Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 (Mercredi 9 juillet 1997.)

2 (L'audience est ouverte à 10 heures 30.)

3 (Audience publique avec mesures de protection.)

4 (Contre-interrogatoire du Témoin P par Me Residovic.)

5 M. le Président (interprétation): Bonjour, Mesdames et Messieurs.

6 Pourrais-je savoir qui comparait aujourd'hui?

7 Mme McHenry (interprétation): Bonjour, Monsieur le Président. Grant

8 Niemann, substitut principal du Procureur est toujours à l'étranger. Je

9 suis Teresa McHenry avec Giuliano Turone et le substitut d'audience Elles

10 van Dusschoten.

11 Mme Residovic (interprétation): Bonjour, Monsieur le Président. Je

12 représente l'accusé Delalic et je m'appelle Edina Residovic et m'assiste

13 dans cette tâche M. O'Sullivan du Canada.

14 M. Olujic (interprétation): Bonjour Monsieur le Président. Je m'appelle

15 Zeljko Olujic. Je défends avec Me Greaves M. Mucic.

16 M. Karabdic (interprétation): Bonjour, Monsieur le Président. Je m'appelle

17 Salih Karabdic, je représente M. Hazim Delic et m'assiste dans cette tâche

18 Thomas Moran qui vient de Houston Texas.

19 M. Ackerman (interprétation): Bonjour, Monsieur le Président, je m'appelle

20 Thomas Ackerman. Je représente Esad Landzo et m'assiste dans cette tâche

21 Mme Cynthia McMurrey

22 M. le Président (interprétation): Merci.

23 Veuillez rappeler au témoin qu'il est toujours sous serment.

24 M. Dubuisson: Je vous rappelle que vous témoignez toujours sous serment.

25 Mme Residovic (interprétation): Bonjour, Messieurs de la Cour. Je voudrais

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1 vérifier si mon casque marche parce que mon collègue vient de me dire

2 qu'il a des problèmes.

3 M. le Président (interprétation): Merci. Vous pouvez poursuivre, Madame

4 Residovic. Vous avez des difficultés encore?

5 Mme Residovic (interprétation): Je n'entends rien. Oui, j'entends

6 maintenant, merci.

7 Monsieur le Président, puis-je commencer?

8 M. le Président (interprétation): Oui.

9 Mme Residovic (interprétation): Merci.

10 Bonjour Monsieur P. Comme vous avez entendu, je suis Edina Residovic et je

11 défends M. Zejnil Delalic.

12 Monsieur P, je voudrais vous donner un avertissement et je me donne cet

13 avertissement à moi-même aussi par la même occasion. Hier, vous avez

14 répondu aux questions qui vous ont été posées toute la journée, des

15 questions qui vous étaient posées par des personnes ne parlant pas votre

16 langue. Nous deux, nous nous comprenons très bien donc nous pourrions sans

17 doute dialoguer l'un avec l'autre à une assez grande vitesse. Mais je vous

18 demanderais, si vous le voulez bien, d'écouter attentivement les questions

19 que je vous pose et d'y répondre avec un débit relativement lent, de façon

20 à ce que tout le monde ici, dans ce prétoire, puisse nous suivre.

21 Nous nous sommes compris?

22 Témoin P (interprétation): Oui, nous nous sommes compris.

23 Question: Monsieur P, vous avez demandé avant de déposer ici des mesures

24 de protection pour des raisons que le Tribunal a acceptées. Est-ce bien le

25 cas?

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1 Réponse: Oui.

2 Question: Un peu avant dans des médias et d'autre manière vous avez parlé

3 de la situation dans laquelle vous vous étiez trouvé en 1992.

4 Réponse: J'en ai parlé en une occasion.

5 Question: L'interview a été publié dans le journal "Le Télégraphe" le 6

6 mars 1996, n'est-ce pas?

7 Réponse: Vous avez raison Madame.

8 Question: Dans cet Article, il était question d'un certain nombre de

9 personnes, de personnalités et de fonctionnaires en poste à l'époque en

10 Bosnie-Herzégovine. Est-ce exact? A Konjic?

11 Réponse: Il y avait un certain nombre de noms qui étaient mentionnés mais

12 20 journaux sont publiés tous les jours à Belgrade environ. Et dans chacun

13 de ces journaux, vous pouvez lire des articles qu'il est possible

14 d'interpréter de façons différentes.

15 Question: Très bien, merci. Mais vous n'avez pas lu cet article?

16 Réponse: J'ai lu l'article du Télégraphe à la mi-avril au moment où je

17 suis rentré de Belgrade.

18 Question: Vous savez que le nom de M. Zejnil Delalic n'était même pas

19 mentionné dans cet article du Télégraphe?

20 Réponse: Je ne peux pas me rappeler aujourd'hui.

21 Question: Très bien, merci. En tout état de cause, Monsieur P, vous avez

22 vécu de nombreuses années à Konjic?

23 Réponse: Oui.

24 Question: Et avant la guerre, vous ne connaissiez pas personnellement M.

25 Delalic, est-ce exact?

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1 Réponse: Avant la guerre, j'ai peut-être eu l'occasion une fois de

2 rencontrer M. Delalic dans le bureau de mon chef, le docteur Hamed

3 Jusufbegovic. Cela s'est passé une fois.

4 Question: Vous saviez que M. Delalic vivait à l'étranger?

5 Réponse: Oui, je le savais.

6 Question: Vous saviez également, puisque vous en avez parlé dans votre

7 déposition devant ce Tribunal, qu'il lui arrivait de temps en temps de

8 venir à Konjic. Est-ce exact?

9 Réponse: Oui.

10 Question: Etant donné que vous venez de mentionner à l'instant votre

11 rencontre avec M. Delalic dans les locaux de votre centre médical, vous

12 êtes sûrement au courant du fait que M. Delalic était un ami de votre chef

13 le docteur Hamed Jusufbegovic, n'est-ce pas?

14 Réponse: Oui et ils étaient très bons amis.

15 Question: Vous êtes également au courant du fait que M. Delalic

16 connaissait bien un certain nombre d'autres collègues à vous, le docteur

17 Grubac par exemple et d'autres également?

18 Réponse: Oui, je suis au courant.

19 Question: Cette amitié était liée au fait... à des soins procurés aux

20 membres de sa famille et à d'autres raisons également?

21 Réponse: Oui.

22 Question: Puisque vous avez dit que vous avez rencontré M. Delalic peu de

23 temps avant la guerre à l'hôpital, je suis sûr qu'en tant que médecin vous

24 êtes au courant, et si tel est le cas, je vous prie de me le confirmer.

25 Vous êtes donc au courant du fait que M. Delalic peu de temps avant la

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1 guerre a commandé deux appareils d'hémodialyse pour l'hôpital en tant que

2 donateur; mais que ces appareils n'étaient pas encore installés avant la

3 guerre en raison d'un certain nombre de problèmes techniques qui se

4 posaient dans les locaux de l'hôpital. Est-ce exact?

5 Réponse: Je suis au courant du fait que deux appareils d'hémodialyse

6 existaient. Certaines personnes étaient même envoyées au centre de dialyse

7 pour y subir une rééducation. Mais qui était le donateur de ces deux

8 appareils, je ne sais pas.

9 Question: En tant que médecin vous êtes sans doute également au courant du

10 fait qu'un certain nombre de patients de Konjic devaient se rendre une ou

11 deux fois par semaine en hémodialyse?

12 Réponse: Au moins deux fois.

13 Question: Et vous savez qu'ils étaient envoyés dans les services

14 d'hémodialyse de Sarajevo?

15 Réponse: Vous avez raison. Mais avant la guerre, je crois que l'un d'entre

16 eux allait à Mostar en raison des difficultés.

17 Question: Vous ne pouvez pas nous dire ce qui pouvait arriver à des

18 personnes qui avaient besoin d'être connectées aux appareils d'hémodialyse

19 si ce branchement ne se faisait pas à temps?

20 Réponse: Eh bien, pour des gens qui devaient subir une dialyse pendant

21 deux ou trois ans, le fait de ne pas subir une ou deux séances conduisait

22 directement à la mort.

23 Question: Lorsque les patients étaient emmenés à des séances de dialyse,

24 c'est vous qui les emmeniez en ambulance. Lorsque je dis "vous", je veux

25 dire les représentants de votre centre médical.

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1 Réponse: Oui.

2 Question: Et lorsque ces patients étaient emmenés à Sarajevo ils étaient

3 obligés de passer par Bradina?

4 Réponse: Oui.

5 Question: Vous-même comme d'autres, vous êtes en mesure de confirmer que

6 Bradina se trouve sur la grande route M17 qui relie Konjic à Sarajevo?

7 Réponse: Je ne connais pas exactement le numéro de cette grande route mais

8 je sais que c'est bien la route qui va de Sarajevo à Konjic.

9 Question: Vous ne connaissez peut-être pas le numéro de cette route mais

10 vous savez que c'est la seule grande route asphaltée?

11 Réponse: Je sais qu'il y a des routes secondaires mais je crois que celle-

12 ci est bien la seule route asphaltée.

13 Question: Donc Monsieur P, vous pouvez confirmer qu'au cas où cette route

14 est bloquée, les communications normales entre Konjic et Sarajevo sont

15 rendues pratiquement impossibles?

16 Réponse: Sauf à utiliser des routes secondaires, effectivement.

17 Question: Monsieur P, vous avez déclaré qu'en tant que médecin spécialisé

18 en oto-rhino-laryngologie, vous avez quitté le centre médical de Konjic

19 pour des raisons particulières dans des circonstances particulières et

20 vous êtes parti à Bradina?

21 Réponse: Oui.

22 Question: Dans votre souvenir, cela a eu lieu le 24 ou le 25 avril?

23 Réponse: Oui.

24 Question: Votre famille se trouvait déjà là-bas, n'est-ce pas?

25 Réponse: Ils sont partis ce jour-là mais eux sont partis en autobus et moi

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1 je suis parti en voiture puisque au barrage routier de Podorasac, ils ont

2 été obligés de descendre.

3 Question: Oui, vous avez dit qu'il y avait un barrage routier à Podorasac

4 où travaillaient des membres de la police de Konjic, n'est-ce pas?

5 Réponse: Oui.

6 Question: Vous avez dit aussi que lorsque vous êtes rentré à Konjic vous

7 avez été appelé par téléphone et que vous avez appris à ce moment-là qu'un

8 groupe de Musulmans qui souhaitait quitter le territoire de Konjic avait

9 été arrêté à Bradina à un barrage. Est-ce bien le cas?

10 Réponse: Oui.

11 Question: Donc, Monsieur P, saviez-vous qu'à Bradina une barricade, un

12 barrage routier avait été installé?

13 Réponse: Oui, un point de contrôle, un barrage routier avait été installé.

14 Question: Ce barrage, ce n'est pas le MUP ou la Défense territoriale de

15 Konjic qui l'avait installé?

16 Réponse: Cela, je n'en sais rien.

17 Question: Comme vous l'avez dit devant ce Tribunal, jusqu'au 4 ou 5 mai,

18 vous avez tout de même continué à vous rendre à Konjic avec différent

19 moyens de..., avec différents véhicules.

20 Réponse: Jusqu'au 5 ou 6 mai.

21 Question: Vous vous rappelez que le 1er mai 1992, votre directeur, le

22 docteur Jusufbegovic, a accompagné deux ambulances qui transportaient des

23 patients se rendant en hémodialyse à Sarajevo?

24 Réponse: Oui. Ils avaient été envoyés par moi.

25 Question: Vous savez que parce que c'est vous qui aviez envoyé ces

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1 patients, ce groupe a été arrêté au barrage routier de Bradina?

2 Réponse: Oui. Il y avait le Dr Risto Kalen qui accompagnait le Dr

3 Jusufbegovic.

4 Question: Oui et à ce moment-là, après 6 heures de pourparlers avec les

5 personnes qui contrôlaient ce barrage, vous avez réussi à obtenir le droit

6 de passage de ces patients. Cela devait être la dernière fois qu'ils se

7 rendaient à Sarajevo, est-ce exact?

8 Réponse: Le tunnel était détruit du côté du village de Vukovic où se

9 trouvaient les Musulmans. Il était impossible de passer en voiture donc

10 les patients qui allaient en dialyse sont revenus à Bradina, ils m'ont

11 contacté. J'ai essayé de voir ce qui se passait et j'ai constaté que le

12 tunnel était détruit. C'est-à-dire était bouché, c'est-à-dire qu'une

13 voiture avait été remplie de terre et bloquait le passage.

14 J'ai demandé qu'on enlève cette voiture pour que l'ambulance puisse passer

15 et le Dr Risto Kalen a pu constater que la situation était tendue. La

16 situation des patients était assez difficile, il a demandé que les

17 patients reçoivent à boire de l'alcool et ensuite une discussion animée a

18 commencé qui a failli finir par un pugilat, car je n'étais pas d'accord

19 avec lui.

20 Question: Merci, Monsieur P. Vous avez dit que grâce à vos efforts ce

21 dernier transport de personnes se rendant en dialyse devait traverser

22 Bradina et que cela s'est passé avant le début des combats, n'est-ce pas?

23 Réponse: Je crois qu'il y a eu encore un transport puisque le tunnel a

24 encore une fois était muré du même côté avec des troncs d'arbres.

25 Question: Très bien. Dites-moi, après cela vous êtes resté sur le

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1 territoire de Bradina dans le dispensaire?

2 Réponse: Tant que les lignes téléphoniques ont continué à fonctionner,

3 j'informais tous les jours mon chef de l'endroit où je me trouvais.

4 Question: Comme vous l'avez déclaré vous-même après avoir décidé de rester

5 sur les lieux, vous avez discuté de cette décision avec votre chef, le Dr

6 Hamed Jusufbegovic?

7 Réponse: Oui.

8 Question: Pour être plus exact, c'est le Dr Grubac qui a mené cette

9 conversation avec votre chef, en votre présence. Est-ce exact?

10 Réponse: Non, le Docteur Jusufbegovic est parti dans son village natal, le

11 village de Repovci qui est un village musulman et, lors de ce voyage, il

12 est passé devant ma maison. Nous nous sommes assis ensemble devant ma

13 maison, je lui ai dit que j'allais venir régulièrement au travail, aussi

14 longtemps que des moyens de transports seraient disponibles.

15 Question: Oui, vous nous avez expliqué cela hier. Vous n'êtes donc pas au

16 courant de cette conversation téléphonique qui a eu lieu avec le Dr

17 Jusufbegovic de la part de votre collègue?

18 Réponse: Je ne sais pas.

19 Question: Monsieur P, plus tard, vous avez transféré votre famille qui se

20 trouvait à Bradina à Hadici?

21 Réponse: Oui.

22 Question: Cela s'est passé une dizaine de jours après votre décision de

23 rester à Bradina?

24 Réponse: Oui.

25 Question: Ils sont partis à Hadici chez votre oncle M. Milos Mrkajic, car

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1 vous aviez le sentiment qu'ils se seraient plus en sécurité dans ce

2 village qui était contrôlé par la JNA et les forces serbes, n'est-ce pas?

3 Réponse: Mon oncle avait un fils qui vivait en République fédérale de

4 Yougoslavie, à Cacik, et je pensais que cette solution était la meilleure

5 pour assurer leur sécurité.

6 Question: Merci. Vous avez également déclaré qu'aux alentours du 20 avril,

7 200 membres du HOS sont arrivés à Konjic.

8 Réponse: Oui.

9 Question: Et qu'ils ont d'abord été stationnés dans le motel de Konjic?

10 Réponse: Oui.

11 Question: Et que l'arrivée de ces membres du HOS a suscité la crainte chez

12 les habitants et que les gens ont donc commencé à quitter la ville. Je

13 parle bien de Serbes comme de Musulmans. Est-ce exact?

14 Réponse: Oui, seulement...

15 Question: Pouvez-vous me dire ce que signifie le sigle HOS et, si vous le

16 savez, d'où venaient les représentants du HOS?

17 Réponse: Je n'en sais rien mais le sigle signifie les forces armées

18 croates.

19 Question: Lorsque vous avez travaillé pour la dernière fois à Konjic; le 5

20 ou le 6 mai, la ville avait déjà été pilonnée le soir du 4 mai, n'est-ce

21 pas?

22 Réponse: Je suis arrivé au travail à Konjic et la ville avait été

23 pilonnée. On voyait des vitres cassées qui jonchaient le sol dans les

24 rues.

25 Question: Vous êtes au courant du fait que ce pilonnage venait de l'Est,

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1 c'est-à-dire du territoire de Borci?

2 Réponse: Je ne suis pas expert en balistique, je ne suis pas un soldat non

3 plus. La seule chose que je peux dire, c'est que des bâtiments étaient

4 endommagés, il y avait des vitres cassées et on voyait des signes de

5 pilonnage.

6 Question: Vous savez que le 17 avril la mobilisation générale a été

7 décrétée à Konjic en raison d'une situation de danger imminent.

8 Réponse: Oui.

9 Question: Et vous savez qu'il était interdit pratiquement à toute personne

10 en âge de porter les armes de quitter la ville?

11 Réponse: Oui.

12 Question: Vous êtes également au courant -je crois que vous êtes au

13 courant-, mais je vous prierai de le confirmer si tel est bien le cas, du

14 fait que les soldats du HOS qui se trouvaient dans le motel ont ensuite

15 été transférés à Podorasac qui est un lieu situé entre Konjic et Bradina.

16 Réponse: C'est la première fois que j'entends cela.

17 Question: Monsieur P, est-ce que vous saviez quà Podorasac se trouvait le

18 commandement du HVO?

19 Réponse: Non.

20 Question: Est-ce que vous saviez qu'on cite le nom de Zovko Zvonko comme

21 commandant du HVO sur ce territoire?

22 Réponse: Je ne sais pas qui était le commandant. J'ai vu Zvonko lorsque

23 j'ai été arrêté au barrage routier de Podorasac. Il portait un uniforme de

24 camouflage et je l'ai vu dans un véhicule de marque Niva Lada appartenant

25 à l'entreprise Sipad de Konjic.

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1 Question: Merci.

2 Réponse: Et lorsque je suis arrivé chez M. Delalic le 27, j'ai vu dans son

3 appartement M. Dinko Zebic.

4 Question: Oui, cela vous l'avez déjà dit. Merci.

5 Réponse: Je voulais donner quelques détails supplémentaires et j'ai

6 supposé que c'était lui le commandant.

7 Question: Dinko Zebic, n'est-ce pas?

8 Réponse: Oui.

9 Question: Merci. Vous avez dit hier que vous n'aviez pas de fonctions

10 militaires officielles ou d'autres fonctions officielles et que vous

11 n'aviez pas d'activité politique à l'époque, est-ce exact?

12 Réponse: Oui.

13 Question: Dans un des documents remis par l'accusation à la défense, un

14 certain nombre d'éléments figurent. J'aimerais vous les citer et vous

15 demander de dire s'ils sont exacts ou pas.

16 Est-il exact, par exemple, que lorsque vous vous trouviez à Bradina vous

17 avez essayé d'agir pour empêcher le conflit imminent?

18 Réponse: Oui.

19 Question: Est-il exact que le 20 avril 1992 vous avez participé à la

20 première réunion qui s'est tenue dans le café de Pero Mrkajic à Bradina, à

21 laquelle Kuljanin Jovo, Pero Mrkajic et Milan Zulja et Gligorevic Radovan

22 étaient présents du côté serbe.

23 Réponse: De quel côté?

24 Réponse: De votre côté.

25 Réponse: Oui, ils étaient présents.

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1 Question: Vous souvenez-vous des hommes qui représentaient l'autre partie?

2 Réponse: Je crois qu'il s'agissait de Ajanovic Fikret nous le surnommions

3 Fiko. Il avait terminé des études de machiniste et travaillait à Sarajevo

4 dans une entreprise d'électricité. Les autres participants, je connaissais

5 les autres participants à l'exception d'un seul.

6 Question: Est-il exacte que la deuxième rencontre a eu lieu à Sunje au

7 mois de mai et qu'y participaient du côté serbe Jovo Kuljanin, Branoslav

8 Gligorevic, vous-même et un autre homme?

9 Réponse: Oui.

10 Question: Savez-vous qui y participaient pour l'autre partie?

11 Réponse: Spiljak Saban, Ljevo…, je ne me rappelle pas son nom de famille.

12 Il y avait également son père et je ne me rappelle pas les noms des autres

13 participants.

14 Question: La troisième rencontre s'est tenue dans le village de Zukici et

15 du côté serbe étaient présents Vaso Vujicic, Rajko, vous Monsieur P et

16 Kuljanin Jovo. Cette réunion s'est tenue à la mi-mai en 1992?

17 Réponse: Je pense qu'il y avait un homme de plus.

18 Question: Pouvez-vous vous rappeler, pourriez-vous me donner ce nom?

19 Réponse: Branko Gligorevic.

20 Question: Savez-vous qui étaient vos interlocuteurs?

21 Réponse: Monsieur Lokas, Goran Lokas M. Smajo Prevljak et je ne me

22 souviens pas du nom, il s'appelait Diver. C'était un officier d'active, un

23 militaire d'active. Il m'a demandé si je représentais des autorités

24 militaires. Je lui ai répondu que non. Si j'avais voulu être militaire, je

25 l'aurais été depuis longtemps et j'aurais eu un grade bien plus élevé que

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1 le sien.

2 Je déclare qu'à chaque fois que je me suis rendu à ces pourparlers, on

3 m'attendait parce que je venais après mon travail au dispensaire, parce

4 que les gens se sentaient en confiance puisque je travaillais comme

5 médecin, puisque je connaissais beaucoup de gens. Ils savaient que rien

6 n'allait leur arriver pendant que j'étais avec eux.

7 Question: Merci. Une quatrième réunion s'est tenue. De votre côté, il y

8 avait les mêmes personnes que vous venez de citer et en plus de ceux que

9 vous avez mentionnés comme interlocuteurs, à l’exception de Diver, il y

10 avait Jusufbegovic Ahmed, est-ce exact?

11 Réponse: Non. Non je ne me souviens pas du tout de cette réunion et je ne

12 me souviens pas d’avoir rencontré M. Ahmed Jusufbegovic.

13 Mme McHenry (interprétation): Pour le procès-verbal, la défense fait état

14 d'un rapport qui a été remis par l'accusation. Ce n'est pas réellement un

15 rapport, c'est uniquement une pièce qui a été communiquée dans le cadre

16 des obligations de communication de pièces par une partie à l'autre. Donc

17 l'exactitude de ces documents n'est pas avérée.

18 Mme Residovic (interprétation): Je voudrais juste établir les faits. Je ne

19 suis pas intéressé par ce rapport. Monsieur P a pu nous répondre de

20 manière très précise au sujet de ce qu'il s'est produit à ce moment-là.

21 Monsieur P, vous nous avez mentionné les fonctions des différents

22 interlocuteurs. Pouvez-vous nous dire qui était M. Goran Lokas? Vous

23 n'avez rien dit à son sujet.

24 Témoin P (interprétation): Je connaissais M. Goran Lokas en tant que

25 Président du Tribunal, du Tribunal municipal.

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1 Question: Est-ce qu'il a pris part aux négociations en tant que Président

2 du Tribunal?

3 Réponse: Je ne peux pas vous le dire, je ne le sais pas.

4 Question: Monsieur P, pourriez-vous me dire si lors de ces négociations,

5 il a été question de la remise des armes et de la levée des barrages?

6 Réponse: Il a été question de ne pas attaquer, d'éviter les attaques et

7 d'assurer la libre circulation.

8 On s'est mis d'accord sur le fait que tout pouvait circuler, les personnes

9 et les biens, que seules les armes ne devaient pas circuler.

10 Question: Cependant Monsieur P, vous savez que jusqu'au 25 mai, la libre

11 circulation n'a pas été assurée, à savoir que le barrage n'a pas été levé

12 et que les armes n'ont pas été rendues de la part de la population. Est-ce

13 exact?

14 Réponse: On s’est mis d'accord à la dernière réunion où j'ai participé, le

15 25 mai à midi, que les négociations reprendraient à Bradina.

16 Question: S'il vous plaît, pourriez-vous répondre à ma question? Jusqu'à

17 ce jour, quelle que ce soit l'issue des négociations, jusqu'à ce jour, les

18 barrages n'ont pas été levés, jusqu'à ce jour les armes n'ont pas été

19 rendues, est-ce correct?

20 Réponse: Trois jours avant le 25 mai, quelques femmes se sont rendues à

21 Konjic, puisque le car ne circulait pas de Repovci, le village musulman, à

22 travers Bradina en direction de Konjic. Elles sont arrivées devant le

23 tunnel bouché, du côté sud de ce tunnel qui a été bouché par les forces du

24 HVO et par la Défense territoriale, autant que je sache.

25 Près du pont, elles ont été attendues. Elles ont été vues en uniforme de

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1 camouflage, un homme qui s'appelait Niksic, je ne me rappelle pas son nom.

2 Question: Vous connaissez certainement beaucoup de choses au sujet de ces

3 événements, mais je vous prie de répondre seulement à ma question. Est-ce

4 que les armes ont été rendues autant que vous sachiez? Si vous ne le savez

5 pas, dites-le pour qu’on ne dise pas des choses qui ne sont pas vérifiées.

6 Donc, est-ce que le barrage était levé au centre de Bradina et est-ce que

7 les gens ont rendu leurs armes?

8 Réponse: S'il vous plaît, ne simplifiez pas à outrance les choses.

9 Procédons dans l'ordre. Mais je répondrai à votre question: non.

10 Question: Merci.

11 Devant le Tribunal, vous avez déclaré que la population s'est organisée

12 toute seule pour se défendre parce qu'elle avait peur. Donc cela veut dire

13 que les gens se procuraient des armes et se préparaient à réagir en cas de

14 besoin. Est-ce exact?

15 Réponse: Oui, c'est vrai. Le marché noir des armes fonctionnait, donc pour

16 les armes, le pétrole et les cigarettes.

17 Question: Monsieur P, vous étiez au courant également que, suite à ce que

18 vous avez appelé "conflit sporadique" le long de la ligne de séparation,

19 on a commencé à creuser des tranchées autour de Bradina, est-ce exact?

20 Réponse: Je ne le sais pas. Je ne me suis pas rendu à ces endroits.

21 Question: Merci. Au moment de ces activités militaires de Bradina, vous

22 avez dit que vous étiez au dispensaire?

23 Réponse: Oui.

24 Question: Est-il exact que dans l'après-midi, Kuljanin Radovan qui avait

25 été blessé au ventre s’est rendu au dispensaire?

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1 Réponse: Exact.

2 Question: Vous l'avez soigné de manière appropriée, est-ce exact?

3 Réponse: Oui.

4 Question: Le soir, le père de Kuljanin s’est rendu pour vous voir, les

5 médecins, est-ce exact?

6 Réponse: Oui.

7 Question: Nedjo Kuljanin était blessé à la cuisse droite et vous, vous

8 vous êtes allé lui procurer des soins, est-ce exact?

9 Réponse: Oui.

10 Question: Par la suite, vous êtes revenu au dispensaire où vous avez passé

11 la nuit, est-ce exact?

12 Réponse: Oui.

13 Question: Le lendemain matin avec Milan Zuza, Kuljanin Milovan, Mrkajic

14 Risto, Kuljanin Radovan, vous vous êtes rendu aux membres de la Défense

15 territoriale et du HVO, est-ce exact?

16 Réponse: Ce n'était pas le matin, c'était à 16 heures de l'après-midi.

17 Question: Donc c'était le 26, à 4 heures de l'après-midi.

18 Monsieur P, même si la population s’armait comme vous l’avez dit, vous

19 personnellement, vous n’aviez pas d'arme du tout?

20 Réponse: Non.

21 Question: Il est vrai qu'a la mi-mai, Vujicic Drago, appelé Spaco, vous a

22 proposé des armes, mais vous avez refusé, est-ce exact?

23 Réponse: Oui.

24 Question: Vous savez que votre collègue, docteur Milan Zuza au moment où

25 vous avez été arrêté, vous a remis son fusil semi-automatique, est-ce

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1 exact?

2 Réponse: Oui.

3 Question: Il avait ce fusil au dispensaire, non pas à l'endroit où se

4 trouvent les patients?

5 Réponse: Dans la partie de stomatologie. Oui.

6 Question: Comme vous avez déposé, vous avez été arrêté ensemble avec

7 jusqu’à 150 personnes?

8 Réponse: Oui.

9 Question: Quand vous êtes parti, au début à pied et ensuite par camion, il

10 n'y avait que des hommes, est-ce exact?

11 Réponse: Oui.

12 Question: Les femmes et les enfants sont restés à Bradina?

13 Réponse: Je l’ai expliqué hier.

14 Question: Excusez-moi d'avoir répété la question.

15 Réponse: Cela ne fait rien.

16 Question: En partie ces gens qui ont été arrêtés, ont remis tout de suite

17 leurs armes comme le Dr Zuza, d’autres ont jeté leurs armes ou les ont

18 cachées, est-ce exact?

19 Réponse: C'est ce que j'ai appris dans le camp, que cela s'était passé

20 comme cela.

21 Question: Bien. Vous avez décrit en détail les tortures que vous avez

22 subies, suite à votre arrivée de Bradina. Humainement, je ne peux que

23 compatir avec vous mais vous comprendrez que je dois vous poser quelques

24 questions supplémentaires à ce sujet.

25 Vous avez été emmené au gymnase de Musala?

Page 4480

1 Réponse: Oui.

2 Question: Pouvez-vous nous dire combien de temps vous êtes resté là-bas?

3 Je ne suis pas sûr que votre réponse était précise pendant

4 l'interrogatoire.

5 Réponse: Oui effectivement, je ne peux pas être très précis, car je ne

6 peux pas le dire avec exactitude. Je pense que nous y sommes restés 30

7 voire 40 minutes.

8 Question: Merci. Et à ce moment-là, Monsieur P, on vous a dit que vous

9 étiez emmené par erreur, que vous auriez dû être emmené à Grude, est-ce

10 exact?

11 Réponse: Oui.

12 Question: Qu'est-ce que cela veut dire Grude, s'il vous plaît?

13 Réponse: C'est un bourg croate qui se trouve sur l'actuel territoire de

14 l’Herceg-Bosna qui fait partie de la fédération croato-musulmane.

15 Question: A ce moment-là, vous saviez que c'était là que se trouvait

16 l'état-major du HVO?

17 Réponse: Je le sais.

18 Question: Monsieur P, après avoir été emmené après toutes ces tortures à

19 Celebici, vous avez dit que vous avez été emmené dans un couloir

20 souterrain, ensemble, avec d'autres personnes qui ont été arrêtées?

21 Réponse: Après avoir subi les tortures.

22 Question: Pouvez-vous vous souvenir à quelle heure approximative vous avez

23 été emmené dans ce couloir, ce corridor, dans ce tunnel?

24 Réponse: Je pense qu'il était vers 3 heures, 3 heures 30 du matin.

25 Question: Dans la nuit du 26 au 27, est-ce exact?

Page 4481

1 Réponse: Oui.

2 Question: Dans ce groupe dont vous faisiez partie, il y avait un homme

3 plus âgé, Kuljanin Mirko de Bradina, est-ce exact?

4 Réponse: Je ne me souviens pas de lui. Voulez-vous que je vous cite

5 quelques noms?

6 Question: Oui, si vous voulez, deux ou trois seulement.

7 Réponse: Quelques-uns dont je me souviens, Milan Zuza, Mijailo Mrkajic,

8 Relja Kuljanin, Radomir Dordic.

9 Question: Merci, cela suffira. Je vous remercie.

10 Vous avez dit qu'à un moment, Miralem appelé Rale Musinovic est venu en se

11 présentant comme commandant du camp?

12 Réponse: C'est exact.

13 Question: Combien de temps s'est-il passé entre le moment où vous êtes

14 arrivé dans le tunnel et le moment où Rale Musinovic est arrivé pour vous

15 faire sortir du tunnel?

16 Réponse: Je pense qu'il s'est passé environ une demi-heure.

17 Question: Pouvez-vous vous rappeler si quelques autres personne ont été

18 sorties de ce tunnel à ce moment?

19 Réponse: J'ai été sorti le premier.

20 Question: Pourriez-vous me dire si vous vous souvenez qu'à ce moment, on a

21 fait sortir Simo Jovanovic et son fère.

22 Réponse: Comme je vous disais, j'ai été sorti le premier. C'est tout.

23 Question: Monsieur P, vous avez déclaré que quelques personnes se

24 trouvaient à l'extérieur quand on vous a fait sortir. Pouvez-vous nous

25 dire qui étaient ces hommes et ce qu'ils ont fait?

Page 4482

1 Réponse: Oui. Comme je l'ai dit hier c'était Marko Rajic qui travaillait à

2 la compagnie Unis Igman à Konjic. Puis, me semble-t-il, il y avait deux

3 autres personnes dont un s'appelait -je pense-, Gulas.

4 Question: Vous ne savez pas quelles étaient leurs fonctions, quels étaient

5 leurs rôles?

6 Réponse: Non.

7 Question: Vous ne savez pas, merci.

8 En premier lieu après avoir été sorti, où vous êtes-vous rendu ce matin,

9 en cette matinée du 27? Pouvez-vous vous souvenir de cela?

10 Réponse: Ils m'ont d'abord permis d'aller chercher mes chaussures dans un

11 tas de chaussures et, par la suite, ils m'ont emmené voir M. Zejnil

12 Delalic.

13 Question: Donc, vers 4 heures du matin, comme vous l'avez confirmé, on

14 vous a emmené dans le bâtiment où se trouvait M. Delalic Zejnil?

15 Réponse: Oui.

16 Question: Vous saviez par ailleurs que M. Delalic avait une maison à

17 Konjic?

18 Réponse: Oui je le savais bien.

19 Question: Vous saviez que cette maison se trouvait à la sortie de Konjic

20 en direction de Celebici c'est-à-dire de Jablanica?

21 Réponse: Oui, en face de la station d'essence.

22 Question: C'était une maison à un étage, est-ce exact?

23 Réponse: Oui, c'est exact.

24 Question: Cette maison, si on regarde de Konjic vers Celebici, à gauche de

25 cette maison passe cette route principale M17, le long de la clôture du

Page 4483

1 terrain de la maison?

2 Réponse: C'est exact.

3 Question: En face de cette rue se trouve la station d'essence que vous

4 venez de mentionner?

5 Réponse: C'est exact.

6 Question: Cette station d'essence et cette maison de M. Delalic, elles

7 sont à l'abri d'un rocher très escarpé, est-ce exact?

8 Réponse: Oui c'est exact.

9 Question: A droite de la maison de M. Delalic, autrement dit la clôture de

10 sa basse-cour, se trouve la rivière Neretva. En fait, on peut dire c'est

11 le début du lac de Jablanica parce que c'est un endroit où la Neretva

12 s'élargit?

13 Réponse: Oui, c'est exact.

14 Question: Et du même côté, sur la rive de la Neretva et le long de la

15 clôture du terrain devant la maison de M. Delalic il y a beaucoup de

16 verdure, est-ce exact?

17 Réponse: Je ne me suis pas rendu de ce côté de la maison.

18 Question: Vous avez déclaré qu'avant la guerre en bas de la maison il y

19 avait une discothèque?

20 Réponse: Oui.

21 Question: Le jour en question où vous êtes arrivé, on vous a emmené à

22 l'étage, au premier étage où se trouvait l'appartement de M. Delalic?

23 Réponse: Vous avez raison, Madame.

24 Question: Je voudrais maintenant vous demander à l'aide des

25 enregistrements de nous aider à montrer les lieux. L'accusation a réalisé

Page 4484

1 des films. Je demanderai au technicien de nous montrer la vidéo n°1.

2 Mme McHenry (interprétation): Oui effectivement, j'ai pu voir cette

3 cassette vidéo hier et je ne vois aucune objection à ce qu'elle soit

4 projetée aujourd'hui.

5 Mme Residovic (interprétation): Donc je demanderai qu'on montre au témoin

6 la vidéo n°1. Puisqu'il n'y a pas de texte, je pense qu'on peut le

7 regarder, comme cela il n'y a pas besoin de pas besoin de passer à huis

8 clos.

9 (Projection de la vidéo.)

10 C'est la station d'essence dont nous avons parlé, est-ce exact?

11 Témoin P (interprétation): Je vois qu'il est marqué "Yugopetrol".

12 Question: Et cela, c'est la clôture de la maison vers la rue?

13 Réponse: Je m'orienterais mieux sur les maquettes.

14 Question: Là, on voit l'angle de la station d'essence?

15 Réponse: Euh!

16 Question: Là, on voit le côté de la maison qui donne sur le motel?

17 Réponse: Il semblerait que ce soit la maison de M. Delalic.

18 Question: On peut voir l'ensemble de la bande puisqu'elle ne dure pas plus

19 de 4 minutes, puis vous pourrez nous dire à la fin.

20 Là, on voit l'entrée à la discothèque.

21 Il y a eu peut-être quelque modification puisque l'enregistrement a été

22 fait le 1er juillet 1997.

23 Témoin P (interprétation): Est-ce qu'on peut parler?

24 Mme Residovic (interprétation): On attendra la fin de l'enregistrement. Ce

25 que j'aimerais savoir, c'est si vous avez reconnu la maison ou non.

Page 4485

1 Vous êtes entré par l'autre côté. Là, on voit le côté qui donne sur le

2 motel.

3 Réponse: Je suis entré par en bas.

4 Question: Oui.

5 Réponse: Je ne vois pas l'escalier.

6 Question: Oui, parce que, là, on a vu l'enregistrement du côté de la

7 station d'essence, autrement on ne l'aurait pas vu.

8 Question: La neretva est de ce côté là, est-ce exact?

9 Réponse: Oui.

10 Question: Voilà, c'est cela.

11 Réponse: Mais je ne vois toujours pas l'escalier.

12 Question: Mais l'escalier est de l'autre côté.

13 Réponse: Je suppose que c'est la maison de M. Delalic mais je ne vois

14 toujours pas l'escalier.

15 Question: Mais c'est bien l'entrée de la discothèque? Est-ce que vous

16 voyez l'entrée de la discothèque?

17 Réponse: Oui, c'est exact. Oui et à côté, il y a le garage et puis il y a

18 un endroit avec les yeux vidéo pour les enfants.

19 Question: Vous n'avez pas vu le côté par où vous êtes entré parce que

20 l'escalier est de l'autre côté. Mais d'après cet enregistrement, vous

21 reconnaissez la maison de M. Delalic?

22 Réponse: Je ne peux sûr qu'après avoir vu l'escalier.

23 Question: Donc, ce n'est pas la maison de M. Delalic?

24 Réponse: Madame, je vous dis que je n'en suis pas sûr.

25 Question: D'accord. Nous n'introduirons cette pièce que lorsque nous

Page 4486

1 aurons eu un témoin qui aura reconnu la maison.

2 Réponse: Si vous voulez, je peux vous faire un dessin.

3 Question: Non, merci ce n'est pas utile.

4 Donc, vous avez été emmené le 27 dans cette maison que vous n'avez pas

5 reconnue, est-ce exact?

6 Réponse: C'est exact.

7 Question: Monsieur qui est entré avec vous?

8 Mme Odio Benito (interprétation): Madame Residovic, pourriez-vous nous

9 donner une explication quant à cette discothèque. Quel genre de

10 discothèque est-ce?

11 Mme Residovic (interprétation): Une discothèque c'est un lieu de

12 divertissement pour les jeunes, plutôt la nuit. C'était du moins la

13 fonction de cette discothèque avant la guerre qui se trouve donc au rez-

14 de-chaussée de cette maison.

15 Mme Odio Benito (interprétation): Merci.

16 Mme Residovic (interprétation): De rien.

17 Qui a été le premier à entrer?

18 Témoin P (interprétation): Je pense que le premier était Marko Ruzic. Je

19 suis resté à patienter une minute ou deux devant.

20 Question: Lorsque vous êtes entré vous avez dit que M. Delalic était en

21 robe de chambre, est-ce exact?

22 Réponse: Oui, c'est exact.

23 M. le Président (interprétation):Madame Residovic, je propose que nous

24 fassions maintenant la pause. Nous reviendrons dans une demi-heure après

25 la suspension d'audience.

Page 4487

1 Mme Residovic (interprétation): Merci.

2 (L'audience, suspendue à 11 heures 30, est reprise à 12 heures.)

3 M. le Président (interprétation): Maître Residovic, vous pouvez procéder.

4 M. Residovic (interprétation): Merci Monsieur le Président.

5 Monsieur P, pouvons-nous reprendre au moment où nous nous sommes arrêtés

6 avant la pause?

7 Monsieur Rale Musinovic a appelé votre nom et vous a fait sortir du tunnel

8 9, n'est-ce pas?

9 Témoin P (interprétation): (Hors micro) Oui.

10 Question: Lorsque Rale vous avez fait sortir du tunnel et vous a dit qu'il

11 fallait que vous alliez travailler, vous n'aviez pas les mains liées,

12 n'est-ce pas?

13 Réponse: C'est exact.

14 Question: Donc avec votre blouse tachée de sang, vous êtes monté dans la

15 voiture et à ce moment-là non plus vous n'étiez pas ligoté, vous n'étiez

16 pas dans la situation de quelqu'un qu'on arrête? N'est-ce pas vous n'étiez

17 pas ligoté dans la voiture?

18 Réponse: Non.

19 Question: C'est dans le même état que vous êtes entré dans l'appartement

20 de M. Delalic?

21 Réponse: Oui, oui.

22 Question: Monsieur P, au moment où Rale vous a appelé, ce que vous avez

23 compris c'est qu'on vous libérait, qu'on vous faisait sortir de ce tunnel,

24 n'est-ce pas?

25 Réponse: Comment aurais-je pu le savoir puisque je ne savais pas où on

Page 4488

1 m'emmenait? En fait il m'a dit que j'étais appelé à aller travailler mais

2 je n'avais aucune certitude quant à l'endroit où il m'emmenait.

3 Question: Très bien merci. Lorsque je vous ai posé la question un peu plus

4 tôt, vous m'avez répondu que vous êtes arrivé dans la maison de M.

5 Delalic, qu'il était en robe de Chambre et qu'il vous a offert quelque

6 chose à manger et à boire, c'est exact?

7 Réponse: Vous avez raison.

8 Question: Dites-moi, à part Dinko Zebic, qui d'autre se trouvait dans

9 cette pièce dans laquelle vous vous trouviez vous-même?

10 Réponse: Une femme est arrivée dont je ne connais ni le prénom ni le nom.

11 Question: Merci. Au cours de cette conversation, après que vous ayez pu

12 vous débarbouiller, quand vous avez bu votre café le jour se levait déjà,

13 n'est-ce pas?

14 Réponse: Pas tout à fait.

15 Question: Monsieur Delacic et M. Zebic vous ont dit qu'ils étaient

16 certains que vous n'aviez participé d'aucune manière dans le conflit de

17 Bradina, n'est-ce pas?

18 Réponse: D'après mes connaissances actuelles...

19 Question: Je vous pose la question d'après ce que vous saviez à l'époque.

20 Réponse: Mais je réponds d'après les connaissances actuelles, je pense

21 qu'il s'agissait de calmer le jeu. Monsieur Zebic m'a demandé si je

22 connaissais Mme Stojka Boras.

23 Question: Je vais vous poser la question.

24 Puisque vous venez de parler de Mme Boras, vous aviez déjà dit à certains

25 habitants de Bradina de ne pas insulter Mme Boras, n'est-ce pas?

Page 4489

1 Réponse: Oui.

2 Question: Est-ce que M. Delalic vous a dit à ce moment-là qu’il allait

3 essayer, en raison de son amitié avec votre directeur, de vous faire

4 retravailler à l'hôpital?

5 Réponse: C'est exact.

6 Question: Et à ce moment-là, il a appelé M. Jusufbegovic?

7 Réponse: Oui.

8 Question: Je vous prie Monsieur P, dites-moi, je vais vous poser une

9 question préliminaire. Vous saviez, n'est-ce pas que la ville avait été

10 pilonnée le dernier jour de votre présence dans la ville, que ce pilonnage

11 s’est poursuivi, que les événements de Bosnie-Herzégovine étaient

12 largement discutés. A ce moment-là, en ville l'ambiance était plutôt anti-

13 serbe, n'est-ce pas?

14 Réponse: C'est exact.

15 Question: A ce moment-là, et dans la période immédiatement ultérieure,

16 vous avez pu vous rendre compte que vos amis personnels vous évitaient?

17 Réponse: Ils n'ont même pas fait quoi que ce soit pour éviter que je me

18 fasse frapper.

19 Question: Vous saviez que les Croates et les Musulmans à l'époque, dans ce

20 climat, ceux qui avaient essayé d'aider les Serbes, étaient critiqués très

21 sévèrement et que certains se faisaient même taxer de Chetnik, n'est-ce

22 pas?

23 Réponse: Ils se faisaient taxer de membres de la 5e Colonne.

24 Question: Donc vous saviez qu'il y avait très peu de gens qui avaient le

25 courage d'aider ces personnes, n'est-ce pas?

Page 4490

1 Réponse: Oui, je le savais.

2 Question: Mais il y avait tout de même des gens qui faisaient fi de leur

3 sécurité personnelle et des persécutions?

4 Réponse: Leur nombre était très réduit.

5 Question: Bien merci. Revenons maintenant sur ce trajet que vous avez

6 parcouru depuis l'hôpital où vos plaies ont été pansées, jusqu'à Celebici.

7 Vous avez dit que vous aviez passé deux jours dans le département de

8 gynécologie, c'est exact?

9 Réponse: J'ai passé la nuit, j'ai passé la journée, la nuit du lendemain

10 et la journée suivante et vers 3 heures environ, j'ai été transféré en

11 même temps que deux ou trois autres blessés qui avaient été plâtrés. Je ne

12 sais pas exactement à quelle jambe ils étaient plâtrés mais il y en avait

13 qui avaient un plâtre sur la cuisse et la hanche.

14 Question: Monsieur, vous avez passé deux jours à cet endroit en tant que

15 patient et non en tant que médecin, est-ce exact?

16 Réponse: Je ne pourrais pas le dire exactement, car sur la feuille de

17 température, ce qui était écrit c'était: "SE, KS, urine, RTG, pulmo, RTO,

18 craniogramme".

19 Question: Ce qui voulait dire?

20 Réponse: Alors que je n’avais jamais eu tous ces examens. On m'a fait une

21 perfusion et on m'a administré des analgésiques par voie intramusculaire.

22 Question: Oui mais vous ne remplissiez pas les fonctions de médecin?

23 Réponse: Non.

24 Question: Vous vous trouviez dans une chambre avec d'autres malades?

25 Réponse: Non, j'étais seul.

Page 4491

1 Question: A ce moment-là vous n'étiez gardé par personne, n'est-ce pas?

2 Réponse: Des hommes en uniforme se présentaient.

3 Question: De temps en temps?

4 Réponse: De temps en temps.

5 Question: Merci. Après quoi vous avez été transféré à l'école du Trois

6 Mars, qui avait été transformée de façon improvisée en centre médical, en

7 centre où l'on dispensait des soins médicaux?

8 Réponse: C'était un centre tout à fait mal équipé. Il y avait une table de

9 professeur sur laquelle nous avions des instruments? comme je l’ai

10 indiqué.

11 Question: Oui. Mais vous êtes allé là-bas en tant que médecin?

12 Réponse: On m'a dit que j'y étais en tant que médecin.

13 Question: Cette école se trouve près de l'hôpital, n'est-ce pas?

14 Réponse: C'est exact.

15 Question: L'école et l'hôpital se trouvent dans un quartier qui avait été

16 affecté de façon assez considérable par les combats, n'est-ce pas?

17 Réponse: Je le suppose. Je ne suis pas expert en question militaire.

18 Question: Avec vos collègues, Grubac et Zuza, vous avez soigné les détenus

19 blessés dans cet endroit, n'est-ce pas?

20 Réponse: Oui.

21 Question: En fait, vous venez de répondre à ma question suivante. Certains

22 des détenus qui avaient subi des blessures assez graves ont reçu des soins

23 médicaux dans l'hôpital où vous vous trouviez?

24 Réponse: Il s'agissait de Marko Mrkajic, Sejad Gligorevic et d'une autre

25 personne dont je ne me rappelle pas le nom. Mais Madame…

Page 4492

1 Question: Ne me posez pas de question. Nous ne sommes pas dans une

2 situation où vous me posez des questions. Je vous prie de bien vouloir

3 répondre à mes questions. Nous pourrions en parler en une autre occasion.

4 Je vais vous poser la question suivante: Est-il exact que vous êtes sans

5 doute arrivé dans cette école le 30 mai?

6 Réponse: A peu près.

7 Question: Bien. Dans cette école, vous avez immédiatement trouvé 25

8 patients dont les plaies avaient été pansées?

9 Réponse: Partiellement.

10 Question: Plus tard, comme vous l'avez dit, le nombre de patients a

11 augmenté pour atteindre environ 30. Est-ce exact?

12 Réponse: Oui.

13 Question: Dans cette école, vous avez passé tout votre temps avec ces

14 patients, c'est exact?

15 Réponse: Oui.

16 Question: Vous pouviez sortir en ville?

17 Réponse: Absolument pas. Comment est-ce que j'aurais pu sortir pour aller

18 en ville puisque des policiers se trouvaient à la porte? Nous devions

19 frapper à la porte lorsque nous avions besoin de satisfaire nos besoins

20 physiologiques. Nous n'étions autorisés à sortir que deux fois dans la

21 journée.

22 Question: En fait, des représentants du MUP de Konjic gardaient cette

23 école, est-ce exact?

24 Réponse: Les premiers jours, des membres de la police militaire du HVO

25 gardaient l'école.

Page 4493

1 Question: Après, des représentants du MUP Konjic également?

2 Est-ce exact?

3 Réponse: Je ne connaissais pas un seul membre du MUP. C'était des civils

4 qui avaient été mobilisés.

5 Question: Dans cette salle, vous avez également confirmé que Slobodan

6 Babic de Donje Selo est mort dans cette école, c'est exact? Et que vous

7 avez constaté le décès?

8 Réponse: Slobodan Babic vient du village de Bijelovcina.

9 Question: Oui, mais il est mort, n'est-ce pas?

10 Réponse: Ce qui est exact c'est que j'ai constaté le décès.

11 Question: Très bien, merci. Comme vous l'avez dit, après une dizaine de

12 jours, pour des raisons de sécurité comme on vous l'a dit, vous avez été

13 transféré dans la caserne de Celebici avec quelques-uns des patients?

14 Réponse: C'est exact.

15 Question: Avant ce transfert, est-ce que M. Jusufbegovic vous a dit que

16 vos collègues n'étaient pas prêts à accepter que vous travaillez avec eux

17 à l'hôpital?

18 Réponse: A la sortie du camp.

19 Question: Merci. Après votre arrivée à Celebici, dans le bâtiment 22, vous

20 n'avez pratiquement plus la moindre information au sujet des évènements

21 qui se déroulaient à Konjic et dans les environs de la ville, est-ce

22 exact?

23 Réponse: C'est exact.

24 Question: Cependant, lorsqu'un groupe de nouveaux venus était amené dans

25 la prison, vous en étiez informé?

Page 4494

1 Réponse: J'étais partiellement informé.

2 Question: Je voudrais que vous répondiez à la question suivante: saviez-

3 vous si au début du mois de juin, un groupe de Serbes de Bradina, arrêtés

4 à Igman et qui avaient essayé de passer par Igman pour s'enfuir vers

5 Kalinovic. Etes-vous au courant que ce groupe est arrivé à Celebici?

6 Réponse: Oui.

7 Question: Vous savez sans doute qu'à ce moment-là, ce qui se racontait,

8 c'est que c'était un groupe de Serbes radicaux et qu'au moment de leur

9 arrestation, ils avaient subi un passage à tabac assez sérieux. Etes-vous

10 au courant de cela?

11 Réponse: Certains se sont fait tuer, d'autres ont été passés à tabac.

12 Question: Vous savez que votre cousin Pero Mrkajic faisait partie de ce

13 groupe et qu'il avait également été passé à tabac de façon violente?

14 Réponse: Oui.

15 Question: Vous avez déjà expliqué au Tribunal qu'à la suite de cet

16 événement, Pero est mort. Vous en avez parlé hier. Alors, je vous prie de

17 répondre à la question suivante…

18 Mme McHenry (interprétation): Ce n'est pas une objection mais je voudrais

19 simplement vous prier, pour le procès-verbal, de dire clairement s'il y a

20 un seul Pero Mrkajic ou s'il y en a plusieurs parce qu'il pourrait y en

21 avoir plusieurs; pour que les choses soient claires.

22 M. Jan (interprétation): Il a été question d'un parent du témoin.

23 Mme McHenry (interprétation): Oui, mais je crois qu'il est tout de même

24 nécessaire d'établir clairement où se trouvait cette personne au moment où

25 elle est morte, de façon à ce que l'on sache exactement de qui l'on parle.

Page 4495

1 Mme Residovic (interprétation): Bien. Je vais faire de mon mieux pour

2 éclaircir ce point.

3 Au cours de la première semaine du mois de juin, un groupe d'hommes a été

4 arrêté et a subi un passage à tabac avant d'arriver au camp de Celebici.

5 C'est bien le groupe dans lequel se trouvait également votre cousin Pero

6 Mrkajic, au sujet duquel vous avez dit hier que, par la suite, vous avez

7 constaté son décès, est-ce exact?

8 Témoin P (interprétation): Oui. Il y avait deux Pero Mrkajic.

9 Question: Oui. Il y avait celui de Musala?

10 Réponse: Il y avait le "grand Pero" et le "petit Pero". Là, nous parlons

11 du "grand Pero".

12 Question: Il avait un café et il est mort à Celebici?

13 Réponse: Oui.

14 Question: Si des personnes qui ont fourni des déclarations au Tribunal,

15 des personnes qui ont été arrêtées en même temps que lui disent qu'il est

16 mort dans la première moitié du mois de juin c'est un lapsus lorsque nous

17 reprenons ce que vous avez dit hier, à savoir qu'il est mort à la fin du

18 mois de juin et non au début du mois de juillet?

19 Réponse: Non.

20 Question: Bien.

21 Réponse: Je vais vous expliquer les choses. Il faut distinguer la période

22 qui va jusqu'au 22 juillet et la période qui commence à partir du 22

23 juillet.

24 Question: Juin?

25 Réponse: Juillet, date de ma remise en liberté, car cinq ans après, je ne

Page 4496

1 peux pas oublier, je ne peux sortir de ma mémoire des faits exacts.

2 Question: Monsieur P, voyons les choses clairement. Vous, vous avez une

3 date limite qui vous permet de vous souvenir, à savoir la période qui va

4 de votre arrestation à votre remise en liberté et vous vous souvenez très

5 bien également la période qui a suivi votre période de remise en liberté?

6 Réponse: C'est à peu près cela.

7 Question: Vous acceptez le fait que, dans cette période qui va de votre

8 arrestation à votre remise en liberté, vous ne pouvez pas vous souvenir

9 exactement des dates des différents évènements qui sont survenus, est-ce

10 exact?

11 Réponse: C'est exact.

12 Question: Très bien, merci.

13 Monsieur, vous avez déclaré que dans le bâtiment 22 ont été amenées pour y

14 être soignées des personnes qui avaient été blessées au cours du pilonnage

15 de Musala, est-ce exact?

16 Réponse: Oui.

17 Question: En fait, pendant un moment, c'était là les personnes les plus

18 gravement blessées dans le bâtiment 22, est-ce exact?

19 Réponse: Les personnes qui nécessitaient les soins les plus longs, deux

20 d'entre eux.

21 Question: Bien, merci.

22 En face du bâtiment 22, se trouvait le bâtiment administratif de la

23 caserne de Celebici?

24 Réponse: Oui.

25 Question: Jusqu'au début du mois de juillet, une équipe d'enquêteurs qui

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1 demandaient des déclarations aux détenus travaillaient dans cet endroit.

2 Etes-vous au courant de cela?

3 Réponse: Oui.

4 Question: Ces enquêteurs faisaient partie du MUP et du HVO, êtes-vous au

5 courant de cela?

6 Réponse: Et de la Défense territoriale de Bosnie-Herzégovine.

7 Question: Lorsque cette Commission a commencé ses travaux, le Président de

8 la commission était Goran Lokas, est-ce exact?

9 Réponse: C'est ce que j'ai appris dans l'école primaire du Trois Mars.

10 Question: Cependant, à partir du début du mois de juillet, vous n'avez

11 plus vu ces personnes en train d'interroger les détenus, c'est exact?

12 Réponse: C'était Miroslav Stenek, dit "le cuisinier", un homme appelé "le

13 cuisinier" dont je ne me rappelle ni le nom ni le prénom, le sergent

14 Pajic, dont je ne me rappelle pas le prénom, procédaient à des

15 interrogatoires. C'est ce que j'ai appris.

16 Question: Bien. Je me demande si nous nous sommes bien compris. Ces

17 interrogatoires, ils les ont menés jusqu'au début du mois de juillet de

18 cette année?

19 Réponse: Je ne sais pas exactement jusqu'à quand, jusqu'à quelle date.

20 Question: C’est Pajic dont le prénom est Sacir qui vous a interrogé, vous?

21 Réponse: Je ne connais pas son prénom mais son nom de famille est

22 effectivement Pajic.

23 Question: Merci. Monsieur P, vous saviez que cette commission avait pour

24 tâche de décider qui pouvait être remis en liberté et, que dès le début de

25 ses travaux, une cinquantaine de personnes ont immédiatement été

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1 relâchées. Est-ce exact?

2 Réponse: Des détenus ont été relâchés à partir du 3 septembre, je crois, à

3 part Miro Golubovic, son père Stanko, moi-même et mon collègue, si je ne

4 m'abuse.

5 Question: Bien, merci. Vous avez dit que vous aviez fourni une

6 déclaration, une dizaine ou une quinzaine de jours après votre

7 arrestation?

8 Réponse: C'est cela.

9 Question: Tout ce que vous avez dit a été inscrit dans un procès-verbal,

10 c'est exact?

11 Réponse: Je crois que c'est exact.

12 Question: Monsieur Pajic n'a nullement utilisé la violence à votre égard

13 pendant que vous répondiez aux questions?

14 Réponse: Au contraire, il était très aimable.

15 Question: Au moment où vous avez fait cette déclaration personne ne vous a

16 puni, de quelque manière que ce soit, est-ce exact?

17 Réponse: C'est exact.

18 Question: Monsieur P, vous avez dit que cette déclaration couvrait environ

19 une demi-page format 21-29,7.

20 Réponse: Oui.

21 Question: Puisque vous avez dit avoir fait une déclaration de ce genre, je

22 vous prierai de jeter un coup d'œil à ce document, à cette déclaration -ce

23 n'est pas une très bonne copie- mais de la regarder pour nous dire si

24 c'est bien la déclaration que vous avez faite à Celebici. Je crois que

25 c'est l'accusation qui nous a remis ce document. Si tel n'est pas le cas,

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1 voici des exemplaires de ce document.

2 (Questions relatives à la procédure.)

3 Mme McHenry (interprétation): Ce document n'a pas été montré à

4 l'accusation donc nous demandons à le voir au préalable.

5 Mme Residovic (interprétation): Très bien. Il y en a un exemplaire pour

6 l'accusation et des exemplaires pour les Juges et un exemplaire pour le

7 témoin.

8 (L'huissier s'exécute.)

9 Mme McHenry (interprétation): Ce document n'a pas été remis à l'accusation

10 au préalable. Je voudrais donc poser la question de savoir: dans quel but,

11 il est présenté au témoin?

12 Mme Residovic (interprétation): Il est présenté au témoin pour qu'il

13 puisse reconnaître sa déclaration, pour qu'il puisse identifier ce

14 document.

15 Mme McHenry (interprétation): Monsieur le Président, dans ces conditions,

16 je suis contraint d'élever une objection, car là encore nous sommes dans

17 une situation où l'accusation n'a pas reçu ce document à l'avance. Comme

18 nous l'avons dit par écrit au conseil de la défense, nous allons objecter

19 dans ces conditions chaque fois que la défense demandera le versement au

20 dossier d'une pièce à conviction qui ne nous aura pas été remise à

21 l'avance. Nous avons indiqué que nous avions élevé une objection. Donc

22 c'est ce que nous faisons en cet instant.

23 M. le Président (interprétation): Pouvons-nous connaître votre réaction à

24 cette allégation?

25 Mme Residovic (interprétation): Comme je l'ai déjà dit à plusieurs

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1 reprises, en fonction de l'Article 66 de notre Réglement de procédure et

2 de preuve, la défense a pour obligation effectivement de remettre à

3 l'accusation tous les éléments de preuve qui sont en sa possession qu'elle

4 entend utiliser en tant que pièce à conviction, en tant de qu'élément de

5 preuve. Mais un document ne peut être considéré comme un élément de preuve

6 qu'après avoir été reconnu par le témoin.

7 En cet instant, nous ne sommes pas dans le cadre de l'Article 66 et nous

8 n'avons pas obligation de remettre ce document préalable à l'accusation.

9 C'est la raison pour laquelle nous venons de demander que ce document soit

10 remis au témoin, pour qu'il puisse nous dire s'il le reconnaît, s'il

11 s'agit bien de la déclaration qu'il a faite à Celebici, le 8 juillet. La

12 disposition que je viens de citer est tout à fait claire.

13 M. le Président (interprétation): La défense n'est pas dans l'obligation

14 de communiquer à l'accusation les documents qu'elle a l'intention

15 d'utiliser? Est-ce que c'est cela qui est très clair? L'accusation n'a pas

16 obligation de remettre à l'accusation une déclaration qu'elle entend

17 utiliser?

18 Mme Residovic (interprétation): C'est ce que je viens de dire. Je crois

19 que le Tribunal s'est déjà prononcé sur ce point. La déclaration que nous

20 avons reçue, ou plutôt quelques documents que nous pensons utiliser en

21 temps qu'éléments de preuve et qui est en notre possession doit être remis

22 à l'accusation. C'est une obligation.

23 Les Articles 66 et 67, nous font obligation de remettre ces documents mais

24 nous ne pouvons utiliser en tant qu'élément de preuve un document qu'après

25 identification par le témoin. Donc nous ne prévoyons pas encore d'utiliser

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1 le document en tant qu'élément de preuve, Monsieur le Président.

2 Je pense qu'il a été accepté par le Tribunal qu'un document soit d'abord

3 remis au témoin. Si le témoin identifie le document, il est soumis en

4 qualité d'élément de preuve mais, s'il n'est pas identifié, il n'y a

5 aucune raison que nous le proposions comme élément de preuve.

6 Le témoin a déjà confirmé un certain nombre de points figurant dans la

7 déclaration, en fait pratiquement tous les points figurant dans cette

8 déclaration. Ce qui m'intéresse simplement, c'est de savoir si c'est bien

9 sa déclaration, car je dois poser au témoin des questions sur la base de

10 cette déclaration, pour ensuite la verser au dossier en temps qu'élément

11 de preuve.

12 Mme McHenry (interprétation): Monsieur le Président, si vous me le

13 permettez, j'aimerais répondre en quelques mots.

14 Avec tout le respect que je dois à mon honorable collègue Me Residovic, je

15 considère cet argument incroyable. Le fait de dire que les articles

16 concernant la communication de pièce n'entrent en vigueur qu'après que les

17 fondements de la recevabilité ont été confirmés, cela était déjà évoqué à

18 plusieurs reprises par le passé et très souvent parce qu'un document

19 particulier ne faisait pas l'objet d'une objection de notre part.

20 Nous avons néanmoins indiqué de la façon la plus claire, par le passé, que

21 ceci constituait une violation très nette des règles de communication de

22 pièce.

23 L'accusation depuis la comparution initiale a remis à la défense un très

24 grand nombre de documents, en faisant savoir quels documents elle

25 entendait utiliser en tant que pièce à conviction. Alors, le fait de dire

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1 qu'il suffit de présenter un document au témoin pour qu'ensuite

2 l'intention de le verser au dossier soit stipulée, fait de cette

3 obligation de cet Article du Règlement… tourne en dérision cet Article du

4 Règlement. C'est tout à fait inacceptable. Nous devons immédiatement

5 recevoir tous les éléments de preuve que la défense entend utiliser.

6 La défense ne peut pas décider d'invoquer les articles de communication de

7 pièces extensives qui imposent des obligations de communication

8 réciproque. Or, c'est ce qu'a fait la défense. La Chambre d'instance a

9 établi de la façon la plus claire qu'elle exigeait de la défense la

10 communication des pièces.

11 Donc, nous insistons sur le fait que tous les documents utilisés par la

12 défense doivent être remis immédiatement à l'accusation comme l'accusation

13 remet ses pièces à la défense.

14 Mme Residovic (interprétation): La défense vient de remettre le document

15 qui est en sa possession et elle pense être tenue de remettre à la partie

16 adverse les éléments de preuve qui surgissent au cours du procès.

17 La conclusion de cette Chambre de première instance suite à la requête

18 présentée par nous, m'a semblé indiquer que la défense n'était pas dans

19 l'obligation de remettre à l'accusation

20 (Interruption de cassette en français cf: transcript anglais p. 4648,

21 ligne 5)

22 très importants pour la défense concernant un certain nombre de personnes

23 au sujet desquelles la défense ne possédait aucune information.

24 J'insiste sur l'Article 66. J'ai remis plus d'une centaine de documents à

25 l'accusation en raison de cet Article 66. Tout ce que j'ai évoqué hier à

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1 été remis à l'accusation. Mais cet Article 66 est très clair. Lorsque la

2 défense a en sa possession un certain nombre de documents qu'elle a

3 l'intention d’utiliser en tant qu'éléments de preuve. Donc il s'agit bien

4 là de deux conditions cumulées. Nous, nous sommes conformés aux

5 obligations évoquées dans cet Article.

6 La Chambre d'instance a accepté ce que nous avons fait jusqu'à présent et

7 j'agis d'une façon tout à fait identique aujourd'hui.

8 Si la Chambre d'instance, suite à la requête présentée par l'accusation

9 statue de façon opposée, nous adapterons notre comportement à la décision

10 de la Chambre d'instance mais pas à l'interprétation du contenu très clair

11 de notre Règlement et de preuve, de la part de l'accusation.

12 Mme McHenry (interprétation): L'accusation se fonde sur l'Article 66 (C):

13 si le Procureur peut demander à la Chambre de première instance… Plutôt

14 Article 67 (C): si la défense introduit la requête prévue au paragraphe

15 (B) de l'Article 66, le Procureur peut à son tour prendre connaissance des

16 livres, etc.

17 Il doit ressortir clairement du compte rendu que l'accusation s'est

18 acquittée des autres obligations. La défense a bien compris qu'il y avait

19 obligation réciproque de divulgation.

20 M. Jan (interprétation): L'Article 67 est lié à l'Article 66 (B).

21 Mme McHenry (interprétation): Oui, effectivement.

22 M. Jan (interprétation): Si la défense avait souhaité examiner tous les

23 documents à charge, l'accusation a alors le droit d'examiner à son tour

24 tous les documents dont la défense à l'intention de se servir comme moyen

25 de preuve.

Page 4504

1 Mme McHenry (interprétation): Effectivement, il n'y a pas de controverse

2 ici quant au fait que la défense a demandé l'application de l'Article 66

3 (B), dès le début de la procédure. L'accusation a passé des dizaines,

4 voire des centaines d'heures à s'acquitter de cette obligation de

5 communication.

6 M. le Président (interprétation): Le litige porte sur la réciprocité

7 concernant tous les documents que les uns et les autres ont l'intention

8 d'utiliser.

9 Mme McHenry (interprétation): Je ne suis pas sûre de vous comprendre mais

10 je dirai en tout cas que la défense doit nous autoriser à examiner tous

11 les documents qui sont en sa possession et dont elle a l'intention de se

12 servir comme moyen de preuve lors du Tribunal.

13 M. le Président (interprétation): Oui, voilà la disposition qui

14 s'applique. Il s'agit du 66 (B).

15 Mme McHenry (interprétation): Non, excusez-moi. Il s'agit en l'occurrence

16 de l'Article 67 (C).

17 M. le Président (interprétation): 67 (C) mais c'est le 66 (B)?

18 Mme McHenry (interprétation): L'Article 67 (C) s'applique si la défense

19 introduit la requête prévue au paragraphe B de l'Article 66.

20 M. le Président (interprétation): C'est là que la réciprocité intervient.

21 Il y a réciprocité qui s'ensuit de ces dispositions.

22 S'il y a notification, en vertu de ces dispositions, et donc examen

23 possible des documents, l'accusation est aussi autorisée à examiner les

24 documents de l'autre partie.

25 Mme McHenry (interprétation): Je ne suis pas sûre de vous comprendre

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1 entièrement. Il y a obligation réciproque et obligation égale.

2 M. le Président (interprétation): L'Article 66.

3 Mme McHenry (interprétation): L'Article 66 (B) impose à l'accusation des

4 obligations qui sont peut-être plus larges qu'à la défense. Mais en tout

5 état de cause, les exigences minimales à imposer à la défense font que

6 l'accusation doit pouvoir examiner tous les documents que la défense a

7 l'intention d'utiliser lors du procès. Il y a là une formulation très

8 claire qui se trouve dans le Règlement.

9 M. le Président (interprétation): Voyons ce que l'Article 66 (B) dit.

10 Mme McHenry (interprétation): Oui, l'Article 66 (B) dit qu'à la demande de

11 la défense, le Procureur doit sous réserve du paragraphe C permettre à

12 celle-ci de prendre connaissance des livres photographiques, pièces à

13 conviction et documents se trouvant en sa possession ou sous son contrôle

14 qui, soit sont nécessaires à la défense de l'accusé, soit seront utilisés

15 par le Procureur comme moyen de preuve au procès, soit ont été obtenus de

16 l'accusé ou lui appartiennent.

17 M. le Président (interprétation): Cela vous autorise à invoquer l'Article

18 67 (C).

19 Mme McHenry (interprétation): Oui, effectivement, vous avez raison.

20 La défense a tiré tout le parti possible de l'Article 66 (B), et la

21 Chambre de première instance en audience publique a confirmé que cela se

22 passerait ainsi et a confirmé qu'il y avait obligation réciproque de

23 communication.

24 M. le Président (interprétation): Vous invoquez maintenant l'Article 67

25 (C)?

Page 4506

1 Mme McHenry (interprétation): Oui, nous l'avons évoqué à l'époque et nous

2 continuons d'insister pour que l'Article 67 (C) s'applique. Nous l'avons

3 fait par lettre, il y a déjà un an. Nous l'avons fait par voie de requête

4 déposée devant la Chambre et je ne crois pas que la défense niera que nous

5 avons systématiquement demandé que nos droits soient respectés en vertu de

6 l'Article 67 (C).

7 M. le Président (interprétation): Il y a une difficulté d'interprétation.

8 Ici, si ce que vous êtes autorité à demander se limite aux documents qui

9 sont énumérés à l'Article 67 (C), est-ce que les déclarations en font

10 partie?

11 Mme McHenry (interprétation): Oui, Monsieur le Président, je peux

12 comprendre qu'il y ait une discussion sur le point des déclarations. Est-

13 ce que l'accusation y a droit ou non? Nous présenterons peut-être des

14 arguments en temps voulu sur ce point. Ce n'est pas la question qui se

15 pose maintenant.

16 Ce qui se passe maintenant c'est que Mme Residovic a indiqué et déclaré

17 qu'elle avait l'intention d'utiliser le présent document comme moyen de

18 preuve pour le procès, à supposer que le témoin soit à même de le

19 reconnaître. Par conséquent, nous ne voyons pas de doute possible quant au

20 fait que le document en question tombe sous le coup de l'Article 67 (C).

21 C'est un document que la défense a l'intention d'utiliser comme moyen de

22 preuve au procès.

23 Madame Residovic dit par ailleurs qu'elle souhaite l'utiliser au procès

24 mais que, tant que le témoin ne l'aura pas authentifié, elle ne peut pas

25 le faire et donc l'Article en question ne s'applique pas. Pour moi cela

Page 4507

1 revient à tourner en dérision cet Article du Règlement. Pareille décision

2 s'appliquait autant à l'accusation qu'à la défense et cela éliminerait les

3 obligations de communication, car vous ne savez jamais tant que vous

4 n'avez pas montré une pièce à un témoin si cette pièce va être utilisée ou

5 non.

6 Madame Residovic dit qu'elle était prête à suivre la décision de la

7 Chambre de première instance et je ne suis pas sûre du préjudice que nous

8 subissons du fait que nous n'avons pas reçu cette pièce par avance. Mais

9 nous serions reconnaissants à la Chambre de première instance de prendre

10 une décision claire indiquant que l'Article 67 (C) impose à la défense de

11 communiquer immédiatement toute pièce qu'elle aurait l'intention

12 d'utiliser comme moyen de preuve au procès.

13 M. Ackerman (interprétation): Puis-je intervenir, Monsieur le Président?

14 M. le Président (interprétation): Oui, je vous en prie.

15 M. Ackerman (interprétation): Ce n'est pas que j'ai un intérêt particulier

16 dans le document qui est ici contesté, mais je voudrais aborder la

17 question plus générale des incidences qu'aurait votre décision sur ce

18 point particulier.

19 L'Article 66, si on le lit, envisage que la défense puisse présenter une

20 demande auprès de l'accusation et que, sur la base de cette demande, les

21 documents détenus par l'accusation et communiqués à la défense suscitent

22 une obligation réciproque de communication.

23 L'accusation, à la date d'aujourd'hui, n'a peut-être pas encore

24 entièrement appliqué cette obligation. Nous venons de recevoir ce matin

25 -je n'ai même pas eu l'occasion encore d'y jeter un coup d'œil- tout un

Page 4508

1 tas de documents. Je ne me plains pas en l'occurrence, je ne dis pas que

2 l'accusation retient des documents qu'elle aurait dû nous donner depuis

3 longtemps. Le procès néanmoins a déjà été entamé il y a quelques mois et

4 nous continuons de recevoir des documents en vertu de l'Article 66.

5 Deuxième chose qui me préoccupe et qui m'intéresse au premier chef: il se

6 peut qu'il y ait des documents en possession des accusés que nous n'avons

7 pas l'intention de présenter actuellement comme moyens de preuve, car nous

8 ne savons pas ce que les témoins diront dans le cadre de leur déposition.

9 Ce document cependant, en possession des accusés, peut soudainement

10 prendre une importance beaucoup plus grande aux fins de récusation des

11 témoins.

12 Je pense que Mme McHenry comprendra que certains documents que nous

13 n'avons pas l'intention d'utiliser comme moyen de preuve peuvent, à un

14 certain point, devenir pertinents aux fins de récusation, du fait des

15 dépositions que nous entendons.

16 Nous ne pouvions donc remettre à l'accusation ces documents puisque nous

17 n'avions pas l'intention de les utiliser comme moyen de preuve alors que

18 nous ne savions pas quelle allait être la teneur des dépositions; teneur

19 qui rendrait ultérieurement ces documents pertinents aux fins de

20 récusation.

21 Je pense donc ne pas être en désaccord important avec Mme McHenry, mais je

22 voudrais dire clairement à la Chambre que nous nous réservons le droit

23 d'utiliser tou document que nous avons aux fins de récusations et au vue

24 des dépositions.

25 Mme Residovic (interprétation): Si vous me permettez…?

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1 M. le Président (interprétation): Mais n'y aurait-il pas alors violation

2 dans votre obligation de communication réciproque?

3 M. Ackerman (interprétation): Monsieur le Président, nous avons

4 l'obligation de remettre à l'accusation les documents que nous avons

5 utilisés comme moyen de preuve. Mais cette obligation ne s'applique pas

6 aux documents que nous n'avons pas l'intention d'utiliser comme moyen de

7 preuve. Cette obligation porte sur les documents que j'ai l'intention

8 d'utiliser comme moyen de preuve dans le cadre des témoins à décharge.

9 Voilà ce qui est visé par l'Article évoqué ici.

10 Mais lorsqu'il s'agit de dépositions en quelque sorte inattendues, il se

11 peut que nous ayons des documents en notre possession que nous n'avions

12 pas l'intention d'utiliser mais qui soudainement deviennent pertinents aux

13 fins de récusation du témoin. Je crois qu'alors nous devons pouvoir

14 l'utiliser sans avoir au préalable remis ce document à l'accusation

15 puisq'au départ, nous n'avions pas l'intention d'utiliser le document dans

16 le cadre de nos interrogatoires principaux des témoins à décharge.

17 Il viendra un moment où l'accusation elle-même avancera le même argument,

18 je pense, car elle entendra nos témoins à décharge et elle voudra alors

19 utiliser des documents pour récuser ces témoins et elle ne voudrait pas à

20 ce moment-là nous voir objecter au versement de ces pièces. Cet argument

21 vaut dans les deux sens.

22 Mme Residovic (interprétation): Monsieur le Président…

23 Mme McHenry (interprétation): Je vous voudrais rapidement répondre à ce

24 qu'a dit Me Ackerman.

25 De fait, l'accusation est d'accord avec Me Ackerman comme quoi il y aura

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1 des situations dans lesquelles un témoin dépose et fait des déclarations

2 inattendues, en quelque sorte, et que des documents qui n'apparaissaient

3 pas pertinents au départ le deviendront. Cela est clair et ce genre de

4 situation surgira.

5 Tant que l'accusation estime que c'est bien cette situation qui surgit et

6 que, de bonne foi, la défense ne pense pas qu'un document serait pertinent

7 mais que ce document devient pertinent, l'accusation n'a pas l'intention

8 d'objecter à la présentation de ces moyens de preuve. Ce n'est pas le cas

9 en l'occurrence.

10 Pour répondre à Me Ackerman, je dirai aussi que l'obligation de

11 communication subsiste. C'est-à-dire que lorsque l'accusation obtient de

12 nouvelles pièces, elle les communique à la défense. Le fait que nous

13 donnions encore aujourd'hui des documents à la défense est le signe du

14 fait que nous nous acquittons de notre obligation de communication des

15 pièces.

16 Je pense donc ne pas être en désaccord avec Me Ackerman sur ce point. Le

17 litige nous oppose plutôt à Mme Residovic.

18 M. le Président (interprétation): Entendons Madame Residovic.

19 Mme Residovic (interprétation): Je dirai simplement que je suis très

20 surprise. J'attendais de Mme McHenry qu'elle s'excuse pour les mots

21 qu'elle a prononcés devant la Chambre: parler de tourner en dérision le

22 Règlement, c'est une accusation grave qu'on lance contre moi et je pense

23 avoir passé suffisamment de temps à travailler sur ce point pour pouvoir

24 dire que ce ne sont pas là des propos acceptables.

25 M. Jan (interprétation): Un instant, s'il vous plaît.

Page 4511

1 Mme Residovic (interprétation): Voilà pour ce qui concerne le…

2 M. Jan (interprétation): Vous avez tout à fait raison mais personne ne

3 voulait tourner en dérision le Règlement. Je crois que nous pouvons passer

4 cette expression.

5 Mme McHenry (interprétation): Je m'excuse et j'ai bien utilisé le terme

6 "dérision" mais je n'accusais aucunement Mme Residovic de tourner le

7 Règlement en dérision. Ce n'était pas du tout notre intention.

8 M. le Président (interprétation): Il n'y avait aucune intention de blesser

9 qui que ce soit. Il s'agit plutôt d'une interprétation du Règlement dont

10 nous débattons maintenant.

11 Madame Residovic, voulez-vous ajouter quelque chose?

12 Mme Residovic (interprétation): Madame et Messieurs les Juges, comme vous

13 venez de le dire, l'Article 66 a été invoqué au mois de mai, le 29 mai

14 l'année dernière, par la défense et la défense a appliqué la décision

15 prise par la Chambre de première instance et les différents juges qui la

16 composent.

17 Je pense que vu cette décision qui a été rendue, l'objection qui nous est

18 opposée ne tient pas et cela concerne non seulement les documents que

19 l'accusation a l'intention d'utiliser comme moyen de preuve mais aussi les

20 moyens de preuve que la défense a l'intention d'utiliser.

21 Cette obligation ne peut donc être complètement identifiée à l'Article 67

22 (C). Nous respectons bel et bien cet Article mais nous avons le droit

23 d'utiliser tous documents ou déclarations. L'Article en question n'évoque

24 pas ces déclarations.

25 La Chambre de première instance a pris une décision distincte sur ce point

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1 et nous avons respecté cette décision de la Chambre. Nous pouvons y faire

2 référence comme aide-mémoire ou pour contester la fiabilité d'un témoin,

3 ou encore pour authentifier un document. Nous avons le droit d'entrer en

4 contact avec un témoin, de lui montrer cette pièce et ce n'est qu'alors

5 que nous pourrons dire si le moyen de preuve sera utilisé ou non lors du

6 procès.

7 Voilà qui enclenche notre obligation secondaire de communication. Il faut

8 que ce document soit, premièrement, en la possession de la défense;

9 deuxièmement, que ce document serve de moyen de preuve entre les mains de

10 la défense. Il y a donc là deux critères, deux conditions qui doivent être

11 réunies pour que l'Article 67 (C) s'applique.

12 La défense de M. Delalic respecte cette obligation de communication de

13 façon beaucoup plus large et je pense qu'il est aussi dans l'intérêt de la

14 défense que l'accusation connaisse les moyens de preuve potentiels que

15 nous avons l'intention d'utiliser.

16 Voilà donc notre démarche mais, si la Chambre de première instance prend

17 une décision différente dans une instance différente, de toute évidence

18 nous respecterons cette décision également.

19 Cela étant, je ne vois pas pourquoi, chaque fois, en particulier lorsque

20 l'accusation communique… En particulier, hier, lorsque l'accusation et non

21 la défense de Delalic a présenté des documents aux fins d'enregistrement

22 dans une langue qui n'était pas compréhensible, pourquoi la défense ne

23 pourrait-elle à son tour présenter des documents de la façon dont nous le

24 faisons maintenant?

25 M. le Président (interprétation): Je vous remercie. Je pense que la

Page 4513

1 défense peut verser au dossier ce document et que ce document peut être

2 montré au témoin.

3 M. Greaves (interprétation): Je ne sais pas si vous souhaitez m'entendre.

4 Peut-être pourrais-je vous apporter une aide si je reviens sur les termes

5 employés dans le Règlement et j'en aurais pour deux minutes.

6 Les termes employés dans le Règlement sont: "Dès que possible, après la

7 comparution initiale de l'accusé." Fin de citation.

8 Et à l'Article 67 (A), il est dit: "Dès que possible, en toute hypothèse,

9 avant le début du procès." Fin de citation.

10 Il est donc précisé dans les articles quand cette divulgation doit se

11 faire. Mais ces termes ne se retrouvent pas dans d'autres parties du

12 Règlement, notamment au point C. Donc, nous pensons que les rédacteurs du

13 Règlement n'ont pas souhaité que cet élément, ce facteur temps, soit

14 présent partout.

15 Voilà à notre avis, le sens dans lequel il faut lire le Règlement.

16 M. Jan (interprétation): Vous comprenez, c'est très clair. L'Article 66 et

17 l'Article 67 ont trait aux procédures lors du procès.

18 Il se peut que, lors du procès, surgisse le besoin d'examiner un document

19 qui au départ ne devait pas servir comme de moyen de preuve mais qui

20 s'avère soudainement pertinent.

21 M. Greaves (interprétation): Absolument.

22 M. Jan (interprétation): Tout ce qu'il faut faire alors, c'est le plus tôt

23 possible en fournir un exemplaire à la défense.

24 M. le Président (interprétation): Si vous lisez attentivement le texte,

25 vous constaterez que cela ne fait pas partie de la procédure de

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1 communication. Les déclarations ne sont pas incluses dans les paragraphes

2 qui ont trait à la communication.

3 M. Greaves (interprétation): Absolument.

4 M. le Président (interprétation): Je pense que vous pouvez verser le

5 document.

6 Mme McHenry (interprétation): Je n'avais pas argumenté avec la Chambre

7 après que la décision a été rendue mais, dans la mesure où vous avez

8 interprété le Règlement, cela aura une incidence sur la façon dont

9 l'accusation s'acquittera de ces obligations de communication.

10 Je voudrais donc être sûre de comprendre. En l'occurrence, je crois

11 comprendre que vous autorisez la défense à montrer ce document au témoin.

12 Je voudrais simplement alors demander: quel est le fondement de cette

13 décision? De sorte que l'accusation puisse à son tour procéder de la même

14 façon et voir quelles pièces exactement elle a pour obligation de

15 communiquer à la défense.

16 M. le Président (interprétation): Je crois que nous avons ici un problème

17 d'interprétation du Règlement. Pour ce qui est de la procédure, ce ne sont

18 pas toutes les règles qui se prêtent à une interprétation très stricte. Si

19 vous lisez l'Article 66 (B) qui fait référence aux documents à divers

20 documents, cette communication se fait sous réserve du paragraphe C. La

21 communication est restreinte aux documents mentionnés au paragraphe C.

22 Si vous souhaitez, si vous voulez interpréter cette règle de façon

23 stricte, les déclarations ne tombent pas sous le coup de cet Article.

24 Vos obligations, en ce qui concerne la communication, sont clairement

25 exprimées et ne doivent pas être mises en rapport avec les déclarations

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1 qui sont maintenant présentées. Les déclarations ne sont pas visées.

2 En tout état de cause, nous allons maintenant suspendre l'audience et nous

3 reprendrons à 14 heures 30.

4 (L’audience, suspendue à 13 heures, est reprise à 14 heures 30.)

5 (Contre-interrogatoire du Témoin P par Me Residovic.)

6 M. le Président (interprétation): Veuillez-vous asseoir.

7 Bonne après-midi Mesdames et Messieurs. Je vois que deux conseils de la

8 défense sont debout.

9 Madame Residovic, je vous prie de poursuivre.

10 Mme Residovic (interprétation): Je vous remercie. Nous nous sommes arrêtés

11 au moment où nous voulions montrer au témoin la déclaration qu'il a donnée

12 le 8 juillet à Celebici.

13 Monsieur P, pourriez-vous s'il vous plaît lire la déclaration qu'on vous a

14 rendue et vérifier que c'est bien la déclaration que vous avez donnée?

15 Il reste quelques lignes au verso. Avez-vous lu?

16 Témoin P (interprétation): Oui.

17 Question: Est-ce bien la déclaration que vous avez faite à M. Pajic?

18 Réponse: C'est une bonne partie de ma déclaration.

19 Question: Avez-vous signé ce texte? Jetez un coup d'œil au verso pour voir

20 si c'est bien votre signature?

21 Réponse: Cela devrait être ma signature.

22 Question: Dites-moi s'il vous plaît, ce qui n'est pas exact dans cette

23 déclaration. Ce que vous pensez ne pas avoir dit.

24 Réponse: Entretien avec le Dr Jusufbegovic.

25 Question: C'est ce que vous avez précisé aujourd'hui mais, tout le reste,

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1 que vous étiez à Bradina au dispensaire, c'est exact, n'est-ce pas?

2 Réponse: Oui.

3 Question: Que vous avez aidé Radovan Kuljanin? Que par la suite vous vous

4 êtes rendu auprès de Kuljanin Nedjo? Qu'on vous a proposé des armes que

5 vous avez refusées?

6 Réponse: Oui, oui.

7 Question: Qu'un Pam a été rendu?

8 Réponse: Fusil.

9 Question: Excusez-moi, un fusil semi-automatique?

10 Réponse: Oui.

11 Question: Tout le reste figure dans votre déclaration comme vous l'avez

12 dit?

13 Réponse: Oui.

14 Question: Puisque le témoin a reconnu sa signature, nous proposons que ce

15 document, cette déclaration soit versée comme une pièce à conviction de la

16 défense.

17 Pourriez-vous, s'il y vous plaît, me donner le numéro sous lequel le

18 document peut être enregistré?

19 M.Dubuisson: Il s'agit du numéro D46-1.

20 Mme Residovic (interprétation): Merci.

21 Mme McHenry (interprétation): L'accusation objecte au versement de cette

22 pièce au dossier pour les raisons expliquées avant la pause. Notamment

23 parce que cette pièce n'a pas été fournie à l'accusation au préalable et

24 qu'il n'y a rien dans ce document qui permette de récuser les propos du

25 témoin. Pour ces raisons donc je souhaite qu'il soit clairement indiqué

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1 que l'accusation objecte au versement de la pièce.

2 M. le Président (interprétation): Vous pouvez continuer.

3 Mme Residovic (interprétation): Je vous remercie.

4 Mme McHenry (interprétation): Pour le procès verbal, nous voulons qu'il

5 soit noter que le document a été accepté malgré notre opposition.

6 Mme Residovic (interprétation): Monsieur P, comme vous avez déposé devant

7 ce Tribunal, vous avez été libéré le 22 juillet. Est-ce exact?

8 Témoin P (interprétation): Oui.

9 Question: J'ai juste quelques questions au préalable à vous poser.

10 A ma question qui était de savoir si au moment où vous avez donné cette

11 déclaration, M. Pajic s'était comporté d'une manière non correcte ou s'il

12 avait été violent, vous avez répondu que, tout au contraire, il avait été

13 très correct.

14 Réponse: Oui. Nous étions soumis à une certaine pression psychologique,

15 parce qu'avant et après les dépositions, les détenus ont été battus, même

16 devant la porte du bâtiment 22.

17 Question: Bien, merci. Je voudrais juste vous posez quelques questions.

18 Nous savons que vous avez subi des tortures entre Bradina et le moment où

19 vous êtes arrivé à Celebici. Mais est-il vrai qu'après ces tortures, vous

20 n'avez jamais à aucun moment ultérieur était soumis à ce genre de

21 traitement? Vous n'avez jamais été battu, est-ce exact?

22 Réponse: C'est exact. Mais on m'a insulté au moins cent fois, on a insulté

23 mon père et ma mère.

24 Question: Mais vous n'avez jamais été sanctionné, vous n'avez jamais été

25 mis en isolement ou autre chose?

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1 Réponse: Non, cela ne m'est pas arrivé.

2 Mme McHenry (interprétation): Excusez-moi. Je ne vous interromps pas pour

3 objecter mais je voudrais simplement demander que ce dialogue se

4 poursuivre de façon un peu plus lente.

5 M. le Président (interprétation): Je ne vois pas la pertinence de cette

6 série de questions. Il n'y a rien à objecter, le témoin n'objecte pas.

7 Cette déclaration a été donnée spontanément. Il l'a reconnu. Quelle est

8 donc la nécessité de ces questions?

9 La déclaration a été versée au dossier en tant que telle, je ne vois pas

10 pourquoi on s'étend sur la question.

11 Mme Residovic (interprétation): Monsieur le Président, je ne poursuis pas

12 mon interrogatoire au sujet de cette déclaration. Je voulais savoir si, à

13 aucun moment, après son arrivée à Celebici, il était soumis à des

14 traitements violents. Nous savons tous qu'il a été arrêté mais avant

15 d'arriver à Celebici, il a été torturé. Nous savons maintenant d'après sa

16 déclaration qu'il ne l'a pas été après son arrivée à Celebici.

17 Témoin P (interprétation): Je n'ai pas été battu mais comme tous les

18 autres détenus du bâtiment 22, notre alimentation était la même pour tous,

19 à savoir... et puis le matin et le soir, nous avions la possibilité de

20 satisfaire nos besoins physiologiques.

21 Question: Monsieur P, au moment de votre libération et par la suite, vous

22 avez passé quelques jours à Konjic et par la suite chez votre famille à

23 Ostrozac, juste après votre déclaration?

24 Réponse: Oui.

25 Question: Alors à Ostrozac, vous avez été hébergé, vous avez pu vous vêtir

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1 normalement?

2 Réponse: Oui.

3 Question: Et pendant toute cette période, conformément à vos possibilités,

4 vous avez offert des soins médicaux aux détenus qui étaient blessés ou

5 malades. Est-ce vrai?

6 Réponse: Ce n'était pas de manière régulière. Je dois dire aussi que j'ai

7 soigné des civils qui m'ont été envoyés de Konjic. Sur les ordonnances, il

8 était marqué Hôpital serbe d'Ostrozac.

9 Question: Cela s'est produit après votre libération de la prison de

10 Celebici, est-ce vrai?

11 Réponse: Oui.

12 Question: Monsieur P, s'il vous plaît, le Procureur… vous avez dit qu'un

13 des gardiens, appelé Focak est venu vous voir avec une bonne nouvelle,

14 c'était le 22 avril. Il est venu vous annoncer que vous étiez libéré, que

15 vous pouviez prendre vos affaires et que, vu que c'était une très bonne

16 nouvelle, vous devriez offrir quelque chose pour fêter.

17 Réponse: C'était le 22 juillet et non pas avril.

18 Question: Excusez-moi, c'était le 22 juillet à 11 heures.

19 Réponse: A 11 heures du soir.

20 Question: Bien. A ce moment, M. Focak vous a remis ce document, vous

21 permettant d'apprendre cette bonne nouvelle, n'est-ce pas?

22 Réponse: Oui.

23 Question: Sur ce document figurait votre nom et il y avait la signature de

24 la personne qui aurait émis ce document, n'est-ce pas?

25 Réponse: Oui.

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1 Question: Plus tard, en votre présence, on a ajouté que quelques mots:

2 "Continue à soigner les détenus blessés."

3 Réponse: Oui.

4 Question: Monsieur P, vous n'êtes restés que très brièvement à l'école du

5 Trois Mars mais vous savez que, pendant ce temps, les détenus qui étaient

6 blessés avaient le droit de recevoir des visites. Il pouvait également

7 recevoir de la nourriture de la part des membres de leur famille, n'est-ce

8 pas?

9 Réponse: Pendant très peu de temps une journée ou deux.

10 Question: Plus tard, vous avez dit que pendant quatre ou cinq jours… Non,

11 quatre ou cinq jour avant votre libération, à savoir vers le 17 juillet,

12 on a commencé progressivement à autoriser de recevoir la nourriture de

13 l'extérieur et puis, après la visite de la Croix-Rouge également, les

14 visites des familles à leurs parents détenus à Celebici?

15 Réponse: Oui, c'est exact mais la nourriture était contrôlée à l'entrée.

16 Une bonne partie du contenu de la nourriture était confisquée, dont les

17 cigarettes et puis certains vêtements, notamment le linge et les

18 chaussettes.

19 Question: Bien. Quand vous avez été libéré, on n'a pas restreint votre

20 liberté de mouvement où que ce soit, n'est-ce pas?

21 Réponse: A la demande de M. Zejnil Delalic. Les autres personnes qui ont

22 été libérées ultérieurement ont eu leur liberté de mouvements restreinte.

23 Question: Monsieur P, pouvez-vous confirmer qu'à une occasion, M. Eno

24 Tahirovic qui s'est rendu à la prison de Celebici, était commandant de la

25 défense de la ville et qui vous a dit qu'on allait accélérer la procédure

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1 concernant le traitement des détenus?

2 Réponse: Il est venu.

3 Question: Vous avez également confirmé l'entretien avec le major Sefik

4 Kevric concernant l'approvisionnement en nourriture, l'amélioration de la

5 nourriture pour les détenus?

6 Réponse: C'était le major Sefik Kevric.

7 Question: Vous pouvez également confirmer que le Comité international de

8 la Croix-Rouge, à la suite à sa visite au camp les conditions se sont

9 améliorées rapidement et considérablement.

10 Réponse: Pas aussi rapidement que vous le croyez mais les conditions sont

11 devenues considérablement meilleures.

12 Question: Monsieur P, je le dis, autant que vous nous le dites puisque

13 vous le savez beaucoup mieux que moi. C'est vous qui y étiez; moi, je me

14 fie à ce que vous dites devant ce Tribunal. Cette amélioration des

15 conditions a été rendue possible en partie grâce à vous. Est-ce exact?

16 Réponse: Je ne peux pas dit de quelle manière… Comment vous le pensez?

17 Question: Un nombre considérable de gens ont été libérés, une partie a été

18 transférée à Musala. Vous donniez des conseils médicaux sur le choix de

19 ces gens, n'est-ce pas?

20 Réponse: C'était en la présence et la coordination de la part de M. Pavo

21 Mucic et M. Hazim Delic.

22 Question: Monsieur P, vous savez également qu'une commission a été formée

23 pour classer les gens et que, à la fin du mois d'août, elle est venue

24 évaluer ce qui venait d'être fait. C'est suite aux travaux de cette

25 commission qu'on a libéré un certain nombre de personnes.

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1 Réponse: Je sais qu'il existait un certain nombre de catégories.

2 Question: Vous aussi, Monsieur P, vous avez pris part aux travaux de cette

3 commission, est-ce exact?

4 Réponse: Non.

5 Question: Donc, si quelqu'un affirme le contraire, vous, vous dites que

6 vous n'y avez pas pris part?

7 Réponse: Comment pourrais-je dire que j'ai participé à la classification,

8 à la catégorisation? Je ne suis pas un militaire, je ne suis pas juriste.

9 Question: A la mi-août, cela faisait trois semaines que vous étiez déjà en

10 liberté, est-ce exact?

11 Réponse: Eh bien, après le 22 juillet, j'étais confiné à un domicile.

12 Question: Monsieur P, vous ne saviez pas si les prisonniers avaient

13 demandé que vous les soignez depuis le tout début?

14 Réponse: Non.

15 Question: Mais vous saviez qu'on vous a dit de vous y rendre et d'ouvrir

16 une sorte d'infirmerie pour permettre les soins pour les détenus?

17 Réponse: L'infirmerie existait déjà au moment où j'ai été transféré de la

18 maternité du centre médical de Konjic à l'école primaire du Trois Mars.

19 Là, sur place, j'ai trouvé les blessés qui avaient été transférés avant.

20 Question: S'il vous plaît, on parle de la mi-août, entre le 15 et le 20

21 août. A ce moment, comme vous l'avez affirmé ici, vous veniez travailler

22 tous les jours, généralement en voiture?

23 Réponse: Au début on m'amenait tous les jours mais par la suite, c'était

24 tous les deux ou trois jours ou peut-être même tous les sept jours, une

25 fois par semaine.

Page 4523

1 Question: Comme auparavant, tous les jours vous faisiez des listes de

2 besoin pour les médicaments et tous les matériels de pansement?

3 Réponse: Quand je venais, je pouvais dresser ces listes.

4 Question: Est-il vrai qu’à la mi-août vous avez commencé à établir ces

5 listes pour quelques jours, pour plusieurs jours?

6 Réponse: Non.

7 Question: A l'époque vous aviez suffisamment de matériel, de pansements

8 dans cette infirmerie?

9 Réponse: Non.

10 Question: Et ce matériel n'était pas stérilisé?

11 Réponse: Non. ce matériel n'a pas été stérilisé.

12 Question: La coopération avec l'hôpital de Konjic était bonne, à la mi-

13 août j'entends?

14 Réponse: Ce que j'ai écrit sur les médicaments...Je n’en recevais qu'une

15 partie. Je disais qu'il fallait emporter des instruments pour qu'ils

16 soient stérilisés mais je n'étais pas sûr que ces stérilisations étaient

17 bien faites.

18 Question: Monsieur P, devant le bâtiment 22 il y a un espace bétonné,

19 n'est-ce pas? Je veux dire un espace qui est asphalté.

20 Réponse: Un plateau.

21 Question: Un plateau?

22 Réponse: Oui.

23 Question: Cet espace asphalté c’est comme une route qui s'étend vers

24 l'entrée de la caserne et puis qui remonte vers le bâtiment n°9, n'est-ce

25 pas?

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1 Réponse: Je vois la maquette.

2 Question: Dans cette zone quand on y travaillait s’il faisait trop chaud,

3 parce que c'était en été, il n'y avait pas d'abri où l'on pouvait

4 s'abriter devant le soleil, que ce soit les détenus ou d'autres personnes

5 pour autant que je puisse voir la maquette moi aussi.

6 Réponse: On passait la plupart de notre temps dans le bâtiment n°22, c'est

7 uniquement lorsque Pavo était présent qu'on nous autorisait à ouvrir la

8 porte. Plus tard après la visite de la Croix-Rouge, quand je venais là-

9 bas, la porte était généralement ouverte.

10 Je n'avais pas la possibilité de sortir, comme vous semblez vouloir

11 laisser entendre.

12 Question: Bien, merci je n'essaye rien du tout, je vous pose des

13 questions, si vous pouvez répondez-moi.

14 Question: Monsieur P, vous avez dit que vous avez eu un entretien avec les

15 journalistes de la télévision de Sarajevo. Une journaliste est venue

16 c'était Jadranka Milosevic, est-ce exact?

17 Réponse: Oui.

18 Question: Le caméraman était Zvonko Maric, est-ce exact?

19 Réponse: C'est comme cela qu'ils se sont présentés à moi.

20 Question: Vous avez donné cette interview devant l'infirmerie, le bâtiment

21 n°22.

22 Réponse: Oui.

23 Question: Je demanderai aux techniciens de nous montrer cette bande qui a

24 été montrée au Procureur en juillet l'année dernière; que donc cette bande

25 soit montrée au témoin pour faire la comparaison avec la déposition qu'il

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1 vient de faire, pour vérifier donc sa déposition.

2 Est-ce que je peux demander aux techniciens de nous montrer la vidéo n°2?

3 McHenry (interprétation): Madame et Messieurs les Juges, avant que nous ne

4 le fassions, il s'agit d'un témoin protégé. Or ce témoin apparaîtra sur

5 l'écran. Donc il faudrait donc que nous passions à huis clos.

6 Mme Residovic (interprétation): Je voulais demander qu'on passe à huis

7 clos avant de montrer la vidéo.

8 Mme McHenry (interprétation): On me dit qu'il y a une différence entre une

9 audience privée et une audience à huis clos. Il faut en substance que

10 l'image du témoin ne soit pas montrée, voilà ce qui nous interesse.

11 Mme Residovic (interprétation): Oui, nous sommes tout à fait d'accord sur

12 le fait qu'il ne faut voir son image ni à l'écran ni sur les photos, mais

13 il faut que nous entendions le contenu de son entretien avec les

14 journalistes.

15 (Audience à huis clos.)

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24 (Audience publique avec mesures de protection.)

25 Question: Monsieur P, vous savez aussi qu'une partie des personnes dont

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1 les noms figuraient sur la liste établie par vous ont été remises en

2 liberté ou plus exactement transférées à Musala, est-ce exact?

3 Réponse: Vous parlez de remise en liberté?

4 Question: De remise en liberté, oui.

5 Réponse: Oui. En fonction de la catégorie dans laquelle ils se trouvaient:

6 ceux qui appartenaient à la catégorie 1, 2 ou 3 ne pouvaient pas être

7 remis en liberté.

8 Question: Oui, c'est pour cela que j’ai parlé d’une partie de ces

9 personnes car vous avez expliqué cela ce matin.

10 Monsieur P, dites-moi, je vous prie si après cette visite du Comité

11 international de la Croix-Rouge, d'autres organisations humanitaires sont

12 venues dans le camp avec lesquelles vous auriez eu une conversation au

13 sujet de la situation des détenus.

14 Réponse: Avant, alors que j'étais en détention dans le camp, les

15 Pharmaciens sans frontière sont venus.

16 Question: Mais je vous pose la question au sujet de la période ultérieure

17 après la visite du Comité international de la Croix-Rouge.

18 Réponse: Je ne me rappelle pas.

19 Question: Est-ce que vous vous rappelez qu'à la fin du mois d'août vous

20 avez discuté avec des femmes qui représentaient une organisation

21 humanitaire et que vous avez parlé de la situation dans la prison?

22 Réponse: Elles ne se sont pas présentées comme représentantes d’une

23 organisation humanitaire. Elle a dit qu'elle s'appelait Teresa et qu’elle

24 était membre du Parlement autrichien. Et l'autre femme, je crois qu'elle

25 s'appelait Marina, je n’en suis pas sûr. C'était une Mercedes blanche

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1 immatriculée à Split et conduite par un jeune homme de grande taille et

2 blond qui les a amenées.

3 Question: Ce jour-là, vous avez dit que la situation s'était

4 considérablement améliorée, n'est-ce pas?

5 Réponse: Oui.

6 Mme McHenry (interprétation): Ce n'est pas une objection mais je demande

7 simplement que le témoin attende la fin de l'interprétation de façon à ce

8 que ceux qui ne parlent pas serbo-croate puissent suivre.

9 Mme Residovic (interprétation): Merci.

10 Il est exact qu'à ce moment-là, à la fin du mois d'août, il ne se trouvait

11 que trois ou cinq lits dans le dispensaire réservé aux détenus blessés.

12 Témoin P (interprétation): Je ne peux pas me rappeler exactement.

13 Question: Avant cette époque il y en avait 12, 13 et même plus, n'est-ce

14 pas?

15 Réponse: Oui.

16 Question: Et tout cela vous l'avez dit aux représentants de cette

17 organisation?

18 Réponse: Non. J'ai seulement parlé des médicaments.

19 Question: Je demanderai que l'on passe à nouveau à huis clos et que l'on

20 montre au témoin l’enregistrement de la conversation cassette B que la

21 défense a reçue de l'accusation. Il s'agit d'un passage de 30 secondes.

22 M. le Président (interprétation): Je suppose que le conseil devrait savoir

23 exactement comment organiser sa défense et devrait savoir ce qu’il a à

24 faire. Vous voulez que nous repassions en séance à huis-clos?

25 M. Residovic (interprétation): Oui.

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1 M. le Président (interprétation): Bon d'accord.

2 (Audience à huis clos.)

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9 (Audience publique avec mesures de protection.)

10 Monsieur P, est-il donc exact que vous avez dit à ces personnes qu'il y

11 avait 12 à 13 lits avant et que maintenant la situation s'était améliorée,

12 qu'il y en avait 3, 4 ou 5.

13 Témoin P (interprétation): Que les choses soient claires. Les lits sont

14 toujours restés sur place. Sur ordre de M. Delic, et de peut-être d'autres

15 personnes que je ne connais pas, des personnes enfermées dans le hangar en

16 fait des détenus arrivaient en ce lieu.

17 Question: Ce que je vous demandai c’est si c’est cela que vous avez dit

18 Monsieur P, si ce que nous avons vu est exact?

19 Réponse: Vous voyez bien que je suis sur l'image.

20 Question: Oui, mais il y a quelques instants devant ce Tribunal, vous avez

21 dit que vous n'aviez pas dit cela, donc je vous demande si ce que vous

22 avez dit à ces représentants de l'organisation est exact, ou si ce qui est

23 exact est ce que vous avez dit aujourd’hui devant le Tribunal?

24 Réponse: Ce que j'ai dit aujourd'hui devant le Tribunal.

25 Question: Bien, merci. Je demande que cette vidéo sur laquelle le témoin

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1 s'est reconnu soit également acceptée en tant que pièce à conviction de la

2 défense. Je parle bien de cet extrait de video qui vient d’être diffusé.

3 M. le Président (interprétation): Celui-ci?

4 Mme Residovic (interprétation): Oui.

5 M. le Président (interprétation): Bien. La pièce est acceptée. Mais je ne

6 sais pas, est-ce que vous penser qu'elle a quelque action que ce soit

7 cette vidéo?

8 Cela dépend de la façon dont vous la voyez parce que la personne qui parle

9 n'est pas bien définie. On peut y voir toute sorte de chose.

10 Mme Resedovic (interprétation): La vidéo est une vidéo filmée sur les

11 lieux même où se trouvait le témoin. Donc je pense qu'il est évident

12 qu'elle a une valeur.

13 J’en termine avec ma question. Vous avez déclaré qu'une fois vous avez été

14 conduit en voiture devant la maison de M. Delalic et que Mucic est allé

15 dans la maison. Vous, vous êtes resté dans le véhicule, n'est-ce pas?

16 Témoin P (interprétation): Oui.

17 Question: Vous n'êtes pas sorti du véhicule et vous n'êtes pas entré dans

18 la maison à ce moment-là?

19 Réponse: Non, M. Mucic avait même un fusil.

20 Question: Monsieur Mucic n’est resté que quelques instants dans la maison

21 et il est revenu, n'est-ce pas?

22 Réponse: Quelque chose comme cela.

23 Question: Personne d'autre n'est sorti de la maison avec M. Mucic et

24 personne ne s’est joint à vous dans le véhicule?

25 Réponse: Je crois que non.

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1 Question: Vous ne savez pas qui se trouvait dans la maison de M. Delalic

2 en cette occasion, n'est-ce pas?

3 Réponse: Non.

4 Question: Bien. Merci beaucoup Monsieur P. Je vous prie de m'excuser si je

5 vous ai fatigué avec mes nombreuses questions, j'ai eu plaisir à vous

6 interroger.Merci.

7 Merci Monsieur le Président. Je n’ai plus de questions.

8 M. le Président (interprétation): Merci beaucoup.

9 Y a-t-il d’autres contre-interrogatoire?

10 (Contre-interrogatoire du Témoin P par Me Olujic.)

11 M. Olujic (interprétation): Excusez-moi, Monsieur le Président, quelques

12 instants pour ranger mes papiers.

13 Bonjour Monsieur P.

14 Témoin P (interprétation): Bonjour.

15 Question: J'espère que vous n'êtes pas trop fatigué, vous avez parlé toute

16 la journée, vous avez dû subir un grand nombres de questions aussi bien de

17 la part de l'accusation que de ma confrère. Ce que je peux vous assurer

18 d’emblée c'est que je ne vous interrogerai pas aussi longuement, mais

19 certainement plus brièvement.

20 Monsieur P, nous parlons deux langues, vous parlez serbe; je parle croate

21 et je pense que nous nous comprendrons bien?

22 Réponse: Je le pense.

23 Question: Merci. Eh bien, commençons.

24 Monsieur P, dans votre déclaration vous avez dit que lorsque vous vous

25 trouviez chez M. Delalic, il avait dit à M. Zebic et il s'agissait de

Page 4538

1 vous: "Regarde ce que tes Oustachis lui ont fait", est-ce exact?

2 Réponse: Oui.

3 Question: Donc c'est exactement cela qu’a dit M. Delalic?

4 Réponse: Oui.

5 Question: Dites-moi, s'il vous plaît, qui vous a fait cela?

6 Réponse: Monsieur, c'est au moment de l'arrestation qu'ils m’ont fait cela

7 à Konjic dans la salle de sport et à Celebici.

8 Question: Mais qui vous a fait cela? Est-ce que cela correspond à la

9 vérité de dire que ce sont les Oustachis comme l’a dit M. Delalic?

10 Réponse: J'ai vu sur l'uniforme d'un des hommes, l'échiquier sur le

11 couvre-chef. Cela se passait dans la salle de sport, il m'a même salué. Je

12 ne me rappelle pas son nom ni son prénom, je n’ai pas non plus pu le

13 reconnaître car mes lunettes étaient pratiquement complètement cassées.

14 Mais j'ai supposé que c'était un représentant du HVO étant donné la

15 dimension de l'insigne.

16 Il y avait aussi des représentants de la Défense territoriale, des

17 représentants de la Défense territoriale se trouvaient également dans la

18 salle de sport.

19 Question: Que les chsoes soient claires, qui est-ce que que vous

20 considériez comme des Oustachis? Les membres de la Défense territoriale ou

21 ceux qui avaient un insigne?

22 Réponse: Vous savez qui je considèrais comme Oustachi?

23 Question: Dites-le.

24 Réponse: Ce sont les gens de la Deuxième Guerre mondiale.

25 Question: Donc Monsieur P, vous acceptez la possibilité que vous ayez subi

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1 des sévices de la part de quelqu'un d'autre et pas, comme M. Delalic l’a

2 dit, de la part des Oustachi?

3 Réponse: Oui.

4 Question: Merci. Monsieur P, vous avez dit que le 27 mai, Rale Musinovic

5 était commandant du camp de Celebici, est-ce que c’est exact?

6 Réponse: Oui.

7 Question: Merci.

8 Mme McHenry (inteprétation): Excusez-moi, encore une fois, je n'aime pas

9 beaucoup interrompre les débats mais je demande vraiment au témoin

10 d'assurer une pause très longue à la fin de chaque question de façon à ce

11 que nous puissions suivre.

12 M. Olujic (interprétation): Monsieur, dans votre déclaration vous avez dit

13 que vous avez demandé à Zrinko Brekalo qu’il vous...

14 M. le Président (interprétation): Maître McHenry, vous ne respectez pas la

15 procédure en vigueur, vous n'êtes pas censé vous adresser directement à un

16 conseil de la partie adverse et je m'attendais à ce que vous sachiez cela.

17 M. Olujic (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

18 Monsieur dans votre déclaration, vous avez dit que vous avez demandé à

19 Zrinko Brekalo des équipements médicaux, est-ce exact?

20 Témoin P (interprétation): Oui.

21 Question: Dites-nous, est-ce que M. Zrinko Brekalo vous a donné les

22 équipements médicaux demandés?

23 Réponse: En cachette des gardiens quand il venait nous visiter, il sortait

24 toujours de son sac quelques médicaments.

25 Question: Quelle était sa nationalité?

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1 Réponse: Croate.

2 Question: Dans votre déclaration, vous avez dit que Zdravko Mucic vous a

3 dit qu'il était forcé d'être commandant du camp, est-ce exact?

4 Réponse: Oui.

5 Question: Monsieur, est-ce que vous pouvez nous dire avec plus de

6 précision à quel moment M. Mucic vous a dit cela?

7 Réponse: Nous nous trouvions encore dans les locaux de l'école primaire du

8 Trois Mars.

9 Question: Donc c'est au moment où vous étiez dans l'école du Trois Mars?

10 Réponse: Oui.

11 Question: Vous a-t-il dit peut-être qui le forçait à accepter le poste de

12 commandant du camp lorsqu'il vous a dit cela?

13 Réponse: Non.

14 Question: Dans votre déclaration, hier vous avez également ajouté que M.

15 Mucic avait sorti de sa poche de l’insuline qui était destinée à son père

16 et qu'il vous a proposé cette insuline à l'intention de M. Mrkajic mais

17 que vous pour d’autres raisons -et aujourd'hui je ne dirai pas pour quelle

18 raison- vous n'avez bien sûr pas administré ces médicaments à M. Mrkajic,

19 est-ce exact?

20 Réponse: Exact.

21 Question: Dites nous, s’il vous plaît, comment est-ce que vous interprétez

22 l'attitude de M. Mucic qui donne un médicament destiné à son père à

23 l'intention d'une personne à qui vous étiez censé administrer ce

24 médicament?

25 M. McHenry (interprétation): Monsieur le Président, je vous prie d'excuser

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1 mon comportement de tout à l'heure, mais à ce stade j'élève une objection

2 car je ne pense pas que la question soit pertinente.

3 M. le Président (interprétation): Elle peut être pertinente, le témoin est

4 un médecin et la question porte sur les circonstances particulières de

5 l'événement. Il n'y a rien à redire.

6 Le témoin peut répondre. Je crois que vous pouvez répondre Monsieur.

7 Témoin P (interprétation): Je ne peux faire aucun commentaire à ce sujet.

8 M. le Président (interprétation): Bien, vous ne pouvez faire aucun

9 commentaire au sujet de la nature d'une personne qui offre volontairement

10 un médicament destiné à son père, à une personne qui a besoin d'être

11 soignée par vous.

12 Témoin P (interprétation): Dans des circonstances normales je le

13 considérerais comme un homme humain.

14 M. le Président (interprétation): Merci, beaucoup.

15 M. Olujic (interprétation): Merci. Dites nous, cette insuline que vous

16 n'avez pas administrée à cet homme, est-ce que vous l’avez utilisée pour

17 un autre patient par la suite, est-ce que vous l'avez utilisée, est-ce que

18 cette insuline a été utilisée?

19 Témoin P (interprétation): Non.

20 Question: Vous avez évoqué une liste qui a été donnée par M. Mucic à M.

21 Delalic, pouvez-vous nous dire combien de noms figuraient sur cette liste?

22 Il y en avait 10, 15, 20, 30 ou plus?

23 Réponse: Il y en avait plus de 15.

24 Question: Dites-moi, pourrait-on dire que sur cette liste figuraient des

25 noms de personnes qui n'avaient absolument pas besoin de soins médicaux?

Page 4542

1 Réponse: Pendant les premiers jours, non.

2 Question: Et plus tard?

3 Réponse: Oui.

4 Question: Il y en avait combien?

5 Réponse: Très peu.

6 Question: Monsieur P, à un moment quelconque avez-vous vu que M. Mucic ait

7 maltraité quelqu'un?

8 Réponse: Non.

9 Question: Avez-vous entendu à un moment quelconque que M. Mucic ait

10 torturé quelqu'un?

11 Réponse: Non.

12 Question: Peut-on dire que M. Mucic dans une certaine mesure a protégé les

13 détenus autant qu'il le pouvait?

14 Réponse: Voulez-vous mon opinion subjective?

15 Question: Oui.

16 Réponse: Mon opinion subjective est que pendant qu'il était dans le camp,

17 M. Mucic, je n'ai jamais vu qu'il ait battu quelqu'un. Je ne me sentais

18 pas humilié.

19 Question: Allez-y, allez-y.

20 Réponse: Un instant s'il vous plaît. J'étais sûr qu'on ne me battrait pas.

21 Question: Merci.

22 Question: Monsieur P, vous avez dit que vous avez assisté à un

23 anniversaire, l'anniversaire de M. Mucic que c'était une fête, qu'on a

24 mangé de l’agneau, qu’il y avait beaucoup à manger, qu'on vous a invité à

25 cette fête d'anniversaire. Si je vous ai bien compris, corrigez-moi si ce

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1 n'est pas le cas, que vous vous souvenez de la date parce que cette date

2 correspond à la date de la fête de votre père?

3 Réponse: C'était plus tard.

4 Question: Plus tard?

5 Réponse: Oui.

6 Question: Combien de jours plus tard?

7 Réponse: Je ne suis pas tout à fait sûr mais je pense que c'était quelques

8 jours plus tard.

9 M. le Président (interprétation): Laissez-le répondre, vous ferez une

10 pause.

11 Témoin P (interprétation): Je sais que c'était à partir du moment où j’ai

12 été confiné à domicile.

13 (Interruption d'enregistrement sur la cassette en français, cf: transcript

14 anglais page 4692 ligne 15 ==> traduction des trancripteurs: Question:

15 Savez-vous quelle est la date de l'anniversaire de M. Mucic? Réponse: je

16 crois que c'est en août. )

17 Question: Et quand c’était? Au début du mois d’août, à la mi août ou à la

18 fin du mois?

19 Réponse: Je n'en suis pas sûr. La seule chose que je sais, c’est que j'y

20 étais . Je peux même dire quel est l'endroit où je me trouvais, où se

21 trouvait M. Music où était assis M. Zoran Cecez.

22 Question: Est-ce que vous considérez qu'il est possible que ces dates

23 étaient à la fin du mois d’août?

24 Réponse: Je n'en suis pas sûr.

25 Question: Est-ce que vous pensez que c'est possible? Je veux dire, je vous

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1 aiderai... La raison pour laquelle je vous pose cette question c’est parce

2 que la date anniversaire est le 31 août pour M. Mucic.

3 Réponse: Je ne sais pas.

4 Question: D'accord, on peut continuer.

5 Monsieur P, vous avez passé relativement beaucoup de temps à Celebici,

6 vous étiez en contact avec cet endroit. D’après ce que vous savez, en fait

7 quelles étaient les fonctions de M. Mucic dans ce camp?

8 Réponse: Je ne le sais pas.

9 Question: Aujourd'hui, en déposant vous avez dit qu'à Konjic les gens qui

10 y étaient, les Serbes, qu'ils étaient appelés la 5e Colonne.

11 Réponse: Oui.

12 Question: Pouvez-vous préciser un peu: qu'entendiez-vous en disant cela?

13 Réponse: Qu'ils étaient des Serbes.

14 Question: Par conséquent que dans le milieu où ils vivaient, ils avaient

15 des problèmes à cause de cela, est-ce que c'est cela?

16 Réponse: Oui, probablement.

17 Question: Monsieur P, vous avez déclaré... vous avez dit que vous

18 connaissiez un monsieur nommé Golub, et M. Mrkajic appelé Zaro. Leur avez-

19 vous procuré des soins médicaux personnellement au moment où ils en

20 avaient besoin?

21 Réponse: Monsieur Golubovic a été amené dans le bâtiment 22 et par la

22 suite, j'ai appris que c'était sur l'intervention du Dr Zrinko Brekalo et

23 de Pavo Mucic.

24 Question: Ces messieurs, vous ont-ils dit qui vous a torturé?

25 Réponse: Non, pas particulièrement.

Page 4545

1 Question: Vous avez pu comprendre qui les a torturés, puisqu'ils étaient

2 blessés?

3 Réponse: Ils se trouvaient à l'intérieur du bâtiment 9.

4 Question: Etait-ce peut-être Guska?

5 Mme McHenry (interprétation): Objection. Madame et Messieurs les Juges,

6 j'objecte car le témoin nous a déjà dit qu'il ne disposait pas

7 d'informations sur ce point.

8 M. le Président (interprétation): Si le témoin ne connaît pas cette

9 information, il n’est pas besoin de poursuivre ces questions.

10 M. Olujic (interprétation): Merci, Monsieur le Président, je retire ma

11 question.

12 Monsieur P, pendant la guerre, pendant cette horrible guerre, est-ce que

13 vous considériez M. Zdravko Mucic comme un ami?

14 Témoin P (interprétation): Je ne voudrais pas donner de commentaires à ce

15 sujet.

16 Question: Néanmoins, je vous demande de répondre.

17 Réponse: Avant la guerre, nous étions de bons camarades.

18 Question: Et pendant la guerre?

19 M. le Président (interprétation): Il vous a dit qu'il ne pouvait pas faire

20 de commentaires sur cette question. C'est une question très difficile qui

21 peut susciter des sentiments mélangés de la part du témoin; et pour ma

22 part je voudrais que vous lui fassiez l'économie de cette question.

23 M. Olujic (interprétation): Oui Monsieur le Président, croyez-moi, la

24 seule intention que j'avais au moment de poser cette question c'est parce

25 que le Procureur a déclaré de manière catégorique que M. P considérait

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1 qu’ils n’étaient pas des amis. Là, je ne rentre pas dans les détails, je

2 ne veux pas faire de commentaire sur la mauvaise conscience etc.

3 Mais si le témoin ne souhaite pas rentrer dans ce domaine de questions qui

4 ont à voir avec la vie privée, je ne vais pas insister.

5 M. le Président (interprétation): Il a en réalité dit assez ce qu'il en

6 était de leurs rapports durant l'époque où il était à Celebici.

7 M. Olujic (interprétation): Monsieur P, pouvez-vous nous dire qui faisait

8 partie de la commission d'enquête à Celebici?

9 Témoin P (interprétation): Miro Stenek.

10 McHenry (interprétation): Objection cette question a déjà été posée et le

11 témoin y a déjà répondu.

12 M. le Président (interprétation): Mais y a-t-il déjà répondu?

13 Mme McHenry (interprétation): Oui, Monsieur le Président, je pense qu'il y

14 a répondu entièrement.

15 M. Olujic (interprétation): Non il n'a pas répondu entièrement. Je

16 reformulerai alors ma question. Est-ce que c'était des membres du MUP?

17 Mme McHenry (interprétation): Cela a déjà été demandé et il y a été

18 répondu. Le témoin a dit qu'il pensait qu’il s’agissait de membres du MUP,

19 de membres de la Défense territoriale et de membres du HVO, si je me

20 souviens bien. Toujours est-il qu'il a déjà répondu à cette question.

21 M. le Président (interprétation): Avez-vous un point précis à l'esprit, et

22 si votre question peut être précisée alors posez là?

23 M. Olujic (interprétation): Merci, Monsieur le Président. Je poursuivrai.

24 Monsieur P, dites-moi si M. Mucic était au courant du fait que vous avez

25 quitté la municipalité de Konjic et que ce que vous avez décrit devant ce

Page 4547

1 Tribunal?

2 Réponse: Je n’en suis pas sûr.

3 Question: S'il vous plaît, au moment de l'arrivée de la Croix-Rouge, quels

4 instruments ou équipements avez-vous reçus?

5 Réponse: Je n'ai absolu absolument pas été enregistré par la Croix-Rouge.

6 Question: Monsieur P, à quelle fréquence voyiez-vous M. Mucic à Celebici?

7 Réponse: J'ai déjà répondu à cette question.

8 Question: A Celebici dans le camp pendant que vous y étiez est-ce qu’on a

9 passé en revue les détenus?

10 Réponse: Je ne le sais pas.

11 Question: Pendant que vous étiez dans le camp, à qui obéissaient les

12 gardiens?

13 Réponse: A Monsieur Mucic.

14 Question: A un moment quelconque, est-ce qu’il y a eu des conflits entre

15 M. Mucic et les gardiens?

16 Réponse: Je n'en suis pas sûr. Je ne l'ai pas vu. Je n’ai pas vu de

17 conflit.

18 Question: Monsieur P, d'après votre déposition très ample hier et

19 aujourd'hui, est-ce qu’il découle que les pires tortures se produisaient

20 au moment où on était fait prisonnier?

21 Réponse: En ce qui me concerne personnellement c'était au moment où j'ai

22 été fait prisonnier et pendant que j'étais emmené au centre de sport et à

23 Celebici. Pour ce qui est des autres détenus, je les laisse répondre eux-

24 mêmes.

25 Question: Le dispensaire où vous travailliez, est-ce que d'autres patients

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1 y étaient traités qui n'étaient pas détenus au camp?

2 Réponse: Oui. A une occasion, j'ai trouvé trois personnes en uniforme qui

3 avaient des uniformes noirs. J'ai également soigné un habitant du village

4 qui avait heurté avec son vélo un groupe de femmes qui se tenaient devant

5 l'entrée du camp, elles attendaient que quelqu'un vienne chercher la

6 nourriture.

7 Question: Dans cette infirmerie, est-ce qu'il y venait aussi des

8 militaires du front qui étaient blessés?

9 Réponse: Non.

10 Question: Ils ont utilisé une autre infirmerie?

11 Réponse: Oui.

12 Question: Pendant que vous étiez au camp Celebici, est-ce qu’il y avait

13 une revue tous les matins où on lisait les noms des détenus et où on

14 saluait le drapeau?

15 Réponse: Non.

16 Question: Est-ce que les militaires, c’est-à-dire les gardiens du camp

17 obéissaient à cette règle?

18 Réponse: Je ne sais pas.

19 Question: Dites-moi, quel genre d’uniforme voyiez-vous dans le camp?

20 Réponse: L'uniforme du HVO, et plus tard après le 22 juillet, l'uniforme

21 de l'armée de Bosnie-Herzégovine.

22 Question: Il est arrivé que les gardiens s’enivrent dans le camp?

23 Réponse: Oui.

24 Question: Les gardiens portaient-ils des armes, même quand ils n'étaiennt

25 pas de garde?

Page 4549

1 Réponse: Je ne le sais pas.

2 Question: Est-ce qu'il y a eu des conflits entre les gardiens pendant que

3 vous étiez là-bas?

4 Réponse: Je n'en ai pas vu.

5 Question: Oui, dites-moi seulement ce que vous savez Monsieur P, je ne

6 vous demanderais pas autre chose.

7 Est-ce qu'on devait rapporter pendant qu’on voyait les gardiens?

8 Réponse: Comment voulez-vous dire?

9 Question: Est-ce qu'on devait se mettre au garde à vous quand on les

10 voyait?

11 Réponse: Non.

12 Question: Monsieur P, avez-vous fait votre service militaire à la JNA?

13 Réponse: Oui, 10 ans avant le début de la guerre.

14 Question: Vous avez eu un grade là-bas?

15 Réponse: Oui.

16 Question: Quel grade Monsieur P?

17 Réponse: En 1987, j'ai eu le grade de lieutenant de réserve.

18 Question: Ce sera tout Monsieur P, je vous remercie.

19 Monsieur le Président, je vous remercie.

20 M. le Président (interprétation): Merci.

21 Y a-t-il d'autres conseils de la défense qui souhaite procéder au contre-

22 interrogatoire?

23 M. Moran (interprétation): Ayant conféré avec mon client, je pense que je

24 vais accepter l'idée que le meilleur contre-interrogatoire consistait

25 parfois à ne poser aucune question Monsieur le Président.

Page 4550

1 M. le Président (interprétation): Je vous remercie. Qu’en est-il pour

2 votre part, Maître Ackerman.

3 Mme McMurrey (inteprétation): Je ne suis pas M. Ackerman, je suis Cynthia

4 McMurrey.

5 M. le Président (interprétation): Je m'adresse au conseil principal qui

6 pourra faire son choix.

7 Mme McMurrey (inteprétation): Certes Monsieur le Président. Il est 4

8 heures moins 5. Puis-je demander que l'on reprenne après la pause?

9 Je n'ai que quelques questions à poser, je serais rapide.

10 M. le Président (interprétation): Nous allons revenir à 16 heures 30.

11 Mme McMurrey (inteprétation): Merci.

12 (L’audience, suspendue à 15 heures 55, est reprise à 16 heures 30.)

13 (Contre-interrogatoire du Témoin P par Me McMurrey.)

14 M. le Président (interprétation): Je pense, Madame McMurrey que vous vous

15 apprêter à poursuivre le contre-interrogatoire.

16 Mme McMurrey (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

17 Puis-je procéder? Merci.

18 Monsieur P, je m’appelle Cynthia McMurrey et je représente Esad Landzo.

19 J'ai quelques questions à vous poser.

20 L’une de ces questions est la suivante. Je sais que vous avez dit hier que

21 vous viviez dans un immeuble, appartement qui était proche de celui où

22 habitait la famille de M. Landzo.

23 Le 12 juillet était une date importante pour vous car –et j’aimerais que

24 vous me le confirmiez- deux de vos voisins ont été tués ce jour-là, n'est-

25 ce pas?

Page 4551

1 Témoin P (interprétation): Le 12 juillet, 7 ou 8 policiers membres de la

2 Défense territoriale ont été tués. C'est cela que j'ai dit.

3 Question: Et deux de ces policiers militaires s'appelaient Mendici Brabic

4 et Panzer Drazin, une personne qui habitait dans l'immeuble voisin du

5 vôtre, n'est-ce pas?

6 Réponse: Je n'en sais rien je ne connaissais pas ces personnes. Je

7 connaissais un policier militaire qui s'appelait Mangic et le frère d'un

8 policier militaire....

9 Question: C'est très bien. Vous savez que certaines de vos connaissances

10 faisaient partie de ce groupe. Je voudrais que vous me confirmiez que cet

11 assassinat a été brutal.

12 Réponse: Je n'ai pas vu les corps.

13 Question: Donc vous n'avez pas vu d'articles de presse ou quoi que ce soit

14 d'autre concernant ces meurtres?

15 Réponse: Non.

16 Question: Très bien, alors je passe directement à la question suivante.

17 Avez-vous jamais été emmené au Mont Igman et vous y trouviez-vous le 28 et

18 29 mai?

19 Réponse: Non jamais. Il y a deux personnes qui portent le même nom et le

20 prénom mais qui ont un père différent et qui sont nés un jour différent.

21 Question: Donc c’est quelqu’un qui porte votre nom, le même nom que vous

22 qui se trouvait au Mont Igman mais vous nous dites que ce n'était pas

23 vous?

24 Réponse: Effectivement.

25 Question: Merci beaucoup. Je voudrais revenir sur ce que vous avez dit

Page 4552

1 hier. Je ne me souviens plus très bien mais vous avez parlé hier de

2 l’article paru dans le télégraphe. Avez-vous été à Timisoara en Roumanie?

3 Réponse: Vous le savez, oui, j'y étais.

4 Question: Très bien, excusez-moi si je ne me souviens pas exactement.

5 Vous avez aussi dit et c'est cela paraît à la page 4539, ligne 25, que

6 vous étiez allé à Belgrade pour participer à un cours; que s'y trouvaient

7 d'autres ex-détenus et qu'ils avaient commencé à parler de toutes ces

8 choses, bien entendu douloureuses. C'est là, d'après ce que vous avez dit,

9 que vous avez appris le nom d'Esad Landzo, le véritable nom d'Esad Landzo.

10 Est-ce correct?

11 Réponse: Je m'étais inscrit à des cours que j'ai suivis pendant trois mois

12 environ à Belgrade. A la clinique, il n'y avait pas de blessés, c'était

13 simplement un hôpital ordinaire pour des civils. Cela étant, à Belgrade,

14 dans la ville de Belgrade on peut parfois rencontrer certains ex-détenus

15 et parler avec eux.

16 Question: Ces rencontres ou il s'agit des cours auxquels vous faisiez

17 référence auparavant?

18 Réponse: Ce à quoi je faisais référence ce sont les cours qui étaient

19 organisés; des cours de microchirurgie qui étaient organisés et que je

20 suivais, pour l'oreille. En effet avant la guerre, j'ai participé à trois

21 cours, trois stages dans le cadre de ma thèse qui portait sur la

22 microchirurgie de l'oreille.

23 Question: Ma question est, lorsque vous avez pu vous rendre à Belgrade et

24 que vous y avez rencontré d'autres ex-détenus, est-ce bien là que vous

25 avez appris le nom de M. Landzo?

Page 4553

1 Réponse: Je connaissais son surnom, Zenga, mais c'est là que j'ai appris

2 son véritable nom.

3 Mme McMurrey (interprétation): J'en ai terminé avec le témoin.

4 Merci, Monsieur le Président.

5 M. le Président (interprétation): Je vous remercie. Voilà qui termine le

6 contre-interrogatoire.

7 Y a-t-il un interrogatoire supplémentaire par l'accusation?

8 Mme McHenry (interprétation): Oui, nous avons quelques questions à poser.

9 (Questions relatives à la procédure.)

10 Mme McHenry (interprétation): L'accusation m'a donné l'instruction de

11 demander une brève pause de sorte que nous ayons le temps d'examiner les

12 éléments de preuve qui ont été présentés. Sur instruction du Procureur, je

13 voudrais donc demander une brève pause de 45 minutes à une heure. En

14 d'autres termes, je demanderai que l'audience soit suspendue jusqu'à

15 demain.

16 M. le Président (interprétation): Nous apprécions le fait que vous avez

17 encore des arguments à faire-valoir.

18 Concernant les versements au dossier des déclarations, il reste ce point à

19 débattre.

20 Mme McHenry (interprétation): Oui, effectivement, Monsieur le Président et

21 nous sommes en train de procéder à des recherches. Je crois d'ailleurs que

22 le conseil de M. Mucic fait les mêmes recherches de son côté. Nous

23 présenterons nos conclusions très prochainement concernant ce point.

24 M. le Président (interprétation): Oui. Je voudrais entendre les positions

25 des parties respectives de sorte que nous puissions prendre une position.

Page 4554

1 M. Jan (interprétation): Il y a aussi la question des échantillons

2 graphologiques de l'accusé Mucic. C'est une question extrêmement

3 intéressante. Peut-on forcer l'accusé à fournir un échantillon

4 graphologique, étant donné la protection garantie à l'accusé qui ne peut

5 être contraint de témoigner contre lui-même.

6 Mme McHenry (interprétation): Oui, effectivement. Madame et Messieurs les

7 Juges, je pense qu'il convient que les conclusions des parties respectives

8 soient présentées sur ce point.

9 M. le Président (interprétation): Je pense que la Chambre de première

10 instance partage cet avis. Il faudra entendre les positions de chacun

11 avant de prendre une décision définitive.

12 Mme McHenry (interprétation): Nous présenterons donc nos arguments. Je ne

13 sais pas si le conseil de Mucic sait quand il sera à même de déposer son

14 mémoire, à moins que vous ne souhaitiez nous donner un délai. Toujours

15 est-il que des gens travaillent déjà sur cette question.

16 M. Jan (interprétation): C'est une question importante. Qu'en est-il de

17 votre prochain témoin?

18 Mme McHenry (interprétation): Nous ne prévoyons pas d'appeler notre… Nous

19 n'avions pas prévu de faire entendre le prochain témoin en attendant le

20 règlement de cette question. Autant que je sache, la question en litige ne

21 nécessite pas de déposition supplémentaire de la part du présent témoin.

22 Nous n'avons donc pas prévu une interruption dans le flux des témoins.

23 M. le Président (interprétation): Je ne pense pas que la décision doive

24 retarder les choses. Vous pouvez aller de l'avant. Tout ce dont nous avons

25 besoin, c'est d'entendre vos arguments à l'appui de la recevabilité des

Page 4555

1 pièces.

2 Mme McHenry (interprétation): Oui, Monsieur le Président.

3 M. Greaves (interprétation): Au contraire de mon éminent confrère, je n'ai

4 pas une armée de chercheurs pour m'aider et donc il me faudra un peu plus

5 de temps qu'à ma consœur pour vous donner nos arguments sur ce point.

6 M. le Président (interprétation): Je pense qu'une semaine serait trop

7 longue... ou peut-être une semaine, d'ici une semaine?

8 M. Greaves (interprétation): D'ici une semaine.

9 M. le Président (interprétation): Au maximum, pour mercredi prochain.

10 M. Greaves (interprétation): Il est extrêmement utile d'avoir une date

11 limite, cela vous oblige à travailler.

12 M. le Président (interprétation): Ce que je crains c'est que puisque vous

13 dépendez largement des arguments avancés par l'accusation, vous devrez

14 attendre les conclusions de l'accusation pour faire vos propres

15 recherches.

16 M. Greaves (interprétation): Je pense que je peux prévoir dans une

17 certaine mesure.

18 M. le Président (interprétation): Très bien. Pour mercredi prochain donc

19 nous entendrons les arguments de chacun.

20 A ce stade, il me paraît opportun de suspendre l'audience jusqu'à demain

21 matin 10 heures.

22 Mme McHenry (interprétation): Merci, Monsieur le Président.

23 M. le Président (interprétation): Vous n'avez pas d'autres témoins

24 maintenant? Il nous reste 45 minutes.

25 Mme McHenry (interprétation): Si, Monsieur le Président, nous avons un

Page 4556

1 témoin qui est là. Si vous voulez commencer aujourd'hui et interrompre

2 ensuite pour reprendre l'interrogatoire supplémentaire du présent témoin,

3 c'est également possible.

4 M. le Président (interprétation): Oui.

5 M. Turone (intrprétation): Nous appelons donc le témoin suivant. Il s'agit

6 de Mirko Dordic

7 (Le témoin P est reconduit hors du prétoire.)

8 (Hors micro, cf: transcript anglais page 4705, ligne 19)

9 M. Turone (interprétation): Cette déposition nous intéresse en rapport

10 avec plusieurs chefs de l'Acte d'accusation. Il s'agit des chefs 30 et 32.

11 En tout cas, sous ces chefs, le témoin apparaît comme victime.

12 (Audience publique.)

13 (Le témoin, M. Mirko Dordic, est introduit dans le prétoire.)

14 (Interrogatoire principal du témoin, M. Mirko Dordic, par M. Turone.)

15 M. Dubuisson: Voulez-vous vous lever?

16 M. le Président (interprétation): Veuillez faire prêter serment au témoin.

17 Montrez lui la déclaration.

18 M. Mirko Dordic (interprétation): Je déclare solennellement que je dirai

19 la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

20 M. le Président (interprétation): Vous pouvez vous asseoir.

21 M. Turone (interprétation): Puis-je poursuivre?

22 M. le Président (interprétation): Je vous en prie.

23 M. Turone (interprétation): : Merci.

24 Monsieur, voudriez-vous nous donner votre identité complète?

25 M. Mirko Dordic (interprétation): Je m'appelle Mirko Dordic.

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1 Question: Merci. Monsieur Dordic, quelle est votre date de naissance?

2 Réponse: Le 30 août 1956.

3 Question: Et quelle est votre appartenance ethnique?

4 Réponse: Je suis Serbe.

5 Question: Où êtes-vous né?

6 Réponse: Je suis né dans la localité de Bradina, dans la municipalité de

7 Konjic.

8 Question: Monsieur Dordic, quelle éducation avez-vous reçue, à quelle

9 école êtes-vous allé?

10 Réponse: Je suis allé à l'école primaire, d'abord à Bradina et ensuite à

11 l'école secondaire de Mostar où j'ai suivi une formation spécialisée en

12 hôtellerie.

13 Question: Quelle était votre profession en 1992?

14 Réponse: En 1992, j'étais serveur dans un restaurant à Konjic qui

15 s'appelle Oracica.

16 Question: Où viviez-vous au début de 1992?

17 Réponse: A Bradina, dans la maison de ma famille.

18 Question: Merci. Monsieur Dordic, y a-t-il eu un moment où Bradina a été

19 touché par le conflit armé en 1992?

20 Réponse: Oui.

21 Question: Pouvez-vous dire comment et quand cela a commencé?

22 Réponse: Pas des combats immédiatement mais, dès 1991, à la fin de 1991,

23 la situation avait commencé à se détériorer. Plus tard, il y a eu

24 l'attaque contre Bradina en mai 1992. Avant, il y a avait eu dès le mois

25 d'avril des actes de provocation, car Bradina se trouve entre deux

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1 tunnels, il y avait 5 ou 6 kilomètres de route. La zone est entourée par

2 des collines, il y a des villages musulmans du côté de Konjic, Zukici,

3 Repovci et, de l'autre côté, Korca, Vukovici, Orajnica(?), se sont

4 d'autres villages.

5 Question: Pouvez-vous nous dire quel jour à peu près, le village de

6 Bradina lui-même a été touché par les hostilités, par ces actions

7 militaires, opérations militaires?

8 Réponse: La première attaque a eu lieu le 12 mai sur les hauteurs de

9 Bradina vers Repovci qui était un village musulman. Cela s'est passé le 12

10 mai. La situation était tendue, nous avions des vigies dans les villages

11 et ces personnes ont été capturées et emmenées au village de Repovci.

12 Puis des négociations se sont tenues avec un médecin qui était né là, qui

13 s'appelait Ahmed Jusufbegovic, ainsi qu'avec quelqu'un du HVO, Zvonko

14 Zovko, qui était commandant, quelque chose comme ça. Il y a donc eu des

15 négociations, et ces deux gardes ont été relâchés.

16 Ensuite, l'attaque s'est poursuivie le 13 mai, une attaque qui est venue

17 du côté du village musulman de Korca. Tomas Dragan, un des nôtres, a été

18 tué pendant cette offensive. C'était un Serbe.

19 Question: Est-ce que ces attaques ont duré pendant d'autres journées de

20 mai 1992?

21 Réponse: Non. Plus tard, il y a eu d'autres négociations encore. Il y a eu

22 une cellule de crise qui a été mise en place pour négocier avec les

23 autorités musulmanes, de sorte que les Serbes ont rendu leurs armes et que

24 les territoires contrôlés par les Serbes sont passés aux mains des autres

25 forces.

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1 Cela devait se passer le 25 mai, vers une heure de l'après-midi comme

2 convenu. Mais au lieu de cet accord, en définitive, notre village a été

3 pilonné et des tirs nombreux ont retenti. De fait, chacun protégeait sa

4 maison et ses biens. Nous avons résisté jusqu'au 26 mai, jusque vers 4

5 heures, et de l'autre côté, car j'étais moi du côté Est de Bradina, vers

6 Prehulja et Korca. C'est là que se trouve ma maison.

7 C'est donc du côté ouest que nous pouvions voir des maisons qui

8 commençaient à brûler. A un moment donné, je suis arrivé chez moi c'était

9 vers 5 ou 6 heures, j'ai pu voir que tout le monde avait battu retraite.

10 Tous les villageois du coin avaient battu en retraite vers la partie où

11 les forces musulmanes et croates n'étaient pas encore parvenues. J'ai

12 demandé ce qui se passait, quelqu'un m'a dit que Bradina était tombé,

13 qu'il fallait que nous nous rendions.

14 Il y avait aussi des rumeurs comme quoi des gens avaient été tués. J'ai

15 essayé de ne pas me rendre et j'ai passé la nuit dans une espèce d'abri

16 près de la maison, dans un ravin près de la maison avec mon frère, ma

17 femme, deux enfants et un voisin. Le matin du 27 mai, nous avons décidé

18 d'essayer de traverser, de passer en territoire contrôlé par les Serbes.

19 Question: Quand vous dites: "Nous avons décidé", qu'entendez-vous par là?

20 Combien de personnes?

21 Réponse: 12 personnes.

22 Question: Y a-t-il eu un moment où vous avez été capturés ou arrêtés?

23 Réponse: La nuit du 27 mai, nous l'avons passé à Bjelasnica dans la

24 montagne et, le 28, nous avons poursuivi notre voyage. Nous ne savions pas

25 exactement où aller. Nous voulions passer en territoire serbe près de

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1 Kalinovik ou Hadzici ou encore Trnovo, car à l'époque c'était les Serbes

2 qui contrôlaient ces différents coins.

3 Mais vers le soir du 28 mai, dans un ravin, tout d'un coup, nous avons été

4 attaqués. Ces 12 personnes ont été attaquées. Des tirs ont été tirés

5 contre nous, ils nous ont dit: "Arrêtez-vous!", ce que nous avons fait et

6 ils ont commencé à sortir des bois, cela ressemble à une petite pinède.

7 On nous a donné l'ordre de nous disperser. On nous a demandé d'où on

8 venait. Nous avons dit qu'on venait de Bradina, alors ils ont

9 immédiatement commencé à nous insulter, à nous traiter de Chetniks, à dire

10 que nous avions mis le feu à nos propres villages et que nous étions en

11 train de nous enfuir. Voilà comment cela a commencé.

12 Ensuite, ces terribles passages à tabac et les mauvais traitements ont

13 commencé. Ils ont commencé par nous fouiller, à confisquer tout ce que

14 nous avions, nos montres, les bijoux que nous pouvions avoir, l'argent et

15 les tortures ont commencé.

16 Question: Soit dit en passant, est-ce que vous avez jamais retrouvé par la

17 suite vos effets personnels qui vous avaient été confisqués?

18 Réponse: Non.

19 Question: Est-ce que ces personnes qui vous ont capturé étaient des

20 soldats?

21 Réponse: Oui. Ils portaient tous des tenues de camouflage et des insignes

22 de la Défense territoriale et du HOS. Plus tard, nous avons appris que

23 nous avions de la chance, car si nous avions été… parce que nous étions

24 capturés par les gens de Juka Prazina. Juka Prazina était le commandant

25 d'une espèce de force spéciale qui portait un béret vert; ou d'une espèce

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1 de ligue patriotique qui, à l'époque, était une unité spéciale de l'armée

2 musulmane.

3 Question: Pouvez-vous nous dire à peu près combien de soldats il y avait?

4 Réponse: A peu près 20. 20.

5 Question: Vous étiez en train de dire comment vous aviez été traité par

6 ces soldats après votre arrestation. Pourriez-vous décrire ces traitements

7 rapidement?

8 (Juge Jan hors micro.)

9 M. Turone (interprétation): Pouvez-vous nous décrire ces passages à tabac

10 et ce qu'on a utilisé pour vous frapper?

11 Réponse: On nous a frappé avec toutes sortes de choses. Ils nous ont

12 frappé avec des crosses de fusil, avec les poings. Ces mauvais traitements

13 se sont poursuivis pendant une heure environ. Ensuite, ils nous ont

14 conduit plus loin à pied mais, semble-t-il, quelqu'un avait fait venir un

15 véhicule et c'est ainsi qu'un petit camion Tam est apparu, c'est une

16 marque.

17 On nous a fait monter dans ce petit camion et ils ont continué à nous

18 frapper pendant que nous grimpions dans le camion. Ils nous ont donné

19 l'ordre de rester debout près du camion, de lever les mains en l'air comme

20 ceci, de chanter des chants et de crier des slogans… Ils nous faisaient

21 répéter des slogans.

22 Question: Vous a-t-on dit pourquoi vous étiez arrêtés?

23 Réponse: Eh bien, cela ne nous a pas été dit mais nous en étions

24 conscients. Ils ont commencé à nous dire que nous étions des Chetniks et

25 donc nous savions que c'était parce que nous étions des Serbes.

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1 Question: Oui. Est-ce que, d'une manière quelconque, vous avez pris part à

2 la défense de Bradina, de votre village?

3 Réponse: C'était mon devoir moral à l'égard de ma propriété et de ma

4 maison familiale, de ma maison natale de participer à la défense.

5 Question: Pouvez-vous expliquer comment vous avez pris part à la défense

6 de Bradina?

7 Réponse: Comment j'y ai participé? Je n'ai pas tiré une seule balle, car

8 plus tard quand je suis allé prendre un fusil, on a pu voir que, avec les

9 trois policiers qui sont allés chercher le fusil que j'avais laissé à la

10 maison, ils ont pu constater tout de suite que je n'avais pas pu tirer une

11 seule balle.

12 Question: Alors vous aviez une arme. Est-ce correct?

13 Réponse: Oui.

14 Question: Quel type d'arme?

15 Réponse: J'avais un fusil automatique.

16 Question: Aviez-vous sur vous un fusil au moment où on vous a arrêté?

17 Réponse: Non.

18 M. Turone (interprétation): Pardon?

19 M. le Président (interprétation): Je crois qu'il y a eu un petit problème

20 avec l'interprétation. Nous n'avons pas entendu.

21 M. Turone (interprétation): S'il y a eu un problème de traduction, je vais

22 répéter la question.

23 Est-ce que vous aviez sur vous une arme au moment où vous avez été arrêté?

24 Pouvez-vous répéter votre réponse?

25 M. Mirko Dordic (interprétation): Non.

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13 M. Moran (interprétation): Je crois que la connexion a été perdue.

14 M. Turone (interprétation): Oui, tout à fait, il n'y a pas de traduction.

15 On ne sait pas qui parle en fait.

16

17 M. Jan (interprétation): Quelle était l'arme qu'il portait? Cette question

18 n'a pas reçu de réponse. Pourriez-vous lui poser une question précise?

19 M. Moran (interprétation): Monsieur le Président, peut-on attendre un

20 instant. Je crois qu'il y a eu un problème dans les canaux

21 d'interprétation.

22

23 M. Turone (interprétation): Est-ce que tout est revenu à la normale? Très

24 bien.

25

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1

2 Monsieur Dordic, il faut que nous répétions cette dernière question.

3 Je vous demandais le type d'arme que vous aviez?

4

5 M. Mirko Dordic (interprétation): J'avais un fusil automatique.

6 Question: Aviez-vous votre arme sur vous au moment où vous avez été

7 arrêté?

8 Réponse: Non.

9

10 Question: C'était où? Où se trouvait l'arme à ce moment-là?

11 Réponse: Elle était restée chez moi à la maison.

12 Question: D'accord, merci.

13 Pouvez-vous dire à peu près combien de personnes de votre village étaient

14 armées au moment où le conflit a éclaté? Donc des personnes qui

15

16 participaient à la défense?

17 Réponse: Entre 200 et 250.

18 Question: D'accord, merci. Monsieur Dordic, que vous est-il arrivé tout de

19 suite après l'arrestation? Où vous a-t-on emmené?

20

21 Réponse: Eh bien, quand on est montés dans cette voiture, dans ce

22 véhicule, on devait chanter des chansons patriotiques. On devait dire des

23 prières musulmanes et puis dire des slogans. Est-ce que je peux être un

24 peu vulgaire, est-ce que je peux vous dire ce qu'on devait dire?

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2 Question: Si vous le souhaitez.

3

4 M. Jan (interprétation): Est-ce important?

5

6 M. Turone (interprétation): Non, ce n'est pas très important. On peut

7 poursuivre, on peut passer là-dessus.

8

9 Vous pouvez continuer sans dire quel était le contenu de ces slogans.

10 M. Mirko Dordic (interprétation): Une heure plus tard à peu près, on a été

11 conduits mais on nous battait tout le temps. Il y avait des musulmans

12 armés, des soldats musulmans avec nous. On ne pouvait pas les voir parce

13 qu'on leur tournait le dos. On devait être là debout avec les bras en

14 l'air, comme cela (le témoin montre).

15 Et on est arrivés à Bradici sur le Mont Igman. D'abord, on s'est arrêtés

16 devant l'hôtel Bjelasnica ou Famos, je ne suis pas sûr. On est restés un

17 peu de temps et après on nous a fait monter dans une camionnette qui nous

18 a emmenés au motel Mraziste sur le Mont Igman.

19

20 Alors là, on nous a mis dans une sorte de discothèque, je ne sais pas

21 comment dire, dans ce motel. Puis, on a vu entrer un homme assez fort,

22 gros. Cet homme fort nous a dit qu'on devait se mettre à genoux et dire

23 les prières musulmanes. Lui, il commençait "Allah egbar". Je ne sais pas

24 comment vont les mots mais nous, on devait les répéter et, lui, il

25

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1

2 marchait en faisant des cercles et il nous battait avec ses pieds. Il nous

3 donnait des coups à la tête.

4

5 Enfin, un policier est venu, je ne sais pas qui c'était. C'était quelqu'un

6 en uniforme qui a placé un gardien à l'entrée. Il lui a ordonné de sortir

7 et donc ce gardien devait empêcher quiconque de rentrer dans cette pièce.

8 On nous a apporté à chacun une petite tasse de thé et une tranche de pain

9 sur nos genoux. Après, ils ont commencé les interrogatoires.

10

11 Alors pendant les interrogatoires, ils étaient vraiment très corrects.

12 Celui qui m'interrogeait, moi personnellement, s'est présenté comme Serbe.

13 Il a dit qu'il s'appelait Miroslav Bozic. Moi, je lui ai raconté ce que je

14 savais.

15

16 Alors, comme nous étions tous blessés. Moi, j'avais l'oreille blessée, lui

17 il a demandé qu'un médecin vienne pour nous panser et pour nous donner des

18 médicaments. Cela a effectivement été fait.

19

20 C'est là que nous avons passé la nuit. Le lendemain, on nous a ordonné de

21 charger de l'orge dans un entrepôt, de charger un camion. Nous étions

22 battus et nous devions travailler dans cet état. Le soir, on nous a

23 ramenés dans cette pièce où nous étions installés préalablement. Soudain,

24 on a vu des hommes entrer qui portaient des bandeaux rouges et nous ont

25

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1 mis cela sur les yeux. Ils nous ont attachés les mains derrière les le

2 dos, ils nous ont dit qu'ils allaient nous amener à Grude pour que les

3 Oustachis nous liquident.

4

5 On nous a fait monter sur des camions. Je ne savais absolument pas quelle

6 était notre destination. Cela a duré environ une heure. Je sais que la

7 route était très mauvaise, car il y avait beaucoup de secousses dans le

8 camion. Au bout d'un certain temps, le camion s'est arrêté.

9 On nous a ordonné de descendre du véhicule et, un par un, on nous a

10

11 emmenés. Je ne pouvais pas voir parce que j'avais le bandeau sur les yeux.

12 Quand on nous a enlevé le bandeau, j'ai compris qu'on était dans le silo

13 de Tarcin parce que je m'étais rendu à cet endroit auparavant et je savais

14

15 ce que c'était. Alors là, tout de suite, on nous a apporté du riz dans un

16 petit pot et puis on devait partager à quatre cette portion de riz. On a

17 eu aussi de petits morceaux de pain. On nous a apporté un seau pour nos

18 besoins physiologiques. Il y avait un garde en haut. Il y avait des

19 provocations. C'est là qu'on a passé la nuit.

20

21 Le lendemain matin, on nous a emmenés à l'interrogatoire. C'est là qu'ils

22 n'étaient pas tout à fait corrects. Il y a eu des coups pendant les

23 interrogations, on nous posait des questions auxquelles on ne pouvait

24 absolument pas répondre.

25

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1

2 Puis, on nous a ramenés dans cette pièce où nous avions été installés à la

3 veille au soir. Mais un peu plus tard, deux hommes sont venus en uniforme

4 de Konjic, des gens que je connais. J'en connaissais un personnellement,

5 car il a travaillé avec moi dans mon entreprise. Il était juriste,

6 Sabcibovic Nusred. Il a dit qu'on devait le suivre, qu'on allait nous

7 transporter ailleurs.

8

9 Au bout de quelque temps, il est sorti. Puis au bout d'un certain temps,

10 la porte s'est ouverte et un soldat nous a ordonné de sortir. Nous sommes

11 sortis, devant l'entrée du silo on a vu un car. Il commençait à faire

12 nuit. On s'est mis dans ce car. On nous a interdit de regarder autour de

13 nous; on ne pouvait que regarder devant nous en bas. On nous a dit qu'on

14 nous amenait à Grude. Au bout d'un kilomètre environ, le car s'est arrêté.

15 On a vu cinq hommes monter, cinq Serbes de Bradina qui avaient été arrêtés

16

17 avant à cet endroit. A Mont Igman, ils en avaient eu deux de plus, donc on

18 était 19 en tout.

19 Alors dans ce car, il y avait une dizaine de leurs soldats. Ils

20 n'arrêtaient pas de nous insulter, de nous injurier et de nous menacer

21

22 avec ce qui allait nous arriver à Grude. Je pensais vraiment qu'ils nous

23 amenaient à Grude, parce que dès qu'on est passés à travers Konjic, j'ai

24 cru qu'ils nous y emmenaient vraiment. Mais au bout de quelque temps de

25

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1

2 cette conduite, le car a tourné à gauche. Alors, j'ai compris tout de

3 suite où on allait. J'ai compris que c'était l'ancienne caserne de l'armée

4 de Celebici.

5

6 Question: Monsieur Dordic, c'était quel jour? Vous souvenez-vous du jour

7 où vous êtes arrivé à Celebici?

8

9 Réponse: C'était le 30 mai, le 30 mai au soir.

10

11 Question: Où exactement s'est arrêté le car? Est-ce que c'était à

12 l'intérieur du camp?

13 Réponse: C'était à l'intérieur du camp, devant le hangar n°6. Je ne

14 connaissais pas les numéros à ce moment-là. Après, j'ai su que c'était le

15 hangar n°6 qui avait une triste réputation.

16

17 Il s'est arrêté à peut-être 5 ou 6 mètres devant la porte et j'ai vu la

18 lumière à l'intérieur. La première personne qui nous a accueillis devant

19 le car, j'ai vu qu'il y avait une rangée de soldats devant le hangar et, à

20 l'entrée quand la porte s'est ouverte, il y avait Hazim Delic qui nous a

21 accueillis.

22 A cette époque-là, il avait des béquilles car il était blessé à la jambe,

23

24 je ne me souviens plus laquelle, ni pourquoi. C'est lui qui nous

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1 accueillait et puis il donnait des ordres. Il donnait des ordres: quel

2 était le prisonnier qui pouvait entrer librement et lequel devait être

3 battu?

4 Question: Que s'est-il passé après, avec cette rangée où on battait?

5

6 Réponse: Eh bien, là, j'ai subi des coups terribles parce que même après

7 les premiers coups, après l'arrestation, j'avais les yeux complètement

8 enflés qui étaient fermés, j'étais complètement bleu. La seule chose dont

9 je me souvienne, c'est qu'au bout de cette rangée, j'ai vu un soldat qui

10 avait un surnom Labud. Je suppose que c'est lui qui m'a cogné avec la

11 crosse du fusil au front.

12

13 A un moment, j'ai perdu conscience. Je n'entendais que des voix de manière

14 très vague, à travers le brouillard. Je marchais à quatre pattes.

15 J'entendais des cris: "Il veut se sauver" et j'ai entendu que quelqu'un

16 m'appelait: "Mrki, viens par ici, viens par ici", alors je me suis avancé

17 vers cette personne qui m'a tiré vers l'intérieur. C'était Ratko Mandic.

18

19 Alors on m'a rincé le visage et j'ai repris conscience. On m'a demandé où

20 j'avais été arrêté. J'ai dit à Bjelasnica et je leur ai raconté un peu.

21 Question: Excusez-moi, Monsieur Dordic. Lorsque vous parlez de cette

22 rangée où l'on vous battait. Est-ce que ces gens qui vous battaient

23 disaient quelque chose pendant qu'ils vous battaient?

24

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1

2 Réponse: Ils injuriaient tout le temps la mère Chetnik, des choses comme

3 cela.

4 Question: Monsieur Delic a-t-il dit quelque chose à cette occasion?

5 Réponse: Oui, tout à fait. Juste quand c'était mon tour, il a dit: "Lui,

6

7 celui-là." A ce moment-là, j'avais une barbe et, pour lui, celui qui

8 portait une barbe était Chetnik.

9 Question: Donc Monsieur Dordic, est-ce que c'était le bâtiment n°6, ce

10 bâtiment où vous avez été amené? Dans quel bâtiment du camp de détention

11 de Celebici vous avez été détenu, après votre arrivée?

12 Réponse: Dans ce bâtiment, eux, ils l'appelaient n°6.

13

14 Question: Est-ce que vous avez reçu des soins médicaux ou des médicaments

15 après votre arrivée?

16 Réponse: Non, non.

17 Question: Monsieur Dordic…

18

19 Réponse: De l'eau parfois si, on arrivait à nous en apporter, parce que je

20 pense que c'était interdit, mais pour nous aider quand on a été passés à

21 tabac, pour empêcher qu'on soit complètement déshydratés. Mais c'était

22 très rare qu'on ait pu nous procurer un peu d'eau, car ils n'osaient pas,

23 c'était interdit. Ils étaient battus, ceux qui le faisaient.

24

25

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1 Question: D'accord, merci. Alors pouvez-vous nous dire pendant combien de

2 temps vous êtes resté, dans l'ensemble, à l'intérieur du bâtiment n°6?

3 Réponse: Eh bien, je suis resté dans ce hangar n°6 entre le 30 mai et le

4 21 août. A partir du 21 août, le commandant du camp, Mucic Pavo, m'a fait

5 transférer au centre de sport Konjic. C'est là que j'y suis resté 10

6 jours, et puis le 31 mai, au matin…

7

8 Question: Vous avez dit du mois de mai, le 31 mai?

9

10 Réponse: Le 31 août. Le 31 août 1992 au matin, Pavo est arrivé, Pavo

11 Mucic, et il nous a dit que certains allaient devoir retourner à Celebici.

12 Il nous a dit que certains allaient être remis en liberté et que d'autres

13

14 de Celebici allaient être transférés au centre de sport.

15

16 Puis, dans l'après-midi, Hazim Delic est arrivé. Il tenait une liste et il

17 s'est mis à lire les noms de ceux qui devaient retourner à Celebici. Je

18 figurais sur cette liste.

19 Question: Vous voulez dire que vous êtes retourné le 31 août au hangar

20 n°6?

21

22 Réponse: Oui, le 31 août, je suis retourné au hangar n°6 et j'y suis resté

23 jusqu'à peu près la fin du mois de novembre. Et c'est à ce moment-là que

24

25

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1

2 j'ai été transféré dans une pièce qu'ils appelaient la 22; ce qu'ils

3 appelaient l'infirmerie. C'est là que j'y suis resté jusqu'au 9 décembre

4 1992. Le 9 décembre 1992, j'ai été transféré parmi les 32 derniers

5 détenus. J'ai été transféré au centre de sport de Konjic.

6 Question: D'accord, merci Monsieur Dordic.

7 Pour revenir au premier jour, la journée de votre arrivée à Celebici le 30

8 mai. Quand vous êtes entré pour la première fois dans ce hangar n°6,

9 combien de prisonniers à peu près avez-vous pu voir à l'intérieur du

10 hangar n°6? Donc à votre première arrivée dans ce hangar.

11

12 Réponse: Il y avait à peu près une centaine de personnes, même peut-être

13 davantage mais je ne les ai pas comptées. J'étais pris par mes propres

14 problèmes, une centaine environ.

15

16 Question: Parmi ces prisonniers, est-ce qu'il y en avait que vous

17 connaissiez?

18

19 Réponse: La plupart d'entre eux.

20 Question: Est-ce que ces gens étaient de Bradina comme vous ou d'autres

21 villages?

22

23 Réponse: Il y en avait de Bradina et de Brdjani, du village serbe de

24

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1

2

3 Brdjani.

4

5 Question: Et un quelconque de ces prisonniers avait-il des traces de

6 blessures?

7

8 Réponse: Tous. Tous les prisonniers avaient été sévèrement battus. Ils

9 avaient des bleus, ils avaient des pansements… et sur la tête, ils avaient

10 des pansements.

11

12 Question: Vous personnellement, avez-vous vu un prisonnier ou plusieurs

13 prisonniers recevoir un traitement médical à votre arrivée au hangar n°6?

14

15 Réponse: Le 30, au soir, Radoslav Vujicic a été sorti à l'extérieur

16 vraisemblablement parce qu'il nous a aidés quand on a demandé de l'eau. On

17 ne sait pas, qui, mais quelqu'un l'a tellement battu que ses deux bras

18 étaient cassés.

19

20 Le lendemain, Hazim Delic est venu. Il nous a sermonnés, il a demandé:

21 "Mais qui vous a fait cela" car celui-là a travaillé avant avec Hazim

22 Delic. Voilà, c'est tout ce que j'ai vu à ce moment-là.

23 Question: Monsieur, le nombre de détenus à l'intérieur du hangar n°6, est-

24 ce qu'il a varié pendant que vous y étiez?

25

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1

2 Réponse: Pendant une période ce nombre n'arrêtait pas d'augmenter. On a

3 atteint 250 prisonniers un moment c'était en juin, juillet, jusqu'au 21

4 août.

5 Le nombre variait, augmentait. Au bout d'une dizaine de jours, de nouveaux

6 détenus sont arrivés. On était jusqu'à 250.

7 Question: Merci. Pouvez-vous nous décrire quel était l'aspect de ce hangar

8 n°6?

9

10 Réponse: Je peux dire que c'était comme une espèce de garage. Je ne

11

12 connais pas les dimensions exactes, 25 mètres sur 12, quelque chose comme

13 ça. Le sol était bétonné et, sur les côtés, il y avait de la tôle et, en

14 haut, on avait un toit en métal.

15 Question: Est-ce qu'il y avait une porte ou plusieurs portes?

16 Réponse: Il y avait d'un côté du hangar... tout le long du hangar, il y

17 avait les grandes portes comme l'harmonica(?) et puis, de l'autre côté, il

18 y avait une petite porte qui s'ouvrait vers l'extérieur. C'est cette

19 porte-là qu'on utilisait comme porte de sortie.

20 Question: Y avait-il des fenêtres sur le hangar?

21 Réponse: Oui.

22 Question: Monsieur Dordic, est-ce que les prisonniers avaient des places

23 précises à l'intérieur du hangar n°6?

24

25

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1 Réponse: Oui. Oui, nous avions tous des places, c'est Hasim Delic qui nous

2 a installés à des places précises. Nous devions rester assis avec les bras

3 sur les genoux et le regard orienté vers le sol. Puis plus tard, quand il

4 entrait, on devait se mettre debout.

5 Question: Bon. Monsieur le Président, est-ce qu'on pourrait montrer au

6 témoin une photocopie de la pièce à conviction de l'accusation qui est une

7 carte. C'est la pièce d'accusation n°1, page 7.

8 Est-ce qu'on pourrait mettre cela sur le rétroprojecteur?

9

10 (L'huissier s'exécute.)

11

12 Monsieur Dordic, pouvez-vous, s'il vous plaît, jeter un coup d'œil sur ce

13 document. Reconnaissez-vous cela comme une carte du hangar n°6?

14 Réponse: Oui.

15

16 Question: Pourriez-vous nous indiquer où se trouve la porte sur cette

17 carte?

18 Réponse: Tout cela, c'était des portes mais, cela, c'était la porte

19 d'entrée.

20 Question: A l'aide de cette carte, pouvez-vous expliquer au Tribunal

21 comment étaient installés les prisonniers à l'intérieur du hangar? Comment

22 s'organisaient-ils, comment étaient-ils répartis à l'intérieur du hangar?

23 Réponse: Quand on était environ une centaine, on était installés comme ça

24

25

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1 le long des murs, autour. Puis plus tard, quand le nombre a augmenté

2 jusqu'à 250, il y avait deux rangées supplémentaires à l'intérieur au

3 milieu et puis sur le côté.

4 Question: Vous personnellement, êtes-vous resté toujours à la même place

5 pendant toute la durée de votre séjour à l'intérieur de ce hangar?

6

7 Réponse: Oui.

8 Question: Pouvez-vous montrer sur ce schéma où vous vous trouviez à

9 l'intérieur du hangar?

10 Réponse: Eh bien, là, j'étais cinquième.

11

12 Question: Pouvez-vous mettre une petite croix à l'endroit où vous étiez, à

13 l'endroit où vous vous trouviez?

14 Réponse: J'étais cinquième. Là, il y avait un poteau et j'étais troisième

15 à côté du poteau, non en fait quatrième.

16

17 Question: Je voudrais que vous mettiez un X pour indiquer votre place,

18 avec ce crayon. Est-ce que l'huissier pourrait vous donner un crayon?

19 Réponse: Oui, voilà je l'ai indiqué.

20 Question: D'accord, merci.

21

22 Monsieur le Président, je souhaite verser au dossier cette photocopie

23 indiquant la place du détenu à l'intérieur du hangar. Ce serait le n°15...

24 M. Dubuisson : 157.

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1 M. Turone (interprétation): 157, d'accord, merci.

2 Monsieur Dordic, quelles étaient les conditions dans le hangar n°6? Je

3 veux dire du point de vue nourriture, eau et tout cela, comment vous

4 dormiez?

5 Réponse: Quant à la nourriture, elle était très mauvaise. On était nourris

6 deux fois par jour et on nous donnait à chaque fois une tranche de pain:

7 un morceau de pain d'un kilo était divisé en 14 voire 18 tranches. Et puis

8 une espèce de bouillie. On recevait deux ou trois cuillérées de cette

9 bouillie.

10

11 Il est arrivé qu'on ne nous donne rien à manger. C'était entre le 13 et le

12 17 juillet, on ne nous a absolument pas donné de nourriture.

13 Nous, les détenus de Bradina, on n'était pas autorisés à recevoir de

14 l'eau. L'eau était distribuée également deux ou trois fois par jour, une

15 bouteille à peu près pour 7 à 8 personnes. Tout dépend combien il y avait

16 de personnes entre ces poteaux qui portaient la construction. On avait de

17 la chance si on recevait une bouteille d'un litre et demi, car c'était

18 plus qu'un litre.

19

20 Quant à la manière dont nous dormions, nous dormions au sol. Si on avait

21 un anorak pour le mettre par terre, cela nous servait de lit et les

22 chaussures nous servaient d'oreiller. Voilà.

23 On ne pouvait pas maintenir des conditions d'hygiène. On pouvait juste se

24 rincer le visage de temps en temps. Pour les besoins physiologiques, on

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1 devait y aller quand c'était indiquer. Deux fois par

2 jour, on avait le

3 droit d'uriner et puis, pour les grands besoins, on devait demander au

4 gardien. Par exemple, Hazim Delic nous forçait à aller pisser par groupe

5 de 30 à 40 personnes. On devait y aller en courant et c'était sur son

6 ordre qu'on devait se déboutonner et commencer à pisser et s'arrêter.

7 C'était vraiment très bref. On devait courir là-bas et au retour. Il y

8 avait des gens qui n'arrivaient vraiment pas à le faire, à uriner.

9 Puis à une occasion quand la Croix-Rouge est venue, il y avait un délégué

10 qui s'appelait Michel. Il a chronométré le temps, nous étions 250 à uriner

11 en à peine trois minutes.

12 Question: Il n'y avait pas de toilettes à l'intérieur du hangar, une

13 espèce de récipient ou quelque chose comme cela?

14 Réponse: Si, il y avait un récipient, un seau.

15 C'est là qu'on faisait nos

16 besoins la nuit… la nuit, pour nos besoins et puis quand on allait à

17 l'extérieur, il y avait un trou creusé dans le sol et il y avait une

18 planche par-dessus.

19 Question: Merci.

20

21 M. le Président (interprétation): Je pense que nous pouvons nous arrêter

22 maintenant et nous allons continuer demain à 10 heures.

23 M. Turone (interprétation): Oui, à 10 heures.

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1 (L'audience est levée à 17 heures 30.)

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