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1 TRIBUNAL PENAL INTERNATIONAL AFFAIRE N° IT-96-21-T
2 POUR L'EX-YOUGOSLAVIE
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4 Lundi 30 mars 1998
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7 (L'audience est ouverte à 10 heures 20)
8 (Les accusés, MM. Delalic, Delic, Mucic et Landzo, sont introduits dans la
9 salle d’audience)
10 M. le Président (interprétation). - Mesdames et Messieurs,
11 bonjour.
12 Nous sommes de retour en ce prétoire aujourd'hui, et nous allons
13 commencer par la présentation des éléments de preuve à décharge.
14 Nous avons reçu quelques requêtes, une au moins.
15 Maître Résidovic vous ne semblez pas recevoir l'interprétation en serbo-
16 croate ?
17 Mme Résidovic (interprétation).- Elle n'est pas arrivée tout de
18 suite, mais maintenant tout va bien, Monsieur le Président, je vous
19 remercie.
20 M. le Président (interprétation). - Quelles sont les
21 comparutions ce matin ?
22
23 M. Niemann (interprétation). - Mesdames et Messieurs les Juges,
24 je m'appelle Grant Niemann, je comparais en compagnie de Maître McHenry et
25 de Maître Turone et nous avons un nouveau substitut d'audience,
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1 Madame Udo.
2 M. le Président (interprétation). - Merci. Et pour la défense ?
3 Mme Résidovic (interprétation). - Je m'appelle Edina Residovic,
4 je suis avocate de Sarajevo. Je défends Monsieur Zejnil Delalic avec
5 Me O'Sullivan, professeur canadien.
6 M. Olujic (interprétation). - Je m'appelle Zeljko Olujic de
7 Croatie. Je défends avec Zdravko Mucic avec Maître Michael Greaves, avocat
8 britannique.
9 Mme Résidovic (interprétation). – Apparemment, il y a toujours
10 un problème avec mon interprétation. Il y a énormément de bruit à la
11 réception et toutes les langues se mélangent.
12 M. le Président (interprétation). – Maître Karabdic…
13 M. Karabdic (interprétation). – Bonjour, Mesdames, Messieurs, je
14 m'appelle Salih Karabdic, je suis avocat de Sarajevo. Je défends
15 Hazim Delic avec Me Moran, avocat de Huston au Texas.
16 Mme McMurey (interprétation) – Bonjour, Madame et Messieurs
17 les Juges, je m'appelle Cynthia McMurrey, je défends Esad Landzo et j'ai
18 le plaisir de vous présenter Me Nancy Boler, qui va être mon co-conseil et
19 qui défendra, elle aussi, M. Landzo.
20 M. le Président. - Je vous remercie.
21 Effectivement, j'ai peut-être anticipé quand j'ai commencé à
22 parler
23 de la question de la requête qui a été déposée. Effectivement, une requête
24 a
25 été déposée par l'accusation aux fins d'obtenir une ordonnance relative à
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1 la comparution de témoins à décharge et de l'ordre du
2 contre-interrogatoire, qui sera mené à la fois par l'accusation et par les
3 conseils des autres accusés.
4 Nous avons déjà entendu des réactions de la défense, à cette
5 requête. La Chambre de première instance s'est penchée sur cette requête.
6 Nous concluons que nous n'avons pas l'intention de faire appel à la
7 défense pour ce qui est de la première partie, à savoir l'ordre de
8 comparution des témoins à décharge. Nous pensons que la défense n'aura pas
9 besoin de présenter ses arguments sur ce point.
10 Par contre, nous allons demander à l'accusation de présenter ses
11 arguments relatifs au deuxième volet, à savoir l'ordre du
12 contre-interrogatoire. Maître Niemann, vous avez la parole.
13 M. Niemann (interprétation). - Je demande une précision. Avez-
14 vous dit que vous ne vouliez pas entendre d'argument pour la première
15 partie de la requête ?
16 M. le Président (interprétation). - Oui.
17 M. Niemann (interprétation). - S'agissant de la deuxième partie
18 de la requête, dans une large mesure, nous nous fondons sur les arguments
19 présentés dans les écritures. A ce propos, nous disons que c'est plutôt
20 une question relevant du bon sens. En effet, selon nous, au niveau du
21 contre-interrogatoire, le rôle qui incombe à l'accusation peut être tout à
22 fait différent de celui qui revient au conseil des accusés et des
23 coaccusés ; souvent, beaucoup de questions sont communes à tous les
24 conseils de la défense.
25 Parce que le contre-interrogatoire est vaste et ne se limite pas
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1 à ce qui a été présenté au cours de l'interrogatoire principal, la défense
2 a amplement l'occasion de présenter ou de demander le versement d'éléments
3 de preuve au cours du contreinterrogatoire. Ce ne sont pas nécessairement
4 des éléments de preuve écrits, mais d'autres qui seraient apparus au fil
5 des questions.
6 Ceci donne un avantage injuste à la défense par rapport à
7 l'accusation. Si cette dernière doit intervenir en premier lieu pour le
8 contre-interrogatoire de questions qui seraient apparues à la suite de
9 l'interrogatoire principal et si l'accusation s'occupe de cette question
10 ainsi que d'autres questions plus vastes, puisque c'est un
11 contre-interrogatoire sans limitation, l'accusation va bien sûr
12 s'intéresser à ce qui a été soulevé au cours de l'interrogatoire
13 principal.
14 Mais si vous avez une série de conseils représentant les
15 coaccusés qui commencent leur contre-interrogatoire, il existe un fort
16 potentiel pour qu'ils soulèvent aussi de nouvelles questions. Si tel est
17 le cas, dans quelles conditions se trouve l'accusation ? Elle devra
18 demander le droit à la Chambre de procéder à un nouveau
19 contre-interrogatoire sur ces nouveaux éléments ou, à défaut, elle ne
20 pourra pas revenir sur ces questions qui se seront présentées.
21 Si, effectivement, cette dernière situation est celle qui
22 prévaut, il faudra faire une demande en duplique. Ce n'est pas facile pour
23 l'accusation car elle n'aura pas l'occasion de confronter le témoin ; ce
24 serait peut-être injuste pour ce témoin aussi, car l'accusation ne pourra
25 pas le confronter avec une telle question puisqu'elle ne pourra pas le
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1 faire au niveau du
2 contre-interrogatoire. On aura une duplique alors qu'on n'aura jamais
3 entendu l'avis du témoin, ce qui pourrait résoudre la question.
4 C'est une question de bon sens, à mon avis. Nous ne partageons
5 pas les mêmes intérêts, intérêts qui sont communs à tous les coaccusés. Je
6 ne veux pas dire que les accusés sont d'accord sur tous les points, mais
7 leur potentiel est bien plus grand que le nôtre. C'est pourquoi vous êtes
8 en mesure de dire aux conseils de la défense -vous étiez en mesure de le
9 faire quand nous avons présenté nos éléments de preuve- l'ordre dans
10 lequel ils vont présenter leur contre-interrogatoire. Ils ont fait preuve
11 d'une grande coopération et ont déterminé l'ordre dans lequel ils allaient
12 intervenir.
13 Je ne pense pas que se soit présenté un seul cas de litige que
14 vous auriez dû trancher. Vous auriez pu avoir à trancher si, par exemple,
15 la défense avait dit : "Nous ne pouvons pas trouver de solution à ce
16 problème, vous devez, vous, Juges, nous aider en statuant sur la
17 question". Ceci, à mon humble avis, montre à suffisance que vous avez
18 compétence pour faire ce genre de choses, en tant que Juges. Si les
19 conseils ne peuvent pas se mettre d'accord, c'est à vous de trancher.
20 Vous avez également compétence pour rendre une ordonnance, quant
21 à l'ordre du contre-interrogatoire par rapport au conseil des co-accusés
22 et à l'accusation. Vous avez le pouvoir de le faire, dans l'intérêt d'un
23 procès équitable et ordonné.
24 Ceci touche vivement à la question de l'équité du procès. En
25 effet, si l'accusation n'est pas en mesure de poser des questions sur les
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1 éléments supplémentaires qui seraient apparus, dont on s'attend en tout
2 cas à ce qu'ils apparaissent, cela veut dire que la défense reste en
3 suspens et ne peut
4 recourir qu'à la duplique pour trouver une solution.
5 Vous le savez, un des objectifs poursuivis par le contre-
6 interrogatoire est de confronter le témoin à des questions qui sont
7 apparues, à des éléments qui se sont présentés. Nous pensons que la façon
8 la plus efficace de résoudre ce problème est de permettre à la défense de
9 déterminer, parmi les conseils de la défense, l'ordre du contre-
10 interrogatoire, comme ils l'ont fait pour la présentation des témoins à
11 charge. Je pense qu’ils pourraient se mettre d'accord. Et enfin, vous
12 permettriez à l'accusation de procéder au contre-interrogatoire, après
13 qu'il y ait eu contre-interrogatoire par tous les conseils de la défense.
14 Je pense que ce serait un processus bien plus efficace, qui éviterait
15 cette multiplication de réouvertures de contre-interrogatoires.
16 M. Jan (interprétation). - Je suis sûr que vous avez déjà pris
17 connaissance de la réplique présentée par la défense à votre requête. Les
18 arguments que vous venez de présenter ont été utilisés, mais à l'inverse,
19 par la défense. Je pense qu’il s'agit du paragraphe de leur réplique à
20 propos du contre-interrogatoire par l'accusation, qui arriverait en
21 dernier lieu et qui pourrait être dommageable pour les autres co-accusés
22 qui auraient déjà épuisé leur droit à la réplique.
23 Ce sont effectivement vos arguments, mais à l’inverse.
24 M. Niemann (interprétation). - Il y a un grain de vérité,
25 effectivement, ce potentiel est bien plus grand. Mais ce qui nous
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1 distingue de la défense, c'est que, manifestement, les co-accusés et les
2 conseils de la défense ont beaucoup plus de choses en commun que nous. Le
3 potentiel est donc plus grand concernant les différences qui peuvent
4 exister entre les questions
5 que nous avons à poser et celles que les co-accusés ont à poser.
6 Nous estimons que c'est un acte d'équilibrage qu'il faut
7 réaliser. Il faut utiliser le bon sens pour trancher. Quelles sont les
8 probabilités de se trouver dans une situation où une partie demande un
9 contre-interrogatoire parce qu'une question a surgi ? Pourquoi, par
10 exemple, si l'interrogatoire principal commence et que le premier contre-
11 interrogatoire, fait par un conseil de la défense, présente
12 hypothétiquement une nouvelle question, le conseil suivant ne peut-il pas
13 reprendre cet élément, et ainsi de suite ? C'est tout à fait possible. Je
14 ne le conteste pas. Cela peut marcher dans les deux sens. C'est donc une
15 question d'équilibrage et de probabilité plus grande.
16 Où les difficultés risquent-elles d’être les plus grandes ? Je
17 pense que c'est du côté de l'accusation, car nous n'avons rien de commun
18 avec la défense.
19 M. Jan (interprétation). - Si une telle situation se présente,
20 les co-accusés ne seraient-ils pas lésés du fait que de nouveaux éléments
21 soient apportés par un autre co-accusé. Il faudrait qu'ils aient le droit
22 au contre-interrogatoire.
23 M. Niemann (interprétation). - Tout à fait. J’imagine
24 parfaitement cette hypothèse. Si les fondements sont raisonnables, si une
25 question radicalement nouvelle est posée, et si un co-accusé désire un
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1 nouveau contre-interrogatoire parce qu'il estime avoir été pris par
2 surprise, je serai prêt à le concéder. Je ne vais pas m'insurger contre
3 une telle mesure. Dans de telles circonstances, effectivement, il est aisé
4 de s'imaginer qu'il s'agit d'un cas exceptionnel et nous n'aurions aucune
5 objection.
6 Mais il est moins probable que cette situation se produise pour
7 les
8 co-accusés, car ils ont plus d'intérêts en commun que l'accusation. C’est
9 vrai dans toute affaire. Je m'attends, en toute franchise, à ce qu'il y
10 ait beaucoup plus d'éléments nouveaux soulevés par le contre-
11 interrogatoire. Nous devrons faire face à tout cela. C'est une question de
12 bons sens.
13 M. Jan (interprétation). - Si nous faisons droit à cette
14 requête, ce sera sous réserve de cet élément.
15 M. le Président (interprétation). - Avant de vous rasseoir,
16 Maître Niemann... Vous avez peur de ne pas bénéficier d’un nouveau droit
17 au contre-interrogatoire. Mais vous avez ce droit.
18 Quand de nouveaux éléments apparaissent au cours du contre-
19 interrogatoire, alors qui pourrait être lésé ? En ayant un contre-
20 interrogatoire large, tout le monde pourrait intervenir.
21 M. Niemann (interprétation). - Je le perçois bien de la défense.
22 Elle semblait suggérer que nous disions ne jamais avoir le droit à un
23 nouveau contre-interrogatoire. Ce n'est pas là notre position. Si de
24 nouveaux éléments apparaissent, manifestement, il y a droit au contre-
25 interrogatoire, sous réserve, bien sûr, de la décision rendue par la
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1 Chambre, en tout état de cause. Nous n'essayons pas de nier ce droit. Nous
2 nous contentons de dire que, si la défense commence le contre-
3 interrogatoire, nos demandes seront plus ciblées et nous aurons plus de
4 facilités à présenter nos arguments. Alors que si nous, nous commencions
5 dans l'ordre du contre-interrogatoire, ceci ne pourrait que prolonger le
6 processus. Voilà. J'en ai terminé, Monsieur le Président.
7 M. le Président (interprétation). - Bien. Des réactions ?
8 M. O’Sullivan (interprétation). - Permettez-moi de réagir à ce
9 que vient de dire Maître NIemann. Je serai bref.
10 A l'appui de la requête conjointe déposée par Delalic et Delic,
11 nous vous invitons à débouter la requête du Procureur et à rendre pour
12 ordonnance que, après l'interrogatoire principal d'un témoin, l'accusation
13 devrait terminer son contre-interrogatoire avant que les conseils des co-
14 accusés ne procèdent à leur propre contre-interrogatoire.
15 J'aimerais réagir rapidement à ce que disait Me Niemann. Avec
16 tout le respect que je lui dois, nous savons que si l'ordre de contre-
17 interrogatoire ne faisait pas un ordre convenu, alors nous suivrions les
18 accusés énumérés dans l'acte d'accusation. Je ne suis pas d'accord avec
19 Maître Niemann lorsqu’il dit que les co-accusés ont beaucoup plus de
20 choses en commun. C'est une supposition qui ne peut pas être fondée par le
21 fait qu'il y ait jonction d'instance.
22 Nous nous basons sur l'article 21-4-e du statut, qui donne droit
23 au contre-interrogatoire de l'accusé. C'est seulement après qu'il y ait eu
24 interrogatoire principal et contre-interrogatoire par l'accusation que le
25 co-accusé saura si le témoin lui est devenu hostile ou l’a impliqué. C'est
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1 à ce moment-là que, en vertu de l'article 21-4-e du statut, celui-ci
2 intervient. Notre requête se base sur cet article 21-4-e. Pour assurer
3 pleinement le droit de contre-interrogatoire, il faut qu'il y ait d'abord
4 interrogation par un conseil d'un accusé, contre-interrogatoire de
5 l'accusation, et puis intervention des autres co-accusés.
6 Nous disons, au contraire de ce que dit l'accusation, que nous
7 nous basons sur le statut qui envisage notre position, où il y a
8 interrogatoire principal, contre-interrogatoire par l'accusation et, à ce
9 moment-là, les autres co-accusés sauront s'ils ont intérêt à procéder à
10 leur contre-interrogatoire.
11 A vous de décider si l'accusation a besoin de revenir, par un
12 interrogatoire supplémentaire. Je pense que notre requête est fondée dans
13 l'article 21-4-e. Nous n'avons rien à ajouter. Nous avons émis notre
14 position dans nos écritures en réplique à l'accusation.
15 Si vous avez des questions, je suis prêt à y répondre.
16 M. le Président (interprétation). - Voulez-vous dire qu'à votre
17 avis, l'accusé non seulement dépose, mais appelle aussi des témoins ?
18 Il y a deux options : ou bien il est le seul témoin, ou bien il
19 y a, en sus de lui, d'autres témoins. Tout est en fonction de la position
20 que vous adoptez. Votre position doit être la même.
21 M. O’Sullivan (interprétation). - Oui, je parlais simplement de
22 l'ordre de la comparution pour les contre-interrogatoires.
23 M. le Président (interprétation). - Je vous ai bien compris.
24 Mais tout est fonction de savoir si l'accusé est le seul témoin ou si, en
25 sus de lui-même, il va en citer d'autres.
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1 M. O’Sullivan (interprétation). - Je ne crois pas que ceci
2 changerait en quoi que ce soit l'ordre des contre-interrogatoires.
3 M. le Président (interprétation). - Ce sera toujours la même
4 chose, qu'il appelle d'autres témoins en sus de lui-même, ou s'il décide
5 de ne rien dire lui-même.
6 M. O’Sullivan (interprétation). - Nous disons que c'est toujours
7 l'accusation qui devrait faire le premier contre-interrogatoire.
8 M. le Président (interprétation). - Je vous donne simplement les
9 diverses options ouvertes à l'accusé. Il peut décider de comparaître lui-
10 même en tant que témoin ou appeler d'autres témoins à la barre.
11 M. O’Sullivan (interprétation). - D'accord.
12 M. Moran (interprétation). - Permettez-moi d’émettre quelques
13 réflexions. Je crois qu'effectivement, nous allons avoir les mêmes
14 arguments que Maître Niemann.
15 L'article 82-a prévoit que nous ne sommes pas simplement une
16 jonction d'instances. Nous sommes quatre procès différents. En tant
17 qu'accusés, nous avons la garantie de voir les mêmes droits respectés que
18 ceux que nous aurions dans une disjonction d'instance.
19 La procédure que je connais, lorsque qu'il y a jonction
20 d'instances, prévoit que, d'abord, il y ait contre-interrogatoire par
21 l'accusation, puis les conseils des co-accusés ont le droit de faire le
22 contre-interrogatoire et, éventuellement, il y a de nouveau un contre-
23 interrogatoire supplémentaire, si une nouvelle question a surgi.
24 Mais pratiquement, parce que les arguments sont les mêmes, si
25 l’on adoptait cet ordre ce serait aussi efficace que d'une autre manière.
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1 Par ailleurs, le statut parle abondamment des droits de
2 l'accusé. Le droit primordial pour l’accusé, à part celui d'avoir un
3 conseil, c'est aussi le droit de confronter les témoins qui sont à charge
4 contre lui. Nous avons déposé une liste de témoins aujourd'hui. Mais je ne
5 sais pas ce que bon nombre de ces témoins vont dire. Je ne sais pas du
6 tout si Maître Niemann a un dossier rempli de déclarations faites par des
7 témoins qui vont incriminer mon client.
8 M. Jan (interprétation). - Oui, mais on a parlé de réserve. Si,
9 au
10 cours du contre-interrogatoire, un témoin implique un co-accusé, ou a des
11 éléments qui l'incriminent, ce co-accusé a droit à un nouveau contre-
12 interrogatoire, car ce serait un plus gros avantage, si vous arriviez à la
13 fin.
14 M. Moran (interprétation). - Je suppose que les avocats
15 connaissent mieux leurs dossiers que les juges. Bien sûr, en fin de
16 parcours, vous devriez, en tant que Juges, mieux connaître le dossier que
17 nous.
18 M. Jan (interprétation). - (hors micro.)
19 M. Moran (interprétation). - Maître Niemann, ou vous-mêmes, les
20 Juges, n’êtes peut-être pas d'accord avec ce qui peut être incriminatoire
21 pour mon client, parce que nous serions intervenus plus tard, dans l'ordre
22 de comparution pour les contre-interrogatoires.
23 Le problème est de savoir si ce témoin, disons le témoin A, est
24 un témoin à charge pour mon client. Il se peut que mon client ne soit
25 jamais mentionné dans sa déposition. mais je pense que, à ce stade, nous
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1 connaissons mieux les éléments qui pourraient être retenus contre mon
2 client.
3 Je n'ai plus rien à dire, à moins que vous ayez des questions à
4 me poser.
5 M. le Président (interprétation). - Je vous remercie.
6 M. Olujic (interprétation). - Madame et Messieurs les Juges, je
7 serais concis également, pour les arguments que j'ai à présenter, en
8 réaction à ceux de l'accusation. Dans notre réponse écrite, nous nous
9 sommes opposés à la requête et nous campons sur cette position. Nous
10 demandons que les deux éléments de la requête soient déboutés.
11 Me Niemann sait bien que, en l’absence de précédent, s’agissant
12 du réglement de procédures et de preuves, à l’appui de sa thèse, il a
13 utilisé le bon sens. Mais ceci ne peut être retenu, pour une raison bien
14 simple. Sa position part d’une hypothèse qui est celle de la culpabilité
15 de l'accusé. Ceci est inadmissible. Ce Tribunal a compétence pour juger
16 par lui-même du décours que prend la procédure. Nous nous en tenons aux
17 arguments présentés dans nos écritures ; nous pensons que la requête de
18 l'accusation est irrecevable et que les deux éléments devraient être
19 rejetés.
20 M. le Président (interprétation). - Merci, Maître Olujic.
21 Mme McMurrey (interprétation). - Nous nous rallions, nous aussi,
22 aux arguments présentés par Me O'Sullivan s'agissant du contre-
23 interrogatoire. De surcroît, Me Moran avait expliqué que nous connaissons
24 un peu mieux et que nous connaîtrons mieux les éléments au fil de la
25 présentation des témoins de chacun des co-accusés. Si l'accusation
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1 intervenait en dernier lieu, il faudrait peut-être rappeler ces témoins à
2 la barre, parce qu'au moment de notre intervention, nous n'aurions pas su
3 quels étaient les éléments plus négatifs ou plus à charge pour notre
4 client que d'autres. Nous devrions être en mesure d'intervenir dans
5 l'ordre du contre-interrogatoire après l'accusation.
6 De plus, en vertu de l'article 21 du statut, -et là, nous
7 prenons la position inverse de celle de Me Niemann- effectivement, il a le
8 même droit que nous et si de nouveaux éléments interviennent il a droit à
9 un nouveau contre interrogatoire. Quand il y a match nul, lorsqu'on peut
10 voir quelle est la partie la plus lésée, il faut trancher en faveur de
11 l'accusé le plus souvent.
12 Je crois que nous sommes pratiquement à égalité mais je pense
13 que la présomption devrait bénéficier à l'accusation et que nous devrions
14 intervenir au niveau du contre interrogatoire après l'accusation, c'est
15 l'histoire de la face sur laquelle retombe la pièce qu'on lance en l'air.
16 M. Jan (interprétation). - Pour chacun des quatre co-accusés,
17 l'accusation n'aurait-elle pas le droit d'intervenir en dernier lieu pour
18 le contre-interrogatoire ? Si un accusé fait une déclaration qui peut être
19 négative pour l'un des quatre co-accusés, ce co-accusé peut avoir droit au
20 contre-interrogatoire par rapport à chacun des quatre co-accusés.
21 Mme McMurrey (interprétation). - Nous avons déposé une requête
22 aux fins de disjonction dès janvier 97.
23 M. Jan (interprétation). - Oui mais je parle de chacun des co-
24 accusés, je ne les prends pas collectivement. Pour chacun d'entre eux, la
25 partie opposante reste l'accusation.
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1 Mme McMurrey (interprétation). - Cela devrait être le cas mais
2 il apparaît que nous n'avons pas nécessairement les mêmes lignes de
3 défense. Le chef d'accusation peut être négatif mais ce peut être aussi un
4 témoin présenté par un autre co-accusé. Lorsque nous avons une procédure
5 accusatoire, je crois que la défense doit avoir le droit de procéder au
6 contre-interrogatoire après que l'accusation soit intervenue. En effet,
7 nous n'avons pas nécessairement les mêmes lignes de défense pour chacun
8 des co-accusés. Je vous remercie.
9 M. le Président (interprétation). - Merci. Nous allons suspendre
10 l'audience. Nous reprendrons à midi et nous rendrons notre décision à ce
11 moment-là.
12
13 (Suspendue à 10 h 50, l'audience est reprise à 11 heures)
14 M. le Président (interprétation). - Nous sommes arrivés à notre
15 décision, une décision extrêmement concise. Nous nous sommes appuyés sur
16 les arguments présentés par les deux parties, dans le prétoire tout à
17 l'heure.
18 La requête déposée le 18 mars 1998 demandant autorisation de
19 modifier la comparution des témoins de la défense et demandant également à
20 modifier l'ordre de contre-interrogatoire mené à la fois par l'accusation
21 et les conseils de l'accusé, a fait l'objet d'un certain nombre
22 d'oppositions écrites provenant de tous les conseils de la défense. Cette
23 requête a fait l'objet d'un débat ce matin, mais la Chambre de première
24 instance a considéré qu'il n'était pas nécessaire d'entendre les arguments
25 relatifs à la première partie de la requête, c'est-à-dire le fait de
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1 demander à la Chambre de Première Instance de délivrer une ordonnance sur
2 l'ordre de comparution des témoins de la défense. Nous estimons qu'il
3 n'était pas besoin de procéder à l'argumentation de cette partie de la
4 requête.
5 L'accusation a estimé, et nous sommes d'accord, que ce point
6 n'est pas directement régi par le statut du Tribunal ou par le règlement
7 de procédures et de preuves de notre institution. Ceci dit, nous nous
8 sommes appuyés sur la pratique en vigueur dans certaines juridictions
9 relevant de la Common Law telles que l'Angleterre et le Pays de Galle, le
10 Nigeria, l'Afrique du Sud et nous pensons que, dans les cas où l'accusé
11 déclare ou bien fait un témoignage et demande la citation à comparaître de
12 certains témoins, il est normal qu'il commence par faire son témoignage
13 avant de
14 citer à comparaître ses propres témoins.
15 Nous sommes d'accord sur le point de vue de la défense selon
16 lequel la proposition sur laquelle s'appuie l'accusation ira à l'encontre
17 des dispositions de l'article 20 de notre statut. L'article 8-5A du
18 règlement, qui autorise un accusé à déposer et à citer à comparaître des
19 témoins est que l'accusé, au titre de l'article 85-C, ne peut être appelé
20 et ne peut pas être cité à comparaître en tant que témoin pour sa propre
21 défense. Par conséquent, l'ordre dans lequel la défense choisit de faire
22 comparaître ses témoins est une décision qui lui revient entièrement ;
23 c'est un accord qui doit intervenir entre le conseil de la défense et son
24 accusé.
25 La Chambre de Première Instance ne peut intervenir en la
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1 matière. Selon la Chambre de Première Instance, si cela correspond aux
2 dispositions de l'article 21-4-d du statut, cette décision est en toute
3 cohérence avec le principe d'équité et de justice qui doit présider lors
4 d'un procès.
5 Il irait tout à fait à l'encontre des intérêts de la justice que
6 la Chambre de Première Instance détermine dans quel ordre tel ou tel
7 témoin doit comparaître pour témoigner. L'accusé est obligé de répondre
8 des charges qui sont retenues contre lui dans la mesure de ses moyens et
9 selon les procédures qu'il pense être les bonnes.
10 J'en viens maintenant à la deuxième partie de la requête.
11 L'accusation demande que soit observé l'ordre suivant : d'abord un contre-
12 interrogatoire du témoin par la défense, après l'interrogatoire principal
13 mené par la défense, après également que l'accusé ait contre-interrogé les
14 témoins.
15 La défense a fait objection à cette proposition sur la base du
16 fait que le contre-interrogatoire mené par l'accusation pourrait mettre à
17 jour des circonstances de l'affaire dans lesquelles l'accusé pourrait être
18 à nouveau remis en cause, donc des questions qui pourraient toucher à la
19 ligne de défense choisie par le conseil de l'accusé.
20 Là encore, des faits pourraient surgir au cours d'un
21 contre-interrogatoire, qui pourraient laisser supposer qu'il y ait
22 duplique de la part de la partie opposée. Ce droit pourrait être perdu et
23 les accusés pourraient donc se retrouver lésés si l'ordonnance devait être
24 délivrée dans ce sens.
25 Il est absolument élémentaire de savoir que l'affaire va
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1 maintenant être présentée par la défense. Il est tout à fait normal que
2 chaque accusé ait le droit (suite inaudible). A la fin du
3 contre-interrogatoire de l'accusé, l'accusation aura le droit de procéder
4 à un second contre-interrogatoire. L'accusation a le droit de parler en
5 dernier lieu. Il n'y a pas dans notre règlement de disposition statutaire
6 mais nous disposons heureusement du paragraphe 190, d'un certain nombre de
7 cas nigérians et, selon ce paragraphe, la décision que nous prenons est la
8 suivante : "Dans le cas où plus d'un accusé est concerné par un procès, un
9 témoin appelé par un des accusés peut être contre-interrogé par un des
10 autres accusés. Si c'est le cas, cet interrogatoire devra avoir lieu mené
11 par l'accusation".
12 C'est un argument qui relève du bon sens tout simplement. Le
13 contre-interrogatoire mené par l'accusation d'un accusé fait partie de
14 l'affaire qui concerne directement l'accusé et ne lèse en aucun cas
15 l'accusé qui a toujours le droit de demander un autre contre-
16 interrogatoire et de
17 témoigner en son propre nom.
18 Les objections élevées par la défense à la seconde partie de la
19 requête sont, par conséquent, rejetées. La Chambre de Première Instance
20 rejette la requête demandant qu'une ordonnance soit délivrée pour modifier
21 l'ordre de comparution des témoins de la défense, mais fait droit à la
22 requête visant à modifier l'ordre du contre-interrogatoire. Telle est
23 notre décision.
24 Nous avons également reçu une demande concernant l’autorisation
25 de ne pas comparaître les 7 et 8 pour raison de fêtes religieuses.
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1 M. Karabdic (interprétation). - Monsieur le Président, j'ai
2 demandé que les 7 et 8 avril me soient accordés parce que cela correspond
3 à des jours de vacances musulmanes, mais les deux jours que je demande
4 nous seront amplement suffisants puisque qu'ils correspondent à deux jours
5 de vacances musulmanes extrêmement importants. Il va dans le droit de
6 l'accusé et de son conseil de la défense de pouvoir prendre ces jours de
7 vacances pour respecter leur croyance.
8 M. Jan (interprétation). - Ce mois de célébration religieuse a-
9 t-il commencé ? Je crois qu'il commence aujourd'hui ou demain. Est-ce
10 aujourd'hui ou demain ?
11 M. Karabdic (interprétation). - Monsieur le Président, ce n'est
12 ni aujourd'hui, ni demain, cela commence le 7 avril.
13 M. Jan (interprétation). - Je crois que cela a commencé. Je ne
14 connais pas bien cette question mais le mois de célébration religieuse a-
15 t-il commencé ?
16 M. le Président (interprétation). - (hors micro)
17 M. Karabdic (interprétation). - D'après notre calendrier, il
18 apparaît que ce mois commence les 7 et 8 avril prochains. Ici, à La Haye,
19 la communauté turque a également émis un calendrier qui commence à courir
20 le 7 avril et qui s'étend sur quatre jours consécutifs. Je n'ai
21 connaissance d'aucune autre date et je crois que cette année ce calendrier
22 ne prête à aucune controverse ; les responsables religieux ont déjà
23 commencé la préparation des célébrations. Il me semble qu'elles débutent
24 le 7 et le 8.
25 M. le Président (interprétation). - Ne pensez-vous pas que le 7
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1 suffirait, Maître ? Peut-être ne faut-il pas trop demander ? Vous pourriez
2 obtenir la date du 7 ? Vous voyez ce que je veux dire ?
3 Mme Residovic (interprétation). - Monsieur le Président, Madame
4 et Monsieur les Juges, permettez-moi de faire un certain nombre de
5 commentaires sur ce point.
6 Maître Karabdic a déposé une demande au nom de tous les accusés,
7 de tous les conseils de la défense, qui célèbrent cette fête religieuse.
8 Je crois qu'il est tout à fait raisonnable que, sur les quatre jours qui
9 constituent cette célébration religieuse, deux nous soient accordés. C'est
10 une demande raisonnable, me semble-t-il.
11 Maître Karabdic a bien tenu compte des souhaits et des
12 sentiments ressentis par les accusés et les conseils de la défense
13 concernés. Il a essayé de faire en sorte que cela n'entrave pas trop le
14 travail de la Chambre de Première Instance.
15 D'autre part, Monsieur le Président, Madame et Monsieur les
16 Juges, nous aimerions savoir si votre décision peut nous être communiquée
17 dès maintenant afin que nous puissions prendre des dispositions notamment
18 relatives à la déposition des témoins et à l'ordre des témoins qui seront
19 cités à comparaître.
20 M. le Président (interprétation). - Si nous vous accordons le 7
21 et le 8, vous devriez être ici et prêts à travailler le 9. N'est-ce pas ?
22 M. Karabdic (interprétation). - Merci beaucoup, Monsieur le
23 Président de nous accorder notre demande.
24 M. le Président (interprétation). - Nous vous autorisons à
25 prendre congé le 7 et le 8 et nous reviendrons ici pour reprendre nos
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1 travaux le 9 avril.
2 Il faut maintenant poursuivre nos travaux. Peut-être serait-il
3 plus raisonnable de ne commencer qu'après la pause du déjeuner.
4 Maître Residovic, vous semblez vouloir ajouter quelque chose. Je
5 vous en prie...
6 (Accord de Me Residovic)
7 M. le Président (interprétation). - Si tout le monde en est
8 d'accord, nous reportons le début de nos débats à 14 heures et c'est la
9 défense, bien entendu, qui aura la parole.
10 (Suspendue à 12 heures 10 la séance est reprise à 14 heures)
11 M. le Président (interprétation). - Bon après-midi, mesdames et
12 messieurs. Nous sommes une fois de plus de retour et nous allons commencer
13 par la présentation des éléments de preuve à décharge. Maître Residovic,
14 vous allez, apparemment, nous faire quelques déclarations préliminaires.
15 Mme Residovic (interprétation). - Merci, Madame et Messieurs les
16 Juges. Avant d'appeler à la barre le premier témoin à décharge, j'aimerais
17 saisir le droit qui m’est offert par l'article 84 de vous faire quelques
18 déclarations liminaires brèves.
19 En application de l'article 84 du Règlement de procédures et de
20 preuves, le conseil de la défense de M. Delalic commencera par des
21 déclarations préliminaires qui indiqueront rapidement la méthode adoptée
22 et les objectifs poursuivis dans la présentation des éléments de preuve à
23 l'audience.
24 L'article 21 du statut du Tribunal pénal international établit
25 les droits de l'accusé. L'accusé a le droit de procéder à l'interrogatoire
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1 ou d’interroger les témoins à charge, et les mêmes conditions s'appliquent
2 aux témoins à décharge. Il s'agit là de l'article 21-4-e du statut du
3 Tribunal.
4 Après que l'accusation ait présenté ses éléments de preuve, le
5 conseil de M. Delalic a préparé les éléments de preuve à décharge de
6 l'accusé. C'est lui qui interviendra, dans un premier temps, avant les
7 trois autres accusés.
8 Les éléments favorables à la défense de M. Delalic commencent
9 alors que celui-ci a passé deux ans et douze jours en détention
10 préventive. Ce fait, à lui seul, indique clairement que M. Delalic ne
11 s’est pas vu accorder le droit à un procès rapide. Les requêtes aux fins
12 de disjonction d'instances ont été rejetées, alors que cette possibilité
13 est offerte par le règlement et que ce dernier est appliqué face à
14 d'autres personnes traduites en justice, devant ce Tribunal.
15 Zejnil Delalic participe donc à un procès qui est bien plus long
16 qu'il ne serait nécessaire pour établir sa responsabilité personnelle et
17 pénale, ou pour l’acquitter.
18 Il y a d'autres caractéristiques sur lesquelles nous aimerions
19 attirer l'attention des Juges, s'agissant de M. Delalic. Seules deux
20 personnes ont été arrêtées en application de l'article 40 du règlement de
21 procédures et de preuves régissant ce Tribunal, à savoir avant qu'un acte
22 d'accusation ait été dressé et confirmé à leur encontre. Zejnil Delalic
23 est l’une de ces deux personnes. Il a été arrêté et cette arrestation a
24 été exécutée à la demande du Procureur, même si, comme nous l'avons appris
25 des témoins à charge, au moment de l'arrestation, il n'y avait aucune
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1 inculpation retenue contre lui et, bien qu'aucun pays n'ait émis de mandat
2 d’arrêt, il n'a pas non plus été placé devant des juridictions nationales
3 ou internationales.
4 M. le Président (interprétation). - Je pensais que ces éléments
5 allaient intervenir à l'appui des éléments de la défense. Vous critiquez
6 maintenant des éléments qui ont déjà été réglés. Ce que vous êtes censé
7 faire, c'est apporter à la Chambre les éléments de preuve, ou du moins les
8 présenter. Vous aurez suffisamment de temps pour critiquer ce qu’a fait
9 l'accusation. Vous aurez énormément de temps, vous êtes toujours maîtresse
10 du jeu ;
11 rien ne vous empêche d'apporter ces critiques par la suite. Mais, en début
12 de présentation des éléments à décharge, vous devez esquisser les grandes
13 lignes. Si vous estimez que ce n'est pas nécessaire, vous pouvez, sans
14 plus tarder, appeler vos témoins. Ceci n'est pas logique, vous êtes déjà
15 en train de préparer ce que vous allez dire plus tard. Vous pourrez le
16 faire plus tard.
17 Mme Residovic (interprétation). - J'ai l'intention, Monsieur le
18 Président, de vous dire comment et pourquoi nous allons présenter les
19 éléments de preuve que nous avons l'intention de présenter. Mais pour ce
20 qui est de leur qualité et de leur quantité, cela se fonde sur une période
21 antérieure, ce qui nous place dans une position tout à fait particulière,
22 s’agissant de la présentation de ces éléments.
23 Je me contenterai d'évoquer encore deux faits s'agissant de la
24 position qu'a connue jusqu'à présent M. Delalic et par la suite, j'ai bien
25 l'intention de vous énoncer ce que nous avons l'intention de faire. Ce
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1 bref commentaire relatif à la position qu'avait mon client dans cette
2 affaire me semblait tout à fait acceptable avant de présenter les éléments
3 de preuve. Je vous demande de me permettre d'évoquer ces deux faits
4 supplémentaires et de passer à ce que vous avez demandé.
5 M. le Président (interprétation). – Faites-le, mais je pense que
6 c'est superflu pour la présentation des éléments à décharge puisque ceci
7 n'a rien à voir avec votre partie de la procédure. C'est supplémentaire.
8 Mme Résidovic (interprétation). - Je vous remercie. Comme je
9 viens de le dire, Zejnil Delalic a été interrogé sitôt après son
10 arrestation, en l'absence d'un avocat, bien que l'hypothèse ait été que
11 les actes pour lesquels il était tenu responsable, en vertu de
12 l'article 21, doivent lui
13 accorder le droit à une assistance juridique. De toute façon, ceci est
14 nécessaire quand c'est dans l'intérêt de la Justice. Là, c'est un droit
15 que ne pouvait pas abandonner l'accusé.
16 Invoquant l'article 89 C du Règlement de Procédures et de
17 Preuves, la Chambre a accepté et a déclaré recevables nombre d'éléments de
18 preuve apportés par l'accusation. Enfin, l'accusation à soumis à la
19 défense, le 25 mars de cette année, onze documents à propos desquels
20 l'accusation a indiqué que c'étaient des éléments de preuve, c'est-à-dire
21 que de nouveaux éléments ont été présentés cinq jours avant la
22 présentation des éléments à décharge, ce qui prouve que l'accusation
23 continue son enquête alors que sa présentation est terminée. Pour toutes
24 ces raisons, nous sommes dans une position telle que même aujourd'hui,
25 alors que nous commençons la présentation des éléments à décharge, la
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1 défense n'est pas en mesure de déterminer de façon complète combien
2 d'éléments de preuve il faudra présenter, ni le temps qu'il faudra pour
3 cela.
4 La défense de M. Delalic va présenter tous les éléments de
5 preuve qui sont nécessaires afin d'assurer sa défense complète et de
6 veiller à l'équité du procès. Nous sommes convaincus que la Chambre de
7 Première Instance sera attentive aux droits de l'accusé et assurera un
8 procès équitable, comme elle doit le faire en vertu de l'article 20 du
9 statut de ce Tribunal.
10 La défense va présenter des éléments de preuve à l'attention de
11 cette Chambre, éléments qui vont montrer l'innocence de M. Delalic. Le
12 Procureur accuse M. Delalic d'avoir coordonné les activités des forces se
13 trouvant dans la région de Konjic, à partir d'avril 1992 jusqu'en
14 septembre 1992. Il l'accuse aussi d'avoir été le commandant du premier
15 groupe tactique des forces bosniennes et dit qu'au cours de cette période,
16 à ce titre, il était responsable des activités pénitentiaires et qu'il
17 avait position de supérieur par rapport à tous les gardes et toute autre
18 personne qui serait entrée dans le camp pour y violenter les prisonniers.
19 Quant au fait d'établir cette position de responsabilité et de
20 supériorité hiérarchique pour M. Delalic, l'accusation dit qu'il savait ou
21 bien avait des raisons de savoir que ses subordonnés commettaient des
22 actes criminels sans prendre les mesures nécessaires pour prévenir la
23 Commission de ces actes et punir les auteurs de ceux-ci.
24 L'accusation ne peut pas y parvenir pour la simple raison que
25 M. Delalic n'a pas le statut de supérieur hiérarchique. Ces raisons nous
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1 permettent de comprendre que l'accusation dise, dans ses déclarations
2 préliminaires, qu'il y avait beaucoup de discussions quant aux
3 autorisations qu'avait Delalic sur papier. Ce n'est pas étonnant. En
4 effet, un coordinateur est une nouvelle fonction qui a été établie étant
5 donné la situation complexe de l'époque à Konjic. Il n'y a pas eu
6 d'organisation, d'instance qui ait pu établir la compétence ou bien qui
7 avait la responsabilité de Celebici. Dans la même veine, l'accusation
8 allègue que d'autres ont peut-être partagé cette compétence, mais que ceci
9 ne peut pas être invoqué comme moyen de défense par M. Delalic.
10 Avant de présenter ses propres éléments de preuve, la défense se
11 voit face à une procédure ou une thèse assez difficile, car si nous ne
12 savons pas qui est responsable, c'est Zejnil Delalic, si nous ne savons
13 pas quel est l'organe responsable c'est toujours Zejnil Delalic. Et si
14 d'autres sont
15 responsables, Zejnil Delalic l'est aussi.
16 Je suis convaincue que cette Chambre va résister à une telle
17 démarche et va ici confirmer le principe suprême régissant toute procédure
18 pénale in dubio pro rea, c'est-à-dire qu'en cas de doute, il faut toujours
19 faire pencher la balance du côté de l'accusé.
20 La défense va aider la Chambre à établir que Zejnil Delalic,
21 pour ce qui est de la période couverte par l'acte d'accusation, n'a jamais
22 eu de responsabilité hiérarchique par rapport à la prison ou à son
23 personnel.
24 La défense va présenter les éléments suivants. D'abord, elle va
25 inviter des témoins experts en matière d'histoire et de doctrine
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1 militaire. La défense va demander à la barre la comparution de témoins qui
2 connaissent bien les événements en Bosnie-Herzégovine et à Konjic. La
3 défense va citer des témoins qui connaissent bien les activités de
4 M. Delalic. La défense va demander le versement au dossier de nombreux
5 éléments de preuve. La défense va également montrer plusieurs cassettes
6 vidéo et d'autres types de moyens de preuve afin d'établir que
7 Zejnil Delalic n'est pas responsable et n'a pas à répondre des charges
8 retenues contre lui.
9 Bien qu'en conformité avec le statut du Tribunal pénal
10 international, la responsabilité pénale individuelle soit en jeu ici, en
11 l'espèce, il est impossible d'établir cette responsabilité pénale
12 individuelle sans bien comprendre, de façon plus large, le contexte de ce
13 conflit qui a sévi en Bosnie-Herzégovine et à Konjic.
14 Le Procureur, à juste titre, a invité à la barre trois témoins
15 experts avec l'aide desquels, il a essayé d'établir des éléments qui
16 comptaient beaucoup pour l'accusation. Ceci s'est répété, a déjà été fait
17 dans l'affaire
18 Tadic ainsi que dans d'autres affaires jugées ici.
19 Pour bien comprendre le cadre général de la situation et les
20 événements qui se sont véritablement produits à Konjic en 1992, période à
21 laquelle ces événement visés par l'acte d'accusation se seraient produits,
22 la défense a l'intention de citer, au moins deux experts témoins,
23 M. Hadzibegovic Ilijas, expert de l'histoire de Bosnie-Herzégovine et le
24 brigadier général Vejzajic, expert militaire qui parlera de la JNA et du
25 développement de l'armée de Bosnie-Herzégovine après la proclamation de
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1 l'indépendance. Ces deux experts vous donneront un aperçu général de la
2 situation militaire qui se présentait notamment à Konjic en 1992 et c'est
3 à partir de leur savoir-faire et de leurs recherches faites sur le terrain
4 qu'ils se prononceront.
5 Avec l'aide de ces témoins, et d'autres, la défense va démontrer
6 que la Bosnie-Herzégovine a cherché à établir son état ou l'Etat au fil
7 des siècles, que, par sa topographie, se trouvant au carrefour de
8 plusieurs civilisations, la Bosnie-Herzégovine a préservé son caractère
9 multi-ethnique, multiculturel, qui est une caractéristique essentielle,
10 qu'il est impossible de diviser la Bosnie-Herzégovine par des critères
11 ethniques sans infliger de terribles violences, que les aspirations des
12 voisins à s'accaparer de parties de la Bosnie-Herzégovine ou de tous ces
13 territoires, ont été présentes tout au long de l'histoire.
14 La Bosnie-Herzégovine a été attaquée le jour-même où elle a
15 proclamé son indépendance. Ses villes, y compris Konjic, ont été en proie
16 à d'horribles destructions et à des tueries. Les dirigeants de la Bosnie-
17 Herzégovine ont mené une guerre et ont créé leur propre armée. Les
18 autorités de Konjic ont fait le maximum pour éviter le conflit et lorsque
19 la ville a été encerclée et attaquée, ils ont fait des efforts surhumains
20 pour assurer les meilleures conditions possibles à la survie de la
21 population, pour loger et nourrir des réfugiés venant d'autres parties de
22 la Bosnie-Herzégovine, afin de procurer les soins médicaux les plus
23 élémentaires à de nombreux blessés et pour veiller à ce que l'équité règne
24 dans la meilleure mesure possible s'agissant des personnes mises en
25 détention.
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1 Les éléments de preuve prouveront que les personnes détenues à
2 Celebici étaient des ressortissants de la Bosnie-Herzégovine, étaient des
3 résidents, et dans la plupart des cas, des gens de bonne réputation, des
4 notables de Konjic, qu'au moment de la proclamation d'un danger imminent
5 de guerre, ces personnes ont acheté de l'équipement militaire, ont établi
6 des barrages sur les routes et ont même perpétré des attaques contre leurs
7 propres autorités légitimes, ce qui permet raisonnablement de croire
8 qu'elles ont commis des infractions pénales en vertu du code criminel de
9 la Bosnie-Herzégovine -en d'autres termes, c'étaient des rebelles et des
10 poursuites ont été engagées contre au moins cent personnes de cette
11 sorte-, que les personnes détenues à Celebici ne bénéficiaient pas de la
12 protection en vertu des conventions de Genève.
13 S'agissant de Zejnil Delalic, les éléments de preuve apportés
14 par la défense démontreront que, à compter d'avril et au moins jusqu'au
15 27 juillet, M. Delalic n'avait pas la moindre fonction de nature a être
16 caractérisée comme étant de supériorité hiérarchique ou civile.
17 Nous montrerons que, jusqu'au moment où il est devenu commandant
18 du groupe tactique n° 1, après le 27 juillet 1992, M. Delalic
19 n'avait comme activité que des activités de logistique, et qu'à partir du
20 18 mai 1992, il était également coordinateur, mais qu'il avait surtout des
21 charges civiles qui lui avait été conférées par une instance civile, à
22 savoir la Présidence de guerre de la municipalité de Konjic.
23 En tant que soldat ordinaire, M. Delalic -et les éléments de
24 preuve le montreront- a passé tout le mois de juillet 1992 dans des zones
25 éloignées et montagneuses, éloigné de tout conflit militaire, sans avoir
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1 la moindre activité militaire ni de mission militaire précise. Durant tout
2 son séjour à Konjic, depuis avril jusqu'à la fin de novembre 1992, nous
3 montrerons que M. Delalic n'était membre d'aucun parti politique ni à
4 Konjic ni en Bosnie-Herzégovine, qu'il n'a pas été élu, qu'il n'a été
5 désigné à aucune fonction d'état ou autre, qu'il n'était pas membre de la
6 Présidence de guerre et qu'il n'était pas non plus membre d'institutions,
7 de partis politiques ou d'autres organismes.
8 Les éléments de preuve que nous allons apporter vont vous
9 démontrer qu'en 1992, il n'était ni commandant, ni membre de l'état-major
10 municipal de la Défense territoriale qui allait devenir l'armée de Bosnie-
11 Herzégovine, ni non plus membre du commandement conjoint de la Défense
12 territoriale et du HVO, à aucune période de cette année 1992.
13 Nous allons également démontrer qu'après le 27 juillet 1992,
14 M. Delalic a été désigné à une fonction militaire ; il est devenu
15 commandant du Groupe tactique n° 1, avec pour tâche militaire de
16 participer à lever le siège de Sarajevo. A ce titre, il disposait de
17 forces, de ressources qui lui étaient subordonnées dans un cadre plus
18 large qui allait de Igmen* à Tresnic*. Mais, nous démontrerons que, alors
19 qu'il occupait
20 ces fonctions militaires, il n'avait aucune supériorité hiérarchique dans
21 la région, il n'avait aucune compétence sur l'état-major municipal ou des
22 corps locaux, il n'avait non plus aucune compétence sur aucun organe de la
23 région.
24 Les éléments que nous allons apporter vous montreront que
25 Zejnil Delalic n'a jamais eu une fonction de supériorité hiérarchique sur
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1 la prison de Celebici et son personnel.
2 Nous allons également démontrer que les effectifs qui lui
3 étaient subordonnés alors qu'il était commandant du Groupe tactique n° 1,
4 n'étaient pas des gardes, n'étaient pas non plus des membres du personnel
5 de la prison de Celebici, et qu'aucun de ses subordonnés n'a commis les
6 infractions qui lui sont reprochées.
7 Les éléments de preuve que nous allons apporter vont également
8 démontrer qu'à partir d'avril 1992, les forces de défense en place à
9 Konjic étaient la force de Défense territoriale, le HVO, le Ministère de
10 l'intérieur, MUP, et que Zejnil Delalic n'a jamais eu une position de
11 commandement par rapport aux instances que je viens de citer.
12 Nous démontrerons également que les autorités légitimes à partir
13 d'avril 1992 ont organisé la défense et qu'il n'y avait pas de groupe ni
14 d'armée privés qui opéraient dans cette région.
15 Tous ces éléments seront établis par la défense qui va, pour ce
16 faire, citer des témoins à la barre, présenter des éléments de preuve et
17 montrer des cassettes vidéo à l'appui de la défense de M. Delalic.
18 A ce stade, la défense ne va pas demander de mesure de
19 protection pour ses témoins. Toutefois, s'il devait s'avérer que de telles
20 mesures sont nécessaires aux témoins, nous en ferons la demande en temps
21 voulu devant la Chambre de Première Instance.
22 Je n'ai pas ici l'intention de revenir par mes arguments sur les
23 différents éléments de l'acte d'accusation puisque nous en avons déjà
24 parlé dans notre requête déposée aux fins de prouver l'insuffisance de
25 moyens de preuve à charge. Par conséquent, en conclusion, Madame et
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1 Messieurs les Juges, je tiens à rappeler que la défense saisira les droits
2 qui lui sont offerts par l'article 21 du statut et par d'autres
3 dispositions du règlement et du statut. Elle va donc apporter ses moyens
4 de preuve et montrera que les accusations retenues contre M. delalic sont
5 dénuées de fondement.
6 M. le Président (interprétation). – Je vous remercie. Je crois
7 qu'en ce moment vous êtes en train de promettre des éléments de preuve
8 plutôt que de les énoncer déjà. Vous avez le droit de le faire si vous
9 voulez appuyer vos thèses.
10 Je vous en prie, Maître Residovic, souhaitez-vous poursuivre ?
11 Qui est votre prochain témoin ?
12 Mme Résidovic (interprétation). – J'appelle à la barre le
13 premier témoin de la défense, un témoin expert en histoire. Je souhaite
14 que le témoin soit introduit dans le prétoire, s'il vous plaît,
15 Monsieur le Président.
16 M. Niemann (interprétation). – Monsieur le Président, permettez-
17 moi d'intervenir dans le débat.
18 M. le Président (interprétation). - Je vous en prie. Que
19 souhaitez-vous ajouter ?
20 M. Niemann (interprétation).– Monsieur le Président, Madame et
21 Messieurs les Juges, jeudi dernier, à 14 heures 45, la défense nous a
22 communiqué l'ensemble des documents que vous voyez derrière moi, un énorme
23 ensemble de documents, documents relatifs aux deux témoins experts que
24 Me Residovic a dit qu'elle allait citer à la barre.
25 D'après la liste de témoins qu'elle nous a communiquée, ces deux
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1 témoins experts sont les deux premiers témoins à comparaître devant la
2 Chambre de Première Instance. L'accusation n'a bien évidemment pas été à
3 même de consulter tous les documents qui lui ont été communiqués ; ce sont
4 des documents dont la teneur est extrêmement complexe. Nous avons
5 certaines décisions à prendre sur la teneur de ces documents pour nombre
6 d'entre eux. Nous souhaiterino sélever un certain nombre d'objections
7 quant à certains de ces documents, d'autres ne posent pas de problème ;
8 certaines séquences vidéo nous ont été communiquées à 17 heures vendredi
9 dernier, c'est la première fois que nous avons eu connaissance de ces
10 séquences vidéo, je n'ai pas pu les voir et, d'après ce que je sais, l'une
11 de ces séquences dure près de deux heures, Monsieur le Président. Pour ce
12 qui est de l'autre séquence, je ne sais même pas de quoi elle traite
13 puisque, je le répète, je n'ai pas vu ces deux bandes vidéo.
14 Vous vous rappellerez, Monsieur le Président, Madame et
15 Messieurs les Juges, que lorsque nous nous sommes trouvés dans la même
16 position que Me Residovic aujourd'hui, nous avons appelé deux témoins
17 experts à la barre et Me Ackerman avait alors manifesté ce qui, d'après
18 lui, était nos erreurs en la matière. A l'époque, la défense se plaignait
19 du fait que le curriculum vitae du témoin expert avait été communiqué
20 quelque peu tardivement et que les documents relatifs au témoignage
21 avaient aussi été communiqués tardivement, ce qui n'était pas du tout
22 notre intention
23 bien évidemment ; l'accusation ne souhaitait pas engendrer quelque retard
24 que ce soit. En fait, la raison de ce retard est que ces documents ne nous
25 avaient été communiqués qu'assez tard et nous n'avions jamais eu
Page 9825
1 l'intention de demander le versement au dossier de ces documents de toute
2 façon, en dépit de ce qu'a dit Me Ackerman. Je pourrais d'ailleurs le
3 citer, si je le voulais ; je pense qu'il est important de voir ce qu'il a
4 dit à l'époque. Je cite : "Il me semble que c'est une violation des
5 obligations qui incombent au Procureur d'après les textes fondateurs du
6 Tribunal et d'après l'interprétation qui a été faite de ces textes, dans
7 le cadre de l'affaire Blaskic. On nous a passé ces documents cinq minutes
8 avant l'arrivée du témoin à la barre, ce qui rend absolument impossible,
9 ou du moins peu probable, la capacité des conseils de la défense de
10 prendre connaissance de la teneur de la déclaration de ces témoins.
11 Je n'ai pas l'intention de dire que le bureau du Procureur a
12 fait cela intentionnellement, parce qu'il souhaitait nous empêcher de
13 prendre connaissance de certaines informations. Mais ce que je sais, en
14 revanche, c'est que l'accusation a prévenu, il y a près d'un mois, la
15 Chambre de Première Instance de son intention de citer à la barre ces
16 témoins".
17 Moi, Monsieur le Président, j'affirme en la matière que la
18 défense savait fort bien, elle aussi, que ce témoin expert devait venir à
19 la barre.
20 Maître Ackerman continue, je cite : "Il m’est très difficile
21 d’accepter l'idée que ces documents n'auraient pas pu nous être
22 communiqués avant le moment où ils nous l’ont été, c'est-à-dire cinq
23 minutes avant le début de l'audience. Je crois que la Chambre de première
24 instance peut prendre un certain nombre de mesures : tout d'abord,
25 interdire aux témoins experts de comparaître, parce que l'accusation a
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1 violé plusieurs de ses obligations. La Chambre de Première Instance peut
2 également ajourner l'audience pour une période de temps satisfaisante qui
3 permettrait à la défense de prendre connaissance des documents qui
4 l’intéressent. Il y a beaucoup d'informations concernant ce témoin
5 contenues dans les documents qui nous ont été communiqués".
6 Monsieur le Président, là, nous parlons d'un document que nous
7 ne souhaitons pas verser au dossier ; nous parlons également d'un
8 curriculum vitae, et alors que nous ne parlons que de documents de valeur
9 négligeable, Maître Ackerman déclare ce que je viens de citer. Suite à
10 cette intervention, Monsieur le Président, Madame et Messieurs les Juges,
11 vous avez donné à la défense le temps de se préparer pour son contre-
12 interrogatoire.
13 Mais ici, Monsieur le Président, nous n'avons pas affaire à un
14 curriculum vitae, ni à un document qui ne fait que donner des informations
15 générales, nous sommes confrontés à des documents à propos desquels
16 Maître Residovic a dit qu'elle souhaitait demander leur versement au
17 dossier. Ce sont des documents complexes, qui traitent de questions
18 complexes, et nous les avons reçus il y a si peu de temps qu'il serait
19 inhumain de nous demander d'avoir pris connaissance, à ce jour, de leur
20 teneur.
21 Ceci étant dit, Monsieur le Président, nous ne demandons pas que
22 l'audience soit levée, ni qu’un délai nous soit accordé. Notre position
23 est la suivante : nous estimons que la défense a eu, il y a quelques
24 temps, le droit de bénéficier d'un délai assez conséquent. Je vous
25 rappelle, Monsieur le
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1 Président, que pour ce qui est du Pr Economides et du Pr Gow, leur
2 témoignage s'est étendu sur un certain laps de temps et que la défense a
3 eu tout le temps nécessaire pour se préparer.
4 Dans le cas d'espèce, nous ne demandons pas la même chose. Nous
5 ne demandons pas que la date de notre contre-interrogatoire soit repoussée
6 à plus tard, nous demandons simplement que le contre-interrogatoire n'ait
7 lieu qu'après la comparution des témoins prévus pour cette semaine.
8 Pour les documents dont le versement au dossier est demandé,
9 nous demandons que cette demande n'intervienne que lorsque le contre-
10 interrogatoire aura été mené à son terme. La raison pour laquelle nous
11 demandons cela est que, si nous disposons d'un délai raisonnable nous
12 permettant de compulser tous ces documents et peut-être de manifester
13 notre accord quant à leur versement, alors nous serons mieux à même de
14 travailler efficacement et nous pourrons essayer d'avancer le plus
15 rapidement possible. Si ce n’est pas le cas, nous serons obligés de les
16 prendre un par un et, pour chacun d’entre eux, d’émettre un certain nombre
17 d’objections au fur et à mesure que leur versement au dossier sera
18 demandé.
19 Si nous disposons d'un délai de temps suffisant, nous pensons
20 être capables de travailler rapidement et de façon efficace ; ce sera une
21 façon de gagner du temps. Nous ferons, bien sûr, de notre mieux pour aller
22 dans le sens de la défense, pour ne pas élever d'objection à l’égard des
23 documents qui nous ont été communiqués. Mais, bien sûr, nous préserverons
24 toujours les intérêts de l'accusation.
25 Nous sommes également concernés par le fait de présenter à la
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1 Cour des documents qui soient fiables et crédibles. Mais nous avons été
2 mis, Monsieur le Président, dans une situation intenable. C’est la défense
3 qui nous met dans une telle position. Nous demandons simplement à
4 bénéficier des mêmes conditions que celles accordées à la défense en son
5 heure.
6 M. le Président (interprétation). - Merci, Maître Niemann, de
7 nous avertir de choses qui pourraient se produire à l’avenir.
8 Maître Residovic, souhaitez-vous intervenir sur ce que vient de
9 dire Maître Niemann, à propos des témoins experts notamment ?
10 Mme Residovic (interprétation). - Monsieur le Président, Madame
11 et Monsieur les Juges, je n’accepte pas tous les arguments avancés par
12 M. le Procureur, quant à l’incapacité de la défense de faire face à ses
13 obligations vis-à-vis de l'accusation.
14 Conformément à l'ordonnance de la Chambre, la défense a informé
15 le bureau du Procureur en temps voulu du fait qu’elle pensait citer à
16 comparaître ce témoin précis. Elle a, d’autre part, communiqué à
17 l’accusation le curriculum vitae de ce témoin.
18 De plus, la défense a fait savoir au Procureur qu’elle allait
19 citer à comparaître un expert militaire. Etant donné que ce dernier a été
20 l’un des acteurs des événements qui nous concernent, et à la demande de
21 l'accusation, nous avons renoncé à faire venir cet expert militaire.
22 Il y a environ un mois, nous avons fait parvenir à l'accusation
23 le nom d'un nouvel expert militaire. Ce faisant, nous respections
24 l'ordonnance délivrée par la Chambre de première instance. Nous avons
25 averti le bureau
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1 du Procureur en temps opportun de la venue de cet autre témoin expert.
2 Pour ce qui est maintenant du temps nécessaire à l’accusation
3 pour se préparer au contre-interrogatoire, je ne peux pas me prononcer sur
4 ce point, car les deux parties ont bien entendu le droit de se préparer au
5 contre-interrogatoire. J’aimerais simplement vous rappeler,
6 Monsieur le Président, que ce procès a commencé le 10 mars dernier, le
7 10 mars 1997. L'accusation, qui dispose de nombre d'outils qui sont prêts
8 à travailler pour elle -ce qui n'est pas le cas de l'équipe de la défense-
9 nous a fait parvenir les documents relatifs au Pr Calic le 4 mars, à
10 savoir six jours ouvrables avant le début du procès.
11 C'est pour cela qu'il me semble que la défense n'a rien fait qui
12 puisse faire dire qu'elle va à l'encontre des règles de fonctionnement et
13 de procédure de ce Tribunal et c'est pourquoi je rejette les arguments de
14 l’accusation.
15 Ceci dit, je comprends qu'elle sente le besoin de consulter tous
16 les documents qui lui ont été communiqués, qu’elle sente le besoin de se
17 préparer, mais le bureau du Procureur propose quelque chose que nous, en
18 tant que conseils de la défense, ne pouvons accepter, à savoir que,
19 pendant que nous interrogeons le témoin, nous ne soyons pas autorisés à
20 demander le versement au dossier de certains documents. On nous met ici
21 dans une situation tout a fait inéquitable. Si l'on regarde ce qui a été
22 fait avec le témoin de l'accusation, le Pr Calic, ce n'est que six jours
23 avant la comparution de ce témoin que nous avons reçu des documents très
24 importants qui étaient à la base-même du témoignage.
25 Par conséquent, Monsieur le Président, si vous acceptez les
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1 arguments qui viennent de vous être exposés par le Bureau du Procureur, et
2 selon lesquels il a besoin d’un certain temps pour se préparer au contre-
3 interrogatoire, alors moi, je propose que nous repoussions la comparution
4 de nos témoins experts à la fin de la semaine, à savoir jusqu'au moment où
5 l'accusation sera prête à mener à terme son contre-interrogatoire.
6 M. le Président (interprétation). - Je ne pense pas que ce soit
7 notre intention. Je crois que nous allons commencer immédiatement
8 l'audition des témoins de la défense.
9 Vous pouvez appeler votre témoin. Nous trouverons bien un moyen
10 de voir à quel moment le contre-interrogatoire aura lieu.
11 Le témoin peut être introduit.
12 Mme Residovic (interprétation). - Merci, Monsieur le Président.
13 M. le Président (interprétation). - La défense appelle donc son
14 premier témoin ?
15 Mme Residovic (interprétation). - Peut-on faire introduire le
16 premier témoin, s'il vous plaît ? L'huissier peut-il aider les conseils de
17 la défense à faire introduire le témoin ? Merci.
18 (Le témoin, M. Hadzibegovic, est introduit dans la salle d'audience)
19 M. le Président (interprétation). - Veuillez faire prêter
20 serment au témoin.
21 M. Hadzibegovic (interprétation). - Je déclare solennellement
22 que je dirai la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.
23 M. le Président (interprétation). - Maître Residovic ?
24 Mme Residovic (interprétation). - Je demande simplement que le
25 témoin s’asseye. Je vous remercie.
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1 Bonjour, Monsieur. Veuillez, s’il vous plaît, décliner votre
2 identité.
3 M. Hadzibegovic (interprétation). - Je m’appelle Ilijaz
4 Hadzibegovic.
5 Mme Residovic (interprétation). - Quel âge avez-vous,
6 Monsieur Hadzibegovic ?
7 M. Hadzibegovic (interprétation). - J’ai 59 ans, j’aurai 60 ans
8 cette année.
9 Mme Residovic (interprétation). - Où êtes-vous né ?
10 M. Hadzibegovic (interprétation). - Je suis né à Bogonja**, qui
11 se trouve à 135 kilomètres au sud-ouest de Sarajevo.
12 Mme Residovic (interprétation). - Pouvez-vous nous décrire
13 brièvement votre carrière ? Pouvez-vous nous dire quelle est votre
14 profession, tout d'abord ?
15 M. Hadzibegovic (interprétation). - Je suis historien. Je
16 travaille à l'université.
17 Mme Residovic (interprétation). - A quelle université
18 enseignez-vous ?
19 M. Hadzibegovic (interprétation). - Je travaille à l’université
20 de Sarajevo, à la faculté de philosophie.
21 Mme Residovic (interprétation). - Où avez-vous fait vos études,
22 Monsieur ?
23 M. Hadzibegovic (interprétation). - J'ai suivi mes études à
24 l'université de Sarajevo. J'ai fait mes études de diplômé à Belgrade. J'ai
25 terminé en 1967.
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1 Mme Residovic (interprétation). - Quel est votre diplôme le plus
2 élevé ?
3 M. Hadzibegovic (interprétation). - C'est ma thèse, en 1977...
4 le doctorat donc. En 1986, j'ai reçu le titre de "professeur d'université"
5 à l'université de Sarajevo.
6 Mme Residovic (interprétation). - Combien y avait-il de
7 professeurs qui jouissaient du même diplôme que vous, dans l’école où vous
8 enseigniez avant la guerre ?
9 M. Hadzibegovic (interprétation). - Avant la guerre, il y avait
10 douze départements dans notre faculté et il y avait environ 150 docteurs
11 en université, des professeurs d'université.
12 Mme Residovic (interprétation). - Pouvez-vous nous dire combien
13 de professeurs il reste, aujourd'hui ?
14 M. Hadzibegovic (interprétation). - Entre cinquante et soixante.
15 Mme Residovic (interprétation). - Pourriez-vous nous dire quand
16 vous avez soutenu votre thèse ?
17 M. Hadzibegovic (interprétation). - C'était en 1977.
18 Mme Residovic (interprétation). - Quel a été le sujet de votre
19 thèse ?
20 M. Hadzibegovic (interprétation). - Il s'agissait de l'émergence
21 de la classe ouvrière en Bosnie et l'histoire de cette classe ouvrière
22 jusqu'en 1914. Cette thèse portait à la fois sur l'histoire économique et
23 sociale.
24 Mme Residovic (interprétation). - Depuis quand enseignez-vous à
25 l'université de Sarajevo et plus précisément à la faculté d'histoire ?
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1 M. Hadzibegovic (interprétation). - J'ai d'abord travaillé en
2 tant qu'assistant à l'institut historique, pendant cinq ans. A partir du
3 1er janvier 1970, je suis allé à la faculté de philosophie où je suis
4 resté depuis lors.
5 En 1978, j'ai obtenu un titre différent. Par la suite, j'ai été
6 élu professeur associé en 1981. Depuis 1986, je suis professeur à part
7 entière. C’est en tant que tel que je travaille aujourd'hui.
8 Mme Residovic (interprétation). - Au cours de cette période,
9 vous avez dû diriger certaines recherches ou faire des recherches vous-
10 même. Pourriez-vous nous dire dans quelles universités ou dans quels
11 instituts vous les avez menées ?
12 M. Hadzibegovic (interprétation). - Chez nous, il existe une
13 tradition qui veut que nous consultions les archives qui se trouvent le
14 plus près de nous. Pour moi, c'étaient les archives de Sarajevo, qui
15 comptent près de vingt millions de documents. Puis il y a Belgrade,
16 Zagreb, Dubrovnik, etc.
17 Etant donné que la Bosnie a été placée, pendant près de quarante
18 ans, sous le gouvernement de l’Austro-Hongrie, j'ai passé pas mal de temps
19 dans les archives à Vienne. J’ai également passé beaucoup de temps à la
20 Bibliothèque nationale à Vienne parce qu'il y a dans cette ville des
21 bibliothèques d'une importance considérable pour l’histoire de la région,
22 l'histoire des Balkans.
23 J'ai aussi fait des recherches à Budapest, dans les archives
24 nationales hongroises, et dans la bibliothèque nationale de Budapest. J'ai
25 fait quelques recherches à Prague. J'ai également eu l’occasion de passer
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1 un certain temps à Munich, dans l'institut des études européennes
2 -notamment l’Europe du sud-est- et, pendant un certain temps, j’ai été
3 invité en tant qu'expert. J'ai reçu une bourse me permettant de mener une
4 étude sur la population, étude que je n'ai malheureusement pas pu mener à
5 son terme.
6 Mme Residovic (interprétation). - Je vous remercie, Professeur.
7 Est-il exact que vous avez publié près de cent articles dans le
8 cadre de votre spécialité ?
9 M. Hadzibegovic (interprétation). - Absolument exact. J'ai
10 publié une centaine d'articles, et je ne compte pas les articles non
11 publiés à ce jour.
12 Mme Residovic (interprétation). - Monsieur le Professeur, quelle
13 est votre spécialité ? Quels sont les sujets qui vous intéressent le
14 plus ?
15 M. Hadzibegovic (interprétation). - Ce qui m'intéresse le plus,
16 c'est l'histoire du peuple en Bosnie, à la fin du XIXème siècle. Je suis
17 également intéressé par les populations slaves du sud, pendant la même
18 période.
19 Mme Residovic (interprétation). - Est-il exact que vous avez
20 publié deux livres ?
21 M. Hadzibegovic (interprétation). - C'est exact. J'ai d'abord
22 publié un livre en 1980, qui porte le même titre que ma thèse. Mon
23 deuxième livre a été publié en 1991. Il porte sur les villes en Bosnie-
24 Herzégovine à la fin du XIXème et au début du XXème siècle. L'objectif
25 était d'étudier la dynamique qui avait permis le développement moderne de
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1 la Bosnie-Herzégovine.
2 Mme Residovic (interprétation). - Est-il exact que vous êtes
3 auteur et co-auteur d'un certain nombre d'articles ou de livres dont les
4 titres apparaissent en annexe du rapport que vous avez rédigé en tant
5 qu'expert ?
6 M. Hadzibegovic (interprétation). - Dans cette annexe, je n'ai
7 donné la liste que d'un certain nombre de livres auxquels j'ai participé.
8 Je n'ai pas tout cité dans ma bibliographie. Je crois que cela suffit
9 parce que cela correspond à la teneur de mon rapport. Les sujets
10 principaux qui figurent dans ce rapport et dans cette annexe sont les
11 mouvements politiques et sociaux en Bosnie-Herzégovine.
12 Plus récemment, j'ai mené un certain nombre de recherches sur
13 les flux migratoires et sur leur influence, sur les rapports ethniques en
14 Bosnie-Herzégovine. Bien sûr, ce sujet est très étroitement lié aux
15 événements récents qui se sont produits à la fois en Bosnie-Herzégovine et
16 sur les autres territoires de l'ex-Yougoslavie.
17 Mme Residovic (interprétation). - Pourriez-vous dire aux Juges
18 quand vous avez publié pour la première fois vos travaux en tant
19 qu'expert ?
20 M. Hadzibegovic (interprétation). - En 1962. J'étais toujours
21 étudiant à l'époque.
22 Mme Residovic (interprétation). - Quand avez-vous publié votre
23 dernier ouvrage ?
24 M. Hadzibegovic (interprétation). - Mon dernier ouvrage est paru
25 au début de cette année et son titre est "La société civile en Bosnie-
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1 Herzégovine - Origines et contexte historique".
2 Mme Residovic (interprétation). - Professeur, est-il exact de
3 dire que vos recherches sont directement liées à l'histoire de l'ex-
4 Yougoslavie et à l'histoire contemporaine de la Bosnie-Herzégovine ?
5 M. Hadzibegovic (interprétation). - C'est parfaitement exact.
6 Mme Residovic (interprétation). - Pourriez-vous nous dire où
7 vous avez passé la guerre en Bosnie-Herzégovine entre 1992 et 1996 ?
8 M. Hadzibegovic (interprétation). - Entre 1992 et la mi-94, je
9 me trouvais à Sarajevo qui était alors sous le siège. Après cela, j'ai
10 quitté la ville pour un certain nombre de raisons de famille, de santé
11 notamment. Je suis parti pour Vienne où j'ai travaillé durant un certain
12 temps, pendant que ma famille s'est rendue à Munich.
13 Mme Residovic (interprétation). - Pourriez-vous nous confirmer
14 ici qu'en tant qu'expert, en tant qu'universitaire distingué de la Bosnie-
15 Herzégovine, vous êtes à même de porter un regard objectif sur les
16 événements auxquels vous avez participé ? Pouvez-vous nous dire que vous
17 allez nous fournir un jugement objectif et neutre sur ce qui s'est passé ?
18 M. Hadzibegovic (interprétation). - Oui, je le confirme. Je suis
19 historien et un historien doit toujours rester objectif. Un historien qui
20 ne dit pas la vérité ne peut pas se qualifier d'historien.
21 Mme Residovic (interprétation). - Sur quelles sources vous êtes-
22 vous appuyé, en consultant votre rapport si besoin est ?
23 M. Hadzibegovic (interprétation). - J'ai d'abord eu recours à
24 mes propres travaux et j'ai également utilisé ceux d'un certain nombre
25 d'experts qui travaillent dans le même domaine, à savoir l'histoire de la
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1 Bosnie-Herzégovine fin XIXème siècle/début XXème siècle. Je me suis
2 inspiré de documents pertinents que j'ai trouvés dans les archives, dans
3 l'Institut, notamment tous les document relatifs aux crimes de guerre en
4 Bosnie-Herzégovine. Là, j'ai trouvé des document extrêmement précieux pour
5 l'élaboration de mon rapport. J'ai utilisé les ressources de l'Institut de
6 statistiques car cet institut m'a fourni des document très pertinents et
7 beaucoup de statistiques extrêmement intéressantes sur les événements.
8 J'ai aussi travaillé à partir d'articles ou de documents qui ont
9 été publiés à Sarajevo pendant la période qui nous concerne, notamment des
10 articles de journaux, qu'ils soient bosniaques ou d'autres nationalités.
11 J'ai également utilisé d'autres document qui m'ont été communiqués
12 notamment par la télévision de Sarajevo et par le poste de de télévision à
13 Ljablanica* et à Konjic.
14 J'ai exploité des documents qui m'ont été communiqués par mes
15 collègues, notamment MM. Calic et Gow. Je me suis inspiré de documents qui
16 m'ont été communiqués par vous-même, Madame, et par les autres conseils de
17 la défense.
18 Mme Residovic (interprétation). - Monsieur le professeur, avez
19 vous essayé de corroborer la teneur de certains des document dont vous
20 avez eu connaissance ? Avez-vous essayé de mener des enquêtes de votre
21 côté pour vérifier ces documents ?
22 M. Hadzibegovic (interprétation). - La corroboration de
23 documents est un processus permanent, c'est une activité qu'il faut
24 toujours poursuivre, et ce jusqu'à ce que l'authenticité de chacun des
25 document ait était prouvée. C'est un processus permanent, je le répète.
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1 Mme Residovic (interprétation). - Dernière question sur ce
2 point : votre déposition, votre rapport aujourd'hui se basent-ils sur des
3 faits qui ont été dûment vérifiés et confirmés ?
4 M. Hadzibegovic (interprétation). - Je pense avoir fondé mon
5 rapport sur des sources dignes de foi, des faits solides. Il y avait
6 beaucoup de documents, beaucoup de faits que je n'ai pas repris dans mon
7 rapport car, selon moi, ils n'avaient pas été dûment vérifiés mais je
8 crois que tout ce qui se trouve consigné dans ce rapport, à ce stade du
9 moins de mon processus de recherche, a été corroboré.
10 Mme Residovic (interprétation). - Suite à la réponse que vous
11 venez de fournir, pourriez-vous me dire si vous avez rencontré des
12 difficultés lorsque vous avez mené cette recherche afin de rédiger ce
13 rapport ?
14 M. Hadzibegovic (interprétation). - Bien entendu, c'est le fait
15 de tout historien. Un historien lutte contre ces éléments, surtout
16 lorsqu'il se penche sur une période et des événements contemporains.
17 Nombre des événements ne sont pas tout à fait terminés ou leurs retombées
18 sont encore d'actualité. Nous avons connu une guerre, des documents sont
19 encore
20 manquants. Il n'empêche qu'étant donné que ceci couvre une période de
21 temps et qu'en dépit des difficultés, nous sommes parvenus à dresser un
22 inventaire factuel suffisant. Le temps permettra bien entendu de confirmer
23 avec davantage de détails certaines des conclusions auxquelles nous sommes
24 parvenus.
25 Mme Residovic (interprétation). - La défense de M. Delalic vous
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1 a-t-elle contacté au cours de l'année dernière pour vous demander de
2 comparaître à titre de témoin expert dans ce procès ?
3 M. Hadzibegovic (interprétation). - Oui, la défense m'a contacté
4 afin que je comparaisse à titre de témoin expert.
5 Mme Residovic (interprétation). - Et manifestement vous avez
6 répondu favorablement à notre demande. Pourriez-vous nous dire combien de
7 temps vous avez passé à la préparation de ce rapport ?
8 M. Hadzibegovic (interprétation). - Vous m'avez contacté il y a
9 un an. Je crois avoir consacré les six derniers mois à ce projet alors que
10 les six premiers mois étaient sans doute des mois de travail moins
11 intensif.
12 Mme Residovic (interprétation). - Professeur, je vous demanderai
13 quels sont les sujets sur lesquels vous avez travaillé ces dix derniers
14 mois, ce que nous avons à ouvrir à la Chambre en guise de documents ? Est-
15 il exact que vous ayez dressé ce rapport d'expert ?
16 M. Hadzibegovic (interprétation). - Oui.
17 Mme Residovic (interprétation). - Madame et Messieurs les juges,
18 je demande l'enregistrement de ce rapport aux fins d'identification. Nous
19 avons veillé à ce que la Chambre dispose de suffisamment d'exemplaires de
20 ce dossier.
21 M. Niemann (interprétation). - Je suppose que c'est aux seules
22 fins d'identification.
23 Mme le Greffier (interprétation). - C'est le premier document
24 D 135/1.
25 M. Niemann (interprétation). - Je tiens à consigner au procès-
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1 verbal que nous avons une objection s'agissant du versement de ce document
2 au dossier.
3 Mme Residovic (interprétation). - Professeur, est-ce bien le
4 rapport que vous avez dressé ?
5 M. Hadzibegovic (interprétation). - Oui.
6 Mme Residovic (interprétation). - Madame et Messieurs les juges,
7 je demande le versement au dossier de ce rapport d'expert dressé par
8 M. Hadzibegovic.
9 M. Niemann (interprétation). - Objection à ce que ce document
10 soit versé au dossier.
11 Quel est le fondement de mon objection ? C'est tout d'abord que
12 le témoin est ici appelé à la barre pour faire une déposition mais
13 apparemment, la défense cherche non seulement à avoir une déposition orale
14 par le biais d'un interrogatoire principal mais aussi de couvrir la même
15 matière par cette déclaration écrite.
16 Ceci ne nous semble pas correct car les meilleurs éléments de
17 preuve que vous puissiez recevoir, ce sont les paroles mêmes du témoin.
18 Nombreux sont les points d'objection qui sont repris dans ce rapport.
19 L'accusation devrait se pencher sur chacune de ces questions litigieuses
20 avant de pouvoir éventuellement marquer son accord à l'admission de ce
21 document, alors que les choses seraient bien plus simples si l'on
22 procédait comme de coutume en entendant le témoin. S'il nous posait des
23 questions et si, au moment des questions, des points surgissaient, nous
24 pourrions effectivement présenter telle ou telle objection mais faire
25 entrer ce rapport par la petite porte en invoquant uniquement le fait que
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1 ce que soit un rapport et qu'il ait été identifié comme rapport d'expert
2 par le témoin, ceci n'est pas valable. De plus, le rapport se fonde sur
3 cette masse de documents que nous avons reçus si tardivement, la semaine
4 dernière seulement, et à ce stade, nous avons déjà beaucoup d'objections à
5 soulever car nous n'avons aucunement eu le temps de prendre une décision
6 sur la question de savoir si ces documents sont recevables ou pas.
7 Voilà qu'elle est notre position actuelle. Nous ne pouvons
8 qu'indiquer que cette demande mérite objection et que le rapport en lui-
9 même fait référence à ces documents pour lesquels nous avons déjà soulevé
10 une objection. C'est un peu comme si l'on appelait un témoin à la barre
11 alors que l'on demanderait le dépôt d'une preuve documentaire.
12 M. le Président (interprétation). - Je ne suis pas enclin à
13 entendre cette objection. Est-ce que vous doutez de la base ?
14 M. Niemann (interprétation). - Notre fondement à l'objection est
15 qu'il y a dans ce rapport des éléments sur lesquels nous avons sans doute
16 présenté des objections, et que la façon coutumière de recevoir des
17 éléments de preuve, ce serait effectivement que ce témoin, qu'il soit
18 témoin expert ou témoin factuel, soit entendu. On ne demande pas d'abord
19 le versement d'un rapport au dossier pour ensuite seulement entendre le
20 témoin ; ce n'est pas l'ordre dans lequel les choses sont généralement
21 faites.
22 M. le Président (interprétation). – Le document sera enregistré
23 aux seules fins d'identification à ce stade.
24 M. Niemann (interprétation). - Je vous remercie.
25 M. le Président (interprétation). – Poursuivez l'interrogatoire
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1 principal du témoin, Maître Residovic.
2 Mme Résidovic (interprétation). – Professeur, vous êtes-vous
3 fondé pour préparer votre rapport sur des documents contenus dans ces
4 classeurs ?
5 M. Hadzibegovic (interprétation). - Oui.
6 Mme Résidovic (interprétation). - Je demanderai que ce classeur
7 sur la base duquel ce rapport a été rédigé, soit enregistré aux seules
8 fins d'identification ; nous disposons des exemplaires nécessaires pour
9 les Juges. Nous verrons alors si le témoin reconnaît ces documents dont il
10 s'est servi pour rédiger son rapport et préparer sa déposition.
11 M. le Président (interprétation). - Je ne pense pas que l'on
12 conteste qu'il se soit servi de ces documents pour préparer son rapport.
13 Ceci n'est pas en litige.
14 Mme Résidovic (interprétation). - Je suis reconnaissante de
15 l'expérience qu'a l'accusation, mais j'adopte tout à fait la même
16 procédure que celle utilisée par l'accusation quand elle a cité le
17 Dr Calic. Je n'ai pas d'autre expérience que celle-ci et je crois
18 respecter les règles de procédure déterminées par la Chambre de Première
19 Instance.
20 Mme le Greffier (interprétation). – C'est le document de la
21 défense D 136/1.
22 Mme Résidovic (interprétation). - Je vous demanderai
23 d'examiner le sommaire de la table des matières de ce classeur que vous
24 avez sur la table.
25 Est-ce bien ce classeur qui contient les documents dont vous
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1 vous êtes servi pour préparer votre déposition d'aujourd'hui et pour
2 préparer votre rapport ? Avez-vous des problèmes pour trouver le canal
3 d'interprétation ?
4 M. Hadzibegovic (interprétation). - J'entends le canal anglais.
5 Mme Résidovic (interprétation). - Monsieur le professeur, je
6 vous demanderai d'ouvrir ce classeur et de me dire s'il s'agit bien là des
7 documents sur lesquels vous avez fondé votre avis d'expert ?
8 M. Hadzibegovic (interprétation). – Pourriez-vous répéter le
9 numéro ?
10 Mme Résidovic (interprétation). – Sont-ce bien là les documents
11 dont vous vous êtes servi pour rédiger votre rapport et préparer votre
12 avis d'expert ?
13 M. Hadzibegovic (interprétation). – Oui.
14 Mme Résidovic (interprétation). – Merci, je demanderai que ces
15 documents soient admis comme pièces à conviction.
16 M. Niemann (interprétation). - Objection à ce que ces documents
17 deviennent des pièces à conviction.
18 M. le Président (interprétation). - Quelle est la nature de
19 votre objection ?
20 M. Niemann (interprétation). - Ce ne sont pas ces documents sur
21 lesquels le témoin s'est basé pour rédiger ce rapport. Je fais objection
22 s'agissant de nombreux documents, d'abord parce que nous ne connaissons
23 pas leur source, il est impossible d'estimer leur fiabilité, ensuite
24 certains d'entre eux se présentent sous forme de déclarations ou de non-
25 déclarations. Ce sont des lettres écrites à Mme Residovic pour dire que
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1 telle ou telle interprétation est correcte. Alors je ne peux pas me servir
2 de cela pour attester de la recevabilité d'un dossier ou d'un document.
3 Pour certains des documents, si nous comprenons leur pertinence
4 nous n'aurons pas d'objection, mais la défense cherche à établir une
5 procédure par laquelle une déclaration et un dossier, un classeur énorme,
6 sont ainsi jetés dans le prétoire et nous, nous nous n'allons pas avoir la
7 possibilité d'objecter à tel ou tel document. Non, on nous les donne en
8 bloc alors que s'ils étaient présentés individuellement ce serait
9 différent.
10 Nous faisons objection à ce que ces documents soient présentés
11 de cette façon-là. Nous l'avons déjà dit, si nous pouvions bien établir
12 leur qualité nous pourrions le faire.
13 M. le Président (interprétation). – Voulez-vous dire que vous
14 faites objection à un document que quelqu'un a utilisé pour se faire une
15 opinion ?
16 M. Niemann (interprétation). - Ce n'est pas cela la base de mon
17 objection.
18 M. le Président (interprétation). - Je ne pense pas que ces
19 documents soient considérés comme étant la vérité.
20 M. Niemann (interprétation). - Mais ils sont présentés comme
21 étant quand même d'une teneur véritable.
22 M. Jan (interprétation). - Il y a tellement de déclarations dans
23 ce document... Vous pouvez poser une question au témoin à propos des
24 sources dont il s'est servi puisque ce n'est que son opinion. Vous
25 pourrez, au cours du contre-interrogatoire, lui demander les références
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1 qu'il a utilisées pour telle ou telle déclaration qu'il a faite.
2 M. Niemann (interprétation). - Cela me prive de mon droit à
3 faire objection au document, ce que précisément la défense a passé des
4 heures entières à faire. On a fait des objections du côté de la défense à
5 tel ou tel élément et j'ai dû passer des éléments au crible pour montrer
6 qu'ils étaient recevables et maintenant, la défense arrive, remet un
7 document énorme, un classeur plein de déclarations.
8 M. le Président (interprétation). – Non, il a simplement dit que
9 ce sont des documents sur lesquels il s'est basé. Cela ne veut pas dire
10 pour autant que ces documents soient véridiques. Il dit simplement qu'il
11 s'est fondé sur ces documents. Cela ne veut pas dire pour autant qu'ils
12 aient été authentifiés par qui que ce soit. Ce sont des documents dont il
13 est servi.
14 M. Niemann (interprétation). - Mon objection n'a plus de sens
15 dans une certaine mesure tant que l'on n'essaie pas de dire que ces
16 documents représentent la vérité.
17 M. le Président (interprétation). - Ils ne sont pas présentés
18 comme étant la vérité de quelque chose. Le témoin s'est fondé sur ces
19 documents pour voir ce qu'il allait dire, cela ne veut pas dire pour
20 autant que ces documents soient la vérité. Quelqu'un va peut-être tirer
21 une conclusion différente de ce qu'aura dit le témoin.
22 M. Niemann (interprétation). - Pourquoi alors demander le
23 versement de ce classeur au dossier ?
24 M. le Président (interprétation). - Simplement comme base du
25 rapport que le témoin a présenté.
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1 M. Niemann (interprétation). – Je suis désolé, je pensais que
2 Me Residovic, voulait le versement au dossier de ce document à d'autres
3 fins.
4 M. le Président (interprétation). - Cela peut être uniquement
5 versé au dossier comme étant les documents sur lesquels le témoin s'est
6 fondé pour préparer son opinion.
7 Mme Résidovic (interprétation). – Professeur, je vais vous
8 demander d'examiner ces cartes pour nous dire si elles ont été utilisées
9 par vous afin que vous prépariez votre avis d'expert et votre rapport.
10 Nous avons les cartes en nombre suffisant pour le témoin et pour
11 les Juges.
12 Je demanderai qu'une cote leur soit attribuée.
13 M. le Greffier (interprétation) - Il s'agit du document D 137/1.
14 Mme Résidovic (interprétation). – Monsieur le professeur, ces
15 trois bandes vidéo, vont d'abord recevoir une cote pour identification.
16 Par la suite, je vais vous les montrer et vous demander si vous avez
17 également utilisé ces bandes pour préparer votre rapport ainsi que votre
18 déposition.
19 M. le Greffier (interprétation) - C'est la pièce de la défense
20 D 138/1, D 139/1 et D 140/1.
21 Mme Résidovic (interprétation). – Ces bandes sont-elles bien
22 celles dont vous vous êtes servi pour préparer votre rapport d'expert ?
23 M. Hadzibegovic (interprétation). - Tout à fait.
24 Mme Résidovic (interprétation). – Merci. Je demande que ces
25 pièces reçoivent une cote aux fins d'identification et qu'elles soient
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1 admises au dossier comme étant la base à partir de laquelle le témoin
2 expert a
3 rédigé son rapport d'expert ainsi que sa déposition.
4 M. le Président (interprétation). – Elles sont admises aux fins
5 d'identification.
6 Mme Résidovic (interprétation). – Professeur, je vais vous
7 demander de préciser les contextes historique, politique et autres des
8 événements qui se sont produits dans ce qui est maintenant l'ex-
9 Yougoslavie après 1980 et ce qui s'est passé en Bosnie-Herzégovine, et
10 plus précisément dans la ville de Konjic après 1990. Cependant au vu de
11 vos conclusions d'expert et eu égard au fait que tous nous comprenons bien
12 que les événements contemporains ne se produisent pas hors du contexte
13 historique, je vais vous poser des questions qui portent sur un passé plus
14 lointain.
15 Je connais bien le principe historique selon lequel le présent
16 est la fille du passé et la mère de l'avenir. Si l'on ne comprend pas des
17 événements quelque peu éloignés dans le temps, il ne sera pas possible de
18 comprendre des événements qui auront été décisifs pour l'avenir de la
19 Bosnie-Herzégovine ainsi que pour un passé récent.
20 M. Niemann (interprétation). – Objection, soit on pose des
21 questions, soit on n'en pose pas, mais ceci n'est rien d'autre qu'un
22 discours, d'où mon objection.
23 M. le Président (interprétation). - Posez une question au
24 témoin.
25 Mme Résidovic (interprétation). – Merci. Dites-nous
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1 succinctement quand la Bosnie-Herzégovine est devenue un état et ce qui
2 s'est passé dans cette première formation étatique sur le territoire de la
3 Bosnie-Herzégovine.
4 M. Hadzibegovic (interprétation). – La Bosnie-Herzégovine est
5 mentionnée une première fois vers le milieu du Xème siècle dans l'ouvrage
6 du roi Konstantin en 904 comme étant un petit territoire se trouvant sur
7 les rives d'une rivière portant le même nom ainsi qu'une région qui est
8 passée entre les mains de voisins plus puissants.
9 Mme Résidovic (interprétation). – Je vous demanderai de mettre
10 la carte M 1 sur le rétro projecteur pour nous montrer les points
11 saillants de cette période historique et leur relation avec les événements
12 actuels ou les plus récents.
13 M. Hadzibegovic (interprétation). - Vous avez devant vous une
14 carte qui vous montre l'état de Bosnie médiévale. Ou plus précisément des
15 changements qui sont intervenus depuis le X ème siècle.
16 En effet, la partie que vous voyez en rouge s'appelait
17 Orione bosnione* mentionnée par le roi Konstantin au X ème. Vous avez en
18 rose un territoire plus large, c'est la Bosnie du XII ème siècle. Le trait
19 en rouge foncé que vous voyez tout autour vous montre la Bosnie au plus
20 beau de son essor en 1377, quand elle est devenue un royaume. La ligne
21 vert foncé vous montre les frontières actuelles de la Bosnie-Herzégovine.
22 Mme Résidovic (interprétation). – Pourriez-vous nous dire où se
23 trouve la Bosnie-Herzégovine ? Sa position topographique a-t-elle des
24 répercussions sur son histoire actuelle ?
25 M. Hadzibegovic (interprétation). – La Bosnie-Herzégovine est
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1 une contrée dont la position historico-géographique a été déterminée parce
2 ce qu'elle s'est trouvée au carrefour de plusieurs civilisations. Au
3 départ, elle était la division entre l'Est et l'Ouest, entre le
4 catholicisme et
5 l'orthodoxie. Puis, la Bosnie s'est retrouvée à la frontière de l'empire
6 des Habsbourg et de l'empire Ottoman, entre le catholicisme et l'islam. Il
7 y a aussi cette autre ligne de division de l'histoire moderne, puisque
8 vous avez cette ligne de division qui traversait la Bosnie et les pays
9 yougoslaves. C'était aussi la ligne de division entre l'Ouest et l'Est.
10 Cette région s'est toujours trouvée entre deux mondes. La partie orientale
11 penchant vers l'orthodoxie et l'Islam alors que la partie occidentale
12 penchait plutôt vers le catholicisme.
13 Dans une histoire moderne et au vu des divisions politiques qui
14 se sont produites, le bloc de l'Est rencontrait l'Ouest en Bosnie et en
15 Yougoslavie. Ceci correspond bien à la situation actuelle. La partie
16 occidentale et la partie orientale de ce qu'était la Yougoslavie se
17 trouvent de nouveau divisées au niveau de la culture et de la
18 civilisation.
19 Mme Résidovic (interprétation). – Professeur…
20 M. le Président (interprétation). - Nous allons faire une pause
21 et nous reprendrons à 16 heures.
22 (L'audience, suspendue à 15 heures 45, est reprise à 16 heures)
23 Mme Residovic (interprétation). - Pouvons-nous introduire à
24 nouveau le témoin, s'il vous plaît ?
25 (Le témoin est introduit dans la salle d'audience)
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1 M. le Président (interprétation). - Maître Residovic, je vous en
2 prie, vous pouvez poursuivre.
3 Mme Residovic (interprétation). - Merci, Monsieur le Président.
4 Professeur, je voulais vous présenter mes excuses, à vous et à
5 la Chambre de Première Instance, parce que j'ai oublié de vous avertir.
6 Nous
7 parlons tous les deux la même langue mais il faut savoir que tout ce que
8 nous disons doit être entendu et compris par tous les membres de la
9 Chambre de Première Instance. Il faut permettre aux interprètes de
10 transmettre le message à toutes les personnes qui en ont besoin.
11 Je vais vous demander de regarder autour de vous. Il y a une
12 paire d'écouteurs sur votre bureau. Veuillez simplement prêter attention à
13 ce qui est diffusé dans ce casque. Quand vous entendrez que la diffusion
14 est terminée, vous pourrez répondre à ma question. Vous comprenez ?
15 M. Hadzibegovic (interprétation). - Oui, je vous comprends très
16 bien.
17 Mme Residovic (interprétation). - Très bien.
18 Professeur, veuillez nous dire succinctement quelles sont les
19 caractéristiques des rapports existant entre les différents groupes
20 religieux, pendant la période ottomane et jusqu'à aujourd'hui.
21 M. Hadzibegovic (interprétation). - Au Moyen-Age, la Bosnie-
22 Herzégovine était une province multi-ethnique, au sein de laquelle
23 plusieurs religions étaient représentées. Ce caractère multi-ethnique est
24 resté une des caractéristiques de la province jusqu'à la chute de l'Etat
25 de Bosnie en 1453.
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1 Après la reprise par les Turcs, l’Islam et l'histoire de l'Islam
2 sont entrés dans la région et se sont superposés aux religions catholique
3 et orthodoxe. Nous en arrivons à la population d'aujourd'hui, celle que
4 l'on appelle la population bosnienne.
5 A la fin du XVème siècle, on assiste à l’apparition d'une
6 quatrième religion. Les Juifs venant d'Espagne se sont établis à Sarajevo,
7 ils y sont restés jusqu'à aujourd'hui.
8 Cette mozaïque de religions est restée une réalité en Bosnie
9 pendant 415 ans. Par la suite, elle s'est propagée au cours de la période
10 de domination par l'empire Austro-Hongrois.
11 Mme Residovic (interprétation). - Lorsque l'empire Ottoman s'est
12 retiré des Balkans, ce retrait a-t-il eu des conséquences très importantes
13 sur la population locale ?
14 M. Hadzibegovic (interprétation). - Le retrait de l'empire
15 Ottoman a duré quelque deux siècles ; il a également supposé le retrait de
16 la population musulmane, notamment la population turque. En fait, la
17 population est passée par l’Europe, le Bosphore, puis l’Anatolie où elle
18 s'est établie.
19 Ce retrait avait pour objet de faire quitter les territoires
20 perdus par la population. L'autre cause de ce transfert était
21 l’annihilation de tout le patrimoine légué par l'empire Ottoman. Ce fut le
22 cas en Grèce, puis par la suite en Serbie, et plus tard encore en
23 Bulgarie.
24 Mme Residovic (interprétation). - Merci.
25 Quel était le statut de la Bosnie-Herzégovine sous la domination
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1 de l'empire Austro-Hongrois ? J'aimerais notamment que vous nous parliez
2 de la création de la Bosnie-Herzégovine et de la création de sa
3 constitution.
4 M. Hadzibegovic (interprétation). - La Bosnie-Herzégovine est
5 passée sous le contrôle austro-hongrois en 1878. En fait, l'Autriche a été
6 mandatée par les puissances européennes au cours du congrès de Berlin. Les
7 rapports entre l’Autriche et la Hongrie ont été définis dans un autre
8 cadre.
9 La Bosnie a été annexée à l'empire Autro-Hongrois en 1908 et a
10 reçu une constitution distincte. La première disposition de cette
11 constitution était que la Bosnie-Herzégovine constituait un
12 corpus separatum. Elle n'appartenait ni à l'Autriche, ni à la Hongrie.
13 C'était un corpus separatum qui appartenait à l'empire des Habsbourg. Le
14 parlement de Bosnie devenait un des constituants de la vie politique de
15 cet empire. Il n'avait pas de pouvoir législatif mais il pouvait coopérer
16 avec les corps législatifs établis à Vienne.
17 Mme Residovic (interprétation). - Je vous remercie. Pouvez-vous
18 nous dire si la Bosnie-Herzégovine, sous le contrôle de l’empire Austro-
19 Hongrois, en tant que corpus separatum, couvrait le même territoire
20 qu’actuellement ?
21 M. Hadzibegovic (interprétation). - Au cours du congrès de
22 Berlin, la Bosnie-Herzégovine couvrait un territoire de 51 027 kilomètres
23 carrés ; ce sont les frontières que la Bosnie-Herzégovine avait quand elle
24 est devenue composante de la Yougoslavie en 1918.
25 Mme Résidovic (interprétation). – Cette composante que vous
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1 venez de mentionner apparaît, je crois, parmi les documents annexés à
2 votre rapport, je pense qu'il s'agit de l'annexe A1. Pourrions-nous
3 examiner cette constitution ? Je crois que le document a été placé sur le
4 rétroprojecteur. Vous avez déjà expliqué de quoi il s'agissait.
5 M. Hadzibegovic (interprétation). - Oui, ici se trouve une
6 traduction en anglais de la constitution.
7 Mme Résidovic (interprétation). – Oui, cela fait partie du
8 dossier que vous nous avez communiqué. Comment la Bosnie-Herzégovine a-t-
9 elle
10 été incorporée au royaume des Serbes, des Slovènes et des Croates après la
11 disparition de contrôle de l'Austro-Hongrie, après la première guerre
12 mondiale et ensuite quel est le statut qui lui a été attribué ?
13 M. Hadzibegovic (interprétation). - Le premier état yougoslave à
14 été formé en 1918. C'était en fait le royaume des Croates, de Serbes et
15 des Slovènes. Ce royaume fut formé le premier décembre 1918, la Bosnie-
16 Herzégovine est devenue une des composantes de cet état aux côtés des
17 territoires placés sous le contrôle de l'Autriche-Hongrie, notamment la
18 Slovénie, la Croatie et la Bosnie-Herzégovine. Ils ont constitué une seule
19 et même entité, se sont unis avec le royaume de Serbie qui comprenait la
20 Vojvodine et le Monte-Negro. Le 1er décembre, tous ces différents royaumes
21 et territoires se sont unis et les frontières territoriales de cette
22 entité ont été garanties par la première constitution de 1920, dans la
23 disposition 135 notamment qui protège les territoires de cette entité. Il
24 était précisé que cette entité formait une partie de l'empire Austro-
25 Hongrois, qu'elle n'était pas une unité distincte de l'empire.
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1 Mme Résidovic (interprétation). – Professeur, la disposition 135
2 de la constitution que vous venez de citer est-elle extraite du document
3 qui apparaît comme étant l'annexe A2 dans le classeur que vous avez entre
4 les mains ?
5 M. Hadzibegovic (interprétation). - Absolument.
6 Mme Résidovic (interprétation). – Je vous remercie. Professeur
7 pourriez-vous nous dire quelles étaient les circonscriptions
8 administratives et territoriales en Bosnie-Herzégovine au cours de la
9 période d'existence du royaume de Yougoslavie et sur quels critères
10 reposaient ces divisions, si
11 elles existaient ?
12 M. Hadzibegovic (interprétation). - Les divisions les plus
13 importantes en Yougoslavie ont été introduites par la dictature du
14 6 janvier 1929. Quand la dynastie et l'oligarchie serbes ont essayé de
15 mettre sur pied un état unitaire, ils ont essayé d'effacer les frontières
16 historiques et à cette époque-là ; l'état a été scindé en neuf banovines.
17 Les noms historiques n'ont pas été maintenus mais les banovines ont tiré
18 leur nom des rivières qui coulaient dans leur territoire. Toutes les
19 provinces étaient baptisées d'après le nom de certaines rivières. La
20 Bosnie a été scindée en quatre banovines. Sa tradition séculaire en tant
21 qu'état a été annihilée.
22 Mme Résidovic (interprétation). – Je vous remercie. Je vais
23 demander à l'équipe technique de nous diffuser l'image de la carte à la
24 page 1/3. J'aimerais que vous nous expliquiez les points indiqués sur
25 cette carte.
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1 Il suffit d'attendre que l'image de cette carte apparaisse sur
2 le rétroprojecteur, Monsieur le professeur.
3 Pouvez-vous nous dire ce que représente cette carte ?
4 M. Hadzibegovic (interprétation). - Elle montre les frontières
5 du royaume de Yougoslavie de 1929. On voit distinctement les neufs
6 banovines et l'on distingue le district de Belgrade. Puis-je demander que
7 la carte des frontières actuelles de la Bosnie-Herzégovine soit placée
8 par-dessus cette première carte ? Il s'agit d'un transparent.
9 Mme Résidovic (interprétation). – L'équipe technique peut-elle
10 nous aider, s'il vous plaît ?
11 M. Hadzibegovic (interprétation). - On voit ici en lignes
12 rouges, les frontières de la Bosnie-Herzégovine à l'heure actuelle. On
13 voit le territoire que nous avons vu tout à l'heure dans la carte D 18 et
14 ici, on voit très bien qu'effectivement, la Bosnie a été divisée entre
15 Vrasna, Drinska. Zetka et une autre banovine. Nous pouvons voir qu'une de
16 ces régions a été annexée à la Serbie.
17 Mme Résidovic (interprétation).– Pourriez-vous nous expliquer
18 les points qui apparaissent sur la carte 1/4, et j'aimerais que l'équipe
19 technique nous aide afin que l'image de cette carte apparaisse sur le
20 rétroprojecteur.
21 M. Hadzibegovic (interprétation). – Ici, dans le coin, on peut
22 voir les divisions qui correspondent aux différentes banovines. La carte
23 principale montre le résultat de l'accord Cvetkovic-Matcek, accord signé
24 le 26 août 1939, quatre jours avant le début de la seconde guerre
25 mondiale. En fait, cette carte montre bien que le principe unitaire de la
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1 Yougoslavie n'a pas fonctionné, que les Serbes et les Croates se sont mis
2 d'accord entre eux. Ils souhaitaient créer une Yougoslavie composée de
3 trois unités, l'une étant la Slovénie, l'autre la Croatie et la dernière
4 le territoire serbe.
5 Mme Résidovic (interprétation). – Pourriez-vous, en vous
6 appuyant sur la carte H1/4/1, nous expliquer le destin et l'évolution de
7 la Bosnie-Herzégovine.
8 M. Hadzibegovic (interprétation). – On peut voir que la Bosnie-
9 Herzégovine a été partiellement incluse dans la région de la Posavine, les
10 trois autres provinces ont été annexées par la Banovine croate et, dans la
11 partie sud-ouest de la Bosnie, qu'un certain nombre de comtés ont été
12 annexés à la Banovine croate. Le reste du territoire devait être intégré
13 au territoire serbe. Il s'agissait d'un accord, d'un compromis, passé
14 entre les Serbes et les Croates, et notamment les mouvements nationaux de
15 ces deux entités.
16 Mme Residovic (interprétation). - Monsieur le professeur, dans
17 votre rapport, et c'est souvent le cas dans le cadre d'une analyse
18 universitaire, vous parlez du projet de "Grande Serbie".
19 Pourriez-vous nous expliquer exactement les tenants et les
20 aboutissants de ce concept, et que signifiait-il plus exactement pour la
21 Bosnie-Herzégovine ?
22 Il serait utile que la cabine technique diffuse l'image de la
23 carte H1/5. Pourrait-elle également diffuser l'image de la carte H1/5/1,
24 afin que nous puissions voir quelle était la situation de la Bosnie-
25 Herzégovine telle que représentée sur cette carte ?
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1 M. le Président (interprétation). - Maître Residovic, excusez-
2 moi mais je ne vois pas quel est votre objectif, quels points vous
3 souhaitez mettre en relief. C'est très intéressant, c'est un exposé
4 historique absolument passionnant, là n'est pas la question, mais dans le
5 cadre de votre stratégie, de votre ligne de défense, quels sont vos
6 objectifs ?
7 Mme Residovic (interprétation). - Monsieur le Président, j'ai
8 dit que nous avions l'intention de citer à comparaître un témoin expert en
9 histoire qui nous permettrait d'avoir un aperçu rapide de l'histoire du
10 territoire qui nous concerne et qui pourrait nous expliquer quelles sont
11 les origines du conflit qui a éclaté au début des années 90 et qui a
12 abouti à la dissolution de la Yougoslavie.
13 Etant donné que mon client a été associé aux activités des
14 forces de Bosnie au cours des événements, étant donné que nous avons déjà
15 couvert l'histoire de 900 ans, que nous en sommes déjà quasiment aux
16 années 90 et que tout cela n'a pris que quelques minutes, il me semble que
17 nous pouvons encore prendre quelques minutes et couvrir tous les éléments
18 historiques qui nous paraissent importants pour les événements qui se sont
19 produits par la suite.
20 M. le Président (interprétation). - Je ne critique pas votre
21 style ou vos intentions mais je me demande ce que tout cela signifie. Vous
22 savez quels sont vos objectifs fondamentaux, vous savez très bien ce que
23 vous avez l'intention de faire, alors je ne vois pas très bien la
24 pertinence de tout ceci. Je parle en mon nom propre, évidemment, je ne
25 parle pas au nom de mes collègues. Peut-être ont-ils une opinion
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1 différente.
2 Nombre des événements historiques et des antécédents historiques
3 de la région n'ont jamais été le sujet d'un débat quelconque, ils ne sont
4 pas controversés. S'il y a controverse et dispute, il me semble qu’elles
5 portent plutôt sur ce qui se passe à l'heure actuelle et sur les
6 frontières actuelles, et non pas sur l'histoire passée de la région. Je
7 préfère toujours arriver à un but de la façon la plus rapide et la plus
8 efficace possible.
9 Mme Residovic (interprétation). - Monsieur le Président, Madame
10 et Monsieur les Juges, je partage votre préoccupation d'efficacité et de
11 rapidité. Mon témoin expert va bientôt se concentrer sur la région de
12 Konjic. Vous vous souviendrez que nous allons également parler de la
13 défense territoriale, du HVO, de la Republika Srpska... Pour comprendre
14 ces différents éléments, il faut bénéficier d'un certain contexte
15 historique et factuel. Je parle notamment pour les personnes qui n'ont pas
16 vécu comme nous dans la région pendant un certain temps. Il est très
17 important pour vous, notamment au moment de prendre vos décisions finales,
18 de savoir quel était le contexte de tous les événements qui se sont
19 produits dans la région. Je vais tâcher d’être succincte, d'accélérer le
20 rythme.
21 M. le Président (interprétation). - Tâchez de ne pas semer le
22 doute dans nos esprits en vous concentrant sur trop de détails. Cela
23 pourrait avoir l'effet inverse de celui que vous recherchez.
24 Mme Residovic (interprétation). - Merci, Monsieur le Président.
25 Monsieur le professeur, vous avez déclaré que nous voyons là une
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1 carte du projet appelé "Grande Serbie". Est-ce qu’il comprend certaines
2 parties du territoire de Bosnie-Herzégovine ?
3 M. Hadzibegovic (interprétation). - Oui. Tout le territoire, à
4 l'exception du territoire annexé à la Croatie, dans le sud-ouest et au
5 nord, dans la région de la rivière Sav*. Le reste de la Bosnie a été
6 attaché à la Serbie, ou plutôt au "territoire serbe", comme il était
7 appelé à l'époque.
8 Mme Residovic (interprétation). - Le principe de la "Grande
9 Croatie" se retrouve régulièrement dans le cadre de vos analyses
10 historiques et universitaires. Pourriez-vous, sur la carte H1/6, nous
11 indiquer ce que signifie ce principe sur le terrain? Que signifie-t-il
12 pour la Bosnie-Herzégovine ? L'équipe technique peut-elle nous aider à
13 obtenir l'image de la carte H1/6 sur l'écran, s’il vous plaît ?
14 M. Hadzibegovic (interprétation). - On voit sur cette carte, en
15 jaune, la région de l'Etat indépendant de Croatie tel que créé le
16 10 avril 1941 comme état pantin créé par l’Italie et l’Allemagne
17 fascistes.
18 Mme Residovic (interprétation). - Peut-on placer sur cette carte
19 le transparent montrant les frontières de la Bosnie-Herzégovine, la
20 carte H1/6/1 ? Je vais vous demander, monsieur le professeur, comment le
21 destin de la Bosnie-Herzégovine a été touché, modifié, par ce projet.
22 M. Hadzibegovic (interprétation). - On voit ici que l'ensemble
23 du territoire de Bosnie-Herzégovine avait été intégré dans l'Etat
24 indépendant de Croatie. Ceci représentait, en fait, la réalisation du
25 concept de Grande Croatie.
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1 Quand il y a des débats entre les historiens yougoslaves ou
2 entre historiens du monde entier, quant aux frontières entre la Serbie et
3 la Croatie, les extrémistes serbes souhaitent toujours rattacher la Bosnie
4 à la Serbie. Alors la frontière se trouve sur la rivière Una. Lorsque,
5 d'autre part, c'est la thèse de la Grande Croatie qui est soutenue, alors
6 la frontière correspond à la rivière Drina. En fait, ces deux intérêts se
7 sont toujours affrontés tout au long de l'histoire, et ce aux dépens de la
8 Bosnie-Herzégovine. On le voit bien sur cette carte, puisque, dans son
9 intégralité, le territoire de Bosnie-Herzégovine est absorbé par l'Etat de
10 Croatie.
11 Je me permets d’ajouter, à cet égard, que toutes ces
12 modifications, toutes ces évolutions, ont été accompagnées par la grande
13 souffrance de la population, qu'il s'agisse des Serbes, des Croates ou des
14 Musulmans.
15 Au cours de la seconde guerre mondiale, le nettoyage ethnique
16 était déjà incorporé, à la fois dans les programmes politiques et en
17 pratique. Par conséquent, il nous semble important de montrer quelles sont
18 les racines des maux qui se sont répétés au cours du XXème siècle en
19 Bosnie-Herzégovine. Cette dernière a été reconstruite trois fois. Elle a
20 pu renaître trois fois de ses cendres. Cela a supposé des destructions
21 humaines et matérielles terribles. C'est la raison pour laquelle nous
22 essayons de dire qu'il faut absolument trouver une solution à tous ces
23 problèmes, afin que ces événements ne se reproduisent jamais.
24 Mme Residovic (interprétation). - Ce concept radical des
25 Oustachis a, à l'autre extrême de l'éventail, en guise de pendant, le
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1 concept chetnik de la Grande Serbie. Pourriez-vous nous expliquer ce
2 dernier concept sur la carte H1/7 ? Je demanderai à l’équipe technique de
3 nous diffuser cette carte.
4 Une fois de plus, là aussi, on a la H1/7/1. Je vous demanderai
5 de superposer la Bosnie-Herzégovine sur cette carte pour voir les effets
6 de ce projet sur la Bosnie-Herzégovine.
7 M. Hadzibegovic (interprétation). - Voici une carte de la
8 Yougoslavie. Vous avez, en blanc, une zone montrant que toute la Bosnie-
9 Herzégovine a été absorbée dans la Serbie. Cela a été conçu de telle sorte
10 que cela a retrouvé vigueur au cours de cette guerre. Il fallait que ceci
11 s'étende jusqu’à Karlovad**, au nord, et reprenne tous les territoires.
12 Pas seulement la Bosnie-Herzégovine, mais aussi une partie de la Croatie,
13 là où la population serbe résidait. C’est là qu’est née l'idée d’avoir
14 tous les Serbes dans un seul et même Etat. Ceci correspond à l'histoire
15 contemporaine.
16 Mme Residovic (interprétation). - Pourriez-vous rapidement nous
17 dire quel était le programme du mouvement chetnik ? Les Juges ont
18 entendu certaines dépositions et veulent avoir des précisions sur ce
19 concept. Vous avez discuté de ceci dans les différents documents et plus
20 précisément dans l'annexe n° 6, l’annexe A-6.
21 M. Hadzibegovic (interprétation). - C’est peut-être l’extrait le
22 plus important du programme chetnik qui vous a été traduit en anglais.
23 L'auteur de ce programme s'appelait Draza Mihajlovic. C'était un
24 colonel de l'armée yougoslave. Il était également commandant de l'armée
25 Chetnik. Pendant un certain temps, il a également rempli les fonctions de
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1 ministre du roi en exil. Il était ministre d'un gouvernement lui aussi en
2 exil.
3 Mme Residovic (interprétation). - Ce programme implique-t-il,
4 pour être réalisé, que la population musulmane doive disparaître du
5 territoire de Bosnie-Herzégovine ?
6 M. Hadzibegovic (interprétation). - On fait ici référence à la
7 création de territoires serbes qui sont énumérés. Il est déclaré qu'il
8 faut que ces personnes soient d'origine ethnique pure. Il est également
9 envisagé que la population non serbe soit évacuée du territoire. Toute une
10 série de possibilités sont considérées depuis les tueries, en passant par
11 la persécution, l'exil, les expulsions, ce qui veut dire que ce programme
12 a servi aussi de base à la guerre qui a été menée.
13 Mme Residovic (interprétation). - Eu égard au fait que ces deux
14 projets, le projet Tcheknik et le projet Oustachis, ont trouvé leur
15 expression au cours de la seconde guerre mondiale, comment a réagi la
16 population musulmane et, plus précisément ces intellectuels, face aux
17 crimes commis contre les Serbes, les Juifs et d'autres groupes ethniques ?
18 M. Hadzibegovic (interprétation). - Par le biais des résolutions
19 adoptées par les Musulmans dans les villes les plus importantes en 1941.
20 Je voulais vous montrer que les crimes commis contre les serbes ont été
21 dénoncés. Cette population se dissocie des musulmans qui font partie du
22 mouvement Oustachis et qui ont participé à la perpétration de ces crimes.
23 C'est quelque chose qui a été mis en branle par des prêtres musulmans à
24 Sarajevo. Ces résolutions étaient passées à Sarajevo, Mostar, Bijejina,
25 Mostar notamment.
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1 Ceci constitue une des rares formulations anti-fascistes, une
2 des rares actions anti-fascistes prises en Europe.
3 Mme Residovic (interprétation). - Quelle est l'importance de
4 tout ceci, et plus précisément de cette lutte anti-fasciste du peuple de
5 Yougoslavie et de la Bosnie-Herzégovine pour l'Etat de
6 Bosnie-Herzégovine ?
7 M. Hadzibegovic (interprétation). - Au cours de la seconde
8 guerre mondiale, trois idées ont fusionné : celle de la grande Croatie,
9 celle de la grande Serbie et la troisième a été cette idée du mouvement de
10 libération anti-fasciste qui cherchait à réunir, à unifier les peuples de
11 Yougoslavie et de Bosnie-Herzégovine. Ce mouvement est sorti victorieux en
12 Bosnie-Herzégovine au cours de la seconde guerre mondiale.
13 Mme Residovic (interprétation). - Serait-il possible de voir la
14 carte H1/8 et 8.1 ? Elle nous permettra de recevoir vos explications quant
15 à la signification que ceci avait pour la population de Bosnie-Herzégovine
16 dans son combat anti-fasciste.
17 M. Hadzibegovic (interprétation). - C'est une carte de la
18 Yougoslavie créée au cours de la deuxième guerre mondiale et qui était
19 organisée en état fédéral avec six républiques sur un même pied d'égalité.
20 Ces républiques avaient les mêmes droits mais toute la population avait
21 les mêmes droits. Toutes les républiques présentaient des caractéristiques
22 ethniques particulières alors que la Bosnie-Herzégovine, qui était un état
23 multi-ethnique était, elle aussi, indépendante et avait autant de droits,
24 était sur le même pied d'égalité que les autres républiques de la
25 Yougoslavie. Cette carte est restée d'application jusqu’en 1992.
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1 Mme Residovic (interprétation). - Madame et Messieurs les juges,
2 nous en arrivons ainsi au terme de cet aperçu très rapide de l'histoire de
3 l'Etat de Bosnie-Herzégovine et de sa population. Je demanderai maintenant
4 au professeur de passer à l'histoire d'aujourd'hui, ce qui est, à toutes
5 fins pratiques, le but de votre déposition devant cette Chambre.
6 Veuillez-nous expliquer les caractéristiques principales de la
7 crise qui a éclaté en ex-Yougoslavie après 1980, après la mort du
8 Président de la République fédérative socialiste de Yougoslavie,
9 M. Joseph Broz Tito.
10 Pour ne pas se perdre dans les détails, je vous demanderai
11 d'abord si cette crise, au départ, était une crise politique ou plutôt
12 économique ?
13 M. Hadzibegovic (interprétation). - La mort de Joseph Broz Tito,
14 Président de la RFSY à l'époque, a accéléré la crise et la destruction de
15 la société yougoslave. Cette crise a d'abord été économique. Elle se
16 manifestait par une dette externe énorme qui représentait 22 milliards de
17 dollars américains, et même si des efforts ont été consentis en
18 instituant, par exemple, une commission de crise et un programme de
19 stabilisation économique à long terme, cette crise était trop profonde
20 pour être surmontée.
21 De ce fait, elle est devenue d'économique au départ, une crise
22 sociale et politique. L'idéal communiste a été mis en question. L’on s'est
23 mis à la recherche de nouvelles idées.
24 Mme Residovic (interprétation). - Y avait-il des différences
25 quant à la façon de gérer cette crise au sein de l'ex-Yougoslavie dans
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1 chacune des républiques ?
2 M. Hadzibegovic (interprétation). - Il est évident qu'il
3 existait des différences qui ne tenaient pas simplement à cette crise dont
4 je viens de parler mais à l'histoire qui avait précédé la crise. Chacun
5 avait sa façon de voir le développement social. La Slovénie et la Croatie
6 étaient les premières à vouloir développer une société démocratique avec
7 une économie de marché, davantage de démocratie dans le but ultime de
8 créer des états nationaux, alors que la Serbie, le Montenegro voulaient
9 créer un état centralisé et contrôlé depuis Belgrade.
10 Mme Residovic (interprétation). - Les choses étant ce qu'elles
11 étaient, quelle était la signification du mémorandum de l'académie Serbe
12 des sciences, publié en 1986 ?
13 M. Hadzibegovic (interprétation). - C’était une analyse réalisée
14 par des intellectuels de premier plan, qui étaient membres de l'académie
15 Serbe et qui avaient à leur tête Anton Izakovic. Il a été dit que la
16 Serbie était perdante depuis la constitution de 1974. En effet, par
17 rapport à la période précédant 1974, la Serbie n'était plus, en 1964,
18 qu'une république parmi six. Pour sortir de la crise, les intellectuels
19 ont proposé trois étapes. Au cours d'une première étape, la Serbie
20 proprement dite devrait renforcer, mieux asseoir son autorité. Deuxième
21 étape : centralisation en Serbie.
22 Troisième étape : création d'une grande Serbie. Voilà la première étape.
23 Slobodan Milosevic et ses disciples ont d'abord essayé, et y sont parvenus
24 d'ailleurs.
25 D'abord il fallait faire quelque chose pour avoir une meilleure
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1 homogénéité. Pour parvenir à cette fin Milosevic a utilisé plusieurs
2 institutions.
3 D'abord, il a nettoyé les médias de tous éditeurs et rédacteurs
4 en chefs rebelles. Il a aussi opéré des modifications dans la direction du
5 parti. Il a éloigné les modérés et lorsque qu'il a pris le contrôle des
6 médias et qu'il a affermi sa position au sein du parti, il a réglé le
7 problème de la désobéissance. Alors intervient la deuxième étape, celle de
8 la décentralisation en Serbie. Il fallait pour cela abolir les différentes
9 autonomies puisque qu'il y avait deux provinces autonomes, la Vojvodine et
10 le Kosovo. Il fallait aussi changer la direction au Monte-Negro, afin que
11 soit constitué un territoire qui permettrait à la Serbie d'être le
12 tremplin d'une expansion ultérieure et d'assurer le contrôle de toute
13 terre qui serait à l'extérieur de la Serbie et du Monte-Negro. Par le
14 biais des médias qu'il contrôlait déjà -les médias qui étaient entre les
15 mains de ses partisans-, des réunions politiques, des rassemblements de
16 masses ont été organisés dans diverses villes et les dirigeants modérés
17 ont été éloignés de leur poste pour être remplacés par des partisans de
18 Slobodan Milosevic.
19 Mme Résidovic (interprétation). – En résumé, les forces en
20 Serbie ont-elles réussi à mener à bien cette étape de centralisation et à
21 abolir l'autonomie de la Vojvodine et du Kosovo ?
22 M. Hadzibegovic (interprétation). - Un processus parallèle s'est
23 poursuivi. La résistance la plus vive a émané des Albanais qui refusaient
24 d'abandonner leur autonomie, puisqu'ils représentaient 90 % de la
25 population du Kosovo. Ils avaient leurs institutions nationales déjà
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1 constituées et leurs corps constitués, ils ne voulaient pas renoncer à
2 leur autonomie. Il y a eu des affrontements très féroces entre l'armée et
3 la police qui essayait de réprimer les manifestations du Kosovo.
4 A la suite de tous ces affrontements, les Albanais n'ont pas
5 réussi à conserver leur autonomie. La constitution a été amendée et le
6 28 mars 1989 ; la Serbie s'est dotée d'une nouvelle constitution. La
7 Serbie était centralisée. Slobodan Milosevic a été élu président et, à
8 Novisad, Podgorica et Pristina, les dirigeants ont juré allégeance à
9 Milosevic. Ce fut le résultat de ce mémorandum mais aussi de toutes les
10 grandes tendances politiques qui se manifestaient à l'époque dans le pays.
11 Mme Résidovic (interprétation). – Après 1990, après des
12 élections démocratiques en Slovénie et en Croatie, de nouvelles forces
13 démocratiques sont apparues dans le monde politique. Quelles sont les
14 réactions de Belgrade face à ces modifications ? Que dit en substance
15 cette devise lancée à Belgrade : "Tous les serbes dans un seul pays" ?
16 M. Hadzibegovic (interprétation). - Après que ces modifications
17 soient intervenues, et surtout après que le quatorzième congrès de la
18 Ligue Communiste de la Yougoslavie se soit soldé par un échec, puisque
19 qu'il avait été interrompu, puis repris et qu'à ce congrès la ligue des
20 communistes a fait une déclaration selon laquelle ils ne voulaient plus
21 avoir le monopole du pouvoir politique dans le pays, après toutes ces
22 modifications, il y a eu tout un processus qui a vu la disparition de la
23 Ligue
24 Communiste comme étant le seul élément de parti puisque l'on avait un
25 système monopartite qui était auparavant en place. Des mécanismes ont
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1 ainsi été mis en place, qui visaient à établir un bon équilibre entre
2 divers concepts politiques.
3 La Croatie et la Slovénie voulaient développer une société
4 démocratique, voulaient voir l'avènement de leurs propres états alors
5 qu'il y avait aussi un autre concept défendu par la Serbie et le Monte-
6 Negro qui consistait à préserver la Yougoslavie qui deviendrait une
7 fédération centralisée ayant pour centre Belgrade.
8 Mme Résidovic (interprétation). – Je vous avais posé une
9 question à propos de cette devise "Tous les Serbes dans un seul état".
10 Etait-ce un appel pour que soient modifiées les frontières existant alors
11 de la république de Yougoslavie ?
12 M. Hadzibegovic (interprétation). - Oui. Milosevic a dit à
13 l'époque qu'il ne reconnaîtrait pas les frontières républicaines si la
14 Yougoslavie se démantelait. Cela voulait dire qu'il voulait créer un état
15 à partir de composantes ethniques plutôt que de frontières historiques,
16 jetant ainsi les bases de cette idée d'avoir tous les Serbes dans un seul
17 état.
18 Ceci, après tout, a été repris dans le plan cadre qui couvrait
19 toute la Serbie, la Bosnie-Herzégovine et une certaine partie de la
20 Croatie où l'on trouvait une population majoritairement serbe. Ceci a créé
21 une situation : lorsque tout ceci avait été préparé, on voulait avoir
22 davantage d'homogénéité parmi les Serbes dans les autres territoires et le
23 mouvement national serbe a pris un tournant plus radical qu'en Croatie,
24 avec l'aide et la protection de l'armée populaire yougoslave qui, de plus
25 en plus, revêtait les
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1 caractéristiques d'une armée serbe.
2 En 1990, 60 % des forces armées étaient serbes alors que la
3 Serbie ne représentait démographiquement qu'une proportion bien plus
4 petite de la population.
5 Mme Résidovic (interprétation).– Pour éviter de parler de la
6 guerre qui a sévi en Slovénie et en République de Croatie, je vais vous
7 poser une question : après le retrait de la JNA du territoire des
8 républiques de Slovénie et de Croatie, où se trouvait l'essentiel des
9 forces de l'ex-JNA ?
10 M. Hadzibegovic (interprétation). - La plupart des forces ont
11 été déployées en Bosnie-Herzégovine. Toutes celles qui ont été retirées de
12 la Slovénie et de la Croatie ont été déployées en Bosnie-Herzégovine.
13 Trois corps supplémentaires ont même été appelés à se stationner là. Il y
14 en avait à Podgorica, à Novisad et à Bucice. On peut dire qu'il y avait
15 une surpopulation de l'armée en Bosnie et ceci a constitué ce que certains
16 ont qualifié d'occupation tranquille ou silencieuse. En définitive, cette
17 armée couvrait tout le territoire et avait le plein contrôle de toutes les
18 ressources, de toutes les artères de communication au sein de la Bosnie-
19 Herzégovine
20 Mme Residovic (interprétation). - Dans le bref aperçu que vous
21 avez fait de l'histoire de Bosnie-Herzégovine, vous avez montré que tout
22 au long de son histoire, la Bosnie-Herzégovine a été un état multi-
23 ethnique. Je vais vous demander d'examiner la carte H1/9, ainsi que la 9.1
24 pour nous montrer quelle était la situation ethnique en Bosnie-Herzégovine
25 avant que la guerre éclate en 1992.
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1 Je demanderai à l'équipe technique de nous diffuser ces cartes.
2 M. Hadzibegovic (interprétation). - Voici une carte ethnique de
3 la Bosnie-Herzégovine établie à partir du recensement et des chiffres
4 obtenus du recensement de 1988-1991. Nous voyons la composition ethnique
5 de la population. En bleu, les Musulmans ou Bosniens, en brun les Croates,
6 en jaune les Serbes et en bleu pâle les autres. Cette carte vous montre
7 que la Bosnie-Herzégovine comptait 109 municipalités, mais aucune d'entre
8 elles n'était ethniquement pure.
9 Mme Residovic (interprétation). - Vous venez de nous dire,
10 Professeur, que chacun de ces cercles représente une municipalité, que
11 l'on y voit la ventilation par groupes ethniques. Ces populations étaient-
12 elles les seules à vivre en Bosnie-Herzégovine juste avant que la guerre
13 éclate en 1992 ?
14 M. Hadzibegovic (interprétation). - Non, il y avait d'autres
15 ethnies d’après le recensement de 1991. Il existait soixant-dix
16 déclarations d'origines différentes. Mais, en plus des Serbes, des Croates
17 et des Musulmans, de fait, il y avait vingt groupes ethniques
18 supplémentaires qui vivaient en Bosnie-Herzégovine. C'était véritablement
19 une communauté multiethnique.
20 C'était une caractéristique permanente de la Bosnie-Herzégovine
21 depuis le Moyen-Age jusqu'à aujourd'hui.
22 Mme Residovic (interprétation). - Les élections eurent lieu
23 en 1990. Quelles en furent les résultats ? Quels furent les partis
24 politiques qui obtinrent le plus de sièges à l'assemblée de Bosnie ?
25 M. Hadzibegovic (interprétation). - Ces élections ont eu lieu en
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1 novembre 1990. Les partis nationaux sont sortis vainqueurs. Il y a eu le
2 parti de l'action démocratiques, le parti musulman qui a recueilli la
3 majorité des voix, le plus de voix.
4 Il y a 240 sièges au Parlement. Le SDA en a conquis 86, à savoir
5 35,8 % des voix. S'agissant du parti social-démocrate serbe, il a gagné
6 72 sièges soit 30 % des sièges. L'Alliance démocratique croate a gagné
7 44 sièges, soit 17,33 %. Les partis nationaux avaient la majorité absolue
8 des sièges : 202 sur 240 sièges. Les autres partis ont obtenu 38 sièges.
9 Je ne me rappelle plus exactement du pourcentage de chacun des petits
10 partis.
11 Mme Residovic (interprétation). - La période dont vous nous
12 parlez à l'heure actuelle est celle qui a vu la dissolution de la
13 Yougoslavie. Alors pouvez-vous nous dire si la Bosnie-Herzégovine, en tant
14 qu'une des entités fédérales de la RSFY, et ses dirigeants politiques ont
15 eu une influence importante sur la dissolution de la Yougoslavie et
16 pouvez-vous également nous dire quelles étaient les grandes lignes de la
17 résolution mises en avant par le Président Izetbegovic et qui sont citées
18 dans votre rapport ?
19 M. Hadzibegovic (interprétation). - J'ai déjà précisé quelles
20 étaient les différences qui existaient entre les différentes républiques
21 en Yougoslavie. J'ai déjà expliqué que les concepts de la Slovénie et de
22 la Croatie étaient différents de ceux de la Serbie et du Montenegro. Les
23 deux républiques les plus faibles, à savoir la Bosnie-Herzégovine, ont à
24 l'époque essayé de réagir et d'éviter la guerre.
25 Les Présidents des républiques et des provinces autonomes se
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1 sont rencontrés six fois pour essayer de trouver une solution à cette
2 crise constitutionnelle. La dernière tentative a été menée par le
3 Président Gligorov et Izet Begovic. Ils ont essayé de trouver un compromis
4 entre les deux concepts : ils ont proposé d'opter pour la préservation,
5 ils ont proposé une alliance d'états, une alliance de républiques. Ils
6 voulaient préserver une identité yougoslave. La Slovénie et la Croatie ont
7 adopté des décisions visant à la proclamation de leur indépendance et à la
8 création de leur état-nation.
9 Mme Residovic (interprétation). - Ces positions ont-elles eu
10 des résultats concrets ?
11 M. Hadzilegovic (interprétation). - Non, ce programme n'a pas eu
12 de résultats concrets et la paix n’a pas pu être préservée.
13 Mme Residovic (interprétation). - Professeur, vous venez de
14 préciser un certain nombre d'éléments, mais ce programme politique fait-il
15 partie des documents sur lesquels vous vous êtes basé pour faire votre
16 rapport ? N'est-il pas celui qui apparaît à l'annexe D 1 ?
17 M. Hadzilegovic (interprétation). - En effet.
18 Mme Residovic (interprétation). - Je vous renvoie à certains
19 événements, à certains éléments qui concernaient la Bosnie--Herzégovine de
20 cette période. Pouvez-vous me dire quelle était la position des trois
21 partis politiques les plus importants, c’est-à-dire le SDS (le parti
22 serbe), le SDA (le parti musulman) et le SDZ (le parti croate) ? Quelle
23 était la position de ces trosi partis vis-à-vis de l’indépendance de la
24 Bosnie-Herzégovine ?
25 M. Hadzilegovic (interprétation). - Les partis nationalistes
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1 ont coopéré parce qu'ils voulaient gagner les élections et prendre la
2 place des communistes au pouvoir. Après cette première coopération, chacun
3 des partis a suivi sa propre ligne politique ; ils n'avaient pas la même
4 opinion
5 concernant la survie de la Boznie-Herzégovine.
6 Mme Residovic (interprétation). - Vous voulez dire le SDA ?
7 M. Hadzilegovic (interprétation). - Non, excusez-moi, je veux
8 dire que le parti de l'action démocratique et le parti de l'union
9 démocratique croate ont coopéré très étroitement et dès le départ. Ils
10 souhaitaient la création d'une Bosnie-Herzégovine souveraine et
11 indépendante alors que le SDS souhaitait qu’elle reste une des composantes
12 de la Yougoslavie.
13 Mme Residovic (interprétation). - Professeur, quels sont les
14 facteurs-clés qui ont conduit à la création de la Bosnie-Herzégovine comme
15 un état indépendant vers la fin de 1991 et le début de l'année 1992 ?
16 M. Hadzibegovic (interprétation). - Plusieurs facteurs sont
17 intervenus. Tout d'abord, il existait une longue tradition historique en
18 tant qu'état, il existait une réelle identité de la Bosnie-Herzégovine
19 comme état. Cette tradition restait très vivante, que ce soit sous
20 l'empire Ottoman ou sous l'empire Austro Hongrois. Un autre facteur est
21 très important, celui du référendum par le biais duquel la majorité de la
22 population a manifesté son désir de voir la Bosnie-Herzégovine devenir
23 indépendante. Le troisième facteur est qu'il y a eu un réel combat pour
24 maintenir l'indépendance de la Bosnie-Herzégovine.
25 Tels sont les principaux éléments qui ont abouti à la création
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1 de la Bosnie-Herzégovine comme un état indépendant. Un facteur-clé est la
2 reconnaissance de la Bosnie-Herzégovine en tant qu’état par l'Uunion
3 Européenne et par d'autres payes. Il y a aussi le fait qu'elle ait été
4 reconnue
5 comme un membre des Nations Unies.
6 Mme Residovic (interprétation). - Quel a été le rôle joué par
7 l'ex-JNA dans la dissolution de l'ex-Yougoslavie ? Quel a été son rôle
8 dans la guerre qui a éclaté par la suite ?Je vous demande d'être
9 extrêmement bref et je vous demanderai de vous centrer davantage sur les
10 caractéristiques historiques plutôt que militaires de cette question.
11 M. Hadzibegovic (interprétation). - En fait, la JNA était un
12 bastion du nationalisme. Je ne parle pas seulement de l'armée yougoslave
13 populaire mais simplement de la direction en Yougoslavie à l'époque. La
14 JNA a commencé à armer et à protéger une partie de la population
15 seulement. En fait, c’est devenue une armée constituée par une seule
16 ethnie, elle a perdu son caractère yougoslave, elle était constituée par
17 un seul groupe ethnique. Son rôle de garant de la constitution de la
18 Yougoslavie a complètement disparu. La JNA protégeait les Serbes en
19 Croatie et en Bosnie-Herzégovine. Elle les a armés, elle les a protégés et
20 tout cela visait à la création d'une grande Serbie. Je résume vraiment la
21 question.
22 Mme Residovic (interprétation). - Vous avez déclaré que le SDS,
23 en tant qu'un des partis ayant remporté les élections en
24 Bosnie-Herzégovine en 1990, s’était prononcé contre l'indépendance de la
25 Bosnie-Herzégovine en tant que république de SDS, il s'était opposé au
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1 fait que la Bosnie-Herzégovine puisse jouir d'un statut égal à celui des
2 autres républiques. Pourriez-vous nous dire quelles mesures ont été prises
3 par les dirigeants du SDS au cours des mois qui ont suivi les élections,
4 et notamment à la veille de la guerre en 1992 ?
5 M. Hadzibegovic (interprétation). - Le parti démocrate serbe,
6 après les élections, a essayé de s'assurer le soutien de Belgrade et a
7 commencé à essayer de créer un état dans l'état, en Bosnie-Herzégovine. Il
8 a établi des liens avec la JNA et il a été l'un des partis politiques qui
9 ont présidé à la division de la Bosnie-Herzégovine. En Bosnie-Herzégovine,
10 dès lors qu'il y avait présence de populations serbes ou une majorité
11 serbe, ils ont commencé à mettre sur pied des régions autonomes. Cinq
12 régions autonomes ont été créées en 1991. Par la suite, une assemblée du
13 peuple serbe a été créée en Bosnie-Herzégovine et cette assemblée a adopté
14 un certain nombre de décisions qui visaient à la création d'autres
15 structures politiques destinées à la population serbe de
16 Bosnie-Herzégovine. Ensuite des municipalités serbes ont été créés.
17 Ces municipalités serbes étaient établies de deux façons
18 différentes : soit elles étaient créés dans les régions où les serbes
19 représentaient la majorité de la population -ce qui permettait de
20 constituer une municipalité serbe-, soit cette municipalité était créée
21 quand les serbes étaient minoritaires au sein d'une communauté. Même dans
22 ces cas, il y avait création d’une municipalité serbe. L'objectif était de
23 créer une république serbe unifiée en Bosnie-Herzégovine.
24 Le SDS a également dressé un nouveau programme, qui établissait
25 comment le peuple serbe devait agir en cas de situation de crise. Ce
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1 programme a été adopté dans les municipalités constituées d'une majorité
2 et dans celles qui étaient constituées d'une minorité serbe.
3 Le plan visait à établir des structures de pouvoir, à établir
4 des structures de défense organisées et le programme prévoyait que toutes
5 les
6 municipalités devaient fusionner conformément au plan que j'ai fourni dans
7 le cadre de la documentation annexe. Bien sûr d'autres documents indiquent
8 comment cette expansion territoriale était programmée. Tout cela s'est
9 fait dans le plus grand secret. Là où la population serbe représentait une
10 minorité, ce processus a été mis en place secrètement. Clandestinement des
11 conseils ont été établis localement, des conseils municipaux ont mis sur
12 pied d'autres institutions comme des comités, des cellules de
13 consultation ; chacun se voyait attribuer une tâche bien précise pour
14 organiser la population. Il fallait déjà établir des fichiers, des lignes
15 de communication pour contrôler la circulation de biens, etc.
16 M. Jan (interprétation). - En fait, vous dites la même chose que
17 le Pr Calic, me semble-t-il. Ce n'est qu'une répétition de ce qui a été
18 dit. Vous ne pensez pas que la déclaration précédente suffit dans cette
19 affaire ?
20 Mme Residovic (interprétation). - Monsieur le juge, il est
21 possible qu'une partie de ce rapport d'expert coïncide avec les
22 conclusions du rapport du Pr Calic. Nonobstant, certaines des conclusions
23 de ce rapport sont différentes du rapport précédent. C'est pourquoi nous
24 avons jugé nécessaire de présenter notre propre expert et ses propres
25 opinions sur les mêmes sujets.
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1 Professeur, vous avez déclaré qu’en 1991, le SDS avait mis sur
2 pied le programme d'homogénisation ethnique de la Bosnie-Herzégovine et
3 qu'il l'avait fait en secret. Pourriez-vous nous dire si les représentants
4 du SDS ont rendu leurs opinions et leurs intentions publiques à un moment
5 donné ?
6 M. Hadzibegovic (interprétation). - Oui, en effet. Dès cette
7 époque, Radovan Karadzic le Président du SDS, commençait à se manifester
8 ouvertement au sein du parlement de Bosnie-Herzégovine.
9 Mme Residovic (interprétation). - Avant d'aborder ce sujet
10 précis, j'aimerais demander à la cabine technique de diffuser la cassette
11 qui porte le numéro 1 et qui fait partie des éléments vidéo sur lesquels
12 vous avez basé votre rapport.
13 La cabine technique peut-elle diffuser cette séquence, s'il vous
14 plaît ?
15 L'interprète - "Ce que vous faites est mal, vous voulez que la
16 Bosnie-Herzégovine emprunte ce chemin, ce chemin de souffrance et ce
17 chemin infernal qu'a choisi la Slovénie. Vous condamnez la Bosnie-
18 Herzégovine, la population de Bosnie-Herzégovine ne pourra pas se défendre
19 si la guerre éclate. De telles situations demandent que je prononce
20 certaines paroles. Comment empêcher que des gens viennent tuer toute la
21 population de Bosnie-Herzégovine ?" Fin de la cassette.
22 Mme Résidovic (interprétation). – Je vous remercie. Pourriez-
23 vous nous dire quel était l'objectif de ce message prononcé par Karadzic ?
24 En tant qu'expert, quelle est votre opinion sur cette question ?
25 M. Hadzibegovic (interprétation). - Avant tout, je crois que
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1 l'objectif de ce message était d'avoir un effet dissuasif sur les partis
2 de Bosnie-Herzégovine qui souhaitaient proclamer son indépendance de la
3 Bosnie-Herzégovine. Deuxièmement, c'était un avertissement à la population
4 serbe, c'était une indication de ce qu'elle devait faire.
5 Mme Résidovic (interprétation). – Monsieur le Président, Madame
6 et Monsieur les Juges, nous n'avons vu qu'une séquence
7 extrêmement brève de cette cassette vidéo qui nous a été fournie par
8 M. Hadzibegovic. Je demande à présent le versement au dossier de cet
9 extrait précis.
10 M. le Président (interprétation). - Quel est l'élément que vous
11 souhaitez verser au dossier, la cassette ?
12 Mme Résidovic (interprétation). – Non, Monsieur le Président,
13 simplement le discours de Karadzic face à l'assemblée de Bosnie-
14 Herzégovine, le 14 octobre. Je demande le versement au dossier de cette
15 séquence précise, parce qu'elle est un des fondements de l'expertise qui
16 est donnée par le Pr Hadzibegovic. Je crois que cette séquence est
17 parfaitement pertinente, notamment au vu des évolutions qui ont vu le jour
18 par la suite en Bosnie-Herzégovine
19 M. le Président (interprétation). - Je ne sais pas exactement
20 comment vous avez obtenu cette cassette, maître.
21 Mme Résidovic (interprétation). – Le professeur nous a donné
22 nombre d'informations concernant cette séquence vidéo. Il me semble qu'il
23 a cité toutes les sources desquelles il s'était inspiré. Il a également
24 été témoin de ces événements. C'est un historien ; ce document vidéo a
25 servi de base également à sa recherche. C'est pourquoi je pense que cette
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1 séquence est parfaitement pertinente et directement liée aux événements
2 qui sont au centre de ces débats.
3 M. le Président (interprétation). - En quoi cela est-il
4 pertinent ? Quel est le lien qui existe entre cette séquence et ce qu'est
5 en train de dire le professeur ? A-t-il filmé cette séquence ? D'où vient
6 cette cassette ? L'a-t-il apporté ? Comment est-elle arrivée entre ses
7 mains ? Comment à elle
8 était réalisée ?
9 Mme Résidovic (interprétation). – Monsieur le Président, j'ai
10 essayé d'expliquer cela. C'est une cassette originale tirée de la
11 télévision de Sarajevo. Je crois qu'elle nous a été communiquée par
12 l'Institut de recherche sur les crimes de guerre. C'est ainsi que nous
13 l'avons reçue. Le Professeur, d'autre part à lui aussi été témoin de cette
14 période historique. Il a été témoin de ce discours, comme nous l'avons
15 tous été à l'époque d'ailleurs. Toutes les télévisions du monde ont
16 diffusé ces images. Monsieur le Président, cette séquence a été versée au
17 dossier dans le cadre de l'affaire Tadic auparavant et, étant donné
18 qu'elle est directement liée à Karadzic, je crois qu'elle est pertinente
19 de toute façon aux yeux de ce tribunal.
20 M. le Président (interprétation). - Tout dépend de la façon dont
21 elle est arrivée ici. Qui l'a filmée ? Qui en revendique la réalisation ?
22 C'est de cela que dépend le fait que cette pièce soit versée ou pas,
23 admise ou pas. Je pense qu'elle est recevable et qu'elle est pertinente,
24 mais j'aimerais bien savoir par qui cette cassette est arrivée ici.
25 Mme Résidovic (interprétation). – Conformément à l'article 89…
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1 Monsieur le Président êtes-vous en train de dire que vous déclarez que
2 cette pièce est admissible au dossier ? Ai-je bien compris ce que vous
3 avez dit Monsieur le Président ?
4 M. le Président (interprétation). - Si ce témoin déclare et
5 affirme que c'est lui qui a produit cette cassette, et s'il a
6 effectivement été témoin de ce qui s'est passé, il me semble qu'il
7 pourrait lui-même en demander le versement au dossier, s'il revendique une
8 telle chose.
9 Mme Résidovic (interprétation).– Professeur, avez-vous été le
10 témoin de ce discours prononcé par Karadzic, vous, en tant que citoyen de
11 Bosnie-Herzégovine ?
12 M. Hadzibegovic (interprétation). - J'étais à Sarajevo au
13 moment où ce discours a été prononcé. J'en ai été le témoin. A l'époque,
14 nous n'avions pas d'électricité, je n'ai pas pu voir les images à la
15 télévision. Au cours de la période de temps où nous avions de
16 l'électricité, nous avons pu voir ces images car elles ont été rediffusées
17 par la suite. C'est un discours qui a choqué tous les citoyens de Bosnie-
18 Herzégovine. Si le président d'un parti, dont il est bien connu qu'il
19 entretient des liens avec Belgrade et la JNA, dont on sait bien que la JNA
20 a pris le contrôle en Bosnie, déclare de telles choses, bien évidemment on
21 est choqué. Très rapidement, le 6 avril, lorsque l'indépendance de la
22 Bosnie-Herzégovine a été proclamée, j'étais présent. J'étais présent
23 lorsque la population dans la rue est devenue la cible de tireurs. C'est
24 ce qui s'est passé tout de suite après ce discours.
25 M. le Président (interprétation). - Comme je le dis, ce n'est
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1 pas que vous n'avez pas été un témoin de la diffusion de cette cassette,
2 mais ce n'est pas la même chose que d'avoir produit vous-même cette
3 cassette. Vous avez dit qu'elle vous avait été communiquée par l'institut
4 dont vous avez parlé, par un membre de l'institut qui a filmé cette prise.
5 Les membres de l'institut d'où provient cette cassette la présentent comme
6 étant une casquette de l'institut, c'est quelque chose d'assez différent.
7 Mme Résidovic (interprétation). – Monsieur le Président, Madame
8 et Monsieur les Juges, le témoin a communiqué cette cassette
9 parce qu'elle fait partie des documents sur lesquels il a fondé sa
10 recherche. Elle n'a pas été donnée au témoin par la défense.
11 M. le Président (interprétation). - Dans ce cas, je pense que
12 cette pièce peut être reçue et admise au dossier.
13 Mme Résidovic (interprétation). – Merci, Monsieur le Président.
14 Pourrait-on donner la cote de ce document ?
15 Mme le Greffier – La cassette portera le numéro suivant : pièce
16 de l'accusation D 141/1.
17 M. le Président (interprétation). - C'est une des cassettes qui
18 a été enregistrée aux fins d'identification ? Car trois cassettes ont été
19 enregistrées aux fins d'identification. Les pièces D 138 à D 140 ? Cela
20 appartient-il à ce groupe ?
21 Mme le Greffier – Oui, il me semble que cette cassette fait
22 parti de ce groupe. Je ne sais pas laquelle de ces cassettes est celle qui
23 nous concerne à présent, mais je crois qu'elle en fait partie. C'est
24 pourquoi je préfère attribuer à cette cassette une cote distincte et
25 séparée.
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1 Mme Résidovic (interprétation). – Merci. Monsieur le Président
2 j'attire votre attention sur l'heure : il est 17 heures 30. Je ne sais pas
3 si le moment est bienvenu pour suspendre l'audience.
4 M. le Président (interprétation). - Absolument. Le moment est
5 bien choisi pour nous arrêter mais nous allons avoir une audience à huis
6 clos pour tenir une conférence de mise en état afin que nous sachions
7 exactement où nous en sommes et que nous puissions établir les travaux à
8 venir. Nous allons revenir dans cinq minutes et faire une audience à huis
9 clos pour mener à bien une conférence de mise en état.
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11 (L'audience, suspendue à 17 heures 30, est reprise 17 heures 40)
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25 (expurgée)
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14 Pages 9883 – 9900 expurgées en audience à huis clos
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25 (L'audience est suspencue à 18 heures 20)