Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mercredi 22 février 2006

2 [Audience publique]

3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

5 --- L'audience est ouverte à 14 heures 18.

6 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bonjour. J'aimerais vous rappeler que

7 la déclaration solennelle que vous avez faite au tout début de votre

8 témoignage est toujours en vigueur. Je crois que Me Lukic doit terminer

9 votre contre-interrogatoire à présent.

10 A vous Maître Lukic.

11 M. LUKIC : [interprétation] Bonjour, Madame et Messieurs les Juges. Bonjour

12 à toutes les personnes présentes dans le prétoire. LE TÉMOIN : BOGDAN VUJIC

13 [Reprise]

14 [Le témoin répond par l'interprète]

15 Contre-interrogatoire par M. Lukic : [Suite]

16 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Vujic.

17 R. Bonjour.

18 M. LUKIC : [interprétation] J'ai deux petites interventions au niveau du

19 compte rendu d'audience d'hier. En page 475, lignes 10 et 11, il y a une

20 question maladroitement traduite que j'ai posée à M. Vujic et il a répondu.

21 Je vais répéter cette question, celle de savoir si le témoin avait

22 connaissance des dispositions de la loi régissant la procédure pénale

23 prévoyant que pour tout faux témoignage il peut y avoir une responsabilité

24 pénale d'impliquer. Le témoin m'a répondu à cette question.

25 Et la deuxième intervention se situe à la page 4 774, ligne 17, j'ai

26 demandé au témoin : "Si après la réunion de Velepromet lorsqu'il a vu le

27 commandant Lukic," et au compte rendu d'audience, il dit "à la réunion,"

28 alors que le commandant Lukic n'était pas à la réunion à Velepromet. C'est

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1 la raison pour laquelle d'ailleurs j'ai voulu que cette rectification soit

2 apportée au compte rendu d'audience.

3 Q. Monsieur Vujic, nous allons continuer avec les questions et réponses.

4 Je vous redemanderais de répondre le plus brièvement possible, puisque je

5 suis très limité par le temps. Nous allons passer aux événements de

6 Negoslavci à la date du 19, date de votre arrivée, et l'heure est celle de

7 20 heures. Avez-vous une information disant que le siège du commandement de

8 la Brigade de la Garde se trouvait au même bâtiment que le commandement du

9 Groupe opérationnel sud ?

10 R. Partant de l'information que j'ai eue, j'ai su que le commandant

11 Sljivancanin était le chef chargé des instances de sécurité, et qu'il était

12 le seul techniquement autorisé à venir. Les autres pouvaient se présenter

13 seulement si convoqués par le commandant Sljivancanin ou un autre

14 commandant.

15 Q. Réponse brève, est-ce que le siège de cette instance-là se trouvait

16 dans le même bâtiment ?

17 R. Non, je ne pense pas.

18 Q. Une fois de plus, oui ou non. Lorsque vous êtes arrivé, une fois que

19 cette réunion a commencé chez le colonel Mrksic, est-ce que le commandant

20 Sljivancanin était déjà là ou est-ce qu'il est arrivé plus tard ?

21 R. Je vais essayer de répondre. Il n'était pas de façon évidente devant

22 nous lorsque nous avons dit bonjour, ce qui fait qu'il a pu arriver à un

23 moment donné lorsque les présentations ont été faites au niveau du colonel

24 Mrksic, du colonel Pavkovic et du lieutenant-colonel Panic.

25 Q. Nous n'allons pas répéter les groupes qui étaient présents. Les deux

26 groupes étaient présents ?

27 R. Oui.

28 Q. Nous allons faire une petite digression. J'ai oublié de vous demander

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1 hier. Savez-vous si ce type de groupes opérationnels qui étaient créés au

2 niveau de la 1ère Région militaire ou appartenant à l'administration de la

3 sécurité, est-ce que ces groupes sont allés au Groupe opérationnel nord

4 aussi ?

5 R. Je ne le sais pas. Je n'ai pas d'information.

6 Q. Alors, vous êtes restés ensemble à cette réunion, et après la réunion

7 avec Sljivancanin, vous avez quitté Velepromet, vous et votre personnel

8 opérationnel ?

9 R. Oui.

10 Q. Après la réunion que vous avez eue chez Mrksic et suite à ce que Mrksic

11 et Sljivancanin vous ont dit, vous avez présenté un témoignage en long et à

12 large auprès du tribunal de Belgrade, aux enquêteurs de ce Tribunal-ci et

13 au procès de Belgrade. Vous êtes bien d'accord avec moi, n'est-ce pas ?

14 R. Oui.

15 Q. Dans votre déclaration auprès du bureau du Procureur de La Haye, vous

16 avez indiqué que vous aviez prêté foi à ce que Sljivancanin vous avait dit

17 à l'occasion des rapports présentés lors de cette réunion, n'est-ce pas ?

18 R. Oui.

19 Q. Veuillez nous indiquer pourquoi, en votre qualité de colonel, le

20 commandant vous présente un rapport et non pas le commandant du groupe

21 opérationnel ?

22 R. Il s'agissait d'un devoir qui lui a été confié.

23 Q. Et vous l'avez accepté ?

24 R. Oui.

25 Q. A cette réunion chez le colonel Mrksic, est-ce que Mrksic, en votre

26 présence, aurait dit de se présenter auprès du chef médical Jovanovic pour

27 ce qui est de la désignation des médecins qui devaient y aller le

28 lendemain ?

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1 R. Non. Cela, je ne l'ai pas entendu.

2 Q. Est-ce que vous avez dit quoi que ce soit vous-même à cette réunion ?

3 R. Non. Mais soyez plus précis.

4 Q. La réunion chez Mrksic.

5 R. Non. Il n'y a que Slavko Tomic qui posait ça et là des questions. Pour

6 savoir si c'était là à la réunion chez le colonel Mrksic ou ailleurs, mais

7 on y a également vu une présentation graphique des pertes. Peut-être cela

8 est-il important ?

9 Q. Ce qui est important à mes yeux, c'est de savoir si vous avez pris la

10 parole pour dire quelque chose vous-même.

11 R. Non, je n'arrive pas à m'en rappeler. Je ne pense pas.

12 Q. Après l'entretien avec Sljivancanin, est-ce que c'est vous qui aviez

13 dit que vous aviez été envoyé par l'administration de la sûreté pour

14 apporter une aide professionnelle ?

15 R. Non. C'est Slavko Tomic qui a posé les questions en sa qualité de chef

16 du groupe opérationnel.

17 Q. Quelques propos au sujet de la conversation que vous avez eue avec

18 Sljivancanin ce soir-là à Negoslavci. Nous sommes en train de parler de la

19 réunion qui a suivi la conversation que vous avez eue avec le colonel

20 Mrksic. A votre avis, combien de temps cet entretien avec Sljivancanin a-t-

21 il duré ? Pouvez-vous nous le dire ?

22 R. Je ne peux pas être trop précis, voyez-vous. Le commandant Sljivancanin

23 a planifié le temps et le contenu, et s'agissant de ce contenu, je dirais

24 que c'est un contenu qui a été planifié. Tout officier est censé se

25 préparer en vue de la réunion qui vient.

26 Q. S'agissant de votre conversation avec le colonel Mrksic, vous avez

27 déclaré que, selon vous, cela avait duré dix à 15 minutes. Est-ce que

28 celle-ci a été plus longue ou plus courte que la précédente ?

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1 R. Plus courte.

2 Q. Alors, je vais vous citer en vitesse ce que vous avez déjà dit en guise

3 de témoignage. Donc, mon client a dit que Vukovar avait été libéré. Il vous

4 a communiqué, à vous de confirmer si c'est exact.

5 R. Oui, Vukovar a été libérée.

6 Q. Ensuite qu'il y a eu reddition des combattants de la partie adverse ?

7 R. Il a parlé de ce qui s'est passé dans la zone des activités de combat.

8 Il a été question "d'Oustachi", "d'ennemis", les Croates disaient les

9 Chetniks, l'ennemi, les Serbo-Chetniks, enfin c'étaient là les expressions

10 utilisées au champ de bataille.

11 Q. S'agissant de Mitnica, est-ce qu'il en a parlé ?

12 R. Il a dit que c'était la dernière poche de résistance. Il a parlé de

13 certaines conditions de reddition, et que c'est le colonel Pavkovic qui est

14 allé pour réaliser la reddition en question.

15 Q. En page 4 493 du compte rendu d'audience, il y a quelques jours, vous

16 avez qu'il avait déclaré, à ce moment-là, que des criminels potentiels se

17 cachaient à l'hôpital, qu'ils craignaient la reddition, qu'ils se

18 blessaient eux-mêmes.

19 R. Il a dit que la situation la plus floue était au niveau de l'hôpital,

20 et je m'en excuse.

21 Q. Je vous rappelle seulement ce que vous avez dit la fois passée.

22 R. Oui, je comprends.

23 Q. Vous avez dit qu'à Velepromet il y avait des forces paramilitaires

24 croates qui s'étaient mêlées à la population civile. C'est ce que vous nous

25 avez dit.

26 R. Je crois que je me suis exprimé autrement.

27 Q. J'ai donné lecture de ce que vous avez dit. Mais si vous voulez, on

28 peut citer à la lettre. Dites-nous ce que vous avez dit.

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1 R. D'après mes souvenirs, j'ai déclaré ce que le commandant Sljivancanin

2 nous a dit en répondant à la question du colonel Tomic, pour ce qui était

3 de savoir combien d'Oustachi il y avait de faits prisonniers. Sljivancanin,

4 lui, a dit qu'on en ignorait le nombre exact, qu'ils se rendaient de façon

5 successive, qu'ils se mêlaient aux civils et qu'ils venaient même en

6 compagnie de civils, et qu'on ne savait pas qui était qui. Il a dit qu'à

7 Velepromet il y avait environ 2 000 personnes mélangées, toute personne

8 confondue. Il y avait plus d'hommes civils que de militaires, Oustachi ou

9 criminels. Il a dit qu'il y avait aussi des membres de la TO avec la foule,

10 et il a dit que ces installations étaient sécurisées par les membres de la

11 police militaire, voire la sienne ou celle qui relevait des compétences du

12 colonel Mrksic, avec un officer à leur tête s'appelant X Y.

13 Q. Il vous a dit que les autocars allaient arriver ce soir là ?

14 R. Oui, bien sûr. On a dû poser des questions pour les éléments qui

15 étaient peu clairs. Donc il y avait une espèce d'ambiguïté au niveau de nos

16 tâches d'officiers, et il nous a dit qu'il ne fallait pas que nous nous

17 préoccupions, qu'il n'y aurait pas de surprise particulière, que les choses

18 étaient planifiées, que des autocars allaient venir et que tout était

19 organisé.

20 Q. Je suppose que vous nous avez restitué vos dépositions ?

21 R. Oui, en effet.

22 Q. On va vous les redonner. On prendra la déposition que vous avez faite

23 devant le tribunal militaire.

24 R. Ecoutez, s'il y a quoi que ce soit de contestable me concernant, posez-

25 moi la question. Je n'ai pas besoin de ce texte. Ce sont mes dépositions.

26 Posez-moi la question et je vous répondrai de façon concrète. Me rappeler

27 ici que j'ai dit telle chose là-bas, telle chose ici, nous sommes ici

28 devant ces Juges de la Chambre ici présents pour tout tirer au clair, et je

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1 vous prie de procéder ainsi.

2 Q. Monsieur Vujic, avec l'aide des Juges de la Chambre, je vous pose des

3 questions et à vous de répondre. Il appartiendra aux Juges de dire si ces

4 questions ne sont pas admises ou si c'est au contraire le cas. C'est la

5 pratique qui appliquée ici.

6 R. Je m'excuse dans ce cas-là.

7 M. LUKIC : [interprétation] Pour les besoins de mon confrère du bureau du

8 Procureur, je précise qu'il s'agit des pages 8 et 9 en anglais, dernier

9 passage.

10 Q. Est-ce que vous pouvez passer vous à la page 7 ?

11 R. De ma première déclaration ?

12 R. Oui, je ne suis pas en train de parler de la version B/C/S.

13 M. LUKIC : [interprétation] Je m'excuse une fois de plus aux interprètes.

14 Q. Version anglaise, page 4, paragraphe 2.

15 "Suite à cela, Sljivancanin nous a informé du fait que les derniers

16 points de résistance étaient brisés à Vukovar, qu'il y a eu reddition en

17 masse des membres des unités et de civils, et qu'il a été créé un centre de

18 rassemblement au niveau de l'entreprise Velepromet non loin de la caserne

19 où se trouvent quelque 2 000 personnes. Parmi eux bon nombre de femmes,

20 d'enfants, de vieillards et autres civils. On ne savait pas lesquels

21 d'entre eux avaient participé à l'insurrection armée et lesquels d'entre

22 eux auraient éventuellement commis des crimes. A cet effet, il a également

23 dit qu'il fallait séparer les hommes âgés de 16 à 65 ans, des femmes et des

24 vieillards, afin que ces hommes, dès cette nuit-là, lorsque les autocars

25 seront arrivés, soient montés à bord desdits autocars aux fins d'être

26 transportés au centre de rassemblement de Sremska Mitrovica, où l'on

27 reprendrait la procédure telle que prévue à l'égard de ces personnes."

28 Autre chose que nous allons étudier et nous viendrons à la question.

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1 S'agissant de votre déclaration auprès du bureau du Procureur de La Haye,

2 donc la déposition que vous avez faite à l'intention de M. Le Procureur.

3 M. LUKIC : [interprétation] Je me propose de donner lecture de la page 8 en

4 version anglaise.

5 Q. Vous, il vous faut vous référer à la page 7. Je vous donne lecture de

6 la toute dernière phrase. Au sujet des mêmes faits, votre témoignage se lit

7 comme suit :

8 "Il a dit que notre mission, une fois que les autocars militaires seraient

9 arrivés, serait de procéder à la séparation des prisonniers de guerre, des

10 femmes et des enfants à Velepromet. Il a, en particulier, parlé des hommes

11 âgés de 16 à 65 ans. Il s'agissait de les faire monter à bord des autocars,

12 suite à quoi, ils seraient évacués vers Sremska Mitrovica conformément au

13 planning déterminé. Et il a précisé que les autocars seraient là dans le

14 courant de la nuit."

15 Penchons-nous sur ce que vous avez dit au procès à Belgrade toujours sur le

16 même sujet.

17 M. LUKIC : [interprétation] A l'intention de mon confrère M. le Procureur,

18 page 9 de la version anglaise. Je vais donner lecture de la page 33 de

19 votre témoignage dans l'affaire Ovcara.

20 Q. Sur le même sujet vous avez déclaré ce qui suit, je donne lecture de la

21 fin de la page 33.

22 "Notre mission consisterait à coordonner la séparation des hommes âgés de

23 16 à 65 ans, des femmes et des enfants, les autocars étant censés arriver

24 vers 22 ou 23 heures, et on nous a dit qu'il ne fallait pas que nous nous

25 inquiétions particulièrement parce que la situation était sous contrôle,

26 les officiers de la police militaire chargés de sécuriser le tout étaient

27 conscients de leur mission, de leur devoir, et que l'on attendait que

28 l'arrivée des autocars."

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1 Alors vient ma question. C'est bien tout cela que vous avez déclaré ?

2 R. Oui, à des enquêteurs différents sur le même sujet.

3 Q. Essentiellement…

4 R. C'est la même teneur, c'est les mêmes mots-clés.

5 Q. Ma question --

6 R. Allez-y avec votre question.

7 Q. Pourquoi ici, devant ce Tribunal-ci, pour la première fois avez-vous

8 déclaré des choses que vous n'avez pas déclarées à l'intention du Procureur

9 lors des préparatifs pour votre témoignage ? Pourquoi n'avez-vous pas dit

10 que Sljivancanin vous avait dit que le tri avait déjà été effectué, vous

11 l'avez dit pour la première fois ici ?

12 R. Il l'a dit non pas seulement devant moi, mais devant tout le monde.

13 Oui, il l'a dit.

14 Q. Mais pourquoi avez-vous dit trois fois des choses différentes ?

15 R. Ce sont des représentants différents ou des juges différents qui m'ont

16 posé les questions, et chacun a posé la question différemment pour essayer

17 de voir si je dissimulais quelque chose, si j'essayais de représenter de

18 façon erronée les choses ou si quelque chose était peu clair. J'ai apporté

19 des éclaircissements. J'ai dit que c'était un devoir. J'ai dit devant cette

20 Chambre de première instance, en toute sincérité, ce que j'ai dit en

21 répondant à vos questions. Je vous ai décrit la séquence des événements.

22 Q. Donc au tribunal militaire et à l'occasion de votre témoignage à

23 Belgrade vous avez également été entendu comme témoin auprès du juge

24 Alimpic, vous avez également été entendu comme témoin. Vous avez passé sous

25 silence des faits que vous avez avancés ici ?

26 R. Monsieur Lukic, je n'ai rien passé sous silence. Ce que je voudrais,

27 c'est que l'on détermine ce que le commandant Sljivancanin a déclaré devant

28 le président de la Chambre du tribunal militaire, et j'aimerais le savoir,

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1 mais c'est une chose que j'ignore.

2 Q. Essayons un peu d'aller de l'avant. Compte tenu de la mission qui vous

3 a été confiée par vos supérieurs de l'administration de la sûreté, ceux

4 qu'on a mentionnés hier notamment, suivant les intentions qui étaient les

5 leurs, vous avez imaginé votre arrivée à Vukovar en votre qualité de haut

6 responsable de la sûreté, vous êtes allé là-bas pour faire monter des gens

7 à bord de l'autocar et non pas pour faire autre chose. Expliquez-moi ?

8 R. Monsieur Lukic, c'est la raison pour laquelle nous y sommes allés.

9 C'est la question la plus complexe dans l'histoire des guerres, d'après ce

10 que j'ai pu apprendre, à savoir, procéder au tri des prisonniers de guerre

11 et des civils pour préserver leur vie et les acheminer à destination dans

12 toute sécurité, pour procéder aux procédures prévues en application des

13 dispositions du droit de guerre international.

14 Q. Bien.

15 R. Compte tenu de tout ce qui se pouvait se produire là-bas, les généraux

16 compétents qui se trouvaient être responsables pour ce qui est de faire

17 respecter les règles et la loi, c'est pour cela qu'ils ont envoyé trois

18 colonels sur les lieux pour que cette mission soit accomplie comme il se

19 doit.

20 Q. Monsieur Vujic, à chaque fois que vous avez fait des déclarations, on

21 vous a donné le droit de procéder à des rectifications s'agissant de ce que

22 vous avez déjà dit auparavant, notamment pour ce qui est du bureau du

23 Procureur en 2002 et devant M. Moore il y a sept jours. Alors ce fait-là,

24 vous ne l'avez jamais mentionné, oui ou non ?

25 R. J'ai procédé à des rectificatifs, ce que j'ai dit tout à l'heure devant

26 vous et devant M. Sljivancanin. Parce qu'avant, au niveau du tribunal

27 spécial et au niveau du tribunal militaire, il n'y avait pas le commandant

28 Sljivancanin de présent. A nous deux de voir si ce que j'ai dit correspond

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1 à la vérité ou pas.

2 Q. Je vais vous dire tout de suite l'opinion de mon client, qui est celle

3 de ne pas avoir dit cela, mais d'avoir dit ce que vous avez dit dans vos

4 témoignages précédents.

5 R. Il n'en est pas ainsi parce qu'il y a d'autres témoins qui ont été

6 présents.

7 Q. Juste après la réunion avec Sljivancanin, vous êtes allé à Velepromet;

8 c'est cela ?

9 R. Oui.

10 Q. Par le passé, avant jeudi de la semaine dernière, quand vous avez

11 commencé à déposer devant cette Chambre et même lors de votre récolement

12 avec le bureau du Procureur, vous n'avez jamais dit que Sljivancanin avait

13 parlé avec vous devant le commandement sur la route. Vous l'avez dit pour

14 la première fois ici dans cette Chambre.

15 R. Oui, je n'ai pas vraiment dit que c'était sur la route.

16 Q. Oui, mais c'était devant le bâtiment ?

17 R. Oui, devant le bâtiment.

18 Q. C'était devant le bâtiment, là où il y avait le QG ?

19 R. Oui, c'est cela. Là où il y avait le QG.

20 Q. Quand vous avez corrigé votre déclaration lors de la réunion avec le

21 bureau du Procureur le 14 février, vous avez signé le corrigendum. Le point

22 1 a été lu à M. Moore, le point 1 du corrigendum où il est écrit la chose

23 suivante : "La réunion avec M. Sljivancanin au QG à Negoslavci," et cetera,

24 et cetera. Là encore, vous avez dit que c'était au QG du commandement.

25 R. Ecoutez, Monsieur Lukic, on a eu une partie de la réunion qui était

26 dans le QG et on a continué ensuite devant le bâtiment.

27 Q. Mais il faut conclure --

28 R. On a parlé de la même chose de toute façon. On a parlé de la mission.

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1 Il nous a informés -- je m'excuse.

2 Q. J'attendais l'interprétation.

3 La réunion avec Sljivancanin s'est poursuivie dans le bâtiment, et

4 vous êtes sortis ensemble pratiquement jusque dans la rue ?

5 R. Non, pas jusque dans la rue. Cela ne s'est pas vraiment passé comme

6 cela.

7 Q. Voici la position de mon client : à ce moment-là, quand vous étiez

8 pratiquement en route pour Velepromet, vous avez dit que vous vouliez vous

9 rendre le lendemain à l'hôpital ?

10 R. Non. On a parlé de l'hôpital, c'est vrai, à cette occasion, parce que

11 le colonel Slavko Tomic avait demandé si l'hôpital allait être évacué aussi

12 ce soir-là. Le commandant Sljivancanin a dit non, il ne serait évacué

13 qu'une fois qu'on aurait évalué la situation à l'hôpital, et donc cela ne

14 pourrait se faire que le lendemain au matin, qu'une décision serait prise

15 pour savoir qui s'y rendrait. Mais c'était un autre plan. Il a dit que,

16 personnellement, il serait en charge de ce plan.

17 Q. Parfait. Passons à autre chose, mais on parle toujours quand même des

18 mêmes événements. Si vous pouviez regarder un petit peu la déclaration que

19 vous avez donnée devant le tribunal militaire. Vous êtes sans doute

20 d'accord avec moi pour dire qu'une demi-page porte sur ce que vous avez

21 entendu à cette occasion de la part de Mrksic et de Sljivancanin. C'est

22 dactylographié sur votre déclaration.

23 Nous n'avons pas entendu votre réponse. Vous êtes d'accord avec ce

24 que je viens de dire ?

25 R. Oui.

26 Q. Dans la déclaration aux enquêteurs du bureau du Procureur, après quatre

27 jours d'interview, il y a une page et demie de pages dactylographiées à

28 interligne simple qui porte sur ce dont vous vous souvenez de cette

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1 conversation; c'est cela ?

2 R. Oui.

3 Q. Quand vous avez fait votre première déposition aux enquêteurs de La

4 Haye, vous avez demandé une correction par rapport à ce que vous aviez

5 déclaré devant le tribunal militaire, et c'est là où le juge d'instruction

6 Trifunovic avait parlé de son interprétation du fait que vous ayez entendu

7 des bruits du côté d'Ovcara. Vous avez dit qu'il avait mal interprété ce

8 que vous aviez dit; c'est cela ?

9 R. Oui.

10 Q. Dites-moi oui ou non, et on continuera. Jamais devant aucun juge

11 d'instruction, devant aucun enquêteur du bureau du Procureur, vous n'avez

12 dit ce que vous avez dit il y a deux ou trois jours ici, c'est-à-dire cette

13 phrase que vous avez dite il y a deux jours lors de votre interrogatoire

14 principal avec M. Moore, cette phrase qui figure à la page 4 497, le fait

15 que Sljivancanin, alors que vous partiez, vous aurait dit : Ne soyez pas

16 surpris si les Chetniks massacrent les Oustachi ?

17 R. Il a peut-être été écrit.

18 Q. Oui, mais il y avait aussi les Oustachi.

19 R. Cela a été écrit certes, mais il y a aussi un commentaire de l'adjudant

20 Korica.

21 Q. Oui, c'est vrai. C'est la.

22 R. Je dois encore répéter.

23 Q. Qu'a-t-il dit exactement ? Pouvez-vous le répéter ?

24 R. Ce sera intéressant de voir comment les Chetniks font un massacre et

25 mettent en scène le massacre organisé et comment ils égorgent le monde.

26 Q. Vous avez répété cela, mais vous n'avez pas répondu à ma question. Ma

27 question n'était pas la même chose. Ce n'est pas ce qu'on veut entendre. Ce

28 que l'on veut savoir c'est si vous l'avez déjà dit auparavant.

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1 R. En effet. Je ne l'avais jamais dit devant aucune autre Chambre, aucune

2 autre institution devant lesquelles j'ai déposé.

3 Q. Vous êtes d'accord, c'est quand même une phrase qu'on n'oublie pas ?

4 C'est quelque chose qui frappe l'esprit quand même. Cela donne la chair de

5 poule.

6 R. Oui, surtout dans mon cas, parce que j'ai repensé par la suite, et

7 j'avais rencontré Vojvoda, je vous en ai déjà parlé, quand j'ai eu

8 l'altercation avec Vojvoda, Vojvoda qui était chef chetnik, et quand il m'a

9 mis son couteau sous la gorge.

10 Q. Et vous ne vous êtes souvenu de cette phrase que quand vous avez vu M.

11 Moore ?

12 R. Non. Je l'avais avec moi dans l'esprit pendant longtemps. Pendant 14

13 ans, elle était enfouie, et je suis heureux enfin de pouvoir exprimer mes

14 sentiments ici devant cette Chambre et de pouvoir réfléchir à ce propos.

15 Q. Ce jour-là, quand vous êtes allé à Velepromet pour avoir la réunion

16 avec Borisavljevic, avec votre collègue, Korica était là, est-ce que vous

17 avez parlé entre vous de cette phrase que Sljivancanin aurait dite ?

18 R. Non, ce n'était pas approprié. Cela n'aurait pas été bien de faire

19 cela.

20 Q. Nous allons maintenant lire à la page 7. Page 7 de la déclaration que

21 vous avez faite devant l'enquêteur de La Haye. Dans la version anglaise, il

22 s'agit de la page 9. Il s'agit de la conversation que vous auriez eue avec

23 Sljivancanin. Voici comment vous l'auriez décrite. Vous avez dit la chose

24 suivante : "Il a aussi dit que plusieurs membres de l'unité de la cellule

25 de Crise de la TO serbe de Vukovar étaient à Velepromet; mais il n'a pas

26 donné de détail sur ces unités."

27 R. Oui. Et alors ?

28 Q. Rien pour l'instant. Continuons.

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1 R. Mais qu'est-ce qui se passe ? Est-ce par rapport à mes déclarations

2 précédentes ? Est-ce par rapport à ce que je dis maintenant ?

3 Q. Monsieur, cette phrase que vous auriez dite aux enquêteurs de La Haye,

4 vous la niez, oui ou non ?

5 R. Non, je n'en fais pas une affaire d'Etat.

6 Q. Parfait. Passons maintenant à une autre phrase qui vient d'une de vos

7 déclarations.

8 L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas saisi de quelle déclaration il s'agit.

9 M. LUKIC : [interprétation]

10 Q. -- quand vous êtes arrivé -- c'est la déclaration que vous avez faite

11 devant le tribunal militaire, en page 7, l'avant-dernier paragraphe,

12 deuxième phrase. Vous décrivez ce que vous avez dit à Mrksic lorsque vous

13 êtes arrivé :

14 "A cette occasion, j'étais en colère parce qu'on n'avait pas été

15 informé des vrais problèmes qui avaient à voir avec le comportement des

16 volontaires et des membres de la Défense territoriale. On n'avait pas

17 préparé de plan pour répondre à cette situation."

18 R. Là encore, je ne vois pas du tout pourquoi vous voulez rentrer là-

19 dedans.

20 Q. Parfait. Vous étiez fâché avec Mrksic et vous n'étiez pas content parce

21 que vous n'avez pas été prévu de la situation, alors qu'avec Sljivancanin,

22 cela a été complètement différent, votre attitude était différente ?

23 R. Voyez comment les événements se sont déroulés. Les problèmes sont

24 arrivés. Le juge du tribunal militaire m'a interviewé sur les circonstances

25 autour de ces crimes qui ont été commis. Il avait déjà interrogé --

26 d'ailleurs, on ne sait pas s'il m'avait interrogé sur les circonstances

27 pendant lesquelles les personnes auraient commis des crimes ou des

28 circonstances portant sur ma présence là ainsi que sur la description que

Page 4793

1 j'avais faite des événements auxquels j'avais assisté.

2 Q. Parfait. Mais dans ce cas-là, pourquoi lui avez-vous dit en long et en

3 large tout ce que vous avez dit ? Vous avez aussi parlé aux enquêteurs de

4 La Haye en long et en large, mais vous n'avez jamais parlé de cette phrase

5 ?

6 R. C'est parce que là-bas, c'était ce que le juge m'avait demandé, alors

7 que les enquêteurs avaient une différente méthodologie d'interrogatoire, et

8 j'ai répondu à leurs questions, c'est tout.

9 Q. Oui, je sais que mon éminent collègue M. Moore a une méthodologie très

10 spéciale pour vous rafraîchir la mémoire.

11 R. Mais non. Je suis venu ici devant cette Chambre pour que les choses

12 soient claires une bonne fois pour toutes. Vous voyez tous les documents

13 qui existent. Il y a eu beaucoup de papiers d'écrit, beaucoup de pages

14 rédigées.

15 Q. Très bien. Continuons. Avez-vous demandé à mon client de prendre une

16 certaine mesure par rapport aux événements, et vous avez fait cela en

17 accord avec vos autorités ?

18 R. S'il vous plaît, dites son nom. Ne dites pas "mon client." J'ai

19 beaucoup de respect pour le commandant Sljivancanin.

20 Q. Quand vous êtes revenu de Velepromet, est-ce que vous avez demandé à M.

21 Sljivancanin de prendre certaines mesures ?

22 R. Pourquoi ? C'était son unité. Il m'avait envoyé sur un établissement

23 dont il était responsable. Le commandant Sljivancanin était responsable de

24 ce bâtiment et il était sous les ordres de M. Mrksic.

25 Q. On y reviendra. Revenons aux déclarations que vous avez faites devant

26 le tribunal de Belgrade, à la page 34. Ici, on parle toujours du même

27 sujet.

28 M. LUKIC : [interprétation] Pour M. Moore, en version anglaise, il s'agit

Page 4794

1 de la page 10.

2 LE TÉMOIN : [interprétation] De quelle page s'agit-il ?

3 M. LUKIC : [interprétation]

4 Q. Page 34, au milieu de la page.

5 "Au cours de la réunion, les missions ont été distribuées." Ici, on se

6 réfère à la réunion avec Borisavljevic --

7 R. Et d'autres officiers en charge. Borisavljevic n'était pas l'officier

8 le plus supérieur. Il y avait un autre colonel qui était au-dessus de lui.

9 Q. Laissez-moi terminer d'abord.

10 "Au cours de la réunion, alors que les missions étaient distribuées, j'ai

11 remarqué qu'il y avait des têtes qui se montraient dans l'entrebâilleur de

12 la porte, des barbus, des barbus assez mal habillés. J'ai demandé : 'Qui

13 sont ces personnes ?' Jusqu'à là, je n'ai pas remarqué qu'il y avait une

14 unité présente, unité appelée les Chetniks, et je n'avais pas envisagé, je

15 n'avais pas entendu non plus, qu'il y avait le moindre indice disant qu'on

16 pouvait s'attendre à une situation assez désagréable de leur part. C'était

17 une surprise."

18 R. Oui, c'est exactement ce que j'ai dit.

19 Q. Mais c'était bien vrai ?

20 R. Je ne vois pas où vous voulez en venir, Monsieur Lukic.

21 Q. Dans votre déposition ici dans cette Chambre, vous nous avez dit que le

22 compte rendu du procès de Belgrade était la déclaration la plus fiable que

23 vous ayez faite.

24 R. Oui. Ici aussi, ce que je dis est extrêmement fiable, parce que je suis

25 en présence de l'accusé.

26 Q. Qu'en est-il de Belgrade ?

27 R. Non, ils n'y étaient pas.

28 Q. Ce que je viens de vous lire, vous avez déposé sous serment en tant que

Page 4795

1 témoin, et c'est bien totalement contraire au témoignage que vous avez fait

2 devant cette Chambre ici, n'est-ce pas, oui ou non ?

3 R. Non.

4 Q. Parfait. Alors, passons maintenant à Velepromet.

5 Quand vous êtes parti pour Velepromet ce jour-là, est-ce que vous saviez

6 que le jour même, le matin, avant midi, avant votre arrivée, Cyrus Vance

7 était sur place avec un aréopage éminent ?

8 R. Je l'avais entendu dans les médias et j'avais bien compris qu'il était

9 escorté par plusieurs officiers. J'avais déjà vu le colonel Nebojsa

10 Pavkovic, mais je ne savais pas qu'il avait fait le tour de Velepromet et

11 je ne sais pas ce qu'il a vu d'ailleurs. Il aurait pu voir d'autres choses

12 que ce que j'avais vu. Mais ce que j'ai vu, c'est ce que je vous ai décrit

13 ici.

14 Q. Je vous parle des choses du point de vue de mon client, le commandant

15 Sljivancanin. Vous, en tant qu'officier de sécurité, est-ce que vous

16 permettriez à une délégation très haut placée de visiter un établissement

17 où il y aurait un danger certain ?

18 R. Non. Mais ce que je vous dis, une fois de plus, c'est que ce que

19 j'ai vu, ce n'est pas forcément ce qu'ils ont vu. Ce que j'ai vécu, ce

20 n'est pas forcément ce que M. Cyrus Vance a vécu et ce qu'on lui a montré.

21 Q. Vous êtes un spécialiste de la sûreté. Disons que vous êtes en charge

22 d'une certaine zone et que votre commandant va arriver.

23 R. Ecoutez, cela ne sert à rien ce que vous êtes en train de faire. Je

24 sais parfaitement que Cyrus Vance était là. Je sais parfaitement qui il

25 est. Je sais pourquoi il était là.

26 Q. J'attends l'interprétation. Il n'y a pas de problème, Monsieur Vujic.

27 C'est très difficile pour les sténotypistes de prendre le compte rendu et

28 cela va être très difficile à comprendre plus tard; cela c'est nette. Mais

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1 on y reviendra.

2 Passons à autre chose. Je vais vous poser quelques questions à propos

3 de Srecko Borisavljevic. Il y a un point sur lequel je suis d'accord avec

4 vous. Je dois le dire. M. Borisavljevic était sous les ordres de M.

5 Sljivancanin dans la chaîne de commandement de la sûreté. Il était

6 capitaine de première classe au sein de l'unité de police.

7 R. Oui, la chaîne de commandement est en effet celle-là.

8 Q. Ecoutez-moi. Voilà ce que je suis en train de vous dire. Je vous dis

9 qu'il n'était pas officier de police militaire. Il y avait un officier de

10 police militaire à Velepromet qui s'appelait Nenad Bajic, et Srecko

11 Borisavljevic était un officier de police militaire à la caserne qui

12 englobait aussi Velepromet; c'est bien cela ?

13 R. Non, vous avez raison, mais je vais être honnête, Nenad Bajic, c'est

14 mon voisin. J'habite au 74 et il habite au 82. Si je reviens chez-moi, je

15 risque de le rencontrer ou je risque de rencontrer son père. Je le connais

16 bien. Je l'ai vu. Je sais qui c'est. Je l'ai vu là-bas. Mais je tiens à

17 vous dire une chose : la personne qui commandait, c'était le capitaine de

18 première classe, Srecko Borisavljevic. Qui était son supérieur ? Le

19 commandant Sljivancanin et le colonel Mrksic savent très bien qui c'était.

20 Q. Alors, c'était qui ?

21 R. Pourquoi vous le dirais-je ?

22 Q. Mon client, M. Sljivancanin, a ordonné à Srecko Borisavljevic de vous

23 rencontrer et de prendre contact avec vous ?

24 R. C'était la personne qui était censée venir se présenter à moi, Monsieur

25 Lukic. Dans toute armée, vous savez bien ce que cela veut dire.

26 M. LUKIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'essaie de maîtriser un

27 peu la situation, mais je pense qu'il faut absolument que je dise au témoin

28 de répondre à mes questions. Je vais lui expliquer comment marche la

Page 4797

1 procédure. Il faut absolument qu'il se concentre sur mes questions.

2 LE TÉMOIN : [interprétation] Je suis désolé, mais vous êtes vraiment en

3 train de me tenter de prendre des chemins de traverse.

4 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Souvenez-vous, s'il vous plaît,

5 comment cela fonctionne. C'est sont les conseils qui doivent poser des

6 questions, ce ne sont pas les Juges. Vous ne connaissez peut-être pas bien

7 cette procédure, mais quand les conseils de chaque partie, que ce soit les

8 conseils de l'Accusation ou les conseils de chaque accusé, vous posent des

9 questions, c'est comme cela qu'on connaît de l'affaire. Si un conseil vous

10 demande des choses ou fait des affirmations avec lesquelles vous n'êtes pas

11 d'accord, dites-lui. S'il vous propose aussi d'autres choses avec

12 lesquelles vous n'êtes pas d'accord, dites-lui, c'est tout. Mais ne pensez

13 pas qu'il a quelque chose contre vous. Il est juste en train de faire son

14 travail. Il doit vous faire des propositions, des suggestions, des

15 affirmations, et c'est à vous de faire des commentaires dessus pour qu'on

16 sache un petit peu quelle est votre position. Il faut répondre calmement,

17 Monsieur le Témoin, et lui dire simplement si vous êtes d'accord avec ce

18 qu'il vient de vous dire ou si vous n'êtes pas d'accord avec ce qu'il vient

19 de vous dire. Et si vous n'êtes pas d'accord, dites-lui exactement à quel

20 endroit vous n'êtes pas d'accord avec lui.

21 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

22 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Lukic, vous pouvez continuer.

23 M. LUKIC : [interprétation]

24 Q. Monsieur Vujic, on va essayer d'être rapide. Si vous avez quelque chose

25 à ajouter, je suis certain que pendant les questions supplémentaires de M.

26 Moore, vous aurez le temps de le faire. Hier, vous nous avez confirmé ce

27 que vous aviez déclaré au Procureur de La Haye quand il vous a parlé de

28 l'évacuation de l'hôpital. Vous avez dit que c'était le commandant

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1 Sljivancanin qui était en charge de cette évacuation et qu'elle était

2 effectuée sous le commandement de l'officier de police militaire qui était

3 là et qu'il s'était présenté à vous. C'est ce que vous avez dit hier.

4 Maintenant, voici ma question : en tant qu'expert, un organe de sécurité ne

5 peut que contrôler techniquement la police militaire, mais il n'y a qu'un

6 officier qui peut véritablement commander une unité de police militaire.

7 C'est bien comme cela que cela fonctionne ?

8 R. Mon interprétation du rôle du commandant Sljivancanin est la suivante :

9 il représentait la sûreté et il était aussi le commandant de l'unité de

10 police militaire.

11 Q. Ce que je vous dis, c'est qu'il n'était pas commandant. Il y avait deux

12 bataillons de police militaire et il y avait deux commandants de ces deux

13 bataillons de police militaire. Vous ne le saviez pas ? Si vous ne le

14 saviez pas, vous n'avez qu'à me le dire et on passera à autre chose.

15 R. Je sais qu'il y avait le commandant Gavalic qui était l'un de ces

16 commandants, mais je ne l'ai pas trouvé.

17 Q. Il a été remplacé par le commandant Susic -- mais enfin, passons à

18 autre chose.

19 R. Voici ma réponse : le commandant Sljivancanin était en charge de

20 l'évacuation de l'hôpital. C'était lui qui contrôlait les choses.

21 Q. Revenons maintenant à Velepromet. Vous dites que Srecko Borisavljevic

22 s'est présenté à vous quand vous êtes arrivé à Velepromet. Vous avez fait

23 un petit peu le tour de la situation et vous êtes parti en réunion; c'est

24 bien cela ?

25 R. Oui.

26 Q. Dans votre déclaration faite devant le bureau du Procureur, vous

27 semblez dire que la réunion s'est déroulée de 23 heures à 23 heures 30.

28 Vous avez bien dit cela à M. Vasic et vous l'avez aussi dit devant le

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1 tribunal militaire; c'est cela ?

2 R. Monsieur Lukic, ce n'est pas si important à savoir exactement quand la

3 réunion a commencé et quand elle a fini. Ce qui est important, c'est ce

4 qu'on a dit lors de la réunion. Ce qui est important, c'est que la réunion

5 s'est tenue avant que l'on prenne la moindre mesure, avant que les missions

6 soient attribuées et exécutées, et avant que les bus soient arrivés. Les

7 missions ont été attribuées, ont été définies et attribuées lors de la

8 réunion. J'ai vraiment été très clair dans toutes mes dépositions là-

9 dessus.

10 Peut-être dans ma déclaration devant le tribunal militaire, c'est vrai que

11 le juge d'instruction m'a posé des questions assez étranges et il n'a pas

12 bien suivi la chronologie des événements, et du coup on n'arrive pas très

13 bien à savoir quand s'est tenue cette réunion.

14 Q. Corrigez-moi, si je me trompe. Là, je vous parle du déroulement des

15 choses. C'est important, parce que vous êtes en train de bouger un petit

16 peu les temps et vous n'êtes pas net avec les heures.

17 L'INTERPRÈTE : L'interprète n'a pas compris la dernière partie de la

18 question du conseil.

19 LE TÉMOIN : [interprétation] Non, non, pas du tout, Monsieur Lukic. Je

20 pense que vous êtes en train d'essayer de clarifier le déroulement exact

21 des événements et pas du tout ce que j'ai dit.

22 L'INTERPRÈTE : Est-ce que les orateurs pourraient parler un après l'autre

23 uniquement ?

24 M. LUKIC : [interprétation]

25 Q. Ma question n'avait pas été enregistrée. Voici ma théorie : je pense

26 que vous êtes en train de totalement modifier le déroulement de ce qui

27 s'est passé juste pour arriver à justifier la différence entre vos

28 dépositions devant les différentes juridictions.

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1 L'INTERPRÈTE : Il faut aller moins vite.

2 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Vujic, vous commencez à

3 répondre même avant la fin de la question de M. Lukic. L'interprète, bien

4 sûr, lui, il lui faut du temps pour finir la question de M. Lukic et il ne

5 peut pas entendre ce que vous vous êtes en train de dire. Alors Monsieur

6 Vujic, s'il vous plaît, il suffit juste que vous vous reteniez un tout

7 petit peu, que vous attendiez la fin de la question de M. Lukic, que vous

8 attendiez que l'interprète ait fini d'interpréter vers le français et vers

9 l'anglais et, ensuite, vous pourrez répondre à la question, sinon c'est

10 contreproductif. Merci.

11 LE TÉMOIN : [interprétation] Merci.

12 M. LUKIC : [interprétation]

13 Q. Il faudrait compter jusqu'à cinq avant de commencer à prendre la

14 parole, c'est ce que je devrais faire également.

15 Je reviendrai là-dessus un petit peu plus tard. Je vais vous poser une

16 autre question. Est-ce que vous vous souvenez de la conversation que vous

17 avez eue avec Sljivancanin à Negoslavci lors de la première réunion ? Est-

18 ce que vous vous souvenez que Sljivancanin vous a dit que l'état-major de

19 la Défense territoriale de Vukovar avait le contrôle de Velepromet et qu'il

20 se trouvait là-bas ? Est-ce que vous vous souvenez qu'il vous a dit cela ?

21 R. Non.

22 Q. Est-ce que le nom de Ljubinko Stojanovic évoque quelque chose pour

23 vous ?

24 R. Non.

25 M. MOORE : [interprétation] Je m'excuse d'interrompre mon estimé confrère.

26 C'est la tournure de sa formule qui me préoccupe un peu. Il a demandé :

27 "Est-ce que vous vous souvenez que Sljivancanin vous a dit que l'état-major

28 de la Défense territoriale," et cetera. Si mon estimé confrère est sur le

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1 point de dire ce qui a été dit par Sljivancanin, il devrait poser la

2 question de façon plus claire pour que le témoin ait la possibilité de dire

3 : Bien, cela s'est passé ou cela ne s'est pas passé. Il ne faut pas qu'il

4 formule sa question en suggérant qu'il a raison, alors que cela n'a jamais

5 été dit. S'il s'agit d'une façon de contester ce qui a été dit, il faut le

6 dire clairement.

7 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Lukic, est-ce qu'il s'agit de

8 vos instructions à propos d'un aspect d'une conversation que vous avez eue

9 avec votre client ?

10 M. LUKIC : [interprétation] C'est cela, Monsieur le Président.

11 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Voilà ce que vous pourriez dire. Est-

12 ce que vous pourriez autoriser le témoin à présenter des observations

13 directement, plutôt que de dire : Est-ce que vous vous souvenez, et cetera,

14 et cetera.

15 M. LUKIC : [interprétation] J'essaie de dire au témoin exactement ce que

16 mon client m'a dit. Ma question porte sur ce qui a été dit entre ces deux

17 personnes. J'essaie de citer les propos de mon client.

18 Q. Monsieur Vujic, est-ce que mon client vous a dit que Velepromet était

19 sous le contrôle de la Défense territoriale et que leur QG s'y trouvait ?

20 R. Non.

21 Q. Vous pouvez répondre à la question maintenant.

22 R. Bien, il y avait des civils, des prisonniers de guerre, des membres de

23 la Défense territoriale là-bas.

24 Q. Qu'en est-il de Zigic Nenad ? Est-ce que ce nom évoque quelque chose

25 pour vous ?

26 R. Non.

27 Q. La réunion à Velepromet, réunion à laquelle vous avez participé avec

28 vos officiers, des membres de la police militaire et Borisavljevic, lors de

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1 cette réunion, est-ce qu'il y avait quelqu'un qui représentait l'état-major

2 de la Défense territoriale de Vukovar ? Est-ce que quelqu'un s'est présenté

3 comme étant membre de la Défense territoriale ?

4 R. Non. Personne ne m'a été présenté à cette réunion en cette capacité.

5 Q. La déclaration que vous avez faites au tribunal militaire, il s'agit de

6 la page 5 de la version anglaise, cela se trouve à peu près au milieu de la

7 page 5.

8 "Il y avait également à la réunion des représentants -- ou plutôt des

9 officiers de la Défense territoriale ainsi que des volontaires qui y

10 avaient été invités."

11 Est-ce que vous avez déclaré ceci, Monsieur ?

12 R. Je vais vous expliquer quelque chose. Si quelqu'un vous pose une

13 question-piège : Est-ce qu'il y avait des représentants de la Défense

14 territoriale à cette réunion, et que je réponds par l'affirmative. Si

15 j'avais répondu de façon négative : Non, il n'y a pas eu ce genre de

16 personnes. Puis ensuite, j'explique qu'il y avait des gens qui passaient la

17 tête pour la porte, il y avait des barbus, des personnes qui portaient

18 différents types d'uniformes, mais qui ne portaient pas l'uniforme de la

19 JNA, cela ne répond pas à votre question, n'est-ce pas ? Si je ne réponds

20 pas à votre question, une fois de plus, j'aimerais vous poser une question

21 : Comment est-ce que je suis censé répondre à votre question ?

22 Q. Très bien. Poursuivons, poursuivons. Le 16 février -- je disais que je

23 pense qu'il s'agit du 16 février. Il s'agit de la page 73 du projet de

24 compte rendu. Je n'ai pas la page officielle, mais je suis sûr que vous

25 vous souviendrez que vous aviez commencé à évacuer cette salle et que vous

26 avez appelé : "Mais où se trouve Srecko Borisavljevic ? On ne le voit nulle

27 part." Vous avez demandé à Sekic d'envoyer un officier à Mrksic pour que

28 Mrksic puisse envoyer des renforts. C'est bien cela que vous avez dit ?

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1 R. Oui. C'est ce que j'ai dit et c'est ce que j'ai fait également.

2 Q. Dites-moi une chose, et essayez de vous souvenir de quelque chose, est-

3 ce que vous avez dit à Borisavljevic de se rendre auprès de Mrksic ?

4 R. Non, je ne l'ai pas fait, Maître Lukic. Borisavljevic est parti de cet

5 endroit, tout comme l'a fait le colonel Tomic. Dans ma déclaration et dans

6 ma déposition, j'ai utilisé le terme "trahison." J'ai dit qu'ils m'avaient

7 trahi.

8 Q. Oui, nous l'avons entendu cela. Je vous demanderais de prendre le

9 procès-verbal du procès de Belgrade, il s'agit de la page 37.

10 M. LUKIC : [interprétation] Il s'agit de la page 15 pour mon estimé

11 confrère.

12 Q. Je donne lecture du premier paragraphe, au milieu de ce paragraphe.

13 "J'ai donné l'ordre au capitaine Srecko Borisavljevic de se rendre auprès

14 du colonel Mrksic pour obtenir de l'aide et pour s'assurer qu'un renfort

15 arrive sous la forme d'une unité de la police militaire pour être sûr de

16 pouvoir accomplir notre mission."

17 R. Oui, c'est ce que j'ai dit au tribunal spécial.

18 Q. Et vous aviez prêté serment pour ce faire ?

19 R. Oui, j'avais prêté serment.

20 Q. Et vous avez témoigné sous serment là-bas ?

21 R. Oui, j'ai témoigné sous serment.

22 Q. Merci. Poursuivons.

23 R. Vous voulez que je précise quelque chose, Maître Lukic ?

24 Q. Non, non, non. Mon estimé confrère de l'Accusation est présent ici et

25 je suppose que vous aurez beaucoup d'explications à lui fournir.

26 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Le Tribunal souhaiterait préciser

27 certaines questions, Maître Lukic.

28 M. LUKIC : [interprétation] Je m'excuse.

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1 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Vous êtes tout excusé.

2 Monsieur Vujic, vous avez dit apparemment que vous avez prêté serment au

3 tribunal de Belgrade et que vous avez donné l'ordre au capitaine de se

4 rendre auprès du colonel Mrksic pour obtenir de l'aide. Il y a quelques

5 minutes, d'après votre déposition, j'ai cru comprendre que vous n'avez pas

6 donné d'ordre au capitaine pour qu'il se rende auprès du colonel Mrksic

7 pour obtenir des renforts; il vous avait abandonné. C'est à quelqu'un

8 d'autre que vous avez donné l'ordre. Est-ce que vous pourriez préciser tout

9 cela ? Est-ce que vous avez donné un ordre au capitaine ou à quelqu'un

10 d'autre pour que cette personne aille demander au colonel Mrksic de l'aide,

11 ou est-ce que vous n'avez donné d'ordre à personne ?

12 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, Messieurs les Juges, je

13 m'en tiens à la déclaration que je viens de faire. Au cours des jours

14 précédents, j'ai décrit comment j'avais agi et comment j'avais donné cet

15 ordre. Car cela signifie que deux fois j'ai appelé à haute voix le nom du

16 capitaine Borisavljevic, je lui ai demandé de répondre pour que je puisse

17 lui donner un ordre pour qu'il aille se présenter auprès du colonel Mrksic

18 pour demander de l'aide et pour qu'il lui explique la situation et pour

19 qu'il demande l'aide d'une unité de la police militaire. Au tribunal de

20 Belgrade, lorsque le juge m'a demandé de décrire la façon dont j'avais agi,

21 j'ai expliqué que j'avais appelé le nom, donc j'ai donné un ordre au

22 capitaine Borisavljevic. Mais là, face à ce tribunal spécial, devant la

23 chambre et devant les conseils de la Défense et les membres de la famille,

24 je n'ai rien dit d'autres pour épargner à ma personne ainsi qu'au public

25 des angoisses supplémentaires. La vérité, c'est ce que j'ai dit devant

26 cette Chambre de première instance.

27 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Dois-je comprendre votre déposition

28 comme suit : au tribunal de Belgrade, vous avez donné l'impression que vous

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1 aviez donné l'ordre au capitaine de se rendre auprès du colonel Mrksic pour

2 demander de l'aide ?

3 LE TÉMOIN : [interprétation] Monsieur le Président, je ne l'ai pas dit avec

4 de mauvaises intentions, je n'ai pas dit devant la chambre de Belgrade que

5 les membres de mon équipe et de mon groupe opérationnel m'avaient quitté,

6 le colonel Tomic et le colonel Kijanovic. Il m'était très, très difficile

7 de dire cela devant le tribunal de Belgrade.

8 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je suppose que votre réponse est une

9 réponse affirmative ?

10 LE TÉMOIN : [interprétation] Je m'excuse, Monsieur le Président, j'ai

11 répondu en disant que j'avais agi comme je l'ai décrit ici devant cette

12 Chambre de première instance. Là-bas, il m'était difficile de dire que le

13 capitaine Borisavljevic n'était pas là, qu'il avait quitté l'endroit, qu'il

14 avait abandonné la mission. Et il m'était extrêmement difficile de dire

15 également que mon supérieur Slavko Tomic avait abandonné également la

16 mission, tout comme le colonel Kijanovic.

17 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous avais posé une première

18 question et je crois comprendre que vous répondez à cette question par oui.

19 Vous avez, au tribunal de Belgrade, laissé en quelque sorte flotter cette

20 impression et cela a été consigné au dossier de Belgrade, l'impression

21 étant que vous aviez donné l'ordre au capitaine de se rendre auprès du

22 colonel Mrksic pour demander de l'aide. Vous en avez expliqué maintenant

23 les raisons, mais c'est ce qui s'est passé; est-ce exact ?

24 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui.

25 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie.

26 M. LUKIC : [interprétation]

27 Q. Nous avons indiqué préalablement, pour ce qui est de votre première

28 déclaration faite au tribunal militaire, que vous avez apporté des

Page 4807

1 corrections à propos de la chronologie des événements à Velepromet, et vous

2 avez dit que les choses se sont produites comme vous l'avez décrit ici à

3 cette Chambre de première instance. Si vous êtes arrivé à Negoslavci à 8

4 heures - c'est une information fiable parce que cela a été consigné dans le

5 registre de la Brigade des Gardes - et si la réunion avec Mrksic a duré un

6 quart d'heure, si la réunion avec Sljivancanin a également duré un quart

7 d'heure -- dans un premier temps, vous avez dit qu'il fallait compter 45

8 minutes même une heure pour se rendre à Velepromet. Si, compte tenu de ces

9 informations vous êtes arrivé à Velepromet à 10 heures disons, qu'avez-vous

10 fait pendant une heure si vous avez convoqué la réunion immédiatement ?

11 R. Je ne comprends pas très bien. Qu'est-ce que vous contestez

12 exactement ? Qu'est-ce que vous contestez au niveau de la chronologie ?

13 Q. Ce que je conteste c'est qu'il y a une heure supplémentaire. Vous dites

14 être arrivé à Velepromet à 10 heures et la réunion a commencé à 11 heures ?

15 R. Non, Maître Lukic. Vous n'avez pas raison lorsque vous avancez ceci. Ce

16 que je vous dis, c'est que nous étions à Velepromet pendant tout ce temps

17 jusqu'au moment où les bus sont arrivés. Voyons combien de temps s'est

18 écoulé.

19 Q. Non, non. Ma question porte sur le début de la réunion par rapport au

20 moment de votre arrivée. Ce que je vous dis, c'est que vous êtes arrivé à

21 10 heures et que la réunion a commencé à 11 heures. Entre-temps, vous avez

22 visité l'endroit. En fait, ce que je vous dis, c'est que vous avez décrit

23 la chose d'une façon face au tribunal militaire, et cela, vous l'avez nié

24 par la suite. C'est ce que j'avance.

25 R. Maître Lukic, ce n'est pas vrai.

26 Q. Merci. Je vais vous donner lecture de la page 5 du procès-verbal du

27 tribunal militaire, c'est quelque chose que vous niez, mais il faut que

28 cette Chambre de première instance sache ce que vous avez réfuté et que

Page 4808

1 vous aviez avancé auprès du tribunal militaire.

2 M. LUKIC : [interprétation] Je dirais à l'intention de mon estimé confrère,

3 qu'il s'agit du paragraphe 2 et de la page 6 de version anglaise.

4 Q. "Entre-temps, les bus sont arrivés devant Velepromet, escortés d'une

5 unité de la police militaire. A ce moment, j'ai convoqué une réunion

6 destinée à tous les officiers qui se trouvaient au centre de rassemblement

7 à Velepromet afin de nous mettre d'accord sur la façon d'exécuter cette

8 mission."

9 Je connais votre point de vue, mais toutefois la logique de votre

10 déposition ne signifie pas pour autant qu'il y a une erreur. Bon, il y a

11 une suite d'événements, il y a des bus, et une réunion qui est convoquée.

12 R. Non, Maître Lukic. Ce que je vous dis, c'est que l'ordre des événements

13 et la mise en application de la mission dépendaient de l'arrivée des bus.

14 Il faut établir cela. Il faut que M. Mrksic et M. Sljivancanin vous disent

15 quand est-ce que les bus sont arrivés. Il fallait bien que quelqu'un

16 accompagne les bus, il fallait qu'il y ait des officiers dans les bus.

17 Q. Merci. Donc vous continuez à vous en tenir à votre déclaration

18 précédente. Nous allons poursuivre et répondez de façon concise. Après le

19 départ des bus, vous êtes resté jusqu'à la fin, jusqu'au départ du dernier

20 bus, et ensuite vous êtes reparti à Negoslavci; est-ce exact ?

21 R. Oui.

22 Q. Vous avez déjà dit auparavant, et vous l'avez répété maintenant, et

23 vous avez dit que vous ne vouliez pas le dire au tribunal de Belgrade, mais

24 vous avez dit que vos collègues Tomic et Kijanovic vous ont laissé tomber.

25 A la page 7 de votre déposition, déposition faite auprès du tribunal

26 militaire, voilà ce que vous avez dit, et d'ailleurs vous ne l'avez jamais

27 réfuté, vous ne l'avez jamais nié auprès d'aucune institution, voilà ce que

28 je vous avez dit et je vais vous citer la phrase.

Page 4809

1 M. LUKIC : [interprétation] Je dirais à l'intention de mon estimé confrère,

2 qu'il s'agit de la page 8 de la version anglaise.

3 Q. Je cite : "Je ne suis pas parti avec la colonne, mais je suis resté

4 avec tous les autres officiers dans l'enceinte de Velepromet."

5 R. De quelle déclaration s'agit-il, Maître Lukic ?

6 Q. Trifunovic, tribunal militaire. Il est vrai que vous n'avez pas dit

7 qu'ils sont partis ou peut-être que vous avez insisté pour que cela soit

8 consigné.

9 R. Je n'ai pas insisté; c'est ce que j'ai dit.

10 Q. Très bien. Que diriez-vous si j'avançais ici au sein de cette Chambre

11 de première instance où nous entendons les dépositions des victimes et des

12 personnes qui se trouvaient à Velepromet qui ont été emmenées cette nuit-là

13 et qui ont dit être parties de Velepromet vers 4 heures, est-ce que ces

14 personnes avaient tort de dire cela ?

15 R. Peut-être qu'elles sont parties de Velepromet. Oui, si quelqu'un les a

16 cachées et les a ensuite fait sortir. Je ne savais rien à propos de ces

17 victimes.

18 Q. Très bien. Nous allons parler de votre arrivée à Negoslavci. Vous avez

19 dit que Sljivancanin se trouvait face au QG du commandement à Negoslavci

20 lorsque vous êtes revenu de Velepromet. C'est ce que vous avez dit. Vous

21 avez dit que Tomic était là. Vous avez également mentionné Kijanovic. Vos

22 autres collègues, Stosic, Muncan, Korica, est-ce qu'ils sont également

23 repartis au QG du commandement ?

24 R. Oui.

25 Q. Je ne sais pas si vous le savez, mais mon client indique que ce soir-là

26 il a eu beaucoup d'activités. Il a interviewé Vesna Bosanac, il a rencontré

27 Marin Vidic, il a rencontré Aleksandar Vasiljevic, il s'est rendu à Ovcara

28 pour voir les réfugiés qui avaient passé la nuit là-bas, et ce qu'il dit

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1 c'est que vous ne l'avez jamais vu ce soir-là. C'est qu'il avance.

2 R. Quelle est votre question ?

3 Q. Très bien. Non, je voulais juste vous donner son point de vue.

4 Lors de votre déposition ici, vous avez dit à la page 4 522 que vous avez

5 dit au général Jerko Crmaric quelle avait été votre expérience à

6 Velepromet. L'Accusation vous a posé une question, il s'agit de la page 4

7 523 du compte rendu d'audience, elle vous a demandé si vous aviez informé

8 le général Crmaric des meurtres. Vous avez dit, de façon absolument

9 catégorique à M. Moore, qu'à ce moment-là vous ne disposiez pas de cette

10 information. C'est ce que vous avez déclaré et c'est ce qui a été consigné

11 ici dans ce prétoire. Voilà quelle est ma question : est-ce que vous avez

12 mentionné à mon client, si vous l'avez vu à une heure, est-ce que vous lui

13 avez mentionné toutes les altercations que vous avez eues, et est-ce que

14 vous avez mentionné à M. Sljivancanin tous les meurtres ?

15 R. Maître Lukic, lorsque je suis revenu au QG du commandement, il y avait

16 un certain nombre d'officiers, comme je l'ai dit. Ils arrivaient et ils

17 sortaient et ils observaient, tout comme je le faisais moi-même d'ailleurs.

18 Le commandant Sljivancanin était également présent. J'accepte qu'il était

19 fort occupé, qu'il faisait toutes ces tâches que vous avez mentionnées,

20 mais il est allé voir également le colonel Mrksic pour lui parler des

21 résultats accomplis pour ce qui est de l'exécution des tâches, et le

22 commandant Sljivancanin a tenu une réunion avec nous pour ce qui est de la

23 liste de l'hôpital.

24 Q. Oui, vous en avez parlé de cela.

25 R. Et il nous a fourni des informations à ce sujet. Il nous a dit comment

26 l'hôpital allait être évacué le lendemain matin, et comment nous n'allions

27 pas tous pouvoir l'accompagner, mais il a ajouté également que nous aurions

28 une réunion à ce sujet à 6 heures du matin suivant, au portail de

Page 4811

1 Velepromet.

2 Q. Je vais maintenant vous indiquer quel est le point de vue de mon

3 client. Tout ce que vous avez déclaré jusqu'à présent, ce sont des choses

4 qu'il vous a dit à 8 heures ou à 20 heures -- ou la première fois que vous

5 l'avez rencontré. Je vais vous dire ce qu'il dit également, le matin au

6 portail de Velepromet, il n'y a que vous et Korica qui êtes arrivés, il n'y

7 avait pas d'autres collègues. Est-ce que cela est vrai ou non ?

8 R. Non, ce n'est pas vrai, Maître Lukic, je dois vous fournir une

9 explication brève, qui est comme suit : à 20 heures, le commandant

10 Sljivancanin n'avait pas encore la liste. Il a reçu la liste dans le

11 courant de la nuit de la part de Mme Vesna Bosanac et probablement de Gjuro

12 Njavro et de Marin Vidic. Pour ce qui est des personnes de l'hôpital, le

13 personnel hospitalier, les médecins, toutes les personnes qui étaient

14 soupçonnées de crimes, toutes ces personnes qui étaient déguisées en

15 quelque sorte, il n'a appris des renseignements à leur sujet que lorsqu'il

16 a commencé à compiler les renseignements, à savoir lorsqu'il a commencé à

17 collecter des renseignements auprès de Mme Bosanac. Donc il a convoqué une

18 réunion avec nous, comme je vous l'ai déjà dit, et il nous a informé

19 brièvement à ce sujet. A ce moment-là il a dit --

20 Q. Oui, nous savons ce qu'il a dit. Bon, c'est votre point de vue. Certes.

21 Je vous ai donné notre point de vue. Il y aura d'autres témoins, et cela

22 fera l'objet d'une évaluation.

23 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Vous avez avancé une deuxième

24 proposition à propos du lendemain matin, et le témoin ne s'en est pas

25 souvenu.

26 M. LUKIC : [interprétation] Je m'excuse, Monsieur le Président. C'est mon

27 problème : moi, aussi je suis sous pression, je regarde l'horloge. Je suis

28 très conscient de l'heure butoir que vous avez imposée et je fais de mon

Page 4812

1 mieux pour essayer de respecter cela.

2 Q. Monsieur, vous ne nous avez pas répondu à propos de ce que je vous ai

3 dit, le lendemain matin à 6 heures en face du portail de Velepromet, c'est

4 seulement vous et Korica qui êtes arrivés pour aller à l'hôpital et il n'y

5 avait d'autres officiers; c'est exact ?

6 R. Non, ce n'est pas exact, Maître Lukic. Il y avait les deux groupes qui

7 étaient là, dirigés par le colonel Slavko Tomic et toutes les personnes qui

8 lui étaient subordonnées; puis, il y avait également le commandant Muncan

9 qui dirigeait ceux qui lui étaient subordonnés; puis, il y avait le groupe

10 du commandant Sljivancanin, et les commandants qui lui étaient subordonnés,

11 son chauffeur également d'après ce que j'ai pu voir. Son chauffeur était

12 également officier. Nous étions tous rassemblés là à 6 heures du matin, le

13 20 novembre au portail de Velepromet, à l'intérieur de l'enceinte de

14 Velepromet.

15 Q. Merci. Mon estimé confrère de l'Accusation vous avait posé une question

16 à propos du trajet entre Velepromet et l'hôpital ce matin-là. J'aimerais

17 vous poser une autre question à propos de cette question qui vous avait été

18 posée par M. Moore. Est-ce que vous vous souvenez, à la réunion avec Mrksic

19 le soir du 20, est-ce qu'il y a des officiers ou des soldats qui sont

20 arrivés pour vous informer d'un incident qui s'était déroulé dans un

21 véhicule avec des soldats ? Bon, c'est une question un peu orientée, peut-

22 être que je devrais la reformuler.

23 Est-ce que vous vous souvenez que quelqu'un a dit en votre présence à

24 Mrksic que quatre soldats avaient été tués dans un blindé ce soir-là ?

25 R. Oui, je me souviens de ce moment. Lors de la séance d'information, vers

26 la fin de cette séance d'information tenue par le colonel Mrksic, alors il

27 y a un officier subalterne qui est arrivé, un sergent peut-être ou un

28 caporal qui a dit qu'un véhicule avait roulé sur une mine et que quatre

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1 soldats avaient été tués. Le colonel Mrksic a écouté cela et il a dit au

2 soldat ou au sous-officier qui était arrivé qu'il devait envoyer un télex

3 au centre opérationnel. Il a dit également que les données relatives aux

4 victimes devraient être répertoriées dans un organigramme.

5 Q. Est-ce que vous savez où ont été tués les soldats qui se trouvaient ou

6 qui conduisait en fait ce véhicule de transport de troupes ?

7 R. Non, je n'étais pas en mesure de le savoir. Non, je ne le sais pas.

8 Q. Alors, essayons un peu de mettre un terme à tout cela. Vous rencontrez

9 Kijanovic à Negoslavci une fois de plus et il vous dit qu'il a réussi à

10 mettre ou à faire sortir de ce bus quatre soldats de la JNA ?

11 R. Oui.

12 Q. Est-ce qu'il vous a dit où cela s'est passé précisément ? Est-ce que

13 cela s'est passé dans le hangar à Ovcara ? Ou plus précisément, est-ce que

14 Kijanovic vous a dit que lui-même et Tomic se trouvait dans le hangar

15 d'Ovcara ?

16 R. Kijanovic a dit que les bus étaient à Ovcara lorsqu'il a fait sortir

17 ces soldats. Lui et Tomic ne se sont pas séparés, donc je suppose qu'ils

18 étaient là-bas ensemble. Il a également dit qu'il s'agissait de soldats qui

19 se trouvaient à l'hôpital dans la pièce que j'ai décrite, lorsque je suis

20 arrivé dans cette pièce.

21 Q. Pendant que vous attendiez que la colonne parte pour Negoslavci ce

22 soir-là, est-ce que Kijanovic ou Tomic vous ont dit qu'ils étaient entrés

23 dans le hangar à Ovcara où se trouvaient les détenus ?

24 R. Non, ils ne me l'ont pas dit.

25 M. LUKIC : [interprétation] Je souhaiterais que nous passions rapidement à

26 huis clos partiel. Je ne sais pas en fait s'il y a des mesures de

27 protection qui sont eu jeu. Je pense en fait aux questions que je suis sur

28 le point de poser.

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1 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Huis clos partiel, je vous prie.

2 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes à huis clos partiel, Monsieur

3 le Président.

4 [Audience à huis clos partiel]

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20 (expurgé)

21 [Audience publique]

22 M. LUKIC : [interprétation]

23 Q. En fait, ces personnes n'étaient pas des soldats de la JNA, mais

24 c'était plutôt des déserteurs de la JNA qui s'étaient ralliés aux forces de

25 la ZNG, et qu'ils se sont présentés aux soldats de la JNA de Kijanovic un

26 moment --

27 R. Non. Je vous en prie, Maître Lukic, n'essayez même pas. Je m'excuse.

28 Q. Il me reste dix minutes.

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1 R. Maître Lukic, il y a des rapports de ces entretiens de ces soldats,

2 entretiens pris par le colonel Kijanovic. Donc, cela doit se trouver

3 quelque part dans les dossiers de Vukovar, ainsi qu'au centre pénitentiaire

4 de Sremska Mitrovica.

5 M. LUKIC : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai exactement dix

6 minutes. Alors, étant donné que j'avais grappillé un peu de temps hier, je

7 ne pense pas en fait que l'on me considérera comme coupable de cela.

8 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Vous voulez, Maître Lukic, que nous

9 gardions notre sourire donc, à votre égard.

10 Donc, nous allons maintenant lever l'audience et nous reprendrons à

11 16 heures 05. Et vous aurez vos sept minutes à ce moment-là.

12 --- L'audience est suspendue à 15 heures 46.

13 --- L'audience est reprise à 16 heures 09.

14 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, Maître Lukic. Allez-y.

15 M. LUKIC : [interprétation]

16 Q. Monsieur Vujic, nous nous approchons de la fin. Il n'y a plus que

17 quelques questions que j'aurais à vous poser. Je vous rappelle le moment où

18 vous étiez dans la voiture avec Tomic, Kijanovic, Stosic et Mirkovic. Vous

19 étiez à bord d'un véhicule et vous entendez ce qui vous créé des

20 appréhensions pour ce qui est de méfaits en cours. Avez-vous songé - je

21 sais que vous ne l'avez pas fait - mais est-ce que vous n'auriez pas

22 proposé à vos collègues de faire un détour par Ovcara pour voir ce qui s'y

23 passait ? C'est ma question.

24 R. Monsieur Lukic, tout ce que j'ai vécu dans cette journée a fait de

25 cette journée la journée la plus longue de ma vie. Je n'en aurais pas de

26 plus longue. Cette journée, pour moi, a duré 27 heures. Pensez-vous

27 vraiment que c'était là une chose à faire de ma part à ce moment-là, aller

28 je ne sais où, voir ce qui se passait ? La question qui se pose, c'est de

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1 savoir si je pouvais y aller, si je pouvais y accéder, et comment.

2 Q. Merci. Mais vous ou l'un quelconque de vos collègues, aurait-il proposé

3 d'aller chercher le général Crmaric ou de chercher Gvero, des hauts

4 responsables du secrétariat fédéral à la Défense nationale, ou Pavkovic qui

5 était là, ou le représentant de la Croix-Rouge internationale ?

6 R. Monsieur Lukic, tout ce que je pouvais faire, c'était aller voir le

7 colonel Mrksic, rien que cela. S'il voulait bien me recevoir. Je ne savais

8 même pas s'il m'aurait reçu. Comme l'a dit Slavko Tomic, il était allé au

9 sujet de ce problème lorsque les véhicules sont arrivés à la caserne. Il a

10 dit : Si j'y étais allé trois fois. Je crois que c'est bien ce qu'il a dit.

11 Q. Oui, nous le savons. Mais M. Tomic, votre chef de groupe, vous a-t-il

12 dit que la mission était accomplie et que vous pouviez quitter la zone où

13 vous étiez venus ?

14 R. Non. Il a dit au sujet de Velepromet que la mission était accomplie.

15 Lorsque j'ai été fâché en disant qu'il y avait des cadavres, des meurtres -

16 -

17 Q. Oui, oui, je sais. Le 20 --

18 R. Non, rien au sujet de cette mission --

19 Q. Merci. En quels termes étiez-vous avec Bogoljub Kijanovic ?

20 R. Kijanovic, je ne l'ai pas vu depuis des années.

21 Q. Pensez-vous que c'est un homme honorable ?

22 R. S'il a dit quoi que ce soit d'inexact ou quoi que ce soit de contre

23 moi, ce serait plutôt déshonorable.

24 Q. Branko Korica, est-ce un homme honorable ?

25 R. Il a gardé ma vie. Il a vécu la même expérience, ou plus ou moins. Je

26 crois que c'était quelqu'un dévoué à ma sécurité.

27 Q. Est-ce que vous pensez que vous avez quelque chose à vous reprocher à

28 leur égard ?

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1 R. Je ne pense pas, à moins que quelqu'un ne médit auprès d'eux ou ne fait

2 des pressions. Je vais vous parler des pressions qui ont été exercées à mon

3 égard.

4 Q. Dites-moi, si je vous disais que Korica Branko m'a affirmé qu'il n'a

5 jamais entendu les propos que vous avez cités au sujet des Chetniks et

6 Oustachi, pourquoi pensez-vous qu'il ait eu des raisons de m'induire en

7 erreur ?

8 R. Je ne sais pas comment vous avez pu accéder à Korica Branko sans la

9 médiation des services officiels. Si je puis en tirer la conclusion

10 suivante, vous avez exercé des pressions à son égard aussi.

11 Q. Merci. Si je vous disais que vous deux, vous avez participé ensemble au

12 tri à l'hôpital et qu'avec vous, il avait retrouvé des grenades sous les

13 lits et qu'il y avait à vos côtés plusieurs membres de la TO qui vous ont

14 quitté, et c'est lui qui avait fait sortir une quarantaine de personnes de

15 l'hôpital, personne n'était blessé, c'étaient des civils, et qu'il les a

16 dirigés vers les autocars, que pourriez-vous faire comme commentaire ?

17 R. Je ne sais pas s'il a pu accomplir ce type de mission, parce qu'il a

18 passé la plupart de son temps en ma compagnie. Il est exact de dire qu'à

19 plusieurs reprises, il s'est éloigné de moi pour voir ce que faisaient les

20 autres; cela, oui.

21 Q. Monsieur Vujic, vous aviez une mission officielle pendant deux jours à

22 Vukovar, vous l'avez dit, le 19 et le 20. On vous a offensé. On s'est

23 attaqué verbalement à vous. On vous a menacé physiquement. On vous a menacé

24 de liquidation. Vous avez été attaqué aussi par un dénommé Topola. On vous

25 a dit qu'un lieutenant, un tireur d'élite, avait l'intention de vous tuer.

26 Vous avez douté du pire pour ce qui est de ce qui se passait à Ovcara. La

27 seule chose que vous avez dite à Sid c'est : Savez-vous ce qui se passe là-

28 bas ?

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1 R. Oui. J'ai dit : Est-ce que tu sais, général Babic - parce qu'on se

2 tutoie, général Babic, sais-tu ce qui se passe là-bas ? J'ai dit : Est-ce

3 que toi, Ljubica - je n'ai pas dit "Petkovic," j'ai dit Ljubica - est-ce

4 que tu sais ce qui s'est passé là-bas ? Ils ont à chaque fois dit : Oui, on

5 le sait. On est au courant.

6 Q. Ma toute dernière question à ce sujet-là, et j'en aurai quelques autres

7 par la suite, ce serait la suivante : est-ce que vous pensez que vous vous

8 êtes conformé à la réglementation lorsque, s'agissant du feu colonel Babic

9 et feu colonel Petkovic, en vous référant au feu colonel Tomic, en

10 prononçant cette phrase, estimez-vous vous être conformé à la

11 réglementation en vigueur ?

12 R. C'est la première fois que j'apprends que le général Babic est décédé

13 lui aussi. Vous l'avez qualifié de colonel, mais c'est de votre bouche que

14 j'apprends qu'il n'est plus des vivants. Cela, je ne le savais pas. Ce que

15 je sais, c'est comment a péri le colonel Petkovic. J'ai été à son

16 enterrement. Il n'est plus des vivants. J'ai été aussi aux funérailles de

17 Slavko Tomic. Il n'est plus des vivants non plus. Mais il y en a d'autres

18 qui sont vivants et qui ont été témoins. Il n'y a pas de procureur non plus

19 qui avait suivi les activités des instances chargées de la sécurité à

20 l'occasion de cette procédure préalable pour nous donner des instructions

21 et qui nous a confié des missions. Il n'est plus des vivants. Il s'est

22 suicidé. Je m'attendais à ce que vous mentionniez son nom aussi, mais vous

23 ne l'avez pas fait.

24 Q. Je n'ai mentionné que les noms --

25 R. Mais vous n'avez pas mentionné le procureur, et on sait quel est le

26 rôle du procureur.

27 Q. Ma question est la suivante : estimez-vous vous être conformé à la

28 réglementation en prononçant cette phrase ?

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1 R. S'agissant de mon intégrité morale et de mon sens du devoir, j'estime

2 que ma plus grande contribution vis-à-vis de la vérité c'est celle que j'ai

3 faite devant cette Chambre, devant ces conseils de la Défense et devant ces

4 accusés. Aussi, vous demanderais-je, s'agissant de mes dires et de mes

5 déclarations, de procéder à des vérifications, mais de le faire de façon

6 honorable et responsable. Vous vouliez dire quelque chose ?

7 Q. Non, non, je ne veux pas vous interrompre. Allez-y.

8 R. Mes dires sont également sujets à vérification.

9 Q. En répondant aux questions de mes confrères, vous vous étiez senti

10 offensé. Or, personne dans ce prétoire n'avait voulu susciter ce type de

11 sentiment. Mais il découle de votre témoignage d'aujourd'hui la conclusion

12 suivante - vous me direz si je me trompe - étant donné que vous avez dit

13 que ce témoignage devant cet honorable Tribunal et devant cette Chambre est

14 une chose que vous maintenez, le tribunal de Belgrade chargé de poursuivre

15 les crimes de guerre et l'autre tribunal sont-ils moins honorables ?

16 R. Non, Monsieur Lukic. J'ai beaucoup d'estime pour le président de la

17 chambre du tribunal à Belgrade. Il a été si pédagogique à mon égard. Il n'a

18 même pas demandé à ce que je prête serment devant sa chambre. Je ne vous ai

19 pas attiré votre attention sur ce fait, mais regardez ceci, il ne me l'a

20 pas demandé. Il m'a demandé de prendre mon courage à deux mains pour dire

21 la vérité. Croyez-moi bien, Monsieur, que c'est souvent plus difficile pour

22 le témoin que pour l'accusé. Je m'excuse à l'égard de cette Chambre d'avoir

23 à le dire, mais si j'avais davantage de possibilité de le faire, je crois

24 que je pourrais argumenter bien plus en détail.

25 Q. Devant ce tribunal de Belgrade qui poursuit les crimes de guerre, à

26 Vesna Krstajic --

27 R. Oui. Vesna Krstajic m'a dit de dire la vérité, et j'ai dit, autant que

28 je pouvais, la vérité, au maximum, et devant cette Chambre et devant vous,

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1 j'affirme que j'ai dit toute la vérité, et vous pouvez le vérifier.

2 Q. Merci beaucoup.

3 M. LUKIC : [interprétation] Monsieur le Président, je vous remercie. Je

4 viens de terminer mon contre-interrogatoire. Je tiens également à dire que

5 je veux m'excuser auprès de mon confrère M. Moore pour ce qui est de

6 l'interjection qui m'a échappée dans le feu du contre-interrogatoire.

7 J'espère qu'il aura de la compréhension.

8 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci, Maître Lukic.

9 Monsieur Moore, vous avez des questions complémentaires ?

10 M. MOORE : [interprétation] Certainement, si vous le permettez.

11 J'aimerais que nous tirions quelques points au clair. Pour ma part, je

12 voudrais que les déclarations de ce témoin soient toutes versées au dossier

13 en guise d'éléments de preuve. Il y a eu contre-interrogatoire au sujet de

14 documents et au sujet de dépositions qu'il a faites. Aussi estimerai-je

15 qu'il serait tout à fait justifié de les présenter aux Juges de la Chambre

16 et de faire en sorte que soient surlignés, d'une façon ou d'une autre, les

17 points inconsistants de l'avis des conseils de la Défense.

18 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Moore, je crois que vous

19 réalisez que cela n'est pas conforme à la procédure habituelle, mais il y a

20 eu des possibilités de procéder à des innovations récemment concernant des

21 points de preuves matérielles.

22 M. MOORE : [interprétation] Oui.

23 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Peut-être est-ce là un moment où l'on

24 justifierait le fait de s'écarter de la procédure habituelle.

25 M. MOORE : [interprétation] Oui, mais si je me souviens bien, avec un autre

26 témoin, nous ne l'avons pas fait étant donné que la Défense a également

27 indiqué qu'il y avait des points incohérents ou divergents. A notre avis,

28 nous estimerions que les Juges de la Chambre devraient adopter cette

Page 4822

1 proposition, et cela concernerait, bien entendu, la crédibilité du témoin

2 et il conviendrait de surligner ce contexte avec les divergences.

3 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Donc, vous ne parlez pas du versement

4 du point de vue de la véracité de la teneur, mais du point de vue de la

5 crédibilité de ce témoin ?

6 M. MOORE : [interprétation] Ce n'est pas nécessairement de cette façon

7 qu'il faut l'entendre. A mon avis, pour ce qui est du droit anglo-saxon ou

8 du "common law", il est habituel de ne pas verser au dossier les

9 dépositions pour ce qui est de faire montre de leur consistance. Mais s'il

10 y a des éléments indiquant qu'il y a des divergences, il serait bon pour

11 les Juges de la Chambre d'examiner ces dépositions pour voir à quel point

12 le témoin a divergé de ce qu'il a déclaré au préalable. Maintenant, il

13 convient de savoir quel est l'effet que cela peut avoir sur le témoignage

14 du témoin en tant que tout. Je crois que cela concerne clairement les

15 questions de crédibilité. Je suis d'avis également que les Juges de la

16 Chambre devraient examiner la question dans un autre contexte, à savoir, du

17 poids qu'il convient d'attribuer à ces dépositions. Je crois que nous

18 pourrions peut-être trouver un justificatif à cet effet au niveau des

19 articles du Règlement. Pouvez-vous me donner quelques instants pour

20 retrouver l'article concerné ?

21 Si nous nous penchons sur l'article 89(F), et je me propose à présent d'en

22 donner lecture à l'intention de tout un chacun, il se lit comme suit : "Une

23 Chambre peut admettre comme élément de preuve le témoignage fait de façon

24 orale ou le témoignage fait sous forme écrite."

25 Alors, il apparaît clairement que mon éminent confrère a voulu se

26 référer à cet article-là pour faire la démonstration des divergences qu'il

27 a relevées. Dans ce sens-là, je pense que notre proposition serait

28 justifiée. Cela ne concerne pas seulement la cohérence de ce qu'il a dit

Page 4823

1 dans son témoignage.

2 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Moore, le 89(F) ne serait pas

3 considéré comme étant pertinent pour ce qui est du versement des pièces au

4 dossier. La pratique normale de ce Tribunal, c'est de faire en sorte que le

5 document présenté à l'occasion du contre-interrogatoire pour ce qui est de

6 procéder à l'identification des divergences au niveau des témoignages, il

7 convient de donner lecture au compte rendu d'audience des parties

8 pertinentes et de faire présenter par le témoin les commentaires qu'il

9 pourrait apporter et non pas de verser au dossier le document en tant que

10 tel.

11 Je voudrais laisser entendre qu'il y a une petite distinction

12 matérielle qui justifierait peut-être la nécessité de s'écarter de la

13 procédure habituelle et d'appliquer les mécanismes qui ont été récemment

14 mis en place.

15 M. MOORE : [interprétation] Je vais présenter une requête en ce sens étant

16 donné que j'entends bien qu'il s'agit ici d'un cas d'exception pour ce qui

17 est des dispositions qui se fondent sur le droit anglo-saxon, le "common

18 law." Je serais content de voir cela se produire parce qu'il s'agit de tout

19 un jeu de circonstances assez inhabituelles auxquelles nous faisons face.

20 Je crois qu'il conviendrait de prendre cela en compte.

21 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] J'estime, en dernière analyse,

22 Monsieur Moore, que cela concerne les points de crédibilité au final.

23 M. MOORE : [interprétation] Monsieur le Président, je suis certain que vous

24 êtes bien meilleur juge que je ne le serais à quel que moment que ce soit.

25 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Me flatter ne me vous mènera pas loin.

26 M. MOORE : [interprétation] Oui, je sais.

27 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Au cas où dans la déposition

28 précédente il y aurait des points qui devraient être versés au dossier, et

Page 4824

1 Maître Lukic, j'aimerais savoir s'il y a là des points pour lesquels vous

2 estimeriez que cela devrait être versé au dossier ?

3 M. LUKIC : [interprétation] Je dois dire que je n'ai pas consulté à cet

4 effet mes confrères. Je me suis conformé à la règle que vous avez fixée, à

5 savoir, présenter les éléments que nous avons estimés divergents par

6 rapport au témoignage. Personnellement, dans l'intérêt de la Défense de mon

7 client, je serais tout à fait disposé à faire en sorte que ces dépositions

8 soient versées intégralement au dossier. Mais je me dois de dire une chose,

9 à savoir, si nous acceptons une exception ici, cela sera mis en veilleuse

10 pour toutes les affaires jugées par ce Tribunal. Et je me dois de dire

11 autre chose, au fur et à mesure que ce procès évoluera, il y aura de plus

12 en plus de témoins qui auront donné plusieurs dépositions différentes du

13 point de vue des témoins de l'Accusation et des témoins de la Défense. Vous

14 devez certainement savoir qu'il y a ici un élément qui ne manquera pas de

15 réapparaître à chaque fois qu'il y aura contestation de la crédibilité d'un

16 témoin. Cela reviendra en permanence sur le tapis. Je pense qu'il y a un

17 moyen, pour ce qui est du Procureur quand il conduit l'interrogatoire de

18 son témoin, et bientôt moi-même lorsque j'aurai à conduire mon témoin dans

19 mon interrogatoire pour lui faire dire ce que je veux entendre. Je veux

20 démontrer quels sont les points où il y a divergence, des points où il y a

21 collision dans les différentes déclarations. Si nous faisons à présent une

22 exception sachant qu'il y a beaucoup de documents au niveau des différents

23 procès, il arrivera forcément qu'il y aura des parties qui voudront que ce

24 soit versé au dossier. Je crois que les deux parties devraient se

25 restreindre à des éléments de témoignage qui devraient être versés là où

26 l'on a relevé des incohérences ou des divergences. Parce qu'autrement, nous

27 allons avoir des problèmes parce que nous aurons à faire face à bon nombre

28 de dépositions de la part de personnes qui seront les mêmes personnes avec

Page 4825

1 des déclarations ou des dépositions différentes. C'est bien pour ma part ce

2 que je dois redouter ici, pour ce qui est d'événements pertinents.

3 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie, Maître Lukic. Je

4 comprends parfaitement bien votre préoccupation et c'est la raison pour

5 laquelle la pratique adoptée par ce Tribunal, d'après ce que j'ai cru

6 comprendre, était de procéder de façon uniforme et de ne procéder qu'à

7 l'identification des parties qui sont pertinentes au niveau des

8 dépositions, et cela restreint l'ouverture de débats et de discussions à

9 l'occasion du procès. Cela facilite également la tâche au niveau des

10 appels, pour ce qui est de permettre aux Chambres d'appel de voir de quoi

11 il en retourne. Donc, il y a deux facettes à ce raisonnement.

12 Y a-t-il d'autres requêtes à cet effet ?

13 Monsieur Moore, avant que de statuer sur la question, vous constaterez que

14 la Chambre n'a vu aucun de ces documents, ce qui fait que votre commentaire

15 précédent nous intéresse en tant que voie à suivre potentiellement. Il

16 s'agirait de nous présenter une version surlignée - vous pouvez le faire en

17 consultation avec les conseils de la Défense - aux fins d'identifier les

18 passages pertinents concernant les points de détail contestés, à savoir les

19 éléments où il y a eu changement dans la présentation du récit, ou alors là

20 où l'on peut mettre en place le mécanisme mis en place dernièrement.

21 Ensuite, il nous appartiendra d'étudier le contexte pour évaluer s'il y a

22 lieu de mettre en œuvre le dispositif récemment mis en place. Si cela nous

23 aide sur le plan matériel, peut-être les circonstances justifieront-elles

24 le versement au dossier. Aussi, n'allons-nous pas rendre une décision sur-

25 le-champ, mais attendrons-nous l'obtention de cette version surlignée et

26 nous statuerons. Si cela venait à être versé au dossier, Monsieur Moore,

27 cela ne concernera que la question de la crédibilité.

28 M. MOORE : [interprétation] Monsieur le Président, j'accepterai la décision

Page 4826

1 rendue par la Chambre. Je n'ai pas de problème à ce sujet. Je voudrais

2 également dire qu'en Angleterre, nous avons un nouveau code pénal datant de

3 2003 qui constitue une variation au sujet des règles de l'ouï-dire, si

4 éventuellement cela risquait d'être intéressant.

5 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous allons nous conformer à notre

6 Règlement à nous, Monsieur Moore.

7 M. MOORE : [interprétation] Je vous suis très reconnaissant. C'est ce que

8 j'ai cru comprendre.

9 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, veuillez continuer.

10 M. MOORE : [interprétation] Merci beaucoup.

11 Nouvel interrogatoire par M. Moore :

12 Q. [interprétation] Colonel, vous nous avez dit qu'à Belgrade, s'agissant

13 de Kijanovic, Tomic et notamment Borisavljevic, vous avez indiqué à

14 Borisavljevic d'aller chercher Mrksic. Or, devant cette Chambre-ci, vous

15 avez dit que cela n'a pas été le cas et vous avez apporté une explication.

16 J'aimerais vous poser une question à ce sujet-là. A quel point vous a-t-il

17 été difficile de témoigner à Belgrade sur ces sujets-là du point de vue de

18 vos collègues ?

19 M. VASIC : [interprétation] Monsieur le Président.

20 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, Maître Vasic.

21 M. VASIC : [interprétation] Mon éminent confrère, en posant sa question,

22 vient de dire au témoin que le témoin a dit à Borisavljevic d'aller

23 chercher Mrksic. Or, ce n'est pas ce qu'il a dit. Cela n'est même pas

24 consigné aux dépositions. Il n'a pas été question de l'envoyer chercher

25 Mrksic. Il a été question de sa part d'informer Mrksic de la nécessité

26 d'envoyer une unité de la police militaire. C'est dans ce sens-là que je me

27 suis levé pour intervenir.

28 M. MOORE : [interprétation] J'accepte cette objection. Cela dit, j'espère

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1 que le fond reste identique.

2 Q. Pouvez-vous nous dire si vous avez trouvé qu'il était difficile de

3 déposer à Belgrade à propos de tout ce qui est arrivé, de ces sujets ?

4 R. Monsieur Moore, je ne vous dirais qu'une chose. La première fois que

5 j'ai été convoqué pour témoigner à propos de l'affaire d'Ovcara devant le

6 président du procès sur la guerre, le général, à l'époque colonel, qui est

7 devenu général, le général Gojevic, mon point de vue, c'était que je ne

8 voulais pas témoigner. J'aurais préféré ne pas témoigner. J'aurais préféré

9 qu'ils me mettent en cellule, qu'ils m'accusent et que je puisse prouver

10 ensuite ce que j'avais fait, pour pouvoir lui montrer comment j'avais mis

11 en œuvre ma mission et comment je l'avais exécutée. C'était trois jours

12 après la déclaration d'état de guerre, après le début des bombardements de

13 l'OTAN. Ensuite, avec le président du tribunal de guerre, j'ai réussi à le

14 convaincre de ne pas m'interroger en tant que témoin. C'était très

15 difficile pour moi de témoigner. Je savais très bien -- j'anticipais

16 d'ailleurs exactement le type de pressions auxquelles je serais soumis. On

17 m'a demandé de témoigner trois jours après le début de la guerre contre la

18 Yougoslavie. On m'a demandé de témoigner sur ce qui s'était passé à Vukovar

19 et à Ovcara. Je ne sais pas combien d'autres personnes ont été convoquées

20 pour témoigner à ces propos à l'époque. Sur la base de ce que j'ai entendu,

21 je crois qu'il n'y a que le commandant Lukic et un autre journaliste qui

22 peut-être -- je ne suis pas sûr qu'il ait témoigné ici d'ailleurs. J'ai

23 refusé de témoigner à cette occasion et j'ai attendu une autre convocation,

24 convocation qui m'a été envoyée après la guerre.

25 Q. Merci. Cela répond en partie à ma question. Mais je reprends la

26 question quand même. M. Lukic vous a posé des questions, des questions

27 raisonnables, en vous disant : Vous êtes à Belgrade, et là vous avez dit

28 que vous avez parlé à Borisavljevic. Alors qu'ici, lors de votre

Page 4828

1 déposition, vous avez dit que quand vous l'avez appelé à haute voix, il

2 n'était pas là. Donc, il y a vraiment une différence, et nous sommes

3 d'accord avec le fait qu'il y a une différence. Voici ma question : quand

4 vous étiez en train de déposer à ces propos, je voudrais savoir si c'est

5 vraiment difficile, en tant que Serbe, de témoigner à Belgrade ?

6 R. Oui, c'était très difficile. C'était extrêmement difficile, vraiment.

7 Vous voyez bien ce que j'ai dit lors de ce procès. Je crois que le

8 président de la chambre a bien compris les difficultés que je rencontrais.

9 Il m'a guidé. Il m'a encouragé à dire la vérité.

10 Q. Puis-je vous demander autre chose ? Vous avez aussi dit que devant

11 cette Chambre vous alliez dire qui avait essayé de vous soumettre à des

12 pressions pour ne pas dire la vérité. Vous avez bien dit cela. Vous vous en

13 souvenez ?

14 R. Tous les conseils de la Défense avaient les déclarations que j'ai

15 faites devant les tribunaux militaires et des déclarations que j'ai faites

16 à l'Accusation. J'ai dit que, pour ce qui est de la partie militaire des

17 choses, la commission nationale pour la coopération -- enfin, un

18 représentant de cette commission était présent pendant absolument tout le

19 temps. Il m'a amené pour l'interview avec le bureau du Procureur. Il

20 s'appelait le colonel Mojsilovic. Il était toujours présent. Peut-être

21 qu'il est sorti un petit peu, mais il a reçu la déclaration que j'ai faite

22 devant l'Accusation de La Haye. Le colonel Mojsilovic avait ma déclaration,

23 et ma déclaration a été évaluée de ce point de vue. J'ai aussi été --

24 Q. Oui --

25 R. -- cité par la commission. On m'a invité pour une entrevue avec la

26 commission pour leur parler de la déclaration. Je peux dire cela, et

27 j'espère que M. Vasic ne va pas mal interpréter mes dires. Mais quand le

28 lieutenant-colonel Panic m'a appelé pour, comme il a dit, réconcilier nos

Page 4829

1 déclarations c'est encore difficile pour moi. Je les ai avertis tous les

2 deux. Je leur ai dit que la première déclaration que j'avais faite devant

3 le tribunal militaire avait été envoyée avec tout le dossier au bureau du

4 Procureur. Ce n'est pas moi qui ai envoyé la déclaration. Elle a été

5 envoyée très officiellement avec tout le dossier, faisant partie d'un

6 dossier qui avait été compilé contre des auteurs non identifiés.

7 Q. Merci. Vous avez été contre-interrogé par M. Lukic à propos d'une

8 déclaration qui, selon vous, a été faite par M. Sljivancanin alors que vous

9 quittiez la première réunion à Negoslavci. C'est quand Sljivancanin aurait

10 dit : Ne soyez pas surpris si vous voyez des Chetniks en train de massacrer

11 des gens. Là, je parle de façon assez générale. Vous me suivez ? Vous en

12 avez parlé ici. Ce n'est pas dans la déclaration que vous avez faite au

13 bureau du Procureur, ce n'est pas mentionné dans les comptes rendus audio

14 devant différentes cours. Cela fait 14 ans que vous avez cela en tête,

15 pourquoi est-ce que vous n'avez pas dit cela aux enquêteurs du bureau du

16 Procureur ou au juge ce que vous avez entendu Sljivancanin dire alors que

17 vous quittiez Negoslavci quand il a dit que les Chetniks allaient commettre

18 des massacres ? Vous comprenez bien ma question ?

19 R. J'ai très bien compris votre question. C'est une question essentielle

20 sur la façon dont j'ai présenté les faits. Jusqu'à aujourd'hui, je ne sais

21 même pas si Vojvoda Topola est encore vivant. Aucun des conseils ni M.

22 Sljivancanin n'ont jamais dit qui était véritablement Vojvoda Topola. Peut-

23 être que je vais le rencontrer ou peut-être qu'il va me surprendre d'une

24 manière ou d'une autre. Est-ce qu'il va être plein de bienveillance dans

25 l'interprétation de mes propos ou pas ? Je n'en sais rien. C'est peut-être

26 une raison aussi pour laquelle je n'ai jamais mentionné cela ni devant le

27 tribunal militaire ni devant le tribunal spécial. Mais ici, j'ai décidé de

28 dire ce que j'avais vraiment vécu là-bas et ce que j'avais vraiment entendu

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1 là-bas.

2 Q. Vous aviez peur pour votre vie si, publiquement, vous aviez dit ce que

3 Sljivancanin avait exprimé à propos d'un massacre possible perpétré par les

4 Chetniks ?

5 R. Evidemment. Tout le monde sait que le commandant Sljivancanin était

6 bien défendu avant et même pendant son arrestation à Belgrade. Un de mes

7 voisins m'en a parlé. Il était dans un des groupes qui protégeaient le

8 commandant Sljivancanin. Il appartient à une association qui s'appelle

9 Sloboda. C'est un homme corpulent, très grand, et il fait deux mètres de

10 haut, c'est un chef dans un grand hôtel de Belgrade. Donc je me suis

11 demandé s'il m'avait contacté par accident pour parler de choses comme :

12 Qui est un traître ? Qu'est-ce que c'est qu'un traître ? Qu'est-ce qu'un

13 patriote ? Quelle est la conduite à tenir, et cetera ? Cela arrivait tous

14 les jours, c'est le genre de choses que l'on vit tous les jours à Belgrade.

15 Q. Merci.

16 M. MOORE : [interprétation] Ici c'est peut-être plutôt pour la Chambre,

17 parce que je vais traiter du colonel Mrksic. A mon avis, je ne trouve pas

18 que la Défense ait demandé au témoin s'ils étaient d'accord pour dire,

19 comme le témoin l'a dit, que l'établissement de Velepromet était dans la

20 zone de responsabilité du colonel Mrksic. Le témoin a dit que c'était le

21 cas, en effet. A notre avis, je trouve que le conseil de M. Mrksic n'a pas

22 demandé cela au témoin, donc il pourrait peut-être répliquer.

23 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je pense en effet que lors du contre-

24 interrogatoire cela n'a pas été soulevé. Je vais peut-être me le confirmer

25 avec M. Vasic.

26 M. MOORE : [interprétation] Le même principe s'applique à ma question

27 suivante : est-ce que les conseils de la Défense acceptent que la caserne

28 de la JNA était dans la zone de responsabilité de Mrksic ?

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1 M. VASIC : [interprétation] Pour ce qui est de la question qui nous vient

2 de l'Accusation, je tiens à dire que la Défense du général Mrksic ne

3 conteste pas le fait que le général Mrksic commandait le groupe sud des

4 opérations, donc Velepromet et la caserne dépendaient de cette zone de

5 responsabilité. Mais au travers des questions, la Défense a contesté -

6 d'ailleurs cela s'est aussi vu dans la façon dont on a distribué un petit

7 peu les différents sujets entre nous les différents conseils de la Défense

8 - là, on a contesté le fait que la JNA était basée pendant tout le temps à

9 Velepromet et qu'il y avait un état-major de la Défense territoriale de

10 Vukovar à Velepromet.

11 Pour ce qui est de la zone d'opération, la caserne et Velepromet

12 étaient en effet dans la zone d'opération du Groupe opérationnel sud.

13 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] La caserne et Velepromet étaient dans

14 la zone d'opération du Groupe opérationnel sud.

15 M. MOORE : [interprétation] Oui. Il était sous la responsabilité du colonel

16 Mrksic.

17 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui.

18 M. MOORE : [interprétation] Merci pour cette clarification.

19 Q. Colonel, passons à autre chose maintenant. Pour un commandant, est-ce

20 que c'est vraiment important de savoir ce qui se passe dans la zone dont il

21 a la responsabilité ?

22 R. Tous les règlements militaires sont conçus pour assurer cela justement.

23 Tous les organes qui sont subordonnés au commandant doivent informer ce

24 commandant dès qu'il y a une modification de la situation, une évolution de

25 la situation. C'est bien connu. Le règlement est là pour être sûr que les

26 gens suivent les règles, pour être sûr que le commandement soit efficace.

27 Le commandant qui est en charge d'une situation doit être tenu au courant

28 de toute évolution. On doit aussi l'avertir de ce qui risque d'arriver. Les

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1 travaux de tous les organes visent justement à accomplir ce but, même le

2 commandement supérieur d'ailleurs va lui donner des lignes directrices qui

3 vont dans ce sens.

4 Q. Merci. Vous avez un petit peu répondu à la question, mais comment est-

5 ce que c'était accompli dans une structure militaire ? Comment est-ce qu'on

6 y arrive à obtenir ce résultat ? Dans une zone de responsabilité, comment

7 est organisé le commandement et le contrôle et comment est-ce qu'on arrive

8 à être certain d'être en charge du commandement et du contrôle quand on est

9 commandant et qu'on a une zone de responsabilité dont il faut s'occuper ?

10 R. Tout d'abord, le commandant va évaluer la situation et ensuite va

11 prendre des décisions seul. La décision qu'il prend va ensuite être

12 proposée à ses supérieurs pour recevoir une approbation. S'il s'agit d'un

13 commandant et d'un commandement qui est à très haut niveau, et si là on

14 traite d'une étape importante de l'opération, très importante, suffisamment

15 importante pour nécessiter l'approbation du commandement supérieur, alors,

16 dans cas-là, le commandant doit s'assurer qu'il a reçu l'approbation pour

17 tout cela. Je pense que le colonel Mrksic, à la fin de l'opération Vukovar,

18 avait pour devoir de s'assurer que la décision qu'il avait prise allait

19 être approuvée par le commandement Suprême.

20 Q. Qu'en est-il de la subordination des unités par rapport au commandant ?

21 Comment est-ce qu'on le contrôle et comment est-ce qu'on l'applique sur les

22 unités ? Comment est-ce que cela fonctionne ? Comment est-ce organisé au

23 sein de la JNA ?

24 R. Je crois que j'en ai déjà parlé ici, suite à l'article 112 de la loi

25 sur la Défense populaire, les principes de commandement sont très

26 clairement définis. Le premier principe, c'est l'unicité de commandement

27 pour s'assurer que toutes les ressources et toutes les forces sont

28 mobilisées en vue d'obtenir l'objectif. Donc le commandant dans sa zone de

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1 responsabilité est l'officier supérieur. C'est lui qui donne les missions à

2 ses commandants qui sont subordonnés et aux unités qui lui sont

3 subordonnées. Ses décisions doivent absolument être appliquées. Ses ordres

4 aussi doivent être appliqués. Un ordre venant d'un supérieur, c'est comme

5 une loi pour ceux qui sont sous ce supérieur, cet ordre a force de loi.

6 C'est l'autorité. Les pouvoirs du commandant peuvent être transférés à ses

7 adjoints uniquement dans des cas qui sont prévus d'ailleurs au titre de la

8 loi ou au titre du règlement. J'ai bien expliqué que le colonel Mrksic

9 avait mandaté le commandant Sljivancanin pour ce qui est de sa mission de

10 briefing. Ce qui fait qu'ensuite le commandant Sljivancanin nous avait

11 mandaté pour cette tâche, cette tâche qu'il avait reçue lui-même de son

12 supérieur.

13 Q. Dans ce cas-là, si je vous ai bien compris, à qui était subordonné le

14 commandant Sljivancanin ?

15 R. Le commandant Sljivancanin était subordonné au colonel Mrksic.

16 Q. Qu'en est-il de Borisavljevic --

17 M. VASIC : [interprétation] Monsieur le Président.

18 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Vasic, s'il vous plaît.

19 M. VASIC : [interprétation] J'avais l'impression que le témoin voulait

20 terminer sa phrase, mais mon éminent collègue l'a interrompu avant. Il

21 serait peut-être bon de le laisser finir sa phrase.

22 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] En effet, il semble, Monsieur Moore,

23 que vous deviez laisser votre témoin terminer sa phrase.

24 M. MOORE : [interprétation] Très bien, pas de problème.

25 Q. Donc Colonel, vous avez dit que Sljivancanin était subordonné au

26 colonel Mrksic et ensuite vous avez dit : "Et pour ce qui est de." Qu'est-

27 ce que vous vouliez dire ? Finissez votre phrase.

28 R. Je voulais dire qu'en ce qui concerne le côté professionnel des choses,

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1 quand on parle des règles qui gouvernent le fonctionnement des organes de

2 sécurité et leur mise en œuvre, il est responsable de ce qu'il fait devant

3 son supérieur hiérarchique immédiat dans la chaîne de commandement. Je ne

4 sais pas qui était son supérieur hiérarchique immédiat pour ce qui est en

5 tout cas de la chaîne de commandement de la sécurité.

6 Q. Parfait, je vais essayer de vous poser ma question suivante. Pour ce

7 qui est du capitaine Borisavljevic, à qui était-il subordonné ?

8 R. Borisavljevic était subordonné, en ce qui concerne ses fonctions de

9 sûreté, au commandant Sljivancanin. Cela, c'était la chaîne de commandement

10 professionnelle. Cela dit, pour ce qui est de l'officier en tant

11 qu'officier subordonné, là, il était subordonné au colonel Mrksic. Pour ce

12 qui est de la mission Velepromet, cette mission bien spécifique, je ne sais

13 pas très bien quel était l'ordre qui avait été donné et comment cela avait

14 été organisé, comment on avait réglementé les différentes missions qui

15 avaient été attribuées pour ce qui est de Velepromet. Mais de toute

16 manière, quelque part, il y avait quelque chose qui a été écrit, un plan,

17 une planification quelconque qui explicitait bien tout cela.

18 Q. Parfait. Maintenant, pour ce que vous savez, d'après vous, à qui est-ce

19 que Miodrag Panic était subordonné ?

20 R. En tant que chef d'état-major du colonel Mrksic, il était subordonné au

21 colonel Mrksic. Il avait aussi quelques pouvoirs puisqu'il était son

22 adjoint.

23 Q. Merci. Passons maintenant à autre chose. Pouvez-vous vous rappeler de

24 la déposition que vous avez faite à propos de votre retour à Negoslavci,

25 après avoir vu certains incidents à Velepromet ? M. Vasic vous a posé une

26 question selon quoi vous aviez dit à Mrksic ce que vous aviez vu, vous lui

27 aviez dit que vous aviez vu des gens en train de se faire tuer. Voilà la

28 réponse que vous lui avez donnée :

Page 4836

1 "Je voulais qu'il l'entende."

2 Est-ce que vous vous souvenez de cela : "Je voulais qu'il l'entende."

3 Vous vous rappelez d'avoir dit cela ?

4 R. Oui.

5 Q. Pourquoi est-ce que vous vouliez que Mrksic entende qu'il y avait eu

6 des meurtres à Velepromet ?

7 R. Monsieur le Procureur. si j'avais fait autre chose -- enfin je suis

8 désolé. Si j'avais fait ce que mes camarades officiers ont fait, comme

9 Tomic et Kijanovic, dans ce cas-là, si on se base sur le droit, je serais à

10 la gauche ou à la droite de M. Mrksic en ce moment pour répondre à cette

11 question. Quand j'ai accepté la mission, quand j'ai accepté de mettre en

12 œuvre cette mission et de l'exécuter, j'ai fait en sorte que je ferais tout

13 mon possible physiquement et mentalement pour exécuter ma mission. Donc

14 j'ai fait ce que j'ai fait en sachant bien que peut-être je ne pourrais

15 jamais témoigner ici, ou que peut-être personne ne saurait jamais ce qui

16 c'était vraiment passé.

17 Q. Je me suis peut-être mal exprimé dans ma question. Mais pourquoi est-ce

18 que vous avez considéré qu'il était très important de dire au colonel

19 Mrksic que vous aviez assisté à des meurtres à Velepromet ? Pourquoi ?

20 R. Pour lui dire, pour l'informer de ce qui s'était passé, car c'était mon

21 devoir au titre de la loi, je dois informer mon supérieur hiérarchique, mon

22 commandant que c'est arrivé et que c'est arrivé dans sa zone de

23 responsabilité.

24 Q. Passons à autre chose, mais qui découle de ce que je viens de vous

25 demander. Qu'est-ce que vous vous attendiez qu'il fasse ? Comment est-ce

26 que vous pensiez qu'il allait réagir une fois qu'on lui aurait dit qu'il y

27 avait des gens qui se faisaient exécuter dans sa zone de responsabilité ?

28 Vous comprenez bien ma question ?

Page 4837

1 R. Oui, je comprends bien votre question. Il aurait pu agir ou ne rien

2 faire ou ne rien dire. C'est ce qu'il a fait d'ailleurs. Mais s'il

3 appliquait la loi conformément aux règles qui gouvernent la guerre, le

4 droit international de la guerre, il devait d'abord prendre toutes les

5 mesures possibles pour rétablir la vérité pour savoir ce qui s'était passé.

6 Il devait vérifier si ce que je lui avais dit était vrai ou faux. Il devait

7 vérifier mes dires. Le colonel Mrksic avait les ressources, il avait les

8 effectifs sous la main pour ce faire. Il avait tout ce qu'il fallait pour

9 établir la vérité des faits et pour vérifier plus ou moins ce qui s'était

10 fait. Conformément à la loi, il aurait dû mettre sur pied un comité en

11 nommant des officiers. Il avait un assistant juridique au sein de son

12 unité, le lieutenant Jankovic. Sa mission en temps de guerre était

13 d'établir l'identité des morts, des blessés, d'enquêter sur les

14 infractions, sur les crimes. C'était la mission du lieutenant Jankovic.

15 Q. Dans ce cas-là, je tiens à utiliser un document de l'article 65 ter au

16 numéro 298, qui traite sur les règlements 1988 portant sur l'application du

17 droit international de la guerre. Si vous pouviez, s'il vous plaît,

18 regarder ces deux pages.

19 M. MOORE : [interprétation] Pour aider mes éminents collègues de la

20 Défense, je vous ai donné les références.

21 Q. J'ai un exemplaire papier pour le colonel. Pour ce qui est du tribunal

22 électronique, on peut trouver tout cela au 00807698 et 00807699. Vous

23 pouvez choisir. Vous avez soit l'électronique, soit le papier.

24 R. Est-ce que je pourrais avoir un exemplaire, je vous prie ?

25 M. MOORE : [interprétation] J'espère qu'après avoir donné tous ces détails,

26 la Chambre trouvera ces références. Ce n'est pas du tout ce à quoi je

27 m'attendais.

28 Q. En attendant que l'ordinateur trouve lesdits documents, est-ce

Page 4838

1 que vous pourriez regarder la règle 20 et la règle 21, puisque vous avez le

2 document papier. Est-ce que vous pouvez répondre par oui ou par non,

3 Colonel, est-ce que vous l'avez en face de vous ?

4 R. Oui, je l'ai et je peux le lire.

5 Q. Un petit moment, je vous prie.

6 M. MOORE : [interprétation] Je vois l'exemplaire électronique, mais je ne

7 peux pas le lire. C'est beaucoup trop flou; en tout cas sur mon écran. Je

8 ne sais pas pour vos écrans, mais sur mon écran, c'est très flou.

9 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous avons la version B/C/S. Nous

10 n'avons pas encore la version anglaise.

11 M. MOORE : [interprétation] Je suis sûr que vous serez ravi de lire cela en

12 B/C/S.

13 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] J'attendais en fait que vous nous

14 offriez le document écrit, Monsieur Moore.

15 M. MOORE : [interprétation] Je ne pense pas qu'il m'en reste.

16 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maintenant, nous avons la version

17 anglaise qui figure à l'écran, et c'est très clair.

18 M. MOORE : [interprétation] J'ai la version en B/C/S --

19 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Non, ils sont en train d'essayer de

20 remonter la filière historique du document.

21 M. MOORE : [interprétation] Voilà ce que je vais faire. Je vais me déplacer

22 un peu de côté, parce qu'il semblerait que l'un des écrans soit un peu plus

23 clair. Je vois que c'est la version B/C/S, et j'ai la version anglaise.

24 Alors, si vous n'y voyez pas d'inconvénient, je vais peut-être, dans un

25 premier temps, voir la version anglaise.

26 Q. Colonel, est-ce que vous pourriez, je vous prie, voir l'article 20.

27 Est-ce que vous l'avez d'abord ? Vous l'avez. De toute façon, vous avez le

28 document écrit.

Page 4839

1 R. Oui, je vois le document, Monsieur. Voilà ce que je lis : "Prévention

2 de toute infraction du droit pénal international et de la responsabilité

3 pénale. Article 20. "Responsabilité personnelle pour toute violation du

4 droit international de la guerre."

5 Est-ce que vous voulez que je lise cela à haute voix ou est-ce que

6 vous voulez --

7 Q. Est-ce que vous pourriez nous en donner lecture, je vous prie. Car je

8 vais demander que cela devienne une pièce à conviction, mais je pense que

9 ce serait utile pour tout le monde d'entendre cette lecture. Parce que je

10 vais vous poser quelques questions à propos de l'article 20 et de l'article

11 21. Je vous en prie.

12 R. L''article est comme suit : "Toute personne militaire ou civile est

13 personnellement responsable pour toute violation des droits de la guerre si

14 cette personne commet ladite violation ou donne l'ordre afin qu'elle soit

15 commise. L'ignorance des dispositions du droit de la guerre n'exempte pas

16 les personnes ayant commis l'infraction de toute responsabilité."

17 Le deuxième paragraphe est comme suit : "Toutes les personnes qui

18 commettent un crime de guerre ou toute autre infraction du droit de la

19 guerre seront poursuivies dans leur tribunaux nationaux, ou si ces

20 personnes tombent entre les mains de l'ennemi, elles seront poursuivies

21 dans les tribunaux de l'ennemi."

22 Il s'agit d'un article qui décrit la responsabilité personnelle. Au

23 paragraphe 3, il est indiqué : "Les auteurs de ce crime --

24 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, Maître Vasic.

25 M. VASIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président. J'ai

26 une objection à soulever. Je ne me souviens pas que cela ait été soulevé

27 lors du contre-interrogatoire par un membre des équipes de la Défense. Il

28 n'a pas été question de normes. Il n'a pas été question de la mise en

Page 4840

1 vigueur de normes ou de dispositions, bien entendu, toujours à propos de

2 l'année 1991. Je pense que mon estimé confrère aurait dû poser ce genre de

3 questions lors de l'interrogatoire principal s'il le souhaitait. Mais

4 jusqu'à présent, nous n'avons même pas établi l'existence de ces

5 dispositions et normes dans la constitution de la RSFY à l'époque. Puis,

6 comme je l'ai déjà dit, je ne pense pas que cela ait été soulevé lors de

7 l'interrogatoire principal.

8 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Moore.

9 M. MOORE : [interprétation] Je pense que c'est une corollaire aux questions

10 qui ont été posées par mon estimé confrère Me Vasic. Car Me Vasic a posé

11 des questions. Vous lui avez dit que vous aviez vu des gens qui s'étaient

12 fait tuer. Je voulais qu'il l'entende. Alors, dans un premier temps, je

13 peux tout à fait lui demander pourquoi il voulait que cela soit entendu. Et

14 deuxièmement : pourquoi ? Parce que la conséquence est que cela allait à

15 l'encontre du droit et nous pensons qu'il s'agit d'attirer l'attention du

16 témoin sur les règles en vigueur à l'époque, les règles de la JNA, règles

17 qui existaient à l'époque et qui avaient été compilées en 1988. Je pense

18 que c'est la suite naturelle des questions qui ont été posées par Me Vasic.

19 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur Moore.

20 Je pense que M. Moore a bien défini sa base juridique pour poser sa

21 question, car je pense que cela émane directement des questions que vous

22 avez posées. Il s'agit de bien identifier la façon dont ce témoin comprend

23 les critères juridiques.

24 M. MOORE : [interprétation] Je vous remercie.

25 Q. Je pense que nous en étions au troisième alinéa. Est-ce que vous pouvez

26 reprendre votre lecture là où vous l'aviez interrompue ?

27 R. Monsieur le Procureur, j'écoutais l'interprétation. Je ne sais pas si

28 j'ai très bien compris. Vous avez vu des gens qui se faisaient tuer --

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1 Q. Je souhaiterais juste que vous interrompiez et que vous repreniez votre

2 lecture, je vous prie, lecture de cet alinéa.

3 R. "Les auteurs de ces crimes peuvent également être traduits en justice

4 devant un tribunal international si ce tribunal existe."

5 Paragraphe suivant : "Une personne qui a organisé, incité ou aidé à ce que

6 soit commise une infraction du droit de la guerre" --

7 Q. Bien --

8 R. -- "ou une personne qui est un complice pour ces agissements sera

9 également considérée comme responsable en tant qu'auteur des délits."

10 Q. Je vous remercie. Il s'agit de la responsabilité personnelle en cas de

11 violation du droit de la guerre. Je pense que vous avez déjà accepté cela.

12 J'aimerais vous demander de passer à l'article 21. Si vous pouvez nous en

13 donner lecture, et j'aimerais vous poser une question à la fin.

14 R. Article 21 : "Responsabilité pour les actions des subordonnés. Un

15 officier sera personnellement responsable des violations du droit de la

16 guerre s'il savait ou avait des raisons de savoir que les unités qui lui

17 étaient subordonnées ou que d'autres unités ou d'autres personnes

18 planifiaient ou envisageaient que ces violations soient commises, et à un

19 moment où il était encore possible d'empêcher que ces actes soient commis,

20 n'a pas su ou n'a pas pu prendre les mesures pour prévenir ou empêcher ce

21 genre de violations. L'officier qui savait que des violations du droit de

22 la guerre ont été commises et qui n'a pas été à même de diligenter une

23 procédure disciplinaire ou au pénal contre les responsables d'infraction

24 sera considéré personnellement responsable, ou si le fait de diligenter des

25 poursuites n'est pas de son ressort, n'a pas été en mesure de rapporter

26 cette infraction à son officier supérieur."

27 "Un officier sera considéré comme complice ou instigateur si, du fait qu'il

28 n'a pas pris des mesures contre ses subordonnés qui enfreignent le droit de

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1 la guerre, il a contribué à ce que ces actes soient commis par des unités

2 ou par des individus qui lui sont subordonnés."

3 Q. Voilà quelle est ma question : si vous prenez l'article 21, quelle est

4 l'importance de cet article pour un officier qui découvre que des

5 assassinats ou des meurtres sont commis dans sa zone de responsabilité ?

6 R. Il est assez certain que cet article définit la responsabilité d'un

7 officier ayant le commandement pour toute violation du droit international

8 de la guerre. Il est assez clair et manifeste que des mesures sont

9 envisagées et que ce sont des mesures que tout officier doit prendre contre

10 quiconque ayant enfreint à ces règles. Il en va de même dans le cas où un

11 officier ayant le commandement ne prend pas les mesures, ou ne diligente

12 pas une poursuite, ou lorsqu'il n'y a pas d'enquête menée à bien contre les

13 auteurs de ces crimes.

14 Q. Je vous remercie.

15 M. MOORE : [interprétation] Je n'ai plus de questions à poser.

16 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Vous aviez indiqué, Monsieur Moore,

17 que vous souhaitiez verser ces documents au dossier.

18 M. MOORE : [interprétation] Oui, je vais verser ces documents au dossier.

19 Je vais convoquer un expert qui s'appelle Theunens. Il va, de toute façon -

20 -

21 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je suis tout à fait heureux s'il

22 vient.

23 M. MOORE : [interprétation] Ce que je voulais vous dire, c'est que cela va

24 être versé au dossier comme un seul jeu de documents. C'est pour cela que

25 je réserve mon point de vue à propos de ces documents.

26 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bien, nous attendons de voir ce qui va

27 se passer, Monsieur Moore.

28 M. MOORE : [interprétation] Merci beaucoup.

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1 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] J'aimerais faire une observation. Ces

2 documents, est-ce qu'ils ont été traduits par les personnes qui nous aident

3 ici ? Ces documents ont été interprétés à partir du B/C/S ici, et il s'agit

4 d'un texte juridique. Pour tout texte juridique, le libellé du texte est

5 important, et la Chambre fera référence à une traduction autorisée plutôt

6 qu'à ce que nous avons dans le compte rendu d'audience --

7 M. MOORE : [interprétation] Oui.

8 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] -- s'il y a des différences.

9 M. MOORE : [interprétation] Merci beaucoup.

10 [La Chambre de première instance se concerte]

11 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Vujic, je pense que vous

12 serez heureux d'entendre que vous êtes arrivé au terme de votre déposition

13 ici. La Chambre de première instance vous est reconnaissante d'être venu à

14 La Haye et souhaiterait vous remercier pour l'aide que vous avez accordée à

15 la Chambre. Nous vous remercions. Bien entendu, vous êtes tout à fait libre

16 de disposer et de rentrer chez vous maintenant. Nous allons maintenant

17 lever l'audience, et dans un petit moment -- vous pouvez rester assis pour

18 le moment, et lorsque nous aurons quitté le prétoire, vous pourrez vous-

19 même quitter le prétoire.

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

21 M. MOORE : [interprétation] Il y a autre chose, et c'est entièrement de ma

22 faute. Je ne l'ai pas mentionné tout à l'heure. Il s'agit d'un document. Je

23 souhaiterais faire une observation à propos de ce document. Je suppose que

24 mes estimés confrères auront quelques problèmes --

25 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Est-ce que cela porte sur la

26 déposition du témoin ?

27 M. MOORE : [interprétation] Oui. Pas de façon importante, mais toutefois,

28 oui.

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1 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je dois vous demander, Monsieur, de

2 vous rasseoir, car il se peut que nous devions encore vous poser des

3 questions.

4 M. MOORE : [interprétation] Je souhaiterais que le témoin n'entende pas ce

5 que je vais dire, parce que je ne souhaiterais pas que l'on pense que ce

6 que je vais dire peut porter tort à la Défense. Je ne sais pas si cela peut

7 être fait d'ailleurs.

8 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, tout à fait.

9 Monsieur Vujic, l'Accusation souhaiterait faire des observations à notre

10 intention. Il ne souhaiterait pas parler en votre présence au cas où cela

11 pourrait vous influencer. Est-ce que vous pourriez, je vous prie, suivre M.

12 l'Huissier ? Nous entendrons ensuite l'Accusation, puis nous aurons une

13 pause. Si vous devez revenir pour répondre à certaines questions, vous

14 reviendrez dans ce prétoire après la pause.

15 [Le témoin se retire]

16 M. MOORE : [interprétation] Voilà ce que je voulais dire. Il s'agit du

17 contre-interrogatoire mené à bien au nom de M. Mrksic, car ce qui a été

18 dit, en bonne et due forme d'ailleurs, est que Mrksic n'a jamais reçu de

19 notification à propos de l'incident de Velepromet; deuxièmement, il a été

20 également dit que Mrksic n'a jamais été informé de la part de Tomic qu'il y

21 avait des incidents qui se produisaient à la caserne de la JNA.

22 J'aimerais dans un premier temps aborder la deuxième partie de son

23 intervention. Manifestement, ce que la Défense avance est que ce témoin est

24 en train de nous présenter un rapport inventé de toutes pièces pour ce qui

25 est de ce qu'on lui a dit à propos de Velepromet, mais également à propos

26 de Tomic, Tomic qui aurait dit à Mrksic qu'il y avait des incidents qui se

27 produisaient à la caserne de la JNA, et que fondamentalement Mrksic n'a

28 rien fait, ou n'a pas tenu compte de ce qui a été dit. Pour être très

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1 direct, ce qui a été dit par le conseil de M. Mrksic, c'est qu'il ne faut

2 pas croire ce témoin, et que ce témoin nous a inventé des choses de toutes

3 pièces.

4 Pour ce qui est de la crédibilité du témoin à ce sujet, et pour cette

5 question, je dirais que si tel est le cas, et s'il s'agit d'un problème de

6 crédibilité, je pense que nous devrions pouvoir présenter à ce témoin

7 d'autres éléments de preuve, notamment une partie de la déclaration de

8 Tomic. C'est pour cela que je ne voulais pas m'exprimer en présence du

9 témoin qui dit dans sa déclaration que Tomic est allé informer Mrksic de ce

10 qui s'était passé à la caserne de la JNA. Nous vous présentons cela, non

11 pas pour ce qui est de la véracité de cet argument, mais parce que cela est

12 tout à fait conforme à ce que nous a dit ce témoin. Si vous évaluez la

13 crédibilité du témoin, je pense que vous ne devez pas considérer cela pour

14 ce qui est de la véracité de la teneur de ses propos, mais vous avez le

15 droit de prendre cela en considération lorsque vous considérez la cohérence

16 des éléments de preuve présentés par le témoin.

17 Nous disons que, dans le Règlement, nous avons la possibilité de

18 rappeler à un témoin ce qu'une personne a dit, et la Chambre devra évaluer

19 l'intégralité de la crédibilité. En fait, il est important de savoir que Me

20 Vasic s'est exprimé de forme négative. Il n'est pas accepté que Tomic a dit

21 à Mrksic ce qui se passait à la caserne de la JNA.

22 La Défense a indiqué de façon tout à fait catégorique que cela ne s'est pas

23 passé et, par conséquent, cela est présenté maintenant à la Chambre. Il

24 s'agit de la cohérence du témoin et de la crédibilité du témoin. Voilà. Il

25 s'agit, pour m'exprimer de façon différente, de la crédibilité du témoin

26 qui est en jeu.

27 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Pour que je comprenne un peu mieux,

28 qu'est-ce que vous souhaiteriez dire au témoin ?

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1 M. MOORE : [interprétation] Je souhaiterais que le témoin puisse lire ce

2 que Tomic a dit à propos du fait que Tomic soit allé voir Mrksic et qu'il

3 l'ait informé des événements qui s'étaient produits à la caserne de la JNA.

4 Il l'a informé des préoccupations qu'il avait. Ce témoin a dit que Tomic

5 avait dit qu'il l'avait fait. Ce qui est maintenant suggéré, c'est que cela

6 n'est pas vrai, et qu'il s'agit de quelque chose qui est monté de toutes

7 pièces.

8 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Cela, dans le contexte qui apparemment

9 est accepté, à savoir cette personne Tomic n'est plus en vie ?

10 M. MOORE : [interprétation] C'est exact.

11 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Dans quelles circonstances a été faite

12 sa déclaration ?

13 M. MOORE : [interprétation] Les indices de fiabilité qui ont été compilés

14 le 14 mars, devant le juge d'instruction au tribunal militaire de Belgrade,

15 à propos d'auteurs non connus pour des délits au pénal. Cela a été consigné

16 par un juge d'instruction. Il y avait également un représentant du greffe,

17 et ensuite il y a eu un entretien. Si vous me permettez de lire :

18 "Conformément à l'article 231, on a indiqué au témoin quels étaient ses

19 droits, et qu'il était obligé de dire la vérité." Je vais vous en donner

20 lecture. "Il doit dire la vérité, et il ne doit pas dissimuler des faits."

21 Ensuite, le nom de Tomic est indiqué, et le document est consigné,

22 répertorié. C'est un document qui a été rédigé par le tribunal.

23 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Et quelle en est la date ?

24 M. MOORE : [interprétation] La date est la date du 14 mars 2000. Très

25 heureusement, ma consoeur Mme Regue me rappelle que c'est le même processus

26 qui a été utilisé lors de la déposition du colonel Vujic et a été la base

27 sur laquelle repose la crédibilité des arguments, ce qui a été avancé par

28 mes estimés confrères.

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1 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui.

2 Maître Vasic.

3 M. VASIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président. Je

4 pense que mon estimé confrère essaie d'introduire le fond d'une déclaration

5 qu'il a déjà essayé de présenter, conformément à la déclaration au titre de

6 l'article 92 bis du colonel Tomic. Il s'agissait d'une proposition qui a

7 été rejetée par la Chambre à ce moment-là. Le témoin est décédé, et sa

8 déclaration porte sur les agissements de l'accusé. Nous ne pensons pas que

9 cela puisse être admis ou considéré comme recevable au titre de l'article

10 92 bis.

11 Ensuite, et outre ceci, je pense que mon estimé confrère a tout à fait

12 tort, car la Défense n'essaie pas de contester le fait que le colonel Tomic

13 lui ait dit qu'il s'est rendu auprès du colonel Mrksic, ou ce qu'il lui ait

14 dit. Ce que nous contestons, c'est le fait que le colonel Tomic était avec

15 le colonel Mrksic, mais nous n'avons jamais contesté le fait que le colonel

16 Vujic ait parlé au colonel Tomic, et que le colonel Tomic lui ai dit ceci

17 et cela pour certaines raisons, principalement qu'il a parlé au colonel

18 Mrksic, qui n'est pas le cas.

19 Il ne s'agit pas d'une circonstance qui a une incidence pour la crédibilité

20 du témoin. Nous n'avons pas dit que le colonel Vujic ne disait pas la

21 vérité lorsqu'il nous a relaté qu'il avait parlé au colonel Tomic. Ce que

22 nous contestons, c'est le fait que le colonel Tomic se soit jamais rendu

23 auprès du colonel Mrksic. Ce sont deux faits tout à fait différents. Et qui

24 plus est, nous pensons que lorsque l'on introduit une déclaration,

25 notamment l'extrait pertinent que mon estimé confrère souhaiterait voir

26 lire, va à l'encontre d'une décision prise par la Chambre de première

27 instance, décision de la Chambre de première instance qui a été prise

28 lorsque le bureau du Procureur lui a demandé de pouvoir utiliser cette

Page 4849

1 déclaration au titre de l'article 92 bis.

2 Mon estimé confrère, Me Lukic, me rappelle qu'il y a un autre

3 problème juridique qui est en jeu et qui était un problème semblable dans

4 l'affaire Simic, et là, la Chambre avait rejeté une requête présentée par

5 le bureau du Procureur. Dans ce cas, mon estimé confrère Me Lukic pourra

6 certainement fournir de plus amples explications à ce sujet.

7 Une fois de plus, la Défense ne conteste pas le fait que feu colonel

8 Tomic a dit quelque chose au colonel Vujic, mais ce que nous contestons,

9 c'est le fait que le colonel soit allé voir le colonel Mrksic ce jour-là.

10 Ce qu'a dit mon estimé confrère à propos de Velepromet ne se trouve

11 absolument pas dans la déclaration du colonel Tomic. Par conséquent, cela

12 ne peut pas être utilisé par rapport à cette partie de la déclaration. Je

13 vous remercie, Monsieur le Président.

14 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Lukic. On vous a désigné

15 volontaire. Est-ce que vous avez une référence à nous donner à propos de

16 l'affaire Simic, une référence qui a son importance ?

17 M. LUKIC : [interprétation] D'une façon procédurale, il s'agit d'une

18 citation, à mon avis, identique. Dans l'affaire Simic, Bosanski Samac, le

19 Procureur, au tout début du procès, a proposé de verser au dossier en guise

20 d'éléments de preuve une interview que le Procureur a effectuée avec

21 Miroslav Tadic. Les Juges de la Chambre ont statué - je ne sais pas si la

22 décision a été rendue sous forme écrite ou au compte rendu - mais c'est

23 daté 2001. Il a été rejeté le versement au dossier de ces interviews parce

24 qu'on a estimé que cela n'a pas été rédigé dans une forme qui pourrait

25 permettre d'en faire un élément de preuve.

26 Ultérieurement, dans le courant du procès, après avoir entendu en

27 guise de témoin Miroslav Tadic; quoiqu'il ait eu une décision de rendue par

28 les Juges de la Chambre pour ce qui est de la possibilité de verser un

Page 4850

1 élément de preuve au dossier, l'Accusation a demandé à des fins de

2 crédibilité que des parties de l'interview soient montrées au témoin. Les

3 Juges de la Chambre ont rejeté cela puisque la décision a déjà été rendue

4 d'ores et déjà. Partant de là, les Juges de la Chambre ne pouvaient pas

5 réexaminer une décision relative à la crédibilité, étant donné que la forme

6 suivant laquelle l'interview a été effectuée ne pouvait pas constituer une

7 pièce à conviction. Et en application du 92 bis, j'estime que cette

8 déclaration ne correspond pas à la forme qui permettrait un versement au

9 dossier. Ce serait le complément de commentaire que j'apporterais par

10 rapport à ce que mon éminent confrère Me Vasic a déjà dit. Merci.

11 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Cette décision a été rendue avant

12 l'adoption de l'article 89(F), n'est-ce pas ?

13 M. LUKIC : [inaudible]

14 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, Monsieur Moore.

15 M. MOORE : [interprétation] Tout d'abord, j'ai un compte rendu d'audience

16 pour répondre à la question soulevée par notre confrère Me Vasic.

17 "Vous nous avez dit ce que vous avez entendu, ce que le colonel Tomic

18 a dit au colonel Mrksic lorsque la TO a voulu prendre de force les

19 prisonniers de guerre dans la caserne. Alors, si je vous dis que le colonel

20 Mrksic a déclaré que le colonel Tomic n'a jamais rien dit de la sorte et

21 que le colonel Mrksic ne s'est pas employé en faveur de cette prétendue

22 idée que quiconque devrait être traité avec laisser-aller ou de façon

23 laxiste, que voulez-vous dire ?"

24 Alors, il y a deux éléments qui sont pris en question : d'abord, on

25 explique que Tomic n'a pas dit cela à Mrksic.

26 Pour ce qui est de la distinction à faire, et j'estime que la

27 distinction est importante à faire, c'est celle de savoir quelle est la

28 finalité de la présentation de cette déposition. Alors, si cela ne consiste

Page 4851

1 qu'à parler de la véracité du témoignage, je veux bien, mais j'estime que

2 cela ne pourrait être versé au dossier ou accepté du point de vue de la

3 véracité et de la teneur. Lorsque l'Accusation a fait une requête en

4 application du 92 bis, la déclaration a été proposée pour versement pour

5 prouver la véracité. Or, il se trouve que nous ne proposons pas le

6 versement au dossier de cette pièce pour la véracité de la teneur, mais

7 pour ce qui est de la cohérence du témoignage du témoin et pour ce qui est

8 notamment de sa crédibilité. C'est là la distinction importante à faire, à

9 mon avis.

10 Ce que la Défense a voulu laisser entendre, c'est que ce témoin n'est

11 pas fiable, n'est pas digne de foi. Ils lui ont présenté des éléments à cet

12 effet, mais nous estimons qu'il appartient aux Juges de la Chambre

13 d'évaluer la crédibilité totale de ce témoin-ci. Une fois de plus, je me

14 réfère aux Règlements, notamment à l'article 89(F), comme j'ai déjà essayé

15 de le faire, à savoir que : "Le témoignage d'un témoin peut être versé au

16 dossier oralement ou, si c'est dans l'intérêt de la justice, sous forme

17 écrite." A mon avis, cela relève de l'intérêt de la justice qu'en

18 corrélation de la crédibilité de ce témoin Vujic, je pense que cela devrait

19 être admis. C'est ce que je présente comme requête.

20 M. VASIC : [interprétation] Monsieur le Président.

21 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Vasic.

22 M. VASIC : [interprétation] Je veux expliquer à mon confrère une chose. La

23 Défense ne peut pas savoir si M. Vujic et M. Tomic se sont entretenus, nous

24 ne voulons pas et nous ne pouvons pas le contester cela. Nous ne pouvons

25 pas savoir non plus -- ou plutôt si M. Tomic a pu dire une contrevérité au

26 témoin Vujic. Nous ne mettons pas en cause la crédibilité sur ce point-là.

27 Ce que nous affirmons, c'est qu'il n'y a pas eu d'entretien de cette

28 nature-là avec le colonel Tomic. Par conséquent, j'estime que mon éminent

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1 confrère est en tort pour ce qui de ce fait. Nous n'avons pas de fait à

2 notre disposition pour savoir si le colonel Tomic et le colonel Vujic se

3 sont entretenus ou pas.

4 S'agissant du 89(F), maintenant je crois que le problème qui se pose, c'est

5 celui dont nous avons déjà parlé lorsque mon éminent confrère a présenté

6 une requête générale concernant l'application de cet article-là. En

7 l'occurrence, s'agissant de la crédibilité, nous pourrions parler de

8 l'application ou non application de cet article. Mais l'objection ne porte

9 pas sur la crédibilité de M. Vujic sur ce point-là, sa crédibilité est mise

10 en cause sur d'autres éléments que nous avons avancés ici. Si maintenant il

11 est question des agissements des accusés, nous estimons que le 89(F) ne

12 devrait pas mettre en péril les dispositions qui sont déjà accordées ou qui

13 sont mises en vigueur par l'article 92 bis. Merci.

14 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Vasic, ai-je bien compris que

15 la question que vous avez posée au témoin, en substance, a été celle de

16 savoir : vous nous avez dit avoir entendu Tomic dire au colonel Mrksic que

17 la TO voulait emmener par la force des prisonniers de la caserne ? Est-ce

18 que c'est là, la substance de votre question ?

19 M. VASIC : [interprétation] Non, Monsieur le Président. Etant donné que M.

20 Vujic nous a dit que M. Tomic lui avait parlé de la réunion avec le colonel

21 Mrksic, je lui ai demandé ce qu'il dirait si je lui disais que le colonel

22 Mrksic ne s'était pas vu avec le colonel Tomic, sans pour autant contester

23 la possibilité qu'ils se soient entretenus tous les deux, cela je ne le

24 sais pas. Je ne sais pas si le colonel Tomic a dit la vérité ou pas à

25 l'égard du colonel Vujic pour ce qui est de son entrevue avec le colonel

26 Mrksic. Ici, il s'agit --

27 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Ce que je viens de vous dire, c'est la

28 façon dont j'ai compris le compte rendu d'audience dont a donné lecture M.

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1 Moore. Peut-être ai-je mal compris ce qu'il a dit ?

2 M. VASIC : [interprétation] Monsieur le Président, ce que mon confrère a

3 donné comme lecture, c'est que j'avais dit au témoin que le colonel Tomic

4 et le colonel Mrksic ne se sont pas entretenus sur ce sujet-là. Cela, c'est

5 d'un. Puis, je lui ai demandé : Vous nous avez dit que le colonel Tomic

6 s'était entretenu avec vous pour vous dire qu'il est allé voir le colonel

7 Mrksic. Je vous dis qu'il n'est pas allé voir le colonel Mrksic. Quel est

8 votre commentaire ?

9 C'était la teneur de ma question. A mon avis, il ne découle pas de

10 cette question le fait que j'ai contesté que le colonel Vujic se soit

11 entretenu avec le colonel Tomic.

12 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vais demander à M. Moore de nous

13 rappeler ce qu'il nous a lu, Monsieur Vasic.

14 M. MOORE : [interprétation] Ce que j'ai ici c'est la journée 52 du compte

15 rendu d'audience. Je crois que le numéro est le 4706.18. Malheureusement,

16 je n'ai pas la version imprimée, donc permettez-moi de le retrouver pour

17 vous en donner lecture de façon absolument précise.

18 [Le conseil de l'Accusation se concerte]

19 M. MOORE : [interprétation] La question se lisait comme suit. Merci.

20 "Vous nous avez dit que vous avez entendu le colonel Tomic dire au colonel

21 Mrksic que la TO avait l'intention d'emmener des prisonniers de force des

22 locaux de la caserne. Si je vous disais que le colonel -- du point de vue

23 du colonel Mrksic, que le colonel Tomic, en la présence d'un colonel de

24 l'aviation, ne lui a jamais rien dit de ce genre, pas plus que le colonel

25 Mrksic ait été partisan de la prétendue idée qu'il conviendrait d'être

26 laxiste à l'égard de quiconque, que diriez-vous à ce sujet ?"

27 Voilà, c'est ce que je viens de donner comme lecture du compte rendu

28 d'audience.

Page 4854

1 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je crois qu'il y a une contestation

2 entre la façon dont vous avez compris la question dont M. Vasic a posé la

3 question et ce que le compte rendu d'audience nous dit à ce sujet.

4 Je crois, Maître Vasic, que la plus équitable des choses à faire c'est de

5 vous permettre de vous pencher sur la question pendant la pause afin d'être

6 sûr que vous pouvez accepter le fait que la question, telle que vous l'avez

7 posée au témoin, est bel et bien celle qui figure au compte rendu

8 d'audience. Si besoin est, M. Moore et vous-même pouvez vous entretenir à

9 ce sujet. Mais nous allons, nous, reprendre à 18 heures cinq nos travaux,

10 et le témoin devrait attendre et patienter jusque-là.

11 --- L'audience est suspendue à 17 heures 47.

12 --- L'audience est reprise à 18 heures 09.

13 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Vasic.

14 M. VASIC : [interprétation] Grand merci, Monsieur le Président. Il me

15 semble que cette pause nous a été utile, et je crois avoir constaté où est

16 le problème. Le problème se situe notamment au niveau du compte rendu

17 d'audience, qui de façon évidente ne correspond pas à ce que j'ai posé

18 comme question. Comme mon éminent confrère vient d'en donner lecture, ma

19 question est celle de dire : "Vous nous avez dit que vous avez entendu le

20 colonel Tomic dire au colonel Mrksic."

21 En réalité, j'ai posé la question au témoin : "Vous nous avez dit que vous

22 avez entendu de la bouche du colonel Tomic qu'il s'était entretenu avec le

23 colonel Mrksic parce que le colonel Vujic n'était pas présent," et on le

24 voit partant des questions et réponses entre le témoin et mon confrère en

25 page 4 567, lignes 11 à 14 du compte rendu d'audience, où mon collègue a

26 posé la question : "Et au sujet de Tomic ?"

27 Et la réponse a été : "Le camarade Slavko Tomic a dit qu'il est allé parce

28 que, ces deux ou trois fois, le colonel Mrksic devait intervenir au sujet

Page 4855

1 des autocars."

2 On voit de cette réponse que le témoin Vujic n'a pas été présent à

3 l'occasion de la conversation, et je n'ai pas pu pour ma part contester le

4 fait qu'il ait entendu la conversation entre Tomic et Mrksic. J'ai demandé

5 à M. Vujic : Partant de la conversation avec M. Tomic, que dirait-il si je

6 lui disais que M. Tomic n'avait pas vu M. Mrksic. Je ne sais pas si M.

7 Tomic s'est entretenu avec M. Vujic ou pas ou s'il lui a dit la vérité ou

8 pas. Je crois que c'est là qu'il y a l'erreur, au niveau de la traduction

9 du compte rendu d'audience d'hier, et ceci à la page que mon éminent

10 confrère a indiquée tout à l'heure.

11 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci, Maître Vasic. Monsieur

12 Moore.

13 M. MOORE : [interprétation] Bien, je suis désolé, mais ceci concerne la

14 crédibilité du témoin. Parce qu'il a été clairement dit au témoin qu'en

15 réalité cela ne s'était jamais produit. Par conséquent, j'essaie de donner

16 lecture de ce qui a été dit au final de façon exacte. Je demande aux Juges

17 de m'accorder quelques instants.

18 [Le conseil de l'Accusation se concerte]

19 [La Chambre de première instance se concerte]

20 M. MOORE : [interprétation] Monsieur le Président, je cherche l'original et

21 non pas ce qui nous a été rapporté au sujet de celui-ci.

22 [La Chambre de première instance se concerte]

23 M. MOORE : [interprétation] Monsieur le Président, je ne retrouve pas le

24 compte rendu d'audience dans la forme qui devrait être la sienne, mais

25 toujours est-il que d'après la façon dont cela a été posé, il était tout à

26 fait clair que jamais rien ne lui avait été dit de la sorte, et jamais le

27 colonel Mrksic n'avait défendu cette thèse.

28 Ce qu'on a laissé entendre à Vujic, c'est que Tomic ne s'était pas

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1 entretenu avec Mrksic. Par conséquent, il est laissé entendre que Vujic

2 avait inventé des choses. J'affirme que si l'on étudie la crédibilité de ce

3 témoin-ci, il faudrait que les Juges de la Chambre disposent de cette

4 partie-là de la déposition de Tomic - pas en entier, mais la partie qui dit

5 clairement que Tomic est allé voir Mrksic pour lui dire ce qu'il a dit

6 d'après le contenu de la déposition, pour le prévenir au sujet des

7 prisonniers de guerre et de la caserne, parce que ces éléments de preuve

8 confirment ce qui a été dit à Vujic. Or, la corroboration est relative à la

9 véracité de la teneur. Mais je ne le fais pas pour cette raison. Il s'agit

10 de la question de crédibilité.

11 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] M. Vasic fait la distinction entre le

12 fait qu'il y a eu un entretien entre Tomic et le colonel Mrksic --

13 [Le conseil de l'Accusation se concerte]

14 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je crois qu'il serait tout de

15 même équitable de patienter un peu, Maître Vasic, parce que M. Moore est en

16 train de regrouper ses forces.

17 M. MOORE : [interprétation] Monsieur le Président, j'ai cela sur l'écran

18 d'un côté, et le micro est de l'autre malheureusement. Je vais essayer de

19 voir si ce micro-ci fonctionne. Voilà ce que j'ai trouvé au compte rendu

20 d'audience : "Merci. Vous nous avez dit que vous avez entendu le colonel

21 Tomic dire au colonel Mrksic que la TO avait de force souhaiter prendre en

22 charge les prisonniers de guerre qui se trouvaient à la caserne. Si je vous

23 dis que le colonel Mrksic a été d'avis que le colonel Tomic, en présence

24 d'un colonel de l'aviation, n'a jamais dit chose pareille, pas plus que le

25 colonel Mrksic a défendu cette prétendue idée aux termes de laquelle

26 quiconque devrait être traité avec laxisme, que diriez-vous ?"

27 Voilà, je viens de donner lecture de ce qui figure au 4 706, lignes 18 à

28 25. Ce que je dis, c'est que le colonel Vujic s'est vu poser la question

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1 aux termes de laquelle son récit, suivant lequel Tomic aurait dit à Vujic

2 que Tomic était allé voir Mrksic pour exprimer sa préoccupation au sujet de

3 la TO et son comportement à la caserne, ce qui a été laissé entendre au

4 témoin c'est que Vujic a inventé de toutes pièces ce qu'il a dit.

5 De mon avis, compte tenu de la façon dont la question a été posée,

6 cela remet en question la crédibilité du témoignage même de M. Vujic. Une

7 fois de plus, j'affirme que mon souhait est celui de joindre la partie de

8 la déclaration de Tomic qui dit que Tomic déclare qu'il est allé Mrksic

9 pour exprimer à plusieurs reprises sa préoccupation.

10 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Moore, le problème c'est

11 qu'il dit que la traduction ne traduit pas la teneur de la question qu'il a

12 posée au témoin. Or, comme il semble l'avoir compris, sa question ne

13 commençait pas par les mots, "Vous nous avez dit que vous avez entendu le

14 colonel Tomic dire à Mrksic," mais cela commence par la teneur suivante :

15 Ce que vous dites avoir entendu de la bouche du colonel Tomic au sujet de

16 sa conversation avec le colonel Mrksic, et ainsi de suite. C'est là que Me

17 Vasic fait la distinction au sujet de savoir, si conversation il y a eue du

18 tout entre Tomic et le colonel Mrksic, auquel sujet il n'y a pas de

19 contestation. Mais ce qui est contesté par ses soins, c'est la teneur même

20 de cette conversation. Le témoin n'a pas du tout dit qu'il avait entendu

21 cette conversation. Le témoin a relaté ce que Tomic lui a dit

22 ultérieurement au sujet de ladite conversation. C'est sur cette base-là que

23 la contestation conteste l'exactitude de ce que le témoin a entendu de la

24 bouche de Tomic au sujet de la conversation qui s'est déroulée entre Tomic

25 et Mrksic. Mais il n'est pas contesté que cela ait effectivement été dit au

26 témoin par Tomic. Cela, on ne le sait pas.

27 M. MOORE : [interprétation] Oui, je suis d'accord. Je suis d'accord si on a

28 dit qu'il y a une erreur dans la traduction. Cela, bien sûr, je le prends

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1 au mot. J'imagine qu'il faudra réviser peut-être le compte rendu, qu'il

2 soit finalisé ou non.

3 A mon avis, de toute façon, il n'est pas encore finalisé. Mais le

4 problème, c'est que M. Vasic, sur instructions, est en train de dire à ce

5 témoin Vujic qu'il invente de toutes pièces certaines preuves pour ce qui

6 est, par exemple, de Negoslavci, mais ici il s'agit de la caserne. Parce

7 que ce que dit le témoin, c'est que Tomic lui a dit qu'il avait été voir

8 Mrksic, et mon éminent confrère M. Vasic, ce qu'il dit est que cela n'est

9 jamais arrivé en fait. Il dit qu'il n'y a jamais eu de conversation entre

10 Tomic et Mrksic. Que ce soit vrai ou faux, il nous dit qu'il n'y a jamais

11 eu de conversation entre Mrksic et Tomic. Le problème, à mon avis, c'est de

12 savoir s'il faut croire Vujic par rapport à ce que Tomic lui aurait dit.

13 Parce qu'à mon avis, c'est quand même tout à fait recevable en tant que

14 preuve contre Mrksic.

15 Si on attaque la crédibilité de ce témoin, or il est dit que cette

16 conversation entre Tomic et Mrksic n'est jamais arrivée, dans ce cas-là, je

17 fais valoir que la Chambre doit pouvoir voir toutes les preuves qui portent

18 là-dessus, pas pour la teneur même de ce qui a été dit par Tomic, mais pour

19 ce qui est que Tomic a indiqué, dans sa déclaration, qu'il avait été voir

20 Mrksic. Cela porte sur la crédibilité du témoin, et non pas sur la véracité

21 de la teneur de la conversation.

22 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Cet argument est influencé

23 matériellement par la question qui a été vraiment posée, et il me semble

24 que la Chambre va devoir reconsidérer les choses en étudiant les bandes.

25 M. MOORE : [interprétation] Certes.

26 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] On va rentrer dans les détails, et on

27 va voir ce qui s'est dit. Mais allons plus loin, pour ce qui est de la

28 deuxième partie, enfin quand on regarde l'anglais, et, bien sûr, il faut

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1 aussi là voir dans la bande ce qui a été véritablement dit au départ -- je

2 pense que ce qui est dit par mon client, c'est qu'en présence d'un colonel

3 de l'armée de l'air, Tomic n'a jamais dit quoi que ce soit de cette teneur,

4 il semble quand même que l'implication c'est qu'il y a eu une conversation

5 en présence d'un colonel de l'armée de l'air, mais que la teneur était

6 différente que ce que Tomic aurait éventuellement relaté. La question est

7 de savoir si on est en train de contester la crédibilité du témoin, ou la

8 crédibilité de Tomic. Je pense que c'est le nœud du problème.

9 Monsieur Moore, étant donné qu'il est déjà très tard, voyons comment on

10 pourrait arriver à faire avancer les choses. Si tout était redressé, et

11 tout était accepté par toutes les parties, qu'est-ce que vous voudriez

12 poser à ce témoin ? Une question, si tant est que la portion pertinente du

13 compte rendu de feu M. Tomic soit admissible en tant que preuve pour ce qui

14 est de sa crédibilité ? Et l'autre problème, c'est de savoir comment votre

15 témoin va contribuer à éclaircir les choses.

16 M. MOORE : [interprétation] Vous avez exactement touché le nœud du

17 problème. Je ne vois aucune raison pourquoi on devrait retarder le témoin

18 ou de le rappeler. Il suffit d'abord de vérifier la fiabilité du compte

19 rendu et on pourra déterminer ainsi l'argument juridique. A mon avis, je

20 voudrais que cette portion même du compte rendu, cette partie de la

21 déclaration soit produite devant nous en tant qu'élément de preuve, mais je

22 ne vais pas poser la question au témoin. Je pense qu'on peut tout à fait

23 considérer que l'on prend cette portion de la déclaration en tant

24 qu'élément de preuve et on n'a pas besoin, dans ce cas-là, de rappeler le

25 témoin.

26 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui. J'ai l'impression, Monsieur

27 Moore, que nous arrivons enfin à une solution. La Chambre pense que c'est

28 la forme même de la question et la réponse et qui sont essentielles. Il

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1 semblerait que M. Vasic remet en cause l'interprétation en anglais de ce

2 qui a été dit. Donc il faut qu'on étudie exactement la véritable question

3 dans son original, ainsi que la réponse dans son original. Cela va, bien

4 sûr, prendre du temps. Je pense que la meilleure chose à faire, quant à

5 savoir si l'extrait de ce document peut être admissible ou non, c'est

6 quelque chose que nous déciderons un peu plus tard, une fois que l'on aura

7 bien compris quelle était la véritable question et la véritable réponse à

8 l'original. Mais vous comprenez bien de toute façon que même si, en fin de

9 compte, on accepte votre version des faits, nous ne voyons vraiment pas

10 comment le témoin peut apporter quoi que ce soit.

11 M. MOORE : [interprétation] D'accord.

12 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui. Le témoin a dit : "J'ai entendu

13 certaines choses qui m'ont été relatées par Tomic," et si nous recevons un

14 document écrit éventuellement, on pourra savoir ce qui a été dit par feu

15 Tomic. Pour l'instant, nous allons prendre une décision plus tard sur votre

16 requête. Nous avons entendu ce que M. Vasic avait à dire, nous sommes

17 d'accord qu'il faut absolument vérifier la traduction exacte de ce qui pose

18 problème pour l'instant, et une fois que l'on saura exactement quelle est

19 la teneur véritable de la question et de la réponse dans l'original, on

20 pourra prendre notre décision de façon informée.

21 Je tiens à dire qu'à notre avis, ce n'est pas quelque chose qui est soulevé

22 au titre de l'article 92 bis et qui n'est pas déterminé par une décision

23 permise suite à l'application de l'article 92 bis, parce que la décision

24 prise au titre d'un article 92 bis, c'est une requête qui autorise la

25 recevabilité à propos de la véracité d'un contenu d'un déclaration écrite.

26 Ce qui n'aurait pas à voir avec les actes et la conduite d'une personne en

27 accusation, ce qui est différent de ce que l'on a à l'heure actuelle,

28 puisqu'ici il s'agit d'une question de crédibilité, quant à savoir si on

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1 doit accepter cette déclaration qui confirmerait ou qui infirmerait

2 l'élément de preuve fourni par ce témoin. Nous comprenons bien et je tiens

3 à dire que nous comprenons que ce n'est pas quelque chose qui peut être

4 décidé au titre de l'article 92 bis du Règlement. S'il était admissible, ce

5 document serait admissible au titre du 89(F) plutôt. Mais on verra bien de

6 toute façon une fois que la traduction aura été vérifiée.

7 Monsieur Vasic, vous avez quelque chose à ajouter ?

8 M. VASIC : [interprétation] Peut-être puis-je vous aider et aider aussi

9 tout le monde dans cette salle. Je crois que nous sommes tous d'accord pour

10 dire que M. Vujic n'était pas présent quand M. Tomic et M. Mrksic se sont

11 soi-disant entretenus. Donc, je n'aurais pas pu lui demander s'il avait

12 entendu la conversation. Je tenais juste à clarifier cela. Cela, personne

13 ne peut le contester, n'est-ce pas ? Dans ce contexte, je pense que la

14 question que j'ai posée dans ma langue est tout à fait claire.

15 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Très bien.

16 Nous avons terminé avec le témoin. Dans ce cas-là, il faudrait lui dire

17 qu'il peut partir.

18 Monsieur Moore, êtes-vous prêt à interroger le prochain témoin ?

19 M. MOORE : [interprétation] Oui. Nous avons un témoin qui est là

20 disponible, qui est prêt à témoigner.

21 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Vous devenez presque aussi énervé que

22 M. Vasic sur sa dernière question. Je tiens à dire qu'il faut absolument

23 que nous en ayons fini à 7 heures moins le quart aujourd'hui. Est-ce que

24 vous pensez que ce soit une bonne chose de commencer l'interrogatoire pour

25 un seul quart d'heure ?

26 M. MOORE : [interprétation] Non, je pense qu'il vaut mieux attendre avant

27 de l'interroger.

28 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Quelqu'un voit-t-il une objection ?

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1 Quelqu'un a-t-il une objection si on finit tôt aujourd'hui ?

2 M. VASIC : [interprétation] J'espère que mon éminent confrère sera content

3 de voir que nous sommes tout à fait d'accord pour accepter votre

4 proposition.

5 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous serais reconnaissant de ce que

6 vous venez de dire. Cela m'aide. On va terminer un peu plus tôt que

7 d'habitude, et nous reprendrons nos débats demain à 14 heures 15.

8 --- L'audience est levée à 18 heures 32 et reprendra le jeudi 23 février

9 2006, à 14 heures 15.

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