Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le lundi 30 novembre 2015

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 32.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à toutes et à tous.

  6   Monsieur le Greffier, veuillez, s'il vous plaît, citer la cote de

  7   l'affaire.

  8   M. LE GREFFIER : [interprétation] Bonjour, Messieurs les Juges. Ceci est

  9   l'affaire IT-09-92-T, le Procureur contre Ratko Mladic.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur le Greffier.

 11   Il n'y a pas eu de question d'intendance qui aurait été annoncée. Par

 12   conséquent, Maître Stojanovic, j'imagine que vous êtes prêt à citer à la

 13   barre votre témoin suivant, M. Kovic.

 14   M. STOJANOVIC : [interprétation] Ce sera le Pr Milos Kovic, en effet.

 15   [Le témoin est introduit dans le prétoire]

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour, Monsieur Kovic.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Avant de témoigner, en vertu du

 19   Règlement de procédure et de preuve, vous devez prononcer une déclaration

 20   solennelle que vous direz la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 21   Le texte de cette déclaration vient de vous être remis. Veuillez, s'il vous

 22   plaît, prononcer la déclaration solennelle.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la

 24   vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

 25   LE TÉMOIN : MILOS KOVIC [Assermenté]

 26   [Le témoin répond par l'interprète]

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, et veuillez vous asseoir,

 28   Monsieur Kovic.


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  1   Monsieur Kovic, la première personne à vous interroger sera Me Stojanovic,

  2   qui vient de se lever. Me Stojanovic est un conseil de la Défense de M.

  3   Mladic.

  4   Vous avez la parole, Maître Stojanovic.

  5   Interrogatoire principal par M. Stojanovic :

  6   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur le Professeur.

  7   R.  Bonjour.

  8   Q.  Nous nous sommes déjà mis d'accord pour ralentir notre débit pour

  9   parler lentement.

 10   Alors pour commencer, veuillez, s'il vous plaît, nous dire quel est votre

 11   nom.

 12   R.  Je m'appelle Milos Kovic.

 13   Q.  Monsieur le Professeur, veuillez nous présenter brièvement votre

 14   parcours professionnel.

 15   R.  Je suis maître de conférence à l'Université de Belgrade, la faculté de

 16   philosophie. La matière que j'enseigne, c'est l'histoire générale à

 17   l'époque moderne. J'ai reçu un master et mon doctorat à l'Université de

 18   Belgrade, et j'ai fait plusieurs séjours d'études à l'étranger. J'ai

 19   assisté à toute une série de conférences. J'ai publié plusieurs

 20   monographies, des dizaines d'articles et d'autres textes académiques.

 21   Q.  Est-ce la première fois que vous témoignez en votre qualité d'expert

 22   devant un tribunal international ?

 23   R.  Oui, en cette qualité, je témoigne pour la première fois.

 24   Q.  Merci. J'attends tout simplement que l'interprétation soit finie. Ne

 25   m'en tenez pas rigueur, s'il vous plaît.

 26   R.  Non, non. Oui, je le vois.

 27   M. STOJANOVIC : [interprétation] Alors, très bien. J'aimerais maintenant

 28   que l'on présente dans le système du prétoire électronique le document qui


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  1   porte la cote sur la liste 65 ter 1D05903.

  2   Q.  Monsieur le Professeur, vous verrez afficher à l'écran un document dans

  3   quelques instants. Il s'agit de votre curriculum vitae. Je n'ai qu'une

  4   brève question à vous poser : avez-vous des modifications ou des

  5   corrections à apporter à ce curriculum vitae ?

  6   R.  Eh bien, depuis le temps où ce curriculum vitae a été rédigé, j'ai

  7   publié d'autres articles et livres. J'ai publié un livre sur Gavrilo

  8   Princip et sur son assassinat de Franz Ferdinand donc, et j'ai aussi publié

  9   un autre article qui concerne la position affichée par les grandes

 10   puissances à l'époque de la Grande Crise orientale. Donc voilà, ce sont

 11   quelques publications qui ont eu lieu entre-temps et que j'aimerais

 12   signaler aux fins de cette procédure.

 13   Q.  Merci.

 14   M. STOJANOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, je souhaite demander

 15   le versement au dossier de ce curriculum vitae.

 16   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Un instant, s'il vous plaît. Monsieur

 17   Kovic, vous dites que vous avez fait des séjours d'études à l'étranger. Où

 18   cela ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, j'ai eu un stage de perfectionnement

 20   à l'Université d'Oxford. C'était dans le cadre de la rédaction de mon

 21   doctorat. J'y ai séjourné entre 2004, 2005, et j'étais un étudiant en

 22   visite, alors j'ai fait un séjour d'études.

 23   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.

 25   M. LE GREFFIER : [aucune interprétation]

 26   L'INTERPRÈTE : Inaudible.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le document est admis au dossier.

 28   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Veuillez, Monsieur le Greffier, s'il


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  1   vous plaît, répéter la cote.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] On vient de m'apprendre que la version

  3   B/C/S du document manque.

  4   M. STOJANOVIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Le document

  5   porte la cote 1D05903 sur la liste 65 ter.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais est-ce que c'est un document

  7   différent par rapport à celui que vous avez cité ?

  8   [La Chambre de première instance se concerte]

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais en fait, c'est toujours la même

 10   cote, celle que vous avez citée tout à l'heure. Cela veut-il dire que la

 11   version en B/C/S manque, qu'elle n'a pas du tout été téléchargée dans le

 12   prétoire électronique ?

 13   M. STOJANOVIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président, il n'y a pas

 14   de version en B/C/S.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Eh bien, compte tenu de la nature de ce

 16   document et de son incidence sur la Défense, je pense que pour nous, cela

 17   est acceptable. Mais tout de même --

 18   Monsieur Traldi.

 19   M. TRALDI : [interprétation] Eh bien, je tiens tout simplement que la

 20   Défense confirme que le témoin comprend la langue anglaise, parce que,

 21   autrement, il n'est pas clair s'il a compris le document qui lui a été

 22   présenté il y a quelques instants.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. On va lui poser la question même

 24   si, compte tenu du fait qu'il a fait ses études à Oxford, normalement, il

 25   devrait maîtriser l'anglais.

 26   Monsieur Kovic, vous lisez et vous parlez anglais, n'est-ce pas ?

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, bien sûr. Toujours est-il que je préfère

 28   à déposer dans ma propre langue, en serbe, et je préfère que l'on me pose


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  1   des questions dans cette langue dans la mesure du possible.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cela ne pose pas de problème. Le seul

  3   problème, c'est que nous avons votre CV en anglais seulement. L'avez-vous

  4   revu ? Avez-vous vérifié son exactitude ?

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Eh bien, je pense que nous avons déjà

  7   annoncé que le document a été admis au dossier.

  8   Veuillez continuer.

  9   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Oui, le document a été admis au

 10   dossier, mais la cote ne figure pas dans le compte rendu d'audience puisque

 11   les voix se chevauchaient à ce moment-là, les voix de différents orateurs.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Monsieur le Greffier, quelle sera

 13   la cote du document ?

 14   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D1367, Messieurs les

 15   Juges.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La pièce D1367 est admise au dossier.

 17   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Et j'invite Me Stojanovic et le

 18   témoin de bien ménager une pause entre les questions et les réponses.

 19   Autrement, il est impossible de suivre.

 20   M. STOJANOVIC : [interprétation] Nous le ferons, Monsieur le Juge.

 21   Q.  Monsieur le Professeur, dites-nous, s'il vous plaît, quelle a été la

 22   tâche concrète qui vous a été confiée par la Défense du général Mladic ?

 23   R.  Eh bien, on m'a confié la tâche d'étudier quatre documents, ou plutôt,

 24   des rapports rédigés par deux experts, Robert Donia et Patrick Treanor. Les

 25   deux rapports rédigés par Robert Donia concernaient les questions relatives

 26   au contexte, à la stratégie et au siège de Sarajevo de 1991 à 1995, y

 27   compris des extraits pertinents tirés des débats menés à l'assemblée

 28   nationale de la Republika Srpska de 1992 à 1995. Comme je l'ai déjà


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  1   indiqué, il s'agit de deux rapports. Ou plutôt, il y a deux rapports qui

  2   ont été rédigés par Patrick Treanor sur les dirigeants des Serbes de Bosnie

  3   de 1990 à 1992 -- ou non, plutôt, excusez-moi, je vous demande pardon, il

  4   s'agit de dirigeants des Serbes de Bosnie de 1993 à 1995.

  5   Alors, ma tâche consistait à fournir mon évaluation sur la fiabilité

  6   factuelle et académique de ces documents. Autrement dit, j'étais censé

  7   procéder à une analyse historique, une analyse qui peut être faite par un

  8   historien ou une autre personne qui a fait ses études dans le domaine des

  9   sciences humaines. Il s'agissait, en fait, de passer en revue ces quatre

 10   documents et rédiger un document là-dessus.

 11   Q.  Merci.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Témoin, tout ce que vous

 13   avez dit figure déjà dans votre rapport. Il est superflu de réélaborer.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Très bien.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stojanovic, veuillez continuer.

 16   M. STOJANOVIC : [interprétation]

 17   Q.  Monsieur le Professeur, avez-vous rédigé plusieurs rapports dans le

 18   cadre de la mission qui vous a été confiée ?

 19   R.  Eh bien, en fait, j'ai présenté deux rapports aux Juges de la Chambre.

 20   Q.  Merci. Alors, pour commencer, j'aimerais que nous étudiions brièvement

 21   votre rapport, le rapport qui est intitulé : Les dirigeants bosno-serbes de

 22   1990 à 1992, et les dirigeants bosno-serbes de 1993 à 1995. Donc, c'est une

 23   analyse que vous avez rédigée et qui porte sur les rapports de l'expert, du

 24   Pr Patrick Treanor et de son équipe.

 25   M. STOJANOVIC : [interprétation] Alors, veuillez, s'il vous plaît, afficher

 26   le document 1D05904 dans le système du prétoire électronique. C'est un

 27   document de la liste 65 ter.

 28   Q.  Monsieur le Professeur, ceci représente-t-il la page de garde de l'un


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  1   des deux rapports que vous avez rédigés ?

  2   R.  Oui.

  3   Q.  Alors, j'aimerais passer en revue brièvement quelques points principaux

  4   de votre rapport.

  5   M. STOJANOVIC : [interprétation] Et c'est pourquoi j'aimerais que l'on

  6   affiche la page 3 de la version B/C/S, correspondant à la page 3 dans la

  7   version anglaise, le deuxième paragraphe à compter par le bas.

  8   Q.  Monsieur le Professeur, ici, vous étudiez la signification du terme

  9   "Bosno-Serbes", les Serbes de Bosnie, et vous expliquez pour quelle raison

 10   cette appellation ou ce terme vous semble incorrect du point de vue

 11   professionnel et historique.

 12   Sans répéter tout ce qui figure déjà dans votre rapport, j'aimerais

 13   que vous présentiez les raisons-clés pour lesquelles vous pensez que ce

 14   terme ne devrait pas être utilisé dans les rapports d'expert que vous avez

 15   analysés.

 16   R.  Eh bien, ce terme manque de précision. Et il est même inexact. Le terme

 17   manque de précision, puisque tous les Serbes qui ont fait partie des

 18   dirigeants de la Republika Srpska n'ont pas nécessairement été originaires

 19   de Bosnie. Certains étaient originaires d'Herzégovine. C'est comme si à une

 20   personne provenant d'Utrecht, vous lui dites qu'elle provient de La Haye.

 21   Je ne sais pas qu'elle serait la réaction d'une telle personne, mais une

 22   personne venant d'Herzégovine n'est pas contente quand on lui dit qu'elle

 23   provient de Bosnie. Donc, c'est imprécis.

 24   Et c'est aussi controversé sur le plan politique, parce que désigner

 25   une personne habitant en Republika Srpska comme étant un ou une Serbe de

 26   Bosnie, eh bien, cette personne risque de s'en fâcher. Ces personnes sont

 27   des Serbes de Republika Srpska. Donc, pour ma part, je me serais attendu à

 28   un degré supérieur de prudence sur le plan académique et méthodologique, et


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  1   aussi un peu plus d'équité, puisque l'auteur de ces rapports était censé

  2   être quelqu'un de sérieux. Par ailleurs, c'est aussi une question

  3   politique. C'était l'une des raisons pour laquelle la guerre a été menée.

  4   Les Serbes habitant en Bosnie-Herzégovine ont refusé de se faire appeler

  5   les Serbes de Bosnie.

  6   C'était même une question politique épineuse à l'époque de la

  7   Yougoslavie socialiste; est-ce que la littérature publiée à Sarajevo devait

  8   être appelée la littérature de Bosnie-Herzégovine ou la littérature

  9   provenant de Bosnie-Herzégovine ? L'un des plus grands écrivains musulmans

 10   de Bosnie-Herzégovine a refusé de se voir qualifié d'écrivain de Bosnie-

 11   Herzégovine. Si vous comprenez ce que je veux dire. Cet écrivain musulman

 12   n'était pas du tout satisfait de se faire appeler de la sorte et la même

 13   chose s'appliquait pour un grand nombre de Serbes. Ils avaient l'impression

 14   que c'était une tentative de les assimiler à une entité plus importante,

 15   une entité politique de Bosnie, ou que c'était une tentative de les

 16   assimiler au sein d'une nation bosniaque.

 17   Q.  Merci. Et donc à la page 7 de la version B/C/S et à la page 6 de la

 18   version anglaise, au troisième paragraphe, vous critiquez le rapport rédigé

 19   par M. Treanor, et vous dites, entre autres, que ce type de recherche

 20   requiert d'étudier les sources qui présentent des points de vue opposés.

 21   Chaque sujet doit être examiné de points de vue différents pour arriver à

 22   des conclusions nuancées, et cela s'applique surtout lorsque le sujet

 23   concerne la guerre et des crises internationales. Et c'est la raison pour

 24   laquelle vous dites qu'il s'agit là d'un rapport partial.

 25   Ma question pour vous est la suivante : l'approche adoptée par M. Treanor

 26   peut-elle être qualifiée d'approche scientifique, et est-ce que des

 27   conclusions peuvent être tirées sur la base de l'approche méthodologique

 28   adoptée par lui ?


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  1   R.  Eh bien, comme je l'ai déjà indiqué, je ne pense pas que cela devrait

  2   être une approche adoptée par un historien. Tout simplement, lorsqu'il

  3   s'agit d'une guerre, et notamment d'une guerre civile, vous ne pouvez pas

  4   étudier ce phénomène si vous ne l'envisagez pas de points de vue

  5   différents. Si le Pr Treanor a, par exemple, étudié les conversations

  6   interceptées entre Radovan Karadzic et ses associés, eh bien, c'est quelque

  7   chose qui présente beaucoup d'intérêt, et c'est une source qui est

  8   pertinente, mais le lecteur se demande pour quelle raison il n'a pas étudié

  9   aussi les conversations menées entre Alija Izetbegovic et Ejub Ganic, par

 10   exemple, ou les conversations menées avec l'un des Moudjahiddines qui

 11   aujourd'hui se trouve à Guantanamo Bay. On peut s'imaginer le type de

 12   conversations qui ont pu être menées.

 13   Et c'est un principe de base que l'on enseigne dès la première année de

 14   l'université, qu'il faut étudier toute une série de sources mutuellement

 15   opposées et différentes. Donc, s'occuper des Serbes de Bosnie, cela était

 16   très bien, mais on ne peut pas juger et présenter des évaluations

 17   politiques sans étudier des sources différentes et avec beaucoup

 18   d'attention et beaucoup de prudence.

 19   Q.  Merci. J'aimerais que nous nous penchions maintenant sur la page 9 de

 20   votre rapport, c'est la page 9 dans la version en B/C/S' et dans la version

 21   anglaise c'est la page 7, la dernière phrase du paragraphe 4, où vous

 22   dites, entre autres -- et là, encore une fois, vous abordez le problème de

 23   la partialité manifestée dans le rapport de M. Treanor :

 24   "L'auteur envisage la division serbe par rapport à la Bosnie-Herzégovine

 25   comme quelque chose de complètement séparé par rapport à ce qui se passe au

 26   niveau de la Yougoslavie. Comme nous le verrons dans la suite du texte, il

 27   n'accorde même pas une importance particulière au fait que les Musulmans de

 28   Bosnie et les Croates ont décidé de procéder à une sécession par rapport à


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  1   la Yougoslavie."

  2   Alors, Monsieur le Professeur, dites-nous brièvement pourquoi croyez-vous

  3   qu'une telle conclusion demande d'étudier un contexte plus large que tout

  4   simplement les événements qui se passent en Bosnie-Herzégovine ?

  5   R.  Eh bien, il y a trois objections méthodologiques à soulever.

  6   Pour commencer, les sources ont été utilisées d'une façon

  7   unilatérale. Deuxièmement, l'auteur est biaisé, cela est manifeste sur la

  8   base des termes, du langage dont il se sert, de la manière dont il analyse

  9   le discours, vous le verrez dans la suite de mon analyse. Et troisièmement,

 10   il sort les faits et ne les étudie pas dans leur contexte historique.

 11   L'auteur, Patrick Treanor, dans ses deux rapports, par exemple,

 12   laisse de côté la sécession des Musulmans et des Croates par rapport à la

 13   Yougoslavie ou par rapport à la Bosnie-Herzégovine. Or, cela pose problème

 14   puisque vous ne pouvez pas comprendre les raisons pour lesquelles les

 15   Serbes ont décidé de se séparer de la Bosnie-Herzégovine, si vous ne

 16   comprenez pas que les Musulmans et les Croates avaient décidé de se séparer

 17   de Bosnie-Herzégovine ou que les Croates avaient décidé de se séparer de

 18   Yougoslavie. Donc, c'est un problème fort complexe, mais je ne peux pas

 19   expliquer tout cela en quelques mots seulement.

 20   Q.  Merci, Monsieur le Professeur. D'ailleurs, nous avons relativement peu

 21   de temps à notre disposition.

 22   M. STOJANOVIC : [interprétation] Alors, continuons à étudier la même page

 23   dans la version en B/C/S, et dans la version anglaise c'est la page 8, le

 24   premier paragraphe.

 25   Q.  Ici, Monsieur le Professeur, vous dites que les gestes-clé des Serbes

 26   dans la période qui va de 1990 à 1995, et notamment en 1992 ou de 1990 à

 27   1992, que tous les gestes, toutes les décisions prises par les Serbes

 28   étaient en fait une réaction forcée aux décisions prises par les Musulmans


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  1   et les Croates. Pour quelle raison le croyez-vous ?

  2   R.  Eh bien, dans toutes les guerres sécessionnistes, la partie qui décide

  3   de procéder à la séparation dirige tout ce qui se passe. Souvenez-vous de

  4   la Belgique. Et cela arrive pratiquement toujours dans l'histoire. Et ici,

  5   les premières mesures ont été prises par les Musulmans et les Croates qui

  6   souhaitaient obtenir l'indépendance ou, comme le disait Alija Izetbegovic,

  7   ils souhaitaient obtenir la souveraineté, et ils étaient même prêts à payer

  8   le prix de la paix; alors que les Serbes souhaitaient tout simplement de

  9   préserver le statu quo et de rester au sein de la Yougoslavie. Donc, toutes

 10   les manœuvres, toutes les mesures prises par les Serbes étaient des

 11   mesures, des réactions forcées. Bien sûr, au cours de la guerre, l'une ou

 12   l'autre partie procédait à l'offensive à un moment ou à un autre, mais

 13   lorsqu'on envisage la guerre de Bosnie-Herzégovine comme une guerre

 14   sécessionniste, alors, en fait, les Serbes essayaient de répondre aux

 15   mesures prises par les sécessionnistes.

 16   Q.  J'aimerais savoir quel est le point de vue de M. Treanor par rapport à

 17   cette hypothèse que vous présentez ici ?

 18   R.  Eh bien, le problème c'est que l'auteur laisse de côté le contexte et

 19   il présente toutes les actions entreprises par les Serbes sous-vide, sous

 20   le sous-vide, et nous ne savons pas ce qui se passe autour d'eux. Chaque

 21   décision politique est une réaction à quelque chose. Mais si vous laissez

 22   de côté le contexte, comme M. Treanor l'a fait dans son rapport, eh bien,

 23   vous pourriez dire à ce moment-là que la France a lancé une attaque contre

 24   l'Allemagne en 1914. Or, on sait que l'Allemagne avait entamé depuis

 25   longtemps des préparatifs pour la guerre, et vous savez pertinemment que la

 26   Grande-Bretagne suivait de près ce qui se passait dans l'Allemagne de

 27   Hitler à la veille de la Deuxième Guerre mondiale.

 28   Q.  Merci, Monsieur le Professeur. Alors, nous nous occupons toujours de ce


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  1   même sujet, nous allons nous pencher sur la page 13 de votre rapport en

  2   B/C/S, page 10, le dernier paragraphe dans la VRS.

  3   Et, entre autres, vous dites, toujours sur le même sujet :

  4   "L'idée était que les Slovènes, les Croates et les Musulmans démantèlent la

  5   Yougoslavie, mais une Bosnie-Herzégovine unitaire devrait être défendue à

  6   tout prix."

  7   Est-ce qu'il y a un raisonnement à suivre derrière cette conclusion ?

  8   R.  Bien sûr. Je pense que cela est évident à étudier toute mon analyse. Il

  9   y a un problème de suite dans les raisonnements de l'auteur. Chacun

 10   souhaite défendre son pays, cela est tout à fait normal. Mais d'un côté, on

 11   a donné son aval au démantèlement de la Yougoslavie --

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Témoin, on vous demande de

 13   reprendre votre réponse dès le départ, et de ralentir votre débit. Donc, on

 14   vous a demandé si vous pouviez présenter le raisonnement derrière la

 15   description que vous avez faite dans votre rapport, et veuillez résumer.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Il est clair que toutes les tendances

 17   sécessionnistes ou séparatistes, qu'il s'agisse des Serbes au sein de

 18   Bosnie-Herzégovine ou des Croates et de Musulmans au niveau de la

 19   Yougoslavie, que toutes ces approches séparatistes sont mutuellement liées

 20   et l'auteur n'a pas fait preuve de suite logique dans sa façon à réfléchir.

 21   Si vous vous engagez en faveur d'une société multiculturelle, ce qui est un

 22   point de vue raisonnable, comment pouvez-vous soutenir en même temps le

 23   démantèlement séparatiste de la Yougoslavie, qui était un Etat fédératif,

 24   et en même temps vous avez insisté à préserver à tout prix une Bosnie-

 25   Herzégovine multiethnique et multiculturelle. Alors ça n'a aucune logique.

 26   Et dans le rapport de Robert Donia, il s'engageait même en faveur d'une

 27   Croatie unitaire, puisqu'on met en doute, on remet en question le droit

 28   d'exister pour la Krajina serbe. Donc, on insiste sur le démantèlement de


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  1   la Yougoslavie, mais pour la préservation à tout prix d'une Bosnie-

  2   Herzégovine unitaire et multiethnique. Ça n'a pas de sens, à mon avis.

  3   M. STOJANOVIC : [interprétation]

  4   Q.  Donc, mis à part le fait que ce que vous venez de décrire n'est

  5   effectivement pas logique, est-ce que cela montre --

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Stojanovic, ce n'est pas à vous

  7   de décider si le témoin a raison ou non lorsqu'il dit que quelque chose

  8   manque de logique.

  9   Veuillez continuer, s'il vous plaît.

 10   M. STOJANOVIC : [interprétation] Je souhaitais simplement résumer,

 11   Messieurs les Juges.

 12   Q.  Ce que vous venez de nous dire, est-ce qu'on peut dire que sur un plan

 13   scientifique on ne peut pas justifier les conclusions de M. Treanor ?

 14   R.  Alors, lorsqu'on fait des recherches scientifiques, il faut être

 15   cohérent, donc dans une certaine mesure, c'est incohérent. Je souhaite dire

 16   que le Pr John Fine, qui est ami et un mentor du Pr Donia, John Fine, qui a

 17   publié un ouvrage avec Donia sur la Bosnie-Herzégovine, insiste sur le

 18   caractère illogique que je viens de mettre en exergue. Parce que M. Fine

 19   dit si on est en faveur d'une préservation de la Bosnie-Herzégovine, dans

 20   ce cas-là il faut également soutenir une préservation de la Yougoslavie. Le

 21   principe d'un Etat multiculturel et multinational était en jeu. La

 22   Yougoslavie est l'ensemble du monde -- et même l'Europe.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez épeler le nom de John Fine,

 24   s'il vous plaît.

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. F-i-n-e, c'est son nom de famille. John

 26   Fine. F-i-n-e. C'est, comme Milorad Ekmecic était avec le Pr Donia à

 27   Sarajevo. C'était la même chose, c'est un de ses collègues et mentor de

 28   Robert Donia. Et John Fine a travaillé avec Donia à la rédaction d'un


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  1   ouvrage qu'ils ont publié ensemble.

  2   M. STOJANOVIC : [interprétation]

  3   Q.  Monsieur le Professeur, je souhaite que nous regardions la page 14

  4   maintenant, s'il vous plaît, en B/C/S; et en anglais, ce sera la page 11,

  5   paragraphe 3. Alors, vous dites, entre autres :

  6   "Comme le dit Robert Hayden, le critère qu'a repris la Commission Badinter

  7   lorsqu'elle l'appliquait à la Yougoslavie, lorsqu'elle a conclu que la

  8   Yougoslavie était en train de se désintégrer, est un principe qui

  9   logiquement aurait pu également être appliqué à la Bosnie-Herzégovine. Ces

 10   critères représentaient simplement un encouragement à tout mouvement

 11   séparatiste qui conduirait à une déclaration d'indépendance et le retrait

 12   des organes centraux du gouvernement."

 13   Alors voici ma première question : veuillez nous dire en quelques phrases,

 14   s'il vous plaît, et plus en détail qui est Robert Hayden ?

 15   Et ma deuxième question : dans le cas où, d'après la Commission Badinter,

 16   la RSFY était en train de se désintégrer, la Bosnie-Herzégovine aurait-elle

 17   pu, au nom du même critère, être traitée comme un pays analogue, c'est-à-

 18   dire en pleine désintégration, enfin d'après vous qui êtes chercheur ?

 19   R.  Alors, Robert Hayden est un professeur à l'Université de Pittsburgh et

 20   il enseigne le droit, les relations internationales et l'anthropologie,

 21   donc à l'Université de Pittsburgh. Ses travaux de recherche sur la

 22   Yougoslavie et sur l'Inde sont fort connus. Et j'ai avancé les résultats

 23   que lui propose, autrement dit, le critère permettant d'établir qu'un Etat

 24   est en décomposition, c'est-à-dire que l'Etat n'est plus en mesure de

 25   contrôler l'ensemble de son territoire et que toutes ses régions ne sont

 26   pas représentées dans des institutions conjointes, ce principe-là est un

 27   principe qui aurait pu être appliqué à la Yougoslavie à l'époque de sa

 28   dissolution mais aurait pu être appliqué à la Bosnie-Herzégovine également


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  1   en 1991 et 1992. En tout cas, ce sont ses conclusions et je crois que ses

  2   conclusions sont assez convaincantes.

  3   Q.  M. Treanor a-t-il abordé cette question-là dans son rapport ?

  4   R.  Non.

  5   Q.  Veuillez nous dire, Monsieur le Professeur, puisque nous sommes

  6   toujours sur la même page en B/C/S, et nous allons passer, en réalité, à la

  7   dernière phrase qui se trouve sur cette page dans la version anglaise et

  8   ensuite nous allons passer aux pages suivantes.

  9   Donc à la page 12, la première phrase :

 10   "D'après Steven Burg et Paul Shoup, la reconnaissance de la Bosnie-

 11   Herzégovine s'est faite trop tôt en raison des pressions exercées par les

 12   Etats-Unis d'Amérique. D'après eux, l'indépendance aurait dû être accordée

 13   à condition qu'il y ait accord entre les trois parties au sujet de l'ordre

 14   constitutionnel."

 15   Tout d'abord, veuillez nous dire qui sont ces deux auteurs, et ensuite

 16   veuillez nous donner votre avis sur cette reconnaissance prématurée de la

 17   Bosnie-Herzégovine ainsi que la manière dont aborde cette question M.

 18   Treanor.

 19   R.  Alors au vu des notes en bas de page, Robert Donia reconnaît Steven

 20   Burg et Paul Shoup comme étant les chercheurs les plus expérimentés en la

 21   matière. Ce sont des gens qui n'ont pas commencé à explorer ce domaine-là

 22   récemment. Le Pr Paul Shoup est un professeur émérite à l'Université de

 23   Virginie. Il a publié de nombreux ouvrages qui n'ont rien à voir avec ces

 24   questions-ci mais qui portent sur l'Europe de l'est. Et Steven Burg

 25   enseigne dans une université plus petite, près de Boston, et le nom va me

 26   revenir.

 27   J'ai tendance à être d'accord avec leurs conclusions. Et plutôt que

 28   d'organiser des négociations entre les trois parties afin de parvenir à un


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  1   quelconque accord, la reconnaissance de l'indépendance en lieu et place de

  2   cela a été déclarée. Et c'est également l'avis de Lord Carrington et ces

  3   deux auteurs-là ne sont pas les deux personnes à dire la même chose. Ces

  4   personnes disent que dans le cas de la Croatie, comme dans le cas de la

  5   Bosnie-Herzégovine, les parties en présence auraient dû être contraintes à

  6   négocier en premier lieu. Mais au lieu de cela, la Bosnie et la Croatie ont

  7   obtenu la reconnaissance de leur indépendance trop tôt. Les grandes

  8   puissances commettent souvent des erreurs très graves au niveau de leurs

  9   politiques internationales et ce sont les citoyens des pays en question qui

 10   payent le prix de ces erreurs, et il y a des pays qui font des erreurs et

 11   dont les citoyens subissent les conséquences. A mon avis. Les participants

 12   à ces événements sont énumérés à la page suivante.

 13   Q.  Merci, Monsieur le Professeur.

 14   M. STOJANOVIC : [interprétation] Page 16 en B/C/S, s'il vous plaît, et page

 15   13, au paragraphe 1, de la version anglaise.

 16   Q.  Monsieur le Professeur, étant donné que vous analysiez toutes les

 17   thèses de M. Treanor, vous présentez une théorie intéressante, entre

 18   autres, vous dites qu'Alija Izetbegovic a également rejeté ce qui été

 19   appelé l'initiative de Belgrade. C'était un accord qui avait été conclu

 20   entre Radovan Karadzic et Slobodan Milosevic en juillet 1991. Et Adil

 21   Zulfikarpasic était l'une des autres parties en présence, un des fondateurs

 22   du SDA, et ses collaborateurs de l'association musulmane bosnienne.

 23   Donc, j'ai une question à vous poser : pensez-vous qu'un analyste objectif,

 24   un historien, doit parler de l'échec de cette initiative dans son rapport

 25   et des conséquences qui s'en sont suivies en Bosnie-Herzégovine ?

 26   R.  Oui. L'initiative de Belgrade, qui datait du mois de juillet 1991,

 27   n'est pas citée dans le rapport du Pr Treanor et n'est pas mentionnée non

 28   plus dans le rapport du Pr Donia. Donc, il s'agit encore d'une objection,


Page 41956

  1   car il s'agit dans ce cas d'omettre des faits, question que nous n'avons

  2   pas encore abordée.

  3   Donc, un des fondateurs du SDA, Adil Zulfikarpasic, et leurs collaborateurs

  4   -- et ses collaborateurs, en juillet 1991, ont conclu un accord

  5   premièrement avec les Serbes de la Republika Srpska, ensuite avec la

  6   Bosnie-Herzégovine, et ensuite avec Slobodan Milosevic. Ceci portait sur la

  7   préservation de la Yougoslavie. La Yougoslavie aurait été organisée dans ce

  8   cas comme un Etat fédéral et la Bosnie-Herzégovine aurait été organisée

  9   sous la forme d'une unité fédérale unitaire. Les Serbes de Bosnie-

 10   Herzégovine étaient disposés à abandonner tout ce qu'ils avaient réussi à

 11   obtenir jusque-là. Adil Zulfikarpasic a écrit beaucoup de choses sur la

 12   question et il a montré qu'Alija Izetbegovic, jusqu'au dernier moment, a

 13   soutenu cette initiative et ensuite, brusquement, il a abandonné l'idée et

 14   a tourné le dos à Adil Zulfikarpasic. Pourquoi ? Parce que ceci montre que

 15   les Serbes en Bosnie-Herzégovine étaient disposés à vivre dans un Etat

 16   yougoslave multiethnique et conjoint.

 17   Et tout ce qui s'est passé par la suite était des actions faites sous la

 18   contrainte en raison du fait que les Musulmans de Bosnie et les Croates

 19   avaient fait sécession. En même temps, cela montre que les dirigeants

 20   musulmans n'étaient pas unis. Et Adil Zulfikarpasic s'est rendu en Suisse

 21   et représentait une aile plus libérale, et pendant longtemps a vécu en

 22   Occident. Et Adil Zulfikarpasic est un islamiste.

 23   L'INTERPRÈTE : Note de l'interprète : Les noms sont inaudibles.

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] C'est particulièrement important, puisque une

 25   de ces personnes est nationaliste et islamiste et l'autre, non. Donc, c'est

 26   ce qui s'est passé entre les Bosno-Musulmans. En raison du point de vue de

 27   ce président d'Etat, qu'il a été proposé à Alija Izetbegovic --

 28   M. LE JUGE FLUEGGE : [aucune interprétation]


Page 41957

  1   LE TÉMOIN : [interprétation] Donc Alija Izetbegovic a reçu la proposition

  2   de devenir président de cet Etat et il a refusé.

  3   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Je demande une précision, s'il vous

  4   plaît.

  5   Monsieur Kovic, à la page 60 [comme interprété], ligne 8, vous avez dit que

  6   la Yougoslavie aurait été organisée sous la forme d'un Etat fédéral, et la

  7   Bosnie-Herzégovine aurait été organisée sous la forme d'une unité fédérale.

  8   Je ne sais pas très bien ce qu'est une unité fédérale. C'est comme ça

  9   que vous l'avez exprimé. Veuillez nous fournir une explication ou peut-être

 10   que vous n'avez pas été cité correctement.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. C'est ce que j'ai dit. J'ai dit que la

 12   Bosnie-Herzégovine devait rester au sein de la Fédération yougoslave,

 13   c'est-à-dire la Yougoslavie aurait été dans ce cas un Etat fédéral qui

 14   comprendrait la Serbie, la Bosnie-Herzégovine, le Monténégro et serait un

 15   Etat fédéral. Mais la Bosnie-Herzégovine, dans ce cas, ne serait pas un

 16   Etat fédéral. La Bosnie-Herzégovine serait une des unités faisant partie de

 17   la Fédération et ce serait sur la base d'un système centralisé. Il n'y

 18   aurait pas d'entité distincte en Bosnie. C'est ce que souhaitait Adil

 19   Zulfikarpasic. Il a dit que c'était la limite au-delà de laquelle il

 20   n'était pas prêt à négocier.

 21   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'ai une question à vous poser.

 23   En Herzégovine, est-ce que la population serbe est majoritaire ? Ou est-ce

 24   que des Musulmans et des Croates y vivent également ?

 25   LE TÉMOIN : [interprétation] Bien sûr. La Neretva traverse l'Herzégovine,

 26   et c'est un pays multiethnique par définition.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez répondu à ma question.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Je n'ai pas besoin d'en parler en détail --


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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] A la page 16, lignes 17 et 18, vous avez

  2   parlé de ce qu'ont fait les Musulmans de Bosnie et les Croates. Alors, les

  3   Musulmans d'Herzégovine et les Croates d'Herzégovine seraient-ils insultés

  4   par les propos que vous utilisez ou les termes que vous employez ? Parce

  5   que vous avez critiqué Treanor parce qu'il utilisait le terme de Bosno-

  6   Serbes qui auraient pu être originaires d'Herzégovine. Et vous, vous parlez

  7   de "Musulmans et de Croates d'Herzégovine" [comme interprété], est-ce que

  8   vous pensez qu'ils pourraient se sentir insultés par les termes que vous

  9   employez ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Honnêtement, je ne le pense pas, parce qu'il y

 11   a quelque chose que l'on appelle l'idée bosnienne. Les Musulmans

 12   n'insistent pas sur ces différences. Si vous voulez, je peux vous en parler

 13   plus en détail. La nation bosniaque qui a été mise en place par Benjamin

 14   Kallay au XIXe siècle, après il y a cette idée de bosniaque et bosnienne.

 15   Bien sûr, les Musulmans de Bosnie ont leur propre idée sur la question,

 16   mais ne seraient pas insultés comme le seraient les Serbes dans ce sens-là.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et qu'en est-il des Croates ? Est-ce

 18   qu'ils ont le même sentiment ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, d'après ce -- bon pour les Croates,

 20   il y aurait des nuances. Evidemment, la majorité des Croates en Bosnie-

 21   Herzégovine vivent en Herzégovine même si certains vivent en Bosnie. Ils

 22   insistent davantage sur cette différence. Donc, cette idée bosniaque, eh

 23   bien, les Croates ne l'acceptaient pas, comme les Serbes ne souhaitaient

 24   pas l'accepter non plus, en fait.

 25   Je peux développer cela, si vous le souhaitez. Toutes ces questions ont une

 26   portée historique.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, vous avez expliqué vos critiques,

 28   pourquoi les gens d'Utrecht se sentiraient insultés si on disait que ces


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  1   personnes étaient originaires d'une autre ville. Vous n'avez pas fourni de

  2   nuance, vous avez simplement dit que ces personnes étaient nées ailleurs,

  3   donc je comprends bien maintenant qu'il y a beaucoup de nuance dont il faut

  4   tenir compte, mais qu'il ne s'agit pas simplement de manque de précision de

  5   la part des historiens, mais qu'il y a beaucoup plus d'éléments en jeu, si

  6   je comprends bien, et vous incluez énormément de choses dont vous ne parlez

  7   pas dans votre rapport à cet égard sur le fait que les termes employés

  8   pourraient sembler insultants ou non.

  9   Est-ce que vous êtes d'accord avec cela ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui, je comprends bien. Je crois que je

 11   comprends ce que vous essayez de me dire. Oui, oui. Oui, oui, je comprends.

 12   Mais permettez-moi de dire une chose. Je crois qu'il faut marquer la

 13   différence entre ce qui est écrit et qui constitue un rapport d'expert, et

 14   ce qui est quelquefois déclaré ou dit au cours d'une conversation. Nous

 15   essayons toujours de n'insulter personne. Mais lorsque l'on rédige un

 16   document qui est censé être versé au dossier, il faut faire

 17   particulièrement attention, faire preuve de prudence. C'est ce que je

 18   souhaite dire par rapport à ce que j'ai déjà dit, et je comprends très bien

 19   ce que vous voulez me dire.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et de telles nuances sur lesquelles vous

 21   insistez maintenant ont été omises, et dans le passage de votre rapport,

 22   vous dites que dans le rapport de M. Treanor, les termes qu'il emploie sont

 23   insultants. Est-ce que vous êtes d'accord avec cela ?

 24   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, je ne suis pas très sûr d'avoir compris

 25   votre question, peut-être que c'est un problème d'interprétation.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous dites que c'est insultant d'appeler

 27   de dire de quelqu'un qu'il est originaire d'Utrecht, s'il est né ailleurs,

 28   sans présenter davantage de nuances. Et ces nuances-là ne figurent pas dans


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  1   votre rapport écrit dans lequel vous critiquez M. Treanor justement sur

  2   cette question-là, ou est-ce que cela vous a échappé ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, j'ai fait l'effort de tenir compte de

  4   ces nuances. Alors, c'est une chose de faire une erreur quand on parle et

  5   vous dites que quelqu'un est originaire d'Utrecht alors qu'il est

  6   originaire de La Haye. Mais si la personne originaire d'Utrecht fait

  7   l'objet d'un procès, et que vous écrivez quelque chose qui est censé servir

  8   d'élément de preuve contre cette personne-là --

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Il n'y a pas d'élément de preuve contre

 10   une personne. Il s'agit ici de fournir des éléments de preuve aux Juges de

 11   la Chambre et de fournir votre avis en qualité d'expert. Nous ne nous

 12   attendons pas de vous que vous témoigniez ici ni en faveur de M. Mladic ni

 13   contre M. Mladic, nous nous attendons à ce que votre rapport, votre avis

 14   d'expert soit donné en toute indépendance et conformément aux règles

 15   déontologiques de votre profession.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Alors, comme je l'ai dit, pour ce qui est des

 17   ouvrages de Patrick Treanor -- ah oui, il nous faut continuer.

 18   M. STOJANOVIC : [interprétation]

 19   Q.  Monsieur le Professeur, une autre question qui porte sur votre premier

 20   rapport. Je vous remercie de vos efforts.

 21   Je souhaite que nous regardions maintenant, s'il vous plaît, la page 21 en

 22   B/C/S, et dans la version anglaise de votre rapport, c'est la page 60, la

 23   dernière phrase. Et cela se poursuit à la page 70.

 24   Voici ce que vous dites :

 25   "Le contexte fournit ne peut pas correspondre à des jugements de valeur

 26   donnés en toute confidentialité, ni en critiques venant d'une partie à la

 27   guerre civile. De façon générale, le manque de contexte font que les

 28   auteurs parlent de sujets sans tenir compte des éléments historiques, qui


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  1   sont dépourvus de relation de cause à effet et des conséquences ou un cadre

  2   temporel réaliste."

  3   Alors, vous utilisez une phrase ici, vous dites qu'il s'est agi d'une

  4   guerre civile. Alors, s'il vous plaît, veuillez nous dire le plus

  5   rapidement possible pourquoi vous avez qualifié l'évolution de la Bosnie-

  6   Herzégovine de cette façon-là ?

  7   R.  Alors, je ne suis pas le seul, je ne suis pas le seul à avoir qualifié

  8   ce qui s'est passé en Bosnie-Herzégovine de cette façon. C'est tout à fait

  9   normal, cela fait l'objet de débat. Mais mon avis sur cette question

 10   terriblement triste et difficile qui a été infligé au peuple de nos

 11   territoires depuis des siècles. C'est le sort qui est cela de la Bosnie-

 12   Herzégovine. Il y a des guerres au cours desquelles les voisins sont en

 13   guerre, les voisins qui parlent la même langue, et nous appelons cette

 14   langue notre langue. Cela s'appelait autrefois le serbo-croate.

 15   Ce sont des personnes qui ont différentes religions. C'est un sort terrible

 16   qui est celui de la Bosnie-Herzégovine, mais eux ne sont pas les seuls

 17   responsables. Malheureusement, quelqu'un de l'extérieur a souhaité

 18   encourager de tels conflits. Alors, prenez l'exemple, par exemple, du XVIe

 19   siècle en France, ou du XVIIe siècle en Allemagne, c'est ce genre de

 20   guerres civiles-là, on peut les appeler des guerres de religion également,

 21   mais si quelqu'un est un croyant, il ne peut pas détruire un lieu de culte

 22   de quelle que religion que ce soit, donc il s'agit de savoir s'il est

 23   question de guerre de religion ou non.

 24   Donc, la guerre s'est poursuivie comme au XVIe siècle pour des raisons

 25   religieuses, comme au XVIIe siècle, comme au moment du génocide contre les

 26   Serbes par les Croates au cours de la Deuxième Guerre mondiale. Autrement

 27   dit, on réduit les gens à leur appartenance religieuse et on ne tient pas

 28   compte de leurs intérêts communs, de leur sort commun, de leur relation


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  1   avec leurs voisins. C'est la raison pour laquelle je parle de guerre

  2   civile. Il y a d'autres facteurs à prendre en jeu également mais, pour

  3   l'essentiel, c'est une répétition, ou ce sont les mêmes faits qui se

  4   déroulent encore une fois après 1941 et 1945, et dans un contexte

  5   historique différent qui était celui de la guerre de 1914 et 1918, sans

  6   parler du XIXe siècle. Et en Europe, lorsque la Guerre des 30 ans s'est

  7   terminée, après de traité de Versailles également. Et en Europe, les

  8   guerres n'avaient pas pris cette dimension-là. Mais dans les Balkans, ceci

  9   s'est poursuivi en raison de l'Empire austro-hongrois. Je ne souhaite pas

 10   aborder tout ceci dans le détail.

 11   Q.  Monsieur le Professeur, vous avez prononcé une déclaration solennelle

 12   devant les Juges de cette Chambre, maintenant que nous avons examiné votre

 13   rapport avec vous, est-ce que vous êtes d'accord avec tout ce que vous

 14   dites dans votre rapport écrit, autrement dit, que vous avez intitulé : Les

 15   dirigeants bosno-serbes entre 1990 et 1992, et vous analysez le rapport de

 16   M. Treanor entre 1992, 1993 et 1995, votre rapport, tel que vous souhaitez

 17   qu'il soit présenté aux Juges de cette Chambre aujourd'hui ?

 18   R.  Oui.

 19   M. STOJANOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, après le contre-

 20   interrogatoire, je souhaite demander le versement au dossier du 1D05904 au

 21   dossier. C'est le rapport du Pr Kovic.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Habituellement, nous prenons notre

 23   décision à la fin de l'interrogatoire du témoin, je suppose que vous voulez

 24   qu'il soit versé aux fins d'identification ?

 25   Monsieur le Greffier, s'il vous plaît.

 26   M. STOJANOVIC : [interprétation] Oui, tout à fait, c'est le cas.

 27   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera le document MFI D1368.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le D1368 est marqué aux fins


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  1   d'identification.

  2   Il est l'heure de faire la pause, Maître Stojanovic.

  3   M. STOJANOVIC : [interprétation] C'est exact. Après la pause, nous allons

  4   aborder les autres rapports, et je crois que je vais m'en tenir au temps

  5   qui m'a été accordé.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous souhaitons vous revoir dans 20

  7   minutes, Monsieur Kovic. Vous pouvez suivre l'huissier.

  8   [Le témoin quitte la barre]

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons reprendre à 11 heures

 10   moins dix.

 11   --- L'audience est suspendue à 10 heures 31.

 12   --- L'audience est reprise à 10 heures 52.

 13   [Le témoin vient à la barre]

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stojanovic, vous pouvez

 15   poursuivre.

 16   M. STOJANOVIC : [interprétation]

 17   Q.  Monsieur le Professeur, est-ce que pour les besoins de la défense du

 18   général Mladic, vous avez fait le rapport intitulé : Analyse du rapport de

 19   l'expert Robert Donia relatif aux événements historiques en Bosnie-

 20   Herzégovine dans l'affaire le Procureur contre Ratko Mladic, et est-ce que

 21   vous l'avez communiqué en forme écrite ?

 22   R.  Oui.

 23   M. STOJANOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, peut-on afficher

 24   dans le système du prétoire électronique le document qui porte le numéro 65

 25   ter 1D05905.

 26   Q.  Monsieur le Professeur, est-ce qu'il s'agit de la page de garde de

 27   votre rapport ?

 28   R.  Oui.


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  1   Q.  Vous pouvez voir cela à l'écran qui est devant vous.

  2   R.  Oui.

  3   M. STOJANOVIC : [interprétation] Maintenant, j'aimerais qu'on affiche dans

  4   le prétoire électronique la page numéro 6 dans la version en B/C/S de votre

  5   rapport. Et pour ce qui est de la version en anglais, il s'agit de la page

  6   5, le deuxième paragraphe en partant du bas de la page.

  7   Q.  Monsieur le Professeur, suivant le même principe appliqué sur le

  8   rapport précédent, j'aimerais vous demander de ne pas répéter ce qui figure

  9   en état dans votre rapport et de nous dire en répondant aux questions

 10   seulement par rapport à ce qui suit.

 11   Ici, il est dit :

 12   "Le terme 'siège' est à contester, puisque ceux qui était assiégés

 13   avaient des liens avec le monde extérieur par les biais des forces de

 14   maintien de la paix des Nations Unies…"

 15   Et dans le paragraphe suivant, à la page 7 en B/C/S, vous avez

 16   expliqué cela en disant :

 17   "Sarajevo, à partir de 1992 jusqu'à 1995, était une ville divisée et

 18   non pas une ville assiégée."

 19   Voilà ma question pour vous : pourquoi, Monsieur le Professeur,

 20   pensez-vous que le terme utilisé par le Pr Donia, et c'est le terme de

 21   "siège de Sarajevo", d'après vous, est incorrect et que d'après vous,

 22   l'expression ou le terme "la ville divisée" conviendrait mieux ?

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cela n'est-il pas été clairement

 24   expliqué dans le rapport ? A moins que vous ne souhaitez ajouter quelque

 25   chose à cela ? Mais, alors, vous devez poser une question concrète par

 26   rapport à cela. Mais je pense que cela est clairement expliqué dans le

 27   rapport, n'est-ce pas, Sarajevo est, Sarajevo ouest, tout cela est expliqué

 28   dans le rapport. Pourquoi, encore une fois, poser la question là-dessus


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  1   alors que cela figure dans le rapport ?

  2   Si vous avez d'autres questions concrètes, vous pouvez poursuivre mais,

  3   s'il vous plaît, ne demandez pas au témoin de répéter ce qu'il avait décrit

  4   dans son rapport en détail.

  5   M. STOJANOVIC : [interprétation] Comme je l'ai déjà dit, je n'aimerais pas

  6   que les choses qui figurent dans le rapport soient réitérés.

  7   Q.  Mais, Monsieur le Professeur, par rapport à ce dont on a déjà discuté

  8   lors de la séance de récolement, pouvez-vous nous dire pourquoi, d'après

  9   vous, ce terme "la ville divisée" conviendrait mieux par rapport au terme

 10   "la ville assiégée" ?

 11   R.  Il y a deux termes qu'on peut utiliser à ce niveau-là. Robert Donia a

 12   utilisé dans son deuxième rapport "struggle for Sarajevo", la lutte pour

 13   Sarajevo ou le combat pour Sarajevo. Et la deuxième expression est "la

 14   ville divisée".

 15   Et si vous considérez le centre de la ville de La Haye comme le centre de

 16   la ville et si vous dites que Scheveningen n'appartient pas à la ville de

 17   La Haye et s'il y a des combats à Scheveningen et si vous avez dit que

 18   seulement le centre de La Haye est La Haye, vous allez dire qu'il s'agit du

 19   siège de La Haye. Mais si vous avez six districts qui sont divisés entre

 20   eux, il s'agit d'une ville divisée. Il s'agit d'une situation hypothétique,

 21   bien sûr.

 22   Et il insiste sur le fait que je n'ai pas fait figurer dans mon

 23   rapport que Michael Rose, dans ses souvenirs, concernant son service en

 24   Bosnie-Herzégovine en 1994 a dit que, d'après lui, Sarajevo n'était pas une

 25   ville assiégée, puisque Sarajevo avait des liens avec le monde extérieur

 26   grâce aux Nations Unies et grâce à d'autres choses dont on peut également

 27   parler. D'un côté vous avez les forces serbes -- excusez-moi, de l'autre

 28   côté vous avez ceux que le Pr Donia a appelé défenseurs. Et dans sa


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  1   monographie, ce qui est intitulé Sarajevo, il dit que plus de 90 % de ces

  2   personnes sont d'appartenance ethnique musulmane, et cela veut dire que

  3   vous avez deux armées qui contrôlent des différentes parties de la ville.

  4   Et c'est dans ce sens-là que j'ai contesté ce syntagme, "le siège de

  5   Sarajevo."

  6   Q.  Merci.

  7   M. STOJANOVIC : [interprétation] Peut-on afficher la page 9 dans la version

  8   en B/C/S de votre rapport, ce qui correspond à la page 7, paragraphe 3,

  9   dans la version en anglais.

 10   Q.  Et soyez bref, Monsieur le Professeur, par rapport à ce que vous avez

 11   dit aux contextes des rapports préparés par M. Donia, vous avez dit encore

 12   une fois qu'il manque la partie concernant la période préalable à la guerre

 13   à Sarajevo. Est-ce qu'il s'agit de la méthodologie et de l'approche du Pr

 14   Donia et de votre objection du point de vue académique par rapport à cela,

 15   à l'approche et à la méthodologie du Pr Donia ?

 16   R.  Bien sûr. Le Pr Donia lui-même, il a dit dans son introduction qu'il

 17   allait parler du contexte, et le fait qu'il manque le contexte dans ce

 18   rapport, c'est mon objection principale. Puisqu'il n'a pas consacré

 19   suffisamment d'attention aux actions menées par les responsables des

 20   Musulmans et des Croates, et, si vous voulez, des Etats-Unis et de l'OTAN

 21   parce qu'ils étaient une partie au conflit à partir de 1995, donc il manque

 22   une approche plus sérieuse au contexte de la guerre civile.

 23   Ils sont donc une partie au conflit à partir de 1995. J'aimerais donc

 24   apporter cette correction au compte rendu.

 25   Donc, il manque le contexte par rapport à la guerre en Croatie,

 26   puisque dans cette guerre en Croatie les citoyens de la Bosnie-Herzégovine

 27   ont pris part également. Il est clair que quelqu'un de la Croatie voulait

 28   que la guerre éclate en Bosnie-Herzégovine, d'après moi. Et finalement, ce


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  1   qui manque également dans ce rapport est une introduction un peu plus

  2   longue concernant le contexte historique par rapport à la guerre en Bosnie-

  3   Herzégovine, qui engloberait au moins l'histoire de l'Etat indépendant

  4   croate du NDH à partir de la Deuxième Guerre mondiale.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous avez apporté une correction à

  6   l'interprétation. C'est quelque chose qu'on ne fait pas habituellement. Si

  7   vous pensez qu'il y a un problème lié à l'interprétation, vous pouvez nous

  8   le dire et par la suite cela sera vérifié. Ce n'est pas à vous de corriger

  9   l'interprétation. Si vous avez des préoccupations par rapport à

 10   l'interprétation, vous pouvez mentionner cela, et nous pouvons par la suite

 11   réécouter l'enregistrement audio pour savoir si ce que vous avez dit a été

 12   correctement interprété. Mais ce n'est pas à vous de corriger les

 13   interprètes.

 14   M. STOJANOVIC : [interprétation] Merci.

 15   Q.  Est-ce qu'on peut afficher la page 12 de votre

 16   rapport en B/C/S, cela correspond à la page 9, et au milieu du paragraphe

 17   2, où, Monsieur le Professeur, vous avez fait figurer vos objections au

 18   rapport de M. Donia pour ce qui est de sa méthodologie, vous avez dit,

 19   entre autres :

 20   "Ce qui est étonnant est le fait que l'auteur de ce rapport utilise la

 21   presse musulmane qui était publiée dans la ville de Sarajevo pendant la

 22   guerre et vous citez les titres des journaux en tant que source des

 23   informations concernant les événements pendant la guerre sans les comparer

 24   avec les informations publiées, par exemple, dans la presse serbe ou dans

 25   la presse croate."

 26   Répondez de façon brève, Monsieur le Professeur, à ma question suivante :

 27   pour ce qui est des analyses historiques et des procédés scientifiques,

 28   quelle est la qualité de ces sources d'information des articles de presse


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  1   de l'une des parties belligérantes ?

  2   R.  Pour ce qui est des historiens, les articles de presse représentent une

  3   source précieuse, une source très précieuse, l'information pour établir ce

  4   qui s'était passé, mais ces sources sont plus importantes en tant que

  5   source des informations concernant la politique de rédaction de ces

  6   journaux. Dans ce sens-là, les historiens sont très prudents quand il

  7   s'agit d'établir des faits et des événements sur la base des informations

  8   publiées dans la presse. Puisque la presse, avant tout, est la source des

  9   informations concernant les positions d'auteurs d'articles ou du

 10   propriétaire d'un journal ou d'un autre média.

 11   Et en particulier lorsqu'il s'agit d'une guerre, vous avez la propagande de

 12   toutes les parties au conflit. Ici, on voit l'article dans Slobojenje

 13   [phon] intitulé : Sarajevo est cible des Chetniks. "Chetniks", c'est un

 14   terme péjoratif pour désigner les Serbes. Lorsqu'on utilise cet article

 15   pour rétablir les faits, d'abord on peut dire que c'est péjoratif; et

 16   deuxièmement, on peut dire qu'il faut au moins comparer le contenu de cet

 17   article avec ce que les Croates et les Serbes en ont dit. Lorsque vous avez

 18   une guerre, vous avez une propagande de guerre. Et l'utilisation d'articles

 19   de presse dans ce sens-là peut être contestée du point de vue de la

 20   méthodologie utilisée dans ces articles.

 21   Q.  A la même page, dans le deuxième paragraphe en partant du bas dans la

 22   page dans la version en anglais, vous avez dit, en parlant toujours de ces

 23   exemples du rapport du Pr Donia :

 24   "L'auteur a également établi la chronologie des événements sur le

 25   territoire de l'ancienne Yougoslavie sur la base des analyses et des

 26   rapports publiés par l'Agence centrale d'information des Etats-Unis … et"

 27   vous avez cité "où cela se trouve sans comparer ces informations avec les

 28   informations d'autres sources."


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  1   Est-ce que vous pouvez nous dire pourquoi vous avez mis l'accent sur cette

  2   objection dans votre rapport ?

  3   R.  Aujourd'hui, nous utilisons des documents qui étaient créés dans cette

  4   Agence centrale d'information, mais nous savons tous ce qu'est cette

  5   agence, le CIA. Mais au moins il faut être prudents pour ce qui est de la

  6   méthodologie appliquée pour ce qui est de ces sources d'information. On

  7   peut utiliser ces sources d'information. Vous avez quelques publications

  8   qui sont très précieuses et importantes, mais ici, pour ce qui est de la

  9   CIA, et des Etats-Unis et de l'OTAN, ce sont les entités qui ont pris part

 10   à ce conflit, et ils représentaient une partie belligérante également.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] J'aimerais vous poser la question

 12   suivante.

 13   Est-ce que vous pensez -- puisque nous nous intéressons à ce que vous nous

 14   dites. Concernant aux références aux rapports de Donia, où vous avez dit

 15   qu'il n'utilisait que les sources d'un côté, est-ce que vous avez analysé

 16   d'autres sources qui parlaient des mêmes sujets ? Puisqu'une chose est de

 17   nous dire M. Donia avait tort, et l'autre chose est de nous donner une

 18   image complète en s'appuyant sur les comparaisons pour nous dire qu'il

 19   s'agissait de la propagande, et qu'il y avait d'autres informations. Est-ce

 20   que vous avez considéré cette possibilité pour que nous puissions voir une

 21   image plus complète par rapport à ce que vous avez dit concernant le

 22   rapport de M. Donia ?

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, c'est ce que j'ai fait. Exactement dans

 24   ce rapport. Les exemples concrets sont les conflits au centre de Sarajevo

 25   le 22 mai 1992. L'auteur a parlé d'un côté de ces événements, et j'ai parlé

 26   de ce que l'autre côté a dit de ces événements et du massacre à Pofalici en

 27   1992, où l'auteur a appelé cela la lutte contre les nationalistes serbes.

 28   J'ai parlé de ces événements en s'appuyant sur les sources serbes où le


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  1   massacre sur les civils a été commis. Donc j'ai essayé de modérer le

  2   langage que j'ai utilisé. J'ai fait cela dans mon rapport. Je ne sais pas

  3   si j'ai bien compris votre question.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, j'ai vu des exemples de ce type-là.

  5   Mais est-ce que vous avez procédé de façon systématique dans ce sens-là

  6   pour nous donner une image complète du rapport du Dr Donia ?

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Ma tâche était de préparer une analyse

  8   critique de ce rapport, de présenter une image complète des événements, et

  9   cela pourrait être une monographie à part. Dans ce rapport, j'ai donc

 10   présenté des preuves, des choses qui ne figurent pas dans son rapport. Et

 11   l'image que je vous offre des événements n'est pas une image complète, mais

 12   partielle, parce que je ne m'efforçais de donner l'image complète des

 13   événements. Je critique les analyses faites par le Pr Donia et par M.

 14   Treanor, et donc j'essaie d'apporter d'autres informations pour que vous

 15   puissiez avoir une image complète des événements qui étaient arrivés en

 16   Bosnie-Herzégovine.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, j'ai compris cela. Vous avez

 18   préparé votre rapport dans le contexte qui vous a été imposé par la

 19   Défense.

 20   Continuez, Maître Stojanovic.

 21   M. STOJANOVIC : [interprétation] Merci.

 22   Q.  Est-ce qu'on peut maintenant afficher dans la version en B/C/S la page

 23   23. Il s'agit de la page 17 en anglais, le deuxième paragraphe en partant

 24   du bas de la page.

 25   Vous avez dit dans ce paragraphe, après avoir fait l'analyse du rapport du

 26   Pr Donia du chapitre 2, intitulé, La transformation de la JNA, vous avez

 27   dit :

 28   "Les actions de la JNA étaient les actions forcées, et il faut ajouter à ce


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  1   niveau-là que les actions forcées n'étaient pas seulement les actions

  2   menées par la JNA en Bosnie-Herzégovine, mais également par la VRS. Les

  3   sécessionnistes étaient ceux qui prenaient l'initiative en Slovénie, en

  4   Croatie, en Bosnie-Herzégovine."

  5   Monsieur le Professeur, dites-nous brièvement en quoi consistent, d'après

  6   vous, ces actions forcées de la JNA et de la VRS ?

  7   R.  Quand il s'agit de Sarajevo, si vos casernes sont encerclées, si on

  8   vous tire dessus - et c'était comme cela à Sarajevo - alors vos réactions

  9   sont forcées. Le général Kukanjac demandait la réponse à une provocation

 10   concrète. Cela s'applique à la Croatie également. Alors ce que Donia écrit

 11   des attaques contre Sarajevo, il aurait dû nous dire que les casernes

 12   étaient encerclées et assiégées, ainsi que les installations de la JNA.

 13   Donc vous avez ici une attaque, et qu'est-ce que vous pouvez faire d'autre

 14   ? De vous défendre ou de vous rendre.

 15   C'est pour cela que dans ce rapport, il n'y a aucun mot pour ce qui

 16   est de la caserne à Varazdin ou à Virovitica qui se sont rendues,  mais il

 17   y a d'autres casernes qui se défendaient à l'époque. Et la deuxième partie

 18   de la question concerne ce dont on a déjà parlé du point de vue historique,

 19   et je peux développer cela plus tard.

 20   Les sécessionnistes étaient actifs, et si les sécessionnistes

 21   bénéficient d'un appui de l'extérieur, cela garantit le succès de la

 22   sécession. C'est comme cela que la lutte de l'indépendance des colonies aux

 23   Etats-Unis, c'est un exemple de cette lutte, également la lutte pour se

 24   libérer du joug des Ottomans en ex-Yougoslavie. 

 25   Q.  Lorsque vous parlez des actions et des mesures forcées de la JNA, mais

 26   également de la VRS, pouvez-vous élaborer cette partie de votre phrase ?

 27   R.  Robert Donia en a parlé dans son rapport, il a parlé du fait que les

 28   armées des partis politiques étaient formées du parti du SDA et du HDZ


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  1   également. Mais lui, il a présenté ces informations après avoir parlé des

  2   positions de Radovan Karadzic qui étaient incriminées, donc il a tiré cela

  3   du contexte. Puisque la chronologie des événements est très importante ici.

  4   Nous avons beaucoup d'information là-dessus - mais je suppose qu'il ne soit

  5   pas nécessaire que je vous parle en détail - de la période allant du mois

  6   de mai 1990, lorsqu'ils ont refusé de rendre les armes, les armes de la

  7   Défense territoriale, dont Donia a parlé. Ensuite, on a les premières

  8   mesures pour établir les forces armées du SDA, et cetera.

  9   Ensuite, il y a des événements survenus en Herzégovine occidentale où

 10   l'armée de la Croatie est entrée sur le territoire de l'Herzégovine

 11   occidentale. Donc vous avez la présence des forces armées croates sur le

 12   territoire de la Bosnie-Herzégovine, mais il semble que dans ce rapport,

 13   cela n'a pas été le sujet qui était développé.

 14   Q.  Pour ce qui est de votre point de vue, est-ce qu'un historien objectif

 15   qui prépare un rapport comme celui-ci aurait dû tenir compte de ce contexte

 16   au moment où il présente ses conclusions ?

 17   R.  Oui, bien sûr. C'est pour cela que j'ai dit que de cette façon-là, vous

 18   pouvez prouver n'importe quoi. Que la France a attaqué l'Allemagne en 1914.

 19   Ou que Israël est l'unique coupable pour ce qui est de la guerre de 1967.

 20   Vous pouvez dire cela aussi si vous vous penchez sur les actions et sur les

 21   sources d'information d'un côté, et en tirant les informations de leur

 22   contexte.

 23   Q.  C'est justement sur quoi porte ma question suivante.

 24   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] J'ai une question à poser au témoin.

 25   Revenons à la guerre sur le territoire de l'ancienne Yougoslavie.

 26   Me Stojanovic vous a posé la question en disant que vous devriez élaborer

 27   davantage la partie de votre phrase où vous avez dit que les actions de la

 28   VRS étaient également forcées.


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  1   Vous avez fourni une longue réponse, mais je n'ai entendu rien par rapport

  2   à la façon à laquelle la VRS était forcée de prendre ces actions. Pouvez-

  3   vous nous expliquer cela.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  5   La VRS a été formée le 12 mai 1992. Au moins, cette date a été mentionnée

  6   comme étant la date de la création de la VRS. A ce moment-là, il y avait

  7   déjà la guerre en Bosnie-Herzégovine. Les attaques contre les casernes,

  8   Donia a dit cela lui-même. Au début de 1992, vous avez des conflits. Mais

  9   la situation a empiré en avril et en mai. C'est ce que j'ai dit par rapport

 10   à l'entretien entre le général Adzic et Izetbegovic. Les attaques au

 11   mortier et à l'artillerie sur le centre du 2e District militaire, le 2 mai,

 12   au centre de Sarajevo. On sait également qu'en avril, les Bérets verts

 13   ainsi que la Ligue patriotique, l'armée du parti SDA, étaient transformés

 14   en Défense territoriale et par la suite, en l'armée de la BH. Les unités de

 15   la République de Croatie étaient entrées sur le territoire de la Bosnie-

 16   Herzégovine. Vous avez les massacres des Serbes à Sijekovac, près de

 17   Bosanski Brod, vers la fin du mois de mai 1992. Tout cela précédait la

 18   formation de la VRS. Donc qu'est-ce que les Serbes auraient dû faire en

 19   Bosnie-Herzégovine en ce moment-là ?

 20   Vous avez également la création de l'armée du parti politique croate. Je

 21   n'ai pas mentionné cela jusqu'ici.

 22   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Encore une fois, vous avez fourni une

 23   réponse très longue, mais vous n'avez pas mis l'accent sur ce que vous avez

 24   écrit par rapport à cela dans votre rapport. Les actions de la VRS étaient

 25   les actions forcées. Nous ne parlons pas de la création de la formation de

 26   la VRS. Nous parlons des actions prises par la VRS, quelles étaient ces

 27   actions et de quelle façon ces actions étaient forcées. C'était la question

 28   que Me Stojanovic vous a posée. Vous devez vous concentrer sur les


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  1   questions qui vous sont posées.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne suis pas tout à fait certain d'avoir

  3   compris votre question. Donc, la formation de la VRS était forcée ou

  4   provoquée d'une certaine façon. Et d'un côté, vous avez les sécessionnistes

  5   qui sont mentionnés dans cette phrase dans mon rapport et --

  6   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Excusez-moi de vous avoir interrompu

  7   encore une fois. Je fais référence au paragraphe où on peut lire, et c'est

  8   ce qui est affiché à l'écran : "La JNA était -- émanait les actions qui

  9   étaient forcées en Bosnie-Herzégovine … mais les actions de la VRS étaient

 10   également forcées…"

 11   Qu'est-ce que cela veut dire ? Puisque je ne sais pas quel est le contexte

 12   de cela, et Me Stojanovic vous a posé la question concernant cette phrase

 13   courte.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais vous donner réponse courte. C'est

 15   l'armée de la Republika Srpska. Vous avez la guerre. Vous avez l'armée de

 16   l'ennemi armé. Vous avez deux possibilités : de se rendre ou de se

 17   défendre.

 18   Et vous avez la création des armées, des partis politiques des

 19   Croates et des Musulmans, ce qui précédait la formation de l'armée de la

 20   Republika Srpska. C'est la réponse à votre question.

 21   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Maître Stojanovic, vous avez la

 22   parole.

 23   M. STOJANOVIC : [interprétation]

 24   Q.  Monsieur le Professeur, je vais revenir sur la partie où vous avez

 25   mentionné le rapport du Pr Donia. Et, dans ce contexte, j'aimerais qu'on

 26   affiche la page 79 dans la version en B/C/S, et c'est la page 58 dans la

 27   version en anglais. Il faut afficher le troisième paragraphe en partant du

 28   bas de la page dans la version en anglais.


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  1   Dans ce paragraphe, vous avez cité un exemple où le Pr Donia a mentionné

  2   les souffrances des Serbes dans la partie musulmane de Sarajevo, et vous

  3   avez cité une phrase du rapport du Pr Donia, où il a dit :

  4   "Le destin de ces Serbes était devenu l'un des aspects les plus

  5   controversés du siège."

  6   Et ensuite, vous dites :

  7   "Bien sûr, lorsque la guerre civile et ethnique à Sarajevo est considérée

  8   comme la lutte entre le bien et le mal, la persécution des Serbes doit

  9   devenir controversée…"

 10   J'aimerais vous poser la question suivante : pourquoi avez-vous eu besoin,

 11   pour ce qui est de la méthodologie utilisée par le Pr Donia, de dire et de

 12   mettre l'accent sur ce qu'il a dit par rapport au destin des Serbes à

 13   Sarajevo et où il a dit qu'il s'agissait d'un des aspects les plus

 14   controversés du siège ?

 15   R.  Cette citation est tirée du livre de Donia s'intitulant "Sarajevo".

 16   Cela ne figure pas dans le rapport qui a été soumis à ce Tribunal. Il n'y a

 17   même pas cette phrase. J'ai dit que l'auteur de cet ouvrage a fait figurer

 18   dans son ouvrage cette seule phrase où il parle des souffrances des Serbes

 19   à Sarajevo, également la phrase concernant la bataille à Pofalici. Ce n'est

 20   pas dans son rapport que cela figure, mais dans son livre. Ecrire de la

 21   guerre à Sarajevo de cette façon-là est très controversé puisqu'il ne parle

 22   pas des souffrances des Serbes à Sarajevo et des victimes serbes. C'est

 23   quelque chose qui choque. Donc, c'est la citation tirée du livre de cet

 24   auteur et, bien sûr, que c'est controversé.

 25   Il ne faut pas que je répète ce que j'ai déjà écrit. Si on admet que

 26   la guerre à Sarajevo était la guerre entre le bien et le mal et que les

 27   Serbes représentaient le mal et que les [inaudible] représentaient le bien.

 28   Donc, vous avez ici la mention du combat à Pofalici. C'est peut-être l'une


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  1   des réponses à la question posée par Monsieur le Juge pour savoir de quelle

  2   façon les actions de la VRS étaient forcées, parce que vous avez les

  3   souffrances et les victimes parmi les civils, et ensuite les actions de la

  4   VRS. Dans le rapport de Donia, il est dit qu'il s'agit d'un combat avec les

  5   nationalistes serbes. Il aurait fallu au moins mentionner les victimes

  6   civiles à Pofalici. Et qu'est-ce que les sources serbes en disent ?

  7   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je ne suis pas sûr d'avoir

  8   parfaitement compris votre explication. Est-ce que vous vous référez à un

  9   livre publié par M. Donia ou à son rapport fourni à la Chambre ?

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Les deux citations, les deux phrases qui ont

 11   été lues sont tirées de son livre, de sa monographie intitulée : La ville

 12   de Sarajevo, et qui a été écrite par Robert Donia. Et c'est seulement dans

 13   son livre, dans sa monographie qu'il évoque le sort subi par ces Serbes.

 14   Mais dans le rapport qu'il a soumis à la Chambre, il n'en est pas question.

 15   Il ne dit rien au sujet des prisons privées où les Serbes étaient enfermés.

 16   Rien du tout.

 17   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Merci.

 18   M. STOJANOVIC : [interprétation] J'aimerais que nous nous penchions

 19   maintenant sur la page 83 dans la version B/C/S qui correspond en anglais à

 20   la page 61 au deuxième paragraphe au-dessous du sous-titre.

 21   Q.  Vous y citez Michael Rose, le commandant de la FORPRONU. Celui-ci a dit

 22   :

 23   "Jusqu'à la mi-1994, le gouvernement de Bosnie a sans aucun doute arrêté de

 24   soutenir les efforts de maintenir la paix investie par l'ONU parce qu'ils

 25   croyaient qu'un cessez-le-feu pourrait pérenniser les lignes existantes de

 26   conflit à ce moment-là, résultant ainsi dans une division peu équitable des

 27   territoires.

 28   "Et l'armée de Bosnie avait un autre objectif, celui de forcer l'ONU


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  1   et l'OTAN de s'engager dans un combat, dans une lutte de terre."

  2   Alors, puisque c'est une citation tirée du livre rédigé par M. Rose, je me

  3   dois de vous poser la question suivante : après avoir étudié la manière

  4   dont la situation a évolué en Bosnie-Herzégovine et concrètement à

  5   Sarajevo, est-ce que vous avez constaté que ces conclusions avancées par M.

  6   Rose étaient justes ou est-ce qu'un historien objectif serait arrivé à une

  7   conclusion différente ?

  8   R.  Le général Michael Rose n'est pas le seul à avoir présenté une telle

  9   conclusion à laquelle il n'arrête pas de revenir en rédigeant ses mémoires.

 10   D'ailleurs, il affiche une attitude très critique vis-à-vis de la partie

 11   serbe aussi. Il explique qu'en 1994, la présidence - donc Alija Izetbegovic

 12   et ses associés - s'efforce de provoquer une intervention militaire des

 13   Etats-Unis et de l'OTAN. Et pour y arriver, ils sont prêts même à faire

 14   souffrir leurs propres citoyens. Dans la Déclaration islamique signée par

 15   Alija Izetbegovic, il y a cette phrase effrayante où l'on lit un peuple

 16   endormi doit être réveillé par des coups de poings, je cite pratiquement

 17   mot à mot. Je reprends cette phrase dans mon rapport. Donc, c'est une

 18   approche tout à fait effrayante. Mais évidemment, la tâche des historiens

 19   est de montrer ce qui s'est passé en réalité, et cela vaut aussi pour les

 20   historiens de Sarajevo.

 21   Q.  Merci, Monsieur le Professeur. J'aimerais maintenant que nous nous

 22   penchions sur la page 87 dans la version B/C/S.

 23   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Avant d'y procéder, j'aurais une

 24   question relative à la note en bas de page 165 -- ah, non, excusez-moi.

 25   J'ai confondu deux sujets différents. Je retire ma question. Vous pouvez

 26   continuer.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je souhaite moi aussi poser une

 28   question.


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  1   Vous dites que le général Rose a affiché une attitude assez critique vis-à-

  2   vis des Serbes. Où est-ce que cela figure dans votre rapport ?

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, vous savez, le rapport que j'ai

  4   analysé abonde en critiques dirigées contre la partie serbe. Vous y

  5   trouverez toute une panoplie de données --

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez répondre à ma question, s'il

  7   vous plaît.

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Ma tâche consistait à émettre des critiques

  9   portant sur les rapports rédigés par Robert Donia et Patrick Treanor.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Apparemment, vous êtes en train de nous

 11   expliquer quelque chose. Dois-je comprendre, qu'en fait, vous ne vous êtes

 12   pas penché, vous n'avez pas approfondi ce sujet pour des raisons que vous

 13   êtes maintenant en train de nous expliquer, êtes-vous en train de nous dire

 14   qu'en fait vous ne vous êtes pas penché sur les observations critiques

 15   formulées par le général Rose vis-à-vis des Serbes ? Ah, vous hochez

 16   positivement de la tête. Très bien.

 17   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, une réponse simple serait de dire

 19   : Non, je ne l'ai pas fait, et vous pouvez par la suite fournir une

 20   explication ou alors, Me Stojanovic peut vous poser d'autres questions pour

 21   le préciser.

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Bien, très bien, voilà. Donc, non, je ne l'ai

 23   pas fait, parce que si je l'avais fait, ce rapport de 120 pages -- très

 24   bien, très bien.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stojanovic, veuillez continuer,

 26   s'il vous plaît.

 27   M. STOJANOVIC : [interprétation]

 28   Q.  Je reviens à mes choux. Monsieur le Professeur, je vous en demande


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  1   pardon. Donc, page 87 dans la version B/C/S qui correspond à la page 74

  2   dans la version anglaise, le troisième paragraphe de cette page dans la

  3   version anglaise.

  4   Vous y dites, Monsieur le Professeur :

  5   "Cependant, Robert Donia n'évoque pas l'épisode où il est question de

  6   Zimmermann et d'Izetbegovic. Au lieu de cela, il dit très brièvement en une

  7   seule phrase que le projet Cutileiro a été refusé par toutes les parties au

  8   conflit." Et puis, vous poursuivez : "S'il faut vraiment discuter de la

  9   responsabilité des uns et des autres, la décision prise par les Etats-Unis

 10   mérite d'être évoquée tout au moins et peut-être même d'être approfondie,

 11   puisque le rôle joué par les USA était un rôle controversé."

 12   Alors, est-ce qu'il existe des éléments historiques au sujet de

 13   l'attitude affichée par les Etats-Unis où l'on disait qu'en fait les Etats-

 14   Unis insistaient pour que la BH refuse le plan de Cutileiro ?

 15   R.  Mais bien évidemment. Et je m'attendais à ce que l'auteur en mentionne

 16   au moins quelques-unes.

 17   Cette question a été évoquée dans les écrits de David Binder, un

 18   journaliste américain de plus haut niveau. Il reproduit les propos de

 19   Zimmermann où celui-ci décrit les débats qu'il a mené avec Alija

 20   Izetbegovic. Il dit qu'Alija Izetbegovic était mécontent de cet accord, à

 21   quoi Zimmermann aurait répondu : Mais alors, pour quelle raison l'avez-vous

 22   signé ? Ce texte a été publié à New York, et je peux vous donner une

 23   référence précise. Dans ses mémoires publiées un peu plus tard, Zimmermann

 24   a essayé de rendre son rôle dans ce débat un peu moins important.

 25   Donia, d'ailleurs, évoque David Binder dans ses écrits. Il dit

 26   aujourd'hui, c'est-à-dire en 1993, lorsque Binder a publié cet article, il

 27   dit : Nous avons eu tort de convaincre Izetbegovic pour qu'il rejette

 28   l'accord. Donc, les discussions au sujet du plan Cutileiro auraient pu se


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  1   développer tout autrement, sans une intervention des Etats-Unis. Et pour un

  2   historien objectif, eh bien, je m'attendais à ce que cela soit évoqué et

  3   expliqué, que l'on explique ce qui s'est passé réellement.

  4   Il faut quand même présenter au moins les données de base et ce sont

  5   là les données de base, notamment pour le travail du Tribunal. Nous

  6   essayons d'établir ce qui s'est passé en réalité. Mais, en même temps, bon,

  7   j'imagine que M. Donia a fait de son mieux.

  8   Q.  Compte tenu de la réponse que vous venez de fournir, en votre qualité

  9   d'historien, est-ce que vous pensez que dans un rapport comme celui rédigé

 10   par M. Donia, on aurait dû évoquer non seulement les débat menés au sujet

 11   du plan Cutileiro mais aussi les conséquences du rejet de ce plan pour la

 12   population de la Bosnie-Herzégovine pour ces différents peuples ?

 13   R.  Eh bien, je dirais même qu'un historien n'a pas le devoir de poser ce

 14   type de questions. Est-ce que des conséquences ont été néfastes ou, au

 15   contraire, propices, c'est une question de points de vue. Et cela peut

 16   différer d'une personne à l'autre. Mais M. Donia, dans son rapport, s'est

 17   livré à des exercices d'évaluation politique et il a émis un certain nombre

 18   de jugements de valeur. Et pour cette raison et cette raison seulement, il

 19   aurait peut-être été bon aussi de se pencher sur les conséquences de ce

 20   rejet du plan Cutileiro pour les Croates, les Musulmans et les Serbes de

 21   Bosnie-Herzégovine, puisque finalement, la Bosnie-Herzégovine a été

 22   divisée. Mais après combien de souffrances ? Et cela nous fait penser à

 23   l'attitude affichée parfois par les grandes puissances et les conséquences

 24   par la suite sont subies par les petites gens du peuple. C'est eux qui

 25   paient. Ceci représente un exemple très important, un exemple -- l'exemple

 26   d'une erreur faite par les Etats-Unis. Bon, j'espère que cette erreur

 27   n'était pas délibérée.

 28   Q.  Monsieur le Professeur, vous avez prononcé votre déclaration solennelle


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  1   dans cette salle d'audience. dites-nous si vous maintenez entièrement le

  2   rapport que vous avez fourni pour les besoins de la Défense du général

  3   Mladic et où vous analysez les rapports rédigés par Robert Donia ?

  4   R.  Oui.

  5   M. STOJANOVIC : [interprétation] Messieurs les Juges, mon interrogatoire

  6   principal du Pr Kovic vient de toucher à sa fin. Je souhaite demander le

  7   versement au dossier du document 1D05905, évidemment il ne peut se voir

  8   attribuer qu'une cote provisoire jusqu'au moment où le contre-

  9   interrogatoire sera terminé.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.

 11   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce D1369 MFI, Messieurs les

 12   Juges.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La pièce reçoit une cote provisoire.

 14   Monsieur Kovic, vous allez maintenant être contre-interrogé par M. Traldi

 15   qui se trouve à votre droite et qui est un avocat de l'Accusation.

 16   Monsieur Traldi, vous avez la parole.

 17   Contre-interrogatoire par M. Traldi :

 18   Q.  [interprétation] Bonjour, Monsieur.

 19   R.  Bonjour.

 20   Q.  Les deux rapports dont il a été question aujourd'hui, ce sont les

 21   premiers travaux que vous avez publiés en ce qui concerne les événements

 22   qui se sont produits en Bosnie-Herzégovine dans les années 1990, n'est-ce

 23   pas ?

 24   R.  Eh bien, tout dépend de ce que vous définissez comme des "travaux

 25   publiés".

 26   M. IVETIC : [interprétation] J'aimerais que l'on affiche la pièce D1367,

 27   s'il vous plaît.

 28   Q.  C'est le curriculum vitae que vous avez fourni à la Défense, que vous


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  1   avez revu et qu'il a été admis au dossier ce matin.

  2   Alors, j'aimerais que nous nous penchions sur la page 2, nous voyons

  3   une liste des travaux publiés principaux. Le premier livre sur la liste,

  4   c'est un livre : Disraeli et la question orientale.

  5   Disraeli était le premier ministre britannique au XIXe siècle, n'est-

  6   ce pas ?

  7   R.  En effet.

  8   Q.  Alors, je souhaite attirer votre attention sur la manière dont les

  9   choses se sont développées en 1989 en ce qui concerne la terminologie. Le

 10   terme "historiographie" signifie deux choses à la fois. Il s'applique à la

 11   méthodologie appliquée par un historien d'une part; et de l'autre part, il

 12   s'applique à des études qui sont faites par rapport à un sujet particulier

 13   ?

 14   R.  Eh bien, il existe une question d'équivalence de terminologie qui se

 15   pose entre le serbe et l'anglais. En serbe, l'histoire c'est la science et

 16   c'est ce qui s'est passé. L'historiographie est un terme synonyme pour

 17   l'histoire en tant que science humaine. Donc, voilà le sens de ce terme tel

 18   qu'utilisé ici.

 19   Q.  Donc, historiographie depuis 1989 décrit, autrement dit, tout ce qui

 20   s'est passé dans l'histoire de la science depuis ?

 21   R.  Oui, je pense que vous l'avez bien définie. C'est une analyse critique

 22   de tout ce qui a été publié par les historiens serbes depuis 1989. C'est

 23   donc très semblable le travail que j'ai fait ici. C'est un aperçu critique

 24   de tout ce qui a été produit dans le domaine d'histoire en Serbie. Et c'est

 25   donc un type de travail très similaire à celui que j'ai fait ici.

 26   Q.  N'est-il pas vrai que votre curriculum vitae comprend deux articles

 27   concernant la Deuxième Guerre mondiale et tous les autres articles se

 28   réfèrent à des époques historiques précédentes ?


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  1   R.  Cela est exact. Mais quatre ou cinq articles sont consacrés à la

  2   Bosnie-Herzégovine au XIXe siècle. Et si vous avez lu mon livre consacré à

  3   Disraeli, vous verrez que le centre d'attention c'est justement la Bosnie-

  4   Herzégovine, ce que j'étudie dans ce livre c'est justement l'attitude

  5   affichée par les grandes puissances vis-à-vis de la Bosnie-Herzégovine. Il

  6   faut revenir en arrière, il faut étudier le XIXe siècle pour comprendre ce

  7   qui se passe aujourd'hui. Vous ne comprendrez pas ce qui se passe en

  8   Arménie sans tenir compte du génocide qui a été commis. Vous ne pouvez pas

  9   comprendre Israël et la politique menée là-bas si vous ne connaissez pas ce

 10   qui s'est passé dans les camps de concentration à l'époque nazie. Donc,

 11   pour comprendre ce qui s'est passé récemment en Bosnie-Herzégovine, le même

 12   principe s'applique.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Traldi, je cherche

 14   désespérément la page affichée à l'écran. Mais vous avez dit qu'il

 15   s'agissait de la page 4 --

 16   M. TRALDI : [interprétation] Chez moi, c'est la page 3.

 17   LE TÉMOIN : [aucune interprétation]

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui, mais ce n'est pas la page 2 que

 19   vous avez citée. Donc, il faut quand même citer la page à laquelle vous

 20   faites référence.

 21   M. TRALDI : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

 22   Q.  Alors, Monsieur, mais lorsque tout est dit, il est vrai, n'est-ce pas,

 23   que ces deux rapports sont vos premiers travaux consacrés aux événements

 24   qui se sont produits en ex-Yougoslavie dans les années '90 ?

 25   R.  Oui, on pourrait le dire. Ce sont mes premiers travaux consacrés à la

 26   guerre de Bosnie de 1992 à 1995.

 27   Q.  Avant de passer aux questions qui ont été approfondies dans le cadre de

 28   l'interrogatoire principal, j'aurais quelques questions à vous poser


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  1   concernant quelques autres éléments qui figurent dans votre rapport.

  2   A la page 51 de votre rapport consacré à Donia, vous écrivez :

  3   "La souffrance de tous les civils quelle que soit leur appartenance

  4   ethnique à Sarajevo ne peut pas être réfutée ou justifiée."

  5   N'êtes-vous pas d'accord pour dire que dans votre rapport et dans votre

  6   déposition ce matin, vous vous concentrez surtout sur la souffrance des

  7   civils serbes dans la partie de Sarajevo contrôlée par les Musulmans ?

  8   R.  Oui. Et si vous me permettez d'expliquer, je peux vous dire pour quelle

  9   raison -- c'est parce que tout cela ne figure pas dans les rapports que

 10   j'ai analysés.

 11   Q.  Vous l'avez déjà expliqué dans le cadre de l'interrogatoire principal.

 12   Alors, en écrivant cette phrase, de quelle façon aviez-vous l'intention de

 13   signaler que des Musulmans civils ont aussi souffert dans la ville de

 14   Sarajevo pendant la guerre ?

 15   R.  Mais toutes les informations nécessaires figurent déjà dans le rapport

 16   de Robert Donia qui a fait l'objet de mon analyse, et que j'ai étudié. Il

 17   évite d'évoquer les victimes serbes comme si certaines victimes avaient une

 18   certaine valeur alors que d'autres n'en avaient pas.

 19   Q.  Faut-il alors comprendre que vous avez évité d'évoquer les victimes

 20   musulmanes puisque vous ne remettez pas en question la description fournie

 21   par le Dr Donia au niveau de ce qui est arrivé aux civils musulmans à

 22   l'intérieur des lignes de confrontation ?

 23   R.  Tout ce que je conteste, je le signale dans le rapport. Il y a toute

 24   une série de différents points que je conteste dans mon rapport, mais je ne

 25   remets pas en question les souffrances vécues par les Musulmans civils.

 26   Bien au contraire, je respecte énormément toutes les personnes qui ont

 27   connu des souffrances, qui ont souffert.

 28   Q.  Et est-ce que vous remettez en question les allégations sur lesquelles


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  1   les civils musulmans qui se trouvaient à l'intérieur des lignes de

  2   confrontation ont été terrorisés par des tirs d'obus et par des tirs de

  3   tireurs embusqués ?

  4   R.  Eh bien, vous utilisez le terme de terroriser. C'est aussi le terme

  5   utilisé dans l'acte d'accusation. Et je pense que ce terme a été utilisé à

  6   tort. J'explique ce qui s'est passé à Sarajevo. Je pense que l'objectif

  7   poursuivi n'était pas de terroriser. L'objectif était de contenir le

  8   personnel militaire des Musulmans, les forces armées de la BH, et

  9   manifestement on a fait le choix de diviser la ville. Mais l'objectif visé

 10   n'était pas de terroriser. Il y a eu des victimes par suite des tirs d'obus

 11   et des tirs de tireurs embusqués. Mais la même chose s'appliquait aux

 12   Serbes, et cela ne figure pas dans le rapport de Donia.

 13   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] J'aurais une question à vous poser.

 14   Vous dites que l'objectif visé n'était pas de terroriser la population.

 15   Mais est-ce que ce n'était pas l'effet produit ?

 16   M. STOJANOVIC : [interprétation] Mais cela arrive dans chaque guerre, la

 17   population est terrorisé, qu'il s'agisse de Musulmans ou de Serbes. Donc,

 18   ma tâche était de critiquer le texte qui m'a été remis. Si Robert Donia

 19   décrit ce qui s'est passé à Pofalici --

 20   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Excusez-moi, je ne vous pose pas de

 21   question concernant les critiques que vous avez formulées par rapport aux

 22   textes. Je vous ai posé une question au sujet du terme de terroriser. Donc,

 23   les effets de ce qui se faisait à Sarajevo était de terroriser la situation

 24   [comme interprété]. Merci.

 25   M. TRALDI : [interprétation]

 26   Q.  Il y a quelques instants, vous l'avez évoqué dans votre rapport

 27   consacré à Donia à la page 62, vous dites que l'objectif était de contenir

 28   les militaires musulmans et vous l'expliquez dans votre rapport, vous


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  1   précisez qu'il s'agissait d'un blocus.

  2   Alors mais si on bloque le centre même d'une ville, alors toutes les

  3   personnes qui s'y trouvent y sont bloquées ?

  4   R.  Pouvez-vous me présenter à l'écran mon rapport, s'il vous plaît. Je

  5   n'ai que mon CV affiché à l'écran. Il sera plus facile pour moi de suivre

  6   les questions que vous me poser.

  7   Alors, j'aimerais revenir à la question précédente qui m'a été posée. Donc,

  8   je dis que la terreur n'était pas l'objectif visé. L'objectif était de

  9   contenir le personnel de l'ennemi. Mais même la question du blocus est une

 10   question contestée. Regardez les cartes. Les cartes montrent quelles

 11   étaient les positions de combat en Bosnie-Herzégovine, y compris la ville

 12   de Sarajevo, ce sont des cartes qu'on peut retrouver sur Internet, et vous

 13   verrez que la ville de Sarajevo est toujours liée à l'arrière-pays. Et ces

 14   cartes, elles n'ont pas été élaborées à Banja Luka, vous verrez que sur

 15   toutes les cartes il y a un lien entre la ville de Sarajevo et l'arrière-

 16   pays. Donc, la situation n'était pas la même qu'à Srebrenica et qu'à Zepa.

 17   Si c'est un blocus, il y avait quand même une certaine ouverture. Oui, les

 18   Serbes ont essayé de bloquer la partie orientale de la ville, comme les

 19   Musulmans ont bloqué Ilijas, Hadzici, et cetera. La partie musulmane de

 20   Sarajevo était imbriquée dans la partie serbe de la ville, et cette partie

 21   serbe de la ville dépassait sur la partie musulmane du territoire. Donc,

 22   ici on peut parler d'un blocus.

 23   M. TRALDI : [interprétation] J'aimerais que l'on affiche la pièce P3. Et il

 24   me faut plus particulièrement la page 54.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] En attendant l'affichage du document,

 26   puis-je demander une précision. Vous ai-je bien entendu tout à l'heure,

 27   vous auriez dit : Les Serbes aussi ont été terrorisés.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, si on parle des Musulmans qui ont été


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  1   terrorisés, si on souhaite recourir à ce terme, à ce moment-là, bien

  2   évidemment, les Serbes aussi ont été terrorisés. A mon avis, cela relate du

  3   bon sens.

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais ce n'est pas ce que vous avez dit.

  5   Vous avez dit :

  6   "Dans toutes les guerres, la population souffre, et les victimes. Les

  7   Serbes, eux aussi, ont été terrorisés."

  8   Donc, vous n'avez pas dit : Si on évoque les Musulmans terrorisés il faut

  9   parler aussi des Serbes terrorisés. Vous avez dit tout simplement :

 10   "Les Serbes, eux aussi, ont été terrorisés."

 11   Je vous ai entendu dire cela ou, du moins, c'est l'interprétation que j'ai

 12   reçue.

 13   LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, merci beaucoup. Vous m'avez

 14   maintenant, grâce à votre question, permis de préciser mon point de vue.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Eh bien, ce n'est pas ce que je vous ai

 16   demandé de faire.

 17   Mais continuons.

 18   M. TRALDI : [interprétation] J'aimerais que nous nous concentrions sur ce

 19   cercle qui se trouve à gauche de cette carte.

 20   Q.  Alors, Monsieur, ceci est une carte militaire du SRK. Vous voyez des

 21   lignes en bleu et des lignes en rouge. Et nous voyons la partie urbaine de

 22   la ville de Sarajevo, le centre-ville en bleu, et nous voyons les

 23   abréviations pour les différentes unités du SRK qui entouraient ce centre

 24   urbain de la ville.

 25   Alors, ce centre-ville de Sarajevo est entouré par des lignes rouges

 26   montrant où se trouvaient les forces de la VRS, n'est-ce pas ?

 27   R.  Oui, oui. Mais regardez ce qui se passe en direction de Butmir,

 28   d'Igman, et de Bjelasnica, et la zone du 4e Corps d'armée qui ne se voit


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  1   pas ici, sans parler de Konjic, de Mostar, et cetera.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Traldi, je regarde l'heure

  3   qu'il est. Je pense que le moment est venu de faire une pause.

  4   M. TRALDI : [interprétation] Je suis bien d'accord avec vous.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cette Chambre s'est vu présenter un

  6   grand nombre d'éléments de preuve concernant les sites où se trouvaient les

  7   unités, où elles étaient déployées à l'intérieur de Sarajevo, dans les

  8   alentours de Sarajevo, nous avons également entendu un grand nombre de

  9   témoignages concernant ce que certains définissaient comme étant un siège

 10   ou un encerclement, alors que d'autres utilisaient une terminologie

 11   différente. Les Juges de la Chambre souhaitent s'appuyer sur des faits et,

 12   en fait, les sites où les unités étaient déployées n'ont pas vraiment été

 13   contestés. Donc, appuyez-vous sur les faits plutôt que de les décrire.

 14   M. TRALDI : [interprétation] Je comprends ce que vous voulez dire, Monsieur

 15   le Président.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci. Nous allons faire une pause. Nous

 17   vous reverrons dans 20 minutes, Monsieur le Témoin.

 18   [Le témoin quitte la barre]

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous reprenons nos travaux à midi 15.

 20   --- L'audience est suspendue à 11 heures 56.

 21   --- L'audience est reprise à 12 heures 17.

 22   [Le témoin vient à la barre]

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] C'est à vous, Monsieur Traldi.

 24   M. TRALDI : [interprétation] Numéro 65 ter 33442, s'il vous plaît.

 25   Q.  Il s'agit d'un livre intitulé le "Leçons apprises en Bosnie" rédigé par

 26   le général Michael Rose. Vous en parlez dans votre livre, n'est-ce pas ?

 27   Donc, vous l'avez lu ce livre, n'est-ce pas ?

 28   R.  Non, ce n'est pas le livre -- ah, si. Oui, c'est combattre pour la


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  1   paix. J'ai lu la traduction en serbe.

  2   Q.  Et quels passages avez-vous choisi d'inclure dans votre livre ?

  3   R.  Alors, je vais vous dire cela très précisément dans l'édition serbe,

  4   c'étaient les pages 40 et 41, si je me souviens bien. Il s'agit des

  5   références dans l'ouvrage en serbe.

  6   Q.  Page 25 de ce document, s'il vous plaît.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Traldi, je ne sais pas quelle

  8   attention vous voulez faire porter à ce livre, mais le témoin nous a

  9   expliqué déjà qu'il n'a pas payé attention aux critiques envers la partie

 10   serbe pour la raison qu'il a expliquée. J'étais sur le point de dire ne

 11   vous inquiétez pas parce que l'auteur ici semble apparaître en tant que

 12   témoin, donc nous avons beaucoup d'information concernant cette question-là

 13   et les points de vue du témoin là-dessus.

 14   Veuillez garder ceci à l'esprit. Je ne sais pas où vous allez, si ceci peut

 15   vous être utile.

 16   M. TRALDI : [interprétation] Ecoutez, je pense qu'il y a deux exemples que

 17   je souhaite soumettre au témoin, et on parle de son ouvrage. Cela concerne

 18   les critiques envers la partie serbe, malheureusement.

 19   Q.  Alors ici, le début du dernier paragraphe se lit comme suit, le bas de

 20   la page :

 21   "Un Etat qui risque de s'effondrer, comme c'était le cas de la Bosnie en

 22   1992, dépend véritablement de la présence des forces des Nations Unies si

 23   elles souhaitent survivre."

 24   Alors vous commencez ici votre citation :

 25   A la mi-1994, le gouvernement de Bosnie avait visiblement cessé

 26   d'appuyer les efforts de maintien de la paix des Nations Unies en pensant

 27   qu'un cessez-le-feu pouvait se transformer en gèle de la ligne de conflit,

 28   ce qui donnerait lieu à une division injuste" -alors page suivante, en haut


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  1   de la page, s'il vous plaît - "du pays. Par conséquent, il a ordonné à son

  2   armée de lancer des offensives pour reprendre les territoires perdus au

  3   cours des derniers combats avec les Serbes, et donc la plaçant dans une

  4   situation de confrontation avec les Nations Unies dont le but était

  5   d'assurer le maintien de la paix dans le pays."

  6   Alors la question que je vous pose, c'est que ce paragraphe ne tient

  7   pas compte du fait que la VRS avait conquis une grande partie du territoire

  8   en Bosnie-Herzégovine, n'est-ce pas ?

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Témoin, veuillez ne pas

 10   interrompre M. Traldi lorsqu'il prend la parole, s'il vous plaît. Et

 11   apparemment, il y a quelque chose qui vous inquiétait ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Pardonnez-moi. Je ne vois plus le paragraphe

 13   en question. Il a disparu, le paragraphe que vous citez. Est-ce que c'est

 14   entre les pages 8 et 9 ? Je ne le vois pas. Je ne vois pas de quoi il

 15   s'agit, je ne vois pas ce que j'ai omis.

 16   Il y a quelques instants je l'ai vu, maintenant cela n'est plus à l'écran.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous sommes passés de la page 8 à la

 18   page 9, me semble-t-il. Monsieur Traldi, peut-être que nous pourrions

 19   revoir la page 8, s'il vous plaît, Monsieur Traldi, parce que -- 

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Cela n'est pas nécessaire. Je comprends

 21   maintenant.

 22   M. TRALDI : [interprétation]

 23   Q.  Donc le passage que je vous soumets et que vous avez omis, c'est qu'en

 24   1992, le gouvernement de Bosnie, pour m'assurer que j'ai les bons termes,

 25   risquait de s'effondrer et dépendait de la présence des forces des Nations

 26   Unies pour pouvoir survivre.

 27   Estimez-vous qu'il est important de comprendre ce que dit le général

 28   Rose dans ce passage ?


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  1   R.  Puis-je revoir la phrase, s'il vous plaît, la page 8 ?

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Une page en arrière, s'il vous plaît.

  3   M. TRALDI : [interprétation] C'est en bas de la page, le paragraphe qui se

  4   trouve en bas de la page.

  5   LE TÉMOIN : [interprétation] Très bien. "Collapse", d'accord.

  6   Vous voyez la phrase en question. Je ne vois pas ce qui est contesté à ce

  7   niveau-là. Donc :

  8   "Un Etat qui risque de s'effondrer, comme c'était le cas de la Bosnie en

  9   1992, dépendait à l'origine de la présence des forces des Nations Unies

 10   pour sa survie."

 11   Alors, si on omet de citer cette phrase, qu'est-ce que cela prouve à votre

 12   avis ? Bon, je vais attendre ce que vous avez à me dire.

 13   M. TRALDI : [interprétation]

 14   Q.  Est-ce que vous dites dans votre déposition que vous pouvez bien

 15   comprendre la description qu'a faite le général Rose sans préciser cet

 16   élément d'information, c'est-à-dire qu'en 1992, lorsque la guerre a

 17   commencé à se propager sur l'ensemble du territoire de la Bosnie-

 18   Herzégovine, l'Etat de Bosnie risquait de s'effondrer ?

 19   R.  Il ne parle pas de campagne menée par l'armée de la Republika Srpska,

 20   pas du tout. Cela ne figure pas dans ces phrases-ci. Donc, oui,

 21   effectivement, je confirme que la citation que j'ai fournie illustre la

 22   position prise par le général Rose. On ne parle pas du tout de la VRS ici.

 23   Vous voyez, cela ne figure pas ici. On parle d'un Etat qui risque de

 24   s'effondrer, il s'agissait de la Bosnie en 1992, et qui dépendait de la

 25   présence des forces des Nations Unies pour sa survie. Et les dirigeants --

 26   je crois que c'est tout à fait clair. Je vous en prie, allez-y.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez simplement répondre à la

 28   question. M. Traldi vous a demandé si vous pensez que le fait de ne pas


Page 41993

  1   inclure cette première phrase, pensez-vous que nous serions en mesure de

  2   parfaitement comprendre la position ou le point de vue qui était celle du

  3   général Rose dans ce livre.

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] La réponse est oui, bien entendu.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre.

  6   M. TRALDI : [interprétation]

  7   Q.  Vous avez attiré notre attention sur le fait que la VRS n'est pas

  8   mentionnée de façon explicite. En tant qu'historien, qui risquait de

  9   compromettre la survie de l'Etat de Bosnie en 1992 ? Etait-ce vous, moi ?

 10   C'était la VRS, n'est-ce pas ?

 11   R.  Etant donné que vous me posez la question en tant qu'historien, vous

 12   courez le risque d'entendre une réponse fort longue à cette question,

 13   comment la guerre en Bosnie s'est déroulée. J'en ai déjà parlé dans

 14   d'autres sources. Si vous pensez que c'est les Serbes ou la VRS qui a

 15   commencé à attaquer, et que eux étaient à l'origine, c'est eux qui ont

 16   commencé la guerre --

 17   Q.  Ne pensez-vous pas que cette affaire ne porte pas sur qui a commencé la

 18   guerre, mais sur quels crimes ont été commis pendant la guerre ?

 19   R.  Vous me posez une question différente maintenant. Est-ce que nous

 20   pouvons revenir à la première question et à ce moment-là, je pourrais

 21   répondre à vos questions une à la fois.

 22   Vous m'avez posé une question au sujet de ces fantômes. Je ne sais pas,

 23   est-ce que nous pourrions en parler de façon sérieuse ?

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, vous semblez être très bouleversé

 25   par cette question. Vous êtes là simplement pour répondre aux questions.

 26   Veuillez vous concentrer là-dessus.

 27   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, donc voici ma réponse.

 28   Je ne suis pas du tout bouleversé. Je ne vois pas ce que les chasseurs de


Page 41994

  1   fantômes ont à voir avec la souffrance de la population en Bosnie-

  2   Herzégovine en 1992.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors la question posée était simplement

  4   de savoir - et je vais vous relire la question - qui a démarré -- non, la

  5   dernière question qui vous a été posée était de savoir si vous comprenez

  6   que cette affaire ne porte pas sur qui a commencé la guerre, qui a démarré

  7   la guerre, mais qu'il s'agit de crimes commis pendant la guerre.

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Il s'agit de deux questions. Je lis la

  9   première question qui m'a été posée : En tant qu'historien, qui a menacé la

 10   survie de l'Etat de Bosnie en 1992 ? Et ensuite, cette deuxième question. A

 11   quelle question souhaitez-vous que je réponde ? La seconde ?

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si vous avez bien écouté, vous sauriez

 13   que je vous ai posé la deuxième question. Nous allons peut-être revenir à

 14   la première question, c'est possible. Je vous demande de bien vouloir

 15   répondre à cette deuxième question plutôt que de commencer un débat sur le

 16   sujet de quelle question vous a été posée.

 17   LE TÉMOIN : [interprétation] Donc je comprends que des crimes sont le sujet

 18   qui vous intéresse. Les rapports que j'ai lus et analysés portent sur qui a

 19   commencé la guerre et quels sont les crimes qui ont été commis. Donc, je

 20   reviens ici à ma mission qui est la mienne. Et le terme qui est abordé, je

 21   pense que le renvoi à des chasseurs de fantômes montre qui est bouleversé

 22   ici.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Apparemment, ceci vous a beaucoup

 24   bouleversé, ce qui fait que vous ne répondez pas à la question. La question

 25   n'est pas de savoir quelle est votre mission ici, la question est de savoir

 26   si vous comprenez que cette affaire ne porte pas sur qui a commencé la

 27   guerre. Et oubliez pendant quelques instants les chasseurs de fantômes.

 28   Cette affaire ne porte pas sur qui a commencé la guerre, mais porte sur les


Page 41995

  1   crimes commis pendant la guerre. Est-ce que vous comprenez cela ?

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dans ce cas, Monsieur Traldi, vous

  4   pouvez reprendre.

  5   Monsieur Traldi, étant donné que le témoin apparemment est préoccupé par le

  6   fait qu'une question n'a pas été abordée, même s'il n'a pas répondu tout de

  7   suite à la question, veuillez répéter votre question sans parler des

  8   chasseurs de fantômes.

  9   M. TRALDI : [interprétation] J'entends bien.

 10   Q.  Monsieur, c'était la VRS qui menaçait l'état naissant que constituait

 11   la Bosnie et qui menaçait sa survie en 1992, n'est-ce pas ?

 12   R.  Eh bien, je vais vous dire quelque chose. Des séparatistes, des

 13   sécessionnistes se trouvaient parmi les dirigeants des Musulmans et des

 14   Croates dans la République de Bosnie-Herzégovine et qui ont participé à la

 15   destruction de la Yougoslavie. Avec leurs unités paramilitaires, ils ont

 16   attaqué des unités de l'armée régulière. Autrement dit, la JNA, les armées

 17   de l'armée régulière de la République fédérale de Yougoslavie. Et donc, eux

 18   ont compromis l'existence même de la Yougoslavie. Et ensuite, la guerre a

 19   éclaté. Vous savez quels événements se sont produits.

 20   Ensuite, les troupes de Croatie, les troupes croates, se sont

 21   trouvées sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine au moins entre le mois

 22   de mars 1992 jusqu'à la fin de la guerre. Et ça, peut-être, est-ce que vous

 23   pensez que cela compromet --

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Vous semblez vouloir dire que cela n'est

 25   pas vrai.

 26   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, oui, oui. Oui.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Dites-le simplement, dites que cela

 28   n'est pas vrai. Et à ce moment-là, nous verrons quelle sera la question


Page 41996

  1   suivante de M. Traldi.

  2   En outre, Monsieur Mladic, je vous demande de bien vouloir vous abstenir

  3   d'exprimer votre joie ou mécontentement de quelle que manière que ce soit

  4   par rapport aux réponses fournies.

  5   Et vous, vous ne devez absolument pas établir un quelconque contact

  6   visuel avec la Défense. C'est M. Traldi qui vous interroge, et donc,

  7   veuillez vous tourner vers lui. C'est lui qui vous interroge.

  8   Monsieur Mladic, veuillez vous tourner dans cette direction-ci et

  9   éviter tout contact inapproprié avec des membres de la galerie du public.

 10   Vous savez ce dont je parle.

 11   Veuillez poursuivre.

 12   M. TRALDI : [interprétation]

 13   Q.  A la page suivante, on parle des territoires que le gouvernement de

 14   Bosnie avait perdu dans le cadre de combat avec les Serbes. Vous admettez

 15   que ces combats se sont déroulés, n'est-ce pas, il s'agissait de combats

 16   essentiellement avec la VRS ?

 17   R.  Oui, ça, c'est à la page suivante. Je ne vois pas cette page. C'est à

 18   la page 9, n'est-ce pas ? Permettez-moi de voir ce paragraphe, s'il vous

 19   plaît.

 20   Q.  Cela se trouve en haut de la page, Monsieur.

 21   R.  Très bien. Oui, d'accord, le gouvernement ordonne une offensive pour

 22   rendre des territoires qui étaient --

 23   Q.  Je vais vous demander de bien vouloir répondre à ma question. Vous

 24   admettez que ces combats au cours desquels des territoires ont été perdus,

 25   qu'il s'agissait de combats contre la VRS et que c'est la VRS qui a conquis

 26   ces territoires, n'est-ce pas ?

 27   R.  Oui, je réponds. Il s'agissait de combats qui ont eu lieu avec l'armée

 28   de la Republika Srpska.


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  1   Q.  Vous ne parlez absolument pas soit dans votre rapport, soit ailleurs,

  2   ce qu'il est advenu des non-Serbes qui vivaient sur le territoire que le

  3   gouvernement de Bosnie avait perdu, n'est-ce pas ?

  4   R.  Je dois vous répéter quelle était ma mission en tant que témoin expert

  5   ? On m'a demandé d'analyser le rapport de Robert Donia et Patrick Treanor,

  6   et dans ces rapports-là, aucune mention n'est faite de cela. On peut parler

  7   de façon générale de l'historique de la guerre en Bosnie-Herzégovine, mais

  8   je n'ai pas écrit là-dessus --

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, vous avez donné vos raisons, mais

 10   vous n'avez pas répondu à la question. La réponse, c'est que non, vous n'en

 11   avez pas parlé, n'est-ce pas ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien.

 14   M. TRALDI : [interprétation]

 15   Q.  Nous allons passer à la page 52. On peut lire le commentaire du général

 16   Rose, qui se trouve en haut de la page :

 17   Pendant la guerre, les Musulmans de Bosnie ont constitué les principales

 18   victimes d'une politique délibérée et systématique de nettoyage ethnique

 19   et, dans certaines régions, d'extermination. Même si les trois parties au

 20   conflit, dans une certaine mesure, étaient coupables de crimes de guerre,

 21   le génocide, tel que définit par les conventions des Nations Unies sur le

 22   génocide, ceci ne constitue pas la politique officielle du gouvernement de

 23   Bosnie à la manière dont cela l'était pour les Serbes.

 24   Je pense que vous pouvez comprendre la partie du texte que vous avec citée,

 25   sans pour autant savoir ce qui s'était passé sur ces territoires qui

 26   avaient été perdus, et la politique délibérée systématique de nettoyage

 27   ethnique, d'extermination et de génocide. C'est cela, la vérité, n'est-ce

 28   pas ?


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  1   R.  Non. Pour ce qui est de l'extermination et du sort des Musulmans sur

  2   les territoires détenus par les Bosno-Serbes, c'est ce sur quoi se penchent

  3   Patrick Treanor et Robert Donia de façon importante. Cela ne fait pas

  4   l'objet de mon analyse. Mon analyse porte sur les textes et ce que vous

  5   citez maintenant est quelque chose qui a été longuement abordé par ces deux

  6   personnes.

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, la question était de savoir si

  8   vous étiez à même de comprendre le passage que vous avez cité du livre du

  9   général Rose, sans tenir compte de ce passage-ci de son livre. C'était la

 10   question qui a été posée. On ne vous demande pas si c'était vrai ou pas. On

 11   vous demandait simplement de nous dire si vous étiez capable de comprendre

 12   la position du général Rose, sans tenir compte de ce passage qui vient de

 13   vous être cité du livre.

 14   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Oui, on peut tout à fait comprendre la

 15   raison pour laquelle je l'ai cité, oui, tout à fait.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez poursuivre.

 17   M. TRALDI : [interprétation]

 18   Q.  Ce matin, vous avez longuement évoqué le fait qu'il était important de

 19   comprendre les motivations des acteurs historiques. Alors, si la présidence

 20   de Bosnie avait, par exemple, abordé la question ou avait abordé la

 21   nécessité de résister dans le cadre d'accords de paix permettant de

 22   cimenter ou, en tout cas, de rendre permanents les changements territoriaux

 23   provoqués par le nettoyage ethnique et le génocide, cela changerait-il

 24   votre avis sur le fait de savoir si vous aviez besoin d'inclure ce passage

 25   pour comprendre la partie de son livre que vous avez citée ?

 26   R.  Je dois admettre que je n'ai pas compris votre question. Veuillez poser

 27   une question plus simple et plus courte. Peut-être que c'est un problème

 28   d'interprétation.


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  1   M. TRALDI : [interprétation] Je vais essayer d'être très rapide et je vais

  2   vous montrer un document, mais avant de faire cela, je demande à ce que

  3   l'on réserve une cote pour certains extraits de cet ouvrage qui a été

  4   utilisé en présence de plusieurs témoins.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier d'audience.

  6   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P7718, Messieurs les

  7   Juges.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc cette cote a été réservée pour les

  9   extraits de ce livre du général Rose qui n'a pas encore été téléchargé dans

 10   le prétoire électronique.

 11   Je pense qu'il faut permettre au témoin de répondre à la question. Alors,

 12   moi, je vais voir si je comprends la question, parce que la question était

 13   assez longue.

 14   Est-ce que vous estimez que ces observations faites par le général Rose

 15   sont des observations pertinentes et si elles permettent de comprendre

 16   pourquoi le gouvernement de Bosnie a résisté ou s'est opposé aux accords de

 17   paix qui cimenteraient et rendraient permanents ces changements au niveau

 18   des changements territoriaux ?

 19   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui. Cette motivation du gouvernement de

 20   Bosnie figure dans cette partie du texte du livre que j'ai cité. Faites

 21   attention, regardez bien ce que j'ai cité. J'ai dit qu'ils ont opposé une

 22   résistance en 1994 parce qu'ils pensaient que les Serbes avaient conquis

 23   une région très grande et qu'ils souhaitaient reprendre leur territoire.

 24   Alors, je l'ai cité cela. Veuillez regarder cette citation.

 25   Et j'ai parlé de la motivation de ce gouvernement dans cette partie-là du

 26   rapport.

 27   M. TRALDI : [interprétation]

 28   Q.  Alors, la motivation qui consiste à éviter que soient cimentés les


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  1   résultats ou les conséquences du nettoyage ethnique et du génocide ne

  2   sont pas dans la partie du livre que vous citez de façon explicite,

  3   n'est-ce pas ?

  4   R.  Alors, si vous voulez parler de nettoyage ethnique et de génocide, ceci

  5   a été commis contre les Serbes également en Bosnie-Herzégovine. Peut-être

  6   que les Serbes souhaitaient reprendre certains de ces territoires d'où ils

  7   avaient été chassés. Voilà la réponse que j'ai à vous donner.

  8   Alors, permettez-moi de répéter. Dans la citation que j'ai fournie,

  9   citation du livre, je parle de la motivation du gouvernement, la présidence

 10   d'Alija Izetbegovic, qu'ils souhaitaient reprendre ou prendre le contrôle

 11   de ces territoires. Cela vous pouvez le lire. Cela figure dans cette

 12   citation. Si c'est cela la question que vous me posez.

 13   Q.  Je vois, qu'encore une fois, vous êtes revenu sur la question de savoir

 14   ce qui est arrivé aux Serbes. Est-ce que vous contestez le fait qu'il y a

 15   eu un nettoyage ethnique contre les Musulmans de Bosnie et les Croates de

 16   Bosnie ?

 17   R.  Non, je ne le conteste pas. Et j'ai dit que des crimes avaient été

 18   commis -- c'est ce que dit Michael rose également. Des crimes avaient été

 19   commis par toutes les parties au conflit. Et cela je ne le nie pas. Mais ma

 20   mission ne consistait pas à écrire l'historique de la guerre en Bosnie-

 21   Herzégovine.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Alors, c'était une question simple,

 23   personne ne vous dit que vous deviez parler d'un terme ou d'un autre. Vous

 24   n'avez pas besoin de répéter cela. Vous avez déjà répondu à la question.

 25   M. TRALDI : [interprétation]

 26   Q.  Est-ce que vous contestez le fait que le nettoyage ethnique de Croates

 27   de Bosnie et de Musulmans de Bosnie a été commis, entre autres, par la

 28   VRS ?


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  1   R.  Cela n'était pas le sujet de mon livre, et je n'ai pas été cité à la

  2   barre ici pour répondre à cette question-là.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Mais la question vous est maintenant

  4   posée. Si vous pouvez répondre à la question, bien, soit, faites-le. Si

  5   vous ne pouvez pas répondre à la question dites-le-nous, et dites-nous

  6   pourquoi vous ne pouvez pas répondre à la question.

  7   Tout d'abord, si vous ne pouvez pas répondre à la question, dites-nous

  8   pourquoi vous ne pouvez pas répondre à la question.

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne peux pas répondre à cette question.

 10   Puisque ma tâche était d'analyser les rapports de ces deux experts, et non

 11   pas d'écrire l'histoire des nettoyages ethniques dans certaines parties de

 12   la Bosnie-Herzégovine. Je répète : un rapport est consacré à Sarajevo, et

 13   je souhaite répondre à des questions concernant Sarajevo. Je souhaite

 14   répondre à des questions concernant mon rapport et concernant les rapports

 15   de ces experts de l'Accusation. Nous pouvons parler de l'histoire générale

 16   de la guerre en Bosnie-Herzégovine mais je ne suis pas cité en tant que

 17   témoin expert pour parler de cela.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Témoin, vous avez été cité

 19   en tant que témoin ici pour déposer et pour répondre à des questions,

 20   indépendamment du fait si vous pensez que ces questions sont pertinentes et

 21   si ces questions doivent vous être posées. La Défense vous a cité à la

 22   barre en tant que témoin. Et l'Accusation, lors du contre-interrogatoire,

 23   peut poser toutes les questions qu'elle considère pertinentes.

 24   Ce n'est pas à vous de décider sur quel sujet les questions porteront. Si

 25   vous ne connaissez pas certaines choses, dites-le-nous. Mais ne dites pas

 26   que vous n'êtes pas ici pour répondre à ces questions, vous êtes ici pour

 27   répondre à toutes les questions posées par les parties au procès et par les

 28   Juges de la Chambre.


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  1   Continuez, Monsieur Traldi.

  2   M. TRALDI : [interprétation]

  3   Q.  Monsieur, à la page 8 de votre rapport où vous répondez à Patrick

  4   Treanor, c'est la pièce aux fins d'identification D1368, vous dites que les

  5   conclusions de Treanor résument "ce que les Serbes de Bosnie ont vécu des

  6   référendums le 10 novembre 1991 jusqu'à la fin de 1992 au moment où ils

  7   contrôlaient 70 % du territoire de la Bosnie-Herzégovine et lorsqu'ils

  8   étaient engagés au nettoyage ethnique."

  9   Vous n'avez pas exprimé votre point de vue concernant cette conclusion dans

 10   votre rapport. Est-ce que je dois supposer que par rapport à vos réponses

 11   que vous ne contestez pas cela ?

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stojanovic.

 13   M. STOJANOVIC : [interprétation] Est-ce que le témoin peut voir cela à

 14   l'écran pour qu'il voit le contexte. Et pour qu'il puisse utiliser

 15   également la version papier de la version en anglais de ce document.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Traldi, je pense que c'est une

 17   demande correcte.

 18   M. TRALDI : [interprétation] Bien sûr. J'ai fourni le numéro. Et maintenant

 19   je demande que la page 8 en anglais soit affichée pour le témoin.

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Je préférerais que la page correspondant en

 21   serbe soit affichée.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Témoin, attendez quelques

 23   instants, Monsieur le Témoin, pour que cela soit affiché, et vous allez

 24   voir que la version en serbe est là, et vous n'avez pas besoin d'y

 25   insister.

 26   Continuez. Et nous n'avons même pas la version en anglais à l'écran pour le

 27   moment.

 28   M. TRALDI : [interprétation] J'ai des copies du rapport de Treanor dans les


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  1   deux versions linguistiques, et je peux les faire remettre au témoin.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Oui. Monsieur le Témoin, vous allez

  3   recevoir les copies papier de ces rapports…

  4   LE TÉMOIN : [interprétation] J'ai vu ce rapport en serbe il y a quelques

  5   instants.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Témoin, vous l'avez --

  7   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Mais cela a disparu de l'écran.

  8   Des deux côtés dans l'écran.

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] S'il y a une version en B/C/S, vous

 10   allez toujours la voir sur votre écran, pour ce qui est de vos rapports

 11   vous les avez en copies papier. Et cela devrait résoudre le problème

 12   concernant cet affichage. Bien que les versions en papier ont été montrées

 13   à la Défense -- la Défense n'a pas voulu les revoir.

 14   Continuez, Monsieur Traldi.

 15   M. TRALDI : [interprétation] Je crois que cela correspond à la page 9 dans

 16   la version en B/C/S.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pouvez-vous répéter votre question,

 18   Monsieur Traldi.

 19   M. TRALDI : [interprétation]

 20   Q.  Vous avez fait référence au paragraphe 4 du rapport de Treanor où on

 21   voit les conclusions, vous avez dit qu'il résume étape par étape le chemin

 22   passé par "les Serbes de Bosnie du référendum les 9 et le 10 novembre 1991

 23   jusqu'à la fin de 1992 au moment ils contrôlaient 70 % du territoire de la

 24   Bosnie-Herzégovine et/où ils étaient impliqués au nettoyage ethnique."

 25   Est-ce que je peux conclure, vu votre réponse de ce matin, que vous

 26   ne contestez pas cette conclusion de M. Treanor ?

 27   R.  Non. Je conteste cette conclusion de M. Treanor, et je peux expliquer

 28   cela, si vous le voulez.


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  1   Q.  Allez-y.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Traldi, je n'ai pas trouvé

  3   cela, la partie que vous venez de citer.

  4   M. TRALDI : [interprétation] C'est le deuxième paragraphe entier en

  5   anglais, du côté droit, Monsieur le Président.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maintenant, je vois cela.

  7   Pouvez-vous expliquer pourquoi vous contestez cette conclusion ?

  8   LE TÉMOIN : [interprétation] Dans la suite de mon paragraphe, il est

  9   clairement dit pourquoi j'ai contesté cela. C'est parce que dans la

 10   conclusion du rapport de M. Treanor, dont il est question et où il suit le

 11   chemin qui, entre les guillemets, les Serbes de Bosnie ont passé en

 12   procédant à un nettoyage ethnique, que les autres parties belligérantes ne

 13   sont pas mentionnées du tout. Je l'ai appelée, cette conclusion, comme

 14   étant la conclusion absurde.

 15   Et ce qui est mentionné au paragraphe 92 de ce rapport, où il est dit

 16   que le SDS armait ses partisans en automne 1991, mais il n'est rien dit

 17   pour ce qui est de l'armement beaucoup plus auparavant des membres du SDA

 18   et du HDZ. La Défense m'a fourni les copies papier, mais je ne sais pas

 19   s'il faut que je me concentre sur ces copies papier ou sur ce qui est

 20   affiché à l'écran, je ne sais pas ce qu'il faut que je fasse.

 21   M. TRALDI : [interprétation]

 22   Q.  Est-ce que vous contestez que, comme il l'a dit, les Serbes de Bosnie

 23   étaient impliqués au nettoyage ethnique pendant l'année 1992 ? Oui ou non.

 24   R.  Voilà, ma réponse ne peut être que ce qui suit : le nettoyage ethnique

 25   était fait par les trois parties belligérantes. Et c'est ce qui est dit

 26   dans le paragraphe que vous avez lu dans le livre de Michael Rose.

 27   Q.  L'une de ces parties était les Serbes de Bosnie, n'est-ce pas ?

 28   R.  Oui.


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  1   Q.  Maintenant, pour ce qui est de votre déposition ce matin en disant

  2   qu'il est nécessaire de citer les sources de tous les côtés, de toutes les

  3   parties, les sources meilleures à être évaluées sont les propos du général

  4   Mladic pour ce qui est du nettoyage ethnique planifié ?

  5   R.  Non. Et je peux vous dire pourquoi.

  6   Q.  Oui.

  7   R.  Vous ne pouvez écrire l'histoire des événements survenus en Bosnie-

  8   Herzégovine en s'appuyant seulement sur une source, mais vous devez les

  9   comparer avec les autres. Mais j'aurais aimé, Monsieur Traldi, d'avoir

 10   obtenu les notes de Ganic ou d'un Moudjahiddine, Abu Hamza Al-Masri, qui

 11   combattait aux côtés des Musulmans de Bosnie.

 12   Q.  Monsieur le Témoin, je comprends que vous préfériez répéter donc les

 13   noms des personnes du côté musulman. Qu'est-ce que vous pouvez nous dire

 14   pour ce qui est des notes du général Mladic ?

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Stojanovic.

 16   M. STOJANOVIC : [interprétation] Excusez-moi, il y a eu l'intervention du

 17   général Mladic, la dernière question n'a pas été interprétée.

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous avez reçu

 19   l'interprétation de la question ?

 20   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 21   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc cela me surprend. Pouvez-vous

 22   répéter puisque M. Mladic n'a pas entendu l'interprétation de la question.

 23   LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi, dans la question, cela n'est pas

 24   clair. Il y a la mention des personnes du côté des Musulmans, mais Abu

 25   Hamza n'est pas mentionné.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pouvez-vous répéter votre question,

 27   Monsieur Traldi.

 28   M. TRALDI : [interprétation]


Page 42007

  1   Q.  Les notes concernant ces personnes du côté des Musulmans peuvent vous

  2   dire pour ce qui est de l'intention du général Mladic ?

  3   R.  Dans l'histoire, une action ne se déroule pas sans raison. Il s'agit de

  4   l'interaction des parties belligérantes, de l'action et de la réaction des

  5   parties belligérantes.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Témoin, pouvez-vous répondre

  7   à la question posée, à la question qui était posée pour savoir ce que ces

  8   commentaires, ces textes pourraient vous dire pour ce qui est de

  9   l'intention du général Mladic.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, la réponse à la question est de dire si

 11   les notes du général Mladic étaient importantes pour ce qui est du

 12   nettoyage ethnique. La réponse était non, puisqu'il faut les comparer avec

 13   d'autres sources. L'information historique et toute la comparaison des

 14   déclarations de témoins faites par le Tribunal peuvent être considérées

 15   comme quelque chose qui est similaire à la comparaison des sources des

 16   informations par les historiens.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Apparemment, vous n'avez pas bien

 18   entendu la question.

 19   M. TRALDI : [interprétation]

 20   Q.  En fait, la source-clé avec laquelle il faudrait comparer ces

 21   informations serait les déclarations parlant des événements survenus sur le

 22   terrain et que vous avez exclus délibérément de votre rapport ?

 23   R.  Non, je n'ai pas fait cela de façon délibérée, non.

 24   M. TRALDI : [interprétation] Peut-on maintenant afficher le document 65 ter

 25   00994.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Traldi, si vous voulez obtenir

 27   la réponse à vos questions, la prochaine fois ne posez pas deux questions

 28   en une question. Procédez pas à pas; une question concernant les sources-


Page 42008

  1   clés et la deuxième question concernant le fait si quelque chose a été omis

  2   de façon intentionnelle.

  3   M. TRALDI : [interprétation] Je vais le faire.

  4   Q.  Monsieur le Témoin, seriez-vous d'accord pour dire que les événements

  5   sur le terrain auraient dû être la source-clé pour pouvoir les comparer

  6   avec les déclarations faites par certaines des personnes pour établir leur

  7   intention concrète ?

  8   R.  Oui, les événements sur le terrain, oui.

  9   M. TRALDI : [interprétation] Maintenant, pour ce qui est de cet article, il

 10   s'agit d'un article de Nin, il s'agit de l'entretien accordé par le général

 11   Mladic. Le titre est : "Je suis juste un soldat." Page 3 en anglais et page

 12   2 en B/C/S, dans la deuxième colonne, la deuxième colonne en dessous de la

 13   photo. Et je ne pense pas que la page en anglais soit la bonne page.

 14   Excusez-moi, il faut afficher la page 4 en anglais.

 15   Q.  On a posé la question au général Mladic concernant les raisons pour

 16   lesquelles la guerre entre les Musulmans et les Croates a éclaté. Et cela

 17   commence quelques lignes vers la fin du paragraphe :

 18   "Nous savons tous qui sont les Turcs. En fait, ces Musulmans ne sont même

 19   pas les Turcs. Ils sont les convertis à l'Islam. Ils ont trahi le peuple

 20   serbe et l'ont opprimé pendant 500 ans. Il s'agissait de la racaille du

 21   peuple serbe qui a changé leur religion."

 22   Ce type de déclaration pourrait aider un historien à évaluer l'intention du

 23   général Mladic, n'est-ce pas, et l'objectif du général Mladic ?

 24   R.  Je n'ai pas voulu vous interrompre, mais je ne vois pas la version en

 25   serbe de cet article. Cela n'a pas été montré du tout. Cela n'est pas cela.

 26   Mais je peux répondre à votre question entre-temps, si vous le

 27   voulez.

 28   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Si vous y insistez, nous allons


Page 42009

  1   retrouver cette version.

  2   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Et ensuite, vous pouvez répondre à la

  4   question.

  5   M. TRALDI : [interprétation]

  6   Q.  Cela commence en bas de la première colonne et vous pouvez voir que les

  7   mots "500 ans" se trouvent en dessous de la photo.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Est-ce que vous avez trouvé cela ?

  9   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Répondez à la question, s'il vous plaît.

 11   LE TÉMOIN : [interprétation] Je vais répondre en tant qu'historien. C'est

 12   pour cela que je suis ici devant la Chambre. Vous allez trouver ces

 13   déclarations du côté de la partie qui combattait les Serbes. J'ai déjà

 14   mentionné des noms. Il n'est pas nécessaire que je répète ces noms.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Témoin, il faut que je vous

 16   arrête là. S'il vous plaît, répondez à la question posée par M. Traldi.

 17   Monsieur Traldi, répétez votre question, s'il vous plaît.

 18   M. TRALDI : [interprétation]

 19   Q.  Ce type de déclaration pourrait aider un historien à évaluer les

 20   intentions et les objectifs du général Mladic, n'est-ce pas ?

 21   R.  Dans une guerre, on peut appeler cela la propagande de guerre. Ce qui a

 22   été publié comme son entretien dans le journal Nin ne représente pas de

 23   preuve que cela aurait été fait sur le terrain. Chez nous, souvent les gens

 24   disent une chose et pour ce qui se passe en réalité, c'est tout à fait

 25   autre chose.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc votre réponse est simple : cela

 27   n'aide pas pour comprendre les intentions de M. Mladic.

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Cela pourrait être l'une des sources pour


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  1   déterminer cela.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pourquoi ne répondez-vous pas à la

  3   question de façon directe au lieu de parler de différentes raisons, puisque

  4   nous nous attendons à ce que la réponse soit donnée à la question. Vous

  5   pouvez dire que cela pourrait être source d'information pour comprendre

  6   mieux l'intention de M. Mladic.

  7   Question suivante.

  8   M. TRALDI : [interprétation] Je demande le versement de ce

  9   document.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.

 11   M. LE GREFFIER : [interprétation] Cela sera la pièce P7719.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Cette pièce est versée au dossier.

 13   M. TRALDI : [interprétation] Peut-on afficher maintenant P6647.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Mladic, ne parlez pas à voix

 15   haute. Et c'est le dernier avertissement. Vous savez ce qui va se passer si

 16   vous continuez à parler à voix haut.

 17   [Le conseil de la Défense se concerte]

 18   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Monsieur Traldi, je n'ai pas entendu

 19   le numéro 65 ter de la pièce P7719.

 20   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] C'était 994.

 21   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Merci.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous attendons toujours que la version

 23   en anglais du document soit affichée. Ah, maintenant, on la voit.

 24   M. TRALDI : [interprétation] Il s'agit du cinquième paragraphe.

 25   Q.  Ce sont les lignes directrices concernant le fonctionnement de l'organe

 26   chargé des questions juridiques liées au culte du Corps Sarajevo-Romanija

 27   daté du 2 décembre 1994, et l'auteur du document est Luka Dragicevic. Dans

 28   le cinquième paragraphe de ce document, on peut lire :


Page 42011

  1   "Oui, du point de vue génétique, nous sommes plus forts, plus intelligents,

  2   plus beaux. Essayez de vous souvenir du nombre de Musulmans qui étaient

  3   parmi les meilleurs disciples, étudiants, soldats, les premiers dix. Très

  4   peu. Pourquoi ? Parce qu'ils se sont convertis à l'Islam, ils sont

  5   'Poturice', et les 'Poturice' étaient les descendants des Serbes les plus

  6   faibles."

  7   Nous voyons ici la propagation de cette position du général Mladic qui a

  8   été exprimée dans l'entretien précédent, mais ici, cela est donc fait par

  9   l'organe chargé du moral des troupes de la VRS.

 10   R.  Ma réponse devrait être la même par rapport à ce que Robert Donia a

 11   dit. Cela, il ne s'agit que d'une partie de l'histoire de la guerre en

 12   Bosnie-Herzégovine. Nous pouvons parler de la guerre en --

 13   Q.  C'est la partie par rapport à laquelle on vous pose la question.

 14   Pouvez-vous répondre à la question ?

 15   R.  Il ne s'agit que d'une partie des faits concernant la guerre civile en

 16   Bosnie-Herzégovine.

 17   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Kovic, on ne vous a même pas

 18   dit qu'il s'agit de l'histoire complète. La question vous a été posée pour

 19   savoir si cela correspond à ce que nous venons de voir tout à l'heure, à

 20   savoir la citation des paroles de M. Mladic dans l'entretien. C'était la

 21   question qui vous a été posée.

 22   LE TÉMOIN : [interprétation] Je pense que j'ai répondu à cette question.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Non. Et si vous continuez à ne pas

 24   répondre à des questions, alors, nous devons réfléchir à la façon à

 25   laquelle nous allons nous occuper de votre déposition. La question vous a

 26   été posée pour savoir si ce qui vous a été lu de cet article correspond à

 27   ce que nous avons vu, la réponse de M. Mladic qui a été publiée dans un

 28   journal.


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  1   LE TÉMOIN : [interprétation] En tant qu'historien, je dois demander qui a

  2   signé ce document et d'où provient ce document, quelle est la source de ce

  3   document ?

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Témoin, vous n'êtes pas ici

  5   pour demander cela. Vous êtes ici pour répondre à des questions.

  6   L'authenticité du document n'est pas quelque chose dont on discute à

  7   présent.

  8   On vous a lu une partie de cet article et on vous a posé la question

  9   de savoir si cela correspond à ce qui a été affiché il y a quelques

 10   instants dans l'entretien de M. Mladic.

 11   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Et de plus, au début de la question

 12   posée par M. Traldi, il a été clairement expliqué de quoi il s'agit, de

 13   quel type de document qu'il a signé et quelle est l'origine du document. Et

 14   si vous aviez écouté attentivement sa question, vous n'auriez pas eu besoin

 15   de répéter la même question.

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne trouve pas cet endroit. Je vois aussi le

 17   nom Perendija Milenko, les informations et les lignes directrices. J'ai,

 18   donc, entendu ce qui a été dit par rapport à cet article --

 19   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Ecoutez les questions. C'est tout.

 20   M. TRALDI : [interprétation]

 21   Q.  Regardez le cinquième paragraphe entier.

 22   R.  D'accord.

 23   Q.  La deuxième phrase dans ce paragraphe, vous allez voir que c'est la

 24   partie que je viens de lire. Est-ce que cela correspond à l'opinion

 25   exprimée par le général Mladic dans l'entretien que nous avons vu, à savoir

 26   que les Serbes qui se sont reconvertis, qui ont changé leur religion,

 27   étaient la pire racaille et étaient devenus Musulmans de Bosnie, oui ou

 28   non ?


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  1   R.  Non.

  2   Q.  Le mot "poturica" se réfère aux Serbes qui se sont reconvertis à

  3   l'Islam, qui sont devenus musulmans.

  4   R.  Oui, il s'agit d'un terme péjoratif et je peux expliquer l'acception de

  5   ce terme, si vous le voulez.

  6   Q.  Et vous avez refusé d'admettre que la déclaration selon laquelle il

  7   s'agit des Serbes les plus faibles et que les Serbes sont plus forts, plus

  8   intelligents et plus beaux, vous, donc, refusez d'admettre que cela

  9   corresponde à l'opinion exprimée par le général Mladic, n'est-ce pas ?

 10   R.  Est-ce que je peux répéter la question que j'ai déjà posée pour savoir

 11   qui est l'auteur de ce texte ?

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Témoin, ce n'est pas ce dont

 13   on parle à présent. C'est le document qui a déjà été versé au dossier dans

 14   cette affaire. D'abord, cela vous a été déjà expliqué, vous avez été invité

 15   à ne pas poser de telles questions, si cela vous a été expliqué. Mais vous

 16   avez encore fait la même chose.

 17   Concentrez-vous sur la question qui vous a été posée.

 18   LE TÉMOIN : [interprétation] Non, il ne s'agit pas d'un lien causal, pas

 19   nécessairement.

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce n'était pas la question non plus. Si

 21   vous continuez à donner des réponses à des questions qui n'ont pas été

 22   posées, la seule question qui vous a été posée est de savoir si cela

 23   correspond, et non pas s'il y a un lien de cause à effet, s'il y a un

 24   rapport causal. On vous a posé la question pour savoir si la partie qu'on

 25   vous a lue tout à l'heure correspond à ce qu'on a vu il y a quelques

 26   instants, si cela correspond à ce que M. Mladic a dit pendant l'entretien

 27   accordé ce jour-là ?

 28   LE TÉMOIN : [interprétation] Vous n'avez pas besoin d'un historien pour


Page 42014

  1   cela. Il y a une certaine similitude entre les deux.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Continuez.

  3   M. TRALDI : [interprétation] Je vois qu'on est presque arrivé au moment

  4   pour la pause. J'ai l'intention de passer à un autre sujet. Je suggère

  5   qu'on fasse la pause maintenant.

  6   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons faire la pause, Monsieur le

  7   Témoin. Vous devez revenir dans le prétoire dans 20 minutes. Maintenant,

  8   vous pouvez suivre M. l'Huissier et quitter le prétoire.

  9   [Le témoin quitte la barre]

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous allons reprendre à 13 heures 35.

 11   --- L'audience est suspendue à 13 heures 12.

 12   --- L'audience est reprise à 13 heures 35.

 13   [Le témoin vient à la barre]

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Témoin, je dois vous

 15   rappeler que vraiment, vous devriez vous concentrer sur les réponses à

 16   fournir aux questions posées. La Défense vous a cité à la barre en tant que

 17   témoin expert. Cela veut dire que, eh bien, vous faites -- vous devez faire

 18   l'objet d'un contre-interrogatoire par l'Accusation. Si vous sentez que

 19   l'Accusation adopte une approche qui n'est pas parfaitement balancée, Me

 20   Stojanovic aura l'occasion plus tard de vous poser des questions

 21   supplémentaires pour restaurer l'équilibre. La plupart des questions ne

 22   visent pas à nous apporter des conclusions historiques définitives, ce sont

 23   de simples questions portant sur des faits, sur des opinions que vous avez

 24   pu formuler, sur la question de savoir s'il y a des correspondances entre

 25   un texte, un autre texte, et cetera. Quant aux conclusions générales qu'il

 26   s'agit de tirer, laissez-nous cette tâche qui nous revient.

 27   Je vous répète tout cela parce qu'il est important pour les Juges de la

 28   Chambre de ne pas perdre votre déposition et, d'autre part, notre patience


Page 42015

  1   est limitée. Vous êtes censé fournir des réponses claires à des questions

  2   claires.

  3   Monsieur Traldi, vous pouvez continuer.

  4   M. TRALDI : [interprétation] Est-il possible de présenter le document 65

  5   ter --

  6   LE TÉMOIN : [interprétation] Excusez-moi. Ai-je le droit de dire quelque

  7   chose ?

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bon, très bien, mais brièvement, s'il

  9   vous plaît.

 10   LE TÉMOIN : [interprétation] Moi, je m'attendais à ce que le débat porte

 11   sur les textes que j'ai rédigés sur lesquels j'ai travaillé. Je ne

 12   m'attendais pas vraiment à ce type de questions qui s'écarte de loin par

 13   rapport à ce que j'ai fait. Donc, je fais de mon mieux pour me concentrer.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Eh bien, alors, peut-être que la séance

 15   de récolement n'a pas été suffisante pour vous préparer. Mais, en tout cas,

 16   en ce moment, il n'est pas question de débattre quoi que ce soit. Pour

 17   vous, il s'agit tout simplement de répondre aux questions posées.

 18   Monsieur Traldi, votre question suivante, s'il vous plaît.

 19   M. TRALDI : [interprétation] J'aimerais qu'on affiche le document 07923 de

 20   la liste 65 ter.

 21   Q.  Comme présenté dans votre rapport sur le rapport rédigé par Treanor, la

 22   vérité, c'est que les Serbes de Bosnie ont essayé d'appliquer une politique

 23   de régionalisation qui était dictée par les échelons les plus élevés,

 24   n'est-ce pas ?

 25   R.  C'est une façon de le dire.

 26   M. TRALDI : [interprétation] J'aimerais que l'on présente la page 5 de

 27   l'anglais qui correspond à la page 3 en B/C/S, le point numéro 5.

 28   Q.  Alors, ici, c'est le procès-verbal d'une réunion qui s'est tenue au


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  1   niveau du Conseil exécutif du SDS le 7 novembre 1991. Au point 5, on évoque

  2   un rapport sur la régionalisation, on dit que l'ancien comité devrait

  3   préparer un projet pour que le territoire soit organisé en régions et

  4   définissant les modalités de fonctionnement pour les autorités locales, des

  5   conditions doivent être créées pour permettre d'observer les principes, y

  6   compris les règles d'engagement qui doivent s'appliquer au niveau national

  7   et territorial. Donc, ceci constitue un exemple de la politique de

  8   régionalisation qui a été contrôlée par les échelons les plus élevés du

  9   SDS, n'est-ce pas ?

 10   R.  Oui. Mais il faut garder à l'esprit le fait que cela se passe au mois

 11   de novembre 1991. C'est un moment historique très particulier.

 12   M. TRALDI : [interprétation] J'aimerais que l'on affiche maintenant le

 13   document 03632 de la liste 65 ter, s'il vous plaît.

 14   Q.  Ceci est le procès-verbal d'une séance de l'assemblée de la SAO de

 15   Romanija, la séance s'est tenue le 11 novembre [comme interprété] 1991, à

 16   Pale. Dans l'introduction, nous voyons que le premier ministre, c'est D.

 17   Blagojevic. Il nous faut la page 5 de la version anglaise, la page 4 de la

 18   version en B/C/S, le dernier paragraphe, Drago Blagojevic s'y exprime, en

 19   disant :

 20   "Cette assemblée soutient entièrement le SDS et sa politique menée au

 21   niveau des effectifs, ainsi que le conseil principal du SDS et l'assemblée

 22   du peuple serbe en Bosnie-Herzégovine."

 23   Donc, ces observations nous montrent le soutien apporté par cet SAO aux

 24   autorités de la Bosnie centrale, n'est-ce pas ?

 25   R.  Vous souhaitez que je réponde à la question ? Oui, oui, oui. Cela s'est

 26   produit au mois de décembre 1991. Au sein de l'assemblée, les Musulmans et

 27   les Croates se sont prononcés en faveur d'une sécession et en faveur de

 28   l'indépendance malgré le souhait contraire exprimé par la partie serbe de


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  1   la population.

  2   M. TRALDI : [interprétation] J'aimerais que nous présentions maintenant le

  3   document 02354 [comme interprété] de la liste 65 ter.

  4   L'INTERPRÈTE : Si l'interprète a bien entendu le chiffre.

  5   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Pouvez-vous répéter la cote, s'il

  6   vous plaît.

  7   M. TRALDI : [interprétation] 02545.

  8   Q.  Ceci est le procès-verbal de la deuxième séance de l'assemblée serbe du

  9   conseil des ministres qui s'est tenue le 17 janvier 1992. Il nous faut la

 10   page 4 dans les deux versions linguistiques. En bas de la page, nous voyons

 11   qu'il y a un projet de programme de travail préparé par le Conseil des

 12   ministres de l'assemblée du peuple serbe en BH. Par ailleurs, nous pouvons

 13   lire que :

 14   "Le territoire devrait être organisé de façon à élargir le territoire de

 15   différentes régions et de façon à comprendre un nombre plus importants," -

 16   maintenant il faut passer à la page suivante - "et de façon à englober le

 17   nombre le plus important d'habitants possibles de façon à consolider les

 18   territoires sur le plan ethnique et économique."

 19   Cette consolidation ethnique, cela faisait partie des objectifs poursuivis

 20   dans le cadre du processus de la régionalisation tel que décrit ici, n'est-

 21   ce pas ?

 22   R.  Non. Et je peux élaborer, si vous le souhaitez.

 23   Q.  Oui, je vous en prie.

 24   R.  Eh bien, définir les territoires sur la base des critères ethniques,

 25   toutes les trois communautés ethniques commencent à s'y efforcer dès le

 26   mois de janvier 1992. Les Croates en Herzégovine occidentale, ainsi que les

 27   Musulmans et les Croates ailleurs, ont violé la constitution de la Bosnie-

 28   Herzégovine. Et cela s'est produit dès le mois de novembre 1991.


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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Témoin, je dois vous

  2   interrompre encore une fois. Vous n'arrêtez pas de souligner ce qui a été

  3   fait par les autres. Or, la question concernait la régionalisation -- cela

  4   ne veut pas dire que les autres parties n'avaient pas procédé de la même

  5   façon. Je ne sais pas si nous avons déjà des éléments de preuve à cet

  6   effet. Mais il est superflu pour vous de dire ce que les autres ont fait,

  7   il suffit de se concentrer sur la question. Et la question concernait la

  8   consolidation ethnique, est-ce que cela faisait partie des objectifs

  9   poursuivis dans le cadre du processus de régionalisation tel que décrit

 10   dans ce document.

 11   Oui ou non ?

 12   LE TÉMOIN : [interprétation] Eh bien, oui.

 13   M. TRALDI : [interprétation] Je souhaite demander le versement au dossier

 14   des trois derniers documents présentés au témoin. Le premier document porte

 15   la cote 07923 de la liste 65 ter.

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.

 17   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P7720, Messieurs les

 18   Juges.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Le document est admis au dossier.

 20   M. TRALDI : [aucune interprétation]

 21   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

 22   M. LE GREFFIER : [aucune interprétation]

 23   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]

 24   M. TRALDI : [interprétation] Nous avons le document ensuite 02545 de la

 25   liste 65 ter.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Greffier.

 27   M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce P7722.

 28   L'INTERPRÈTE : L'interprète se corrige : La cote du document précédent


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  1   c'était 7720.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La sténotypiste ne semble pas avoir le

  3   temps de noter tous les chiffres.

  4   La pièce P7722 est admise au dossier.

  5   Veuillez continuer.

  6   M. TRALDI : [interprétation] Eh bien, moi --

  7   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Les autres -- oui, je pense que la pièce

  8   P7720 a déjà été admise au dossier. Puis la pièce P7722 a été admise au

  9   dossier. Je pense qu'il y a une pièce qui manque.

 10   M. TRALDI : [interprétation] Permettez-moi d'apporter mon aide, Monsieur le

 11   Président.

 12   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous en prie.

 13   M. TRALDI : [interprétation] Il s'agissait du document 03632 de la liste 65

 14   ter qui s'est vu assigner la cote P7721.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Très bien. La pièce est admise au

 16   dossier.

 17   Veuillez continuer.

 18   M. TRALDI : [interprétation] Je souhaite maintenant que l'on présente le

 19   document 03580 de la liste 65 ter.

 20   Q.  Ceci est le livre qui est écrit par Warren Zimmermann. Vous évoquez ses

 21   mémoires dans la note en bas de page 175 de votre rapport, et vous l'avez

 22   d'ailleurs évoqué dans votre déposition de ce matin, c'est bien ce livre-là

 23   que vous avez fait référence ?

 24   R.  Oui, j'ai évoqué une déclaration qu'il a fournie à David Binder, et

 25   j'ai évoqué ce livre aussi, le livre rédigé par Zimmermann.

 26   Q.  Passons maintenant à la page 214, s'il vous plaît. Je vais maintenant

 27   vous poser mes questions dans le contexte des débats sur la division de la

 28   Bosnie en 1991 que vous évoquez dans votre déposition. Nous lisons ici que


Page 42020

  1   Tudjman aurait dit à Zimmermann qu'il avait parlé avec Milosevic, avec des

  2   dirigeants de l'armée yougoslave, avec les Serbes de Bosnie, et que "ils

  3   sont tombés d'accord que la seule solution était de diviser la Bosnie entre

  4   la Serbie et la Croatie."

  5   Il écrit que Tudjman aurait insisté sur une division 50 % par rapport à 50

  6   %. Il aurait dit :

  7   "Laissons Milosevic prendre la partie la plus importante. De toute façon,

  8   il la contrôle. Donc, nous, on peut accepter moins de 50 %. Nous sommes

  9   prêts à n'abandonner aux Musulmans que de petites zones entourant la ville

 10   de Sarajevo."

 11   Alors vous avez mentionné Zimmermann dans le contexte de la division de

 12   Serbie. Pourquoi n'avez-vous pas évoqué cette partie de ce livre ?

 13   R.  Eh bien, parce que si je l'avais fait, mon rapport n'aurait pas compté

 14   90 pages, mais 190 pages, voire 290 pages. Cette déclaration ne nous dit

 15   rien du tout si elle n'est pas comparée avec d'autres déclarations de ce

 16   type.

 17   Est-ce que Tudjman a vraiment déclaré ceci ? Est-ce plutôt Zimmermann

 18   qui l'a dit ? Est-ce que Tudjman l'a vraiment dit à Zimmermann ? Est-ce

 19   qu'il avait vraiment parlé avec Milosevic, et cetera, et cetera ?

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur le Témoin, je devrai vous

 21   interrompre. Vous avez déjà expliqué pour quelle raison vous avez omis de

 22   citer cette partie du livre. On ne vous a pas invité à vous livrer à des

 23   observations sur la véracité des propos de M. Zimmermann.

 24   Veuillez continuer.

 25   M. TRALDI : [interprétation]

 26   Q.  Passons maintenant à la page 220. Nous voyons qu'en bas de la page,

 27   Zimmermann évoque les négociations de Lisbonne, que vous avez évoquées

 28   aussi. Et puis à la page 221, en haut de la page, il décrit les débats qui


Page 42021

  1   ont été menés avec Karadzic à la fin du mois de février 1992, puis un peu

  2   plus loin, en faisant défiler le texte, on voit que Karadzic s'était

  3   embarqué dans une stratégie qu'il appelle des luttes de paroles. Il

  4   s'agissait d'entamer des pourparlers et d'adresser des menaces de guerre

  5   dans le cas où l'indépendance se serait proclamée. Il a dit que Karadzic et

  6   Milosevic avaient une ligne qu'ils ne souhaitaient pas dépasser, à savoir

  7   qu'on ne pouvait diviser la Bosnie qu'en laissant aux Serbes le contrôle de

  8   deux tiers du territoire.

  9   Donc, ces extraits du livre de Zimmermann sur les négociations de Lisbonne

 10   ne sont pas non plus évoqués dans votre rapport, n'est-ce pas?

 11   R.  Oui. Et je peux vous expliquer pourquoi.

 12   Q.  Allez-y.

 13   R.  C'est à peine pertinent. Zimmermann, en raison de son appui à Alija

 14   Izetbegovic pour qu'il rejette le plan, n'a pas la conscience tranquille.

 15   Ceci est intéressant, mais ne prouve rien.

 16   Q.  Alors nous allons passer à la page suivante maintenant, en haut de la

 17   page suivante. On peut lire qu'Izetbegovic avait entendu parler de la

 18   collusion de Karadzic avec les Croates et qu'il était furieux.

 19   Et je reviens maintenant au bas de la page précédente --

 20   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Traldi, lorsque vous citez les

 21   numéros de page, cela me pose quelques difficultés. Je crois que nous

 22   sommes maintenant à la page 221, c'est cela, du prétoire électronique.

 23   M. TRALDI : [interprétation] Nous étions à la page 221, nous sommes

 24   maintenant à nouveau à la page 220.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Ce que nous voyons sur nos écrans

 26   maintenant, c'est la page 221 du prétoire électronique.

 27   M. TRALDI : [interprétation] Je remercie M. le Greffier. C'est

 28   effectivement ce que je cherchais.


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  1   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Poursuivons.

  2   M. TRALDI : [interprétation]

  3   Q.  En bas de la page, on peut lire que :

  4   "Le dirigeant bosno-serbe s'est rencontré un jour plus tard avec un des

  5   collaborateurs les plus proches pour aborder les détails de la division de

  6   la Bosnie."

  7   Donc, lorsque vous citez Zimmermann, vous ne parlez pas des négociations de

  8   Lisbonne; autrement dit, qu'une partie de la réaction d'Izetbegovic était

  9   due au fait que Karadzic avait tenté de signer un accord séparé avec les

 10   Croates ?

 11   R.  Oui. Je ne parle pas de cela dans mon document et je peux vous dire

 12   pourquoi.

 13   Q.  Est-ce parce que vous estimez que Zimmermann est à peine pertinent sauf

 14   dans les passages de son livre où il est d'accord avec vous ?

 15   R.  Non. Il n'est pas d'accord avec lui-même. Et dans ma note en bas de

 16   page, vous avez sa déclaration, déclaration qu'il a faite à David Binder,

 17   qui est tout à fait différente de ce qui est dit ici. Il est en

 18   contradiction avec lui-même. Et le rôle qu'il a joué est quelque chose qui

 19   devrait faire l'objet d'une analyse détaillée, et il y a la question de sa

 20   conscience qui n'était pas tranquille non plus qu'il faudrait aborder.

 21   M. TRALDI : [interprétation] Je demande que l'on réserve un numéro pour ces

 22   extraits, une cote pour ces extraits.

 23   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, une cote provisoire ou une cote

 24   que l'on réserve pour ces extraits ?

 25   M. LE GREFFIER : [interprétation] P7723, Messieurs les Juges.

 26   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Donc, nous avons réservé cette cote à

 27   cette fin.

 28   M. TRALDI : [interprétation] Le P356, maintenant, s'il vous plaît. C'est la


Page 42023

  1   page 73 de l'anglais qui m'intéresse, et 89 en B/C/S. Pardon, nous n'avons

  2   pas la page en B/C/S, et je souhaite vérifier mes notes. Peut-être que je

  3   n'ai pas été clair et c'est peut-être la raison de cela.

  4   La page 89 dans l'original en B/C/S.

  5   Q.  Ici, nous voyons les notes du général Mladic prises le 26 octobre 1992

  6   lors d'une réunion avec la délégation de Croatie et de l'Herceg-Bosna. Nous

  7   voyons les commentaires de Praljak. Et en bas, le général Mladic précise,

  8   d'après ses propres dires que :

  9   "Nous sommes sur une bonne voie. Nous allons en direction de" -- nous

 10   allons passer à la page suivante.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La page suivante dans les deux langues,

 12   s'il vous plaît.

 13   M. TRALDI : [interprétation] Oui.

 14   Q.  "…contraindre Alija à diviser la Bosnie."

 15   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Nous n'avons pas cette page à l'écran

 16   encore.

 17   M. TRALDI : [interprétation]

 18   Q.  En bas de la page, Praljak reprend la parole.

 19   Nous allons passer à la page suivante dans les deux langues, au

 20   milieu de la page, troisième alinéa, Mladic rapporte les propos de Praljak

 21   :

 22   "Il est dans l'intérêt des Musulmans d'obtenir leur propre canton pour

 23   qu'ils aient un endroit où s'installer."

 24   Estimez-vous que cela était pertinent de mentionner dans votre rapport le

 25   fait que le général Mladic a aussi rencontré les dirigeants croates de

 26   Bosnie et d'Herzégovine au sujet de la division du pays et du déplacement

 27   des Musulmans ?

 28   R.  Non, je n'en ai pas parlé et j'estimais que cela n'était pas pertinent.


Page 42024

  1   Et je peux vous expliquer pourquoi.

  2   Q.  Allez-y.

  3   R.  Je vous rappelle la date encore une fois. Il s'agit du mois de décembre

  4   1992, si je ne me trompe pas. A ce moment-là, les parties belligérantes,

  5   chacun leur objectif de guerre --

  6   Q.  Octobre 1992 ?

  7   R.  Oui, d'accord, octobre 1992. Cela remonte à un certain nombre d'années.

  8   Izetbegovic et ses collaborateurs voulaient une Bosnie-Herzégovine

  9   unitaire, les Serbes et les Croates souhaitaient diviser le pays. Ce sont

 10   des faits. Tout le monde les connaît. Alors, un type de division, considéré

 11   comme raisonnable, qui respectait les frontières de la Bosnie-Herzégovine,

 12   est quelque chose qui avait déjà été élaboré dans le cadre du plan

 13   Cutileiro. Ceci n'a pas fonctionné. Nous savons pourquoi. Nous savons qui

 14   l'a empêché.

 15   Et je vois ce texte pour la première fois et je ne peux que vous

 16   prendre au mot, puisque vous dites que c'est authentique, et je souhaite le

 17   voir également. Donc, je vois quelque chose ou certains éléments ici pour

 18   la première fois. J'ai quelques réserves à émettre et je dois vous prendre

 19   au mot, ce qui ne me dérange pas.

 20   Cela étant dit, chaque partie belligérante a ses propres objectifs de

 21   guerre. Vous auriez pu me montrer un accord entre les Musulmans et les

 22   Croates, ou l'accord de Washington, mais les Juges vont m'interrompre

 23   encore une fois et pour voir ce qu'ils ont abordé dans ces cadres-là sous

 24   les auspices des Etats-Unis. Je veux parler de l'année 1994.

 25   M. TRALDI : [interprétation] Pouvons-nous afficher le P2003, s'il vous

 26   plaît.

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Veuillez vous abstenir de faire le type

 28   de commentaire que vous venez de faire. Que cela vous plaise ou non, si les


Page 42025

  1   Juges vous interrompent, il y a de bonnes raisons à cela.

  2   Veuillez poursuivre.

  3   LE TÉMOIN : [interprétation] Pardonnez-moi, vous voulez parler de quel

  4   commentaire ?

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] "Les Juges vont m'interrompre une

  6   nouvelle fois."

  7   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, je vois.

  8   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Faites attention à vos paroles.

  9   M. TRALDI : [interprétation] Est-ce qu'on peut agrandir le côté gauche de

 10   la page en B/C/S.

 11   Q.  Il s'agit des objectifs stratégiques du peuple serbe en Bosnie-

 12   Herzégovine. Ces objectifs étaient publiés dans la gazette officielle. Ce

 13   sont les objectifs de guerre des Serbes de Bosnie dont vous parlez, n'est-

 14   ce pas ?

 15   R.  Il s'agit de ces objectifs qui sont mentionnés dans les rapports de

 16   Donia et de Treanor, oui. Ils sont mentionnés dans leurs rapports souvent.

 17   Q.  Ces objectifs ne sont pas mentionnés dans aucun de vos deux rapports,

 18   n'est-ce pas ?

 19   R.  Oui. Je peux vous expliquer pourquoi.

 20   Q.  Allez-y.

 21   R.  C'est parce que Donia et Treanor ont suffisamment parlé de ces

 22   objectifs et en détail. Donc, j'ai critiqué leurs textes, j'ai parlé des

 23   choses qui n'apparaissent pas dans leurs rapports. C'était ma tâche.

 24   Q.  Est-ce que nous pouvons comprendre ce que vous venez de dire dans le

 25   sens suivant : vous ne contestez pas ce qu'ils ont dit lors de leurs

 26   dépositions concernant ces objectifs ?

 27   R.  S'il s'agit de la gazette officielle de la Republika Srpska, il s'agit

 28   de quelque chose qui est officiel, d'un document officiel. Je ne conteste


Page 42026

  1   pas cela. Mais j'aimerais voir toute la page et non pas seulement cette

  2   partie-là.

  3   Donc, ma réponse est oui, puisque ce document semble être un document

  4   officiel.

  5   M. TRALDI : [interprétation] Est-ce qu'on peut agrandir la version en

  6   B/C/S.

  7   Q.  Est-ce que vous êtes content maintenant, Monsieur le Témoin ?

  8   R.  Oui.

  9   M. TRALDI : [interprétation] Est-ce qu'on peut afficher maintenant la pièce

 10   P7235.

 11   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] En attendant que cette pièce soit

 12   affichée à l'écran, Monsieur le Témoin, j'aimerais vous poser cette

 13   question : est-ce que vous étiez au courant de ces six objectifs

 14   stratégiques qui étaient publiés dans la gazette officielle ? Est-ce que

 15   vous les connaissiez avant ce moment-là ?

 16   LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, bien sûr. Parce que ces objectifs sont

 17   mentionnés dans les rapports que j'ai analysés en détail.

 18   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Merci.

 19   M. TRALDI : [interprétation] Je pense qu'il ne s'agit pas du bon document.

 20   Est-ce qu'on peut afficher la pièce P7325.

 21   Le document est daté du 19 mai 1992 et a été envoyé par le général Gvero à

 22   de différents corps. On voit ici leurs numéros au sein de la JNA et cela a

 23   été envoyé à d'autres unités également.

 24   Est-ce qu'on peut afficher la page 2 dans les deux versions.

 25   Q.  Dans le deuxième paragraphe, sous le chiffre romain II, on peut lire :

 26   "Le peuple serbe qui est constitutif pour ce qui est de l'Etat et qui vit

 27   sur à peu près 65 % du territoire et qui représente à peu près 35 % de la

 28   population de la Bosnie-Herzégovine doit combattre pour la séparation


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  1   totale du peuple musulman et du peuple croate et doit créer son propre

  2   Etat."

  3   C'est la référence au premier objectif stratégique, la séparation par

  4   rapport à d'autres groupes ethniques.

  5   R.  Oui. Et je peux expliquer pourquoi c'était ainsi. C'est le mois de mai

  6   1992, et il était clair que -- mais je pense qu'il n'est pas nécessaire que

  7   je répète ce que j'ai déjà dit.

  8  (expurgé)

  9  (expurgé)

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 15   [Audience à huis clos partiel]

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 13  Pages 42028-42029 expurgées. Audience à huis clos partiel.

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  1  (expurgé)

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 23   [Audience publique]

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur le Greffier.

 25   Monsieur le Témoin, nous vous reverrons demain matin. Avant que vous

 26   quittiez cette salle d'audience, je tiens à vous donner la consigne

 27   suivante, vous n'êtes censé parler ou communiquer avec personne au sujet de

 28   votre déposition, qu'il s'agisse de la partie de la déposition que vous


Page 42031

  1   avez déjà fournie ou de celle qui vous reste à fournir dans la suite.

  2   Si vous l'avez bien compris, vous pouvez maintenant suivre l'huissier.

  3   [Le témoin quitte la barre]

  4   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] La séance est levée, nous reprendrons

  5   nos travaux demain, mardi, le 1er décembre, à 9 heures 30, dans cette même

  6   salle d'audience, la salle d'audience numéro I.

  7   --- L'audience est levée à 14 heures 21 et reprendra le mardi, 1er décembre

  8   2015, à 9 heures 30.

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