LA CHAMBRE DE PREMIÈRE INSTANCE

Composée comme suit : M. le Juge Adolphus G. Karibi-Whyte, Président

Mme le Juge Elizabeth Odio Benito

M. le Juge Saad Saood Jan

Assistée de : Mme Dorothee de Sampayo Garrido-Nijgh, Greffier

Décision rendue le : 19 janvier 1998

 

LE PROCUREUR

C/

ZEJNIL DELALIC
ZDRAVKO MUCIC alias "PAVO"
HAZIM DELIC
ESAD LANDZO alias "ZENGA"

_____________________________________________________________

DÉCISION RELATIVE À LA REQUÊTE DE L'ACCUSATION AUX FINS DE DÉTERMINER LA RECEVABILITÉ D'ÉLÉMENTS DE PREUVE

_____________________________________________________________

 

Le Bureau du Procureur :

M. Grant Niemann

Mme Teresa McHenry

M. Giuliano Turone

Le Conseil de la Défense :

Mme Edina Residovic, M. Ekrem Galijatovic, M. Eugene O’Sullivan, pour Zejnil Delalic

M. Zeljko Olujic, M. Michael Greaves, pour Zdravko Mucic

M. Salih Karabdic, M. Thomas Moran, pour Hazim Delic

M. John Ackerman, Mme Cynthia McMurrey, pour Esad Landzo

 

I. INTRODUCTION

1. La Chambre de première instance du Tribunal international chargé de poursuivre les personnes présumées responsables de violations graves du droit international humanitaire commises sur le territoire de l'ex-Yougoslavie depuis 1991 ("le Tribunal international") a été saisie d'une requête relative à la recevabilité d'un certain nombre de documents et cassettes vidéo et à leur versement au dossier des éléments de preuve ("la Requête") que le Bureau du Procureur a argumentée oralement le 31 octobre 1997. Les exposés se sont poursuivis les 3, 5 et 6 novembre 1997. Les circonstances dans lesquelles s'inscrit cette requête sont les suivantes :

2. Le 18 mars 1996, des membres de la police autrichienne, suite à une demande de coopération émanant de l'Accusation, ont procédé à des perquisitions dans un certain nombre de locaux à Vienne, en Autriche. Parmi ces locaux se trouvaient ceux de l'entreprise "Inda-Bau", une entreprise à laquelle, selon l'Accusation, l'accusé Zejnil Delalic ("Delalic"), était étroitement lié, et l'appartement de l'accusé Zdravko Mucic ("Mucic"). Au cours de cette opération, de nombreuses cassettes vidéo et douze chemises contenant des documents ont été saisies dans les locaux d'Inda-Bau. Quatre autres cassettes vidéo ainsi que certains documents ont été saisis dans l'appartement de Mucic.

3. Après avoir entendu les témoignages de quatre officiers de la police autrichienne comparaissant en qualité de témoins de l'Accusation et s'exprimant sur des questions relatives à l'opération menée, la Chambre de première instance, dans une décision orale du 12 septembre 1997, a admis au dossier des éléments de preuve les douze chemises découvertes dans les locaux de l'entreprise Inda-Bau. Dans cette décision, la Chambre de première instance s'est déclarée convaincue que la filière de conservation et de transmission des éléments en question avait été maintenue, et a admis les chemises, mais non leur contenu. Dans une décision ultérieure du 22 octobre 1997, la Chambre de première instance a admis au dossier deux des documents que les chemises auraient contenu à l'origine, ainsi que des séquences d'une cassette vidéo présumément saisie à Inda-Bau (pièces 137, 141 et séquences 00.00 - 02.41 et 11.49 - 16.26 de la pièce 114). Ces pièces ont été admises sur la base des éléments de preuve fournis par le Général Pasalic, témoin de l'Accusation qui, au cours de son témoignage, a pu authentifier les documents et reconnaître le contenu de la cassette vidéo comme étant une interview accordée par lui en décembre 1992.

4. Parmi les quatre membres de la police autrichienne entendus par la Chambre de première instance se trouvait l'inspecteur de district Thomas Moerbauer, qui a décrit dans son témoignage comment, après les perquisitions, il a examiné les documents se trouvant dans les douze chemises d'Inda-Bau et comment il en a dressé la liste. Au cours de son témoignage, l'Accusation lui a soumis un certain nombre de documents et lui a demandé de vérifier qu'il s'agissait bien là des documents se trouvant à l'origine dans les douze chemises saisies à l'entreprise Inda-Bau.

5. Le Procureur demande aujourd'hui que les documents présentés à Moerbauer, ainsi qu'un certain nombre de cassettes vidéo qui auraient été saisies à Inda-Bau et à l'appartement de l'accusé Mucic soient admis au dossier des éléments de preuve. Les pièces faisant l'objet de cette demande sont les pièces 110, 111, 112, 115, 116, 117, 118, 119, 121, 122, 123, 124, 125, 126, 127, 128, 129, 130, 131, 132, 133, 135, 143, 144, 145, 146 et 147 A-C ("les pièces").

LA CHAMBRE DE PREMIÈRE INSTANCE,

ENTENDU les exposés des parties,

STATUE COMME SUIT.

 

II. ARGUMENTATION

A. Dispositions applicables

6. Il est utile de reprendre dans leur intégralité certaines des dispositions du Règlement de procédure et de preuve du Tribunal international ("le Règlement") qui ont été invoquées à l'attention de la Chambre de première instance au cours de l'exposé des arguments.

Article 89

Dispositions générales

(A) En matière de preuve, les règles énoncées dans la présente section s'appliquent à toute procédure devant les Chambres. La Chambre saisie n'est pas liée par les règles de droit interne régissant l'administration de la preuve.

(B) Dans les cas où le Règlement est muet, la Chambre applique les règles d'administration de la preuve propres à parvenir, dans l'esprit du Statut et des principes généraux du droit, à un règlement équitable de la cause.

(C) La Chambre peut recevoir tout élément de preuve pertinent qu'elle estime avoir valeur probante.

(D) La Chambre peut exclure tout élément de preuve dont la valeur probante est largement inférieure à l'exigence d'un procès équitable.

(E) La Chambre peut demander à vérifier l'authenticité de tout élément de preuve obtenu hors audience.

Article 95

Exclusion de certains éléments de preuve

N'est recevable aucun moyen de preuve obtenu par des moyens qui entament fortement sa fiabilité ou si son admission irait à l'encontre d'une bonne administration de la justice et lui porterait gravement atteinte.

B. Présentation des arguments

1. L'Accusation

7. L'Accusation affirme que les pièces devraient être admises au dossier des éléments de preuve puisqu'elles sont pertinentes eu égard aux chefs d'accusation contenus dans l'acte d'accusation et qu'elles ont valeur probante. Selon l'Accusation, la décision orale de la Chambre rendue le 12 septembre 1997 a confirmé que la filière de conservation et de transmission des pièces avait été respectée. En outre, l'Accusation estime que les pièces ont été identifiées par le témoin Moerbauer durant son audition comme étant des documents et des cassettes saisies à Vienne par la police autrichienne.

8. L'Accusation affirme que, pour établir la pertinence et la valeur probante des pièces, un certain degré de fiabilité doit être démontré. À cet égard, le Procureur avance que la teneur des pièces, ainsi que le lieu et les circonstances de leur découverte, leur confèrent des éléments suffisants de fiabilité. L'Accusation est d'avis que le fait que certains des objets saisis dans les locaux d'Inda-Bau ont déjà été admis en tant qu'éléments de preuve, après authentification par le Général Pasalic, renforce encore la fiabilité desdites pièces. Elle soutient également qu'il existe une corrélation entre les pièces et que la détermination de celle-ci vient étayer l'authenticité et la fiabilité des documents et cassettes qui font l'objet de la demande d'admission.

9. Les pièces sont, selon l'Accusation, pertinentes et ont valeur probante vis-à-vis des chefs d'accusation puisqu'elles ont trait, directement ou indirectement, aux fonctions de Delalic et dans une moindre mesure, de Mucic, dans la région de Konjic en 1992. Ces éléments touchent au coeur-même de la question de la responsabilité du supérieur hiérarchique imputée à Delalic et Mucic dans l'acte d'accusation. En outre, le Procureur est d'avis que toutes les pièces viennent corroborer les éléments de preuve déjà admis par la Chambre de première instance ayant trait à la situation dans la région de Konjic, à l'époque de la perpétration des crimes dont il fait état dans l'acte d'accusation.

2. La Défense

10. Les Conseils des quatre accusés (La "Défense") s'opposent à l'admission de ces pièces. La Défense affirme que les documents et cassettes vidéo dont le versement est demandé ne sont pas pertinents et manquent de valeur probante puisqu'ils souffrent d'un absence totale de fiabilité. De plus, le Conseil de Delalic insiste sur le fait que l'Accusation n'a pas pu prouver l'origine des pièces. Le Conseil soutient que, bien que le témoin Moerbauer ait déclaré, lors de sa comparution, qu'en préparant sa liste de références des documents saisis à Inda-Bau, il avait apposé une marque sur chacun d'entre eux, il n'a pu retrouver cette marque sur les documents qui font l'objet de la présente demande de versement. Le Conseil avance, par conséquent, que rien ne prouve que les documents présentés à la Chambre de première instance sont bien ceux qui ont été saisis à Inda-Bau. S'agissant des cassettes vidéo prétendument saisies à Inda-Bau que l'Accusation soumet maintenant pour admission à la Chambre de première instance (pièces 115 et 116), le Conseil estime qu'il n'est pas démontré qu'elles ont été découvertes à Inda-Bau. Selon la Défense, l'Accusation n'a pas expliqué la différence existant entre le nombre de cassettes comptabilisées à l'origine et celui obtenu lors de la constitution de la liste de référence et du classement.

11. La Défense suggère que la Chambre de première instance adopte une procédure claire régissant l'admission des éléments de preuve. Selon la Défense, le premier critère à remplir est celui de l'authenticité et de la fiabilité des documents. Elle est d'avis que la détermination de l'auteur du document est cruciale à cet égard, et elle classe les documents actuellement soumis à la Chambre de première instance en trois catégories. La première catégorie regroupe les documents qui semblent avoir été rédigés par un tiers qui n'est pas partie aux présents débats et qui n'a pas été cité à la barre des témoins pour authentifier les documents. La Défense avance que ces documents ne sont, en fait, que des preuves indirectes et que leur admission violerait le droit de l'accusé à interroger les témoins à charge. Elle affirme également qu'étant donné que l'Accusation n'a pas cité les auteurs présumés de ces documents à la barre afin qu'ils puissent être contre-interrogés, la fiabilité du contenu de cette catégorie de documents ne peut être en aucune manière éprouvée . La deuxième catégorie est constituée des documents qui auraient été rédigés par l'un des accusés. La Défense souligne que l'Accusation n'a jamais tenté de faire authentifier l'un ou l'autre de ces documents par l'accusé concerné et conclut que rien ne démontre que l'auteur des documents est effectivement l'un des accusés. Les documents constituant la troisième catégorie sont ceux ne portant aucune signature ni indication permettant de déterminer l'identité de l'auteur. La Défense avance qu'étant donné le manque d'éléments de preuve portant sur l'identité des auteurs, il est tout simplement impossible de prouver la fiabilité et la crédibilité des documents de cette catégorie.

12. La Défense rejette la démarche adoptée par l'Accusation consistant à utiliser un document, alors que sa fiabilité n'a pas encore été établie et qu'il n'est pas encore versé au dossier, pour corroborer un autre document. La Défense est d'avis qu'une procédure dans laquelle un document de fiabilité douteuse est utilisé pour en corroborer un autre est tout à fait irrégulière et que les liens présumés entre les documents sont ténus et se résument à de simples suppositions de la part de l'Accusation. La Défense affirme que l'authenticité et la fiabilité des documents qui font l'objet de la demande de versement n'ont pas été établies et s'oppose, par conséquent, à leur admission.

13. Selon la Défense, ça n'est qu'après, au deuxième stade du processus de détermination de la recevabilité des éléments de preuve, que la Chambre de première instance peut commencer à évaluer la pertinence et la valeur probante des pièces. À cet égard, la Défense affirme que les éléments de preuve dont le versement est demandé manquent totalement de pertinence et, pour cette raison, devraient être rejetés. Elle estime que les documents n'ont pas trait au camp de Celebici et relatent souvent des événements sans rapport avec les charges énoncées dans l'acte d'accusation ni avec la période couverte par ce dernier.

14. La Défense conclut que ces documents sans pertinence ni fiabilité ne peuvent manifestement pas avoir une valeur probante. Elle soutient, par conséquent, qu'ils ne devraient pas être admis au dossier des éléments de preuve.

C. Conclusions

15. La question dont est saisie la Chambre de première instance est celle de la recevabilité d'éléments de preuve, question à laquelle les systèmes juridiques nationaux ont répondu de diverses façons. La procédure du Tribunal international, et sa combinaison unique d'éléments de common law et de droit civiliste, ne peut être assimilée à cet égard à aucune tradition existante. Contrairement aux systèmes de common law, où les questions relatives à la recevabilité et l'exclusion des éléments de preuve occupent une place de choix dans la procédure pénale, les dix dispositions du Règlement régissant toutes les questions relatives à l'administration de la preuve dans les débats du Tribunal international ne contiennent pas un jeu détaillé de normes techniques sur ces questions.

16. La question de la recevabilité d'éléments de preuve devant le Tribunal international est régie par la Section 3 du Chapitre Sixième du Règlement intitulée "De la preuve". La démarche adoptée dans le Règlement préconise clairement la recevabilité tant que l'élément de preuve est pertinent et qu'il est considéré comme ayant valeur probante (article 89 C)), et que sa valeur probante n'est pas largement inférieure à l'exigence d'un procès équitable (article 89 D)). Un élément de preuve pourra aussi être exclu aux motifs prévus par les articles 95 et 96. Au paragraphe E), l'article 89 traite de l'authentification des éléments de preuve obtenus hors audience. Le paragraphe B) du même article contient une disposition de nature résiduelle qui, lorsque le Règlement est muet, permet l'application de règles d'administration de la preuve propres à parvenir, dans l'esprit du Statut et des principes généraux du droit, à un règlement équitable de la cause.

17. Parmi ces dispositions, le paragraphe C) de l'article 89 présente un intérêt particulier pour la question dont la Chambre de première instance est saisie. Selon sa formulation sans équivoque, les deux critères de la recevabilité des éléments de preuve sont la pertinence et la valeur probante. Eu égard à la signification substantielle de ces critères, la Chambre de première instance fait remarquer que, dans les systèmes de common law, un élément de preuve présentant une valeur probante est défini de la façon suivante: "un élément qui tend à prouver un point litigieux ("evidence that tends to prove an issue")1. En ce qui concerne la pertinence, on dit souvent que ce concept contient intrinsèquement le critère implicite de la valeur probante. L'un des plus éminents spécialistes en la matière fait remarquer que :

L'élément de preuve pertinent doit répondre à deux critères : il doit être substantiel et avoir valeur probante. Le caractère substantiel dépend du rapport entre les thèses à l'appui desquelles l'élément de preuve est administré et les points litigieux de l'affaire...Le deuxième indice de la pertinence est la valeur probante, c'est-à-dire la mesure dans laquelle l'élément de preuve tend à établir la thèse qu'il est censé prouver2.

De même, la Cour Suprême du Canada, dans R. v. Cloutier (2 S.C.R. 709, 731) a confirmé la déclaration suivante de Sir Rupert Cross :

Pour qu'un fait soit pertinent par rapport à un autre, il doit exister entre eux une connexion ou un lien qui permette d'inférer l'existence de l'un de celle de l'autre. Un fait n'est pas pertinent vis-à-vis d'un autre s'il n'a pas de valeur probante réelle vis-à-vis de ce dernier3.

Comme l'a affirmé la Chambre de première instance dans sa Décision relative aux Requêtes orales de l'Accusation aux fins d'admission de la pièce 155 au dossier des éléments de preuve et aux fins d'exiger de l'accusé Zdravko Mucic qu'il produise un échantillon graphologique (19 janvier 1998) ("Décision relative à l'écriture de Mucic"), il est cependant manifeste que ces concepts sont difficiles à définir de façon claire et simple in abstracto. Leur application nécessite des évaluations se fondant sur l'expérience humaine ainsi que la logique, et dépendra des circonstances particulières de l'affaire en question ainsi que de la nature des éléments de preuve qui font l'objet de la demande.

18. Dans sa Décision sur la recevabilité des éléments de preuve indirects dans l'affaire Le Procureur c/ Dusko Tadic (Décision concernant la Requête de la Défense sur les éléments de preuve indirects, 5 août 1996, IT-94-1-T), Procès-verbal officiel, RG cote D 11608-D 11598 ("Décision sur les éléments de preuve indirects"), la majorité des membres de la Chambre de première instance II (Mme le Juge McDonald, Président, et M. le Juge Vohrah, opinion individuelle de M. le Juge Stephen) a estimé que le Règlement impose implicitement que la fiabilité soit une composante de la recevabilité. La Chambre de première instance adhère au raisonnement suivi dans la Décision et considère que la fiabilité est une composante inhérente et implicite de chaque élément de recevabilité, tel que décrit ci-après. Il est évident que si l'élément de preuve présenté n'est pas fiable, il ne peut être ni pertinent, ni avoir valeur probante. Il est donc non-admissible en vertu du paragraphe C) de l'article 89.

19. La Défense soutient, cependant, que l'établissement de la fiabilité devrait être considérée comme le premier stade, indépendant, du processus d'évaluation des pièces soumises, et déclare que ce n'est qu'après avoir franchi ce premier cap que la Chambre de première instance est en mesure d'évaluer la pertinence et la valeur probante des éléments de preuve. Cette démarche, consistant à faire de la fiabilité un critère à part entière, indépendant de ceux visés au paragraphe C) de l'article 89, a été rejetée par la Chambre dans sa Décision relative à l'écriture de Mucic. Comme l'a fait remarquer la Chambre de première instance à cette occasion, l'une des règles d'or de l'interprétation du droit consiste à ne pas interpréter une disposition lorsque celle-ci est formulée de façon claire et sans aucune ambiguïté. C'est donc le paragraphe C) de l'article 89 qui prévaut et il n'est, par conséquent, ni nécessaire, ni souhaitable, d'ajouter à cette disposition une condition de recevabilité qui n'est pas expressément visée par cette disposition.

20. Alors que l'importance des normes régissant la recevabilité de la preuve dans les pays de common law découle de l'impact que peut avoir l'admission de certains éléments sur un jury, les procès du Tribunal international se déroulent devant des juges professionnels, qui, grâce à leur formation et expérience, savent évaluer chacun des éléments de preuve qui leur sont soumis et en déterminer le poids. Comme nous l'avons précisé précédemment, il est implicitement prévu dans le Règlement que la Chambre de première instance accorde une attention particulière aux indices de fiabilité des éléments de preuve lorsqu'elle en évalue la pertinence et la valeur probante avant de se prononcer sur leur admissibilité. Cependant, la terminologie utilisée risque de provoquer un certain malentendu, consistant à croire qu'une décision définitive doit être prise à ce stade sur l'authenticité, l'identité de l'auteur ou la crédibilité de l'élément de preuve. C'est pour cette raison que la Chambre tient à insister sur le fait que la simple admission d'un document en tant qu'élément de preuve ne signifie pas en soi que les déclarations le constituant soient considérées comme une représentation exacte des faits. Des facteurs tels que l'authenticité et la preuve de l'identité de l'auteur seront, bien sûr, prédominants lorsque la Chambre jugera du poids à accorder à chaque élément de preuve. Le critère de l'admission de la preuve ne doit cependant pas être trop strict, car il arrive souvent que des documents faisant l'objet d'une demande d'admission n'aient pas pour but de prouver la culpabilité ou l'innocence de l'accusé, mais d'établir un contexte et de compléter l'image formée par les preuves déjà rassemblées.

21. La Défense avance que l'admission de documents dont les auteurs ne sont pas cités à comparaître dans les présents débats revient à priver l'accusé de son droit à contre-interroger les témoins à charge, prévu à l'article 21 4) e) du Statut du Tribunal international ("le Statut") et que, par conséquent, elle est incompatible avec l'obligation de la Chambre de première instance visée à l'article 20 1) du Statut, d'assurer la tenue d'un procès équitable. Pour cette raison, et en invoquant les articles 89 D) et 95, la Défense soumet que la Chambre de première instance devrait rejeter certains des documents faisant l'objet de la demande d'admission.

22. Il ressort à l'évidence des dispositions pertinentes du Règlement qu'il n'existe pas de principe d'exclusion systématique de documents simplement parce que l'auteur présumé n'a pas été cité à la barre au cours du procès. Les conditions régissant la recevabilité des éléments de preuve sont, en fait, contenues dans le paragraphe C) de l'article 89 déjà cité. Qui plus est, si la Chambre de première instance devait estimer que la valeur probante d'une pièce de cette nature était largement inférieure à l'exigence d'un procès équitable, elle pourrait l'exclure au titre du paragraphe D) de l'article 89. Cependant, rien ne justifie que l'on adopte un principe général selon lequel la valeur probante des documents de cette catégorie est tellement inférieure à leur effet préjudiciable qu'ils devraient généralement être considérés comme irrecevables. Certes, leur valeur probante sera nécessairement amoindrie du fait de l'absence d'examen des documents dans le cadre d'un contre-interrogatoire, mais c'est là une autre question. C'est, cependant, un facteur important que la Chambre de première instance ne manquera pas de considérer lorsqu'elle évaluera le poids à accorder aux pièces de cette nature.

23. La Chambre de première instance va maintenant examiner la recevabilité des pièces litigieuses. Dans la présentation de ses arguments, la Chambre de première instance établira une distinction entre, d'une part, les documents et, d'autre part, les cassettes vidéo. La Chambre de première instance n'estime pas nécessaire d'examiner toutes les pièces individuellement, mais plutôt de les diviser en plusieurs catégories appropriées.

1. Documents

24. S'agissant de l'examen des documents qui feraient partie de ceux saisis dans les locaux d'Inda-Bau à Vienne, la Chambre de première instance répondra en premier lieu à l'opposition soulevée par la Défense, selon laquelle l'Accusation n'a pas prouvé l'origine des documents. En second lieu, les documents seront divisés en trois catégories, qui feront chacune l'objet d'une argumentation.

25. La Défense allègue que le témoin, Moerbauer, qui a comparu devant le Tribunal international afin d'authentifier les documents, n'a pu retrouver les marques qu'il avait apposées sur les documents à l'issue de leur saisie. L'Accusation, en revanche, signale à juste titre que ce témoin, grâce à l'inventaire qu'il a dressé, a pu, au cours de son audition, confirmer que chacun des documents faisant l'objet de la demande de versement a effectivement été saisi dans les locaux de l'entreprise Inda-Bau et placé dans l'une des chemises admises au dossier des éléments de preuve par la Chambre de première instance dans le cadre de sa Décision du 12 septembre 1997. En outre, au cours de son témoignage, Moerbauer a pu préciser de quelle chemise particulière provenait chacun des documents qui lui étaient présentés. Il est donc indéniable que le témoin Moerbauer a positivement identifié chacun des documents devant la Chambre comme étant un document découvert dans les locaux d'Inda-Bau.

26. Pour que chaque pièce soit déclarée recevable, il faut démontrer qu'elle est à la fois pertinente et qu'elle a valeur probante. Cependant, étant donné leur origine et circonstances de découverte communes, la Chambre de première instance considère qu'il convient d'évaluer la recevabilité des documents en les répartissant dans les trois catégories suivantes. La première inclut les documents qui ont déjà été admis. La deuxième concerne les documents qui sont hautement pertinents pour cette affaire. La troisième catégorie, quant à elle, est constituée des documents plus nombreux dont il est suggéré qu'ils n'ont qu'une pertinence plus générale.

(a) Documents déjà admis

27. Parmi tous les documents saisis à Inda-Bau, la Chambre de première instance a déjà admis les documents enregistrés sous les cotes 137 et 141. Ces pièces ont été admises au cours du témoignage du Général Pasalic qui a pu authentifier les documents le 22 octobre 1997. À ce jour, la Défense n'a pas présenté d'informations supplémentaires pouvant entraîner l'exclusion de ces documents. Il est, par conséquent, inutile de revenir sur les pièces 137 et 141, qui demeurent admises en tant qu'éléments de preuve.

28. La pièce 118 est une ordonnance portant nomination de Zejnil Delalic au poste de commandant du Groupe tactique I et a été identifiée par l'accusé Delalic au cours d'un interrogatoire par l'Accusation les 22 et 23 août 1996 à Scheveningue. Une copie du document a donc été annexée au procès-verbal de l'interrogatoire admis en tant que pièce 99 par la Décision de la Chambre de première instance relative aux requêtes de l'accusé Delalic aux fins d'irrecevabilité d'éléments de preuve, datant du 25 septembre 1997 (RG cote D 23-1/D5180 Bis). Cette pièce est également identique au document admis suite au témoignage du Dr Marie-Janine Calic sous la cote 71 par la Décision de la Chambre de première instance du 24 mars 1997. La Défense n'a pas présenté d'information pouvant entraîner l'exclusion des pièces 71 et 99, et elles demeurent donc admises au dossier. Il est inutile de rouvrir le débat de la recevabilité de ce document. A la demande de l'Accusation, il est admis sous la cote 118.

(b) Documents hautement pertinents

29. La deuxième catégorie de documents présentée à la Chambre de première instance pour admission regroupe les documents hautement pertinents quant aux chefs d'accusation de responsabilité du supérieur hiérarchique auxquels doit répondre l'accusé Delalic. Les documents portant les cotes 117, 130, 131, 132, 144 et 147A font tous référence, d'une manière ou d'une autre, à Delalic comme commandant du Groupe tactique I. Il ne fait aucun doute que ces documents satisfont au premier critère de recevabilité tel qu'établi par l'article 89 C) puisqu'ils sont directement pertinents vis-à-vis de certaines charges de l'acte d'accusation.

30. La pièce 144 est un rapport prétendument rédigé par Delalic et faisant état des incidents qui ont eu lieu dans la région de Konjic en 1992. La lettre constituant la pièce 117 contient des informations très similaires, de même que la pièce 130 qui est un rapport prétendument rédigé par Mucic et relatant de façon assez détaillée les incidents qui se sont produits à Konjic en 1992, ainsi que le rôle joué par certaines personnes, y compris Delalic. De même, la pièce 147A, une carte de membre de l'Association unie des anciens combattants de la République de Bosnie-Herzégovine, contient une description de Delalic en tant que coordinateur puis commandant du Groupe tactique I. Les pièces 131 et 132 auraient été rédigées par le commandant adjoint du Groupe tactique I, Edib Saric. Ce récit des événements et la fonction occupée par Saric sont des informations figurant dans le document précédemment admis sous la cote 137. Les informations figurant dans ces documents concordent également avec celles fournies par le Général Pasalic, autre témoin, et celles d'autres documents actuellement proposés à la Chambre pour admission.

31. Les documents litigieux ont tous été découverts dans les locaux d'Inda-Bau, entreprise avec laquelle Delalic entretenait une certaine forme d'association et où il a été aperçu par la police autrichienne quelques jours avant la saisie. Les séquences d'événements décrits dans les documents sont, dans une certaine mesure, cohérentes entre elles, et correspondent généralement, aux déclarations des témoins et au contenu des documents déjà admis. Il est, par conséquent, permis de conclure, à ce stade, que suffisamment d'indices de fiabilité ont été établis pour que les documents soumis à la Chambre de première instance soient considérés à la fois comme pertinents et comme établissant une présomption de valeur probante. En tant que tels, ils sont admissibles. Là encore, il convient d'insister sur le fait que cette décision ne constitue aucunement une détermination définitive de l'authenticité ou de la crédibilité des documents soumis. Ces questions seront traitées à un stade ultérieur par la Chambre de première instance lorsque celle-ci déterminera le poids qu'il convient d'attribuer aux différentes pièces.

(c) Documents de pertinence plus générale

32. La troisième catégorie de documents soumis par l'Accusation englobe les pièces 119, 121, 122, 123, 124, 125, 126, 127, 128, 129, 133, 135, 143, 145, 146 et 147 B-C. L'objectif premier de ces pièces est également de démontrer que Zejnil Delalic a été nommé commandant du Groupe tactique I, qu'il se considérait comme occupant ce poste et qu'on lui reconnaissait cette position. De même, Mucic y apparaît comme le commandant de la prison de Celebici. Ensemble, ces pièces illustrent les activités de Delalic et Mucic dans la région de Konjic en 1992. Elles viennent donc corroborer les pièces 118, 137, 141, 144 et 147A qui ont déjà été admises en bonne et due forme au dossier des éléments de preuve. Ce sont des documents découverts dans les locaux d'Inda-Bau, et qui n'ont pas été obtenus dans des circonstances qui mettraient en doute leur crédibilité. S'agissant, en particulier, de la pièce 125, la Chambre de première instance fait observer que la contestation de l'authenticité et de la fiabilité de ce document par la Défense doit être examinée à la lumière du fait qu'un document identique a été soumis par le Conseil de Delalic le 27 octobre 1997 et a été enregistré sous la cote de la Défense (Delalic) D82/1 mais n'a pas fait l'objet d'une demande de versement.

33. En droit anglais, selon la doctrine de la res gestae, un fait peut être tenu pour pertinent vis-à-vis d'un autre fait litigieux lorsque le premier est contemporain de l'objet de l'investigation. Ce peut, notamment, être le cas s'il jette une certaine lumière sur celui-ci en raison de sa proximité temporelle, géographique ou circonstancielle de façon à constituer une partie intégrante de l'événement faisant l'objet de l'investigation. Ainsi, lorsqu'une déclaration est contemporaine de la perpétration d'un acte ou du déroulement d'un événement faisant l'objet de l'investigation, cette déclaration peut être admissible afin d'expliquer l'existence de l'acte ou de l'événement en question. Un élément de preuve de ce type constitue, par conséquent, une exception au principe régissant les éléments de preuve indirects et il est donc admissible car tombant dans le cadre de la res gestae.

34. Il est exact, d'un point de vue juridique, d'affirmer que c'est la personne qui a agi qui est apte à justifier ou expliquer les circonstances d'un acte ou d'un événement. Cependant, dans certains cas, il est difficile d'obtenir des éléments de preuve directs relatifs à l'acte ou un témoignage de l'auteur. Ainsi, des déclarations sont admissibles si elles sont généralement contemporaines de l'objet de l'investigation, si elles émanent de l'auteur de l'acte en question et qu'elles ont un lien avec ce dernier. La Chambre de première instance estime que les documents de la troisième catégorie répondent à cette description. Le fait que la déclaration émane de l'auteur ou d'un autre participant peut être déterminé à l'aide de preuves circonstancielles pointant sans ambiguïté sur le fait en question. Les pièces 124 et 125, par exemple, sont des déclarations relatives à la fuite de Delalic de Konjic. Des déclarations qui relatent la fuite de Zejnil Delalic, qui affirment que Zejnil Delalic avait fait don de 2000 uniformes à des soldats et avait travaillé sans repos pendant vingt-quatre heures, ne peuvent que renvoyer à Delalic comme étant l'auteur. De même, d'autres pièces sont constituées de déclarations spontanées relatives aux événements auxquels a participé l'accusé Delalic. C'est le cas notamment de sa déclaration d'innocence après qu'il ait accusé de malhonnêteté et de s'être enfui de la région. Il n'est pas nécessaire dans une telle situation de prouver la véracité des déclarations. Il suffit qu'elles existent ; dans ces circonstances, elles entrent dans le cadre de la res gestae.

35. La Chambre de première instance est d'avis que les pièces soumises contiennent des déclarations contemporaines de la période d'hostilités faisant l'objet de l'investigation et pour laquelle se pose la question des fonctions occupées par Delalic et Mucic. Elles jettent une certaine lumière sur le rôle et les fonctions des deux hommes. S'insérant dans le cadre global de l'affaire dont cette Chambre est saisie, elles sont admissible en l'espèce en tant qu'éléments de preuve.

2. Cassettes vidéo

36. Outre les documents dont il est question ci-dessus, la Chambre de première instance a également été saisie de l'examen de la recevabilité de cinq cassettes vidéo. Parmi celles-ci, trois cassettes ont été découvertes chez l'accusé Zdravko Mucic à Vienne et les deux autres l'auraient été dans les locaux d'Inda-Bau.

37. Le premier lot de cassettes a été découvert par le témoin Wolfgang Panzer, Inspecteur de district de la police de Vienne, qui a été entendu par la Chambre de première instance et a identifié les cassettes. Les cassettes vidéo, pièces 110 à 112, présentent différentes scènes du camp de Celebici. Les cassettes sont pertinentes puisqu'elles ont un lien avec l'accusé Mucic et ses activités au camp de Celibici. Elles ont été découvertes dans l'appartement de Mucic, aisément identifiable sur les enregistrements. Elles présentent, par conséquent, des indices de fiabilité et sont considérées comme ayant valeur probante. Les pièces 110, 111 et 112 sont donc admises en tant qu'éléments de preuve.

38. Les deux autres cassettes qui sont maintenant soumises par l'Accusation sont les pièces 115 et 116. L'Accusation affirme que ces deux cassettes faisaient partie d'un lot beaucoup plus important de cinquante-quatre cassettes découvert dans les locaux d'Inda-Bau à Vienne. La Défense souligne que dans le premier procès-verbal de saisie (le "Niederschrift") dressé à l'époque de la perquisition par le témoin Wolfgang Navrat de la police de Vienne, le nombre de cassettes saisies à Inda-Bau s'élevait à cinquante et une. Ce n'est qu'un mois après la saisie que le témoin Moerbauer, en faisant l'inventaire de tous les documents et cassettes retrouvés, en a comptabilisées cinquante-quatre. La Défense considère qu'étant donné cette différence, il est impossible de conclure avec certitude que les cassettes qui font l'objet de la demande de versement se trouvaient bien dans les locaux d'Inda-Bau à Vienne.

39. La pièce 115 est un enregistrement vidéo d'une interview accordée par le Général Divjak, témoin, et Delalic, ainsi qu'un autre homme La seconde cassette soumise sous la cote 116 est constituée de deux parties. L'accusation demande l'admission de la première, un enregistrement de l'émission "Slikom na Sliku" de la télévision de Zagreb datant de mai 92 , qui contient une interview de Delalic. Les deux cassettes vidéo contiennent des informations relatives à la situation générale dans la région de Konjic et les activités de l'accusé Delalic en 1992 et sont donc pertinentes.

40. La nature du contenu des deux pièces - c'est-à-dire des enregistrements de personnes identifiables menant des interviews - est telle que leur valeur probante n'est pas nécessairement exclue par la persistance d'une certaine incertitude quant à la source de ces pièces. La Chambre de première instance fait observer qu'elle a déjà admise des séquences d'une autre cassette vidéo qui, selon l'Accusation, aurait été saisie dans les locaux d'Inda-Bau lors de la même perquisition. Il s'agit de la pièce 114, renfermant une interview du Général Pasalic, qui a déclaré à la Chambre de première instance, au cours de sa déposition, qu'il se souvenait de cette interview. Sur cette base, des séquences de la cassette ont été admises en tant qu'éléments de preuve le 22 octobre 1997. Eu égard aux deux cassettes qui font maintenant l'objet de la demande de versement, le Général Divjak, témoin, a été entendu par la Chambre de première instance et a reconnu la séquence de la pièce 115 montrant l'interview donnée par lui-même et Delalic. Bien qu'il n'ait pas vu la pièce 116 à proprement parler, Delalic a reconnu, lorsque l'Accusation l'a interrogé sur l'interview au cours d'un interrogatoire à Scheveningue le 23 août 1996, qu'il avait participé à une interview de ce type pour l'émission de télévision "Slikom na Sliku" durant la période concernée. Dans ce contexte, il faut aussi faire remarquer que des séquences de cette dernière cassette ont été montrées au témoin Branko Gotovac par le Conseil de l'accusé Esad Landzo le 25 mars 1997, à la suite de quoi cette pièce a été admise en tant que pièce de la Défense (Landzo) D5/4. À cette occasion, le Conseil de la Défense a informé la Chambre de première instance que cette cassette, qui avait été remise à la Défense par l'Accusation, était l'une des cassettes saisies parmi celles de Delalic. Un extrait de cette cassette a également été utilisé par le Conseil de Delalic et a été admis en tant que pièce de la Défense (Delalic) D 11 6/1. Comme l'a fait remarquer à juste titre l'Accusation, cela semble indiquer que des membres de la Défense attribuent une certaine crédibilité à cette pièce.

41. La Chambre de première instance est donc convaincue qu'il existe suffisamment d'indices de fiabilité pour que les cassettes soient considérées comme étant à la fois pertinentes et ayant valeur probante. Les pièces 115 et 116 sont, par conséquent, admissibles. Les séquences de la pièce 114 demeurent admises en tant qu'éléments de preuve.

 

III. DISPOSITIF

 

PAR CES MOTIFS,

LA CHAMBRE DE PREMIERE INSTANCE,

Saisie de la requête du Procureur,

EN APPLICATION DE L'ARTICLE 54 du Règlement,

EN CONFORMITÉ À L'ARTICLE 89 du Règlement ,

ADMET les pièces 110, 111, 112, 115, 116, 117, 118, 119, 121, 122, 123, 124, 125, 126, 127, 128, 129, 130, 131, 132, 133, 135, 143, 144, 145, 146, et 147 A-C en tant qu'éléments de preuve.

 

Fait en anglais et en français, la version en anglais faisant foi.

 

Le Président de la Chambre

de première instance,

/Signé/

___________________

Adolphus Godwin Karibi-Whyte

Fait le dix-neuf janvier 1998

La Haye (Pays-Bas)

[Sceau du Tribunal]


1. Henry C. Black, Black's Law Dictionary 1203 (6e éd. 1991). Traduction non officielle.

2. Charles T. McCormick, McCormick on evidence, p. 338-339 (4e éd. 1992). Traduction non officielle.

3. Cross on evidence, p.16 (4e éd. 1974). Traduction non officielle.