Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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  1   Le jeudi, 15 décembre 2016

  2   [Audience publique]

  3   [L'accusé est introduit dans le prétoire]

  4   --- L'audience est ouverte à 9 heures 34.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bonjour à tout le monde dans le prétoire

  6   et à l'extérieur du prétoire.

  7   Monsieur le Greffier d'audience, si vous pouvez citer le numéro de

  8   l'affaire.

  9   M. LE GREFFIER : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Messieurs

 10   les Juges. C'est l'affaire IT-09-92-T, le Procureur contre Ratko Mladic.

 11   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur le Greffier.

 12   C'est le dernier jour du réquisitoire et des plaidoiries. Je vais d'abord

 13   donner la parole à l'Accusation. L'Accusation dispose d'une heure et demie

 14   pour s'adresser à la Chambre.

 15   Vous avez la parole, Monsieur Tieger.

 16   M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

 17   pendant tout notre réquisitoire, nous avons donné beaucoup d'exemples pour

 18   expliquer que la Défense, dans leur mémoire en clôture, s'est appuyée sur

 19   les moyens de preuve qui ne sont pas fiables, tirés du contexte et même non

 20   existants, pour soutenir les arguments inexacts pour ce qui est de cette

 21   affaire. Dans leurs plaidoiries, ils n'ont pas changé leur approche. A la

 22   place de cela, ils l'ont renforcée en donnant des leçons erronées pour ce

 23   qui est des analyses des moyens de preuve, des tentatives pour interpréter

 24   de façon erronée certains principes de la procédure, comme par exemple la

 25   charge de la preuve, pour les utiliser comme des armes pour attaquer en

 26   accusant l'Accusation, ce procès et même tout le monde entier de cela.

 27   Et en ignorant quatre ans et demi de ce procès, le dossier volumineux

 28   dans lequel il y a beaucoup de documents inculpant, ainsi que des


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  1   témoignages de témoins oculaires, la Défense affirme que Mladic est ici

  2   devant ce Tribunal tout simplement parce qu'il est Serbe et ils essaient de

  3   faire justifier cette accusation.

  4   D'abord, l'Accusation est accusée par la Défense d'utiliser le

  5   principe de la charge de la preuve "sens dessus, sens dessous". Pourquoi ?

  6   C'est parce que l'Accusation, au début de son réquisitoire "a parlé de

  7   beaucoup de choses pour lesquelles la Défense a dit que l'Accusation ne les

  8   avait pas prouvées dans le mémoire en clôture." Ensuite : "Mais nous ne

  9   devons rien prouver dans notre mémoire de clôture."

 10   Mais personne ici n'a dit que la Défense devait prouver ou même dire

 11   quoi que ce soit. Malheureusement pour eux, une fois que la Défense a

 12   décidé cela, il est admissible, même obligatoire d'examiner les moyes de

 13   preuve qui auraient corroboré leurs allégations. Et à plusieurs reprises,

 14   nous avons montré dans notre mémoire en clôture et dans notre réquisitoire

 15   que la Défense s'appuie sur les moyens de preuve qui ne corroborent ce

 16   qu'il affirment ou bien ils ont présenté de façon erronée, ou bien ils

 17   émanent des témoins qui ne sont pas crédibles où, après un examen

 18   approfondi, ce sont les preuves qui ne corroborent pas leurs affirmations.

 19   Après avoir dit de façon erronée qu'il n'est approprié de faire

 20   remarquer leurs allégations erronées, eux, non seulement qu'ils adoptent la

 21   même approche, mais prétendent que cela représente un doute raisonnable.

 22   "Pourquoi parlaient-ils de nos arguments et non pas des leurs ? Cela veut

 23   dire qu'ils ont perdu la cause."

 24   Pour la Défense, cela veut dire que plus ces arguments sont révélés

 25   comme étant faux, plus la thèse de l'Accusation est faible. Le caractère

 26   absurde de ce concept est encore plus clair. Si on tient compte du fait que

 27   montrer que les arguments de la Défense sont erronés menaient toujours à la

 28   confirmation de la thèse de l'Accusation et des allégations de l'acte


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  1   d'accusation.

  2   Par exemple, la Défense accuse l'Accusation d'avoir essayé de

  3   manipuler le personnel du Tribunal en faisant référence à Karadzic lors du

  4   procès Mladic. Ils disent que c'est la tentative d'accuser Mladic seulement

  5   par rapprochement et pour susciter des émotions. Mais, encore une fois,

  6   c'est leur tentative de s'écarter des moyens de preuve à charge.

  7   La référence à Karadzic, Karadzic qui était le seul supérieur de

  8   Mladic dans la chaîne de commandement et son allié-clé pour ce qui est de

  9   la mise en œuvre de quatre entreprises criminelles communes, à commencer

 10   par la tentative de présenter comme inexacte la tentative de Mladic pour

 11   jeter la responsabilité concernant la directive 7 illicite seulement sur

 12   Karadzic. Et ensuite, de plusieurs façons, ils ont procédé de la même façon

 13   où les déclarations de Karadzic et son comportement illustre clairement la

 14   responsabilité et la culpabilité de Mladic, par le fait que Karadzic avait

 15   déjà mis en œuvre la campagne de nettoyage ethnique en Bosnie, avait

 16   demandé à Mladic de mettre en œuvre ses objectifs sur la base de ce qu'il

 17   avait fait en Croatie; et même avant que Mladic ait assumé sa position, il

 18   a travaillé avec Karadzic pour réaliser les objectifs stratégiques, à

 19   savoir la séparation ethnique et les territoires où cela devait être fait.

 20   Ensuite, Karadzic et Mladic se sont mis d'accord pour dire qu'il s'agissait

 21   d'une occasion historique pour créer un État avec peu d'ennemis internes;

 22   ensuite, Karadzic et Mladic se sont mis d'accord pour dire qu'il est

 23   essentiel de créer une situation de fait sur le terrain; ils se sont mis

 24   d'accord pour utiliser "tous les moyens" ou les moyens "réciproques", que

 25   leur emploi est justifié en face d'une lutte génocidaire; et ils ont

 26   travaillé de concert pendant la guerre pour réaliser les objectifs qui,

 27   d'après ce que le président de la cellule de Crise de Foca a dit, étaient

 28   "nos dirigeants".


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  1   Et pourtant, la Défense affirme que mentionner Karadzic peut être

  2   assimilé à un acte de manipulation.

  3   Il y a un autre argument faux et creux qui a été répété plusieurs

  4   fois : l'affirmation selon laquelle l'Accusation, le premier jour, vous a

  5   demandé d'accepter une conclusion "meilleure" ou une version "meilleure" et

  6   que, de ce fait, un doute raisonnable peut être soulevé.

  7   D'abord, l'adjectif "meilleur" n'a été utilisé que trois fois ce

  8   jour-là : la première fois, dans la citation concernant Mladic, qui a

  9   utilisé ce mot; ensuite, dans une citation d'un article d'un journal du

 10   SDS, disant que des Croates meurtriers veulent tuer les Serbes qui sont

 11   "meilleurs"; et ensuite, la citation concernant le message du commandant

 12   adjoint du SRK aux unités où il a dit que les Serbes sont supérieurs aux

 13   Musulmans du point de vue génétique — "ils sont plus forts, ils sont

 14   meilleurs, ils sont plus beaux et ils sont plus intelligents."

 15   Le seul exemple qu'ils ont cité est que l'Accusation, donc, a

 16   contesté l'affirmation de la Défense pour ce qui est de la signification de

 17   l'expression "lutter contre l'agression". Nous avons donc contesté cette

 18   affirmation selon laquelle c'était le seul sens anodin, parce qu'on peut

 19   trouver dans la citation la référence à une réunion entre Mladic et

 20   Karadzic et les habitants locaux, où il est dit : "Il n'y a plus de

 21   Musulmans maintenant dans la municipalité de Bratunac. Il s'agit d'une

 22   ville complètement libérée."

 23   Nous avons dit que la position de la Défense est raisonnable mais

 24   qu'il y a une autre possibilité. Nous avons parlé de ce point de vue

 25   alternatif offert par la Défense et nous avons expliqué que ce point de vue

 26   n'est pas raisonnable. Et, après un examen approfondi, cela prouve notre

 27   thèse. Encore une fois, il s'agit d'un effort évident de la Défense

 28   d'écarter l'attention pour qu'on ne se penche pas sur les moyens de preuve


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  1   utilisés par la Défense et qui montrent la culpabilité de Mladic au-delà de

  2   tout doute raisonnable.

  3   La Défense a clairement fait remarquer ce que vous deviez faire pour

  4   éviter d'arriver à cette conclusion. Vous devez, selon eux, analyser les

  5   moyens de preuve de façon pas raisonnable, en les examinant de façon

  6   isolée, et vous pencher uniquement sur les moyens de preuve que la Défense

  7   veut que vous vous penchiez. Cela ressort clairement du premier exemple de

  8   la vidéo qui montre que Mladic entre à Srebrenica en disant, Il est venu le

  9   moment pour se venger des Turcs. Donc, ils donnent des interprétations

 10   fantaisistes, y compris l'interprétation selon laquelle Mladic aurait dit à

 11   ce moment-là que tuer des Musulmans -- il fallait les tuer avec

 12   gentillesse. Tout simplement, il voulait "obtenir une supériorité morale"

 13   et, de cette façon-là, rendre les forces ennemies furieuses. C'était leur

 14   argument. Et ce n'est pas non seulement déraisonnable en soi, mais vu les

 15   faits historiques - la rébellion des Dahis - il fait abstraction du poids à

 16   donner aux moyens de preuve qui doivent donner une interprétation informée

 17   de cette vidéo.

 18   Il y a d'autres exemples où ils ont essayé de présenter des arguments

 19   sans aucun sens ou inventés pour les présenter comme étant des doutes

 20   raisonnables.

 21   D'abord, l'affirmation selon laquelle la Republika Srpska n'a pas

 22   proclamé l'état de guerre de façon légale, c'est pas pertinent.

 23   Beaucoup de lois de la Republika Srpska invoquent des dispositions

 24   concernant l'état de guerre et l'état de menace imminente de guerre. Et ça

 25   a été proclamé par la RS en avril 1992. Comme Karadzic l'a expliqué lors de

 26   la 5e [comme interprété] Assemblée, toutes les lois qui auraient pu être

 27   utilisées en temps de guerre avaient déjà été, selon lui, "en vigueur", à

 28   l'exception d'une loi concernant les cours martiales et des exécutions


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  1   sommaires. C'est la pièce P4583, page 104 et page 342.

  2   Par conséquent, le fait que l'état de guerre n'a pas été proclamé de

  3   façon formelle ne résultait pas du fait qu'il n'avait pas eu l'influence

  4   sur l'armée, mais du fait qu'il considérait ce qu'aurait été l'impact sur

  5   l'objectif commun. Un officier du VRS a expliqué les motivations des

  6   membres de l'entreprise criminelle commune pour ne pas proclamer l'état de

  7   guerre : "Ils considéraient que si on n'était pas en guerre, la législation

  8   concernant la guerre ne s'appliquait pas." Et il a expliqué ce qu'il

  9   voulait dire de cela lorsqu'il a parlé des départs forcés des Musulmans.

 10   P439, paragraphe 5.

 11   La Défense a également affirmé que l'Accusation, la semaine dernière,

 12   avait dit que Mladic et Drljaca, chef du SJB de Prijedor, étaient "les

 13   meilleurs amis".

 14   En fait, nous avons mentionné Drljaca à deux reprises et nous avons cité la

 15   déclaration de Drljaca concernant une coopération exceptionnelle entre la

 16   VRS et le MUP de la Republika Srpska. Cela ne veut pas dire que nous

 17   soutenons que Drljaca et Mladic étaient dans une liaison romantique, mais,

 18   bien sûr, il ne s'agit que d'un exemple de nombreux exemples concernant la

 19   coopération entre le SJB de Prijedor et la 43e Brigade pendant la campagne

 20   de nettoyage. Pour ce qui est d'autres exemples, il faut voir les pièces

 21   P2432 et P4062, il s'agit d'une note de Drljaca où il exprime son

 22   remerciement au commandant Talic, commandant du 1er Corps de Krajina, pour

 23   son "aide sans réserve" pendant 1992. En dépit de la tentative de la

 24   Défense de créer cet argument creux, la VRS et le MUP de la Republika

 25   Srpska, pendant toute cette situation, agissaient de concert.

 26   La Défense a également dit que nous avions essayé de présenter

 27   certains auteurs du crime du MUP en tant que soldats du VRS à Prijedor.

 28   Le premier exemple est une tentative sans succès pour ce qui est de


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  1   la préparation des camps à la veille de la visite des journalistes, et ils

  2   citent la différence présumée entre ce que Mladic avait ordonné pour

  3   nettoyer des camps et la question que j'ai posée à un témoin dans l'affaire

  4   Brdjanin pour savoir si Zupljanin, chef du MUP de la RAK au niveau

  5   régional, y était impliqué. Le jour suivant, pourtant, la Défense a montré

  6   à la Chambre l'ordre de Mladic, c'est P2879, et a fait remarquer que Mladic

  7   avait ordonné à Talic de prendre des mesures, y compris par le biais du

  8   MUP, pour que tout soit prêt avant ces visites. Et par l'intermédiaire du

  9   MUP dans le cadre de la RAK, à savoir par le biais de Zupljanin, la VRS et

 10   la police, dans ce cas-là, ont agi de concert. Par rapport à ces questions,

 11   il n'y a pas de point incohérent. Et pour ce qui est de l'argument de Me

 12   Ivetic, on peut dire que cela ne tient pas la route.

 13   La Défense, ensuite, a essayé de dire pour ce qui est d'Omarska et de

 14   Keraterm la même chose, et cela n'a aucune valeur. Dans notre mémoire en

 15   clôture, nous disons que les officiers du MUP de Prijedor commandaient

 16   Omarska et Keraterm. C'est aux paragraphes 537 et 33, 34 et 37 du récit

 17   concernant Prijedor, ainsi que le tableau contenant les faits répertoriés

 18   concernant Prijedor. Nous avons expliqué que la VRS a coopéré pour ce qui

 19   est de la gestion de ces camps. La VRS assurait la sécurité de ces camps et

 20   fournissait des inspecteurs et regroupait des gens qui étaient détenus et

 21   qui étaient maltraités. Le MUP, donc, a la responsabilité principale, ainsi

 22   que les commandants qui étaient le personnel du MUP.

 23   La Défense a cité un document qui n'a pas été versé au dossier, c'est

 24   la Résolution du Conseil de sécurité 752. Ils ont dit qu'on peut conclure

 25   de façon raisonnable que Zeljaja "agissait de façon faible" lorsqu'il a

 26   menacé d'incendier Kozarac. Les documents qui ont été versés au dossier

 27   montrent clairement qu'il est difficile d'y croire. P2052 montre ce Conseil

 28   de sécurité, dans la Résolution 752, "exigeait aussi que toutes les unités


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  1   dans la JNA et les éléments de l'armée croate qui se trouvent en Bosnie-

  2   Herzégovine à présent doivent se retirer ou se soumettre à l'autorité du

  3   gouvernement de Bosnie-Herzégovine, ou être démantelés et désarmés et que

  4   leurs armes soient placées sous le contrôle de la communauté

  5   internationale."

  6   Confer le fait jugé 291.

  7   Donc, le Conseil de sécurité n'encourageait pas Zeljaja à désarmer qui que

  8   ce soit, encore moins d'incendier leurs villages et de les raser s'ils ne

  9   lui obéissaient pas. Il disait simplement que c'est lui qui devait être

 10   désarmé, partir et se placer sous le commandement de la présidence de

 11   Bosnie.

 12   Les éléments de preuve montrent également concernant ce point-là que les

 13   exigences de Zeljaja, à savoir que les résidents de Kozarac remettent 7 000

 14   armes, étaient un simple prétexte. Drljaca en a conclu à l'époque qu'entre

 15   Kozarac et Kozarusa, tout ce qu'il y avait, c'était une unité correspondant

 16   aux "effectifs d'une compagnie"; P2869. En conséquence, la 43e Brigade, qui

 17   faisait à ce moment-là partie de la VRS, a rapidement et de façon brutale

 18   nettoyé le village, tuant et déplaçant les civils ainsi que les soldats,

 19   notamment les femmes, les enfants et les personnes âgées.

 20   Accessoirement, outre la résolution du Conseil de sécurité, la Défense a

 21   cité un certain nombre de documents dans son mémoire en clôture et a

 22   présenté des arguments qui n'ont simplement aucun lien avec les éléments de

 23   preuve. Nous avons identifié ces documents et nous lui en avons parlé il y

 24   a quelques semaines, mais la Défense n'a pas encore apporté de corrections.

 25   Nous supposons qu'ils le feront pendant la contre-réfutation.

 26   La P7441 se trouve dans le même cas. A la note de bas de page 304, nos

 27   arguments sur Prijedor cadrent avec les décisions de la Chambre de première

 28   instance. Nous ne nous reposons donc pas sur les pages 15 à 20 de ce


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  1   document.

  2   Par opposition aux éléments de preuve présentés dans nos arguments

  3   concernant les inquiétudes des membres de l'entreprise criminelle commune

  4   au sujet de l'indépendance de la Bosnie et des préparatifs qui consistaient

  5   à diviser sur un plan ethnique la Bosnie par la force si cela s'avérait

  6   nécessaire, la Défense a dépeint un tableau des Bosno-Serbes menacés par un

  7   "monstre"; la machine de guerre islamique, pour l'essentiel, un équivalent

  8   moderne de l'Etat islamique d'Irak et de Syrie, dirigée par le chef de la

  9   "Déclaration islamique", Izetbegovic, qui souhaitait détruire les Serbes,

 10   tel qu'avancé par le magazine Vox et le porte-parole du SDA qui a évoqué

 11   ces soi-disant appels à la décapitation des Serbes et accueillant ainsi le

 12   IVe Reich.

 13   Nous savons qu'il y a eu des victimes de part et d'autre, que ces victimes

 14   ont été nombreuses et qu'il y a eu des auteurs de crime appartenant à

 15   chaque groupe ethnique, mais cette description apocalyptique des

 16   circonstances de l'époque ne cadre tout simplement pas avec les éléments de

 17   preuve et ne peut pas écarter la responsabilité du général Mladic pour les

 18   crimes qu'il a commis.

 19   Et à titre d'exemple, les éléments de preuve montrent que :

 20   Premièrement, la menace qui soi-disant galvanisait la population de la

 21   Déclaration islamique n'a même pas été évoquée lors de l'assemblée avant

 22   1993; et encore, à ce moment-là, l'orateur à l'époque ne savait même pas si

 23   l'auditoire savait de quoi il parlait.

 24   Karadzic a reconnu que lors de la campagne électorale, les Musulmans

 25   étaient des Slaves qui étaient Européens, des fanatiques et des

 26   fondamentalistes [comme interprété] avec lesquels les Serbes cohabiteraient

 27   toujours. Et après les élections, il y a eu trois partis nationalistes qui

 28   ont formé un gouvernement de coalition. P7759, pages 8 à 9; et P6921, page


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  1   13.

  2   Les intentions d'Izetbegovic aux yeux des Bosno-Serbes ont été prouvées

  3   lors d'une discussion entre Koljevic et Tudjman en janvier 1992, P6727, qui

  4   montre Koljevic qui prône l'homogénéité ethnique par le biais de transferts

  5   de population en réponse à l'intérêt marqué d'Izetbegovic pour un "état

  6   civil".

  7   Le magazine Vox ne prônait pas ce qui a été montré sur la page de

  8  couverture, les décapitations et le IVe Reich -- le fait d'accueillir le IVe

  9   Reich. Ils dénonçaient et condamnaient les efforts visant à opposer un

 10   peuple contre l'autre. Après ce désordre avancé par la Défense, lisez

 11   simplement l'introduction à cet article qui montre tout le contraire de ce

 12   qu'ils avancent. Page 2, D580.

 13   Alors, pour ce qui est de la description de la Défense de la VRS comme

 14   étant une armée de va-nu-pieds, qui se battaient contre un "monstre" et "la

 15   machine de guerre islamique", le 1er Corps de Krajina, le commandant Talic,

 16   avant même la création de la VRS, a déclaré : "Le Corps de Banja Luka est

 17   une force très importante et une organisation telle qu'il n'y a aucun

 18   risque pour que le corps ou le peuple de Krajina puissent être mis en

 19   danger," P7464. Dans son appréciation, le chef d'état-major Kelecevic a

 20   indiqué que cela cadrait avec sa déposition, T37174.

 21   Et le 23 mai 1992, le poste de commandement avancé [comme interprété] a

 22   rapporté à Mladic que les effectifs étaient à 128 % de ce qui avait été

 23   prévu; P3987.

 24   Les forces musulmanes dans les municipalités reprochées dans l'acte

 25   d'accusation étaient mal équipées, si on les compare avec celles-ci, et

 26   devaient faire face à cette force. Comme l'a indiqué le Témoin à décharge

 27   Kupresanin, qui à l'époque a reconnu devant l'assemblée en septembre 1992

 28   que :


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  1   "Nous avions des aéronefs, des obusiers, des chars, des canons, mais de

  2   quoi disposaient les Musulmans ? Ils avaient des fusils, ils avaient des

  3   mitrailleuses qu'ils avaient achetées aux Serbes et ils avaient des fusils

  4   artisanaux. Nous aurions pu traverser la Bosnie comme un couteau qui coupe

  5   le fromage."

  6   P6921, page 10.

  7   C'est parce qu'ils ont, à ce moment-là, pu utiliser le matériel de la JNA,

  8   au moment où il y a eu cette transformation. Donc, Mladic n'était pas un

  9   super homme. Il était simplement quelqu'un en mission qui disposait d'une

 10   force suffisante placée sous son commandement qui s'est rendue en Bosnie,

 11   qui a traversé ce pays comme s'il utilisait un couteau pour couper du

 12   fromage, et il a utilisé ces forces pour commettre des crimes de masse et

 13   détruire les communautés qui s'y trouvaient.

 14   Les représentants de la communauté internationale savaient que les forces

 15   du gouvernement de Bosnie n'étaient pas une machine de guerre. Wilson a

 16   expliqué qu'aux mois de mai et juin 1992, les forces de la BiH n'étaient

 17   "pas encore une force combattante complète. Ils étaient équipés de façon

 18   légère et disposaient d'un entraînement limité. Il y avait du chemin à

 19   parcourir avant de devenir une force militaire compétente." Le SRK, de

 20   l'autre côté, était bien équipé, bien organisé et se battait de façon

 21   professionnelle; pages du compte rendu d'audience 4 008 à 4 011. M. Weber a

 22   cité la semaine dernière des éléments de preuve montrant que le SRK a

 23   continué à être une armée mieux équipée et mieux armée pendant toute la

 24   durée de la guerre.

 25   Alors, permettez-moi de parler de deux jours importants dans le courant de

 26   l'été 1992, qui illustre la réalité à l'époque, le P7692 qui montre les

 27   membres de la présidence qui abordent la question de savoir ce qu'il

 28   fallait faire au sujet des Musulmans que l'on avait transférés par la


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  1   force, par ceux "dont l'intention était de créer des territoires ethniques,

  2   de déplacer la population et de créer des unités nationales propres."

  3   Et ceci traduit l'observation d'Izetbegovic à propos de leur

  4   dilemme:

  5   "Si nous n'acceptons pas l'ultimatum, ce peuple pourra souffrir. Si

  6   nous l'acceptons, nous allons légaliser la division ethnique, c'est-à-dire

  7   une modification du tableau démographique en Bosnie, et la création de

  8   territoires ethniquement purs."

  9   Et notant plus avant que :

 10   "S'agissant de tous ces accords, je crois que de toute façon, après,

 11   ils vont simplement diriger leurs canons contre ces personnes et les tuer.

 12   Toutes les fois qu'ils ont rendu leurs armes, ils ont finir par souffrir."

 13   Page 4.

 14   Et un autre jour de l'été 1992, lors de l'assemblée des Serbes de

 15   Bosnie, c'était au mois de juillet, il s'agit de la 17e Séance de

 16   l'assemblée, P4581. Il n'aborde pas à ce moment-là, il ne parle pas du

 17   dilemme portant sur le transfert, sur le dilemme de savoir s'il fallait

 18   accepter le transfert forcé pour éviter que des choses comme cela se

 19   produise, il parle d'autre chose. Et Karadzic explique comment la situation

 20   sur le terrain créée par Mladic se développe :

 21   "Nous avons libéré quasiment tout ce qui nous appartient, et dans des

 22   pourparlers définitifs, nous pourrons revenir sur certains territoires,

 23   villages qui ne nous appartiennent pas."

 24   D'autres orateurs se joignent à lui pour faire l'éloge de Karadzic,

 25   qui se rend sur les lieux pour leur rendre visite et qui chasse les

 26   Musulmans des territoires où ils étaient autrefois majoritaires; page 65.

 27   Et ils indiquent qu'ils ont l'espoir qu'au moins la moitié des Musulmans de

 28   BiH seront chassés. Karadzic, à ce moment-là, cite un orateur qui a précisé


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  1   que les Musulmans leur avaient été présentés comme un peuple dont

  2   l'exécution -- un peuple dont les Serbes étaient les bourreaux, en étant

  3   d'accord avec le fait que l'Europe les avait menés au conflit pour éliminer

  4   les Musulmans". P4581, pages 41 à 86.

  5   La Défense exagérait également le nombre de Musulmans et Croates qui

  6   servait dans la VRS, se demandant rhétoriquement si des Musulmans et des

  7   Croates, qui étaient des soldats de la VRS, commettaient un génocide contre

  8   leur propre population. Oui, c'est exactement ce que l'on demandait aux

  9   conscrits musulmans qui étaient restés à la VRS, à l'époque, et c'est

 10   exactement la raison pour laquelle ils ont demandé à être libérés de leur

 11   unité ou ont déserté. Ils étaient mécontents de la destruction massive de

 12   leurs villes par les forces de la VRS. Page 151.

 13   Et pour gonfler le nombre de non-Serbes dans la VRS, la Défense cite

 14   des données qui comprennent des Musulmans et des Croates qui avaient quitté

 15   la région, qui servaient dans la JNA, mais n'ont jamais servi dans la VRS,

 16   ou qui n'ont servi qu'après la guerre tout en passant sous silence des

 17   preuves relativement à des purges des non-Serbes de la VRS. Voir paragraphe

 18   36 de notre mémoire.

 19   En tout état de cause, le nombre limité de Musulmans ethniques ou

 20   Croates qui sont restés à la VRS, où l'ont rejointe pour des motifs

 21   personnels, ne contredit pas ni les crimes, ni la responsabilité de Mladic.

 22   La Défense prétend également que sans ce qu'elle appelle "le voile de

 23   l'entreprise criminelle commune", les réunions de Mladic étaient "des

 24   discussions tout simplement normales d'un système d'administration engagé

 25   dans un conflit."

 26   Ce serait vrai si l'on accepte que ce sont des questions

 27   d'administration normales que de discuter du fait que l'armée a réalisé

 28   certains de ces objectifs stratégiques, mais pas la totalité, qu'il était


Page 44848

  1   temps de s'occuper de la Drina et de réaliser l'objectif 3, une réunion qui

  2   a été suivie par la directive 4 de Mladic d'expulser la population

  3   musulmane de la région de Drina, en plus des forces musulmanes; P358, pages

  4   146, 147. Puisque l'on peut accepter que c'est du travail administratif

  5   normal lorsque les autorités locales se réunissent avec leurs hauts

  6   dirigeants, en ce compris, Karadzic, Mladic pour se vanter de la réduction

  7   des populations musulmanes à Foca, Kljuc, Bratunac, Zvornik et ailleurs.

  8   Voir paragraphe 290 de notre mémoire.

  9   Mais voilà, c'est un exemple de la manière dont la Défense vous

 10   invite à examiner les preuves de manière isolée. Si Mladic et Mico Stanisic

 11   se rencontrent en juillet 1992 pour une coopération entre la VRS et la RS

 12   MUP, eh bien, vous savez sur la base du reste du dossier que ce que font

 13   ensemble la VRS et le MUP à l'époque, en ce compris, organiser des camps où

 14   des non civils serbes sont détenus, et soumis à des sévices, et mènent

 15   ensemble des opérations de nettoyage ethnique. A ce moment-là, on ne peut

 16   pas parler d'une réunion administrative normale. C'est une réunion entre

 17   deux personnes dont les organisations commettent ensemble des crimes en

 18   masse pour améliorer leur coopération. Car, c'est cela que l'ensemble des

 19   moyens de preuve dans leur totalité vous explique.

 20   L'affirmation de la Défense selon laquelle on ne sait pas très bien

 21   quelle est la thèse de l'Accusation est basée sur des affirmations

 22   faussement justifiées; par exemple, nous avons abandonné les accusations

 23   sur Kalinovik dans nos arguments en clôture, dans notre réquisitoire, en

 24   relevant que Mladic avait utilisé les Musulmans serbes de Kalinovik, comme

 25   exemple, de Musulmans qui ne seraient peut-être pas expulsés, tout en

 26   précisant que, par la suite, les subalternes de Mladic ont nettoyé

 27   ethniquement les municipalités. Le général Mladic est accusé de ce

 28   nettoyage comme il l'a été lors de tout le procès.


Page 44849

  1   De manière tout aussi grotesque, que la Défense prétend, que du fait

  2   que la première citation citée dans les arguments datés de 1993, lorsque

  3   Mladic s'est attribué le mérite d'avoir du nettoyage mené par ses forces

  4   depuis 1992, elle se trompe sur la date de début de l'ECC, qui est énoncé

  5   clairement dans l'acte d'accusation et tout aussi clairement dans notre

  6   mémoire et dans nos arguments. Mladic n'est accusé que des crimes commis

  7   après le 12 mai, voir paragraphe 191 de notre mémoire, mais ce qu'il a fait

  8   ainsi que les autres membres de l'ECC est pertinent pour comprendre

  9   l'existence de l'ECC, de ses objectifs.

 10   Il n'est pas accusé pour les crimes en Croatie, mais ce qu'il a fait là-

 11   bas, comme je l'ai déjà dit, explique son intention de commettre des

 12   crimes, il est accusé, l'intention de commettre de Karadzic, et l'intention

 13   criminelle des autres membres de l'entreprise criminelle commune, tels que

 14   Milosevic qui a surveillé la campagne en Croatie. Ce n'est pas une

 15   surprise, comme vous pourrez le voir au paragraphe 15 de la décision de la

 16   Chambre, acceptant le témoignage de Milan Babic.

 17   La Défense prétend également qu'elle ne sait pas quels sont les actes

 18   criminels spécifiques reprochés à Mladic. Mais cela revient à ignorer, par

 19   exemple, l'annexe B du mémoire de l'Accusation, qui identifie pour la

 20   partie de municipalités de notre thèse, les preuves prouvant au-delà de

 21   tout doute raisonnable, les meurtres, la destruction de sites culturels, la

 22   détention et le traitement cruels, dont est accusé le général Mladic et

 23   pour lesquels nous demandons sa condamnation.

 24   Les crimes que nous mentionnons par nom à l'annexe B sont les mêmes que

 25   ceux de l'acte d'accusation, un exception près, l'annexe B montre que ne

 26   nous voulons une condamnation que sur deux mosquées à Kalinovik. Nous ne

 27   voulons pas de condamnation sur les mosquées pour lesquelles M. Riedlmayer

 28   n'a pas conclu qu'elles aient été détruites pendant la guerre et dont a


Page 44850

  1   parlé M. Ivetic vendredi et que nous n'avons pas inclus dans l'annexe B.

  2   Seuls les actes de persécution sont cités dans l'annexe A.

  3   La Défense a également parlé des crimes non abandonnés suggérant que

  4   cet ajout dans le dossier ne peut refléter une intention de condamner le

  5   général Mladic pour ces crimes. Cette affirmation ignore les plaidoiries et

  6   la jurisprudence et n'est pas basée sur la véritable position de

  7   l'Accusation. Tout simplement, la Chambre devrait estimer que ces crimes

  8   prouvent le caractère systématique et généralisé des attaques contre les

  9   civils non-serbes et la systématicité des crimes de Mladic et des autres

 10   membres de l'ECC utilisés pour assurer le nettoyage ethnique des

 11   territoires revendiqués ainsi que leur intention.

 12   Nous avons prévenu que nous utilisions les preuves sur l'existence

 13   des démarches systématiques pendant le procès. Par exemple, Ivetic a dit

 14   que nous n'avons pas respecté notre obligation de notifier que nous allions

 15   présenter des preuves sur les camps abandonnés à Sanski Most, Sokolac,

 16   Kotor Varos, donc qui faisaient partie du scénario de crimes contre les

 17   non-Serbes dans ces municipalités et que nous avons cités dans notre

 18   mémoire.

 19   Premièrement, nous avons notifié cela dans notre liste des témoins 65

 20   ter. Nous avions notifié que nous parlerions dans camps dans ces

 21   municipalités. En tout état de cause, ce n'était pas une obligation, voir

 22   le compte rendu d'audience 9 770, 71. Il n'y a pas de surprise. Il se

 23   trouve que des preuves sont si accablantes que la Défense doit feindre la

 24   confusion plutôt que de répondre à notre thèse.

 25   La Défense suggère que le fait que nous ayons parlé de Prijedor a

 26   pour signification que nous avons abandonné le chef d'accusation 1 pour les

 27   autres municipalités. Nous avons, en fait, donné le cadre d'analyse que la

 28   Chambre doit appliquer au fait de chaque municipalité incriminée. Par


Page 44851

  1   exemple, à la suite d'une campagne de purification ethnique similaire menée

  2   à Foca --

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, vous êtes debout.

  4   M. IVETIC : [interprétation] M. Tieger ne parle pas de notre plaidoirie.

  5   Nous n'avons pas dit, en fait, que cela était abandonné. Nous avons parlé

  6   de Prijedor.

  7   M. TIEGER : [interprétation] La suggestion était que les autres

  8   municipalités incriminées, c'était une concession de l'Accusation pour ce

  9   qui était des autres municipalités incriminés.

 10   Donc, pour donner un exemple d'application de ce cadre de l'analyse

 11   aux autres municipalités à la suite d'une campagne de purification ethnique

 12   de nature similaire menée à Foca, donc comme Prijedor, la plus grande

 13   municipalité en Bosnie et symbole pour les Serbes de l'Islam, le général

 14   Mladic lui-même a relevé que Foca était serbe à 99 % en septembre 1992. En

 15   utilisant les faits énoncés dans le résumé sur les municipalités, la

 16   Chambre peut prendre connaissance des milliers d'actes relevant des

 17   articles 4(2)(a) à (c), des centaines de personnes tuées à KP Dom et

 18   d'autres lors de massacres de Trosanj. Les forces serbes ont rassemblé les

 19   Musulmans de Foca, les ont détenus dans des facilités où les détenus ont

 20   été soumis à des actes interdits relevant des articles 4(2)(a) à (c). Les

 21   passages à tabac habituels, des tensions dans des conditions terribles,

 22   l'absence de nourriture, de chaleur et de soins médicaux, la vulnérabilité

 23   des détenus a exacerbé l'effet destructif des conditions dans les camps. La

 24   violence systématique infligée démontre les conditions inhumaines qui

 25   visaient leur destruction massive. Un survivant l'a dit :

 26   "Les conditions au KP Dom étaient calculées pour causer la peur et

 27   démoraliser, pour moi."

 28   RM046, P738, page 9.


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  1   Des crimes de violence sexuelle étaient menés contre les femmes dans

  2   les camps, des viols étaient systématiques et des agressions sexuelles

  3   contre ces victimes étaient systématiques. Parfois, ces sévices duraient

  4   plusieurs mois. Un survivant de la campagne de nettoyage dans les camps a

  5   relevé :

  6   "Je ne me remettrai pas. Ma vie a été détruite. Ma famille a été

  7   détruite. Mes être chers ont été tués. Tout ce que j'avais en vie m'a été

  8   pris, ainsi que mon bonheur."

  9   RM070, compte rendu d'audience 11 752 à 753.

 10   Et la Chambre évaluera également la totalité de l'attaque, y compris

 11   les transferts forcés, la destruction des mosquées traumatiques, ce qui

 12   montre une intention éclairée par les moyens utilisés pour réaliser

 13   l'objectif total à Foca. L'intensité des crimes, d'échelle des crimes

 14   montre l'intention de Mladic et des autres membres de l'ECC, au même titre

 15   que les expressions régulières de satisfaction des dirigeants serbes de

 16   Bosnie par rapport au résultat de la campagne à Foca que nous décrivons au

 17   paragraphe 2 du résumé sur les municipalités. Et tout cela, c'est une

 18   analyse qu'il faut faire porter à toutes les municipalités. Cela montre

 19   qu'il y a une intention de détruire au titre des articles applicables de la

 20   convention sur les génocides.

 21   Sarajevo, la critique a reproché à l'Accusation de ne pas avoir parlé

 22   du témoignage de Fadila Tarcin au sujet de l'origine d'un des obus lors du

 23   bombardement G1. Ils ont fait état d'un passage limité de son témoignage,

 24   où elle aurait dit que :

 25   "L'obus venait de la ville, mais pas de la colline où se trouvaient

 26   les Serbes."

 27   Mais à nouveau, ici, la Défense déforme les moyens de preuve.

 28   Tarcin, premièrement, a déclaré que l'obus est arrivé sur le côté de


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  1   la maison qui était face à la ville. Alors, ce n'était pas la même chose

  2   que de dire que l'obus venait de la ville; 3 447, 3 448, compte rendu

  3   d'audience. En plus, à la page 342, elle a déclaré, ainsi que dans sa

  4   déclaration P282, au paragraphe 3, que l'obus venait de Borije, l'est de

  5   Sirokaca. La Chambre a énormément de preuves au sujet de la localisation de

  6   Borije, au nord-est, en face de Sirokaca, de l'autre côté de la Miljacka.

  7   En fait, le témoin du SRK Veljovic - D532, paragraphe 32 et compte rendu

  8   d'audience 23 002 à 03 et 23 013 - le témoin Dzida du SRK, D489, paragraphe

  9   17 et D490, page 1 - et Gengo, compte rendu d'audience 21 619, ont confirmé

 10   qu'il y avait des positions d'artillerie du SRK à Borije.

 11   En outre, le journal de Stari Grad, P549, page 72, indique également

 12   qu'il y a d'autres quartiers de Sarajevo, Vratnik et Kovaci, qui ont été

 13   pris pour cibles lors de l'événement ou du fait G1, avec des projectiles

 14   provenant de Borije.

 15   La Défense a cité le Témoin Oien pour dire que le 28 juin 1995, une

 16   attaque à bombe aérienne modifiée sur le bâtiment de la RTV a été menée par

 17   l'ABiH et cite Segers qui aurait dit prétendument "qu'il connaissait un

 18   autre cas où la même chose s'était produite".

 19   L'ABiH ne possédait pas de bombes aériennes modifiées. Le SRK s'est

 20   vanté dans un rapport interne que c'est lui qui avait frappé le bâtiment de

 21   la RadioTélévision ce jour-là, D147. Et des rapports des Nations Unies ont

 22   confirmé la même chose; D165, pages 1, 6 et 12. Et un observateur militaire

 23   des Nations Unies, Brennskag, a même vu une bombe aérienne modifiée tirée à

 24   partir du territoire sous contrôle de la VRS voler dans les airs et frapper

 25   le bâtiment de la RTV. P992, paragraphe 52.

 26   Segers et Oien se trompent manifestement. Les efforts de la Défense de

 27   transformer le témoignage de Segers en un deuxième événement reposaient sur

 28   le fait que Segers parlait de ce que quelqu'un lui aurait dit, un collègue


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  1   à lui, à Zagreb, un an plus tard. En fait, la prise en compte importante

  2   par la Défense de la déposition de Segers s'effondre face à son aveu de

  3   problèmes de mémoire importants et même de complets blancs et de son

  4   incapacité, selon ses propres mots, à "représenter correctement ne serait-

  5   ce que ce qui s'était passé lorsqu'il était à Sarajevo."

  6   Transcript, pages 43 803 à 43 804.

  7   A la page 44 745 du compte rendu d'audience, la Défense argue du fait que

  8   l'ABiH voulait pilonner et frapper son propre peuple pour perpétuer le

  9   mythe selon lequel le RSK était en train d'agir de la sorte. A l'appui de

 10   ses dires, elle met en avant la déposition du général Rose et d'Edin

 11   Garaplija.

 12   Le général Rose, cependant, a reconnu clairement qu'alors qu'il savait que

 13   de telles allégations étaient propagées par les médias, il n'avait pas la

 14   moindre idée du fait que ces allégations étaient fondées ou pas.

 15   D'autres représentants internationaux, tels que Fraser, n'étaient pas

 16   au courant de ces allégations, et encore moins de la déposition indiquant

 17   qu'il existait un parti pris.

 18   En tout état de cause, l'insinuation que Rose laisse entendre, c'est que

 19   les crimes qui font l'objet des charges retenues contre Mladic étaient en

 20   fait commis par les Musulmans, et ceci est une transformation de la

 21   réalité. Rose a déclaré, dans la pièce P736, paragraphe 217, que

 22   "s'agissant des tirs embusqués, le niveau de tirs embusqués était

 23   infiniment supérieur de la part des Serbes" et que "le grand nombre de

 24   civils tués étaient manifestement des Musulmans de Bosnie à l'intérieur de

 25   la ville de Sarajevo."

 26   L'Accusation s'intéresse ensuite au pilonnage important de Sarajevo par le

 27   RSK dans la page 44 497 et 44 498 du compte rendu d'audience de son

 28   réquisitoire et aux paragraphes 915 à 1 002 de son mémoire en clôture.


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  1   Et les affirmations de Garaplija qui reposent toutes sur des aveux supposés

  2   de Nedzad Herenda, eh bien, Garaplija aurait battu et torturé Herenda, et

  3   c'est un aveu qui vient de lui. Garaplija a été condamné à une peine de

  4   prison pour l'enlèvement de Herenda et le passage à tabac et les tirs se

  5   sont produits pendant cet interrogatoire. Par ailleurs, le récit

  6   extravagant de Garaplija destiné à justifier ses crimes, comme on le voit

  7   au contre-interrogatoire, ont été rejetés à plusieurs reprises au fil des

  8   années. Aucun poids ne peut être accordé à cette déposition.

  9   La Défense a affirmé que des bombes aériennes modifiées avaient été conçues

 10   par des experts à l'aide de tableaux de tir détaillés dont elle déclare que

 11   l'Accusation l'a nié dans une "tentative désespérée" d'appuyer ses

 12   allégations contre Mladic. Page 44 765 du compte rendu d'audience. Donc,

 13   grattons la surface et voyons ce qui est si désespéré.

 14   Même si la Défense admet que la bombe aérienne modifiée n'avait pas

 15   été "conçue par un amateur", Milovanovic l'a décrite en disant qu'elle

 16   avait été "construite d'une façon artisanale", ce qui est presque

 17   comiquement confirmé par l'aveu de Radojcic que sa propre brigade, et non

 18   pas un constructeur, au hasard, avait construit ce lance-roquettes sur la

 19   base de schémas provenant du commandement supérieur; page 23 044 du compte

 20   rendu d'audience. L'affirmation initiale de Radojcic selon laquelle il

 21   existait une "table de tir" s'est avérée n'être rien d'autre qu'une

 22   qualification concernant un élément "temporaire" ou "provisoire" sur

 23   feuille A4 dont nous savons - et pas lui - qui était à son origine; page 23

 24   170 du compte rendu d'audience.

 25   Les seules tables de tir produites par rapport à cette question et

 26   qui n'ont pas été versées au dossier concernent un lance-roquettes Kosava.

 27   Dans un ordre du 3 août 1995, pièce 4282, le général Mladic déclare que la

 28   VRS "possède un certain nombre de lance-roquettes Kosava venant de


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  1   plusieurs constructeurs dont la qualité ne garantit pas la précision

  2   nécessaire si on la compare à des FAB 105 [sic] ou des FAB 250."

  3   Au vu de l'admission de l'époque de Mladic par rapport à cette

  4   imprécision, le développement de tableaux de tir qui pourraient avoir

  5   amélioré la situation après les incidents répertoriés ne change rien à

  6   l'intégralité des éléments de preuve selon lesquels les bombes aériennes

  7   modifiées étaient une arme de la plus haute imprécision.

  8   Et enfin, nous avons Veljovic, adjoint au chef d'état-major chargé

  9   des opérations et de l'entraînement au sein du RSK, qui témoigne que des

 10   bombes aériennes modifiées n'étaient pas associées à des tableaux de tir et

 11   étaient largement connues au sein de la VRS comme grotesquement imprécises.

 12   Pages 22 949 à 22 953 du compte rendu d'audience. Etant donné l'imprécision

 13   inhérente et la capacité destructrice de cette arme, c'était une arme

 14   terrifiante pour la population de Sarajevo, comme Fraser, Konings, Radojcic

 15   et Brennskag en ont témoigné.

 16   En page 44 757 du compte rendu d'audience, la Défense affirme :

 17   "En fait, conformément au droit de recours à la force pour se protéger soi-

 18   même, il était parfaitement légitime que le RSK retourne les tirs face aux

 19   assauts dont faisaient l'objet ses positions. En effet, le Témoin Jordan a

 20   confirmé que ces pratiques étaient une procédure opérationnelle standard,

 21   en page 1 818 du compte rendu d'audience."

 22   Jordan n'a pas confirmé. Il a dit qu'il n'avait guère de connaissances à ce

 23   sujet. Il n'a pas confirmé cela. Mais ce qu'il a dit, c'est que les tirs

 24   embusqués contre les civils faisaient partie de "la vie quotidienne" et

 25   qu'il "croyait fermement" que la base des observations entre 1992 et 1995

 26   était centrée sur une tentative de terroriser les civils à Sarajevo par des

 27   pilonnages et des tirs embusqués, rappelant, entre autres choses, que les

 28   tireurs serbes allaient poursuivre les personnes les plus jeunes au sein


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  1   d'un groupe; P126, paragraphe 42.

  2   La Défense s'est appuyée sur les Témoins Segers et Mole pour prétendre que

  3   le pilonnage des hôpitaux était en fait des "tirs en retour" qui

  4   "techniquement visaient" des mortiers mobiles et pas les hôpitaux en tant

  5   que tels; page 44 759 du compte rendu d'audience. En fait, une seule fois,

  6   il a vu un mortier mobile tirer à partir d'un endroit situé non loin de

  7   l'hôpital de Kosevo, Segers a vu que l'artillerie serbe aurait répliqué

  8   contre l'hôpital lui-même après le départ du mortier mobile; pages 43 760,

  9   43 761 du compte rendu d'audience. Ceci n'est pas équivalent à un tir

 10   "technique" par un mortier mobile. C'est un tir sur l'hôpital.

 11   En dehors de ce seul incident, Segers a attesté du fait qu'il avait rendu

 12   compte régulièrement du fait que l'hôpital de Kosevo était pilonné de façon

 13   répétée et très lourde par les mortiers et l'artillerie de la VRS. Page 43

 14   765 du compte rendu.

 15   Et Mole était explicite lorsqu'il a déclaré que les tirs sur l'hôpital

 16   étaient "des tirs en représailles, et non une réplique militaire." Pièce

 17   P421, paragraphe 126.

 18   Vous trouverez au paragraphe 1 042 de notre mémoire en clôture des

 19   références aux nombreux rapports et protestations concernant le pilonnage

 20   de l'hôpital. Vous verrez aussi les paragraphes 1 038 à 1 041 concernant

 21   les mortiers mobiles.

 22   Les représailles contre des zones ou des objets civils ne constituent pas

 23   une réaction autorisée à des attaques par des mortiers mobiles.

 24   La Défense a prétendu que l'Accusation, "semblait abjectement effrayé", de

 25   parler de proportionnalité laissant entendre que ceci était dû à "une

 26   absence de compréhension fondamentale de ce principe." Page 44 755 du

 27   compte rendu." 

 28   La Défense sait parfaitement bien pourquoi la proportionnalité n'est pas le


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  1   cœur du débat concernant la campagne de terreur, et le motif, eh bien,

  2   c'est que la proportionnalité suppose à un effort de frapper une cible

  3   militaire légitime qui, dans ce cas, exige qu'une appréciation de la valeur

  4   militaire soit faite par rapport au risque de dommage collatéral.

  5   Ce n'est pas ce qui s'est passé. Au lieu de cela, le RSK a tiré de façon

  6   répétée sur des zones et des objets civils, ou les a intégrés dans des

  7   attaques indiscriminées. Ces attaques directes concernaient les civils et

  8   n'avaient aucun rapport avec la proportionnalité.

  9   La Chambre d'appel dans Milosevic, paragraphe 53, et dans Galic, paragraphe

 10   190, a souligné le fait "qu'il est parfaitement établi que le principe de

 11   distinction exige des parties qu'elles distinguent à tout moment entre 'la

 12   population civile et les combattants, entre les objectifs civils et

 13   militaires, et que ces attaques directes ne concernent que des objectifs

 14   militaires'." Ajoutant que : "Il est absolument interdit de frapper ou de

 15   prendre pour cible des civils, c'est une interdiction du droit

 16   international coutumier qui englobe les attaques indiscriminées."

 17   L'existence du principe de proportionnalité n'exonère pas la campagne du

 18   SRK par rapport aux tirs embusqués contre les civils et les objets civils,

 19   et notamment contre des femmes et des enfants ou des autobus et des

 20   tramways, ne l'exonère pas de la caractéristique d'abjectement illégal. Il

 21   est impossible de justifier des pilonnages isolés, des obus qui tombent au

 22   hasard dans des zones habitées en centre-ville, où il n'y a aucune activité

 23   militaire. Il ne peut pas y avoir la moindre justification de traiter toute

 24   une ville comme une cible; or, c'est ce que le SRK a fait par le biais de

 25   bombardements massifs comme G1 et G2. Il est impossible de justifier des

 26   pilonnages répétés de quartiers résidentiels.

 27   La Défense prétend que les bombardements indiscriminés tels que G1 et G2

 28   "sont la preuve du fait que le SRK agissait en vertu d'un objectif


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  1   consistant à ramener une paix permanente et à faire cesser le conflit à

  2   Sarajevo". Ce sont des déclarations qui n'ont pas de base. Page 44 762 du

  3   compte rendu, voir aussi pages 44 760 à 44 761 de ce même compte rendu. Si

  4   on laisse de côté la perversité de la proposition selon laquelle les

  5   tentatives de représailles par Mladic consistant à "les faire sortir de

  6   leurs gonds", pièce P105, et à présenter ce fait comme un fait reposant sur

  7   la bonté, un fait à récompenser, encore une fois, nous voyons là une preuve

  8   du mépris de Mladic pour le principe de distinction. C'est la raison pour

  9   laquelle les arguments glaçants de la Défense selon lesquels "la ville de

 10   Sarajevo composait une cible militaire valable", page 44 767 du compte

 11   rendu doivent être rejetés. Comme la Chambre d'appel Milosevic l'a dit au

 12   paragraphe 54 de son arrêt, lorsqu'on examine un tel argument, "une

 13   affirmation générale selon laquelle ces attaques étaient légitimes parce

 14   qu'elles concernaient des 'zones militaires' prises pour cible dans toute

 15   la ville ne peut qu'échouer."

 16   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] On va passer à huis clos partiel. 

 17   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

 18   [Audience à huis clos partiel]

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  8   [Audience publique]

  9   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur le Greffier.

 10   M. TIEGER : [interprétation] Monsieur le Président, il y a aussi les

 11   moyens de preuve qui montrent que l'affirmation de la Défense, qu'aucun des

 12   officiers de la VRS n'a témoigné pour ce qui est d'ordre illégal donné par

 13   Mladic.

 14   Et il n'y avait pas d'analyse de proportionnalité pour ce qui est du G1 et

 15   du pilonnage du G1, et c'est au paragraphe 932 de notre mémoire en clôture,

 16   qui montre également que la JNA "ne voulait pas assumer la responsabilité

 17   pour ce qui est de l'attaque de cette nuit-là."

 18   La Défense essaie donc d'écarter les tensions de cela, et dit que Sarajevo

 19   n'était pas une ville qui n'était pas défendue. C'est la même affirmation

 20   pour Srebrenica et pour Kozarac. L'Accusation n'a jamais dit que Sarajevo

 21   était une ville qui n'était pas défendue et que tous les pilonnages étaient

 22   des pilonnages illégaux. Mais la Défense s'appuie sur un raisonnement

 23   tordu. Et selon la Défense, s'il n'était pas défendu de tirer du tout,

 24   alors n'importe quelle attaque, et toutes les attaques sur Sarajevo étaient

 25   permises. L'Accusation n'a jamais dit que le SRK ne pouvait pas utiliser

 26   une force appropriée contre les cibles militaires à Sarajevo. Mais il ne

 27   leur était pas permis de tirer sur les civils dans une campagne de tireurs

 28   embusqués et de pilonnages. Donc la Défense, manifestement, avance des


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  1   arguments qui ne sont pas pertinents, disant que la ville était une ville

  2   qui n'était pas défendue, puisqu'il y a des moyens de preuve accablants qui

  3   montrent comment le général Mladic et la VRS se sont comportés par rapport

  4   à Sarajevo et ailleurs, par rapport à d'autres villes qui avaient traité

  5   ainsi que des villages, et des hameaux comme étant des cibles militaires.

  6   De plus, bien que la Défense essaie de rejeter la responsabilité à l'armée

  7   de BiH, donc de ne manquer à séparer des civils des objectifs militaires et

  8   de les utiliser en tant que boucliers humains, même si cela a été vrai dans

  9   certains cas, le droit dit clairement que le manquement donc à l'obligation

 10   de déplacer des civils dans la mesure du possible des objectifs militaires

 11   et d'éviter de placer les objectifs militaires dans des zones densément

 12   peuplées, ne dispense pas l'assaillant de respecter les principes de

 13   proportionnalité lorsqu'il lance une attaque.

 14   La Défense a dit que "les efforts tenaces de l'Accusation de manipuler les

 15   moyens de preuve pour induire en erreur les Juges en affirmant que des

 16   moyens de preuve étaient erronés, et que cela donc représente un doute

 17   raisonnable. Il y a deux exemples qui corroborent cela. Le premier exemple

 18   dit que le témoignage du Témoin RM147 pour ce qui est de l'utilisation du

 19   SRK et des tireurs embusqués du SRK à Sarajevo, "c'est quelque chose qui

 20   est complètement disparu" puisque le Témoin RM147 n'était pas du tout

 21   membre de peloton de tireurs embusqués. En fait, l'Accusation a clarifié le

 22   statut de ce témoin. Et maintenant, est-ce qu'on peut passer à huis clos

 23   partiel.

 24   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

 25   [Audience à huis clos partiel]

 26   (expurgé)

 27   (expurgé)

 28   (expurgé)


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  1   (expurgé)

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  9   (expurgé)

 10   (expurgé)

 11   (expurgé)

 12   [Audience publique]

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci.

 14   M. TIEGER : [interprétation] En fait, le Témoin RM147 a corroboré les

 15   moyens de preuve produits par l'Accusation, indépendamment cette hyperbole

 16   de la Défense. De plus, son témoignage pour ce qui est de l'utilisation des

 17   tireurs embusqués du RSK à Grbavica et à Sarajevo, cela a été étayé par le

 18   témoin de la Défense, Maletic, qui a confirmé qu'il y avait un peloton de

 19   tireurs embusqués au "commandement du RSK qui était directement subordonné

 20   au commandant."

 21   C'est D482, paragraphe 31, et page du compte rendu 21 758.

 22   Maletic a reconnu le nom de l'un des tireurs embusqués sur la liste des

 23   tireurs embusqués du RSK, c'est la pièce P6517, et a confirmé que cet

 24   individu était présent aux réunions du matin avec les commandants de

 25   bataillon et les commandants adjoints; c'est la page du compte rendu 21

 26   756. Le Témoin RM147 ainsi que le Témoin RM141 ont identifié certains de

 27   ces tireurs embusqués qui sont mentionnés dans la pièce P6517. Egalement,

 28   dans la pièce P2624, paragraphe 93, où on peut lire "tout le monde à


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  1   Grbavica savait qui les tireurs embusqués étaient et personne n'a essayé de

  2   cacher cela."

  3   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Tieger, pouvez-vous répéter la

  4   cote de la pièce où vous avez dit que certains de ces tireurs embusqués

  5   sont mentionnés.

  6   M. TIEGER : [interprétation] C'est P6517.

  7   Pour ce qui est des moyens de preuve détaillés concernant cette question,

  8   je vous réfère à la note de bas de page 3601 du paragraphe 838 du mémoire

  9   en clôture de l'Accusation.

 10   Il y a un autre exemple de la Défense où la Défense a affirmé que

 11   l'Accusation déploie des efforts constants de manipuler, et cetera, et

 12   c'est l'exemple de Srebrenica. La Défense a souligné, à la pièce P1500,

 13   c'est l'autorisation de Mladic pour ce qui est l'utilisation de cinq tonnes

 14   de carburant diesel qui devaient être accordées à la Brigade de Zvornik

 15   pour mener des "travaux du génie"; en fait, les moyens de preuve montrent

 16   qu'il s'agissait de l'opération de réensevelissement. La Défense ne

 17   conteste pas ce document pour ce qui est de ce carburant qui était destiné

 18   à l'opération de réensevelissement - ce sont les paragraphes 3 293 jusqu'à

 19   3 304 - mais l'Accusation est stupéfaite par leur affirmation disant que le

 20   document provient de la direction des opérations, et "non pas de Mladic".

 21   Mais il n'y a pas de cohérence ici. La Défense est d'accord pour dire que

 22   SR signifie, comme il l'a dit lui-même - à la page du compte rendu

 23   d'audience 16 302 et page du compte rendu d'audience 34 887 - et les

 24   documents émanent de Mladic personnellement et très souvent rédigés par les

 25   hommes des opérations, étant donné que la Défense a versé au dossier des

 26   documents qui, d'après eux, provenaient de Mladic et qui comportent en fait

 27   un numéro administratif des opérations 03/4; D187. Voir d'autres exemples,

 28   comme par exemple le P4532, le 1557 et le 1677.


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  1   En tout état de cause, dans cet exemple, P1500, il est clair que cela

  2   émanait de Mladic. Regardez le P2131, un ordre de suivi aux fins de livrer

  3   les cinq tonnes de carburant ordonné dans le document P1500, qui reconnaît

  4   de façon expresse que P1500 était "en vertu de l'ordre du commandant de

  5   l'état-major principal de l'armée de la Republika Srpska."

  6   Et si vous grattez un petit peu la surface, ces deux exemples, entre

  7   autres, montrent qui est en train de nous induire en erreur, et ce, de

  8   façon constante.

  9   Ils se fondent sur quelques propos prononcés par le commandant Franken du

 10   ministère de la Défense néerlandais. La Défense affirme que Franken a

 11   conclu que le transport de la population musulmane de Potocari était

 12   "anodin" et qu'"il ne s'agissait pas de déportation ou d'expulsion, ni de

 13   transfert forcé."

 14   Mais la Défense n'a pas fourni la suite de la description fournie par le

 15   commandant Franken, qui pensait que la population avait véritablement un

 16   choix de rester ou de ne pas rester à Srebrenica :

 17   "Théoriquement, c'était un choix. Est-ce que c'est un choix que de pouvoir

 18   rester entassé dans de telles conditions météo, sans approvisionnement,

 19   sans nourriture, sans soins médicaux, et cela revient à dire qu'il s'agit

 20   simplement de mourir à petit feu ou de s'en aller. Vous appelez ça un choix

 21   ? Ils avaient un choix ?"

 22   Et si on demande si "ce choix était réel, c'est-à-dire de mourir à petit

 23   feu ou de s'en aller, est-ce que c'est cela que vous voulez dire ?"

 24   Et Franken a répondu en disant : "Oui, c'est cela que je voulais dire."

 25   Contrairement à ce qu'avance la Défense, Franken, en réalité, a conclu que

 26   l'ensemble des éléments de preuve étaient clairs à cet égard, qu'il n'y

 27   avait pas de départ volontaire, qu'il n'y avait pas de choix, précisément

 28   comme cela avait été l'intention de Karadzic et de Mladic dans la directive


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  1   numéro 7.

  2   La Défense a déclaré à trois reprises dans ses plaidoiries que l'expert

  3   militaire à charge, Richard Butler, n'a pas trouvé "un seul ordre émanant

  4   du général Mladic ordonnant les meurtres de Srebrenica."

  5   Mais ce sur quoi M. Butler a témoigné était comme suit :

  6   "Je n'ai pas trouvé de document du général Mladic ordonnant spécifiquement

  7   l'exécution des prisonniers."

  8   Bien sûr, on ne peut pas s'attendre à ce que Mladic ou son état-major

  9   principal soient aussi téméraires que cela et qu'ils rédigent des ordres à

 10   l'intention de Krstic, Tolimir, Beara et d'autres hommes en ordonnant

 11   précisément que les prisonniers soient tués, en particulier en sa présence

 12   sur le terrain. Ces ordres ont été donnés oralement.

 13   Nous disposons d'éléments de preuve sur ces ordres donnés individuellement

 14   pour réaliser l'opération meurtrière.

 15   Par exemple, cet ordre envoyé à ses hommes aux fins de séparer les hommes

 16   valides ou en âge de se battre à Potocari annoncé à l'hôtel Fontana le 2

 17   [comme interprété] juillet. Notre mémoire en clôture, paragraphe 1 172.

 18   L'ordre du 13 juillet envoyé à Furtula de façon à ce qu'il mette à

 19   disposition une unité pour travailler avec Beara. Mémoire en clôture,

 20   paragraphes 1 289 à 1 296.

 21   L'ordre du 13 juillet envoyé à Malinic pour cesser d'enregistrer les

 22   nombreux prisonniers à Nova Kasaba. Mémoire en clôture 1 261.

 23   L'ordre du 16 juillet intimant à Keserovic de commander l'opération de

 24   ratissage comme on a pu le constater dans la partie écrite de cet ordre

 25   daté du 17 juillet, en effet un ordre visant à tuer tout prisonnier qui

 26   avait été capturé lors de cette opération de ratissage. Paragraphes 1 337,

 27   1 340. L'ordre du 14 septembre afin de mettre à disposition du carburant

 28   pour l'opération de réensevelissement. Paragraphe 1 384.


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  1   La Défense a fait valoir qu'au paragraphe 1 116 de notre mémoire en

  2   clôture, nous avons présenté une "nouvelle thèse" sur le sens même du plan

  3   d'attaque de Krivaja 95. Ce paragraphe fait remarquer que l'objectif était

  4   de réduire l'enclave de Srebrenica et de la circonscrire à une zone urbaine

  5   conçue pour chasser la population de la zone urbaine de Srebrenica et, par

  6   conséquent, de créer les conditions de vie impossibles de surpeuplement,

  7   reproduisant ainsi le désastre humanitaire à Srebrenica de 1993. Cette soi-

  8   disant nouvelle thèse a toujours été la position de l'Accusation concernant

  9   le plan d'attaque de Krivaja 95. Comme cela a été noté pour la première

 10   fois dans notre mémoire préalable au procès, au paragraphe 208, et comme

 11   nous l'avons dit dans notre déclaration liminaire à la page 486, encore une

 12   fois dans nos arguments en vertu de l'article 98 [comme interprété] bis aux

 13   paragraphes 20 835 à 20 836.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Tieger, plutôt que d'attirer

 15   votre attention sur l'heure, à la fin d'une heure et demie, nous devrons

 16   nous arrêter, 15 à 17 minutes --

 17   M. TIEGER : [interprétation] Présentant de façon incorrecte la position de

 18   l'Accusation est encore une fois une façon de vous induire en erreur et

 19   attaquer la conclusion de la Défense que, par ailleurs, ils sont incapables

 20   de contester.

 21   La Défense fait valoir que l'affirmation de l'Accusation en vertu de

 22   laquelle Mladic et Krstic ont dîné ensemble à l'hôtel Fontana le 11 juillet

 23   après la réunion avec le Bataillon néerlandais a été inventée par

 24   l'Accusation, mais celle-ci, au contraire, a été présentée pour la première

 25   fois dans son réquisitoire et "n'a pas été citée dans son mémoire en

 26   clôture, et il n'existe pas non plus d'éléments de preuve à l'appui de

 27   cela."

 28   Ceci est inexact. Veuillez vous reporter aux éléments de preuve sur ce


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  1   dîner dans notre mémoire en clôture, paragraphes 1 174 à 1 219.

  2   Mladic et Krstic étaient ensemble à l'hôtel Fontana cette nuit-là, comme on

  3   peut le constater au niveau de la vidéo, lors de la deuxième réunion qui

  4   s'est déroulée à l'hôtel Fontana. Ces deux hommes étaient assis à l'hôtel

  5   Fontana et ont dîné ensemble à l'hôtel et au même endroit où la réunion

  6   s'est tenue. Voir la page du compte rendu d'audience 11 160 à 11 162.

  7   Et c'est là que Mladic a pris la décision de séparer des hommes en âge de

  8   porter des armes, soit ce soir-là, soit le lendemain matin, avant l'annonce

  9   de cette décision de Mladic lors de la réunion de 10 heures du 12 juillet à

 10   l'hôtel Fontana.

 11   Monsieur le Juge, j'ai commencé mon intervention en évoquant les

 12   accusations proférées par la Défense contre l'Accusation qui sont allés

 13   chez M. Lukic jusqu'à insinuer que le procès faisait penser à un procès du

 14   "IVe Reich". Examinons un instant ce procès dit du IVe Reich dont parle la

 15   Défense et qui a été infligé à M. Mladic.

 16   Ça fait quatre ans et demi et que les déclarations liminaires  ont été

 17   prononcées. Pendant ce temps-là, la Chambre a entendu plus de 400 témoins,

 18   plus de la moitié y ont été convoqués par la Défense. La Défense a passé

 19   700 heures à interroger des témoins dans le prétoire, plus de temps que

 20   l'Accusation et la Chambre. La Défense a versé plus de 2 000 pièces au

 21   dossier, en ce compris trois acceptées par la Chambre ce lundi, des mois

 22   après l'expiration du délai, pour garantir que Mladic ait la possibilité

 23   d'être entendu au sujet de l'application de la peine. Et le procès a été

 24   interrompu pendant un an et demi pour lui permettre de convoquer ses six

 25   derniers témoins. Et lorsque les mémoires ont été déposés, ça faisait dix

 26   mois depuis notre dernière contribution jusqu'à lundi dernier, nous

 27   n'avions passé que 18 jours en audience cette année.

 28   Compte tenu de tout ce temps, vu de tout ce temps passé, au vu du


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  1   nombre de témoins, du volume des preuves, il ne reste à la Défense que la

  2   rhétorique de l'exagération, car les preuves de culpabilité sont

  3   accablantes.

  4   Et le temps que nous parlons des récriminations qu'a la Défense au

  5   sujet de la Défense [comme interprété], rappelez-vous que Me Ivetic a

  6   déclaré, un petit peu avant de dire que Mladic regrettait le sort des

  7   victimes des crimes de guerre, que "l'Accusation avait été autorisée à

  8   espionner les communications entre l'accusé et la Défense"; compte rendu

  9   d'audience 44 832. On aurait pu croire, vu de l'extérieur, que cette

 10   conversation secrète avec le conseil portait sur la stratégie à suivre lors

 11   du procès, les témoins à convoquer, les questions à poser, mais non.

 12   L'incident auquel Me Ivetic faisait référence, c'était un incident où

 13   Mladic, lors d'une pause, et lorsque l'Accusation se trouvait à la place

 14   qui est la sienne de l'autre côté du prétoire, au cours duquel Mladic a

 15   exprimé des insultes horribles et ethniquement inacceptables au sujet d'une

 16   témoin musulmane qui avait survi à des crimes terribles de violences

 17   sexuelles. Ce n'était pas de l'espionnage et il ne s'agit pas de stratégie

 18   à mener lors du procès, il ne s'agissait pas de remords.

 19   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Arrêtez de parler à voix, Monsieur

 20   Mladic.

 21   Et vous en connaissez les conséquences.

 22   Vous pouvez poursuivre.

 23   M. TIEGER : [interprétation] Enfin, la Défense a dit à plusieurs reprises

 24   que le général Mladic est jugé tout simplement parce qu'il est Serbe.

 25   Pourquoi n'avions-nous pas également incriminé les négociateurs

 26   internationaux tels que Akashi, Cutileiro, Owen, Stoltenberg, qui parfois

 27   considéraient la séparation comme une mauvaise solution, ou les forces des

 28   Nations Unies, certaines néerlandaises, qui ont demandé sa permission pour


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  1   transporter les Musulmans afin de les évacuer de l'enclave de Srebrenica ?

  2   Alors, nous expliquons au paragraphe 283 de notre mémoire la manière dont

  3   le nettoyage ethnique plaçait les organisations internationales face à un

  4   choix cornélien, dans la mesure où ils savaient qu'en sauvant les

  5   populations des persécutions en les évacuant, cela faisait progresser la

  6   politique serbe de purification ethnique. Mais parfois, la situation était

  7   si désespérée qu'il n'y avait pas le choix. Srebrenica est un exemple

  8   particulièrement glaçant de cela.

  9   Enfin, de manière plus fondamentale, Ratko Mladic n'est pas incriminé ou

 10   accusé parce qu'il pense que la séparation ethnique était la meilleure

 11   solution dans une situation négative. Il est accusé d'avoir utilisé la VRS

 12   pour le réaliser par le biais de crimes brutaux.

 13   L'ambassadeur Akashi n'a pas mené une armée qui a incendié, violé,

 14   tué et pillé en conquérant les territoires revendiqués par les Serbes, en

 15   détruisant les villages croates et musulmans et en tuant ou en expulsant

 16   leurs habitants. Ratko Mladic, lui, l'a fait.

 17   L'ambassadeur Cutileiro n'a pas ordonné à ses subalternes d'expulser

 18   par la force les civils musulmans de l'est de la Bosnie. Ratko Mladic l'a

 19   fait.

 20   L'ambassadeur Hurd n'a pas ordonné à ses subalternes de pilonner les

 21   quartiers civils de Sarajevo, rendant fous leurs habitants. Ratko Mladic

 22   l'a fait.

 23   L'ambassadeur Owen n'a pas ordonné d'utiliser comme otages des

 24   centaines de Casques bleus. Ratko Mladic l'a fait.

 25   L'ambassadeur Stoltenberg n'a pas ordonné, supervisé une opération au

 26   cours de laquelle 7 000 hommes et jeunes garçons ont été exécutés. Ratko

 27   Mladic l'a fait.

 28   Le général Mladic n'est pas jugé parce qu'il est Serbe. Il n'est pas


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  1   jugé parce qu'il est un officier militaire. Il est jugé parce que les

  2   preuves montrent et prouvent au-delà de tout doute raisonnable qu'il est

  3   coupable de crimes contre l'humanité, crimes de guerre et génocide.

  4   Merci, Messieurs les Juges.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Merci, Monsieur Tieger.

  6   Maître Lukic, lors de la pause, est-ce que vous pourriez indiquer

  7   clairement à M. Mladic que nous ne tolérerons plus aucun éclat de voix de

  8   sa part. Et comme le sait M. Mladic, les conséquences de cela pourraient

  9   être qu'il soit expulsé du prétoire.

 10   Nous allons faire une pause d'une demi-heure, ce qui est ce que nous

 11   faisons habituellement lorsque nous avons des séances d'une heure et demie,

 12   et nous reprendrons à 11 heures.

 13   --- L'audience est suspendue à 10 heures 59.

 14   --- L'audience est reprise à 11 heures 33.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous reprenons nos débats. Maître

 16   Ivetic, vous disposez d'une heure et demie et vous pouvez procéder dès

 17   maintenant.

 18   M. IVETIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

 19   Je vais m'efforcer de parler le plus possible des éléments que l'Accusation

 20   vient d'évoquer dans son propos, mais il est possible que je ne couvre pas

 21   tous les propos de l'Accusation dans le détail, car nous ne disposons que

 22   d'un temps assez limité et nous n'avons eu guère de temps pour traiter des

 23   propos de l'Accusation à préparer notre réponse.

 24   En tout cas, je commencerai par m'occuper de ce que M. Tieger a

 25   qualifié d'arguments hyperboliques. Monsieur le Président, Messieurs les

 26   Juges, je ne pense pas que j'ai besoin de vous rappeler que nous avons

 27   déposé un mémoire en clôture qui dépasse les 900 pages. Et à l'intérieur de

 28   ces 900 pages et plus, nous avons passé en revue dans le plus grand détail


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  1   nos arguments, nous avons évoqué les éléments de preuve de l'Accusation, et

  2   nous avons proposé des citations d'éléments de preuve dont nous estimons

  3   qu'elles sont susceptibles de permettre un doute raisonnable. Il a fallu

  4   une heure et demie à M. Tieger pour se contenter de déclarer que

  5   l'Accusation avait prouvé la réalité de sa cause au-delà de tout doute

  6   raisonnable, mais elle n'a pas réussi à démontrer qu'elle l'avait fait.

  7   Je voudrais insister, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, sur

  8   la nécessité, pour vous, de garder à l'esprit ce que j'ai dit l'autre jour

  9   lorsque j'ai passé en revue le principe de la charge de la preuve et des

 10   critères qui conviennent à cet égard. Et il ne s'agit pas uniquement

 11   d'apporter une preuve au-delà de tout doute raisonnable, car il nous faut

 12   également ne jamais perdre de vue le principe du doute qui doit profiter à

 13   l'accusé, ce qui signifie en d'autres termes que le doute doit être

 14   favorable à l'accusé. Ce que l'Accusation aimerait que vous fassiez à tout

 15   moment, c'est que vous vous saisissiez de ces arguments et de sa façon de

 16   voir les éléments de preuve dans le vide.

 17   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, vous ne pouvez pas agir

 18   ainsi. La Défense vous a demandé à tout moment de prendre en compte

 19   l'intégralité, tous les éléments de preuve, et nous maintenons cette

 20   demande. La totalité des éléments de preuve, à notre avis, permet de

 21   démontrer que l'Accusation n'a pas rempli son obligation d'apporter la

 22   charge de la preuve ou de répondre de façon satisfaisante au principe du

 23   doute qui doit profiter à l'accusé; or il s'agit de deux principes

 24   juridiques importants.

 25   Alors, je commencerai par dire quelques mots de l'entreprise

 26   criminelle commune. M. Tieger a dit aujourd'hui qu'en 1991 en Croatie, cet

 27   élément ne faisait pas partie de la cause. En fait, il n'y a pas eu d'acte

 28   d'accusation, c'est certain. Mais l'Accusation que vous avez devant vous a


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  1   présenté de très nombreux éléments de preuve concernant l'année 1991 et la

  2   Croatie, en souhaitant tirer de ces éléments de preuve des conclusions et

  3   des déductions relatives à l'intention, et elles souhaitent que vous

  4   utilisiez les éléments de preuve pour en tirer la conclusion de l'existence

  5   d'une entreprise criminelle commune. Et même si M. Tieger a été clair

  6   aujourd'hui pour la première fois quant à fait qu'à son avis la

  7   responsabilité pénale de l'accusé commence le 12 mai 1992, nous ne l'avons

  8   toujours pas entendu dire à quel moment il est allégué que cette entreprise

  9   criminelle commune aurait vu le jour et à quel moment M. Mladic aurait

 10   accepté de rejoindre ou de participer à une quelconque entreprise

 11   criminelle commune.

 12   Par rapport à 1991 en Croatie, ce que l'Accusation vous a demandé de

 13   prendre en compte et d'examiner, ce sont les éléments de preuve qu'elle a

 14   cités, en particulier la déposition de l'ambassadeur Okun que l'Accusation

 15   a soumise à la Chambre au titre de l'article 92 quater du Règlement. Nous

 16   avons compté 12 citations dans le mémoire en clôture de l'Accusation qui

 17   sont censées apporter de l'eau au moulin de la déposition de M. Okun :

 18   notes en bas de page 632, 635, 642, 643, 1125, 1455, 1575, 1583, 1913,

 19   1914, 1953 et 2847. L'Accusation, par ailleurs, a fait référence à cinq

 20   reprises à la déposition de M. Okun dans son réquisitoire l'autre jour;

 21   pages 44 354, 44 366, 44 368, 44 369 et 44 370 du compte rendu d'audience.

 22   Des éléments de preuve supplémentaires ont été ajoutés en vertu de

 23   l'article 92 quater du Règlement conformément à la jurisprudence de ce

 24   Tribunal, comme par exemple, les éléments Milosevic [sic] dans le volume 3,

 25   paragraphe 276 du jugement de première instance --

 26   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Maître Ivetic, pour le dernier numéro

 27   de page du compte rendu d'audience que vous venez de citer, vous avez dit 4

 28   470. Je pense qu'il manque un chiffre.


Page 44874

  1   M. IVETIC : [interprétation] 44 470. J'ai sauté un 4.

  2   M. LE JUGE FLUEGGE : [interprétation] Je vous remercie.

  3   M. IVETIC : [interprétation] Et puis, je vois qu'au transcript, il est

  4   indiqué Milosevic. En fait, je voulais dire Milutinovic. J'ai donc fait un

  5   lapsus. Il faut remplacer au compte rendu "Milosevic" par "Milutinovic".

  6   Ajout, donc, d'éléments de preuve au titre de l'article 92 quater du

  7   Règlement, c'est une façon de faire qui empêche d'utiliser ces éléments de

  8   preuve pour déterminer les actes et les comportements de l'accusé. Or,

  9   c'est ce que M. Tieger vous demande de faire aujourd'hui. Pourquoi ?

 10   Pourquoi est-ce que l'Accusation n'a pas soumis des éléments de preuve ?

 11   Pourquoi est-ce qu'elle n'a pas évoqué 1991 en Croatie dans l'acte

 12   d'accusation ? Pourquoi est-ce qu'elle a demandé de nombreux constats

 13   judiciaires pendant l'espèce ? Elle a choisi d'adopter cette façon de

 14   faire.

 15   Alors qu'elle parlait de l'entreprise criminelle commune principale

 16   présumée au cours des quelques derniers jours dans son mémoire en clôture,

 17   l'Accusation s'est appuyée grandement sur les déclarations de responsables

 18   politiques s'exprimant devant des séances de l'assemblée qu'elle présente

 19   en dehors de tout contexte. Un exemple de cela se trouve à pièce P4580, qui

 20   concerne une séance de l'assemblée à laquelle le général Mladic n'a pas

 21   participé. Et, en fait, dans un grand nombre d'autres éléments soumis par

 22   l'Accusation, on voit que d'autres personnes, d'autres responsables

 23   politiques parlent d'un certain nombre de choses en l'absence de M. Mladic

 24   qui n'est pas présent, et pourtant l'Accusation souhaite attribuer les

 25   propos tenus dans ces séances au général Mladic et lui imputer l'intention

 26   qui préside derrière ces mots. Je vous demande, Monsieur le Président,

 27   Messieurs les Juges, je vous demande et je le demande au monde entier, est-

 28   ce que cela est juste ?


Page 44875

  1   A la page 44 358 du compte rendu d'audience, l'Accusation déclare :

  2   "Les dirigeants considéraient qu'ils avaient atteint le niveau

  3   souhaitable pour procéder à une division ethnique et à la destruction de la

  4   Bosnie, et donc la question de quantité a été laissée de côté au profit de

  5   la question de qualité", et elle le cite dans la pièce P4580.

  6   Mais si vous examinez tous les éléments caractérisant le contexte, la

  7   discussion dont il est question ici c'est un débat qui porte sur les

  8   diverses solutions pour régler la crise en Bosnie-Herzégovine; page 16 du

  9   document, c'est ce qu'on voit à cet endroit du texte.

 10   "La valeur de ce document c'est qu'il rend compte du fait que nous

 11   avons accompli quelque chose, mais que ce n'est pas achevé. Nous pensons

 12   que nous devons réaliser ce qui a été le plus contesté et qu'il se pose là

 13   une question d'égalité. La qualité que nous souhaitons réaliser dans la

 14   division de la Bosnie-Herzégovine concerne la création de trois Bosnie-

 15   Herzégovine. Et ce qui demeure en question, c'est la quantité concernant

 16   aussi la création d'une fédération ou d'une confédération, et en combien de

 17   parties la Bosnie sera divisée."

 18   Alors, Monsieur le Président, ce que nous voyons que les responsables

 19   politiques discutent à ce moment-là, c'est la poursuite du conflit ou la

 20   poursuite de ce qui existait par le passé en Bosnie-Herzégovine avant le

 21   début des hostilités, où il y avait trois représentations ethniques

 22   existant sur un pied d'égalité au sein du gouvernement et qui étaient

 23   reconnues par la constitution de l'État. Donc même dans le document cité

 24   par l'Accusation, dans lequel elle cherche à dire que la Serbie voulait la

 25   séparation, il est question de trois parties ethniques qui peuvent vivre et

 26   travailler les unes aux côtés des autres au sein de quelque chose qui

 27   pourrait être une fédération ou une confédération. Les efforts des Serbes

 28   consistaient tout simplement à essayer de restaurer l'ordre constitutionnel


Page 44876

  1   préexistant.

  2   D'autres exemples maintenant où le bureau du Procureur s'est appuyé

  3   sur des déclarations d'autres personnes, qu'elle a sorties de leur contexte

  4   et qu'elle tente d'attribuer à Mladic, ce sont les pièces P3076 concernant

  5   Karadzic; P406 concernant Karadzic également; P6997 concernant Brdjanin;

  6   P6994 concernant Brdjanin également; P3959 Brdjanin toujours; et P4581

  7   concernant Plavsic et Koljevic.

  8   Aujourd'hui, nous avons entendu M. Tieger parler de Karadzic, et dire

  9   qu'il avait essayé de s'éloigner des éléments négatifs contenus dans les

 10   éléments de preuve, et que c'est la raison pour laquelle elle a cité

 11   Karadzic qui était le partenaire principal de M. Mladic. Monsieur le

 12   Président, nous n'avons pas entendu M. Tieger dire le moindre mot ou en

 13   tout cas très peu de mots au sujet des arguments présentés par nous selon

 14   lesquels la relation reliant Karadzic et Mladic n'était pas toujours

 15   excellente. Donc comment est-ce qu'ils auraient pu travailler ensemble en

 16   tant que partenaires principaux dans une entreprise criminelle commune

 17   alors qu'ils ne partageaient pas des points de vue identiques et qu'ils

 18   étaient souvent en conflit l'un avec l'autre ?

 19   Pièce P2471, c'est une pièce de l'Accusation, il y est allégué, car

 20   cette pièce est présentée comme une conversation entre Mladic, Karadzic et

 21   Milovanovic, et on y trouve aussi une conversation entre Mladic et Karadzic

 22   qui est proche de la querelle, principalement à la fin des pages 1 et de la

 23   page 2 du document. Nous avons la pièce P1052, autre pièce de l'Accusation,

 24   qui nous soumet des extraits d'une interview de quelqu'un, et qui précise :

 25   "Il existait des malentendus permanents entre Karadzic et Mladic. Le

 26   premier représentait l'autorité suprême, le second n'appréciait guère ses

 27   supérieurs, notamment lorsqu'ils n'étaient pas des professionnels en bonne

 28   et due forme, il n'aimait pas qu'ils se mêlent à son travail."


Page 44877

  1   Nous avons aussi la pièce P736, paragraphes 211 à 212 émanant du

  2   général Rose :

  3   "La relation entre le général Mladic et Dr Karadzic était telle que

  4   l'on pouvait s'attendre à ce qu'elle débouche sur une situation marquée par

  5   la confusion et la violence d'intensité variable. A certains moments,

  6   Mladic semblait dominer la discussion et déterminer le cours des choses. A

  7   d'autres occasions, Karadzic avait la possibilité de maintenir ses

  8   positions politiques et Mladic les confirmait, selon l'intensité des

  9   pressions qu'il ressentait, qu'elles soient politiques ou militaires ou

 10   émanent du terrain."

 11   La pièce D862, déclaration sous serment du Témoin Milutinovic,

 12   paragraphe 130 : 

 13   "Si je me souviens bien, les accords et les oppositions entre le

 14   général Mladic et le président Karadzic en tant que commandant suprême se

 15   sont produits en août 1993, au moment où le commandant suprême a ordonné à

 16   l'armée de se retirer du mont Igman et de remettre les positions dont ils

 17   s'étaient emparées à la FORPRONU."

 18   Paragraphe 132 :

 19   "Le conflit entre le général Mladic et le président Karadzic a fait

 20   son apparition, entre autres, en raison du fait que le personnel de l'armée

 21   avait faim, alors que tout était destiné à indiquer que leur sort était bon

 22   et qu'ils allaient s'enrichir."

 23   Paragraphe 138 :

 24   "Ne perdons pas de vue les décisions [comme interprété] de plus en

 25   plus nombreuses de la VRS entre les soutiens de Mladic et les soutiens de

 26   Karadzic."

 27   Nous devons souligner encore une fois que par rapport à nos arguments

 28   déjà présentés, si ces deux hommes étaient des partenaires principaux,


Page 44878

  1   alors pourquoi est-ce que le président Karadzic a essayé de limoger le

  2   général Mladic à plusieurs reprises ? Il est certain que les éléments de

  3   preuve ne permettent pas de soutenir l'affirmation de l'Accusation selon

  4   laquelle ces deux hommes étaient des partenaires importants et proches.

  5   Quant à l'entreprise criminelle commune, l'Accusation a prétendu que

  6   la "Déclaration islamique" d'Alija Izetbegovic n'était pas connue. Je

  7   suppose qu'elle voulait dire que les gens n'y prêtaient pas réellement

  8   attention, mais nous avons des éléments de preuve qui indiquent le

  9   contraire. Les dirigeants serbes de Bosnie connaissaient parfaitement bien

 10   la Déclaration islamique et s'inquiétaient beaucoup du sens qui était le

 11   sien.

 12   Nous avons entendu le Témoin Dodik témoigner en page 42 267 du compte

 13   rendu d'audience lorsqu'il lui a été demandé si la déclaration a été

 14   discutée pendant des séances de l'assemblée :

 15   "Nous avions à l'esprit la politique d'Izetbegovic exposée dans la

 16   "Déclaration islamique", et moi-même, j'ai lu cette déclaration à plusieurs

 17   reprises, je pense que n'importe qui, qui s'occupait de politique peu ou

 18   pro à l'époque était au courant du contenu de cette déclaration. Ce n'était

 19   pas un secret, c'était un document public qui est devenu particulièrement

 20   populaire parmi ceux qui soutenaient Izetbegovic."

 21   Nous avons d'autres éléments de preuve montrant que le rôle de la

 22   Déclaration islamique était important, ainsi que des craintes générées par

 23   la même déclaration. Page du compte rendu 29 633 jusqu'à 29639, Témoin

 24   Kupresanin; page du compte rendu 23 904, Témoin Kecmanovic. Nous avons même

 25   une pièce à conviction de l'Accusation concernant un témoin de

 26   l'Accusation, c'est la pièce P3265. Il s'agit du Témoin Macleod. Et nous

 27   avons également un témoin de la Défense, Tadic, qui en parle dans sa

 28   déclaration, D661, paragraphe 17.


Page 44879

  1   Donc, dire que la Déclaration islamique n'était pas quelque chose dont tout

  2   le monde était au courant, cela ne cadre pas avec les éléments de preuve

  3   s'y rapportant.

  4   Nous devons également tenir compte de ce qui s'était passé par la suite,

  5   puisque que cet ouvrage a été publié, elle invitait au Djihad ou à la

  6   guerre sainte, il invitait les Musulmans de Bosnie pour dominer sur les

  7   autres, sur les non-croyants, mais ce n'était pas tout. Il faut qu'on parle

  8   également de l'article du magazine Vox, dont M. Tieger a parlé et a fait

  9   référence à cet article. Les auteurs de cet article étaient intelligents

 10   lorsqu'ils ont dit : Nous allons imprimer cela, mais nous ne savons pas

 11   quelle est la source de cela, peut-être que la source sont des Serbes. Ils

 12   ont donc couvert leurs propres faits en faisant cela. Pourquoi ?

 13   Ils ont peut-être pu dire quelque chose là-dessus, mais le magazine Vox a

 14   préparé la page de couverture sur laquelle on voit un soldat de la Division

 15   Handzar, la division des Musulmans de Bosnie qui, donc, piétine quelques

 16   têtes. Il s'agit, entre autres, de la tête de Karadzic. Ce ne sont pas les

 17   Serbes qui ont inventé cela.

 18   Il y avait un autre article du même journal, il s'agissait des notices

 19   nécrologiques concernant quelques hommes politiques, des Serbes de Bosnie,

 20   qui étaient en vie à l'époque. Les Serbes n'ont pas inventé cela. Donc, il

 21   est plus probable, selon les éléments de preuve, que les dirigeants des

 22   Musulmans de Bosnie qui étaient très proches du SDA et du maire de Sarajevo

 23   et Alija Izetbegovic, que cela ait été publié.

 24   Quel est le message que les Serbes de Bosnie-Herzégovine pouvaient en

 25   tirer, si vous êtes Serbe et si un matin vous voyez soudainement que vous

 26   n'avez pas vos droits constitutionnels en tant que partie égale en Bosnie

 27   et que deux autres parties ont proclamé l'indépendance et décident de votre

 28   sort ? Comment vous vous sentez si Alija Izetbegovic appelle au Djihad ?


Page 44880

  1   Comment vous vous sentez si des notices nécrologiques sont publiées

  2   concernant les Serbes qui sont toujours en vie ? Tout simplement, on peut

  3   dire qu'il s'agissait de la peur qu'ils ressentaient. Les Serbes ordinaires

  4   ressentaient la peur à cause de ce qui a été publié, de ce qu'ils ont pu

  5   voir, et vu également les souvenirs du sort qui leur a été réservé pendant

  6   la Deuxième Guerre mondiale.

  7   Pour ce qui est de l'entreprise criminelle commune, et M. Tieger a fait

  8   référence à cela aujourd'hui lorsqu'il a parlé du fait que l'intention peut

  9   être conclue sur la base de quelques documents parlant de "ciscenje" ou de

 10   nettoyage dans la vallée de la Drina, et l'Accusation a utilisé un terme

 11   concret qui a une acception non criminelle, militaire; elle essaie de dire

 12   qu'il s'agit d'une autre acception de ce terme qui convient à leur thèse.

 13   Et nous avons vu des moyens de preuve clairs d'un expert militaire, Kovac,

 14   à la page 41 924, où il a donné la définition de "ciscenje", ou nettoyage,

 15   en utilisant des termes militaires. Il a dit que "ciscenje", nettoyage ou

 16   ratissage du terrain, veut dire qu'on procède au nettoyage du terrain des

 17   formations ennemies armées dans une zone de responsabilité sur le

 18   territoire où la force a été utilisée, donc cela concerne des unités

 19   armées. Lorsqu'on lui a posé la question s'il y a une différence entre

 20   "ciscenje", nettoyage, et "ciscenje terena", nettoyage du terrain, le

 21   Témoin Kovac a dit que nettoyage, ou "ciscenje", est un terme de portée

 22   générale, et le ratissage du terrain ou nettoyage du terrain concerne des

 23   éléments armés, des unités armées, des terroristes, des groupes de

 24   sabotage, et cetera. C'est ça la définition du ratissage du terrain.

 25   Et à ce sujet, Monsieur le Président, j'aimerais également dire que le

 26   Témoin RM097 a fait une distinction claire entre les ordres de la JNA

 27   relatifs à "ciscenje" ou au ratissage du terrain et l'ordre concernant le

 28   déplacement forcé ou le fait de malmener des civils. Donc, l'emploi de ce


Page 44881

  1   terme, "ciscenje", dans des documents militaires du terme "ratissage du

  2   terrain" est interprété de façon erronée et on ne peut pas faire comme

  3   l'Accusation a fait, d'attribuer une acception différente et néfaste à ce

  4   terme.

  5   L'Accusation a parlé pendant un certain temps de Foca et, en particulier,

  6   l'Accusation s'est concentrée sur la destruction des mosquées à Foca.

  7   Encore une fois, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, étant donné la

  8   charge de la preuve et tenant compte de ce principe et du fait que toutes

  9   les conclusions doivent être faites en faveur de l'accusé, nous vous

 10   invitons à analyser tous les moyens de preuve dans leur intégralité pour

 11   voir s'il y a une explication alternative pour dire pourquoi et comment, de

 12   quelle façon ces mosquées à Foca avaient été détruites.

 13   Il faut que vous vous rappeliez qu'on dispose d'une photographie montrant

 14   un canon militaire près du toit d'une mosquée. Vous allez vous souvenir que

 15   des témoins avaient dit que les unités armées de l'ABiH procédaient à des

 16   activités de combat à partir des mosquées. Pièce D706, Témoin Trivko

 17   Pljevalcic, paragraphe 8 :

 18   "J'ai été blessé le 14 juillet 1992. Pour ce qui est des combats dans la

 19   ville de Foca, ces combats ont duré quelque dix jours. A partir de

 20   l'éclatement du conflit, toutes nos activités étaient concentrées sur la

 21   défense ou sur la riposte aux attaques des forces musulmanes jusqu'au jour

 22   où on a perdu le premier homme, et c'était le premier jour du combat où cet

 23   homme a été tué, des tirs du minaret de la mosquée Aladza. Je sais que des

 24   forces musulmanes utilisaient leurs édifices religieux à des fins

 25   militaires. Ils ont utilisé ces édifices pour y organiser des entraînements

 26   et pour les utiliser comme des entrepôts pour les armes."

 27   Au paragraphe 9, il est dit :

 28   "Pour autant que je sache, le premier combattant qui a été tué à Foca était


Page 44882

  1   Radoljub Trifkovic. Il a été touché du minaret de la mosquée Aladza, et je

  2   me trouvais à quelque 10 mètres par rapport à l'endroit où il se trouvait

  3   et où cela s'est passé. Dragan Nikolic a été tué à la même occasion."

  4   Ensuite, nous avons entendu le témoignage du Témoin Vujicic. D'abord, à la

  5   page 4 240 [comme interprété] du compte rendu :

  6   "Donc, quand les Musulmans se sont procurés des armes et quand ils ont fait

  7   importer des armes à Foca, ils les ont placées principalement à des

  8   endroits où se trouvaient des édifices religieux. Près de certains édifices

  9   religieux, mais pas près de tous. Il s'agissait des armes, des explosifs,

 10   et cetera. En plus, pour ce qui est de certains de ces édifices religieux,

 11   comme il s'agit de la mosquée Pilav à Gornje Polje, c'est là où ils ont

 12   entraîné les Bérets verts et les forces armées ainsi que la Ligue

 13   patriotique."

 14   A la page du compte rendu 24 201.

 15   Le Juge Orie a posé une question à la ligne 4 :

 16   "Oui, c'est parce que vous êtes en train de nous expliquer qu'il y avait

 17   des activités qui étaient entreprises à partir de ces mosquées et de quand

 18   et de quelle manière ces mosquées ont-elles été détruites ou endommagées.

 19   C'était la question qui vous a été posée. Concentrez-vous sur cette

 20   question, s'il vous plaît."

 21   "Le témoin dit : Ces mosquées ont été démolies dans des conflits, la

 22   plupart d'entre elles lors des activités de combat, précisément parce que

 23   des Musulmans ouvraient le feu à partir des minarets de certains de ces

 24   mosquées. J'ai vu en personne que des Musulmans pilonnaient des positions

 25   serbes et des maisons serbes à partir de ces mosquées. Et plus tard, à un

 26   moment donné en 1995, après que les forces de l'OTAN ont tiré plusieurs

 27   projectiles sur Foca, ces mosquées, étant donné qu'il s'agissait des

 28   bâtiments qui étaient vieux, ont été endommagées, considérablement


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  1   endommagées et démolies. Et c'est comment ces lieux du culte ont été

  2   détruits."

  3   Vous pouvez, encore une fois, vous pencher sur la totalité des éléments de

  4   preuve. Lorsqu'il y a une explication alternative concernant un fait, vous

  5   devez également appliquer le principe pro dubio in reo. Et pour ce qui est

  6   de ces mosquées à Foca, cela ne veut pas dire que cela est arrivé pour ce

  7   qui est d'autres mosquées ailleurs. Donc, vous devez regarder toutes les

  8   municipalités concernant cela et concernant les éléments de preuve

  9   concernant ces municipalités. Et pour ce qui est de Foca, nous avons des

 10   éléments de preuve que l'Accusation n'a pas abordés et qui montrent qu'il y

 11   a une explication alternative selon laquelle le général Mladic n'est pas

 12   responsable de cela et il ne peut pas être responsable de cela et ne peut

 13   pas être pénalement responsable de cela.

 14   Par rapport à un point que M. Tieger a soulevé vers la fin de sa

 15   présentation aujourd'hui, il semblait que l'utilisation du terme "écoute"

 16   par moi lui posait problème concernant des témoignages concernant des

 17   déclarations faites par le général Mladic et par les membres de son équipe,

 18   c'est parce que l'équipe de l'Accusation se trouvait à un endroit où ils

 19   étaient censés entendre quelque chose, mais il n'a pas dit comment les

 20   membres de l'équipe de l'Accusation ont appris cela et comment ils se

 21   trouvaient là-bas. Donc, pour moi, c'est une offense, puisqu'il a dit aux

 22   membres de l'équipe de l'Accusation de se rendre là-bas et d'entendre une

 23   conversation confidentielle entre l'avocat et son client, ses juristes. Et

 24   cela est dit, ce que M. Tieger avait dit par rapport à cela, ça me dégoûte.

 25   De la même façon, à la page 18 174, l'un des membres de l'équipe de

 26   l'Accusation, à savoir le Témoin Sokola, a dit que le représentant du

 27   bureau du Procureur leur avait dit de prendre note de tout ce que Mladic

 28   disait, même lorsqu'il s'agissait des choses privées. Page du compte rendu


Page 44884

  1   d'audience 18 174. A la page du compte rendu 18 180, le même témoin a

  2   confirmé que toute la communication se déroulait entre Mladic et ses

  3   avocats et qu'il n'y avait pas d'autres personnes présentes à ce moment-là.

  4   Lorsqu'on lui a posé la question pour savoir comment il se fait qu'il se

  5   soit trouvé à cet endroit-là, à la page du compte rendu 18 172, le témoin

  6   leur a dit qu'on leur avait dit de rester dans le prétoire aux fins

  7   d'écouter la conversation. Et lorsqu'on lui a posé la question pour savoir

  8   si le représentant du bureau du Procureur leur avait dit qu'il s'agissait

  9   de conversations privilégiées entre le conseil et son client, le témoin a

 10   dit que cela n'avait pas été abordé à l'époque. Donc ici, on voit que pour

 11   le bureau du Procureur, donc, violer cette relation privilégiée entre un

 12   avocat et son client ne leur pose aucun problème.

 13   Je vous demande, je demande à tout le monde ici si cela est honnête ?

 14   Est-ce que nous voulons que ce procès soit géré par l'Accusation ?

 15   Maintenant, j'aimerais parler de Sarajevo. Au vu de la présentation

 16   d'aujourd'hui, l'Accusation a reconnu qu'il y avait proportionnalité et

 17   maintenant se concentre sur la sélectivité, page du compte rendu provisoire

 18   23, lignes 6 à 9, M. Tieger sait pertinemment -- a dit que :

 19   "La Défense savait pertinemment pourquoi la proportionnalité n'est

 20   pas ce sur quoi se concentrent les arguments liés à la campagne de terreur,

 21   parce que cela suppose un effort et qu'il fallait particulièrement cibler

 22   la cible militaire légitime, alors qu'il faut apprécier la valeur militaire

 23   contre le risque des dommages collatéraux."

 24   Messieurs les Juges, nous soumettons que la proportionnalité telle

 25   qu'exigée par la loi doit être appréciée en fonction des actions militaires

 26   et du pilonnage. Enfin, ils parlent de G1 qui est une campagne de

 27   pilonnage. Cela étant dit, à part Fadila Tarcin, ont-ils identifié et

 28   évoqué d'autres victimes du fait répertorié G1 ? Ils parlent énormément de


Page 44885

  1   victimes, mais où sont les preuves à l'appui ? Comment pouvons-nous nous

  2   défendre quand des victimes inconnues, le fait que l'on avance qu'il y ait

  3   des victimes et que ceci ne soit pas étayé ?

  4   Les éléments de preuve qui existent de cibles militaires du côté de

  5   l'ABiH, qu'il s'agissait en fait de cibles militaires légitimes et qui

  6   étaient la cible des tirs sélectifs engagés comme indiqué dans le fait

  7   répertorié G1. Comme Bascarsija, D808 [comme interprété]. Velesici, D653.

  8   Et Vratnik, le P549. Et Sirokaca, D524. Donc, s'ils prétendent qu'il n'y

  9   avait pas de cible militaire et que ceci n'est pas étayé par les éléments

 10   de preuve, il existe une conclusion alternative.

 11   Concernant Sirokaca, nous avons autre chose et je souhaite aborder

 12   cela maintenant. Le cas de Mme Fadila Tarcin, est-ce la Défense qui déforme

 13   sa déposition ? Est-ce vraiment le cas ? Plutôt que de reprendre les propos

 14   prononcés, je vais reprendre la déposition de Mme Tarcin et le compte rendu

 15   de sa déposition. Et vous verrez si je déforme ses propos ou non ou si, à

 16   l'inverse, comme l'a dit M. Tieger, nous déformons ses paroles. Encore une

 17   fois, c'est un témoin à charge. Page du compte rendu d'audience 3 424 :

 18   "Q.  Merci, Madame, et je vous remercie. Dans ce paragraphe, vous dites

 19   également et je cite :

 20   "'D'après les gens de la région, l'obus provenait de Borije, à l'est de

 21   l'endroit où nous étions.'

 22   "Tout d'abord, ces personnes de la région sont-elles les mêmes personnes

 23   que celles dont nous parlons ?

 24   "R.  Oui, il s'agit bien des voisins."

 25   Et je marque une pause. Donc, Fadila Tarcin a dit que l'obus

 26   provenait de Borije ? Non. Non, Monsieur Tieger, pardonnez-moi, mais elle

 27   n'a pas dit ça.

 28   Et je poursuis :


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  1   "Q.  Et ce site qu'ils ont évoqué, Borije, pourriez-vous nous dire à quelle

  2   distance se trouve Borije de cet endroit, de l'endroit où vous-même vous

  3   avez été blessée ?

  4   "R.  Honnêtement, je n'ai aucune idée. On peut les voir, mais je ne sais

  5   absolument pas combien de kilomètres les séparent.

  6   "Q. Et qu'en est-il des lignes de front ? Où se trouve Borije par rapport

  7   aux lignes de front que vous avez précisées un peu plus tôt, vous avez dit

  8   que ces lignes de front se trouvaient quelque part près de votre -- en

  9   hauteur par rapport à votre maison ?

 10   "R. Ce serait donc à l'opposé, à l'est. Si vous regardez Sirokaca, ce

 11   serait de l'autre côté, sur la droite."

 12   L'INTERPRÈTE : Veuillez ralentir, s'il vous plaît, à l'intention des

 13   interprètes.

 14   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, vous avez cité, je crois,

 15   une page du compte rendu d'audience, le 3 242.

 16   M. IVETIC : [interprétation] Non, c'est le 3 424. Nous sommes maintenant à

 17   3 425. On a posé la question suivante au Témoin Tarcin :

 18   "Q. Merci. Ai-je raison de dire que ce secteur de Borije était tenu

 19   principalement par les forces qui étaient restées loyales envers les forces

 20   d'Izetbegovic ?

 21   "R. Honnêtement, cela, je ne le sais pas."

 22   Nous allons maintenant passer au reste de la déposition de Fadila Tarcin, 3

 23   447. C'est le Juge Orie qui a posé une question au témoin.

 24   "Le Juge Orie : Avant de vous laisser interroger à nouveau le témoin, j'ai

 25   une question à vous poser. Je comprends, d'après votre déclaration, que

 26   vous avez été blessée par des éclats d'obus lorsqu'une maison voisine a été

 27   frappée par un projectile. Est-ce comme cela qu'il faut comprendre les

 28   choses ?


Page 44887

  1   "Le Témoin : C'est exact.

  2   "Le Juge Orie : Avez-vous, par la suite, vu la trace d'impact sur la maison

  3   de vos voisins, la trace d'impact de cet obus, dans le cas où cet obus a

  4   véritablement touché la maison ?

  5   "Le Témoin : Oui, cela a touché la maison, et oui, je l'ai vu.

  6   "Le Juge Orie : Pourriez-vous nous dire, dans ce cas, si cette trace

  7   d'impact se trouvait du côté de la maison qui faisait face à la colline, en

  8   haut de la colline; ou était-ce en contrebas par rapport à la colline ? Ou

  9   l'un ou l'autre, c'est aussi possible.

 10   "Le Témoin : C'était vers le bas de la colline, autrement dit, face à la

 11   ville.

 12   "Le Juge Orie : En face de la ville. Bien. Alors, la trace d'impact -- si,

 13   par exemple, vous regardez la maison et essayez d'identifier l'endroit --

 14   d'identifier la trace de l'impact, à ce moment-là, cela provient de la

 15   direction du fleuve, plutôt que du haut de la colline. C'est exact ?

 16   "Le Témoin : Oui, oui.

 17   "Le Juge Orie : Merci."

 18   Messieurs les Juges, il n'y a aucun lien entre cet obus et le général

 19   Mladic. L'Accusation n'a pas fourni ce lien. Ils ont fourni des éléments de

 20   preuve qui sont sujets à des interprétations multiples et des conclusions

 21   multiples, certaines de ces preuves exonèrent Mladic et, en vertu de la

 22   loi, dans ce cas, il y en a certaines que vous devez accepter.

 23   Je souhaite parler de Sarajevo -- et je souhaite passer à huis clos

 24   partiel, s'il vous plaît.

 25   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Huis clos partiel.

 26   M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes actuellement à huis clos

 27   partiel.

 28   [Audience à huis clos partiel]


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 26   [Audience publique]

 27   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.

 28   M. IVETIC : [interprétation] Alors, pour ce qui est de Sarajevo,


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  1   l'Accusation fait valoir que vous n'avez pas besoin d'aborder la ville

  2   défendue parce que l'Accusation n'a jamais dit que c'était une ville sans

  3   défense. D'un côté, c'est la façon dont M. Tieger reconnaît que Sarajevo

  4   était une cité défendue tout en essayant de se disculper par rapport aux

  5   moyens utilisés.

  6   Et je suis surpris de constater que M. Tieger ne connaît même pas la teneur

  7   de l'acte d'accusation qu'il avance, car cela porte sur les chefs 9 et 10

  8   qui portent sur Sarajevo, le chef 6, chef de meurtre, et en vertu de

  9   l'article 3 du Statut du TPIY. Messieurs les Juges, si vous vous en

 10   souvenez lorsque je l'ai lu l'autre jour, lorsque M. Tieger a dit "de quel

 11   statut s'agit-il," j'ai cité un extrait, ce que l'Accusation cite dans son

 12   acte d'accusation et dit précisément que les violations qui font l'objet de

 13   poursuites portent sur des attaques ou des bombardements par quelques

 14   moyens que ce soient contre des villages, des villes ou des appartements ou

 15   bâtiments non défendus. Et donc, l'Accusation a indiqué de façon très

 16   explicite, s'agissant des chefs 9 et 10 et 6, que ces localités étaient

 17   sans défense.

 18   Maintenant, l'Accusation avance que cela n'était pas le cas, donc il faut

 19   prononcer un acquittement.

 20   Des villes sans défense ou des villes défendues -- la ville défendue

 21   s'applique à Sarajevo, s'applique à Srebrenica, et toute localité dans

 22   laquelle une force militaire armée opposait une défense et refusait de

 23   rendre la ville ou de faire en sorte que la ville soit une ville ouverte.

 24   Alors, regardons maintenant le droit. Qu'est-ce que l'on appelle une ville

 25   sans défense ? L'article 59(2) du Protocole additionnel I déclare qu'une

 26   ville sans défense est un endroit habité proche d'une zone ou dans une zone

 27   où des forces armées sont en contact -- est une ville ouverte qui peut être

 28   occupée par la partie adverse. S'il n'y a pas d'accord, les quatre


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  1   conditions doivent être remplies. Tous les combattants, toutes les armes

  2   mobiles et matériel militaire mobile doit avoir été évacué.

  3   S'agit-il là de Sarajevo ? Non. S'agit-il de Srebrenica ? Non.

  4   S'agit-il de ces villages dans les municipalités où se trouvaient des

  5   unités de l'ABiH ou dans lesquels se trouvaient des paramilitaires armés ?

  6   Non.

  7   Donc, aucune utilisation contraire ou hostile à des installations

  8   militaires fixes.

  9   S'agit-il là de Sarajevo ou de Srebrenica ? Non.

 10   Aucun acte hostile commis par les autorités ou par la population.

 11   Il n'y avait aucune action menée à l'appui des opérations militaires.

 12   Contrairement à l'AP I, les routes et les chemins de fer qui

 13   traversent des zones non défendues ne doivent pas être utilisés pour le

 14   mouvement des combattants ou le transport de matériel militaire, et ne

 15   doivent pas constituer un passage ou un transit.

 16   Souvenez-vous du tunnel à Sarajevo et de l'existence des forces de

 17   l'ABiH à Sarajevo.

 18   L'article 59(6), Protocole additionnel numéro I, il doit y avoir des

 19   panneaux qui indiquent que la ville n'est pas défendue.

 20   Souvenez-vous de la déposition concernant Srebrenica. Il n'y avait

 21   aucun panneau indiquant qu'il s'agissait d'une zone démilitarisée.

 22   Si nous regardons les instructions de la BiH de 1992, si un endroit

 23   ou un local n'est pas défendu, cela doit être reconnu par les parties ou

 24   remplir certaines conditions : manque de défense ou de forces armées,

 25   manque d'unités aux fins de transporter du matériel militaire, manque

 26   d'action ayant une quelconque importance militaire, manque de liaison avec

 27   les forces locales sur place ou les forces alliées.

 28   Je cite le manuel militaire de la RSFY : Un local non défendu doit


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  1   correspondre au nouveau projet d'accord de 1956. Lorsqu'un endroit, une

  2   ville, est déclaré sans défense, la partie adverse en sera notifiée.

  3   "Celle-ci devra répondre. Et si elle est d'accord et d'accord que de

  4   reconnaître que la localité en question est une ville ouverte … en

  5   l'absence de toutes conditions particulières, dans un cas ou un autre, en

  6   un cas donné, sur lesquelles on peut trouver un accord avec la partie

  7   adverse, une localité, pour qu'elle soit déclarée 'ville ouverte', doit

  8   répondre aux questions suivantes : cette localité ne doit pas être

  9   défendue, ni abriter des forces armées; n'avoir aucun contact ou lien avec

 10   les forces nationales ou armées; cesser toute activité à caractère

 11   militaire ou à des fins militaires … doit cesser tout transit militaire

 12   dans la ville."

 13   Messieurs les Juges, à différents moments dans cette affaire, nous

 14   avons parlé de la ville. Nous avons soumis des manuels militaires du

 15   Royaume-Uni et des Etats-Unis. Cette définition d'une vision non défendue

 16   qui ne constitue pas une cible légitime et ce qui est dans le cas d'une

 17   ville défendue, et il s'agit d'une cible militaire légitime, cela est

 18   conforme non seulement à la loi en RSFY, mais à la loi qui s'applique à

 19   toutes les armées du monde.

 20   Donc, nous faisons valoir que Sarajevo n'est pas un endroit qui est

 21   sans défense. Au contraire, c'est une ville défendue. De multiples cibles

 22   militaires se trouvaient à Sarajevo qui sont légitimes et pouvaient donc

 23   être utilisées pour servir de cibles de tir. Nous disposons, entre autres,

 24   d'un déploiement important de l'ABiH dans Hrasnica, y compris le poste de

 25   commandement avancé de la 104e Brigade, D559, à Hrasnicki Stan, paragraphe

 26   2. Le centre d'entraînement des forces spéciales de l'ABiH à l'école Alekse

 27   Santic, D559, paragraphe 21. Deux tours et les mitrailleuses installées

 28   dans un appartement, et deux étages en dessous ou au-dessous vivaient des


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  1   familles. Le colonel Sehovac a dit cela dans sa déposition, page du compte

  2   rendu d'audience 24 036. D559, paragraphe 19, parle en fait du bâtiment des

  3   PTT à Hrasnica ayant été utilisé à des fins militaires.

  4   Ainsi que Sokolje, deux camions chargés de dynamite, page du compte

  5   rendu d'audience 2 015 [comme interprété].

  6   Alipasino Polje, nous disposons d'informations indiquant qu'un nombre

  7   important de Bérets verts se trouvait à l'intérieur de ce bâtiment de la

  8   RTV. Tous les jours, 50 à 70 % [comme interprété] d'entre eux se trouvent

  9   dans ce bâtiment. D2015, D453.

 10   Nous avons entendu dire que le complexe agricole s'était livré à des

 11   actions militaires, page du compte rendu d'audience 21 067.

 12   Dolac-Malta, Geodetski Zavod, P468, paragraphe 9; la tour Unis, D467;

 13   ZIS, Buca Potok, D647; la tour Sibica, D647; et l'école Vaso Miskina, D489,

 14   paragraphe 13.

 15   A Dobrinja, il y avait des positions de mortiers dans le parc à 500 à

 16   700 mètres du front, D559, paragraphe 20. A Nedzarici, le bâtiment

 17   d'"Oslobodjenje" a été utilisé par l'ABiH, D453. A Otoka, le bâtiment

 18   Drljaca [comme interprété] a été utilisé, P647. A Kosevo, l'institut pour

 19   les enfants atteints de problèmes d'ouïe, et imaginez le centre de

 20   communication placé à cet endroit par l'ABiH, D647. L'unité spéciale du CSB

 21   stationnée à cet endroit, en face du musée olympique. L'institut

 22   psychiatrique a également été réquisitionné. La faculté d'éducation

 23   physique a été réquisitionnée également. D'après le Témoin Rasevic, D551.

 24   Le stade de Kosevo, l'hôpital de Kosevo, le tunnel de Kosevo et l'école

 25   Nemanja Vlatkovic ont de même été utilisés par l'ABiH, D551. A Bjelave,

 26   l'école et le logement pour les étudiants étaient utilisés. L'école

 27   élémentaire a été utilisée par des membres du HVO, D648 [comme interprété],

 28   page 2. L'usine Zrak à Buca Potok, D647. Le cimetière juif à Kovacici et


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  1   Soukbunari, D48419.

  2   Nous avons plusieurs cartes au dossier - D469 et 470, par exemple -

  3   qui montrent la position d'emplacements et de cibles militaires.

  4   La liste pourrait être longue, mais nous avons une abondance de

  5   preuve qui parlent de cibles militaires présentes à Sarajevo qui tiraient

  6   sur les Serbes. Non, Messieurs les Juges. Sarajevo est un exemple typique

  7   de ville défendue qui devient une cible légitime car l'ABiH avait entrepris

  8   des actions pour placer ses forces à côté des civils pour les utiliser

  9   comme boucliers civils. De ce fait, la proportionnalité doit entrer en

 10   ligne de compte dans la discussion, au contraire de ce qu'a affirmé dans

 11   son exposé l'Accusation.

 12   Le SRK, je vous le rappelle, veillait à ne pas tirer sur des civils

 13   et cibles civiles suite à des confirmations visuelles ou d'informations

 14   obtenues d'informateurs ou de personnes ayant fui Sarajevo. Le Témoin

 15   Tusevljak en a témoigné, compte rendu d'audience -- nous avons D535,

 16   paragraphe 146; D824; D825; D643; D540; D468; D658.

 17   [Le conseil de la Défense se concerte]

 18   M. IVETIC : [interprétation] Messieurs les Juges, la sélectivité était bien

 19   présente lorsque le SRK ciblait. Nous avons entendu M. Tieger dire que le

 20   général Mladic disposait d'une armée qui pouvait trancher la Bosnie comme

 21   un couteau le fromage. Mais ce n'est pas le cas. Il se défendait des

 22   attaques contre l'ABiH à partir de la ville elle-même.

 23   Le commentaire au sujet de l'article 52(2) du Protocole additionnel des

 24   conventions de Genève, 2024, il est question d'avantage militaire défini

 25   qui peut provenir de la destruction, capture ou neutralisation. Le 2025

 26   parle d'une zone spécifique qui peut être un objectif militaire légitime

 27   compte tenu de son emplacement et des circonstances. C'est un commentaire

 28   du Canada, République fédérale d'Allemagne, des Pays-Bas et des Etats-Unis.


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  1   Et le Royaume-Uni a fait une même déclaration dans une réunion similaire et

  2   a répété cette déclaration au moment de signer les protocoles additionnels.

  3   La proportionnalité dans le contexte d'une attaque sur une ville défendue

  4   doit être évaluée dans le contexte du conflit dans sa globalité. Les

  5   bombardements sont acceptables. Voir nos informations dans nos arguments en

  6   clôture en ce qui concerne le pilonnage intensif. Je voudrais également

  7   dire que plusieurs témoins en ont parlé dans le prétoire : Piers Tucker, le

  8   général Fraser, le Témoin Butler et le Témoin Kovac. Reportez-vous à leurs

  9   témoignages. Ils ont parlé de la doctrine de la ville défendue en des

 10   termes on ne peut plus clairs et, par exemple, ils ont analysé la doctrine

 11   de la force écrasante. Je pense que c'est M. Tucker qui en a parlé, il a

 12   dit que les commandants de l'OTAN qui étaient responsables des

 13   bombardements des Serbes étaient tellement pris par leur vision de la force

 14   écrasante, enseignée au titre de la doctrine de l'OTAN, qu'ils ne voulaient

 15   pas se restreindre en termes d'utilisation de la force contre les Serbes.

 16   Et donc, les Serbes, quant à eux, ne font pas comme l'OTAN et ils font

 17   preuve de retenue. Alors, est-ce que c'est leur culpabilité ? D'après

 18   l'Accusation, ils sont coupables.

 19   Il existe une stratégie militaire qui s'appelle le choc et la stupéfaction,

 20   qui est liée à la force écrasante. Le but est d'avoir une domination rapide

 21   de l'ennemi en imposant immédiatement une force écrasante. Plutôt que de

 22   réduire à néant les capacités militaires de l'adversaire, cette stratégie a

 23   pour but de casser la volonté de l'adversaire au-delà de ce que la doctrine

 24   considère comme les capacités militaires. Et le but n'est pas, à ce moment-

 25   là, d'obtenir une supériorité militaire. Voilà le sens de cette doctrine.

 26   Est-ce que les Serbes pendant la guerre, au début, est-ce qu'ils ont

 27   cherché à limiter les victimes pour G1 ? Lorsque G1 a commencé, l'opération

 28   a été interrompue quand on a vu que les risques de victimes civiles étaient


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  1   trop grands. A ce moment-là, Mladic a mis fin à cette opération. Donc, la

  2   sélectivité était bien présente à l'esprit des dirigeants du SRK lorsqu'ils

  3   menaient ces actions autour de Sarajevo.

  4   L'article 3 du Statut prévoit qu'il est interdit de bombarder une ville non

  5   défendue, mais il faut le faire à la lumière du droit international qui dit

  6   que l'on peut bombarder une ville défendue. Les manuels militaires font une

  7   distinction entre les différents éléments. Bâtiment, habitation et ville,

  8   ce n'est pas la même chose. Et le bombardement contre ces villes et

  9   localités est dès lors soumis aux critères normaux permettant d'attaquer

 10   une cible. Il doit s'agir d'une attaque proportionnée et la cible doit être

 11   une cible militaire légitime.

 12   Le fait qu'il y ait eu des civils à Sarajevo ne signifie pas que ce

 13   n'était pas une cible militaire valable. Cela signifie qu'elle devait être

 14   traitée comme une cible militaire en tenant compte des civils au niveau de

 15   la proportionnalité, et cela a été fait. L'Accusation n'a pas démontré que

 16   les attaques contre Sarajevo étaient disproportionnées à cet égard.

 17   D'autres raisons expliquant pourquoi -- non, non, je recommence.

 18   Pour ce qui est de Sarajevo, il faut souligner à nouveau que selon la

 19   jurisprudence Gotovina, la Chambre d'appel, page 66, souligne que la

 20   présence de mortiers mobiles à Sarajevo remet en cause les affirmations de

 21   l'Accusation selon lesquelles le SRK tirait de manière non discriminée. Et

 22   paragraphe 66, appel Gotovina, la présence de mortiers mobiles "fait naître

 23   un doute raisonnable quant à la question de savoir si la présence de

 24   mortiers … permet vraiment d'affirmer que les pilonnages étaient illégaux."

 25   De ce fait, les tirs de la SRK n'étaient pas indiscriminés, et donc

 26   cela met en échec les dires de l'Accusation.

 27   Au paragraphe 79 de l'appel Gotovina, il est dit que les observations

 28   des témoins sans expérience de l'artillerie et dont les points


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  1   d'observation rendaient difficile l'identification de l'impact ne sont pas

  2   suffisantes pour dire que le pilonnage était indiscriminé.

  3   Il en va de même ici pour les preuves de l'Accusation au sujet de

  4   Sarajevo, Messieurs les Juges.

  5   Les jugements en appel de Gotovina et Markac disent que l'on ne peut

  6   pas appliquer la responsabilité stricte. On ne peut pas dire que tout obus

  7   atterrissant à plus de 200 mètres d'une cible militaire est indiscriminé,

  8   car cela ne tient pas compte de variables telles que la distance, la

  9   température et le vent. Paragraphe 60 de ce jugement en appel.

 10   Parlons de ce dont je parlais auparavant, où y a-t-il des preuves de

 11   victimes de G1 au-delà de tout doute raisonnable ? L'Accusation a présenté

 12   P7171, un rapport avec une liste de personnes décédées ce jour-là, le 15

 13   novembre 1993. On ne sait pas comment elles sont mortes, ce n'est pas

 14   prouvé. Aucun lien démontré avec G1. Aucune preuve qu'ils étaient dans des

 15   lieux civils plutôt qu'ils aient été des civils tenus en otage par l'ABiH.

 16   Et il n'y a pas de preuve que ces civils [comme interprété] aient été des

 17   civils. C'étaient peut-être des combattants.

 18   Une autre pièce de l'Accusation, P7731, dit que six personnes sont mortes

 19   dans le dernier tir de barrage. Mais pas d'identification de ces six

 20   victimes ici encore. Et ces facteurs ne sont pas pris en compte, ce que je

 21   viens d'aborder.

 22   Et l'Accusation parle de victimes. Elle convoque Fadila Tarcin et insiste

 23   pour l'utiliser pour corroborer ses dires.

 24   En ce qui concerne les bombes aériennes modifiées, M. Tieger a parlé

 25   de plusieurs témoins, notamment Radojcic. Le Témoin Radojcic, rappelons-le,

 26   a évalué les bombes aériennes modifiées en disant qu'elles étaient assez

 27   précises. Et M. Tieger l'a lui-même reconnu, le témoignage de M. Radojcic

 28   dit que son unité préparait le lanceur en utilisant des schémas, des


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  1   dessins. Ils n'ont pas concocté quelque chose à la va-vite, non. Ils

  2   avaient un document sur l'utilisation de ces armes.

  3   M. Tieger a parlé de M. Radojcic et des tables de tir. Mais rappelons que

  4   le colonel Radojcic est le commandant de brigade. C'était un officier

  5   professionnel, en réalité, le seul avec le commandant de l'artillerie dans

  6   la brigade, qui était responsable de l'utilisation des systèmes de

  7   lancement des bombes aériennes modifiées avec les autres pièces

  8   d'artillerie et qui savait comment utiliser les tables de tir et comment

  9   utiliser l'équipement. Et rappelons que le colonel Radojcic a déclaré que

 10   ses unités ont tiré trois bombes aériennes modifiées et que toutes trois

 11   ont atteint leur cible. Donc, utiliser le colonel Radojcic comme exemple du

 12   manque de précision de ces armes, ce n'est pas acceptable. Ce n'est pas

 13   cela qu'a dit le colonel Radojcic. Ce n'est pas ce que dit son témoignage.

 14   Et je vous invite à en prendre connaissance au moment de délibérer.

 15   De la même manière, Messieurs les Juges, comme a toujours cherché à le

 16   faire l'Accusation, ils ont peur et évitent les tables de tir pour les

 17   lanceurs de bombes aériennes modifiées. Le Procureur dit que ce n'est même

 18   pas au dossier. Mais elles sont au dossier. Plusieurs témoins en ont parlé.

 19   Des experts en ont parlé et en ont même donné un extrait. Plus tard, nous

 20   avons reçu les documents officiels, et vous les avez, ils sont au dossier.

 21   Alors, dire que ces tables ne sont pas au dossier ? Eh bien, la thèse de

 22   l'Accusation est basée sur la conviction de leur non-existence, mais elles

 23   existent.

 24   M. LE JUGE MOLOTO : [interprétation] Numéro de pièce ?

 25   M. IVETIC : [interprétation] Me Lukic cherche, mais il a des problèmes.

 26   Passons à la suite et j'y reviendrai lorsqu'il aura retrouvé les

 27   références. Mais vous vous rappellerez qu'avec le Témoin Subotic, et il y a

 28   un extrait, il y avait des tables de tir pour 1995 pour des lanceurs de


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  1   roquettes Kosava.

  2   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Pour éviter toute confusion, d'après

  3   moi, quand M. Tieger parlait des tables de tir, il parlait des tables de

  4   tir A4, dont a parlé un des témoins, alors que les tables de tir qui ont

  5   été produites ultérieurement sont ce dont vous parlez. Je sais que lorsque

  6   l'on parle de tables de tir, on ne parle peut-être pas exactement de la

  7   même chose.

  8   M. IVETIC : [interprétation] Moi, je pense parler de ce dont M. Tieger

  9   parle, parce qu'il a parlé de Kosava, c'est le nom du système, et nous

 10   avons des tables de tir datant de 1995 et pour les années postérieures

 11   également. Nous en avons pour 1995. Et rappelons le témoignage : les bombes

 12   aériennes modifiées n'ont pas été utilisées avant 1995. Nous avons

 13   également la déposition d'autres témoins qui expliquent les tests dans les

 14   champs d'essai d'artillerie à Kalinovik.

 15   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Monsieur Tieger, est-ce que vous pouvez

 16   nous confirmer que nous parlons de la même chose lorsque vous avez dit que

 17   les tables de tir ne sont pas au dossier ?

 18   M. TIEGER : [interprétation] Je ne sais pas si on se comprend. Mais moi, je

 19   ne parlais pas des tables de tir pour -- le A4 dont j'ai parlé pour le

 20   Témoin Radojcic. Moi, je parlais de documents déposés plus tard qui ont été

 21   utilisés mais qui n'ont pas été versés au dossier.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Nous savons maintenant à quoi se

 23   réfèrent les parties lorsqu'elles parlent de tables de tir dans ce

 24   contexte.

 25   Vous pouvez poursuivre.

 26   [Le conseil de la Défense se concerte]

 27   M. IVETIC : [interprétation] Je vais maintenant parler de Srebrenica.

 28   Encore une fois, penchons-nous sur cette réunion qui est à la base de tout,


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  1   parce que nous avons vu l'autre jour que l'Accusation a concédé qu'il

  2   n'existait pas d'entreprise criminelle commune visant à éliminer avant

  3   cette réunion. Nous avons évoqué l'autre jour les paragraphes cités par

  4   l'Accusation de leur mémoire en clôture où il est question du fait qu'ils

  5   ne savent pas à quel moment cette réunion a eu lieu. Monsieur le Président,

  6   Messieurs les Juges, comment est-ce qu'un élément peut être prouvé au-delà

  7   de tout doute raisonnable si l'Accusation elle-même admet qu'elle ne sait

  8   pas ?

  9   Et M. Tieger a parlé d'un dîner dont il était question au paragraphe 1 174,

 10   et ensuite ce dîner qui est évoqué également dans son mémoire en clôture.

 11   Mais qu'est-ce que l'Accusation dit à ce sujet ? J'aimerais donner lecture

 12   d'un passage parce que l'Accusation n'évoque que l'existence d'un dîner,

 13   alors que la pièce 1175 parle de "la décision prise par Mladic et d'autres

 14   membres de l'entreprise criminelle commune de séparer et de tuer les hommes

 15   et jeunes gens musulmans," et que c'est ce sujet qui devait être discuté et

 16   faire l'objet d'une décision au cours de la soirée du 11 juillet, moment où

 17   Mladic a eu connaissance d'un grand --

 18   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, est-ce que je pourrais

 19   vous demander de vérifier si vous avez bien cité le numéro 1 175 --

 20   M. IVETIC : [interprétation] C'est exact, Monsieur le Président. Je parle

 21   du paragraphe numéro 1 175 du mémoire en clôture de l'Accusation.

 22   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie.

 23   M. IVETIC : [interprétation] Donc, la soirée du 11 juillet, date à laquelle

 24   Mladic a eu connaissance du fait que les hommes musulmans de Potocari

 25   tomberaient bientôt sous le contrôle de la RS. Et il parle aussi de la

 26   troisième réunion à l'hôtel Fontana à 10 heures le 12 juillet, où il a été

 27   annoncé qu'il y aurait inspection des hommes musulmans de Potocari.

 28   Donc, encore une fois, l'Accusation vous présente toute une série


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  1   d'éléments et déclare qu'il y a dû y avoir une réunion et que l'on doit

  2   convenir qu'il s'agissait d'un crime avant même qu'il y ait eu inspection

  3   et séparation, alors que c'est là que réside le lien avec un quelconque

  4   crime. M. Tieger a dit cela aujourd'hui également.

  5   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, nous avons entendu une

  6   déposition en l'espèce, celle du colonel Pieter Boering, un officier

  7   néerlandais, donc pas un Serbe, et voici ce qu'il dit au sujet de la

  8   détection. Page 10 080 du compte rendu d'audience :

  9   "Question : Conviendrez-vous avez moi que selon les règlements militaires,

 10   il est entièrement légitime lorsqu'on a des prisonniers de guerre de

 11   procéder une sélection, de faire un tri et de vérifier si tel ou tels

 12   groupes de personnes contiennent des personnes qui pourraient être

 13   suspectes d'avoir commis des crimes de guerre ?

 14   "Réponse : Oui, cela semble une procédure standard lorsqu'il s'agit

 15   d'interroger les prisonniers de guerre."

 16   Donc, Monsieur le Président, Messieurs les Juges, vous ne pouvez pas

 17   considérer une annonce de plan visant à procéder à un tri comme la preuve

 18   d'une intention de commettre des actes criminels, parce que le témoin de

 19   l'Accusation vous a dit qu'il s'agissait d'une procédure opérationnelle

 20   standard dans toute conduite militaire.

 21   Et continuons avec ce paragraphe 1 175 du mémoire en clôture de

 22   l'Accusation, parce que cette rencontre mystérieuse dont l'Accusation parle

 23   aurait eu lieu durant un dîner. Or, l'Accusation n'est même pas sûre que ce

 24   dîner ait eu lieu. Elle dit qu'il a dû avoir lieu le 12. Mais qui est-ce

 25   qui peut dîner le matin du 12 ? Non, tout cela, c'est une invention de la

 26   part de l'Accusation.

 27   Continuons à examiner ce paragraphe 1 175.

 28   M. LE JUGE ORIE : [aucune interprétation]


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  1   M. IVETIC : [interprétation] En décidant de tuer les hommes en âge de

  2   porter les armes de Potocari, Mladic aurait consulté Krstic ainsi que ses

  3   officiers chargés du renseignement et de la sécurité qui étaient présentés

  4   à Bratunac. Vous avez cela en note en bas de page 5 077 du mémoire en

  5   clôture de l'Accusation, qui est le seul élément porté à l'appui de la

  6   déposition du général Milovanovic, ainsi que plusieurs citations tirées du

  7   compte rendu d'audience. Je répète : aucune de ces citations n'indique ce

  8   que prétend l'Accusation, à savoir que c'est cet élément qui est au cœur de

  9   la thèse de l'Accusation. Elle n'a pas apporté d'élément de preuve pour

 10   étayer cette thèse. Et poursuivons notre travail d'examen des citations.

 11   La première, c'est la page 16 937 du compte rendu d'audience. Que dit

 12   le général Milovanovic dans cette page ? Il dit qu'à aucun moment Mladic ne

 13   tenait des réunions régulières lorsqu'il était à l'état-major principal.

 14   Est-ce que ceci constitue la preuve d'un crime ? Non. Est-ce que Mladic se

 15   trouvait à l'état-major principal entre les 11 et 12 juillet ? Non. Cette

 16   référence n'a rien à voir avec la citation qui a été faite par

 17   l'Accusation.

 18   Autre référence, à la page 16 946 à 947 du compte rendu d'audience.

 19   Dans ce passage, Milovanovic explique qu'en son absence ou en l'absence de

 20   Mladic, le chef de secteur le plus haut gradé devient responsable d'une

 21   réunion et, donc, préside la réunion en question. Encore une fois, est-ce

 22   que ceci a le moindre rapport avec les allégations de l'Accusation quant

 23   aux réunions de l'hôtel Fontana ? Non.

 24   Référence suivante, nouvelle citation de l'Accusation, pages 16 949 à

 25   16 952 du compte rendu d'audience, où le général Milovanovic explique que

 26   les participants, les ordres du jour, les réunions mensuelles destinées à

 27   rendre compte, et cetera, et cetera, se déroulent dans telle ou telles

 28   circonstances. Il ne parle pas de l'hôtel Fontana. Il ne présente aucun


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  1   élément de preuve probant sur lequel l'Accusation pourrait s'appuyer pour

  2   affirmer qu'il y a eu une réunion, durant un dîner ou en d'autres

  3   circonstances, à laquelle auraient participé un certain nombre de personnes

  4   dans le but de créer une entreprise criminelle commune.

  5   La dernière citation faite par l'Accusation, pages 16 955 à 16 957 du

  6   compte rendu, c'est à cet endroit que Milovanovic parle de ce qu'il est

  7   convenu d'appeler les réunions collégiales des commandants et de la façon

  8   dont les décisions étaient prises pendant ces réunions collégiales. Encore

  9   une fois, rien à voir avec l'hôtel Fontana. Rien à voir avec ce dîner

 10   présumé que l'Accusation ne peut pas situer dans le temps et dont elle

 11   parle uniquement sur base d'imagination. Regardez le mémoire en clôture de

 12   l'Accusation. Elle ne présente aucun élément de preuve d'une quelconque

 13   activité illégale qui aurait été discutée ou qui aurait fait l'objet d'une

 14   décision liée au général Mladic avec un rapport quelconque avec une

 15   entreprise criminelle commune présumée à Srebrenica en vue d'élimination.

 16   Il n'y a rien de tout cela. Et est-ce qu'on arrive ainsi tout en haut de la

 17   pyramide et est-ce que tout cela permet de supprimer tout doute raisonnable

 18   ? Non. La thèse de l'Accusation fourmille de doutes.

 19   Quant à l'ordre concernant le carburant, ce que l'Accusation ignore

 20   et laisse de côté, c'est ce dont nous avons parlé en détail aux paragraphes

 21   3 293 à -- excusez-moi, au paragraphe 3 302 de notre mémoire en clôture,

 22   qui cite le document P1500 provenant du département chargé des opérations

 23   et qui a un rapport avec le témoignage d'autres témoins où il est question

 24   du fait que d'autres personnes pouvaient signer à la place du général et

 25   que les initiales SR ne signifiaient pas que la personne en question avait

 26   connaissance du document ou qu'elle l'avait signé. Je renvoie les Juges à

 27   la déposition du Témoin Stevanovic en page 35 250 du compte rendu. C'était

 28   l'officier chargé des transmissions au sein de l'état-major principal, donc


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  1   il devait être au courant. Il a souligné que les personnes qui pouvaient

  2   utiliser la signature de l'accusé afin d'obtenir l'exécution d'un ordre

  3   pouvaient le faire même si l'accusé n'était pas au courant de cela. Page

  4   35 266 du compte rendu.

  5   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Maître Ivetic, je sais que vous n'avez

  6   l'aide de personne qui pourrait vous indiquer quelle est l'heure. Mais est-

  7   ce que vous pourriez nous dire où vous en êtes du point de vue du temps ?

  8   M. IVETIC : [interprétation] J'ai besoin encore de sept à dix minutes,

  9   Monsieur le Président.

 10   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Sept à dix minutes. Eh bien, accordez-

 11   moi un instant, je vais consulter mes collègues.

 12   [La Chambre de première instance se concerte]

 13   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Bien. Veuillez procéder.

 14   [Le conseil de la Défense se concerte]

 15   M. IVETIC : [interprétation] M. Stevanovic affirme que certaines personnes

 16   pouvaient signer à la place de l'accusé au bas d'un ordre. Ceci figure donc

 17   en page 35 266 du compte rendu d'audience, déposition Stevanovic.

 18   Et nous disposons d'autres documents qui ont été versés au dossier et

 19   qui prouvent à quel endroit se trouvait Mladic dans la période où il

 20   n'était pas en mesure de se trouver à l'état-major principal.

 21   Nous avons la pièce P364, pièce de l'Accusation, qui indique que M.

 22   Mladic a rencontré une délégation américaine à Dobanovci. Je répète, c'est

 23   un document versé au dossier. Et il est à Belgrade aussi le 13 septembre

 24   1995, c'est-à-dire la veille de l'ordre en question, à 18 heures. Nous

 25   avons également à notre disposition un document émis avec la signature SR

 26   au nom du général Mladic, mais avec un autre numéro de celui que l'unité

 27   opérationnelle, qui annonce un accord de cessez-le-feu conclu avec les

 28   Américains. Encore une fois, que fait le général Mladic à ce moment-là ?


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  1   Est-ce qu'il s'occupe d'ordres concernant le carburant ? Est-ce qu'il

  2   s'occupe de la campagne de ratissage de Momir Nikolic ? Non. Il est en

  3   train de tenter de négocier la paix.

  4   Et rappelons également la déposition de Momir Nikolic. Dans sa

  5   déposition, il parle d'opération d'"assainissement", mais pas une seule

  6   fois il ne dit que cette opération a été menée sur ordre du général Mladic.

  7   Il dit que c'était sur l'ordre de l'état-major principal. Alors, pourquoi

  8   est-ce que les choses sont si vagues dans la bouche du témoin si c'est le

  9   général Mladic qui avait donné cet ordre ?

 10   Monsieur le Président, Messieurs les Juges, un doute raisonnable

 11   existe dans tous les aspects de la cause de l'Accusation. Et plutôt que de

 12   nous montrer hyperboliques, je vais simplement vous demander de vous

 13   pencher sur tous les détails du mémoire en clôture qui énumère tous les

 14   aspects de la cause de l'Accusation, et vous verrez que le général Mladic

 15   ne peut pas être tenu pénalement responsable, parce que l'Accusation que

 16   vous avez devant vous ne vous a pas permis d'atteindre le haut de la

 17   pyramide. Elle n'a pas éliminé le doute raisonnable alors que c'était son

 18   travail, son obligation, et elle a tout fait pour éviter de le faire.

 19   Monsieur le Président, je vous remercie du temps que vous avez consacré à

 20   m'écouter, et je vois que nous avons un peu débordé par rapport au temps

 21   qui nous était imparti. Je vous remercie pour votre indulgence, et encore

 22   une fois, j'indique que je n'ai plus d'autres arguments à présenter au nom

 23   du général Mladic.

 24   M. LE JUGE ORIE : [interprétation] Je vous remercie, Maître Ivetic.

 25   Nous sommes donc parvenus à la fin de ce procès qui a duré plusieurs

 26   années. Avant de suspendre sine die, je vais revenir sur un point qui est

 27   clair aux yeux de l'ensemble d'entre vous, je pense, en tout cas je voulais

 28   dire que vous avez participé à un procès qui reposait principalement sur la


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  1   tradition du procès contradictoire dans lequel les parties ont un rôle

  2   important. Et la Chambre tient à dire à quel point elle a apprécié l'aide

  3   que les parties lui ont apporté dans le travail qui est le sien, c'est-à-

  4   dire celui qu'elle va devoir mener à bien maintenant dans le but de rendre

  5   un jugement en l'espèce.

  6   Mais en dehors de ces remerciements que la Chambre adresse aux parties,

  7   j'aimerais également remercier le Greffe et tous les départements du

  8   Greffe, notamment la Section chargée des Victimes et des Témoins, ainsi que

  9   les techniciens qui nous ont apporté leur concours, les responsables de la

 10   sécurité, toutes les personnes relevant du Greffe qui nous ont aidé, y

 11   compris les interprètes, les traducteurs, les sténotypistes, et toutes les

 12   autres personnes qui ont contribué à la bonne conduite de ce procès. La

 13   Chambre exprime sa grande estime pour l'appui fourni par toutes ces

 14   personnes.

 15   Et à présent, la Chambre suspend l'audience sine die.

 16   --- L'audience est levée à 13 heures 07.

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