Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mardi 8 novembre 2005

2 [Audience publique]

3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

5 --- L'audience est ouverte à 9 heures 25.

6 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bonjour à tout le monde. La Chambre

7 doit vous présenter des excuses car nous vous avons fait attendre ce matin.

8 Il y a eu une urgence qui d'ailleurs n'avait rien à voir avec cette

9 affaire-ci et qui a requis, de notre part, notre attention immédiate. Nous

10 nous excusons de vous faire attendre.

11 LE TÉMOIN: WITNESS P-013 [Reprise]

12 [Le témoin répond par l'interprète]

13 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bonjour, Madame P-013. Vous devez être

14 habituée à ce nom maintenant. J'aimerais vous rappeler la déclaration

15 solennelle que vous avez prononcée au début de notre déposition,

16 déclaration qui est toujours valable.

17 Maître Lukic ? Non, je vois Me Bulatovic.

18 M. BULATOVIC : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Président. Je

19 souhaiterais me présenter au témoin. Je suis Me Bulatovic, conseil de M.

20 Sljivancanin.

21 Contre-interrogatoire par M. Bulatovic :

22 Q. [interprétation] Madame, mon confrère vous a déjà expliqué ce qu'il en

23 est en matière de contre-interrogatoire, donc, je ne vais pas vous faire

24 perdre notre temps pour répéter tout cela.

25 Madame, hier nous vous avons entendu dire que votre fils vous avait emmenée

26 à l'hôpital à un moment donné pendant le mois septembre 1991.

27 R. Oui.

28 Q. Vous avez dit qu'à votre connaissance, votre fils connaissait le Dr

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1 Bosanac, la directrice de l'hôpital. Je souhaiterais vous demander, à

2 propos du fait que le Dr Bosanac et votre fils se connaissaient, si vous

3 avez de plus amples renseignements à ce sujet : où s'étaient-ils

4 rencontrés, depuis combien de temps se connaissaient-ils, quel type de

5 relations il s'agissait ?

6 R. Je ne sais pas grand-chose hormis ce que j'ai déjà dit. Je pense qu'il

7 la connaissait ou qu'il avait connu à partir du moment où elle avait été

8 nommée directrice de l'hôpital, il ne la connaissait pas auparavant.

9 Q. Savez-vous comment ils sont rencontrés ?

10 R. Non.

11 Q. Vous avez dit que vous êtes arrivée à l'hôpital à la mi-septembre ou

12 vers la fin du mois de septembre après que votre maison et votre garage ont

13 été détruits, et vous nous avez dit que votre mari était resté. Pouvez-vous

14 nous dire où votre mari est resté et pourquoi est-il resté à cet endroit ?

15 R. Il est resté chez nous dans la cave. Nous avons une petite cave et il

16 n'a pas voulu se déplacer. Il était tout simplement resté chez nous.

17 Q. Etait-il seul dans cette cave ou est-ce qu'il y avait des voisins, par

18 exemple, avec lui ?

19 R. Je pense qu'il était seul dans notre cave, mais après, je ne sais pas

20 où il est allé et je ne sais pas où il a demeuré. Je dirais que, pour

21 l'essentiel, il est resté dans notre quartier. C'est là qu'il a été blessé,

22 et c'est ensuite, à partir de là, qu'il a été emmené à l'hôpital.

23 Q. Lorsque vous parlez de votre quartier, est-ce que vous pourriez nous

24 expliquer ce dont il s'agit ?

25 (expurgé)

26 (expurgé)

27 (expurgé)

28 Q. Quelle est la distance qui sépare votre maison de l'hôpital ?

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1 R. Peut-être deux kilomètres.

2 Q. Vous nous avez dit que votre mari avait été blessé. Est-ce que vous

3 savez dans quelle circonstance il a été blessé, où il a été blessé et

4 comment il a été blessé ?

5 R. Il se trouvait à l'extérieur. Un obus est tombé sur la maison qui se

6 trouvait en face -- de l'autre côté donc de notre maison, en face de la

7 rue, et il a été blessé au cou par un éclat d'obus.

8 Q. A l'époque au moment où il a été blessé, est-ce que votre mari était

9 membre du ZNG ?

10 R. Hier j'avais dit -- j'ai dit que mon mari n'était pas membre du ZNG. Il

11 portait ces vêtements civils. Mon mari était invalide, il a été blessé à

12 l'instar de nombreuses personnes à Vukovar lorsqu'un obus est tombé. Il y

13 avait des éclats d'obus qui éclataient un peu partout. C'est comme cela

14 qu'il a été blessé et c'est comme cela qu'il s'est retrouvé à l'hôpital.

15 Q. Vous nous avez dit que votre mari était invalide. Est-ce que vous

16 pourriez nous dire l'année de naissance de votre mari, et comment il est

17 devenu invalide, et quand également il est devenu invalide ?

18 R. Mon mari est né en 1950. Lorsqu'il était jeune, il est allé travailler

19 en Autriche. Il est tombé d'un bâtiment -- d'un immeuble. A partir de l'âge

20 de 25 ans, il était en invalidité.

21 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, Madame Tuma.

22 Mme TUMA : [interprétation] S'il y a d'autres questions précises qui vont

23 être posées à ce sujet, je souhaiterais vous rappeler les mesures de

24 protection.

25 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci, Madame Tuma. Je ne pense que

26 cela est un problème jusqu'à présent, mais je suis absolument sûr que M.

27 Bulatovic est conscient de ceci.

28 Mme TUMA : [interprétation] Non.

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1 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, je suis sûr que M. Bulatovic est

2 conscient de cela.

3 M. BULATOVIC : [interprétation] Oui, tout à fait, Monsieur le Président. Si

4 je désirais poser une question qui devrait mettre en danger la protection

5 qui a été assurée pour garantir l'identité du témoin, je demanderais à ce

6 que nous passions à huis clos partiel, bien que je ne pense pas que cela

7 soit nécessaire pour le moment.

8 Q. Est-ce que vous pourriez nous dire si vous étiez dans l'hôpital au

9 moment où votre mari y a été amené ?

10 R. J'étais dans l'hôpital, mais je n'étais pas présente au moment où il

11 est arrivé.

12 Q. Comment avez-vous donc appris qu'il avait été emmené à l'hôpital ?

13 R. Quelqu'un est venu me le dire. Quelqu'un est venu me dire qu'il avait

14 été blessé, et après qu'ils ont pensé ces blessures, il était déjà au lit.

15 Je l'ai vu le lendemain allongé, blessé.

16 Q. A quelle heure vous a-t-on appris que votre mari était arrivé à

17 l'hôpital et qu'il avait été blessé ? Vous en souvenez-vous ?

18 R. Je ne me souviens pas de l'heure où cela s'est passé. S'il a été blessé

19 le 31, il se peut que j'ai appris qu'il se trouvait à l'hôpital le

20 lendemain, mais pas avant de toute façon.

21 Q. Donc, il a été blessé le 31 septembre et vous ne l'avez pas vu ce jour-

22 là ?

23 R. Non.

24 Q. Mais vous l'avez vu le lendemain donc. Dans quel service de l'hôpital

25 se trouvait-il ?

26 R. Il n'y avait pas de services hospitaliers. Tout cela se passait au

27 sous-sol. Il y avait des lits même des lits gigognes d'ailleurs parce qu'il

28 y avait très, très peu d'espace. Il y avait un patient qui se trouvait dans

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1 un lit gigogne, donc, au niveau du lit inférieur. Il se trouvait sur le lit

2 supérieur, au-dessus de l'autre patient.

3 Q. Est-ce que cela se passait -- est-ce qu'il s'agissait d'une salle

4 d'hôpital au rez-de-chaussée ou au sous-sol ?

5 R. Cela se passait dans l'abri atomique qui se trouve sous l'hôpital,

6 donc, au sous-sol.

7 Q. Mais savez-vous combien de patients se trouvaient avec lui dans cet

8 abri atomique ?

9 R. Il y avait de nombreux patients. Il y a de nombreux blessés, bon nombre

10 de personnes. Je ne les ai pas comptés. Je ne peux pas vous en donner le

11 chiffre exact, mais ils étaient nombreux. Il y avait des gens qui étaient

12 blessés et qui arrivaient à l'hôpital tous les jours.

13 Q. Savez-vous quel est le médecin qui s'est occupé des blessures de votre

14 mari ?

15 R. Je ne sais pas qui était le médecin qui s'occupait de lui, mais j'ai

16 toujours vu le Dr Ivankovic et le Dr Njavro là. J'en ai vu d'autres de

17 temps à autre, mais ce que j'ai vu le plus souvent c'étaient Ivankovic et

18 Njavro.

19 Q. Donc, vous nous dites qu'il a été blessé le 31 septembre. Entre le

20 décembre et le 20 novembre, est-ce que votre mari s'est levé de son lit ?

21 R. Il pouvait se rendre aux toilettes, mais il se trouvait toujours dans

22 cet endroit où ils étaient toujours au lit, mais il pouvait se déplacer et

23 aller aux toilettes.

24 Q. Au début de votre témoignage, lorsque vous êtes entrée dans le

25 prétoire, vous avez dit que la blessure de votre mari n'était pas très

26 grave. Vous avez dit qu'il était porté disparu et que vous ne savez rien de

27 lui jusqu'à aujourd'hui. Est-ce que cela est exact ?

28 R. J'ai dit que ces blessures étaient légères puisque, six semaines après,

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1 il pouvait se déplacer et lorsqu'ils ont dû sortir, tous ceux qui étaient

2 en état de marcher ont dû sortir eux-mêmes du bâtiment, alors que ceux qui

3 étaient gravement blessés, qui avaient des plâtres, et cetera, n'ont pas pu

4 sortir par eux-mêmes.

5 Q. Lorsque vous mentionnez des plâtres, lorsque vous avez parlé de M.

6 Dosen, si je ne m'abuse, vous avez dit qu'il était plâtré. Est-ce que vous

7 pourriez nous expliquer quelle était la partie de son anatomie qui était

8 plâtrée ?

9 R. C'était toute la jambe à partir de la hanche. Je ne sais pas comment

10 est-ce qu'ils l'ont plâtré. Ce n'est pas moi qui l'ai fait. Je l'ai vu tout

11 simplement, mais je ne peux pas véritablement vous fournir de plus amples

12 détails à ce sujet.

13 Q. Je vous pose cette question parce qu'à ce sujet, je me suis dit que je

14 pourrais peut-être vous poser des questions à propos de votre mari. Lors de

15 son séjour à l'hôpital, est-ce que vous lui avez rendu visite ? Est-ce que

16 vous lui avez parlé ?

17 R. Oui.

18 Q. Est-ce qu'il a des séquelles à la suite de sa blessure au cou ? Un

19 petit moment, je vous prie. Par exemple, est-ce qu'il a eu un problème

20 d'élocutions ou est-ce qu'il a eu des difficultés à bouger le cou ou

21 d'autres séquelles ?

22 R. Non. Il disait, en fait, qu'il avait la tête qui tournait.

23 Q. Je n'ai pas entendu votre réponse. Donc, je vais vous reposer la

24 question. Est-ce que votre mari a été trouvé ?

25 R. Non. Il n'a toujours pas été retrouvé jusqu'à aujourd'hui.

26 Q. Merci. Une autre question à propos de votre mari pour mettre un terme à

27 cela. Savez-vous qui a emmené votre mari à l'hôpital et savez-vous comment

28 cela s'est fait ?

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1 R. Il m'a dit qu'un homme est passé en voiture lorsqu'il se trouvait là-

2 bas. Il l'a placé dans sa petite voiture et l'a emmené à l'hôpital.

3 (expurgé)

4 (expurgé)

5 je n'y ai pas fait référence à ce que vous faisiez et ce pour des raisons

6 évidentes. Donc, ce que j'aimerais savoir c'est où se trouvait cette

7 cuisine ? Est-ce qu'elle se trouvait à l'intérieur de l'hôpital ? Est-ce

8 qu'elle se trouvait à l'extérieur de l'hôpital ? Ou est-ce que se trouvait

9 dans un endroit bien précis de l'hôpital ?

10 R. C'était une cuisine de fortune, une cuisine improvisée. Ce n'était pas

11 vraiment une cuisine comme on en trouve dans les hôpitaux. Cela avait

12 d'ailleurs fait l'objet de beaucoup de pilonnages. Donc, c'était juste une

13 pièce que l'on utilisait. En fait, auparavant, c'était le service d'oto-

14 rhino-laryngologiste, dans l'ancien bâtiment et c'est là que nous

15 préparions les repas des patients et des blessés.

16 Q. Donc, la cuisine se trouvait dans l'ancien bâtiment de l'hôpital,

17 n'est-ce pas ?

18 R. Oui.

19 Q. Est-ce que l'ancien bâtiment et le nouveau bâtiment étaient reliés ?

20 Est-ce qu'il y avait peut-être un couloir souterrain qui les reliait ou

21 est-ce que les gens devaient, pour se rendre d'un bâtiment à un autre,

22 traversés un espace ouvert ?

23 R. Il y avait un couloir sous terrain que les gens empruntaient pour

24 passer d'un immeuble à un autre.

25 (expurgé)

26 (expurgé)

27 (expurgé)

28 (expurgé)

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1 (expurgé)

2 (expurgé)

3 R. A côté de la cuisine, il y avait une salle, une pièce où dormiront --

4 en fait, les vivres étaient amenés par d'autres personnes, donc, ils

5 étaient amenés par ce couloir dans cette pièce, ce n'était pas la peine de

6 se déplacer.

7 Q. Lorsque vous dites que ces vivres étaient amenés par d'autres

8 personnes, est-ce que vous entendez par cela que ces vivres étaient amenés

9 dans l'ancien bâtiment de l'hôpital ou dans le nouveau bâtiment ?

10 R. Ils ne devaient amener cela où se trouvait la cuisine, donc, c'est ce

11 qu'ils faisaient. Il s'agissait -- il y avait tout un personnel qui amenait

12 les pommes de terre, le pain, l'eau. Tout cela était apporté dans cette

13 salle que nous avions en quelque sorte transformée en cuisine de fortune

14 Q. Est-ce qu'il y avait des patients dans l'ancien hôpital, si je puis me

15 permettre de l'appeler ainsi ?

16 R. Il y avait des malades et des blessés un peu partout. Cela était

17 valable également dans le bâtiment que vous venez de mentionner.

18 Q. Savez-vous qui s'occupait de ces blessés, et ce jusqu'à quand ? Là, je

19 fais référence maintenant au bâtiment à l'ancien bâtiment de l'hôpital.

20 R. Tous les médecins qui se trouvaient à l'hôpital, les infirmières, les

21 médecins, il y en avait un certain nombre. Il y a certaines personnes qui

22 sont décédées, d'autres qui n'ont jamais véritablement récupéré, puis, il y

23 a des personnes qui sont restées là jusqu'à la chute de Vukovar. Certaines

24 personnes sont peut-être restées d'ailleurs même après la chute, je n'en

25 sais rien.

26 Q. Donc, jusqu'à jusqu'au 18 novembre, il y avait encore des blessés

27 alités dans l'ancien hôpital, ainsi que des malades, n'est-ce pas ?

28 R. Oui, il y avait des personnes blessées dans l'hôpital et ce jusqu'au

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1 18, c'est exact.

2 M. BULATOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Messieurs

3 les Juges, je souhaiterais montrer au témoin une photographie, qui vient du

4 jeu de pièces à conviction de l'Accusation. Il s'agit de la liste au titre

5 de l'Article 65 ter. Le numéro -- donc, document 224, numéro ERN 453-1257,

6 photographie numéro 3.

7 Monsieur le Président, je dirais pour ce qui du compte rendu

8 d'audience, page 9, ligne 2, que la question que j'avais posée était comme

9 suit : "Est-ce qu'il y avait des malades dans l'ancien hôpital ?" Je vois

10 que la réponse est : "Dans l'hôpital," par opposition au "dans le vieil

11 hôpital." Je pense que cela doit être précisé.

12 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je pense que le témoin a voulu

13 indiquer qu'il y avait des gens partout. Ce qui est important, c'est qu'en

14 fait, elle a indiqué qu'il y avait des personnes, notamment dans l'ancien

15 bâtiment. Je veux savoir si cela répond à votre question d'une façon ou

16 d'une autre.

17 M. BULATOVIC : [interprétation] Je vous remercie.

18 Q. Est-ce que vous voyez maintenant cette photographie sur l'écran qui se

19 trouve en face de vous ?

20 R. Oui.

21 Q. Est-ce que vous reconnaissez ce bâtiment ? Nous en avons parlé hier,

22 donc, je ne voudrais surtout pas perdre trop de temps à ce sujet. Mais,

23 est-ce qu'il s'agit du bâtiment de l'hôpital ?

24 Notre consœur du bureau du Procureur nous a dit que c'était une photo qui

25 avait été prise en 1997, si je ne m'abuse. Ce qui signifie que ce n'est

26 certainement pas ou cela ne correspond pas à l'apparence que l'hôpital

27 avait à l'époque auparavant.

28 Mais est-ce que vous reconnaissez ce bâtiment comme étant un bâtiment

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1 semblable, à celui où vous vous trouviez lors de la période dont nous

2 parlons ?

3 R. Oui, mais il s'agit du nouveau bâtiment de l'hôpital.

4 Q. Très bien. Est-ce que vous pourriez nous indiquer sur cette

5 photographie, plus ou moins, où se trouvait l'ancien bâtiment de

6 l'hôpital ? Alors, est-ce que cela fonctionne d'abord ?

7 R. Je ne peux pas vous montrer ce que vous m'avez demandé de vous montrer

8 sur cette photographie car, en fait, il s'agit de la partie intérieure de

9 l'hôpital - la façade intérieure - alors que le vieux bâtiment se trouvait

10 à gauche de l'entrée principale. Je ne le vois pas sur cette photographie,

11 donc, je ne suis pas tellement sûre de l'angle ou de la prise de vue de la

12 photographie, donc, je ne peux pas vous montrer où se cela se trouve.

13 Q. Est-ce que vous pourriez peut-être nous indiquer, sur cette

14 photographie, où se trouvait l'entrée principale ? Est-ce que vous pourriez

15 peut-être nous l'indiquer sur l'écran, je vous prie.

16 R. Non. Je ne peux pas le faire sur cette photographie. Il y a des marches

17 qui amènent les gens à l'entrée principale. Cela je ne le vois pas sur

18 cette photographie. En fait, d'après ce que je comprends, cela devrait se

19 trouver de l'autre côté de l'hôpital.

20 M. BULATOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Messieurs

21 les Juges, est-ce que nous pourrions montrer la photographie numéro 2, qui

22 appartient au même jeu de documents ? Peut-être que cela facilitera les

23 choses pour ce témoin.

24 Q. Est-ce que vous le voyez ? Est-ce que vous voyez cette photographie sur

25 l'écran, maintenant ?

26 R. Non.

27 Q. Voyez-vous la nouvelle photographie maintenant sur l'écran ?

28 R. Oui.

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1 Q. Est-ce que vous pouvez voir l'entrée principale sur cette

2 photographie ?

3 R. Oui.

4 M. BULATOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Messieurs

5 les Juges, je ne sais pas si la technique fonctionne parce que je

6 souhaiterais que le témoin nous indique certains endroits. Si cela

7 fonctionne, je souhaiterais dans un premier temps que l'on appose en haut

8 de la photographie le chiffre romain IV.

9 LE TÉMOIN : [interprétation] Est-ce que je suis censée le faire ?

10 M. BULATOVIC : [interprétation]

11 Q. Oui. Est-ce que vous pouvez apposer ce chiffre en haut de la

12 photographie ?

13 R. [Le témoin s'exécute]

14 Q. Merci. Pourriez-vous nous montrer à l'aide de ce chiffre 1 l'entrée

15 principale de l'hôpital ?

16 R. [Le témoin s'exécute]

17 Q. Est-ce que vous pourriez peut-être maintenant faire un cercle autour de

18 ce chiffre numéro 1 ?

19 R. [Le témoin s'exécute]

20 Q. Pourriez-vous, je vous prie, indiquer à l'aide d'une flèche la

21 direction de l'ancien bâtiment de l'hôpital ?

22 R. [Le témoin s'exécute]

23 Q. Est-ce que vous pourriez peut-être mettre le chiffre arabe numéro 2 au-

24 dessus de cette flèche, et je vous demanderais de faire un cercle autour de

25 ce chiffre numéro 2 ?

26 R. [Le témoin s'exécute]

27 Q. Non, non, je voudrais que vous écriviez cela en chiffre arabe 2.

28 R. En chiffre arabe ? Je ne sais pas ce que vous entendez. Vous voulez

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1 parler du chiffre numéro 2, tout simplement ?

2 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui. Je répondrais par l'affirmative à

3 cette question.

4 M. BULATOVIC : [interprétation]

5 Q. Pourriez-vous, je vous prie, nous indiquer où se trouvent d'autres

6 entrées de l'hôpital, si vous en voyez sur cette photographie ? Est-ce que

7 vous pourriez également nous expliquer de quel type d'entrée il s'agit ?

8 R. Voici l'entrée principale, l'entrée que je viens juste d'indiquer et je

9 suis sur le point de vous indiquer la sortie que nous empruntions pour

10 sortir du bâtiment.

11 Q. Est-ce que vous pourriez, je vous prie, mettre le chiffre numéro 3 et

12 entourer ce chiffre 3 d'un cercle ?

13 R. [Le témoin s'exécute]

14 Q. Cette flèche qui se trouve dans le coin droit inférieur, qu'est-ce

15 qu'elle montre ?

16 R. C'est la sortie. Il s'agit d'une porte qui se trouvait près de ce hall

17 et, en fait, c'est par là que vous sortiez de l'hôpital. C'est une sortie

18 secondaire et elle vous amenait dans la cour de l'hôpital.

19 Q. Je pense et je crains, Madame, que nous nous ne sommes pas compris car,

20 sur ma photographie, j'ai une flèche qui se trouve dans le coin inférieur

21 droit. Est-ce que c'est vous qui avez apposé cette flèche et qu'est-ce

22 qu'elle signifie ?

23 R. Vous m'avez demandé où se trouvait l'ancien bâtiment de l'hôpital. Il

24 se trouvait sur la gauche, à la gauche de l'entrée principale du bâtiment

25 principal, donc à la gauche, il y avait avant l'ancien bâtiment de

26 l'hôpital.

27 Q. Je le comprends. C'est là que vous avez apposé le chiffre numéro 2, au-

28 dessus de cette flèche ?

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1 R. Oui.

2 Q. Juste en dessous de cela, il y a une flèche sur mon écran, une flèche

3 qui se trouve dans le coin inférieur gauche de la photographie. J'aimerais

4 savoir à quoi cela correspond ?

5 R. Il s'agit de l'entrée principale qui débouche sur la cour de l'hôpital.

6 Q. Est-ce que vous pourriez apposer le chiffre numéro 4 auprès de cette

7 entrée et l'entourer d'un cercle ?

8 R. [Le témoin s'exécute]

9 Q. Dans ce bâtiment avec l'entrée que vous venez de nous montrer par le

10 chiffre numéro 4, à quoi cela correspondait ?

11 R. C'était la réception, ou plutôt, c'était la salle des urgences. Je

12 pense que la salle des urgences se trouvait de ce côté-là.

13 Q. Ensuite de ces deux entrées à l'hôpital que vous venez de nous montrer,

14 est-ce qu'il y avait d'autres entrées à l'hôpital ? Le cas échéant, est-ce

15 que vous pourriez nous les montrer ?

16 R. J'ai mis le chiffre numéro 3 sur la photographie. En temps de paix, il

17 s'agissait d'un service de l'hôpital où l'on emmenait les blessés, les

18 malades. C'était la salle d'urgence. C'est là que l'ambulance les déposait.

19 C'était la salle chirurgicale.

20 Q. Est-ce que cela signifie qu'en sus des deux entrées que vous nous avez

21 indiquées à l'aide du chiffre numéro 1 et du numéro 3, il n'y avait pas

22 d'autre entrée pour le bâtiment de l'hôpital ?

23 R. Je n'en sais rien.

24 Q. Ici, vous avez parlé des insignes de la croix rouge qui marquaient

25 l'endroit où se trouvait l'hôpital. Quelque chose n'a pas été tout à fait

26 clair pour moi, même si mes collègues vous ont posé des questions, à

27 savoir, où se trouvaient ces insignes ? Avant cela, je souhaite vous poser

28 une autre question : vous voyez sur cette photographie l'hôpital tel qu'il

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1 existait en 1997. Est-ce que vous vous souvenez si le toit de l'hôpital, et

2 là, je parle du nouveau bâtiment, même avant le conflit armé à Vukovar en

3 1991, ressemblait à cela ?

4 R. Je pense que non.

5 Q. D'après vos souvenirs, est-ce que vous pouvez me décrire dans la

6 manière du possible à quoi elle ressemblait, la couleur et tout le reste ?

7 R. Non. Malheureusement, lorsque j'allais à l'hôpital, je n'observais pas

8 le toit. Si jamais j'étais malade, j'y allais sans regarder. Par

9 conséquent, je ne peux pas vous décrire à quoi ressemblait le toit.

10 Q. Vous avez dit que vous alliez à l'hôpital si vous étiez malade. Je vais

11 vous poser la question suivante : est-ce qu'au cours de l'année 1991 ou

12 1990, vous avez suivi un traitement à l'hôpital ? Si oui, pourquoi ?

13 R. En 1989, j'ai été opérée à l'hôpital de Vukovar. J'avais une

14 inflammation de l'estomac.

15 Q. Nous allons reparler des insignes marquant la croix rouge. Vous avez

16 dit qu'il y avait le drapeau de la Croix Rouge sur l'ancien bâtiment de

17 l'hôpital ?

18 R. Sur l'ancien bâtiment de l'hôpital. Je n'aurais probablement même pas

19 regardé cela non plus, mais lorsque je venais à l'hôpital, je voyais cela

20 au moment de l'entrée à l'hôpital, lorsque mon fils m'y emmenait, dans la

21 première partie de l'hôpital immédiatement à côté de la rue, il y avait un

22 grand morceau de tissu, un drapeau avec les insignes de la Croix Rouge.

23 Q. Est-ce que vous pouvez me dire quelle était la taille de ce drapeau et

24 où il était ?

25 R. Il était assez grand et il était situé sur le toit.

26 Q. Vous avez parlé de deux signes de la croix rouge qui étaient dans la

27 cour. Est-ce que sur cette photo qui est toujours à l'écran devant vous,

28 vous pouvez nous dire à quel endroit dans la cour se trouvaient ces deux

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1 signes ?

2 R. Ici, maintenant, nous voyons un arbre, mais c'était à peu près ici,

3 entre ces deux bâtiments.

4 Q. Est-ce que vous pouvez marquer cela et apporter le chiffre 5, s'il vous

5 plaît ?

6 R. [Le témoin s'exécute]

7 Q. Est-ce que les deux insignes y étaient ? Si oui, à quelle distance l'un

8 par rapport à l'autre ?

9 R. Je ne sais pas quelle était la distance, mais ils étaient loin l'un de

10 l'autre.

11 Q. Où était le deuxième ? Est-ce que vous pouvez nous l'inscrire, si

12 possible, sur cette photo et le marquer avec le chiffre 6 ?

13 R. [Le témoin s'exécute]

14 Q. Dans la déclaration que vous avez fournie le 18 juin 1995, vous avez

15 mentionné, c'est ce que vous avez dit ici aussi, qu'il n'y avait pas d'eau

16 dans l'hôpital. Alors qu'à l'époque vous avez dit que vous deviez aller au

17 puits qui était en face de l'hôpital pour chercher de l'eau. Est-ce que sur

18 cette photographie vous pouvez montrer l'endroit où se trouvait le puits

19 dont vous preniez de l'eau et qui se trouvait en face de l'hôpital. Si oui,

20 marquez le avec le chiffre 7.

21 R. Non, je ne peux pas, parce que c'était près d'une maison un peu plus

22 loin vers la ville, vers le centre de ville.

23 Q. A quelle distance de l'hôpital ?

24 R. Je ne sais pas; 200 mètres peut-être. Je ne suis pas sûre.

25 Q. Vous étiez à l'hôpital depuis la mi-septembre ou fin septembre jusqu'au

26 20 novembre 1991. Dans votre déclaration, là je fais référence de nouveau à

27 la déclaration que vous avez fournie le 18 juillet 1995, que les pompiers

28 vous fournissaient de l'eau. Puis, ici, hier, vous avez dit que tous ceux

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1 qui étaient sortis de l'hôpital avaient été tués. Puis, vous avez dit

2 aussi, qu'il y avait des soupçons au sujet de certaines personnes à

3 l'hôpital qui auraient donné certaines informations aux gens de

4 l'extérieur. Vous avez dit que les rumeurs circulaient. Ce qui m'intéresse

5 est de savoir qui faisait circuler ces rumeurs, et veuillez me citer au

6 moins une personne qui était à l'hôpital de Vukovar et qui vous a parlé de

7 telles rumeurs ?

8 R. Les pompiers se faisaient tuer effectivement lorsqu'ils allaient

9 chercher de l'eau. Comme je l'ai déclaré, je le déclare de nouveau, on

10 disait qu'à l'intérieur de l'hôpital il y avait certaines personnes qui

11 fournissaient des informations au sujet de la question de savoir quand cela

12 allait chercher de l'eau. Justement à ce moment-là, les obus tombaient.

13 Mais, je ne connais pas plus de détails à ce sujet. Je ne peux pas vous

14 dire ce que je ne sais pas. Là, il s'agit de ce dont j'ai entendu parler.

15 Q. Vous avez passé beaucoup de temps à l'hôpital. Lorsque vous êtes venue

16 à l'hôpital, est-ce que vous connaissiez beaucoup de personnes qui étaient

17 déjà là ?

18 R. Je ne connaissais très peu de personnes. Je connaissais une femme qui

19 travaillait dans la cuisine, une femme que je connaissais d'avant. Pour le

20 reste, très peu. Quant à ceux que j'ai rencontrés là-bas, je les

21 connaissais pendant trop peu de temps pour pouvoir me rappeler encore

22 aujourd'hui de leurs prénoms et de leurs noms.

23 Q. Veuillez me dire, s'il vous plaît, comment est-ce que les rumeurs

24 circulent, si les gens ne se fréquentent pas et ne se connaissent pas ?

25 Comment est-ce que vous avez entendu les rumeurs concernant ce qui se

26 passait concernant les informations envoyées à ceux qui étaient à

27 l'extérieur ?

28 R. Comme je vous l'ai dit, j'ai passé la plupart du temps dans cette

Page 1279

1 pièce, puis les gens parlaient, lorsqu'ils disaient celui-ci faisait ceci

2 ou cela. Vous savez, mes oreilles n'étaient pas bouchées. J'entendais ce

3 que les gens disaient.

4 Q. Vous avez dit que les gens disaient qu'un poste de radio était utilisé

5 afin d'envoyer des informations. Est-ce qu'à un moment-là donné vous avez

6 vu les personnes blessées ou quelqu'un d'autre utilisé soit un poste de

7 radio soit un autre moyen de communication ?

8 R. Non. Moi, non.

9 Q. Vous dites que les gens disaient que le Dr Ivankovic possédait un poste

10 de radio ?

11 R. C'est ce que les gens disaient. Mais je n'ai pas vu cela, donc, je ne

12 peux pas le confirmer.

13 Q. Vous avez dit qu'un soldat blessé croate voulait tuer le

14 Dr Ivankovic, mais que le Dr Njavro l'a empêché de le faire. Ce qui

15 m'intéresse est comment il souhaitait le tuer. Comment le savez-vous et

16 comment le Dr Njavro l'a empêché dans ce dessein ?

17 R. Il est venu rendre visite à quelqu'un, une personne qu'il connaissait

18 et qui était blessée. Je passais juste à ce moment-là, donc, par hasard,

19 j'ai entendu cela. Il a commencé à crier sur le

20 Dr Ivankovic : "Toi, Serbe, qu'est-ce que tu fais ici ?" C'était à peu près

21 cela. Vous savez, je ne peux pas le dire en mot à mot, parce qu'avant ce

22 moment-là je ne savais même pas que le Dr Ivankovic était serbe. Il

23 commençait à l'agresser. Le Dr Njavro était là. Il a pris le soldat à part,

24 puis après je n'ai pas vu la suite. Bien sûr, je ne me suis pas arrêtée. Je

25 passais simplement.

26 Q. Vous dites que le Dr Njavro a pris le soldat à part, ce qui veut dire

27 que celui-là, celui qui est venu rendre visite à quelqu'un portait un

28 uniforme ?

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1 R. Oui, le plus probablement, il portait un uniforme.

2 Q. Était-il armé ?

3 R. Cela, je ne l'ai pas vu.

4 Q. Ce qui m'intéresse maintenant, l'on a parlé de votre travail là-bas, de

5 l'endroit où vous occupiez de vos activités. Voici ce qui m'intéresse : sur

6 la base de votre travail et des données dont vous disposiez, est-ce que

7 vous sauriez nous dire combien de repas étaient préparés quotidiennement à

8 l'hôpital ?

9 R. Beaucoup de repas étaient préparés. En ce qui concerne les quantités,

10 je peux vous dire qu'il s'agissait de deux chaudrons énormes. Ce qui ne

11 permettait pas à chacun des patients de manger à sa faim. On donnait des

12 portions très petites, pour permettre aux gens de survivre. Il n'y avait

13 pas suffisamment de nourriture. Donc en ce qui concerne la quantité, nous

14 ne pouvions pas préparer beaucoup.

15 Q. Y avait-il un réfectoire dans l'hôpital ? Comment est-ce que les gens

16 mangeaient les repas qui étaient préparés à l'hôpital ?

17 R. On leur distribuait la nourriture là où ils étaient allongés. S'il

18 s'agissait des soupes, on avait des espèces de bol, mais il n'y avait pas

19 de réfectoire. On ne pouvait pas organiser tout cela. Les locaux étaient

20 petits et il y avait beaucoup de personnes.

21 Q. Est-ce que les membres du personnel de l'hôpital, les infirmières, les

22 médecins, le personnel, mangeaient de la même manière ?

23 R. Rien n'était différent pour eux. Ils recevaient le même traitement.

24 Peut-être qu'il n'y avait pas suffisamment de nourriture.

25 Q. Est-ce que vous savez qui était la personne qui distribuait ou qui

26 apportait la nourriture au directeur de l'hôpital, Dr Bosanac ?

27 R. Je ne sais pas.

28 Q. Est-ce que parfois c'était vous par hasard ?

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1 R. Jamais.

2 Q. Est-ce qu'à un moment donné, à quelques moments que ce soit ou quelques

3 raisons que ce soit, vous vous êtes retrouvée dans la pièce, dans le bureau

4 du Dr Bosanac ?

5 R. Non, jamais.

6 Q. Est-ce qu'à un moment donné pendant votre séjour à l'hôpital, vous avez

7 parlé avec elle, compte tenu du fait que vous étiez venu à l'hôpital suite

8 à la recommandation de votre fils ?

9 R. Je n'ai jamais parlé avec elle.

10 Q. Je vais vous demander si vous savez si les lignes téléphoniques

11 existaient et fonctionnaient à l'hôpital; si oui, où se trouvait le

12 téléphone ?

13 R. Je ne l'ai pas vu et je ne sais pas si un téléphone existait. C'était

14 certainement dans le bureau du directeur de l'hôpital, mais je ne sais pas.

15 Q. Nous avons entendu de la part de vous que vous vous auriez entendue

16 dire de la part de quelqu'un d'autre et ceci est mentionné dans votre

17 déclaration, mais nous y reviendrons. L'histoire concernant ce soldat,

18 Sasa, qui vous a dit que ce soldat, Sasa, avait appelé le général Raseta et

19 vous a décrit sa conversation avec lui. Ce qui m'intéresse c'est de savoir

20 quand et comment vous avez appris qu'un soldat au prénom de Sasa était à

21 l'hôpital ?

22 R. Je l'ai appris tout comme on apprenait tout dans cet hôpital. En ces

23 journées, il y avait de personnes qui se déplaçaient plus à travers

24 l'hôpital. Ils venaient dans la cuisine là où on était et on parlait. Vous

25 savez, il faut bien parler. Entre autres choses, j'ai entendu dire, comme

26 je l'ai déjà dit, qu'un soldat serbe y était alité et que l'un des

27 responsables de l'hôpital lui avait dit d'appeler le général Raseta pour

28 que celui, en tant que soldat serbe, fasse appel au général Raseta pour que

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1 l'hôpital ne soit pas pilonné. C'est ce que j'ai entendu dire et c'est ce

2 que je vous relate ici.

3 Q. Avez-vous jamais vu ce soldat, Sasa ?

4 R. Je ne suis pas allée observer ce soldat.

5 Q. Avez-vous entendu dire s'il s'agissait d'un soldat de la JNA ou d'un

6 Chetnik ?

7 R. J'ai entendu dire qu'il s'agissait d'un soldat régulier de l'armée

8 populaire yougoslave, de la JNA.

9 Q. Est-ce que vous avez entendu dire de quelle manière ce soldat avait été

10 blessé et de quelle manière il avait été amené à l'hôpital ?

11 R. Je n'ai pas entendu parler de cela.

12 Q. Avez-vous entendu dire par hasard s'il y avait d'autres soldats de la

13 JNA qui avaient été amenés avec ce soldat, Sasa ?

14 R. Cela non plus je n'en ai pas entendu parler.

15 Q. Avez-vous entendu dire ou était logé ce soldat -- hébergé ?

16 R. Les gens disaient qu'il avait sa propre chambre.

17 Q. Quelle est cette information selon laquelle il avait sa propre

18 chambre ? Faisait-elle l'objet de vos commentaires échangés avec qui ce

19 soit, quant à savoir pourquoi il disposait de sa propre chambre ?

20 R. Je n'ai pas entendu un tel commentaire.

21 Q. Par rapport au temps où vous êtes venue à l'hôpital, à quel moment

22 avez-vous entendu cette information concernant cette conversation avec

23 Raseta ? Est-ce que vous pouvez le déterminer ? Est-ce que c'était deux

24 jours au cours de votre arrivée à l'hôpital ou 20 jours plus tard ou un

25 mois plus tard ?

26 R. Je ne sais pas exactement, mais j'étais certainement à l'hôpital depuis

27 un mois déjà. C'était quelque part à un moment donné au mois d'octobre,

28 mais je ne sais pas exactement quand.

Page 1283

1 Q. Vous dites qu'à l'hôpital, vous avez entendu dire que l'un des

2 responsables de l'hôpital avait demandé que le soldat, Sasa, parle avec le

3 général Raseta. Lors de vos entretiens avec ceux qui vous avaient relaté

4 cette information, est-ce qu'ils vous ont dit aussi qui était le général

5 Raseta, ce qu'il faisait, où il était et pour quelle raison proposait-on

6 que ce soldat l'appelle ? Quelle était son importance en raison de laquelle

7 il fallait que ce soldat l'appelle ?

8 R. Je n'ai pas entendu parler de cela. Nous n'avons pas parlé de la

9 question de savoir quelles étaient les fonctions exercées par ce M. Raseta.

10 Q. Est-ce qu'à un moment donné lors de votre séjour à l'hôpital, vous avez

11 entendu dire que le nom du général Raseta était mentionné au sujet d'autres

12 choses mis à part cette conversation avec le soldat ?

13 R. Non.

14 Q. Vous parlez souvent dans votre déposition et aussi dans la déclaration

15 que vous avez fournie. Vous utilisez le terme "Chetnik" et la "JNA", les

16 Chetnik et l'armée populaire yougoslave. Ce que je souhaite savoir c'est :

17 comment vous faisiez une distinction entre les Chetnik et la JNA, l'armée

18 populaire yougoslave, si vous faisiez une telle distinction ?

19 R. Les Chetnik que j'ai vus, on les appelait ainsi car ils portaient une

20 barbe. C'étaient ceux qui y chantaient la chanson, vous savez.

21 Q. Cette chanson qu'ils chantaient, et dont vous avez parlée hier pour la

22 première fois, quand l'avez-vous entendue pour la première fois, hier,

23 comme vous l'avez vu pour la première fois ?

24 R. Le 20, lorsqu'on était déjà à l'hôpital, à l'extérieur et lorsqu'on

25 nous a dit d'aller à l'entrée principale de l'hôpital, qu'il y avait des

26 bus là-bas dans la rue qui allaient nous amener ailleurs plus loin. Un

27 grand groupe de ces personnes portait des barbes et un drapeau noir avec la

28 "tête de mort".

Page 1284

1 Q. Excusez-moi. Ce n'était pas ma question. C'était simplement la date qui

2 m'intéressait. C'était le 20 ou pas ?

3 R. C'était le 20 novembre à midi.

4 Q. Est-ce qu'avant ce jour, avant le 20 novembre, à midi, vous n'avez

5 jamais auparavant vu ces personnes-là, telles que vous les avez décrites,

6 avec des barbes, avec un drapeau noir et tout cela ?

7 R. Ce matin-là, ces gens-là étaient sur place, pas ceux qui avaient chanté

8 la chanson, mais d'autres portant des barbes, et tout cela dans l'enceinte

9 de l'hôpital.

10 Q. Là encore, si j'ai bien compris, vous parlez de la date du 20

11 novembre ?

12 R. Oui.

13 Q. Avant votre arrivée à l'hôpital, qui a eu lieu, comme vous l'avez dit,

14 vers la mi-septembre ou fin septembre 1992 ? Est-ce que vous avez vu ces

15 hommes-là dans le quartier dans lequel vous habitiez ?

16 R. Non.

17 Q. Vous dites que, de temps en temps, vous sortiez dans la cour. Est-ce

18 que vous avez vu de telle personne correspondant à une telle description à

19 ces moments-là autour de l'hôpital ?

20 R. Non.

21 Q. Dites-moi, s'il vous plaît : depuis combien de temps vivez-vous à

22 Vukovar -- ou pendant combien de temps avez-vous vécu à Vukovar avant le 20

23 novembre ?

24 R. Trente ans.

25 Q. Vous avez travaillé à un poste où énormément de gens venaient et

26 partaient. Les gens circulaient beaucoup et je suppose qu'au cours de ces

27 30 années, vous avez rencontré beaucoup de personnes et que vous

28 connaissiez beaucoup de personnes de Vukovar.

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1 R. Oui, on peut dire cela comme cela.

2 Q. Je vais vous mentionner maintenant une dizaine de noms, et je vous prie

3 de me dire simplement si vous aviez entendu parler de ces personnes que je

4 vais vous mentionner, si vous en connaissez quelques-uns, et si oui, ce que

5 vous savez au sujet de cette personne.

6 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Madame Tuma.

7 Mme TUMA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je ne sais pas de

8 quels noms il s'agit, mais peut-être il y aura des noms de personnes entre

9 lesquelles pour le témoin, il existe des liens de parentés. Je pense qu'il

10 faut tenir compte des mesures de protection.

11 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Evidemment, M. Bulatovic prendra cela

12 en considération.

13 Mme TUMA : [interprétation] Merci.

14 M. BULATOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, il ne s'agit pas de

15 personnes qui ont un lien privé avec le témoin, au moins c'est ce que je

16 pense, donc, je pense que ceci ne risque pas de dévoiler son identité.

17 Q. Est-ce que le nom de d'Ivica Arbarnas vous dit quelque chose ?

18 R. Jamais entendu parler.

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27 M. BULATOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, c'est justement

28 parce que je ne savais pas cela que l'on a ce problème. En raison de cela,

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1 je pense que, la prochaine fois où l'on va mentionner des noms, il va

2 falloir passer à huis clos partiel.

3 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, je pense que c'est une décision

4 sage, Monsieur Bulatovic. Nous allons en audience à huis clos partiel.

5 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

6 [Audience à huis clos partiel]

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1 [Audience publique]

2 M. BULATOVIC : [interprétation]

3 Q. Vous avez parlé hier de votre fils et vous avez dit qu'il était membre

4 de ZNG, de cette unité particulière, de cette ZNG. Ce que je voulais savoir

5 c'est : quelle sorte d'unité c'était ? Après tout, votre fils en était

6 membre et votre mari était un sympathisant. Quelle sorte d'unité était-ce ?

7 Qui l'a constituée ? Est-ce qu'ils étaient armés ? Dans quelle mesure ? Qui

8 leur avait fourni du matériel, des équipements, des armes, des munitions,

9 des uniformes ?

10 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Madame Tuma ?

11 Mme TUMA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Tout au moins,

12 mes oreilles n'ont pas entendu qu'elle ait dit que son mari était un

13 sympathisant de ZNG.

14 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je n'ai pas entendu cela non plus,

15 Maître Bulatovic. Est-ce qu'il y a quelque chose, une référence

16 particulière dans le compte rendu qui vous vient à l'esprit ?

17 M. BULATOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, il y a une omission

18 que j'ai faite. Je voudrais maintenant ajouter ceci que je tire de la

19 déclaration faite par le témoin le 18 juillet 1995.

20 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Mais alors, vous devez --

21 M. BULATOVIC : [interprétation] Qui en dit davantage.

22 M. LE JUGE PARKER : [hors micro]

23 Mme TUMA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

24 M. BULATOVIC : [interprétation] Je vous remercie. Je vais essayer de

25 formuler la question sans mentionner quoi que ce soit de cela.

26 Q. Témoin, que savez-vous concernant le ZNG en tant qu'unité, en tant que

27 formation militaire, compte tenu du fait que votre fils en était membre ?

28 R. Rien.

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1 Q. Vous avez dit que votre fils était censé faire son service militaire

2 dans la JNA et avait demandé un sursis de quatre ans. Dans l'intervalle, il

3 a rejoint le ZNG. Ce que je veux savoir c'est ceci : savez-vous s'il a reçu

4 une formation pour rejoindre cette unité ?

5 R. Non.

6 Q. Non, il n'a pas reçu de formation ? Ou non, vous ne savez pas ?

7 R. Je ne sais pas.

8 Q. Savez-vous qu'il y avait une cellule de Crise à l'hôpital, quelque

9 chose qu'on appelait une cellule de Crise ?

10 R. Non.

11 Q. Vous n'avez jamais entendu quoi que ce soit à ce sujet, du fait que des

12 réunions auraient été tenues, que l'hôpital était bombardé après tout,

13 qu'il y avait un conflit armé en cours et que des gens étaient en train

14 d'être tués ?

15 R. Je n'ai rien entendu.

16 Q. Vous avez expliqué certaines incohérences ou différences entre votre

17 déposition et la déclaration que vous aviez faites en 1995, et ce que vous

18 avez déclaré lors de l'audition avec les membres du bureau du Procureur

19 lorsque vous êtes venue au Tribunal. Ces différences concernaient certaines

20 dates. Je ne vais pas vous poser de questions concernant ces dates parce

21 que mes collègues ont suffisamment épuisé le sujet. Mais, ce que j'aimerais

22 savoir concernant cette personne connue sous le nom de Martin Dosen, vous

23 avez dit à un moment qu'il portait un plâtre de la hanche jusque tout au

24 long de sa jambe gauche ou droite, je ne me souviens plus très bien avec

25 précision. Ce que je voulais savoir c'est avant cet événement dont vous

26 avez parlé, vous n'étiez pas sûre qu'il s'agissait du 19 ou 20, vous avez

27 dit que vous aviez connue M. Dosen précédemment. Pourquoi cela ?

28 R. Je le connaissais de vue, et c'était la raison pour laquelle je l'ai

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1 reconnu lorsqu'il a été emmené sur une civière.

2 Q. Est-ce que vous connaissiez la profession de M. Dosen avant cela, avant

3 qu'il arrive à l'hôpital ?

4 R. Non.

5 Q. Connaissiez-vous sa femme ?

6 R. Non.

7 Q. Pendant votre séjour à l'hôpital, peut-être l'avez-vous rencontrée

8 pendant la période où vous êtes restée à l'hôpital ?

9 R. Non.

10 Q. Savez-vous du tout qui est sa femme ? Ou s'il était marié ?

11 R. Non, je ne sais pas.

12 Q. Dois-je considérer cela comme voulant dire "Non, il n'était pas marié,"

13 ou "Non, je ne sais pas quoi que ce soit concernant sa femme" ?

14 R. Je ne sais pas. Je ne connais pas la femme de Martin Dosen. C'est cela

15 que cela veut dire.

16 Q. Vous dites qu'il a été transporté hors de l'hôpital et qu'on l'a fait

17 tomber de sa civière et qu'il a reçu des coups de pied alors qu'il était à

18 terre. C'est bien ce que j'ai compris. J'ai bien compris ?

19 R. On l'a fait tomber de la civière et ensuite il a reçu des coups de

20 pied. Ils lui ont donné des coups de pied avec leurs bottes.

21 Q. Est-ce que ceci a eu lieu à l'extérieur de l'hôpital ?

22 R. Tout ceci avait eu lieu à la sortie que nous utilisions pour quitter le

23 bâtiment, la sortie de secours, en l'occurrence. C'était à mi-chemin par

24 rapport au sentier qui conduisait aux cars qui attendaient à l'extérieur de

25 l'hôpital, entre cette sortie et les cars, à mi-chemin dans ce sentier à

26 peu près là. C'est là qu'on l'a laissé tomber de cette civière et il a reçu

27 des coups de pied.

28 M. BULATOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, pourrions-nous, s'il

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1 vous plaît, revoir cette photographie ?

2 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Bulatovic, je dois vous donner

3 de mauvaises nouvelles, des nouvelles dont je suppose qu'aucun d'entre nous

4 ne le savait en ce qui concerne ce nouveau système technique. On me dit

5 qu'après un certain temps si le document n'est pas enregistré et

6 photographié, ce qui a été marqué est perdu. Donc, lorsque nous reprendrons

7 après la suspension de l'audience, il sera nécessaire de faire en sorte que

8 le témoin appose de nouvelles marques sur la photographie, et donc à ce

9 moment-là, si vous voulez qu'elle soit présentée pour versement au dossier,

10 il faudra que vous le fassiez de telle sorte que l'on puisse enregistrer

11 avant que les marques ajoutées ne soient perdues. Je suis désolé de vous

12 donner cette mauvaise nouvelle et j'espère que tout le conseil prendra note

13 de cela. Il faut que nous nous habituions à ce nouveau système technique.

14 Mais je pense que nous en sommes arrivés maintenant à un moment qui

15 convient pour avoir une première suspension de séance. Nous allons avoir

16 besoin d'une demi-heure parce que nous avons un certain nombre

17 d'expurgations qui doivent être faites également pour éviter qu'il y ait

18 des renseignements permettant d'identifier le témoin. Nous reprendrons à 11

19 heures 20.

20 --- L'audience est suspendue à 10 heures 49.

21 --- L'audience est reprise à 11 heures 25.

22 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Sommes-nous en audience publique ?

23 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes en audience publique,

24 Monsieur le Président.

25 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Bulatovic, je me demande si

26 nous pourrions immédiatement régler cette question des marques apposées sur

27 la pièce à conviction avant que vous ne poursuiviez.

28 Madame, vous avez devant vous la photographie que vous aviez précédemment

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1 marquée; est-ce que vous la voyez à l'écran ?

2 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

3 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je regrette, mais il va falloir que je

4 vous demande de mettre à nouveau des marques sur cette photographie. Je

5 suis désolé de vous demander cela. Pourriez-vous, s'il vous plaît, mettre

6 tout en haut de la photographie un IV romain, comme vous l'aviez fait

7 précédemment ?

8 LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]

9 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie. Pourriez-vous,

10 maintenant, indiquer en apposant le chiffre 1, simple 1, l'entrée

11 principale de l'hôpital du bâtiment principal de l'hôpital ?

12 LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]

13 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Pourriez-vous mettre un cercle autour

14 de ce chiffre, s'il vous plaît ?

15 LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]

16 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Pourriez-vous indiquer avec une flèche

17 la direction du vieux bâtiment ? Vous nous avez dit que ce n'était pas sur

18 la photographie, mais que vous pouviez indiquer la direction de l'endroit

19 où se trouvait l'ancien bâtiment en mettant une flèche.

20 LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]

21 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie. Pourriez-vous, s'il

22 vous plaît, mettre le chiffre 2 à l'intérieur d'un cercle près de cette

23 flèche ?

24 LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]

25 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie. Maintenant, vous

26 avez dit qu'il y avait une sortie de secours qui en temps de paix était

27 utilisée comme l'entrée des ambulances. Pourriez-vous, s'il vous plaît,

28 inscrire le chiffre 3 à cet endroit-là ?

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1 LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]

2 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie. Maintenant, vous

3 avez dit qu'il y avait une entrée où une réception au service des urgences.

4 Je vais vous demander de bien y inscrire le chiffre 4 pour ce qui est de

5 cet endroit.

6 LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]

7 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie. Je crois que c'est

8 tout ce qu'il y avait comme marques. Est-ce que c'est bien le cas, Maître

9 Bulatovic ? Non, je crois que j'en ai oublié. Le numéro 5, vous avez

10 mentionné le fait que, dans la cour, il y avait deux symboles de la Croix

11 Rouge. Pourriez-vous, s'il vous plaît, inscrire le chiffre 5 à l'endroit où

12 se trouvaient ces Croix Rouges ?

13 LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]

14 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Vous nous aviez dit que, sur le toit

15 d'un bâtiment il y avait un autre symbole de la Croix Rouge. Est-ce que

16 vous pourriez, à l'aide du chiffre 6, nous indiquer où se trouvait ce

17 bâtiment si ce bâtiment figure sur cette photographie ?

18 LE TÉMOIN : [interprétation] Je ne le vois pas.

19 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Tout à l'heure, vous aviez indiqué sur

20 la photographie, à l'aide du chiffre numéro 6, un endroit. Me Bulatovic

21 vous avait demandé, à ce moment-là, si vous pourriez nous indiquer où se

22 trouvait l'autre symbole de la Croix Rouge ? Est-ce que vous pourriez peut-

23 être maintenant apposer ce chiffre à nouveau ?

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Quel chiffre dois-je inscrire ?

25 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Le chiffre 6.

26 LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]

27 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie. Peut-être que nous

28 devrions préciser quelque chose. Est-ce qu'il s'agissait d'un symbole qui

Page 1297

1 se trouvait à même le sol, ou est-ce que c'était un symbole qui se trouvait

2 sur un toit ? Est-ce que vous pourriez nous le dire ?

3 LE TÉMOIN : [interprétation] C'était un symbole qui se trouvait à même le

4 sol.

5 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie vivement.

6 Maître Bulatovic, est-ce que nous avons tout pris en considération ?

7 M. BULATOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Oui, tout à

8 fait, nous avons tout maintenant.

9 Q. J'aimerais revenir sur le chiffre numéro 5. Est-ce qu'il s'agissait

10 d'un symbole de la Croix Rouge qui se trouvait par terre ou non ?

11 R. Oui.

12 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Bulatovic, souhaitez-vous

13 verser cette photographie au dossier comme pièce à conviction ?

14 M. BULATOVIC : [interprétation] Oui. J'aimerais poser d'autres questions au

15 témoin. J'aimerais lui demander d'apposer une flèche qui sera le numéro 7

16 afin de nous indiquer la direction -- vers quelle direction se trouvait le

17 bâtiment qui avait un drapeau de la Croix Rouge.

18 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Est-ce que vous pourriez mettre, près

19 de cette flèche, le chiffre 7 entouré d'un cercle, s'il vous plaît ?

20 LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]

21 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] C'est tout, Maître Bulatovic ?

22 M. BULATOVIC : [interprétation] Oui, je le pense, Monsieur le Président. Je

23 propose que cette photographie soit ainsi versée au dossier.

24 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui. Quelle cote ?

25 M. LE GREFFIER : [interprétation] Ce sera la pièce à conviction numéro 55,

26 Monsieur le Président.

27 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Bulatovic, nous apprenons tous

28 les jours à propos des merveilles de la technologie. Donc, merci, Madame,

Page 1298

1 d'avoir répété l'exercice.

2 Maître Bulatovic, avez-vous d'autres questions à poser ?

3 M. BULATOVIC : [interprétation] Oui, Monsieur le Président.

4 Q. J'aimerais que nous revenions au 20. Vous nous aviez dit qu'il y avait

5 des soldats dans l'hôpital. Des soldats qui dirigeaient les femmes vers la

6 droite et les hommes vers la gauche. Donc, des soldats qui, en d'autres

7 termes, séparaient les hommes des femmes, si je vous ai bien compris.

8 Pouvez-vous me répondre et me corriger si j'ai fait une erreur ?

9 R. Il y avait un soldat qui se trouvait à l'entrée. Je m'y suis dirigée

10 vers la droite et mon mari s'est dirigé vers la gauche, tout comme les

11 autres hommes d'ailleurs.

12 Q. Vous vous êtes dirigée vers la droite, comme toutes les autres femmes,

13 et les hommes sont allés vers la gauche. Est-ce que c'est ainsi que les

14 choses se sont passées ?

15 R. Oui, pour l'essentiel.

16 M. BULATOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Messieurs

17 les Juges, est-ce que nous pouvons utiliser cette photographie qui se

18 trouve toujours sur nos écrans, mais qui a déjà été versée au dossier.

19 Donc, je pense que, de ce fait, nous devrons avoir une nouvelle

20 photographie qui sera présentée au témoin afin qu'elle nous indique un

21 certain nombre d'endroits.

22 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Vous avez, tout à fait, raison, Maître

23 Bulatovic. Nous allons tout simplement nous assurer que cette photo a été

24 sauvegardée électroniquement et, lorsque cela aura été fait, nous allons

25 remettre l'original sans les inscriptions et l'original réapparaîtra à

26 l'écran.

27 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

28 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Poursuivez, Maître Bulatovic.

Page 1299

1 M. BULATOVIC : [interprétation]

2 Q. Vous avez toujours la même photographie sur votre écran, n'est-ce pas ?

3 R. Oui.

4 Q. Est-ce que vous pourriez utiliser le stylo pour indiquer

5 l'endroit à partir duquel vous avez quitté l'hôpital et la direction vers

6 laquelle vous vous êtes dirigée après avoir quittée l'hôpital ? Je fais

7 référence à l'entrée principale.

8 R. [Le témoin s'exécute]

9 Q. Est-ce que vous pourriez peut-être nous indiquer, à l'aide d'une ligne,

10 avec une flèche pour indiquer la direction vers laquelle vous vous

11 déplaciez ? Est-ce que vous pourrez faire cela ?

12 R. [Le témoin s'exécute]

13 Q. Pourriez-vous mettre le chiffre numéro 1 et l'entourer d'un cercle ?

14 R. [Le témoin s'exécute]

15 Q. Pourriez-vous à l'aide de cette photographie indiquer vers quelle

16 direction se sont dirigés les hommes, vers la gauche ? Donc, est-ce que

17 vous pourriez apposer le numéro 2, là ?

18 R. [Le témoin s'exécute]

19 Q. Combien de temps tout cela a duré ? Combien de temps cela vous a pris

20 pour partir de l'endroit où vous avez inscrit le chiffre numéro 1 ? Donc,

21 combien est-ce que cela a pris, depuis le numéro 1 jusqu'à la fin de la

22 flèche ?

23 R. Cela a commencé vers 7 heures du matin et cela s'est poursuivi jusqu'à

24 11 heures. Nous sommes restés tout ce temps-là à cet endroit que j'ai

25 indiqué à l'aide du chiffre numéro 1.

26 Q. Avez-vous quitté cet endroit ?

27 R. Non. La plupart du temps, nous sommes restés là dans un groupe.

28 Q. Combien de femmes y avait-il dans ce groupe ?

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1 R. Beaucoup, beaucoup de femmes. Il y avait beaucoup de femmes, d'enfants,

2 vraiment beaucoup.

3 Q. Est-ce que vous pourriez me donner un chiffre approximatif ?

4 R. Non.

5 Q. Même pas un chiffre approximatif ?

6 R. Non.

7 Q. Vous avez fait référence à M. Sljivancanin. Vous avez dit que vous

8 l'aviez vu. Pourriez-vous nous indiquer, à l'aide du chiffre numéro 3, où

9 vous l'avez vu, si cela est visible sur la carte ? Où était-il lorsqu'il

10 s'entretenait avec ce représentant de la Communauté européenne ou du comité

11 international de la Croix Rouge ou, en fait, je ne sais pas avec qui il

12 parlait ? Nous allons le déterminer.

13 R. [Le témoin s'exécute]

14 Q. Toujours sur la même photographie, pour éviter tout problème technique,

15 j'aimerais demander au témoin d'apposer le chiffre 4 à l'endroit où se

16 trouvaient les autobus, autobus dans lesquels sont montés les femmes et les

17 enfants y compris d'ailleurs, le témoin ?

18 R. [Le témoin s'exécute]

19 Q. Est-ce que vous pourriez mettre le chiffre 4 entouré d'un cercle ?

20 R. [Le témoin s'exécute]

21 Q. Pourriez-vous apposer le chiffre 5 à l'endroit où se trouvaient les bus

22 dans lesquels sont montés les hommes ?

23 R. [Le témoin s'exécute]

24 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Bulatovic, on m'a demandé de

25 vous demander de vous interrompre un petit moment parce qu'il faut procéder

26 à un réglage technique, apparemment --

27 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]

28 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Bulatovic, il va falloir que je

Page 1301

1 refasse ce que vous veniez de faire. J'espère en fait que ce petit problème

2 technique est solutionné ou sera solutionné, maintenant.

3 Madame, vous avez cette photographie qui se trouve en face de vous.

4 J'aimerais vous demander de nous indiquer quelle fut la direction prise par

5 les femmes et les enfants, lorsqu'ils ont quitté l'entrée principale -- le

6 bâtiment principal ?

7 LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]

8 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Pourriez-vous apposer le long de cette

9 ligne, le chiffre numéro 1, entouré d'un cercle ?

10 LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]

11 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci.

12 J'aimerais maintenant vous demander de nous indiquer quelle fut la

13 direction suivie par les hommes.

14 LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]

15 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Pourriez-vous apposer le chiffre

16 numéro 2, entouré d'un cercle ?

17 LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]

18 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Pourriez-vous, à l'aide du chiffre

19 numéro 3, indiquer l'endroit où vous avez vu M. Sljivancanin, ainsi qu'un

20 homme portant une blouse blanche ?

21 M. BULATOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je m'excuse, mais je

22 vois que tout vient de disparaître sur mon écran. Visiblement nous avons

23 encore perdu cela.

24 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Sur le mien aussi.

25 [La Chambre de première instance et le greffier se concertent]

26 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous allons faire une autre tentative,

27 Maître Bulatovic. Là si nous faisons sous blanc, nous allons avoir une

28 pause pendant que les techniciens vont essayer de trouver une solution.

Page 1302

1 Mais nous allons faire une autre tentative.

2 Madame, je m'excuse, mais est-ce que vous pourriez peut-être nous indiquer

3 une fois de plus la direction que vous avez empruntée avec les femmes et

4 les enfants, lorsque vous avez quitté le bâtiment principal ?

5 LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]

6 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Pourriez-vous apposer le chiffre 1 et

7 l'entourer d'un cercle ?

8 LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]

9 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maintenant, est-ce que vous pourriez

10 nous indiquer quelle fut la direction empruntée par les hommes ?

11 LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]

12 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Pourriez-vous nous mettre le chiffre

13 2, entouré d'un cercle à cet endroit.

14 LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]

15 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Pourriez-vous maintenant, avec le

16 chiffre numéro 3, nous indiquer où se trouvait

17 M. Sljivancanin, que vous avez vu ainsi que cet homme qui portait cette

18 blouse blanche ? Est-ce que vous pourriez nous indiquer l'endroit où vous

19 les avez vus, lorsqu'ils parlaient ?

20 LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]

21 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Est-ce que vous pourriez maintenant,

22 grâce au chiffre numéro 4, nous indiquer où se trouvaient les autobus dans

23 lesquels sont montés les femmes et les enfants ?

24 LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]

25 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie, vivement.

26 Est-ce qu'il y avait d'autres endroits que vous souhaitez voir

27 localiser, Maître Bulatovic ?

28 M. BULATOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, oui. Nous avions le

Page 1303

1 chiffre numéro 5 qui indiquait l'endroit où se trouvaient les autobus qui

2 ont emporté les hommes.

3 LE TÉMOIN : [Le témoin s'exécute]

4 M. BULATOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, avant que je ne

5 fasse verser ces pièces à conviction au dossier, je voudrais poser une

6 question au témoin.

7 Q. L'endroit numéro 5 montre l'endroit où se trouvaient les bus. Est-ce

8 qu'il s'agissait d'un endroit qui se trouvait dans la rue ?

9 R. Non, non. Dans la cour de l'hôpital.

10 M. BULATOVIC : [interprétation] Monsieur le Président, je souhaite verser

11 cette photographie au dossier.

12 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] La pièce est versée au dossier.

13 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, ce sera la pièce à

14 conviction 56.

15 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous allons entendre un peu pour nous

16 assurer que tout a bien fonctionné, Maître Bulatovic.

17 Bien. Voilà, cela a fonctionné.

18 Madame Tuma ?

19 Mme TUMA : [interprétation] Je m'excuse, mais mon co-conseil vient de

20 vérifier la pièce à conviction 55 afin de voir si les inscriptions se

21 trouvent encore sur cette pièce à conviction.

22 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Il est encore à l'écran et cela sera

23 fait pendant la pause.

24 Mme TUMA : [interprétation] Très bien.

25 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] C'est pour cela que du fait de ce

26 problème on a attiré notre attention sur cela et l'officier instrumentaire

27 nous a expliqué qu'il y avait ce problème.

28 Mme TUMA : [interprétation] Je vous remercie.

Page 1304

1 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Il est là maintenant et nous

2 récupérerons cette pièce pendant la pause.

3 Mme TUMA : [interprétation] Je vous remercie.

4 M. BULATOVIC : [interprétation]

5 Q. Maintenant que nous parlons de ce sujet, est-ce que le témoin pourrait

6 nous dire si les bus qui ont emporté les hommes, en fait, est-ce que le

7 témoin pourrait nous fournir une description de ces bus ?

8 R. Tous les autobus qui nous ont emportés, à la fois les hommes et les

9 femmes, avaient une couleur vert olive.

10 Q. Est-ce que vous disposiez d'informations -- est-ce que vous saviez où

11 ces bus allaient se rendre, les bus qui vous ont emportés, vous, et les bus

12 qui ont emporté les hommes ?

13 R. Non.

14 Q. Revenons à cette conversation entre l'homme à la blouse blanche et M.

15 Sljivancanin, conversation qui a eu lieu à l'endroit où vous avez apposé le

16 chiffre numéro 3 sur cette photographie. Dites-nous, si vous vous souvenez,

17 de l'heure à laquelle cela s'est passé ?

18 R. C'était tôt le matin. Cela s'est passé de suite. Je vous ai dit que

19 nous étions sortis entre 6 heures 30 et 7 heures, et lorsque nous étions

20 tous dehors et que nous étions debout dehors, c'est à ce moment-là que

21 cette conversation a eu lieu.

22 Q. Est-ce que cette conversation a eu lieu avant qu'on ait été donné

23 l'ordre de séparer les hommes des femmes, ou est-ce que cette conversation

24 a eu lieu après ?

25 R. Nous avions déjà été séparés, parce que la personne qui portait cette

26 blouse blanche, qui représentait la communauté internationale, a demandé à

27 connaître les noms des hommes qui avaient été séparés. Il a insisté pour

28 que soit dressée une liste des noms de tous ces hommes.

Page 1305

1 Q. Est-ce que vous pourriez me dire combien de temps a duré cette

2 conversation entre l'homme en blanc et M. Sljivancanin ?

3 R. Ecoutez, c'était une conversation assez animée et elle n'a pas duré

4 très, très longtemps.

5 Q. Quelle était la distance entre vous et eux au moment où ils avaient

6 cette discussion véhémente ?

7 R. J'étais juste derrière leur dos, tout près.

8 Q. Souvenez-vous lorsque M. Sljivancanin et cet homme vêtu de blanc

9 étaient en train de parler, est-ce qu'il y avait une autre personne auprès

10 d'eux ?

11 R. Peut-être, je n'en suis pas sûre. Si j'essaie de revoir les choses

12 maintenant, mentalement, je me souviens de leur conversation, mais peut-

13 être effectivement il y avait un soldat ou plusieurs.

14 Q. Avez-vous vu par hasard un interprète ?

15 R. Je suppose qu'un interprète devait être là. Je n'ai pas compris ce que

16 le monsieur en blanc disait, mais j'ai compris ce que disait M.

17 Sljivancanin.

18 Q. Vous supposez qu'un interprète était là ? Enfin, vous dites que vous le

19 supposez. Est-ce que vous en souvenez, ou est-ce que vous ne en souvenez

20 pas ?

21 R. Il y était, certainement. Comment est-ce que j'aurais su puisque je ne

22 parle pas l'anglais ? Comment est-ce que j'aurais su qu'il parlait et qu'il

23 exigeait explicitement que l'on dresse une liste des personnes blessées et

24 des hommes.

25 Q. Ce n'est pas l'homme en blanc qui a dit cela directement, mais vous

26 avez entendu cela de la part de la personne qui interprétait ?

27 R. Oui, c'est la personne qui interprétait qui l'a dit qu'il fallait

28 dresser une liste.

Page 1306

1 Q. Est-ce que vous vous souvenez si l'interprète était un homme ou une

2 femme ?

3 R. Non, non, je ne me souviens pas.

4 Q. Pardon. Puisque vous avez entendu M. Sljivancanin en train de dire

5 certaines choses, est-ce que vous pouvez nous répéter exactement ce qu'il

6 avait dit ?

7 R. Il a dit : "Monsieur, c'est ma terre. Monsieur, c'est la guerre ici.

8 Ici, c'est moi qui commande. Lorsque, je viens dans votre pays, je vais me

9 comporter conformément à ce que vous demanderez de moi. Par conséquent, je

10 vous demande de vous comporter vous-même de la sorte."

11 Q. Avez-vous entendu M. Sljivancanin dire au cours de cette conversation à

12 cet homme en blanc qu'il lui a dit qu'à ce même endroit ses propres jeunes

13 soldats s'étaient faits tuer ?

14 R. Oui. Il l'a dit.

15 Q. Vous avez dit que s'agissant des personnes au sujet desquelles je vous

16 ai posé des questions, vous avez lu beaucoup de choses au sujet de ces

17 personnes-là en lisant le livre de Sljivancanin. Ai-je bien compris ?

18 R. Oui.

19 Q. Est-ce que vous pouvez me dire comment s'appelle ce livre ? Quel est

20 son titre et quand vous l'avez lu ?

21 R. Le livre s'appelle : "Ceci est ma terre," et je l'ai lu peut-être trois

22 mois avant de venir ici.

23 Q. Vous êtes en train de parler souvent de l'armée populaire yougoslave

24 qui vous pilonne. Je vais devoir vous demander si feu votre mari avait fait

25 son service militaire au sein de la JNA ? Est-ce que vous le savez,

26 puisqu'on vous a dit que c'était un invalide de travail ? C'est la raison

27 pour laquelle je pose cette question.

28 R. Je ne saurais vous le dire.

Page 1307

1 Q. Est-ce que vous pourriez m'expliquer comment vous conceviez l'armée

2 populaire yougoslave ? Quelle était votre attitude personnelle à l'égard de

3 l'armée populaire yougoslave, à l'égard de ce qu'elle faisait, de qui elle

4 représentait, votre opinion personnelle ?

5 R. D'après la manière dont j'ai vécu les choses à son sujet, au départ, je

6 pensais qu'il souhaitait jouer un rôle de réconciliateur, mais par la suite

7 ils se sont placés directement du côté du camp serbe.

8 Q. Est-ce que vous pouvez m'expliquer la différence ou m'expliquer à

9 partir de quel moment cette distinction a commencé à exister entre ce que

10 vous dites au sujet de ce qui se passait au départ et par la suite ?

11 R. Au départ, c'était au mois de mai, au mois de juin, lorsque Borovo Selo

12 ont tiré sur Borovo Naselje, et à ce moment-là, l'armée y allait afin

13 d'intervenir. Là, je parle de l'armée populaire yougoslave.

14 Q. Savez-vous à l'encontre de qui l'armée est intervenue ?

15 R. Elle calmait. Vous savez, il y avait deux parties. Elle ne faisait pas

16 la guerre contre elle-même. Il y avait la garde d'un côté et l'armée de

17 Borovo Selo. Ils avaient commencé à tirer assez tôt.

18 Q. Vous avez mentionné "la garde." De quelle garde parlez-vous ?

19 R. Je parle des soldats croates.

20 Q. Savez-vous qu'à ce moment-là, au mois de mai, l'Etat fédéral existait

21 encore, la République fédérative socialiste de Yougoslavie ?

22 R. Peut-être, mais je ne me souviens pas de dates en ce qui concerne la

23 proclamation de l'indépendance ni le moment où la Slovénie se séparait et

24 la Croatie. Je ne me souviens pas de ces dates-là.

25 Q. Est-ce que vous savez qui est Stipe Mesic ?

26 R. Je sais qu'aujourd'hui c'est le président de la Croatie, mais je ne

27 sais pas qui il était avant.

28 Q. Est-ce que vous savez en 1991, au cours de la période dont vous êtes en

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1 train de parler, est-ce que vous savez quelles étaient les fonctions que M.

2 Mesic occupait ?

3 R. Non.

4 Q. Etait-ce un Croate, ou plutôt, est-ce un Croate encore aujourd'hui, je

5 suppose ?

6 R. Je ne le sais pas non plus.

7 Q. Savez-vous, ou plutôt, comment réagiriez-vous si je vous disais que M.

8 Stipe Mesic à l'époque était le président de la Présidence de la République

9 fédérative socialiste de Yougoslavie ?

10 R. Après le camarade Tito, je ne connaissais plus de noms de présidents.

11 Q. Vous avez mentionné la garde. Vous aviez dit que vous parlez de la

12 Garde nationale, ZNG. Est-ce que vous pouvez nous dire, s'il vous plaît,

13 quelle était la composition ethnique de la Garde nationale ?

14 R. Je dois vous dire, tout d'abord, que la composition ethnique de la

15 population de Vukovar était bien variée. Il y avait le plus grand nombre de

16 mariages mixtes. Par conséquent, ceux qui rejoignent les rangs de la garde

17 étaient ceux qui défendaient leurs foyers.

18 Q. Je n'ai pas eu de réponse à ma question. Je vais la reformuler. Dans la

19 Garde nationale, est-ce qu'il y avait des ressortissants serbes, pour

20 autant que vous le sachiez ?

21 R. Je le pense. Oui, il y en avait.

22 Q. Est-ce que vous êtes au courant de leur nombre ?

23 R. Je ne les ai pas comptés, et je ne peux pas savoir quel était leur

24 nombre, mais je suis sûre qu'il y en avait.

25 Q. Savez-vous combien de brigades ou d'unités de la Garde nationale

26 existaient-ils à Vukovar ?

27 R. Je ne le sais pas.

28 Q. Ici, vous avez mentionné, si je ne me trompe, la 204e Brigade. Que

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1 savez-vous à son sujet ?

2 R. Vraiment rien.

3 Q. Qui vous a informé de son existence ?

4 R. C'était déjà après les combats. On n'était déjà plus à Vukovar. C'est

5 là que l'on a mentionné cette 204e Brigade, parce que j'ai reçu une lettre

6 communiquant que mon fils avait été membre de la 204e Brigade. C'est tout

7 ce que je sais à ce sujet.

8 Q. Est-ce que vous vous souvenez des détails de cette lettre ? A cause de

9 quoi est-ce qu'elle vous a été adressée ? Qui vous l'a envoyée, et

10 pourquoi ?

11 R. C'était une attestation. Je ne sais pas si je m'exprime bien ou pas, et

12 j'en avais besoin afin de réaliser mes droits issus de la guerre

13 patriotique.

14 Q. Tout à l'heure, vous avez dit que le camarade Tito était le seul

15 président dont vous connaissiez le nom. C'est ce que vous avez dit ?

16 R. Oui.

17 Q. Quelle est votre attitude à l'égard de cette époque, l'époque pendant

18 laquelle il était président ?

19 R. Très positive.

20 Q. Contre qui et à cause de qui est-ce que la Garde nationale se

21 protégeait, si l'armée populaire était une armée yougoslave ?

22 R. Vous m'avez posé une question au sujet du feu camarade Tito et je vous

23 ai répondu au sujet de la période à l'époque. Maintenant, si vous me

24 demandez qu'entre qui la garde se défendait, ce n'est pas une question

25 qu'il faut me poser à moi.

26 Mme TUMA : [interprétation] Monsieur le Président --

27 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, Madame Tuma.

28 Mme TUMA : [interprétation] Oui. En ce qui concerne hier, ces questions

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1 sont de nature spéculative, du point de vue du témoin, de même que les

2 questions militaires. C'est ce qu'elle a déjà dit, hier. Elle a dit qu'elle

3 ne connaît pas ses sujets-là en profondeur. Merci.

4 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] C'est peut-être le cas, mais Me

5 Bulatovic a le droit de l'explorer.

6 Poursuivez, Maître Bulatovic.

7 M. BULATOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

8 Q. Puisque nous sommes en train de parler de cette période, voici ma

9 question. Avez-vous entendu parler du terme, "Oustachi" ?

10 R. Oui.

11 Q. Quand avez-vous entendu parler du terme "Oustachi" ? Veuillez nous

12 l'expliquer; peut-être je le sais, mais peut-être la Chambre de première

13 instance ne le sait pas. Que voulait dire le terme "Oustachi" ? Que

14 représentait-il et à quel moment a-t-il fait son apparition ?

15 R. Je ne sais pas à quel moment il a fait son apparition.

16 Q. Qui étaient les Oustachi ?

17 R. Au cours de cette guerre, de la dernière guerre, il n'y a pas eu

18 d'Oustachi. C'est comme cela que les gens s'appelaient, les Serbes

19 appelaient les Croates les Oustachi, et les Croates appelaient les Serbes,

20 les Chetniks, mais, en fait, il ne s'agissait d'un terme approprié pour la

21 dernière guerre, celle de l'année 1991.

22 Q. Autrement dit, il n'y a pas eu de Chetnik, ni d'Oustachi, au cours de

23 cette guerre-là ?

24 R. Il y a eu des combattants qui luttaient, mais cette appellation, à mon

25 avis - là, je parle en mon nom personnel - est erroné, mais, visiblement,

26 les gens les nommaient ainsi.

27 Q. Une autre question. Savez-vous quelle était la composition ethnique de

28 la JNA ? De ces unités-là, avez-vous des connaissances à ce sujet ?

Page 1311

1 R. Non.

2 Q. Y a-t-il eu des Musulmans dans les Unités de la JNA, de l'armée

3 populaire yougoslave ? Est-ce que vous en avez entendu parler ?

4 R. Mais je ne sais pas. Maintenant, si vous me parlez au sujet de la

5 période avant la guerre ou au sujet de l'année 1991, mais, dans les deux

6 cas, je ne sais pas quelle était la composition ethnique.

7 Q. Est-ce que vous pourrez me dire, d'après vous, qui - et pourquoi - a

8 tiré sur les unités et tué les jeunes soldats de l'armée populaire

9 yougoslave ? D'ailleurs, vous les avez vus.

10 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Bulatovic, là, c'est une

11 question à laquelle l'objection de Mme Tuma s'applique. Comment est-ce que

12 le témoin peut répondre à cela, à moins d'être là et à moins d'être là au

13 moment où l'on a tiré. Donc, je pense que, finalement, vous avez dépassé

14 les limites dont Mme Tuma a parlé tout à l'heure.

15 Mme TUMA : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

16 M. BULATOVIC : [interprétation] J'accepte cela, Monsieur le Président. Vous

17 avez tout à fait raison.

18 Q. Ici, au cours de cet interrogatoire, il a été beaucoup de questions de

19 la déclaration que vous avez fournie en juillet 1995. Certains points y

20 contenus me restent peu clairs et, avec la permission de la Chambre, je

21 vais vous poser des questions à ce sujet.

22 Tout d'abord, où avez-vous fourni cette déclaration, en juillet 1995 ?

23 R. A Pula.

24 Q. Savez-vous combien de personnes ont assisté du côté de ceux qui

25 prenaient cette déclaration, au moment où vous l'avez fournie ?

26 R. Deux.

27 Q. Est-ce que ce même jour, lorsque vous avez fourni cette déclaration,

28 est-ce que vous l'avez signée le même jour ?

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1 R. Je suppose que oui.

2 Q. C'est oui ou vous supposez que oui.

3 R. Je ne me souviens pas à présent.

4 Q. Après avoir eu cet entretien, jusqu'à aujourd'hui, est-ce que vous avez

5 eu d'autres conversations avec ces deux personnes qui ont pris cette

6 déclaration de vous en 1995 ?

7 R. Non.

8 Q. Est-ce que cette déclaration a été prise auprès de vous, de la manière

9 suivante ? Est-ce que vous étiez en train de parler, quelqu'un était en

10 train de dactylographier, ou est-ce que la forme a été différente ?

11 R. Je parlais. Il y avait une personne qui interprétait mes propos à

12 l'autre, qui se tenait là et qui dactylographiait le texte.

13 Q. Donc, celui, qui était en train de parler, tapait ce que l'autre lui

14 interprétait.

15 R. Oui.

16 Q. Dans quelle langue avez-vous fourni la déclaration ?

17 R. Dans la langue croate.

18 Q. À la fin de cette prise de déclaration, lorsqu'elle a été

19 dactylographiée, avez-vous relu ce qui était écrit ?

20 R. Oui.

21 Q. Avez-vous eu des remarques à formuler, de quelle que nature que ce soit

22 au sujet de cette déclaration que vous avez relue ?

23 R. Je ne me souviens pas.

24 Q. Lorsque vous êtes venu ici à La Haye, est-ce que l'un des deux

25 personnes qui avait pris la déclaration était ici, est-ce qu'ils ont

26 assisté à vos entretiens ici ?

27 R. Non.

28 Q. Combien de personnes du côté du bureau du Procureur ont parlé avec vous

Page 1313

1 ici à La Haye ?

2 R. Le Procureur et l'interprète.

3 Q. Vous avez mentionné le mois d'août 2005. Vous avez mentionné le fait

4 que c'est à ce moment-là qu'on vous a parlé au sujet de la déclaration. Ai-

5 je raison de dire cela ?

6 R. Par téléphone.

7 Q. Qu'est-ce qui vous a été dit exactement ?

8 R. Que le procès allait commencer et qu'il allait falloir que je vienne en

9 tant que témoin.

10 Q. Lorsque vous êtes venue à La Haye au cours de cet entretien auquel le

11 représentant du bureau et l'interprète ont assisté, combien de temps est-ce

12 que ceci a duré ?

13 R. Une heure et demie, tout au plus.

14 Q. Veuillez m'expliquer, s'il vous plaît, comment la conversation avait

15 démarré. Est-ce que la déclaration vous a été lue, la déclaration dont est

16 en train de parler ? Est-ce que vous a demandé si c'était conforme à vos

17 souvenirs, ou est-ce que ceci s'est déroulé de manière différente ?

18 R. Il y avait un entretien, mais la déclaration n'a pas été lue à ce

19 moment-là. C'est seulement après que j'ai tout dit qu'il y a eu certains

20 petits dérapages. Voilà.

21 Q. En ce qui concerne ces petits dérapages, ces petites différences, est-

22 ce que les enquêteurs vous ont demandée des clarifications ?

23 R. Oui. Même à ce moment-là, j'ai dit que c'était certainement dû à une

24 erreur de l'interprétation ou de traduction, et c'est la raison pour

25 laquelle j'ai demandé des rectifications.

26 Q. Qu'est-ce qui a été mal interprété puisqu'il y a quelques minutes que

27 vous avez dit que vous n'avez pas revu votre déclaration et qu'elle ne vous

28 a pas été redonnée ?

Page 1314

1 R. Effectivement, ma déclaration ne m'a pas été redonnée au moment où j'ai

2 parlé avec le bureau du Procureur.

3 Q. Qu'est-ce que qui a été mal traduit alors ou mal

4 interprété ?

5 R. J'ai lu ma déclaration de 1995 après ma conversation. Une phrase

6 n'était pas correcte à la réalité comme je l'ai dit tout à l'heure, puis,

7 une autre avant.

8 Q. Une seule phrase, est-ce que vous vous en souvenez ?

9 R. Oui. La phrase c'était là où je donnais des noms de certains soldats en

10 disant qu'ils avaient emmené Martin Dosen. J'ai dit que je n'avais pas dit

11 que j'avais vu les soldats -- que ces mêmes soldats avaient emmené Martin

12 Dosen, mais que c'étaient d'autres soldats que je ne connaissais pas. Cela

13 c'était la différence.

14 Q. C'était la seule différence et tout le reste de ce qui est contenu dans

15 la déclaration du mois de juillet est conforme au mieux de vos souvenirs ?

16 R. Oui, au mieux de mes souvenirs, d'après la manière dont je vois les

17 choses aujourd'hui et dont je voyais les choses, à l'époque.

18 M. BULATOVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président, Madame,

19 Messieurs les Juges, je n'ai plus de questions pour ce témoin.

20 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci, Monsieur Bulatovic.

21 Madame Tuma.

22 Mme TUMA : [interprétation] Oui, Monsieur le Président. Je n'ai que deux

23 questions supplémentaires ou plutôt deux sujets. Merci.

24 Nouvel interrogatoire par Mme Tuma :

25 Q. [interprétation] La déclaration fournie au bureau du Procureur qui a

26 été prise en juillet en 1995, je vais maintenant montrer au témoin ladite

27 déclaration, et lui demander si c'est bel et bien sa signature qui y

28 figure ? Les numéros ERN sont 00327806 et 00327809 entre ces deux numéros.

Page 1315

1 Cela c'est la version en anglais. Pour être correcte, je vais le montrer

2 au témoin la version en B/C/S dont les numéros ERN sont 003327806 jusqu'à

3 7810. La déclaration en B/C/S n'a pas été signée. C'est la version en

4 anglais qui a été signée et je vais lui montrer les deux déclarations.

5 Mme TUMA : [interprétation] Monsieur l'Huissier, pourriez-vous m'aider,

6 s'il vous plaît ?

7 Q. Madame le Témoin numéro P-013, à la dernière page, page 5, dans la

8 version en anglais à ce que l'on voit à l'écran à présent, est-ce que --

9 M. VASIC : [interprétation] Excusez-moi. Je m'excuse, je pense que nous

10 sommes en audience publique et que l'on voit la signature ici.

11 Mme TUMA : [interprétation] Huis clos partiel.

12 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, effectivement. Merci, Monsieur

13 Vasic.

14 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel.

15 [Audience à huis clos partiel]

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13 Pages 1316-1321 expurgées. Audience à huis clos partiel.

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14 [Audience publique]

15 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Veuillez vous asseoir. L'audience est

16 reprise.

17 Maître Vasic ?

18 M. VASIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Après que vous

19 ayez expliqué le but de ce document, l'objectif recherché est la raison

20 pour laquelle il a été versé au dossier comme élément de preuve. Les

21 équipes de la Défense n'ont plus de doute concernant l'utilisation de ce

22 document et nous ne proposons plus que la déclaration originale soit

23 présentée et versée au dossier. Je voulais simplement répondre à la

24 question que aviez posée avant la suspension d'audience. Je vous remercie.

25 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie.

26 Maître Borovic ? Nous vous n'avons pas entendu aujourd'hui. C'est une

27 nouvelle surprise. Oui.

28 M. BOROVIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

Page 1323

1 Peut-être que je vais vous surprendre un peu plus souvent ces jours-

2 ci. Je voudrais soulever une question juridique que nous avions annoncée au

3 nom des trois équipes de la Défense. Je pense que le moment est venu pour

4 nous de soulever ce problème parce qu'aujourd'hui, nous avons vu admettre

5 cet additif au dossier. Trois témoins protégés ont été entendus et il y a

6 eu un certain nombre d'additifs de ce genre. Nous percevrons cela comme

7 étant un problème. Les équipes de la Défense sont franchement préoccupées

8 qu'en tant que conseil de la Défense nous puissions parvenir à un stade où

9 les intérêts de nos clients subiront un préjudice, qu'il y aura un risque

10 pour eux et que la procédure ne soit plus équitable. Nous estimons que les

11 dépositions obtenues par ces méthodes, qui sont des dépositions de témoins

12 protégés, en ce qui concerne ces témoins ainsi que d'autres témoins qui

13 comparaîtront au cours de ce procès pourraient être utilisées pour

14 contester leur crédibilité.

15 Qu'est-ce que je veux dire exactement ? Je veux dire que si cela

16 continue à être la pratique que ces additifs soit communiqués aux équipes

17 de la Défense un ou deux jours avant la comparution du témoin, ce qui

18 semble être devenu une pratique établie au bureau du Procureur au cours des

19 derniers jours, tel que l'additif pour les témoins portant le numéro P-006,

20 P-021 et P-013, à ce moment-là, nous nous trouvons en présence d'une

21 violation de l'Article 21(3)(b) du Statut, en vertu duquel l'accusé n'a pas

22 suffisamment de temps ou n'est pas dans les conditions appropriées pour

23 pouvoir réagir à tous ces additifs qui ont été communiqués aux équipes de

24 la Défense par le bureau du Procureur. Ceci devrait être un exemple

25 classique d'une violation de l'Article 21 du Statut.

26 Je pense, toutefois -- je pense également qu'il y a une autre

27 question plus grave qui est en jeu ici et qui risque de se poser au cours

28 de ce procès. Comme je l'ai dit d'emblée, c'est en ce qui concerne la

Page 1324

1 méthode utilisée pour obtenir les dépositions, le type de méthode dont nous

2 avons été témoins au cours de ces derniers jours. Chacune de ces

3 déclarations a des corrections qui ont été apportées par la suite en se

4 servant d'additifs. Je sais maintenant que nous parlons de témoins

5 protégés, mais si vous modifiez une déclaration, cela veut dire que d'une

6 certaine manière vous déterminez qu'elle est l'incidence d'une déposition

7 d'un témoin qui, parfois, peut être très différente de la déposition

8 d'origine que l'on trouve dans la déclaration. Le bureau du Procureur a

9 parfaitement le droit de le faire comme les témoins ont le droit de

10 modifier leurs déclarations.

11 Je prends pour exemple le témoin P-006, et j'ai même préparé un

12 exposé pour analyser ce cas. Toutefois, j'analyserais-là des éléments de

13 preuve que je n'ai pas le droit d'analyser. Ceci sera beaucoup trop

14 prématuré, mais si nous avons un témoin qui a prononcé un serment au moment

15 de déposer dans le procès de Dokmanovic et qui a présenté certains faits au

16 Tribunal, là encore nous avons un témoin qui a pris un engagement solennel

17 et qui s'exprime sur les mêmes faits d'une façon tout à fait différente, ou

18 plutôt, en modifiant les faits. La Défense estime que ceci pourrait -- dans

19 ce cas-là, il se pourrait bien que ce soit un cas d'un faux témoignage

20 après avoir prononcé le serment ou, plus exactement, un cas de parjure ou

21 "perjury".

22 De même, je ne souhaite pas maintenant entrer dans la question de savoir

23 qui a été l'instigateur de cet acte qui pourrait faire l'objet de

24 sanctions. Je ne veux pas en quoi que ce soit endommager les bonnes

25 relations qui existent entre les parties, mais le procès se déroule d'une

26 façon qui est parfaitement équitable. Tout ceci, en tout les cas, tout au

27 moins jusqu'à ce qu'il y a eu cette question des additifs. Mais, nous

28 sommes préoccupés si ces pratiques se poursuivent, notamment, à l'idée que

Page 1325

1 de tels additifs continueront d'être transmis aux équipes de la Défense en

2 leur donnant trop peu de temps pour réagir. Nous ne pensons pas que ceci

3 soit une pratique légitime. Incidemment, la méthode utilisée peut avoir des

4 effets sur la déposition de telle sorte que cela diminue sa crédibilité. Ce

5 que ceci signifie, en terme pratique, c'est que, lorsque l'on obtient une

6 déposition d'éléments de preuve, le versement de ceci comme élément de

7 preuve au dossier, le versement de tels additifs serait contraire à

8 l'atmosphère générale de diligence et de dignité qui doivent entourées ce

9 procès. Ceci est d'autant plus que nous considérons l'exemple qu'a

10 représenté le Témoin P-006. A un moment donné, les conditions étaient

11 réunies pour que soit appliqué l'Article 91(B)(ii) du Règlement, et à ce

12 stade, nous avons un problème que doit également examiner la Chambre de

13 première instance. Par conséquent, nous voudrions que le bureau du

14 Procureur exprime sa position par rapport à ces questions, et nous pensons

15 également qu'après nous aurons nous-mêmes examiné cela, la Chambre de

16 première instance peut souhaiter donner des instructions sur ce qui devrait

17 être fait à l'avenir pour obtenir des éléments de preuve ou des

18 dépositions, ceci avec les témoins proprement dits. Je vous remercie,

19 Monsieur le Président.

20 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie, Maître Borovic.

21 Effectivement, je comprends que ceci est dit au nom des trois équipes de la

22 Défense.

23 Maintenant, je ne sais pas si M. Demirdjian, ou --

24 M. AGHA : [interprétation] Monsieur Agha, en fait, Monsieur le Président.

25 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Très bien. Je souhaite savoir si vous

26 êtes en position maintenant de répondre à ce qui vient d'être dit, Monsieur

27 Agha ?

28 M. AGHA : [interprétation] Je peux répondre très brièvement à cette

Page 1326

1 question des additifs ou d'un des additifs. Premièrement, comme vous vous

2 en rendez compte, Monsieur le Président, Madame, Messieurs les Juges, ainsi

3 que mes confrères de la Défense, un grand nombre de ces déclarations ont

4 été recueillies en 1995, ce qui fait il y a assez longtemps, qu'il soit

5 vrai que certains de ces témoins aient également déposés dans l'affaire

6 Dokmanovic, certains ne l'ont pas fait. Dans de nombreux cas, les témoins

7 n'ont pas vu leurs propres déclarations jusqu'au moment où ils sont arrivés

8 ici pour qu'on puisse procéder à leur récolement. Donc, en toute justice à

9 l'égard des témoins, ils ont la possibilité d'examiner leur déclaration et

10 de confirmer si c'est bien exact parce que c'est une déclaration qui a été

11 communiquée à la Défense. S'il se peut qu'il y ait des erreurs et qu'ils

12 estiment qu'on a mal interprété ou que quelque chose n'est pas clair, et à

13 ce moment-là, nous communiquons à la Défense dès que possible et, bien

14 entendu, à la première occasion dès que le témoin a eu la possibilité de

15 préciser les points qui étaient nécessaires dans cette déclaration.

16 Maintenant, la position de l'Accusation est que ceci ne porte pas atteinte

17 à l'Article 21 du Statut en ce qui concerne le droit à un procès équitable.

18 Nous sommes simplement en train d'essayer de communiquer tout ce que l'on

19 peut faire pour que le procès soit aussi équitable que possible pour toutes

20 les parties. Si vous voulez bien regarder les additifs qui ont été jusqu'à

21 présent soumis, ils ne sont pas très longs. D'une façon générale, ils

22 permettent d'éclaircir des points clés, des points essentiels.

23 Si je peux revenir à la question du faux témoignage, avec tout le respect

24 que je dois, je ne pense pas que ceci soit nécessairement le cas parce que,

25 par exemple, je pourrais utiliser des dépositions d'un témoin que je

26 nommerais pas, qui a un pseudonyme, mais qui a également déposé dans le

27 procès Dokmanovic, et sur les points de cette déclaration, qui, selon ce

28 témoin, n'étaient pas exacts, n'étaient pas corrects. Lorsqu'on lui a posé

Page 1327

1 des questions au cours du contre-interrogatoire, en fait, le témoin a nié

2 en donnant des explications sur les raisons pour lesquelles il y avait ces

3 corrections. Par conséquent, ces corrections peuvent être faites dès que

4 possible à la déposition. Maintenant, le même témoin vient au Tribunal

5 aujourd'hui et on lui présente sa déposition et souhaitait modifier les

6 choses conformément à la déposition qui avait été faite dans l'affaire

7 Dokmanovic, donc, loin de manquer à son serment, il s'agit simplement

8 d'apporter les corrections voulues.

9 L'Accusation voudrait dire qu'à l'évidence j'espère bien qu'il n'y aura pas

10 des additifs dans tous les cas. C'est seulement si le témoin estime que

11 quelque chose a été mal interprété qu'il doit être très difficile. Il y a

12 quand même deux langues qui sont concernées. Certainement, la position de

13 l'Accusation est que ces additifs ne peuvent causer aucun préjudice à la

14 Défense dans la mesure justement où il s'agit de ces corrections. Voilà ce

15 que nous voudrions répondre pour commencer.

16 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie beaucoup, Monsieur

17 Agha.

18 Maître Borovic ?

19 M. BOROVIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président,

20 Madame, Messieurs les Juges. Il est très évident que mon confrère ne

21 connaît pas bien ce dont je viens de parler. Le témoin dont j'ai parlé, le

22 P-006, n'était pas le dernier témoin qu'on a entendu -- le témoin qu'on a

23 entendu hier. Je ne veux pas aller plus loin dans les détails.

24 Le problème qui se pose est beaucoup plus grave que cela. La Chambre a

25 entendu la Défense examiner les premiers deux témoins, Vesna Bosanac et

26 Binazija Kolesar. Il n'y avait pas d'additifs pour ces deux témoins, mais,

27 grâce à la compréhension de votre Chambre, nous avons eu la possibilité de

28 leur montrer les déclarations qui avaient été faites au bureau du

Page 1328

1 Procureur, les déclarations qui avaient été faites devant d'autres

2 juridictions lorsqu'ils ont comparu comme témoins en ce qui concerne la

3 même affaire. Après les contre-interrogatoires, il est devenu très clair

4 que c'était précisément de ces dates que le témoin avait parlé en ce qui

5 concernait les contradictions dans leurs dépositions. Ensuite, nous avons

6 eu, à ce moment-là, toute une suite d'additifs pour les deux témoins

7 suivants, ce qui montre clairement qu'une méthode a été utilisée et que

8 cette méthode n'est pas autorisée. C'est tout simplement quelque chose qui

9 n'est pas autorisée. Un témoin est, à ce moment-là, encouragé à faire un

10 faux témoignage, et je ne sais pas nécessairement par qui. Je vous

11 remercie.

12 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Lukic ?

13 M. LUKIC : [interprétation] Je serais très bref, Monsieur le Président.

14 Notre confrère du bureau du Procureur vient de nous confirmer que des

15 questions d'ordre matériel ont été précisées par ces différents additifs.

16 Cela a été dit à la page 64, ligne 9. C'est justement ce qui nous pose

17 problème. Il faut savoir, en fait, que nous nous sommes préparés pour le

18 procès. Nous avons donné des déclarations de témoin. Il semble que cela ait

19 été une pratique depuis des années. Nous avons évalué ces déclarations,

20 nous avons préparé notre Défense. Parfois, un témoin arrive un ou deux

21 jours avant ou le même jour de sa déposition, et il est absolument

22 essentiel et les choses matérielles sont changées. Si cela continue

23 -- en fait, si ce genre de chose continue, nous pourrions tout à fait

24 déchirer des déclarations qui ont été faites, il y a dix ans. Je ne peux

25 pas accepter le fait, suivant lequel les témoins ne voient que ces vieilles

26 déclarations qu'une fois qu'ils sont ici. Tous les témoins ont confirmé

27 qu'ils avaient vu et signé les déclarations, à l'époque. Alors, pourquoi

28 lorsqu'ils sont ici, dix ans plus tard, les témoins modifient certains

Page 1329

1 aspects qui sont absolument essentiels ? Je pense que c'est une infraction

2 de la règle, de l'Article 21 du Statut. Nous n'avons pas le temps suffisant

3 de bien nous préparer en connaissance de cause, pour notre Défense. C'est

4 ce qui nous pose des problèmes, des soucis, rien de plus.

5 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, Maître Vasic.

6 M. VASIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

7 Je voudrais tout simplement ajouter quelque chose, enchaîner à la suite de

8 mon confrère. En fait, il s'agit des préoccupations que nous ressentons. Je

9 dois dire que tous les témoins bénéficiant de mesures de protection avaient

10 des additifs. Il semblerait qu'il y ait également un additif pour ce qui

11 est du témoin suivant. Cela semble être la pratique établie, maintenant. A

12 chaque fois qu'un témoin arrive dans le prétoire, des corrections sont

13 apportées aux déclarations qu'ils ont faites, il y a dix ans. J'aimerais

14 rétorquer et répondre à mon confrère, et ce, à sujet d'un sujet. Il y a une

15 supposition qui a été avancée, à savoir, ces modifications sont nécessaires

16 par rapport à la façon dont les déclarations ont été faites. Les

17 déclarations ont été consignées exactement de la même façon en 1995, en

18 1998 et de nos jours. C'est la même méthode qui est utilisée par le bureau

19 du Procureur, nous le savons pour ce qui est des déclarations de témoins.

20 Nous savons très bien que la déclaration est faite en présence d'un

21 interprète, puis l'interprète relit la déclaration au témoin dans sa langue

22 maternelle et ledit témoin doit ensuite confirmer l'authenticité de ladite

23 déclaration, en signant la déclaration.

24 Déclaration qui d'ailleurs est également signée par l'interprète,

25 afin de confirmer que l'interprète a bien interprété la déclaration, et que

26 le témoin a accepté la déclaration comme étant sa propre déclaration.

27 En ce qui concerne l'équipe de la Défense, je ne pense pas qu'il y ait des

28 doutes qui planent à propos de l'exactitude de l'interprétation, ou à

Page 1330

1 propos du fait que la déclaration reprend ce qui a été dit par le témoin.

2 Mais c'est la pratique que nous avons toujours choisie. Maintenant, il

3 semblerait qu'il y ait une nouvelle pratique qui se dessine ici au sein du

4 Tribunal, ou en tout cas c'est une pratique que je n'ai jamais connu dans

5 les trois différentes affaires auxquelles j'ai participé. Je crains qu'il

6 s'agisse, en fait, d'une méthode qui représente une infraction très

7 sérieuse, à l'Article 21 du Statut, ainsi que par rapport aux droits de

8 l'accusé.

9 Je vous remercie.

10 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie.

11 [La Chambre de première instance se concerte]

12 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Alors, il s'agit, en fait, de

13 questions qui ont une importance capitale pour la Défense. Ces questions

14 étaient soulevées et ces questions émanent de la mise à disposition de la

15 Défense d'additifs, additifs qui correspondent à des déclarations faites

16 par des témoins qui ont été appelés ou convoqués par l'Accusation, et ces

17 additifs indiquent que le témoin a un point de vue différent à propos de

18 certaines questions qui avaient été consignées dans les déclarations

19 précédentes. Les additifs peuvent également permettre d'identifier des

20 modifications que souhaite apporter le témoin -- modification apportée à

21 des éléments de preuve qui ont été apportées dans le cadre d'une affaire

22 précédente au sein de ce Tribunal.

23 La Défense a exprimé sa préoccupation et a indiqué que, dans un

24 premier temps, cela pourrait représenter une infraction de l'Article 21, à

25 savoir la Défense n'a pas eu le temps nécessaire ou suffisant pour examiner

26 la nouvelle version des faits. La Défense a indiqué que cela pourrait

27 représenter un encouragement pour que les témoins de l'Accusation modifient

28 leurs éléments de preuve précédents, pour ce qui est de certains éléments

Page 1331

1 matériels.

2 Alors, il est absolument indubitable que la Défense de chaque accusé

3 a tout à fait le droit de bénéficier d'un temps adéquat pour justement

4 préparer leur défense. En ce sens, l'Accusation doit leur fournir en temps

5 voulu, tel que cela est prévu par le Règlement, doit alors fournir, disais-

6 je, les éléments de preuve que l'Accusation a justement l'intention

7 d'utiliser avec les témoins.

8 Dans ce cas d'espèce, je dirais que c'est un cas assez classique pour

9 ce Tribunal, dans cette affaire en l'espèce, les déclarations ont été

10 prises il y a de nombreuses années de cela. Je pense qu'en l'espèce, les

11 déclarations ont été dans un premier temps prises en 1995, donc il y a 10

12 ans. Pour certains de ces témoins, il faut savoir qu'ils ont également

13 présenté des dépositions dans une autre affaire, en 1998. Donc, la Défense

14 a exprimé sa préoccupation, puisque ces additifs qui lui ont été fournis

15 peu de temps avant que le témoin n'arrive dans le prétoire pour déposer,

16 comportaient des modifications à la déclaration fournie en 1995 par le

17 témoin ou peut-être des modifications qui avaient été apportées aux

18 éléments de preuve apportés en 1998 dans le cadre de cet autre procès.

19 Jusqu'à présent, il a été indiqué que le témoin en 1995, le témoin

20 avait signé sa déclaration, il l'avait acceptée comme véridique. Pour ce

21 qui est de l'année 1998, le témoin avait fourni des éléments de preuve

22 après avoir prononcé la Défense solennelle et ces éléments de preuve ont

23 donc été consignés au compte rendu d'audience.

24 Alors, ce qui s'est passé, c'est que le témoin est arrivé ici à La

25 Haye quelques jours avant sa déposition dans cette affaire-ci. Ce témoin a

26 identifié un certain nombre de faits. En fait, le témoin a considéré que ce

27 qui correspondait à sa déclaration préalable ou aux éléments de preuve,

28 qu'elle avait présentés, ne correspond pas à ce qui, d'après ce témoin,

Page 1332

1 correspond à la vérité. Alors, manifestement, si ce témoin est maintenant

2 convoqué par l'Accusation pour fournir une déposition, après avoir prêté

3 serment, le témoin devra fournir les preuves d'après ce qui correspond à la

4 vérité telle qu'elle la comprend maintenant. Il se peut que la façon dont

5 le témoin se souvienne de ces événements ait évolué au cours des dernières

6 années. Le témoin peut avoir compris les choses différemment. Le témoin

7 peut avoir entendu des choses différentes provenant d'une autre source. Il

8 se peut qu'il y ait toute une gamme de raisons qui nous permettent de

9 comprendre pourquoi un témoin comprend maintenant un fait de façon

10 différente de la façon dont elle le comprenait en 1995 ou en 1998 ou lors

11 d'autres années, lors d'années plus récentes.

12 Parce qu'un témoin dépose sous serment, et lorsque sa déposition

13 comporte des différences par rapport aux déclarations préalables ou

14 comporte des différences par rapport à ce qui a été dit sous serment dans

15 ce Tribunal ou dans tout autre tribunal, d'ailleurs, cela forme la base à

16 partir de laquelle dans un premier temps la Défense peut procéder au

17 contre-interrogatoire du témoin pour justement mettre en exergue les

18 différences. Plus les changements sont importants, plus les changements

19 sont véritablement des changements de base, il est évident que cela a une

20 incidence sur la crédibilité du témoin.

21 Deuxièmement, on peut, lors du contre-interrogatoire, demander au

22 témoin pourquoi le témoin a changé ces éléments de preuve. Il se peut qu'il

23 y ait des éléments extérieurs. Il se peut que quelqu'un leur ait relaté

24 quelque chose de nouveau. Il se peut qu'ils aient lu un ouvrage. Il se peut

25 qu'ils aient fait un certain nombre de choses. En l'espèce, il faut que,

26 lors du contre-interrogatoire, on puisse leur demander si l'Accusation leur

27 a suggéré de changer quoi que ce soit.

28 Mais, lorsqu'il y a changement par rapport à une déclaration qui a

Page 1333

1 été préalablement signée ou par rapport à des éléments de preuve qui ont

2 été présentés sous serment, de toute évidence, la Chambre doit considérer

3 si cela lamine la crédibilité du témoin ou si cela démontre que le témoin

4 s'est trompé, se trompe maintenant ou si le témoin relate quelque chose qui

5 est faux ou peut-être que cela indique la déclaration qui a été faite

6 préalablement correspondait à une histoire qui n'était pas véridique ou

7 cela peut indiquer également que la déclaration faite préalablement était

8 fausse. Mais, pour ce qui est de ces questions de crédibilité, pour ce qui

9 est de savoir pourquoi il y a une modification, cela peut être considéré

10 par la Chambre. C'est pour cela qu'il est extrêmement important que la

11 Défense soit en mesure de procéder au contre-interrogatoire en posant des

12 questions à propos des changements afin d'aider la Chambre à comprendre

13 pourquoi cela s'est passé, et afin de déterminer si ces changements peuvent

14 faire planer le soupçon, et afin de savoir si la Chambre n'est pas en

15 mesure d'accepter les éléments de preuve apportés par le témoin, à ce

16 moment-là.

17 Lorsqu'un témoin indique à une partie qui convoque ce témoin, qui se

18 propose de modifier les éléments de preuve qu'ils ont apportés

19 préalablement ou les éléments de preuve qui faisaient l'objet d'une

20 déclaration, si cette déclaration ou si ces éléments de preuve sont connus

21 de l'autre partie, il est tout à fait en bonne et due forme que l'autre

22 partie soit informée de ces changements. Dans le cas de l'Accusation,

23 l'Accusation a un devoir, et ce devoir consiste à informer la Défense

24 immédiatement que le témoin en question a indiqué qu'il y avait des

25 différences considérables entre les éléments de preuve qui vont être

26 apportés par le témoin par rapport à ce qui aurait pu être dit lors d'une

27 déposition préalable, ce qui aurait pu faire l'objet d'une déclaration

28 préalable. Il y a une raison qui est extrêmement importante et qui

Page 1334

1 explique, en fait, pourquoi l'Accusation doit notifier immédiatement la

2 Défense, car la Défense doit pouvoir avoir la possibilité de préparer son

3 contre-interrogatoire. Mais si cela est nécessaire, la Défense doit pouvoir

4 mener à bien son enquête à propos de la nouvelle version des faits avant

5 qu'elle ne procède au contre-interrogatoire.

6 L'objectif des additifs est justement de fournir à la Défense une

7 modification des changements importants. Le fait qu'il y a des changements

8 importants suscite pour la Chambre de première instance des questions

9 relatives à la crédibilité, et la Chambre doit pouvoir déterminer cela.

10 Mais la Défense doit avoir la possibilité de mener à bien son enquête. Il

11 doit avoir la possibilité également de se préparer afin de pouvoir prendre

12 en considération les modifications par rapport à la première version de la

13 déclaration ou de la déposition du témoin.

14 Les circonstances de ce Tribunal et des audiences du Tribunal sont

15 telles qu'il est inévitable que la situation suivante se pose, un témoin

16 arrive ici et indique, en fait, que la façon dont ils comprennent les faits

17 matériels est différente à certains aspects à ce qu'ils ont dit

18 préalablement. Dans chacune des affaires pour lesquelles cette Chambre a

19 siégé, cela s'est produit, et des additifs ont été fournis afin de notifier

20 la Défense. Ces circonstances ne sont pas surprenantes, normalement. Il

21 n'est pas surprenant normalement de se rendre compte qu'il y a certaines

22 modifications ou corrections qui sont nécessaires. Alors, il s'agit de

23 savoir ou pour ce qui est de savoir si cela a son importance ou si cela a

24 une connotation négative - et je pense à ces modifications - c'est quelque

25 chose qu'il faudra déterminer après que ces questions ont été examinées

26 lors du contre-interrogatoire, et compte tenu de tous les éléments de

27 preuve apportés dans cette affaire.

28 Alors, potentiellement, cela représente une difficulté pour la

Page 1335

1 Défense, à savoir, si la notification relative aux modifications leur est

2 donnée au tout dernier moment. De ce fait et à cause de cela, cette Chambre

3 va réitérer ce qu'elle a déjà indiqué par le passé à l'intention du bureau

4 du Procureur et, lors d'affaires précédentes, à savoir, tous les efforts

5 doivent être déployés pour pouvoir identifier ces modifications à un moment

6 qui permettra à la Défense d'avoir le temps nécessaire ou suffisamment de

7 temps pour mener à bien son enquête pour se préparer à prendre en

8 considération ces modifications. Il y a donc des moments où ces questions

9 sont assez simples et où le conseil de la Défense est en mesure de traiter

10 cela sur le terrain, et sans aucun problème et sans qu'il n'y ait aucune

11 injustice créée.

12 Mais parfois ces modifications sont si importantes, parfois elles

13 soulèvent ou elles présentent une toute nouvelle version des faits, ce qui

14 requiert une enquête. Lorsque cela se produit, cette Chambre est d'avis que

15 le contre-interrogatoire peut commencer avec un peu de retard, et cela,

16 afin de donner à la Défense le temps nécessaire pour pouvoir prendre

17 connaissance des modifications. Cela peut se faire soit en déférant le

18 contre-interrogatoire ou en demandant que le contre-interrogatoire qui

19 portera sur cette modification ait lieu plus tard, et nous voyons, en fait,

20 ce qui est la solution la plus pragmatique.

21 Cela est fait afin d'assurer que la Défense se voit octroyer

22 suffisamment de temps pour en considération ou prendre connaissance des

23 changements matériels et pour pouvoir, bien entendu, mener à bien son

24 enquête pour voir quelle est cette nouvelle version des faits.

25 Ce qui signifie cette Chambre, dans le cadre de cette affaire, va

26 garantir et va s'assurer que la Défense ne soit invariablement lésée par

27 ces modifications tardives. Nous voulons éviter que cela devienne une

28 source constante de difficultés dans le cadre de cette affaire. Comme je

Page 1336

1 l'ai indiqué, l'Accusation devra faire de son mieux, et devra faire tout

2 son possible pour assurer que ces modifications font l'objet d'une

3 notification auprès de la Défense, et ce, en temps voulu. Manifestement,

4 lorsqu'il s'agit de modifications importantes, un jour ou deux, ne

5 représente pas un temps adéquat.

6 Pour toutes ces raisons, la Chambre de première instance est d'avis que

7 nous pouvons prévoir qu'il y aura d'autres additifs, car cette Chambre sait

8 par expérience que ces additifs ont été présentés dans d'autres affaires et

9 dans toutes les affaires, en fait, qu'elle a entendues, en tous cas. La

10 Chambre va s'assurer, affaire après affaire, élément par élément, que cela

11 ne va pas constituer un désavantage, un inconvénient pour la Défense, et

12 ce, afin que le procès puisse être mené à bien de façon toute équitable.

13 J'aimerais également mentionner autre chose car, au vu des

14 circonstances qui se sont produites jusqu'à présent, la Chambre ne pense

15 pas qu'il y ait de raisons pour considérer qu'il y ait eu un comportement

16 actif qui aurait encouragé le témoin ou un témoin à modifier la façon dont

17 ce témoin comprenait les faits pertinents car la Chambre de première

18 instance est très vigilante à ce sujet, et ce, naturellement, comme la

19 Défense l'est, bien entendu, naturellement également. Mais, pour le moment,

20 les circonstances semblent être -pour la Chambre, en tous cas - expliquées

21 par le fait que la mémoire humaine n'est pas toujours précise ou, en tous

22 cas, dans un des cas par le fait que le témoin avait acquis une

23 connaissance supplémentaire après avoir lu un livre. En tant que Chambre de

24 première instance, nous ne sommes pas préoccupés, pour le moment, que ce

25 genre de comportements ait eu lieu. Bien entendu, nous allons continuer à

26 être vigilant à l'avenir afin de voir si ce genre de problèmes peut se

27 poser.

28 Je pense que j'en ai suffisamment à ce sujet pour indiquer quel est

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1 le point de vue adopté par la Chambre à propos de l'objection soulevée.

2 Nous comprenons que c'est une question qui peut représenter une

3 préoccupation extrêmement sérieuse pour la Défense, et il est tout à fait

4 juste que cela ait été soulevé pendant cette phase, mais nous espérons

5 avoir dit que nous ne pensons pas que ces préoccupations de la Défense

6 pourraient aboutir à d'énormes problèmes. Nous espérons également que

7 l'Accusation a bien compris que nous allons continuer à veiller au grain,

8 et qu'il faut qu'il y ait notification des modifications de ce genre, et

9 que s'il y a des problèmes à propos de ces modifications, il faudra que

10 l'Accusation fasse quelque chose.

11 Sur ces bonnes paroles, nous allons maintenant lever l'audience sans

12 avoir fait comparaître le témoin suivant, et nous allons reprendre demain à

13 9 heures.

14 --- L'audience est levée à 13 heures 58 et reprendra le mercredi 9 novembre

15 2005, à 9 heures 00.

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