plus utile.
15 Est-ce que vous l'avez ?
16 M. IVETIC : [interprétation] Je ne l'ai pas téléchargée au prétoire
17 électronique.
18 M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]
19 M. IVETIC : [interprétation] Mais de toute façon, je me sers de ce document
20 comme un point de départ. Il est question du marché noir.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur McCloskey, je vais maintenant
22 procéder à la vérification de tous les faits jugés.
23 Entre-temps, nous allons reprendre les débats. Me Ivetic peut poser
24 ses questions. S'il estime nécessaire que le témoin soit informé des choses
25 qui ne sont pas visibles dans le compte rendu d'audience, vous pouvez de
26 nouveau soulever une objection.
27 Veuillez reprendre, Maître Ivetic.
28 M. IVETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
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1 Q. Monsieur, est-ce que vous avez eu l'occasion d'être un témoin oculaire
2 des opérations au noir qui ont été engagées par les forces de l'ABiH à
3 l'intérieur de l'enclave ? Je pense plus précisément à la vente d'aide
4 humanitaire livrée en l'enclave.
5 R. Pendant que je me trouvais dans l'enclave, j'ai entendu dire que
6 certains éléments, et je ne sais pas si ces éléments faisaient partie des
7 forces de la BiH, vendaient de l'aide humanitaire aux réfugiés. J'ai
8 entendu parler du café et du sucre qu'on faisait venir dans l'enclave.
9 Donc, j'en ai entendu parler, mais je n'ai jamais été sur place au
10 moment cela s'est produit, si mes souvenirs sont bons.
11 Q. Est-ce que vous avez des connaissances relatives aux incidents où
12 l'ABiH a offert aux effectifs du Bataillon néerlandais la possibilité de
13 participer dans des activités illicites de ce type ? Je parle des activités
14 au marché noir.
15 R. C'est une histoire dont j'ai entendu parler. Mais je n'ai jamais été
16 témoin oculaire de ce type d'événement et je n'ai jamais participé à ce
17 type d'activité.
18 Q. Et avez-vous eu l'occasion de voir ou d'entendre dire que les forces de
19 l'armée de la BiH à Srebrenica cherchaient à proposer des prostitués aux
20 membres du Bataillon néerlandais qui étaient engagés dans des postes
21 d'observation ?
22 R. J'ai entendu des histoires de ce type circuler. Mais je tiens apporter
23 une précision à vos deux questions. Pour moi, il n'est pas du tout prouvé
24 que c'étaient les forces de la BiH qui se trouvaient derrière ces
25 différentes tentatives.
26 Q. Permettez-moi de vous demander une précision. Je garde à l'esprit le
27 fait que vous ne savez pas si c'étaient les forces de la BiH qui avançaient
28 ce type de proposition, que vous ne savez pas de quelles personnes ou de
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1 quelles parties il s'agissait, mais s'agissait-il de propositions qui
2 provenaient de l'enclave elle-même?
3 R. Je pense que oui, en effet.
4 Q. Et avez-vous eu l'occasion de voir ou d'entendre parler des personnes
5 situées à l'intérieur de l'enclave de Srebrenica qui participaient à des
6 guerres intestines et aux assassinats afin de régler les comptes
7 mutuellement et pour pouvoir contrôler le marché noir ?
8 R. Je n'en ai jamais entendu parler. J'ai entendu des histoires qui
9 circulaient au sujet des règlements de comptes, mais je n'ai jamais entendu
10 une explication quant à ce qui les avait motivés.
11 Q. Merci, Monsieur. Alors, maintenant, je laisse de côté cette question du
12 marché et je me penche sur un sujet qui vous sera plus familier.
13 S'il est nécessaire de passer à huis clos partiel, signalez-le-moi, s'il
14 vous plaît, mais voilà ma question. Quelques semaines après votre
15 déploiement à Srebrenica, est-ce que vous avez eu une expérience
16 dérangeante et qui concerne des personnes qui sont restées aux Pays-Bas ?
17 Si vous souhaitez que nous passions à huis clos partiel, n'hésitez pas à me
18 le signaler, je le répète encore une fois.
19 R. Non, cela n'est pas nécessaire.
20 Q. Très bien. Donc, vous souvenez-vous de cet incident que je viens
21 d'évoquer et où vous avez reçu la lettre envoyée par le frère de l'un des
22 commandants musulmans de Srebrenica à votre adresse aux Pays-Bas ?
23 R. Oui, je m'en souviens.
24 M. IVETIC : [interprétation] Examinons maintenant le document 1D900, c'est
25 un rapport sur lequel nous nous sommes déjà penchés précédemment. Il nous
26 faut la page 2 des versions anglaise et néerlandaise, page 3 en B/C/S.
27 Q. Je pense que nous trouvons ici le résumé le plus succinct de cet
28 incident sur lequel je souhaite vous poser des questions.
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1 M. IVETIC : [interprétation] Je répète, page 2 de la version anglaise
2 et néerlandaise.
3 Q. Dernier paragraphe à cette page, veuillez suivre pendant que je lis,
4 s'il vous plaît :
5 "Au mois de février, sa fiancée a reçu une lettre d'un Yougoslavie habitant
6 à Amsterdam. Il s'est avéré qu'il s'agissait du frère d'Ibro Smajic. Cette
7 lettre comprenait, entre autres, les mots suivants : 'Votre petit ami est
8 au courant de tout et l'argent est en route,' et puis il y avait une lettre
9 en serbo-croate qui y était rattachée. Il en a informé M. Rave. Un peu plus
10 tard, une enveloppe est arrivée, cette enveloppe contenait quelque 800
11 marks allemands. Il ne savait pas du tout comment les Yougoslaves avaient
12 déterré son adresse aux Pays-Bas. Rave croyait que cette adresse a pu être
13 relevée par un sergent qui était souvent en contact avec Ibro Smajic.
14 Lorsqu'il est parti, ce sergent qui s'appelait Hagenbeek avait offert un
15 cadeau, des baskets et un jogging à cet homme. Et il savait, par ailleurs,
16 que quelqu'un d'autre avait eu une expérience similaire."
17 Alors, pour commencer, ceci est-il un récit correct et véridique ?
18 R. Oui, il correspond à la vérité et il est exact.
19 Q. Et la personne qui est identifiée ici comme étant Rave, qui vous a
20 parlé de cet incident et qui a soupçonné l'un de vos collègues d'avoir aidé
21 ce commandant des Musulmans de Bosnie à contacter les résidents
22 néerlandais, s'agissait-il de Rave ?
23 R. Oui. Nous avons aussi un sigle qui indique son rang, c'est un acronyme,
24 et il s'appelle Bert Rave. Et je pense que vous le connaissez puisqu'il a
25 déposé devant ce Tribunal.
26 Q. Merci. Et j'imagine que votre frère [sic] ne savait rien de tout ceci,
27 bien que ce soit indiqué dans la lettre ? Il ne savait pas pourquoi la
28 lettre a été envoyée ou pourquoi l'argent a été envoyé; ai-je raison de
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1 l'affirmer ?
2 R. Oui, vous avez raison. Je ne sais pas comment ils ont trouvé mon
3 adresse, et je ne savais absolument rien du tout au sujet de l'argent. Il y
4 avait aussi une lettre en serbo-croate qui a été traduite par nous. Mais je
5 n'étais pas du tout au courant de la teneur de cette lettre.
6 Q. Très bien. Et dans cet extrait que je viens de lire, on peut voir dans
7 la dernière phrase :
8 "Il savait que quelqu'un d'autre avait vécu une expérience similaire."
9 Alors, j'imagine que cela se réfère à votre collègue fournissant des
10 informations de nature personnelle aux Musulmans de Bosnie. Est-ce que
11 c'est lui qui était au courant du fait que d'autres avaient vécu des
12 expériences similaires ou est-ce que vous parlez de M. Rave ?
13 R. Non. Ce "il" ici se réfère à moi. Mais en fait, maintenant, quand j'y
14 pense, je ne me souviens plus d'autre personne qui aurait vécu des choses
15 similaires.
16 Q. J'aimerais vous poser quelques questions au sujet d'un incident relié,
17 et je pense que la façon la plus efficace de procéder est de vous présenter
18 une liste des réponses que vous avez fournies aux questions qui vous ont
19 été posées dans le cadre de l'affaire Popovic.
20 M. IVETIC : [interprétation] Document 1D898 de la liste 65 ter au prétoire
21 électronique, page 6, veuillez afficher le document, s'il vous plaît.
22 Q. Nous commençons à la ligne 2 à compter depuis le début de la page.
23 Veuillez suivre ma lecture, Monsieur :
24 "Question : Et est-ce qu'il y a eu des soupçons concernant la poste interne
25 et la possibilité que la population locale ait pu la manipuler ?
26 "Réponse : Oui, parce que nous avions des soupçons au sujet des éléments de
27 renseignement dont nous disposions en général ou au niveau des informations
28 personnelles qui étaient connues par les commandants militaires musulmans
Page 10369
1 locaux.
2 "Question : Et je pense qu'aussi la centrale de la Compagnie Bravo avait
3 été connectée par un représentant de la population
4
5
6 locale ?
7 "Réponse : Oui. C'est ce que j'ai entendu dire.
8 "Question : Une ou deux questions vous ont déjà été posées à ce sujet, mais
9 j'aimerais l'approfondir. Vous avez compris au fil du temps qu'il y avait
10 d'autres agences qui étaient en présence dans l'enclave et dans ses
11 environs, n'est-ce pas ? Je pense aux agences militaires.
12 "Réponse : Oui, c'est exact.
13 "Question : Hier, nous vous avons posé une question relative à la présence
14 de la SAS britannique à l'intérieur de l'enclave. Ils n'étaient pas compris
15 dans la mission officielle, n'est-ce pas ?
16 "Réponse : Je pense qu'ils avaient leur propre mission, mais ils logeaient
17 dans notre base avec nous.
18 "Question : Et vous ne savez pas si leurs objectifs étaient les mêmes que
19 les vôtres ou s'ils étaient tout à fait différents ?
20 "Réponse : Je n'ai aucun élément d'information à ce sujet.
21 "Question : Je pense que vous vous êtes aperçu à un moment donné que les
22 effectifs militaires américains étaient eux aussi actifs dans la région de
23 l'enclave.
24 "Réponse : Je n'ai aucune information à cet effet. La seule chose que nous
25 avons relevée, c'est que nous avons trouvé un certain nombre de rations
26 américaines pendant que nous faisions nos patrouilles."
27 Alors, pour commencer, Monsieur, pourriez-vous me confirmer que le texte
28 que je viens de vous dire correspond à la vérité et qu'il est correct ?
Page 10370
1 R. Oui, tout est véridique et correct, en effet.
2 Q. Je vais commencer par la dernière partie du texte. Cet incident relatif
3 aux rations américaines, c'est quelque chose que nous avons déjà évoqué
4 tout à l'heure lorsque nous avons parlé des rations d'urgence ?
5 R. Oui, il s'agit d'un seul et même incident. Il s'agit des mêmes rations.
6 Q. Très bien. Et dans cet extrait du compte rendu d'audience, vous dites
7 que vous vous êtes aperçu à un moment donné que d'autres agences militaires
8 ont été actives à l'intérieur de l'enclave et dans ses environs. Est-ce que
9 vous parliez de l'armée de la BiH uniquement ou est-ce que vous aviez à
10 l'esprit des agences étrangères qui étaient physiquement présentes à
11 l'intérieur de l'enclave ?
12 R. Je pensais exclusivement aux activités de la SAS britannique, et je
13 n'ai pas parlé des fournitures qui ont été remises par les forces de la BiH
14 ou d'autres agences étrangères.
15 Q. Merci de cette précision.
16 Alors, j'aimerais que nous nous concentrions maintenant sur le laps
17 de temps qui va du 9 au 10, voire au 11 juillet, lorsque vous vous trouviez
18 aux positions d'arrêt. Vous en parlez en détail dans votre déposition en
19 vertu de l'article 92 ter, à commencer par la page 11 et suivantes, ainsi
20 qu'à la page 15 de P1154, qui correspond à la page du compte rendu
21 d'audience 2 268 en vertu de l'article 92 ter. Au début de la page, à la
22 ligne 1, on évoque le départ des soldats musulmans. Et je pense que cela
23 concerne des discussions qui ont eu lieu dans la partie sud de Srebrenica,
24 dont il est question sur la page précédente.
25 J'aimerais vous poser la question suivante : d'après vos connaissances, où
26 se trouvaient ces soldats musulmans au moment où les événements décrits
27 dans le compte rendu d'audience se sont produits ?
28 R. Puis-je lire la page précédente, s'il vous plaît, afin de placer les
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1 choses dans leur contexte.
2 Q. Bien entendu.
3 M. IVETIC : [interprétation] Peut-on revenir à la page précédente et peut-
4 on zoomer la deuxième partie de la page, s'il vous plaît.
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Bon. Maintenant, c'est clair pour moi.
6 M. IVETIC : [interprétation]
7 Q. Alors, ces soldats musulmans pour lesquels vous avez dit qu'ils étaient
8 partis, pouvez-vous nous aider à nous y retrouver, où se trouvaient donc
9 ces soldats musulmans une fois qu'ils sont partis?
10 R. J'ai fait référence à la partie des positions d'arrêt où je me trouvais
11 moi-même, c'est-à-dire au sud de la ville. Et nous sommes restés là-bas
12 jusqu'au moment où les réfugiés, comme je l'ai dit à la page précédente,
13 ont eu la possibilité de se diriger vers le nord, c'est-à-dire vers
14 Potocari, où se trouvait le campement. Et pendant une période donnée de
15 temps dans la nuit et le matin, lorsqu'il y avait encore des Musulmans là-
16 bas en train de prendre position non loin de nos sites à nous, les sites de
17 nos positions d'arrêt, ce que je mentionne ici au haut de la page, que je
18 puis voir devant moi, c'est le fait qu'à un moment donné, les soldats
19 musulmans s'étaient retirés, ils sont partis. Par rapport, donc, au point
20 où je me trouvais moi-même, j'ai pu voir qu'ils s'étaient dirigés eux aussi
21 vers le nord, dans la même direction que celle du déplacement des réfugiés.
22 Q. Ces soldats musulmans, que vous venez de nous décrire de façon plus
23 concrète à présent, est-ce que vous avez eu des estimations concernant leur
24 nombre ou leur puissance ?
25 R. A proximité immédiate de mon blindé de transport de troupes, les forces
26 variaient. Ils étaient des fois cinq, des fois dix, parfois même 20, mais
27 je crois que ce chiffre de 20 était un maximum.
28 Q. Si, maintenant, nous pouvons avancer un peu plus dans le compte rendu,
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1 et je crois qu'il s'agirait de la page 18 de votre déposition en
2 application du 92 ter que nous avons ici au prétoire électronique. Pour le
3 compte rendu, je précise qu'il s'agit de la page 2 271 de la transcription
4 originale --
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, puis-je poser une
6 question.
7 M. IVETIC : [interprétation] Certainement.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez dit qu'ils se sont déplacés
9 dans la même direction.
10 Vous souvenez-vous s'ils avaient porté des armes, et si oui, lesquelles ?
11 Et pouvez-vous aussi nous dire comment ils se sont déplacés ? Avaient-ils
12 des véhicules ?
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Ils se déplaçaient à pied. Et ceux qui se
14 trouvaient à proximité immédiate de moi-même portaient un fusil mitrailleur
15 sur un trépied, et ils avaient quelques armes portatives, des pistolets.
16 Dans un cas de figure, il y a eu aussi un lance-roquettes.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et des fusils ?
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, des fusils aussi.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.
20 M. IVETIC : [interprétation] Je vois maintenant qu'on nous a affiché la
21 page que j'ai demandée. Alors, penchons-nous sur les lignes allant de 17 à
22 22.
23 Q. Ici, à ces lignes 17 à 22, page 18 de la pièce P1154, vous nous avez
24 dit que vous aviez vu des hommes musulmans qui s'étaient dirigés vers
25 Susnjari. Je ne veux pas vous citer de façon erronée, et je voudrais donner
26 lecture de votre réponse de façon intégrale :
27 "Réponse : "Alors, en fait," - dites-vous dans votre réponse -"ça s'est
28 passé lorsque nous nous trouvions au point 0.02, où nous avons vu un nombre
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1 important d'hommes qui se dirigeaient vers Susnjari. Ils ont quitté le
2 point 0.02 vers OP Mike, c'est-à-dire poste d'observation Mike, et ce, dans
3 une autre direction. On a pu les voir porter des armes de petit calibre sur
4 eux. Il y avait des hommes de tout âge, il y avait même des jeunes garçons
5 et des hommes âgés. Ils n'ont pas tous porté des armes, mais c'étaient tous
6 des hommes et ils allaient dans cette direction-là."
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, vous avez souhaité lire à
8 des fins de précision. Or, vous avez dit "or" en anglais au lieu de lire
9 "so" en anglais dans la ligne 2.
10 M. IVETIC : [interprétation] Je m'excuse.
11 Q. Alors, est-ce que c'est là le groupe de soldats musulmans dont nous
12 avons parlé jusqu'au moment où ils sont partis au matin du 11 ? Ou est-ce
13 qu'il s'agit d'un groupe autre ?
14 R. Non. Le groupe du matin du 11 était bien plus petit. Ceci avait été un
15 groupe fort important. Il se peut que les soldats que j'avais vus le 11 au
16 matin et le 10 au soir, et même le 9, aient fait partie de ce grand groupe
17 que j'ai pu voir à la date du 11 en train de partir du point 0.02 pour
18 aller en direction de Susnjari. Mais je ne peux pas être tout à fait sûr.
19 Q. Merci, Monsieur. Essayons de parler maintenant de ce groupe que vous
20 avez qualifié de grand groupe ou de groupe important se dirigeant vers
21 Susnjari. Quand vous dites "groupe important" ou "grand groupe",
22 qu'entendez-vous au juste ?
23 R. Je pense qu'il devait y avoir là des centaines d'hommes, de garçons et
24 d'hommes âgés dans le groupe. En fait, ils faisaient partie d'une colonne
25 qui était en train de marcher en direction de Susnjari.
26 Q. Lorsque vous dites qu'ils portaient des armes de petit calibre ou que
27 certains d'entre eux portaient cela, est-ce que vous parlez des mêmes types
28 d'armes, c'est-à-dire pistolets, fusils, peut-être des mitrailleuses ou des
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1 lance-roquettes portatifs ?
2 R. Les seules armes que j'ai vues étaient des armes de petit calibre. Il
3 n'y avait pas eu de mitrailleuses ou de lance-roquettes.
4 Q. Et pour ce qui est d'apporter des éclaircissements à la réponse que
5 vous avez faite : est-ce que vous avez parlé d'armes de petit calibre ou de
6 fusils de petit calibre ?
7 R. J'ai dit armes de petit calibre, cela veut dire pistolets des fusils.
8 Q. Merci. Alors ce groupe, ce grand groupe, ai-je raison de dire à son
9 sujet qu'à un moment donné, ils ont continué à marcher dans une direction
10 donnée puis ils sont revenus sur leurs pas ? Est-ce que c'est bien ce
11 groupe-là qui l'a fait ?
12 R. Ce n'est pas ce que j'ai vu.
13 Q. Bien.
14 R. Je les ai vus quitter le point 0.02 pour aller vers l'ouest et je ne
15 les ai jamais vus revenir.
16 Q. Penchons-nous maintenant sur la page suivante de votre déposition en
17 application du 92 ter. Ce serait la page 19 dans le prétoire électronique,
18 et penchons-nous concrètement sur les lignes 16 à 24.
19 Ici, vous parlez, Monsieur, du matin où vous avez reçu un message disant
20 que des effectifs serbes s'étaient emparés de l'enclave, votre mission
21 consistait à déposer vos armes et, en somme, n'avoir pour mission que la
22 fourniture d'une aide humanitaire par la suite.
23 Alors la question que je voudrais vous poser, tout d'abord, c'est celle-ci
24 : Pouvez-vous nous dire si, avant ce moment-là, vous avez reçu des ordres
25 qui étaient primordialement de couleur verte, c'est-à-dire de nature
26 militaire ?
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur McCloskey.
28 M. McCLOSKEY : [interprétation] Est-ce qu'on peut avoir une date ? Parce
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1 qu'il n'est pas clair à partir du compte rendu d'audience de quelle date on
2 est en train de parler.
3 M. IVETIC : [interprétation]
4 Q. Vous souvenez-vous de la date où vous avez reçu ce message ? Etait-ce
5 le 11 ou le 12 ?
6 R. Je pense que c'était le 12 juillet, c'était la première journée du
7 début des transferts.
8 Q. Mais êtes-vous d'accord avec moi pour dire que les ordres que vous avez
9 reçus avant ceci de la part de vos supérieurs avaient été plutôt des ordres
10 de nature verte ? Parce que cet ordre-ci est de tout à fait un ordre de
11 couleur bleue, pour les qualifier ainsi.
12 R. Au soir du 9, nous avons reçu cet ordre vert qui consistait à prendre
13 des positions d'arrêt afin d'essayer de stopper ou essayer du moins de
14 stopper le -- l'avancée des forces serbes en direction du nord, afin que
15 les réfugiés puissent avoir le temps de parvenir jusqu'au secteur de
16 Potocari. Et l'ordre vert a été en vigueur jusqu'à l'obtention de cet
17 ordre-ci où l'on nous a donné instruction de déposer nos armes, mais ça
18 allait au-delà de la mission en bleu que nous avions reçue au début de
19 notre mission ou de notre tâche. Parce que la tâche en bleu, la mission
20 normale du Bataillon néerlandais, cela comportait aussi des règles
21 d'implication dans les combats avec possibilité d'appui aérien rapproché,
22 et cela englobait bien plus que ce que nous avions comme mission jusque-là.
23 A partir de ce moment concret, la seule chose que nous pouvions faire était
24 de fournir une aide humanitaire, c'était bien moins que ce que nous avions
25 eu comme mission auparavant.
26 Q. Lorsqu'il s'agit des ordres que vous aviez obtenus, soit vert ou bleu,
27 obtenus précédemment, est-ce que l'on vous aurait donné des ordres
28 consistant à coordonner vos activités avec celles des soldats musulmans de
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1 Bosnie ? Je parle de vos activités qui consisteraient à tirer en direction
2 des forces des Serbes de Bosnie qui étaient en train de progresser.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, lorsque vous avez parlé
4 "d'ordres qui étaient mélangés, c'est-à-dire verts et bleus"…
5 Alors, au témoin de me rectifier si besoin est, mais, moi, j'ai cru
6 comprendre que le témoin avait considéré que les ordres reçus avant la date
7 du 9, qui étaient des ordres qui englobaient une mission de plus grande
8 envergure, qui incluraient la possibilité de participer au conflit, c'est-
9 à-dire participer au combat avec un appui aérien rapproché, et vous
10 considérez ceci comme étant de ordre de couleur bleue.
11 Or maintenant vous parlez d'ordres verts et bleus, mixtes, et ça prête à
12 confusion, Maître Ivetic, parce qu'à moins que vous n'ayez la possibilité
13 de nous préciser les ordres auxquels vous faites référence exactement.
14 M. IVETIC : [interprétation] A la page 63, au numéro 4, le témoin a
15 commencé par répondre en disant que :
16 "Le 9 il y avait ce qu'on qualifie d'ordre vert," et ensuite les
17 ordres sont devenus mixtes, verts et bleus.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais faisons une distinction entre
19 mission et ordre.
20 Si j'ai bien compris, l'ordre qui a été donné le 9 visait à ne pas
21 intervenir de façon ouverte et de ne pas [comme interprété] se comporter
22 plutôt de façon militaire. Et l'ordre vert, si j'ai bien compris, c'était
23 des ordres qui étaient en vigueur avant l'obtention des ordres bleus, à
24 moins que je n'aie pas bien compris.
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, vous avez bien compris. Dans mon esprit,
26 il n'y a pas eu de confusion entre les ordres pour ce qui est des dates
27 allant jusqu'au 9. A compter du 6 janvier jusqu'au 9 juillet, nous avions
28 une mission en bleu. Et à partir du 9 juillet, ou du soir du 9 juillet, mes
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1 activités étaient plutôt vertes, donc plutôt militaires, nous avons essayé
2 de faire de ces activités des activités couvertes, donc des activités sous
3 le couvert, et c'était des activités de combat avec tirs et exposition à
4 des tirs.
5 Et ça a duré jusqu'au matin du 12.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors si l'on comprend ainsi le
7 témoignage, Maître Ivetic, on ne comprend pas alors ce à quoi vous faites
8 référence lorsque vous parlez d'ordres verts et bleus, donc de ce mélange
9 d'ordres verts et bleus et j'aimerais que vous fassiez une distinction pour
10 ce qui est de ces ordres.
11 Veuillez continuer.
12 M. IVETIC : [interprétation] Merci. Je vais le préciser.
13 Q. Les ordres que vous avez reçus entre le 9 et le 12 juillet, c'était des
14 ordres qui se rapportaient à la coordination des activités de combat en
15 compagnie des combattants musulmans contre les combattants serbes ?
16 R. Je ne me souviens pas avoir reçu ce type d'ordres, mais si vous vous
17 penchez sur mes positions d'arrêt et les activités des forces musulmanes
18 là-bas, j'ai coordonné mes activités avec autant que faire se pouvait afin
19 que nous ne nous tirions pas dessus les uns les autres. Je ne sais pas s'il
20 y a eu des ordres de reçus par la filière de la chaîne de commandement,
21 mais c'est ce que j'ai fait sur le site, oui.
22 Q. Je voudrais maintenant, Monsieur le Témoin, que nous allions un peu
23 plus de l'avant et que l'on se centre sur la période de temps où vous êtes
24 arrivé au campement des Nations Unies de Potocari.
25 LE TÉMOIN : [interprétation] Et si je peux élaborer, je voudrais parler des
26 difficultés de la situation. Parce qu'à un moment donné, il y a eu
27 tentative de coordination avec les soldats qui se trouvaient là-bas, les
28 soldats musulmans qui se trouvaient là-bas, mais avec les changements de
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1 nombres dont j'ai parlés -- les changements intervenus au niveau des
2 quantités d'effectifs. Il y a eu, quelques heures plus tard, une situation
3 où un soldat musulman avait pris possession devant un lance-roquettes qui
4 se trouvait juste face à mon blindé de transport de troupes et on m'a dit
5 que c'était parce que les forces musulmanes voulaient nous empêcher de
6 quitter ce site. Donc il était très difficile de coordonner nos activités
7 avec celles des effectifs musulmans qui étaient présents là-bas parce que
8 ça changeait tout le temps.
9 M. IVETIC : [interprétation]
10 Q. Mais pendant cette période de temps, est-ce que ce lance-roquettes, qui
11 se trouvait à proximité de votre blindé de transport de troupes - je ne
12 sais plus s'il y en avait un ou deux - mais, dites-nous : Est-ce qu'on vous
13 avait menacé ? Est-ce que les forces musulmanes de Bosnie avaient menacé --
14 de nous tirer dessus, puisqu'il n'y avait pas eu d'appui aérien rapproché,
15 il n'y a pas eu de frappe aérienne. Vous l'a-t-on dit ?
16 R. Je ne me souviens pas qu'il y ait eu un lien quelconque avec cet appui
17 aérien rapproché. Pour autant que je m'en souvienne, nous avions pris nos
18 positions d'arrêt et il y avait aussi possibilité pour nous de quitter ces
19 positions d'arrêt. Et ceci apporte peut-être des éclaircissements pour ce
20 qui est de la partie de la déclaration relative au départ des soldats
21 musulmans, où j'avais la liberté d'intervenir, de quitter mes positions
22 d'arrêt et de me déplacer vers une autre position d'arrêt.
23 Q. Merci d'avoir apporté cet éclaircissement.
24 Je voudrais revenir à la période de temps où vous êtes arrivé à la
25 base des Nations Unies.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, puis-je poser une
27 question.
28 Si j'ai bien compris votre réponse, lorsque les effectifs musulmans se
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1 trouvaient encore là-bas et lorsqu'ils ont essayé d'utiliser un lance-
2 roquettes contre vous, vous n'aviez pas ressenti une liberté de mouvement
3 pour ce qui était de changer de position, et vous n'avez pu le faire qu'une
4 fois ces gens-là partis ?
5 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est exact.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.
7 M. IVETIC : [interprétation] Merci.
8 Q. Alors, Monsieur, peut-on se concentrer sur la période de temps qui est
9 celle de votre arrivée au campement des Nations Unies à Potocari. Et je
10 voudrais tout d'abord attirer votre attention sur la date du 12 juillet.
11 Aurais-je raison de dire qu'à un moment donné les combattants de l'armée
12 serbe sont partis et ils ont été remplacés par des effectifs de la police
13 serbe ?
14 R. Tout d'abord, je voudrais dire que je ne suis pas arrivé au campement
15 des Nations Unies à ce moment-là. On parle maintenant d'heures tardives de
16 la soirée. Moi, j'étais quelque part entre le campement et la position 0.02
17 au sud du campement, mais pas dans le campement des Nations Unies en tant
18 que tel.
19 Et à un moment donné, des membres des effectifs de la police serbe,
20 puisqu'ils se sont présentés en tant que tel, sont venus aussi à cet
21 endroit-là. Je ne sais pas s'ils ont été remplacés, mais à un moment donné
22 des membres de la police serbe sont venus au site où je me trouvais moi-
23 même, en effet.
24 Q. Bien.
25 M. IVETIC : [interprétation] Alors, je voudrais maintenant que nous nous
26 penchions sur le 1D897, c'est une fois de plus une partie du compte rendu
27 de l'affaire Popovic. Page 30 du prétoire électronique, qui devrait
28 correspondre à la page 2 341 du compte rendu d'audience de ce procès.
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1 Alors, essayons de nous pencher plutôt sur la deuxième moitié de la page, à
2 compter de la ligne 14 et au-delà.
3 Q. Est-ce que vous souhaitez que je vous présente ce que vous avez dit
4 pour avoir un suivi, un contexte, parce qu'au début de la page 14 :
5 "Quand vous avez continué vos témoignages, page 53 du compte rendu,
6 lignes 9 à 12, où vous avez dit que vous étiez en contact avec le
7 commandant Franken et que c'est de sa bouche que vous avez appris que lui
8 aussi avait connaissance du fait que les réfugiés allaient être transportés
9 et que, pratiquement, c'est là que vous aviez compris que c'était ce qui
10 allait se produire. Est-ce bien exact ?
11 "Réponse : Oui. A l'occasion de mes contacts avec le commandant
12 Franken, lui a confirmé qu'il avait également ouï dire à l'occasion de
13 pourparlers que c'était le cas, et que les réfugiés étaient censés être
14 transportés hors de l'enclave.
15 "Question : Ce commandant Franken le savait déjà lorsque vous l'avez
16 contacté, n'est-ce pas ?
17 "Réponse : Oui. Cela est exact. En somme, il a été surpris de voir
18 que c'était en train de se produire déjà.
19 "Question : Donc, partant de là, partant de votre réponse, est-ce
20 qu'il serait possible de conclure du fait que l'accord relatif à
21 l'évacuation des réfugiés avait été établi à des niveaux plus hauts que les
22 vôtres et à un niveau plus haut que celui du capitaine Mane, qui était sur
23 le site même ?
24 "Réponse : Je ne sais pas s'il y a eu un accord quel qu'il soit de ce
25 genre. Ce qui était clair, c'est que non seulement à mon niveau, mais à des
26 niveaux supérieurs aussi, il y a eu des négociations relatives à
27 l'évacuation des réfugiés."
28 Monsieur, est-ce que vous confirmez cette partie-là de votre
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1 déposition, est-ce que ceci correspond à la vérité et est-ce précisément
2 les faits tels que vous les avez énoncés ?
3 R. Oui, c'est conforme à la vérité et c'est tout à fait précis.
4 Q. S'agissant des pourparlers ou des discussions à des réunions au niveau
5 supérieur, avez-vous eu des connaissances plus précises que vous vous
6 seriez procurées à ce moment-là ou plus tard pour dire que vous avez dû
7 vous référer à d'autres pour ce qui est de ce sujet même ?
8 R. Non, je n'ai pas eu cela à l'époque, du tout.
9 Q. Bon, alors, je vais limiter mes questions à ce que vous avez pu
10 apprendre ou entendre dire.
11 Est-ce que l'un quelconque de vos supérieurs hiérarchiques, y compris le
12 commandant Franken, aurait dit à un moment donné que les évacuations de la
13 population hors de l'enclave étaient considérées comme une mauvaise chose
14 et que ce type de chose devrait être empêchée ?
15 R. Je ne peux pas me souvenir d'avoir entendu dire quoi que ce soit de ce
16 type de la part du commandant Franken, non.
17 Q. Bon.
18 M. IVETIC : [interprétation] Alors, si à présent nous pouvions nous pencher
19 sur la page 69 de ce même compte rendu au prétoire électronique, et ça
20 devrait être la page 2 380 du compte rendu afférent.
21 Q. Et j'aimerais que l'on nous montre les lignes 18 à 25. Je vais d'abord
22 citer :
23 "Question : Est-il exact de dire qu'une évacuation rapide des gens de
24 Potocari était la seule solution pour la population ?"
25 Et la réponse apportée était celle-ci :
26 "A l'époque, lorsque tous ces réfugiés s'étaient rassemblés à l'endroit où
27 se trouvait auparavant une usine, à ce moment-là, il n'y avait pas de
28 solution autre que celle de les évacuer, parce que, comme je l'avais dit
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1 auparavant, il y avait de fortes possibilités de voir une épidémie se
2 présenter, les gens n'avaient pas à manger, n'avaient pas d'eau et les
3 températures étaient fort élevées. Cela veut dire qu'à ce moment-là, il n'y
4 avait plus d'autres solutions; c'est exact."
5 Alors, dites-nous, Monsieur, si vous maintenez cette partie-là de votre
6 déposition antérieure et est-ce que c'est conforme à la vérité, et est-ce
7 précis pour ce qui est de ce sujet concret ?
8 R. Oui. C'est tout à fait conforme à la vérité et tout à fait précis.
9 Q. En sus, Monsieur, est-il exact de dire que les réfugiés qui s'étaient
10 rassemblés à Potocari avaient en fait, pour bon nombre d'entre eux, exprimé
11 le souhait de quitter l'enclave pour quelle que raison que ce soit ?
12 R. Oui. A ce moment-là, eux aussi avaient compris, parce qu'ils n'avaient
13 plus ni foyer, ni lit, ni vivres, ni eau, et que ce n'était pas un endroit
14 où ils pouvaient rester.
15 Q. Ai-je raison de dire, Monsieur, que le Bataillon néerlandais avait créé
16 une chaîne humaine avec son propre personnel pour utiliser par la suite des
17 blindés de transport de troupes pour essayer de canaliser la foule et
18 empêcher les gens d'y aller sous forme de "stampedo" lorsqu'ils se sont
19 efforcés d'accéder aux autocars pour sortir de Srebrenica ?
20 R. Oui, nous, on avait formé une chaîne humaine de l'autre côté de la
21 route, c'est exact, et nous avons essayé d'apaiser ces réfugiés. Non
22 seulement ils étaient en train de former un "stampedo", mais en plus, en
23 raison de la chaleur, ils perdaient conscience, ils
24 étaient en train de tomber par terre, et il y avait un gros risque de voir
25 les gens marcher les uns sur les autres. Donc plus tard, le deuxième jour,
26 on a utilisé quatre blindés de transport de troupes, non pas deux, pour
27 essayer de créer une espèce d'entonnoir en forme de lettre V pour faciliter
28 l'orientation de cette quantité énorme de réfugiés.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, je voudrais vous demander
2 d'essayer de faire en sorte que nous fassions une pause dans les deux
3 minutes qui viennent.
4 M. IVETIC : [interprétation] Oui, merci. Je crois qu'après ma question
5 suivante, on pourra faire une pause.
6 Q. Alors dans cette période de temps, les Serbes n'étaient pas encore
7 arrivés, et en l'absence du personnel serbe, pourriez-vous nous dire que
8 les réfugiés musulmans de Bosnie avaient eux aussi exprimé la volonté de
9 s'en aller, et est-ce qu'il n'y a eu personne pour les forcer à quitter
10 Srebrenica ?
11 R. Oui, ils tenaient à s'en aller, ils voulaient s'en aller parce qu'à ce
12 moment-là les forces serbes n'étaient pas là, il n'y avait que les forces
13 des Nations Unies. Et j'ai pris la décision de commencer à effectuer les
14 transports de ces réfugiés. Et à mon avis, pour les réfugiés, ça avait été
15 une opportunité pour eux de faire en sorte que les familles restent
16 ensemble afin qu'ils montent à bord d'autocars, de camions, ensemble d'une
17 façon normale, sans pour autant être bousculés, poussés ou sans recevoir de
18 coups de pied ou être brutalisés d'une façon quelle qu'elle soit.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.
20 M. IVETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Nous allons faire une pause.
22 Vous pouvez suivre l'huissière, Monsieur Van Duijn.
23 [Le témoin quitte la barre]
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur McCloskey, je vous vois debout.
25 M. McCLOSKEY : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Nous avons un
26 autre témoin qui est disponible, et je voulais dire que je n'ai pas de
27 questions supplémentaires à poser.
28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, de combien de temps
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1 pensez-vous avoir besoin après la pause, il nous restera quelque 40
2 minutes.
3 M. IVETIC : [interprétation] Eh bien, je vais probablement avoir besoin de
4 la totalité de ce temps, et il se peut que j'aie besoin de dix à 15 minutes
5 au-delà.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais est-ce que vous pouvez faire un
7 effort pour en terminer avec le témoignage de ce témoin-ci aujourd'hui,
8 sans faire attendre alors le témoin suivant.
9 M. IVETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Nous allons faire une pause, et
11 nous reprendrons à 13 heures 25.
12 --- L'audience est suspendue à 13 heures 16.
13 --- L'audience est reprise à 13 heures 37.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Peut-on faire entrer le témoin dans le
15 prétoire.
16 [La Chambre de première instance se concerte]
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, si vous avez besoin de
18 cinq ou dix minutes supplémentaires, il se peut que nous en venions à
19 demander l'indulgence de toutes les personnes qui travaillent avec nous,
20 mais, de toute façon, nous terminerons avant 14 heures 30.
21 M. IVETIC : [interprétation] Ecoutez, nous avons trois courts extraits
22 vidéo à montrer. Je ne sais pas combien de temps cela va prendre pour
23 charger la vidéo -- bon. Ce que vous montrez ne dure pas plus qu'une
24 minute.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si vous nous donnez peut-être les
26 numéros par avance ?
27 M. IVETIC : [interprétation] Je l'ai déjà fait.
28 M. GROOME : [interprétation] Oui, nous pouvons tout à fait vous aider, si
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1 cela est possible.
2 Monsieur le Président, M. McCloskey est…
3 M. GROOME : [interprétation] Il doit arriver d'une minute à l'autre, mais
4 nous pouvons poursuivre.
5 [Le témoin vient à la barre]
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Poursuivez, Maître Ivetic.
7 M. IVETIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
8 Q. Je souhaiterais maintenant que nous parlions de la séparation et
9 d'autres choses que vous avez relatées à propos des évacuations. Alors,
10 premier temps, pièce P1154, page 34 de ce document, c'est-à-dire il s'agit
11 à nouveau de votre déposition en application de l'article 92 ter.
12 M. IVETIC : [interprétation] Et j'indique que cela correspond à la page 2
13 287 [comme interprété] du compte rendu d'audience, lignes 6 à 13.
14 Q. Et là, vous parlez des explications qui vous ont été fournies par Mane,
15 à savoir qu'ils avaient une liste de criminels de guerre et qu'il fallait
16 qu'ils vérifient les noms de tous les hommes pour voir si ces noms
17 figuraient sur la liste. Alors, dois-je comprendre de votre déposition que
18 vous, en tant que militaire, ne considériez pas cette séparation des hommes
19 par rapport aux autres réfugiés comme autre chose qu'un événement qui
20 pourrait se produire lorsqu'un camp s'empare du territoire d'un autre ?
21 R. Oui, c'est exact. Fondamentalement, cela correspond à une
22 procédure normale.
23 Q. Alors, pages 51 et 50 de ce compte rendu d'audience, vous faites
24 référence à la maison blanche, à ce qui s'y passait, et au fait que vous
25 aviez découvert des passeports qui avaient été laissés là. Et à la page 12
26 du compte rendu d'audience --
27 M. IVETIC : [interprétation] Excusez-moi, il me semble qu'il n'y a
28 pas de traduction ? On me dit que le problème est réglé.
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1 Q. Donc, compte rendu d'audience d'aujourd'hui, page 12, ligne 4, vous
2 parlez des passeports, et outre les passeports, vous faites référence au
3 fait que des documents d'identité ont été trouvés devant la maison blanche,
4 et je souhaiterais que nous nous intéressions à nouveau à votre déposition
5 dans l'affaire Popovic pour voir si cela va vous rafraîchir la mémoire à
6 propos de ce que vous avez trouvé à cet endroit.
7 M. IVETIC : [interprétation] Document 1D897 pour le système e-court, page 9
8 de ce document, et cela devrait correspondre à la page 2 320 du compte
9 rendu d'audience d'aujourd'hui. C'est le haut de la page, à partir de la
10 première ligne. Et je cite, Monsieur :
11 "Question : Vous nous avez également dit hier qu'après le départ des
12 réfugiés de Potocari le 13 juillet 1995, ils ont laissé un certain nombre
13 d'objets personnels, et vous avez mentionné, entre autres, des
14 photographies et des couvertures. Alors, ma question est comme suit :
15 hormis ces photographies et couvertures, est-ce que vous avez vu des
16 documents d'identité, des documents permettant d'identifier les personnes,
17 des passeports, des permis de conduire, des permis de port d'armes et des
18 documents semblables ?
19 "Réponse : Les passeports que j'avais vus se trouvaient sur la pelouse du
20 bâtiment qu'on appelle la 'maison blanche', et si je ne m'abuse, les autres
21 photographies et couvertures dont j'ai parlé hier étaient les objets
22 personnels qui avaient été abandonnés dans la zone des réfugiés. Dans la
23 zone des réfugiés, j'ai vu des couvertures des photographies. Je n'ai pas
24 vu de passeports, par exemple, dans la zone des réfugiés. Les passeports
25 que j'ai vus se trouvaient sur la pelouse de la maison blanche.
26 "Juge Agius : Et les cartes d'identité, les permis de port d'armes et les
27 permis de conduire, qu'en est-il ?
28 "Le témoin : Non, non, je n'ai pas vu cela.
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1 "Juge Agius : Fort bien. Merci."
2 Donc, est-ce que cette déposition que vous avez faite dans l'affaire
3 Popovic vous rafraîchit la mémoire à propos de ce que vous aviez trouvé ?
4 Est-ce que vous avez trouvé les passeports seulement sur la pelouse devant
5 la maison blanche, et vous n'avez pas trouvé de documents d'identité ?
6 R. Oui, cela me rafraîchit la mémoire. Je réfléchis à ce que j'avais
7 trouvé sur la pelouse de la maison blanche. Alors, je suis absolument sûr
8 qu'il y avait des passeports à cet endroit, et si je ne me trompe, il y
9 avait également d'autres types de documents d'identité sur cette même
10 pelouse. Mais vous devez savoir que ces documents étaient en serbo-croate,
11 et j'ai eu l'impression, en fait, qu'ils correspondaient à des documents
12 d'identité.
13 Q. Donc vous êtes en train de modifier la déposition que vous avez faite
14 dans l'affaire Popovic ou est-ce que vous confirmez cette déposition ?
15 Parce que, là maintenant, je dois dire que j'ai du mal à comprendre.
16 R. Je confirme la déposition que j'ai faite dans l'affaire Popovic, et je
17 vous dis très clairement que lorsque M. le Juge Agius m'a posé la question
18 à propos des cartes d'identité, des permis de port d'armes et des permis de
19 conduire, je pense qu'il faisait référence à la zone où s'étaient trouvés
20 les réfugiés. Et comme je l'ai déjà indiqué auparavant, je n'avais pas vu
21 de documents d'identité dans la zone destinée aux réfugiés. J'y avais vu
22 des photographies et des couvertures.
23 Q. Et à propos de la maison blanche, est-ce que les passeports que vous
24 avez trouvés se trouvaient en un seul et même endroit ou est-ce qu'ils
25 étaient dispersés ?
26 R. Ils se trouvaient en fait sur la pelouse de la maison blanche qui avait
27 une superficie de 10 mètres de long et de 4 à 5 mètres de large. Ils
28 étaient dispersés sur cette surface.
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1 Q. Ai-je raison d'avancer que vous avez trouvé quelque 20 à 25 passeports
2 que vous avez rassemblés et placés dans la poche de votre short ?
3 R. Oui, cela semble plus ou moins exact.
4 Q. Est-ce que vous avez eu l'impression qu'il s'agissait de vieux
5 passeports de la République yougoslave socialiste ou est-ce qu'il s'agit de
6 nouveaux passeports de Bosnie-Herzégovine ? Ou est-ce que vous ne savez pas
7 ?
8 R. Je ne le savais pas.
9 Q. Est-ce que vous savez si ces passeports étaient encore valides à ce
10 moment-là ?
11 R. Non, non, je ne le savais pas.
12 Q. Puis-je avancer que vous ne pouvez pas exclure la possibilité que les
13 passeports avaient été abandonnés par les hommes musulmans ?
14 R. Je n'en sais rien. Je n'en sais rien, pourquoi ils ont laissé leurs
15 passeports à cet endroit.
16 Q. Est-il exact qu'outre les passeports que vous aviez trouvés à
17 l'extérieur de la maison blanche, vous avez également vu que d'autres
18 réfugiés avaient abandonné leurs passeports ainsi que des effets personnels
19 à la gare routière ?
20 R. Non. Je ne pense pas qu'à la gare routière ou dans la zone pour les
21 réfugiés, comme nous l'avons indiqué préalablement, j'avais vu des
22 passeports. Je n'ai vu, là-bas, que des photographies et des couvertures.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, pour que la Chambre
24 comprenne et suive votre raisonnement et la série de questions que vous
25 posez, est-ce que vous êtes en train d'envisager la possibilité que ces
26 passeports n'étaient plus valides et que, de ce fait, les personnes qui les
27 avaient laissés là le savaient et, pour cette raison, ont pensé : Bon, ils
28 ne sont plus valides, donc, par conséquent --
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1 M. IVETIC : [interprétation] Non, non, Monsieur le Président.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Qu'en est-il, alors --
3 M. IVETIC : [interprétation] Le témoin nous a indiqué ce que Mane avait dit
4 à propos du fait qu'ils n'auraient plus besoin de leurs documents
5 d'identité, mais cela aurait pu -- on peut envisager une autre
6 interprétation. Si un passeport n'est plus valide, le détenteur du
7 passeport n'en a plus besoin.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bon. C'est clair pour la Chambre.
9 M. IVETIC : [interprétation]
10 Q. Est-ce que vous vous souvenez que dans la déclaration originale que
11 vous avez faite au bureau du Procureur le 25 octobre 1995 se trouvait une
12 référence à propos du fait que vous aviez vu des passeports à la gare
13 routière, et lorsque cela vous a été présenté lors de l'affaire Popovic,
14 vous avez déclaré que vous ne saviez pas comment cela s'était retrouvé dans
15 votre déclaration pour le TPIY ? Vous vous souvenez de cela ?
16 R. Non, je ne m'en souviens pas.
17 M. IVETIC : [interprétation] Ou peut-être, aux fins du compte rendu
18 d'audience, étant donné que je ne l'ai pas mentionné, je dirais que cela
19 figure à la page 2 353 du compte rendu d'audience dans l'affaire Popovic.
20 Mais fondamentalement, le témoin nous dit aujourd'hui qu'il ne se souvient
21 pas avoir vu les passeports dans la gare routière.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ça, ce n'est pas un élément de preuve
23 auquel la Chambre a accès. Mais s'il y a un accord à propos de ce que le
24 témoin nous dit -- cela est maintenant consigné au compte rendu d'audience.
25 Monsieur McCloskey, est-ce que vous considérez que cela est exact ou non ?
26 M. McCLOSKEY : [interprétation] Ecoutez, je vais réfléchir, je vais voir.
27 Je ne m'en souviens pas au pied levé, comme cela, Monsieur le Président.
28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je comprends.
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1 M. IVETIC : [interprétation] Si nous pouvons être d'une certaine utilité,
2 je vous dirais que cela figure aux lignes 1 à 23 de la même page. C'est à
3 M. McCloskey que je m'adresse.
4 Q. Est-ce que vous saviez que dans le cadre du système civil de Bosnie,
5 une carte d'identité était utilisée comme un document d'identification de
6 base ?
7 R. Non, je ne le savais pas, cela.
8 Q. Et les propos que vous avez attribués au Serbe que vous appelez Mane à
9 propos de ces passeports, j'aimerais vous poser une question à ce sujet.
10 Lorsqu'il a dit qu'ils n'auront plus besoin de passeports, est-ce qu'il
11 s'exprimait en anglais ou est-ce qu'il parlait par le truchement d'un
12 interprète ?
13 R. Non, il a parlé grâce à l'aide de l'interprète, Miki, qui était
14 toujours très près de Mane.
15 Q. Est-ce que vous avez eu l'impression que Miki n'était pas un interprète
16 professionnel, mais plutôt quelqu'un qui avait une connaissance limitée de
17 l'anglais ?
18 R. Non, je n'ai pas eu l'impression que Miki était un interprète
19 professionnel, mais le fait est qu'il s'exprimait parfaitement en anglais.
20 Q. Et est-ce que Mane ou quelqu'un d'autre au nom des Serbes vous a dit de
21 ne pas prendre les passeports ou est-ce qu'ils vous ont forcé à rendre les
22 passeports ?
23 R. Non, ils ne m'ont pas forcé à rendre les passeports, et ils ne m'ont
24 pas non plus empêché de les prendre d'ailleurs, non.
25 Q. Quant à votre interprétation de la signification qu'avaient pu avoir
26 les propos proférés par Mane, lorsque vous repensez à ces événements
27 rétrospectivement et compte tenu de ce qui a été publié dans la presse et
28 les médias, est-ce que vous pensez que tout ce qui a été dit par la suite a
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1 un impact sur la façon dont vous envisagez le sort des hommes de Srebrenica
2 ?
3 R. L'interprétation des propos proférés par Mane que j'ai faite doit être
4 comprise à la lumière des images que j'avais déjà pu voir avant d'aller en
5 mission, et qui vous font penser nécessairement aux camps de concentration.
6 Ces images, on pouvait les voir à la télévision néerlandaise dès 1991 ou
7 1992. Et, évidemment, au cours de notre formation, on nous a fait savoir
8 que ce genre d'atrocités est effectivement quelque chose qui arrivait.
9 Donc, dès le moment où on a commencé à transporter et à isoler les
10 hommes, j'avais déjà ces images à l'arrière de la tête, et donc, déjà le
11 fait que les hommes ont été séparés semblait annoncer un sort funeste qui
12 leur était réservé. Mais quand j'ai entendu Mane dire ce qu'il a dit, alors
13 il m'a semblé que leur sort devait être encore plus sinistre, puisque les
14 hommes après avoir été isolés n'auraient plus besoin de leurs passeports.
15 Q. Et la conversation que vous avez eue avec Mane ne se rapportait qu'aux
16 passeports, pas aux pièces d'identité ?
17 R. Nous n'avons évoqué que les passeports, en effet.
18 M. IVETIC : [interprétation] J'aimerais qu'on affiche brièvement le
19 document 1D00897 sur la liste 65 ter, page 51, qui correspond à la page 2
20 362 du compte rendu d'audience.
21 Q. Monsieur, ici, aux lignes 8 à 23, il y a un échange assez long
22 concernant l'utilisation des cartes d'identité à la place des passeports
23 aux fins d'identification. On y souligne qu'une personne qui n'avait pas de
24 passeport mais qui était munie d'une carte d'identité satisfaisait aux
25 critères d'identification qui étaient en vigueur en Bosnie à l'époque sur
26 le plan juridique. Alors, pendant que vous parliez, j'ai fait une
27 recherche, et nulle part dans le compte rendu d'audience dans l'affaire
28 Popovic je n'ai pu repérer un endroit où vous corrigez les personnes qui
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1 vous posent des questions au sujet des cartes d'identité et où vous les
2 contredisez pour affirmer que vous avez vu, outre les passeports, des
3 cartes d'identité en face de la maison blanche.
4 Maintenant, quand vous dites que vous avez vu également des cartes
5 d'identité devant la maison blanche, peut-être vous trompez-vous ?
6 R. Je ne pense me tromper, non.
7 Q. Alors, j'aimerais maintenant passer à la page 12 du compte rendu
8 d'audience temporaire, ligne 4, où vous dites que la maison blanche a été
9 bondée. J'aimerais essayer d'établir de combien d'hommes il s'agit au
10 juste.
11 M. IVETIC : [interprétation] Veuillez afficher, s'il vous plaît, le
12 document 1D898 de la liste 65 ter, page 18 au prétoire électronique, qui
13 correspond à la page du compte rendu d'audience
14 2 450 [comme interprété] dans l'affaire Popovic.
15 Q. Je commence par la ligne 1, et j'aimerais que vous me suiviez
16 attentivement pendant que je fais ma lecture et pendant que je procède à
17 des calculs.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, c'est à 2 405 vous vous
19 référez, n'est-ce pas ?
20 M. IVETIC : [interprétation] 2 405.
21 Q. "La question sur laquelle je souhaite que vous vous concentriez est la
22 suivante : quand vous dites que vous avez vu plus de 300, voire 350 hommes
23 qui ont été isolés, c'est le nombre d'hommes qui ont été pris, et non pas
24 le nombre d'hommes qui ont été amenés avant votre intervention ?
25 "Réponse : Non. C'est le chiffre total des hommes qui ont été isolés au
26 cours de la journée, d'après mes estimations.
27 "Question : Eh bien, c'est une question qui m'intéresse parce que Mme
28 Fauveau a établi avec vous hier que le nombre de personnes que vous avez
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1 vues dans la maison le premier jour allait de 15 à 50, n'est-ce pas ?
2 "Réponse : Oui. Je m'en souviens, en effet.
3 "Question : Et vous dites que le lendemain dans la maison blanche vous avez
4 vu entre 50 et 100 personnes, n'est-ce pas ?
5 "Réponse : Oui. Je m'en souviens.
6 "Question : Donc, au total, le nombre d'hommes que vous avez vus dans ces
7 deux maisons au cours de ces deux journées était au maximum 150 personnes ?
8 "Réponse : Les hommes que j'ai vus à ce moment-là, leur nombre devait se
9 rapprocher de 150 plus ou moins. Mais quand j'examine dans sa totalité ce
10 laps de temps qui s'écoulait sur deux jours et quand j'essaie de réfléchir
11 et d'évaluer le nombre d'hommes qui ont été isolés, il me semble qu'ils
12 devaient être plus nombreux. Je n'étais pas à la maison blanche pendant
13 toute la journée du deuxième jour et je ne sais pas si d'autres hommes ont
14 été transportés avant mon arrivée."
15 Pour commencer, Monsieur, est-ce que vous confirmez ce qui est écrit dans
16 cet extrait et est-ce que vous vous en tenez toujours à cette déposition
17 que vous avez faite ? Confirmez-vous qu'elle est véridique et exacte quant
18 à sa teneur ?
19 R. Oui, elle correspond à la vérité et les données sont exactes.
20 Q. Alors, les autres hommes que vous avez vus se faire isoler ont peut-
21 être été relâchés par les Serbes par la suite sans que vous le sachiez,
22 est-ce que c'est une autre raison pour laquelle vous avez cité le nombre
23 que vous avez cité pour les hommes isolés dans la maison blanche ?
24 R. Non, je ne pense pas que ce soit là la raison. La raison, je l'ai déjà
25 expliquée au cours de ma déposition précédente, c'est que je n'ai pas passé
26 tout mon temps sur les lieux, dans la maison blanche.
27 Q. Très bien. Et est-il vrai que le 13 juillet dans la matinée, lorsque
28 vous avez commencé l'évacuation en autobus, et avant l'arrivée des Serbes,
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1 quelque 100 à 150 hommes musulmans de Bosnie sont sortis de ces convois
2 avant l'arrivée des Serbes ?
3 R. Je ne sais pas quels sont les chiffres avancés par NIOD. Je sais que
4 NIOD a procédé à des évaluations quant au nombre d'hommes musulmans qui ont
5 réussi à s'en sortir. Je pense qu'ils en ont retrouvé quelques-uns et
6 qu'ils ont recueilli leurs dépositions pour se faire une idée de la
7 situation qui prévalait à l'époque. J'espère que ces hommes étaient
8 nombreux…
9 Q. Eh bien, je me fonde sur le chiffre de 100 à 150 hommes musulmans que
10 vous avez cité dans l'affaire Popovic, page du compte rendu d'audience 2
11 318. Et qui, à son tour, était basé sur le chiffre cité dans le rapport
12 NIOD ? Si vous souhaitez, je peux vous présenter cet extrait.
13 M. IVETIC : [interprétation] Document 1D897, à la fin de la page 7 et au
14 début de la page 8.
15 Q. Donc la question commence à partir de la ligne 19 et votre réponse est
16 entamée à la ligne 25. Et quand vous aurez fini la lecture, veuillez nous
17 le dire pour que nous puissions passer à la page suivante.
18 R. Puis-je voir la page suivante, s'il vous plaît.
19 Q. Et est-ce que cela vous rafraîchit la mémoire quant au chiffre que j'ai
20 cité tout à l'heure, à savoir le chiffre de 100, 150 hommes musulmans ?
21 R. Oui, ce document permet de me rappeler de ma déposition dans l'affaire
22 Popovic, mais si mes souvenirs sont bons, j'ai déposé dans cette affaire
23 avant que les chiffres calculés et présenté dans le rapport du NIOD aient
24 été publiés. Et je ne sais donc pas si les évaluations de ce rapport sont
25 basées sur mes évaluations ou s'ils ont procédé à des calculs indépendants.
26 Q. Mais sur quoi basez-vous votre évaluation ? S'agit-il des observations
27 que vous avez pu faire personnellement --
28 R. [aucune interprétation]
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1 Q. Bon. Maintenant, j'aimerais passer à un autre sujet.
2 D'abord, vous décriez un incident où un jeune garçon a été pratiquement
3 étranglé par un Serbe portant un uniforme noir --
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez nous citer la référence, Maître
5 Ivetic, s'il vous plaît. De quelle page s'agit-il ?
6 M. IVETIC : [interprétation] Page 81, ligne -- ah, je pense que la
7 correction vient d'être apportée. Je suis désolé. Je [inaudible],
8 sans doute, beaucoup trop vite. J'aimerais donc vous poser des questions au
9 sujet de cet incident où vous dites qu'un jeune garçon a été pratiquement
10 étranglé par un Serbe portant l'uniforme noir. Dès le moment où vous vous
11 êtes adressé à Mane pour lui dire ce qui s'est passé, il a mis fin aux
12 actions de ce Serbe en uniforme noir, il vous a dit que vous aviez bien
13 raison de vous plaindre de cette façon de procéder et il a dit au Serbe en
14 question qu'il était un soldat serbe et ne devrait pas se trouver sur place
15 et il l'a donc amené ailleurs. Est-ce que cela correspond à la vérité, la
16 description que je viens de faire ?
17 R. Oui, en effet.
18 Q. Et mis à part cet incident isolé, personnellement, vous n'avez pas été
19 témoin de mauvais traitement ou de délits de quelque ordre que ce soit
20 commis par des Serbes pendant l'évacuation des réfugiés ou pendant la
21 séparation des hommes ?
22 R. Quand il s'agit de mauvais traitement ou de délits, mais bien sûr il y
23 a eu de nombreuses journées qui regorgeaient de mauvais traitements et de
24 délits, ou d'activités répréhensibles. Pour ce qui est d'incidents concrets
25 et de la séparation des hommes en général, je me trouvais bien sûr en plein
26 milieu de ce qui se passait, et donc j'ai pu voir de mes propres yeux un
27 certain nombre d'incidents.
28 Le fait que ce jeune garçon a été pratiquement étranglé, eh bien,
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1 c'est un incident auquel j'ai participé directement, mais il y a eu
2 d'autres incidents, de nombreux incidents où j'ai essayé de convaincre Mane
3 de permettre aux hommes de rester avec leurs familles.
4 Donc si vous souhaitez tirer la conclusion qu'un seul incident s'est
5 produit à cette époque, eh bien, non, je dois dire que vous avez tort.
6 M. IVETIC : [interprétation] J'aimerais qu'on nous affiche à présent
7 la pièce 1D900, page 16 dans la version anglaise, page 14 en version B/C/S.
8 Q. Une fois de plus, il s'agit d'un briefing qui est fait à l'intention de
9 l'Armée royale néerlandaise en 1995.
10 Il s'agit de la page 16 en version anglaise, page 14 en B/C/S,
11 disais-je, et je me réfère à l'avant-dernier paragraphe qui commence par
12 les mots :
13 "Il a estimé qu'il n'était pas possible que les Serbes fassent quoi
14 que ce soit à l'égard des réfugiés sans que ce soit remarqué. Alors cela
15 aurait été remarqué et générerait de la panique, il y aurait eu des cris
16 parmi les Musulmans. Les Musulmans paniquaient dès qu'ils voyaient quelque
17 chose, comme par exemple lorsque ce Musulman s'était pendu."
18 Alors, est-ce que vous confirmez que cet extrait se trouve être conforme à
19 la vérité et précis s'agissant des faits qui sont évoqués ?
20 R. Oui, c'est tout à fait précis. Et si je ne m'abuse, il s'agit de la
21 soirée et de la nuit du 12 au 13. Et la question qu'on vous a posée était
22 celle de parler de la nuit et de la soirée pour savoir si les Serbes
23 seraient revenus pour faire quoi que ce soit à l'égard des réfugiés
24 musulmans sans que nous ne le remarquions.
25 Q. Je voudrais que nous nous penchions sur ce qui est dit trois
26 paragraphes avant à la même page en anglais, vous évoquiez les hommes dans
27 la maison blanche, et je cite ce que vous dites :
28 "Il n'a vu aucun homme à être malmené là-bas."
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1 Alors est-ce que ceci est conforme à la vérité et est-ce bien exact, est-ce
2 que ça coïncide avec les faits tels que vous en avez eu connaissance ?
3 R. C'est tout à fait conforme à la vérité et précis. Si vous vous penchez
4 sur les événements qui se sont produits pendant que je me trouvais là-bas,
5 personne n'a été ni battu, ni étranglé, ni quoi que ce soit d'autre. Donc
6 pendant que j'étais là-bas, il n'y a eu aucun contact physique entre les
7 Serbes et les hommes musulmans qui se trouvaient dans cette maison blanche.
8 Q. Merci, Monsieur. Je voudrais que nous tournions à la page suivante de
9 ce document. Il se trouve là une partie intitulée "Comportement à l'égard
10 des civils/réfugiés". C'est le deuxième des alinéas à partir du haut : "Et
11 pour autant qu'on puisse le dire, c'était raisonnablement bon".
12 Alors, est-ce que vous confirmez que ce segment décrit de façon exact et
13 conforme à la vérité l'attitude à l'égard des réfugiés dans Potocari à
14 l'époque ?
15 R. Ecoutez, vous devez lire ceci comme étant une partie du document
16 entier. Le document entier, je ne sais combien de pages il comporte, mais
17 cela a été un rapport présenté par moi-même à Assen, et à toutes ces pages-
18 là, les incidents que nous avons évoqués hier et aujourd'hui se trouvent
19 être décrits. Donc ceci est une déclaration que vous devez lire dans le
20 contexte du document tout entier. Donc en sus des mauvais traitements et
21 autres choses que j'ai eu l'occasion de voir, il n'y a rien eu d'autre à
22 faire remarquer.
23 Q. Justement, Monsieur, c'est la raison pour laquelle je suis un peu dans
24 la confusion. Le seul mauvais traitement que vous ayez relevé dans votre
25 rapport et dans votre témoignage antérieur, cela a trait à une personne qui
26 a presque étranglé un Musulman de Bosnie, et on vient d'en parler
27 justement. Or, en sus de cela, vous dites que vous n'avez été témoin
28 oculaire d'aucun mauvais traitement autre. C'est la raison pour laquelle je
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1 vous demande si vous avez été témoin oculaire d'autres mauvais traitements
2 infligés mis à part cet incident.
3 Et je vous redemande, Monsieur, vous souvenez-vous si cet incident
4 avec le jeune garçon en question était le seul mauvais traitement auquel
5 vous ayez été témoin par vous-même ?
6 R. Ecoutez, si vous considérez que pilonner sur des gens, leur tirer
7 dessus, les expulser de chez eux, le fait de briser des familles et de les
8 faire passer d'un côté à l'autre, si vous estimez que ce n'est pas des
9 mauvais traitements, alors là, je crois que vous vous trompez parce que
10 j'ai perçu ceci comme étant des mauvais traitements. En sus, il y a tout un
11 éventail d'atrocités de commises, et ça, c'est un des mauvais traitements
12 que j'ai pu constater par moi-même. Ce mauvais traitement infligé à ce
13 jeune garçon, oui.
14 Q. Mais le fait de tirer sur des gens, de pilonner des endroits et de
15 transférer des gens d'un endroit à l'autre, n'est-ce pas là des événements
16 constituant d'une guerre ?
17 R. Oui, ce sont des facteurs ou des éléments constituant d'une guerre.
18 Mais cela ne veut pas dire que c'est une bonne chose de faite.
19 Q. Est-il exact de dire, Monsieur, que les seuls cadavres que vous ayez pu
20 voir et que vous ayez décrits vous-même, c'étaient des victimes
21 d'hostilités, ça n'avait rien à voir avec les transports de réfugiés ?
22 R. Ça, c'est exact. Les corps que j'ai vus étaient des corps qui se
23 trouvaient à d'autres sites et non pas au site où il y a eu transfert des
24 réfugiés.
25 Q. Merci. Je voudrais maintenant que nous parlions de l'incident où il y a
26 eu rencontre avec le général Mladic.
27 Tout d'abord, vous décrivez le général Mladic qui était en train de parler
28 des Pays-Bas, et il a parlé de prévisions disant que dans dix ans il
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1 aiderait les Néerlandais à se protéger eux-mêmes. Vous avez indiqué que
2 ceci vous avait été traduit par les soins d'un traducteur serbe. Est-ce le
3 traducteur répondant au prénom de Miki que nous avons précédemment
4 mentionné ?
5 R. Non, ce n'était pas Miki. Je pense que c'était un interprète qui
6 accompagnait tout le temps le général Mladic.
7 Q. Etait-ce le colonel Jankovic ?
8 R. Non, ce n'était pas le colonel Jankovic non plus.
9 Q. Bien. J'aimerais à présent que nous parlions d'un autre incident où
10 l'interprète des Nations Unies que vous avez décrit a eu une rencontre avec
11 le général Mladic.
12 Alors dites-moi, tout d'abord, si j'ai raison d'affirmer que tout ce que le
13 général Mladic a dit vous a été interprété et véhiculé par ce traducteur
14 des Nations Unies ?
15 R. Je pense que c'est exact, oui.
16 M. IVETIC : [interprétation] Monsieur le Président, je vois qu'il est 2
17 heures et 15.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Moi, je me demande de combien de temps
19 vous avez besoin encore.
20 M. IVETIC : [interprétation] Mais je crois que je ne pourrai pas le faire
21 en moins de 25 minutes. J'ai besoin d'encore 25 minutes pour que nous
22 puissions voir trois extraits vidéo assez brefs, et pour me permettre de
23 poser des questions au sujet de sa rencontre avec le général Mladic, ce
24 traducteur répondant au prénom de Miki, puis les entretiens avec Mane, et
25 ce sont pratiquement les seuls deux sujets que j'ai en suspens.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donnez-nous un instant.
27 [La Chambre de première instance et la Greffière se concertent]
28 [La Chambre de première instance se concerte]
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Van Duijn, malheureusement,
2 nous n'allons pas pouvoir terminer aujourd'hui avec votre témoignage. Bien
3 que nous ayons voulu le faire, comme vous avez probablement dû le
4 comprendre. Mais étant donné qu'il faut pas mal de temps encore à la
5 Défense pour qu'elle puisse terminer son contre-interrogatoire, les Juges
6 de la Chambre estiment qu'il serait plus équitable de leur permettre de
7 terminer demain, votre contre-interrogatoire. Je suis désolé d'avoir à vous
8 demander de revenir, bien que ce soit pour une courte période de temps
9 s'agissant de la matinée de demain.
10 Alors, je voudrais entre-temps vous donner instruction de ne pas vous
11 entretenir avec qui que ce soit au sujet de votre témoignage, et nous
12 allons très probablement terminer avec votre témoignage à l'occasion de la
13 première session d'audience demain matin.
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Fort bien.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et vous pouvez maintenant suivre
16 l'huissière, donc, revenez donc nous voir demain matin à 9 heures 30.
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Nous allons nous revoir donc demain.
18 [Le témoin quitte la barre]
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons lever l'audience pour
20 aujourd'hui, s'il n'y a aucune autre question à aborder, et nous
21 reprendrons demain, vendredi, 26 avril, à 9 heures 30, dans cette même
22 salle d'audience.
23 --- L'audience est levée à 14 heures 17 et reprendra le vendredi, 26 avril
24 2013, à 9 heures 30.
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