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1 Le lundi 13 mars 2006
2 [Audience publique]
3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]
4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]
5 --- L'audience est ouverte à 14 heures 21.
6 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin. Veuillez,
7 s'il vous plaît, lire la déclaration qui figure sur la carte qui vous est
8 tendue.
9 LE TÉMOIN : [interprétation] Je déclare solennellement que je dirai la
10 vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
11 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Veuillez vous asseoir. Je vous
12 remercie.
13 LE TÉMOIN : EMIL CAKALIC
14 [Le témoin répond par l'interprète]
15 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Moore, c'est à vous.
16 M. MOORE : [interprétation] Merci beaucoup, Monsieur le Président. Il y a
17 une ou deux questions administratives et je me demande si on pourrait en
18 traiter maintenant au début de l'audience. Elles ne concernent pas ce
19 témoin, mais peut-être que ceci concerne d'autres facteurs pour ce qui
20 concerne le calendrier.
21 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous allons essayer de nous en
22 souvenir, Monsieur Moore. Si vous pensez qu'il est clair que cela m'échappe
23 du point de vue de mémoire à un moment donné, veuillez me le rappeler.
24 M. MOORE : [interprétation] Je vous remercie beaucoup.
25 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie.
26 Interrogatoire principal par M. Moore :
27 Q. [interprétation] Témoin, quel est votre nom complet, s'il vous plaît ?
28 R. Mon nom est Emil Cakalic.
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1 Q. Vous êtes né quand ?
2 R. Le 5 janvier 1934.
3 Q. Je vais essayer de résumer vos études. Vous êtes allé à l'école
4 primaire et ensuite à l'école de médecine secondaire à Zagreb de 1949 à
5 1953; est-ce exact ?
6 R. Oui.
7 Q. Ensuite, vous êtes allé vous installer à Vukovar en 1958; est-ce
8 exact ?
9 R. Oui.
10 Q. De 1968 à 1972, vous avez étudié à Belgrade pendant deux ans à l'école
11 de médecine pour les ingénieurs. Je crois que vous faisiez cela en même
12 temps que vous travailliez; est-ce bien cela ?
13 R. Oui.
14 Q. Ensuite, vous avez travaillé à l'hôpital de Vukovar et vous vous êtes
15 occupé, je crois, de la communauté de Vukovar qui, je crois, était
16 présentée comme étant un gouvernement ou une administration régionale; est-
17 ce exact ?
18 R. J'ai d'abord travaillé au centre médical. J'étais au laboratoire et au
19 service des transfusions. Après dix ans de travail à l'hôpital, j'ai été à
20 la municipalité de Vukovar où j'ai été nommé comme inspecteur des questions
21 de santé et des questions sanitaires de la municipalité de Vukovar.
22 Q. Le travail de l'inspecteur des questions sanitaires, est-ce que ceci
23 comportait l'examen de telles choses que l'adduction d'eau dans la
24 municipalité de Vukovar, l'eau potable ?
25 R. Oui, effectivement.
26 Q. D'une façon très générale, que représentait ce travail d'inspecteur
27 chargé des questions sanitaires ?
28 R. Je surveillais et je m'occupais des questions de santé du point de vue
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1 de la production et de la fabrication ainsi que le commerce ou la vente de
2 différents aliments d'origine animale et biologique, et ceci comprenait
3 également le fait de surveiller la qualité de l'eau, la lutte contre les
4 maladies infectieuses. C'étaient les tâches essentielles.
5 Q. Je voudrais, là encore, parler de façon très générale en ce qui
6 concerne la période qui va, disons, du mois d'août, la mi-août jusqu'à la
7 chute de Vukovar qui a eu lieu, dirons-nous, le 18 novembre. Je crois qu'il
8 est juste de dire que vous étiez volontaire et que vous avez travaillé en
9 qualité de personnel médical pour les forces croates; est-ce que c'est
10 exact ou non, tout au long de cette période ?
11 R. Oui.
12 Q. Je voudrais, s'il vous plaît, parler du type de travail qu'était le
13 vôtre au cours de cette période de deux ou trois mois. Je parle
14 essentiellement de votre travail à caractère médical ou sanitaire. Aviez-
15 vous à vous occuper de l'eau potable à Vukovar ?
16 R. Oui, oui, l'eau potable.
17 Q. Parlons de la période de septembre, octobre, novembre. Quelle était la
18 qualité de l'eau fournie à Vukovar pour l'eau de boisson pour la population
19 civile ?
20 R. Jusqu'à un certain point, la qualité de l'eau était satisfaisante du
21 point de vue d'hygiène. Mais au fur et à mesure qu'il y a eu des coupures
22 d'électricité, la qualité de l'eau a empiré parce que l'adduction d'eau
23 dépendait de l'électricité. Même si le système d'adduction d'eau avait des
24 experts dans leur personnel qui vérifiaient la qualité de l'eau de façon
25 quotidienne, nous en tant qu'inspecteurs procédions également à ces
26 contrôles, mais au sein des institutions qui étaient autorisées à le faire,
27 et nous exigions que la qualité de l'eau soit excellente, de façon à
28 pouvoir être utilisée aussi longtemps que ce système d'adduction d'eau
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1 pouvait fournir la ville en eau potable.
2 Q. Est-ce qu'il est venu un moment où il est devenu nécessaire de prendre
3 des mesures pour protéger la population civile contre les dommages qui
4 pourraient être causés par l'eau qui avait été fournie ?
5 R. Oui.
6 Q. Qu'est-ce qui n'allait pas avec la qualité de l'eau en octobre et
7 novembre ?
8 R. A ce moment-là, le système d'adduction d'eau de la ville ne parvenait
9 plus à transporter de l'eau par les systèmes de tuyauterie qui étaient
10 fortement endommagés. L'ensemble des systèmes, ainsi que les laboratoires,
11 étaient détruits. Il a été nécessaire de prendre d'autres mesures, des
12 mesures plus simples, de façon à prévenir la population du fait que l'eau
13 qu'ils utilisaient, notamment l'eau qui était prise dans des puits, devait
14 être d'abord bouillie, ce qui voulait dire qu'il fallait désinfecter l'eau
15 en la faisant bouillir thermiquement. Il fallait qu'ils désinfectent l'eau
16 comme moyen de préserver leur santé dans de tels cas.
17 Q. Il y avait des égouts qui existaient à Vukovar; c'est bien clair. Est-
18 ce que vous pourriez nous dire si les conduites des égouts avaient été
19 endommagées à la suite d'opérations militaires ou d'actions militaires ?
20 R. Oui. Il n'y avait pas un seul immeuble, il n'y avait pas une seule
21 installation de Vukovar qui n'a pas été endommagée d'une façon ou d'une
22 autre.
23 Q. Si vous avez des égouts ou des liquides provenant des égouts qui
24 entrent dans l'eau de boisson et que celle-ci n'est pas traitée, quels sont
25 les types de maladies qui peuvent se produire ?
26 R. Toutes sortes de maux et de maladies. Il y avait différents types
27 d'épidémies causées par la mauvaise qualité de l'eau. Il y avait également
28 d'autres maladies qui s'étendent dans l'eau parce qu'il s'agit de maladies
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1 infectieuses qui ont un temps d'incubation très court, mais qui durent
2 longtemps. Elles sont à la fois des maladies infectieuses et contagieuses.
3 Elles s'étendent rapidement, et si on manque de précautions, ceci peut
4 facilement donner lieu à des maladies.
5 Q. Vous dites que l'un des processus que vous aviez recommandé était des
6 procédés thermiques. Je suppose que vous voulez dire faire bouillir l'eau;
7 c'est bien cela ? Si on fait bouillir l'eau pendant un certain temps, ceci
8 améliore sa qualité ?
9 R. Oui.
10 Q. Pour autant que vous le sachiez personnellement, est-ce qu'on a donné
11 le conseil à la population de Vukovar, pendant cette période, de faire
12 cela ?
13 R. Oui.
14 Q. Pourriez-vous nous dire comment cette mise en garde du point de vue
15 santé ou ces recommandations ont été communiquées à la population civile de
16 Vukovar ?
17 R. C'était le poste de radio de Vukovar qui l'a fait.
18 Q. Quels étaient les types de mises en garde ou d'avis qui étaient donnés
19 à la radio à la population ?
20 R. On a donné à la population pour conseil que l'eau qui devait être
21 utilisée comme eau potable, l'eau de boisson, devait d'abord être bouillie
22 pendant au moins dix minutes, de façon à tuer tous les micro-organismes qui
23 pourraient s'y trouver.
24 Q. Quels produits chimiques ont été utilisés ? Est-ce qu'on en a utilisé
25 pour stériliser l'eau ou la rendre plus propre ?
26 R. Oui, il y avait du chlorhydrate, qui était l'un des principaux agents
27 utilisés, mais ceci veut dire que si on l'utilise à cette fin, il faut
28 qu'il y ait une certaine concentration.
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1 Q. Je vous remercie. Maintenant, je voudrais que nous parlions des puits à
2 Vukovar. Nous savons, et effectivement vous avez mentionné le fait qu'il
3 existait des puits à Vukovar. Savez-vous comment la population civile se
4 servait de ces puits ou si elle s'en servait d'ailleurs au cours de cette
5 période de trois mois ?
6 R. Oui, elle s'est servie des puits qui n'avaient pas été détruits, parce
7 qu'il faut dire qu'ils avaient été délibérément pris pour cibles. Si vous
8 laissez une population sans eau, ceci veut dire qu'elle va commencer à
9 mourir lentement.
10 Q. Lorsque vous dites que les puits étaient délibérément pris pour cibles,
11 comment êtes-vous parvenu à cette conclusion ?
12 R. Ma femme est allée chercher de l'eau chez un voisin qui avait des
13 puits, et brusquement des obus ont commencé à tomber. Heureusement, celui
14 qui est tombé le plus près du puits n'a pas touché le puits, n'a pas
15 explosé.
16 Q. Vous nous parlez d'un incident, peut-être proche de chez vous, si je
17 peux utiliser cette formule. Est-ce que vous avez eu des renseignements
18 concernant d'autres puits selon lesquels ils étaient pris pour cibles, des
19 puits qui étaient utilisés par la population civile au cours de cette
20 période ?
21 R. Oui.
22 Q. Pourriez-vous développer un peu votre réponse ?
23 R. Vukovar recevait de l'eau de façon centralisée, de sorte que le réseau
24 d'adduction d'eau centralisé s'est développé au cours des années. Un grand
25 nombre de personnes ont quitté leurs anciens puits. Ils ne les ont pas
26 vraiment complètement abandonnés, mais ils les avaient conservés en les
27 couvrant, de façon à éviter que des gravats ou des débris ne tombent
28 dedans, quant à maintenir la qualité de l'eau. Toutefois, lorsqu'il était
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1 nécessaire d'utiliser à nouveau cette eau qui avait été protégée dans les
2 puits pendant un certain temps, il fallait tout d'abord la désinfecter.
3 Q. Qu'en est-il des obus qui tombaient dans le secteur des puits ?
4 R. Certains puits ont été détruits.
5 Q. Pourrais-je traiter de l'un des domaines de votre déposition ou d'un
6 autre domaine ? Vous nous avez dit que vous viviez à Vukovar jusqu'au 17
7 novembre. Dans quel type d'immeuble est-ce que vous viviez ?
8 R. A l'hôpital, l'hôpital de Vukovar.
9 Q. Mais je veux parler de la période qui précède le moment où vous êtes
10 allé à l'hôpital. Où est-ce que vous viviez avant cela ?
11 R. Je vivais dans la rue Borisa Kidrica. Je ne sais pas comment on
12 l'appelle maintenant. C'était près du stade de football à Vukovar, dans une
13 cuvette. Il y a quatre immeubles, et je vivais dans celui du milieu.
14 Q. A quel point était-il prudent de sortir de ces bâtiments au cours du
15 mois de septembre, d'octobre et novembre ?
16 R. Ce n'était pas prudent du tout parce que les bâtiments se trouvaient à
17 peu près à 400 mètres de la rive droite de la rivière Vuka, et cette partie
18 de la ville sur la rive droite de la Vuka était occupée et il y avait
19 pénurie constante.
20 Je peux dire qu'une fois, je ne me rappelle pas la date, un avion a
21 tiré un missile ou une roquette qui a touché un appartement et l'a détruit;
22 c'était au rez-de-chaussée. Il se trouve que ma femme se trouvait au rez-
23 de-chaussée aussi, mais de l'autre côté. Elle était du côté gauche faisant
24 face à la rue.
25 Q. Vous nous avez parlé du bâtiment qui se trouvait juste à la rive
26 droite de la rivière Vuka et vous avez dit que ce secteur était occupé par
27 des tirs constants. Quelle sorte de tirs y avait-il et qui tirait ?
28 R. Lorsque je rentrais du travail, et je vous parle d'une circonstance
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1 particulière, trois ou quatre mètres plus tôt, j'étais sur le point de
2 rentrer dans le hall d'entrée de mon bâtiment et il se trouve que j'ai
3 bougé la tête et que j'ai évité d'être tué par une grenade ou un obus. Les
4 obus tombaient constamment. Vous ne saviez jamais quand cela commencerait
5 et vous ne saviez jamais quand cela s'arrêterait.
6 Q. Je vous remercie. Je voudrais passer à la journée du 17 novembre, parce
7 que nous avons entendu beaucoup de dépositions sur ce qui s'est passé à
8 Vukovar avant cela. Donc, passons maintenant au 17 novembre, aux environs
9 de cette date. Pourriez-vous, s'il vous plaît, nous dire pourquoi vous êtes
10 allé à l'hôpital de Vukovar ?
11 R. Il n'y avait pas toute la sécurité voulue, et un voisin est venu me
12 dire que des chars étaient arrivés, des chars de l'armée populaire
13 yougoslave, et qu'ils avaient déjà traversé les voies de chemin de fer. Je
14 les ai vus plus tard sur une pente. C'est quand ma femme et moi avons
15 décidé que la meilleure chose à faire serait de partir, et nous sommes
16 allés à l'hôpital de Vukovar. Il était déjà tard dans la nuit. Il faisait
17 sombre et il n'y avait de lumière nulle part. Nous étions juste sur le
18 point de tourner à gauche dans une rue lorsqu'ils ont commencé à tirer.
19 Nous avons poursuivi notre chemin vers l'hôpital. Je suis entré
20 immédiatement. Ma femme ne pouvait pas y entrer tout de suite, mais sur
21 l'intervention de mes collègues, elle a réussi à aller à l'intérieur.
22 Ce jour-là, il n'y a pas eu beaucoup de pilonnages d'obus. Je l'ai
23 mentionné simplement pour cette occasion. C'était vers 10 ou 11 heures. Je
24 ne peux pas vous dire exactement à quelle heure ceci a eu lieu, mais
25 ensuite les choses se sont calmées à Vukovar. Pratiquement, c'était la
26 journée où Vukovar est tombée. Parce que tous les soldats avaient quitté
27 les fronts qui étaient, en l'occurrence, nos fronts.
28 Q. Pourrais-je maintenant vous parler un instant de l'hôpital lui-même. Je
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1 sais que vous allez déposer que par la suite vous êtes allé à l'hôpital. Je
2 vais m'occuper de cela. Est-ce que vous êtes entré à l'hôpital, dans le
3 périmètre de l'hôpital avec votre femme ou seul ?
4 R. Avec ma femme.
5 Q. Lorsque vous êtes allé dans l'hôpital, est-ce que vous avez rencontré
6 des personnes que vous connaissiez ?
7 R. Je connaissais de nombreuses personnes. J'avais travaillé sur place
8 pendant dix ans. Il y avait Milinkovic, Milenko Zuvic. C'étaient des
9 collègues avec qui j'avais l'habitude de travailler. Il y avait Ivankovic
10 qui est arrivé un peu plus tard, après nous. Stjepan Guncevic est également
11 venu. Il est arrivé un jour plus tard. Il y avait de nombreuses personnes.
12 Nous nous trouvions tous au service de radiologie, et nous dormions dans la
13 chambre noire où on développait les clichés. Nous avons passé du temps
14 ensemble, de façon étrange, parce que chacun d'entre nous, avait quelque
15 chose d'étrange qui arrivait. Nous ne nous attendions pas à ce que ceci
16 puisse arriver dans notre ancien pays.
17 Q. Comment pourriez-vous décrire l'atmosphère à l'hôpital à l'époque où
18 vous y êtes rendu ?
19 R. L'atmosphère était très désagréable. Il y avait un très grand nombre de
20 personnes qui se trouvaient dans la cour. Seules quelques-unes avaient pu
21 entrer. Le nombre de personnes qui se trouvaient dans la cour était peut-
22 être de 1 000 à 2 000 ou davantage. Je ne sais pas si quelqu'un a réussi à
23 compter combien il y avait de gens là, mais je pense qu'il y en avait au
24 moins 1 000 sur place.
25 Q. Pourrais-je vous demander si vous avez vous-même vu quelqu'un du nom de
26 Marin Vidic ou quelqu'un connu sous le nom de Bili Vidic. Est-ce que vous
27 avez vu cette personne ?
28 R. Oui, je l'ai vue à l'hôpital avant que nous ne travaillions ensemble à
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1 la municipalité de Vukovar. J'ai également travaillé avec lui pendant le
2 pilonnage d'obus. Nous sommes allés à Borovo pour prendre des mesures
3 hygiéniques anti-épidémiologiques, anti-épidémie, pour empêcher que des
4 maladies ne se déclarent. De sorte que j'ai travaillé avec lui. Aussi, je
5 l'ai vu à l'hôpital avant la chute de Vukovar. Je suis allé le voir
6 personnellement et nous avons parlé.
7 J'avais un laissez-passer spécial de la Croix-Rouge croate, qui me
8 permettait de participer aux négociations. Toutefois, lorsque j'ai montré
9 cette passe une fois à Velepromet, on me l'a déchirée et on m'a dit où je
10 pouvais me le mettre.
11 Q. Là encore, traitant uniquement de l'hôpital, pouvez-vous vous rappeler,
12 au premier souvenir, de l'arrivée de soldats de la JNA, de l'armée
13 régulière ou non régulière ?
14 R. Il était facile d'entrer à l'hôpital. Je ne sais pas s'il y avait eu
15 des tirs d'armes à feu. Je ne pouvais pas entendre cela dans la chambre
16 noire où je me trouvais. Mais il était facile d'y rentrer. Je ne pense pas
17 qu'il y ait eu de problèmes jusqu'à ce que ne commença l'évacuation de la
18 population.
19 Q. C'est moi, je suppose que j'ai mal formulé la question que je
20 souhaitais vous poser. Est-ce que vous vous souvenez de l'arrivée des
21 soldats de la JNA à l'hôpital ? Si tel est le cas, est-ce que vous pouvez
22 nous dire, d'après vos souvenirs, quand est-ce que cela s'est passé, et
23 comment est-ce que cela s'est passé ?
24 R. Cela s'est passé le 18 et le 19. Cela a commencé le matin du 18
25 jusqu'au 19, au moment où ils sont venus chercher Marin Vidic Bili. Un
26 commandant, M. Sljivancanin, et une de ces escortes que je connaissais, qui
27 était -- je le connaissais, d'ailleurs. C'était Bogdan Kuzmic qui,
28 d'ailleurs, avait l'habitude de travailler à la réception de l'hôpital. Ils
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1 sont arrivés. Le commandant Sljivancanin est entré dans le bureau de Vidic.
2 Je ne sais pas d'ailleurs de quoi ils ont parlé, probablement de reddition.
3 Parce que j'avais beaucoup passé de temps avec Marin Vidic, mais nous n'en
4 avions jamais parlé directement de ceci. Kuzmic était à la porte. Après un
5 certain temps, ils sont partis, ils ont quitté l'hôpital. Je n'ai pas vu
6 Marin Vidic jusqu'à Sremska Mitrovica, lorsque j'ai amorcé une opération
7 afin de désinfecter les prisonniers.
8 Q. D'après ce que vous pouviez voir, qui assurait le commandement lors de
9 la présence de la JNA à ce moment-là ? Qui était responsable ? Si vous ne
10 pouvez pas répondre à la question, n'hésitez pas à le dire.
11 R. Le commandant Sljivancanin était l'une des personnes qui était
12 responsable de toutes les opérations, à commencer avec le fait que Marin
13 Vidic a été enlevé, emmené hors du périmètre. Ensuite, il y a des soldats
14 qui ont commencé à arriver, qui portaient l'uniforme de l'armée yougoslave
15 populaire. On nous a intimés l'ordre de quitter les pièces où nous nous
16 trouvions, parce que nous ne faisions pas partie du personnel hospitalier,
17 du personnel médical. Car le personnel médical avait sa propre réunion. Je
18 ne sais pas comment ils ont réglé ce problème.
19 Nous, il a fallu que nous sortions dans la cour. Il y avait deux
20 soldats dans la cour. Il a fallu que nous nous alignions. Il y a quelques
21 mots qui ont été proférés, des jurons. Après un certain laps de temps, il a
22 fallu que nous sortions tout ce que nous avions dans nos poches, que nous
23 placions tout cela devant nous pour montrer ce que nous avions sur nous.
24 Lorsque cela s'est terminé, en fait, ce n'était pas terminé. Cette
25 opération continuait encore. Nous avons été insultés. Ils ont insulté nos
26 parents avec des propos qui ne convient pas d'utiliser.
27 Après, il y avait des autobus qui étaient garés devant l'entrée de
28 l'hôpital de Vukovar.
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1 Q. Vous avez répondu de façon assez longue. Je vais essayer de scinder
2 tout cela.
3 Je pense que nous pouvons dire, par souci d'équité, que vous ne
4 connaissiez pas le nom du commandant Sljivancanin à l'époque. Vous nous
5 avez dit que vous l'avez vu avec Bogdan Kuzmic, mais vous ne connaissiez
6 pas son nom à l'époque; est-ce exact ?
7 R. Non, non. Voilà comment les choses se sont passées. Je pense tout
8 Vukovar connaissait le commandant Sljivancanin. C'était un officier
9 militaire connu.
10 Q. Très bien. Est-ce que vous pouvez, je vous prie, nous décrire la taille
11 de la personne que vous avez vue, et qui, d'après vous, était le commandant
12 Sljivancanin ?
13 R. C'est quelqu'un qui, je pensais, à l'époque avait
14 1 mètre 80. Par la suite, lorsque je l'ai vu, je me suis dit qu'il était
15 peut-être encore plus grand. Il avait des cheveux noirs, il avait une
16 moustache et il portait toujours un uniforme de la JNA.
17 Q. Qu'en est-il de son couvre-chef ? Est-ce que vous vous souvenez du type
18 de couvre-chef qu'il portait ?
19 R. Oui, je m'en souviens. Une casquette de Tito avec l'étoile à cinq
20 étoiles. Il disait qu'il représentait la JNA. D'ailleurs, c'était exact.
21 Q. Quel était le comportement du commandant Sljivancanin vis-à-vis des
22 gens lorsqu'il devait traiter avec ces personnes à l'hôpital ?
23 R. C'était un homme à personnalité extravertie, d'après moi. Il refusait
24 toutes les critiques quelle que soit leur origine. C'était un officier
25 chargé d'opérations qui, probablement, suivait les ordres donnés par
26 quelqu'un ou agissait de sa propre initiative, mais menait à bien ses
27 opérations aussi bien qu'il le pouvait. Je dois dire que j'ai énormément de
28 respect pour lui en tant que soldat, mais pas du tout en tant qu'être
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1 humain.
2 Q. Je vous demanderais de mettre de côté, pour le moment, votre point de
3 vue à propos du commandant Sljivancanin. Je vous demanderais de ne traiter
4 que des éléments de preuve, si vous n'y voyez pas l'inconvénient.
5 J'aimerais maintenant que nous parlions des deux soldats qui se trouvaient
6 dans la cour. Est-ce que vous avez pu le voir, est-ce qu'il s'agissait de
7 soldats de métier, de soldats de la JNA ou de soldats de la TO ?
8 R. J'ai appris ultérieurement - parce que ces mêmes deux soldats nous ont
9 escortés jusqu'à Sremska Mitrovica - j'ai appris que l'un s'appelait Pero,
10 je ne connais pas son nom de famille, il était originaire de Bosnie, d'un
11 village qui s'appelle Josavka, qui se trouve un peu plus à l'ouest, qui se
12 trouve au niveau de la frontière tripartite que j'avais utilisée par
13 l'autoroute, donc je savais où c'était.
14 Q. Je vous avais posé une question, Monsieur. Je vous avais demandé si
15 vous étiez en mesure de savoir s'il s'agissait de conscrits de la JNA ou
16 s'il s'agissait de soldats de la Défense territoriale, je pense aux soldats
17 qui vous fouillaient à ce moment-là.
18 R. Je pense et je crois qu'ils faisaient partie de la JNA, parce qu'ils
19 portaient le même type d'uniformes qui étaient portés par les soldats de
20 l'armée yougoslave. Je ne pense pas qu'il s'agissait de soldats de la
21 Défense territoriale, parce qu'ils nous ont escortés jusqu'à Sremska
22 Mitrovica, et ce, à partir de l'hôpital de Vukovar.
23 Q. J'aimerais maintenant que nous parlions des autobus. Vous nous avez dit
24 qu'il y avait des autobus. Combien d'autobus y avait-il à l'extérieur de
25 l'hôpital ? Est-ce que vous vous en souvenez ?
26 R. Cinq.
27 Q. Manifestement, vous êtes monté dans un autobus ?
28 R. Dans le troisième.
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1 Q. Merci. Je n'étais pas arrivé encore à cette précision, mais je vous
2 remercie d'avoir répondu à la question, de toute façon.
3 R. Je m'excuse. Je m'excuse.
4 Q. Il n'y a aucun problème. Combien de personnes se trouvaient dans cet
5 autobus lorsqu'il est parti ? Est-ce que vous pouvez nous le dire ?
6 R. Il y avait quelque 200 personnes. Je suis sûr qu'il y en avait 207, et
7 il y en a qui ont été sauvés.
8 Q. Oui, mais je vous pose la question à propos de votre autobus.
9 J'aimerais que nous réfléchissions ou que vous vous reportiez à ce qui
10 s'est passé dans cet autobus et non pas à l'extérieur de l'autobus.
11 R. Très bien.
12 Q. Nous allons parler de votre autobus. Combien de personnes, d'après
13 vous, se trouvaient dans cet autobus, le bus dans lequel vous, vous avez
14 voyagé ?
15 R. Une quarantaine. Je ne peux pas vous en donner le chiffre exact parce
16 que je n'ai pas compté les gens, mais nous étions une quarantaine.
17 Q. Parmi les personnes qui se trouvaient dans cet autobus, quelle était
18 leur appartenance ethnique ?
19 R. Voilà comment les choses se sont passées. Nous étions tous Croates. Je
20 ne sais pas ce qu'il en est de Berghofer, parce que son nom est un nom
21 allemand. Je pense qu'il se déclarait Croate. Toutefois, je n'en suis pas
22 absolument sûr et certain.
23 Q. Toujours à propos de l'autobus dans lequel vous vous trouviez, combien
24 de femmes se trouvaient dans cet autobus ?
25 R. Je pense qu'il y en avait qu'une.
26 Q. Je souhaiterais que nous parlions de l'autobus qui démarre. Nous
27 savons, d'après certains éléments de preuve, que les autobus se sont rendus
28 à la caserne de la JNA. Nous allons parler donc du trajet entre l'hôpital
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1 et la caserne seulement.
2 Lorsque vous étiez dans cet autobus, pour aller jusqu'à la caserne de
3 la JNA vous avez dû franchir un pont sur la Vuka. Je pense que c'est exact,
4 n'est-ce pas ?
5 R. Oui.
6 Q. Lorsque vous avez franchi ce pont dans l'autobus, pont qui enjambait la
7 Vuka, est-ce que vous avez pu voir les autres ponts ?
8 R. Oui.
9 Q. Est-ce que vous avez vu quoi que ce soit sur l'un de ces ponts ? Est-ce
10 que vous auriez vu quelque chose qui aurait attiré votre attention ?
11 R. Oui, tout à fait.
12 Q. Est-ce que vous pourriez, lentement, je vous prie, me relater ce que
13 vous avez vu ? Que s'est-il passé sur l'un des autres ponts ?
14 R. Nous nous trouvions sur le pont de droite et nous regardions en aval.
15 Le pont dont vous me parlez était le deuxième pont vers le Danube. C'est un
16 pont qui enjambait aussi la Vuka. Il y avait un bâtiment là qui était un
17 bâtiment qui se trouvait très proche du pont.
18 Est-ce que je dois poursuivre ?
19 Très bien. Alors là, j'ai vu plusieurs personnes. J'ai pensé que
20 l'une de ces personnes était M. Vance, mais ce n'était pas
21 M. Vance. C'était quelqu'un qui lui ressemblait. D'ailleurs, je ne connais
22 pas le nom de cette personne.
23 Q. Lorsque vous avez vu cela, vous pensiez qu'il s'agit de
24 M. Vance, un civil, je présume. Est-ce que cette personne était seule ou
25 non ?
26 R. Non. Il était en compagnie du commandant Sljivancanin. Cet homme, que
27 je pensais qu'il s'agissait de M. Vance, se trouvait là. Il y avait
28 quelqu'un d'autre peut-être. Ils étaient entre le pont et ce bâtiment. Je
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1 me trouvais à leur gauche. Dans le bus, j'ai pu observer tout cela à partir
2 du bus.
3 Q. Est-ce que vous êtes en mesure de nous dire si vous avez pu voir si,
4 hormis le commandant Sljivancanin, il y avait des soldats ? Je ne vous
5 demande pas de nous dire de qui il s'agissait. Est-ce que vous avez tout
6 simplement pu observer s'il y avait des militaires là ?
7 R. Je n'en suis pas sûr.
8 Q. J'aimerais maintenant que nous parlions du trajet. Vous passez par le
9 pont, ensuite, le bus se dirige vers la caserne de la JNA. Est-ce que vous
10 vous souvenez du moment où vous êtes arrivés à la caserne de la JNA ?
11 R. Oui, je m'en souviens.
12 Q. Est-ce que vous pourriez nous dire ce qui est arrivé lorsque vous êtes
13 arrivés à la caserne de la JNA ?
14 R. Avant d'entrer dans la caserne, nous avons vu plusieurs cadavres vers
15 le dispensaire. Je ne sais pas qui étaient les personnes qui étaient
16 mortes, et je ne sais pas non plus qui les avait tuées. Avant d'entrer dans
17 le bâtiment de la caserne, le portail, d'ailleurs, était ouvert. Les
18 autobus sont entrés l'un après l'autre. Je me trouvais dans le troisième
19 bus. C'est le troisième bus qui est entré dans la caserne.
20 Q. Est-ce que vous savez quelle heure il était ? Est-ce que vous savez à
21 quelle heure vous êtes arrivé à la caserne ? Et je vous demanderais de ne
22 pas deviner, mais de nous dire si vous le saviez.
23 R. Je ne portais pas de montre, mais je suppose qu'il était environ 11
24 heures.
25 Q. J'aimerais maintenant vous parler du bus dans lequel vous êtes allé
26 jusqu'à la caserne de la JNA. Est-ce que vous vous souvenez du nom des
27 personnes qui se trouvaient dans cet autobus avec vous ?
28 R. Oui. Berghofer, Guncevic, un homme qui répondait au nom de Veliki
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1 Bojler, Damjan Samardzic également. Il y avait des gens que je connaissais
2 et des gens que je ne connaissais pas. Il y avait également une femme, me
3 semble-t-il. Il y avait beaucoup de personnes qui se trouvaient là que je
4 ne connaissais pas.
5 Q. Merci. J'aimerais que nous parlions de l'autobus à proprement parler,
6 car nous avons entendu que l'autobus s'est arrêté à l'intérieur du
7 périmètre de la caserne de la JNA. Est-ce que vous avez vu quiconque à
8 l'extérieur des autobus lorsque ces autobus se sont arrêtés et se sont
9 garés ?
10 R. Oui. J'ai vu des gens.
11 Q. Est-ce que vous auriez l'amabilité, je vous prie, de nous relater
12 exactement ce que vous avez vu ?
13 R. J'ai vu un soldat qui portait un uniforme militaire. J'avais déjà vu ce
14 soldat avant qu'il n'arrive à la caserne. Il préparait alors les repas dans
15 une école, et ces repas étaient destinés à toutes les personnes qui avaient
16 été mobilisées, parce qu'à cette époque-là, il y avait encore des
17 volontaires; ils ont été en fait mobilisés beaucoup plus tard. Cet homme
18 est originaire de Bobota. C'est un endroit qui se trouve à une quinzaine de
19 kilomètres ou peut-être un peu moins de Vukovar dans la direction d'Osijek.
20 Il faut tourner à droite près du bâtiment administratif Vupik. Cet homme
21 montait la garde dans la caserne. Il y avait un grand toit et il y avait
22 beaucoup d'armes dessous. Si quelqu'un avait activé une seule grenade, je
23 pense que la moitié de Vukovar aurait explosé. Mais avant tout cela, sa
24 femme était venue me voir.
25 Q. Je vous remercie.
26 R. Je m'excuse.
27 Q. Ce n'est pas un problème. Avez-vous vu d'autres personnes outre cet
28 homme qui faisait la cuisine pour les réservistes ?
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1 R. Oui. J'ai vu des gens qui parlaient avec un accent différent et ils
2 portaient des couvre-chefs ronds. Il y avait quelque chose sur ces couvre-
3 chefs et ce n'est que par la suite que j'ai appris qu'ils s'appelaient
4 Topola. Peut-être qu'on va revenir là-dessus et alors j'essaierai de m'en
5 souvenir.
6 D'ailleurs, peut-être que le nom va me revenir.
7 Q. Ce n'est pas la peine de vous soucier des noms parce que j'essaie de
8 comprendre ce qui s'est passé de façon générale, et ensuite peut-être que
9 nous préciserons un peu plus.
10 Je m'excuse, j'ai l'impression qu'il y a un problème.
11 M. BOROVIC : [interprétation] Monsieur le Président.
12 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Borovic.
13 M. BOROVIC : [interprétation] Je m'excuse. J'aimerais que l'Accusation pose
14 à nouveau une question à propos de ces hommes qui portaient ces couvre-
15 chefs ronds. Il a dit que les chapeaux étaient ronds et qu'il y avait des
16 franges. Il a dit qu'il s'agissait de peupliers, ou de Topola. Est-ce que
17 l'Accusation pourrait préciser tout cela ?
18 M. MOORE : [interprétation] Je ne vais pas essayer de préciser quoi que ce
19 soit, à moins que vous me forciez à le faire, parce que je suis sûr que mon
20 estimé confrère aura tout le temps et la possibilité de le faire pendant le
21 contre-interrogatoire. Je voudrais faire en sorte que le témoin continue à
22 réfléchir aux éléments de preuve et à ce que je vais aborder maintenant, si
23 vous n'y voyez pas d'inconvénient.
24 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui. Poursuivez, Monsieur Moore.
25 M. MOORE : [interprétation] Je vous remercie.
26 Q. Est-ce que vous pourriez nous parler du nombre de personnes qui se
27 trouvaient à l'extérieur des bus dans la caserne ?
28 R. Oui. Il y avait des gens de Vukovar, mais il y avait également des
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1 étrangers, des gens que nous ne connaissions pas. Il y avait des personnes
2 avec qui j'avais travaillé à Ovcara à un moment donné, Inka et son mari
3 Vlado, par exemple. Il y avait Sreto, que j'ai mentionné, qui gardait ces
4 armes. Il y a beaucoup de personnes qui sont venues voir la tournure que
5 tout cela prenait. Vlado Kosic, le mari d'Inka, a dit : "Emil, choisis un
6 bon autobus." Je lui ai demandé s'il y en avait un meilleur, et il m'a dit
7 : "Bien non, ils sont tous les mêmes." C'était une boutade en fait, mais
8 tout cela avait l'air très sérieux en même temps. Cela nous a donné matière
9 à réflexion.
10 Q. J'aimerais vous poser une question : les gens qui se trouvaient à
11 l'extérieur des autobus, les gens que vous avez décrits, est-ce qu'il y en
12 avait qui portaient l'uniforme, oui ou non ?
13 R. Oui. Vlado Kosic ainsi que sa femme avaient des uniformes militaires.
14 L'homme qui montait la garde auprès des armes portait également un uniforme
15 militaire avec tous les insignes de la JNA.
16 Q. Je vous remercie beaucoup. Quel était le comportement de ces gens ? Je
17 pense aux gens qui se trouvaient à l'extérieur des autobus.
18 R. Ils se moquaient de nous. Ils riaient de nous. Lorsque qu'il m'a dit
19 que je n'avais pas choisi un bon bus, j'ai commencé à comprendre. J'avais
20 quand même une petite idée de ce qui allait se passer. D'ailleurs, c'est
21 exactement ce qui s'est passé.
22 Q. Je sais qu'il y a des femmes dans le prétoire et je sais que vous
23 n'aimez pas jurer en présence de femmes, et d'ailleurs que vous n'aimez
24 absolument pas les jurons, mais est-ce que vous vous souvenez du type de
25 choses qui avaient été dites ?
26 R. Nous, les Croates, étions devenus subitement des Oustachi. Ils
27 maudissaient nos pères et nos mères oustachi. Ils nous ont menacés. Ils
28 nous ont dit que le destin nous réservait un mauvais coup. J'avais
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1 l'impression qu'ils connaissaient notre destination.
2 Q. J'aimerais juste que nous parlions de votre autobus et seulement de
3 votre autobus. Est-ce que vous vous souvenez si toute personne portant
4 l'uniforme, ou d'ailleurs ne portant pas l'uniforme, si quelqu'un est monté
5 dans votre autobus à la caserne de la JNA ?
6 R. Oui. Un ou deux soldats sont montés et on demandé si dans l'autobus il
7 y avait un employé du dispensaire ou du centre médical. Mon ami Guncevic
8 était assis tout près et il a dit : "Oui, j'ai une carte qui montre que je
9 suis un employé du centre médical." Il a montré la carte à cette personne,
10 mais cette personne n'a pas accepté la carte parce qu'elle ne comportait
11 pas de photographie.
12 Q. Comment est-ce que vous vous sentiez au vu de leur comportement, au vu
13 de ce qu'ils disaient à votre intention et à l'intention également des
14 autres personnes qui se trouvaient dans l'autobus ?
15 R. Je me sentais humilié, avec un très fort sentiment de gêne. J'ai
16 commencé à tirer des conclusions à propos de ces personnes et à propos de
17 la façon dont ils traitaient les autres.
18 Q. Quelles ont été vos conclusions ?
19 R. Qu'ils ne nous voulaient pas vraiment du bien.
20 Q. Vous avez dit qu'un ou deux soldats sont montés dans l'autobus et
21 qu'ils avaient demandé s'il y avait quelqu'un dans l'autobus qui était
22 employé du centre médical. Les personnes qui sont montées dans l'autobus
23 étaient manifestement des soldats, d'après ce que vous avez dit. Est-ce que
24 vous avez pu voir si ces personnes avaient un grade ? Est-ce que ces
25 personnes étaient des officiers ou des sous-officiers ?
26 M. LUKIC : [interprétation] Objection.
27 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, Maître Lukic ?
28 M. LUKIC : [interprétation] Je pense que c'est une question orientée. Le
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1 témoin a dit que deux soldats étaient montés dans l'autobus, et
2 préalablement, lors de sa déclaration, il a toujours fait la différence
3 entre les soldats et ceux qui n'étaient pas soldats. Je pense que
4 l'Accusation essaie d'orienter le témoin pour qu'il modifie sa déclaration.
5 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je suis désolé, Maître Lukic, mais je
6 ne suis absolument pas d'accord avec ce que vous avancer. "Soldats," c'est
7 un terme qui est très souvent usité pour parler du grade le plus inférieur,
8 mais pour parler également de toute personne qui fait partie des forces
9 armées.
10 Vous me suivez ? Je vois que vous toussiez.
11 Cette question n'est pas véritablement orientée vers une réponse,
12 mais il s'agit tout simplement de savoir si les soldats qui ont été vus
13 avaient un grade particulier dans les forces armées.
14 Poursuivez, Monsieur Moore.
15 M. MOORE : [interprétation]
16 Q. Est-ce que vous pouvez répondre à cette question, Monsieur Cakalic ?
17 R. D'après moi, les soldats, les sous-officiers et les officiers sont tous
18 des soldats. Dans la caserne -- plutôt, dans l'autobus, il y avait deux
19 soldats qui demandaient si quelqu'un avait une carte. Je n'avais pas de
20 carte, donc je n'ai rien dit. J'entends par une carte, une carte du centre
21 médial.
22 Q. Merci beaucoup. Combien de temps croyez-vous être resté dans la caserne
23 de la JNA ?
24 R. Jusqu'à 14 heures environ. Mais je ne suis pas tout à fait sûr de
25 l'heure exacte. On peut dire que c'était aux alentours de 14 heures.
26 Q. Parlons maintenant du bus ou des bus qui étaient partis de la caserne
27 de la JNA. Nous avons entendu des éléments de preuve déjà fournis par
28 d'autres témoins. J'aimerais savoir, s'agissant de ces autobus qui sont
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1 partis de la caserne à Ovcara, pourriez-vous nous dire, s'il vous plaît, si
2 les autobus sont partis tous ensemble ou un par un ? Est-ce que vous pouvez
3 nous le dire ?
4 R. Entre-temps, un autre autobus est arrivé dans l'enceinte de la caserne.
5 Nous ne savions pas d'où provenait cet autobus. Nous ne savions pas non
6 plus quelle était la raison de son arrivée. Nous ne savions pas non plus si
7 cet autobus était parti avant nous ou après nous. Cela, je ne peux pas vous
8 le dire puisque nous devions garder les têtes penchées. Nous n'avions pas
9 le droit de regarder. C'était très souvent les ordres que nous recevions,
10 de pencher la tête et de ne pas regarder autour de nous. C'était le sixième
11 autobus qui était arrivé dans l'enceinte de la caserne. Nous n'avons jamais
12 su qui se trouvait à bord de cet autobus. Excusez-moi, je vous ai coupé la
13 parole.
14 Q. Non, ce n'est pas grave. Vous nous avez dit que, très souvent, vous
15 receviez des instructions vous disant de regarder par terre, d'avoir la
16 tête penchée. Qui vous donnait ce genre d'ordre ?
17 R. Dans l'autobus, il y avait deux soldats. Je crois que c'étaient des
18 soldats réguliers. Ils portaient des uniformes de la JNA. Ils ont commencé
19 à nous demander de leur remettre les objets en or que nous avions, des
20 objets de valeur, des montres, des bracelets, et cetera, des gourmettes.
21 Ils nous ont dit : Donnez-nous cela et nous allons vous les remettre
22 lorsque vous sortirez. C'étaient deux jeunes soldats. Ils venaient
23 d'arriver, je crois. Ils venaient de faire leur service militaire et ils
24 étaient très arrogants. Voilà, c'est tout.
25 Q. Parlons maintenant d'Ovcara et de votre arrivée à Ovcara, si je puis.
26 Vous souvenez-vous si un autobus est arrivé au hangar à Ovcara, si un
27 autobus s'est immobilisé devant le hangar à Ovcara ?
28 R. Oui. L'autobus avait passé Negoslavci. Avant Negoslavci, l'autobus a
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1 pris un virage pour tourner à gauche, ce qui mène vers Ovcara. La route
2 principale qui mène vers Ovcara est la route qui va en direction d'Ilok et
3 de Tovarnik.
4 Q. Pourriez-vous, je vous prie, nous raconter comment vous avez descendu
5 du bus ?
6 R. Les autobus, au fur et à mesure qu'ils arrivaient, les gens sortaient
7 de ces bus. Devant le hangar, l'autobus s'immobilisait, et devant le
8 hangar, il y avait une haie d'hommes. Les personnes qui descendaient du bus
9 devaient passer par la haie d'hommes. Il y avait des Chetniks dans cette
10 haie d'hommes et il y avait également des notables de Vukovar.
11 Q. Parlons à présent de votre arrivée à Ovcara. Vous nous avez dit que
12 vous êtes arrivé, que vous êtes descendu du bus. Mais j'aimerais savoir si
13 vous avez vu des personnes portant des uniformes de la JNA à l'extérieur du
14 hangar d'Ovcara ?
15 R. Oui. J'ai déjà dit que j'étais à bord du troisième bus. Nous avons
16 commencé à descendre du troisième bus, et c'est à ce moment-là que j'ai vu
17 ceux qui nous attendaient. Il y avait un homme qui nous accueillait alors
18 que nous descendions du bus et il prenait notre argent. Il disait : Donne-
19 moi ton argent, donne-moi ton argent. Il n'a pas pris mon argent, mais il a
20 vu mes lunettes qui réagissent aux rayons. Comme il faisait un peu soleil,
21 les verres commençaient à être légèrement teintés et donc il pensait que
22 c'étaient des lunettes de soleil. Il a pris mes lunettes et les a mises sur
23 le nez, et il a vu qu'en fait il y avait une dioptrie, que ce n'étaient pas
24 seulement des lunettes de soleil. Quand il a vu qu'il ne pouvait pas les
25 porter, il a pris mes lunettes et il les a jetées par terre en marchant
26 dessus. Il les a brisées. J'avais également vu qu'il portait un uniforme de
27 la JNA qui était trop serré sur lui.
28 Q. Pouvons-nous maintenant parler de soldats de la JNA. Vous nous avez dit
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1 que cet homme en particulier avait un uniforme qui était un peu trop serré
2 sur lui. Est-ce que vous avez vu s'il y avait d'autres soldats qui
3 portaient des uniformes qui semblaient être leur taille ?
4 R. C'étaient des soldats qui étaient venus avec nous. Deuxièmement, il y
5 avait un autre soldat qui se trouvait dans cette haie d'hommes. J'ai vu un
6 ami d'autrefois, Slavko Dokmanovic. Nous travaillions ensemble à la
7 municipalité autrefois. Nous étions même amis. Il a appelé mon nom et il a
8 dit : "Tiens, voilà notre inspecteur. Emil, qu'est-ce que tu fais là ?"
9 J'ai dit : "Voilà, je suis ici comme tous les autres. Je dois sortir de
10 l'autobus et courir vers le hangar."
11 Là, ils nous donnaient des coups. C'était absolument effrayant. Les hommes
12 tombaient par terre. Ils étaient sans pitié. Il y avait des membres de la
13 Défense territoriale dans cette haie d'hommes de Vukovar, bien sûr. Il y
14 avait toutes sortes de personnes dans cette haie d'hommes impitoyables qui
15 nous battaient alors qu'on courait pour entrer dans le hangar.
16 Q. Je souhaiterais que l'on parle du passage à tabac et de la gravité de
17 ce passage à tabac. Je sais que vous n'aimez pas en parler, mais pourriez-
18 vous avoir la gentillesse, je vous prie, d'expliquer aux Juges de la
19 Chambre avec précision le type de passages à tabac que vous aviez dû subir,
20 et si on s'est servi d'armes lors de ces passages à tabac ?
21 R. Je dois donner des noms de personnes afin que nous puissions tout à
22 fait être précis. Il y avait Slavko Dokmanovic, il y avait les membres de
23 la Défense territoriale de Vukovar. Ils nous passaient à tabac avec des
24 bâtons, avec des armes. Certains avaient des armes avec lesquelles ils nous
25 frappaient, d'autres nous donnaient des coups de pied. Voilà. Ils donnaient
26 des coups-de-poing, des coups de pied. Ils se servaient de toutes sortes
27 d'objets. Je veux dire par là, qu'ils nous donnaient des coups alors qu'on
28 essayait d'entrer dans le hangar.
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1 Q. Est-ce qu'il y a eu des hommes qui sont tombés à la suite de coups
2 reçus ?
3 R. Oui. C'était déjà ainsi dans le hangar. Samardzic Damjan est tombé par
4 terre. On l'appelait la grande chaudière, Veliki Bojler. Un autre qui
5 s'appelait Kemal. Il y avait ces soldats qui entraient dans le hangar. Ils
6 leur ont donné des coups de pied si férocement qu'ils les ont tués.
7 D'abord, alors qu'ils étaient couchés sur le dos, ensuite, sur le ventre.
8 Ils ont tué la grande chaudière, Veliki Bojler et l'autre homme, Kemal.
9 Q. Parlons maintenant de la haie d'hommes qui vous attendait alors que
10 vous deviez passer par cette haie d'hommes pour vous rendre au hangar.
11 Avant d'entrer dans le hangar, vous deviez passer, n'est-ce pas, par
12 cette haie d'hommes, comme vous nous l'avez expliqué ? J'aimerais savoir si
13 vous avez vu quelqu'un tomber par terre alors qu'il passait par la haie
14 d'hommes ?
15 R. J'étais probablement déjà à l'intérieur. Il nous était impossible de
16 nous retourner derrière, de regarder derrière nous. Il a fallu entrer le
17 plus rapidement possible dans le hangar puisque les coups étaient très
18 sévères.
19 Q. Quelle était la sévérité des coups reçus ? Est-ce que vous étiez passé
20 à tabac grièvement ?
21 R. Ce n'est pas Dokmanovic qui m'a frappé, mais il m'a provoqué. Il a
22 donné mon nom aux autres, mon nom et mon prénom. Quand il a dit : "Voilà
23 l'inspecteur." Quand il a dit que j'étais inspecteur, il pensait
24 probablement que j'étais un inspecteur de police. S'il n'avait pas appelé
25 mon nom, je n'aurais pas subi le sort que j'ai dû subir.
26 Q. Pourriez-vous expliquer aux Juges de la Chambre quelle était la gravité
27 des coups reçus, que vous avez reçus ? Est-ce que vous pourriez, je vous
28 prie, leur expliquer cela ?
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1 R. Oui, certainement. Nous étions tous ensanglantés. C'était des coups que
2 je n'avais jamais vus nulle part. Je n'avais vu ce genre de coups que dans
3 les films. Il y avait également des hommes de la Défense territoriale. Ils
4 étaient particulièrement enclins à nous battre. Si quelqu'un ne leur avait
5 pas dit que le colonel arrivait, je crois qu'ils nous auraient tués sur
6 place.
7 Q. Nous allons revenir sur cette phrase annonçant l'arrivée du colonel.
8 J'aimerais d'abord parler d'une autre chose. Vous avez donné certains
9 noms comme étant des personnes qui avaient été dans la haie d'hommes,
10 Dokmanovic, l'équipe de la Défense de Vukovar. Est-ce que vous avez vu des
11 gens porter des uniformes de la JNA dans cette haie d'hommes ?
12 R. Dokmanovic portait un uniforme de la JNA. Il portait également ses
13 grades, ses galons. Plutôt, il portait ses galons sur son épaule. Il était
14 soit commandant ou lieutenant-colonel. Je crois qu'il était lieutenant-
15 colonel. Il portait un uniforme bleu et portait un couvre-chef avec une
16 étoile de Tito sur le front. Il est arrivé vêtu en soldat.
17 Q. Combien y avait-il de personnes de part et d'autre alors que vous
18 passiez par cette haie d'hommes ? Pourriez-vous nous donner une évaluation,
19 s'il vous plaît ?
20 R. De chaque côté, peut-être 12 ou 13 hommes. Il faut multiplier par deux,
21 peut-être plus, d'ailleurs.
22 Q. Je souhaiterais à présent parler du hangar, lorsque vous êtes arrivés
23 dans le hangar et entrés dans le hangar.
24 M. MOORE : [interprétation] Avant de poser ces questions-là, je voudrais
25 demander aux Juges de la Chambre s'ils estiment que l'heure de la pause est
26 propice, ou souhaiteriez-vous peut-être continuer ? J'ai l'impression que
27 c'est un bon moment pour prendre la pause, Monsieur le Président, car je ne
28 voulais pas interrompre mes questions que j'allais poser concernant le
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1 hangar.
2 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Malheureusement, Monsieur Moore, c'est
3 un peu trop tôt. Nous allons nous trouver coincés un peu plus tard, si vous
4 voyez ce que je veux dire.
5 M. MOORE : [interprétation] Très bien.
6 Q. Je souhaiterais parler du hangar. Est-ce que vous connaissiez le hangar
7 d'Ovcara avant cette date-là ?
8 R. J'avais passé au moins une centaine de fois devant ces hangars. Il y
9 avait un lac où j'allais régulièrement pêcher du poisson. C'était une
10 ferme, en fait, de pisciculture.
11 Q. Bien. Parlons maintenant du hangar. Vous nous avez dit être passés par
12 la haie d'hommes. Vous nous avez expliqué que vous avez reçu des coups.
13 Lorsque vous êtes entrés finalement dans le hangar, est-ce que vous aviez
14 des blessures ? Est-ce que vous aviez subi des blessures à la suite du
15 passage par la haie d'hommes ?
16 R. Oui. Même dans le hangar même. Milan Bulic a pris un blessé que je
17 connaissais. On l'appelait Dado. Il a pris une béquille que ce dernier
18 avait - il se déplaçait à l'aide de ces béquilles - il m'a frappé avec sa
19 béquille à deux reprises derrière à la nuque. J'étais tombé. Je m'étais
20 relevé. J'ai voulu courir après lui, mais il était déjà parti, il était
21 déjà sorti du hangar.
22 Maintenant, pour ce qui est de cette côte qu'il a cassée, il a cassé une
23 côte. Vous voyez que j'ai encore des problèmes à ce jour. J'ai un tic.
24 D'ailleurs, cela me fait très mal. Chaque fois que cette douleur se
25 réactive, je me remémore malheureusement de ces moments terribles que j'ai
26 passés dans ce hangar.
27 M. MOORE : [interprétation] Je vais demander aux Juges de la Chambre de
28 nous permettre de présenter une pièce. Il s'agit d'un dossier médical, le
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1 dossier médical du témoin. Le témoin avait eu des blessures en 1992. Nous
2 allons vous montrer le dossier médical du témoin. Nous allons faire cela un
3 peu plus tard.
4 Q. Maintenant, dites-nous, Monsieur, est-ce que vous savez ce qui s'est
5 passé à l'intérieur du hangar ? Qu'est-ce que vous avez vu, et combien de
6 personnes y avait-il dans le hangar ?
7 R. Selon des données que nous avions recueillies nous-mêmes, il y avait
8 207 personnes. Plus tard, effectivement, cela était confirmé. Les personnes
9 qui étaient entrées avant nous dans le hangar ont dû aller s'accoter contre
10 le mur avec les bras et les pieds contre le mur. Il fallait que les jambes
11 soient légèrement éloignées du mur. Ils étaient dans cette position-là
12 lorsque nous sommes entrés dans le hangar.
13 Lorsque nous avons commencé à être passés à tabac, non pas seulement nous,
14 mais les autres, tous ceux qui étaient là nous battaient, nous donnaient
15 des coups. Il est certain que ces personnes manquaient d'humanité. Il y
16 avait de la paille dans un coin. Nous sommes allés nous asseoir sur cette
17 paille. J'avais vu que les gens essuyaient le sang de leur visage. C'est là
18 que nous attendions pour voir ce qui allait se passer plus tard.
19 Q. Vous nous avez dit un peu plus tôt que vous aviez vu deux personnes qui
20 s'étaient faites attaquées. Vous nous avez parlé de Samardzic et de Kemal.
21 R. Oui, Samardzic et Kemal. Oui, effectivement.
22 Q. Pourriez-vous nous raconter ce qui s'est passé ? Qu'est-ce que vous
23 avez vu concernant Samardzic ? Qu'est-ce qui lui est arrivé exactement ?
24 R. Samardzic est renté dans le hangar après moi, car il était sorti du bus
25 après moi également. Il est passé par la haie d'hommes, par les auteurs de
26 ces coups. Il est passé par là. On lui a donné des coups. Il est entré dans
27 le hangar. Ils l'ont suivi -- ils les ont suivi. Je crois que l'un et
28 l'autre sont morts après deux minutes. Ils ont eu des coups à la tête, à la
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1 tête, dos. Ensuite, ils les ont placés sur le ventre. Ils ont sauté sur
2 eux. Je crois que c'est une mort atroce qu'il leur a été réservée.
3 Q. Vous dites que ces hommes leur donnaient des coups, les passaient à
4 tabac et leur donnaient des coups à la tête. De qui parlez-vous lorsque
5 vous parlez de "eux" au pluriel ?
6 R. Les hommes qui faisaient partie de la haie d'hommes, ensuite, les
7 membres de la Défense territoriale sont entrés à l'intérieur du hangar.
8 Q. Qu'en est-il de Kemal ? Quel était le traitement qui lui était
9 réservé ?
10 R. C'était le même traitement que Samardzic. Voyez-vous, je n'avais même
11 pas le temps de regarder la scène. Il fallait trouver un lieu, un petit
12 espace qui pourrait nous protéger. Nous ne nous regardions pas tellement
13 non plus, vous savez. Il nous fallait garder l'esprit clair. Ceux qui
14 avaient reçu énormément de coups, c'étaient des malheureux. Nous étions
15 tous en train de courir à l'intérieur du hangar, et nous essayions de
16 protéger, chacun essayait de protéger sa tête. Je n'aurais peut-être pas
17 reçu ce coup aussi fort à la nuque si cet homme ne m'était pas -- si Milan
18 Vujic ne m'avait pas frappé à la béquille. Parce qu'il est arrivé derrière
19 le dos, il m'est arrivé derrière le dos. C'est comme cela qu'il m'a frappé
20 à la nuque. C'est après, je me suis effondré. Ensuite, je me suis relevé.
21 Je lui ai couru après. Je voulais lui donner des coups, mais il est sorti à
22 l'extérieur.
23 Q. C'est peut-être bien de ne pas vous être bagarré avec lui. Parlons
24 maintenant d'autres choses. Il y a eu ces attaques que vous nous avez
25 décrites à l'intérieur du hangar. Dites-nous si vous avez vu une quelconque
26 personne qui ait essayé d'empêcher ces auteurs de ces coups, à donner des
27 coups soit vous, des membres de votre groupe, quelqu'un qui ait essayé
28 d'empêcher les auteurs, ces personnes qui donnaient des coups de donner des
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1 coups justement, d'asséner tous ces coups à toutes ces personnes, y compris
2 vous-même ?
3 R. Non, je n'ai pas vu personne. Je n'ai vu personne essayant de faire
4 quoi que ce soit de ce type.
5 Q. Est-ce que vous avez vu quelqu'un portant un uniforme de la JNA à
6 l'intérieur du hangar ?
7 R. Oui, mais seulement après l'arrivée des adjudants. Il y avait un soldat
8 qui montait la garde devant le hangar. C'était un soldat de la JNA. Je le
9 connais. C'est le fils d'une dame qui s'appelait Marijana, qui travaillait
10 avec moi dans la municipalité. Il ouvrait et fermait la porte du hangar
11 lorsque cela était nécessaire.
12 Q. Vous nous avez expliqué que vous avez vu des personnes qui portaient
13 des uniformes de la JNA, mais vous nous avez dit : "Mais seulement après
14 l'arrivée des officiers." Pourriez-vous nous dire, dans vos propres mots,
15 que s'est-il passé lorsque ces officiers sont venus dans le hangar ?
16 R. Quelqu'un a fait irruption dans le hangar, et cette personne a dit, et
17 je cite : "Le colonel arrive avec deux lieutenants-colonels." Je crois
18 qu'il a donné le nom de famille du colonel, mais je ne pourrais pas vous le
19 donner avec certitude. Lorsqu'ils sont arrivés, tout le monde s'est tu.
20 Q. Vous nous avez dit que "lorsqu'ils sont arrivés, tout le monde s'est
21 tu." Dites-nous ce qui s'est passé lorsqu'ils sont arrivés. Qu'est-ce que
22 vous pouvez nous dire quant à leur arrivée, si vous vous souvenez ?
23 R. Je me suis d'abord dit, ce sont des personnes qui ont toutes terminé
24 des études militaires supérieures. Ce sont des personnes qui ont eu des
25 cours d'humanité. J'ai cru que ces personnes allaient empêcher ce genre de
26 comportement déplorable. En réalité, ils ont empêché brièvement ces
27 personnes de nous battre, toutes les personnes qui se trouvaient dans le
28 hangar. Ils se sont tous enfuis à l'extérieur. Seul le soldat qui gardait,
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1 qui montait la garde devant la porte du hangar, était resté sur place.
2 Q. Qu'est-ce vous avez vu par la suite ? Vous nous avez dit qu'ils ont
3 empêché ces comportements déplorables, mais seulement pendant une courte
4 période. Que voulez-vous dire par là ?
5 R. A ce moment-là, peut-être quelque peu de temps avant l'entrée des
6 officiers supérieurs dans le hangar, Zoric Stevan avait fait irruption. On
7 l'appelait Celo. Il m'a interpellé. Il m'a dit de me lever et de venir vers
8 lui, car j'étais assis sur ce foin.
9 Il m'a dit : "Tu m'a rendu service, et ce, lorsque j'avais énormément
10 besoin d'aide. Je vais te sauver la vie."
11 Il m'a fait sortir à l'extérieur. Les officiers supérieurs n'étaient pas
12 encore arrivés à ce moment-là. J'étais à l'extérieur. Ensuite, on a fait
13 sortir Guncevic. Nous étions sept en tout qu'on a fait sortir dans la cour.
14 Nous étions là, debout, un peu éloignés de l'entrée du hangar. C'est à ce
15 moment-là que les officiers sont arrivés dans le hangar. Nous avons vu tout
16 ce qui s'était passé à ce moment-là à l'intérieur du hangar. Mais ensuite
17 on a fermé la porte du hangar. C'était une porte coulissante en tôle, et
18 lorsque cette porte avait été fermée nous avons entendu des cris
19 épouvantables qui se faisaient entendre depuis l'intérieur du hangar.
20 Je dois ajouter quelque chose.
21 Avant l'entrée des officiers dans le hangar, un homme est arrivé. Je
22 n'avais jamais vu un homme aussi énorme. Il était grand et gros de taille.
23 Il avait une cocarde sur un couvre-chef et il portait un bâton en
24 caoutchouc qui pouvait se plier énormément. Il avait d'autres grenades
25 autour de la taille, accrochées au ceinturon. Il s'appuyait sur Stef
26 Guncevic. Il y avait également un commandant de la JNA qui était juste à
27 côté de lui et qui lui a dit : "Donne-moi ce bâton électrique pour que je
28 tue cette personne."
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1 Cette personne qui portait ce vêtement de chetnik a dit : "Non, ne
2 le tue pas, car il y a énormément de témoins oculaires."
3 Quand ils ont annoncé l'arrivée du colonel et de deux lieutenants-colonels,
4 c'est à ce moment-là que tous les membres de la Défense territoriale et
5 tous les autres qui se trouvaient dans le hangar, sans aucune raison
6 apparente, se sont enfuis à l'extérieur du hangar.
7 Q. Vous nous avez dit que vous aviez été emmené à l'extérieur. Vous nous
8 avez parlé d'une porte coulissante et que cette porte coulissante s'est
9 refermée derrière vous. Vous nous avez expliqué qu'on entendait des cris et
10 des gémissements à l'intérieur ?
11 R. Oui, mais nous étions à l'extérieur. Il y avait sept personnes à
12 l'extérieur. Nous étions sept à l'extérieur du hangar.
13 Q. Très bien, merci. Mais ce que je souhaiterais savoir, c'est la chose
14 suivante : vous pensiez que les soldats de la JNA étaient arrivés. Lorsque
15 l'on vous a fait sortir à l'extérieur, les officiers de la JNA étaient-ils
16 déjà arrivés ou non ?
17 R. On m'a d'abord fait sortir. Ensuite, ils sont arrivés, et toutes les
18 personnes qui s'étaient faites sortir, on nous a ramenés à l'intérieur du
19 hangar pour que l'on puisse voir ce qui se passait. Alors j'ai dit : Mais
20 qu'est-ce qui se passe avec nous ? J'ai dit que certaines personnes nous
21 avaient sauvé la vie. Ensuite, il a fait une liste de noms et il voulait
22 savoir comment cela se fait que ces personnes nous ont sauvé la vie,
23 pourquoi est-ce qu'ils nous connaissent, qui je suis. Cette personne a pris
24 mon nom de famille, ma date de naissance, et cetera. Il a pris toutes mes
25 coordonnées personnelles, et cette feuille de papier est restée chez cet
26 homme.
27 Q. Est-ce que votre cou vous fait mal ? Est-ce que vous souhaiteriez
28 prendre une pause ?
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1 R. Non, je vais bien, merci.
2 Q. Vous nous avez dit --
3 R. Je vais pouvoir endurer.
4 Q. Très bien.
5 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] De toute façon, nous pouvons avoir une
6 pause maintenant ou comme vous le souhaitez.
7 M. MOORE : [interprétation] Oui. Je souhaiterais juste poser une ou deux
8 questions, si vous n'y voyez pas d'inconvénient.
9 Q. Vous nous avez parlé des officiers, et ensuite vous avez utilisé les
10 propos suivants : "il a demandé qui nous avait sauvés." Vous faites
11 référence à "il," mais vous ne nous avez pas dit de qui il s'agissait. Est-
12 ce que vous pouvez nous dire qui était cette personne ? Est-ce qu'elle
13 avait un grade ? Est-ce qu'elle portait l'uniforme ?
14 R. Il n'avait pas de grade. C'était un soldat et il avait la redingote
15 militaire, mais son pantalon était différent, d'après ce dont je me
16 souviens. Le pantalon n'était pas de la même couleur que la redingote ou
17 que le veste. On n'avait pas l'impression que les deux allaient ensemble.
18 Il a dit qu'il m'avait sauvé la vie parce qu'une fois je lui avais rendu un
19 très, très grand service. Par la suite, j'ai supposé, et j'insiste sur ce
20 terme, j'ai supposé que je l'avais aidé à obtenir une approbation sanitaire
21 avant qu'il n'obtienne un rendez-vous, quelque chose de ce style-là.
22 Q L'audience va être interrompue, avec l'autorisation des Juges, et
23 lorsque nous reprendrons après la pause, je vais vous poser des questions à
24 propos des officiers de la JNA qui sont arrivés. Vous me suivez ? Mais nous
25 le ferons après la pause.
26 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous reprendrons à 16 heures 10,
27 Monsieur Moore.
28 --- L'audience est suspendue à 15 heures 47.
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1 --- L'audience est reprise à 16 heures 18.
2 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Moore, c'est à vous.
3 M. MOORE : [interprétation]
4 Q. Pourrions-nous maintenant, s'il vous plaît, parler du hangar. Je crois
5 que vous nous avez dit qu'il y avait trois officiers qui étaient arrivés.
6 Pouvez-vous nous dire à quel moment ils sont arrivés, s'il vous plaît ? De
7 façon générale, quelle était la séquence ou la chronologie ?
8 R. A un moment donné vers 15 heures 30 ou 16 heures. Il faisait déjà
9 sombre à 17 heures, alors qu'il faisait encore jour lorsqu'ils sont
10 arrivés.
11 M. VASIC : [interprétation] Monsieur le Président.
12 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Vasic.
13 M. VASIC : [interprétation] Je vous remercie. A la page 32, linge 3 du
14 compte rendu d'audience, je croyais que le témoin avait dit qu'ils étaient
15 venus entre 15 heures et 15 heures 30, tandis que sur le compte rendu
16 d'audience, on voit entre 15 heures 30 et 16 heures.
17 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie.
18 Monsieur Moore.
19 M. MOORE : [interprétation]
20 Q. Monsieur Cakalic, nous avons un petit problème avec notre machine
21 électronique qui enregistre votre déposition. Pourriez-vous, s'il vous
22 plaît, vous rappeler approximativement à quelle heure ces officiers sont
23 venus ? Vous nous avez dit qu'il commençait à faire nuit -- enfin, il
24 faisait sombre déjà à 17 heures. Quand sont-ils venus ?
25 R. Nous nous sommes mis en route -- j'essaie très fort. Il était
26 impossible de déterminer l'heure précise. Je ne peux vous dire que quelque
27 chose d'approximatif du point de vue de l'heure. Il faut comprendre que
28 nous étions tous préoccupés de rester en vie. On ne se demandait pas quelle
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1 heure il était à la minute près.
2 Q. Bien. Je pense que la Chambre comprend. Dans ce cas-là, parlons de ces
3 officiers. Quand ils sont arrivés, faisait-il encore jour ou est-ce qu'il
4 faisait déjà sombre ?
5 R. Il faisait encore jour. Il faisait encore jour, oui. Mais c'était vers
6 la fin du jour, donc il commençait déjà à faire un peu sombre. C'était
7 cette époque de l'année où les nuits durent plus longtemps, sont plus
8 longues.
9 Q. Pourriez-vous nous dire, s'il vous plaît, comment vous avez vu que ces
10 officiers arrivaient, dont vous vous êtes rendu compte ?
11 R. Quelqu'un de l'extérieur a probablement dit à quelqu'un d'autre que les
12 officiers arrivaient ou venaient. Tous les paramilitaires qui se trouvaient
13 à ce moment-là dans le hangar ont tous disparus ainsi que ceux de la
14 Défense territoriale. Ils ont tout simplement disparu, tous.
15 Q. Je voudrais pour le moment qu'on se centre sur les officiers. Est-ce
16 que vous avez vu ces officiers arriver ?
17 R. Oui. Je les ai vus arriver, puis je les ai vus entrer dans le hangar.
18 Q. Combien y avait-il d'officiers tels vous les décrivez, quel était leur
19 nombre ?
20 R. Un colonel et deux lieutenants-colonels.
21 Q. Comment avez-vous pu vous rendre compte que l'un était colonel et deux
22 autres étaient des lieutenants-colonels ?
23 R. Le colonel avait des épaulettes à bordure dorée et trois étoiles. Les
24 lieutenants-colonels avaient également une bordure dorée sur l'épaulette,
25 mais seulement deux étoiles.
26 Q. Pouvez-vous vous rappeler quel type de coiffure ils portaient ? Je vous
27 en prie, n'essayez pas de deviner si vous ne le savez pas.
28 R. Ils avaient des casquettes Tito avec des étoiles à cinq branches.
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1 C'était des insignes normaux pour la JNA à l'époque.
2 Q. Pourriez-vous, s'il vous plaît, nous dire ce que ces trois officiers
3 ont fait lorsqu'ils sont arrivés ?
4 R. Quand ils sont entrés à l'intérieur, tout était très silencieux à
5 l'intérieur. Les gens qui s'y trouvaient croyaient que ce qui s'était passé
6 jusqu'à ce moment-là allait s'arrêter. Il n'y avait personne des
7 paramilitaires, comme je l'ai dit, parce qu'ils étaient déjà tous partis.
8 Les officiers ont parlé à ceux d'entre nous qui avaient été sauvés, qui
9 avaient reçu une garantie de quelqu'un. Comme je l'ai déjà dit, il a fait
10 une liste de nous tous, prénom, nom de famille, date de naissance, nom du
11 père. Puis, nous avons quitté le hangar.
12 Q. Parlons des trois officiers qui sont arrivés. Y avait-il d'autres
13 soldats qui sont arrivés avec ces officiers ?
14 R. Je ne me souviens pas.
15 Q. Vous dites que quelqu'un vous a parlé, ou que "les officiers vous ont
16 parlé, ont parlé de ceux qui avaient été sauvés." Pouvez-vous vous rappeler
17 quand --
18 R. Oui.
19 Q. -- ou où cela a eu lieu ? Est-ce que c'était à l'intérieur du hangar
20 ou à l'extérieur du hangar ?
21 R. Nous avons parlé seulement à l'intérieur du hangar. Il y avait une
22 petite table. Le colonel, c'est le colonel qui a fait cela lui-même, qui
23 s'était installé à cette table pour écrire. Je suis prêt pour la question
24 suivante.
25 Q. A combien de personnes a-t-il parlé lorsqu'il se trouvait à cette
26 table, approximativement ?
27 R. Il était plutôt debout qu'assis à cette table. Il m'a parlé pendant
28 environ une minute ou peut-être sept ou huit minutes, parce que cela me
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1 donne l'impression de faire beaucoup.
2 Q. Après qu'il vous ait parlé, qu'avez-vous fait ou où êtes-vous allés ?
3 R. Quand la conversation a pris fin, nous avons quitté le hangar. L'un des
4 officiers avait probablement fait venir un véhicule de Vukovar. Il
5 commençait déjà à faire nuit. Nous avons été escortés jusqu'à un véhicule
6 de marque Citroën, une voiture. Près de cette voiture, j'ai rencontré
7 quelqu'un que je connaissais, le chauffeur. Il y avait deux soldats qui
8 étaient correctement vêtus dans l'uniforme réglementaire de la JNA. Cet
9 homme dont j'ai parlé, Mile Bakic, m'a reconnu et m'a demandé ce que je
10 faisais là. Je lui ai répondu : "La même chose que tout le monde." Il m'a
11 dit : "Viens t'asseoir à côté de moi." Il s'est assis dans le siège du
12 conducteur, et je me suis assis à côté de lui. A sa droite, il y avait un
13 soldat avec un fusil. En fait, il y avait deux soldats. Le deuxième était
14 assis à l'arrière avec les autres hommes. Six hommes se trouvaient
15 derrière, et ce soldat qui était devant était le soldat Bakic. Puis, il y
16 avait moi-même au milieu.
17 Q. J'ai un certain nombre de questions à vous poser. Je voudrais
18 maintenant que nous parlions simplement de la voiture, puis de votre retour
19 au hangar.
20 Vous nous avez parlé de la Citroën. Je crois que vous nous avez décrit les
21 deux soldats qui s'y trouvaient. Est-ce que vous êtes en mesure de dire
22 quel était l'âge de ces soldats qui se trouvaient dans ce véhicule ? Est-ce
23 que vous pourriez nous dire si c'était des soldats de la JNA de l'armée
24 régulière ou non ?
25 R. Ces soldats, à en juger par leurs vêtements, étaient membres de la JNA
26 de l'armée régulière, d'unités régulières de la JNA. C'était l'apparence de
27 soldats de l'armée régulière. Quant à Bakic, il commençait à faire sombre,
28 mais je crois qu'il portait des vêtements civils. Je ne pourrais pas le
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1 jurer, mais j'ai eu cette impression.
2 Q. Vous nous avez dit que le colonel vous avait parlé alors qu'il était à
3 cette table, qu'il vous avait parlé à l'intérieur du hangar. Combien de
4 temps êtes-vous restés dans le hangar avant de quitter Ovcara dans ce
5 véhicule ?
6 R. Une fois qu'il a eu noté nos noms et nos renseignements nous
7 concernant, nous sommes sortis du hangar, un par un. Puis, nous avons
8 attendu que tout le monde soit réuni, rassemblé. Quelqu'un nous a appelé,
9 je ne parviens pas à me rappeler qui maintenant. Puis, on nous a emmenés à
10 quelques mètres de là - je ne sais pas combien de mètres - jusqu'à ce
11 véhicule. Il se peut que cela ait été ces soldats qui se trouvaient dans le
12 véhicule qui nous ont escortés jusqu'à ce véhicule, mais je ne peux pas
13 être certain de cela.
14 Q. A partir du moment où on vous a emmenés -- ou enfin où vous avez quitté
15 cette table, que vous êtes allé à l'extérieur, puis un certain groupe
16 d'entre vous s'est ressemblé, vous nous avez dit un peu plus tôt que vous
17 pensiez que les passages à tabac avaient pris fin. Seriez-vous en mesure de
18 dire si ces passages à tabac ont repris lorsque les officiers étaient là ?
19 Je ne parle pas de ce qu'on peut vous avoir dit; je voudrais simplement
20 vous poser des questions concernant le moment où vous vous trouviez à
21 l'extérieur.
22 Q. Je comprends votre question. A partir du moment où ces officiers
23 supérieurs sont arrivés et que nous sommes sortis du hangar, il y a eu un
24 silence. Les portes du hangar ont été fermées. Des hommes portant des
25 casques étaient arrivés - je ne sais pas combien - dans un véhicule
26 spécial, et sont entrés. Ils portaient des battes. A ce moment-là, tout a
27 commencé. Ils ont commencé à battre des hommes jusqu'à ce qu'ils tombent
28 par terre. Je ne sais pas combien ont été tués, mais je crois que plusieurs
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1 ont été tués. On pouvait entendre les cris de très loin même si le hangar
2 était fermé. C'était horrible. C'était terrible.
3 Q. Vous nous avez parlé de ces hommes qui portaient des casques, qui sont
4 entrés dans le hangar et qui ont commencé à donner des coups. Vous nous
5 avez parlé des cris. Pendant combien de temps est-ce que cela a duré ? Est-
6 ce que vous seriez en mesure de nous renseigné, ces cris et ces coups, des
7 passages à tabac ?
8 R. Ils s'étaient probablement divisés en deux groupes; un groupe qui se
9 reposait, et l'autre groupe qui faisait des passages à tabac. Je ne peux
10 pas vous dire pendant combien de temps cela a duré; je ne me suis pas
11 concentré là-dessus. C'est difficile à dire. Quand on se trouve entre la
12 vie et la mort, c'est difficile de se rendre compte.
13 Q. Pourrions-nous parler alors du nom des personnes qui ont fait ce trajet
14 dans ce véhicule avec vous ? Est-ce que vous connaissez le nom de certaines
15 de ces personnes qui, dans la soirée, se sont trouvées dans ce véhicule
16 avec vous ?
17 R. Vers Vukovar ?
18 Q. De façon à ce que nous soyons bien précis, peut-être que je vais
19 reformuler ma question. Vous nous avez dit que vous étiez allés dans une
20 voiture ou une camionnette, et vous étiez escortés par deux soldats de
21 l'armée régulière. Vous nous avez dit qu'il y en avait sept. Pourriez-vous
22 nous dire les noms de ces personnes ? Est-ce que ce serait plus facile de
23 cette manière-là ?
24 R. Oui. Il y avait Cakalic, Stjepan Guncevic, Tihomir Perkovic, Vlado
25 Dudas, Zarko Kojic, Tihomir Perkovic. Cela fait sept, tous les sept.
26 Q. Je crois qu'il vaudrait mieux compter, parce que pour moi, cela ne fait
27 pas sept.
28 Il y a vous-même, M. Guncevic, le témoin Berghofer, Kojic -- R.
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1 Berghofer, Vlado Dudas.
2 Q. J'ai six noms. Je vais les répéter. Si vous ne vous souvenez pas,
3 n'essayez pas de deviner. Donc, vous-même, M. Guncevic, M. Berghofer, M.
4 Kujic, M. Perkovic et M. Dudas. Si vous ne pouvez pas vous rappeler
5 d'autres noms, ne vous en préoccupez pas, nous passerons à autre chose et
6 nous garderons cela de côté, n'est-ce
7 pas ?
8 Maintenant, vous êtes dans ce véhicule. Où est-ce que ce véhicule
9 vous emmène ? Où va-t-il, s'il vous plaît ?
10 R. Ce véhicule est allé en direction de Velepromet à Vukovar.
11 Q. Lorsque vous êtes arrivés à Velepromet, est-ce que vous êtes entrés
12 dans l'enceinte de Velepromet proprement dite ou non ? Pourriez-vous nous
13 le dire ?
14 R. Nous nous sommes arrêtés devant la grille, la barrière.
15 Q. Est-ce que vous êtes entrés à l'intérieur de ce périmètre ?
16 R. Oui, mais sans la voiture.
17 Q. Pourriez-vous nous dire ce qui s'est passé à Velepromet ? Est-ce que
18 vous y êtes restés ou est-ce que vous êtes allés
19 ailleurs ?
20 R. Les soldats qui nous avaient escortés jusque-là ont dit qu'ils nous
21 laissaient à eux, et que si les soldats n'étaient pas arrivés à 7 heures du
22 matin, le lendemain matin, il fallait les tuer -- ils devaient nous tuer.
23 Le commandant qui était là, il était de Negoslavci, je le connaissais. Il
24 avait passé des examens avec moi. Il a dit : "Non, je ne vais pas les tuer,
25 et vous n'allez pas les laisser là. Allez à Modateks."
26 Q. Passons maintenant à Modateks. Est-ce que vous êtes allés à Modateks ?
27 R. Oui.
28 Q. Combien de temps est-ce que vous avez passé à Modateks ? Combien de
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1 temps y êtes-vous restés ?
2 R. Il faisait nuit, ou sombre. Il s'agissait d'une société qui fabriquait
3 des vêtements. Les pièces étaient pleines de machines à coudre. Ils nous
4 ont placés dans une salle où il y avait plus de 100 femmes. Il y avait
5 également des personnes âgées qui se trouvaient là, gisant sur des
6 civières, des femmes.
7 Q. Combien de temps est-ce que vous êtes restés à Modateks, s'il vous
8 plaît ?
9 R. Je crois que nous avons passé deux nuits.
10 Q. Pourriez-vous nous dire quand vous avez quitté Modateks, où êtes-vous
11 allés ?
12 R. Nous sommes retournés à Velepromet.
13 Q. Quand vous êtes retournés à Velepromet, qu'est-ce qui s'est passé à
14 Velepromet ?
15 R. Ils nous ont emmenés de Modateks. Nous avons été escortés par un homme
16 qui avait reçu pour mission de le faire. Il y avait cet homme également qui
17 était arrivé de Vukovar que je connaissais, qui nous a emmenés à
18 Velepromet. Devant Velepromet, il y avait un certain nombre de personnes -
19 je ne sais pas combien - de l'autre côté de la route. Nous sommes arrivés
20 là sur la route, ils se trouvaient sur l'autre côté de la route. Ils ont
21 commencé à crier en disant : "Donnez-moi, Berghofer. Donnez-moi Cakalic.
22 Donnez-moi celui-ci ou celui-là. Nous voulons les tuer." Je connaissais
23 l'un d'entre eux, et je lui ai dit : "Tu devrais avoir honte." Il a fait
24 semblant de ne pas m'entendre.
25 Nous sommes allés à Velepromet. Ils nous ont emmenés vers la chambre
26 de la mort. C'est comme cela qu'on appelait cette pièce, parce que des tas
27 de choses s'y passaient. C'était l'atelier de charpentier qui appartenait à
28 Velepromet, un atelier de menuiserie.
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1 M. MOORE : [interprétation] Maintenant, ce que je fais faire, c'est que
2 j'espère pouvoir présenter à l'écran par voie électronique, c'est une photo
3 aérienne de Velepromet qui porte le numéro 04672115. C'est une photographie
4 que les membres de la Chambre ont déjà vue.
5 Est-ce qu'on pourrait la présenter à l'écran, s'il vous plaît ?
6 J'espère qu'on peut la présenter par le logiciel e-court parce que je
7 voudrais que l'on puisse voir l'image et je voudrais que vous puissiez
8 utiliser le crayon magique.
9 Q. Est-ce que vous avez cela devant vous maintenant, Monsieur Cakalic ? Le
10 microphone est bloqué, je vois, pour vous. Je ne sais pas si vous pouvez
11 être entendu.
12 Avant que vous ne commenciez à utiliser ce crayon, je voudrais vous
13 expliquer un instant. Vous avez cette photographie de Velepromet. La voyez-
14 vous clairement ?
15 R. Oui.
16 Q. La route qui se trouve à droite va de Vukovar à Negoslavci et l'entrée
17 est à la droite. Maintenant, est-ce que vous seriez en mesure de mettre un
18 cercle assez grand autour du secteur où vous pensez que se trouvait la
19 chambre de la mort ? Pouvez-vous faire cela, s'il vous plaît ? Maintenant,
20 vous prenez cette plume et vous dessinez simplement là. Essayez encore.
21 R. [Le témoin s'exécute]
22 Q. Je vous remercie beaucoup. Vous pouvez maintenant reposer ce crayon,
23 s'il vous plaît, et nous allons mettre la lettre A majuscule. Peut-être un
24 A majuscule. Est-ce que quelqu'un pourrait faire cela ? Oui, ou l'Huissier
25 pourra vous aider, je suis sûr, à mettre un A majuscule.
26 R. [Le témoin s'exécute]
27 M. MOORE : [interprétation] Est-ce que je pourrais demander, s'il vous
28 plaît, un numéro de pièce à conviction ?
Page 5928
1 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] La pièce est versée au dossier.
2 M. LE GREFFIER : [interprétation] Monsieur le Président, c'est la pièce à
3 conviction 265.
4 M. MOORE : [interprétation] Je vous remercie beaucoup. Est-ce que
5 maintenant l'on pourrait ôter de l'écran cette photographie ?
6 Q. L'image est disparue. J'espère que la vôtre a disparu aussi, Monsieur
7 Cakalic.
8 Parlons maintenant, s'il vous plaît, de la chambre de la mort telle que
9 vous l'avez décrite. Est-ce qu'elle est encore là ? On peut la voir ?
10 R. Oui.
11 Q. Merci beaucoup. Parlons de ce qui s'est passé à Velepromet. Où est-ce
12 qu'on vous a emmené ?
13 R. Nous étions à Velepromet et nous y sommes restés jusqu'à environ
14 minuit. Il y a beaucoup de personnes qui en ont été sorties et qui ont été
15 tuées. Tihomir Perkovic a été tué. Le directeur de l'abattoir de Vukovar,
16 Karlo Crk, lui aussi. Martin Sajtovic et son fils ont été tués. Tihomir
17 Perkovic a été tué.
18 Q. Est-ce que nous pouvons parler des bâtiments de Velepromet ? Qui
19 contrôlait ces bâtiments à ce moment-là ? Est-ce que vous avez vu quelqu'un
20 en uniforme qui se trouvait dans l'enceinte ou dans le périmètre de
21 Velepromet et qui contrôlait Velepromet ? Est-ce que vous êtes en mesure de
22 vous en souvenir ou non ?
23 R. J'ai vu le Dr Mico Maric. Il se cachait. Je sais que quelqu'un que
24 j'avais vu à Velepromet souffrait de diabète et il ne se sentait pas bien.
25 Donc, il lui a donné du sucre parce que la personne souffrait quasiment de
26 coma hypoglycémique.
27 Est-ce que vous pourriez peut-être répéter la question ?
28 Q. Ce n'est pas grave. Je pense que c'est la façon dont je formule mes
Page 5929
1 questions.
2 Lorsque vous avez été placé dans cette chambre de la mort, est-ce que
3 quelqu'un la gardait ?
4 R. Oui, deux soldats montaient la garde. Il y avait l'entrée, vous avez vu
5 les fenêtres. L'entrée se trouvait tout près des fenêtres. Il y avait des
6 pièces vers la droite, et la chambre de la mort se trouvait à gauche. Ces
7 soldats nous ont dépouillés de tout ce que nous avions. Ils ont pris nos
8 documents personnels, notre argent. Ils ont tout pris, tout pris, et ils
9 ont détruit tout cela.
10 Q. Est-ce que ce sont les seuls soldats que vous avez vus à Velepromet ?
11 R. Il y avait également ceux qui portaient l'uniforme, mais je savais
12 qu'il ne s'agissait pas de soldats parce que je les connaissais.
13 Q. Lorsque vous parlez des deux soldats qui montaient la garde auprès de
14 la chambre de la mort, quel type d'uniforme portaient-ils ?
15 R. Des uniformes militaires classiques. Un couvre-chef à la façon Tito
16 avec l'étoile à cinq bras, un ceinturon, une redingote, un fusil.
17 Q. Est-ce que vous êtes en mesure de dire s'il s'agissait de soldats
18 réguliers de la JNA ou non ?
19 R. Je ne peux pas vous le dire. Toujours est-il qu'ils étaient habillés
20 comme des soldats.
21 Q. Qu'en est-il de l'âge de ces soldats ? Est-ce que vous pouvez nous dire
22 s'ils étaient jeunes, s'ils avaient la quarantaine ou s'ils étaient plus
23 âgés ?
24 R. Non, il s'agissait de jeunes gens.
25 Q. Vous nous avez dit que des gens étaient sortis, qu'on les faisait
26 sortir de la chambre de la mort. Qui a été sorti de la chambre ?
27 En fait, je ne vais pas poser cette question. Je m'excuse. Ce n'est
28 pas une question très maligne.
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1 Voilà ce que j'aimerais vous demander : cette pièce, lorsque vous y êtes
2 entré, est-ce qu'il y avait d'autres personnes dans cette pièce ?
3 R. Oui, il y en avait.
4 Q. Quelle était l'appartenance ethnique des personnes que vous connaissiez
5 et qui se trouvaient dans cette chambre de la mort ?
6 R. Vous voulez parler des personnes qui étaient capturées ?
7 Q. Oui.
8 R. Ils étaient Croates.
9 Q. Les gens qui les faisaient sortir, quelles étaient les personnes qui
10 faisaient sortir les Croates de cette pièce et qui les tuaient, comme vous
11 nous l'avez dit ?
12 R. Voilà ce qui se passait en général : la porte s'ouvrait d'abord. Une
13 personne portant un uniforme de la JNA -- c'est quelqu'un qui faisait
14 partie de la JNA, mais qui travaillait également à Vuteks. Il avait des
15 grenades de chaque côté. Il avait un ceinturon, et en fait il avait deux
16 fusils, deux fusils automatiques à canon court. C'était un certain Zarko.
17 Je le connaissais très bien. Lorsqu'il partait, il refermait à porte à
18 nouveau. Il y avait un cadenas. Après un certain temps, la porte était
19 ouverte à nouveau. Telle et telle personne était appelée, et cetera, et
20 cetera. Tihomir Perkovic, qui était avec nous, a subi cela trois fois. Ils
21 l'ont fait sortir trois fois et ils l'ont ramené trois fois. Et la
22 quatrième fois, il est sorti et je n'ai plus jamais entendu parler de lui.
23 Je ne sais pas ce qui lui est arrivé.
24 Q. Vous nous avez dit que les gens étaient sortis, qu'on les faisait
25 sortir et qu'ils étaient tués. Comment savez-vous qu'ils étaient tués ?
26 R. J'ai entendu parler de Karlo Crk parce que vous vous souviendrez qu'il
27 se trouvait juste en dessous de la fenêtre dans la pièce que j'ai décrite.
28 On l'a fait sortir, et juste en face de la porte, la personne qui
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1 l'attendait lui a parlé. Il lui a dit : "Karlo, qu'est-ce qui s'est passé à
2 l'abattoir ? Qu'est-il advenu de l'argent ? Qu'est-ce qui s'est passé ?"
3 Ils ont parlé de choses superficielles, puis ensuite, on a entendu une
4 explosion suivie d'un bruit, et je n'ai plus jamais entendu parler de Karlo
5 Crk. C'était un ingénieur agronome et c'était le directeur de l'abattoir de
6 Vukovar. Je n'ai plus jamais entendu parler de lui après.
7 Q. Les autres gens, ceux que vous connaissiez, qui ont dû sortir de cette
8 pièce et qui ne sont pas revenus dans la pièce, est-ce que vous ne les avez
9 jamais revus ?
10 R. Non.
11 M. VASIC : [interprétation] Monsieur le Président.
12 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, Maître.
13 M. VASIC : [interprétation] Merci. J'aimerais intervenir à nouveau à propos
14 du compte rendu d'audience. Il s'agit de la page 43, ligne 6. Le témoin a
15 dit qu'il avait entendu un coup et qu'il n'a plus jamais revu cette
16 personne. Dans le compte rendu d'audience, il est question d'un bruit. Un
17 bruit, cela peut avoir plusieurs sens.
18 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Moore.
19 M. MOORE : [interprétation]
20 Q. Est-ce que je peux vous poser des questions à propos de Karlo Crk, et
21 ce, afin que nous obtenions une précision à propos du compte rendu.
22 Vous avez dit que vous avez vu -- ou que vous saviez que Karlo était
23 sorti à l'extérieur, qu'on lui a posé des questions à propos de la
24 situation à l'abattoir.
25 R. Oui. J'ai entendu qu'il était à l'extérieur.
26 Q. Certes. Ensuite, vous avez dit que vous avez entendu un bruit. Une
27 personne a entendu le mot "coup," une autre personne a entendu le mot
28 "bang." Alors, est-ce qu'il s'agissait d'un coup ? Est-ce qu'il s'agissait
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1 d'un bruit ou d'un bang ?
2 Je vois que mes estimés confrères semblent grimacer, mais je ne vois pas
3 pourquoi, parce qu'il me semble que je pose les questions en bonne et due
4 forme.
5 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Poursuivez, Monsieur Moore.
6 M. MOORE : [interprétation]
7 Q. Est-ce que vous êtes en mesure de nous aider, ou d'aider la Chambre de
8 première instance ?
9 R. On a entendu un coup. On pouvait l'entendre. C'était un coup, une
10 gifle, et je n'ai plus jamais entendu parler de lui. Je sais que par la
11 suite il a été enterré, et cetera, et cetera.
12 Q. Très bien. Je vous en remercie. Je remercie Me Vasic pour cette
13 précision.
14 J'aimerais maintenant que nous parlions de la pièce où vous vous
15 trouviez. Pendant combien de temps êtes-vous resté dans cette pièce ? Le
16 savez-vous ?
17 R. Oui, jusqu'à minuit.
18 Q. Est-ce que vous pourriez nous dire comment vous êtes sorti de la
19 pièce ? Est-ce qu'on vous a fait sortir de cette pièce ?
20 Comment cela s'est-il passé ?
21 R. Un capitaine est arrivé, le capitaine Kosa. Il est entré dans la pièce.
22 Il s'est mélangé un peu à nous, et il a dit : "Allez, les types. Sortez. Je
23 suis ici avec un bus et si vous ne sortez pas, les Chetnik vont venir tous
24 vous massacrer."
25 Je lui ai demandé sa parole d'officier, ce qu'il a fait d'ailleurs, et nous
26 l'avons cru. Nous sommes sortis. Vous savez ce qu'il fallait que nous
27 fassions, parce que nous avions tous les vessies pleines. Ensuite, avec ce
28 capitaine, nous l'avons suivi jusqu'au bus qui se trouvait à une petite
Page 5933
1 distance. Je ne sais pas à combien de mètres. Nous sommes entrés dans le
2 bus. Ils ont essayé de faire démarrer le bus. Le moteur ne démarrait pas,
3 donc ils ont fait une autre tentative. Il a dit : "Bien, sortons, et on va
4 pousser l'autobus." C'est ce que nous avons fait. Nous avons poussé
5 jusqu'au moment où le moteur a démarré. Mais nous ne sommes même pas
6 arrivés jusqu'au portail parce que les Chetniks avaient commencé à chanter
7 leurs chansons habituelles. Slobo, Slobo, envoie-nous de la salade, il va y
8 avoir de la viande parce qu'on va massacrer des Croates. Enfin, leurs
9 chansons habituelles.
10 Q. Donc, vous êtes dans un autobus qui finalement démarre. Quelle fut
11 votre destination ? Où est-ce que le bus est allé ?
12 R. A la caserne de Vukovar.
13 Q. Est-ce que vous pourriez nous dire très, très rapidement ce qui s'est
14 passé à la caserne ?
15 R. Rien. Nous avons bien été accueillis par de jeunes conscrits qui nous
16 ont donné à manger et à boire. Nous mourrions de faim. Ils se sont bien
17 comportés à notre égard. Nous avons parlé entre nous. Ensuite, ils nous ont
18 placés dans une pièce. Il y a des soldats un peu plus âgés, qui avaient des
19 grades plus élevés, qui sont arrivés plus tard dans cette pièce. Je ne sais
20 pas quels étaient leurs points de vue, mais petit à petit, lentement, ils
21 ont commencé à gifler certains hommes. Ils ne m'ont pas touché, mais j'ai
22 vu qu'ils le faisaient à d'autres. Ils s'exprimaient avec un accent
23 étrange. Je ne pense pas qu'ils étaient originaires de cette région. Je ne
24 pense pas qu'ils étaient de la Slavonie.
25 Cela s'est poursuivi toute la nuit. Ils ont détaché les mains d'un
26 homme qui avait été attaché avec du fil. Nous avions essayé de le faire
27 déjà dans la chambre de la mort, mais tout cela était emmêlé de telle façon
28 que nous n'avions pas pu démêler ce fil. Les soldats sont arrivés à ce
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1 moment-là avec des tenailles et ils ont libéré les mains de ce jeune homme.
2 Mais pour les remercier du service, il a fallu qu'il avale deux balles.
3 Q. J'aimerais vous poser une question à propos d'un des éléments de votre
4 déposition. Vous venez de nous parler de fil de fer autour des poignets
5 d'un jeune homme et vous nous avez dit que vous aviez essayé d'enlever ce
6 fil de fer lorsque vous vous trouviez dans la chambre de la mort. Est-ce
7 qu'il était la seule personne qui avait les poignets liés avec du fil de
8 fer ? Est-ce que vous savez si cela était également le cas pour d'autres
9 personnes ?
10 R. Non, je ne le sais pas.
11 Q. Nous allons revenir à la caserne de la JNA. Vous nous avez dit qu'il
12 avait dû avaler des balles. Combien de temps est-ce que vous êtes resté
13 dans cette caserne, approximativement ?
14 R. Jusqu'à environ 8 heures du matin.
15 Q. Est-ce que vous pourriez nous dire comment vous avez quitté la
16 caserne ?
17 R. Nous avons tous été appelés dans un genre de hall où il y avait
18 également des femmes. Il y a un capitaine première classe qui est arrivé.
19 Je pense qu'il portait une redingote. Je ne pense pas que même un maréchal
20 aurait porté ce genre de redingote. Il était très bien habillé. Voilà ce
21 qu'il a dit : "Tous les Croates restent là où vous vous trouvez, et les
22 autres doivent passer de l'autre côté."
23 Une femme a posé une question bête, ou stupide. Elle a dit : "Qu'est-
24 ce que je suis alors moi, mon mari est serbe et je suis croate." Sur quoi
25 il a répondu : "C'est à vous de décider." Elle est allée avec les femmes,
26 mais je ne sais pas quelles femmes.
27 Ensuite, il s'est présenté. Il a dit : "Je suis le capitaine Vojin Misic,
28 un Serbe de Negoslavci. Nous allons tous vous tuer. Nous allons vous
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1 brûler, vous faire brûler, et nous allons complètement faire disparaître la
2 quintessence des Croates en jetant les cendres dans le Danube."
3 Q. Qu'avez-vous pensé lorsque cela a été dit ?
4 R. Dans un premier temps, je me suis demandé s'il était vraiment normal et
5 s'il envisageait véritablement de faire quelque chose de ce goût-là. Il
6 aurait dû s'en tenir aux règles militaires, car finalement, il n'a pas fait
7 cela.
8 Q. Qu'est-ce qu'il a fait alors ?
9 R. Rien. Il nous a insultés, il nous a maudits. Il a proféré des insultes.
10 Un bus est arrivé. Nous nous apprêtions à monter dans l'autobus et à aller
11 vers le dernier camp de détention.
12 Q. Est-ce que vous avez des problèmes du fait de votre cou ? Je vois que
13 vous --
14 R. Non, non. Il faut juste que je trouve une bonne position.
15 Q. Je pense, ensuite, qu'il est exact de dire que vous êtes allés à
16 Sremska Mitrovica, n'est-ce pas ? Est-ce que cela est exact ou pas ?
17 R. Oui.
18 Q. Est-ce que vous pourriez nous dire comment vous y êtes arrivés ?
19 R. Premièrement, nous sommes passés pas le dernier village croate. C'était
20 Tovarnik. Ensuite, nous sommes entrés dans Sid. Là, nous avons attendu
21 pendant un certain temps. Je ne sais pas pourquoi d'ailleurs. Puis, nous
22 sommes repartis. Nous sommes arrivés à Sremska Mitrovica. Nous sommes
23 arrivés sur la place principale. Le centre sportif est près de cette place.
24 Le chauffeur s'est arrêté. Des officiers de la JNA sont venus nous regarder
25 et sont venus nous insulter. Ils avaient depuis le grade de capitaine
26 jusqu'au grade de colonel. Vraiment, ils ont proféré des tas de choses à
27 notre égard, du style : "Nous aimerions vous laisser partir, mais Tudjman
28 ne veut pas de vous. Maintenant, c'est nous qui allons nous occuper de
Page 5936
1 vous."
2 Q. Est-ce que nous pouvons parler de la façon dont vous avez été traités à
3 Sremska Mitrovica ?
4 R. Nous sommes arrivés à l'entrée. Après que nous sommes partis du premier
5 endroit où nous nous étions arrêtés à Mitrovica, nous sommes arrivés à la
6 prison de Mitrovica. C'était la prison où les gens purgeaient leurs peines
7 de prison après avoir été condamnés. Nous sommes passés par un passage ou
8 une entrée assez étroite. Il fallait passer par cette entrée, ensuite il
9 fallait descendre trois ou quatre marches afin d'arriver. C'est là qu'ils
10 nous attendaient, des officiers de police habillés en tenue de policier.
11 Ils ont commencé à nous passer à tabac immédiatement. Il ne s'agissait pas
12 d'officiers de police militaire, mais d'officiers de police réguliers.
13 Ils nous ont passés à tabac. Ils nous frappaient. Nous avons couru
14 jusqu'au moment où nous sommes arrivés à un endroit. Ils nous ont demandé -
15 - il y avait deux personnes. Il y en avait un qui parlait avec un accent
16 bosnien. Je ne sais pas qui était l'autre personne d'ailleurs, parce qu'il
17 ne nous parlait pas beaucoup. Il n'était pas très loquace. Le premier homme
18 nous posait des questions du style : "Quel est ton nom ? Qu'est-ce que tu
19 fais ? Et cetera, et cetera." Ensuite, il posait des questions. "J'ai fait
20 ceci, j'ai fait cela." Ensuite il disait : "C'est ce que tu as fait. Tu
21 tuais des Serbes," et cetera, et cetera. Cela a duré un certain temps.
22 Ensuite, nous avons été envoyés vers le centre sportif. Je me souviens d'un
23 officier de police qui portait un uniforme bleu. Il y avait une des portes
24 qui ne fonctionnait pas bien.
25 Q. Je m'excuse de vous interrompre. Je voudrais que nous nous
26 interrompions maintenant, parce que je souhaiterais que nous abordions un
27 ou deux autres sujets.
28 M. MOORE : [interprétation] Je souhaiterais, dans une premier temps, que
Page 5937
1 nous passions à huis clos partiel pendant un laps de temps bref.
2 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Huis clos partiel.
3 [Audience à huis clos partiel]
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8 [Audience publique]
9 M. MOORE : [interprétation] Je vous remercie.
10 Q. Je souhaiterais que vous examiniez ce document qui porte la date du 13
11 févier 1992.
12 M. MOORE : [interprétation] Pour aider la Chambre de première instance, je
13 dirais qu'il y a deux documents; le document original en B/C/S, puis un
14 document anglais. Le document anglais est le document 00320180. Je ne sais
15 pas si ce document peut être localisé.
16 Peut-être qu'il serait utile que je prenne le document B/C/S, puis nous
17 verrons la traduction après.
18 Q. Monsieur Cakalic, est-ce que vous auriez l'amabilité d'examiner le
19 document qui se trouve à votre gauche.
20 Peut-être que vous pouvez lui montrer. Ce n'est pas nécessaire de le
21 mettre sur le rétroprojecteur.
22 R. Oui.
23 Q. Maintenant, je pense qu'il est exact de dire que --
24 R. Ce sont les résultats de mes examens médicaux. C'est le premier examen
25 médical dont j'ai fait l'objet à ma sortie du camp.
26 Q. Je vous remercie.
27 M. MOORE : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Monsieur les
28 Juges, il existe une traduction anglaise de ce document. Il vous appartient
Page 5939
1 d'en décider. Je pense que c'est un document de la liste 65 ter, et je
2 pense que c'est le numéro 1 -- non, le numéro 7. Cela devrait être le
3 document numéro 7. Le document est 00320180.
4 Q. Monsieur Cakalic, excusez-nous pour ce retard; c'est l'une des joies
5 des systèmes électroniques.
6 M. MOORE : [interprétation] Très bien. Je ne voudrais surtout pas perdre
7 davantage de temps. Je ne sais pas si ce document va pourvoir être affiché.
8 C'est une traduction anglaise que je n'ai pas. Je suppose que le Tribunal
9 en a un exemplaire.
10 Je voudrais que le document original en B/C/S soit considéré comme une
11 pièce à conviction et que nous pourrions y attacher la traduction anglaise.
12 Je ne vais pas entrer dans les détails. D'ailleurs, le témoin a déjà donné
13 des détails à propos de ses genoux, de ses vertèbres. J'aimerais attirer
14 l'attention de la Chambre sur les radiologies bi-directionnelles des genoux
15 qui ont été faites, ainsi que l'analyse de la colonne vertébrale cervicale,
16 de la colonne vertébrale thoracique et de la colonne vertébrale
17 lombo-sacrale.
18 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je pense que maintenant nous avons la
19 partie B/C/S qui est sur l'écran. Je suppose que la traduction anglaise se
20 trouve dans le système, mais elle n'est pas encore affichée.
21 M. MOORE : [interprétation] Je souhaiterais que cela soit une pièce à
22 conviction. Le témoin a déjà donné des détails à propos de ses lésions aux
23 genoux et tout cela.
24 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, vous y avez déjà fait mention.
25 [La Chambre de première instance et le Greffier se concertent]
26 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] C'est la version avec la traduction en
27 langue anglaise, je présume, qui sera reçue comme étant l'annexe de la
28 pièce en question.
Page 5940
1 M. LE GREFFIER : [interprétation] Il s'agira de la pièce 266, Monsieur le
2 Président.
3 M. MOORE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je n'ai plus de
4 questions à poser à ce témoin.
5 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie.
6 Me Vasic aura un certain nombre de questions pour vous, Monsieur. Merci.
7 M. VASIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Bonjour à tous et
8 à toutes.
9 Contre-interrogatoire par M. Vasic:
10 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Cakalic.
11 R. Bonjour.
12 Q. Je souhaiterais d'abord vous demander de toujours ménager des pauses
13 entre les questions et les réponses, étant donné que nous parlons la même
14 langue. Je vous demanderais de laisser le temps aux interprètes de bien
15 interpréter ma question afin que le tout puisse être transcrit au compte
16 rendu d'audience le plus fidèlement que possible.
17 D'abord, je souhaiterais vous demander de parler de quelques aspects
18 techniques concernant votre déclaration, ensuite, je vais voudrais poser un
19 certain nombre de questions. Je souhaiterais d'abord confirmer que vous
20 avez effectivement donné un certain nombre de déclarations. Vous avez
21 également été témoin dans plusieurs affaires. Alors, je souhaiterais
22 d'abord aborder ces aspects-là de votre déposition.
23 Dites-moi, je vous prie, si vous vous rappelez que le
24 18 mars 1992, vous avez fait une déclaration, si vous vous souvenez d'avoir
25 fait une déclaration en cette date, portant le numéro d'identification VU-
26 BOL-46, BOL pour "bolnica" qui veut dire hôpital.
27 R. J'ai sans doute fait une déclaration, mais veuillez me rappeler, s'il
28 vous plaît, auprès de quelles autorités, à qui je l'aurais faite ?
Page 5941
1 L'INTERPRÈTE : Est-ce que le témoin peut s'approcher du micro, s'il vous
2 plait ?
3 M. VASIC : [interprétation]
4 Q. Je peux vous montrer la déclaration en question. Cela pourra peut-être
5 rafraîchir votre mémoire. Je demanderais à l'Huissier de bien vouloir
6 montrer au témoin cette déclaration.
7 C'est une déclaration qui a été dactylographiée, alors que nous pouvons
8 lire ici que vous l'avez faite vous-même et que vous l'avez manuscrite.
9 Est-ce que vous pourriez nous dire si vous vous souvenez d'avoir vu votre
10 déclaration que vous aviez rédigée à la main et qui se présente sous
11 l'aspect d'une déclaration dactylographiée ?
12 R. Oui, c'est bien ma déclaration.
13 Q. Merci, Monsieur Cakalic.
14 R. Je n'ai pas signé cette déclaration. Je ne vois pas ma signature
15 toutefois. Oui, effectivement. Puisque cette déclaration aurait été
16 manuscrite initialement et qu'elle a été dactylographiée par la suite. Oui,
17 oui, effectivement. Merci.
18 Q. Je vous remercie. Il ne faudrait vraiment pas oublier de ménager une
19 pause entre mes questions et vos réponses. Bien. Vous pouvez déposer la
20 déclaration sur le pupitre.
21 Il y a également une autre déclaration qui a été faite auprès du centre
22 médical des droits de l'homme à Zagreb. Cette déclaration a été faite en
23 date du 18 mars 1992.
24 R. Pourriez-vous me rappeler, je vous prie, auprès de qui je l'aurais
25 faite, cette déclaration ?
26 Q. Certainement. C'est une déclaration que vous auriez faite au centre
27 médical des droits de l'homme de Zagreb en date du 18 mars 1992 à Zagreb.
28 R. Si j'ai signé cette déclaration, je l'ai sans doute rédigée moi-même,
Page 5942
1 mais je ne me souviens pas du tout de cette déclaration.
2 Q. Je demanderais à M. l'Huissier de bien vouloir montrer au témoin cette
3 déclaration. Vous verrez qu'au dernier paragraphe, vous avez déclaré :
4 "Cette déclaration, je l'ai faite de façon libre et volontaire," et vous
5 avez signé en bas de page. Vous avez également mis votre date de naissance
6 et d'autres détails.
7 Prenez la troisième page -- ou si vous voulez, la dernière page, en
8 anglais.
9 R. Non, non, c'est ma déclaration. C'est ma déclaration. Je la reconnais.
10 Q. Merci, Monsieur. Vous pouvez également la mettre de côté.
11 Ensuite, le 16 mai 1992, vous vous êtes entretenu avec les représentants du
12 MUP de Croatie. Il s'agissait du poste de police de Vukovar, section
13 chargée des questions opérationnelles. Il s'agit d'une note de service
14 rédigée par un employé du MUP. Vous n'avez pas signé toutefois cette
15 déclaration, mais c'est l'employé du MUP qui l'a signée.
16 R. Il me faudra certainement consulter cette déclaration. Je voudrais la
17 voir.
18 Q. Oui, certainement. Merci.
19 Est-ce que vous voyez sur la première page votre nom, et à la dernière
20 page, on peut lire, note de service, signée par un employé du MUP, et ce
21 n'est pas vous qui l'avez signée ? Je voudrais savoir si cette note de
22 service était rédigée à la suite d'un entretien que cet employé du MUP a eu
23 avec vous ?
24 R. Oui, oui. Cette déclaration a été rédigée à la suite d'un entretien.
25 Q. Vous pouvez la mettre de côté.
26 R. Je n'aime pas faire de déclarations non signées vous savez, et cette
27 déclaration n'a pas été signée effectivement. Je souhaite simplement vous
28 dire que je n'accepte pas cette déclaration pour ce qui est de la teneur de
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1 cette déclaration puisque je ne l'ai pas signée.
2 Q. Très bien. Je ne vous demande pas de faire des commentaires sur le
3 contenu pour l'instant. Nous allons y revenir un peu plus tard. Je voulais
4 simplement savoir si c'est bien vous qui l'aviez fait.
5 Le 6 mars 1993, vous vous êtes entretenu avec une dame. Il s'agit
6 d'un lieutenant-colonel de l'armée canadienne et son nom est Kim Carter.
7 Vous vous êtes entretenu avec elle ?
8 R. Oui.
9 Q. A la suite de cet entretien, on a consigné un transcript que j'imagine
10 vous avez pu voir ?
11 R. Oui. C'était en 1993 ou 1992.
12 Q. C'était le 6 mars 1993.
13 R. Oui, le 6 mars 1993, effectivement. Mais il y avait un homme également.
14 M. Clyde était présent également. Son prénom était Snow. M. Snow Clyde.
15 Q. Ensuite, on vous a entendu en tant que témoin. Vous avez déposé devant
16 le tribunal cantonal de Zagreb en date du 10 juin 1993. Vous souvenez-vous
17 de cela ?
18 R. Oui. Je me souviens du juge de Sarengrad.
19 Q. Il s'agissait de l'affaire contre Slavko Dokmanovic et autres; est-ce
20 que c'est exact ?
21 R. Alors, à ce moment-là, ce n'est pas le document que j'ai à l'esprit.
22 Q. Je peux vous montrer ce document, en demandant à M. l'Huissier de bien
23 vouloir vous le remettre. Est-ce que vous reconnaissez ce document ?
24 R. Je n'ai pas trouvé l'endroit où j'aurais signé. Je vivais à Samobor à
25 l'époque. Je cherchais également un appartement à l'époque.
26 Q. Est-ce que c'est bien votre déclaration ? Est-ce que c'est la
27 déclaration que vous avez faite en tant que témoin ?
28 R. Oui, c'est de cela que j'avais parlé, effectivement. Merci.
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1 Q. Très bien. Vous pouvez également laisser de côté cette déclaration.
2 Ensuite, vous avez eu un entretien avec les membres du bureau du Procureur
3 du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie, et vous leur avez
4 fait une déclaration en date du 18 juin pour une première fois, le 18 juin
5 1995. C'était la première fois que vous leur aviez parlé; est-ce que c'est
6 exact ?
7 R. Pourriez-vous, je vous prie, me montrer la déclaration en question ?
8 Q. Ensuite, vous aviez quelque chose à ajouter en date du 21 avril 1996,
9 et je vais également vous montrer ce document. Je vais d'ailleurs vous
10 montrer les deux documents. Je vais demander à M. l'Huissier de vous les
11 montrer à l'instant. Vous souvenez-vous de cette déclaration ?
12 R. Oui.
13 Q. Merci. Ensuite, le 5 février 1998, vous avez déposé devant ce Tribunal
14 dans l'affaire Dokmanovic. Est-ce que vous vous souvenez de cela ?
15 R. Oui.
16 Q. Ensuite, vous avez déposé dans une autre affaire devant ce même
17 Tribunal, et c'était en date du 16 juin 2003, et c'était dans l'affaire du
18 feu Slobodan Milosevic.
19 R. Oui, contre Slobodan Milosevic.
20 Q. Avant cela, le 10 juin 2003, vous vous étiez entretenu avec les
21 représentants du MUP du poste de police de Kastel et ils ont également
22 rédigé une note de service à la suite de votre entretien; est-ce que c'est
23 exact ?
24 R. Oui.
25 Q. Par la suite, à la demande du tribunal cantonal de Belgrade et à la
26 demande du juge d'instruction dans le cadre de procès de crimes de guerre,
27 vous avez fait une déclaration à Zagreb que vous avez donnée à un procureur
28 de Belgrade, et c'était au mois d'avril 2004; est-ce que c'est exact ?
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1 R. Oui.
2 Q. Après cela, le 25 octobre 2004, vous avez témoigné devant la chambre
3 des crimes de guerre à Belgrade, et un transcript qui fait état de vos
4 propos a été consigné à cette occasion; est-ce exact ?
5 R. Oui.
6 Q. J'ai une autre déclaration que vous avez faite et qui a été signée. Le
7 prénom qui y figurait, Emil, le nom, Cakalic. Mais il y n'y a pas de date
8 et on ne sait pas auprès de quelles autorités vous avez fait cette
9 déclaration.
10 Je vais demander à M. l'Huissier de vous montrer cette déclaration, et vous
11 demander de nous dire si vous vous rappelez de cette déclaration. Pour qui
12 est-ce que vous aviez fait cette déclaration et en quelle date ?
13 Sur la première page, on voit votre nom, "Emil Cakalic," alors qu'à la
14 dernière page, on voit une signature, mais est-ce bien la vôtre ?
15 R. Oui. C'est ma signature et c'est ma déclaration.
16 Q. Pourriez-vous nous dire en quelle date vous avez fait cette déclaration
17 et à qui elle était destinée ?
18 R. C'est bien ma déclaration, mais je ne sais plus à qui je l'avais
19 envoyée. Je ne sais plus à qui elle était destinée. Je ne me souviens plus
20 qui m'avait demandée de la faire.
21 Q. Est-ce que vous vous souviendrez de la date à laquelle vous l'auriez
22 faite ?
23 R. Non, je ne me souviens pas. Je n'ai pas une très bonne mémoire pour les
24 dates.
25 Q. D'accord. Merci.
26 M. VASIC : [interprétation] Monsieur le Président, je ne sais si l'heure
27 est opportune pour prendre un pause ?
28 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, effectivement. Nous allons
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1 reprendre nos travaux à 17 heures 55.
2 --- L'audience est suspendue à 17 heures 34.
3 --- L'audience est reprise à 18 heures 02.
4 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous écoute, Maître Vasic.
5 M. VASIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.
6 Q. Monsieur Cakalic, je vais poursuivre le contre-interrogatoire que j'ai
7 commencé tout à l'heure. Vous avez déclaré avoir travaillé pendant une
8 certaine période à l'hôpital, si j'ai bien compris. J'ai cru comprendre que
9 c'était entre 1968 et 1978; est-ce que c'est exact ?
10 R. Oui, j'y ai travaillé pendant dix ans.
11 Q. Par la suite, vous avez commencé à travailler dans la municipalité de
12 Vukovar en tant qu'inspecteur sanitaire. J'imagine que c'était pour
13 l'ensemble de Vukovar, pour tous les villages qui appartenaient à la
14 municipalité de Vukovar. Vous étiez inspecteur auprès de la mairie de
15 Vukovar ?
16 R. Oui, c'est exact.
17 Q. Je vous remercie. J'attendais que l'interprétation soit terminée. C'est
18 la raison pour laquelle je ménage une pause.
19 R. Oui, oui, c'est très bien.
20 Q. Nous avons déjà entendu dire de plusieurs témoins que la région de
21 Vukovar était une région multiethnique et que tous les peuples vivaient
22 dans une harmonie avant la guerre; est-ce que c'est exact ?
23 R. Oui.
24 Q. Vous avez parlé, dans votre déclaration, des événements du
25 2 mai 1991 et des événements qui se sont déroulés dans Borovo Selo.
26 Certains témoins ont également parlé de ces événements. Ce que je
27 souhaiterais vous demander, c'est de savoir si vous vous êtes rendu à
28 Borovo Selo accompagné d'une délégation de la municipalité de Vukovar et
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1 des membres du gouvernement fédéral ?
2 R. Oui. J'ai été le chef de l'équipe.
3 Q. Très bien. Merci. Pourriez-vous me dire maintenant si à la suite des
4 événements de Borovo Selo, si on a commencé à ériger des barricades dans
5 les villages avoisinants, les villages qui étaient majoritairement soit
6 peuplés par les Croates ou peuplés par une population serbe ? Est-ce que
7 cela s'est passé ainsi ?
8 R. Ce que je peux vous dire, c'est que dans le village de Negoslavci, par
9 exemple, Trpinja, je sais que dans ces villages-là, il y avait des
10 barricades qui avaient été érigées effectivement, car j'y passais en
11 voiture.
12 Q. A Borovo Naselje, en direction de Trpinja et Borovo Selo, est-ce que
13 vous avez également vu des barricades érigées ?
14 R. Je crois que oui. Je n'ai pas été présent, mais j'ai entendu dire que
15 tout près du centre technique, il y avait une barricade d'érigée.
16 Q. Je vous remercie.
17 R. C'était en contrebas, tout près de Borovo Selo.
18 Q. Etant donné que votre activité principale était le service sanitaire à
19 l'époque, vous aviez également des contacts avec l'hôpital, n'est-ce pas ?
20 R. Oui, il y avait un homme à l'hôpital qui était mon contact.
21 Q. Est-ce que vous savez si, après les événements du mois de mai, on a
22 instauré des mesures particulières à l'hôpital de Vukovar, c'est-à-dire,
23 est-ce que les gens avaient reçu pour tâche de se préparer pour un début de
24 conflit éventuel, recevoir des blessés ?
25 R. J'en entends parler pour la première fois. Je suis désolé.
26 Q. Merci. Vous travailliez dans la municipalité de Vukovar aux mois de
27 mai, juin et juillet. Vous étiez dans le bureau municipal de Vukovar.
28 J'aimerais savoir quelle était l'atmosphère à l'assemblée municipale de
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1 Vukovar.
2 R. Vous savez, je n'étais pas délégué à l'assemblée municipale. Je ne peux
3 pas répondre à votre question. Je peux toutefois vous dire les contacts
4 entre nous, collègues; je peux vous décrire les contacts que nous avions.
5 Q. Oui. Alors, dites, je vous prie.
6 R. Le peuple serbe s'est senti menacé. Je vais vous dire depuis quand.
7 Q. Oui, allez-y. Dites-le-nous.
8 R. A partir du mois de juin, un monsieur de Sibenik s'est présenté à
9 Vukovar. Je crois que vous savez à qui je fais référence. Je n'arrive pas à
10 trouver son nom de famille. C'était le Dr, le Dr --
11 Q. Est-ce que c'est un médecin qui travaillait à l'hôpital ?
12 R. Oui, c'était le psychiatre qui travaillait à l'hôpital de Sibenik.
13 Q. Est-ce que c'était un homme de nationalité croate ou serbe ?
14 R. Serbe.
15 Q. Est-ce que c'est Raskovic ?
16 R. Oui, voilà, le Dr Raskovic. Je viens de me rappeler de son nom,
17 effectivement. Le Dr Raskovic, au mois de juin, était venu à Vukovar. Un
18 très grand nombre de Serbes étaient particulièrement heureux de le voir. Je
19 crois qu'il a fait erreur de venir parce que c'est lui qui a monté le
20 peuple serbe contre leurs voisins. C'est pour cela que les événements de
21 Vukovar se sont déroulés tels qu'ils se sont déroulés.
22 Vous savez, j'avais un chalet qui se trouvait sur une montagne, je
23 veux dire sur un mont. C'était depuis mon chalet que je pouvais entendre
24 son discours. Le porte-voix était tellement fort que je l'entendais même si
25 j'étais dans mon jardin. Il y avait un rassemblement quand je suis rentré
26 dans la ville. C'était un rassemblement de Serbes. J'y étais pratiquement
27 présent, puisque, alors que j'étais dans mon chalet, comme je vous l'ai
28 dit, à flanc de montagne, je l'entendais. J'ai tout entendu.
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1 Q. Vous nous avez dit que les Serbes ont commencé à se sentir menacés à
2 partir du mois de juillet; pourquoi, concrètement ?
3 R. Je n'ai pas dit qu'ils étaient menacés à partir du mois de juillet.
4 Q. Non. Ils se sentaient menacés, vous avez dit; c'est cela ?
5 R. Oui, oui. C'est une différence énorme. Je présume, mais je n'affirme
6 pas, je présume encore une fois, que lorsque M. Raskovic est parti, ils
7 sont restés seuls. Ils se sont sentis seuls, coincés. Au lieu de continuer
8 la vie comme on l'avait avant - vous savez, je parle de collègues - si
9 quelqu'un était venu à Vukovar et avait parlé contre les Serbes, je serais
10 fâché. Je n'aurais pas permis cela. Pourquoi ? Parce que nous avons été à
11 l'école ensemble, nous avons été à la pêche, nous avons pêché les mêmes
12 poissons, nous sommes allés faire des pique-niques ensemble. Je n'aurais
13 pas accepté que l'on dise quoi que ce soit contre les Serbes. Ce n'était
14 pas correct de leur part d'accepter que l'on parle contre nous.
15 Q. Très bien. Merci. Dites-moi, est-ce qu'à partir du mois de juin, dans
16 la municipalité de Vukovar, est-ce qu'on a vu des activités inhabituelles ?
17 Est-ce que c'était quelque chose que vous aviez tout d'un coup entendu du
18 domaine du secrétaire de la Défense nationale, par exemple ?
19 R. Le secrétaire de la Défense nationale a effectué des travaux. Il
20 travaillait selon son travail, selon sa mission normale. Chacun fait son
21 travail. Je ne vais pas m'immiscer dans le travail des autres. Si quelqu'un
22 ne fait pas bien son travail, c'est autre chose.
23 Posez-moi une question directe, je vous prie.
24 Q. Certainement. Est-ce que c'est exact de dire que le
25 15 juin 1991, vous avez pris part à des activités d'organisation qui
26 s'appelait la défense de Vukovar qui, plus tard, est devenue l'armée
27 croate ?
28 R. Oui, de façon volontaire. Parce que j'ai vu -- je vais vous dire
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1 pourquoi. Est-ce que vous allez m'écouter ?
2 Q. Oui, certainement. Allez-y, je vous prie.
3 R. J'ai vu qu'il y avait des problèmes pour ce qui est de l'hygiène. Des
4 fois, on faisait la cuisine dans les cours d'école, ailleurs, et cetera.
5 Les conditions d'hygiène n'étaient pas respectées. Je me suis porté
6 volontaire, et j'ai voulu être inspecteur sanitaire au sein de l'armée.
7 C'est ce que j'ai fait. On m'a dit que je pouvais y aller. J'organisais les
8 centres. Je me suis assuré que les lieux où on cuisinait la nourriture
9 soient propres, et cetera, sanitaires, salubres.
10 Q. Pourriez-vous nous expliquer quel était ce système ? Quelle était la
11 façon dont on s'approvisionnait de nourriture ? Où se trouvaient les
12 centres de distribution et à qui l'on distribuait ces denrées alimentaires
13 ?
14 R. Le centre principal était le club des employés. C'est là qu'il y avait
15 une énorme cuisine. Je supervisais le travail de ces employés. Je peux vous
16 dire qu'ils faisaient un excellent travail.
17 Les propriétaires étaient des Serbes. Je n'ai jamais fait de commentaires
18 contre eux, car ils ont très, très bien travaillé. Ils ont très bien fait
19 leur travail. Si ceux qui ont travaillé m'entendent maintenant, ils vont
20 sûrement être très fâchés contre moi, puisque tout le monde faisait un
21 excellent travail.
22 Q. Je suis tout à fait certain qu'ils ne seront pas fâchés s'ils vous
23 entendent maintenant. Dans tous les cas, de quelle façon est-ce qu'on
24 distribuait la nourriture à partir de cette salle des employés ? De quelle
25 façon est-ce que l'on faisait cela ?
26 R. Jusqu'à ce qu'une partie de ce centre d'employés ne soit détruit. C'est
27 là qu'on préparait la nourriture pour l'armée. Il s'agissait d'énormes
28 bouteilles de thermos. C'était la seule façon de garder la nourriture
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1 salubre. C'était la seule façon de faire. A chaque fois que l'on voulait
2 manger, prendre de la nourriture, il fallait ouvrir cette énorme bouteille
3 thermos. C'est ainsi que j'ai supervisé. Je me suis assuré que les gens se
4 servent correctement de ces bouteilles de thermos. On distribuait ces
5 bouteilles à des endroits particuliers. C'était l'armée qui procédait à la
6 distribution, à bord de véhicules.
7 Q. Qui a contrôlé la nourriture et la qualité de cette nourriture ?
8 R. Chaque cuisinier doit d'abord goûter à la nourriture qu'il fait. Moi-
9 même, il m'arrivait de goûter, d'essayer pour voir si c'était bon. C'est
10 tout à fait normal. La nourriture était également préparée à l'hôtel
11 Vukovar pour la police, également pour un certain nombre d'employés.
12 Q. Est-ce qu'il s'agit de l'hôtel Danube ?
13 R. Oui, c'est cela. C'est l'hôtel Danube.
14 Q. Je vous remercie. Vous nous avez dit que vous vous êtes porté
15 volontaire au mois de juin 1991. Est-ce que vous pourriez nous dire à qui
16 vous vous êtes adressé ? Qui vous a confié cette tâche pour laquelle vous
17 vous étiez porté volontaire ?
18 R. Je vous ai dit, je suis arrivé à un endroit qui s'appelait le
19 département de la Défense. Malheureusement, c'est un homme qui est
20 maintenant décédé avec qui je me suis entretenu. Je lui ai dit : Bonjour,
21 je me porte volontaire pour travailler dans l'armée croate, pour effectuer
22 le contrôle de la nourriture, de la salubrité de l'eau, et cetera. Je ne
23 sais pas si vos inspecteurs ont fait la même chose.
24 Q. Je ne sais pas. Je ne le sais pas vraiment. Dites-moi, est-ce qu'à la
25 tête du secrétariat pour la Défense nationale, Tomislav Mercep se trouvait
26 déjà à la tête de ce secrétariat ?
27 R. Oui.
28 Q. A l'époque, on vous a confié ces fonctions en juin, est-ce qu'il était
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1 chargé des préparatifs pour la défense de Vukovar ? Dans la négative,
2 savez-vous qui c'était ?
3 R. Tous ceux qui travaillaient au secrétariat travaillaient à ce projet.
4 Q. A l'époque, en vertu d'une décision du gouvernement croate, l'assemblée
5 municipale de Vukovar avait été renvoyée. M. Marin Vidic avait été nommé
6 pour quelle fonction ?
7 R. L'assemblée n'était pas en fonction lorsque M. Dokmanovic a disparu,
8 lorsqu'il a quitté la région. Je ne sais pas où il est allé. Je crois qu'il
9 a traversé le Danube pour aller de l'autre côté ou qu'il vivait à Bobota;
10 je ne sais pas. En tout état de cause, oui, ce que j'ai dit précédemment
11 est vrai.
12 Q. Ce que je souhaiterais savoir, c'est si en juin, la cellule de Crise de
13 Vukovar était déjà formée à ce moment-là ?
14 R. Je ne sais pas si c'était en juillet ou plus tard. Je ne suis vraiment
15 pas capable de vous le dire.
16 Q. Je vous remercie. Bien entendu, nous n'allons pas insister sur les
17 dates si vous ne pouvez pas vous les rappeler.
18 Savez-vous -- enfin, comment est-ce que vous vous sentez maintenant ?
19 Est-ce que vous avez des problèmes ? Dites-le-nous si vous en avez.
20 Savez-vous qui composait la cellule de Crise de la municipalité de Vukovar
21 ?
22 R. Je ne sais pas. Je ne voudrais pas faire d'hypothèse.
23 Q. Vous n'avez pas participé à des réunions de la cellule de Crise ?
24 R. Non. Je faisais simplement mon travail.
25 Q. Est-ce que vous aviez des contacts fréquents avec M. Marin Vidic
26 pendant le mois de juillet et le mois d'août ?
27 R. Oui.
28 Q. Je suppose que ces contacts avaient à voir avec votre travail que vous
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1 aviez commencé à faire en juin. Ce que je voudrais savoir, c'est si vous
2 savez quelles étaient les fonctions de M. Vidic pendant ces deux mois, le
3 mois de juillet et le mois d'août ?
4 R. Il était chargé par le gouvernement croate de la région de Vukovar. Il
5 était le commissaire du gouvernement de la Croatie pour le secteur de
6 Vukovar.
7 Q. Est-ce qu'il remplissait seulement les fonctions qu'il aurait remplies
8 en tant que président de la municipalité de façon régulière ou est-ce qu'il
9 faisait quelque chose qui avait à voir avec les activités de la cellule de
10 Crise pour faire les préparatifs pour la défense de Vukovar ?
11 R. Il faisait partie de la cellule de Crise. Nous sommes allés à Borovo
12 Naselje ensemble. Nous avons vécu des explosions de roquettes, pluies
13 d'obus, de grenades. C'était la zone autour de Vukovar. Heureusement, nous
14 avons survécu. Nous avons été emmenés par un chauffeur. Il avait dû
15 repartir pour déjeuner, et lui aussi, il avait dû prendre du carburant.
16 Malheureusement, il a été touché par un obus et il a été tué.
17 Q. Je vous remercie. Vous avez mentionné M. Mercep ?
18 R. Non, c'est vous qui avez mentionné M. Mercep.
19 Q. Oui, c'est exact. C'est moi qui l'ai mentionné. Pour autant que je
20 sache, ce n'était pas un soldat de métier, un militaire ?
21 R. Non, c'était un ingénieur qui s'occupait de construction civile, génie
22 civil. C'est ce qu'il est encore aujourd'hui.
23 Q. Est-ce que vous êtes au courant du fait qu'il s'occupait de la défense
24 de Vukovar jusqu'à ce que M. Dedakovic soit venu, qui lui, était un soldat
25 de métier, mais c'était à un moment donné au mois d'août 1991 ?
26 R. Oui, c'est exact.
27 Q. Je vous remercie beaucoup. Je suppose qu'au fur et à mesure que vous
28 remplissiez vos fonctions depuis le mois d'août, vous avez eu des contacts
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1 non seulement avec M. Marin Vidic Bili, mais aussi avec le commandement de
2 la défense de Vukovar, puisque vous étiez chargé de veiller à la
3 distribution des vivres à l'armée ou aux soldats; est-ce exact ?
4 R. C'est exact.
5 Q. Avec quelle fréquence êtes-vous allé à l'état-major de la défense de
6 Vukovar et où se trouvait-il ?
7 R. C'était en face du bâtiment de la municipalité, dans une rue latérale.
8 Est-ce que vous savez où c'était ?
9 Q. Oui.
10 R. Vous m'avez demandé si j'étais allé au commandement. Non, j'avais des
11 instructions de mon commandant de faire telle ou telle chose, et ainsi de
12 suite. Ensuite, M. Dedakovic m'a appelé et m'a dit de venir le voir. Il a
13 parlé dans la cour et il m'a dit : "Inspecteur, il faut que vous fassiez
14 ces choses-là, telle et telle chose." Je lui ai dit : "Très bien, mais je
15 les fais déjà depuis un certain temps, ces choses." Voilà comment ces
16 contacts ont pris fin.
17 Q. Je comprends qu'en fait, vous remplissiez simplement vos fonctions
18 professionnelles, donc il n'était pas vraiment nécessaire d'en discuter en
19 détail, n'est-ce pas ?
20 R. Oui, c'est exact.
21 Q. Avez-vous eu les mêmes relations après le départ de Vukovar de M.
22 Dedakovic et après que lui ait succédé M. Borkovic ?
23 R. Oui, je connaissais Branko. Mais ceci était déjà assez avancé pour le
24 conflit, et je ne sais pas, à partir du moment où je me trouvais dans
25 l'immeuble municipal, il y avait ces obus qui tombaient et je ne pouvais
26 pas quitter, donc j'y ai passé la nuit. Je crois que Branko était là aussi.
27 Nous avons parlé, mais brièvement.
28 Q. Puisque vous vous occupiez de surveiller la qualité des aliments, peut-
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1 être pourriez-vous nous parler aussi des quantités de vivres et combien il
2 y avait de soldats qui recevaient ces vivres en août 1991 ?
3 R. Je ne sais pas combien de soldats il y avait, mais j'ai ordonné que la
4 nourriture qui n'était pas consommée par les soldats devrait être donnée
5 aux habitants.
6 Q. Je suppose que les vivres étaient distribués dans les abris à Vukovar ?
7 R. J'ai ordonné de ne pas gaspiller du tout de nourriture. On était en
8 temps de guerre. Si les soldats ne prenaient pas tous les vivres, il
9 fallait les donner à quiconque pourrait avoir faim.
10 Q. Je vous remercie. Vous avez dit que vous étiez allé à l'hôpital ex
11 officio et qu'il y avait une personne à contacter là. Lorsque vous êtes
12 allé à l'hôpital, est-ce que vous avez vu des soldats de la JNA qui étaient
13 blessés et emprisonnés, qui étaient gardés par des soldats ?
14 R. Non, je ne les ai pas vus. J'ai vu des membres du ZNG qui avaient été
15 tués en l'occurrence. Mais c'est la première fois que j'entends parler de
16 ce que vous venez de dire.
17 Q. Donc, vous ne saviez pas qu'il y avait des soldats de la JNA dans
18 l'hôpital ?
19 R. Oui, je sais qu'ils avaient été fait prisonniers et qu'il y avait des
20 patients dans l'hôpital. Mais le jour où nous avons été arrêtés et emmenés,
21 ce jour-là, ils ont été envoyés quelque part. Je ne sais pas où exactement.
22 Je crois qu'ils ont été renvoyés à Sremska Mitrovica. Non, c'était un
23 lieutenant qui a été renvoyé à Sremska Mitrovica. Je sais qu'on les a
24 rendus, mais en fait je n'ai jamais appris où ils étaient allés finalement.
25 Q. Je vous remercie beaucoup. Juste une correction au compte rendu à la
26 page 66, ligne 22. Ma question était : vous ne saviez pas qu'il y avait des
27 soldats de la JNA à l'hôpital, et le texte anglais parlait d'hôpitaux de la
28 JNA. C'est une erreur de transcription.
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1 R. Est-ce que ceci me concerne ? Non ?
2 Q. Non, non, cela ne vous concerne pas. C'est ce que j'avais dit qui
3 n'avait pas été correctement interprété.
4 Dites-moi, où vous trouviez-vous lorsque vous n'étiez pas en train de faire
5 des tournées sur le terrain ?
6 R. Chez moi. Je suis allé au travail aussi longtemps que j'ai pu le
7 faire. En juillet, c'est à ce moment-là que je remplissais ces tâches. Mais
8 après cela, lorsqu'il n'a plus été possible d'aller nulle part, j'ai reçu
9 l'ordre de rester à domicile et de me présenter si nécessaire.
10 Q. Je vous remercie. Votre maison se trouvait dans le voisinage immédiat
11 de l'hôpital ?
12 R. Ce n'était pas ma maison. C'était un immeuble à appartements. Il y
13 avait trois immeubles. Ils se ressemblaient tous. Ils avaient simplement
14 des couleurs différentes.
15 Q. Oui, vous nous l'avez dit. Ce que je voulais savoir c'est à quelle
16 distance de l'hôpital se trouvait votre appartement, ou à quelle distance
17 du bâtiment municipal ?
18 R. A vol d'oiseau ou par la voie normale ?
19 Q. L'itinéraire que vous suiviez.
20 R. Je prenais un raccourci, mais parfois j'allais également par la voie la
21 plus longue. A vol d'oiseau, cela fait à peu près 400 mètres. C'est
22 approximatif. Je ne l'ai jamais mesuré, donc je ne peux pas vous donner une
23 estimation précise.
24 Q. Je vous remercie. Dites-moi, lorsque vous remplissiez votre mission, il
25 y avait des unités du ZNG, n'est-ce pas, et vous étiez membre de cela parce
26 que vous faisiez ce travail ?
27 R. Oui. Ils étaient en cours d'organisation.
28 Q. Indépendamment des tâches que vous effectuiez du point de vue du
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1 contrôle de la qualité --
2 R. Oui, c'était ma profession.
3 Q. -- est-ce que vous avez fait d'autres travaux qui avaient trait à la
4 protection civile ?
5 R. Oui, pour la Croix-Rouge. J'étais le président du comité de la Croix-
6 Rouge municipal à Vukovar. Je l'avais été depuis dix ans environ. J'étais
7 membre d'autres organisations humanitaires aussi. J'ai reçu de nombreuses
8 distinctions pour ce travail, mais lorsque je suis revenu à Vukovar, je
9 n'en ai pas trouvé une seule. C'est quelqu'un d'autre qui est en train de
10 les présenter.
11 Q. Je suppose que vous étiez à la tête de Karitas [phon] et de la Croix-
12 Rouge. Qui vous avait nommé à ces fonctions et quand est-ce que vous avez
13 arrêté de remplir ces fonctions ?
14 R. J'étais élu par l'assemblée de la Croix-Rouge, qui m'a nommé à nouveau.
15 Pourriez-vous répéter la deuxième partie de votre question aussi ?
16 Q. Pendant l'été et l'automne de l'année 1991, est-ce que vous étiez le
17 président de la Croix-Rouge à Vukovar, et ce jusqu'à quand ?
18 R. Jusqu'à ce que j'ai pu le faire. Lorsque je suis parti du camp, nous
19 avons fondé la Croix-Rouge en exile à Zagreb, et une fois de plus j'ai été
20 élu président.
21 Q. Merci. Est-ce que vous pourriez nous dire qui, hormis vous, assurait la
22 présidence de la filiale de la Croix-Rouge à Vukovar pendant les mois
23 suivants, août, septembre, octobre, novembre 1991 ?
24 R. La secrétaire, son mari Slobodan Maricic, et puis avec l'évolution de
25 la guerre, il y a eu désintégration de la société. La secrétaire a quitté
26 la Croix-Rouge. Elle est partie ailleurs, ce qui fait que j'avais nommé une
27 femme qui était secrétaire de la Croix-Rouge. Mais comme l'assemblée ne
28 pouvait plus se réunir, en tant que président, j'avais tout à fait le droit
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1 de la nommer. Elle a fait du bon travail. Elle a fait certes du bon travail
2 pour tous les habitants de Vukovar.
3 Q. Merci. Est-ce que vous vous souvenez du nom de cette femme ?
4 R. Zeljka Zgonjanin.
5 Q. Merci. Dites-moi, vous avez dit que vous vous étiez porté volontaire et
6 qu'à cette époque-là, les défenseurs de la ville pouvaient se rallier à la
7 défense de façon volontaire. Quand est-ce qu'il y a eu cette mobilisation
8 générale à Vukovar ?
9 R. J'étais chez moi. Il y a des types qui sont arrivés et qui m'ont
10 demandé quel était mon âge. Je leur ai demandé pourquoi, et ils m'ont dit :
11 "Parce que nous pouvons vous mobiliser." C'était quelques jours avant la
12 chute de Vukovar. Parce qu'ils faisaient du porte à porte pour essayer de
13 rassembler des gens.
14 Q. Est-ce qu'ils faisaient partie de la cellule de Crise municipale ou de
15 l'état-major de la défense ?
16 R. Lorsque ces gens sont arrivés chez moi, c'était la première fois que je
17 les voyais.
18 Q. Donc, vous ne savez pas.
19 R. Non, je ne le sais pas.
20 Q. Merci. Dites-moi, à Vukovar, est-ce qu'il y avait des volontaires qui
21 venaient d'autres régions de la Croatie ? Est-ce que vous le savez ?
22 R. Oui, il y en avait.
23 Q. Vous souvenez-vous, dans la mesure où vous le savez, d'où ils
24 venaient ?
25 R. De Zagreb, de Sisak, de Medjimurje. Il y avait de nombreux volontaires
26 à Vukovar. Ce n'était pas seulement des gens de Vukovar qui ont assuré la
27 défense de Vukovar.
28 Q. Merci. Dites-moi, je vous prie, outre les volontaires qui sont venus
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1 défendre Vukovar, il y a certaines unités du MUP qui sont venues d'autres
2 villes de la Croatie. Est-ce que vous savez cela ?
3 R. Voyez-vous, il n'y a pas une seule formation qui est arrivé en disant
4 qu'elle venait de tel ou tel endroit. Ils étaient toujours appelés les
5 défenseurs de Vukovar.
6 Q. Mais vous savez qu'ils n'étaient pas natifs de Vukovar parce que vous
7 ne les connaissiez pas ?
8 R. De toute façon, je ne connaissais pas tout le monde à Vukovar. Bien que
9 j'aie beaucoup bougé à Vukovar, je ne connaissais pas tout le monde. Il y
10 avait 20 000 travailleurs à Borovo. Qui pouvait tous les connaître ?
11 Q. Merci. Savez-vous si certains partis, tel que le Parti croate des
12 droits, ont envoyé des membres de leurs unités des forces de défense croate
13 pour défendre Vukovar ?
14 R. Oui, il y en a eu quelques unités spéciales. Mais ils ont disparu assez
15 facilement. Je ne sais pas s'ils ont été tués d'ailleurs, mais ils étaient
16 très peu de toute façon.
17 Q. Merci beaucoup. En réponse à une question posée par mon estimé
18 confrère, vous avez dit que vous aviez exécuté vos tâches sur le terrain et
19 que vous aviez passé le reste du temps chez vous, et ce jusqu'au 17
20 novembre 1991. Mais voilà ce que j'aimerais savoir : quand est-ce que vous
21 avez quitté votre appartement le 17 novembre pour vous rendre à l'hôpital ?
22 A ce moment-là, est-ce que vous saviez déjà que l'hôpital de Vukovar était
23 sur le point d'être évacué grâce à des bateaux qui se trouvaient sur le
24 Danube et que l'évacuation allait se diriger vers la Hongrie ?
25 R. J'en ai entendu parler lorsque j'étais à l'hôpital. J'ai quitté mon
26 appartement. Il y avait deux soldats qui se dirigeaient vers l'endroit, et
27 je leur ai dit : "Les gars, où est-ce que vous allez ?" Nous avons parlé un
28 peu, nous avons conversé, puis nous sommes allés chacun de notre côté.
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1 C'étaient des enfants, vous savez. Je pense que vous savez pourquoi je vous
2 dis cela.
3 Q. Est-ce que vous parlez de conscrits qui ne pouvaient pas avoir plus que
4 19 ans ?
5 R. Oui.
6 Q. Cela ne se trouve pas au compte rendu d'audience. La loi stipulait que
7 vous deviez faire votre service militaire lorsque vous aviez 18 ans ?
8 R. Oui.
9 Q. Je vous remercie. Qu'avez-vous entendu à l'hôpital et qui vous a parlé
10 de cette évacuation qui allait avoir lieu près du Danube ?
11 R. Je n'ai entendu que des bruits qui couraient. Quelqu'un a dit : Il va y
12 avoir une évacuation. Mais cela ne s'est pas passé. Quelqu'un l'a dit, mais
13 nous étions plusieurs dans une pièce et je ne sais pas qui l'a dit.
14 Q. Mais ce n'est pas la raison pour laquelle vous êtes allé à l'hôpital
15 alors ?
16 R. Non, ce n'en était pas la raison. Je pensais que c'était une
17 institution humanitaire qui ne devrait pas être touchée, bien qu'elle ait
18 déjà été touchée, puisque vous savez certainement que 200 kilos d'obus ont
19 atterri entre les jambes de quelqu'un.
20 R. Oui, nous en avons entendu parler.
21 R. C'est vrai, et il est toujours vivant. Je vous parle de ce projectile.
22 Q. On nous a dit qu'il était d'appartenance ethnique serbe.
23 R. Je ne sais pas ce qu'il était. Je n'en ai aucune idée.
24 Q. Merci. A votre arrivée à l'hôpital, est-ce que vous avez dû vous
25 présenter auprès de la cellule de Crise de l'hôpital pour indiquer votre
26 arrivée ?
27 R. Oui, je me suis présenté. Le Dr Vesna Bosanac était la directrice de
28 l'hôpital et il fallait qu'elle sache qui arrivait à l'hôpital, elle devait
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1 le voir. Donc, je me suis présenté auprès d'elle.
2 Q. Vous nous avez dit que, dans un premier temps, votre femme n'a pas pu
3 entrer dans l'hôpital. Est-ce que je vous ai bien compris ? Les civils qui
4 s'étaient rassemblés là pouvaient entrer dans l'enceinte de l'hôpital, mais
5 pas dans l'hôpital ?
6 R. Oui. Toutefois, je suis intervenu. Je lui ai dit d'attendre à
7 l'extérieur, ce qu'elle a fait.
8 Q. Merci. Est-ce que vous pourriez me dire la chose suivante : lorsque
9 vous êtes arrivé à l'hôpital et que vous êtes arrivé dans le service de
10 radiologie --
11 R. Oui.
12 Q. -- est-ce que M. Guncevic, ainsi que l'autre homme dont vous avez
13 parlé, étaient déjà là ?
14 R. Guncevic est arrivé après moi.
15 Q. Est-ce que vous connaissiez le Dr Ivankovic à l'époque, quand il
16 travaillait à l'hôpital ?
17 R. Oui, et je connaissais son fils également.
18 Q. Vous le connaissiez, ainsi que son fils, et vous le connaissiez avant
19 que le conflit n'éclate ?
20 R. Oui. Parce que je travaillais à l'hôpital. J'avais rencontré son fils à
21 Ovcara.
22 Q. Merci. Son fils s'appelle Goran.
23 R. Oui.
24 Q. Dites-moi, compte tenu du fait que vous étiez un membre de la Croix-
25 Rouge --
26 R. J'étais volontaire, et c'était une organisation municipale. Pour ce qui
27 est de l'association des municipalités de la Slavonie et de la Baranja,
28 j'en ai été président également pendant un moment.
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1 Q. Merci. Est-ce que vous savez qu'en octobre 1991, il y a eu un convoi de
2 l'hôpital de Vukovar et certains blessés ont été envoyés dans la direction
3 de Vinkovac et ensuite à Zagreb ? Cela s'est passé le 17 octobre 1991. Est-
4 ce que vous en avez entendu parler ? R. Je pense qu'ils étaient censés
5 partir, mais qu'ils n'ont pas pu passer. Toutefois, je n'en suis pas sûr.
6 Je ne pense pas qu'ils aient pu véritablement passer.
7 Q. Je ne souhaiterais surtout pas jeter la confusion dans votre esprit,
8 mais d'après ce que ne avons entendu d'autres témoins, il y a eu deux
9 convois; l'un le 13 octobre, qui n'est pas passé à cause des barrages, donc
10 il n'a pas pu aller de la caserne à l'hôpital --
11 R. Oui, cela y est. Maintenant, vous m'avez rafraîchi la mémoire.
12 Q. Puis le deuxième convoi est parti le 17 octobre avec un certain nombre
13 de blessés et il s'est rendu à Zagreb, ce convoi.
14 R. Oui, oui, je m'en souviens maintenant.
15 Q. Est-ce que vous savez comment est-ce que les fournitures médicales
16 étaient distribuées à l'hôpital ou vous ne vous occupiez pas de cela ?
17 R. Non, ce sont d'autres services de l'hôpital qui s'en occupait, ce
18 n'était pas moi. Mais je souhaiterais toutefois vous dire que j'obtenais du
19 chlore de la pharmacie de l'hôpital.
20 Q. J'étais juste sur le point de vous poser cette question. J'allais vous
21 demander où est-ce que vous vous obteniez les produits et substances
22 chimiques indispensables à votre activité ?
23 R. Je les obtenais dans cette pharmacie et de la part d'autres pharmacies.
24 Q. Est-ce que vous vous souvenez s'il y a eu des médicaments et des
25 produits chimiques qui ont été acheminés vers Vukovar par hélicoptères qui
26 atterrissaient près du stade Sloga, qui était d'ailleurs près de votre
27 appartement ?
28 R. J'en ai entendu parler, mais je ne l'ai jamais vu moi-même.
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1 Q. Merci. Vous aviez certaines responsabilités à Vukovar, mais pas à
2 Borovo Naselje ?
3 R. J'ai été à Borovo Naselje avec Vidic. Vidic et moi, nous y sommes
4 rendus pour régler quelques problèmes, et ensuite je ne suis pas reparti à
5 Borovo Naselje jusqu'à la fin de la guerre.
6 Q. Mais ce n'était pas un secteur qui vous était affecté, n'est-ce pas ?
7 R. Non, d'autres étaient affectés à ce secteur. Il était très difficile
8 d'y aller. Vous le savez certainement. Je pense que cela s'est passé au
9 début du mois de novembre et il y avait des tirs partout. Nous avons eu
10 beaucoup de chance, car notre véhicule n'a pas été touché par un seul obus.
11 Q. Est-ce que vous pourriez-me dire si une partie de la nourriture
12 préparée dans ces cuisines était livrée au château du compte d'Eltz ? Est-
13 ce qu'il y avait des unités qui recevaient ces vivres ?
14 R. Je n'allais pas là-bas. J'avais un certain itinéraire que je couvrais
15 tant que j'ai pu. Je ne me suis pas rendu au château, qui a fait l'objet de
16 nombreux pilonnages.
17 Q. Merci.
18 M. VASIC : [interprétation] Monsieur le Président, Madame Monsieur les
19 Juges, je souhaiterais accorder à mon éminent confrère M. Moore le quart
20 d'heure qu'il avait demandé pour aborder certaines questions. Ensuite, je
21 reprendrai mon contre-interrogatoire demain. Si vous pensez, bien entendu,
22 que cela est acceptable.
23 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Vous avez besoin d'un quart d'heure,
24 Monsieur Moore ?
25 M. MOORE : [interprétation] Non, de cinq minutes seulement.
26 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Cinq minutes, je vois. Alors, Maître
27 Vasic, qu'en pensez-vous ? Poursuivez pendant cinq minutes encore, et
28 ensuite vous pourrez reprendre votre interrogatoire demain.
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1 M. VASIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. Je ne voulais pas
2 que mon estimé confrère pense que je ne souhaitais pas lui attribuer le
3 temps nécessaire qu'il avait demandé pour traiter de ce dont il a à
4 traiter. Mais merci.
5 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci, Maître Vasic.
6 M. VASIC : [interprétation]
7 Q. Avant le 17 novembre, lorsque vous vous êtes rendu à l'hôpital, est-ce
8 que vous avez vu des membres du ZNG en face de l'hôpital qui gardaient la
9 cour et l'hôpital ?
10 R. Non, mais j'en ai vus qui étaient morts; je l'ai déjà dit.
11 Q. Vous avez dit qu'il y avait beaucoup de morts devant l'hôpital ?
12 R. A l'intérieur du périmètre de l'hôpital.
13 Q. La raison c'est que pendant un certain temps, il était possible
14 d'enterrer les morts ?
15 R. Oui, c'est vrai. Nous avons eu des problèmes de ce fait à Vukovar. Je
16 suis allé au cimetière où les gens de tout appartenance ethnique étaient
17 enterrés, et dès qu'ils voyaient qu'il y avait quelqu'un d'autre là, ils
18 commençaient à tirer. J'ai même vu une personne qui vivait dans une maison
19 à quatre étages et qui leur envoyait le signal pour qu'ils puissent
20 véritablement ouvrir le feu.
21 Q. Vous n'avez jamais vu une seule personne qui assurait la sécurité de
22 l'hôpital ? En d'autres mots, y avait-il des personnes qui assuraient la
23 sécurité de l'hôpital ? Est-ce que cela aurait été normal de penser ainsi ?
24 R. Oui. Mais vous savez, je n'allais pas à l'hôpital très souvent.
25 Effectivement, il y avait une équipe qui s'occupait de certaines tâches
26 précises, mais je m'étais rendu à l'hôpital à une seule reprise, et c'était
27 deux jours avant de devenir prisonnier. C'était un de mes collègues qui
28 était là et qui travaillait à l'hôpital. Il assurait la section sanitaire
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1 de l'hôpital.
2 Q. Quand vous alliez dans le bâtiment de la municipalité, là où la cellule
3 de Crise était située, pour avoir des entretiens avec M. Vidic, est-ce
4 qu'il vous a fallu passer devant le MUP ?
5 R. Je me suis entretenu avec M. Vidic une seule fois. Je n'allais pas de
6 façon régulière pour le rencontrer. Cette fois-là, nous sommes allés à
7 Borovo.
8 Q. Merci. Est-ce que vous pourriez me dire s'il n'y avait que vous et
9 votre épouse de votre famille qui vous êtes rendus à l'hôpital ou y avait-
10 il d'autres personnes de votre famille qui vous ont accompagnés ?
11 R. Non, il n'y avait que moi et ma femme.
12 Q. Très bien. Après votre arrivée à l'hôpital, est-ce que vous y avez vu
13 M. Dragutin Berghofer ?
14 R. Oui, et nous sommes partis ensemble de l'hôpital pour aller à Ovcara.
15 Q. Est-ce que vous avez vu à l'hôpital des membres de la ZNG ? Est-ce que
16 vous pouvez nous le dire ? Est-ce que vous avez vu des personnes que vous
17 auriez reconnues ?
18 R. Seules les personnes qui raccompagnaient les blessés et les malades
19 avaient accès à l'hôpital, y compris le personnel de l'hôpital. Jusqu'au 17
20 environ. Il y avait un portier à la porte d'entrée; je ne sais pas
21 exactement tous les détails. Le Dr Bosanac était le directeur de l'hôpital,
22 et c'était elle qui avait décidé ainsi. Je n'ai jamais essayé de m'immiscer
23 dans le travail d'autrui.
24 Q. Merci. Ce que je voudrais maintenant vous demander c'est de nous
25 raconter si, après le 17, vous avez vu des membres de la ZNG, des personnes
26 qui ne portaient plus d'uniformes, mais qui maintenant étaient vêtues de
27 blouses blanches ?
28 R. Vous savez, il y avait énormément de personnes à l'hôpital. Toutes ces
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1 personnes essayaient de se réfugier quelque part. Alors, la façon la plus
2 logique c'était soit l'hôpital ou les abris. Les abris étaient tellement
3 bondés, donc c'était beaucoup trop compliqué, mais l'hôpital était
4 également plein à craquer.
5 Q. Merci.
6 M. VASIC : [interprétation] Monsieur le Président, est-ce que vous croyez
7 que nous pourrions peut-être laisser la possibilité à mon éminent confrère
8 de poser ses questions ?
9 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci, Maître Vasic.
10 Monsieur, la Chambre va lever la séance sous peu et nous reprendrons nos
11 travaux demain à 14 heures 15. Nous avons une question de procédure à
12 aborder. Plutôt que de vous garder assis à votre place, je crois que vous
13 préféreriez sans doute pouvoir quitter cette salle d'audience. Nous vous
14 demanderons de bien vouloir revenir demain à 14 heures 15, et vous pourrez
15 ainsi poursuivre votre témoignage et le contre-interrogatoire. En
16 l'occurrence, le Greffier [comme interprété] va vous escorter à l'extérieur
17 du prétoire maintenant.
18 LE TÉMOIN : [aucune interprétation]
19 [Le témoin se retire]
20 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous écoute, Monsieur Moore.
21 M. MOORE : [interprétation] Monsieur le Président, trois questions assez
22 brèves. D'abord, concernant les faits admis. Toutes les questions ont fait
23 partie des faits admis, mais il y a une seule question sur laquelle nous ne
24 nous sommes pas tout à fait mis d'accord. Il s'agit d'un de mes confrères
25 de la Défense, je crois que c'est M. Borovic, qui a fait objection à
26 l'endroit où l'un des tombeaux est trouvé. Je crois que c'était le 18
27 octobre 1992 que l'on a trouvé cet endroit où la personne avait été
28 enterrée. J'espère que Me Borovic ne formulera pas d'objection quant à se
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1 mettre d'accord sur cette date. Sinon, je vais devoir faire appeler un
2 autre témoin pour venir témoigner là-dessus.
3 Deuxième question, à la suite du malheureux décès de
4 M. Milosevic, nous tenions des séances dans l'après-midi. Je sais que mes
5 éminents confrères et moi-même préférerions avoir des sessions matinales
6 plutôt que d'avoir des audiences dans l'après-midi. Je ne sais pas si vous
7 seriez d'accord avec cela. Je sais que vous avez peut-être d'autres
8 obligations.
9 Troisièmement, à la suite du procès Milosevic, puisque le procès
10 Milosevic sera interrompu, je crois que Me Borovic et moi-même, nous nous
11 étions mis d'accord que si la Chambre l'accepterait, nous serions d'accord,
12 bien sûr après avoir consulté nos collègues, d'avoir des sessions doubles
13 pendant une semaine ou deux pour rattraper le temps perdu. Pour ce qui nous
14 concerne, nous pourrions ainsi appeler certains témoins. Je ne sais pas si
15 cela vous conviendrait. Il s'agirait de séances doubles de 9 heures à 19
16 heures. A ce moment-là, il faudrait faire venir des témoins. Je voulais
17 savoir si les Juges de la Chambre étaient d'accord avec cette idée. Je sais
18 que Me Borovic n'avait pas élevé d'objection là-dessus.
19 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci, Maître Moore.
20 Maître Borovic, concernant ce seul fait admis sur lequel vous n'êtes
21 pas tout à fait d'accord, est-ce que vous pourriez nous donner quelques
22 précisions sur ce fait ?
23 M. BOROVIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. J'entends
24 parler pour la première fois de ce problème. Nous nous étions entretenus,
25 mon éminent confrère et moi-même -- c'est-à-dire que nous n'avions pas
26 parlé de ce problème. C'est-à-dire que je ne souhaite vraiment pas déclarer
27 quoi que ce soit ici. Je ne vois vraiment pas s'il y a quoi que ce soit de
28 neuf.
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1 Pour ce qui concerne le temps, mon client et moi, nous espérons que
2 ce procès sera terminé le plus rapidement que possible. Je me livre à vous,
3 Monsieur le Président. C'est entre vos mains. C'est à vous de décider si
4 vous souhaitez tenir des séances doubles.
5 Merci.
6 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Borovic, Monsieur Moore,
7 pourriez-vous vous assurer, je vous prie, que l'attention nécessaire a été
8 portée au fait admis dans l'espoir que cette question pourra être résolue
9 avant la fin de cette semaine ? Je vous remercie.
10 Je vous remercie également, Maître Borovic.
11 Monsieur Vasic, je vous écoute. Je vous ai aperçu du coin de l'oeil.
12 M. VASIC : [interprétation] Monsieur le Président, voilà.
13 Pour ce qui est du premier point, vous nous avez donné vos
14 instructions. Merci.
15 Concernant maintenant ce que mon éminent confrère a mentionné, les séances
16 matinales, les membres de l'équipe de la Défense appuient cette
17 proposition.
18 Pour ce qui est de la troisième proposition, j'ai voulu simplement
19 expliquer aux Juges de la Chambre que nous avons un problème concernant ce
20 troisième point. Mon client a effectivement un problème. De ce fait, moi-
21 même, je ressens ce même problème. Vous savez que mon client a subi deux
22 opérations au cœur avant qu'il ne se livre volontairement au Tribunal. Le
23 rythme qui dure depuis deux mois, cinq jours par semaine, il s'agit d'un
24 rythme assez rapide pour lui. Il s'agirait d'une difficulté de suivre ce
25 procès. Je crois que s'il fallait doubler le temps d'audience, il sera
26 encore plus difficile pour lui de suivre le procès. Je ne sais pas si les
27 Juges de la Chambre souhaiteraient entendre mon témoin vous expliquer sa
28 situation et sa condition physique, comment il se sent.
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1 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci. Je ne vais pas demander à M.
2 Lukic de prendre parole, pas parce que je suis impoli, mais je souhaiterais
3 simplement dire quelque chose néanmoins qui s'adresse à tous les conseils
4 de part et d'autre. Eu égard à la situation malheureuse et malencontreuse
5 devant laquelle nous nous trouvons, il est tout à fait possible que l'on
6 puisse changer d'horaire. Il est certainement possible d'ajuster et de voir
7 comment les autres procès se déroulent. Nous verrons, en consultant les
8 autres procès, comment les choses vont se dérouler. D'autres décisions
9 doivent également être prises. Il est tout à fait certain que le Président
10 va devoir revoir un certain nombre de facteurs pour ce qui est des futurs
11 procès placés au rôle et de la façon dont les Juges seront repartis. Pour
12 ce qui me concerne, il ne serait pas approprié de prendre des démarches et
13 de m'engager à prendre des décisions sans en avoir consulté mes collègues
14 et le Président, surtout.
15 Il est tout à fait certain que lorsque des sessions matinales seront
16 disponibles, nous pourrons bénéficier de ces possibilités. Nous sommes
17 également quelque peu éprouvés par les heures tardives. Il y a deux salles
18 d'audience qui seraient disponibles, mais il y a un certain nombre de
19 facteurs, y compris le temps déjà imparti et alloué qui ferait en sorte que
20 les membres des Juges de la Chambre ne pourraient pas changer d'horaire
21 aujourd'hui. Pour ce qui me concerne, j'ai certains engagements cette
22 semaine et la semaine prochaine. Le seul fait de savoir qu'une salle
23 d'audience est disponible dans la matinée ne veut pas nécessairement dire
24 qu'il nous serait possible de siéger dans la matinée.
25 La Chambre a déjà, par le passé, tenu des audiences doubles et des
26 audiences de ce type. Il est arrivé que deux Chambres ont déjà tenu séance
27 de 7 heures du matin jusqu'à 21 heures dans la soirée. Donc, celle de la
28 matinée et de l'après-midi. Ce n'est que dans des conditions
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1 exceptionnelles que nous accepterions de siéger de cette façon-là. Il
2 s'agit d'une pression particulière, une pression que pourrait ressentir les
3 conseils, les Juges, l'accusé et les témoins. Il ne faut surtout pas
4 oublier les témoins. Cette Chambre sait par expérience que si nous
5 siégeons à partir de 10 heures jusqu'à
6 16 heures 30 ou un peu plus tard, avec une pause déjeuner complète, et ce
7 pendant plus de deux ou trois jours, cela produit un stress qui est assez
8 soutenu. Puis, cela a des incidences, des conséquences pour le reste du
9 personnel. Je pense aux interprètes, aux gardes de la sécurité, et cetera.
10 Bien entendu, dès que nos différents engagements et les problèmes qu'ils
11 posent sont réglés et s'il y a des prétoires disponibles, nous envisagerons
12 de commencer un peu plus tard et de siéger pendant l'après-midi. Nous
13 pensons que c'est une possibilité qui existe, certes, mais qui n'est pas
14 souhaitable, et ce pour un certain nombre de raisons, notamment celle qui a
15 été avancée par
16 Me Vasic. Envisager de siéger jour après jour de 9 heures du matin à 19
17 heures me semble peu souhaitable.
18 Dès que toutes ces incertitudes auront été élucidées, j'espère que nous
19 pourrons avoir un nouveau calendrier pour cette Chambre de première
20 instance, et nous prendrons tout cela en considération.
21 Je vous remercie. Nous allons maintenant lever l'audience et nous retrouver
22 demain à 14 heures 15.
23 --- L'audience est levée à 19 heures 03 et reprendra le mardi 14 mars 2006,
24 à 14 heures 15.
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