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1 Le lundi 11 novembre 2013
2 [Audience publique]
3 [L'accusé est introduit dans le prétoire]
4 --- L'audience est ouverte à 9 heures 33.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à tous.
6 Madame la Greffière d'audience, veuillez citer l'affaire, s'il vous plaît.
7 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Bonjour. Il s'agit de l'affaire IT-09-
8 92-T, le Procureur contre Ratko Mladic.
9 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci. Monsieur Groome, vous souhaitiez
10 présenter les arguments concernant la manière dont l'Accusation souhaite
11 présenter les éléments de preuve de Mme Tabeau. On pourrait le dire tout de
12 suite avant qu'elle arrive, mais une autre manière de le faire est de
13 l'aborder dès maintenant de façon à ce que la Défense puisse y réfléchir.
14 M. GROOME : [interprétation] Mme Marcus allait le faire. J'ai ses notes, je
15 peux le faire maintenant, ou je peux le faire au début du deuxième volet
16 d'audience.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si c'est ses notes, il est peut-être
18 préférable d'attendre qu'elle soit là, donc durant le deuxième volet
19 d'audience.
20 M. GROOME : [interprétation] Je lui demanderai qu'elle soit présente.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Puisqu'il n'y a pas d'autres aspects
22 liminaires à aborder, est-ce que l'on pourrait faire entrer le témoin
23 suivant, qui est, Monsieur Groome…
24 M. GROOME : [interprétation] C'est le général Richard Dannatt.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Et je voudrais très rapidement
26 aborder le document D330. Le 1er [comme interprété] juillet, la Chambre de
27 première instance a accepté le versement de la vidéo D330 avec comme
28 instructions que la Défense fournisse une transcription anglaise corrigée.
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1 La Défense a fait part par une correspondance informelle le 3 octobre
2 qu'elle avait donc fourni une traduction anglaise corrigée de la vidéo.
3 Cependant, l'Accusation répondait le même jour en disant qu'une ligne ne
4 figurait pas dans la transcription. Autant que la Chambre sache, il n'y a
5 pas eu de réponse de la Défense à ce sujet. La Chambre a examiné la vidéo
6 et les notes, et ceci semble correspondre avec ce que l'Accusation a
7 mentionné, c'est-à-dire qu'il manquerait une phrase dans la transcription.
8 La Chambre considère que la transcription devrait refléter ce qui figure
9 dans la vidéo et, par conséquent, demande à la Défense de fournir une
10 nouvelle version qui sera à nouveau corrigée, et ceci, avant le 15
11 novembre.
12 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Dannatt.
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant que vous déposiez, le Règlement de
16 procédure et de preuve exige que vous prononciez une déclaration
17 solennelle. Nous allons vous fournir le texte.
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous invite à lire cette déclaration
20 solennelle.
21 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
22 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
23 LE TÉMOIN : FRANCIS RICHARD DANNATT [Assermenté]
24 [Le témoin répond par l'interprète]
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci. Veuillez vous asseoir.
26 Monsieur Dannatt, la raison pour laquelle je vous appelle simplement
27 "Monsieur", ce n'est pas parce que je fais fi de grade ou de titre, mais
28 c'est la manière dont les Chambres ici s'adressent aux témoins qui viennent
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1 déposer ici.
2 LE TÉMOIN : [interprétation] Aucun problème. Merci.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous allez tout d'abord répondre aux
4 questions de M. Groome, qui est à votre droite et qui représente
5 l'Accusation.
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
7 M. GROOME : [interprétation] Merci.
8 Interrogatoire principal par M. Groome :
9 Q. [interprétation] Pourriez-vous, tout d'abord, décliner votre identité.
10 R. Je m'appelle Francis Richard Dannatt, et j'étais général dans l'armée
11 britannique jusqu'en 2009, où j'ai pris ma retraite.
12 Q. Quels sont les titres que vous avez à l'heure actuelle ?
13 R. Je suis conneta [phon] de la Tour de Londres et je suis également un
14 indépendant à la Chambre des Lords au parlement britannique.
15 Q. Monsieur le Général Dannatt, les paragraphes 7 à 22 de votre rapport,
16 que nous aurons dans quelques instants à l'écran, présentent en détail
17 votre formation professionnelle et votre expérience. En bref, vous décrivez
18 votre formation militaire et votre expérience entre 1971 et 2009, c'est une
19 carrière dont le point d'orgue a été le chef de l'état-major principal, qui
20 signifie que vous êtes en fait le responsable de la branche professionnelle
21 des forces armées britanniques, n'est-ce pas ?
22 R. Oui. En fait, j'ai rejoint l'armée en 1969, et mes deux premières
23 années j'étais en fait un officier en formation, et j'ai été ensuite
24 officier à partir de 1971.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous pouvez ralentir parce
26 que les interprètes ont du mal à suivre la cadence de votre discours.
27 LE TÉMOIN : [interprétation] D'accord.
28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez continuer.
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1 M. GROOME : [interprétation]
2 Q. Général Dannatt, à l'automne 2011, est-ce que je vous ai demandé si
3 vous étiez disposé à être témoin --
4 R. Oui. Vous me l'avez demandé et j'ai accepté.
5 Q. Et, en partie, on vous a demandé -- donc, dans le cadre de ce rôle de
6 témoin, on vous a demandé de vous pencher sur une série de documents et de
7 répondre à une série de questions basées sur votre étude de ces documents
8 ainsi qu'en utilisant votre expérience en tant que commandant militaire;
9 est-ce exact ?
10 R. Oui. Et donc, j'ai parcouru ces documents et j'ai fourni un rapport.
11 M. GROOME : [interprétation] Je voudrais que le document de la liste 65 ter
12 28317 soit affiché sur les écrans. Il s'agit d'un document qui porte la
13 date du 23 avril 2012 et qui est intitulé "Déclaration du général Dannatt."
14 Ce document a été recensé officiellement auprès de la Chambre le 24 avril
15 2012. Vous avez un exemplaire de ce document, une version papier. Est-ce
16 que je pourrais également demander que l'on en fournisse également un
17 exemplaire au témoin durant sa déposition ?
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Des objections de la
19 Défense ?
20 M. IVETIC : [interprétation] Aucune.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, dans ce cas-là, est-ce que l'on
22 peut fournir une copie papier de ce document au témoin.
23 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
24 M. GROOME : [interprétation]
25 Q. Général Dannatt, nous voyons le document de la liste 65 ter 28317 sur
26 les écrans. Est-ce qu'il s'agit bien de votre rapport ?
27 R. Effectivement.
28 Q. Pourrait-on passer à la dernière page de ce document de façon à ce que
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1 l'on puisse voir la date de ce rapport.
2 R. Oui, je consulte cette page en ce moment.
3 Q. Est-ce que vous pouvez confirmer qu'il s'agit effectivement de votre
4 rapport ?
5 R. Oui, qui porte la date du 23 avril.
6 M. GROOME : [interprétation] Pourrait-on verser ce document au dossier.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière d'audience.
8 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Le document de la liste 65 ter 28317
9 reçoit la cote P2629.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cote provisoire aux fins
11 d'identification.
12 M. GROOME : [interprétation] Pourrait-on afficher le document de la liste
13 65 ter 26317A. Le général Dannatt a préparé le rapport avant le début du
14 procès et, par conséquent, les citations dans le rapport mentionnent les
15 numéros 65 ter et également les numéros ERN. Pour aider la Chambre
16 lorsqu'elle va consulter ce rapport, nous avons préparé un tableau de
17 concordance de ces documents. Je voudrais que ce document, donc, reçoive
18 une cote provisoire aux fins d'identification, et je demanderai que ce soit
19 en fait une cote définitive lorsque je demanderai le versement du rapport à
20 proprement parler.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière d'audience.
22 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Le document de la liste 65 ter 28317A
23 recevra la cote P2630.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cote MFI aux fins d'identification.
25 M. GROOME : [interprétation]
26 Q. Dans le paragraphe 3 du rapport, vous présentez la manière dont vous
27 comprenez ce rapport. Au paragraphe 4, vous mentionnez -- c'est à la
28 première page des deux versions. Vous mentionnez donc :
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1 "De temps en temps, j'ai demandé des documents supplémentaires afin de me
2 familiariser plus avant avec certains points de détail."
3 Ma question est la suivante : est-ce que vous pensez que vous avez eu accès
4 à suffisamment de documents concernant l'armée de la Republika Srpska pour
5 fournir des éléments complets et des conclusions fiables concernant le
6 commandement et son fonctionnement dans cette armée ?
7 R. Oui, j'ai demandé des documents supplémentaires, qui m'ont été fournis,
8 et j'ai jugé que j'avais suffisamment d'éléments pour arriver à une
9 conclusion.
10 Q. Avant de considérer votre analyse et vos opinions figurant dans le
11 rapport, je voudrais tout d'abord me concentrer sur vos diplômes et vos
12 qualifications. Je ne vais pas vous demander de repasser en revue votre CV
13 que vous avez fourni dans le rapport, mais je voudrais que vous nous
14 parliez de certains points précis qui pourraient être pertinents aux yeux
15 de la Chambre pour que celle-ci puisse vous reconnaître comme témoin expert
16 en l'espèce.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Encore une fois, je vous demande que les
18 intervenants ménagent des pauses entre les questions et les réponses et
19 qu'ils ralentissent.
20 M. GROOME : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, c'est de ma faute.
21 Q. Général, est-ce que vous avez été reconnu par une Chambre de première
22 instance dans ce Tribunal comme un expert dans les questions qui portent
23 sur le commandement et le contrôle ?
24 R. Oui. J'ai participé au procès contre le général Krstic il y a un
25 certain nombre d'années et j'ai été reconnu comme expert dans ce procès à
26 l'époque.
27 Q. Est-ce que vous avez été reconnu par les Juges de la Cour
28 internationale de justice en tant qu'expert dans les questions militaires
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1 qui portaient sur l'ex-Yougoslavie ?
2 R. Oui, et des questions similaires m'ont été posées dans le procès
3 précédent, similaires à celles qu'on va me poser aujourd'hui.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous parlez d'un procès ici alors que la
5 question portait sur la CIJ. Est-ce que vous parlez de la CIJ ou est-ce que
6 vous parlez du TPIY ?
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, j'ai mal entendu la question. J'ai
8 déposé effectivement devant le TPIY dans un autre procès, mais j'ai
9 également déposé devant la CIJ en tant qu'expert. Je suis désolé. J'ai mal
10 entendu la question. Merci d'avoir corrigé ma réponse.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez continuer.
12 M. GROOME : [interprétation]
13 Q. Au paragraphe 11, que l'on trouve à la page 3 du rapport sur le système
14 de prétoire électronique, vous mentionnez, et je vous cite :
15 "J'étais l'auteur principal des publications de doctrine militaire, et
16 notamment du volume 1, intitulé 'Opérations', qui présentait une doctrine
17 révisée en matière de combat pour l'armée britannique, doctrine qui était
18 adaptée à l'environnement sécuritaire d'après-Guerre froide."
19 Ma question à ce stade est de savoir si l'on vous avait donné ce rôle
20 d'élaboration de cette doctrine ainsi que d'autres publications que vous
21 avez mentionnées précisément parce que vous étiez un expert dans les thèmes
22 liés au commandement et au contrôle militaire ?
23 R. Oui. On m'a donné cette mission parce qu'à l'époque, j'avais le grade
24 de colonel et j'étais responsable au niveau du collège de formation de
25 l'armée britannique, et comme son nom l'indique, ce cours de formation
26 enseigne à des officiers haut gradés l'art de la guerre au niveau
27 stratégique et opérationnel, et pour ce faire, il faut avoir des
28 connaissances exhaustives, pas uniquement sur la manière dont fonctionne
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1 l'armée britannique, mais également des connaissances comparatives du
2 fonctionnement des autres armées. Et à l'époque, c'est-à-dire en 1992-1993,
3 c'est-à-dire juste après la fin de la Guerre froide, il était plus ou moins
4 évident qu'on se concentrait auparavant sur le modèle soviétique, c'était
5 donc un modèle alternatif, et je le connaissais bien, afin de forger la
6 doctrine britannique par rapport à d'autres doctrines d'armées qui
7 pouvaient être de l'autre côté de la ligne de confrontation. Il était donc
8 important de comprendre tant la manière dont nous fonctionnions mais
9 également la manière dont des adversaires potentiels fonctionnaient. Et
10 c'est donc dans cette toile de fond que j'ai établi la doctrine de l'armée
11 britannique dans des situations de combat pour la période qui a suivi la
12 fin de la Guerre froide.
13 Q. Et cette publication a été en vigueur jusqu'à quand ?
14 R. Jusqu'à environ 2005, et, en fait, c'était sa durée de vie prévue en ce
15 qui me concerne. Le monde est en évolution constante et, par conséquent,
16 toute organisation, toute organisation militaire, doit réviser sa doctrine
17 et doit réviser la manière dont elle mène ses activités par rapport aux
18 changements qui s'opèrent dans le monde actuel. Et juste après la fin de la
19 Guerre froide, la conjoncture mondiale avait un certain aspect, mais après
20 le 11 septembre 2001, le monde a changé, et l'armée britannique a donc jugé
21 qu'il était bon de réviser sa doctrine et une nouvelle doctrine a été
22 publiée en 2005.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La version B/C/S vient simplement de
24 terminer. Je vous demande donc de garder ceci à l'esprit lorsque vous
25 parlez.
26 M. GROOME : [interprétation]
27 Q. Dans les paragraphes 12 et 14 à 15 - on peut les trouver aux pages 3 et
28 4 dans les deux versions sur le système de prétoire électronique - vous
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1 décrivez votre déploiement en ex-Yougoslavie, et plus particulièrement en
2 Bosnie-Herzégovine ainsi qu'au Kosovo, et dans le cadre de cette mission,
3 vous deviez notamment mettre en œuvre les accords de paix de Dayton. Durant
4 cette mission, est-ce que vous avez eu la possibilité de rencontrer
5 personnellement Ratko Mladic ?
6 R. Non, je n'ai jamais rencontré personnellement Ratko Mladic.
7 Q. Au paragraphe 11, vous mentionnez que le général Sir Michael Rose, qui
8 était le commandant de la FORPRONU, vous l'expliquez donc, et puis il vous
9 avait demandé de rédiger ce que vous décrivez comme un plan de campagne
10 pour la Bosnie, un plan que vous avez fourni au général Rose en février
11 1994. J'aimerais savoir si vous savez pourquoi vous avez été choisi pour ce
12 rôle ?
13 R. On m'a nommé pour m'acquitter de cette mission parce que le général
14 Rose, avant d'avoir été commandant de la FORPRONU, le général Rose a été en
15 fait le commandant du collège de formation, et j'étais donc sous ses ordres
16 et, notamment, je rédigeais cette doctrine pour les situations de combat en
17 temps de guerre. Et, il m'a contacté, il m'a dit, vous enseignez la
18 planification de campagne au collège de formation de l'armée britannique,
19 et je pense que l'opération de la FORPRONU en Bosnie a besoin d'avoir une
20 vision plus claire, et je voudrais que vous établissiez une équipe de façon
21 à ce que vous puissiez rédiger un plan de campagne pour la Bosnie.
22 Donc, en fait, ce qu'il m'a demandé c'était de transposer la théorie
23 en pratique pour la Bosnie, c'est-à-dire d'appliquer la théorie que
24 j'enseignais au collège de formation de l'armée britannique. C'était, bien
25 sûr, un défi, comme vous pouvez l'imaginer intéressant, et moi-même ainsi
26 que l'équipe d'experts que j'ai mise sur pied ont été très enthousiastes,
27 et j'ai donc présenté au général Rose ce plan quand je suis allé à Sarajevo
28 le rencontrer.
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1 Q. Dans le cadre de ces activités, est-ce que vous avez dû vous
2 familiariser avec les armées des différentes parties belligérantes en ex-
3 Yougoslavie ?
4 R. Oui, mais comme vous pouvez vous l'imaginer, le conflit en Bosnie
5 faisait rage depuis déjà un certain temps à l'époque, c'est-à-dire au début
6 de l'année 1994, et, par conséquent, au collège de formation nous avions
7 déjà étudié ce qui se passait en Bosnie et en ex-Yougoslavie de manière
8 générale et ceci par le menu. Donc, même si à l'époque, c'est-à-dire en
9 janvier 1994, je n'avais pas servi en Bosnie, j'avais déjà pas mal de
10 connaissance de ce qui se passait sur le terrain, et beaucoup de formateurs
11 au collège de formation de l'armée britannique avaient déjà servi en
12 Bosnie. Et, par conséquent, compte tenu de mon parcours, compte tenu du
13 contexte que je connaissais et en posant des questions, en contactant
14 différentes personnes, en faisant des recherches avec l'équipe d'experts
15 militaires que j'avais mise sur pied au collège de formation de l'armée
16 britannique afin de produire ce plan de campagne pour le général Rose, et
17 il est évident donc que ce plan devait être le résultat de beaucoup de
18 recherches, de beaucoup d'études, et devait avoir également un objectif
19 pratique, sinon ce n'aurait pas, en fait, répondu aux attentes du général
20 Rose.
21 Q. J'aimerais passer au rapport en tant que tel à présent. Au paragraphe
22 23 qui se trouve aux pages 5 dans les deux versions du prétoire
23 électronique, vous déclarez qu'il existe des principes de base qui
24 s'appliquent à toutes les armées conventionnelles, et vous expliquez le
25 premier principe au paragraphe 24. La première phrase nous dit, et je cite
26 :
27 "Le premier principe consiste en la chose suivante, les commandants
28 supérieurs donnent des ordres aux commandants subordonnés qui obéissent à
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1 ces ordres et les mettre en œuvre."
2 Ma question est la suivante, j'aimerais savoir s'il existe des différences
3 dans l'application de ce principe en cas d'armées nationales différentes ?
4 R. Non, Monsieur. Je pense que ce principe est un principe fondamental
5 commun à toutes les armes, à toutes les organisations militaires. Les
6 commandants donnent des ordres aux commandants subordonnés qui obéissent à
7 ces ordres, et qui les mettent en œuvre. C'est comme cela que fonctionne
8 une organisation militaire dans toute armée.
9 Q. Vous expliquez le deuxième principe au paragraphe 25, où vous déclarez
10 :
11 "Le deuxième principe consiste à ce que les subordonnés doivent faire
12 rapport vers l'amont des résultats de leurs actions pour informer leurs
13 supérieurs de l'état d'avancement ou, le cas échéant, pour que le
14 commandement supérieur mette en œuvre son propre processus décisionnel."
15 Là, encore, j'aimerais savoir s'il existe des différences dans
16 l'application de ce principe en cas d'armées nationales différentes ?
17 R. Le principe de base est commun à toutes les armées. Sa mise en œuvre
18 varie d'une armée à l'autre en fonction de la doctrine militaire qu'une
19 armée particulière suit. Et je serais heureux de vous donner davantage de
20 détails maintenant ou plus tard.
21 Q. Je vais vous poser des questions de détail dans quelques instants. Mais
22 avant cela, j'aimerais revenir au premier principe, celui qui dit que les
23 supérieurs donnent des ordres aux subordonnés. Pourriez-vous énumérer les
24 différentes façons par lesquelles un commandant peut donner un ordre à son
25 subordonné ?
26 R. Un commandant peut donner un ordre à ses subordonnés de plusieurs
27 façons. Il peut rédiger une directive par écrit, qui est une déclaration
28 générale de ses intentions à l'avenir. Il peut également délivrer un ordre
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1 opérationnel, qui est une déclaration détaillée de ce qu'il faut faire. Il
2 peut donner des ordres en personne, en parlant face-à-face, et il peut
3 donner des ordres par radio. Ces ordres peuvent être donnés de façon
4 abrégée en utilisant la technologie moderne, telle que le courriel et les
5 SMS. Le principe sous-jacent étant que le subordonné doit comprendre ce que
6 le supérieur veut qu'il fasse, et il y a plusieurs façons pour que cet
7 ordre donné par le supérieur soit transmis. Il n'y a pas de bonne ou de
8 mauvaise façon de transmettre des ordres, il y a juste différents moyens
9 qui existent. L'important c'est ce que l'intention soit comprise, et que
10 l'action soit exécutée par la suite.
11 Q. Est-ce que le fait qu'un ordre a été donné oralement et pas verbalement
12 diminue l'obligation ou atténue l'obligation du subordonné de mettre en
13 œuvre cet ordre ?
14 R. Pas du tout. A condition que l'intention ait été clairement transmise,
15 toute forme de transmission de cette intention est légitime. Un ordre oral
16 est tout à fait acceptable.
17 Q. Est-il possible qu'un ordre ne soit donné ni par écrit ni verbalement,
18 mais simplement en faisant un geste ?
19 R. Je pense que je maintiendrai ma réponse précédente. Tant que
20 l'intention du supérieur est bien transmise aux subordonnés, le moyen par
21 lequel cette intention est transmise n'a pas d'importance. Je vais
22 illustrer cela, par l'exemple, des gladiateurs qui combattaient dans le
23 Colisée à Rome. Lorsque le point d'orgue de l'engagement est atteint, le
24 peuple regardait l'empereur, et levait le pouce vers le haut ou baissait le
25 pouce pour indiquer son assentiment ou non. Donc, je pense qu'un geste est
26 une façon tout à fait acceptable de transmettre un message, mais ce n'est
27 pas la façon la plus habituelle.
28 Q. Aux paragraphes 27 et 28 de votre rapport - page 7 dans le prétoire
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1 électronique pour la version originale et page 6 dans la version traduite -
2 vous décrivez deux paradigmes généraux ou concepts du commandement
3 militaire, l'Auftragstaktik, c'est-à-dire l'approche manœuvrière aux
4 opérations, et la Befehlstaktik, une approche qui se fonde sur un
5 commandement centralisé. Pourriez-vous expliquer en quelques phrases à
6 l'attention des Juges de la Chambre les différences qui existent entre
7 cette approche manœuvrière aux opérations et l'approche du commandement
8 centralisé ?
9 R. Oui. Et je vais essayer d'être bref. Ce sont deux termes allemands que
10 vous avez utilisés. La première tactique l'Auftragstaktik est une doctrine
11 militaire qui est utilisée au mieux par les armées professionnelles lorsque
12 le niveau d'instruction est élevé et lorsque l'éducation militaire, en
13 particulier celle des officiers, est de haut niveau, et c'est une forme de
14 commandement et de contrôle qui a pour objectif d'optimaliser l'initiative
15 de commandants moins aguerris. En bref, un commandant supérieur donne,
16 déclare son intention générale, délègue des missions à des personnes, et
17 s'attend à ce que cette dernière prenne l'initiative dans un cadre plus
18 large tout en restant dans le cadre de son intention générale pour
19 atteindre la mission et l'objectif. Et de la sorte, les cerveaux bien
20 instruits des commandants moins aguerris peuvent gagner ou se faire la
21 main, gagner en expérience pour atteindre le meilleur effet et bien mener
22 l'opération demandée.
23 Le troisième élément qui entre en jeu dans ce système est le suivant : même
24 si le commandant supérieur délègue ces missions, il a une obligation
25 impérative de superviser l'exécution de ces missions, et il le fait soit de
26 près soit de plus loin en fonction de la confiance qu'il a dans ses
27 subordonnés, subordonnés à qui il a confié ces missions. Voilà donc comment
28 une armée bien instruite opère. Ce sont principalement les armées
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1 occidentales qui fonctionnent de la sorte, comme l'armée britannique,
2 l'armée des Etats-Unis, et plus largement les armées du système de l'OTAN.
3 L'autre système est celui du Befehlstaktik, c'est un autre mot allemand, et
4 c'est une doctrine qui est plus centralisée. Elle se caractérise par une
5 armée qui est assez grande, composée de conscrits probablement, et où le
6 niveau d'instruction est plus faible. Et d'après ce système, nous n'avons
7 pas la souplesse, la flexibilité et la délégation que nous retrouvons dans
8 la première tactique, l'Auftragstaktik, que je viens de décrire. Cela veut
9 dire que le commandant supérieur donnera des instructions détaillées à ses
10 subordonnés qui vont mener ces missions et, une fois la mission accomplie,
11 les subordonnés s'attendent à recevoir d'autres instructions. Donc, ce que
12 j'essaie de vous dire en l'essence, c'est que d'après la Befehlstaktik
13 centralisée, on laisse beaucoup moins l'initiative aux commandants plus
14 jeunes comparée à l'autre système que j'ai décrit.
15 Tout dernier commentaire, et j'aimerais revenir à l'une de mes questions
16 précédentes, dans ces deux systèmes, il est impératif que les subordonnés
17 fasse rapports en amont du résultat de leurs activités. D'après la
18 Befehlstaktik centralisée, donc la doctrine centralisée, cela se fait sur
19 une base régulière sans exception et en détail. D'après l'Auftragstaktik,
20 la première tactique, il est acceptable de ne faire rapport que lorsque
21 quelque chose d'important a eu lieu, pas de nouvelle bonne nouvelle, et le
22 commandant supérieur assume dans ce cas-là que tout va bien et que tout
23 fonctionne comme prévu.
24 Q. Je laisse aux interprètes le temps de terminer votre réponse, et puis
25 je vais poser la question suivante.
26 Sur cette question des rapports, d'après la doctrine centralisée, la
27 doctrine de commandement centralisé ou la Befehlstaktik, que se passe-t-il
28 en général si un rapport n'arrive pas en temps ?
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1 R. Si un rapport n'arrive pas en temps voulu, on s'attend à ce qu'un
2 officier des opérations à l'état-major du QG du supérieur envoie un message
3 radio, aujourd'hui un courriel au QG subordonné et demande : Où se trouve
4 le rapport ? Quelle est la situation ? Qu'est-ce qui se passe ? Pourquoi
5 n'y a-t-il pas eu d'information ? Donc, on chercherait les informations.
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous devez vraiment ralentir. Cela va
7 vraiment trop vite pour les interprètes.
8 Veuillez continuer.
9 M. GROOME : [interprétation]
10 Q. J'aimerais, à présent, attirer votre attention sur la VRS et sur vos
11 conclusions quant à son système de commandement et de contrôle.
12 Quel type de système de commandement était utilisé par la VRS ? Lequel de
13 ces deux modèles était utilisé ?
14 R. La VRS reprenait les caractéristiques d'une armée contrôlée de façon
15 centralisée, c'est-à-dire la Befehlstaktik, que je vous ai décrite, et je
16 vais vous expliquer pourquoi je pense que la VRS a suivi ce système.
17 L'histoire a montré que la VRS a été formée à partir de l'armée de l'ex-
18 Yougoslavie, et même si la Yougoslavie n'était pas - comment dire ? - même
19 si la Yougoslavie était un membre plus ou moins à part entière du Pacte de
20 Varsovie, et sous influence soviétique, le système militaire, néanmoins,
21 suivi par l'armée nationale yougoslave était très influencé par le modèle
22 soviétique, qui était un modèle fondé sur le contrôle centralisé
23 caractérisé par la Befehlstaktik que je vous ai expliquée.
24 Q. Dans le cadre de votre mission ou de votre travail, avez-vous pu
25 dégager un point de vue sur le fait de savoir si le premier principe, celui
26 où les supérieurs donnent des ordres aux subordonnés, fonctionnaient ou
27 étaient d'application dans l'armée de Republika Srpska ?
28 R. Oui. Toutes mes enquêtes ont montré que l'armée de Republika Srpska
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1 agissait comme toute armée, c'est-à-dire des directives, des ordres
2 opérationnels, et quelquefois des ordres donnés verbalement, qui étaient
3 passées à des subordonnés pour que des missions soient menées, et ce, de
4 façon très traditionnelle.
5 Q. Général, au paragraphe 32, que l'on retrouve à la page 9 de la version
6 originale et à la page 8 de la version traduite, vous décrivez un événement
7 pendant lequel vous étiez commandant de la 4e Brigade blindée en mission en
8 Bosnie pour mettre en œuvre les accords de paix de Dayton, et vous décrivez
9 une tentative que vous avez faite pour rencontrer le général Talic.
10 J'aimerais savoir ce que ce cas-là vous a montré quant à la structure de
11 commandement de la VRS ?
12 R. Sans entrer dans les détails de ce qui s'est passé à l'époque, je
13 dirais qu'alors que je rencontrais régulièrement et que je discutais
14 régulièrement avec les commandants des forces musulmanes et croates, je
15 n'avais pas encore eu l'occasion de rencontrer le commandant des forces
16 serbes de Bosnie. Et d'après les accords de Dayton, nous devions nous
17 déplacer en Republika Srpska et agir dans la zone territoriale de la
18 Republika Srpska. Ma préoccupation était la suivante : même si un accord
19 avait été atteint au niveau stratégique à Dayton, peut-être que les soldats
20 sur le terrain ne comprendraient pas pourquoi des soldats de l'OTAN, des
21 troupes de l'OTAN allaient entrer en Republika Srpska et peut-être qu'à ce
22 moment-là des combats allaient avoir lieu. Donc j'ai décidé que, pour que
23 cela n'arrive pas, je devais me rendre à Banja Luka, voir le général Talic
24 et confirmer directement auprès de lui qu'il avait bien compris ses
25 obligations au terme des accords de Dayton et que mes troupes avaient le
26 droit de traverser la frontière, d'entrer en Republika Srpska et d'agir
27 pour mettre en œuvre ces accords de Dayton.
28 Et j'ai fait savoir via les officiers de liaison mon arrivée, et je
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1 me suis rendu à Banja Luka, mais je n'ai pas pu rencontrer le général Talic
2 car il n'avait pas reçu l'autorisation de la part du général Mladic pour me
3 rencontrer. J'ai transmis le message que je voulais transmettre aux
4 officiers de liaison du général Talic à l'état-major. On m'a dit que le
5 général Talic n'avait pas eu l'autorisation pour décider de me rencontrer
6 et qu'il ne pouvait le faire que si le général Mladic, c'est-à-dire le
7 commandant de l'armée, lui donnait cette autorisation. Et cela m'a
8 davantage convaincu dans l'idée que c'était la structure centralisée de
9 commandement et de contrôle qui était d'application dans l'armée de
10 Republika Srpska.
11 Q. A l'avant-dernière phrase du paragraphe 30, vous dites :
12 "La culture de rapports réguliers vers l'amont n'a jamais changé, et, en
13 fait, les règlements exigeaient de passer les informations vers l'amont."
14 J'aimerais savoir sur quoi se fonde cette conclusion sur la fonction de
15 rapport de la VRS. Est-ce que vous pourriez nous résumer sur quoi vous avez
16 basé ce point de vue, Monsieur ?
17 R. Dans un certain nombre de documents que j'ai examinés, il était très
18 clairement dit qu'il y avait des obligations de reddition de comptes
19 placées sur le QG des subordonnés d'envoyer des rapports à un certain
20 moment donné dans la journée, et ce, en amont, afin que le QG supérieur
21 puisse en être bien informé. J'ai également examiné plusieurs documents à
22 plusieurs étapes différentes du conflit qui étaient des exemples démontrant
23 que ces rapports avaient été envoyés du QG de la brigade à ses QG
24 supérieurs, et du QG du corps à l'état-major principal.
25 Même lorsque les combats étaient devenus très difficiles et que la
26 guerre avait rejoint son apogée, le système de "reporting" se faisait
27 toujours. Donc, mon enquête a démontré que c'était effectivement le cas et
28 que le mécanisme de commandement et de contrôle fonctionnait de manière
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1 efficace et était en place.
2 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] J'aimerais vous demander si -- vous
3 nous avez dit avoir souhaité rencontrer le général Talic, et vous nous avez
4 également dit qu'il n'avait pas reçu l'autorisation du général Mladic. De
5 qui avez-vous reçu cette information ? Comment le savez-vous ?
6 LE TÉMOIN : [interprétation] L'officier de liaison avec lequel je m'étais
7 entretenu était navré, il s'excusait, et il m'a dit à ce moment-là que le
8 général Talic n'avait pas reçu l'autorisation de me rencontrer et que ce
9 n'était rien de personnel, et donc je devais transmettre mon message par le
10 truchement de l'officier de liaison. Je crois que c'était le capitaine
11 Popovic. Voilà. Je ne sais pas s'il était colonel ou capitaine, mais
12 c'était Popovic. J'ai une image du colonel en tête, mais je ne me souviens
13 pas de son nom.
14 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie.
15 M. GROOME : [interprétation] Je demanderais que P353 soit affiché à
16 l'écran, et ce qui m'intéresse surtout, c'est une entrée qui se trouve au
17 compte rendu d'audience de 246 à 272 dans l'original et 244 à 270 dans la
18 traduction. J'aimerais maintenant que l'on passe à 244, s'il vous plaît.
19 Q. Général, pendant que l'on attend l'affichage de ce document à l'écran,
20 vous ai-je demandé hier soir d'examiner une entrée faite dans le carnet du
21 général Mladic ?
22 R. Oui, effectivement.
23 Q. Nous sommes toujours en attente de l'affichage de la traduction en
24 langue anglaise à l'écran. Vous souvenez-vous d'une entrée dans laquelle
25 Mladic enregistre une information qu'il a reçue lors d'une réunion qu'il a
26 eue avec les dirigeants municipaux ?
27 R. Oui. J'ai vu cette entrée hier soir. Mais je ne l'ai pas à l'écran. Je
28 crois en fait que -- voilà, ça y est. La traduction est affichée maintenant
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1 à l'écran.
2 M. GROOME : [interprétation] C'est bien la page 244. Mais j'aimerais
3 demander que l'on passe à la page 246, s'il vous plaît, et que l'on montre
4 également la traduction en langue anglaise. Il s'agira de 246 en anglais et
5 de 244 en B/C/S, et le B/C/S c'est la transcription de l'original. Voilà,
6 nous avons maintenant la page en anglais.
7 Q. S'agit-il bien de l'entrée que vous avez examinée hier
8 soir ?
9 R. Oui.
10 Q. Cette entrée dans le carnet de Mladic figure au dossier et la Chambre
11 sera en mesure de l'examiner. Mais j'aimerais vous demander de bien vouloir
12 nous résumer de quelle manière est-ce que cette réunion qui a eu lieu avec
13 les représentants du gouvernement du cru cadre avec la manière de
14 rassembler des informations par un commandant afin de pouvoir prendre des
15 décisions relatives au commandement ?
16 R. Pour répondre à votre question, je dois placer le tout dans son
17 contexte, à savoir il faut voir de quel type de conflit il s'agit, c'est-à-
18 dire il faudrait décrire le conflit qui caractérise le conflit en Bosnie-
19 Herzégovine en 1995. Lorsqu'il s'agit d'une opération militaire classique,
20 lorsqu'une armée se bat contre une autre armée, dans ce cas-là vous
21 rassemblez les renseignements concernant une armée, vous cadrez vos projets
22 et vous menez à bien des opérations. Mais dans ces circonstances-ci, dans
23 ce cas-ci, c'était ce que l'on a dit, qu'il s'agissait d'une guerre contre
24 la population, c'est-à-dire que la communauté locale faisait réellement
25 partie du fond où la guerre s'est menée.
26 Et donc, des commandants militaires à tous les niveaux menaient des
27 dialogues de manière régulière avec les autorités civiles, qu'il s'agissait
28 de maires de ville, de dirigeants des communautés locales ou des ministres
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1 du gouvernement du cru. Il était donc important que les dirigeants civils
2 comprennent ce que l'armée était en train de faire et il était important
3 que les militaires écoutent ce que les représentants civils avaient à leur
4 dire. Donc les rapports entre l'armée et les civils étaient une
5 caractéristique réelle de ce type de conflit, car il ne s'agissait pas
6 simplement d'une guerre menée par deux parties belligérantes, mais c'était
7 encore plus complexe car c'est exactement comme je l'ai décrit, c'était une
8 guerre parmi la population, et donc la population civile était un élément
9 critique et faisait partie de cette guerre, en fait.
10 Q. J'aimerais maintenant attirer votre attention à un autre sujet.
11 Général, vous avez rédigé votre rapport d'expert avant que ce procès ne
12 débute. Votre analyse a été basée sur les éléments de preuve documentaires
13 et également sur certaines vidéos. Avant de venir déposer aujourd'hui, vous
14 ai-je fourni la déposition du général Manojlo Milovanovic, qui était le
15 chef de l'état-major du général Mladic, et vous ai-je demandé de passer en
16 revue son témoignage ?
17 R. Oui, effectivement, vous l'avez fait. Je l'ai passé en revue.
18 Q. Est-ce que vous l'avez passé en revue dans son ensemble ? Avez-vous
19 passé en revue l'interrogatoire principal, le contre-interrogatoire ainsi
20 que les questions posées par les Juges ?
21 R. Non, ce n'est pas cela que j'ai fait. Parce que, initialement, vous
22 m'avez fourni certains éléments ou certaines parties du transcript, et
23 dernièrement vous m'avez fourni l'ensemble du transcript, dont j'ai pris
24 connaissance. Cela m'a pris un peu de temps pour le lire.
25 Q. Avant de vous demander de nous donner vos observations, j'aimerais vous
26 demander de décrire aux Juges de la Chambre quel était le rôle d'un chef
27 d'état-major par rapport à un commandant ?
28 R. Le chef de l'état-major dans toute formation se trouve dans une
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1 position unique; non seulement que ce dernier, comme le nom l'indique, est
2 le chef de l'état-major, c'est-à-dire que c'est le chef du QG, le dirigeant
3 du QG, mais il s'agit également d'une personne qui agit en tant que
4 commandant adjoint.
5 Maintenant, ce n'est pas le cas dans toutes les armées. Dans l'armée
6 britannique, le chef de l'état-major va agir en tant que commandant adjoint
7 si le commandant n'est pas présent ou s'il n'est pas en mesure d'exercer
8 ses fonctions pour une raison ou pour une autre, et il assumera le
9 commandement jusqu'à ce qu'un commandant de remplacement soit nommé.
10 Mais dans le cas de l'armée yougoslave nationale, c'est-à-dire la JNA, et
11 donc également dans l'armée de la Republika Srpska, le chef de l'état-major
12 est le commandant adjoint, et c'est lui qui dispose d'une autorité pour
13 agir au nom du commandant si le commandant n'est pas présent. Et donc,
14 lorsque le commandant n'est pas présent, le chef de l'état-major, en sa
15 qualité de commandant adjoint, détient une autorité égale à celle du
16 commandant même. Donc la position d'un chef de l'état-major est une
17 position très importante pour les deux raisons que je viens de décrire.
18 Q. Et après avoir pris connaissance de la déposition du général
19 Milovanovic, est-ce que cela vous a permis d'avoir une opinion plus -- en
20 d'autres mots, est-ce que cela confirme vos conclusions ou bien est-ce que
21 cela fait en sorte que vous souhaitez les modifier ?
22 R. D'un point de vue militaire professionnel, j'ai été fasciné de lire
23 l'ensemble du témoignage du général Milovanovic et de prendre connaissance
24 du contre-interrogatoire, car cela m'en a dit long sur les origines de
25 l'armée de la Republika Srpska. Je connaissais le sujet de par mes
26 recherches, mais j'ai trouvé cela fascinant de lire sa description de ce
27 qu'il s'est passé car ceci est venu s'ajouter à la recherche que j'avais
28 effectuée. Et donc, j'ai vu que l'armée de la Republika Srpska avait pris
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1 ses origines dans l'ancien district militaire de l'armée yougoslave
2 nationale, de la JNA, et que les doctrines et les règlements de la VRS ont
3 été pris presque dans leur ensemble de la doctrine et des règlements de la
4 JNA, qui était une armée professionnelle plutôt compétente, et elle avait
5 un système de fonctionnement de commandement et de contrôle que je
6 reconnaissais. Et même si en mai, juin, et au début de 1992, il s'agissait
7 de tout un défi de faire en sorte que l'armée de la Republika Srpska puisse
8 commencer à fonctionner rapidement, étant donné qu'une guerre civile était
9 sur le point de se passer, ceci a été fait de manière rapide en raison de
10 la doctrine et des règlements et d'un très grand nombre d'effectifs qui ont
11 été transférés d'une armée à l'autre en bloc.
12 De plus, il était particulièrement intéressant de comprendre de par la
13 déposition du général Milovanovic que la présence du général Mladic était
14 importante en tant que commandant de l'état-major principal. Il était très
15 clair dans son témoignage que le général Mladic était une personnalité,
16 était une personne avec beaucoup d'importance et avait beaucoup de
17 personnalité, et tout ce qui était fait était fait avec son autorisation.
18 Et lorsque le général Mladic, pour une raison ou une autre, n'était pas
19 présent au QG ou lorsqu'il était absent du pays, le général Mladic [comme
20 interprété], en sa qualité de commandant adjoint, prenait les décisions. Il
21 informait le général Mladic très rapidement de ses décisions, et quand
22 l'autorisation du général Mladic ne lui était pas donnée ou si cela n'était
23 pas conforme et ne cadrait pas avec ce que le général Mladic souhaitait, il
24 les modifiait, il modifiait ses ordres.
25 Et donc, le style du commandement du général Mladic m'était apparu
26 très clairement de par la déposition du général Mladic [comme interprété]
27 et j'ai rapidement compris quel était son style de commandement.
28 M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, je vois qu'il est
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1 l'heure de la pause. Et avant de poser ma prochaine question, je voulais
2 vous demander si vous souhaitiez prendre une pause ?
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons prendre une pause
4 maintenant. Monsieur Dannatt, pour ce qui vous concerne, la pause sera un
5 peu plus longue que d'habitude. Normalement nos pauses sont de 20 minutes,
6 mais il nous faudra entendre certaines requêtes immédiatement après la
7 pause, et donc votre pause durera probablement une demi-heure. Vous pouvez
8 maintenant disposer et suivre M. l'Huissier.
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge.
10 [Le témoin quitte la barre]
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de prendre la pause, Monsieur
12 Mladic, j'aimerais vous rappeler que lorsque vous consultez votre conseil,
13 vous devriez parler à voix basse. Et pour ce faire, vous devriez enlever
14 vos écouteurs, car il vous sera plus facile de communiquer à voix basse
15 avec votre conseil.
16 Nous allons maintenant faire une pause, et reprendrons nos travaux à 11
17 heures moins dix.
18 --- L'audience est suspendue à 10 heures 30.
19 --- L'audience est reprise à 10 heures 57.
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame Marcus, je vous souhaite la
21 bienvenue dans la salle d'audience. L'Accusation a annoncé vouloir faire
22 quelques commentaires concernant la déposition du Dr Tabeau. Vous avez
23 maintenant l'occasion de nous en faire part.
24 Mme MARCUS : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Je vous
25 remercie.
26 Avez votre permission, Monsieur le Président, Messieurs les Juges,
27 j'aimerais distribuer les copies des listes de pièces à être versées par le
28 truchement du Dr Tabeau. Je crois que le fait de voir ces listes pourrait
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1 vous aider à comprendre ma requête. Est-ce que vous l'avez, Monsieur le
2 Président ?
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, je l'ai sous les yeux. Nous l'avons
4 reçue. Je vous remercie.
5 Mme MARCUS : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président. Très
6 bien. Donc, eu égard au nombre de documents et du sujet que couvrira
7 l'Accusation par le truchement du Dr Tabeau, je croyais qu'il était utile
8 de présenter à la Chambre de première instance de la manière dont j'entends
9 présenter les éléments de preuve.
10 Et je crois que cela pourrait faire gagner du temps et pourrait aider
11 la Chambre à entendre sa déposition.
12 Nous voyons, en haut, deux extraits de dépositions antérieures et en
13 dessous, deux rapports d'expert en tant que pièces connexes à être versés
14 au dossier par le truchement du Dr Tableau en application de l'article 92
15 ter. Vous allez voir les extraits de déposition en haut, et les numéros de
16 ces derniers sont 30446 et 30447. Et en dessous du rapport, en tant que
17 pièce connexe qui porte le numéro 29146 et 11102.
18 Dans le cadre du récolement de sa déposition qui aura eu lieu demain,
19 le Dr Tabeau a préparé trois éléments qui sont des éléments essentiels à sa
20 déposition, et j'ai l'intention de lui demander de faire une attestation ou
21 de confirmer ceci à la suite du processus 92 ter. Et vous allez pouvoir
22 voir ces points sur la liste de pièces juste en dessous du CV mis à jour.
23 Et ces numéros sont 30454, 30455 et 30465, deux rangées plus bas.
24 Pour conclure, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, le Dr
25 Tableau a préparé une série de diapositives pour sa présentation dans le
26 cadre de sa déposition, et ceci figure dans la liste de pièces sous 30454
27 [comme interprété]. Ces diapositives sont de nature descriptive, expliquent
28 et simplifient certains aspects de son témoignage. Ils ont un caractère
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1 démonstratif et non pas un caractère évidenciaire [phon], et j'ai
2 l'intention de m'en servir afin de pouvoir vous aider à comprendre sa
3 déposition un peu plus tard.
4 Je propose de faire verser au dossier tous les documents du Dr Tabeau
5 qui figurent sur cette liste à la fin de son témoignage. Ceci permettra de
6 faire en sorte que le témoin suivant, qui est RM407, et qui a des
7 contraintes de temps, comme vous le savez, pourra à ce moment-là déposer.
8 Et si nous n'arrivons pas à faire verser au dossier tous les documents,
9 ceci pourrait être reporté à plus tard si vous le souhaitez.
10 Afin de pouvoir faciliter ce processus, je vous demande la
11 permission, Monsieur le Président, d'assigner des numéros MFI aux documents
12 figurant sur cette liste par avance. Je m'en remets entre vos mains, à
13 savoir si vous souhaiteriez que l'on assigne ces numéros MFI maintenant ou
14 à la fin de son processus de confirmation à la suite de sa déposition en
15 vertu du 92 ter.
16 Et un dernier point, Monsieur le Président. Le 7 novembre, au compte
17 rendu d'audience 18875, la Chambre a demandé que toutes questions portant
18 sur l'accès des documents de source du Dr Tabeau, que la Chambre devrait en
19 être informée. A 11 heures 30, du 7 novembre, l'Accusation a envoyé une
20 communication informelle à la Chambre vous informant, Monsieur le
21 Président, Monsieur les Juges, de l'information à cet égard, que je
22 souhaite mentionner pour le compte rendu d'audience.
23 La Défense a envoyé un courriel à l'Accusation avec plusieurs questions le
24 28 octobre 2013, dont une demande d'accéder à la base de données intégrées
25 qui se trouvent au sein de l'Unité de démographie du bureau du Procureur.
26 L'Accusation a répondu à la demande de la Défense le même jour. Et dans
27 cette réponse, nous avons informé la Défense que l'Unité de démographie a
28 été fermée en septembre 2011, mais que cette unité a été réactivée aux fins
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1 de préparatif de la déposition du témoin expert le Dr Tabeau dans cette
2 affaire. Et l'Accusation a offert à la Défense l'accès à toutes les bases
3 de données au sein de l'Unité de démographie, et a demandé à la Défense
4 d'obtenir des informations supplémentaires afin de nous permettre de
5 répondre à leur demande, c'est-à-dire à quel moment auront-ils besoin de
6 l'accès à cette base de données, combien de personnes devraient accéder
7 cette base de données, et cetera. Et aucune réponse n'a été soulevée,
8 aucune autre requête concernant cette question n'a été soulevée par la
9 Défense dans les correspondances supplémentaires. Et l'Accusation et le Dr
10 Tabeau sont prêts à fournir plein accès à tous les documents sur lesquels
11 le Dr Tabeau s'est fiée dans le cadre du préparatif de son rapport
12 d'expert.
13 Et je voulais simplement vous donner une information quant aux questions et
14 aux détails techniques et logistiques, et cela pourra prendre quelques
15 jours, et que des accords contractuels devraient aussi être faits car,
16 comme je l'ai mentionné, le personnel de l'Unité de démographie ne sont
17 plus présents ici, on devra les faire venir, et cetera. Et donc, si par
18 exemple, la Défense demandait l'accès immédiat aujourd'hui à ces documents,
19 nous ne serions pas en mesure de le faire. Mais, toutefois, dès que nous
20 recevrons cette demande, nous allons faire de notre mieux pour leur
21 permettre accès à ces documents. Je vous remercie de m'avoir donné
22 l'occasion de vous présenter mes arguments.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Madame Marcus. Est-ce que la
24 Défense souhaite répondre immédiatement, ou veut un peu plus de temps pour
25 y réfléchir ?
26 M. IVETIC : [interprétation] Monsieur le Président, Monsieur les Juges,
27 nous n'avons aucune objection à ce que la Chambre octroie des cotes MFI
28 pour les documents présentés dans cette liste. Nous avons toujours une
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1 objection en ce qui concerne les rapports conformément au titre de
2 l'article 94.
3 Et donc, nous n'avons pas l'intention de demander l'accès à cette
4 base de données avant la déposition du témoin. Notre propre expert a dû
5 subir des soins médicaux et donc est en train de récupérer pour l'instant.
6 Donc il faudra assurer la coordination avec l'Accusation suite à la
7 déposition du Témoin Tabeau.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que cela signifie que vous
9 ne comptez pas procéder au contre-interrogatoire de Mme Tabeau
10 immédiatement ?
11 M. IVETIC : [interprétation] Non, Monsieur le Président, la déposition de
12 Mme Tabeau peut continuer.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais vous avez dit que vous demanderiez
14 de coordonner ceci avec l'Accusation suite à la déposition du Témoin
15 Tabeau. Donc, ça ne sera pas après l'interrogatoire principal mais après la
16 fin de la déposition ?
17 M. IVETIC : [interprétation] Effectivement.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] De façon à ce que la Défense puisse se
19 préparer à présenter donc ses moyens à décharge, le cas échéant.
20 M. IVETIC : [interprétation] C'est exact.
21 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Donc, Madame Marcus, je vous
22 propose de fournir les numéros 65 ter à Mme la Greffière d'audience de
23 façon à ce qu'elle puisse déjà donner des cotes provisoires et réserver
24 donc les différentes cotes nécessaires.
25 Mme MARCUS : [interprétation] Vous voulez que je le fasse ici dans le
26 prétoire ou par écrit ?
27 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Par écrit, et je vous demande donc de
28 faire copie au personnel de la Chambre de première instance ainsi qu'au
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1 personnel de la Défense.
2 Merci, Madame Marcus. Et merci à Me Ivetic pour la réponse déjà brève qu'il
3 a fournie.
4 Est-ce que l'on peut maintenant demander au témoin de rentrer dans le
5 prétoire.
6 Madame Marcus, vous pouvez disposer.
7 Monsieur Groome, pour ce qui est de l'horaire, est-ce que nous sommes dans
8 les temps ? Je crois que vous aviez demandé 90 minutes.
9 M. GROOME : [interprétation] Oui, nous sommes dans les temps.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] D'accord. Ce qui signifie que vous
11 n'aurez pas besoin de la totalité de cette séance.
12 [Le témoin vient à la barre]
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Dannatt, M. Groome va donc
14 poursuivre son interrogatoire principal.
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
16 M. GROOME : [interprétation]
17 Q. A la page du compte rendu d'audience 16 932, le général Milanovic
18 [comme interprété] dit :
19 "Le fonctionnement du commandement doit être centralisé, c'était le cas
20 dans notre armée. C'était un commandement continu et toute activité devait
21 se solder par un exercice de synthèse ou d'analyse. Et entre l'analyse et
22 l'ordre qui avait été donné, on passe par les phases de supervision et de
23 contrôle pour savoir comment l'ordre est mis en application."
24 Je vous demanderais de faire un commentaire sur cette déposition du général
25 Milanovic [comme interprété] et de façon à ce que l'on puisse le comprendre
26 dans le cadre de la structure conceptuelle que vous avez présenté en début
27 de déposition aujourd'hui ?
28 R. Il s'agit d'une description claire du fonctionnement d'une organisation
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1 militaire ou d'une armée, c'est-à-dire qu'elle est basée sur une
2 philosophie de commandement centralisé, et c'est ce que le général
3 Milanovic dit ici, à savoir qu'une mission est arrêtée, des ordres sont
4 donnés, les activités commencent dans le cadre de cette mission - ces
5 activités sont supervisées - et ensuite une analyse est menée pour savoir
6 ce qui s'est passé et ce qui ne s'est pas passé afin de mieux comprendre si
7 cette opération a été une réussite ou pas et de façon à ce qu'une opération
8 similaire fonctionne mieux à l'avenir.
9 Donc, ce qu'il décrit, c'est en fait un processus complet de la décision
10 jusqu'à l'exécution et jusqu'au retour d'information à la fin d'une
11 opération.
12 Q. Au paragraphe 56 de votre rapport, que l'on trouve à la page 19 en
13 anglais et à la page 16 dans la traduction en B/C/S, vous êtes d'accord
14 avec cette citation, à savoir :
15 "Le système de communication de la VRS semble être diversifié et robuste."
16 Est-ce que vous avez des éléments qui vous permettent d'étayer cette
17 opinion lorsque vous avez examiné la déposition du général Milovanovic ?
18 R. Le général Milovanovic, en tant que chef d'état-major, se concentre en
19 large mesure sur le processus d'établissement de rapports et de flux
20 d'information, et il parle de la question des directives, des ordres qui
21 sont donnés, de l'utilisation de lignes téléphoniques sécurisées, de
22 l'utilisation de la radio, et il est tout à fait univoque, à savoir que
23 pour que le commandement d'une armée fonctionne de manière efficace, il est
24 très important qu'il y a un très bon flux d'information du sommet vers les
25 QG subordonnés et les formations subordonnées afin de mieux comprendre le
26 processus décisionnel qui peut se dérouler par la suite au niveau des QG
27 supérieurs. Et comme dans le cadre d'autres armées bien organisées, il y a
28 toujours, en fait, des méthodes de communication qui font un doublon, parce
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1 que si une méthode de communication est brouillée ou que les radios, par
2 exemple, ne fonctionnent pas, l'information peut quand même passer, de
3 façon à s'assurer que les QG supérieurs et subordonnés puissent rester en
4 contact d'une manière ou d'une autre les uns avec les autres.
5 Q. Je voudrais maintenant revenir plus particulièrement sur le général
6 Mladic en tant que commandant de l'état-major général -- ou de l'état-major
7 principal, je vous prie de m'excuser. Au paragraphe 39 de votre rapport,
8 vous faites la déclaration suivante :
9 "En pratique, même si ce n'est pas conformément aux règlements de la VRS,
10 le général Mladic faisait montre de toutes les caractéristiques d'un
11 commandant d'armée qui était tout à fait en contact avec le terrain."
12 Est-ce que je pourrais vous demander d'expliquer de quelles
13 caractéristiques vous parlez ?
14 R. D'après ce que j'ai lu, les rapports télévisés ou des vidéos que j'ai
15 vus, il est évident que le général Mladic était un commandant très efficace
16 et qu'il contrôlait de très près ce qui se passait. Un des exemples les
17 plus évidents, et c'est un exemple qui a été cité à de nombreuses reprises,
18 ce sont ses activités à Srebrenica en juillet 1995.
19 Srebrenica était dans le cadre de la zone d'opérations du Corps de la
20 Drina, mais c'était le centre des activités de l'époque, donc on pourrait
21 dire que c'était là où l'armée concentrait ses plus importants efforts, et
22 donc ce n'était pas illogique de la part du général Mladic en tant que
23 commandant de l'armée d'aller au sein de la zone de responsabilité du Corps
24 de la Drina pour voir ce qu'il se passait.
25 Et il exerçait un contrôle personnel important sur ce qui se passait.
26 Par exemple, il y a eu trois réunions à l'hôtel Fortuna et il a assuré la
27 présidence de ces réunions. On voit des vidéos de M. Mladic qui évolue dans
28 la ville et qui donne des instructions.
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1 Donc, ce que cela signifie pour moi, c'est qu'il s'agit vraiment d'un
2 commandant qui est vraiment un commandant de terrain. C'était quelqu'un qui
3 avait une forte personnalité, qui était respecté. Et, par conséquent, ce
4 qu'il disait et les ordres qu'il donnait, eh bien, ils étaient respectés.
5 Et lorsque je l'ai décrit en tant que commandant de terrain, c'est ce que
6 je voulais dire. Ce n'était pas quelqu'un qui était très éloigné dans un
7 QG, mais c'était quelqu'un qui voulait être sur le terrain et qui voulait
8 exercer un contrôle personnel. Et c'est une manière tout à fait raisonnable
9 de mener des activités militaires.
10 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Votre langue a probablement fourché
11 lorsque vous parliez de "l'hôtel Fortuna"; vous vouliez dire "l'hôtel
12 Fontana", n'est-ce pas ?
13 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, vous avez tout à fait raison. Mes
14 excuses.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez continuer.
16 M. GROOME : [interprétation]
17 Q. Le général Milanovic [comme interprété] a dit dans sa déposition que
18 Mladic se trouvait dans la zone de Sarajevo au début de la guerre. Est-ce
19 que ceci est cohérent avec ce que vous avez décrit, à savoir que c'était un
20 commandant qui avait une approche très proche du terrain ?
21 R. Ceci cadrerait tout à fait avec un commandant qui se concentrerait sur
22 le point d'activité principal, c'est-à-dire à l'endroit où les activités
23 les plus importantes ont lieu. C'est-à-dire c'est là qu'un commandant
24 souhaiterait se situer de façon à ce qu'il ait une bonne impression sur ce
25 qui se passe et de façon à ce qu'il comprenne bien la situation dans le
26 lieu le plus critique des opérations. Et il est évident qu'étant donné que
27 Sarajevo était la capitale de la Bosnie, c'était certainement le centre des
28 activités, certainement au début, et ce n'est donc pas surprenant qu'il ait
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1 choisi de se baser là-bas pour qu'il sache exactement ce qui se passait et
2 pour qu'il puisse avoir une influence sur ce qui se passait.
3 Q. Au paragraphe 62 de votre rapport, vous décrivez le concept de contrôle
4 dans tous les domaines qui doit être, donc, une des compétences d'un
5 commandant. Est-ce que vous pourriez décrire quelles sont les relations
6 entre ces deux concepts que nous venons d'aborder.
7 R. Oui, je suis désolé d'incorporer encore un terme allemand, mais la
8 théorie militaire Fingerspitzengefuhl est en fait un terme qui permet au
9 commandant de comprendre jusqu'au bout des doigts comment les choses
10 fonctionnent et comment les choses vont évoluer. Et vous pouvez le faire,
11 pas en étant nécessairement présent tout le temps sur le terrain; vous
12 pouvez le faire en obtenant des informations, en les analysant, en les
13 comprenant et en donnant des ordres et des instructions. Mais souvent, il
14 faut avoir un sentiment qui vous permet d'établir ce qui est important, et
15 ceci vous permet également de vous concentrer sur les activités qui devront
16 être les activités principales. Donc vous avez en fait ces deux concepts,
17 le Fingerspitzengefuhl, et le fait d'être sur le terrain, qui peuvent se
18 recouper. C'est-à-dire que vous devez être sur le terrain et, en même
19 temps, vous devez avoir un sentiment jusqu'au bout des doigts pour savoir
20 ce qui va se passer ou ce qui semble se passer sur le terrain.
21 Q. Au paragraphe 60 dans votre rapport, que l'on trouve à la page 20 dans
22 l'original et à la page 17 de la traduction, vous faite la citation
23 suivante, et vous dites :
24 "Un commandant est responsable de ses actions vis-à-vis de ses soldats qui
25 sont sous son commandement, quelles que soient les circonstances. Et
26 d'ailleurs, les interceptions radio téléphoniques qui sont abordées dans
27 d'autres parties de la déclaration montrent bien que Mladic recevait des
28 rapports et donnait des ordres, qu'il soit présent physiquement ou pas à
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1 l'endroit où les événements se déroulaient."
2 Est-ce que je peux vous demander de développer plus avant et de nous dire
3 comment vous êtes arrivé à cette conclusion ?
4 R. Ce que je voulais dire, c'est qu'un commandant est responsable pour un
5 plan qu'il conçoit afin de mener à bien une mission donnée, et dans
6 certaines circonstances, et c'est la raison pour laquelle j'utilise le
7 terme "zone de responsabilité tactique", "TAOR" en anglais, et je pense que
8 la guerre en Bosnie est une de ces formes de conflit, c'est-à-dire qu'en
9 fait, le territoire qui est contesté est divisé en zones de responsabilité
10 tactiques. Tout ce qui se passe dans le cadre d'une zone de responsabilité
11 est précisément cela, c'est-à-dire qu'en fait, cela reste la responsabilité
12 du commandant. Donc, que le commandant, homme ou femme, soit physiquement
13 présent, ce n'est pas vraiment ce qui est important ici. Des missions
14 peuvent être déléguées, mais la responsabilité ne peut jamais faire l'objet
15 d'une délégation. Si vous êtes considéré comme responsable d'une opération
16 ou d'un plan de campagne, c'est votre responsabilité, même si vous déléguez
17 l'exécution de ce plan ou de cette opération. Et dans le cadre d'un conflit
18 où vous avez des subdivisions territoriales, ce qui se passe dans votre
19 zone de responsabilité tactique reste votre responsabilité. Et c'est ce que
20 j'essaie d'expliquer ici.
21 Q. Au paragraphe 80, vous parlez des défis opérationnels pour pouvoir
22 transporter toutes les populations de Potocari hors de cette zone. Et vous
23 dites :
24 "Dès le départ, cependant, les instances militaires doivent garder à
25 l'esprit qu'une fois qu'elles décident de faire partir un nombre important
26 de civils d'un endroit vers un autre, en vertu du droit international, les
27 instances militaires prennent certaines responsabilités et, par conséquent,
28 ont certaines obligations d'un point de vue juridique."
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1 Ma question est la suivante : dans quelles circonstances serait-il
2 approprié qu'une forme militaire d'occupation ait la possibilité de faire
3 partir d'une zone un nombre important de personnes ?
4 R. L'usage légitime de forces militaires doit se faire contre d'autres
5 forces militaires. J'ai parlé précédemment aujourd'hui d'une expression qui
6 est "guerre parmi les populations", et un commandant militaire responsable
7 doit également garder à l'esprit la sécurité des civils et des non-
8 combattants dans sa zone de responsabilité tactique ou dans la zone
9 géographique où une opération va être menée. Et, par conséquent, la
10 solution responsable ou l'option responsable est de proposer aux non-
11 combattants civils de cette zone la possibilité de quitter cette zone pour
12 leur propre sécurité et, dans ce cas-là, de fournir des moyens de transport
13 afin qu'ils puissent partir. J'utilise le terme "offrir la possibilité"
14 parce que c'est la manière appropriée. Si l'on force les personnes à
15 quitter leur maison, dans ce cas-là, d'un point de vue international et
16 d'un point de vue juridique, ceci risque d'être considéré comme
17 inacceptable. Et si l'on force les personnes à partir, ce n'est pas la
18 bonne manière de procéder. L'action appropriée à mener, c'est en fait de
19 concevoir vos opérations militaires de telle manière à ce que vous évitiez
20 à un centre de population de devoir partir de la zone si ces populations
21 ont décidé d'y rester.
22 Mais dans ce cas, il y avait un nombre important de personnes qui, pour une
23 raison ou pour une autre, devaient quitter cette zone. De là à savoir si
24 c'était volontaire ou pas, le fait est que ces personnes devaient quitter
25 la zone, et certains éléments de la VRS ont pris la responsabilité de
26 déplacer ces personnes d'un endroit vers un autre.
27 M. GROOME : [interprétation] Je demande l'affichage de la pièce P363, s'il
28 vous plaît. Il s'agit d'une partie du carnet militaire du général Mladic.
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1 Et je demande l'affichage dans le prétoire électronique de la page 4 dans
2 les deux versions.
3 Q. Général Dannatt, j'aimerais vous montrer une entrée du carnet militaire
4 du général Mladic, et cette entrée rapporte qu'une réunion qui a eu lieu à
5 Dobanovci, dans la banlieue de Belgrade, le 15 juillet 1995. Milosevic,
6 Stoltenberg, Akashi, Bildt, le général de La Presle et le général Smith
7 étaient présents. Au bas de la page, nous voyons que Mladic a pris note
8 d'une réunion séparée entre lui, le général de La Presle et le général
9 Smith. Est-ce que vous connaissez le général Rupert Smith ?
10 R. Oui, je connais le général Smith très bien.
11 M. GROOME : [interprétation] Passons à la page suivante, s'il vous plaît,
12 dans les deux versions.
13 Q. Nous voyons que le général Mladic -- un instant, un instant pour que la
14 page suivante s'affiche. Nous voyons ici que le général Mladic a consigné
15 une déclaration du général Smith. Et j'aimerais attirer votre attention sur
16 le paragraphe qui commence au numéro 4. Mladic prend note de ce que Smith
17 déclare. Il a pris note de la chose suivante :
18 "Le traitement de la population à Srebrenica et à Zepa. Il y a des rumeurs
19 qui circulent sur des atrocités, des massacres et des viols."
20 Ma première question se fonde sur votre instruction et votre expérience
21 vaste de commandant. J'aimerais savoir quel serait l'objectif d'un
22 commandant qui dit à un autre commandant qu'il y a des informations qui
23 circulent sur des crimes commis par les troupes de ce commandant ?
24 R. Si un commandant dit à un autre commandant qu'il a des informations
25 selon lesquelles ou qu'il a entendu des rumeurs disant que des activités
26 illégales ou inadéquates avaient été menées par les troupes du commandant,
27 comme cela semble être le cas dans cette conversation qui a lieu entre le
28 général Smith et le général Mladic, dans ce cas-là l'action responsable de
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1 l'autre partie, celle contre qui ces allégations sont portées, serait
2 d'entamer une enquête. Bien sûr, je ne sais pas si cela a eu lieu dans les
3 faits, mais si j'avais participé à cette conversation et si quelqu'un avait
4 proféré une allégation de la sorte, je me sentirais tenu par mon honneur et
5 obligé d'enquêter et d'obtenir des informations les plus récentes
6 possibles.
7 Lorsque j'étais à la tête de l'armée britannique, de temps en temps des
8 allégations étaient rapportées sur des actions inappropriées de soldats
9 britanniques, soit en Irak ou en Afghanistan. Et l'on peut bien comprendre
10 l'importance absolue de devoir enquêter ouvertement et de façon
11 transparente sur ces rumeurs, sur ces allégations, soit pour les rejeter
12 catégoriquement ou, si elles sont fondées, de demander une enquête plus
13 approfondie et, le cas échéant, de faire comparaître les auteurs de ces
14 activités inadéquates ou illégales devant le système judiciaire et devant
15 des tribunaux si nécessaire. Malheureusement, de temps en temps, dans
16 l'armée britannique, nous avons été confrontés à ce genre de cas. Mais ce
17 serait la réponse appropriée à ce genre de comportement.
18 M. GROOME : [interprétation] Alors, j'aimerais que l'on regarde à présent
19 une autre entrée du carnet qui date du mois de juillet, plus tard au cours
20 du mois de juillet. C'est la pièce P345. Page 229 dans le prétoire
21 électronique.
22 Q. Pendant que l'on attend l'affichage de cela à l'écran, j'aimerais vous
23 dire, Général, la chose suivante : nous savons à présent que le général
24 Mladic, lorsqu'il a reçu ces informations du général Smith, n'est pas
25 retourné à Srebrenica mais a été participé au mariage de l'un de ses amis
26 le lendemain. A votre avis, est-ce que l'on s'attende à un commandant des
27 forces qui a reçu des informations de ce genre-là, informations sur de
28 telles atrocités, de se comporter de la sorte ?
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1 R. Bon, je ne vois pas le document à l'écran, mais peu importe. Je pense
2 qu'il est surprenant si des allégations de ce genre-là ont été apportées
3 qu'un commandant choisisse de se rendre à la réception d'un mariage, à un
4 événement social, plutôt que de suivre attentivement les événements et
5 commencer une enquête sur les circonstances. Je ne peux pas me mettre à la
6 place du général Mladic, je n'étais pas dans sa peau ce jour-là, mais je
7 suis assez surpris en tout cas que s'il avait pris au sérieux les
8 allégations du général Smith, qu'il n'était pas préoccupé et qu'il n'ait
9 pas voulu suivre le plus près ou plus près possible l'évolution de la
10 situation et qu'il ait préféré se rendre à une réception de mariage. Je
11 crois que cela est surprenant, et je crois qu'il pouvait s'attendre à des
12 critiques.
13 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Puis-je, Monsieur Groome, poser une
14 question. Monsieur Dannatt, est-il possible ou acceptable qu'un commandant
15 dans ce genre de cas ordonne à son bras droit d'entamer une enquête ou
16 ordonne à tout autre personne qu'il estime être qualifiée pour le faire ?
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, Monsieur, c'est tout à fait possible, et
18 peut-être que c'est ce qu'il s'est passé. Mais ce que j'essayais de dire
19 c'est que si ces allégations étaient aussi graves et significatives
20 qu'elles le semblaient, je me demande si le commandant le plus haut gradé,
21 la personne qui est responsable en dernier ressort, a fait preuve de
22 sagesse en se montrant à la réception un mariage à un moment très sensible
23 et très difficile. Sa présence au mariage n'a pas empêché l'enquête, mais
24 la question que je pose, et je n'ai pas encore eu de réponse à cette
25 question, c'était de savoir si c'était bien l'endroit le plus approprié
26 auquel il pouvait se trouver, vu les allégations qui avaient été portées.
27 M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur.
28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai également une question. Est-ce que
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1 vous pensez que cela entre dans le cadre de votre expertise, je vais vous
2 donner un exemple, supposons que des ordres aient été donnés, ordres
3 d'enquêter, j'aimerais savoir si dans ce genre de cas les choses ne
4 relèvent pas plutôt de la politique que du commandement et du contrôle
5 d'une armée ?
6 LE TÉMOIN : [interprétation] Dans le commandement et le contrôle, Monsieur,
7 se trouve le jugement, et le caractère idoine de l'utilisation de ce
8 jugement. Je pense qu'en qualité d'expert militaire, il est tout à fait
9 légitime de se demander pourquoi le général Mladic a décidé de se rendre à
10 un mariage alors que des allégations très graves avaient été portées contre
11 son armée. C'est une question de jugement.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Mladic, veuillez rester assis.
13 Apparemment, vous voulez consulter votre conseil.
14 [Le conseil de la Défense et l'accusé se concertent]
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Plus bas, s'il vous plaît. Nous vous
16 entendons. Je pense que l'huissier m'a mal compris ce que j'ai dit, nous
17 vous entendons, je m'adressais à M. Mladic. Je ne parlais pas d'un problème
18 d'écouteur.
19 M. GROOME : [interprétation]
20 Q. Général Dannatt, MM. les Juges Moloto et Orie ont tous deux émis la
21 possibilité que Mladic, lorsqu'il a reçu ces informations du général Smith,
22 ait pu donner des ordres pour entamer une enquête sur la question. Lorsque
23 vous avez analysé les documents qui vous ont été remis pour étude, est-ce
24 que vous avez trouvé des éléments de preuve ou quoi que ce soit qui ait
25 indiqué que lorsque le général Mladic a reçu ces informations, il a ordonné
26 d'entamer une enquête ?
27 R. Je ne pense pas avoir vu quoi que ce soit. Mais, là encore, mes
28 connaissances sont limitées peut-être qu'il y a des documents qui existent
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1 et que je n'ai pas vus indiquant qu'une enquête a été ordonnée, mais pour
2 ma part je n'ai rien vu de ce genre-là.
3 Q. J'aimerais attirer votre attention sur l'écran. A présent, nous avons
4 la pièce P345 à l'écran - page 229 dans le prétoire électronique - nous
5 voyons dans cette entrée du carnet du général Mladic qu'il a consigné une
6 réunion le matin du 24 juillet 1995, un moment où les informations sur ce
7 qui se passe à Srebrenica sont connues du grand public. Il rencontre le
8 président Milosevic et le général Perisic, le chef de l'état-major de
9 l'armée yougoslave. Et il consigne que Milosevic a dit : "Srebrenica et
10 Zepa nous ont fortement porté atteinte."
11 Si le président d'un pays voisin et ami, en présence du commandant de son
12 armée, dit au commandant de la VRS que les événements à Srebrenica et à
13 Zepa ont provoqué énormément de dégâts, j'aimerais savoir si cela suffit
14 pour que ce commandant démarre une enquête sur les circonstances et sur les
15 responsables ?
16 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Monsieur Groome, je ne suis pas sûr
17 que nous ayons la bonne page affichée en B/C/S. Veuillez vérifier, s'il
18 vous plaît.
19 M. GROOME : [interprétation] Je ne parle pas B/C/S. Peut-être que Me Ivetic
20 peut nous aider. Je pense que la version dactylographiée du carnet nous
21 aiderait plutôt que de la version manuscrite.
22 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Vous avez fait référence à l'entrée
23 de 9 heures 30. C'est peut-être la partie inférieure de la page, mais c'est
24 illisible ou quasiment illisible.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mis à part la lisibilité, je pense que
26 c'est la bonne page à l'écran. Maître Ivetic, est-ce que vous pouvez nous
27 confirmer que la première puce, qui commence par les lettres "SM",
28 représente la bonne référence ? Et je crois que c'est la bonne page en
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1 B/C/S que nous avons à l'écran, à moins qu'il y ait contestation.
2 M. IVETIC : [interprétation] On me dit que cela semble être la bonne page,
3 même si c'est assez illisible à l'écran.
4 Puis-je consulter mon client, Monsieur le Juge ?
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais n'oubliez pas d'instruire
6 votre client de parler à voix basse pour que personne ne l'entende.
7 [Le conseil de la Défense et l'accusé se concertent]
8 M. IVETIC : [interprétation] Oui, mon client vient de m'indiquer qu'il
9 avait du mal à lire la page à l'écran et qu'il préférerait avoir une copie
10 papier de cette page, si l'Accusation en dispose.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce pour suivre les questions ou
12 plutôt pour vérifier la véracité de la citation ? Je vous dis cela, car je
13 sais qu'il existe une version dactylographiée en B/C/S. Nous pouvons en
14 demander l'affichage.
15 M. IVETIC : [interprétation] Je pense qu'il voudrait faire les deux, mais
16 principalement suivre les questions.
17 M. GROOME : [interprétation] Je vais peut-être en donner lecture, et nous
18 allons essayer de trouver une copie pour M. Mladic. Le document dit :
19 "Réunion avec le président Milosevic et le général Perisic.
20 SM : Srebrenica et Zepa nous ont fortement porté atteinte.
21 Point suivant : Vous devez avoir une dimension politique dans le
22 poste du commandant de l'armée.
23 Point suivant : Je voulais prouver à tout le monde que vous êtes un
24 homme sérieux."
25 C'est la fin de l'entrée.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non, vous n'avez pas tout lu, Monsieur
27 Groome. La première puce commence par une astérisque et ensuite, SM.
28 Ensuite, nous avons une deuxième puce sans identification claire quant à
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1 qui parle et puis, une troisième puce. C'est comme cela que se présente la
2 version anglaise. Veuillez continuer.
3 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Oui, et je voudrais ajouter que cette
4 entrée est datée du 24 juillet 1995 et dit Belgrade, 9 heures 30.
5 M. GROOME : [interprétation]
6 Q. Revenons à ma question, Général. Si un commandant reçoit ce genre
7 d'informations, est-ce que ces informations suffiraient pour entamer une
8 enquête quant aux circonstances exactes de ce qu'il s'est passé à
9 Srebrenica et Zepa et pour savoir qui était responsable au sein de l'armée
10 de la Republika Srpska ?
11 R. A mes yeux, c'est un commentaire assez grave qui a été fait par M.
12 Milosevic. Je suppose que les trois puces du document sont à attribuer aux
13 propos de Milosevic. Et si eux me disaient cela et si j'étais le général
14 Mladic, si j'avais participé à cette réunion, j'aurais été relativement
15 gêné. Dire que Srebrenica et Zepa font l'objet d'une attaque militaire pour
16 capturer ces villes est une chose, mais ces commentaires portent sur ce
17 qu'il s'est passé par la suite. Donc, je serais gêné d'apprendre qu'il y a
18 eu de grands dommages. Je serais gêné lorsqu'on me dit, si j'étais
19 commandant de l'armée, je serais gêné de cela, parce qu'il y a une
20 dimension politique et l'on remettrait en question mon rôle de commandant
21 de l'armée. Et je serais également gêné que le président d'un autre pays
22 soit en train de me dire, en fait : J'aimerais vous aider et j'aimerais
23 faire à tout le monde que vous êtes un homme sérieux. Suite à tout cela, eh
24 bien, j'aurais entamé une enquête pour savoir ce qu'il s'était passé et qui
25 était responsable. Et cette gêne se serait assez rapidement transformée en
26 colère. J'aurais voulu savoir, aller vraiment au fond des choses pour
27 rejeter ces allégations, parce que le président d'un autre pays m'a dit des
28 choses gênantes.
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1 M. GROOME : [interprétation] Avant de passer au document suivant, je
2 voudrais vous dire que Mme Stewart dispose d'une copie papier de cette
3 entrée du carnet de Mladic. M. le Greffier peut peut-être la fournir à la
4 Défense et la donner à M. Mladic s'il désire la lire.
5 Je demande l'affichage du document 02261 de la liste 65 ter. Cela va
6 prendre peut-être un instant.
7 Q. Mais il s'agit d'une évaluation de Radislav Karisic [comme interprété]
8 pour une période qui inclut le mois de juillet 1995. Cette évaluation a été
9 faite le 6 novembre 1995, bien après les événements de Srebrenica qui ont
10 été sus du public. Avant de vous faire lire un passage de ce document,
11 j'aimerais savoir si vous connaissiez cette utilisation des évaluations des
12 membres de l'armée et, si oui, quelle était la fonction de ces évaluations
13 ?
14 R. Oui, je connais bien le processus d'évaluation dans l'armée
15 britannique. Ceci est fait de manière constante pour toutes les personnes,
16 indépendamment du grade, il s'agit d'un rapport annuel et sur les
17 activités. Donc, il y a deux objectifs pour ces évaluations annuelles. Le
18 premier est afin d'aider une personne à améliorer, donc de lui donner la
19 capacité d'améliorer sa performance; et deuxièmement, c'est d'évaluer, de
20 savoir s'ils peuvent être promus à un grade supérieur ou peut-être à un
21 poste plus exigeant. Donc, je connais très bien le processus. Et lorsque
22 j'ai vu ce document pour la première fois, j'ai été intéressé par ce
23 document, étant donné que je connais très bien la procédure et les
24 processus de l'armée britannique, et je voulais voir de quelle manière
25 l'armée de la Republika Srpska menait à bien ce type d'évaluations. J'ai
26 donc lu les propos qu'a faits le général Mladic concernant le général
27 Krstic.
28 M. GROOME : [interprétation] J'aimerais que l'on se penche sur la partie
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1 intitulée "Description et conclusion". Et si nous lisons cela, nous pouvons
2 lire que Mladic écrit des commentaires très détaillés et positifs sur le
3 service de Krstic pendant la guerre, dont pendant la période de la guerre,
4 pendant la période entourant Srebrenica. Et à la dernière page de cette
5 évaluation, il évalue les performances de Krstic comme étant "excellentes".
6 Et en effet, la dernière phrase de l'évaluation se lit comme suit :
7 "Le général Krstic est l'un des généraux les plus prometteurs du peuple
8 serbe."
9 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Pourrait-on passer à la page suivante
10 en anglais, s'il vous plaît.
11 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui.
12 M. GROOME : [interprétation] "…est le général le plus prometteur du peuple
13 serbe."
14 Q. D'après votre expérience en tant que commandant, si nous acceptons que
15 Mladic était sincère dans ses louanges du général Krstic, est-ce que ceci
16 nous indique quoi que ce soit quant à l'intention de Mladic concernant ce
17 qui s'est passé à Srebrenica ?
18 R. [aucune interprétation]
19 M. IVETIC : [interprétation] Objection. Cette question fait appel aux
20 conjectures. On demande au témoin de se livrer à des conjectures, va au-
21 delà de l'expertise du témoin.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Groome.
23 M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, le général Dannatt nous
24 a expliqué l'utilisation de ce système d'évaluation dans le cadre d'un
25 système militaire, et je lui demande simplement de nous dire qu'est-ce que
26 cela nous indique concernant le comportement du général Krstic à Srebrenica
27 eu égard aux commentaires que nous voyons ici ?
28 M. IVETIC : [interprétation] Mais ce n'est pas la façon dont la question a
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1 été posée.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si vous avez une objection à cette
3 question, de la manière dont elle a été reformulée, est-ce que vous
4 aimeriez toujours soulever une objection, Maître Ivetic ?
5 M. IVETIC : [interprétation] Non, pas de la manière dont elle a été
6 reformulée, je n'aurais pas d'objection à ce moment-là.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Dannatt, pourriez-vous, je vous
8 prie lire la deuxième question qui vous a été posée par M. Groome, elle a
9 été reformulée par M. Groome et figure à l'écran. Pourriez-vous, je vous
10 prie, en prendre connaissance.
11 LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis justement en train de la lire.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Mladic, c'est maintenant la
13 troisième fois aujourd'hui que je vous demande de parler à voix basse. Je
14 ne souhaite pas répéter ceci de nouveau. Veuillez poursuivre, je vous prie.
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Dans ma tentative de répondre à la question
16 telle que formulée, d'après ce que j'ai cru comprendre, le général Mladic,
17 en tant que commandant de l'armée, rédige un rapport sur l'un de ses
18 commandants de corps, à savoir le général Krstic dans ce cas-ci, et il lui
19 donne la mention excellente, il l'évalue comme étant excellent, donc il
20 approuve son comportement et il a dit qu'il est un général avec beaucoup de
21 succès. Donc, il approuve son comportement.
22 Le problème que j'ai, et ce n'est pas à moi d'essayer de répondre à cette
23 question, c'est que nous savons qu'il est un fait qu'environ 8 000 hommes
24 et garçons ont trouvé la mort à Srebrenica et quelqu'un en est responsable.
25 Le général Krstic était le commandant du Corps de la Drina et ces morts ont
26 eu lieu dans la zone de responsabilité du Corps de la Drina. Nous devons
27 croire qu'il ne s'agit pas d'une activité qui a été ordonnée par le général
28 Mladic ou le général Krstic; l'on doit penser qu'une activité illégale a eu
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1 lieu à une échelle plus large.
2 Mais si nous prenions ceci pour hypothèse, je ne vois pas comment le
3 comportement du général Krstic aurait été vraiment excellent de la manière
4 dont le général Mladic le décrit. Ses performances au début de la guerre
5 auraient pu être justement telles, mais plus de 8 000 hommes et garçons ont
6 trouvé la mort dans la zone de responsabilité du Corps de la Drina, et cela
7 fait en sorte que l'on a un très grand point d'interrogation. Je suis donc
8 étonné, en tant qu'officier de carrière, que l'on puisse qualifier le
9 comportement de quelqu'un comme étant excellent eu égard à un si grand
10 point d'interrogation qui y figure là.
11 M. GROOME : [interprétation]
12 Q. Monsieur Dannatt, ma dernière question que je souhaite vous poser est
13 la suivante. La question à savoir si le général Mladic a commis des crimes
14 est une question sur laquelle doit trancher la Chambre. Cela va bien au-
15 delà de vos compétences. Mais ce que j'aimerais vous demander d'un point de
16 vue purement militaire est de savoir si vous pensez que le général Mladic,
17 donc, d'un point de vue purement militaire, est responsable pour le
18 comportement de ses subordonnés et de leurs actions concernant la ville de
19 Sarajevo et concernant les zones qui étaient placées sous le contrôle de la
20 VRS et concernant ce qui s'est passé à Srebrenica ? Est-ce que vous avez eu
21 une opinion à partager avec nous d'un point de vue purement militaire ?
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic.
23 M. IVETIC : [interprétation] Objection. La question est beaucoup trop
24 large. Et c'est à la Chambre de statuer sur ce genre de question.
25 [La Chambre de première instance se concerte]
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Groome, on a répondu à cette
27 question car le témoin nous a dit que la responsabilité ne pouvait pas être
28 déléguée, et cela, donc, fait en sorte que la Chambre le comprend de cette
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1 manière-ci, donc à moins que vous nous dites que ce n'est pas vrai que vous
2 avez une responsabilité militaire sur vos subordonnés parce que vous ne
3 pouvez pas déléguer votre responsabilité. Mais, bien sûr, il s'agirait
4 d'une déclaration plutôt abstraite. Mais la Chambre estime que l'on a
5 répondu à cette question qui a été posée. A moins que je n'aie pas très
6 bien compris votre réponse, Monsieur Dannatt.
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, vous avez compris mes
8 réponses précédentes tout à fait correctement. Les tâches peuvent être
9 déléguées, mais la responsabilité ne peut pas être déléguée. Là où on est
10 préoccupé, c'est-à-dire que si l'on demande aux personnes de mener à bien
11 certaines tâches, en se rappelant que vous êtes personnellement
12 responsable, le fait de mener une enquête et, si nécessaire, de traduire
13 les responsables en justice, ça fait partie de la responsabilité.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En fait, vous êtes en train d'élargir la
15 question quelque peu, car vous nous expliquez ce que être responsable
16 encourt, et donc vous avez répondu à cette question. Je vous remercie.
17 Monsieur Groome.
18 M. GROOME : [interprétation] Simplement pour donner suite aux commentaires
19 faits par les Juges de la Chambre.
20 Q. Le Juge Orie a compris votre réponse précédente comme étant une réponse
21 à cette dernière question, à savoir que --
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est la Chambre.
23 M. GROOME : [interprétation] Excusez-moi.
24 Q. La Chambre estime qu'il s'agissait d'une déclaration plutôt abstraite.
25 J'aimerais vous demander si vous pouviez appliquer ce concept abstrait à
26 votre étude des documents et d'autres éléments de preuve portant sur le
27 général Mladic ?
28 R. Je crois qu'il nous faut revenir aux documents qui ont fait l'objet
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1 d'une discussion il y a quelques instants lorsqu'il semblait, au moins à
2 une occasion, que le général Smith a fait référence aux rumeurs de
3 massacre, de viol et de meurtres, et le président Milosevic a fait une
4 référence à savoir que de tels événements pouvaient leur porter atteinte.
5 Et donc, pour reprendre ma réponse précédente, à savoir que l'on peut pas
6 déléguer la responsabilité, si vous êtes préoccupé par ce qui s'est passé,
7 en effet, en votre nom, la seule chose responsable que vous pouvez faire à
8 ce moment-là est de diligenter une enquête pour savoir où se trouve la
9 vérité et si d'autres personnes ont commis des torts, et donc c'est eux
10 plutôt que vous qui devront être traduits en justice. Parce que si vous ne
11 vous livrez pas à une telle enquête, vous pouvez faire preuve de négligence
12 pour ne pas avoir été responsable. Vous devez démontrer de la discipline.
13 Et donc, le fait de faire preuve de négligence et de ne pas faire la bonne
14 chose fait partie de tout ceci.
15 M. GROOME : [interprétation] Je n'ai plus d'autres questions, Monsieur le
16 Président, Messieurs les Juges.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Groome.
18 C'est l'heure de la pause. Monsieur Dannatt, nous allons maintenant prendre
19 une pause de 20 minutes. Je vous demanderais de bien vouloir suivre
20 l'huissier, s'il vous plaît.
21 [Le témoin quitte la barre]
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons reprendre nos travaux à midi
23 20.
24 --- L'audience est suspendue à 12 heures 00.
25 --- L'audience est reprise à 12 heures 21.
26 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez, je vous prie, faire entrer le
27 témoin dans la salle d'audience.
28 Monsieur Groome, je vous écoute.
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1 M. GROOME : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai oublié de demander
2 le versement au dossier du document 65 ter 2261, il s'agit de l'évaluation
3 du général Krstic. Je propose de le faire maintenant.
4 M. IVETIC : [interprétation] Aucune objection.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Madame la Greffière.
6 Mme LA GREFFIÈRE : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les
7 Juges, le document 2261 recevra la cote P2631.
8 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Versé au dossier.
9 Je vais commencer par aborder une question, et lorsque M. Dannatt sera là,
10 j'arrêterai. Je voudrais parler de l'injonction de comparaître pour le
11 Témoin RM225, qui a été délivrée le 25 avril de cette année. Pour
12 mentionner les choses en bref, je ne crois pas que le témoin sera appelé à
13 témoigner, mais je vais aborder la question un peu plus tard. Vous pourrez
14 peut-être réfléchir sur les conséquences de cela, Monsieur Groome.
15 [Le témoin vient à la barre]
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Dannatt, vous serez maintenant
17 contre-interrogé par Me Ivetic, qui est un membre de l'équipe de la Défense
18 de M. Mladic. Maître Ivetic, vous avez la parole.
19 M. IVETIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.
20 Contre-interrogatoire par M. Ivetic :
21 Q. [interprétation] Bonjour, Général.
22 R. Bonjour.
23 Q. Tout d'abord, Monsieur, j'aimerais vous demander si vous estimez être
24 un expert sur les sujets de la JNA, la doctrine de défense de l'armée
25 populaire yougoslave et la doctrine de la Défense territoriale ou du
26 système de la TO qui était en vigueur dans la République socialiste
27 fédérative de Yougoslavie avant 1992 ?
28 R. J'ai étudié ces questions dans une certaine mesure et je crois bien
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1 maîtriser le sujet, et ce, dans un contexte plus large qui cadre avec ma
2 formation militaire et avec mon expérience en tant qu'officier dans l'armée
3 britannique, qui est une expérience de plus de 40 ans.
4 Q. Mais, Monsieur, j'aimerais maintenant vous demander la question si vous
5 pensez être un expert ou non ?
6 R. Oui.
7 Q. Est-ce que vous estimez que votre expertise sur ces sujets est en
8 mesure de couvrir l'ensemble de l'histoire et des origines de la JNA, de la
9 doctrine de la Défense populaire yougoslave et du système de la Défense
10 territoriale à partir de ses débuts ?
11 R. Je me suis penché sur un très grand nombre de questions. De quelle
12 manière définissez-vous un expert ? Est-ce que je connais tout, est-ce que
13 je maîtrise tous les sujets ? Je pourrais vous dire que je connais un très
14 grand nombre d'éléments, et si vous me posez si j'ai suffisamment de
15 connaissances pour répondre aux questions qui me sont posées, je répondrais
16 par l'affirmative.
17 Q. En se fondant sur votre propre définition en tant qu'expert, est-ce que
18 vous estimez être expert sur le sujet de la VRS, c'est-à-dire l'armée de la
19 Republika Srpska ?
20 R. Je répondrais de la même manière. J'ai fait une étude approfondie de la
21 VRS dans un contexte plus élargi de la situation, et je crois pouvoir être
22 en mesure de donner une opinion sur le sujet.
23 Q. Est-ce que vous estimez que votre expertise concernant la VRS puisse
24 couvrir et inclure l'ensemble de la période allant de 1992 à 1995 ?
25 R. Sans vouloir être répétitif ou ennuyeux, je ne peux pas prétendre de
26 connaître tout ce qui s'est passé entre 1992 et 1995, mais je me suis
27 penché sur un très grand nombre de questions, j'ai été présent en Bosnie,
28 et ce, à plusieurs reprises entre 1992 et 1995, et je crois avoir
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1 suffisamment de connaissances pour pouvoir offrir une opinion à la Chambre.
2 Et c'est la raison, d'ailleurs, pour laquelle je suis ici.
3 Q. Avez-vous jamais eu l'occasion de rencontrer ou avez-vous jamais
4 participé à des échanges avec les officiers de la JNA ou avec d'anciens
5 officiers de la JNA avant 1992 ?
6 R. Avant 1992, non.
7 Q. En dehors des rapports d'experts que vous avez rédigés pour le bureau
8 du Procureur de ce Tribunal dans l'affaire Krstic et dans cette affaire-ci,
9 avez-vous rédigé des articles ou des publications sur les doctrines de
10 commandement et de contrôle de la JNA, de la VRS ou de la Défense populaire
11 yougoslave, et ce, concernant les doctrines de ces dernières ?
12 R. Non.
13 Q. Vous avez publié un livre, que, je crois, vous mentionnez au paragraphe
14 22 dans votre déclaration d'expert dans cette affaire. Seriez-vous d'accord
15 avec moi pour dire que votre livre est plutôt une autobiographie, plutôt
16 que d'être un texte représentant ou parlant de la doctrine du commandement
17 soit de la JNA, de la VRS ou de la Défense populaire yougoslave ?
18 R. Je crois que le titre du livre est intitulé "Autobiographie", et je
19 crois que cela répond à votre question.
20 Q. Dans votre déclaration concernant ce livre, vous dites maintenant qu'il
21 s'agit d'une autobiographie, mais vous dites également dans la déclaration
22 qu'il s'agit d'une étude sur les dirigeants. Et c'est la raison pour
23 laquelle je vous demande s'il s'agit d'une autobiographie ou s'il s'agit
24 également d'une étude sur la direction d'une armée, y compris le
25 commandement et le contrôle ?
26 R. Je ne pense pas que le fait que ce livre soit qualifié d'autobiographie
27 empêche également d'aborder une discussion concernant la direction d'une
28 armée. Dans les 12 chapitres de ce livre, je fais référence à ma propre
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1 expérience dans le domaine du commandement et du contrôle. Et je ne vois
2 donc aucune incohérence.
3 M. IVETIC : [interprétation] J'aimerais que l'on consulte maintenant la
4 pièce P2629, qui a une cote MFI.
5 Q. Et qui est votre déclaration d'expert. J'aimerais que l'on passe à la
6 page 3 dans les deux versions, et j'aimerais qu'on se concentre sur le
7 paragraphe 11. Ici, vous parlez de la période où vous avez été instructeur
8 et vous parlez de la structure de ce cours de formation d'études comparées
9 avec les autres procédures de commande et de contrôle des autres armées.
10 Est-ce que dans ces études comparatives vous avez parlé des forces armées
11 de la RSFY ?
12 R. Dans la mesure où les forces armées de la RSFY ont des antécédents en
13 matière de doctrine dans les bases doctrinales plus générales de l'Union
14 soviétique et des armées du Pacte de Varsovie, ma réponse à votre question
15 est affirmative. De plus, nous avons également beaucoup étudié dans le
16 détail le Pacte de Varsovie dans cette série de formations, et à l'époque
17 il y avait donc la JNA qui faisait partie du Pacte de Varsovie, et, par
18 conséquent, les implications plus générales sont -- ma réponse est
19 affirmative.
20 Q. Quelle sont les années durant lesquelles la JNA était membre du Pacte
21 de Varsovie, Général ?
22 R. Je pense que ce que j'essaie de vous dire, c'est que pour comprendre de
23 manière plus générale les aspects de doctrine de la JNA, il faut savoir que
24 celle-ci a été influencée par le style soviétique de commandement et de
25 contrôle, et puis les membres de la JNA participaient à des cours de
26 formation en Russie, et, par conséquent, le cadre doctrinal est fortement
27 influencé par l'armée russe et par l'Union soviétique et par le Pacte de
28 Varsovie.
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1 Q. En tant qu'expert, vous n'êtes pas en mesure de répondre à la question
2 de savoir pendant combien de temps les Yougoslaves ont fait partie du Pacte
3 de Varsovie ?
4 R. Je ne suis pas en mesure de répondre à cette question.
5 Q. Dans votre déclaration, vous avez également mentionné que vous étiez
6 l'auteur de cette doctrine britannique révisée de situation de combat en
7 période de guerre. Et je pense que c'est au paragraphe 22, approche
8 manœuvrière donc aux opérations, c'est au paragraphe 22 de votre
9 déclaration qui est à la page 5 en anglais, page 5 en serbe. Est-ce que
10 vous serez d'accord avec moi pour dire que cette doctrine, dont vous êtes
11 l'auteur avec votre équipe, ne s'applique pas et n'a aucune raison d'être
12 dans une étude de la VRS et dans notre discours aujourd'hui ?
13 R. Je mentionne dans ma déclaration que j'ai une bonne compréhension de
14 l'importance de la doctrine et de l'importance d'une armée d'avoir une
15 doctrine qui conditionne sa manière de réfléchir. Et le rôle que l'on
16 m'avait donné était en fait de rédiger une doctrine qui était adaptée à
17 l'armée britannique dans la période après la Guerre froide. Et c'est ce que
18 j'avance ici, et je pense que je donne les éléments qui soutiennent cette
19 thèse.
20 Q. Je ne vais pas contester cela, Monsieur.
21 R. Merci.
22 Q. Est-ce que l'on pourrait passer à la première page de votre déclaration
23 P2629, cote MFI, et j'aimerais qu'on se concentre sur le paragraphe 4 de ce
24 document. Vous dites que des documents vous ont été fournis par le bureau
25 du Procureur et que vous les avez étudiés et que vous pouvez donc formuler
26 des commentaires à leur sujet. Ma première question est de savoir si vous
27 avez conservé un registre de tous les documents qui avaient été fournis par
28 l'Accusation à votre attention pour examen ?
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1 R. Je n'ai pas conservé de registre ou de recueil, mais il y a un autre
2 document qui a été mentionné et qui recense, afin d'aider les Juges de la
3 Chambre, qui recense les documents que j'ai consultés, et je leur ai donné
4 des numéros de façon à ce qu'ils puissent s'identifier. Je ne l'ai pas
5 devant moi, mais c'est un document de trois ou quatre pages qui recense
6 donc tous les documents avec leur contenu et vous avez un numéro qui est
7 propre à ce procès et qui est associé à chacun de ces documents. Et ça
8 constitue donc cette liste de documents que j'ai consultés.
9 Q. Je pense que la liste que vous mentionnez est intitulée "Index des
10 documents cités dans le rapport d'expert du général Dannatt, 23 avril
11 2012," et la copie que j'ai à ma disposition n'identifie que les documents
12 qui en fait étaient cités dans votre déclaration. Est-ce que nous parlons
13 de la même liste ?
14 R. Est-ce que l'on pourrait m'afficher ce document sur les écrans, s'il
15 vous plaît ?
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que c'est déjà téléchargé ?
17 M. GROOME : [interprétation] Oui. En fait, cela fait partie du document MFI
18 P2630.
19 M. IVETIC : [interprétation]
20 Q. Est-ce qu'il s'agit du tableau dont vous parlez ?
21 R. Oui. Merci.
22 Q. Et est-ce que ce tableau identifie chacun des documents que vous avez
23 consultés et qui ont été fournis par le bureau du Procureur afin de
24 diligenter ce rapport d'expert ?
25 R. Autant que je me souvienne, vous savez, j'ai élaboré ce rapport il y a
26 18 mois de cela lorsque je pensais que j'allais déposer dans ce procès, et
27 cette liste de documents est une liste de documents que j'ai consultés, et
28 que j'ai mentionnés dans mon rapport. Maintenant de là à savoir si chacun
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1 de ces documents est mentionné dans ce rapport, je ne pourrais le faire que
2 si je repasse en revue la totalité du rapport, mais l'objet de cette liste
3 était d'avoir des numéros propres à cette affaire de façon à ce que ceci
4 aide la Chambre de première instance.
5 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je crois qu'il y a un malentendu,
6 Monsieur le Témoin. Ce que Me Ivetic souhaiterait savoir c'est si mis à
7 part les documents que vous mentionnez explicitement dans votre rapport, il
8 y a d'autres documents que vous avez consultés mais que vous n'avez pas
9 mentionnés explicitement dans ce rapport. Et cette liste semble être un
10 tableau des documents qui sont cités. Me Ivetic souhaiterait savoir s'il y
11 a d'autres documents qui n'ont pas été cités de façon à ce qu'il sache
12 exactement quels sont les documents que vous avez examinés et qui
13 pourraient constituer le fondement de ce rapport.
14 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est ainsi que j'avais compris sa
15 question, il y avait d'autres documents, mais il m'a demandé si j'avais un
16 registre ou une liste et ma réponse était non, et sa question suivante
17 était quels sont les autres documents que vous avez consultés, je ne peux
18 pas répondre à cette question parce que je m'en souviens pas.
19 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, saurait peut-être été
20 votre prochaine question ?
21 M. IVETIC : [interprétation] Eh bien, --
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Peut-être pas.
23 M. IVETIC : [interprétation] Peut-être pas.
24 Q. Ces documents qui vous ont été fournis, est-ce que c'est des documents
25 qui avaient été présélectionnés par le bureau du Procureur, ou est-ce que
26 vous avez eu la possibilité de leur demander ou de leur dire quels étaient
27 les documents que vous souhaitiez obtenir de leur part ?
28 R. Comme ceci a été expliqué ce matin très clairement, j'ai participé à un
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1 autre procès au sein du TPIY et également une autre affaire impliquant la
2 Bosnie et la Serbie et, par conséquent, ces deux procès, et ce procès-ci,
3 signifient que j'ai consulté un nombre important de documents. Pour ce qui
4 est de ce procès précis, il y a certains documents que le bureau du
5 Procureur m'a présentés, mais cette liste que vous avez devant vous n'est
6 pas en fait une liste de lecture recommandée par le bureau du Procureur.
7 Beaucoup de ces documents, je les avais déjà vus quand je m'étais préparé
8 pour le procès Krstic il y a 12, 13, ou 14 ans.
9 Q. Je voudrais revenir aux préparatifs pour votre rapport d'expert dans
10 l'affaire Krstic. A l'époque, est-ce que ces documents avaient été
11 présélectionnés par le bureau du Procureur et est-ce qu'ils vous avaient
12 été donnés afin que vous puissiez mener cette expertise ?
13 R. Je m'étais préparé énormément pour ce procès à l'époque, j'avais eu
14 également de longues réunions avec des représentants du bureau du
15 Procureur, avec des enquêteurs, et j'ai également passé un certain temps
16 sur le terrain en Bosnie pour me pencher sur cette question. Donc, en fait,
17 ces préparatifs étaient très importants avant ce procès, de façon à bien
18 comprendre la toile de fond, les endroits où les événements s'étaient
19 produits, et ensuite je suis retourné en Bosnie un peu plus d'un an après
20 ma déposition, je suis retourné sur les lieux à plusieurs reprises. Donc,
21 ma compréhension du contexte est plus vaste que simplement quelques
22 documents qui m'auraient été fournis.
23 Q. Je comprends bien, Monsieur le Témoin. Mais je voudrais rester sur les
24 documents. Donc, j'aimerais savoir si on vous a donné une série de
25 documents, est-ce que le bureau du Procureur avait présélectionné ces
26 documents de façon à ce que vous meniez votre expertise ?
27 R. Oui, il y avait des documents que l'on m'a donnés et que je les ai
28 consultés. Mais ceci ne représente pas la totalité de ma recherche ni la
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1 totalité de mes préparatifs pour ce procès-là. Je pense que ça aurait été
2 surprenant si ça avait été le cas, d'ailleurs.
3 Q. Je voudrais maintenant que l'on revienne à votre déclaration P2629 MFI
4 et, en attendant que ce document s'affiche, j'aimerais savoir si vous avez
5 rédigé cette déclaration seul ou est-ce que d'autres personnes vous ont
6 aidé dans son élaboration ?
7 R. La déclaration pour ce procès-ci reprend dans une grande mesure des
8 éléments de ma déclaration dans l'affaire Krstic, déclaration que j'avais
9 rédigée -- j'essaie de me souvenir, parce que cela remonte à 1999. Je me
10 souviens avoir rédigé moi-même cette déclaration dans ce procès-ci,
11 quelqu'un qui avait une formation juridique m'a aidé pour élaborer cette
12 déclaration. Mais comme tout document que vous devez signer, je suis
13 satisfait de tous les termes qui ont été utilisés. Donc, ça a été en partie
14 rédigé par moi avec l'aide, comme je le disais d'une autre personne, mais
15 je considère ceci comme pas vraiment pertinent étant donné que c'est moi
16 qui ai signé cette déclaration, et je considère cette déclaration comme
17 représentant mes propos.
18 Q. En ce qui concerne la personne qui a une formation juridique et qui
19 vous a aidé dans l'élaboration, pourriez-vous nous dire qui était
20 l'employeur de cette personne qui, à l'époque, vous a aidé ?
21 R. La personne concernée c'est ma belle-sœur [comme interprété], qui est
22 avocate dans le domaine des droits de l'homme, et qui a travaillé dans de
23 nombreux procès dont plusieurs tribunaux à l'époque. Elle ne travaillait
24 pas, elle avait trois enfants en bas âge. Et, pour répondre qui la payait,
25 je crois que c'est moi qui l'ai payé, en utilisant le petit pécule qui
26 avait été mis à ma disposition par le Tribunal pour me préparer en
27 l'espèce. Donc, je ne me souviens pas quelles étaient les sommes
28 faramineuses qui étaient impliquées dans cette transaction, mais je l'ai
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1 défalqué, j'ai défalqué son temps, et pour être honnête, étant donné que
2 durant l'affaire Krstic j'étais encore dans l'armée, je considérais que
3 c'était en fait ma responsabilité, étant donné que je suis à la retraite de
4 l'armée, et je ne pouvais pas vraiment consacrer le temps nécessaire à
5 l'époque. Et, par conséquent, c'est la raison pour laquelle j'ai demandé à
6 ma belle-fille de m'aider et d'utiliser son expérience dans ce type
7 d'affaire, et, je suis très reconnaissant qu'elle ait pu m'aider.
8 M. IVETIC : [interprétation] Pour terminer sur ce thème, j'aimerais
9 afficher le document 1D1448 sur le système du prétoire électronique.
10 Q. Et, en attendant, je pense qu'il s'agit d'extraits de votre livre, si
11 la cote est appropriée, et j'aimerais que l'on passe à la page 11 sur la
12 version du prétoire électronique, qui devrait correspondre aux pages 218 et
13 219 de votre livre. En haut de la colonne de gauche, il est mentionné :
14 "La femme de mon aîné, Lucinda, a ensuite travaillé comme avocate pénaliste
15 à la CPI à La Haye, et ensuite à Sarajevo, et j'ai suivi ses travaux et ses
16 activités avec beaucoup d'intérêt et je ne fais qu'approuver."
17 Monsieur, pourriez-vous confirmer si votre belle-fille qui est mentionnée
18 ici a effectivement travaillé pour la CPI ou pour ce Tribunal-ci ?
19 R. C'est une excellente question, et dans la quête de la vérité, je dirais
20 que je ne suis pas sûr. Je sais qu'elle a travaillé et vécu à Sarajevo
21 pendant un certain temps, et qu'elle a travaillé à La Haye. Et si ma
22 description dans ce paragraphe n'est pas exacte, eh bien, c'est le cas,
23 mais je pense que vous comprendrez que pour des profanes, cette description
24 suffisait parce que cela décrivait son domaine d'activité, son domaine de
25 spécialité. Maintenant si vous vouliez être plus précis, vous l'avez été.
26 Q. Ce qui m'intéresse plus c'était de savoir dans quel département elle
27 travaillait, si c'était l'Accusation, la Défense ou une autre entité.
28 R. Je ne me souviens pas. Elle a passé à autre chose dans des domaines
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1 plus exotiques les uns que les autres, et elle représente la Défense. C'est
2 en fait une affaire très connue au niveau international, et donc elle
3 représente la Défense. Donc ce n'est pas quelqu'un qui représente en
4 général le ministère public, mais bien sûr elle suit leurs activités comme
5 tous les avocats le font et tous les juristes.
6 Q. Merci. Je voudrais maintenant revenir à votre déclaration, P2629 MFI,
7 et je voudrais revenir à la première page de votre déclaration avant
8 d'avoir emprunté des chemins de traverse.
9 Au paragraphe 4, vous dites que le document principal sur lequel vous vous
10 êtes concentré consistait en des rapports rédigés par un autre expert
11 proposé par le bureau du Procureur, Richard Butler. Ai-je bien compris ce
12 paragraphe ?
13 R. Oui, c'est le travail de Richard Butler. J'ai étudié très attentivement
14 ces rapports, je les ai trouvés très précieux, et d'après ce que j'ai
15 compris, c'était quelqu'un qui en savait beaucoup de la situation.
16 Q. Est-ce que vous vous souvenez si M. Butler avait un grade au sein des
17 forces armées américaines ?
18 R. Non.
19 Q. Pouvez-vous nous dire si dans le travail de M. Butler quelque chose
20 vous a poussé à conclure qu'il s'agissait de référence pour votre travail ?
21 Est-ce que vous connaissiez son travail avant votre déposition dans
22 l'affaire Krstic ?
23 R. Non. J'ai rencontré M. Butler pour la première fois lorsque je me suis
24 préparé pour l'affaire Krstic. J'ai lu les documents à ce moment-là, il me
25 les avait fournis, alors je vous parle de mémoire. Je pense que je l'ai
26 rencontré, j'ai parlé avec lui pour préparer cette affaire Krstic, mais
27 peut-être que je me trompe. Mais d'après mes souvenirs, nous nous sommes
28 rencontrés, j'ai été très impressionné, et ce qu'il m'a dit m'a informé,
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1 intéressé, et il m'a également fourni des documents écrits.
2 Q. Par rapport à ses documents, son rapport, s'agit-il de documents écrits
3 qu'il a présélectionnés pour vous et qu'il vous a donnés via le bureau du
4 Procureur ou est-ce que vous avez obtenu ces documents par d'autres moyens
5 ?
6 R. Non. J'ai obtenu ces documents sur invitation, je pense de la Chambre.
7 Je pense que le représentant du bureau du Procureur l'a fait. En fait,
8 c'est l'armée britannique en 1999, qui est entré en contact avec moi, et il
9 fallait qu'un général, qu'un haut gradé serve de témoin expert pour aider
10 la Cour, les Juges d'une Chambre à comprendre les questions relatives au
11 commandement et contrôle. Et, le chef de l'état-major général de l'époque,
12 connaissant mon parcours, m'a demandé si j'étais prêt à agir en qualité de
13 témoin expert. J'ai accepté, et je suis venu à La Haye. J'ai rencontré le
14 représentant du bureau du Procureur, j'ai rencontré l'équipe du bureau du
15 Procureur, et ensuite nos contacts ont continué.
16 Donc, je ne dis pas que je connaissais bien les activités du général Krstic
17 avant cela, ni l'affaire Krstic avant d'avoir été invité à aider les Juges
18 de la Chambre à comprendre le système de commandement et de contrôle. Je
19 m'intéressais de plus près à l'affaire Krstic ensuite. Donc je suppose que
20 c'est le bureau du Procureur qui a dû me fournir des documents. J'ai étudié
21 ces documents et j'ai rédigé un rapport. Comme je vous l'ai dit, cela a
22 pris du temps. J'étais sur le terrain en Bosnie, je suis allé voir ce qu'il
23 en était de quelques points qui portaient sur Srebrenica, et puis je suis
24 venu à La Haye pour déposer. Donc je ne l'ai pas fait parce que je me suis
25 dit que c'était une bonne idée, je l'ai fait parce que mon général m'a
26 invité à le faire ainsi que le bureau du Procureur.
27 Q. Est-ce que vous avez mené des recherches sur les publications et le
28 parcours professionnel de M. Butler pour vous assurer de son expérience, de
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1 son expertise et de sa fiabilité sur les sujets repris dans ses rapports ?
2 R. Je pense que j'ai pris la réputation et le travail de M. Butler pour
3 argent comptant, et à la lecture de ses rapports, cela m'a conforté dans
4 cette idée-là. C'est quelqu'un qui avait une grande intégrité, qui était
5 très capable, et ses rapports me semblaient suffisamment crédibles pour les
6 utiliser.
7 Q. Est-ce que vous vous êtes contenté d'étudier les différents rapports de
8 M. Butler ou est-ce que vous avez également eu accès à la déposition de M.
9 Butler dans d'autres affaires devant ce Tribunal ?
10 R. Alors, je voudrais une petite précision à votre question. Est-ce que
11 cette question porte sur ma préparation pour l'affaire Krstic ou autre ?
12 Q. Pour l'affaire Krstic et en l'espèce. S'il y a des différences, dites-
13 nous lesquelles elles sont.
14 R. Pour répondre à vos deux questions, je n'ai pas consulté les
15 dépositions de M. Butler dans d'autres affaires sauf pour la préparation à
16 l'affaire Krstic et pour les questions qui portaient sur les documents en
17 ma possession portant sur cette affaire.
18 Q. Dois-je en comprendre, Monsieur, que vous voulez dire par là que vous
19 avez revu ou relu les comptes rendus de la déposition de M. Butler ou les
20 enregistrements en l'espèce dans l'affaire Mladic ?
21 R. Non, là, je crois qu'il faut encore une petite clarification. Est-ce
22 que vous me demandez si j'ai lu le compte rendu de la déposition de M.
23 Butler dans cette affaire ?
24 Q. Oui, c'est bien cela.
25 R. La réponse est non, je ne l'ai pas fait. Je n'ai pas le temps de le
26 faire. Je suis relativement -- je suis quelqu'un de très occupé et je me
27 suis préparé du mieux que je pouvais pour ma déposition. Et je n'ai pas
28 passé du temps à lire le point de vue d'autres personnes. Le général
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1 Milovanovic est un cas à part et très intéressant parce qu'il était
2 l'adjoint du général Mladic, et j'ai été fasciné par la lecture de ses
3 propos. Et d'ailleurs, je tiens à remercier le bureau du Procureur de
4 m'avoir fourni ces documents.
5 Q. Monsieur, la raison pour laquelle je vous pose cette question, c'est
6 parce que M. Butler a déposé en l'espèce et il a apporté des corrections à
7 ses rapports. Je voudrais savoir si vous en étiez au courant ?
8 R. Non.
9 Q. A l'époque où l'on vous a demandé pour la première fois de préparer un
10 rapport d'expert dans l'affaire Krstic, est-ce que vous avez ou est-ce que
11 quelqu'un en votre nom a décidé de lire toutes les publications qui
12 existaient à ce sujet ?
13 R. Alors, si vous parlez d'une étude complète des documents qui
14 existaient, ma réponse à votre question est non. Je le répète, ce n'est
15 qu'après ma première visite ici, lorsque l'on m'a invité à rencontrer les
16 représentants du bureau du Procureur, que j'ai obtenu des documents. J'ai
17 pu me plonger dans l'affaire et j'ai pu élargir le champ des documents à
18 disposition par mes propres recherches. J'ai discuté également avec des
19 enquêteurs, j'ai passé du temps sur le terrain pour peaufiner un petit peu
20 quelques aspects sur Srebrenica dans l'affaire Krstic, mais je suis parti
21 des documents que le bureau du Procureur m'a fournis. Et je ne vois pas où
22 est le problème.
23 Q. Passons à la toute dernière page des deux versions de votre
24 déclaration, s'il vous plaît. Le paragraphe 110 porte un avis, ou je
25 devrais plutôt dire sur une évaluation relative à la qualité des différents
26 rapports de M. Butler, et j'aimerais vous demander pourquoi l'on retrouve
27 ça ici. Est-ce que c'est quelque chose que le bureau du Procureur ou M.
28 Butler vous a demandé d'inclure dans le cadre de votre rapport d'expert en
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1 l'espèce ?
2 R. Pour que les choses soient claires, vous parlez bien du paragraphe 110,
3 et pas du paragraphe 109 ?
4 Q. Je pense, Monsieur, que les paragraphes 109 et 110 font référence au
5 même rapport. Corrigez-moi si je me trompe.
6 R. Oui, je pense vous avez raison. Mais le paragraphe 109 est plus précis
7 sur les références à Richard Butler et à son travail. Alors, je vais vous
8 dire la vérité; honnêtement, je ne m'en souviens pas. J'ai rédigé ce
9 rapport il y a 18 mois, et, inévitablement, il y avait quelques répétitions
10 du rapport. Donc, pour répondre honnêtement â votre question à savoir si
11 j'ai voulu intégrer cela ou si l'on m'a suggéré de le faire, eh bien, j'ai
12 signé le document et j'assume mes propos et l'avis qui est reflété dans ce
13 document.
14 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Butler, mais la question reste
15 -- ah non, pardon, Monsieur Dannatt. Excusez-moi. La question reste de
16 savoir si vous avez pris l'initiative d'ajouter ces deux paragraphes dans
17 le rapport. Cela n'a rien à voir avec la responsabilité que vous assumez au
18 bout du compte. Ce sont deux questions différentes.
19 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, pour éviter toute
20 équivoque, tous les termes repris dans le paragraphe 110 reflètent mes
21 propos et j'assume totalement la responsabilité de ces propos. Ce sont mes
22 mots.
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais cela ne répond toujours pas à la
24 question de savoir qui a réfléchi à l'inclusion de ce paragraphe, qui a
25 décidé de l'inclure dans le rapport.
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, Monsieur, je m'en tiens à ce que j'ai
27 dit tout à l'heure. J'ai rassemblé tout cela il y a 18 mois, et
28 honnêtement, je ne m'en souviens. C'est la réponse la plus honnête et la
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1 plus sincère que je puis vous donner. Je ne veux pas me prêter à des
2 conjectures car je pourrais me tromper.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez continuer, Maître Ivetic.
4 M. IVETIC : [interprétation] Merci.
5 Q. Le type d'étude que vous avez menée sur la VRS incluait-elle une étude
6 approfondie de la JNA ?
7 R. Bon, je crois que nous sommes vraiment dans de la sémantique pure ici.
8 Savoir ce qui est approfondi ou pas est relatif. Moi, je me suis penché sur
9 les origines de l'armée de Republika Srpska, qui découlait clairement d'un
10 district militaire de la JNA. Et il y a 13 ou 14 ans, lorsque j'ai commencé
11 à me pencher sur ces questions, je me suis demandé comment une armée qui
12 avait été créée en pleine urgence en 1992 pouvait prendre le commandement
13 et le contrôle, pouvait reprendre des réglementations, pouvait prendre
14 corps et commencer à fonctionner comme une armée, et je me suis dit que
15 cela ne pouvait pas venir de nulle part. Et lors de ma recherche, j'ai pu
16 voir clairement que la réponse à cette question était la suivante : la VRS
17 avait repris les réglementations, la forme et l'essence d'une partie de la
18 JNA. C'était ça, la réponse à la question. Créer une armée de rien dans
19 l'urgence en plein milieu d'une guerre civile aurait été impossible.
20 Q. J'aimerais, à présent, que nous nous penchions sur la pièce 1D1450. En
21 attendant l'affichage, je vais vous dire de quoi il s'agit. Il s'agit de la
22 déposition que vous avez faite devant la CIJ le 20 mars 2006.
23 Page 3 dans le prétoire électronique. Jusqu'à la page 11 du document
24 du compte rendu de la CIJ. J'aimerais attirer votre attention sur la
25 dernière question et sur la première partie de votre réponse.
26 Je cite :
27 "Mme Korner : Merci beaucoup, Général Dannatt. Je vais à présent passer
28 directement à l'un des aspects sur lesquels nous aimerions que vous
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1 éclairiez les Juges de la Chambre, à savoir la théorie des doctrines de
2 commandement et le processus décisionnel. Pourriez-vous expliquer aux Juges
3 de la Chambre quelle est la principale théorie ou quelles sont les
4 principales théories de ces doctrines ?
5 "Général Dannatt : Brièvement, les armées mènent leurs activités de l'une
6 des deux façons suivantes. Ces deux façons se caractérisent par un mot
7 allemand compliqué. L'un d'entre eux est l'approche Befehlstaktik pour le
8 commandement et le contrôle, et l'autre est la méthode Auftragstaktik de
9 contrôle du commandant."
10 Je vais m'arrêter là et je voudrais vous poser une question sur cette
11 partie de votre réponse. Est-ce que vous pouvez me confirmer, Monsieur, que
12 vous répéteriez exactement la même chose si l'on vous posait la même
13 question aujourd'hui et est-ce que vous pouvez me confirmer la véracité de
14 cette réponse ?
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, je pense que le témoin
16 nous a déjà expliqué quelles seraient ses réponses aujourd'hui.
17 LE TÉMOIN : [interprétation] Ce que j'ajouterais à cela aujourd'hui, si
18 vous me le permettez, c'est que le compte rendu n'est pas totalement
19 précis, parce qu'on fait référence au contrôle de commandant par opposition
20 au commandement et au contrôle. Donc je crois que la phrase est un petit
21 peu erronée, mais je suis tout à fait d'accord avec le commentaire de M. le
22 Président. J'ai parlé de la Befehlstaktik, j'ai parlé de l'Auftragstaktik,
23 et je ne vois pas pourquoi j'aurais un différent point de vue deux heures
24 plus tard.
25 M. IVETIC : [interprétation]
26 Q. Ma question est la suivante, Monsieur. Dans votre déposition auprès de
27 la CIJ, vous déclarez qu'il n'y a que deux façons pour une armée de mener
28 ses activités. Est-ce que vous confirmé qu'à part ces deux tactiques pour
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1 lesquelles vous avez utilisé un mot allemand, il n'existe rien d'autre --
2 qu'il n'y a pas d'autres doctrines de commandement et de contrôle pour les
3 personnes qui travaillent dans votre domaine d'activités ?
4 R. Bien sûr, la réponse est oui. Tout comme aujourd'hui, dans cette
5 affaire-là j'essayais d'expliquer aux Juges de la Chambre de quoi il
6 retournait. Tout n'est pas toujours blanc ou noir, mais c'est la plus
7 simple façon d'expliquer les choses. Il y a toujours du gris entre les deux
8 positions pour nuancer les points de vue. Mais lorsque l'on explique
9 quelque chose, il est bon de dire que d'un côté il y a telle doctrine, et
10 de l'autre côté, une autre doctrine. C'est la façon dont on explique une
11 théorie et une approche. Mais vous savez, le débat existe depuis très
12 longtemps. Dans l'armée, on dirait que c'est un art et pas une science.
13 L'utilisation de la force armée peut aussi dépendre fortement de la
14 technologie et de la science. Mais le commandement, c'est quelque chose
15 d'intuitif, c'est quelque chose pour lequel on a besoin de discernement, et
16 souvent on y fait référence comme étant un art opérationnel.
17 Et la Befehlstaktik et l'Auftragstaktik décrivent deux côtés, les
18 deux faces d'une même monnaie, si vous voulez. Ce n'est pas une question
19 scientifique. C'est une question plutôt artistique. Ce que je fais et ce
20 que le général Mladic pourrait faire pourrait être totalement différent,
21 mais cela se fonderait sur la doctrine qui prévaut, et c'est ce que
22 j'essaie de vous dire. Il est très important de comprendre que la doctrine
23 d'une armée, c'est la façon de penser de l'armée. Et la façon de penser de
24 l'armée influencera énormément l'instruction de ses officiers, la formation
25 des officiers et des soldats. La doctrine, c'est la pensée. La directive,
26 quant à elle, c'est plutôt le mot et cela implique qu'un document dirige
27 l'activité. La doctrine est une pensée et la directive est une activité.
28 Q. Très bien. Passons à la page suivante de la déposition à la CIJ.
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1 J'aimerais parler plus en détail de la partie qui commence au milieu de la
2 page, plus ou moins. La question, donc, est la suivante -- en fait, c'était
3 Mme Korner qui vous a posé la question suivante :
4 "Mme Korner : Nous allons maintenant nous pencher sur un détail concernant
5 la manière dont la JNA, l'armée nationale yougoslave, fonctionnait et de
6 quelle manière les entités qui en dépendaient fonctionnaient. Mais vous
7 devez croire que la JNA a suivi le modèle de Befehlstaktik. De quelle
8 manière est-ce que cela a été fait ?
9 "Général Dannatt : Je peux dire qu'à la suite d'une étude
10 approfondie, je peux le confirmer, et également grâce à un exemple
11 personnel. J'ai mentionné un peu plus tôt que j'étais l'un des commandants
12 en Bosnie en 1995. A ce moment-là, lorsque nous planifiions le transfert de
13 la FORPRONU à la FOR des Nations Unies, j'avais besoin, parmi d'autres
14 personnes, de parler au général Tadic, qui à l'époque était le commandant
15 de l'un des Corps de Krajina à Banja Luka. Je n'étais pas en mesure, dans
16 le cadre de mes fonctions normales, de me rendre à Banja Luka, mais je lui
17 ai transmis un message en lui disant que je voulais le rencontrer. Et, en
18 réalité, je suis allé à Banja Luka où l'on m'a informé qu'il n'était pas en
19 mesure de me rencontrer car il n'avait pas reçu l'autorisation du général
20 Mladic, son supérieur. C'était étonnant de voir qu'il n'était pas prêt à me
21 rencontrer, car ce que j'avais à lui dire aurait été très utile concernant
22 la façon de mener à bien les opérations futures. Mais comme il n'avait pas
23 reçu cette autorisation, il n'avait pas ou cette permission, il n'avait pas
24 l'autorisation de me rencontrer, de son propre chef, et je me suis servi de
25 cet exemple pour démontrer ce type de commandement centralisé."
26 Donc, Monsieur, j'aimerais vous poser la question suivante : la question
27 qui très spécifique vous a demandé de vous concentrer tout d'abord à la
28 JNA, l'armée populaire yougoslave, et votre réponse parle d'un incident qui
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1 s'est déroulé en 1995. Mais suis-je en droit de dire qu'en 1995, la JNA
2 n'existait plus ?
3 R. Voilà, c'est une façon de poser une série de questions très
4 intéressantes, vous êtes maintenant en train de vous concentrer sur la
5 façon dont Mme Korner a posé ses questions. Je ne me souviens pas des
6 détails de notre conversation qui s'est déroulée à ce moment-là lorsqu'elle
7 a dit que vous vous attendriez à ce que la JNA suive le modèle de la
8 Befehlstaktik, et ensuite j'ai donné cet exemple. Probablement ce que
9 j'aurais fait c'est de dire que la VRS découle de la JNA, et donc la même
10 doctrine opérationnelle, le modèle de la Befehlstaktik et le modèle qui
11 caractérise les deux. Je ne crois pas donc qu'il soit déraisonnable que je
12 me serve d'un exemple qui s'est déroulé en 1995. Maintenant, si vous voulez
13 que l'on parle de cet exemple-ci, je serai bien heureux de le faire, mais
14 je crois que je n'arrive pas à suivre exactement là où vous voulez en
15 venir, je n'arrive pas à comprendre exactement là où vous voulez en venir
16 concernant la question de Mme Korner.
17 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Pour bien comprendre le compte rendu
18 d'audience, le document que nous avons sous les yeux est un document qui
19 fait référence au général Tadic. Vous nous avez expliqué un peu plus tôt,
20 ce matin, Monsieur Dannatt, que vous aviez voulu rencontrer le général
21 Talic, avec un L; est-ce exact ?
22 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, tout à fait. C'est un commentaire qui est
23 truffé d'erreur. Je n'ai pas parlé de la FOR des Nations Unies mais de
24 l'IFOR. J'ai dit la FORPRONU, transfert de la FORPRONU à l'IFOR, par
25 exemple, et lorsque j'ai parlé du général Tadic, c'était le général Talic.
26 Donc il y a, ce compte rendu est truffé d'erreur, mais je ne l'ai pas
27 mentionné, ça n'est pas ma responsabilité à moi.
28 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie, bien sûr que non.
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1 Bien, merci beaucoup.
2 M. IVETIC : [interprétation]
3 Q. Maintenant j'aimerais vous poser la question suivante : vous avez
4 préparé cette expertise qui est très sérieuse, est-ce que vous estimez
5 qu'il s'agit d'une méthodologie appropriée que de tirer des conclusions
6 d'une expérience isolée, d'un événement isolé tel que cet incident qui
7 s'est déroulé avec le général Tadic [comme interprété], au paragraphe 32 de
8 votre déclaration ?
9 R. Oui, je crois que cela serait tout à fait inacceptable de tirer des
10 conclusions de cette manière-là. Mais vous savez la vie peut des fois être
11 très ennuyeuse. Et donc le fait de montrer, d'insérer une illustration peut
12 rendre les choses un peu plus intéressant. Comme vous le savez, par
13 exemple, cet exemple de commandement, le commandement centralisé que nous
14 avons vu dans la VRS et anciennement dans la JNA, c'est quelque chose qui
15 est très fréquent dans les autres documents que nous avons examinés. Si
16 vous avez du temps, j'en serais heureux d'en parler. Mais c'est un exemple
17 personnel qui, d'après moi, donnait un peu de couleur à ce document, ce
18 matériel factuel et théorique.
19 Q. Est-ce que vous aviez peut-être pu penser que le général Talic n'a pas
20 souhaité vous rencontrer pour des raisons personnelles et qu'il ne s'est
21 servi que d'une excuse pour ne pas vous rencontrer, le fait de dire qu'il
22 n'avait pas reçu l'autorisation ? Est-ce que c'est plausible ?
23 R. C'est tout à fait possible. Mais comme j'ai dit un peu plus tôt, les
24 deux officiers de liaison - le capitaine Popovic, il y avait un autre
25 colonel dont je ne me souviens pas de son nom - j'étais quelque peu gêné
26 lorsque je les ai entendu dire que le général Talic n'était pas en mesure
27 de me rencontrer, car il n'avait pas reçu l'autorisation de ce faire, car
28 il ne pouvait obtenir l'autorisation que d'une seule personne, et c'est le
Page 19115
1 général Mladic.
2 Mais, en réalité, je n'arrive pas à voir pourquoi il n'aurait pas
3 voulu me rencontrer, parce que j'ai dit très clairement que je voulais me
4 rendre à Banja Luka et que c'était quelque peu difficile de m'y rendre, et
5 je voulais lui donner des informations qui, probablement, auraient été
6 utiles pour ce qui est de la mise en œuvre au sens plus large des accords
7 de Dayton. Et, donc je n'arrive vraiment pas à voir pourquoi il n'aurait
8 pas voulu me rencontrer. Les généraux se rencontrent de manière fréquente,
9 régulièrement, j'ai demandé de le rencontrer, si j'avais cru qu'il n'avait
10 pas souhaité me rencontrer, je ne me serais pas dirigé jusqu'à Banja Luka.
11 Il s'agissait d'un voyage quelque peu difficile, et donc je ne me serais
12 pas dirigé en ces directions pour aller le voir.
13 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, je regarde l'heure.
14 M. IVETIC : [interprétation] Oui, nous pouvons prendre une pause.
15 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Effectivement. Monsieur Dannatt, vous
16 serez peut-être heureux de savoir que l'on dit que les avocats sont souvent
17 des artistes, et maintenant vous nous avez dit que le commandant est un
18 art. Nous allons peut-être pouvoir réfléchir à cette question au cours des
19 20 prochaines minutes. Nous allons prendre une pause, et nous reprendrons
20 nos travaux dans 20 minutes. Vous pouvez maintenant suivre M. l'huissier.
21 [Le témoin quitte la barre]
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si vous voulez consulter vos conseils,
23 Monsieur Mladic, vous allez pouvoir le faire pendant la pause. Nous allons
24 donc faire une pause, et nous reprendrons nos travaux à 13 heures 40.
25 --- L'audience est suspendue à 13 heures 20.
26 --- L'audience est reprise à 13 heures 42.
27 L'INTERPRÈTE : De la cabine française. Veuillez remplacer les évocations
28 des artistes par [inaudible] dans la partie précédente.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de poursuivre, Monsieur
2 Mladic, je vous ai demandé à plusieurs reprises ce matin de ne pas parler à
3 voix haute. Et lorsque nous étions en train de quitter la salle, vous
4 parliez encore plus fort que normalement. Alors, veuillez, je vous prie,
5 faire attention et ne nous placez pas dans la position où nous devrions
6 prendre des mesures à votre encontre.
7 La Chambre souhaite mentionner, Monsieur Groome, comme je l'ai dit un
8 peu plus tôt, l'Accusation ne va pas présenter les éléments de preuve par
9 le truchement du Témoin RM225, et c'est pour cette raison que la Chambre
10 retire l'injonction à comparaître ainsi que les parties pertinentes de la
11 demande adressée à l'Etat où le témoin réside et enjoint le Greffe
12 d'informer le témoin proposé ainsi que les autorités de l'Etat en question
13 de cette décision et d'en informer la Chambre lorsque cela sera fait.
14 M. GROOME : [interprétation] L'Accusation n'a pas d'objection quant à cette
15 façon de procéder.
16 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, effectivement. Cela met un point à
17 la lecture de cette décision par rapport à cette question. Veuillez, je
18 vous prie, faire entrer le témoin dans la salle d'audience, s'il vous
19 plaît.
20 M. GROOME : [interprétation] Je voudrais simplement mentionner à la Chambre
21 deux petits problèmes potentiels qui pourraient avoir lieu. Il y a des
22 témoins [comme interprété] polonais qui ont été appelés pour un témoin qui
23 témoignera en polonais, et c'est pour jeudi prochain. Et Me Lukic nous a
24 informé qu'il était en train de revoir son évaluation quant à
25 l'interrogatoire de M. Brown qui ira peut-être à huit heures pour la
26 semaine prochaine, donc il s'agira d'une semaine pleine. Et j'informerai à
27 la Chambre quant à la disponibilité de M. Treanor pour continuer, la
28 semaine qui suivra. Alors, nous pouvons peut-être tous réfléchir là-dessus.
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1 Nous allons peut-être prendre cinq minutes pour en discuter avant la fin de
2 cette semaine.
3 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Avant la fin de la semaine,
4 donc, je suis d'accord avec vous.
5 [Le témoin vient à la barre]
6 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, vous pouvez continuer
7 votre contre-interrogatoire.
8 M. IVETIC : [interprétation]
9 Q. Général, je vous demande de prendre votre déclaration écrite, P2629,
10 versée au dossier aux fins d'identification, page 4 en anglais et page 3 en
11 serbe, paragraphe 12, et de relire la dernière phrase du paragraphe 12 en
12 anglais. Vous dites s'agissant des réunions que vous avez eues avec les
13 commandants supérieurs des trois factions belligérantes. Avez-vous eu
14 l'occasion de rencontrer des membres de l'état-major principal de la VRS ?
15 R. Je suis en train d'essayer de me rappeler. Le général Gvero est venu à
16 Mrkonjic Grad. Je pourrais vous donner la date exacte si vous me permettiez
17 de consulter mes documents. C'est en fait la date qui correspond aux
18 accords de Dayton et il s'agit du retour de Mrkonjic Grad. Le général Gvero
19 est venu lorsque la région autour de cet endroit-là est passée du contrôle
20 croate au contrôle serbe.
21 La plupart de mes échanges n'étaient pas avec les officiers de
22 l'état-major principal mais avec le général Talic et d'autres qui étaient à
23 Banja Luka. Et par la suite, le général Simic, j'ai fait sa connaissance et
24 je l'ai bien connu, mais c'était plus tard, lorsque j'étais de retour en
25 tant que commandant adjoint de l'OTAN en 1999 -- ou, plutôt, non, en 2000
26 ou en 2001.
27 Q. Très bien. Juste pour rester avec cette réunion que vous auriez eue
28 avec le général Gvero, est-ce que c'était environ D-plus 90 --
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1 R. Oui, je crois que c'est probablement le cas. J'essaie simplement de me
2 rappeler de la séquence des événements, mais je crois que vous avez raison.
3 Il y avait une période de quatre ou cinq jours au cours de laquelle les
4 forces croates devaient quitter. Je crois qu'ils ont quitté à D-plus 45.
5 Q. Pourriez-vous expliquer ce que cela veut dire ?
6 R. Oui. D, c'est le jour où l'accord de paix de Dayton est devenu
7 opérationnel, et je crois que c'était le 20 décembre 1995, mais il aurait
8 pu s'agir du 21 également. Et par la suite, il s'agit de la mise en œuvre
9 portant sur cet accord, donc D-plus quelque chose.
10 Q. Concernant, maintenant, la réunion que vous avez eue avec le général
11 Gvero, donc vous l'avez rencontré, et plus tard vous avez rencontré le
12 général Simic, si je ne m'abuse. Est-ce que ces réunions ont servi de base
13 pour vos opinions, pour les opinions qui sont contenues dans votre rapport
14 ?
15 R. Oui. Je crois que toutes les réunions de ce type permettent d'acquérir
16 une connaissance plus poussée. Mais je vais essayer d'être bref. Je
17 voudrais rajouter quelque chose. J'ai mentionné précédemment que j'avais
18 été colonel dirigeant un cours au niveau du collège de formation de l'armée
19 britannique, et j'étais notamment responsable d'un cours sur la
20 planification des campagnes et l'enseignement de cette planification des
21 campagnes. Et en 1995, j'avais été très intéressé de voir comment les
22 choses avaient évolué sur le terrain en Bosnie. De 1992 jusqu'au début de
23 1995, c'est-à-dire, les territoires qui étaient détenus par l'une ou
24 l'autre des parties n'avaient pas vraiment beaucoup changé de main. Mais au
25 printemps et au début de l'été 1995, il y a eu une opération de grande
26 envergure dans le sud et l'ouest de la Bosnie qui a impliqué les forces
27 croates et musulmanes jusqu'à la Krajina, et Banja Luka a commencé à être
28 menacée. Mais ce qui était intéressant, c'était de voir comment une
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1 campagne complexe avait été mise sur pied. Pour être bref, j'ai donc décidé
2 que durant mon séjour dans le pays entre octobre 1995 et avril 1996, en
3 marge de ce que je faisais, j'ai décidé de faire une étude pour voir
4 comment cette campagne avait été élaborée. Et avec un de mes subalternes,
5 un officier, j'ai donc posé des questions aux commandants des trois parties
6 belligérantes pour savoir ce qui s'était passé durant l'année écoulée. J'ai
7 parlé avec le général Dudakovic, le général Glasnovic du côté de la
8 Croatie, et encore une fois le général Talic a hésité à me parler. Mais les
9 deux officiers de liaison que j'ai rencontrés à nouveau sont venus au QG de
10 Sipovo et ils ont été très francs dans la mesure où ils m'ont expliqué
11 comment ils avaient mené leurs opérations. Et ceci m'a permis, en fait, de
12 trouver l'explication du développement de ces opérations militaires.
13 Si je vous donne l'impression de prendre une tangente, je m'en
14 excuse, mais ceci montre bien comment j'ai pu acquérir une meilleure vision
15 de la manière dont la guerre était menée et également de voir comment les
16 différentes armées se comportaient, en gardant à l'esprit que ces trois
17 armées découlaient à l'origine de la JNA. Et ce dont je me souviens
18 clairement, c'est qu'il y a eu une conférence de commandants à la fin du
19 mois de décembre, je crois, en 1995. C'était la première fois que des
20 commandants haut placés des trois armées étaient réunis dans une même
21 pièce. Et après des soupçons au départ, ils se sont salués comme d'anciens
22 camarades, parce qu'ils étaient allés l'école militaire ensemble. Je vous
23 prie de m'excuser, donc, si je vous donne l'impression d'être hors sujet,
24 mais c'est simplement pour montrer que je m'étais intéressé de près à la
25 manière dont ces trois armées avaient des origines communes et j'en ai
26 tiré, donc, des conclusions. Je suis désolé si vous avez l'impression que
27 j'ai vraiment été hors sujet.
28 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En fait, si cela ne vous dérange pas,
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1 c'est pas vraiment le sujet, mais c'est la cadence de votre discours --
2 LE TÉMOIN : [interprétation] En fait, c'est mon enthousiasme qui me dicte
3 ici. Je vous prie de m'excuser.
4 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Continuez, Maître Ivetic.
5 M. IVETIC : [interprétation]
6 Q. J'aimerais revenir à un autre point que vous avez mis en exergue au
7 paragraphe 6 de votre déclaration que vous avez examinée. Il s'agit de
8 mémoires.
9 M. IVETIC : [interprétation] Je voudrais que l'on affiche le document
10 1D1450 sur le système de prétoire électronique. Et j'aimerais que l'on
11 affiche la page 7 de ce document. Et ceci correspond à la page 15 du
12 document de la CIJ.
13 Q. J'aimerais que l'on se concentre sur le milieu de la page. Vous verrez
14 que Mme Korner vous a demandé combien de mémoires vous aviez lus, et votre
15 réponse est la suivante :
16 "Général Dannatt : Effectivement. Le général Sir Michael Rose, le général
17 Sir Rupert Smith, M. Richard Holbrooke, ont tous couché sur papier leurs
18 mémoires, et je possède certainement ces livres. Et les témoignages dans
19 ces livres ne font que confirmer les faits que j'ai retrouvés dans les
20 documents."
21 J'aimerais savoir si cette déposition dans le procès devant la CIJ
22 reflète ce qui était dans les mémoires que vous mentionnez au paragraphe 6
23 de votre déclaration en l'espèce ?
24 R. Oui. Mais le temps a passé. J'ai lu ces témoignages. Je pense que nous
25 avons tous participé aux événements des Balkans dans les années 1990 et
26 que, par conséquent, tous ceux qui ont participé ont continué à
27 s'intéresser d'un point de vue professionnel. Et il y a eu un certain
28 nombre de livres, de mémoires, de témoignages qui ont été publiés. Et,
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1 effectivement, je confirme que ce qui est mentionné dans le paragraphe 6
2 est correct, c'est-à-dire que j'ai lu un nombre important de mémoires.
3 Q. Et est-ce que votre position est que ces mémoires vont dans le même
4 sens que vos conclusions sur la JNA et la VRS, tel que ceci figure dans
5 votre déclaration ?
6 R. Je pense, effectivement. On peut voir, en fait, que le ton dans ces
7 livres ne fait que mettre en exergue les faits que j'ai choisis dans les
8 documents du procès que j'ai étudiés. Les documents sont souvent très
9 pointus, mais lorsque l'on a une meilleure compréhension du contexte et de
10 la toile de fond, bien sûr, ces documents, en fait, prennent tout leur
11 sens. Donc je pense que c'est un commentaire tout à fait judicieux.
12 Q. Pourriez-vous nous rappeler si ce M. Holbrooke avait occupé à un moment
13 donné un grade militaire ou s'il avait une expérience militaire ?
14 R. Je ne me souviens pas. Je suppose que quelqu'un de sa génération avait
15 probablement - je vais ralentir - avait probablement une expérience
16 militaire qui remonte à l'époque du Vietnam, mais je ne m'en souviens pas.
17 Mais je pense que vous ne disconviendriez pas qu'il avait une connaissance
18 très intéressante de l'évolution et de la conclusion de la guerre en Bosnie
19 et qu'il a joué un rôle important qui s'est soldé par les accords de paix
20 de Dayton. Donc je pense que ses opinions sont également très
21 intéressantes.
22 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Dannatt, je vous demande de
23 vous en tenir à cette question-là. La question n'était pas de savoir s'il
24 serait intéressant de lire le livre de M. Holbrooke. La question était de
25 savoir s'il avait un grade militaire ou s'il avait une expérience
26 militaire. Les quatre premiers mots de votre réponse auraient suffi pour
27 répondre à la question.
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Très bien.
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1 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez continuer, Maître Ivetic.
2 M. IVETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
3 Q. Est-ce que vous avez eu la possibilité de lire les livres ou les
4 mémoires d'anciens officiers de la JNA afin d'étudier la doctrine de
5 commandement et la structure de commandement de la JNA et de la VRS, ainsi
6 que la Défense populaire, rôle que vous avez donc pris en charge dans cette
7 affaire ?
8 R. Pour être bref, la réponse serait négative.
9 Q. Est-ce que vous connaissez les livres rédigés par le général Branko
10 Mamula, le Dr Momcilo Lazovic ou le Dr Milenko Stezevic [phon] ?
11 R. Encore une fois, la réponse est non, comme pour la question précédente.
12 Q. D'accord. S'agissant des documents que vous a fournis le bureau du
13 Procureur pour lecture et sur lesquels vous vous êtes fondé pour dégager
14 votre opinion, j'aimerais savoir si ces documents incluent la stratégie de
15 Défense populaire généralisée et la protection de la RSFY, qui porte la
16 cote 17295 de la liste 65 ter en l'espèce ?
17 R. Je ne vois pas le document à l'écran pour l'instant, mais cela ne va
18 pas tarder. Je voudrais vous dire que pendant la pause, j'ai réfléchi à une
19 partie de notre conversation. Lorsque vous parliez de doctrine militaire,
20 et lorsque moi je vous ai dit que la doctrine consistait en la pensée d'une
21 armée, je pense qu'à ce sujet justement, le concept de la Défense populaire
22 généralisée constituerait une stratégie plutôt qu'une doctrine. C'est de
23 cette façon-là qu'on l'a formulée au début des années 1940, et c'était la
24 stratégie qui a mené la JNA à sa dissolution au début des années 1990. Ah,
25 voilà, le document est affiché. Ce document s'appelle un document
26 stratégique, et voilà pourquoi j'ai fait ce distinguo entre stratégie et
27 doctrine. Et quand on parle de questions militaires, la terminologie peut
28 varier.
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1 Q. Très bien.
2 M. IVETIC : [interprétation] Affichons le document 17293 de la liste 65
3 ter. Il s'agit d'un livre de la JNA datant de 1983 sur le commandement et
4 le contrôle.
5 Q. Et je voudrais vous demander si vous aviez accès à ce document et si
6 vous l'avez lu dans le cadre de votre déposition en l'espèce ?
7 R. Attendons qu'il s'affiche à l'écran, alors.
8 Q. Passons à la deuxième page en anglais, s'il vous plaît, c'est la partie
9 qui m'intéresse. Est-ce que vous vous souvenez avoir lu ce livre, Monsieur
10 ?
11 R. Non. Je ne pense pas, non.
12 M. IVETIC : [interprétation] Regardons le document 25695 de la liste 65 ter
13 à présent.
14 Q. Il s'agit des règles de service de 1985 des services armés. Et je vous
15 repose la même question : est-ce que vous avez lu ce document dans le cadre
16 de votre déposition en l'espèce ? Est-ce que l'on vous l'a fourni ?
17 R. Franchement, je ne m'en souviens pas. J'ai consulté plusieurs documents
18 traitant de la JNA parce qu'ils étaient pertinents pour étudier les
19 origines de l'armée des Serbes de Bosnie. Je ne me souviens pas, je ne peux
20 pas vous dire si j'ai consulté ce document ou pas. Et je suppose que vous
21 allez m'en présenter deux ou trois autres. Mais je ne m'en souviens pas. En
22 revanche, j'ai compris que la VRS tirait son origine dans la JNA et ses
23 différents règlements et documents.
24 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Groome, je vois que vous vous
25 êtes levé.
26 M. GROOME : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Peut-être que je
27 pourrais aider Me Ivetic. Il pose des questions sur des documents que le
28 général Dannatt a consultés mais qu'il ne cite pas dans son rapport.
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1 J'aimerais attirer son attention sur un courriel qui a été envoyé par le
2 bureau du Procureur en date du 5 juillet 2012 où nous avons fourni une
3 liste de tous ces documents.
4 M. IVETIC : [interprétation] Je pense que cela va répondre à quelques
5 questions que je comptais poser. Merci beaucoup, Monsieur Groome, de ces
6 informations.
7 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci aussi.
8 M. IVETIC : [interprétation]
9 Q. Est-ce que vous avez eu l'occasion de mener des recherches ou d'étudier
10 le régime d'instruction militaire qui était en place en RSFY avant 1992 et
11 qui était d'application pour les officiers de l'armée ?
12 R. Non, je n'ai pas étudié cela en particulier.
13 Q. Lors de l'interrogatoire principal, vous avez déclaré que les officiers
14 étaient envoyés pour instruction en Union soviétique. J'aimerais savoir si
15 dans le cadre de votre expertise et dans le cadre de votre recherche, vous
16 avez constaté qu'en fait les officiers yougoslaves étaient également
17 envoyés pour instruction aux Etats-Unis d'Amérique; par exemple, le général
18 Kadijevic, qui était le ministre de la Défense yougoslave en 1991 et 1992,
19 qui a suivi des cours au commandement de l'armée américaine et au collège
20 de l'état-major général alors qu'il était colonel ?
21 R. Cela ne me surprend pas, et cela est lié à ce que nous avions dit tout
22 à l'heure, à savoir que nous savons tous que l'ex-Yougoslavie avait une
23 place assez particulière dans les pays signataires du Pacte de Varsovie et
24 que l'ex-Yougoslavie était plutôt influencée par le bloc soviétique.
25 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc vous êtes en train de nous dire que
26 cela ne vous surprend pas de savoir que M. Kadijevic ait été instruit aux
27 Etats-Unis, mais vous ne le saviez pas ?
28 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, Monsieur, je n'en suis pas sûr. Mais cela
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1 ne me surprend pas.
2 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourriez-vous nous dire, alors, si les
3 officiers qui étaient envoyés pour instruction en Union soviétique étaient
4 nombreux ou s'agissait-il d'une exception, un, deux, trois ? Etaient-ils
5 envoyés par centaines ?
6 Monsieur Groome, vous voulez dire quelque chose ?
7 M. GROOME : [interprétation] J'aimerais avoir la référence des propos de ce
8 matin. Je ne retrouve pas la citation.
9 M. IVETIC : [interprétation] Je pense qu'il a parlé de Moscou plutôt que de
10 l'Union soviétique.
11 M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Non, il a dit en Russie.
12 Cela, peut-être, va vous aider à trouver le passage pertinent.
13 M. IVETIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Juge, d'avoir cet œil acéré
14 qui me manque parfois.
15 LE TÉMOIN : [interprétation] Alors, pour répondre à votre question,
16 Monsieur, je ne connais pas les chiffres exacts, mais je sais que plusieurs
17 personnes sont allées dans des académies russes pour y étudier.
18 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous pose cette question parce que la
19 question qui a été posée suggère plus ou moins que ces personnes n'étaient
20 envoyées pas uniquement en Russie mais aussi aux Etats-Unis, ou tout du
21 moins que certains y ont suivi leur instruction. J'aurais aimé avoir une
22 idée de grandeur. J'aimerais savoir s'il était coutume de les envoyer en
23 Occident, ou plutôt, à l'Est ? C'est une question qui m'est venue à
24 l'esprit. Si les parties ont des informations à ce sujet, cela pourrait
25 m'aider ainsi que mes collègues.
26 LE TÉMOIN : [interprétation] Personnellement, je dirais qu'ils étaient
27 plutôt envoyés vers l'Est que vers l'Occident. Parce que la structure de
28 commandement et de contrôle de la JNA et de la VRS se fondait sur le
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1 système de commandement et de contrôle centralisé qui est celui du Pacte de
2 Varsovie et des armées de l'Est. Si un grand nombre s'était rendu dans les
3 académies militaires des Etats-Unis, on aurait constaté alors qu'avec le
4 temps, la JNA ou la VRS allait plutôt embrasser la doctrine de commandement
5 et de contrôle de l'Occident, et pas celle des armées de l'Est et de l'ex-
6 bloc soviétique et du Pacte de Varsovie.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, veuillez continuer.
8 M. IVETIC : [interprétation] Merci.
9 Q. J'aimerais passer à un autre sujet. Je voudrais revenir à votre
10 déclaration, la pièce P2629, marquée aux fins d'identification, page 2 en
11 anglais et pages 1 et 2 pour la version serbe, paragraphe 5. En attendant
12 que le document s'affiche, j'aimerais vous donner quelques explications,
13 Monsieur. On y parle des visites de terrain que vous avez menées à
14 différents emplacements en Bosnie, et vous y étiez accompagné par
15 l'enquêteur, M. Ruez, et le représentant du bureau du Procureur, M. Andrew
16 Cayley. J'aimerais savoir si, lors de ces visites sur site, M. Ruez ou M.
17 Cayley vous ont donné des informations sur ce qu'ils pensaient s'être passé
18 là-bas ?
19 R. Pour répondre brièvement, oui.
20 Q. Vous êtes-vous fondé sur ce qu'ont avancé Ruez et Cayley comme étant
21 des faits d'autorité concernant ce qui s'est passé à ces endroits-là ?
22 R. Dans le sens général, oui; mais lorsque je me suis rendu à ces
23 endroits-là, sur la base de mes observations des bâtiments, des sites
24 d'enfouissement et de réenfouissement, il était tout à fait raisonnable de
25 conclure ce qui a pu s'y passer ou pas. Mais, effectivement, c'est une
26 information qui m'a été transmise surtout par M. Jean-René Ruez, un
27 enquêteur français, qui avait passé beaucoup de temps à élaborer tout ceci
28 et à m'informer de tout ceci en détail. Et je dois dire que mon opinion
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1 s'est, dans une grande mesure, basée sur les informations que j'ai reçues.
2 Q. Maintenant, compte tenu de l'information qui vous a été donnée par M.
3 Jean-René Ruez, est-ce que vous estimez que cette information était plutôt
4 partiale ou impartiale, cette information qui vous a permis de vous forger
5 des opinions ?
6 R. Je ne crois pas que je pourrais considérer que ces informations étaient
7 partiales; le fait qu'elles semblaient nous mener vers différentes
8 conclusions, peut-être. Mais il y avait huit [comme interprété] hommes et
9 enfants musulmans qui avaient été tués, enfouis, dans la plupart des cas
10 exhumés et réenfouis, dans un secteur qui était placé sous le contrôle de
11 la population serbe de Bosnie. Je crois donc que j'ai pu tirer mes propres
12 conclusions quant aux auteurs de manière générale. Mais ce n'est pas à moi
13 de dire qui avait une responsabilité précise. Qui étaient les auteurs, cela
14 n'est pas à moi de le dire.
15 Q. Très bien.
16 M. IVETIC : [interprétation] J'aimerais maintenant que l'on prenne 1D1448
17 dans le prétoire électronique.
18 Q. Il s'agit d'extraits de votre autobiographie, document que nous avons
19 vu un peu plus tôt. Mais pendant que l'on attend l'affichage de ce
20 document, j'aimerais savoir si l'on vous a aidé à rédiger ce livre, est-ce
21 que c'est vous qui en êtes l'auteur ?
22 R. Contrairement à la pratique et aux attentes, c'est moi-même qui ai
23 rédigé ce livre entièrement tout seul.
24 Q. Je vous remercie. J'aimerais maintenant que l'on affiche la page 16
25 dans le prétoire électronique. Ceci cadre avec la page 258 et 259 de votre
26 livre -- de la copie papier. Et l'on voit également deux colonnes. L'on
27 parle de la manière dont vous avez été retenu en tant que témoin expert, et
28 j'aimerais vous poser des questions supplémentaires là-dessus. Donc je vous
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1 demanderais de bien suivre avec moi. Ici, il est indiqué :
2 "…le chef de l'état-major principal m'a appelé au téléphone et m'a demandé
3 si je serais préparé à venir au Tribunal pénal international pour l'ex-
4 Yougoslavie à La Haye afin de déposer en qualité de témoin expert dans un
5 procès portant sur le massacre de Srebrenica en 1995. J'ai répondu que
6 j'allais bien évidemment me plier à cette demande et je suis allé à
7 plusieurs reprises en Bosnie et aux Pays-Bas afin de me préparer pour ma
8 déposition. L'accusé était le général Radovan Krstic qui, en juillet 1995,
9 était le commandant du Corps de la Drina de l'armée des Serbes de Bosnie.
10 Il était allégué que ses troupes avaient mené à bien un massacre de plus de
11 8 000 hommes et garçons musulmans autour de Srebrenica à la mi-juillet
12 1995. Il était très clair de par les documents que j'ai examinés que
13 l'intention derrière le massacre provenait du haut et que les ordres
14 directs du général Krstic avaient été reçus du général Ratko Mladic lui-
15 même. La question présentée devant la Cour était de savoir à quel point
16 Krstic était impliqué personnellement. Pour me préparer pour cette affaire,
17 je n'ai pas seulement eu des discussions très élaborées avec l'équipe du
18 bureau du Procureur de La Haye, mais je me suis également rendu sur le site
19 de l'exécution et des sites d'enterrement avec un officier de l'armée
20 française, Jean-René Ruez. Il avait passé des années à enquêter le massacre
21 et se sentait très proche de toutes les questions."
22 Alors, tout d'abord, j'aimerais savoir si ceci reflète précisément la
23 manière dont vous avez été contacté pour venir témoigner en tant que témoin
24 expert dans l'affaire Krstic ?
25 R. Oui. Comme je l'ai dit un peu plus tôt, oui, c'est exact, c'est la
26 façon dont j'ai été contacté.
27 Q. Et dans une partie que vous avez mentionnée un peu plus tôt
28 aujourd'hui, est-ce que c'est le fait d'avoir passé en revue les documents
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1 qui vous ont permis de conclure que l'intention derrière le massacre
2 découlait des ordres directs du général Mladic, est-ce que c'est une
3 conclusion à laquelle vous étiez parvenu avant d'avoir été appelé pour
4 venir témoigner en tant que témoin expert dans l'affaire Mladic ?
5 R. Je suis en train de réfléchir à la question, et j'aimerais voir quels
6 sont les propos qui ont encore été utilisés.
7 C'était une opinion personnelle, et je crois que la transcription de
8 ma déposition dans l'affaire Krstic n'inclut pas mon opinion, mais j'ai le
9 droit de présenter une opinion et je peux également ne pas l'exprimer. Je
10 l'ai exprimée dans mon livre, mais un livre est un livre. Ce n'est pas un
11 témoignage que je présente devant la Cour.
12 Q. Pourriez-vous, je vous prie, identifier pour nous où sont les ordres
13 directs que vous dites que Krstic a reçu de Mladic pour le massacre ? Sont-
14 ils rédigés quelque part ?
15 R. Non. Je ne crois pas qu'ils sont rédigés quelque part, mais je crois
16 que j'ai le droit d'exprimer mon opinion dans un ouvrage.
17 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Dannatt, vous êtes en train de
18 vous engager dans un débat, mais vous n'êtes pas en train de répondre à la
19 question. Me Ivetic peut vous poser une question et vous êtes invité à
20 répondre aux questions telles quelles vous sont posées plutôt que d'entrer
21 dans un débat avec le conseil.
22 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]
23 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, je n'ai pas voulu vous
24 arrêter exactement à 14 heures 15, car je croyais que la question que vous
25 alliez poser était une question qui vous était importante. C'est la raison
26 pour laquelle nous allons lever l'audience quelques minutes plus tard.
27 Monsieur Dannatt, j'aimerais vous inviter à rester avec nous pendant
28 encore une demi-minute.
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1 Et Maître Ivetic, dois-je conclure qu'à la lumière du fait que vous
2 avez passé plus d'une heure ou près d'une heure et demie, que vous aurez
3 besoin d'encore de temps ?
4 M. IVETIC : [interprétation] Oui, encore deux heures et demie, Monsieur le
5 Président. Quatre heures au total, en fait, donc un autre deux heures et
6 demie.
7 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Donc, vous allez pouvoir
8 conclure demain et M. Groome aura l'occasion de poser des questions
9 supplémentaires.
10 M. IVETIC : [interprétation] Oui, je crois que cela est tout à fait
11 possible. C'est mon intention.
12 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. Alors, Monsieur Dannatt,
13 j'aimerais vous demander de ne pas vous entretenir avec qui que ce soit du
14 témoignage que vous avez donné aujourd'hui ou concernant le témoignage que
15 vous êtes sur le point de donner demain. Nous aimerions vous revoir demain
16 matin dans cette même salle d'audience à 9 heures 30. Vous pouvez
17 maintenant suivre l'Huissier.
18 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.
19 [Le témoin quitte la barre]
20 M. LE JUGE ORIE : [interprétation] L'audience sera maintenant levée. Nous
21 allons reprendre nos travaux demain matin, salle d'audience numéro III, 12
22 novembre, à 9 heures 30.
23 --- L'audience est levée à 14 heures 20 et reprendra le mardi, 12 novembre
24 2013, à 9 heures 30.
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