DÉCISION DU BUREAU

Composé comme suit :
Mme le Juge Gabrielle Kirk McDonald, Président
M. le Juge Shahabuddeen, Vice-PPrésident
M. le Juge Cassese, Président de la Chambre de première instance II
M. le Juge Jorda, Président de la Chambre de première instance I
M. le Juge May, Président de la Chambre de première instance III

Assisté de :
Mme Dorothee de Sampayo Garrido-Nijgh, Greffier

Décision rendue le :
25 octobre 1999

LE PROCUREUR

C/

ZEJNIL DELALIC
ZDRAVKO MUCIC alias "PAVO"
HAZIM DELIC
ESAD LANDZO alias "ZENGA"

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DÉCISION DU BUREAU RELATIVE À LA REQUÊTE AUX FINS DE RÉCUSER DES JUGES EN APPLICATION DE L'ARTICLE 15 DU RÈGLEMENT OU, DANS L'ALTERNATIVE, AUX FINS DE DÉPORT DE CERTAINS JUGES

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LE BUREAU du Tribunal international chargé de poursuivre les personnes présumées responsables de violations graves du droit international humanitaire commises sur le territoire de l'ex-Yougoslavie depuis 1991, composé constitué de son Président, Mme le Président Juge MMc Donald, M. lede son Vice-PPrésident, M. le Juge Shahabuddeen, de M. le Juge Cassese, Président de la Chambre de première instance  II, de M. le Juge Jorda, Président de la Chambre de première instance I et de M. le Juge May, Président de la Chambre de première instance III.

DÉCIDE ce quicomme suit :

I. HISTORIQUE RAPPEL DE LA PROCÉDURE

1. Le 30 juillet 1999, la Chambre d'appel connaissant de l'affaireu Le Procureur c/ Zejnil Delalic, Zdravko Mucic, Hazim Delic et Esad Landzo (IT-96-21-T, «l'affaire Celebici»)ne a accueilli larequête intitulée «Requête aux fins de récuser des juges en application de l'article 15 du Règlement ou, dans l'alternative, aux fins de déport de certains juges» déposée par les accusés à l'exception de Zejnil Delalic (la «Requête»). a été déposée devant la Chambre d'appel par tous les accusés à l'exception de Zejnil Delalic dans l'affaire Le Procureur c/ Zejnil Delalic, Zdravko Mucic, Hazim Delic et Esad Landzo (IT-96-21-T «l'affaire Celebici»).

2. Dans ladite cette requêterequête, les appelants demandaient, en application de l'article  15 du Règlement, que soient récusés ou que se déportent dans le cadre de l'appel interjeté du Jugement dans l'affaire Celebici, tous les juges du Tribunal la révocation des juges désignés pour connaître de leur appel à l'encontre de leur condamnation dans l'affaire Celebici ou, dans l'alternative, leur déport en l'espèce au motif que ces juges ayantavaient participé soit soit à la session session pplénière qui a conclu où il que l'élection de Mme leMme le Juge Odio Benito à la vice-présidence dupouvait continuer à exercer ses fonctions de juge après avoir été élue Vice-président du Costa-Rica ne serait pas incompatible avec son mandat de juge du Tribunal, soit à cellela plénière réunie qui s'est tenue après cetteson élection, qui a accepté , où Mme qu'elle avoir prête serment après son élection en tant que vice-président du Costa-Rica tout en conservant ses fonctions de Juge du Tribunal. La Requête a été déposée par les appelants aux motifs suivants :

i. En raison de son investiture à la vice-présidence du Costa-Rica, Mme le Juge Odio Benito ne satisfait plus aux conditions requises pour siéger en tant quen'était plus qualifiée pour exercer les fonctions de J juge du Tribunal, notamment parce que l'article 13 1) du Statut requiert entre autres, que les juges soient elligibles aux plus hautes fonctions judiciaires dans leur pays respectifs alors que l'article 161 de la Constitution du Costa-Rica le lui interdit.

ii. Bien que l'on ne sache pas exactement qui parmi les autres des autresjuges a participé à ces plénières aux sessions plénières, tous les jJuges qui étaient en fonction avant novembre 1998 ont ont ddéjà eu l'occasion de se prononcer sur la questionla question et devrraient par conséquent, être révoqués ou se déporter.

iii. La lecture conjointe des paragraphes A), C) et D) de l'article 15 révèle qu', un juge qui s'est déjà prononcéa déjà exprimé une opinion sursur une affaire ou qui a déjà connu d'une partie d'une affaire ne peut connaître de la suite sans que son sens de l'équité et son impartialité ne puissent être raisonnablementen soient mises en doute affectées.

iv. Les Juges juges se sont prononcés à deux reprises en pllors de plénières sur la question de savoir si Mme le Mme le Juge Odio Benito pouvait continuer à exercer d'être ses fonctions de juge près le Tribunal tout en occupant le poste de vice-président du Costa-Rica, sans en informer les appelants ni leur donner la possibilité d'être entendus sur la question.

v. Rien n'indique n'indique que lles jugeses Juges participant à la plénière connaissaient ou avaient dûment examiné lors des plénières, la question de l'incompatibilitéde l'interaction entre de l'article 161 de la Constitution du Costa-Rica et de l'article 13  1) du Statut du Tribunal.

3. Le 10 août 1999, le Bureau du Procureur a déposé sa Réponse à la requête requête aux fins de récuser des juges en application de l'article 15 du Règlement ou, dans l'alternative, aux fins de déport de certains juges (la «Réponse du Procureurde l'Accusation») qui demandait le rejet de la requête Requête aux motifs suivants :

i. Les arguments présentés n'ont n'ont satisfait aucun des motifs de de façon probante récusation ou d'empêchement des juges définis par à l'article 15 du Règlement puisqu'puisque aucune de cesdes dispositions exclusives de cet article ne fait référencevise les sessions plénières ou n'empêche les jJuges qui y participent de connaître d'une affaire en première instance ou en appel.

ii. L'argument selon lequel le fait que les jJuges se soient déjà précédemment prononcés lors d'une plénière sur une question de droit touchant les appelants sans les en informer ni leur donner la possibilité d'être entendus ne peut raisonnablement constituer un motif de récusation ; en effet, cela reviendrait à soutenir que tout juge qui se prononce lors de plénières sur les modifications à apporter au Règlement ne peut connaître d'une affaire dans laquelle il aurait à statuer sur la mise en application desdites modifications. Au resteEn tout état de cause, rien n'autorise ne fonde les appelants à demander à être entendus sur des questions examinées lors des sessions plénières, lesquelles sont destinées à donner aux juges l'occasion de se réunir pour exercer dles fonctions expressément prévues à l'article 24 du Règlement.

iii. Rien ne permet de conclure que les juges connaissant de la présente affaire en appel et qui ont assisté aux sessions plénières relatives à la candidature de Mme lede Mme le Juge Odio Benito à la vice-présidence du Costa-Rica et à sa nomination ne seraient pas en mesure de se prononcer impartialement en appel à la lumièresur les conclusions des parties à ce sujet, compte tenu du fait que les juges se réunissant en plénièrepuisqu'en plénière, ils ont examiné ladite question dans le cadre de leurs fonctions inscritesen vertu àde l'article 24 du Règlement et non en rapport avec l'espèceune quelconque affaire particulière.

iv. Même si l'on considère que les débats en plénière constituent sont considérés des «décisions» antérieures sur la question de savoir si Mme Mme le Juge Odio Benito peut ou non continuer de siéger,connaître des affaires menées devant le Tribunal, les juges peuvent réexaminer cette question dans la mesure où compte tenu de leur professionnalisme, les juges qui ont couramment à se prononcer sur des points de fait et de droit sont couramment laissés à l'appréciation de juges sont censés pouvoir revenir dont on peut supposer, compte tenu de leur professionnalisme, qu'ils sont capables de revenir en toute objectivité sur ddes décisions antérieures. ises auparavant.

v. La question n'a pas été soulevée en temps opportun.

54. Les 15 et 17 septembre 1999, la Chambre d'appel a rendu deux arrêts concernant la procédure à suivre pour trancher la requêteRequête. Le 15 septembre, le Juge Hunt, Président de la Chambre d'appel, a rendu un arrêt intitulé «Dépôt d'une demande auprès du Bureau en application de l'article 15 15 B) du Règlement» (le «Renvoi»), par lequel la requête de l'appelant était renvoyée devant le Bureau pour examen. Le 17 septembre 1999, la Chambre d'appel a rendu unle second arrêt intitulé «Décision relative à la Requête aux fins de récuser des juges en application de l'article 15 du Règlement ou, dans l'alternative, aux fins de déport de certains juges» (l'«Arrêt»). Dans dans cet Arrêt,laquelle la Chambre d'appel se déclarait incompétente. Elle précisant concluait qu'il ne lui appartenait pas de trancherque l'objet de la requête ne relevait pas de son ressort mais que ladite requête constituait devait être considérée comme une demande adressée au Président de la Chambre d'appel en application de l'article 15  B) du Règlement et elle rappelait que lle avait par conséquent été renvoyée au Bureau parla Chambre d'appel avait renvoyé la question devant le Bureau dans son arrêt du 15 septembre 1999.

5. Dans le mémorandum joint au renvoi de la demande, le Juge Hunt a considéré qu'il n'était pas nécessaire que les juges concernés se déportent ou soient récusés de l'appel Celebici aux motifs suivants :

i. Les débats en plénière ne valent pas décision sur les droits de l'une ou l'autre des parties à l'affaire Celebici et ils n'ont jamais eu vocation à l'être, les sessions plénières des juges du Tribunal n'ayant pas pour objet de rendre des décisions relatives aux droits des parties à une procédure devant le Tribunal. En tout état de cause, les opinions exprimées au cours d'une plénièreen plénière ne lient pas les juges dans l'hypothèsedans l'hypothèse où la question débattue serait ultérieurement soulevée aux fins d'une décision dans le cadre des actions menéesd'une procédure devant le Tribunal, de la même manière que l'on ne peut raisonnablement soutenir que tous les juges qui discutent des modifications à apporter au Règlement lors d'une plénière doivent de ce fait être empêchés de se prononcer ultérieurement sur l'interprétation à donner à ces articles quand une telle question est soulevée au cours des actions devant le Tribunal.

ii. La consultation de chacun des juges concernés en application de l'article 15 B) du Règlement a simplement permis de confirmer qu'aucun motif objectif ne justifiait leur déport en l'espèce.

II. ARGUMENTS

A) LE DROIT APPLICABLE

6. Le Bureau soutient qu'il convient de faire le départ entre deux questions distinctes : i) la première est celle des qualifications requises pour être juge du TPIY et, partant, des comportements ou situations incompatibles avec l'exercice de fonctions judiciaires ; ii) la seconde est celle des motifs qui justifient la récusation d'un juge dans une espèce particulière.

7. La première question est régie par l'article 13 du Statut du Tribunal international. Son paragraphe 1 dispose, entre autres, que «les juges doivent être des personnes de haute moralité, impartialité et intégrité possédant les qualifications requises, dans leurs pays respectifs, pour être nommés aux plus hautes fonctions judiciaires». Le paragraphe 4 du même article stipule, entre autres, que les «conditions d'emploi ?des jugesg sont celles des juges de la Cour internationale de Justice». Cette disposition renvoie donc indirectement à l'article 16 de la Cour internationale de Justice libellé comme suitqui prévoit que : «1. Les membres de la Cour ne peuvent exercer aucune fonction politique ou administrative, ni se livrer à aucune autre occupation de caractère professionnel. 2. En cas de doute, la Cour décide». Il ressort de ce qui précède que pour être juge du TPIY, une personne élue par l'Assemblée générale en application de l'article 13 2) du Statut doit à la fois remplir les conditions fixées à l'article 13 1) et n'exercer aucune fonction politique ou administrative, ni se livrer à aucune autre occupation de caractère professionnel. En d'autres termes, le droit applicable fixe à la fois des conditions positives et des conditions négatives. Une décision de la quatrième session plénière des juges du TPIY et la pratique du Tribunal ont confirmé qu'il s'agit bien là de la règle applicable au sujet qui nous occupe.

En cas de doute ou de litige sur la question de savoir si un juge remplit les conditions stipulées, notamment les conditions négatives susmentionnées, le Président doit essayer de trouver une solution en consultant le juge lui-même. Sur demande du juge ou d'office, le Président peut soumettre la question à l'assemblée plénière des juges, qui se prononcera sur la question dans le cadre de ses fonctions administratives.

8. La question de la récusation ou de l'empêchement des juges pose un problème distinct. Un juge peut se déporter ou être récusé d'une affaire particulière lorsque, comme auxau senstermes de l'article 15 A) du Règlement, «il a un intérêt personnel» dans l'affaire ou encore a ou a eu avec elle «un lien quelconque de nature à porter atteinte à son impartialité». En application de l'article 15 B), les décisions relatives à cette question – qui peut être soulevée par toute partie au procès – sont prises par le Président de la Chambre, soit ou, à la demande de ce dernier, par le Bureau.

9. Les deux questions soulevées abordées jusqu'ici diffèrent l'une de l'autre. La première revient à se demander si un juge a toutes les qualifications requises pour exercer au Tribunal. Elle revêt un caractère administratif et Elle relève de l'administration interne du Tribunal et ne peut être tranchée que par les organes compétents du Tribunal. Si ces derniers estiment qu'un juge ne remplit pas l'une des conditions requises, notamment s'il exerce une fonction politique ou administrative incompatible avec ses fonctions judiciaires, il est de son devoir soit de renoncer à cette fonction politique ou administrative, soit de démissionner de ses fonctions de juge.

En revanche, la seconde revêt un aspect judiciaire. Elle peut être soulevée par le juge lui-même ou par une des parties au procès devant une Chambre de première instance ou devant une Chambre d'appel et porte sur le droit d'un juge de connaître d'une affaire donnée. Si le juge ne remplit pas les conditions fixées à l'article 15 B) du Règlement, il est récusé d'une affaire particulière tout en restant pleinement en droit d'exercer ses fonctions judiciaires de juge du Tribunal dans d'autres affaires.

10. Il peut arriver bien sûr que ces questions se recoupent'elles se chevauchent. . C'est notamment le cas lorsqu'une partie à une affaire en première instance ou en appel allègue le parti pris d'un juge connaissant de l'affaire et qu'il n'a donc pas l'impartialité requise en raison d'activités politiques, administratives ou de toute autre activité professionnelle qui font qu'il a dans cette affaire «un intérêt personnel» ou «un lien». La partie qui soulève la question de la récusation ou de l'empêchement des juges doit prouver que l'incompatibilité prétendue alléguée avec les fonctions judiciaires fait naître un risque de partialité en l'espèce. En d'autres termes, elle doit établir l'existence d'un rapport le entre l'activité présumée incompatible avec les fonctions judiciaires et l'affaire particulière en question. Il ne suffit pas de prétendre que le juge concerné exerce une fonction politique, administrative ou toute activité incompatible avec ses fonctions judiciaires. Cette question-là relève du cadre administratif et les décisions y relatives appartiennent aux seuls juges. Comme il est exposé plus haut, seuls le Président ou l'assemblée plénière des juges peuvent trancher cette question. En revanche, si la partie requérante allègue que l'activité incompatible avec l'exercice deles fonctions judiciaires porte atteinte directement et spécifiquement à l'impartialité d'un juge dans l'affaire particulière dont il connaît, la question relève alors d'une procédure de récusation ou d'empêchement et doit être tranchée en vertu de l'article 15 B) du Règlement.

 

B) L'INSTANCE L'ESPÈCE

11. En l'espèce, comme il est exposé plus haut, les trois appelants allèguent que les Juges Riad, Wang et Nieto-Navia doivent être récusés de l'appel interjeté du Jugement. Ils fondent leur demande de récusation sur les bases suivantes : l'un des motifs d'appel concerne la validité de la composition de la Chambre de première instance saisie de l'affaire Celebici. Les appelants la contestent au motif que Mme le Juge Odio Benito, ayant été éluee vice-président du Costa-Rica, n'était plus qualifiée pour exercer ses fonctions de juge du Tribunal et partant, pour siéger dans l'affaire Celebici et au motif que l'on pouvait considérer que son impartialité risquait d'avoir étéavait été compromise entamée. Comme les trois juges précités s'étaient prononcés en plénière sur la question de savoir si Mme le Juge Odio Benito pouvait ou non exercer son mandat de juge après son élection au poste de vice-président du Costa-Rica, les appelants alléguaient que ces trois juges avaient des préjugés s'agissant de l'un des motifs d'appel.

12. Il est à noter que le 23 mai 1997 au cours d'un entretien avec Mme le Juge Odio Benito qui venait de se porter officiellement candidate à la vice-présidence du Costa-Rica, le Juge Cassese alors Président du Tribunal avait déjà soulevé au plan administratif la question de savoir si ces fonctions étaient compatibles avec lesles fonctions judiciaires. Dans une lettre du 16 octobre 1997, Mme lLe Juge Odio Benito a répondu précisé au Président Cassese que, si elle était éluedans une lettre du 16 octobre 1997 dans laquelle elle précisait que dans l'hypothèse où elle serait élue, elle ne prendrait pas ses fonctions de vice-président avant la fin de son mandat de juge dans l'affaire Celebici ; elle s'engageait par ailleurs, toujours dans l'hypothèse où elle seraitsi elle était élue, à se consacrerassurer à plein temps à ses fonctions judiciaires à plein temps. Sur la foiAu vu de cet engagement, le Président Cassese a décidé que Mme le Juge Odio Benito était fondée à se porter candidate au poste de vice-présidentétait fondée à briguer la vice présidence. Il a toutefois jugé préférable de consulter sur ce point les juges réunis en plénière. En octobre 1997, lors de la quatorzième session plénière, les juges du Tribunal, dans l'exercice de leurs fonctions administratives, ont avalisé la décision du Président.

La question a de nouveau été soulevée en mars 1998, après l'élection, le 1er février 1998 du Mme le Juge Odio Benito au poste de second vice-président du Costa-Rica. À cette occasion, elle s'est une nouvelle fois engagée auprès du Président McDonald à ne pas prendre ses fonctions de second vice-président, ni celles de président du Costa-Rica, en cas d'absence permanente ou temporaire du Président ou du Vice-Président, avant la fin de son mandat de juge du Tribunal. Elle a en outre pris l'engagement de remplir totalement ses fonctions judiciaires jusqu'en novembre 1998. Au vu de ces engagements, le Président McDonald a décidé qu'il n'existait pas d'incompatibilité entre les obligations judiciaires de Mme le Juge Odio Benito et son nouveau poste de second vice-président du Costa-Rica. À l'instar du Président Cassese, le Président McDonald a jugé préférable de soumettre la question aux juges réunis lors de la dix-septième session plénière. Le 11 mars 1998, l'assemblée plénière des juges du Tribunal – une fois encore dans l'exercice de ses fonctions administratives – a unanimement avalisé la décision du Président McDonald.

13. Il convient de souligner que i) lors des quatorzième et dix-septième sessions plénières, les juges n'ont fait que se prononcer sur la question administrative de la compatibilité entre les fonctions de second Vice-président du Costa-Rica et les fonctions judiciaires du Juge Odio Benito et ii) cette décision a été prise sans qu'il soit fait référence à la question particulière de la récusation ou de l'empêchement du Juge Odio Benito dans l'affaire Celebici. En fait, ce n'est que le 25 mai 1998, soit plus de deux mois après la décision administrative de la dix-septième plénière, que la Défense dans l'affaire Celebici a déposé sa requête aux fins d'obtenir que Mme le Juge Odio Benito ne prenne plus part aux procédures de ladite instance.

14. Il ressort de ce qui précède que les trois juges visés par la Requête aux fins de récusation actuellement en cours d’examen n’ont participé qu’à la prise d’une décision administrative le 11 mars 1998, sur la question générale de savoir si, en application de l’article 13 du Statut du TPIY et de l’article 16 du Statut de la Cour internationale de justiceJustice, le Juge Odio-Benito avait le droit de continuer d’exercer ses fonctions de Juge du Tribunal international. Ils n’ont pas contribué à la prise d’une quelconque décision judiciaire et n’ont pas exprimé d’opinion touchant une question spécifiquement judiciaire, qui à l’époque n’avait pas encore été soulevée, soit celle de savoir si Mme le Juge Odio-Benito devait être récusée dans l’affaire Celebici parce que son élection au poste de Vice-président du Costa-Rica lui créait un intérêt personnel dans l’affaire ou encore un lien avec elle, portant ainsi atteinte à son impartialité. Cette question, soulevée par la Requête de la Défense du 25 mai 1998, a été tranchée par la décision rendue le 4 septembre 1998 par le Bureau, dans lequel ne siégeait aucun des trois juges susmentionnés.

15. À la lumière de ce qui précède, le Bureau estime que le fait qu'un juge, dans le cadre de ses fonctions, prenne part à une décision collégiale à caractère administratif sur la question administrative qui fait l'objet de la présente discussion ne peut constituer un motif pour empêcher par la suite ce juge, siégeant en appel, d'exercer ses fonctions judiciaires (en l'espèce, trancher la question soulevée par les trois appelants, aux fins de savoir si l'élection du Juge Odio Benito au poste de second vice-président du Costa-Rica, était de nature à l'empêcher de siéger dans l’affaire Celebici et, en tout état de cause, s'il pouvait sembler que son impartialité soit compromise).

16. Le Bureau conclut que les appelants n'ont pas satisfait aux conditions requises à l'article 15 A) du Règlement. En particulier, ils n'ont pas démontré que, s'agissant de la question de savoir si le Juge Odio Benito avait le droit de connaître de l'affaire Celebici, les Juges Riad, Wang et Nieto-Navia avaient un intérêt personnel ou un lien quelconque de nature à porter atteinte à leur impartialité.

17. Par ces motifs, le Bureau décide à l'unanimité que l'article 15 A) du Règlement n'exige pas que les Juges Riad, Wang et Nieto-Navia soient récusés ou se déportent s'agissant de la procédure d'appel dans l'affaire Celebici.

 

III. DISPOSITIF

18. Le Bureau décide, à l'unanimité que l'article 15 B) du Règlement n'interdit pas aux Juges Riad, Wang et Nieto-Navia de siéger à la Chambre d'appel pour entendre l'appel interjeté du Jugement dans l'affaire Celebici.

 

Le Président
(signé)
Gabrielle Kirk McDonald

Fait le 25 octobre 1999,
La Haye (Pays-Bas)

M. le Juge Shahabuddeen joint une déclaration à la présente Décision.

(Sceau du Tribunal)