Tribunal Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia

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1 TRIBUNAL PENAL INTERNATIONAL AFFAIRE N° IT-96-21-T

2 POUR L'EX-YOUGOSLAVIE

3 29 mai 1998

4 (L'audience est ouverte à 10 h 10.)

5

6 M. le Président (interprétation) - Bonjour Mesdames et Messieurs

7 les Juges. Les parties peuvent-elles se présenter ?

8 M. Niemann (interprétation). - Bonjour Madame et Messieurs les

9 Juges, je suis Maître Niemann et je suis présent en audience aujourd'hui

10 en compagnie de Me Turone, de M McHenry et de M. Rubert*.

11 M. le Président (interprétation) - Et pour la défense ?

12 Mme Residovic (interprétation) - Bonjour Madame et Messieurs les

13 Juges, je m'appelle Edina Residovic, je défends M. Zejnil Delalic en

14 compagnie de Me O’Sullivan, professeur au Canada.

15 Je crois qu'il y a peut-être eu méprise hier. Les témoins que

16 nous avions cités apparaissaient déjà dans la liste des témoins. Je

17 voudrais attirer votre attention sur le fait que cette liste est datée du

18 20 mai. Ils étaient censés être les témoins B et C. Il s'agit des témoins

19 Delalic et Ciso. Excusez-moi, si nous avons semé la confusion.

20 M. Duric (interprétation) - Je suis avocat de Croatie. Je suis

21 présent en audience aujourd’hui en lieu et place de Me Kusmanovic et

22 Me Olujic qui sont absents pour des raisons professionnelles et nous

23 défendons M. Zdravko Mucic. Je vous remercie.

24 M. le Président (interprétation) - Toutes les parties se sont-

25 elles présentées ?

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1 M. Karabdic (interprétation) - Bonjour Madame et Messieurs les

2 Juges, je m’appelle Salih Karabdic, avocat de Sarajevo, et je défends

3 M. Hazim Delic.

4 Mme McMurrey (interprétation) - Bonjour Madame et Messieurs, je

5 m’appelle Cynthia McMurrey, et c’est avec Maître Nancy Boler que nous

6 défendons M. Esad Landzo.

7 M. le Président (interprétation) - Je vous remercie. Merci de

8 vos explications Maître Résidovic. La Chambre de première d'instance se

9 fonde effectivement sur la liste des témoins pour organiser son travail.

10 Pourriez vous faire entrer le témoin, s'il vous plaît ?

11 (Le témoin est introduit dans le prétoire)

12 Mme Residovic (interprétation) - Puis-je commencer ?

13 M. le Président (interprétation) - Je vous rappelle, Monsieur,

14 que vous témoignez sous serment.

15 Mme Residovic (interprétation) - Bonjour Monsieur Ciso, j’espère

16 que vous vous êtes bien reposé et que vous vous sentez mieux ce matin.

17 M. Ciso (interprétation) - Je me sens beaucoup mieux, je vous

18 remercie.

19 Mme Residovic (interprétation) - Hier, je vous avais demandé

20 d'attendre l'interprétation de mes questions avant de prendre la parole.

21 Je vous demanderai de faire la même chose aujourd'hui de manière à ce que

22 les interprètes n’aient pas besoin de nous interrompre pour nous demander

23 de procéder de cette façon.

24 Hier, vous nous avez dit que vous aviez mis au point un montage

25 vidéo avec Elvir, Dzafer Delalic et l'aide d’un journaliste de Bosnie-

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1 Herzégovine. Est-ce exact ?

2 M. Ciso (interprétation) - Oui, je me souviens avoir dit cela.

3 Mme Residovic (interprétation) - Pourriez-vous nous dire ce que

4 vous avez fait de ce premier montage vidéo ?

5 M. Ciso (interprétation) - En ce qui concerne ces deux,

6 trois cassettes, premier montage, nous les avons apportées à Zagreb et

7 nous les avons remises à Ekrem Milic, le journaliste. M. Melic Selik*, qui

8 avait participé à la guerre en Bosnie, a saisi cette occasion pour mettre

9 en exergue certains aspects très importants pour le travail du journaliste

10 Ekrem Milic.

11 Mme Residovic (interprétation) - M. Milic considérait-il qu’il

12 disposait à l’époque d’une documentation suffisante et avait-il une idée

13 de la manière dont on pourrait utiliser cette cassette ?

14 M. Ciso (interprétation) - Ekrem Milic nous a dit qu'il allait

15 voir ces premiers montages et qu’il lui était plus facile naturellement de

16 travailler avec deux ou trois cassettes plutôt qu'avec une trentaine.

17 Il a donc emporté ces cassettes. Il nous a fait savoir que par

18 le truchement de Vejsil, il nous ferait savoir ce qu'il avait fait de ces

19 cassettes. Il nous a dit qu'il rédigerait un texte pour accompagner ces

20 cassettes vidéo. Ensuite nous devions ultérieurement revoir ce texte à

21 Vienne en parallèle avec la vidéo.

22 Mme Residovic (interprétation) - Que vouliez-vous obtenir avec

23 cette vidéo ?

24 M. Ciso (interprétation) - Au départ, il s'agissait de récuser,

25 de contrecarrer les articles très péjoratifs qui avaient été publiés en

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1 Croatie concernant Zejnil Delalic même et, d'une manière générale, la

2 situation qui régnait. C'était une sorte de contre-offensive, une campagne

3 pour contrecarrer ce que disait à l'époque la presse en Croatie.

4 Mme Residovic (interprétation). - En ce qui concerne la

5 préparation de cette vidéo, ce travail s'est-il terminé avec la cassette

6 remise à Zagreb ou avez-vous réalisé un travail plus poussé par la suite

7 pour le montage ?

8 M. Ciso (interprétation). - Je n'ai pas arrêté de participer à

9 tout cela à ce moment-là. En fait, nous avons pratiquement terminé notre

10 travail à Vienne puisque nous attendions ce que M. Ekrem Milic allait

11 faire. Nous attendions de recevoir son texte, ce qui était prévu

12 rapidement.

13 Dzemal m'a dit que, dix jours après environ, Ekrem avait renvoyé

14 la cassette avec ses commentaires, avec le commentaire qui devait

15 accompagner la projection de la cassette et avec le texte que nous étions

16 censés intégrer dans la version définitive de la cassette. Il nous a donné

17 quelques indications sur la manière dont nous devions procéder pour la

18 révision du texte.

19 Mme Residovic (interprétation). - Avez-vous suivi les

20 instructions de M. Milic ? Qui a fait ce travail et où ?

21 M. Ciso (interprétation). - Oui, nous avons suivi à la lettre

22 les instructions de M. Milic. Nous étions très confiants, nous savions

23 qu'il s'agissait d'un journaliste, que c'était un professionnel et qu'il

24 avait travaillé de manière professionnelle. Dès que nous avons reçu tout

25 cela, nous sommes allés dans l'immeuble d'Inda-Bau où nous disposions de

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1 l'équipement nécessaire pour le montage définitif de la cassette.

2 Elvir, Vejsil, moi-même ainsi que la jeune femme dont je vous ai

3 déjà parlée -qui était censée relire le texte-, nous avons composé la

4 version définitive du texte et de la cassette.

5 Mme Residovic (interprétation). - Monsieur Ciso, vous souvenez-

6 vous du texte, du commentaire que vous avez inséré dans la cassette ?

7 M. Ciso (interprétation). - Cette cassette n'était pas

8 essentielle pour moi. Je sais qu'elle joue un rôle important dans le cadre

9 de ce procès, mais il y a des choses dont je me souviens, en fait des

10 parties les plus importantes du texte qui, pour moi, en tant que profane,

11 me semblait un peu trop lourd, trop pompeux.

12 Un exemple : M. Delalic avait été accusé d'être un espion serbe

13 et d'avoir fui dans un hélicoptère tchetnik ; c'étaient les allégations.

14 Ekrem Milic, pour récuser ce type de propagande, a déclaré qu'il avait

15 fait prisonniers et gardé prisonniers des Serbes dans cette région.

16 Pour moi, tout cela est difficile à juger parce que je suis un

17 profane. Je me souviens de cela, mais pas des détails du texte de cette

18 cassette.

19 Mme Residovic (interprétation). - Vous souvenez-vous ce qui

20 avait été proposé pour terminer la présentation de la cassette ?

21 M. Ciso (interprétation). - Je préférerais commencer par le

22 début de la cassette. Vous ne devez pas oublier que cela correspond à la

23 création de notre Etat.

24 M. Milic, qui est un professionnel, nous a dit qu'il fallait

25 commencer par la présentation du drapeau de notre Etat et que cela devait

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1 être la première chose sur la cassette. La fin devait présenter la

2 première arrivée de Zejnil, de la Bosnie-Herzégovine et de la rencontre

3 dans le bâtiment de Inda-Bau. Ce fut un moment très intense du point de

4 vue émotif. Tel est le début et la fin.

5 Mme Residovic (interprétation). - En ce qui concerne cette

6 suggestion pour terminer la cassette, avez-vous suivi les instructions de

7 M. Milic ou avez-vous ajouté quelque chose vous-même ?

8 M. Ciso (interprétation). - Je n'ai rien ajouté. Je n'ai pas

9 fait de proposition quelle qu'elle soit en ce qui concerne la cassette,

10 puisque je partais du principe que cette cassette avait été faite de

11 manière professionnelle. Mais Dzemal Delalic avait enregistré certaines

12 déclarations de Zenjil Delalic qu'il lui avait remises.

13 Il souhaitait, comme il me l'avait dit, l'envoyer à Sarajevo

14 pour indiquer combien il était peu satisfait de la situation dans cette

15 région à ce moment-là. Dzemal a dit que cela pourrait peut-être constituer

16 la meilleure conclusion possible pour la cassette. C'est une idée que nous

17 avons d'ailleurs fait accepter.

18 Mme Residovic (interprétation). - Dzemal vous a-t-il dit quand

19 M. Delalic avait enregistré cette déclaration qu'il avait proposé de

20 prendre pour la fin de la cassette ?

21 M. Ciso (interprétation). - Je ne lui ai pas posé cette

22 question. Je ne lui ai pas demandé. En fait, je ne sais pas quand cet

23 enregistrement a été fait. J'ai pensé que cela avait été enregistré après

24 son arrivée à Vienne.

25 Mme Residovic (interprétation). - Après avoir préparé cette

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1 version définitive de cassette, en suivant les instructions de M. Milic et

2 repris l'enregistrement de Dzemal, qu'avez-vous fait de cette cassette ?

3 M. Ciso (interprétation). - J'ai participé à la préparation de

4 cette version définitive. Nous l'avons rapportée à Ekrem Milic à Zagreb.

5 Nous voulions qu'il la regarde et qu'il nous dise ce qu'il en pensait, ce

6 qu'il pensait de la qualité de notre travail. Nous voulions savoir si nous

7 avions bien suivi ses instructions dans la préparation de cette cassette.

8 Mme Residovic (interprétation). - Etait-il satisfait ou a-t-il

9 émis des critiques ?

10 M. Ciso (interprétation). - Quelques jours plus tard, Ekrem nous

11 a contacté et il nous a dit que nous avions vraiment fait de grands

12 efforts pour le montage de cette cassette, mais que, toutefois, il

13 estimait que le produit final était un travail d'amateur, et qu'il

14 n'aimait pas tellement la manière dont le commentaire était lu.

15 Il estimait qu'il aurait fallu faire appel à des professionnels,

16 par exemple à un journaliste à la radio, que toutefois la cassette

17 pourrait effectivement être utile, mais qu'il voulait avoir l'aval de

18 Zenjil Delalic avant de l'utiliser.

19 Mme Residovic (interprétation). - Est-ce vous-même qui avez

20 demandé l'approbation de Zenjil ? Est-ce vous qui lui avez montré la

21 cassette ?

22 M. Ciso (interprétation). - Non. Lorsque Ekrem Milic nous a

23 renvoyé la cassette, Dzemal et sa femme, Suada, ont prit la cassette et

24 sont allés à Munich pour aller voir Zejnil. Je l'aurais fait moi-même,

25 mais je n'avais pas de visa. Il est très difficile à partir de l'Autriche

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1 pour nous d'aller en Allemagne, bien que j'ai eu un travail en Autriche.

2 Suada et Dzemal sont allés à Munich et ont demandé à Zenjil de regarder la

3 cassette.

4 Mme Residovic (interprétation). - Savez-vous ce que Zejnil a

5 pensé de cette cassette ?

6 M. Ciso (interprétation). - Le soir du même jour, Zejnil m'a

7 téléphoné chez moi et m'a dit qu'il avait été très touché par notre souci

8 pour lui et par cette tentative de notre part de contrecarrer la presse.

9 En ce qui concerne la cassette, il m'a dit qu'à son avis la

10 cassette ne répondait pas à la qualité technique nécessaire. Et il

11 estimait que les textes n'étaient pas tout à fait véridiques, qu'il y

12 avait beaucoup d'exagération dans la présentation des événements et qu'il

13 ne souhaitait pas que la cassette soit rendue publique.

14 Mais il a dit qu'il avait l'intention d'utiliser d'autres moyens

15 pour se défendre, pour sa dignité, le respect qui lui était dû et il

16 pensait faire appel à des conseils juridiques et à entreprendre des

17 poursuites judiciaires.

18 Mme Residovic (interprétation). - Avez-vous accepté cette

19 position prise par Zejnil et est-ce la fin de votre participation ?

20 M. Ciso (interprétation). - Il fallait accepter ce qu'il disait

21 puisque cela le concernait personnellement. Et en fait, si nous avions

22 rendu publique une telle cassette sans son approbation nous nous serions

23 transformés en menteurs nous aussi. Nous avons donc suivi son avis et son

24 conseil, ce qui veut dire que la cassette s'est transformée en souvenir

25 pour certains de nous qui avaient pris à coeur de faire cette cassette. Je

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1 l’ai chez moi dans ma vidéothèque privée.

2 Mme Residovic (interprétation). - Merci, Monsieur Ciso, après

3 avoir participé à cette cassette, est-ce que par la suite vous avez

4 rencontré Zejnil Delalic et quand ?

5 M. Ciso (interprétation). - Après notre dernière rencontre dans

6 l'immeuble Inda-Bau à Vienne, j'ai rencontré Zejnil Delalic, je ne me

7 souviens pas de la date exacte mais c'était à l'occasion des funérailles

8 de son frère Sefik à Vienne. Ce fut c'était une tragédie personnelle, il a

9 perdu ces deux frères le même jour, Sefik et Vejnil à Zagreb

10 Ils sont tous les deux morts de mort naturelle à deux heures

11 d'intervalle

12 Mme Residovic (interprétation). - Est-ce que vous étiez présent

13 à cet enterrement avec M. Delalic ?

14 M. Ciso (interprétation). - Oui, j'étais présent au premier

15 enterrement à Zagreb, l'enterrement de Vejsil. Nous, les amis de Konjic,

16 amis de la famille, relations, y avons participé. Nous nous sommes rendus

17 à Zagreb.

18 Mais Zejnil ne s'est pas rendu à Zagreb pour l'enterrement parce

19 qu'en fait, c'était au moment ou le conflit armé faisait rage entre

20 Bosnie-Herzégovine et les forces HVO de Croatie. Mais il est venu à Vienne

21 et nous avons été à l'enterrement à Vienne. La sécurité étant assurée par

22 la police militaire du HVO, et par la police croate. Il est probable que

23 l'on attendait l'arrivée de Zejnil Delalic pour l'arrêter.

24 Mme Residovic (interprétation). - Pourriez-vous me dire, puisque

25 vous avez rencontré cet homme à l'enterrement de Vienne, auquel

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1 M. Zejnil Delalic était présent… Est-ce que vous l'avez donc rencontré à

2 ces funérailles à Vienne ?

3 M. Ciso (interprétation). - Effectivement, il était présent lors

4 des funérailles à Vienne, et ce fut la première fois que je le rencontrai

5 de nouveau depuis notre dernière réunion à Inda-Bau au moment où il était

6 rentré de Bosnie-Herzégovine.

7 Mme Residovic (interprétation). - Avez-vous poursuivi votre

8 coopération avec M Delalic par la suite ? Vous est-il arrivé de vous

9 rencontrer à Vienne ?

10 M. Ciso (interprétation). - Oui, il m'arrivait de le rencontrer

11 à Vienne. Nous avions d'excellents contacts et ils furent encore meilleurs

12 lorsqu'une nouvelle société de la Bosnie-Herzégovine, la société des

13 citoyens de Bosnie-Herzégovine en Autriche a été établie.

14 L'inauguration de cette société a eu lieu au cours de l'été ou

15 au début de l'automne 1993, au n °15 de la Taubergasse, dans le

16 XVIIe arrondissement de Vienne.

17 Mme Residovic (interprétation). - Aviez-vous un poste, une

18 fonction particulière au sein de ce club ?

19 M. Ciso (interprétation). - Effectivement, dès la création de ce

20 club qui comptait 400 à 500 adhérents, j'étais membre dès le départ du

21 conseil d'administration. Le vice-président de ce Club des citoyens de

22 Bosnie-Herzégovine est le Président du Conseil exécutif de ce club à

23 Vienne.

24 Mme Residovic (interprétation). - Que proposait ce club

25 précisément ? Quelles activités offrait-il ?

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1 M. Ciso (interprétation). - Je vous rappelle que nous sommes une

2 société, un club créé en vertu du droit autrichien et nous sommes donc

3 enregistrés en République autrichienne. Cette association avait pour but,

4 dès sa création, d'apporter une contribution aux activités culturelles,

5 sportives, humanitaires et toutes autres activités déployées par les

6 citoyens de Bosnie-Herzégovine en Autriche, quelle que soit leur religion.

7 Des sympathisants autrichiens participaient aussi aux activités

8 de l'association et en faisaient partie en tant que membres.

9 Mme Residovic (interprétation). - Pourriez-vous nous dire si

10 vous avez discuté d'événements survenus en Bosnie-Herzégovine ? Avez-vous

11 également fait des collectes en vue d'aider la Bosnie-Herzégovine dans le

12 cadre du club ?

13 M. Ciso (interprétation). - Effectivement, cette association est

14 devenue l'une des associations les plus efficaces et puissantes en

15 Autriche, voire en Europe. Nous avons organisé des manifestations

16 particulières, des soirées du cinéma, des expositions artistiques. Nous

17 avons aussi organisé des manifestations plus politiques s'il était

18 nécessaire de le faire à la suite des événements qui se produisaient en

19 Bosnie-Herzégovine, notamment lors des événements de Srebrenica, bien sûr

20 avec l'aval des autorités autrichiennes.

21 Nous avons eu la chance d'avoir la visite de personnalités de

22 premier plan lors de ces manifestations que nous avons organisées. Nous

23 avons eu des citoyens autrichiens tels que M. Simon Wiesenthal qui a

24 participé à une exposition. Dans le domaine sportif également, nous avons

25 créé une équipe de football et même une ligue.

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1 Mme Residovic (interprétation). - Merci, cela nous donne une

2 bonne idée des activités de l'association. Pouvez-vous nous dire si

3 M. Delalic était membre de l'association et faisait aussi partie du

4 conseil d'administration ?

5 M. Ciso (interprétation). - Tout à fait, il était membre de

6 l'association, membre du conseil d'administration. Je pense qu'il était le

7 dirigeant ou le directeur des services veillant aux contacts à établir

8 avec d'autres organisations, non pas en Bosnie-Herzégovine, mais en

9 Europe.

10 Mme Residovic (interprétation). - Vous dites que vous avez

11 récolté des fond. Avez-vous envoyé ces fonds à Konjic, en Bosnie-

12 Herzégovine ainsi qu'à Jablanica ?

13 M. Ciso (interprétation). - Ce qui nous tenait le plus à cœur,

14 c'était que cette aide parvienne en Bosnie-Herzégovine. Nous avons récolté

15 des fonds et les médias de Bosnie-Herzégovine ont fait état de nos

16 activités. Nous avons acheté des lits d'hôpital, dès fauteuils roulants,

17 des produits permettant d'aider à la gestion de l'hôpital.

18 Mme Residovic (interprétation). - Vous est-il arrivé d'acheminer

19 vous-même cette aide humanitaire en Bosnie-Herzégovine ?

20 M. Ciso (interprétation). - Effectivement, aussitôt après que le

21 conflit ait commencé entre l'armée de Bosnie-Herzégovine et le HVO, j'ai

22 eu le plaisir personnel d'acheminer de l'aide à Electro-Konjic.

23 Cette entreprise rencontrait de grosses difficultés puisqu'elle

24 ne pouvait plus fournir l'électricité nécessaire aux maternités, aux

25 hôpitaux. Je ne sais pas si cela s'est passé en octobre ou novembre, mais

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1 je sais que j'ai conduit moi-même un camion qui était rempli d'aides

2 humanitaires que j'ai acheminées à la société d'électricité, Electro-

3 Konjic, à Konjic.

4 Mme Residovic (interprétation). - Excusez-moi, j'ai lu le compte

5 rendu, vous dites que c'était aussitôt après le conflit entre l'armée de

6 la Bosnie-Herzégovine et le HVO. Est-ce une erreur d'interprétation ou

7 est-ce bien ce que vous avez dit ?

8 M. Ciso (interprétation). - Après la fin du conflit. Sinon, il

9 nous aurait été impossible d'arriver à Konjic.

10 Mme Residovic (interprétation). - Votre association avait-elle

11 des cassettes vidéo qu'elle prêtait à d'autres membres de l'association ?

12 M. Ciso (interprétation). - Nous avons eu toute sorte

13 d'activités. Nous avions une grosse importance au niveau des médias. Toute

14 la Bosnie-Herzégovine savaient que nous existions, et c'était une

15 association qui accueillait tous les citoyens de Bosnie-Herzégovine d'où

16 qu'ils viennent.

17 Nous avons eu de nombreux visiteurs, des gens qui s'occupaient

18 de logistique, des représentants des autorités officielles, des réfugiés,

19 des gens qui avaient réussi à s'enfuir. Nous avons reçu effectivement

20 beaucoup de cassettes vidéo qu'il nous arrivait de diffuser dans nos

21 locaux.

22 Il y avait affluence lorsque nous faisions ces projections. Les

23 gens voulaient voir leur pays, les souffrances que subissaient leurs

24 concitoyens, les membres de leur famille, les amis. Grâce à l'assistance

25 de nos mécènes, nous avons réussi à faire des copies de ces cassettes.

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1 Nous en avons envoyé des copies à des branches ou des sections de

2 l'association à Salzbourg.

3 Mme Residovic (interprétation). - Merci. Dites-moi, cette

4 entreprise, Inda-Bau, faisait partie des mécènes dont vous avez parlé,

5 n'est-ce pas ?

6 M. Ciso (interprétation). - Effectivement, l'entreprise Inda-Bau

7 était un des mécènes de l'association dès la création.

8 Il y a aussi une entreprise qui s'appelle Septère*, autre

9 entreprise de bâtiment. Inda-Bau nous a soutenu surtout au niveau des

10 installations techniques, lorsqu'il a fallu faire des copies de cassettes.

11 Il nous ont été d'un grand secours.

12 Ils nous ont apporté du soutien significatif sous toute sorte de

13 forme.

14 Mme Residovic (interprétation). - Hormis ces cassettes et

15 certains documents qui vous sont personnels, arrivait-il que ces

16 documents, ces cassettes soient dans les locaux de Indabau à titre

17 provisoire ou de façon plus permanente.

18 M. Ciso (interprétation). - Indabau, comment dire, était un

19 poste avancé, ou dirai-je un dépôt. Avec l'arrestation de M. Delalic par

20 des enquêteurs du Tribunal de La Haye, nous avons appris qu'un certain

21 nombre de nos cassettes vidéo avait disparu, ainsi que plusieurs

22 documents. Nous avons effectivement réagi sur le champ. Nous avons demandé

23 des explications à l'entreprise Indabau. Nous avons demandé pourquoi ces

24 documents et ces cassettes, qui nous paraissaient d'une importance

25 capitale pour nos activités futures, avaient disparu.

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1 Vous-même Maître Residovic qui défendez Zejnil Delalic vous avez

2 été contactée par nos soins. Pourtant, à ce jour, nous n'avons retrouvé ni

3 les cassettes ni les documents. Vous nous avez expliqué personnellement

4 que vous n'étiez pas en mesure de nous aider pour les récupérer.

5 Mme Residovic (interprétation). - Hier, dans le cadre de votre

6 déposition, vous avez dit vous êtes trouvé à deux reprises à Konjic au

7 cours de l'année 1992, et plus tard aussi à la fin du conflit en 1994.

8 Lors de vos visites en 1992, êtes-vous allé à la caserne de

9 Celebici ?

10 M. Ciso (interprétation). - Non, jamais je n'y suis allé.

11 Croyez-moi je n'ai jamais même eu le temps d'y penser. La caserne ne

12 présentait aucun intérêt pour moi. Je n'y suis jamais allé.

13 Mme Residovic (interprétation). - Je vous remercie

14 Monsieur Ciso. Madame et Messieurs les Juges, j'en ai ainsi terminé de

15 l'interrogatoire principal de ce témoin

16 M. le Président (interprétation). - Y a-t-il contre-

17 interrogatoire ?

18 M. Duric (interprétation) - Bonjour, Monsieur Ciso, je m'appelle

19 M. Duric, je suis présent à l'audience pour défendre Pavo Mucic, alias

20 "Pavo". Connaissez-vous M. Mucic ?

21 M. Ciso (interprétation) - Effectivement, je le connais, c’est

22 aussi un collègue de travail. Nous avons travaillé un certain temps

23 ensemble en Autriche.

24 M. Duric (interprétation) - Connaissez-vous sa famille ?

25 M. Ciso (interprétation) - Oui, je connais son fils Zoran, sa

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1 fille Sandra et son ex épouse Alisa.

2 M. Duric (interprétation) - En septembre 1992, avez-vous

3 rencontré M. Mucic ?

4 M. Ciso (interprétation) - Vous voulez dire si je l'ai rencontré

5 en Autriche ?

6 M. Duric (interprétation) - Oui.

7 M. Ciso (interprétation) - J’étais vraiment ravi de le voir lors

8 de sa venue en Autriche car il m’apportait des nouvelles et des

9 salutations de ma famille. En effet, mes parents étaient malades. C’est

10 moi qui l’ai reçu au cours de son séjour, il a dormi chez moi. C’était en

11 septembre 1992.

12 M. Duric (interprétation) - Savez-vous combien de temps il a

13 passé à Vienne cette fois-là ?

14 M. Ciso (interprétation) - Pas mal de temps. Il ne me laissait

15 pas dormir la nuit, nous passions des nuits blanches à parler.

16 M. Duric (interprétation) - Merci. Pourriez-vous dire à

17 l'attention des Juges ce que vous avez fait pour lui ? Avez-vous essayé de

18 lui trouver un appartement ?

19 M. Ciso (interprétation) - Monsieur Mucic m’a dit que ses

20 enfants étaient laissés sans beaucoup de soins, qu'il voulait trouver un

21 appartement pour qu’ils puissent aller à l’école, puisqu'il avait déjà un

22 statut, aux yeux des autorités autrichiennes, d’employé ou de travailleur

23 provisoire. Donc je pense qu'il a réussi à trouver un logement pour ses

24 enfants dans le 16ème ou 17ème arrondissement de Vienne.

25 M. Duric (interprétation) - Est-ce que vous vous êtes occupé de

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1 le faire inscrire au registre de l’état civil à Vienne ?

2 M. Ciso (interprétation) - Je ne me souviens pas si c'est mon

3 fils ou moi qui l’a fait, mais il n’a pas eu beaucoup de chance cette

4 fois-là non plus. La police a dit que ses pneus n'étaient pas aux normes,

5 il a dû payer une amende assez lourde.

6 M. Duric (interprétation) - Que représente la date du

7 27 juillet ?

8 M. Ciso (interprétation) - A mon avis, c'est l’anniversaire de

9 l'insurrection de la République de Bosnie-Herzégovine en ex-Yougoslavie.

10 Je ne suis pas très fort en histoire, excusez-moi.

11 M. Duric (interprétation) - Vous conviendrez avec moi pour dire

12 qu’à cette époque-là c’était un jour férié assez important.

13 M. Ciso (interprétation) - Un jour suffisamment important pour

14 être déclaré jour férié dans tout le pays.

15 M. Duric (interprétation) - Le 27 juillet 1992, Pavo était-il

16 avec vous et où étiez-vous si c’était le cas ?

17 M. Ciso (interprétation) - Je ne me souviens plus très bien.

18 Pourriez-vous me rafraîchir la mémoire ?

19 M. Duric (interprétation) - Etait-il avec vous à Vienne le

20 27 juillet 1992?

21 M. Ciso (interprétation) - Il restait chez moi, à Vienne, mais

22 je ne me souviens plus de la date.

23 M. Duric (interprétation) - Mais vous pourriez confirmer qu'il

24 était à Vienne fin juillet ?

25 M. Ciso (interprétation) - Oui. Pratiquement chaque fois qu’il

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1 venait à Vienne, il m’appelait et nous passions une soirée ensemble.

2 M. Duric (interprétation) - Pouvons-nous nous mettre d’accord

3 sur le fait que Pavo, en 1992, a passé plus de temps à Vienne qu'à

4 Konjic ?

5 M. Ciso (interprétation) - Vous pouvez me croire, il a effectué

6 pas mal de déplacements, sans doute à cause de ses enfants, il voulait

7 s’occuper d’eux, faire en sorte de les inscrire à l'école.

8 Je crois qu'il est venu à Vienne à plusieurs reprises, je ne

9 sais plus combien de fois. En tout cas, à chaque fois qu’il était là, il

10 était toujours utile, car il me permettait d’acheminer des produits

11 alimentaires et des médicaments à mes parents qui se trouvaient à Konjic.

12 M. Duric (interprétation) - Mais cela s’est passé très souvent

13 en 1992 ?

14 M. Ciso (interprétation) - Oui, très souvent.

15 M. Duric (interprétation) - Pavo était-il un bon ami, un ami

16 proche de M. Sefik Delalic ?

17 M. Ciso (interprétation) - Je ne sais pas à quel point ils

18 étaient amis, mais je sais qu'ils leur arrivaient de se réunir.

19 M. Duric (interprétation) - Merci, Monsieur Ciso.

20 Monsieur le Président, j'en ai terminé.

21 M. le Président (interprétation) - Y a-t-il un autre

22 interrogatoire ?

23 M.Karabdic.(interprétation). - Nous n'avons pas de question à

24 poser à ce témoin, Monsieur le Président.

25 Mme McMurrey (interprétation). - Nous n'avons pas de question à

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1 poser à ce témoin, je vous remercie.

2 M. le Président (interprétation). - L'accusation veut-elle mener

3 un contre-interrogatoire ?

4 Mme McHenry (interprétation). - Oui, Monsieur le Président,

5 merci. Bonjour Monsieur, je m'appelle Thérésa McHenry et au nom de

6 l'accusation, je vais me permettre de poser quelques questions. Ecoutez

7 bien ces questions avec attention. Au cas où vous ne comprenez pas,

8 n'hésitez pas à me le dire. Lorsqu'il vous est possible de répondre par un

9 oui, par un non, ou par un "je ne sais pas" n'hésitez pas à le faire non

10 plus.

11 Que faites-vous comme travail à Vienne ?

12 M. Ciso (interprétation). - Je faisais plusieurs choses. J'avais

13 plusieurs emplois à Vienne.

14 D'abord, j'ai travaillé dans des chantiers de construction et

15 puis j'étais plongeur dans un hôpital. Et puis j'ai travaillé aussi dans

16 un entrepôt. En fait j'en ai eu plusieurs, je faisais un peu de tout en

17 Autriche.

18 Mme McHenry (interprétation). - Avez-vous fait du travail de

19 journalisme ?

20 M. Ciso (interprétation). - Non jamais, mais j'étais le chef de

21 la section qui s'occupait des formation, des relations publiques au sein

22 de l'association des citoyens de Bosnie-Herzégovine à Vienne;

23 Mme McHenry (interprétation). - A l'évidence, vous aviez des

24 rapports étroits avec la famille Delalic. Etait-ce des rapports d'amitié

25 personnelle ou des relations d'affaires avec les membres de la famille

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1 Delalic ?

2 M. Ciso (interprétation). - C'était des liens d'amitié que

3 j'avais avec la famille Delalic, d'abord parce que nous venons du même

4 coin. Mais nous avons aussi des contacts professionnels conjoints

5 Mme McHenry (interprétation). - A quelle époque cette cassette

6 vidéo a-t-elle été confectionnée ?

7 M. Ciso (interprétation). - Je ne me souviens plus de la date

8 exacte, mais je crois qu'elle a été réalisée au cours d'une certaine

9 période qui est allée de la mi janvier à la fin mars 1993.

10 Mme McHenry (interprétation). - Est-ce que de façon tout à fait

11 approximative, vous pouvez nous dire combien d'heures de montage, de

12 déplacements vous avez passé sur ce projet ?

13 M. Ciso (interprétation). - Impossible de vous le dire Madame.

14 Je n'ai pas fait le décompte de ces heures d'activité. Je n'ai pas non

15 plus comptabilisé les heures que j'ai passées à travailler pour la

16 Bosnie-Herzégovine dans le cadre d'efforts humanitaires.

17 Mme McHenry (interprétation). - Il y a Elvir qui vous a aidé,

18 qui vient d'Inda-Bau, quel est son nom de famille, son patronyme ?

19 M. Ciso (interprétation). - Ce jeune homme qui venait...

20 Mme McHenry (interprétation). - ... Pardon, la question était :

21 "Ce jeune homme d'Inda-Bau qui aidait Elvir, comment s'appelle-t-il ?"

22 M. Ciso (interprétation). - Je comprends bien la question. C'est

23 peut être Elvir de Inda-Bau qui nous a assistés. Je crois qu'il y a

24 confusion dans votre esprit, il n'y a pas de troisième personne. C'est

25 Elvir, qui lui venait d'Inda-Bau, qui nous a aidés.

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1 Mme McHenry (interprétation). - Excusez-moi. Je ne suis toujours

2 pas sûre d'avoir bien compris les noms. Si je me trompe une fois de plus,

3 dites-le moi.

4 Il y a donc une personne qui vient d'Inda-Bau qui vous a aidé.

5 Comment s'appelait cette personne ,

6 M. Ciso (interprétation). - Elvir Rizvanovic, et il vient de

7 Konjic.

8 Mme McHenry (interprétation). - Est-ce qu'il s'est trouvé à

9 Konjic au moment de la guerre au cours de l'année 1992 ?

10 M. Ciso (interprétation). - Je ne pense pas que ce fut le cas.

11 Mais je ne pourrais pas vous le garantir.

12 Mme McHenry (interprétation). - Et puis il y a aussi une femme

13 de l'association qui vous a aidé comment s'appelait-elle ?

14 M. Ciso (interprétation). - Elle s'appelle Harisa Prevljak.

15 Elle était la petite amie d'Elvir Risvanovic, et puis ils se sont mariés.

16 Elle est donc devenue Harisa Risvanovic.

17 Mme McHenry (interprétation). - S'est-elle trouvée à Konjic en

18 1992? Le sauriez-vous ?

19 M. Ciso (interprétation). - Je ne pourrai pas vous le dire,

20 Tout ce que je sais, c'est qu'on se voyait, qu'on se rencontrait

21 avant la guerre. Au début de la guerre lorsque les réfugiés ont commencé à

22 affluer à Vienne, c'est à ce moment-là qu'elle est venue à Vienne.

23 Mme Mc Henry (interprétation). - De Konjic ?

24 M. Ciso (interprétation). - Oui.

25 Mme Mc Henry (interprétation). - Il y avait donc vous,

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1 M. Rizvanovic, sa femme, le journaliste, M. Milic, Vejsil et

2 Dzemal Delalic. Y a-t-il eu d'autres participants à ce projet hormis ces

3 personnes ?

4 M. Ciso (interprétation). - Et bien, il y a Sefik, le frère de

5 Zejnil, qui a travaillé à ce projet avec moi. Il est venu à Zagreb à deux

6 ou trois reprises pour y apporter les cassettes.

7 Mme Mc Henry (interprétation). - Vous avez fait beaucoup de

8 travail autour de ce projet. Vous vous êtes notamment rendu à Zagreb à

9 plusieurs reprises. Avez-vous payé les frais de tout cela ou avez-vous

10 bénéficié d'un certain remboursement de vos frais ?

11 M. Ciso (interprétation). - Quoi que j'ai pu faire pour la

12 République de Bosnie-Herzégovine, pour ses citoyens, ses réfugiés. C'était

13 là un devoir qui m'incombait puisque moi aussi j'étais citoyen de Bosnie-

14 Herzégovine, j'étais en plus citoyen de Konjic. Je l'ai fait en payant

15 moi-même. C'est la raison pour laquelle, à la fin de la guerre, j'avais

16 beaucoup de dettes à payer, de frais à rembourser.

17 Mme Mc Henry (interprétation). - Monsieur Milic, le journaliste,

18 a-t-il été payé pour son travail ?

19 M. Ciso (interprétation). - Je ne suis pas en mesure de répondre

20 à cette question, c'est une question personnelle. Je crois qu'il serait

21 préférable de poser la question directement à M. Milic. Moi, je ne l'ai

22 pas payé ni donné d'argent ni d'autres formes de dédommagement.

23 Mme Mc Henry (interprétation). - Vous avez dit que M. Milic

24 était de Bosnie. Est-il lui aussi de Konjic ?

25 M. Ciso (interprétation). - Il n'est pas de Konjic. C'est un

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1 citoyen de Bosnie-Herzégovine, je crois qu'il est de Foca ou de l'Est de

2 la Bosnie. Je n'en suis pas sûr.

3 Mme Mc Henry (interprétation). - Sauriez-vous si M. Milic s'est

4 trouvé à Konjic au cours de l'année 1992, pendant la guerre ?

5 M. Ciso (interprétation). - Je sais qu'il m'a parlé de son

6 intention de se rendre à Sarajevo. Il m'a dit qu'il était réfugié en

7 Croatie. Je ne pourrais pas vous dire s'il était à Konjic ou non.

8 M. Duric (interprétation). - Un nom est constamment mal écrit

9 dans le compte rendu, Monsieur le Président, il ne s'agit pas de M. Melic

10 mais de M. Milic.

11 M. le Président (interprétation). - Merci d'avoir apporté cette

12 précision.

13 Mme Mc Henry (interprétation). - Lorsque vous étiez en Bosnie

14 en 1992, étiez-vous impliqué dans les conflits ou n'avez-vous fait

15 qu'apporter des produits pour les membres de votre famille ?

16 M. Ciso (interprétation). - Je me suis surtout occupé de ma

17 famille et de mes amis. Je n'ai jamais pris part aux opérations militaires

18 et aux combats. Je n'ai jamais passé plus de deux ou trois jours de suite

19 en Bosnie-Herzégovine lors de mes séjours.

20 Mme Mc Henry (interprétation). - Vous nous avez dit que

21 Dzemal Delalic était en Bosnie en 1992 et qu'il était impliqué dans

22 certaines activités. Pouvez-vous nous dire, dans la mesure où vous le

23 savez, dans quel type d'activité il était impliqué ? Par exemple s'il

24 était soldat, si oui quel était son grade ?

25 M. Ciso (interprétation). - Vous parlez bien de Dzemal Delalic ?

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1 Mme Mc Henry (interprétation). - Oui, Dzemal.

2 M. Ciso (interprétation). - Je ne sais pas grand chose de ce

3 qu'il faisait en Bosnie-Herzégovine à l'époque. Tout ce que je sais, c'est

4 qu'à chaque fois qu'il s'y rendait, il transportait l'aide humanitaire que

5 nous avions pu récolter.

6 En ce qui concerne ses activités précises pendant la guerre, je

7 ne peux pas vous en parler.

8 Mme McHenry (interprétation). - Ai-je bien compris que Dzemal

9 habitait à Vienne et que, tout comme vous, il se rendait de temps en temps

10 en Bosnie-Herzégovine pour de brèves visites ?

11 M. Ciso (interprétation). - Oui.

12 Mme McHenry (interprétation). - Je vous prie de m'excuser si je

13 prononce mal ce nom, qu'en est-il de Vejsil ? Vejsil Delalic était-il

14 alors présent à Konjic ?

15 M. Ciso (interprétation). - Je ne peux pas répondre à cette

16 question. Je ne sais pas. Il était notre homme de liaison à Zagreb. Je ne

17 peux pas vous dire s'il est allé à Konjic ou pas.

18 Mme McHenry (interprétation). - D'après ce que vous savez, il

19 vivait essentiellement à Zagreb mais il aurait pu se rendre à Konjic. Ai-

20 je bien compris ?

21 M. Ciso (interprétation). - Je sais qu'il habitait à Zagreb.

22 Quant à savoir s'il est allé à Konjic ou s'il s'est rendu en Bosnie-

23 Herzégovine, je ne le sais pas.

24 Mme McHenry (interprétation). - Sefik Delalic vivait-il à Konjic

25 en 1992 pendant la guerre ?

Page 12046

1 M. Ciso (interprétation). - M. Sefik Delalic était travailleur

2 temporaire en Autriche, même avant la guerre. Pendant la guerre en effet,

3 il s'est rendu de temps en temps à Konjic, bien que sa famille, sa femme

4 et son enfant, se soient trouvés à Vienne. Il travaillait à Vienne et se

5 rendait de temps en temps à Konjic.

6 Mme McHenry (interprétation). - Merci beaucoup. Vous nous avez

7 dit que Zejnil Delalic faisait l'objet d'une campagne de diffamation après

8 son retour à Vienne et qu'on l'avait notamment accusé d'avoir aidé des

9 Serbes. Savez-vous que d'autres ont dit -et M. Delalic l'a d'ailleurs

10 reconnu- qu'il avait été accusé d'être un criminel de guerre dans les

11 médias notamment et dans les médias serbes ?

12 M. Ciso (interprétation). - Pouvez-vous répéter votre question,

13 s'il vous plaît ?

14 Mme McHenry (interprétation). - Vous nous avez dit que, lorsque

15 M. Delalic est rentré, il a été victime d'une campagne de diffamation.

16 Vous avez parlé d'articles dans la presse croate. Ma question est la

17 suivante : savez-vous qu'il y a également eu des articles dans les médias

18 serbes qui accusaient M. Zejnil Delalic d'être un criminel de guerre ?

19 M. Ciso (interprétation). - Ecoutez, je ne peux pas répondre, je

20 ne sais pas. Je n'avais pas accès à la presse serbe à l'époque.

21 Mme McHenry (interprétation). - Lorsque vous avez parlé de

22 M. Delalic et des accusations portées à l'encontre de certains membres,

23 saviez-vous que l'une des accusations portée à l'encontre de M. Delalic

24 était le meurtre et d'autres événements qui se sont produits dans le camp

25 de Celebici ? Saviez-vous cela ? Aviez-vous eu connaissance des

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1 accusations ? Je parle évidemment de l'époque où vous vous occupiez de

2 cette cassette vidéo.

3 M. Ciso (interprétation). - Croyez-moi, je n'ai jamais entendu

4 de telles choses.

5 Mme McHenry (interprétation). - Vous nous avez dit que, même si

6 personne ne croyait cette propagande à l'encontre de M. Delalic, vous avez

7 néanmoins estimé qu'il s'agissait d'une sorte de menace à l'encontre de

8 M. Delalic et de sa famille. Ces articles représentaient-ils une menace

9 encore plus grande lorsque M. Delalic occupait un poste de commandement

10 pendant la guerre ?

11 M. Ciso (interprétation). - Je pense que ces accusations, ces

12 articles n'auraient pas été rédigés sur cette base. En effet, Zejnil avait

13 investi beaucoup de temps, d'argent et d'efforts dans la République de

14 Bosnie-Herzégovine. Je crois que c'était là sa principale motivation. En

15 ce qui concerne son rôle de commandant, je ne pense pas que cela soit lié.

16 Mme McHenry (interprétation). - Je n'ai peut-être pas été

17 suffisamment claire dans ma question. Je répète ma question :

18 A l'époque où M. Delalic était impliqué dans les combats, dans

19 la guerre, c'est-à-dire lorsqu'il était à Konjic ou dans d'autres endroits

20 en 1992, il n'y avait pas de menaces particulières à son encontre ou

21 envers sa famille, mais vous pensez que cela a été le cas plus tard en

22 raison de ces articles dans la presse. Ai-je bien compris ?

23 M. Ciso (interprétation). - Oui. C'est bien cela.

24 Mme McHenry (interprétation). - Vous nous avez dit que

25 Dzemal Delalic avait 20 à 30 cassettes. A qui appartenaient ces

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1 cassettes ?

2 M. Ciso (interprétation). - Ces cassettes vidéo appartenaient à

3 tout le monde. Dzemal en apportait ainsi que Sefik et moi-même. Nous avons

4 également utilisé des émissions qui étaient passées à la télévision à

5 Sarajevo et ailleurs, à Rajic*, par exemple. Je ne peux pas vous dire

6 exactement à qui appartenaient ces cassettes. Nous avions tous un certain

7 nombre de cassettes. On les réunissait et on les a utilisées pour faire

8 cette cassette.

9 Mme McHenry (interprétation). - Certaines de ces cassettes

10 appartenaient-elles à M. Zejnil Delalic ?

11 M. Ciso (interprétation). - Je ne sais pas si certaines de ces

12 cassettes lui appartenaient. Je ne peux pas vous en parler, ce n'était pas

13 si important.

14 Mme McHenry (interprétation). - Vous pouvez toujours dire : "Je

15 ne sais pas", si en effet vous ne connaissez pas la réponse à mes

16 questions. Ces cassettes portaient-elles des titres ? Y avait-il une

17 certaine organisation, étaient-elles étiquetées ?

18 M. Ciso (interprétation). - Chaque cassette portait un titre

19 pour que son propriétaire puisse se souvenir que cette cassette était à

20 lui et se souvenir du contenu. Nous avions des étiquettes autocollantes et

21 chaque cassette portait, je pense, une étiquette.

22 Mme McHenry (interprétation). - Certaines de ces cassettes

23 comportaient-elles des descriptions ? Par exemple, s'il s'agissait d'un

24 combat, une voix off décrivait-elle ce que l'on voyait à l'image ?

25 M. Ciso (interprétation). - Oui, en effet. La voix off était

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1 réalisée par un certain nombre de journalistes de la radio. Je ne sais pas

2 si j'ai bien compris ce que vous demandiez.

3 Mme McHenry (interprétation). - Que sont devenues ces

4 cassettes ? Savez-vous où elles se trouvent aujourd'hui ?

5 M. Ciso (interprétation). - Certaines de ces cassettes sont

6 restées à l'association. D'autres sont retournées dans l'entreprise Inda-

7 Bau et d'autres encore se trouvent en notre possession. Après tout, elles

8 font partie de notre collection privée. Mais la plupart des cassettes sont

9 restées auprès de la société Inda-Bau parce que c'est là que nous avons

10 fait le montage.

11 Mme McHenry (interprétation). - Y a-t-il des cassettes sur le

12 camp de Celebici ?

13 M. Ciso (interprétation). - Je ne me souviens pas d'une cassette

14 qui montrerait plus que ce que l'on a vu à la télévision officielle,

15 autrement dit la télévision de Konjic. Je n'ai pas vu de cassettes plus

16 complètes sur le camp de Celebici que ce que l'on a vu à la télévision.

17 Mme McHenry (interprétation). - Si je vous ai bien compris, et

18 veuillez me corriger si je me trompe, le montage de la cassette et

19 l'enregistrement même de la bande son ont été faits par vous-même chez

20 Inda-Bau, avec le matériel d'Inda-Bau. Est-ce correct ?

21 M. Ciso (interprétation). - Non, le montage s'est fait avec

22 Elvir, Dzemal et moi-même ainsi que Harisa qui a fait la voix off.

23 Mme McHenry (interprétation). - Mais le montage et

24 l'enregistrement ont-il été faits chez Inda-Bau avec les micros et les

25 tables de montage qui lui appartenaient ?

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1 M. Ciso (interprétation). - Oui, c'est bien cela.

2 Mme McHenry (interprétation). - Quel est le type de la société

3 Inda-Bau ?

4 M. Ciso (interprétation). - Inda-Bau est une société de

5 construction du bâtiment qui s'occupait de différents types de travaux.

6 Mme McHenry (interprétation). - Pour revenir à ce travail de

7 montage que vous avez fait chez Inda-Bau, vous avez dû bien travailler ?

8 Posons la question autrement. Ce que vous avez vous-même préparé

9 comme cassette est identique à la copie qui a été rendue après que

10 M. Milic l'a visionnée, est-ce bien cela ?

11 Je vais essayé de reformuler cela. Est-il vrai que M. Milic n'a

12 pas apporté de modification à cette cassette vidéo que vous lui avez

13 fournie ?

14 M. Ciso (interprétation). - C'est nous qui avons fait le

15 montage. M. Milic a un peu dirigé ce montage et a rédigé un texte qui

16 devait être inséré. C'est nous qui avons fait le montage technique.

17 Mme McHenry (interprétation). - Vous nous avez dit qu'après le

18 montage de la cassette, vous et Dzemal êtes allés à Zagreb. Vous avez

19 rencontré un journaliste, et Dzemal Delalic et vous-même lui avez donné

20 des informations sur cette cassette, est-ce bien cela ?

21 M. Ciso (interprétation). - Non, vous ne m'avez pas bien

22 compris. J'ai dit que nous avons emporté, Sefik et moi-même, deux ou trois

23 cassettes à Zagreb et nous les avons remises à M. Milic. J'avais dit

24 d'ailleurs que Sefik avait expliqué un certain nombre de détails

25 concernant les événements en Bosnie-Herzégovine.

Page 12051

1 Mme McHenry (interprétation). - Lorsque vous avez emporté ces

2 deux ou trois cassettes, s'agissait-il de cassettes identiques ou

3 différentes ?

4 M. Ciso (interprétation). - C'étaient des cassettes différentes.

5 Il y avait des résumés. Il s'agit d'extraits de vingt ou trente cassettes.

6 Nous avons fait un grand travail de montage afin de parvenir à la version

7 définitive. Il s'agissait d'extraits provenant de vingt à trente cassettes

8 que nous présentions en deux ou trois, car cela nous semblait être les

9 passages les plus importants.

10 Mme McHenry (interprétation). - Pendant votre rencontre entre

11 Sefik et M. Milic, combien de temps cela a-t-il duré ? A quel moment vous

12 a-t-il parlé des événements en Bosnie-Herzégovine, de la guerre

13 notamment ?

14 M. Ciso (interprétation). - Vejsil était également présent. Nous

15 avons passé deux à trois heures ensemble.

16 Mme McHenry (interprétation). - Vous avez dit que vous-même et

17 les autres aviez décidé d'aider M. Zejnil Delalic en fabriquant cette

18 cassette vidéo. Ne seriez-vous pas d'accord avec moi qu'un autre moyen

19 aurait été de dire que M. Delalic n'avait pas d'influence, de pouvoir,

20 qu'il n'aurait pas pu faire tout ce dont il était accusé ? Avez-vous

21 envisagé cette possibilité ?

22 M. Ciso (interprétation). - Nous étions tout à fait convaincus

23 que Zejnil Delalic n'était pas espion de quiconque, qu'il était un

24 combattant et qu'il n'avait pas commis de crime, que ce n'était pas

25 quelqu'un qui avait profité du conflit. Nous étions persuadés de son

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1 honorabilité, qu'il était un citoyen honorable de la République de Bosnie-

2 Herzégovine.

3 Mme McHenry (interprétation). - Bien sûr, mais ma question était

4 la suivante : avez-vous envisagé les uns et les autres que, pour lutter

5 contre cette propagande, vous auriez pu déclarer tout simplement que

6 Zejnil Delalic n'avait aucun pouvoir et n'aurait pas pu faire ce dont il

7 était accusé ?

8 M. Ciso (interprétation). - Nous y avons songé. Nous avons

9 envisagé de présenter des démentis qui auraient été plus puissants, plus

10 forts, plus convaincants que les allégations. Je ne sais pas comment vous

11 répondre autrement.

12 M. le Président (interprétation). - Il vient de vous dire qu'il

13 ne sait pas vous dire autre chose.

14 Mme McHenry (interprétation). - Je demandais s'ils en avaient

15 discuté ou s'ils l'avaient envisagé. Au moment où vous étiez en train

16 d'élaborer cette cassette, saviez-vous si M Delalic, lui aussi, tâchait de

17 lutter contre cette campagne de diffamation ?

18 M. Ciso (interprétation). - Non, je n'ai pas connaissance de

19 cela. A cette époque-là, il ne s'en occupait pas. Il était en pleine crise

20 sur le plan émotionnel et mental. Je ne pense pas qu'il ait entrepris

21 quelque chose. Nous nous sommes occupés de cela justement en raison de son

22 état.

23 Mme McHenry (interprétation). - Saviez-vous que, à un moment

24 donné, M Delalic a pris la parole et a lutté contre la campagne de

25 diffamation ? Saviez-vous qu'il avait écrit des lettres à des journaux,

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1 par exemple ?

2 M. Ciso (interprétation). - Non, je n'en ai pas connaissance.

3 Mme McHenry (interprétation). - Lorsque vous avez élaboré cette

4 vidéo, à qui aviez-vous l'intention d'envoyer cette cassette ?

5 M. Ciso (interprétation). - Après avoir terminé la version

6 définitive, nous l'avions envoyée à M Milic, celui qui nous l'avait

7 demandée. M Milic avait l'intention, après que Zejnil Delalic a pu

8 visionner la cassette, d'organiser une conférence de presse afin de

9 diffuser la cassette à des organes de presse, de la presse écrite et

10 parlée. Le but était de nous mettre d'accord pour faire cela.

11 Mme McHenry (interprétation). - Plutôt que de demander l'accord

12 de M Delalic au départ, pourquoi avez-vous attendu d'avoir pour ainsi dire

13 terminé la cassette pour lui demander son accord ?

14 M. Ciso (interprétation). - Lorsqu'un homme se trouve dans un

15 contexte psychologique délicat, nous avons pensé qu'il serait préférable

16 de le surprendre agréablement avec le résultat de notre travail. Nous

17 pensions qu'il serait d'accord pour la diffusion de cette cassette, mais

18 cela n'a pas été le cas.

19 Mme McHenry (interprétation). - Vous nous avez dit que, lorsque

20 vous-même et Zejnil Delalic avez..., pardon, Dzemal Delalic, avez parlé

21 avec M. Milic, le journaliste, votre but était de découvrir la vérité dans

22 l'élaboration de cette cassette. Avez-vous atteint cet objectif, c'est-à-

23 dire, démontrer la vérité ?

24 M. Ciso (interprétation). - Non, il ne s'agissait pas de

25 découvrir la vérité puisqu'on ne travaillait que sur la base du matériel

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1 que nous avions. M Milic n'avait pas d'autres informations. C'était un

2 journaliste professionnel censé parfaire notre travail.

3 Mme McHenry (interprétation). - Cette cassette était-elle

4 destinée à être véridique ou pas ?

5 M. Ciso (interprétation). - Le contenu de la cassette était

6 d'ordre documentaire et véridique. Mais M Milic estimait qu'il fallait

7 exagérer quelque peu les choses. Je ne sais pas très bien comment

8 l'expliquer. Je ne suis pas moi même journaliste, je ne suis pas expert en

9 la matière, mais il fallait exagérer en quelque sorte la vérité, exagérer

10 les événements montrés afin de leur donner une plus grande signification

11 Mme McHenry (interprétation). - Au moment où vous travailliez

12 sur ce projet, vous saviez que le but du projet était de modifier la

13 vérité, en quelque sorte pour atteindre l'objectif de M Delalic.

14 M. le Président (interprétation). - Le but de la cassette était

15 de présenter un démenti et de lutter contre la campagne de diffamation.

16 Mme McHenry (interprétation). - J'estime avoir le droit de poser

17 la question

18 M. le Président (interprétation). - J'ai également le droit de

19 comprendre quoi il s'agit.

20 M. Jan (interprétation). - Le but de la cassette était de

21 démentir les accusations dont ils ont exagéré quelque peu le rôle que

22 jouait M Delalic.

23 Mme McHenry (interprétation). - Autrement dit, pour aider

24 M Delalic, et démentir les accusations, vous avez participé à ce projet

25 qui ne représentait pas une description complète de la vérité.

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1 M. Jan (interprétation). - (hors micro) Pour mettre à jour la

2 vérité, il faut exagérer la vérité.

3 Mme McHenry (interprétation). - Est-il vrai que cette cassette

4 vidéo était destinée à être un mensonge pour lutter contre cette

5 diffamation ?

6 M. Ciso (interprétation). - Monsieur le Juge a donné une très

7 bonne définition de ce que j'essayais de dire.

8 Cette cassette était censée exagérer l'importance de

9 Zejnil Delalic dans la zone, afin de contrecarrer les mensonges que l'on

10 disait.

11 Mme McHenry (interprétation). - Il fallait que ce soit proche de

12 la vérité pour qu'on puisse y croire, mais pas exactement la vérité, de

13 telle sorte que cassette puisse aider M. Delalic. Est-ce que cela vous

14 semble exact ?

15 M. Ciso (interprétation). - Cette cassette correspondait à la

16 vérité mais le commentaire exagérait, gonflait un peu le rôle que jouait

17 M Zejnil Delalic à l'époque. Ce serait là ma réponse à votre question.

18 Mme McHenry (interprétation). - Je voudrais être complètement

19 sûre.

20 Lorsque vous dites " gonflait ",cela signifie-t-il que

21 l'information que contenait la cassette n'était pas correcte ?

22 M. le Président (interprétation). - (hors micro) Poursuivez.

23 Lorsque les questions ont déjà reçu une réponse, il n'est pas

24 utile d'insister à plusieurs reprises

25 Mme McHenry (interprétation). - Vous nous avez dit Monsieur, que

Page 12056

1 vous connaissiez M Music assez bien. Est-ce que cela est juste ?

2 M. Ciso (interprétation). - Oui tous les habitants de Konjic se

3 connaissent Ce n'est pas un grand village.

4 M. Jan (interprétation). - (hors micro)

5 Mme McHenry (interprétation). - Oui, je voulais simplement

6 clarifier.

7 Est-ce que M Music vous avait montré des cassettes vidéo qu'il

8 avait filmées pendant la guerre ?

9 M. Ciso (interprétation). - Non.

10 Mme McHenry (interprétation). - Savez-vous si à un moment donné,

11 M Music avait fait quelque chose pour démentir les accusations portées à

12 l'encontre de M Delalic ?

13 M. Ciso (interprétation). - Non, je ne suis pas au courant.

14 Mme McHenry (interprétation). - Avez-vous connaissance d'autres

15 efforts à part la cassette que vous avez élaborée, connaissez-vous

16 d'autres efforts pour démentir les accusations dont était l'objet

17 M Delalic, et d'autres efforts pour exagérer le rôle qu'il aurait joué ?

18 M. Ciso (interprétation). - Je n'ai pas bien compris votre

19 question.

20 Mme McHenry (interprétation). - Même si vous n'étiez pas vous

21 même impliqué dans d'autres projets, avez-vous connaissance d'autres

22 efforts pour contrecarrer, pour démentir les accusations dont faisait

23 l'objet M Delalic ? Si vous ne savez pas, répondez tout simplement que

24 vous ne savez pas.

25 M. Ciso (interprétation). - Non.

Page 12057

1 M. le Président (interprétation). - Nous allons suspendre la

2 séance jusqu'à midi.

3 (Suspendue à 11 h 30, la séance est reprise à 12 h 10.)

4 (Le témoin est introduit dans la salle.)

5 Mme le Greffier (interprétation) - Puis-je rappeler au témoin

6 qu'il est encore sous serment ?

7 M. le Président (interprétation). - Continuez, je vous remercie

8 .

9 Mme McHenry (interprétation). - J'ai conclu de votre déposition

10 que vous connaissiez une cassette vidéo sur la Bosnie-Herzégovine à

11 laquelle vous aviez participé et qui a été saisie. Quelle est la copie qui

12 a été saisie par la police autrichienne ? Le savez-vous ?

13 M. Ciso (interprétation). - Cette copie de la cassette vidéo qui

14 a été saisie était celle qui appartenait à l'association. Je le pense, je

15 n'en suis par certain, ce n'était pas mon propre exemplaire.

16 Mme McHenry (interprétation). - Cela signifie que vous aviez

17 votre exemplaire, mais que l'association avait ses propres exemplaires.

18 Est-ce exact ou ne le savez-vous pas ?

19 M. Ciso (interprétation). - Si, je le sais bien. J'avais un

20 exemplaire, une copie, et l'association BH en avait également. Pour moi,

21 c'est un souvenir.

22 Mme McHenry (interprétation). - Qui a fourni les copies à

23 l'association BH ?

24 M. Ciso (interprétation). - Nous sommes membres adhérents de

25 cette association. Tous ceux qui ont travaillé pour mettre au point cette

Page 12058

1 cassette vidéo étaient membres de l'association.

2 Mme McHenry (interprétation). - M. Delalic n'avait aucun rapport

3 avec Inda-Bau à Vienne, n'est-ce pas ?

4 M. Ciso (interprétation). - Oui. Je sais qu'il y venait de temps

5 en temps avec son frère Dzemal, quant aux relations, je ne sais pas.

6 Mme McHenry (interprétation). - Avait-il des documents ou avait-

7 il déposé des documents, des cassettes ou des choses de ce genre à Inda-

8 Bau ?

9 M. Ciso (interprétation). - L'association BH avait déposé

10 certains de ces documents à Inda-Bau parce que nous n'avions pas

11 suffisamment de place à l'association. On utilisait des pièces d'Inda-Bau

12 où étaient déposés des documents et d'autres possessions de

13 l'association BH.

14 Mme McHenry (interprétation). - Peut-être n'avez-vous pas

15 compris ma question. M. Zejnil Delalic ne conservait-il ni document ni

16 vidéo ou quoi que ce soit dans les bureaux d'Inda-Bau ?

17 M. Ciso (interprétation). - Je ne peux malheureusement pas

18 répondre. Je pense qu'il faudrait demander à des gens qui travaillent à

19 Inda-Bau, au responsable de cette entreprise parce que, moi, je ne sais

20 pas.

21 Mme McHenry (interprétation). - Bien. Vous nous avez dit que

22 M. Delalic n'avait pas été favorable à la publication de cette cassette

23 vidéo parce qu'il ne la considérait pas comme tout à fait exacte. En ce

24 qui vous concerne, avez-vous des documents ou des informations qui vous

25 permettent de penser que ce qui était dit dans cette cassette vidéo était

Page 12059

1 une exagération de la réalité, s'il n'y avait pas de documents signés par

2 M. Delalic ?

3 M. Ciso (interprétation). - M. Delalic a dit très clairement:

4 "Non, ce n'est pas une arme que je veux utiliser pour lutter. Je vais

5 utiliser d'autres moyens. Je vais faire appel à un avocat."

6 Mme McHenry (interprétation). - S'il y avait des documents

7 signés par M. Delalic, avez-vous des informations qui pourraient indiquer

8 que ce qui est dit dans ces documents serait une exagération de la

9 réalité ?

10 M. Jan (interprétation). - Il faudrait lui demander s'il a vu

11 ces documents. S'il n'a pas d'informations qui lui permettent de savoir ce

12 qu'il y avait dans ces documents, c'est qu'il ne les a pas vus. Vous lui

13 avez demandé si M. Delalic gardait ces documents.

14 Mme McHenry (interprétation). - Je ne lui demande pas ce qu'il

15 en est des documents à Inda-Bau ou pas à Inda-Bau.

16 M. Jan (interprétation). - Comment pourrait-il savoir s'il y

17 avait d'autres documents ailleurs, pas à Inda-Bau?

18 Mme McHenry (interprétation). - Monsieur, savez-vous s'il

19 existait des documents, signés ou non par M. Delalic, qui contiendraient

20 des informations sur le rôle joué par M. Delalic et qui seraient des

21 informations grossies, exagérées ?

22 M. Jan (interprétation) - Demandez-lui d'abord s'il a vu des

23 documents ? Lui avez-vous demandé s’il a vu ces documents ?Après,

24 demandez-lui s’il y a exagération. Avez-vous vu, à un moment ou à un

25 autre, des documents signés ou non par M. Delalic décrivant le rôle joué

Page 12060

1 par ce dernier ?

2 M. Ciso (interprétation) - Je ne sais pas. Je ne comprends pas

3 votre question. Je n'ai jamais vu de tels documents et je ne sais pas

4 s'ils existent.

5 M. Jan (interprétation) - Documents rédigés par M. Delalic

6 concernant son rôle dans le camp de Celebici, par exemple.

7 M. Ciso (interprétation) - Non, je n’ai jamais vu ce genre de

8 documents.

9 Mme McHenry (interprétation) - Avez-vous eu connaissance

10 d’autres documents ?

11 M. Ciso (interprétation) - Je n'ai pas connaissance de

12 l’existence d’autres documents à part cette cassette vidéo.

13 Mme McHenry (interprétation) - Si, dans une lettre, M. Delalic

14 disait qu’il envoyait une cassette dans laquelle son rôle pendant la

15 guerre était décrit, disposez-vous d'informations permettant de savoir de

16 quelle cassette vidéo il s'agit ?.

17 M. Ciso (interprétation) - Non, je ne sais pas. Je n'ai jamais

18 vu de telles lettres et je ne peux rien dire.

19 Mme McHenry (interprétation) - Avez-vous eu connaissance

20 d'autres cassettes qui auraient été préparées qui décriraient le rôle de

21 M. Delalic pendant la guerre en Bosnie ?

22 M. Ciso (interprétation) - Je ne me souviens pas exactement de

23 tout ce qui a été saisi à Inda-Bau. Je sais que des cassettes ont été

24 saisies, également des enregistrements de musique folklorique que nous

25 utilisions lors de nos rencontres, mais je ne me souviens pas des détails

Page 12061

1 de tout ce qui a été saisi.

2 Mme Residovic (interprétation) - Je vous remercie pour votre

3 témoignage.

4 M. le Président (interprétation) - Voulez-vous poursuivre

5 l’interrogatoire ?

6 Mme Residovic (interprétation) - Je n'ai pas d'autres questions

7 à poser, mais je voudrais vous dire que nous avons prévu de faire entrer

8 notre prochain témoin, Salih Ruvic, à 14 h 30. Ces personnes sont arrivées

9 tard, après 11 heures. Je dois les rencontrer et leur expliquer comment

10 cela fonctionne. Voilà pourquoi j'avais informé l’accusation que nous les

11 citerions à 14 h 30.

12 Je vous remercie, Messieurs les Juges.

13 M. le Président (interprétation) - Nous allons suspendre la

14 séance et la reprendre à 14 h 30.

15 (Suspendue à 12 h 20, la séance est reprise à 14 h 35..)

16

17 M. le Président (interprétation) - Bienvenue, Maître Residovic,

18 voulez-vous appeler à la barre votre premier témoin ?

19 Mme Residovic (interprétation) - J'aimerais appeler

20 M. Salih Ruvic.

21 (Le témoin est introduit dans le prétoire.)

22 M. le Président (interprétation) - Veuillez procéder à la

23 prestation de serment.

24 M. Ruvic (interprétation) - Je déclare solennellement que je

25 dirai la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

Page 12062

1 Mme Residovic (interprétation) - Voulez-vous, s’il vous plaît,

2 vous présenter en nous indiquant votre nom complet.

3 M. Ruvic (interprétation) - Je m'appelle Salih Ruvic, mon père

4 s’appelait Ibro.

5 Mme Residovic (interprétation) - Avant de poursuivre,

6 Monsieur Ruvic, comme je l'ai fait dans tous les cas précédents,

7 j'aimerais attirer votre attention sur une question d'ordre technique.

8 Nous parlons tous les deux la même langue, il vous serait donc très facile

9 de répondre immédiatement à mes questions.

10 Mais ici nous avons une interprétation simultanée, les

11 interprètes ont un travail particulièrement difficile et je vous demande

12 de bien vouloir attendre la fin de l'interprétation que vous entendez dans

13 le casque posé sur la table et de ne répondre qu'ensuite. Ainsi, tous les

14 participants, et Madame et Messieurs les Juges en particulier, pourront

15 suivre notre dialogue. Avez-vous compris ?

16 M. Ruvic (interprétation) - Oui, je ferai de mon mieux.

17 Mme Residovic (interprétation) - Merci. Où êtes-vous né ?

18 M. Ruvic (interprétation) - Je suis né le 17 août 1941 dans le

19 village de Drunovici, la municipalité de Prozor.

20 Mme Residovic (interprétation) - Quelles études avez-vous faites

21 et à quel endroit ?

22 M. Ruvic (interprétation) - J'ai d’abord fait une école de

23 formation des enseignants à Sarajevo, ensuite je suis allé à l'université,

24 dans le département de la sécurité de la défense et j'ai eu mon diplôme au

25 mois de mai 1980.

Page 12063

1 Mme Residovic (interprétation) - Quelle est votre profession,

2 Monsieur Ruvic ?

3 M. Ruvic (interprétation) - Je suis professeur en matière de

4 défense et de sécurité. Actuellement, je ne travaille pas comme enseignant

5 mais auprès du ministère de la Défense de la Fédération de Bosnie-

6 Herzégovine.

7 Mme Residovic (interprétation) - Monsieur Ruvic, où vous

8 trouviez-vous et que faisiez-vous le 6 avril 1992 lorsque la Bosnie-

9 Herzégovine s’est déclarée un Etat indépendant et au moment où il y a eu

10 des agressions à l’encontre de cet Etat ?

11 M. Ruvic (interprétation) - Le 6 avril 1992, j'occupais le poste

12 de commandant du quartier général de la Défense territoriale à Prozor.

13 J’avais été nommé par le commandant du quartier général de district,

14 M. Merdan.

15 Mme Residovic (interprétation) - Dans le quartier général

16 municipal à Prozor dont vous étiez le commandant, qui était le supérieur

17 hiérarchique ?

18 M. Ruvic (interprétation) - Je viens de vous dire que le

19 quartier général municipal de Prozor, sous l'ordre du commandant suprême,

20 était commandé par le quartier général de Zenica. C'était Dzemo Merdan,

21 comme je l’ai dit il y a un instant.

22 Mme Residovic (interprétation). - Jusqu'à quelle date, en 1992,

23 le quartier général municipal de Prozor était-il sous la responsabilité du

24 quartier général de Zenica ?

25 M. Ruvic (interprétation). - Le quartier général de défense

Page 12064

1 municipale de Prozor était sous l'autorité de Zenica jusqu'en

2 novembre 1992, au moment où le Quatrième corps de l'armée de Bosnie-

3 Herzégovine a été créé. C'est M. Pasalic, décédé aujourd'hui, qui était à

4 la tête. Le quartier général se trouvait à Mostar. En effet, il est mort

5 dans un accident de voiture.

6 Mme Residovic (interprétation). - Avez-vous, à un moment donné

7 en 1992, abandonné le poste de commandement du quartier municipal et si

8 oui, qui a été nommé à votre place ?

9 M. Ruvic (interprétation). - Oui, j'ai été commandant pendant

10 moins de deux mois. J'ai abandonné ce poste puisque je n'étais pas

11 d'accord avec les responsables du parti SDA qui étaient alliés au HVO, le

12 dernier n'acceptant pas l'Etat de Bosnie-Herzégovine et suivait les ordres

13 qui venaient de Gruder plutôt que les ordres venant de Sarajevo.

14 Mme Residovic (interprétation). - Qui était le nouveau

15 commandant et pouvez-vous nous dire qui l'a nommé ?

16 M. Ruvic (interprétation). - Le commandant du quartier général

17 municipal qui m'a succédé était M. Muharem Sabic. Il était commandant en

18 chef lorsque j'étais commandant. Il a été nommé par la même personne que

19 moi, c'est-à-dire M. Dzemo Merdan du quartier général du district de

20 Zenica.

21 Mme Residovic (interprétation). - Pendant combien de temps

22 M. Sabic a-t-il occupé le poste de commandant du quartier général

23 municipal de Prozor ?

24 M. Ruvic (interprétation). - Monsieur Sabic était officiellement

25 commandant. En fait, son dernier jour en poste était lors de l'occupation

Page 12065

1 de Prozor, le 25 octobre 1992. Lorsqu'il a quitté la municipalité de

2 Prozor, il n'est pas revenu. Pour répondre brièvement, jusqu'au

3 25 octobre.

4 Mme Residovic (interprétation). - Monsieur Ruvic, une fois que

5 vous avez quitté votre poste au sein du quartier général municipal,

6 faisiez-vous toujours partie des forces municipales ?

7 M. Ruvic (interprétation). - Oui, j'étais adjoint au commandant

8 pour les opérations et la formation. Je m'occupais du front et je devais

9 aider le commandant à établir la chaîne de commandement par rapport aux

10 différentes unités de la Défense territoriale dans la municipalité de

11 Prozor.

12 Mme Residovic (interprétation). - Une fois que M. Sabic a quitté

13 son poste de commandant, avez-vous, à un moment donné, repris le poste de

14 commandant au sein du quartier général de la municipalité de Prozor ?

15 M. Ruvic (interprétation). - A la demande du commandement

16 suprême, je me suis rendu à Konjic le 2 novembre et j'ai été nommé,

17 provisoirement, chef d'état-major et commandant de l'état-major municipal.

18 C'est M. Sefer Halilovic qui m'a nommé. C'est le commandant du Quatrième

19 corps, M. Padedic* qui m'a transmis cet ordre, ce document. Il s'agissait

20 de la copie du document d'origine qui porte sa signature.

21 Mme Residovic (interprétation). - Parmi vos responsabilités à

22 Prozor en 1992, j'ai un certain nombre de questions à vous poser

23 concernant vos responsabilités par rapport aux unités à Prozor. D'abord,

24 en votre qualité de commandant du quartier général de la Défense

25 territoriale avant la guerre, pouvez-vous me dire quel type d'armement

Page 12066

1 vous aviez en votre possession ?

2 M. Jan (interprétation). - Pouvons-nous nous en tenir à ce qui

3 s'est passé à Celebici, s'il vous plaît ? Pouvons-nous nous en tenir à ce

4 que sait le témoin concernant le groupe Tactique 1 ? Les armements à

5 Prozor ne nous intéressent pas. On nous a déjà parlé de ces armements et

6 qu'il n'y avait que 20 % de ces armements lorsque la caserne a été

7 reprise.

8 Mme Residovic (interprétation). - Etant donné que le témoin est

9 un des commandants, il est en mesure de confirmer ces faits.

10 M. Jan (interprétation). - (Hors micro.) Que ce soit 50 %

11 ou 60 %, cela ne change pas grand-chose pour nous.

12 Mme Residovic (interprétation). - Vous savez, les différents

13 témoins de Jablanica et des autres lieux ont été appelés à la barre en

14 raison du fait qu'ils étaient commandants de groupes Tactique. Je ne peux

15 donc pas leur poser des questions directement liées à Celibici ?

16 Monsieur Ruvic, savez-vous ce qu'est le groupe Tactique 1 ?

17 M. Ruvic (interprétation). - Oui, en effet, je connais le groupe

18 Tactique 1. Il faisait partie du commandement qui était responsable de

19 lever le siège à Sarajevo à partir de Pazaric, de l'autre côté du

20 mont Igman.

21 Mme Residovic (interprétation). - Monsieur, lorsque vous étiez

22 commandant du quartier général de la Défense territoriale de Prozor, vos

23 unités ont-elles été réaffectées au groupe Tactique 1 et, si oui, pouvez-

24 vous nous dire à quelle date ?

25 M. Ruvic (interprétation). - Début juin 1992. On nous a affectés

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1 à la tâche d'envoyer une petite unité au front pour lever le siège de

2 Sarajevo. J'étais moi-même à la tête d'une unité partie de Prozor qui est

3 arrivée jusqu'à Konjic et, de Konjic avec une unité de Jablanica et une

4 autre de Konjic, nous nous sommes rendus à Pazaric. Là, M. Mustafa Polutak

5 était le commandant ; il était lieutenant-colonel et aujourd'hui il est

6 général de l'armée. C'était lui le commandant de ces trois unités.

7 Mme Residovic (interprétation). - Vous avez parlé d'un petit

8 groupe. Pouvez-vous nous dire combien il y avait de soldats dans le groupe

9 dont vous étiez à la tête ?

10 M. Ruvic (interprétation). - Il y avait 42 soldats. J'ai donc

11 été le commandant de cette unité.

12 Mme Residovic (interprétation). - En ce qui concerne les autres

13 unités de la Défense territoriale, qui en était responsable, qui était le

14 commandant lorsque vous-même étiez parti pour effectuer cette mission ?

15 M. Ruvic (interprétation). - Ces autres unités étaient sous le

16 commandement de M. Muharem Sabic.

17 Mme Residovic (interprétation). - Pendant combien de temps avez-

18 vous été sous le commandement de M. Polutak, du groupe Tactique 1 ?

19 M. Ruvic (interprétation). - Environ six jours. Je ne suis pas

20 tout à fait certain, au jour près. Ensuite, nous sommes rentrés à Prozor.

21 Mme Residovic (interprétation). - Lorsque vous êtes rentré à

22 Prozor, les soldats étaient-ils toujours sous le commandement du groupe

23 Tactique 1 ?

24 M. Ruvic (interprétation). - Non, cela n'aurait pas pu être

25 possible car il s'agissait de soldats qui faisaient partie du quartier

Page 12068

1 général municipal. Chacun devait rejoindre son unité d'origine qui

2 correspondait à son affectation d'origine.

3 Mme Residovic (interprétation). - Au moment où vous étiez

4 commandant, et plus tard, connaissiez-vous M. Zejnil Delalic ?

5 M. Ruvic (interprétation). - Je connaissais M. Zejnil Delalic,

6 mais lui ne me connaissait pas. Cela peut vous paraître bizarre voire

7 illogique, mais il faut savoir que son frère habitait à Prozor et qu'il

8 s'y est marié. Il venait souvent en vacances puisqu'il vivait et

9 travaillait à l'étranger. J'ai donc rencontré Zejnil Delalic pour la

10 première fois, lorsque je lui ai parlé en avril 1992, mi-avril 1992, au

11 moment où nous lui avions demandé de nous aider à obtenir des armements et

12 du matériel pour l'armée.

13 Il était aisé, il avait une bonne place et il était prêt à aider

14 à la défense du pays. Il était donc normal de faire appel à lui pour son

15 aide, étant donné qu'il avait un certain nombre de bons contacts.

16 Mme Residovic (interprétation). - A la lumière de ce que vous

17 venez de dire, à savoir que M. Delalic travaillait en faveur de la défense

18 du pays, qu'il avait des contacts, comment avez-vous perçu son rôle en

19 avril 1992 ? Pour vous, était-il un civil et quelles étaient ses

20 activités ?

21 M. Ruvic (interprétation). - Lorsque j'ai rencontré

22 Zejnil Delalic et son frère Zajko, il était civil à l'époque. Il

23 s'occupait de supports logistiques, il était assez aisé et avait de plus

24 le désir d'aider son pays, d'aider l'Etat. Nous voulions donc en profiter.

25 Il y a quelques instants, je n'ai pas pu terminer ma réponse. Je voulais

Page 12069

1 ajouter que nous n'avions presque pas d'armement. J'étais stationné à

2 Ljuta en 1990. Suite à des ordres, l'ensemble du matériel de la Défense

3 territoriale avait été saisi et envoyé aux entrepôts de la JNA à Ljuta.

4 Mme Residovic (interprétation). - A un moment donné en 1992,

5 avez vous appris que M Zejnil Delalic était devenu commandant militaire ?

6 M. Ruvic (interprétation). - J'ai appris que Zejnil Delalic

7 avait été nommé commandant du groupe Tactique n° 1 au début du mois

8 d'août 1992, et qu'il a succédé à M. Mustafa Polutak.

9 Mme Residovic (interprétation). - Monsieur Ruvic, vous venez de

10 nous dire que vous étiez responsables des unités de combats à Prozor.

11 Dites-moi, au moment où Zejnil Delalic était commandant militaire, y

12 avait-il des unités qui avaient été réaffectées à Zejnil Delalic en tant

13 que commandant du groupe Tactique 1 ?

14 M. Ruvic (interprétation). - Etant donné que j'étais membre du

15 quartier général municipal, cela ne s'est pas produit mais je l'aurais su

16 car j'étais moi-même assistant responsable des opérations et responsable

17 de la formation.

18 Mme Residovic (interprétation). - Pouvez-vous nous dire si

19 Zejnil Delalic, en sa qualité de commandant du groupe Tactique 1, avait un

20 poste supérieur en responsabilités par rapport à l'ensemble des forces

21 armées dans le territoire des forces de Prozor ?

22 M. Ruvic (interprétation). - Cela n'aurait pu être le cas pour

23 deux raisons. D'abord parce que le HVO n'a pas participé au quartier

24 général de la Défense territoriale, donc cela ne correspondait pas à la

25 chaîne du commandant. Deuxièmement, le MUP avait sa propre chaîne de

Page 12070

1 commandement et il n'aurait pu être commandant puisque nous faisions

2 partie du quartier général du district de Zenica. Chacun devait rejoindre

3 son unité d'origine qui correspondait à son affectation d'origine.

4 Mme Residovic (interprétation). - Au moment où vous étiez

5 commandant, et plus tard, connaissiez-vous M. Zejnil Delalic ?

6 M. Ruvic (interprétation). - Je connaissais M. Zejnil Delalic,

7 mais lui ne me connaissait pas. Cela peut vous paraître bizarre voire

8 illogique, mais il faut savoir que son frère habitait à Prozor et qu'il

9 s'y est marié. Il venait souvent en vacances puisqu'il vivait et

10 travaillait à l'étranger. J'ai donc rencontré Zejnil Delalic pour la

11 première fois, lorsque je lui ai parlé en avril 1992, mi-avril 1992, au

12 moment où nous lui avions demandé de nous aider à obtenir des armements et

13 du matériel pour l'armée.

14 Il était aisé, il avait une bonne place et il était prêt à aider

15 à la défense du pays. Il était donc normal de faire appel à lui pour son

16 aide, étant donné qu'il avait un certain nombre de bons contacts.

17 Mme Residovic (interprétation). - A la lumière de ce que vous

18 venez de dire, à savoir que M. Delalic travaillait en faveur de la défense

19 du pays, qu'il avait des contacts, comment avez-vous perçu son rôle en

20 avril 1992 ? Pour vous, était-il un civil et quelles étaient ses

21 activités ?

22 M. Ruvic (interprétation). - Lorsque j'ai rencontré

23 Zejnil Delalic et son frère Zajko, il était civil à l'époque. Il

24 s'occupait de supports logistiques, il était assez aisé et avait de plus

25 le désir d'aider son pays, d'aider l'Etat. Nous voulions donc en profiter.

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1 Il y a quelques instants, je n'ai pas pu terminer ma réponse. Je voulais

2 ajouter que nous n'avions presque pas d'armement. J'étais stationné à

3 Ljuta en 1990. Suite à des ordres, l'ensemble du matériel de la Défense

4 territoriale avait été saisi et envoyé aux entrepôts de la JNA à Ljuta.

5 Mme Residovic (interprétation). - A un moment donné en 1992,

6 avez vous appris que M Zejnil Delalic était devenu commandant militaire ?

7 M. Ruvic (interprétation). - J'ai appris que Zejnil Delalic

8 avait été nommé commandant du groupe Tactique n° 1 au début du mois

9 d'août 1992, et qu'il a succédé à M. Mustafa Polutak.

10 Mme Residovic (interprétation). - Monsieur Ruvic, vous venez de

11 nous dire que vous étiez responsables des unités de combats à Prozor.

12 Dites-moi, au moment où Zejnil Delalic était commandant militaire, y

13 avait-il des unités qui avaient été réaffectées à Zejnil Delalic en tant

14 que commandant du groupe Tactique 1 ?

15 M. Ruvic (interprétation). - Etant donné que j'étais membre du

16 quartier général municipal, cela ne s'est pas produit mais je l'aurais su

17 car j'étais moi-même assistant responsable des opérations et responsable

18 de la formation.

19 Mme Residovic (interprétation). - Pouvez-vous nous dire si

20 Zejnil Delalic, en sa qualité de commandant du groupe Tactique 1, avait un

21 poste supérieur en responsabilités par rapport à l'ensemble des forces

22 armées dans le territoire des forces de Prozor ?

23 M. Ruvic (interprétation). - Cela n'aurait pu être le cas pour

24 deux raisons. D'abord parce que le HVO n'a pas participé au quartier

25 général de la Défense territoriale, donc cela ne correspondait pas à la

Page 12072

1 chaîne du commandant. Deuxièmement, le MUP avait sa propre chaîne de

2 commandement et il n'aurait pu être commandant puisque nous faisions

3 partie du quartier général du district de Zenica. C'était M. Dzemo Merdan

4 qui était le commandant. Voyez-vous, cela aurait été impossible.

5 Mme Residovic (interprétation). - Monsieur Ruvic, Zejnil Delalic

6 a-t-il été, à un moment ou à un autre, votre commandant suprême ?

7 M. Ruvic (interprétation). - Non. Il n'a jamais été mon

8 supérieur hiérarchique.

9 Mme Residovic (interprétation). - Merci. Je voudrais aborder une

10 autre question. En 1992, lorsque vous étiez commandant, quelles étaient

11 les relations entre la Défense territoriale et le HVO à Prozor ?

12 M. Ruvic (interprétation). - Il faut que je divise ma réponse en

13 deux parties. Au début, les relations étaient bonnes jusqu'à la

14 proclamation de la Bosnie-Herzégovine.

15 A partir de ce moment, la communauté croate de la Bosnie-

16 Herzégovine n'avait pas reconnu cette indépendance, et il y a eu des

17 tensions en ce qui concerne la reconnaissance des instances étatiques et

18 la Défense territoriale de Prozor qui ne suivait que les instructions qui

19 lui étaient données par le ministre de la Défense, M. Jerko Doko.

20 Mme Residovic (interprétation). - Pourriez-vous me dire si,

21 entre les forces de la Défense territoriale et le HVO à Prozor, il y a eu

22 des conflits armés ou bien avez-vous lutté ensemble contre l'ennemi ?

23 M. Ruvic (interprétation). - A partir de mai 1992, le HVO et

24 l'armée de la Bosnie-Herzégovine ont défendu le territoire contre

25 l'agresseur serbe du Monténégro. Il s'agissait du territoire qui allait

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1 jusqu'à Gernaco*. Nous avions nos services logistiques ensemble, mais nous

2 avions deux hiérarchies et chaque unité avait son commandement.

3 Jusqu'au 23, puisque l'attaque a eu lieu le 23 octobre contre Prozor et

4 non pas le 25, la plupart du temps, j'ai été sur les lignes de front avec

5 mes soldats. Nous avions coopéré jusqu'au moment où, à une date critique,

6 le HVO a attaqué Prozor.

7 Mme Residovic (interprétation). - Monsieur Ruvic, jusqu'à ce

8 moment, puisque vous étiez actif dans la Défense territoriale, avez-vous

9 reçu, à un moment ou à un autre, des ordres provenant de Zejnil Delalic en

10 sa qualité de commandant du groupe Tactique 1 ?

11 M. Ruvic (interprétation). - Je n'ai jamais vu de tels ordres.

12 Et si cet ordre avait été envoyé au responsable du quartier général,

13 j'aurais été le premier à le voir. Mais n'oubliez pas que j'étais sur le

14 front avec mes soldats et en coopération avec le HVO.

15 Mme Residovic (interprétation) - Pourrait-on montrer la pièce à

16 charge 189 au témoin ?

17 (L'huissier montre la pièce au témoin)

18 Mme Residovic (interprétation) - Vous avez dit que vous auriez

19 vu un tel ordre s’il avait été donné. Monsieur Ruvic, avez-vous déjà vu

20 cet ordre qui est devant vous ?

21 M. Ruvic (interprétation) - Je n’ai jamais vu cet ordre, ni la

22 manière dont il est rédigé sous cette forme. Je suppose d'ailleurs que

23 M. Zejnil Delalic n'avait pas autorité pour donner un tel ordre puisqu'il

24 ne pouvait pas donner de tels ordres à des unités qui avaient été

25 réaffectées.

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1 C'est vrai qu'en ce qui me concerne, je me trouvais à Dolic* et

2 j'aurais été au courant si un tel ordre avait été donné, je l'aurais mis

3 en oeuvre. J'aurais obéi si c'était mon commandant supérieur qui me

4 l’avait donné.

5 Mme Residovic (interprétation) - Monsieur Ruvic, vous étiez sur

6 la ligne de front à l'époque. Vous êtes-vous retiré de cette ligne de

7 front avant l'attaque du mois d'octobre dont vous avez parlé. ? Des ordres

8 ont-ils été donnés pour un tel retrait ?

9 M. Ruvic (interprétation) - Non, aucune unité, ni la mienne, ne

10 s'est retirée avant le 22 octobre, c'est-à-dire le jour précédent

11 l'attaque sur Prozor. J’étais à Dolic à l’époque, et quand j’ai su que

12 Prozor serait attaqué, j’ai ordonné à mon unité de se retirer pour ne pas

13 être capturée puisque l'ordre avait été donné de nous faire prisonniers.

14 Mme Residovic (interprétation) - Monsieur Ruvic, je souhaiterais

15 vous poser quelques questions portant sur un autre sujet. Vous nous avez

16 dit qui désignait le commandant du quartier général. Etait-il membre de la

17 Présidence de guerre de Prozor?

18 M. Ruvic (interprétation) - M. Sabic ne pouvait pas être membre

19 de la Présidence de guerre, et il ne pouvait pas l’être tout

20 particulièrement à Prozor du fait que le président de la municipalité

21 était croate. Donc il suivait les directives qu'il recevait de Grude, ou

22 du moins qu’il a commencées à recevoir à partir de la fin du mois d'avril.

23 Mme Residovic (interprétation) - Vous avez dit que vous

24 appliquiez la législation de la Bosnie-Herzégovine. Etait-il possible,

25 compte tenu de cette réglementation, que le commandant du quartier général

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1 soit membre de la Présidence de guerre ?

2 M. Ruvic (interprétation) - Compte tenu du degré promulgué en

3 1992 par les responsables de la Bosnie-Herzégovine, les commandants des

4 unités et des quartiers généraux n’étaient pas membres de la Présidence de

5 guerre, ce qui veut dire que M. Sabic ne pouvait être membre de cette

6 dernière.

7 Mme Residovic (interprétation) - Merci. Passons à un autre

8 sujet, si vous le voulez bien. Après l'attaque du 23 octobre, les membres

9 du quartier général ou des forces de la Défense territoriale se sont-il

10 retirés de Prozor?

11 M. Ruvic (interprétation) - Après l'agression, c'est-à-dire

12 après le 25 octobre, toutes les forces de la Défense territoriale se sont

13 retirées, ont quitté Prozor le 24 octobre.

14 Elles ont été retirées de la partie orientale de Prozor, Cico,

15 Zetuka* et Pakim*. Moi, j'étais déjà à Gorni Vakuf, après avoir quitté

16 Dorci* pour Prevenje* et Dolci, je me suis présenté à M. Merdan. Je lui ai

17 indiqué ma position et il m'a donné l'ordre d'établir une ligne de défense

18 et de continuer à obéir à ses instructions.

19 Mme Residovic (interprétation). - Je vous remercie. Le Tribunal

20 sait quels ont été les efforts de défense faits à l'époque. Mais pourriez-

21 vous nous dire si la population expulsée alors de cette région est ensuite

22 revenue à Prozor ?

23 M. Ruvic (interprétation). - Le 2 novembre 1992, une réunion a

24 eu lieu à Prozor...

25 Mme Residovic (interprétation). - … Veuillez m'excuser,

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1 pourriez-vous être bref ?

2 M. Ruvic (interprétation). - Je vais essayer. Une réunion a eu

3 lieu à Prozor le 2 novembre ; M. Vehbija Karic a participé pour l'armée de

4 la Bosnie-Herzégovine et M. Praljak a représenté la partie croate.

5 Mme Residovic (interprétation). - Monsieur Ruvic, avez-vous

6 participé à l'un des groupes chargés d'évaluer les dégâts subis par

7 Prozor ?

8 M. Ruvic (interprétation). - Je voudrais dire encore une chose.

9 J'aurais dû être présent mais je suis arrivé en retard à ces négociations

10 de Prozor. Effectivement, par la suite, j'ai participé à l'évaluation des

11 propriétés de Bosniaques à Prozor qui avaient été endommagées. Avec les

12 autres membres de groupe, nous avons fait l'état des lieux. Dix maisons

13 avaient été brûlées, dont la mienne, ainsi qu'à Blaze* et Nemici* qui fait

14 partie de Oguci* où des maisons ont été également incendiées.

15 Mme Residovic (interprétation). - Il y a une erreur dans la

16 manière dont les noms ont été épelés. Puis-je vous demander d'essayer

17 d'être bref ? Cette attaque et tout ce qui s'est passé à ce moment-là,

18 cela a-t-il été suivi par de la propagande et des campagnes de diffamation

19 contre des personnalités de la communauté bosniaque ?

20 M. Ruvic (interprétation). - Les forces de la Défense

21 territoriale étaient plus fortes à ce moment-là. Lorsque l'indépendance de

22 la Bosnie-Herzégovine a été proclamée, les activités ont été intensifiées

23 et une campagne plus intense a été menée contre des personnalités de la

24 Bosnie-Herzégovine. A l'époque, les informations que l'on nous fournissait

25 étaient ridicules, par exemple que la zone croate avait été bombardée par

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1 M. Zeveric* alors qu'il se trouvait complètement ailleurs.

2 Tout cela visait en fait à intensifier la haine entre les

3 différentes communautés de manière à faciliter la tâche à d'autres forces

4 en Bosnie-Herzégovine pour lutter contre nous.

5 Mme Residovic (interprétation). - Monsieur Ruvic, avez-vous fait

6 l'objet d'une campagne de diffamation de ce genre ?

7 M. Ruvic (interprétation). - Oui, moi mais d'autres

8 personnalités de notre communauté de Prozor ont aussi été visées par de

9 telles campagnes.

10 Je voudrais vous donner un exemple : lorsque je faisais partie

11 du Quatrième corps, on m'a montré un document du HVO dans lequel il était

12 dit que j'étais un officier du KOS, donc des anciens services secrets, que

13 j'avais reçu une formation très spéciale et que je m'étais trouvé à Anice*

14 à un moment donné ; or, je n'avais fait que traverser Anice* alors que

15 j'étais dans la JNA avant la guerre. Je n'ai jamais séjourné à Anice*

16 auparavant.

17 Mme Residovic (interprétation). - Merci. Monsieur Ruvic, savez-

18 vous où se trouve la caserne de Celebici ?

19 M. Ruvic (interprétation). - Je sais où se trouve la caserne de

20 Celebici du fait que c'est dans un village proche en direction de

21 Jablanica, dans le village de Celebici. Je connais donc l'emplacement.

22 Mme Residovic (interprétation). - Monsieur Ruvic, en 1992, vous

23 êtes-vous rendu dans cette caserne à un moment donné ?

24 M. Ruvic (interprétation). - Non, ce n'était pas nécessaire que

25 j'y aille, et je n'y suis jamais allé. Mon travail n'exigeait pas que je

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1 m'y rende.

2 Mme Residovic (interprétation). - Au cours de l'année 1992, à un

3 moment donné, avez-vous entendu que la caserne de Celebici avait été la

4 scène de mauvais traitements à l'égard de détenus ? Avez-vous entendu dire

5 que des prisonniers de la région de Konjic avaient été maltraités ?

6 M. Ruvic (interprétation). - En 1992, non. Non, je n'ai rien

7 entendu de ce genre. Comme je vous l'ai dit, j'ai passé la plus grande

8 partie de cette période sur le front. Oui, peut-être plus tard, j'ai

9 entendu des rumeurs, mais bien plus tard que cette période précise.

10 Mme Residovic (interprétation). - Monsieur Ruvic; puisque vous

11 étiez commandant du quartier général à Prozor, après toutes ces tentatives

12 pour essayer de trouver des solutions au conflit, les choses se sont-elles

13 calmées en 1992 ? Je pense ici aux relations entre vous et le HVO ?

14 M. Ruvic (interprétation). - On a tenté au début du mois de

15 novembre 1992 de trouver une solution, mais en vain bien qu'un certain

16 nombre de personnes soient revenues à Prozor en se fondant sur une

17 déclaration conjointe rédigée dans cette réunion.

18 Ensuite, lorsqu'une attaque a été menée contre Gornje Vakuf le

19 13 janvier 1993, attaque du HVO, à ce moment-là le HVO a également pris la

20 municipalité de Prozor qui n'était pas sous le contrôle du HVO. Rien n'a

21 été résolu.

22 Plunica* a été également attaquée ultérieurement, mais grâce à

23 une initiative de la communauté européenne, sous la direction de

24 M. Glenn*, il y a eu toute une série de réunions ; la première ayant eu

25 lieu le 17 mars à Prozor.

Page 12079

1 Nous avons finalement essayé de dégager un accord, mais compte

2 tenu des attaques contre Jablanica puis contre Konjic, il a été impossible

3 de se mettre d'accord. Les anciens membres de la force de la Défense

4 territoriale ont été arrêtés. Plus de 900 soldats ont été arrêtés et

5 amenés dans des camps de concentration dans la région de Prozor et de

6 Grude.

7 Mme Residovic (interprétation). - Merci Monsieur le Président,

8 j'en ai terminé avec mon interrogatoire principal.

9 M. le Président (interprétation). - D'autres questions que vous

10 souhaitez poser au témoin ?

11 M. Duric (interprétation). - Bonjour, M. Ruvic. Je représente

12 M. Mucic. Le connaissez-vous ?

13 M. Ruvic (interprétation). - Bonjour. Non, je ne connais pas

14 M. Mucic. La première fois que j'ai entendu son nom, c'est lorsque son

15 arrestation a été rendue publique dans la presse.

16 M. Duric (interprétation). - Il y a quelques instants, vous avez

17 dit qu'au cours de 1992, les relations entre le HVO et les forces de

18 Défense territoriale de la Bosnie-Herzégovine étaient assez bonnes mais

19 qu'elles se sont dégradées ultérieurement, est-ce correct ?

20 M. Ruvic (interprétation). - Oui, c'est correct. Je parlais de

21 la première période, c'est-à-dire jusqu'à l'indépendance de la Bosnie-

22 Herzégovine. En fait, les croates se sont exprimés en faveur de la

23 création de la Bosnie-Herzégovine.

24 M. Duric (interprétation). - Pourriez-vous nous dire si vous

25 connaissez le village de Ravno ?

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1 M. Ruvic (interprétation). - Attendez.... dans la municipalité

2 de Kupres, il y a un village qui s'appelle Ravno...

3 M. Duric (interprétation). - ... Non, un peu plus vers le sud,

4 en se dirigeant vers Dubrovnik, également en Bosnie-Herzegovine. Un

5 village s'appelle Ravno, le connaissez-vous ?

6 M. Ruvic (interprétation). - J'en ai entendu parler mais je ne

7 me m'y suis jamais rendu. Je ne sais pas exactement où se trouve ce

8 village ?

9 M. Duric (interprétation). - Savez-vous si c'est un village

10 serbe, croate ou musulman ?

11 M. Ruvic (interprétation). - Je ne suis pas sûr. Je ne connais

12 pas la composition démographique de la population. Je crois que la

13 majorité est de la population est croate mais je n'en suis pas absolument

14 sûr.

15 M. Duric (interprétation). - Merci. Monsieur Ruvic, savez-vous

16 ce qui s'est passé dans ce village fin 1991, début 1992 ?

17 M. Ruvic (interprétation). - Je sais que des choses pas belles

18 se sont produites là. Mais je ne sais pas exactement ce qui s'est produit.

19 Je n'ai pas eu accès à ces informations. Mais si je ne m'abuse, il y a eu

20 des massacres et l'on a expulsé des gens de ce village, mais je ne peux

21 pas vous donner plus de détails parce que je ne sais pas.

22 M. Duric (interprétation). - Vous avez dit "de mauvaises

23 choses", cela signifierait que vous en savez donc un peu plus sur ce qui

24 s'est passé là ? Est-ce que vous pourriez nous donner un peu plus de

25 détails ?

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1 M. le Président (interprétation). - Non, non, nous ne sommes pas

2 intéressés par ce village. Sommes-nous intéressés par ce village ?

3 M. Duric (interprétation). - Monsieur le Président, compte tenu

4 des relations entre le HVO et les Défenses territoriales, puisque ma

5 collègue a attiré l'attention sur ces relations entre le HVO et la Défense

6 territoriale....

7 M. Jan (interprétation). - … Nous savons qu'il y a eu une

8 détérioration des relations.

9 M. Duric (interprétation). - J'essaie de remonter pour voir d'où

10 vient cette détérioration, ce qui explique cette détérioration des

11 relations, et permettez-moi de poser quelques questions dans ce sens.

12 M. Jan (interprétation). - On a l'impression que tout cela

13 n'avait pas de raison d'être. Le conseil entend-il défendre les Croates ou

14 les Bosniaques ?

15 M. Duric (interprétation). - Je ne défends personne.

16 M. Jan (interprétation). - Ce qui nous intéresse, c'est la

17 question de Celebici, et ce qui s'est passé à Celebici. Si vous avez des

18 question à poser sur ce qui s'y est passé, posez ces questions.

19 M.Karabdic.(interprétation). - Je n'ai pas de question.

20 Mme McMurrey (interprétation). - Je n'ai pas de question non

21 plus à poser à ce témoin.

22 M. Niemann (interprétation). - On vous a montré la pièce 189 et

23 je pense que vous l'avez toujours sous les yeux. Est-ce que vous voyez

24 cette pièce ?

25 M. Ruvic (interprétation). - Oui.

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1 M. Niemann (interprétation). - Vous avez dit que vous auriez

2 exécuté cet ordre si vous l'aviez reçu mais si j'ai bien compris, vous ne

3 vous souvenez pas de l'avoir reçu ?

4 Mme Residovic (interprétation). - Objection.

5 M. Ruvic (interprétation). - Si j'avais reçu une ordre du

6 Quartier Général municipal, je l'aurais respecté évidemment. Si je l'avais

7 reçu, je l'aurais respecté mais je n'ai jamais reçu cet ordre car j'étais

8 présent sur la ligne de front et j'y suis resté, donc cet ordre ne m'est

9 pas parvenu.

10 M. le Président (interprétation) - Il a indiqué qu'il aurait

11 respecté l'ordre s'il l'avait reçu de son commandant, notamment la

12 pièce 189.

13 M. Ruvic (interprétation) - Si mon commandant du quartier

14 général municipal l'avait reçu du commandant du district de Zenica, il va

15 de soi que je l'aurais mis en oeuvre puisque cela aurait été un ordre de

16 mon commandement supérieur.

17 M. Niemann (interprétation). - Ma question était : si vous aviez

18 reçu cet ordre, l'auriez-vous respecté ?

19 M. Ruvic (interprétation) - Non, puisque Zejnil Delalic n'était

20 pas un supérieur hiérarchique dans la Défense territoriale de Prozor,

21 c'était M. Dzemo Merdan du quartier général de district.

22 M. Niemann (interprétation). - Comment auriez-vous pu savoir si

23 cet ordre avait été édicté par lui ou tout simplement transféré mais

24 provenant du commandant suprême ?

25 M. Ruvic (interprétation) - Les commandants agissent en fonction

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1 des ordres écrits et sur la base d’instructions et d'ordre qu'ils

2 reçoivent de leurs supérieurs hiérarchiques. Lorsque quelqu'un publie un

3 ordre, il doit donc le signer et y apposer un tampon.

4 Dans le cas précis, il n'y a pas le sceau du quartier général du

5 district. M. Kavic* ne l'aurait pas respecté s'il l'avait reçu. Dans ce

6 cas, il aurait été obligé de se renseigner auprès de son supérieur

7 hiérarchique. Cela n'a pas été le cas puisque l'armée ne s'est pas

8 retirée. Elle est restée sur la ligne de défense.

9 M. Niemann (interprétation). - Il n'y avait pas d'incident entre

10 Croates et Musulmans aux environs du 27, 28 août 1992 ?

11 M. Ruvic (interprétation) - Le 27 août, j’étais à Ajdovac, à

12 environ 30 kilomètres de Prozor. Ce sont les collines du Mont Ajdovac.

13 Je me souviens qu’un petit nombre de membres du HVO se

14 trouvaient à Prozor. Ils avaient essayé de démolir quelques boutiques,

15 mais le commandant Karabic* a édicté des ordres selon lesquels aucun

16 membre du HVO ne devait rien faire qui puisse susciter des conflits. Il

17 n’y a donc pas eu de conflit.

18 Le lendemain, les Croates ont condamné les dégâts, ces

19 agissements et ont dit qu'ils étaient prêts à verser des compensations.

20 Mais ceci n'a pas eu d'influence sur la coopération à l'époque.

21 Le 27 et 28 août 1992, les membres du HVO et du OST ont attaqué

22 des bâtiments qui appartenaient à des Musulmans de Prozor éminents et

23 fortunés, n'est-ce pas ?

24 M. Ruvic (interprétation) - Je vous l'ai dit, je l'ai appris

25 après coup, car j'étais moi-même ailleurs, sur le front. Dans toute armée

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1 et dans tous les conflits armés, et plus particulièrement dans cette

2 guerre, il y a toujours des groupes qui essaient de faire justice eux-

3 mêmes.

4 En l'occurrence, ils ont échoué parce que leurs commandants

5 supérieurs ont mis fin à cela. Ceci n’a pas détérioré les relations entre

6 Bosniaques et Croates dans la région de Prozor.

7 M. Niemann (interprétation). - A vous entendre, j'ai

8 l'impression qu'il y avait tout de même quelques plaintes, des difficultés

9 à contrôler les agissements des extrémistes croates, n'est-ce pas ?

10 M. Ruvic (interprétation) - Je crois que vous n'avez pas bien

11 compris. Je disais qu'au sein du HVO, et parmi les ordres qui venaient de

12 l'extérieur, certains ne souhaitaient pas que nous nous entendions et que

13 nous défendions ensemble la ligne de front. Mais ces gens-là ont été

14 critiqués par leurs propres concitoyens. Pendant la guerre, nous avons

15 tous pu constater que certains individus voulaient régler leurs propres

16 comptes. Ils n’étaient pas toujours contrôlés.

17 VEN27

18 M. Niemann (interprétation). - Plus tard, vous avez donné votre

19 démission à la Défense territoriale puisque le HVO ne voulait pas accepter

20 les ordres en provenance de Sarajevo ? N'est-ce pas ?

21 M. Ruvic (interprétation). - J'ai dit, au début de mon

22 témoignage, je peux le répéter si vous le souhaitez...

23 M. Niemann (interprétation). - … Vous n'êtes pas obligé de

24 répéter, il suffit de dire oui ou non.

25 M. Ruvic (interprétation). - Voulez-vous répéter pour que je

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1 comprenne bien la question ?

2 M. Niemann (interprétation). - Peu après votre nomination au

3 poste de commandant de la Défense territoriale, vous avez donné votre

4 démission, puisque le HVO refusait d'accepter les ordres en provenance de

5 Sarajevo et prenait les ordres de Gruda ? Est-ce bien cela ?

6 M. Ruvic (interprétation). - Cela est juste, je disais qu'à la

7 création de la Bosnie-Herzégovine, et lorsque les ordres en provenance de

8 la présidence visant à créer un quartier municipal et que la date limite

9 pour la mise en place de ce quartier général était le 15 avril, était la

10 dernière date pour l'enregistrement de ce quartier général municipal.

11 C'est donc la date qui est considérée comme le début de la

12 création de l'armée de Bosnie-Herzégovine. Certains ne voulaient pas

13 rejoindre cette armée. Les commandements ont été nommés et des individus

14 qui provenaient de l'extérieur de la Bosnie-Herzégovine, ils n'étaient

15 même pas des concitoyens. M. Praljak lui-même qui se trouvait à Prozor,

16 même lui, n'était pas citoyen de Bosnie-Herzégovine, il était officier de

17 l'armée croate.

18 M. Niemann (interprétation). - En effet, je crois qu'ils

19 appliquaient les ordres de Grude, ainsi que de Zagreb ? N'est-ce pas ?

20 M. Ruvic (interprétation). - Ils recevaient des instructions de

21 Zagreb puisqu'ils essayaient d'asseoir leur autorité. Il y avait aussi le

22 conté de Split. Ils voulaient faire partie de Banaver* et à l'automne

23 de 1992, ils essayaient d'introduire des programmes croates dont les

24 enseignants n'étaient pas d'accord.

25 Mme Residovic (interprétation). - Je ne comprends pas la

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1 pertinence de cet examen ?

2 M. Niemann (interprétation). - Vous avez parlé du parti SDA qui

3 a eu un impact dans votre démission. S'agissait-il de la branche locale ou

4 de celle de Sarajevo ?

5 M. Ruvic (interprétation). - La branche locale. Je disais qu'une

6 partie des responsables, pas tous. Je pourrais vous donner les noms des

7 individus si nécessaire.

8 M. Niemann (interprétation). - Ce n'est pas nécessaire. Qui

9 étaient les membres du quartier général municipal de Prozor ? Vous-même et

10 qui d'autre ? Pouvez-vous me dire leur grade ?

11 M. Ruvic (interprétation). - Et bien au début, il y avait moi-

12 même, mon député, M. Mustafa Hero et le commandant du quartier général,

13 M. Mustafa Saric. Voulez-vous tous les noms ? Si vous les voulez, je peux

14 vous les donner.

15 M. Niemann (interprétation). - J'aimerais connaître les

16 organisations représentées. Le MUP y était-il représenté ?

17 M. Ruvic (interprétation). - Le MUP fait partie des forces

18 armées de Bosnie-Herzégovine. Elle a sa propre chaîne de commandement,

19 mais les unités du MUP font partie de la défense de la Bosnie-Herzégovine.

20 Le MUP a sa propre chaîne de commandement.

21 M. Niemann (interprétation). - Il a sa propre chaîne de

22 commandement, mais il y a une coordination sur le champ de bataille entre

23 le MUP et la Défense territoriale ?

24 M. Ruvic (interprétation). - Comme je l'ai dit, le MUP est

25 partie intégrante des forces armées de Bosnie-Herzégovine, l'une des

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1 parties, mais il possède sa propre chaîne de commandement.

2 M. Jan (interprétation). - (hors micro)

3 M. Ruvic (interprétation). - Ils font partie des forces armées

4 et non de la Défense territoriale. Au début, les forces armées de Bosnie-

5 Herzégovine se composaient de la Défense territoriale et du MUP.

6 M. Niemann (interprétation). - Lorsqu'il y avait une opération

7 militaire sur le champ de bataille, chacun fait-il ce qu'il veut, le MUP

8 d'un côté, le HVO de l'autre, ou y a-t-il une coordination des

9 manoeuvres ?

10 M. Ruvic (interprétation). - Tout dépend de qui est responsable

11 de telle ou telle opération. Ensuite on décide du déploiement des unités.

12 On décide de qui va commander. Il n'y a pas de règle stricte. Lorsqu'on

13 prévoit une opération, on décide qui en sera le commandant, quel sera

14 l'ordre des opérations et ensuite on décide qui fera quoi.

15 M. Niemann (interprétation). - Donc la Défense territoriale peut

16 être le commandant du MUP ou vice versa ?

17 M. Ruvic (interprétation). - Le MUP n'a jamais été en situation

18 de commander les unités de la Défense territoriale, mais ils ont participé

19 à des actions, puisque le MUP faisait partie des forces armées de Bosnie-

20 Herzégovine.

21 M. Niemann (interprétation). - Mais dans certains cas, ils

22 pouvaient être placés sous l'autorité de la Défense territoriale

23 municipale ?

24 M. Ruvic (interprétation). - Pour être concret, dans la zone de

25 Prozor, le MUP n'a jamais participé aux forces armées dans des opérations

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1 militaires jusqu'à fin 1995. A ce moment-là, il y avait le Quatrième corps

2 et les représentants du MUP se sont vu accorder certaines tâches qui ont

3 été mises en œuvre, notamment sur les lignes de front et certaines

4 opérations. Mais à Prozor, des opérations conjointes par la Défense

5 territoriale et le MUP n'ont jamais eu lieu.

6 M. Niemann (interprétation). - Lorsque vous participiez aux

7 activités militaires en 1992, dans la région de Prozor, avez-vous à un

8 quelconque moment pris des prisonniers de guerre ou avez-vous arrêté des

9 individus ?

10 M. Ruvic (interprétation). - Au moment où j'étais moi-même

11 commandant du quartier général municipal, nous n'avions pas de prisonniers

12 de guerre. Mais après, en 1993, il y en avait trois qui ont tous été

13 échangés. Au moment où j'étais commandant du quartier général municipal,

14 j'ai reçu des ordres de co-commandants, et chacun appliquait ces ordres.

15 Je n'ai donc pas participé au commandement de ces unités après le mois

16 de février 1993, date à laquelle, à la suite d'ordres donnés par

17 M Arif Pasalic, un officier du Quatrième corps a été nommé commandant de

18 bataillon. C'est un certain Hodza.

19 M. Niemann (interprétation). - Est-il vrai de dire que, pendant

20 toute l'année 1992, la Défense territoriale de Prozor n'a pas pris un seul

21 prisonnier ? Est-ce juste ?

22 M. Ruvic (interprétation). - Oui, pendant toute l'année 1992, la

23 Défense territoriale de Prozor n'a pas pris un seul prisonnier.

24 M. Niemann (interprétation). - Au début de la guerre, notamment

25 début avril 1992, y avait-il des groupes de volontaires, des soi-disant

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1 bérets verts ou d'autres groupes qui agissaient dans la zone de Prozor ?

2 M. Ruvic (interprétation). - A la suite de la formation du

3 quartier général de la Défense territoriale à Prozor en avril 1992 dont

4 j'étais le commandant, toutes les unités de volontaires se sont placées

5 sous le commandement du quartier général. Après cette date, il n'y avait

6 pas d'autres unités, tout du moins en ce qui concerne les Bosniaques.

7 M. Niemann (interprétation). - Autrement dit, les bérets verts

8 n'agissaient que jusqu'en avril 1992 ?

9 M. Ruvic (interprétation). - En effet, car à partir de cette

10 date, j'ai fait le tour de la municipalité moi-même. Dans certains

11 villages tels que Here, Donji Krad, Hrnici et d'autres vers le sud, vers

12 Jablanica, il y avait certains groupes autonomes, car les gens se

13 rendaient compte qu'il y avait des dangers.

14 Les agressions avaient commencé dès le 6 avril et à la suite de

15 cela l'ensemble des unités a été placé sous la responsabilité de la

16 Défense Territoriale. Cela est à 100 % vrai, toutes les autres allégations

17 sont fausses.

18 M. Niemann (interprétation). - Je ne suggérais en rien que ce

19 que vous avez dit était faux.

20 Vous avez dit que, avant que M. Delalic devienne commandant du

21 groupe Tactique 1, il n'avait aucune fonction militaire. Vous souvenez-

22 vous d'avoir dit cela ?

23 M. Ruvic (interprétation). - J'ai rencontré M. Delalic deux fois

24 avant le mois d'août. La première fois, c'était mi-avril 1992 lorsque nous

25 lui avons demandé de l'aide. Nous lui avons demandé d'obtenir des

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1 armements et des équipements. La seconde fois, c'était lorsque nous nous

2 sommes rendus à Hadica afin de débloquer Sarajevo.

3 Je ne sais pas exactement quel était son rôle, mais il nous a

4 souhaité la bienvenue et beaucoup de succès devant l'hôtel car nous

5 allions débloquer Sarajevo.

6 Je considérais que c'était un honneur de participer à cette

7 opération de libération de Sarajevo. M. Zejnil Delalic nous a aidés sur le

8 plan logistique.

9 M. Jan (interprétation). - Contentez-vous de répondre à la

10 question.

11 M. Niemann (interprétation). - Lorsque vous avez vu M. Delalic,

12 portait-il l'uniforme militaire ?

13 M. Ruvic (interprétation). - La première fois non, j'en suis

14 sûr. La seconde fois, j'avoue que je n'en suis pas sûr car cela remonte à

15 six ans.

16 A l'époque, il n'occupait aucune fonction militaire. Cela ne

17 signifie pas pour autant qu'il n'avait aucune responsabilité.

18 M. Jan (interprétation). - Soyez bref, si vous voulez bien. Vous

19 êtes sûr de ce que vous avez vu la première fois. La seconde fois vous ne

20 vous en souvenez pas ?

21 M. Niemann (interprétation). - Si vous aviez vu M. Delalic

22 portant l'uniforme militaire ainsi que l'insigne de l'armée de Bosnie-

23 Herzégovine, vous auriez un avis totalement différent quant à ses

24 fonctions ?

25 M. Jan (interprétation). - Ce n'est pas ce qu'il a dit.

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1 M. Niemann (interprétation). - Nous allons voir.

2 M. Ruvic (interprétation). - Je disais que je ne peux pas dire

3 avec certitude si oui ou non il portait l'uniforme. Mais je suis certain

4 qu'il nous a parlé, qu'il nous a souhaité le succès. Il nous avait aidés à

5 obtenir du matériel, des armements, il nous a donné des vêtements, des

6 postes de radio Motorola par le biais de son frère qui habitait à Prozor.

7 M. Niemann (interprétation). - Il s'agit de son frère Zahir ?

8 M. Ruvic (interprétation). - Oui, Zahir Delalic.

9 M. Niemann (interprétation). - Quel était son rôle à Prozor

10 en 1992 ?

11 M. Ruvic (interprétation). - Jusqu'à la formation de la Défense

12 territoriale, M. Zahir Delalic était membre du parti SDA. Il s'est mis au

13 service de la défense du pays. Lorsque j'ai démissionné de mon poste, il

14 nous a aidés sur le plan logistique. Il n'a pas été tout de suite membre

15 du quartier général municipal, mais sur mon départ M. Sabic l'a nommé son

16 conseiller pour certains domaines, au sein du quartier général municipal

17 de Prozor. Il doit d'ailleurs y avoir une trace écrite, car j'ai vu ce

18 document à un moment donné.

19 M. Niemann (interprétation). - Vous avez dit dans votre

20 témoignage que la détérioration des relations entre les différentes

21 communautés, entre le HDZ ne s'est produite que vers le mois

22 d'octobre 1992. J'ai d'ailleurs un exemplaire de ce document.

23 M. Jan (interprétation). - (Hors micro.)

24 (L'huissier montre le document au témoin et à la Cour.)

25 Mme le Greffier (interprétation) - La pièce 247.

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1 M. Ruvic (interprétation). - J'ai l'impression que vous ne

2 m'avez pas bien compris. Je disais que, lors de la formation du quartier

3 général de la Défense territoriale de Prozor, les Croates ne pouvaient pas

4 participer au commandement conjoint, bien qu'ils avaient promis de le

5 faire puisque, au cours de la nuit du 14 au 15 avril, nous avons envoyé

6 les documents d'enregistrement. Mais le lendemain, lors d'une réunion

7 conjointe, il devait normalement y avoir quinze personnes, c'est-à-dire

8 six Bosniaques et neufs Croates, mais cela n'a pas été fait. En effet, on

9 nous a dit qu'il ne pouvait pas y avoir de Défense territoriale à Prozor :

10 c'était soit le HVO soit les Tcheniks.

11 Je disais que c'était un privilège de défendre l'Etat de Bosnie-

12 Herzégovine, que c'était le devoir de tout citoyen de Bosnie-Herzégovine

13 de défendre l'Etat, que c'était le seul Etat que nous ayons et que nous

14 étions en mesure d'accepter tous ceux qui étaient pour l'Etat de Bosnie-

15 Herzégovine, tous les autres étaient nos ennemis.

16 M. Jan (interprétation). - (Hors micro.) C'est un document très

17 intéressant. Maître Niemann, je ne connais pas exactement l'explication

18 mais j'ai l'impression que le SDS représentait la municipalité. C'est un

19 document du SDS et non pas un document de la municipalité. C'est donc

20 intéressant du fait qu'il y ait eu ce quartier général de crise.

21 M. Niemann (interprétation). - Oui, en effet. Combien y avait-il

22 de soldats de la Défense de Prozor qui avaient été affectés au groupe

23 Tactique 1 ? Vous en souvenez-vous ? Si vous ne vous en souvenez pas, ce

24 n'est pas grave.

25 Mme Residovic (interprétation). - Le témoin a déjà répondu à

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1 cette question.

2 M. Ruvic (interprétation). - J'ai dit qu'il y avait 42 soldats

3 avec moi et que j'étais le commandant. J'étais donc le commandant de ces

4 42 soldats.

5 M. Niemann (interprétation). - Je suppose que vous n'avez pas vu

6 tous les ordres pendant la période concernée. Ou, au contraire, avez-vous

7 vu tous les ordres ?

8 M. Ruvic (interprétation). - J'ai déjà dit que j'avais vu tous

9 les ordres. Mais, lorsque je n'étais plus commandant, le commandant devait

10 m'informer des cas qui me concernaient ou m'informer afin de m'aider à

11 prendre les bonnes décisions, étant donné les circonstances. Mais les

12 autres décisions qui n'avaient rien à voir avec mes responsabilités, je

13 n'avais pas à en avoir connaissance.

14 Un commandant peut avoir des informations qui ne sont pas

15 forcément transmises à d'autres membres du quartier général.

16 M. Niemann (interprétation). - Y a-t-il eu une participation de

17 la Défense territoriale dans le Jug 92 ?

18 M. Ruvic (interprétation). - J'ai l'impression que vous me posez

19 la question pour la troisième fois. Je disais que, en 1992, les éléments

20 de la Défense territoriale ont participé à la levée du blocage de Sarajevo

21 sous le commandement de M. Mustafa Polutak. Quelques jours après, chacun

22 est retourné à son unité d'origine et il n'y a eu aucune opération de

23 combat jusqu'à l'attaque de Prozor, le 23 octobre 1992. Il n'y a pas eu

24 d'autres attaques auxquelles auraient participé des membres de la Défense

25 territoriale de la municipalité de Prozor.

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1 M. Niemann (interprétation). - Je crois que vous avez dit que

2 M. Zahir Delalic était conseiller à la Défense territoriale de Prozor.

3 Savez-vous pourquoi il se rendait parfois à Celebici ?

4 M. Ruvic (interprétation). - Je sais qu'il était conseiller du

5 commandant. Le commandant lui demandait d'aller à Konjic puisqu'il était

6 originaire de Konjic. Je sais qu'il y avait sa famille. Pourquoi est-il

7 allé voir son frère ? Je ne le sais pas. C'est sans doute le

8 commandant Sabic qui pourrait vous le dire. Je ne sais pas quelles étaient

9 ses tâches ni pourquoi il est allé à Konjic. Ce n'était pas à moi de le

10 savoir.

11 Je vous ai dit que je passais le plus clair de mon temps sur la

12 ligne de front, près de la montagne dont je vous ai parlé tout à l'heure,

13 face à l'agresseur.

14 M. le Président (interprétation). - C'est l'heure de la

15 suspension de séance.

16 M. Niemann (interprétation). - J'ai encore une question, si vous

17 voulez bien. Vous nous avez dit que vous avez entendu des informations sur

18 Celebici, non pas en 1992 mais plus tard. Je voudrais savoir ce que vous

19 avez entendu sur le camp de Celebici après ?

20 M. Ruvic (interprétation). - Pourriez-vous poser une question

21 plus précise, s'il vous plaît ?

22 M. Niemann (interprétation). - On vous a demandé si vous aviez

23 entendu parler des événements qui se sont produits au camp de Celebici.

24 Vous avez répondu : "Je n'ai rien entendu en 1992 mais j'ai entendu des

25 choses après." Ma question est : qu'avez-vous entendu après ?

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1 M. Ruvic (interprétation). - Quand je disais "plus tard", je

2 voulais dire "beaucoup plus tard". J'ai entendu parler des accusations à

3 l'encontre de différents individus. On a parlé de camp de concentration à

4 Celebici, ce qui n'aurait pas pu être le cas. Mais Prozor se trouve

5 à 54 kilomètres de Konjic.

6 M. Niemann (interprétation). - (Hors micro.)

7 M. Ruvic (interprétation). - Je ne sais pas.

8 M. le Président (interprétation). - Avez-vous un contre-

9 interrogatoire ?

10 Mme Residovic (interprétation). - La réponse est non. Je n'ai

11 pas de question. C'est le dernier témoin pour la défense aujourd'hui.

12 M. le Président (interprétation). - Vous n'avez pas d'autres

13 témoins aujourd'hui ?

14 Mme Residovic (interprétation). - Non, je n'en ai pas d'autres.

15 M. le Président (interprétation). - Nous ne siégeons pas lundi

16 car c'est un jour férié. Vous voyez ce qui se passe. Si vous n'avez pas

17 déjà prévu la liste des témoins pour la semaine prochaine, je vous suggère

18 de profiter de cet après-midi pour le faire de telle sorte que nous

19 remplissions la journée. Il faut peut-être augmenter d'au moins deux par

20 jour le nombre de témoins pour que nous ayons de quoi nous occuper du

21 mardi au vendredi.

22 Je crois que c'est ce schéma qu'il faudra suivre à partir de la

23 semaine prochaine.

24 Mme Residovic (interprétation). - Nous allons analyser les

25 dépositions des témoins que nous avons entendus jusqu'à présent et, mardi

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1 matin, nous vous remettrons une liste définitive des témoins que nous

2 envisageons de citer. Nous allons continuer d'essayer de réduire le nombre

3 de témoins à appeler pour mettre en oeuvre votre suggestion.

4 Pour cette semaine-ci, nous avons fait beaucoup d'efforts. Nous

5 avons un grand nombre de témoins cette semaine : sept. Nous n'avons jamais

6 eu autant de témoins en une semaine.

7 M. le Président (interprétation) - Nous avons eu jusqu'à

8 dix témoins. Nous pourrions arriver à dix dépositions. En ce qui concerne

9 les témoins, il ne faut pas trop prolonger les dépositions et essayer de

10 ne pas dépasser le cadre strict des questions qui les intéressent. Ce

11 n'est pas valable seulement pour vous mais également pour l'accusation.

12 M. Jan (interprétation) - Le document qui nous a été remis

13 concernant votre témoin en tant que commandant comporte deux traductions.

14 Je ne sais pas laquelle est la bonne. Dans la traduction déposée par le

15 brigadier, il s'agit de toutes les formations et dans l'autre, il s'agit

16 des unités au front.

17 Mme Residovic (interprétation) - Merci, nous allons vérifier ce

18 qu'il en est. Merci, Monsieur le Juge, d’avoir attiré notre attention sur

19 cette différence.

20 M. le Président (interprétation) - La séance est levée. La

21 Chambre reprendra ses travaux mardi à 10 heures.

22 (L’audience est levée à 16 h 10)

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