Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 Le mercredi 29 novembre 2006

2 [Audience publique]

3 [Les accusés sont introduits dans le prétoire]

4 --- L'audience est ouverte à 14 heures 20.

5 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bonjour.

6 Monsieur Lukic, je vois que vous êtes pressé de parler.

7 M. LUKIC : [interprétation] Monsieur le Juge, j'ai un élément d'information

8 dont je tiens à vous faire part, un éclaircissement pour voir si

9 effectivement j'ai bien compris. Cela a à voir avec le calendrier.

10 Lorsque nous étions en train de mettre en place le calendrier, nous

11 pensions que M. Karan et M. Karanfilov prendraient un peu plus de temps, et

12 c'est la raison pour laquelle nous avions prévu l'arrivée de M. Susnjar

13 aujourd'hui. Nous pensions que nous ne commencerions pas sa déposition

14 avant vendredi. Or, d'après ce que j'ai cru comprendre de mes conversations

15 avec mes collègues, je crois que nous en aurons terminé avec M. Karan

16 demain matin ou peut-être même à la fin de la journée. J'ai peut-être une

17 heure, j'ai encore une heure peut-être de questions à poser, et mes

18 collègues m'ont indiqué qu'ils ne poseraient pas trop de questions.

19 Le problème est qu'à l'aéroport de Belgrade, il y a un brouillard

20 terrible et que son avion n'a pas encore décollé. Il n'a pas atterri, donc

21 il devrait atterrir peut-être à 18 heures ce soir à Schipol et peut-être

22 passer par les procédures, et il ne serait sans doute pas disponible avant

23 ce soir. Etant donné, bon, la fatigue du voyage, et cetera, je ne sais pas

24 s'il pourrait passer à la séance de récolement.

25 L'Accusation a également exprimé le souhait de lui parler, et je ne

26 sais pas s'il est prêt à répondre à leur demande. Il serait peut-être bien

27 que nous le fassions entrer dans le prétoire sans les notes de récolement,

28 et nous avons toutes les raisons de croire que l'Accusation aimerait

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1 s'entretenir avec lui avant qu'il n'apporte son témoignage ici.

2 Là, il s'agit de l'un des témoins qui n'a pas encore fait de

3 déclarations à quiconque, en tout cas pas à ma connaissance. C'est la même

4 chose que pour M. Korica, M. Stojic et M. Karan, ce qui veut dire que nos

5 notes de récolement doivent être réellement détaillées comme nous avons

6 essayé de le faire jusqu'à présent.

7 Ce que je voulais vous demander en ce sens est que si nous en

8 terminons avec l'interrogatoire de M. Karan aujourd'hui, nous ne

9 commencions pas l'interrogatoire de M. Susnjar avant vendredi, donc là

10 encore nous respectons le calendrier. Mais je ne crois pas que M. Susnjar

11 pourrait apporter son témoignage pendant une audience très longue, cela

12 prendrait peut-être juste une session. Puis, on pourrait ensuite commencer

13 avec M. Vuga, notre expert militaire, dès mardi. Son témoignage ne concerne

14 qu'un point sur lequel l'Accusation insiste pour s'entretenir avec M.

15 Susnjar. Si l'on est d'accord, je ne vois pas comment nous pouvons le faire

16 entrer dans le prétoire dans l'après-midi.

17 C'est la première fois que la Défense demande une petite marge de

18 manœuvre après une période très intense où on a eu les témoins l'un après

19 l'autre qui se sont succédés.

20 C'est la raison pour laquelle je voulais vous demander que si nous en

21 terminons avec l'interrogatoire de M. Karan aujourd'hui, nous n'ayons pas

22 M. Susnjar dans le prétoire demain. D'ailleurs, on ne sait même pas si son

23 avion va pouvoir décoller parce qu'il y a ce brouillard terrible à

24 l'aéroport de Belgrade.

25 Voilà ce que j'avais à dire.

26 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Tant que le brouillard n'est pas dans

27 le prétoire II, Monsieur Lukic.

28 Je suppose que votre requête est la suivante : quelle que soit l'heure à

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1 laquelle nous en terminons avec le témoin actuel, vous aimeriez avoir le

2 témoin suivant vendredi après-midi ou pas avant, en tout cas, vendredi

3 matin.

4 M. LUKIC : [interprétation] Oui, vendredi matin.

5 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Votre requête est entendue. A ce

6 moment-là, nous verrions le dernier témoin mardi, comme nous en avions

7 parlé précédemment.

8 Maître Moore.

9 M. MOORE : [interprétation] Monsieur le Président, la question soulevée au

10 sujet de notre témoin, M. Susnjar, n'est peut-être pas aussi simple que mon

11 éminent confrère M. Lukic semble le dire, et pour la raison suivante. J'ai

12 été en contact avec la Croix-Rouge internationale, et il y a un certain

13 nombre de contraintes qui sont imposées par le comité international de la

14 Croix-Rouge sur les individus qui viennent apporter leur témoignage. C'est

15 quelque chose qui, de toute évidence, me préoccupe, et je ne souhaite en

16 aucun cas interférer avec la demande de mon éminent confrère d'appeler ce

17 témoin, mais je veux simplement éclaircir un point. Je veux éclaircir

18 notamment le fait, je voudrais savoir s'il y aurait des difficultés à ce

19 que nous puissions nous entretenir avec le témoin comme j'en avais

20 l'intention.

21 D'après ce que j'ai cru comprendre, et ce n'est qu'aujourd'hui à midi que

22 j'ai pu parler à la personne qui traite de cette question, le comité

23 international de la Croix-Rouge pourrait demander à avoir des éléments

24 d'information sur cet appel du témoin, parce que si j'ai bien compris, il

25 peut y avoir des autorités qui ont déjà pris une décision qui indique que

26 non seulement le comité international de la Croix-Rouge, mais d'autres

27 autorités pourraient -- des éléments d'information qui sembleraient montrer

28 que ce témoignage ne pourrait pas être apporté, donc les institutions de la

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1 Croix-Rouge ou d'autres personnes seraient entravées par les mêmes

2 contraintes. Je ne tiens pas du tout à faire obstacle, je suis neutre sur

3 ce point, mais je pense qu'il est juste que la Chambre soit au courant du

4 fait qu'il pourrait y avoir un problème.

5 La personne qui traite de ce problème au nom du comité international de la

6 Croix-Rouge rentre à Genève aujourd'hui et devrait rentrer, pardon, à

7 Genève vendredi après-midi. Je lui a dit - c'est une femme - que si elle

8 souhaitait, elle pouvait parler au témoin ou venir se présenter devant le

9 prétoire. C'est à eux de régler la question, mais cela peut être une

10 question préliminaire qui a besoin d'être déterminée, et je voulais

11 simplement en informer la Chambre.

12 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci, Monsieur Moore. Effectivement,

13 il y a des questions qui concernent la partie initiale, initialement, donc

14 cela pourrait aboutir à des questions qui seront soulevées devant le

15 prétoire. Nous attendrons un certain temps pour ce faire.

16 Pour ce qui est de la requête de M. Lukic sur le calendrier de

17 comparutions, je suppose, d'après votre commentaire, que M. Lukic pourrait

18 entendre le témoin vendredi et pas avant, donc cela sera fait sur la base

19 qu'effectivement, le témoignage ne peut-être reporté dans la journée,

20 c'est-à-dire vendredi.

21 On peut élaborer le calendrier sur cette base.

22 M. LUKIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président. C'est ce que je

23 pensais et je pense que nous essaierons tous de nous en tenir à ce

24 calendrier.

25 Je suis également conscient de certaines décisions et ordres du

26 Tribunal concernant les représentants du comité international de la Croix-

27 rouge, et je vais en parler avec M. Susnjar et je lui demanderai s'il est

28 au courant, ce qu'il en pense, et j'en informerai bien entendu l'Accusation

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1 pour que la situation soit claire pour nous tous d'ici à vendredi.

2 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci.

3 Nous pouvons faire entrer le témoin, si vous le voulez bien.

4 [Le témoin est introduit dans le prétoire]

5 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Bonjour.

6 LE TÉMOIN : [interprétation] Bonjour.

7 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Veuillez vous asseoir. Je tiens à vous

8 rappeler la déclaration solennelle que vous avez prêtée au début de votre

9 témoignage. Cette déclaration s'applique toujours.

10 L'INTERPRÈTE : Le témoin acquiesce par le truchement de l'interprète.

11 LE TÉMOIN: MLADEN KARAN [Reprise]

12 [Le témoin répond par l'interprète]

13 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Lukic.

14 Interrogatoire principal par M. Lukic : [Suite]

15 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Karan.

16 R. Bonjour.

17 Q. Nous allons poursuivre votre interrogatoire, et j'aimerais revenir au

18 point où nous en étions restés hier, c'est-à-dire votre souvenir du 19

19 novembre. J'aimerais vous demander ce qui s'est passé le lendemain matin.

20 Dans votre souvenir, qu'avez-vous fait le matin du 20 ?

21 R. Nous nous sommes réveillés et levés assez tôt. M. Sljivancanin, moi-

22 même, le médecin, le conducteur, nous nous sommes rendus à l'hôpital. En

23 fait, nous sommes partis vers 6 heures. Enfin, je ne me souviens plus

24 l'heure exacte, mais je sais que c'était très tôt.

25 Q. Pouvez-vous nous donner l'identité du médecin ? Qui était-il ?

26 R. C'est le médecin qui était arrivé de Novi Sad, je crois. Il était

27 revêtu d'un uniforme d'officier militaire. En chemin vers Vukovar, à

28 proximité de Vukovar, nous avons été arrêtés par un groupe de personnes. Je

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1 n'en ai pas un souvenir très précis parce que j'étais sur le siège arrière,

2 et M. Sljivancanin était assis sur le siège avant, passager. Il s'est

3 adressé à l'un des individus, il a abaissé sa vitre et s'est adressé à

4 cette personne. Je ne connaissais pas cet individu à l'époque, mais je m'en

5 souviens parce qu'il était très arrogant et très hardi. Je l'ai vu du siège

6 où j'étais assis parce que je le dominais, de là où j'étais assis. Il

7 n'était pas très grand.

8 Je me suis levé de mon siège, et deux personnes sont entrées dans la

9 voiture, et c'est comme cela que nous sommes arrivés à l'hôpital.

10 Q. Pendant cette rencontre, est-ce que Sljivancanin a quitté le véhicule ?

11 R. Non, non.

12 Q. [aucune interprétation]

13 R. Pour autant que je le sache, il est resté dans le véhicule pendant

14 toute la rencontre. Il était assis sur le siège du passager avant.

15 Ce n'était pas du tout un conflit ou une dispute, c'est simplement que

16 cette personne s'exprimait avec une certaine attitude. C'est comme cela que

17 je l'ai perçu. Il parlait très fort, mais ce n'était pas un conflit.

18 Q. Avez-vous appris par la suite l'identité de cette personne ?

19 R. Oui. Il s'agissait du colonel Vujic en retraite. J'en avais entendu

20 parler, mais je pense qu'il avait déjà pris sa retraite avant que je ne

21 rentre dans l'administration chargée de la sécurité, donc il n'était pas là

22 au moment où j'ai pris mon poste.

23 Q. Pouvez-vous nous dire, en chemin vers l'hôpital et à l'hôpital

24 lui-même, avez-vous entendu ou vu Sljivancanin émettre des ordres et les

25 adresser au colonel Vujic ?

26 R. Non. Ce serait absurde, en tout cas en termes militaires, tel que

27 la chaîne de commandement était définie à l'époque et notamment au sein de

28 l'organe de sécurité. La chaîne de commandement était telle qu'une personne

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1 de grade inférieur ne pouvait pas vraiment donner d'ordres à une personne

2 de grade supérieur, notamment si cette personne émanait d'un organe de plus

3 haute responsabilité et de plus haut rang.

4 Q. Que s'est-il passé par la suite ? Est-ce que vous vous souvenez de

5 votre arrivée et de votre présence à l'hôpital ? Que s'est-il passé à ce

6 moment-là ?

7 R. Lorsque nous sommes entrés, je me suis immédiatement acquitté de mes

8 fonctions. Je sais que M. Sljivancanin et le médecin, - je pense que son

9 nom était Ivankovic, je ne suis pas sûr, en tout cas cela commençait par I

10 - je sais qu'ils sont allés à une réunion et que moi-même et le Dr Njavro

11 qui était là et un autre médecin qui était peut-être un médecin local, mais

12 je n'en suis pas sûr. En tout cas, il me semble qu'il faisait partie de

13 l'équipe de Novi Sad.

14 Nous sommes allés au sous-sol de l'hôpital, ce qu'ils appelaient

15 l'abri. J'ai commencé à m'acquitter de ma mission de la manière suivante.

16 Le Dr Njavro est descendu avec moi et les autres nous ont suivis. J'ai vu

17 un certain nombre de personnes en bas, un grand nombre de personnes qui

18 portaient des pansements. Certains étaient plâtrés, d'autres avaient des

19 bandages soit aux bras, soit à la tête, et cetera. J'ai posé la question à

20 voix haute pour demander si l'un d'entre eux portait des armes ou avait des

21 armes. Le Dr Njavro a répété la question. Je crois que l'un des patients

22 dont la jambe était plâtrée ou peut-être était-ce simplement un bandage

23 très épais - enfin, cette jambe avait l'air soutenue par un triangle, en

24 tout cas c'est ce qu'il me semblait à l'époque - il a pris la parole pour

25 dire qu'il détenait une arme. Je lui ai demandé où était cette arme. Il a

26 montré une poutre au-dessus de lui, qui faisait partie de la structure du

27 plafond du sous-sol. Là, effectivement, dans un sac plastique se trouvait

28 un Beretta. J'ai continué à m'acquitter de ma mission. Aucune des autres

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1 personnes qui étaient blessées et qui se trouvaient là n'a déclaré détenir

2 d'armes.

3 Q. Vous avez mentionné que vous avez fait votre tour avec le Dr Njavro et

4 un autre médecin qui faisait partie de l'équipe des médecins militaires. Ma

5 question est : avez-vous vu l'arrivée des médecins militaires et ce qu'ils

6 ont fait ?

7 R. Je ne sais pas ce qu'ils ont fait. Je ne l'ai pas vu à ce moment-là.

8 J'ai vu quand ils sont arrivés, c'était un groupe de six, sept, huit

9 personnes peut-être. Ils étaient là, dans le hall de l'hôpital, et lorsque

10 je suis arrivé par la suite, je n'ai pas eu l'occasion de voir ce qu'ils

11 faisaient vraiment.

12 Q. Combien de temps avez-vous passé dans les couloirs de l'hôpital ?

13 Combien de temps vous a-t-il fallu pour vous acquitter de l'ensemble de

14 cette mission ?

15 R. Je dirais moins d'une heure.

16 Q. Maintenant, j'aimerais vous poser une autre question. Au cours de cette

17 heure, est-ce que vous avez vu des gens évacués de l'hôpital sur un

18 brancard ?

19 R. Non. La raison en est très simple : nous étions les premiers à arriver

20 dans cette zone où se trouvaient les blessés et les malades, et je n'ai vu

21 aucune évacuation par brancard.

22 Q. Lorsque vous dites que vous avez été les premiers à arriver, c'était

23 qui, les premiers à arriver ?

24 R. C'étaient Jure Njavro, moi-même et cet autre médecin.

25 Q. Vous avez parcouru l'enceinte ou la zone; est-ce que vous avez vu

26 Sljivancanin quelque part ?

27 R. Non, je ne l'ai vu à aucun moment, parce qu'il était déjà parti, il

28 avait une réunion à laquelle il devait assister. Je sais que c'est ce qu'il

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1 devait faire. Maintenant, quant à savoir qui nous étions censés rencontrer,

2 en revanche j'ai appris par la suite que la personne qu'il devait

3 rencontrer était Vesna Bosanac dans cette réunion.

4 Q. En dehors des blessés, des malades et du personnel soignant que vous

5 avez vus, est-ce qu'il y avait d'autres personnes qui relevaient de la

6 catégorie qu'on pourrait définir comme étant des civils ? Le cas échéant,

7 que faisaient ces personnes, je veux dire, des individus qui n'avaient

8 aucun signe apparent, qui auraient indiqué qu'ils n'étaient autre chose que

9 des civils ?

10 R. Oui, il y avait des gens de ce type là-bas. Il y avait certaines femmes

11 aussi. Je crois que j'ai même vu des enfants; ils étaient un petit peu sur

12 le coté, ils n'étaient pas allongés et ne semblaient pas être blessés.

13 Q. Alors vous nous avez déclaré que vous n'avez pas fait cette sélection,

14 ce tri des personnes. Pour la partie du tri qui devait se dérouler dans

15 l'hôpital, nous avons déjà décrit les tâches que cela impliquait. Est-ce

16 que vous pouvez définir la catégorie de personnes qui auraient été définies

17 comme des personnes suspectes et pour lesquelles il y avait des raisons de

18 suspecter quoi que ce soit, comme on pourrait le définir dans notre système

19 juridique ?

20 R. Nous avions reçu des rapports sur le fait que deux jours avant la chute

21 de Vukovar, il y avait déjà eu une mobilisation générale de tous les

22 hommes. Pour nous, pour l'organe de sécurité, toutes ces personnes

23 pouvaient être considérées comme ayant commis des délits ou des infractions

24 pénales dans le cadre de notre juridiction.

25 Q. Est-ce que vous pouvez définir la tranche d'âges dans laquelle se

26 situaient ces hommes qui pouvaient être en infraction pénale par rapport à

27 la loi ?

28 R. Bien entendu. L'infraction pénale d'insurrection armée ou de rébellion

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1 était concernée.

2 Q. Qui auraient été les personnes considérées comme suspectes de ces

3 crimes ?

4 R. Les personnes de plus de 16 ans.

5 Q. Que s'est-il passé par la suite, lorsque vous avez visité l'hôpital ?

6 R. Peu de temps après, Sljivancanin est venu me voir et il m'a dit qu'il

7 fallait que je me rende des les bureaux de Negoslavci et que j'organise,

8 avec la police, le transport du Dr Bosanac, de Mladen Vidic, Bili et

9 Mitrovisa.

10 Q. Avez-vous eu la possibilité de voir le Dr Vesna Bosanac à l'hôpital

11 avant de partir pour Negoslavci ?

12 R. Oui, j'y étais pendant une période très brève et je ne voulais pas lui

13 parler du fait de ce qui s'était passé la veille. C'est ce que je vous ai

14 déjà raconté, d'ailleurs.

15 Q. Est-ce que quelqu'un d'autre était présent, des personnes que vous

16 aviez identifiées ? Est-ce qu'elles étaient seules dans ces bureaux, ou y

17 avait-il quelqu'un d'autre ?

18 R. Je ne m'en souviens pas.

19 Q. Un instant, s'il vous plaît. A quel moment avez-vous quitté l'hôpital

20 de Vukovar ? Pourriez-vous situer cela dans le temps, par rapport au moment

21 où vous êtes arrivé ? Combien de jour après cela, vous avez quitté

22 l'hôpital?

23 R. Nous sommes partis vers six heures ou un peu après six heures. Bon, je

24 dirais vers 11, 12 heures. Pas plus tard que cela, en tout cas.

25 Q. Bon, on va essayer de définir cela d'une autre façon. En sortant de

26 l'hôpital, est-ce que vous avez vu des autobus à proximité de l'hôpital ?

27 Est-ce que vous avez vu s'ils ont procédé à un tri ou une fouille ?

28 R. Non.

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1 Q. Est-ce que vous avez vu des véhicules sanitaires, des convois, des

2 journalistes, la télé, des journalistes de la télé ?

3 R. Non, non. Il y avait quelques policiers de l'unité de Simic, et c'est

4 tout, c'est à peu près tout.

5 Q. Que se passe-t-il par la suite? Où allez-vous, que faites-vous ?

6 R. Je me suis rendu dans mon bureau et je pense qu'à ce moment-là, j'ai

7 appelé le capitaine Bozic pour lui dire qu'il fallait se préparer, ou

8 plutôt qu'il fallait préparer les véhicules pour transporter les hommes

9 jusqu'à Mitrovica. En même temps lui ai-je dit que moi aussi, j'avais

10 besoin d'un véhicule, parce qu'on a approuvé ma demande de me rendre de

11 Mitrovica à Bijeljina puisque je n'étais pas allé en permission depuis plus

12 de 30 jours.

13 Q. Qui vous a donné cette permission ?

14 R. C'était encore à l'hôpital, pendant qu'on était encore à l'hôpital.

15 C'était le commandant Sljivancanin qui m'a permis cela. Je lui ai posé

16 cette question, puisque Mitrovica se trouvait à une dizaine de kilomètres

17 de Bijeljina. Je lui ai demandé si je pouvais rendre visite chez moi, et il

18 me l'a accordée, cette permission.

19 Après être arrivé dans le bureau, j'étais en train de préparer des notes

20 avec des questions éventuelles à poser, des questions qui me semblaient

21 être importantes, les questions à poser dans l'éventualité où c'étaient des

22 interrogatoires de ces personnes à l'avenir. Il s'agissait des questions

23 relevant de notre ressort en vue des activités futures.

24 Par exemple, je peux essayer de vous citer quelques exemples. Je

25 pense que j'avais énuméré une vingtaine de questions possibles, une

26 vingtaine de points à aborder. Cela tenait en une seule page. C'était une

27 sorte d'instruction destinée aux collègues qui allaient s'en occuper par la

28 suite.

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1 Q. A quel moment êtes-vous parti pour Mitrovica ? Pourriez-vous nous

2 décrire la façon dont cela s'est fait ?

3 R. J'étais occupé avec mon travail, je ne faisais pas vraiment attention à

4 cela. On m'a dit de toute façon que j'allais être informé à partir du

5 moment où la colonne allait être formée. Entre-temps, le véhicule que je

6 demandais était arrivé, c'était le véhicule que je devrais emprunter

7 d'abord pour me rendre à Mitrovica et ensuite pour continuer pour Bijeljina

8 le soir.

9 A peu près le soir, en tout cas la nuit était tombée déjà, je ne me

10 souviens pas de l'heure exacte, 7 heures, 8 heures du soir, comme j'ai dit

11 il faisait nuit déjà, j'ai été informé du fait que la colonne était prête à

12 partir. J'y suis allé, j'ai pris ma voiture pour y aller puisqu'elle se

13 trouvait à une centaine de mètres de là en direction de Belgrade et si l'on

14 quittait Vukovar, pour voir les personnes qui se trouvaient à la tête de la

15 colonne, les responsables.

16 Il y avait deux véhicules blindés dont les portières étaient encore

17 ouvertes. J'ai vu qu'il n'y avait pas deux personnes à prendre, mais

18 quatre, contrairement à ce qu'on m'avait dit. Là-dedans, dans ce véhicule,

19 dans un véhicule, se trouvaient Vesna Bosanac, Ante Navric [phon], et dans

20 l'autre véhicule, il y avait Marin Vidic. J'ai décidé de faire monter Ante

21 Navric dans le véhicule blindé où se trouvait Marin Vidic.

22 Il y a un petit détail qui s'est gravé dans ma mémoire, c'est que Marin

23 Vidic m'a demandé où était ma guitare. Puisque Bozic était assez énervé,

24 puisqu'on ne partait pas, j'ai décidé d'aller chercher ma guitare et je la

25 lui ai donnée. J'ai quelques problèmes avec les gens du cru, des vieillards

26 qui me demandaient pourquoi j'avais besoin d'une guitare. J'ai dit :

27 écoutez, laissez-le prendre cette guitare.

28 Q. Une correction, s'il vous plaît. Il a été dit que dans le premier

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1 véhicule blindé se trouvaient Vesna Bosanac, Jure Njavro et Ante Aric,

2 alors que dans l'autre véhicule blindé, il n'y avait que Marin Vidic, et

3 c'est pour cela que j'ai décidé de faire monter Ante Aric dans le véhicule

4 dans lequel se trouvait Marin Vidic.

5 M. LUKIC : [interprétation] Je pense qu'il n'a pas besoin de répéter cela,

6 on voit bien de qui il s'agit.

7 Q. Monsieur Karan, entre-temps est-ce que vous avez appris où se

8 trouvaient Vesna Bosanac, Vidic, Njavro et Alic ?

9 R. Non. Tout ce que je peux dire, c'est que je ne les ai vus que le matin

10 à l'hôpital. Ensuite, pendant toute la journée, je ne savais pas où ils

11 étaient.

12 En ce qui concerne Marin Vidic, je sais que les techniciens de la

13 police scientifique, Karanfilov et Momcilovic, étaient supposés faire un

14 tour dans le dépôt, dans les abris, puisqu'ils savaient aussi où cela se

15 trouvait, mais je ne voudrais pas entrer dans tous ces détails.

16 Q. Avant de partir à Sremska Mitrovica, à partir du moment où vous avez

17 quitté l'hôpital, est-ce que vous avez eu la possibilité de revoir à

18 nouveau le commandant Sljivancanin ?

19 R. Non. A un moment donné, pendant que j'étais encore en train d'écrire ce

20 que je vous ai dit, Momcilovic était venu parce qu'il avait apporté la clé

21 du sceau, il voulait la rendre, parce qu'eux ils se dirigeaient déjà vers

22 Belgrade. Je ne sais pas si mes souvenirs sont exacts. Il me semble qu'au

23 retour, puisque la guitare était restée dans mon bureau, je pense que j'ai

24 rencontré Borisavljevic. Je n'en suis pas sûr.

25 Q. Bien. Vous avez dit qu'il y avait deux véhicules blindés qui faisaient

26 partie de ce convoi. A quel moment êtes-vous arrivé à peu près à l'hôpital,

27 à la prison de Mitrovica ?

28 R. Il y avait à la tête de ce convoi un véhicule Puch où se trouvait

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1 Bozic, avec les policiers. Puis, il y avait aussi ces véhicules de combat

2 où dans chacun se trouvaient deux policiers pour en assurer la sécurité.

3 Puis, à la fin, il y avait mon véhicule. Ce n'était pas un blindé, c'était

4 un Puch aussi. Quand on est arrivés, il se faisait assez tard. Nous avions

5 besoin d'une heure, une heure et demie pour arriver à Mitrovica. En

6 arrivant là-bas, nous avions du mal à trouver vraiment l'endroit où

7 s'arrêter puisque nous ne connaissions pas très bien ce complexe

8 pénitencier, et il fallait trouver la personne chargée de nous accueillir.

9 Je sais qu'ils étaient presque fâchés parce que nous avions pris du

10 retard. C'était leur point de vue.

11 Q. Qui était en colère contre vous ?

12 R. C'était le service de la sécurité de la prison, l'accueil, les gens qui

13 travaillent à l'accueil. Je suis entré dans l'enceinte de la prison avec

14 nos véhicules. Je me souviens qu'on avait immédiatement séparé le Dr

15 Bosanac, qu'on l'avait introduite dans une pièce assez importante qui, en

16 hiver, pouvait abriter quelques activités sportives même s'il n'y avait pas

17 vraiment de tribune. Les trois autres hommes, on les a fait coucher sur des

18 bitumes d'un terrain de basket qui se trouvait à une trentaine de mètres de

19 là.

20 Moi, personnellement je n'ai pas trop aimé, à l'égard de cela, assister à

21 cette scène. Il faisait assez froid, je me suis dit qu'ils étaient un peu

22 durs avec eux. Je me suis dit que c'était probablement les règles de la

23 maison et je ne me suis pas mêlé à cela.

24 Après cela, Bozic est parti là où il fallait qu'il parte, et je suis allé à

25 Bijeljina.

26 Q. Etait-ce la première fois que vous vous rendiez à Bijeljina ?

27 R. Oui, oui.

28 Q. Combien de temps êtes-vous resté dans votre appartement à Bijeljina ?

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1 R. Je suis arrivé après minuit, 1 heure, 1 heure matin, je dirais. Si l'on

2 compte cette nuit-là, oui, je suis resté donc cette nuit-là, le lendemain

3 dans la journée, j'y ai dormi encore une nuit et ensuite je suis rentré,

4 donc deux jours en tout.

5 Q. Au bout de deux jours, vous êtes rentré où ?

6 R. A mon poste de travail à Negoslavci.

7 Q. Vous souvenez-vous à quel moment vous êtes revenu à Belgrade ?

8 R. Quand je suis revenu, l'ambiance était assez euphorique. Les gens

9 étaient heureux, contents, puisqu'ils ont appris qu'il n'y avait pas de

10 mission à suivre et que toute l'unité allait rentrer à Belgrade. Nous avons

11 commencé à faire nos bagages. Nous sommes revenus deux ou trois jours après

12 mon retour, deux ou trois jours, je dirais. Nous ne sommes pas restés

13 longtemps là-bas.

14 Q. Monsieur Karan, pendant votre séjour à Vukovar, est-ce que vous vous

15 êtes jamais rendu à Ovcara ? Savez-vous ce que c'est qu'Ovcara ? Est-ce que

16 vous pouvez nous dire ce que cela signifiait pour vous à l'époque ?

17 R. J'y suis allé une fois au tout début. Je savais qu'il y avait une

18 espèce de ferme là-bas. Je sais que le commandant Sljivancanin m'avait

19 demandé de m'y rendre pour préparer un cochon parce que c'était la journée

20 de la fête de l'unité. Quand j'ai vu les conditions qui prévalaient là-bas,

21 quand j'ai vu qu'il y avait des rats, je me suis dit que je ne pourrais

22 jamais manger cette viande-là, donc je suis revenu sans avoir rapporté quoi

23 que ce soi.

24 Sljivancanin était fâché, mais je lui ai dit que c'était mieux de

25 faire cela que d'attraper une infection. On pourrait dire que c'était un

26 petit conflit que nous avons eu, mais c'est tout.

27 Q. Est-ce qu'après cela, est-ce que vous êtes jamais revenu à Ovcara ?

28 R. Non.

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1 Q. A présent, quand vous pensez aux journées du 19 et du 20 de votre

2 mission à l'époque, est-ce que vous avez entendu qui que ce soit ce jour-

3 là, donc la journée du 19, mentionner Ovcara, mentionner cette localité ?

4 R. Que je sache, non, pas devant moi en tout cas.

5 Q. Dans votre curriculum vitae, nous avons entendu, nous avons vu qu'à un

6 moment donné, vous êtes revenu à Vukovar. C'était en 1995 et c'était pour

7 une période assez courte. Même si ceci ne tombe pas dans le temps pertinent

8 pour l'acte d'accusation, la localité nous intéresse. Pourriez-vous nous

9 dire pourquoi vous y êtes resté si peu de temps ?

10 R. J'y suis allé dans le cadre du 11e Corps d'armée de l'armée serbe de la

11 Krajina. Il s'agissait là d'une unité chargée de la sécurité, et je me suis

12 rendu compte très rapidement qu'on ne respectait pas la règle en vigueur,

13 que les services du MUP, les forces du MUP travaillaient sur la base de

14 leurs requêtes. J'ai démis de leurs fonctions pratiquement tous les chefs

15 de brigades. J'ai tout simplement laissé les chefs des groupes chargés de

16 contre-renseignements et j'ai fait venir aux postes de chefs de brigade,

17 donc des personnes chargées de la sécurité de ces brigades, les gens venant

18 de la Krajina et qui à l'époque étaient déjà tombés sous le contrôle

19 croate. C'était une condition sine qua non pour commencer à faire quoi que

20 ce soit.

21 Evidemment que cela n'a pas arrangé les personnalité du cru, surtout

22 les structures du MUP de Serbie, parce que quand on a fait cela, si vous

23 voulez, on a mis fin à la contrebande et certains réseaux de la contrebande

24 qui convenaient à tout le monde, et la police était impliquée là-dedans.

25 Evidemment que la chose la plus facile à faire, c'était de me traiter de

26 traître, de dire que c'était moi le criminel et de me chasser, de

27 m'interdire donc de revenir sur ce territoire. C'est exactement ce qui

28 m'est arrivé, à moi. Je suis parti avec un organe de sécurité relevant du

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1 11e Corps d'armée, et c'était à peu près ce qui s'est passé.

2 Q. Pouvez-vous nous dire à quel moment vous avez entendu parler de ce qui

3 s'est passé à Ovcara ?

4 R. Quand on est revenus, à l'époque une tragédie est arrivée au sein de ma

5 famille. C'est mon beau-frère qui s'est fait tuer. Peu de temps après, j'ai

6 pris de nouvelles fonctions et ensuite je suis parti en Krajina. J'y suis

7 resté pendant deux années, et au moment du retrait, quand on a parlé dans

8 les médias, c'est là que j'en ai entendu parler pour la première fois,

9 effectivement.

10 Q. Est-ce que vous avez entendu parler de cela dans les médias, alors ?

11 R. Bon, je ne sais pas si c'était vraiment dans les médias, mais je savais

12 que Sljivancanin était accusé de cela. C'est à peu près à ce moment-là, au

13 moment où l'acte d'accusation a été dressé contre Sljivancanin que j'ai

14 entendu parler de cela.

15 M. LUKIC : [interprétation] Merci, je n'ai pas d'autres questions, mais je

16 voudrais vous dire que nous avons reçu un document aujourd'hui, et ceci

17 concerne justement l'année 1995. Le témoin en a parlé ici. C'est pertinent

18 pour qui que ce soit. Si qui que ce soit souhaite aborder cette question

19 avec le témoin, je voudrais demander qu'au préalable, on montre justement

20 ce document. C'est un document qu'il a écrit, qu'il aurait écrit, même si

21 moi, personnellement, je pense que ce n'est absolument pas pertinent en

22 l'espèce. Mais bon, cela étant dit, je ne peux même pas affirmer cela parce

23 que je n'ai pas lu l'intégralité de ce document.

24 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je vous remercie, Maître Lukic.

25 Maître Vasic.

26 M. VASIC : [interprétation] Je vous remercie, Monsieur le Président.

27 Bonjour à tout le monde présent dans ce prétoire.

28 Interrogatoire principal par M. Vasic :

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1 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur le Témoin.

2 R. Bonjour.

3 Q. Je vais vous demander quelque chose, exactement la même chose que M.

4 Lukic vous a demandée, à savoir de respecter un temps de pause entre mes

5 questions et vos réponses pour permettre aux interprètes de faire leur

6 travail. Mais je pense que le rythme que vous avez adopté en répondant aux

7 questions de M. Lukic était tout à fait acceptable, donc je vous prie de

8 bien vouloir continuer à observer ce rythme de travail.

9 Hier, nous avons entendu dire qu'en 1991, vous travailliez au sein de la

10 sécurité militaire, et ceci jusqu'au mois d'octobre. Vous étiez donc

11 l'officier de garde du 1er Département de l'administration de la sécurité,

12 on appelait cela le département opérationnel, et c'était le colonel

13 Gligorevic qui était à la tête de ce département; est-ce exact ?

14 R. Oui.

15 Q. Vous nous avez dit que ce département, en réalité, coordonnait les

16 activités de contre-renseignement sur tout le territoire de la République

17 socialiste fédérative de l'époque, aussi bien au niveau des organes de

18 sécurité de la JNA qu'au niveau de la Défense territoriale.

19 R. C'est exact.

20 Q. Je pense que les interprètes ne vous ont pas entendu.

21 R. C'est exact.

22 Q. Merci. Vous avez aussi dit qu'à un moment donné, en tant que l'officier

23 le plus jeune, mais pourtant très capable, que vous avez en plus reçu comme

24 mission, comme tâche, d'observer la situation dans toutes les républiques

25 de l'ex-Yougoslavie, mis à part dans la Serbie ?

26 R. Oui, c'est exact.

27 Q. Est-ce que vous vous souvenez d'une information qui serait arrivée à

28 l'automne 1991 concernant l'entrée par effraction dans un immeuble du 5e

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1 Corps de l'armée de l'air et tout le scandale s'y afférant ? A l'époque,

2 cette affaire s'appelait affaire Labrador.

3 R. Oui, je me souviens de certains détails de cela.

4 Q. Je ne vais pas vous demander des questions au sujet de cette opération,

5 pas des questions en détail, en tout cas, mais est-ce que vous vous

6 souvenez si, après l'éclatement de cette affaire Labrador, un groupe

7 d'officiers a été arrêté à Zagreb ?

8 R. Oui, je pense que cela s'est effectivement passé.

9 Q. Est-ce que vous savez si, dans la direction chargée de la sécurité,

10 l'on considérait que ce groupe et que le réseau qui existait donc sur le

11 territoire de la Croatie, qu'il fallait préserver coûte que coûte ce

12 groupe, qu'il fallait les protéger contre toute arrestation et toute

13 découverte ?

14 R. Je vais être très clair. Il y avait très peu de gens qui connaissaient

15 le nom déjà de cette activité. C'était un nom de code. Il n'y avait que

16 quelques personnes qui ne pouvaient être au courant de cela, donc un des

17 officiers très haut placé au sein de la direction, les chefs des analyses,

18 et cetera. Mais les autres organes n'étaient absolument pas au courant du

19 nom de code de cette opération qui était donc appelée l'opération Labrador.

20 Cela étant dit, je ne sais pas si la direction de la sécurité

21 considérait qu'il fallait à tout prix garder tout cela, ce réseau des

22 collaborateurs. Evidemment, à partir du moment où vous avez des

23 collaborateurs, où vous traitez avec eux, cela veut dire que vous avez fait

24 tout au niveau de la procédure pour commencer à coopérer avec quelqu'un.

25 C'est un rapport officiel, si vous voulez. Tous les autres contacts, ce ne

26 sont rien d'autre que des relations sociales ou amicales. Il ne s'agit pas

27 là des liens de coopération, contrairement à ce que certains pourraient

28 dire. Le seul rapport que l'on peut traiter de rapport officiel, c'est le

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1 rapport où vous avez des informations concernant chaque collaborateur qui

2 collabore ou coopère activement avec un autre service.

3 Tout ceci est prévu dans les règles, par les règles. Il existe une

4 procédure à respecter. C'est uniquement dans le cas où on a vraiment

5 respecté cette procédure que l'on peut essayer de garder ces personnes avec

6 qui on coopère activement. Cela, oui, on a certainement essayé de les

7 garder; les autres, non, je ne pense pas que c'était la priorité de la

8 direction de la sécurité. La direction de la sécurité ne voulait préserver

9 que les liens officiels, si vous voulez. Je ne sais pas si j'ai été clair.

10 Q. Oui, parfaitement clair. Vu qu'entre-temps vous avez commencé à

11 travailler au sein de la Brigade de la Garde et que vous êtes revenu à

12 Belgrade, est-ce que vous savez si, au mois de décembre, un échange a eu

13 lieu, a été organisé, où l'on a échangé d'un côté les membres de ce réseau

14 Labrador et de l'autre côté des personnes demandées par la République de

15 Croatie de l'époque ? Parmi les personnes qui faisaient l'objet de cette

16 échange, il y en avait que vous aviez, vous personnellement, emmenées ou

17 escortées à Sremska Mitrovica. Est-ce que vous savez quoi que ce soit au

18 sujet de cet échange ?

19 R. Puisqu'il s'agissait d'un échange tous contre tous négocié par le

20 premier ministre Panic, si c'est de cela que l'on parle, oui,

21 effectivement, c'est exact. Là, je parle de Milan Panic, le premier

22 ministre. Mais si ce n'est pas cela, alors je ne sais pas de quoi vous

23 parlez.

24 Q. Savez-vous à quel moment Vesna Bosanac a été échangée et contre qui ?

25 Est-ce que vous avez enquêté pour avoir des éléments d'information sur ce

26 point ?

27 R. Non, mais je sais qu'un document écrit émanant du gouvernement des

28 Etats-Unis attestait du fait qu'il y avait une note émanant de nos

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1 autorités qui demandait qu'elle bénéficie d'un traitement favorable et

2 qu'on lui accorde l'indulgence ou une amnistie.

3 Q. Avez-vous eu vent d'un ordre selon lequel d'autres personnes en dehors

4 du Dr Bosanac et du Dr Njavro ou de M. Aric devaient être protégées et

5 traitées de la même manière que des personnes bénéficiant de mesures de

6 sécurité particulières ? Avez-vous eu vent que cet ordre émanait de

7 l'administration de sécurité ?

8 R. Non.

9 Q. Merci. Est-ce que vous savez si, pendant que vous étiez dans la 1ère

10 Division opérationnelle de l'administration de sécurité, c'est-à-dire celle

11 qui agissait en Slavonie orientale, à Baranja et en Srem occidental, c'est-

12 à-dire le théâtre d'opérations de Vukovar, donc est-ce que vous savez si,

13 pendant cette période, le groupe de contre-espionnage du 1er District

14 militaire était actif à cet endroit ? Il était dirigé par le colonel --

15 L'INTERPRÈTE : L'interprète note que le nom n'a pas été saisi.

16 LE TÉMOIN : [interprétation] Oui, mais Ljubisa Petkovic ne dirigeait pas

17 cette division. C'était le général Babic qui dirigeait le district. Ljubisa

18 Petkovic était son assistant ou son adjoint en matière de contre-

19 renseignement. Je crois qu'il y avait une autre personne qui était à la

20 tête du groupe de contre-espionnage, mais peut-être était-ce une erreur.

21 Cela ne change rien de toute façon.

22 M. VASIC : [interprétation] En fait, la réponse donnée par le témoin

23 comprend une correction -- ou le nom que les interprètes n'ont pas pu

24 saisir, donc je ne vais pas le répéter ici.

25 Q. Est-ce que vous pouvez nous indiquer si ce groupe de contre-espionnage

26 avait son QG à Sid ? Vous savez si c'était le cas?

27 R. Le QG du groupe de contre-espionnage se trouvait à Belgrade, mais peut-

28 être que le groupe détaché dans les opérations de la zone avait son QG à

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1 Sid. En tout cas, je n'avais aucun contact avec eux parce que j'étais dans

2 la brigade et, par la suite, c'est-à-dire cette année en 1992, j'étais déjà

3 au département de la sécurité du cabinet du ministère fédéral de Défense

4 nationale.

5 Q. Merci. Y avait-il un autre groupe de contre-espionnage, un groupe de

6 contre-espionnage aérien ou concernant la force aérienne qui était actif

7 dans la région ? Ce serait le groupe de contre-espionnage des forces

8 aériennes ou les forces de défense antiaériennes.

9 R. Je connais certains des officiers des forces aériennes qui étaient dans

10 ce territoire. Maintenant, je ne sais pas s'ils faisaient partie d'un

11 groupe de contre-espionnage dirigé par les forces aériennes ou s'ils

12 étaient là simplement en tant que membres du commandement de la défense

13 aérienne ou antiaérienne. Je ne sais pas. En tout cas, ils étaient là-bas.

14 Ce sont les éléments que je sais assurément. Je ne connaissais que

15 Rakocevic, parce que nous n'étions pas beaucoup ensemble. Ils restaient de

16 leur côté, et je ne connaissais aucun des officiers de moindre grade.

17 Q. Merci. Ces deux groupes de contre-espionnage étaient subordonnés à

18 l'administration chargée de la sécurité au cours des opérations dans la

19 région; est-ce exact ?

20 R. Je dois vous corriger, ici. Le groupe de contre-espionnage des forces

21 aériennes était subordonné au chef d'état-major de la force aérienne, le

22 groupe de contre-espionnage du 1er District militaire ou de l'organe de

23 sécurité du 1er District militaire était subordonné au chef de l'organe de

24 sécurité du 1er District militaire. Il y avait une unité qui était plus

25 stationnaire, qui avait plus d'équipement et qui était utilisée pour des

26 fins différentes. On appelait cela le centre de contre-espionnage, c'est

27 une unité totalement différente. Ils étaient plus mobiles que les groupes

28 de contre-espionnage qui faisaient partie de ces branches à des niveaux

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1 inférieurs.

2 Q. Ces groupes de contre-espionnage, en accord avec les règles de service,

3 établissaient-ils un réseau avec les collaborateurs de la zone ? Etaient-

4 ils actifs ou pas ?

5 R. Bien entendu, l'organe de sécurité et son collaborateur n'avaient

6 aucune raison d'être.

7 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Lukic.

8 M. LUKIC : [interprétation] Monsieur le Président, je ne sais pas si

9 l'on peut passer en audience à huis clos partiel, parce que je voulais

10 soulever une question. Je veux vous consulter sur ce point.

11 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Séance à huis clos partiel.

12 M. LE GREFFIER : [interprétation] Nous sommes maintenant en séance à huis

13 clos partiel.

14 [Audience à huis clos partiel]

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23 [Audience publique]

24 M. VASIC : [interprétation]

25 Q. Hier, vous nous avez dit que lorsque vous êtes arrivé à la

26 Brigade de la Garde, vous êtes devenu chef adjoint du département de

27 sécurité pour le renseignement; est-ce exact ?

28 R. Oui.

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1 Q. Vous nous avez dit également hier que vous rédigiez les rapports et

2 qu'ils étaient ensuite signés par le chef. Vous les rédigiez en tant

3 qu'officier opérationnel d'une certaine expérience. J'aimerais vous poser

4 la question suivante : en tant que chef adjoint, étiez-vous autorisé à

5 signer ces rapports que vous émettiez ?

6 R. D'après le règlement, le rapport des organes de sécurité de la Brigade

7 de la Garde était censé être signé par M. Sljivancanin. Ce rapport qui

8 porte ma signature précise que le rapport a été rédigé à 9 heures. Je ne

9 m'en souviens plus exactement, sans doute avant le jour de mon arrivée ou

10 peut-être le deuxième jour après mon arrivée, et peut-être avant cela, M.

11 Sljivancanin n'était pas là et notre division ne pouvait pas vraiment

12 attendre de recevoir le rapport de cette zone. C'est la raison pour

13 laquelle j'ai signé le rapport, sinon je n'avais pas l'autorisation de le

14 faire. J'étais très prudent sur ce point, et on m'en a averti. Mais je ne

15 voulais pas que nous ayons à attendre l'arrivée de M. Sljivancanin.

16 Q. C'est précisément la question que je voulais vous poser sur ce rapport

17 particulier. Vous nous avez expliqué ce fait hier. Que se passe-t-il en

18 fait d'absence du chef ? Effectivement, on ne peut pas exiger l'arrivée du

19 chef avant d'envoyer le rapport. Est-ce que quelqu'un d'autre a l'autorité

20 de signer à sa place? Est-ce que cette personne était vous, en

21 l'occurrence ?

22 R. Oui, effectivement, je pouvais signer à sa place. Lorsqu'il était à

23 l'extérieur, lorsqu'il se trouve en dehors de la zone de combat,

24 Vukasinovic est l'adjoint; je suppose qu'en l'occurrence, j'étais censé

25 être l'adjoint parce que j'étais assistant en matière de contre-espionnage.

26 Néanmoins, je n'avais pas encore assumé ces fonctions, et c'était logique

27 que la personne plus gradée que moi occupe cette fonction.

28 Bon, cela ne me dérangeait pas, je savais que quelqu'un arriverait un

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1 moment donné pour lire le rapport et le signer. Il n'y avait pas d'autre

2 choix, parce que les départements de sécurité du cabinet du ministère

3 fédéral à Belgrade devaient obtenir ce document à temps, puis ensuite ils

4 devaient signer tous les autres documents qui étaient renvoyés après cela.

5 Q. Merci. Je pense que nous avons maintenant éclairci ce point. Hier, dans

6 votre réponse à la question de M. Lukic, vous avez parlé d'un rapport que

7 vous avez rédigé sur l'utilisation à mauvais escient de la police militaire

8 dans le théâtre des opérations de Vukovar. Dans la mesure où nous parlons

9 de police militaire, j'aimerais vous demander de nous expliquer un petit

10 peu ce qui s'est passé. Vous avez certainement conscience des règles de

11 fonctionnement des organes de sécurité et des forces armées de la

12 République fédérative socialiste de Yougoslavie. Est-ce que vous pourriez

13 nous expliquer la chose suivante ? La police militaire -- je vous renvoie

14 ici à la pièce 435.

15 Si l'on pouvait avoir ce document à l'écran, article 13, même si je

16 pense que tout le monde sait de quoi il s'agit ? Nous avons déjà lu à

17 maintes reprises, et je pense que le témoin en a connaissance puisque c'est

18 un officier. J'aimerais lui en donner lecture pour savoir de quoi il

19 s'agit.

20 La police militaire, d'un point de vue professionnel, est contrôlée

21 par un officier responsable, c'est-à-dire l'unité dont relève cette section

22 de la police militaire, et l'officier responsable de cette unité à laquelle

23 la police militaire est rattachée propose l'utilisation de la police

24 militaire. Elle est responsable de l'état de préparation de combats des

25 unités de police militaire et de l'accomplissement de leurs missions.

26 Une disposition semblable est reprise dans les règles de

27 fonctionnement des organes de sécurité, pièce 107, article 23.

28 Monsieur Karan, pouvez-vous nous expliquer en quoi consiste le rôle des

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1 organes de sécurité qui rend cet organe de sécurité responsable de

2 l'accomplissement des tâches de la police militaire ? Qu'est-ce que cela

3 représente ?

4 R. L'organe de sécurité, au moment où il se voit confier une tâche

5 par le commandant en matière de sécurité, tout dépend de l'unité impliquée.

6 Ici, on parle de la Brigade de la Garde, par exemple. Dans ce cas, il

7 s'agit d'une unité spéciale. Il y a aussi d'autres structures impliquées.

8 La chaîne de commandement et de contrôle qui s'applique à la police

9 militaire est un petit peu différente. L'organe de sécurité est, en tout

10 état de cause, responsable de l'état de préparation au combat, du moral des

11 troupes au sein de l'unité. L'organe de sécurité est également responsable

12 de la formation professionnelle parce que l'organe de sécurité est

13 responsable du recrutement des nouveaux membres de l'unité. A tout point de

14 vue, c'est une personne qui est responsable devant le commandant de l'unité

15 de l'état de l'unité.

16 L'organe de sécurité n'est pas le commandement ou le commandant de

17 l'unité de police militaire, alors la police militaire n'aurait pas de

18 commandant à proprement parler, un dirigeant d'escadron, un dirigeant de

19 section, et cetera. D'un certain point de vue, on peut considérer que

20 l'organe de sécurité est un organe consultatif du commandant; d'un autre

21 point de vue, un organe professionnel qui fait en sorte que l'unité puisse

22 agir de manière professionnelle, de manière planifiée et de manière à

23 respecter la loi dans l'accomplissement de toutes ces fonctions et de

24 toutes ces missions.

25 Q. Est-ce que cela veut dire que l'organe de sécurité est

26 responsable des agissements légaux de cette unité, est responsable aussi de

27 la manière dont cette unité doit s'acquitter de ses tâches de manière

28 planifiée, à un moment où cette unité accomplit une tâche qui lui a été

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1 confiée en passant par la chaîne de commandement logique ?

2 R. Si l'on parle ici de la Brigade de la Garde, le commandant de la police

3 militaire est celui qui est responsable de cela, parce que ce que l'on

4 regarde ici, c'est pratiquement le rôle double de l'organe de sécurité en

5 tant qu'organe consultatif auprès du commandant, sur le plan professionnel,

6 bien entendu, et cette personne est responsable de l'état de l'unité.

7 Néanmoins, cette unité n'aurait pas de commandant si l'organe de

8 sécurité faisait tout cela, donc à ce moment-là, ce serait totalement

9 superflu de payer autant de personnes pour accomplir la même tâche. Ce

10 serait superflu.

11 Q. Il me semble que dans cette disposition du règlement, et corrigez-moi

12 si je me trompe, il est stipulé que le commandant commande l'unité de

13 police militaire, mais pour ce qui est de la légalité de son utilisation,

14 c'est l'organe de sécurité qui est responsable de cela et c'est l'organe de

15 sécurité qui doit veiller à ce que cette unité agisse en conformité avec

16 les règlements et les règles dans l'accomplissement de sa tâche.

17 R. L'organe de sécurité, effectivement, doit veiller à ce que chaque

18 membre de l'unité de police ait connaissance de son mandat, de ses

19 missions, et doit veiller également à ce que chaque membre de la police

20 agisse de manière légale. L'organe de sécurité peut avoir certaines

21 responsabilités si un membre de la police militaire est en infraction des

22 règlements. Néanmoins, si un policier commet une infraction pénale, alors à

23 ce moment-là, c'est lui qui est tenu pour responsable, et non pas l'organe

24 de sécurité. C'est cela, la situation sur le plan professionnel.

25 Ce serait le commandant de la compagnie ou de la section qui serait

26 tenu pour responsable si un membre de la police militaire agissait de

27 manière illégale. A ce moment-là, seulement dans ce cas l'organe de

28 sécurité serait impliqué plutôt que le commandant de l'unité.

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1 Q. Pouvez-vous expliquer le paragraphe 2 de cet article qui dit : "Etant

2 responsable de --" ?

3 L'INTERPRÈTE : L'interprète précise que les interprètes n'ont pas le texte.

4 M. VASIC : [interprétation]

5 Q. "-- a les mêmes droits, responsabilités que les officiers des

6 différents Corps d'armées et des services et que les institutions au sein

7 des différents corps d'armée et services."

8 Quels sont ces pouvoirs et responsabilités par rapport à l'unité de

9 police militaire ?

10 R. En termes de formation, en termes d'évaluation des membres de l'unité

11 de police militaire, parce que les membres de la police militaire et leurs

12 officiers sont évalués, ensuite ils sont récompensés pour leur travail, et

13 cetera. Je ne sais pas ce que je pourrais dire d'autre.

14 Q. Merci beaucoup.

15 M. VASIC : [interprétation] J'aimerais vous demander de montrer la pièce

16 107 à l'écran, article 23, page 18.

17 Q. Au paragraphe 3 de l'article 23, il est dit --

18 R. Je ne le vois pas, je ne le vois pas.

19 Q. Excusez-moi, nous devons voir la page 18. Voilà, merci.

20 Vous voyez, Monsieur Karan ?

21 R. Oui.

22 Q. Merci. Le paragraphe 3 de l'article 23 précise : "L'engagement des

23 unités ou des membres individuels de la police militaire dans

24 l'accomplissement de leurs tâches, d'après le mandat," et cetera.

25 R. Le texte s'est déplacé, je ne peux pas voir l'article 23.

26 Q. Est-ce qu'on peut avoir la page précédente à l'écran, la page 18 ?

27 R. Maintenant, je la vois, merci.

28 Q. Je répète : "L'engagement d'unités ou de membres individuels de la

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1 police militaire dans l'accomplissement de leurs tâches dans le cadre du

2 mandat fixé par l'organe de sécurité est décidé ou déterminé par l'officier

3 de l'organe de sécurité d'après le paragraphe 1 de cet article, avec

4 l'accord de l'officier militaire de grade supérieur."

5 Ce qui m'intéresse ici, c'est la chose suivante : est-ce que cela

6 fait référence à l'ensemble des tâches accomplies par les organes de

7 sécurité en tant que protagonistes de certaines tâches et d'autres tâches

8 auxquelles ils participent avec d'autres ?

9 R. L'article 23, 3, parle des situations particulières où l'on peut voir

10 la situation où agissent en même temps l'organe de sécurité et une unité de

11 police militaire. Dans cet article, on dit de façon générale que par

12 exemple un cas où il y a infiltration d'un groupe terroriste sur un

13 territoire, dans ce cas, certains membres de la police militaire seraient

14 employés pour résoudre cette mission qui relève de notre compétence. Bien

15 sûr, l'autre, le reste de cette unité de la police militaire ne serait pas

16 employée dans ce sens. Donc, le commandant de cette unité aurait plus

17 d'éléments de contre-renseignement pour pouvoir prendre la décision

18 adéquate que les soldats qui accomplissent la tâche. C'est cela l'essence,

19 si vous voulez, de ce paragraphe ou de cet article.

20 Q. Très bien. Encore une question et ensuite la pause, puisque nous avons

21 dépassé le temps, et vous êtes sans doute fatigué.

22 Est-ce que je vous ai bien compris ? Ici, on parle des missions

23 accomplies par la police militaire alors qu'il s'agit de la compétence qui

24 relève donc des activités de la sécurité militaire ?

25 R. Oui.

26 Q. Je vous remercie de vos réponses.

27 M. VASIC : [interprétation] Monsieur le Président, je pense que le moment

28 est venu pour prendre une pause.

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1 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Très bien. Nous prenons une pause

2 jusqu'à 4 heures 10.

3 --- L'audience est suspendue à 15 heures 47.

4 --- L'audience est reprise à 16 heures 15.

5 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Vasic, vous pouvez reprendre.

6 M. VASIC : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

7 Q. Bonjour, Monsieur Karan.

8 R. Bonjour.

9 Q. Nous allons continuer avec encore une seule question concernant le

10 service de Sécurité.

11 Je voudrais demander que l'on montre la page 11 de ce document qui

12 est sur l'écran. C'est l'article 6, page 11, où l'on parle des missions des

13 organes de sécurité, donc ils sont les porteurs de ces missions.

14 R. Je ne le vois pas très bien.

15 Q. Vous allez le voir. Ce qui m'intéresse, c'est le petit B, où l'on dit :

16 "Les organes de sécurité sont les porteurs de la mission qui consiste à

17 découvrir et empêcher les activités des ennemis, qu'il s'agisse des

18 individus de groupes ou d'organisations dirigés contre les forces armées et

19 leurs membres. Il s'agit des organes de sécurité de la JNA qui vont aussi

20 s'occuper des activités concernant l'organisation de la contrebande de

21 munitions."

22 R. [aucune interprétation]

23 M. VASIC : [interprétation]

24 Q. "Et personnes qui font partie des organisations qui ont pour but de

25 détruire l'ordre social tel qu'établi par la constitution de la République

26 socialiste fédérative de Yougoslavie, qui menacent la Sûreté de l'Etat et

27 qui menacent aussi les forces armées, ou qui menacent la sécurité des plans

28 et des préparations des forces armées pour préparer la défense du pays."

Page 15595

1 Ce que je veux savoir, c'est si ces personnes que l'on qualifie de

2 rebelles, est-ce qu'on peut dire que ces rebelles sont en train de menacer

3 la Sûreté et la Sécurité de l'Etat et l'ordre social de la RSFY, tel que

4 cité dans la constitution ?

5 R. Oui, on pourrait dire cela.

6 Q. Très bien. Maintenant, je voudrais aborder un autre thème, tout autre

7 thème. Vous avez abordé ce thème quand vous avez répondu à question posée

8 par Me Lukic concernant les missions d'une section de sécurité appartenant

9 à la Brigade de la Garde. Vous, vous avez vous-même rejoint cette unité

10 dans le secteur de Vukovar et vous avez dit hier que cette unité n'était

11 pas une unité qui était supérieure par rapport aux autres unités qui

12 faisaient partie du Groupe opérationnel sud. Est-ce que je vous ai bien

13 compris ?

14 R. Non. Vous ne m'avez pas très bien compris. Cette section de sécurité

15 n'existait que dans la Brigade de la Garde. La section de sécurité n'a pas

16 son propre QG qui existerait au niveau de la Défense territoriale. Je pense

17 que la Brigade motorisée qui est arrivée de Kragujevac dans la région de

18 Vukovar ne disposait pas d'une unité de sécurité. Je pense que la seule

19 unité, la seule brigade de toutes les brigades de l'ex-JNA qui disposait

20 d'une section chargée de la sécurité, c'était la Brigade de la Garde.

21 Q. Cette section chargée de la sécurité a été créée au niveau de la

22 Brigade de la Garde ainsi que dans les unités plus importantes au niveau

23 des Corps d'armées et des armées, n'est-ce pas ?

24 R. Oui.

25 Q. Au niveau de l'armée, on a un département de sécurité, n'est-ce pas ?

26 R. Oui, à ce niveau stratégique d'une armée, à savoir l'armée de terre, la

27 marine, et cetera, oui on a ces unités-là.

28 Q. Bien. La situation est telle qu'elle est, et vous dites que la section

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1 de sécurité de la Brigade de la Garde n'était pas supérieure aux organes de

2 sécurité des unités qui faisaient partie du Groupe opérationnel sud ?

3 R. Oui, c'est exact. Ils ne leur étaient pas supérieurs.

4 Q. Pourriez-vous nous dire alors qui procédait au contrôle de contre-

5 renseignements et qui dirigeait au niveau professionnel ces unités qui

6 faisaient pourtant partie du Groupe opérationnel sud sans pour autant

7 relever de la Brigade de la Garde ?

8 R. J'ai dit hier que l'organe de sécurité chargé de la 80e Brigade de

9 Kragujevac se trouvait au niveau du Corps d'armée de Kragujevac.

10 Q. C'est le 24e Corps d'armée ?

11 R. Oui, c'est bien le 24e ou le Corps de Kragujevac.

12 Q. Qu'en est-il des autres unités ?

13 R. Pour le QG de la Défense territoriale, la structure de contrôle ou de

14 commandement ne pouvait pas venir que du 1er District militaire.

15 Q. En ce qui concerne la 20e Brigade de Partisans, est-ce que c'était

16 aussi le commandement se trouvant au numéro du 24e Corps d'armée qui était

17 chargé de cela ?

18 R. Je ne m'en souviens pas.

19 Q. Cette brigade est venue de Pozarevac, elle a été remplacée par la 80e

20 Brigade motorisée, ceci dans la région de Vukovar.

21 R. Je ne saurais affirmer cela. Je ne sais pas quelle a été la division à

22 laquelle elle appartenait, si elle appartenait à la division de Danube.

23 Elle aurait pu dépendre du Corps d'armée de Novi Sad. Si elle dépendait

24 d'une autre division, enfin, de la 2e Division, dans ce cas-là elle

25 relevait du 1er District militaire, mais je ne suis pas sûr de cela.

26 Q. Je voudrais savoir autre chose, Vu vos réponses, si le service de

27 Sécurité du 24e Corps d'armée est responsable de l'organe de sécurité de la

28 80e Brigade motorisée, s'il reçoit des rapports de cette unité qui au sein

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1 de ce 24e Corps envoie ce rapport quant aux activités du 80e Brigade à

2 Vukovar.

3 R. On les envoie à l'organe de sécurité, au département de sécurité du 1er

4 District militaire.

5 Q. L'organe de sécurité du QG de la Défense territoriale lui aussi envoie

6 ses rapports au département chargé de la sécurité du 1er District militaire.

7 Est-ce que vous conviendrez que pour ce territoire-là, le territoire

8 couvert par ces unités, que le département de sécurité du 1er District

9 militaire serait celui qui réunirait les informations et qui dirigerait du

10 point de vue professionnel ou coordonnerait plutôt le travail de tous les

11 organes sur son territoire ?

12 R. Oui, De tout sauf de l'organe de sécurité de la Brigade de la Garde.

13 C'était la situation sur le terrain, si vous voulez.

14 Q. Vous avez dit que vous, en tant que section chargée de la sécurité de

15 la Brigade de la Garde, vous envoyiez vos rapports directement à l'adjoint

16 du chef du cabinet du secrétariat fédéral chargé du renseignement et --

17 R. De la sûreté, pas du renseignement.

18 Q. Oui, excusez-moi, de la sûreté.

19 Est-ce que cela veut dire que toutes les informations venant de la

20 région de Vukovar concernant toutes les unités qui s'y trouvaient, y

21 compris la Brigade de la Garde, étaient réunies au niveau du 1er Département

22 de la direction de la sécurité qui recevait les rapports aussi bien du

23 département de sécurité du 1er District militaire que de l'adjoint du chef

24 du cabinet du secrétariat de la Défense fédérale chargé du renseignement ?

25 R. Oui. C'est très précis et c'est parfaitement exact.

26 Q. le département opérationnel de la direction de sécurité connaissait la

27 situation sur la base des rapports venant du territoire tout entier où se

28 déroulaient les opérations de combat, ceci au niveau de Vukovar ?

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1 R. C'est exact.

2 Q. Merci. Vu ce que vous avez dit hier quand vous avez parlé de votre

3 arrivée dans la région, par rapport au fait qu'à un moment donné les

4 représentants du département de sécurité du 24e Corps sont venus vous voir

5 pour vous poser des questions concernant la situation sur le terrain,

6 puisque la 80e Brigade motorisée devait intervenir sur ce terrain et leur

7 aurait été subordonnée, Vu ce que vous avez dit à ce sujet hier, à savoir

8 que vous avez donné à cet officier toutes les informations nécessaires, je

9 pense que vous parliez du lieutenant-colonel Zika Petrovic ?

10 R. Oui, Zika Petrovic, et il y avait un autre. Zika, je le connaissais de

11 Bijeljina.

12 Q. Est-ce que le nom du lieutenant-colonel ou du colonel Jevtic vous dit

13 quelque chose ?

14 R. Non, ou plutôt, je n'en suis pas sûr. Ce prénom ne me dit rien.

15 Q. Après, vous avez dit que le chef de sécurité de la 80e Brigade est venu

16 vous voir à partir du moment où cette brigade était déjà dans la région de

17 Vukovar. Vous avez dit que vous avez discuté, si je vous ai bien compris,

18 de l'aide future ou d'une coopération future. Est-ce que je vous ai bien

19 compris ? Parce que vous pourriez peut-être me dire tout simplement de quoi

20 vous avez parlé avec ce chef.

21 R. C'est presque tout ce que vous avez dit. Il n'était pas nécessaire

22 qu'il connaisse la situation précise sur le terrain. Nous nous sommes dit,

23 si le besoin se présentait, que chacun allait décider de cela dans sa zone

24 de compétence. Si les besoins se présentaient, nous allions échanger les

25 informations, nous allions nous consulter. Voilà, c'est à peu près cela que

26 nous nous sommes dit. Il n'y a pas vraiment eu de trace écrite de tout

27 cela.

28 Q. Hier, vous avez dit qu'il n'a pas envoyé des rapports ni à vous ni à

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1 votre département et qu'il ne venait pas aux réunions d'information de

2 façon régulière, et qu'il n'avait pas de contact non plus avec d'autres

3 officiers de votre département.

4 R. Non, je n'ai pas dit qu'il ne venait pas régulièrement. J'ai dit qu'il

5 ne venait pas du tout aux réunions d'information puisqu'il n'avait pas

6 besoin de venir. Nous ne l'avons pas invité, d'ailleurs. Cela étant dit, je

7 savais que de toute façon, il n'était pas en mesure d'assister à ces

8 réunions d'information. Comme je vous ai déjà dit, je l'ai vu au maximum

9 trois fois, deux ou trois fois. Je ne me souviens pas d'une conversation

10 particulièrement importante que nous avons eue concernant soit la direction

11 ou le commandement de la brigade.

12 Q. Merci. Que me dites-vous si je vous disais qu'ici, nous avons entendu

13 un témoin dire que l'organe de sécurité de la 80e Brigade venait faire des

14 rapports devant vous en personne, puisque vous étiez là, les représentants

15 d'un commandement supérieur; est-ce exact ?

16 R. Je ne me souviens pas de cela.

17 M. VASIC : [interprétation] Monsieur le Président, je fais référence à la

18 déposition figurant aux pages 8 697 et 8 698.

19 Q. Encore une fois, si je vous disais que nous avons entendu un témoin ici

20 dire que ce chef de sécurité de la 80e Brigade venait de façon quotidienne

21 pour vous présenter des informations, est-ce que vous pourriez accepter

22 cela comme étant une information véridique ?

23 R. Non, c'est hors de question. Il n'y avait absolument pas de visites

24 quotidiennes, il n'y avait pas briefings quotidiens. Je le démens, je dis

25 que ce n'est pas vrai, tout simplement.

26 M. VASIC : [interprétation] Je fais référence à la page 8 653.

27 Q. Monsieur Karan, je vous remercie, mais maintenant je voudrais vous

28 demander de revenir sur les événements qui se sont produits le 18, le 19 et

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1 le 20. Je vous demande si vous vous souvenez de la date à laquelle Vesna

2 Bosanac a été emmenée à Negoslavci.

3 R. Non. Je n'ai pas vu Vesna Bosanac, je ne l'ai pas vue depuis le moment

4 où Sljivancanin m'a ordonné d'apporter l'argent dans le bureau et

5 d'établir, par le biais d'une commission, quel était le montant exact.

6 C'est une proposition que je lui ai faite. Sljivancanin, il m'a donné un

7 ordre allant dans ce sens suite à cette proposition. Je ne l'ai pas vue à

8 partir de ce moment-là jusqu'au 20, tôt dans l'après-midi.

9 Q. Est-ce que vous savez comment elle est arrivée à Vukovar le 20, le

10 lendemain, comme vous nous dites ? Qui l'a emmenée à Vukovar, comment, et

11 cetera ?

12 R. Non.

13 Q. Lorsque vous êtes arrivé à l'hôpital, est-ce que vous pouvez nous dire

14 où est-ce que vous avez vu Mme Bosanac ? Il était quelle heure à peu près ?

15 Elle était avec qui ?

16 R. Vous faites référence à la date du 20 ?

17 Q. Oui, à partir du moment où vous la revoyez le 20.

18 R. Elle était dans ce même bureau où nous étions ensemble la veille. Je ne

19 sais pas s'il y avait d'autres personnes là-bas, je sais qu'il y en avait

20 plusieurs, qu'on était plusieurs, mais je ne me souviens pas de toutes les

21 personnes qui étaient présentes. Je sais que le Dr Njavro était à peu près

22 présent, il allait et venait, mais pour les autres personnes, je ne saurais

23 pas vous donner les noms de ces autres personnes.

24 Peut-être Ante Aric y était aussi, mais je n'en suis pas sûr.

25 Q. Pourriez-vous nous dire à quelle heure à peu près vous êtes

26 arrivé à ce bureau au moment où vous la voyiez ?

27 R. C'est à peu près 8 heures et demie, 9 heures. Vous savez, cela

28 fait 15 ans que je n'ai pas réfléchi à ce sujet.

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1 Q. Je suis tout à fait d'accord avec vous.

2 R. Il était assez tôt dans la journée, je dirais 8 heures et demie, 9

3 heures.

4 Q. Je vais poser la question autrement pour vous faciliter les choses.

5 Est-ce que cela s'est produit avant la réunion qui a eu lieu avec le

6 personnel médical ou après la réunion dont vous avez entendu parler ?

7 R. C'était après, parce que c'est à ce moment-là que j'ai appris qu'elle

8 avait été démise de ses fonctions, qu'il y avait un autre directeur. Mais à

9 l'époque, cela ne me semblait pas être d'une importance cruciale pour que

10 ceci se grave vraiment dans ma mémoire.

11 Q. Je vais faire une petite digression et je vous pose la question

12 suivante : vous souvenez-vous ou savez-vous où dormait Marin Vidic la nuit

13 entre le 19 et le 20 novembre, s'il dormait d'ailleurs cette nuit-là ?

14 R. Il a été avec nous, et après cela, même après que nos supérieurs

15 hiérarchiques soient venus et repartis, c'est l'équipe des techniciens de

16 la police scientifique qui a pris en charge Marin Vidic. Il fallait qu'ils

17 fassent quelques entretiens avec lui. Cela étant dit, je ne sais pas où

18 est-ce qu'il a passé la nuit et s'il a dormi du tout cette nuit-là. Ils

19 l'ont emmené quelque part, je ne sais pas où.

20 Q. Quand est-ce que vous le revoyez pour la prochaine fois ?

21 R. La fois suivante, je le vois dans le deuxième blindé qui faisait partie

22 de la colonne qui se dirigeait vers Sremska Mitrovica.

23 Q. Vesna Bosanac, était-elle toujours à l'hôpital au moment où vous

24 quittez l'hôpital ?

25 R. Oui.

26 Q. Est-ce que vous n'avez entendu jamais dire que Vesna Bosanac et le Dr

27 Njavro et Marin Vidic étaient dans la caserne le 20 novembre, ou est-ce que

28 vous n'êtes pas au courant de cela, tout simplement ?

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1 R. Non, je ne suis pas au courant de cela. Vu le temps qui s'est déroulé,

2 enfin, maintenant oui, j'ai entendu parler de cela avec le temps qui est

3 passé, mais à l'époque non, je n'étais absolument pas au courant de cela.

4 Q. Pourriez-vous me dire à quel moment vous avez entendu dire que Vesna

5 Bosanac et Maric Vidic étaient venus à Negoslavci, et ceci le 20 novembre

6 1991 ?

7 R. Je vais être très précis. Je ne les ai pas vus arriver et je ne sais

8 pas comment ils sont arrivés là. Tout ce que je peux vous dire, c'est que

9 je les ai vus dans le cadre d'une colonne déjà formée, si l'on peut définir

10 une colonne militaire comme une colonne qui est constituée de trois ou plus

11 véhicules. Je peux vous dire que c'est ce jour-là que je les ai vus à

12 Negoslavci le 20, si on ne tient pas compte du fait que j'ai déjà vu Vesna

13 Bosanac un petit peu plus tôt dans la matinée, ainsi que le Dr Njavro.

14 Q. Est-ce que vous savez qui a donné l'ordre de les incorporer dans la

15 colonne ?

16 R. J'ai reçu cet ordre dans le bureau même où se trouvait Vesna Bosanac,

17 qui était en train de parler avec la cellule de Crise. C'est là que j'ai

18 reçu l'ordre d'aller chercher cette colonne à Negoslavci pour l'escorter

19 jusqu'à Mitrovica où il fallait amener Marin Vidic et Bosanac. C'était un

20 ordre venant du commandant Sljivancanin.

21 Q. A quel moment vous avez vu ce convoi et ces personnes au sein de ce

22 convoi ?

23 R. C'était peut-être à 9 heures, peut-être à 8 heures du soir, en tout

24 cas, il faisait nuit.

25 Q. Si je vous disais que cela se produit vers 11 heures, qu'il faisait

26 vraiment nuit noire, parce qu'il fait nuit au mois de novembre déjà à 5

27 heures de l'après-midi, est-ce que vous seriez d'accord avec moi, puisque

28 nous avons ici entendu une déposition à la page numéro 695 indiquant que

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1 Mme Bosanac avait été interrogée le soir du 20 à 10 heures du soir dans la

2 caserne de Vukovar et qu'elle ne pouvait pas être dans le convoi ?

3 R. Je ne pense pas que ceci soit exact, parce que je sais à quel

4 moment je suis arrivé à Bijeljina. Je sais exactement du temps qu'il nous

5 fallait même avec tout ce temps qu'on a perdu à Mitrovica en cherchant

6 notre chemin. Je sais que ceci ne pouvait pas avoir eu lieu à 22 heures.

7 C'était avant cela, j'en suis sûr, parce que si tel était le cas, je serais

8 arrivé à Mitrovica vers minuit, et je suis sûr que j'étais arrivé plus tôt

9 que cela.

10 Q. Pourriez-vous nous dire, si vous vous en souvenez, quel est le chemin

11 que vous avez emprunté pour vous rendre à Mitrovica ? Est-ce que vous avez

12 pris la route principale ou est-ce que vous avez fait des détours ?

13 R. Nous avons pris la route la plus brève, la plus directe qui soit,

14 l'autoroute qui mène à Sremska Mitrovica en passant par Berak, Sid, et

15 cetera.

16 Q. Je vous pose cette question puisqu'ici on a entendu un témoin dire que

17 cette colonne est allée à Srmeska Mitrovica en passant par Belgrade, et là

18 je fais référence à la page 1 557.

19 Est-ce que vous avez des informations à ce sujet, telles que la colonne

20 serait arrivée tôt d'abord à Belgrade, à Dedinje; ensuite, est-ce qu'elle

21 se serait dirigée vers Sremska Mitrovica ?

22 R. Ce n'est pas exact. Je l'affirme en toute responsabilité puisqu'il n'y

23 avait aucun besoin de passer par Belgrade. Ensuite, la mission était claire

24 et simple : il s'agissait de transporter, d'escorter ces personnes de

25 Negoslavci à Mitrovica. Je ne pouvais pas, ni moi ni la personne qui était

26 le chef de la colonne, changer cet ordre de quelque façon que ce soit. Nous

27 ne l'avons pas changé, nous l'avons respecté tel quel.

28 Q. Si vous êtes parti directement à Sremska Mitrovica sans vous arrêter où

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1 que ce soit, est-ce qu'il est possible que vous soyez arrivé à Mitrovica à

2 4 heures du matin et que c'est pour cela précisément que les gardiens de la

3 prison à Sremska Mitrovica n'étaient pas d'accord ? Là, je fais référence à

4 la page 1 557 à nouveau. Est-ce là la raison pour laquelle les gardiens de

5 la prison n'étaient pas contents ?

6 R. Non, c'est parfaitement inexact, puisqu'à cette époque-là, à ce moment-

7 là, j'étais à Bijeljina, chez moi. J'étais en train de dormir.

8 Q. Dites-moi, Monsieur Karan, ces blindés de transport de troupes vous ont

9 escorté jusqu'à Sid ou plus loin que cela ?

10 R. Le véhicule de la police de marque Puch dans lequel se trouvait feu

11 capitaine Mile Bozic, ainsi que deux véhicules blindés de transport de

12 troupes nous ont quittés. Puisque je connaissais très bien Mitrovica, j'ai

13 pris le chemin le plus direct pour arriver en traversant des villages

14 jusqu'à la prison.

15 Q. Je vais vous poser quand même une question au sujet de Marin Vidic.

16 Est-ce que vous savez d'où l'on a fait venir Marin Vidic quand on l'a

17 emmené à Negloslavci le 19 ? Est-ce que vous savez à quel moment cela s'est

18 produit ?

19 R. Je l'ai vu, Marin Vidic, j'étais avec lui dans le bureau de la cellule

20 de Crise dans l'hôpital. Ensuite, il est parti. Il avait une mission à lui.

21 Je ne l'ai pas vu après cela, avant que l'on arrive au bureau des services

22 de Sécurité dans la soirée. C'était vers 21 heures, 22 heures. On l'a fait

23 venir après notre réunion d'information habituelle, je dirais une heure,

24 une heure et demie après cela. Je le sais parce que je me souviens qu'il y

25 avait des généraux qui sont venus dans nos bureaux après 22 heures, à peu

26 près.

27 Q. Pouvez-vous me dire qui a donné l'ordre que l'on fasse venir Marin

28 Vidic et qui l'a emmené ?

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1 R. Je ne sais pas qui l'a emmené puisque j'étais occupé. Je faisais

2 quelque chose pendant cela. Je peux, cela étant dit, imaginer qui a donné

3 l'ordre que l'on fasse venir, mais je ne sais pas si c'est vraiment

4 valable, mes suppositions.

5 Q. Non, nous ne pouvons pas accepter vos suppositions. Nous allons passer

6 à un autre sujet.

7 Pouvez-vous me dire qui a eu ces premiers entretiens avec Marin

8 Vidic ?

9 R. Vous voulez dire à l'endroit où se trouvaient les organes de sécurité,

10 ou ailleurs ?

11 Q. Non, je veux parler de l'immeuble de l'organe de la sécurité où il a

12 été emmené.

13 R. Je vous le dis à nouveau; j'en ai déjà parlé hier, d'ailleurs. Ce

14 n'était pas un entretien typique classique : Monsieur, donnez-nous vos

15 coordonnées, nom, prénom de votre père, nom de la mère, et cetera. Ce

16 n'était pas du tout ce genre d'entretien. Nous avons commencé à

17 communiquer. D'ailleurs, je pourrais dire que c'est lui, en quelque sorte,

18 qui a donné le ton et qui a, en quelque sorte, instauré cette atmosphère

19 décontractée. Je peux vous dire que cela nous convenait tout à fait à ce

20 moment-là. Il n'y avait pas de relations officielles. Il n'y avait pas de

21 brutalité, il n'y avait pas d'insultes, encore moins l'utilisation ou

22 l'usage de la force physique.

23 Je peux dire que c'était un peu comme si nous étions amis, comme si

24 nous nous étions rencontrés. Voilà comment les choses se sont passées.

25 Voilà quelle est la tournure qu'a prise la situation. Je ne sais pas

26 pourquoi ni comment, d'ailleurs, mais simplement parce que c'est ce genre

27 de personne. Il sait comment se débrouiller dans une situation difficile et

28 il a certainement pensé que les choses seraient plus faciles pour lui

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1 ainsi.

2 Q. Je comprends cela. Mais ma question était très, très formelle. Il n'a

3 pas été appréhendé, il n'a pas été arrêté ?

4 R. Non, je ne sais pas comment il se sentait, lui, mais à ce moment-là,

5 cela n'est pas quelque chose que nous lui avons dit. De toute façon,

6 c'était le cadet de nos soucis de lui dire cela et de lui dire ce que cela

7 représentait pour lui de se trouver là où il se trouvait.

8 Est-ce que cela aurait changé grand-chose ? Si vous dites à quelqu'un

9 : vous êtes arrêté, vous êtes en état d'arrestation, ou si cette personne

10 est emmenée vers ce genre d'endroit, est-ce que cela change grand-chose à

11 sa situation ?

12 Q. Je vous avais demandé s'il avait été convoqué à un entretien, s'il a

13 été arrêté. S'il a été convoqué à un entretien, est-ce qu'il a été convoqué

14 en sa qualité d'homme politique ou en tant que membre des forces

15 territoriales de Vukovar ou de l'état-major de Vukovar, le centre de

16 Vukovar ?

17 M. LUKIC : [interprétation] Objection, je vous prie.

18 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous allons, dans un premier temps,

19 entendre la réponse à la question.

20 LE TÉMOIN : [interprétation] Il a été emmené et conduit là, afin de

21 répondre à une sorte d'entretien, mais la situation a été telle que

22 l'entretien n'a pas véritablement eu lieu. C'est ce que je vous ai déjà dit

23 hier. Mais je vous ai relaté déjà comment il s'est présenté. C'était une

24 personnalité politique, c'était le commissaire du gouvernement croate pour

25 le secteur de Vukovar. Il allait présenter sont point de vue à propos de la

26 politique générale de la République de la Croatie vis-à-vis de la JNA, il

27 allait parler de Tudjman en des termes péjoratifs. Nous pensions que cela

28 aurait un effet de propagande si cela devait ou venait à être diffusé en

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1 Serbie et relayé à la télévision serbe.

2 Toutefois, lorsque le général Vasiljevic est arrivé, ainsi que

3 Tumanov, nous avons changé d'intention, du fait de leur position, de ce

4 qu'ils ont dit, parce qu'ils ont parlé. Ils nous ont dit qui était cet

5 homme, s'il allait s'exprimer contre son propre président, contre une

6 politique qu'il avait jusqu'à présent adoptée lorsqu'il se trouvait à

7 l'hôpital, lorsque l'armée avait pris des mesures. Cela aurait été

8 complètement absurde. Cela n'aurait pas eu l'effet que nous pensions que

9 cela allait avoir. Nous avons marqué notre accord avec cela, je dois dire

10 que cela, nous avions fait, mes collègues et moi, une très piètre

11 évaluation de la situation.

12 M. VASIC : [interprétation] Je vous remercie beaucoup. Maître Lukic. En

13 d'autres termes, puis-je poursuivre ?

14 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Je pense que nous avons raté le

15 moment, de toute façon.

16 M. VASIC : [interprétation]

17 Q. Vous parlez de ces généraux. Le général Tumanov et le général

18 Vasiljevic, est-ce qu'ils sont arrivés ensemble ou est-ce qu'ils sont

19 arrivés séparément ?

20 R. Si vous me demandez comment ils sont entrés dans la pièce où nous nous

21 trouvons, je peux vous dire qu'ils sont arrivés ensemble parce qu'il y en a

22 un qui est arrivé, puis l'autre était tout près du pas de la porte. Ils

23 sont arrivés dans la pièce ensemble. Pour ce qui est de savoir s'ils sont

24 arrivés ensemble vers la zone de combat, là je ne peux vous le dire de

25 façon précise.

26 Q. Bien. Est-ce que vous vous souvenez, et nous allons parler du 19 et du

27 20 novembre, maintenant, est-ce que vous vous souvenez, disais-je, combien

28 de fois est-ce que Marin Vidic a été conduit ou emmené à l'immeuble de

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1 l'organe ou de la section de sécurité; en d'autres termes, dans cette

2 maison où vous vous trouviez ?

3 R. Bien sûr que je m'en souviens. Outre cette fois-là, la soirée du 19,

4 Marin Vidic n'est plus revenu dans cet endroit.

5 Q. Si je vous disais que le 20 novembre, Marin Vidic a été emmené dans

6 votre bureau vers 22 heures ou 23 heures, qu'il a parlé à trois capitaines,

7 qu'à la suite de cela, il a été placé en état d'arrestation, qu'il a été

8 enfermé dans le sous-sol, qu'il n'est jamais parti avec la colonne qui se

9 dirigeait vers Sremska Mitrovica, qu'auriez-vous à me dire alors ?

10 R. Je vous dirais que cela signifie que je suis allé deux fois à Sremska

11 Mitrovica avec Vesna Bosanac, que je suis allé deux fois à Bijeljina, que

12 j'ai eu deux fois des problèmes avec les gens du cru, que tout cela n'est

13 pas vrai, que je suis allé chercher la guitare deux fois. Tout cela n'est

14 pas vrai.

15 Q. Merci. Si je vous disais que nous avions entendu ce genre de moyen de

16 preuve ici dans ce prétoire, que Marin Vidic ne se trouvait pas dans le

17 convoi avec M. Njavro avec Vesna Bosanac et Ante Aric, qu'auriez-vous à me

18 dire ?

19 R. C'est un flagrant mensonge parce que Marin Vidic, Bili, avec le Dr

20 Njavro, le Dr Vesna Bosanac, Ante Aric, ont été emmenés à Sremska

21 Mitrovica, la prison qui s'y trouvait là la nuit du 20. C'est la seule

22 vérité qui tienne.

23 Q. Si je devais vous dire que nous avons entendu un témoignage, une

24 déposition ici suivant laquelle après que Vesna Bosanac ait été emmenée

25 depuis la caserne et après avoir été interrogée, vers 22 heures toujours le

26 20, elle a été ensuite conduite à Sremska Mitrovica dans un convoi, elle a

27 eu cet entretien à 22 heures que Marin Vidic est resté, lui, dans la

28 caserne, qu'elle l'a revue à Zagreb après ces événements, qu'auriez-vous à

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1 me dire ?

2 R. Je ne sais pas qui a témoigné de la sorte. Ce que je peux vous dire, je

3 peux vous décrire comment la situation s'est déroulée. La seule vérité est

4 la vérité que je vous expose maintenant. Ce que je peux vous dire, c'est

5 que j'ai remis ces quatre personnes à la prison de Sremska Mitrovica dans

6 un convoi. Je vous ai décrit cela, puis ensuite je suis allé à Bijeljina.

7 C'est cela qui correspond à la vérité, rien d'autre. En fait, je ne peux

8 pas vous dire quelle était l'apparence de Vesna Bosanac lorsqu'elle est

9 arrivée là-bas, parce qu'il ne serait pas véritablement très agréable de

10 parler de ce genre de chose devant Madame et Messieurs les Juges. Vous

11 savez qu'il y a des gens qui mentent froidement.

12 Q. Je dirais que je vais vous donner les références de ce que je viens

13 d'avancer au témoin. Il s'agit des pièces 1557 et 695.

14 Le fait que Vesna Bosanac était conduite là-bas ne fait pas l'objet

15 de discussion. Ce qui fait l'objet de discussion, c'est justement la

16 présence de Marin Vidic, Bili, dans le convoi. Est-ce que vous êtes sûr que

17 vous l'avez vu, qu'il faisait partie de ce convoi ?

18 R. Je ne sais pas combien de fois il va falloir que je vous le dise. On

19 m'a confié cette mission, on m'avait demandé de conduire cette personne,

20 j'ai effectué, j'ai exécuté ma mission, j'ai emmené ces personnes à Sremska

21 Mitrovica ce jour-là. Il se peut qu'il y ait une marge d'erreur d'une

22 heure, je dois m'excuser parce que je ne vous ai pas peut-être donné la

23 date ou l'heure exacte.

24 Je dois que cela signifierait que je n'ai pas exécuté l'ordre émanant

25 de mon supérieur. J'ai reçu cet ordre, ce n'est pas la peine d'en discuter.

26 Q. Je vous remercie. Une autre chose : après que vous êtes parti avec le

27 convoi, vous ne savez pas si les généraux Vasiljevic et Tumanov, les

28 généraux de la sécurité, est-ce qu'ils sont revenus à Negoslavci ?

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1 R. Non, nous sommes restés là-bas avec eux aussi longtemps qu'ils l'ont

2 souhaité. Ce ne fut pas une très longue conversation, ils étaient plutôt

3 satisfaits. Ils ont quitté notre bâtiment; je ne sais pas où ils sont

4 allés, d'ailleurs. D'ailleurs, on ne me l'a pas dit.

5 Q. Je vous remercie, Monsieur Karan, d'avoir répondu à toutes mes

6 questions, ce qui a été un peu long. J'en ai terminé avec mon contre-

7 interrogatoire et je vous remercie.

8 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Maître Borovic, je vous prie.

9 M. BOROVIC : [interprétation] Monsieur le Président, Madame, Messieurs les

10 Juges, bonjour.

11 Contre-interrogatoire par M. Borovic :

12 Q. [interprétation] Bonjour, Monsieur Karan.

13 R. Bonjour.

14 Q. Est-ce que vous savez qui est le capitaine Miroslav Radic ? Que savez-

15 vous à son sujet ?

16 R. Lorsque je suis arrivé dans la zone de combat, je ne savais pas de qui

17 il s'agissait. Je pense d'ailleurs que j'ai entendu parler de lui à la

18 chute de Vukovar, c'est d'ailleurs là que nous avons été présentés lorsque

19 l'opération se trouvait dans sa phase finale.

20 Q. Merci. Lorsque Me Lukic vous a posé quelques questions hier, vous lui

21 avez dit que vous aviez parlé avec le Dr Njavro et qu'à cette occasion,

22 vous lui aviez posé une question à propos de votre ami, le Dr Radimir

23 Dejanovic; est-ce que cela est exact ?

24 R. Oui.

25 Q. Est-ce que vous auriez, je vous prie, l'amabilité de nous dire sur quoi

26 a porté votre conversation et que savez-vous de Radomir Dejanovic, et ce, à

27 l'attention de la Chambre de première instance ?

28 R. Oui, tout à fait. Lorsque j'ai parlé au capitaine Simic, il m'a montré

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1 ou, plutôt, il m'a dit : voilà, cette personne est le Dr Njavro. Ensuite,

2 je pense que je lui ai couru après, je l'ai rattrapé, je voulais lui poser

3 la question suivante : est-ce que vous connaissez le Dr Dejanovic ? Il m'a

4 répondu par l'affirmative. Je lui ai demandé où se trouvait-il. Il m'a

5 dit : il se trouve à Borovo Selo. Ensuite, je lui ai dit : il se trouve que

6 c'est un de mes très bon amis, c'est un camarade d'école, je suis allé à

7 l'école avec lui à Belgrade. Je n'ai pas précisé de quelle école il

8 s'agissait, et voilà, voilà la teneur de notre conversation à propos du

9 Dr Dejanovic.

10 Q. Merci. Est-ce que Radomir Dejanovic, est-ce qu'il est né en 1956 dans

11 le village de Branjina, Beli Manastir ?

12 R. Je n'en sais rien. Je sais qu'il a le même âge que moi parce que nous

13 sommes allé à l'école ensemble. Nous étions d'ailleurs dans la même classe

14 et nous avons passé l'examen ou le contrôle médical la même année pour

15 l'école supérieure militaire. Bon, je ne sais pas s'il est natif de ce

16 village. Je sais où est né son père, je connais son père. Je leur ai rendu

17 visite, je sais que Mihajlo enseignait la musique à l'école de Bobota, je

18 sais qu'il jouait du tambura, c'est un instrument typique de Kordun. Je

19 sais que sa mère travaillait dans un atelier de chaussures à Borovo. Je

20 sais que son père ainsi que le frère de son père étaient natifs du village

21 de Vera, près de Vukovar, et qu'ils ont construit une maison ensemble à

22 Bele Vode, dans un quartier de Belgrade, que Radomir a vécu dans cette

23 maison lorsqu'il a dans un premier temps étudié ou suivi les cours de

24 l'école dentaire. Ensuite, il a changé d'école. Je sais, je connais tous

25 ces détails parce que nous étions amis.

26 Q. Il a étudié, il a fait ses études à Belgrade et il était chirurgien à

27 Vukovar ?

28 R. Je savais qu'il souhaitait devenir chirurgien. C'est ce qui l'a poussé

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1 à quitter l'académie militaire après le premier exercice sur le terrain.

2 D'ailleurs, il m'a un peu piégé parce que nous étions véritablement

3 de très bons amis. J'étais un étudiant qui avait de très bonnes notes.

4 J'étais censé aller étudier à l'académie technique de Zagreb. Il n'était

5 pas aussi bon étudiant que moi. Il m'a persuadé - nous n'étions que de

6 jeunes garçons à l'époque - il m'a persuadé, il m'a dit qu'il fallait que

7 j'aille à l'académie militaire d'infanterie parce que nous allions devenir

8 tous les deux généraux, et je me suis dit que ce serait facile et que je

9 pourrais devenir effectivement général.

10 M. BOROVIC : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, les références

11 relatives à ces détails se trouvent dans la pièce à conviction 350. Le

12 compte rendu des pages 1 639 à 1 640 contient également ces références.

13 Puisque votre réponse comporte de nombreux détails, vous trouverez

14 également des références aux pages 1 678 à

15 1 681.

16 Je vois d'ailleurs qu'il y a une erreur qui s'est glissée dans le

17 compte rendu d'audience. Nous devrions avoir 1 678 et 1 681, de la page 1

18 678 à 1 681. Les chiffres ne sont pas exacts, 1 678 et 1 681.

19 Q. Vous avez fait référence à Ante Aric. Quand l'avez-vous vu pour la

20 première fois, à cette époque-là ?

21 R. La première fois que j'ai entendu le nom d'Ante Aric, c'était le Dr

22 Vesna Bosanac, d'ailleurs, qui l'a mentionné. Je l'ai rencontré dans la

23 salle qu'elle appelait la salle pour la cellule de Crise. C'était un homme

24 jeune, un bel homme, il avait une barbe qui commençait à pousser à ce

25 moment-là. En dépit de cela, je dirais que c'était un bel homme.

26 Q. Merci. Est-ce que vous vous souvenez des chaussures qu'il portait ?

27 R. Oui. Il portait des brodequins jaunes, ce qu'on appelait des bottes

28 canadiennes, le type de brodequins qui étaient portés par les membres du

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1 ZNG. D'ailleurs, je lui ai dit, je lui ai posé la question. Je lui ai dit :

2 mais si vous êtes médecin, où avez-vous obtenu ces brodequins ? Il les a

3 enlevés immédiatement et il a mis des chaussures tout à fait ordinaires.

4 M. BOROVIC : [interprétation] Madame, Messieurs les Juges, vous trouverez

5 les références relatives à ces questions au compte rendu d'audience, à la

6 page 1 535 du compte rendu d'audience.

7 Q. Auriez-vous l'amabilité, je vous prie, de développer un peu, à la suite

8 d'une question qui vous a été posée par Me Vasic ? Vous êtes arrivé à

9 Sremska Mitrovica, vous y êtes arrivé avec le capitaine Bozic, vous y aviez

10 conduit le Dr Njavro avec les autres; c'est cela ?

11 R. Oui.

12 Q. Dans ce convoi, comme vous l'appelez, est-ce que le capitaine Radic

13 s'est trouvé avec vous à vos côtés, à un moment donné ? Je parle du convoi

14 qui allait Sremska Mitrovica.

15 R. Non, jamais.

16 Q. Merci. Vous étiez capitaine de première classe. Quel type d'uniforme

17 portiez-vous et où se trouvaient, sur votre uniforme, les insignes

18 correspondant à votre grade ?

19 R. J'avais l'uniforme M-77, c'est le type d'uniforme. J'arborais mes

20 quatre étoiles qui se trouvaient dans un cadre au niveau de mon école.

21 Q. Pour un capitaine, comment est-ce que sont les insignes ?

22 R. Il y a trois étoiles; pour capitaine de première classe, il y a quatre

23 étoiles.

24 M. BOROVIC : [interprétation] Vous trouverez les références relatives à cet

25 élément de preuve à la page 1 634, lignes 15 à 19.

26 Q. Puis finalement, Monsieur, dans l'hôpital, au moment où vous vous êtes

27 trouvé dans l'hôpital, est-ce que vous avez vu ou entendu le capitaine

28 Radic ? Est-ce que vous l'avez vu ou entendu participer d'une façon ou

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1 d'une autre aux activités relatives à la sélection, au tri, à toute autre

2 activité que vous avez pu observer ?

3 R. Je ne connaissais pas cet homme. Lorsque je le regarde maintenant,

4 lorsque je pense à l'époque où je le connaissais, je répondrais non à votre

5 question.

6 M. BOROVIC : [interprétation] Je vous remercie, je n'ai plus d'autres

7 question.

8 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci, Maître Borovic.

9 Monsieur Moore.

10 Contre-interrogatoire par M. Moore :

11 Q. [interprétation] Monsieur Karan, j'aimerais dans un premier temps

12 préciser certains éléments de preuve que vous avez apportés, je pense à la

13 totalité de ces éléments de preuve et à ce que vous avez dit à propos du

14 20. Vous êtes allé entre 6 et 7 heures du matin; c'est cela ?

15 R. Oui, aux environs de 6 heures. J'ai dit que j'étais peut-être ou il se

16 peut que je sois arrivé vers 7 heures.

17 Q. Vous êtes resté à l'hôpital jusqu'à 11 heures du matin, 10 heures ou 11

18 heures du matin approximativement; c'est cela ? C'est exact ?

19 R. Oui. C'est ce qu'on peut dire.

20 Q. Vous êtes reparti vers Negoslavci, d'après vos souvenirs, vous êtes

21 parti de Negoslavci entre 19 heures et 20 heures ?

22 R. Je n'ai pas très bien saisi votre question. Vous pourriez répéter ?

23 Q. Je vous demande quand est-ce que vous êtes parti de Negoslavci le soir

24 du 20.

25 R. Lorsque je suis allé de Negoslavci vers Sremska Mitrovica; c'est cela

26 que vous entendez ? J'en suis parti vers 20 heures, 21 heures, 22 heures.

27 Je ne peux pas véritablement être précis et vous donner une heure précise,

28 parce que si j'avais eu la possibilité d'en parler avec quelqu'un, il se

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1 peut que je m'en souvienne, je n'en sais rien.

2 Il faisait nuit, et je suis arrivé chez moi vers 1 heure ou 2 heures

3 du matin.

4 Q. Vous avez quitté l'hôpital vers 10, 11 heures, vous êtes reparti à

5 Negoslavci, vous êtes parti de Negoslavci alors qu'il faisait nuit et vous

6 nous dites que c'était entre 20 heures, 21 heures, 22 heures; c'est cela,

7 grosso modo ?

8 R. Oui.

9 Q. Pour ce qui est du témoin à propos de ces éléments de preuve, M.

10 Sljivancanin, vous n'êtes pas en mesure de nous apporter des renseignements

11 utiles sur ce qui s'est passé entre le moment où vous êtes parti de

12 l'hôpital et le moment où vous êtes parti de Negoslavci. Entre 10, 11

13 heures du matin et 20 heures, 21 heures, 22 heures, vous n'êtes pas en

14 mesure de nous fournir quelques éléments de preuve qui soient à propos de

15 M. Sljivancanin ? C'est cela, n'est-ce pas, pour ce qui est de cette

16 période ?

17 R. Lorsque je suis parti de l'hôpital, je ne sais pas ce qu'il a fait

18 après et je ne l'ai pas vu jusqu'au moment où je suis revenu de Bijeljina.

19 Q. Oui, c'est même un peu plus long. Vous êtes parti de l'hôpital à 10

20 heures ou 11 heures le 20 novembre et vous n'êtes absolument pas en mesure

21 de nous dire quoi que ce soit à propos de

22 M. Sljivancanin pour ce qui est de la période qui a suivi cette heure-là,

23 n'est-ce pas ?

24 R. Je ne sais pas si je vous suis utile en disant ce que j'ai dit et je ne

25 vois pas pourquoi vous dites que je ne peux pas vous fournir de

26 renseignements utiles. J'ai répondu aux questions qui m'ont été posées et

27 je m'en tiens à ce que j'ai dit, et je ne vois pas pourquoi vous me dites

28 maintenant que je ne donne pas de renseignements utiles à la Chambre de

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1 première instance.

2 Q. J'entends, lorsqu'il s'agit d'éléments de preuve directs à propos de M.

3 Sljivancanin. Vous êtes parti de l'hôpital et c'est la dernière fois que

4 vous avez vu M. Sljivancanin; c'est cela, n'est-ce pas ?

5 R. Oui, bien sûr, c'est exact, mais je ne peux pas vous donner de

6 renseignements à ce sujet parce que je ne sais pas ce qu'a fait

7 Sljivancanin à ce moment-là. Je sais ce que j'ai fait, et c'est ce dont je

8 parle. Pour ce qui est de savoir si ce sont des renseignements qui

9 suffisent à la Chambre de première instance ou non, je n'en sais rien.

10 Q. Vous ne pouvez pas, visiblement ou manifestement, nous dire ce qui

11 s'est passé dans le secteur de Vukovar après votre départ de l'hôpital ce

12 matin-là; c'est cela ? Puisque vous êtes allé à Negoslavci ?

13 R. C'est exact. C'est exact.

14 Q. Vous ne pouvez pas nous dire ce qui s'est passé à la caserne, n'est-ce

15 pas ? Cela aussi, c'est exact ?

16 R. Je ne peux pas vous parler d'endroits où je ne me trouvais pas. Je peux

17 tout simplement relater les activités que j'ai exécutées ou que j'ai vues.

18 Je peux vous parler d'événements auxquels j'ai assisté.

19 Q. Vous ne pouvez pas nous parler de cette fameuse réunion

20 gouvernementale, n'est-ce pas ?

21 R. Bien sûr que je ne peux pas vous en parler, puisque je n'étais pas

22 présent.

23 Q. Vous n'avez rien et vous ne pouvez rien nous dire à propos du tri des

24 prisonniers, des prisonniers qui ont été conduits à Ovcara, par exemple ?

25 Vous ne pouvez rien nous dire à ce sujet ?

26 R. Je ne peux pas vous en parler, parce que je n'ai pas participé à ce

27 tri, comme vous l'appelez.

28 Q. Prenons comme hypothèse ou comme prémisse le fait que vous êtes parti -

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1 - je vais couper la poire en deux et je dirai 21 heures. Bon, ce n'est pas

2 pour vous piéger, c'est tout simplement pour essayer de trouver, de faire

3 la part des choses. Est-ce que vous avez vu vos collègues de l'organe de la

4 sécurité à Negoslavci ?

5 R. A quelle heure ?

6 Q. J'avais dit à 21 heures.

7 R. J'ai dit que lorsque j'étais reparti pour aller chercher la guitare de

8 M. Marin Vidic, j'y ai rencontré Srecko Borisavljevic. En fait, c'est parce

9 que je me souviens de son apparence physique. C'est ce qui m'est resté

10 gravé dans la mémoire.

11 Q. Si nous parlons de Bili Vidic, et n'allons pas nous pencher sur le

12 détail de savoir s'il était là ou s'il n'était pas là, mais supposons qu'il

13 était là, vous, vous êtes reparti pour aller chercher cette guitare

14 quelques instants avant de partir en direction de Sremska Mitrovica; c'est

15 cela ? C'est exact, n'est-ce pas ?

16 R. Oui, c'est exact.

17 Q. Savez-vous que M. Vukasinovic -- non, je m'excuse, je recommence.

18 Vous avez dit que c'était Borisavljevic que vous avez vu, ou

19 Vukasinovic ?

20 R. M. Vukasinovic fait 35 centimètres de plus que

21 M. Borisavljevic, et forcément je les distingue l'un de l'autre. La seule

22 personne à atteindre cette taille était M. Borisavljevic, le capitaine

23 Borisavljevic. Je me souviens qu'il était assis sur sa chaise et il avait

24 la tête baissée. C'est ce dont je me souviens, donc c'est ma réponse

25 finale.

26 Q. M. Borisavljevic était dans les locaux de l'organe de sécurité, dans le

27 bureau de l'organe de sécurité ? C'est ce que vous êtes en train de nous

28 dire ?

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1 R. Oui, c'est ce que je suis en train de dire.

2 Q. Vous êtes en train de nous dire que vous n'avez pas vu d'autres membres

3 de l'organe de sécurité dans ce bâtiment à votre retour ?

4 R. Non. Je sais que le capitaine Karanfilov et l'adjudant chef Momcilovic

5 s'étaient rendus à Belgrade avant moi au cours de la journée.

6 Quant à Vukasinovic et Sljivancanin, je ne savais pas où ils étaient,

7 et lorsque je suis revenu pour prendre la guitare, j'y ai trouvé le

8 capitaine Borisavljevic. Je ne lui ai pas parlé, parce que j'ai fait tout

9 dans la hâte. Je suis passé à proximité de ce groupe de gens qui

10 m'insultaient, qui me lançaient des injures, parce qu'ils avaient entendu

11 qu'il avait demandé sa guitare. C'était peut-être à une distance de 100

12 mètres, et cela me prenait 15 à 20 secondes, parcourir le chemin dans les

13 deux sens. N'oubliez pas mon âge à l'époque.

14 Q. Ce que je veux savoir, c'est si vous avez vu d'autres membres de

15 l'organe de sécurité en dehors de Borisavljevic. C'est la seule question

16 que je vous ai posée. Est-ce que la réponse est non ?

17 R. Je n'ai vu personne d'autre que Borisavljevic.

18 Q. Apparemment, M. Vidic souhaitait jouer de la guitare et, par

19 gentillesse, vous avez décidé de la lui apporter; est-ce exact ?

20 R. Non. Il n'y a pas eu d'acte de ma part. J'ai simplement essayé de me

21 comporter conformément à mes fonctions en tant qu'officier vis-à-vis d'une

22 personne avec laquelle j'étais entré en contact, indépendamment de ses

23 relations avec moi. En tant qu'officier de la JNA, nous n'étions pas

24 agressifs et nous devions respecter le règlement de manière stricte, et

25 nous devions respecter les règles. Le niveau de discipline était très

26 élevé, notamment dans la Brigade de la Garde.

27 Q. Je ne sais pas quelle traduction a pu vous parvenir, mais je ne parlais

28 pas d'attaques. Je disais simplement que vous avez apporté à M. Vidic, par

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1 gentillesse, une guitare. Je ne suggérais pas que vous l'aviez attaqué avec

2 une guitare; je disais simplement que par gentillesse, vous êtes allé

3 chercher une guitare.

4 R. Oui, je vous ai bien compris. Vous avez parlé d'un acte de gentillesse,

5 en disant par gentillesse, mais le terme utilisé a été une attaque de

6 gentillesse. L'interprétation parlait d'une attaque de gentillesse. Je

7 pensais que vous étiez sarcastique, que nous avions agi différemment de ce

8 que nous avons fait, mais ce n'est pas ce que nous avons fait.

9 Q. Non. Je sais qu'il est tard, mais je ne suggère absolument pas que vous

10 l'ayez attaqué avec une guitare ou quoi que ce soit de ce genre. Tout ce

11 que je sais, c'est que vous êtes allé lui chercher une guitare. Est-ce que

12 nous sommes d'accord sur ce fait ?

13 R. Non, j'ai bien compris que vous n'avez jamais dit que je l'ai attaqué

14 avec une guitare. C'est simplement que l'interprétation m'a conduit à

15 réagir à ce que j'ai compris comme étant un ton un petit peu sarcastique.

16 Je vous ai bien compris, mais l'interprétation m'a conduit à comprendre les

17 choses de cette manière.

18 Q. Monsieur Karan, je ne suis pas du tout sarcastique. Je tiens à ce que

19 cela soit bien compris.

20 Est-ce qu'on pourrait revenir à un point de détail ? A quel moment

21 avez-vous vu Bili Vidic pour la dernière fois avant de le rencontrer à

22 Negoslavci ?

23 R. La dernière fois que je l'ai vu et que j'ai passé un peu de temps

24 avec lui était dans le bureau du Dr Bosanac le 19, avant 15 heures, 14

25 heures. Je ne peux pas être plus précis que cela, mais je sais que c'était

26 après le déjeuner. Je sais aussi que j'ai été pressé parce que M.

27 Sljivancanin m'avait demandé de venir, et après cela je l'ai vu dans notre

28 bureau --

Page 15621

1 Q. Merci.

2 R. -- le même jour.

3 Q. Revenons à cette heure de 21 heures. Avez-vous eu conscience de

4 commentaires faits à Negoslavci par un membre de l'organe de sécurité ou

5 par qui que ce soit d'autre sur le fait que des personnes avaient été

6 témoin de comportement hostile aux casernes de la JNA et à Ovcara,

7 comportement vis-à-vis de gens qui allaient être acheminés vers Sremska

8 Mitrovica ?

9 R. Non. Je n'ai jamais eu vent de telles informations.

10 Q. Vous étiez à Negoslavci, et Negoslavci n'est pas précisément une grande

11 ville, n'est-ce pas ?

12 R. Negoslavci est un village avec 400, 500 habitants. Si vous considérez

13 que c'est un petit village, vous pourrez appeler cela un petit village,

14 mais maintenant une population de 400, 500 habitants peut être considérée

15 comme celle d'un grand village.

16 Q. Est-il exact de dire que les bureaux de l'organe de sécurité se

17 trouvaient à proximité du poste de commandement ?

18 R. Oui, à proximité, c'est à 400, 500 mètres de distance, en tout cas

19 moins d'un kilomètre. Cela dépend. Si vous devez parcourir cette distance à

20 pied, c'est assez loin. Ce n'est pas non plus que le commandement était

21 juste à côté de nous, à deux ou trois maisons de distance.

22 Q. Vous avez pris, vendredi dernier, je crois, un avion, et je crois que

23 vous avez voyagé avec M. Karanfilov, n'est-ce pas exact ?

24 R. C'est exact. Effectivement.

25 Q. Merci. Etes-vous dans le même hôtel ou étiez-vous dans le même hôtel

26 que M. Karanfilov jusqu'à aujourd'hui ?

27 R. Je n'ai pas choisi mon hôtel. Je n'ai pas choisi cet hôtel. J'y étais

28 amené sans pouvoir influer en quoi que ce soit sur cette décision. J'ai été

Page 15622

1 simplement amené dans cet hôtel. On m'a donné une chambre, et je me suis

2 conformé aux instructions que m'ont donné les gens de l'unité des Témoins

3 et des Victimes.

4 Q. Je ne suggère rien qui aille dans le sens contraire. Ne comprenez pas

5 cela comme une sorte de complot. Tout ce que je veux dire, c'est que vous

6 êtes arrivé sur le même avion et vous étiez logé jusqu'à aujourd'hui dans

7 le même hôtel que M. Karanfilov; est-ce exact ? La réponse à cette question

8 est-elle oui ?

9 R. Absolument.

10 Q. Merci. Serait-il exact de dire que vous avez dîné avec lui ?

11 R. Seulement lorsque nous sommes venus ici. Nous n'avons jamais dîné à

12 nouveau. Cela ne m'aurait jamais traversé l'esprit, d'ailleurs, de

13 reprendre un dîner à cet hôtel, parce que la nourriture était exécrable.

14 Nous avons laissé tomber cette idée. Nous mangions le matin et nous

15 n'avions rien à manger jusqu'au lendemain suivant.

16 Q. Merci beaucoup. Je suis convaincu que l'hôtel vous en saura gré.

17 Si l'on peut passer à un point différent.

18 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Avant que vous n'avanciez, Monsieur

19 Moore.

20 Maître Lukic.

21 M. LUKIC : [interprétation] Page 61, Madame, Messieurs les Juges, ligne

22 20, lorsqu'il a demandé les chiffres de la population de Negoslavci, le

23 témoin a dit entre 4 000 et 5 000. Je voulais préciser cela parce que ce

24 qui est dit dans le procès-verbal est incorrect.

25 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Merci.

26 Monsieur Moore, dans la mesure où vous avez été interrompu, le moment

27 est-il opportun de faire une pause ?

28 M. MOORE : [interprétation] Monsieur le Président, oui, c'est un moment

Page 15623

1 opportun.

2 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Nous reprendrons à 17 heures 50.

3 --- L'audience est suspendue à 17 heures 28.

4 --- L'audience est reprise à 17 heures 54.

5 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Monsieur Moore.

6 M. MOORE : [interprétation] Merci, Monsieur le Président.

7 Q. Monsieur Karan, je vais essayer de terminer mon contre-interrogatoire

8 ce soir. Je ne peux pas vous garantir que ce sera le cas, je vais m'y

9 forcer. Essayons d'entrer dans le vif du sujet. Voyons si nous pouvons nous

10 concentrer sur un certain nombre d'éléments.

11 Lorsque vous êtes arrivé le vendredi, aviez-vous parlé aux avocats au sujet

12 de la déposition de M. Sljivancanin ?

13 R. Le vendredi, non; samedi, brièvement, oui, peut-être deux heures ou

14 trois. La même chose dimanche, puis lundi nous nous sommes penchés sur des

15 documents.

16 Q. Aviez-vous parlé aux avocats de M. Sljivancanin avant vendredi au sujet

17 de votre déposition ?

18 R. J'ai vu M. Lukic avant de venir dans ce Tribunal, je l'ai vu à deux

19 reprises en 2006, il y a un an et demi, il m'a téléphoné et il m'a demandé

20 si je serais prêt éventuellement à venir témoigner en tant que témoin de la

21 Défense dans le cadre de cette affaire, si c'était nécessaire.

22 Q. On vous pose tout d'abord la question de savoir si vous seriez prêt à

23 témoigner en tant que témoin pour la Défense. Est-ce que vous ne vous êtes

24 jamais rendu dans les bureaux de M. Lukic ?

25 R. Je m'y suis rendu dans le courant de l'année, une fois au printemps,

26 une fois cet été. C'était peut-être en juillet que je m'y suis rendu pour

27 la deuxième fois. Une fois, il m'a appelé, pour être très honnête, du fait

28 de mes propres activités professionnelles. Je ne pouvais pas me rendre dans

Page 15624

1 son bureau.

2 Q. Ce que je veux savoir est une chose très simple. Au départ, vous avez

3 eu un appel téléphonique. Vous dites que vous vous êtes rendu dans son

4 bureau et vous avez dit que c'était au printemps. Est-ce que vous avez

5 rencontré M. Lukic à cette occasion ?

6 R. Je ne sais pas ce que l'interprète a dit; ce que j'ai dit, moi, c'est

7 qu'il y a un an et demi, disons qu'aujourd'hui est le jour J, il y a un an

8 et demi, et je n'ai eu avec lui qu'une conversation téléphonique et je

9 n'étais pas en sa présence. A ce moment-là, tout ce qu'il m'a demandé,

10 c'est si j'étais prêt à venir témoigner en tant que témoin de la Défense

11 dans le cadre de cette affaire. Nous ne nous sommes rencontrés que cette

12 année; c'est la première fois que j'ai vu à quoi cet homme ressemblait.

13 Q. Vous avez beaucoup de chance. Mais une fois que l'on a pu définir à

14 quoi ressemble M. Lukic, est-ce que vous pouvez nous dire à quel moment

15 vous avez rencontré M. Lukic pour la première fois cette année ?

16 R. Je viens de vous le dire, cette année au printemps et à un moment donné

17 peut-être au mois de juin.

18 Q. Revenons au printemps. Lorsque vous avez rencontré M. Lukic, c'était à

19 son bureau; est-ce exact ? Oui ou non ?

20 R. C'est exact.

21 Q. Votre entretien avec M. Lukic a duré combien de temps ?

22 R. A dire vrai, je n'étais pas particulièrement prêt à venir témoigner en

23 tant que témoin de la Défense. Néanmoins, une chose m'a poussé à le faire.

24 Lorsque je me suis rendu compte que d'autres avaient réagi, je me suis dit

25 : je ne suis ni mieux ni pire que qui que ce soit. A ce moment-là, j'ai

26 accepté de venir témoigner.

27 Nous avons parlé pendant une heure, une heure et demie. Nous avons

28 consacré beaucoup plus de temps au fait de décider si j'allais venir ou

Page 15625

1 pas.

2 Q. Est-ce que vous avez présenté à M. Lukic votre version des faits ?

3 R. Pour autant que je m'en souvienne, la seule chose qu'il m'ait demandée,

4 c'était le type de relations que j'avais avec M. Sljivancanin. Il m'a

5 demandé si j'étais un ami proche de M. Sljivancanin, il m'a demandé si

6 j'avais eu des conflits avec lui, autres questions semblables dans la

7 mesure où il savait que je n'étais pas membre de la Brigade de la Garde

8 pendant très longtemps. Il m'a dit que si la Défense estimait qu'il était

9 indispensable que je vienne apporter mon témoignage, à ce moment-là il

10 entrerait à nouveau en contact avec moi sur ma version des faits.

11 Q. C'était une question simple. Je voudrais vraiment poursuivre. Avez-vous

12 raconté à M. Lukic les éléments de témoignage que vous pourriez apporter

13 afin qu'il puisse évaluer si oui ou non votre témoignage était

14 indispensable ?

15 R. Non, ce n'était pas comme cela que j'ai compris les choses. C'est ce

16 qu'ils m'ont expliqué, ils m'ont dit que s'ils estimaient que mon

17 témoignage était indispensable et nécessaire. J'ai décrit ce que j'avais

18 fait en fonction mes missions, sur le principe qu'ils connaissaient un

19 certain nombre de détails au sujet de mon engagement parce qu'ils

20 disposaient déjà de certains documents, des documents qui m'appartenaient,

21 nos documents, mes documents, ceux que j'avais signés. J'étais assez

22 surpris qu'ils disposent d'originaux émanant des organes de sécurité.

23 Q. Je reviens au printemps. Vous avez dit que vous l'avez vu une deuxième

24 fois à Belgrade. Cette fois-là, c'était pendant combien de temps ?

25 R. C'était en juillet. Il faisait chaud.

26 Q. Merci. Combien de temps a duré votre entrevue avec M. Lukic ?

27 R. A peu près la même durée que l'entretien précédent, environ deux

28 heures.

Page 15626

1 Q. Votre version des faits, celle que vous avez donnée ici, était-ce la

2 même, et surtout ne prenez pas offense de ce que je suis en train de dire,

3 était-ce la même que la version des faits que vous avez relatée ici devant

4 cette Chambre ?

5 R. Non. J'en suis sûr parce qu'au cours de mon séjour ici à La Haye, j'ai

6 pu me remémorer un certain nombre de détails. Je pense que ma version des

7 faits n'est pas la même, même si je dois dire que j'ai un souvenir très

8 précis des événements auxquels j'ai participé.

9 Q. Alors voyez-vous, dans le cadre d'un procès, la Défense fournit à

10 l'Accusation la trame du témoignage qui sera apporté par un témoin. On nous

11 a donné la trame du témoignage que vous alliez apporter.

12 La première fois que nous avons reçu quoi que ce soit, c'était au mois de

13 juillet. Je n'essaie pas de critiquer les dates. Je vais peut-être vous

14 donner lecture de la trame qui nous a été fournie par la Défense. Je cite :

15 "A l'époque de la présence de la Brigade motorisée de la Garde dans la zone

16 de Vukovar, le témoin", c'est vous, M. Karan, "était officier de la JNA en

17 tant que capitaine de première classe. Le témoin accomplissait les missions

18 dans le cadre de l'organe de sécurité de la Brigade motorisée de la Garde."

19 Je suppose que rien n'est vraiment discutable dans cette citation. Vous

20 êtes d'accord avec cela, oui ?

21 R. Oui.

22 Q. Deuxième paragraphe. "Le témoin apportera des éléments de

23 témoignage sur les missions qu'il a accomplies à Vukovar, notamment tout ce

24 qui est relatif à Veselin Sljivancanin."

25 C'est ce que nous avons reçu; c'est exact, n'est-ce pas ? C'est ce que vous

26 aviez fait.

27 R. Je n'ai fait aucune déclaration, je n'ai rien sous les yeux. Je ne sais

28 pas de quelle manière cela a été formulé, ce document dont vous me donnez

Page 15627

1 lecture. Je n'ai jamais fait de déclaration à quiconque, je n'ai rien donné

2 par écrit. Cela se fonde sur mes contacts avec Lukic, il a peut-être rédigé

3 des notes officielles. Je ne saurais vous dire de quelle manière il a pu

4 rédiger cette note. Je ne l'ai pas sous les yeux et je ne saurais vous dire

5 si c'est précisément ce que j'ai dit.

6 Q. Nous allons tout d'abord traiter de ce point et ensuite nous en

7 viendrons au détail. Ce qui est dit également, c'est : "Le témoin apportera

8 des éléments de témoignage sur la police militaire et d'autres structures

9 militaires à Vukovar."

10 Nous n'avons pas besoin de perdre du temps sur ces points.

11 "Le témoin apportera également des éléments de témoignage quant à la

12 corrélation entre l'organe de sécurité et la Brigade motorisée de la Garde

13 et l'administration de sécurité, le cabinet du secrétariat fédéral de la

14 Défense nationale, le SSNO."

15 Puis : "Le témoin décrira les événements qui se sont déroulés à l'hôpital

16 de Vukovar le 19, le 20 novembre, dans la mesure où il a eu connaissance

17 immédiate de cet événement. Il parlera également des contacts qu'il avait

18 avec le personnel de l'hôpital."

19 Voilà ce que nous avons reçu en tout et pour tout. Vous avez apporté des

20 éléments de témoignage, c'est-à-dire avant votre témoignage plus

21 exactement, nous avons reçu ce qui est appelé une note de la session de

22 récolement qui représentait cinq pages, peut-être, de votre version des

23 faits.

24 Ce qui m'interpelle un petit peu, c'est la chose suivante. Si vous avez

25 parlé à M. Lukic des détails, comment se fait-il qu'ils ne figurent pas

26 dans ce document et que ce document ne soit pas le reflet de ce que vous

27 lui avez dit ? Je veux simplement essayer de faire un petit exercice pour

28 voir quels sont les éléments qui manquent et ceux qui ne manquent pas. Est-

Page 15628

1 ce que vous avez souvenir de ce que vous avez dit à M. Lukic ?

2 R. Je n'ai évité de rencontrer personne. Je crois que c'est vous qui êtes

3 entré en contact avec moi. Je crois que c'était le 22 octobre, personne ne

4 m'a interrogé. On m'a dit que je n'avais pas besoin de venir et j'ai été

5 invité à comparaître à nouveau au printemps de cette année, puis là encore

6 on m'a dit que ma comparution serait remise à plus tard, on m'en

7 informerait. Je pense que ces choses dont vous venez de donner lecture sont

8 en fait une trame générale des éléments sur lesquels je pourrais apporter

9 mon témoignage. Après tout, je ne sais pas si c'est pertinent pour ce

10 procès; les seules choses que je puis raconter sont les événements qui sont

11 survenus à partir du moment où je suis arrivé jusqu'au moment où j'en suis

12 parti. Je ne peux pas dire si c'est pertinent ou pas.

13 Q. Le 4 août, nous avons deux paragraphes supplémentaires de huit lignes

14 chaque. Ce que j'aimerais savoir, c'est la chose

15 suivante : est-ce que M. Lukic a pris des notes lors de vos entretiens avec

16 lui, lorsque vous l'avez vu à Belgrade au printemps et au mois de juillet ?

17 R. Je peux vous dire qu'il n'a pas pris de notes pendant notre entretien.

18 Maintenant, quant à savoir s'il a pris des notes après, je ne saurais le

19 dire.

20 Q. Vous lui avez parlé pendant quatre heures et vous ne savez pas s'il

21 prenait des notes ?

22 R. Je ne sais pas ce qui s'est produit après mon départ. Je ne sais pas

23 s'il a pris des notes après mon départ, en tout cas je peux vous dire que

24 lorsque j'étais là, en ma présence, il n'a pas pris de notes. Si cela ne

25 vous intéresse pas, je n'ai pas besoin de rentrer dans les détails. Est-ce

26 que vous voulez que je vous donne une réponse ?

27 Q. Je suis au contraire très intéressé par ce que vous avez à nous dire.

28 R. Nos entrevues ont eu lieu dans son bureau. Nous avons parlé de certains

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1 détails. Je lui ai donné certaines dates. J'ai décrit les choses dans les

2 grandes lignes. Je ne savais pas que tant d'attention allait être portée

3 aux moindres détails, à la moindre heure, à la moindre minute parce

4 qu'évidemment, au bout de 15 ans, vous comprendrez très bien que ma mémoire

5 soit assez précise sur certains événements. Je ne sais plus si les

6 événements se sont déroulés le 18, le 19 ou le 20. Lorsqu'on commence à

7 réfléchir à la séquence des événements, finalement les choses se fixent

8 dans la mémoire, et à ce moment-là vous pouvez vous souvenir de telle ou

9 telle chose.

10 Tout cela était fait dans une ambiance extrêmement informelle. Je ne crois

11 pas qu'il était certain qu'il allait faire appel à moi ou pas, il n'était

12 même pas sûr que je serais d'accord pour témoigner.

13 Q. J'en ai presque terminé sur ce sujet. Ce que je voulais savoir est la

14 chose suivante : normalement, lorsqu'un avocat s'adresse à un avocat

15 éventuel, il va en parler, puis il va lui donner lecture de ce qu'il pense

16 que le témoin a dit pour demander confirmation de la véracité de sa

17 déclaration. Est-ce que cela a été fait ?

18 R. Que voulez-vous dire ? Je n'ai jamais été dans son bureau, je n'ai

19 jamais rédigé aucun document en sa compagnie, soit dans son bureau ou où

20 que ce soit ailleurs. Nous n'avons pas rédigé quoi que ce soit comme

21 déclaration ou document lié aux événements. Nous avons simplement parlé de

22 certains détails, de dates, d'événements, et cetera, donc je n'ai rien

23 signé. Je n'ai fait aucune déclaration.

24 Q. Mais vous ne verriez pas objection, n'est-ce pas, à ce que les notes

25 qui ont été consignées lors de votre conversation avec M. Lukic soient

26 publiées afin que vous puissiez voir si c'est effectivement ce que vous

27 disiez au printemps et en juillet ? Vous ne verriez aucune objection à

28 cela, n'est-ce pas ?

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1 R. Non, je n'y verrais pas objection, parce que je vois, d'après la

2 manière dont se déroule le procès ici, que cela correspond à une procédure

3 normale, mais cela n'est pas du tout quelque chose auquel j'ai participé.

4 Je n'ai rédigé aucune note. Je ne sais pas si M. Lukic lui-même a pris des

5 notes par la suite.

6 Q. Bien, je vais peut-être en parler avec M. Lukic ce soir, mais par

7 exemple, vous dites "étant donné ce qui se passe ici dans le cadre du

8 déroulement de ce procès"; quels procès avez-vous suivis ?

9 R. Les procès ont été diffusés sur la chaîne B92, et j'ai suivi un certain

10 nombre de procès, notamment le procès de Slobodan Milosevic. Ils ont été

11 diffusés en Serbie pendant un moment, puis ensuite, la diffusion a été

12 interrompue. Bon, je crois que le procès était diffusé avec peut-être une

13 demi-heure de décalage ou en direct, je ne sais plus. Mais en tout cas,

14 c'est ce type de procès-là que j'ai suivis.

15 Q. Nous avons entendu dire que ce procès a été suivi par un certain nombre

16 de gens. Je suppose que vous ne l'avez pas suivi en aucune manière; est-ce

17 que c'est exact ?

18 R. Je n'aurais pu le voir. Je ne peux pas le faire aujourd'hui, dans la

19 chambre que j'occupe, je n'ai pas de chaînes de télévision et je comprends

20 que ce procès n'est pas diffusé sur des chaînes de télévision que je sois

21 susceptible de recevoir dans ma chambre d'hôtel.

22 Q. Mais vous ne regardiez pas le procès à Belgrade ? Est-ce qu'on vous a

23 indiqué ce qui était dit ici ?

24 R. Est-ce que vous êtes en train de me demander si j'aurais contacté

25 quelqu'un à Belgrade pour poser des questions sur le déroulement de ce

26 procès ou si quelqu'un m'a appelé depuis Belgrade pour m'informer du

27 déroulement du procès ? Est-ce que c'est cela, votre question ?

28 Q. En fait, ce que je vous demande, c'est si vous avez pris connaissance

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1 du déroulement du procès et de sa teneur de manière générale.

2 R. Non. La seule chose, c'est ce qui a pu me parvenir par la presse. Il y

3 a quelques entrefilets qui paraissent tous les 15 jours où on sait que les

4 audiences du procès sont ajournées, et cetera.

5 Je n'ai jamais suivi le procès et je ne crois pas que ce procès ait

6 été diffusé, sinon je l'aurais certainement suivi à la télé.

7 Q. Nous avons entendu des témoins de la Défense dire qu'ils avaient été

8 informés par des amis ou de ce que des témoins avaient dit. Est-ce que

9 c'est votre cas ?

10 R. Oui, c'est arrivé. C'est arrivé, cette chose à laquelle vous venez de

11 faire référence, par rapport à la présentation des éléments de la Défense.

12 Oui, j'ai pu suivre effectivement ce qui se passait ou on a pu me raconter

13 des détails. Je suis extrêmement occupé depuis ma retraite, parce que je

14 pars très tôt de chez moi, je rentre tard parce que j'ai des activités

15 sportives, donc je n'ai pas pu du tout suivre les procédures en détail.

16 Q. Ce que j'aimerais aborder maintenant, et c'est un sujet totalement

17 différent, est la chose suivante : la période autour du 19 et du 20

18 novembre, nous avons entendu et nous connaissons les noms des membres de

19 l'organe de sécurité dont vous faisiez partie. Est-ce exact qu'il y a eu

20 une réunion d'information le soir du 19 organisée par le capitaine

21 Sljivancanin, réunissant ses collègues, membres de l'organe de sécurité;

22 est-ce exact ?

23 R. Oui.

24 Q. Qui a assisté à cette réunion d'information ?

25 R. Oui, il y a eu une réunion, oui.

26 Q. Mais qui a assisté à cette réunion ?

27 R. J'y ai assisté, j'y étais. Karanfilov y était aussi, Vukasinovic et

28 Momcilovic. Srecko Borisavljevic était à la caserne à l'époque, donc il n'a

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1 pas été présent, que je sache.

2 Q. Nous avons entendu parler de ce qu'étaient les sujets de cette réunion.

3 Est-ce que vous, vous pourriez nous dire ce dont on a parlé ce soir-là,

4 d'après votre meilleur souvenir ?

5 R. Cette réunion n'était pas bien longue. La mission principale, enfin,

6 l'objectif de la réunion était d'évacuer, avec un certain succès, les

7 blessés de l'hôpital.

8 Q. Quelle était la mission de Vukasinovic?

9 R. Si mes souvenirs sont exacts, il devait s'occuper du transport depuis

10 l'hôpital jusqu'à la caserne et ensuite depuis la caserne jusqu'à

11 Mitrovica. C'était sa mission, que je sache.

12 Q. Qui lui a donné cette tâche, s'il vous plaît ?

13 R. Le chef et commandant Sljivancanin.

14 Q. Quelle était la mission de Karanfilov, s'il vous plaît ?

15 R. Le capitaine Karanfilov ainsi que l'adjudant Momcilovic devaient se

16 rendre au poste de commandement, du poste de commandement de la ville de

17 Vukovar, donc le lendemain, pour vérifier s'il y avait quoi que ce soit

18 d'intéressant du point de vue de la sécurité dans cet abri.

19 Il a fallu évidemment apporter la documentation à l'appui, parce que

20 nous aurions pu profiter de documents trouvés pour mieux organiser la

21 situation et mieux analyser la situation.

22 Q. Quelle était la mission du commandant Sljivancanin ?

23 R. Je connaissais ma mission, c'est tout ce que je savais. S'il fallait

24 qu'on aille quelque part ensemble, je connaissais aussi la sienne, mais lui

25 il avait peut-être d'autres missions qu'il ne m'a pas communiquées. Tout ce

26 que je sais, c'est que nous devions nous rendre quelque part ensemble, et

27 je connaissais donc ma part des tâches, la part des tâches qui me

28 revenaient à moi.

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1 Q. Non, non. Vous deviez savoir ce qu'il devait faire lui, parce qu'avec

2 tout le respect que je vous dois, je ne suis pas du tout d'accord avec

3 vous. Je vais vous dire pourquoi. Quand on fait une réunion d'information,

4 cela sert à évaluer les missions de la journée et la mission de la journée

5 suivante, n'est-ce pas ? C'est le but, l'objectif d'une réunion

6 d'information ?

7 R. Vous avez tout à fait raison. C'est bien cela l'objectif de telles

8 réunions. Cela étant dit, je pensais que nous partagions la même mission.

9 Il ne m'a jamais dit : ma mission est comme suit, en me citant la mission.

10 Vous savez, c'est comme cela qu'on fonctionne dans une organisation

11 militaire. Cela fonctionne de la même façon partout, chez nous aussi. Tout

12 simplement, le commandant donne les ordres aux autres, et lui, pour sa

13 part, il sait bien ce qu'il doit faire parce qu'il doit aussi recevoir des

14 ordres de son commandement supérieur ou il doit se réunir avec son

15 commandement supérieur, ou l'entendre au téléphone. Si vous voulez, nous

16 n'avions pas vraiment de problèmes de fonctionnement. Nous fonctionnions

17 comme cela.

18 Je ne peux pas vous dire que Sljivancanin avait d'autres missions que

19 celle qui consistait à assurer les conditions de sécurité pour évacuer les

20 blessés de l'hôpital. Mis à part cette mission-là, je ne connaissais pas

21 l'existence d'une autre mission.

22 Q. Vous devez vous rappeler, parce que nous, aussi bien les conseils du

23 Procureur que les conseils de la Défense, nous avons entendu les éléments

24 indiquant quels étaient les rôles et les fonctions du commandant

25 Sljivancanin, et je dirais que l'on sait que Mrksic lui a confié

26 l'organisation de l'évacuation, la mission qui consistait à organiser

27 l'évacuation de l'hôpital. C'était une mission qui lui a été déléguée par

28 Mrksic ?

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1 R. Quand vous dites "vous", si vous parlez de moi, je peux vous dire qu'il

2 n'était pas de mon ressort que d'organiser l'évacuation, mais il s'agissait

3 de faire une évaluation pour voir si les conditions de sécurité étaient

4 suffisantes, réunies, autrement dit pour procéder à une évacuation sur les

5 blessés, les malades. Je n'étais pas là pour organiser l'évacuation

6 proprement dite, et d'ailleurs, vu les conditions, je ne l'aurais pas

7 accepté puisque j'ai mon domaine d'activité qui est un domaine privilégié.

8 Je ne fais rien d'autre. Je fais cela conformément aux règles qui régissent

9 mon service et ma profession.

10 Q. Je ne parle pas de cela. Je vous parle de M. Sljivancanin. M.

11 Sljivancanin agissait conformément aux ordres donnés par

12 M. Mrksic. C'est ce que je vous dis. Je ne parle pas de vous du tout. Il

13 n'a fait rien d'autre qu'exécuter les ordres de Mrksic, n'est-ce pas ?

14 C'est cela que je vous dis; est-ce exact ?

15 R. S'il a reçu l'ordre de procéder à l'évacuation, dans ce sens oui, mais

16 uniquement dans la mesure où il s'agissait d'assurer les conditions, de

17 réunir les conditions pour procéder à l'évacuation. C'est comme cela que

18 j'avais compris cela. Il ne s'agissait pas d'organiser en soi ou de mettre

19 en œuvre l'évacuation. Ce n'est pas comme cela qu'on fonctionne ou ce n'est

20 pas comme cela qu'on a fonctionné jusqu'alors.

21 Q. Mais vous venez de nous dire Vukasinovic devait organiser l'hôpital

22 jusqu'à Sremska Mitrovica. Vous venez de nous dire cela et vous avez dit

23 cela il n'y a même pas cinq minutes.

24 R. Je suis parfaitement d'accord avec vous, mais là c'est l'une des

25 actions qui fait partie de toute une série d'actions qu'il faut faire pour

26 mener à bien une telle mission. Evidemment que Vukasinovic ne pouvait pas

27 trouver les autocars. Il fallu qu'il se mette en contact avec quelqu'un qui

28 dispose de ces autocars. Il ne pouvait pas le faire tout seul, et un organe

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1 de sécurité en soi ne peut pas faire toutes ces tâches. Ils sont là pour

2 escorter quelqu'un, par exemple en ce qui concerne l'escorte des personnes,

3 c'est par exemple la police militaire qui fait cela.

4 Q. On va regarder les fonctions et les tâches telles qu'elles vous ont été

5 données lors de cette réunion d'information. Nous avons tout d'abord

6 Vukasinovic qui organise le transport et qui supervise le transport des

7 malades de l'hôpital jusqu'à Sremska Mitrovica. Mais vous avez tout à fait

8 raison quand vous dites qu'il faut aussi trouver les autobus. Il faut

9 assurer aussi l'escorte de la police militaire; donc c'est exact ? Ceci

10 fait partie d'un plan, n'est-ce pas, Monsieur Karan ?

11 R. Oui, bien sûr.

12 Q. Ensuite, il faut faire monter les gens dans les bus et il faut aussi

13 trier ces personnes pour voir quelles sont les personnes qu'il s'agit de

14 faire monter dans les bus, n'est-ce pas ?

15 R. Oui.

16 Q. Cette mission est tombée sur vous et sur M. Sljivancanin ? On vous l'a

17 confiée, cette mission, n'est-ce pas ?

18 R. Non. Ce n'est absolument pas vrai. Je répète : ma mission n'était pas

19 de procéder au tri, ou la séparation, si vous voulez, comme on dit ici,

20 mais de réunir les circonstances, d'évaluer si ces circonstances sont

21 réunies, si les organes qui sont présents de Novi Sad et ailleurs, s'ils

22 sont en mesure de procéder au tri des malades et des blessés pour faire la

23 part de ceux qui sont vraiment malades et ceux qui ne le sont pas. Ceux

24 pour lesquels on décide qu'ils ne sont pas malades, qu'ils ne sont pas

25 blessés, leur place n'est pas là, tout simplement. Ils font partie d'une

26 autre catégorie.

27 Q. Partant de l'hypothèse de ce que vous dites, c'est correct. Vous êtes

28 là comme un représentant de l'organe de sécurité pour faire en sorte que

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1 les médecins puissent faire correctement leur travail, autrement dit, faire

2 la part entre les malades et les pas malades, ou les malades et ceux qui

3 font semblant d'être malades; c'est exact, n'est-ce pas ?

4 R. Oui, c'est en partie exact, parce qu'ils ne savent pas qui est vraiment

5 malade avant de bien vérifier que ceux qui se disent malades, sont vraiment

6 malades, que ceux qui se disent blessés sont vraiment blessés. Parce que si

7 vous avez quelqu'un avec une main bandée, plâtrée, et cetera, il faut bien

8 vérifier qu'il s'agit d'un membre injurié. Ils ne pouvaient le savoir

9 d'emblée. Les autres, ceux qui manifestement n'étaient pas blessés, là la

10 situation était claire; il ne s'agissait même pas de les examiner, ceux-là.

11 Q. Monsieur Karan, nous sommes d'accord tout de même pour dire que vous

12 étiez là aux côtés des médecins pour évaluer qui est malade et qui n'est

13 pas malade. C'est ce que vous dites ?

14 R. Non, pas moi. A aucun moment je n'ai décidé si quelqu'un était vraiment

15 blessé ou non. J'ai été là, je suis passé par ce bureau pour vérifier s'il

16 y avait des armes dans ce lieu, oui ou non.

17 Parce que les armes pouvaient représenter un certain danger pour

18 faire le tri entre les malades et les pas malades. Je ne me suis à aucun

19 moment rapproché d'aucun des prisonniers pour intervenir de quelque façon

20 que ce soit. Ce ne sont pas les prisonniers, ce sont les malades.

21 Q. Mais les médecins étaient là à sa demande. Vous saviez que les médecins

22 allaient être là. On vous a dit cela; sinon, vous ne sauriez pas ce que

23 vous deviez faire le lendemain.

24 R. Evidemment, les médecins étaient là pour faire ces choses-là. Cela

25 étant dit, quand je suis passé par le couloir, parce que c'est là qu'ils

26 étaient hébergés, c'est là qu'ils étaient, les blessés et les autres, là on

27 voit les couloirs au sous-sol, quand je suis passé parler avec Jure Njavro

28 et un autre médecin de nationalité serbe, je ne suis pas passé par là pour

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1 faire quelque chose, c'était tout simplement pour passer par là, pour

2 demander aux gens s'ils avaient des armes ou non, ou s'il y avait des armes

3 dans ces lieux. Ensuite, je n'ai pas assisté aux examens, je n'ai pas vu de

4 quelle façon le médecin avait procédé à ces examens. Je n'ai pas assisté à

5 cela, je n'ai pas vu, je ne peux rien dire à ce sujet.

6 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Me Lukic voulait intervenir.

7 M. MOORE : [interprétation] Je m'excuse.

8 M. LUKIC : [interprétation] Tout à l'heure, M. Moore a demandé au témoin

9 s'il savait quelle était la mission de Sljivancanin. Maintenant, à nouveau,

10 il lui demande si les médecins étaient là sur ordre de Sljivancanin. Je ne

11 veux rien affirmer, je peux vous dire que le témoin a déjà répondu une

12 fois, et ceci, à la page 73, ainsi de suite. Maintenant, on revient sur le

13 même sujet, on insiste. Je pense que M. Moore insiste parce qu'il n'a pas

14 été content avec la première réponse reçue.

15 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Qu'il s'agisse d'une affirmation vraie

16 ou non, je ne pense pas qu'il était convenable d'interrompre M. Moore,

17 Monsieur Lukic.

18 Monsieur Moore.

19 M. MOORE : [interprétation]

20 Q. Vous êtes là pour faire en sorte que les conditions de sécurité soient

21 réunies, les médecins sont là pour essayer de faire la différence entre

22 ceux qui sont vraiment blessés et ceux qui ne le sont pas. Que se passe t-

23 il avec les personnes pour lesquelles les docteurs disent qu'elles font

24 semblant d'être malades ?

25 R. A nouveau, je dois vous dire que je ne sais pas si cette interprétation

26 était correcte. Je ne suis pas là pour vérifier ce qu'ils ont établi.

27 Q. Monsieur Karan, je ne sais pas si c'est un problème d'interprétation ou

28 non. Voici la question que je vous ai posée. Que se passe t-il avec les

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1 personnes au sujet desquelles les médecins ont établi qu'il ne s'agissait

2 pas de véritables blessés ? Les personnes faisant semblant d'être malades

3 ou blessées, qu'est-ce qui arrive avec ces personnes-là ? Le médecin vient,

4 il dit : non, vous n'êtes pas blessé à la jambe ? Que se passe t-il avec

5 ces personnes ? Dites-le-nous.

6 R. Je n'étais pas présent au moment où cela a été fait, au moment où les

7 médecins procédaient à leur examen pour établir si quelqu'un est vraiment

8 blessé ou non. Je ne sais pas comment on a traité ces gens-là. Moi, peu de

9 temps après, je suis parti pour faire une autre mission, j'ai quitté

10 l'hôpital, je suis parti à Negoslavci. Je n'étais pas là, je n'étais pas

11 présent au moment du tri, si l'on peut dire, pour pouvoir vous répondre de

12 façon précise. Je ne peux vous dire que j'étais là, que j'étais présent,

13 que je regardais cela. Je ne peux pas vous décrire la façon dont cela s'est

14 fait. Je l'ai appris par la suite. Je pense que ce n'est pas vraiment ce

15 que vous voulez obtenir.

16 Q. Monsieur Karan, vous serez peut-être choqué parce que j'ai été dans cet

17 hôpital et je sais qu'il n'est pas très grand. Alors je vous pose une

18 question très simple. Lorsqu'il avait été indiqué que cette personne

19 faisait semblant d'être malade ou faisait semblant d'être blessée,

20 qu'advenait-il de cette personne ? Parce que nous avions quelque 260

21 personnes qui ont été mises à bord de bus; vous, vous devez savoir comment

22 les choses se sont passées.

23 R. Je n'en sais rien, je ne sais pas ce qui a été fait. Je sais comment

24 ces personnes ont été traitées, les personnes qui n'avaient pas été

25 blessées, lorsqu'il s'agissait d'hommes, parce que quelques jours avant la

26 chute de Vukovar, il y avait eu une déclaration de mobilisation générale.

27 J'en ai déjà parlé aujourd'hui. Je sais que les personnes qui effectuaient

28 le tri avaient pris cela en considération. C'est probablement pour cela

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1 qu'ils ont agi comme cela.

2 Q. Monsieur Karan, je ne veux pas trop insister. Je pense quand même que

3 vous évitez de répondre à la question. Je répète ma question : que se

4 passait-il lorsque l'on se rendait compte ou lorsqu'il avait été décidé que

5 telle personne faisait semblant d'être blessée ? Comment est-ce que cette

6 personne sortait de l'hôpital ?

7 Il y a deux scénarios. Soit vous recevez des instructions qui faisaient

8 partie intégrante du système d'évacuation; deuxièmement, vous nous avez dit

9 que vous été présent pendant plus de trois heures. Vous êtes maintenant en

10 train de nous dire que vous n'avez pas pu voir ou observer pendant trois

11 heures, puisque vous avez été présent trois heures, ce qui est advenu des

12 personnes que l'on a fait sortir de l'hôpital ?

13 R. Une fois de plus je vous le dis, je ne peux pas répondre à cette

14 question parce que je n'étais pas présent, Monsieur Moore. Je n'ai pas

15 assisté à ces activités. Je ne peux pas affirmer avec certitude comment

16 est-ce que cela a été fait et ce qui a été fait, je peux vous dire ce que

17 j'ai fait. Je peux en être absolument sûr et certain.

18 Pour ce qui est de votre question, je n'étais pas présent et je ne

19 peux pas vous fournir une réponse satisfaisante.

20 Q. Qu'en est-il du commandant Sljivancanin, alors ? Il s'agit d'une

21 personne que l'on remarque. Il a une voix qui porte, il est grand. Est-ce

22 que vous ne l'avez pas vu dans l'hôpital pendant cette période de trois

23 heures ? Ce n'est quand même pas une personne que l'on ne remarque pas. En

24 1991, que faisait-il, lui ?

25 R. Je suis d'accord avec ce que vous venez de dire lorsque vous dites

26 qu'on remarque en effet M. Sljivancanin, le commandant Sljivancanin.

27 Pendant que je faisais ce dont nous avons parlé, ce dont nous parlions il y

28 a quelques secondes, le commandant était ailleurs. Il y a eu cette réunion

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1 avec le Dr Vesna Bosanac et avec d'autres personnes également.

2 Je l'ai vu lorsque j'ai terminé ma mission, je l'ai vu dans le bureau du Dr

3 Bosanac, et c'est là que l'on m'a dit pour la première fois qu'elle n'était

4 plus la directrice de l'hôpital, que quelqu'un d'autre avait été nommé.

5 Pour ce qui est de savoir ce qu'il avait fait entre-temps --

6 Q. Est-ce qu'il s'agit de la réunion au cours de laquelle il s'est adressé

7 au personnel de l'hôpital ? Est-ce que c'est de cette réunion dont vous

8 parlez, la réunion au cours de laquelle il a annoncé aux médecins et au

9 personnel de l'hôpital ce qui allait se passer ? Est-ce que vous faites

10 référence à cette réunion ou à autre chose ?

11 R. Non, Monsieur Moore. Je vous dis que je savais qu'il devait y avoir une

12 réunion et qu'il allait être convoqué à la réunion. Pour ce qui est de la

13 teneur de la réunion, des conclusions qui ont été tirées lors de cette

14 réunion, je n'en sais rien. Je connais l'un des résultats de la réunion, à

15 savoir, elle n'était plus la directrice de l'hôpital. Sur quoi portait la

16 discussion pendant la réunion, quels ont été les points d'accord ? Je n'en

17 sais rien parce que je n'ai pas participé à cette réunion.

18 Q. Est-ce qu'il s'agit de la réunion dont vous parlez lorsque vous dites

19 que vous avez vu Sljivancanin ?

20 R. Je l'ai vu après cette réunion. Je faisais une chose. Lui, il est allé

21 avec ce médecin qui était arrivé avec nous depuis Negoslavci et il s'est

22 rendu à cette réunion avec le Dr Bosanac et avec d'autres personnes. Je ne

23 sais pas combien il y avait de personnes à la réunion, lorsque j'ai terminé

24 ma mission. Il se trouve que nous nous sommes retrouvés à nouveau. Dans son

25 bureau, je me suis rendu compte qu'elle n'était plus la directrice, que la

26 réunion était terminée, qu'il y avait des conclusions qui avaient été

27 tirées, qu'il y avait certainement certaines missions qui avaient été

28 confiées ici et là, je ne sais pas quel fut l'objet de la discussion

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1 pendant la réunion.

2 Q. Vous nous avez dit que vous avez pris deux personnes lorsque vous étiez

3 en chemin, en route vers l'hôpital, le matin du 20. Vous en avez parlé,

4 vous avez décrit un certain M. Vujic qui était petit, corpulent et

5 arrogant. Vous vous en souvenez, de cela ?

6 R. Je me souviens qu'il s'agissait d'une personne arrogante et qu'il était

7 chauve, plutôt petit. Je ne me souviens pas d'avoir parlé de sa corpulence.

8 Je ne pense pas que j'ai dit qu'il était gros. Quoi qu'il en soit, je ne

9 pense pas l'avoir dit.

10 Q. L'autre personne que vous avez prise en chemin s'appelait Korica.

11 Korica est arrivé avec Vujic. Vous vous en souvenez, de cela ?

12 R. Oui, oui. Korica était avec nous dans le véhicule. Il est entré dans le

13 véhicule avec Vujic, justement.

14 Q. Korica a déposé, il n'est pas entré dans les détails, mais il a dit

15 qu'il avait fini par arriver à l'hôpital et qu'il avait accompagné des gens

16 en direction d'une table qui se trouvait là, et les personnes étaient

17 fouillées, et on leur prenait des choses dans les poches. Est-ce que vous

18 avez vu Korica pendant cette période de trois heures ? Est-ce que vous

19 l'avez vu à un moment ou à un autre ?

20 R. Je n'ai pas vu Korica à ce moment-là lorsque j'ai vu Sljivancanin, je

21 n'ai pas vu Korica. Bon, je n'en sais rien, je sais qu'ils étaient censés

22 aider pendant l'opération du tri, c'est pour cela qu'ils avaient été

23 envoyés par l'organe supérieur de sécurité. Mais je ne l'ai pas vu, je ne

24 m'en souviens pas, puis après tout, c'était plutôt chaotique.

25 Q. D'après ce que vous nous dites, et vous nous dites que votre déposition

26 est tout à fait intègre, vous arrivez là, Vukasinovic s'occupe des

27 transports, Karanfilov, quant à lui, est en route avec Momcilovic vers une

28 zone centrale, et vous ne savez pas, absolument pas ce qu'a fait

Page 15643

1 Sljivancanin ? Vous l'avez vu deux fois pendant cette période de trois

2 heures; est-ce exact ?

3 R. Maintenant, vous me posez une question comme si j'étais le supérieur de

4 Sljivancanin. Mais --

5 Q. Non, absolument pas. Je me contente de vous demander de faire preuve de

6 bon sens, vous pouvez voir. Vous étiez là pendant trois heures. C'était un

7 endroit assez petit. Je vous demande ce que faisait Sljivancanin. Nous

8 sommes en train de tourner autour du pot. Je vous demande si vous êtes en

9 mesure de nous fournir des informations à ce sujet, oui ou non.

10 R. Je m'excuse, mais je m'excuse si vous avez l'impression que j'essaie de

11 tourner autour du pot. Je vous dis que Sljivancanin avait cette réunion,

12 puis après tout, il y a beaucoup de temps qui s'est écoulé depuis, et on a

13 l'impression qu'il y a une séquence chronologique, mais il ne faut pas

14 oublier qu'il y avait des gens ici et là qui déambulaient. Il y avait

15 beaucoup de médecins. Je suis allé voir un autre médecin entre-temps pour

16 voir s'il y avait eu des sévices de la part de médecins, parce que j'avais

17 trouvé un objet qui aurait pu être utilisé à cette fin.

18 Le temps s'est écoulé, et j'ai informé qu'il n'y avait pas d'armes

19 dans l'hôpital et que cette mission pouvait être effectuée. Puis, après une

20 minute ou deux ou cinq, je ne m'en souviens plus maintenant, nous avons

21 passé un certain temps là, et il m'a dit qu'il fallait que je me prépare.

22 D'ailleurs, je vous l'ai déjà relaté, tout cela, et de façon très

23 détaillée. Je vous ai parlé des transports vers Mitrovica. Je n'essaie

24 absolument pas d'éviter ou d'évincer vos questions.

25 Q. Lorsque vous êtes parti de l'hôpital, je suppose que vous saviez que la

26 mission consistait à isoler certaines personnes et à les emmener à Sremska

27 Mitrovica; c'est exact, n'est-ce pas ?

28 R. Pourquoi est-ce que nous aurions obtenu ces orientations ? Nous savions

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1 quelles étaient les missions, nous savions qu'il y avait une équipe qui

2 venait de Belgrade et nous savions qu'elle travaillerait en fonction des

3 orientations.

4 Q. Je vais poser la question une fois de plus, ensuite on passera à autre

5 chose et la Chambre de première instance pourra tirer ses propres

6 conclusions.

7 Vous saviez que la mission consistait à isoler des personnes et à les

8 emmener à Sremska Mitrovica; c'est exact, n'est-ce pas ?

9 R. La mission consistait à séparer les blessés des autres, ou plutôt les

10 autres des blessés et des malades. Voilà quel était l'essentiel de cette

11 mission, qui ne portait que sur ceci.

12 Q. Il fallait emmener ces personnes à Sremska Mitrovica ?

13 R. Oui.

14 Q. Comme vous nous l'avez dit il y a environ un quart d'heure, vous saviez

15 qu'il fallait se procurer des autobus pour conduire ces personnes à Sremska

16 Mitrovica; c'est exact, cela également, n'est-ce pas ?

17 R. Oui.

18 Q. Il est tout aussi exact de dire que vous aviez le chiffre approximatif

19 des personnes qui allaient être emmenées, parce que nous savons que cinq ou

20 six autobus ont été utilisés; c'est exact, cela également, n'est-ce pas ?

21 R. Non. Non, je ne connaissais pas le chiffre approximatif, le nombre

22 approximatif de ces personnes.

23 Q. Est-ce que vous êtes en train de nous dire qu'une mission vous a été

24 confiée par Sljivancanin le 19, et vous nous dites qu'on ne vous a donné

25 aucune idée du nombre de personnes qui, d'après lui, se trouveraient à

26 l'hôpital et qu'il faudrait emmener à Sremska Mitrovica ?

27 R. Nous avions quelques estimations qui portaient sur le nombre de

28 personnes qui se trouvaient ou qui avaient été logées là. Ou plutôt, nous

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1 n'avions pas, nous ne disposions pas de chiffre exact, nous ne savions pas

2 s'il s'agissait de 500, de 600, de 1 000, de 1 500 personnes. Nous avions

3 reçu des informations dans lesquelles il était question de 2 000 à 3 000

4 personnes à l'hôpital.

5 Q. Nous ne parlons absolument plus de l'hôpital, et cela, vous le savez

6 pertinemment. Nous parlons de personnes qui allaient être évacuées, de

7 personnes qui avaient été isolées et qui allaient être emmenées à Sremska

8 Mitrovica, des gens que j'appellerais, par souci de commodité, les gens

9 d'Ovcara. Est-ce que Sljivancanin ne vous a pas donné le nombre

10 approximatif de ces personnes ?

11 R. Je suis en train de vous dire que ces personnes à l'hôpital, ou plutôt,

12 que la mission que nous avions était comme suit. Il y avait ces personnes

13 qui ensuite ont été séparées des malades et des personnes blessées, il y

14 avait des hommes, il y avait des femmes, il y avait des enfants également.

15 Voilà de quoi je parle. Je ne sais pas de quelles autres personnes vous

16 parlez.

17 Q. Je parle d'une séance d'information au cours de laquelle il avait été

18 indiqué qu'il y aurait plusieurs évacuations, mais qu'il y aurait eu une

19 évacuation bien précise qui consistait à isoler essentiellement des hommes

20 qui auraient pu être intéressants pour les organes de sécurité, parce qu'à

21 ce moment-là on croyait qu'il y avait de nombreuses personnes dans

22 l'hôpital qui n'étaient pas véritablement des patients de l'hôpital. Est-ce

23 que cela n'est pas exact ? Est-ce que ce n'est pas ce qu'on vous a dit lors

24 de la séance d'information ?

25 R. Bien sûr que nous le savions, bien sûr que nous savions qu'il y avait

26 des blessés, des malades et qu'il y avait également d'autres personnes qui

27 ne faisaient pas partie du personnel médical, et il y avait des personnes

28 qui ne devaient pas être dans l'hôpital. Cela, nous le savions. Nous le

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1 savions par avance, parce que nous avions des documents qui faisaient

2 allusion à cela et grâce, à notre travail, nous l'avons appris.

3 Q. Nous parlerons de votre travail en temps voulu. Mais est-ce qu'on vous

4 a donné un nombre approximatif des hommes qui allaient être isolés et qui,

5 séparés, allaient être placés dans des bus jusqu'à Sremska Mitrovica ? Ce

6 que j'avance, c'est que vous comprenez pertinemment cette question.

7 R. Je vais répondre par la négative, parce que cela, nous ne le savions

8 pas. Je suppose que vous vous fondez sur une hypothèse erronée.

9 Q. Je me fonde sur une inscription qui se trouve dans un registre, un

10 registre militaire avec un ordre de mise en garde ou un ordre

11 d'avertissement du 19 novembre. Je pense que cela était écrit à 18 heures.

12 Il est indiqué que 200 personnes vont peut-être arriver à Ovcara et que ces

13 personnes venaient de l'hôpital. Il y a ce chiffre, ce chiffre de 200

14 personnes. Ces 200 personnes sont mentionnées 12 heures avant que vous-même

15 n'arriviez à cet endroit. Il y a quelqu'un qui connaissait ce chiffre.

16 Voyez-vous sur quoi je me fonde pour avancer cette prémisse ?

17 R. Je n'ai pas vu ce document et on ne m'a pas informé de ce document. Je

18 ne savais pas que ce document, qu'un document de la sorte existait. Tout ce

19 que je sais, tout ce que je vous dis, c'est que cela n'a pas fait l'objet

20 de discussion lors de la séance d'information. Nous ne savions pas combien

21 ils étaient, nous avions une estimation suivant laquelle il y aurait entre

22 1 500 et 2 000 ou même 2 500 personnes et nous savions, on nous avait dit

23 qu'ils n'étaient pas tous malades et blessés.

24 Q. En ce qui vous concerne, vous saviez qu'il y avait un groupe d'hommes

25 qui intéressaient l'organe de la sécurité, vous n'aviez rien à voir avec

26 eux ce matin-là. Ces personnes ont toutefois été isolées. C'est ainsi qu'il

27 faut analyser la situation ?

28 R. Cette analyse est absolument erronée. Tous les hommes dont l'âge était

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1 compris entre 16 et 65 ans étaient d'après nous des auteurs potentiels de

2 rébellion armée, qui est un délit criminel, parce qu'il y avait eu une

3 mobilisation générale quelques jours avant la chute de Vukovar. Bien

4 entendu, cela a permis de mieux définir le travail des personnes qui

5 venaient de Belgrade. A ce moment-là, nous ne le savions pas.

6 Q. Comment est-ce que vous avez pu, sur quelles bases est-ce que l'on a pu

7 faire sortir 250 personnes du lot de 2 500 personnes ? Quels sont les

8 critères de sélection ou de tri qui ont été utilisés pour ce faire ?

9 R. Je ne sais pas si le chiffre est exact, de toute façon je n'ai pas

10 participé à cela et je ne sais rien à ce sujet, je ne sais pas quels

11 étaient les critères; cela, je le sais encore moins.

12 Q. En ce qui vous concerne, vous avez 2 500 personnes, vous n'avez aucune

13 idée pourquoi ces 250 personnes à peu près - je dis les chiffres à titre

14 indicatif - sont sélectionnées. En réalité, ils sont plus nombreux que

15 cela. Pourquoi on les a fait monter dans les autocars ? Vous n'avez aucune

16 idée quant aux raisons de cela ?

17 R. Qu'est-ce que vous voulez dire ? Quel sort leur était réservé ? Qu'est-

18 ce que vous voulez dire par là ? Quel est le sens de votre question ?

19 Q. Vous nous dites qu'il y a entre 1 500 et 2 500 personnes dans

20 l'hôpital, n'est-ce pas ?

21 R. Oui, c'est exact.

22 Q. Vous travaillez sur une hypothèse que 50 % des personnes seraient des

23 hommes et 50 % femmes. A quel chiffre on arrive ?

24 R. Je ne sais pas si cette hypothèse est vraiment plausible.

25 Q. Là, il y avait des enfants aussi, oui ou non ?

26 R. Pas beaucoup.

27 Q. Merci. Il y a eu une mobilisation générale des hommes, chaque homme

28 dans cet hôpital était potentiellement intéressant, n'est-ce pas ?

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1 R. Oui.

2 Q. Merci. Ce que je vous demande, si l'on parle de cette hypothèse, qu'il

3 s'agisse d'une bonne ou mauvaise hypothèse, d'à peu près 1 000 hommes, 750

4 à 1 000 personnes, je voudrais savoir comment arrivez-vous à sélectionner

5 250 personnes. Comment se fait-il qu'un certain nombre de personnes se

6 retrouvent dans les autobus ? Est-ce que vous comprenez la question ?

7 R. Tous les hommes entre 16 et 60 ans sont traités de la même façon, de

8 façon égale. Je ne vois pas pourquoi vous me parlez sans arrêt de ces 250

9 hommes alors qu'ils sont tous dans le même cas de figure. Il y avait des

10 Serbes sans doute aussi parmi eux parce que la mobilisation générale

11 concernait aussi les Serbes. Ils se trouvent tous dans le même cas de

12 figure. Ils devaient, d'après ce que je pensais, tous finir à Sremska

13 Mitrovica. C'est là-bas qu'il a fallu faire les actions nécessaires pour

14 établir qui a fait quoi et qui doit répondre quoi.

15 C'est pour cela que nous avions ces documents qui nous dirigeaient

16 quant à la façon de procéder que nous avions sur nous, puisque nous

17 pensions que nous allions passer plus de temps sur le terrain et qu'à

18 travers différentes enquêtes, nous allions trouver des informations

19 nécessaires concernant des éventuels auteurs de crimes. Parce que tous les

20 hommes âgés entre 16 et 60 ans, à partir du moment où ils ont été

21 mobilisés, ils étaient tous coupables d'avoir participé dans la rébellion

22 armée d'après les lois en vigueur et la constitution.

23 Q. Merci. Vous savez, ce n'est pas cela que je veux savoir, la loi ne

24 m'intéresse pas. Je vous demande de me faire une analyse des faits. Là,

25 vous me dites que les 250 hommes que vous avez fait monter dans les bus,

26 que c'étaient les seuls hommes qui se trouvaient dans l'hôpital. C'est cela

27 que vous essayez de me dire ?

28 R. A nouveau, je dois dire que je ne sais pas de qui vous parlez

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1 exactement parce que je ne sais pas quel était le nombre des personnes

2 séparées par rapport au nombre de blessés, des malades.

3 Je ne peux pas vous répondre de la façon dont vous souhaitez que je

4 réponde puisque je n'ai pas participé à cela. Au bout du compte, je ne

5 savais même pas combien il y avait de malades et combien il y avait de

6 blessés.

7 Q. Est-ce que vous avez vu un quelconque homme se tenir debout alors qu'il

8 n'était pas blessé, ceci au moment où vous avez quitté l'hôpital ?

9 R. Où cela ?

10 Q. A l'hôpital. Vous vous souvenez que vous avez passé trois heures à

11 l'hôpital ?

12 R. Oui, il y en avait, il y en avait qui se tenaient à côté, debout à

13 côté. Il y avait du personnel médical, il y avait vraiment des gens là-bas.

14 Je n'étais pas chargé de procéder au tri, de m'en occuper.

15 Q. Je vais essayer de terminer sur sujet, je ne vous garantis rien.

16 Quand vous quittez l'hôpital, est-ce que vous avez vu des

17 représentant de la Croix-Rouge internationale dans des véhicules, des

18 véhicules de la Croix-Rouge internationale, des moniteurs européens, du

19 personnel médical en train d'arriver, des personnes que vous décririez

20 comme étant des personnes étrangères, les étrangers ? Est-ce que vous les

21 avez vues en partant ?

22 R. Non, absolument non.

23 Q. Est-ce que vous avez vu des bus avec des gens à l'intérieur qui

24 attendaient pour qu'on les conduise ailleurs quelque part ?

25 R. Non, pas du tout, je n'ai pas vu d'autocars, je n'ai pas vu de gens.

26 Vous me prenez au mot, là, vous insistez sur cette période de trois heures,

27 mais non, je ne peux pas vous garantir cela, puisque beaucoup de temps

28 s'est écoulé depuis. J'ai l'impression que j'avais passé une éternité là-

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1 bas, mais est-ce que c'était plus court que cela ? Mais je n'ai jamais vu

2 de représentants internationaux; cela, j'en suis sûr.

3 Q. Quand vous dites trois heures, en réalité vous ne pensez pas trois

4 heures ? Vous n'êtes pas sûr de cela ?

5 R. Je ne suis pas sûr à 100 %. C'est peut-être plus court que cela. Vous

6 devez me comprendre, cela fait longtemps, c'est difficile de me rappeler de

7 tout cela, d'évaluer le temps qui passe.

8 Q. Est-ce que ceci est valable aussi pour vos autres évaluations

9 concernant le temps ?

10 R. Bien sûr. Là, vous n'allez pas avoir des oscillations de 10 ou 15

11 heures, mais on peut toujours accepter une marge d'une heure, d'une petite

12 heure, de deux heures. Vous devez me comprendre.

13 M. MOORE : [interprétation] Je suis désolé. Est-ce que le moment est

14 opportun ? J'ai dépassé un petit peu le temps.

15 M. LE JUGE PARKER : [interprétation] Oui, merci, Monsieur Moore.

16 Nous levons la séance. Nous allons reprendre nos travaux à 2 heures 15.

17 --- L'audience est levée à 19 heures 02 et reprendra le jeudi 30 novembre

18 2006, à 14 heures 15.

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